The Red Bulletin FR 12/23

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FRANCE DÉC. 2023-JANV. 2024

HORS DU COMMUN

LE CHANGEMENT

NINOU, MATRIIX, NELO, LIRILIA et MEL un autre esport est possible avec les femmes de la Karmine Corp

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É D ITO R I A L

Le gaming et l’esport sont encore, en 2023, sujets à bien des clichés. Et au sein même de ces scènes, les joueuses sont trop souvent des cibles, victimes de moqueries, voire plus. Un cercle vicieux. Les femmes font partie du « game » et nous avons eu l’occasion de les mettre en avant dans le TRB. Ce mois-ci, nous allons plus loin, en dédiant une cover à une équipe constituée de femmes (une world first en presse ?) : la team Karmine Corp, engagée sur le tournoi international Valorant Game Changers. Notre série photos et nos portraits de ces joueuses, solides, soudées et sincères, peuvent être trompeurs... Ce ne sont pas des pop stars que vous y découvrez, mais bien des pros. Des joueuses performantes et engagées. Avec LiriLia, Ninou, Nelo, Matriix et Mel, changez de point de vue sur l’esport. Bonne lecture ! Votre Rédaction

JEAN DE BLIGNIÈRES Photographe, DA et réalisateur basé à Paris, Jean se présente comme « passionné par la couleur et toujours en recherche de nouvelles techniques pour lier l’élégance au beau ». Il signe ici la série avec la chanteuse en ­ascension Joanna. « J’ai beaucoup apprécié travailler avec elle et mêler nos deux univers et nos deux styles. » Page 70

BRICE BOSSAVIE Ce journaliste indépendant basé à Paris est spécialisé en musique, internet, et sujets de sport et de société. Il travaille avec des titres comme Libération, Society ou l’Abcdr du Son, et anime Une Deux, podcast foot et rap du journal L’Équipe. Il signe ici le sujet de couverture, l’équipe féminine de la ­Karmine Corp. Page 42

FELIPE BARBOSA

Le demain de l’esport, en studio, face au ­photographe brésilien Felipe Barbosa. Page 42

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Photographe brésilien basé à Paris, il a réalisé des campagnes pour KFC, Puma, Asics, ou McDonald’s, et collaboré avec des médias comme Brut, AnOther magazine, Les Inrocks ou Society. Pour ce numéro, il a rencontré l’équipe féminine de la Karmine Corp. « L’opportunité de découvrir de plus près l’univers de l’esport. » P. 42 THE RED BULLETIN

FELIPE BARBOSA (COUVERTURE), EMMANUEL GARCIA

COMPTEZ SUR ELLES

Contributions



CONTENUS

ADIEU MÉLANCOLIE

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Le rappeur bruxellois Swing a dû se dire adieu à lui-même pour renaître, et envisager son futur avec quiétude. PHOTO

L’ART DE L’ACTION

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Red Bull Illume, le plus percutant des concours photo, est de retour. Notre preview des plus beaux shots. ESPORT

CHANGER LA DONNE

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L’esport 100 % féminin prend de l’ampleur ! Parmi les talents à suivre de près, découvrez les joueuses de la Karmine Corp.

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E-FMX

RÉVOLUTION SILENCIEUSE 56 Quand un boss du FMX, le Suisse Mat Rebeaud, envisage la bascule de sa discipline vers l’électrique. C U LT U R E

GÉNIE DU SENSIBLE G A L E R I E 8 F I N G E R B O A R D S 14

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Gospel, rap et jazz, la formule de Tuerie, artiste sensible, ambitieux et généreux issu de Boulogne.

L A P L A Y L I S T D E Y A M Ê 16 B I E N N A L E N É M O 18

L’ÉPOPÉE DE JOANNA

P O P & P S Y 20

Si l’industrie musicale a pu vouloir la catégoriser, Joanna a tenu bon pour imposer sa personnalité, et a su surmonter les pires tourments de la vie.

HÉROS & HÉROÏNES

INSURFABLE ?

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L’Australien Matt Formston surfe des murs d’eau à Nazaré, mais à l’aveugle. Vraiment à l’aveugle.

VIE AU GALOP Comment un enfant des tours de Nanterre, Djibril Sako, s’est fait une place dans le millieu équestre. 6

C U LT U R E

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PERSPECTIVES V O Y A G E : L E S Î L E S L O F O T E N 81

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F I T N E S S : F R O I D D E V A N T ! 86 M A T O S : M O N T R E S A U T O P 90 M E N T I O N S L É G A L E S 96 P O U R F I N I R E N B E A U T É 98 THE RED BULLETIN

LÉO GROSGURIN/RED BULL ILLUME, FELIPE BARBOSA

V A C A N C E S E X T R Ê M E S 17


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THE RED BULLETIN

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Bedford, Indiana, USA

UNDERGROUND Notre planète est truffée de rivières ­souterraines, et Brian Grubb, double champion du monde de wakeskate, ­rêvait d’en parcourir une. En juillet dernier, l’Américain a emmené son e-Foil (planche de surf à foils électriques) à 30 mètres sous terre pour visiter Myst’ry River, plus long cours d’eau souterrain navigable des USA. À 32 km/h, Grubb a parcouru un dixième de ses 34 km. « C’était plus serré que prévu, ­admet-il. Ça peut paraître cool dans la vidéo, mais c’était technique. » À voir sur redbull.com


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ROBERT SNOW/RED BULL CONTENT POOL

DAVYDD CHONG


San José, Costa Rica

MAINS LIBRES

Nous pourrions vous dire que Kenneth « Pollis » Tencio a appris à faire du BMX dans les rues de Cartago, au Costa Rica. Nous pourrions mentionner sa médaille d’argent en Freestyle Park aux Championnats du monde de cyclisme urbain 2018. Nous pourrions même raconter qu’il a obtenu son surnom alors qu’il servait dans la police de Glasgow. Mais nous ne le ferons pas (ce dernier point est d’ailleurs un mensonge). Nous vous laissons juste apprécier ce sublime no-hander. redbull.com ; IG : @agustinmunoz


DAVYDD CHONG AGUSTIN MUNOZ/RED BULL CONTENT POOL, PETER MORNING/RED BULL CONTENT POOL

Mammoth Lakes, CA, USA

À L’ATTAQUE

Maddie Mastro collectionne les surnoms. Mais on ne se fait pas appeler « Mad Dog » et « Maestro » si on n’en est pas digne. P ­ assionnée de snowboard depuis ses six ans, la Californienne est une habituée des médailles – trois d’argent, deux de bronze – aux Championnats du monde et aux ­Winter X Games, et a représenté les US aux JO d’hiver 2018 et 2022. Ici, nous observons son sens de l’attaque (Mad Dog, vu ?) lors d’une session de la Red Bull Snow Team en mai dernier. Grrrr… IG : @maddie_mastro

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Oberland bernois, Suisse

CLASSIC ROC

Au cœur de l’action avec l’alpiniste et freeskieuse autrichienne Nadine Wallner s’attaquant au marathon vertical de la Jungfrau, en juillet dernier. Son coéquipier, le guide de montagne et grimpeur suisse Simon Wahli, et elle ont réussi l’ascension de la vallée de Lauterbrunnen au sommet de la Jungfrau (4 158 m), en passant par deux voies (classées 7a+ et 7a) et l’arête du ­Rotbrättgrat en un temps ­record de 16 heures et 20 minutes. ­Cerise sur le g ­ âteau ? Wallner est devenue la ­première femme à la réaliser.

TIM MARCOUR/RED BULL CONTENT POOL

DAVYDD CHONG

À voir sur redbull.com

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Dans les années 90, deux ados passionnés de skate découvrent les finger boards et fabriquent leurs propres mini-modules. En deux décennies, leur hobby est devenu une entreprise. Ados dans les années 90, Jo Buchan et Tom Passmore sont des obsédés du skate. Mais la pluie constante et le manque de spots dans leur petite ville du Pays de Galles rendent les sessions en plein air rares. Frustrés, ils tombent sur le ­fingerboarding, un skateboard à échelle réduite utilisant les doigts à la place des pieds. Et ils ne tardent pas à construire leurs propres skateparks et rampes pour se perfectionner. Puis, la vie éloigne les deux amis du Pays de Galles et les conduit vers d’autres centres d’intérêt. Mais, en 2020, plus de vingt ans après la mise en sommeil de leur monde de skate miniature, Finlay, le fils de Buchan âgé de 12 ans, déterre ses vieux objets bricolés, ravivant ainsi l’intérêt de son père. Ils se mettent à construire de nouvelles rampes et de nou14

Les obstacles de skate conçus par Sinister Fings ressemblent à s’y méprendre à des vrais, à base d’emballages et autres déchets.

THE RED BULLETIN

LOU BOYD

Les mains sales

RICK SMEE

SINISTER FINGS

veaux rails pour le fingerboard, comme Buchan l’avait fait ­lorsqu’il avait l’âge de son fils. Buchan s’aperçoit que les ­modules qu’ils fabriquent dépassent en qualité la plupart des produits disponibles sur le marché. « La plupart du matos est très américain, très net, inspiré de rues vierges, développe Jo Buchan. Le Royaume-Uni n’est pas comme ça ; nous sommes plus crados, plus sombres, et nous voulons ­capturer cette essence. Nos pièces se concentrent sur ­l’hyperréalisme – des détails comme les emballages, les mégots de cigarettes, la moisissure et la rouille. » Sous le nom de Sinister Fings, le père et le fils vendent désormais leurs répliques réalistes de spots de skate britanniques. Des halfpipes graffés aux poubelles débordantes, en passant par les bancs en béton à l’extérieur de la galerie d’art Tate Modern de Londres, ils veillent à ce que leurs modules reproduisent l’expérience réelle du skate en utilisant des matériaux de récupération, ­notamment des composants de skateparks recyclés et des objets trouvés dans la rue. Et lorsqu’il s’agit d’ajouter des détails complexes à chaque modèle, Buchan se tourne vers son ami d’enfance Passmore. « Je suis charpentier de métier, mais Tom est exceptionnellement créatif, », explique Buchan. Leur première gamme, Sinister Street, est désormais disponible en ligne, et les skate shops du Royaume-Uni et des États-Unis ont demandé à ce que leurs propres skateparks locaux reçoivent le traitement Sinister Fings. « Actuellement, nous travaillons sur une version du South Bank de Londres, dit ­Buchan. Finlay est notre PDG et dirige notre marketing en ligne. C’est lui le responsable. Un membre du “board” à plus d’un titre. » Instagram : @sinister_fings


TH E MO ST CAPAB LE R ARE LY GO IT ALO N E . TH E MO ST CAPAB LE R ARE LY GO IT ALO N E .

AU S T R A L I A N O U T B AC K @ B F G o o d r i c hT i r e s

11.10 . 2 2

AU S T R A L I A N O U T B AC K @ B F G o o d r i c hT i r e s

11.10 . 2 2


YAMÊ

Tempo L’artiste franco-camerounais à la voix de soprano dévoile les rythmiques de son ambition musicale. Originaire du Val-d’Oise, Yamê, artiste autodidacte qui ne jure que par le clavier, est certainement l’une des voix les plus intéressantes du moment dans le monde du hip-hop français. Connu pour l’interprétation de son titre Bécane sur la plateforme Colors, où il a dévoilé au public l’étendue de sa tessiture, Yamê fait partie de celles et ceux qui n’ont guère besoin d’auto-­tune. Chez lui, l’aigu est naturel, et ne laisse pas indifférent, comme son EP Elowi, sorti en octobre dernier : l’art d’exprimer ce qui n’est pas manifesté, autrement dit, imperceptible. Ce féru de musique live qui parcourt les jams parisiennes nous présente un ensemble de morceaux dont il aimerait atteindre l’aisance et la technicité instrumentale.

Snarky Puppy

Josman

Anderson .Paak

Yolele (1995)

Lingus (2014)

J’aime Bien ! (2018)

Come Down (2016)

« J’ai découvert Papa Wemba, quand j’étais enfant. Sur ce morceau, il contrôle sa voix d’une manière que j’ai toujours admirée. Je trouve que mon placement des notes ressemble beaucoup au sien. Il a un confort dans les aigus que je ressens aussi. Sa proposition musicale m’a beaucoup poussé à chanter comme je le fais aujourd’hui. »

« Snarky Puppy est un collectif de jazz et funk d’une vingtaine de personnes. Avec le titre ­Lingus, ils prouvent qu’on peut avoir une grosse équipe et faire du jazz moderne, car leur interprétation et leur mix les ancrent dans notre époque. Ce son m’a vraiment donné envie de lancer mon projet et d’arriver un jour sur scène avec un groupe similaire. »

« Je trouve le parcours et la carrière de Josman exemplaires. Ce son-là a quelque chose de très mélodieux et de lourd à la fois. C’est un titre de trap très musclé, avec des paroles trash, mais acceptables dans l’espace public grâce à sa douceur. Et en même temps, il est simple, je le joue parfois. Je valide fort. Peut-être que je ferai des sons comme ça un jour. »

« Pour moi, avant, ce n’était pas possible de chanter aussi bien, avec autant de flow, en faisant de la batterie. En ­regardant son live dans NPR Music Tiny Desk Concerts, je me suis dit que je voulais aussi avoir cette classe et atteindre ce niveau sur scène. Et pour cela, il faut être tellement bon avec son instrument que ça a l’air inné d’en jouer. »

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OJOZ

Papa Wemba

MARIE-MAXIME DRICOT

Écoutez les titres de Yamê sur Spotify en scannant le QR code.


VOYAGES D’ÉLITE

Direction l’inconnu

KRISTOF STURSA, NIMSDAI/RED BULL CONTENT POOL

LAURA HOLT

Partir en expédition ne signifie pas forcément quitter son job. Chaque année, de plus en plus de voyageurs ordinaires accomplissent des exploits extraordinaires avec l’aide d’aventuriers chevronnés comme Nims Purja. En 2021, un docu Netflix sur un alpiniste népalais peu connu (qui a escaladé les quatorze sommets de 8 000 m du monde en un temps record de sept mois) a trouvé un écho au-delà de la communauté des alpinistes. Aujourd’hui, Nims Purja aide les voyageurs ordinaires à repousser leurs propres limites en grimpant avec lui et son équipe d’Elite Exped, société qui propose des ascensions des sept sommets (les plus hauts de chaque continent) et des aventures dans la « zone de la mort », à 8 000 mètres d’altitude. Des activités autrefois réservées aux pros. « Longtemps, les gens ont pensé que les grandes montagnes n’étaient pas pour eux, déclare Purja. J’espère leur montrer qu’il n’est jamais trop tard pour entreprendre un nouveau voyage. » Nothing is Impossible a été diffusé, l’intérêt pour les expéditions d’élite a e­ xplosé, en particulier parmi les explorateurs ordinaires. Mais il n’en tire pas tout le mérite : « Le COVID a incité les gens à réfléchir à ce qu’ils veulent vivre, à leurs grands rêves lorsqu’ils pourraient à nouveau voyager. » ­Untamed Borders est une autre entreprise qui aide les gens à ­réaliser leurs rêves d’aventure. Au départ, il s’agissait d’une ressource logistique qui aidait les équipes de tournage à accéder à des endroits difficiles d’accès, mais elle s’est développée pour inclure les fans d’aventure de THE RED BULLETIN

Plus haut et plus loin : (de haut en bas) le tout premier voyage commercial en kayak dans la vallée du Panshir en Afghanistan, avec Untamed Borders ; Nims Purja d’Elite Exped.

tous les jours. Elle a connu une augmentation de 20 % des expéditions depuis 2019. Untamed Borders se spécialise dans les « endroits présentant un risque pour la sécurité, où vous aurez besoin de papiers supplémentaires ou d’une aide logistique », explique son fondateur, James Willcox. Il s’agit notamment d’excursions dans le corridor isolé du Wakhan, en Afghanistan, ainsi que de destinations insolites comme le Tadjikistan. À mesure que ce type de voyage se développe, le profil des aventurier·ère·s évolue : les originaires de pays non ­occidentaux représentent désormais 15 % des réservations. Pour Frank Cheshire, responsable de la marque et des produits (cyclisme) pour l’opérateur mondial Intrepid Travel, le changement le plus perceptible est le profil des participants et participantes. « Nous avons récemment lancé les

Women’s Expeditions, conçues pour les voyageuses et dirigées par elles, explique-t-il. L’objectif est de faire tomber les barrières, de démystifier les idées fausses et de donner un aperçu de la vie des femmes au Pakistan ou au Maroc, par exemple. » L’augmentation de la demande s’accompagne d’une plus grande responsabilité environnementale. Toutes ces agences limitent ou compensent l’impact de leurs voyages et s’efforcent d’avoir un effet social positif ; Elite Exped et Untamed Borders forment et emploient des personnes locales pour s’assurer que la communauté soit positivement impactée. Les voyages d’entrée de gamme, comme l’expédition au camp de base de l’Everest avec Elite Exped, commencent à 3 000 dollars par personne. untamedborders.com ; eliteexped.com ; intrepidtravel.com 17


La compagnie Adrien M & Claire B propose via une expérience immersive et hypnotique, une interprétation de la perte d’un père à la naissance d’un fils.

