Musée de Cholet

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ARCHÉOLOGIE & HISTOIRE DU C H O L E TA I S

Des premiers groupes nomades du Paléolithique ancien aux populations bien établies du XIe siècle, les sociétés du passé ont laissé des traces de leur univers quotidien et ont contribué à façonner le territoire. Paysages, axes de communication, activités économiques, agglomérations et frontières administratives sont le résultat de cette patiente intervention de l’homme. A elle seule, la création de la ville de Cholet mérite une attention particulière : à la fin de l’Antiquité, Romains, romanisés et « Barbares » qui s’y côtoient, participent à son premier développement.

A R C H É O LO G I E & H I S TO I R E D U C H O L E TA I S

Cholet et sa région dispose d’un patrimoine archéologique diversifié, témoin d’une occupation continue de la région depuis plus de 300 000 ans. L’exposition « Emergence Archéologie et Histoire du Choletais » est une occasion rare de re-découvrir les pièces majeures qui en font sa valeur.

É m ERGE n CE

É m ER GEnCE

É m ER GEnCE ARCHÉOLOGIE & HISTOIRE DU C H O L E TA I S

Par leurs contributions, archéologues et historiens rendent compte des recherches les plus récentes menées sur les principaux sites de la région et nous fournissent les clés de compréhension d’une évolution qui pousse ses ramifications jusqu’à notre époque contemporaine.

VILLE DE CHOLET

ISBN : 978-2-918274-02-5 Prix public : 12 €

VILLE DE CHOLET


ANDREZÉ BEAUPRÉAU

La Loire

BORDS DE LOIRE CHANTELOUP-LES-BOIS CHEMILLÉ Le

La yo

CHOLET n

LA SÉGUINIÈRE LA TESSOUALLE LE FIEF-SAUVIN

L’Evr e

LE MARILLAIS LE MAY-SUR-ÈVRE LE PUY-SAINT-BONNET LOUBLANDE MAULÉVRIER

La Moine

MAZIÈRES-EN-MAUGES MONTREVAULT

Cholet

MONTJEAN-SUR-LOIRE MOULINS La Sevr

MOZÉ-SUR-LOUET

e Paléolithique

NUAILLÉ SAINT-ANDRÉ-DE-LA-MARCHE

Néolithique Âge du Bronze

Sites archéologiques présentés dans l’exposition « Emergence »

0

5 km

SAINT-FLORENT-LE-VIEIL SAINT-HILAIRE-DE-MORTAGNE

Âge du Fer

SAINT-PIERRE-MONTLIMART

Époque gallo-romaine

SAINT-REMY-EN-MAUGES

Époque médiévale

TRÉMENTINES


É m ER GEnCE ARCHÉOLOGIE & HISTOIRE DU C H O L E TA I S

VILLE DE CHOLET


CRÉDITS PHOTOGRAPHIQUES La campagne photographique a été réalisée par Mathilde Richard et Etienne Lizambard, photographes de la Ville de Cholet. Quelques photographies proviennent de différentes sources : • Collections du MuCEM (Musée des Civilisations de l’Europe et de la Méditerranée), Marseille © MuCEM, Dist RMN / Danièle Adam : p.10 • Gérard Berthaud ou Association Maziéraise d’Archéologie : p.12, p.61 gauche et haut, p. 63 bas droite • Grégor Marchand : p.24 haut • Carole Ventresque-Crestin : p. 27 bas, p. 70 bas et gauche • Roger Joussaume : p.31 gauche • Claudie Guérry : p.36, p.49 centre droite • Jean-Gabriel Aubert EPCC Arc’Antique, Nantes : p.37 • Collections du Musée Dobrée, Nantes : - © H. Neveu-Dérotrie, musée Dobrée, Conseil Général de Loire-Atlantique, Nantes : p.43, p.63 haut gauche

Produit par la Ville de Cholet, ce projet a bénéficié du partenariat de l’Etat (DRAC Pays-de-la-Loire) et de l’AMA (Association Maziéraise d’Archéologie). Les trois partenaires se sont retrouvés au sein du Comité d’organisation.

- © Musée Dobrée, Conseil Général de Loire-Atlantique, Nantes : p.44 centre gauche, p.47 bas gauche, p.55 bas • Jean-Philippe Bouvet : p.44-45 centre • Service Régional d’Archéologie DRAC Pays-de-la-Loire Photographies aériennes de Gilles Leroux : p.44 haut gauche, p.45, p.60 bas, p.64 gauche et droite • Collections du Musée d’Archéologie Nationale, Saint-Germain-en-Laye © RMN / Loïc Hamon : p.50 • Martial Monteil : p.65 haut (détail) • Collections des Archives Départementales du Maine-et-Loire © Archives Départementales du Maine-et-Loire Clichés Eric Jabol : p.76, p.77 • Teddy Véron : p.79 DESSINS • Gilles Tosello : p.14, p.15, p.19 • Roger Paquereau : p.18, p.22, p.44 bas CARTES Toutes les cartes ont été réalisées par Samuel Gautier, Société Futur’ouest qui a assuré également le traitement graphique des dessins : p.32, haut et p.49 bas

Les agents du SRA (Service Régionale d’Archéologie) ont pris une part active à la conception et à la préparation de ce projet. Le conseiller musée l’a soutenu aux différentes étapes de son développement. Enfin, le concours financier de l’Etat a été décisif pour sa réalisation. Le Président et les membres de l’AMA ont apporté leurs connaissances et leur expérience durant tout le temps de l’élaboration et de la mise en oeuvre de ce projet. Les services de la Ville de Cholet ont contribué à son bon déroulement : Direction de la Culture, Direction de la Communication et le Centre Technique Municipal. Emergence est un projet porté par toute une équipe.

COMMISSARIAT • Eric Morin, Directeur des Musées de Cholet COMITÉ SCIENTIFIQUE • François Arné, Conservateur en chef du Patrimoine, Conseiller musée DRAC Pays-de-la-Loire • Gérard Berthaud, Président de l’Association Maziéraise d’Archéologie • Jean-Philippe Bouvet, Conservateur en chef du Patrimoine DRAC Pays-de-la-Loire, Chercheur à l’UMR 6566 « CREAAH » • Lionel Epain, Responsable de la Section préhistoire de la Société des Sciences Lettres et Art de Cholet (SLA) • Nicole Lambert, Ingénieur d’études, SRA-DRAC Pays-de-la-Loire • Grégor Marchand, Chercheur au CNRS - UMR 6566 « CREAAH » Université Rennes 1 • Maxime Mortreau, Céramologue à l’INRAP Pays-de-la-Loire, Chercheur à l’UMR 6566 « CREAAH »

Ouvrage réalisé sous la direction des Musées de Cholet Fabrication : Imprimerie ICI Cholet

• Guy San Juan, Conservateur en chef du Patrimoine, Conservateur régional de l’Archéologie - SRA-DRAC Pays-de-la-Loire

ISBN : 978-2-918274-02-5 Imprimé en France Dépôt légal : janvier 2010 Prix public : 12 €

• Alain Valais, Responsable d’opérations à l’INRAP Pays-de-la-Loire • Teddy Véron, Historien

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R E M E R C I E M E N T S Catalogue

PHOTOGRAPHIE

DOCUMENTATION

• Etienne Lizambard, Mathilde Richard

• Pierre Vigneron

COORDINATION

• Gilles Leroux

MÉDIATION CULTURELLE

GRAPHISME

• Céline Daumalle, Carole Ventresque-Crestin

• Eric Morin

AUTEURS DU CATALOGUE • Gérard Aubin, Inspecteur Général de l’Archéologie - UMR 6566 « CREAAH » • Gérard Berthaud, Président de l’Association Maziéraise d’Archéologie (AMA) • Jean-Philippe Bouvet, Conservateur en chef du Patrimoine - DRAC Pays-de-la-Loire, Chercheur à l’UMR 6566 « CREAAH »

• Valérie Goblet, Adeline Murier • Sabine Godineau, Studio Arengo

RELECTURE

RELATIONS AVEC LE PUBLIC ET PROMOTION • Sophie Bochereau

• Sophie Bochereau, Elisabeth Hamzaoui, Véronique Herlan, Céline Rochefort

ACCUEIL ET SURVEILLANCE

Exposition

• Le personnel vacataire

• Isabelle Béliard, Annie Chauveau, Emmanuelle Diouf, Pierre Goriau, Catherine Pluchon

DIRECTION DE LA CULTURE

• Jean-Marc Gouédo, Conservateur en chef du Patrimoine - SRA-DRAC Ile-de-France

SCÉNOGRAPHIE

• Roger Joussaume, Directeur de Recherche émérite au CNRS (UMR 411, Nanterre)

• Guy Camut et Pascal Proust, Atelier Artefact

• Michel Gabaret, Martine Rémy, Georges Rochard

RÉGIE TECHNIQUE

DIRECTION DE LA COMMUNICATION

• Axel Levillayer, Service Départemental Archéologie du Maine-et-Loire, Doctorant UMR 6566 « CREAAH » - Université Rennes 1

• Jérôme Baumard, Denis Dauzon, Jackie Gautier et Claude Picot

MOBILIERS / PEINTURE

• Grégor Marchand, Chercheur au CNRS UMR 6566 « CREAAH » - Université Rennes 1

• Etienne Supiot et son équipe, Centre Technique Municipal

• Muriel Melin, Doctorante au CNRS UMR 6566 « CREAAH » - Université Rennes 1

• Service peinture, Centre Technique Municipal

• Martial Monteil, Maître de Conférence Université de Nantes, Chercheur à l’UMR 6566 « CREAAH »

RÉGIE DES OEUVRES

• Eric Morin, Directeur des Musées de Cholet

• Didier Le Gouestre SRA-DRAC Pays-de-la-Loire

• Maxime Mortreau, Céramologue à l’INRAP Pays-de-la-Loire, Chercheur à l’UMR 6566 « CREAAH »

• Victor Thierry, Société SACMAB • Claudie Guerry

RÉGIE DE L’ICONOGRAPHIE • Carole Ventresque-Crestin

• Direction, Delphine Stephan • Conception graphique, Valérie Goblet, Adeline Murier • Attachée de Presse, Véronique Bonnet • Relations Publiques, Cathy Moussi Nos remerciements les plus vifs s’adressent à l’ensemble des prêteurs dont la collaboration a été essentielle.

PRÊTEURS PUBLICS • Le Musée Dobrée : Jacques Santrot, Marie-Hélène Santrot, Gildas Salaun, Muriel Biron, Chrystelle Québriac

• Sandra Sicard, Responsable d’opérations, INRAP Pays-de-la-Loire

CARTOGRAPHIE

• Alain Valais, Responsable d’opérations INRAP Pays-de-la-Loire

• Samuel Gautier, Société Futur’ouest

• Le Musée d’Archéologie Nationale : Patrick Perin, Laurent Olivier, Joëlle Brière

DESSIN

• Le SRA-DRAC Pays-de-la-Loire

• Teddy Véron, Historien

RÉGIE DE L’ICONOGRAPHIE • Carole Ventresque-Crestin • Marine Séverin et Romain Taillefait (stagiaires)

COORDINATION CARTES ET DESSINS • Gérard Berthaud

CARTOGRAPHIE

• Roger Paquereau, Gilles Tosello • Christian Belouin

• Archives Départementales du Maine-et-Loire : Guenaëlle Barbot, Elisabeth Véry

PHOTOGRAPHIE

PRÊTEURS ASSOCIATIFS

• Etienne Lizambard, Mathilde Richard • Gilles Leroux

SIGNALÉTIQUE • Jean-François Murzeau, Société Grafic’49

• Samuel Gautier, Société Futur’ouest

ADMINISTRATION

DESSINS

• Elisabeth Hamzaoui, Véronique Herlan, Céline Rochefort

• Roger Paquereau, Gilles Tosello

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• La Société des Sciences Lettres et Arts de Cholet : Gilles Crozemarie, Lionel Epain • L’Association Maziéraise d’Archéologie : Gérard Berthaud • L’ Institut National de Recherches Archéologiques Préventives : Gilbert Aguesse, Sylvie Barbier

ET DE NOMBREUX PRÊTEURS PRIVÉS


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PRÉFACE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8-9 INTRODUCTION . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10-11

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Emergence, Archéologie et Histoire du Choletais

CHAPITRE 1 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13-22

Sur les traces des chasseurs-cueilleurs

CHAPITRE 2 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23-28

Les premières sociétés agro-pastorales en Choletais

CHAPITRE 3 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29-32

Les mégalithes du Choletais

CHAPITRE 4 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33-38

La découverte de la métallurgie

CHAPITRE 5 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 39-50 PAGE

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Les Celtes et l’essor du monde rural

CHAPITRE 6 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51-56

L’or des Mauges

CHAPITRE 7 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 57-66

Rome bâtit un nouveau monde

CHAPITRE 8 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 67-78

L’émergence de Cholet

CHAPITRE 9 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 79-83

Les contours d’un territoire

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BIBLIOGRAPHIE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 84

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Pot du haut Moyen-Âge. Céramique. La Frétellière, Trémentines (49)


P A l’heure où la Ville de Cholet valorise les atouts dont elle dispose au service du développement équilibré de son territoire et de l’amélioration du cadre de vie de ses habitants, il n’est pas inutile de se pencher quelques instants sur son passé. Une telle incursion dans le temps réserve toujours de bonnes surprises ; elle permet aussi de mieux comprendre le présent dans lequel chaque Choletais évolue.

R

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Le site de l’actuelle ville de Cholet est occupé quant à lui depuis l’époque, récente, de l’Empire romain. Il nous offre une histoire originale et complexe. L’émergence de cette ville, organisée autour d’une villa gallo-romaine puis d’églises avant d’être favorisée par l’existence de fortifications, génère beaucoup d’interrogations, propres à alimenter le travail des chercheurs. Et les débats sont loin d’être clos, pour preuve l’intérêt que suscite toujours l’origine du nom de la ville.

L’archéologue est ici d’une aide précieuse. Dans la seconde moitié du XIXe siècle, le docteur Pissot, Célestin Port et les membres de la Société des sciences, lettres et arts avaient ouvert la voie. Dans la seconde moitié du XXe siècle, les méthodes de l’archéologie se sont profondément renouvelées, abordant de nouvelles questions et livrant des séries d’objets dont l’importance ne cesse d’être confirmée.

On le pressent, l’exposition « Emergence, Archéologie et Histoire du Choletais » est d’une grande richesse et va renouveler la perception que nous pouvons avoir du passé de notre territoire. Nos remerciements vont à toutes les personnes qui ont permis l’aboutissement de ce projet.

« Emergence, Archéologie et Histoire du Choletais » regroupe une exposition, un catalogue et de multiples animations afin de mettre en avant les grands traits caractéristiques de l’histoire de la cité et plus globalement de l’espace choletais, des origines au XIe siècle.

Citons tout d’abord les membres de l’active Association maziéraise d’archéologie ainsi que les archéologues des services de l’Etat (Service régional d’archéologie de la DRAC Pays-de-la-Loire) qui ont œuvré, en partenariat, avec notre collectivité.

A la lumière des fouilles archéologiques réalisées, on peut affirmer qu’il y a de cela plus de 300 millénaires, des groupes humains étaient installés dans la région. Et, fait essentiel, la présence de l’homme s’y est depuis lors maintenue. Cette longue occupation a modelé les paysages pour qu’agriculture et élevage s’épanouissent, a également donné naissance à des réseaux routiers favorisant les échanges et a permis la constitution des premières agglomérations aux activités variées. Des sociétés humaines se sont ainsi développées et ont pu se succéder dans le temps non sans laisser également des témoignages de leur univers culturel. On pense aux nombreux mégalithes dont certains sont superbement sculptés, aux monnaies gauloises, reflets d’une mentalité collective mais aussi aux lieux d’inhumation qui nous introduisent dans le monde des morts.

Des historiens, des chercheurs ainsi que des bénévoles de la Société des sciences, lettres et arts les ont rejoints dans le Comité scientifique constitué pour l’occasion. Enfin, de nombreux prêteurs, publics et privés, en faisant confiance au Musée d’Art et d’Histoire de la Ville de Cholet, ont contribué de manière décisive à ce que cette exposition prenne toute son ampleur. L’archéologue est un interlocuteur familier des collectivités locales. Puisse-t-il, par ses efforts continus pour faire parler les archives du sol, nous apporter de nouvelles révélations sur le passé de Cholet et de sa région. Gilles BOURDOULEIX Maire de Cholet, Député, Président de la Communauté d’Agglomération du Choletais

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E m e r g e n c e , e t H i s t o i r e

A r c h é o l o g i e d u C h o l e t a i s

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Fouilles au Petit Nombault, Le Fief-Sauvin, septembre 1892. Présents sur la photographie : MM G Fiévé, Duc de Balcas, Jacques Fourchy et R. Desnais. Album de R. Desnais.


Le Musée d’Art et d’Histoire de la Ville de Cholet accueillait en 1980 l’exposition itinérante « 25 années d’archéologie galloromaine ». Il s’agissait là d’une importante mise au point sur les apports de la recherche à l’échelle régionale depuis l’après-guerre. Par la suite et dans un contexte différent, de nouveaux chantiers archéologiques s’engagèrent. Dans le Choletais, de 1998 à 2000, les travaux de grande ampleur de l’autoroute A 87 apportèrent leur lot de découvertes et mirent en valeur de nombreux sites d’habitat de l’Âge du Fer. Le vote, en 2001, de la loi organisant l’archéologie préventive rendit possible la fouille de terrains recelant des informations archéologiques avant que de nouveaux aménagements ne les détruisent irrémédiablement. Différents projets furent ainsi concernés telle la zone industrielle du Cormier et celle de l’Ecuyère ou la zone d’aménagement concerté de Champ Vallée et tous livrèrent du mobilier d’un intérêt reconnu. Pendant ce temps à Mazières-en-Mauges, les archéologues fournissaient les éléments de compréhension de l’évolution d’une agglomération secondaire antique. Et tout en menant leurs travaux, ces acteurs de terrain conservaient à l’esprit l’originalité des objets exhumés et étudiés dès la fin du XIXe siècle à Cholet même et dans ses environs. Le temps semblait donc venu de proposer une vaste synthèse des connaissances accumulées au fil des recherches archéologiques. Un projet se met en place, souhaité par l’AMA (Association maziéraise d’archéologie), impulsé par la Ville de Cholet et soutenu par les services de l’Etat. Le cadre géographique retenu s’étend sur Cholet et sa région proche, sans s’interdire des incursions plus lointaines lorsque le propos le justifie. Quant au cadre historique, il court des premières traces d’occupation humaine jusqu’au XIe siècle, époque au cours de laquelle le nom de la ville de Cholet apparaît pour la première fois dans les textes. L’exposition se fixe alors pour

objectif de présenter la longue évolution d’un territoire. L’évocation des sociétés qui l’ont successivement occupé permet d’insister sur la part qu’elles ont prise à l’organisation de l’espace par la création des paysages, des axes de communication et des lieux de vie et par la définition des cadres politiques et religieux qui, on le constate, sont particulièrement mouvants dans notre région. Qui dit organisation de l’espace, dit importance du phénomène urbain. Traqué chez les Celtes, repéré à l’époque romaine, il est étudié de près à la fin de l’Antiquité et au début du Moyen-Âge car c’est précisément en ces temps-là qu’émerge petit à petit ce qui deviendra plus tard la ville de Cholet. Dans cette exposition sont réunis plus de 500 objets en provenance de diverses collections. Citons les fonds publics : le Musée d’Art et d’Histoire de la Ville de Cholet, l’Etat avec les services de la DRAC Pays-de-la-Loire et du MAN (Musée d’archéologie nationale), le Musée départemental Dobrée à Nantes. Listons les collections privées rassemblées par des associations telles l’AMA (Association maziéraise d’archéologie) et la SLA (Société des sciences, lettres et arts) ou par des individuels heureux de l’occasion qui leur est ainsi offerte de montrer les objets qu’ils conservent. Toutes ces pièces, certaines bien connues, d’autres inédites, nous disent tout d’abord que l’occupation humaine est continue sur ce territoire depuis le Paléolithique inférieur (300 000 ans avant J-C). Elles témoignent ensuite de la vitalité de ces sociétés locales : les traces de la période du Néolithique sont imposantes et originales, celles de l’Âge du Bronze sont très denses. Comme partout en France, objets et données issus de sites de l’Âge du Fer (la fameuse époque des Gaulois !), nous livrent leur lot de révélations sur un monde très mal connu. L’importance que prend l’exploitation de l’or à l’époque romaine est soulignée. Par ailleurs, les différentes formes urbaines que nous 11

pouvons rencontrer localement permettent de nourrir les réflexions relatives à la ville et ses évolutions. Enfin, et ce n’est pas son moindre mérite, le patrimoine archéologique de Cholet autorise une plongée approfondie dans une période encore trop peu explorée, celle d’une transition entre Antiquité et Moyen-Âge durant laquelle sujets de l’Empereur romain et populations dites « barbares » partagent une histoire commune. Le mobilier archéologique choletais se prête ainsi à l’actuel et vaste travail de questionnement auquel historiens et archéologues accordent toute leur attention. Plus globalement, en proposant l’exposition « Emergence Archéologie et Histoire du Choletais », les chercheurs membres du comité scientifique et contributeurs au catalogue, n’ignorent rien des enjeux à la fois scientifiques et culturels de cette initiative. Enjeux scientifiques d’une synthèse des connaissances à l’échelle d’un territoire, avec le souci constant de proposer une nouvelle lecture des informations en notre possession, au-delà de leur côté épars et bien souvent incomplet. Enjeux scientifiques encore d’une étude plus poussée et d’une valorisation des collections archéologiques parvenues jusqu’à nous avec, à l’horizon, de possibles publications nourries de toutes ces données actualisées. Enjeux culturels enfin avec ce désir de diffuser un savoir auprès d’un large public dont on connaît le grand intérêt pour son passé collectif et la curiosité à comprendre, pour mieux le respecter, le travail des archéologues. Les lecteurs de cet ouvrage et les visiteurs de l’exposition sauront répondre à ces multiples sollicitations. Eric Morin Directeur des musées de Cholet


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Fouilles archéologiques du Chemin creux, Mazières-en-Mauges (49), 2008.


Paléothique ancien

Paléothique moyen

Paléothique final

Mésolithique - 20

476

- 450 - 300 000

- 150 000

- 40 000

- 9500

- 5000

- 2200

- 800

XIeS

1 S u r l e s t r a c e s d e s c h a s s e u r s - c u e i l l e u r s

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Biface.Silex.


Les Homo erectus et les Néandertaliens occupent la région (Le Paléolithique ancien et moyen) Une lente évolution biologique

aux portes de l’Europe il y a environ 1,8 million d’années (site de Dmanisi dans le Caucase) et il était présent en Espagne il y a 1,2 million d’années (site d’Atapuerca dans la région de Burgos).

Le temps des chasseurs-cueilleurs est divisé traditionnellement en quatre périodes, le Paléolithique inférieur, le Paléolithique moyen, le Paléolithique supérieur et le Mésolithique. Mais aujourd’hui les préhistoriens s’accordent pour dire que les choses ne sont pas aussi tranchées.

Un décalage existe entre l’arrivée de ces premiers hommes dans le sud de l’Europe au climat méditerranéen et les régions septentrionales où ils sont apparus entre 600 000 ans avant J-C qui est un chiffre assuré et 1 million d’années avant J-C qui semble un chiffre maximal. Homo antecesor n’est connu pour l’instant qu’en Espagne (à Atapuerca). A-t-il peuplé nos régions ? On ne le sait pas. Viendrait ensuite l’Homo heidelbergensis (d’Heidelberg en Allemagne), sorte d’Homo erectus européen. Le site de Tautavel près de Perpignan est bien connu pour livrer des restes de cet hominidé. Cet Homo heildebergensis/erectus aurait évolué lentement pour donner les Prénéandertaliens qui donnèrent sur la fin les Néandertaliens dont l’exemple français le plus connu est probablement celui de La Chapelle-aux-Saints.

Par exemple, il n’y a pas de véritable rupture entre le Paléolithique ancien et le Paléolithique moyen. Rappelons que la phase moyenne du Paléolithique se définit comme une meilleure maîtrise dans le débitage des pierres pour obtenir des supports qui, après aménagements, donneront divers outils : lames et pointes souvent retouchées, grattoirs, racloirs... Plutôt que d’une rupture, il s’agit en fait d’une évolution, assez lente d’ailleurs. En revanche, on parle volontiers de rupture entre les Paléolithiques moyen et supérieur, car d’importants changements culturels mais aussi anthropologiques s’opèrent dans un laps de temps relativement court.

