Entretiens du Terroir en Valloire Histoires & Découvertes ... Fruits & paysages ...
AnnEYrOn QUADRIE et ant. P
Pour les ENVELOPPES SEULEMENT
Un patrimoine, source d’initiatives en valloire ...
Moras en valloire
vendredi 25 avril 2008
I
II
III
Entretiens DU TERROIR - UN MOMENT D’ÉCHANGES....................................................................... 3 Interventions des organisateurs........................................................................................... 7 Paroles d’acteurs du territoire............................................................................................ 12 Contributions de chercheurs............................................................................................. 20 Gastronomie : une interprétation de terroirs...................................................................... 25 Terroirs - Initiatives......................................................................................................................... 27 Sur le territoire Rhône Valloire Zoom sur Moras, la fête de la poire 2008................................................................ 28 Moras, millénaire à venir.......................................................................................... 29 Les Chemins de l’Arborescence................................................................................ 30 Paysages du bien vivre en Drôme des Collines.......................................................... 34 Terroirs du monde Le Forum «Planète Terroirs» aux Dentelles de Montmirail......................................... 35 Une proposition concrète Constitution d’un groupe de réflexion Action «Terroir en Valloire»........................... 38 Terroirs - Explorations.................................................................................................................. 39 Une approche historique - «La Valloire, que d’histoires !»................................................. 40 Une approche philosophique - «chaque territoire exprime la totalité du monde»............... 44 Des partenaires sur le chemin commun : présentation des organisateurs des Entretiens . .. 46
i
EntrEtiEns DU tErrOir - Un MOMEnt D’ÉCHAnGEs
3
Entretiens du Terroir en Valloire : pourquoi ? La Valloire est un territoire dans lequel des activités diverses produisent de la richesse, du lien social comme du paysage : entreprises, associations, établissements de formation …. Des structures politiques ont en charge des compétences à exercer pour leur mise en lien et en valeur : communes et leur communauté … Des habitants ont fait le choix d’y rester ou d’y vivre. Afin de développer au mieux, le plus harmonieusement possible, les ressources de ce territoire, la MFr d’Anneyron a proposé à quelques-uns de ces acteurs de se rencontrer afin d’explorer un projet commun possible. Une réflexion autour de la notion, encore floue, de terroir pouvait être un facteur de rassemblement, d’unité. les Arbos de Moras avaient déjà organisé deux Fêtes de la Poire (2004 et 2006) et souhaitaient, avant l’édition suivante (septembre 2008) mettre en place une manifestation. La collaboration avec l’Auberge de la valloire y était déjà présente. Sur d’autres territoires, l’association terroirs et Cultures organisaient des “Entretiens du Terroir”. Enfin, la Communauté de communes rhône valloire avait un projet de développement axé sur le tourisme autour du fruit.
72 participants
C’est ainsi, simplement, avec quelques contacts et réunions de préparation, que se sont mis en place les Entretiens du Terroir en Valloire à Moras ce Vendredi 25 avril 2008. Les organisateurs font le pari qu’il s’agit seulement de la première édition et que ces Entretiens auront une suite en vue de valoriser concrètement ce terroir et sa spécificité.
De gauche à droite : Hervé Miachon (pdt Arbos de Moras), Pierre Bocquet (dir MFR Anneyron), Freddy Martin Rosset (pdt CC Rhône Valloire), Aurélien Ferlay (maire Moras), Jacques Deplace (animateur MFR, CCRV), Bertrand Feraud (trésorier Terroirs et Cultures), Eric Barraud (animateur Terroirs et Cultures).
4
18H
Accueil des participants … et ouverture par Aurélien Ferlay (Maire de Moras)
18H30 Introduction : pourquoi ces Entretiens ?
Pierre Bocquet (MFR Anneyron), Bertrand Feraut, Eric Barraud (Terroirs et Cultures), Hervé Miachon (Arbos Moras)
18H50 Interventions d’acteurs du territoire … à partir de deux questions :
1. Ce qu’est le Terroir Valloire, pour nous … 2. Ce que nous pouvons faire ensemble pour développer une spécificité “terroir” …
Un patrimoine historique et culturel
Caroline Fanget et Maurice Thomas
L’eau, en Valloire, un patrimoine naturel fragile et précieux Le fruit, du verger à la table, transformation et commercialisation Une entreprise locale d’aujourd’hui, un ancrage dans l’histoire Un projet de territoire autour de la valorisation concertée des ressources
Jean-Claude Monnet Raphaël Ogier, Jean-Yves Lhorme André Desrieux et la Tonnellerie de Moras Freddy Martin Rosset
19H30 Interventions de chercheurs : Le terroir : un panier de biens au service de l’économie locale - Bernard Pecqueur (CNRS, Université Joseph Fourier Grenoble), Dominique Vollet (Cemagref Clermont Ferrand), Amédée Mollard ( Université Pierre Mendès France, Grenoble) Alimentation et Géographie : richesse et fragilité des cultures “régionales” - Gilles Fumey (Université Paris Sorbonne)
20H10
20H30
21H
Débat général … pour ouvrir des perspectives … animé par Eric Barraud (Terroirs et Cultures) et Jacques Deplace (MFR Anneyron) Conclusion (Pierre Bocquet MFR Anneyron) … … et lancement de “l’Atelier cuisine” par Jean-Jacques Galliffet … Buffet de Terroir offert par Crédit Agricole Centre Est et Sud Rhône Alpes …
Programme des «Entretiens du terroir»
5
J’ai pu apprécier, il y a déjà quelques jours, lors d’une balade dans les vergers, certains talents poétiques qui transcendaient des discours engagés, je laisse alors la parole aux acteurs locaux pour nous compter le terroir, exciter nos esprits et nos papilles en bouquet final.
