Guide pratique du Centre Samara sur les conversations politiques en ligne

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GUIDE PRATIQUE

DU CENTRE SAMARA

SUR LES CONVERSATIONS POLITIQUES EN LIGNE


Le Centre Samara Centre tient à exprimer sa gratitude pour le soutien et la collaboration de la Fondation Walrus. Tout au long de la période électorale, celle-ci va examiner en profondeur et d’une façon non partisane l’état de la démocratie au Canada, dans la presse écrite et sur son site web à thewalrus.ca/democracy.


Table des matières SYNOPSIS 4

INTRODUCTION 6 L’INTÉRÊT DE LA CHOSE

9

DIAGNOSTIQUER LE PROBLÈME

12

LE PIRE DES COMPORTEMENTS : VOILÀ LES EFFETS DES RÉSEAUX SOCIAUX

14

CHANGER LA CONVERSATION

20

AGIR PAR SOI-MÊME

24

CONCLUSION : LES LEADERS DOIVENT DIRIGER AUSSI

32

REMERCIEMENTS 33

NOTES DE FIN

samaracanada.com

34

3


Synopsis Les réseaux sociaux représentent une de nos principales sphères publiques, un endroit où les Canadiens se rendent pour parler de politique. Ils permettent d’avoir des conversations plus poussées, plus libres et plus ouvertes. En donnant aux gens la possibilité de s’engager et d’établir des contacts, d’exprimer des idées et de s’informer mutuellement, les réseaux sociaux peuvent s’avérer un moyen puissant pour améliorer notre démocratie. Mais quelque chose a déraillé.

41%

plus colériques 48% moins courtoises 50%

Les Canadiens disent que les conversations politiques en ligne sont plus colériques (48 %) et moins courtoises (50 %) que celles qui se tiennent hors ligne.

31%

Près de la moitié (47 %) des utilisateurs de réseaux sociaux au Canada affirment se tenir à l’écart des discussions politiques par crainte d’être critiqués.

Il y a au Canada davantage d’utilisateurs de réseaux sociaux qui hésitent à exprimer leurs opinions politiques en ligne (41 %) par rapport à ceux qui le font volontiers (31 %).

Nous avons besoin d’espace pour exprimer notre désaccord avec passion. Mais la discourtoisie en ligne a des conséquences négatives pour notre démocratie. Elle contribue à démobiliser les gens. Elle nuit à l’équité en politique. Elle exacerbe la polarisation. Elle nous rend plus vulnérables aux acteurs malicieux qui tentent de semer la division et la confusion.

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Les Canadiens peuvent contribuer à rendre ces conversations en ligne plus constructives et plus courtoises. Le présent rapport, qui s’inspire d’études sur la psychologie sociale et les comportements sur les réseaux sociaux, présente sept techniques pour améliorer les conversations politiques en ligne :

1

Montrez l’exemple : Le fait d’agir

les choix politiques qu’ils soutiennent, et d’en

avec courtoisie peut inciter les autres

faire autant, peut réduire la polarisation.

participants à une conversation à suivre

5

votre exemple.

2

Recadrez votre langage : Le fait de réfléchir aux fondements moraux

Surveillez votre propre camp : Le

d’un argument, et de les refléter dans ce que

fait de dénoncer le manque de cour-

vous dites, peut réduire la distance psy-

toisie est particulièrement efficace quand

chologique entre vous et votre interlocuteur.

on s’adresse à quelqu’un du même camp

6

politique.

Rappelez-nous ce que nous avons en commun : Le fait d’ame-

Pratiquez une politique des petits

ner quelqu’un à envisager les identités qui

pas : Le fait de changer graduelle-

nous unissent (comme l’identité citoyenne)

ment votre façon d’utiliser la technologie

plutôt que celles qui nous divisent (comme

peut réduire la probabilité de recourir aux ré-

les affiliations à des partis) peut réduire la

seaux sociaux en coup de vent, donc d’avoir

polarisation.

3

des échanges irréfléchis et agressifs.

4

7

Approfondissez les choses : Le fait d’inviter les gens à expliquer en détail

Débusquez les inforobots : Dépistez les comptes fictifs et évitez de leur

donner ce qu’ils recherchent—de l’attention.

Qu’est-ce que la courtoisie? La courtoisie dans le discours politique est une idée contestée. Même si beaucoup reconnaissent l’importance de la courtoisie dans une démocratie, certains soutiennent que le fait de dénoncer la discourtoisie peut contribuer à censurer ou à étouffer la critique. C’est aussi facile de considérer la courtoisie comme une préoccupation minime et secondaire, étant donné les enjeux importants des questions politiques qui sont discutées. C’est impossible de définir la courtoisie en termes absolus. Elle est toujours spécifique à une situation et sera toujours contestée. Et il y a des limites à la courtoisie dans une démocratie. Dans ce rapport, la courtoisie se réfère simplement au fait de démontrer envers nos concitoyens le degré de respect et de courtoisie qui permet d’avoir des conversations démocratiques poussées et constructives. La courtoisie n’exclut pas pour autant la passion, la colère ou un profond désaccord.


Introduction

Environ neuf Canadiens sur 10 actifs en ligne utilisent les réseaux sociaux, qui représentent peut-être la sphère publique la plus influente dans notre société. C’est là que les politiciens s’adressent aux citoyens, qu’il s’agisse des éruptions de colère matinales d’un certain président américain ou des photos plus mondaines des politiciens canadiens. C’est là aussi que les citoyens interpellent leurs dirigeants d’une façon libre et directe, sans intermédiaire. Et c’est surtout là que nous discutons entre nous, en tant que citoyens, des grands enjeux auxquels nous sommes confrontés. Dans un pays aussi vaste que le Canada, les réseaux sociaux permettent d’avoir des échanges personnels directs qui ne seraient pas possibles autrement. En théorie, il s’agit d’une chose extraordinaire pour notre démocratie. On nous demande de ne pas parler de religion ni de politique, mais les conversations politiques sont vitales pour la démocratie. Or les choses ont mal tourné dans la pratique. Nous n’avons pas le même comportement sur les réseaux sociaux. Les conversations politiques y sont souvent plus colériques que celles dont nous sommes témoins hors ligne. Le harcèlement et l’extrémisme prolifèrent sur les réseaux sociaux. Plus tôt cette année, le premier ministre a parlé de « Far West ».1 Les réseaux sociaux représentent la « vraie vie », au sens que les problèmes ne sont pas cantonnés aux plateformes. La nature agressive des conversations politiques en ligne peut éloigner les gens de la politique et, pire encore, causer de l’angoisse mentale.2 Les réseaux sociaux peuvent fausser notre perception de ce que les Canadiens pensent et ressentent vraiment, surtout lorsque les journalistes ou les politiciens s’en servent comme étant représentatifs de l’opinion publique—ce qui n’est pas le cas.3 Et il y a le risque d’être pris dans un cycle vicieux : les gens que la discourtoisie des réseaux sociaux met mal à l’aise décrochent, laissant derrière eux une place qui est de plus en plus contrôlée par les trolls et ceux qui veulent de l’attention, donnant ainsi une image encore plus faussée de la société. Les réseaux sociaux peuvent alors devenir une force polarisante et démobilisatrice, et un moyen pour les politiciens opportunistes de fomenter la colère. Au Centre Samara pour la démocratie, nous menons des sondages biennaux sur la façon dont les Canadiens participent à la politique. En 2019, nous avons remarqué quelque

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chose d’étrange. Contrairement aux années d’avant, les Canadiens discutaient comme jamais encore de politique en personne et par téléphone. Ils étaient plus nombreux à s’adresser aux politiciens et à dire qu’ils s’intéressent à la politique. Pourtant, le nombre de Canadiens qui discutent de politique sur les réseaux sociaux a légèrement diminué. Cela montre qu’il existe une possibilité réelle de délaisser quelque peu les réseaux sociaux pour avoir des conversations libres et ouvertes qui renforcent la démocratie.

