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Dossier

Vérité, justice, égalité… au féminin

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Volume XXII, n˚ 05 Montréal, 1er mars 2015

www.itineraire.ca

ZOOM

Diane Gariépy Isabelle Blais

Les mots pour vaincre les maux Logements sociaux

Des coupures qui font mal

LE DUO DE 19-2

Contre les stéréotypes


AU JEU, IL N’Y A PAS DE TRUC.

C’EST TOUJOURS LE HASARD QUI DÉCIDE.


Diane Gariépy Camelot No : 1041 | Âge : 59 ans Point de vente: métro Place St-Henri et angle Sainte-Catherine/Sanguinet

S

on frère qui accourt du logement d'en haut. Jonathan, son fils de quatre ans qui crie «Maman à terre, maman à terre!». Son frère qui stoppe son ex, qui avait un couteau en main. Et puis plus rien, le noir. Voilà les seuls souvenirs que Diane garde de cette journée sombre de 1996. «Mon frère m'a sauvé la vie», se rappelle-t-elle. À deux doigts de mourir, victime de violence conjugale extrême, Diane est demeurée dans le coma durant un an.

Ce drame est à l'image des épreuves que Diane a dû traverser pour en arriver là. «J'ai vécu une méchante vie, moi. J'ai été abusée, j'ai tout eu moi. J'ai fait des grosses thérapies pour m'en sortir.» Diane vit une enfance de misère. Elle est née dans la pire des circonstances, le 15 juillet 1955 : trois jours après le décès de son père. «J'ai accumulé beaucoup de colère à cause de mon enfance. Je n'ai pas accepté que mon père soit décédé, je pensais qu'il était parti de la maison.» Rejetée par sa mère, elle abandonne ses études à 14 ans, oublie ses rêves de devenir infirmière et se met à enchaîner les petites jobines à temps plein. Après avoir réussi à se trouver un appartement, elle rencontre son ex, le père de son fils Jonathan, son pire cauchemar. Suite à son coma, Diane vit quelques belles années. Mais le destin continue de s'acharner contre elle. En 2002, la DPJ lui retire son fils Jonathan, et tout s'écroule. «Il est le seul vrai amour de ma vie. J'ai vécu une profonde dépression et je me suis retrouvée dans la rue. Pendant douze ans.» Aujourd'hui, elle va mieux, grâce à L'Itinéraire et une thérapie de trois ans au CLSC pour guérir sa colère. Mais surtout grâce aux retrouvailles avec son fils, il y a quatre ans. Ils sont très proches, et Diane vit les meilleurs moments de sa vie. AUTEUR : CHARLES-ÉRIC LAVERY PHOTO: GOPESA PAQUETTE

1er mars 2015 | ITINERAIRE.CA

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NOS PARTENAIRES ESSENTIELS DE LUTTE CONTRE LA PAUVRETÉ

Le Groupe L'Itinéraire a pour mission de réaliser des projets d'économie sociale et des programmes d'insertion socioprofessionnelle, destinés au mieux-être des personnes vulnérables, soit des hommes et des femmes, jeunes ou âgés, à faible revenu et sans emploi, vivant notamment en situation d'itinérance, d'isolement social, de maladie mentale ou de dépendance. L'organisme propose des services de soutien communautaire et un milieu de vie à quelque 200 personnes afin de favoriser le développement social et l'autonomie fonctionnelle des personnes qui participent à ses programmes. Sans nos partenaires principaux qui contribuent de façon importante à la mission ou nos partenaires de réalisation engagés dans nos programmes, nous ne pourrions aider autant de personnes. L'Itinéraire c'est aussi plus de 2000 donateurs individuels et corporatifs qui aident nos camelots à s'en sortir. Merci à tous ! La direction de L'Itinéraire tient à rappeler qu'elle n'est pas responsable des gestes des vendeurs dans la rue. Si ces derniers vous proposent tout autre produit que le journal ou sollicitent des dons, ils ne le font pas pour L'Itinéraire. Si vous avez des commentaires sur les propos tenus par les vendeurs ou sur leur comportement, communiquez sans hésiter avec Shawn Bourdages, chef du développement social par courriel à shawn.bourdages@itineraire.ca ou par téléphone au 514 597-0238 poste 222.

PARTENAIRES MAJEURS

Nous reconnaissons l'appui financier du gouvernement du Canada par l'entremise du Fonds du Canada pour les périodiques, qui relève de Patrimoine canadien. Les opinions exprimées dans cette publication (ou sur ce site Web) ne reflètent pas forcément celles du ministère du Patrimoine canadien.

PRINCIPAUX PARTENAIRES DE PROJETS ISSN-1481-3572 n˚ de charité : 13648 4219 RR0001

DU MONT-ROYAL

Desjardins

L'ITINÉRAIRE EST MEMBRE DE

RÉDACTION ET ADMINISTRATION 2103, Sainte-Catherine Est Montréal (Qc) H2K 2H9 LE CAFÉ L'ITINÉRAIRE 2101, rue Sainte-Catherine Est TÉLÉPHONE : 514 597-0238 TÉLÉCOPIEUR : 514 597-1544 SITE : WWW.ITINERAIRE.CA RÉDACTION Rédactrice en chef par intérim : Catherine Girouard Chef de pupitre, Actualité : Nafi Alibert Chef de pupitre, Société : Gopesa Paquette et Alexandra Guellil Responsable à la production écrite des camelots : Charles-Éric Lavery Infographe : Louis-Philippe Pouliot Collaborateurs : Martine B. Côté, Isaac Gauthier et Ianik Marcil Adjoints à la rédaction : Sarah Laurendeau, Hélène Mai, Carolyn Cutler, Marie Brion Photo de la une : Gopesa Paquette Révision des épreuves : Lucie Laporte, Michèle Deteix

Le magazine L'Itinéraire a été créé en 1992 par Pierrette Desrosiers, Denise English, François Thivierge et Michèle Wilson. À cette époque, il était destiné aux gens en difficulté et offert gratuitement dans les services d'aide et les maisons de chambres. Depuis mai 1994, L'Itinéraire est vendu régulièrement dans la rue. Cette publication est produite et rédigée par des journalistes professionnels et une cinquantaine de personnes vivant ou ayant connu l'itinérance, dans le but de leur venir en aide et de permettre leur réinsertion sociale et professionnelle. Convention de la poste publication No 40910015, No d'enregistrement 10764. Retourner toute correspondance ne pouvant être livrée au Canada, au Groupe communautaire L'Itinéraire 2103, Sainte-Catherine Est, Montréal (Québec) H2K 2H9

Québecor est fière de soutenir l'action sociale de L'Itinéraire en contribuant à la production du magazine et en lui procurant des services de télécommunications.

Directrice générale : Christine Richard ADMINISTRATION Chef des opérations et des ressources humaines : Duffay Romano Responsable de la comptabilité : Philippe Boisvert Adjointe administrative : Nancy Trépannier Responsable du financement : Gessi Vanessa Sérant

ÉQUIPE DE SOUTIEN AUX CAMELOTS Chef du Développement social : Shawn Bourdages Agent d'accueil et de formation : Pierre Tougas Agente de soutien communautaire : Geneviève Labelle Agente de soutien en milieu de vie : Marianne Bousquet Agent de développement : Yvon Massicotte

GESTION DE L'IMPRESSION TVA ACCÈS INC. | 514 848-7000 DIRECTEUR GÉNÉRAL : Robert Renaud CHEF DES COMMUNICATIONS GRAPHIQUES : Diane Gignac COORDONNATRICE DE PRODUCTION : Édith Surprenant IMPRIMEUR : Transcontinental

CONSEIL D'ADMINISTRATION Président : Philippe Allard Administrateur : Jean-Marie Tison Guy Larivière Julien Landry-Martineau, Stephan Morency Geneviève Bois-Lapointe, Jean-Paul Lebel Pierre Saint-Amour

VENTES PUBLICITAIRES 514 597-0238

CONSEILLÈRES : Renée Larivière 450-541-1294 renee.lariviere18@gmail.com Ann-Marie Morissette 514-404-6166 am.mori7@itineraire.ca


1er mars 2015 Volume XXII, n˚ 05

ACTUALITÉS

CARREFOUR

CULTURE

ÉDITORIAL

CONTE

7 De X en Y par Christine Richard 8 ROND-POINT 10 ROND-POINT INTERNATIONAL

COMPTES À RENDRE

par Ianik Marcil

11 Tour de Babel

DANS LA TÊTE DES CAMELOTS

30 Ces femmes célèbres qui ont marqué nos vies

32 32 32 34 34 34

Mots de camelots LORRAINE SYLVAIN CÉLINE MARCHAND CINDY TREMBLAY FRANÇOIS GAUTHIER YVES G. BENOÎT CHARTIER

RENCONTRE

13 Un duo qui confronte les stéréotypes

par Charles-Éric Lavery

CHEMIN FAISANT

par Mathieu Thériault

33 ILS EN SONT MORTS DE RIRE…

38 Polyglotte

par Pierre Saint-Amour

41 PANORAMA 42 CLIN D'ŒIL DU PASSÉ 43 LIVRES 44 LE JOSÉE FLÉCHÉ 45 DÉTENTE 46 À PROPOS DE... REPOS

DOSSIER

17 Femmes de l'ombre

› L'apprentissage à double sens › La vérité qui dérange › Travailler pour soi › Intellectuelle de terrain

35 INFO-RAPSIM

HORS PISTE

par Jean-Pierre Ménard

36 Le sport pour sortir nos jeunes de la rue

RENCONTRE

26 ISABELLE BLAIS 37 CARREFOUR LES MOTS POUR VAINCRE LES MAUX

par Marie-Andrée B.

LOGEMENTS SOCIAUX

par Charles-Éric Lavery et Alexandra Guellil

28 Inquiétudes face à la fin des subventions

50 % DU PRIX DE VENTE DU LES CAMELOTS SONT DES MAGAZINE LEUR REVIENT TRAVAILLEURS AUTONOMES Bravo!

Lire L'Itinéraire, c'est mettre des noms et des visages sur des histoires vraies et touchantes. C'est nous sortir ensemble de l'anonymat de la grande ville, les camelots comme les lecteurs! Bravo à Giselle, une de mes camelots, pour son texte ainsi que pour le beau portrait d'elle dans le numéro du 1er février. Bravo aussi à Pierrette pour son texte «Vivre ou mourir» qui m'a profondément touché. Sylvie Roy, conseillère pédagogique

ÉCRIVEZ-NOUS ! à COURRIER@ITINERAIRE.CA Des lettres courtes et signées, svp! La Rédaction se réserve le droit d'écourter certains commentaires.


En appuyant L'Itinéraire, vous nous aidez à leur offrir les outils nécessaires pour reconstruire leur vie, trouver un logement, se nourrir sainement et briser leur isolement.

Vous êtes partie prenante de la solution. Cécile Crevier Camelot au métro Fabre et au métro l'Assomption

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1 Vous recevrez votre reçu d'impôt début janvier suivant votre don. 2 Les cartes sont distribuées par L'Itinéraire, mais si vous voulez les recevoir pour les donner dans la rue, cochez ici et nous vous les enverrons avec le Guide du bénévole. Cochez ici

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Pour toutes questions, contactez-nous au 514-597-0238 poste 246.

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ÉDITORIAL

De X en Y Pour marquer la journée internationale de la femme qui se tient chaque année le 8 mars, j'ai voulu parler de mon héroïne à moi : ma mère, celle à qui je dois d'être devenue la femme que je suis aujourd'hui. CHRISTINE RICHARD | Directrice générale

M

a mère est née en 1940, année où le droit de vote a été accordé aux femmes. Reconnues comme des citoyennes à part entière, elles devenaient enfin aptes, elles-aussi, à faire progresser la société vers un devenir collectif. Dans sa jeunesse, elle vivait en colocation avec deux copines. Un scandale à l'époque, dira-t-on. Chaque fin de semaine, avec ses deux colocs, elle s'amusait à pointer son index sur une carte, au hasard, pour choisir la destination vers laquelle elles s'évaderaient ensemble au volant de Berta, sa petite voiture. Comme beaucoup d'autres femmes, cette mère, mon modèle, a balisé la route qu'allait emprunter la génération X. Ma mère s'est mariée tard. Mais, celle qui allait devenir la mère de 6 enfants, n'a jamais quitté la maison par la suite. Sauf lorsque mon père est mort. À 52 ans, elle est alors retournée sur les bancs d'école pour obtenir un BAC en littérature française et a occupé un poste en décontamination jusqu'à sa retraite. Elle en était fière. Elle ne manquait d'ailleurs jamais l'occasion de le mentionner, la poitrine bombée et le sourire aux lèvres, à chacune de nos réunions de famille! Ma mère n'a pas pour autant participé activement à la révolution tranquille. Elle n'a pas brûlé son soutiengorge sur la place publique. Cette révolution, elle l'a tranquillement vécue à la maison. Mais, même derrière ses yeux de mère au foyer, elle était, à sa manière, féministe jusqu'au bout des ongles. Alors qu'elle servait le petit déjeuner à mon père, elle insistait grandement auprès de ses filles pour qu'elles n'en fassent rien avec leurs copains. Elle ne le savait peut-être pas, mais elle nous aidait ainsi à nous rapprocher encore un peu plus de l'égalité entre hommes et femmes. Aujourd'hui, je suis reconnaissante envers ces femmes

qui ont pavé la route pour nous : je ne prends rien pour acquis, ni l'égalité salariale, ni mon statut de directrice d'organisation. Je fais partie de la génération X, celle pour qui le féminisme veut certes encore dire quelque chose mais qui n'a pas envie de faire du macramé avec ses poils de jambes. Je constate toutefois qu'il en va autrement de la génération Y. Je disais à mon fils, qui fait partie de cette génération, qu'il devait travailler s'il voulait pouvoir payer un dîner à une fille. Et lui de me répondre : elle se le paiera! Heureusement pour la génération Y, il semble y avoir une meilleure harmonisation entre les genres. Désormais, une majorité d'hommes défend les droits des femmes à leurs côtés. J'observe également que la plupart des jeunes filles refusent même d'être étiquetées comme féministes. Peut-être sommesnous désormais toutes féministes sans même chercher à l'être, comme ma mère qui chuchotait à ses filles de ne pas servir leur homme comme elle le faisait. Mais nous ne devrions jamais oublier qu'il reste encore beaucoup de luttes à mener comme celle pour une meilleure équité salariale, un droit à la parité, la lutte contre cette image formatée de la femme trop souvent véhiculée dans les médias, etc. Pour qu'ensemble nous puissions léguer une société plus équilibrée aux générations futures.