Aurélien FErlAY Maire de Moras
le mot d’accueil
C’est pour moi un grand plaisir de vous accueillir ce soir à Moras en Valloire pour cette toute première édition des «Entretiens du terroir». Un grand plaisir car Moras a l’honneur de recevoir un grand nombre de partenaires aux horizons multiples, rassemblés en ce lieu pour promouvoir, chacun avec un regard singulier, le Terroir de la Valloire. Initiés par Terroirs et Cultures, organisés par la Maison Familiale et Rurale d’Anneyron, l’Association «les Arbos de Moras» et en partenariat avec la Communauté de communes Rhône Valloire et l’Auberge de la Valloire, ces entretiens, ponctués d’interventions et d’échanges, seront certainement l’occasion de promouvoir l’alchimie d’un territoire, la Vallis Aurea, d’une histoire, d’une population, d’une culture, d’une tradition, de savoir-faire et de produits locaux, ces richesses combinées qui forment ensemble un Terroir. Quel beau symbole pour une commune quatre fois millénaire dans son histoire née de poteries néolithiques, quasi millénaire dans sa dénomination, riche d’un patrimoine médiéval remarquable et devenu berceau de la poire en Valloire, de recevoir chez elle les partenaires de la valorisation de ce terroir. Les communes de la Valloire et au-delà du fleuve Rhône sont aussi, depuis plus de quinze ans, unies dans une structure intercommunale dont l’ambition est de construire un territoire de projets et de solidarité, autour de compétences partagées, telles le développement économique. Cette communauté de communes, Rhône Valloire, cherche à valoriser sa situation géographique, son patrimoine historique et culturel, sa richesse en eaux, son terroir de fruits, au travers d’un projet de développement de territoire autour du fruit et de l’histoire dénommé «les chemins de l’arborescence». C’est sans doute par ce biais, loin des tentations mondialisatrices, proche de nos racines et de nos savoir-faire ancestraux, que nous pourrons ensemble mettre en valeur ce nous savons faire et ce qui fait la spécificité de nos produits, de ce qui ne pourra qu’être pâlement imité en un autre lieu et par d’autres mains car dépourvu de cette symbiose fondatrice d’un terroir. Le succès de notre développement futur, agricole, économique, touristique passera certainement par là, par la valorisation de nos savoir-faire locaux, qui prend ce soir toute sa dimension et ouvre des perspectives prometteuses. Je veux aussi rendre hommage à la profession arboricole et notamment à l’association née il y a maintenant plusieurs années à Moras sous le nom des «Arbos de Moras» pour avoir initié une démarche de valorisation du terroir par la fête de la poire qui connaîtra en septembre sa troisième édition, couplée d’un marché des saveurs organisé par la communauté de communes. A l’heure où cette profession connaît, on le sait, des difficultés liées aux transmissions d’exploitations, bien qu’à Moras on échappe heureusement à la tendance, aux aléas climatiques, à l’instabilité des cours des produits agricoles, aux maladies telles le feu bactérien ou la sharka, je trouve admirable de constater ce dynamisme, cette motivation et les partenariats qui se sont établis pour susciter un éveil sur la richesse que constitue notre terroir et permettre ensemble de réfléchir à la culture de la diversité si précieuse. Merci d’avance aux nombreux intervenants qui vont animer ces entretiens. Excellente soirée à toutes et à tous.
6
Pourquoi la MFR est partie prenante des Entretiens du Terroir ?
Un terroir se construit à partir d’histoire locale, de patrimoine, d’actions et d’engagement des acteurs du territoire. Cette construction permet le parallèle avec l’histoire des Maisons Familiales.
C’est une première qui lance une série d’animations dans les mois qui suivent. Nous pouvons en citer quelques-unes : la Fête de la Poire organisée pour sa troisième édition par l’association des Arbos de Moras ; la manifestation des Paysages du Bien vivre sur la Drôme des collines. Organisée en partenariat avec d’autres établissements de formation, elle vise à développer la conscience de la qualité du cadre de vie et du rôle des agriculteurs dans sa construction. J’espère que cette soirée sera riche et utile pour l’avenir.
Créée en 1941 d’une volonté des habitants de la Valloire, la Maison Familiale d’Anneyron traduisait une envie, un besoin d’un établissement de formation et, d’une certaine façon, la reconnaissance d’un terroir. Cela correspondait à l’expression des besoins des agriculteurs pour former leurs enfants et se former eux-mêmes.