BIENNALE NÉMO

Multiformes Pour sa 5e édition, Némo – Biennale internationale des arts numériques de la Région Île-de-France – offre une expérience galvanisante et déconcertante, en interrogeant les personnalités multiples à l’ère numérique. Et vous transporte au-delà de votre réalité. Aux confluences de l’expérimentation et de l’ingénierie esthétique, la Biennale donne la parole aux artistes qui explorent la multiplicité des identités d’aujourd’hui et de demain en entraînant le public au-delà du perceptible, du ­tangible pendant trois mois, dans 22 lieux en Île-de-France. De la petite à la grande couronne de Paris, expositions, installations et concert seront présentés. Le public pourra alors envisager de nouvelles formes de vie tout en réalisant l’inintelligibilité extérieure à son être. Son exposition principale, Je est un autre ?, située au Cent-Quatre, propose des 18

dispositifs ludiques, des installations et des films qui parfois rassurent, parfois inquiètent, mais qui, sans aucun doute, travaillent notre regard critique sur l’ère numérique avec pédagogie. De la fresque digitale monumentale de Marco ­Brambilla, Heaven’s Gate, à l’installation imposante de Christian Rizzo et les avatars interactifs d ­ ’Universal Everything, enfants et adultes voyagent sans fin, entre les différents espace-temps. Si Demain est déjà écrit et que le futur reste à venir, n’est-il pas déjà présentement là ? « Comment en sommes-nous arrivé· e·s-là ? », interrogent les

Le collectif Universal Everything repousse les limites de l’innovation avec Maison Autonome. THE RED BULLETIN


Le producteur, DJ et compositeur Evian Christ, originaire de Liverpool, lors de son live immersif.

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BIENNALE DE NÉMO/ADRIENMCLAIREB/UNIVERSAL EVERYTHING/FREDERIK HEYMAN/MARCO BRAMBILLA

MARIE-MAXIME DRICOT

Isabelle Huppert, Kim Peers et Michèle Lamy s’interrogent sur le souvenir de soi dans le futur, dans Virtual Embalming de Frederik Heyman.

œuvres de France Cadet, Ian Spriggs et Donatien Aubert : androïde, hybridation humainmachine, intelligence artificielle, emprise des technologies de communication. Il n’est pas certain que les moutons ­téléphones de Jean-Luc Cornec puissent nous aider à analyser tout cela, mais pourquoi ne pas essayer de décrocher pour écouter ce qu’il y a de l’autre bout de la ligne ? L’exposition principale de Némo est une expérience scientifique qui relève de la dystopie. L’art côtoie sans vergogne le monde des sciences, pour finalement entrer en symbiose, à l’instar des méduses d’ADN de Fabien Léaustic. Pris au piège de notre propre réalité, avec Je est un autre ?, c’est pour le meilleur comme pour le pire qu’on s’abandonne à un univers fantasmagorique, artificiel, quelques fois dangereux, mais aussi calme et placide. En témoigne l’Ataraxie (qui signifie « paix de l’esprit ») de Maxime Houot, une installation de plus de 30 mètres de haut qui téléporte le public dans une séquence méditative, voire narcotique, grâce à des bras mécaniques et tentaculaires, lesquels dessinent une succession de tableaux im­mersifs. Exaltation. Biennale Némo, Je est un autre ? Du 30 septembre 2023 au 7 janvier 2024 ; CENTQUATRE-PARIS, 5 rue Curial, 75019 Paris ; biennalenemo.fr ; IG : @biennalenemo

Heaven’s Gate clôture la série de collages vidéo Megaplex de Marco Brambilla, et célèbre les rêves et excès du glamour hollywoodien à travers les sept niveaux du Purgatoire.


Médecin psychiatre, Jean-Victor Blanc utilise la pop culture pour faire progresser les connaissances sur la santé mentale auprès du public. Depuis 2018, le Dr Jean-Victor Blanc utilise la pop culture pour faire avancer le débat sur la santé mentale grâce au festival Pop & Psy. Comme bon nombre de spectateurs et spectatrices, l’interprétation du titre L’enfer par Stromae, au sujet de son mal-être, au JT de 20 heures en 2022, n’a pas laissé Jean-Victor Blanc indifférent. « C’était la première fois qu’il y avait un événement de cette envergure en France. Ce qui est très intéressant, c’est qu’il y a eu une augmentation des appels au 3114, le numéro de prévention suicidaire, donc ça a pu sauver des vies. » Ici, le message d’un artiste pop a pu servir à une prise de conscience sur la santé mentale. Même si avant cela, d’autres exemples ont pu attirer l’attention du plus grand 20

nombre, comme remarque le psychiatre : « On m’a proposé de faire une conférence, c’était l’année où il y avait la série 13 Reasons Why qui sortait sur Netflix, c’était aussi une période où l’on parlait de l’état de santé de Britney Spears, et où Mariah Carey avouait son trouble bipolaire. Je trouvais intéressant d’utiliser tout ça pour parler du sujet. » Suite à cette première conférence, Jean-Victor connecte avec Florence Trédez, journaliste pour Elle, puis Emmanuelle Fellous, ex-responsable de contenu chez Majelan (podcasts et livres audio). De ces rencontres vont germer le livre Pop & Psy – Comment la pop culture nous aide à comprendre les troubles psychiques (2019, éd. Plon), dans lequel la figure de Kanye West

Le Dr Jean-Victor Blanc, médecin psychiatre à l’hôpital Saint-Antoine (AP-HP), enseignant à la Sorbonne Université, et auteur.

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HUGUES MARLY

Culture mentale

FLORENT VANONI, BENOIT GABORIAUD

POP & PSY

ou le film Melancholia permettent d’aborder les questions de bipolarité, et les dangers de la dépression. Une entrée vers d’autres propositions, dont un festival, avec une première édition en 2022, qui réunit 10 000 personnes en un week-end. Au programme, tables rondes et échanges avec des personnalités publiques (le rappeur/acteur Gringe, Diariata N’Diaye, membre du Haut Conseil à l’Égalité) pour aborder des thématiques nécessaires, telles que les violences faites aux femmes, la place des proches pour les personnes atteintes de schizophrénie ou le coming out sur un trouble psy. De plus, l’intérêt grandissant autour de Pop & Psy apporte une présence médiatique à Jean-Victor Blanc, soit un moyen d’aider des personnes à sortir de leur isolement. « Une patiente est venue me voir pour une pathologie rare, suite à une interview où je parlais du film Swallow. C’est à propos de la maladie de Pica, c’est le fait d’ingérer des choses non-alimentaires. Elle n’avait jamais osé en parler, c’était énormément de culpabilité. C’est une histoire qui m’a marqué. Elle ne savait même pas que c’était une maladie psychique. » La parole continue de se ­libérer cette saison, à Paris, à travers le ciné-club et son cycle Fame au cinéma Le Brady, des conférences au MK2 Beaubourg, et une deuxième édition du festival Pop & Psy, du 24 au 26 novembre à Ground Control, qui abordera, entre autres, la dépression post-partum avec la sage femme, autrice et chroniqueuse Anna Roy. Toute une ­dynamique de connaissances et d’échanges autour de la santé mentale, et même une façon d’améliorer l’inclusion des personnes concernées par les troubles psychiques. Festival Pop & Psy, 24 au 26 nov. 2023, Ground Control, 81, rue du ­Charolais, 75012 ­Paris ; ­popetpsy.fr ; IG : @culturepopetpsy


LA PHOTO EN ACTION • Capteur X-Trans™ CMOS 5 HS rétroéclairé & empilé de 26,1 Mpx & X-Processor 5 • Viseur 5,76 mégapixels, 120 ips, grossissement 0,8x • Stabilisateur 5 axes 7 IL (équivalent à 7 diaphragmes) • Vidéo 6K30p 4:2:2 10 Bit ProRes Interne sans recadrage • Rafale 40 ips sans blackout, plein cadre/illimitée à 30 ips en JPEG, 20 ips en RAW Découvrez CONTRAST, un projet photo & vidéo réalisé au X-H2S, porté par Mélody Donchet, 6 fois championne du monde de football freestyle. Photo Tristan Shu X-Photographer, Fujifilm X-H2S objectif XF8-16mm F2.8 R LM WR. Vidéo inédite à retrouver sur la chaine Youtube Fujifilm France https://www.youtube.com/user/FujifilmFrance

www.fujifilm-x.com


H É RO S & H É RO Ï N ES

INSURFABLE ?

Imaginez-vous rider les vagues de Nazaré, au Portugal, et devenir un tout petit point sur un mur d’eau de 15 mètres. Les yeux fermés. C’est ainsi que Matt Formston a surfé des vagues monstrueuses qu’il ne pouvait pas voir. TEXTE AMY WOODYATT

the red bulletin : Comment surfer quand on ne voit rien ? matt formston : J’ai commencé à l’âge de cinq ans sur un bodyboard, et mon père me poussait dans les vagues, m’y faisait entrer et me tirait ensuite vers l’extérieur. J’ai appris à sentir la planche. Un bodyboard n’a pas d’aileron, il faut donc surfer en utilisant les rails (bords de la planche, ndlr), pour apprendre à sentir l’eau qui s’écoule. Ensuite, j’ai commencé à pagayer moi-même, à entendre les vagues qui venaient vers moi. En fait, je

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me sers de mes pieds comme d’une canne pour sentir ce qui se passe. Ce sont des milliers et des milliers d’heures passées à prendre de bonnes et de mauvaises vagues, à apprendre ce que je ressens et ce que mon corps doit faire.

peur en voyant la vague. Pourtant, parmi les personnes hautement qualifiées qui s’y rendent, peu d’entre elles sont mortes. Je savais que je m’étais entraîné aussi dur que les autres, avec la meilleure équipe au monde. Sur le papier, j’étais en sécurité.

Quelles ont été vos motivations ? Avant, mon attitude était la suivante : « Je veux prouver aux autres ce que je peux faire. » En réalité, j’essayais de prouver que je n’avais pas de handicap. On me disait : “Tu ne peux pas”, et j’essayais de leur prouver qu’ils avaient tort. Aujourd’hui, c’est plus la curiosité de ce qui est possible qui me pousse.

Comment pouvez-vous surfer Nazaré ? Toute l’équipe se fait confiance pour décider si j’y vais ou non car je ne peux pas voir la taille de la vague. Je ne la découvre que lorsque j’arrive au fond de la vague. Lorsque Lucas Chumbo (ancien champion de surf brésilien qui remorque Formston dans les vagues, ndlr) m’a placé au bon endroit pour que j’aie la bonne vitesse, il donne un grand coup de sifflet et je sais que c’est le moment. Je me tire vers l’avant à l’aide d’une corde, ce qui me permet de franchir le rebord de la vague.

Comment transposer cela au surf de grosses vagues ? Les plus grosses vagues que j’ai trouvées en Australie mesuraient 7,5 m. À Nazaré, on surfe des vagues de 15 m. Il n’y a pas de progression graduelle ! J’ai travaillé sur ma respiration. Car on risque toujours d’être éjecté de sa planche, et quand cela arrive, si on n’a pas la capacité respiratoire et mentale, il y a de fortes chances qu’on y reste. J’ai une femme et des enfants, et je voulais absolument rentrer pour les retrouver. Je me suis entraîné jusqu’à ce que ma plus longue respiration dure cinq minutes et quarante secondes. Ensuite, j’ai fait des exercices à poumons vides, au cas où je percute l’eau et que tout mon air soit expulsé et que mon rythme cardiaque augmente. J’ai appris à réduire mon rythme cardiaque sous l’eau. J’expulsais tout mon air et mon entraîneur écrasait ma cage thoracique. Sans air dans les poumons, j’ai fait un tour de 25 mètres sous l’eau.

Qu’avez-vous ressenti lorsque vous y avez surfé la première fois ? Je n’ai entendu que son sifflement. Puis le monde entier s’est tu. J’ai juste descendu cette énorme vague, et j’ai pu sentir l’eau monter sur ma planche. J’ai eu l’impression que la planche filait à 60 km/h. Quand j’ai entendu ce coup de fouet de la vague, j’ai su que j’avais réussi à me mettre à l’abri. Ensuite, tout le son est revenu et j’ai pu entendre tous les gars crier, les jet-skis vrombir et le fracas des vagues qui se brisent. Quels sont vos prochains objectifs ? J’envisage d’établir un record du monde d’apnée, suite à tout l’entraînement que j’ai fait sur ma capacité respiratoire. C’est quelque chose que je devrais exploiter. IG : @mattformston

La balance risque/famille est délicate ? Le risque est subjectif. Il n’est pas nécessairement basé sur des données. J’ai étudié le cas de Nazaré : les gens prennent THE RED BULLETIN

THE BLIND SEA FILM

Cet Australien est aveugle depuis l’âge de 5 ans. Pour lui, surfer offre des possibilités infinies. Les sensations sont ici essentielles. Formston a passé les quatre dernières décennies à peaufiner son surf, apprenant à manœuvrer sur des vagues qu’il ne peut pas voir. Après qu’il a perdu la vue, les parents de Formston ne l’ont pas traité différemment. Ils l’ont maintenu dans une école ordinaire, l’ont inscrit au rugby et encouragé à essayer tous les sports qu’il voulait. Après des années de paracyclisme, avec un record du monde, des titres nationaux et une participation aux Jeux paralympiques, Formston s’est tourné vers la mer. « Je voulais devenir surfeur pro mais, en raison de mon handicap, je ne pouvais pas me mesurer aux autres dans l’eau, explique-t-il. Même lorsque je faisais du vélo, je disais toujours : “J’ai hâte d’être à la retraite pour pouvoir surfer”, parce que c’est ce que j’aime faire. » Lorsque l’occasion de participer aux premiers championnats du monde pour surfeurs et surfeuses aveugles s’est présentée, il a plongé tête la première. Puis, comme il fait rarement les choses à moitié, Matt s’est préparé à prendre de grosses vagues à Nazaré, la Mecque du surf de gros.


« Je n’ai entendu que le sifflement de la vague. Puis le monde entier s’est tu. » Le voyage de Formston a été immortalisé dans un documentaire, The Blind Sea, qui sortira début 2024.

