ito
_2
neon u n m ag azine v i va n t Avec l’application mobile neon vous avez désormais accès à du contenu intéractif supplémentaire / Vidéos, interview, photos, musiques / Ce contenu frais et mise à jours quotidiennement alimente le magazine via votre mobile. En plus de ce contenu nous vous proposons d’interagir avec l’équipe et les lecteurs de NEON, discutez et partagez votre avis sur les nombreux sujets que traite le magazine.
Neon Magazine_4
neon magazine n4
Quisque laoreet enim et leo hendrerit aliquet. Curabitur quis consequat est. Phasellus scelerisque arcu at enim pretium tincidunt. Aenean ru trum ullamcorper blandit. Aenean pretium mattis velit eu eleifend. Cras rhoncus bibendum massa, ac tempor ligula scelerisque a. Ut nibh diam, tempor eu dictum at, tempus id ipsum. Morbi id dolor in mi convallis iaculis eget rutrum elit. Pellentesque aliquam, nisi vel venenatis elementum, arcu lacus aliquam urna, eu volutpat urna sapien ac velit. In at lectus ut tortor porta cursus. Etiam elementum velit a ligula bibendum tempus vitae ac turpis. Aliquam auctor vestibulum neque, ut commodo ligula dignissim et. Integer adipiscing, dolor id venenatis egestas, erat elit sodales nibh, sed placerat leo tortor ut risus. Mauris iaculis aliquet dapibus. Proin non nulla nunc, sed feugiat sem. Quisque laoreet enim et leo hendrerit aliquet. Curabitur quis consequat est. Phasellus scelerisque arcu.
E c at e g o r i e
A u b o u l o t m o n l a p i n
_3
at enim pretium tincidunt. Aenean rutrum ullamcorper blandit. Aenean pretium mattis velit eu eleifend. Cras rhoncus bibendum massa, ac tempor ligula scelerisque a. Ut nibh diam, tempor eu dictum at, tempus id ipsum. Morbi id dolor in mi convallis iaculis eget rutrum elit. Pellentesque aliquam, nisi vel venenatis elementum, arcu lacus aliquam urna, eu volutpat urna sapien ac velit. In at lectus ut tortor porta cursus. Etiam elementum velit a ligula bibendum tempus vitae ac turpis. Aliquam auctor vestibulum neque, ut commodo ligula dignissim et. Integer adipiscing, dolor id venenatis egestas, erat elit sodales nibh, sed placerat leo tortor ut risus. Mauris iaculis aliquet dapibus. Proin non nulla nunc, sed feugiat sem. Maria desleta
neon magazine n4
Neon Magazine_4
S o m m a i r e 1 2/ 3 5
36/47
36/47
Co n n a î t r e
vo i r
avo i r
Jusqu’ou aller pour ton job
Dur retour pour l’immigré
interview sommare d’aurélien bellanger
Coucher, mentir, trahir, et même... bosser. Vous êtes vraiment pret à tout.
vos stratégies pour mieux vivre les toilettes Petit précis de psychologie de chiottes. Parce qu’on ne devrait s’emm..avec nos besoins naturels
enfants de la balle Petit précis de psychologie de chiottes. Parce qu’on ne devrait s’emm..avec nos besoins naturels
Pipi pour tous Petit précis de psychologie de chiottes. Parce qu’on ne devrait.
Activiste de choc Coucher, mentir, trahir, et même... bosser. Vous êtes vraiment pret à tout.
Coucher, mentir, trahir, et même... bosser. Vous êtes vraiment pret à tout.
Après l’incendire Petit précis de psychologie de chiottes. Parce qu’on ne devrait s’emm..avec nos besoins naturels
vendeur de sperme Petit précis de psychologie de chiottes. Parce qu’on ne devrait s’emm..avec nos besoins naturels
On lui a mis notre sommaire devant les yeux.
Moche power Petit précis de psychologie de chiottes. Parce qu’on ne devrait s’emm..avec nos besoins naturels
4 8 /5 3
48/53
respirer
r e ss e n t i r
mes vacances sur une aire d’autoroute
EVJF à blackpool
Coucher, mentir, trahir, et même... bosser. Vous êtes vraiment pret à tout.
marseille ma ville Petit précis de psychologie de chiottes. Parce qu’on ne devrait s’emm..avec nos besoins naturels
mes series me coachent Petit précis de psychologie de chiottes. Parce qu’on ne devrait s’emm..avec nos besoins naturels
On lui a mis notre sommaire devant les yeux.
_6
Neon Magazine_4
co-
Jusqu’ou aller pour ton job
15
Coucher, mentir, trahir, et même...bosser. Vous êtes vraiment pret à tout. vos stratégies pour mieux vivre les toilettes
15
Petit précis de psychologie de chiottes. Parce qu’on ne devrait s’emm..avec nos besoins naturels
nnai-
enfants de la balle
15
Petit précis de psychologie de chiottes. Parce qu’on ne
Pipi pour tous
15
devrait s’emm..avec nos besoins naturels
Petit précis de psychologie de chiottes. Parce qu’on ne devrait.
Activiste de choc
tre
15
Coucher, mentir, trahir, et même...bosser. Vous êtes vraiment pret à tout.
0.1
Neon Magazine_4
jusque
_8
se travestir, se dépasser ou rester soi-même... 16 expériences vécues dans le monde du travail,, commentées par des spécialistes inattendus, vous aident à trouver vos limites
ou aller
_Un article de Maude Paterson / Crédits photos Samuel Son, Camille JP.
¶
Affronter un tyran Pendant huit ans, Emmanuelle, consultante dans un cabinet de conseil, a supporté un boss colérique, agressif, autoritaire et volontiers grossier envers ses employés. Beaucoup ont quitté le navire, lassés de ses sautes d’humeur. «Même les clients ont parfois peur de lui» glisse Emmanuelle. Elle veut que ça cesse, mais elle est pétrifiée à l’idée de lui dire ses quatres vérités. Avec un analyste, elle participe Pendant huit ans, Emmanuelle, consultante dans un cabinet de conseil, a supporté un boss colérique, agressif, autoritaire et volontiers grossier envers ses employés. Beaucoup ont quitté le navire, lassés de ses sautes d’humeur. «Même les clients ont parfois peur de lui» glisse Emmanuelle. Elle veut que ça cesse, mais elle est pétrifiée à l’idée de lui dire ses quatres vérités. Avec un analyste, elle participe alors à des s»ances de coaching. Pendant huit ans, Emmanuelle, consultante dans un cabinet de conseil, a supporté un boss colérique, ade coaching. alors à des séances de coaching pour répéter l’entretien qui décidera de sn avenir: soit elle arrange les choses avec ce patron irascible mais malgré tout compétent, soit elle met les voiles. Trois mois à définir une stratégie pour maîtriser ses émotions et être au top le jour J. Le tout avec un accompagnement tendance ad hoc: massage, ostéopathie et autres manipulations de fluides corporels. Enfin zen, Emmanuelle convoque son boss: «il faut qu’on parle». Rien de bien croustillant dans la confrontation, un simple dialogue sur ce qui va et ne va pas, chose pourtant impossible durant ces huit ans. Depuis ces quelques minutes d’explication le patron est presque sympa.
conn ai t re
pour ton
job?
Notre expert: Marie Pezé, psychanalyste et docteur en psychologie, 63 ans, spécialiste de la souffrance du travail. Emmanuelle à bien fait de demander une aide psychologique, mais le travailleur doit surtout s’informer sur ses droits et graver dans son esprit l’article L4121-1 du Code du travail, qui stipule ceci: «L’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs».
Risquer ma vie «L’Afrique me faisait rêver depuis tout petit: l’aventure, les grands espaces... Quand ma boite m’a parlé d’un poste en Angola, j’ai signé les yeux fermés. J’ai vite déchanté. Comme tous les expats, je vivais dans un compound ultrasécurisé dont je ne sortais que pour aller au travail, sous escorte. Une fois, je me suis fait dépouiller sur un marché, une autre fois braquer en voiture. J’avais peur du racket et des enlèvements, j’étais sans cesse sur le qui-vive. J’ai tenu deux ans parce que mon boulot était intéressant et que, entre mon salaire et les primes de risques et de mobilité, je gagnais 75000 euros par an. De retour à Marseille, j’ai pu m’acheter un appartement et j’ai trouvé un travail tranquille. Nicolas, 29 ans, Marseille).
1.1
Notre expert: Roméo Langlois, 34 ans, grand reporter, ex-otage des Farc en Colombie. «La vie d’un expat est à l’opposé de celle d’un correspondant à l’étranger: L’expat est envoyé par son entreprise, qui assure sa sécurité dans un pays à risque, le correspondant lui va à la rencontre du pays. Il faut être vigilant mais ne pas tomber dans la paranoïa.
_9
_10
A 21 ans, Sybille décide de se lancer dans des études de médecine. Problème: la prépa coûte cher. Pour s’en sortir, elle s’engage sur le chemin périlleux des petits boulots. «Je finis par trouver un plan qui me convient parfaitement: faire le service dans les mariages. 200 euros par weekend pour une seule nuit de travail. Le premier soir, je suis en binôme avec un jeune homme de 28 ans,. Il me confie que le responsable me fait travailler en même temps qu’une autre fille et qu’il choisira la meilleur pour bosser régulièrement. Coup de massure. Mais je n’ai pas le choix: il me faut ce boulot. Je lui demande: «comment tu sais?» Réponse: «C’est mon frère». L’idée me traverse alors l’esprit de le séduire pour qu’il fasse pencher la balance en ma faveur. Je lui fais de grands sourires pendant la soirée, tout en essaunt de m’appliquer au boulot. Trois heures du matin, le service se calme, il m’invite à faire une pause clope en tête à tête. Bingo. Il me trouve sympa. Je suis ravie. Il fait froid, on grimpe dans sa voiture et il me dit «tu sais si tu as vraiment envie de bosser on peut toujours s’arranger». Tout va très vite, au moment de me rahbiller je me sens aussi sale que forte, au final, j’ai décroché le job. Est-ce que je regrette, oui et non. Ce job j’en avais besoin mais ça a révélé mon manque de confiance en moi.
Seul souci: la machine à café. Tout le monde parle politique, j’ai du mal à tisser des liens. j’évite aussi les déjeuners: impossible d’argumenter face à une table de dix personnes. Et puis le boulot change de nature, on me demande de préparer des «éléments de langage» pour le ministre. Je dois défence des mesures qui vont à l’encontre de mes convictions! Je finis par quitter le cabinet, l’expérience a été riche. Mais si on me faisait aujourd’hui la même proposition je refuserais. Charlotte, 30 ans, Paris.
Virer un ami
conn ai t re
Changer de nom En 2004, Akim décroche un job de courtier en placements financiers. Les premiers mois, il doit se constituer une clientèle en prenant des rendez-vous par téléphone. Il se rend vite compte que quelque chose cloche: «Mon nom, Mon nom arane gêne les clients. J’ai beau avoir un très bon contact avec eux, je sens que ça les empêche d’aller plus loin. Je mets un peu de temps à accepter cette réalité, mais ça devient flagrant: je ne décroche des rendez-vous qu’avez des clients maghrébins! Je finis par en parler à un collège tunisien qui me demande d’emblée: «Tu n’as pas changé de nom?». Lui travaille depuis longtemps avec un nom d’emprunt. J’en parle à mon responsable, très au fait de cette problèmatique, qui m’apporte son soutien. Ensemble, on réfléchit à un nouveau nom, quelque chose qui sonne français, sans en faire trop. C’est comme ça que je deviens Philippe Monier. L’effet est immédiat; J’obtiens quatre fois plus de rendez-vous. Les réactions sont parfois délicates dans mon entourage, notamment du côté de mes parents, qui peinent à comprendre. Mais pour moi, c’est très simple, je contourne un obstacle. Ce nom d’emprunt, il n’a pas plus d’importance que le costume que je porte. Il m’aide lors du premier contact, après il s’éfface. Mes clients réguliers connaissent mon vrai nom. C’est triste de constater que la société française en est encore à ce genre de préjugé.
Me trahir Charlotte est une socialiste convaincue, encartée PS depuis plus de dix ans. Mais en 2008, cette brillante économiste reçoit une proposition étonnante: une place dans un cabinet ministériel du gouvernement Fillon! C’est le début d’une aventure schizophrénique: «Au départ, ça me semble impensable, mais je décide tout de même de rencontre les membres du cabnet. C’est très impressionnant, une ruche foisonnante ou s’affairent des trentenaires dynamiques. On me parle du poste: passionnant! L’attrait du job et la possibilité de booster ma carrière sont trop forts: j’accepte. Je deviens donc conseillère technique, ce qui à son importance puisque à cet instant je me considère comme une technicienne qui met son travail au service de l’in-
1.1
vécu le « bore-out » quand j’ai été placardisée. On pointe, dans la fonction publique. Je venais au bureau de 8h30 à 17h, mais on ne me donnait rien à faire. J’étais évincée de réunions, il y avait un cordon sanitaire autour de moi. Pour que mon cerveau ne s’atrophie pas complètement, j’ai lu des quantités de rapports de droit et d’économie, en attendant de trouver un autre poste. »
térêt général et non pas d’un gouvernement. Au début, ça se passe bien: mon travail est apprécié, c’est exaltant.
Coucher
Me soumettre
«Nous sommes une dizaine autour de la table. Le bureau de l’association au grand compet. Les regards se tournent vers moi, le trésorier. J’ai la gorge un peu sèche mais je me lance... Depuis quelques semaines, l’ambiance s’est tendue dans notre bande de potes, enseignants et journalistes. Tous bénévoles, à part deux salariés permanents. Nous suons sang et eau le soir, après nos boulots respectifs, pour terminer un livre collectif, fruit de nos recherches. L’éditeur s’impatiente. Albert, un de des deux permanents devait coordonner l’ouvrage et s’était attribué l’essentiel de la rédaction. Mais il n’a rien foutu et, quand on s’en est rendu compte, tous les bénévoles ont dû enchainent les nuits blanches pour combler ses manques. Naturellement beau parleur, Albert a cette fois compromis un dossier vital pour l’association. Alors le bureau à décidé de le licencier Problème: c’est un pote. Aussi on m’a demandé à moi, le benjamin, de lui annoncer. Je le regarde dans les yeux, lui débite sans ciller l’acte d’accusion et prononce la sentence. Philippe, 49 ans, Montmorency.