1er mars 2015 | ITINERAIRE.CA

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ROND-POINT questions à

PAR ISAAC GAUTHIER

Anik Larose

Anik Larose est mère d'une fille trisomique de 19 ans avec une déficience intellectuelle (DI). Elle est aussi conseillère en communications pour l'Association québécoise pour l'intégration sociale, qui lutte au bénéfice des personnes ayant une DI. Afin de souligner la Semaine québécoise de la déficience intellectuelle, qui se tiendra du 9 au 15 mars, L'Itinéraire s'est entretenu avec elle. CHARLES-ÉRIC LAVERY

Quels sont les défis d'élever un enfant avec une déficience intellectuelle (DI) ?

Bon 2e Le réputé journal The Economist juge que Montréal arrive en deuxième au palmarès mondial des meilleures villes où habiter. Selon l'index, seule Toronto affiche une meilleure position, alors que Montréal devance des villes comme San Francisco ou Stockholm. Pour en arriver à cette conclusion, le journal a évalué cinquante villes selon des critères de sécurité collective et alimentaire, d'habitabilité, de démocratie, d'environnement et du coût de la vie. (IG)

Chaque parent a ses histoires et ses difficultés, en fonction du type de jeune qu'il a. Ma fille n'a pas de difficultés de comportement, mais c'est certain qu'elle demande un peu plus de suivi qu'un autre jeune. Elle doit être accompagnée plus assidûment pour favoriser ses apprentissages. Mon conjoint et moi avons toujours travaillé fort pour son intégration sociale : garderie, école primaire régulière du quartier… Mais la déficience intellectuelle (DI) n'est pas une priorité pour le gouvernement : la plupart des personnes qui en souffrent ne vont pas voter, n'ont pas beaucoup de poids politique. Les structures nous mettent des bâtons dans les roues.

Pourquoi croyez-vous que les structures se dressent contre vous ?

Parce que des personnes avec une DI vont toujours la garder, certains se demandent si ça vaut la peine d'investir pour une personne qui ne sera jamais « régulière ». Cela reflète un grand manque de connaissances et alimente beaucoup de préjugés. Ce que les décideurs politiques ne comprennent pas, c'est qu'une personne ayant une DI rapporte beaucoup plus à notre société quand on y investit du temps et de l'énergie qu'elle en coûte actuellement quand elle devient inactive!

Le slogan de l'édition 2015 de la Semaine québécoise de la déficience intellectuelle est « comme on se ressemble ! ». Que voulez-vous transmettre à travers ce message?

Les personnes avec une DI ont comme tout le monde des goûts et des aspirations. Elles peuvent avoir une vie intéressante et épanouie. Et, comme le démontre le film Gabrielle, dont la comédienne principale a une déficience intellectuelle, elles peuvent réussir! PHOTO : JEAN-PASCAL BÉLANGER

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ITINERAIRE.CA | 1er mars 2015


Un joint avec votre café? Une enquête du programme The Fifth Estate au réseau anglophone de Radio-Canada a découvert qu'il est extrêmement facile de se procurer de la marijuana de qualité médicale à Vancouver. Selon la loi, les boutiques spécialisées, souvent appelées «clubs de compassion», ne peuvent vendre qu'à des détendeurs de prescription signée par un médecin. Dans les faits, un naturopathe ou un infirmier sur place peut prescrire en quelques minutes de la marijuana à un patient pour l'aider à relaxer ou combattre le stress. Bien qu'illégale, la police tolère cette pratique tant qu'elle reste discrète. Ironiquement, on dénombre plus de ces boutiques que de Tim Hortons! (IG)

Prison : incubateur d'extrémistes ?

PHOTOS : 123RF.COM/CHARLES WOLLERTZ, XIMAGINATION, DIANA ELLER

L'Occident ferait face à un nouvel ennemi : les prisonniers aux idées extrémistes. En réponse aux attentats de Paris, où deux des trois personnes responsables auraient été radicalisées en prison, plusieurs pays ont sonné l'alarme sur cette nouvelle menace. Selon les experts du Service correctionnel du Canada, les prisons sont un terrain propice à la diffusion du radicalisme violent, même s'il n'existe aucune preuve que les prisonniers d'ici en soient victimes. Alors que plusieurs blâment l'Islam fondamentaliste comme la source de ce danger, personne ne semble considérer que le traitement des prisonniers par le système correctionnel soit en cause. (IG)

Du temps gratuit Les Québécois font une fois de plus mauvaise figure en ce qui a trait à leur générosité. Selon la dernière étude de Statistique Canada, seulement un tiers (32 %) de la population active du Québec a donné du temps comme bénévole en 2013. En comparaison, la moyenne canadienne est plutôt de 44 %. La province arrive aussi au dernier rang en nombres d'heures allouées aux œuvres de bienfaisance et au montant total des dons. Plusieurs hypothèses ont été soulevées pour expliquer cette situation, notamment le déclin de l'influence religieuse au Québec et le revenu inférieur des ménages comparé aux autres provinces. (IG)

Mise à nue Comment réagiriez-vous si l'on publiait en ligne des images nues de vous sans votre consentement? L'étudiante danoise Emma Holten a dû répondre à cette question après avoir découvert des images privées d'elle sur un site de «revenge porn», à la suite du piratage de son courriel en 2011. Après trois ans de harcèlement et de chantage par des internautes masculins, elle a repris le contrôle de son corps en publiant des photos d'elle nue dans des situations de tous les jours. Les photos, accompagnées d'un essai intitulé Consent, explorent l'idée du consentement et de l'objectification du corps féminin, deux sujets qui préoccupent les féministes d'aujourd'hui. (IG)

1er mars 2015 | ITINERAIRE.CA

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Les défenseurs des droits des personnes itinérantes militent à Washington pour que des toilettes publiques, propres, sûres et accessibles en tout temps voient le jour dans la capitale américaine. Pour mener à bien cette campagne, les militants ont travaillé main dans la main avec des sans-abris. Et c'est une première sur le continent! Des toilettes similaires avaient déjà été implantées dans d'autres villes, comme à Portland (Oregon), où le concept est né. La « Portland Loo » a d'ailleurs déjà remporté un grand succès à l'extérieur des États-Unis : après leur installation à Victoria, en Colombie-Britannique, ces trônes publics ont même été élus « les meilleures toilettes du Canada »!

Naître femme en Inde, ce n'est pas toujours partir du bon pied dans la vie. Celles qui souffrent en plus d'un handicap se retrouvent trop souvent placées de force dans des hôpitaux psychiatriques ou des institutions gouvernementales où elles sont « moins bien traitées que des animaux », souligne Human Right Watch. L'insalubrité, le manque d'hygiène, l'isolement, mais aussi les violences verbales, physiques et sexuelles font partie intégrante du quotidien des femmes et des filles qui finissent internées. Abandonnées par leurs familles dans ces institutions surpeuplées, c'est dans la plus grande vulnérabilité qu'elles se retrouvent non seulement livrées à ellesmêmes, mais aussi privées de traitements dignes de ce nom.

MEXIQUE | Où sont-ils?

Les autorités mexicaines ont récemment dû rendre des comptes devant un Comité des Nations Unies sur les disparitions forcées, ce fléau qui a laissé les familles de plus de 23000 personnes disparues entre 2007 et 2014 dans le plus grand désarroi. La découverte d'une fausse commune près d'Iguala, à une centaine de kilomètres de l'école où avaient disparu 43 élèves à l'automne dernier, avait interpellé l'opinion publique à l'échelle planétaire. C'est la première fois que le pays doit s'expliquer devant un Comité depuis qu'il a signé la Convention contre les disparitions forcées qui est entrée vigueur en 2010.

OUGANDA | Mettre les poings sur les i

Quand on habite dans un bidonville, chaque jour peut s'apparenter à une véritable lutte pour la survie. Les femmes de Katanga, un des quartiers les plus défavorisés de Kampala (Ouganda), le savent mieux que personne. C'est la rage au ventre qu'elles sont de plus en plus nombreuses à se lancer dans la boxe pour se défendre de la violence qui fait rage et peut-être se sortir de la misère. Les boxeuses d'un des clubs de Katanga ont participé aux derniers Championnats du monde de boxe féminin en Corée du Sud, donnant l'espoir à leurs consœurs de devenir un jour, elles-aussi, des athlètes professionnelles.

L'Itinéraire est membre du International Network of Street Papers (Réseau International des Journaux de Rue - INSP). Le réseau apporte son soutien à plus de 120 journaux de rue dans 40 pays sur six continents. Plus de 200  000 sans-abri ont vu leur vie changer grâce à la vente de journaux de rue. Le contenu de ces pages nous a été relayé par nos collègues à travers le monde. Pour en savoir plus, visitez www.street-papers.org.

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ITINERAIRE.CA | 1er mars 2015

CRÉDIT: REUTERS/EDWARD ECHWALU

PHOTO: REUTERS/JORGE DAN LOPEZ

CRÉDIT: MIKE VOGEL

ÉTATS-UNIS | Un petit-coin de rue

INDE | Jetées aux oubliettes

CRÉDIT: SHAZIA YOUSUF/IPS

ROND-POINT INTERNATIONAL


COMPTES À RENDRE

Tour de Babel Le ministre Poëti a affirmé récemment que son gouvernement n'en était pas un d'austérité, mais bien de «réalité». Le premier ministre Couillard répète également sur toutes les tribunes que son gouvernement ne mène pas des politiques d'austérité, que d'en parler ainsi était «une vue de l'esprit» (en décembre 2014) et, même, que les politiques qu'il mène en sont de «relance économique» (en février dernier). IANIK MARCIL | Économiste indépendant

C

ela montre clairement que le choix de vocabulaire n'est pas innocent, en politique comme ailleurs. Ces «paroles, paroles», comme le chantait Dalida, ne sont pas vaines. On cherche à faire passer la pilule en la sucrant avec les mots adéquats. Il n'y a pas si longtemps, le gouvernement Charest tentait d'enfoncer dans la gorge des étudiants une importante hausse des frais de scolarité en affirmant qu'ils devaient faire leur «juste part». Rigueur, austérité, juste part, responsabilité – les termes utilisés par les gouvernements libéraloconservateurs pour justifier des coupes importantes dans les services publics relèvent du discours moral, de la vertu et de la «gestion en bon père de famille», comme on disait naguère. Cependant, le gouvernement Couillard ne veut rien savoir du mot «austérité». Parce qu'il est fortement connoté. On l'associe aux politiques imposées de force au peuple grec. Pourtant, il s'agit là d'un très beau mot. Austère est le moine qui dédie sa vie à la contemplation, comme est austère le scientifique dans son laboratoire ou l'artiste dans son atelier, dédiant entièrement leurs vies à la recherche ou à la création. Dans sa volonté de réformer l'État, pour utiliser un vocabulaire plutôt neutre, le gouvernement Couillard recourt à un champ lexical qui appartient à celui d'une vision vertueuse des choix politiques. Comme on le

sait, nul n'est contre la vertu. Ce qui fait qu'il est à peu près impossible de s'opposer aux politiques d'austérité sur le champ de bataille des mots. Car le gouvernement nous dit, clairement : «êtes-vous contre la gestion responsable, la rigueur dans l'administration des fonds publics, à ce que chaque groupe dans la société québécoise fasse sa juste part pour protéger nos acquis pour les générations futures ?» En imposant le vocabulaire de la discussion publique, Philippe Couillard, Martin Coiteux et les autres ministres du cabinet à Québec musèlent ainsi le débat politique. Or le choix des mots, au risque d'énoncer une évidence, est l'outil premier de tout débat public. En limitant la liberté de leur accès, on cadenasse le débat. Comment s'opposer aux coupes dans l'aide sociale, dans les organismes de développement régional, dans la santé ou les institutions soutenant la culture et la science ? Nous n'avons pas le choix, affirme le discours du gouvernement. Or en société politique, nous avons toujours le choix. Mais pour le faire, ce choix, il nous faut autre chose que des mots, il nous faut des faits. Le gouvernement Couillard maquille la réalité sous son vocabulaire moralisateur et coupe court à toute discussion collective. Ce qui est profondément antidémocratique.

1er mars 2015 | ITINERAIRE.CA

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ÉDUC'ALCOOL

La consommation d ‘alcool des femmes en hausse

En effet, bien qu’il soit conseillé pour les hommes de ne pas dépasser 3 consommations par jour et 15 par semaine, les femmes devraient quant à elles s’en tenir à 2 consommations par jour et pas plus de 10 par semaine. Pourquoi? Parce que les femmes assimilent l’alcool différemment, tout simplement. Pour un même gabarit et une consommation égale, la quantité d’alcool dans le sang de la femme sera supérieure à celle de l’homme. Depuis plusieurs années, il a été observé que les femmes boivent plus régulièrement et en plus grandes quantités qu’auparavant. Celles qui boivent trop seraient plus portées à cacher leur consommation excessive. N’oubliez pas qu’admettre que l’on a un problème est un premier pas dans la bonne direction et que demander de l’aide n’est pas un signe de faiblesse!

Les conseils du pro • Calories vides. En plus d’ajouter plusieurs calories à votre régime quotidien, l’alcool ne comporte aucun nutriment.

• Fais dodo, Cola mon p’tit frère... L’alcool vous aidera peutêtre à vous endormir, mais il altérera la qualité de votre sommeil, en plus de vous priver de son action réparatrice.

• La modération a bien meilleur goût! Si vous choisissez de

boire – et ce n’est vraiment pas une obligation - Éduc’alcool vous invite à respecter les niveaux de consommation à faible risque. Vous ne vous en porterez que mieux.

• Bébé en vue? Vous êtes enceinte ou voulez le devenir? Il est conseillé d’arrêter de consommer de l’alcool et de s’en abstenir tout au long de la grossesse. Vous trinquerez à la naissance de bébé.

• Savoir dire non. Un ami qui vous met la pression pour

accepter un dernier verre alors que vous n’en avez plus envie ne devrait peut-être pas être qualifié d’ami...

PHOTO : 123RF.COM/MATTHIAS ZIEGLER

La Journée internationale des femmes, le 8 mars, est une belle occasion de lever son verre aux conquêtes passées des femmes dans le monde et à celles qu’il reste à faire! Cependant, quand viendra le temps de trinquer, il ne faudrait pas oublier que, pour des raisons physiologiques, il y a un point sur lequel les hommes et les femmes ne sont pas égaux: la consommation d’alcool.

