Pourquoi l’homme a-t-il fabriqué du fromage ? On sait depuis très longtemps que le lait possède de grandes qualités nutritives. À la période néolithique, quand l’homme a su domestiquer le bétail, il a utilisé le potentiel du lait. Le faire cailler et le transformer en fromage constituait le seul moyen de conserver cet aliment fragile et instable. Dès lors, il n’a eu de cesse de sophistiquer ses installations agricoles afin d’obtenir des denrées pouvant être conservées et subvenir ainsi à ses besoins pendant les hivers rudes : le fromage est la première boîte de conserve de l’humanité, dit-on ! En le créant, l’homme a su prévoir son garde-manger. Le fromage a poursuivi son aventure, tout d’abord comme nourriture de second rang, parce qu’il remplaçait la viande, ensuite comme mets de choix, jusqu’à devenir, en France, un véritable symbole national !
Combien existe-t-il de fromages ?
Page précédente : un fromage de ménage, le barousse, à Sost (65).
18
Il n’existe aucune classification officielle internationale des fromages. De même qu’il n’existe pas UNE liste des fromages du monde entier. Difficile donc de les dénombrer. Plus de mille, c’est une certitude, mais entre tradition et innovation perpétuelle, le fromage n’échappe pas à l’air du temps : il en naît et il en meurt régulièrement. On compte à ce jour en Europe plus de cent soixante-quinze fromages, beurres ou crèmes reconnus AOP, c’est-à-dire qui rassemblent des critères de qualité comme le terroir, la race de la laitière (qu’elle soit vache, chèvre, brebis ou bufflonne) et le savoir-faire du fromager affineur, reconnu et constaté, transmis de génération en génération et transcrit dans un cahier des charges précis. La France en possède cinquante dont quarante-cinq sont des fromages qui garantissent au consommateur des produits aux saveurs et aux arômes spécifiques élaborés de façon authentique. Chaque fromage AOP peut faire l’objet de contrôles plusieurs fois par an, soit au niveau des registres de fabrication, soit sous forme de dégustations anonymes effectuées sous la tutelle d’un organisme certificateur indépendant, lui-même agréé par l’Institut national des appellations d’origine Inao.
Brie de Meaux
Bleu du Vercors-Sassenage
e
e
Époisses
e
Livarot
Pont-l’évêque
Selles-sur-cher
e
e
e
Neufchâtel
Fourme de Montbrison
Beaufort 19
À déguster du plus doux au plus fort ! Printemps
Été
e
e
Un cabécou, un mignon de brebis, un Pouligny-saint-pierre,
Une demi-bûchette d’Escanecrabe, un demi-ricochet de brebis,
un demi-reblochon, un demi-pont-l’évêque, un morceau de salers,
une demi-tomme corse, un demi-fromage d’Échourgnac, un demi-cheddar,
98 un morceau d’ossau-iraty, un morceau de bleu de César Régalis.
un beurre au piment d’Espelette, un morceau de bleu au lait de chèvre.
À déguster du plus doux au plus fort ! Automne
Hiver
e
e
Un charolais, deux barattes de chèvres, un crottin frais,
Un morceau de tour du Montot, un morceau de morbier,
un neufchâtel, un morceau de napoléon commingeois, un demi-livarot,
un morceau de comté 24 mois, un demi-maroilles,
un langres, une boulette d’Avesnes, un morceau de bleu de Gex Haut-Jura.
99 un époisses de Bourgogne, un morceau de roquefort, un morceau de Shropshire.
54
55
Les conditions climatiques revêtent une grande importance et influent sur la perte de poids, la formation de la croûte et le développement de la flore de surface. z Chaque type de fromage réclame des soins propres à sa nature et à son origine afin que se développent les qualités organoleptiques qui lui donneront son goût caractéristique.
Les fromages AOP suivent des règles strictes de lieu, de techniques et de durées minimales, établies dans un cahier des charges propre à chacun d’entre eux.
À quoi sert la croûte ? La croûte protège la pâte qui doit révéler le maximum de plaisirs gustatifs. Pendant l’affinage, les croûtes sont souvent frottées, humidifiées et brossées selon leur contenu en surface et la famille de fromages concernée. L’opération dite de « ressuyage » (séchage) permet à la surface du fromage de ne pas être trop humide dès son jeune âge.