Si l’on prend la moyenne de 800 000 ans avant J-C pour l’apparition d’Homo erectus en France et sachant qu’Homo sapiens (l’homme moderne) arrive vers 40000 ans avant J-C, il a fallu 760 000 ans pour passer d’un représentant du genre Homo, qui se tient debout et maîtrise le feu, à un homme au cerveau comparable au nôtre. Si l’on compte trois à quatre générations humaines par siècle, cela donne approximativement 22 800 à 30 400 générations, ce qui induirait une évolution somme toute assez lente. La recherche avançant assez vite dans ce domaine, ces chiffres ne donnent toutefois qu’un ordre de grandeur.

En l’état actuel de nos connaissances, le genre Homo viendrait d’Afrique où il serait apparu il y a 2 à 2,5 millions d’années. Il était

Evocation d’un paysage du Paléolithique ancien. © Gilles Tosello. Evocation de l’Homo Erectus. © Gilles Tosello.

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Les changements culturels

conjectures et les hypothèses. On imagine pour ces périodes, les hommes vivants en petits groupes ne dépassant pas quinze à vingt personnes, sachant qu’il est plus difficile de nourrir un plus grand nombre d’individus compte tenu des conditions climatiques régulièrement rigoureuses qu’ils rencontraient et du degré de développement technique qu’ils connaissaient. On imagine, par comparatisme ethnographique, que ces petits groupes devaient a minima se rencontrer pour échanger des femmes, impératif à la survie de l’espèce. Cela a longtemps été débattu pour les Néandertaliens mais on sait aujourd’hui qu’ils maîtrisaient le langage, en tout cas ils en avaient les capacités phonatoires.

Plus ou moins parallèlement à l’évolution biologique se fait l’évolution culturelle. Elle est mise en évidence par la taille de la pierre (Paléolithique peut se traduire par « âge de la pierre ancienne »). En effet, si les pierres taillées nous sont parvenues par millions, les objets en os ou en bois sont plus difficiles à étudier car, pour des raisons de non conservation, ils n’ont laissé que peu de traces. Les objets les plus étudiés sont les outils et les armes. Il ne faut pas oublier que la Préhistoire, née au XIXe siècle, s’inscrit dans le courant occidental du positivisme. L’homme est avant tout un Homo faber et l’évolution technique ne peut aller que dans le sens du progrès.

Autre exemple illustrant les difficultés rencontrées : comment prouver qu’ils étaient vêtus de peaux de bêtes, tant que l’on n’aura pas retrouvé un homme préhistorique ainsi vêtu piégé dans la glace comme le célèbre homme protohistorique Otzi découvert dans les Alpes. On le suppose de manière indirecte par la présence de poinçons en os supposés percer les peaux (par exemple site de la Quina dans les Charentes) et par l’étude des traces de grattage des peaux laissées sur les silex. Néanmoins, l’aiguille à chas ne sera inventée qu’au Paléolithique supérieur. Dans le domaine des armes, nous disposons d’un peu plus de précisions. Outre les silex taillés et notamment des pointes que l’on pense emmanchées en bout de lance, on a retrouvé des épieux appointés mais aussi des javelots de deux mètres de long (site de Schoningen en Allemagne).

Ces lointaines civilisations nous sont également connues par les comportements de subsistance (chasse, « charognage », anthropophagie, pêche, cueillette), par les comportements dits de « confort » ou utilitaires (construction de cabanes ou de huttes, maîtrise du feu, utilisation de l’ocre pour assainir, utilisation de colles/résines) et parfois par les comportements non utilitaires voire symboliques (fabrication d’objets assimilés à des manifestations esthétiques ou religieuses, usage supposé de colorant corporel, pratique de l’inhumation, dépôts d’offrandes dans la tombe). Concernant les modes de vie et les relations sociales, les choses sont très difficiles à appréhender et on est plutôt dans les

Evocation d’un paysage du Paléolthique moyen. © Gilles Tosello. Evocation de l’Homo Neandertalensis. © Gilles Tosello.

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Géologie de la France de l'Ouest

Il devait également exister des racloirs sertis dans des manches en bois ou partiellement recouverts d’une pièce en cuir pour être tenus en main. On sait qu’à la fin de la période ils connaissaient la technique pour fendre du bois et produire des planches mais on ne sait pas s’ils ont été jusqu’à les employer pour construire des abris. On connaît des exemples de cabanes en plein air ou appuyées sur les parois des abris sous roche ou des grottes peu profondes, les grottes profondes n’étant fréquentées qu’au Paléolithique supérieur. Il faut distinguer les sites où a régné une activité intensive ou de longue durée quelle qu’en soit la nature (extraction et production de silex, site récurrent d’abattage de gibier, campement de regroupement), de ceux qui ont eu une activité peu intensive ou de courte durée (haltes de chasse, halte pour s’approvisionner en blocs de matière première, petit campement satellite d’un grand campement).

Nord

Angers Nantes Cholet Source : G.Berthaud

Massif Armoricain Terrains Jurassiques Terrains Crétacés Terrains Tertiaires

Les hommes appréhendaient leur environnement en surmontant différentes contraintes : les variations climatiques (alternance de périodes chaudes et froides) ; la faune, la flore et leurs modifications en fonction de ces mêmes variations ; l’accès aux ressources lithiques ou encore les contacts nécessaires à la reproduction de l’espèce évoqués ci-dessus. On suppose donc que ces petits groupes suivaient les troupeaux pendant leurs migrations, en période climatique rigoureuse. Ils devaient au contraire être plus statiques pendant les périodes de réchauffement. En effet, en période chaude, la faune change et s’adapte au milieu forestier et est donc plus sédentaire. En période froide, le couvert forestier régresse fortement, ne subsistant que sous forme de bosquets dans les endroits abrités et laisse la place à un milieu ouvert de prairies. C’est ainsi, par exemple, que le renne est très présent en période froide et qu’il remonte vers le nord au fur et à mesure que le climat se réchauffe. Le cheval, plus à l’aise dans les milieux ouverts que fermés, est davantage présent pendant les périodes froides ou intermédiaires. Il a en revanche tendance à disparaître en plein optimum climatique au profit du cerf.

D’une manière générale dans l’Ouest, les roches provenaient d’un rayon de zéro à cinq kilomètres du site préhistorique pour les temps les plus anciens, mais cette distance pouvait atteindre cent à cent vingt kilomètres à la fin du Paléolithique moyen, ce qui assurait une plus grande diversité des matériaux. Jean-Marc Gouédo

Les sites de Noisy et de Guignefolle Nous n’avons que peu d’éléments pour ces deux gisements, car les données proviennent de ramassages de surface et les séries lithiques sont assez pauvres en objets : quelques dizaines à Guignefolle et un peu moins de deux cents à Noisy. A Guignefolle, les hommes ont utilisé un matériau strictement local, la rhyolite, et quelques amphibolites. Le silex et les autres roches comparables comme la calcédoine sont absents. Les hommes qui vivaient là avaient donc un territoire de chasse et de vie relativement restreint. Le contraste est saisissant avec le mobilier venant du site de Noisy pourtant très proche. Ici les matériaux sont variés, très colorés, globalement nettement plus favorables à la taille. Le silex, très présent, pouvait provenir soit des alluvions de la Loire à environ cinquante kilomètres vers le nord ; soit de Touraine, plus précisément de l’auréole du Crétacé qui borde vers l’est le Massif Armoricain à environ cinquante kilomètres ; soit des terrains crétacés du Poitou, à environ quarante kilomètres vers le sud. Il ne semble pas y avoir eu à Guignefolle de méthode Levallois (technique permettant de prévoir la forme de l’éclat que l’on va

Les hommes sont donc plus ou moins mobiles suivant les conditions climatiques. Ils ont cependant besoin de roches robustes mais facilement taillables pour pratiquer leurs activités. Il leur faut abattre du gibier, couper et désarticuler des pièces de viandes, couper des peaux. Ils doivent également pratiquer un traitement abrasif pour rendre ces dernières utilisables. La coupe et la préparation des végétaux sont essentielles pour les épieux, lances, javelots, manches, perches d’abris, combustible pour le foyer. La collecte des matériaux entraîne donc des déplacements pratiquement obligatoires, car il est difficile de prouver que le colportage existait déjà ou que ce sont les pierres qui ont circulé et non les hommes. 16


Nord

Angers Nantes Guignefolle

Mobilier du Paléolithique moyen : nucléus, bifaces, chopper, racloirs, pointes, éclats et lames. Site de Noisy, Mazières-en-Mauges (49).

Noisy Source : G.Berthaud

Cholet

Provenances des matériaux des sites du Paléolitique ancien et moyen Guignefolle

obtenir). On peut noter également l’absence de nucléus (reste du bloc après les enlèvements) en forme de disque et d’une manière générale de débitage typiquement acheuléen. L’obtention des éclats dépend de la nature du matériau local, qui se taille selon des plans de clivage, ce qui explique que les méthodes habituelles ne se rencontrent pas ici. Il en est de même avec l’outillage qui est fortement adapté lui aussi au matériau. Les pointes triédriques (présentant trois faces) et les bifaces dominent sur quelques racloirs. L’aspect fruste de l’ensemble n’est donc qu’apparent et cette industrie peut être classée comme étant un Acheuléen supérieur. Elle est difficilement datable avec précision, mais on peut avancer prudemment un âge entre 350 000 et 250 000 ans avant J-C. Elle se placerait donc quelque part à la fin du Paléolithique inférieur ou au début du Paléolithique moyen. L’homme qui l’a produite pourrait donc être un Homo erectus terminal ou un Prénéandertalien. L’image qui se dégage du mobilier de Noisy est tout autre. On vient de voir que le territoire, connu et a priori parcouru par ces hommes, était beaucoup plus important que celui de Guignefolle. On peut commencer à parler ici de territoire régional. Même

s’ils ont utilisé des matériaux locaux, il est certain que les hommes de Noisy connaissaient des milieux différents de celui du Massif Armoricain avec ses roches ingrates à tailler. Le débitage est nettement plus élaboré et diversifié : la production des éclats est de type Levallois, alors que celles des lames (éclats allongés) est de type Paléolithique supérieur. L’outillage confirme cette évolution qualitative, les racloirs sont plus légers, il y a des lames retouchées et des pièces esquillées (présentant des enlèvements particuliers). On note également la présence de quelques petits bifaces de formes ovalaire à subcordiforme (forme proche d’un coeur). L’ensemble évoque sans ambiguïté une industrie moustérienne. En revanche, il est plus difficile d’être affirmatif pour le faciès. Il peut s’agir d’un Moustérien de tradition acheuléenne ou d’un Moustérien à petits bifaces qui est très fréquent dans la moitié ouest de la France. On est presque assurément dans un Paléolithique moyen récent. On peut avancer avec prudence une datation de 60 000 à 40 000 ans avant J-C. Les habitants du site de Noisy seraient donc des Néandertaliens. Jean-Marc Gouédo 17

Massif Armoricain Terrains Jurassiques Terrains Crétacés Terrains Tertiaires

Roches locales Territoire de Guignefolle Noisy Roches locales Territoire de Noisy Jaspe et galets de silex Silex

Mobilier du Paléolithique ancien : racloirs, pointes, biface, éclats. Site de Guignefolle, Nuaillé (49).


L e s

d e r n i e r s c h a s s e u r s - c u e i l l e u r s e n C h o l e t a i s (Le Paléolithique final et le Mésolithique)

Evocation d’un paysage du Paléolthique final.

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Un changement climatique global

qui autorisèrent la survie des groupes. Elles prennent une tournure tout à fait actuelle, dans une ambiance médiatique saturée d’informations anxiogènes sur le sujet. Dans la région de Cholet, les éléments à notre disposition sont encore sporadiques et documentent deux phases : l’Azilien (12 000-11 000 avant J-C), qui évolue pendant environ un millénaire dans une ambiance encore steppique et le Mésolithique (9500-5000 avant J-C) qui se déroule sur 4 500 ans dans un milieu forestier de plus en plus fermé. Comme pour les périodes antérieures, l’absence de roches taillables dans le proche environnement est une contrainte forte pour des gens basant leur outillage sur cette matière ; elle a toujours dû être contournée par les déplacements directs sur les sources ou les échanges : aucun des deux choix ne fut anodin, car il impliquait d’entrer en contact avec des voisins.

Il y a plus de 15 000 ans, le climat de la terre a entamé très progressivement un réchauffement, sous l’impulsion de cycles astronomiques complexes, qui ont permis la mise en place de la période chaude dans laquelle nous vivons. Si en moyenne sur la planète, le réchauffement ne fut que d’environ cinq degrés, ses conséquences furent particulièrement spectaculaires et façonnèrent les caractères actuels de nos paysages. Pour l’ouest de la France, c’est la remontée de la mer qui a d’abord eu un impact majeur, non seulement parce qu’elle a ennoyé des espaces immenses, réduisant d’autant les territoires de chasse et de collecte, mais aussi parce qu’elle a relevé le lit des cours d’eau, adouci considérablement le climat et entrainé le déplacement vers l’intérieur de groupes humains. Le niveau de l’océan, situé à plus de cent vingt mètres sous l’actuel au cœur de la glaciation, s’est stabilisé à une dizaine de mètres sous l’actuel vers 6000 avant J-C et la remontée a pris une tournure moins impressionnante par ses conséquences géographiques. En parallèle, faune et flore connurent des modifications drastiques, qui ont vu les paysages choletais passer d’une steppe parcourue par des grands troupeaux à une forêt dense de feuillus sillonnée par des bandes de mammifères plus réduites. Les oscillations climatiques furent multiples, avec même un retour du froid particulièrement marqué entre 10 700 et 9500 avant J-C ; certes il ne permit pas un retour des espèces arctiques, mais il eut probablement un impact sur l’organisation économique de ces peuples. Comment s’adaptèrent des hommes et des femmes qui vivaient de chasse et de cueillette ? Et dans la mesure où ce processus fut très progressif, quelles formes prirent les différentes sociétés de chasseurs-cueilleurs régionaux ? Tout l’enjeu des recherches actuelles est de cerner le rythme des changements et de comprendre les adaptations humaines Evocation de l’Homo Sapiens. © Gilles Tosello.

La fin des temps glaciaires en Maine-et-Loire La culture dite azilienne (du Mas d’Azil, célèbre grotte de l’Ariège) a été repérée par deux fois en Anjou, d’une part lors d’une vaste fouille préventive sur l’autoroute A87 à Mozésur-Louet, d’autre part par un ramassage de surface à Chanteloup-les-Vignes. Partout en France, cette culture s’est déroulée pendant un épisode clément (nommé Alleröd). A quoi ressemblait alors le Maine-et-Loire ? Les effets de la remontée du niveau de la mer sur la Loire et l’Aubance ne se faisaient pas encore sentir. Le cours du fleuve était certainement beaucoup plus encaissé qu’aujourd’hui ; si au plus fort des temps glaciaires de multiples chenaux divaguaient dans le lit de la Loire, avec le réchauffement et les modifications de la pluviosité, ils cédèrent le pas à un chenal principal plus profond. Sous nos latitudes, la clémence du climat, proche de l’actuel mais avec une plus grande instabilité, permit l’installation d’une forêt de bouleaux et de pins, avec aussi des bouquets de saules en zones humides. En nord-Mayenne, les analyses de pollens dans les tourbières montrent encore une steppe à herbacées, ce qui distingue l’ouest de la France du reste du pays. Les températures semblent fraîches et le fort taux d’humidité entraîne les comparaisons vers les Iles britanniques. Les faunes n’ont plus de caractères arctiques ; dans le nord de la France comme en Aquitaine, la chasse aux gros mammifères concerne le cheval, l’aurochs, le cerf, soit 19


un spectre faunique caractéristique d’un milieu tempéré et de forêt claire. Le sanglier est encore rare. Le réchauffement du climat permet donc le repeuplement humain du nord de la France. Avec des niveaux marins inférieurs d’au moins une cinquantaine de mètres sous l’actuel, la Manche est exondée et la Bretagne ferme au sud un immense estuaire qui la sépare des groupes du sud de l’Angleterre. Les pointes aziliennes, en forme de segments de cercle allongés, sont caractéristiques de la période et cette mode technique viendrait du bassin méditerranéen. L’adoption de l’arc est une des hypothèses fréquemment émises pour rendre compte de cette diffusion, mais il faut rester prudent en ce domaine, car nous ne disposons que d’éléments partiels (arcs et flèches ont disparu, il ne reste que les pointes de pierre). Théoriquement, la

Galets gravés du Paléolithique final. Site des Challoignes, Mozé-sur-Louet (49).

chasse est facilitée en milieu boisé par cette arme légère qui ne demande pas d’amples mouvements pour sa mise en œuvre. Mais à l’Alleröd, on l’a vu, l’ambiance est encore steppique ! Cette modification technique n’est donc pas strictement corrélée aux changements environnementaux, mais elle signale peutêtre d’autres organisations de la chasse faisant appel plus à l’affût qu’au rabattage. C’est dans une cuvette formée par la convergence de plusieurs ruisseaux que les hommes de l’Azilien se sont installés de multiples fois, à l’abri des vents, sur l’actuelle commune de Mozé-sur-Louet, au lieu-dit Les Chaloignes. L’environnement immédiat des hommes était fortement marqué par le fleuve, avec dix kilomètres de rives accessibles à moins d’une heure de marche. Les occupants aziliens sont revenus plusieurs fois, sur des petites zones de 25 à 70 m². Aucun aménagement, aucun foyer, aucune zone rubéfiée, aucun effet de paroi n’ont été perceptibles, ce qui accentue l’image de passages assez brefs, dans un cycle de déplacements probablement rapides. Les abris forcément légers étaient à proximité des tas de silex abandonnés. L’acquisition du silex sur les sources les plus proches fut la solution la plus couramment adoptée par les tailleurs : il s’agit pour l’essentiel de galets de terrasses de la Loire, dont les plus proches se trouvent à moins de deux kilomètres de distance. Mais on observe dix matières à cortex non-roulé qui proviennent des bassins sédimentaires, en proportions variables sur les locus. Les contacts ou les déplacements directs mettaient donc les hommes en relation avec des groupes de l’ouest et de l’est, à plusieurs dizaines de kilomètres, au moins dans l’axe de la Loire et évidemment peut-être ailleurs. L’ocre était récupérée par-delà le fleuve, à une dizaine de kilomètres au nord, pour en faire de drôles de crayons : utilisés dans les rituels pour teinter les galets gravés, ils étaient utilisés également dans le tannage des peaux. On réparait les armatures de chasse, on en fabriquait d’autres, on taillait aussi d’autres outils à partir de blocs déjà entamés, récupérés au bord du fleuve ou de bien plus loin en Touraine. On travaillait le bois, l’os, la peau sur place et sur d’autres zones, on repartait avec de nouveaux outils, on laissait peutêtre des réserves pour un prochain passage. Monopointes asymétriques à dos courbe (dites pointes aziliennes), très rares lamelles à dos, burins sur troncature ou sur cassure, grattoirs unguiformes ou sur bout de lame, sont les principaux outils aménagés de l’Azilien des Chaloignes. Bâtons d’ocre et galets gravés de fins traits réalisés au tranchant de silex témoignent enfin de cosmogonies et de rituels aujourd’hui disparus. 20


Le Mésolithique : et maintenant la forêt !

Au sud du département du Maine-et-Loire, l’Etang de Péronne à Chanteloup est un autre point important pour la compréhension de l’Azilien de l’Ouest. Le site a été découvert par M. Goudé sur la rive d’un étang artificiel, et prospecté durant les années 1990 sur une petite surface. Rien ne distingue topographiquement cet endroit, sinon une source pérenne dans un vallon très faiblement imprimé. Les hommes de l’Azilien sont-ils attirés par de telles configurations topographiques ? Les silex blonds issus de galets roulés ramassés sur les rives de la Loire comptent pour plus de la moitié des pièces ; on décompte cependant quatorze types de silex à cortex brut et un quartzite marron à la texture extrêmement fine dont les plus proches affleurements aujourd’hui connus sont dans la région de Montbert au sud de Nantes. Bon nombre de ces matières, comme le silex roulé issu des terrasses de la Loire ou le silex noir issu de niveau turonien du Thouarsais, sont aussi présentes aux Chaloignes, avec ici des distances d’approvisionnement supérieures à trente kilomètres. Les lames aux nervures irrégulières, tirées à la percussion directe, sont la production dominante, avec de nets indices d’un débitage à partir de deux plans de frappe. La structure générale de l’outillage et le style de la production sont comparables à ce que l’on connaît ailleurs en France : grattoirs sur éclat, burins ou pointes à dos aziliennes.

A partir de 9500 avant J-C, le climat bascule dans une dynamique de réchauffement que l’on nomme Holocène et qui n’a toujours pas pris fin. La steppe se couvre progressivement d’arbres (d’abord le bouleau, puis surtout le pin). A partir de 8000 avant J-C, la France se couvre de noisetiers dont les fruits à coque font l’objet d’une consommation effrénée par les hommes. Il s’agit donc de formations

Microlithes : nucléus, micros burins, armatures du Châtelet, pointes, lame, lamelle, triangle isocèle, trapèze. Pierre. Différents sites des environs de Cholet (49).

Nomades par nécessité pour exploiter des ressources dispersées sur le territoire, les hommes et les femmes de l’Azilien ont laissé des traces certes discrètes, mais qui nous dévoilent déjà quelques grands caractères des sociétés contemporaines du réchauffement climatique. La mobilité du groupe est importante, mais l’environnement doit être assez prodigue, puisque l’approvisionnement en silex ne nous montre pas de très larges déplacements.

Nord

Angers

Massif Armoricain

Terrains Crétacés Terrains Tertiaires Péronne La Breffière Galets de la Loire Quarzarénite de Monbert Silex du Thouarsais Mobilier du Paléolithique final : nucléus, percuteurs, burins, grattoirs, lames, triangles isocèles, pointes. Site de Péronne, Chanteloup (49).

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Territoires de Péronne et de La Breffière

Nantes Cholet Cholet

Péronne

La Breffière

Source : G.Berthaud

Terrains Jurassiques

Provenances des matériaux des sites du Paléolithique final et Mésolithique


arbustives basses qui vont progressivement se fermer à mesure que se développent des espèces comme le chêne et le hêtre, vers 7000 avant J-C. Jusqu’aux premiers défrichements des agriculteurs, autour de 5000 avant J-C, ces forêts profondes sont le quotidien des hommes du Mésolithique. Faute de site archéologique d’ampleur, nos connaissances sur le sujet dans la région de Cholet sont sporadiques. En revanche, les nombreuses trouvailles en surface des champs, par exemple à La Breffière à Mazières-en-Mauges, à Puy-Albert ou à Roche Allon en Mauléon nous permettent d’ores et déjà d’esquisser quelques caractères des techniques de l’époque, tout en démontrant que le Choletais n’est pas un désert humain. C’est l’époque de l’arc et des outils composites. Par composite, on entend l’assemblage, sur des manches en bois, d’éléments tranchants de pierre aux formes géométriques (les armatures et les pointes de flèches). Il s’agit là d’une technologie permettant

les réparations rapides des armes et donc une plus grande fluidité dans l’exploitation de l’environnement. Au premier Mésolithique (9500 - 6500 avant J-C), les armatures caractéristiques sont des triangles étroits, des segments ou des pointes ; au second Mésolithique (6500 - 5000 avant J-C), ce sont des triangles larges et des trapèzes. L’acquisition de roches taillables se fait au plus près, ce qui signifie, comme à l’Azilien, la Loire et peut-être le seuil du Poitou. Dans les régions voisines où existent des sites fouillés et bien documentés, l’extraordinaire capacité d’adaptation des hommes à ces environnements forestiers apparaît avec évidence, avec des activités de chasse, de pêche et de collecte pratiquées sur fond de nomadisme plus ou moins intensif selon la dispersion des ressources. Guerre et cannibalisme sont visiblement connus et nous dissuadent d’une vision angélique de ces sociétés qui ont su exploiter les profondes forêts choletaises. Grégor Marchand

Evocation d’un paysage du Mésolithique.

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Néolithique - 20 - 450 - 300 000

- 150 000

- 40 000

- 9500

- 5000

- 2200

- 800

476 XIeS

2 Premières sociétés agro-pastorales en Choletais

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Vase du Néolithique. Céramique. Site des bords de Loire (49).