Prendre un p’tit coup… Quiz utile et agréable Une amie vous invite à souper et vous avez chacune acheté une bouteille de rouge. Que faites-vous? a) Vous buvez ensemble celle qu’elle a achetée, vous lui laissez l’autre comme cadeau d’hôtesse. b) Vous buvez chacune votre bouteille, pardi! c) Vous finissez les deux bouteilles et courez au dépanneur à 22h55. Votre conjoint vous confie qu’il s’inquiète de votre consommation d’alcool. Comment réagissez-vous? a) Vous êtes touchée par sa sollicitude et vous décidez de ralentir la cadence. b) Vous niez tout, bien que vous ayez peine à vous rappeler la dernière fois où vous n’avez pas bu de la journée. c) Vous en échappez votre verre et vous précipitez pour essayer de récupérer le précieux liquide répandu sur le plancher. Quels éléments sont le gage d’une soirée réussie? a) De bons amis, une bonne bouffe, un bon vin! b) De bons amis, une bonne bouffe, beaucoup de vin et une fin de soirée plutôt floue! c) Beaucoup d’alcool! Peu importe qui vous accompagne puisque vous aurez oublié le lendemain!

La modération a bien meilleur goût.

educalcool.qc.ca


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1er mars 2015 | ITINERAIRE.CA

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On entend parfois dire que seuls les hommes peuvent être policiers, les femmes étant jugées pas assez fortes ou trop fragiles. Sinon, on cite en exemple le cas de la matricule 728 pour le démontrer. Vous avez patrouillé pendant des jours avec les policiers et policières. Quelles conclusions en tirez-vous?

R.B. : À l'intérieur même de la police, la parité entre policiers et policières n'est certainement pas présente à Montréal. Pour certains policiers, une voiture de patrouille composée de deux femmes, c'est une voiture perdue. Elles auront besoin d'aide lorsqu'elles auront un cas grave à gérer. Mais ces policiers-là ont une version déformée de la réalité, puisque d'autres voitures de police vont quand même arriver en renfort si ce sont deux hommes qui ont à gérer un cas grave. Les stéréotypes sont également très présents. De nombreux policiers nous affirment que la meilleure équipe possible, c'est une fille de 110 livres et un gars de 200 livres. «Cette équipe-là peut patrouiller dans toutes les situations. Quand ça brasse trop pour l'homme, la femme calme le jeu. Un trop-plein de 400 livres, il n'aura pas envie de se battre contre une fille! Tu vois, c'est une équipe équilibrée!» C.L. : J'appelle ça le rapport à la viande. À un moment donné, ça prend de la viande, des gros bras, pour intervenir. Lorsque deux femmes de 110 livres veulent intervenir dans une bataille impliquant quatre hommes bien musclés, ça ne peut pas fonctionner. Il faut tout de suite du renfort. Par contre, si une équipe formée d'un costaud de 260 livres intervient, ou une femme vraiment baraquée, il se crée déjà un rapport plus égalitaire. C'est seulement une question de viande, et pas du tout d'intelligence ou de sexe. Il existe de nombreux policiers comme la matricule 728, qui sont des hommes. Elle n'avait pas un problème de sexe, mais un

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problème d'attitude, de comportement. Bien des hommes dans la police ont aussi ce genre de problèmes! Et tu ne peux pas te le permettre quand tu es dans la police, parce que tu as un fusil sur la hanche. R.B. : Des policiers me disaient même : «Si j'avais besoin de renfort, j'appelais la matricule 728!» Par contre, elle a fourni et justifié une version déformée de la police, où les policières y sont plus méchantes que les policiers.

Dans la série 19-2, comment avez-vous décidé d'illustrer ces rapports entre hommes et femmes dans la police?

C.L. : Nous avons décidé de combattre ces

Le culte de la beauté est, dans votre métier de comédien, très présent pour les femmes. L'avez-vous également en tant qu'hommes?

R.B. : Je dirais que ce culte de la beauté est présent, mais pas de la même façon. Il n'y a pas si longtemps, les acteurs étaient des gens bien ordinaires. Aujourd'hui, aux États-Unis, les hommes doivent ressembler à Hulk pour être acteurs. Dans l'histoire de l'humanité, on n'a jamais eu si peu besoin de muscles que maintenant, mais, paradoxalement, on n'a jamais été aussi musclé. Au-delà du culte de la beauté, c'est notre travail, que l'on soit homme ou femme, d'avoir un corps qui corresponde au rôle que nous devons jouer.

CINDY TREMBLAY Camelot métro Champ-de-mars et angle Beaubien/29e Avenue

stéréotypes. Nous avons adopté un point de vue plus complexe, plus introspectif. Le personnage joué par Julie Perreault, ce n'est pas une très bonne mère alors que, généralement, c'est l'homme qui est perçu comme le mauvais parent. D'autres femmes de l'émission sont beaucoup plus douces, plus humaines. Bérangère, c'est comme un petit pot de miel! Elle est tellement fragile! Mais c'est également une excellente policière! Elle vient confronter le stéréotype de la policière méchante véhiculé à travers la matricule 728. R.B. : 19-2 n'est pas du tout la même émission sans les policières. Et comme Claude le mentionne, elles sont toutes différentes. Julie Perreault, elle est bien loin d'être maternelle et sensible. Elle joue le rôle d'une femme qui ne pense qu'à son travail. Ne demandez-lui pas de porter une robe et


ENTREVUE

des talons hauts! Nous avons voulu combattre les stéréotypes sur le sexe, tout en en créant d'autres qui les dépassent et en les réunissant tous dans le même poste de police : l'alcoolique, la lesbienne, le fou furieux.

Et vous, personnellement, dans vos vies, comment avez-vous vécu les rapports entre hommes et femmes et leur évolution?

R.B. : J'ai huit sœurs et cinq frères, alors ça changeait tout chez nous quand j'étais petit. Les filles avaient autant sinon plus de pouvoir et leur mot à dire que les garçons. Mais elles n'en abusaient pas! La meilleure idée l'emportait, que ce soit une fille ou un garçon qui l'ait eu. Je n'étais donc pas au courant, à l'époque, des enjeux reliés aux rapports entre hommes et femmes ou à la montée du féminisme. C'est quand je suis

arrivé dans la société, au cégep, que j'ai réalisé que la femme n'était pas l'égal de l'homme, par exemple qu'elle était le plus souvent payée moins cher que l'homme. C.L. : Moi j'avais seulement une sœur, et je sentais déjà que le rapport n'était pas tout à fait égalitaire. Mes frères et moi, on avait toujours plus de permissions que ma sœur. Ma mère était toujours inquiète pour elle, peut-être parce que, justement, c'était un monde de gars. R.B. : Il faut écouter quelques épisodes de la série télévisée Mad Men pour comprendre les rapports de sexe à l'époque. L'histoire se déroule durant les années 60. On y entend des grosses blagues épaisses, sexistes à

Qu'est-ce que vous pensez du travail égal/salaire égal dans la police, entre les hommes et les femmes?

C.L. : J'ai patrouillé avec les policiers et les policières, et quand ils sont obligés de se tirailler par terre à -20°C, ou quand ils doivent réagir à quelqu'un qui leur fonce dessus avec un couteau, ils font le même travail. Et s'ils font le même travail, ils méritent le même salaire. C'est évident que l'expérience doit être considérée. Mais pourquoi ne leur paierait-on pas le même salaire? Une policière de 10 ans d'expérience payée comme un homme qui en a 5, ce n'est pas normal!

BENOÎT CHARTIER Camelot métro Radisson

mort. Ces blagues étaient fréquentes et acceptées! On considérait chanceux celui qui avait réussi à mettre les mains sur les fesses de la serveuse! Aujourd'hui, on porte un regard totalement différent. C.L. : Aujourd'hui, si les hommes faisaient ce qu'ils font dans Mad Men, ils mangeraient une bonne claque sur la gueule! Réal et moi, nous avons grandi directement dans le mouvement féministe. Je me souviens même qu'au cégep les gars ne draguaient pas les filles! Il ne fallait pas insister trop, donc on restait tranquille et on attendait que les filles nous fassent signe. Avant, les mères avaient une seule et unique fonction: rester à la maison. Mais elles travaillaient fort! Aujourd'hui, non seulement les femmes ont des enfants et doivent en prendre soin, mais elles se retrouvent également sur le marché du travail. Je les vois paniquer, à la garderie, matin et soir. Elles doivent également gérer la grossesse et l'accouchement. Et quand le bébé est petit, il est pluggé sur la mère. Nous, les hommes, on ne peut pas nourrir le bébé! Puis la mère reprend le travail, tout en continuant à prendre soin des enfants. Comment les femmes font-elles pour gérer tout ça? R.B. : Oui, les femmes font beaucoup : elles gèrent la famille. Il faut avoir été un homme monoparental pour le comprendre. Ça m'est arrivé, quand mon fils Léo est arrivé au monde et Salomé, ma blonde de l'époque, rentrait de l'école de théâtre à 10h le soir. Pour moi qui travaillais, c'était beaucoup d'ouvrage : récupérer Léo à la garderie sans arriver en retard parce que ça va me coûter un dollar de plus la minute, préparer son lunch et celui de Salomé pour lui éviter de manger de la cochonnerie, préparer le souper, faire le ménage… Ouf! Et on ne parle même pas des critères de beauté dans les magazines. C'est une pression effrayante.

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Lola aimerait bien trouver un refuge pour son maître

CHAQUE PETIT GESTE D’AMOUR QUI SE TRANSFORME EN DON PERMET À L’ŒUVRE LÉGER D’AIDER LES JEUNES DE LA RUE.

leger.org


DOSSIER

Femmes de l'ombre Le 8 mars de chaque année, la Journée internationale de la femme donne lieu a son lot de palmarès de femmes d'affaires, athlètes, musiciennes, leaders de demain ou d'aujourd'hui. L'équipe de L'Itinéraire vous présente quatre femmes au travail admirable, impliquées dans leur communauté, mais dont on entend peu parler. Médiatrice intellectuelle, entrepreneure, organisatrice communautaire et chercheuse, ces femmes que nous présentons travaillent chacune à sa manière pour améliorer le sort des autres. Si le 8 mars est le moment désigné pour souligner l'apport social des femmes, leur travail s'effectue à longueur d'année loin des projecteurs. Et certaines de celles que nous avons rencontrées s'en contentent très bien.

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«Ce n'est pas dans la rue qu'il est difficile de faire comprendre que l'égalité intellectuelle existe, mais plutôt auprès du grand public»

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DOSSIER

NADIA DUGUAY

L'apprentissage à double sens «L'inclusion sociale, pour moi, c'est que chacun ait en main les outils d'esprit critique nécessaire à l'inclusion au sein d'une société, au lieu de tenter d'intégrer des gens dans une société malade», estime Nadia Duguay, cofondatrice et codirectrice générale d'Exeko. La pétulante jeune femme croit au potentiel de chacun et met tout en œuvre pour le prouver. PAR ISAAC GAUTHIER

PHOTO : ISAAC GAUTHIER

PHOTO : JACQUES NADEAU

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près s'être impliquée dans la grève étudiante de 2005, Nadia Duguay a développé un projet-pilote de partage philosophique avec des prisonniers. «Il y a une part de la philosophie qui vient selon moi de l'intuition et qui est accessible à tous», croit-elle, incluant les gens socialement marginalisés. Cette expérience d'échange intellectuel, sans contenu moralisateur, est le fondement de ce que sera l'organisme Exeko, inauguré en 2010. Il ne faut pas être surpris si son nom ne vous dit rien : Nadia Duguay n'aime pas l'attention médiatique. «Il est très important pour moi de rester humble, ça vient de mes racines», explique-t-elle, visiblement mal à l'aise. Des racines qu'elle veut garder privées, même si elles sont inhérentes à son identité et son travail. Née dans une petite communauté de pêcheurs de la Gaspésie, Nadia Duguay raconte qu'il y existe un curieux mélange de résignation et de frustration envers les preneurs de décisions politiques. «On y vit une forme de tutelle où l'on a intégré l'idée que quelqu'un d'autre va prendre des décisions et s'exprimer à notre place». Le résultat de ses sentiments est une posture «d'exclusion et d'autoexclusion», soit un groupe qui refuse et se voit refuser une voix dans le discours public. Une situation inacceptable, soutient l'entrepreneure sociale.

Pourtant, ce travail est d'une «nécessité évidente» selon la cofondatrice, autant pour les gens marginalisés que pour le reste de la société. «Ce n'est pas dans la rue qu'il est difficile de faire comprendre que l'égalité intellectuelle existe, mais plutôt auprès du grand public», explique-t-elle, un peu découragée. Un découragement qui ne s'améliore pas lorsqu'elle réfléchit sur la condition de la femme. Nadia Duguay ne mâche pas ses mots : selon elle, il y a une «présomption d'inégalité de l'intelligence des sexes construite par une

D'égal à égal

Selon Nadia Duguay, Exeko fait de la médiation intellectuelle par l'entremise de l'élaboration «d'espaces de rencontre improbable où l'on se situe tous dans une présomption d'égalité». En des termes plus simples, elle crée un prétexte pour une rencontre sans jugement entre différents membres de la société. Cette idée transparaît dans le nom de l'organisme, du latin ex aequo, «d'égal à égal». Originalement, elle ne concevait pas que le projet prenne l'ampleur qu'il a aujourd'hui, avec plus de 150 ateliers de médiation à son actif depuis son inauguration.

société de mépris». Elle admet qu'elle ne se sent pas à l'aise et bien outillée pour commenter ce sujet en profondeur, estimant qu'elle a «une vision encore bien naïve de la situation». Néanmoins, elle conclut qu'il existe «une dynamique de hiérarchisation sociale posée sur la capacité intellectuelle et de leadership des femmes», un constat qui l'inquiète profondément. Il reste donc beaucoup de travail à faire avant d'arriver à une société inclusive.

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«J'ai toujours voulu travailler pour la défense des droits humains en général et j'ai fini par voir le lien avec les luttes autochtones d'ici.»