Travailler P« Sur mon contrat, je suis à 37,5 heures par semaine. En réalité, je travaille six jours sur sept, de 10h à 21h30 minimum. J’enchaîne régulièrement plusieurs nuits blanches pour boucler un projet dans mon cabinet d’architectes. Moi qui suis une grosse dormeuse, je repousse sans cesse mes limites. Le café aidant, j’ai découvert que j’étais plus efficace en pleine nuit. En juin, j’ai bossé tous les jours non-stop, weekend inclus, car j’avais 3 projets à rendre, en plus du suivi quotidien de deux chantiers. A la fin, j’étais une loque. Mon patron ne m’a donné que cinq jours de récup’. Impossible d’en demander plus dans une petite agence. L’argent n’est pas ce qui me motive. Je gagne 2 200 euros net par mois, quoi qu’il arrive. Je m’accroche car mon patron m’accorde une liberté totale: je gère tout de A à Z. J’emmagasine de l’expérience pour plus tard. J’ai un objectif: monter ma propre agence avec mes 30 ans. » (Cécile, 28 ans, Montreuil) Notre expert: Aurélie Boullet, 33 ans, alias Zoé Shépard, auteure de Ta carrière est fi-nie! Et du best seller Absolument dé-bor-dée! (éd. Albin Michel) « Cécile a l’air passionnée: c’est génial, mais je m’inquiète pour sa santé. Elle devrait s’économiser, sinon elle va s’épuiser à vivre à une telle cadence. Elle n’est pas loin du burn-out. Il faut trouver un juste milieu. Ne rien faire peut être aussi mauvais. Moi, j’ai
« Prévoyez-vous d’avoir des enfants d’ici à cinq ans? » « Que pensez-vous des 35 heures? » « Etes vous fumeuse? » Pendant l’entretien, les questions étaient tellement bizarres qu’Elisa a senti que ça ne tournait pas rond dans cette boîte de traduction. « La cigarette, j’ai compris plus tard que c’était pour savoir si on ferait des pauses. Mais voilà, je sortais de mon école de traduction et il me fallait une expérience sur mon CV. Alors j’ai pris sur moi. » Le règlement intérieur est « ubuesque »: interdiction de parler avec ses collègues (ils communiquaient par Post-it!), tous les mails relus par son supérieur, interdiction d’avoir son téléphone portable allumé... « Régulièrement, le patron s’asseyait derrière moi et me disait: « Vous avez l’impression d’être efficace, là? » Un jour, une collègue ramasse ses affaires alors qu’il n’est que 11 heures. Elisa lui chuchote: « Tu vas où? » Elle lui répond (en chuchotant aussi): « Je suis virée mais je n’ai pas le droit de le dire. » Délirant. « J’ai découvert toute la puissance du harcèlement. On suivait tous comme des moutons, moi la première alors que je suis plutôt grande gueule. Avec ce job, j’ai appris à me taire et qu’il fallait s’attendre à tout dans le travail. » (Elisa, 31 ans, Barcelone) Notre expert: Claude de Scoraille, 49 ans, psychothérapeute à la Clinique du travailler « Les premières questions en disent long: le recruteur cherche des profils soumis. Il est dans le toutcontrôle. Face à un patron harceleur, se taire n’est pas la bonne tactique. Se rebeller non plus! Il faut être plus stratégique: tuer le serpent avec son propre venin. Il faut recréer le ralation. Elisa aurait pu répondre: « Je vous remercie de votre attention. Je sais que tout ce que vous faites, c’est pour que les choses aillent bien. Surtout, dites-moi si quelque chose ne vous convient pas dans mon travail. » Il faut sur-solliciter son retour, jusqu’à faire volontairement des petites erreurs. Le harceleurs sera déstabilisé et n’aura plus de plaisir à harceler. »
Bluffer P« A l’époque, j’avais faim et je prenais tous les petits boulots. » C’était il y a dix ans, Justine écumait les agences d’hôtesses et de street marketing. « Vous savez faire du roller? » « Oui, bien sûr » Franchement, elle m’aurait dit « Vous savez faire du parapente? » j’aurais dit oui avec la même assurance. C’est sorti
_11 tout seul. Il me fallait ce job, je verrais plus tard pour les détails techniques. » Evidemment, Justine NE SAIT PAS faire du roller. L’agence la rappelle pour une mission de tractage sur roulettes devant Monoprix d’Issy-les-Moulineaux, en banlieue parisienne. « Le jour J à 7 heures du mat dans ma grosse doudoune blanche Monoprix, je faisais pas la maligne. » Les fesses en arrière, les jambes écartées et fléchies au maximum pour être le plus près du sol, Justine s’accroche aux lampadaires, aux poteaux, aux passants... « Mes collègues hallucinaient, j’étais dans un état de polio attitude. Finalement, c’est devenu un jeu avec les passants qui avaient pitier de moi et prenaient mes flyers. Comme quoi ça valait le coup, on trouve toujours une solution pour rebondir. » (Justine, 31 ans, Paris)
Nos experts: Marc Blanc, 58 ans, ancien secretaire fédéral de la CFDT chez Total « Christine a le sens des responsabilités. Quand on est irréprochable, on a toute la légitimité pour se faire respecter. C’est plus une question de personnalité que d’âge. Et heureusement! Avec la pression du chômage, nombre de salariés préfèrent courber l’échine plutôt que de se faire remarquer pour obtenir gain de cause. C’est dommage. Les hiérarchies sont aussi en attente de ça. » Sophie M., 32 ans, responsable RH depuis huit ans dans le Notre expert: ElkY, 31 ans, champion de secteur de l’assurance poker, n°1 français « Effectivement, si un salarié « Pour bluffer, il faut avoir est performant, il est plus confiance en soi et le jouer légitime et peut poser ses à fond. Sinon, c’est vraiconditions. Mais dans le cadre ment ridicule. Au poker, c’est du travail, se lâcher à ce une des qualités essentielles point-là est à double tranpour gagner. Tout l’art réside chant. Il faut défendre ses dans le regard. Des yeux qui valeurs, certes, mais ça reste roulent, qui regardent vers le milieu professionnel, on ne le bas ou qui brillent un joue pas sa vie. Dans le cas peu trop et vous êtes cuit. de Christine, j’analyse son L’idéal, c’est de porter des augmentation comme un message lunettes de soleil, et surtout déguisé de ses patrons pour il ne faut pas trop réfléchir. qu’elle se calme. » Au poker, pour progresser, on filme les parties puis on Me faire insulter regarde si notre visage reste « En cuisine, on n’est pas des tendres. La impassible, si on ne casse pas nière dont on se parle peut choquer. C’est la routine des gestes quand on sec, pas de s’il vous plaît », c’est l’efficacité a une bonne main. » prime. » David, 26 ans, a fait ses classes
Me battre
un restaurant haut gamme à Lyon, ava monter en grade pour devenir chef de trées. Les « putains mais tu te branles?!!! sont légion. Pour une botte d’asperges quante, David a déjà vu son chef piqu colère noire, taper de toutes ses forces plan de travail et lui hurler de rage: « T ment trop con! » « Evidemment, ce s rapports infantilisants, et c’est humilia faire reprendre devant ses collègues. A je me justifiait pour tout je bouillonnai compris qu’il valait mieux acquiescer, c compte c’est que le problème soit ré le temps, je trouve que c’est justifié métier où il faut savoir résister à la p les gens sur qui on gueule moins... moins bien. Ce sont les codes de c n’accepterais pas qu’on me parle dans la vie. » (David, 26 ans, Lyon)
Christine, c’est le cauchemar des patrons. Une salariés modèle d’une agence de communication à Nice qui vire au bouledogue à la moindre injustice. « Je fais bien mon boulot, mais faut pas m’chercher. » A 25 ans, elle remet à sa place un patron autoritaire qui l’accuse injustement d’avoir manqué une commande: « Si j’étais un mec, je vous casserais la gueule. » « Il m’a répondu par un petit sourire, j’avais gagné son respect. J’ai compris qu’avec ce genre de patron, il fallait rendre coup pour coup. » Depuis, Christine enchaîne. « La hiérarchie ne m’a jamais pétrifiée. Je considère que l’autre est un adulte avec qui on doit pouvoir discuter. Je ne suis pas du genre à baisser la tête, c’est une question d’estime de soi. » Dernier combat en date: il y a un an, elle frôle le licenciement. « Je sui arrivée au bureau en fin de matinée pour rattraper ma nuit passée chez un imprimeur. » Christine est convoquée par le patron, sermonnée, elle s’énerve, se défend... l’affaire tourne au vinaigre: mise à pied pour « insubordination »! « C’était tellement injuste! Il fallait réagir, l’étape suivante, c’était son licenciement. » Avocat, échanges de lettres recommandées, Christine se tient à carreau pendant trois mois. Résultat: la mise à pied est levée et Christine a été augmentée à la fin de
Notre expert: Michel C., 53 ans, gé l’armée française, en activité « Ca ne me choque pas q puisse avoir un langage vif au moment du coup Comme dans l’armée, on ser les jeunes recrues leur retranchements po aguerrir. L’humiliati pas une méthode en so
1.1
_12 cuisine, comme dans l’armée, chacun doit jouer sa partition au moment de passer à l’action. Celui qui se trompe se fait engueuler et passe pour un peintre après des autres. C’est la règle. »
Ophélie avait pourtant senti l’entourloupe. La première année de son contrat dans une atelier de PSi aux JO il y avait une épreuve du recrutement bijoux fantaisie se passe bien. Puis la situation se le plus long. Alessandro pourrait prétendre au podétériore, les payes arrivent de plus en plus tard et dium: deux ans d’entretiens, de tests, de mises en les derniers salaires ne sont pas versés. Ophélie résituation, de contre-entretiens, de stages de sélecclame, sa boss la balade. Pour ses proches, elle oit tion et d’entretiens de confirmation pour intégrer partir. Problème: elle aime travailler. Créer des biun cabinet d’avocats à Londres. Une machine de joux, c’est son truc. « J’étais très investie. Et ça me guerre, à tel point qu’on se demande si ce n’est pas Tout remettre en jeu faisait de l’expérience. » Alors elle joue le jeu. Mais le plus endurant qui décrochera la médaille. « Je « J’ai quitté mon job et mon petit confort pour toujours pas de chèque. Elle quitte la boîte sans avoir me suis battu jusqu’au bout parce que ce job, c’est créer ma boîte il y a quelques mois. » Tamia, 31 touché ses deux derniers mois, ses heures sup’ et mon assurance-vie. J’aurai toujours cette expéans, tient sur ses genoux le fruit de tous ses efforts: son solde de tout compte. Dans cette affaire, elle a rience pour retomber sur mes pattes. » Alessandra la Thé Box, des coffrets de thés vendus depuis cet aussi perdu de la confiance en soi. « C’est comme si a 27 ans et cela fait près de dix ans qu’il se préété par abonnement. Avant, elle était urbaniste je n’avais pas été reconnue dans mon travail, du coup pare. La bonne université, le meilleur classement, dans le secteur public. « J’ai eu envie de nouveauté, je doutais de mes compétences. » Ophélie a fini par une dizaine de stages, le réseautage dans les conféde travailler sur un projet concret, rapide. » Avec attaquer aux prud’hommes et a récupéré les salaires rences internationales... « Pendant les entretiens, Julia, son associée, elles décident de se lancer: « En manquants. « Cela m’a rendu la reconnaissance que les recruteurs m’ont demandé de leur vendre des une semaine, on avait posé les bases du concept je n’avais pas eue, mon travail retrouvait sa valeur. » baguettes chinoises équipées d’un ventilateur ou et choisi d’engager une bonne partie de nos éco(Ophélie, 27 ans, Paris) • encore ce que je pensais de la crise des subprimes. nomies » Mais l’indépendance a un prix: se jeter En deux ans, il faut rester motivé et entraîné à ce dans l’inconnu de la création d’entreprise, ne pas genre de questions pour répondre du tac au tac. se payer la première année et prendre le risque de Et en dehors des phases de sélection, on est censé la faillite. « Avec ce projet, on s’expose personnel« s’occuper » comme on peut. » L’ultime test de lement. En cas d’échec, notre déception serait immotivation? (Alessandro, 27 ans, Londres) mense. » (Tamia, 31 ans, Paris)
Mariner deux ans
conn ai t re
Notre expert: Yoann Huget, 25 ans, rugNotre expert: Baptiste, 30 ans, trader dans une byman au Stade Toulousain et ailier du grande banque française XV de France « Si on ne prend aucun risque, on « Dans se tels processus de selecne peut pas gagner d’argent. Mais tion, il faut beaucoup d’humilité et Tamia prend bien plus de risques de l’acharnement. C’est ce qu’atqu’un trader. Pour la majoritendent entraîneurs et recruteurs. té d’entre nous, le job consiste A chaque étape pour Alessandro, justement à les maîtriser. Moi, si comme à chaque match pour moi, je fais des erreurs, je ne perds il faut se remettre en question, pas mon job. Tamia, elle, a engagé tenter de s’améliorer pour tendre son capital personnel, n’a pas de vers l’excellence. On tient sur la salaire et n’a plus le cadre séculongueur en se dopant à l’esprit de risant de l’entreprise. Après, il compétition. A chaque fois, il faut existe un infime minorité e traders repartir sur le terrain en essayant seniors qui jouent avec les fonds d’être le meilleur. » propres de la banque (comme Jérôme Kerviel). Ceux-là prennent vraiment des risques »
Me faire arnaquer
1.1
NAM JULI_ Journaliste NEON
Nadège, 25 ans, semble partager ce sentiment. Depuis un an, elle travaille dans une boite d’édition à Toulouse. Avant chaque passage aux cabinets, la même question se pose: «Vais-je finir dans le noir ? ». Car Nad_ge est une
Laetitia, 25 ans, admet que son subterfuge « n’est pas pratique ». Il est vrai que l’objectif avoué est ambitieux: Faire mes besoins loin de toute personne susceptible de me connaître. Rien que ça. Mais pas question d’aller au fin fond des bois, laetitia aime trop le confort. Lorsqu’elle part en vacances avec des amis « moment très compliqué », elle arpente les environs avec un seul objectif en tête : repéré les bars du coin peu fréquenté. « Certe je me complique la vie, mais l’idée même qu’on puisse me voir sur le trône me dégoute...».
« J’ai tout testé: les allumettes, l’aérosol, avant, après, rien ne marche.» Jusqu’à la découverte, il y a quelques mois, de la formule idéale. Je m’assois sur la cuvette de sorte à la couvrir intégralement et j’envoie un pschiit de désodorisant entre les jambes ». « La compression relative de l’air entre les fessus et le fond de la cuvete permet aux bonnes odeurs d’étouffer un peu les mauvaises ». Sa technique, Bertrand lui a même donné un nom : la cocotte-minute. Il n’est pas le seul à savoir passé lusieurs années à développer des stratégies pour que les lieux d’aisances le reste vraiment.
lettes
Les odeurs sont sa hantises. Surtout lorsqu’il est au traval. Depuis trois ans, il bosse dans un bureay d’ingénieuss à Montpellier: «Je te laisse imaginer l’ambiance... pas très détendue.» explique t-il en faisant la moue. Pas de chance, les toilettes sont situées juste à côté de la photocopieuse. Le lieu privilégié de discusssion. Et Bertrand, pour courroner le tout, souffre de problèmes de digestion.
c’est la peur de déranger les autres qui m’a amené ¶ Moi, à développer ma technique, confesse Bertrand, 27 ans.