Le grand basculement du Néolithique La néolithisation ! Par ce nom barbare, les archéologues désignent le processus de transformation d’une économie de chassecueillette en une économie basée sur l’élevage et l’agriculture. Apparue au Proche-Orient il y a 10 000 ans, la domestication des plantes et des animaux visait probablement à s’adapter à l’accroissement démographique de sociétés de chasseurscueilleurs déjà sédentaires. Un tel changement dans le rapport à la nature impliquait au préalable de mettre en œuvre une autre manière de penser le monde et par conséquent un changement de croyances. C’est donc un bouleversement fondamental que connut l’humanité et dont nous sommes les directs héritiers. L’expansion de ces sociétés en Europe répondait à la fois à une logique démographique et à un fort renouvellement de terres agricoles s’épuisant rapidement. Elle ne fut pas fluide : les chasseurs du Mésolithique occupaient les lieux, mais il faut également prendre en compte les transformations et les crises au sein des sociétés agricoles ou encore le climat auquel il fallut adapter les animaux et les cultigènes. C’est donc par un processus très complexe, associant colonisations, acculturations, échanges, et probablement conflits violents, que le continent européen a basculé dans ce mode de production entre 6500 à l’est jusqu’à 4000 avant J-C à l’ouest. A partir de l’Europe centrale, on voit apparaître deux courants principaux de progression du Néolithique, l’un qui passe par le Bassin méditerranéen et arrive dans la région de Nice vers 5800 avant J-C, l’autre qui s’étend dans la grande plaine nordeuropéenne et franchit le Rhin vers 5300 avant J-C. Chacun porte avec lui, mais sous des formes différentes, un bagage technique totalement nouveau, comprenant la céramique, les haches polies, les animaux et les plantes domestiques ou encore des architectures de maisons plus sophistiquées. Foyer à pierres chauffées. Site du Chemin Creux, Mazières-en-Mauges (49),

Mobilier du Néolithique : flèches, perçoirs, lames, racloirs, grattoirs, encoche, haches et hache marteau, Différents sites des environs de Cholet (49).

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Hache avec son emmanchement. Pierre, bois de cerf. Montjean-sur-Loire (49).


Il existe certes des indices convaincants de la présence du courant centre-européen, dit Néolithique ancien de type VilleneuveSaint-Germain, dans le Val de Loire vers 4900 avant J-C, par exemple à Beaufort-en-Vallée, à Brézé, à Tigné, aux Alleuds et dans de nombreuses récoltes sur les berges de Loire. Mais le courant méridional est arrivé en Vendée vers 5 300, soit plusieurs siècles auparavant. On doit laisser à l’imagination l’hypothèse d’une néolithisation du Choletais par cette voie méridionale. Tout ce que l’on peut écrire, c’est qu’un certain type de pointes de flèche mésolithique (armature du Châtelet) est fabriquée sur un modèle néolithique, avec la preuve d’un contact qui a dû concerner d’autres domaines techniques (céramique, élevage, agriculture ?). Mais attendons la première preuve pour oser diagnostiquer en Choletais un phénomène qui ailleurs en Europe trouve illustration à maintes reprises. La part des autochtones dans ce processus est de ce fait impossible à estimer.

agriculteur ? Probablement pas, mais il semble bien symbolique d’une nouvelle manière d’intervenir sur l’espace et de modeler les paysages. Un autre coup de projecteur a été récemment donné sur des pratiques assez mystérieuses de ces premiers agriculteurs. Le site du Chemin Creux à Mazières-en-Mauges a livré trois grands foyers à pierres chauffées, de deux à presque cinq mètres de long, construits de manière similaire : creusement d’une fosse, feu intense à l’intérieur, dépôt sur les braises encore brûlantes d’une chape de pierres jointives, extraites d’une carrière à proximité immédiate. L’objectif était soit culinaire, soit thermique. Ils témoignent donc d’un gros investissement de travail pour un usage exceptionnel, sans abandon de vaisselle ou d’outils. Ces grands foyers sont datés par le radiocarbone autour de 4700-4600 avant J-C. Pour les caractériser, la grande visibilité des feux installés en haut de versant et l’usage préférentiel d’une seule espèce d’arbre - le chêne - entrent peutêtre en ligne de compte. L’analyse anthracologique a cependant montré des arbres qui grandissent dans des milieux très fermés, probablement une forêt primaire, ce qui devait nuire pour le moins à l’observation des feux à longue distance ! C’est la présence de carrières à proximité immédiate des foyers qui confère au Chemin Creux un caractère important. Ce lien fonctionnel n’a jamais été démontré ailleurs en France pour l’élaboration de telles structures et offre à ce site une sorte de dramaturgie, qui reste elle aussi bien mystérieuse. En somme, les premiers indices du Néolithique en Choletais sont rituels ! Nul doute que les découvertes futures corrigeront cette première impression.

Premières et mystérieuses structures néolithiques du Choletais Qui entra pour le premier acte du Néolithique en Choletais ? Le décor est planté, c’est une forêt profonde de chênes et de hêtres, où batifolent cerfs, chevreuils et sangliers. Le menhir de La Bretellière à Saint-Macaire-en-Mauges présente une gravure serpentiforme, qui oriente typologiquement la datation vers le début du Ve millénaire ; est-ce la première intervention de l’homme

Armatures de flèches tranchantes. Silex. Site du Belvédère, Cholet (49).

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Meule. Poudingue. Site de la Roche du Ribalet, Cholet (49). Broyeur. Roche métamorphique. Environs de Cholet (49).


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Vases. CĂŠramique. Sites des bords de Loire (49).


Les habitats du Néolithique dans le Choletais

Briquet et pierres à feu. Silex, pyrite. Mazières-en-Mauges (49).

Poignards. Silex. Sites de La Barbinière, Moulins (79) et de Mazières en-Mauges (49).

Outils en cristal de roche. Quartz. Le Belvédère, Cholet (49).

La suite de la période néolithique reste encore mal connue, même si de grands sites de surface ne laissent guère de doute quant à l’importance de l’occupation, dès le Néolithique moyen (fin Ve et IVe millénaire avant J-C), comme à Puy-Albert, à Moulins ou à La Breffière (Mazières-enMauges). Au Néolithique récent (seconde moitié du IVe et début du IIIe millénaire), de vastes habitats de promontoire aux caractères particuliers viennent nous interpeller sur la nature des sociétés qui occupent alors la région. Sur le promontoire du Belvédère (ou de La Roche du Ribalet) à Mazières-en-Mauges qui domine le lac de Ribou (autrefois la rivière la Moine), des ramassages de surface ont permis de recueillir plus de 9 400 objets lithiques sur une superficie d’environ 1,5 ha. Parmi eux, plus de 200 flèches tranchantes, fracassées par l’usage et souvent brûlées, ont été distinguées, ainsi que cinquante fragments de haches polies (le plus souvent en silex), un débitage de petits éléments en cristal de roche très original, des céramiques, des pierres brûlées (probables éléments de foyers), trois meules et de nombreux percuteurs. Sur la plage du lac de Ribou, en contrebas du Belvédère, les découvertes furent également nombreuses. Ce site est aujourd’hui occupé par quelques maisons qui l’ont définitivement détruit. Il n’y a pas à cet endroit d’indice de fossé défensif, mais on avouera qu’une telle concentration d’extrémités de flèches utilisées laisse pensif... Des habitats de fond de vallée sont signalés par des trouvailles de surface de plus en plus nombreuses, signes d’un réseau dense d’habitats, notamment sur la commune de Cholet (La Garde, La Goubaudière, La Guinchelière, La Grande Moinie, La Souchelière, La Tortière, La Touche Aubert). Ce sont surtout les ensembles à flèches tranchantes du Néolithique récent qui dominent, tandis que les habitats du Néolithique final, à flèches perçantes et poignards du Grand-Pressigny, sont un peu moins nombreux. Avec la déforestation qui s’est intensifiée à partir du milieu du Ve millénaire, l’érosion a gagné rapidement en intensité abrasant les versants et engorgeant les fonds de vallée, l’ensemble créant les paysages que nous observons aujourd’hui. Nul indicateur archéologique ne nous permet d’imaginer un monde cloisonné, bien au contraire.

Le Carteron : un atelier de polissage de haches L’un des symboles de ces réseaux économiques ouverts et dynamiques se trouve sur la commune de Cholet, au lieu-dit Le Carteron. Les neuf polissoirs en granit découverts au bord de la Moine étaient destinés au polissage des haches au Néolithique : les ébauches taillées étaient frottées dans des rainures et des cuvettes avec adjonction fréquente d’eau et de sable. Le site a hélas été très perturbé : trois de ces roches aux traces si caractéristiques trônent dans le jardin du Mail, au centre de Cholet. Une telle concentration est exceptionnelle dans l’ouest de la Polissoir. Granite. Le Carteron, Cholet (49).

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Fragment de vase campaniforme. Céramique. Les Natteries, Cholet (49).

France, mais ce qui accroît l’intérêt de ce site, c’est l’absence paradoxale de carrières à proximité. Un inventaire des haches réalisé par S. Cassen dans les environs du lac de Ribou montre la grande variété des roches polies : si la dolérite issue des ateliers de Plussulien, dans le centre de la Bretagne, a été identifiée, il y a également des roches métamorphiques ou plutoniques probablement locales. Seul le jaspe de Loublande, issu d’affleurement sur la commune du même nom, a une origine connue, mais cette roche siliceuse parfois vivement colorée n’a jamais fait l’objet d’une exploitation ni d’une exportation très développées. Les hommes du Néolithique importaient des ébauches de hache, dont la finition était réalisée sur l’atelier du Carteron ; l’habitat principal était probablement à proximité (des habitats ont été signalés sur la rive gauche de la Moine). Pour la fabrication de ces outils massifs aux usages multiples, le silex issu des plaines carbonatées plus lointaines est toujours minoritaire en Choletais, mais il montre bien l’ouverture des réseaux de diffusion au Néolithique. La découverte récente de vases campaniformes vient également nous confirmer cette circulation des modes, des styles et des hommes. L. Salanova, spécialiste de la période, a bien voulu nous éclairer sur ces éléments fort intéressants. Lors d’une fouille préventive réalisée aux Natteries à Cholet, une fosse a livré un gobelet décoré de style épimaritime classique, courant sur la façade atlantique. Un autre pot a été identifié à La Ferronière à Cholet et désigne un même horizon chronologique que le précédent, soit une phase avec avancée du Campaniforme aux environs de 2300 avant J-C.

Un morceau de terroir néolithique

Pendeloque. Serpentine. Mazières-en-Mauges (49).

La concentration importante de polissoirs au Carteron et les nombreux menhirs alentours sont les marques les plus évidentes de l’emprise néolithique sur les paysages du Choletais. D’autres informations archéologiques beaucoup plus discrètes nous révèlent une très forte implantation, notamment autour des vallées. Les réseaux d’acquisition des roches sont caractéristiques de cette partie du Massif armoricain, encore trop éloignée des plaines riches en silex pour pratiquer une économie dispendieuse en matériaux, mais déjà suffisamment proche pour bénéficier d’un apport régulier. Pas de repli culturel ou économique visible dans les données archéologiques disponibles, mais des sociétés organisées, où les activités guerrières n’étaient peut-être pas irrégulières. Grégor Marchand

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Néolithique - 20 - 450 - 300 000

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Hache d’apparat. Jadéite. St-Rémy-en-Mauges (49).


Le Choletais : un territoire sans aucun dolmen

assyriennes ou de la pyramide de Saqqarah en Egypte. C’est peut-être le moment de signaler ici que les dolmens de l’ouest de la France, entre Normandie et Gironde, ont été édifiés entre 4500 et 3000 ans avant J-C soit, pour beaucoup d’entre eux, entre un et deux milliers d’années avant les pyramides égyptiennes. Ils occupent une vaste région contournant le Choletais qui reste vide de tout dolmen. C’est là une grande énigme : pourquoi aucun dolmen n’a-t-il été élevé dans cette zone ? C’est peut-être en rapport direct avec l’existence du nombre important de grands menhirs qui se dressent dans le Choletais. En effet, il ne semble pas que ce soient les mêmes populations qui aient élevé tous les menhirs et les dolmens. Alors concernant le Choletais, un peuple à menhirs déjà bien installé sur son territoire aurait-il réussi à tenir à l’écart celui des dolmens angevins ? Ce n’est évidemment qu’une hypothèse de travail et bien des recherches seront à développer pour l’affirmer et la préciser, ou la rejeter.

Les mégalithes sont des monuments composés de grosses pierres (de mega, grand et lithos, pierre) mais tous les monuments faits de grosses pierres ne sont pas des « monuments mégalithiques ». Ce terme s’applique en fait aux seuls « dolmens » et « menhirs » de l’imagerie populaire.

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La Vilaine

Les menhirs du Choletais La Loire

Sè e vr se ai nt na

Dolmen conservé ou détruit (hors Morbihan) Menhir conservé ou détruit (hors Morbihan) Limite du Maine-et-Loire

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Source : G.Berthaud, d’après Dr Gruet

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Un « menhir » (pierre longue en breton) est une pierre dressée. Il peut être seul ou associé à d’autres, par deux ou plus, et former alors des alignements rectilignes plus ou moins longs, ou circulaires, abusivement appelés « cromlechs ». Aucun cercle de pierres n’a été formellement reconnu dans le département. Le Choletais compte quarante-deux menhirs dont dix-huit subsistent encore de nos jours. Certains formaient des alignements lâches avec des pierres debout aujourd’hui disparues, plusieurs centaines de mètres pouvant séparer deux menhirs consécutifs. Un nombre important des menhirs du Choletais occupe la rive nord de la Moine. Parmi ceux-ci, j’ai choisi de présenter plus spécialement ici les deux menhirs de La Garde et ceux du plateau de La Bretellière pour l’intérêt particulier qu’ils présentent.

Le Choletais, une terre de menhirs privée de dolmens

Les menhirs de La Garde Le petit menhir de la Garde, dit Pierre à l’huile, s’élève d’environ 3 m au-dessus du sol. « Le sommet est harmonieusement arrondi » nous dit le docteur Gruet, et je voudrais insister sur ce caractère particulier que nous allons retrouver plusieurs fois dans cette région. Le grand menhir de La Garde dit La Pierre à vinaigre, haut de 3,60 m, se dressait à quelques 300 m sur la colline au nord du petit menhir de La Garde. Il se trouve aujourd’hui dans le jardin public de Cholet où il a été transporté en 1888 parce que, très incliné au bord de la route de Maulévrier, il gênait la circulation. Un détail plus intéressant, car rarement souligné, est la forme arrondie de la partie supérieure de sa face nord-ouest comme pour le petit menhir de La Garde.

Il reste cependant que l’image du « dolmen », table de pierre en breton, maintenue à l’horizontale à quelque hauteur au-dessus du sol par des piliers de pierre dressés à chaque extrémité, n’est qu’une caricature qu’il faut rayer de sa mémoire. Le dolmen est une chambre funéraire de forme variable (ronde, polygonale ou quadrangulaire) à laquelle on accède par un couloir plus ou moins long à travers un tumulus de terre ou de pierres. Généralement le tumulus, appelé cairn quand il est en pierre et tertre lorsqu’il est en terre, est limité par un muret de pierres sèches ou par des dalles de pierre dressées juxtaposées, voire par l’alternance des deux. Il arrive fréquemment que plusieurs murets parallèles dans la construction servent d’armature à l’édifice en lui procurant un aspect étagé, à la manière des ziggourats 30


Menhir debout Menhir couché Menhir couché et déplacé

La Brétellière La Bretaudière

Nord

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500 m

Les menhirs du plateau de La Bretellière Sensiblement alignés sur trois kilomètres, cinq menhirs ont été reconnus sur un plateau, proche de Saint-Macaire-enMauges, dominant d’une cinquantaine de mètres la vallée de la Moine. Ce sont de l’ouest vers l’est : • LA PIERRE LEVÉE DE LA BRETAUDIÈRE À LA RENAUDIÈRE Ce menhir d’une hauteur de 3,50 m, présente une face plane au Nord-Ouest dont la partie supérieure montre une belle courbe au milieu de laquelle apparaît une petite pointe, petit rostre apical, lié peutêtre à une forme d’érosion à moins qu’il ne soit dû à un travail humain. Cette pierre dressée au dos arrondi est inclinée vers le Nord-Ouest. Elle possède des cannelures d’érosion verticales sur sa face plane. • LA PIERRE COUCHÉE DE SAINT-MACAIRE-EN-MAUGES C’est une dalle de granite couchée, longue de 1,65 m qui pourrait bien avoir été un menhir.

Menhir de La Bretaudière, St-Macaire-en-Mauges (49).

1 000 m

Source : R. Joussaume

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Alignement de menhirs à Saint-Macaire-en-Mauge

• LA PIERRE COUCHÉE DE LA GRANDE BRETELLIÈRE À SAINT-MACAIRE-EN-MAUGES Il s’agit d’une dalle de granite de dimensions comparables à celles du menhir de La Bretaudière avec une longueur de 3,50 m. Gênant les cultures, elle fut déplacée. Les pierres de calage de la base, partie la plus large, furent mises en évidence lors de cette opération. C’est donc bien un menhir.

En dehors de sa taille exceptionnelle, 6,20 m au-dessus du sol ce qui en fait le plus haut menhir du département, et de la découpe arrondie du sommet de sa face plane est, ce grand menhir présente le dessin en léger relief, sur une grande partie de sa hauteur, d’un zig-zag à extrémité distale enroulée, assimilable à un serpent. • LA PIERRE À CUPULES DE SAINT-MACAIRE-EN-MAUGES Ce prisme rectangulaire, de 1,50 m de long, était couché à près de 300 m à l’est du menhir de La Bretellière. Il a été transporté dans un jardin de Saint-André-de-laMarche. Selon M. Gruet, c’était un menhir qui formait un alignement parfait avec ceux de La Bretellière et de La Bretaudière. Cette pierre présente la particularité de porter une dizaine de cupules artificielles sur une de ses grandes faces. Si l’on sait que certaines

• LA GRANDE PIERRE LEVÉE DE LA BRETELLIÈRE À SAINT-MACAIRE-EN-MAUGES C’est un menhir en granite dit des Aubiers dont on retrouve les affleurements en place à 600 m au nord. Il est haut de 6,20 m. Des gravures d’époque médiévale situées à hauteur d’homme ont été signalées et relevées à différentes reprises. La face est, très plane dans sa partie haute, paraît avoir subi un aménagement sommital par une courbure du plus bel effet que l’on retrouve sur plusieurs menhirs régionaux : La Bretaudière, non loin de La Bretellière et les deux menhirs de La Garde en particulier. Cette forme semble avoir été recherchée et pourrait être rapprochée de celle de « la déesse en écusson » des monuments bretons. La qualité de la surface plane à La Bretellière laisse imaginer des peintures qui auraient pu la recouvrir comme l’ensemble de la face nord-ouest du menhir de La Bretaudière. 31

Menhir de La Bretellière, St-Macaire-en-Mauges (49).


Diadème : trouvaille de Cholet Source Charbonneau-Lassay, 1915.

cupules sont à attribuer au Néolithique, d’autres sont plus tardives et il est donc impossible de leur donner un âge précis et encore moins une interprétation de leur raison d’être.

qui contenait des lames de haches polies et un couteau en silex, associés à « un diadème » fait d’une feuille d’or losangique. Tout cela a également malheureusement disparu des collections choletaises au début du XXe siècle, mais nous renvoie à une découverte semblable faite à Pauilhac dans le Gers en 1865 où des ossements de cheval (?) accompagnaient des lames de silex, deux grandes haches en jadéite d’origine alpine à tranchant évasé parfaitement polies (haches d’apparat), deux défenses de sanglier perforées à la racine et une grande plaque losangique en or au décor pointillé comme sur la pièce de Cholet. La surprise vient évidemment de l’association de ces grandes haches polies en jadéite, considérées comme anciennes (néolithique ancien et moyen à partir du Ve millénaire avant J-C), à l’objet en or dont on a longtemps pensé qu’il appartenait à la deuxième moitié du IIIe millénaire avant J-C, période d’apparition des premiers éléments en or dans la civilisation campaniforme. Nous avons noté qu’à Cholet, le « diadème » se trouvait également dans une ambiance néolithique avec lames de silex et haches polies. La question peut alors se poser d’une circulation bien plus ancienne de quelques objets en or dont on sait qu’ils étaient utilisés dès le Ve millénaire sur les bords de la Mer Noire. Le sujet reste évidemment très ouvert alors qu’on réalise de plus en plus que les échanges à longue distance, probablement de proche en proche, ont été pratiqués très précocement au Néolithique dans une grande partie de l’Europe.

Le décor serpentiforme de La Bretellière Cette sculpture en léger relief fut certainement faite pour être vue en plein jour, cependant l’altération de la roche au cours des millénaires en a rendu la lecture difficile en lumière naturelle, mais elle apparaît nettement la nuit sous un éclairage rasant. Le corps du serpent est une ligne brisée qui, développée, atteint actuellement près de six mètres de longueur mais il se peut qu’il ait été plus long vers la base et débuté au niveau du sol, voire au-dessous, le serpent sortant alors de terre. Dans de telles conditions, il aurait dépassé huit mètres de longueur totale. C’est la plus grande représentation de serpent connue dans toute l’Europe néolithique. A la fin du XIXe siècle, une belle hache en jadéite a été découverte dans les pierres de calage de ce grand menhir. Elle a malheureusement disparu des collections choletaises. L’ensemble serpent/hache polie nous renvoie à la mythologie indo-européenne de l’opposition du serpent, incarnation de l’ancêtre, symbole d’immortalité, au tonnerre représenté par la hache polie, pierre de foudre.

Les haches d’apparat En plus des haches décrites précédemment, deux magnifiques lames de haches en roche jadéitique, en parfait état et sans aucune ébréchure du tranchant (preuve qu’elles ne furent jamais utilisées comme outils), furent trouvées ensemble lors de l’arrachage d’un poirier dans une haie à La Griffunière en Saint-Rémy-en-Mauges, à une vingtaine de kilomètres au nord du menhir de La Bretellière. Les plus anciennes de ces « haches d’apparat », d’origine alpine, sont attribuées à la première moitié du Ve millénaire avant J-C, voire antérieurement. C’est peut-être l’occasion de dire un mot sur ce qui dut être une sépulture préhistorique découverte à Cholet un peu avant 1890 et

Des cérémonies oubliées ? Par sa taille imposante, son décor exceptionnel et son association à d’autres menhirs caractéristiques pour former un alignement lâche sur ce plateau bien délimité par trois rivières, le menhir de la Bretellière paraît avoir joué un rôle particulier, essentiel, au milieu de ce territoire à menhirs qui se développe en bordure de la Moine. On ne sait encore précisément quand il fut dressé en ce lieu. Le dépôt à ses pieds d’une hache en jadéite, « hache d’apparat », pièce remarquable dont l’usage n’était certainement pas fonctionnel, mais plutôt lié au pouvoir de celui qui la possédait, sans doute dès les débuts du Néolithique, contribue au prestige du monument. On se plaît alors à imaginer de grandes cérémonies qui se déroulaient aux abords de la stèle, symbole de puissance et de fertilité en rapport avec les ancêtres… mais nous entrons là dans le domaine de la fiction. De nombreuses études seront encore nécessaires pour affiner nos connaissances et pousser nos rêves un peu plus loin vers la réalité. Roger Joussaume

Haches d’apparat. Jadéite. St-Rémy-en-Mauges (49).

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Âge du Bronze - 20 - 450 - 300 000

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Epée. Bronze. St-Hilaire-de-Mortagne (85).


« L’Âge du Bronze »… C’est ainsi que les archéologues ont appelé cette période de plus d’un millénaire caractérisée par ses vestiges archéologiques en bronze et qui marque un progrès technique majeur : la découverte de la métallurgie.

