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Quand les clowns ne font plus rire

Un adulte sur deux souffrirait de phobie des clowns, ou coulrophobie. Une étude vient d’identifier huit causes à l’origine de cette aversion.

Un nez rouge proéminent, un maquillage excentrique et un accoutrement pour le moins ridicule. Une démarche volontairement gauche et un bon lot de situations décalées. A priori, la recette pour faire rire petits et grands.

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Sauf que cela ne fait pas rire tout le monde. Dans le public, certains se figent, ferment les yeux, voire se mettent à pleurer. Ils sont terrorisés.

QU’EST-CE QUE

LA COULROPHOBIE ?

Aussi extrême que cette réaction puisse paraître, le malaise intense ressenti en présence de clowns est en fait plutôt répandu. Les dernières études menées sur un large panel d’adultes évoquent jusqu’à 53,5 % de personnes mal à l’aise. De quoi amener des chercheurs de l’université de South Wales de Treforest, au Royaume-Uni, à s’intéresser à ses causes. Dans leurs travaux publiés en février dernier dans la revue Frontiers in Psychology, Philip Tyson et ses collègues décrivent les mécanismes psychologiques susceptibles de conduire à la coulrophobie – la phobie des clowns.

Pour parvenir à leurs conclusions, les scientifiques ont élaboré un questionnaire inédit. Un peu moins de 1 000 participants âgés de 18 à 72 ans ont dû attribuer une note subjective de 1 à 7 (1 = complètement en désaccord ; 7 = complètement d’accord) à différentes affirmations du type : « J’ai vu des scènes effrayantes impliquant des clowns dans des films » ou « J’ai déjà vécu une expérience désagréable avec un clown ». Le but était de déterminer les raisons de leur peur. Les différentes questions ont ensuite pu être regroupées selon huit items dont le « sentiment de menace imminente », les « dégoût ou fuite », l’« expérience terrifiante »…

L’équipe a démontré que, sans surprise, le rôle joué par les médias – au sens large – dans la hantise des clowns arrive en deuxième position des facteurs déclenchants. Films, reportages, affiches, la représentation du clown y est souvent effrayante, entre dentition inquiétante, rire démoniaque et comportements sadiques. Dans le film à succès Ça, par exemple, sorti en 2017 et basé sur une nouvelle de Stephen King, le clown a pour habitude de se cacher dans les égouts afin de kidnapper des enfants déambulant dans les rues, avant de les y enfermer. Loin du clown amusant la galerie, donc… Mais, plus surprenant, le facteur décisif s’est révélé être la présence de « signaux émotionnels cachés » – autrement dit, l’incapacité à déchiffrer les émotions véhiculées par le clown, lesquelles sont dissimulées par son maquillage et ses mimiques singulières. Se classent ensuite, après l’impact des médias, le comportement imprédictible, le côté mi-humain/mi-non humain globalement dérangeant (un effet appelé « vallée de l’étrange » ou « vallée dérangeante »), un sentiment de menace imminente, l’impact de l’éducation des parents ou de proches eux-mêmes apeurés et, en dernier lieu seulement, l’expérience personnelle.

Motions Ind Chiffrables

Les découvertes des chercheurs suggèrent ainsi que, contrairement à ce qu’on aurait pu penser, ce n’est pas le souvenir d’enfance d’un tour de magie traumatisant ou d’un jet d’eau surprise envoyé au visage sous les moqueries du public qui façonne le plus fréquemment la coulrophobie.

Quant aux moyens de la soigner, on préconise actuellement une méthode dite « d’exposition », qui consiste à se confronter de manière progressive à des images puis des vidéos de clowns dans un cadre sécurisant, en constatant que rien de grave n’arrive, le tout couplé avec des techniques de relaxation telles que la méditation ou le yoga… £ Tanguy Sourd

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