Le Guillon N°54 - FR

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LA REVUE DU VIN VAUDOIS

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N° 54 2019/1

WITH ENGLISH SUMMARY


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Editorial

Immanquable !

© Pascal Besnard

La Fête des Vignerons sera bel et bien l'événement à ne pas manquer de l'été 2019. L'UNESCO a pris la mesure du caractère exceptionnel de la fête en l'inscrivant, en 2016, sur sa liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité. Patrimoine, culture et humanité... c'est bien de tout cela qu'il s'agit. Edition après édition, jusqu'à cinq fois par siècle, la Fête des Vignerons glorifie le noble - mais souvent ingrat - travail de la vigne par

les gardiens des vignobles de Lavaux et du Chablais que sont les tâcherons, héros de la grande célébration veveysanne, et sujets principaux du dossier que votre revue consacre à la grand-messe vitivinicole vaudoise. Si la FEVI (petit nom de la Fête, pour ses organisateurs, figurants et bénévoles) célèbre d'abord le travail de la vigne, le vin, finalité de l'exigeant labeur, y joue aussi un rôle primoridal. Quatre cuvées – deux de blanc et deux

Pascal Besnard Rédacteur responsable

de rouge – estampillées Fête 2019, sont soumises aux papilles des amateurs depuis l'automne dernier. Deux chasselas de prestige – un Dézaley et un Yvorne – les rejoindront dans le très riche catalogue de la Fête des Vignerons 2019. L'événement qui, pour imiter les formules du célèbre guide gastronomique à couverture rouge, non seulement mérite un détour, mais à l'évidence, vaut le voyage !


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Le Guillon 54_2019/1 Couverture : dans les couleurs de la Fête, le logo de la Confrérie des Vignerons, revisité par Estelle Hofer

1 Editorial Fête des Vignerons 5 «Sans tâcheron, pas de Fête des Vignerons » 13 Crus classiques et cuvées de prestige 17 Tout le vignoble participe à la Fête 19 Les repas des vignerons-tâcherons 25 François Margot, Abbé-Président : «La Fête des Vignerons, c'est tellement rare ! » 26 32 34 39 44 46 49

Les Caves ouvertes vaudoises ont 10 ans Des Bourguignonnes fondues de vins vaudois Sayonara, Monsieur Keller ! Grand Prix du Vin Suisse 2018 Lauriers de Platine blanc 2018 Concours Mondial de Bruxelles à Aigle Les nouveaux cépages font de la résistance

Confrérie du Guillon 53 Message du gouverneur 54 Les Ressats d'Artémis 64 Propos de clavende 66 Guillonneur de Bâle 68 Adolf Ogi, lauréat du Guillon d'Or 70 Les Quatre heures du Vigneron à Valeyres-sous-Rances 74 Soulevons le couvercle, Werner Schürch 79 Portrait de conseiller, Olivier Mages 80 La colonne de Michel Logoz

Revue Le Guillon Sàrl, Ch. de la Côte-à-Deux-Sous 6, CH-1052 Le Mont-sur-Lausanne revue guillon.ch, www.revueleguillon.ch Le Guillon, la revue du vin vaudois paraît deux fois par an en langues française et allemande ; résumés en langue anglaise. IMPRESSUM – Gérants : Dr Jean-François Anken (président), Luc Del Rizzo, Daniel H. Rey – Partenaires: Confrérie du Guillon, Office des Vins Vaudois, Label de qualité Terravin, Fédération des caves viticoles vaudoises, Section vaudoise de l'Association suisse des vignerons encaveurs, Service de l'agriculture et de la viticulture (SAVI), Service de la promotion économique et du commerce (SPECo) – Rédacteur responsable: Pascal Besnard – Ont collaboré à ce numéro: Pierre-Etienne Joye, Michel Logoz, Claude-Alain Mayor, Claude Piubellini, Luc del Rizzo, Pierre Thomas, Alexandre Truffer, Jean-Claude Vaucher, Eva Zwahlen – Traductions: Evelyn Kobelt, Eva Zwahlen, Loyse Pahud, IP Communication in English – Graphisme et mise en page: stl design – Estelle Hofer Piguet – Photographes: Sandra Culand, Edouard Curchod, Philippe Dutoit, Bertrand Rey, Hans-Peter Siffert – Photolitho: l'atelier prémédia Sàrl – Impression: PCL Presses Centrales SA – Régie des annonces: Advantage SA, Isabelle Berney, regie@advantagesa.ch, +41 21 800 44 37 – Abonnements: www.revueleguillon.ch – revue@guillon.ch – ISSNN 0434-9296

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©Bertrand Rey

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Fête des Vignerons

A gauche : François Montet, président de la Fédération vaudoise des vignerons A droite : Jean-François Chevalley, président de la commission d’échantillonnage de la Confrérie des Vignerons

«Sans tâcheron, pas de Fête des Vignerons» Pierre Thomas

C'est l'avis de François Montet, de Blonay, président de la Fédération vaudoise des vignerons. Mais qui se cache derrière cette spécialité bien vaudoise. Et le tâcheron sera-t-il encore d’actualité dans une vingtaine d'années ?

Le 18 juillet à 11 heures du matin, ils seront cinq ou six vignerons à attendre avec impatience le couronnement, à la fois acmé et lever de rideau de la première représentation de la Fête. Rien n’a filtré des résultats de la course à la couronne 2019. Le résultat se jouera à un cheveu, pour une épreuve non pas triennale, mais, parce que la Fête ne tombe pas forcément dans un rythme de trois ans, poussé sur cinq années, soit quinze contrôles et vingt saisons. Depuis 2014, certains millésimes ont apporté leurs lots de surprises à maîtriser, dûment évaluées par la commission des vignes de la Confrérie. Cette commission est présidée par le vigneron-encaveur Jean-François Chevalley, de Treytorrens en Dézaley, qui est aussi président de la commis-

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sion d’échantillonnage. Seuls deux ou trois de ses membres connaissent le classement des couronnés (d’or, d’argent et de bronze) qui sont restés, cette fois, des numéros, pour anonymiser le calcul de leur note moyenne. Le vigneron derrière l’étiquette Qui cultive le vignoble vaudois  ? Y pense-t-on seulement, quand on boit ses trois décis de chasselas ? Qui est derrière l’étiquette d’un flacon  ? Un vigneron-encaveur, propriétaire ou locataire de ses parchets ? Un coopérateur, tenu de livrer son raisin à sa cave, dont il est membre ? Un chef de culture, salarié d’une grande maison ? Ou ce vigneron-tâcheron, corseté par le contrat-type de vignolage arrêté par le Conseil d’Etat le 27 juillet 1994,

spécialité vaudoise, réservée à Lavaux et au Chablais, d’une part, à La Côte, d’autre part ? A 51 ans, et sur 9 ha de vignes, le président de la Fédération vaudoise des vignerons cumule tous les statuts. Pour François Montet, « le vignerontâcheron est un salarié et un indépendant » : un oxymore économique que seuls les conducteurs de bus postaux, les couturières à domicile et certains journalistes libres partagent. Employé, il est aussi employeur, mélangeant les décomptes AVS et 2e pilier, pour ne rien dire du fisc, des uns et des autres. Une drôle de mélasse, mais qui subsiste en l’état depuis des lustres, ces bientôt mille ans où la vigne fut plantée à Lavaux par des moines qui manquaient de bras.

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©Philippe Dutoit

©Bertrand Rey

Daniel Lambelet, président des tâcherons vaudois

Jean-Daniel Suardet , un pur pro de la vigne

« Dans les années 1960, les tâcherons étaient mal payés. Ils se sont battus pour obtenir une couverture en assurances sociales » Daniel Lambelet

Un contrat-type vieux d’un quart de siècle Personne, en 25 ans, n’a remis en cause les bases du contrat-type datant de 1994, certes indexé, évoluant selon le marché du vin plutôt que selon le coût de la vie... « Dans les années 1960, les tâcherons étaient mal payés. Ils se sont battus pour obtenir une couverture en assurances sociales  », rap-

pelle Daniel Lambelet, 63 ans, un des vignerons-tâcherons de la commune de Bourg-en-Lavaux. Et président du Groupement vaudois des vignerons-tâcherons (GVVT), fort de 280 membres, où les tâcherons restent en majorité (170), rejoints par les locataires de vignes et les chefs de culture. Près de 40% du vignoble vaudois sont exploités par ces professionnels.

No Labourers - No Festival That’s the opinion of François Montet, from Blonay, who is President of the Vaud Winegrowers’ Federation. But who’s behind this typical Vaud celebration? On 18th July, at 11 am, five or six winegrowers will be impatiently awaiting the crowning ceremony, the high point and prelude to the first Winegrowers’ Festival event. Nothing has leaked out about the results of the 2019 race for the

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crown. It was a very close race, based on fifteen tests over twenty seasons. Since 2014, they have included years of difficult weather conditions, with their fair share of challenges, all duly evaluated by the Confrérie’s Vineyard Commission. The Commission is presided over by JeanFrançois Chevalley, a winemaker from Treytorrens, in the Dézaley area, and president of the Sampling Commission. François Montet, now 51, president of the

Comment expliquer qu’en 25 ans, malgré l’évolution des méthodes culturales, le contrat-type n’ait pas bougé ? « Tout le monde y trouve son compte. On s’en satisfait les uns, les autres », commente Jean-Daniel Suardet, d’Yvorne. Lui aussi a plusieurs casquettes. Mais si François Montet exerce une petite activité de vigneron-encaveur, pour ses propres vignes et ses propres bou-

Vaud Winegrowers’ Federation, gives the following description of the Festival hero: “The vineyard labourer is a salaried employee and a self-employed person”. He is both employee and employer, combining their respective pension plans (AVS and 2nd Pillar). A strange mix that dates back centuries and subsists to this day. In the nineteen sixties, the labourers were poorly paid. “They had to fight to obtain social security coverage”, recalls 63-years-old Daniel Lambelet, one of the vineyard labourer in the commune

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Fête des Vignerons

280 hectares sous contrôle de la Confrérie Tous s’étaient soumis aux visites des experts de la Confrérie, pour noter, trois fois par an, les parcelles signalées par un piquet, selon des critères de travaux saisonniers, pondérés, depuis 1996, par la surface ou la pente, pour tenir compte de la pénibilité du travail. Soit, au total, une surface inspectée

entre Lausanne et Lavey de 280 ha, pour un vignoble de près de 1400 ha. En 2018 ces chiffres ont peu varié : 286 ha, 600 parcelles, de 70 propriétaires, dont une trentaine d’institutions publiques (communes, bourgeoisies, fondations), pour 94 vignerons-tâcherons, chefs vignerons ou chefs de culture. Tous ne participent pas au concours, réservé à ceux qui cultivent plus de 45 ares depuis deux ans au moins. Chaque visite donne lieu à la notation (sur 6) d’actes de viticulture. « La maîtrise de la récolte, ça vaut cher  !  », commente François Montet, qui prend l’épreuve avec philosophie : « Je travaille les vignes sous l’œil de la Confrérie comme les miennes, mais je ne jardine pas. » Chaque évaluation est sujette à recours et les « contrôlés » deviennent susceptibles, à l’approche de la Fête. « Le temps où les tâcherons n’avaient pas de formation est révolu. Aujourd’hui, ils sont aussi bien instruits que les experts », justifie le président de la Fédération vaudoise des vignerons, qui a un employé à l’année et forme un ou deux apprentis viticulteurs. « Nous révisons les directives de la Confrérie régulièrement, la dernière fois pour 2014. Nous sommes au top de l’évolution de la viticulture », (r)assure Jean-François Chevalley. Les huit experts se tiennent au courant des nouvelles pratiques culturales.

Un contrat ancien et des conditions nouvelles S’il ne s’appelait sans doute pas encore « de vignolage », le contrat, passé devant notaire, entre un propriétaire et un viticulteur existe au moins depuis 1391, selon les historiens, comme l’explique le juriste Denis Tappy*. Le vignerontâcheron doit fournir non seulement ses prestations, mais acquérir les outils nécessaires et engager du personnel, par exemple aux effeuilles et aux vendanges. En principe, ses tâches s’arrêtent à la livraison du raisin, le meilleur possible, avec un intéressement à la vendange, payé en espèces et non en nature. Ce statut a permis quelques jolies réussites économiques durant les belles années. Depuis 1993 et l’imposition de quotas de récolte, la marge s’est restreinte. Lavaux et le Chablais disposent d’un contrat-type et La Côte d’un autre, tenant compte de la taille des exploitations (La Côte compte un peu moins de parcelles que Lavaux, mais trois fois plus étendues) et de la mécanisation. A Lavaux, vignoble en terrasses, le passage aux banquettes (où les ceps sont plantés perpendiculairement à la pente), la mécanisation, avec des chenillards, les remaniements parcellaires, la généralisation de la production intégrée (PI), la diminution des traitements, etc., ont per-

of Bourg-en-Lavaux. He is also president of the Vaud Association of Vineyard Labourers, with 280 members of which the majority (170) are labourers and the remainder are vineyard renters and managers. More than 40% of the vineyards in Vaud are cultivated by these experts. How does one explain the fact that despite the progress in winegrowing methods, the standard contract has not changed an iota? Jean-Daniel Suardet, from Yvorne points out: “It’s a win-win situation that makes everyone happy”. While François

Montet is a small-scale winegrower/winemaker who cultivates his own vines and bottles his own wine, Jean-Daniel Suardet is first and foremost a vinegrower. He is viticultural adviser to Obrist on their 75-hectare vineyards, where he also oversees the other vineyard labourers. At the Clos-du-Rocher estate (11ha), in Yvorne, he works as a vineyard labourer himself, while at Château Maison Blanche (10 ha), also in Yvorne, he fulfils the role of vineyard manager. At 57, in the morning of 18th July,

Jean-Daniel Suardet might well be the crowned hero in the festival arena. “That would be a tremendous reward!”, he says with a smile, admitting that he has a competitive spirit. He has twice - in 2011 and 2014 – come second in the triennial valuation of vineyard labourers, that has been taking place since 1805, between the Festivals.

teilles, Jean-Daniel Suardet est avant tout viticulteur. Il conseille la maison Obrist pour les vignes (75 ha), où il chapeaute d’autres vignerons-tâcherons, rôle qu’il exerce lui-même au Closdu-Rocher (11 ha), en parallèle de chef vigneron au Château Maison Blanche (10 ha), les deux à Yvorne. A 57 ans, on pourrait bien le retrouver le 18 juillet au matin, dans l’arène. « Ce serait une belle reconnaissance ! Et je suis assez compétiteur dans l’esprit », sourit Jean-Daniel Suardet. En 1999, il venait d’arriver au Château Maison Blanche et n’était pas dans la course, mais il prit tout de même part au spectacle. Deux fois de suite, en 2011 et 2014, il s’est classé deuxième de la « triennale », l’épreuve qui, depuis 1805, rythme la vie du tâcheron entre deux fêtes. Ils étaient 92 à concourir en 2011, 88 en 2014, preuve que le métier, malgré les changements culturaux importants, ne s’épuise pas.

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Some 280 hectares under the supervision of the Confrérie The labourers’ work is surveyed by

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mis d’abaisser les heures consacrées à la plante, cultivée non plus en gobelet, mais sur fil de fer. Pour l’ingénieur agronome Philippe Droz, les soins au sol, en heures, par hectare et par an, ont été divisées par dix (de plus de 500 à moins de 50 heures) ces 50 dernières années et, globalement, sur l’ensemble du cycle de la vigne, de la taille à la vendange, « les besoins en main-d’œuvre sont presque trois fois inférieurs à ce qu’ils étaient dans les années 1960  »*. Conséquence, pour vivre, les vignerons-tâcherons, payés selon le tarif, ont dû prendre en charge davantage de surfaces, aussi pour rentabiliser le matériel, plus sophistiqué. « Avant, on pouvait tourner avec trois hectares à Lavaux, maintenant, il en faut deux à trois fois plus », explique François Montet.

©Philippe Dutoit

Fête des Vignerons

Jean-François Franceschini, déjà couronné en 1999

L’émotion d’un couronné de 1999 C’est aussi ce que constate JeanFrançois Franceschini, vignerontâcheron pour la Commune d’Yvorne et pour la Bourgeoisie d’Aigle, au Clos de la Blonaire, à côté du château, soit une demi-douzaine de « piquets ». Au total, il travaille 9 hectares avec sa petite équipe, y compris quelques fossoriers de ses propres vignes. Classé en tête lors des deux dernières triennales, le tâcheron a déjà connu l’émotion du couronnement. Le vigneron de la Commune d’Yvorne (3,5 ha), qui a bichonné, en 2017, le Clos de l’Abbaye, 1er Grand Cru, élu « vin d’hon-

neur de l’année 2019 » par le Conseil d’Etat vaudois, se souvient de la Fête de 1999 : « Je ne m’y attendais pas du tout. C’était une sacrée surprise ! Pour augmenter le suspense, on appelle les vignerons depuis le bas du classement… J’étais quatrième. Je sortais d’une opération d’hernie discale. Et, surtout, je n’ai jamais fait de CFC de viticulture. J’ai appris sur le tas, en observant, en discutant, sur le terrain. Au moment de choisir une formation, l’orienteur professionnel m’avait dit : « La vigne, c’est pas un métier !  Alors, je suis devenu charpentier. J’ai posé des fenêtres dans les Alpes vaudoises. C’est peut-être parce que j’ai appris ce métier de grande précision que je suis resté pinailleur. » A 61 ans, Jean-

François Franceschini a été rejoint par son fils, Adrien, 36 ans, un ancien bûcheron, qui comme son père a bifurqué vers la vigne.

Confrérie experts three times a year. They assess the parcels according to seasonal work criteria, weighted since 1996 for surface area and slope, to factor in the degree of work difficulty. Out of a total of 1,200 hectares of vineyards between Lausanne and Lavey, the inspection involves an area of 280 hectares. The vineyard labourer not only carries out the work but must also acquire the necessary tools and hire workers for

pruning and harvesting. These tasks cease once the grapes - the best possible - are delivered, with incentive pay paid in cash and not in kind. To earn a living and also to make new sophisticated material cost-effective, the vineyard labourers have had to take over larger surface areas. François Montet points out that, “Before, in the Lavaux region, we could keep going with three hectares; now we need two to three times as much”.

The hero crowned in 1999 was JeanFrançois Franceschini, a vineyard labourer who works for the Yvorne Commune and the estate of the Bourgeoisie d’Aigle. With his small team, he works nine hectares, including some parcels of his own vines, and topped the list at the last two triennial assessments. Looking back at the 1999 Festival, he recalls how hugely surprised he was when he was called up as one of the winners.

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Une femme dans le tiercé des triennales Retour à Lavaux, sur la route de Chardonne, où, de son appartement, Corinne Buttet, 56 ans, domine « ses » vignes partagées entre la Ville de Vevey (pour un peu moins de 4 ha) et Obrist (pour 5,4 ha). Elle est l’une des rarissimes vigneronnes-tâcheronnes vaudoises (elles ne sont que trois à Lavaux). Cette fille de vignerontâcheron se réjouit de voir Julien, son fils de 18 ans, s’engager dans la même voie : « Les trois vignerons-tâcherons

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Fête des Vignerons

de la Ville de Vevey ont chacun envoyé un fils à Marcelin. » Derrière les vignerons d’Yvorne, Franceschini et Suardet, c’est elle qui a complété le podium des deux dernières triennales. Et on ne peut pas exclure que le roi, cette année, soit une reine ! Une première historique… Corinne Buttet se souvient fort bien de 1999 : « C’est l’année où, sur le tard, j’ai entamé mon apprentissage à Marcelin. Je n’ai pas voulu faire partie des figurants : je voulais savoir si j’allais m’en sortir à la vigne. C’était une période test pour moi, qui allais succéder à mon père en novembre 2000. Longtemps, je n’ai pas voulu de ces vignes… puis mon père m’a convaincu de ne pas les laisser partir. C’est peut-être pour cela que je n’ai jamais pris mon fils à la vigne. Il me l’a presque reproché ! », analyse celle qui aujourd’hui cultive 10 ha avec son équipe, deux employés portugais, un père et son fils. « Peutêtre que je veux que mes propriétaires ne regrettent pas d’avoir engagé une

femme. Je suis maniaque. Pour une femme, c’est différent que pour un homme : tout doit être rangé quand on sort de la vigne ! J’adore la taille, quand la vigne est comme un enfant, à qui on donne une direction. Ce métier, je le fais par passion, pas pour la couronne ». Avec sa douzaine de parcelles sous revue, son travail sera très bien jugé par les experts. Leur dernière visite, en septembre 2018, juste avant les vendanges, a scellé le classement. Depuis, c’est motus et bouche cousue… La fête du tâcheron, pas du vin ! Sait-on que la Fête des Vignerons est la célébration des tâcherons ? « Rares sont ceux qui pensent que cette fête n’a rien à voir avec la qualité du produit fini, le vin. Mes propres clients savent juste qu’il y a la Fête, mais n’ont pas conscience de son essence même », confie François Montet. Longtemps, le scénario du Festspiel veveysan n’accordait guère de place à ceux sans qui la Fête des Vignerons n’aurait plus

sa raison d’être. L’ethnologue Isabelle Raboud-Schulé rappelle qu’il a fallu attendre le personnage d’Arlevin, en 1999, pour que le vigneron-tâcheron tienne le premier rôle*. «  Arlevin, moi, je l’ai bien aimé ! Il était extraordinaire, même ivre. Car c’est vrai, si on ne fait pas le vin, on aime bien boire un verre », lance Jean-François Franceschini. Avant d’ajouter : « Sans la tradition de la Confrérie, je ne suis pas sûr que des vignerons purs et durs seraient encore là. Plutôt que se demander s’il y aura encore des vignerons-tâcherons en 2037, on pourrait s’interroger  : sans la Fête des Vignerons, le statut de vignerontâcheron existerait-il encore ? » Une pirouette digne du roi… Salomon.