Déceler un problème Selon les utilisateurs de réseaux sociaux au Canada, les conversations politiques en ligne tendent à être plus colériques, moins courtoises et (dans certains cas) moins informatives que celles qui se passent hors ligne. Les Canadiens perçoivent aussi un problème grandissant de discourtoisie dans la politique canadienne : près de la moitié (47 %) des Canadiens pense que la politique devient moins courtoise, contre à peine 12 % qui trouvent qu’elle devient plus courtoise.

Informatives

Plus

Colériques

Plus

Courtoises

Comparées à celles qui se passent hors ligne, les conversations politiques que vous voyez sur les réseaux sociaux sont plus ou moins…

Plus

20 % 44 %

À peu près pareil

36 %

Moins

48 % 35 %

À peu près pareil

17 %

Moins

14 % 36 %

À peu près pareil

50 %

Moins 0%

10 %

20 %

30 %

40 %

50 %

60 %

À votre avis, la politique canadienne…

12 %

32 %

Devient plus courtoise (c.-à-d. polie, respectueuse)

Reste à peu près pareille

samaracanada.com

47 % Devient moins courtoise

9% Ne sais pas/Sans opinion

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On a beaucoup parlé de ce que les gouvernements et les plateformes de réseaux sociaux devraient faire. Mais à la veille d’une élection nationale, le Centre Samara a porté son attention sur les citoyens eux-mêmes. Ce rapport rassemble ce qui ressort de l’étude des conversations difficiles et de celle des réseaux sociaux pour voir ce qui va mal et pourquoi c’est important, les mesures que nous devrions attendre du gouvernement et comment les citoyens peuvent changer la nature des conversations politiques en ligne.

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L’intérêt de la chose Dans l’intérêt de notre démocratie, nous devons commencer à avoir de meilleures conversations politiques en ligne Beaucoup reconnaissent que les conversations politiques sur les réseaux sociaux sont plus impolies, plus colériques et moins courtoises en ligne qu’en personne. Mais s’agit-il nécessairement d’un problème? L’ouverture et la liberté des réseaux sociaux sont précisément ce qui les a rendus aussi attirants et laissé entrevoir en premier lieu leur potentiel démocratique. La discourtoisie est-elle simplement le prix à payer pour avoir une communication libre et ouverte? Les réseaux sociaux se caractérisent par l’émotion brute, mais les conversations politiques devraient refléter la passion. Et si cela déplaît à certains, ne peuvent-ils pas tout bonnement se déconnecter ou ignorer les personnes et les points de vue qu’ils n’apprécient pas? Comme l’a fait remarquer récemment un député canadien « le bouton de blocage n’est pas là pour rien ».4 Mais la discourtoisie dans la politique en ligne a des coûts réels pour notre démocratie : Elle pousse certains à se désintéresser de la politique—en les chassant hors de la sphère publique numérique et possiblement en les amenant à renoncer carrément à toute participation politique. La discourtoisie en soi peut en fait susciter un engagement, car les personnes passionnées restent engagées,5 mais ceux qui sont moins tolérants à l’impolitesse et à la colère vont tout simplement se détacher.6 Pis encore, certaines personnes deviennent moins susceptibles de participer à des conversations politiques hors ligne à cause de ce qu’elles voient sur les réseaux sociaux.7 Elle nuit à l’équité en politique, car tout le monde n’est pas visé de la même façon par la discourtoisie. En fait, elle est pire pour certains groupes déjà sousreprésentés en politique. Selon une étude de plus de deux millions de gazouillis adressés

Selon un sondage mené en 2019 auprès des habitants de 54 pays, les Canadiens diraient très probablement que les réseaux sociaux ont un impact négatif sur la démocratie dans leur pays : 43 % d’entre eux pensent qu’ils ont un impact négatif, contre 38 % qui trouvent qu’ils ont un impact positif.9

à des politiciens, les femmes très en vue dans le milieu attirent plus de discourtoisie que leurs homologues masculins, par exemple.8 Elle accentue la polarisation. La polarisation fait référence aux situations où des gens se rallient à des positions extrêmes à chaque bout du spectre ou adoptent des attitudes de plus en plus négatives à l’égard des personnes qui soutiennent d’autres

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partis. C’est essentiel que les différences politiques soient explorées et représentées dans une démocratie, mais la polarisation érode les fondements de la prise de décision collective et elle peut contribuer grandement au bris de la démocratie.10 Les causes de la polarisation sont multiples, notamment le comportement des politiciens et les médias traditionnels, mais c’est prouvé que nous pouvons devenir plus polarisés simplement en étant exposés à des commentaires politiques discourtois sur les réseaux sociaux.11 La discourtoisie mine aussi la confiance—celle que nous avons les uns pour les autres, et envers nos dirigeants, nos institutions et les médias.12 Cela nous amène à moins croire à l’intérêt des débats et délibérations publics.13 Elle nous rend plus vulnérables aux auteurs malveillants en ligne, notamment ceux de l’étranger qui essaient de miner notre démocratie. La discourtoisie en ligne est étroitement associée au problème grandissant de l’ingérence étrangère de la part des États autoritaires. Ils emploient des armées d’agents numériques pour attiser la colère et la haine, et profitent de la polarisation pour créer plus de révolte et empoisonner davantage le milieu de l’information. Par exemple, des acteurs étrangers ont utilisé des milliers de comptes de trolls pour essayer d’enflammer les débats déjà émotifs sur les pipelines et les politiques d’immigration qui se tiennent sur les réseaux sociaux.14

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Voix manquantes Il y a deux fois plus de Canadiens d’accord (41 %), par rapport à ceux qui ne le sont pas (20 %), pour dire que les conversations politiques en ligne sont une source de « colère et de découragement ». Quarante-sept pour cent des utilisateurs de réseaux sociaux au Canada affirment se tenir en dehors des discussions politiques par peur d’être critiqués. Et il y a plus de Canadiens qui disent avoir peur de partager leurs points de vue politiques en ligne (41 %) que ceux qui le font (31 %). (C’est sans compter l’écart entre les sexes—36 % des hommes n’hésitent pas à partager leurs points de vue, contre 24 % des femmes.) Il manque donc beaucoup de voix dans la discussion politique en ligne— même parmi les utilisateurs de réseaux sociaux. Les conversations politiques en ligne me fâchent et me découragent.

10 %

31 %

39 %

9%% 15

5% 5

J’évite généralement les conversations politiques en ligne par crainte des critiques.

18 %

29 %

39 %

149%%

7%

Je n’ai pas peur de partager mes points de vue politiques sur les réseaux sociaux.

