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Volume XXII, n˚ 11 Montréal, 1er juin 2015

www.itineraire.ca

Les œuvres de 3 poètes de L’Itinéraire mis en musique par 3 artistes Bénévolat extrême Zoom : Michel Marcil


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Michel Marcil Camelot No : 1171 | Âge : 63 ans Point de vente : angle Sainte-Catherine/Berri et Métro Verdun

L'

hôpital a rendu Michel malade. Ses 15 ans passés comme préposé aux bénéficiaires dans un CHSLD le conduisent au burnout. « Un jour, mon patron m'a demandé d'attacher la patiente sur la toilette pour que je puisse aller faire son lit et gagner du temps. C'est la goutte qui a fait déborder le vase», explique celui qui n'a jamais approuvé les nouvelles politiques du ministère de la Santé pour optimiser le rendement. Michel remet sa démission et passe deux ans à «végéter», comme il dit, jusqu'à ce que son médecin lui propose de faire du bénévolat. Il s'implique alors dans plusieurs organismes communautaires, dont la Société Saint-Vincentde-Paul. En 2001, il reçoit même la médaille d'honneur de l'Assemblée nationale pour l'année internationale des bénévoles. «J'ai toujours aimé aider les autres. J'accumule des points de mérite pour en Haut!» Pendant plusieurs années, Michel essaye de retourner sur le marché du travail, mais son âge l'empêche de trouver un emploi à temps plein. Concierge à temps partiel, il est incapable de joindre les deux bouts et finit par atterrir à L'Itinéraire, il y a trois ans. «Ça m'a sorti de l'isolement et me permet de combler le manque à gagner. Je mange tous les jours, c'est tout ce que je demande.» Le sourire aux lèvres et le cœur sur la main, Michel attend patiemment son 65e anniversaire pour pouvoir prendre sa retraite et toucher son fonds de pension. D'ici là, il espère simplement garder la santé et continuer d'avancer, un «point de mérite» à la fois. PAR JULIE LEVASSEUR

1er juin 2015 | ITINERAIRE.CA

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NOS PARTENAIRES ESSENTIELS DE LUTTE CONTRE LA PAUVRETÉ

Le Groupe L'Itinéraire a pour mission de réaliser des projets d'économie sociale et des programmes d'insertion socioprofessionnelle, destinés au mieux-être des personnes vulnérables, soit des hommes et des femmes, jeunes ou âgés, à faible revenu et sans emploi, vivant notamment en situation d'itinérance, d'isolement social, de maladie mentale ou de dépendance. L'organisme propose des services de soutien communautaire et un milieu de vie à quelque 200 personnes afin de favoriser le développement social et l'autonomie fonctionnelle des personnes qui participent à ses programmes. Sans nos partenaires principaux qui contribuent de façon importante à la mission ou nos partenaires de réalisation engagés dans nos programmes, nous ne pourrions aider autant de personnes. L'Itinéraire c'est aussi plus de 2000 donateurs individuels et corporatifs qui aident nos camelots à s'en sortir. Merci à tous ! La direction de L'Itinéraire tient à rappeler qu'elle n'est pas responsable des gestes des vendeurs dans la rue. Si ces derniers vous proposent tout autre produit que le journal ou sollicitent des dons, ils ne le font pas pour L'Itinéraire. Si vous avez des commentaires sur les propos tenus par les vendeurs ou sur leur comportement, communiquez sans hésiter avec Shawn Bourdages, chef du développement social par courriel à shawn.bourdages@itineraire.ca ou par téléphone au 514 597-0238 poste 222.

PARTENAIRES MAJEURS

Nous reconnaissons l'appui financier du gouvernement du Canada par l'entremise du Fonds du Canada pour les périodiques, qui relève de Patrimoine canadien. Les opinions exprimées dans cette publication (ou sur ce site Web) ne reflètent pas forcément celles du ministère du Patrimoine canadien.

PRINCIPAUX PARTENAIRES DE PROJETS ISSN-1481-3572 n˚ de charité : 13648 4219 RR0001

DU MONT-ROYAL

Desjardins

L'ITINÉRAIRE EST MEMBRE DE

Convention de la poste publication No 40910015, No d'enregistrement 10764. Retourner toute correspondance ne pouvant être livrée au Canada, au Groupe communautaire L'Itinéraire 2103, Sainte-Catherine Est, Montréal (Québec) H2K 2H9

RÉDACTION ET ADMINISTRATION 2103, Sainte-Catherine Est Montréal (Qc) H2K 2H9 LE CAFÉ L'ITINÉRAIRE 2101, rue Sainte-Catherine Est TÉLÉPHONE : 514 597-0238 TÉLÉCOPIEUR : 514 597-1544 SITE : WWW.ITINERAIRE.CA RÉDACTION Rédacteur en chef : Josée Panet-Raymond Chef de pupitre, Actualités : Nafi Alibert Chef de pupitre, Société : Alexandra Guellil Responsables à la production écrite des camelots : Charles-Éric Lavery et Réal Noël Infographe : Louis-Philippe Pouliot Stagiaires à la rédaction: Laurence Richard, Julie Levasseur, Héloîse Bargain et Alexandra Nadeau Collaborateurs : Martine B. Côté, Ianik Marcil et Catherine Girouard Adjoints à la rédaction : Christine Bardeau, Julian Ballester, Robin Bélanger, Marie Brion, Dany Chartrand, Sarah Laurendeau, Hélène Mai, Éliane Thivierge Photo de la une : Paul Fleurent/Quentin Ducados, assistant Révision des épreuves : Paul Arsenault, Lucie Laporte, Michèle Deteix

Le magazine L'Itinéraire a été créé en 1992 par Pierrette Desrosiers, Denise English, François Thivierge et Michèle Wilson. À cette époque, il était destiné aux gens en difficulté et offert gratuitement dans les services d'aide et les maisons de chambres. Depuis mai 1994, L'Itinéraire est vendu régulièrement dans la rue. Cette publication est produite et rédigée par des journalistes professionnels et une cinquantaine de personnes vivant ou ayant connu l'itinérance, dans le but de leur venir en aide et de permettre leur réinsertion sociale et professionnelle.

Québecor est fière de soutenir l'action sociale de L'Itinéraire en contribuant à la production du magazine et en lui procurant des services de télécommunications.

Directrice générale : Christine Richard ADMINISTRATION Chef des opérations et des ressources humaines : Duffay Romano Responsable de la comptabilité : Philippe Boisvert Adjointe administrative : Nancy Trépannier Responsable du financement : Gessi Vanessa Sérant

ÉQUIPE DE SOUTIEN AUX CAMELOTS Chef du Développement social : Shawn Bourdages Agent d'accueil et de formation : Pierre Tougas Agente de soutien communautaire : Geneviève Labelle, Jean-François Morin-Roberge Agent de développement : Yvon Massicotte Agent de milieu: Dominic Grenier

GESTION DE L'IMPRESSION TVA ACCÈS INC. | 514 848-7000 DIRECTEUR GÉNÉRAL : Robert Renaud CHEF DES COMMUNICATIONS GRAPHIQUES : Diane Gignac COORDONNATRICE DE PRODUCTION : Marilyn Fortin IMPRIMEUR : Transcontinental

CONSEIL D'ADMINISTRATION Président : Philippe Allard Administrateurs : Jean-Marie Tison Guy Larivière Julien Landry-Martineau, Stephan Morency Geneviève Bois-Lapointe, Jean-Paul Lebel Pierre Saint-Amour

VENTES PUBLICITAIRES 514 597-0238

CONSEILLÈRES : Renée Larivière 450-541-1294 renee.lariviere18@gmail.com Ann-Marie Morissette 514-404-6166 am.mori7@itineraire.ca


1er juin 2015 Volume XXII, n˚ 11

ACTUALITÉS

CARREFOUR

CULTURE

ÉDITORIAL

41 CLIN D'ŒIL DU PASSÉ 42 LIVRES

7 Et si on donnait tous un peu de notre temps…

COMPTES À RENDRE

28 28 28 34 34 39 39

par Ianik Marcil

par Mélanie Loisel

8 ROND-POINT 10 ROND-POINT INTERNATIONAL

11 Dur de comprenure ACTUALITÉ

12 3es États généraux sur l'itinérance

› Qui se ressemble s'assemble › Verve musicale › Rien que pour le plaisir !

CHRONIQUE DU MOIS

16 Comment se sortir de l'itinérance ?

par Michel Marcil

17 CARREFOUR DOSSIER

19 Les plus marginaux des bénévoles

› Bénévolat extrême › Une main tendue entre les barreaux › Toucher pour guérir › Bénévoles et marginaux

Mots de camelots Jean-Pierre Ménard Lorraine Sylvain Réal Lambert Rheo Gallant Anne-Marie Bonin Gaétan Durette Richard Larochelle INFO-RAPSIM

43 PANORAMA 44 LE JOSÉE FLÉCHÉ 45 DÉTENTE 46 À PROPOS DU... DON

29 Retour sur un 40e anniversaire par Bernard St-Jacques

SOCIÉTÉ

30 Les athlètes féminines d'hier à aujourd'hui

par Nafi Alibert

HORS PISTE

par Benoît Chartier

DANS LA TÊTE DES CAMELOTS

CHEMIN FAISANT

par Marie-Andrée Baril

35 Pollution et inégalités

36 Souvenirs de mon père 38 À fleur de peau

L'Itinéraire veut vous lire!

ERRATUM

Lina Sagrehboie, la jeune illustratrice qui a signé plusieurs vignettes dans notre numéro spécial homophobie/transphobie du 15 mai 2015 est étudiante en sciences politiques à l’Université de Montréal, et non à L’UQAM. Nos excuses.

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Un article du magazine vous a spécialement marqué et vous fait réagir ? Un camelot a attiré votre attention et vous voudriez lui communiquer un message ? Un thème vous interpelle et vous avez envie d'écrire à ce sujet ? Le courrier des lecteurs est là pour ça ! Vous êtes notre lectorat, et nous avons envie de vous lire aussi. Vos commentaires, vos réactions et vos critiques nous tiennent à cœur, et nous aimerions avoir la chance de publier vos impressions dans cette section.

Faites nous parvenir de courtes lettres signées à courrier@itineraire.ca afin que notre équipe puisse vous publier. Sans ses lecteurs, L'Itinéraire ne pourrait pas accomplir sa mission, c'est pourquoi nous tenons à vous donner la parole dans nos pages. Nous avons hâte de vous lire ! ÉCRIVEZ-NOUS ! à COURRIER@ITINERAIRE.CA Des lettres courtes et signées, svp! La Rédaction se réserve le droit d'écourter certains commentaires.


En appuyant L'Itinéraire, vous nous aidez à leur offrir les outils nécessaires pour reconstruire leur vie, trouver un logement, se nourrir sainement et briser leur isolement.

Gaetan Prince, Camelot

PHOTO: GOPESA PAQUETTE

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Et si on donnait tous un peu de notre temps… L'été approche, les vacances aussi…À chaque année, on se dit qu'on va enfin prendre un peu du temps pour nous; ce sacro-saint temps après lequel on court tout le temps. On jouera plus avec les enfants, visitera de vieux amis, profitera du bon temps avec les parents et les grands-parents qu'on ne voit jamais assez souvent. Mais pourquoi est-ce si difficile de prendre le temps de donner un peu de son temps?

ÉDITORIAL

PAR MÉLANIE LOISEL | Bénévole au sein du comité éditorial de L'Itinéraire

D

ans ce monde de consommation, de rentabilité et de performance, où tout roule à un rythme effréné, on finit par s'oublier et oublier ceux qu'on aime. Imaginez alors à quel point on oublie tous ces esseulés et ces éclopés de notre société à qui on devrait également accorder un peu de notre précieux temps. Il existe heureusement encore quelques perles rares qui viennent en aide, par simple bonté, aux gens vulnérables et aux marginaux. Certains bercent des nourrissons prématurés, d'autres aident des enfants dans leurs leçons, visitent des prisonniers, accueillent des immigrants ou encore, prêtent l'oreille à des délinquants sexuels. Ces gens de l'ombre font une différence dans nos sociétés sans avoir besoin d'avoir les projecteurs sur eux. Ils sont très souvent discrets, humbles et empathiques. Et quand on leur demande qu'est-ce qui les a motivé à devenir bénévole ? Ils répondent tous, sans la moindre hésitation, que donner de leur temps leur fait du bien! Ils se sentent utiles, valorisés et se réjouissent de pouvoir faire une différence si minime soit-elle. Or, le Québec est la province où on s'adonne le moins au bénévolat. On y compte un peu plus de 2 millions de bénévoles en incluant tous ceux qui donnent quelques heures à embellir leur communauté, à préparer les offices religieux, à organiser des activités sportives ou parascolaires. Dans les faits, seulement le quart de ces bénévoles font la majorité des 385 millions d'heures offertes généreusement aux organismes communautaires. Les bénévoles québécois consacrent en moyenne 128 heures par année alors que ceux de la Nouvelle-Écosse offrent 207 heures de leur temps selon les dernières statistiques canadiennes.

On gagnerait pourtant tous collectivement à donner un peu plus de notre temps à notre prochain. On estime qu'à chaque fois que les gouvernements injectent 1 $ au sein d'un organisme de bienfaisance, les bénévoles génèrent en moyenne 4 $ en prestation de services variés. À l'heure où les organismes communautaires On estime qu'à souffrent des compressions du gouvernement Couillard, il serait chaque fois que peut-être temps de se demanles gouvernements der quel pourrait être notre apport individuel ? injectent 1 $ Sans pour autant accepter la déresponsabilité de l'État face au sein d'un aux plus démunis, on pourrait organisme de tous collectivement contrer certains effets néfastes des polibienfaisance, les tiques d'austérité en consacrant bénévoles génèrent quelques heures de bénévolat par-ci, par là. en moyenne 4 $ Il a d'ailleurs été démontré scientifiquement qu'être altruiste nous en prestation de rend plus heureux qu'adopter un services variés. comportement d'indifférence à l'égard de nos pairs. En remettant l'altruisme au cœur de nos sociétés, certains penseurs vont même jusqu'à dire qu'on pourrait en venir à enrayer la pauvreté dans la mesure où on s'engagerait tous, chacun à notre façon, à œuvrer pour autrui et le bien commun. À quoi donc, ou à qui, aimeriez-vous consacrer un peu de votre temps ? Pensez-y donc cet été !

1er juin 2015 | ITINERAIRE.CA

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ROND-POINT

PAR NAFI ALIBERT, HÉLOÏSE BARGAIN ET JULIE LEVASSEUR

Carton blanc ! Montréal, métropole multiculturelle, accueillera son deuxième tournoi de soccer antiraciste. Au programme des matchs bien entendu, mais aussi un concert, une projection de documentaire ainsi qu'une manifestation prévue le 6 juin contre le racisme, la xénophobie et l'islamophobie. Le but de l'événement est de dénoncer le racisme institutionnel et les dérives capitalistes du soccer, mais également de rassembler les gens autour de valeurs communes telles que l'antisexisme et la coopération. Tous les joueurs novices et expérimentés sont les bienvenus. Programmation disponible sur la page Facebook de Football Antiraciste – Montréal. (HB) Du 2 au 7 juin prochain. Parc Jos-Montferrand.