*Toutes les mentions portant l’astérisque sont tirées de « Acteurs de la vigne », paru aux éditions Antipodes, en octobre 2018 ; 480 pages, avec des contributions d’une quarantaine d’auteurs ; 44 fr. ; ISBN 978-2-88901-152-0.

Corinne Buttet, sans doute couronnée et peut-être reine ?

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©Philippe Dutoit

A woman in the top three at the triennials In Lavaux, route de Chardonne, 56-year-old Corinne Buttet’s flat overlooks ‘her’ vineyards, partly owned by the Ville de Vevey (just under 4 ha) and partly by Obrist (5.4 ha). One of the very rare female vineyard labourers in Vaud (there are only three in Lavaux), she has followed in her father’s footsteps and is now happy to see her 18-year-old son, Julien, following in hers. In the last two triennial assessments, she came third after Franceschini and Suardet. And it’s not impossible that this year the king will be a queen! “Few people realise that the Winegrowers’ Festival celebrates the labourers. Not many are aware that it has nothing to do with the quality of the finished product, the wine. My own clients just know there’s a celebration, but not what it’s really about”, comments François Montet. And Jean-François Franceschini adds: “If it weren’t for the traditions of the Confrérie, I’m not sure whether the hard-core winegrowers would still be around”.

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Fête des Vignerons

Crus classiques et cuvées de prestige Alexandre Truffer Photos : Philippe Dutoit « Lors de la Fête des Vignerons de 1999, chaque appellation de Lavaux avait son vin. Tout le travail d’achat, de préparation et de mise en bouteilles de ces cuvées officielles avait été fait par Obrist », explique Léonard Pfister, œnologue de l’emblématique négoce de Vevey. En vingt ans, beaucoup de choses ont changé. Le système d’appellations du canton de Vaud, par exemple. Exit Lutry, Villette, Epesses, Saint-Saphorin, Chardonne et VeveyMontreux, ces lieux de production ont perdu leur statut d’appellation d’origine contrôlée lors de la refonte de la législation viticole en 2009 pour laisser place à un Lavaux AOC fédérateur. Idem pour le Chablais, où le nom de la région a été substitué aux traditionnels Villeneuve, Yvorne, Aigle, Ollon et Bex. Seules les deux appellations Grands crus, Dézaley et Calamin, ont conservé leur statut originel et ce après quelques atermoiements contés dans des numéros antérieurs de la revue Le Guillon. « La première question qui s’est posée était le nombre de vins officiels qu’il fallait proposer pour la Fête, déclare Daniel Dufaux qui préside la commission des vins de la Fête 2019. Devait-on se limiter à deux vins ou en proposer une dizaine comme lors de l’édition précédente. Nous sommes très vite tombés d’accord pour ne pas trop compliquer. » En effet, les documents de 1999 montrent que tous les crus officiels de l’édition précédente n’ont pas connu le même destin. Certains, en

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Une poignée de crus «classiques» et deux cuvées de prestige, toutes ornées du Label Or Terravin, ont été vinifiées par les maisons Badoux et Obrist pour la première Fête du millénaire. Daniel Dufaux et Léonard Pfister nous disent tout de ces cuvées officielles. rupture de stock après quelques jours, ont manifestement plus convaincu le public que d’autres qui ont eu une certaine peine à se vendre. Le commission des vins – composée de Nicolas Joss, André Linherr, Christophe Rod, Willy Deladoey, Bernard Bovy et des deux œnologues précités – a tout d’abord opté pour quatre vins: deux blancs, l’un de Lavaux, l’autre du Chablais et deux rouges, avec la même répartition en ce qui concerne les origines. « Dans un deuxième temps, Christophe Rod a proposé de rajouter du rosé, ce qui nous a semblé judicieux, car la demande sera importante en cette période de l’année », poursuit Daniel Dufaux. « Sans oublier les deux chasselas de prestige, un dézaley et un Yvorne, qui seront élaborés en plus petite quantité, 5000 bouteilles environ, et vendus à un tout autre prix », précise celui qui préside aussi l'Union suisse des œnologues. Deux millésimes pour un événement «  Nous avons la chance d’avoir un Abbé-Président qui s’est beaucoup impliqué dans le volet vins de la Fête des Vignerons et qui n’a pas simplement délégué cet aspect à un administrateur uniquement préoccupé par la marge que pourraient lui rapporter ces vins », se réjouit le directeur de Badoux Vins. En effet, la plus célèbre manifestation du vignoble a été créée afin de récompenser le travail des vignerons-tâcherons qui œuvraient

Daniel Dufaux et Léonard Pfister pour des propriétaires regroupés dans la Confrérie des Vignerons de Vevey. Si le vin a coulé à flots durant les onze éditions précédentes, les rituels de cette célébration unique au monde – que ce soit le cortège ou le couronnement des meilleurs producteurs de raisin – ont été axés sur le travail du cep et non sur celui de la cave. « Après le cortège, les vins officiels sont pourtant les meilleurs vecteurs de communication de la fête. En outre, à l’heure où la vente des billets n’est pas encore terminée, chaque fois que des gens boivent une de nos bouteilles, la fête est évoquée dans la conversation », estime Daniel Dufaux qui précise que 2019 verra pour la première fois deux millésimes se côtoyer durant une même édition. « Le 2017 a été mis sur le marché au printemps 2018. Le 2018, qui se déclinera selon la même répartition – deux chasselas,

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l’un de Lavaux, l’autre du Chablais, et deux assemblages rouges des mêmes provenances – sera mis en bouteilles sans doute en avril 2019. » Toutes auront une étiquette reprenant le visuel de la Fête représentant une grappe de raisin autour de laquelle virevolte un oiseau. « Une fois que la stratégie a été décidée, Obrist s’est occupé de Lavaux et Badoux du Chablais. Pour les vins classiques nous avons envoyé à tous les producteurs de la région un appel d’offre. Pour les deux vins de prestige, seuls ont été conviés les professionnels possédant des vignes notées par la Confrérie des Vignerons », poursuit Léonard Pfister qui confie que, pour le millésime 2017, Obrist a reçu des lots de chasselas (entre 500 et 2700 kilos) de 26 fournisseurs, tandis que les grappes de pinot noir, gamay, gamaret et garanoir utilisés pour le rouge pro-

venaient de sept producteurs. « Pour le 2018, les chiffres sont à peu près similaires. Il y a eu un engouement certain, que l’on peut expliquer par le fait que ces deux années ont produit une récolte plutôt généreuse. » De plus, en 2017, les kilos de raisin destinés aux vins de la fête étaient payés cinquante centimes de plus que le prix annuel fixé par l’interprofession. L’inconnue 2018 «  Notre principal problème réside dans la difficulté de savoir quelles sont les quantités de vin qu’il faut embouteiller, confie Daniel Dufaux. Lors de l’édition précédente, en 1999, pas moins de 200'000 bouteilles ont été vendues durant les deux semaines de la Fête des Vignerons, sans aucune prévente. Cependant, aujourd’hui les choses sont difficilement compa-

rables : la consommation a tendance à diminuer, mais les arènes peuvent accueillir plus de monde et surtout, ces vins seront vendus pendant plus d’une année. » Au moment où ont été réalisés ces entretiens, un peu plus de 25'000 bouteilles du millésime 2017 avaient été vendues. « Ce qui est non négligeable, réagit Léonard Pfister. Au total, nous avons produit 60'000 bouteilles, deux tiers de blanc et un tiers de rouge, pour moitié de Lavaux, pour moitié du Chablais. En ce qui nous concerne, on remarque que la majorité des vins sont achetés par des privés, mais les restaurants commencent aussi à jouer le jeu. Sans oublier un partenariat que Manor a signé avec la fête pour pouvoir proposer ces cuvées en exclusivité dans ses enseignes de Lausanne et Vevey. » Si Daniel Dufaux confirmait que les pre-

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Fête des Vignerons

miers chiffres de ventes étaient encourageants – d’autant qu’à 19 francs la bouteille (d’assemblage rouge à base de pinot noir et de gamay ou de chasselas) ces vins se situent au-dessus du prix médian de ces appellations – il n’avait pas vraiment de moyen de savoir s’il fallait mettre en bouteille 300'000 ou 500'000 bouteilles de 2018. « Nous allons devoir naviguer à vue, mais comme la dernière vendange a été plutôt généreuse, il n’y a pas de risque de pénurie. De plus, en confiant la vinification à des grands négoces comme Obrist et Badoux, la Fête des Vignerons s’est assuré le concours d’entreprises habituées à gérer des volumes importants », ajoute l’œnologue chablaisien qui estime que la vente des vins de la fête ne s’arrêtera pas abruptement au lendemain de la dernière représentation.

Dézaley et Yvorne de prestige Faire perdurer la Fête des Vignerons 2019 au travers de ses vins, c’est aussi l’ambition des deux cuvées de prestige. « Obrist s’est chargé du Dézaley 2017 qui provient uniquement de parcelles bien notées par la Confrérie des Vignerons. Nous en produirons 5000 cols, pot vaudois compris » explique Léonard Pfister. Sa commercialisation devrait être limitée à la durée de la fête et son prix osciller entre 50 et 55 francs la bouteille. Idem pour l’Yvorne que vinifie la maison Badoux. « Proposer un vin premium était une volonté de la Confrérie et de François Margot, confirme Daniel Dufaux Nous avons fait le constat que deux lieux de production, Yvorne et Dézaley, avaient fait la renommée des vins des deux régions. Tout le monde ne sera peut-être pas d’accord avec cette affirmation,

mais il a fallu prendre une décision. Idem pour le cépage, du chasselas uniquement. Non seulement, c’est le cépage identitaire de nos deux régions, mais en plus il possède un excellent potentiel de garde. L’Yvorne comme le Dézaley seront du 2017, car nous avons également postulé que ces vins avaient besoin de mûrir un minimum de temps pour mériter le statut d’icône auquel leur prix de vente les destine. Nous imaginons que ces vins dont l’habillage n’est pas encore finalisé, mais qui devraient être commercialisés dans des coffrets en bois, seront privilégiés par les principaux partenaires de la Fête ». Mais que les amateurs se rassurent, ces blancs, qui peuvent sans doute prétendre au titre de plus cher chasselas de Suisse, seront accessibles à tout un chacun du 18 juillet au 11 août, lors de la Fête des Vignerons 2019.

The Wines for the Winegrowers’ Festival

Classic Vintages and Prestige Wines Four classic vintages and two prestige wines have been produced by the Obrist and Badoux wineries for the first Winegrowers’ Festival in the 21st century. “The first question we had to ask ourselves was how many official wines we should offer at the Festival”, explains Daniel Dufaux, the director of Badoux and president of the 2019 Festival Wine Commission. We agreed very early on not to overcomplicate things. The commission opted for four wines: two whites, one from Lavaux and the other from Chablais, and two reds from the same two regions. We later added a rosé, bearing in mind that demand would be strong during the summer period (all five wines at 19 CHF per bottle). Then we also decided on two prestige Chasselas wines, a

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Dézaley and an Yvorne, which would be produced in small quantities, and sold in a higher price range”. For the first time, the 2019 edition of the Winegrowers’ Festival will be presenting two vintages - 2017 and 2018 - each comprising two Chasselas, one from Lavaux and one from Chablais, and two red blends from the same two regions. The 2017 vintage was already available for purchase in the spring of 2018, and the 2018 should be bottled in April 2019. The bottles will all carry the same labels with the Festival logo, representing a bird circling around a bunch of grapes.

The Lavaux wines have been produced by Obrist and the Chablais wines by Badoux. The two prestige wines are also intended to perpetuate the 2019 Winegrowers’ Festival. “The Obrist winery produced the 2017 Dézaley, which comes exclusively from parcels highly rated by the Confrérie des Vignerons”, explains the winery’s oenologist, Léonard Pfister. It will be marketed exclusively during the festival, at 50 to 55 francs per bottle. The same applies for the Yvorne prestige wine, produced by Badoux.

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Pour la première fois la Fête des Vignerons s’associe avec les offices de promotion des différentes régions du pays pour présenter des vins de toute la Suisse. Deux espaces, l’un géré par Swiss Wine Promotion, l’autre approvisionné par l’Office des Vins Vaudois (OVV), seront consacrés à ces partenaires. Alexandre Truffer Regroupant des propriétaires de vignes du Chablais et de Lavaux, la Confrérie des Vignerons avait présenté uniquement des vins de ces deux régions lors des précédentes éditions de sa fête. En 2019, symbole d’une manifestation plus orientée vers le vin et pas seulement vers le travail de la vigne, Les Terrasses de la Confrérie, situées au sud des arènes, abriteront deux espaces dédiés aux vins vaudois et helvétiques. « Nous avons développé un concept similaire à celui mis en place pour le Montreux Jazz, explique Benjamin Gehrig, directeur de l'Office des Vins Vaudois. L’office s’est occupé de la sélection des producteurs, mais la gestion de ce bar reste de la compétence de la Confrérie. » L’appel d’offres envoyé aux vignerons de tout le canton indiquait que l’objectif était de fournir au public une « palette de dégustation

composée de vins effervescents, de liquoreux et de vins tranquilles secs blancs, rosés et rouges » qui représente la diversité des régions viticoles vaudoises. « Nous avons reçu plus de 130 réponses, se réjouit le directeur de l’OVV. Cet engouement montre la volonté d’ouverture des vignerons vaudois. Avec la volonté de donner la priorité aux artisans vignerons vaudois indépendants, l’OVV et la Fête des Vignerons offriront la possibilité aux visiteurs de déguster un large assortiment de vins issus de tout le canton au premier étage des Terrasses de la Confrérie. » C’est dans ces espaces, qui se veulent conviviaux et rassembleurs, que l’on pourra également déguster des vins suisses présentés par Swiss Wine Promotion. Ici le concept sera quelque peu différent, puisque les vins des vignobles confédérés ne

©OVV

Tout le vignoble participe à la Fête «Nous avons développé un concept similaire à celui mis en place pour le Montreux Jazz» Benjamin Gehrig, directeur de l'Office des Vins Vaudois

seront pas vendus, mais seulement proposés à la dégustation. De plus, il n’y aura pas une carte fixe, mais un tournus calqué sur les journées cantonales. Ainsi le mardi 23 juillet, où les Grisons seront à l’honneur, Swiss Wine Promotion fera découvrir les pinots noirs et les spécialités du plus grand canton helvétique. Le 27 juillet, à l’inverse, le merlot et le rieslingsylvaner seront à l’honneur puisque ce samedi coïncide avec la journée cantonale de la Suisse centrale et du Tessin. Enfin, le 8 août (où aucun canton n’est à l’honneur), l’espace de la promotion helvétique servira des vins « binationaux », c’est-à-dire faits à l’étranger par des Suisses expatriés.

A Festival of Vine and Wine It is the first time that the Winegrowers’ Festival has partnered with promotion offices to present wines from all over Switzerland. Two organisations, Swiss Wine Promotion and Office des Vins Vaudois (OVV), will be given dedicated exhibition space. At previous events, the Confrérie des Vignerons (Winegrowers’ Fellowship)

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had presented wines exclusively from the Lavaux and Chablais regions. In 2019, to reflect the fact that the event is oriented not only to the work of the vine but also to wine, Les Terrasses de la Confrérie, south of the arenas, will accommodate two spaces for Vaud and other Swiss wines. To give priority to small independent winegrowers in Vaud, the OVV

and the Winegrowers’ Festival will give visitors the opportunity to taste a broad selection of wines from the different regions in the Vaud canton. Wine lovers will also be able to taste Swiss wines presented by Swiss Wine Promotion. However, the wines from vineyards outside the Vaud canton will be available for tasting only.

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Fête des Vignerons

Les repas des vignerons-tâcherons Le travail à la vigne, ça creuse. Les nourritures quotidiennes du vigneron-tâcheron ont évolué au fil des siècles. Des cultures maraîchères entre les plants de vignes aux solides repas pris directement au domaine, une constante : des plats de terroir. Fricots mijotés, fruits et légumes, mais aussi pain et fromage. Les armaillis sont aussi passés par là. avec quelques incursions d’autres contrées. Le canton de Fribourg, en particulier : les armaillis de la Veveyse ou de la Gruyère enchantent par leurs influences. (cf. encadré p. 21).

Vendanges à Lavaux en 1808, gravure aquarellée de François Aimé Louis Dumoulin (Musée historique de Vevey) Pierre-Etienne Joye Photos : Sandra Culand Une besace garnie  ? Un panier de pique-nique ? Pas tout à fait. Un frichti de derrière les fagots ? ça peut le devenir. De nos jours, le vigneron-tâcheron se sustente au domaine. Les menus sont codifiés par nécessité, et assez traditionnels pour ne pas dire régionaux. Aujourd’hui, sauf exception, le tâcheron va chercher sa pitance en cantine ou se fait livrer des casseroles de plats le plus souvent uniques, qu’il mange parfois « au mur ». La nourriture roborative le dispute à l’en-cas

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des pauses, du déjeuner à l’apéro, en passant par le dîner, le goûter et bien le sûr le souper. Mais il n’en a pas toujours été ainsi. Le casse-croûte du tâcheron, on pourrait l’imaginer en corbeilles garnies telles celles trimbalées de bon matin par les canuts lyonnais. Rien à voir pourtant avec un quelconque mâchon agrémenté de fromage blanc ou de cochonaille arrosé de fillettes de beaujolais. Quoique... Remontons le fil de l’histoire. Si la Fête des Vignerons est bien vaudoise, les habitudes alimentaires de ses vignerons-tâcherons sont certes tout aussi locales, mais

Des légumes entre les ceps Qu’est-ce qu’ils croquent, les tâcherons d’antan ? Ce qu’ils ont sous la main. Et ce que l’imagination, le savoirfaire, la débrouille leur permettent de se mettre sous la dent. Restituons le contexte : « Sous l’Ancien Régime et jusqu’au début du 19e siècle, les tâcherons sont des ouvriers qui produisent leur nourriture eux-mêmes, notamment grâce aux cultures maraîchères, explique Guillaume Favrod, assistant archiviste à la Confrérie des Vignerons. A cette époque, les propriétaires terriens mènent une croisade contre les cultures illégales poussant entre les parchets de vigne. » En effet, les vignerons-tâcherons n’ont alors pas des moyens phénoménaux pour vivre. La ration quotidienne en vin est assurément valorisante, mais elle permet uniquement d’acquérir des denrées simples. « Du vin en guise de salaire, poursuit Guillaume Favrod, qui est en grande partie revendu ensuite. Avec cet argent, le tâcheron peut aller faire des achats, mais pas suffisamment pour subvenir aux besoins de sa famille ». Dans le Chablais et en Lavaux, on se nourrit au 18e siècle de manière assez similaire aux autres régions viticoles de Suisse. L’alimentation de base est

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Se pourlécher d’une fricassée Les tâcherons raffolent de plats de viandes mijotés ? Qu’à cela ne tienne. Voici quelques indications pour une fricassée vaudoise classique. En fait, c’est tout simple : il s’agit d’un ragoût de porc à l’étuvée après un bon rissolage des morceaux de viande. Il faudra donc compter pour une ronde de 5 à 8 personnes 2 à 3 kilos de cubes de caïon pris dans l’échine, le cou ou le jarret. Le principe est imparable. On fait revenir la viande dans un peu d’huile, en singeant de farine légèrement. La garniture ? Elle sera composée à choix de carottes émincées, petits oignons, poireaux en paysanne et d’un bouquet garni avec des herbes qui parfumeront le plat. La tradition exige de la marjolaine. Et du vin blanc, qui sera la base liquide du mijotage à feu doux pendant deux bonnes heures. Des variantes font part d’une inversion de cuisson : viande bouillie à petit feu dans le chasselas, puis rôtissage des morceaux de fricassée juste avant de servir en nappant avec la sauce. Dans tous les cas, ça se sert avec passion, agrémenté de patates. En purée ou en gratin. PEJ

Sabine Caruzzo, historienne et secrétaire générale, et Guillaume Favrod, assistant archiviste, tous deux à la Confrérie des Vignerons surtout végétale. En contrepartie de son travail et de la prise en charge de la plupart des frais d’entretien du vignoble, le vigneron-tâcheron reçoit un pourcentage des récoltes. Mais une fois encore, cela n’est pas suffisant. D’où cette parade qui consiste à pratiquer l’élevage et le maraîchage au sein même des parcelles, malgré les interdictions officielles. On va donc trouver au bord des vignes ou entre les rangs de ceps des plants de salades, des légumes racines, des arbres fruitiers ou

des petits fruits. Le tâcheron est souvent un paysan qui s’occupe de la vigne tout en faisant prospérer des plantes et en élevant des animaux de ferme. Ces derniers leur fournissent des laitages ou des œufs pour des repas sobres. « Les vignes sont les terres les plus productives, celles qu’on fertilise le mieux grâce à l’apport de fumier », ajoute Sabine Caruzzo, historienne et secrétaire générale de la Confrérie des Vignerons. Les tâcherons en profitent tout naturellement pour y planter des

Vineyard-Labourers’ Meals Let’s go back in time. The Winegrowers’ Festival is a traditional, typically Vaud festival and so it follows that the eating habits of the vineyard workers should also be typically local; yet there have been culinary incursions from outside, particularly from the canton of Fribourg: the cheesemakers from Vevey and Gruyere have had a delightful influence.

