Onésha Afrika 11

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Onésha Afrika

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Août – Septembre 2013

Politique Économique Social Sportif… NUMÉRO 11

Quid de l’unité des deux Congos ? MONDE – Italie : Racisme au sommet de l’État, Cécile Kyenge RDC : Le progrès sur fond des difficultés SANTÉ : Le cancer de la prostate Football : Les « Africains » du championnat belge

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03 NOTE DE L’ÉDITEUR

Onésha Afrika ÉDITEUR RESPONSABLE Victor OLEMBO LOMAMI DIRECTEUR DE PUBLICATION Cyrille MOMOTE KABANGE

LETTRE DE L’ÉDITEUR

Par Victor OLEMBO L.

victorolembo@oneshaafrika.net

RÉDACTEUR EN CHEF Jean BOOLE RÉDACTEUR EN CHEF ADJOINT Fifi MBAMBI KUMBU Photos / Caméra Nathan Ndele Mayuba RÉVISION Yves Vandenbossche et Frédérique Diambu COMITÉ DE RÉDACTION Jérôme Bigirimana, Emeline Segura, DIna Kitoko, Cornelis Landu, Israël Mutala, Milancia Kalley-Barazany, Vicky Elongo, Cyrille Momote, Noella Kalanga, Victor Olembo Lomami ONT COLLABORÉ À CE NUMÉRO Le journal du Cameroun, MFI SERVICE MARKETING Olembo L. Onya Naomi INFOGRAPHISTE Pierre JOLLY

« Nous devons accepter de vivre africains. C’est la seule façon de vivre libres et de vivre dignes ». Thomas Sankara

Certes, l’Afrique a toutes les capacités pour contribuer au progrès d’un monde plus huma‑ nisé et cela ne peut se faire que grâce à cette prise de conscience dont chacun peut tirer profit. La différence est une grande richesse mais, l’historien burki‑ nabé Joseph Kizerbo de dire : Les dirigeants africains ont trouvé normal de « dormir sur la natte des autres » sans penser qu’ils avaient leur propre natte, et que s’ils n’en avaient plus, ils pouvaient en concevoir une nou‑ velle. Il est d’autant plus difficile à l’Afrique, dans ces conditions, de lutter contre les effets destruc‑ teurs de la mondialisation et de trouver les voies d’un bien‑être qui correspond à ses traditions et à ses civilisations.

En effet, la mondialisation a produit un phénomène étrange des dirigeants africains qui — comme si ils étaient pris dans des courants centrifuges — sont irrésistiblement attirés plutôt par l’extérieur au détriment des intérêts des populations qu’ils représentent. Ils agissent de plus en plus, bon gré mal gré, en conformités avec des prescrip‑ tions établies ailleurs (par les organismes internationaux, par exemple), souvent au mépris de leur population. Ils participent finalement, par choix ou par nécessité due à la dépendance économique, à ce vaste système mondial qui essaye d’adopter un seul et unique mode de vie au dépend des critères et des prio‑ rités économiques des sociétés locales. Ainsi, la légitimité d’une


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politique vis‑à‑vis des bailleurs de fonds internationaux devient plus importante que la légitimité vis‑à‑vis des populations locales. Où est cette première génération du leadership postcolonial qui a donné une minorité peut‑être, mais une minorité réelle, de dirigeants afri‑ cains nationalistes, sociaux et hon‑ nêtes ? Cependant, nous saluons les efforts démocratiques et de bonne gouvernance que fournissent les pays comme le Sénégal, le Kenya, le Ghana… Pour ne citer qu’eux. Même si c’est une goutte d’eau dans l’océan des préoccupations auxquel‑ les les populations africaines sont confrontées, cela ne compromet rien de la force d’âme dont les peu‑ ples africains ont fait montre tout au long de leur histoire mouvementée, de l’esclavage à la colonisation et au sous‑développement économi‑ que. Tout ce désordre ne les a pas anéantis. Au contraire, ils ont puisé

dans leurs valeurs de civilisation pour gagner d’abord la liberté et bannir la haine des oppresseurs d’hier auxquels, ils offrent désor‑ mais des opportunités de coopérer utilement. Nelson Mandela est, par exemple, l’archétype de cet humanisme négro‑africain que le monde entier célèbre de nos jours. Alors, en dépit des difficultés économiques qui nous assaillent, nous devons tou‑ jours relever la tête et parler haut pour souligner ce fait de portée universelle. Plus encore, l’Afrique avance et nous n’avons rien à gagner en nous figeant dans une attitude d’auto‑flagellation qui frise l’alié‑ nation culturelle. L’ambassadeur de la RDC en Belgique, M. Henri Mova, l’a si bien stigmatisé dans une interview donnée dans « La libre Belgique » du 20 juillet 2013, en citant le cas de son pays. La RDC devrait apprendre

à mieux communiquer : « Il faut que nous travaillons à l’amélioration de notre image », en y consacrant le budget y requérant. Le fait d’expo‑ ser aux yeux d’autrui le meilleur de soi‑même ne peut en aucun cas être pris pour de la mauvaise publicité. Sauf à imaginer une situation où la fausse modestie chasserait la vraie modestie, comme quoi, en effet, la vanité ou la vacuité mentale, a plusieurs visages.


05 SOMMAIRE

06

13

3 LETTRE DE L’ÉDITEUR 6 ACTUALITÉ :

6 8 9 11

SOUDAN : Printemps arabe ? ÉGYPTE : Les paradoxes de la démocratie Algérie : Bouteflika dans la presse CAMEROUN : P iraterie maritime: le Cameroun au cœur du combat partagera son expérience 13 Zimbabwe : R obert Mugabe déclaré vainqueur de la présidentielle malgré la contestation 14 MALI : Ibrahim Boubacar Keïta, le nouveau Président

15 POLITIQUE :

14

15 RCA : Bangui en quête de reconnaissance 17 RDC : Pourquoi la Monusco revient-elle sur son ultimatum ?

18 MONDE :

21

18 États‑Unis : Detroit : La fin d’un mythe américain déjà bien écorné 20 RD CONGO : A ppel à la création d’un Tribunal pénal international (TPI) 21 RACISME au sommet de l’État en ITALIE : le calvaire de Cécile Kyenge

22 CHRONIQUE de Cyrille Momote Kabange : RDC : le renouveau à l’horizon ! 24 ÉCONOMIE :

22

24 Égypte : Une aide de 12 milliards de dollars après le départ de Morsi 26 Compagnies minières en Afrique : des Sages accusent 28 MAROC : Coopération Sud-Sud : Le Maroc en tête

30 MILLE VISAGES DE BXL-CAPITALE :

35

34 SOCIÉTÉ :

42

30 La diaspora burundaise de Belgique se mobilise 34 Environnement : F aut-il stopper la croissance pour résoudre la crise ? 35 PROSPECTIVE : Brazzaville et Kinshasa : quid de l’union des deux Congo ! 39 BURUNDI : L es femmes vivant avec la fistule vésico-vaginale au Burundi : Entre espoir et inquiétude.

42 SANTÉ :

42 Hypertrophie bénigne de la prostate, comment le savoir ?

45 CULTURE :

49

45 Les bijoux « Elikia » honorent l’Afrique 48 Gospel : Disparition du leader du groupe Gaêl, Alain Moloto

49 SPORT :

49 FOOTBALL : les « Africains » du championnat belge


06 ACTUALITÉ : Soudan : Printemps arabe ? Le Soudan tenté à son tour par un « printemps arabe » Par MFI Plus de mille personnes auraient été arrêtées. Quant aux blessés, ils se comptent par centaines.

Depuis plusieurs semaines, des manifestations contre la corruption et la hausse des Pourquoi l’hiver dure‑t‑il prix donnent à Khartoum au Soudan ? et à plusieurs autres villes Si plusieurs pays arabes ont réussi à du pays une atmosphère obtenir leur « printemps », l’hiver se de révolte d’une rare prolonge au Soudan. L’une des rai‑ ampleur. Malgré une forte sons est le peu de marge de manœu‑ vre dont disposent la société civile et répression, les activistes l’opposition politique. « Tout l’appareil continuent à se mobiliser d’État, cimenté depuis 24 ans, est voué et les partis d’opposition à entretenir la répression et le statu quo, analyse Faisal Saleh, journaliste et disent avoir un plan fondateur de l’ONG Teeba Press. À précis pour faire tomber travers le gouvernement, la police, l’armée le gouvernement. Vœux et le secteur public, le régime a un contrôle pieux ou changement total sur la population ». Le 2 juillet, un amendement est passé qui autorise la de régime pour une cour militaire à juger des civils, ce qui opposition au point mort est contraire au droit international. depuis des décennies ?

La censure des médias fait qu’aucun journal n’a pu couvrir les révoltes. Début juillet, à Khartoum, sur une quinzaine d’étrangers interrogés, dont certains arabophones, œuvrant dans les domaines de la sécurité et de l’aide humanitaire, aucun n’avait eu vent des troubles des semaines précédentes. La société civile est, du reste, forte‑ ment affaiblie par la fuite des cer‑ veaux. « La plupart des intellectuels sont partis en Europe, aux États‑Unis et dans le Golfe, regrette le journaliste Osman Shinger. Les activistes d’aujourd’hui sont surtout des étudiants de la classe moyenne confortable qui, bien que férus de nouvelles technologies, ne voient pas que la “ révolution Facebook ” de leurs voisins n’est pas adaptable au Soudan ». Un point de vue que partage Saleh : « Les jeunes activistes peinent à mobiliser les masses : ils oublient que la plupart de leurs compatriotes sont illettrés et n’ont pas accès à Internet ».

Diverses manifestations dans le pays et à l’extérieur. Est-il encore possible d’éviter un chaos total ?

Khartoum, après plusieurs semaines de manifestations d’une rare inten‑ sité, le calme revient à peine. Depuis fin juin, à Khartoum et dans plusieurs autres villes telles Medani, Gedaref, Kosti, Nyala, Sennar et Dolga, les contestataires ont multiplié les mar‑ ches pacifiques, immanquablement réprimées par les autorités. Nettement moins médiatisée que celle du Caire, cette période de manifestations qui coïncide avec le 24e anniversaire du coup d’État d’Omar el‑Béchir, est pourtant la plus importante qu’ait connue le Soudan depuis des années.


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La paix sociale par‑dessus tout Le 30 juin, la diaspora soudanaise a manifesté en France, en Angleterre, en Australie et aux États‑Unis. Un membre de Girifna, l’un des princi‑ paux mouvements de jeunes, affirme que l’association, au même titre que beaucoup d’autres, reçoit des fonds de Soudanais expatriés. Mais, selon Faisal Saleh, « le soutien extérieur, même financier, n’est qu’accessoire : le change‑ ment ne peut venir que de l’intérieur du pays ». Omar el-Béchir, désormais aux aguets !

Un analyste souhaitant garder l’ano‑ nymat met cependant en cause la mentalité du peuple soudanais, « qui privilégie la paix sociale par‑dessus tout. Quand les prix du pain et du pétrole ont augmenté drastiquement en 2011, avec une inflation qui dépassait les 40 %, quasiment personne n’a bougé. En Égypte, pour moins que ça, on aurait eu un tollé général ».

les éléphants et les jeunes qui souhaitent prendre le relais, explique Faisal Saleh. Le président s’entoure d’une cour restreinte d’officiers qui, avec les services de rensei‑ gnements et de sécurité, NISS, tiennent les rênes du pouvoir. Mais les troubles du parti présagent un avenir politique hasardeux ».

En outre, la flambée des prix due à la grave crise économique qui frappe le pays depuis l’indépendance du Soudan du Sud en 2011 et la perte des trois‑quarts des revenus pétroliers signifient que « la priorité de la plupart des Soudanais est de nourrir leur famille au jour le jour », rappelle l’économiste Mohamed Ibrahim Abdu.

À cela, s’ajoute une inquiétante mon‑ tée des tensions au sein de l’armée, entre un cercle de haut‑gradés fidèles à el‑Béchir et des officiers, majoritai‑ rement des Frères musulmans, qui s’opposent de plus en plus à leur hiérarchie. Reflétant les dissensions politiques dans le PCN, les officiers les plus radicaux reprochent notamment à el‑Béchir d’avoir renié les idéaux au nom desquels il a pris le pouvoir.

Un régime aux abois Parallèlement, le Congrès national (PCN), le parti au pouvoir, fait face à d’importants troubles internes. « Depuis deux ans, ce parti est le plus faible du pays, avec des tensions entre

Un Occident frileux Le conflit au Mali, dont certains jihadistes ont rejoint depuis quelques mois le Darfour, et les frontières poreuses avec la Libye, le Tchad, la

République centrafricaine et l’Égypte, notamment dans le contexte d’un tra‑ fic d’armes accru depuis la chute de Kadhafi en 2011, rendent l’Occident frileux à l’idée de troubles politiques au Soudan. Pourtant, Al‑Haj men‑ tionne « un dîner, il y a deux semaines, chez l’ambassadeur des États‑Unis avec d’autres leaders de partis d’opposition ». La réunion concernait‑elle le « plan des 100 jours » ? Al‑Haj répond par un sourire entendu… Mais les disparités entre les partis d’opposition (communistes, socialis‑ tes, islamistes, pro‑mouvements armés et ceux qui refusent toute réforme par la violence…) laissent planer le doute sur la réelle efficacité du NCF. Aujourd’hui, aux opposants qui aspi‑ rent à un « printemps soudanais », le président rétorque que celui‑ci a eu lieu le 30 juin 1989. Pourtant, le nou‑ veau régime qui s’érigeait en modèle de justice sociale a perdu toute crédi‑ bilité aux yeux de la population.


08 ACTUALITÉ : Égypte Les paradoxes de la démocratie Par OLV avec Alexandre Buccianti, correspondant de RFI au Caire

L’expérience douloureuse qui se déroule en Égypte et qui a jusqu’ici causé la mort d’une centaine de personnes n’est pas sans précédent. En Algérie, il y a eu le cas du Front islamique du Salut (FIS) a mettre au chapitre tragique de la démocratie qui se saborde elle‑même. L’histoire présente les mêmes contours et les mêmes conséquences.

En attendant d’y voir plus claire, il y a lieu de connaître les intentions de nouveaux maîtres des céans à savoir l’armée et le nouveau gouvernement qu’elle a mis en place. Au mois de juillet dernier, le nouveau chef de la diplomatie égyptienne, Nabil Fahmy, a dressé les grandes lignes de la politique étrangère de son pays. Une Égypte qui veut clairement revenir sur l’échiquier diplomatique international et régional.

Nabil Fahmy, le chef de la diplomatie égyptienne.

Hier en Algérie comme aujourd’hui en Égypte, le pouvoir en place orga‑ nise les élections qu’il croyait gagnées d’avance. Les extrémistes musulmans qui restent victorieux des scrutins sont dépossédés de leurs victoires gagnées le plus démocratiquement du monde mais que leurs agissements ne rassurent pas quant à ce qu’il advien‑ drait des institutions démocratiques si jamais ils se saisissent du pouvoir d’État. Une vraie situation aporétique et un casse‑tête pour les grandes puis‑ sances habituées à penser en termes manichéens.