AnnEYrOn pierre BOCQUEt
Directeur Maison Familiale Rurale Anneyron
Aujourd’hui c’est un organisme de formation qui, depuis les lois “Rocard” de 1984, a diverses missions dont celle de développement local, voilà pourquoi notre CA sous la présidence de Michel Thivolle s’est engagé avec des arboriculteurs dans cette initiative. L’objet de la MFR est de faire rencontrer les acteurs, d’apporter des compétences au niveau local pour exprimer les richesses du territoire.
interventions des organisateurs
Exposition de photos réalisées par les élèves de 2nde Professionnelle pour la manifestation Paysages du bien vivre en Drôme des Collines en partenariat avec MFR Mondy bourg de Péage, Lycée Horticole de Romans (mai 2007).
7
Eric BArrAUD Animateur Terroirs et Cultures
Bertrand FErAUD Paysan Bellegarde Terroirs et Cultures
Forum international en Aubrac (2006)
Jérôme CHArDOn Paysan à Bellegarde Terroir et Cultures
«Terroirs et cultures» a été créé en 2003, nous sommes venus avec Bertrand Feraud agriculteur à Bellegarde (30). Les premiers Entretiens du Terroir ont été organisés en 2004 : l’objectif que nous nous sommes fixés est de mettre des personnes en réflexion autour des richesses de leur territoire. Nous travaillons de façon locale avec ces territoires par ces Entretiens en y associant des chercheurs, ainsi Bernard Pecqueur et Gilles Fumey ici présents. Nous agissons aussi au niveau inter-
national, ainsi, notre association est parrainée par l’Unesco pour innover contre l’uniformisation, la standardisation des produits, des procédés, des paysages Nous pouvons ouvrir une autre voie pour d’autres itinéraires de développement. C’est en ce sens que nous avons organisé un Forum international en Aubrac (2006), le prochain aura lieu sous les Dentelles de Montmirail (Juin 2008).
Je suis ici en tant que trésorier de «Terroirs et Cultures» et je suis paysan à Bellegarde, dans le Gard. Notre objectif quand nous avons démarré : faire connaître et mieux connaître notre terroir... Autour du projet, qui fédére les paysans de notre commune, sur-
tout avec une évolution rapide de population, aujourd’hui autour de 4000 habitants. Ceux-ci, peuvent prendre conscience de la nécessité et de la qualité de notre agriculture. Ainsi, nos salades bio qui partent sur l’Allemagne et nous ouvrent à l’Europe...
...avec Bertrand Féraud, qui est un voisin. Nous sommes sur la commune de Bellegarde,où nous avons organisé des Entretiens du terroir et sur une commune il peut y avoir plusieurs terroirs. Un terroir ce n’est pas seulement de la terre, ce sont des hommes, un climat. Il y a quarante ans, Bellegarde c’était de la vigne et il y eut des aménagements ; il y a eu l’eau qui a permis de développer des cultures variées : maraîchage, riz, céréales, élevage, taureaux, fruits, légumes vins. Nous pourrions presque vivre en autarcie. Chez nous, on a le mistral, c’est le
meilleur fongicide de la terre qui nous a permis de développer l’agri bio. C’est dans notre commune qu’il y a le plus grand nombre d’agriculteurs en bio dans la Région Languedoc Roussillon, ce qui permet de lancer des jeunes qui s’installent presque uniquement en AB, ce qui nous permet d’exporter nos produits en Allemagne, au Canada … Nous avons créé l’appellation “Clairette de Bellegarde” qui couvre seulement 50 ha, elle n’est pas connue mais c’est son atout. C’est un produit rare, unique, apprécié en tant que tel par exemple au Canada.
interventions des organisateurs
Merci à l’équipe qui a organisé cette soirée et avec qui nous espérons continuer à travailler.
8
Conférence de presse dans le verger de Hervé Miachon pour la préparation des Entretiens du Terroir : Didier Conjard et Piet De Haas (arbos de Moras) “encadrent“ Maurice Thomas (Moras en Valeur) sous l’écoute attentive de Jo Gay (Dauphiné Libéré)
Hervé MiACHOn
D’abord, des remerciements à l’association Horizons qui a prêté la sono, la tonnellerie Desrieux, les établissements Morgues, les pépinières Durand, la distillerie Ogier, Françoise Demoulin notre chef décoratrice avec ses produits en vannerie qui a permis la belle décoration de cette salle, à la poterie Jars et l’association Moras en Valeur avec laquelle nous agissons de concert. Merci à Jacques Deplace pour l’énergie qu’il a mis dans le projet. Enfin, nous transmettons les excuses des Fruitiers Dauphinois qui sont en Assemblée Générale. L’association “Les Arbos de Moras” est le résultat de la première Fête de la Poire de 2004. Elle rassemble aujourd’hui la totalité des producteurs actifs ou retraités de la commune et espère fédérer autour d’elle d’autres producteurs de la Valloire. Essayer d’associer les différents acteurs de la filière : producteur, expédi-
l’objectif de cette association est de créer un lien entre les producteurs pour expliquer et défendre les valeurs de la production fruitière.
