Energies #3

Page 1

EE PP FF LL 2015 2015-2016 -2016////ENAC ENACARCHITECTURE ARCHITECTURE FUTURS FUTURS //// FORMES FORMES //// ÉNERGIES ÉNERGIES ATELIER ATELIERDU DUPROF. PROF.RAPHAËL RAPHAËLMÉNARD MÉNARD

Mis en en forme parpar S.Shiraishi Mis forme S.Shiraish&&S.S.Formery, Formery,sous souslaladir. dir.dedeR.R.Ménard Ménard

1.09 ÉE NN EE RR GG II EE SS ## 33

Average Averagesolar solarradiation radiationcalculated calculatedononthethebasis basisofof2424hours hoursper perday, day,and andconsidering consideringthetheclouds clouds(NASA (NASAData Data2012) 2012)


1.09 energies #3 Images tirées du film Gattaca (Andrew Niccol, 1997), séquence du lever de soleil sur une centrale solaire à concentration de type cylindro-parabolique

2


vers un neufert des énergies renouvelables, Part. 2

Nous avons terminé le chapitre précédent sur un objet iconoclaste et hybride : la tour solaire et sa variante, la montagne solaire ; hybride parce que son flux de production obéit davantage à la physique du barrage hydraulique (inversé, certes…) qu’aux technologies usuelles dédiées à la récolte de l’énergie solaire. Ce fascicule constitue donc la seconde partie du cours dédié à l’introduction des techniques de récolte énergétique durable. Dans ce qui va suivre, nous allons attaquer la chasse aux flux surfaciques. Une rapide plongée dans la géothermie puis un zoom sur la grande famille du « solaire direct » : la biomasse d’abord, puis le solaire thermique, viendra ensuite le solaire à concentration, et pour finir, le solaire photovoltaïque. Au terme de ce chapitre en deux parties, vous aurez tous les outils pour scénariser le plan de récolte énergétique de votre ISU en quantité (le flux moyen de production) et en qualité (la nature du productible: la production est-elle un donneur universel comme l’électricité ou au contraire de la chaleur à basse température ?)

3


Les flux géothermiques

Commençons par le cas particulier : la géothermie n’est pas de l’énergie solaire. Avec l’énergie marémotrice, elles sont toutes deux les énergies renouvelables non issues directement (ou indirectement) du soleil : rappelez-vous la classification présentée dès le premier fascicule 1.00 Présentation. Un bémol cependant : la géothermie très peu profonde (et rangeons les puits canadiens dans cette catégorie) est à la fois nourrie énergétiquement par le flux de chaleur issue des couches terrestres très profondes, comme par le flux de chaleur solaire descendant depuis la surface du sol jusqu’à une assez faible profondeur. Voilà pour ce point de détail pour les pointilleux ! Nous devons peut être la vie à la géothermie : François Roddier1 cite le rôle central qu’a pu avoir cette source dans l’apparition de la vie sur Terre et ce, antérieurement à l’apparition des cellules capables de réaliser la photosynthèse (et donc de la transformation du flux solaire). Nous bénéficions encore d’un flux de chaleur rémanent issu de l’activité nucléaire du noyau terrestre. Sa distribution -très hétérogène- peut proposer très localement des gisements importants. La géothermie peut jouer localement un rôle énergétique central dans l’approvisionnement d’un territoire : songeons aux centrales électriques utilisant les sources chaudes en Islande ou en Martinique. Mais rappelons que le flux moyen est bien plus faible que le gisement solaire : de l’ordre de 0,06W par m² à comparer à environ aux 169W par m² issus du solaire et de ses dérivés. Par ailleurs la qualité de ce flux est réduite : alors que le taux exergique2 solaire est de 4

1. Thermodynamique de l’évolution, François Roddier. Voir bibliographie de l’atelier. 2. Ce taux mesure en quelque sorte la qualité de l’énergie, plus il est proche 100%, plus l’énergie s’apparente à de l’énergie mécanique.


l’ordre de 97%, le flux géothermique est au mieux, à l’aplomb de certaines sources très chaudes, de l’ordre de 30%. Cela signifie que le flux géothermique sera dans la plupart des cas tout juste bon à produire de la chaleur à moyenne température.