Comme son logo l'indique, le collectif de Football Antiraciste Montréal a été fondé en 2014.

Que traduit la notion de détour?

Questions à

Rébecca Anne Rowley

Dans le film, le détour fait allusion à la crainte du personnage principal qui fait chaque jour « le même esti de détour » pour éviter de voir son père qui vit dans la rue. Dans la vie, on a parfois peur d'entrer en relation avec soimême, les autres ou certains groupes dans la communauté. On évite par crainte, on fait des détours, mais à un moment donné on doit faire un choix et aller de l'avant, car les relations humaines sont plus importantes que tout ce dont on peut avoir peur.

Qu'est-ce qui vous a inspiré l'idée du scénario?

L'histoire s'inspire de mes réflexions personnelles, de mon ambiguïté par rapport à l'itinérance, et du vécu d'une amie dont la mère a été itinérante, avec tout ce que ça peut remuer. Je voulais parler de l'itinérance du point de vue d'un membre de la famille.

Rébecca Anne Rowley Quelle réflexion Détour peut susciter chez le spectateur? a produit et scénarisé le On ne peut pas toujours comprendre pourcourt-métrage Détour, quoi une personne est dans la rue, ça ne nous un film de 17 minutes appartient pas. Mais on peut confronter nos craintes pour échanger et communiquer la qui traite de la dignité dignité qu'on a tous profondément, qu'on humaine et du rapport vive au Ritz-Carlton ou dans la rue. Le film ambigu qu'entretient la peut être un déclencheur pour une démarche société face à l'itinérance. personnelle sur notre façon d'interagir. PAR JULIE LEVASSEUR

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ITINERAIRE.CA | 1er juin 2015

Le court-métrage Détour est disponible en ligne : http://vimeo.com/125704349.

Verdun, de nouveau en jeu Le 2 juin prochain, les élus d'arrondissement se réuniront pour abolir un ancien règlement interdisant aux enfants de jouer dans les ruelles. Suite à des réclamations citoyennes sur Facebook, le maire de l'arrondissement Jean-François Parenteau a pris l'initiative de rétablir le droit de jouer dans ces ruelles. Le conseil d'arrondissement de Dollard-des-Ormeaux avait pris la même décision en 2012. (HB)


PHOTO : ASSOCIATION AURORE

Du luxe à la rue Yves Sans Logement, Jean Paul Galère, Christian Dehors. Les plus grands noms de la haute couture détournés et apposés sur des photos d'itinérants; telle est la nouvelle campagne de communication de l'association française Aurore pour sensibiliser les gens au sort des itinérants. Depuis la fin du mois d'avril, près de 1000 affiches ont été déployées à Paris. Une campagne payante pour l'organisme et pour les internautes qui peuvent suivre le parcours et les réussites d'Yves, de Jean-Paul et Christian sur le site de l'association. Aurore accompagne les personnes en situation de précarité ou d'exclusion depuis plus d'un siècle; en 2014, elle a accompagné près de 20 000 personnes. (HB) http://aurore.asso.fr/

Lire québécois, en 2.0 Grâce à l'application Opuscules, les détenteurs de téléphone intelligent pourront savourer la littérature québécoise en tout temps et en tous lieux. Lancée par l'Union des écrivaines et des écrivains québécois (UNEQ), Opuscules devrait donner accès aux lecteurs à une trentaine de textes au format numérique d'ici la fin de l'année 2015. Au menu des textes de Jean Bédard, Perrine Leblanc, Larry Tremblay et bien d'autres. De quoi ravir les lecteurs connectés. (HB)

Du queer au musée Il fera chaud cette saison au Musée McCord avec une exposition aussi audacieuse qu'engagée qui redécouvre l'esthétique Camp. Trois céramistes y exposent une soixantaine d'œuvres extravagantes explorant ce style issu de la sous-culture gaie, fondé sur l'autodérision et l'ironie. Unis par leur sens de l'humour et leur penchant pour la critique sociale, les artistes tiennent à souligner ainsi «l'importance et la contribution de la communauté gaie dans le paysage social de Montréal». (JL et NA)

Camp Fires: le Baroque Queer

de Léopold L. Foulem, Paul Mathieu et Richard Milette, du 10 avril au 16 août 2015. Musée McCord.

Le Marché des Possibles revient cet été! Cet espace citoyen extérieur brillera sous le soleil du Mile-End et exposera les créations indépendantes québécoises. Produits gourmands, vêtements, jouets pour enfants...Rien n'est trop beau pour les consommateurs de produits locaux. (HB) Toutes les fins de semaine, du 9 juin au 19 août. 5635 rue Saint-Dominique PHOTO : SUSAN MOSS

PHOTO : RICHARD MILETTE

Made in Québec

Guasparre Richard Milette, 2000, Céramique

1er juin 2015 | ITINERAIRE.CA

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PHOTO : REUTERS/CARLOS BARRIA

ÉTATS-UNIS | Catastrophe oubliée

Cinq ans après l'un des pires désastres environnementaux de l'histoire, la compagnie pétrolière BP a toujours des comptes à rendre concernant la marée noire qu'elle a causée en avril 2010 dans le Golfe du Mexique. La société britannique, qui a déjà reçu une amende pour «graves négligences», fait aujourd'hui face à des poursuites judiciaires potentielles liées aux problèmes de santé des travailleurs impliqués dans la dépollution de la zone. Antonia Juhasz, une journaliste spécialiste de l'industrie pétrolière, déplore en outre qu'aucun changement n'ait encore été apporté aux politiques qui régissent l'exploitation pétrolière en mer. (Street Roots USA)

MONDE | Promesses mensongères

Une récente enquête du Consortium international des journalistes d'investigation met en lumière, une fois n'est pas coutume, l'hypocrisie éhontée de la Banque Mondiale (BM). Les journalistes, qui ont analysé la capacité de la Banque à protéger les communautés vulnérables des impacts négatifs de ses actions, observent que les projets financés par la BM ont déplacé plus de 3 millions de personnes dans la dernière décennie. Vivant pour la majorité en Afrique ou en Asie, celles-ci ont été évincées de leurs maisons ou dépossédées de leur terre. Alors qu'elle prétend apporter des solutions durables pour réduire les inégalités dans le monde, la BM a surtout causé la dégradation de la qualité de vie de millions de personnes. Pour la seule période de 2009 à 2013, 50 milliards $ ont été ainsi injectés dans des projets à haut risque d'impacts dits «irréversibles ou sans précédent». (IPS)

PHOTO : ABDURRAHMAN WARSAMEH/IPS

ROND-POINT INTERNATIONAL

PHOTO : VLADIMIR GIRÓN/IPS

SALVADOR | Aux grands maux, les grands remèdes

Face à la recrudescence de la violence, les élus salvadoriens envisagent de mettre en place des bataillons d'élite pour faire la guerre aux gangs criminels qui sèment la terreur dans plusieurs villes du pays. En trêve depuis 2012, des bandes armées parmi les plus redoutées, comme la Mara Salvatrucha, ont de nouveau fait parler d'elles en s'en prenant directement aux forces de l'ordre. La situation n'est pas sans rappeler la guerre civile qui a déchiré le pays dans les années 1980-1990. Le Salvador, un des pays les plus violents au monde, a enregistré, en mars dernier, son plus haut taux d'homicides en 10 ans, avec 481 meurtres. Soit une moyenne de 16 par jour. (IPS)

Le nombre de déplacés internes a dépassé le million en Ukraine, un pays toujours en proie à la guerre civile. Les affrontements entre les groupes prorusses et les forces militaires ukrainiennes ont entraîné la destruction de dizaines de villages dans le sud-est de la Crimée et dans la région de Donbas. Dépourvue d'eau, de nourriture et d'électricité, la population locale a dû fuir vers l'ouest et le centre du pays. Alors que le gouvernement, qui concentre ses économies dans l'effort de guerre, peine à aider sa population vulnérable, l'aide internationale et les différentes ONG actives en Ukraine fournissent tant bien que mal des vivres et des logements aux réfugiés, dont le nombre risque d'augmenter au cours des prochains mois.

L'Itinéraire est membre du International Network of Street Papers (Réseau International des Journaux de Rue - INSP). Le réseau apporte son soutien à plus de 120 journaux de rue dans 40 pays sur six continents. Plus de 200  000 sans-abri ont vu leur vie changer grâce à la vente de journaux de rue. Le contenu de ces pages nous a été relayé par nos collègues à travers le monde. Pour en savoir plus, visitez www.street-papers.org.

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ITINERAIRE.CA | 1er juin 2015

PHOTO : REUTERS/GLEB GARANICH

UKRAINE | Sauve qui peut!


Dur de comprenure

COMPTES À RENDRE

À pareille date en 2008, l'économie mondiale était sur le point d'entrer en pleine crise financière, qui allait entraîner la plus grande crise économique depuis les années 1930. Sept ans plus tard, les grandes institutions financières, autant les banques que les compagnies d'assurances ou les fonds de retraite, n'ont pas tiré de leçons de la crise. IANIK MARCIL | Économiste indépendant

Ç

a n'est ni moi ni un méchant groupe de gauchistes qui le dit, mais rien de moins que Christine Lagarde et Janet Yellen, respectivement directrice du Fonds monétaire international (FMI) et présidente de la Réserve fédérale américaine (la Fed ), la banque centrale des États-Unis. Au début du mois de mai dernier, elles ont toutes deux mis en garde les acteurs de la finance internationale contre les risques auxquels ils s'exposaient. Ces risques sont comparables à ceux qu'ils étaient en 2007, juste avant la crise. Ils sont causés, entre autres choses, par ce qu'on appelle la « finance de l'ombre », constituée de produits financiers complexes (on les appelle même « exotiques », c'est dire !) qui échappent à toute régulation.

Comme au casino

Pire, Christine Lagarde a mis en garde les dirigeants des institutions financières qui ont recommencé, peu après la crise, à se verser des sommes faramineuses en fonction des rendements de leurs entreprises. Autrement dit, ces dirigeants se versent des revenus en fonction du rendement financier de leurs banques ou fonds de placement, lequel rendement est basé sur ces produits « exotiques » et donc à haut risque. Pourquoi font-ils cela ? Parce que les produits financiers standards rapportent que très peu, les taux d'intérêts étant extrêmement bas. Autant dire que ces personnes jouent au casino avec les fonds de leurs clients afin de s'enrichir de manière indue. Car leurs revenus atteignent des niveaux annuels de l'ordre de dizaines

de millions de dollars, que le commun des mortels n'accumulera jamais, même tout au long de sa vie.

Pas gentil pour les requins

Tout cela peut sembler une réalité totalement hors de la nôtre – un monde exotique, justement. Or ça n'est pas le cas. Si vos modestes économies n'intéressent pas directement ces grands requins de la finance internationale (et c'est une comparaison pas tout à fait gentille pour les requins), en revanche elles peuvent être directement touchées par les risques inconsidérés qui sont pris La quête effrénée actuellement. Rappelons, notamment, qu'en février 2009, au plus du rendement fort de la crise, on apprenait que la fait en sorte que Caisse de dépôt du Québec avait perdu 40 milliards de dollars sur les financiers un portefeuille de placements de 150 milliards. En quelques s'exposent à des semaines, le « bas de laine des Québécois », comme on dit, avait niveaux de risques perdu plus du quart de sa valeur démesurés. dans des placements dont les dirigeants grassement payés n'étaient en mesure ni de comprendre ni d'en évaluer les risques. C'est d'ailleurs ce qu'a rappelé la présidente de la Fed, en affirmant que « trop d'institutions prenaient des risques qu'elles ne pouvaient ni mesurer ni gérer ». C'est quand même un comble d'être aussi dur de comprenure après avoir essuyé une raclée historique il y a à peine sept ans.

1er juin 2015 | ITINERAIRE.CA

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Duo d'unjour

Les 3es États généraux de l'itinérance au Québec se tiendront les 15 et 16 juin prochain à l'UQAM. Organisé tous les cinq ans, cet événement réunit les acteurs provinciaux de tous horizons qui font de la lutte contre l'itinérance leur cheval de bataille.

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ITINERAIRE.CA | 1er juin 2015

À cette occasion, le Réseau Solidaire Itinérance du Québec (RSIQ) a approché les camelots poètes de L'Itinéraire pour qu'ils deviennent les auteurs de chansons inédites qui seront mises en musique et interprétées par des artistes québécois de renom lors d'un cabaret à ne pas manquer.


ACTUALITÉ

Qui se ressemble s'assemble Avec son look de Blues Brother, Paul Cargnello a accepté sans hésitation de donner vie aux textes de Siou. Entretien avec un artiste hétéroclite, multiculturel et plurilingue. En bref, un Montréalais à l'image de sa ville. PAR NAFI ALIBERT

Paul Cargnello

L'Itinéraire : Qu'est-ce qui t'a poussé à choisir les poèmes de Siou?

Paul Cargnello: Ils m'ont parlé émotivement. Il y avait cette dichotomie de vie, avec à la fois de la joie et de la tristesse; des thèmes avec lesquels j'aime jouer dans ma propre musique.

PHOTO : PAUL FLEURENT/ QUENTIN DUCADOS

T'es-tu reconnu dans ses textes?

C'est grâce à L'Itinéraire que j'ai appris le français de ma ville.

Oui, en particulier dans Je m'ennuie d'ennui. Je viens de l'époque punk rock. Dans cette culture tout est plate et on essaie de trouver un moyen de sortir de cette platitude de la vie. Siou : C'est bien que tu aies remarqué ça. Depuis toujours, je traîne une grande tristesse au fond de moi. Je ne sais pas d'où elle vient, mais j'essaie de la contrer en me bousculant, en amenant une certaine pointe d'humour et d'autodérision en me moquant de mon malaise intérieur. Paul : J'ai peut-être catché qu'on avait beaucoup de choses en commun. Moi je fais de l'angoisse et je connais la dépression. Je lutte contre cela et j'essaie de trouver la joie de vivre dans les belles choses que m'a aussi apportées la vie, comme ma famille ou la musique.

Sur des airs de blues et de reggae avec un petit côté punk, ce seront les textes de Siou, mais avec un accent franglophone montréalais.

Paul Cargnello

Ce n'est pas la première fois que tu te mobilises contre l'exclusion et la pauvreté. Te considères-tu comme un artiste engagé?

Je suis plutôt un artiste révolutionnaire et engageant. Révolutionnaire parce que je suis ouvertement à gauche et je pense que le système devrait changer. Je suis très chanceux d'avoir un micro qui me donne le droit de parler haut et fort. C'est ça le rôle d'un artiste. Ils servent à provoquer une réflexion. Mais si c'est pour lancer toujours la same old conversation sexiste, misogyne, conformiste, bah fuck you.

Pourquoi préfères-tu le mot engageant à engagé?

Je n'ai pas la prétention de dire qu'un artiste peut changer le monde, mais il peut y contribuer. Les gens disent qu'on est capable d'exprimer ce qu'ils pensent mais qu'ils n'arrivent pas à formuler clairement. J'espère que mes textes vont les conscientiser et les encourager à contribuer pour de vrai.