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Guillaume Favrod, the assistant archivist at the Confrérie des Vignerons, explained that under the Ancien Régime and up until the beginning of the 19th century, vineyard labourers grew their own vegetables. “Land owners were leading a crusade against those illegal crops which were planted in between the vine

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Fête des Vignerons

courges et autres fruits et légumes. «  Les poires, pommes et pruneaux sont légions. Les grains de raisins, si on les réserve d’abord pour en faire du vin, sont parfois quand-même mangés comme tels ».

parcels.” The vineyard workers had meagre means of livelihood, and although the daily liquid ration was certainly rewarding, it could only buy simple fare. “Most of the wine earned as a salary was immediately sold, and with that money the worker could acquire some food, but not enough to provide for his family”. Eating habits in the Chablais and Lavaux regions in the 18th century were similar to those in the other Swiss wine-

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Sans le ranz des vaches et la présence des armaillis fribourgeois, la Fête des Vignerons serait incomplète. Leur apport nourricier est donc primordial. Pas de gruyère, de vacherin ni de crème double sans l’armailli. C’est lui qui fournit ces denrées nobles sur les rivages veveysans et parade à la fête. Ou plus exactement, au début, ce sont plutôt les notables qui se déguisent en armaillis pour défiler. Jusqu’au milieu du 20e siècle, comme dans le Jura vaudois, les armaillis restent à l’alpage et n’y redescendent que pour confiner leurs fromages dans les caves d’affinage. Ils remontent avec le lait du jour et le pain. Leur nourriture ? « Avant les véhicules à moteur, qui permettent d’acheminer viande et légumes, l’armailli-paysan se contente de potage au petit-lait, de sérac et de crème : les sous-produits de la fabrication du fromage, réservé à l’élite bourgeoise et urbaine, résume Isabelle Raboud-Schüle, directrice du Musée gruérien et ancienne conservatrice de l’Alimentarium de Vevey (photo ci-dessous). Au cours du siècle passé, les patrons sont conscients qu’il faut motiver leurs employés pour faire tourner la baraque. La soupe c’est monotone et ça va un moment ». On leur apporte donc du fromage et de la viande. Mais on reste au plus simple. Question de temps et de moyens, un chaudron sur le feu ouvert. La soupe de chalet s’enrichit, les macaronis de la montagne donnent parfois le change. Les viandes fumées en option, la cuillère en bois dans le plat commun. PEJ

growing regions. Meals were above all plant-based. A worker would receive a percentage of the harvest in return for his work and to cover most of the costs connected with vineyard maintenance. But again, that was not enough to live off. Hence the illegal practice of breeding livestock and growing vegetables in the midst of the vineyards. So, alongside the vines or between the rows of vine stocks one could find lettuce seed-

©Pascal Besnard

© Photo Glasson - Musée gruérien, Bulle

Banquets en récompense Dès le début du fonctionnement de la Confrérie des Vignerons en 1647 –appelée en son temps Abbaye de l’agriculture–, les parades sont instaurées à travers la ville de Vevey avec un banquet à la clé. « Ce défilé fait suite à l’assemblée générale où le travail des vignerons-tâcherons est évalué et précède le traditionnel banquet de la Société, précise Sabine Caruzzo. La promenade à travers la ville s’est par la suite étoffée. C’est cette cérémonie du couronnement des meilleurs ouvriers qui a transformé l’ancienne parade en Fête des Vignerons, en 1797 ». Ce qu’on trouve lors du banquet reste somme toute assez frugal ; ce sont des mets calqués sur les repas de mariage de l’époque : « Du jambon, du fromage, des soupes, du pain, des tartes, des pâtés, des fruits et évidemment un peu de vin, détaille Sabine Caruzzo. Entre les fêtes, dès 1815, on récompense tous les trois ans les meilleurs vignerons-tâcherons. La tradition du banquet perdure, avec des plats principaux souvent composés de viande ou de poisson, puis de

L’indispensable apport des armaillis

lings, root vegetables, fruit trees and small fruit. The worker, who was in most cases a farmer, took care of the vines and at the same time grew crops and raised farm animals, which provided milk and eggs for simple meals. Sabine Caruzzo, a historian and the secretary general of the Confrérie des Vignerons, added that vineyards had the most productive soils, as they were amply fertilised with manure. The workers reaped the benefits

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Fête des Vignerons

gruyère, de vacherin et de tommes vaudoises ». La consommation de fromage a toujours été centrale lors des réjouissances veveysanes. Les vignerons-tâcherons y participent autour de tablées, notamment au moment de la

Saint-Martin en novembre. « Jusqu’au milieu du 19e siècle, les rives de Vevey servaient de port pour l’exportation des fromages fribourgeois en direction de la Savoie, raconte Guillaume Favrod. La viande n’est pas courante

dans l’alimentation d’alors. Bovins ou ovins, ces animaux restent d’abord des outils de travail. Quand ils sont cuisinés, les morceaux de viande sont souvent de qualité médiocre.» Ce n’est plus le cas aujourd’hui.

Interviews Vigneron-tâcheron de la Ville de Vevey, Yves Neyroud gère le domaine des Gonelles, entre les communes de Corseaux et de Chardonne. Son épouse, Anne, régale des dizaines d’artisans de la vigne au moment des vendanges ou des effeuilles en été. Zoom sur les repas des tâcherons d’aujourd’hui. Un vigneron à la tâche a faim. Quelles sont ses habitudes alimentaires ? Anne Neyroud : Les 9 heures, c’est précieux : une pause roborative avec saucisson, fromage, pain et tasse de thé. Ensuite, le repas de midi vient consolider l’estomac. Je propose des plats mijotés, des rôtis ou même de la choucroute garnie. Et des pommes de terre. Les vignerons sont proches de la terre, ils aiment les patates. Yves Neyroud : Traditionnellement, le travailleur de la vigne aime se sustenter de mets du terroir, comme le papet vaudois ou un ragoût accompagné de pommes de terre, effectivement. Les viandes mijo-

and planted marrows and other fruit and vegetables. “There was an abundance of pears, apples and plums. Grapes were primarily destined for making wine, but of course they were sometimes picked and eaten directly.” With the founding of the Confrérie des Vignerons in 1647 – at that time it was called the ‘Abbaye de l’agriculture’ – parades were organised through the streets of Vevey. Sabine Caruzzo explained that,

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tées sont aussi très prisées. Il faut des mets qui tiennent bien au corps. Et quand vient l’heure du goûter, comme pour de grands enfants ? Anne : J’arrive avec des cakes maison. Habituellement à la cannelle ou au chocolat. J’en prépare une bonne vingtaine au moment des vendanges. On sort aussi le pain et du chocolat, des quartiers de pommes. Là aussi, les théières sont de rigueur. Sachez qu’on n’est plus tellement de familles à faire à manger à la maison. La plupart font appel à des traiteurs de nos jours… Le soir, quand la journée se termine ? Yves : Les vendangeurs apprécient les röstis avec une glissade de raclette sur le dessus, ou une fondue ou fromage. Au fait, j’ai repris de mes parents la tradition culinaire des repas des vignerons-tâcherons. Dans ce contexte, il n’est pas rare qu’on mange encore à la vigne. Des casseroles de plats chauds sont alors ame-

nées sur place, qu’on déguste à même le mur. Anne : Dès 18h, c’est l’apéro. Vin blanc. Mais je ne vais quand même pas leur confectionner des petits fours ! Ensuite, en revanche, les plats sont conséquents. Les menus ? Soupe à la courge, gâteaux aux pommes par exemple... Pâtes au gorgonzola ou tartiflette ont aussi la cote, au goût des travailleurs saisonniers. Mais, composé de fromage et de pommes de terre essentiellement, le souper vaudois reste un must. Propos recueillis par PEJ

“The processions took place after the general-assembly meeting held to evaluate the work of the vineyard labourers and was followed by the traditional banquet”. As time went by, the street processions grew in scope and importance and in 1797 the parade and the ceremony that rewarded the best labourers were transformed into the Winegrowers’ Festival”. Banquet meals were relatively frugal, based on typical wedding meals of the period: ham, cheese, soup, bread,

tarts, pies, fruit and obviously, some wine. As from 1815, between the festivals and every three years, the best vineyard labourers are assessed and granted awards. The banquet tradition continues to this day, with main dishes often composed of meat or fish, followed by gruyère, vacherin and tommes vaudoises. Cheese has always been central to Vevey festive meals. The vineyard workers join the banquet on Saint Martin’s day, in November.

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Fête des Vignerons

François Margot, Abbé-Président :

«La Fête des Vignerons, c'est tellement rare ! » Texte et photo : Pascal Besnard « Je suis le voyageur de commerce patenté de la Fête des Vignerons ! ». François Margot a le sens de la formule pour décrire les mois qu'il vient de vivre. A sillonner la Suisse pour « vendre » la Fête. A franchir l'océan Atlantique à deux reprises pour la même cause. Escales à New-York, Los Angeles, Montréal, Toronto ou Vancouver... pour convaincre les NordAméricains que l'événement veveysan est incontournable. Fatigué par toutes ces allées et venues  ? L'Abbé-Président concède un tantinet de lassitude à répéter le même discours. Mais la contrepartie c'est le « plaisir de toucher les gens avec un sujet qui les intéresse. La Fête, c'est une tradition qui mérite d'être divulguée et commentée auprès de publics variés. C'est un devoir.  » François Margot raconte avoir vécu de vrais moments d'émotion avec ceux qui ont évoqué leurs souvenirs des fêtes de 1999, 1977 ou même de 1955 !

La lenteur de la vente des billets préoccupe l'Abbé-Président : « commercialement, ça n'est pas évident. Nous n'intervenons sur les marchés que tous les vingt ans ! Mais tous les organisateurs d'événements connaissent le phénomène: les acheteurs s'y prennent à la dernière minute. » Alors comment convaincre les indécis ? « Si vous êtes amateur de ski, vous pouvez aller au Lauberhorn en janvier 2020... ou l'année d'après. La Fête des Vignerons, c'est tellement rare que ça vaut la peine d'y être cette fois-ci. Il y a une forme d'authenticité qui la distingue de tout autre événement. Il y a la puissance du rattachement à la terre, aux racines. C'est une cuisine riche, joyeuse, allègre que nous sommes en train de concocter, dans un lieu unique. Je ne crois pas qu'en Europe on ait déjà présenté une célébration de cette ampleur, un moment d'une densité émotionnelle aussi forte. »

François Margot, Abbé-Président de la Confrérie des Vignerons

Fête des Vignerons : 18 juillet - 11 août 2019 www.fetedesvignerons.ch

The Winegrowers’ Festival "I’m the authorised travelling salesman of the Winegrowers’ Festival!”. François Margot has found an excellent title for himself that encapsulates the work he’s been doing over the last few months travelling across Switzerland and crossing the Atlantic twice with the mission to ‘sell’ the Festival. The Abbot-President admits to being just a tad weary of repeating the same speech over and over. But on the other

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hand, there’s “the pleasure of being able to address people who are interested. The Festival is a unique tradition that deserves to be made known and presented to diverse audiences. We have a duty to do so.” Slow ticket sales are a concern: “Marketing the event isn’t easy. We hold it only every 20 years! But then all event organisers realise that nowadays people tend to buy tickets at the last minute.” How can we persuade the undecided to

come? “The Winegrowers’ Festival is such a rare event that it’s a shame to miss this chance. Its authenticity sets it apart; its strong connection to the land. We’re preparing a joyful, upbeat happening, with a rich programme, in a unique environment. I don’t think that a celebration of such magnitude and of such intense emotional content has ever been presented anywhere in Europe.”

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Le sens de l’acc Depuis dix ans, le rendez-vous semble incontournable pour les amateurs de vins. Pentecôte est synonyme de Caves ouvertes vaudoises ! Cette année, la manifestation aura lieu les 8 et 9 juin. En avant-goût, visite à 4 vignerons de 4 régions (sur 6) qui y participent.

Eva Zwahlen Photos : Hans-Peter Siffert En 2018, lors de la 9e édition des Caves ouvertes, on a pu voir, dans tout le canton, 300 vignerons déboucher leurs vins, faire visiter leur cave et expliquer leur philosophie. Environ 100'000 visiteurs, dont un tiers venus de Suisse alémanique, ont saisi cette opportunité pour se rendre chez « leur » producteur ou découvrir de nouveaux domaines. C’était le double de la première édition... Certains producteurs, à cette occasion, se montrent particulièrement doués dans l’art de recevoir ces passionnés, soignant l’ambiance, la cuisine, ou exploitant un panorama exceptionnel, quand ce n’est pas tout cela à la fois. Nous avons rendu visite à quatre d’entre eux.

Poulet grillé, Dixieland et Swing Le Domaine de la Baudelière, à Aigle, semble sorti d’un livre d’images : une splendide maison de maître règnant au milieu des vignes, flanquée d’un beau jardin et dont la cave voûtée abrite de très dignes foudres en bois. La porte s’ouvre généreusement pour laisser jaillir l’exubérante chienne Flag suivie de Stéphanie Delarze. Avec sa mère, celle-ci a repris toute jeune encore le domaine du grand-père. Elle en est maintenant la responsable officielle même si la maman, qui n’a rien à envier à l’énergie de Flag, est plus active que jamais. Stéphanie raconte : « Avant, nous participions toujours à Aigle Verre en Main, mais cette mani-

Open Days at the Vaud Wineries For the last ten years, this has been a key Whitsun event for wine lovers. This year, it will take place on 8th and 9th June. At the 9th edition of Open Days in 2018, some 300 winemakers uncorked their wines for the enjoyment of some 100,000 visitors, one-third of whom were from the German-speaking part of the country. Some producers have proved to be particularly skilled in the art of hospitality.

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cueil festation a été remplacée par celle du canton ou, comme les vieux disent, ajoute-t-elle en riant, volée par l’OVV... C’est ma mère qui a pensé qu’on ne pouvait pas servir à boire sans rien proposer à manger. » Christine Delarze renchérit : « Nos vins doivent être correctement mis en valeur. » C’est ainsi que chez les dames Delarze, le samedi de la Pentecôte, les poulets sont rôtis, « des poulets de Suisse évidemment », précise Stéphanie. Le dimanche, en revanche, un racleur armé de son couteau prend le relais pour la raclette. Que demander de plus? Les appétits sont comblés. Et pour l’ambiance, un orchestre, le Beal Street Old Time Jazz Quartet, veille à animer la journée, de ses airs New Orleans, Dixie, Blues et Swing. « Après, on est total lessivées, mais ravies », s’exclament les deux femmes de concert. A leur hôtes, elles proposent en outre d’aller se balader dans le quartier pittoresque du cloître et tout près, au château. « Nous y tenons un stand avec nos vins – et ausi ceux de mon mari », raconte Stéphanie. Serge Diserens, que Stéphanie a connu lors

Grilled chicken, Dixieland and Swing Stéphanie Delarze was still quite young when she took over the Domaine de la Baudelière in Aigle from her grandfather. She is now the manager of the estate, although her mother is still very much involved. Stéphanie tells us that in the past they always used to take part in the Aigle, Glass in Hand event, which has now been replaced by the OVV’s (Office des Vins Vaudois) cantonal event. It was her mother’s idea to serve some food at

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Christine et Stéphanie Delarze – www.labaudeliere.ch

de ses études d’œnologie à Changins, a son propre domaine, celui des Moines à Villeneuve, «  mais visiblement les visiteurs connaissent mieux la route d’Aigle que celle de Villeneuve ». Et pourquoi n’ont-ils pas réuni les deux domaines? « Oh alors, je serais là à m’ennuyer au bureau  », plaisante-telle. Et d’ajouter : « Le vin est quelque chose de très personnel. Chacun a sa signature. Nous voulons garder ça. » C’est exactement pour cette raison que les clients aiment faire la connais-

sance des humains qui sont derrière le vin qu’ils boivent... « Le vin, reprend Stéphanie, est surtout une affaire d’émotion. Il faut raconter l’histoire qui s’y attache, et c’est ce que les gens apprennent quand ils viennent chez nous. » Les Caves ouvertes sont à son avis une excellente publicité pour la production locale. Elles permettent de « montrer d’où vient le vin, comment on le fait, comment on vinifie. Voir tout cela éveille l’intérêt et la compréhension pour le travail et les soucis du

the tastings to show off their wines in the best possible way. That’s how, on Whit Saturdays, the Delarze ladies started offering grilled chicken. On Whit Sundays, a cheese ‘scraper’ takes over and prepares a raclette. And to crown it all, the Beal Street Old Time Jazz Quartet create a vibrant atmosphere with their New Orleans, Dixie, Blues and Swing music. “Clients like to meet the people behind the wine they’re drinking”, Stéphanie explains. “Wine is above all a matter of emo-

tions. People want to know its story, so we tell them all about it.” In her opinion, the Open Days event is an excellent way of promoting local winemaking. “Visitors can be shown where the wine comes from, how it’s made and how it’s vinified. That fuels their interest and gives them some insight into the painstaking work involved. Alongside their brisolée (a chestnut and cheese speciality) party organised in the autumn, Open Days is the most important event of the year for the

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producteur. » Avec la brisolée que le domaine organise en automne, c’est donc le rendez-vous le plus important de l’année de la Baudelière. En 2018, entre 500 et 600 personnes ont fait le déplacement. L’espoir pour cette édition est que « le beau temps sera à nouveau de la partie ! » Vue panoramique sur la biodynamie A Lavaux, Pentecôte rime avec action. Les œnophiles arrivent par charettes (plutôt navettes) aux domaines qui participent aux Caves ouvertes, même chez ceux qui sont un peu distants comme le Domaine Piccard, loin au dessus de Lutry. « Les plus sportifs viennent à pied », note JeanChristophe Piccard, « et après la montée, ils ont vraiment soif ! » Sûr qu’ils sont aussi envoûtés par la vue prodigieuse qu’ils ont sur le ruissellement des vignes, le lac étale comme un miroir et les sommets savoyards flottant à l’horizon. A notre arrivée, les rayons du soleil tombant fendent les nuages. « J’ai de la chance d’être né là, lâche Jean-Christophe Piccard, « artisan de la terre » de la quatrième génération, mais c’est aussi un défi quotidien. » Le vigneron a complètement souscrit à la démarche biodynamique. Depuis l’an dernier, ses vignes qui poussent sur ses deux hectares autour de la maison, plantées de cépages divers allant du chasselas à un Plant Robert élevé en

Domaine de la Baudelière, which last year welcomed between 500 and 600 visitors. A panoramic view of biodynamic winegrowing In the Lavaux region, there’s a lot going on at Whitsun when the Open Days event is in full swing. Buses shuttle wine lovers to the participating estates, even to the more remote ones such as Domaine Piccard, situated high above Lutry. Jean-Christophe Piccard points

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Jean-Christophe Piccard – www.domainepiccard.ch

barriques, ont droit au label Demeter. « Ça fait dix ans que je n’utilise plus ni herbicide, ni insecticide, ni engrais chimique », précise le producteur qui se définit lui-même comme un « esprit libre ». Aux Caves ouvertes 2019, les visiteurs ne pourront néanmoins pas encore déguster les vins ainsi labellisés. Car ceux-ci, y compris le chasselas, « ont besoin de temps  », souligne JeanChristophe Piccard. Le vigneron apprécie la manifestation, qui lui amène

de nouveaux clients, et il constate un gros changement dans sa clientèle depuis sa conversion à la biodynamie. Etre au service des gens lui tient à cœur, ce n’est pas pour rien qu’il a suivi un cours d’œnotourisme. Aux Caves ouvertes, il propose des petits hors d’œuvre en accompagnement, canapés et bruschettes. La musique n’est pas oubliée : ses amis comme le pianiste Alexandre Cellier et la chanteuse américaine Katt mettent de l’ambiance. « Une vraie partie de plaisir ! »

out that sporty people walk up and by the time they reach his estate they’re really thirsty! Of course, they are also mesmerised by the extraordinary view overlooking the streaming vines, the mirror-like lake stretching below, and the Alpine peaks floating on the horizon. A fourthgeneration winegrower, Jean-Christophe Piccard admits that he’s lucky to follow in his ancestors’ footsteps, but it’s a constant challenge. He has fully adopted the biodynamic approach to viticulture; last

year his vineyards, that cover a surface of two-hectares planted to grapes ranging from Chasselas to Plant Robert matured in barrels, were awarded the Demeter certification. Piccard appreciates the Open Days event in that it brings him new clients. Interestingly, since his conversion to biodynamic agricultural methods, he has noticed a huge change in client profile. At the event, he offers small appetisers, canapés and bruschetta – and there’s also some music!