Type de production : - Chaleur à basse et moyenne température - Production d’énergie mécanique dans quelques zones très spécifiques

5


1.09 energies #3

Le flux solaire

La constante solaire correspond à la quantité d’énergie solaire que recevrait une surface d’un mètre-carré située à la distance d’une unité astronomique3, exposée perpendiculairement aux rayons du soleil, et ce, en l’absence d’atmosphère. Pour la Terre, c’est donc la densité de flux énergétique au sommet de l’atmosphère. Cette valeur est de 1361W/ m² et elle coïncide avec le disque éclairé du globe. Si on distribue de façon théorique et homogène ce flux de puissance, le rayonnement solaire incident est alors de l’ordre de 340W/m². Cette valeur est en amont : une partie importante du rayonnement est réfléchi ou réémis directement par l’atmosphère. Après avoir traversé l’atmosphère, le flux solaire moyen est alors de 169W/ m² (nota : le changement climatique ne devrait très probablement n’avoir pas d’effet sur cette valeur au cours du prochain siècle). Cette moyenne annuelle varie de 85 à 290 W/ m² suivant les régions. Aucune région n’est donc dépourvue d’énergie solaire et l’écart entre les plus riches « solairement » des plus pauvres n’est que d’un facteur trois. Autre critère enfin de différentiation (et cela a son importance sur la pertinence du solaire à concentration) : la répartition entre direct et diffus. Plus la part du diffus est importante, plus le flux est « brouillon », « moins en rang » comme le sont des rayons parallèles : dans ce cas, la concentration optique est alors beaucoup moins efficace… Aux alentours du lac Léman, à basse altitude (et sans masque particulier par les reliefs), le flux solaire moyen est d’environ 130W par m² : il est évidemment nul 6

3. La distance moyenne TerreSoleil, soit environ 150 millions de kilomètre.


pendant les nuits et à certaines périodes de l’année, à proximité du solstice de l’été et lorsque le ciel est dégagé, le flux maximum peut parfois tutoyer les 1000W par m². Il faut donc comprendre ces 130W comme la moyenne d’une valeur qui est nulle environ la moitié du temps (la nuit) et qui évolue en-deçà de 1000W en journée. Comme l’illustre l’exemple ci-dessous qui montre la variation journalière du flux solaire horizontal. On remarque que certaines journées en été atteignent 8000Wh par m² et par jour correspond à un flux moyen de plus de 300W par m² sur ces journées, soit un flux d’environ 500W par m² en journée (durée du jour ~ 14-1(h). A l’inverse en hiver, l’irradiation journalière moyenne est de l’ordre de 700Wh par m² soit un flux moyen de 30W par m² soit environ 100W par m² en journée (durée du jour ~ 8-9h). (analyse faite dans le cadre du concours EDF Bas Carbone à Lille, 169 architecture & Elioth.) GISEMENT SOLAIRE Source : Meteonorm - Lille, site interpolé Calculs d’irradiation : solaR

Irradiation globale annuelle kWh.m-²

Plan

Sud

950

788

Ouest

767

Nord

Est

398

550

Irradiation globale journalière moyenne Wh.m-²

Irradiation globale journalière Wh.m-²

7


1.09 energies #3 a.

La biomasse

On appelle biomasse toute la production issue de façon directe ou indirecte de la photosynthèse : il s’agit de l’ensemble des matières organiques d’origine végétale, animale ou fongique (champignons) pouvant devenir source d’énergie par combustion, après méthanisation ou après de nouvelles transformations chimiques. Alimentation, bois de chauffage, bois de construction: depuis le néolithique, les sociétés humaines ont tenté de dompter et d’optimiser le rendement de nos récoltes agraires et forestières. Au-delà des besoins directement alimentaires, la biomasse était utilisée pour cuire, se chauffer ou s’éclairer (torche, lampe à huile). Rappelons que la photosynthèse correspond au processus biochimique capable de constituer des chaînes carbonées complexes via un apport d’énergie lumineuse. Le soleil est l’intrant énergétique primordial de ce processus. Comme pour les fossiles (le solaire ancien), il s’agit d’une forme de stockage 8

a. Cartographie de la proportion des terres cultivées, Ramankutty, N., and J.A. Foley (1999). Estimating historical changes in land cover: North American croplands from 1850 to 1992. Global Ecology and Biogeography 8, 381-396.