10 %

21 %

Tout à fait d’accord

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D’accord

28 % Ni d’accord ni en désaccord

39% 23 % En désaccord

18 % Tout à fait en désaccord

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Diagnostiquer le problème Nous ne sommes pas faits avant tout pour avoir des arguments politiques D’abord et avant tout, la nature difficile des conversations politiques n’est pas entièrement la faute des réseaux sociaux. Les études en sciences politiques, psychologie et économie qui sont menées depuis des décennies montrent que même dans les meilleures circonstances, nous avons du mal à être en désaccord avec la politique.15 Ce n’est pas notre faute. Nous sommes conditionnés ainsi. Cela tient peut-être au fait que nous avons été amenés à nous comporter de la sorte.16 Les groupes sont essentiels pour notre identité et notre bien-être. S’ils sont basés sur des idées, par exemple un groupe idéologique ou un parti politique (en théorie), les renseignements qui remettent en question ces idées constituent en fait une menace pour ces groupes et, par conséquent, pour nous-mêmes. Et c’est alors que nous ressentons de la contrariété. L’imagerie du cerveau montre que les parties du cerveau associées à notre identité personnelle et ce que nous percevons comme des menaces commencent à s’agiter quand nous sommes confrontés à des arguments contraires à nos croyances politiques.17 En fait, nous nous sentons menacés dès qu’un sujet diviseur est soulevé. Le simple fait de mentionner une question litigieuse nous amène à percevoir une menace dans le visage des autres.18 Nous aimons penser que nous sommes des chercheurs de vérité rationnels, qui échangent des faits et des arguments, et évaluent l’information nouvelle à mesure qu’elle arrive pour prendre les meilleures décisions possible. Mais ce n’est pas ainsi que les êtres humains fonctionnent. Nous avons tendance à rechercher la confirmation : nous nous approprions sans jugement critique l’information qui confirme ce que nous croyons déjà et nous trouvons des raisons pour rejeter celle dont ce n’est pas le cas.19 Nous refusons même d’admettre qu’il existe un problème, si nous pensons que cela va déboucher sur une solution politique qui ne nous plaît pas (on parle d’« aversion à la solution »).20 Nous détestons carrément entendre les autres points de vue. En fait, l’expérience a démontré que les gens renoncent à gagner de l’argent afin de ne pas avoir à lire des arguments poli-

Les obstacles humains aux bonnes conversations politiques Identité : Nous traitons les idées et les allégeances politiques en fonction de ce que nous sommes, plutôt que ce que nous pensons. Tendance à rechercher la confirmation : Nous n’aimons que les renseignements qui correspondent à ce que nous croyons déjà ou le soutiennent. Aversion des solutions : Nous rejetons l’information si nous n’aimons pas ses implications. Anxiété et peur : Le seul fait de mentionner un sujet qui divise nous donne le sentiment d’être menacé.

tiques avec lesquels ils sont en désaccord.21

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Il nous arrive souvent aussi de ne pas nous écouter les uns les autres. Les personnes de camps idéologiques différents n’utilisent pas le même langage, lequel s’accompagne de valeurs morales différentes.22 Ce que vous croyez être des propos vraiment persuasifs n’est qu’un bruit détestable pour votre adversaire politique. En ligne ou hors ligne, il y a des choses que nous n’arrivons pas bien à argumenter.

De quoi pouvons-nous parler en tant que pays? Nous avons demandé aux utilisateurs de réseaux sociaux au Canada quels sujets ils sont le moins à l’aise pour discuter avec quelqu’un qui n’est pas d’accord. D’une façon générale, les Canadiens sont assez ouverts au désaccord politique. Mais certains sujets se sont avérés particulièrement efficaces pour stopper la conversation. Plus d’un Canadien sur cinq n’est pas à l’aise pour exprimer son désaccord en ce qui concerne l’avortement, l’immigration et le multiculturalisme, le harcèlement sexuel et les questions autochtones. Pourcentage des Canadiens qui sont mal à l’aise pour discuter avec quelqu’un qui n’est pas d’accord Avortement Immigration et multiculturalisme Harcèlement sexuel et/ou mouvement #MeToo Questions autochtones Contrôle des armes à feu Salaires, revenu et inégalité Scandales et corruption Politique étrangère et affaires mondiales Pipelines et industrie pétrolière Dépenses gouvernementales Changements climatiques et environnement Programmes sociaux, santé et éducation Questions régionales 0%

5%

10 %

15 %

20 %

25 %

30 %

35 %

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Le pire des comportements : voilà les effets des réseaux sociaux C’est dur d’exprimer son désaccord en personne d’une manière courtoise et constructive, et les échanges sur les réseaux sociaux rendent les choses encore plus difficiles. Il n’y a pas une seule raison à cela, mais plusieurs choses permettent de comprendre pourquoi les conversations politiques en ligne ont tellement tendance à dérailler. Les plateformes sont conçues pour susciter des émotions fortes

C’est important de comprendre l’exacerbation des émotions pour saisir la nature des réseaux sociaux et l’« économie de l’attention » dans laquelle ils fonctionnent. Le principe d’une économie de l’attention peut se résumer comme suit : l’information est pour ainsi dire illimitée à l’ère d’Internet, mais l’attention est une ressource rare. Comme nous n’avons qu’une certaine capacité d’attention, les plateformes sont conçues pour lutter férocement pour la capter—en fournissant de l’information intéressante ou utile, mais aussi en utilisant des moyens pour la manipuler. Le fait de provoquer de fortes réactions émotives est une excellente façon de retenir notre attention. Le contenu en ligne qui suscite de fortes émotions—négatives ou positives—est plus susceptible de « devenir viral ».23 L’effroi, la colère et l’angoisse sont au nombre des émotions les plus susceptibles de disséminer rapidement du contenu dans toute la toile.24 L’émotion est également contagieuse. Facebook a mené une étude hautement controversée dans le cadre de laquelle les fils d’actualité de près de 700 000 utilisateurs ont été manipulés à leur insu. L’étude a montré que les utilisateurs ayant accès à du contenu plus négatif ou plus positif exprimaient eux-mêmes des émotions plus négatives ou plus positives.25 Le contenu émotif retient donc plus l’attention. Toute forme d’attention étant bonne pour les résultats d’une plateforme comme Facebook, qui vend de la publicité, le contenu qui attire l’attention et l’« engagement » (commentaires et j’aime) est amplifié—et se retrouve sur un plus grand nombre d’écrans. Et nous risquons de ressentir certaines des émotions qui s’affichent. Il s’agit d’un environnement où la colère peut se répandre rapidement et devenir très contagieuse.

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Selon l’étude, les jours où les réseaux sociaux tiennent une grande place tendent à être moins heureux. Ce n’est peut-être pas vrai, contrairement à ce qu’on peut craindre, que les réseaux sociaux remplacent des activités plus positives, comme le temps passé avec des proches et amis. L’étude a démontré qu’ils prennent plutôt la place d’autres activités dont nous ne raffolons pas—comme le ménage et le travail—mais le ménage comme les gazouillis ne sont pas ce qu’il y a de plus exaltants.26 Parler à un écran est tout autre chose Le fait que nos conversations soient modérées par un ordinateur change la façon dont nous parlons entre nous. Au début de l’ère des réseaux sociaux, l’anonymat était une grande source d’inquiétude. On craignait que le fait de ne pas avoir à s’identifier et à assumer la responsabilité de ses commentaires incite les gens à être mauvais. Certaines expériences ont prouvé, par exemple, que les tableaux de commentaires anonymes engendrent plus d’impolitesse que ceux qui n’autorisent pas l’anonymat.27 Le fait de se croire anonyme a aussi été associé à plus de cyberharcèlement.28 Certaines plateformes, comme Twitter et Reddit, acceptent encore les utilisateurs anonymes, ce qui n’est pas le cas d’autres comme Facebook (et on continue à débattre de l’intérêt de l’anonymat en ligne).29 Les conversations sur les réseaux sociaux se démarquent d’autres façons. Nous ne pouvons pas lire les indices sociaux des personnes à qui nous parlons (ce qui explique la tentation de donner de mauvaises nouvelles par courriel).30 Nos échanges sont brefs, ce qui semble avoir une incidence sur la courtoisie. Une étude a montré, par exemple, que les gazouillis adressés à des politiciens sont aussitôt devenus un peu plus courtois dès que Twitter a augmenté la limite de mots des gazouillis.31 Et les gens sont « plus méchants sur les appareils mobiles »—nous sommes nettement moins courtois lorsque nous allons sur les réseaux sociaux à partir de notre téléphone que de notre ordinateur.32 Il se peut que ces facteurs contribuent à un phénomène plus important—parfois appelé l’« effet de désinhibition en ligne »33—qui consiste à compartimenter notre comportement en ligne et hors ligne. Et même quand nous rendons notre identité publique, nous ne rendons pas de comptes à ceux à qui nous parlons sur les réseaux sociaux, que nous ne rencontrerons sans doute jamais et avec qui nous n’aurons pas à coexister dans le quartier, au travail ou dans un terrain de jeu. Résultat : nous disons des choses sur Internet que nous ne dirions jamais en personne.