Priorité à la question palestinienne : Le Caire veut redevenir un médiateur dans les négociations de paix entre l’Autorité palestinienne et Israël, ainsi que dans les discussions pour la réconciliation entre le Fatah et le Hamas. Autre priorité, la Syrie : l’ac‑ cent sera mis sur la difficile recherche d’une solution politique. Un rôle qui nécessitera la restauration des rela‑ tions diplomatiques que le président Morsi avait récemment rompues avec ce pays.

L’Égypte veut aussi agir au niveau international pour améliorer l’image de tolérance de l’islam face à l’extré‑ misme. Enfin, les Affaires étrangères veulent jouer un rôle dans la relance de l’économie égyptienne par le biais de l’encouragement des investisse‑ ments étrangers et du tourisme.

Priorité des priorités : le Nil L’Égypte agira pour sécuriser l’ap‑ port en eau par le biais de solutions consensuelles avec les pays du bassin du Nil. Le Caire est préoccupé par la construction d’un barrage en Éthiopie qui pourrait affecter le début du Nil Bleu, qui fournit 85 % des eaux parvenant à l’Égypte. « Nous affirmons notre volonté de défendre la sécurité de l’Égypte en matière d’approvisionnement en eau et cela en fonction des droits his‑ toriques de notre pays sur l’eau du Nil », a déclaré le chef de la diplomatie égyptienne Nabil Fahmy. Et le ministre de continuer : « Nous réitérons également notre respect des intérêts des autres pays du bassin du Nil. Notre objectif est de trouver des solutions qui respectent les intérêts de tous, et à ce titre, je salue l’action de mon prédécesseur à ce poste, Mohamed Amer, qui lors de sa visite en Éthiopie et au Soudan, avait conclu un accord stipulant la création de comités au niveau ministériel. Et, malheureusement jusqu’à aujourd’hui, aucune réunion n’a eu lieu. J’appelle donc à une réunion rapide et urgente de ces comités. ».


09 ACTUALITÉ : Algérie Bouteflika dans la presse Par Frédéric Couteau

L’information a fait la Une de la presse algérienne. « Bouteflika rentre à Alger », s’est exclamé El Watan. La nouvelle avait été annoncée par l’Agence France‑Presse puis par l’agence Algérie Presse Service.

Commentaire de La Tribune, un quotidien algérien, à cette annonce tardive par l’agence Algérie Presse Service (APS) : « La communication demeure le maillon faible du pouvoir algérien qui, encore une fois, a laissé la primauté aux agences étrangères et aux médias français d’annoncer le retour, hier, du chef de l’État, Abdelaziz Bouteflika, à Alger après une absence de près de trois mois pour maladie. (…) Il y a là comme un chantier à ouvrir, estime encore La Tribune, si on veut se mettre au diapason avec ce siècle de la communication en temps réel. ». Mais plus que les conditions média‑ tiques de son retour, c’est l’état de santé réel de Bouteflika qui préoc‑ cupe la presse algérienne, à l’instar du Matin : « Le président, totalement amoindri, est donc rentré hier au pays et, dit‑on, revient aux affaires. L’Algérie est livrée à un homme visiblement impo‑ tent et dont on ne sait toujours rien de la gravité de la maladie. Dans quel

état est‑il réellement ? », s’interroge Le Matin. « Une brume, autour de l’état de santé du président, doublée d’une cacophonie de rumeurs, a été habilement entretenue, affirme le quotidien algérien. Ce judicieux et hermétique système de black out, était conduit, en effet, de sorte que l’opinion ne sache rien du mal dont souffre le chef de l’État et que personne ne puisse se faire une idée de sa gravité et, ainsi, le mettre à l’abri de l’article 88 de la constitution algérienne qui prévoit

le cas d’empêchement du Président de la République “ pour cause de maladie grave et durable ” ». Et Le Matin de pointer du doigt le frère cadet du président, Saïd, 58 ans : « C’est lui, affirme le journal, qui, en concertation avec quelques capi‑ tales occidentales et arabes, mais surtout avec des lobbys algériens et étrangers très puissants, a orchestré l’omerta autour de l’état de santé de son frère président. Bouteflika, éviter la destitution précoce.


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Objectif : éviter la destitution. (…) Et qu’importe si, dans cette besogne qui consiste à repousser sans cesse l’échéance, il y a le risque de bloquer la machine étatique. ».

Passer la main ! Dans la presse ouest‑africaine, on s’interroge également sur l’état de santé réel du président algérien, sur les conditions de son retour et sur l’avenir… « Enfin ! Est‑on tenté de dire, s’exclame L’Observateur Paalga au Burkina, puisque plusieurs vrais‑faux retours avaient été annoncés, le dernier en date était le 8 juillet, signe que la com‑ munication autour de la santé du chef de l’État algérien est distillée à dose homéopa‑ thique. (…) Cette fébrilité, doublée d’une certaine omerta qui entoure la communi‑ cation relative à la santé de Bouteflika, est peut‑être symptomatique qu’on cache quelque chose aux Algériens. ».

Et le quotidien burkinabè de s’inter‑ roger : « De quoi souffre véritablement Bouteflika ? Est‑il oui ou non en posses‑ sion de toutes ses facultés pour continuer à diriger l’Algérie ? Pense‑t‑il à la dévolu‑ tion du pouvoir ? » L’Observateur nous livre le fond de sa pensée : « Cette interminable convalescence de Bouteflika sur les bords de la Seine et ce retour contro‑ versé devraient inciter l’intéressé à penser à passer la main. La logique biologique le contraint également à songer à son départ du palais d’El Mouradia. Enfin après des années à la tête de plusieurs ministères, 14 années de présidence, que peut‑il bien vouloir encore prouver à ses compatriotes ? ». Le site d’information Guinée Conakry Infos renchérit : « Beaucoup sont heureux de ce retour, mais les condi‑ tions volatiles qui le caractérisent sont des inconnues qui font gémir les plus pressés et gèlent le sang de ceux dont l’avenir est vissé à la santé chancelante du président

Son état de santé se stabilise mais, à Alger, la succession est déjà engagée.

Les pires rumeurs avaient circulé sur l’état de santé de Bouteflika dans la presse algérienne

Bouteflika. Celui qui murmure “ Inch Allah, Inch Allah… ”, s’abandon‑ nant dans les bras de la toute puissance divine, avec ce masque de pâleur qui montre bien la profondeur du mal qui le ronge. » D’ailleurs, relève encore le site guinéen, « ceux qui connaissent un peu son dossier disent qu’il est aphasique et hémiplégique. » Et « son retour dans l’état qui est le sien, soulève malgré lui, la grande question de sa succession. Va‑t‑il s’accrocher au pouvoir jusqu’à la fin ? Va‑t‑il mettre fin à toutes ces rumeurs qui l’ont tué depuis longtemps et donner vie à une tran‑ sition démocratique ? Celui qu’on a vu hier à la télé, n’a vraiment plus la force de répon‑ dre, pour le moment, en tout cas, à toutes ces questions. ».


11 Actualité : CAMEROUN Piraterie maritime: le Cameroun au cœur du combat partagera son expérience

Par Idriss Njoya en collaboration avec le Journal Intégration

Le pays par vient progressivement à réduire les actes de piraterie dans ses eaux. Ce succès est lié à la combinaison de trois leviers, la force militaire, la diplomatie et la persuasion du développement. Le Cameroun, au cours de la rencontre des chefs d’États et de Gouvernements ayant en commun le partage ou l’utilisation de la zone maritime appelée Golfe de Guinée, a eu une occasion réelle de partager son expérience en matière de sécu‑ risation. Avec son voisin le Nigéria le Cameroun fait partie des pays qui dans cette zone souffre le plus des attaques de pirates. Ainsi, en l’espace de trois ans, on apprend que plusieurs fois au cours d’une même année, des bateaux ont été arraisonnés et leurs équipages captu‑ rés. « La piraterie maritime dans le golfe

de Guinée a connu une augmentation de 25 % entre 2006 et 2007, et près de 200 cas recensés dans le delta du Niger pour la seule année 2008 », indiquait alors un rapport du ministère came‑ rounais des Relations extérieures. Face à la menace le gouvernement de Yaoundé n’a pas tremblé et sa réponse a été triple. D’abord, le président de la République a pro‑ cédé en urgence à la création d’un détachement de l’armée, spécia‑ lement dévoué à la protection des côtes maritimes, le BIR (Bataillon d’Intervention Rapide) Delta. Son rôle est d’assurer la sécurité et la protection du territoire contre les actes de piraterie, le rançonnage et le sabotage de tous ordres. Ce corps dont la feuille de route n’est pas connue dispose de moyens consé‑ quents (un bâtiment de guerre, des chaloupes et embarcations, des radars et d’un hélicoptère, etc.). Il bénéficie également du soutien de l’armée de l’air qui surveille en permanence les eaux maritimes camerounaises. Mais il faut dire que lorsque le Cameroun doit faire face pour la première fois aux phénomènes de piraterie, il doit faire face à deux considérations. Son armée à la base n’est préparée qu’à défendre

l’intégrité du territoire physique et donc n’est pas aguerrie aux combats en zone maritime. De l’autre côté, les premières réponses à la pirate‑ rie sont conformes aux méthodes utilisées par l’armée lors du conflit transfrontalier sur la presqu’île de Bakassi. Avec le temps et au fil des interventions et des expériences, le pays a compris la nécessité d’intro‑ duire d’autres formes de lutte et de prévention contre le développement de la piraterie. Il y a d’abord eu une manifestation du gouvernement camerounais de renforcer sa réponse à ce problème avec la signature d’un décret créant un cadre institutionnel et juridique permettant de mettre en œuvre l’intervention en mer. Le texte du 1er novembre 2007 défini des cadres de responsabilité à deux niveaux, national et locale. La solu‑ tion qui est admise doit néanmoins faire face à un certain nombre de défis. « Il faudrait pour que ce décret prenne tout sa vigueur et sa force, que soient renforcés les moyens de certaines administra‑ tions, la coordination existante, le partage de certaines méthodes de renseignement et l’interface terre et mer », a expliqué le capitaine de Frégate Ndutumu Samuel Sylvain lors de ses explications à l’occasion du symposium de Yaoundé.


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Il est aussi à relever que le Cameroun a pris le leadership et l’option de la coopération sous régionale. De façon régulière, des exercices de simulation menés avec le soutien des partenaires sont menés aux lar‑ ges de côtes camerounaises. Du 25 au 28 février 2013 derniers, le pays a accueilli pour la deuxième fois les sta‑ ges Obangue. « Cette vision qui corres‑ pond à de nouveaux types d’engagements des forces armées, conduit sous l’autorité d’un commandement intégré, implique inéluctablement l’interconnexion des systèmes de communications, l’harmoni‑ sation des procédures opérationnelles, et l’interopérabilité des équipements de nos armées au niveau stratégique, opératif et tactique », a souligné pour la cir‑ constance, le Ministre camerounais de la Défense, Edgard Alain Mebe Ngo’o. Le dernier levier de la stra‑ tégie camerounaise enfin est celui du développement. L’expérience du Nigéria voisin semble édifiante à ce propos et les responsables camerou‑ nais ont compris la leçon et avec eux … hormis dans le Golf de Guinée.

La piraterie maritime est en net recul, …

plusieurs de ses experts. « La piraterie est la rencontre de la misère de la popu‑ lation, la présence des richesses réelles ou supposées qui suscitent la convoitise, un passage stratégique et des croyances idéologiques », a expliqué Jean‑Jacques Nelle Moukouri un spécialiste came‑ rounais des sciences de sécurité. Depuis que les autorités ont véri‑

tablement entrepris de développer la presqu’île de Bakassi récemment rétrocédée au Cameroun, la mise en place progressive d’infrastructures semble générer un surplus d’activi‑ tés avec à son actif la réduction des comportements malfaisants dans l’espace maritime partagé avec le Nigeria notamment.


13 ACTUALITÉ : Zimbabwe Robert Mugabe déclaré vainqueur de la présidentielle malgré la contestation

Par journal du cameroun et agences

Son principal challenger le Premier ministre M o rg a n Ts v a n g i r a i crédité de près de 34 % de voix, promet de saisir la justice. Le président zimbabwéen Robert Mugabe, 89 ans, a été proclamé vainqueur, le samedi 3 août dernier, de la présidentielle avec 61 % des voix et une majorité des deux tiers à l’Assemblée. Un résultat vivement critiqué par l’opposition comme par la communauté internationale. Selon la commission, le président sortant est crédité de plus de 61 %

des suffrages, contre près de 34 % à son adversaire, le Premier ministre Morgan Tsvangirai, qui a qualifié le scrutin de farce électorale et s’est engagé à en contester les résul‑ tats devant les tribunaux. Nous ne participerons pas aux institutions du gouvernement, a‑t‑il annoncé après une réunion de crise des instances dirigeantes de son parti, le MDC, associé depuis 2009 à l’exercice du pouvoir dans un gouvernement d’union nationale. Nous irons en justice, a‑t‑il ajouté, dénonçant une élection illégale après avoir fustigé une énorme farce.

L’UE préoccupée Validée par les observateurs afri‑ cains, l’issue des élections n’en est pas moins largement remise en cause par des contrôleurs locaux

Robert Mugabe est encore reconduit pour 5 ans.

indépendants, en l’absence d’ob‑ servateurs internationaux qui n’ont pas été admis dans le pays. Près d’un million d’électeurs, sur 6,4 millions d’inscrits, auraient ainsi été empê‑ chés de déposer leur bulletin dans l’urne. L’Union européenne s’est déclarée samedi « préoccupée » par les accusations d’irrégularités et le manque de transparence de l’élec‑ tion présidentielle. L’Union euro‑ péenne est préoccupée par les irrégularités présumées et les informations faisant état d’une participation incomplète, ainsi que par les faiblesses identifiées dans le processus électoral et le manque de trans‑ parence, déclare dans un communi‑ qué la porte‑parole de la diplomatie européenne, Catherine Ashton. Le secrétaire d’État américain John Kerry est allé plus loin, rejetant la validité du scrutin. À la lumière des substantielles irrégularités électorales rapportées par les observateurs natio‑ naux et régionaux, les États‑Unis ne pensent pas que les résultats annon‑ cés aujourd’hui représentent l’ex‑ pression crédible de la volonté du peu‑ ple du Zimbabwe, déclare le chef de la diplomatie américaine dans un communi‑ qué. Le résultat du scrutin est l’aboutissement d’un processus pro‑ fondément faussé, ajoute‑t‑il.


14 ACTUALITÉ : MALI Ibrahim Boubacar Keïta, le nouveau Président Par RFI/MFI

Madou Diallo, le président de la jeu‑ nesse de l’Union pour la République et la démocratie (URD), le parti de Soumaïla Cissé, a pu obtenir ces chiffres sur les deux tiers des dépouillements, et constater que l’écart était très impor‑ tant. Des résultats partiels qui confir‑ ment la tendance observée au premier tour, à l’issue duquel Ibrahim Boubacar Keïta avait obtenu une très large avance, avec 39,79 % des voix, contre 19,70 % à son adversaire Soumaïla Cissé. Il avait ensuite été rejoint par la grande majorité des candidats éliminés qui lui avaient apporté leur soutien.