de l’énergie solaire par l’intermédiaire du carbone, provenant originellement du CO2 capté par les plantes ou le phytoplancton. La photosynthèse convertit généralement entre 0,1% et 0,5%4 des quelques 169W/m² frappant en moyenne la surface du globe. La plante doit aussi puiser de l’énergie pour activer son métabolisme : c’est l’une des raisons qui expliquent la relative faiblesse de ce rendement. Nous distinguerons deux productions énergétiques distinctes: la production maraîchaire et la production énergétique et / ou matériautique.

A. Production maraîchère Pour nos besoins alimentaires, il faut composer avec cette belle contrainte d’aménagement du territoire5. Bien que le rendement rapporté en énergie primaire soit faible, cette production n’est pas à négliger par sa qualité (elle est en général comestible et c’est l’énergie essentielle à la chaîne alimentaire) et par les externalités environnementales qu’elle réduit en favorisant l’autoalimentation des ménages, la biodiversité ainsi que d’autres fonctions d’écologie urbaine (rétention d’eaux pluviales, rafraîchissement passif, …).

4. http://www.ader.ch/ energieaufutur/energies/ biomasse/index.php 5. David Mc Kay dans L’énergie durable, pas que du vent, évoque que la surface minimale par individu pour subvenir aux besoins alimentaires est de 1200m². Dans ce cas de figure, la densité maximale est nécessairement inférieure à 800 hab/km²

Type de production : - Biomasse pour alimentation - Rendement max. <0,1% - Ordre de grandeur de l’emprise minimale pour autonomie alimentaire ~1’000 m²/pers

9


1.09 energies #3

B. Production énergétique et/ou matériautique Production de biomasse non directement comestible mais pouvant être utile en tant que: 1. matériau de construction : utilisation du bois et de l’aubier comme matière constitutive du bâti et du mobilier. Dans ce cas de figure, la production constitue un intrant d’énergie grise (ou incorporée) 2. combustible potentiel : il s’agit de valoriser la production de biomasse comme bois de chauffe, essentiellement. Ce productible présente également l’avantage d’être assez aisément stockable ; enfin, la production agricole peut être aussi associée comme production de biomasse fournissant un combustible assez aisément exploitable comme vecteur énergétique secondaire (exemple des agrocarburants) Type de production : - Biomasse énergie et/ou matériau de construction - Rendement max. <0,5% - Stockage assez aisé

10


Le solaire thermique

Première forme technique de « solaire direct », le solaire thermique. L’épithète « thermique » se rapporte à la qualité énergétique de la production : de la chaleur (et parfois du froid) mais aucunement du mouvement (de l’énergie mécanique) ou de l’électricité : ce sera l’apanage des autres techniques que nous verrons plus loin dans ce fascicule. Le solaire thermique est en général dédié à la production d’eau chaude et parfois aussi au chauffage pour les logements. Dans quelques situations, il peut aussi constituer une brique d’un système de climatisation solaire (on peut en effet faire du froid avec du chaud !). D’un point de vue thermodynamique, voilà peut-être pourquoi cette technique de récolte est en général assez simple et rudimentaire. Pas besoin de beaucoup d’efforts pour capter la forme la moins qualitative de l’énergie, la chaleur à basse température ! Une forme encore plus simple : le solaire passif, autrement dit, la fenêtre comme capteur solaire potentiel. Mais cela fera l’objet d’un prochain cours. Du point de vue de cette taxinomie, nous pouvons aussi nous interroger sur la position dans cette arborescence pour les « murs Trombe » et les capteurs pour lesquels le fluide caloriporteur est de l’air (une cheminée solaire par exemple) : nous les rangerons du côté du solaire passif en considérant qu’ils appartiennent davantage à la baie, à la façade et donc à la verticalité de l’architecture. Le solaire thermique sous-entendra ici que l’énergie solaire est récupérée via l’eau comme fluide caloriporteur.