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Taillés aux greubons, malakoffs & Cie Dans la cheminée du carnotzet, le feu crépite joyeusement tandis que de la cuisine parviennent des odeurs plus qu’alléchantes. A peine sommes-nous assis que le producteur Stéphane Schmidt et sa femme Hélène, cuisinière de formation, apportent une énorme planche chargée de délicatesses régionales, et nous servent lard grillé, boulettes de viande, saucisse au marc de muscat, taillé aux greubons et, naturellement, malakoffs. Inutile de dire que nous ne nous faisons pas prier pour manger. Les jours des Caves ouvertes, à cette palette de délices viennent s’ajouter des crêpes,

de la raclette et des gateaux. Sans compter des airs d’accordéon (la petite Schwyzoise) et de cor des Alpes. Sur ce, Stéphane ouvre une bouteille de Vieilles Vignes qui arbore, comme tous ses chasselas, le label d’or de Terravin. «  J’y accorde une grande valeur  !  » s’exclame-t-il. Tout respire le bonheur 100% suisse. On ne s’en étonne pas, car la Cave du Vallon a été la première à avoir eu le droit d’apposer l’arbalète rouge, emblème du Swiss made, sur ses étiquettes. « Pour moi, cela compte beaucoup de produire un vin suisse, car vaudois, car de Lavigny. » Stéphane et Hélène Schmidt ont le sens de l’accueil dans le sang et préfèrent, disent-ils, « investir dans le soin

aux clients que dans les concours ». Toute la famille participe aux Caves ouvertes, y compris les enfants qui s’y font un peu d’argent de poche. Si jusqu’à l’an dernier, les divers délices culinaires étaient gratuits pour tout le monde, maintenant les Schmidt envoient des bons à leurs clients, tandis que les nouveaux visiteurs paient un forfait. « Nous vendons aussi du rêve », estime Stéphane. Digne de Lucullus !

includes pancakes, raclette and cakes, accompanied by accordion and Alphorn music. Stéphane opens a bottle of Vieilles Vignes; it bears the Terravin gold label as do all his Chasselas wines. His Cave du Vallon was the first winery to win the right to stick the Swiss-made logo, depicting a red crossbow, on his labels. Stéphane et Hélène Schmidt have a natural sense of hospitality and prefer to invest their

efforts in client-friendly activities rather than competitions. The whole family contributes to the Open Days activities, including their children who are happy to earn some pocket money.

Cloître et produits du terroir Pas facile à trouver, le Domaine de la Lance à Concise ! Surtout quand on arrive de mauvais côté... Et puis, avec tous ces écriteaux « Propriété privée – Interdit d’entrer », on se demande si on

A gauche: Stéphane et Hélène Schmidt – www.caveduvallon.ch A droite: Stéphane Sandoz – www.lalance.ch

Taillés aux Greubons (savoury pastries flavoured with bacon), Malakoffs (fried cheese balls) and other specialities The fire crackles joyfully as we sit down in the carnotzet. Our hosts, Stéphane Schmidt and his wife Hélène, a trained cook, bring us a huge selection of fried bacon, meat balls, Muscat-flavoured sausage, taillé aux greubons and, of course, some Malakoffs. On Open Days, their palette of delicacies

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A cloister and local produce Domaine de la Lance in Concise is an ancient Carthusian monastery built during the first half of the fourteenth century, and

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Caves ouvertes vaudoises

est vraiment les bienvenus. Il suffit de poursuivre en ignorant les panneaux inquiétants pour se trouver soudainement transporté dans une autre époque. Des chevaux broutent sous d’immenses arbres à côté d’un complexe de bâtiments comprenant granges et écuries, dont l’origine religieuse ne saute pas aux yeux. En effet, l’ancienne chartreuse bâtie pendant la première moitié du XIVe siècle a été partiellement détruite lors de la bataille de Grandson. Après la conquête des Bernois et l’expulsion des moines, l’église a été transformée en pressoir – et bibliothèque. Le somptueux cloître, en revanche, a été conservé intact.

Lors des Caves ouvertes, en ces lieux inspirés proches des rives du lac de Neuchâtel, on déguste les vins du domaine, on mange la raclette et on profite de s’approvisionner, sur divers stands, en confitures, saucisses, fromages et autres produits du terroir. Stéphane Sandoz a repris le domaine – 8 hectares de vignes et trois fois plus de surfaces agricoles – géré par sa famille depuis plus d’un siècle. L’homme est paysan, vigneron et œnologue. En l’absence d’une cave moderne, il fait vinifier son vin chez Schenk : « La collaboration avec le chef œnologue Thierry Ciampi est excellente – il sait exactement ce que je veux. » Dans cette appellation très rouge (Bonvillars),

Stéphane Sandoz, producteur le plus riche en chasselas, amène une note blanche pétillante. Le vigneron n’envoie pas d’invitations spécifiques à ses clients pour les Caves ouvertes, mais fait un mailing pour ses dégustations de septembre et décembre. Si 10% environ de ses clients viennent de Suisse alémanique, « ils achètent 60% de la production et sont fidèles ! », trouver de nouveaux clients de l’autre côté de la Sarine est toujours un coup de chance. Les Caves ouvertes peuvent créer l’occasion. Il arrive qu’un passionné venu d’abord pour la beauté des vieilles pierres se convertisse au vin du cloître. Louées en soient les Caves ouvertes !

partially destroyed at the time of the battle of Grandson. After the Bernese conquest and the expulsion of the monks, the church was converted into a wine press and a library, while the magnificent cloister was preserved intact. If you visit this inspiring site situated close to the shores of the Lake of Neuchâtel during the Open Days event, you can taste the wines produced on the estate, enjoy

a raclette, and stock up at the different stands on local jams, sausages, cheeses and other local produce. Stéphane Sandoz has taken over the management of the estate that has been in his family for more than a century. It comprises 8 hectares of vineyards and three times as much agricultural land. His skills include farming, vine growing and oenology. For lack of a modern winery, he has

his wine vinified by Schenk. In the midst of this predominantly red Bonvillars area, Stéphane Sandoz is the most prolific producer of Chasselas. Although only 10% of his clients are from the German-speaking part of the country, they purchase 60% of his production and are loyal clients. Sometimes they come to admire the beauty of the cloister and end up converting to wine!

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Vigneronnes

Des Bourguignonnes fondues de vins vaudois Alexandre Truffer Photos : Sandra Culand «Nous avions pensé participer à un échange, nous avons découvert une région passionnante et reçu un accueil extraordinaire», déclare MarieFrance Audoin à la fin du repas qui clôture le séjour de cinq productrices bourguignonnes en terres vaudoises. Tout a commencé au printemps 2018. « J’étais à Dijon afin d’exposer mes photos, explique Pierre Keller et j’avais trois heures de temps libre. J’ai demandé conseil au sommelier du restaurant où je mangeais et celui-ci m’a dirigé vers le Domaine Charles Audoin. » L’idée de marier femmes vigneronnes, vins vaudois et Bourgogne éclot pendant cette visite imprévue. Six mois plus tard, les salons du Beau-Rivage Palace de Lausanne

Présentée comme la dernière action d’éclat de Pierre Keller, la rencontre entre vigneronnes bourguignonnes et vaudoises a rencontré un succès d’estime qui pourrait amener l’Office des Vins Vaudois à pérenniser ces face-à-face « terroiristes ». accueillent la première «  rencontre des terroirs » entre productrices vaudoises et bourguignonnes. Du côté des visiteuses, on trouve Lyne Marchive du Domaine des Malandes à Chablis, Clothilde Davenne du Domaine Les Temps Perdus, elle aussi à Chablis, Anne Sophie Debavelaere à Rully, Sylvaine Normand du domaine éponyme à La Roche-Vineuse et, bien entendu, Marie-Françoise Audoin de Marsannay-La-Côte. En ce qui concerne l’équipe jouant à domicile, on retrouve deux caves renommées de La Côte – le Satyre de Noémie Graff et le Domaine Henri Cruchon représenté par Catherine Cruchon – une entreprise familiale de Lavaux, la Cave Champ de Clos dirigée par

Christelle Conne et deux productrices – Madeleine Ruedin du Vully et Anne Müller d’Yvorne – qui depuis quelques années signent des vins reconnus pour leur personnalité. Une longue histoire commune Les liens entre la Bourgogne et le canton de Vaud sont profonds et anciens. Au 5e siècle, le Pays de Vaud (Pagus Valdensis) faisait déjà partie du premier royaume burgonde. Mille ans plus tard, l’indépendance de la Bourgogne et les ambitions de son duc, Charles le Téméraire, sont réduites en cendres à Grandson, puis à Morat. Dans l’intervalle, Saint-Prex aura adopté le pinot noir, connu alors sous la dénomination de servagnin, que l’on dit avoir été

En compagnie de Pierre Keller, les vigneronnes Anne Müller, Marie-Françoise Audoin, Madeleine Ruedin, Lynne Marchive, Clotilde Davenne, Anne Sophie Debavelaere, Christelle Conne, Catherine Cruchon, Sylvaine Normand et Noémie Graff

Discussion entre professionnelles autour d'une bouteille: Clotilde Davenne et Catherine Cruchon

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©OVV

donné en 1420 aux habitants du bourg par Marie de Bourgogne en remerciement de leur hospitalité. En parallèle, les moines de Cîteaux auront joué une influence non négligeable sur le développement des vignobles de Lavaux. Sans oublier, bien entendu, le village de Chasselas, près de Mâcon, dont le nom résonne intensément aux oreilles de tout amateur de vin vaudois. Et ce, même si le grand cépage blanc lémanique n’a jamais prospéré sur les vignoble de la petite commune (les 1200 plants de chasselas plantés par les propriétaires du Château de Chasselas devraient donner leur première récolte en 2019). Déclinaison de terroirs Aujourd’hui, cependant, les points de convergence entre vigneronnes vaudoises et membres de l’association Femmes & Vins de Bourgogne ne sautent pas aux yeux. Ces dernières dirigent des domaines essentiellement tournés vers l’exportation qui profitent de l’engouement mondial pour la Bourgogne. Dotées de clientèles surtout anglo-saxonnes et asiatiques (les

chiffres diffèrent pour chacun des cinq domaines, mais en général la France absorbe moins d’un tiers de leur production et la Suisse ne constitue qu’un marché marginal), travaillant presque exclusivement les deux principaux cépages bourguignons (pinot noir et chardonnay), nos vigneronnes hexagonales contrastaient avec les représentantes d’un vignoble vaudois beaucoup plus diversifié sur le plan viticole et beaucoup moins international au niveau commercial. L’amour du pinot noir, du travail bien fait et la passion du terroir : ces points communs, relevés par les professionnelles des deux régions, ont toutefois permis de tisser des liens solides entre les participantes. Et si Pierre Keller estimait dans son allocution que « la mise sur pied de cette rencontre clouerait le bec à ceux qui le traitaient de misogyne », Benjamin Gehrig considérait pour sa part que l’opération avait été un succès sur le plan de la communication et que « l’OVV réfléchissait à organiser d’autres rencontres du même type, mais avec des productrices et producteurs d’autres régions. »

Vincent Chappuis : nouveau commandeur des vins vaudois Seizième personnalité à être intronisée par le président de l’OVV, Vincent Chappuis s’est vu remettre les insignes de Commandeur de l'Ordre des Vins Vaudois le 4 décembre 2018 lors d’un déjeuner de presse organisé à l’occasion de la visite des vigneronnes bourguignonnes en terres vaudoises. Vigneron et ancien syndic de Rivaz, le récipiendaire a surtout été honoré pour sa contribution déterminante à la création du Vinorama, un projet visionnaire piloté par une fondation dont il est le président. Comme l’a rappelé Pierre Keller, le Vinorama vend, à une clientèle très diversifiée, quelques 30 000 bouteilles de vins de Lavaux par année. AT

The Women Wine-Makers of Vaud and Bourgogne In the autumn of 2018, the Beau-Rivage Palace in Lausanne hosted the first Wine and Terroir Meeting that brought together five women producers from Vaud and another five from Bourgogne. The ties between Bourgogne and the Vaud canton go back a long way. In the fifth century, Vaud was part of the first kingdom of Burgundy. A thousand years later, the independence of Burgundy and the ambitions of its duke were re-

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duced to ashes at Grandson, and then at Morat. In the meantime, Saint-Prex had adopted the Pinot Noir, known at the time as Servagnin, that name it is said was given to the inhabitants of the village, in 1420, by Marie de Bourgogne. During that same period, the Cistercian monks had played a significant role in the development of the vineyards in the Lavaux region. Today, the members of the Bourgogne

Women and Wine Association run mainly export-oriented estates that are benefiting from the world-wide popularity of Bourgogne wines. Vaud wines are less traded internationally. Nonetheless, the women participating in the meeting highlighted their shared love of Pinot Noir and of good-quality work, and their shared passion for terroir, which have ensured the development of strong ties between the wine-makers of both regions.

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Bourlingueur et artiste

Pierre Keller est né en 1945 à Gilly près de Rolle. Graphiste, maître de dessin, artiste et curateur d’expositions, il se fait rapidement un nom. Il a vécu à Londres, au Canada, à San Francisco, à New York, et compte de nombreux artistes parmi ses amis. C’est lui qui était chargé de concevoir les affiches du Montreux Jazz Festival. Il a aussi représenté le gouvernement vaudois lors du 700e et la Suisse lors de diverses biennales, avant de prendre, en 1995, la direction de l’ECAL. En 2011, il prend la présidence de l’OVV, dont il vient d’être nommé président honoraire. EZ

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Rencontre

Sayonara, Monsieur Keller ! Eva Zwahlen Photo: Hans-Peter Siffert Le Léman à nos pieds arbore un ton gris métallisé tandis que, sur la rive d’en face, les montagnes ont pris un air sombre et sévère. Il bruine. Les maisons de Saint-Saphorin se serrent les unes contre les autres et derrière les murs de pierres, on devine des jardins abandonnés par l’hiver. Après avoir un peu cherché, nous trouvons l’entrée de l’antre de Pierre Keller et parvenons via quelques marches à son repaire d’artiste. Le maître des lieux nous invite à entrer et à boire un thé ou un café, vu l’heure matinale. José, l’assistant, le préparera. Il tente de ranimer le feu de cheminée. « Mais non, pas comme ça, ça fume trop… !  » lui montre Pierre Keller en faisant miroiter ses grosses bagues. Enfin les flammes se mettent à danser, diffusant bientôt une douce chaleur qui enveloppe hôtes et invités dans un même bien-être. Boulot plutôt qu’apéro « Non, je ne suis pas triste que cette période soit achevée », annonce d’emblée notre hôte, dont l’engagement à l’OVV a pris fin, pour raison d’âge – il a 74 ans. « J’ai fait mon travail, mis sur pied une bonne équipe, efficace, qui peut parfaitement fonctionner sans moi. » D’ailleurs Benjamin Gehrig, le jeune directeur de l’Office des Vins Vaudois (OVV), diplômé de l’Ecole

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Après sept ans et demi de présidence de l’Office des Vins Vaudois, Pierre Keller laisse son poste à la relève. Le grand petit homme, qui a polarisé le monde du vin vaudois et y a amené une bouffée d’air frais, ne laisse pas le plus petit vide derrière lui. Ses fonctions sont reprises par Michel Rochat, directeur de l’Ecole Hôtelière de Lausanne. Hôtelière de Lausanne, avait déjà travaillé avec lui à l’Ecole Cantonale d’Art de Lausanne (ECAL). Pierre Keller souligne qu’il a investi beaucoup de temps et d’énergie dans ce poste, fidèle en cela à son tempérament. « Non, je n’ai pas été un directeur apéro » ! Au moment de sa nomination, on lui avait dit qu’il n’aurait pas grand chose à faire « juste quatre séances par an… » Il rigole: « Cela s’est avéré un mi-temps passionnant et intense. » Pierre Keller a su créer l’événement, faire parler de lui... et surtout des vins vaudois. C’était son boulot. Pierre Keller n’a pas été un président ennuyeux, il n’a pas joué au technocrate, mais pas non plus au professionnel du vin. Il s’est montré plutôt un touche à tout authentique, un original, un créatif, un être à mille facettes, certes un peu égocentrique et non dénué de coquetterie, mais digne d’estime et richement coloré ! De la couleur, il ne l’amenait pas seulement avec ses cravates, ses chapeaux, ses foulards de dandy et ses costumes – clairs –, mais aussi dans ses manières provocatrices, son humour, son rire contagieux et son indécrottable optimisme. Et l’optimisme, dans un secteur qui a de gros soucis d’avenir, est une qualité à ne pas sous-estimer. Pour Pierre Keller, il est depuis longtemps évident qu’il ne suffit pas de

faire de bons vins. «  Autrefois, les caves du canton de Vaud étaient la plupart du temps verrouillées, et un client devait frapper bien fort avant que le vigneron lui ouvre. Ces temps sont révolus. La qualité des vins est extraordinaire, les viticulteurs font un superbe travail, mais tout cela ne suffit pas. Il faut vendre. Et les vignerons doivent se bouger, s’occuper de la communication. » Quelle était sa tâche à lui dans ce contexte ? Il rétorque qu’il n’a jamais été commerçant de vins ! Mais qu’il s’y entend un peu en matière de marketing... de bon design, de gros events. « Même si pour certains, j’étais trop souvent présent dans les médias. » L’OVV relooké Son plus grand mérite ? « J’ai changé l’image de l’OVV et je l’ai nettement rajeunie. On voit ça au graphisme, à la communication. » Il a intentionnellement collaboré avec de jeunes graphistes et photographes de l’ECAL « et non pas avec une agence qui aurait coûté beaucoup d’argent sans amener forcément grand-chose.  » Son successeur, son « cher ami » Michel Rochat, aurait d’ailleurs déjà mandaté une agence zurichoise, fait-il remarquer, légèrement ironique. Les contacts personnels lui ont toujours paru essentiels. Et si par exemple

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Le tabac transforme les pensées en rêves Victor Hugo

TABAC BESSON Magasin spécialisé dans la vente de tabacs, cigares et spiritueux Rue de Bourg 22 - 1003 Lausanne Tél. 021 312 67 88 tabacbesson@bluewin.ch www.tabac-besson.ch


Rencontre

un vigneron se plaignait, eh bien, une heure après, il était déjà dans sa cave pour régler le problème autour d’un verre. « Et puis, il faut avoir des idées, naturellement. Plus on a d’idées et plus il y a de travail d’ailleurs ! Mes idées me viennent toujours spontanément... » Pour la concrétisation de ses illuminations, Pierre Keller a toujours préféré les commissions « de moins de trois personnes et d’un nombre impair… ». Si ce n’est pas le meilleur moyen de se faire beaucoup de copains, en revanche, c’est très efficace et créatif. Et Keller l’est. Les consommateurs et beaucoup de vignerons ont apprécié son travail. « En tout cas les jeunes », qui semblent nettement plus proches de lui que les « vieux ». Les questions de politique du vin, en revanche, comme notamment celles autour des futures réglementations AOP et IGP ne le touchent pas beaucoup. « Ah vous savez, ces histoires compliquées m’intéressent moins. Malheureusement, on ne va pas vers la simplification… »

Asie contre Suisse alémanique ? C’est plutôt la réputation du vin vaudois qui lui tient à cœur. Et comme on sait que pour valoir quelque chose chez soi, il faut être reconnu à l’étranger, Pierre Keller est sorti des frontières helvétiques. Il s’est rendu, surtout, au Japon et en Chine. Il a également cherché des leaders d’opinion – pas seulement des Asiatiques – qu’il a mis dans sa barque, et qu’il a glorieusement baptisés Commandeurs de l’Ordre des Vins Vaudois. Dans ses voyages, il était toujours accompagné par une poignée de vignerons très investis « qui étaient prêts à tirer à la même corde ». Ses meilleurs souvenirs ? Les formidables soirées sur les terrasses d’hôtels de Tokyo ou de Shanghai, après des manifestations réussies, avec une bouteille de Dézaley... Et quels résultats son engagement a-til eus en Suisse alémanique, le débouché le plus important des vins vaudois ? « On m’a reproché d’avoir négligé les Suisses allemands, mais c’est faux ! » Fâché, Pierre Keller fronce les sourcils:

« Pensez seulement à nos interventions à la Weltklasse Zürich (meeting mondial d’athlétisme) ! Ou au partenariat avec le cirque Knie ! » Une sympathique offensive de charme se cachait en effet derrière le slogan « Mir gö i d’Knie vorem Waadtländer Wii ! » qui jouait sur le mot « Knie » (genou), traduit ensuite en français par « Le monde s’incline devant les vin vaudois », sans jeu de mots... Mais cela suffisait-il à garder vive la soif des Suisses allemands pour les vins vaudois ? Cette question n’est plus le souci de Pierre Keller. Il ne va pas se laisser ennuyer avec ça. Il y a une année qu’est sorti son livre «  My Colorful Life », une sorte de journal intime sous forme de photos Polaroid, montrant toutes les facettes de sa sensibilité homosexuelle. Ce qu’il désire faire, à l’avenir, c’est mettre de l’ordre dans sa collection d’art et ses photos, organiser des expos, des voyages. « Quand c’est fini, c’est fini ! », conclut-il avec énergie. Il se lève. Eh bien, Sayonara Monsieur Keller !