Le bronze, une invention vieille de plus de 4 000 ans LES PREMIERS PAS DE LA MÉTALLURGIE Le cuivre est le premier métal travaillé par l’Homme, avec l’or. Les traces les plus anciennes que l’on connaisse à ce jour datent du VIIe millénaire avant J-C et ont été découvertes en Anatolie (actuelle Turquie). Certaines communautés vont dans un premier temps travailler le cuivre natif, en le chauffant pour qu’il soit plus malléable, puis en le fondant complètement ce qui permet de le couler dans un moule. Progressivement donc, l’artisanat du cuivre sera maîtrisée depuis l’extraction du minerai et sa transformation en métal dans un four, jusqu’à la fabrication d’objets. En France, dans l’état actuel de nos connaissances, les premières traces de la métallurgie du cuivre apparaissent vers l’extrême fin du IVe millénaire avant J-C dans l’Hérault (mines de Cabrières, près de Montpellier). Ce cheminement progressif s’achève avec la fabrication d’alliage de métaux différents : en incorporant de l’étain au cuivre, les artisans inventent le bronze et fabriquent des objets beaucoup plus solides. Nous sommes ainsi entrés dans l’Âge du Bronze, vers 2300/2200 avant J-C dans l’ouest de l’Europe. Dès lors, le bronze devient, pour un millénaire et demi, le matériau de prédilection pour la fabrication des objets du quotidien, sans pour autant que la pierre soit abandonnée, avant l’acquisition de la métallurgie du fer.

Hache plate du Bronze ancien. Bronze. Champ Vallée, Cholet (49).

Hache à talon. Bronze. Saint-André-de-la-Marche (49).

FABRIQUER PUIS DÉPOSER Il existe un type particulier de vestiges archéologiques qui a beaucoup contribué à notre connaissance de l’Âge du Bronze : les « dépôts ». Il s’agit d’ensembles d’objets en bronze enfouis en pleine terre ou dans des vases que l’on retrouve fréquemment tout au long de l’Âge du Bronze. Ces dépôts ont permis aux archéologues de mieux connaître les divers objets fabriqués au cours de cette période et de les classer selon leurs formes. Les haches présentées au Musée de Cholet illustrent bien l’évolution de ce type d’objet. C’est la partie liée à l’emmanchement qui va 34

Hache à aileron du Bronze final. Bronze. Les Roches, Cholet (49).


être améliorée au fil du temps : on passe de haches plates du début de l’Âge du Bronze (comme celle de Champ Vallée) aux haches à talon (haches de Saint-André-de-la-Marche) puis aux haches à ailerons (haches de Cholet) qui permettent de toujours mieux fixer la partie métallique au manche en bois. Ces constats permettent d’établir une chronologie interne : on parle ainsi de « Bronze ancien », « Bronze moyen » et « Bronze final ».

habitat ? Il est probable que les deux haches à talon provenant de Saint-André-de-la-Marche aient fait partie d’un même dépôt, peut-être bien plus important et pouvant avoir contenu des dizaines de haches à l’époque, malheureusement dispersées aujourd’hui. Un grand nombre de dépôts contenant ce type de haches, enterrés au cours du XIVe siècle avant J-C, ont été retrouvés dans le Maine-et-Loire ainsi que dans tout le quart nord-ouest de la France. Ces ensembles sont composés presque exclusivement de haches à talon, déposées entières, quelquefois par centaines. La morphologie des haches de SaintAndré-de-la-Marche reflète par ailleurs des affinités certaines avec les productions métalliques de la péninsule armoricaine.

Ces dépôts, qui ont été retrouvés dans tout le continent européen, ont beaucoup fait parler d’eux pour une autre raison : pourquoi avoir enterrés soigneusement autant d’objets métalliques ? On a longtemps interprété ces ensembles comme des « dépôts de fondeurs », c’est-à-dire des objets cassés, usagés, rassemblés en vue d’être refondus, ou encore, pour d’autres, comme des « trésors ». Mais les raisons sont peut-être plus complexes et bon nombre de ces ensembles pourraient être des dépôts votifs. La présence récurrente de certains objets d’un dépôt à un autre ne peut s’expliquer par un ramassage aléatoire d’objets à refondre. On note également dans beaucoup de cas qu’une attention particulière a été portée à la disposition des objets (haches disposées en cercle). Certaines pièces portent aussi des traces de mutilation (dépôts de la fin de l’Âge du Bronze à Nantes, par exemple). Les découvertes du pays choletais sont dans l’ensemble relativement anciennes et n’ont pas fait l’objet de fouilles : beaucoup d’informations ont été perdues. Nous ne connaissons plus la localisation exacte de certaines pièces archéologiques, ni le contexte dans lequel elles se trouvaient, ce qui rend les interprétations difficiles. Le bracelet du Fief-Sauvin provient-il d’une sépulture ? Ou bien faisait-il partie d’un dépôt, ou d’un

Bracelet . Bronze. La Croix, Le Fief-Sauvin (49).

L’épée trouvée à Saint-Hilaire-de-Mortagne, sur les bords de la Sèvre, est à peu près contemporaine de ce type de haches. Il n’en reste aujourd’hui plus qu’une lame, privée de sa poignée. Cette dernière, probablement réalisée dans un matériau organique qui a disparu aujourd’hui, était fixée à l’aide de rivets sur la partie métallique. Cette épée est datée des XVe ou XIVe siècles avant J-C. Elle témoigne d’une autre pratique également fréquente à l’Âge du Bronze : l’immersion volontaire d’objets dans les cours d’eau, les lacs ou les marais. On admet aujourd’hui que la majorité de ces objets provenant des rivières y ont été déposés intentionnellement au cours de l’Âge du Bronze. Les épées et les pointes de lance sont les objets les plus fréquemment abandonnés dans ces milieux humides. Ces gestes sont liés à des pratiques cultuelles dont la nature reste encore à comprendre : s’agit-il d’offrandes à une divinité ? Est-ce lié à un rituel funéraire ? L’étude de ces dépôts nous conduit nécessairement à interroger les croyances des sociétés de cette époque.

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Epée. Bronze. St-Hilaire-de-Mortagne (85).


Deux enclos de l’Âge du Bronze. Photo aérienne. Site de Champs Vallée, Cholet (49).

Vie et mort à l’Âge du Bronze Nous connaissons très mal l’habitat et la localisation des villages de cette période dans la région. En effet, les habitations de l’époque sont faites de bois et laissent par conséquent des traces ténues : des structures en creux comme les fosses, fossés et trous de poteaux. Aucun site d’habitat n’a été rencontré à ce jour autour de Cholet. Il reste encore beaucoup à découvrir sur cet aspect de la vie des hommes et des femmes de l’Âge du Bronze dans la région, et c’est peut-être l’archéologie préventive qui nous apportera des réponses. ILS ONT ENTERRÉ LEURS MORTS À CHAMP VALLÉE… Les fouilles préventives effectuées, à la fin de l’année 2005 et début 2006, à Champ Vallée, au sud de Cholet ont été très fructueuses. Elles ont apporté un lot d’informations essentielles sur les pratiques funéraires des habitants de Cholet à l’époque de l’Âge du Bronze. Deux grands enclos circulaires, matérialisés par des fossés, interrompus par endroits, ont été découverts. Malheureusement, à cause de l’érosion des sols et de l’acidité du terrain, aucun ossement n’était conservé. C’est par analogie avec d’autres sites mieux préservés que l’on interprète ces deux structures comme étant des espaces funéraires. Ces enclos mesurent 11 et 12 m de diamètre et comportaient vraisemblablement des constructions en bois : 36


Au cours des siècles suivants, elles semblent avoir délaissé le plateau de Champ Vallée pour un autre lieu, qui reste à déterminer. Ce n’est qu’à la fin de l’Âge du Bronze que l’endroit est à nouveau occupé, après un abandon de 13 siècles. Un bâtiment en bois, à vocation probablement cultuelle, est construit entre 900 et 750 avant J-C, puis aurait été volontairement détruit. Des vases ont ensuite été déposés dans les trous des poteaux, dont une passoire ou faisselle, objet unique à ce jour dans la région. Champ Vallée restera un espace funéraire durant l’Âge du Fer.

l’un d’eux devait accueillir en son centre une architecture à quatre poteaux de bois, qui protégeait peut-être les restes du défunt. Plusieurs céramiques aux formes typiques ont permis de dater ces immenses structures du début de l’Âge du Bronze. Une datation par radiocarbone, faite sur charbon, confirme cette date : ces enclos ont été construits entre 2500 et 2270 avant J-C. La découverte sur ce site d’une petite hache plate, en cuivre ou en bronze, est un témoin important des premières productions de la métallurgie du bronze dans la région. Les populations ont clairement choisi d’inhumer leurs morts sur une hauteur, teur, en position dominante dans le paysage ; ceci est une caractéristique actéristique que l’on rencontre dans d’autres régions.

Nord

Carrière moderne

Structures du Bronze ancien Bâtiment rituel du Bronze final

Faisselle. Céramique. Champ Vallée, Cholet (49).

Structures de l’Âge du Bronze ou de l’Âge de Fer

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Source : S. Sicard

Urne. Céramique. Champ Vallée, Cholet (49).

Site de Champ Vallée à l'Âge du Bronze


Hache à douille du Bronze final ou du premier Âge du Fer. Bronze. St-André-de-la-Marche (49).

ENTRE BRONZE ET FER

l’aire d’influence de la péninsule armoricaine, du moins pour ce qui est des productions métalliques. Ces haches à douille particulièrement riches en plomb, donc difficilement utilisables, ont pu servir de moyen d’échange, sorte de « paléomonnaie ». Elles ont circulé ainsi en Europe de la fin du VIIe siècle avant J-C jusqu’au début du Ve siècle avant J-C.

On situe le début de l’Âge du Fer vers 800 avant J-C. C’est une date arbitraire : les premiers objets en fer arrivent dès l’Âge du Bronze, depuis l’est de l’Europe. Le fer ne remplace pas du jour au lendemain le bronze et les populations continueront à fabriquer des objets dans cette matière. La hache à douille provenant de Saint-André-de-la-Marche illustre bien cela : ce type d’objet, longtemps considéré comme étant une production typique de la fin de l’Âge du Bronze, est aujourd’hui attribué à l’Âge du Fer, à la lumière de nouvelles découvertes. Ce type de haches est bien connu dans toute la péninsule armoricaine en contexte de dépôts, que l’on rencontre en très grand nombre. Les populations de cette époque ont enfoui d’importantes quantités de ces haches, quelquefois par centaines ! L’exemplaire de Saint-André-de-laMarche renforce ainsi l’hypothèse d’un territoire choletais dans

Les populations qui se sont installées dans la région de Cholet au cours de l’Âge du Bronze ont certainement laissé plus de traces que ce que l’on connaît aujourd’hui. Le site de Champ Vallée est un bon exemple de ce que l’on peut s’attendre à découvrir dans les années à venir sur cette période. Ce site archéologique constitue une découverte essentielle au plan local, mais également pour tout l’ouest de la France. Muriel Mélin en collaboration avec Sandra Sicard

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Âge du Fer

- 20 - 450 - 300 000

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Meule (catilus). Granite. La Bleure, Cholet (49).


Les occupations humaines au premier Âge du Fer

DES SITES D’HABITATS FORTIFIÉS

Cette période (800/450 avant J-C) que l’on peut parfois appeler Hallstatt (nom d’une ville en Autriche) est attestée en région choletaise par des habitats et une nécropole, fait extrêmement rare en Maine-et-Loire mais aussi dans les départements limitrophes. A ce jour, seuls manquent les habitats de hauteur fortifiés par un rempart, siège du « pouvoir » économique et social.

Les premiers sites d’habitats fortifiés commencent à être découverts dans la région des Pays-de-la Loire. C’est le cas de Mervent en Vendée, vaste site de hauteur de 30 ha délimité par un double rempart et fossé (VIIe et VIe siècle avant J-C). D’autres sites de hauteur, comme Sainte-Suzanne (Mayenne) et la Citadelle à Champtoceaux datées du premier Âge du Fer, viennent d’être reconnus. Toutefois, à ce jour, ces occupations de hauteur n’ont pu être associées à la présence d’un rempart. Le quart sud-ouest du Maine-et-Loire n’a pas encore livré de type d’habitat avec rempart, synonyme de pouvoir, même si des fortifications ont été identifiées notamment le long de l’Evre et de la Moine. Ainsi, les très nombreuses missions de photographie aérienne ont permis de découvrir ou de parfaire nos connaissances sur plusieurs éperons barrés. Seuls leurs fossés sont conservés, le rempart ayant été en partie détruit. Pour l’Evre, il s’agit du Camp de Braud et de l’éperon barré du Chalet au Fief-Sauvin, du camp du VieuxChillou à Saint-Pierre-Montlimart (sondé en 1980 mais sans résultat probant). Le long de la Moine, un éperon barré par un fossé au lieudit La Ménardière sur la commune de Montigné-sur-Moine est aussi à prendre en compte.

LA MÉTALLURGIE DU FER L’utilisation du fer, documentée dès le début du VIIIe siècle avant J-C dans certaines régions centrales de l’Europe et de la Méditerranée telles que l’Etrurie (Italie) et la Grèce archaïque, a longtemps semblé ne pas concerner l’ouest de la France. Situé au marge du Massif armoricain, le quart sud-ouest du Maine-etLoire se trouvait proche des grands centres de production de haches en bronze bien connus en péninsule bretonne. Les haches à douille particulièrement riches en plomb donc difficilement utilisables, ont pu servir de moyen d’échange, sorte de « paléomonnaie ». Elles ont circulé ainsi en Europe de la fin du VIIe avant J-C jusqu’au début du Ve siècle avant J-C. Les recherches réalisées dernièrement en Sarthe ont permis de mettre en évidence une production du fer – des bas fourneaux pour réduire le minerai – importante et précoce, soit dès le VIIe avant J-C voire le VIIIe siècle. Les fouilles préventives dans le Choletais, notamment sur le tracé de l’autoroute A 87 entre Angers et La Roche-sur-Yon, n’ont malheureusement livré aucun bas fourneau de l’Âge du Fer. Les éléments emblématiques sont une hache à douille (VIIe - IVe siècles avant J-C) découverte dans la Loire à SaintFlorent-le-Vieil et un couteau de même époque trouvé dans une probable sépulture à inhumation à Champ Vallée (Cholet). Toutefois la région située au nord du Cholet, notamment au FiefSauvin et dans les communes limitrophes, a livré de nombreuses scories de fer. Il y existe certainement des bas fourneaux qui feront sans doute l’objet de futures découvertes.

DES SITES D’HABITATS PROBABLEMENT AGRICOLES En vérité, la région choletaise est surtout concernée par d’autres types habitats dont l’implantation se réalise dans le courant des VIe et Ve siècle avant J-C. Ces sites sont sans doute essentiellement tournés vers l’agriculture. Il s’agit souvent de simples creusements – des fosses – comme à La Haute Protière ou à La Nommerie (Cholet), de tronçons de fossés comme à L’Elinière (Cholet). Les ensembles palissadés avec bâtiments sur poteaux dont des greniers sur quatre poteaux comme à Champ Vallée (Cholet) sont plus rares. Sur le site de La Prêverie (Cholet), on a retrouvé aussi des bâtiments sur sablières basses ou des parties d’enclos, ainsi

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Couteau du premier Âge du Fer. Fer. Champ Vallée, Cholet (49).

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Gobelet, vase et fusaïole du premier Âge du Fer. Céramique. Champ Vallée, Cholet (49).


que des greniers. Sans que l’on puisse parler de « village », on peut constater l’émergence d’un habitat groupé dont l’occupation est à situer entre les deux Ages du Fer. On peut aussi citer l’habitat de Richebourg à Trémentines dont l’occupation est située dans le courant du Ve siècle avant J-C. Une fusaïole y a été découverte permettant ainsi d’évoquer une activité de filage. Tous ces sites ont livré principalement de la céramique. Les objets en fer y sont absents. Les ossements d’animaux, déchets alimentaires par excellence, ne sont pas conservés du fait de l’acidité des sols. Structure du premier Âge du Fer

Sépulture probable du premier Âge du Fer

Sépulture du premier Âge du Fer (fouillée)

Structures de l’Âge du Bronze ou de l’Âge du Fer

UNE NÉCROPOLE À CHAMP VALLÉE (CHOLET) A l’emplacement d’une nécropole et en continuité d’une occupation du Bronze final, se développe de 800/700 à 500 avant J-C un ensemble de 18 enclos fossoyés (circulaires avec interruption, semi-circulaires, quadrangulaires) occupant un espace de 2 500 m2 environ. Celui-ci peut être interprété comme une nécropole (également un lieu de culte ?). Certaines des céramiques exhumées, dont des exemplaires à pied haut, sont en effet semblables aux urnes funéraires qu’on trouve ailleurs dans l’ouest de la France à la même époque, même si aucun ossement brûlé n’a été retrouvé à l’intérieur des vases. Un creusement, situé en dehors des enclos, a livré des ossements humains brulés. Il s’agit vraisemblablement d’une sépulture secondaire à crémation contenant au moins un individu de plus de 21 ans. Au sud-ouest du site, une dizaine de creusements allongés, à proximité des enclos, peuvent correspondre à autant de sépultures. D’ailleurs, l’une de ces fosses a montré un remplissage, constitué de blocs, tout à fait semblable à ceux de sépultures fouillées à Basly (Calvados) et datées du VIe siècle avant J-C. Le seul objet trouvé dans cette fosse est un couteau en fer daté entre 600 et 400 avant J-C. Les habitants sont venus y enterrer leurs défunts à Champ Vallée pendant plusieurs siècles, du VIIIe au IVe siècle avant J-C, faisant de ce site l’un des sites majeurs de la région.

Nord

Le second Âge du Fer dans la région de Cholet Cette période (450/20 avant J-C), aussi dénommée période de La Tène (nom d’un site sur la commune de Marin-Epagnier au bord du lac de Neuchâtel en Suisse), est celle qui a laissé le plus de traces autour de Cholet. C’est le moment où émerge la société celtique, dont la réalité est perceptible dès le Ve siècle avant J-C, y compris dans l’ouest de la Gaule. Les termes de « Gaule » et de « Gaulois » apparaissent pour leur part à la fin de la période, sous la plume de Jules César pour désigner les Celtes vivant à l’ouest de l’Europe continentale. Au cours de La Tène, les civilisations protohistoriques connaissent de multiples bouleversements qui vont en s’accélérant au fil du temps : développement de la métallurgie du fer, mutations religieuses et artistiques, intensification des échanges, notamment avec le monde romain, au cours des derniers siècles de l’Indépendance, adoption de la monnaie à partir du IIIe siècle avant J-C et naissance à la fin de la période d’une proto-urbanisation. Elle s’accompagne d’un accroissement démographique, d’une spécialisation des

Source : S. Sicard

Carrière moderne

Site de Champ Vallée à l'Âge de Fer

42


productions manufacturées et de la mise en place d’un réseau d’habitats hiérarchisés interdépendants. En région choletaise, le développement des sites - habitats, nécropoles et sanctuaires - ne s’effectuera pas au même endroit du début du premier Âge du Fer à la fin du second Âge du Fer. L’habitat se densifie alors jusqu’à l’époque romaine autour de Cholet. Le paysage sera marqué par la multiplication d’installations essentiellement agricoles. Ces terroirs quadrillés de parcelles délimitées de haies et de landes se développeront à partir du IIIe siècle avant J-C, vraisemblablement à partir artir de fermes et hameaux. Même s’ilil faut relativiser suivant les régions, les espaces forestiers tendront vers leur surface actuelle laissant place à un paysage ouvert. On est loin de l’image, trop souvent véhiculée, des Gaulois vivant dans des forêts profondes. Il ne semble pas non plus exister de rupture dans les manières d’habiter entre la fin du premier Âge du Fer et le début du second es phases Âge du Fer dans notre région. Les d’extension et de mise en valeur des terres mbreuses (parcellaires) - révélées par les nombreuses urfaces fouilles réalisées sur des grandes surfaces vant J-C ont bénéficié à la fin du Ier siècle avant d’un climat doux et tempéré. nts au Ces processus sont concomitants u fer. A développement de la métallurgie du stes du ce jour, aucun atelier de sidérurgistes second Âge du Fer n’est connu danss le quart sud-ouest du Maine-et-Loire alors que les me s’il ne objets en fer sont bien présents même à l’heure sont pas nombreux. Il faut dire qu’à ment mis actuelle, les fouilles ont essentiellement au jour un semis dense d’habitats ruraux de plus ou moins grande importance.

FORTIFICATIONS, VILLAGES ET FERMES ISOLÉES À LA TÈNE FINALE On entend par La Tène finale une époque s’étendant entre 150 avant J-C et l’empereur Auguste. Oppida, vici et aedificia : oppidums (fortification de plaine ou de hauteur qui présente une proto-urbanisation), villages et fermes isolées. C’est par ces termes que l’on pourrait pou traduire cette expression souve souvent employée par César. Ce trip triptyque définirait une hiérarchie e entre les sites d’habitats juste avant la Conquête. Il importe de nuancer cette interprétation grâce aux résultats des nombreuses fouilles réalisées pri principalement dans le cadre de l’archéo l’archéologie préventive. Toutefois, as elle est assez appropriée à la région de Cholet et au quart sud-ouest du Maineet-Loire. de Au delà des nombreux enclos découv découverts par la prospection aérienn qui la plupart du temps aérienne son pas datés, sont attestées à ne sont Cholet même et dans un rayon d’une vingtai vingtaine de kilomètres, des fermes ce dont certaines, dites « aristocratiques prés », présentent d’importants talus et c fossés comme aux Natteries à Cholet fo cations datées de La Tène et des fortifi co finale, comme celle de la Ségourie au Fief-Sauvi Fief-Sauvin.

Statuette d’Hercule. Bron Bronze. Montrevault (49).

43


Fortification de La Ségourie. Photo aérienne. Le Fief-Sauvin (49).

• Les fortifications Le site La Ségourie au Fief-Sauvin présente un rempart qui délimite un espace de 3,8 ha formant ainsi un éperon barré. Des kilos de fiches en fer de vingt-huit centimètres de long découvertes à la fin du XIXe siècle à l’occasion de plusieurs fouilles permettent d’y voir un rempart du type murus gallicus daté de La Tène finale. La surface enclose inférieure à dix hectares empêche d’y voir un oppidum.

Fiches de murus gallicus. Fer. Le Fief-Sauvin (49).

D’autres sites fortifiés, déjà cités pour le premier Âge du Fer comme le Camp de Braud ou celui de La Ménardière, ont des surfaces encloses plus importantes que celle La Ségourie. • Les villages On peut citer à titre d’exemple, au sud de Brissac, le village des Pichelots sur la commune des Alleuds (occupation estimée à 7 hectares). Si le Choletais n’a encore rien livré

Schéma de construction d’un Murus gallicus.

44


Rempart de La Ségourie, Le Fief-Sauvin (49).

Grande enceinte. Photo aérienne. Le Fief-Sauvin (49).

de comparable, les campagnes de photographies aériennes menées de manière intensive depuis 1976 sur la commune du Fief-Sauvin permettent de dresser un plan de structures creusées dans le sol. La densité des enclos, les nombreuses fosses, situé devant le rempart pourrait être les marques d’une agglomération possédant au moins un petit sanctuaire à la Croix de la Vigne mais l’absence de fouilles importantes ne permet pas de conclure. Les découvertes de surface depuis le milieu du XIXe siècle ont permis d’identifier une concentration de monnaies coulées, des potins (61 exemplaires du même type), des statères (monnaies d’or frappées), une boucle de ceinture, des lances, des épées, des fibules, trois perles en verre, des fragments d’amphore italique. Ces mobiliers, datés de La Tène moyenne et de La Tène finale (entre 300 et 20 avant J-C) sont caractéristiques aussi bien d’un village, d’une nécropole ou d’un sanctuaire. Cependant, la présence de meules rotatives de type gaulois est aussi caractéristique d’une activité agricole et oriente à nouveau l’interprétation vers un village.

Fortification gauloise Murus gallicus Zone à fosses re L’Ev

Structure de l’époque gauloise Fortification gauloise ?

Source : J-P. Bouvet & SRA Nantes

Fossé

Le Fief-Sauvin à l'Âge du Fer

45

Structure gauloise ou gallo-romaine

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500 m


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Les monnaies gauloises 12

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La monnaie gauloise est le plus souvent muette : elle comporte rarement des inscriptions et jamais de date : lieu, et période de frappe, identité de l’autorité émettrice sont donc des inconnues à découvrir. Mais qu’elles aient été perdues, cachées ou offertes, les monnaies gauloises témoignent des territoires et des hommes qui les ont peuplés. Imparfaitement certes, en raison du hasard des découvertes et du petit nombre des recherches archéologiques, mais suffisamment pour susciter des questions. Deux zones concentrent les découvertes : Cholet et ses environs, de la Séguinière à Yzernay, et le Fief-Sauvin. Le numéraire qui y circulait fait montre d’une extrême variété, soulignant ainsi un rôle de carrefour, mais aussi de précocité.

