Le Guillon N°49 - FR

Page 1

LA REVUE DU VIN VAUDOIS

REVUELEGUILLON.CH

N° 49 2/2016

WITH ENGLISH SUMMARY



Editorial

Le Chablais, du vent,

des pierres… et des nectars! Pascal Besnard Rédacteur responsable

Caput Lacus (la tête du lac), donnera, au fil du temps, au gré des copistes et des usages locaux Chablais. Un nom partagé par trois régions: le Chablais est valaisan, savoyard et bien sûr vaudois. A propos de lac, le Chablais n’est pas vraiment influencé par le climat lémanique, comme peut l’être Lavaux. Ici le Rhône domine. Lové entre Préalpes et Alpes, le vignoble chablaisien bénéficie de l’effet de foehn, détestable pour les migraineux, rongeur de neige pour les stations de ski, mais si bénéfique à la maturation du raisin. Le sous-sol aussi apporte une contribution majeure à la qualité des vins: le calcaire est omniprésent, la minéralité des chasselas n’est pas une légende.

Tiens, question vins, la confrontation (à fleurets mouchetés) entre les chasselas d’Yvorne et ceux d’Aigle a vu un cru célèbre du premier terroir nommé l’emporter. Mais sur le podium, on notera la présence de deux Yvorne et d’autant d’Aigle (avec 2 troisièmes ex aequo)! Et dans la catégorie monocépages rouges, deux syrahs et deux cabernets francs se sont distingués, comme le vignoble d’Ollon, où sont nés trois des vins vedettes de notre dégustation. Le Chablais est multiple et passionnant. Les hauts lieux de son histoire aussi. A commencer par LE château emblématique de la région, celui d’Aigle. Le monument et son musée aux 350'000 étiquettes de vins sont incontournables, à ne manquer sous aucun prétexte!

WWW.REVUELEGUILLON.CH



Sommaire

Revue Le Guillon n° 49 – 2/2016 Photo de couverture: Château d'Aigle, Edouard Curchod

1 Editorial 3 Sommaire 4 7 15 25 33

Le Chablais Les (faux) jumeaux Un autre Chablais Aigle, Ovaille, Châteaux: l’AOC Passage de témoin au Musée de la vigne, du vin et de l'étiquette

35 39 40 43 45 46 55

Mondial du Chasselas 2016 Grand Prix du Vin Suisse 2016 Sélection vaudoise OVV Concours internationaux Terres de Lavaux: la grande mutation De la noix au colza, les huiles vaudoises Michel Logoz, Pape et Commandeur

Confrérie du Guillon 57 Message du Gouverneur 58 Les Ressats des Combourgeoisies 66 Propos de Clavende 68 Guillonneur de Lucerne 71 L'invité: Guy Parmelin 74 Soulevons le couvercle: Edgard Bovier 79 Portrait de conseiller 79 Hommage à Michel Vidoudez 80 La colonne de Michel Logoz Revue Le Guillon Sàrl, Ch. de la Côte-à-Deux-Sous 6, CH-1052 Le Mont-sur-Lausanne revue@guillon.ch, www.revueleguillon.ch Le Guillon, la revue du vin vaudois paraît deux fois par an en langues française et allemande; résumés en langue anglaise. IMPRESSUM – Gérants: Dr Jean-François Anken (président), Luc Del Rizzo, Daniel H. Rey – Partenaires: Confrérie du Guillon, Office des Vins Vaudois, Label de qualité Terravin, Fédération des caves viticoles vaudoises, Section vaudoise de l'Association suisse des vignerons encaveurs, Service de l'agriculture (SAGR) – Office cantonal de la viticulture et de la promotion (OCVP), Service de la promotion économique et du commerce (SPECO) – Rédacteur responsable: Pascal Besnard – Ont collaboré à ce numéro: Raoul Cruchon, Pierre-Etienne Joye, Michel Logoz, Claude-Alain Mayor, Claude Piubellini, Pierre Thomas, Alexandre Truffer, Jean-Claude Vaucher, Eva Zwahlen – Traductions: Evelyn Kobelt, Eva Zwahlen, Loyse Pahud, IP Communication in English – Graphisme et mise en page: stl design – Estelle Hofer Piguet – Photographes: Edouard Curchod, Sandra Culand, Philippe Dutoit, Bertrand Rey, Hans-Peter Siffert – Photolitho: l'atelier prémédia Sàrl – Impression: PCL Presses Centrales SA – Régie des annonces: Advantage SA, Mary-Julie Badoud, mary-julie.badoud@advantagesa.ch, +41 21 800 44 37 – Abonnements: www.revueleguillon.ch – revue@guillon.ch – ISSNN 0434-9296

Le Guillon

N°49 2/2016

3


Le Chab Le Chablais n’est pas lémanique, comme La Côte ou Lavaux, il est rhodanien. Ses vignes (590 hectares), de Villeneuve à Bex, en passant par Aigle, Yvorne et Ollon, plongent leurs racines dans des sols essentiellement caillouteux et calcaires. On ne s’étonnera donc pas du caractère minéral des vins. De leur belle maturité aussi, due en grande partie aux situations de foehn, générées par les Alpes voisines.

4

Page 7

Les vins, justement… d’abord les chasselas, emblématiques de la région, et leurs fameux arômes de pierre à fusil. A Aigle et Yvorne, ils représentent 80% de l’encépagement. La confrontation des faux jumeaux du Chablais s’est révélée captivante. Page 10


© Pascal Besnard

ablais... Les rouges méritent eux aussi le déplacement. Une grande variété de cépages: syrah, cabernet franc, merlot, gamaret, mondeuse, et d’autres encore, ont trouvé dans le Chablais des terroirs à leur mesure…

L’histoire du Chablais, à l’image des vins, est riche est passionnante, marquée par l’éboulement ravageur de 1584, mais aussi par la renaissance du lieu, par l’édification du Château d’Aigle, aujourd’hui monument et musée. Théâtre une fois par an, de la grand-messe du chasselas: le Mondial…

Page 15

Pages 25 et 35

5


LabeL Vigne d’Or La quête de l’excellence

Quintessence de la nature

Les Artisans Vignerons d’Yvorne ont réservé leurs meilleures terres et leurs meilleurs raisins à cette ligne d’exception. Microclimat, orientation, pente, ensoleillement et aptitude du sol à absorber et restituer l’eau confèrent à chaque parchet sa nature, sa force et sa personnalité. Cette rigoureuse sélection permet d’exprimer la parfaite adéquation des terroirs et des cépages, en donnant à ses vins une grande complexité aromatique et une empreinte hors du commun.

A r t i s A n s V i g n e r o n s d ’ Y V o r n e s o c i é t é co o p é r At i V e

www.avy.ch


Le Chablais | Aigle et Yvorne

Les (faux) jumeaux du Chablais Pierre Thomas Faut-il opposer Aigle et Yvorne? Les deux «lieux de production» du Chablais (un peu plus de 15% du vignoble vaudois) sont assez semblables en surface (159 ha pour Yvorne et 130 ha pour Aigle). Le chasselas y frise les 80% et, en 2015, Aigle a déclaré davantage de chasselas (624'485 litres dans les catégories AOC et grand cru à hauteur de 71%) qu’Yvorne (598'625 litres, dont 85% en grand cru). Même l’étude des terroirs, présentée il y a douze ans déjà, les rassemble, et y ajoute Villeneuve, où «les sols issus d’éboulis sont profonds, toujours très caillouteux. Ils contiennent 50 à 90% d’éclats calcaires emballés dans un matrice plutôt argileuse, ce qui les distingue des dépôts fluvio-glaciaires lavés, gravelo-sableux. (…) Des sols ap-

L’histoire du vignoble vaudois, à l’image du «monument» publié par les Valaisans, est encore à écrire. On pourrait partir d’ici, d’Aigle et d’Yvorne, dont on a réuni les chasselas 2015 pour notre «grande dégustation».

paraissent que l’on ne rencontrait pas sur Ollon ou Bex et que l’on ne rencontrera plus au-delà de Villeneuve.» Entre «vieux» glacier et éboulis Le vignoble, sur le coteau de la rive droite du Rhône, entre Aigle et Yvorne, est bien posé sur un terreau original et propice, parmi les plus drainants du canton. Ajoutez-y une exposition idéale, souvent sur le versant sud, et un microclimat où le fœhn joue son rôle, et le décor est solidement planté. Dans les nuances, on signalera qu’Aigle avait son propre glacier, il y a 22’000 ans, sur l’emplacement occupé par le torrent La Grande Eau. La colline du Château d’Aigle en est un témoin des derniers dépôts, formés autour de petits lacs (disparus).

Aigle and Yvorne: (False) Twins in the Chablais Region These two wine-producing areas in the Chablais region (covering just over 15% of the Vaud vineyards) have similar surface areas (Yvorne 159 ha and Aigle 130 ha), with Chasselas accounting for almost 80%. The vineyard on the right bank of the Rhone, between Aigle and Yvorne, sits on an original fertile soil with excellent drainage, among the best in the canton. In addition, it has perfect expo-

Le Guillon

N°49 2/2016

sure to the sun, lying mainly on southfacing slopes, and a microclimate with the Foehn playing its part. One might wish to add that Aigle had its own glacier 22,000 years ago on the site of the present La Grande Eau torrent. The hill on which the Château d’Aigle stands carries traces of past deposits which had been formed around small lakes (long disappeared).

Ce glacier recouvrait aussi Yvorne, même si on trouve des moraines latérales du Rhône sur la butte de VersPousaz et sur les pentes de la George. «Depuis le retrait des glaciers, il y a 10'000 ans, l’érosion des falaises produit de grandes quantités de cailloux, de pierres et de blocs anguleux, qui s’étendent sous les reliefs, sous la forme de langues d’éboulis plus ou moins pentues, plus ou moins caillouteuses et plus ou moins stables.» Au point que le 4 mars 1584, le ciel tomba sur la tête des habitants d’Yvorne: 69 maisons, 106 granges, 4 caves et 2 battoirs furent ensevelis sous des rochers dérupant d’au-dessus de Corbeyrier. Cent personnes et trois cents animaux périrent. Yvorne a bâti sa réputation sur cette catastrophe,

The glacier also covered Yvorne. “Since the retreat of the glaciers 10,000 years ago, cliff erosion has produced large quantities of pebbles, stones and angular blocks that extend under the slopes in the form of tongues of scree that are more or less pointed, more or less stony and more or less stable.” So much so that on 4th March 1584 the sky fell on the inhabitants of Yvorne: 69 houses, 106 barns, 4 cellars and 2 mash staffs were buried under the rocks that rolled down from Corbeyrier. One hundred people and 300 animals died. … p. 8

7


Le Chablais | Aigle et Yvorne

«Depuis le retrait des glaciers, il y a 10'000 ans, l’érosion des falaises produit de grandes quantités de cailloux, de pierres et de blocs anguleux, qui s’étendent sous les reliefs, sous la forme de langues d’éboulis plus ou moins pentues, plus ou moins caillouteuses et plus ou moins stables.» restée comme la coulée de l’Ovaille – Maison Blanche, car elle emporta la demeure presque neuve des seigneurs d’Erlach (BE). Mais des éboulements, il y en eut déjà avant, qui formèrent le relief de cette partie originale du Chablais… La «guerre des chefs» du Chablais Sans doute ce décor tourmenté influence-t-il le caractère des gens. Entre Aigle et Yvorne se joua une partie (musclée) de la définition du paysage vitivinicole vaudois. C’était dans les années 1950 – 1965. A main gauche, un homme entreprenant, à «l’habileté fortunée», comme l’écrit Michel Logoz, citant Machiavel, dans un texte pour les 50 ans du label Terravin (2014), Henri Badoux, syndic d’Aigle de 1950 à 1956, député au Grand Conseil, conseiller national, président de l’Union des négociants en vin et de la Société des encaveurs de vins suisses. Le négociant milite pour l’élargissement des appellations et pour un nom générique pour le chasselas vaudois, le «dorin», sur

… Yvorne has built its reputation on this catastrophe, still called the Ovaille – Maison Blanche landslide as it carried away the almost new property of the Bernese lords of Erlach. War of the chieftains in the Chablais region A contest between Aigle and Yvorne was largely responsible for defining the Vaud wine landscape. It happened in the years 1950-1965. On the right, Henri Badoux, the mayor of Aigle from 1950 to 1956, a Grand Council deputy, a national council-

8

L’Yvorne «pur» ancêtre du label Terravin Pour résister à la pression du négoce voisin, Robert Isoz avait imaginé un système anticipant les limitations de récolte et la pureté de l’origine. Le 15 janvier 1962, il fait adopter par la

section d’Yvorne de la Fédération vaudoise des vignerons un «règlement instituant une marque de contrôle de l’origine et de la qualité des vins d’Yvorne», qui plafonne le rendement à 0,75 hl de vin rond à l’hectare (un peu plus d’une bouteille de… 70 cl au mètre carré), à 75° Oechslé. Les raisins doivent être issus à 100% du lieu de production. Une dégustation donne droit, uniquement pour le chasselas, au label… Terravin. Deux ans plus tard, en avril 1964, les vignerons d’Yvorne «cèdent» leur marque protégée à tous les Vaudois. Non sans devoir mettre de l’eau dans leur vin: seule subsiste la dégustation, les autres paramètres étant régis par la législation cantonale, qui, finalement, «régionalisera» les AOC en 2009. Tant à Aigle qu’à Yvorne, à peu près un tiers d’une vendange est livré aux négociants, dont les principaux (Schenk, Obrist, Hammel) sont propriétaires de domaines à Yvorne, un tiers est mis en valeur par des vignerons-encaveurs, dont les communes d’Aigle (8 ha) et Yvorne (5 ha) et même l’Etat, via les Hospices cantonaux (3  ha à Aigle), et un tiers par les coopératives, les Artisans Vignerons d’Yvorne (AVY) et les Celliers du Chablais, à Aigle, qui font cause commune avec Ollon.

lor, the president of the Wine Merchants’ Union and of the Association of Swiss Winemakers, as well as an entrepreneur, endowed with qualities, as Michel Logoz described him, quoting Machiavelli in a text for the 50th anniversary of the Terravin quality label (2014). This merchant campaigned for extending appellations and attributing the generic name, Dorin to Chasselas wine from the Vaud region along the lines of Fendant and Perlant in the Valais and Geneva cantons respectively. On the left, a resistance fighter “in the hardline camp”

(wrote Robert Isoz), the mayor of Yvorne, the president of the Vaud Winegrowers’ Federation from 1956 to 1970, and the owner of the Portes Rouges estate. The war of the chieftains lasted for a good ten years. It left its mark. At Badoux Vins, part of the Schenk group since 2008, their Aigle Les Murailles which is the best-selling Chasselas in Switzerland with almost a million bottles sold per year, has AOC Chablais classification, which allows regional blending. La Maison du Lézard focuses on a brand policy and does not produce Grand cru wines.

le modèle du «fendant» valaisan et du «perlant» genevois. A main droite, un résistant, «dans le camp de la tradition pure et dure» (scripsit Logoz), Robert Isoz, syndic d’Yvorne, président de la Fédération vaudoise des vignerons de 1956 à 1970, et propriétaire du domaine des Portes Rouges. La «guerre des chefs» durera une bonne dizaine d’années. Elle a laissé des traces. Chez Badoux Vins, passé dans le giron du groupe Schenk en 2008, l’Aigle Les Murailles, le chasselas le plus vendu de Suisse, qui flirte avec le million de flacons par an, est en AOC Chablais, qui permet l’assemblage régional. La Maison au Lézard, axée sur une politique de marques, n’élabore pas de «grands crus».

Le Guillon

N°49 2/2016


© Pascal Besnard 

Dans les secteurs les moins pentus, tant à Aigle qu'à Yvorne, on pratique une viticulture sur fil et non plus en gobelet.

1ers Grands crus sur le carreau Enfin, dans notre dégustation, aucun des 1ers Grands crus 2015 (et un seul 2014), n’a passé le cap éliminatoire. S’il n’y a aucun 1er Grand cru à Aigle, Yvorne capitalise 15% des 1ers Grands Crus vaudois, avec 27'000 litres de chasselas en 2015, répartis entre L’Ovaille des frères Deladoey, le Clos

de l’Abbaye de la Commune d’Yvorne, le Clos de la George des familles Rolaz et Thorens et L’Ovaille 1584 de Hammel SA. Le Clos du Rocher et le Château Maison Blanche ont déposé un dossier de 1er Grand cru, déjà accepté, mais aucun vin du sommet de la pyramide vaudoise n’a encore été commercialisé sous ces étiquettes. Ces 1ers Grands

crus sont destinés naturellement à un plus long vieillissement et devraient, sur un millésime riche comme 2015, marqué aussi par une amertume caractéristique des Yvorne, se révéler dans plusieurs mois, voire quelques années!

Yvorne a ‘pure’ ancestor of the Terravin quality label To resist the pressure coming from the neighbouring winery, Rober Isoz envisaged a system that would place limits on harvest volumes and ensure purity of origin. On his instigation, a ruling was passed on 15th January 1962 with respect to the Yvorne section of the Vaud Winegrowers’ Federation which “established a trademark guaranteeing the origin and quality of Yvorne wines”, and placed the following limitations on yields: 0.75 hl of wine per hectare

(a little more than a 70cl bottle per m2), 75° Oechsle, 100% production region and one tasting conferring the right to use the Terravin quality label – and that only for Chasselas wine. Two years later, in April 1964, the Yvorne winegrowers extended their protected trademark to the rest of the Vaud canton. Only the tasting remains - all the other parameters were integrated into cantonal legislation which ended up ‘regionalising’ the AOCs in 2009. In both Aigle and Yvorne, about one third of the harvest is delivered to wine mer-

chants of which the main ones, Schenk, Obrist, and Hammel, own estates in Yvorne; one third is treated by the wine producers, that is the communes of Aigle (8 ha) and Yvorne (5 ha), and even the State of Vaud, through its Hospices cantonaux estates (3 ha in Aigle); and one third by the cooperatives, the Artisans Vignerons d’Yvorne, and the Celliers du Chablais, in Aigle, that work together with Ollon.