1.2
La pression des cabinets d’aisances serait-elle plus forte sur la gent féminine? 83% de nos concitoyens ne se sentent pas propres après leur passage aux toilettes. Et la gêne s’accorde aussi au masculin. Malgré ses efforts , Julien, 25 ans, a toujours détesté ce moment. Surtout les odeurs. Pour éviter les désagréments olfactifs, il tire la chasse en plein milieu. Julien n’a rien inventé. Rien d’étonnant dans la culture japonaise, 1400 mots ou expressions pour évoaquer les toilettes. Chez les nippons, le gagdet qui porte le nom Otohimie, reproduit le bruit de la chasse d’eau. Futile? Il permet d’économiser jusqu’à 20 litres d’eau par utilisation, gaspillé pour faire office de camouflage sonor •
Pour évaluer la situation et trouver une solution, il aura suffi de trois coups d’oeil à Sophie, 24 ans, le premier jour dans sa nouvelle entreprise, une banque. Constat n°1: tous ses collaborateurs sont masculins, rien de pire pour me bloquer. Deuxième constat, les toilettes jouxtent la cuisine, là ou tout le monde prend son café et discute. Mais siphie saint comment marche une banque, le matin je consulte en ligne l’agenda de mes collègues. Il suffit de repérer la demi-heure ou ils sont tous en rendez-vous pour filer aux toilettes. Parfois c’est difficile de se retenir alors je prends un comprimé d’immodium et ça passe. Mais ça reviendra. La constipation excessive et la retenue des selles peuvent entrainer des cas d’encoprésie, c’est à dire des fuites de matières.
le matin? Pas question. Elles étaient collées au mur de la chambre. Quant à celle du taf, impossible : plantées au milieu de l’open space. On entendait les mouches voler, alors pendant un an, tous les midis, Marianne rentre chelle elle, juste pour aller aux WC, le truc idiot, j’avais huit stations de métro, le temps d’arriver et de m’exécuter, je devais repartir pour ne pas être en retard. Résultat, Marianne avale tous les jours des sandwichs, et ses collègues finissent par la prendre pour une snob.
c o nn a i t r e
Pour Marianne, 33 ans, les ennuis ont commencé le jour ou elle a démarré un nouveau boulot. Au même moment, elle s’intallait avec son nouveau copain. Aller aux toiletttes
A cette obsession s’ajoute la notion d’intimité, développée à partir du XVIe siècle. Jusque là, c’est la rue qui tient lieu de cabinet. Honte et pudeur ne sont pas de mise. Et voilà que les bourgeois au nez délicat somment la population de confiner les mauvaises odeurs, comme le rappelle l’historien Roger-Henri Guerrand. Depuis il est bon ton de faire ses besoins seul. Loin du regard des autres. Car ce qui inquiète les obsessionnels du colon, c’est bien la peur d’être surpris en train d’effectuer cette basique besogne. Alors il faut se creuser la tête. Jusqu’à l’extrême.
adpete de la technique du fantôme, dès que quelqu’un rentre dans les toilettes d’à côté j’arrête de respirer. Si la lumière s’éteint tant pis. il faudra continuer sans. « Ce qui arrive quasiment à chaque fois, l’avantage c’est que les gens croient que le cabinet est hors-service, et finissent par en chercher un autre. L’inconvénient c’est qu’on peut rester très longtemps.» Son record est de une demi-heure. Pourquoi un tel luxe de précautions pour tenter de dissimuler nos besoins naturels? Excès de pudibonderie? Hygiénisme pathologique? Les raisons sont souvent psychologiques analyse Dominique Mazin, psychologue. De nombreux adultes oublient que leur défécation n’intéresse personne. Ils montent des stratagèmes pour ne pas être entendus, alors que tout le monde s’en fout ! Et il faut retourner l’âge de l’apprentissage de la propreté pour trouver l’explication de cette lubie. C’est la remière fois que le parent dit ouvertement ce qui est bien et mal : dans le pot c’est bien, à côté c’est mal. Et visiblement, les applaudissements au moindre plouf restent dans un coin de l’inconscient. Les adultes sont persuadés que le monde entier est obnubilé par leur production... comme l’étaient leurs parents.
_Un article de Maude Paterson / Crédits photos Samuel Son, Camille JP.
mieux vivre les toi-
trésors d’imagination que l’on peut déployer pour se sentir à l’aise aux vécés.
vos stratégies pour De la toux forcée à la cuvette tapissée de papier, c’est fou les
NAM JULI_ Journaliste NEON
_13
1.2 Neon Magazine_4 ¶
Laetitia, 25 ans, admet que son subterfuge « n’est pas pratique ». Il est vrai que l’objectif avoué est ambitieux: Faire mes besoins loin de toute personne susceptible de me connaître. Rien que ça. Mais pas question d’aller au fin fond des bois, laetitia aime trop le confort. Lorsqu’elle part en vacances avec des amis « moment très compliqué », elle arpente les environs avec un seul objectif en tête : repéré les bars du coin peu fréquenté. « Certe je me complique la vie, mais l’idée même qu’on puisse me voir sur le trône me dégoute...». Pavés, béton, arbres... c’est dix fois plus varié qu’un parcours Nadège, 25 ans, semble partager ce sentiment. Depuis un an, elle travaille dansclassique une boite d’édition à Toulouse. Avant chaque passage aux cabinets, la même question se pose: «Vais-je finir dans le noir ? ». Car Nad_ge est une adpete de la technique du fantôme, dès que quelqu’un rentre dans les toilettes d’à côté j’arrête de respirer. Si la lumière s’éteint tant pis. il faudra continuer sans. « Ce qui arrive quasiment à chaque fois, l’avantage c’est que les gens croient que le cabinet est hors-service, et finissent par en chercher un autre. L’inconvénient c’est qu’on peut rester très longtemps.» Son record est de une demi-heure. Pourquoi un tel luxe de précautions pour tenter de dissimuler nos besoins naturels? Excès de pudibonderie? Hygiénisme pathologique? Les raisons sont souvent psychologiques analyse Dominique Mazin, psychologue. De nombreux adultes oublient que leur défécation n’intéresse personne. Ils montent des stratagèmes pour ne pas être entendus, alors que tout le monde s’en fout ! Et il faut retourner l’âge de l’apprentissage de la propreté pour trouver l’explication de cette lubie. C’est la remière fois que le parent dit ouvertement ce qui est bien et mal : dans le pot c’est bien, à côté c’est mal. Et visiblement, les applaudissements au moindre plouf restent dans
« J’ai tout testé: les allumettes, l’aérosol, avant, après, rien ne marche.» Jusqu’à la découverte, il y a quelques mois, de la formule idéale. Je m’assois sur la cuvette de sorte à la couvrir intégralement et j’envoie un pschiit de désodorisant entre les jambes ». « La compression relative de l’air entre les fessus et le fond de la cuvete permet aux bonnes odeurs d’étouffer un peu les mauvaises ». Sa technique, Bertrand lui a même donné un nom : la cocotte-minute. Il n’est pas le seul à savoir passé lusieurs années à développer des stratégies pour que les lieux d’aisances le reste vraiment.
Moi, c’est la peur de déranger les autres qui m’a amené à développer ma technique, confesse Bertrand, 27 ans. Les odeurs sont sa hantises. Surtout lorsqu’il est au traval. Depuis trois ans, il bosse dans un bureay d’ingénieuss à Montpellier: «Je te laisse imaginer l’ambiance... pas très détendue.» explique t-il en faisant la moue. Pas de chance, les toilettes sont situées juste à côté de la photocopieuse. Le lieu privilégié de discusssion. Et Bertrand, pour courroner le tout, souffre de problèmes de digestion.
_Un article de Maude Paterson / Crédits photos Samuel Son, Camille JP.
Le golf est-il le nouveau skate? La version citadine du sport, baptisé street golf, se joue même quand on est fauché
enfants de la balle 0.1.3
conn voiairt re
_14
conn ai t re voir
Gabrielle, 24 ans, ne se sert pas de la chasse pour étouffer les bruits: Trois feuilles de papier toilette suffisent. Je forme un toboggan, en les répartissant équitablement sur la porcelaine •
La pression des cabinets d’aisances serait-elle plus forte sur la gent féminine? 83% de nos concitoyens ne se sentent pas propres après leur passage aux toilettes. Et la gêne s’accorde aussi au masculin. Malgré ses efforts , Julien, 25 ans, a toujours détesté ce moment. Surtout les odeurs. Pour éviter les désagréments olfactifs, il tire la chasse en plein milieu. Julien n’a rien inventé. Rien d’étonnant dans la culture japonaise, 1400 mots ou expressions pour évoaquer les toilettes. Chez les nippons, le gagdet qui porte le nom Otohimie, reproduit le bruit de la chasse d’eau. Futile? Il permet d’économiser jusqu’à 20 litres d’eau par utilisation, gaspillé pour faire office de camouflage sonore.
Pour évaluer la situation et trouver une solution, il aura suffi de trois coups d’oeil à Sophie, 24 ans, le premier jour dans sa nouvelle entreprise, une banque. Constat n°1: tous ses collaborateurs sont masculins, rien de pire pour me bloquer. Deuxième constat, les toilettes jouxtent la cuisine, là ou tout le monde prend son café et discute. Mais siphie saint comment marche une banque, le matin je consulte en ligne l’agenda de mes collègues. Il suffit de repérer la demi-heure ou ils sont tous en rendez-vous pour filer aux toilettes. Parfois c’est difficile de se retenir alors je prends un comprimé d’immodium et ça passe. Mais ça reviendra. La constipation excessive et la retenue des selles peuvent entrainer des cas d’encoprésie, c’est à dire des fuites de matières.
Pour Marianne, 33 ans, les ennuis ont commencé le jour ou elle a démarré un nouveau boulot. Au même moment, elle s’intallait avec son nouveau copain. Aller aux toiletttes le matin? Pas question. Elles étaient collées au mur de la chambre. Quant à celle du taf, impossible : plantées au milieu de l’open space. On entendait les mouches voler, alors pendant un an, tous les midis, Marianne rentre chelle elle, juste pour aller aux WC, le truc idiot, j’avais huit stations de métro, le temps d’arriver et de m’exécuter, je devais repartir pour ne pas être en retard. Résultat, Marianne avale tous les jours des sandwichs, et ses collègues finissent par la prendre pour une snob.
A cette obsession s’ajoute la notion d’intimité, développée à partir du XVIe siècle. Jusque là, c’est la rue qui tient lieu de cabinet. Honte et pudeur ne sont pas de mise. Et voilà que les bourgeois au nez délicat somment la population de confiner les mauvaises odeurs, comme le rappelle l’historien Roger-Henri Guerrand. Depuis il est bon ton de faire ses besoins seul. Loin du regard des autres. Car ce qui inquiète les obsessionnels du colon, c’est bien la peur d’être surpris en train d’effectuer cette basique besogne. Alors il faut se creuser la tête. Jusqu’à l’extrême.
un coin de l’inconscient. Les adultes sont persuadés que le monde entier est obnubilé par leur production... comme l’étaient leurs parents.
NAM JULI_ Journaliste NEON
_15
Neon Magazine_4
1.2
1.3
pipi pour tous
NAM JULI_ Journaliste NEON
¶
On n’imagine pas toutes les petites vexations que la vie quotidienne apporte à ceux qui se sentent différents. Quand on n’a pas envie de choisir si l’on est un homme ou une femme, même aller aux toilettes peut être vécu comme une discrimination, comme le pointait un rapport de la Commission européenne sur les personnes trans et intersexuées, en 2011. Dans l’arrondissement de Friedrichshain et de Kreuzberg, à Berlin, les indécis vont enfin pouvoir pisser dans leur genre grâce à des lieux d’aisances qui leur sont dédiés dans les administrations ouvertes au public. Une initiative portée par le parti pirate, entré au parlement du Land de Berlin en septembre 2011, et votée avec les voix de la gauche et des verts début mars 2013. Avant d’équiper les écoles et les bibliothèques de W.-C. spécialement aménagés, les panneaux « Hommes » et « Femmes » des toilettes de la sécu et de la mairie qui réunit les deux quartiers seront enlevés dès le 1er juin. Le temps de réfléchir à l’organisation de ces wa-wa du troisième type : si l’installation de tables à langer (pour que les hommes AUSSI puissent changer leurs bébés) est acquise, celle d’urinoirs fait débat •
_Un article de Maude Paterson / Crédits photos Samuel Son, Camille JP.
Le golf est-il le nouveau skate? La version citadine du sport, baptisé street golf, se joue même quand on est fauché
conn ai t re
_16
voir
_17
1.3
1.4 Elles sont la bête noire du président russe Vladimir Poutine. En février dernier, dans une église orthodoxe de Moscou, les Pussy Riot entonnent une prière punk à l’encontre du dirigeant. Une prestation que ce dernier n’apprécie guère. Résultat, deux filles de ce groupe punk féministe ont été condamnées à deux ans de camp de travail. Formées en 2011, les Pussy Riot n’en sont pas à leurs premières frasques. Les punkettes ont participé à diverses performances artistiques au sein du collectif Voïna, dont on vous parlait dans le n°1 de NEON. Parmi leurs actions, il y a eu notamment un phallus géant peint sur un pont faisant face au siège du KGB…
Protester seins nus, tel est le mode opératoire des Femen, groupe féministe originaire d’Ukraine. En octobre dernier, c’est donc topless qu’elles manifestent devant le ministère de la Justice. L’objet de leur indignation ? Le verdict dans une affaire de viols collectifs. Luttant pour le droit des femmes, cessextivistes, comme elles se qualifient, n’en sont pas à leur premier coup d’éclat : protestation lors de l’Euro 2012 et des jeux Olympiques de Londres, mani-
Coup de gueule topless
Des silhouettes blanches sur le sol, un périmètre de sécurité… Non, il ne s’agit pas du dernier tournage deNCIS, mais d’une mise en scène d’Action contre la faim. Dans le cadre de la journée mondiale de l’alimentation, l’ONG a reproduit une scène de crime géante dans une trentaine de villes françaises. But de la manœuvre : représenter les 10 000 femmes et enfants de moins de 5 ans qui meurent chaque année de malnutrition.
Scène de crime
Manifestation à poil contre le commerce de fourrure, mise en scène morbide pour dénoncer la tauromachie… Grand défenseur de la cause animale, l’organisme PETA est connu pour ses actions chocs, souvent dénudées. La petite dernière du genre ? En août dernier, des militantes manifestent place de la Bastille à Paris dans une baignoire remplie de jus de tomate ! Une mise en scène plutôt glauque destinée à dénoncer les tests des labos cosmétiques sur nos amis les bêtes.
Protestation sanglante
¶
Prière punk
chocs
_Un article de Maude Paterson / Crédits photos Samuel Son, Camille JP.
Manifestations seins nus, mises en scène culottées… Pour obtenir gain de cause, certains militants ne reculent devant rien.
activiste de
conn ai t re
_18
c o nn a i t r e
NAM JULI_ Journaliste NEON
En matière de protestation, la Corée du Sud n’est pas à court d’imagination. La preuve : récemment, une dizaine de militants pro-démocratie ont envoyé par ballon 30 000 tracts à destination de Pyongyang, capitale de la Corée du Nord. Dans ces « colis surprise », des photos d’autocrates déchus, comme le Roumain Nicolae Ceausescu ou encore l’Irakien Saddam Hussein. Le but ? Exhorter les Nord-Coréens à se soulever contre leur nouveau dirigeant, Kim Jong-Un. Ce n’est pas la première fois que Séoul nargue son voisin à coups de ballons de baudruche. Interrompus pendant 11 ans, ces lâchers contestataires ont repris en 2010 •
Lâcher de ballons
Voilà qui a dû dérouter bien des passants : en octobre dernier, une vague de syncopes fait rage devant un H&M parisien. Pas de panique : il s’agissait d’une simulation d’Éthique sur l’étiquette, collectif militant pour le respect des droits au travail dans les pays du Sud. Le but ? Symboliser les évanouissements des Cambodgiens bossant dans la confection, ces derniers ne gagnant pas suffisamment pour se nourrir correctement. Objectif : pousser les marques de textiles se fournissant au Cambodge à payer convenablement les ouvriers. Ces derniers touchent en effet 66 dollars par mois, salaire ne couvrant qu’un quart de leurs besoins de base. Résultat, au boulot, des ouvriers s’évanouissent par centaine. Et H&M n’est pas la seule marque concernée: dans le collimateur du collectif, Zara, mais aussi GAP et Levi’s.