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Déceler sur les réseaux sociaux les obstacles à de bonnes conversations politiques Amplification émotive : Les plateformes amplifient et disséminent les émotions fortes comme la colère. Anonymat : Le fait de se cacher peut nous inciter davantage à agir d’une façon que nous éviterions si nous nous sentions personnellement tenus de rendre des comptes. Absence d’indices : Nous n’avons pas à faire face aux réactions humaines des personnes à qui nous nous adressons. Hâte : Nous envoyons des messages peu réfléchis. Désinhibition en ligne : Nous traitons nos côtés en ligne et hors ligne comme deux personnes différentes.

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L’enfer, est-ce bien les autres? Les utilisateurs de réseaux sociaux canadiens s’entendent pour dire que les conversations politiques en ligne tendent à être moins courtoises et plus colériques. Et nous n’aimons pas cela. Mais nous ne perdons pas de temps à rejeter le blâme : à peine 7 % des Canadiens sont en désaccord avec l’énoncé suivant : « Si je discute de politique en ligne, je le fais toujours d’une manière respectueuse ». Cette étrange combinaison de la perception d’une discourtoisie répandue à grande échelle et de la croyance quasi universelle selon laquelle nous n’y participons pas pourrait refléter l’effet toxique qu’un petit nombre d’inforobots et de trolls peuvent avoir sur la sphère publique en ligne. Cela pourrait aussi traduire un manque de conscience personnelle des façons dont les réseaux sociaux nous amènent à adopter un comportement auquel nous ne nous identifions pas. Si je discute de politique en ligne, je le fais toujours d’une manière respectueuse.

24 % Tout à fait d’accord

30 %

40 % D’accord

Ni d’accord ni en désaccord

En désaccord

4 %3%

Tout à fait en désaccord

La « guerre des tranchées »

La structure sociale des réseaux sociaux les rend propices à des échanges colériques. L’essentiel de la conversation publique a mis l’accent sur les « bulles de filtrage » et les « salles d’écho ». Nous devenons plus polarisés, tout d’abord parce qu’Internet permet de chercher plus facilement les nouvelles et les opinions qui sont conformes à nos convictions politiques existantes. Les algorithmes—les règles secrètes automatiques qui affectent (entre autres choses) le contenu que nous voyons—font le reste et filtrent le contenu que les plateformes savent que nous aimerons, de sorte que nous sommes de plus en plus coupés du monde en dehors de notre bulle politique. Mais la salle d’écho des réseaux sociaux est peut-être plus un mythe qu’une réalité. Les preuves selon lesquelles les réseaux sociaux nous exposent à une plus grande variété de sources de nouvelles et de points de vue qu’on ne le croit souvent commencent à s’accumuler.34 Nous vivons effectivement dans des salles d’écho partielles et certains d’entre nous sont très enclins à cultiver leurs bulles sur les réseaux sociaux. Mais cela tient surtout à nos vies et préférences hors ligne—notamment des forces comme le tri idéologique,35 géographique et socioéconomique dans la société, et les nouvelles présentées sur les chaînes de

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câblodiffusion spécialisées—comme c’est le cas avec les plateformes de réseaux sociaux. Le fait d’être sur les réseaux sociaux peut nous exposer plus souvent à différents points de vue que ce serait le cas autrement. La « guerre des tranchées » est une autre façon de conceptualiser le monde des débats en ligne.36 Les réseaux sociaux nous permettent fondamentalement d’exister en partie dans des salles d’écho avec des personnes qui partagent nos points de vue, ce qui renforce les nôtres. Mais contrairement à la vie hors ligne, nous entrons aussi en contact avec des méthodes brèves et superficielles comportant des points de vue fortement contradictoires—ce qui nous pousse à nous retrancher encore plus dans nos propres positions.37 Cela crée une polarisation.

Bulles sociales > Bulles des réseaux sociaux La plupart des utilisateurs de réseaux sociaux au Canada ne considèrent pas qu’ils sont coincés dans une salle d’écho en ligne. À peine 17 % disent que la plupart des opinions politiques qu’ils voient en ligne reflètent leurs propres points de vue. Mais quand nous avons interrogé les Canadiens sur leurs réseaux hors ligne plus tôt cette année, une proportion nettement plus grande a répondu avoir l’impression d’être dans une bulle. Ce constat reflète une étude récente qui suggère que nous avons exagéré la bulle en ligne. La plupart des opinions que je vois sur [les réseaux sociaux] reflètent mes points de vue sur le gouvernement et la politique.

17 %

d’accord

Certaines des opinions que je vois sur [les réseaux sociaux] reflètent mes points de vue, mais ce n’est pas le cas de beaucoup.

59 %

d’accord

Source : Sondage sur les réseaux sociaux et la politique mené par Samara en 2019

samaracanada.com

La plupart de mes amis proches partagent mes points de vue sur le gouvernement et la politique.

33 %

d’accord

Certains de mes amis proches partagent mes points de vue, mais ce n’est pas le cas de beaucoup.

36 %

d’accord

Source : Sondage sur les citoyens mené par Samara en 2019

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Des trolls aux inforobots

Les conflits politiques sur les réseaux sociaux existent simplement parce que certaines personnes—ou les organisations pour lesquelles elles travaillent—veulent qu’il en soit ainsi. Il y a toute une panoplie de gens qui contribuent délibérément à la polarisation et à la discourtoisie en ligne. À l’extrémité plus modérée se trouvent des personnes qui se préoccupent tout simplement moins que la plupart de la discourtoisie38 et qui se réjouissent d’injecter dans leurs échanges sur les réseaux sociaux une impolitesse qui ne serait tolérée nulle part ailleurs. Plus loin dans le spectre se trouvent de vrais « trolls » : des personnes dont l’objectif principal en ligne consiste simplement à mettre les gens en colère ou à les contrarier. Selon les auteurs d’études psychologiques, les trolls en ligne tendent à avoir certains traits de caractère, par exemple un penchant pour le sadisme—simplement pour le plaisir de faire souffrir les autres.39 Certains sont impolis parce que ça ne les dérange pas et d’autres le sont par principe. Il y a aussi des acteurs méchants qui contribuent à la discourtoisie en ligne parce qu’ils ont d’autres buts en tête. Il arrive que ces buts soient commerciaux, comme les personnes qui essaient d’attirer des clics vers des sites de nouvelles fabriquées, ou politiques. Une stratégie essentielle des ennemis étrangers de notre démocratie libérale consiste à tirer parti de la discourtoisie en ligne et à l’exacerber. Les campagnes d’information russes menées aux États-Unis et en Europe ont utilisé des « inforobots »—des comptes de réseaux sociaux fictifs entièrement automatisés ou partiellement contrôlés par quelqu’un—pour générer ou provoquer de part et d’autre des messages émotifs sur un sujet controversé.40 On ne sait pas au juste dans quelle mesure cela a été efficace, mais cela existe aussi au Canada. Une analyse menée par CBC News des comptes d’inforobots, maintenant supprimés, contrôlés par l’Agence russe de recherche sur Internet a découvert que ces inforobots étaient axés sur des enjeux canadiens comme les réfugiés syriens et le débat sur les pipelines.41 Le problème des « fausses nouvelles » retient énormément l’attention en ce moment, mais des examens récents des campagnes d’ingérence étrangère ont montré que les fausses nouvelles ne représentent en fait qu’une infime portion de l’activité en ligne. Les tentatives d’intoxication plus subtile et insidieuse de la sphère publique numérique sont plus courantes, et consistent tirer parti de la polarisation existante et à l’aggraver. Autrement dit, les inforobots peuvent avoir des fins positives, négatives et neutres. Mais une partie de leur problème tient à la façon dont ils peuvent utiliser des analyses douteuses des

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réseaux sociaux pour donner une fausse impression de la popularité, de l’étendue ou de l’influence d’un argument. Quand nous nous fions, en tant qu’utilisateurs de réseaux sociaux, à des choses comme les j’aime et les gazouillis partagés sans faire preuve d’un esprit critique, ou lorsque nous nous fions excessivement aux plateformes de réseaux sociaux qui nous mettent entre les mains d’algorithmes affectant le contenu que nous trouvons mais dépendant d’apports douteux,42 nous devenons plus vulnérables à la manipulation des inforobots.