Le Guillon

N°49 2/2016

9


10

Le Guillon

N°49 2/2016


Le Chablais | Aigle et Yvorne

Le tandem gagnant: André Hotz, œnologue, et Jean-Daniel Suardet, chef de culture, du Clos du Rocher 

Troisième dégustation consacrée aux grands chasselas vaudois, celle d’Aigle-Yvorne s’est déroulée comme les précédentes (Dézaley, Féchy) en deux tours, le lundi 4 juillet, au bar à vins le Midi 20, à Lausanne. Trois nouveaux venus étaient autour de la table: Marie Linder, experte en vins, Rodrigo Banto, chef œnologue d’UVAVINS et Jérôme Aké Béda, sommelier, qui prêtait papilles fortes à un trio de dégustateurs labellisés Terravin, Marco Grognuz, vigneronencaveur, Richard Pfister, œnologue, et Jean Solis, commerçant. La dégustation avait été ouverte aux grands crus et aux vins AOC Chablais respectant les critères du grand cru (notamment en matière de coupage). 36 vins, tous du millésime 2015, soit 19 Aigle et 17 Yvorne, nous étaient parvenus par la poste. Pour le premier tour, les vins avaient été répartis, de manière égale et alternée entre les deux lieux de provenance, en six séries. Le jury a sélectionné, sans les commenter, deux vins par série. Faute de pouvoir départager deux vins, treize se sont retrouvé propulsés en finale. Sur ces 13 vins, 7 provenaient d’Aigle et 6 d’Yvorne. Les vins ainsi sélectionnés ont été dégustés, commentés et classés. L’ensemble de l’exercice s’est fait à l’aveugle, sans aucune indication au jury. Le vainqueur du jour est le Clos du Rocher. Cette propriété historique, acquise il y a un siècle (en 1918) par le négociant veveysan Emile Obrist, est une référence. Ses 10 ha sont plantés à 87% de chasselas, sur les pentes les plus ardues d’Yvorne (50 à 60%),

Le Guillon

N°49 2/2016

 Le

jury: Jean Solis, Marco Grognuz, Marie Linder, Jérôme Aké Béda, Rodrigo Banto et Richard Pfister

© Philippe Dutoit

Les hommes avant le terroir

orientées plein sud. Lors du premier Mondial du Chasselas à Aigle, en 2012, ce grand cru avait obtenu la consécration suprême, avec le millésime 2011. On l’a indiqué à la page précédente: Badoux Vins ne vend aucun grand cru. Mais ses professionnels ont un mandat de vinification aux caves de la Commune d’Aigle et des Hospices cantonaux, à Villeneuve. La Réserve de la Commune d’Aigle, sous l’étiquette «rétro» du peintre Frédéric Rouge, même si elle n’est pas estampillée «grand cru», est «pure de chez pur», assure Daniel Dufaux, le directeur de Badoux. Ce vin, vendu principalement par souscription aux habitants du chef-lieu du Chablais, se classe deuxième, tandis que les Hospices cantonaux, bien connus des fonctionnaires vaudois, est cinquième. Entre ces deux vins «signés Badoux», un troisième rang pour un Aigle de l’œnologue Frédéric Blanc, qu’on attendait plutôt avec ses Yvornes, soit A la George du domaine familial (le 13e vin classé, non commenté), soit le 1er Grand Cru L’Abbaye, de la

Commune d’Yvorne (propriétaire de 5 ha de vignes). Ex aequo avec le Chant des Resses de la coopérative AVY, une valeur sûre! Puis, au 5e rang (ex aequo avec l’Aigle des Hospices cantonaux), la Merveille des Roches, une sélection digne d’un grand cru elle aussi, de la coopérative aiglonne, Les Celliers du Chablais. Puis, le Château Maison Blanche, propriété des familles Schenk et Rosset, dont la situation, tel un phare au milieu du coteau d’Yvorne, est comparable à celle du Clos du Rocher sur 7,5 ha (75% de chasselas). Ensuite, un des vins élaborés par l’œnologue Bernard Cavé, Chapelle, une cuvée sélectionnée respectant la législation grand cru, même si le producteur ne le mentionne pas sur l’étiquette, au contraire du Clos du Crosex Grillé, non finaliste, un grand cru élevé en amphores de béton, qui est suivi par la Mémoire des Vins Suisses. En résumé, si le «terroir» n’a pas imposé sa hiérarchie écrite d’avance, les artistes qui le révèlent savent briller même dans leurs vin à l’étiquette moins enluminée. Belle confirmation! PTs

11


Le Chablais | Aigle et Yvorne

Aigle et Yvorne 1ers Grands crus et Grands crus 2015

La grande dégustation

Pierre Thomas – Photos: Bertrand Rey

1er

18,2/20

Clos du Rocher, Yvorne Grand cru AOC Chablais, Obrist SA, Vevey, 13%, bouteille CDC, vis www.obrist.ch, www.c-d-c.ch Nez ouvert de fruits du verger (pomme, poire et pêche); CO2 un peu agressif à l’attaque; puissant, gras, onctueux, minéral; harmonieux et tonique, avec une pointe d’alcool en fin de bouche; belle persistance; un beau vin, au grand potentiel de garde.

2e

17,4/20

Réserve de la Commune d’Aigle étiquette officielle de F. Rouge, Aigle AOC Chablais, 12,8%, bouteille 70 cl, vis www.aigle.ch Nez discret de fruits blancs mûrs; attaque acidulée, un peu lactique; élégant et frais; manque un peu de peps en finale; belle plénitude actuellement, un vin riche et gourmand.

Daniel Dufaux, responsable de la vinification de la Réserve de la commune d'Aigle 

12

Le Guillon

N°49 2/2016


Frédéric Blanc (à dr.) et son fils Axel

3

e

Patrick Ansermoz, directeur de l'AVY

ex aequo 17,2/20

Le Golliez, Aigle Grand cru AOC Chablais, Charly Blanc & Fils, Versvey, 12%, bouteille 70 cl, vis www.charlyblanc.ch

Chant des Resses, Yvorne Grand cru AOC Chablais, Artisans Vignerons d’Yvorne (AVY), 13%, bouteille 70 cl, vis, label Terravin www.avy.ch

Nez de fleurs blanches, note minérale; belle attaque souple, ample et riche; un vin charnu, goûteux, équilibré, structuré, avec de la souplesse en finale, «bluffant» actuellement note un dégustateur.

Nez floral, de tilleul; attaque fraîche et aérienne, du gras, légères notes fermentaires; assez long en bouche, fine touche d’amertume finale; plus sur l’élégance que sur la structure, bel équilibre entre la maturité et la fraîcheur.

5e ex aequo 17/20

8e 16,5/20

Hospices cantonaux, Aigle Grand cru AOC Chablais, vignobles de l’Etat de Vaud, 12,8%, 75 cl, vis, label Terravin www.vd.ch

Aigle Chapelle AOC Chablais, Bernard Cavé, Ollon, 70 cl, 12,5%, demi-pot vaudois, diams www.bernardcavevins.ch

Nez discret, avec des notes de pêche et de pamplemousse; attaque sur les fruits jaunes; texture fine, avec un joli gras; finale équilibrée et élégante; un vin plein et entier, agréable à boire actuellement.

Nez de poire mûre, avec une note lactée; attaque sur le carbonique; de la fraîcheur en bouche, soulignée par une acidité fine et une finale légèrement beurrée; un vin aux arômes mûrs, mais néanmoins équilibré.

Merveille des Roches, Aigle AOC Chablais, Les Celliers du Chablais SA, 12%, 70 cl, pot vaudois, diams, label Terravin www.lecaviste.ch

9e 16,3/20

Nez discret, un peu lactique; attaque tendre, belle fraîcheur de fruit, note finale un peu amère; frais et élégant; un vin bien construit, auquel il manque un peu de volume.

7e 16,8/20 Château Maison Blanche, Yvorne Grand cru AOC Chablais, 12,5%, bouteille CDC 75 cl, vis www.maison-blanche.ch – www.c-d-c.ch Tendre au nez, notes fermentaires et anisées; carbonique à l’attaque; un vin savoureux, au beau volume, avec du gras, de la puissance et une note minérale (silex) qui s’affirme crescendo au fil de la dégustation.

Le Guillon

N°49 2/2016

Le Tard, Aigle Grand cru AOC Chablais, Cave Borloz, Alexandre Favre, Aigle, 70 cl, 12%, vis www.winechablais.ch Nez un peu fermentaire, avec une touche minérale; carbonique à l’attaque; facile d’accès, souple et riche, sur des arômes de fruits mûrs; manque un peu d’intensité et de longueur en bouche; finale un peu chaude (alcool).

nique; du gras, de la puissance; un vin mûr et riche.

11e 15,5/20 Yvorne Grand cru AOC Chablais, Stéphane Borter, Aigle, 12,5%, 70 cl, liège, label Terravin www.borter-vins.ch Nez un peu fermé, sur la pêche et le melon, avec des notes fermentaires; attaque souple; finale gourmande, saline et minérale, mais un peu court en bouche.

12e 15,4/20 Les Portes Rouges, Yvorne Grand cru AOC Chablais, Claude Isoz, 12%, 75 cl, vis www.winechablais.ch Nez marqué de brûlon, de pierre mouillée; attaque puissante; du gras; on retrouve en bouche les arômes du nez; «old style» sur une trame légèrement tannique et une pointe de végétal.

10e 15,75/20 Chapelle, Aigle Grand cru AOC Chablais, Pierre-Alain Meylan, Ollon, 12,5%, 70 cl, demi-pot vaudois, diams www.pameylan.ch Nez ouvert d’ananas, de mangue, avec une note de miel; attaque fraîche, léger carbo-

13


Toujours là où il y a des chiffres. Immer da, wo Zahlen sind.

En tant que sociétaire découvrez les plus belles régions vinicoles suisses. Entdecken Sie als Mitglied die schönsten Schweizer Weinregionen. 500 vignerons vous invitent à vivre une expérience unique sur leur domaine. Und profitieren von über 500 Spezialangeboten bei den Winzern vor Ort.

raiffeisen.ch/regionsvinicoles raiffeisen.ch/weinregionen

50 %

l’hôtel sur le train, ions et les excurs , Hotels, auf Anreise chiff Bahn und S


Le Chablais | Rouge

Un autre Chablais Partout en Suisse on connaît le chasselas d’Yvorne ou d’Aigle. Plus rares et plus discrets, les cépages rouges du Chablais méritent d’être découverts. Notre dégustation révèle leurs grandes qualités. Eva Zwahlen Photos: Hans-Peter Siffert En Suisse alémanique, Yvorne et Aigle sont des localités célébrissimes. Pour leur chasselas. De ce côté-là du Röstigraben, les autres lieux de production du Chablais comme Villeneuve, Ollon et Bex, sont en revanche plutôt balayés du regard, de la fenêtre de la voiture ou du train, lorsqu’on se rend en Valais. Avec ses 590 hectares de vignes, le Chablais est un peu le corridor de liaison entre les spectaculaires vignobles qui se mirent dans les eaux lémaniques et ceux du Valais, riches en spécialités. Au pied des Préalpes et Alpes vaudoises, et par conséquent très marqué par les montagnes, le Chablais bénéficie d’aussi bonnes conditions climatiques que le Valais – beaucoup de soleil, du foehn – mais voit tomber plus de précipitations.

Bex est le lieu de production qui s’est depuis longtemps le plus dédié aux cépages rouges: 60% de sa vendange aujourd’hui en est issue. Ailleurs le blanc règne en maître. Avec 63% de surfaces, le chasselas reste l’incontesté leader de la région; il est suivi – de loin – par les cépages rouges traditionnels comme le pinot noir (16,5%) et le gamay (presque 7%). Les spécialités dans leur ensemble, blanches et rouges, représentent 13,5% des surfaces du Chablais. Pour cette dégustation, ce sont ces vins qui nous intéressent; non pas les assemblages, mais les vins issus d’un seul cépage.

Les surfaces des spécialités rouges sont très modestes: 3% pour le gamaret (le plus important avec 17 ha), 1,8% pour le merlot (10,3 ha), 1,6% pour le garanoir (9,2 ha), 0,6% pour le galotta (3,3 ha), 0,5% pour la syrah comme pour le cabernet franc (3,3 ha), 0,4% pour le diolinoir, 0,15% pour la mondeuse et 0,1% pour le dornfelder. Malgré des quantités presque anecdotiques, ces cépages rouges, du moins certains d’entre eux, ont montré qu’ils pouvaient donner d’excellents vins dans ce terroir chablaisien. C’est ce qu’a prouvé notre dégustation. ■ ■ ■ Le jury a été séduit par la plupart des vins présentés

13,5% de spécialités L’appellation Chablais compte cinq lieux de production qui se succèdent sur la rive droite du Rhône: Bex (110 ha), Ollon (122 ha), Aigle (135 ha), Yvorne (160 ha) et Villeneuve (63 ha). Les sols chablaisiens sont parmi les plus particuliers du canton. A Villeneuve, Yvorne et Aigle, issus majoritairement d’éboulis, ils sont profonds et caillouteux, et contiennent beaucoup d’éléments calcaires enveloppés dans une matrice argileuse. Les sols des pentes raides, souvent convexes, d’Ollon ou de Bex, en revanche, sont moins profonds; le gypse, parfois le flysch, y dominent.

Le Guillon

N°49 2/2016

15


16


Le Chablais | Rouge

La dégustation Une cinquantaine de producteurs à 100% de l’AOC Chablais, se sont inscrits à notre dégustation. Parmi eux, un certain nombre ne vinifient pas de spécialités monocépages rouges, bien que la plupart aient élargi leur palette de vins ces dernières années, et les cépages «spéciaux» sont noyés dans les assemblages. 19 vins sont finalement arrivés à Zurich pour s’exposer au jugement d’un jury suisse alémanique aguerri (voir encadré). Le résultat? Franchement réjouissant: à quelques exceptions près, ces vins ont su convaincre, voire enthousiasmer les jurés. Quatre vins ont même dépassé le «mur du son» de 17 points! Les vins ont bien entendu été dégustés à l’aveugle, divisés en 8 séries, une par cépage. Le cépage seul a été communiqué aux dégustateurs afin qu’ils tiennent compte de sa typicité. Une classe en soi Avec 18,3 points sur 20, la très stylée Syrah 2014 Grand Cru d’Yvorne arrive en tête du classement. Elle vient d’une des vignes les plus célèbres du

Chablais, le Clos de la George, spectaculairement lové à l’intérieur de murs. Avec son exposition plein sud à l’abri du vent, sa pente escarpée découpée en terrasses, son sol morainique à cailloutis calcaire, ce «clos» offre les conditions idéales non seulement à l’omniprésent chasselas mais à diverses spécialités. Dont notre victorieuse syrah... Anticipant le changement climatique, il y a vingt-cinq ans que le Rollois Charles Rolaz, qui appartient à une famille possédant sept prestigieux domaines dans le canton de Vaud, a commencé à planter des cépages rouges. «Nous avons délibérément opté pour des variétés internationales comme la syrah, le merlot, le cabernet franc, et non pour des nouveautés comme le gamaret ou le garanoir, car nous voulions pouvoir nous mesurer internationalement.» Que la proportion de rouges sur l’ensemble des surfaces demeure très modeste, s’explique selon lui par le fait que le Chablais est traditionnellement célèbre pour ses blancs et que ces derniers se sont toujours bien vendus. «Au contraire d’autres régions viti-

coles vaudoises moins cotées comme la Côte, le Chablais n’a pas dû chercher fortune dans la diversification. Ce qui ne veut pas dire que le terroir et le climat ne sont pas appropriés.» Bien au contraire. La syrah justement, s’intègre parfaitement dans le Chablais qui fait partie de la vallée du Rhône. Un cabernet franc surprenant A la très belle deuxième place, avec 17,5 points, et donc sensiblement en dessous du vin vainqueur, s’est hissé le Cabernet Franc 2014 d’Ollon signé Olivier Christinat. Un vin puissant et élégant, tiré d’un sol profond sablocaillouteux issu d’une ancienne moraine et fruit du travail de vinification du vigneron. Celui-ci se réjouit sans retenue de son succès tout en rendant hommage au gagnant: «Il est évidemment hors classe.» Olivier Christinat travaille son petit domaine de 2 hectares divisé entre Aigle et Antagnessur-Ollon. «Comme tous les vignerons de la région, nous avons commencé il y a vingt ans à nous interroger sur notre gamme de cépages et à lorgner vers des alternatives aux classiques,

Another Chablais Yvorne and Aigle are very well known in the German-speaking part of Switzerland – but only for their Chasselas wines. On the other side of the Röstigraben (the French/Germanspeaking boundary line) other production areas of the Chablais region, such as Vileneuve, Ollon and Bex, are generally overlooked and people tend to go straight to the Valais canton. The Chablais region is rather like a corridor that links the spectacular vineyards reflected in the waters of Lake Geneva with those of the Valais, rich in specialities. Situated at the foot of the Pre-Alps

Le Guillon

N°49 2/2016

and the Swiss Alps, and therefore very much influenced by the mountains, the Chablais region enjoys the same good climatic conditions as does the Valais – a large amount of sun and the Foehn effect – but receives more rainfall. 13.5% of specialities The Chablais appellation covers five production areas which lie side by side along the right shore of the Rhone: Bex (110 ha), Ollon (122 ha), Aigle (135 ha), Yvorne (160 ha) and Villeneuve (63 ha). The Chablais soils are among the most distinctive in the canton. Those of

Villeneuve, Yvorne and Aigle are largely composed of rocky debris (scree), are deep and pebbly, and contain a large amount of calcareous elements enclosed in a clay matrix. In contrast, the soils of the steep, often convex slopes of Ollon and Bex are less deep, and gypsum and often flysch predominate. Bex is a production area that has long focussed on red grape varieties, which account for 60% of the yield. Otherwise, white reigns supreme. Chasselas, which covers 63% of the surface area, is by far the leading variety. It is followed … p. 19

17


BE DIFFERENT. BE SWISS.

WYSCHIFF RAPPERSWIL, LUCERNE, BÂLE, THOUNE, SOLEURE & ZOUG VOYAGE DÉCOUVERTE DANS LE MONDE SAVOUREUX DES VINS SUISSES A l’occasion des Wyschiff, des vignerons suisses renommés sont fiers de vous présenter leurs dernières créations en matière de crus. La plupart d’entre eux sont des vignerons-encaveurs issus de domaines familiaux ayant excellé ces dernières années dans les concours nationaux et internationaux en récoltant une pluie de médailles. Ils auront le plaisir de déguster avec vous une palette de 300 vins et attendent avec impatience votre jugement dans un lieu privilégiant le dialogue entre connaisseurs. Laissez-vous séduire et participez à ce voyage captivant dans le monde des vins suisses. Nous nous réjouissons d’ores et déjà de votre visite ! Association Wyschiff Vignerons Suisses

AGENDA WYSCHIFF 2016 : Wyschiff Rapperswil

25 – 28 février

Wyschiff Lucerne

17 – 20 mars

Wyschiff Bâle

31 mars – 03 avril

Wyschiff Thoune

07 – 10 avril

Wyschiff Soleure ( nouveau )

10 – 13 novembre

Wyschiff Zoug

16 – 19 novembre

Entrée: Fr. 10.– ( verre Wyschiff compris )

www.wyschiff.ch


Le Chablais | Rouge

raconte-t-il. Entretemps, la situation s’est stabilisée et la plupart des collègues en sont venus eux aussi, après une période d’expérimentation, à se concentrer sur des cépages véritablement appropriés à ces terres.» Chez Olivier Christinat la moitié des vignes est plantée en chasselas. «Sur nos pentes plein sud, le pinot noir devient très vite mûr, trop mûr à mon goût. C’est pourquoi j’en ai arraché beaucoup et que je ne produis plus qu’un œil-de-perdrix.» En contrepartie, il propose un pur gamay («celui-là, j’aimerais bien le mettre plus en avant»), un merlot et ce très réussi cabernet franc. Pourquoi pas un cabernet sauvignon? «Chez nous il n’arriverait pas à atteindre sa pleine maturité, au contraire du cabernet franc.» Olivier Christinat avait d’abord imaginé que ce cépage irait se fondre dans un assemblage mais il lui a tellement plu qu’il a essayé de le vinifier seul, dans des barriques de 2-3 ans… Les clients l’apprécient au point que le vigneron veut augmenter sa surface de 1500 m2 et en planter sur d’autres parcelles. Et si la vendange de cette année est bonne, il veut aussi vinifier une pure syrah. ■ ■ ■

… by traditional red grape varieties like Pinot Noir (16.5%) and Gamay (near 7%). Overall, red and white specialities account for 13.5% of the Chablais production area. For the present tasting, it is these wines that are of interest to us, that is, not blends but single variety wines. The surface areas growing red specialities are very small: 3% for Gamaret (the largest, with 17 ha), 1.8% for Merlot (10.3 ha), 1.6% for Garanoir (9.2 ha), 0.6% for Galotta (3.3 ha), 0.5% for Syrah and Cabernet Franc alike (3.3 ha), 0.4% for Diolinoir, 0.15% for Mondeuse, and 0.1% for Dornfelder. Despite the extremely small quantities, these red varieties, or at least certain among them, have

Le Guillon

N°49 2/2016

Dégustation et jury

La dégustation s’est déroulée le 8 juillet 2016 à Zurich, dans les locaux de Swiss Wine Connection. Le jury était composé (de g. à d.) de Hans-Georg Babits (expert en vins et professeur à l’Académie du Vin), Susanne Scholl (journaliste spécialisée), Rudolf Trefzer (éditorialiste et spécialiste cuisine et boissons à la radio SRF), Eva Zwahlen (journaliste spécialisée et collaboratrice de longue date de la revue Le Guillon), ainsi qu’Andreas Keller (journaliste et propriétaire d’une agence de presse spécialisée dans les événements liés au vin).

shown that they can deliver excellent wines on Chablais soils. That is what our tasting has demonstrated. The tasting About 100 producers registered for our tasting, all had AOC Chablais classification. Some of them do not make monovarietal red specialities - although most have broadened their range of wines these last few years - so the specialities are often lost among the blends. In the end, nineteen wines arrived in Zurich to be submitted to a seasoned SwissGerman jury (see box). The outcome was extremely satisfactory. Apart from a few exceptions, these wines managed

to engage and awaken the interest of the jury. Four wines even crossed the ‘sound barrier’ with 17 points! The tasting was blind and the wines were divided into 8 series according to grape variety. The tasting panel were informed only of the grape varieties to allow them to take into account their characteristic features. The podium With 18.3 points out of 20, the highly stylised Syrah 2014 Grand Cru d’Yvorne came first. It comes from one of the most famous Chablais vineyards, le Clos de la George, which is spectacularly nested within walls. With its full… p. 20

19


Le Chablais | Rouge

Comme dans la Loire Hasard ou pas, on trouve un autre cabernet franc d’Ollon (en ex aequo avec une syrah) en troisième place de notre dégustation. Vinifié par PierreAlain Meylan il a obtenu 17,3 points. «Ici à Ollon, s’emballe le vigneron, nous avons un terroir absolument idéal pour le cabernet franc.» Ce vin, issu de raisins qui poussent sur ses meilleures pentes orientées au sud, a déjà été primé. «Les sols, détaille-t-il, ressemblent à ceux de la Loire, très calcaires.» Les vins ligériens sont un modèle pour Pierre-Alain Meylan, une inspiration. «Oui, j’aime ces vins, et je fais au fond des vins que j’aime.» Raison pour laquelle il a non seulement planté du cabernet franc mais aussi du sauvignon blanc. Il n’oubliera pas de sitôt les vendanges 2014, où «tout devait aller très vite, à cause des mouches suzukii. Nous avons vendangé 10 jours plus tôt que d’habitude et n’avons rentré que l’équivalent de deux tiers d’une récolte normale.» A la fin, il a quand même réussi à remplir une douzaine de barriques de rouge de belle qualité, tandis qu’il vinifiait le reste en rosé. «Pour planter du cabernet franc, j’ai dû arracher du chasselas… Ça a été une bonne décision, car j’ai pu ainsi conquérir les

grands restaurants. Goûtez donc un cabernet franc avec de la chasse! La combinaison est parfaite.» Au troisième rang ex  aequo , se place une syrah, également d’Ollon, la Syrah Grand Cru 2014 de Harald Cropt. Ce jeune homme sympathique, diplômé de Changins et amateur multicouronné de lutte suisse, vient d’une famille qui cultive non seulement les 2 hectares sur lesquels poussent 10 cépages différents mais encore des surfaces agricoles. «C’est la toute première fois, dit-il, que je vinifie une syrah pure. En réalité, c’était un essai…» Devenu une réussite! Il a osé élever sa syrah en barriques neuves selon le système de la vinification intégrale. Plantés le long des murets, ses raisins avaient engrangé le maximum de soleil et de chaleur possible... Le résultat met en appétit. Ça tombe bien, Harald Cropt a justement quelques projets: il vient de planter du merlot!