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DOSSIER

WIDIA LARIVIÈRE

La vérité qui dérange À la mi-décembre 2012, le mouvement Idle No More prend de l'ampleur. Depuis le début du mois, les communautés autochtones multiplient les actions. C'est un ras-le-bol collectif devant les changements législatifs cumulés du gouvernement conservateur. Widia Larivière et Melissa Mollen-Dupuis s'échangent des messages sur Facebook se demandant ce qu'il y a de prévu au Québec. «Rien,» répond l'une. «On fait quelque chose ?» relance l'autre. PAR GOPESA PAQUETTE

PHOTO : GOPESA PAQUETTE

PHOTO : WIDIA LARIVIÈRE

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epuis, Widia Larivière est devenue, avec Melissa Mollen-Dupuis, une des figures publiques de Idle No More-Québec. Le mouvement national connecte les multiples luttes autochtones du pays tout en stimulant un dialogue avec le reste de la population canadienne, notamment grâce à un vaste élan d'éducation populaire. Ce désir de connecter les luttes et d'assurer un dialogue entre autochtones et non autochtones semble aller de soi pour cette femme née d'un père québécois et d'une mère autochtone. «Je m'identifie comme Anishinabe (algonquine) même si j'ai un parent québécois,» répond Widia Larivière lorsqu'on lui demande. Elle est une fière héritière d'une lignée maternelle originaire de la communauté de Timiskaming en Abitibi-Témiscamingue. Son père est originaire du Bas-Saint-Laurent et c'est à Québec que ses parents ont élevé leurs enfants. Au cours de ses études collégiales, elle a découvert le lourd héritage porté par les femmes de sa famille. Découvrir l'expérience de sa grand-mère maternelle dans les pensionnats pour enfants autochtones fut un véritable choc. «Ça m'a bouleversée, admet-elle. À la même époque, j'apprenais l'histoire de la colonisation et des tactiques d'assimilation auxquelles les autochtones ont fait face, ce que je n'avais jamais appris à l'école. Ça m'a révoltée.» C'est dans cette mémoire douloureuse tout autant que dans l'ardeur des générations de militants qui ont lutté pour la reconnaissance des droits autochtones qu'elle trouve aujourd'hui sa force. «C'est très motivant si je peux honorer tous ces militants qui m'inspirent en continuant ce qu'ils ont commencé, précise-t-elle. J'essaie de respecter le principe autochtone demandant de penser aux sept prochaines générations, alors si je peux contribuer au changement social, même à très long terme, c'est assez pour moi.» Lors de son passage à l'université en études internationales, elle s'implique auprès de l'association d'étu-

diants autochtones et rencontre pour la première fois des gens des autres nations autochtones du Québec. «Ça m'a ouvert le yeux sur les réalités des autres communautés autochtones et en même temps sur les nombreuses réalités communes.» Elle saisit toutes les occasions pour approfondir son intérêt pour les questions autochtones. «J'ai toujours voulu travailler pour la défense des droits humains en général et j'ai fini par voir le lien avec les luttes autochtones d'ici.» Après ces études universitaires, elle se joint à l'équipe de Femmes autochtones du Québec où elle assure présentement la coordination du programme jeunesse. La présidente

Widia Larivière, Natasha Kanapé Fontaine et Melissa Mollen-Dupuis à la marche d'ouverture du Forum social des peuples qui avait lieu à Ottawa en août 2014.

de l'époque, Ellen Gabriel, était un modèle pour elle. Porte-parole de la nation Mohawk lors de la crise d'Oka, Mme Gabriel est connue pour sa force de caractère et son combat pour une plus grande participation des femmes aux instances politiques autochtones. «Elle m'inspire beaucoup, même si certains la trouvent dérangeante, affirme la militante. On dérange quand on utilise des termes qui sont juste la vérité. Comme parler de génocide et de féminicide pour décrire l'expérience des peuples et des femmes autochtones.» Pour Widia Larivière, ce n'est pas la personne qui utilise le terme qui est dérangeante, mais plutôt les interlocuteurs qui vivent dans le déni.

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«Montréal est un endroit idéal pour travailler à l'autonomisation des femmes. C'est une ville d'ouverture et de culture.»

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DOSSIER

LIS SUAREZ VISBAL

Travailler pour soi «Je ne veux pas reproduire les mêmes modèles économiques et sociaux qu'autrefois. Les profits à tout prix, ça ne m'intéresse pas», lance fièrement Lis Suarez Visbal, directrice de l'organisme d'entrepreneuriat social FEM International. PAR ISAAC GAUTHIER

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me Suarez Visbal a un parcours des plus particuliers. Née en Colombie, elle y étudie la finance, ensuite les relations internationales à Harvard, aux États-Unis. Elle se déniche rapidement un emploi à Boston au sein d'une banque d'investissement. Pourtant, cette vie de confort et de sécurité ne lui plaît pas. C'est en faisant du bénévolat chez un organisme d'aide aux immigrants qu'elle trouve sa réelle passion : l'autonomisation des femmes. Suivant ses instincts, Lis Suarez Visbal quitte son emploi et, malgré l'incompréhension de ses proches, se retrouve en Thaïlande à travailler pour une coopérative d'aide auprès de jeunes femmes victimes du trafic humain. Une tâche dure, mais souvent gratifiante. «Un jour, raconte-t-elle, une des filles qui faisait le programme d'entrepreneuriat m'a offert un mouchoir qu'elle venait de créer. Dessus, elle avait teint l'image d'une femme rêvant d'un monde meilleur. J'ai su à ce moment ce que je voulais faire de ma vie». Cette détermination à écouter son cœur n'est pas née du hasard. «Mes parents ont toujours fait ce qu'ils voulaient», explique-t-elle avec le sourire, «ils ont été une influence déterminante dans ma vie». Son père a toujours pratiqué le droit en soutenant des causes qu'il jugeait importantes, alors que sa mère, elle-même entrepreneure, était une pionnière du milieu. «Moimême une entrepreneure aujourd'hui, je réalise enfin l'influence qu'ils ont eue sur moi, particulièrement celle de ma mère», admet-elle. Chez FEM International, un organisme qui vise l'autonomisation des femmes immigrantes, c'est cette même inspiration qu'elle essaie de transmettre à une nouvelle génération de femmes.

PHOTOS : ISAAC GAUTHIER

Égalitaire, la société québécoise?

Selon Mme Suarez Visbal, «Montréal est l'endroit idéal pour travailler à l'autonomisation des femmes. C'est une ville d'ouverture et de culture». Pourtant, au Québec, «nous ne sommes pas encore arrivés à une société égalitaire». Malgré les pas de géant réalisés par les militantes féministes ces dernières années, il reste encore du travail à

faire, surtout en matière de consolidation des acquis sociaux. Une réalité très importante, surtout si l'on considère que plusieurs des immigrantes arrivent de «sociétés plus machistes» que leur terre d'accueil. C'est pourquoi, selon elle, l'autonomisation des femmes est «doublement indispensable». Mme Suarez Visbal est convaincue que l'entrepreneuriat est un excellent moyen d'autonomiser un individu. «Les immigrants sont des entrepreneurs naturels», explique-telle, «puisqu'ils doivent s'adapter à un nouveau monde, ils doivent repenser leurs idées et leurs acquis». C'est aussi une

façon d'apprendre de nouvelles compétences, autant dans le travail du textile et de la mode que par la vente de soi. C'est ce qu'elle cherche à faire avec son dernier projet, Ethik, qui est à la fois une boutique de vêtements et un centre de formation misant sur le développement écoresponsable et l'entrepreneuriat social. Une idée prometteuse qui, à ce jour, a permis à des dizaines de femmes d'être leur propre patronne.

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C'est ce qui me motive, chaque fois qu'une travailleuse du sexe se lève et prend parole. Même si ça veut dire que quand elle prend sa place, moi je débarque.

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DOSSIER MARIA NENGEH MENSAH

Intellectuelle de terrain Auteure, chercheuse, enseignante et organisatrice communautaire, la professeure à l'école de travail social de l'UQÀM, Maria Nengeh Mensah, travaille depuis 25 ans pour les droits des femmes marginalisées. Élevée par sa mère dans un quartier où relations abusives et consommation de drogues étaient courantes, elle a su voir les regards biaisés des autres comme autant de défis à relever et de pistes de recherche à explorer. TEXTE ET PHOTO : GOPESA PAQUETTE

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epuis ces premières années à travailler de soir comme intervenante dans un centre d'hébergement pour femmes itinérantes, Mme Nengeh Mensah semble s'être donné pour but d'aider les marginalisés à se faire entendre. Prudente dans ces interactions avec les médias, elle reste soucieuse de ne pas parler à leur place. «Lors d'une rencontre du SPVM pour leur plan quinquennal de lutte contre l'exploitation sexuelle, il a fallu que je répète exactement ce qu'une travailleuse du sexe venait de leur dire pour que les policiers en tiennent compte, s'insurge Mme Nengeh-Mensah. Je leur ai dit qu'elle venait de dire la même chose. Il y a un problème si on continue à fonctionner comme ça.» Au cours des nombreuses rencontres avec ces femmes, elle a vu comment elles n'avaient attendu personne pour s'organiser. «Je trouve ça très inspirant. Ça me fait mal de voir à quel point ces femmes-là étaient et sont encore rejetées pour des raisons vraiment irrationnelles, s'indigne-t-elle. Je me sens aussi concernée et si je peux participer à renforcer leur voix ou à amplifier ce qu'elles ont à dire, tant mieux.» Le mépris généralisé à leur encontre reste difficile à accepter, une stigmatisation que partagent les femmes porteuses du VIH et celles exerçant comme travailleuses du sexe.

les thérapies pharmaceutiques. La succession de décès dans son entourage a un impact émotionnel sur la chercheuse. «Des enterrements, des funéraires, des services, il y en avait presque un par mois, se rappelle-t-elle. Tu es là comme bénévole à faire le café et tu te rends compte que sa famille n'est pas là. J'ai trouvé ça très dur. C'est là que je me suis dit que je ne pouvais pas rester dans l'intervention, que j'avais besoin d'avoir un regard plus macro, de voir d'où vient ce manque de respect envers ces personnes.» Une partie de ces recherches s'attarde à faciliter les analyses faites à la base, par les femmes mêmes qui sont les sujets des discours stigmatisant sur le travail du sexe. Un exemple de cette articulation des logiques militantes et intellectuelles fut l'organisation du Forum XXX, une rencontre internationale de

PHOTO : GOPESA PAQUETTE

PHOTO : STELLA

Laisser sa place

Lorsqu'elle a commencé sa maîtrise en sexologie, il y a 25 ans, elle s'attendait à faire une dizaine d'entrevues avec des femmes sidéennes. Elle s'est rapidement retrouvée avec une cinquantaine de témoignages en promettant d'en faire bon usage. C'est la mesure de l'implication de Mme Nengeh Mensah. Tout en poursuivant une maîtrise en sexologie, un doctorat en communications et ensuite une carrière académique au département de travail social de l'UQÀM, la chercheuse s'est impliquée avec Sida Bénévoles Montréal (ACCM), a participé à la fondation du Centre de Ressources et d'Intervention en Santé et Sexualité (CRISS) et a accompagné dans diverses fonctions l'organisme Stella, créé pour et par des travailleuses du sexe. Dans les années 1990, le sida tue beaucoup : c'était avant

Du 3 au 8 août 2008, à Mexico, avait lieu le 17e congrès international sur le sida, auquel participaient 175 travailleuses et travailleurs du sexe venus d'un peu partout dans le monde.

travailleuses et travailleurs du sexe tenue à Montréal en 2005. «C'était supposé être une rencontre entre féministes et travailleuses du sexe, mais les femmes nous ont dit ‘'On ne veut pas rencontrer les féministes, on veut être entre nous''. Ce fut vraiment une leçon d'humilité, c'est ce qui me motive, chaque fois qu'une travailleuse du sexe se lève et prend parole. Même si ça veut dire que quand elle prend sa place, moi je débarque.

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Les mots pour vaincre les maux Une vague de dévoilement d'agressions sexuelles a lieu sur les réseaux sociaux depuis le mois d'octobre dernier. Celle-ci a été déclenchée par Sue Montgomery, qui a révélé sur Twitter avoir été agressée par son grand-père. C'est l'affaire très médiatisée de Jian Gomeshi, ex-animateur de CBC faisant l'objet d'allégations de violence sexuelle, qui a incité Sue Montgomery à agir. On assiste à un effet d'entraînement. Plus le sujet est discuté ouvertement dans les médias, plus les victimes parlent de ce qu'elles ont vécu. C'est dans ce contexte que j'ai interviewé Isabelle Blais. L'actrice représente Trêve pour elles, un organisme à but non lucratif qui lutte à enrayer les agressions sexuelles en offrant des services d'aide aux femmes et des services de sensibilisation du grand public.

MARIE-ANDRÉE B. | Chroniqueuse de rue PHOTOS : GOPESA PAQUETTE

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RENCONTRE

Isabelle Blais Comment es-tu devenue porte-parole de Trêve pour elles?

Que penses-tu de la vague de dévoilements d'agression sexuelle?

C'est un concours de circonstances... J'ai joué le rôle d'Helena, une Je salue le courage de celles qui brisent le silence. Je ne serai pas femme qui se fait utiliser à des fins d'exploitation sexuelle, dans la de la vague de dénonciation tout simplement parce que ça ne télésérie Trafic humain. Une femme au passé trouble s'est identifiée m'est pas arrivé. Mais quand j'y repense bien, ce n'est pas tout à ce personnage et m'a remis une lettre lors à fait vrai. J'ai minimisé des gestes, j'ai d'un de mes spectacles de musique. Plus tard, dû repousser des avances un peu trop nous nous sommes rencontrées et, avec le intrusives. Je me suis fait pogner les « Même dans les cas temps, nous avons créé un lien. Cette femme fesses dans la rue. Je me suis fait tâter où les femmes sont recevait des services d'aide à Trêve pour elles le sein dans le métro. Sans compter les et c'est grâce à elle que j'ai connu cette res- conscientes qu'elles ne sont remarques ou les sifflements sur la place source. Sachant ce que je faisais pour cette publique. Je voudrais bien connaître la aucunement responsables proportion de femmes ayant vécu ne sefemme, les travailleuses m'ont demandé de devenir porte-parole. rait-ce qu'un événement semblable aux de l'agression, elles se C'est bizarre, car avant d'entrer à l'école de miens? C'est troublant de penser que théâtre, je désirais faire des études universentent dépouillées d'une c'est le cas pour la majorité des femmes sitaires en travail social. Je suis fascinée par et que ça ne change pas vraiment. Et puis partie de leur pouvoir l'être humain. C'est l'une des raisons pour laje pense aux actes graves… Je salue celles quelle je suis comédienne. Je me glisse dans qui se reconstruisent. Il est possible de et affaiblies. Ça parait différentes peaux, je me mets à la place de retrouver une qualité de vie à la suite l'autre et j'essaie de comprendre comment mal dans une société de d'un travail de croissance personnelle. il peut se sentir. La preuve est faite puisqu'il existe des performance dans laquelle survivantes résilientes qui transmettent D'après toi, pourquoi les un message d'espoir.

victimes d'agressions sexuelles gardent-elles le silence?

il faut être fort sur tout pour réussir. »

Elles ont l'impression qu'elles sont responsables et qu'elles auraient dû voir venir le coup. Le sentiment de culpabilité et de honte engendre une peur du jugement. Même dans les cas où les femmes sont conscientes qu'elles ne sont aucunement responsables de l'agression, elles se sentent dépouillées d'une partie de leur pouvoir et affaiblies. Ça paraît mal dans une société de performance dans laquelle il faut être fort sur tout pour réussir. Personne ne veut être perçu comme une victime.

Quel message aimerais-tu transmettre?