Évanouissements collectifs
festation devant les fenêtres de Dominique Strauss-Kahn suite à l’affaire du Sofitel… Et cela n’est pas prêt de s’arrêter : les Femen ont pris d’assaut le quartier de la Goutte d’Or à Paris, où elles ont crée le premier centre d’entraînement international pour féministes.
_19
Neon Magazine_4
1.4
vo dur retour pour l’immigré
15
Quand Maldonado clandestin mexicain, rentre chez lui, il n’est plus le bienvenu.
ir
15
Après l’incendie Leur immeuble à brûlé. Dix-huit mois après, les rescapés racontent.
15
Mais dans quel monde vivons nous
Au Brésil, lire ouvre les portes du pénitencier
Mais dans quel pays vivons nous
15
Ayrault fait son jardin à Matignon
Vendeur de sperme
15
Jonas, étudiant, éjacule pour payer la fac.
2.0
dur re-
_22
Maldonado à vécu en clandestin aux Etats-Unis. Sur un malentendu, il est rentré au Mexique. Ou il se sent un étranger.
tour
_Un article de Maude Paterson / Crédits photos Samuel Son, Camille JP.
voi r
pour
trente-huit heures que Maldonado est allongé dans la une cellule pour douze ¶ Voilà détenus. L’air est lourd et humide, la pièce pue la pisse. Il est trempé de sueur, a mal au ventre de faim, mal au coeur de tristesse? D’après la loi fédérale des Etates-Unis, il est un criminel. Infraction «8 USC 1325 – Improper entre by alien», entrée illgéale d’un étranger sur le sol américain. «Leoncio Gaspar Maldonadp!» hurle un officier. Il se lève, le suit. En chemin, il perd à moitié ses chaussures en cuir, son jean glisse sur ses hanches. Les policiers lui ont retiré ses lactes et sa ceinture pour l’empêcher de se pendre. On prend l’empreinte de sa main droite, on scanne son iris, on photographie son visage. 1M64, cheveux coupés très court, plombage sur l’incisive gauche. Les données sont comparées ave celles de la base du FBI. L’ordinateur affiche: «Trouvé». Il y a deux ans, en Floride, Maldonado avait grillé un feu rouge. Il avait alors payé une amande sans faire d’histoire et personne n’avait vérifié son permis de séjour.»Tu étais déjà sur le territoire?» demande l’officier en espagnol. Il fait oui de la tête. Nus sommes à l’été 2009, et c’est la deuxième fois que Leoncio Gaspar Maldonado tente d’entrer sur le territoire américain. La première fois, c’était en 2001, et ça avait marché. Ouvrier agricole en Floride, dans le Michigan et d’autres Etats, en fonction des récoltes, il gagnait pres de dix dollars de l’heure: dix fois plus qu’au Mexique.
l’émigré
Pendant huit ans, il avait envoyé des sous à sa famille, à Santo Domingo dans la province d’Oaxaca, après avoir payé le loyer, le téléphone et de quoi manger. Les dimanches, il leur parlait un quart d’heure en appelant chez les voisins car sa famille n’avait pas le téléphone. Pour Maldonado, ses enfants éaient deux vois devenant un peu plus graves avec les années. Mais un dimanche de 2009, la mère de Maldonado ne vnt pas répondre au téléphone. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit la voisine. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit sa fille. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit son fils. «Elle n’est pas occupée, et elle ne va pas bien», pense Maldonado. «Ne rentre pas à la maison, je t’en prie. Nous avons besoin d’argent». Il ne perdra pas sa mère sans l’avoir vue une dernière fois. Il prend la route:4000 kilomètres en direction du sud, en bus Greyhound et en stop. Personne ne jette un oeil à ses papiers au poste-frontière. Lorsqu’il rapelle chez lui, il est déjà au Mexique. «Ta mère va mieux, le rassure la voisine. Elle était à l’hôpitale, je te la passe» «Mi Hijo, mon fils», dit-elle en prenant le combiné. «Tu es au Mexique?» Ne rentre pas à la maison, je t’en prie. Nous avons besoin d’argent. Comment pourrons-nous envoyer les enfants à l’école, sinon?» «J’aurais dû réfléchir avant de quitter les EtatsUnis» admet Maldonado.
2.1
Pendant deux mois, il erre dans le Nord du Mexique, vend des journaux, travaille sur des chantier et tu ne gagnes pas d’argent.»Là, tu ne fais que travailler et tu ne gagnes as d’argent.» Maldonado veut retourner aux Etats-Unis. Mais huit ans après sa première traversée de la frontière, il est devenu quasiment impossible d’entrer sans papiers. Entre-temps, le nombre de gardes-frontières a doublé. En tout, 18000 policiers surveillent les 3000 kilomètres de grillage. Dans les Etats du Sud des EtatsUnis, on prend des mesures sévères contre ce que beaucoup regardent comme une «invasion étrangère». 400 000 immigrés illégaux ont été expulsés du territoire américain en 2011.
_23 «C’est bon», se dit-il en escaladant pour la deuxième fois de sa vie la clôture de sécurité. 2 heures du matin. L’interstate 10, artère principale du Sud des Etats-Unis, n’est qu’à quelques heures de marche. Sur le bord de l’autoroute, il trouvera sûrement un conducteur pour le prendre en stop jusqu’à la ville la plus proche. Pis il se volatilisera en bus sur le réseau routier américain. Soudain, des phares allumés. Maldonado se couche sur le sol, retient son souffle. Il entend des bruits de moteur, des aboiements, des pas qui se rapprochent – Lorsque Maldonado raconte sa fuite, ça ressemble à un thriller au cinéma. Un museau humide se colle contre son oreille. «Monte dans le camoin», lui ordonne le garde frontière. Destination : le centre de rétention.
sur le sol, se camouflent avec de la terre et des branches séchées. La température grimpe, entre 40 et 50°C. EN moyenne, un migrant meurt chaque jour de soif ou d’insolation sous le soleil cuisant. Le quatuor remplit des bouteilles en plastique dans des trous d’eau croupie et mange la moisissure sur les tortillas. Le coyote tue trois serpents. Maldonado: «J’ai cru que j’allais mourir».
c at e g o r i e
L’histoire de Maldonado commence des années auparavant, à Santo Domingo, un village du Sud du Mexique. On y vit souvent avec moins de deux dollars par jour. Il quitte l’école après le primaire, devient plombier puis père de deux enfants. Il boit trop, sa femme le quitte. Il est débordé avec ses deux gamins âgés de 3 et 4 ans. Il les confie à sa mère pour suivre une cure de désintoxication. A son retour, il ne trouve pas de boulot. Sa famille a de quoi manger, du riz et des haricots, mais pas assez d’argent pour inscrire les enfants à l’école. Chaque mois, un bus s’en va vers le nord. A l’intérieur, des jeunes hommes en route pour les Etats-Unis. Les familles qui ont quelqu’un «là-bas» voient leur maison d’argile se transformer en maison de pierre. Dans leurs assiettes, le poulet remplace les oeufs. Ceux qui en sont revenus racontent: les rues sont propres, on a toujours une liasse de billets dans la poche. Ils montrent des photos de voitures de sport, des vues de Las Vegas.
Maldonado, s’en va sans vraiment dire adieu, sans effusion ni embrasses. Comme s’il allait revenir un peu plus tard. Sur son dos, un sac de toile. Dedans, un tee-shirt, une paire de jeans, deux boîtes de haricots, deux litres d’eau et dix tortillas. Le bus ronronne trois jours et trois nuits avant d’atteintre Nogales, ville frontière ou vit sa cousine. Elle lui trouve un «coyote». Le passeur lui demande 1500 dollars pour l’emmener jusqu’à Phoenix, Arizona. Maldonado n’a même pas cinq dollars en poche. Pas grave: tu me paieras ta dette en travaillant là-bas». Pendant trois nuits, Maldonado et trois autres Mexicains traversent le désert. La journée, il s’allongent sur le sol, se camouflent avec de la terre et des branches séchées. La température grimpe, entre 40 et 50°C. EN moyenne, un migrant meurt chaque jour de soif ou d’insolation sous le soleil cuisant. Le quatuor remplit des bouteilles en plastique dans des trous d’eau croupie et mange la moisissure sur les tortillas. Le coyote tue trois serpents. Maldonado: «J’ai cru que j’allais mourir». Maldonado, s’en va sans vraiment dire adieu, sans effusion ni embrasses. Comme s’il allait revenir un peu plus tard. Sur son dos, un sac de toile. Dedans, un tee-shirt, une paire de jeans, deux boîtes de haricots, deux litres d’eau et dix tortillas. Le bus ronronne trois jours et trois nuits avant d’atteintre Nogales, ville frontière ou vit sa cousine. Elle lui trouve un «coyote». Le passeur lui demande 1500 dollars pour l’emmener jusqu’à Phoenix, Arizona. Maldonado n’a même pas cinq dollars en poche. Pas grave: tu me paieras ta dette en travaillant là-bas». Pendant trois nuits, Maldonado et trois autres Mexicains traversent le désert. La journée, il s’allongent
2.1
Neon Magazine_4
Voilà trente-huit heures que Maldonado est allongé dans la une cellule pour douze détenus. L’air est lourd et humide, la pièce pue la pisse. Il est trempé de sueur, a mal au ventre de faim, mal au coeur de tristesse? D’après la loi fédérale des Etates-Unis, il est un criminel. Infraction «8 USC 1325 – Improper entre by alien», entrée illgéale d’un étranger sur le sol américain. «Leoncio Gaspar Maldonadp!» hurle un officier. Il se lève, le suit. En chemin, il perd à moitié ses chaussures en cuir, son jean glisse sur ses hanches. Les policiers lui ont retiré ses lactes et sa ceinture pour l’empêcher de se pendre. On prend l’empreinte de sa main droite, on scanne son iris, on photographie son visage. 1M64, cheveux coupés très court, plombage sur l’incisive gauche. Les données sont comparées ave celles de la base du FBI. L’ordinateur affiche: «Trouvé».
_24 «C’est bon», se dit-il en escaladant pour la deuxième fois de sa vie la clôture de sécurité. 2 heures du matin. L’interstate 10, artère principale du Sud des Etats-Unis, n’est qu’à quelques heures de marche. Sur le bord de l’autoroute, il trouvera sûrement un conducteur pour le prendre en stop jusqu’à la ville la plus proche. Pis il se volatilisera en bus sur le réseau routier américain. Soudain, des phares allumés. Maldonado se couche sur le sol, retient son souffle. Il entend des bruits de moteur, des aboiements, des pas qui se rapprochent – Lorsque Maldonado raconte sa fuite, ça ressemble à un thriller au cinéma. Un museau humide se colle contre son oreille. «Monte dans le camoin», lui ordonne le garde frontière. Destination : le centre de rétention.
Il y a deux ans, en Floride, Maldonado avait grillé un feu rouge. Il avait alors payé une amande sans faire d’histoire et personne n’avait vérifié son permis de séjour.»Tu étais déjà sur le territoire?» demande l’officier en espagnol. Il fait oui de la tête. Nus sommes à l’été 2009, et c’est la deuxième fois que Leoncio Gaspar Maldonado tente d’entrer sur le territoire américain. La première fois, c’était en 2001, et ça avait marché. Ouvrier agricole en Floride, dans le Michigan et d’autres Etats, en fonction des récoltes, il gagnait pres de dix dollars de l’heure: dix fois plus qu’au Mexique.
voi r
Pendant huit ans, il avait envoyé des sous à sa famille, à Santo Domingo dans la province d’Oaxaca, après avoir payé le loyer, le téléphone et de quoi manger. Les dimanches, il leur parlait un quart d’heure en appelant chez les voisins car sa famille n’avait pas le téléphone. Pour Maldonado, ses enfants éaient deux vois devenant un peu plus graves avec les années. Mais un dimanche de 2009, la mère de Maldonado ne vnt pas répondre au téléphone. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit la voisine. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit sa fille. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit son fils. «Elle n’est pas occupée, et elle ne va pas bien», pense Maldonado. «Ne rentre pas à la maison, je t’en prie. Nous avons besoin d’argent». Il ne perdra pas sa mère sans l’avoir vue une dernière fois. Il prend la route:4000 kilomètres en direction du sud, en bus Greyhound et en stop. Personne ne jette un oeil à ses papiers au poste-frontière. Lorsqu’il rapelle chez lui, il est déjà au Mexique. «Ta mère va mieux, le rassure la voisine. Elle était à l’hôpitale, je te la passe» «Mi Hijo, mon fils», dit-elle en prenant le combiné. «Tu es au Mexique?» Ne rentre pas à la maison, je t’en prie. Nous avons besoin d’argent. Comment pourrons-nous envoyer les enfants à l’école, sinon?» «J’aurais dû réfléchir avant de quitter les Etats-Unis» admet Maldonado.
L’histoire de Maldonado commence des années auparavant, à Santo Domingo, un village du Sud du Mexique. On y vit souvent avec moins de deux dollars par jour. Il quitte l’école après le primaire, devient plombier puis père de deux enfants. Il boit trop, sa femme le quitte. Il est débordé avec ses deux gamins âgés de 3 et 4 ans. Il les confie à sa mère pour suivre une cure de désintoxication. A son retour, il ne trouve pas de boulot. Sa famille a de quoi manger, du riz et des haricots, mais pas assez d’argent pour inscrire les enfants à l’école. Chaque mois, un bus s’en va vers le nord. A l’intérieur, des jeunes hommes en route pour les Etats-Unis. Les familles qui ont quelqu’un «là-bas» voient leur maison d’argile se transformer en maison de pierre. Dans leurs assiettes, le poulet remplace les oeufs. Ceux qui en sont revenus racontent: les rues sont propres, on a toujours une liasse de billets dans la poche. Ils montrent des photos de voitures de sport, des vues de Las Vegas.
Pendant deux mois, il erre dans le Nord du Mexique, vend des journaux, travaille sur des chantier et tu ne gagnes pas d’argent.»Là, tu ne fais que travailler et tu ne gagnes as d’argent.» Maldonado veut retourner aux Etats-Unis. Mais huit ans après sa première traversée de la frontière, il est devenu quasiment impossible d’entrer sans papiers. Entre-temps, le nombre de gardes-frontières a doublé. En tout, 18000 policiers surveillent les 3000 kilomètres de grillage. Dans les Etats du Sud des Etats-Unis, on prend des mesures sévères contre ce que beaucoup regardent comme une «invasion étrangère». 400 000 immigrés illégaux ont été expulsés du territoire américain en 2011.
2.1
Maldonado, s’en va sans vraiment dire adieu, sans effusion ni embrasses. Comme s’il allait revenir un peu plus tard. Sur son dos, un sac de toile. Dedans, un tee-shirt, une paire de jeans, deux boîtes de haricots, deux litres d’eau et dix tortillas. Le bus ronronne trois jours et trois nuits avant d’atteintre Nogales, ville frontière ou vit sa cousine. Elle lui trouve un «coyote». Le passeur lui demande 1500 dollars pour l’emmener jusqu’à Phoenix, Arizona. Maldonado n’a même pas cinq dollars en poche. Pas grave: tu me paieras ta dette en travaillant là-bas». Pendant trois nuits, Maldonado et trois autres Mexicains traversent le désert. La journée, il s’allongent sur le sol, se camouflent avec de la terre et des branches séchées. La température grimpe, entre 40 et 50°C. EN moyenne, un migrant meurt chaque jour de soif ou d’insolation sous le soleil cuisant. Le quatuor remplit des bouteilles en plastique dans des trous d’eau croupie et mange la moisissure sur les tortillas. Le coyote tue trois serpents. Maldonado: «J’ai cru que j’allais mourir».