… southern exposure sheltered from the wind, its steep terraced slope, and its morainal soil rich in limestone gravel, this vineyard offers ideal conditions not only for the omnipresent Chasselas but also for various specialities - such as the winning Syrah. Twenty five years ago, Charles Rolaz from Rolle who belongs to a family that owns seven prestigious estates in the Vaud canton, anticipated the climate change and started planting red grape varieties. The Syrah variety fits perfectly in the Chablais region lying between the Swiss and French parts of the Rhone valley.

The Cabernet Franc 2014 from Ollon, signed Olivier Christinat, came second with 17.5 points, well below the winner’s score. A powerful and elegant wine, drawn from a steep, sandy and stony soil, formerly moraine, it is the fruit of the wine-maker’s vinification talents. Third place in our tasting went jointly to another Cabernet Franc from Ollon and to a Syrah. The former, vinified by Pierre-Alain Meylan, obtained a score of 17.3. “Here in Ollon, we have a climate and soil that are perfect for Cabernet Franc”, the wine-maker explains excitedly. This wine that comes from grapes

20

Merlot, mondeuse et dornfelder Une vieille connaissance a pris la cinquième place: le Merlot Apicius 2013 du Clos du Châtelard, domaine de la famille Rolaz et jugé meilleur merlot de Suisse au Mondial du Merlot 2012, au grand dam des Tessinois. Le suivent

le Gamaret L’Aigle Bleu 2014 de la coopérative de Villeneuve, le Merlot 2014 de l’Abbaye de Salaz (gagnant au niveau du rapport qualité-prix!) et l’époustouflant Dornfelder Entre Ciel et Terre 2015 d’Aigle signé Stéphanie Delarze. Très proches par les points, les trois mondeuses ont suscité un bel enthousiasme auprès du jury, malgré des tanins rustiques propres au vieux cépage savoyard, qui appelleraient un accompagnement solide. La Mondeuse 2014 de la commune d’Yvorne, vinifiée par Frédéric Blanc, s’est placée un brin devant celle de la même année de Charly Blanc & Fils (vinifiée elle aussi par Frédéric…), et cette dernière un chouia devant la Mondeuse 2013 de la famille Dupertuis. Le Gamaret Réserve Les Moines 2013 complète le palmarès. En tout, douze monocépages rouges remarquables qui peuvent tout à fait rivaliser avec l’icône du Chablais, le chasselas.

Charles Rolaz a des ambitions internationales pour sa syrah

that grow on the best south-facing slopes has already won a number of prizes. The joint third, also from Ollon, was the Syrah Grand Cru 2014, produced by Harald Cropt. This likeable young man, a Changins graduate, and a frequent prize-winner in Swiss amateur wrestling, comes from a family that not only grows 10 grape varieties on 2 ha of vineyards, but also has agricultural land. “It’s the very first time that I’ve vinified a pure Syrah. In fact, it was an experiment”, he explains. An experiment that turned out to be a success!

Le Guillon

N°49 2/2016


Rouges monocépages du Chablais Eva Zwahlen Photos: Hans-Peter Siffert

1er

avec 18,3/20

Syrah 2014 Yvorne Grand Cru AOC Chablais Clos de la George, Hammel SA, Rolle www.hammel.ch Robe rouge foncé, jeune, aux reflets violets. Beau nez intense avec des arômes caractéristiques de poivre noir, de baies noires, d’épices, de fumé et de bois neuf bien fondu. Attaque pleine de fraîcheur, très élégante, un vin bien structuré avec de magnifiques tanins lisses et stylés, une bonne acidité et une finale qui se prolonge longtemps dans le palais. Un vin marquant et encore très jeune mais riche en caractère, en potentiel et en profondeur! Chapeau!

21


3e

ex aequo 17,3/20

Ollon Cabernet 2014 Pierre-Alain Meylan, Ollon www.pameylan.ch Robe rouge moyen. Dans son bouquet très frais dominent les arômes de petits fruits rouges (raisinets) et noirs (cassis) arrondis par une nuance de poivron. La bouche se présente pleine de force, encore un peu marquée par le bois, avec un fruit doux et flatteur, et des tanins vigoureux et denses. Un vin encore jeune, typé du cépage, un peu «mode» peut-être, mais assurément prometteur. Syrah Grand Cru d’Ollon 2014 Domaine de Trécord www.trecord.ch Robe pourpre moyen. Au nez, des notes épicées évocatrices de livèche et d’herbes sèches, et de bois. Belle attaque dans la douceur, tanins bien intégrés, un brin asséchants, un corps rond, plein, au fruit doux et d’une belle acidité. Une syrah qui mériterait encore d’être fondue et affinée, et qui demande à vieillir.

5e 16,9/20 Merlot Apicius 2013 Grand Cru de Villeneuve Clos du Châtelard, Hammel SA, Rolle www.hammel.ch

e

2

Olivier Christinat

avec 17,5/20

Ollon Cabernet Franc 2014 Olivier Christinat, Le Sépey www.christinat-vin.ch Belle couleur rubis. Un nez encore un peu sur la retenue mais profond, classique avec des arômes de cerise noire et d’œillet. Au contraire du bouquet, la bouche est déjà bien développée: attaque fraîche, rondeur, bonne structure avec des tanins marquants mais élégants et fins, acidité bien présente soutenue par des notes de fruits mûrs, à la fois épicées relevées et douces. Un vin droit, intéressant et d’une finesse convaincante.

22

Robe d’un beau rouge sombre. Nez intense aux arômes de griotte, de prune, d’œillet et d’herbes des prés. Le bois est présent, mais bien intégré. Attaque un peu raide en bouche, bonne structure, riche en matière, avec des tanins marquants, un peu desséchants, et une belle longueur. Un vin paraissant encore très jeune, actuellement marqué par le bois, mais au potentiel incontestable!

6e ex aequo 16,8/20 Gamaret L’Aigle bleu 2014 Société Coopérative Viticole de Villeneuve www.laviticole.ch Robe rouge foncé. Nez encore sur la retenue, qui dégage une fois aéré de beaux arômes d’épices, de réglisse, de baies noires et de bonbons au cassis. Attaque précise, bonne structure soutenue par des tanins un peu rustiques et rugueux mais bien enveloppés; belle acidité fraîche. Un vin plein de caractère encore marqué par le bois mais prometteur, qu’on voit très bien accompagner une viande braisée.

Le Guillon

N°49 2/2016


Pierre-Alain Meylan

Harald Cropt (Domaine de Trécord)

6e ex aequo 16,8/20

8e ex aequo 16,6/20

11e 16,4/20

Merlot 2014 Ollon Grand Cru AOC Chablais Abbaye de Salaz, Ollon www.abbaye-de-salaz.ch

Mondeuse 2014 Yvorne Grand Cru AOC Chablais Domaine de la Commune d’Yvorne www.provino.ch/domaine-de-la-communedyvorne.html

Aigle Mondeuse 2013 Famille Dupertuis, Artisans du Vin, Aigle www.artisansduvin.ch

Robe jeune, rouge foncé. Nez très expressif, classique et élégant, intensément fruité avec des notes de baies rouges et noires, des arômes doux, du bois bien intégré et une touche de lierre. Attaque fraîche en bouche, belle rondeur, structure ferme, corps dynamique avec des tanins fins. Un vin élégant, long en finale.

8e ex aequo 16,6/20 Dornfelder Entre Ciel & Terre 2015 Aigle Grand Cru AOC Chablais Domaine de La Baudelière, Aigle www.labaudeliere.ch Robe rouge violet dense. Nez intense et expressif, épicé, aux arômes de vanille, de prune, de compote de baies, de cannelle et autres épices douces. Très agréable au palais, d’une rondeur flatteuse, avec des tanins bien enveloppés. Fruit doux, et petite amertume structurante en finale. Un vin original assumé, qui pulvérise tous les préjugés touchant ce cépage.

Le Guillon

N°49 2/2016

Robe rouge moyen. Au nez, arômes de baies des bois, de sous-bois et de poivre vert. Au palais, plein de vivacité et d’espièglerie, avec un beau fruit et des tanins certes un peu rustiques mais bien liés, et une belle acidité toute en fraîcheur. Un vin plein de caractère, typé du cépage, intéressant et droit, qui fait plaisir.

10e 16,5/20 Yvorne La Mondeuse Noire 2014 Charly Blanc & Fils www.charlyblanc.ch Robe rouge moyen. Nez charmant et fruité, aux accents floraux et aux notes de cerise. Attaque moyenne, corps plutôt mince mais dynamique et ferme, structuré par des tanins aimablement rustiques. Un vin frais, agréable, plein de caractère. Un vrai petit montagnard!

Robe rouge moyen. Nez très intense, encore marqué par l’élevage avec des arômes de compote de fruits à noyau. Dense au palais, structuré par des tanins légèrement amers et une belle acidité. Un vin ambitieux avec un potentiel de vieillissement, qu’on voit associé avec du gibier. Et un excellent rapport qualité-prix!

12e 16,3/20 Gamaret Réserve Les Moines 2013 Villeneuve Grand Cru AOC Chablais Domaine Diserens, Villeneuve www.lesmoines.ch Robe d’un beau rouge foncé. Nez intense et fruité aux arômes de compote de baies rouges et noires et de bois neuf. En bouche, il présente une belle rondeur, et de la puissance avec un fruit rayonnant, beaucoup d’éclat et un boisé encore un peu dominant. Un vin «nouveau style», à la fois rond et puissant.

23



Le Chablais | Châteaux

Aigle, Ovaille, Châteaux L’AOC du Chablais Alexandre Truffer

«L’archéologie montre que l’homme est présent dans le Chablais vaudois depuis plus de 3500 ans, mais la région gagne en importance au premier siècle après Jésus-Christ, lorsque l’empereur romain Claude rend carrossable le passage du Grand-Saint-Bernard afin de faciliter le soutien logistique des légions lancées à la conquête de la Grande-Bretagne. La route passe par Agaune, qui deviendra SaintMaurice, où se trouve le péage romain d’entrée dans la province des Gaules, puis traverse le Rhône à Massongex. Elle continue jusqu’à Vevey avant de se diviser en deux voies, l’une conduisant vers Avenches, la capitale de l’Helvétie romaine l’autre vers Lausanne et la Gaule». Cette situation stratégique

Des soldats de la péninsule italienne en route pour des guerres qui se déroulaient au nord de la Suisse: voilà l’élément déclencheur des principaux bouleversements historiques qui ont modelé cette région fille des Alpes et du Léman.

du Chablais que décrit Nicolas Isoz, le conservateur du Musée de la vigne, du vin et de l'étiquette du Château d’Aigle, perdurera au Moyen-Âge avec la présence d’un péage près de Villeneuve. Cette bourgade constitue la porte d’entrée occidentale du caput lacus, en latin la tête ou le sommet du lac, que le temps déformera en «capolai», «chablas» et enfin «chablais». Ce nom désigne différents territoires en fonction des époques et des per­ spectives. Pour simplifier, relevons que le Chablais vaudois – qui voisine les Chablais valaisans et savoyards – correspond à la rive droite du Rhône de Lavey jusqu’au lac Léman. En 1475, durant les guerres de Bourgogne, les Bernois avec l’aide de sujets du Comte

Aigle, Ovaille, and the castles “The region took on greater importance in the first century AD when the Roman emperor Claudius had a road built over the Grand Saint-Bernard to provide logistical support for the legions that had set out to conquer Great Britain. The road passed through Agaune, which later became Saint-Maurice, then continued on to Vevey before breaking up into two parts one leading to Avenches, the capital of Roman Helvetia, and the other to Lausanne and Gaul”. The strategic situa-

Le Guillon

N°49 2/2016

tion of the Chablais region, as described here by Nicolas Isoz, curator of Musée de la Vigne et du Vin in Château d’Aigle, was much used throughout the Middle Ages thanks to a toll gate situated near Villeneuve. This town constitutes the gateway to the top of the lake, caput lacus in Latin which over time degenerated into capolai, chablas and finally chablais. The name designates different territories. The Chablais region of Vaud has been defined by historians as the

de Gruyère s’emparent de ces territoires. Avec un objectif, empêcher le passage de mercenaires italiens venus à la rescousse de Charles le Téméraire. Cette annexion fait du Chablais la première terre francophone à intégrer, dès 1476, la Confédération Helvétique. Définitivement annexé par Berne l’année suivante, la région est divisée en quatre mandements: Aigle, Ollon, Bex et Les Ormonts. Bien que Berne impose dès 1525 la religion réformée sur l’intégralité des territoires qu’elle contrôle, les droits seigneuriaux des abbayes catholiques voisines sont préservés. Ce mélange d’influences savoyarde, bernoise et catholique transparaît dans les sites emblématiques de cette AOC de quelque 600 hectares. ■ ■ ■

Savoyard possessions in Vaud. In 1475, at the time of the Burgundian wars, the Bernese and Fribourg armies captured these territories. Their objective was to prevent the Italian mercenaries from coming to the rescue of Charles the Bold. Thanks to this annexation, the Chablais became the first French-speaking territory to join the Helvetic Confederation. The following year it was annexed by Bern. Although Bern gradually imposed the reformed religion on all the territories under its control, the seigneurial rights of the Roman Catholic … p. 26

25


© Pascal Besnard

… abbeys of the allied regions of Valais and Fribourg were preserved. In 1490, Their Excellencies of Bern built another large square tower facing the city. “It was their way of making it known that the city had a new head”, explains Nicolas Isoz. In the first half of the 12th century, the site looked very different from the way it looks today. Two towers, some tens of metres apart, faced each other. The older one, built by the Aigle family, later became the Château

26

d’Aigle. The other one, built a few years later by the Count of Savoy, was transformed 350 years later into an outbuilding of the castle, the present-day Maison de la Dîme. “In 1798, the last Bernese governor left the castle for Les Ormonts where he tried to organise resistance against the French invaders. In the meantime, Bern capitulated and the magistrate, who was also a wine trader, easily made his way back to the castle to recover the bar-

rels of the 1797 vintage which he had purchased. Unfortunately, he was not as lucky with his silverware which had been stolen by a French general”, recounts Nicholas Isoz with a smile. Vineyards have probably always surrounded the castle. In 1804, they were sold to private owners by the Vaud canton which had nationalised the possessions of the Bernese and found itself short of money. “The canton forced the town of Aigle to acquire the castle and

Le Guillon

N°49 2/2016


Le château d'Aigle

Château d’Aigle: les deux tours «Avant 1476, nous n’avons pas de sources écrites sur le château d’Aigle. Lorsque Leurs Excellences de Berne s’installent dans le Chablais, elles renforcent les murailles afin d’offrir une protection plus efficace contre l’artillerie en plein développement. Dès 1490, ils érigent une grande tour carrée qui fait face à la cité. C’est un édifice de propagande, une manière d’annoncer qu’il y a un nouveau chef dans le pays», explique Nicolas Isoz qui précise que les recherches archéologiques permettent toutefois de formuler des hypothèses vraisemblables sur les origines du château. Les fouilles ont mis au jour des traces d’occupation datant de l’époque romaine ainsi que des sépultures du haut Moyen-Âge (6e et 7e siècles). Dans la première moitié du 13e siècle, le site offrait un aspect très différent d’aujourd’hui. En effet, deux tours se faisaient face à quelques dizaines de mètres. La plus ancienne, construite par les Chevaliers d’Aigle, deviendra au fil des siècles le château. La seconde, érigée quelques années plus tard, par le Comte de Savoie - qui en 1232 l’échange contre le château de Saillon - sera transformée 350 ans plus tard en une dépendance rurale, l’actuelle Maison de la Dîme. La question de savoir si les deux hobereaux et leur maisonnée cultivaient des relations de

put in a court of justice and a prison. The latter was modernised several times before closing in 1970”, explains the present custodian of the building. The project of transforming the prison into a museum took shape following the national exhibition. The Confrérie du Guillon had acquired the objects displayed in Lausanne in 1964 and had the vision of creating an institute for Vaud wines with an exhibition area. In 2008 and then in 2014 the museum was com-

Le Guillon

N°49 2/2016

Le Chablais | Châteaux

Nicolas Isoz, conservateur du Musée vaudois de la vigne, du vin et de l'étiquette 