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Site de l’Âge du Fer

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Le Fief-Sauvin La Ménardière La Boutrie

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Enclos de l’Âge du Fer ou gallo-romain

L’Ecobue Les Natteries La Nommerie

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La Touche Hervé La Bleure 11 La Préverie L’Elinière 10 Champ Vallée

Source : G.Berhtaud

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Enclos de l'Âge du Fer 12 13

C’est en effet dans cette région que l’on situe l’apparition des premières émissions indigènes de l’ouest de la Gaule, succédant aux lourdes imitations de monnaies grecques, à une date indéterminée entre la fin du IIIe siècle et le milieu du IIe siècle avant J-C. Il s’agit de monnaies de petit module - des quarts de statère pesant environ 2 g - mais de très bon aloi (90 % d’or). Si le droit porte une tête de style hellénique, le revers est une création originale car sans modèle grec connu : un petit personnage courant à gauche, tenant un bâton recourbé et une sorte de marteau est désigné par V. Godard-Faultrier puis A. Poilane comme le « pontife forgeron », une sorte de Vulcain celtique. Le nom est resté à cette série. A qui appartenait ce monnayage ? J. Hiernard a proposé d’y voir la monnaie de Korbilôn, le comptoir commercial de la Basse-Loire cité par Polybe. Il en est connu 14 exemplaires dont 8 s’échelonnent entre Mauges et Craonnais, deux régions connues pour leurs gisements d’or filonien.

La Flèche Richebourg

• Les fermes La densification de l’occupation humaine commence dès la Tène ancienne, soit à la fin du IVe siècle avant J-C. Les habitats se situent principalement dans des enclos fossoyés possédant pour la plupart un talus interne. C’est à partir du IIIe siècle avant J-C que l’on constate sur la région choletaise l’accroissement du nombre de ces fermes : Richebourg et La Flèche à Trémentines, Les Natteries, La Bleure, La Nommerie, La Touche Hervé, à Cholet, La Bouterie à La Romagne, L’Ecobue à Mortagne-sur-Sèvre. La commune de Bégrolles-en-Mauges présente aussi une grande densité de ces occupations. Ainsi trois enclos agricoles datés de La Tène finale et du début de l’époque romaine ont été identifiés sur un petit espace. On propose aussi de hiérarchiser ces fermes en s’appuyant notamment sur la puissance des fossés, le nature des bâtiments et leur nombre, la nature des mobiliers tels que les types d’objets en fer, en bronze, le nombre d’amphores, la présence de bijoux en verre, en lignite, notamment.

Potin au taureau chargeant. Bronze. Le Fief-Sauvin (49).

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Quart de statère. Or allié. Le Fief-Sauvin (49).


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La Loire

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Est-ce précisément cette ressource métallifère ou bien le passage supposé de la voie occidentale de l’étain qui attire les marchands des peuples voisins venus avec leurs monnaies ? S’y distinguent notamment, dans le demi-siècle précédent la conquête césarienne, les Namnètes (Nantes), forts de leur contrôle de la Loire, et également de richesses métallifères (l’or, l’étain, le fer), et les Pictons (Poitiers). Mais peut-on isoler un monnayage ethnique propre à cette région et ainsi identifier un territoire et un peuple ? Parmi d’autres séries mal attribuées, celle dite « aux aigrettes », ainsi dénommée en raison d’un motif décoratif en arrière de la nuque, et découverte exclusivement dans ce Sud Loire (plus précisément dans un espace circonscrit entre Angers, Chemillé, Mauléon, la rivière du Thouet et la Loire) pourrait y avoir été émise. On ignore quel peuple fut responsable de son émission ; les Ambilatres cités par César sont un candidat sérieux. Mais toutes ces émissions en or dont on ignore la raison (Achats de prestige ? Paiement de soldats ?) semblent assez brèves.

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Source : G. Aubin & JN. Barrandon

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Enfin, dernière caractéristique, la région des Mauges a recours dans les décennies précédant la Guerre des Gaules, au potin, petite monnaie coulée à base de cuivre et de plomb, d’un usage plus modeste et plus répandu. On suppose même qu’elle fut un centre émetteur. Le modèle utilise le poncif du taureau chargeant, lointain rappel des monnaies de Marseille, mais en le représentant allant à droite (et non à gauche comme ailleurs) et en marquant bien la ligne de sol. Cette différenciation typologique se trouve essentiellement dans cette région, mais aussi en Vendée et en Loire-Atlantique, signalant ainsi la vieille solidarité qui unit ces territoires.

Nord

SANTONS 0

40 km

Répartition des découvertes monétaires gauloises

Dépôt monétaire

10 Nombre de monnaies isolées 4 découvertes sur une même commune 1 Monnaie des séries à la main (attribuée aux Pictons ou aux Santons) Monnaie de séries armoricaines (attribuée aux Namnètes ou aux Vénètes) Monnaie de la série à l’aigrette (non attribuée)

Gérard Aubin

Statère, serié à l’aigrette. Or allié. Chemillé (49).

Statère, serié à la main, attribué aux Pictons. Or allié. Bords de Loire (49).

47


au

lois

Source : P.Maguer

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Enclos 1a : IIIe siècle avant J-C Enclos 1b : IIIe siècle avant J-C Enclos 2 : fin IIIe siècle - 1 tiers du IIe siècle avant J-C

Chenêt. Céramique. Les Natteries, Cholet (49).

Enclos 3 : 150 à 120 avant J-C

• La ferme fortifiée des Natteries : un site « aristocratique »

Col d’amphore estampillé. Céramique. Les Natteries, Cholet (49).

Col d’amphore. Céramique. Les Natteries, Cholet (49).

Ce site créé au début du IIIe siècle avant J-C, présente à la fin de son occupation, soit à la fin du IIe siècle avant J-C, un enclos monumental trapézoïdal de plus de un hectare. Le fossé atteint une profondeur de 3,4 m pour une largeur de 8 m. A l’ouest, une zone de greniers ou d’étables, déjà existante, continue à être utilisée. A l’est et à l’intérieur de l’enclos, six grands bâtiments imposants (jusqu’à 144 m2), sur poteaux, sont construits. Certains portaient sur leur paroi un enduit blanc. Comme sur le site de La Bleure, cette dernière phase d’occupation des Natteries a livré des pesons en grand nombre attestant d’une activité de tissage ainsi que des meules rotatives et les chenêts en terre cuite sont bien présents. Des objets en fer ont été exhumés : couteaux, herminettes, pelle à feu, peut-être un cerclage de roue, un fragment d’épée et un talon de lance. Les quelques scories découvertes permettent d’avancer l’hypothèse d’une forge. L’emploi du fer est ainsi reconnu sur le site des 48

Nord

0

60 m

Plan général du site des Natteries

Natteries ainsi que sur d’autres sites du Choletais (La Bleure et Richebourg) mais il n’atteint pas le nombre d’objets retrouvé dans le village gaulois des Pichelots, commune des Alleuds (plus de 280 objets). Le nombre d’amphores vinaires importées est imposant, soit 20 191 tessons pour un nombre minimum de 99 amphores. Tout ces éléments permettent d’interpréter le site des Natteries comme un habitat de qualité. Le site sera abandonné dans le courant de la première moitié du Ier siècle avant J-C. Il existe à La Romagne, La Bouterie, un site daté de l’époque gauloise semblable à celui des Natteries. Occupant une surface d’environ un hectare, ces fossés et talus sont encore bien conservés. • Le site de « La Bleure » : hameau ou habitat privilégié ? Daté de la fin de La Tène moyenne à La Tène finale, le site de La Bleure est relativement original. Au sein d’un vaste enclos fossoyé trapézoïdal d’environ 9 000 m2, s’organisent différents espaces


Nord

Source : G. Sandoz

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Pesons. Céramique. La Bleure, Cholet (49).

Enclos

Meule (catilus). (catilus) Granite. Granite La Bleure, Cholet (49). 0

20 m

Greniers Bâtiments principaux

Plan général du site de La Bleure

délimités par de petits fossés qui ménage un vaste espace central vierge de toute structure, à l’exception d’un puits. A l’intérieur de ces ensembles, on trouve des bâtiments de taille importante auxquels sont associés des greniers dont la concentration dans la partie sud-est est particulièrement importante. La nature de ces bâtiments n’a pas été identifiée : s’agit-il d’habitations ou de bâtiments à usage agro-pastoral (grange, étable…), voire artisanaux ? Selon que l’on s’accorde sur l’une ou l’autre des hypothèses, alors le statut du site diffère. Si ce sont des unités d’habitation, l’hypothèse d’un hameau rassemblant plusieurs familles est envisageable. La place centrale correspondrait alors à un espace communautaire dont participerait le puits. La vingtaine de greniers sur poteaux concentrés dans la partie méridionale relèverait d’une même gestion collective des denrées. Cependant, cette concentration des structures de stockage au sein d’un seul et même enclos principal à l’organisation rigoureuse, permet d’avancer l’hypothèse

d’une catégorie de sites qui dépasseraient la simple ferme. A cela s’ajoute la présence de mobiliers archéologiques qui pourraient témoigner d’un statut social privilégié. Ainsi les amphores romaines sont relativement nombreuses (312 fragments pour un minimum de 14 amphores) ; on trouve certaines formes de vases peu courantes à l’échelle régionale (tel un vase balustre) ; et enfin, plusieurs pièces d’armement ont été découvertes (umbo de bouclier, possibles pointe de javeline et fragment de bouterolle de fourreau d’épée). Le site de La Bleure pourrait alors constituer la résidence d’une seule famille (élargie à sa gens ?) peut-être « aristocratique », ou en tout cas liée à un pouvoir fort qui peut centraliser les denrées agricoles, contrôler une part du commerce du vin et porter les armes. L’organisation du site renverrait alors à l’existence de différents espaces spécialisés tels qu’on peut les percevoir sur des résidences « aristocratiques » (Paule en Bretagne ou Les Natteries à Cholet). Le site continuera à être occupé jusqu’au Ier siècle après J-C. 49

Umbo de bouclier. Fer. La Bleure, Cholet (49).

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1

1 - Bouclier gaulois. 2 - Umbo de bouclier de La Bleure.


Comme à Paule (Côtes d’Armor), on est peut-être devant la représentation d’un personnage important dont on a souhaité conserver la mémoire sous la forme d’un buste. LE MONDE DES MORTS : DES DÉCOUVERTES RARISSIMES La région des Pays-de-la-Loire a livré peu de lieux d’inhumations ou d’incinérations du second Âge du Fer. On peut citer la probable nécropole à incinérations des Truberdières à Ecommoy (72), datée du IVe siècle avant J-C et la tombe de guerrier de Lelleton à Pétosse en Vendée et datée du IIe siècle avant J-C. C’est à l’occasion de l’agrandissement de l’aérodrome de Cholet que l’on a découvert quatre incinérations du second Âge du Fer (fouilles et études de Nelly Le Meur). Elles étaient placées dans des urnes, elles-mêmes situées dans des coffres en bois (nombreux clous en fer). Ces urnes, malgré leur type différent, sont contemporaines. Le fait qu’elles soient regroupées dans une si faible surface le confirme et ne peut être dû au hasard. La seule datation par la méthode du radiocarbone réalisée sur des charbons trouvés dans une des urnes propose une date calibrée de 356 à 41 avant J-C. C’est donc une découverte de premier ordre sur le plan régional.

Statuette de femme. Calcaire. Environs de Beaupréau (49).

LIEUX DE CULTES ET RITUELS DES RELATIONS INTENSES AVEC LE POURTOUR MÉDITERRANÉEN

Les sanctuaires commencent à être bien connus en France septentrionale même si les structures et les rituels recouvrent des marqueurs et pratiques différents selon les endroits et les chronologies. La région choletaise n’a pas livré à ce jour de sanctuaires gaulois, même si on peut évoquer au Fief-Sauvin un possible lieu de culte sous le fanum gallo-romain de La Croix de la Vigne. Toujours sur cette commune en face de La Ségourie, les mobiliers découverts au XIXe et au milieu du XXe tels que épées, pointes et talon de lance en fer, monnaies en or et en bronze, ainsi qu’une boucle de ceinture en bronze évoquent aussi des dépôts rituels mais en l’absence de fouille il n’est pas possible de conclure. On pourrait les mettre en relation avec l’importante enceinte quadrangulaire à large fossé, inscrite dans un double enclos ouvert au sud-est. Cette enceinte dont le talus était encore en élévation au début du XIXe siècle, appelé « retranchement du Grand Nombault », pourrait s’apparenter à un sanctuaire. Plus énigmatique est la découverte sans contexte d’une statuette féminine en pierre. Provenant peut-être de Beaupréau, elle fait partie de ces statuettes sur socles. La destruction des traits de son visage a fait penser à une désacralisation. Il ne s’agit pas d’une représentation divine mais on doit penser à un « héros », un chef ou un grand propriétaire qui a pu exister au IIIe ou au IIe siècle avant J-C.

Celles-ci sont attestées, par les amphores à vin sur les sites d’habitats. Importées au moins depuis le IIe avant J-C, elles dénotent des surplus que pouvait dégager l’économie agraire. Vraisemblablement réservées à l’élite, ces amphores, souvent en nombre, se retrouvent principalement sur les habitats dits de qualité : Les Natteries (99 amphores) et La Bleure (14 amphores). Ces relations avec le monde transparaissent très tôt, dès le IVe siècle avant J-C. Le petit hercule italique en bronze de Montrevault en est le témoignage remarquable. Des réseaux commerciaux, identifiés physiquement par des tronçons de voies antérieurs à l’époque romaine, comme à Beauvais et aux Natteries (Cholet) sont bien attestés. Ils permettaient d’acheminer jusqu’au fond des campagnes choletaises le vin italien dans des amphores au profil caractéristique. Tout ceci démontre que dès la fin de l’époque gauloise, les campagnes de la région étaient organisées, structurées en lien avec des réseaux économiques et culturels du pourtour méditerranéen, mais aussi de toute l’Europe moyenne. Jean-Philippe Bouvet, Axel Levillayer, avec la collaboration de Sandra Sicard 50


Âge du Fer

Époque gallo-romaine

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Quart de statère au type « pontife forgeron ». Or. Le Fief-Sauvin (49).


C’est en 1895 qu’un ingénieur à la recherche d’étain à SaintPierre-Montlimart identifia, au fond de grandes fosses d’extraction « anciennes », des cailloux constitués de mispickel, contenant notamment de l’or. A l’intérieur d’une concession de 508 hectares, appelée « mines de La Bellière », située presque exclusivement sur la commune de Saint-Pierre-Montlimart et en partie sur Chaudron-enMauges et Montrevault, plusieurs puits ont permis, après 1905, l’exploitation du filon de quartz contenant l’or jusqu’à au moins 140 m de profondeur en 1912 et sur une distance de 300 m en 1908. L’exploitation s’arrêtera en 1952. Des galeries, que Préaubert attribue dès 1907 (suivi en cela par Poilane en 1912) à « l’Antiquité », ont été recoupées par les puits de recherche de Saint-Antoine, Saint-Georges, Saint-Jean, du Verger et du Bois de la Bellière à Saint-Pierre-Montlimart. La profondeur maximum à laquelle ces galeries ont été trouvées est de 30 m environ. Plusieurs galeries sont signalées dans une autre commune au Bois Dolbeau à Saint-Rémy-en-Mauges, trahies par des affaissements de terrain. On peut aussi supposer que les entrées de puits découvertes dans les fosses de la Choisière et de la Boulivrie, à Saint-Rémy-en-Mauges, débouchent sur des galeries souterraines. Les galeries étaient très régulièrement boisées et mesuraient 1,20 m de hauteur. De nombreux objets en bois y ont été découverts : pics sans emmanchement, maillets plats en chêne ou cylindriques en noisetier, pelle sans manche, couteaux en chêne durcis au feu, coins en chêne. Un seul objet en fer a été ramassé. Il s’agit d’un « pic-marteau » dont le manche en bois a disparu. Ce sont surtout des structures en bois liées à la gestion de la mine elle-même et au traitement du minerai qui ont attiré l’attention. Huit cuves monoxyles ont été trouvées. Au moins trois ont fait l’objet de mesures. La première, en châtaignier, mesure 1,37 m de long, 0,80 m de largeur et 0,30 m de hauteur. La seconde, aussi en châtaignier possède une longueur de 1,49 m, une largeur de 0,69 m et une hauteur de 0,31 m. Ces cuves servaient vraisemblablement au lavage du minerai sur place. Il faut aussi faire état de deux vis d’Archimède peutêtre utiles pour l’exhaure de l’eau ainsi que de fragments d’un treuil. Des sluices ont été identifiés : il s’agit là de rampes de lavage des alluvions aurifères pour en extraire l’or. Ils sont en bois de châtaignier alors qu’un autre est constitué de tuiles à crochet. Alfred Poilane présente aussi des lampes en terre cuite des mineurs, de la céramique. D’autres récipients en terre cuite portant des décors digités sont aussi récoltés. Tous ces mobiliers sont datés par Poilane des époques gauloises et gallo-romaines.

La région située à proximité de Beaupréau est connue grâce aux recherches du BRGM (Bureau de Recherches Géologiques et Minières) pour posséder des filons de quartz contenant de l’or. Quatre filons ont été identifiés. Ils concernent les communes de Saint-Rémy-en-Mauges, Montrevault, Saint-Pierre-Montlimart, La Salle-et-Chapelle-Aubry, Beaupréau. A cela s’ajoutent de nombreux autres filons que Bernard Mulot identifie à l’occasion d’études personnelles mais qui ne sont pas figurés sur les cartes géologiques. L’or est ainsi également présent sur les communes du Fief-Sauvin et de Chaudron-en-Mauges.

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Filons de quartz contenant de l'or d'après le BRGM

Extraction en fosses ou en tranchées d’époque gauloise, gallo-romaine ou médiévale

Filons de quartz contenant de l'or d'après Mulot Bernard

Galeries antiques d'après Poilane

Source : JP. Bonnet, d’après BRGM & B.Mulot

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Montrevault

Les aurières dans les Mauges

52


Cuve de lavage du minerai. Bois. St-Pierre-Montlimart (49).

53

Vis d’Archimède. Bois. St-Pierre-Montlimart (49).


Les différentes étapes de préparation du minerai auraient également été identifiées : extraction, bien sûr, concassage et grillage du minerai. Certaines activités de préparation s’effectueraient aussi à l’extérieur des mines et des tranchées, les déchets constituant et délimitant des haldes. Ainsi une meule, retrouvée récemment, a certainement été utilisée pour le broyage du minerai. Les traces concentriques visibles sur la surface de l’objet en sont les caractéristiques d’utilisation. En vérité, les mobiliers rapportés par Poilane, d’une part un sluice en imbrex à crochet et d’autre part des céramiques, appartiennent au bas Moyen-Âge, voire au début de l’époque moderne. Cependant, la zone d’extraction de Saint-PierreMontlimart a bien livré, à l’époque des recherches, du mobilier gallo-romain mais en dehors des mines. Le contexte de découverte est ainsi peu compréhensible, rendant l’interprétation difficile.

Broyons de quartz et mispickel. St-Pierre-Montlimart (49).

C’est grâce à l’utilisation de la méthode de datation par le radiocarbone sur des mobiliers en bois conservés au musée de Cholet que l’on peut sûrement dater de l’époque gallo-romaine et du début du haut Moyen-Âge, l’une des phases d’extraction de l’or sur la commune de Saint-Pierre-Montlimart. En effet, les prélèvements réalisés respectivement sur un coin en bois ramassé par Albert Poilane en 1936 et un autre fragment de bois ont été datés de 80 à 390 après J-C et de 60 à 540 après J-C. Cette activité d’extraction aurifère relevait directement de l’administration romaine. Cette région métallifère était donc nécessairement contrôlée par le pouvoir de Rome. Il est presque certain que l’existence et le développement de l’agglomération gallo-romaine du Fief-Sauvin, en continuité de l’occupation gauloise, est due à cette importante activité d’extraction. Deux « scories » contenant de l’or ont été trouvées aux Chirons et à Bohardy (Fief-Sauvin). Même s’il n’est pas possible de les dater, ces déchets sont manifestement liés à une activité du travail de l’or à l’emplacement de l’occupation gauloise et gallo-romaine du Fief-Sauvin. Il existe un filon au nord-ouest de la commune, en limite de la forêt de Leppo et en direction de la commune du Puiset-Doré. Un sondage de reconnaissance pratiqué en 1902 a confirmé sa présence. Même s’il n’est pas possible d’établir que ce filon a été exploité à l’époque gauloise, gallo-romaine ou au Moyen-Âge, on doit signaler à sa proximité deux enclos à talus et fossés quadrangulaires encore conservés dans la forêt de Leppo. Ces enclos sont peut-être à mettre en relation avec une activité minière.

Meule à minerai. Poudingue. St-Pierre-Montlimart (49).

Scories. St-Pierre-Montlimart (49).

54


Quart de statère au type « pontife forgeron », à droite. Or. Le Fief-Sauvin (49).

55

Quart de statère au type « pontife forgeron », à gauche. Or. Bords de Loire, Ancenis (44).


ain e La M

La Lo ir

Avant l’époque romaine, la question de l’extraction se pose, notamment pour l’époque gauloise. Celle-ci est bien renseignée dans le Limousin et est datée de la fin du IVe et du IIIe siècle avant J-C. Elle se réalise sous la forme de grandes tranchées et de fosses. Dans le parc du château du Verger à Saint-PierreMontlimart, une fosse de très grande dimension fut repérée dès 1834. Celle-ci mesurait près de 100 m de longueur, 80 m de largeur et 18 à 20 m de profondeur. Toujours à Saint-Pierre-Montlimart, des tranchées, longues parfois de 35 m ont été signalées dans le Bois de la Bellière. D’autres aurières, du même type sont signalées sur les communes de Saint-Quentin-en-Mauges, Saint-Rémy-en-Mauges et La Salle-et-Chapelle-Aubry.

Angers

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Il n’existe aucune preuve archéologique permettant de les attribuer à l’époque gauloise. Mais des indices concordent pour reconnaître une activité de la métallurgie de l’or dans la région de Saint-Pierre-Montlimart à cette époque. Au XIXe siècle, une boucle d’oreille en or de l’Âge du Fer a été retrouvée au Fief-Sauvin. Et surtout, on constate la présence presque exclusive dans les Mauges de monnaies gauloises en or de bon aloi, figurant sur une face un personnage courant à gauche (cf encart sur la monnaie dans le chapitre « Les Celtes et l’essor du monde rural »). Ces monnaies au type du « pontife forgeron » précèdent les statères du IIe siècle avant J-C. Par hypothèse, elles sont peut-être issues et caractéristiques de cette région riche en or.

Le Lay on

Source : G. Aubin & J. Hiernard

L’Evre

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Limite du Maine-et-Loire Monnaie au pontife forgeron Mine d’or

Nord

Répartition des monnaies gauloises au type « pontife forgeron »

On a également envisagé une exploitation de l’or dès l’Âge du Bronze. Ainsi propose-t-on de mettre en relation le nombre important d’objets en bronze dans le quart sud-ouest du Maineet-Loire et la présence d’or. Toutefois, nous n’avons pas la preuve d’extraction de ce métal à l’Âge du Bronze même si l’orpaillage est vraisemblablement connu à cette période. Jean-Philippe Bouvet

56


Époque gallo-romaine

- 20 - 450 - 300 000

- 150 000

- 40 000

- 9500

- 5000

XIeS

- 800

- 2200

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57

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Céramique sigillée à la tête de lion. Mazières-en-Mauges (49).


CALETES

Avant la Conquête, la Gaule est une mosaïque de peuples. César l’évoque dans La Guerre des Gaules (56 avant J-C), puis Pline l’Ancien (23-79 après J-C) dans Histoire naturelle, livre IV. La délimitation des diocèses à l’Antiquité tardive et l’interprétation de la toponymie suggèrent l’organisation territoriale gauloise au Ier siècle avant J-C. Les monnayages de ces différents peuples sont également d’un précieux secours pour mettre en évidence leurs limites, même d’une manière imprécise.