L’histoire de Maldonado commence des années auparavant, à Santo Domingo, un village du Sud du Mexique.
c at e g o r i e
_25
2.1
Neon Magazine_4
_26
voi r
Voilà trente-huit heures que Maldonado est allongé dans la une cellule pour douze détenus. L’air est lourd et humide, la pièce pue la pisse. Il est trempé de sueur, a mal au ventre de faim, mal au coeur de tristesse? D’après la loi fédérale des Etates-Unis, il est un criminel. Infraction «8 USC 1325 – Improper entre by alien», entrée illgéale d’un étranger sur le sol américain. «Leoncio Gaspar Maldonadp!» hurle un officier. Il se lève, le suit. En chemin, il perd à moitié ses chaussures en cuir, son jean glisse sur ses hanches. Les policiers lui ont retiré ses lactes et sa ceinture pour l’empêcher de se pendre. On prend l’empreinte de sa main droite, on scanne son iris, on photographie son visage. 1M64, cheveux coupés très court, plombage sur l’incisive gauche. Les données sont comparées ave celles de la base du FBI. L’ordinateur affiche: «Trouvé».
«C’est bon», se dit-il en escaladant pour la deuxième fois de sa vie la clôture de sécurité. 2 heures du matin. L’interstate 10, artère principale du Sud des Etats-Unis, n’est qu’à quelques heures de marche. Sur le bord de l’autoroute, il trouvera sûrement un conducteur pour le prendre en stop jusqu’à la ville la plus proche. Pis il se volatilisera en bus sur le réseau routier américain. Soudain, des phares allumés. Maldonado se couche sur le sol, retient son souffle. Il entend des bruits de moteur, des aboiements, des pas qui se rapprochent – Lorsque Maldonado raconte sa fuite, ça ressemble à un thriller au cinéma. Un museau humide se colle contre son oreille. «Monte dans le camoin», lui ordonne le garde frontière. Destination : le centre de rétention.
milles qui ont quelqu’un «là-bas» voient leur maison d’argile se transformer en maison de pierre. Dans leurs assiettes, le poulet remplace les oeufs. Ceux qui en sont revenus racontent: les rues sont propres, on a toujours une liasse de billets dans la poche. Ils montrent des photos de voitures de sport, des vues de Las Vegas.
Maldonado, s’en va sans vraiment dire adieu, sans effusion ni embrasses. Comme s’il allait revenir un peu plus tard. Sur son dos, un sac de toile. Dedans, un tee-shirt, une paire de jeans, deux boîtes de haricots, deux litres d’eau et dix tortillas. Le bus ronronne trois jours et trois nuits avant d’atteintre Nogales, ville frontière ou vit sa cousine. Elle lui trouve un «coyote». Le passeur lui demande 1500 dollars pour L’histoire de Maldonado commence des années l’emmener jusqu’à Phoenix, Arizona. Maldonado Il y a deux ans, en Floride, Maldonado avait grillé un auparavant, à Santo Domingo, un village du Sud n’a même pas cinq dollars en poche. Pas grave: tu feu rouge. Il avait alors payé une amande sans faire du Mexique. On y vit souvent avec moins de deux me paieras ta dette en travaillant là-bas». Pendant d’histoire et personne n’avait vérifié son permis de dollars par jour. Il quitte l’école après le primaire, trois nuits, Maldonado et trois autres Mexicains séjour.»Tu étais déjà sur le territoire?» demande l’ofdevient plombier puis père de deux enfants. Il boit traversent le désert. La journée, il s’allongent sur le ficier en espagnol. Il fait oui de la tête. Nus sommes trop, sa femme le quitte. Il est débordé avec ses sol, se camouflent avec de la terre et des branches à l’été 2009, et c’est la deuxième fois que Leoncio deux gamins âgés de 3 et 4 ans. Il les confie à sa séchées. La température grimpe, entre 40 et 50°C. Gaspar Maldonado tente d’entrer sur le territoire mère pour suivre une cure de désintoxication. A EN moyenne, un migrant meurt chaque jour de soif américain. La première fois, c’était en 2001, et ça son retour, il ne trouve pas de boulot. Sa famille a ou d’insolation sous le soleil cuisant. Le quatuor remavait marché. Ouvrier agricole en Floride, dans le de quoi manger, du riz et des haricots, mais pas assez plit des bouteilles en plastique dans des trous d’eau Michigan et d’autres Etats, en fonction des récoltes, d’argent pour inscrire les enfants à l’école. Chaque croupie et mange la moisissure sur les tortillas. Le il gagnait pres de dix dollars de l’heure: dix fois plus mois, un bus s’en va vers le nord. A l’intérieur, des coyote tue trois serpents. Maldonado: «J’ai cru que qu’au Mexique. jeunes hommes en route pour les Etats-Unis. Les faj’allais mourir». milles qui ont quelqu’un «là-bas» voient leur maison Pendant huit ans, il avait envoyé des sous à sa famille, d’argile se transformer en maison de pierre. Dans à Santo Domingo dans la province d’Oaxaca, après leurs assiettes, le poulet remplace les oeufs. Ceux avoir payé le loyer, le téléphone et de quoi manger. qui en sont revenus racontent: les rues sont propres, Les dimanches, il leur parlait un quart d’heure en apon a toujours une liasse de billets dans la poche. Ils pelant chez les voisins car sa famille n’avait pas le télémontrent des photos de voitures de sport, des vues phone. Pour Maldonado, ses enfants éaient deux vois de Las Vegas. devenant un peu plus graves avec les années. Mais un dimanche de 2009, la mère de Maldonado ne vnt pas répondre au téléphone. «Elle est occupée, mais elle Maldonado, s’en va sans vraiment dire adieu, sans efva bien» lui dit la voisine. «Elle est occupée, mais elle fusion ni embrasses. Comme s’il allait revenir un peu va bien» lui dit sa fille. «Elle est occupée, mais elle va plus tard. Sur son dos, un sac de toile. Dedans, un bien» lui dit son fils. «Elle n’est pas occupée, et elle tee-shirt, une paire de jeans, deux boîtes de haricots, ne va pas bien», pense Maldonado. «Ne rentre pas à deux litres d’eau et dix tortillas. Le bus ronronne la maison, je t’en prie. Nous avons besoin d’argent». trois jours et trois nuits avant d’atteintre Nogales, Il ne perdra pas sa mère sans l’avoir vue une dernière ville frontière ou vit sa cousine. Elle lui trouve un fois. Il prend la route:4000 kilomètres en direction du «coyote». Le passeur lui demande 1500 dollars pour sud, en bus Greyhound et en stop. Personne ne jette l’emmener jusqu’à Phoenix, Arizona. Maldonado un oeil à ses papiers au poste-frontière. Lorsqu’il ran’a même pas cinq dollars en poche. Pas grave: tu pelle chez lui, il est déjà au Mexique. «Ta mère va me paieras ta dette en travaillant là-bas». Pendant mieux, le rassure la voisine. Elle était à l’hôpitale, je trois nuits, Maldonado et trois autres Mexicains te la passe» «Mi Hijo, mon fils», dit-elle en prenant traversent le désert. La journée, il s’allongent sur le le combiné. «Tu es au Mexique?» Ne rentre pas à sol, se camouflent avec de la terre et des branches la maison, je t’en prie. Nous avons besoin d’argent. séchées. La température grimpe, entre 40 et 50°C. Comment pourrons-nous envoyer les enfants à EN moyenne, un migrant meurt chaque jour de soif l’école, sinon?» «J’aurais dû réfléchir avant de quitter ou d’insolation sous le soleil cuisant. Le quatuor remles Etats-Unis» admet Maldonado. plit des bouteilles en plastique dans des trous d’eau croupie et mange la moisissure sur les tortillas. Le Pendant deux mois, il erre dans le Nord du Mexique, coyote tue trois serpents. Maldonado: «J’ai cru que vend des journaux, travaille sur des chantier et tu ne j’allais mourir».L’histoire de Maldonado commence gagnes pas d’argent.»Là, tu ne fais que travailler et des années auparavant, à Santo Domingo, un village tu ne gagnes as d’argent.» Maldonado veut retourdu Sud du Mexique. On y vit souvent avec moins de ner aux Etats-Unis. Mais huit ans après sa première deux dollars par jour. Il quitte l’école après le pritraversée de la frontière, il est devenu quasiment maire, devient plombier puis père de deux enfants. impossible d’entrer sans papiers. Entre-temps, le Il boit trop, sa femme le quitte. Il est débordé avec nombre de gardes-frontières a doublé. En tout, ses deux gamins âgés de 3 et 4 ans. Il les confie à 18000 policiers surveillent les 3000 kilomètres de sa mère pour suivre une cure de désintoxication. A grillage. Dans les Etats du Sud des Etats-Unis, on son retour, il ne trouve pas de boulot. Sa famille a de prend des mesures sévères contre ce que beaucoup quoi manger, du riz et des haricots, mais pas assez regardent comme une «invasion étrangère». 400 d’argent pour inscrire les enfants à l’école. Chaque 000 immigrés illégaux ont été expulsés du territoire mois, un bus s’en va vers le nord. A l’intérieur, des américain en 2011. jeunes hommes en route pour les Etats-Unis. Les fa-
2.1
Voilà trente-huit heures que Maldonado est allongé dans la une cellule pour douze détenus. L’air est lourd et humide, la pièce pue la pisse. Il est trempé de sueur, a mal au ventre de faim, mal au coeur de tristesse? D’après la loi fédérale des Etates-Unis, il est un criminel. Infraction «8 USC 1325 – Improper entre by alien», entrée illgéale d’un étranger sur le sol américain. «Leoncio Gaspar Maldonadp!» hurle un officier. Il se lève, le suit. En chemin, il perd à moitié ses chaussures en cuir, son jean glisse sur ses hanches. Les policiers lui ont retiré ses lactes et sa ceinture pour l’empêcher de se pendre. On prend l’empreinte de sa main droite, on scanne son iris, on photographie son visage. 1M64, cheveux coupés très court, plombage sur l’incisive gauche. Les données sont comparées ave celles de la base du FBI. L’ordinateur affiche: «Trouvé».
il gagnait pres de dix dollars de l’heure: dix fois plus qu’au Mexique.
r e svoi s e nr t i r
_27
les Etats-Unis» admet Maldonado.
Pendant deux mois, il erre dans le Nord du Mexique, Pendant huit ans, il avait envoyé des sous à sa famille, vend des journaux, travaille sur des chantier et tu ne à Santo Domingo dans la province d’Oaxaca, après gagnes pas d’argent.»Là, tu ne fais que travailler et avoir payé le loyer, le téléphone et de quoi manger. tu ne gagnes as d’argent.» Maldonado veut retourLes dimanches, il leur parlait un quart d’heure en apner aux Etats-Unis. Mais huit ans après sa première pelant chez les voisins car sa famille n’avait pas le télétraversée de la frontière, il est devenu quasiment phone. Pour Maldonado, ses enfants éaient deux vois impossible d’entrer sans papiers. Entre-temps, le devenant un peu plus graves avec les années. Mais un nombre de gardes-frontières a doublé. En tout, dimanche de 2009, la mère de Maldonado ne vnt pas 18000 policiers surveillent les 3000 kilomètres de répondre au téléphone. «Elle est occupée, mais elle grillage. Dans les Etats du Sud des Etats-Unis, on va bien» lui dit la voisine. «Elle est occupée, mais elle prend des mesures sévères contre ce que beaucoup va bien» lui dit sa fille. «Elle est occupée, mais elle va regardent comme une «invasion étrangère». 400 bien» lui dit son fils. «Elle n’est pas occupée, et elle 000 immigrés illégaux ont été expulsés du territoire ne va pas bien», pense Maldonado. «Ne rentre pas à américain en 2011. la maison, je t’en prie. Nous avons besoin d’argent». Il ne perdra pas sa mère sans l’avoir vue une dernière «C’est bon», se dit-il en escaladant pour la deuxième Il y a deux ans, en Floride, Maldonado avait grillé un fois. Il prend la route:4000 kilomètres en direction du fois de sa vie la clôture de sécurité. 2 heures du feu rouge. Il avait alors payé une amande sans faire sud, en bus Greyhound et en stop. Personne ne jette matin. L’interstate 10, artère principale du Sud des d’histoire et personne n’avait vérifié son permis de un oeil à ses papiers au poste-frontière. Lorsqu’il raEtats-Unis, n’est qu’à quelques heures de marche. séjour.»Tu étais déjà sur le territoire?» demande l’ofpelle chez lui, il est déjà au Mexique. «Ta mère va Sur le bord de l’autoroute, il trouvera sûrement un ficier en espagnol. Il fait oui de la tête. Nus sommes mieux, le rassure la voisine. Elle était à l’hôpitale, je conducteur pour le prendre en stop jusqu’à la ville à l’été 2009, et c’est la deuxième fois que Leoncio te la passe» «Mi Hijo, mon fils», dit-elle en prenant la plus proche. Pis il se volatilisera en bus sur le réGaspar Maldonado tente d’entrer sur le territoire le combiné. «Tu es au Mexique?» Ne rentre pas à seau routier américain. Soudain, des phares allumés. américain. La première fois, c’était en 2001, et ça la maison, je t’en prie. Nous avons besoin d’argent. Maldonado se couche sur le sol, retient son souffle. avait marché. Ouvrier agricole en Floride, dans le Comment pourrons-nous envoyer les enfants à Il entend des bruits de moteur, des aboiements, des Michigan et d’autres Etats, en fonction des récoltes, l’école, sinon?» «J’aurais dû réfléchir avant de quitter pas qui se rapprochent – raconte sa fuite, semble •
NAM JULI_ Journaliste NEON
2.1
après
_28
l’incen-
Maldonado à vécu en clandestin aux Etats-Unis. Sur un malentendu, il est rentré au Mexique. Ou il se sent un étranger.