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H É RO S & H É RO Ï N ES

VIE AU GALOP

À 28 ans, Djibril Sako est cavalier en compétition et moniteur d’équitation. Une trajectoire peu commune pour cet ancien enfant des tours de Nanterre, qui a réussi à intégrer un milieu qui lui était inaccessible. TEXTE BRICE BOSSAVIE

Djibril Sako me reçoit dans un centre équestre du très huppé XVIe arrondissement parisien, au cœur du bois de Boulogne. En regardant son parcours, rien ne le destinait à finir à cet endroit. Mais, la débrouille et la détermination en ont voulu autrement : « C’est un milieu qui est assez aisé, où il faut un petit peu d’argent pour pouvoir en faire, mais je me suis débrouillé. » Djibril Sako est en effet cavalier. Et il a démarré sa vie dans un environnement plutôt éloigné de celui que l’on attribue habituellement à l’équitation : les tours colorées de la cité Pablo Picasso, à Nanterre. Pour en arriver là, il a fallu un coup de pouce du destin. « On ne partait pas en vacances avec plusieurs amis et on s’est dit un jour qu’on allait s’inscrire à une colonie de vacances multi-activités organisée par la mairie quand on avait 13 ans. » Parmi les sports proposés : l’équitation. Le début d’une passion qui va le suivre depuis sa jeunesse jusqu’à aujourd’hui. « Je n’avais jamais vu de chevaux de ma vie. Et quand j’ai découvert cet animal, j’ai vraiment senti un truc super fort. Pendant tout mon temps libre durant la colo, j’ai décidé d’aller au centre équestre. » Une fois rentré à Nanterre, Sako sent qu’il lui manque quelque chose : monter à cheval. « L’équitation était devenue une échappatoire, un moyen de me retrouver avec moi-même. Dès lors, je me suis dit qu’il fallait que je travaille là-dedans. » Djibril Sako va alors tout faire pour mettre un pied, dès le plus jeune âge, dans le monde de l’équitation. Seul problème : il n’a pas assez d’argent pour se payer des cours. Le Nanterrois va alors prendre son téléphone et contacter plusieurs centres équestres dans la région,

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PHOTO GUILLAUME LANDRY

en leur proposant un marché : le laisser monter à cheval gratuitement en échange de plusieurs heures par semaine passées à s’occuper des animaux du centre. Un poney club à Rueil-Malmaison (Hauts-de-Seine) finira par accepter, et le laissera faire ses premiers pas dans le monde de l’équitation. Toujours avec la même détermination : « Quand j’étais dans le centre équestre, des parents me donnaient de petits pourboires que j’économisais. Parallèlement, j’allais aussi dans les supermarchés acheter des packs de canettes. Je les revendais ensuite à l’unité dans mon quartier, et avec cet argent-là, je suis allé m’acheter mon premier pantalon d’équitation. » Sénégal et Corée du Sud Malgré son investissement et sa passion, Djibril doit faire face à une difficulté : le regard des autres. Sa passion pour l’équitation fait froncer quelques sourcils à Nanterre. « Quand les gens avec qui je traînais ont appris qu’ils me voyaient moins à cause du cheval, ils m’ont regardé en se moquant. C’était inconnu pour eux, ils voyaient ça comme un sport de bourgeois. Mais j’étais tellement déterminé que j’ai décidé que je ne laisserai personne me casser ça. » Djibril se plonge dans son activité, jusqu’à passer ses diplômes pour devenir soigneur puis entraîneur d’équitation. Il obtiendra toutes ces certifications et commencera sa carrière, entre cours d’équitation et concours, puis remportera les championnats de France d’équitation par équipe en 2016. Malgré tous ses efforts, ­Djibril Sako peine pourtant à ce moment-là à vivre convenablement de son activité. Son travail de jeune moniteur n’étant pas extrêmement bien payé, il vit toujours chez ses parents. Et finira par prendre une décision qui changera sa trajectoire de vie. Grâce à une offre d’emploi, le jeune

Sako part vivre au Sénégal, où il exerce en tant que moniteur dans un centre équestre à Dakar, pendant un an et demi. Juste après, il répondra à une autre offre en tant que cavalier, cette fois-ci en Corée du Sud, pour trois mois. « J’ai vu d’autres façons de faire de l’équitation, j’ai appris d’autres cultures, j’ai pu découvrir plein de choses humainement. C’était le bon moment pour le faire. » Transmission Fort de ses expériences à travers le monde, et de sa détermination, Djibril Sako a réussi à intégrer, à son retour en France L’Étrier de Paris, un des clubs hippiques les plus réputés de France dans le XVIe arrondissement parisien. Une récompense pour le Nanterrois, qui a démarré dans la profession alors qu’il n’avait pas assez d’argent pour se payer des cours. « Je ne vais pas dire que tous les jeunes de quartiers vont devenir cavaliers, mais j’ai envie de montrer, aux jeunes de chez moi, à travers mon parcours, que tout est réalisable. J’ai réussi à m’insérer dans un milieu qui n’était peut-être pas le mien de base. » Ces dernières années, Sako a ainsi participé à plusieurs opérations de sensibilisation avec des associations pour raconter son histoire auprès de jeunes en difficultés. Le but : leur montrer qu’une autre voie est possible. « J’ai fait des stages où j’expliquais aux jeunes mon parcours, avant de les faire monter à cheval. Le matin, ils et elles disaient que ce n’était pas trop leur truc. En fin de journée, plus personne ne voulait quitter le centre équestre. » Mission accomplie. IG : @dji_sak

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« Ils voyaient ça comme un sport de bourgeois. » Djibril Sako, au sujet de la perception des gens de Nanterre sur sa pratique de l’équitation. Moquerie.

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H É RO S & H É RO Ï N ES

ADIEU MÉLANCOLIE

Tiraillé entre la réalité et les allégories de la vie, le rappeur bruxellois, Swing, offre un premier album pittoresque et poignant, Au Revoir Siméon. Un marathon existentiel où s’apprivoiser requiert résilience et endurance. TEXTE MARIE-MAXIME DRICOT

Léthargie et nostalgie. Swing, de son vrai nom Siméon, en est sorti. Rappeur connu pour avoir passé près de dix ans au sein du trio belge L’Or du Commun, il s’affirme désormais en solo avec son premier album Au Revoir Siméon, qui prend le contre-pied de ses précédents LPs Marabout et Alt F4. Quinze titres qui font un état des lieux de lui, de nous, de la société et des espace-temps dans lesquels nos histoires vécues, parfois, nous perdent. Ici, Swing, fait deux pas de côté et débite son chemin parcouru sur des mélodies R’n’B aux rythmes frénétiques. Un rap alternatif dont les basses accentuent la sévérité de sa plume et le piano l’immensité de l’intime. Si chaque premier album est un rite initiatique qui définit la proposition d’un artiste pour les quelques années à venir, il est aussi sujet à de multiples expérimentations et collaborations. Enregistré au printemps 2022 au côté de son ami producteur Crayon, on retrouve également sur l’album la présence du notorious Prince Waly (Un seul ciel) et du rappeur belge YG Pablo (Reykjavik). Avec Au Revoir Siméon, Swing fait preuve de sarcasme et se dit au revoir pour mieux commencer la nouvelle étape de sa vie, celle d’un adulte entre autres choses. Adieu les faux semblants, l’artiste n’a plus de temps à perdre : « Je pense que dire au revoir Siméon, ça fait référence à cette part d’enfant que parfois, on doit laisser derrière soi pour réussir à retrouver un équilibre et réussir à passer au-dessus de certains obstacles de la vie, tout en essayant de la préserver un minimum, car je l’associe aussi à ma créativité qui fait le lien avec ma résilience »

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PHOTO MELIE HIRTZ

En effet, pour beaucoup de personnes, la force morale est un outil primordial pour évoluer en société. Et pour reprendre les termes du rappeur, la chance peut s’avérer être une jolie garce qui rentre dans nos vies puis disparaît comme un Doliprane. C’est donc avec audace et assurance que Swing raconte la précarité sociale et le racisme, à travers le titre Kobe, qui résonne avec Richesse sorti il y a cinq ans. Rêver de grandeur quand on est Noir n’est pas une mince affaire et Swing semble parfois défaitiste (Mafia), me dit-il à juste titre : « Être un homme noir, c’est déjà une forme d’obstacle. Quand je vois comment c’est en train d’évoluer en Belgique et en France, j’ai l’impression que ce n’est pas du tout en train de s’arranger. Alors on se demande si ça va changer un jour, car ce sont tout le temps les mêmes histoires qui se répètent. On ne peut pas toujours parler de choses positivement et surtout sur ce sujet-là. Il faut être réaliste. J’aurais pu être plus dur dans mes propos. » Mais Swing, c’est aussi une réflexion sur l’amour et la condition humaine, avec son morceau Mélanome, qui s’apparente à une tumeur dont la frontière entre la lâcheté et l’empathie est infime. Ne diton rien pour ne pas blesser, pour se préserver ou par manque de courage ? Si l’amour est le sens de la vie, mentir par amour est-il concevable ? « Pour moi, l’amour prend toute la place dans ma vie, je suis très en lien avec mes émotions, dans mes rapports aux autres et à moimême, dans ma musique. » Une chose dont Siméon est convaincu après ces deux années de tristesse et de baisse d’amour-propre. C’est primordial de s’aimer pour être vivant, me raconte-t-il. Un raisonnement qu’il introduit avec Gigi, « plus besoin de frôler la mort pour juste être heureux d’être en vie » et dont la résultante n’est autre que l’allégresse :

« Rien à fêter, mais on danse quand même. » Par ailleurs, Siméon qui a ­traversé des moments de deuils au cours de l’écriture de cet album, a souhaité en faire un projet aussi bien personnel qu’universel : « J’espère que ça pourra résonner avec les blessures de chacun. » Querelle entre espoir et désillusion, existence et hallucination. L’album de Swing est une succession d’analogies, un vingt-quatre images par seconde voire une peinture de Magritte dans lequel il était prisonnier : « Quand on regarde le tableau L’Empire des lumières, c’est impossible de savoir si nous sommes le jour ou la nuit. Ça m’a beaucoup inspiré, car pendant mon processus de reconstruction, j’ai eu la sensation de perdre pied à un moment donné, de ne plus ­distinguer la réalité. » Selon le rappeur, nous, mortel·le·s, avons l’habitude de nous construire tout un univers, le problème, c’est que lorsqu’il est détruit, nous tombons dans un surréalisme, qui nous pousse à entrer en conflit avec nousmême : le cœur et la raison. On se voit alors déconnecté·e·s de notre propre monde. Grâce à Au Revoir Siméon, l’artiste semble être sorti de sa torpeur. Maintenant, il s’agit de comprendre qui il est, et de s’habituer à son nouveau moi : « Je dois m’accepter, car j’ai changé. Le monde dans lequel nous vivons n’est pas simple à appréhender quand on est extrêmement sensible. » Et si la clef était simplement de vivre dans le moment présent comme on peut l’entendre via la voix du père de Siméon dans l’interlude REC030221 ? Se dire qu’au-delà des projections, qui on est, c’est finalement dans l’instant. Au Revoir Siméon, dispo dès le 1er déc. IG : @swing_simeon

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« Plus besoin de frôler la mort pour être heureux d’être en vie. » La guérison est un processus long et intense, surtout lorsqu’il s’agit de réapprendre à s’aimer.

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L’art de l’action

RED BULL ILLUME témoigne de l’engagement des pros de l’aventure et des action sports et de celles et ceux qui capturent leur gloire derrière l’objectif. Mené tous les deux ans, le concours présente les travaux des photographes les plus talentueux·euses au monde. Ouvrez les yeux, voici un avant-goût de la promotion 2023. Texte DAVYDD CHONG et PH CAMY

BRYAN NIVEN Demi-finaliste, top 250, Creative category BRYAN NIVEN/RED BULL ILLUME

Des skills et un œil vif sont clefs dans la photo de sports extrêmes, mais il ne faut jamais sous-estimer le fameux coup de bol. Le photographe américain Bryan Niven était à l’eau au large de Pismo Beach, Californie, prêt à shooter, lorsque « un éclair de néoprène est apparu de nulle part et le leash d’un surf est passé devant mon visage ! Une fois sur le sable, j’ai parcouru mes photos. Et puis, j’ai découvert cette image ». bryanniven.com ; IG : @bryanniven

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DELPHIN MONTESSUIT Demi-finaliste, top 250, Creative category

(en face) HANNES BERGER Finaliste, top 50, Energy

Après avoir shooté le grimpeur Virgile Devin sur le spot de l’Usine, à Voreppe, le Français a eu « l’idée d’un collage ­minimaliste à haut contraste » : « J’ai conçu la scène en utilisant un bloc de glace généré numériquement. Cette image est le résultat des inspirations qui ont façonné mon parcours : les montagnes, le pouvoir des sports extrêmes, les nouvelles façons de créer, le tout partagé avec de bons amis. » IG : @delfaim

« Nous étions en repérage en Inde, près d’Alsisar, raconte le photographe autrichien, et notre guide a mentionné un désert dans le secteur. Fabio (Wibmer, un patron du VTT, ndlr) et moi avons échangé un regard entendu, car l’idée d’un shooting dans le désert nous trottait dans la tête depuis un moment. Le lendemain, on sanglait son vélo dans une jeep, et c’était lancé. » hannesberger.com


DELPHIN MONTESSUIT/RED BULL ILLUME, HANNES BERGER/RED BULL ILLUME

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GUY FATTAL Demi-finaliste, top 250, ­Masterpiece by Sölden De son enfance en Israël, à Jérusalem, à sa vie actuelle à Whistler, au Canada, la nature et les action sports sont une passion de longue date pour Fattal. Juste après s’être fait un ligament croisé, il était dans la peuf canadienne, en train de shooter le:freeskieur Tom Peiffer, aux Pleine face notre abords du ­Tricouni photographe a dû Peak. « La ligne plaisir de offert un contraste dynamique remplacer un FolkTom hero:a“I’m notfiltre making folk music avec cette toile de sereine, d’objectif brisé peufond après that everyone’s heard,” Jackson says. “Inous avoir pris ce cliché. délivrant cette image magnifique. » always embrace my uniqueness. Not guyfattal.com : @guyfattalphoto everyone will get; itIGall the time” 32


GUY FATTAL/RED BULL ILLUME

Trinity Rodman


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IAN COLLINS/RED BULL ILLUME, JEREMY BERNARD/RED BULL ILLUME

IAN COLLINS Demi-finaliste, top 250, Playground by Radiant Photo « Fin 2021, Brandon (Semenuk, un king du VTT, ndlr) et moi sommes allés dans le désert de l’Utah pour un shooting à la fois perso et pour la marque Troy Lee Designs, se souvient le photographe américain. Nous avons trouvé ce rocher en plein milieu d’une zone bien connue et avons gratté une ligne en pleine nuit. Le lendemain matin, nous sommes ­revenus et avons shooté en pleine lumière. » Mission accomplie. iancollinsphotography.com ; IG : @iancollinsphotography

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JEREMY BERNARD Demi-finaliste, top 250, Innovation « Je me sers de la vie réelle, ­explique le Français Jeremy Bernard à propos de ses photos, de la chair incarnée sur des pages. Quand j’ai montré à Nina (Caprez, compagne de Jeremy, et grimpeuse de renom, ndlr) une photo de ce spot, elle a adhéré direct. Elle venait d’accoucher, mais comment résister à l’un des plus hauts 8a, d’un bloc unique et autoportant, ce ­Monolithe du Beaufortain ? » jeremy-bernard.com IG : @jeremy_bernard_photography


JB LIAUTARD/RED BULL ILLUME

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JB LIAUTARD Finaliste, top 50, Playground by Radiant Photo Parfois, un lieu semble trop beau pour être vrai. Voyez cette dune à Nazca, au Pérou, où JB Liautard a shooté la star du VTT enduro/freeride Kilian Bron. « J’ai fait voler mon drone au-dessus et la vue était impressionnante, dit le photographe français. Le vent venait de sculpter cette dune avec un motif parfait… Trop parfait. Cela semblait faux. » Qu’importe. jbliautard.com ; IG : @jbliautard

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LÉO GROSGURIN Demi-finaliste, top 250, Photos of Instagram Laissons le Français Léo Grosgurin nous parler de sa photo avec le rider VTT Arthur Deblonde : « Une image très délicate à réaliser, avec cet arbre magnifique, les cascades dans le fond, tout tellement parfait. On s’est pointés un matin pour construire un jump, puis j’ai fixé un kilo de flashs à un drone et l’ai envoyé au-dessus de l’arbre et du kicker, mais c’était très venteux et il a chuté plusieurs fois. La fenêtre de tir était très réduite, mais je voulais tout avoir à l’image. Un test, une prise de vue, et on avait la photo impeccable. » IG : @leogrgr

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LÉO GROSGURIN/RED BULL ILLUME


KEVIN MOLANO Finaliste, top 50, Lifestyle by COOPH « Dans le monde du skate, où les tricks sont engagés et les crashs fréquents, explique le photographe colombien, skate or die représente un engagement total envers cette discipline. » Sa photo de la skateuse locale Nataly Lucano après une bonne chute mémorable à Bogota l’illustre parfaitement. kevinmolanoph.com ; IG : @kevinmolanoph

TOM McNALLY Demi-finaliste, top 250, Lifestyle by COOPH Les grimpeurs doivent grimper. Lorsque les rochers près de sa maison du Lake District en Angleterre sont trop humides et brumeux, Will Birkett s’entraîne dans son garage. « J’aime les photos qu’on met du temps à comprendre, comme celle-ci, dit McNally. Pour moi, il y a deux choses qui font vraiment l’image : le panneau sur la porte et l­’arrière de la tête de Will. » tommcnally.co.uk ; IG : @tommcnallyphotography 40

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KEVIN MOLANO/RED BULL ILLUME, TOM MCNALLY/RED BULL ILLUME, DENIS KLERO/RED BULL ILLUME

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DENIS KLERO Demi-finaliste, top 250, RAW Le point culminant de la carrière de Klero est un projet de BASE-jump qu’il a tourné sur l’Everest avec feu Valery Rozov, en 2013. Mais pour cette photo, il est resté terre à terre. « J’avais vu un ­c­liché d’un photographe portraitiste avec une mise en scène similaire… J’ai adoré l’esthétique, et j’ai prolongé le concept avec la skateuse Liliya Sukhankova, dans une pose dynamique. » klero.ru ; IG : @denisklero THE RED BULLETIN

Scannez le code pour ­télécharger l’album photo Red Bull Illume 2023. Rendez-vous le 30 nov. pour découvrir les lauréat·e·s de l’édition 2023. ­redbullillume.com 41


Les cinq joueuses de l’équipe Valorant Game Changers, lors du ­shooting The Red Bulletin au studio photo Fridge. Après avoir enchaîné les ­trainings et les ­compétitions dont le KCX, l’heure est enfin à la décontraction.