Aux hommes bons et dignes de confiance, je veux dire : rayonnez, continuez à être porteur de grandeur, de respect et d'amour, mais surtout réagissez à toutes ces injustices! Et à toutes les femmes qui ont souffert, j'ai envie de dire : ces hommes bons et fiers existent, et sont bien plus nombreux que les minables. Sachez les chercher, les reconnaître, leur faire confiance et les aimer.

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LOGEMENTS SOCIAUX

Inquiétudes face à la fin des subventions À la fin de l'année dernière, le gouvernement fédéral a décidé de ne pas renouveler les conventions d'exploitation le liant aux organismes offrant des logements sociaux à travers le Canada. Cette mesure conduira à la suppression des subventions accordées aux ménages à faible revenu leur donnant accès à un logement à loyer réduit. Francine Néméh et Louise Constantin, respectivement directrice générale de la Fédération des coopératives d'habitation intermunicipale du Montréal Métropolitain (FECCHIM) et coordonnatrice de la vie associative et de la mobilisation reviennent sur les conséquences des fins de conventions. PAR CHARLES-ÉRIC LAVERY ET ALEXANDRA GUELLIL

Q : Quelques coopératives ont déjà vu la fin de leurs conventions et pour de nombreuses autres, ce sera dans le courant de l'année, et ce, jusqu'en 2020. De combien de coopératives et de foyers parle-t-on exactement?

Francine Némeh: Environ 40% des coopératives seront touchées par la fin des conventions. Cela signifie que pour de nombreuses coopératives, il n'existera plus aucun soutien du gouvernement fédéral. Pour les foyers, ce seront environ 500 000 canadiennes et canadiens qui seront touchés…jusqu'à parfois perdre leur logement.

Q : Que permettait cette aide financière du gouvernement?

FN : Cette aide pouvait servir à garantir un prêt pour l'ensemble de la coop, qui était remboursé par les loyers payés par les membres. Une fois que l'hypothèque était remboursée, certains besoins des bénéficiaires (entretien, évaluations gratuites, soumissions de recommandations, etc.), pouvaient être pris en charge par cette aide. Un montant était aussi alloué à chaque coopérative qui pouvait être redistribué à ses membres aux revenus trop faibles. En fait, cette aide financière soutenait les personnes à faible revenu et favorisait la mixité sociale, l'intégration des personnes immigrantes et l'entraide.

Q : Une fois que les conventions se termineront, les subventions s'arrêteront aussi. Quelles seront les conséquences?

FN : On n'ose pas être alarmistes au point de dire que des personnes vont se retrouver dans la rue mais cette perte

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engendra une certaine augmentation de leur loyer. Et s'ils ne se retrouvent pas dans la rue, ils se retrouveront dans des taudis ou des logements insalubres. Cela aura un impact sur les familles et les enfants. Louise Constantin : Grâce aux subventions, le loyer pour les familles à faible revenu se situait entre 25 et 30% de leur revenu mensuel, soit 200$ à 300$. Sans la subvention, un loyer dans une coopérative peut passer de 500$ à 600$. Pour un foyer avec un revenu mensuel de 800$ par exemple, c'est une augmentation énorme. Il ne faut pas oublier qu'un peu plus de 80% des personnes concernées gagnent moins de 40 000$ par année. FN : En fait, il faut comprendre que le fédéral accordait des subventions au démarrage de la coopérative, comme c'est le cas pour le programme provincial Accès-Logis. Cette participation peut représenter 50% du prix de la construction de l'immeuble ou de son entretien.

Q : Ces coupes touchent-elles uniquement les coopératives?

LC : La fin des conventions touche l'ensemble des logements sociaux: les organisations sans but lucratif (OSBL), les habitations à loyer modique (HLM), les coopératives, etc. Un peu plus de 200 000 logements sociaux sont visés pour plus de 500 000 Canadiens concernés. C'est en fait le démantèlement complet de tout le patrimoine de logements sociaux à travers le pays. Cela signifie qu'on ne règle pas le problème de la pauvreté, on recule davantage dans les solutions qu'on y apporte.


De gauche à droite, Louise Constantin et Francine Néméh

PHOTOS : RICHARD AUDET / FECHIMM

ACTUALITÉ 66% 47%

de femmes

de personnes seules

À la coopérative d'habitation Terrasse Soleil, des dizaines de résidents devront consacrer jusqu'à 88% de leur revenu pour le loyer.

24% 16%

de familles monoparentales

tirent leurs revenus principalement d'une pension de vieillesse

Les coopératives d'habitation québécoises sont composées de : Source : Confédération québécoise des coopératives d'habitation (2013)

Q : Quelles sont les alternatives envisagées, s'il y en a?

LC : On ne se cache pas qu'un changement de gouvernement pourrait certainement aider mais nous n'avons pas d'engagements catégoriques et fermes de la part des partis de l'opposition. FN : Des alternatives, il y en a, comme la possibilité de bénéficier de subventions individuelles (PSL), mais ce n'est pas une solution envisageable à long terme. En plus d'être attribuées dans le privé, ces subventions ne peuvent qu'aider temporairement les familles sans pour autant leur garantir un loyer à prix fixe. Cela fait plusieurs années qu'on essaye de se mobiliser mais notre voix commence à se faire entendre que maintenant. Sans doute parce que plusieurs coopératives vont perdre leurs subventions au cours de l'année. Dans la métropole, un peu plus de 83 000 logements sociaux seront concernés. Au sein de la FECHIMM, on a tenté d'interpeller, de faire signer des pétitions. On mobilise nos membres, organise des carrefours intercoop par quartier avec des comités logement pour informer le plus de personnes possibles. Nous tentons de faire pression sur le gouvernement du Québec afin que nos élus fassent à leur tour pression sur le gouvernement fédéral.

Conséquences des fins de subventions: coopérative d'habitation Terrasse-soleil

Une coopérative demeure une propriété collective pour les membres qui y vivent et qui la gèrent. Comme ici, à la coopérative de solidarité intergénérationnelle lavalloise. PHOTO : JEAN-PIERRE LACROIX

Type de logement

Revenu mensuel

Coût sans subvention

% du revenu consacré au loyer

711$

626$

88%

733$

627$

86%

733$

551$

75%

604$

482$

80%

733$

451$

62%

Source : FECHIMM / Coop Terrasse Soleil 1er mars 2015 | ITINERAIRE.CA

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DANS LA TÊTE DES CAMELOTS

Ces femmes célèbres qui ont marqué nos vies Elles ont créé, elles ont écrit, elles ont joué, elles ont chanté, elles ont changé l'Histoire. À l'occasion de la Journée internationale de la femme du 8 mars, les camelots rendent hommage à celles qui ont marqué leur vie.

Ma rencontre avec Diane Dufresne Dany Aubé, avec ma casquette « Je vagabonde seule dans la rue, défiant le monde avec ma casquette. Je suis la cible du voisinage, quel commérage sur ma casquette. » J'ai toujours aimé cette chanson de Dany Aubé. C'est une chanson qui me ressemble. Je me retrouve dans cette fille qui se ballade avec sa casquette sans se soucier de l'avis des autres. On peut vagabonder et être bien dans sa peau. C'est un style de vie que j'adore; c'est mon style de vie.

Diane Dufresne est poète et artiste. Elle parle avec son cœur. Elle a un côté humaniste et social. J'ai eu la chance de la rencontrer et j'ai aimé son approche quand je lui ai proposé d'acheter L'Itinéraire. Je ne peux pas oublier sa chanson « Donnez-moi de l'oxygène ». Ça voulait tout dire, j'ai l'impression qu'elle a su voir le futur. JACQUES ÉLIZÉ | Camelot Théâtre du Rideau Vert

MANON FORTIER | Camelot Village Champlain

Le sourire de Guylaine Tremblay J'aime beaucoup Guylaine Tremblay. Elle a un bon rôle dans Unité 9 mais elle a l'air très différente dans la vie. Je l'ai rencontrée quand elle est venue à L'Itinéraire l'an passé. J'avais découvert une femme sympathique et qui a du cœur. Elle a un sourire sincère qui attire les gens. YANNICK LAROUCHE | Camelot métro Beaubien

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La diva Céline Dion J'aurais aimé être une vedette, avoir la bonne formule, une bonne famille, une bonne éducation. Quand tu es bien parti dans la vie, tout peut arriver. Céline Dion n'a pas eu une vie si facile. Je la suis depuis ses débuts et j'ai toujours adoré ses chansons. Elle a commencé en bas de l'échelle mais elle a été tenace et elle a fait ses preuves. Aujourd'hui c'est la diva. Elle a trouvé le bonheur total et elle le mérite. FRANCE LAPOINTE | Camelot angle Mont Royal / Mentana


Christina Perri, un effet positif sur moi Le blues de Nanette Workman C'était mon idole quand j'étais jeune et ça l'est encore aujourd'hui. Quand j'avais sept ans, je jouais de la guitare, j'écoutais son groupe de rock et j'essayais d'imiter ses chansons. Quand elle chantait dans la région, je faisais tout pour aller la voir en concert. J'étais le seul qui aimait le rock dans la famille mais j'insistais pour qu'on m'accompagne. Elle a fait du rock, de la pop, du blues, du disco, elle a même chanté avec les Rolling Stones. Je vais encore la voir en concert dès que j'en ai l'occasion. Pour moi, c'est la chanteuse qui a la plus belle voix de blues, et c'est encore une très belle femme pour son âge. Je l'ai déjà croisée mais j'étais figée, je n'arrivais pas à lui parler. Un jour, j'aimerais obtenir une entrevue avec elle pour L'Itinéraire. DAN & ROZI | Camelot SAQ Jean-Coutu et angle Jary / Lajeunesse

Dalida, mourir sur scène J'aime les vieilles chansons et j'écoute souvent Dalida. Sa chanson « Mourir sur scène » me fait frissonner. Peut-être parce que j'ai une sœur qui s'est suicidée, comme Dalida. Elle chantait sa vie, on sentait chez elle une profonde souffrance. Le monde l'acclamait et l'aimait mais elle restait quand même seule et cela ne l'a pas empêchée de se suicider. CINDY TREMBLAY | Camelot métro Champ-de-Mars

Depuis que j'ai appris à la connaître, j'ai appris à me connaître plus, à exprimer mes émotions et à les vivre. J'ai appris à faire part de ce que je ressens à quelqu'un. Ce quelqu'un, c'est mon père qui est au ciel. Les chansons de Christina Perri m'ont beaucoup aidé et m'ont inspiré. Cela m'a ouvert des horizons, cela m'a ouvert l'esprit. Ça vient te chercher à l'intérieur. SYLVAIN PÉPIN | Aide à l'entretien ménager

Amy Winehouse, rehab C'est un de mes amis qui m'a fait découvrir Amy Winehouse. Je ne comprends pas bien l'anglais mais mon ami m'a traduit les paroles de la chanson « Rehab ». Elle raconte qu'elle devait partir en désintoxication mais qu'elle n'était pas sûre d'elle. Ça me faisait penser à ma situation personnelle, elle expliquait des choses que je ressentais aussi. Je me voyais en elle. CHANTAL TISSEUR | Camelot Place d'Armes

Les sœurs Trung, héroïnes de l'Histoire du Vietnam Dans l'Histoire antique du Vietnam, les deux sœurs Trung ont résisté contre l'envahisseur chinois, elles ont formé une armée et combattu les généraux ennemis à dos d'éléphant. Ces femmes ont marqué l'Histoire de mon pays et quand je vivais là-bas, on nous parlait beaucoup d'elles à l'école. On célèbre encore ces héroïnes chaque année au Vietnam. TUAN TRIEU-HUANG | Camelot métro Henri-Bourassa

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MOT DE CAMELOT Souterraine Comment vous parler de ces reproches que l'on adresse aux petites gens, et de ces contradictions avec lesquelles nous devons faire une équation, afin d'éviter de mourir en pleurant? On m'a souvent dit que je ne pourrais pas réaliser mes rêves puisque je ne le voulais pas assez. Et, par contre, quand j'ai voulu, on m'a fort obligeamment fait remarquer que, mon possible n'étant pas bien fort, je n'étais pas adéquatement équipée pour obtenir ce que je désirais. Les deux assertions sont complémentaires, et ne m'apparaissent pas totalement dénuées de sens. Et il y a aussi ce discernement, qui ne m'aurait été attribué qu'avec parcimonie, et qui est toujours plus ou moins obnubilé par les différentes failles dont mon âme est affligée. Et quoi encore? Sous ma peau coule la même richesse dont les gagnants rayonnent. Elle est simplement souterraine. À la recherche de nutriments, mes racines fouillent aussi ce sol qui alimente les géants de la forêt, et, quoiqu'on en pense, nos filaments sont tous entrelacés. Je suis le silence de votre éclat, et l'absence, sans laquelle vous ne pourriez percevoir la présence. Il faut bien que quelqu'un meure d'abord, et prépare ce nid qui nous recevra tous.

LORRAINE SYLVAIN Camelot métro Peel

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La sieste spirituelle Cher Mathieu Bon, je regarde mon café posé sur la table, à ma droite, sans lait ni sucre parce que finalement… je l'aime comme ça. Et puis je fais du «flânage» mental, ce qui veut dire que mon cerveau n'a plus de paramètres. Je me sens libre. D'ailleurs nous sommes le 15 du mois. Le 15 est mon chiffre magique, mystique. Qu'un «1» suivi d'un «5». Libre, je le suis. Mais Mathieu, lui, ne l'est plus. Il est parti au pays des souvenirs. Je te revois Mathieu, l'an passé, cognant à la vitre d'un Dollarama, m'envoyant des tas de baisers avec la main, pendant que je magasinais des lumières de Noël. Pourquoi? Pourquoi? Un seul souvenir de toi, mais un vrai et un douloureux. Pas facile de te dire «Adieu». Une vie si courte, mais pleine; pleine d'amour, de souffrance, de passion. Maudit vagabond, je t'aime, parce que tu sonnais vrai. La magie d'un regard, l'espace d'un instant, j'ai fondu, frémis, et réalisé que j'étais en présence d'un jeune homme avec une aura d'une rare intensité. Tu vas vivre encore longtemps dans ma mémoire. Au revoir.