Sayonara, Mr. Keller! After seven and a half years as president, Pierre Keller has resigned from the Office des Vins Vaudois (OVV) to make way for someone younger. Keller polarised the world of Vaud wine, but also brought it a breath of fresh air. He will certainly be missed. His position has been taken over by Michel Rochat, the director of the Lausanne Hotel School. Our guest explained from the outset that he wasn’t sad that his OVV period had come to end. He was 74 years old and had quit for reasons of age. “I have done my job and built a good team that is efficient and can function perfectly well without me”. Incidentally, Benjamin Gehrig, the young director of OVV, a Lausanne Hotel School graduate, used

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to work with him at the Ecole Cantonale d’Art de Lausanne (ECAL). Pierre Keller told us that he had put a lot of time and energy into his work - that was in keeping with his character. But on his appointment, he had been told there wasn’t going to be much work, “just four sessions a year… in fact it turned out to be an intense and exciting half-time job”. It was always obvious to Pierre Keller that making great wine wasn’t enough. “In the past, the wineries in the Vaud canton were mostly closed and clients had to knock hard to be let in. Those times are over. The quality of the wines is extraordinary, and the producers do a fantastic job, but all that isn’t enough.

You must be able to sell it. Wine-makers must be proactive and work hard on communication.” What was his role? He admitted he had never actually been a wine merchant, but that he did know a bit about marketing, about what makes a good design or how to organise big events! “Even though some people found that I appeared too often in the media!” Pierre Keller had understood that the key to being appreciated at home was to first gain recognition abroad, so he made a point of travelling overseas, especially to Japan and China. He also sought out and hired opinion leaders, awarding them the glorious title of Commander of the Order of Vaud Wines.

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Grand Prix du Vin Suisse 2018

Quatre victoires et le Vinissimo Rouge pour les Vaudois Plus de 400 personnalités de la vigne et du vin étaient réunies le 18 octobre 2018 pour découvrir le palmarès du Grand Prix du Vin Suisse. Marquée par un troisième titre de Cave Suisse de l’Année pour Diego Mathier, cette édition a vu les producteurs vaudois remporter quatre catégories et un prix spécial, le Vinissimo Rouge, qui récompense le coup de cœur du jury. Alexandre Truffer – Photos : VINUM L’édition 2018 du concours national a vu concourir 2867 vins présentés par 525 producteurs. En juin, le jury, qui regroupait 158 professionnels, a passé six jours à décerner médailles d’or et d’argent. Deux mois plus tard, un second jury, restreint et international, a reçu pour mission de redéguster les six meilleurs vins de chacune des treize catégories. Les lauréats qu’ils ont désignés ont été couronnés mioctobre à Berne lors du Gala du Grand Prix du Vin Suisse. Dans Le Guillon de l’automne passé, nous vous présentions les nominés vaudois à ces « Césars » du vignoble

helvétique. Seize producteurs pouvaient prétendre au sacre et ce, dans sept (des treize) catégories. Finalement, le palmarès ne recèle pas de grandes surprises. Vaud a mis dans le mille là où il était attendu. A l’inverse, les outsiders n’ont pas pu surclasser les favoris. Ainsi, la Réserve SaintJacques 2017 du Château de Valeyres, à Valeyres-sous-Rances, qui était le premier Riesling x Sylvaner romand à avoir été nominé dans cette catégorie, n’a rien pu faire face aux poids lourds alémaniques. Le Gewürztraminer du Domaine des Sieurs 2017, à Luins, a connu le même destin dans les vins

doux, dominés par les Valaisans. Tout comme le Merlot 2016 du Château de Montagny, un domaine appartenant à la Ville de Payerne, qui n’a pu empêcher le triplé tessinois dans la catégorie dédiée au plus tendance des cépages rouges. Chasselas : triplé réussi Avec 442 vins, cette catégorie demeure la deuxième la plus disputée de la compétition derrière les « cépages blancs purs ». 92 vins ont obtenu une médaille d’argent et 52 une médaille d’or. Cinq des six nominés venaient du canton de Vaud. Lors de la redégustation, le

Swiss Wine Grand Prix 2018 More than 400 vine and wine personalities were gathered on October 18th to discover the winners of the Swiss Wine Grand Prix. Besides the remarkable achievement of Diego Mathier’s third Cave Suisse de l’Année title, this year’s edition witnessed four category awards for Vaud producers, as well as the special Jury’s Favourite prize, Vinissimo Rouge. In all, 2,867 wines were presented by 525 producers. The 158 members of the jury spent three days in June determining the gold and silver award winners. Two months later, a further smaller jury, that

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included international members, re-tasted the six best wines in each of the thirteen categories. The designated winners received their awards mid-October, in Bern, at the Swiss Wine Grand Prix gala.

Chasselas: a triple win This category, with 442 wines, was close behind the Pure White Varieties in number of participants. Ninety-two wines obtained silver medals and fifty-two ob-

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jury international a accordé un diplôme d’honneur au Clos de la Dame 2017 du Domaine de Feuillerage à Perroy et au Dézaley-Marsens De La Tour 2015 des Frères Dubois à Cully. Il a fait monter sur la troisième marche du podium un chasselas vif et minéral doté d’une bouche ample et d’une finale délicatement saline, le Bérollon 2017 de la Cave du Consul à Perroy. Toutefois, quant il s’est agi de choisir entre les deux coqs, le jury n’a pas pu se départager et à donc couronné deux vainqueurs. Le premier « est un classique du domaine : fin, équilibré, avec une finale ample mais délicate. C’est un Riex vinifié par François Meylan, notre œnologue, selon les codes usuels du canton de Vaud. Il a fait sa deuxième fermentation et n’est élevé qu’en cuve inox », déclare Beat Blatter, le caviste de la Bourgeoisie de Fribourg qui a

Les chasselas vaudois ont été brillants, et les récompenses nombreuses !

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rejoint ce domaine historique en 2012. « Cette année-là, la vinification a été rapatriée à Riex. La Bourgeoisie de Fribourg, propriétaire de ce domaine de Lavaux depuis le 14e siècle, a investit 15 millions de francs pour complètement refaire la cave. » Ce domaine qui présente une structure viticole assez typique pour Lavaux – quatre hectares, dont un en Dézaley Grand Cru, et 85% de chasselas – commercialise près des quatre cinquièmes de sa production en bouteilles. « La moitié de nos vins sont vendus grâce à un petit magasin dans la ville de Fribourg qui est ouvert deux après-midi par semaine. Pour le reste, notre commercialisation se fait surtout en Suisse alémanique », confie ce Bernois d’origine qui se réjouit de livrer des crus de la Bourgeoisie dans vingt cantons différents. Et le succès ne devrait pas se démentir, car « 2018 sera mieux que le 2012 que je trouvais déjà magnifique. Ce sera tout simplement le meilleur millésime jamais élaboré au Domaine de la Bourgeoisie de Fribourg ! »

Le second chasselas primé est le Château d’Etoy 2017 de la Cave de Jolimont. Vinifié à Rolle par Thierry Ciampi «  selon un protocole relativement classique qui implique une fermentation à température contrôlée, une fermentation malolactique terminée et un élevage sans passage dans des récipients en bois », ce vin naît de raisin travaillé par le vigneron Christian Dupuis. « J’ai acheté cette parcelle de deux hectares et demi l’an passé. Je vends le raisin au groupe Schenk qui en fait une sélection pour un client unique », explique ce producteur de Féchy. Le Château d’Etoy est en effet une exclusivité commercialisée dans toute la Suisse par le groupe Otto’s, que l’on connaît en Suisse romande comme « Otto le Soldeur ». Rosés et blancs de noirs : beau doublé Dans cette catégorie qui a souvent souri aux vignerons vaudois, on retrouvait trois Vaudois parmi les six nominés. Si le Rosé de Gamay du Domaine de la Croix à Bursins a dû se contenter d’un


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accessit, le canton de Vaud s’empare des deux premières places. La version rosée du plus connu des vins suisses, l’Aigle Les Murailles de Badoux Vins monte sur la deuxième marche du podium avec son assemblage de cépages rouges enchâssé dans un pot vaudois translucide. Ce lézard à la robe saumonée est battu par le Domaine de Brazière 2017, de Serge Dentan à Tartegnin. « Il s’agit d’un pur de rosé de gamay. Une fois les raisins vendangés, ils sont pressés tout de suite. Les derniers millésimes ont permis au raisin d’atteindre de magnifiques maturités. On ne se pose même plus la question de la chaptalisation. Cependant les fermentations peinent parfois à se terminer complètement, ce qui laisse un léger sucre résiduel, semble-t-il assez apprécié », explique ce vigneron propriétaire, avec sa femme Marlyse, d’un domaine d’un peu plus de six hectares à Tartegnin. Le couple vinifie beaucoup de chasselas, pas mal de pinot noir et de gamay ainsi que des spécialités en quantités plus confidentielles à base

d’auxerrois, de chardonnay, de merlot ou encore de diolinoir. Désormais épuisé, le lauréat du concours national va laisser la place à une millésime 2018 que Serge Dentan qualifie de « riche, mais ce n’est pas forcément une mauvaise chose car le 2017 qui a remporté le Grand Prix dépassait les 14° d’alcool. Ce qui peut paraître beaucoup pour un rosé, mais le fait de travailler avec du gamay exclusivement permet d’obtenir une acidité qui apporte de l’équilibre même dans des années très ensoleillées ». Gamay : deux sur trois Dans cette catégorie qui a vu s’affronter 95 vins, trois Vaudois pouvaient prétendre au titre suprême. Le Gamay Barrique 2016 de Bolle termine finaliste, mais pas lauréat. Un autre 2016, Le Petit Versailles, un Dézaley Grand Cru des Frères Dubois, remporte la médaille de bronze tandis que la victoire est partagée entre un cru genevois et le gamay « de caractère, équilibré, vif et gouleyant » du Domaine

de Chantemerle de la famille Jaccoud. « Issu de vieilles vignes, ce vin est vinifié de manière traditionnelle après avoir fait une macération préfermentaire à froid pendant une semaine. Le chasselas, le pinot noir et le pinot gris restent nos cépages les plus importants. Avec quelques trois mille bouteilles annuelles, le gamay est le plus important des viennent-ensuite », précise Nicolas Jaccoud qui représente la cinquième génération de ce domaine familial de dix hectares. Interrogé sur le regain d’intérêt que connaît la variété emblématique du Beaujolais sous nos latitudes, notre lauréat de Tartegnin préfère rester prudent « ce genre de résultat prouve que notre gamay offre un excellent rapport qualité-prix, mais ne va pas nous inciter à réencépager notre domaine. Le rouge emblématique du domaine reste le Pinot Noir (le millésime 2015 a d’ailleurs terminé deuxième de sa catégorie au Grand Prix du Vin Suisse 2016) sur lequel nous avons beaucoup travaillé ces dernières années. »

tained gold. Five of the six contestants nominated came from the Vaud canton. At the re-tasting, the international jury awarded a diploma of honour to Clos de la Dame 2017, from Domaine de Feuillerage, in Perroy, and to Dézaley-Marsens De La Tour 2015, from Les Frères Dubois, in Cully. A lively, mineral Chasselas, a full wine with a delicately saline finish, the Bérollon 2017, from Cave du Consul in Perroy, received third prize. But when it came to choosing between the two best wines, the jury was unable to agree on their ranking and appointed two winners. Describing one of the winners, Beat Blatter, the cellar master at Cave de la Bourgeoisie de Fribourg, and owner of the Lavaux estate founded in the 14th century, pointed out, “It’s a classic Riex wine from our estate, vinified by our oenologist, François Meylan, according to

cantonal norms. It underwent secondary fermentation and was aged in stainlesssteel tanks". The other winning Chasselas was Château d’Etoy 2017, from Cave de Jolimont. Vinified in Rolle by Thierry Ciampi, this wine comes from a two-anda-half-hectare parcel, cultivated by the vine grower, Christian Dupuis.

Gamay: two out of three In this category comprising 95 contestants, Gamay Barrique 2016, from Bolle, was among the finalists, but not the winners. Another 2016 Gamay, Le Petit Versailles, a Dézaley Grand Cru, from Frères Dubois, was awarded a bronze medal while the first place was shared between a Geneva wine and the Jaccoud family’s Gamay, Domaine de Chantemerle.

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Rosés and Blancs de Noirs: a nice twosome The Vaud canton took first and second place. The rosé version of the best-known Swiss wine, Aigle Les Murailles, from Badoux Vins, took second place with its red grape blend, presented in a typical Vaud bottle. This salmon coloured rosé was beaten by Rosé de Gamay - Domaine de Brazière 2017, from Serge Dentan, in Tartegnin.

Gamaret: the best red “Winning the Vinissmo Rouge prize was particularly special for us. It’s unusual for our wines to obtain this distinction”, explains Rodrigo Banto, the oenologist at Cave de La Côte who is used to win top awards at the Swiss Wine Grand Prix. This oenologist of Chilean origin admits to having a particular affinity for

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Grand Prix du Vin Suisse 2018

Gamaret : le meilleur des rouges « Gagner le Prix Vinissimo Rouge a donné une résonance particulière à cette soirée. Ce n’est pas une récompense où sont très attendus les vins de notre appellation  », confie Rodrigo Banto, l’œnologue de la Cave de La Côte, quand on demande à cet habitué des plus hautes marches des podiums du Grand Prix du Vin Suisse quelle importance peut avoir une nouvelle victoire. Surtout dans l’une des plus petites catégories du concours (85 vins présentés, sept médailles d’or, 21 d’argent et un autre Vaudois en finale : le Gamaret de Lavaux 2015 de Christophe Chappuis à Rivaz) qui semble encore quelque peu se chercher puisque l’intitulé de l’an passé « Gamaret, Garanoir (en monocépage ou en assemblage) » a été remodelé pour devenir « Gamaret, Garanoir et Mara purs ». Il est vrai que cet œnologue d’origine chilienne avoue une affinité particulière avec ce fils du gamay et du reichensteiner. « J’ai découvert le gamaret à mon arrivée en Suisse en 2003. Cela faisait déjà quelques années que la Cave de La Côte vinifiait du gamaret et du garanoir. Cette création de Changins m’a tout de suite intéressé, car il s’agit d’une variété caractérisée par sa puissance et qui se montre très polyvalente. En plus, il présente une petite note épicée qui lui donne une certaine ressemblance avec la syrah, un cépage que j’apprécie beaucoup mais qu’il est difficile de cultiver dans notre région, poursuit Rodrigo Banto. Même dans les millé-

simes difficiles, le gamaret permet de réussir des cuvées intéressantes. Il n’a qu’un défaut : ses problèmes de dépérissement à la vigne (qui ont fait l’objet d’un article dans Le Guillon n° 53). » « Un nez intense et complexe. Des parfums floraux, des arômes de baies des bois et des notes fumées sont enrobés dans une structure très équilibrée. Un vin expressif, riche et savoureux » : telle est la description du jury international qui l’a redégusté en août avant de lui attribuer la première place dans sa catégorie puis de le primer une seconde fois lorsqu’il s’est retrouvé opposé aux autres rouges vainqueurs de leurs catégories respectives. Ce qui lui a valu le Prix Vinissimo. « Les vignes du Gamaret Inspiration sont situées

Gamaret, a cross between Gamay and Reichensteiner: “Even in difficult years, Gamaret grapes give interesting wines. They have one weakness and that is that they are susceptible to grapevine decline”. “An intense and complex nose; floral scents and berry aromas, with smoky notes, in a well-balanced structure. An

expressive, rich and flavoursome wine.” That was how the international jury retasting it in August described it, giving it first place in its category, and then top place again from among other winning reds in the Prix Vinissimo award. Rodrigo Banto goes on to explain: “The Gamaret Inspiration vines are situated in the vicinity of Morges. Of course,

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Rodrigo Banto (à droite), œnologue de la Cave de la Côte et Fabien Coucet, son adjoint

dans les environs de Morges. Nous les vendangeons environ deux semaines après les autres parcelles de gamaret, afin d’assouplir les tanins et d’augmenter la complexité aromatique. Bien entendu, nous limitons aussi les rendements et l’élevage se fait en barriques », explique Rodrigo Banto qui précise que 2015 a comblé toutes les attentes qualitatives des producteurs et qu’il était sans doute le plus beau millésime de ce 21e siècle. Et tout cas jusqu’à 2018…

we also limit the yield and the wine is matured in barrels. The year 2015 surpassed all quality expectations and is certainly the best year in the 21st century – at least so far”.

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Lauriers de Platine blanc 2018

Villeneuve coiffe Yvorne au poteau Résultat serré pour les Lauriers de Platine de Terravin blancs de novembre 2018. Au dernier round, le Villeneuve de la Viticole de Villeneuve l’a emporté de justesse face à l’Yvorne Le Chardon de Jean-François Morel. Eva Zwahlen Photos : Pascal Besnard Murmures, soupirs, éclats… Un petit vent de rébellion a soufflé sur cette onzième édition des Lauriers de Platine. La raison ? Le désir, au sein du jury, de couronner deux vins ex æquo. Haut et fort, le journaliste spécialisé en vins Pierre Thomas a exprimé la chose: « Je verrais bien les deux derniers finalistes ensemble sur le podium. » Las, malgré les murmures d’approbation dans les rangs du jury, la proposition est restée lettre morte. Après avoir laissé sur le carreau, en trois rounds éliminatoires, sept chasselas de Lavaux – dont deux dézaleys et deux calamins –, six La Côte et un Bonvillars, c’est en effet au coude à coude que les deux derniers ont couru le sprint final. Voisins mais pas cousins A ce stade, la trentaine de professionnels du vin, sommeliers et journalistes spécialisés composant le jury ne savaient pas encore que ces vins venaient tous deux du Chablais : l’un d’Yvorne, l’autre de Villeneuve, appellation un brin mal aimée, éclipsée par sa célèbre voisine, Yvorne. Mais voilà, cette fois, c’est Villeneuve qui en a remontré à Yvorne. Malgré leur proximité géographique, les deux vins qui se sont affrontés dans la dernière ligne droite n’auraient pas pu être plus différents : l’un d’une grande finesse, élégant, porté par une

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Dégustation et concentration vont de pair belle acidité et prêt à être bu; l’autre, au nez encore discret, mais puissant, bien charpenté, minéral. Chacun dans son genre, un digne représentant de son cépage et du terroir vaudois. C’est le deuxième, le Villeneuve, qui a remporté la couronne. Président de la Viticole de Villeneuve, Ulrich Künzli ne boude pas sa joie  : « C’est la première fois qu’un vin de Villeneuve gagne les Lauriers de Platine. Nous sommes comblés et extrêmement fiers. Ce succès récompense tous nos efforts de qualité entrepris depuis quelques années.  » Cela fait vingt ans que l’homme préside ce qui était d’abord une coopérative avant de devenir il y a deux ans une société anonyme. Les effets de la distinction Terravin sur

les ventes, raconte-t-il, ont été immédiats: « L’écho donné à cette victoire a été énorme. Les 4-5000 bouteilles qui restaient en stock en novembre 2018, des 20'000 mises en bouteilles en mai, ont fondu comme neige au soleil. J’ai pu à peine en sauver une petite réserve. » Une rue qui porte bien son nom Pour Ulrich Künzli, la Viticole de Villeneuve, fondée en 1907, est la cave la plus « représentative » de Villeneuve. Située, avec à propos, à la rue des Pressoirs, elle compte 35 membres actionnaires qui ensemble possèdent 13,5 hectares de vignes. Ulrich Künzli, pour sa part, confie la culture de ses 3,5 ha à un vigneron-tâcheron. Et bien qu’il soit formé en viti- et arboricul-

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ture, il dirige aujourd’hui une entreprise d’assainissement et d’hygiène publique. « A la rue des Pressoirs, explique-t-il, la Viticole dispose d’infrastructures très modernes ; on y égrappe les raisins, on les presse, et on y fait aussi la vinification. » Parmi les cépages cultivés par la Viticole, le chasselas caracole en tête avec 70% des surfaces. Le Grand cru « normal » est produit avec des plants

de 5 à 30 ans, tandis que le « Vieilles Vignes » est issu de plants plus vieux de 30 ans. En blanc, chardonnay et pinot gris jouent les seconds rôles. La palette des rouges se compose de pinot noir, gamay, gamaret, garanoir, merlot et cabernet franc. A veiller sur la vinification de tous ces vins, on trouve depuis deux ans le jeune Frédéric Pernet, œnologue chez Badoux

La grande finale Le 15 novembre 2018, à Crissier, les 16 finalistes restés en lice sur les 753 «coqs» (qui avaient obtenu le Label d’Or Terravin durant l’année) ont été dégustés et notés par séries de quatre, selon un système de coupe. Les vainqueurs ont été fêtés en présence du conseiller d’Etat Philippe Leuba et du parrain de la manifestation, le chef triplement étoilé Frank Giovannini. Le carré final: 1. Villeneuve Grand Cru, La Viticole de Villeneuve. 2. Yvorne Le Chardon, Jean-François Morel (Chablais AOC). 3. Elevé sur Lies, Christian Dupuis (La Côte AOC). 4. Epesses, Cave de l’Hôpital, Bourgeoisie de la Ville de Fribourg (Lavaux AOC). EZ

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Vins à Aigle. « On vinifie de manière parfaitement traditionnelle», affirme Ulrich Künzli. Badoux et les vignerons semblent fort bien travailler puisque l’an dernier la Viticole a eu son représentant parmi les 16 finalistes. « Et en 2018, les sondages de nos raisins ont dépassé tous nos records ! » Attention, donc à la prochaine édition des Lauriers de Platine !