LA QUESTION DE SIOU Avec ton parcours et ta vision de la vie, tu me fais penser aux troubadours, ces musiciens sans patrie qui se promenaient librement. Peux-tu nous en parler?

C'est vrai, je n'ai pas de fierté de nation. Je suis beaucoup plus à l'aise avec le fait d'être artiste. Ma mère vient de Lituanie. Mon père d'Argentine, mais il est Italien. Moi j'ai toujours eu une crise d'identité : suis-je Québécois, allophone, anglophone, francophone ou whatever? J'ai grandi surtout en anglais à Notre-Dame-de-Grâce. Quand j'ai déménagé au centre-ville à 18 ans, j'ai tout de suite réalisé que je n'avais pas appris le français même si j'avais étudié à l'école soi-disant bilingue. Oh my God! Je réalisais que non seulement j'y avais gaspillé mon temps, mais qu'en plus je n'avais pas eu assez de respect pour la culture francophone d'ici. Heureusement que ma femme n'a jamais arrêté de me dire : « Paul, tu es stupide, il faut apprendre le français! » Je me suis donc mis à lire davantage en français. C'est en partie ainsi que je suis devenu un fervent lecteur de L'Itinéraire, c'était un excellent moyen d'apprendre le bon joual.

Bébé punk C'est «pour se faire plaisir» que Paul Cargnello vient de boucler un album pour enfants dans un style… punk rock. «C'est un projet entre moi et mon fils. Je pense que c'est le projet le plus touchant que j'aie jamais fait.»

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Verve musicale Dany Placard et David Marin ont choisi les textes de Jean-Marie Tison et Josée Cardinal. C'est à L'Itinéraire que les deux artistes folk ont rencontré pour la première fois les auteurs des textes qu'ils interprèteront le 15 juin prochain. Gros plan sur une rencontre artistique et humaine. PAR ALEXANDRA GUELLIL PHOTO : ALEXANDRA GUELLIL

A

ssis avec les deux artistes, Josée Cardinal et JeanMarie Tison commentent, chacun leur tour, des passages de leurs textes respectivement intitulés Ruelles et le Blues de L'Itinéraire. «À partir du moment où l'on se rencontre, cela devient une œuvre collective puisqu'on travaille ensemble. Je te donne ce texte pour que tu te l'appropries», amorce Jean Marie Tison à Dany Placard. C'est l'écriture de Jean-Marie qui a séduit Dany Placard. Il dit préférer des textes qui ont, comme les siens, des

Anne-Marie Boucher et Anne Bonnefont, organisatrices des 3 es États généraux de l'itinérance.

accents et des apostrophes. «C'est une question de fond et de formes. Je n'aurai pas de mal à me l'approprier, puisque j'écris aussi comme lui» précise-t-il. Le texte de Josée Cardinal demandera pour sa part, une plus grande collaboration, estime David Marin. «Il est plus court et plus ouvert à l'interprétation musicale », confirme Josée Cardinal visiblement heureuse de travailler avec

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David Marin. «Ce qui compte, c'est la rencontre, mais aussi de trouver la musique qui sonne bien», complète le chanteur originaire de Drummondville. Quand il ne chante pas, David Marin travaille à la SAQ. Tous les jours, il dit rencontrer «le Québec tel qu'il est réellement», dans sa diversité comme ses errances. Il a choisi le texte de Josée Cardinal pour relever un défi littéraire et poétique. Pour lui, le plus important est de «ne pas [le] dénaturer, mais d'y amener de la couleur».

Un événement public

David Marin met aussi l'accent sur l'opportunité de véhiculer un message positif à un nouveau public. «On va donner une voix à l'Itinérance. Ce sera assez unique comme show. Un moment qui sonne vrai avec des gens vrais» conclut-il. Derrière ce projet ambitieux se cachent deux On va donner une femmes, Anne-Marie Boucher et Anne Bonnefont, les voix à l'itinérance. deux coordonnatrices du Ce sera assez RSIQ. Avec ce Cabaret, elles espèrent voir augmenter unique comme la participation citoyenne à la réflexion. «Parmi nos show. Un moment membres, il y a beaucoup qui sonne vrai avec de talents. Il fallait un évènedes gens vrais. ment pour parler autrement de l'itinérance pour valoriser ceux qui la vivent», explique Mme Boucher. «Le Cabaret était une idée aussi pour Dany Placard  inviter le public à passer une bonne soirée malgré ces temps d'austérité», complète Mme Bonnefont. Les États généraux permettent aux institutions, politiciens et organismes communautaires de réfléchir aux différents enjeux liés à la lutte contre l'itinérance. Pour cette troisième édition, l'accent est mis sur «les pouvoirs de faire une différence». Plusieurs séminaires seront donc organisés afin de laisser la parole aux panélistes d'ici et d'ailleurs. Pour les deux organisatrices, cet évènement permettra de réfléchir ensemble aux politiques à mettre en œuvre pour contrer l'itinérance. Et à Anne Bonnefont de conclure: «Il y a des gens qui ont énormément de pouvoir pour agir sur la question et faire une différence. C'est facile de le faire, mais ce sont des responsabilités qui ne sont pas prises ou pas entièrement.»


ACTUALITÉ

L'ITINÉRANCE E D X U A R É N É G ÉTATS CABARET DES 3

!   r i s i a l p e l r Rien que pou ES

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ison et José u, Jean-Marie T io S e d es xt te ts des Quelques extrai PHOTOS : PAUL

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Josée Cardinal

e d'un gars qui «C'est l'histoir ­ ICE DISTRIBUTR érer inconsciem cherche à se lib re p sité de sa pro ment de l'inten le, ant dans sa bul vie en se réfugi ol, o nt aussi de l'alc en consomma out rt du sexe, mais su de la drogue et n so rler son art et en laissant pa sa ilà vo , n créatio imaginaire. La n.» vraie libératio e joke de La vie est un s o p ro p à u, io S 'ennui Je m'ennuie d s votre vie … Assis ici dan aysé, exilé Je dépéris, dép ves, déplumé Loin de mes rê s, le bec soudé… r Les ailes cassée rs j'suis un joke joke, alo La vie est une cident T'es né d'un ac ontrer les dents ém T'as jamais os peu Tu sifflotes un l' quotidien r se pour traver eu d' la rue et au beau mili lette t' coupes le siff e La vie est unje on lle d' nu part joke… alors r! , et au milieu ke cher drette jo un suis capab' de mar pu . 14 20 , ou s d' une ville de Si rdi aux klaxon ixte. Technique m1 cm. Étou e… 31x3 vient vaudevill r tout de veni Avant de de son, une chan a cette œuvre é d'abord ét un tableau.

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CAMELOT AU MÉTRO CONCORDIA ET ANGLE L/ MONT-ROYA CHAMBORD

Paul Cargnello

Ruelle carton palpite, Sur le béton le des journaux. L'encre suinte

David Marin

elle Un plaisir de ru tine rou Injecte dans la de cul-de-sac. Une euphorie t Les désirs figen éternel, r d'un instant u le u o d la s n a D ôle Le fixe. ade du camé fr ss u a m se es gr L'allé re du badaud… Le dédain hila

on Jean-MarieE Tis CHRONIQUEUR

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Dany Placard melot Le Blues du ca , m'as ach'té hier … L'journal qu'tu ire, éa cl nu be m une bo Pas peur, c'pas re, x, ça rien d'sectai C'pas dangereu ire pe communauta l'espoèr! C'est just'un grou ne d' udes, qui m'don Qui s'serre les co ; gné l'dictionnaire L'aut' jour j'ai po ‘'itinéraire''; J'ai cherché l'mot , sentier, un repère ire; C't'une route, un fa af un même peur d' re Mais j'ai quand ai lv ca 'hui pi d'main . !.. Qu'entr'aujourd er hi d' s soit l'ombre L'horizon qu'jvoi férence faire une dif tinérance e d s ir vo u o p l'i Les es s généraux de État Cabaret des 3 istian Vanasse hr C r : Animateu 15, à 19 h 30 Lundi 15 juin 20 ke Ouest à Montréal  oo 200 rue Sherbr ntaire volo Contribution

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CHRONIQUE DU MOIS

Comment se sortir de l'itinérance? Selon le dictionnaire Larousse, une personne itinérante est une personne qui n'a pas de lieu de résidence fixe, qui est en déplacement constant. Certes, la question du logement est importante pour contrer l'itinérance, mais la problématique est beaucoup plus profonde et il faut se concentrer sur bien d'autres aspects pour espérer la contrer. PAR MICHEL MARCIL | Camelot angle Ste-Catherine/St-André et métro Verdun

B

«

urnout » au travail. Dépression, donc on prend des médicaments. Ceux-là qui rendent zombie. Passifs… Tellement que tout ce qu'on fait c'est rester assis dans notre salon à regarder la télévision. Manque d'énergie. Précarité. Solitude. Ça, c'est mon histoire : j'ai tourné en rond pendant deux ans.

Tous ensemble

L'important, c'est de se sortir de cette solitude et de s'ouvrir aux autres. Moi, c'est un voisin qui m'a montré l'issue de secours en m'invitant au Centre de soir Denyse Massé, un café un peu comme celui de L'Itinéraire. Là, j'ai pu reprendre des activités : des ateliers d'art, de cuisine collective, de peinture… Mais aussi sortir à nouveau avec du monde au musée ou au cinéma. Hé oui, ça prend des activités sociales pour sortir une personne de sa solitude, pour lui redonner le goût de communiquer et de se valoriser. Inutile de tout résumer à une question d'argent. L'important c'est la santé, le bienêtre et l'enrichissement personnel que chacun peut tirer de ses expériences. Alors faisons davantage participer les marginaux de ce monde à la société ! C'est ainsi qu'on apprend à connaître le parcours de gens qui, comme nous, sont fragiles et peuvent, euxaussi, avoir leur moment de faiblesse. En rencontrant les autres, ils deviennent nos amis et ensuite nous progressons ensemble. Je me suis impliqué. J'ai à mon tour organisé des activités. Petit à petit j'ai eu des responsabilités qui m'ont permis de m'affirmer. Encore une fois, ce n'était pas une question d'argent puisque j'ai fait du bénévolat. Toutefois, je ne conseillerais pas de mettre toutes ses billes dans le même panier. Il faut ensuite diversifier ses activités, apprendre à se valoriser ailleurs aussi. Bref, il faut persévérer au lieu de se conforter. Moi,

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par exemple, je suis devenu journaliste pour Le Petit journal.

Trouver un but dans la vie

Chacun a sa porte. Chacun a son étincelle. Chacun détient sa voie. À un moment il faut trouver son but dans la vie. Bien que des conseillers professionnels ou des proches puissent nous aider, on doit également chercher et s'ouvrir des portes soi-même. À chacun de saisir les opportunités qui se présentent. Dans la vie, il faut savoir se faufiler. Si un projet n'a pas marché Pourquoi est-ce comme on le souhaitait, il faut essayer de se donner d'autres valeurs de fierté. que l'argent est Regardez-vous donc dans le miroir et faites-vous un sourire. Regardez-vous le seul outil pour autrement pour dénicher les bonnes sortir les gens de la valeurs et vous accepter. Prendre le côté positif et avancer! Penser rue? L'important, à construire au lieu de détruire. Avancer à pas lents, mais assurés. À un moment c'est d'être fier ce donné une porte va s'ouvrir devant vous. Vous l'aurez compris : il ne faut surtout qu'on est, être bien pas couper l'accès à toutes ces portes dans sa peau. de sortie. En particulier en région où il y a aussi beaucoup d'itinérance, même si elle est cachée. Aujourd'hui le gouvernement restructure. Il coupe ! Les samedis et dimanches, ce n'est pas lui que je vois apporter de la nourriture aux itinérants au Parc Émilie-Gamelin. Où est le gouvernement ? Où vont les rapports écrits à coups de 500 000$? Ça donne une porte aux pauvres, ces rapports-là ? Moi, je crois pas.


Les camelots du comité de rédaction créé pour coordonner la rédaction de l'édition 100% camelots (de gauche à droite) : Guy Thibault, Jean-Paul Lebel, Marie-Andrée Baril, Cindy Tremblay et Jean-Marie Tison.

PHOTO : VANESSA SÉRANT

Le 15 juin, une édition 100 % camelots Les camelots prennent les rênes du magazine L'Itinéraire !

S'

ils ont toujours été associés à la rédaction du magazine, les participants ont cette fois conçu un numéro dans son ensemble. Une première en 20 ans! Élection d'un comité éditorial, choix des sujets développés, compilation et hiérarchisation des articles, relecture, choix des illustrations  : tout le contenu de cette édition 100 % camelots a été pensé et réalisé par leurs soins. Les participants ont su faire preuve de professionnalisme et d'imagination pour vous proposer un numéro à leur image avec des entrevues, des reportages, des témoignages, des poèmes, des dessins, des photographies… Et même un quiz qui vous permettra de gagner un abonnement d'un an à L'Itinéraire. Attendez-vous à être agréablement surpris par le numéro 100 % camelots, disponible dès le 15 juin auprès de votre camelot préféré.

PHOTO : MARIO REYES ALBERTO ZAMORA

PHOTO : MARIO REYES ALBERTO ZAMORA

CARREFOUR

Le comité de rédaction a été élu démocratiquement par les camelots eux-mêmes lors d'une réunion spéciale. Le comité de rédaction s'est réuni à chaque semaine. Ici accompagné de Charles-Éric Lavery, responsable de la production écrite, et Simon Posnic, stagiaire.

Salut Alain !

Alain Ménard 15 juillet 1959 – 20 mai 2015

Camelot travaillant, honnête et toujours prêt à aider son prochain, Alain nous a quitté après avoir perdu son combat contre la maladie. Toute l’équipe de l’Itinéraire regrettera cet homme de cœur, aimé de tous.