Soumaïla Cissé a reconnu sa défaite à l’élection présidentielle au Mali. Il a rencontré son rival Ibrahim Boubacar Keïta pour le « féliciter ». Cette annonce surprise est intervenue à l’issue d’une journée marquée par un début de polémique concernant l’organisation Une rencontre houleuse avec du second tour. l’ONU et les observateurs Même s’il faut attendre la proclamation officielle pour dire que le Mali a un nouveau président, tous les Maliens connaissent à présent son nom : Ibrahim Boubacar Keïta. Son rival Soumaïla Cissé s’est spontanément rendu dans la soirée à son domicile, avec femme et enfants, pour le féliciter et reconnaître sa victoire. « Plutôt qu’un coup de téléphone, j’ai préféré la tradition malienne », a‑t‑il expliqué. « J’ai rencontré mon grand frère Ibrahim Boubacar Keïta. Je l’ai félicité et je lui ai dit : “ Félicitations, Monsieur le président de la République ” », a déclaré Soumaïla Cissé au correspondant de RFI à Bamako. « Je n’ai pas attendu parce que, justement, j’ai vu l’écart des voix. J’ai vu les résultats provisoires portant sur plus des deux tiers du dépouillement des bulletins de vote et j’en ai conclu que je ne pouvais pas rattraper mon retard », a‑t‑il précisé. À la commission centrale de recensement des votes,

Selon un diplomate africain, Soumaïla Cissé a également rencontré ce lundi des représentants des Nations unies, des observateurs internationaux. Une réu‑ nion houleuse, pendant une heure.

Mais si Soumaïla Cissé a reconnu sa défaite, il se refuse à sortir du jeu politi‑ que dans les mois à venir. « Je ne quitterai pas la politique », a‑t‑il martelé. Dès qu’il a annoncé avoir reconnu sa défaite, Soumaïla Cissé a reçu des SMS de soutien en nombre et des militants sont venus le féliciter. Cette annonce intervient alors qu’au cours de cette journée du 12 août, des voix se sont élevées, parmi les partisans de Soumaïla Cissé, pour dénoncer des « fraudes ». Un début de polémique qui n’aura finalement duré que quelques heu‑ res, au lendemain d’un scrutin dont les observateurs ont jugé qu’il s’était mieux déroulé qu’au premier tour. Ce lundi soir encore, Soumaïla Cissé a maintenu les accusations portées par ses partisans et a confirmé ce qu’ils avaient dit sur les « fraudes massives », montrant notamment une photo d’un électeur, sur une moto, transportant une urne bourrée de bul‑ letins de vote. Il s’est dit « lésé » lors de l’organisation de ce second tour.

 Suite en page 29


15 POLITIQUE : RCA Bangui en quête de reconnaissance Par Fifi Mbambi Kumbu

Il y’a peu, l’Afrique centrale a connu l’épilogue d’un conflit a r mé qu i se mb la it interminable. La chute du régime Bozizé n’a pas encore rassuré l’avenir de ce pays habitué des coups d’État. C’est peut‑être cette tare qui retarde la reconnaissance de nouvelles autorités centrafricaines.

les multiples condamnations qui avaient suivi la prise du pouvoir le 24 mars, au détriment de François Bozizé, de cet ancien fonction‑ naire du ministère centrafricain des Affaires étrangères et ex‑consul à Nyala au Soudan apparaissent comme oubliées. De quoi penser à une farce politique et diplomatique. Comme le souligne fort à propos le politologue camerounais Firmin Mbala, à l’exception de Paul Biya dont le régime se montre peu pressé de s’associer au carnaval communau‑ taire, « la plupart des dirigeants (de la CEMAC [NDLR]) qui l’ont reçu ont été plus ou moins partie prenante de son adoubement à la

tête de la RCA, selon la formule bicéphale qu’on sait », avec un Premier ministre, Nicolas Tiangaye, doté des clés opérationnelles du pouvoir. Par ricochet, l’objectif de la tournée régionale de présenta‑ tion de Michel Djotodia la semaine dernière au Tchad, au Gabon et en Guinée équatoriale « est largement atteint », a noté l’universitaire à Xinhua. « Parrainé évidemment par le régime Deby, explique‑t‑il, Michel Djotodia est dans un scénario de civi‑ lianisation, c’est‑à‑dire qu’il se rend présentable aux yeux de la commu‑ nauté si ce n’est internationale, du moins africaine ». Replié à Yaoundé au Cameroun, le président déchu

Michel Djotodia, le président de la transition en Centrafrique.

Intronisé par le Conseil national de transition (CNT) mis en place par ses propres soins, le nouvel homme fort de Bangui et leader de l’ex‑rébel‑ lion de la Séléka, Michel Djotodia, a franchi un pas extrêmement impor‑ tant dans la reconnaissance de son pouvoir après sa tournée réussie dans les pays de la Communauté économique et monétaire de l’Afri‑ que centrale (CEMAC). Du Tchad d’Idriss Deby Itno, le parrain, au Congo de Denis Sassou Nguesso, médiateur de la crise centrafricaine, en passant par la Guinée équato‑ riale de Teodoro Obiang Nguema Mbasogo et le Gabon d’Ali Bongo Ondimba, le président de la transi‑ tion en République centrafricaine (RCA) peut désormais se prévaloir des attributs de dirigeant fréquenta‑ ble. Presque deux mois après,


16 ONÉSHA AFRIKA

François Bozizé, lui‑même tombeur d’Ange‑Félix Patassé en 2003, a beau faire feu de tout bois par médias interposés en dehors des actions de coulisses pour appeler au secours pour son retour aux affaires, le constat impose plutôt de se confor‑ mer à la nouvelle donne, qui veut qu’une croix soit définitivement tirée sur l’ancien régime. De l’avis de Mbala, « Djotodia, comme Bozizé avant, bénéficie de la prime de « democratising soldier », c’est‑à‑dire un homme capable d’assurer la stabilité sécuritaire de manière à ce qu’on passe ensuite à un régime civil dans un contexte pacifié ». Mais un bémol vient atté‑ nuer les ardeurs à cause du vide créé pour l’étape camerounaise dans la tournée de séduction de l’ex‑chef rebelle. « Il semble que, commente le politologue, il y ait un accord de principe avec Yaoundé, mais une date n’a pas encore été arrêtée. C’est une formule diplomatique qui laisse transparaître d’une part les réticences du régime camerounais à dérouler le tapis rouge au nouvel homme fort de Bangui, et d’autre part ce qu’on pourrait considérer comme l’agacement du régime de Bangui à voir se prolonger le séjour de François Bozizé au Cameroun. » Dans ce pays, l’ex‑chef d’État centra‑ fricain « semble de surcroît bénéfi‑ cier d’un ensemble de facilités pour le moins inattendues de la part du régime de Yaoundé ». Cette attitude du pouvoir camerounais se perçoit comme une réaction à « la crainte du rôle grandissant du gendarme régional qu’est en train d’occuper le Tchad, plus précisément Deby ».

Sans oublier qu’au plan purement interne, du point de vue sécuritaire, « depuis l’installation de la Séléka au pouvoir se sont multipliés des incidents sécuritaires à la frontière avec le Cameroun ». À l’instar des échanges de tirs nourris entre les forces camerounaises et centrafricai‑ nes, certains des incidents évoqués ont été violents.

de convaincre les populations de son pays de sa capacité de rétablir la paix et la sécurité sur le territoire national afin de mettre un terme aux exactions (pillages, assassinats et viols) commises par ses hommes et d’autres groupes armés. Déjà, des voix s’élèvent pour attirer l’attention sur les risques d’une crise institution‑ nelle au sommet de l’État.

«Bozizé peut aider les autorités came‑ rounaises à stabiliser la région» À ce jour, un policier camerounais reste détenu par les rebelles Séléka. Cette situation sécuritaire, croit savoir Firmin Mbala, enseignant à l’Université catholique d’Afrique centrale (UCAC) à Yaoundé, a probablement penché en faveur d’un séjour prolongé de François Bozizé, qui avait pourtant vocation à s’établir de manière transitoire, au Cameroun. « Bozizé connaissant bien le terrain, il peut aider les autorités camerounaises à stabiliser la situa‑ tion à la frontière ». En plus de cette menace, le Cameroun est confronté à des flux relativement massifs de réfugiés centrafricains sur son sol et qui viennent grossir les rangs d’une communauté de plusieurs dizaines de milliers de personnes antérieure‑ ment installées à l’Est et au Nord du pays. Cette présence est une source de préoccupation supplémentaire dans la mesure où certains réfugiés sont soupçonnés de détenir des armes. En même temps, Michel Djotodia est soumis à l’obligation

Problème de protocole au sommet de l’État Depuis Paris en France où il est désormais établi après la dispa‑ rition de son mentor en 2011 et suit de près l’évolution des évé‑ nements en cours, Guy Kodégué, ex‑porte‑parole d’Ange‑Félix Patassé, s’est inquiété dans un entretien téléphonique avec Xinhua de l’adoption par le CNT du principe de la motion de censure du gouvernement. « Ce texte va à l’encontre des accords de Libreville. Juridiquement et politiquement, ça pose un pro‑ blème pour une bonne régulation et un meilleur fonctionnement des institutions de transition », affirme Kodégué qui dénonce en outre les ambiguïtés de l’or‑ dre protocolaire qui provoquent des disputes entre le Premier ministre et le président du CNT Alexandre Nguendet pour la place de deuxième personnalité du pouvoir.


17 POLITIQUE : RDC Pourquoi la Monusco revient-elle sur son ultimatum ? L’analyse de Radio France Internationale

Dans l’Est de la République Démocratique du Congo, la Monusco, nouvelle brigade d’in‑ tervention avait lancé un ultima‑ tum demandant le désarmement des rebelles se situant dans l’axe Goma‑Saké. Un ultimatum qui a été accueilli avec soulagement par la population.

tum ordonnant leur désarmement, le commandant de la force est fina‑ lement revenu sur cet avertissement. Il a expliqué que cet ultimatum n’en était pas vraiment un mais plutôt une « opportunité pour les groupes armés » de coopérer. Ce n’est peut-être pas à Goma mais à Nairobi qu’il faut chercher une explication. Quelques heures après le lancement de l’ultimatum, s’ouvrait dans la capitale kenyane un sommet réunissant les chefs d’État des Grands Lacs. Et selon des sour‑ ces à Nairobi, le président ougandais Yoweri Museveni a fait part de ses préoccupations à Mary Robinson, l’envoyée spéciale de l’ONU dans la région. Il estime qu’avec cet ultimatum, la Monusco risquait de mettre de l’huile sur le feu alors que

les négociations entre le M23 et le gouvernement congolais sont déjà au plus mal. Des négociations cha‑ peautées justement par le président ougandais.

L’ONU évoque un problème de communication

Mary Robinson, qui a pris ses fonc‑ tions il y a seulement quelques mois, a fait remonter ces préoccupations à New York. Plus tard, à Goma, lors Mais le chef de la Monusco est fina‑ de sa conférence de presse, le chef lement revenu sur cet ultimatum, expliquant que l’avertissement était militaire de la Monusco qui avait plutôt une « opportunité pour les lancé l’ultimatum est revenu sur groupes armés » de coopérer. son annonce. Au quartier général de l’ONU, on assure qu’il s’agissait Rétropédalage de la Monusco. Alors simplement d’un problème de com‑ que la nouvelle brigade d’interven‑ munication, d’autant que la zone tion avait fixé aux rebelles un ultima de sécurité concernée n’englobe pas les positions « Plus que la présence massive de la Monusco, la paix en RDC dépend essentiellement de l’engagement sous contrôle des autorités congolaises » du M23. Pas de remise en cause non plus du mandat de la brigade d’inter‑ vention, mais ce changement de ton inquiète y compris au sein de la Monusco. À Goma, pen‑ dant ce temps un convoi de la mission des Nations unie a été visé par des jets de pierre dans la ville.


18 Monde : États‑Unis Detroit : La fin d’un mythe américain déjà bien écorné Par Clémence Denavit

La ville de Detroit, aux États-Unis, berceau de l’industrie automobile américaine, a engagé ce 18 juillet une procédure de mise en faillite. L’annonce a été faite par Dave Bing, le maire de Detroit. Triste épilogue après soixante ans d’appauvrissement et d’exode. Déclin économique et

Detroit, jadis…

déchéance sociale

Detroit est devenue ce 18 juillet la plus grande ville américaine à se déclarer en faillite. Avant elle, huit autres villes avaient engagé cette démarche. En tête : Jefferson, dans l’Alabama, qui affichait une dette de 4 milliards de dollars, cinq fois moins que celle de la ville de Detroit. La dette cumulée de Detroit était devenue insoutenable : 18,5 mil‑ liards de dollars. Dès le mois dernier, la municipalité avait prévenu qu’elle serait obligée de faire défaut sur une partie de cette somme. Une dette vertigineuse, construite — selon l’expert mandaté par le gouverneur du Michigan — sur des années de mauvaise gestion financière, d’exode de la population et donc aussi d’érosion fiscale.

En soixante ans, Detroit a perdu la moitié de sa population, passant de près de 2 millions d’habitants à 700 000 aujourd’hui. L’exode a débuté dans les années 1950, et s’est accéléré dans la foulée des émeutes de juillet 1967, les plus sanglantes de l’histoire des États‑Unis (43 morts, 467 blessés, plus de 2 000 bâtiments détruits). Une population divisée par deux, c’est autant de revenus en moins pour la municipalité. Dans le même temps, la population active s’est réduite à peau de chagrin. On compte deux retraités pour un actif. Le taux de chômage est de près de 19 %, soit deux fois plus que le taux national. Il y a 70 ans, les habitants de Detroit étaient de ceux qui avaient le meilleur niveau de vie des États‑Unis.

Aujourd’hui, c’est son taux de crimi‑ nalité qui est l’un des plus élevés du pays. La ville se vide et ses services avec : hôtels, centres commerciaux, banques… On ne compte plus les fermetures. Dans certains quartiers, un quart des immeubles est laissé à l’abandon, ce qui est source d’insé‑ curité, l’éclairage public n’est plus assuré partout. Il y a la vétusté des bâtiments et des services, des ambu‑ lances jamais remplacées : seul un tiers du parc ambulancier était en service au premier semestre 2013. Motor City n’était pas un surnom usurpé. Detroit était le berceau des « BIG 3 », les trois grands, pour les trois grands constructeurs de voitu‑ res aux États‑Unis : Ford, Chrystler et General Motors.


19 ONÉSHA AFRIKA

Une chance pour la ville Les destins de l’industrie et de la ville sont intimement liés, et ce déclin est aussi un symbole du déclin de l’industrie américaine plus généra‑ lement. D’autant que Detroit ne s’est pas diversifiée. Elle aurait pu devenir un berceau de l’industrie musicale. C’est à Detroit, en effet, qu’est née en 1959 la Motown, la célèbre maison de disques de Soul et de Rythm and Blues. Mais la maison a déménagé, comme les habitants finalement, au début des années 1970, pour aller s’installer à Los Angeles.

Entre les lignes, c’est ce que sem‑ blait dire l’autre jour le maire de Detroit, Dave Bing : « Nous avons pris la décision de déclarer la ville en faillite. L’une des choses que je souhaite dire à mes concitoyens, c’est que je ne voulais pas en arriver là, mais même si c’est très difficile à vivre, maintenant que nous en sommes là, il faut tirer le meilleur parti de la situation. C’est très dur pour nous tous, mais si ça peut arranger la vie de nos concitoyens, nous devons voir cela comme un nouveau départ. ». Un nouveau départ, une chance en effet dans la mesure où la ville, une fois déclarée en faillite, pourra renégocier sa dette et ne sera plus

tenue de rembourser ses créanciers. Elle aura le temps d’assainir son économie et de repartir sur de bon‑ nes bases, des bases financièrement saines. C’est d’ailleurs le sens des propos tenus ce vendredi par le gou‑ verneur du Michigan. Rick Snyder voit là l’opportunité de mettre fin à soixante ans de déclin et de revenir avec une ville plus forte et meilleure. Il ne manque plus maintenant que le feu vert de la justice fédérale, seule à même de dire si Detroit peut, ou non, être placée sous le régime des faillites.