_Un article de Maude Paterson / Crédits photos Samuel Son, Camille JP.
die voi r
¶
Voilà trente-huit heures que Maldonado est allongé dans la une cellule pour douze détenus. L’air est lourd et humide, la pièce pue la pisse. Il est trempé de sueur, a mal au ventre de faim, mal au coeur de tristesse? D’après la loi fédérale des Etates-Unis, il est un criminel. Infraction «8 USC 1325 – Improper entre by alien», entrée illgéale d’un étranger sur le sol américain. «Leoncio Gaspar Maldonadp!» hurle un officier. Il se lève, le suit. En chemin, il perd à moitié ses chaussures en cuir, son jean glisse sur ses hanches. Les policiers lui ont retiré ses lactes et sa ceinture pour l’empêcher de se pendre. On prend l’empreinte de sa main droite, on scanne son iris, on photographie son visage. 1M64, cheveux coupés très court, plombage sur l’incisive gauche. Les données sont comparées ave celles de la base du FBI. L’ordinateur affiche: «Trouvé». Il y a deux ans, en Floride, Maldonado avait grillé un feu rouge. Il avait alors payé une amande sans faire d’histoire et personne n’avait vérifié son permis de séjour.»Tu étais déjà sur le territoire?» demande l’officier en espagnol. Il fait oui de la tête. Nus sommes à l’été 2009, et c’est la deuxième fois que Leoncio Gaspar Maldonado tente d’entrer sur le territoire américain. La première fois, c’était en 2001, et ça avait marché. Ouvrier agricole en Floride, dans le Michigan et d’autres Etats, en fonction des récoltes, il gagnait pres de dix dollars de l’heure: dix fois plus qu’au Mexique. Pendant huit ans, il avait envoyé des sous à sa famille, à Santo Domingo dans la province d’Oaxaca, après avoir payé le loyer, le téléphone et de quoi manger. Les dimanches, il leur parlait un quart d’heure en appelant chez les voisins car sa famille n’avait pas le téléphone. Pour Maldonado, ses enfants éaient deux vois devenant un peu plus graves avec les années. Mais un dimanche de 2009, la mère de Maldonado ne vnt pas répondre au téléphone. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit la voisine. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit sa fille. «Elle est occu-
2.2
pée, mais elle va bien» lui dit son fils. «Elle n’est pas occupée, et elle ne va pas bien», pense Maldonado. «Ne rentre pas à la maison, je t’en prie. Nous avons besoin d’argent». Il ne perdra pas sa mère sans l’avoir vue une dernière fois. Il prend la route:4000 kilomètres en direction du sud, en bus Greyhound et en stop. Personne ne jette un oeil à ses papiers au poste-frontière. Lorsqu’il rapelle chez lui, il est déjà au Mexique. «Ta mère va mieux, le rassure la voisine. Elle était à l’hôpitale, je te la passe» «Mi Hijo, mon fils», dit-elle en prenant le combiné. «Tu es au Mexique?» Ne rentre pas à la maison, je t’en prie. Nous avons besoin d’argent. Comment pourrons-nous envoyer les enfants à l’école, sinon?» «J’aurais dû réfléchir avant de quitter les Etats-Unis» admet Maldonado. Pendant deux mois, il erre dans le Nord du Mexique, vend des journaux, travaille sur des chantier et tu ne gagnes pas d’argent.»Là, tu ne fais que travailler et tu ne gagnes as d’argent.» Maldonado veut retourner aux Etats-Unis. Mais huit ans après sa première traversée de la frontière, il est devenu quasiment impossible d’entrer sans papiers. Entretemps, le nombre de gardes-frontières a doublé. En tout, 18000 policiers surveillent les 3000 kilomètres de grillage. Dans les Etats du Sud des Etats-Unis, on prend des mesures sévères contre ce que beaucoup regardent comme une «invasion étrangère». 400 000 immigrés illégaux ont été expulsés du territoire américain en 2011.
L’histoire de Maldonado commence des années auparavant, à Santo Domingo, un «C’est bon», se dit-il en escaladant pour la deuxième village du Sud du fois de sa vie la clôture de sécurité. 2 heures du matin. L’interstate 10, artère principale du Sud des Etats-Unis, n’est qu’à quelques heures de marche. Sur le bord deMexique. l’autoroute, il trouvera sûrement un
voi r
_29
2.2
catvoi egori r e
_30
L’histoire de Maldonado commence des années auparavant, à Santo Domingo, un village du Sud du Mexique. un criminel. Infraction «8 USC 1325 – Improper entre by pée, mais elle va bien» lui dit son fils. «Elle n’est pas occuque Maldonado est allongé dans la
Voilà trente-huit heures une cellule pour douze détenus. L’air est lourd et humide, la pièce pue la pisse. Il est trempé de sueur, a mal au ventre de faim, mal au coeur de tristesse? D’après la loi fédérale des Etates-Unis, il est un criminel. Infraction «8 USC 1325 – Improper entre by alien», entrée illgéale d’un étranger sur le sol américain. «Leoncio Gaspar Maldonadp!» hurle un officier. Il se lève, le suit. En chemin, il perd à moitié ses chaussures en cuir, son jean glisse sur ses hanches. Les policiers lui ont retiré ses lactes et sa ceinture pour l’empêcher de se pendre. On prend l’empreinte de sa main droite, on scanne son iris, on photographie son visage. 1M64, cheveux coupés très court, plombage sur l’incisive gauche. Les données sont comparées ave celles de la base du FBI. L’ordinateur affiche: «Trouvé».
pée, et elle ne va pas bien», pense Maldonado. «Ne rentre pas à la maison, je t’en prie. Nous avons besoin d’argent». Il ne perdra pas sa mère sans l’avoir vue une dernière fois. Il prend la route:4000 kilomètres en direction du sud, en bus Greyhound et en stop. Personne ne jette un oeil à ses papiers au poste-frontière. Lorsqu’il rapelle chez lui, il est déjà au Mexique. «Ta mère va mieux, le rassure la voisine. Elle était à l’hôpitale, je te la passe» «Mi Hijo, mon fils», dit-elle en prenant le combiné. «Tu es au Mexique?» Ne rentre pas à la maison, je t’en prie. Nous avons besoin d’argent. Comment pourrons-nous envoyer les enfants à l’école, sinon?» «J’aurais dû réfléchir avant de quitter les Etats-Unis» admet Maldonado.
Il y a deux ans, en Floride, Maldonado avait grillé un feu rouge. Il avait alors payé une amande sans faire d’histoire et personne n’avait vérifié son permis de séjour.»Tu étais déjà sur le territoire?» demande l’officier en espagnol. Il fait oui de la tête. Nus sommes à l’été 2009, et c’est la deuxième fois que Leoncio Gaspar Maldonado tente d’entrer sur le territoire américain. La première fois, c’était en 2001, et ça avait marché. Ouvrier agricole en Floride, dans le Michigan et d’autres Etats, en fonction des récoltes, il gagnait pres de dix dollars de l’heure: dix fois plus qu’au Mexique.
Pendant deux mois, il erre dans le Nord du Mexique, vend des journaux, travaille sur des chantier et tu ne gagnes pas d’argent.»Là, tu ne fais que travailler et tu ne gagnes as d’argent.» Maldonado veut retourner aux Etats-Unis. Mais huit ans après sa première traversée de la frontière, il est devenu quasiment impossible d’entrer sans papiers. Entretemps, le nombre de gardes-frontières a doublé. En tout, 18000 policiers surveillent les 3000 kilomètres de grillage. Dans les Etats du Sud des Etats-Unis, on prend des mesures sévères contre ce que beaucoup regardent comme une «invasion étrangère». 400 000 immigrés illégaux ont été expulsés du territoire américain en 2011.
Pendant huit ans, il avait envoyé des sous à sa famille, à Santo Domingo dans la province d’Oaxaca, après avoir payé le loyer, le téléphone et de quoi manger. Les dimanches, il leur parlait un quart d’heure en appelant chez les voisins car sa famille n’avait pas le téléphone. Pour Maldonado, ses enfants éaient deux vois devenant un peu plus graves avec les années. Mais un dimanche de 2009, la mère de Maldonado ne vnt pas répondre au téléphone. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit la voisine. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit sa fille. «Elle est occu-
«C’est bon», se dit-il en escaladant pour la deuxième fois de sa vie la clôture de sécurité. 2 heures du matin. L’interstate 10, artère principale du Sud des Etats-Unis, n’est qu’à quelques heures de marche. Sur le bord de l’autoroute, il trouvera sûrement un Voilà trente-huit heures que Maldonado est allongé dans la une cellule pour douze détenus. L’air est lourd et humide, la pièce pue la pisse. Il est trempé de sueur, a mal au ventre de faim, mal au coeur de tristesse? D’après la loi fédérale des Etates-Unis, il est
2.2 Neon Magazine_4
alien», entrée illgéale d’un étranger sur le sol américain. «Leoncio Gaspar Maldonadp!» hurle un officier. Il se lève, le suit. En chemin, il perd à moitié ses chaussures en cuir, son jean glisse sur ses hanches. Les policiers lui ont retiré ses lactes et sa ceinture pour l’empêcher de se pendre. On prend l’empreinte de sa main droite, on scanne son iris, on photographie son visage. 1M64, cheveux coupés très court, plombage sur l’incisive gauche. Les données sont comparées ave celles de la base du FBI. L’ordinateur
affiche: «Trouvé». Il y a deux ans, en Floride, Maldonado avait grillé un feu rouge. Il avait alors payé une amande sans faire d’histoire et personne n’avait vérifié son permis de séjour.»Tu étais déjà sur le territoire?» demande l’officier en espagnol. Il fait oui de la tête. Nus sommes à l’été 2009, et c’est la deuxième fois que Leoncio Gaspar Maldonado tente d’entrer sur le territoire américain. La première fois, c’était en 2001, et ça avait marché. Ouvrier agricole en Floride, dans le Michigan et d’autres Etats, en fonction des récoltes, il gagnait pres de dix dollars de l’heure: dix fois plus qu’au Mexique. Pendant huit ans, il avait envoyé des sous à sa famille, à Santo Domingo dans la province d’Oaxaca, après avoir payé le loyer, le téléphone et de quoi manger. Les dimanches, il leur parlait un quart d’heure en appelant chez les voisins car sa famille n’avait pas le téléphone. Pour Maldonado, ses enfants éaient deux vois devenant un peu plus graves avec les années. Mais un dimanche de 2009, la mère de Maldonado ne vnt pas répondre au téléphone. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit la voisine. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit sa fille. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit son fils. «Elle n’est pas occupée, et elle ne va pas bien», pense Maldonado. «Ne rentre pas à la maison, je t’en prie. Nous avons besoin d’argent». Il ne perdra pas sa mère sans l’avoir vue une dernière fois. Il
_31
dix dollars de l’heure: dix fois plus qu’au
Mexique.
de se pendre. ses lactes et sa ceinture pour l’empêcher scanne son on , droite main sa de On prend l’empreinte , cheveux coupés iris, on photographie son visage. 1M64 e. Les données très court, plombage sur l’incisive gauch L’ordinateur FBI. du base la de celles ave sont comparées affiche: «Trouvé».
à sa famille, à Pendant huit ans, il avait envoyé des sous après avoir aca, d’Oax ce provin la Santo Domingo dans manger. Les dipayé le loyer, le téléphone et de quoi en appelant chez manches, il leur parlait un quart d’heure one. Pour téléph le pas n’avait famille sa car s avait grillé un feu les voisin Il y a deux ans, en Floride, Maldonado un peu ant deven vois deux éaient s faire d’histoire et Maldonado, ses enfant sans e amand une payé alors rouge. Il avait che de 2009, la plus graves avec les années. Mais un diman vérifié son permis de séjour.»Tu étais déjà n’avait nne perso one. téléph au dre espagnol. Il fait oui mère de Maldonado ne vnt pas répon sur le territoire?» demande l’officier en dit la voisine. «Elle c’est la deuxième et «Elle est occupée, mais elle va bien» lui 2009, l’été à es somm Nus tête. la de occumais elle va bien» lui dit sa fille. «Elle est ée, d’entrer sur le occup tente est nado vend Maldo ue, r Mexiq Gaspa io du fois que Leonc n’est pas occuPendant deux mois, il erre dans le Nord pée, mais elle va bien» lui dit son fils. «Elle La première fois, c’était en 2001, et ça ne gagnes pas tu cain. et er améri ire chanti des territo sur le rentre travail ux, «Ne nado. des journa e, dans le Michigan pée, et elle ne va pas bien», pense Maldo et tu ne gagnes as avait marché. Ouvrier agricole en Florid d’argent». d’argent.»Là, tu ne fais que travailler il gagnait pres de à la maison, je t’en prie. Nous avons besoin es, pas récolt des Mais on Unis. foncti en Etatsaux Etats, es ner et d’autr d’argent.» Maldonado veut retour mère sans l’avoir vue une dernière fois. Il sa pas a ue. perdr Mexiq ne Il qu’au est plus il fois re, dix e: frontiè la dix dollars de l’heur ion du sud, en bus huit ans après sa première traversée de prend la route:4000 kilomètres en direct s. Entrepapier sans er d’entr sible impos paent ses à un oeil devenu quasim à sa famille, à Greyhound et en stop. Personne ne jette a doublé. En tout, Pendant huit ans, il avait envoyé des sous il est déjà temps, le nombre de gardes-frontières après avoir poste-frontière. Lorsqu’il rapelle chez lui, au aca, piers d’Oax ce . provin grillage la de dans tres ngo kilomè Domi Santo 18000 policiers surveillent les 3000 mère va mieux, le rassure la voisine. Elle «Ta er. Les diue. mang Mexiq au quoi de et meone des téléph prend on payé le loyer, le mon fils», dit-elle Dans les Etats du Sud des Etats-Unis, était à l’hôpitale, je te la passe» «Mi Hijo, un quart d’heure en appelant chez ent comme parlait regard leur il oup es, beauc manch que ce rentre contre s Ne ue?» sures sévère téléphone. Pour en prenant le combiné. «Tu es au Mexiq rés illégaux ont les voisins car sa famille n’avait pas le d’argent. une «invasion étrangère». 400 000 immig ant un peu maison, je t’en prie. Nous avons besoin la à deven pas vois deux éaient s enfant 2011. ses en Maldonado, s à l’école, siété expulsés du territoire américain 2009, la de che Comment pourrons-nous envoyer les enfant diman un Mais s. année plus graves avec les r les Etats-Unis» non?» «J’aurais dû réfléchir avant de quitte deuxième ne vnt pas répondre au téléphone. la nado pour Maldo dant de escala mère en dit-il se «C’est bon», dit la voisine. «Elle admet Maldonado. heures du matin. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui fois de sa vie la clôture de sécurité. 2 «Elle est occufille. sa dit lui Unis, bien» va Etatselle des mais Sud ée, du est occup L’interstate 10, artère principale il erre dans le Nord du Mexique, vend mois, pas occudeux n’est nt «Elle Penda fils. son l’audit de lui bord Sur le pée, mais elle va bien» et tu ne gagnes pas n’est qu’à quelques heures de marche. des journaux, travaille sur des chantier , pense Maldonado. «Ne rentre heures bien» -huit pas va trente ne Voilà elle un et ent pée, sûrem as ra s et tu ne gagne toroute, il trouve besoin d’argent». d’argent.»Là, tu ne fais que travailler cellule pour douze pas à la maison, je t’en prie. Nous avons Mais que Maldonado est allongé dans la une Maldonado veut retourner aux Etats-Unis. dernière fois. Il nt.» une d’arge vue Il l’avoir pisse. sans la pue mère sa pièce pas a la Il ne perdr détenus. L’air est lourd et humide, ère traversée de la frontière, il est premi sa sud, en bus après du ans ion huit direct en tres coeur au faim, mal prend la route:4000 kilomè papiers. Entreest trempé de sueur, a mal au ventre de devenu quasiment impossible d’entrer sans nne ne jette un oeil à ses pail est Perso -Unis, stop. Etates en et des le ound fédéra Greyh loi la ès tout, a doublé. En de tristesse? D’apr chez lui, il est déjà temps, le nombre de gardes-frontières Improper entre by piers au poste-frontière. Lorsqu’il rapelle . un criminel. Infraction «8 USC 1325 – rs surveillent les 3000 kilomètres de grillage policie e la voisine. Elle 18000 rassur le , cain. mieux va améri sol mère le «Ta sur au Mexique. on prend des mealien», entrée illgéale d’un étranger Dans les Etats du Sud des Etats-Unis, je te la passe» «Mi Hijo, mon fils», dit-elle officier. Il se lève, ale, un l’hôpit hurle à était nadp!» e Maldo r comm Gaspa ent cio regard «Leon ue?» Ne rentre sures sévères contre ce que beaucoup chaussures en cuir, en prenant le combiné. «Tu es au Mexiq rés illégaux ont le suit. En chemin, il perd à moitié ses besoin d’argent. une «invasion étrangère». 400 000 immig avons Nous retiré prie. ont lui t’en rs je n, policie maiso Les la à es. pas 2011. son jean glisse sur ses hanch s à l’école, siété expulsés du territoire américain en de se pendre. Comment pourrons-nous envoyer les enfant ses lactes et sa ceinture pour l’empêcher son e réfléchir avant de quitter les Etats-Unis» on scann , dû is droite «J’aura main sa non?» de reinte ème l’emp deuxi la pour On prend «C’est bon», se dit-il en escaladant , cheveux coupés admet Maldonado. s du matin. iris, on photographie son visage. 1M64 de sa vie la clôture de sécurité. 2 heure fois es donné Les e. gauch ve Unis, Etatsdes Sud très court, plombage sur l’incisi du pale princi du Mexique, vend L’interstate 10, artère FBI. L’ordinateur Pendant deux mois, il erre dans le Nord Sur le bord de l’ausont comparées ave celles de la base du n’est qu’à quelques heures de marche. le sur des chantier et tu ne gagnes pas travail ux, journa des s heure vé». -huit «Trou : trente affiche et tu ne gagnes as toroute, il trouvera sûrement un Voilà d’argent.»Là, tu ne fais que travailler pour douze Etats-Unis. Mais Maldonado est allongé dans la une cellule aux que ner feu retour un veut grillé nado avait Maldo nado nt.» d’arge Il Il y a deux ans, en Floride, Maldo est lourd et humide, la pièce pue la pisse. L’air frontière, il est us. la de déten sée et traver ire ère d’histo premi faire sa huit ans après faim, mal au coeur rouge. Il avait alors payé une amande sans est trempé de sueur, a mal au ventre de sible d’entrer sans papiers. Entreétais déjà impos .»Tu ent séjour de s quasim u permi deven son est vérifié il n’avait -Unis, Etates personne a doublé. En tout, de tristesse? D’après la loi fédérale des espagnol. Il fait oui temps, le nombre de gardes-frontières per entre by sur le territoire?» demande l’officier en tres de grillage. criminel. Infraction «8 USC 1325 – Impro un kilomè 3000 me les deuxiè llent la survei c’est rs et policie 2009, 18000 de la tête. Nus sommes à l’été illgéale d’un étranger sur le sol américain. e des meentré , prend on alien» Unis, le Etatssur er des Sud d’entr Dans les Etats du officier. Il se lève, fois que Leoncio Gaspar Maldonado tente «Leoncio Gaspar Maldonadp!» hurle un ce que beaucoup regardent comme 2001, et ça en contre s c’était fois, sévère ère sures premi La cuir, cain. en améri chaussures territoire rés illégaux ont le suit. En chemin, il perd à moitié ses e, dans le Michigan une «invasion étrangère». 400 000 immig ont retiré avait marché. Ouvrier agricole en Florid glisse sur ses hanches. Les policiers lui jean son de pres it gagna il es, récolt et d’autres Etats, en fonction des
L’histoire de Maldonado commence des années auparavant, à Santo Domingo, un village du Sud du Mexique.