11


1.09 energies #3

Le solaire thermique est simple et robuste ; il permet un rendement de conversion important, mais la chaleur à faible température (moins de 100°C) est une énergie faiblement qualitative. Le solaire thermique est en général destinée à une consommation directe sur le site de production, quoique certains réseaux de chaleur utilisent parfois des panneaux solaires thermiques pour une partie de leur production. Sous nos latitudes, son intégration architecturale est relativement aisée (bien que son orientation optimale soit moins triviale que pour le photovoltaïque). Du fait de l’autoconsommation, l’inclinaison des panneaux tâche d’optimiser l’adéquation offre-demande. Par conséquent, les inclinaisons sont généralement plus élevées que pour les panneaux photovoltaïques par exemple : on cherche à récolter le soleil en hiver au moment de la demande de chaleur. La création d’une boucle chaude pour le fluide caloriporteur rend aussi moins facile son interface avec le bâti : un réseau secondaire d’eau est à créer, qu’il est nécessaire de calorifuger pour éviter les pertes (et donc limiter la chute du rendement net) ; il faut aussi veiller aux problématiques de gel potentiel en situation hivernal. Le solaire thermique apporte souvent une participation à la production d’eau chaude sanitaire ; de façon moins courante, à la production de chauffage. Les panneaux solaires à thermosiphon sont notamment très largement diffusés dans les pays à fort ensoleillement6: Grèce, Israël, Afrique du Sud, … et marginalement à la production de froid7. Selon le type de technologie8, l’ordre de grandeur de l’écart de température maximum est inférieur à 100°C. 12

b. b. Photo d’un capteur solaire thermique en Capadoce, Turquie, R. Ménard, 2015

6. On pourra voir les chapitres qui y sont consacré dans Let It Shine de John Perlin. 7. Climatisation à absorption ou adsorption mais suppose en général l’emploi de tubes sous vide. 8. Tubes sous vide, panneaux thermiques derrière vitrages isolants, moquettes solaires, …


Ce type de récolte peut aussi être intégré dans des réseaux d’énergie de petite dimension comme des réseaux de chaleur à l’échelle de l’ilot ou du quartier. Le solaire thermique peut en particulier très bien se marier avec le stockage intersaisonnier9 . Par la nature de son offre, la chaleur, son stockage est également relativement aisé : un parc solaire thermique couplé à un silo à chaleur peut définitivement être une option pour votre ISU ! Type de production : - Chaleur (comprise entre 30°C et 80°C en général et selon les technologies) - Rendement compris entre 45% et 80% - Stockage de la chaleur à basse température assez aisée

9. Voir le numéro d’octobre 2013 de la revue Systèmes Solaires.

13


1.09 energies #3

c.

Le solaire à concentration

Attention, la famille solaire à concentration héberge une quantité impressionnante d’individus techniques. Relisons John Perlin et son Let It Shine pour voir l’émergence des premiers artefacts s’employant à concentrer le feu solaire. L’histoire ancienne la plus connue est sans doute celle des miroirs conçus par Archimède, destinés à mettre feu aux gréements romains au large de Syracuse : une nouvelle puissance de feu militaire ! (quoiqu’on ne sache pas si ce fait est avéré). Comme nous l’avons pour le solaire thermique, la densité surfacique de la radiation solaire (qui excède très rarement les 1000 Watts par m2) permet difficilement d’atteindre des températures supérieures à 100°C : les tubes sous vide du solaire thermique permettent parfois d’atteindre cet ordre de grandeur de température. Si l’on souhaite aller au-delà (par exemple pour chauffer plus intensément ou mettre en branle une moteur), il faut alors concentrer le flux solaire. L’optique et la géométrie arrivent à la rescousse. 14