La plus importante banqueroute d’une ville dans l’histoire des États-Unis.


20 MONDE : RD CONGO Appel à la création d’un Tribunal pénal international (TPI) Par Le Figaro avec AFP

Cinquante‑deux personnalités fémi‑ nines demandent dans une déclara‑ tion la création d’un Tribunal pénal international pour juger les crimes commis en République démocratique du Congo, notamment les viols. Les 52 femmes — dont les ex‑ministres françaises Rama Yade et Roselyne Bachelot, et Ingrid Betancourt — ont signé une déclaration « sur les viols comme arme de guerre et l’instaura‑ tion d’un Tribunal pénal international pour la République démocratique du Congo », pour succéder au Tribunal pénal international pour le Rwanda, qui doit fermer ses portes fin 2014. La déclaration, initiée par l’avocat congolais Me Hamuly Rély, est présen‑ tée comme une « solution incontour‑ nable pour la paix et la justice dans la région des Grands Lacs ». Ce TPI serait « chargé de poursuivre tous les crimes répertoriés dans le “ rapport mapping ” des Nations unies ». Le rap‑ port Mapping, de plus de 550 pages, concerne les violations des droits de l’homme commises entre 1993‑2003 en RDC. Il répertorie 617 incidents violents mais en tout « des dizaines de milliers de personnes ont été tuées, de nombreuses autres ont été violées et mutilées — par des groupes armés congolais et des forces militaires étrangères », résume le site du centre d’information de l’ONU.

Faire connaître et dénoncer ces abominations Ne pas ouvrir de TPI pour la RDC « serait une discrimination à l’égard de la femme congolaise, un déni de jus‑ tice internationale ainsi qu’un encou‑ ragement à commettre le “ génocide ” ou “ fémicide ”. Car en effet, après publication du “ rapport mapping ” et la multitude de rapports sur la situation de ces femmes, nul n’est plus fondé à prétendre n’avoir rien vu, rien su, ni rien entendu », est‑il écrit dans la déclaration. « Tout doit être fait pour faire connaître et dénoncer ces abominations, ces crimes monstrueux perpétrés contre les femmes en RDC », a indiqué lundi Françoise Héritier, professeure d’anthropologie émérite au Collège de France. Le gouverneur de la province riche et instable du Nord‑Kivu (Est), Julien Paluku, a pour sa part déclaré que « ce genre de juridiction était nécessaire pour mettre fin aux crises récurrentes

dans l’Est de la RDC ». « Il faudrait que tous les partis politiques, la société civile et les communautés locales s’engagent, que tout le monde s’in‑ vestisse avec l’accompagnement de la communauté internationale, sinon je crains que tout ne soit bâclé. Or un tel tribunal pourrait vraiment décourager ceux qui veulent faire du mal », a pour sa part expliqué Angélique Kipu, pré‑ sidente à Kinshasa de la Ligue pour le droit de la femme congolaise. La déclaration est adressée au secré‑ taire général de l’ONU Ban Ki‑Moon, aux présidents français François Hollande et américain Barack Obama et à la présidente de la commis‑ sion de l’Union africaine Nkosazana Dlamini‑Zuma, entre autres. Selon le site qui héberge la pétition (change. org/fr), le gynécologue congolais Denis Mukwege — réputé pour son aide aux femmes violées dans l’est de son pays, et déjà pressenti pour le prix Nobel de la paix — soutient la créa‑ tion de ce tribunal pour la RDC.


21 Monde : RACISME au sommet de l’État en ITALIE Le calvaire de Cécile Kyenge Par Victor Olembo

En Italie, le racisme semblait éradiqué depuis la chute de l’axe maléfique ROME – BERLIN. Mais le voilà qui revient au galop aiguillé par certains partis, plus particulièrement, l’Extrême‑Droite qui fleurit au nord de l’Italie. Cela se montrait de temps en temps lors des matches de football au cours desquels on entendait surgir des cris de « singe » dès qu’un joueur à la peau foncée s’emparait du ballon. La presse italienne rendait compte de ces comportements inacceptables mais absolument rien n’y a fait. Aujourd’hui le bouchon a été poussé trop loin. Cela, depuis le 27 avril 2013, date de la nomination de Mme Cécile Kashetu Kyenge, au poste de ministre pour l’intégration du gouvernement d’Enrico Letta. Elle devient ainsi la première minis‑ tre africaine, d’origine congolaise, à entrer dans l’exécutif italien. Cette

La ministre Cécile Kyenge plus déterminée que jamais !

katangaise bon teint est venue en Italie pour y poursuivre les études de Médecine d’où elle est sortie Agrégée et spécialisée en ophtalmo‑ logie. Devenue citoyenne italienne, elle s’inscrivit dans un parti politique de Centre‑gauche et se distinguera au point qu’elle sera choisie pour ses compétences indiscutables. Mais voilà que le racisme le plus

abject montre sa face odieuse et entreprend, au nom du refus des différences de la déstabiliser. Ces barbares des temps nouveaux font feu de tout bois sur une jeune femme qui prouve sa supériorité en les ignorants superbement.

 Suite au prochain numéro « Une société tolérante », c’est son objectif.


22 CHRONIQUE de Cyrille Momote Kabange RDC : le renouveau à l’horizon ! Les événements récents en République Démocratique du Congo notamment la guerre d’usure que se livrent dans les Kivu les bandes armées et les forces gouvernemen‑ tales de Kinshasa ont permis de retenir une leçon des choses : à force de prendre son adversaire pour un âne, on oublie que ses propres forces sont limitées. Insidieusement on glisse vers la perte du sens des réalités. D’où cette sagesse Kongo : « Lorsque vous faites profession de filou, n’oubliez pas que les hom‑ mes jugés les plus bêtes, ne le sont souvent qu’en apparence. Ayant encaissé un coup tordu une fois, ils sont tout à fait capables de vous surprendre dès lors que vous cher‑ cheriez à récidiver ». Deux cas de figure se présentent dans l’actualité récente qui mon‑ trent que les hommes du M23 n’ont pas su que le président Joseph Kabila les avait pris sur le fait et ne devait effectivement pas tomber une nouvelle fois dans le panneau. Le chantage a consisté en 2009 à faire diversion sur leurs vrais objectifs en prétendant étendre leur champ d’activité à l’assemble du Congo, ce qui permettrai d’offrir aux vrais maîtres‑d’œuvres de Kigali, un alibi commode. « C’est une affaire entre Congolais, le Rwanda n’y voit que dalle ». Ayant obtenu par les accords de Goma presque tout ce qu’ils avaient réclamé, la voie était libre, croyaient‑ils, pour foncer droit au but, c’est‑à‑dire, jeter les bases d’une République des Virunga, en projet de l’autre côté des rives du lac Kivu. Mais, Michel Audiard en a fait une réplique célèbre dans un de ses films

Le Premier ministre congolais, Augustin Matata Ponyo et Herman Van Rompuy, le Président permanent du Conseil européen.

bien que l’aphorisme est repris d’un texte de Jacques Prévert : « Il ne faut pas prendre les enfants du Bon Dieu pour des canards sauvages ». C’est ainsi que dernièrement à Kampala, la naïveté a changé de camp. Pris de court, les responsa‑ bles du M23 n’ont pas vu venir le coup qui consistait à les mettre en porte‑à‑faux avec leurs comman‑ ditaires. N’en déplaise aux « purs esprits » du M23, les États ont des obligations qui ne sont pas celles d’un simple mouvement. Face à la pression internationale (l’ONU et les États‑Unis en tête), Kigali a su raison garder. Discrètement, il a pris ses distances et l’énorme château de cartes qui trônait à Rutshuru est en train de s’écrouler. Et du coup, les FARDC ont repris du poil de la bête et sont arrivés à créer la peur dans les rangs ennemis. Il est vrai que l’autorité suprême a utilisé les leçons des échecs passés pour corriger le tir

en matière militaire (augmentation et paiement des soldes des militaires, équipements impeccables et surtout la remise en ordre dans la chaîne de commandement). Il est vrai que le « retropédalage » effectué par les troupes de la Monusco (voir l’analyse de RFI), donne la dimension de la complexité du système des Nations‑Unies qui, en l’occurrence, semble se mêler les pinceaux dans le drame qui se déroule à l’Est de la RDC. Le secré‑ tariat des Nations‑Unies n’en est pas à sa première déconvenue. Il eut en 1961 au Katanga le même imbro‑ glio lié à des intérêts particuliers de certaines puissances qui phagocytent l’énorme machinerie du « Machin » selon De Gaulle. Hélas, cette fois‑là, le mic‑mac de foire a couté la vie à Dag Hammarjoeld dont un certain ponce‑pilatisme a montré la férocité des enjeux, à l’époque, marqués par la guerre froide. N’empêche que,


23 ONÉSHA AFRIKA

le jeu diplomatique à New‑York même s’il bride l’action des casques bleus sur le terrain, ne peut, sans contradiction majeure, empêcher l’histoire de poursuivre son cours au Congo. Le rêve irréaliste des Tutsi Congolais adoubés par les responsables à Kigali, ceux‑ci en proie à l’inex‑ pugnable quête de l’espace vital liée inévitablement à la tentation de puissance, se heurte déjà à une mobilisation des forces populaires « kivutiennes » (voir la proposition de Pierre Péan). Or la perspec‑ tive d’une réactivation de l’armée congolaise équilibrerait sans aucun doute les intentions d’une ou l’autre puissance, lesquelles ne peuvent accepter d’être confondues avec de vulgaires malfrats internationaux dans la mesure où une sortie tapa‑ geuse ruinerait le fondement même du droit international. Souhaitons que cette embellie se pour‑ suive au profit des populations. Cela dit, il faut relever qu’au milieu des difficultés écono‑ miques, le Congo ne sombre pas et de l’avis d’observa‑ teurs objectifs, il y a comme un frémis‑ sement palpable à l’échelle macro‑éco‑ nomique (baisse de l’inflation et crois‑ sance maintenue à plus de 5 % boostée par la hausse du prix

des matières premières). Quant au climat des affaires, il bénéficie des promesses que fournit l’adhésion de la RDC à l’OHADA. Quant à la recherche des moyens pour améliorer le confort des popula‑ tions, l’espoir existe au travers de nombreuses initiatives des citoyens particulièrement ceux qui vivent à l’étranger telles que les assises du Forum économique de la RDC dans l’Union Européenne tenues réguliè‑ rement depuis trois ans, pendant le mois de juillet, au palais d’Egmont à Bruxelles, l’ont montré. D’autres actions au niveau de l’aménagement du territoire et dans le secteur des télécommunications à l’exemple de la pose du câble optique à partir de Moanda tout dernièrement.

Nonobstant tous ces faits encou‑ rageants, il est quelque chose de terrifiant qui ressemble à la tunique empoisonnée de Nessus parce que collant à la peau des gens, du som‑ met de la pyramide sociale aux écu‑ ries d’Augias, la corruption. Cette tare résiste encore aux remèdes de cheval que lui administre le premier ministre Augustin Matata Ponyo Mapon. Soyons optimistes et seule la foi en nos possibilités morales et intellectuelles fera que nous puis‑ sions venir à bout de cette hydre de Lerne. Sans doute parce que l’éradi‑ cation des systèmes mis en place par l’esprit malfaisant des hommes exige une mobilisation de tous les instants sans tapages intempestifs. Dans ce genre de situation, il sied de laisser le temps au temps, selon l’expression de François Mitterrand.

La Monusco, censée mettre tout en œuvre tout en œuvre pour ramener la paix en RDC.


24 ÉCONOMIE : ÉGYPTE Une aide de 12 milliards de dollars après le départ de Morsi Par Myriam Berber / MFI

En Égypte, la crise politique, avec le départ forcé du président islamiste Mohamed Morsi, se double d’une crise économique. Pour faire face à ses difficultés économiques, l’Égypte va recevoir une aide de quelque 12 milliards de dollars de la part de trois pays du Golfe.

L’Arabie Saoudite a annoncé 5 mil‑ liards de dollars, le Koweït, 4 mil‑ liards et les Emirats Arabes Unis, 3 milliards. En tout, 12 milliards de dollars, dont une partie sera versée à la Banque centrale égyptienne pour assurer une certaine stabilité à la monnaie égyptienne, la livre, face au dollar. La livre égyptienne est aujourd’hui à son plus bas niveau depuis dix ans. Le reste de cette aide des trois pays du Golfe se fera sous forme de dons, de subventions ou de prêts.

Cela devrait permettre de redonner de l’oxygène à l’économie égyp‑ tienne qui connait de graves difficul‑ tés. Alors que le budget 2012‑2013 avait établi une prévision de crois‑ sance du produit intérieur brut d’au moins 4 %, les chiffres tournent plutôt autour d’une croissance pro‑ che de zéro. Quant aux réserves de change qui étaient à un seuil critique de 15 milliards de dollars fin juin, elles diminuent à un rythme de 1 à 2 milliards par mois.


25 ONÉSHA AFRIKA

Un prêt du FMI en discussion Tous les indicateurs dans le rouge Ces deux dernières années, l’Égypte a été le théâtre de nombreux trou‑ bles sociaux et politiques. Des trou‑ bles qui ont mis à mal l’économie. Les prix ont augmenté de 4,5 % en moyenne l’an dernier, alors que les revenus des ménages ont baissé de 11 %. Les investissements étran‑ gers ont chuté, à moins de 2 mil‑ liards de dollars en 2012 contre une moyenne de 5 milliards durant les années 2000. La situation politique a également eu de graves répercussions sur le tou‑ risme. Ce secteur qui, avant la chute du régime Moubarak, représentait 11 % du PIB égyptien, s’est effondré. Une activité touristique qui consti‑ tuait un gisement d’emplois dans un pays marqué par le chômage : près de 90 % des chômeurs sont des jeunes de moins de 30 ans. Malgré ses ressources en gaz et pétrole, l’Égypte reste un pays pau‑ vre. Dans ce pays de 80 millions d’habitants, 50 % de la population vit avec moins de deux dollars par jour, selon le Programme des Nations unies pour le développe‑ ment (Pnud).

Pour s’en sortir, l’Égypte compte également sur l’aide du Fonds monétaire international. Un prêt de 4,8 milliards de dollars est toujours en discussion. Mais la nomination de l’économiste Hazem el‑Beblaoui comme Premier ministre de transi‑ tion devrait améliorer les chances de voir le FMI débloquer le prêt promis. Quant aux États‑Unis, la Maison Blanche n’envisage pas de modifier, dans l’immédiat, l’aide financière américaine à l’armée égyptienne. Le Caire reçoit une contribution de 1,3 milliard de dollars de la part des États‑Unis, conséquence de la paix séparée signée avec Israël en 1979. Mais le président Barack Obama a ordonné le 11 juillet une réévaluation des programmes d’aides américains au gouvernement égyptien, selon un communiqué du Pentagone.