Doit-on manger la croûte ? Certaines sont plus appétissantes que d’autres, il faut bien l’avouer. L’intérêt, c’est le goût, rien d’autre. Il appartient donc à chacun de choisir de la manger… ou non.
Qu’appelle-t-on « croûte naturelle » ?
Ci-contre : affinage des fromages. L’affineur doit savoir entretenir la croûte, la laver, la brosser, et serrer plus ou moins les fromages entre eux pour aider chacun d’eux à mûrir au bon moment.
72
Un fromage à croûte naturelle est un fromage dont la croûte n’a subi aucune pulvérisation pour « se faire ». Cela concerne avant tout les fromages de la famille des pâtes molles à croûte naturelle. Par opposition, les autres croûtes se forment à partir de ce que le fromager affineur va pulvériser sur ses fromages : le camembert de Normandie, par exemple, possède une croûte fleurie, car du Penicillium camemberti est pulvérisé sur sa surface afin d’obtenir le duvet qu’on lui connaît. Il existe de nombreux fromages dont la croûte a été lavée uniquement à l’eau salée (ossauiraty, comté…).
73
On compte à ce jour 45 fromages AOP qui garantissent au consommateur des produits aux saveurs et aux arômes spécifiques élaborés de façon authentique. 1
Le maroilles
Aisne (02) et Nord (59)
2
Le neufchâtel
3
Le pont-l’évêque
4
Le livarot
5
Le camembert de Normandie
6
Le brie de Meaux
Aube (10), Loiret (45), Marne (51), Haute-Marne (52), Meuse (55), Seine-et-Marne (77) et Yonne (89)
7
Le brie de Melun
Aube (10), Seine-et-Marne (77) et Yonne (89)
8
Le chaource
9
Le langres
Seine-Maritime (76) et Oise (60) Calvados (14), Eure (27), Manche (50) et Orne (61) Calvados (14), Eure (27) et Orne (61) Calvados (14), Eure (27), Manche (50) et Orne (61)
Aube (10) et Yonne (89) Côte-d’Or (21), Haute-Marne (52) et Vosges (88)
10 Le munster, ou munster-géromé
Bas-Rhin (67), Haut-Rhin (68), Haute-Saône (70), Meurthe-et-Moselle (54), Moselle (57), Vosges (88) et Territoire de Belfort (90)
11 Le selles-sur-cher
Cher (18), Indre (36) et Loir-et-Cher (41)
12 Le chavignol, ou crottin de Chavignol
Cher (18), Loiret (45) et Nièvre (58)
13 Le sainte-maure-de-touraine
Indre (36), Indre-et-Loire (37), Loir-et-Cher (41) et Vienne (86)
14 Le valençay
Cher (18), Indre (36), Indre-et-Loire (37) et Loir-et-Cher (41)
15 Le mont d’Or, ou vacherin du Haut-Doubs
Doubs (25)
16 L’époisses
Côte-d’Or (21), Haute-Marne (52) et Yonne (89)
17 Le morbier
Ain (01), Doubs (25), Jura (39) et Saône-et-Loire (71)
18 Le chabichou du Poitou
Charente (16), Deux-Sèvres (79) et Vienne (86)
19 Le pouligny-saint-pierre
Indre (36)
20 Le comté
Ain (01), Doubs (25), Haute-Savoie (74), Jura (39) et Saône-et-Loire (71)
21 Le mâconnais
Rhône (69) et Saône-et-Loire (71)
22 Le bleu de Gex Haut-Jura, ou bleu de Septmoncel
Ain (01) et Jura (39)
23 Le charolais
Allier (03), Loire (42), Rhône (69) et Saône-et-Loire (71)
24 L’abondance
Haute-Savoie (74)
25 La fourme d’Ambert
Cantal (15), Loire (42) et Puy-de-Dôme (63)
26 La fourme de Montbrison
Loire (42) et Puy-de-Dôme (63)
27 Le reblochon de Savoie
Savoie (73) et Haute-Savoie (74)
28 Le saint-nectaire