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Nantes Ratiatum

La conquête de la Gaule

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Cholet PICTONS

LA ROMANISATION DE LA GAULE

AQUITAINE

Organisation des cités galo-romaine au Haut-Empire

Mis en échec devant Gergovie, César est vainqueur à Alésia en 52 avant J-C. C’en est fini de l’indépendance de la Gaule, malgré quelques révoltes vite réprimées. Les lois romaines sont imposées, le latin devient la langue commune pour tous les peuples conquis. Les divinités celtes sont assimilées dans le panthéon romain, en conservant les lieux de culte. Le calendrier latin est de rigueur, l’espace est cadastré. Les villes sont créées avec de véritables plans d’urbanisme organisés à partir de deux axes orthogonaux, un cardo et un decumanus et dotées de monuments publics. Les thermes, bains publics ou privés, sont l’un des reflets de la romanisation. Les aristocrates gaulois deviennent les notables du nouvel empire créé par Auguste (fils adoptif de César) et vont par là même s’enrichir. Les artisans et les commerçants, attirés dans les villes nouvelles, vont profiter de la « paix romaine », qui leur permet d’augmenter d’une manière sensible leur niveau de vie. Les échanges commerciaux sont facilités par le développement d’un important réseau routier. Les personnes, les marchandises et les biens manufacturés peuvent ainsi voyager d’un bout à l’autre de l’Empire.

SA

NT ON

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Limonum

Source : “Archéologie de la France, 30 ans de découverte”

OSISMES

Anagnutes et Ambiliates (nommés par César) ou Ambiliatres (selon Pline l’Ancien) ne seront plus évoqués par les auteurs latins après le Ier siècle après J-C. Ils ont peut-être subi la nouvelle organisation administrative en perdant leur autonomie. Quoiqu’il en soit, la localisation de ces deux peuples, avant la conquête, fait toujours débat. Des érudits et archéologues ont placé les Anagnutes dans le Pays de Retz et les Ambiliates/Ambiliatres dans les Mauges voire à cheval sur la Sèvre Nantaise et dans le pays de Retz. La répartition des types de monnaies gauloises retrouvés au sud de la Loire nous est de peu de secours. Cependant, en dehors du monnayage abondant attribués aux Pictons, Santons, Namnètes et Vénètes, d’autres séries monétaires sont bien caractérisées. Mais elles ne sont constituées que de quelques individus. C’est le cas des monnaies à l’aigrette dont la répartition se situe à l’extérieur et à l’est des Mauges. L’hypothèse de son attribution aux Ambiliates/Ambiliatres a déjà été posée. La Gaule « chevelue », jusqu’ici indépendante, entre ainsi de plain-pied dans l’histoire romaine.

AMBILIATES ET ANAGNUTES : DES PEUPLES TOMBÉS DANS L’OUBLI ?

La cité des Pictons et « la route de l’or »

L’empereur Auguste intégrera au monde romain les territoires des peuples gaulois nouvellement conquis sous la forme de civitates (ou cités), elles mêmes regroupées en provinces (Aquitaine, Lyonnaise et Belgique). Ainsi, Pictons, Andes, Namnètes, Santons, Turons, seront confirmés dans leurs limites même si certaines ont du être modifiées par le nouveau pouvoir. Deux peuples situés vraisemblablement au sud de la Loire,

La cité des Pictons, à laquelle le Choletais appartient alors, s’étend maintenant jusqu’à l’embouchure de la Loire. Sa capitale est Lemuno (Poitiers). Ratiatum (Rezé), importante agglomération portuaire pictonne située face à Nantes, constitue le principal débouché commercial sur la Loire et l’océan. 58


Le Fief-Sauvin

Juliomagus (Angers) 0

10 km

Nord

Source : G. Berthaud

Ratiatum (Rezé)

Mazières-en-Mauges

St-Clémentin

Organisation de l'espace le long de la voie Poitiers-Rezé

La Barbinière Lemonum (Poitiers)

Élévation des thermes. La Barbinière, Moulins (79).

Faye-l'Abesse Agglomération secondaire

Villa attestée

Tr o i s a g g l o m é r a t i o n s a n t i q u e s

Enclos de l’Age du Fer ou gallo-romain Voie romaine tracé nord

Villa présumée (Albiniacum)

Voie romaine tracé sud

Enclos fouillés

Voie romaine présumée

Des bourgades plus ou moins importantes, agglomérations secondaires, s’installent le long des voies profitant ainsi de ces axes commerciaux. Trois d’entre elles sont actuellement connues dans le Choletais.

Le Choletais privé de tout axe fluvial navigable doit son développement aux deux tronçons de voie reliant Poitiers à Rezé créés à l’époque augustéenne. L’un de ces tronçons obligeait le voyageur désireux de rejoindre Juliomagus (Angers) à se détourner par la probable « Segora ». Ce tronçon nord est mentionné dans la carte de Peutinger, copie médiévale d’une carte de l’Empire romain. On s’interroge au milieu du XXe siècle au sujet de la situation de l’antique Segora, mais une majorité d’auteurs s’accorde aujourd’hui à la situer sur La Ségourie du Fief-Sauvin.

La Barbinière de Moulins n’est connue que par les résultats des fouilles pratiquées en 1909, 1910 et 1911, par N. Gabillaud alors instituteur dans cette commune des DeuxSèvres. Au vu des structures, on peut proposer l’hypothèse d’une agglomération secondaire avec une villa, des thermes et un possible « fanum ». Le matériel recueilli est révélateur d’un certain niveau de vie. Les diverses monnaies indiquent une occupation du début du Ier siècle au milieu du IVe siècle.

Six coupes ont été pratiquées sur son tracé sur les territoires communaux de Cholet et de Mazières-en-Mauges. On a pu ainsi mettre en évidence son mode de construction. Une tranchée de fondation de six mètres de large est creusée, ses côtés sont aménagés par un rang de pierres posées verticalement et le fond par une couche de grosses pierres plates assurant la tenue de l’ensemble. Une ou plusieurs couches de cailloutis constituent la partie supérieure de la chaussée. Deux larges bas-côtés de huit à neuf mètres de large sont prolongés par les fossés. L’ensemble atteint vingt-cinq mètres de large. Cette route, bien que très impressionnante, ne possède aucune surface de roulement dallée à la différence des voies du sud de la Gaule.

Therme Villa Sanctuaire du type fanum

La riche région métallifère des Mauges, dont l’exploitation de l’or sous la forme de mines et d’aurières est placée nécessairement sous le contrôle de l’Empire, vient doper les échanges commerciaux assurant ainsi la richesse de la région. La voie romaine de Poitiers à Rezé pourrait être qualifiée de « route de l’or ».

Habitat Ruelle Puits

Nord

Dolium Vestiges non localisés

59

0

30m

Source : G.Berthaud, d’après N.Gobillaud

Enclos et villa entre Mazières et le Fief-Sauvin

La Barbinière (Moulins) à l'époque gallo-romaine


1/ Quartier du Vieux-Bourg

1

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2/ Quartier de La Liaudière

Grand bâtiment. Photo aérienne. Le Fief-Sauvin (49).

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Juliomagus (Angers)

Voie romaine

Source : J-P. Bouvet & SRA Nantes

Fondations de construction Ruelle

Lemuno (Poitiers)

Voie romaine d’après Célestin Port Voirie avérée

0

500 m

Fortification gauloise

Voirie supposée

Fortification gauloise ?

Structures gallo-romaines

Structure gauloise ou gallo-romaine

Puits

Fossé

Forge

Bassin Four de potier

Mazières à l'époque gallo-romaine

est vraisemblablement dû à la proximité de l’exploitation de l’or. C’est certainement la plus importante des trois agglomérations secondaires faisant l’objet de notre étude. Enfin Mazières-en-Mauges, a bénéficié de nombreuses fouilles récentes. Le site gallo-romain s’étend sur environ vingt-cinq hectares, mais aucune nécropole n’est connue actuellement. Deux quartiers ont été partiellement observés : Le Vieux Bourg et La Liaudière. Au nord, dans le quartier du Vieux Bourg, les dernières opérations ont révélé des murs imposants (plus d’un mètre d’épaisseur), des sols de chaux et des fragments d’enduits peints. Cela suggère de grands bâtiments publics ou privés se répartissant dans un plan de voirie orthogonal qui commence à apparaître. Un bassin peut évoquer la présence de thermes. Les vestiges sont enfouis à faible profondeur, souvent une cinquantaine de centimètres, et ne sont malheureusement conservés le plus souvent que sous les routes actuelles, ce qui rend leur interprétation assez difficile. A six cent mètres au sud du Vieux Bourg, La Liaudière est un quartier d’habitat et une zone artisanale qui se développent le long de la voie romaine de Poitiers à Rezé.

Nord

Voie romaine

B

Enclos

Source : G. Berthaud

Ratiatum

Le Fief-Sauvin à l'époque gallo-romaine

Au Fief-Sauvin, un matériel abondant et de qualité – monnaies, intailles, boites à sceau, cachet d’occuliste et fibules notamment – a été recueilli sur la présumée Segora. Un fanum y a été fouillé, mais cette agglomération n’est pratiquement connue que par les photographies aériennes. Elle est située à un carrefour routier important à l’embranchement des voies en direction d’Angers, de Rezé et de Poitiers et révèle un plan organisé. Des bâtiments de qualité y sont attestés. Son développement à l’époque romaine 60


Fabrications locales

L’habitat s’organise à partir de deux ruelles, l’une parallèle et l’autre perpendiculaire à la voie, suivant un plan comparable à celui de Chanceaux-sur-Choisille en Indre-et-Loire. Les bâtiments étaient construits en torchis sur des fondations de grosses pierres mais les toits n’étaient pas recouverts de végétaux, il s’agissait de tuiles. L’agglomération de Mazières s’installe dès l’époque augustéenne (début du Ier siècle). L’occupation est tout d’abord discrète, puis son développement est assuré par la fabrication de produits manufacturés, dont la diffusion de certains dépassait largement le cadre local. Au début du IVe siècle, il ne subsiste que de rares habitants sur le site de Mazières. En l’absence de toutes traces d’événement violent, on peut s’interroger sur les raisons d’un déplacement de la population : difficultés économiques ou insécurité.

Fouilles archéologiques. Mazières-en-Mauges (49).

Pot. Céramique. Mazières-en-Maugess (49)

Pichet. Céramique. Mazières-en-Mauges (49)

Empreintes sur tuile. Terre cuite. Mazières-en-Mauges (49).

Un artisanat dynamique Potiers, tuiliers, verriers, forgerons et peut-être tisserands, installés dans le quartier de La Liaudière, animent la vie économique de Mazières. Le site a livré des structures, fours et nombreux puits, rattachées au travail de la poterie. Les objets fabriqués, très diversifiés (céramiques communes, amphores, sigillées, céramiques peintes) étaient destinés à la consommation et à l’exportation. Bien que leurs fours n’aient pas été retrouvés, les analyses ont confirmé un artisanat de tuiliers. D’ailleurs une réserve d’argile prête à l’emploi, d’environ quarante tonnes, a été partiellement fouillée dans le quartier nord. Elle était probablement destinée à alimenter Production de forgeron : loquet de les potiers et tuiliers du quartier porte. Fer. Mazières-en-Mauges (49). sud. Les fours des verriers n’ont pu être localisés, mais les déchets de fabrication et les scories ont apporté la preuve de cette activité. La forge mise au jour et fouillée n’était pas une simple forge d’élaboration et de maintenance Production de forgeron : fragment d’outil. Fer. Mazières-en-Mauges (49). des objets métalliques, mais servait également à l’épuration des lingots de fer importés, pour pouvoir Production de forgeron : herminette. être utilisés à la fabrication. Une Fer. Mazières-en-Mauges (49). simple pierre faisait souvent office d’enclume, le forgeron travaillant à genoux. 61


Pesons.Céramique.Mazières-en-Mauges (49).

Le tissage a été mis en évidence par la découverte de nombreux pesons employés pour tendre les fils de chaîne des métiers à tisser verticaux. Cependant, il est impossible de savoir s’il s’agit d’un artisanat ou d’une simple activité domestique. Si les potiers exportaient leur production à l’échelon de la région, les verriers et les forgerons se contentaient probablement d’une clientèle locale. Mazières a donc bénéficié de sa situation le long de la voie romaine pour acquérir et commercialiser de nombreux biens de consommation. Les importations d’amphores permettent de retrouver les circuits commerciaux qui alimentent le Choletais particulièrement en provenance du sud de la Gaule, ainsi que de la péninsule ibérique. Les assiettes, bols et coupes en céramique sigillée, considérés comme des produits de luxe, arrivent des ateliers renommés de la Graufesenque ou de Lezoux.

Clés. Bronze. Le Fief-Sauvin (49), Mazières-en-Mauges (49).

Tranchet. Fer. Mazières-en-Mauges (49).

Les bénéfices de la « paix romaine » La « pax romana » fut une source ne large d’enrichissement pour une articupartie de la population, particucle. lièrement durant le IIe siècle. es Les traces archéologiques n témoignent d’ailleurs d’un niveau de vie assez satisfaisant à cette époque. Les éléments architecturaux sont partout de qualité, que ce soient les thermes de la Barbinière e ou les constructions de ve Mazières. On y retrouve en effet des éléments de colonnes, fragments d’enduits peints et du verre à vitre y nts en torcompris dans les bâtiments chis des artisans, ce qui peut paraître surprenant. Quant au Fief-Sauvin, on peut facilement imaginer qu’une élite y vivait dans une réelle aisance sur la base des bâtiments observés en photographie aérienne, d’éléé ments de colonnades et d’objets de qualité collectés en surface.

Mazières, les habitants ont pu être approvisi approvisionnés au IIe siècle en produ produits exotiques directement issu issus de la colonisation roma maine. Certaines espèces vvégétales ont pu ensuite ê être acclimatées et cultivées. On peut se demander également si des denrées produites, comme les fruits, le vin ou la bière d’épeautre n’auraient pas été comm mercialisées. Le Les populations locales bén bénéficient pleinement des avant avantages de la culture romaine dans une région désenclavée par la grande voie de Poitiers à Rezé. Il subsiste certes un fonds indigène comme le montre une statuette en bois, de facture gauloise, découverte au fond d’un puits à Mazières. Mais ici comme ailleurs, les habitants ont accepté le mode de vie romain, que l’on ressent dans leur nourriture nour et vaisselle de table. ab e

Intailles et perles. Jaspe, cornaline, pierres noire et bleue. Le Fief-Sauvin (49)

62


Bague avec hachette néolithique. Or et pierre. Le Fief-Sauvin (49).

Peigne. Buis. Le Marillais (49).

Cachet d’occuliste . Argilite vert-olive. Le Fief-Sauvin

Spéculum sur pierre de préparation. Métal et or. Le Fief-Sauvin (49).

Céramique sigillée. Céramique. Mazières-en-Mauges (49).

63

Statuette. Bois. Mazières-en-Mauges (49).


Villa. Photo aérienne. Montigné-sur-Moine. (49).

Fanum. Photo aérienne. Le Fief-Sauvin (49).

La maîtrise de l’espace rural

La religion à l’époque romaine

Différentes formes d’habitat rythment un paysage au parcellaire très strict fortement marqué par la trouée de la voie romaine. La Haute Boissière (Montigné-sur-Moine) est une villa reconnue par photographie aérienne. Albiniacum, donnée traditionnellement comme une villa, est située sur l’emplacement de l’actuel quartier Saint-Pierre de Cholet. Dans un paysage où le bocage est désormais bien présent, de nombreux enclos quadrangulaires se répartissent. Ils peuvent être gaulois, romains ou médiévaux. Les enclos de La Flèche et de Richebourg (Trémentines), de L’Ecobue (Mortagne-sur-Sèvre) et de La Chauvelière Neuve (Cholet) ont fait l’objet de fouilles qui ont permis de les dater. Les trois premiers sont d’époque gauloise et ont connu un développement à l’époque augustéenne. Le quatrième est une création antique. La ferme gauloise de La Bleure (Cholet) a continué à être occupée durant le début de l’époque romaine, sous l’empereur Auguste. Le débat est vif au sujet d’un présumé camp romain découvert en photographie aérienne aux Vordeaux (Cholet). Certains y voient plutôt une simple ferme, peut-être gauloise. Une prospection de surface, réalisée en août 2009, n’a pas permis de collecter un matériel suffisant pour émettre une quelconque hypothèse. Seule une campagne de fouilles permettrait de se forger une opinion. Les auteurs du XIXe siècle citent d’autres camps romains : La Baugeau-Château à Cholet et le camp de La Boutrie à La Romagne, pour ne nommer que ces deux exemples. La Boutrie est en fait une grande ferme gauloise comme La Bleure ou Les Natteries (Cholet) étudiées précédemment. La Bauge-au-Château est peut-être d’époque antique, mais il s’agit d’un simple enclos quadrangulaire.

L’époque romaine marque l’introduction en Gaule du panthéon nthéon siste à gréco-romain et la diffusion du culte impérial, qui consiste us des honorer les empereurs défunts et divinisés ou les vertus sistent empereurs vivants. Certaines divinités gauloises subsistent toutefois, mais sous des formes réinterprétées et sans doute e. Les très différentes de ce qu’elles étaient avant la conquête. tes sanctuaires, au sein desquels s’accomplissent des rites communautaires complexes et variés, n’ont plus guère à voir non plus avec leurs précédents gaulois, mais la religion se pratique aussi dans le cadre privé ou encore à l’occasion des cérémonies funéraires. La région de Cholet et ses environs offre quelques ux aperçus intéressant cette question de la religion. Les deux ération temples à plan centré et galerie périphérique de l’agglomération nsions du Fief-Sauvin, dont un seul a été fouillé, ont des dimensions relativement réduites et un plan très répandu dans less Trois enne à Gaules ; un autre a été identifié par photographie aérienne ouvent Beaupréau, peut-être en lien avec un domaine rural. Souvent ut être improprement qualifié de fanum, ce type de temple peut considéré comme spécifiquement gallo-romain, dans la mesure où il correspond à une création originale sans antécédent gaulois ou romain. Sa fonction est toutefois identique à celle d’un temple romain classique et consiste à abriter l’image de la divinité emples (ou des divinités). La situation périphérique des deux temples du Fief-Sauvin incite à penser qu’un sanctuaire plus central, u sein mais non reconnu, devait exister tout comme d’ailleurs au de l’agglomération de Mazières-en-Mauges où aucun édifice religieux n’est connu pour l’heure. 64


Ces petits temples se distinguent en tout votif où sont mentionnés les puissances cas du vaste complexe monumental qui divines des empereurs et le dieu Mullo. semble pouvoir être identifié à SainteCe nouveau témoignage s’ajoute à un Gemmes-sur-Loire et où l’on doit sans corpus d’une douzaine d’autres mentions doute reconnaître un sanctuaire dédié de Mars Mullo, divinité poliade (protectrice à la principale divinité protectrice des de la cité) honorée dans plusieurs cités Andécaves. En revanche, le site de de l’ouest de la Gaule. La dénomination La Barbinière (Moulins), exploré au du dieu sous la forme Mullo, sans le nom début du XXe siècle, pose question : les romain de Mars, peut être considérée comme un témoignage de la dévotion plans incomplets dont on dispose ne populaire qui attache sans doute moins permettent pas, en effet, d’y reconnaître d’importance à la version officielle (Mars avec certitude, comme cela a été dit, un Mullo) qu’à la dénomination traditionnelle sanctuaire avec balnéaire et bâtiments Vase d’offrandes à « Mars Mullo » et d’origine gauloise. annexes. On se retrouve là devant un cas détail. Céramique. Le Marillais (49) Les figurines en terre cuite, auxquelles courant, lorsque les données disponibles les croyances populaires attribuent sont lacunaires, où l’on peut hésiter des vertus protectrices, sont très courantes et pour la plupart entre une grande villa, un sanctuaire rural ou une agglomération produites dans des ateliers du centre de la Gaule. Les deux secondaire avec édifices religieux. Les dimensions des thermes types représentés - Vénus anadyomène (qui sort de l’eau) et (420 m2), par exemple, ne permettent pas de trancher entre statut déesse nourrice allaitant - symbolisent l’amour, la fécondité, privé ou statut sta public. De même, le grand bâtiment la maternité ou la prospérité et interviennent dans les rites de (2 300 m2) situé au nord, non intégralement la vie quotidienne. On les rencontre ainsi en contexte privé, pe fouillé, peut être interprété soit comme un souvent rassemblées avec les génies des ancêtres et les dieux sanctuaire avec péribole, soit plutôt comme une lares protecteurs du foyer dans de petits oratoires (ou laraires), villa avec g galerie de façade et pavillons latéraux, à l’exemple de celui découvert à Rezé et conservé au musée forme cour courante dans les Gaules romaines. Enfin, Dobrée. Elles jouent aussi un rôle protecteur dans le cadre des à l’est, un petit p édifice carré inscrit dans un vaste activités artisanales (quartier de potiers de espace de forme rectangulaire a été qualifié Mazières-en-Mauges). Elles se retrouvent de fan Mazière fanum, mais sans que là encore l’image souvent en plan pla soit vraiment typique. souven parmi les offrandes déposées Avec quelques découvertes anciennes mal dans des lieux de culte qui échappent à la docu relig religion officielle, comme celles qui ont été documentées, seule la statuette en bronze du Fief-Sauvin F pla placées au contact du dolmen du Champ illustre les dieux romains hon Ru Ruisseau à Champtocé-sur-Loire. Enfin, honorés ici. Elle représente un Mercure nu dieu des échanges, générateur de on les rencontre également dans des nu, ric sé sépultures, à l’exemple de celle qui a richesses et patron des marchands m été fouillée en 2002 à Gorges. mais aussi protecteur des voyageurs. C En bref, les quelques témoignages C’est l’une des divinités les plus a dispo disponibles dans le quart sud-ouest du attestées en Gaule, représentée ici da une posture classique dans l’art Maine Maine-et-Loire illustrent bien, malgré leur dans gréco-roma mais avec une facture générale faible quantité, quelques-uns des principaux gréco-romain, suggèr une traduction gauloise du modèle. aspect de la religion à l’époque romaine. aspects qui suggère h Sa faible hauteur (6,5 cm) incite à la rattacher à context de culte privé, voire à y reconnaître Martial Monteil un contexte élémen décoratif d’applique de meuble. un élément s Le bol en sigillée découvert fortuitement à NotreM Dame-du Marillais constitue le document le plus original, en ce qu’il porte un graffite à caractère Statue du dieu Mercure. Bronze. Le Fief-Sauvin (49)

65

Statuette de Vénus, fragment. Terre blanche. Mazières-en-Mauges (49)


Le statut de Gallo-romain

accorde la citoyenneté romaine à tous les hommes libres de l’Empire. Ceci ne concerne évidemment pas les esclaves, source importante de revenus et moteur de l’économie romaine.

Après la conquête, le régime imposé par Rome aux élites gauloises consiste à les transformer en acteurs de la romanisation en leur déléguant certains pouvoirs. Elles profitent rapidement des avantages de la romanité (loisirs, culture, art de vivre...) et voient leurs prérogatives confirmées. Avec habileté, les Romains n’ont pas supprimé l’aristocratie gauloise. Ils l’ont incitée à adhérer au système à la fois par intérêt et par fascination vis-à-vis de la grandeur de Rome. « Le farouche Gaulois jaloux de son indépendance est une invention du XIXe siècle », comme le proclame Christian Goudineau, professeur au Collège de France. On a trop souvent regardé la Gaule comme une vaste forêt peuplée de barbares chevelus et vivant dans des huttes de branchages. En fait, elle est couverte d’exploitations agricoles. Le Choletais en est un parfait exemple avec ses nombreuses fermes. De fructueux échanges commerciaux existaient depuis longtemps avec le monde méditerranéen. Il suffit de considérer les importations de vin dont les Gaulois étaient friands. Les nombreuses amphores découvertes dans les fermes gauloises de La Bleure et des Natteries (Cholet) en sont l’illustration. C’est pourquoi le monde gaulois s’est prêté aussi facilement à la romanisation. Le ralliement des notables au monde romain entraîna celui du peuple. Certes les couches les plus populaires de la société (artisans, paysans...) n’en ont sans doute pas profité de la même manière, mais en 212, un édit de l’empereur Caracalla

Le latin était-il utilisé dans le Choletais ? Probablement, comme dans tout l’Empire, mais sans doute guère avant la fin du Ier siècle. A Mazières, la totalité des graffitis des potiers sur les fragments de vases sont, au IIe siècle, bien romains et non gaulois. Le Rhin et le Danube déterminaient une frontière naturelle à l’est de l’Empire ; au-delà, on était chez les « Barbares », c’est-à-dire ceux qui ne parlaient pas latin. Alors que représente un Gallo-romain? C’est tout simplement un Gaulois romanisé, mais pas au point de subir une acculturation totale. Son habillement était certainement proche de celui des habitants de Rome mais les fibules, ces attaches de vêtement, découvertes à Mazières ou au Fief-Sauvin sont d’origine gauloise et non romaine. Le Gaulois a gardé ses dieux dans un panthéon élargi avec ceux des Romains. Avec la fin de la « Pax romana », la Gaule traversa une période de crise à partir du milieu du IIIe siècle. Pour maintenir son unité, Rome fit appel à de nouvelles recrues issues du « Barbaricum », le territoire des Barbares. Au Bas-Empire, la romanisation de tous les « Barbares » venus servir dans l’armée romaine fut un nouveau défi pour l’Empire et la Gaule. Gérard Berthaud

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Époque gallo-romaine

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Fibule germanique. Argent. Cholet (49).