Président Arbos de Moras
interventions des organisateurs
teur, transformateur, artisan, jusqu’au consommateur ; sans oublier les établissements de formation … en particulier la MFR d’Anneyron qui nous soutient activement depuis le début. La “Morassienne”, que vous pourrez apprécier en fin de soirée, le gratin morassien, dont vous trouverez la recette dans le prochain livre de Jean-Jacques Galliffet et Gilles Fumey … sont les résultats de notre démarche. La prochaine édition de la Fête de la Poire nous fera découvrir d’autres horizons avec notamment la vanille de Madagascar.
pour nous, les Entretiens du terroir sont la suite logique de notre démarche qui cherche à promouvoir le territoire et les hommes. Cette initiative s’inscrit dans un contexte difficile : sharka, feu bactérien … qui perturbe le fonctionnement de nos exploitations. Mais comme nos prédécesseurs, nous saurons trouver les ressources nécessaires pour surmonter les handicaps qui se dressent devant nous. Je devrais laisser la parole à Jean-Jacques Galliffet mais il s’exprimera tout à l’heure avec une interprétation originale …
9
Je suis fier de présider cette Communauté de Communes qui fut une des premières de France. Nous avons pris tout de suite la TPU (Taxe Professionnelle Unique) pour supprimer les concurrences entre les unes et les autres et mutualiser les ressources, en se souvenant des accidents. Je suis fier de la solidarité mise en place, aujourd’hui on peut dire qu’il n’y a plus avec la Dotation de Solidarité, de communes en difficulté.
nous sommes un territoire de 14 communes de base : la plus grosse 5000 habitants, la plus petite 200. Ensemble nous faisons 20 000 habitants dans un territoire étendu, au lieu d’être ramassés dans un petit territoire. QUADRIE et ant. P
Freddy MArtin rOssEt Pour les ENVELOPPES SEULEMENT
Président Communauté de Communes Rhône Valloire
La Communauté de Communes, vous la connaissez, lorsqu’elle s’est créée il y a 15 ans … lors de l’élection du président la semaine dernière, il y avait beaucoup de personnes, ce qui nous indique que cette Communauté de Communes paraît importante pour les communes, pour la population. Nous sommes passés de 3 compétences à 14, ce qui est signe du chemin parcouru.
interventions des organisateurs
Nous avons en projet le développement touristique axé sur le fruit dont nous reparlerons. Je suis heureux qu’il y ait dans cette commune de Moras des gens qui aiment leurs métiers, ces «Entretiens du terroir» en sont la preuve. Je vous souhaite une bonne soirée.
10
Paysages de Valloire
le village de Moras
Prieuré de Manthes
Fruits de la valloire
Pile du bac à treille - Champagne (07) La Tour d’Albon
nous vivons dans l’histoire, nous la faisons vivre...
11
pArOlEs D’ACtEUrs DU tErritOirE
La Valloire, un patrimoine historique et culturel jusqu’au début du XXème siècle (à étudier : des agencements différents selon les époques)
- architecture religieuse (la plupart des églises)
- architecture militaire
(château de Moras,
remparts…)
Un découpage administratif ancien qui marque encore le paysage culturel, les relations entre villages (affinités et rivalités). - le mandement/châtellenie créé une unité, une histoire commune pendant près de 8 siècles (du XIème à la fin du XIXème siècle)
- un tempérament longtemps prompt à la contestation (moyen-âge, guerres des paysans/carnaval de Romans, révolution de 1789…)
Acteurs du territoire, de gauche à droite : Caroline Fanget, André Desrieux, Raphaël Ogier, Maurice Thomas
Caroline FAnGEt Maurice tHOMAs
Association Moras en Valeur
paroles d’acteurs du territoire
Ce qu’est le terroir valloire (à travers notre expérience d’association)
Terroir vient de terre… c’est bien par là que l’on peut trouver une identité à la Valloire, une identité historique liée à la terre : - terre fertile, vallis aurea, «grenier à blé», population majoritairement composée de paysans (Antiquité et Moyen Age) - 1ère présence humaine connue : époque du néolithique = époque de «l’invention» de l’agriculture. - depuis un siècle : la culture de la poire sur le versant sud de la Valloire et la pêche sur son versant nord (différence de
nature de sol).
Toujours tiré du sol, une architecture spécifique : galet, molasse, pisé… - architecture civile : maisons en galets
mais plus affaibli aujourd’hui.
Ce que nous pouvons faire ensemble pour développer une spécificité « terroir » Une meilleure collaboration entre les villages (municipalités et associations), des projets communs autour de leur identité commune (l’exemple du millénaire). Un travail de fond est à réaliser sur les éléments constitutifs de cette identité (géologie, histoire, architecture, agriculture…). Dans le but de «reconstruire» une identité liée au terroir (qui s’est «perdue» contrairement à d’autres lieux) pour ensuite en mettre en valeur les différents aspects, en faire à terme un outil de communication et de promotion de la Valloire.