Cantal (15) et Puy-de-Dôme (63)
29 Le chevrotin
Savoie (73) et Haute-Savoie (74)
30 Le bleu d’Auvergne
Aveyron (12), Cantal (15), Corrèze (19), Haute-Loire (43), Lot (46), Lozère (48) et Puy-de-Dôme (63)
31 La rigotte de Condrieu
Loire (42) et Rhône (69)
32 La tome des Bauges
Savoie (73) et Haute-Savoie (74)
33 Le beaufort
Savoie (73) et Haute-Savoie (74)
34 Le salers Aveyron (12), Cantal (15), Corrèze (19), Haute-Loire (43) et Puy-de-Dôme (63) 35 Le cantal Aveyron (12), Cantal (15), Corrèze (19), Haute-Loire (43) et Puy-de-Dôme (63) 36 Le picodon
Vercors-Sassenage ors-Sassenage 37 Le bleu du Verc 38 Le rocamadour 39 Le laguiole 40 Le banon 41 Le bleu des Causses
Drôme (26) et Isère (38) Aveyron (12), Corrèze (19), Dordogne (24), Lot (46) et Tarn-et-Garonne (82) Aveyron (12), Cantal (15) et Lozère (48) Alpes-de-Haute-Provence (04), Hautes-Alpes (05), Drôme (26) et Vaucluse (84) Aveyron (12), Lot (46), Lozère (48), Gard (30) et Hérault (34)
42 Le roquefort
Aude (11), Aveyron (12), Gard (30), Hérault (34), Lozère (48) et Tarn (81)
43 Le pélardon
Aude (11), Gard (30), Hérault (34), Lozère (48) et Tarn (81)
44 L’ossau-iraty
Hautes-Pyrénées (65) et Pyrénées-Atlantiques (64)
45 Le brocciu, ou brocciu corse
124
Ardèche (07), Drôme (26), Gard (30) et Vaucluse (84)
Corse du Sud (2A) et Haute-Corse (2B)
Maroilles
1
2 Neufchâtel
3 Pont-l’évêque
Livarot
4
5 Camembert
de Normandie
Brie de Melun
6 Brie de Meaux
7
Chaource
8
Chavignol 12 Selles-sur-cher 11 Sainte-maure-de-touraine 13 Valençay 14
Chabichou 18 du Poitou
Mont d’Or 15 16 Époisses
19 Pouligny-saint-pierre
25
Saint-nectaire 28 Bleu d’Auvergne 30 Salers 34
38 Rocamadour
35 Cantal
Morbier 17 Comté 20
21 Mâconnais
Charolais 23
Fourme d’Ambert
Munster 10
9 Langres
Bleu de Gex 22
26 Fourme
24 Abondance 27 Reblochon
Chevrotin 29
de Montbrison 31 Rigotte de Condrieu 36 Picodon
32 Tome des Bauges 33 Beaufort 37 Le Bleu
du Vercors-Sassenage
39 Laguiole 40 Banon 41 Bleu des Causses 42 Roquefort 43 Pélardon
44 Ossau-iraty
45 Brocciu
125
LE BLEU D’AUVERGNE
AOC 1975
0 Pâte persillée
DÉGUSTATION PRINTEMPS
ÉTÉ
AUTOMNE
HIVER
1 Terroir et origine : En 1845, un jeune Auvergnat,
odeur est forte, pleine de son terroir, avec des parfums
Antoine Roussel, fit l’expérience d’ensemencer son lait
de réglisse, de gentiane et d’anémone. À la dégusta-
caillé avec un peu de moisissure formée sur du pain de
tion, la pâte est ferme, onctueuse et tendre, ni crayeuse
seigle : il inventa le bleu ! Puis il perfectionna sa « recette »
ni coulante. Sa texture est fondante et onctueuse, son
en perçant son fromage avec une aiguille pour faire
goût intense et corsé, mais équilibré, avec des arômes
passer l’air et laisser les moisissures se développer :
de sous-bois et de champignon.
le bleu respira et se stabilisa. Le procédé fut repris par d’autres Auvergnats, pour d’autres fromages aujourd’hui
1 Comment l’apprécier ? De caractère affirmé, le bleu
réputés. Seules les vaches ferrandaises et salers donnent
d’Auvergne allie qualités gustatives et digestives : vous
le lait de ce bleu.