CHANGER LA DONNE Cinq femmes bousculent les codes et les idées préconçues sur l’esport français : avec leur équipe dédiée au sein de la structure Karmine Corp, L ­ iriLia, Mel, Nelo, Ninou, et Matriix montrent à tous que le jeu vidéo compétitif professionnel (esport) est aussi possible pour les femmes. Et servent de modèles pour les joueuses de demain.

Texte BRICE BOSSAVIE Photos FELIPE BARBOSA

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Game Changers

« Le public nous a acclamées comme n’importe quelle autre équipe. » Emash

uatre rideaux, de la pénombre, et un peu d’incertitude. Sur la pyramide au centre de la Défense Arena, LiriLia, Nelo, Mel, Ninou, Matriix et Emash attendent. Les mains derrière le dos, postées les unes à côté des autres, les six jeunes femmes savent qu’elles s’apprêtent peut-être à vivre un des moments les plus forts de leur vie, sans trop savoir à quoi s’attendre. Jusqu’à ce que l’horloge passe 18 h 15 : sous la voix du host Doigby, quatre grands rideaux de plusieurs dizaines de mètres de hauteur tombent d’un coup du plafond de la plus grande salle fermée d’Europe ce 16 septembre 2023 pour révéler l’intégralité des membres de la Karmine Corp, organisation d’esport majeure en France. Face aux joueurs et joueuses disposé·e·s tout autour de la grande structure à étages : 30 000 personnes, rassemblées ce jour-là pour célébrer le KCX, événement annuel de la Karmine Corp à Paris durant lequel des fans de toute la France se réunissent. « Au moment où le rideau tombe, je n’entends plus rien autour de moi. J’avais juste l’impression qu’on ne faisait qu’une. 44

Up & down

Depuis dix mois, les cinq membres de l’équipe Game Changers enchaînent les tournois et prouvent une chose : les femmes ont tout autant leur place dans le monde de l’esport compétitif que les hommes. Une initiative couronnée d’applaudissements lors du dernier KCX qui, en dehors des enjeux sportifs, a aussi pour but d’inspirer d’autres filles à se lancer dans le monde du jeu vidéo compétitif, encore aujourd’hui très masculin. LiriLia, capitaine de l’équipe, explique : « Quand j’étais plus jeune, il y avait quelques joueuses. Mais la scène était tellement peu développée que je ne pouvais pas me projeter plus que ça. Tu savais que tu prenais un risque fou

KCX/YANIS LARRAS

Q

Il y a une partie de moi qui est restée là-bas », affirme quelques semaines plus tard, Emash, commentatrice de ­Valorant devenue assistante coach de la KCorp, pas encore redescendue de son nuage. Les émotions ne vont pas s’arrêter là : deux heures plus tard, sur la même scène, les cinq jeunes femmes, accompagnées de Emash et de LaAw, entraîneur principal, vont jouer une partie de Valorant, jeu de tir à la première personne en ligne, au milieu de la salle pleine. Avant de monter sur scène, chaque membre est présentée une par une, tout en fendant la foule. Emash va alors être frappée par un détail : « J’ai remarqué que le public nous a acclamées comme n’importe quelle autre équipe. C’était un message particulièrement fort ce soir-là. »

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L’équipe féminine de la Karmine Corp, Valorant Game Changers en pleine action à l’occasion du KCX3, le 16 septembre 2023, à Paris La Défense Arena. Lors d’une soirée exceptionnelle pleine de divertissements et de rebondissements, les équipes de la Karmine Corp ont affronté le reste du monde. THE RED BULLETIN

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Game Changers

à te lancer dans l’esport professionnel en tant que femme. Aujourd’hui ce n’est pas forcément le cas. » Fin 2022, l’association France Esports révélait son baromètre des comportements des joueurs en France. Dans les chiffres, on apprenait alors qu’on trouvait plus de joueuses (52 %) que de joueurs (48 %) « grand public » de jeux d’affrontements, soit des jeux dans lesquels se confrontent des joueur·euse·s en ligne. Mais concernant les pratiquant·e·s en compétition au niveau amateur, les chiffres s’effondrent totalement : 94 % d’hommes pour 6 % de femmes. Dans une vidéo publiée sur sa chaîne YouTube en début d’année, le journal Le Monde révélait qu’au niveau professionnel, parmi les mille joueur· euse·s d’esport les mieux rémunéré·e·s dans le monde… seulement une était une femme. Pourtant, les ligues d’esport – performance qui ne se repose pas sur des capacités physiques – sont officiellement mixtes au niveau professionnel. Une ouverture qui ne s’applique pourtant pas dans la réalité. Et la cause est plutôt simple : le patriarcat. Dans une longue série de messages sur X (ex-Twitter) LaAw, entraîneur de l’équipe Karmine Corp Game Changers expliquait début 2023 les raisons qui expliquent pourquoi les femmes sont bien moins représentées que les hommes dans l’esport. Dès le plus jeune âge, les jeunes filles seraient beaucoup moins poussées à aller vers le jeu vidéo, activité historiquement vue comme masculine, au point de beaucoup moins franchir le pas professionnellement que les hommes. « Mathieu (LaAw, ndlr) a évoqué une très bonne image qui était que les hommes ont pris l’ascenseur là où les femmes ont été obligées de monter les escaliers, appuie Emash. C’est exactement ça. C’est une course, et on part avec dix minutes de retard, donc il ne faut pas s’attendre à ce que l’on gagne tout de suite. »

L’équipe féminine de la Karmine Corp, Valorant Game Changers au grand complet. De gauche à droite : Emash (assistante coach), LiriLia (capitaine), Matriix, LaAw (coach), Nelo, Ninou et Mel. Une structure professionnelle qui dessine l’esport de demain.

Gotaga m’a dit : « Mel, c’est la chance d’une vie, il faut que tu la saisisses. » 46

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MÉLINA HOUSSEIN (X) @MelHssn Pseudo : Mel Âge : 27 ans Rôle : Controller Agent favori : Omen Qualité : Good vibes


MATHILDE BELTOISE (X) @Bully_Nelo Pseudo : Nelo Âge : 21 ans Rôle : Flex Agent favori : Breach Qualité : Mécaniques

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Game Changers

Obstacle

LES MOTS DE COACH LaAw « Emma m’a contacté fin 2022 pour me faire savoir que la ­Karmine Corp allait potentiellement lancer une équipe féminine sur le jeu Valorant, et j’ai été ensuite mis en relation avec eux. Ils m’ont fait part de leur projet, j’ai exprimé mes envies, et finalement ça correspondait bien, donc je suis devenu coach. J’ai vraiment beaucoup appris de cette année, notamment sur le côté exigeant de l’esport pro. En tant que coach, on doit arriver à leur faire comprendre qu’elles font partie des 0,0001 % des joueuses dans le monde à être payées pour faire ça, il faut être hyper précis et rigoureux dans tout ce qu’on fait. Coacher une équipe féminine m’a complètement plongé dans le sujet de la place des femmes dans l’esport. Je me suis vraiment renseigné sur la cause féminine en général, comprendre pourquoi il y a une différence de niveau. Ça m’a ouvert les yeux. Mais c’est un sujet qui dépasse le sport, ça concerne toute la société entière. » THE RED BULLETIN

Si les cinq membres de la Karmine Corp Valorant Game Changers en sont arrivées là, leur parcours n’a en effet pas été sans embûches. Après avoir été initiées aux jeux vidéo souvent via leur père ou leur grand frère, les cinq jeunes femmes passent plusieurs années à jouer sur des jeux en ligne comme Counter-Strike, League Of Legends, ou Overwatch, après les cours. Malgré leur bon niveau, elles vont devoir faire face à un obstacle de taille. Régulièrement, lorsqu’elles se connectent pour jouer en ligne, une partie de la communauté des joueurs vient perturber leurs parties. Il ne faut même souvent pas grand-chose pour que les ennuis commencent. « En début de partie, quand tu ouvres ton micro et qu’ils entendent une voix de fille, ça peut te tomber dessus direct. Parfois, ça peut être juste un “hello” et c’est mort », soupire LiriLia. Pendant leurs parties, des commentaires fleuris peuvent alors ­survenir. « C’est un peu moins le cas aujourd’hui, mais par le passé quand je saluais les autres joueurs on me disait direct : “Oh une fille !” puis certains se mettaient à aboyer, ou alors à me dire “Go back to the kitchen” quand je ratais quelque chose, se rappelle Mel. C’était vraiment pas mal de propos misogynes. » Alors qu’elle commence à atteindre un très bon niveau, Emash, actuellement coach assistante et commentatrice, décide, après des heures passées sur le jeu de tir Overwatch, de prendre ses distances avec ce dernier. Une des raisons : les commentaires qu’elle recevait au quotidien en jouant en ligne. « J’avais atteint le rang diamant (niveau de compétence, ndlr), et j’ai fini par désinstaller le jeu. Ça me faisait du mal d’entendre des mecs me dire que j’étais une fille et que je devais retourner à la cuisine. » Au printemps 2023, l’IFOP dévoilait une enquête sur le sexisme dans le monde du jeu vidéo en France. On apprenait alors que 40 % des joueuses confiaient avoir déjà été victimes de comportements sexistes en ligne. Et elles étaient autant à utiliser des stratégies d’évitement pour ne pas

« On me disait : “Go back to the kitchen” quand je ratais quelque chose. » Mel

donner d’indications sur leur sexe aux autres participants en jouant. « Les gens ne se rendent pas compte à quel point les mots et les messages que véhicule la société ont un impact, s’agace Emash. Game Changers est aussi là pour y répondre. »

« La chance d’une vie »

Le 21 février 2021, le jeu vidéo de tir en ligne Valorant publie un tweet qui va changer la trajectoire de nombreuses joueuses : dans une vidéo de 2 minutes, Anna Donlon, la productrice exécutive, annonce la création d’une ligue visant à mettre en avant les femmes et les communautés marginalisées au sein du jeu, grâce à des compétitions dédiées tout au long de l’année, et, surtout, des championnats du monde. Son nom : Game Changers. Quand elle en reparle, LiriLia affiche un grand sourire : « C’était incroyable, j’étais vraiment hyper contente. Je pense que ça a rassuré beaucoup de femmes qui jouaient au jeu, parce qu’on savait que ça allait permettre de débloquer beaucoup de choses, et nous crédibiliser au sein de la communauté. » Très rapidement, les plus grosses structures présentes sur le jeu se lancent dans l’aventure et commencent à annoncer des équipes dans la compétition. En France, dans le milieu de l’esport, une rumeur commence petit à petit à monter fin 2021 : la Karmine Corp, une des plus grosses structures en France avec Vitality ou Solary, songerait à lancer aussi son équipe. Au même moment, Emash, qui commentait jusque-là des matches sur le jeu, s’active dans le milieu pour convaincre une structure de monter une équipe dans laquelle elle serait assistante coach, accompagnée de Mathieu « LaAw » Plantin en entraîneur principal. Très vite, le squelette de l’équipe envisagée se forme : trois joueuses françaises expérimentées déjà sur le circuit dans d’autres équipes (LiriLia, Ninou et Nelo) et deux profils prometteurs plus jeunes avec la Belge Matriix, et Mel. Cette dernière n’est d’ailleurs pas inconnue du public d’Internet : elle est la petite sœur de Gotaga, un ex-joueur pro et un des créateurs de contenus les plus célèbres de France pour ses exploits sur Call Of Duty par le passé, et aujourd’hui pour ses contenus sur Twitch et YouTube, qui compte des millions d’abonné·e·s. Lorsque son téléphone sonne, Mel doit alors faire face à un dilemme : « Je travaillais avec mon 49


« En voyant notre équipe, beaucoup de filles se disent que c’est possible pour elles aussi d’avoir une carrière dans l’esport. » LiriLia


Game Changers

Au sujet de l’action menée par la Karmine Corp, toutes les joueuses de l’équipe s’accordent sur les mots de LiriLia.

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NOUHARA MARCOS ­ORAHA (X) @Ninouuu__ Pseudo : Ninou Âge : 25 ans Rôle : Initiatrice Agent favori : Skye Qualité : Sang-froid

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Game Changers

« Nous portons une certaine cause. » LiriLia

ASMA BOUGHIDA (X) @LiriLia Pseudo : LiriLia Âge : 25 ans Rôle : Lead in game/Flex Agent favori : Astra Qualité : Réflexion


LÉA RANSQUIN (X) @matriixl Pseudo : Matriix Âge : 18 ans Rôle : Duelist Agent favori : Raze Qualité : Agressivité


Game Changers

sera officiellement née. Le début d’une aventure de presque un an aujourd’hui pour Mel, LiriLia, Nelo, Ninou et Matriix.

Modèles

EMASH

27 ans, assistante coach : « Les gens ne se rendent pas compte à quel point les mots ont un impact. Game Changers est aussi là pour y répondre. »

grand frère sur sa chaîne et j’étais très bien. Et j’ai reçu une proposition pour rejoindre la Karmine Corp. » Dans le doute la jeune femme consulte son frère. « On s’est parlé pendant plusieurs heures, et il m’a dit : “Mel, c’est la chance d’une vie, la même que j’ai eu quand j’avais 15 ans, et il faut que tu la saisisses. Parce qu’après ce sera trop tard. Et si jamais ça ne fonctionne pas, on sera encore là pour toi après.” » Le 2 janvier 2023, Emash publie une photo de signature de contrat tiré d’un épisode du dessin animé Les Simpsons sur son compte X sans rien dire de plus. Un mois plus tard, la première équipe féminine Game Changers de la Karmine CorpTHE RED BULLETIN

« On doit commencer par les fondations pour ensuite aller vers le sommet. » Emash

Le jour du shooting photo pour The Red Bulletin, l’ambiance est à la décontraction. Pendant les préparations, les joueuses se vannent, se piquent, et, surtout, se complimentent. Des indices qui ne trompent pas : en match, mais aussi en dehors, les cinq membres de l’équipe se sont bien trouvées. Il faut dire que les derniers mois ont été plutôt intenses pour les sept membres de l’équipe récemment formée, entre les entraînements quotidiens, les bootcamps, les compétitions régulières, les interviews, et leur présence au KCX à La Défense Arena mi-septembre 2023. Les résultats, eux, ont d’abord été prometteurs, puis frustrants. La preuve que le niveau de la compétition est déjà relevé, deux ans seulement après le lancement de Game Changers : « On ne s’en rend pas compte avec le côté starification de la Karmine Corp, mais par rapport à d’autres équipes bien installées, on part d’un peu plus loin, analyse Emash. On a deux profils moins expérimentés (Matriix et Mel, ndlr) que l’on doit accompagner, donc il y a aussi un petit aspect centre de formation ou chacune doit s’entraider pour soutenir les autres. C’est comme une pyramide, on doit commencer par les fondations pour ensuite aller vers le sommet. » Pourtant, ces derniers mois en dehors des matches en compétition, les joueuses ont récolté d’autres succès. Régulièrement sur leurs téléphones, les différentes membres de la Karmine reçoivent des messages privés. Leurs contenus : des remerciements d’autres joueuses. « Beaucoup de filles m’ont dit qu’elles étaient fières de ce qu’on représentait, et ça m’a fait comprendre qu’on portait une certaine cause, s’exclame LiriLia. Ce sont souvent des personnes qui jouent pour leur plaisir et qui, en voyant notre équipe, se disent que c’est aussi possible pour elles d’avoir une carrière dans l’esport. » De son côté, Mel confirme les propos de sa capitaine. « Je reçois énormément de messages de filles douées aux jeux vidéo, qui se posent des questions sur leur avenir, et qui envisagent maintenant de devenir pro. » Elle ajoute : « Encore plus depuis que la Karmine a recruté. Elles se disent que ce choix de vie est possible pour elles aussi. » Sans doute la plus belle des victoires. 55


Même sans faire de bruit, Mat crée des remous lorsqu’il s’élance sur la piste de Grangesprès-Marnand.