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DOSSIER

s u l p s Le naux i g r s a e l m névo é b s de

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Bénévolat extrême Les bénévoles sont des denrées rares et précieuses au Québec, la province qui a le plus faible taux d'engagement volontaire au pays. Alors qu'on se bouscule aux portes d'organismes aux causes populaires comme l'aide à l'enfance, les volontaires sont beaucoup moins nombreux à s'engager auprès d'une clientèle marginalisée et stigmatisée comme les délinquants sexuels, les détenus ou encore les gens atteints du VIH-sida. Malgré tout, certains répondent à l'appel. Peut-on alors parler de bénévoles de l'extrême ? PAR CATHERINE GIROUARD

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elon Statistique Canada, les trois principales raisons qui poussent les gens à faire du bénévolat sont le désir de contribuer à la communauté (93 %), celui de mettre à profit leurs compétences et leur expérience (78 %), ou encore le fait d'être personnellement touchés par une cause (59 %). Mais, certaines causes sont plus populaires que d'autres. «Nous manquons toujours de bénévoles pour le soutien aux personnes âgées, les popotes roulantes, les visites amicales et les accompagnements médicaux, énumère François Lahaise, agent des communications au Centre d'aide bénévole de Montréal, qui aide les organismes à recruter des volontaires. Et lorsqu'on publie des annonces de bénévolat pour s'impliquer auprès de délinquants sexuels avec le Cercle de soutien et de responsabilité du Québec (CSRQ), par exemple, nous ne recevons pas une tonne de réponses non plus.» Pascal Bélanger, coordonnateur général de l'ARCAD, un organisme qui offre des activités aux détenus dans les

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pénitenciers fédéraux, croit que ces difficultés à recruter pour des organismes comme le sien sont inhérentes à la peur. Dans le cas des prisons, la peur est amplifiée par la fausse représentation qu'en font les médias. «Je n'ai pas encore vu un seul bénévole dans Unité 9, alors qu'il y en a 9000 impliqués dans les prisons du pays», fait-il remarquer au passage. «Il faut rappeler que le bénévolat n'est pas considéré comme séduisant en soi», ajoute M. Lahaise. Les Québécois ne sont d'ailleurs que 33 %, selon les statistiques, à répondre à l'appel. En plus d'être moins nombreux à s'y adonner que dans le reste du pays, ils y consacrent aussi moins d'heures. François Lahaise croit même que ces statistiques dressent un portrait plus rose de la réalité qu'elle ne l'est. «Ça voudrait dire que plus de 2 millions de Québécois font du bénévolat, souligne-t-il. Si c'était le cas, des centres de recrutement de bénévoles comme le nôtre n'existeraient pas.» Selon M. Lahaise, notre faible taux d'engagement pourrait s'expliquer en partie par la perte de notre esprit de «vivre ensemble», encouragé depuis plusieurs années par la promotion de l'individualisme. «On se fait répéter jour après jour à travers des centaines de messages publicitaires de penser à soi; ça finit par avoir des répercussions sur nous.» «Mais essayer le bénévolat, c'est l'adopter», assure l'agent des communica-


DOSSIER Envie de vous engager? Plus de 600 activités au sein de plus de 400 organismes sont offertes sur le site du Centre d'action bénévole de Montréal. cabm.net

Il n'est pas plus difficile d'aider une personne en détention qu'un élève en difficulté.

tions. Tous les bénévoles rencontrés dans le cadre de ce dossier étaient du même avis. Même des études le prouvent : le bénévolat serait bon pour la santé psychologique et physique de ceux qui le pratiquent.

minceur – est passé de quelques dizaines de milliers de dollars par année à zéro. Pascal Bélanger, Ces causes ne passant pas bien la rampe coordonnateur général de l'ARCAD de l'opinion publique, elles peinent à trouver d'autres sources de financement. L'ARUne réputation à refaire CAD et le CSRQ sont donc voués à une mort imminente – «Il n'est pas plus difficile d'aider une personne en détention qu'un élève en quelques mois à peine – si rien ne change. Il y a pourtant là un enjeu de santé publique important. difficulté», fait valoir Pascal Bélanger. «Il n'y a, quant à moi, d'extrême que le «Moins les gens pourront recevoir d'aide, plus la société sera contexte; l'activité en tant que telle est pas mal plus soft qu'on peut l'imaginer.» Tous sont encore une fois d'accord sur ce point. Leurs causes n'auraient donc malade», prévient M. Lahaise. Ces compressions budgétaires coupent l'herbe sous le d'extrêmes que leur réputation. «Les bénévoles qui travaillent chez Tel-Aide ou Suicide Action ou auprès d'enfants gravement malades vivent à mon avis des pied de gens qui sont pourtant prêts à s'impliquer corps et âme pour le bien-être de la société. «Ce qui me fait situations plutôt extrêmes», nuance M. Lahaise. peur, c'est que ces coupures m'enlèvent presque cette pasOrganismes et bénévoles en voie de disparition sion et ce désir de m'engager. Ça finit par ronger», dira Mais cette réputation qui colle à la peau d'organismes comme l'ARCAD ou le enfin Annick Lavogiez, bénévole engagée dans plusieurs CSRQ n'est pas sans répercussions. Attirant peu de capital de sympathie poli- causes, dont le CSRQ. Et ces mots résonnent fort, quand tique, surtout auprès des Conservateurs, ils sont maintenant victimes de coupures ils viennent de la bouche de la médaillée de la paix par les financières majeures. Leur budget de fonctionnement – pourtant déjà au régime YMCA du Québec pour la qualité de son engagement...

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Une main tendue entre les barreaux Les mardis et jeudis soir, Jacques Fréchette est toujours occupé. Il soupe en vitesse après le travail, pédale jusqu'au métro Saint-Michel où il rejoint son groupe de covoiturage, direction Laval. Ce n'est pas pour ses soirées hockey ou entre gars, mais plutôt pour ses soirées de bénévolat où il anime des activités sociales dans des pénitenciers. PAR CATHERINE GIROUARD PHOTO : CATHERINE GIROUARD

J

acques Fréchette a commencé à faire du bénévolat en prison par accident, raconte-t-il autour d'un café sur la rue Masson. Un ami hongrois lui a lancé l'invitation durant sa maîtrise. Déstabilisé par cette offre qui sortait de l'ordinaire, il réfléchit pendant six mois avant de tenter le coup. Il était alors loin de se douter que la prison ferait dès lors partie prenante de sa vie. 14 ans plus tard, le quinquagénaire qui travaille le jour à LEUCAN se rend encore aux pénitenciers deux fois par semaine, un soir pour jouer à des jeux de société, l'autre pour jouer au volleyball. «Il y a parfois des choix qui nous choisissent, dit-il avec philosophie en sirotant son double court. On ignore parfois pourquoi, mais il y a des choses qui nous interpellent et le cœur répond à l'appel. J'ai simplement envie d'offrir une main tendue.»

La réalité vs le préjugé : deux poids, deux mesures

Au début, Jacques ne savait pas du tout à quoi s'attendre. Il avait certaines craintes. Même si l'organisme ARCAD, par l'entremise duquel il s'implique, prévient les bénévoles que la réalité en prison est différente de l'image véhiculée par les médias, le choc fut grand. «Il y avait un fossé en moi entre la réalité et l'image que je m'étais construite de la prison, se souvient-il. Quand tu es à l'intérieur, la prison prend toute une dimension humaine insoupçonnée.» Ne pas porter de jugement sur les détenus qu'il côtoie ne s'est pas fait du jour au lendemain. «Au début, je voulais en savoir le moins possible sur ce qu'ils avaient fait pour ne pas les juger. Moins j'en savais, mieux c'était», avoue-t-il. Peu à peu, il a appris à voir l'homme derrière le crime. «Quand tu connais l'histoire de ces gars-là, tu te rends compte qu'ils ont manqué d'amour et qu'ils ont été laissés à eux-mêmes trop jeunes, affirme-t-il. Ils étaient à la base des victimes qui ne se savaient pas victimes.» En tendant la main aux prisonniers durant des activités

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de socialisation où ils sont traités comme tout le monde, Jacques et les autres bénévoles de l'ARCAD cherchent à humaniser l'incarcération. «Le gouvernement Harper opte plutôt pour la vieille approche punitive. Mais veut-on que les détenus puissent fonctionner dans notre société à leur sortie de prison, ou veut-on simplement leur mise aux fers?», questionne-t-il.

Aller au bout de son petit mystère

Inutile de chercher de midi à 14 h ce qui motive Jacques. « Je n'ai d'autres explications à donner que mon désir de faire ma petite part, de donner un sens à la vie », expliquet-il après un moment de silence, s'appliquant à trouver les mots justes. Ce dernier ne considère pas son bénévolat comme étant extrême en soi. «Je suis sportif et compétitif de nature, je m'amuse vraiment quand je vais en prison!, lâche-t-il. Pour moi, ce qu'il y a d'extrême dans mon bénévolat, c'est de ne rien attendre en retour.» Son implication a-t-elle changé la personne qu'il est? «Tout à fait, c'est comme si j'avais ouvert une toute petite fenêtre en moi qui aère les pièces de mon intérieur», répond-il avec poésie. Son bénévolat le rend-il plus heureux? «Plus entier», ditil plutôt. Dans quelques heures, Jacques se rendra justement en prison pour une partie de volleyball. Un soir de match éliminatoire du Canadien. En enfilant son casque, Jacques me dit qu'on devrait parler de sa passion pour le vélo, lors d'une prochaine entrevue. Adepte depuis ses 15 ans, il ne compte plus les kilomètres qu'il a parcourus sur deux roues. «J'habitais à la campagne durant ma jeunesse; mon vélo me permettait de m'évader de ce que je percevais comme étant ma prison. Mais je n'avais pas compris que ma prison était dans ma tête.» Comme quoi tous les outils sont bons pour faire tomber les murs... même une main tendue.


DOSSIER

Pour moi, ce qu'il y a d'extrême dans mon bénévolat, c'est de ne rien attendre en retour. Je donne, mais je plonge sans attente. - Jacques Fréchette

L'ARCAD Depuis 1965, l'Association de rencontres culturelles avec les détenus organise des activités de socialisation entre des détenus et des citoyens libres. Des jeux de table, des activités sportives ou artistiques servent de prétexte pour permettre aux détenus d'agir dans un contexte plus humanisant et où ils sont traités comme tout le monde. L'organisme compte presque uniquement sur l'action de bénévoles pour mener ses activités. Budget annuel de l'organisme : 70 000 $ Mort annoncée : fin juillet, si le gouvernement ne change pas son fusil d'épaule. « Avec mon budget annuel, je fais voler un CF18 pendant deux heures », ironise le coordonnateur de l'organisme, Pascal Bélanger.

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J'apporte un peu de tendresse Ă ceux qui en ont besoin. - Marguerite Ronaldo

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DOSSIER

Toucher pour guérir Tous les jeudis après-midi, Marguerite Ronaldo se rend à la Maison d'Hérelle. Depuis 1994, la massothérapeute aujourd'hui à la retraite offre bénévolement des massages aux résidents atteints du VIH-sida. PAR JULIE LEVASSEUR PHOTO : JULIE LEVASSEUR

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u troisième étage du centre d'hébergement se do fait régulièrement des bilans avec les intervenants trouve une petite pièce chaleureuse aux lumières et les usagers. Certains bénéficiaires se surprennent tamisées et à l'atmosphère de détente. C'est là eux-mêmes lorsqu'ils remarquent l'amélioration de leur que Marguerite Ronaldo reçoit les bénéficiaires de ses qualité de vie et sont très reconnaissants envers la bénéséances de «thérapie émotionnelle et corporelle», comme vole. «Ils n'ont pas toujours les mots pour le dire, mais on le elle les décrit. sent», confie-t-elle souriante. La massothérapie est complémentaire aux traitements médicaux, explique la bénévole. «Le toucher a un S'aider en aidant pouvoir à mi-chemin entre la psychologie et la médecine. La massothérapeute en apprend beaucoup sur elle-même Les massages permettent aux clients de faire le point, de dans le cadre de son implication. La Maison d'Hérelle lui donne, entre autres, l'occasion de confronter prendre conscience de leur corps et de profiter ses préjugés. «J'ai appris qu'il n'existe pas de aussi du moment.» clientèle type; le VIH-sida peut toucher n'imMme Ronaldo donne aux personnes séroJe ne veux porte qui dans la société. Ma mission est d'aipositives l'occasion de prendre soin d'elles et de se sentir mieux dans leur peau. «C'est pas changer der les gens plus démunis et rejetés pour leur apporter un peu de richesse humaine.» un acte d'amour pour leur donner un second le monde, Après 20 ans de bénévolat, l'expérience souffle», résume-t-elle. est toujours aussi gratifiante pour Marguejuste faire rite Ronaldo. Un baume sur la maladie «Il y a une forme de liberté dans ma part. Au-delà des massages, le bénévolat de l'acte d'aider les autres sans rien attendre en Marguerite Ronaldo repose en grande parretour», estime-t-elle. Son implication lui tie sur l'écoute active. «Les clients ont connu procure un équilibre et lui permet de satisun cheminement difficile et ont eu plusieurs deuils à faire faire son côté humanitaire. «Je me soigne en soignant les à la suite de leur diagnostic : leur santé, leur emploi, leur autres. C'est un travail à la chaîne où chacun donne au entourage qui les rejette, etc.», révèle-t-elle. suivant pour améliorer la situation sociale.» Son défi est d'apprivoiser la «clientèle» parfois difficile d'approche. Elle les accompagne dans les différentes étapes de la maladie, que ce soit vers la rémission ou la fin de leur combat. Pour bien des «clients», il s'agit d'une Située en plein cœur de Montréal, la première expérience de massage. «Il y en a qui n'ont Maison d'Hérelle est un centre jamais été touchés comme ça dans leur vie», révèle Mme d'hébergement communautaire adapté Ronaldo, qui doit être patiente et y aller étape par étape. aux besoins des personnes atteintes du «Tout est dans la façon de désamorcer les peurs, afin de créer un lien de confiance.» VIH-sida. Depuis sa fondation en 1990, Au fil des séances, la massothérapeute établit une relala Maison d'Hérelle a accompagné près tion de proximité avec les résidents de la Maison d'Héde 1000 personnes séropositives. relle, qui sont «comme une grande famille». Mme Ronal-

La Maison d'Hérelle

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Bénévoles et marginaux Leur engagement et leur mobilisation rendraient jaloux plusieurs employeurs. Pour preuve : ils sont quatre bénévoles à accompagner leur coordonnateur – lui aussi bénévole depuis peu en raison des coupes budgétaires du fédéral – à venir rencontrer L'Itinéraire. Leur cause n'est pourtant pas des plus séduisantes : soutenir et responsabiliser des délinquants sexuels à haut risque de récidive. PAR CATHERINE GIROUARD PHOTO : CATHERINE GIROUARD

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ifficile de dresser un portrait type du bénévole du Cercle de soutien et de responsabilité du Québec (CSRQ) après un tour de table. Maxime Falardeau, un policier membre de l'équipe de soutien aux urgences psychosociales. Fernand Bessette, Frère et doyen de l'organisme du haut de ses 71 ans. Christophe De Muylder, venu de Belgique pour apprendre les méthodes avantgardistes de justice réparatrice des CSR. Et Annick Lavogiez, une jeune femme dans la trentaine, très impliquée dans plusieurs causes. Leur trait commun : ils se sentent tous investis d'une double mission. «En aidant ces délinquants sexuels à se reprendre en main, ce n'est pas juste leur vie qu'on aide à remettre sur le droit chemin, c'est aussi plein de victimes potentielles qu'on essaie d'éviter », explique d'entrée de jeu Annick Lavogiez. Une fois par semaine, ces quatre bénévoles et des dizaines d'autres prennent le temps d'écouter, de soutenir, de rassurer et de conseiller des délinquants sexuels qui ont terminé de purger leur peine, mais qui sont toujours considérés à haut risque de récidive. Ils deviennent les confidents de ces hommes marginalisés, leur apportent un soutien et les aident à lutter contre leurs démons intérieurs. Cette aide n'est pas banale quand on sait que l'isolement social est l'une des plus grandes causes de récidive pour ces hommes stigmatisés et rejetés.