Les lauréats. A droite Ulrich Künzli, président de la Viticole de Villeneuve et l'œnologue Frédéric Pernet

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Concours Mondial de Bruxelles à Aigle

Une première suisse à ne pas louper Certains l’avaient vu à Montana ou à Martigny, d’autres à Genève-Cointrin ou à Montreux. Du 2 au 5 mai, pour la première fois, la Suisse accueillera le plus grand concours dédié aux vins du monde entier, le Concours Mondial de Bruxelles (CMB), à Aigle. Un rendez-vous à ne pas manquer. Pierre Thomas* L’idée avait germé chez le syndic Frédéric Borloz, le spécialiste en tourisme des Alpes vaudoises Pierre-Alain Morard et l’œnologue Daniel Dufaux. Entretemps, ces chevilles ouvrières du Mondial du Chasselas ont pris du galon dans le monde du vin suisse. Le politicien, conseiller national, est à la tête de la Fédération suisse des vignerons. L’acteur du tourisme est retourné à ses origines, comme directeur de l’Union fribourgeoise du tourisme, puis a été nommé président de Swiss Wine Promotion SA. Et le président de l’Union suisse des œnologues dirige

Badoux Vins, entreprise emblématique du Chablais vaudois. Ce trio, avec d’autres bénévoles de l’ombre, réunis en association, a été rejoint par Nicolas Joss, ancien directeur de l’Office des vins vaudois, et promu secrétaire général de l’association aiglonne dédiée à l’organisation du CMB. La Suisse ? Une destination exclusive La candidature suisse a dû laisser son tour à Haidian, un quartier de Pékin, l’an passé. Itinérant depuis 2005 (à Lisbonne), après avoir fait le tour des cités belges, le Concours Mondial de

Les responsables du CMB, Baudouin Havaux et Thomas Costenoble, Marion Lemesre, échevine des Affaires Economiques pour la ville de Bruxelles, les représentants d'Aigle Nicolas Joss, Frédéric Borloz et Daniel Dufaux, à l'Hôtel-de-Ville de Bruxelles, le jour de la signature du contrat, le 29 août 2018.

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Bruxelles connaîtra sa 26e édition dans la plus petite des villes jamais visitées, après l’escale dans la capitale chinoise, trois fois plus peuplée que la Suisse ! Habituée au Plat-Pays, la caravane sera logée en montagne, à Leysin. Les 340 dégustateurs, parmi lesquels, exceptionnellement, 40 Suisses, soit un par jury, jaugeront quelque 9'000 vins de 5'000 producteurs, au cœur de l’anneau du Centre mondial du cyclisme. Cette succession de nouveautés, souvent insolites, réjouissent le président du CMB, le Belge Baudouin Havaux, qui a pris le relais de son père, Louis, à la tête de la compétition. « Il y a un véritable engouement pour cette édition. Elle a l’attrait de la nouveauté, de l’inconnu. Peu exportés, les vins suisses intriguent. Les dégustateurs


sont impatients de venir voir sur place. La Suisse fait figure de destination exclusive. » Jamais, jusqu’ici, le concours n’avait été organisé en Suisse. Et, autant le dire tout de suite, il y a peu de chance qu’il le soit à nouveau avant une bonne dizaine d’années.

Photos : Anick Goumaz/CMB Aigle

Des retombées pour toute la Suisse « A chaque fois, il s’agit d’un partenariat entre le concours et la région d’accueil, avec, pour celle-ci, un gros travail humain et un important investissement financier », explique Baudouin Havaux. De son côté Nicolas Joss rappelle que le budget global « local » du CMB se monte à 950'000 francs. Comme le CMB entretient une communication et un réseautage efficaces, l’annonce de la candidature aiglonne a déjà généré des retombées d’une valeur de 200'000 francs… Les retombées finales des concours à Plovdiv (Bulgarie, 2016) et à Valladolid (Espagne, 2017) ont été estimées à près de 2 millions de francs. Sur place, 380 chambres ont été réservées à Leysin, en hôtels et résidences, et plusieurs délégations étrangères séjourneront sur la Riviera, dont un fort contingent chinois. Il viendra vérifier « de visu » si les Suisses font mieux que les Pékinois ! « Ce sera plus simple mais avec plus d’émotion », promet d’ores et déjà Nicolas Joss.

Les 340 jurés, journalistes spécialisés en vins et blogueurs (60%), œnologues (15%), sommeliers, acheteurs et commerciaux, arriveront à GenèveCointrin par avion le 1er mai, puis en train jusqu’à Leysin. Alors que, d’habitude, cette cohorte passe le lendemain déjà à l’évaluation des vins, le jeudi 2 mai, ces hôtes, venus du monde entier, visiteront le vignoble romand en bus (Genève, La Côte, Nord vaudois, Neuchâtel). En fin de journée, ils assisteront, à Leysin, à deux conférences sur la viticulture suisse, par Monsieur vignoble vaudois, Olivier Viret, et par l’ampélologue José Vouillamoz, avant de rejoindre en télécabine le Kuklos à la Berneuse pour le coucher du soleil et le repas du soir. Jamais, le CMB n’aura grimpé si haut ! Le concours débutera le lendemain matin, au Centre mondial du cyclisme. Les échantillons, soit près de 30'000 bouteilles, seront arrivés dix jours plus tôt par camions. Après la dégustation d’une cinquantaine de vins évalués sur ordinateur par des jurys de cinq dégustateurs, le repas sera pris en commun à la salle des Glariers. Ce vendredi, tous s’en iront ensuite à Vevey, en bus, visiter l’arène de la Fête des Vignerons (onze semaines avant la première représentation), embarqueront sur un bateau de la CGN pour le vignoble de Lavaux, puis le Château de

Chillon. Après la dégustation du samedi matin, cap sur le vignoble valaisan, avec une soirée raclette. Dimanche, troisième séance, puis apéritif et repas de gala à l’hôtel Alpine Classic, à Leysin. « Durant toute la manifestation, on mettra l’accent sur les produits du terroir local », commente Nicolas Joss. Lundi, départ en train jusqu’à GenèveCointrin et retour chez soi, sauf pour une sélection de journalistes, envoyés pour deux ou trois jours, avec l’appui de Suisse-Tourisme, aux quatre coins de la Suisse vitivinicole (Trois-Lacs, Schaffhouse, Grisons, Tessin). Ce programme le montre : c’est toute la Suisse qui bénéficiera des retombées de cette première historique, due à une poignée de Vaudois persévérants, même quand ils se firent brûler la politesse par les Chinois. Sur le net : www.concoursmondial.com *Participera, à Aigle, comme dégustateur, à son vingt-et-unième CMB.

The Concours Mondial de Bruxelles in Aigle For the very first time, from 2nd to 5th May 2019, Switzerland will be hosting one of the major world wine competitions, the Concours Mondial de Bruxelles (CMB), in Aigle. The original idea had come from the town’s mayor, Frédéric Borloz, the tourism expert Pierre-Alain Morard, and the oenologist Daniel Dufaux. In the meantime, the concept has gained in prestige: the three key players of the Mondial du

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Chasselas have been joined by Nicolas Joss, former director of the Office des Vins Vaudois. Last year, Switzerland lost its application to host the CMB to Haidian, a district of Beijing. The CMB has been itinerant since 2005, and after visiting different cities in Belgium and then travelling to the Chinese capital – which has a population three times that of Switzerland – it will hold its 26th edition in the smallest

town ever! The 340 tasters, exceptionally including 40 Swiss, one in each jury, will be judging some 9,000 wines from 5,000 producers in the small Swiss town that also hosts the World Cycling Centre. This is the very first time the competition is being held in Switzerland and it might as well be said straight away that there’s only a small chance of that happening again within the next ten years. www.concoursmondial.com

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SERVAGNIN MORGES GRAND CRU

Le vrai goût DU du SERVAGNIN Servagnin

LE VRAI GOÛT

DESCRIPTION Seules les vignes plantées en Pinot Noir, clone Salvagnin, situées dans le lieu de production Morges, ont droit à l’appellation Servagnin de Morges. La production maximale ne doit pas dépasser 50 hectolitres à l’hectare et son raisin doit atteindre un minimum de 82 degrés Oechslé. Vinifié obligatoirement en barrique de chêne, son élevage doit durer au moins 16 mois. Il ne peut pas être commercialisé avant le 1er avril de chaque année. La Commission du Servagnin, qui contrôle toutes ces normes, attribue l’appellation Servagnin de Morges après avoir jugé par une sévère dégustation que les qualités obtenues correspondent à la haute définition exigée. Les bouteilles ayant obtenu l’agrément portent la capsule rouge d’authentification Servagnin de Morges.

Association pour la promotion des Vins de Morges Case postale 72 1110 Morges 1 T 079 869 28 94 vinsdemorges@bluewin.ch www.vinsdemorges.ch


Cépages

Les nouveaux cépages font de la résistance Pierre Thomas

Cela fait bientôt un demi-siècle qu’on parle des «nouveaux cépages» de Changins. Ceux de la dernière génération, divico rouge et divona blanc, sont résistants aux champignons, fléaux de la vigne. Et les suivants seront développés avec l’INRA de Colmar (Alsace). Une avancée fondamentale !

Divico, autorisé dès 2013 « Un cépage qui ne nécessite aucun traitement, c’est magique, ça change la vie ! », s’exclame d’emblée l’œnologue Catherine Cruchon, d’Echichens. Pour Olivier Viret, responsable du Centre (vaudois) de compétences des cultures spéciales, à Marcelin, ces « cépages résistants » s’inscrivent en première ligne du plan d’action phytosanitaire fédéral, qui impose aux cantons d’appliquer leurs propres mesures. « Il y a une attente sociétale de diminution des intrants, avec une lourde pression  », constate le scientifique. Le Conseil d’Etat vaudois a ainsi annoncé que les domaines cantonaux, dont les vignobles (une quinzaine d’hectares), doivent renoncer au glyphosate d’ici 2020. Pas de cépages traditionnels sans traitement « On cherche depuis 1970 à réduire les intrants », rappelle Olivier Viret. Et la production intégrée (PI) était déjà une première réponse. Mais, pour le spécialiste, « si on veut cultiver la vigne de la façon la plus écologique et durable possible, on doit raisonner sur le matériel végétal. Car si on s’en tient aux cépages traditionnels que sont le chasselas, le gamay et le pinot noir, on va continuer de devoir traiter avec des produits phytosanitaires. » Que ce soit en PI ou en bio, la lutte contre le mildiou et l’oïdium exige six à dix traitements par an. En culture

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Divona, dès 2018

« Un cépage qui ne nécessite aucun traitement, c’est magique, ça change la vie ! » Catherine Cruchon

dite conventionnelle, ces traitements représentent 80% des intrants phytosanitaires utilisés à la vigne. Quant au recours limité par le bio au soufre et au cuivre, il pose d’autres problèmes… On continue de chercher des substances d’origine naturelle, qui combattraient efficacement les trois fléaux que sont l’oïdium, le mildiou et le botrytis (la pourriture grise). Des études sont menées à Agroscope Changins, par Katia Gindro, depuis 2006, cofinancées notamment par neuf des plus célèbres châteaux bordelais

(dont Château Latour, qui a obtenu, en octobre dernier, le label bio Ecocert, Mouton Rothschild, Yquem et Petrus). Les avancées portent sur des extraits de sarment, avec un mélange de molécules complexe, et un biogel efficace contre l’oïdium, qui nécessitent d’être stabilisés pour les rendre utilisables à grande échelle. Deux enfants du gamaret Mais, constate Olivier Viret, à ce jour, « la molécule miracle n’existe pas ». Après la prévision des risques par

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©Sandra Culand

2012 à 2017, puis 320 autres à évaluer jusqu’en 2022, on devrait pouvoir sélectionner, au final, trois à cinq variétés résistantes, avec pour objectif de les inscrire au catalogue français des cépages en 2024. L’avantage de cette collaboration franco-suisse fait qu’Agroscope touchera la moitié des royalties de la vente des futurs cépages résistants, alors que le divico et le divona sont en libre accès et n’ont pas été protégés.

Jean-Laurent Spring, chercheur au domaine expérimental de Caudoz, à Pully le suivi météo (10 à 30% d’efficacité), le dosage adapté des produits (20 à 30%), les « cépages résistants » représentent, selon les années, 75 à 100% d’efficacité. Sans le gamaret, divico et divona ne seraient pas nés. Tour à tour, le cépage rouge croisé entre gamay et reichensteiner en 1970 par Changins, est devenu le père et la mère de ces deux demi-frères. Leur autre parent est le bronner, un cépage allemand. Croisé en 1997, mais homologué et disponible chez les pépiniéristes depuis 2013, le divico connaît un beau succès, notamment dans le vignoble vaudois,

sur dix hectares. Le divona a été officiellement présenté en automne 2018. Depuis 2011, l’Institut national (français) de la recherche agronomique (INRA) reconnaît le domaine expérimental de Caudoz, à Pully, à « valeur agronomique technique et environnementale ». Avec le chercheur JeanLaurent Spring, l’INRA Colmar a entrepris une collaboration de croisements et de sélections, avec des parents tirés de la recherche suisse (divico, divona, IRAC 1933) et française (Floreal, Voltis, Artaban, IJ119). A partir de 80 individus évalués de

Oublier les anciens hybrides Le croisement de cépages n’est pas une méthode nouvelle. Dès 1916, le centre de recherches de Caudoz (Agroscope) a étudié les hybrides producteurs. Près de 160 croisements entre des vignes américaines et « vitis vinifera » sont nés. La France les a interdits dès 1935 parce qu’ils ne donnaient pas satisfaction par leur « goût foxé » et leur piètre qualité, due à de gros rendements. Peu après la fin de la Seconde Guerre Mondiale, quand la Suisse importe à nouveau du vin rouge, ces hybrides – dont trois avaient été retenus – sont arrachés et disparaissent du vignoble vaudois. Les « nouveaux cépages » doivent répondre à une « attente qualitative ». « On n'a le résultat réel des croisements que

The New Grape Varieties are Resistant Changins has been developing new grape varieties for almost half a century. Those of the latest generation, Divico red and Divona white, are resistant to the fungal diseases that plague vines. The next creations are going to be developed in collaboration with the National Agronomic Research Institute in Colmar, Alsace. That’s a major step forward! “A grape variety that doesn’t require any treatment is magic, it’s a life-changer!”, according to the oenologist, Catherine Cruchon, from Echichens. For Olivier Viret, who heads the Vaud Specialty Grapes Competence Centre in Marcelin,

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these resistant varieties fall perfectly in line with the federal plan of action for plant protection, which obliges the cantons to apply their own measures. He adds that “Consumer expectations are high, and the pressure for reducing chem-

ical inputs is intense,”. The Government of Vaud has announced that the cantonal estates, including vineyards (approx. 15 hectares), must abandon the use of glyphosate by 2020. Olivier Viret points out that efforts have been made since 1970 to reduce chemical inputs. The introduction of integrated production was a first step. But according to this specialist, “If we want our winegrowing to be as environment-friendly and sustainable as possible, we need to

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Cépages

lorsqu’on fait le vin », rappelle Olivier Viret. A Caudoz, Jean-Laurent Spring procède à de nombreuses micro-vinifications et à des dégustations croisées, à Pully et à Colmar, des sélections en cours. Cette attente qualitative est mesurée à l’aune des « vinifera ». En France, en Italie comme en Suisse, on croise des cépages avec des variétés déjà connues, comme les très récents cabernello, merello, gamarello, cornarello, nerolo, tous homologués en 2018, résistants à la pourriture, mais pas à l’oïdium et au mildiou. Pour Jean-Laurent Spring, les « cépages résistants  » sont «  une voie royale  ». Economiquement, l’absence de traitement (ou leur diminution drastique) représente un gain immédiat en temps et en argent pour le viticulteur. Leur succès dépend toutefois de la «  réceptivité du consommateur  », insiste Olivier Viret.

du divico. « On est vraiment au début. Les plus intéressants que j’ai dégustés ont été élevés en barrique », commente l’œnologue cantonal Samuel Panchard, qui ajoute : « Le divico donne aussi des rosés sur la framboise et la fraise. On en est au stade de la découverte… » Noémie Graff, à Begnins, qui l’avait incorporé à un assemblage en fait sa cuvée « Ni Dieu, ni maître » 2018, en pur divico en barrique. « En 2018, il a une densité folle. Je l’ai égrappé, cette année, alors que, vinifié en grappe entière, le 2016, sans sulfite, a évolué vers des notes animales de Brett. Jeune, il est impressionnant, donne tout au premier plan, mais paraît manquer de dimension », constate l’œnologue Catherine Cruchon. A qui redoute la précocité du cépage, dès la véraison, Olivier Viret rétorque qu’on peut le laisser mûrir jusqu’à

Olivier Viret, responsable du Centre de compétences des cultures spéciales, à Marcelin

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©Pascal Besnard

En pur et en assemblage Pour l’heure, ils vont rester une « spécialité » et devraient pouvoir s’illustrer en vin d’assemblage. Plusieurs membres d’Arte Vitis (Christian Dugon, Rodrigo Banto, de la Cave de La Côte, Blaise Duboux, Raoul Cruchon, Raymond Paccot, le Domaine cantonal de Marcelin) ont planté et vinifient déjà

look at plant material. If we stick to the traditional varieties such as Chasselas, Gamay and Pinot Noir, we’ll have to continue using pest control products”. The miracle molecule has not yet been found. After risk monitoring based on weather forecasts with 10-30% accuracy, and appropriate product dosing at 20-30%, resistant grape varieties have an effectiveness range of 75-100%, depending on the year. If not for Gamaret, Divico and Divona wouldn’t have existed. Thus, the red grape produced by Changins in 1970, by crossing Gamay and Reichensteiner, is the parent of these two half-siblings. Crossed in

parfaite maturité des tanins, puisqu’il ne craint pas la pourriture… En assemblage, son potentiel pourrait être « énorme », selon Samuel Panchard, au moment où la Communauté interprofessionnelle du vin vaudois (CIVV) a annoncé vouloir lancer une réflexion sur un assemblage rouge vaudois, entre résurrection du Salvagnin, Dôle moderne, voire Esprit de Genève. Le blanc, divona, à l’aromatique proche du savagnin, est plus rare : Marcelin vient d’en vinifier deux lots, l’un en cuve, l’autre en barrique, avec et sans fermentation malolactique. Appel a été lancé aux vignerons vaudois pour envoyer un maximum de vins à la Fête du divico, à Bramois, aux portes de Sion, vendredi 5 et samedi 6 avril, qui en est déjà à sa quatrième édition. Pour les prometteurs divicos 2018 en barriques, ce sera trop tôt !

1997, and approved and available in nurseries from 2013, Divico has been a great success and is now planted in 10 hectares of Vaud vineyards. Divona was officially presented in the autumn of 2018.

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The Guillon Goblet By Claude-Alain Mayor, Tabellion

bunch of grapes. Alas, a tragic fate awaited the precious chalice: during a moment of inattention on a councillors’ outing to a traditional festival in Zurich in 1999, it completely disappeared never to be found again. It took several years before the Confrérie could order another goblet, in every way identical to the first one, thanks to the generosity of a patron. Since then, the Confrérie watches jealously over the treasure. At every banquet, it takes pride of place on the table of the governor, who invites his councillors and distinguished guests to drink from it as a token of friendship and appreciation.

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At the initiation ritual of the Confrérie du Guillon (Guillon fellowship), the governor hands each candidate a goblet and pronounces the ritualistic formula: “Partake of this wine and be worthy of it!”. The goblet is thus an essential and symbolic item; instrumental in the accession to the much-envied status of fellowship and the embodiment of aspiring members’ spiritual communion with those that went before them and their promise to adhere to the principles of the Confrérie. The Guillon goblet, worthy of the Holy Grail, was designed by a well-known artist, crafted by a goldsmith and studded with precious stones in the form of a

Grand Cru – AOC Lavaux / Vin du château de Chillon TM Chasselas et assemblage de trois cépages : Gamaret, Garanoir et Merlot. Vinifié par Badoux-Vins dans la cave de la forteresse, ce vin est à déguster à l’espace « La Verrée Vaudoise » dans la salle du Châtelain. En exclusivité à la boutique et au bazar du château ou sur: www.chillon.ch/Z5042

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Message du gouverneur Jean-Claude Vaucher

Vaud, centre mondial du vin Faut-il encore le rappeler  ? Les vignerons vaudois ont encavé en 2018 un millésime d’anthologie sur lequel nous ne tarirons pas d’éloges tant les paramètres qualitatifs ont dépassé toutes les attentes des professionnels les plus optimistes. Cette récolte parfaite a surpassé allègrement, tant en termes de sondage que d’équilibre, le fameux 2015 qui ne faillit d’ailleurs aucunement à sa réputation. Tous ceux qui ont eu la sagesse de glisser quelques flacons de 2015 « derrière les fagots » pour savourer prochainement et durant de longues années encore un tout grand chasselas ne seront pas déçus, bien au contraire. Et voilà que cette icône est dépassée par le petit dernier qui s’annonce plus grandiose encore, lui qui va entrer par la grande porte dans le panthéon des millésimes légendaires comme 1934, 1945, 1947, 1959 et plus près de nous 2003, 2009 et 2015. Un vrai bonheur. Cette réussite exceptionnelle est bien le fruit du savoir-faire de nos vignerons. Mais elle est aussi liée aux humeurs de Dame Nature qui semble avoir pris goût, sous nos latitudes, au climat méditerranéen.