c. Gravure: moteur solaire d’Augustin Mouchot, lors de l’exposition universelle à Paris en 1878. Augustin-Bernard Mouchot (1825 1912) En 1866, il invente le premier moteur solaire avec un réflecteur parabolique et une chaudière cylindrique en verre alimentant une petite machine à vapeur. Cette machine est présentée à Napoléon III, puis exposée, jusqu’au siège de Paris, au cours duquel elle disparaît. (...) Le traité de commerce francoanglais de 1860, ainsi que l’amélioration du réseau ferré ont facilité l’approvisionnement en charbon et accéléré le développement industriel. Cela a conduit le gouvernement français à estimer que l’énergie solaire n’était finalement pas rentable et à cesser de financer les recherches de Mouchot. source: wikipedia, consulté le 2015.12.07


d. Illustraions comparatives des systèmes à concentration linéique et surfacique. Concentrating Solar Power, Global Outlook 09, Why Renewable Energy is Hot, Richter Christoph, Teske Sven and Short Rebecca, Greenpeace International, SolarPACES and ESTELA

d.

Retenons deux sous-familles fondamentales : la concentration linéique ou la concentration surfacique. L’une et l’autre se distinguent du taux de concentration optique auxquelles elles parviennent et donc la température maximale atteignable au foyer. Dans le cadre d’un modeste four solaire en mode Do It Yourself, disposant de deux volets réfléchissants, le taux de concentration maximum est de l’ordre de 3 ; au foyer d’un miroir cylindro-parabolique de l’ordre de 40 (et la température au foyer tend alors vers 300°C) ; au foyer d’un miroir parabolique ou au point focal d’une centrale à tour : supérieur à 300 (soit localement une densité de puissance supérieure à 100kW par m²) et la température supérieure à 800°C !

15


1.09 energies #3

e.

Rappelons-nous aussi la lentille de Fresnel utilisée par Markus Kayser pour son Solar Sinter: un pur exemple de concentration optique surfacique permettant d’atteindre une température au foyer de loupe qui permet la liquéfaction du sable du désert ! La limite théorique à la concentration ultime ? C’est affaire de dimensions astronomiques ! Le diamètre du soleil et la distance Terre-Soleil sont les perturbateurs géométriques : les rayons directs en provenance du soleil ne sont pas rigoureusement parallèles : un faible écart angulaire subsiste entre deux rayons issus de zone diamétralement opposé sur le soleil. Et cette diffraction ontologique suffit à opposer une limite maximale du taux de concentration solaire. Contrainte importante aussi au solaire à concentration (qu’il soit d’ailleurs pour le solaire thermodynamique 16

e. Solar Sinter de Markus Kayser


ou le photovoltaïque à concentration) : la mobilité de certains éléments pour suivre la course solaire. Dans le cadre d’une concentration linéique (et c’est là l’un de ses avantages : un seul degré de liberté à trouver. Pour les champs cylindro-paraboliques (comme dans Gattaca par exemple), le cylindre parabolique s’oriente toujours de façon à confondre la directrice de la parabole avec l’angle projeté des rayons. Pour un système surfacique, c’est plus complexe : il faut deux degrés de liberté. On parle parfois de tracker bi-axe pour désigner ce type de système mobile utilisé par exemple pour les héliostats (les miroirs d’une centrale à tour) ou d’un système photovoltaïque suiveur. A ce jour, les technologies de solaire à concentration restent cantonnées dans des situations extra-urbaines et dans les zones où la disponibilité solaire est très importante. Les centrales à tour ou les systèmes à concentration linéaire (parabolique ou miroirs de Fresnel) connaissent depuis quelques années un très large engouement. Dans certaines zones du globe, fortement ensoleillées et aux cieux clairs, le solaire à concentration est prometteur, a fortiori s’il est intégré dans le périmètre urbain : il produit de l’électricité et le « déchet » de chaleur peut alors être potentiellement valorisé. Ces technologies présentent les avantages d’un rendement de conversion électrique intéressant (un peu supérieur à celui d’un champ photovoltaïque) et également de capacité de stockage de la haute chaleur produite via notamment des technologies de type sels fondus : la production électrique peut ainsi être adaptée et lissée sur le rythme de la journée.

