Sophie Abida
2 heures tous les 15 jours
inclus le cahier d’accompagnement.
Deux heures d’amour et de lutte.
Les visites encadrées entre une mère courage et ses quatre enfants.
2 heures tous les 15 jours Sophie Abida
À mes enfants chéris, Sherynn, Eden, Nael, Jade, Iris
Le silence s’est installé dans ma maison depuis ce maudit 13 février 2023, comme un voile lourd et oppressant. Depuis, les éclats de rire et les cris joyeux de mes enfants ont laissé place à un vide douloureux, une absence assourdissante.
Chaque pièce est empreinte d’un vide cruel, chaque recoin murmure le manque, chaque meuble, chaque jouet abandonné, respire la mélancolie d’une famille brutalement éclatée.
Leurs chambres, autrefois sanctuaires de rêves et d’innocence, sont désormais des espaces figés dans le temps. Les lits sont faits mais restent intacts, les peluches semblent attendre désespérément des câlins qui ne viennent plus.
Les dessins accrochés aux murs racontent une histoire d’amour et de bonheur interrompue, des souvenirs figés dans une époque révolue.
Chaque jour est une bataille contre le vide. Les matins sont les plus cruels, lorsque la maison se réveille sans l’agitation familière, sans les appels joyeux au petit-déjeuner, sans les baisers rapides avant l’école. Les soirées sont des étendues de solitude, où le tic-tac de l’horloge est devenu mon seul compagnon dans une maison qui a perdu son âme. La douleur de la séparation est une torture constante. Mon cœur se serre à chaque instant, déchiré par l'absence de mes enfants. Les murs de notre maison sont devenus les témoins silencieux de mes larmes, de mes prières, de mes espoirs inassouvis.
Chaque pas que je fais dans cette maison me rappelle leur absence, chaque objet me renvoie à leur sourire, à leur voix, à leur amour.
L’injustice de cette situation pèse lourdement sur mon cœur de maman. J’ai osé dénoncer, j’ai osé protéger, et pour cela, j’ai été punie.
La maltraitance institutionnelle a arraché mes enfants à mon étreinte, a brisé notre quotidien, a semé la douleur là où il y avait l’amour.
La séparation d’avec mes enfants est une torture indicible, une blessure ouverte qui ne cicatrise jamais.
La maison est silencieuse, mais mon amour est bruyant. Il résonne dans chaque coin, il habite chaque silence, il transcende chaque absence. Et même si la séparation est une épreuve insupportable et insoutenable, je sais que l’amour que j’ai pour mes enfants est la force qui me permettra de continuer à espérer, à croire en un avenir où nous serons enfin réunis.
Chaque visite médiatisée est une goutte d’eau dans un désert aride. La joie de revoir mes enfants est éclipsée par la douleur de savoir que ce moment est éphémère, que les rires et les câlins sont comptés.
Pourtant, malgré la cruauté de ces rencontres courtes et surveillées, je m’accroche à ces instants comme à une bouée de sauvetage dans une mer de désespoir.
C’est ce mélange de douleur et d’espoir, de souffrance et de résistance, que je veux partager à travers ce livre. Pour que chacun comprenne ce que signifie être une mère séparée de ses enfants, pour que personne n’ignore la cruauté de cette injustice, pour que l’amour triomphe toujours, même dans les moments les plus sombres.
C’est la veille d'une de ces journées si précieuses, où je vais enfin pouvoir revoir mes enfants lors de notre visite médiatisée.
Deux heures, toutes les deux semaines, c'est peu, mais chaque minute compte et je veux que chaque visite soit mémorable.
Le soir, après une longue journée entremêlée de démarches diverses, je me consacre entièrement aux préparatifs. La table de la cuisine se transforme en atelier de fête. Des sacs en papier ornés de cœurs colorés sont étalés devant moi. Je prends soin de les remplir de bonbons, de sucettes et de petites surprises. Il y a des ballons aussi, que je gonflerai une fois arrivée au centre.
Chaque article que je place dans les sachets est choisi avec soin. Je veux que mes enfants sentent tout l'amour que je mets dans ces préparatifs, même s'ils sont encore trop jeunes et n’ont pas le recul nécessaire pour comprendre pourquoi nous devons nous voir dans un cadre médiatisé.
Les bonbons colorés, les friandises aux formes amusantes, tout est là pour leur offrir un moment de bonheur et de légèreté.
Un petit distributeur de bonbons trône fièrement au centre de la table. Les enfants adorent les nouvelles surprises, et je suis sûre que cela les fera sourire.
Je dispose également quelques jeux et activités que nous pourrons faire ensemble. Ces moments partagés sont si précieux, et je veux que chaque seconde soit remplie de rires et de complicité. Je sais que le temps file trop vite lors de ces visites, alors je me prépare au mieux pour en profiter pleinement.
La veille des visites est toujours un mélange d'excitation et de nervosité. Excitation à l'idée de retrouver mes enfants, de voir leurs visages
où nos visites ont lieu, je serai prête.
Prête à offrir encore à mes enfants deux heures de joie, de rires et de tendresse.
s'illuminer en découvrant les petites surprises que je leur ai préparées. Nervosité aussi, car je veux que tout se passe bien, que chaque visite soit une parenthèse de bonheur dans notre quotidien morcelé.
Demain, lorsque je franchirai la porte de ce lieu neutre où nos visites ont lieu, je serai prête. Prête à offrir encore à mes enfants deux heures de joie, de rires et de tendresse. Prête à leur montrer, malgré les circonstances, que l'amour que j'ai pour eux est inébranlable et qu'il traverse toutes les épreuves.
La salle est prête, décorée avec soin par ma grande fille Sherynn et moi, avant l'arrivée des enfants.
Pour marquer les dix ans d'Eden, nous avons suspendu une guirlande, des ballons formant le chiffre "10" sur les grandes fenêtres. Des ballons colorés parsèment la table et le canapé, apportant une touche de fête à cet environnement impersonnel. Eden est né un 29 juin, et aujourd'hui, il fête son dixième anniversaire. L'émotion de célébrer ce moment spécial dans ce centre médiatisé est intense. Au lieu de le fêter chaleureusement avec ses amis, entouré de sa famille dans notre cocon familial, il doit le célébrer ici, dans ce centre.