l’aimerez en fin de repas. Mais vous pouvez aussi le savourer dès l’apéritif, sur des canapés, travaillé en
1 Comment le choisir ? Sous l’aluminium, la croûte
pommade avec du beurre. Sa force s’adoucit avec des
naturelle fleurie doit être sèche (pas visqueuse) et la
lamelles de poire et des cerneaux de noix. En salade, il
pâte blanche à ivoire, persillée de veines allant du bleu
aime les notes amères de l’endive et de la betterave ;
au vert, régulières et uniformes. Les moisissures
écrasé, il parfume une vinaigrette. Il apporte une note
piquantes se marient avec le sel imprégné de la pâte.
originale aux soufflés, à certaines viandes, à l’assaison-
Au toucher, le bleu doit être ferme, ni dur ni gras. Son
nement des pâtes, des tartes salées et des crêpes.
/ x/ Son plus proche cousin est la fourme d’Ambert. CONSERVATION : Deux à trois semaines au réfrigérateur, dans son papier aluminium d’origine pour lui permettre de s’affiner
et éviter qu’il se dessèche. Le sortir une heure au moins avant de le consommer, surtout s’il est prétranché. Le bleu d’Auvergne tout juste sorti des caves se plaît avec un vin blanc tel qu’un bergerac, un sauternes, un gewurztraminer, voire un pineau-des-charentes. La rencontre du bleu salé aux arômes de sous-bois avec le fruité et le moelleux d’un vin doux est un duel tonique et agréable. Mariez le bleu d’Auvergne en cours d’affinage avec un rosé cabernet-d’anjou et, si l’affinage est plus avancé, avec un vin rouge charpenté. 132
« Souvent considéré comme le bleu le moins savoureux, peut-être parce que le moins cher de tous, c’est en eff effet et l’un des fromages AOP dont le rapport qualité-prix est le plus intéressant ! Et un bon bleu d’Auvergne peut vous donner au moins autant de plaisir que ses cousins ! »
LE BRIE DE MELUN
AOC 1980
0 Pâte molle à croûte fleurie DÉGUSTATION PRINTEMPS
ÉTÉ
AUTOMNE
HIVER
1 Terroir et origine : Charlemagne et Robert le Pieux
croûte fine, un peu frisée et colorée de pigments rouges,
l’aimaient déjà, les tables de Philippe Auguste et de
peut parfois être un peu collante et présenter quelques
Charles d’Orléans lui firent honneur, puis Jean de La
points bruns. Au nez, il doit avoir l’odeur du lait, du
Fontaine le plaça au cœur de sa célèbre fable Le Cor-
sous-bois, des champignons, du cuir et de la terre
beau et le Renard avant que Talleyrand le porte au
humide. Sous vos papilles, le brie de Melun dégage
congrès de Vienne, avec son cousin, le brie de Meaux,
une odeur puissante et franche, presque musquée
qui lui vola la vedette. Depuis 1995, la confrérie des
mais très agréable. Il se déguste affiné sur la moitié au
Chevaliers du brie de Melun se démène avec ardeur
moins de son épaisseur.
pour la préservation et la commercialisation de ce fromage qui serait, dit-on, l’ancêtre de tous les bries…
1 Comment l’apprécier ? Ajoutez-le à une quiche lorraine par exemple : le mariage est des plus divins.
1 Comment le choisir ? Plat comme son cousin de
D’une façon plus simple, lorsqu’il est fait à souhait,
Meaux, le brie de Melun est toutefois plus petit. Sa
associez-le à un bon pain de campagne.
/ x/ Son plus proche cousin est le brie de Meaux. CONSERVATION : Une dizaine de jours dans son emballage d’origine, jamais sous film alimentaire ou sous papier d’aluminium,
idéalement sur un plateau en bois et sous cloche en verre. Dans la partie la moins froide du réfrigérateur s’il faut le conserver au frais. Attention : s’il sèche, il perdra tout son goût. De même que pour son cousin de Meaux, choisissez un vin rouge de Bourgogne, solide mais élégant, comme un gevrey-chambertin. Côtes-du-rhône ou saumur-champigny feront aussi merveille. Pour un jour de fête, essayez un saint-nicolas-de-bourgueil : un accord charpenté mais jouissif en perspective !