17


1.09 energies #3

A plus petite échelle, on notera les réflexions en cours sur des systèmes analogues à l’échelle domestique. Dans ce cas de figure, le rendement de conversion de l’énergie solaire est tout à fait intéressant : à la différence des centrales installées en situation désertique, la chaleur produite n’est plus un « déchet » mais elle est valorisée. Dans le cadre de la consultation pour le Grand Paris en 2008, j’avais proposé de façon un peu utopique un projet consistant à intégrer à grande échelle des énergies renouvelables en situation urbaine : pourquoi ne pas imaginer que de grands vides urbains (parcs, aires logistiques, …) puissent participer à la production énergétique métropolitaine? « Les Hauts Lieux intègrent notamment dans leur vide l’ « urbanisation » de champs solaires, d’éoliennes de grande puissance comme la sylviculture en territoire métropolitain pour la production de la biomasse. Les Hauts Lieux seront en particulier les espaces de cogénération renouvelable : la chaleur des centrales solaires à concentrateur –habituellement inutiliséesera bien entendu valorisée pour le chauffage et la production d’eau chaude. La géothermie des aquifères franciliens pourront aussi venir en complément ; les champs photovoltaïques seront intégrés dans un paysage urbain et offriront des extérieurs protégés du vent et des intempéries. Dans ce contexte –lorsque la haute densité équilibre son intensité d’usage avec des vides producteurs- les tours à énergie positive deviennent possibles. En pratiquant cet exercice sur le site du Parc de la Courneuve, nous parvenons à rendre autonome en énergie ce Haut Lieu. »10 10. Extrait de Introduction au Développement Durable dans Naissances et renaissances de mille et un bonheurs parisiens.

18


f. Proposition pour une tour solaire en milieu urbain. Croquis RM.

f.

Une déclinaison de cette perspective pourrait consister à faire entrer en situation urbaine les technologies de concentration solaire : le rendement de conversion de l’insolation annuelle serait maximisée en valorisant production d’électricité, de chaleur voire également de froid. Dans le cadre de votre ISU, et autour du Léman, bornez-vous plutôt à des systèmes simples, autrement dit linéique, pour augmenter la surface de captation de votre système producteur. Le taux d’ensoleillement direct légitime en effet faiblement la mise en place d’une cinématique sophistiquée ! Type de production pour le solaire thermodynamique : - Moyenne à haute chaleur - Rendement max. ~80% - Contenu exergique <40% Type de production pour le photovoltaïque à concentration : - Electricité - Doit être monté sur un tracker - Rendement max. ~40% - Contenu exergique ~100% 19


1.09 energies #3

Le solaire photovoltaïque

Nous y arrivons enfin : la baguette magique énergétique, le bardage du 21ème siècle ! Si nous terminons par lui, cela n’est aucunement par désintérêt, au contraire. Tous les indicateurs (de 2015) lui promettent un avenir radieux : capacités industrielles importantes, coût de fabrication en chute libre, externalités environnementales induites par sa fabrication réduites de façon important, rendements de conversion croissant… Voilà un extrait du programme. Pour rappel, l’effet photovoltaïque permet la production principale d’une offre d’électricité à partir du gisement solaire. A l’échelle d’une ferme solaire, son rendement de conversion est environ de 5 à 10%11. Le solaire photovoltaïque est très prometteur du point de vue de la facilité de son intégration et de son coût de production12. Du point de vue économique, on s’attend à une coïncidence entre le coût marginal de production du photovoltaïque avec le tarif de revente réseau des opérateurs. La parité réseau est déjà acquise dans beaucoup de zones géographiques du globe. Du point de vue technologique, le rendement de conversion des prochaines générations de panneaux photovoltaïques devraient tendre vers 20% voire 25%13. En situation urbaine, le photovoltaïque est sans doute la technologie disposant du plus bel avenir : - Elle est silencieuse - L’énergie produite est de plus haute exergie qu’un combustible primaire - Son intermittence est relativement prévisible

20

11. A l’échelle du panneau photovoltaïque, le rendement peut aujourd’hui atteindre 15 à 20%. Néanmoins les contraintes physiques d’installation réclament des interstices non producteurs. 12. Parité réseau effective déjà en plusieurs endroits du globe. 13. Et ainsi tendre vers puissance-crête surfacique de l’ordre de 250 à 300W.


