2 minute read
Du pouvoir de l’albédo sur l'effet d’ilot de chaleur
Du pouvoir de l’albédo sur l'effet d’ilot de chaleur La notion d’îlot de chaleur urbain (« ICU ») désigne l’augmentation de la température due à l’urbanisation et à l’artificialisation des sols. Les villes sont notoirement plus chaudes que leurs environs moins denses. L’ICU mesure l’écart de température entre le centreville et la périphérie située à proximité de la campagne. L’ICU amplifie les effets du réchauffement26 , particulièrement lors des canicules, avec des écarts pouvant atteindre une dizaine de degrés. Au cœur des grandes concentrations, l’impact en termes de confort et de santé publique est considérable, a fortiori dans un contexte de vieillissement démographique, et de populations donc plus fragiles. À Paris, lors de la canicule de 2003, la surmortalité a atteint 141%, contre 40% en zones rurales27 . Dans le texte Post-Combustion28 , cette nécessité était traduite à l’échelle de Paris :
« […] En plein été, [les toitures parisiennes] peuvent recevoir jusqu’à 20 GW d’énergie solaire, autant que la puissance thermique dissipée par un embouteillage gigantesque de 2 millions de voitures. Dès lors, la capacité des toits à renvoyer ce trop-plein d’énergie est fondamentale. […]. Cela rend nécessaire une stratégie solide, un plan directeur programmant dans le temps une augmentation progressive de l’albédo. Cette trajectoire supposera de cartographier rues et façades selon la quantité d’énergie solaire reçue en période critique, et de prescrire leur albédo en conséquence, en créant par exemple une règle associant l’albédo minimum d’une facette à la quantité d’énergie solaire reçue entre le 15 avril et le 15 septembre. »
Advertisement
Demain, l’albédo devra être une « pesée » de tout projet, comme la quantification d’autres critères environnementaux : énergie, matériaux, carbone, biodiversité... et à l’avenir, les cadastres pourront documenter ces métriques29. Aménager, transformer, bâtir : tous ces actes interagissent avec les phénomènes naturels et les processus physiques. Dès aujourd’hui, pour l’albédo, cette évaluation devra se traduire opérationnellement lors de l’instruction d’un permis (de construire ou d’aménager) en évaluant l’« avant-après ».
Avec recul, cet enjeu est global. Dans son ouvrage, Histoire naturelle de l’architecture30 , Philippe Rahm citait31 Ban Ki-moon, ancien secrétaire général de l’ONU, qui, lors d’une interview à la BBC en 2019, encourageait toutes les populations du monde à repeindre les toits en blanc32 . De fait, il y a urgence à renforcer le pouvoir de réflexion des toits, précieux « boucliers thermiques », particulièrement dans la bande de latitude située entre les latitudes -30° S et 30° N, là où vivent les deux-tiers de la population mondiale (et où le flux solaire est important33) Comment opérer alors ? Pour mettre en œuvre cette
26 Cette notion est extrêmement bien documentée avec par exemple des projets de recherche de grande ampleur comme Muscade ou Épicéa. 27 Cadot (2006) cité dans ADEME, Rafraîchir les villes des solutions variées, mai 2021 - https://librairie.ademe.fr/cadic/5604/recueil-rafraichissement-urbain-011441.pdf 28 Catalogue de l’exposition La Beauté d’une Ville- Controverses esthétiques et transition écologique à Paris - Ménard R., « PostCombustion », pp534-545, dans La Beauté d’une Ville- Controverses esthétiques et transition écologique à Paris, Wildproject et Pavillon de l’Arsenal, juin 2021 - https://www.pavillon-arsenal.com/fr/expositions/12034-la-beaute-dune-ville.html 29 Nouvelle cartographie mentionnée dans Retrouver le chemin vers les « petits pays renouvelables » - https://theconversation.com/debat-retrouver-le-chemin-vers-les-petits-pays-renouvelables-176335 30 Philippe Rahm, L’histoire naturelle de l’architecture, Chapitre 10, pourquoi l’architecture moderne est-elle blanche, p220 31 « Le blanc de retour pour lutter contre le réchauffement » 32 How much can painting a roof white reduce its temperature? https://www.bbc.com/news/world48395221#:~:text=In%20a%20recent%20BBC%20interview,as%20much%20as%20seven%20degrees. 33 Souvent supérieur à 200 watts par m² contre 145 watts par m² en France métropolitaine