12
Pique nique fermier sur le marché
du village
r à Moras
La maison du gouverneu
Chapelle St-Bosc village Horizons en concert au marché du
paroles d’acteurs du territoire
13
L’ eau un patrimoine précieux et fragile ...
la pêche en France, en Drôme, en valloire
Jean-Claude MOnnEt Président de la Fédération pour la Pêche et la Protection du Milieu Aquatique de la Drôme Ancien président de l’association la Truite des Veuzes et Orons (pendant plus de 20 ans) Résidant à Saint-Sorlin depuis 65 ans
paroles d’acteurs du territoire
France : 1,6 million de pêcheurs dans plus de 4 000 associations / Drôme : 17 000 pêcheurs, 34 associations, + de 1 000 bénévoles Valloire : 6 associations, dont : En Drôme : St-Rambert - Anneyron Veuzes et Orons - Lens Lestang. En Isère : Beaurepaire - St Barthélemy. Sur ce territoire : + de 1 000 pêcheurs dont 50% du territoire, + de 70 kms de rivières de 1ère catégorie, pas ou peu de plans d’eau. La Truite des Veuzes et Orons est au cœur de la Valloire, avec le plus grand domaine piscicole de cette région, peuplé principalement de truite fario. Trois rivières principales : Oron, Collières et les Veuzes. Et une multitude de canaux d’irrigation détruits en partie lors du remembrement mis en place au passage du TGV. La pêche est sous la tutelle du Ministère de l’Environnement et nous avons à rendre compte de nos activités au Préfet. Le législateur nous a confié des missions d’intérêt général, de préservation des milieux aquatiques et de protection du patrimoine piscicole (il existe encore dans le secteur de la Madone un petit ruisseau avec une espèce d’écrevisse
rare), de leurs surveillances (Police de la pêche), de valorisation de ces milieux, du développement du loisir pêche, de l’éducation à l’environnement (avec un salarié à plein temps). Par ailleurs, la Drôme fait partie de deux grands clubs réciprocitaires, soit 65 départements pour le développement du tourisme pêche.
nos missions quotidiennes Pour résumer : la lutte contre les pollutions, la protection des espèces, la surveillance des débits de nos rivières, la participation aux diverses structures ayant pour objet l’eau, le poisson et l’environnement aquatique. Les pêcheurs sont des sentinelles, prêts à tirer la sonnette d’alarme au moindre disfonctionnement. L’Office National de l’Eau et des Milieux Aquatiques - ONEMA - (ex Conseil Supérieur de la Pêche -C.S.P.-) a en charge la police de l’eau et de la pêche. Ce sont les gendarmes de nos rivières, mission régalienne de l’Etat. La police de la pêche est assurée aujourd’hui pour une grande part par nos gardes-pêche particuliers bénévoles d’associations, une dizaine en Valloire.
le domaine piscicole de la valloire est un des plus beau domaine de plaine de notre département, de par sa diversité. Chaque rivière est différente : - les Orons (rivière à crues) plus puissantes, température qui varie avec les saisons, qui prend sa source aux Roches
14
de Pajay et qui rassemblent les eaux qui descendent des Chambarans de la plaine de Bièvres et du Lières. - les Veuzes qui émergent à Manthes et qui circulent paisiblement par divers biefs et canaux jusqu’à Anneyron. Température fraîche entre 10 et 13° toute l’année. - les Collières qui sont exclusivement des eaux de surface qui drainent les deux précédentes. Toutes ces rivières sont riches en truites et offrent à nos pêcheurs locaux, aux touristes, de bons moments. Je rappelle que la Valloire était un marais que les moines ont drainé pour favoriser les cultures, prés, etc. Qu’un réseau d’irrigation impressionnant avait été mis en place ; c’est d’ailleurs par la constitution d’un syndicat d’irrigation qu’est née l’association des Veuzes avant guerre, avec sa mise en sommeil pendant cette période pour repartir dès 1947 en association des pêcheurs. Le président était morassien puisqu’il s’agissait de Pierre Gontard suivi de Charles Lafaury.
l’eau La Valloire sans l’eau ce n’est plus la Valloire. L’eau est la principale richesse de ce territoire pour l‘agriculture, pour certaines industries, pour les populations. La qualité est indissociable de la quantité. Les récentes études du Cabinet Gay Environnement pour le SAGE confirment une dégradation nette aux portes de l’Isère sur l’ensemble du réseau dû pour une part aux eaux usées de nos collectivités et d’autre part par les rejets des piscicultures et par l’agriculture (ni-
paroles d’acteurs du territoire
trates, pesticides). D’autres sources mal connues au niveau de Beaurepaire restent à identifier.
dans les meilleurs délais. Nous devons garantir sa qualité. Nous devons la partager.
la quantité
Développement du loisir pêche et du tourisme pêche
Depuis la sécheresse de 1990 et celle de 2003, nous n’avons jamais retrouvé les niveaux d’eau des années 70-80, ce qui aggrave les phénomènes de pollution (moins de dilution). Le lac de Manthes a séché pratiquement 3 fois depuis 1990. Il est resté artificiellement en eaux (mare aux canards) en 2007. Il est clair que les besoins en eaux augmentent avec l’accroissement de l’urbanisation, avec les besoins plus importants en période d’étiage pour l’agriculture et pour les piscicultures.
la nature ne peut donner ce qu’elle ne reçoit pas.