142
« Moins connu que son cousin de Meaux, il faut absolument l’avoir goûté. Et on ne comprend pas alors pourquoi il n’est pas davantage plébiscité ! Plus petit que son cousin, il est au même âge plus savoureux. Et s’il vieillit plus vite, il devient alors incontournable pour les initiés. »
LE CAMEMBERT DE NORMANDIE
AOC 1983
0 Pâte molle à croûte fleurie DÉGUSTATION PRINTEMPS
ÉTÉ
AUTOMNE
HIVER
1 Terroir et origine : Si la légende attribue son
crème peut être partiellement trouée ; souple, elle
invention à Marie Harel, du village de Camembert, au
retrouve sa forme après une pression au doigt. Elle
xviii siècle, c’est en 1863 que l’aventure du camembert
possède donc une bonne tenue et n’est pas coulante.
commence : un descendant de la fermière eut l’idée de
Dans le cœur – partie non affinée –, un feuilletage tra-
le faire goûter à Napoléon III qui inaugurait la ligne
duit la trace de son moulage spécifique. En bouche, la
Paris-Granville. L’empereur en fit un tel éloge que les
texture ne doit être ni trop fondante ni trop collante.
restaurants de la capitale mirent sur leur carte ce « fro-
Sa saveur franche et équilibrée est un peu salée. Le
mage de Napoléon III », ce qui valut au camembert sa
camembert de Normandie ne doit pas être neutre au
célébrité. Dès 1880, il fut transportable grâce à l’ingé-
goût, ni être trop acide, trop amer, trop ou pas assez
nieur Eugène Ridel qui mit au point une boîte faite de
salé. Les arômes, de bonne intensité et persistants,
copeaux de bois permettant sa conservation. En 1910,
sont lactés (beurre frais, crème), fruités, un peu soufrés
il devint blanc grâce au Penicillium candidum pulvé-
d’ail et de chou, et empreints de notes de sous-bois
risé – jusqu’alors, il était recouvert d’un duvet bleu
(léger goût de champignon). Pour retrouver cette
sauvage, non maîtrisé.
richesse, il faut choisir un camembert de Normandie
e
portant la mention « au lait cru, moulé à la louche ». 1 Comment le choisir ? Ce cylindre aux talons droits, aux arêtes nettes, aux faces planes et parallèles non
1 Comment l’apprécier ? Essayez-le en feuilleté, en
creusées ni bombées, présente une croûte assez fine et
gratin, en terrine… Faites une tarte de camembert
fleurie d’un fin duvet blanc, qui montre parfois une
recouverte de lamelles de pomme, pour l’accord régio-
pigmentation rouge. Dans la partie tendre, la pâte jaune
nal de poire ou d’abricot.
/ x/ Son plus proche cousin est le brie de Meaux. CONSERVATION : Une dizaine de jours dans son papier et sa boîte. S’il est affiné, au frais, sans oublier de le sortir une heure
avant la dégustation. S’il n’est pas affiné à cœur, à température ambiante. L’accord idéal est le cidre fermier, surtout si le camembert est affiné ! 146
« Ma grand-mère prétendait que ce fromage “ puait le diable ” et le mettait loin des autres sur l’étal, ne comprecomprenant pas pourquoi elle en vendait autant. Sans s’en rendre compte, en lui accordant une telle place, elle en faisait l’éloge aux plus curieux des gastronomes. »
LA FOURME DE MONTBRISON
AOC 1972
0 Pâte persillée
DÉGUSTATION PRINTEMPS
ÉTÉ
AUTOMNE
HIVER
1 Terroir et origine : L’origine de la fourme de
1 Comment la choisir ? La fourme de Montbrison
Montbrison remonte aux temps les plus anciens : sans
se présente comme un cylindre d’environ 13 cm de dia-
doute était-elle déjà produite par les Arvernes, bien
mètre. Sa pâte, couleur crème, est plus douce et moins
avant la conquête romaine. On prétend même que
persillée que celle de sa cousine d’Ambert, et sa croûte
Jules César en mangea avant d’attaquer Gergovie, en
est rouge orangé. Sa texture est friable et son goût va
franchissant les monts du Forez ! Longtemps confon-
de fruité à corsé, selon l’affinage.