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Quand l’on pense que depuis le début du 21e siècle nous enregistrons déjà quatre millésimes d’exception sans oublier les somptueux 2011 et 2017 ! Il serait faux d’ignorer les effets positifs du réchauffement climatique sur nos vignobles et son influence directe sur l’amélioration qualitative de nos crus. Comme quoi ce réchauffement, que certains incrédules semblent toujours ignorer, peut aussi avoir du bon. Ces crus merveilleux viennent à point nommé pour accompagner et honorer dignement une année 2019 qui verra le Canton de Vaud devenir le centre mondial du vin. Si la Fête des Vignerons sera l’événement majeur à ne manquer sous aucun prétexte, soulignons également la tenue en Suisse romande et en Pays de Vaud du congrès mondial de l’OIV (Organisation Internationale de la Vigne et du Vin). Cet organisme intergouvernemental compte 47 pays membres et constitue la référence scientifique et technique de tout ce qui touche au monde de la vitiviniculture. Il réunit chaque année plus de 500 délégués qui, en plus de leurs travaux, iront à la découverte des vignobles vaudois

et suisses pour assister finalement au spectacle grandiose de la Fête des Vignerons. La venue de ces spécialistes est un événement rarissime en Suisse puisque l’OIV avait tenu ses dernières assises dans notre pays en 1977, coïncidant également avec une autre édition de la fête. Mais je ne saurais passer sous silence une troisième manifestation tout aussi importante, la tenue à Aigle du Concours Mondial de Bruxelles, référence planétaire en termes de compétitions internationales du vin. Cette dégustation réunira 340 œnophiles chevronnés issus de cinquante nationalités différentes qui auront à choisir la crème de la production mondiale parmi plus de 9'000 références. Un rendez-vous incontournable pour tous les professionnels du secteur. Signalons à ce propos que lors de la dernière édition, le meilleur blanc sec toutes catégories confondues était un chasselas vaudois. Espérons que cette conjonction très favorable d’évènements vitivinicoles majeurs en Pays de Vaud permettra de mettre un éclairage international mérité sur nos grands crus.

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Les Ressats d'Artémis Pascal Besnard, échotier Edouard Curchod, photographe Une déesse de la mythologie grecque, Artemis, fille de Zeus et de Léto, sœur d'Apollon, porte-étendard de la Confrérie du Guillon à l'automne dernier... le luxe ! Mais n'y voyez pas l'expression maladroite d'un narcissisme collectif de la part des conseillers du Guillon. Car les derniers ressats automnaux relevaient bel et bien du divin. Grâce aux talents culinaires du binôme de maîtres queux de souche germanique. Par ordre d'apparition au château: 1) Thomas Neeser, chef du Grand Hôtel du Lac de Vevey, de retour à Chillon après une première étape brillante lors des ressats des Douze Lustres en 2014. 2) Werner Schürch, chef étoilé du Gasthof Emmenhof de Berthoud. Un Bernois sur les traces de ses ancêtres (peut-être) dans l'univers de mâchicoulis, de barbacanes et de poternes que propose la vénérable forteresse savoyarde. Divins aussi... les vins ! D'Yvorne, des Côtes de l'Orbe, d'Epesses, de Vinzel, de Bonvillars, de Tartegnin et bien entendu de la sublime pente du Dézaley. Et dans le registre olympien, une cohorte d'intronisés de classe. Parmi eux, une sportive de l'extrême, un président d'école polytechnique, un dessinateur de BD, deux archéologues, un entrepreneur-collectionneur, et des couples d'inséparables prêtant serment en tandem devant le noble Gouverneur. On aperçut même à Chillon un Conseiller fédéral originaire du sud des Alpes, un habitué des lieux !

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Ressats

Vendredi 25 octobre

Compagnon majoral Denis Knoepfler Epigraphie et histoire, Université de Neuchâtel Karl Reber Directeur de l’Ecole suisse d’archéologie en Grèce Compagnon ministérial Michel Gfeller Assistant au légat de la Confrérie du Guillon Compagnon Helder de Pinho Nyon Catherine Doutaz-Favre Troistorrents Fabrice Grand Maxilly-sur-Léman Florence Grand Maxilly-sur-Léman Séverine Lecoq Ollon VD Derek John Shaw Brent Laurent Tornay Les Granges (Salvan) Albert Zurcher Noville

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Samedi 26 octobre Compagnon Daniel Affolter Zurich Oriane Engel Yvorne Dean Gocevski Bussigny Didier Lasaygues Paris Vincent Légeret Lausanne Claude Mellana Bussy-Chardonney François Molliex Féchy Sébastien Pilet Buchs ZH Max Polonovski Paris François Pugliese Saint-Légier Jürg Renggli Gossau SG Hugues-Vincent Roy Clarens Félix Schläpfer Rorschach Hans Peter Schor Thoune Werner Studer Waldkirch David Vauclair Paris

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Vendredi 2 novembre Compagnon majoral Philippe Cottet Directeur général de Polyval Compagnon Eliane Aubert Lausanne Gérald Balimann Puidoux Stéphane Délitroz Givrins Christophe Donzé Trélex Olivier Duvoisin Moudon David Faba Morges Jean-Luc Jaquier Ecublens VD Jean-Marc Rossy Neuchâtel Bertrand Schrago Vucherens Albert von Braun Lutry

Samedi 3 novembre

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1. Une sportive de l'extrême... extrêmement souriante : Géraldine Fasnacht 2. Dédicace préfectorale du Tessinois Matteo Huber 3. Un habitué des lieux, Ignazio Cassis, et son épouse Paola, entourés d'une délégation du cotterd du Tessin conduite par son préfet, Pierre Schulthess

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Compagnon majoral Géraldine Fasnacht Sportive de l’extrême Compagnon ministérial Matteo Huber Préfet adjoint du Cotterd du Tessin Compagnon Alain Berset Grenilles Christian Boillat Saint-Prex Jean-Marc Borcart Chernex Luc Califano Corseaux Alexandre Dayer Lausanne Victor Fiadeiro Fey Pierre Gauchat Lugano Stéphane Haller Arlesheim Dominique le Creff Morrens VD Ludovic Peguiron Bercher Pasqualino Alessandro Rosini Lumino Alain Saugy Lausanne Mireille Vuffray Bettens

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Ressats

Vendredi 9 novembre Compagnon d’honneur Jean-Marc Probst Entrepreneur, collectionneur Compagnon majoral Bernard Cosendai (Cosey) Dessinateur, auteur de BD Compagnon Claude Aberlé Meinier Laurent Bertschi Chamblon René-Marc Blaser Epalinges Pascal Chevalley Thoiry Louis Gilliéron Belmont-sur-Lausanne Gaspard Guillemin Lonay Fabrice Iglesias Bernex Michael Jean-Petit-Matile Tolochenaz David Parisod Morrens VD

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Samedi 10 novembre

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Compagnon d’honneur Aude Pugin Présidente CVCI, CEO d’APCO Technologies Compagnon Pierre-Yves Baby Morges Daniel Bretscher Holzhäusern ZG Sébastien Chambaz Bremblens Chantal Chambaz Bremblens Ronald Colliard Châtel-Saint-Denis Damien Colliard Châtel-Saint-Denis Catherine Cruchon Echichens Arnaud Duruz Monnaz Roger Givel Lucerne Noémie Graff Begnins Nicolas Loeffel Colombier VD Dan Loup Cugy VD Ludovic Robert Münchenwiler Jill Rossier Lavigny Jérémie Rossier Lavigny Jérémy Tinguely Sévery Urs Vock Kriens Daniel Wiedmer Attalens

4. L'entrepreneur et collectionneur Jean-Marc Probst : la Course autour du Monde, le Petit Prince et maintenant la Confrérie du Guillon... quelle trajectoire! 5. Le dessinateur Cosey, créateur de Jonathan et fan de Mickey Mouse 6. Un sourire ravageur et un talent cosmique : Edouard Chollet, clavendier hors-norme 7. La salle est en liesse, le ressat est réussi

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Ressats

Vendredi 16 novembre Compagnon Grégory Autier Aubonne Florian Binggeli Yvonand Danièle del Rizzo Corseaux Joseph Filippone Chernex Benoît Noverraz Gilly Denis Pache Froideville Thony Perey Belmont-sur-Yverdon Yan Slade Poliez-le-Grand Bastien Suardet Féchy Jérôme Thuillard Romanel-sur-Lausanne Eric Williams Féchy

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8. En bonne élève, la rectrice Luciana Vaccaro écoute attentivement la leçon (d'humour) donnée par Fabrice Welsch 9. La coupe du gouverneur pour le président (de l'EPFL), Martin Vetterli 10. La volée d'intronisés du 17 novembre applaudit. La cérémonie s'achève. Il est temps de passer à table...

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Samedi 17 novembre

Compagnon d’honneur Luciana Vaccaro Rectrice HES-SO Martin Vetterli Président de l’EPFL Compagnon Jean-Jacques André Bassins Vincent Antonioli Lonay Geneviève Auger-Guérin Crassier Jérôme Bastian La Chaux (Cossonay) Henry Beausire Corseaux Yves Blondel Mont-sur-Rolle Sven Eggenberger Fey Sylvain Freymond Montricher Bruno Giovanola La Rippe Pierre Gordien Vulliens Julien Haenny Echandens Manuel Leal Penthalaz Pierric Martin Daillens Roland Parisod Grandvaux Jean-Marc Rochat Penthalaz Enrique Rodriguez de la Rubia Lully VD David Vionnet Préverenges

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Ressats

Vendredi 23 novembre Conseiller David Moginier Journaliste gastronomique, 24 Heures Compagnon majoral Luc Sergy Directeur de l’Association suisse des services de sécurité Compagnon Alexandre Centeleghe Lausanne Jean-Claude Chatelain Tramelan Gilles Duboux Puidoux Philippe Egger Chavornay Sylvain Jaquenoud Lausanne Denis Krebs Gingins Christian Perroset Coinsins Anne Rochat Lausanne Antoine Rochat Lausanne Stephan Studer Belmont-sur-Lausanne Constantin Tsacanikas Cheseaux-sur-Lausanne

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11. Le bleu a revêtu sa robe jaune. Le néo-conseiller David Moginier reçoit l'assistance vestimentaire de Luc Massy 12. D'une main sûre, Luc Sergy, pro de la sécurité, dédicace le livre d'or du Guillon 13. Anne et Antoine Rochat, une prestation de serment en tandem 14. Un beau trio de VIP: Michel Rochat et Pierre Keller, présidents de l'OVV (entrant et sortant) et Philippe Gex, gouverneur d'honneur de la Confrérie du Guillon

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Samedi 24 novembre Compagnon majoral Chantal Robin Directrice de la Chambre de commerce et d’industrie de Fribourg Werner Schürch Chef du Gasthof Emmenhof à Berthoud Compagnon ministérial Raphaël Dromelet Trompes d’Hauteville Compagnon Stéphanie Blanchet Echallens Romain Delacrétaz Pully Mikael Ferreiro La Croix-sur-Lutry Michael Fuchs Chailly-Montreux Etienne Gonvers La Sarraz Francis Granget Fribourg Daniel Hammer Pully Cathy Joye Bussigny David Krienbühl Fribourg Nicolas Lagier Savigny Charles Roberge Saint-Prex Dominique Ruchet Saint-Légier Laurent Vialle Gland

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Propos de clavende

L’entrecôte de cerf rosé au jus de romarin Eric Loup, conseiller Noble gouverneur, notre gardien de basse-cour, Conseillers mes frères, virils lapins, Compagnons coqs fiers et parfois bruyants, Et vous Mesdames, nos si charmantes petites poulettes… Cette introduction agri/avicole me permet de vous entretenir sur notre heureux pays qui organise une votation fédérale pour demander au peuple de se prononcer sur les cornes des vaches. N’étant guère spécialiste en la matière, j’ai décidé d’acheter le journal AgriHebdo pensant ainsi trouver quelques explications.

Mais je suis tombé, je pense, sur le prochain sujet qui va défrayer la chronique : l’épointage du bec des poules pondeuses ! Bien sûr quelques esprits malins, tourmentés ou peut-être biaisés auront vite fait de retranscrire tout ça sur des activités humaines, mais tout ce que je vais vous dire est vrai ! Parce que Mesdames et Messieurs, les poules pondeuses qui s’ennuient sont des poules qui piquent ! Jusqu’à en venir au cannibalisme.

Il est précisé qu’avec les poules blanches les éleveurs arrivent à maintenir un certain équilibre alors qu’il y a des problèmes avec les brunes. Pour sûr vous verrez, on va bientôt avoir une initiative UDC pour interdire les poules de couleurs ! Pour diminuer le picage, il est donc nécessaire d’occuper les poules et les chercheurs d’Aviforum travaillent d’arrache-pied (et non d’arrache-becs) là-dessus. Ils sont déjà arrivés au constat que lorsque la poule a toujours le même os à ronger, elle se lasse et donc il faut changer régulièrement le matériau d’occupation. D’autre part, il est constaté que la lumière forte provoque chez la poule un comportement agressif avec des picages accrus. Le cannibalisme se réduit avec la diminution de l’intensité de la lumière.

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Messieurs soyons inventifs pour que Mesdames ne se lassent pas ; Mesdames soyez encore plus douces à la tombée de la nuit ; Et pour sûr, on ne parlera plus de poules et on aura bien moins à parler de cornes ! Comme je devais trouver une transition, permettez que je saute du coq à l’âne pour vous dire qu’initialement je voulais disserter sur les voyages, plus particulièrement les vacances des politiciens. Mais pour une fois en politique, les événements vont plus vite que le calendrier des Ressats. Je constate juste que c’est surtout chez les socialistes que c’est difficile ces jours. Tristes et énervés, ils se demandent s’ils ont fait le bon choix du bon bord.. Si oui, ils doivent, comme le PDC Darbellay, justifier pourquoi ils sont allés à gauche. Parce que c’est fou quand même aujourd’hui cette déferlante médiatique, cette quasi mise à nu. Oui vous le savez déjà mais remarquez que le PLR Maudet, c’est normal qu’il soit mis à nu, il est à bout d’habits. En parlant de mise à nu, je dois vous raconter ma dernière visite ce printemps chez le médecin, certains passages d’âge demandant d’effectuer un checkup total. Après avoir subi les -32 degrés du stéthoscope sur la poitrine et renquemelé à plusieurs reprises sans savoir à quoi ça sert ;

Imaginez la scène, le médecin vous fait mettre sur le côté, position qu’on appelle lors des cours de samaritains la position de sécurité. A mon avis, la première sécurité, c’est de bien choisir son médecin. Le TR, vous savez, c’est le genre de truc qui ne vous rend pas gai et qui ne vous incite pas à le devenir ! Si lors de grands moments, on utilise la formule : « C’est un événement à marquer d’une pierre blanche », pour moi mon check-up ça restera plutôt marqué : « d’un doigt ganté dans les annales ». Le toubib m’a dit que j’étais en surpoids ou en plus imagé que mon corps n’était pas prêt pour l’été mais par contre grave prêt pour l’hiver. Mon copain Ulysses a aussi dû aller chez le médecin. J’avais bien vu que ça n’allait pas trop fort. Un jour il m’a dit « j’ai fait une éclipse de chasselas ; l’éclipse de chasselas, c’est quand le foie passe devant le cœur ». Et surtout il m’a dit souffrir de cénosillicaphobie. J’ai cherché dans le dictionnaire : peur irraisonnée, phobie du verre vide. Comme il avait un peu peur d’aller consulter, il a pris sa femme avec. Elle était contente car elle devait dire quelque chose ! Docteur, c’est insupportable, mon mari parle toute la nuit ! La réponse est venue direct : Facile, il suffit de le laisser parler la journée

- si j’ai une baisse de pression je bois du vin rouge, - si j’ai une pression un peu haute je bois du whisky, - si j’ai un rhume je bois de la goutte - et quand je vais bien je bois du chasselas. Et l’eau s’est inquiété le docteur ? Ben j’ai pas encore eu de maladie aussi grave. Ulysses a quand même reçu une ordonnance qu’il s’est empressé d’aller faire valoir à la pharmacie. Il m’a dit hier : tu vois maintenant je marche aux granulés. Heureusement nous sommes ce soir tous bien portants et prêts à déguster ce plat principal, une entrecôte de cerf chassé dans les règles de l’art, soit avec une seule balle puis immédiatement préparé. Ce qui me fait vous rappeler que le végétarien a toujours existé. Seulement dans les temps anciens, c’était simplement un mauvais chasseur. Profitons maintenant du contenu de cette assiette, la bouche pleine du cerf vidé. Bonne continuation

Il a aussi dû faire le test pour la prostate et au moment de l’acte le docteur lui a demandé :

Après avoir réagi aux coups du petit marteau sur le genou et le coude ;

Si je presse là ça vous fait mal ?

Après avoir transpiré au moment de l’agression de l’aiguille au bout du doigt pour contrôler le fer dans le sang :

Ben vu notre nouveau degré d’intimité je crois qu’on peut se tutoyer.

Alors Ulysses a répondu :

C’est l’épreuve du TR.

Le toubib s’est montré quand même inquiet quant aux moyens d’hydratation utilisés par notre gaillard. Alors Ulysses a dit c’est très simple :

Est-ce que tout le monde c’est ce qu’est le TR ?

- Quand j’ai un peu de peine à digérer, je bois de la Suze,

J’ai dû passer au moment du contrôle de la prostate.

- si j’ai pas trop d’appétit je bois de la bière,

© Edouard Curchod

Fort de ces trouvailles, je pense que l’homme devrait s’inspirer de ces recherches pour ses propres agissements.

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Guillonneur de Bâle

Un carnaval avant l'heure…

Claude Piubellini, prévôt Photos : Edouard Curchod Tout se présentait sous les meilleurs auspices, lorsque votre serviteur s'est engagé vers le nord du pays en direction de la cité rhénane. Pourtant, quelques signaux inquiétants se sont profilés lorsque le Légat, visiblement inquiet, m'a appelé en catastrophe pour m'indiquer que certains vins n'avaient pas été livrés en temps et en heure, en particulier ceux du Nord vaudois. Je recevais donc la mission de me procurer en catastrophe douze bouteilles du précieux nectar réservées dans une succursale d'un des deux géants orange bien connus de ce pays. N'ayant pas compris de quelle appellation il s'agissait (la ligne était mauvaise), je n'avais qu'à passer rapidement, charger les cartons, puis reprendre ma route. Comment on perd le nord (vaudois) en période de stress Les cartons chargés, un bref coup d’œil sur l'étiquette m'intrigue  : Céligny, voilà une appellation très proche de

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Genève et pas vraiment du nord vaudois, mais qu'importe… Je me rappelle que Crans-près-Céligny est à côté de Nyon, donc c'est du « La Côte »… Je poursuis donc ma route, profitant d'un léger goût de bouchon habituel entre Berne et Härkingen (canton de Soleure). Arrivé à Bâle, le préfet Ivo Corvini vient récupérer les bouteilles afin de les mettre au frais. Mission accomplie, je peux prendre possession de ma chambre « au Violon », au nom déterminé par les lieux, soit l'ancienne prison de la ville réaménagée en hôtel de charme. Je suis en plein centre de la vieille ville, à deux pas du Nadelberg où est située la cave de carnaval qui va recevoir le cotterd de Bâle pour cette soirée dédiée aux vins vaudois. Désillusion géographique des enclaves : un cas de conscience Sur place, on plonge dans le sous-sol d'une immense cave, richement décorée de masques et lanternes de carnaval. Tout ici rappelle l'événement annuel qui sera célébré en 2019 pour la xième fois, tant il se perd dans la nuit des temps, toutes les archives ayant été détruites lors du tremblement de terre dévastateur de 1356. Mais là, pas le temps de rêver, il faut organiser au plus vite les bouteilles qui vont servir pour le concours Jean-Louis des régions viticoles vaudoises. Mes fameuses bouteilles sont extraites des cartons et là je remarque la mention «  appellation Genève  ». Mince, nous nous sommes appropriés pour un

soir une enclave genevoise en pays de Vaud, car la commune de Céligny est bien rattachée à la ville du bout du lac, contrairement à nos suppositions géographiques antérieures. Plus le temps de rien changer, il nous faudra en faire façon. De bleu, de bleu, voilà un nordvaudois qui a une drôle d'allure… Bâle : un cotterd qui prend de l'importance sous l'impulsion de son préfet Notre ami Corvini a fort bien organisé son guillonneur : 76 personnes se pressent pour se retrouver dans une salle prévue pour 60 personnes. Pas toujours facile de se glisser entre deux tables pour y servir les crus qu'il faudra déguster. Nous avons un Château de Mont (Mont-sur-Rolle), notre fameux «  Nord vaudois  » genevois de Céligny, du Villette (Lavaux) présenté par son vigneron Jacques Joly et son épouse, un Dézaley et un Villeneuve présenté par son vigneron Christophe Bertholet et son épouse Christine. Ces vins sont dégustés et commentés par le légat ou les vignerons présents avant d'être resservis cette fois à l'aveugle dans une chaussette noire et dans un ordre évidemment différent. Aux participants de s'y retrouver, et dans ce domaine les Bâlois sont plutôt fins palais. Au final, sept personnes trouveront la combinaison correcte, seize commettront une inversion de deux verres (j'en étais…), dix-sept en trouveront deux, dix-sept n'en trouveront qu'un seul et quatorze feront ce qu'il est coutume d'appeler « chou blanc ».