Anatomie des inforobots Pour dire les choses très simplement, les inforobots sont des comptes de réseaux sociaux factices. Certains sont entièrement automatisés. D’autres sont partiellement contrôlés par de vraies personnes, mais ils font quand même appel à l’automatisation pour générer plus d’activité que ne le pourrait un utilisateur humain (un « cyborg » du point de vue technique). Dans un contexte politique, les inforobots sont utilisés à diverses fins, bonnes et mauvaises. Selon les chercheurs en communications canadiens Elizabeth Dubois et Fenwick McKelvey,43 ces fins incluent ce qui suit :

!

!

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Amortisseurs :

Amplificateurs :

Inforobots de

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voix ou certains mes-

et tenir les gouverne-

des acteurs politiques

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comme des politiciens

commentant une

en partageant continuel-

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exemple, en supprimant

gazouillis sur les ré-

automatiquement sur

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la page Facebook d’un

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agressive et négative);

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Changer la conversation Une culture des conversations politiques en ligne discourtoises et contre-productives comporte des risques réels. Les causes de cette culture sont nombreuses et compliquées à régler. Ces problèmes sont bien connus, mais on a accordé trop peu d’attention aux solutions—surtout les solutions publiques à des problèmes désormais publics. Ce rapport va donner à présent un bref aperçu de la façon dont les gouvernements interviennent de plus en plus dans la supervision de la sphère numérique, avant de se tourner vers des approches que les citoyens peuvent eux-mêmes adopter pour avoir de meilleures conversations politiques en ligne.

Déceler le potentiel L’essentiel de l’optimisme à l’égard des réseaux sociaux a disparu—mais ceux-ci permettent d’offrir des possibilités démocratiques qui n’existeraient pas sinon. Les Canadiens continuent d’être dans une certaine mesure plutôt d’accord qu’en désaccord avec le fait que les réseaux sociaux peuvent servir à tenir les politiciens imputables et à explorer de nouvelles perspectives. Les réseaux sociaux m’aident à tenir les politiciens imputables de leurs opinions et actes.

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Les réseaux sociaux m’ont exposé(e) à des idées et perspectives nouvelles, et amené(e) à changer d’avis sur certaines choses.

8% Tout à fait d’accord

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Tout à fait en désaccord

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Cap sur la gouvernance des plateformes Pendant la première décennie de l’ère des réseaux sociaux, on n’a guère prêté attention au rôle que jouent les autorités publiques pour superviser, réglementer et gérer la sphère publique numérique. On a laissé aux plateformes de réseaux sociaux le soin de prendre des décisions importantes—comme décider du contenu qui a franchi une ligne et du moment où les utilisateurs devraient être exclus. Les mégaévénements politiques, par exemple le scandale de Cambridge Analytica, ont soulevé une énorme colère publique et attiré l’attention sur des problèmes qu’on avait négligé de s’occuper. La plupart des gouvernements sont à présent en passe de réglementer les réseaux sociaux, même si ces initiatives ont un poids et une efficacité variables. Même Mark Zuckerberg, le fondateur de Facebook, a publiquement concédé que de nouvelles règles devraient être imposées par la loi.44 Les esprits s’échauffent beaucoup et il n’y a pas assez de lumière. Qu’est-ce que tout cela signifie pour les conversations politiques en ligne? Qu’est-ce qu’une plateforme?

Dans ce contexte, une plateforme est une application ou un service en ligne propulsés par des données. Facebook, Google Search, YouTube et Twitter sont tous des exemples. Les plateformes sont des endroits où les utilisateurs peuvent avoir des conversations politiques en ligne. Qu’est-ce que la gouvernance des plateformes?

Les plateformes elles-mêmes décident de ce qui est mis sur leurs sites. Par exemple, elles font de la modération de contenu—cela consiste à décider du matériel qui est offensant ou contrevient aux conditions du service et doit être supprimé, et à bannir à l’occasion des utilisateurs pour leur comportement. Les plateformes sont aussi régies par la loi. Par exemple, les plateformes de réseaux sociaux sollicitent une certaine supervision de la part d’autorités chargées du respect de la vie privée, lesquelles déterminent si les plateformes protègent suffisamment les données des utilisateurs; des autorités antitrust, qui voient si les plateformes agissent comme des monopoles; et d’autres organismes chargés de réglementer les entreprises. Le comportement des personnes et des organisations sur les plateformes de réseaux sociaux est aussi réglementé par la loi. Par exemple, la publicité

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politique numérique est régie par les limites de dépenses et les exigences en matière de transparence de la Loi électorale du Canada. Mais il y existe un sentiment de plus en plus répandu selon lequel que les gouvernements auraient laissé aux plateformes de réseaux sociaux le soin de se gouverner dans une trop large mesure. Les tendances observées dans le monde démocratique suggèrent qu’une nouvelle ère pour la gouvernance des plateformes publiques est en vue ou déjà en place. On a beaucoup écrit pour réclamer une plus grande réglementation des réseaux sociaux, mais il subsiste une série de questions délicates. Par exemple : Avant tout, comment les gouvernements font-ils pour réduire les comportements

nocifs sans interférer avec la liberté d’expression politique? Comment devrait-on traiter les plateformes de réseaux sociaux dans la loi? Par exemple,

devrait-on les considérer comme des éditeurs ou des sociétés de médias, tout aussi responsables de leur contenu? Avons-nous besoin de nouvelles lois pour régler les problèmes sur les réseaux sociaux

ou de nouvelles façons d’appliquer les lois existantes (comme celles qui concernent le harcèlement et le discours haineux)? Comment peut-on soumettre les algorithmes à un contrôle ou un examen public?