Une crise alimentaire menace l’Egypte L’Égypte pourrait faire face à une sérieuse pénurie alimentaire du fait des désordres politiques et de la baisse des réserves en devises étrangères nécessaires à l’impor‑ tation, a indiqué jeudi 11 juillet l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agricul‑ ture (FAO). De son côté, l’ancien ministre Frère musulman de l’Ap‑ provisionnement a indiqué que les réserves égyptiennes en blé ne dépassaient pas les deux mois. Le gouvernement du président Morsi avait visiblement caché le sérieux du risque de crise alimentaire et volontairement surestimé la production locale. Un gouverne‑ ment qui avait cessé d’importer du blé depuis février du fait du déficit budgétaire. Entre‑temps, les réserves de blé sont tombées à un seuil frisant la catastrophe, deux mois de réserves quand il faut deux mois entre le moment où le blé est acheté à l’étranger et celui où il est transformé en farine pour fabriquer le pain. Un pain subventionné qui est vital pour les 85 millions d’habitants de la vallée du Nil qui sont champions du monde en consommation de blé. Importer du blé sera donc l’une des priorités du nouveau gouvernement.

MFI/Avec le correspondant de RFI au Caire, Alexandre Buccianti


26 ÉCONOMIE : Compagnies minières en Afrique Des Sages accusent Par Jean-Pierre Boris

À l’occasion du 23e Forum économique mondial africain qui s’est tenu au Cap, en Afrique du Sud, le Groupe de travail sur l’Afrique en progrès dénonce les méfaits des compagnies minières internationales qui spolient les gouvernements africains de 38 milliards de dollars par an. Dès lors, comment résoudre l’équation du développement ?

Après avoir consacré en 2012 leur rapport annuel aux inégalités crois‑ santes en Afrique, les personnalités du Groupe de travail sur l’Afrique en progrès frappent un grand coup dans leur édition 2013. Elles repren‑ nent en effet à leur compte des dénonciations traditionnellement portées par les militants des ONG. Kofi Annan, l’ancien secrétaire général des Nations unies, Olegun Obasanjo, ancien président du Nigeria, Michel Camdesssus, ancien patron du FMI, et d’autres dénon‑ cent l’opacité qui entoure la gestion des compagnies minières opérant en Afrique.

« Elles utilisent soit des paradis fiscaux, soit des coquilles vides », affirme ainsi Michel Camdessus. Les sociétés établies dans les paradis fiscaux facilitent la corruption, écrivent ces Sages, chiffrant à plusieurs centaines le nombre d’entreprises offshore liées aux investissements dans le négoce des concessions minières en Afrique. Un phénomène qui « sape le processus de réforme jusqu’en Afrique même », écrivent‑ils, et auquel l’Afri‑ que seule ne pourra remédier. D’où l’appel lancé aux pays-membres du G8 pour qu’ils s’emparent de ce dossier.

« Les compagnies minières privent l’Afrique de 38 milliards de dollars. »


27 ONÉSHA AFRIKA

La RDC privée de 1,3 milliard de dollars Mais plus encore, le problème majeur dans le collimateur de ces éminents personnages n’est autre qu’une fraude fiscale à l’échelle continentale. « Il faut avoir ce chiffre en tête, poursuit Michel Camdessus, la fraude fiscale organisée par beaucoup de compagnies minières coûte globale‑ ment 38 milliards de dollars aux États africains. Une somme supérieure à l’aide au développement ». Ce que les institutions multilatérales comme le FMI, la Banque mondiale, la Banque africaine de développement et les grandes puissances comme les États‑Unis ou l’Union européenne donnent à l’Afrique, rapporte une trentaine de milliards de dollars par an.

La volonté des auteurs est d’aider l’Afrique à résoudre l’équation à laquelle elle est actuellement confrontée : comment transformer la croissance économique tirée de l’exploitation des ressources naturel‑ les pour hisser le niveau de vie des populations africaines à des niveaux décents ? Pour ce faire, il faut sortir l’économie minière et pétrolière de « l’enclave » à faible valeur ajoutée dans laquelle elle est enfermée et suivre le chemin emprunté jadis par le Canada, le Chili ou la Malaisie. Il faut donc accroître le contenu local et les revenus tirés des ressources naturelles pour soutenir des politi‑ ques de développement industriel.

En guise d’exemple, les Sages du groupe de travail sur l’Afrique en progrès consacrent de longs dévelop‑ pements à la situation en République démocratique du Congo. « Entre 2010 et 2012, écrivent‑ils, la RDC a perdu au moins 1,36 milliard de dollars de recettes provenant de la sous‑évaluation d’actifs miniers vendus aux société offshore ». Mais ce chiffre est probablement sous‑évalué, reconnaissent d’emblée les auteurs du rapport : « Ce n’est sans doute qu’une faible proportion de la totalité des pertes causées par la sous‑évaluation. Nous n’avons couvert qu’une petite partie des accords pour la période 2010‑2012 ». La complexité des montages financiers mis sur pied par les compagnies minières expli‑ que les limitations de ce travail.

Un « Davos africain » en Afrique du Sud « Faire tenir ses promesses à l’Afrique ». C’est avec ce slogan que s’est ouvert, ce 8 mai, le 23e Forum économique mondial africain. Le continent devrait connaître en 2013 un taux de croissance de 5 %, mais il pèche toujours par manque de compétiti‑ vité. C’est ce qu’indique un rapport du Forum, publié avec la Banque africaine de développement et la Banque mondiale à l’occasion de cet événement, surnommé le « Davos africain ». En résumé, la confiance domine, même si les difficultés per‑ durent. L’heure est à l’optimisme prudent, car avec des taux de crois‑ sance annuels dépassant les 5 % sur

la dernière décennie, l’Afrique a bien résisté à la crise économique mondiale. En conséquence, le conti‑ nent est devenu un aimant pour les investisseurs internationaux. Mais la prudence s’impose tout de même, car pour l’instant les Africains n’en ont pas encore récolté les fruits. Quatorze des vingt pays les moins compétitifs au monde sont en Afrique. Les économies du conti‑ nent sont aussi les moins intégrées et ceci, tout comme les besoins criants en matière d’infrastructures, continue à entraver le commerce. Par exemple, l’Afrique produit chaque année, pour ses 800 millions d’habitants, à peine autant d’élec‑ tricité que l’Espagne, qui compte une population de près de 20 fois plus faible. D’après le rapport sur la compétitivité, ces handicaps coûtent de 2 à 3 points de croissance chaque année au continent. D’où l’interro‑ gation lors de ce Forum : L’Afrique peut‑elle débloquer ses économies, saisir l’opportunité de la croissance pour courir sur les trajectoires qu’a empruntées l’Asie il y a quelques décennies ? Les pions sont en place mais il s’agit maintenant, ont dit les économistes du forum, de les faire bouger.


28 ÉCONOMIE : maroc Coopération Sud-Sud : Le Maroc en tête Par Fifi MBAMBI KUMBU

solaire et le premier producteur mon‑ dial de phosphate et détient 50 % du phosphate mondial.

Le Maroc est devenu le premier investisseur Le royaume est classé par la CNUCED africain dans la zone de la dans son rapport 2013, deuxième pays le plus performant en Afrique en matière Communauté économique de facilitation du commerce, après et monétaire de l’Afrique l’Afrique du Sud et devant l’Île Maurice, centrale (CEMAC) et la zone la Namibie et la Tunisie. D’après cer‑ de l’Union économique et tains spécialistes des affaires africaines, monétaire ouest-africaine le Maroc représente la cinquième puis‑ sance économique du continent. (UEMOA). Cette dernière structure continentale, Plusieurs projets réalisés par des opé‑ créée en 1994, regroupe rateurs économiques marocains sont huit pays : Bénin, Burkina présents sur le continent africain. Ils intéressent divers secteurs (BTP, Tic, Faso, Côte d’Ivoire, Electricité, Finances…) et se distinguent Guinée Bissau, Mali, Niger, par le fait d’associer les partenaires Sénégal et Togo. Ces pays locaux. L’ensemble de ces projets ont ont comme monnaie permis au pays de devenir le deuxième en Afrique après l’Afrique commune le Franc CFA investisseur du Sud, rapporte le journal marocain et représentent un marché francophone « Les Echos ». de plus de 70 millions d’habitants. Le Maroc négocie actuellement des Royal Air Maroc, véritable tentacule vers le sud accords de partenariats stratégiques, incluant la Une multitude d’entreprises marocai‑ mise en place progressive nes des secteurs public et privé sont de zones de libre-échange, implantées en Afrique. La RAM n’a de cesse d’étoffer son réseau à travers avec la CEDEAO et la l’Afrique noire et relie régulièrement CEMAC. Casablanca à 27 autres cités du conti‑

Depuis 2012, le Maroc est la première économie en Afrique du Nord, la plus attractive en termes d’Investissements directs étrangers (IDE) et la sixième en Afrique. Le Maroc est l’un des premiers pays producteur mondial d’énergie

nent, faisant du Maroc un véritable hub ouvert sur l’Europe et l’Amérique. Dans le domaine de la télécommunication, l’on rappelle la participation de Maroc Telecom à Mauritel (Mauritanie), à Onatel (Burkina Faso), à Gabon Telecom et à la Société malienne de télé‑ com (Sotema). Dans le secteur financier, Attijari Wafabank, Groupe Banque

Populaire et BMCE Bank, trois banques 100 % marocaines, comptent des pré‑ sences directes dans 19 pays africains. D’autres grandes entreprises nationales, comme le Groupe Addoha, la holding Sanad, Managem et l’Office marocain de l’Eau et de l’Electricité (ONEE) sont également présentes dans de nombreux pays de l’Afrique de l’Ouest et d’Afrique Centrale. Au‑delà de ces grandes entre‑ prises, de nombreuses PME marocaines développent aujourd’hui leurs activités en Afrique. Les échanges économiques et com‑ merciaux entre le Maroc et l’Afrique enregistrent une croissance régulière, renforcée par le dynamisme des des‑ sertes aériennes et par les perspectives déjà ouvertes par l’axe routier reliant le Maroc au Sénégal, à travers le territoire de la Mauritanie. En 2010, les échanges commerciaux entre les deux parties ont bondi à 11,7 milliards de dirhams, avec des pers‑ pectives prometteuses pour les prochai‑ nes années, compte tenu de l’important potentiel de croissance de ces pays et leurs richesses minières et naturelles, encore sous-exploitées. Les exporta‑ tions marocaines qui ont progressé sur la période de 5,8 milliards de dirhams pour atteindre 7,2 milliards en 2010. Les importations en provenance de cette région ont cru, de leur côté, de 2,4 milliards de dirhams sur la même période pour s’établir à 4,5 milliards de dirhams en 2010, selon les derniers chiffres officiels disponibles. La région représente aussi un énorme marché de plus de 800 millions d’habitants et qui devrait atteindre, selon les estimations de l’ONU, plus de 1,3 milliard d’habi‑ tants en 2030.


… Suite de la page 14 :

Pas de commentaire dans l’entourage d’IBK Dans l’entourage d’Ibrahim Boubacar Keïta, on se refuse pour l’instant à tout commentaire. « Si quelque chose doit être annoncé, c’est à l’autre camp de le faire, ce n’est pas à nous », a déclaré lundi soir un collaborateur d’Ibrahim Boubacar Keïta au micro de RFI. Au QG de campagne d’Ibrahim Boubacar Keïta, les militants et sympa‑ thisants se sentent plus libres de laisser éclater leur joie. Un petit groupe de jeunes est venu fêter l’événement. « On est très soulagés, explique l’un d’eux, on craignait qu’il y ait des troubles alors que l’élection s’est bien déroulée ».

« On apprécie beaucoup ce qu’a fait Soumaïla » dit un militant. « Il est hon‑ nête », ajoute un autre. Certains disent avoir particulièrement apprécié que le candidat vaincu n’ait pas fait qu’appeler le vainqueur, mais soit allé le voir avec sa famille, signe encore plus fort : « Ça, c’est la vraie démocratie, il faut accepter la défaite. Pour moi, c’est la démocratie. Il a reconnu avoir perdu ; donc quand on perd il faut féliciter celui qui a gagné. Il montre l’exemple à tout le monde ».


30 MILLE VISAGES DE BXL-CAPITALE La diaspora burundaise de Belgique se mobilise Par Jérôme Bigirimana

Les Burundais de Belgique regroupés au sein de leur organisation Diaspora Burundaise de Belgique, la DBB, ont organisé une journée de solidarité avec le Burundi le samedi 22 juin à Bruxelles. Au programme, des conférences mais aussi des compétitions de chansons burundaises, le tout ponctué par de superbes danses traditionnelles burundaises. Organisée à la veille des grandes vacances, cette journée visait le rassemblement des Burundais et des amis du Burundi afin d’échanger sur des projets et des intérêts communs de la diaspora.

À quelques 8 mois de sa fonda‑ tion, la DBB compte déjà près de 200 membres selon les dirigeants de cette organisation. Et c’est la 2e activité principale organisée par la DBB après celle de février dernier

qui avait pour thème « Famille et jeunesse en diaspora ». En effet, cette organisation vise d’abord à ras‑ sembler les Burundais de Belgique, avant de les interpeller à leur contri‑ bution au développement de leur mère patrie, le Burundi. Le programme est très ambitieux et de nombreux défis ne manquent pas mais les dirigeants de la DBB rassurent désormais de ne plus baisser les bras. Ainsi dans le court et moyen terme, la DBB compte relever le niveau d’éducation au Burundi, mettre en place un fonds de transfert d’argent vers le Burundi à tarif très réduit, mettre en place une mutualité, un centre culturel burundais à Bruxelles et un fonds d’entraide et de solidarité entre burundais de Belgique, etc.

Mais, le projet phare de la DBB reste actuellement celui de relève du niveau des élèves du secondaire des classes terminales au Burundi. Projet qui a recueilli toute l’atten‑ tion de plus d’une centaine de participants présents à cette jour‑ née. Une journée très réussie selon les organisateurs dont Pr Libérat Ntibashirakandi, président de la DBB : « Je crois bien que le message est passé. Les conférences étaient de très bonne qualité. Ce qui m’a frappé le plus, c’est l’intérêt des participants pour ce projet de relève de niveau des élèves du cycle des humanités. Mais également, la participation de cette jeunesse dans les différentes compétitions. C’est vraiment impressionnant. Il y a même ceux qui n’étaient pas inscrits aux compétitions qui ont décidé d’agrémenter les activités en improvisant des chansons. Des amis du Burundi, des voisins étaient aussi là. À voir l’enthousiasme des participants, je suis vraiment entièrement satisfait ».