dues ou assimilées comme jumelles, la fourme de Montbrison et la fourme d’Ambert sont désormais deux
1 Comment l’apprécier ? D’une qualité de fonte
fromages bien distincts : leurs appellations sont sépa-
remarquable, ce fromage est extraordinaire en cuisine,
rées depuis 2002 et leurs techniques d’égouttage et de
en particulier si vous voulez gratiner une soupe de
salage ne sont plus identiques – la fourme de Montbri-
champignons. Pour un accord régional, certains le
son est notamment salée en cours de moulage du caillé.
dégustent gratiné sur des œufs au plat.
/ x / Son
plus proche cousin français est la fourme d’Ambert. Du point de vue gustatif, elle ressemble plus au stichelton anglais. CONSERVATION : De quelques jours au réfrigérateur, dans son emballage d’origine, à quelques semaines, si la fourme est
jeune. À chambrer une heure avant dégustation pour que tous les arômes se libèrent. Parce que la fourme de Montbrison est douce, évitez de lui associer un vin trop corsé et choisissez-lui un compagnon souple, rond et léger tel qu’un grand roussillon rosé, un rivesaltes tuilé, un banyuls grand cru ou un jurançon vendanges tardives.
166
« Très peu, trop peu d’amateurs connaissent ce fromage. Souvent comparée à sa voisine d’Ambert, cette fourme est bien diff différente. érente. Elle vous séduira par une pâte un peu plus sèche, aux arômes de noix et surtout de champichampignons forestiers. »
LE MORBIER
AOC 2000
0 Pâte pressée non cuite
DÉGUSTATION PRINTEMPS
ÉTÉ
AUTOMNE
HIVER
1 Terroir et origine : Le morbier serait né, raconte-
1 Comment le choisir ? Le morbier est cylindrique
t-on, par hasard à cause des mauvaises conditions
et plat, d’un poids variant de 5 à 8 kg et d’une hauteur
météorologiques qui empêchaient parfois les fermiers
de 8 cm maximum. Il fait partie des fromages marqués
de porter le lait à la fruitière pour la fabrication du
par une plaque de caséine. Sa croûte est naturelle et
comté. Plutôt que de perdre leur lait, ces fermiers le
lisse, de couleur gris clair à beige, voire orangée. La raie
versaient dans une cuve et le recouvraient d’un peu
noire est bien serrée, continue sur toute la tranche. La
de cendre afin d’éloigner les insectes. En versant
pâte, de couleur jaune pâle, peut tolérer quelques trous
par-dessus le lait de la traite du lendemain, le morbier
de taille modeste. C’est un fromage aux arômes francs,
était né. On dit aussi que le morbier proviendrait du
fruités et même vanillés et caramélisés si son affinage
surplus de caillé de comté. Dès la fin du xviii siècle,
est poursuivi.
e
des écrits attestent de la fabrication de fromages du Doubs et du Jura à la « pâte plus grasse […] et un peu
1 Comment l’apprécier ? Le morbier est l’un de ces
persillée par des raies ». Ce n’est qu’au siècle suivant
fromages qui peuvent être consommés sans pain. Et
que le morbier obtient son nom, éponyme d’un bourg
que l’on peut conseiller aux parents pour éduquer le
jurassien. Aujourd’hui, il est réalisé en une fois et la
palais de leurs enfants, qui apprécient son goût léger
cendre a été remplacée par du charbon végétal, qui
et beurré. En hiver, faites une raclette au morbier : c’est
reste sans incidence sur le goût du fromage.
vraiment bon !
/ x/ Son plus proche cousin est le jeune vacherin fribourgeois. CONSERVATION : Deux à trois semaines dans un endroit sec et frais, donc surtout pas dans le bac à légumes, trop humide.
À placer au réfrigérateur dans la partie la moins froide et dans son papier d’origine. À sortir une heure avant de le déguster. Sur un morbier jeune, mettez un rouge léger et fruité – un jura issu de poulsard. Sur un morbier plus affiné, prenez un rully, un mercurey, un bourgogne-hautes-côtes-de-nuits ou hautes-côtes-de-beaune. Ou préférez un vin d’Arbois ou du Jura.