Il y a donc une étude à faire des besoins à mettre en phase avec le potentiel probable de ce que nous pouvons recevoir. Notre participation à ces débats trouve là toute son importance dans le partage de la ressource et dans sa préservation. Contrairement à une idée répandue l’eau n’est pas une ressource inépuisable. Nous travaillons à cette idée avec nos partenaires, avec les administrations, les collectivités, les politiques. Nous devons garder l’eau sur nos territoires et arrêter de l’envoyer au Rhône
La Valloire est au centre d’un triangle ayant comme pointe Lyon, Grenoble et Valence. Elle est donc d’un grand intérêt pour les populations urbaines avides d’oxygène, de coins paisibles, pour se ressourcer. Chaque week-end nombre d’entre eux se retrouvent dans les quelques campings de la région ou chez l’habitant et participent ainsi au développement économique de ce territoire. Nous participons à ce développement au travers de la réciprocité, nous souhaitons que des projets touristiques voient le jour. Nous avons nous-même quelques idées. La pêche est une composante des diverses activités touristiques de ce territoire. Par ailleurs nous développons l’éducation à l’environnement et à l’activité pêche auprès des enfants avec l’association Valloire Loisirs.
les enfants, les jeunes, c’est l’avenir. C’est avec eux que nous pérenniserons nos activités liées à ce territoire.
Merci aux organisateurs de cette manifestation d’avoir invité les pêcheurs, ce qui n’est pas fréquent.
15
Des entreprises locales ancrées dans l’histoire
La compétence comme valorisation des qualités de terroir... Trois points importants : L’attachement de la maison Lhorme aux produits locaux et à leurs qualités. L’importance de la compétence des producteurs comme des expéditeurs pour la valorisation de ces qualités.
Jean Yves lHOrME
Expéditeur Fruits Anneyron Message transmis par Jacques Deplace
raphaël OGiEr
Distillerie Ogier Moras
«Tonnelerie, Distillerie, Poterie ... chemins d’histoire»
paroles d’acteurs du territoire
La nécessité de l’action collective de l’ensemble des activités, pour le développement du potentiel de ce territoire.
Distiller la poire, distiller l’espoir ... Nous sommes producteurs de fruits à Moras. Les mots territoire et terroir sont des mots bien différents. Le terroir vient du terrain, sur Moras nous pouvons repérer des saveurs particulières et pour nous transformateurs c’est important. Sur un territoire nous pouvons avoir une variété de terroirs. Nous n’avons pas d’appellation ni de reconnaissance mais nous avons des produits : ainsi pour la chataîgne jusqu’à une reconnaissance nationale avec la chataîgne d’Ardèche.
Nous pouvons par exemple développer une gamme de produits pour des consommateurs. Pour les années à venir, l’intérêt des petites communes est de développer les atouts particuliers dont on dispose. On a transformé des produits d’autres territoires et il nous semble que le nôtre a des qualités particulières. Une chose me paraît certaine : le terroir nous aidera à avoir une reconnaissance, de nos activités, pas avec une démarche individuelle mais par une démarche collective.
16
Une entreprise dans les siècles du monde ... La famille Desrieux est arrivée sur Moras vers 1700 … à la quatrième génération il y a eut 7 garçons … en 1830, les quatre aînés sont partis en Algérie puis les derniers les ont rejoints … mon arrière grand’père Moïse est tombé malade, l’un des fils est revenu de Constantine une fois son père décédé. Il a pris le métier de tonnelier. Il est parti apprendre son métier entre 14 et 18 ans, dans le tour de France et en 1885 a créé une tonnellerie à Moras. C’était la 3ème à Moras. Il a su s’implanter et a poursuivi jusqu’en 1920 avec un fils (encore un Moïse) né en 1891 qui a fait 3 ans de service et 4 ans de guerre. Il est revenu en 1919, il s’est marié et a pris la suite. Il a fait le métier de tonnelier et de paysan car le métier de tonnelier était bien saisonnier. Il faisait les barriquets et les tarares, il était un spécialiste reconnu. Il a tenu jusqu’en 1952 et j’ai pris la suite, les
André DEsriEUx Tonnellerie Desrieux Moras
paroles d’acteurs du territoire
affaires marchaient bien, il y avait du travail, toutes les fermes avaient leurs tonneaux et leurs cuves … puis dans les années 1970-75, l’inox et la fibre de verre sont arrivés. De nombreux collègues ont abandonné. La tonnellerie a connu des moments difficiles. Je me suis mis à faire des bacs à fleurs puis il y a eut une reprise du tonneau.
Quand j’ai pris en 1952, le tonneau “chêne”, était seulement contenant, il est devenu bonificateur. Il y avait la découverte de son effet sur le vin par les viticulteurs. Il fallait des tonneaux neufs qui n’étaient pas utilisés plus de cinq ans (auparavant, les tonneaux pouvaient être centenaires). Il y a eut un regain d’activité. Alors mon fils est revenu, il est assez bon commercial … le travail d’aujourd’hui est moins saisonnier. On travaille un peu pour l’exportation : Australie, Afrique du sud, Californie. Le vieillissement du vin se faisant dans des tonneaux neufs, tous nos concurrents se sont bien agrandis … il faudrait maintenant se moderniser pour faire des tonneaux de grand volume mais il y a de quoi hésiter à investir des centaines de milliers d’euros, ce qui fait d’importantes sommes.