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Présence « inattendue »… Journée très réussie également parce que la DBB a vu pour une première fois depuis sa création la présence d’une des autorités de l’ambassade du Burundi à Bruxelles, Mme Triphine Nduwayo, premier conseiller d’ambassade à Bruxelles. De quoi, redorer l’image de la DBB souvent ternie par ses détracteurs qui voient en elle un rassemblement des opposants au régime Nkurunziza. À tort ou à raison, la DBB devait en tout cas se réjouir de cette présence « inattendue » d’un des diplomates burundais à Bruxelles. Par ailleurs, Pr Ntibashirakandi ne cache pas sa satisfaction : « C’est très positif. Je crois que les relations sont aujourd’hui bonnes. La DBB est incontournable ici en Belgique. Nous sommes partout, des sections provinciales

sont actives sur le terrain. Je crois que les autorités de l’ambassade ont déjà compris que la DBB peut arriver là où l’ambassade ne peut pas arriver parce que tout simplement nous sommes crédibles par rapport aux bailleurs en Belgique et en Europe. Donc, c’est la raison pour laquelle je crois que l’ambassade com‑ prend que nous sommes au service du Burundi. Et une diaspora responsable doit avoir le courage de dire ce qui ne va pas, de conseiller et de dire ce qui va bien aussi via des canaux appropriés. Mais ne pas applaudir des deux mains quand les choses ne vont pas bien. Je crois que les relations sont bonnes et le resteront, c’est bien notre souhait ». Les meilleures chansons sélec‑ tionnées lors de la compétition seront promues par le centre Menya Media du Burundi. Le jeune Didier Kwizera, qui a remporté le premier prix était aux anges : « c’est incroya‑ ble, incroyable ! Je ne m’attendais pas


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d’être le premier. Merci au public d’avoir aimé ma chanson. Je suis vraiment très content d’entendre que Menya Media va promouvoir mes chansons. Maintenant, je vais m’y mettre à fond », a‑t‑il assuré. Le deuxième prix a été remporté par Andy Cool, compositeur et chanteur de l’hymne de la Diaspora.

Des dires de tous les participants, la DBB ne cesse d’étonner de par ses originalités dans le programme des activités qu’elle organise. « Nous nous sommes marrés » à déclarer une dame qui a bien apprécié le théâtre improvisé de dot. D’ajouter, « tous les Burundais de Belgique devraient

soutenir les activités de la DBB, aucune association n’a jamais réussi en si peu de temps d’existence de telles initiatives qui mettent en avant la culture burundaise, les intérêts des membres de la Diaspora comme l’emploi et l’intégration ; la pro‑ motion de jeunes talents burundais, j’attends impatiemment l’annonce de la prochaine activité, je suis curieuse de savoir la prochaine surprise ». La journée de solidarité avec le Burundi a été aussi marquée par la projection du film « Na Wewe » nominé aux Oscars 2011, faisant partie d’un des moments forts qui ont rapproché les Burundais de leur origine ou plutôt de leur sombre histoire surtout celle de 1993. Par ailleurs, une exposition de plus de 45 titres de livres et publications sur le Burundi donnait envie de connaître davantage ce petit pays d’Afrique centrale, jadis surnommé « Suisse d’Afrique ». Enfin, à voir les chants, les danses, le discours de dot (Gusaba umugeni en langue locale), on se croyait être au Burundi. En tout cas, agréable à suivre si on n’est pas déraciné de sa culture burundaise !



34 SOCIÉTÉ : Environnement Faut-il stopper la croissance pour résoudre la crise ? Par Sarah Rodriguez-Perez

Journaliste au quotidien français Le Monde et spécialisé sur la question environnementale, Hervé Kempf analyse l’évolution possible, et même souhaitable, du monde face à la crise écologique actuelle. L’auteur livre ses convictions politiques mais aussi son souhait de faire prendre conscience à tous qu’il est temps d’agir.

Après un bref panorama historique mon‑ trant comment s’est établie l’économie mondialisée, Hervé Kempf explique, à tra‑ vers une analyse du système économique, pourquoi la croissance n’est plus viable. Selon lui, l’évolution même du capita‑ lisme va faire peser un coût écologique croissant aux sociétés contemporaines, en associant augmentation du prix des matières premières, baisse de leur taux de retour énergétique et approfondissement de la crise écologique. Il relève par ailleurs que les effets néfastes de la croissance sur l’environnement vont creuser les écarts de richesses entre les pays les plus pauvres et les plus riches. Ce sont les pays du Sud, de par leur situation géographique et leurs moyens financiers, qui seront les moins armés pour faire face au changement climatique.

Le risque le plus grave que fait courir la crise écologique est, pour le journa‑ liste du Monde, qu’elle fasse sombrer l’humanité, sur le long terme, dans des guerres. En effet, l’auteur considère que des conflits majeurs découleront de la hausse de « l’inégalité mondiale, de la course aux ressources et de la dégradation des condi‑ tions écologiques ». Sur ce point, il rejoint Harald Welzer(1) pour qui le potentiel de conflictualité du changement climatique est évident, car la hausse du nombre de réfugiés environnementaux engendrera inévitablement des conflits. Face à ce défi, Hervé Kempf estime que deux directions peuvent être prises : soit les « pays occiden‑ taux tenteront de bloquer cette tendance historique, et les rivalités pour l’accès aux ressources, notamment, s’accroîtront jusqu’à multiplier les guerres », soit « les sociétés occidentales s’adapteront à ce courant historique, et le monde pourra alors faire face à la crise écologique ».

La gauche doit choisir : conservation oligarchique ou politique écologique En guise de solution, Hervé Kempf n’utilise presque jamais le mot « décrois‑ sance » mais préfère parler de « transition de phase », de « passage d’une ère à une autre ». Cette « renaissance » du monde pas‑ serait par l’égalisation des conditions de vie à l’échelle mondiale et donc par une réduction de la consommation matérielle des pays développés. Le constat est donc clair : pour limiter la crise écologique, il faut que l’Occident réduise son niveau de consommation. Réaliste quant à la difficulté à faire accep‑ ter ce changement, l’auteur en appelle à une réelle mise en action du monde

politique et à des choix concrets, en par‑ ticulier pour la gauche qui doit choisir « entre la conservation oligarchique et la politique écologique ». Ce nouvel élan initié par le politique devrait donner la voie à de nouveaux modes de vie mais aussi à une restructu‑ ration des « imaginaires » et des valeurs. Le capitalisme a fait intégrer aux individus que l’amélioration des conditions d’exis‑ tence dépendait de l’accroissement des biens matériels. Il a aussi « imprégné les habitants des pays occidentaux d’un indi‑ vidualisme exacerbé par trente ans d’un capitalisme sans adversaire ». Mais l’auteur pense qu’un autre monde est possible ; un monde où les valeurs d’équité, de partage, et de solidarité seraient centrales. Croyant en la capacité des hommes à innover en toute situation, Hervé Kempf s’appuie sur l’analyse du sociologue Immanuel Wallerstein. Pour ce dernier, « les valeurs universelles globales ne nous sont pas données, elles sont créées par nous ». Fort de cette conviction, l’auteur expli‑ que comment parvenir à restructurer les sociétés occidentales en suivant trois axes essentiels : reprendre la maîtrise du système financier, réduire les inégalités, et écologiser l’économie. L’ouvrage d’Hervé Kempf a l’intérêt de mettre en lumière un problème poli‑ tique essentiel. Si ses propositions ont de quoi surprendre, elles n’en sont pas moins empreintes de réalisme. Le but de l’auteur est bien d’aider ses lecteurs à regarder lucidement et sereinement l’avenir.

1. Fin de l’Occident, naissance du monde, Hervé Kempf. Éditions du Seuil, Paris, janvier 2013 ; 192 pages, 15 euros..


35 SOCIÉTÉ : PROSPECTIVE Brazzaville et Kinshasa : quid de l’union des deux Congo ! Par Yves Makodia Mantséka et Victor Olembo

L’occasion faisant le larron, un Congolais de Brazzaville tirant conséquence de la construction prochaine du pont route‑rail entre Kinshasa et Brazzaville pour pousser un cri de cœur. Le style est lyrique et compense la hargne de certains dans l’ancienne colonie française qui pensent sans rire qu’entre une vipère et un congolais de Kinshasa, il vaut mieux choisir le reptile. Voici son texte.

Brazzaville et Kinshasa sont deux capitales les plus proches du monde. Les deux capitales africaines abri‑ tent un même peuple et une même culture. Historiquement, ces deux nations dérivent d’une mère com‑ mune dénommée Kongo. Le grand royaume qui comprenait entre les XVe et XVIIe siècles, de vastes étendues en Afrique Centrale et dont les ramifications enfouies sous les décombres de la coloni‑ sation subsistent et rend compte

Joseph Kabila et Denis Sassou Nguesso.

de l’unité culturelle des Bantous. L’épicentre est donc le Congo qui se double d’un grand fleuve qui porte le même nom, deuxième du monde après l’Amazone par le débit. Ce fleuve mythique ne devrait pas être une clôture mais un chemin qui consacre au contraire la subdi‑ vision en rive gauche et rive droite. Et portant, c’est au cœur de ce long et majestueux fleuve Congo dont les vagues gonflées par les écumes éclatantes et qui rend compte de la chaleur communicatrice des hom‑ mes le long de ses rives. Cela aurait suffi à jeter les bases d’une fraternité sans faille.

Le MUNTU et le pont sur le fleuve Congo L’unité entre les deux peuples est inséparable du fleuve Congo où coulent les eaux miroitantes d’amour. Ce faisant, il devient incontournable aux dirigeants

actuels de bâtir le pont d’alliance entre les deux nations. Avec ce joyau viaduc, le rapprochement de deux villes amplifiera les liens d’hier rompus et consolideront les échanges effacés. Dans l’ère d’alors, le Congo sous l’empire du Kongo, était un royaume « Muntuïste ». Le concept « Muntu » issu de la langue Kongolaise était l’essence et la quin‑ tessence du paradigme enseigné et conseillé au sein du royaume d’autrefois. Le « Muntu » — homme bon, généreux, sage, fraternel et spirituel — fut au centre de tout. Et il symbolisait par‑dessus tout une valeur magnifiée, sublimée. Fondé sur ce principe essentiel, il consti‑ tuait la pierre angulaire de la nation Congo. Considéré comme une phi‑ losophie ancestrale, le Muntuïsme guidait la politique, l’économie, le social, le culturel, l’environnement. D’essence morale et spirituelle, ce concept ancestral millénaire orien‑ tait l’homme congolais dans sa vie active, familiale et professionnelle.


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Initié aux principes du « Muntu » sous l’inspiration de « NZambé Mokonzi » ou « NZambia Mpungu », le Congolais d’alors professait l’amour fraternel et considérait l’autre son frère comme lui‑même. C’est cet amour du prochain qui au cœur de la doctrine du « Muntu » originel dans sa noble vision de l’humanisme intégral africain. Cette idéologie humaine trouve ses racines dans le sol Kongo, elle prône la voie de « Ki‑Muntu ». Cet homme qui renait de nouveau pour incarner la tolérance, le pardon, la non‑vio‑ lence… C’est ce congolais nouveau qu’il faut dans cette époque difficile pour symboliser l’unité indivisible et transformer les paroles en actes.

Kinshasa, vue de Brazzaville.

Les richesses à foison Car, le vrai « Ki-Muntu » prêche la bonne parole, exalte la vérité, cher‑ che le bonheur de tous dans l’action d’aide et de servir la nation. C’est le refus de la félicité personnelle au profit de l’intérêt général qui est le fondement même du « Muntuïsme » déifié. Ce faisant, les deux Congos modernes doivent s’identifier à cette humaine philosophie pour acquérir l’antique sagesse, propice au déve‑ loppement de l’homme Congo. Que nous sommes tous frères et sœurs dans cette terre congolaise de la fraternité.

Hormis cette tradition commune, les deux Congos sont des nations riches culturellement, économiquement, sportivement, musicalement… Le Congo Kinshasa est l’unique pays africain qui regorge des ressources naturelles colossales : diamant, or, fer, cuivre, cobalt… Aucun pays au monde ne possède autant de richesses. Le Congo Brazzaville possède d’énormes réser ves de pétrole. Grand pays pétrolier, tout réside dans ce gisement qui fait sa puissance économique. Ces mines reconnues mondialement feront du Congo uni la locomotive de l’Afri‑ que voire du monde.


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Ensuite, d’’énormes réserves fores‑ tières jonchent la terre Congolaise. Une manne qui fait de lui le gros producteur de bois. Avec les eaux qui circulent partout, l’énergie électrique existante constitue une force incommensurable avec la construction de multiples barrages. L’industrie du Tourisme se déve‑ loppera à plus forte raison avec la primauté accordée à la richesse environnementale qu’offrent les sites pittoresques mettant en lumière les rives attirantes. Et le fleuve Congo illuminé par ses magnifiques bords donnera au Congo unifié la splendeur et la prospérité tant attendue. Les Congolais ont inventé la Rumba et elle s’est exportée à Cuba. Avec la Rumba porte étendard de la musi‑ que congolaise, la nation fraternelle reste et restera le centre de cette danse répandue aux quatre coins du monde. Aujourd’hui, la musique congolaise s’affirme prépondérante sur l’échiquier internationale. Les grandes figures Congolaises de la musique comme Passi, Abdal Malik, Youlou Mabiala, Mabélé, Zao, Tanawa, Blaise kounkou, Djeskin, Kosmos, Sam Mangwana, le grand Rochereau, Papa Wemba, Nioka Longo, Koffi Olimidé, JB Mpiala, F. Ipupa, …, font l’honneur et la fierté de la nation. De même, le sport congolais reste une vitrine de réussite sur le continent africain. Dans le domaine du football, les deux pays réunis comptent dans leur actif trois coupes d’Afrique des Nations. Un registre éloquent qui montre ô combien le Congo

La traversée.

rassemblé est une force supérieure. C’est cet esprit chevaleresque et victorieux qu’il faut concilier pour faire du futur un espoir certain de réussite glorieuse. La nation libre et fraternelle Congolaise a besoin de cette ambition de progression et de conquête finale pour rayonner, redéfinir les stratégies échouées et réinventer les nouveaux modèles de développement et de croissance grâce à l’unité retrouvée. Aujourd’hui, d’autres voies s’ouvrent à la nation congolaise unifiée. À savoir : la « sapologie » ou le patri‑ moine de la Sape. Une culture du vêtement et du beau se développe dans les deux Congo. Elle devient au fil des ans, une richesse locale et à mettre sur le compte d’un patrimoine national à cultiver et à développer. Son exportation fera du Congo une marque de fabrique et de coloration nationales. Ainsi la Sape, vitrine des jeunes « ambianceurs », deviendra un modèle mondial d’ori‑ gine congolaise. Une invention dont nous serons les détenteurs.

En outre, les deux rives renferment plusieurs tribus et une multitude de langues vernaculaires. Mais la dominance des langues comme lin‑ gala, kikongo parlées dans les deux nations constituent une force de cohésion, d’entente et d’harmonie. De plus, la démographie Congolaise est galopante. Le Congo Kinshasa est le pays le plus peuplé dans la francophonie. En somme, on note aux Congos, une main d’œuvre abondante et bien formée. L’élite congolaise est florissante et fort recherchée. Ayant étudiée dans les grandes écoles occidentales, elle monnaye ses talents et fait la richesse, le bonheur des grandes entreprises étrangères et internationales. La Diaspora actuelle contribue largement à l’essor et au progrès dans l’investissement destiné aux Congos. Cette partie du peuple vivant à l’extérieur est un vecteur de structuration et de développe‑ ment de première importance pour l’économie des deux pays. La forte croissance actuelle est tirée par ses enfants de l’étranger pétris de valeur


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patriotique. Ce faisant, le Congo modèle dans ce domaine devrait profiter avec l’union de deux patries pour s’enrichir en créant massive‑ ment des emplois. Avec lui, l’esprit d’entreprise s’activera et l’initiative individuelle s’amplifiera encore d’avantage dans un but commun.