© Edouard Curchod

bon voisinage ou s’ils se regardaient en chiens de faïence ne sera sans doute jamais résolue, faute de témoignage écrit relatif à cette étonnante copropriété médiévale. L’arrivée des gouverneurs bernois, élus pour six ans et qui avaient pour tâche de récolter les impôts ainsi que d’administrer la justice, verra la forteresse perdre un peu de son caractère militaire pour devenir plus habitable. Pendant les trois siècles suivants, plafonds peints, fresques, poêles et escalier monumental viendront embellir la résidence bernoise. «En janvier 1798, le dernier gouverneur, Beat-Emmanuel de Tscharner, quitte le château pour le Pays d’Enhaut où il tente d’organiser la résistance contre l’envahisseur français. Berne capitule dans l’intervalle et le magistrat, actif dans le commerce

pletely renovated. Its four depots currently house 350,000 labels and 8,000 objects all connected with Vitis vinifera and Bacchus. 1584: A Terrible Year of Landslides Alongside the Aigle fortress, the Château Maison Blanche is the most spectacular feature of the Chablais region heritage. It has belonged to the Schenk and Rosset families since 1930. The Ovaille estate, which no doubt has

de vin, revient tranquillement rechercher les tonneaux du millésime 1797 qu’il avait acheté. Malheureusement, il n’a pas autant de chance avec son argenterie. Cette dernière lui a été dérobée par un général français, le bien nommé Rapinat», s’amuse Nicolas Isoz. Cette anecdote rappelle que des vignes ont sans doute encerclé le château depuis plus de mille ans. Elles seront d’ailleurs revendues à des propriétaires privés dès 1804 lorsque Vaud, qui a nationalisé les biens des Bernois, a besoin d’argent. «Le canton a forcé la main à la ville d’Aigle pour qu'elle fasse l’acquisition du château afin d'y installer un tribunal et une prison, qui après avoir été décrite comme la plus inhumaine et la moins sûre du canton dans un rapport de 1829, sera modernisée plusieurs fois jusqu’à sa fermeture en 1970», poursuit l’actuel gardien des lieux. Le projet de transformer les geôles en musée prend forme à la suite de l’Expo 64. «La Confrérie du Guillon avait racheté des objets présentés à Lausanne et avait le projet de faire une maison du vin vaudois incorporant un espace d’exposition. La muséogra-

the richest soil in the Chablais region, emerged as a result of a tragic event. One Sunday in March 1584 an earth tremor destroyed some old buildings, but no one was killed. Over the following two days a number of aftershocks were recorded. On the Wednesday, the weakened slopes of the mountain above the villages of Corbeyrier and Yvorne gave way and slid down the cliff. Corbeyrier was destroyed in seconds. The landslide then hit the village of Yvorne. … p. 29

27



Le Chablais | Châteaux

Abbaye de Salaz

© Hans-Peter Siffert

Fief de l’Abbaye de Saint-Maurice

Entouré d’un domaine mixte (vigne, bétail et céréales) de 60 hectares, l’Abbaye de Salaz fait partie de ces caves vaudoises qui ont fait le pari de l’œnotourisme. «Entre les manifestations comme les Caves ouvertes vaudoises et les Balades dans le vignoble, les événements organisés pour des privés et nos animations estivales, nous recevons quelques 8000 personnes par année», explique Bernard Huber qui s’occupe de la vinification des quatre hectares de vignes du domaine familial. Les nombreux visiteurs apprécient l’architecture de la

… The men were in the fields and the hundred or so victims were mainly women and children. Sixty-nine houses were carried away together with several hundred head of cattle. The village and the Maison Blanche were rebuilt a quarter of a century later, to the east of the rock fall. Vineyards were planted in the debris and four centuries later they produced two Premiers

Le Guillon

N°49 2/2016

bâtisse, dont l’aspect actuel remonte à 1706, mais connaissent rarement son riche passé. Durant le Moyen-Âge, la majorité de la bourgade d’Ollon appartenait à la puissante abbaye de Saint-Maurice fondée en 515 par le roi burgonde Sigismond. Pour administrer ce territoire, les chanoines construisent plusieurs bâtiments dont la maison de Salaz (qui prendra avec le temps le nom d’abbaye bien qu’elle n’ait jamais eu de caractère religieux). Fondée par l’abbé Rodolphe dans la deuxième moitié du 12e siècle, cette maison forte sert de centre

Grands Crus, one of which is vinified by Hammel, in Rolle, and the other by the Deladoey family. Abbaye de Salaz The Abbaye de Salaz, which is surrounded by a 60-hectare estate, is one of the Vaud wineries that have set their sights on wine tourism. In the Middle Ages, most of the village of Ollon be-

administratif, de prison, puisque les chanoines rendent la justice sur les terres dont ils sont suzerains, mais aussi d’hôpital, d’hospice pour les nécessiteux et de halte pour les voyageurs. L’arrivée des Bernois va modifier l’équilibre des pouvoirs. L’édit de Réformation, accepté à Ollon en mars 1528, implique que l’abbé de SaintMaurice perd ses droits spirituels, mais conserve ses droits temporels sur les territoires qu’il administre. Les impôts continuent donc d’être perçus par les chanoines catholiques, mais une partie de ces taxes sont utilisées pour rémunérer les pasteurs protestants qui ont désormais seuls droit de cité dans le Chablais bernois. Cet étonnant arrangement perdurera jusqu’au 18e siècle. En 1851, le gouvernement valaisan oblige les établissements religieux du canton à financer les frais de guerre consécutifs à la Guerre du Sonderbund. SaintMaurice se voit contrainte de vendre le domaine de Salaz qui passera en mains de plusieurs propriétaires privés avant d’être racheté en 1949 par un paysan bernois, Max Zbinden, le père et grand-père des propriétaires et exploitants actuels. AT

longed to the powerful abbaye de SaintMaurice, founded in 515 by Sigismund, King of Burgundy. In order to administer the land, the monks constructed a number of buildings one of which was Salaz which over time took on the name of abbey although it had never been used for religious purposes.

29


© Pascal Besnard

Le Chablais | Châteaux

Artisans Vignerons d’Yvorne Les atouts des nouveaux atours «Si nous avons décidé de rajeunir les étiquettes de notre vin le plus connu, le Chant des Resses, c’est que nous voulions mettre cette marque davantage en évidence», explique Patrick Ansermoz, le directeur des Artisans Vignerons d’Yvorne, la coopérative créée en 1902 qui encave, vinifie et commercialise la production de quelque 120 vignerons. Ces derniers possèdent plus du tiers du vignoble d’Yvorne (55 hectares sur 160). «Dans un avenir proche, les appellations d’origine contrôlée (AOC) seront pro

bablement transformées en appellations d’origine protégée (AOP). Vu qu’on ne sait pas quelles implications auront ces changements, nous désirons nous laisser une certaine marge de manœuvre, car une seule chose est garantie à l’heure actuelle, c’est que la marque Chant des Resses restera», poursuit Patrick Ansermoz. Produit à quelques 80'000 bouteilles – sur les 700'000 cols commercialisés par la cave – le Chant des Resses fait partie de ces classiques très souvent en haut des podiums. Lauriers

Ludovic Parisod, caviste et Patrick Ansermoz, directeur de l'AVY

de Platine en 2009, troisième vin sec du Mondial du Chasselas 2014, cette spécialité est «issue d’une sélection viticole. Les parcelles qui le composent se situent principalement au cœur du vignoble et les producteurs s’engagent à accepter de différer la récolte jusqu’à ce que la maturité optimale soit atteinte même si cela implique de vendanger une à deux semaine après le reste». Deux autres classiques – le Chasselas Tradition (160'000 bouteilles) et le Pinot Noir Feu d’Amour (40'000 bouteilles) – ont aussi été rafraîchis pour un résultat considéré, selon Patrick Ansermoz: «comme très positif par la clientèle, même s’il reste quelques nostalgiques.» AT www.avy.ch

© Bertrand Rey

Artisans Vignerons d’Yvorne (AVY) “We have decided to rejuvenate the label of our best-known wine, Chant des Resses, because we want to bring more focus to the brand”, explains Patrick Ansermoz, the director of AVY, a cooperative created in 1902 which presses, vinifies and markets the production of some 120 winegrowers. Altogether they own more than one third of the Yvorne vineyards, 55 ha out of the total 160 ha.

30

In the near future, the appellations d’origine contrôlée (AOC) will most probably be changed to appellations d’origine protégée (AOP). We don’t know what implications these changes may have, but one thing we’re sure about is that the Chant des Resses brand is here to stay”, Patrick Ansermoz added. With some 80,000 bottles marketed - out of the 700,000 total sold by the

cooperative – the Chant des Resses is one of those classics that are frequently awarded prizes. This special wine that won the Platinum Laurels award in 2009, and came third in dry wines at Mondial du Chasselas 2014 “comes from a selected vineyard area. The plots are situated mainly in the very heart of the vineyards, and the producers have committed to defer harvesting until maximum maturity has been reached”. www.avy.ch

Le Guillon

N°49 2/2016


 Le

phie de l’époque, centrée autour des objets relatifs à la vigne et au vin tombés en désuétude – on organisait des récoltes dans toutes les appellations pour récupérer ce dont les vignerons ne se servaient plus - avait un côté très nostalgique. De 2008 à aujourd'hui, le musée a été complètement transformé afin d’expliquer de manière ludique et interactive le travail et la vie du vigneron. Les objets, passés au deuxième plan, sont et seront mis en valeur dans des expositions temporaires», conclut Nicolas Isoz qui précise que dans les quatre dépôts de l’institution reposent à l’heure actuelle 350'000 étiquettes et 8'000 artefacts en rapport avec vitis vinifera ou Bacchus. 1584: la terrible année de l’ovaille Avec la forteresse d’Aigle, Château Maison Blanche, à Yvorne, est le plus spectaculaire élément patrimonial du Chablais. Appartenant aux familles Schenk et Rosset depuis les années 1930, le domaine est entouré d’un magnifique écrin de vignes dans lesquelles naissent les trois vins du domaine, le chasselas membre de la Mémoire des Vins Suisses, le savagnin blanc et un assemblage rouge. Rénové en 1974 suite à un incendie qui ravage la charpente, le bâtiment a acquis son titre de château au 19e siècle lorsqu’un

Le Guillon

N°49 2/2016

château Maison Blanche et le vignoble de l'Ovaille

donjon et un clocheton sont ajoutés à la Maison Blanche appartenant à la famille Würstenberger, depuis 1750. Ces patriciens l’avaient achetée aux descendants d’Antoine et Borckhardt d’Erlach qui avait édifié la première maison en 1573. Sans doute le plus célèbre terroir du Chablais, l’Ovaille est né d’un événement tragique. Comme le raconte un notaire d’Aigle dont l’histoire a gardé le récit, mais pas le nom: «Le Dimanche premier jour de mars 1584 és pays de Lyonnois, Masconnois, Dauphiné, Saouye, Piedmont, Valais, Suisse et Bourgogne, à onze heures et demie venanz à midi, l’air estant coy, assez clair et serain, et le soleil luisan, se fit une secousse ou prompt eslancement et tremblement de terre qui ne dura pas plus de dix ou douze minutes d’orloge pour ce coup là.» Cette secousse détruisit de nombreuses cheminées et quelques vieux édifices, mais sans faire de victimes. Les deux jours suivants ont lieu diverses répliques. Le mercredi, entre neuf et dix heures du matin, les flancs de la montagne surplombant les villages de Corbeyrier et Yvorne fragilisés par les mouvements telluriques cèdent et dévalent la falaise. Le premier, composé selon notre notaire de huit maisons et d’une dizaine de granges, est rasé en quelques

secondes à l’exception d’une demeure miraculeusement épargnée. Après Corbeyrier, le glissement de terrain gagne encore en furie et s’abat sur le village d’Yvorne. Peut-être en est-il des villages comme des personnes: une fois décédés, ils n’ont plus que des qualités. Dans tous les cas, notre notaire fait de l’Yvorne antérieur à 1584 un portrait idyllique. Il le décrit comme «un lieu si fertile que l’on faisait chaque année trois cueillettes de blé, de millet et de raves. Aussi n’y avait-il ni pauvres, ni mendiants,… mais tous étaient gens simples, travailleurs, éloignés des mauvaises pratique comme l’usure ou les procès.» Les hommes étant aux champs, la centaine de victimes se compose surtout de femmes et d’enfants. Quatre caves, six granges et soixante-neuf maisons sont emportées ainsi que plusieurs centaines de têtes de bétail. Il semble que l’événement ait marqué les mémoires puisque le village, et la Maison Blanche, ne seront reconstruits qu’un quart de siècle plus tard, à l’est des éboulis. L’ovaille est lui transformé en un vignoble qui, quatre siècles plus tard, donne naissance à deux Premiers grands crus, l’un vinifié par la maison Hammel, de Rolle, l’autre par la famille Deladoey.

31


puissance des couleurs,

ĂŠveil des saveurs

PCL Presses Centrales SA Av. de Longemalle 9 | 1020 Renens | TĂŠl. 021 317 51 51 | www.pcl.ch


Le Chablais | Musée

Passage de témoin Pascal Besnard

au Musée vaudois de la vigne, du vin et de l’étiquette

Le château d’Aigle est un monument historique d’importance majeure (voir l’article d’Alexandre Truffer p. 25). Il l’est d’autant plus qu’il abrite depuis 1971, année de sa création par la Confrérie du Guillon, un remarquable musée, qui n’a cessé de se développer au fil des décennies. Le Musée vaudois de la vigne, du vin et de l’étiquette est une institution de référence pour les aficionados d’histoire vitivinicole comme pour les œnographiles ou œnosémiophiles, autrement dit les collectionneurs d’étiquettes. Le musée recèle un véritable trésor (parmi d’autres): 350'000 étiquettes de bouteilles de vin! Passage de témoin entre Fabien Loi Zedda (à dr.) et Kurt Egli 

Derrière le musée et ses collections, il y a des femmes et des hommes. Autrement dit, un comité. Son président depuis 2006, Fabien Loi Zedda (en tout 16 ans de comité), a passé le relais, au début de l’été, à Kurt Egli, ancien directeur général de Badoux Vins, retraité depuis début 2016, après quarante-trois années de vie professionnelle à Aigle! En souplesse Un passage de témoin en souplesse entre deux hommes qui se connaissent bien: ils se côtoyaient depuis dix ans au sein du comité du musée. A l’historien-archéologue (1) succède le professionnel de la vente et du marketing dans le secteur vitivinicole. Fabien Loi Zedda s’en va, explique-t-il, «à la fin d’une époque. En 2010, la refonte des deux tiers du musée était achevée et en 2013, la salle des étiquettes était inaugurée. Depuis 2006, trois millions de francs ont été investis dans le musée.

Et puis sur le plan personnel, je suis coutumier de cycles de dix-douze ans.» Kurt Egli, de son côté, salue « le souci de Fabien de laisser un musée financièrement sain. Sans dettes qui ne soient remboursables. En ce qui me concerne, j’ai non seulement le souci de pérenniser, mais aussi de créer. Par exemple, une antenne du musée en Suisse alémanique, un région que je connais bien, et pourquoi pas une autre au Tessin. J’ai l’espoir que le monde viticole helvétique dans son intégralité sera derrière le château d’Aigle, qu’il le reconnaisse comme symbole du vin suisse.» Loi Zedda-Egli, les deux hommes le disent haut et fort: c’est la même équipe. Et histoire de lier le passé au futur, Fabien Loi Zedda a été nommé Président d’honneur du musée. (1) Il est aussi Conseiller de la Confrérie du Guillon et fin dégustateur, comme en témoigne son titre de Vice-Chapeau Noir 2015!

Passing the Baton at the Vaud Vine, Wine and Label Museum © Pascal Besnard

The Vaud Vine, Wine and Label Museum located in the Château d’Aigle is a leading reference for wine lovers and label collectors. The museum displays 350,000 wine bottle labels! Fabien Loi Zedda, who had presided the institution since 2006, handed the baton at the beginning of the summer to Kurt Egli, the

Le Guillon

N°49 2/2016

former CEO of Badoux Vins who had retired a few months earlier. The two men had rubbed shoulders for ten years at the museum’s committee meetings. A sales and marketing specialist takes over from a historian-cum-archaeologist. Fabien Loi Zedda is proud to point out that two-thirds of the museum had been refurbished by 2010 and that a

Labels hall had been inaugurated in 2013, while Kurt Egli for his part is happy to see that his predecessor has left behind a financially sound institution. He hopes to be able to create a branch of the museum in the Germanspeaking part of Switzerland. His objective is to ensure that the Swiss wine sector backs the Château d’Aigle which he considers the symbol of Swiss wine.

33


AIGLE - 24 JUIN 2016

MEILLEUR CHASSELAS DU MONDE

PAVILLON des VINS de TOLOCHENAZ - Ch. du Saux 5 - T +41 21 804 54 90 CAVE de NYON - Rte du Stand 37 - T +41 22 363 88 00 - cidis@cidis.ch


Concours

Mondial du Chasselas 2016

Les Vaudois triomphent Cette compétition très dynamique a de nouveau souri aux producteurs vaudois. Le Vieilles Vignes de Morges d’Uvavins s’adjuge la catégorie reine tandis que la Cure d’Attalens rafle pas moins de cinq trophées. Alexandre Truffer Photos: Edouard Curchod

Début juin 2016, 763 chasselas, fendant et Gutedel de Suisse, d’Allemagne, de France, de Hongrie, du Canada, des Etats-Unis et du Mexique ont été dégustés par un panel de spécialistes venus de toute l’Europe. Les vins évalués par ces jurés du Mondial du Chasselas étaient regroupés dans cinq catégories: les vins secs contenant moins de quatre grammes par litre de sucre résiduel, les vins doux, les crus issus de vinification spéciale, les 

vieux millésimes (2009 et plus ancien) ainsi que les «Swing», catégorie introduite lors de cette cinquième édition, qui regroupait les vins secs affichant moins de 11,5° d’alcool. Malgré une augmentation importante du nombre de concurrents (10%) par rapport à l’année précédente, les chasselas du canton de Vaud (186 venaient de La Côte, 119 de Lavaux, 105 du Chablais et 9 de Bonvillars ou des Côtes de l’Orbe tandis que 39 arboraient l’AOC Grand cru Dézaley et treize étaient originaires du Calamin) réussissent une nouvelle

Le nez, la bouche... et l'œil (Alexandre Sakkas, Grèce)

Le Guillon

N°49 2/2016

fois une belle performance d’ensemble symbolisée, dans ce millésime souvent qualifié d’excellent, par les sept trophées – sur les neuf auxquels ils pouvaient prétendre – que s’adjugent deux classiques du vignoble vaudois. Morges persiste et signe Lors de l’édition précédente du Mondial du Chasselas, la Grand’Rue 2013 du Domaine de la Ville de Morges avait créé l’événement en remportant la catégorie principale. Cette année, les jurés ont à nouveau couronné le même lieu de production. Vinifié par Uvavins – Cave de la Côte, le Morges Vieilles

Un jury de professionnels. Ici Marie Linder

35


Concours

Sylvie Camandona, directrice commerciale chez Uvavins–Cave de la Côte, présente les deux trophées récompensant le Morges Vieilles Vignes 

Vignes 2015 est selon son géniteur, l’œnologue Rodrigo Banto: «le fruit de deux sélections. Tout d’abord, celle des meilleures vignes de plus de vingt ans à l’intérieur du lieu de production Morges. Ensuite, seuls les meilleures cuves et les meilleurs vases sont

«Le Morges Vieilles Vignes 2015 est le fruit de deux sélections. Tout d’abord, celle des meilleures vignes de plus de vingt ans à l’intérieur du lieu de production Morges. Ensuite, seuls les meilleures cuves et les meilleurs vases sont assemblés pour donner naissance à notre chasselas fétiche.» Rodrigo Banto, œnologue d'Uvavins – Cave de la Côte

assemblés pour donner naissance à notre chasselas fétiche.» Arborant une étiquette rétro, dont l’existence remonte quasiment à la création de la cave (1933), cette cuvée apparaît aussi comme l’expression d’un millésime de très grande qualité. «Nous avons obtenu une matière première superbe, affichant des degrés Oechslés très élevés ainsi qu’une acidité plus importante que ce que nous espérions. Cette vivacité naturelle marquante, que nous avons pu préserver en ne faisait que des fermentations malolactiques partielles, confère au vin un équilibre magistral», dévoile le responsable de la vinification de cette coopérative qui encave et vinifie le raisin élaboré par plus de 400 sociétaires sur La Côte. Produit en quantité importante (17'000 cols), ce qui a lui valu de remporter aussi le trophée de Meilleur vin produit à plus de 15'000 exemplaires, le millésime 2015 du Morges Vieilles Vignes est le premier à avoir été vinifié dans les nouvelles installations de l’entreprise. Pour Rodrigo Banto, cela confirme que: «les investissements importants consentis dans les infrastructures techniques de Tolochenaz étaient justifiés et commencent déjà à porter leurs fruits.» (www.cidis.ch)

The Triumphs of Vaud Wines At the beginning of June 2016, a panel of specialists from all over Europe conducted tastings of 763 Chasselas, Fendant and Gutedel wines from Switzerland, Germany, France, Hungary, Canada, the USA, and Mexico. The wines evaluated by this jury at the Mondial de Chasselas were grouped into five categories: dry wines containing less than 4 gm/litre of residual sugar, sweet wines, special vinifications, old

36

vintages (2009 and earlier) and Swings. The latter, introduced at the fifth edition, included dry wines with less than 11.5° alcohol. Morges keeps winning At the previous edition of Mondial du Chasselas, Grand’Rue 2013, from Domaine de la Ville de Morges, carried the day by winning in the main category. This year the jury rewarded the same

production area. The Morges Vieilles Vignes 2015, vinified by the Uvavins – Cave de la Côte cooperative (400 members), is described by its creator, the oenologist Rodrigo Banto as, “the fruitful result of two selections. First that of the best more-than-twenty-year-old vines within the Morges production area. Secondly, only the best vats and the best vessels were assembled to create our favourite Chasselas”. This wine

Le Guillon

N°49 2/2016


Un triomphe pour André Hotz, œnologue d'Obrist: la Cure d'Attalens a obtenu cinq trophées! 