Des bibittes rares

L'implication de ces bénévoles fait parfois l'objet de discussions animées. Pas étonnant : la délinquance sexuelle est considérée comme étant le crime suprême. Mais l'impopularité de leur cause explique en quelque sorte une des raisons de leur implication. «J'avais envie de m'impliquer auprès d'eux parce que ces hommes sont négligés par le système, affirme le policier Maxime Falardeau. Les alcooliques, les hommes violents, les femmes abusées, tout le monde a son service d'aide, sauf eux.» «Ça convient aussi à mon goût personnel d'être dans la marge, avoue pour sa part Christophe De Muylder. Il faut

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bien que quelqu'un soit là où personne n'a envie d'aller.» Mais l'histoire de ces hommes n'est-elle pas des plus lourdes à partager ? Oui, parfois. Le Frère Bessette se souvient d'avoir quitté un cercle un soir, attristé et préoccupé par l'état d'un des hommes. Ce dernier était révolté d'être habité par des envies qu'il savait malsaines. «Il se sentait comme harcelé, agressé par ses pulsions», se souvient-il.

Relation donnant-donnant

Malgré tout, ces bénévoles disent recevoir autant qu'ils donnent, sinon plus, de la relation qu'ils développent avec les membres du Cercle. «On est tous un peu égoïstes; si ça ne nous faisait pas plaisir, on ne le ferait pas», fait remarquer Annick Lavogiez, un sourire en coin. «Je pensais que j'étais vivant en Inde, où j'ai habité pendant plusieurs années, mais je me rends compte à 71 ans que ces hommes me donnent vie, raconte le Frère Fernand Bessette. Quand je vois la volonté qu'ils ont de s'en sortir malgré tout, ça ne peut que me donner vie à moi aussi. La recette de mon bonheur, c'est ça.» Ces hommes sont la preuve vivante de notre capacité à évoluer et nous battre, avancent-ils. «C'est paradoxal que ce soient les pires criminels qui nous donnent foi en l'humanité!», commente Maxime Falardeau. Paradoxal en effet, mais leur bénévolat auprès de ces délinquants sexuels a bel et bien quelque chose d'apaisant, disent-ils. «Je suis toujours impressionné par leur faculté à regarder ce qu'ils sont et ce qu'ils ont fait, souligne Christophe. Ils m'apprennent à me regarder tel que je suis et à essayer de parler des vraies affaires.» «Ça a quelque chose de recadrant de venir ici», conclut Annick. Quelque chose d'extrême, aussi? «Quand je viens au Cercle, je viens discuter; c'est tout sauf extrême, comme bénévolat!», répond-elle sous l'approbation générale de ses pairs.

Les femmes majoritaires On pourrait croire que la proportion de femmes bénévoles auprès des délinquants sexuels est à peu près représentative de notre tablée – une femme pour trois hommes. Au contraire, deux tiers des bénévoles du CSRQ sont des femmes, et 88 % d'entre elles ont moins de 30 ans.

De gauc he à droite : le Frère Fernand Bessette, le policier Maxime Falardeau, le coordonnateur du CSRQ Maxime Janson et Christophe De Muylder. Annick Lavogiez préférait ne pas être photographiée.


DOSSIER

Je vois les cercles de soutien comme la cordée en escalade. Pour des délinquants sexuels, réinsérer la société, c'est pire que de gravir la plus haute des montagnes. Faire ça seul, ce serait suicidaire.  - Le Frère Fernand Bessette

Ce que ces hommes ont de plus monstrueux, on l'a en nous aussi. La ligne est tellement ténue entre la part monstrueuse et la part lumineuse en nous. - Christophe De Muylder

Le Cercle de soutien C'est le seul organisme à offrir des services aux délinquants sexuels. Il vise notamment à accroître la sécurité des collectivités et à diminuer le nombre de victimes d'actes criminels en accompagnant, en aidant et en responsabilisant des personnes qui ont commis des infractions de nature sexuelle et qui retournent dans la collectivité, afin qu'ils mènent une vie responsable et productive.

Mort annoncée : L'organisme devrait être déjà mort. Depuis le 31 mars dernier, il ne reçoit plus aucun financement public. Si ce n'était pas du don personnel du Frère Fernand Bessette, pris à même son héritage familial, l'organisme aurait déjà cessé ses activités. L'équipe peut assurer ses activités jusqu'en septembre prochain, mais après cette date, si rien ne change, le CRSQ n'existera plus. Des dizaines de délinquants sexuels à haut risque de récidive se retrouveront donc sans aucun soutien. 1er juin 2015 | ITINERAIRE.CA

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MOT DE CAMELOT La chance d'avoir encore mon père Depuis que ma mère est décédée, il y quelques mois, je garde sa photosouvenir avec moi en tout temps. J'ai pris la résolution d'être plus proche de mon père. J'ai la chance qu'il demeure à quelques rues de chez moi. Le décès de ma mère plus tôt cette année m'a fait réaliser que les gens qu'on aime peuvent partir à tout moment. Même si je n'étais pas quelqu'un qui était porté à appeler et fréquenter mes proches, j'essaie, depuis que ma mère est partie, de faire le contraire. Mon père est un travailleur infatigable. Il était rembourreur de meubles et il avait trois emplois. À partir de l'âge de 10 ans, j'allais travailler avec lui la nuit pour retirer la housse et les broches des fauteuils. Je l'aidais pour qu'il puisse rentrer plus rapidement à la maison! Comme je l'expliquais dans mon mot de camelot sur la fête des Mères, je n'ai jamais vraiment cru aux fêtes. Ce qui a changé aujourd'hui, c'est que je fréquente davantage ma famille. Je n'ai pas besoin d'une fête en particulier pour les rendre heureux. Merci!

Les fissures dans l'espace Au fil des ans, beaucoup de personnages ont attiré mon attention sur divers phénomènes, matériels ou immatériels. Une vieille femme en fauteuil roulant, rencontrée alors que je travaillais en milieu hospitalier, a, plus que bien d'autres, changé ma vie. Alors que les patients dans sa condition vivaient des heures maussades - légitimement, je dois en convenir - elle avait ce charme, lorsqu'à deux nous nous approchions d'elle pour la mobiliser, de tendre les bras vers nous, de projeter l'extase de son âme dans l'expression de son visage, et de s'écrier: «On va danser!» Pour elle, le simple pivot que nous lui faisions exécuter pour l'installer sur une chaise d'aisance, c'était une danse. J'avais 40 ans, et j'ai désiré être cette femme dans ma vieillesse, afin de n'avoir pas vécu en vain. Elle m'a fait voir les innombrables fissures dans l'espace, à travers lesquelles on peut passer les doigts, et accéder à la poésie, en permanence, en abondance, et à volonté. À mesure que les années se déroulent, que les fardeaux s'accumulent, que la trame de ma vie se transforme en points de suspension là où la mémoire et le raisonnement s'effritent, je reviens naturellement à cette leçon, et je danse lorsque je vous vois, les si beaux humains qui marchent, un pied au sol, l'autre dans l'air, symboles de la raison et de la liberté, qui vous animent intimement à chaque heure du jour et de la nuit.

JEAN-PIERRE MÉNARD Camelot angle Saint-Zotique/ Saint-André et métro de L'Église LORRAINE SYLVAIN Camelot métro Peel

Ma malchance dans les sports J'ai pratiqué beaucoup de sports du primaire au secondaire. Cela me permettait de me dépasser et de rivaliser contre quelqu'un ou une équipe. J'ai dû abandonner le hockey car j'ai été plaqué dans la bande, mon bâton m'a frappé l'estomac et cela m'a coupé le souffle. J'ai eu peur d'étouffer et de mourir. Je me suis ensuite mis à pratiquer le baseball mais j'ai reçu une balle dans l'œil gauche. Après ma guérison, je voyais à peine de mon œil gauche. Décidément, je n'étais pas chanceux. Et la malchance a continué ! Je me suis mis au judo. Lors d'une compétition, un adversaire m'a eu dans une prise de soumission et m'a quasiment étouffé à cause de son poids. En plus, il ne voulait pas lâcher prise! J'aimais bien le judo, donc j'ai ensuite opté pour le karaté. Malheureusement, j'ai reçu un coup qui m'a coupé le souffle. J'ai perdu conscience. Mon entraîneur a dû pratiquer des techniques de réanimation cardiorespiratoire. J'ai finalement dû me résigner à pratiquer des sports moins à risque de blessures, comme le badminton et le volleyball, car je me suis dit qu'il était plus important d'avoir les capacités de gagner ma vie que de devenir handicapé et ne plus être capable de travailler. J'ai appris avec le sport qu'il faut avoir le respect de l'adversaire et accepter qu'on puisse perdre comme gagner.

RÉAL LAMBERT Camelot angle Laurier/Lanaudière

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LE RAPSIM A 40 ANS

Pertinent de 1974 à 2015 Avec la tenue d'un Forum le 23 avril dernier portant sur les enjeux de l'itinérance à Montréal et les défis qui attendent le Réseau, le RAPSIM vient boucler la boucle des festivités de son 40e anniversaire. Les 130 participants présents à la journée provenant de différents horizons, entre autres des 105 membres du RAPSIM, sont venus témoigner de sa pertinence comme acteur de mobilisation, de revendication et de représentation.

INFO RAPSIM

PHOTO : THIBAULT LARQUEY

BERNARD ST-JACQUES | Organisateur communautaire

L

a journée a débuté par un mot du maire Denis Coderre, qui reconnaît le rôle de la Ville à l'égard de l'itinérance, notamment avec un Plan d'action ambitieux adopté sur le sujet. Il a été suivi d'un petit balayage historique de 1974 à 2015. Deux périodes marquantes y ont été approfondies, à commencer par 1987, année internationale du logement des sans-abri. Les réflexions tenues alors ont donné toute une impulsion dans la lutte à l'itinérance en matière de logement (maisons de chambres, etc.), la création de nouveaux organismes et d'une définition. La commission parlementaire sur le phénomène de l'itinérance de 2008 et 2009 tenue dans quatre villes a aussi été mentionnée. Le rapport unanime des députés, qui reprenait bien la demande d'une Politique en itinérance, constituait un bon pas devant mener à l'adoption de cette dernière 5 ans plus tard. Suite à des ateliers tenus en mars, notamment sur six visages de l'itinérance (hommes, femmes, autochtones, etc.), deux réalités montréalaises grandissantes ont été abordées lors du Forum, soit les communautés culturelles et le vieillissement de la population itinérante. Les stratégies menées dans nos organismes revêtent aussi plusieurs enjeux qui ont aussi été soulevés lors du Forum. Par exemple, la réinsertion socioprofessionnelle se trouve bien malmenée actuellement étant donné les coupures dans les programmes gouvernementaux et dans l'accès limité lié au resserrement des critères. L'exercice de la citoyenneté demeure aussi un enjeu, tout comme l'approche de réduction des méfaits, dont on devrait voir bientôt une autre phase de son dévelop-

pement avec la mise en place de sites d'injection supervisée. Le clou du Forum a pris la forme d'un échange en fin de journée sur la situation de l'itinérance autour des paliers gouvernementaux (fédéral, provincial et municipal). Sous l'animation avisée du journaliste Louis Lemieux, le président de la Commission des droits de la personne, Me Jacques Frémont, le maire de Mercier HochelagaMaisonneuve, Réal Ménard ainsi que Pierre Gaudreau du RAPSIM sont venus y enrichir les discussions. L'invitation y était faite de commenter des enjeux, au niveau fédéral d'abord, concernant la réorientation du programme de la SPLI (Stratégie de partenariats de lutte à l'itinérance) par le gouvernement conservateur. Le fait d'aligner d'abord le programme vers l'approche Housing first limitera le financement de services et initiatives nécessaire pour lutter conte l'itinérance. Au provincial, il a été question du nouveau Plan d'action interministériel en itinérance 2015-20, certes déposé en contexte budgétaire difficile, mais qui vient en même temps déployer la récente Politique nationale en itinérance, un outil incontournable venu orienter les principes de l'intervention en itinérance au Québec. Les enjeux au niveau municipal, que l'on retrouve dans le nouveau Plan d'action montréalais (logement, espace public, cohabitation, dénombrement, Services d'injection supervisée, etc.), ont aussi fait l'objet des discussions et des préoccupations soulevées par les participantEs. Cet échange, tout comme l'ensemble de cette journée riche en contenu et en participation, nous a fait prendre conscience de la pleine mesure des défis qui nous attendent dans les prochaines années et de tout le bagage dont nous disposons pour y faire face.

Ce 40e anniversaire a été rendu possible notamment grâce à la contribution du Syndicat des professionnels/les municipaux de Montréal (SPPMM).

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Les athlètes féminines D'hier…

«

PAR JULIE LEVASSEUR

S

i le sport est le lieu par excellence où se définit l'identité masculine, la «participation des femmes ne s'est pas faite sans heurts», écrit d'entrée de jeu Élise Detellier. Dans un Québec sous le joug de l'Église, quand des bourgeoises angloprotestantes de Montréal montent à bicyclette pour la première fois au début du XXe siècle, certains médecins crient au scandale en avançant que cette pratique pourrait causer un orgasme féminin. L'accès au sport a lieu plus tard pour les Canadiennes françaises, vers 1919. Mais l'immoralité et la masculinisation font toujours partie des nombreux « risques » que courent les sportives en s'adonnant à certaines activités sportives. « Les religieux exhortent les jeunes Canadiennes françaises à la modestie pour démontrer leur attachement au modèle traditionnel de la féminité, c'est-àdire demeurer pures pour trouver un mari et fonder une famille », précise l'historienne.

Le sexe faible

La théorie du déterminisme biologique est un autre obstacle de taille. À l'époque, de nombreux médecins considèrent que les capacités physiques des femmes sont naturellement inférieures à celle des hommes. «Pour eux, le corps de la femme est uniquement destiné à la reproduction. Les sportives sont mises en garde contre les blessures causées par des efforts trop exigeants et qui pourraient poser des risques pour leur maternité », commente Mme Detellier.

Partie de volleyball à la Palestre nationale, 27 novembre 1947.

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On ne reconnaît pas assez les efforts des sportives, qui sont présentées comme des athlètes de second rang.

Élise Detellier

PHOTO : BIBLIOTHÈQUE ET ARCHIVES NATIONALES DU QUÉBEC, BANQ

Malgré d'importantes avancées dans la lutte pour l'égalité homme/femme, le ratio du genre dans le sport reste inégal. Les athlètes féminines font face à un adversaire redoutable: la société patriarcale. Retour sur les origines du sport féminin au Québec avec l'historienne Élise Detellier, auteure du livre Mises au jeu: les sports féminins à Montréal, 1919-1961.


SOCIÉTÉ

Le saviez-vous? Dans les années 1890, les premières équipes féminines de hockey apparaissent au Québec. Au début du XXe siècle, le basketball, sport inventé par le Canadien James Naismith, est le sport le plus populaire chez les femmes. Alors qu'elles pratiquaient des sports comme le baggataway (ancêtre de la crosse) à l'époque précoloniale, les femmes autochtones brillent par leur absence en sport. Hormis la balle molle, toute autre activité sportive leur a été interdite pendant de trop longues années.

PHOTO : ARCHIVES UQAM

Le culte de la beauté

Équipe championne de volleyball, 1944

Les femmes doivent donc se contenter de sports adaptés à la «fragilité féminine», comme la natation, la gymnastique, le volleyball ou le basketball. Les règlements y sont modifiés, car les spécialistes estiment aussi que le sport de compétition ne convient pas à la nature féminine. «La pratique sportive devait mettre en valeur des qualités reconnues comme féminines  : la grâce, l'entraide, la délicatesse. Elle devait favoriser l'épanouissement personnel des femmes, à la fois pour maintenir leur santé et rehausser leur beauté», ajoute l'auteure.