180
« Chacun de nous sait le reconnaître : c’est celui qui a une raie au milieu. Elle n’agit pas sur le goût. C’est un frofro mage au rapport qualité-prix imbattable. Vous êtes sûr qu’il est fait au lait cru. Quand il est tendre et sensiblement généreux en arômes lactiques et torréfiés de vanille et de caramel, alors c’est un excellent morbier. »
LE NEUFCHÂTEL
AOC 1969
0 Pâte molle à croûte fleurie DÉGUSTATION PRINTEMPS
ÉTÉ
AUTOMNE
HIVER
1 Terroir et origine : Aucun document n’atteste de
600 g, selon le modèle choisi. Chaque forme et chaque
l’origine précise du neufchâtel. Sans doute est-il l’un
taille donnent des arômes et des goûts différents ; les
des plus anciens fromages normands, issu de la lignée
plus petits ont un affinage plus rapide que les gros. Le
des « bondons » et des « angelots ». Vers 1543, son nom
neufchâtel a une croûte fleurie blanche, fine et légère-
est pour la première fois mentionné dans les comptes
ment duveteuse, tirant vers le doré selon son stade
de l’abbaye de Saint-Amand, à Rouen. Selon la légende,
d’affinage. La pâte est sans affaiblissement, ferme et
sa variante en forme de cœur serait née pendant
onctueuse. Avec le temps, elle devient plus souple et
la guerre de Cent Ans : pour les fêtes de fin d’année, les
plus élastique, mais ne coule pas. S’il est plus ou moins
jeunes filles offraient aux soldats anglais – avec lesquels
salé selon les saisons, son goût reste toujours franc,
elles avaient sympathisé – des fromages en forme de
doux et lacté. Le neufchâtel fermier est présenté nu sur
cœur. Ce n’est qu’au xix siècle que le neufchâtel connaît
paillon et sera emballé pour être vendu ; le neufchâtel
son apogée avec le développement des affineurs et la
laitier, en revanche, est présenté dans un emballage
bénédiction de Napoléon I , ravi de le découvrir lors
papier ou dans une boîte.
e
er
d’un voyage. 1 Comment l’apprécier ? Parce qu’il est légèrement 1 Comment le choisir ? Ce fromage se présente sous
salé, accordez le neufchâtel avec des mûres, des fram-
six formes différentes – bonde cylindrique, briquette,
boises ou des groseilles. Osez ce fromage en cuisine :
carré, double bonde, cœur (sa forme emblématique) et
il est épatant et surprenant, notamment pour lier la sauce
gros (ou grand) cœur – et son poids varie entre 100 et
d’un filet mignon.
/ x/ Ses plus proches cousins sont le carré frais demi-sel de Normandie ou le chaource champenois. CONSERVATION : Huit à douze jours. Comme ses cousins, le mieux est de le laisser dans son emballage d’origine, sinon sous
cloche et au réfrigérateur, sur l’étagère la moins froide. Si le cidre bouché fermier local l’accompagne comme une évidence, vous pouvez aussi tenter un vin fruité tel qu’un côtes-du-rhône ou bien un vin rouge de Loire, à choisir selon le degré d’affinage du fromage – un saumur, un chinon, un anjou, un bourgueil…
184
« Le cœur de Neufchâtel, comme on l’appelle souvent, est l’orgueil du pays de Bray et plaît au plus grand nombre, peut-être parce qu’il est fondant et doux. Plus on le goûte, plus on y revient. Sa pointe de sel est tout à fait normale et se marie admirablement avec son crémeux. »
FROMAGES A French Master’s Guide to the Cheeses of France by Dominique Bouchait Rizzoli International Publications 300 Park Avenue South New York, NY 10010 www.rizzoliusa.com ISBN: 978-0-8478-6673-1 $37.50 HC, 6 1/8 x 8 inches 240 pages 150 color and b/w photographs Rights: World English For serial rights, images to accompany your coverage, or any other publicity information about this title please contact: Pam Sommers, Executive Director of Publicity T. (212) 387-3465 psommers@rizzoliusa.com