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RÉVOLUTION SILENCIEUSE MAT ­REBEAUD, star du FMX, a troqué un moteur bruyant pour un doux ronronnement. Avec les motos électriques, il découvre un tout nouveau terrain, pour lui et pour son sport. Texte ANNA MAYUMI KERBER

Photos DEAN TREML


Mat avant l’entraînement sur sa piste dans le canton de Vaud. L’agriculteur voisin se réjouit de la réduction sonore.


Mat ­Rebeaud

Avec sa moto électrique, Mat Rebeaud explore de nouvelles pistes, comme ici au parc éolien du Saint-Gothard.

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orté par le chant des oiseaux, Mat ­Rebeaud s’envole. Jambes au ciel, mains bien agrippées à la selle, il reste au moins quatre secondes dans les airs. Quand sa moto atterrit, on entend juste un léger vrombissement. Légende mondiale du FMX (motocross freestyle), Matthieu « Mat » Rebeaud fait son premier backflip en 2003. D ­ epuis, le Suisse romand a raflé à peu près tous les trophées possibles dans l’univers du FMX, Red Bull X-Fighters, Night of the Jumps, championnats du monde, et sept fois médaillé aux X-Games. D ­ ésormais, c’est une véritable figure de proue du motocross électrique.

THE RED BULLETIN

Quatre ans plus tôt, sa première vidéo sur une moto électrique était accueillie par un flot de messages haineux. On ne voulait pas d’un sport sans le bruit du moteur et l’odeur du gasoil. Mat est resté stoïque. « Moi aussi j’aime le bruit, l’odeur, ce sont des bons souvenirs. Mais l’électrique rend les choses beaucoup plus simples et plus cool. Je peux rouler quand je veux, sans déranger personne. » Pour Mat, les motos électriques ouvrent de nouvelles portes.

Into the wild

Au guidon de son modèle électrique, il peut faire du freestyle dans des endroits interdits aux motos traditionnelles. Il s’est envolé sur les pistes enneigées de Laax, réservées uniquement au ski ou au snowboard, a survolé les escaliers du Musée des transports de Lucerne (une nuit au musée ? un rêve de gosse) et peut même réaliser des tricks sur des barrages ou dans le parc éolien du Saint-Gothard. « Pouvoir explorer de nouveaux territoires, c’est vraiment génial », explique-t-il. Les rampes et les pistes de terre sont une chose, la nature

en est une autre… tout à fait différente. Et justement, il voit l’avenir en vert pour le motocross. La première fois, ça n’est pas venu tout seul. « Sur une électrique, on n’entend pas les vibrations du moteur, juste celles de la piste. » C’était un peu compliqué, il lui manquait tous ces retours qu’il avait l’habitude de recevoir de son engin. « J’entendais les moteurs des autres, mais je manquais d’infos sur les sons de ma propre moto. » Puis il s’est adapté et son ouïe est devenue plus sensible. Maintenant, il peut entendre si la chaîne est bien huilée ou pas, détails importants mais généralement impercep-

« Sur une moto ­électrique, on n’entend pas les vibrations du moteur, juste celles de la piste. » 59


Mat ­Rebeaud

« Nous sommes en pleine mutation, y compris en ce qui concerne le motor­sport. » tibles, noyés qu’ils sont dans le brouhaha du moteur. Désormais, les points négatifs se limitent à certains facteurs marginaux, comme le fait de jurer qui perd un peu de sa spontanéité. Son « Merde ! » n’est plus masqué par le furieux vrombissement du moteur. C’est même le contraire : maintenant, sa frustration couvre le léger vrombissement de la machine. Mat a passé deux ans à plancher sur le développement du nouveau modèle Stark. Résultat : une moto esthétiquement infaillible de 118 kilos, soit 10 kilos de plus qu’une moto traditionnelle dans la même catégorie. « Mais on fait une économie de sept à huit litres d’essence et donc de poids par la même occasion », observe Mat. Cela lui permet de faire des courses de 45 minutes à une vitesse maximale de 142 km/h ou de rouler six heures d’affilée sur un terrain facile. Au niveau des compétitions, les modèles électriques sont encore dans une zone grise. Les catégories se basent sur des critères tels que la taille du moteur ou le nombre de cylindres, ce qui n’est pas compatible avec les moteurs électriques. Sa Stark équivaut à un 450 cc. « On en est pleine époque de transition », précise-t-il. Les premières compétitions 100 % électriques vont bientôt arriver. Le compte à rebours est lancé. En attendant, il profite de cette unique opportunité qu’il s’est créée en passant à l’électrique.

La moto, une affaire de famille

Antoine Rebeaud, son père, fait déjà les cent pas sur la piste d’entraînement non loin de Payerne, son lieu de naissance. Il vérifie les pneus et la chaîne de la Stark, resserre quelques vis au niveau de l’embrayage. Sur sa piste, Mat Rebeaud s’entraîne depuis des années déjà. Depuis ses tout premiers pas dans la discipline – il roule sa première moto à 4 ans et prend part à sa première course à 10 ans – ­Antoine accompagne son fils sur quasiment toutes les compétitions, s’assurant que la technique est toujours 60

Dans l’atelier qui jouxte sa maison, Mat met en place le châssis de sa Stark VARG.

au top. « Quand c’est moi qui m’occupe de la moto, il sait que tout est au poil. » Les mots sont rares mais le respect mutuel évident, même pour un observateur extérieur. « Pendant dix ans, nous ne sommes plus partis en vacances. En effet, tous les week-ends et tout notre temps libre étaient consacrés aux compétitions et aux spectacles de Mat. Il participait à plus de cinquante événements par an à cette époque. Depuis, ce sont moins d’une trentaine. » Avec le passage à l’électrique, Mat ne fait plus autant appel à son père en cas de pépin : une puce intégrée permet de régler pas mal de trucs d ­ epuis un ordinateur à Barcelone. Cela d ­ érange-t-il Antoine ? « Non ! », rit-il. Lui-même trouve cet apprentissage perpétuel passionnant :

« Moi aussi j’aime le bruit, l’odeur, ce sont de bons souvenirs. Mais l’électrique rend les choses plus simples. » THE RED BULLETIN


La maison de Mat et de sa famille. Les ­panneaux solaires alimentent partiellement maison, voiture et ­vélos en électricité.

Photo du grand-père de Mat, Fredy Rebeaud, sur une DKW, de 1953. La fascination pour les deux-roues est dans la famille.

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Mat ­Rebeaud

« Je ne suis pas du genre à dire : “Hey, tu dois faire ça comme moi. Je le fais parce que j’aime ça.” » les nouvelles technologies leur permettent de ­savoir combien de temps Mat reste en l’air lors de ses tricks ou à quelle vitesse il prend ses virages. Et A ­ ntoine en connaît un rayon. Mat dispose d’environ quatre secondes en l’air pour effectuer ses cascades. Dans les compétitions, les choses se passent ainsi : plus la rampe est grande, plus le saut est haut, plus il a de temps pour les tricks fous. « C’est du temps de gagné, mais en cas de chute, je prends aussi plus cher. » Mat n’est pas devenu champion par hasard. C’est une affaire de famille : son grand-père a remporté de nombreuses courses nationales sur une DKW. Son père a fait de la compétition sur une Montesa 2 temps. « Beaucoup de choses ont changé depuis, précise Antoine, et pas qu’au niveau du bruit qui brille désormais par son absence. » Le grand-père a roulé avec le même casque tout au long de sa carrière, lui n’en a eu que deux. Contraste avec le garage de Mat : des dizaines de casques en rang militaire font face à plus d’une douzaine de motos et de vélos. Mat Rebeaud est le visage du motocross freestyle made in Switzerland depuis vingt ans. Le clou du garage ? La Stark et ses 118 kilos pour 80 cc. Une vraie beauté. Un mur entier de l’atelier du garage est recouvert d’outils, de tournevis, clés, marteaux et compagnie. Au centre, une borne de recharge. Quant au bruit ? Non, ça ne lui manque vraiment pas. Et à son fils aîné encore moins : le garçon de 5 ans ne supporte pas le tintamarre des anciennes motos de papa. Dans la cour, avec son petit frère de 3 ans, ils partent déjà à l’assaut des rampes sur leurs motos électriques accompagnés par le tintement des cloches de vaches.

Idylle paysanne

Nous sommes en Suisse romande. Les veaux du beau-père de Mat broutent paisiblement dans le champ voisin. Sur les portails, la façade de la maison (et même tatoués sur les bras de Mat et de 62

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Mat, sa Stark VARG, et nombre de casques dans le garage de sa maison qui témoignent de ses cascades et exploits.

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« Je suis convaincu que le passage à l’électrique peut conquérir un nouveau public qui ne s’intéresserait ­jamais au motocross autrement. »


Mat ­Rebeaud

Lors de l’entraînement à Granges-prèsMarnand (canton de Vaud), Mat ne lésine pas sur les figures les plus folles.

Avec sa moto e-FMX, Mat peut rouler là où les autres ne le peuvent pas. Ici, au barrage du Saint-Gothard.

sa femme Floriane), ces trois lettres : RMF, les initiales du couple, symbole de cette forte cohésion familiale. Peut-être pas ses enfants, mais ses petits-enfants lui demanderont comment c’était à l’époque… Lorsque les motos marchaient encore à l’essence. Mat s’en régale d’avance. « Je pourrai leur dire que les motos faisaient un sacré boucan et que tout le monde faisait la gueule quand les premiers modèles électriques sont apparus. Ça va être drôle. » Héritée de la grand-mère de Floriane, la maison a été entièrement rénovée. Nostalgique de l’ancien, ils ont choisi de conserver les poutres sous le toit, et se réjouissent des grandes fenêtres qui donnent sur les collines environnantes. L’électricité issue des panneaux solaires suffit à alimenter l’ancienne ferme, mais les 10 kW ne permettent pas de recharger les motos et la voiture électrique Hyundai Ioniq 5. Il faut donc les brancher sur une prise secteur. Un coup de pouce minimal, conclut Mat. Les Rebeaud restent malgré tout largement auto-­suffisants.

Plaisir et discrétion

« Plein de gens me contactent sur les ­réseaux et me disent : “J’adore ce que tu fais, j’aimerais bien m’y mettre aussi.” Je leur réponds : “C’est simple, achète une moto, puis un van ou un bus et

« Pouvoir explorer de nouveaux ­territoires en électrique, c’est vraiment génial ! » roule 2-3 heures jusqu’à la piste d’entraînement.” » En Suisse, les pistes de motocross sont fermées le d ­ imanche pour éviter les nuisances sonores… L’ironie veut qu’il s’agisse forcément du jour où la plupart peuvent s’adonner à leur passion, sans compter que c’est un sport qui prend du temps, autre facteur qui fait que beaucoup y renoncent. Les motos électriques peuvent sauver notre sport, explique Mat. « Je suis convaincu que le passage à l’électrique peut conquérir un nouveau public qui ne s’intéresserait jamais au motocross autrement. » Imaginez des pistes de motocross tout près des villes ou même au centre-ville, équipées de station de rechargement, car c’est encore ce qui manque trop souvent sur les tracks : « Ce serait une véritable révolution ! » IG : @matrebeaud 65


Génie du sensible Grâce à sa plume sincère et un savant mélange entre gospel, rap et jazz, TUERIE a secoué le rap français ces dernières années. Après une carrière qui tarde à démarrer, il s’impose désormais par sa singularité. Rencontre à hauteur d’homme avec un artiste ambitieux et généreux. Texte HUGUES MARLY

Photos FIFOU

Avec la sortie en 2021 de son album Bleu Gospel, puis celle de Papillon Monarque cette année, Tuerie (Paul Nnaze de son vrai nom) propose des récits de vie poignants et des ego-trips mordants à travers une combinaison réussie qui sent bon les chants d’églises afro-américains et le rap de haute volée, guidé par les maîtres du genre, Kendrick Lamar en tête. Le rappeur originaire de Boulogne qui est aussi passé par une chorale, a été bercé par le jazz, le funk et la soul hybride de Prince, ainsi que des groupes de rock tels que Nirvana ou Queen. D’ailleurs, il transpire le côté à fleur de peau du premier, et parfois même l’énergie grandiloquente du second. Quand il parle de ses inspirations, il cite aussi Jacques Brel, Daniel Balavoine ou encore la chanteuse Rosalía, dont il apprécie l’audace. Une mosaïque d’influences où chaque fragment vient ­apporter une nuance de couleur à cet ­artiste qui ne s’impose aucune barrière. Tout comme son ami et frère de son ­Luidji, qui rempli des Zéniths, et qui lui 66

aussi fait bouger les lignes, via un rap de crooner intimiste et séduisant. Leur structure, Foufoune Palace, est jusqu’au bout une affaire de famille, puisque, dans cette maison, les deux artistes se partagent les services du producteur Ryan Koffi, dont les compositions soignées et inspirées, infusées de jazz et de neo soul, participent à la signature ­sonore du label. Aujourd’hui, le rappeur boulonnais, lauréat du prix Joséphine 2023, connaît un joli succès aux côtés de ceux avec lesquels il avance depuis plusieurs années, et Tuerie collabore également à la réalisation de titres pour d’autres a ­ rtistes (Jewel Usain, récemment), et se produit sur scène jusqu’en Belgique. Le parcours de ce personnage hors-norme avant de s’imposer dans le rap francophone fut pourtant difficile.

Transformer ses plaies

Jusqu’à l’adolescence, Tuerie navigue entre la France et le Cameroun, le pays où il est né, qui est aussi celui de ses parents. Malmené par une histoire familiale chaotique et douloureuse, dans laquelle son père tient un rôle particulièrement toxique, c’est grâce à la force de sa mère que le rappeur va réussir à tenir dans tout ce tumulte. Après de graves problèmes de santé, il partira vivre en France pour y rester. Malgré tout cela, ce papa de 35 ans semble prendre du recul : « Aujourd’hui, ça nourrit mon art. Il y a beaucoup de rappeurs qui se la racontent un peu, avec des vécus d’écorchés vifs. En réalité, il s’agit plus de la vie de leurs parents. Bleu Gospel, c’est le plus vibrant hommage aux efforts de ma mère. » Dans cette nourriture artistique, on trouve aussi tout ce que le Cameroun a pu lui offrir, notamment un rapport au langage très riche : « C’est le pays avec le plus de dialectes différents, ça chante à tous les coins de rue, tout le monde y parle un français extrêmement éloquent. Ce truc du battle rap, c’est totalement naturel au pays, ce n’est que de la répartie.» C’est sûrement pour cela que sa musique ne tombe jamais dans le pathos, il y a toujours une lueur d’espoir, une forme de célébration chez Tuerie, une ­façon de sublimer les traumatismes. « Ma mission, c’est de rendre digestes des récits difficiles à l’aide de sourires, de ritournelles, de petites boutades en plein milieu d’un morceau. Mes changements de voix qui donnent l’impression de regarder un film ou d’être au théâtre, ça THE RED BULLETIN


Tuerie entend ­sublimer les traumatismes grâce à sa ­musique.