La pression des femmes de correspondre à des idéaux de beauté ne date pas d'hier. Après la Seconde Guerre mondiale et particulièrement à compter des années 1960, l'idée de séduction naît dans le milieu des sports féminins, souligne Élise Detellier. L'aérobie transforme le rapport des femmes à leur corps, alors qu'est vendue l'idée du sport pour maigrir et pour plaire. «C'est le début de l'hypersexualisation des sportives, qui se poursuit jusqu'à aujourd'hui avec, par exemple, certaines tenues athlétiques.» Encore en 2015, la culture patriarcale affecte les athlètes féminines, déplore l'historienne. «On ne reconnait pas assez les efforts des sportives, qui sont présentées comme des athlètes de second rang. Tout ce qui peut être lié à la féminité – la beauté, la famille, les relations amoureuses – est mis en avant, aux dépens des performances. Même les salaires sont inférieurs à ceux des hommes.» Élise Detellier estime qu'il reste beaucoup de travail à faire pour l'égalité des sexes dans les sports. Même si les filles et les femmes ont plus facilement accès à un large éventail de sports qu'au siècle précédent, la couverture médiatique des sports féminins n'est toujours pas suffisante. «Il faut davantage de visibilité pour intéresser le public et encourager les jeunes filles à s'inscrire dans des ligues sportives», conclut-elle.

Mises au jeu, les sports féminins à Montréal, 1919-1961

De Élise Detellier, Éditions Remue-ménage, 2015, 300 pages

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... À aujourd'hui Entrevue avec Marie-Ève Nault Bannies des terrains de sport il y a quelques décennies encore, les femmes ont su se tailler, petit à petit, une place dans le sport de haut niveau. À quelques jours du coup d'envoi de la Coupe du monde de soccer féminin qui se tiendra au Canada cet été, L'Itinéraire s'est entretenu avec Marie-Ève Nault, une des trois joueuses québécoises sélectionnées dans l'équipe nationale. PAR NAFI ALIBERT

E

ntre une session d'entraînement et le rituel quotidien des bains de glace pour récupérer; c'est depuis leur camp de préparation à Santa Monica (Californie) que la défenseure au maillot numéro 20 a répondu à nos questions.

L'Itinéraire : Vous vous apprêtez à disputer votre deuxième Coupe du monde. Comment vous sentez-vous?

Marie-Ève Nault : Je suis vraiment très excitée à l'idée de pouvoir jouer dans notre pays, devant nos partisans. Rien que de pouvoir participer à une Coupe du monde, c'est un rêve un soi. C'est une opportunité unique pour une joueuse de soccer.

Est-ce difficile de faire carrière dans le soccer?

Il y a eu des moments difficiles. J'ai fait mon premier camp avec l'équipe nationale en 2003-2004, mais je n'ai pas été recontactée pendant 5 ans, jusqu'en 2009. Ces années-là ont été dures. Il a même fallu que je me trouve un autre travail pour vivre. De nos jours il y a beaucoup plus d'opportunités, mais il faut accepter de s'expatrier, par exemple en Europe où il y a des ligues professionnelles qui permettent de bien vivre de ce sport. Mais il y a encore une dizaine d'années, il n'y avait pas toutes ces possibilités-là.

Qu'est-ce qui vous a amené à choisir ce sport?

PHOTO : CANADA SOCCER/BOB FRID

Ce sont mes parents qui m'ont inscrite au soccer à 7 ans parce que dès que j'ai commencé à marcher, je voulais juste botter tout ce que je voyais sur mon chemin. J'ai tout de suite eu la piqûre. J'ai aussi trouvé en Luce Mongrain un modèle. Comme moi, c'est une fille de Trois-Rivières. Elle jouait dans l'équipe nationale de 1987 à 1995. C'était mon idole. Dès que j'ai su qu'il y avait une fille de mon coin qui avait réussi dans le soccer, j'ai vraiment voulue faire comme elle. Je me souviens de l'avoir vu à Montréal et d'avoir eu son autographe, ça m'avait vraiment marquée et donné, l'envie de représenter un jour, moi aussi, le Canada.

Son plus beau souvenir de carrière Gagner la médaille de bronze aux Jeux olympiques en 2012 avec la victoire 1-0 contre la France. «C'était un des plus beaux moments de ma vie. Il restera à jamais gravé dans ma mémoire.»

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La sélection canadienne se frottera aux meilleures joueuses de la planète cet été lors de la Coupe du Monde FIFA. Entourée de ses coéquipières, Marie-Ève Nault est au premier rang (quatrième en partant de la gauche).


SOCIÉTÉ

On joue un match le 15 juin à Montréal. On espère que le public sera au rendez-vous, car on va avoir besoin de cette 12e joueuse-là.

qu'il y ait enfin eu ce développement pour encourager les femmes à avoir une bonne place dans le sport. Non seulement du côté des joueuses, mais aussi du côté des entraîneuses : il y a de plus en plus de femmes qui font leur marque.

Pensez-vous que le sport soit encore un enjeu pour lequel les femmes doivent se battre pour s'affirmer et exister?

Au niveau mondial, même si notre équipe est mieux classée (8e) que celle des hommes (100e), ils ont quand même plus de support financier que nous qui devons nous battre pour en avoir. Mais je vois que les choses évoluent dans le bon sens. Il y a maintenant de plus en plus de personnes qui se rendent compte que le soccer féminin est tout aussi excitant que le soccer masculin, même si le style est différent.

Et votre public, est-il majoritairement féminin? Aujourd'hui, le soccer est-il votre seule activité professionnelle?

Oui. Ça fait deux ans que je joue comme professionnelle au KIF Örebro, un club en Suède. En général je pars de février jusqu'en juillet pour la saison là-bas. En juillet, j'ai trois semaines de congé. Je repars fin juillet jusqu'à fin octobre.

PHOTO : CANADASOCCER /JEFF VINNICK

Avec le recul, est-ce plus difficile de vivre d'un sport professionnel quand on est une femme?

C'est sûr. Les hommes gagnent des millions, et nous c'est très rare qu'on gagne la même chose pour une saison. Mais du côté féminin on le fait plus pour la passion que pour l'argent.

Qu'est-ce que vous pensez de la condition des femmes dans le sport?

Elle s'est énormément améliorée. Il n'y a pas si longtemps, le soccer était encore uniquement réservé aux hommes. Mais il y a désormais beaucoup de clubs professionnels avec une équipe féminine. C'est bien Après avoir obtenu un baccalauréat en éducation physique à l'université du Tennessee, Marie-Ève Nault a joué dans plusieurs équipes québécoises, mais aussi en France, aux États-Unis et en Ontario. Elle porte le maillot canadien depuis 2009.

Ce sont principalement des femmes, des familles et des jeunes filles qui nous prennent comme des modèles. C'est ce que l'on veut. Avec la venue de la Coupe du Monde, on veut inspirer ces jeunes filles pour qu'elles puissent se dire que c'est possible. Au Québec, le soccer devient de plus en plus populaire. Les équipes nationales commencent dès le niveau U-15, donc pour les moins de 15 ans. On a beaucoup de représentantes québécoises qui en font partie. L'enjeu au Québec est de garder ces filles-là dans le sport de haut niveau et d'essayer de les amener dans l'équipe senior le plus possible. Dans les années passées, on a eu beaucoup de talents. Mais là on est juste trois Québécoises dans l'équipe sénior. On a tellement de talents qu'on pourrait au moins être cinq ou six joueuses.

Alors, quels sont vos pronostics pour la Coupe du monde?

On sait que ça va être très difficile, mais on veut aller chercher le trophée le 5 juillet à Vancouver. Peu de gens y croient, mais on est 23 filles avec un staff, qui y croyons. On va vraiment tout donner pour rendre les Canadiens et les Canadiennes le plus fiers possible de notre équipe.

Son pire moment de carrière La Coupe du Monde en Allemagne en 2011. «Il y avait beaucoup d'attente sur notre équipe, mais on a perdu nos trois matches au premier tour.»

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MOT DE CAMELOT Le travail de la STM Je travaille comme camelot dans une station de métro depuis deux ans. J'observe beaucoup ce qui se passe autour de moi. J'ai travaillé comme garde de sécurité dans le passé et mon expérience m'a amené à observer et étudier les gens. J'ai remarqué que plusieurs personnes manquent de respect envers les employés de la Société de transport de Montréal (STM). Tout d'abord, il y a des gens qui urinent dans les stations de métro! Je vois aussi les employés à l'entretien du métro Cadillac travailler très dur et les étudiants s'amuser comme s'ils étaient dans une cour d'école. À mon avis, les gardes de sécurité devraient être beaucoup plus sévères envers les étudiants, et la STM devrait s'arranger pour qu'ils soient plus encadrés afin d'éviter des blessures ou des accidents graves. Les changeurs de métro sont des gens très gentils qui font du bon travail. À chaque fois que quelqu'un me demande une information, je les dirige vers eux. Souvent, les gens rendent leur tâche difficile parce qu'ils ne lisent pas bien les panneaux ou ils ne prennent parfois pas le temps de s'arrêter et de les lire. Je voulais donc dire aux employés de la STM que j'ai beaucoup de respect pour eux. Ils doivent souvent faire face à des situations délicates.

RHEO GALLANT Camelot métro Cadillac

Solidarité sociale De plus en plus de personnes reçoivent de l'aide sociale. Celles-ci se retrouvent démunies quand le Ministère du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité Sociale (MESS) leur adresse une réclamation s'il juge en avoir trop versé. Beaucoup se sentent démunis face à cette situation, ne savent pas trop quoi faire. Voici donc des informations qui pourraient vous être utiles, car j'ai moi-même eu à gérer de telles situations. Lorsque vous recevez un avis de réclamation, vous avez 90 jours suivant la date de réception pour demander une révision. Si la réclamation est plus que votre budget ne le permet, que vous avez un loyer à payer, etc., et que la saisie par l'aide sociale va vous mettre dans le trouble, je vous suggère fortement de demander une révision. Si vous ne connaissez pas d'avocat, vous pouvez l'inscrire sur le formulaire de révision prévu pour cela. Vous pouvez par ailleurs contester toute décision vous-même sans avocat. Il suffit d'écrire «Je conteste la décision datée du …… avec votre numéro de dossier et la date de la contestation.» Vous pouvez écrire en vos propres mots les raisons de votre contestation, mais cela n'est pas obligatoire. Suite à votre demande de révision, le MESS a 90 jours pour prendre une décision. Si leur verdict ne vous satisfait pas, vous avez 60 jours pour déposer un recours au Tribunal administratif du Québec. Si le MESS n'a pas pris de décision au bout des 90 jours, vous pouvez vous adresser directement au Tribunal administratif. Le Tribunal administratif vous proposera peut-être une conciliation entre vous et l'aide sociale. Si aucune conciliation n'est possible, le Tribunal prendra une décision. Mes expériences y sont assez bonnes et gagnantes.

ANNE-MARIE BONIN Camelot angle Beaubien/Saint-André

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HORS PISTE

Pollution et inégalités Je me considère comme un écologiste en herbe : cela fait trente ans que je m'intéresse à l'environnement et à l'écologie. Un membre de ma famille est cultivateur et acériculteur. J'ai toujours été fasciné par son travail. Mes émissions préférées sont La Semaine verte et Découverte, à Radio-Canada… J'en apprends beaucoup! Je trouve que c'est très important de préserver notre environnement. BENOÎT CHARTIER | Camelot IGA Place Bercy et Métro Radisson

A

ujourd'hui, les composantes des pluies acides, c'est-à-dire l'anhydride sulfureux (SO2) et l'oxyde d'azote (NOx), participent de plus en plus au réchauffement de la planète, à l'acidification des sols et de l'eau. Des ententes supposées de bonne foi sont prises par les différents paliers de gouvernement depuis 1970, mais la situation empire. Voici quelques exemples des conséquences des pluies acides sur l'environnement : • En Suède, les canalisations d'eau potable en cuivre sont atteintes de corrosion importante causée en partie par l'acidité, provoquant de graves maladies chez les enfants. Pourtant, j'ai appris à la Semaine verte que le pays a été un des premiers, avec les pays scandinaves, à étendre de la chaux sur la glace l'hiver pour contrer l'acidité de l'eau. • Les coquilles d'œufs des oiseaux sont de plus en plus minces. Le feuillage des arbres est moins abondant, ce qui donne moins d'abris pour les insectes dont se nourrissent les oiseaux. La sève des érables est moins abondante, ce qui conduit à une moins grande production de sirop, d'où son prix plus élevé. • Les pluies acides éliminent du sol par le lessivage des substances nutritives telles que le magnésium, le calcium, le potassium dont les arbres ont besoin pour survivre, faisant même disparaître leur feuillage et leurs aiguilles (site web).

Répartition de la population 50% 30% 10% 10%

Répartition de la richesse 86% 0,5% 5,5% 8%

À l'émission La Semaine verte, on a parlé d'étendre de la chaux sur les érablières par hélicoptère en hiver. Cela coûte très cher pour augmenter la production de sirop d'érable, mais a des conséquences néfastes sur l'environnement et la santé. L'exploitation et l'utilisation du pétrole ont également des effets sur l'environnement. On rêvait de le remplacer par un carburant non-polluant. On a découvert du pétrole en Alberta… cela a changé les plans! On parle aussi de pétroliers et de pipelines traversant le Québec… Et ce n'est pas fini! On étouffe les chercheurs éco- La dégradation de logistes afin de favoriser les lobl'environnement byistes du pétrole. Ceux-ci sont contrôlés par des multinationales est un phénomène qui détiennent toute la richesse. catastrophique En effet, 10 % des gens les plus riches du monde détiennent 86 % où les recherches de la richesse mondiale en ne sont bâillonnées pensant qu'à leurs propres profits au lieu de penser à l'environneà grands coups ment qui nous entoure. Tout en haut de l'échelle, les forde coupures de tunés ne représentent qu'une pesubventions. tite frange de la population (0.7 %) alors qu'ils détiennent plus de 41 % du patrimoine mondial. Cela signifie que 31,7 millions d'adultes ont un patrimoine de plus d'un milllion de dollars dont 98 663 qui possèdent une fortune supérieure à 50 millions de dollars. À l'opposé, la moitié de la population mondiale ne dispose que de 0,5 % de toute cette richesse. C'est donc dire que la moitié des habitants de la planète ne possèdent pratiquement rien… Ces gens courent à leur propre perte ainsi qu'à la nôtre au nom du profit. Quand l'air sera devenu irrespirable, iront-ils chercher de l'oxygène sur la planète Mars ? On y a découvert de l'eau ! Sources : La Semaine verte, 2011. «Chaulage dans les érablières».