Peut-être à cause des questions sans réponse, et même s’ils perçoivent le danger des plateformes, les Canadiens ont néanmoins quelques réserves en qui concerne la réglementation des réseaux sociaux. L’étude portant sur 54 pays a montré que les Canadiens diraient très probablement que les réseaux sociaux ont un impact négatif sur la démocratie et que seulement 40 % d’entre eux veulent une plus grande réglementation du contenu partagé sur les réseaux sociaux—ce qui nous place au 29e rang sur 54, autrement au milieu du lot.46

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Comment est-ce que la gouvernance des plateformes devrait être implantée au Canada? Le gouvernement fédéral est susceptible de prendre dans un proche avenir des mesures à propos de la gouvernance des plateformes. Mais la réglementation des réseaux sociaux doit se faire avec prudence, en cherchant à bâtir un consensus. Le gouvernement devrait envisager de suivre l’exemple du Comité permanent de l’accès à l’information, de la protection des renseignements personnels et de l’éthique—un comité parlementaire présidé par l’opposition qui a commencé à examiner les questions ayant trait aux données, à la protection des renseignements personnels, à la réglementation des réseaux sociaux et à la démocratie, et qui a présenté un rapport unanime sur ces sujets en décembre 2018. En reprenant ces enjeux, le comité pourrait envisager de commanditer une assemblée de citoyens—un groupe de Canadiens choisis au hasard qui auraient l’occasion de se rencontrer régulièrement, de s’informer sur les sujets et d’en discuter, et enfin de faire des recommandations. Des comités d’autres parlements suivant le système de Westminster ont commencé à recourir à des assemblées de citoyens pour les aider à résoudre des problèmes épineux qui ont besoin de solutions multipartisanes partagées et démocratiquement légitimes.47 Étant donné qu’il y a plus de questions que de réponses et que les enjeux sont grands, les Canadiens devraient s’employer à corriger le processus. Le Centre Samara est d’avis qu’un comité multipartite fonctionnel, qui a le soutien d’une assemblée de citoyens, pourrait être plus crédible qu’un gouvernement pour prendre des décisions à propos des concessions essentielles.

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Agir par soi-même

Étant donné toute l’attention qui est reportée sur ce que les plateformes de réseaux sociaux et les gouvernements devraient faire à propos de l’état des conversations politiques en ligne, on ne s’est guère demandé ce que les citoyens peuvent faire. Y a-t-il des mesures que les citoyens peuvent prendre pour avoir de meilleures conversations politiques, en dépit des obstacles? Nous sommes tentés de répondre que oui. Nous proposons sept règles pour avoir des conversations en ligne plus constructives, basées sur les études existantes. Il s’agit d’une ère nouvelle et toutes ces techniques devraient être mises à l’essai dans le cadre de nouvelles recherches.

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Montrez l’exemple

Le fait d’agir avec courtoisie peut inciter les autres participants à une conversation à suivre votre exemple

La première règle est tout ce qu’il y a de plus simple. Les études montrent que l’impolitesse est contagieuse. Tout comme la courtoisie. Par exemple, une expérience a demandé aux gens de lire un article de presse sur un sujet controversé (le contrôle des armes à feu), puis un fil de commentaires.49 Les participants ont été assignés au hasard à un fil contenant un débat courtois ou discourtois. Comme de bien entendu, ceux qui lisaient les commentaires courtois étaient plus susceptibles de faire des commentaires courtois. Heureusement, ils étaient aussi plus enclins à s’en tenir au sujet et à offrir de nouvelles perspectives—ce qui montre que la courtoisie donne des conversations plus utiles et constructives, pas seulement plus sympathiques. Dans la vraie vie, on ne contrôle pas la mesure dans laquelle une conversation est globalement courtoise. On se heurte au défi que posent les trolls et la discourtoisie qu’ils peuvent introduire chez les autres. Mais il est à souhaiter que des actes ciblés de courtoisie unilatérale engendreront plus de courtoisie de la part des autres (et des commentaires plus pertinents et plus intéressants).

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Surveillez votre propre camp Le fait de dénoncer le manque de courtoisie est particulièrement efficace quand on s’adresse à quelqu’un du même camp politique

Cela aide-t-il de dénoncer un mauvais comportement? La réponse ne va pas de soi. L’expérience décrite plus haut a démontré que le fait de parler de l’état déplorable du fil de commentaires n’engendrait pas nécessairement plus de courtoisie. Mais cela s’est avéré efficace ailleurs. La clé réside dans celui qui dénonce la situation. Kevin Munger de l’Université de New York l’a découvert en construisant des inforobots de courtoisie—des comptes Twitter factices déguisés en vraies personnes—pour envoyer des gazouillis aux trolls sur les réseaux sociaux et les inciter à changer de comportement. Il a ensuite observé leur comportement public sur les réseaux sociaux pour voir si les critiques avaient eu un effet. Il a commencé par diriger des inforobots vers les personnes qui avaient tenu de graves injures contre les Noirs sur Twitter, en variant l’identité des inforobots—leur apparence et le nombre de leurs suiveurs.50 Il a découvert que les inforobots les plus efficaces pour ce qui est de changer le comportement des gens provenaient de « l’intérieur du groupe » (dans ce cas-ci, des hommes blancs envoyant des gazouillis à d’autres hommes blancs) et étaient considérés comme ayant un statut élevé (dans ce cas-ci, ayant plus de suiveurs sur Twitter). Il a ensuite essayé quelque chose de similaire avec des trolls sur Twitter qui avaient été discourtois envers des personnes ayant des opinions politiques différentes pendant l’élection présidentielle de 2016 aux États-Unis.51 Là encore, il a constaté que le fait d’être critiqué pour son comportement par quelqu’un qui appartient au même camp politique peut contribuer à changer ce comportement. Leçon à retenir : si vous voulez encourager une conversation en ligne plus saine, vous risquez de devoir faire le travail psychologique plus dur qui consiste à observer le comportement des gens avec qui vous êtes d’accord (ou partagez des identités sur d’autres plans). Les personnes seront plus enclines à vous écouter si vous leur dites qu’elles dépassent les bornes.

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Pratiquez une politique des petits pas Le fait de changer graduellement votre façon d’utiliser la technologie peut réduire la probabilité de recourir aux réseaux sociaux en coup de vent, donc d’avoir des échanges irréfléchis et agressifs

Pensez à tous les gazouillis supprimés par les personnalités publiques, les excuses et les publications sur les réseaux sociaux qui font un tort durable à la réputation des gens. À l’heure des réseaux sociaux, on tombe très vite en disgrâce. Il est prouvé que la vitesse et la brièveté qui caractérisent les réseaux sociaux nous rendent plus durs.52 Et n’oubliez pas que les gens sont « discourtois sur les appareils mobiles ».53 L’étude montre aussi que même l’ennui nous pousse à des extrêmes politiques.54 Et nous avons tendance à utiliser les réseaux sociaux pour éviter de faire des choses désagréables comme des tâches ménagères.55 Tout cela laisse entendre que ce n’est pas l’idéal d’arriver sur les réseaux sociaux à l’improviste à un arrêt de bus—et de sauter dans une discussion sans avoir choisi activement d’y participer. Peut-être est-il temps d’introduire une friction dans notre utilisation des réseaux sociaux—pour ralentir et prendre davantage le temps de réfléchir. Le Center for Humane Technology fait une série de recommandations sur la façon de limiter notre utilisation des réseaux sociaux sur les appareils mobiles,56 lesquelles consistent entre autres à : • Désactiver toutes les notifications d’applis, sauf les vrais messages provenant de vraies personnes (parce que les applis de réseaux sociaux utilisent des notifications pour nous attirer); • Changer les réglages de votre téléphone pour une échelle de gris (car les icônes de couleur servent à attirer notre attention); • Supprimer carrément toutes les applis de votre téléphone (vous pouvez toujours les utiliser sur votre ordinateur). Ces recommandations brisent l’emprise de l’économie de l’attention sur notre temps et notre focus. Mais elles peuvent aussi améliorer la santé de nos conversations politiques, en nous obligeant à faire un choix délibéré pour ouvrir une session et participer.