« Ma mission, c’est de rendre digestes des récits difficiles à l’aide de sourires, de ritournelles. »


« C’est une tare de ne pas pouvoir dévoiler ses émotions, ce truc absurde : un homme ne pleure pas. »


Tuerie

« Il fallait convaincre les gens qui ont envie de me jeter des tomates. » met la distance nécessaire pour protéger l’auditeur. » Quand on parle de cet art du contraste qui constitue l’un des fils rouges de sa musique, il commente ainsi : « C’est spontané, c’est lié au côté taquin que j’ai développé en faisant des battles, en étant le clown de la classe. Ma première règle, c’est que je n’ai pas le droit d’ennuyer le public. » Il voit aussi son écriture comme un chemin de résilience. « C’est de l’art thérapeutique. » Et assume pleinement la part de vulnérabilité dans sa proposition. « C’est une tare de ne pas pouvoir dévoiler ses émotions, ce truc absurde de prétendre qu’un homme ne pleure pas, ou doit être fort ! Ça demande trop d’énergie. Je préfère laisser des clés aux gens, quitte à ce qu’on dise que je fais de la musique chialée. » L’artiste va plus loin dans ce raisonnement quand il s’agit de mettre de la chanson dans son rap, et de ce que peuvent se permettent les rappeurs aujourd’hui. « Je pense que la personne qui nous a permit de faire ça, c’est Lauryn Hill, sauf qu’il y a ce côté sexiste qui lui procure un laisser-passer : “C’est une fille, elle a le droit de chanter, c’est pas grave, ça reste soft.” Mais quand c’est Drake, c’est plus problématique. Maintenant, ça a changé, et a ouvert la porte à de grandes choses. »

Socialement vôtre

La ville de Boulogne, tout particulièrement sa cité du Pont de Sèvres, sont des terres de rap depuis fort longtemps. Dès le milieu des années 90, Les Sages Poètes de la Rue ont imposé leur ville sur la carte du rap français, à l’aide de flows aiguisés, novateurs et de productions jazzy. Les années 2000 verront s’affirmer des groupes aux atmosphères bien plus sombres comme Lunatic (Booba et Ali), Mo’vez Lang ou le rappeur Salif. Une marque de fabrique dans laquelle Tuerie ne va pas trouver sa place. « Je passais pour un ovni, dans ma musique il y avait THE RED BULLETIN

beaucoup trop de sourires, beaucoup trop de couleurs », et ce malgré sa relation avec Booba. S’il travaille pendant un temps dans la boutique de vêtements de ce dernier (la marque Ünkut) et qu’on l’invite sur les tournages de clips, ses contacts ne représentent aucune opportunité. Seul le renommé Dany Dan des Sages Poètes de la Rue l’encourage à persévérer. C’est donc ailleurs que le jeune Tuerie va tester sa musique, notamment dans le métro. « Il fallait convaincre les gens qui ont envie de me jeter des tomates, ceux qui essaient de t’éviter, se disent que tu vas les soûler avec un accordéon. C’était il y a environ dix ans. » Un moyen de se confronter au plus grand nombre, loin de toute zone de confort. Rusé et accompagné d’un live band dont il apprécie la sonorité organique (ce qui va le rapprocher de Luidji qui s’entoure lui aussi de musiciens), Tuerie accède aux tremplins musicaux de sa ville qui privilégie plutôt les formats rock, en louvoyant : « Sur les fiches d’inscription, je mettais néo metal gothique. » Il fait aussi partie du groupe Capsule Corp, au début des années 2010, mais c’est une période difficile pour le rap français, il y a peu de chance de réussir dans une industrie qui a du mal à rebondir face au téléchargement illégal. À cette période, il laisse de côté sa carrière, et s’investit pendant huit ans dans les activités socio-culturelles de sa ville, au Centre Boulonnais d’Initiatives Jeunesse (CEBIJE). C’est aussi pour lui une manière de continuer à apprendre : « Ça m’a permis d’affiner mes compétences en terme de réalisateur de morceaux et de direction artistique. » Ce rôle au sein du monde associatif local revêt une dimension affective pour l’artiste. « J’ai toujours eu ce syndrome du sauveur, et cet endroit, c’était une façon pour moi de satisfaire ce besoin, jusqu’à ce que les gens au-dessus de moi ne me suivent plus. » Le CEBIJE a quelque chose d’une pépinière, qui voit passer de

futurs t­ alents tels que le chanteur R&B Tayc ou le rappeur Malo. Ceci étant, aux yeux de Tuerie, la mission reste avant tout sociale, et non de transformer ce lieu en incubateur de jeunes a ­ rtistes. Mais sa hiérarchie ne le voit pas de cet œil. L’expérience professionnelle se finit très mal, mais cette nouvelle étape laisse la possibilité au rappeur de se concentrer sur lui-même, et de travailler sur son premier album, Bleu Gospel. « Ça fait partie du mal nécessaire. J’embrasse ces moments de toutes mes forces, ça m’a poussé hors d’une forme de sommeil. Ça m’a permis d’augmenter mes capacités. » Malgré la déception, le monsieur retombe sur ses pieds, et une fois de plus, transforme la boue en or.

Papa artiste

Nouvelle vie, nouvelles contraintes et ­recherche d’un équilibre. Devenu père, en même temps que rappeur à plein temps, Tuerie aborde les difficultés et les efforts que peuvent représenter ce genre de choix. « Quand tu as des rêves aussi gros, ton chemin est obligatoirement fait de sacrifices. Il faut des heures de studio, il faut que j’aille clipper, il faut que je réfléchisse avec mon équipe, et en même temps, mon fils c’est aussi mon meilleur ami. Je l’amène sur les tournages, parfois en interview, mais en v­ oulant apporter le meilleur aux gens que tu aimes, il y a moyen de s’en éloigner. » Difficile de trouver le juste milieu ­selon lui, même si son rôle de père reste ce qu’il y a de plus important, tout en ­investissant à fond son énergie dans la musique et dans son approche du live. Preuve en est sa performance au Grünt festival à Bruxelles, en septembre dernier, desservie par des problèmes techniques, qui n’en reste pas moins l’une des plus impressionnantes de la programmation. Mais Tuerie ne s’arrête pas là. Fin septembre 2023, dans La M ­ aroquinerie pleine à craquer, il offre au public parisien une performance s­ olide de Papillon Monarque, tout aussi remarquable que puissante. « Je fais n’importe quelle scène comme si je d ­ evais performer au stade de France. » Pour lui, l’important, c’est de créer du lien avec le ­public, de rentrer en communion avec celui-ci. Comme dans un gospel. IG : @tuerie__ Écoutez Papillon Monarque sur ­Spotify. 69


L’ÉPOPÉE DE JOANNA

Avec son deuxième album autoportrait, Where’s The Light?, l’auteure-compositrice-­interprète JOANNA nous confie le secret de sa renaissance, qui marque assurément un tournant autant sur le plan musical que personnel. Photos JEAN DE BLIGNIÈRES

Deux ans après son LP Sérotonine, Joanna est de ­retour avec Where’s the Light?.

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BOUCLES D’OREILLES : ARCHIVE STYLISTE ; ENSEMBLE TOP MANCHES LONGUES ET LEGGING : LUU7 ; SANDALES : NO DRESS

Texte MARIE-MAXIME DRICOT



Joanna

oanna, 24 ans, est une auteurecompositrice-interprète française, originaire de Nantes. Après un premier album à succès en 2021, l’artiste revient en 2023 avec un album autoportrait, Where’s The Light? dans lequel elle aborde la dépression qu’elle a traversée. Elle nous explique le cercle vicieux que cela représente, entre déni et lâcheté, mais surtout, la manière dont elle a remonté la pente : « J’ai rebooté mon s­ ystème. » Joanna nous invite à pénétrer dans son antre pour découvrir les secrets de sa résurrection. « Cet album parle de mon cheminement pour sortir de la dépression. » Dix heures du matin, quartier de la Bibliothèque François Mitterrand, je retrouve Joanna sur le shooting de The Red Bulletin, pour découvrir qui se cache réellement derrière le nouvel album Where’s The Light? qui sortira le 24 novembre. Joanna se livre à cœur ouvert. Il faut dire que depuis la sortie en 2018 de son morceau Séduction sur YouTube, qui atteint 100 000 vues en deux mois, la chanteuse s’est retrouvée sous le feu des projecteurs. 72

Peu de temps après, le single sera diffusé sur toutes les plateformes de streaming via le label de Yelle. La chanteuse devient la nouvelle voix de la pop française, à la fois vaporeuse et délicate, qui fait vibrer nos oreilles et se retrouve dans la sélection 2019 des INOUïS du Printemps de Bourges. Dès lors, Universal, Barclays et d’autres majors la repèrent, mais Joanna sortira son premier album Sérotonine en 2021 via BMG, dans lequel elle conte les différentes étapes propres à une relation amoureuse, le meilleur comme le pire. L’artiste autodidacte à la direction artistique affirmée revient aujourd’hui avec un tout nouveau projet, Where’s The Light?, un récit autobiographique qui nous plonge dans les méandres de sa reconstruction personnelle après avoir subi un drame social, qui touche encore beaucoup trop de femmes à ce jour. Joanna se raconte en musique en offrant un récit intime et belliqueux, qui marque incontestablement une métamorphose musicale et psychologique, dont elle est l’héroïne.

CHEMISE ET VESTE : MM6 ;;CRAVATE : PERSONNALITIES ;; BOUCLES D’OREILLES : R.L.E ;;BOTTES : MIISTA

J

« Je pense que j’ai touché les prémices de l’extase, mais grâce à ce projet, j’espère la ressentir. »

THE RED BULLETIN


Plus qu’un projet musical, son nouvel album revendique l’humanité et la ­liberté de l’artiste Joanna sans pudeur ni modestie.



Joanna

« J’ai vécu quelque chose que je n’avais pas envie de vivre. »

PHOTO DE GAUCHE : VESTE EN CUIR : MM6 PHOTO DE DROITE : BONNET EN PERLES, BOUCLES D’OREILLES, T-SHIRT, JUPE ET GUÊTRES : LA COMPAGNIE DU COSTUME ; MINI SHORT : ALFIE ; CEINTURE : JUSTINE CLENQUET ; BOOTS : EMPTY BEHAVIOR

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Joanna

Un temps

Deux ans se sont écoulés depuis le premier album de la Nantaise. C’est à la fois beaucoup et pas grand-chose à l’échelle d’une vie. Pour elle, cet album était l’occasion de faire le point sur les aspects positifs et négatifs de sa création tout en se laissant l’opportunité d’expérimenter son style musical. En effet, pour tout·e artiste, un premier album est généralement l’espace dans lequel il se cherche sur de nombreux aspects : création, écriture, sujet, relations professionnelles, image, gestion des réseaux sociaux. Si Sérotonine était pour Joanna ce que l’on peut appeler un crash test, Where’s The Light? est sa nouvelle définition de son être car, depuis, elle a testé des choses, elle a appris à se connaître et sait ce qu’elle veut : « C’est comme si j’avais pris conscience de ce qui m’entourait. J’avais envie d’enlever de ma vie tout ce qui me mettait mal à l’aise. L’envie d’être moimême dans ma vie perso et pro. » L’impression de jouer un rôle permanent pour satisfaire autrui, c’est ce que Joanna définit comme malaisant, l’idée d’un projet que peuvent se faire les équipes qui l’entouraient : « J’ai l’impression que depuis que je suis rentrée dans l’industrie de la musique, j’ai fait face à des situations où l’on m’a mise dans des catégories en pensant que je n’étais que ça. J’avais la sensation qu’une partie de moi n’était pas prise en compte, dans mes prods, dans ma manière de poser. » En résumé, sa direction artistique. Elle a donc dit : « Stop ! » Pour autant, l’artiste a pleinement pris conscience qu’on ne pouvait pas la comprendre puisqu’elle-même se découvrait musicalement. Elle ne regrette pas les expériences qu’elle a vécues grâce à cet album : « Ça m’a aidée à grandir. Sérotonine, c’est un album qui me res76

semble dans le concept, l’univers et les paroles, mais pas dans la musicalité. Aujourd’hui, je passe un step en termes de composition et de cinématographie. » Et, c’est peu de le dire, avec Where’s The Light?, Joanna offre une narration angélique dont chaque titre, de sa genèse à sa sortie, lui ressemble. Il s’agit d’un album « fidèle aux émotions que j’ai envie de transmettre ».

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Lorsqu’on regarde attentivement les tracklists de Sérotonine et Where’s The Light?, on se rend vite compte que la première tourne autour du désir, du drame entre séduction, jalousie, amour et lassitude, tandis qu’à l’inverse, la seconde se recentre autour de sa figure, ses maux et ses espoirs. Il y a une certaine forme d’affirmation de soi avec, en fil rouge, l’amour. L’écoute est progressive et Joanna nous amène vers la lumière au fur et à mesure que les morceaux défilent. C’est la raison pour laquelle le point de départ est le morceau éponyme de l’album, me raconte l’auteure-compositrice : « C’est la prise de conscience que je veux sortir de l’obscurité et petit à petit, j’avais envie de donner la sensation à l’auditeur· rice, qu’il y a quelque chose qui se dénoue et que la lumière entre dans la pièce. » Le nébuleux et le complexe s’effacent au profit d’une légèreté et d’une clarté qu’on entend dans Exstase : « Avec ce titre, on peut s’endormir tranquillement, il est comme un sentiment de sécurité. C’était important de faire ressentir de la positivité à la fin de l’album, une touche de bienveillance avec un ton rassurant. » Malgré cela, l’artiste tient à souligner que l’extase est une sensation qui lui est encore inconnue à ce jour, car cet album est un itinéraire pour sortir de la dépres-

sion : « J’ai tendance à voir les choses de manière négative, maintenant ça va mieux, mais il y a des émotions que je découvre aujourd’hui que je ne connaissais plus trop. Je pense que j’ai touché les prémices de l’extase, mais grâce à ce projet, j’espère la ressentir. »

Épique

Dans la musique de Joanna, le romantisme palpable permet de continuer d’avoir la foi, un peu comme Ophélie Winter en 1991, mais sans la dimension religieuse, car elle aussi disait : « J’en ai assez, je n’en peux plus, j’ai trop souffert/[…] C’est la lumière qui guide nos pas. » La Nantaise fait de ses quatorze titres une poésie dramatique remplie d’espoir qui se renforce par le caractère épique de ses textes, sublimés par l’élégance de sa voix. Fighting est en la preuve : « Je reboote mon système, je suis prête pour la haine. » Souvenir d’une vie antérieure, Joanna précise : « C’est un titre où je me souviens que je me suis battue, que j’en suis arrivée là, mais qu’il faut que je continue de lutter et que je sois prête. C’est comme si, quand j’avançais avec un mindset différent de la survie, c’était nécessairement la dépression. » Maladie psychique, la dépression entraîne une vision pessimiste du monde et de soi-même, qui retentit de manière importante sur la vie. « Le problème avec le trouble dépressif, c’est que l’on n’arrive pas à ne pas s’y identifier. On mélange sa personnalité à cette condition. On est constamment rattrapé·e, comme si on ne se connaissait qu’à travers cette expérience. C’est très dur de switcher. » Fighting en est le reflet, un véritable tumulte de tous les traumatismes qu’elle évoque dans Mes larmes sont belles – où elle fait référence à Athéna, déesse de la guerre et de la sagesse – et dans Si je meurs tu fais quoi : « Tu m’as pourrie/rouée de coups/coupée mes veines/du sang partout/non, fais pas ça/si je meurs/tu fais quoi ? » Non, Joanna a bien trop d’espoir et d’ambition pour s’adonner à de sombres pratiques. Néanmoins, l’extrême sensibilité de la chanteuse la pousse constamment dans ses retranchements. Si je meurs tu fais quoi a une double lecture ; si la première écoute s’apparente à une rupture amoureuse, c’est aussi un constat alarmant de ce que l’humain fait subir à la planète : « Les problèmes climatiques m’ont rendu très anxieuse il y a un THE RED BULLETIN

VESTE : PENG TAI ; CORSET : LEO ; CEINTURES : VINGT-DEUX ET LA COMPAGNIE DU COSTUME ;;BERMUDA : RUOHAN

« J’ai fait face à des ­situations où l’on m’a mise dans des catégories en pensant que je n’étais que ça. »


Joanna

L’éminence absolue. Where’s the light? nous rend compte d’une ­solitude partagée sur le point de cesser.


Assistant photo SOLIOU LIGALI @soliouligali Coiffure MELISSA ROUILLÉ @melissarouillehair Maquillage ANAÏS KREIB @anaiss.faces Stylisme / DA SAMANTHA GIL @ducotedechezsam


Joanna

BONNET EN PERLES, BOUCLES D’OREILLES, T-SHIRT, JUPE ET GUÊTRES : LA COMPAGNIE DU COSTUME ; MINI SHORT : ALFIE ; CEINTURE : JUSTINE CLENQUET ; BOOTS : EMPTY BEHAVIOR

« On m’avait fait ­comprendre que c’était de ma faute en m ­ e reprochant ­d’aimer plaire. » an et demi, j’avais l’impression qu’il n’y avait pas de solution. Mon objectif, c’était donc de réussir à faire une chanson qui parle de ce sujet sans être trop littérale. D’une certaine manière, ce qu’on inflige à la planète, c’est aussi ce qu’on se fait à soi-même », ça impacte notre santé mentale.