Moisson de trophées pour la Cure d’Attalens Au 12e siècle, les Seigneurs de Blonay lèguent une vigne à l’Eglise d’Attalens. Après avoir été propriété du clergé, du canton de Berne et de l’Etat de Fribourg, le vignoble de la Cure d’Attalens est racheté par Emile Obrist en 1896. 120 ans plus tard, ce domaine de quinze hectares sur la Riviera lémanique fait partie des classiques les plus renommés du canton. En dehors d’une parcelle de rouge où poussent gamay, gallotta, regent et merlot, et de 3000 mètres de viognier, le domaine n’accueille que du chasselas. Cultivé par cinq vigneronstâcherons - Corinne Buttet, Jean-Marc Favez, Pierre Fontannaz, Yves Neyroud et Gianni Bernasconi – et vinifié par l’œnologue d’Obrist André Hotz, la Cure d’Attalens a marqué le Mondial du Chasselas 2016. Le millésime 1983 de ce Chardonne Grand cru a ainsi décroché la note spectaculaire de 97,9, le plus haut pointage jamais attribué dans ce concours. Cette appréciation dithy-

also appears to represent a top quality vintage. It was produced in large volumes (17,000 bottles), which enabled it to win the trophy for the best wine produced in more than 15,000 units. (www.cidis.ch). Abundant trophies for Cure d’Attalens This fifteen-hectare estate on the Lake Geneva Riviera is among the most well-known classics in the canton. Apart from a plot of red and 3,000 metres of Viognier, the estate grows only

Le Guillon

N°49 2/2016

rambique lui a permis de remporter la catégorie Vieux Millésimes, mais aussi les trophées de Meilleur vin vaudois et Meilleur classement toutes catégories. De plus, la Cure d’Attalens 2015 s’est classée huitième de la catégorie principale avec un score de 91,3 points. Cette performance lui a donné la possibilité d’intégrer et de remporter la dégustation du Coup de cœur de la presse, parrainée par le magazine VINUM, qui a vu les quinze meilleurs chasselas

secs redégustés par la marraine du concours, Sandrine Caloz, ainsi que par les journalistes France Massy, Manuella Magnin, Pierre Thomas, Romain Felley et Pascal Besnard. Pour couronner le tout, la Cure d’Attalens remporte le trophée Excellence et Régularité, créé par le comité pour récompenser le vin le mieux noté sur les cinq ans de la compétition. (www.obrist.ch)

Chasselas. Cultivated by five winegrowers and vinified by the Obrist oenologist, André Hotz, the Cure d’Attalens has left its mark on the Mondial du Chasselas 2016. The 1983 vintage of this Chardonne Grand Cru achieved the spectacular mark of 97.9, the highest number of points ever attributed in this competition. This outstanding evaluation enabled it to win not only the Old Vintage category but also the best Vaud Wine and the Best Overall Ranking trophies. In addition,

the Cure d’Attalens 2015 was ranked 8th in the main category with a score of 91.3 points. This excellent performance gave it the chance to take part in and carry off the Favourite Wine award at the Press tasting, sponsored by the VINUM magazine. On top of all that, the Cure d’Attalens won the Excellence and Regularity trophy, created by the committee to remunerate the wine with the highest marks over five years of competition. (www.obrist.ch)

37


OENOTHÈQUE LA LICORNE W W W . B O L L E . C H

Rue Louis-de-Savoie 75-79, 1110 Morges T 021 801 27 74 - bolle@bolle.ch - www.bolle.ch


Agenda

OLLON

Balades dans le vignoble 10 - 11 SEPTEMBRE

Les nominés vaudois 2016 marque la dixième édition du concours national organisé par le magazine VINUM et l’association VINEA. Les quelques 150 professionnels du jury ont dégusté 2864 cuvées de toutes les régions de Suisse. Les six meilleurs vins de chacune des douze catégories ont été nominés pour le gala du Grand Prix du Vin Suisse, qui aura lieu le 26 octobre à Berne. Lors de cette «soirée des Oscars» du vignoble helvétique, dix producteurs du canton de Vaud seront en lice pour une consécration nationale. Dans la catégorie chasselas, Château Maison Blanche à Yvorne, Domaine Chamvalon à Gilly et Les Trois Terres – Cofigo SA à Morges peuvent tous rêver du titre suprême avec leur millésime 2015. Du côté des effervescents, c’est le pinot noir & pinot gris méthode traditionnelle Château Rochefort 2014 des Domaines de la Ville de Lausanne qui défendra les couleurs lémaniques. En rosé, l’oeil-de-perdrix Les Chaumes 2015 - vainqueur en 2012 – visera encore une fois la première marche du podium. Ultime blanc à pouvoir espérer décrocher le Graal: le gewurztraminer 2015 du Domaine des Sieurs à Luins qui s’aligne parmi les vins doux. Les rouges ne sont pas à la traîne puisque deux pinots de La Côte, le Domaine de Chantemerle 2015 et le vieilles vignes bio 2015 du Domaine La Capitaine, font partie des finalistes. La Violette 2014 de la coopérative de Villeneuve défendra ses chances contre cinq autres gamays. Enfin, le gamaret-garanoir 2015 du Domaine du Feuillerage à Perroy tentera de devenir le meilleur assemblage rouge helvétique. AT www.grandprixduvinsuisse.ch

Le Guillon

N°49 2/2016

Pour fêter cette 20e édition, 16 artistes ont été invités à exposer une oeuvre chez chacun des vignerons engagés dans la manifestation. Au programme, dégustations de vins et de mets variés, musique et animations diverses, y compris pour les enfants. La navette principale sera assurée par de vieux cars Saurer. Un petit train, des minibus, des side-cars (dimanche) et des jeep Willys complèteront le service des navettes. vin-ollon.ch/event/balades-dans-le-vignoble

LUTRY

Lavaux Passion 10 - 11 SEPTEMBRE

Le temps d’un week-end, les vigneronnes et les vignerons de Lavaux se joignent à l’association Lavaux Patrimoine Mondial, pour transmettre leur passion commune pour cette terre d’exception, inscrite au Patrimoine mondial de l’UNESCO depuis 2007. Au programme: dégustations, croisières, ateliers, visites guidées, projection du film Chasselas Forever de Florian Burion et conférence de José Vouillamoz, spécialiste de l’ADN des cépages. lavauxpassion.ch

AIGLE

Chablais Wine Award 24 NOVEMBRE

La Communauté Interprofessionnelle des Vins du Chablais Vaudois propose la 2e édition des Chablais Wine Award, jeudi 24 novembre 2016.

Cette année, la manifestation se déplace au Centre Mondial du Cyclisme d'Aigle. Les Chablais Wine Award récompensent les meilleurs vins primés dans les concours de l’année 2016. Les Chablais Wine Award proposent un repas de gala réalisé par le Chef Sang Hoon Degeimbre, ** Michelin, 18.5/20 Gault & Millau, chef de l'année Gault & Millau 2016.

39


Concours Les lauréats de la sélection 2016 entourent Pierre Keller, président de l'OVV

Sélection des

Alexandre Truffer

Si l’on devait juger la qualité d’un millésime par la hauteur des pointages obtenus, pas de doute: 2015 mérite le qualificatif d’exceptionnel!

Vins Vaudois 2016 Températures hors norme et ensoleillement exceptionnel constituent les piliers sur lesquels les vignerons vaudois ont bâti ce 2015 que Nicolas Joss, le directeur de l’OVV, a qualifié du «plus grand millésime de notre génération». Dans le cadre du Montreux Jazz Festival, les organisateurs de la Sélection des Vins Vaudois ont dévoilé les résultats de l’édition 2016 qui a vu 162 des 904 vins en compétition recevoir une médaille d’or

(90 points ou plus) et 132 concurrents se parer d’argent (88 à 89,9 points). A la lumière des résultats, la météo de 2015 a favorisé les spécialités blanches (vins secs hors Chasselas). En effet, le Gewürztraminer 2015 du Domaine de Chantemerle à Tartegnin, qui s’adjuge le trophée Master (meilleur pointage du concours) avec un stratosphérique 95  points sur 100, est suivi par le Sauvignon Gris du Domaine La Capitaine de Begnins,

2014 40

Le Guillon

N°49 2/2016


© OVV

lauréat du Trophée Bio Vaud, l’autre prix spécial de cette compétition. Du côté des chasselas 2015, on retrouve aussi des très hauts pointages puisque le Daley de Jean-Daniel Porta (Aransur-Villette), la Pépite du Domaine de Joli-Clos (Etoy), le Coup de Loup des Caves du Château de Montmagny (Montmagny) et l’Ovaille 1er Grand cru des Frères Deladoey à Yvorne obtiennent tous plus de 92,5 points. En ce qui concerne les millésimes plus anciens, le Dézaley-Marsens Vase N°4 2013 des Frères Dubois à Cully s’impose avec 92 points devant deux autres «classiques», le Vinzel Grand Cru 2014 de Jean-Daniel Monachon (Cave des Ruaz) et l’Aigle les Murailles 2013 de Badoux Vins.

Notes élevées dans toutes les catégories Du côté des rouges, on remarquera la performance de Benjamin Morel (Caves du Château de Valeyres) qui s’adjuge trois podiums dans trois catégories différents. A la victoire de son Courson 2015 dans les assemblages s’ajoute une deuxième place du côté des gamays derrière le remarquable 2015 (94 points) du Domaine de Marcy à Saint-Prex, et une troisième place pour son Pinot Noir La Cuvée du Baron 2015 dans une catégorie remportée par la cave Gaillard & Fils à Epesses. Un autre cru de Lavaux, la Mondeuse Noire 2014 du Domaine des Rueyres à Chardonne, s’illustre dans les autres cépages rouges. Cette rareté devance

Sélection des Vins Vaudois 2016 Competition Exceptionally warm temperatures and sunshine characterised the 2015 vintage which Nicolas Joss, the director of the Vaud Wine Office (OVV), has described as “the greatest vintage of our generation”. At the Sélection des Vins Vaudois event, 162 of the 904 wines entered received a gold medal (with scores of 90 or more), and 132 wines were awarded silver medals (with scores of 88 to 89.9). The 2015 weather was particularly favourable for white specialities (dry

Le Guillon

N°49 2/2016

whites other than Chasselas). Indeed Gewürztraminer 2015 from Domaine de Chantemerle in Tartegnin, which won the Master trophy (best competition score) with 95/100, was followed by Sauvignon Gris from Domaine la Capitaine, in Begnins, which was awarded the Trophée Bio Vaud (Vaud Organic Wine trophy), the other special prize of the competition. Some 2015 Chasselas wines achieved very high scores: scores of more than 92.5 points were obtained by Daley from Jean-Danile Porta (Aran-sur-Villette), La Pépite from Domaine de Joli-Clos (Etoy), Le Coup de Loup from Caves du

une Mara 2014 du Domaine de Joli-Clos (Etoy), le Cabernet Franc Crescendo 2013 du Domaine de Chantegrive (Gilly) et la Syrah de Saint-Saphorin 2014 de la Cave des Rois (La Tour-dePeilz). Enfin, notons que les catégories rosés, mousseux et vins doux n’ont pas échappé à des domaines habitués aux plus hautes marches des concours: la Cave du Consul à Perroy (Rosé du Consul 2015), Philippe Bovet - dont le Brut 2012 arrive ex  aequo avec le Bertrand de Mestral Brut d’Uvavins – et Laurent Berthet (Grains d’Amour 2015), qui partage la victoire avec le Solaris 2013 du Champagnoux (Eric Schopfer à Champagne). Tous les résultats sont disponibles sur le site de l’OVV: www.vins-vaudois.com

Château de Montmagny (Montmagny), and Ovaille 1er Grand Cru from Frères Deladoey, in Yvorne. As for reds, Benjamin Morel (Caves du Château de Valeyres) won three awards in three different categories: a gold for his Courson 2015 in the blended category, second place in the Gamay category behind the remarkable 2015 (94 points) from Domaine de Marcy, in Saint-Prex, and a third place for his Pinot Noir La Cuvée du Baron 2015 (the first prize went to Gaillard & Fils, in Epesses). For all the results go to the OVV website: www.vins-vaudois.com

41


design stanprod

en 2016

Les Vignerons Encaveurs Vaudois se rapprochent encore plus de vous et proposent un programme exclusif…

Afin d’être informé des nouveautés et des événements, visitez notre site.

www.vignerons-vaudois.ch – www.waadt-weinbauern.ch


Concours internationaux

Palmarès plus étoffé à Québec qu’à Bruxelles Pierre Thomas Aux Sélections mondiales de Québec, autoproclamées «plus important concours international de vins en Amérique du Nord», et qui fait partie de la Vinofed (dont le siège est à Sierre), fin mai, Badoux Vins a fait main basse sur quatre médailles d’or: pour l’Aigle Les Murailles rouge 2014, pour le chasselas de la même marque, du millésime 2009 (argent avec le 2013), et pour deux vins de la ligne Lettres de Noblesse, un chasselas barrique 2014 et une vendange tardive de pinot gris 2013, et de l’argent pour le viognier d’Aigle 2014, sous le même label. En attendant le CMB à Aigle en 2018? Fin avril, à Plovdiv, les organisateurs du Concours Mondial de Bruxelles (CMB) ont accueilli une délégation vaudoise emmenée par le syndic d’Aigle, Frédéric Borloz, conseiller national

Fortunes diverses pour les vins vaudois aux Sélections Mondiales de Québec ou à Plovdiv, en Bulgarie, où se jouait le Concours Mondial de Bruxelles. Et une syrah valdo-valaisanne remporte le titre (officieux) de «championne du monde». devenu ce printemps président de la Fédération suisse des vignerons: le chef-lieu du Chablais a déposé un dossier de candidature pour 2018 au plus tôt (en 2017, c’est Valladolid, en Espagne, qui accueillera le CMB, itinérant). Ce passage n’a pas porté chance aux vins vaudois, puisque sur dix médailles d’or suisses – et une «grand or», remportée par la petite arvine Sous l’Escalier 2012, du Domaine du Mont-d’Or, propriété du groupe rollois Schenk –, la «moisson» vaudoise a été bien chiche, avec une seule médaille d’or, en liquoreux également, obtenue par le Trilogie de Bernard Ravet 2014, un chardonnay, doral et pinot gris vinifié par Rodrigo Banto, chez CidisUvavins, à Tolochenaz. La même collection Vin Vivant, en collaboration avec le chef de Vufflens-leChâteau, a été à l’honneur au Mondial

du Merlot, organisé fin avril à Sierre, par Vinéa, avec le Bernardin 2012. Pour Uvavins, la médaille d’or s’ajoute à celle du Merlot Empreinte 2014. Derrière les Tessinois (12 médailles d’or) et les Valaisans (7), les Vaudois (6) se sont bien défendus. Philippe Bovet, de Givrins, décroche deux trophées, avec un merlot AOC Vaud 2011 et la Cima del Adula 2012, un «vin de pays suisse», tout comme le merlot Exception 2014, du Domaine d’Aucrêt à Cully. Le merlot barriques Cachoteries 2012, de la Cave Beetschen, à Bursins, complète le palmarès. Une syrah cueillie à Vétroz, élevée à Villeneuve Le titre le plus «renversant», pour son détenteur lui-même, reste celui remporté par Serge Diserens, de la Cave des Moines à Villeneuve. C’est sur terre vaudoise qu’il a vinifié et élevé sa syrah Terra Solis 2012, même si les grappes ont été cueillies sur des schistes, à Saillon, en Valais. Cette cuvée de 1500 bouteilles a été rapidement épuisée. Elle s’est classée en tête parmi 374 vins de 23 pays, à Syrah du Monde, à Ampuis. Son Gamaret Réserve des Moines 2013, AOC Chablais, a décroché une médaille de bronze au Challenge International du Vin à Bourg, dans le Bordelais. Titre plus modeste, sûrement, mais seule médaille suisse de ce concours!

Daniel Dufaux et l'équipe de Badoux Vins: quatre médailles d'or à Québec! 

Le Guillon

N°49 2/2016

43


Quelles sont vos préoccupations? La vie évolue et soulève de nouvelles questions. Constamment. Nous trouvons des réponses en recourant à notre expertise et en apportant le soin nécessaire à un conseil personnalisé. Il nous tient à cœur d’investir du temps pour vous. Nous vous accueillons à Lausanne (avenue du Théâtre 1, tél. 021 313 26 26) ou à Genève (boulevard Georges-Favon 5, tél. 022 307 21 21). www.notenstein-laroche.ch


Economie vitivinicole

Terres de Lavaux:

la grande mutation

«Notre démarche va certainement susciter l’intérêt d’autres coopératives». La démarche, à laquelle fait allusion Jean-Charles Estoppey, président de Terres de Lavaux, n’est pas anodine. La coopérative, née en 1906 (elle est devenue Terres de Lavaux en 2012), basée à Lutry, s’est transformée en société anonyme. Les 55 coopérateurs, qui cultivent 14 hectares de vignes sur Lutry et Villette, ont validé le choix de leurs dirigeants le 2 mai dernier. Une trajectoire rectiligne de 110 années s’est alors inscrite dans une courbe inhabituelle. Une telle mue ne s’était jamais observée dans le canton de Vaud: c’est une première. Pas un effet de mode Et le passage du statut de coopérative à celui de SA n’est ni un effet de mode, ni un simple souci cosmétique, comme l’explique Jean-Charles Estoppey: «Actuellement un quart à un tiers du volume de raisins produits sont vendus en vrac pour assurer de la trésorerie et pouvoir payer les vignerons après la vendange. En ouvrant le capital, nous escomptons vendre nous-mêmes la totalité de notre production, soit 120'000 à 150'000 bouteilles». Avec le passage à la SA, les coopérateurs sont devenus actionnaires. Au même titre qu’une poignée d’investisseurs d’ores et déjà trouvés. La plupart d’entre eux sont des entrepreneurs issus de secteurs d’activités économiques sans lien direct avec le monde vitivinicole, mais dont les attaches régionales sont reconnues. L’un de ces nouveaux actionnaires, sans être vigneron luimême, rallie Terres de Lavaux avec dans sa hotte deux hectares de vignes familiales!