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Une soirée pourtant bien vaudoise et sous le soleil du Chablais Nous passons ensuite à la partie roborative de la soirée avec un repas de circonstance, puisqu'il s'agit tout d'abord de la traditionnelle soupe à la farine servie durant le carnaval que la famille Bertholet déjà citée accompagne d'un rosé de pinot noir d'une grande fraîcheur. Ce sont leurs vins qui vont d'ailleurs escorter tout le repas. Suivront un papet vaudois et son saucisson IGP accompagnés de deux pinots noirs différents, car le second a séjourné en barrique de chêne. Ces vins, servi généreusement, sont présentés par Christine Bertholet et dans la langue de Goethe s'il vous plaît. Suit un magnifique plateau de fromages qui se verra accompagné d'un chasselas en barrique d'acacia aux arômes de résine qui se marie à merveille avec les pâtes mi-dures proposées. L'assemblée fera honneur au banquet, puisqu'il n'en restera

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pratiquement rien en fin de soirée. Au final, les résultats du concours sont dévoilés et parmi les vainqueurs, un tirage au sort est effectué dont le Compagnon Philipp Simonius sort gagnant, avec à la clé une invitation pour deux personnes aux prochains ressats de printemps au château de Chillon. Quelques derniers verres plus tard et après les salutations d'usage, c'est proche de minuit que les derniers invités retrouvent l'air libre et s'en retournent prudemment à leur domicile et moi… en prison... enfin « au Violon » !

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1. Vue plongeante de la cave durant l'apéritif précédant le Jean-Louis 2. Le préfet Ivo Corvini récupérant les bulletins du concours 3. Une convive en pleine concentration durant la dégustation

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Adolf Ogi, lauréat du Guillon d’Or 2018… en compagnie de Jean-Claude Vaucher, gouverneur de la Confrérie du Guillon et d’André Fuchs, président de Clos, Domaines et Châteaux

Guillon d’Or

Adolf Ogi

Lauréat du Guillon d'Or

Clos, Domaines et Châteaux 2018

Claude-Alain Mayor, tabellion Photos : Delphine Clément/CdC

INTERVIEW

Pour la première fois en sept éditions, le Prix Guillon d'Or – Clos, Domaines & Châteaux a couronné une personnalité du monde politique. La distinction honorant Aldolf Ogi pour une vie consacrée à notre pays lui a été remise le 2 octobre dernier au Royal Savoy devant une assistance considérable. L’ancien président de la Confédération, « retraité » depuis bientôt 18 ans, n’a rien perdu de son incroyable charisme ni du punch qui l’a toujours caractérisé. En réponse à la laudatio du tabellion Claude-Alain Mayor, il a remercié le jury avec une verve et un sens de l’humour qui ont ravi l’auditoire, avant qu’un hommage original lui soit rendu par les Gais Compagnons interprétant « For me, formidable » de Charles Aznavour. Mais quels liens unissent donc le plus célèbre citoyen de Kandersteg avec la terre et les vignobles vaudois ? Une interview de l’intéressé, enrichie de savoureux extraits de sa réponse, permet de dessiner les contours d’une longue complicité.

CAM : Parlez-nous de vos liens avec la Confrérie du Guillon et le canton de Vaud. AO : Il y a plus de vingt ans, Claude Massy m’a proposé de devenir Compagnon d’Honneur de la Confrérie du Guillon. J’ai bien sûr tout de suite accepté. Mon intronisation au Château de Chillon reste un de mes meilleurs souvenirs du canton de Vaud, qui est pour moi une Suisse en miniature, un concentré de nos paysages : forêts, montages, lacs et bien sûr, vignes. Et puis, j’aime les gens : j’ai admiré le général Guisan, évidement, et entretenu d’excellents rapports avec des Vaudois plus contemporains  : JeanPascal Delamuraz, Marcel Blanc, Jean Abt, Claude Nicollier… A propos de Jean-Pascal, l’inoubliable, que j’aimais beaucoup, j’évitais d’aller le voir trop tôt le matin dans son bureau, parce que je supportais moins bien le blanc que lui. Ma fille Caroline a en outre fait une partie de sa carrière d’hôtelière à Lausanne et à Montreux au Suisse Majestic, avec son directeur Andres Oppenheim, qui servait toujours des vins vaudois parfaitement sélectionnés.

Le Guillon d'Or, création du maître verrier Yann Oulevay

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Quels sont pour vous les qualités et les défauts des Vaudois ? Les Vaudois ont un tempérament modéré, tranquille et manifestent un vrai talent pour conclure la paix avant même d’ouvrir les hostilités. Je parlais de Claude Nicollier  : peut-être que l’apesanteur a été inventée par les Vaudois, cette légèreté, cette faculté de vivre en équilibre… Mais leur charme romand s’accompagne parfois d’un sens exagéré de l’ordre et de l’autorité. Deux semaines avant mon élection au Conseil fédéral, alors que je stationnais sur la place de la Gare à Lausanne, un policier m’a demandé de nettoyer ma plaque d’immatriculation !

d’un coup de blanc… bref, je n’en dirai pas plus ! En politique, c’est un peu différent : le vin a la vertu de détendre l’atmosphère. Je me rappelle que Jean-Pascal veillait toujours à la qualité des crus servis, vaudois de préférence. Mais il était un peu freiné par notre grand argentier Otto Stich, qui, lui, en surveillait le prix  ! Aujourd’hui encore, le Conseil fédéral ne sert jamais à ses hôtes, même à la reine d’Angleterre, une bouteille achetée plus de 45 francs. A la Maison Blanche ou au Kremlin, les vins atteignent facilement 500 ou 1000 francs, et le vin n’est pas meilleur pour autant : je l’ai goûté.

En tant qu’ancien responsable sportif, quel est votre rapport au vin ? J’aime beaucoup le vin, beaucoup trop pour en abuser, et donc je le déguste avec respect. L’alcool, bien sûr, ne fait pas bon ménage avec les performances sportives. Aux JO de Sapporo en 1972, où j’étais directeur du ski suisse et chef de la délégation helvétique, j’ai même interdit toute consommation d’alcool. La plupart des athlètes, disciplinés, ont suivi mes directives, mais allez donc essayer de priver les skieurs valaisans

Quels vin vaudois trouve-t-on dans votre cave ? J’adore le chasselas, principalement à l’apéritif : pour moi, le Dézaley Chemin de Fer et l’Aigle Les Murailles restent des vins de référence. Je me rappelle que Jean-Pascal disait souvent qu’on aurait dû l’appeler l’Aigle « Delamuraille ». Mais j’ai aussi découvert des rouges magnifiques, comme le Rouge de Rouges de Philippe Gex à Yvorne. Depuis que j’ai quitté le Conseil fédéral, j’ai toujours recherché des

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activités stimulantes, la dernière en date étant celle de Sales Manager de l’Hôtel Schönegg à Wengen, dirigé jusqu’il y a peu par ma fille. Donc si vous cherchez quelqu’un pour promouvoir les vins vaudois, vous connaissez mon adresse ! Tout le monde s’accorde d’ailleurs à dire que je suis bon vendeur… des produits suisses, de la politique suisse, de notre pays en général. Vous considérez-vous comme un bon vivant ? Oui, j’apprécie la bonne chère, mais bien sûr avec modération. En revanche, je ne passe jamais derrière les fourneaux. D’une part j’ai toujours été trop occupé dans ma vie pour développer ce talent, et d’autre part, mon épouse, ma fille et mon gendre sont de vrais cordons-bleus. Pour terminer, quels conseils donneriez-vous aux Suisses en 2018 ? Ne jamais oublier, d’une part, ce que nos ancêtres ont construit, le magnifique héritage qu’ils nous ont laissé, et d’autre part y croire, oser, ne pas se contenter d’administrer, mais se battre et vouloir gagner.

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Les Quatre heures du Vigneron

Valeyres-sous-Rances,

le «Petit Berne» 1. Corinne Tallichet-Blanc, syndique: « Pour rien au monde les Côtes de l'Orbe n'échangeraient leur qualité de vie contre celle de Lavaux. »

Pascal Besnard, échotier Photos : Edouard Curchod Cet accueillant village des Côtes de l'Orbe doit son surnom à l'installation des patriciens bernois au XVIe siècle. Le climat favorable et la richesse des terres expliquent pourquoi les aristocrates bernois ont transformé le hameau en zone résidentielle. Ces demeures d'exception sont en grande partie toujours là. Elles ont constitué le décor somptueux de l'édition 2018 des Quatre heures du vigneron, dans la dernière ligne droite d'un été caniculaire. Mais le dernier samedi d'août et le premier de septembre, le fond de l'air était un tantinet plus frais et le ciel plus chargé que lors des trois mois précédents. Des conditions finalement idéales pour déguster des crus, qui, s'ils sont nordistes, sont aussi remarquables. En témoigne le palmarès des Lauriers de Platine rouge 2018. Sur les seize vins sélectionnés pour la finale, huit provenaient des Côtes de l'Orbe ! Après avoir essuyé les salves oratoires du héraut et du prévôt, les centaines d'aficionados des vins vaudois présents ont bu les paroles pleines de sagesse ponctuée d'humour de la syndique Corinne Tallichet-Blanc. Ensuite lors d'un joyeux périple intravaleyrien, ils ont découvert des nectars proposés par une escouade de vignerons enthousiastes et talentueux venus d'Arnex-sur-Orbe, d'Agiez, de Bavois, d'Eclépens, de Mathod et bien sûr de Valeyres-sous-Rances.

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Au terme de cette douce croisade vinicole, les «Quatre-heuriens», ont vécu l'ultime étape, le feu d'artifice culinaire concocté par le boucher-traiteur de Baulmes, Grégory Perusset et son équipe.

2. Les Dalton, version Guillon 3. et 4. En plein air ou en cave pleine, la bonne humeur régnait partout 5. Ambiance en cuisine et triomphe en salle. Pari tenu pour Grégory Perusset et son équipe

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Les Quatre heures du Vigneron

Le salut du prévôt

(extraits)

Claude Piubellini Bienvenue dans la chaude et riante cité de Valeyres-sous-Rances, bienvenue su sud... de Baulmes et de Sainte-Croix, car même dans le nord vaudois, on reste toujurs au sud de quelque part! Valeyres-sous-Rances, qui partage son patronyme avec Valeyres-sousUrsins et Valeyres-sous-Montagny, doit sa toponymie au latin vallis signifiant vallée ou vallon mais aussi au nom latin Valerius, devenu Valérien, masculin de Valérie. Est-ce à dire que les habitants s'appellent les Valaisans ? Que nenni, ils sont dénommés les Valeyriens, un comble quand on est en pays de Vaud. Nous leur préférerons leurs sobriquets, à savoir les Renards ou les Hirondelles.

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Je croyais également que les Valeyriens étaient tous originaires du Mont, mais beaucoup m'ont dit être résistants à cette affirmation. D'une superficie de 635 hectares, le village est principalement partagé entre la vigne et les champs. Une vigne amenée ici par les Romains, développée par les moines et les seigneurs et qui a prospéré dans toute la région alentour, au point qu'avant les ravages du phylloxéra, Orbe était le plus grand district viticole du canton. Et saviez-vous qu'en 1950, on a bâti dans ce village une usine de choucroute, laquelle a fait faillite en 1980. Mais il reste le salon de coiffure pour en faire une... !

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Soulevons le couvercle

Werner Schürch, chef du restaurant Emmenhof de Berthoud

Entre le marteau et le fourneau Pascal Besnard, échotier Photos : Edouard Curchod A l'évidence, Werner Schürch n'a pas été parachuté un beau jour sur la cité bernoise de Burgdorf (Berthoud pour les francophones). La maison qui abrite aujourd'hui l'Emmenhof est achetée par son grand-père, marchand de chevaux, en 1919. La grand-maman de Werner y tient un bistrot de quartier. « Le jeudi était le jour de la choucroute et le vendredi évidemment, celui du poisson. » En 1955, Werner et Thérèse, ses parents, reprennent l'établissement. Papa a hérité du commerce de chevaux et maman entretient la tradition culinaire du lieu. Les clients sont les ouvriers des usines voisines et les habitants du quartier. Werner fils voit le jour en 1955. Très vite il opte pour la voie gastronomique, au détriment du parcours équestre. Dans les années septante on le retrouve apprenti de cuisine au Mövenpick de Berne. Ensuite son itinéraire passe par le célèbre restaurant Du Théâtre,

repris par le non moins célèbre Ernesto Schlegel, en provenance du Schweizerhof. Werner Schürch gravit petit à petit les échelons hiérarchiques au Du Théâtre. En 1976 il fait un stage de six mois à Saulieu, en Bourgogne. Le restaurant La Côte d'Or du chef François Minot vaut alors deux étoiles au Michelin. En 1982 Werner accède au rang de sous-chef de cuisine au Du Théâtre. Cette année-là il épouse Margrit qui travaille elle aussi dans l'établissement. Le couple décide de reprendre l'Emmenhof en 1985. Le restaurant est plutôt modeste avec ses plats du jour à douze francs. «  Au début nous n'avions que deux tables gastronomiques. Deux ans après, le restaurant en comptait six. » La consécration survient en 1996 avec l'obtention d'une étoile décernée par le guide Michelin. Werner Schürch peut s'enorgueillir de 22 années étoilées. Et de 17/20 au Gault-Millau. Mais le bis-

trot populaire n'a pas été abandonné et continue d'attirer une clientèle locale fidèle. « Je n'ai jamais songé à abandonner le bistrot, parce que dans cette région, les gens aisés ne sont pas nombreux », explique Werner. Une seule escale à l'étranger dans son parcours, cela semble peu pour un chef renommé. Il y a une explication: « Je n'ai pas quitté Berne, sauf le temps de mon stage chez Minot, parce que j'ai pratiqué l'athlétisme à haut niveau. J'ai été champion suisse junior et vice-champion suisse élite de lancer du marteau. La fréquence des entraînements ne me permettait pas de quitter mon club d'athlétisme bernois très longtemps ». A l'instigation de son complice Andy Zaugg, de Soleure et du maisonneur Hansruedi Gerber, Werner Schürch (compagnon de la Confrérie du Guillon depuis 1992) relève le défi des ressats à l'automne 2018. Affirmer que c'est un succès, c'est peu dire...

« Je n'ai pas quitté Berne, sauf le temps de mon stage chez Minot, parce que j'ai pratiqué l'athlétisme à haut niveau. J'ai été champion suisse junior et vice-champion suisse élite de lancer du marteau. … » Werner Schürch

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BE DIFFERENT. BE SWISS.


Soulevons le couvercle

La soupe de Berthoud au chasselas garnie de ris de veau Recette pour 10 personnes SOUPE 300 g de mirepoix 50 g de beurre 1 l de bouillon de légumes 1 l de chasselas 1 l de crème Sel et poivre

Faire suer le mirepoix (mélange d’oignons, de carottes et de céleri coupés en dés) dans le beurre, mouiller avec le bouillon et laisser cuire. Mixer finement et ajouter le vin et la crème, porter à ébullition et laisser mijoter, rectifier l’assaisonnement. GARNITURE 150 g de ris de veau 20 g de beurre 50 g de céleri, poireau et carottes

Blanchir le ris de veau à l’eau bouillante, égoutter, parer et effilocher, saisir au beurre. Couper les légumes en julienne. DRESSAGE Répartir la julienne de légumes et le ris de veau dans des assiettes à soupe, verser la soupe au chasselas chaude sur la garniture.

Pour accompagner la soupe, Werner Schürch a choisi un chardonnay 2017 de son ami Pierre Henchoz, membre, comme lui, du Club Prosper Montagné. Un cru vinifié par Blaise Duboux, à Epesses.

« Un chardonnay avec une soupe au chasselas... ! Mais le mariage est réussi parce que le chardonnay a une rondeur, du gras, qui répondent parfaitement à la richesse de la soupe ».

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Portrait de conseiller

Olivier Mages, une belle histoire Là-haut, Silvio Mages s’arrête, pose sa trompette et se penche sur le château de Chillon. C’est qu’il faut quand même suivre un peu ce qu’il s’y passe. Silvio voit avec plaisir son fils Grégoire, conseiller depuis de nombreuses années, passer sa robe à son frère Olivier. Quel parcours cet Olivier, depuis sa naissance le 23 Mai 1969, marqué du sceau de la fidélité. Fidèle en amour, avec Florence, puis la naissance de Yann et Justin. Fidèle ensuite à sa profession, ayant débuté un apprentissage de cuisinier à l’hôpital de Morges pour en être, encore aujourd’hui, le chef de cuisine. Fidèle encore au service du feu auquel il consacrera trente-et-une

années de sa vie. Fidèle enfin à la musique et au Guillon qu’il rejoint en 1979 en qualité de trompette, rôle qu’il porte depuis aux rythmes des sonneries des ressats. Cette trompette, Silvio sait qu’ils l’ont partagée ensemble, jusqu’au bout. Olivier s’est imprégné de cette histoire, de la vallée de Joux, où l’on résidait secondairement pour en ramener de mythiques vacherins, de Morges où la famille vit encore et du Chablais, Bex en particulier, dont on est originaires et bourgeois. Ma foi, tout est pour le mieux. Mamita, la matriarche, est toujours là. La famille se tient et Olivier saura perpétuer la belle histoire des Mages et du Guillon.

© Edouard Curchod

Luc del Rizzo, héraut

Rassuré, Silvio reprend sa trompette. C’est que Roland Guignard, Jean-Marc Sauvant et les copains l’attendent. C’est l’heure de l’apéro.


CENTRE DE DÉCOUVERTE La colonne de Michel Logoz

Les avatars du vin en trois actes express Horaires et jours d’ouverture :

Acte I - La sobriété s’avère une vertu à géométrie vaJuin à octobre : ouvert tous les jours de 10h30 à 20h00, riable. Dans les années 1950, le métro de Paris pladimanche de 10h30 à 19h00. cardait la recommandation de ne pas boire plus d’un Mi-janvier à fin mai, novembre et litre de vin au quotidien pour les lundi métiers manuels et décembre : fermé et mardi. Fin décembre à mi-janvier : pas plus d’un demi-litre pour les travailleurs intellecfermeture annuelle. tuels. Vendus en litrons au degré sous des marques flamboyantes, sans indication d’origine ou de provenance, (dans nos contrées sous les dénominations <Montagne> ou <Vino da Pasto>) ces vins constituaient le gros de l’ordinaire dans les ménages. Acte II - Deux et trois décennies plus tard, changement de décor. Les Trente Glorieuses ont boosté les niveaux et styles de vie, ouvert de nouveaux horizons. Le temps ne se décline plus en boulot-dodo, les activités culturelles, les sports, les vacances tous azimuts prennent une place toujours plus grande dans l’existence. L’univers du vin s’est, lui aussi, profondément transformé. Grâce aux AOC qui n’autorisent que la commercialisation de vins provenant d’une région délimitée, les vins de qualité occupent désormais le terrain. Les vins de vignobles réputés, de régions plus modestes, se disputent les faveurs des amateurs. Avec la globalisation des marchés et la présence des vins du nouveau monde, la concurrence est omniprésente. Le consommateur a tous les vins de la planète à sa disposition. Les émissions audiovisuelles, les revues spécialisées, mais aussi les concours, le star-système et le culte des champions multiplient les pôles d’attractions. L’intérêt pour le vin grandit, devient un plaisir d’esthète. On boit moins, mais mieux. Conséquence : la consommation globale chute de plus ou moins de moitié. Acte III - Mais voilà qu’un nouveau défi de taille se profile. La vague écologique, de modeste houle, prend des allures d’ouragan. Aux problèmes liés à l’environnement s’ajoute la sécurité alimentaire. La valeur santé (avant le goût !) s’établit comme un élément prioritaire de toute production agroalimentaire. A bon entendeur, salut !

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UN ASSORTIMENT DE 300 VINS DÉGUSTATIONS COMMENTÉES Horaires et jours d’ouverture : Novembre et décembre - mi-janvier à fin avril : lundi et mardi fermé. Mercredi à samedi : de 10h30 à 20h00 et dimanche de 10h30 à 19h00 Mai à fin octobre : ouvert tous les jours de 10h30 à 20h00 sauf le dimanche de 10h30 à 19h00 Ouvert les jours fériés.

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