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Céramiques germaniques et gallo-romaines des nécropoles de Cholet. Céramique. Cholet (49).


LA NÉCROPOLE À INHUMATION DE LA RUE DU PARADIS

Dès la fin du IIIe siècle, pour pallier les difficultés de recrutement, des contingents germaniques sont intégrés dans l’armée romaine. Leur arrivée va ainsi précéder les invasions des « Barbares » en Occident. Par l’Edit de Milan (313) le christianisme devient la religion officielle de l’Empire, mais il faut attendre la fin du IVe siècle pour voir nos campagnes commencer à être évangélisées par Saint Martin de Tours. Commence alors une période caractérisée par un mélange de traditions antiques (que les historiens appellent la « romanité »), d’apports chrétiens et d’influences « barbares ». De ce bouillonnement culturel et religieux va naître le Moyen Âge. Que dire de Cholet ? Les nombreuses monnaies romaines récoltées dans la ville et pouvant être datées de la fin du IIIe siècle ou du IVe siècle, témoignent d’une occupation au Bas-Empire. Plus importantes sont les observations archéologiques du docteur Léon Pissot concernant les modes d’inhumation pour cette même période et le début du Moyen Âge.

Elle fut découverte lors de la construction de l’Ecole de Filles en 1881. Le docteur Léon Pissot y a fouillé au moins douze tombes. Toutes dirigées nord-ouest/sud-est, elles se présentaient sous l’aspect de fosses rectangulaires. Le mode d’ensevelissement n’est pas explicité : coffres en bois ou pleine terre ? Le mobilier associé, découvert dans les tombes, peut être classé en plusieurs catégories. Citons tout d’abord les offrandes monétaires (siliques en argent) qui concernent deux tombes. Ces offrandes, oboles à Charron, sont rares dans la région, les bronzes frappés étant plus courants comme à la gare SaintLaud à Angers. Viennent ensuite les dépôts de céramiques et de verrerie, viatique pour l’au-delà et enfin, les effets d’habillement personnel : colliers en perles de verre ou d’ambre, boucles de ceinture ou de jambières. Cette nécropole, à l’étendue sans doute limitée, semble avoir fonctionné, d’après l’étude du mobilier, entre la seconde moitié du IVe et la première moitié du Ve siècle. La présence de siliques d’argent, d’un collier en perles de verre, de boucles en argent, d’un vase dont la facture présente des similitudes avec des exemplaires connus en Crimée sont autant d’indices sur la présence d’une population germanique à Cholet au Bas-Empire.

Des « Barbares » à Cholet ? Sur le site même de Cholet, deux nécropoles ont été découvertes à la fin du XIXe siècle, au sud et au nord du quartier Saint-Pierre, rue du Paradis et rue Saint-Bonaventure.

Boucles. Argent. Cholet (49).

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Collier germanique. Ambre, verre. Cholet (49).


LA NÉCROPOLE DE LA RUE SAINT-BONAVENTURE COUVENT SAINT-FRANÇOIS La découverte de cette nécropole s’effectua en octobre 1861, lors de la rectification de la rue Saint-Bonaventure et de la construction du couvent Saint-François. Les ouvriers mirent au jour, à une profondeur d’un mètre, trois rangées superposées de cercueils en pierre de direction nord-ouest/sud-est qu’ils coupèrent obliquement. Ces sarcophages, en calcaire coquillier de Doué, sont probablement du VIIe siècle. Ils ne renfermaient plus aucune trace d’ossements, mais seulement des poteries gallo-romaines. Hormis un exemplaire pouvant être daté de la fin du Ier siècle, l’ensemble de ces vases peut être daté des IVe-Ve siècles. Enfin, on doit signaler un pichet ansé qui offre une ressemblance frappante avec une forme rencontrée en Aquitaine et attribuée aux populations wisigothes du Ve siècle. Léon Pissot signale également la découverte, dans le jardin de la communauté, de plusieurs autres fosses mais sans sarcophages, simplement creusées dans le granit en décomposition, comme celles de la rue du Paradis.

Sarcophage d’enfant. Calcaire coquillier de Doué. Cholet (49).

Une autre découverte est survenue postérieurement. Il s’agit tout d’abord d’une paire de fibules en argent dont la datation oscille entre 325 et le milieu du Ve siècle. Michel Kazanski, dans un article récent, les attribue plus particulièrement à une population germanique de l’Elbe en se fondant sur la répartition og géographique de ce même type.

Fibule germanique. Argent. Cholet (49).

Pot germanique. Céramique. Cholet (49).

70


Diadème. Or et pierres. Cholet (49).

UNE INSTALLATION GERMANIQUE À CHOLET

En 1899, une sépulture livra un collier en or (volé depuis) associé à une bandelette frontale en or avec six pendentifs en forme de cœurs et de deux plaques temporales circulaires ue. La facture des dont seule l’une nous est parvenue. rdiformes, le objets, l’emploi des pierres cordiformes, e datation travail au repoussé suggèrent une des Ve-VIe siècles.

La présence dans les deux nécropoles de tombes au mobilier attribuable à des populations germaniques nous renseigne sur ces étrangers à l’Empire romain dont l’intég l’intégration s’est faite sur la base d’un engage engagement volontaire d’individus ou de group groupes familiaux dans l’armée romaine. Mê Même si les armes sont absentes, le les dépôts d’offrandes monétaires ((siliques d’argent), les parures féminines, les effets d’habillement, les céramiques d’inspiration germanique vont dans le sens d’une telle proposition.

Il a donc existé antérieurement à e ce cimetière mérovingien, une autre nécropole gallo-romaine qui partage des similitudes avec celle de la rue du Paradis, dans le domaine du mode de sépulture (fosses taillées dans le substrat) et des offrandes. Ce fait est confirmé par la présence de mobilier archéologique antérieur au VIIe siècle : fibules en argent ou céramiques remployées comme dépôt funéraire dans les sarcophages mérovingiens. Cette tradition de dépôt d’objets anciens a rs été remarquée et décrite à plusieurs reprises pour le Maine-et-Loire et plus généralement pour d’autres partiess de la Gaule.

Comme à Angers, ancienne capitale de la Cité des Andécaves, des Germains s’installèrent à Cholet avec leur famille. Auxiliaires dans l’armée romaine, ils assuraient la sécurité d de la région et de ses habitants dans un Empire devenu perméable aux peup peuples jusqu’alors maintenus sur une frontière fixe à l’Est. Temporal. Or. Cholet (49).

L’ensemble torque/diadème/temporaux pourrait se rattacher à cette première nécropole. Cela pourrait expliquer la perte de l’un des disques temporaux, des terrassiers n’ayant perçu que trop tardivement la présence d’une tombe, alors qu’un dépôt en sarcophage offre la sécurité d’un ensemble clos.

Les premières traces d’un habitat

En 1882 des fragments de tuiles à rebords, une brique en forme de claveau et des céramiques données alors comme romaines, ont été découverts sous l’emplacement de l’église Saint-Pierre. 71


Ajoutés à ceux évoqués précédemment, ces indices pourraient trahir un habitat, à proximité des nécropoles, dont on ne connaît pas encore le statut.

La présence de la voie romaine à plus d’un kilomètre au nord pousse alors à opter pour une villa plutôt qu’une bourgade. En outre, la proximité de Mazières-en-Mauges, à quatre kilomètres le long de cette voie, n’autorise guère la coexistence de deux agglomérations aussi proches au Haut-Empire.

Les auteurs anciens évoquent le nom d’Albiniacum pour désigner ce premier noyau d’occupation sur Cholet. Ce toponyme est avéré par deux textes du XIe siècle et paraît correspondre assez précisément à l’emplacement du quartier Saint-Pierre. S’agit-il d’une villa, grand domaine agricole, ou d’une agglomération secondaire ?

Si la pars urbana (demeure du maître ou de son régisseur) se limitait sans doute au versant sud du coteau compris entre les ruisseaux de Montruonde et de Pineau, la pars rustica (domaine cultivé) s’étendait certainement bien plus à l’ouest, de l’autre côté du ruisseau de Pineau. En effet, les habitants de la villa Albiniacum ne pouvaient pas ignorer l’avantage défensif que représentait l’éperon rocheux qui accueillit par la suite le premier château de Cholet.

Léon Pissot dans son Histoire de Cholet, cite un petit chemin « le charroux », qui aurait relié deux tronçons de la voie romaine de Poitiers à Nantes, l’un au nord et l’autre au sud. Sur la foi de ces renseignements et en utilisant des cartes de la ville de 1760, 1811 et 1813, il a été possible de redécouvrir son tracé. Il est surprenant de remarquer que les sépultures des deux nécropoles étaient orientées de la même manière, y compris les sarcophages mérovingiens du VIIe siècle de la rue Saint-Bonaventure et les fosses des IVe - Ve siècles de la rue du Paradis. Cela suppose une forte contrainte dans le paysage. Or « le charroux » longeait les deux nécropoles et son axe était perpendiculaire à celui des tombes, ce qui plaide en faveur de l’antiquité de ce chemin.

Cette villa dut être occupée dès le Haut-Empire, comme en témoignent les quelques monnaies de cette époque récoltées dans la ville et une céramique présente dans l’une des tombes de la nécropole de la rue Saint-Bonaventure. Mais c’est seulement au Bas-Empire qu’elle acquiert une importance indéniable. Avait-elle bénéficié d’un apport de population ? L’agglomération de Mazières-en-Mauges disparaît presque totalement entre la fin du IIIe et le début du IVe siècle, peut-être en raison d’une insécurité. On ne peut donc pas exclure, de par la proximité des deux sites, un apport d’habitants de Mazières venus se réfugier à Albiniacum.

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Il faut y ajouter la présence des auxiliaires Germains et de leurs familles venant renforcer ce premier habitat.

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Nécropole

Site de Cholet à la fin de l'époque gallo-romaine


Les époques mérovingiennes et carolingiennes Les campagnes choletaises

Plusieurs petites monnaies en or, tiers de sous mérovingiens, recueillies à Cholet témoignent d’une occupation à cette époque. Par ailleurs, la nécropole de la rue Saint-Bonaventure contenait, selon Léon Pissot en 1861, trois rangées de sarcophages trapézoïdaux superposés. Ces derniers, en calcaire coquillier de Doué-la-Fontaine, sont des éléments caractéristiques de l’époque mérovingienne et répandus à partir du VIIe siècle. Une telle quantité impressionnante était révélatrice d’une occupation dense à Albiniacum. On peut remarquer également que les cas de continuité entre une nécropole du bas Empire et un cimetière du haut Moyen-Âge ne sont pas très nombreux. Cholet constituerait donc une exception en Maine-et-Loire.

LES HABITATS RURAUX Lorsque du VIIe au XIe siècle Cholet commence à s’urbaniser, comment se présentent les habitats ruraux dans les campagnes avoisinantes ? Les populations occupent autour du VIIe siècle des habitats de taille relativement modeste, souvent entourés d’un simple fossé, comme c’est le cas à La Petite Vernière, L’Ecuyère ou La Ferronnerie, tous trois sur la commune de Cholet.

En 1882, en creusant les fondations de la nouvelle église Saint-Pierre un grand nombre de ces sarcophages, taillés dans la même roche et se touchant tous, ont été mis au jour. Ils confirmaient, très probablement, l’existence d’un ancien bâtiment religieux.

L’enclos quadrangulaire de La Bergerie, à La Séguinière, voit son entrée probablement protégée par un porche, ce qui constitue un aménagement exceptionnel pour la région et suffit à le distinguer socialement des autres sites… Un autre enclos quadrangulaire du Xe siècle existe également à La Gadellerie à Trémentines.

La période carolingienne (VIIIe - Xe siècle) est probablement la plus mal connue en ce qui concerne le noyau urbain de Cholet car aucun texte et très peu de vestiges archéologiques ne viennent l’éclairer, à l’exception de deux monnaies découvertes dans la ville. Les incursions vikings des IXe et Xe siècles n’ont pourtant pas dû ignorer la région car nous savons que les Scandinaves sont descendus plus au sud, dans le Poitou.

D’autres vestiges se limitent à quelques fossés, fosses et trous de poteau, seuls éléments qui subsistent de constructions en bois au plan incertain. Ces vestiges mal conservés appartiennent généralement à de simples fermes isolées. Une fois abandonnés, la nature du substrat, le temps et quelques labours ont eu rapidement raison des restes archéologiques.

Disques perforés pour la fabrication de cordelettes.Terre cuite.La Fretellière.Trémentines (49)

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QUELQUES TRACES D’ACTIVITÉS DOMESTIQUES ET AGRICOLES Des fours ont été découverts sur trois sites La Frétellière, La Gadellerie et La Feronnière. Ces structures de combustion sont entièrement creusées dans le soussol argileux. De petite taille, elles se composent d’une fosse ovale dont le fond et les parois ont été rougis par les feux répétés, ils sont utilisés pour cuire le pain. Les découvertes de fusaïoles, rondelles en céramique ou en calcaire, indiquent que l’on filait la laine sur la plupart des sites. Des réseaux de fossés limitant des champs ont été relevés autour de la plupart des habitats. A La Frétellière par exemple, des parcelles de petite taille plutôt réservées aux cultures existent à côté de vastes parcelles qu’il est tentant d’assimiler à des zones de pâturage.

La fouille du site de La Frétellière a permis d’étudier la production de potiers œuvrant, entre le VIe et le milieu du Xe siècle, dans plusieurs petits ateliers implantés au sein d’un réseau de parcelles agricoles. Parmi les nombreux types d’ustensiles produits, on remarque des faisselles, récipients servant à la fabrication de fromages.

encore lacunaires. Les sites, généralement mal conservés, y sont peu étendus. Comme partout en Pays-de-la-Loire, ces habitats modestes ne semblent constituer que des zones nouvellement mises en valeur. Elles sont sans doute abandonnées quand les temps deviennent plus difficiles à la faveur de terroirs plus faciles à cultiver où existent d’autres habitats mieux situés, plus importants. Certains de ces habitats doivent être dotés d’un cimetière et d’un lieu de culte. Ces sites qu’il nous reste à découvrir sont sans doute à rechercher sous les villages actuels. Sachant que beaucoup ont livré des sarcophages mérovingiens, on peut dès cette époque s’interroger sur la présence d’espaces habités à proximité, de villages occupés sans discontinuer jusqu’à nos jours.

CARACTÉRISTIQUES DE L’OCCUPATION RURALE

LES PAYSANS-POTIERS DE LA VALLÉE DU RUISSEAU DES MUSSES

Les données sur l’occupation des campagnes au haut Moyen-Âge, autour de Cholet, sont

Le site de La Frétellière occupe une large vallée où coule le ruisseau des Musses,

LES ACTIVITÉS ARTISANALES Des scories ont été découvertes sur plusieurs sites, notamment sur celui de La Petite Vernière à Trémentines et sur les sites de L’Ecuyère à Cholet pour la période mérovingienne. Pour ces exemples on parle de réduction de minerai de fer tout comme sur le site de La Bergerie à La Séguinière.

Pot. Céramique. La Frétellière, Trémentines (49).

Bassine (ou grand pot). Céramique. La Frétellière, Trémentines (49).

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Fusaïole. Céramique.


à l’extrême nord de la commune de Trémentines. Les vestiges ont surtout été relevés sur le versant sud. Ils se composent d’un ensemble de fossés qui délimitaient des parcelles agricoles. Les traces les plus anciennes remontent à la fin de la période mérovingienne. De très rares structures domestiques s’y rattachent. Le réseau de fossés s’affirme ensuite et s’organise tout au long de la période carolingienne (VIIIe - début du Xe siècle). Cette ultime phase du haut Moyen-Âge est la mieux attestée avec des ensembles de parcelles bien établis où les structures d’habitat sont totalement absentes. En périphérie de ces champs, quatre fours de potiers ont pu être relevés souvent associés à des tessonnières (amas de poteries issues de fournées plus ou moins avortées).

La Frétellière, Trémentines (49).

Cent trente vases complets ou suffisamment complets pour en connaître la forme, mais présentant tous des défauts notamment des fentes liées à des incidents de cuisson et plus de 750 kg de tessons ont été retrouvés dans les fossés voisins. Tous ces rebuts ont permis d’étudier une production exclusivement modelée (fabrication sans tour de potier) et produite entre le VIIe siècle et le début du Xe siècle. La phase carolingienne est la mieux attestée avec les principaux amas de tessons et les quatre fours. L’activité potière cesse au milieu du Xe siècle et un peu plus tard, vers l’an mil, ne subsiste sur le site qu’une modeste ferme. Elle est abandonnée dès la fin du XIe siècle. La zone n’est ensuite réoccupée qu’au XVe siècle avec une série d’aménagements liés probablement au trempage du chanvre. Le site de production céramique de La Frétellière constitue une première dans les Pays-de-la-Loire pour cette période.

Faisselle. Céramique. La Frétellière, Trémentines (49).

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Les fours retrouvés, ainsi que la plupart des vases étudiés sont également inédits. L’activité potière pratiquée durant plus de trois siècles est liée à la présence de matière première (filons d’argile) facilement accessible. La production est répartie en petits ateliers dont la quantité à l’échelle de la vallée est pour l’instant difficile à apprécier. Il semble cependant que dans cette modeste vallée, il y ait eu bien plus que quelques potiers à travailler en même temps, ces petites unités pouvant toutes ensemble constituer une des zones principales de production régionale de céramique durant le haut Moyen-Âge. Ces petites officines en se fixant en limite des champs, ce qui n’empiète en rien sur les parcelles agricoles, fournissent probablement une ressource complémentaire à des populations qui restent sans doute avant tout paysannes. Alain Valais

Pot. Céramique. La Frétellière, Trémentines (49).


Cholet au XIe siècle : une agglomération qui se structure Deux toponymes surviennent quasiment simultanément dans les sources écrites au XIe siècle pour désigner l’emplacement actuel de l’agglomération de Cholet : Albiniacum et Cauletum. Il y avait donc à Cholet deux noyaux urbains qui se sont développés conjointement : le bourg proprement dit (Albiniacum) et la ville ceinte, c’est-à-dire entourée d’un rempart (Cauletum). ALBINIACUM, LA VILLA DEVENUE AGGLOMÉRATION Si l’on s’appuie sur les données archéologiques étudiées précédemment, Albiniacum dont le nom est probablement formé à partir du patronyme « Albinus » (Aubin), semble être une villa du Ier ou du IIe siècle. Ce lieu aurait prospéré durant toute l’Antiquité tardive et le haut Moyen-Âge en bénéficiant du site défensif naturel voisin qui a accueilli par la suite le château.

Albiniacum mentionné en fin de 3e ligne. Acte de donation d’une borderie. Parchemin XIe siècle.

la rivière en latin est intéressante. En effet, la Mayenne/Maine qui coule à Angers et la Grande et la Petite Maine qui se jettent dans la Sèvre Nantaise s’écrivent en latin de manière strictement identique : « meduana ». On remarque la fréquence d’utilisation, dans un espace relativement réduit, de ce même nom dont le sens reste par ailleurs très largement obscur.

Il existait à Albiniacum deux églises – Saint-Pierre et SaintAubin – attestées au XIe siècle, mais probablement beaucoup plus anciennes si l’on se fie à leur vocable. En effet, les églises dédiées à Saint Pierre sont souvent mérovingiennes, voire antiques et saint Aubin, évêque d’Angers entre 525 et 550 a sans doute été choisi en référence au nom du lieu : Albiniacum. On retrouve ce phénomène à Saint-Aubin d’Aubigné (Ille-et-Vilaine) ou plus proche de Cholet à La Romagne (Romania) dont l’église fut dédiée à saint Romain.

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Eglise Saint-Aubin

Cours d’eau

Castrum Cauletum

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Ces églises semblent appartenir dans les années 1060 aux moines de Marmoutier installés au prieuré Saint-Pierre de Chemillé. C’est du moins ce que l’on peut comprendre d’un acte par lequel deux chevaliers, dont l’un, Geoffroy Le Gros (Crassus) est l’ancêtre de la maison de Cholet, cèdent aux moines divers droits et une terre située à Albiniacum près de ces églises. Le texte précise que les moines furent autorisés à y établir un bourg. Cela sous-entend que Cholet ne devait pas être densément occupé auparavant. Cet acte est donc crucial pour comprendre l’histoire de la ville car cette donation constitue probablement l’impulsion à l’origine du développement du quartier Saint-Pierre de Cholet. La référence à une châtaigneraie, dans laquelle les moines et les habitants du bourg étaient autorisés à y envoyer leurs cochons, brosse un tableau qui devait, somme toute, rester assez champêtre. L’acte ajoute que la Moine (Meduana) était aménagée pour y recevoir un moulin à eau qui porte le nom de La Grange (Grangia) ainsi qu’une pêcherie. Cette mention de

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Source : G.Berthaud

Cauletum

Site de Cholet au XIe siècle

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L’ESSOR DE CAULETUM

De futures découvertes permettront peut-être de trancher définitivement la question.

Le toponyme Cauletum sert à désigner le site fortifié de la ville. Il est à l’origine du nom actuel de Cholet. Utilisé tout au long du XIe siècle Cauletum ou Caulletum, a progressivement évolué en Coletum (attesté entre 1062 et 1082), puis Choletum (attesté en 1082) ; Choleth (attesté fin XIe - début XIIe siècle) ; Choleit (attesté entre 1124 et 1142) ; pour parvenir au Cholet actuel en passant par Chollet. La dénomination Calletum que l’on retrouve plus rarement, semble être une déformation sans conséquence qui serait plutôt le fait des scribes médiévaux.

Si la première mention d’un castrum à Cholet date de 1069, tout porte à croire que celui-ci est plus ancien. Mais alors de quand date-t-il ? Deux moments semblent propices à l’érection de ce château. Le premier est la période de Foulques Nerra (987-1040), notamment vers 1005-1006, après son coup de force en Mauge (cf le chapitre « Les contours d’un territoire »). Le problème est que les sources contemporaines restent absolument muettes. Le second moment est le règne de son fils Geoffroy Martel (1040-1060) qui a notamment étendu son influence vers l’ouest en érigeant la forteresse de Clisson. L’appartenance de Cholet à l’orbite angevine ne fait aucun doute lorsque l’on étudie les chevaliers qui ont été installés dans ce château. Il s’agit d’un certain Geoffroy le Gros (Crassus)

Plusieurs auteurs ont essayé d’en expliquer le sens. Léon Pissot, le premier, dans son Histoire de Cholet en 1883 a donné trois propositions : « Collis loeta, la riante colline » ; « Cauletum de caulis pays des choux » ; « Coelte la forêt », ou mieux « la divine forêt », qui avait sa préférence. On peut y ajouter l’hypothèse de Raymond Arnaud (ancien souspréfet de Cholet) formulée dans la revue de la SLA en 1967 à partir de Calla, terme gaulois qui signifierait le « lieu semé de rochers ».

Cartulaire de Saint-Pierre-de-Chemillé. Parchemin XIIIe siècle. Castrum cauletum mentionné à la ligne 12.