17
Histoire, Territoire, valorisation des ressources. On parle de terroir, de territoire, ici c’est un territoire carrefour avec la voie royale de la vallée du Rhône et sur une voie transversale. Regardons la carte de Cassini, la route est mentionnée passant par Albon et Moras et par le bac à traille de Champagne. Ce n’est pas un hasard si la première voie transversale du PLM passe par là. Carrefour d’influence, vallis aurea, la blonde vallée, les blés … Dans le précis historique de Henri Martin, il a extrapolé pour retrouver ce Val d’or grenier à blé dans les écrits de Jules César. Cela pouvait paraître vraisemblable car ici, les rendements ici dépassent de 20 q les rendements départementaux. Nous sommes le sud du nord et le nord du sud. J’avais écrit un article sur la tonnellerie Desrieux que j’avais intitulé “la tradition des Allobroges” : la grande invention de notre région, c’est la barrique. Inventée par les Allobroges parce que la vigne a rencontré les premières forêts de chataîgniers et on a conservé le vin dans le bois. Cette invention n’a pas changé depuis 2 millénaires.
Freddy MArtin rOssEt
Président Communauté de communes Rhône Valloire Passionné d’histoire
paroles d’acteurs du territoire
Ces hommes, paysans, avaient un drôle de caractère, un aspect radical notamment dans leur vote ; cela venait-il des curés mais on peut remonter à la “guerre des paysans” … mais l’effet papillon nous indique
que les petites causes peuvent avoir de grands effets.
Comment créer des richesses ? Ici nous sommes bien placés déjà avec l’eau. Nous sommes un grand territoire déconcentré avec plein de verdure pour ces 20 000 habitants à la CCRV. Nous avons cherché un biais touristique : déjà un CA de 3 M€. Nous n’avons pas de produit phare : remparts de Carcassonne, Palais des Papes … mais nous avons l’entrée de l’histoire. Moras la médiévale, la tour d’Albon naissance du Dauphiné, le château de Boson, Lachal, le prieuré de Manthes … l’eau, émergence de nappes ; il y a des personnes qui viennent vivre ici pour pêcher. Le bureau d’études propose d’orienter le projet de développement touristique autour du fruit. Nous avons été la première région fruitière de France, les Arbos de Moras, ce n’est pas un hasard, avec le poirier … bien sûr il y a les maladies (sharka …) mais les arbos aiment leur métier ; l’orientation des Maîtres un Rêve sur le fruit est logique. D’autant qu’il y a des restaurateurs pour mettre en valeur par la gastronomie. Nous avons eu une étape du Critérium du Dauphiné Libéré, nous en avons profité avec la MFR toujours présente avec ses compétences, pour valoriser le fruit et faire déguster les cerises. Les visiteurs internationaux présents ont apprécié, ils reviendront sûrement … mais nous ne ferons rien sans vous.
18
Scènes de marchés au village : producteurs, produits, habitants. Colette Biennier de
Peyraud
Patrick et Françoise Gra
illat de Bathernay
la Motte de Armelle Cheval de
ntaille Albon
Katia Lepage - Ma
Galaure Jean Delobre de Bo gy avec Geneviève Gillard (jardin de Cocagn es à Andancette)
plaisirs de l’échange ... le doux commerce.
19
COntriBUtiOns DE CHErCHEUrs
Le terroir, un panier de biens au service de l’économie locale Je vais vous présenter une expérience, non pour en extraire une super méthode mais pour permettre de réfléchir.
Nous venons d’entrendre des contributions intéressantes, variées d’acteurs de ce territoire. Si nous avions sollicité des témoignages il y a 25 ans nous n’aurions pas entendu cela mais entendu parler de productivité, de rendement … et l’agriculture a vu ses performances “techniques” évoluer très vite. Ce qui a fait le changement après ces performances extraordinaires, c’est pour une part le fait que les agriculteurs se sont trouvés victimes de leur réussite. Plus vous êtes performants, plus vous êtes en concurrence. Cela vous oblige à la dépendance par rapport à un extérieur, par exemple sur les prix et cette dépendance fragilise les territoires.
Bernard pECQUEUr CNRS Université Joseph Fourier Grenoble
Contributions de chercheurs
Alors comment contourner l’obstacle ? “il faut faire ce que nous savons faire”, oui, pourquoi ?
Je vais essayer de vous le montrer à partir d’un terrain d’étude commun à plusieurs de mes collègues : le sud du département, la région des Baronnies avec l’huile d’olive. Je ne vous laisserai pas croire que cela est reproductible ici mais cela permet de repérer les différents facteurs qui ont permis à la stratégie de fonctionner. Vers 1994, quand nous rencontrions le directeur de la coopérative de Nyons, on se demandait comment le produit “huile d’olive de Nyons” pouvait être vendu autour de 100 F, ce qui nous paraissait énorme, aujourd’hui 20€ le litre. Il nous disait, en agitant la bouteille : “il n’y a pas que de l’huile dans la bouteille : il y a le chant des cigales, les paysages, les champs de lavande …”. Ainsi le consommateur, quand il achète de l’huile d’olive, il n’achète pas seulement cela mais aussi tout ce qui va avec. On fait l’expérience avec les touristes de l’Europe du nord. Il est avéré qu’ils n’achèteraient pas plus cher s’ils avaient trouvé le même produit dans une GMS d’Allemagne.