Le Guillon

N°49 2/2016

Cave de référence Terres de Lavaux ambitionne de devenir un producteur de référence dans le canton. Ses dirigeants l’ont écrit noir sur blanc dans le communiqué de presse annonçant la destinée de la désormais ex-coopérative, dont l'offre en vins blancs et rouges se décline en une large palette de cépages. Une certitude: les vins élaborés sous la houlette du gérant Jean-Michel Gosteli

sont régulièrement primés. Pour ne donner qu’un exemple, le Lutry Tradition 2015 de Terres de Lavaux (Label Or Terravin) a récolté en 2016 une médaille d’or au Mondial du Chasselas, avec 89,3 points et une récompense de même valeur dans la sélection vaudoise de l’OVV, avec 92 points.  Jean-Michel Gosteli (à g.), gérant et Jean-Charles Estoppey, président de Terres de Lavaux

© Philippe Dutoit

Pascal Besnard

Terres de Lavaux: a major change The cooperative based in Lutry, that dates back to 1906 and became Terres de Lavaux in 2012, has been converted into a limited company. The 55 cooperative members that between them cultivate 14 hectares of vines in Lutry and Villette, together with a handful of investors have become the shareholders. This kind of transformation is a first in the Vaud Canton. The wines produced by Terre de Lavaux members are frequently awarded prizes. Recently, Lutry Tradition 2015 (Label Or Terravin) won a gold medal at Mondial de Chasselas scoring 89.3 points and another one at Sélection des Vins Vaudois, scoring 92 points.

45



Produits du terroir

De la noix au colza,

les huiles artisanales vaudoises Pierre-Etienne Joye Photos: Sandra Culand

Où est-ce qu’on produit la plus grande quantité d’huile de noix en Suisse? Gagné! C’est bien dans le canton de Vaud. L’huile de noix est même devenue un produit de luxe de la gastronomie vaudoise depuis quelques décennies. Une AOP (Appellation d’origine protégée) est sur le point de voir le jour. Propriétaire du Moulin de Sévery dans le district de Morges, Jean-Luc Bovey indique que le projet est en bonne voie: «Les conditions sont réunies, on attend une réponse positive de Berne cette année encore. On a travaillé de concert avec les autres huileries qui font partie de l’interprofession.» Alors quelles sont-elles? Il y en a 4, situées à Corcelles-sur-Payerne, Yverdon, Bex et Pompaples. Ça fait donc cinq huileries artisanales avec Sévery. Un chiffre honorable? Certes. Mais qui n’a rien à voir avec la quantité impressionnante d’avant la seconde guerre mondiale. Le Pays de Vaud a compté jusqu’à près de 40 huileries, avant que les productions industrielles ne prennent le des-

Le Guillon

N°49 2/2016

Le Pays de Vaud compte actuellement 5 huileries artisanales, dont une, à Sévery, qui produit de l’huile toute l’année. Si l’huile de noix se taille la part du lion, d’autres productions ne sont pas en reste, notamment grâce au colza. Mais aussi avec certains nectars huileux de niche, comme le pépin de raisin. sus. Les grands froids de 1956 n’ont rien arrangé: le gel a eu raison de bon nombre de noyers. Aujourd’hui il y a un vrai retour à cette tradition d’un canton de Vaud fier de son huile, prêt à séduire les amateurs gourmands et les tables gastronomiques. La demande d’huiles artisanales est en augmentation. Les noyers ont donc progressivement été replantés au fil des années, la terre vaudoise a retrouvé son panache avec des noiseraies dignes de ce nom. En l’an 2000, lors du dernier recensement officiel, Vaud était bel et bien le canton où poussaient le plus de noyers en Suisse avec plus de 18'000 spécimens. Dernièrement, environ 10'000 autres arbres ont été mis en terre. La noix et son huile peuvent affronter l’avenir avec sérénité.

La coquille de noix. Sèche et pure. Avant brisure et travail mécanique. 

Les cerneaux de noix, coupés, préparés, prêts pour la torréfaction, le broyage et le pressage. 

Indispensable torréfaction Alors, comment ça se passe en somme, la fabrication de cette huile de noix artisanale si prisée? C’est avant tout une

47


Avec les mains... et le cœur!

www.henricruchon.com

Les formations à Changins Haute école de viticulture et œnologie (HES) Bachelor of Science HES-SO en Œnologie Master of Science HES-SO in Life Sciences orientation Viticulture et œnologie

Ecole Supérieure (ES) de Technicien/ne vitivinicole Technicien/ne vitivinicole dipl. ES La formation pour devenir viticulteur encaveur

Ecole du Vin Formations modulaires destinées aux amateurs et professionnels du vin et de la table Nouveau : Brevet fédéral de sommelier – Début des cours : en septembre, tous les 2 ans

Le site internet www.changins.ch vous renseigne sur toutes les formations proposées.

Changins

Route de Duillier 50 Case postale 1148 1260 Nyon 1 Suisse +41 22 363 40 50 www.changins.ch

haute école de viticulture et oenologieécole supérieure de technicien/ne vitivinicole école du vin


Colza et tournesol, de la fleur à l’huile Des champs jaunes au printemps, des fleurs dorées et brunes l’été, le colza et le tournesol sont les sœurettes de l’huile de noix. De nombreux domaines du canton de Vaud cultivent les deux plantes oléagineuses, dont l’huile est obtenue après séchage des graines et un pressage à différentes températures. Les premières plantations de colza en Suisse datent de la fin du 18e siècle. Dans un but qui n’était pas gastronomique dans un premier temps, comme ce fut le cas pour l’huile de noix: ces huiles étaient surtout employées pour faire fonctionner des lampes. Petit à petit, les vertus comestibles de ces huiles ont repris le dessus. Et depuis quelques dizaines d’années, c’est clairement l’huile de colza qui a la cote, car non seulement sa culture met en valeur les productions locales et le terroir -vaudois en ce qui nous concerne-, mais encore, cette huile est considérée comme un produit sain, avec de «bons» acides gras. Au goût, elle est aussi moins marquée que l’huile de tournesol et convient à la fois pour enrichir des plats froids et faire sauter des viandes, des légumes ou des poissons. Pour la friture, une variété d’huile de colza existe désormais. Besoin d’aller chercher votre huile de colza comestible en voiture à présent? Joignons l’utile et l’agréable en faisant d’une pierre deux coups: la Suisse produit du biocarburant à base d’huile de colza. C’est contesté. On en restera donc à son utilisation en cuisine. Pej

From Walnut to Rapeseed – Non-Industrial Oils Made in the Vaud Canton Today, there are five non-industrial oil mills in the Vaud canton, one of which is located in Sévery, and produces oil all the year round. Although walnut oil accounts for the lion’s share, other varieties are not negligible, in particular rapeseed. Most of Swiss walnut oil is produced in the Vaud canton. In the last couple of decades, walnut oil has even become a gastronomic luxury product. An appellation d’origine protégée classification is about to be granted. Jean-Luc Bovey, the owner

Le Guillon

N°49 2/2016

of the Moulin de Sévery near Morges, has pointed out that the project is well under way: “All the conditions have been met and we’re expecting a positive response from Bern before the end of the year. We have been working together with the other oil mills that belong to the trade association.” There are four of them: one in Corcelles-sur-Payerne, another two in Yverdon and Bex, and one in Pompaples. That makes five non-industrial oil mills including Sévery - certainly a respecta-

ble number - but that is still a long shot from the near-40 oil mills that existed in Vaud prior to WWII, before the start of industrial production. The extremely cold 1956 winter did not help: frost damaged many of the walnut trees. Today, we are seeing a genuine return to tradition. Our canton is proud of its oil and is ready to attract the attention of connoisseurs of good food and gastronomic restaurants. Demand for non-industrial oils has been rising. … p. 50

49


Produits du terroir

1

… So over the years, the walnut trees have gradually been replanted and the land has been restored to its former glory with walnut groves worthy of that name. According to the last official census in 2000, Vaud with its 18,000 specimens was clearly the Swiss canton with the largest number of walnut trees. Lately, another 10,000 trees have been planted. The walnut and its oil now have a promising future. Roasting is key So how is this precious nut oil made? Above all, it is a matter of applying traditional pressing methods. To obtain perfect quality and authentic taste, it is crucial to observe all the steps, from nut to oil. Roasting plays an essential part. Once collected and dried, the nuts must to be cracked manually or by machine to extract the kernel, the flesh of the nut. It is the kernels, which must be free from any mould or parasites, which are pressed. If you want to make a top quality product the ingredients have to be perfect from the start. The kernels are crushed to obtain a compact floury paste. Now comes the key process – that will make all the difference - of concentrating and distilling the flavour of the oil: the roasting. It is generally carried out at more than 100°C (212°F) for close to 20 minutes. The product is then put in cloths and pressed. The thick golden juice will flow out and

50

2

3

slowly decant before it is poured into a barrel or a bottle. The remaining dry matter is used for making the traditional walnut cake (see above). A walnut oil that has been made according to traditional procedures is full of intense yet refined flavour, making it a luxury gourmet product. It is strong, so only small quantities are needed. It goes well with different local cheeses and adds flavour to vegetables and all kinds of salads. It is perfect with head lettuce, and is ideal for enhancing the taste of new potatoes in a slightly creamy sauce acidified with a touch of apple vinegar. Beware! Walnut oil does not stand up to heat and so cannot be cooked or fried. One way of reducing its intensity is to mix it with an oil that has a less intense flavour - with rapeseed oil, for example, another jewel in the crown of Vaud savoir faire. Rapeseed and sunflower, from flower to oil Yellow fields in the spring and gold and brown flowers in the summer, rapeseed and sunflower are walnut oil’s younger sisters. Many farms in the Vaud canton grow both oil plants. The oil is obtained by pressing the dried seeds at different temperatures. The first rapeseed plantations in Switzerland date back to the end of the 18th century. At first, as was the case with walnuts, the oil was not made for gastronomic purposes but for use in

lamps. Gradually the edible virtues of the oils gained the upper hand. For several decades now rapeseed oil has clearly been the favourite because not only does it promote local agricultural production, but what is more the oil is considered a healthy product with the ‘right’ fatty acids that are good for us. The Guillon Walnut Cake This cake, often simply referred to as walnut bread, is made from the solid residue left over after pressing the walnut paste, which in the Vaud canton is called nillon or nion. There’s no question of throwing it away or giving it to animals as is the case with colza seeds! The delicious – and very rich - tarts and cakes made with nillon give a second life to our cherished walnuts. One classic recipe requires 100 grams of nillon, in a slab or ready grated, which is mixed with 2 dl of milk and then left to rest for a few hours. One then adds one soupspoon of cream, one of flour and one of sugar, and 2 soupspoons of raisinée (cooked wine) and mixes it all until the mixture is smooth and homogenous. It is then poured on to a short crust pastry base which has been covered with a layer of sugar to which a few drops of walnut oil have been added. It then goes into the oven at 200°C (395°F) for a good half hour. Eggs and plum jam can also be added to the mixture, which is the case for Frédy Girardet’s famous Tarte au nion.

Le Guillon

N°49 2/2016


4

5

histoire de mode de faire traditionnel, dit «pressage à l’ancienne». De la noix à l’huile, les étapes à respecter sont primordiales pour obtenir une qualité parfaite et une authenticité des goûts. La torréfaction joue un rôle essentiel dans ces cas-là. Les noix sont ramassées? Elles sont sèches? Parfait, place à la cassée des noix. Manuellement ou à la machine. Il faut les énoiser, c’està-dire les décortiquer pour en extraire les cerneaux, la chair de la noix (1). Ce sont ces cerneaux, exempts de tout défaut, moisissures ou parasites qui seront pressés. Pour faire de la qualité, pas de miracle, le produit doit être parfait dès le début. Ces cerneaux, ils sont donc broyés (2) jusqu’à obtention d’une

6

pâte farineuse et compacte. Et là, le fameux tour de main qui fera toute la différence afin de concentrer et sublimer les parfums de l’huile: la torréfaction (3). Plus de 100 degrés pendant près de 20 minutes en général. Le résultat est ensuite mis dans des toiles et pressé (4). Le jus d’or visqueux peut alors s’écouler (5) et décanter gentiment avant sa mise en fût ou en bouteille. Et la matière sèche qui reste? On appelle ça le nillon – ou nion – (6) et on en fait des gâteaux typiques (voir encadré). Très recherchée en cuisine Du goût, des parfums intenses autant que fins. Les caractéristiques d’une huile de noix élaborée dans les règles

de l’art en font un produit de luxe en cuisine. Inutile d’en abuser, parce que, malgré tout, c’est fort. Ce sera bien senti avec des fromages de terroir ou pour agrémenter des légumes et salades en tout genre. Elle sera idéale avec une laitue pommée, parfaite pour magnifier des carrés de pommes de terre nouvelles dans une sauce légèrement crémée et acidulée d’un vinaigre de pomme. Attention! L’huile de noix ne tient pas à la cuisson, encore moins à la friture. Une manière d’adoucir l’intensité de cette huile? La mélanger à une autre plus légère en goût. L’huile de colza, par exemple, un autre fleuron du savoir-faire vaudois. Lire interviews page 53

Le nillon du Guillon

Le tourteau de noix (résidu solide issu du pressage de la pâte de noix), ça s’appelle donc le nillon dans le canton de Vaud. On parle aussi de pain de noix ou de nion. Pas question de jeter ça ou de le donner aux bêtes comme on le fait pour les restes de graines de colza! Les tartes et les gâteaux au nillon donnent une deuxième vie fort gourmande à cette chère noix. Et c’est du costaud. Une des recettes classiques consiste à se procurer une centaine de grammes de nillon en plaque ou déjà râpé, de les mélanger avec deux décis de lait et de le laisser reposer pendant plusieurs heures. On y incorpore ensuite une cuillère à soupe de crème, une de farine, une de sucre, deux de raisinée (vin cuit), et on mélange le tout jusqu’à obtention d’une masse lisse et homogène. Il suffit de la verser ensuite sur la pâte brisée piquée, recouverte d’un tapis de sucre mouillé de quelques gouttes d’huile de noix. Au four à 200 degrés pendant une bonne demi-heure. Certains ajoutent encore à la préparation des œufs et de la confiture de prune. C’est le cas avec la fameuse tarte au nion de Frédy Girardet. pej

Le Guillon

N°49 2/2016

51


Anthologie Le meilleur du canton de Vaud Profitez de l'offre spéciale Anthologie édition 2016 : 15 grands vins vaudois pour votre plaisir ! Oui, je commande la sélection officielle FCVV « Anthologie »* composée de 15 grands vins vaudois : 15 bts 70/75 cl : 7 blancs, 7 rouges, 1 rosé. Nb cartons « Anthologie » : Total :

au prix spécial de

CHF 174.90

Nom : Prénom : Rue/No : NPA :

Localité :

Tél. :

Date de naissance :

CHF (TVA incluse)

Veuillez m’envoyer ma commande par poste (frais de port offerts dès 2 cartons). Participation aux frais de port pour un carton : CHF 20.–.

E-mail : Date et signature obligatoires :

La livraison et la facturation sont effectuées par Cave Cidis SA. Livraison à domicile souhaitée la semaine du _______________________ 2016

Par ma signature, je certifie avoir 18 ans révolus.

Passez commande

Je viens chercher ma commande au Pavillon de Cave Cidis à Nyon * Edition limitée : dans la limite des disponibilités des millésimes et des stocks.

RT DE P O FR AIS S DÈS T R E OFF TO N S . 2 C AR

En retournant ce coupon par poste : FCVV – 1131 Tolochenaz/Morges par e-mail : cidis@cidis.ch – Par fax : 021 804 54 55 Tél. 021 804 54 64 – www.anthologie.ch

GUI-F 16

Je viens chercher ma commande au Pavillon de Cave Cidis à Tolochenaz


Produits du terroir

Interviews… … avec Jean-Luc Bovey, maître artisan huilier et propriétaire du Moulin de Sévery, au-dessus de Morges.

Moulin de Sévery J.-L. Bovey Le Moulin 10 1141 Sévery (Suisse) T +41 21 800 33 33 www.huilerie-de-severy.ch

Le Guillon: On a l’impression que vous avez toujours baigné dans l’huile. C’est vrai? Jean-Luc Bovey: On peut dire ça. J’ai fait un apprentissage de meunier, mais en ce qui concerne l’huilerie, ça vient des gènes de l’entreprise familiale. J’ai appris sur le tas. Il faut dire que le savoir-faire se transmet de père en fils depuis 1845. C’est vite dit, ça fait 6 générations. Mais l’huile de noix est extraite au Moulin de Sévery dès la fin du 16e siècle déjà. C’est aujourd’hui la dernière huilerie artisanale de Suisse à travailler toute l’année, six jours sur sept non-stop. Quel est le rythme de production alors? En moyenne, on presse 60 tonnes de cerneaux de noix par an, ce qui correspond

… avec Pascal Walter, de l’Huilerie du Cotterd à Bex qui a repris le flambeau de son grand-père Jean-Louis Dupraz.

Huilerie du Cotterd P. Walter Rte de St-Maurice 1 1880 Bex (Suisse) T. +41 24 463 26 08 www.lepetitcageot.ch

Le Guillon: Depuis quand le Moulin de Bex est-il actif dans la production de noix? Pascal Walter: L’activité artisanale de la Cidrerie et Huilerie du Cotterd a commencé à la fin du 17e siècle. Le pressoir sert surtout à obtenir du jus de pomme. La production d’huile de noix constitue notre deuxième activité. Si nous possèdons effectivement quelques noyers, nous transformons essentiellement les noix que d’autres producteurs viennent nous apporter. On les presse «à façon», pour qu’ils puissent ensuite emporter leur propre huile de noix. Vous n’êtes donc pas en activité toute l’année, comme au Moulin de Sévery…

grosso modo à 36'000 litres d’huile de noix. En ce qui concerne le colza, on peut parler de 15 à 20'000 litres par an. Quant au tournesol, c’est plus difficile, le goût ne plaît pas forcément. Et comme nous parlons surtout de vin et de raisin dans cette revue, l’huile de pépins de raisin, vous en faites? On commence. Tout comme l’huile de cameline, qui est l’ancêtre du colza. En fait, on produit à des degrés divers plus d’une dizaine d’huiles. De l’huile de chanvre, de lin, de pépins de courge, de noisettes, de sésame, etc. Dans le canton de Vaud, il y a une grande diversité d’oléagineux et de fruits secs, qui permettent de faire de l’huile. L’huile «à façon», c’est-à-dire la fabrication d’huile à partir de produits qui nous sont livrés par divers récoltants, constitue quand même 70 pour cent de notre production.

En effet, on presse de mi-janvier jusqu’à la fin mars, et pas tous les jours. Les grosses années, c’est trois jours par semaine; les petites saisons, c’est plutôt un jour par semaine d’activité. Vous savez, les noix, c’est très aléatoire. Bien plus que les pommes. Une année sur 7 en moyenne est considérée comme très rentable. Ça peut varier de 1500 kilos jusqu’à 7000 kilos de noix par an. Une fois l’huile obtenue et mise en bouteille, on donne des indications aux clients pour la conserver? L’huile de noix est fragile. Pour éviter qu’elle ne devienne rance trop vite, il faut la garder à l’abri de la lumière et au frais. Jean-Luc Bovey vous a dit qu’idéalement il faudrait la stocker au frigo? Je n’irais pas jusque-là. Mais c’est vrai que si la température ambiante est trop chaude, pourquoi ne pas essayer…

Propos recueillis par Pej.

Le Guillon

N°49 2/2016

53


En vente chez OBRIST SA, avenue Reller 26 à Vevey plus d’information sur www.testuz.ch

re è p o e i g a Et la m

!


