Maladies rares :Les orphelines du système de santé algérien

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Maladies rares :

Les orphelines du système de santé algérien Sans jeu de mots aucun, les maladies orphelines le sont, véritablement, en Algérie, où leur prise en charge est, fortement, aléatoire. Le problème ne se pose pas tant dans les thérapeutiques, mais, plutôt, dans la faiblesse des moyens de dépistage et de diagnostic. Evidemment, aucun chiffre fiable ne quantifie le nombre d’algériens, atteints de maladies rares.

Par

L

e cas de Manil Blidi, un bébé bulle de huit mois a créé, durant tout le mois de janvier, le buzz sur les pages facebook algériennes. L’enfant, souffrant d’une maladie rare - un déficit immunitaire nécessitant une greffe de la moelle osseuse - a été pris, pendant des jours, en otage d’un conflit entre la Caisse nationale de sécurité sociale et celle de France, sur une histoire d’impayés. Le transfert de cet enfant, en France, pour subir une greffe n’a pu se réaliser que grâce à une mobilisation, sans faille, de la presse nationale et des internautes. Audelà de ce qui peut être assimilé à un fait divers, c’est la problématique de la prise en charge des maladies orphelines, qui est posée. Si dans notre pays, il est, déjà, aléatoire d’assurer un traitement efficace et durable pour des pathologies, dont la prévalence est très importante, que fautil penser de celles qui ne touchent qu’une partie, infime, de la population. Par définition, les maladies sont considérées comme rares ou orphelines, si elles touchent moins de 0,05% de la population générale. Dans 80% des cas, elles sont d’origine génétique ou héréditaire. Mais, elles peuvent - être, aussi, classées comme infectieuses ou auto-immunes (une anomalie du système im-

munitaire). La neurofibromatose, les chondrodysplasies, le syndrome de Rett, la sclérose latérale, le sarcome de Kaposi font partie de cette famille. A vrai dire, la liste des maladies, dites orphelines, est très longue. Certaines sont, relativement, connues comme la mucoviscidose, les myopathies, la néphropathie, le syndrome d’Aarskog… D’autres ne sont, nullement, évocatrices, y compris pour le personnel médical, tel que le syndrome d’Aase, Achondrogenèse ou encore anémie de Fanconi. En Algérie, comme dans d’autres pays du Maghreb, les maladies génétiques rares ciblent, particulièrement, les enfants issus de mariages consanguins, encore assez répandus dans cette région du monde. Elles sont, difficilement, diagnostiquées par des médecins généralistes et des pédiatres, peu édifiés sur leurs signes cliniques et leur évolution. Souvent, les parents sont ballottés d’une structure à une autre, pendant des semaines, voire des mois, sans être fixés sur le mal, qui ronge leurs enfants. A ce titre, l’exemple de la myopathie, une maladie neuromusculaire d’origine génétique, pourtant relativement connue, est illustrateur. Les différentes formes de myopathie touchent, environ, 40 000 algériens. La plupart d’entre eux ne sont diagnostiqués qu’au stade de l’atrophie musculaire, bien que la personne atteinte naisse avec la maladie. Même, quand il y a suspicion sur un cas, il n’est pas possible de faire une exploration complète, car la biopsie musculaire n’est pas réalisée, en Algérie. Les prélèvements sont envoyés à l’étranger, pour analyse, dans la majorité des cas, aux frais de la famille du patient. Ce qui représente une charge financière, considérable, pour les reve-

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Santé-Mag - N° 03 Février 2012

Rania HAMDI

nus bas et moyens. Selon le président de l’Association espoir contre les myopathies (ADEM), les myopathes et leurs familles sont confrontés à des contraintes multiples, dont un accès limité à la scolarisation, pénuries de médicaments, problèmes financiers et surtout, difficultés dans l’accès à la consultation et aux soins. Au fil des années, la maladie se complique, jusqu’au niveau de l’assistance respiratoire. Dans notre pays, un seul myopathe, Liès Radi, résidant à Chéraga, a réussi à se libérer d’un séjour, permanent, à l’hôpital en bénéficiant de la ventilation à domicile, grâce à une aide d’une ONG française, qui lui a offert l’équipement, dont le prix avoisine le million de dinars. C’est, justement, souvent, les associations qui se substituent aux autorités sanitaires, en portant assistance aux patients. Il faut croire que, partout dans le monde, la souffrance des personnes porteuses de maladies orphelines, sont grandes. Ce sont, généralement, des maux auxquels aucun remède n’a été trouvé, jusqu’à présent. L’on se limite, alors, à mettre en œuvre des schémas thérapeutiques, qui ne traitent que les symptômes ou, au mieux, freinent l’évolution de la maladie. Parce que, ce segment n’intègre pas les classes thérapeutiques à forte prévalence, l’industrie pharmaceutique n’investissant pas, beaucoup, dans la recherche. En France, à titre d’exemple, c’est par le truchement d’une chaine de solidarité, mise en branle par le téléthon, institué en 1987, que des recherches sur des maladies orphelines sont financées. Celles, orientées sur les cellules souches ou les biotechnologies, sont porteuses de grands espoirs, en la matière.•


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