CÉLINE MARCHAND Camelot angle St-Denis/Ontario et préposée à la réception

Un matin, les lumières derrière la pénombre, ton visage angélique, qui criait par-dessus les couvertures; tu étais là telle une sainte dans son cercueil de diamant. Tu rêvais peut-être que tu étais reine, mais en t'admirant, je constatais que tu l'étais déjà. Ta chevelure brune et brillante, qu'on désirerait caresser, donnait vie à l'oreiller. Emballée de blanc, tu étais le cadeau du Seigneur. Vierge et pure, ton âme guérissait mes plaies, ton énergie apaisait ma souffrance, ton aura soignait ma peine. Ta peau douce et scintillante rafraîchissait ma maison abandonnée. Les longs cils invitants de tes yeux me faisaient voyager. Si je définissais cette Déesse en une couleur, ce serait le blanc, car elle était parfaite et sa beauté, éternelle. Si je comparais cet ange à une odeur, ce serait celle d'une rose épanouie. Si j'imitais cette magnificence avec un son, ce serait celui des chutes d'eau de source. Si j'imaginais cette expérience divine à travers un goût, ce serait un sublime chocolat fondant qui se déposerait sur ma langue pendant plusieurs instants. Elle ressemblait à une fée au repos. J'avais maintenant une raison de vivre, ma princesse était de retour. Je la regardais, étendue sur le dos, prenant des forces pour affronter le monde de demain. Je t'aime Annie Ta Best

CINDY TREMBLAY Poète de rue / camelot métro Champ-de-Mars et coin 28e Avenue/Beaubien


CHEMIN FAISANT

CHARLIE HEBDO

ILS EN SONT MORTS DE RIRE… MATHIEU THÉRIAULT | Camelot angle Bernard/de l'Épée

V

ous en connaissez beaucoup, des anarchistes de géants de l'Hebdo, bien avant de rire de Dieu ou de Maho80 ans ? Qui sont en plus de véritables génies de met, ont surtout bien ri de tous les cons et de tous les imla plume, des maîtres du coup de crayon, bref des bus d'eux-mêmes, ce que l'humanité, malheureusement, artistes ? Pour moi, ils étaient des géants. Personnages produit toujours par légions. Face à l'armée increvable des plus grands que nature qui charriaient le poids de l'his- imbéciles, Charlie opposait des bataillons de rires, des régitoire tout en continuant à dénoncer un présent trop sou- ments de sarcasme, des fantassins d'esprit critique. Et non, vent déprimant sans jamais cesser de croire en des len- cette arme n'est pas et ne sera jamais soluble dans l'intédemains plus chantants. Et on les a canardés comme des grisme, quel qu'il soit. lapins ! Eux qui chaque semaine tentaient de sauver des Quand j'étais dans une des périodes de ma vie, privé de animaux de compagnies en détresse dans leur hebdo. ma liberté d'avoir accès à un peu de littérature, cet oxygène Qui ont toujours pris le parti des opprimés, des exclus, de la liberté, Charlie m'a offert gracieusement un abonnedes marginalisés, pour mieux cracher sur tous les pou- ment. C'était aussi ça Charlie : la générosité d'offrir gratuivoirs. Leur leitmotiv : le pouvoir est absolument mauvais tement un abonnement à un quidam, un otage anonyme parce qu'il corrompt absolument ! de l'État, à plus de 5 000 km de distance, parce que cela Le 7 janvier 2015, une lumière s'est éteinte. Le jour- correspondait à leurs principes, à leur amour de la vie et à nal qui m'avait tant fait rire, qui avait fait une partie de leur générosité intrinsèque. mon éducation politique n'existait plus. Parce que moi, Quand je m'exprime aujourd'hui, même sur les sujets les « je suis Charlie », je ne l'ai pas découvert le 8 janvier plus sérieux, j'essaie toujours d'y mettre un peu d'humour. 2015. L'Hebdo du Charlie soudain intime pour tout le De cet humour salutaire, qui permet de critiquer et réfléchir monde, j'avais l'impression que je le lisais depuis que à cette époque trouble qui est la nôtre sans sombrer dans j'étais assez vieux pour lire par moi-même un média le défaitisme. Car je suis sûr que les endeuillés de Charlie un tant soi peu sérieux, et tellement pas, à la fois. De auraient été les premiers à trouver pour le moins bizarre que tous les médias, Charlie Hebdo était probablement le dans les manifestations monstres en leur honneur, tous les seul, après la lecture duquel, je me sentais parfois plus grands de ce monde marchent hypocritement bras dessus « intelligent ». J'avais l'impression de mieux connaître bras dessous et que les foules se mettent au garde-à-vous et comprendre le monde qui m'entoure. Certains di- pour saluer les flics tombés au combat pour les défendre ! saient qu'ils avaient un peu perdu de leur mordant. Drôle de République, se seraient-ils sans doute dits. En Sauf que du mordant, ils en avaient toujours assez espérant que « je suis Charlie » ne soit pas qu'une éphépour qu'on veuille leur limer les canines et les réduire mère vogue sur Facebook et qu'au contraire les médias au silence. Par la pire des manières qui soit. Et j'espère s'inspirent de « l'esprit Charlie » dans leur vie, comme bien que dieu(x)-, quand il(s)- a(ont) vu débarquer ce moi je m'en suis inspiré dans la mienne. Mais bon, sans cortège d'irrévérencieux, se (ou se sont) dit(s), « eh trop y croire, pour les morts, on souhaite toujours ses merde, pas encore eux ! Et pour l'Éternité en plus ! » meilleurs vœux ! Mais en relisant mes anciens numéros, en riant encore Vive Charlie ! une fois de leurs caricatures les plus cinglantes, j'ai réaVive la vie ! lisé à quel point Charlie avait sensiblement transformé Et vive l'anarchie ! ma façon de comprendre le monde et de voir la vie. Les Par Mathieu Cabu-Charb-Wolinski-Maris…

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MOT DE CAMELOT Les défis à venir Je travaille à L'Itinéraire depuis les trois dernières années. Mon programme d'aide et d'accompagnement social d'Emploi-Québec est renouvelable le 28 février de cette année. Compte tenu des compressions gouvernementales, je m'attends à être obligé d'aller ailleurs pour me réaliser et travailler ma sociabilité. J'ai le goût de faire de la radio et j'ai déjà entrepris des démarches afin de faire du bénévolat à la radio CKUT de l'Université McGill. J'ai hâte d'entreprendre ce nouveau défi et pouvoir me réaliser pleinement. Je voudrais remercier Philippe Boisvert, mon patron, pour m'avoir épaulé durant les deux dernières années. C'était vraiment agréable de travailler pour L'Itinéraire et j'en garderai un précieux souvenir. Je me souviens de tous mes fidèles clients lorsque j'étais camelot et j'espère pouvoir échanger encore avec eux dans un avenir rapproché. L'Itinéraire a beaucoup contribué à l'amélioration de ma santé mentale et physique et je sais que j'aurai toujours besoin d'être encadré pour me réaliser pleinement et contribuer à la société pour encore quelques années. J'ai 56 ans; malgré que l'avenir soit incertain pour moi, je pense pouvoir faire encore pleins choses.

FRANÇOIS GAUTHIER Préposé à la réception

Espérance Conscient/ Inconscient De nombreuses personnes prétendent que personne ne les connait mieux qu'euxmêmes. Pourtant, d'autres disent qu'ils connaissent mieux les gens autour d'eux qu'ils ne se connaissent euxmêmes, et je penche plutôt vers cette idée. Pourquoi? Je pense qu'il existe une partie inconsciente de notre esprit qui gère nos actions, d'où l'expression «ne pas avoir conscience de quelque chose». Nous, nous ne pouvons percevoir que la partie consciente de notre esprit. Sa partie inconsciente, qui nous échappe, peut être perçue par les autres. Ainsi, les autres ont la possibilité de nous voir entièrement, alors que nous ne pouvons que nous voir «à moitié». Des gens sont même capables de distinguer parfaitement les deux côtés, le conscient et l'inconscient, chez leurs semblables, par exemple ceux qui animent des ateliers de développement personnel. En effet, les différents programmes de développement personnel peuvent être efficaces, car ils aident les participants à faire surgir leur côté inconscient. D'où l'expression «prendre conscience de quelque chose».

Ô toi seule, unique Espérance de vie Allume ma lumière Éclairvis (erreur voulue) le chemin de ma vie Éveille en moi le secret bien gardé Deviens à jamais le secret bien gardé Deviens à jamais complice Pour l'âge d'un Monde nouveau Dans l'affrontement rends-moi gagnant Éteins les troubles de la  pensée Fais-moi faire un pas Brise les chaînes qui m'assaillent Détruit l‘écran de ma solitude Traverse le miroir à deux cotés Scie les barreaux de la maladie Fais fondre mes peurs de glace Que mon cœur se porte bien Assure-moi d'aucun danger Prends-moi en douceur sans arrière pensée Éloigne-moi de l'exploitation Ne me soumets pas à la domination Retire-moi de l'agitation Élimine les tensions qui me tiraillent Pardonne la parole en trop Aussi l'action sans permission Que par magie mes rideaux s'ouvrent Que la vie en plein jour soit Décroche le fil de mon ennui À la pleine lune calme-moi Sois avec moi en pensée Rends-moi sourd à la critique Aveugle à la douleur Et muet à l'ignorance Donc éloigne-moi de l'indifférence Et fais-moi profiter d'une vie bien remplie P.S. : Et pose-toi la question

BENOÎT CHARTIER Camelot YVES G. Commis à la distribution

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UN AN APRÈS L'ADOPTION DE LA POLITIQUE EN ITINÉRANCE :

Trop peu de moyens et de volonté À la fin février 2014, le gouvernement du Québec se dotait enfin d'une politique nationale de lutte contre l'itinérance. Résultats de huit ans de lutte par le Réseau SOLIDARITÉ itinérance du Québec (RSIQ) et d'une année d'intenses travaux pilotés par la ministre Véronique Hivon, cette politique fut très bien accueillie. Un an plus tard, le gouvernement a trop peu fait pour permettre de la déployer. Le tir doit être corrigé.

INFO RAPSIM

PIERRE GAUDREAU | Coordonnateur du RAPSIM

Une politique forte

La politique proposée par le gouvernement nommait des principes forts, permettant d'identifier les actions nécessaires à mettre en place afin de réduire et prévenir l'itinérance, identifiée comme un déni de droits. Les axes d'interventions et les orientations couvraient d'ailleurs plusieurs champs d'actions : le logement, les services de santé et services sociaux, le revenu, l'éducation et l'insertion sociale, la cohabitation et la judiciarisation.

Des actions à contre-courant

Une politique gouvernementale vit et demeure, au-delà des changements de gouvernements, en témoignent celles concernant la violence conjugale ou celle relative à la lutte contre l'homophobie. Il demeure que l'arrivée au pouvoir des Libéraux en avril 2014 a amené bien des questions sur le plan d'action interministériel qui serait adopté pour mettre en œuvre un plan d'action pour lutter contre l'itinérance. Le premier test fut le nouveau budget 2014-2015 déposé par le gouvernement libéral. Bien des actions identifiées dans ce projet n'y trouvent pas de moyens, voire pire, notamment avec les coupes dans plusieurs ministères qui ont de nombreux impacts: moins de nouveaux logements sociaux, baisse du budget de l'emploi et de la solidarité sociale (avec les coupures annoncées depuis), abandon de l'engagement du gouvernement Marois de hausser substantiellement le financement des organismes communautaires, etc. Parmi les autres mesures adoptées par le gouvernement, la réorganisation du réseau de la santé en est une

autre qui soit négative. Au moment d'écrire ces lignes, malgré les dires du ministre Barrette, tout n'est pas clair. Ainsi la lutte à l'itinérance qui était pilotée par l'agence de la santé et des services sociaux, se retrouvent orpheline, dans les limbes, entre une direction régionale du ministère à créer et un CIUSSS Centre-Sud1 à organiser. Finalement, comme autre action contre-productive, il faut souligner le fait que le gouvernement du Québec a accepté la réorientation de l'aide fédérale à la lutte à l'itinérance où les budgets sont canalisés vers le Housing first, une aide en logement passant par le marché privé, sans pérennité, qui délaisse toute action de prévention. En signant une telle entente avec Ottawa, Québec a fait fi de sa politique visant à réduire et prévenir le phénomène.

Un peu de baume ? Plus encore !

À la mi–décembre, la ministre Lucie Charlebois annonçait enfin l'adoption d'un Plan d'action interministériel en itinérance. Certes celui-ci respecte la vision de la Politique et identifie des actions pertinentes, mais avec des moyens insuffisants. Outre les logements sociaux, la ministre annonçait alors 6 millions $ d'investissements pertinents pour soutenir divers programmes, actions en santé, justice et hébergement. Il y a un an, les journalistes se demandaient si la politique adoptée permettrait d'endiguer l'accroissement incessant de l'itinérance. Oui, mais certainement pas avec les moyens adoptés jusqu'à présent. Il n'est pas trop tard pour bien faire, pour cela il faudrait que le gouvernement repousse dans son prochain budget, non pas la lutte à l'itinérance, mais l'atteinte de l'équilibre budgétaire. 1

Centre intégré universitaire de santé et services sociaux Centre-Sud, qui fusionne de nombreux organismes dont deux CSSS, le Centre Dollard-Cormier, les Centres jeunesse et qui aura près de 10 000 employés...

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HORS PISTE

Le sport pour sortir nos jeunes de la rue Pour sortir les jeunes de la rue, nous devons agir rapidement. Plus nous nous en occupons, plus ils auront la chance d'être sur la bonne voie. L'une des façons d'aider les jeunes est selon moi de favoriser la pratique d'activités sportives. Qu'ils soient dans la rue ou non, les jeunes ne pratiquent pas assez d'activités physiques. Ils passent beaucoup de temps devant les ordinateurs et jouent trop souvent aux jeux vidéo. Pourtant, on connaît les bénéfices du sport pour la santé physique, psychologique et mentale. JEAN-PIERRE MÉNARD | Camelot, métro de l'Église et angle St-André/St-Zotique

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ertains diront que le sport, ça coûte cher. Ce n'est pas vrai! Aller jouer dans la ruelle, comme nous le faisions dans le temps, ça ne coûte pas un sou. Une «cacane», un bâton et un drapeau, voilà tout ce qu'il nous fallait pour nous amuser tout en dépensant de l'énergie. Le sport m'a permis de demeurer hors de la rue durant mon enfance et mon adolescence. De 7 à 17 ans, j'ai pratiqué la lutte olympique; je suis même devenu champion provincial et canadien. Non seulement ce sport me gardait en forme physique, mais il donnait également un sens à ma vie et me gardait motivé. Le sport a continué de me garder sur la bonne voie. À l'âge adulte, c'est encore une fois grâce au sport que j'ai réussi à m'en sortir. En 1996, je suis devenu directeur du marketing pour les Roadrunners de Montréal, une équipe professionnelle de roller-hockey qui évoluait au Forum de Montréal. J'y ai développé une passion pour ce nouveau sport. Quelques années plus tard, j'ai démarré une association de roller-hockey à Verdun, qui permettait à des jeunes adeptes de pratiquer ce sport. J'ai également effectué des démarches afin que les pratiques de roller-hockey ne tombent pas la même journée qu'une pratique d'un autre sport. Cela a favorisé la pratique du sport chez les jeunes : ils n'ont pas eu à choisir entre deux sports qu'ils aimaient. Je croyais déjà dur comme fer – parce que je l'avais moi-même vécu – que cela allait garder ces enfants et adolescents hors de la rue, que cela allait les mettre sur la bonne voie. Pour favoriser l'accès au sport, j'ai établi un système basé sur l'amélioration des résultats scolaires plutôt que sur l'excellence à l'école. Dès qu'un jeune améliorait ses résultats scolaires, il pouvait participer aux activités de roller-hockey. De cette façon, la pratique du roller-hockey favorisait la réussite à l'école! Pour cer-

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tains jeunes, j'étais comme un père. Ils avaient grandement confiance en moi. Je les traitais comme des adultes, avec sérieux et respect. Un jour, un jeune de 13 ans est venu me porter son 25$ de frais d'inscription en pièces d'un sou qu'il avait ramassées une à une. Quelle détermination! Plus tard, après avoir passé plus de six mois dans la rue, j'ai réalisé pleinement l'importance que le sport avait eue dans ma jeunesse et qu'il pourrait encore avoir dans ma vie. C'est ainsi que j'ai décidé de fonder une ligue de roller-hockey pour adultes au niveau provincial (RHQ). Une fois que cette ligue sera établie, je compte créer une association pour les jeunes de 7 à 17 ans, basé sur le modèle des ligues de hockey mineur. De cette façon, les jeunes auront comme mentors les joueurs de la RHQ. En se préoccupant des jeunes, en leur faisant pratiquer une activité physique, nous les sortons de la rue. Plusieurs multinationales font des dons d'argent ou d'équipements sportifs selon les besoins ciblés. Des moyens existent pour inciter les jeunes à faire du sport. Suffit simplement de notre volonté pour contribuer à leur santé et à leur bien-être.