Plus récemment, deux linguistes, Jean-Pierre Chambon et Jean-Paul Chauveau ont repris le dossier. Ils assurent que le toponyme Cauletum est formé à partir de la racine Caule, du latin Caulis, le chou ; et du suffixe latin –etum très fréquemment accolé à des noms de plantes, ce qui signifierait donc « le lieu planté de choux », c’est-à-dire l’ager ou partie cultivée d’Albiniacum. Jean-Pierre Brunterc’h, un autre spécialiste, propose que les triens (tiers de sous) en or frappés Cadolidi et apparentés aux monnaies poitevines aient été émis depuis Cholet et qu’il faille y rechercher l’origine du nom de la ville puisque en évoluant normalement, ce mot s’approche de Cauletum. Comme il était courant au Moyen-Âge que des termes latins dont on ne comprenait plus le sens soient légèrement modifiés par les scribes pour leur redonner un sens plus clair, peut-être Cadolidum, devenu mystérieux, s’est-il transformé en Cauletum : le lien avec les choux ayant l’avantage de la simplicité. Quel pourrait être alors le sens de Cadolidum ? Si le suffixe –lidum assez répandu dans l’ouest paraît lié aux cours d’eau, le préfixe –cado pourrait judicieusement être rapproché du celte Catu qui signifie « combat ». Ce sens lié à la guerre pourrait alors être pertinent pour désigner un lieu à la nature défensive et qui a accueilli par la suite la forteresse de Cholet. 77


La famille de Cholet

GEOFFROI LE GRAS dit de Chimilliaco ou d’Albiniaco attesté dès les années 1030 feudataire de l’évêque d’Angers meurt avant 1067 EP. AGNES

GEOFFROI LE GRAS dit « de Cholet », présent dans le château dès 1069 vit encore en 1109

HERVE LE GRAS dit « de Cholet »

GEOFFROI LE GRAND vassal de Pierre Chemillé dans les années 1040-1050

RAOUL DE CHOLET Ep. ANGEVINE

MILESENDE DE CHOLET Monial au Ronceray prioresse de Seiche

HERVE

GUILLAUME

GAUTIER

RENAUD DE CHOLET EP. HILDEGARDE remariée avec Campanus, frère d’Orri

AUBRI

MATHIEU de Cholet

RENAUD MACRUS

GEOFFROI de Cholet présent à Beaupréau

AIMERI RUFUS

GRIFERIUS

PIERRE dit Laidet, moine de Marmoutier fin XIe - début XIIe

RENAUD

ETIENNE

AREMBOURFE EP. ULGER DU PIN

GUILLAUME

PIERRE de Cholet

GIRARD

GUY DE LA POSSONIERE

et de son frère Geoffroy le Grand (Grandis). Alors que le premier est affublé dans un acte du surnom « d’Albiniaco », son fils homonyme est parfois appelé « de Choleto » ce qui relie Albiniacum et Cauletum de manière irréfutable. Des liens très solides unissent Geoffroy Crassus père aux comtes d’Anjou puisqu’il apparaît comme étant un fidèle des comtes Geoffroy Martel, puis de ses neveux et successeurs Geoffroy le Barbu et Foulques le Réchin dans les années 1050-1060. Par ailleurs, ce même Geoffroy Crassus est feudataire d’un évêque d’Angers, ce qui n’est pas anodin si l’on considère le rôle joué par l’épiscopat dans la poussée angevine au sud de la Loire. Sa famille a eu en outre des liens avec la place-forte comtale de Vihiers, dont certains des défenseurs ont été lotis dans les Mauges au moment de l’intrusion du comte d’Anjou. Ce faisceau d’indices ne constitue pas une preuve, mais permet d’envisager l’hypothèse que la place forte de Cholet ait joué un rôle dans la conquête des Mauges et d’une partie de l’ancien pagus de Tiffauges par les Angevins.

Si le toponyme Cauletum (Cholet) a pris le dessus sur Albiniacum, c’est du fait de la forteresse, lieu du pouvoir, à l’instar de ce qui s’est passé pour le château de Beaupréau (Bello Pratello) par rapport à l’antique église Saint-Martin. D’ailleurs, la permanence des lieux du pouvoir local explique encore aujourd’hui pourquoi de toutes petites communes sont chefs-lieux de canton, comme Montfaucon ou Montrevault. Albiniacum, quant à lui, n’est devenu qu’un quartier de Cholet, corrompu en « Le Bigné ». Pour Célestin Port, ce nom rappelle celui de l’église paroissiale Saint-Aubin devenue simple chapelle d’Aubigné et dédiée maintenant à la Vierge. En réalité, c’est bien le bourg d’Albiniacum qui survit à travers ce toponyme. Sans la présence de Cauletum sur les terres d’Albiniacum, Cholet se serait sans doute appelée Aubigné, comme ce fut le cas pour la commune d’Aubigné-sur Layon, nommée Albiniacus dans les sources du XIe siècle. Gérard Berthaud, Maxime Mortreau et Teddy Véron

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Haut Moyen-Âge

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Cholet au cœur de trois pagi poitevins

L’espace concerné par cette exposition est celle d’un Choletais élargi, englobant le sud-ouest du Maine-et-Loire et débordant sur le nord des départements voisins (Vendée et Deux-Sèvres). Mais ce découpage a-t-il une légitimité historique ? Sans revenir sur le problème des Ambiliates/Ambiliatres dont la localisation paraît évoluer, la plus ancienne délimitation administrative comprenant le Choletais est la grande province d’Aquitaine dessinée par le premier empereur romain Auguste (27 avant J-C - 14 après J-C) qui s’étend des Pyrénées jusqu’à la Loire.

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C’est semble-t-il vers cette époque, et tout au moins durant l’Antiquité, que furent créées dans la région des subdivisions plus réduites, les pagi. Ce terme de pagus n’a pas de traduction littérale parfaite, mais il correspond grosso modo à la notion de pays, dans le sens où on l’entend localement. On ne connaît les limites des pagi d’Herbauge, de Tiffauges et de « Mauge » que dans une source tardive mais néanmoins assez fiable : la Chronique de Nantes. Elle précise que leur territoire s’étend du cours du Layon descendant en Loire jusqu’à son confluent avec l’Hyrôme, puis de la source de cette rivière jusqu’à Petra Ficta, et c’est ensuite le petit fleuve côtier Lay en Vendée qui matérialisait cette frontière jusqu’à l’océan atlantique. Les délimitations antiques prenaient appui sur des éléments naturels visibles, le plus souvent des cours d’eau, mais aussi parfois sur des constructions humaines. L’usage du menhir de « Père fiche », déformation de la traduction « Pierre Fiche » (Petra Ficta) comme borne spatiale en est ici un bon exemple qui a en plus le mérite d’établir un lien physique entre les différentes périodes parcourues par cette exposition. Cette pierre dressée au Néolithique a probablement servi immédiatement de point de repère, mais le fait de la conserver comme tel et de la réutiliser plusieurs millénaires après est assez remarquable.

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L’étymologie du nom « Mauge », lié à l’exploitation de mines (pagus Metallicus), éclaire la raison d’être de cette circonscription. Mais qu’en est-il pour son voisin le pagus de Tiffauges, dont le site actuel de Cholet faisait partie ? La proximité du pagus minier de « Mauge » dont la taille est très réduite mais le sous-sol très riche, pourrait justifier le rôle militaire important que semble jouer son voisin de Tiffauges. Ce pagus tire en effet son nom des Taifales, peuplade Sarmate originaire des bords de la Mer Noire, servant comme auxiliaire dans l’armée romaine. Ces soldats sont attestés dans le Poitou au Ve siècle dans la Notitia Dignitatum, compilation de toutes les dignités tant civiles que militaires de l’Empire romain : « Praefectus Sarmatarum et Taifalorum gentilium, Pictavis » (Préfet des peuples des Sarmates et des Taifales, Poitiers) et au VIe siècle par Grégoire de Tours. De plus, les découvertes archéologiques effectuées dans les nécropoles de Cholet mentionnées précédemment attestent de la présence de troupes d’auxiliaires étrangers installés aux IVe-Ve siècles avec leur famille. Enfin ce rôle militaire du pagus de Tiffauges permettrait d’expliquer, selon J.-P. Brunterc’h, les toponymes Romania (La Romagne) et Mauritania (Mortagne-sur-Sèvre) comme étant des lieux de garnisons romaines et maures. En reliant ces deux villages avec celui de Tiffauges (Taifales), un triangle se dessine. Il se transforme en losange si l’on

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Le nord du Poitou au IXe siècle Limite incertaine entre Mauge et Tiffauges

Localités

Limite du comté d’Herbauge d’après la Chronique de Nantes

Toponymie liée à la notion de frontière

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y intègre Cholet et les Germains. Était-ce le cœur militaire de ce petit territoire ?

sur le sud de la Loire depuis ses droits exercés à plusieurs reprises sur le comté de Nantes tout au long du Xe siècle.

Relevant du royaume d’Aquitaine sous les Mérovingiens et les Carolingiens – on se souvient du palais de Louis-le-Pieux à Doué-laFontaine – la région est totalement ignorée par les sources historiques avant le XIe siècle à l’exception de Champtoceaux mentionnée au VIe puis au VIIIe siècles et de l’abbaye Saint-Florent sur le Mont-Glonne, l’actuel St-Florent-le-Vieil qui apparaît régulièrement à partir du VIIIe siècle. Justement, la vie de la communauté monastique a été troublée par les incursions répétées des Vikings qui remontèrent la Loire à partir du IXe siècle. S’installant vers 853 sur l’île Batailleuse, au pied du Mont Glonne, ils poussèrent les moines à se retirer dans l’une de leurs possessions, à Saint-Gondon-sur-Loire, dans le Berry. Ne respectant aucune délimitation administrative, les Normands ont bouleversé les frontières des comtés et avec elles le destin de nos trois pagi. Tout d’abord, afin de mieux résister à la pression des Scandinaves, un comté d’Herbauge, constitué des pagi d’Herbauge, de Tiffauges et de Mauge, est détaché du grand comté de Poitiers et réuni avec celui de Nantes dans la main d’un certain Renaud. Comprenant les régions atlantiques et ligériennes, celui-ci a été créé dans le but de rationaliser la défense du royaume carolingien face aux Normands. Mais la rivalité aiguë entre hauts dignitaires francs favorisait la progression des Vikings, toujours plus nombreux, auxquels se joignirent parfois des Bretons profitant de cette relative anarchie pour étendre leur influence sur le Nantais et ses alentours. Le comté d’Herbauge se retrouva bientôt éclaté entre les fidèles du nouveau comte de Nantes Lambert, rival et meurtrier de Renaud. Ainsi, le pagus de Mauge échut à un certain Rainier, tandis que celui de Tiffauges est confié à Girard. Cependant, la présence scandinave restait endémique sur tous ces territoires. Cholet n’a pas pu échapper à ces troubles, car les Vikings descendirent plus au Sud, jusqu’à Saint-Jouin-de-Marnes, près de Loudun.

L’ i n t r u s i o n d e s A n g e v i n s Après la période particulièrement troublée des IXe et Xe siècles durant laquelle les trois pagi d’Herbauge, de Tiffauges et de Mauge passèrent alternativement sous juridiction poitevine, nantaise puis angevine, la situation se clarifia à partir du début du XIe siècle. L’affaiblissement des comtes de Nantes profita à ses voisins, Poitevins, qui recouvrèrent l’essentiel de leurs droits sur l’Herbauge et Angevins, qui réussirent à s’implanter durablement sur la rive sud de la Loire. Une grande partie des pagi de Mauge et de Tiffauges était détenue en alleux, c’est-à-dire en pleine propriété, par le vicomte d’Angers Renaud Torench. L’abbaye Saint-Florent, reconstruite dans le château de Saumur, où les moines se sont installés vers 950 au retour de leur exil berrichon, ayant recouvré ses droits sur l’antique monastère du Mont-Glonne, apparaissait comme l’autre grand possesseur de biens de la région. Une telle concentration dans seulement deux ensembles fonciers était une aubaine pour un comte aussi ambitieux et opportuniste

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Cette situation chaotique dans laquelle se trouvaient nos trois pagi dura des décennies pendant lesquelles ils partageaient le sort du Nantais et commencèrent à s’éloigner de l’orbite poitevine. Lorsque les Normands furent définitivement chassés, dans les premières décennies du Xe siècle, le duc de Bretagne Alain Barbe-Torte en revendiqua la possession et le comte de Poitiers Guillaume Têted’Etoupe accéda à sa requête en 942 pour s’en faire un allié. L’ancien comté d’Herbauge, qui ne devait pas rester nantais très longtemps, retourna sous juridiction poitevine avant 958, mais l’accord de 942 fut renouvelé entre le comte de Nantes Guerech et celui de Poitiers Guillaume Fier-à-Bras (Fierebrace) peu après 981. C’est aussi à ce moment que la maison d’Anjou commença à jeter un regard avide

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Source : T.Véron

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Forteresse Extension maximale du comté d’ Anjou au XIe siècle

L'avancée angevine du XIe siècle au sud de la Loire


L’ a p p a r i t i o n d’un imbroglio juridique

que Foulques Nerra (987-1040) qui profita tout d’abord du contexte familial de son vicomte. Celui-ci ayant, en effet, perdu prématurément un fils, le second, prénommé lui aussi Renaud hérita donc de toutes les possessions familiales à la mort de son père vers 1001. Or, ce Renaud, qui n’est autre que l’évêque d’Angers, n’avait pas d’héritier direct et voulut les léguer au chapitre de chanoine de la cathédrale ainsi qu’à l’abbaye SaintSerge. Il obtint même dans son entreprise le soutien du pape Jean XVIII et du roi de France Robert le Pieux. Estimant avoir suffisamment de garanties pour que son héritage soit distribué comme il l’entendait, l’évêque Renaud prit le chemin du Jérusalem, sans pouvoir atteindre la Terre sainte, la mort l’ayant surpris en chemin à Embrun dans les Alpes, le 12 juin 1005. Lorsqu’il apprit la nouvelle, le comte Foulques se mit en quête de trouver un nouvel évêque pour sa ville d’Angers. Mais plus que la dignité dans cette fonction, ce qui importait aux yeux du comte, c’est que le nouveau prélat, en l’occurrence Hubert de Vendôme, l’aidât à s’implanter durablement dans le nord du Poitou en détournant l’héritage de son prédécesseur. On mesure ainsi l’intelligence politique de Foulques Nerra qui voila l’usurpation massive à laquelle il s’était livré puisque ce fut le jeune évêque Hubert qui installât les fidèles du comte sur les anciennes possessions des Renaud dans les pagi de Mauge et de Tiffauges, entraînant l’intégration de ces territoires à l’Anjou. On ne peut lire autrement en 1058 l’analyse tardive mais néanmoins lucide des moines de Saint-Serge lésés dans l’affaire : « Puisque bien longtemps auparavant, le vénérable évêque Renaud avait donné à Saint-Serge [l’église Saint-Rémy], quand il a fait son testament, abandonnant à Saint-Maurice ses autres alleux de la région de Mauge et du pagus de Poitiers. Mais tout cela, la violence de Foulques Nerra l’avait arraché tant à SaintMaurice qu’à Saint-Serge, il avait tout distribué en bénéfice à ses chevaliers et érigé ici un château dénommé Montrevault ». Cette source est très utile car elle décrit précisément le processus d’extension du pouvoir politique angevin au sud de la Loire par la nomination de chevaliers fidèles au comte dans des châteaux érigés sur les anciens alleux de Renaud Torench. Plusieurs forteresses furent érigées à cette occasion par les Angevins comme à Montrevault, Montjean ou Beaupréau. Il a ensuite suffi au comte de prendre d’assaut la ville de Saumur en 1026 pour contrôler via l’abbaye-mère de Saint-Florent les possessions poitevines de ces moines et compléter ainsi son implantation dans les pagi de Mauge et de Tiffauges. Le comte érigea alors la forteresse de Montfaucon et celle de Saint-Florent-le-Vieil sur les terres de l’abbaye afin d’affermir sa conquête. Enfin, d’autres châteaux dont celui de Cholet (cf le chapitre « L’émergence de Cholet ») complétèrent le dispositif angevin.

Suite à la poussée de l’influence comtale angevine vers le sud jusqu’à Cholet, les évêques d’Angers tentèrent de faire de même, avec toutefois un décalage de plusieurs décennies. C’est surtout l’intense activité d’Eusèbe Brunon (1047-1081) qui permit l’agrandissement de son diocèse contre les évêques de Poitiers, trop éloignés, et ceux de Nantes, qui étaient alors très affaiblis. Mais l’extension spatiale du ressort de l’évêché d’Angers n’atteignit jamais les limites politiques fixées par Foulques Nerra et son fils Geoffroy Martel. Les prélats angevins ne purent contrôler que les Mauges tandis que les évêques de Nantes se maintinrent autour de Champtoceaux et de Montfaucon et que ceux de Poitiers conservaient leur juridiction sur la châtellenie Maulévrier et, dans celle de Cholet, sur l’église SaintPierre et les paroisses environnantes. L’absence de coïncidence entre frontières politiques des comtés et frontières religieuses des diocèses provoqua l’apparition des territoires de marches. Dans l’espace qui nous intéresse, on relève à l’ouest les Marches avantagères à l’Anjou sur la Bretagne dont les paroisses relevaient du tribunal pénal d’Angers, pour les problèmes juridiques, et de l’évêché de Nantes, pour les questions religieuses. Cette situation faisait dire avec humour aux habitants qu’ils dépendaient du « diable d’Anjou » et du « bon Dieu de Nantes ». Le souvenir des Marches communes d’Anjou et de Poitou, au sud, qui jouissaient d’une autonomie plus grande vis-à-vis des comtés d’Angers et de Poitiers perdure quant à lui dans le toponyme Saint-André-de-laMarche. Tiraillé entre plusieurs influences politiques, le Choletais n’était donc pas uni sur le plan religieux, partagé entre les diocèses d’Angers, de Nantes et de Poitiers. C’est seulement lors du concordat de 1801 signé entre Napoléon et le pape Pie VII que cet enchevêtrement de frontières fut simplifié lorsque l’on fit correspondre le plus souvent diocèse et département.

Vers la naissance d’une région : le Choletais La mémoire de l’ancien pagus de Tiffauges, partagé entre plusieurs comtés et diocèses, dont les frontières ne coïncidaient même pas, a perdu toute réalité spatiale ce qui l’a quasiment fait disparaître. C’est de ce « vide » géographique qu’a émergé le Choletais, coincé entre un département de Vendée créé en 1790 avec la partie sud des marches communes mais qui a rapidement constitué un marqueur identitaire du fait des « Guerres de Vendée », d’une part et une région des Mauges, le seul des trois pagi ayant eu une postérité territoriale, bien que délimité de manière fluctuante, de l’autre. En effet, si l’on 82


Limite entre les diocèses d’Angers, Nantes et Poitiers

Nord

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LIRE

Marche commune d’Anjou et de Bretagne

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Marche avantagère de l’Anjou sur la Bretagne Marche commune d’Anjou et de Poitou

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Les marches séparantes d'Anjou, Bretagne et Poitou durant le Moyen-Âge

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Pagus de Mauge Limite de l’arrondissement du Choletais Limite départementale

a pu proposer des frontières historiquement pertinentes pour les Mauges au haut MoyenÂge, force est de constater que celles-ci ont ensuite fortement varié depuis, dans le sens d’un très net agrandissement. Dès le XIIe siècle, le doyenné des Mauges, circonscription religieuse, s’étendait jusqu’à Rochefort-sur-Loire, mais sans descendre plus au sud que la Jubaudière. En revanche, la liste des sept sergenties dites « des Mauges » mises à contribution pour payer la rançon du roi Jean II le Bon, prisonnier des Anglais en 1360, comprenait Montjean, Saint-Florent, le Petit et le Grand-Montrevault, Beaupréau, ainsi que Champtoceaux et Montfaucon, mais par conséquent ni Cholet ni Maulévrier. Actuellement, le « pays des Mauges » regroupe les communautés de communes qui correspondent approximativement aux cantons de Champtoceaux, Saint-Florent-leVeil, Montfaucon, Montrevault, Beaupréau, Chemillé et Maulévrier, mais à l’exclusion de la structure intercommunale de Cholet. Enfin, certains considèrent aujourd’hui que les Mauges s’étendent à tout le quart sud-ouest du département de Maine-et-Loire, Cholet compris. La meilleure preuve de cette confusion réside dans le nom de la commune de Mazières qui a demandé et obtenu par décret, le 31 décembre 1929, d’être appelée « Mazières-en-Mauges » pour se distinguer de ses nombreux homonymes. Tout comme Cholet, ce village n’a pourtant historiquement jamais fait partie des Mauges. Le concept un peu flou de « Choletais » naît de ce « brouillage des cartes ». Il recouvre parfois tout l’arrondissement de Cholet, suite au transfert de la sous-préfecture installée jusqu’en 1857 à Beaupréau – comme l’indiquent les panneaux à l’entrée des bourgs – et devient alors synonyme de « Mauges » dans son acception la plus vaste. Mais de manière plus stricte le Choletais ne désigne seulement que l’ensemble des communes situées entre le département de Vendée et les Mauges, c’est-àdire essentiellement l’ancien territoire seigneurial commandé depuis le château de Cholet.

Nord

Le Choletais et les Mauges aujourd'hui

83

Teddy Véron


Cette bibliographie se veut une sélection, par période historique, d’ouvrages généraux et spécialisés traitant l’ensemble d’une thématique ou bien abordant les réalités locales.

B I B L I O G R A P H I E Paléolithique

Âge du Bronze

• GRIMAUD-HERVE Dominique, SERRE Frédéric, BAHAIN Jean-Jacques, NESPOULET Roland. Histoire d’Ancêtres. La grande aventure de la préhistoire. Editions Errance, Paris, 2005, Collection Artcom’, (4e édition).

• CAROZZA Laurent, MARCIGNY Cyril. L’âge du Bronze en France. Editions La Découverte, Paris, 2007.

• JAUBERT Jacques. Chasseurs et artisans du Moustérien. La maison des roches éditeur, Paris, 1999, Collection Histoire de la France Préhistorique. • KRAUSE Elmar-Björn (dir.). Les hommes de Néandertal. Collection des Hespérides, Editions Errance, Paris, 2004. • MOHEN Jean-Pierre, TABRIN Yvette. Les sociétés de la préhistoire. Hachette, Paris, 1998, Collection HU, Histoire Université. • OTTE Marcel. Le Paléolithique inférieur et moyen en Europe. Armand Colin, Paris, 1996. • Société Préhistorique Française. La vie préhistorique. Editions Faton, Dijon, 1996. • TUFFREAU Alain. L’Acheuléen, de l’Homo Erectus à l’homme de Néandertal. La maison des roches éditeur. Paris, 2004, Collection Histoire de la France Préhistorique.

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Néolithique

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84

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e Paléolithique

NUAILLÉ SAINT-ANDRÉ-DE-LA-MARCHE

Néolithique Âge du Bronze

Sites archéologiques présentés dans l’exposition « Emergence »

0

5 km

SAINT-FLORENT-LE-VIEIL SAINT-HILAIRE-DE-MORTAGNE

Âge du Fer

SAINT-PIERRE-MONTLIMART

Époque gallo-romaine

SAINT-REMY-EN-MAUGES

Époque médiévale

TRÉMENTINES


ARCHÉOLOGIE & HISTOIRE DU C H O L E TA I S

Des premiers groupes nomades du Paléolithique ancien aux populations bien établies du XIe siècle, les sociétés du passé ont laissé des traces de leur univers quotidien et ont contribué à façonner le territoire. Paysages, axes de communication, activités économiques, agglomérations et frontières administratives sont le résultat de cette patiente intervention de l’homme. A elle seule, la création de la ville de Cholet mérite une attention particulière : à la fin de l’Antiquité, Romains, romanisés et « Barbares » qui s’y côtoient, participent à son premier développement.

A R C H É O LO G I E & H I S TO I R E D U C H O L E TA I S

Cholet et sa région dispose d’un patrimoine archéologique diversifié, témoin d’une occupation continue de la région depuis plus de 300 000 ans. L’exposition « Emergence Archéologie et Histoire du Choletais » est une occasion rare de re-découvrir les pièces majeures qui en font sa valeur.

É m ERGE n CE

É m ER GEnCE

É m ER GEnCE ARCHÉOLOGIE & HISTOIRE DU C H O L E TA I S

Par leurs contributions, archéologues et historiens rendent compte des recherches les plus récentes menées sur les principaux sites de la région et nous fournissent les clés de compréhension d’une évolution qui pousse ses ramifications jusqu’à notre époque contemporaine.

VILLE DE CHOLET

ISBN : 978-2-918274-02-5 Prix public : 12 €

VILLE DE CHOLET


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