Source : Global Wealth Databook (2013)

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DANS LA TÊTE DES CAMELOTS Pour 10 sous Dans la boîte du pick-up Quand j'avais neuf ou dix ans, mon père bâtissait une maison en campagne. J'y allais parfois avec lui. Ce que je préférais c'était quand on roulait sur un chemin de terre et que j'embarquais dans la boîte arrière de son camion. Il ne voulait pas toujours donc il fallait que je le supplie. J'aimais beaucoup rouler sur les bosses, avec la boucane. CYBELLE PILON - CAMELOT ANGLE SAINT-HUBERT/ SAINT-ZOTIQUE

Souvenirs de mon père

Quand j'avais cinq ans, mon père m'a emmené prendre une marche sur l'île Sainte-Hélène. À un moment donné, il m'a pointé un 10 sous qui traînait par terre. Il m'a dit de le prendre et d'aller me chercher une crème glacée. Je savais bien que c'était lui qui l'avait fait tomber. C'était en 1957. Avec 10 sous, j'en avais assez pour m'acheter deux fudges. MICHEL HOULE - CAMELOT MÉTRO PAPINEAU

Le premier héros, le premier modèle : le père habite souvent les plus beaux moments de l'enfance. À l'approche de la fête en leur honneur, les camelots de L'Itinéraire vous racontent leurs meilleurs souvenirs.

Taquiner le poisson

Planter un arbre

Le plus beau souvenir que je garde de mon père, c'est nos parties de pêche à la morue. Je viens d'une famille de pêcheurs de la Gaspésie, j'ai ça dans le sang. J'y retourne encore quand je vais passer des vacances à Grosse-Roche, mon village natal. Je ne me tannerai jamais de ce sentiment de liberté que j'éprouve en pêchant.

Quand j'avais sept ans, j'ai planté un arbre dans la cour arrière avec mes parents et mon frère. Il était aussi petit que moi à l'époque. Depuis, presque 20 ans plus tard, il est devenu très touffu et fait près de trois étages de haut. Je suis très proche de la nature, c'est sûrement pour cette raison que ce moment m'a autant marqué.

CLAUDINE BOUCHER - RESPONSABLE DES LOISIRS

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MARIO REYES ZAMORA - PRÉPOSÉ À LA CUISINE


Un drôle d'incident Il est arrivé un incident qui nous a bien fait rire, mon père et moi, quand j'avais 20 ans. Ma mère préparait des fèves au lard à l'autocuiseur. D'un seul coup, elles sont toutes sorties par l'unique trou du couvercle et ont défoncé le plafond! Les pompiers ont dû intervenir. Ce soir-là, pour nous changer les idées, j'ai emmené mes parents au cinéma voir La tour infernale, sans me douter que le drame tournait en fait autour d'un incendie! On n'a pas dormi de la nuit. BENOÎT CHARTIER - CAMELOT MARCHÉ IGA PLACE FRONTENAC ET MÉTRO RADISSON

Le tour de la Gaspésie Quand j'avais environ sept ans, on a fait le tour de la Gaspésie en famille. C'est un des seuls voyages dont je me rappelle. C'était une saison où il mouillait pas mal donc on n'a pas pu visiter grand-chose, mais on a mangé de la morue dans des restaurants et on a acheté des souvenirs. On est allé à Percé et on a marché dans l'eau jusqu'au rocher. YANNICK LAROUCHE - CAMELOT MÉTRO BEAUBIEN

Sur le perron de l'église Mon plus beau souvenir de mon père, c'est quand je le voyais devant l'église en me promenant avec ma mère. Il vivait dans la rue, mais elle me le cachait parce que j'étais trop petit. J'allais souvent le voir. Une fois, je lui ai sauté dans les bras et il m'a parlé dans l'oreille, c'était tout ce qu'un enfant peut vouloir de son père. Après son décès, j'ai pris une fleur et je l'ai déposée sur la dernière marche de l'église où il se tenait. J'ai regardé vers le ciel et j'ai eu une pensée pour lui. SYLVAIN PÉPIN-GIRARD - PRÉPOSÉ À L'ENTRETIEN MÉNAGER

L'art de boulanger Mes parents étaient cultivateurs. Quand j'avais neuf ans, mon père m'a dit qu'il allait m'apprendre à boulanger, vu que j'étais la plus vieille des filles de ma famille. Il m'a donc montré comment préparer un pain de ménage, avec la technique et la recette. Il a dû m'aider à pétrir la pâte parce que ce n'était pas facile à neuf ans, avec mes petits poings. Pour une première fois, ça avait assez bien été, j'ai bien aimé mon expérience. GISÈLE NADEAU - CAMELOT MÉTROS IBERVILLE ET JARRY

Décollage J'adorais travailler avec mon père à la cantine mobile de l'aéroport Dorval quand j'étais jeune. De sept à neuf ans, je m'assoyais dans son camion toute la journée et j'observais ce qui se passait autour de moi. J'aimais surtout regarder les avions décoller. C'était tellement impressionnant dans les yeux d'un enfant.

STÉPHANE AVARD - CAMELOT MÉTRO PLACE-D'ARMES

Travail père-fils Mon plus beau moment avec mon père, c'était travailler avec lui. Il était chef infirmier dans des hôpitaux. On a eu ben du fun. J'aimais prendre soin des êtres humains, aider les gens. Ça nous a rapprochés, mon père et moi. Il m'a montré plein d'affaires. C'est mon héros pour la vie. SYLVAIN CLOT - CAMELOT ANGLE SAINT-DENIS/ONTARIO

Sous l'eau Jusqu'à mes neuf ans, j'allais me baigner avec mon père et mes deux frères dans un lac de Sainte-Victoire, près de Sorel. On y faisait de la plongée, avec des masques et des palmes. Quand on était au fond de l'eau et prêt à remonter à la surface, on s'accrochait à notre père et on lui donnait le signal. Lorsque j'en ai reparlé avec mes petits frères il y a deux ans, on a convenu que c'était les beaux moments de notre enfance! YANNICK BRASSARD - CAMELOT ANGLE RENÉ-LÉVESQUE/DE LORIMIER

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CHEMIN FAISANT

À fleur de peau Jusqu'à l'âge de 19 ans, j'ai refoulé mes émotions et mes besoins. À force de tout garder à l'intérieur, la pression devenait trop forte. Par moment, j'étais totalement envahie par des émotions négatives et je tombais en état de crise. Sans le vouloir, je devenais agressive envers mon amoureux et ma famille. Pourtant à l'extérieur de la maison, j'avais l'air calme et ne parlais pas beaucoup. MARIE-ANDRÉE BARIL | Chroniqueuse de rue

de faire une crise. Je me pose alors les questions: comment est-ce que je me sens? Quels sont mes besoins? Cet exercice m'apaise et me permet de retrouver peu à peu ma paix intérieure.

Demandes

Plus je sais ce que je veux et plus je précise à l'autre les actions concrètes que j'attends de lui, meilleures seront les chances qu'il accède à mes demandes. Je tente de verbaliser ce que je veux au lieu de ce que je ne veux pas. Il peut être fort utile de demander de la rétroaction à mon interlocuteur pour vérifier s'il a bien Observation J'ai maintenant compris mon message et s'il est enclin à répondre La première étape d'une communication adéquate à ma demande. S'il n'y est pas disposé, je souune relation est d'identifier les faits de façon objective. Dans un haite faire preuve de compréhension à son égard monde idéal, je décrirais les faits de façon conforme et non le faire sentir coupable. Mes demandes ne beaucoup plus à la réalité sans les interpréter. Premièrement, cette doivent pas être des exigences, car dans un tel cas méthode m'évite bien des souffrances inutiles pro- harmonieuse avec j'utilise la manipulation au détriment de la relavenant de pensées erronées. Deuxièmement, une tion. Je souhaite que les autres répondent à mes moi-même et simple observation dénuée de tout jugement perdemandes seulement s'ils en ont le désir sincère. met à mon interlocuteur de dialoguer avec moi sans Je tente d'appliquer cette méthode de commuavec les autres. se sentir critiqué. Cette méthode crée une ouvernication depuis environ sept ans, et je peux dire ture pour un échange bienveillant, ce qui m'a vraiqu'elle donne des résultats concrets. Je me sens ment manqué durant ma jeunesse. libérée d'un lourd sentiment de culpabilité, et j'ai pris conscience que mes besoins sont aussi importants que ceux Sentiments des autres. Cette méthode m'a donné les outils nécessaires pour En effet, l'éducation qui m'a été donnée ne m'a pas appris à écou- prendre ma place et m'affirmer librement. ter mes sentiments et à m'ouvrir aux autres. Par conséquent, j'ai toujours eu de la difficulté à identifier et dire ce que je ressens. Aujourd'hui, je m'efforce d'exprimer mes sentiments en prenant le temps d'écouter ce qui se passe en moi, car je ne peux pas être en contact avec les autres sans l'être avec moi au préalable. Lorsque je suis moi-même troublée, je ne peux pas offrir à l'autre une vraie disponibilité; il faut d'abord que je m'occupe de moi et que je trouve l'empathie dont j'ai besoin.

Besoins

Il est important que je sois à l'écoute de mes sentiments, car ils agissent comme un système d'alarme pour m'indiquer si mes besoins sont satisfaits. À présent, si je ressens des émotions fortes, je me retire au lieu

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PHOTO : DELPHINE BERGERON

C

omment allais-je gérer mes émotions? Comment allais-je en arriver à m'exprimer et m'affirmer sans blesser personne? J'ai trouvé des réponses à ces questions cruciales dans un livre intitulé: Les mots sont des fenêtres (ou bien ce sont des murs) : Introduction à la Communication non violente de Marshall Rosenberg. J'y ai appris de nouvelles techniques de communication facilement applicables qui m'amènent à mettre l'accent sur quatre éléments. Je décris d'abord les faits de la situation conflictuelle, je parle de mes sentiments, j'exprime mes besoins et je formule une demande.


MOT DE CAMELOT L'itinéraire de la démocratie Histoire de mon enfance Je suis né à Amqui dans le Bas-Saint-Laurent. Le plus loin que je me souvienne de mon enfance, avec mes parents, nous avons souvent déménagé. À l'âge de six ans, je vivais à Montréal dans un motel. Ma mère ne travaillait pas encore et mon père avait trouvé un emploi comme éboueur. C'était un travail à temps partiel, donc nous n'avions pas beaucoup d'argent. Nous allions à l'école mon frère et moi. Ma mère nous avait mis un cordon autour du cou avec l'adresse du motel pour qu'on puisse retrouver notre chemin. Comme j'étais gaucher, les sœurs qui nous enseignaient me frappaient sur les mains pour que j'écrive de la main droite, ce que ma mère n'appréciait pas beaucoup. Quand j'avais sept ans, mon père a trouvé un travail comme bûcheron dans le bois. C'était un emploi mieux rémunéré. Ma mère, elle, a trouvé un emploi dans une usine de valises. Nous avons donc déménagé dans un petit appartement proche d'un parc. C'était un appartement assez confortable, proche de notre école. Il était facile pour mon frère et moi de retrouver notre chemin. Ma mère nous faisait tous les matins un petit lunch. Quand je revenais à la maison à la fin de la journée, j'aimais beaucoup sauter sur le lit. Une fois, je suis tombé et je me suis disloqué le pouce que j'ai replacé moi-même. Plus tard, nous avons encore déménagé au coin de Panet et Ontario. J'ai donc dû me refaire d'autres amis. Serge, l'un d'entre eux, habitait à l'étage en dessous. Il a eu une peine d'amour et il est pendu dans sa chambre. Cela m'a marqué puisque c'était un bon ami, on faisait toutes sortes de mauvais coups ensemble. Quand j'étais en 7e ou 8e année, j'allais voler des concombres avec lui et d'autres amis. C'était durant les années de l'Expo 67. C'ÉTAIT LE BON VIEUX TEMPS.

GAÉTAN DURETTE Camelot angle Ontario/Bourbonnière

Droit et liberté De manifester tout court Pour éviter de devenir Un état totalitaire! Démocratie internationale Droit et liberté De manifester contre l'austérité Nations unies Contre l'austérité Nations unies Contre le recul social Nations unies Pour le progrès social De la nourriture pour tous La fin de la faim De l'eau pour tous La fin de la soif Un toit pour tous Tous à l'abri Accessibilité à l'éducation La fin de l'ignorance Nations unies Pour que les gens de toutes les couleurs de peau vivent en harmonie La fin du racisme Pour la fin des préjugés entre les jeunes et les vieux Une bonne relation intergénérationnelle L'égalité homme femme Le droit des femmes Respecté à travers le monde Autant que celui des hommes Plus de haine des femmes Plus de féminicide En Arabie saoudite En Inde Et en Chine Ni nulle part La fin de l'apartheid sexiste Envers les femmes de l'Arabie Saoudite

RICHARD LAROCHELLE Camelot métro McGill

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Dignité Pauvreté

Plus de six millions de personnes à travers le monde votent pour la dignité en achetant un journal de rue. En agissant ainsi, ils participent à changer la vie de 27000 camelots dans 40 pays, représentant plus de 120 journaux de rue différents. En retour, les lecteurs profitent d’un journalisme indépendant de qualité, tout en sachant qu’ils ont fait une différence.

Votez pour la dignité.


Série sur l'Histoire de la pauvreté au Québec

CLIN D'ŒIL DU PASSÉ

La pauvreté est une réalité qui ne date pas d'hier, et les ressources pour la combattre non plus. À travers une série de dix textes, L'Itinéraire dresse un portrait historique de l'aide offerte aux personnes vulnérables et en situation d'itinérance au Québec depuis la colonisation.

La guerre : entre pauvreté et prospérité Après 10 années de crise et de misère économique, une autre catastrophe frappe : le Canada déclare la guerre à l'Allemagne, la Deuxième Guerre mondiale bat son plein. Une tragédie humaine innommable... mais qui permettra au Québec de recouvrer une prospérité économique. Triste paradoxe. PAR MARTINE B. CÔTÉ

PHOTO : COMMONS.WIKIMEDIA.ORG

L

a crise de 1929 et la Grande Dépression qui en a découlé ont plongé le Québec, et Montréal particulièrement, dans des conditions misérables. L'appauvrissement frappe sans distinction les classes sociales, le chômage atteint la barre des 27 % en 1933. Le Canada entre en guerre et le conflit devient rapidement une «planche de salut» économique. Les ouvriers au chômage et les jeunes partent au front et c'est le début des industries de guerre, qui embauchent à tout vent. Même les femmes feront leur entrée sur le marché du travail pour contribuer à l'effort de guerre. En 1943, on assiste même à une pénurie de main-d'oeuvre estimée à 19 000 ouvriers.

Avec la guerre, les classes sociales, qui s'étaient quelque peu diluées pendant la Grande Dépression, se reforment plus nettement, faisant grimper en flèche la masse de prolétaires. Les agriculteurs continuent de délaisser leur terre pour rejoindre la ville et les usines amenant ainsi une pénurie de logements. De 1939 à 1945, la construction domiciliaire est presque arrêtée, les gens s'entassent dans de petits espaces existants.