En route

Plus l’album progresse, plus l’auditeur· rice comprend le long voyage que ­parcourt Joanna, grâce à un savant mariage entre l’hyperpop et la new wave aux semblants de R&B. Prendre conscience de son mal-être, de ses souffrances, de sa désolation et d’où l’on vient est bouleversant. Parfois, on en arrive même à se situer entre le fantasme et la réalité pour mieux vivre notre condition. Surtout après avoir subi un viol. Sujet phare de Where’s The Light? qui arrive juste après un morceau qui évoque le déni, Meta deuil, écrit dans une période de rupture qui l’a ébranlée : « Elle m’a ouvert les yeux sur moi-même : où est-ce que je me positionne, ce sur quoi j’ai fermé les yeux, ce que j’ai laissé faire et dans quelle situation j’ai pu me mettre parce que je ne savais pas dire non. » Comment interagissons-nous les uns avec les uns ? Pourquoi est-ce si difficile de dire non ? Par peur de blesser, de perdre l’autre ? Meta deuil pose un regard sur les deux versions qu’une histoire d’amour peut avoir, ce que l’on accepte de vivre, ce que l’on émet comme message et ce que l’on reçoit via une communication pas si évidente : « J’avais besoin que la ­personne en face de moi me comprenne, je me suis battue pour ça, car je pensais que c’était logique étant donné qu’on était ensemble. Et je me suis pris THE RED BULLETIN

un mur. » Un épisode qui résonne avec une expérience passée de Joanna. Les qualifications de l’Eurovision 2022, la chanteuse y interprète le son Navi­ga­ teure. « À l’origine, j’avais refusé parce que je n’avais pas du tout envie de faire ça, sauf qu’on a insisté et on m’a relancée à multiples reprises, donc j’ai craqué. » L’auteure-compositrice-interprète m’explique qu’in fine, grâce à ça, elle sait maintenant dire non, que lorsqu’on n’impose pas ses barrières, les personnes qui nous entourent se font de fausses images de nous, par faute de poser nos limites. Il est donc naturel, une fois le moment venu de s’exprimer, que ces mêmes personnes soient dans l’incompréhension. Elles n’ont pas les clefs de lecture. « J’ai vécu quelque chose que je n’avais pas envie de vivre. » Sortir du déni et vivre des événements qu’on n’a pas envie de vivre, c’est ce que Joanna raconte d’une autre manière avec Ce n’est pas si grave. L’artiste délivre sa souffrance en mêlant douceur, sang-froid et colère. Un partage viscéral qu’elle ne fait pas à demimot. Et à celles et ceux qui reprendront son vers : « Pourquoi t’en parle maintenant ? », elle répond : « Quand on vit un viol, on peut faire une amnésie, mais on peut aussi s’en souvenir et vouloir l’occulter. Mais la mémoire revient toujours. Pour ma part, j’avais l’impression d’être responsable de ce qui m’était arrivé, car autour de moi, je n’ai pas trouvé l’aide dont j’avais besoin. On m’avait fait comprendre que c’était de ma faute en me reprochant d’aimer plaire. J’avais besoin de parler de cela, car se retrouver seule avec son dialogue intérieur qui nous répète ce qu’il se dit à l’extérieur, c’est violent. Alors on réin-

vente les choses en se disant que ce n’est pas si grave. Mais le déni, c’est dur, parce qu’il s’inscrit en nous, il est plus fort que la réalité, et ça nous pousse à remettre en question la véracité d’un fait. » Reconstruction. Pour ce faire, Joanna s’est armée de courage et de lectures féministes qui l’ont aidée à mettre des mots sur des sensations pour réapprendre à délier sa parole et s’écouter. Par ailleurs, il me semble important de transmettre ce message que l’artiste m’a confié et qui est destiné à l’ensemble des personnes qui écouteront ce morceau, toutes celles qui se sont, un jour, retrouvées dans sa situation : « Ce qu’il s’est passé, c’est grave. Ce n’est pas votre faute. Vous n’êtes obligée de rien, si ce n’est d’apaiser votre traumatisme. » Chaque chose en son temps, la lumière n’est plus si loin et à ses côtés marche son Cher Égo.

Apothéose

Sartre écrivait, dans L’Être et le Néant (1943) : « C’est la conscience dans son ipséité fondamentale qui permet l’apparition de l’ego dans certaines conditions. » On a tendance à bien trop le voir comme une partie diabolique de notre personne, alors qu’il peut être une arme pour continuer d’avancer vers un épanouissement personnel lorsqu’on se situe encore dans les ténèbres, lesquels ne sont pas une fatalité. Alors à la question l’Apocalypse était-elle un mal nécessaire à la reconstruction, Joanna me répond cash : ­« ­Carrément. Ce morceau, c’est l’illustration de comment je gère mon anxiété. Si je ne peux pas en faire grandchose, autant profiter de la vie. J’y parle d’amour, d’amitié, de relation amoureuse et de relation sexuelle, on n’a pas le temps de tourner autour du pot, ça ne sert à rien de faire sembler, restons qui nous sommes dans notre entièreté. » Avec ­Apocalypse, Joanna renaît dans ce traquenard qu’est la vie. Elle nous plonge dans son métavers aux bass lines fébriles dignes d’un 6 heures du matin, en banlieue parisienne, en sortie de warehouse. On se laisse porter par la vie au lever du soleil, un sentiment de toute-puissance nous anime et, comme elle, on se concentre sur des sensations agréables, en allant à l’essentiel, pour vivre des expériences positives. « C’est mon mood. » L’album Where’s The Light? de Joanna dispo sur toutes les plateformes dès le 24 nov. ; IG : @joannaclubbb 79


HORS DU COMMUN Retrouvez votre prochain numéro en décembre en abonnement avec et avec dans une sélection de points de distribution et sur abonnement. LITTLE SHAO/RED BULL CONTENT POOL

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PERSPECTIVES

LARS PETTER JONASSEN

Expériences et équipements pour une vie améliorée

AVENTURES EN NORVÈGE

Bienvenue aux îles Lofoten.

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PERSPECTIVES Voyage

« Bains glacés, hors-bord et poisson. Au cœur de la Norvège, laissez-vous charmer par les îles Lofoten, la vitesse en mer et le confort sur terre. »

K

lippfisk. Skrei. Wild cod. Trois noms pour désigner ce héros local devenu indissociable de la vie des habitant·e·s des îles ­Lofoten. Plus connu chez nous sous le nom de cabillaud ou de morue, ce poisson est également devenu mon pain quotidien à côté des autres spécialités dont regorgent les Lofoten, ces quatrevingt îles norvégiennes situées au nord du cercle polaire. Moi, c’est Nina. Rédactrice pour The Red Bulletin, je vais me lancer dans un concentré d’action de six jours avec au programme kayak, excursion en bateau à moteur dans un fjord, sortie de pêche en mer du Nord et mélange très spécial de surf et de vol. Ma guide ? Ragnhild ­Pedersen I­ ndresand, 26 ans, originaire de Svolvær, une petite bourgade de pêcheurs coincée entre mer et montagnes. Une Mac Gyver au féminin qui dispose 82

disputent quelques poissons. Les emd’un plan B, C ou D pour l’escalade, le bruns de la mer du Nord nous assaillent kayak et le surf. Aujourd’hui, elle et son de tous côtés, et une personne dans fiancé Laurids nous accompagnent sur mon dos hurle de joie, grisée par cette un bateau pneumatique semi-rigide à chevauchée sauvage. Quand les seune vitesse de 40 nœuds (environ cousses se font trop fortes, il faut quitter 75 km/h). Nous progressons le long des son siège pour s’agripper aux poignées fjords jusqu’au Trollfjord, impressiondu bateau et ménager sa colonne verténant bras de mer de deux kilomètres sibrale. Et même si l’âpre beauté du paytué dans le détroit de Raftsund dont la sage nous laisse bouche-bée, mieux largeur n’excède pas la centaine de vaut fermer son clapet pour éviter une mètres à cet endroit-là. Notre petit bonne rasade d’eau de mer. Après cette groupe se compose de voyageurs et montée d’adrénaline, voyageuses solitaires nous retournons dans aguerri·e·s par le notre hébergement froid : Cameron, du de Skårungen dans Colorado, Marit, de le village de Kabelvag. Norvège, un intrépide Je commence à combaroudeur allemand, prendre le sens du ­Thomas, et moimot « hyggelig » : même. Au-dessus de Nina Kaltenböck (à gauche) et terme d’origine danos têtes, mouettes la guide du groupe, Ragnhild Pedersen noise et norvégienne et aigles de mer se Indresand, originaire de Svolvær. THE RED BULLETIN

LARS PETTER JONASSEN

Nina Kaltenböck, rédactrice pour The Red Bulletin


PERSPECTIVES Voyage

Un décor de carte postale nous attend à Henningsvær, village de pêcheurs de 500 âmes. Amitiés sans frontières : l’Américain Cameron (à gauche) et l’Allemand Thomas m’accompagnent pour un tour en hors-bord de Svolvær au Trollfjord (à gauche).

Nous filons à 40 nœuds le long des fjords de la mer du Nord à bord d’un bateau pneumatique. THE RED BULLETIN

désigne tout ce qui est confortable, douillet, apaisant, réconfortant et traduit parfaitement nos conditions paradisiaques : feu crépitant, soupe de moules aux artichauts et morue obligatoire tout en planifiant notre lendemain. PDG de Norrøna Hvitserk ­Adventure, Marit Vidnes, la Norvégienne du groupe, m’accompagnera pour une intense séance de sauna dans un cube vitré au milieu des montagnes enneigées, avant de nous détendre dans un jacuzzi. Je lui demande comment sont les gens du pays. « Ils sont réservés, un peu distants de prime abord, et ne se mettent jamais en avant. C’est pour ainsi dire une loi tacite. » Je confirme : ici, on ne se vante pas de sa réussite sociale (la Norvège fait partie des cinq pays les plus riches au monde), de ses exploits sportifs ou de son intelligence. Marit est bientôt prête pour un polar plunge, un saut en bikini dans la mer du Nord à six degrés. 83


PERSPECTIVES Voyage

Svolvær LOFOTEN

Norvège Oslo

Comment s’y rendre ? Le voyage en vaut la peine On rejoint Svolvær ou Ballstad sur les îles Lofoten via les aéroports d’Oslo et Bodø. De là, il suffit de louer un véhicule.

À chaque saison son charme En hiver, entre octobre et avril, les aurores boréales illuminent le ciel.

Bon à savoir

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L’imperturbable Roland Hummer m’initie aux joies de l’e-foil.

filme la scène et les commentaires des ­témoins : “Now you have to buy the boat!” Si une bière coûte 10 € ici, combien vaut un kayak tout neuf. 50 bières, 70… ? Je suis interrompue dans mes laborieux calculs par un énergumène filant à plus de 50 km/h sur l’eau : ­Roland ­Hummer, originaire d’Autriche comme moi. Pour celles et ceux qui ne connaissent pas l’e-foil, ou surf électrique : on dirait un homme du futur survolant les eaux sur une planche de surf équipée d’un hydrofoil à moteur. Roland me propose une petite introduction : je n’avais jamais pratiqué un sport nautique aussi marrant et aussi excitant. Un vrai coup d’adrénaline ! Plongée en eaux froides, vol sur les eaux, surf à gogo, j’ai tout vécu … mais n’ai pas pu admirer les aurores boréales. On reviendra, très vite !

adventure.norrona.com ; norrona.com THE RED BULLETIN

NINA KALTENBÖCK

Je l’imite et me sens complètement réveillée ! Après une excursion dans le village de pêcheurs de Henningsvær, nous rejoignons Ballstad, autre village de pêcheurs de 832 âmes. Nous prenons nos quartiers dans la magnifique Hattvika Lodge puis je me prépare à une sortie en kayak. Passionnée des activités en plein air, Raga (pour Ragnhild) m’en enseigne les bases. « Serre bien les jambes et détends-toi au niveau des hanches. La force vient de la rotation du torse, pas des bras », m’explique-t-elle avant de disparaître sur ses skis avec une partie du groupe dans son sillage. En hôte chaleureux, Kristian Bøe, le propriétaire de la Hattvika Lodge, m’accompagne pour une paisible traversée en kayak avec trois habitués… jusqu’à un passage plus étroit que prévu où l’avant de mon kayak heurte un rocher de plein fouet. Bam !­Cameron

LARS PETTER JONASSEN, ROLAND HUMMER/@MY_EFOIL

La morue est séchée sur d’immenses échafaudages en bois. Kevin Karlsson fait le bonheur de nos papilles au Fangst (Ballstad) (en haut). Kristian Bøe, mon guide de kayak, me fait découvrir le versant maritime des Lofoten (en bas).

Norrøna Hvitserk Adventure est une agence de voyages spécialisée dans les séjours en Norvège. L’année dernière, elle s’est associée à ­Norrøna, une marque spécialisée dans le sport de plein air. Mon ­séjour : Winter ­Adventure in ­Lofoten. adventure.norrona.com



PERSPECTIVES Fitness on pense aux gants et aux moufles, mais pas uniquement. « Même par des températures au-dessus de zéro, le fait de garder des pieds froids et humides trop longtemps peut avoir des conséquences irréversibles », nous avertit Leah Gruhn, qui a remporté l’édition 2023 de l’Iditarod Trail Invitational, une course cycliste de 21 jours et 1 600 km à travers l’Alaska, dans des conditions glaciales. C’est pour cela qu’elle conseille de porter des chaussures de cyclisme doublées de néoprène ou des bottes avec des chaussettes bien chaudes. Pour les longs trajets, ou lorsqu’il fait très froid, enfilez un sac plastique sous ses chaussettes – ça les empêche d’absorber la sueur et garde les pieds secs.

COUPS DE FRAIS

Petit coup de chaud

Selon Alice Goodridge, coach en natation, il y a de nombreux avantages à faire du sport en plein air, même en plein hiver. Goodridge est la fondatrice de SwimWild, une entreprise basée dans les Highlands écossais et spécialisée dans la nage en eaux vives : elle a l’habitude d’aller nager toute l’année, quelle que soit la température de l’eau, ce qui l’amène régulièrement à devoir percer des trous dans la glace (photo). « Après avoir nagé dans l’eau glacée, on ressent une incroyable sensation, comme de l’euphorie, explique-t-elle. Physiquement, on pourrait conquérir le monde. » Un constat que partage la Norvégienne Abelone Lyng, championne d’ultra-trail : pour elle, l’exercice par temps froid rend également plus résistant·e : « Si vous êtes sorti·e pour courir lorsqu’il faisait très froid, il sera plus facile de résister aux aléas climatiques lors d’une course cruciale. » 86

Au-delà de ces simples constats, il y a des preuves scientifiques : en 2021, l’International Journal of Environmental Research and Public Health publiait des études ­indiquant que l’exposition ­répétée au froid réduisait les battements cardiaques et ­favorisait la vasoconstriction, ce qui avait pour effet d’augmenter les perfs sportives et de booster le métabolisme. Avec un bon équipement et quelques bons conseils, faire du sport par temps froid peut même être beaucoup plus stimulant qu’en plein été. Alice Goodridge, Abelone Lyng et la cycliste américaine Leah Gruhn dévoilent leurs tuyaux.

contraire se concentrer sur l’expiration – expirer va vous permettre de dépasser vos ­limites mentales, et ainsi d’éviter potentiellement ce qu’on appelle le choc hypothermique, qui vous conduit à hyperventiler face au froid. »

Pensez à vos pieds

Par temps froid, ce sont les extrémités qui dégustent en premier. Et une fois qu’elles sont engourdies, difficile de les faire bouger. Évidemment,

Inverser ses réflexes

Le premier conseil de Good­ ridge s’applique dès que l’on rentre dans l’eau glacée : ­« À ce moment-là, on a le souffle coupé et instinctivement, on prend une inspiration, ­explique-t-elle. Il faut au

« On pourrait conquérir le monde. » Alice Goodridge, de SwimWild

L’hydratation !