Talente

Michel Logoz, pape de l’étiquette et Commandeur de l’Ordre des Vins Vaudois

Pascal Besnard, échotier

envié de Commandeur de l’Ordre des Vins Vaudois. Il reste également un chroniqueur attitré de cette revue. Ne manquez pas la dégustation de la célébrissime Colonne de Michel Logoz à la page 80! © OVV

C’est un jeune homme de près de quatre-vingts-sept ans qui, le 17 juin dernier à Saint-Saphorin, a reçu des mains de Pierre Keller, président de l’Office des Vins Vaudois, les insignes de Commandeur de l’Ordre des Vins Vaudois. Infatigable créateur, curieux permanent, cultivé au-delà des limites du raisonnable, râleur parfois, mais toujours à bon escient, Michel Logoz a créé pas moins de 30'000 étiquettes de vin, en un peu plus d’un demi-siècle. Il a aussi édité de nombreux ouvrages d’art, rédigé des textes remarquables sur les vins et vignobles, et régalé durant des décennies les hôtes de la Confrérie du Guillon de ses interventions ciselées de chantre ou clavendier lors des ressats de printemps et d’automne au Château de Chillon. Aujourd’hui chancelier honoraire de la Confrérie, Michel Logoz, déjà consacré pape de l’étiquette, et désigné comme «le Karl Lagerfeld de la bouteille» par Pierre Keller, accède donc au titre

Michel Logoz, the Label Champion and Commander of the Order of Vaud Wines On June 17, at St. Saphorin, this young man of near eighty-seven years of age received the decoration of Commander of the Order of Vaud Wines from Pierre Keller, president of the Vaud Wine Office. A tireless creator, permanently curious and cultured beyond all reasonable limits, Michel Logoz has created

Le Guillon

N°49 2/2016

no less than 30,000 wine labels in just over half a century. He has also published numerous works of art, written remarkable texts about wines and vineyards, and for tens of years has amused the guests of the Confrérie du Guillon (Guillon Fellowship) with his finely chiselled speeches at the spring and au-

tumn ressats (banquets), at the Château de Chillon. Honorary chancellor of the Fellowship, the hallowed label champion Michel Logoz, whom Pierre Keller has designated “the Karl Lagerfeld of bottles”, has now received the much-envied title of Commander of the Order of Vaud Wines.

55


Eric Loup, chantre & clavendier

Chantres and Clavendiers At the ressats (banquets) held by the Confrérie de Guillon (Guillon Fellowship) the chantres refer to the Fellowship councillors who serve the wine, and clavendiers to those who serve the food. Ever since 1954 when the very first ressat was celebrated, the formula of excellence, finesse, competence and humour has been preserved. At every ressat, each wine is tasted and presented by a chantre and each dish by a clavendier, but given their many talents it is not unusual for them to swap roles. The former will marvel at the grape variety, at the appellation d’origine, at the vintage or even at the history of the vineyard, while

56

the latter will go into raptures about the ingredients of a particular dish, its subtle construction, the cook’s tricks or the way it has been cooked. But these councillors soon depart from their principal task to introduce a bit of humour and make fun of latest local or international news items. Their texts, written for onthe-spot amusement rarely survive the test of time except for the rare few that are selected and adapted for some issues of our review (see p. 66-67 in this issue). No sauciness is allowed, just a bit of good risqué humour touching the limits of acceptability - or otherwise immediately sanctioned by a yellow card brandished

© Edouard Curchod

by the master of ceremonies. Anyone who has attended one of these famous ressats will tell you that they are the soul of Guillon festivities, and they make the whole difference which is the envy of all, including our French neighbours… Fabien Loi Zedda, former president of the chantres and clavendiers

Le Guillon

N°49 2/2016


Message du gouverneur Jean-Claude Vaucher

A la gloire du cépage roi

Le chasselas a subi pendant bien des années une campagne de dénigrement sans précédent, affublé qu’il était de tous les maux et présenté comme un vin sans vertu et sans avenir. Même certains professionnels ont contribué à ce négativisme en le décriant et en l’abandonnant. A tel point que les autorités fédérales ont favorisé son arrachage en subventionnant les vignerons qui plantaient des cépages supposés plus qualitatifs. Ainsi les surfaces de chasselas en Suisse ontelles fortement régressé ces vingt dernières années, particulièrement en Valais où il couvre aujourd’hui moins de 1'000 hectares. Fort heureusement, les vignerons vaudois ont été peu inspirés par cette mode destructrice et ce magnifique cépage est resté très largement majoritaire dans nos coteaux. D’autant plus qu’aujourd’hui le vent a tourné, les esprits ont changé et même les journalistes les plus virulents ne le dénigrent plus. Bien au contraire. Nous assistons actuellement à un réel regain d’intérêt de la part de tous les leaders d’opinion, accompagné d’un activisme promotionnel sans précédent afin de

Le Guillon

N°49 2/2016

faire connaître ses qualités exceptionnelles et toute son originalité. Pensons au très bel ouvrage de la journaliste alémanique Chandra Kurt Chasselas – de Féchy au Dézaley, un merveilleux voyage à la découverte des trésors du vignoble vaudois édité en français et en allemand. Le succès de ce livre fait qu’il sera même traduit en anglais. Pensons également au livre du célèbre sommelier Jérôme Aké Béda, Les 99 chasselas à boire avant de mourir, un ouvrage qui illustre l’énorme potentialité de vieillissement de ce cépage, qualité dont personne ne faisait l’éloge auparavant et qui explique en bonne partie les raisons du retour en grâce de ce vin. Nous ne saurions passer sous silence le magnifique film de Florian Burion Chasselas Forever où, pendant plus d’une heure passionnante, scientifiques, historiens et vignerons lèvent le voile sur l’origine de ce cépage emblématique de Suisse romande. Une réalisation techniquement exception-

nelle qui nous plonge dans l’histoire du chasselas comme nous ne l’avons encore jamais vue. L’OVV n’est pas en reste avec son dépliant In Chasselas veritas où toutes les facettes du cépage sont décrites et encensées. Hormis ouvrages, films et autres articles dithyrambiques qui fleurissent dans les médias, n’oublions pas le dynamisme remarquable du comité du Mondial du Chasselas, concours qui a vécu cette année sa cinquième édition avec un succès grandissant. Cette dégustation internationale ne se contente pas de décerner des médailles, puisque cette manifestation est aussi à l’origine d’une grande fête à la gloire de ce cépage tout en poursuivant, entre deux concours, la promotion du chasselas en Suisse et à l’étranger. Ce retour en grâce de notre cépage roi ne peut que nous réjouir. Le chasselas vit une révolution salutaire et parfaitement méritée dont la viticulture vaudoise sera la première gagnante.

57


58

Le Guillon

N°49 2/2016


Ressats

Les Ressats

des Combourgeoisies Pascal Besnard, échotier Edouard Curchod, photographe La Confrérie du Guillon intronise ressat après ressat des escouades de compagnons, dames et messieurs. Ils sont 4'000 aujourd’hui, amoureux des vins régionaux, de la bonne chère et de l’esprit si particulier qui anime ce coin de pays: l’humour vaudois, à nul autre pareil. Parfois la Confrérie accueille en son sein des communes. Propriétaires de vignes, elles deviennent, après adoubement de leurs autorités, combourgeoises. Le Guillon s’enorgueillit de compter 200 de ces ambassades dont la seule mission est de promouvoir les vins vaudois, dans toutes les déclinaisons de robes, tranquilles ou effervescents. Ainsi, à l’automne 2015, Treycovagnes, Froideville et Oron ont grossi les rangs des cités définitivement ensoleillées. Au printemps dernier, Prangins, Givrins, Crans-près-Céligny et Agiez les ont rejointes. Celles-là et toutes les autres méritaient bien que des ressats leur soient dédiés. Et quels ressats! Edgard Bovier, l'hyper-fidèle (26 ressats au compteur!), et sa brigade virevoltante ont enchanté leurs aficionados et ravi les nouveaux initiés avec une cuisine aérienne aux saveurs méditerranéennes. Edgard au doux regard est homme de Palace mais aussi de partage: il nous livre dans ces colonnes deux recettes interprétées avec talent ce printemps à Chillon. Les vins étaient au diapason: Vinzel 2012, Epesses 2013, Côtes de l’Orbe Grand Cru 2014, Ollon 2013 et Dézaley Grand Cru 2014 ont subjugué les papilles des convives. Et tous les intervenants ont donné le meilleur d’eux-mêmes pour qu’art de la table et art oratoire s’accordent harmonieusement. Pour que musique, chansons et service soient au diapason. Dire des Ressats des Combourgeoisies qu’ils ont été réussis, c’est exprimer une évidence. Son rayonnement, le Guillon le doit surtout à ses principaux acteurs: vous, Compagnonnes et Compagnons. Merci de votre fidélité!

Le Guillon

N°49 2/2016

59


Ressats

Vendredi 22 avril Compagnon majoral Jean Denais Maire de Thonon-les-Bains Compagnon ministérial Vincent Duc Vérificateur, Confrérie du Guillon Manuel Guerra Vérificateur, Confrérie du Guillon Commune combourgeoise Prangins Compagnon Mike Bornand Gimel Claude-Alain Bornand Grens François Brandt Saubraz Thierry Brocard Aubonne Fabien Coucet Lully VD Philippe Diesbach Pully Marielle Gallay Aubonne Michel Gfeller Allaman Didier Hunacek Blonay Yves Mégroz Bière Jean-Luc Rochat Etoy Philippe Rossier Aubonne Thierry Sandoz Corseaux Nicholas Visinand Blonay

1

1. Maire de Thonon-les-Bains, Jean Denais devient compagnon majoral 2. Un tirer au guillon réussi avec charme par Marielle Gallay 3. Philippe Rossier, vigneron à Aubonne. Son Féchy Les Curzilles 2015 a obtenu le 11e rang, sur 638 vins, au Mondial du Chasselas! 4. Une escouade d’intronisés (ceux du 22 avril) 5. Entrée des conseils sous la conduite du panetier Roger Rey, hoqueteau à ses heures

60

4

Le Guillon

N°49 2/2016


2

3

5

Le Guillon

N°49 2/2016

61


Ressats

Samedi 23 avril Compagnon majoral Alain Gorka Commandant de la Gendarmerie vaudoise Commune combourgeoise Givrins Compagnon André Bonny Blonay Jacques Despont Echallens Jean-Christophe Ferraris Pully Peter Friedmann Pully Patrick Guex Allaman Thomas Kretz Unterentfelden Guy Marty Saint-Légier Roger Müller Rheinfelden Philippe Rappaz Penthaz Pascal Rubin Grimisuat 6

6. Le commandant Gorka encaisse avec le sourire les flèches verbales décochées par l'échotier 7. Le Maisonneur et le Maître Queux visiblement enchantés de se retrouver à Chillon (Hansruedi Gerber et Edgard Bovier) 8. Les insignes du Guillon prêts à rejoindre les boutonnières des compagnons 9. Vieux dicton du Guillon: «Si le Gouverneur est heureux, le ressat sera joyeux!» 10. Un prévôt (Gilbert Folly) pour une commune combourgeoise (Givrins)

62

9

Le Guillon

N°49 2/2016


7

8

10

Le Guillon

N°49 2/2016

63


Ressats

Vendredi 29 avril Conseiller Sandy Beetschen Responsable RH Compagnon juré Antoinette Monnard Chapeau noir Commune combourgeoise Crans-près-Céligny Compagnon Ismet Bajrami Romanel-sur-Lausanne Paul-Marie Bühler Tolochenaz Harald Cropt Ollon VD Jean-Marc Favez Saint-Légier Erik Haas La Tour-de-Peilz Nessim-Maxime Medina Courchapoix William Pacalet Epalinges Stéphane Python Nyon Jonathan Richard Ollon VD 11

Samedi 30 avril Compagnon majoral Stéphane Dupays Directeur de l’usine d’embouteillage de l’eau d’Evian Commune combourgeoise Agiez Compagnon Yannick Juillerat Vouvry Rudolf Mohler Oberwil Olivier Perret Treycovagnes Valentino Torriani Zurich Marc-André Vulliens Thierrens

13

64

Le Guillon

N°49 2/2016


11. Tout sourire devant ses pairs hilares, Sandy Beetschen devient conseiller de la Confrérie du Guillon 12. La promotion du 29 avril: une belle brochette de compagnons! 13. L’art du tirer au guillon, interprété par Antoinette Monnard, Chapeau Noir 2015 14. Le mariage de l’eau et du vin pour une fois réussi: Stéphane Dupays, directeur de l’usine d’embouteillage de l’eau d’Evian, en est ravi! 15. Crans-près-Céligny n’était jusqu’ici que commune vaudoise: la voici combourgeoise

12

14

15

Le Guillon

N°49 2/2016

65


© Edouard Curchod

Honneur aux Communes viticoles Combourgeoises de notre belle Confrérie! D’Aigle à Yvorne elles sont 157… par ordre alphabétique. Petit tour d’horizon en jouant des mots et des noms. Du Champagne et que les femmes dansent! On commence au Nord. Grande et belle région blottie entre lacs et Jura. C’est le Pays de ce Bon-Villars qui a les Côtes de l’Orbe en long à force de tirer sur le Arnex pour arrêter son pic à tous les troquets. L’autre jour il était avec le Grand-Son à Mathod, ils ont Vallamand commandé du Vully… pour une fois il était Mur! Bavois, ils ont eu de la chance, après ils ont essayé du Baulmes… ils l’on eut sur le cœur! Partons maintenant tout au bout de La Côte où là-bas on a parfois l’impression qu’ils Nyon rien compris. S’appeler Crassier, Trélex, c’est pas beau ça! Et puis c’est Vich dit, mais là encore, si le grand Bogis-Bossey un peu plus et buvait un peu moins y finirait pas Borex tous les soirs. A force, il a fini Gingins et a é-Coppet de six mois à Prangins. Mais le gaillard a eu du Crans et s’en est sorti en allant Commugny en Terre Sainte. Revenons un peu vers le cœur de la Côte. Si ça reste à prouver que Tartegnin est le pays du bon vin, on est par contre sûr qu’Allaman a l’Aubonne. Si on peut trouver normal que Bougy tienne la chandelle à Féchy quand il Monte-sur-Rolle… Le problème n’est pas si Begnins quand Vinzel serre fortement Luins contre Gland. Car Luins s’est toujours épanouie dans les bras de Vinzel. Et si on le sert c’est qu’il est prêt…le Luin. Trait d’union entre le cœur de la Côte et Lavaux Morges se tient là au mitan du vignoble vaudois.

66

Le Guillon

N°49 2/2016


Propos de Clavende

Chablais AOC Ollon 2013, nobles cépages rouges

Raoul Cruchon, conseiller

Ah Morges! Mon pays, mon terroir Je pourrais vous en parler toute la nuit Rien que là 39 communes viticoles! Impossible de les citer ici. La plus grande région viticole du canton, la plus belle aussi. ses 620 ha, ses 11 châteaux viticoles, son riche passé. le berceau du Servagnin, L’Ecole de Marcelin Le triomphe d’ARVINIS La Véritable capitale des vins vaudois! Un jour que j’étais à Féchy avec Torchette À la table du bistrot y avait un petit morveux de vigneron, Qu’arrêtait pas de se vanter, Genre… Oui nous au cœur de la Côte… C’est pas pour dire mais quand même au cœur de la Côte… Oui mais c’est pas comme au cœur de la Côte… Au bout d’un moment j’ai vu que Torchette commençait sérieusement à grimper les tours, Et ça n’a pas traîné, Quand le gaillard a remis ça, Torchette s’est levé et lui a lancé: «Dit donc, petit morveux, tu sais ce qu’il y a entre le cœur de la Côte et Lavaux? Il y a l’Entre-côte!» Et bien traversons maintenant la capitale et allons à Lavaux ma mignonette… Alors là c’est un autre monde. Si partout ailleurs on dit que le blanc «ça redemande!» Sous le Mt Pèlerin on dit «Cha… redonne!» Plus bas, alors là, plus bas, on nage en plein bonheur, un peu comme dans ces histoires qu’on raconte aux enfants et qui finissent toujours bien. car, même si Rivaz et «Saint Sa font rien» ils Vevey-Montreux et eurent beaucoup d’enfants. Vevey-Montreux! Voilà deux appellations qui ont réussi leur fusion, elles! Tandis que de l’autre côté de Lavaux…. Grandvaux et Villette se sont se sont retrouvées pommes avec le Bourg… en Lavaux.

Le Guillon

N°49 2/2016

A Puidoux on est tout Dézaley Qu’à Riez les grappes soient si Epesses qu’on peut les vendanger Calamin. Elles sont si lourdes que personne veut les Cully. Logiquement nous finissons se tour d’Horizon ici Au Chablais et son icône…. Yvorne! Clos du Rocher, L’Ovaille, Trechêne, La George, Maison Blanche, les plus beaux terroirs du Chablais. Oh! Je sais, de le dire, Chablais pas à tout le monde. Mais on a beau regarder, c’est vrai quand même. Prenons déjà juste à côté, Villeneuve par exemple. Quand on réalise que le vignoble de Villeneuve est coincé entre le Pissot et Chillon on est en droit de se demander si le terroir dont ils sont si fiers c’est bien la cargneule qui le donne! Si maintenant on remonte à Bex, on constate que là-bas, le terroir on s’en est toujours Lavey-les-Bains. Quand à Aigle on a beau dire Mais les terroirs sont quand même traversés par la Grande Eau! Non… s’il fallait voter pour le meilleur ce serait Yvorne. Sauf si Chillon faisait valoir son droit de Veytaux. Reste Ollon… Celui que vous avez dans votre verre. Un Assemblage noble 2013 La robe est rouge rubis avec des reflets noirs. Le nez est direct sur la cannelle, le toast, l’amande grillée, la banane écrasée et la cerise confite. La bouche évoque la girofle, les épices douces et vaguement la confiture de fraise. Sa texture est très fine, caressante, flatteuse, sensuelle et finalement carrément racoleuse! Gouverneur mets-nous en perce ce grand vin! Ne serait-ce que pour contredire Le cri du cœur du petit Delarze Qui dernièrement ma lancé, vaniteux: «Le terroir d’Ollon?... Vaut pas Verchiez!»

67


Guillonneur de Lucerne

Entre Iron Maiden et bouchons routiers

Un guillonneur aux petits oignons!

Claude Piubellini, conseiller Photos: Edouard Curchod Il fallait un brin de courage pour se rendre à Lucerne ce vendredi 3 juin dernier, la date coïncidant avec un concert du groupe Iron Maiden dans le cadre de l'Allmend Rockt Festival, entraînant un trafic monstre dû à l'afflux de fans venant de toute la Suisse et audelà. Les plus prévoyants – dont votre serviteur – avaient prévu un départ anticipé, mais quelques aficionados des vins vaudois ont pu goûter un large quart d'heure éponyme avant de rejoindre le restaurant Kreuz à Emmen. Comme à l'accoutumée, le préfet en place, notre frère de robe Eric Nicole, avait organisé sa soirée aux petits oignons dans le cadre agréable du restaurant tenu par Mme Romaine Stoffel à l'accueil et Hans-Peter Suter aux fourneaux. L'établissement a par ailleurs été distingué par le guide Gault et Millau d'une note de 16/20 cette année, la carte des vins ayant pour sa part été déclarée comme la meilleure de Suisse, rien de moins… Un concours Jean-Louis d'exception Après les salutations d'usage aux 40 participants et aux conseillers du Guillon présents pour l'occasion, le

68

Le maître de cérémonie, le préfet Eric Nicole

préfet rappelle les règles du JeanLouis (dégustation commentée par les experts, puis ces mêmes vins sont servis carafés dans un ordre aléatoire). Ce seront cinq chasselas 2015 provenant des cinq régions emblématiques du vignoble vaudois: La Côte, Nord vaudois, Lavaux, Dézaley et Chablais. Le millésime est juste exceptionnel et Philippe Schenk qui présente les deux premiers (Domaine du Martheray et Château d'Eclépens) relève qu'une telle concen-

tration ne se voit probablement qu'une ou deux fois dans la vie d'un vigneron. Guy-Louis Chappuis lui succède pour présenter son saint-saphorin et son dézaley et André Linherr, légat de la Confrérie, termine en présentant l'yvorne. Une épreuve pas si facile, car les vins ont un fruité si intense qu'on peut les confondre aisément lors de la dégustation de concours. Chacun finit par remplir SA solution et vers 20h00, le préfet ramasse tous les bulletins et invite l'assemblée pour un apéritif riche et gourmand, arrosé d'un torrent de chasselas haut de gamme. Un repas gastronomique et les vins du domaine Bovy Vers 21h00, le repas commence par une entrée de noix de saint-jacques, couscous aux amandes et vinaigrette aux abricots. Eric Bovy du domaine Bovy à Chexbres l'accompagne d'un viognier

Le Guillon

N°49 2/2016


Dégustation, observation, réflexion, hésitation, décision... ou l'art de pratiquer le Jean-Louis!