CARREFOUR Félicitations Nancy!

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e 2 février dernier, Nancy Trépanier, participante de L'Itinéraire au programme d'aide et d'accompagnement social (PAAS), a été embauchée à titre d'adjointe administrative. Pour souligner le merveilleux chemin parcouru par Nancy, voici un témoignage de Duffay Romano, chef des opérations et des ressources humaines à L'Itinéraire : «J'ai connu Nancy il y a presque trois ans déjà. Elle faisait partie de l'équipe des participants du café de L'Itinéraire, dans le cadre du programme d'insertion sociale (PAAS). J'ai tout de suite été étonnée par sa détermination à bien faire les choses, son charisme et son engagement pour la cause. Mais ce qui la qualifie d'abord et avant tout, c'est qu'elle ne peut rester indifférente face aux injustices sociales. Nancy est convaincue que, jour après jour, avec de petits détails, elle peut embellir la vie de celles et ceux qui l'entourent. Nancy s'inquiète énormément pour les gens. Malgré les situations auxquelles elle a dû faire face, elle espère pouvoir contribuer à ce que tout le monde ait une vie plus équitable. Depuis le 2 février, Nancy fait partie de mon équipe, et

j'en suis honorée. Je sais que j'ai à mes côtés un atout précieux qui fera avancer L'Itinéraire. L'histoire de Nancy démontre que notre travail porte fruits. Elle nous prouve que nous devons poursuivre nos efforts afin de contribuer à une meilleure qualité de vie pour les personnes qui, pour quelques raisons que ce soit, ont vécu des situations difficiles, mais qui ont le désir de s'en sortir.»

L'Itinéraire mobilisé pour la semaine internationale des camelots!

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De droite à gauche : France, Nicole, Daniel, Patricia, Pierre, Yvon, Sylvio, Cindy, Jean-Marc, Marie-Andrée, Marianne, Gaétan et Geneviève. Devant : Franck Lambert

ous avez vu plusieurs personnes lire le magazine L'Itinéraire? Vous avez vu plusieurs personnes portant un dossard L'Itinéraire sur certains quais de métro? Eh bien vous n'avez pas rêvé! Durant la semaine du 2 au 8 février, les camelots à travers le monde avaient leur semaine bien à eux, la semaine internationale des camelots. Plusieurs actions de visibilité ont donc été organisées par L'Itinéraire pour marquer cette semaine importante. Voici quelques témoignages de camelots qui y ont participé: Jacques Élyzé, camelot au Théâtre du Rideau Vert « Nous étions nombreux avec le magazine, cela à eu un impact sur les gens. Ils avaient des sourires qui voulaient tout dire. » Gaétan Prince, camelot métro Bonaventure /Promenade Masson « C'était très bon pour la visibilité du magazine. Des affiches, c'est beau, mais ce genre d'activité crée des réactions plus concrètes qui resteront gravées dans la mémoire des passants. »

PHOTO : MARIO ALBERTO REYES ZAMORA

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Polyglotte PIERRE SAINT-AMOUR

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es achats, nous les faisions surtout chez Dupuis Frères, magasin à rayons desservant l'est de la ville, moins chic peut-être, mais plus adapté à notre condition. En arpentant le territoire de l'île avec ma grand-mère, j'avais observé - je dirais : au fil du temps - que les points cardinaux exerçaient une influence indiscutable sur la conduite de nos vies. Ainsi, le Nord et le Sud, porteurs d'un univers mythique présent dans mes rêves d'enfant, représentaient bien plus que la direction indiquée par l'Étoile Polaire ou la Croix du Sud : c'étaient des mondes parallèles autonomes qui existaient en dehors de moi, inaccessibles, invisibles, qui m'avaient été révélés par la lecture de bandes dessinées ou de romans d'aventures : Nord évocation imaginaire d'une contrée blanche et glaciale où vivaient des gens qui chassaient la baleine au harpon, vêtus de parkas confectionnées en peau de phoque et qui habitaient dans des maisons construites en blocs de neige compactée : Sud - domaine infini de la forêt équatoriale, luxuriante, impénétrable, étouffante, où un homme, drapé d'un caleçon en léopard, se déplaçait de liane en liane sur des distances considérables pour faire régner la justice. Chaque tempête de neige me servait de prétexte pour que j'aille investir la cour arrière, armé de mon javelot (je n'avais pas de harpon), pourchassant opiniâtrement le narval ou l'ours polaire : chaque épisode de canicule réveillait en moi le besoin de combattre le lion à mains nues et de pousser mon fameux cri d'hommesinge, qui rendait ma mère si nerveuse. Si le Nord et le Sud étaient synonymes de froid et de chaleur, d'exotisme et d'éloignement, l'Est et l'Ouest recouvraient, en revanche, une réalité plus concrète et plus immédiate. L'Est, c'était le lieu où nous vivions, mes parents, mes grandsparents, ma soeur et moi, les autres aussi, des gens ordinaires, pauvres et catholiques, qui parlaient le français. L'Est, c'était pour moi «la ville aux mille clochers», la ville des familles nombreuses, des familles ouvrières, à une époque où le clergé exerçait sur ses ouailles une emprise absolue. L'Est, c'était le fief de Duplessis,

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qui réprimait par la force les associations citoyennes. Duplessis, qui avait fait adopter «la loi du cadenas» et qui avait, en deux mots, résumé à Antoine Rivard, alors ministre des Transports, sa conception toute personnelle de la démocratie  : «Toé, tais-toé !» Duplessis, qui vendait nos richesses naturelles aux Américains à une cenne la tonne. L'Est, tel que je le concevais, allait devenir en 1960, avec l'élection du Parti libéral, le ferment de la révolution tranquille, qui couvait déjà depuis plusieurs années. L'Ouest, à l'opposé, c'était l'inaccessible. C'était le monde de l'argent et de la haute finance. C'était l'Anglais. Ces deux microcosmes - homogènes, dissociés, hermétiques -, je les avais assimilés depuis ma naissance. Inconsciemment, je connaissais les règles qui les régissaient et je savais qu'une barrière infranchissable séparait nos deux communautés : celle de la langue. Depuis deux siècles, par une espèce de fatalité historique qui s'était abattue sur lui le jour de la défaite des plaines d'Abraham, le Canadien français était devenu un citoyen de seconde zone. Et l'Anglais, qui possédait tout, dictait ses lois. Du temps de mon enfance exquise, tous ceux et celles qui vivaient à l'Est partageaient la même croyance  : nous étions, tous et toutes, nés pour un petit pain. *** Bien que, de nos jours, l'Anglais ait cessé d'incarner le rôle de l'oppresseur et que la société se soit transformée radicalement, les inégalités n'ont pas pour autant disparu. Il y a


CONTE

- comme il y avait - des riches et des pauvres. Mais aujourd'hui, c'est différent. Contrairement à la situation qui prévalait au début du XXe siècle, un pauvre, au XXIe siècle, est soit un étudiant en sciences sociales à l'Université du Québec, soit un employé travaillant au salaire minimum, soit une personne vivant de l'aide sociale, soit rien de tout cela. Cela dépend. La pauvreté d'aujourd'hui est protéiforme et pluriethnique. Avant, c'était plus simple : le Québécois francophone (le Canadien français, si l'on préfère) était ouvrier, bûcheron ou paysan. À peu de chose près. Ce que je retiens surtout de ces deux époques que j'ai chevauchées, l'une plus que l'autre, c'est que certaines valeurs de mes grandsparents, héritées de leurs aïeux, ont résisté à la marche du temps pour se retrouver presque inaltérées dans le discours des camelots. Ainsi, par exemple, mon grand-père n'était pas réfractaire à l'idée d'adhérer à un syndicat pour améliorer sa condition sociale; cependant, il ne croyait tout simplement pas qu'il était en mesure de modifier son destin. Les choses étant ce qu'elles étaient, il lui apparaissait absurde et vain de prétendre qu'il pouvait les changer. Ma grandmère aussi abondait dans ce sens, malgré son tempérament frondeur, naturellement porté à la dissidence. Je me souviens qu'elle me racontait parfois, reprenant à son compte le récit que lui en avait fait sa propre grand-mère, l'histoire tragique de «la guerre des bâtons», c'est-à-dire la révolte des Patriotes de 1837. Portés par la voix de «ce bon monsieur Papineau», une poignée d'hommes et de femmes, armés de fourches et de quelques fusils de chasse, avaient

défié la couronne britannique pour défendre un idéal de justice au mépris de leur vie. Pour mes grands-parents, ce sacrifice avait été inutile, car en définitive rien n'avait changé. Les Anglais étaient plus forts que nous, c'était comme ça, et il fallait l'accepter. *** Pendant que j'avale en vitesse mon petitdéjeuner au Café L'Itinéraire, j'observe attentivement les gens. Il y a Lorraine, intelligente, affable, qui discute avec Raoul ; Desjardins, accoudé au comptoir, qui fait la baboune parce qu'on tarde à lui servir son premier café ; j'entends la voix d'Anne-Marie, percutante et autoritaire, qui menace d'intenter un procès à tous ceux qui se dresseront sur sa route ; derrière moi à la distribution, celle de Joseph, provocateur et rusé comme un renard, qui tente d'enjôler Geneviève pour obtenir une faveur quelconque ; debout près de l'entrée, Sly, fripé, rit à gorge déployée même si ce n'est pas drôle ; j'aperçois Claudine, assise à une table, en train de raconter à Réjeanne l'histoire du chat qu'elle a peinturé en rouge ; et Tuan, enfin, qui prouve à lui seul l'existence des extraterrestres. Il y a Yvon aussi. Et Serge Dumont. Et Richard Touzin. Et JeanGuy. Ils sont tous là, enfin presque tous, animés et vivants, superbes et grandioses, floués, résilients, pathétiques. Ces camelots, que j'aime tant, ne sont pas que les acteurs passionnés de leur histoire personnelle : ils sont l'Histoire. En 1837, des gens comme eux ont pris les armes pour combattre l'armée anglaise. Des gens simples, emplis d'humanité, qui désespéraient de s'en sortir. Des gens qui croyaient qu'ils étaient nés pour un petit pain. Dans cent ou deux cents ans, un historien, au crépuscule de sa vie, se remémorant le passé, notera peut-être, dans son calepin électronique : «C'est à L'Itinéraire que tout a commencé.» Pour relire la première partie de ce texte, se référer au magazine du 15 février.

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Dignité Pauvreté

Plus de six millions de personnes à travers le monde votent pour la dignité en achetant un journal de rue. En agissant ainsi, ils participent à changer la vie de 27000 camelots dans 40 pays, représentant plus de 120 journaux de rue différents. En retour, les lecteurs profitent d’un journalisme indépendant de qualité, tout en sachant qu’ils ont fait une différence.

Votez pour la dignité.


PANORAMA

PHOTO : CALARTS

PAR NAFI ALIBERT

L'ambiance survoltée du MNM 2015

Décloisonner l'art!

Pour plus d'information : festivalmnm.ca

PHOTO : PALMEN DESIREE

PHOTO : FRONT 404

Si tu ne viens pas au musée, c'est le musée qui ira à toi! Telle pourrait être la devise d'ART SOUTERRAIN. Pour la 7ème année consécutive, ce festival d'art contemporain vous invite à venir profiter gratuitement des quelques 75 œuvres qui seront exposées, du 2 au 15 mars, dans certains édifices et dans les dédales des galeries souterraines de la métropole. Pour ne pas vous y perdre, laissez-vous guider par l'audio-guide téléchargeable sur le site Web du festival : artsouterrain.com.

Il reste encore une semaine pour profiter du festival international Montréal/Nouvelles musiques qui articule cette année sa programmation autour de l'environnement et des nouvelles technologies. Le compositeur et guitariste Tim Brady a profité de l'occasion pour célébrer, à sa manière, le centième anniversaire de Les Paul, l'inventeur de la guitare électrique. Samedi 7 mars, à 15 heures tapantes, les cordes de 100 guitaristes s'entrechoqueront le temps de cet hommage qui fera vibrer les planchers du Complexe Desjardins. En plus de ce concert gratuit, de nombreuses autres activités sont proposées aux festivaliers, qui pourront bénéficier de réduction sur les spectacles payants en s'y rendant en transport en commun, en vélo, ou en apportant des fruits bio à la billetterie.

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Série sur l'Histoire de la pauvreté au Québec

CLIN D'ŒIL DU PASSÉ

La pauvreté est une réalité qui ne date pas d'hier, et les ressources pour la combattre non plus. À travers une série de dix textes, L'Itinéraire dresse un portrait historique de l'aide offerte aux personnes vulnérables et en situation d'itinérance au Québec depuis la colonisation.