- Son rendement de conversion en électricité est intéressant et est appelé à évoluer au cours des prochaines décennies14 - Son intégration architecturale est relativement simple15 et elle n’engendre pas de risques particuliers - Sa pérennité est intéressante16 et elle requiert un entretien assez faible - Enfin les externalités environnementales associées17 à sa fabrication tendent à diminuer grâce aux évolutions technologiques en cours (amincissement des wafers, couches minces, prise en compte du recyclage...) - Le coût en énergie grise correspond actuellement à environ une à deux années d’exploitation (et la durée de vie des panneaux est largement supérieure à 20 ans).

14. L’ordre de grandeur typique est de 10% : il varie cependant entre 5% et presque 20% en fonction des technologies. On attend dans les prochaines années des rendements moyens de 15 à 20%. 15. Epaisseur faible du complexe producteur, intégration possible dans systèmes verriers, poids surfacique mesuré, etc. 16. Les rendements sont en général garantis à hauteur de 80% sur 20 ans de vie. 17. A titre d’exemple, on retient comme ordre de grandeur un remboursement de l’énergie grise au bout de un à deux de production. 18. Une ombre portée sur un panneau est susceptible de réduire la production des autres panneaux auquel il est aussi raccordé.

On retient que l’installation du photovoltaïque en situation urbaine trouve une place de choix en l’intégrant en toiture. Cependant, l’étalement urbain offre de larges zones artificialisées très facilement « solarisables » : les parkings avec couverture photovoltaïque en constituent un bon exemple. Demain, une partie des voiries et la couverture des infrastructures de transport ? Sans faire l’examen complet des avantages et inconvénients des technologies photovoltaïques, on notera toutefois les conséquences éventuelles suivantes : - La transformation de l’albédo des toitures et les conséquences éventuelles sur les effets d’îlot de chaleur - La problématique du stockage de l’électricité et les freins pour le développement massif de l’autoconsommation dans le secteur résidentiel (déphasage entre offre et demande). 21


1.09 energies #3

- Elle souffre des situations de masque partiel18 (et nous détaillerons cette petite pathologie dans le prochain et dernier fascicule) La diffusion possible des trackers ou systèmes suiveurs de la course solaire permettront aussi de maximiser la productivité annuelle (rapport entre la production annuelle surfacique et la puissance-crête de la technologie installée). Aussi, on retiendra le développement possible des solutions photovoltaïques combinées assurant une production de chaleur: lame d’air réchauffée à l’arrière du panneau pour préchauffage de l’air neuf (et réduire d’autant les besoins en chauffage) ; ou échangeur solide-liquide participant à une production de chauffage à basse température ; ou encore des systèmes photovoltaïques à concentration (lentilles de Fresnel, miroirs paraboliques ou à double courbure,…) : la chaleur est alors récupérée. Type de production pour le photovoltaïque à concentration : - Electricité - Récupération éventuelle de chaleur. - Rendement max. ~25% - Contenu exergique ~100%

22


g. Tableau comparatif des divers dispositifs solaires

23


1.09 energies #3

Conclusion : vos plans de récolte énergétique

Au terme de ce court voyage dans les énergies renouvelables, vous disposez à présent de tous les intrants culturels pour projeter. Voilà vos nouveaux actifs de savoir : à vous de constituer et dimensionner la récolte énergétique de votre ISU. Vous pourrez ainsi dessiner en plan et en coupe les flux énergétiques entrants dans l’espace de votre édifice comme dessiner l’emprise énergétique territorial de vos mille habitants : le toit de votre ISU parviendra-t-il à assurer l’autonomie ? Ou bien votre plan de récolte doit-il s’élargir pour capter des flux sur une surface plus importante ?

24


Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.