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Approfondissez les choses Le fait d’inviter les gens à expliquer en détail les choix politiques qu’ils soutiennent, et d’en faire autant, peut réduire la polarisation

Que nous débattions en ligne ou hors ligne, nous avons l’habitude de tenir sans cesse les mêmes arguments. Nous arrêtons très vite d’écouter les autres ou de réfléchir sérieusement aux arguments contraires—ou même de penser sérieusement aux nôtres. C’est difficile de s’en détacher, mais une stratégie prometteuse consiste à entrer dans les détails. Certaines études laissent entendre que des positions idéologiques fortes se nourrissent de « l’illusion de comprendre »—nous croyons en savoir davantage sur les questions complexes que c’est réellement le cas. (L’« effet Dunning-Kruger » ne fait qu’empirer les choses; le manque de connaissances qui nous amène à tirer des conclusions douteuses nous rend incapables de voir nos propres lacunes)57. Si nous étions plus conscients de la complexité, des nuances et des limites de notre propre compréhension, nous serions peut-être plus intéressés à écouter les autres et à revoir nos propres points de vue. Une expérience a démontré que le simple fait de demander aux gens de fournir une explication détaillée, étape par étape, de la façon dont une politique qu’ils soutiennent fonctionnerait les force à admettre qu’ils la comprennent pas tant que ça et à adopter des attitudes modérées et moins polarisées.58 Alors envisagez ce qui suit comme une intervention pour avoir des conversations politiques en ligne plus constructives et plus utiles. Au lieu de resservir de vieux arguments (p. ex. « Nous devrions / ne devrions pas construire le pipeline TMX »), posez des questions d’approfondissement (p. ex. « Comment devrait-on construire le pipeline TMX, étant donné les obstacles? » ou « Comment croyez-vous que l’arrêt de la construction du pipeline va réduire notre impact sur les changements climatiques? »). Encouragez les gens à s’impliquer dans la mécanique de leurs postes et faites-en autant avec le vôtre.

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Recadrez votre langage Le fait de réfléchir aux fondements moraux d’un argument, et de les refléter dans ce que vous dites, peut réduire la distance psychologique entre vous et la personne avec qui vous discutez

En plus d’aborder un enjeu sous un angle nouveau, envisager d’adopter un nouveau vocabulaire. C’est la réponse à une importante école de psychologie politique qui jette un regard sur nos « fondements moraux »—les instincts fondamentaux de base que nous avons et qui influencent notre façon de voir le monde. Selon les scientifiques sociaux comme George Lakoff et Jonathan Haidt, les idéologies politiques s’articulent autour de différentes conceptions de la moralité.59 Haidt et d’autres chercheurs ont avancé que les libéraux sont plus réceptifs aux arguments basés sur l’équité ou la considération, par exemple, tandis que les conservateurs réagissent davantage aux appels à la loyauté et à l’autorité.60 Cela fait que nous avons plus de difficulté à parler entre nous, parce que nous basons nos propres arguments sur un langage et des valeurs qui ne sont pas entièrement partagées. Mais le fait de comprendre les différences entre nous peut nous aider en fait jeter des ponts entre ces différences dans les conversations politiques. Matthew Feinberg et ses collègues de l’Université de Toronto ont fait l’expérience de tenir le même argument en utilisant un langage moral différent.61 Ils trouvent que le fait d’utiliser le langage moral de l’autre côté du spectre peut rendre un argument plus persuasif. Par exemple, les conservateurs sont plus favorables au mariage entre partenaires de même sexe quand il y a un argument basé sur la loyauté (« les couples de même sexe sont fiers et patriotiques… ») plutôt que sur l’équité (« tous les citoyens devraient être traités équitablement »). Les libéraux appuient davantage le financement de l’armée quand on avance un argument basé sur l’équité (l’armée permet aux personnes défavorisées de progresser vers le haut) plutôt que sur la loyauté (l’armée nous unit et nous donne du prestige dans le monde). Ils ont trouvé que cela fonctionne aussi dans le contexte d’une campagne politique et que cela affecte le soutien des candidats. Si le recadrage moral suffit à persuader un petit nombre de ceux qui sont de l’autre côté, il aide probablement à combler l’écart psychologique entre les camps. Cela pourrait engendrer davantage d’échanges courtois, même quand les gens ne sont pas convaincus. Dans la vraie vie, c’est sans doute impossible de recadrer d’une façon experte votre argument en se basant sur ce que les psychologues sociaux ont appris de nos différents fondements moraux. Peut-être que la leçon à retenir consiste simplement à écouter attentivement les arguments opposés à votre position. Pensez à la teneur des arguments et leur provenance—les valeurs sur lesquelles ils sont bâtis. Essayez de les refléter. 28


6

Rappelez-nous ce que nous avons en commun Le fait d’amener quelqu’un à envisager les identités qui nous unissent (comme l’identité citoyenne) plutôt que celles qui nous divisent (comme les affiliations à des partis) peut réduire la polarisation

Nos opinions politiques ont beaucoup à voir avec nos identités—comment nous nous voyons, à quelle tribu politique nous estimons appartenir. C’est un problème pour la délibération démocratique. Mais peut-être pouvons-nous utiliser cette réalité—le pouvoir de l’identité—pour réduire la polarisation, du moins assez longtemps pour avoir un échange constructif. Nous sommes plus polarisés quand nos identités partisanes ou idéologiques sont activées—quand, sur le coup, nous nous considérons libéraux ou conservateurs, de droite ou de gauche. Mais nous avons d’autres identités—des identités qui sont partagées à travers tout le spectre politique. Par exemple, la plupart des participants (mais pas tous) à une élection au Canada s’identifieront comme étant Canadiens. Et des expériences ont montré que lorsque nous sommes amenés à réfléchir à l’identité citoyenne partagée, nous sommes plus tolérants à l’égard des personnes d’autres camps politiques. Une étude américaine a démontré que lors de l’élection présidentielle de 2008, les personnes interrogées un peu avant et après la fête nationale du 4 juillet ou avant et après les Jeux olympiques (quand l’équipe des États-Unis s’est mesurée au reste du monde) avaient systématiquement une meilleure opinion du candidat auquel ils s’opposaient. Si une conversation en ligne déraille, utilisez un langage qui incite les gens à se rappeler les choses qu’ils partagent malgré la politique—un pays, le désir de rendre ce pays plus fort. Ça peut sembler artificiel, mais il existe de réelles raisons de croire que le fait de jouer sur le patriotisme des gens peut les aider à passer outre les divisions politiques. Le fait que la courtoisie soit perçue (à tort ou à raison) comme une caractéristique nationale et une norme commune des Canadiens aide sans doute aussi. C’est un incitatif puissant.

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Débusquez les inforobots

Enfin, n’oublions pas que la discourtoisie politique vient en partie des inforobots, des comptes fictifs souvent exploités par des intérêts étrangers qui existent pour empoisonner l’environnement de l’information. C’est difficile pour les utilisateurs individuels de combattre leur présence. L’essentiel de leur rôle consiste simplement à amplifier un message par un partage coordonné massif. Mais il est nécessaire de savoir comment les reconnaître pour éviter d’adopter le comportement qu’ils veulent nous amener à prendre. Inutile de leur hurler dessus. La première étape consiste simplement à faire preuve d’un esprit critique et à se demander si le message vaut la peine de s’y engager. Rappelez-vous que les inforobots profitent de notre dépendance à l’analytique—comme le nombre de gazouillis partagés et de j’aime— ce qui ne nous dit en fait pas grand chose sur la popularité ou la portée d’un argument. Dans le cas d’un compte en particulier, l’Atlantic Councils Digital Forensic Research Lab donne des indices pouvant suggérer que vous parlez peut-être à un inforobot,65 par exemple : • Y a-t-il beaucoup d’activité sur le compte—p. ex., plus de 50 publications par jour? • L’essentiel de son activité consiste-t-il à copier, partager et republier des gazouillis, plutôt que de publier du contenu original? Les inforobots passent l’essentiel de leur temps à amplifier, ce qui peut être un indice; • Est-ce que l’activité est très faible ou s’agit-il d’un compte de courte durée, mais dont les publications ont été partagées et les gazouillis ont été abondamment republiés? C’est un indice très fort qu’il s’agit d’un inforobot amplifié par tous ses petits cyberamis; • Est-il anonyme ou utilise-t-il un pseudonyme (ou un nom qui semble avoir été généré au hasard, avec des chiffres et des lettres) ou encore une photo de profil qui n’est pas celle d’une personne? Moins il y a de renseignements d’identification, plus il est probable que ce soit un inforobot—mais certains d’entre eux utilisent aussi des images et des noms; • Si vous regardez la photo d’une personne qui semble réelle mais soupçonnez quand même qu’il s’agit d’un inforobot, vous pouvez passer à l’étape suivante, qui consiste à rechercher la même image sur Google. (Dans Google Chrome, il suffit de faire un clic droit sur une image et de sélectionner « Rechercher l’image dans Google ».) Google montrera d’autres