Conclusion La politique est un nœud de vipère qui divise les peuples fraternels. Il se dénouera avec l’acceptation de l’autre comme son frère de sang. Le peuple libéré de la haine du prochain construira la patrie unique. Cette nation gagnera avec

l’intégration dans ses rangs de cette nouvelle école de pensée habitée par les idéaux élevés. L’expérience acquise à l’étranger fera bénéficier le manque criard des cerveaux penseurs et porteurs des projets sociétaux communs. La nouvelle classe dirigeante issue de cette famille rassemblée pilotera la Nation sur les bases saines et vivifiantes de la démocratie plura‑ liste, le socle doctrinal sur lequel, le Congo nouveau enfantera une nation riche, belle et rayonnante. Celle qui effacera l’ardoise de la dette, éradiquera les maladies, la pauvreté, sources de guerres intestines.

Et le peuple uni chantera l’hymne de la paix. La stabilité, la sérénité et la tranquillité des esprits feront de la nation, un espace libre, égal, convivial et fraternel. Tels sont les chemins où le Congo sera meilleur et diffusera à l’échelle mondiale son propre modèle édifié. Celui de l’unité entre le peuple fraternel issu d’une mère unique celle qui chante l’éternel refrain de l’amour inconditionnel. Cette mélodieuse musique sacrée que le fleuve Congo continue de donner sans compter dans ce monde qui passe et celui qui renait magnifique.


39 SOCIÉTÉ : BURUNDI Les femmes vivant avec la fistule vésico-vaginale au Burundi : Entre espoir et inquiétude.

Par Jérôme Bigirimana

Appelée « Ingwara yo mu Kigo » en langue maternelle, le Kirundi, la fistule vésico‑vaginale (FVV) condamne plus d’un millier de femmes chaque année à vivre isolées dans l’arrière‑ cour au Burundi. Malgré l’appui de quelques ONGs internationales et la gratuité des soins offerts par le gouvernement burundais, les défis pour améliorer la situation de ces femmes sont encore énormes.

Alors qu’elle est presque inconnue dans les pays développés, la FVV est classée parmi les problèmes de santé publique dans les pays en voie de développement. Dans ces pays, 1000 nouveaux cas sont enregistrés chaque année. En effet, le Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP) estime à deux millions le nombre total de femmes atteintes de fistule dans le monde.

Selon le Dr Déogratias Ntukamazina, coordinateur du centre de référence de la fistule au CHU de Kamenge à Bujumbura au Burundi, la FVV est principalement due aux compli‑ cations d’un accouchement long et difficile. Les plus touchées sont essentiellement les femmes rurales, pauvres et qui vivent loin des établis‑ sements sanitaires. Lorsque le travail de l’accouchement commence, elles préfèrent rester à la maison à cause du manque d’argent et moyens de transport pour atteindre une unité de soins. Par ailleurs, les centres de santé les plus proches ne peuvent rien faire lorsque le cas nécessite une césarienne. Ainsi, ces pauvres femmes endurent entre 3 à 4 jours de travail d’accouchement. Dr Ntukamazina explique que, « La suite devient fatale pour la mère et pour l’enfant au cours de ce long travail d’ac‑ couchement difficile car environ 98 % de

ces femmes expulsent un enfant mort‑né à cause de la souffrance fœtale extrême. La vessie et/ou le rectum sont tellement comprimés par la tête du fœtus, de telle manière qu’après l’accouchement, la zone vésicale et/ou rectale comprimée se nécrose et laisse un trou ou un passage anormal entre ces organes et le vagin ; ce qui laisse donc passer en permanence et de manière incontrôlée les urines et/ou les selles par les organes génitaux de la femme. Ces femmes vont avoir un écou‑ lement permanent des urines partout où elles seront et elles sont caractérisées par une odeur d’urines ; ce qui les poussent à s’isoler de la société ». Comme le malheur ne vient jamais seul, la femme ayant fait cette complication en accouchant est souvent abandonnée par son mari à cause des mauvaises odeurs, et elle présente aussi un écoulement


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permanent et incontrôlé d’urines par voie vaginale. De plus, dans la majorité des cas, les relations intimes deviennent pénibles.

L’aide internationale des ONG Jusqu’en 2006, rien n’était fait pour ces femmes. C’est en 2006 qu’un contrat fut signé entre l’ONG Gynécologues Sans Frontières et le Gouvernement du Burundi, qu’un projet de traitement de la fistule fut mis en place au Burundi. Un grand soulagement pour ces milliers de femmes rurales oubliées par la société alors que le malheur leur est arrivé entrain de donner la vie [Ndlr : à un membre de cette société]. Les actions clés de ce projet étaient d’aider à reconnaître la fistule comme un problème de santé publique au Burundi, d’impli‑ quer les plus hautes autorités du pays à l’appui de traitement de la fistule, et enfin, de sensibiliser les gouvernements et les ONG inter‑ nationales pour créer d’autres centres de fistule et de former des médecins locaux qui prendront la relève lorsque l’ONG quittera le pays. L’ONG Gynécologues Sans Frontières estime que sa mission est réussie puisqu’un autre centre à fistule, le centre Urumuri piloté par l’ONG Médecins Sans Frontières (MSF) a été créé à Gitega, au centre du Burundi depuis 2010. Mais, à part le gynécologue Ntukamazina, un seul médecin généraliste a accepté d’être formé

à Gitega. Les autres ne sont pas emballés par cette offre. Motif : d’une part, la réparation de la fis‑ tule ne paie pas. Elle est à charge des ONGs ou du gouvernement. D’autre part, « les médecins n’ont pas le temps, ils préfèrent travailler dans le secteur privé qui paie plus. Par ailleurs, il y a peu de spécialistes qui peuvent accepter de cesser leur activité à Bujumbura pour aller dans une formation de 6 mois au centre Urumuri de Gitega », reconnaît le Dr Ntukamazina.

pourrie, abandonnée par mon mari et ma famille proche, sauf ma mère. Je ne pouvais pas accéder à l’espace public à cause de mon odeur. »

Prise en charge des patientes

Lorsque les femmes arrivent au centre Urumuri, MSF leur fournit un support complet : soins, trans‑ port, vêtements, repas, animations, conseils. MSF estime entre 20 et 30 femmes à être reçues par jour. Mais, le centre ne dispose que de 50 lits. D’où des tentes sont érigées en raison d’une grande affluence, conséquente à la sensibilisation et à l’appui logistique gratuit.

Rose Nahimana, 42 ans, vient de passer deux semaines au centre Urumuri à Gitega, à 100 km de Bujumbura. Visage illuminé par de fréquents sourires, elle se confie : « C’est la fin de mon calvaire. C’était trop dur pour moi. Je viens de passer environ 20 ans dans l’arrière‑cour,

Selon le Dr Ntukamazina, 90 % des maris abandonnent leurs femmes à cause de la fistule. C’est pour‑ quoi MSF fournit actuellement des séances d’information et des cam‑ pagnes de sensibilisation dans les villages, en synergie avec Handicap International, en charge de l’identi‑ fication, des cas de référencement et de transport de certains patients.


41 ONÉSHA AFRIKA

Par conséquent, le centre de Bujumbura mis en place par Gynécologie Sans Frontières (GSF), reçoit peu de femmes fistuleuses en raison du manque de soutien logis‑ tique et financier. Dr Ntukamazina estime à 300 dollars américains, le coût de la réparation de la fistule, sans frais de consultation, de restau‑ ration pour le malade et sa garde et le transport aller‑retour à la maison. Mais, pour ce qui est des frais des soins, le gouvernement les prend en charge.

Faible implication de la communauté Les autorités et les organisations locales s’impliquent peu ou pres‑ que pas. Excepté les initiatives des ONG internationales et de ce petit soutien du gouvernement, aucune autre action locale n’est envisagée. En fait, il y a une faible sensibilisation du public et une faible médiatisation de la question pendant que la discrimination de la communauté reste grande. Aucune campagne organisée pour mettre fin à la stigmatisation alors qu’il y a de nombreuses organisations locales de femmes qui pourraient plaider pour ces femmes fistuleuses. Des femmes séjournant au centre à fistule de Bujumbura critiquent l’inertie de la société civile, en par‑ ticulier les organisations de femmes. Pour Mathilde Bunyoni, 32 ans, « j’entends qu’il y a des organisa‑ tions qui militent pour les droits des femmes mais elles ne nous appor‑ tent rien. Par exemple, la journée

internationale de la femme célébrée chaque année le 8 mars ne signifie rien pour moi. J’ai perdu ma dignité et suis discriminée par tous ». Même point de vue que son amie Marthe Barahinduka, 40 ans, également en attente pour la réparation de la fistule : « La journée internationale de la femme est juste un slogan pour les femmes à fistule. Je ne suis pas une criminelle, mais voilà je vis en quarantaine pendant 20 ans. Je n’ai rien fait de mal, la fistule était juste un accident. Je voulais donner naissance comme toutes les autres mamans, mais quand le malheur arrive, voilà que nous sommes exclues comme des malfaiteurs. Et où sont ces associations de femmes pour nous aider ? Je ne les ai pas vues ! Aident‑elles seulement celles qui sentent une bonne odeur de par‑ fum ? Merci à Dieu qui nous a envoyé notre docteur [Ndlr : Dr Ntukamazina] et ces humanitaires ».

Quid de l’après 2015 C’est connu de tous, le Burundi comme beaucoup de pays moins développés, souffre de l’absence d’un nombre suffisant de gynécologues qua‑ lifiés et surtout formés aux opérations spécifiques des fistules. Sur plus de 10 millions d’habitants, le Burundi n’a que 20 gynécologues locaux, eux aussi tous établis seulement à Bujumbura, la capitale. Parmi ceux‑ci, seul le Dr Ntukam azina est maintenant en mesure de mener des opérations de fistules. Mais, les cas compliqués sont souvent envoyés au centre d’Urumuri où prestent deux gynécologues expa‑ triés à temps plein payés par MSF.

De l’avis de plusieurs experts, la pérennisation des services offerts par les ONG présentes est un sérieux problème quand ces dernières vien‑ dront à la fin de leurs activités. Et le gouvernement burundais devrait déjà commencer à pleinement s’im‑ pliquer dans les opérations de fistule et mettre en place un véritable plan de traitement de la fistule et ses conséquences sociales et morales. GSF a par exemple déjà commencé à réduire ses missions parce qu’elle n’a plus de moyens financiers. Et MSF, avec un gros budget, est très active sur terrain dans tout le Burundi sauf la région de Bujumbura, va malheureusement quitter ce ter‑ rain de la fistule vésico‑vaginale au Burundi en 2015. À quel sort seront donc vouées ces milliers de femmes oubliées dans le fin fond du pays ? Le gouvernement burundais pour‑ ra‑t‑il prendre la relève ? Rien n’est évident quand on sait que les plus hautes autorités du pays sont plus préoccupées par le renouvellement ou le triplement de leur mandat en 2015. Elles pourront peut‑être faire des promesses alléchantes mais seulement à des fins électorales. En tout cas, si rien n’est décidé d’ici là, la situation risque de dégénérer et s’empirer plus qu’avant 2006.


42 SANTÉ Hypertrophie bénigne de la prostate, comment le savoir ? Par Ariane Nkoma et Nadine Kelambile, source passeport santé

Plus de 50 % des hommes âgés de 60 ans en sont atteints, et 90 % de ceux de plus de 80 ans L’hypertrophie bénigne de la pros‑ tate se caractérise par une augmen‑ tation de la taille de la prostate. Une prostate volumineuse comprime l’urètre tout en faisant pression sur la vessie, ce qui engendre un besoin fréquent d’uriner et divers problè‑ mes de miction, selon le cas (débit plus faible et intermittent, douleurs, etc.). Presque tous les hommes sont sujets à l’hypertrophie bénigne de la prostate, en vieillissant. En effet, plus de 50 % des hommes âgés de 60 ans en sont atteints, et 90 % de ceux de plus de 80 ans. Cependant, tous n’en souffrent pas : environ 1 homme atteint sur 2 est incom‑ modé par des symptômes urinaires. Cette affection n’est pas d’origine cancéreuse. Elle n’augmente pas le risque de cancer de la prostate, mais n’empêche pas non plus son déve‑ loppement. On appelle aussi cette affection « hyperplasie bénigne de la prostate ». L’hyperplasie désigne la prolifération des cellules de la pros‑ tate. Le terme hypertrophie, quant à lui, fait référence à l’augmentation du volume de la prostate.

Causes Les causes de l’hypertrophie bénigne de la prostate ne sont pas clairement identifiées. Il existe probablement une prédisposition héréditaire car

certaines familles sont plus affectées que d’autres. Toutefois, d’autres fac‑ teurs entrent en jeu. Par exemple, on sait que la testostérone et son dérivé actif, la dihydrotestostérone, jouent un rôle important. Aussi, les œstrogènes, des hormones sexuelles féminines présentes en petite quan‑ tité chez l’homme, pourraient être impliquées. Pour le moment, on ignore les mécanismes exacts par lesquels ils agissent. Il est possible qu’avec l’âge, la prostate devienne plus sensible à ces hormones.

Plus de 50 % des hommes âgés de 60 ans en sont atteints, et 90 % de ceux de plus de 80 ans. Conséquences et complications possibles Les hommes atteints d’hypertrophie bénigne de la prostate risquent davantage de rencontrer l’un ou l’autre des problèmes suivants. Cependant, la majorité d’entre eux n’en souffrent pas.


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Des infections urinaires : une vessie qui ne se vide pas complètement favorise la prolifération de bactéries. Si les infections urinaires se produi‑ sent à répétition, une chirurgie pour réduire le volume de la prostate et désobstruer les voies urinaires peut être envisagée ; la rétention aiguë d’urine dans la vessie : lorsque l’urè‑ tre est complètement comprimé, il devient impossible d’uriner ; ce qui cause des douleurs aiguës. Il s’agit d’une situation d’urgence médicale. Un cathéter est introduit dans l’urè‑ tre pour vider la vessie ; des calculs dans la vessie : des dépôts de minéraux peuvent se produire et causer des infections, irriter la paroi de la vessie et obstruer l’évacuation de l’urine ;

une distension des parois de la ves‑ sie : l’hypertrophie bénigne de la prostate peut accélérer le vieillisse‑ ment de la paroi de la vessie ; avec le temps, celle‑ci perd du tonus et ses contractions sont moins efficaces. Il arrive que la vessie reprenne du tonus après une chirurgie de réduc‑ tion de la prostate ; des dommages aux reins : la réten‑ tion chronique d’une certaine quantité d’urine dans la vessie et les infections urinaires à répétition peuvent compromettre les fonctions rénales, à long terme.

Diagnostic Il est important de consulter un médecin en cas de symptômes. On réduit ainsi le risque de complica‑ tions sévères. Toutefois, il faut savoir

qu’il n’y a pas toujours de relation entre les symptô‑ mes ressentis et le volume de la prostate. En effet, certains hommes ont une prostate volumineuse sans avoir de symptômes, alors que d’autres en présentent malgré tout une plus petite. Par un toucher rectal, le médecin peut détecter une prostate hypertrophiée et en suivre l’évolution. Ce test sert aussi à détecter la présence de nodules dans la prostate et d’évaluer le risque qu’il y ait un cancer. Une analyse d’urine et un test sanguin pour mesurer le taux d’antigène prostati‑ que spécifique (APS) peu‑ vent être effectués, selon le cas.