À des températures de − 20 °C, l’eau de la gourde « se transforme vite en gros glaçon », rappelle Lyng. En revanche, boire du chaud permet de réchauffer son corps : « Lors de la course Ice Ultra, on nous donnait de l’eau chaude tous les 10 km. J’avais toujours sur moi des sachets de poudre aux fruits ou au chocolat, et je m’en préparais dans les stands de secours. » Et si l’on ne dispose pas d’un staff pour nous approvisionner en eau chaude, une gourde isotherme fera l’affaire.

IG : @swimwild_uk ; @abelonely ; @leahgruhn THE RED BULLETIN

HOWARD CALVERT

Faire du sport en plein air quand il gèle dehors, ça ne vous tente pas ? Les avantages sont pourtant nombreux – si vous suivez de bons conseils.

Même avec les bons vêtements, on finit par ressentir le froid. Abelone Lyng, qui a remporté l’ultra-trail Beyond the Ultimate Ice Ultra en 2019 – une course de 230 km en autonomie à travers le cercle arctique – a trouvé la parade : « J’utilise une compresse chauffante, que je place dans une de mes mitaines et que je change de côté dès qu’une main est réchauffée afin d’éviter la transpiration. Pour plus d’efficacité, placez-la à l’intérieur du poignet. »

JANE BARLOW/PA/PICTUREDESK.COM

Nage de glace


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L’ÉLITE DE LA PERFORMANCE

Avec le PC MSI Stealth 16 Mercedes-AMG Motorsport, les constructeurs informatique et automobile signent une collaboration unique : le premier PC co-brandé MSI × Mercedes AMG, qui vise à offrir une expérience de jeu ultime et luxueuse. Thomas Drouet, pilote de compétition en GT3 et g ­ amer acharné, est ­l’ambassadeur d’un PC qui passionnera les fous de performance informatique et de sports mécaniques.

D

es circuits automobiles aux jeux de simulateurs sur PC, jamais la frontière entre pilotage IRL et ­virtuel n’a été aussi mince. ­Thomas Drouet, pilote GT3 de l’écurie­ ­Akkodis-ASP Team, est le symbole de cette symbiose de performance tout-­ terrain. « Avant même de devenir un ­pilote GT3, j’étais un gamer aguerri, ­explique Thomas. Adolescent, j’ai d’abord fait l­ ’acquisition d’un PC MSI, qui m’a ­p ermis de me confronter à des jeux très exigeants en termes de performance comme de puissance. Puis j’ai très vite basculé vers les composants MSI, notamment les cartes graphiques. C’est une marque à laquelle je peux faire confiance, comme je peux me fier à la Mercedes-­ AMG à laquelle je confie mon destin en compétition. » Côté circuits, la passion du pilotage est déjà une vieille histoire pour ce jeune

« Comme ma voiture de compétition doit être au summum de ses possibilités et de sa puissance, mon PC MSI Stealth 16 MercedesAMG Motorsport atteint lui aussi des sommets de performance. »

THOMAS DROUET

PC MSI Stealth 16 Mercedes-AMG Motorsport

athlète de 24 ans. « Comme beaucoup de pilotes confirmés, j’ai commencé par le karting, dès mes 8 ans, puis à 17 ans, gagné par la fièvre de la compétition et de la vitesse, j’ai intégré la Formule 4. Je rêvais déjà du GT… J’ai intégré la catégorie GT4 en 2018, et la GT3 en 2021. J’ai été Champion de France GT4 en 2021, et Vice-Champion d’Europe Silver en GT3, la catégorie Junior, sur les ­s aisons 2021 et 2022. » Le talent français, en pleine ascension, était donc un ambassadeur de choix pour MSI, l’un des rares à pouvoir incarner à merveille l’association entre deux entités réputées pour leur technologie et leur performance : le mix de gaming et de compétition automobile. Qu’il soit sur circuit à près de 300 km/h au volant de sa Mercedes-AMG GT3 Evo, ou chez lui en quête de vitesse sur un jeu de simulation, Thomas est toujours là où il doit être, en confiance, dans une zone de performance et de fiabilité extrêmes. « Chez moi, une fois mon PC MSI Stealth 16 Mercedes-AMG Motorsport allumé, je bascule sur un autre type de circuit, virtuel. En tant que gamer, j’aborde la course autrement, même si le réalisme de ces compétitions virtuelles et la puissance d’exécution de mon PC MSI me rappellent la réalité des circuits. C’est bluffant. Avec le PC développé par MSI en collaboration avec MercedesAMG Motorsport, j’ai la sensation de glisser naturellement de la fulgurance des circuits à un monde virtuel ou ma quête de vitesse devient plus ludique. » Mais pour ce fan du fameux circuit Nürburgring Nordschleife (Allemagne), le gaming n’est pas qu’une activité de ­loisir. En compétition auto, le jeu, poussé au plus haut niveau, en mode esport, revêt désormais une importance cruciale. « Un PC, c’est également essentiel aux pilotes avant les courses lors de nos séances sur le jeu Assetto Corsa Competizione, qui peuvent nous rapporter des points pour notre championnat IRL réel, le Championnat Fanatec Esports GT Pro Series. Car performer ou non, en simulateur, pourra changer l’issue d’un championnat très serré… L’esport et le p ­ ilotage IRL ne font désormais plus qu’un. »


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L’ALLIANCE PARFAITE

UNE ALLIANCE PARFAITE Son design collaboratif allie harmonieusement l’élégance subtile de Mercedes-Benz à des accents rouges frappants qui symbolisent à la fois la performance AMG et l’esprit bouillonnant de MSI. Au-delà de sa ligne, la performance est au cœur du PC MSI Stealth 16 Mercedes-AMG Motorsport : MSI et Mercedes-AMG sont motivés par la performance, la technologie et le savoir-faire. Mercedes-AMG défend le concept de « Changer le jeu », tandis que MSI s’est constamment engagé dans des innovations révolutionnaires qui améliorent l’expérience de jeu.

Pour ce pilote engagé sur le Fanatec GT World Challenge Europe cette ­s aison, la collaboration entre MSI et Mercedes-AMG Motorsport était une évidence. Et la justesse de cette association entre deux entités ultra-­ crédibles et hyper fiables ne f­ aisait aucun doute. « En fait, je me rends compte que j’ai toujours roulé avec des pros, dit Thomas. C’est pour cela que j’ai toujours fait confiance à MSI. Alors, comme moi, avec le PC MSI Stealth 16 Mercedes-AMG Motorsport, entrez dans un univers de performance ultime. »

Le PC MSI Stealth 16 MercedesAMG Motorsport est disponible exclusivement chez Boulanger. @msi_france ; @msigaming_france ; @mercedesamgmotorsport ; @thomas_drouet

DONNÉES ­TECHNIQUES ÉCRAN L’écran OLED 16:10 à résolution UHD+ assure une expérience visuelle sans défauts. Semblable à l’expérience offerte par la boîte de 6 vitesses et aux jantes forgées des voitures AMG, cet écran vous propulsera au cœur de votre jeu grâce à des performances sans compromis. CONNECTIQUE Connectique complète avec 1x Thunderbolt™ 4, 1x Type-C USB 3.2 Gen 2, 1x Type-A

USB 3.2 Gen 2, 1x RJ45, 1x lecteur de carte Micro SD, 1x HDMI™ 2.1, 1x jack audio combo. CPU Processeur Intel® Core™ série H à 14 cœurs de 13 e génération qui assure des performances impressionnantes. GPU Carte graphique jusqu’à NVIDIA® GeForce RTX® 4070 offrant des performances ultrarapides pour les gamers et les créateurs, compatible avec Ray Tracing et DLSS 3.

Son design collaboratif allie ­harmonieusement l’élégance subtile de Mercedes-AMG à des accents rouges frappants qui symbolisent à la fois la performance AMG et l’esprit bouillonnant de MSI. Au-delà de sa ligne, la performance est au cœur du PC MSI Stealth 16 Mercedes-­ AMG Motorsport : les deux ­e ntités sont motivées par la ­p erformance, la technologie et le savoir-faire. Mercedes-AMG défend le concept de « changer le jeu », tandis que MSI s’est constamment engagée dans des innovations révolutionnaires qui améliorent l’expérience de jeu.

Certifié par le ­ Nvidia Studio, le PC optimise vos applis de création et vous offre une stabilité parfaite dans vos créations de contenus. CLAVIER Clavier Steelseries à rétroéclairage LED RGB au touche par touche, 100 % personnalisable. REFROIDISSEMENT Technologie de refroidissement MSI Cooler Boost 5 disposant de deux ventilateurs et de cinq caloducs, parmi ­lesquels deux sont partagés entre le processeur et le processeur

graphique. Ce nouveau design aide à améliorer la capacité thermique des composants lorsqu’ils subissent de lourdes charges. SON Le système Dynaudio exclusif avec six hautparleurs offre une qualité audio sans pareil qui vous assure une immersion totale dans votre jeu. BUNDLE Accessoires ­c obrandés inclus (packaging, pochette, serrecâble, clé USB, carte postale, souris, tapis de souris).


PERSPECTIVES montres

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Un classique du streetwear au poignet. Et tout en or. THE RED BULLETIN


PERSPECTIVES montres RETOUR VERS LE FUTUR TISSOT PRX DIGITAL Si l’esthétique rétro r­ appelle les années 70, la technologie à quartz sous le verre saphir est tournée vers l’avenir. L’ensemble forme une montre au look rétro-futuriste unique. Dès 395 € ; tissotwatches.com

EN MODE RÉTRO CITIZEN PROMASTER NY0120-01ZE Dans les années 70 et 80, les montres de plongée sont devenues très popu­ laires auprès du grand pu­ blic. Ce modèle rend hom­ mage aux designs Citizen de l’époque en reprenant certains détails comme les couleurs rétro. 269 € ; citizenwatch.eu

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ENTRES DEUX GARMIN INSTINCT CROSSOVER Une smartwatch ambi­ valente : analogique (aiguilles) et numérique (toutes les autres fonc­ tions). En mode éco, la version avec recharge solaire dispose d’une ­batterie presque illimitée. Dès 339,99 € ; garmin.com

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Avec son cadran squelette, cette montre sport ne cache rien de son méca­ nisme et ne pèse que 78 grammes. Heurtoirs en caoutchouc pour ­affronter tous les défis. 5 250 € ; norqain.com

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PERSPECTIVES montres TOP CHRONO GRAND SEIKO TENTAGRAPH Premier chronographe ­mécanique de la marque, ce modèle arrête le temps au dixième de seconde près. Son double barillet et son échappement économique lui permettent de fonctionner pendant trois jours. 14 300 € ; grand-seiko.com

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REINE DES MERS LONGINES HYDROCONQUEST GMT Ce modèle a été conçu comme une montre de sport capable de résister à une pression de 30 bars et répondre ainsi aux attentes des plongeur·euse·s les plus exigeant·e·s. Dès 3 000 € ; longines.com THE RED BULLETIN


PERSPECTIVES montres RÉACTION EN ­DIRECT RAYMOND WEIL FREE­LANCER POP BI-COMPAX-­ CHRONOGRAPH Une montre censée transporter l’énergie créative de la musique live, notamment grâce à ses accents turquoise. Boîtier en titane avec lunette tachymétrique en céramique noire, limitée à 400 exemplaires. 4 125 € ; raymond-weil.com

BEAUTÉ FROIDE ALPINA ALPINER EXTREME AUTOMATIC

OPTIMISÉE TUDOR BLACK BAY 58

Impact visuel, confort et praticité en mode optimum. THE RED BULLETIN

Tudor a pensé ce modèle comme un hommage aux premières montres de plongée. Le boîtier acier de la Black Bay 58 a été réduit à 39 mm (versus les 41 de la Black Bay d’origine), soit le format idéal pour les poignets fins. 3 640 € ;­ tudorwatch.com

Pour fêter ses 140 ans, la maison Alpina révèle quatre nouveaux modèles de son Alpiner Extreme, dont deux variantes de l’Automatic, dotée de trois aiguilles centrales, pour une lecture plus traditionnelle de l’heure. La voici en version grise, avec son bracelet acier intégré. 1 995 € ; alpinawatches.com

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PROMOTION

REDÉFINIR LE MAINTIEN ETLES PERFORMANCES SOUS TOUTES LES COUTURES Benni Raich a testé la praticabilité du système BOA® Fit dans toutes les conditions.

Le spécialiste américain du serrage BOA introduit une petite révolution dans le monde du ski alpin, résultat de vingt ans d’expérience et du savoir-faire du double champion olympique Benni Raich. Au commencement était la chaussure de snowboard Ce sont souvent les petits détails qui changent tout. BOA, le spécialiste des fermetures de chaussures, en sait quelque chose : son disque de serrage à peine plus grand qu’une pièce de 2 € a révolutionné les chaussures de snowboard en 2001 et s’est ensuite invité dans les autres sports : du cyclisme au ski de randonnée, on ne jure que par BOA et son système de serrage simple à utiliser et parfaitement ajusté.

meilleure répartition de la pression sur la voûte plantaire pour de meilleures performances en toute sécurité, tout en éliminant les éventuels points de compression. Un nouveau système qui bénéficie de plus de vingt ans d’expérience dans diverses disciplines sportives. Pourquoi ? « Une chaussure de ski alpin doit résister à des contraintes énormes », explique Benni Raich. Le triple champion du monde et double champion olympique en sait quelque chose. Il s’est donc entouré d’une équipe d’ingénieurs et de designers pour développer la solution alpine BOA. « Grâce au système BOA®, la coque bénéficie d’un système de serrage latéral. Finies les fermetures verticales. Résultat : la pression est mieux répartie et le skieur bénéficie d’un maintien du talon plus ferme pour plus de performance et de sécurité même dans les conditions les plus extrêmes. »

«

Le système BOA® Fit a été amplement testé, y compris en conditions de course. Je suis convaincu à 100 % de son efficacité. Benni Raich

»

UN MAINTIEN REDÉFINI Serrage à disque, lacet et guides pour lacets : les trois éléments clés du système BOA.

boafit.com

TOM KLOCKER, MIRJA GEH

La révolution de la chaussure de ski alpin Il ne s’est pas passé grand-chose au niveau du développement des chaussures de ski ces quarante dernières années. Du moins jusqu’à ce que BOA y mette son grain de sel avec son nouveau système H+i1 BOA Fit pour chaussures de ski. L’équipe, basée dans les Rocheuses au Colorado, propose de nouvelles solutions mieux adaptées : maintien du talon et stabilité améliorés, micro-réglage plus précis, ­utilisation simplifiée et


S /PR O S UPR A B OA Entrez dans la nouvelle ère du Fit.

La construction EXOWRAP ® associée au BOA ® Fit System.

Un enveloppement du pied plus précis.

Plus de points de contact pour un

Un contrôle parfait des skis.

L’écosystème EXOWRAP ® est issu de l’expertise Salomon, il combine une coque optimisée et un chausson en mousse de latex, avec le BOA ® Fit System, pour envelopper vos pieds avec précision et vous offrir un maximum de maintien et de performance.


M E N T I O N S L ÉGA L ES

The Red Bulletin Autour du monde

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The Red B ­ ulletin est distribué chaque mois dans six pays. Vous d ­ écouvrez ici la couverture de l’édition britannique, dédiée au king du SuperEnduro, Billy Bolt. Le plein d’histoires hors du commun sur redbulletin.com

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P O U R FI N I R E N B E AU T É

C’est un gros classique d’octobre sur Red Bull TV : le Red Bull Rampage, la plus grande compétition de VTT freeride au monde, organisée dans le désert de l’Utah (USA). Les riders internationaux les plus engagés s’y lancent chaque année, accompagnés de quelques potes, pour créer de leurs mains des lignes insensées. Chaque édition semble surclasser la précédente et ce fut encore le cas le 13 octobre dernier. Vous voyez ici Cam Zink, vainqueur treize ans après son premier sacre, exécuter un backflip d’anthologie. « J’ai l’impression d’avoir touché les étoiles », a lâché l’Américain après sa victoire. Nous aussi.

Le prochain THE RED BULLETIN sortira le 11 janvier 2024

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LONG NGUYEN/RED BULL CONTENT POOL

Jusqu’où iront-ils ?


Expérience Gaming De Luxe

* Les accessoires offerts sont fournis pendant une durée limitée et ne sont pas couverts par la garantie standard MSI. ** Les accessoires offerts peuvent varier selon le pays. Veuillez vérifier auprès de votre revendeur local.


Elegance is an attitude Marco Odermatt

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