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endroits où la photo a été utilisée, ce qui vous permettra de voir si vous avez affaire à un inforobot qui a pris les traits de quelqu’un ou qui utilise la même photo que beaucoup d’autres comptes. Si vous prenez vraiment les choses au sérieux, il existe une énormément d’outils qui peuvent détecter les inforobots pour vous, notamment les sites web et les extensions de navigateurs. Le simple fait de vous poser la question—est-ce que je suis en train de discuter avec un inforobot qui est là pour me harceler et me faire sortir de mes gonds pour servir les intérêts d’autoritaires étrangers?—devrait avoir un effet disciplinateur.

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Conclusion : Les leaders doivent diriger aussi En l’espace d’un peu plus d’une décennie, notre société optimiste est devenue profondément angoissée par la signification que les réseaux sociaux revêtent pour la démocratie. Cette angoisse est ressentie profondément ici au Canada comme ailleurs dans le monde66. Le temps est venu de procéder à la première grande rénovation de la sphère publique numérique. C’est mieux qu’une panique morale qui aurait pour effet de nous éloigner de la possibilité qu’offrent encore les réseaux sociaux d’avoir des conversations démocratiques plus importantes, plus libres et plus ouvertes. Ce rapport a essayé de montrer aux utilisateurs de réseaux sociaux des façons de naviguer dans les conversations en ligne—et, souhaitons-le, de rendre ces conversations plus agréables, inclusives et constructives. Le Centre Samara espère ainsi stimuler une rénovation de bas en haut. Mais ce faisant, il ne faut jamais perdre de vue l’importance critique du désaccord féroce, voire émotif. Il s’agit d’une ressource indispensable dans la démocratie. Il y a des limites à ce que de bons citoyens peuvent faire par eux-mêmes. Notre comportement est puissamment façonné par les plateformes, et c’est pourquoi nos leaders politiques ont besoin d’arriver à un consensus autour d’une meilleure gouvernance des plateformes.

Réaction du président américain Donald Trump aux réponses à ses gazouillis : « J’avais l’habitude de regarder ça. Les perles que je publiais déclenchaient de vrais tirs de roquettes. C’est comme la fois où j’ai dit— vous savez—que quelqu’un m’espionnait? Une vraie déflagration! »67

Notre comportement est également façonné par ces leaders. Les gens qui ont des profils importants et beaucoup de suiveurs sur les réseaux sociaux sont appelés des « influenceurs », et avec raison. Les études sont claires : si les leaders ne peuvent pas résister aux messages qui suscitent des émotions très fortes et des réactions sanguines, ils nous infectent avec leur discourtoisie et leur désinformation. Ou ils peuvent rediriger leurs émotions puissantes, leur langage persuasif et leur portée inégalée pour signaler le genre de respect et de tolérance politique que la démocratie exige.

Un mot à propos des données Sauf indication contraire, les données contenues dans ce guide pratique proviennent du sondage du Centre Samara sur la politique et les réseaux sociaux mené par Daniel Rubenson et Peter Loewen entre le 17 et le 19 juillet 2019 auprès de 1 010 Canadiens très actifs sur les réseaux sociaux. L’échantillon du sondage en ligne fourni par Dynata a été tiré avec les quotas des régions, sexes et langues, et pondéré d’après les valeurs de recensement pour l’âge, le sexe, la langue, la région et le statut d’immigration. The Samara Centre’s Field Guide to Online Political Conversations

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Remerciements

Nous aimerions remercier David Moscrop et Fenwick McKelvey pour leurs commentaires extrêmement utiles sur les premières ébauches du rapport. Nous sommes également reconnaissants à Matthew Feinberg et Kevin Munger d’avoir répondu aux questions sur leur importante contribution à l’étude. Le Centre Samara Centre tient à exprimer sa gratitude pour le soutien et la collaboration de la Fondation Walrus. Tout au long de la période électorale, celle-ci va examiner en profondeur et d’une façon non partisane l’état de la démocratie au Canada, dans la presse écrite et sur son site web à thewalrus.ca/democracy. Merci à tous les particuliers qui, d’un bout à l’autre du pays, nous soutiennent grâce à leurs dons. Cette étude n’aurait pu se faire sans leur générosité.

Ce projet a été rendu possible en partie grâce au gouvernement du Canada.

Also avaiblable in English.

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Notes de fin

1. Alex Boutilier (2019), « Trudeau takes aim at big tech, announces ‘Digital Charter’ », Toronto Star, 16 mai 2019, disponible en ligne à : https://www.thestar.com/news/canada/2019/05/16/trudeau-takes-aim-at-big-tech-announces-digital-charter.html.

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15. Pour avoir un excellent aperçu de sa recherche, voir

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how-tolerance-incivility-affects-political-participation.

16. Pour avoir un aperçu, voir Elizabeth Kolbert (2017),

7. Kevin Hampton, Inyoung Shin et Weixu Lu (2017),

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17. Jonas Kaplan, Sarah Gimbel et Sam Harris (2016), « Neural correlates of maintaining one’s political beliefs in the face of counterevidence », Scientific Reports 6. 18. Joseph Simons et Melanie Green (2018), « Divisive Topics as Social Threats », Communication Research 45 (2) : 165-187. 19. Kolbert. 20. Troy Campbell et Aaron Kay (2014), « Solution aversion: On the relation between ideology and motivated disbelief », Journal of Personality and Social Psychology 107

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hind-social-media-interactions.

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31. Kokil Jaidka, Alvin Zhou et Yphtach Lelkes (2018),

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tal Social Psychology 72 : 1-12.

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22. Voir par exemple Matthew Feinberg et Robb Willer

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32. Jacob Groshek et Chelsea Cutino (2016), « Meaner

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33. John Suler (2004), « The Online Disinhibition Effect »,

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DATE DE PARUTION : 19 septembre 2019 Copyright © Le Centre Samara pour la démocratie 2019 CITATION: Michael Morden 2019. « Guide pratique du Centre Samara sur les conversations politiques en ligne ». Toronto : Le Centre Samara pour la démocratie. RÉDACTION : Allison Jane Smith COLLECTE DES DONNÉES : Dr. Peter Loewen et Dr. Daniel Rubenson ANALYSE DES DONNÉES : Michael Morden et Adelina Petit-Vouriot CONCEPTION : Geneviève Biloski TRADUCTION : Françoise Orvoine Le Centre Samara pour la démocratie est un organisme de bienfaisance non partisan qui s’emploie à renforcer la démocratie au Canada, en la rendant plus accessible, réactive et inclusive. Le Centre Samara produit des études basées sur l’action—ainsi que des outils et des ressources pour les citoyens actifs et les leaders publics—qui sont conçues pour amener les Canadiens à s’impliquer dans leur démocratie. Pour en savoir davantage sur le travail de Samara ou pour faire un don afin de soutenir nos études, visitez www.samaracanada.com/fr ou appelez-nous au 416-960-7926.

33, avenue Prince Arthur, Toronto (Ontario) M5R 1B2 416-960-7926 | info@samaracanada.com @SamaraCDA

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