Éducation Le cancer reste une maladie injuste d’où, la meilleure préven‑ tion reste le dépistage précoce chez tous les hommes après 50 ans sur initiative personnelle ou sur proposition du médecin surtout lorsqu’un membre de la famille proche à souffert de cela, exem‑ ple, le père ou un frère. Une alimentation saine permettra d’éviter toute maladie y compris le cancer (fruits et légumes, pois‑ sons et moins de viande, et surtout beaucoup boire de l’eau et moins de boissons alcoolisées. Chez les hommes les fruits et légumes rouges sont recommandés (ex : les tomates crues).


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45 CULTURE – DIASPORA Originalité et modernisme : Les bijoux « Elikia » honorent l’Afrique

Nous retrouvons sur cette photo la créatrice Cindy Lemba Simiti Mpindi entourée de ses mannequins. La marque de bijoux « Elikia » est pour toutes les femmes.

Dans le domaine peu abordé jusqu’ici, une jeune belge d’origine congolaise se fraye un chemin dans le roc tant sa tentative vient de l’exploit. Sans aide financière ni formation en ar t (l’intéressée détient un baccalauréat en marketing), elle crée des bijoux marqués au coin de l’originalité la plus sobre. C’est pourtant des

créations qui présentent un assor timent des pièces d’une élégance rare. Fin mélange des motifs africains et de style moder ne, ces bijoux s’insèrent tout naturellement dans un ensemble vestimentaire à l’allure fun. Toutes les femmes y trouvent leur compte.

L’initiatrice Cindy Lemba Simiti Mpindi et ses congénères ont exposé leurs créations le 9 mars lors d’une manifestation de l’ASBL Roots-events intitulée le « Brussels African Market ». Le 29 mars, Elikia a été partenaire lors du « Diner Jambo » organisé par le cercle des étudiants congolais de l’université libre de Bruxelles.


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Entretien conduit par Cyrille Momote Kabange

Dans le domaine peu abordé jusqu’ici, une jeune belge d’origine congolaise se fraye un chemin dans le roc tant sa tentative vient de l’exploit. Sans aide financière ni formation en art (l’inté‑ ressée détient un baccalauréat en mar‑ keting), elle crée des bijoux marqués au coin de l’originalité la plus sobre. C’est pourtant des créations qui présentent un assortiment des pièces d’une élégance rare. Fin mélange des motifs africains et de style moderne, ces bijoux s’insèrent tout naturellement dans un ensemble vestimentaire à l’allure fun. Toutes les femmes y trouvent leur compte. L’initiatrice Cindy Lemba Simiti Mpindi et ses congénères ont exposé leurs créations le 9 mars lors d’une manifestation de l’ASBL Roots‑events intitulée le « Brussels African Market ». Le 29 mars, Elikia a été partenaire lors du « Diner Jambo » organisé par le cercle des étudiants congolais de l’université libre de Bruxelles.

ONESHA AFRIKA : Pouvons‑nous connaitre d’où vous est venue l’idée de vous lancer dans une telle entreprise ? Cindy : Je m’appelle Cindy Lemba Simiti Mpindi et je suis une jeune étudiante de 24 ans en gestion d’en‑ treprise passionnée par les métiers liés au monde de la mode et de la création. Dans cette optique, en juillet 2012, j’ai suivi un stage de 3 mois dans l’entreprise Manice chez la styliste belge Charlotte Boute.

naire du Bas‑Congo où l’on y parle le Kikongo, j’ai voulu faire un clin d’œil à mes origines. Cette première collection de bijoux se veut être un mélange de culture entre l’exubérance esthétique de l’Afrique et la finesse de l’Occident. Mon but est de montrer l’habit tra‑ ditionnel africain dans une autre dynamique et surtout d’une manière plus fashion en alliant ma terre d’origine et ma terre de naissance. Elikia est constituée des bijoux qui sont à la fois fun, chic et unique à toute occasion. Le mannequin Luxia G. porte le collier « Bunene » qui signifie grandeur en Kikongo. et boucle d’oreille « triangle ».

Étant autodidacte, je créais mes bijoux et ceux de mes pro‑ ches depuis 1 an. Il y a 2 mois, j’ai concrétisé ma pas‑ sion en lançant ma première collection de bijoux en tissus africain (le pagne), sous le nom de la marque « Elikia ». Le mot « Elikia » qui signifie espoir en lingala langue par‑ lée au R.D Congo. J’utilise également le kikongo pour nommer mes bijoux en choi‑ sissant des mots ayant une signifi‑ cation positive. Ma famille est origi

Le mannequin Audrey. D porte le collier et bracelet « double Buntotila » en kikongo signifie la royauté. Ensemble idéal pour cocktail.


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ONESHA AFRIKA : Avez‑vous une orga‑ nisation de travail ? Cindy : Je suis étudiante donc je dois jongler entre mes obligations académiques et ma visison de déve‑ loppement d’Elikia. Ce qui n’est pas une chose aisée.

Le Collier « Bunene » en kikongo signifie la grandeur.

Le mannequin Jennifer. D porte l’ensemble (col‑ lier, headband, boucle-d’oreille, bracelet, bague) « Ndona » en kikongo signifie La déesse.

Concernant plus particulièrement Elikia, j’occupe tous les postes (productrice, créatrice et directrice marketing). Je dois savoir gérer mon temps entre mes rendez‑vous d’af‑ faire, répondre aux e‑mails(elikia. collection@gmail.com), m’occuper de la page facebook d’Elikia (Elikia. jewerly) sur laquelle vous pouvez retrouver toutes les informations sur la marque et les shooting. Pour mes shootings, j’ai la chance de travailler avec des personnes professionnelles

comme le photographe Léopold Mputu dans son studio L.M. art, les maquilleurs Wi’n’bee make up et Droz make up. De plus , j’ai la chance de me faire aider par mon entourage qui croit en l’avenir d’Eli‑ kia, les membres de ma famille ainsi que plusieurs de mes amies pour ne citer que Célia, Nadège, Paméla et Landrine… J’ai des journées très chargées mais le plus important pour moi est de garder le plaisir de créer.

ONESHA AFRIKA : Quelles sont vos perspectives d’avenir ? Cindy : J’ai plusieurs projets pour ma marque Elikia. À cours terme, je souhaite développer une gamme pour les hommes, vendre mes bijoux dans des petites boutiques. À long terme, j’aimerai faire produire mes bijoux en R.D Congo.

D’un point de vue personnel, étant une perfectionniste, je compte sui‑ vre une formation de bijouterie dès septembre de cette année.

La créatrice des bijoux Elikia « Cindy Lemba ».


48 CULTURE : RDC Gospel : Disparition du leader du groupe Gaêl, Alain Moloto Par Victor Olembo

La musique religieuse de la République Démocratique du Congo, tant appréciée de par le monde entier, a perdu une de ses figures de proue. Alain Moloto est décédé, vendredi 2 août, à Kinshasa des suites d’une longue maladie à l’âge de 52 ans. Celui‑ci avait été empoisonné et luttait depuis plus de 2 mois contre le poison qui s’insi‑ nuait au plus profond de sa chair. Le patron du Groupe adorons l’Éternel (GAEL) était un artiste compositeur très connu dans les milieux évangé‑ liques en RDC et à l’étranger.

Une profondeur spirituelle incontestable Né à Kisangani dans la Province Orientale de la RDC, le 27 juillet 1961, Alain Moloto était troisième d’une famille de quinze enfants. Marié à Christine Tshiabu il laisse quatre enfants au terme de treize années

de vie conjugale. L’auteur de Shilo, Divine amour et bien d’autres chansons religieuses a effectué une

grande partie de ses études dans la ville de Lubumbashi avant de rejoin‑ dre Kinshasa pour les huma‑ nités et les étu‑ des supérieures. Alain Moloto a débuté ses étu‑ des supérieures en 1983 à l’ISC (Institut supé‑ rieur de com‑ merce) où il s’était engagé dans le théâtre universitaire dans lequel il écrivait des chansons en français intégrées à la dramaturgie. Il y jouait le rôle de chantre et de parolier. Bien écrites, les gens s’in‑ téressaient vraiment à ses chansons qui étaient toujours accompagnées d’une profondeur spirituelle incon‑ testable. Moloto est ainsi poussé un peu plus tard à embrasser une carrière en solo. Le groupe musi‑ cal Gaêl a déjà perdu trois de ses membres les plus actifs en l’espace de quelques semaines. Il s’agit de Marthe Bulayi, Christian Mvuanda et Alain Moloto.


49 SPORT – FOOTBALL Portraits des jeunes joueurs d’origine africaine dans le championnat belge Par Alain Eliasy et JCO

Frank Acheampong Âge : 19 Club : Anderlecht Position : aillier gauche Nationalité : ghanéen Matches en D1 belge avant cette saison : 1 (0 buts) Frank Acheampong était en avril à Anderlecht, finalement prêté, pour 6 mois, avec option d’achat, par son club Thaïlandais de Buriram United. Le prix : un million d’euros. Avec Acheampong, Anderlecht possède le prototype de l’ailier : pieds rapi‑ des, agiles et une bonne rapidité

La saison dernière, le ghanéen alors âgé de 19 ans, a joué une minute pour Anderlecht, il a d’autant plus impressionné par ses prouesses. Lors de la Ligue des Champions pour les joueurs de moins de 19 ans, Acheampong, a écla‑ boussé la compétition de son talent, de plus, il l’a confirmé à la prestigieuse Coupe Viareggio en Italie. Ses deux buts en finale contre l’AC Milan ont, d’ailleurs, suscité l’in‑ térêt des Rossoneri. Dernièrement, Acheampong a également donné sa carte de visite au Championnat du monde U20 en Turquie. Grâce à ses deux buts et quatre assits, le Ghana a pris le bronze à la Coupe du Monde.

Hervé Kagé

Frank Acheampong

en course. En Thaïlande, où le petit milieu de ter‑ rain a joué au football durant deux saisons, il a été nommé le Messi du Ghana. Ce n’est pas pour rien !

Acheampong à Anderlecht n’est actuellement pas considéré comme un titulaire, mais l’entraîneur John van den Brom a une haute opinion de son poulain.

Hervé Kagé Âge : 24 Club : La Gantoise Position : allier gauche Nationalité : belge / congolais Matches en D1 belge avant cette saison : 74 (4 buts) Rien, ni personne ne pourra stop‑ per Hervé Kagé, l’animateur du jeu offensif du club de Gand en Belgique. Pas même une pneumo‑ nie contractée lors de la reprise des entrainements en juillet dernier. Véritable « ambianceur » du cham‑ pionnat, avec sa capacité à animer une partie à lui seul, il fait l’unani‑ mité des fans du beau jeu, grâce à des créations techniques, qui arrachent même des applaudissements chez


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les supporters adverses. Souvent à gauche, capable de prendre l’axe, ce leader technique est déroutant, armé d’un coup de rein capable de briser une carrière. Johan Walem, ancien international belge et coach du joueur dans son cycle de formation, voulait faire d’Herve Kage, un milieu défensif récupérateur – relayeur – buteur – ambianceur. Intelligent dans la vie comme sur le terrain, il se différen‑ cie aussi par un mental imperturba‑ ble fixé sur la réussite de ses objectifs personnels et collectifs. Si son objectif principal est de deve‑ nir encore plus décisif, avec plus de buts et de passes décisives, son objectif prioritaire est avant tout de gagner tous les matches qu’il aura à jouer en club… Et ainsi remporter des trophées.

Ibrahima Conte Âge : 22 Club : Zulte Waregem Position : ailier droit Nationalité : guinéen Matches en D1 belge avant cette saison : 82 (5 buts) Talent absolu, dribbleur de pre‑ mière classe : Ibrahima Conte, ces derniers mois, il a été prêté par le AA Gent à Zulte Waregem après des doutes surgis à propos de la fragi‑ lité du Guinéen. Conte a montré de multiple facette de son jeux en séries éliminatoires I. Ses dribbles inimitables et ses mouvements des hanches sont aussi imprévisibles que sa forme courbe. Mais que Conte soit fait de bon bois, tout le monde au Gaverbeek, est d’accord. Prêté au Regenboogstadion dans un premier temps, il a même été évoqué de le transformer en un transfert perma‑

nent. Mais les Buffalo’s n’ont pas voulu d’une option de vente dans les conditions du prêt. Conte a commencé avec brio lors de la saison 2013‑2014. Dans le troisième tour de qualification de la Ligue des Champions contre le PSV Eindhoven, il a mis en boîte plu‑ sieurs fois son adversaire direct.

Junior Kabananga Âge : 24 Club : Cercle de Bruges Position : attaquant Nationalité : congolais Matches en D1 belge avant cette saison : 8 (1 but) Après une année de deuxième classe à Roeselare, Junior Kabananga fait, cette saison, à nouveau partie de l’élite belge. Le joueur congolais

Ibrahima Conte


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sée mais il ne nous surprendrait pas si Kabananga durant les mois à venir par‑ vienne enfin à percer en jupiler league.

Geoffrey Mujangi Bia Âge : 24 Club : Standard P o s i t i o n  : a i l l i e r droit N a t i o n a l i t é  : belge / congolais Matches en D1 belge avant cette saison : 82 (11 buts)

âgé de 24 ans, à rejoint le nouveau leader des candidats à la relégation, le Cercle Bruges, où il a signé un contrat pour deux saisons. Si Kabananga parvient à rencontrer les attentes élevées de l’Association, il pourrait tirer le Cercle hors de la zone dangereuse. Pourtant le grand attaquant — 1,90 m, 88 kg à sec sur le crochet — semblait com‑ plètement perdu pour le football de haut niveau après une grave bles‑ sure au genou subie au Beerschot. Auparavant, c’était l’aventure à Anderlecht qui n’avait rien donné. Cependant Kabananga était en 2010, au Congo, vu comme sosie de Dieumerci Mbokani. La comparai‑ son avec Mbokani est peut‑être biai‑

L’histoire de Geoffrey Mujangi Bia, c’est l’histoire d’un groupe d’amis d’enfance dont font partie Hervé Kagé, Andréa Mutombo. Tous venu du même quartier dans le nord de Bruxelles et soucieux de tous réussir. Jeune, Bia était ce qui se faisait de mieux dans le groupe ainsi que dans sa

catégorie d’âge à Anderlecht. Mais c’est Charleroi qui met le petit dans l’univers du foot pro. Parce que le talent ne se perd pas, l’aillier viru‑ lent fait vite parler de lui avec un premier but fantastique en D1 et une sélection obtenue avec l’équipe nationale en équipe d’âge. Ses prestations dépassent les fron‑ tières du pays et la Premier League parvient à l’attirer chez elle en 2010. Exigeante, elle ne le fera jamais briller ni à Wolverhampton ni à Watford en D2 anglaise durant la saison 2012‑2013. Ce ne sont pas ses entrainements sur le sol anglais mais bien cette expérience de vie difficile qui font de Mujangi Bia la révélation de ce début de champion‑ nat belge. Agé désormais de 24 ans le joueur marque et fait marquer à la grande joie des supporters du Standard. Un club heureux, qui se félicite d’avoir toujours cru en lui. Rien ne se perd, rien ne se crée pour Mujangi Bia comme pour ses amis d’enfance, tous occupé à performer. C’est l’assurance d’une plus grande maturité.

Geoffrey Mujangi Bia

Junior Kabananga

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