« Mardis et vendredis maigres »

Sacrifier sa santé, sa vie et sa famille à défendre le Canada en guerre donne aux citoyens un sentiment accru de leurs droits d'attendre, «en retour», qu'on s'occupe de leur sécurité sociale. Les syndicats se multiplient et font pression sur le gouvernement. En cette période où peu de biens sont disponibles pour l'achat, l'État voit d'un bon oeil la perception de cotisation et accepte de créer, en 1940, un système d'assurance-chômage. Peu de temps après, en 1945, la Loi sur les allocations familiales entre en vigueur non sans controverse. Maurice Duplessis y voit de l'ingérence du fédéral alors que le clergé peste contre le fait que les chèques soient versés aux mères, y voyant une attaque à l'autorité du père de famille. L'État-providence commence tranquillement à s'élaborer, mais plusieurs catégories de personne restent négligées, voire ignorées. Seuls 42 % des travailleurs peuvent cotiser à l'assurance-chômage et les mères immigrantes sont privées d'allocations familiales. C'est avec la mort du premier ministre Maurice Duplessis et les années 1960 que prend forme un réel état soucieux de redistribuer la richesse, et ce, de façon universelle.

Mais si la croissance économique monte, elle amène dans son ascension une dégradation des conditions de vie et de travail. Les journées de travail durent de 10 à 12 heures, les salaires sont normés et les augmentations de salaire sévèrement contrôlées. Les femmes travaillent elles aussi en usine, mais en échange de salaires beaucoup plus bas que ceux des hommes, souvent sur des quarts de nuit. Au petit matin, c'est l'autre journée qui commence avec les tâches domestiques et les soins aux enfants. L'État finit par mettre en place quelques garderies, moins pour soulager les femmes que pour mettre un frein au phénomène de plus en plus présent des enfants qui errent, seuls, dans les rues... Même si les industries de guerre fonctionnent à plein régime, on en demande toujours plus aux travailleurs. Avec la conscription, une logique s'installe : « enrôlez-vous ou crevez de faim.» Pour nourrir les flottes parties au combat, l'État instaure, dès 1943, des rationnements. Peu à peu, les familles recevront des ordres de consommer des quantités maximales de sucre, de thé, de café et de beurre. Puis, vient le rationnement sur la viande, qui mettra en péril le commerce de plusieurs bouchers. C'est le début des « mardis et vendredis maigres », imposés tant aux familles qu'aux restaurants.

Vers l'État-providence

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PAR YANNICK BRASSARD, JULIE LEVASSEUR ET LAURENCE RICHARD

LIVRES

Loin de chez soi L'histoire vécue d'une petite Polonaise qui n'avait que 10 ans lorsqu'Hitler a envahi son pays. Déportée de son petit village du nord-est de la Pologne, elle est envoyée dans un camp en Sibérie, où elle travaille dans une. Elle doit s'adapter aux conditions sibériennes : famine, isolement et solitude, en plus de l'hiver qui n'en finit plus. Bien que le thème du livre soit lourd, le style de l'auteure est léger, facile et agréable. Il est narré à la première personne, ce qui en fait un témoignage profond d'une survivante de l'holocauste. (YB)

La steppe infinie

Esther Hautzig, Médium, 252 pages

Prisonnière des préjugés «Ne jugez pas un livre à sa couverture». Le proverbe est doublement vrai pour cet ouvrage autobiographique, bien plus intéressant qu'il n'en a l'air à première vue. Combattre les préjugés est d'ailleurs le cheval de bataille de la narratrice, une ex-détenue qui aide des femmes en réinsertion. Ce livre bouscule certaines idées préconçues sur les personnes qui doivent répondre de leurs actes devant la justice. Comme en témoigne l'histoire de Geneviève Fortin, c'est une mésaventure qui peut arriver à n'importe qui. Celle qui a grandi «dans la ouate», dans une famille modèle, s'est tout de même retrouvée à la rue sur fond de criminalité pendant 15 ans. Elle partage son expérience du système carcéral, en précisant que la pire prison pour les détenues est la «marque au fer rouge» invisible qui les suit une fois dehors. (JL)

Des deux côtés de la prison.

Geneviève Fortin et Martin Forgues, Éditions Parfum d'encre, 246 pages

Un médecin dans la toundra Comment un roman qui mêle parties de pêche, médecine et froid nordique peut-il s'avérer passionnant? Grâce à sa plume dynamique et à sa façon unique de raconter, Jean Désy captive pourtant le lecteur. Fort d'une quarantaine de récits parfois drôles, parfois tragiques, ce 34e ouvrage du médecin-conteur illustre la souffrance, la vulnérabilité, mais aussi la fierté qui habitent les peuples du Nord. Très humble, l'auteur raconte avec beaucoup d'humanité ses interventions médicales, ses nouvelles amitiés et ses excursions dans la toundra, dont il est visiblement tombé amoureux. Désy en profite pour se questionner sur les fondements de la médecine, les relations humaines et les vices de la société. Un grand conte qui fait rêver et réfléchir. (LR)

L'accoucheur en cuissardes

Jean Désy, Éditions XYZ, 221 pages

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PANORAMA

PAR LAURENCE RICHARD

Capturer l'insolite

PHOTO : VÉRONIQUE ALLAIRE

Les grands oubliés de la ville seront à l'honneur lors de l'exposition Voyage à travers l'Insolite. L'artiste Véronique Allaire y dévoile ses photographies Abandon de natures mortes inspirées de la rue, un univers qu'elle affectionne depuis ses débuts. Grâce à son appareil photo, elle immortalise des objets abandonnés pour en retirer les émotions qui s'y cachent. La photographe capture ainsi, souvent en noir et blanc, parfois en couleur, ce qui nous est invisible : un parapluie abandonné, un vieux pneu jeté, un bout de tissu prisonnier de fils électriques par exemple. «Mes clichés traitent de l'oubli, de ce qui est devenu encombrant Mike ou inutile, exactement comme sont perçues les personnes en situation d'itinérance. Ces êtres humains survivent dans la rue et vivent l'abandon», explique l'artiste. Cette quête des objets insolites la conduit à prendre des portraits d'individus qui habitent la rue, avec lesquels elle crée des liens «qui vont au-delà de la photographie». Touchée par le phénomène de l'itinérance, Véronique Allaire s'implique depuis janvier auprès de l'association SOS Itinérant. Une partie des profits des ventes de l'exposition sera d'ailleurs remise à l'organisme pour contribuer à l'achat d'un chapiteau.

«Voyage à travers l'Insolite» au Bloc

du Boucher (2000, av. Mont-Royal E.) jusqu'au 11 juin.

L'univers coloré de Yinka Shonibare La fondation DHC/Art présente actuellement Pièces de résistance, une exposition regroupant une vingtaine d'œuvres de Yinka Shonibare MBE, un artiste britannique reconnu pour son exploration – souvent teintée d'humour – de l'identité culturelle et du partage des pouvoirs entre classes sociales, races et genres. Shonibare critique la société moderne avec originalité et légèreté. Ses pièces rappellent le parallèle qui subsiste entre la colonisation et les inégalités sociales d'aujourd'hui. Librement inspirées de faits historiques, les œuvres traitent d'enjeux actuels mettant en scène des personnages connus du passé. Il s'agit d'une façon pour l'artiste de «ne pas pointer du doigt les coupables de notre époque». L'artiste d'origine nigériane capture le regard grâce à son univers très coloré, enrichi par l'utilisation du tissu wax, qui a contribué à sa renommée mondiale. Ce pagne, riche et somptueux, a des origines confuses datant de l'époque coloniale : porté en Afrique, il est en fait conçu en Hollande. Une appropriation culturelle et identitaire qui est intimement liée au travail de l'artiste. «Pièces de résistance» exploite la peinture, la sculpture, la photographie, ainsi que le cinéma, ce qui en fait une exposition très dynamique. DHC/Art offre des visites guidées gratuites sur l'heure du midi ou sur réservation : le meilleur moyen de plonger à fond dans l'univers particulier de l'artiste.

«Pièces de résistance» de Yinka Shonibare jusqu'au 20 septembre au DHC/Art (451 rue St-Jean). GRATUIT. ADDIO DEL PASSATO (EXTRAIT). 2011. VIDEO PHOTO : YINKA SHONIBARE MBE / SOUS LA LICENCE DE SODRAC / AVEC L'AIMABLE CONCOURS DE JAMES COHAN GALLERY, NEW YORK ET SHANGHAI

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LE JOSÉE FLÉCHÉ

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l’Église firmaments donnerait-elle ce titre à un inverti? onéreux fidèle

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SOLUTION DU 15 MAI Réponses du2015 15 mai 2015 Réponses du 1er juin

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« Je m'appelle Josée, je travaille à la distribution et voici mon petit fléché »

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V Solution dans le prochain numéro

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L E résidu de houille

B R A I

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JOSÉE CARDINAL | Distributrice

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1 2 3 HORIZONTALEMENT 1. 4Registre pharmaceutique. 2. Derme. -­‐ Criera. 3. 5Dépouillai des meilleurs éléments. -­‐ Années. 4. Mouvement des membres postérieurs d'un équidé. -­‐ Prénom de la romancière Triolet. 5. 6Pomme. -­‐ Dont le cours est ferme. -­‐ Pronom. 6. Qui repose sur des témoignages. 7. 7Bordures. -­‐ Navire. 8. Id est. -­‐ Déesse égyptienne. -­‐ Trois. 9. 8Souveraines. -­‐ Veau mort-­‐né. 10. Existes. -­‐ Régnèrent. 1 9 VERTICALEMENT 1. Chirurgicale. 10 2. Retrouvées.

4 HORIZONTALEMENT 2 8 1. Partisanes d'un État centralisé. -­‐ Erbium. 9. Répartir. 3Coquerets. 2.

3. Déversoir d'un étang. Solution dans le prochain numéro 4. Rivière d'Afrique du Nord. -­‐ Coloré. 5. Croiser. 6. Nuança. -­‐ Éminence. -­‐ Unité de sensibilité. 7. Rendons fou. Jeu8. Sréalisé par-­‐ Satellite. Josée-­‐ Cale. Cardinal | joseecardinala1@yahoo.ca ans vêtements.

HORIZONTALEMENT 1. Partisanes d'un État centralisé. - Erbium. 2. Coquerets. 3. Court. - Qui ont deux côtés égaux. 4. Fonça. - Retenu. - Radon. - Puis. 5. Interrogea. 6. Bondit. - Mauvaise odeur. 7. Transpirations. - Condensation. 8. Personnage cinématographique. - Pronom. - Nazi. 9. Relative à un groupe. - Prêtresse d'Héra. 10. Plantes. VERTICALEMENT 1. Gesses. 2. Tas. - Véhicules. 3. Cavalier russe. - Pulsions. 4. À quel endroit ? - Se dit d'un frère. 5. Cassées. - Champion. 6. Nés. - Terre entourée d'eau. 7. Nouveau. - Tour. - Monnaie. 8. Récipient. 9. Art théâtral. 10. Alu. - Sortis. - Au. 11. Qui concernent les peuples de la mer Égée. 12. Demeurâtes.

10. Victoire de Napoléon. -­‐ Refuge. 11. Légumineuse. -­‐ Lui. -­‐ Atome. Solutions du 15 mai 2015 12. Roulement de tambour. -­‐ Clé. -­‐ Tout-­‐terrain.

3. Court. -­‐ Qui ont deux côtés égaux.NIVEAU DE DIFFICULTÉ: DIFFICILE Placez un chiffre de 1 à 9 4. Fonça. -­‐ Retenu. -­‐ Radon. -­‐ Puis. 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 dans chaque case vide. 2 5 Chaque ligne, chaque R D O N N A N C I E R 1 O 5. I nterrogea. colonne et chaque boîte U L U L E R A 2 P E A U 3x3 délimitée par un trait 4 8 9 4 E C R E M A I A N S 3 plus épais doivent contenir 6. B ondit. -­‐ M auvaise o deur. tous les chiffres de 1 à 9. E L S A C 4 R U A D E Chaque chiffre apparaît P TIranspirations. T E N U -­‐ SCondensation. I L 8 1 3 7 5 6 55 A 7. 8 donc une seule fois dans T E S T I M O N I A L E 6 une ligne, dans une colonne R PEersonnage E S N cinématographique. E F S F et dans une boîte 3x3. 7 O 8. -­‐ P9ronom. -­‐ Nazi. 4 5 I S I S I I I 8 I E E RI elative N E à S un gV roupe. E L O-­‐ Prêtresse T 9 R 9. d'Héra. NOTRE LOGICIEL 3 2 9 T R O N E R E N T DE SUDOKUS EST 10 E S MAINTENANT 10. Plantes. DISPONIBLE. 2 7 8 4 7 8 6 9 2 3 5 1 10 000 sudokus inédits de VERTICALEMENT niveaux par notre expert, 6 3 2 1 4 5 8 9 7 6 4 1 8 9 4Fabien Savary. En vente exclusivement sur 5 1 3 8 7 2 6 4 1. 9Gesses. notre site. 1 4 7 9 5 3 6 2 8 2. 2Tas. -­‐ V éhicules. www.les-mordus.com 8 9 4 1 6 7 3 5 6 3 7 r2usse. 8 4-­‐ P 1ulsions. 9 4 3 1 3. 5Cavalier 3 9 5 8 6 4 1 7 2 Solution dans le prochain numéro 4. 8À 2quel 6 5endroit 7 1 9? -­‐4 Se 3 dit d'un frère. 7 1 4 2 3 9 5 8 6 5. Cassées. -­‐ Champion. Jeu réalisé par Ludipresse | info@les-mordus.com 6. Nés. -­‐ Terre entourée d'eau. 2 5 9 1 4 6 8 3 7 7. Nouveau. -­‐ Tour. -­‐ Monnaie. 7 3 6 8 9 2 5 4 1 1 juin 2015 | ITINERAIRE.CA 45 4 8 1 3 7 5 9 6 2 8. Récipient. 9 1 8 2 3 4 7 5 6 er

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A PROPOS DU...

DON C'est rusticité que de donner de mauvaise grâce: le plus fort et le plus pénible est de donner: que coûte-t-il d'y ajouter un sourire?

Donner est un plaisir plus durable que recevoir, car celui des deux qui donne est celui qui se souvient le plus longtemps.

Jean de La Bruyère

Chamfort

Plus le sage donne aux autres, plus il possède.

La promesse a des jambes; seul le don a des mains.

Lao-Tseu

Proverbe allemand

Le bonheur est souvent la seule chose qu'on puisse donner sans l'avoir et c'est en le donnant qu'on l'acquiert.

L'amour est avant tout le don de soi-même. Jean Anouilh

Voltaire

Ce qui compte ce n'est pas ce que l'on donne, mais l'amour avec lequel on donne. Mère Teresa

On se donne en donnant. Marcel Mauss

H. Jackson Brown

Sainte Catherine de Sienne

Quand je paye une dette c'est un devoir que je remplis; quand je fais un don c'est un plaisir que je me donne. Jean-Jacques Rousseau

Vous ne donnez que peu lorsque vous donnez vos biens. C'est lorsque vous donnez de vousmêmes que vous donnez réellement. Khalil Gibran

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ITINERAIRE.CA | 1er juin 2015

PHOTO : 123RF.COM/TEERAWUT MASAWAT

Si tu ne peux donner à tes enfants les meilleures choses du monde, donne-leur le meilleur de toi-même.

Il n'y a que les imparfaits qui regardent plus au don qu'au donateur.



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9 - 10 JUIN 2015

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