2.2
Neon Magazine_4
c atvoi e g or r i e
ion du sud, en bus prend la route:4000 kilomètres en direct un oeil à ses pajette ne nne Perso stop. en Greyhound et chez lui, il est déjà piers au poste-frontière. Lorsqu’il rapelle e la voisine. Elle au Mexique. «Ta mère va mieux, le rassur mon fils», dit-elle Hijo, «Mi passe» la te je ale, l’hôpit à était ue?» Ne rentre en prenant le combiné. «Tu es au Mexiq besoin d’argent. pas à la maison, je t’en prie. Nous avons s à l’école, siComment pourrons-nous envoyer les enfant r les Etats-Unis» quitte de avant hir réfléc dû is «J’aura non?» admet Maldonado.
_32 Voilà trente-huit heures que Maldonado est allongé dans la Les données sont comparées ave celles de la base du FBI. une cellule pour douze détenus. L’air est lourd et humide, L’ordinateur affiche: «Trouvé». Pendant huit ans, il avait envoyé des sous à sa famille, à la pièce pue la pisse. Il est trempé de sueur, a mal au ventre Santo Domingo dans la province d’Oaxaca, après avoir de faim, mal au coeur de tristesse? D’après la loi fédérale Il y a deux ans, en Floride, Maldonado avait grillé un feu payé le loyer, le téléphone et de quoi manger. Les dides Etates-Unis, il est un criminel. Infraction «8 USC 1325 rouge. Il avait alors payé une amande sans faire d’histoire et manches, il leur parlait un quart d’heure en appelant chez – Improper entre by alien», entrée illgéale d’un étranger personne n’avait vérifié son permis de séjour.»Tu étais déjà les voisins car sa famille n’avait pas le téléphone. Pour sur le sol américain. «Leoncio Gaspar Maldonadp!» hurle sur le territoire?» demande l’officier en espagnol. Il fait oui Maldonado, ses enfants éaient deux vois devenant un peu un officier. Il se lève, le suit. En chemin, il perd à moitié ses de la tête. Nus sommes à l’été 2009, et c’est la deuxième plus graves avec les années. Mais un dimanche de 2009, la chaussures en cuir, son jean glisse sur ses hanches. Les polifois que Leoncio Gaspar Maldonado tente d’entrer sur le mère de Maldonado ne vnt pas répondre au téléphone. ciers lui ont retiré ses lactes et sa ceinture pour l’empêcher territoire américain. La première fois, c’était en 2001, et ça «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit la voisine. «Elle de se pendre. On prend l’empreinte de sa main droite, on avait marché. Ouvrier agricole en Floride, dans le Michigan est occupée, mais elle va bien» lui dit sa fille. «Elle est occuscanne son iris, on photographie son visage. 1M64, cheet d’autres Etats, en fonction des récoltes, il gagnait pres de pée, mais elle va bien» lui dit son fils. «Elle n’est pas occuveux coupés très court, plombage sur l’incisive gauche. dix dollars de l’heure: dix fois plus qu’au Mexique. pée, et elle ne va pas bien», pense Maldonado. «Ne rentre
catvoi egori r e
L’histoire de Maldonado commence des années auparavant, à Santo Domingo, un village du Sud du Mexique.
2.2 Neon Magazine_4
_33 pas à la maison, je t’en prie. Nous avons besoin d’argent». Il ne perdra pas sa mère sans l’avoir vue une dernière fois. Il prend la route:4000 kilomètres en direction du sud, en bus Greyhound et en stop. Personne ne jette un oeil à ses papiers au poste-frontière. Lorsqu’il rapelle chez lui, il est déjà au Mexique. «Ta mère va mieux, le rassure la voisine. Elle était à l’hôpitale, je te la passe» «Mi Hijo, mon fils», dit-elle en prenant le combiné. «Tu es au Mexique?» Ne rentre pas à la maison, je t’en prie. Nous avons besoin d’argent. Comment pourrons-nous envoyer les enfants à l’école, sinon?» «J’aurais dû réfléchir avant de quitter les Etats-Unis» admet Maldonado. Pendant deux mois, il erre dans le Nord du Mexique, vend des journaux, travaille sur des chantier et tu ne gagnes pas d’argent.»Là, tu ne fais que travailler et tu ne gagnes as d’argent.» Maldonado veut retourner aux Etats-Unis. Mais huit ans après sa première traversée de la frontière, il est devenu quasiment impossible d’entrer sans papiers. Entretemps, le nombre de gardes-frontières a doublé. En tout, 18000 policiers surveillent les 3000 kilomètres de grillage. Dans les Etats du Sud des Etats-Unis, on prend des mesures sévères contre ce que beaucoup regardent comme une «invasion étrangère». 400 000 immigrés illégaux ont été expulsés du territoire américain en 2011.
voi r
«C’est bon», se dit-il en escaladant pour la deuxième fois de sa vie la clôture de sécurité. 2 heures du matin. L’interstate 10, artère principale du Sud des Etats-Unis, n’est qu’à quelques heures de marche. Sur le bord de l’autoroute, il trouvera sûrement un Voilà trente-huit heures que Maldonado est allongé dans la une cellule pour douze détenus. L’air est lourd et humide, la pièce pue la pisse. Il est trempé de sueur, a mal au ventre de faim, mal au coeur de tristesse? D’après la loi fédérale des Etates-Unis, il est un criminel. Infraction «8 USC 1325 – Improper entre by alien», entrée illgéale d’un étranger sur le sol américain. «Leoncio Gaspar Maldonadp!» hurle un officier. Il se lève, le suit. En chemin, il perd à moitié ses chaussures en cuir, son jean glisse sur ses hanches. Les policiers lui ont retiré ses lactes et sa ceinture pour l’empêcher de se pendre. On prend l’empreinte de sa main droite, on scanne son iris, on photographie son visage. 1M64, cheveux coupés très court, plombage sur l’incisive gauche. Les données sont comparées ave celles de la base du FBI. L’ordinateur affiche: «Trouvé».
L’histoire de Maldonado Il y a deux ans, en Floride, Maldonado avait grillé un feucommence des anrouge. Il avait alors payé une amande sans faire d’histoire et auparavant, à Sanpersonne n’avait vérifié son permis de séjour.»Tunées étais déjà sur le territoire?» demande l’officier en espagnol. Il fait oui de la tête. Nus sommes à l’été 2009, et c’est la deuxième to Domingo, un village fois que Leoncio Gaspar Maldonado tente d’entrer sur le territoire américain. La première fois, c’était en 2001, et ça Sud du Mexique. du
avait marché. Ouvrier agricole en Floride, dans le Michigan et d’autres Etats, en fonction des récoltes, il gagnait pres de dix dollars de l’heure: dix fois plus qu’au Mexique. Pendant huit ans, il avait envoyé des sous à sa famille, à Santo Domingo dans la province d’Oaxaca, après avoir payé le loyer, le téléphone et de quoi manger. Les dimanches, il leur parlait un quart d’heure en appelant chez les voisins car sa famille n’avait pas le téléphone. Pour Maldonado, ses enfants éaient deux vois devenant un peu plus graves avec les années. Mais un dimanche de 2009, la mère de Maldonado ne vnt pas répondre au téléphone. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit la voisine. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit sa fille. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit son fils •
NAM JULI_ Journaliste NEON
2.2
_34
VEN-
voi r
DEUR DE SPERME
Maldonado à vécu en clandestin aux Etats-Unis. Sur un malentendu, il est rentré au Mexique. Ou il se sent un étranger. _Un article de Maude Paterson / Crédits photos Samuel Son, Camille JP.
¶
Voilà trente-huit heures que Maldonado est allongé dans la une cellule pour douze détenus. L’air est lourd et humide, la pièce pue la pisse. Il est trempé de sueur, a mal au ventre de faim, mal au coeur de tristesse? D’après la loi fédérale des Etates-Unis, il est un criminel. Infraction «8 USC 1325 – Improper entre by alien», entrée illgéale d’un étranger sur le sol américain. «Leoncio Gaspar Maldonadp!» hurle un officier. Il se lève, le suit. En chemin, il perd à moitié ses chaussures en cuir, son jean glisse sur ses hanches. Les policiers lui ont retiré ses lactes et sa ceinture pour l’empêcher de se pendre. On prend l’empreinte de sa main droite, on scanne son iris, on photographie son visage. 1M64, cheveux coupés très court, plombage sur l’incisive gauche. Les données sont comparées ave celles de la base du FBI. L’ordinateur affiche: «Trouvé». Il y a deux ans, en Floride, Maldonado avait grillé un feu rouge. Il avait alors payé une amande sans faire d’histoire et personne n’avait vérifié son permis de séjour.»Tu étais déjà sur le territoire?» demande l’officier en espagnol. Il fait oui de la tête. Nus sommes à l’été 2009, et c’est la deuxième fois que Leoncio Gaspar Maldonado tente d’entrer sur le territoire américain. La première fois, c’était en 2001, et ça avait marché. Ouvrier agri-
cole en Floride, dans le Michigan et d’autres Etats, en fonction des récoltes, il gagnait pres de dix dollars de l’heure: dix fois plus qu’au Mexique. Pendant huit ans, il avait envoyé des sous à sa famille, à Santo Domingo dans la province d’Oaxaca, après avoir payé le loyer, le téléphone et de quoi manger. Les dimanches, il leur parlait un quart d’heure en appelant chez les voisins car sa famille n’avait pas le téléphone. Pour Maldonado, ses enfants éaient deux vois devenant un peu plus graves avec les années. Mais un dimanche de 2009, la mère de Maldonado ne vnt pas répondre au téléphone. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit la voisine. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit sa fille. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit son fils. «Elle n’est pas occupée, et elle ne va pas bien», pense Maldonado. «Ne rentre pas à la maison, je t’en prie. Nous avons besoin d’argent». Il ne perdra pas sa mère sans l’avoir vue une dernière fois. Il prend la route:4000 kilomètres en direction du sud, en bus Greyhound et en stop. Personne ne jette un oeil à ses papiers au poste-frontière. Lorsqu’il rapelle chez lui, il est déjà au Mexique. «Ta mère va mieux, le rassure la voisine. Elle était à l’hôpitale, je te la passe» «Mi Hijo, mon fils», dit-elle en prenant le combiné. «Tu
es au Mexique?» Ne rentre pas à la maison, je t’en prie. Nous avons besoin d’argent. Comment pourrons-nous envoyer les enfants à l’école, sinon?» «J’aurais dû réfléchir avant de quitter les Etats-Unis» admeendant deux mois, il erre dans le Nord du Mexique, vend des journaux, travaille sur des chantier et tu ne gagnes pas d’argent.»Là, tu ne fais que travailler et tu ne gagnes as d’argent.» Maldonado veut retourner aux Etats-Unis. Mais huit ans après sa première traversée de la frontière, il est devenu quasiment impossible d’entrer sans papiers. Entre-temps, le nombre de gardes-frontières a doublé. En tout, 18000 policiers surveillent les 3000 kilomètres de grillage. Dans les Etats du Sud des Etats-Unis, on prend des mesures sévères contre ce que beaucoup regardent comme une «invasion étrangère». 400 000 immigrés illégaux ont été expulsés du territoire américain en 2011. «C’est bon», se dit-il en escaladant pour la deuxième fois de sa vie la clôture de sécurité. 2 heures du matin. L’interstate 10, artère principale du Sud des Etats-Unis, n’est qu’à quelques heures de marche. Sur le bord de l’autoroute, il trouvera sûrement un
c at e g o r i e
_35
Voilà trente-huit heures que Maldonado est allongé dans la une cellule pour douze détenus. L’air est lourd et humide, la pièce pue la pisse. Il est trempé de sueur, a mal au ventre de faim, mal au coeur de tristesse? D’après la loi fédérale des Etates-Unis, il est un criminel. Infraction «8 USC 1325 – Improper entre by alien», entrée illgéale d’un étranger sur le sol américain. «Leoncio Gaspar Maldonadp!» hurle un officier. Il se lève, le suit. En chemin, il perd à moitié ses chaussures en cuir, son jean glisse sur ses hanches. Les policiers lui ont retiré ses lactes et sa ceinture pour l’empêcher de se pendre. On prend l’empreinte de sa main droite, on scanne son iris, on photographie son visage. 1M64, cheveux coupés très court, plombage sur l’incisive gauche. Les données sont comparées ave celles de la base du FBI. L’ordinateur affiche: «Trouvé». Il y a deux ans, en Floride, Maldonado avait grillé un feu rouge. Il avait alors payé une amande sans faire d’histoire et personne n’avait vérifié son permis de séjour.»Tu étais déjà sur le territoire?» demande l’officier en espagnol. Il fait oui de la tête. Nus sommes à l’été 2009, et c’est la deuxième fois que Leoncio Gaspar Maldonado tente d’entrer sur le territoire américain. La première fois, c’était en 2001, et ça avait marché. Ouvrier agri-
cole en Floride, dans le Michigan et d’autres Etats, en fonction des récoltes, il gagnait pres de dix dollars de l’heure: dix fois plus qu’au Mexique. Pendant huit ans, il avait envoyé des sous à sa famille, à Santo Domingo dans la province d’Oaxaca, après avoir payé le loyer, le téléphone et de quoi manger. Les dimanches, il leur parlait un quart d’heure en appelant chez les voisins car sa famille n’avait pas le téléphone. Pour Maldonado, ses enfants éaient deux vois devenant un peu plus graves avec les années. Mais un dimanche de 2009, la mère de Maldonado ne vnt pas répondre au téléphone. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit la voisine. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit sa fille. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit son fils. «Elle n’est pas occupée, et elle ne va pas bien», pense Maldonado. «Ne rentre pas à la maison, je t’en prie. Nous avons besoin d’argent». Il ne perdra pas sa mère sans l’avoir vue une dernière fois. Il prend la route:4000 kilomètres en direction du sud, en bus Greyhound et en stop. Personne ne jette un oeil à ses papiers au poste-frontière. Lorsqu’il rapelle chez lui, il est déjà au Mexique. «Ta mère va mieux, le rassure la voisine. Elle était à l’hôpitale, je te la passe» «Mi Hijo, mon fils», dit-elle en prenant le combiné. «Tu
es au Mexique?» Ne rentre pas à la maison, je t’en prie. Nous avons besoin d’argent. Comment pourrons-nous envoyer les enfants à l’école, sinon?» «J’aurais dû réfléchir avant de quitter les Etats-Unis» admet Maldonado. Pendant deux mois, il erre dans le Nord du Mexique, vend des journaux, travaille sur des chantier et tu ne gagnes pas d’argent.»Là, tu ne fais que travailler et tu ne gagnes as d’argent.» Maldonado veut retourner aux Etats-Unis. Mais huit ans après sa première traversée de la frontière, il est devenu quasiment impossible d’entrer sans papiers. Entre-temps, le nombre de gardes-frontières a doublé. En tout, 18000 policiers surveillent les 3000 kilomètres de grillage. Dans les Etats du Sud des Etats-Unis, on prend des mesures sévères contre ce que beaucoup regardent comme une «invasion étrangère». 400 000 immigrés illégaux ont été expulsés du territoire américain en 2011. «C’est bon», se dit-il en escaladant pour la deuxième fois de sa vie la clôture de sécurité. 2 heures du matin. L’interstate 10, artère principale du Sud des Etats-Unis, n’est qu’à quelques heures de marche. Sur le bord de l’autoroute, il trouvera sûrement un
_36 Voilà trente-huit heures que Maldonado est allongé dans la une cellule pour douze détenus. L’air est lourd et humide, la pièce pue la pisse. Il est trempé de sueur, a mal au ventre de faim, mal au coeur de tristesse? D’après la loi fédérale des Etates-Unis, il est un criminel. Infraction «8 USC 1325 – Improper entre by alien», entrée illgéale d’un étranger sur le sol américain. «Leoncio Gaspar Maldonadp!» hurle un officier. Il se lève, le suit. En chemin, il perd à moitié ses chaussures en cuir, son jean glisse sur ses hanches. Les policiers lui ont retiré ses lactes et sa ceinture pour l’empêcher de se pendre. On prend l’empreinte de sa main droite, on scanne son iris, on photographie son visage. 1M64, cheveux coupés très court, plombage sur l’incisive gauche. Les données sont comparées ave celles de la base du FBI. L’ordinateur affiche: «Trouvé».