Émilie Gamelin, l'ange des pauvres Aujourd'hui, le nom d'Émilie Gamelin fait automatiquement penser à une place publique souvent utilisée comme lieu de rassemblement politique, aussi connue pour sa faune diversifiée et ses nuits agitées. Celle qui a vu son nom donné à ce lieu central montréalais a une histoire aussi fascinante qu'inspirante pour quiconque lutte contre la pauvreté. Émilie Tavernier-Gamelin a mené un combat quotidien pour soutenir les plus démunis, les malades, les personnes handicapées et les prisonniers politiques. Ne croyant pas à la notion de classes sociales, elle a côtoyé tous les milieux, créant ainsi un modèle d'entraide unique. PAR MARTINE B. CÔTÉ

É

milie Tavernier est née à Montréal le 19 février 1800. Ses parents, comme la plupart des Canadiens-français du temps, vivent dans une précarité et dans le deuil quasi perpétuel : la mère d'Émilie accouchera de 15 enfants, dont neuf mourront en bas âge. Émilie n'a que quatre ans quand sa mère meurt. Très tôt, la petite fille montre un dévouement peu commun envers les plus démunis, elle qui ne vivait qu'avec quelques sous. À l'âge de 23 ans, Émilie Tavernier épouse Jean-Baptiste Gamelin, un bourgeois de 50 ans dont la récente fortune lui permet de redistribuer sans souci. Le deuil semble toutefois imprimer la vie d'Émilie Gamelin : elle perd coup sur coup ses deux premiers enfants, le premier âgé de trois mois, le second de moins de quatre mois. Après seulement quatre années de vie commune, Jean-Baptiste Gamelin meurt à son tour. Quelques mois plus tard, Madame Gamelin, en deuil de son mari, perd son troisième enfant, un bébé de 21 mois. Désormais, son quotidien sera consacré à l'entraide. L'énergie déployée à aider les plus vulnérables est à la hauteur des multiples chagrins de cette courageuse femme. Toute sa vie, Émilie Gamelin s'occupa de trouver des maisons, parfois des recoins d'écoles ou de maisons privées pour y installer les personnes démunies qu'elle rencontre. La première maison qu'elle transforme en refuge voit le jour en 1830 et loge jusqu'à 20 femmes pauvres et malades, dont l'une âgée de 102 ans. À Montréal, en ces temps-là, on parlait de Madame Gamelin et de « ses vieilles ». Chaque jour, elle doit trouver des provisions et de l'argent pour fournir soins et nourriture aux femmes qu'elle héberge. Elle organise des bazars, sollicite les dons et récolte les denrées de porte en porte. En 1836, elle sensibilise un riche homme d'affaires qui lui donne finalement une maison appelée la Maison Jaune. C'est ainsi que d'années en années, elle obtient des résidences pour les pauvres et les

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malades, de plus en plus nombreux vu la situation économique extrêmement difficile et l'épidémie de choléra qui fait des ravages. L'année 1837 marque le début d'un climat politique tendu et les incarcérations arbitraires d'hommes engagés dans la Rébellion des Patriotes. Émilie Gamelin est très sensible à la situation de ces prisonniers politiques et leur rend visite presque quotidiennement. Elle apporte aux prisonniers du Pied-du-Courant des lettres de leur famille, de la nourriture et réussit même à faire entrer la fille de 13 ans d'un détenu, à qui on avait interdit toute visite. En 1841, Monseigneur Bourget, alors évêque de Montréal, décide de donner aux bonnes œuvres d'Émilie Gamelin une structure religieuse qui prévaudra désormais sur la structure civile. À partir de ce jour, le travail de madame Gamelin relève de la juridiction de l'évêque. Il était pratique courante pour le clergé de prendre en charge l'administration d'œuvres laïques dans un but, disait-il « d'assurer leur permanence chrétienne». On suppose qu'elle décida de prononcer ses vœux en 1844 à la suite de ce changement de garde. En étant nommée Mère Supérieure, elle garda ainsi un certain rôle dans l'administration de ses Maisons, mais se buta tout de même souvent à des tentatives de limiter ses actions Elle meurt du choléra à l'âge de 51 ans, laissant dans le deuil nombre de personnes vulnérables et de comparses dans sa lutte à la pauvreté. Au final, Emilie Gamelin aura mis sur pied neuf maisons et multiplié les initiatives d'entraide, un travail qui a inspiré la création d'œuvres similaires à Longueuil, Laprairie et à Saint-Hyacinthe.


CHARLES-ÉRIC LAVERY, GOPESA PAQUETTE ET LOUIS-PHILIPPE POULIOT

LIVRES

Leur géographie Une région fantasmée plus que réellement connue par les Québécois, la Caraïbe est le creuset d'une forte tradition littéraire et intellectuelle dans laquelle s'inscrit cette géographie humaine et populaire. En écho à L'histoire populaire des États-Unis, de l'historien Howard Zinn, l'auteur dresse un portrait alternatif de la région, autre que celui imposé par les intellectuels de l'Europe et de l'Amérique du Nord. Ce qui frappe avant tout est l'étonnante diversité de la Caraïbe qui s'est largement définie par l'histoire de l'esclavage et de l'occupation coloniale. À lire pour le savant mélange d'érudition et de connaissance de terrain d'un auteur qui sait combiner statistiques sur les ouragans et vignettes pleines de tôle crissant et de trombes de pluie. (GP)

Une géographie populaire de la Caraïbe Romain Cruse. Mémoire d'encrier, 592 pages.

Un Romain Gary pakistanais C'est l'histoire rocambolesque d'un petit entrepreneur pakistanais qui tente de survivre dans un monde asiatique en profonde transformation où règnent le capitalisme et la mondialisation sauvages. Romanéclair, où quelques heures de lecture suffisent pour survoler huit décennies d'existence, il est rédigé comme un faux livre de croissance personnelle. Le récit est raconté à la deuxième personne du singulier, et chaque chapitre porte le nom d'une pseudo-tactique afin de s'en mettre plein les poches, tel «monter à la ville», «faire des études» et «travailler pour soi-même». Décapant, déstabilisant, mais surtout plein d'humour et de tendresse (une fin tout en douceur). Un autre bijou de l'auteur de L'intégriste malgré lui. (CEL)

Suivre le sombre sentier Il paraît évident à la lecture de cet ouvrage que l'auteur avait, dès le début, l'intention de créer une œuvre magistrale, ce devait être son Seigneur des Anneaux. On s'aperçoit aussi très vite qu'il ne sait pas vraiment où il s'en va, mais qu'il se laisse porter par sa plume. C'est ce qui fait le charme de cet ouvrage : c'est une improvisation littéraire. Ce sentiment si rare lorsqu'on lit un livre où l'on n'a absolument aucune idée de ce qui va se passer, et pour cause, parce que l'auteur lui-même n'en savait pas plus au moment d'écrire… Un seul mot pour le décrire : génial. (LPP)

La Tour sombre

Stephen King. J'ai lu, 2741 pages.

Comment s'en mettre plein les poches en Asie mutante

AN

DS CLA

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Mohsin Hamid, Grasset, 243 pages.

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mêlées de caramelennuyées mondain

guide

cténaire

pauvre

ivres champignon

olivettes laboure couvent

cigarillo

LE JOSÉE FLÉCHÉ

enzymes parfait

agaces

rioté

« Je m'appelle Josée, je travaille à la distribution et voici mon petit fléché »

éternel divise

ornées

mères tuée

tête pronom relatif aréomètre

à qui mieux mieux: à l’...

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SOLUTION DU 15 FÉVRIER Réponses du 15 février 2015 Réponses du cténaire 1 MARS 2015 guide enzymes pauvre mondain

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P largeurs

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Solution dans le prochain numéro

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T O M A T E S

L A M A S E R I G E L A A S

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outilla

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P I N A R D I F I E N S A A E L S E L R I B A R M A N A I S S N I E R E E S I E Z

ivres laboure

parfait champignon

cigarillo

agaces

rioté

tuée

relatif à Isis

arachnide

article étranger

rôda à qui mieux mieux: à l’...

égal

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finies

relevé lois baies

lettre

technétium

propre

nombre conjonction rigolé

monnaie

célèbre

JOSÉE CARDINAL | Distributrice


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HORIZONTALEMENT 1. Araignées. 2. Image religieuse. - Rongeur d'Amérique du Sud. 3. Poème. - À nous. - Nota bene. 4. Iridium. - Tutélaires. 5. Remorque. - Qu'il souhaitât. 6. Qui ne produit pas de fruits. - Cale. 7. Cérémonies. - Pareilles. 8. Poisson. - Âge. 9. Adeptes de la doctrine selon laquelle les connaissances proviennent des sensations. 10. Opposée à hivernale. - Médicament. VERTICALEMENT 1. Pourvoit d'une force guerrière 2. Pesticides. 3. Règle. - Manquent. 4. Manganèse. - Papa. - Note. 5. Victoire de Napoléon. - Post scriptum. - Ultraviolets. 6. Enlevée. - Coulée de lave. 7. Nez. - Colline artificielle. 8. Argent. - Révérend Père. - Grand Lac. 9. Pavillons couverts de verdure. 10. Garnir de tubes. - À toi. 11. Puis. - Nettoierez. 12. Sommes. - Saint.

HORIZONTALEMENT 1. Se dit de cellules embryonnaires non différenciées, aptes à former des tissus divers. 2. Versants exposés au nord. -­‐ Aluminiums. 3. Avant Jésus-­‐Christ. -­‐ Astate. -­‐ Route rurale. 4. Cultes aux images saintes. 5. Certitude. -­‐ Brillé. 6. Iridium. Tamisa. -­‐ Orient. 7. Bouclier. -­‐ Accumula. 8. Lieux d'où l'on extrait les nitrates. -­‐ Deux. 9. Issu. -­‐ Pilote. 10. Levant. -­‐ À lui. -­‐ Sélénium. VERTICALEMENT 1. Maghrébine. 2. Assombries. 3. À toi. -­‐ Métal. -­‐ Do. 4.Peintures religieuses. -­‐ Dieu solaire. Solution dans le prochain numéro 5. Post-­‐scriptum. -­‐ Phoques. 6. Bières. -­‐ Âge. 7. Palpa. -­‐ Période de 6585 jours. Article étranger. -­‐ Fils qCardinal ui servent à| fjoseecardinala1@yahoo.ca ormer les duites. Jeu8. réalisé par Josée 9. Gêner. -­‐ Vin. 10. Travailleur social. -­‐ Atolls. 11. Abouties. NIVEAU DE DIFFICULTÉ: DIFFICILE Solutions dud15 12. Qui bénéficie d'un élai.février 2015

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HORIZONTALEMENT 1. Araignées. 3 2. Image religieuse. -­‐ Rongeur d'Amérique du Sud. 7 3. 1 Poème. -­‐ À nous. -­‐ Nota bene. Placez un chiffre de 1 à 9 4. I2ridium. -­‐ Tutélaires. 1 9 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 dans chaque case vide. 2 Chaque ligne, chaque 1 T O T I P O T E N T E S 5. Remorque. -­‐ AQu'il souhaitât. colonne et chaque boîte 2 U B A C S L U S U 3x3 délimitée par un trait 5 1 8 4 6 3 N S O A T I R R plus épais doivent contenir 6. Q ui n e p roduit p as d e f ruits. -­‐ C ale. tous les chiffres de 1 à 9. 4 I C O N O L A T R I E S Chaque chiffre apparaît 25 7. 1 S U R E T E R E L U I donc une seule fois dans C érémonies. -­‐ P areilles. 6 I R S A S S A E S T une ligne, dans une colonne et dans une boîte 3x3. 7 E C U R A M A S S A 4 2 8. P oisson. -­‐ Â ge. 8 N I T R I E R E S I I 9 9. N A E deptes A E de R la O doctrine S T I Eselon R NOTRE LOGICIEL laquelle les proviennent 4connaissances 3 DE SUDOKUS EST 10 E S T S E S I S E MAINTENANT des sensations. DISPONIBLE. 5 9 3 4 1 3 8 4 6 2 7 1 5 9 10 000 sudokus inédits de 4 niveaux par notre expert, 10. 5Opposée à h1ivernale. 2 9 8 4 3 7 6 -­‐ Médicament. 3 8 1 5 Fabien Savary. En vente exclusivement sur 6 1 7 5 9 3 4 8 2 VERTICALEMENT notre site. 7 6 5 3 1 8 9 2 4 6 2 8 www.les-mordus.com 9 1 7d'une 5 2 f8orce 6 3guerrière 1. P4ourvoit 2 3 8 4 6 9 7 1 5 9 6 2. P8esticides. 5 2 1 3 4 6 9 7 Solution dans le prochain numéro 7 3 2 8 6 5 4 1 3. R91ègle. -­‐ M anquent. 4 6 9 7 5 2 3 8 Jeu réalisé par Ludipresse | info@les-mordus.com 4. Manganèse. -­‐ Papa. -­‐ Note. 5. Victoire de Napoléon. -­‐ Post scriptum. -­‐ Ultraviolets. 4 3 9 6 5 1 2 8 5 1 2 8 9 4 3 6 1 mars 2015 | ITINERAIRE.CA 45 6. Enlevée. -­‐ Coulée de lave. 6 8 2 1 3 9 5 4 9 1 4 2 5 8 3 6 7. Nez. -­‐ Colline artificielle. 6 4 3 8 1 2 9 5 er


A PROPOS DE...

REPOS De temps en temps, il faut se reposer de ne rien faire.

Je fais le plus de choses que je peux par amour pour me reposer d'en faire tant par nécessité.

JEAN COCTEAU

MARIE NOËL

Ainsi s'écoule toute la vie. On cherche le repos en combattant quelques obstacles ; et si on les a surmontés, le repos devient insupportable. BLAISE PASCAL

Le repos est un rêve ; la vie est un orage.

Rien n'assure mieux le repos du cœur que le travail de l'esprit.

GEORGE SAND

DUC DE LÉVIS

Nous avons toute la vie pour nous amuser et toute la mort pour nous reposer.

Quand on ne travaillera plus les lendemains des jours de repos, la fatigue sera vaincue. ALPHONSE ALLAIS

Prenez un peu de repos, afin de finir plus vite.

Nous devons utiliser le temps comme outil et non comme repose-pied.

C'est pour parvenir au repos que chacun travaille : c'est encore la paresse qui rend laborieux. JEAN-JACQUES ROUSSEAU

JOHN FITZGERALD KENNEDY

Tout le monde s'agite pour trouver enfin le repos : mais il y a des hommes si paresseux qu'ils mettent le but au début. RIVAROL

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PHOTO : 123RF.COM/EVGENY KOSHARSKY

GEORGE HERBERT

GEORGES MOUSTAKI



Chez Tim Hortons, si nous ne pouvons servir notre café de première qualité dans les vingt minutes suivant sa préparation, nous ne le servons tout simplement pas. C’est pour cette raison qu’à chaque nouvelle carafe que nous préparons, nous y inscrivons l’heure. De cette façon, vous êtes assurés que nous vous servons un café toujours savoureux.


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