Aux fourneaux, Hans-Peter Suter, 16/20 au Gault et Millau

de St-Saphorin 2013 qui se marie parfaitement aux saveurs du plat. Le plat principal est une noix de cerf grillée, légumes méditerranéens du four et gnocchis à la romaine. Notre amphitryon nous propose cette fois deux rouges de St-Saphorin en dégustation: le Valdensis 2013, assemblage de 6 cépages (merlot, cabernet sauvignon, cabernet franc, gamaret, garanoir et diolinoir) et l'Optimus 2012 (diolinoir pur). Le dessert, une profiterole saint-honoré, est accompagné d'un St-Saphorin 2011 (gewurztraminer passerillé), un de ces vins doux dont on dit qu'il fait du bien à Monsieur quand Madame en boit…

C'est finalement le préfet Eric Nicole qui appelle l'équipe de cuisine in extenso pour la remercier et la féliciter pour cet excellent repas, permettant à toute l'assemblée de manifester bruyamment son contentement. Il remercie enfin chacun pour sa participation et rappelle le prochain rendez-vous du Guillon, soit les Quatre Heures du Vigneron à Constantine, qui auront lieu à la fin de l'été. Et c'est autour de quelques flacons de chasselas dégotés par nos amis vignerons que la soirée se termine, dans la joie générée par le vin vaudois, dissolvant ainsi définitivement toute éventuelle barrière de röstis. Grand merci au préfet pour son organisation impeccable… et à l'année prochaine!

…and the winner is… Mais entre plat et dessert, le préfet divulgue le résultat du concours JeanLouis en relevant l'intensité et le sé-

Le Guillon

N°49 2/2016

rieux de la compétition. Huit convives ont trouvé trois régions exactes et l'ancien préfet Willy Toggwyler leur offre, en plus du diplôme de bon dégustateur qu'ils reçoivent, le dernier CD des Gais Compagnons qui sort de presse. Si Philippe Schenk (hors concours) a trouvé les cinq régions, une seule personne a également réussi cette performance: il s'agit de Daniela Mahrer d'Udligenswil, laquelle gagne ainsi une invitation pour deux personnes à l'un de nos ressats du printemps 2017 au château de Chillon. Elle est vivement applaudie par toute l'assistance. Après le dessert, une petite surprise nous est proposée avec une impressionnante démonstration de tango argentin présenté par la dame compagnon Muriel Rücklander et Bruno Hafliger. Eux aussi sont vivement applaudis, tant leur prestation est gracieuse et convaincante.

69


1er Grand Cru

Un millénaire d’excellence

Entrez dans l’univers d’exception d’un 1er grand cru www.chatagnereaz.ch Les 1ers Grands Crus vaudois, nouveaux symboles d’excellence


L'invité

Guy Parmelin

Un ministre aux racines vigneronnes Pascal Besnard, échotier Photos: Edouard Curchod

Le décor du bureau dans lequel Guy  Parmelin nous reçoit à Berne, dans une rue adjacente à la Place fédérale, par une chaude journée d’été, est minimaliste. Un drapeau suisse, des plantes vertes, quelques photos. C’est tout. Mais ça n’est pas une question de goût: la rénovation du Palais fédéral n'était pas tout à fait terminée. Et puis le vrai décor de l’entretien est ailleurs: il se situe dans le vignoble, sur la Côte, à Bursins. L’homme qui dirige depuis le premier janvier 2016 le Département fédéral de la défense, de la protection de la population et des sports, y a exploité avec son père, Richard, puis avec son frère, Christophe, un domaine agricole et viticole de 36 hectares, dont 5 de vignes. Guy Parmelin a complètement cessé cette activité après son élection. Mais la trajectoire reste: le Conseiller fédéral vaudois a fait un apprentissage d’agriculteur. Il est aussi diplômé de l'école de Marcelin à Morges et titulaire d’une maîtrise d’agriculteur-viticulteur. Souvenirs frais Les souvenirs sont évidemment encore très frais. Le chef du DDPS évoque spontanément le moment-clé de la vie vigneronne: «La récolte. Elle sanctionne une année entière de tra-

Le Guillon

N°49 2/2016

vail. Mes dernières vendanges, celles de 2015, étaient parmi les plus belles. La mouche suzukii n’avait pas sévi, comme en 2014.» Mais Guy Parmelin de rappeler aussitôt que rien n’est jamais acquis en viticulture: «Il y a aussi les épisodes de grêle. Malgré les fusées et même s’il y a une assurance pour ça, c’est dur d’assister, impuissant, à la destruction d’une partie de la récolte. Je me souviens de 2013. J’étais en vacances. Et mon frère m’a demandé de rentrer au plus vite. Une quarantaine de lignes ont été perdues.» Aujourd’hui, le Conseiller fédéral avoue manquer de temps pour passer au domaine. La carrière politique – que Guy Parmelin assure n’avoir jamais planifiée – a pris le dessus au fil des ans. «Lorsque j’étais député au Grand Conseil vaudois, je suis parvenu à

concilier vie politique et activités professionnelles. On s’est toujours bien entendu avec mon père et mon frère. L’organisation est devenue plus complexe avec mes mandats au Conseil national, mon rôle dans les commissions, notamment à la présidence de la commission de la sécurité sociale et de la santé publique, etc…» Une fois qu’on les goûte… En matière de vin, les préoccupations de Guy Parmelin ne sont pas uniquement focalisées sur sa région d’origine. Ainsi la présence des vins suisses à l’étranger, notamment lors des grandes manifestations sportives, ne le laisse pas indifférent, bien au contraire. «Dans les ambassades de Suisse, on sert du vin suisse. On trouvait du Vinzel et du vin tessinois pen-

71


L’Oenothèque du Petit Versailles est ouverte Du mardi au vendredi L’Oenothèque du Petit 10h00 – 12h30 Versailles est ouverte 15h00 – 18h30

Du mardi au vendredi Le samedi 10h00 – 12h30 10h00 – 18h30 16h00 15h00 –

Des vins élevés dans le respect de leur terroirs et caractères. Des vins élevés dans le respect de leurdéguster terroirs et caractères. Venez Lavaux tout entier dans votre verre ! Venez déguster Lavaux tout entier dans votre verre ! Les Frères Dubois SA – Ch. de Versailles 1 – 1096 Cully – 021 799 22 22 – www.lfd.ch

design stanproddesign stanprod

Le samedi 10h00 – 16h00


L'invité

dant l’Euro de football à Paris et des vins vaudois à Rio, pour les Jeux olympiques. Parfois, c’est vrai, les vins de chez nous ne sont pas faciles à trouver à l’étranger. Il ne faut pas oublier que le pays est petit et la production faible en quantité. Mais si on peut montrer nos vins, il faut le faire. Grâce aux œnologues, aux jeunes vignerons, nos crus ont fait un bond en avant, en termes de qualité. Pas mal d’étrangers l’ont constaté: une fois qu’on les goûte, on ne peut plus s’en passer! Une reconnaissance internationale est très importante pour les vignerons de nos régions. Un événement comme le Mondial du Chasselas y contribue.» Un verre de vin suisse après la séance du CF En Suisse même, les vins indigènes ne sont pas toujours bien lotis. Leur présence est souvent discrète sur les cartes des restaurants et ils sont parfois carrément absents dans les établissements qui accueillent les grandes manifestations. Mais Guy Parmelin ne prône pas la répression: «Que ce soit au Hallenstadion, au Comptoir de Berne, ou à Palexpo, par exemple, le titulaire de la patente a la liberté de choix, rien ne l’oblige à servir des vins suisses. Je préfère inciter, mettre en avant le comportement du tenancier qui joue le jeu plutôt que jeter l’anathème sur celui qui ne propose pas de vins suisses. En pratiquant de la sorte, lorsque j’étais Conseiller national, avec d’autres parlementaires, nous avons pu faire évoluer positivement la pratique des restaurateurs en ville de Berne. Ils ont consenti de gros efforts.» Le Conseil d’Etat vaudois choisit chaque année, lors d’une dégustation à l’aveugle, son vin officiel. Pourquoi le Conseil fédéral ne pratiquerait pas de la même manière? «Chaque Conseiller fédéral soutient les vins de sa région. Vous imaginez,

Le Guillon

N°49 2/2016

s’il fallait tous les déguster à l’aveugle! Mais je vous assure que chaque mercredi, au terme de notre séance hebdomadaire, on boit un verre de vin blanc ou de vin rouge suisse!» Parrain d’un CD des Gais Compagnons En dépit d’un agenda que l’on devine hyperchargé, Guy  Parmelin n’a pas hésité à faire le déplacement jusqu’au château de Châtagneréaz (Mont-surRolle), à fin mars, pour parrainer le dernier CD des Gais Compagnons, On est Vaudois. Le ministre explique que pour lui c’était tout à fait naturel: «J’aime le chant et les chorales. Je suis membre de la Confrérie du Guillon, qui fait énormément pour le rayonnement du vin vaudois au-delà des limites du canton. Et ce domaine de Châtagneréaz m’est cher, comme il l'est pour mon père, ami de l’ancien régisseur. A l’instar de mon frère, j’ai noué d’excellentes relations avec le régisseur actuel, Philippe Schenk, an-

cien brillant junior du FC Bursins! (réd: et conseiller de la Confrérie du Guillon)» Ce jour-là Guy Parmelin est venu seul à Châtagneréaz, sans escorte, ce qui correspond à l’image de simplicité donnée depuis longtemps par le gouvernement helvétique. «Hormis la présence d’un journaliste du Blick, il n’y avait rien de bien dangereux! Plus sérieusement, la fonction impose un certain protocole. Mais ça n’est pas parce que l’on est ministre que l’on est au-dessus de tout. Il faut juste trouver la bonne mesure. Le contact avec la population, c’est le minimum que l’on puisse lui rendre. Mais parfois il faut prendre certaines précautions, on doit accepter les mesures de sécurité.» Un dernier mot de Guy Parmelin, sur l’image du politicien romand, souvent brocardé en Suisse alémanique pour son goût pour les festivités, un verre à la main: «Tout est dans la façon, dans la mesure. L’essentiel, c’est de rester soi-même.»

Le dernier CD des Gais Compagnons, On est Vaudois, parrainé par Guy Parmelin, authentique amateur de chant choral

73


74

Le Guillon

N°49 2/2016


Soulevons le couvercle

Talent et fidélité E. Bovier, La Table d’Edgard, Lausanne Palace

«Les épices, l’huile d’olive et le vin blanc subliment le foie gras et la poulette. Il y a beaucoup de légumes, dont le choix évolue selon la saison. C’est un plat qui excite le palais et ouvre l’appétit!»

Pascal Besnard, échotier Photos: Edouard Curchod Au château de Chillon, Edgard Bovier se sent comme un poisson dans l’eau. Pour ce passionné de cuisine méditerranéenne, cela tombe plutôt bien. Pour les convives du Guillon, c’est idéal. "Dans un restaurant gastronomique et à Chillon, la philosophie est la même", explique le chef, elle tient en trois mots: "qualité, constance et convivialité". On serait tenté d’en ajouter deux : talent et fidélité. Le talent était flagrant lors des ressats du printemps dernier. Et la fidélité? Edgard Bovier, c’est 26 ressats au compteur. Pas moins. Voici deux recettes qui portent le label des Ressats des Combourgeoisies.

La composition de poulette. Recette page 76 Le Guillon

N°49 2/2016

75


Soulevons le couvercle

Composition de poulette foie gras et légumes en barigoule Recette pour une terrine (15 parts)

INGRÉDIENTS: 500 g de cuisse de volaille 500 g de blanc de volaille 250 g terrine de foie gras 1 l de vin blanc 300 g de mirepoix (oignons, cèleri, carottes et blanc de poireaux 1 bouquet garni 3 pièces d’artichauts violets cuits en barigoule 1 bulbe de fenouil cuit en barigoule 100 g de brunoise de carottes cuites en barigoule 1 botte de persil frisé 1 botte de coriandre 1 botte de ciboulette 25 pièces de mini-poireaux cuits fondants 10 feuilles de gélatine Clarification: 200 g de viande de bœuf hachée 1 carotte 1 oignon ½ blanc de poireau 1 blanc d’œuf Vinaigrette de tomates: 1 dl d’huile d’olive Taggiasche ½ dl de vinaigre de vin rouge 4 échalotes hachées finement 4 pétales de tomates séchées en brunoise 1 botte de cerfeuil Sel et poivre

PROGRESSION: la cuisse de volaille dans une casserole. Mouiller avec le vin blanc et de l'eau froide, porter à ébullition et ajouter la mirepoix. Cuire à feu doux 1h30, désosser et dégraisser les cuisses et pocher les suprêmes dans le bouillon. • Clarifier le bouillon de cuisson et y ajouter la gélatine. • Réunir les cuisses effilochées, ajouter la brunoise de carottes, le persil haché et un peu de bouillon. • Chemiser la terrine avec les minis poireaux rangés en quinconce. Coller avec du bouillon au pinceau, saupoudrer de coriandre et de ciboulette. Garnir de l’effiloché, puis des artichauts et du fenouil taillé en quartiers, du foie gras et du suprême de volaille. Verser le reste du bouillon, et finir avec une lamelle de poireau. Réserver 12h au frigo. • Couper une belle tranche, la poser sur une assiette et entourer de vinaigrette de tomates séchées et décorer de cerfeuil. • Mettre

Pour accompagner ce plat, le sommelier Romain Leyssenne a sélectionné Le Viognier 2014 du Domaine Henri Cruchon, à Echichens

«Dans la palette aromatique, très persistante, on décèle la fleur d’acacia. Ce vin présente un bel équilibre entre fraîcheur et rondeur. La fraîcheur fait écho aux légumes et la rondeur, au foie gras. La légère amertume finale prolonge les sensations de la dégustation du vin comme du plat.»

76

Le Guillon

N°49 2/2016


Conversation à la rhubarbe

glace à huile d’olive Taggiasche Grand cru Recette pour 4 personnes

PROGRESSION: • réaliser une compote de rhubarbe

Crème d’amande: • Mélanger tous les ingrédients à température ambiante • Foncer les moules à tartelette avec de la pâte feuilletée • Mettre une petite quantité de crème d’amande puis la compote de rhubarbe jusqu’à hauteur de cercle. • Refermer avec un cercle de feuilletage

«C’est un dessert très féminin. La glace à l’huile d’olive, c’est la signature de ma pâtisserie.» Glace royale: • Etaler sur le dessus un mélange de sucre glace et de blanc d’œuf jusqu’à obtenir une pate épaisse puis quadriller avec des bandes de feuilletage • Cuire à 175°C pendant 25 minutes

Glace à huile d’olive: • Chauffer la crème et le lait. Blanchir les jaunes avec le sucre et verser le liquide chaud dessus. Remettre le tout sur le feu et fouetter jusqu’à la première ébullition. Passer au

chinois, laisser refroidir et turbiner. Ajouter l’huile d’olive à la fin, juste avant de sortir la glace de la sorbetière. Coulis de fraises: • Mixer les fraises avec les zestes, le jus de citron et le jus de fraise. Finition et presentation: • Mettre du jus de fraise au fond de l’assiette puis disposer la conversation ainsi qu’une quenelle de glace avec un trait d’huile d’olive

INGRÉDIENTS: 500 g de pâte feuilletée Compotée rhubarbe: 200 g de rhubarbe 20 g de sucre 1 gousse de vanille Crème d’amande: 30 g de sucre glace 30 g de beurre 30 g de poudre d'amande 1 œuf une pincée de farine Glace royale: 5 g de blanc d’œuf 200g de sucre glace Glace à huile d’olive: 2 dl de crème 3 dl de lait 4 jaunes d’œufs 75 g de sucre 0,8 dl d’huile d’olive Coulis de fraise: 500 g de fraises 1 citron vert

Le Guillon

N°49 2/2016

77



Sandy Beetschen,

Un nouveau promu prometteur En choisissant Sandy Beetschen, responsable des ressources humaines chez Global Blue (leader mondial du commerce hors taxes), les Conseils du Guillon ont recruté un chantre et clavendier mordu de la scène et donc propre à présenter invités de prestige, plats raffinés ou vins d'exception lors de nos ressats de Chillon. Ce qui frappe chez Sandy, c'est tout d'abord son sourire malicieux et son empathie immédiate. Amoureux des vins vaudois – sa famille proche exploite de la vigne à Begnins – il apprécie tout particulièrement le chasselas, vin de conversation, de gastronomie et même parfois de soif quand la soirée s'avance en heureuse compagnie. Membre de diverses sociétés mais sachant bien souvent se rendre disponible, il a déjà à cœur de participer intensément aux activités de la Confrérie. Tout fraîchement intronisé ce printemps parmi les Conseils, il brûlera les planches des ressats cet automne déjà, aux côtés entre autres de notre chancelier Édouard Chollet,

© Edouard Curchod

Portrait de conseiller

dont s'il n'a pas encore la carrure, il a toutefois définitivement adopté la tonsure. Nul doute que son humour fin mais ravageur fera merveille. Nous souhaitons donc le meilleur accueil à ce nouveau frère de robe, passionné de jazz et assoiffé de convivialité. Bienvenue parmi nous, Sandy! Claude Piubellini, conseiller

Hommage

Chroniqueur gastronomique et Conseiller honoraire,

© Confrérie du Guillon

Michel Vidoudez nous a quittés à l’âge de 81 ans Durant près d’un demisiècle, il aura exploré l’univers infini des mets et des vins, livrant sous sa signature une multitude d’articles, ainsi que nombre d'ouvrages consacrés à notre cuisine régionale. Recruté au service de presse de l’Expo nationale de 1964, Michel Vidoudez entre ensuite à la rédaction de La Feuille d’Avis de Lausanne (aujourd’hui 24 Heures), d’abord comme localier, puis en qualité de responsable de la rubrique gastronomique et cela durant des décennies. A l’époque où une cuisine inventive bouscule la tradition, Michel Vidoudez crée

Le Guillon

N°49 2/2016

le guide du Coup de Fourchette, aujourd’hui encore et toujours hautement apprécié par les amateurs de bonne chère. La présence de Michel Vidoudez dans la presse gastronomique ne s’arrête pas là. Jusqu’à ces dernières années, il collabore à maintes revues spécialisées et à l’hebdomadaire Coopération. Tout à la fois épris d’innovation et de défense des valeurs traditionnelles, il célèbre la cuisine de son terroir natal dans plusieurs livres, tous parus chez Cabedita. A la Confrérie du Guillon, où il s’illustre comme clavendier de 1977 à 1986, ses boutades et son humour font florès. Rendant hommage à ce fécond prescripteur du goût, nous exprimons à sa famille notre sincère sympathie. Michel Logoz, chancelier honoraire

79


La colonne de Michel Logoz

Hold-up sur le goût! Grand pontife de la dégustation, Robert Parker aura été, non seulement le critique le plus craint et le plus influent de son temps, mais sa notation des crus s’est imposée comme une référence absolue. Saluons au passage les lauriers dont il a gratifié trois de nos prestigieux producteurs, soit LouisPhilippe Bovard, Pierre-Luc Leyvraz et Blaise Duboux! Comment expliquer le phénomène Parker? Tout a commencé par une attaque en règle des prix et qualités des bordeaux 1973. Pour agiter l’opinion publique, rien de mieux que ramer à contre-courant des idées reçues. Formé au droit, Robert Parker rend ses verdicts seul, sans s’encombrer d’un jury, dans des propos concis et tranchants. Voilà qui contraste avec les dégustations en bandes organisées de nos concours et autres fiestas, dont les suffrages sont noyés dans une ratatouille anonyme! Certes, les joutes gustatives n’ont rien de très sexy. Rien à voir avec les paillettes de l’Eurovision ou le top chrono des virtuoses du cyclisme ou de l’athlétisme! En revanche, tout ce qui fait débat ou question intéresse les amateurs de vin: pensons à la dérive des artifices œnologiques, à l’abus des fongicides et pesticides, aux réponses spécifiques apportées aux aléas du réchauffement climatique ou encore à la recherche de méthodes aptes à produire des crus identifiables selon les terroirs. Avec, dans chaque cas, la parole donnée au pour et au contre. Fort heureusement, Le Guillon et nombre de chroniqueurs spécialisés ne nous ont pas attendus pour passer à l’acte!

80




Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.