voi r
Il y a deux ans, en Floride, Maldonado avait grillé un feu rouge. Il avait alors payé une amande sans faire d’histoire et personne n’avait vérifié son permis de séjour.»Tu étais déjà sur le territoire?» demande l’officier en espagnol. Il fait oui de la tête. Nus sommes à l’été 2009, et c’est la deuxième fois que Leoncio Gaspar Maldonado tente d’entrer sur le territoire américain. La première fois, c’était en 2001, et ça avait marché. Ouvrier agricole en Floride, dans le Michigan et d’autres Etats, en fonction des récoltes, il gagnait pres de dix dollars de l’heure: dix fois plus qu’au Mexique. Pendant huit ans, il avait envoyé des sous à sa famille, à Santo Domingo dans la province d’Oaxaca, après avoir payé le loyer, le téléphone et de quoi manger. Les dimanches, il leur parlait un quart d’heure en appelant chez les voisins car sa famille n’avait pas le téléphone. Pour Maldonado, ses enfants éaient deux vois devenant un peu plus graves avec les années. Mais un dimanche de 2009, la mère de Maldonado ne vnt pas répondre au téléphone. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit la voisine. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit sa fille. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit son fils. «Elle n’est pas occupée, et elle ne va pas bien», pense Maldonado. «Ne rentre pas à la maison, je t’en prie. Nous avons besoin d’argent». Il ne perdra pas sa mère sans l’avoir vue une dernière fois. Il prend la route:4000 kilomètres en direction du sud, en bus Greyhound et en stop. Personne ne jette un oeil à ses papiers au poste-frontière. Lorsqu’il rapelle chez lui, il est déjà au Mexique. «Ta mère va mieux, le rassure la voisine. Elle était à l’hôpitale, je te la passe» «Mi Hijo, mon fils», dit-elle en prenant le combiné. «Tu es au Mexique?» Ne rentre pas à la maison, je t’en prie. Nous avons besoin d’argent. Comment pourrons-nous envoyer les enfants à l’école, sinon?» «J’aurais dû réfléchir avant de quitter les Etats-Unis» admet Maldonado. Pendant deux mois, il erre dans le Nord du Mexique, vend des journaux, travaille sur des chantier et tu ne gagnes pas d’argent.»Là, tu ne fais que travailler et tu ne gagnes as d’argent.» Maldonado veut retourner aux Etats-Unis. Mais huit ans après sa première traversée de la frontière, il est devenu quasiment impossible d’entrer sans papiers. Entre-temps, le nombre de gardes-frontières a doublé. En tout, 18000 policiers surveillent les 3000 kilomètres de grillage. Dans les Etats du Sud des Etats-Unis, on prend des mesures sévères contre ce que beaucoup regardent comme une «invasion étrangère». 400 000 immigrés illégaux ont été expulsés du territoire américain en 2011.
«C’est bon», se dit-il en escaladant pour la deuxième fois de sa vie la clôture de sécurité. 2 heures du matin. L’interstate 10, artère principale du Sud des Etats-Unis, n’est qu’à quelques heures de marche. Sur le bord de l’autoroute, il trouvera sûrement un Voilà trente-huit heures que Maldonado est allongé dans la une cellule pour douze détenus. L’air est lourd et humide, la pièce pue la pisse. Il est trempé de sueur, a mal au ventre de faim, mal au coeur de tristesse? D’après la loi fédérale des Etates-Unis, il est un criminel. Infraction «8 USC 1325 – Improper entre by alien», entrée illgéale d’un étranger sur le sol américain. «Leoncio Gaspar Maldonadp!» hurle un officier. Il se lève, le suit. En chemin, il perd à moitié ses chaussures en cuir, son jean glisse sur ses hanches. Les policiers lui ont retiré ses lactes et sa ceinture pour l’empêcher de se pendre. On prend l’empreinte de sa main droite, on scanne son iris, on photographie son visage. 1M64, cheveux coupés très court, plombage sur l’incisive gauche. Les données sont comparées ave celles de la base du FBI. L’ordinateur affiche: «Trouvé».
Etats-Unis, on prend des mesures sévères contre ce que beaucoup regardent comme une «invasion étrangère». 400 000 immigrés illégaux ont été expulsés du territoire américain en 2011.
Il y a deux ans, en Floride, Maldonado avait grillé un feu rouge. Il avait alors payé une amande sans faire d’histoire et personne n’avait vérifié son permis de séjour.»Tu étais déjà sur le territoire?» demande l’officier en espagnol. Il fait oui de la tête. Nus sommes à l’été 2009, et c’est la deuxième fois que Leoncio Gaspar Maldonado tente d’entrer sur le territoire américain. La première fois, c’était en 2001, et ça avait marché. Ouvrier agricole en Floride, dans le Michigan et d’autres Etats, en fonction des récoltes, il gagnait pres de dix dollars de l’heure: dix fois plus qu’au Mexique. Pendant huit ans, il avait envoyé des sous à sa famille, à Santo Domingo dans la province d’Oaxaca, après avoir payé le loyer, le téléphone et de quoi manger. Les dimanches, il leur parlait un quart d’heure en appelant chez les voisins car sa famille n’avait pas le téléphone. Pour Maldonado, ses enfants éaient deux vois devenant un peu plus graves avec les années. Mais un dimanche de 2009, la mère de Maldonado ne vnt pas répondre au téléphone. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit la voisine. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit sa fille. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit son fils. «Elle n’est pas occupée, et elle ne va pas bien», pense Maldonado. «Ne rentre pas à la maison, je t’en prie. Nous avons besoin d’argent». Il ne perdra pas sa mère sans l’avoir vue une dernière fois. Il prend la route:4000 kilomètres en direction du sud, en bus Greyhound et en stop. Personne ne jette un oeil à ses papiers au poste-frontière. Lorsqu’il rapelle chez lui, il est déjà au Mexique. «Ta mère va mieux, le rassure la voisine. Elle était à l’hôpitale, je te la passe» «Mi Hijo, mon fils», dit-elle en prenant le combiné. «Tu es au Mexique?» Ne rentre pas à la maison, je t’en prie. Nous avons besoin d’argent. Comment pourrons-nous envoyer les enfants à l’école, sinon?» «J’aurais dû réfléchir avant de quitter les Etats-Unis» admet Maldonado.
L’histoire de Maldonado commence des années auparavant, à Santo Domingo, un village du Sud du Pendant deux mois, il erre dans le Nord du Mexique, vend des journaux, travaille sur des chantier et tu ne gagnes pas d’argent.»Là, tu ne fais que travaillerMexique. et tu ne gagnes as d’argent.» Maldonado veut retourner aux Etats-Unis. Mais huit ans après sa première traversée de la frontière, il est devenu quasiment impossible d’entrer sans papiers. Entre-temps, le nombre de gardes-frontières a doublé. En tout, 18000 policiers surveillent les 3000 kilomètres de grillage. Dans les Etats du Sud des
Voilà trente-huit heures que Maldonado est allongé dans la une cellule pour douze détenus. L’air est lourd et humide, la pièce pue la pisse. Il est trempé de sueur, a mal au ventre de faim, mal au coeur de tristesse? D’après la loi fédérale des Etates-Unis, il est un criminel. Infraction «8 USC 1325 – Improper entre by alien», entrée illgéale d’un étranger sur le sol américain. «Leoncio Gaspar Maldonadp!» hurle un officier. Il se lève, le suit. En chemin, il perd à moitié ses chaussures en cuir, son jean glisse sur ses hanches. Les policiers lui ont retiré ses lactes et sa ceinture pour l’empêcher de se pendre. On prend l’empreinte de sa main droite, on scanne son iris, on photographie son visage. 1M64, cheveux coupés très court, plombage sur l’incisive gauche. Les données sont comparées ave celles de la base du FBI. L’ordinateur affiche: «Trouvé». Il y a deux ans, en Floride, Maldonado avait grillé un feu rouge. Il avait alors payé une amande sans faire d’histoire et personne n’avait vérifié son permis de séjour.»Tu étais déjà sur le territoire?» demande l’officier en espagnol. Il fait oui de la tête. Nus sommes à l’été 2009, et c’est la deuxième fois que Leoncio Gaspar Maldonado tente d’entrer sur le territoire américain. La première fois, c’était en 2001, et ça avait marché. Ouvrier agricole en Floride, dans le Michigan et d’autres Etats, en fonction des récoltes, il gagnait pres de dix dollars de l’heure: dix fois plus qu’au Mexique. Pendant huit ans, il avait envoyé des sous à sa famille, à Santo Domingo dans la province d’Oaxaca, après avoir payé le loyer, le téléphone et de quoi manger. Les dimanches, il leur parlait un quart d’heure en appelant chez les voisins car sa famille n’avait pas le téléphone. Pour Maldonado, ses enfants éaient deux vois devenant un peu plus graves avec les années. Mais un dimanche de 2009, la mère de Maldonado ne vnt pas répondre au téléphone. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit la voisine. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit sa fille. «Elle est occupée, mais elle va bien» lui dit son fils. «Elle n’est pas occupée, et elle ne va pas bien», pense Maldonado. «Ne rentre pas à la maison, je t’en prie. Nous avons besoin d’argent». Il ne perdra pas sa mère sans l’avoir vue une dernière fois. Il prend la route:4000 kilomètres en direction du sud, en bus Greyhound et en stop. Personne ne jette un oeil à ses papiers au poste-frontière. Lorsqu’il rapelle chez lui, il est déjà au Mexique. «Ta mère va mieux, le rassure la voisine. Elle était à l’hôpitale, je te la passe» «Mi Hijo, mon fils», dit-elle en prenant le combiné. «Tu es au Mexique?» Ne rentre pas à la maison, je t’en prie. Nous avons besoin d’argent. Comment pourrons-nous envoyer les enfants à l’école, sinon?» «J’aurais dû réfléchir avant de quitter les Etats-Unis» admet Maldonado. Pendant deux mois, il erre dans le Nord du Mexique, vend des journaux, travaille sur des chantier et tu ne gagnes pas d’argent.»Là, tu ne fais que travailler et tu ne gagnes as d’argent.» Maldonado veut retourner aux Etats-Unis. Mais huit ans après sa première traversée de la frontière, il est devenu quasiment impossible d’entrer sans papiers. Entre-temps, le nombre de gar •
NAM JULI_ Journaliste NEON
voir
_37
cat egori e
_38
Neon Magazine_4
c at e g o r i e
_39
Neon Magazine_4
cat egori e
_40
Neon Magazine_4
c at e g o r i e
_41
Neon Magazine_4
cat egori e
_42
Neon Magazine_4
c at e g o r i e
_43
Neon Magazine_4
cat egori e
_44
Neon Magazine_4
c at e g o r i e
_45
Neon Magazine_4
cat egori e
_46
Neon Magazine_4
c at e g o r i e
_47
Neon Magazine_4
cat egori e
_48
Neon Magazine_4
c at e g o r i e
_49
Neon Magazine_4
cat egori e
_50
Neon Magazine_4
c at e g o r i e
_51
Neon Magazine_4
cat egori e
_52
Neon Magazine_4
c at e g o r i e
_53
Neon Magazine_4
cat egori e
_54
Neon Magazine_4
c at e g o r i e
_55
Neon Magazine_4
cat egori e
_56
Neon Magazine_4
c at e g o r i e
_57
Neon Magazine_4
cat egori e
_58
Neon Magazine_4
c at e g o r i e
_59
Neon Magazine_4
cat egori e
_60
Neon Magazine_4
c at e g o r i e
_61
Neon Magazine_4
cat egori e
_62
Neon Magazine_4
c at e g o r i e
_63
Neon Magazine_4
cat egori e
_64
Neon Magazine_4