Qu’est-ce qui fait qu’un consommateur achète un produit plus cher ? Ce que le consommateur achète c’est un produit collectif, pas seulement les producteurs d’huile d’olive. Ainsi on a comparé les prix : une huile d’olive sans cahier des charges est à 35F, avec cahier des charges et qualité 70F, avec AOC (la première en France et dans le monde) à 100F et même 120 F
20
pour l’achat sur place, à Nyons. Ainsi avec la qualité, cela donne une rente, qui n’est pas territoriale mais avec des effets de réputation liés au territoire. D’où l’objectif possible d’une double rente qualité : du produit et du territoire.
Mais comment construire une rente de territoire, des signes territoriaux de qualité ? Ainsi la moyenne des prix des gîtes ruraux est plus élevée dans les Baronnies que dans la moyenne du département. Une enquête auprès des utilisateurs de ces gîtes a permis de faire surgir des “aménités” qui les motivaient au un “consentement à payer” plus cher pour un service apparemment identique. On y retrouve le paysage avec les champs de lavande. Ainsi la filière lavande, participant à la construction du paysage : les producteurs de lavande ne sont pas seulement concernés par leur filière spécifique mais se trouvent en correspondance, en solidarité. Ainsi les opérateurs touristiques vont vendre “le tour de l’olivier” et ont intérêt à ce que l’huile d’olive, la lavande participent à leur succès. Mais aussi les pouvoirs publics : on y trouve les champions pour s’accaparer les financements de l’UE, ainsi on a redressé les banquettes pas pour la production mais pour le paysage qui rentrait dans l’image de qualité de l’ensemble des produits. Il ne s’agit pas simplement d’attirer des emplois mais que la politique publique entre dans le projet
Contributions de chercheurs
collectif. Or, depuis quelques années, il y a progrès de la contractualisation. Auparavant cela ressemblait beaucoup à la subvention : qu’est-ce qu’il faut faire pour avoir un financement public, logique de guichet, d’équipement. Ici, soit on fait dans la ressemblance, dans la concurrence pour faire comme le voisin, soit on développe une spécificité. Ainsi dans le Choletais ou le Romanais pour le textile ou la chaussure, sur un marché où la ressemblance avec la production asiatique va les condamner sur la simple base d’une concurrence de produits similaires.
il vaut mieux essayer de “décrocher”, de rechercher la spécificité. Ainsi pour les régions viticoles avec les AOC, où l’on peut prétendre à se différencier, à faire un produit unique au monde.
il faut essayer de combiner des produits qui se valorisent mutuellement.
Pour revenir aux Baronnies, on y voit des étiquettes de vin qui indiquent leur appartenance au territoire de … l’olivier (!) … le mariage de la vigne et de l’olivier. Il s’agit bien d’une offre territoriale avec des producteurs en synergie.
Invitation à la rencontre ... des produits et des paysages
Ainsi pour vous, par exemple la poire. Puis-je faire un produit spécifique avec une valorisation des paysages, d’autres productions.
21
Richesse et fragilité des cultures régionales
le sujet est difficile mais nous pouvons essayer d’éclaircir quelques points.
Une culture régionale, qu’est-ce?
Gilles FUMEY Université Paris Sorbonne
Contributions de chercheurs
Bien sûr dans les Baronnies mais dans l’histoire, c’est une création récente, du XIXème siècle. Après la Révolution Française qui a uniformisé les départements en éliminant les noms des provinces. Lors de la Constituante puis sous la monarchie et la IIIème République, on a vu arriver de toutes les régions de France les délégués qui représentaient leur province venaient siéger loin de chez eux. Ils ont suscité l’ouverture des restaurants : ils ramènent des plats de chez eux. On peut le voir aujourd’hui avec les étudiants qui reviennent en train de chez eux : ça sent dans les trains du dimanche soir! Dans les restaurants parisiens on pouvait y sentir le gratin dauphinois ou la caillette, qui n’avaient pas encore de valeur en dehors de leur région. Au début, personne ne s’y intéresse mais pour les députés qui se trouvent à Paris, loin de leur province, cela a de la valeur. Ils vont donc “importer” à Paris la culture de leur région. C’est de là que l’on peut dater les gastronomies régionales.
Peut-être que la Valloire est un produit en train d’émerger ? On communique aujourd’hui avec le monde entier, la découverte d’un territoire qui se nomme Valloire peut créer une image avec des châteaux, des tonneaux, de la pêche, de l’alcool de poire, … les arbres en fleurs … on va manger la Valloire chez Galliffet … les clients qui viendront à Epinouze dégusteront un produit local mais fait pour eux.
Alors richesse ? Oui ! Mais aussi fragilité ! Contrairement à ce que vous pensez, les producteurs, comme toute production vivante, votre situation est fragile.
C’est vous certes qui produisez mais ce sont les consommateurs qui reconnaissent le travail à travers leurs achats. les acheteurs qui vous reconnaissent.
Vous produisez pour un revenu, Mr le Maire est intéressé par le développement de sa commune, mais si vous ne trouvez pas d’acheteurs … verra-t-on demain des bains douches à la poire de la Valloire ? C’est bien une image qui se construit.
22
Un exemple de la famille Heineken pour imposer sa bière aux EU, il va dans les grands restaurants et demande : vous avez Heineken ? Non ! Alors je m’en vais ! Vous n’êtes pas un grand restaurant !… et peu à peu il développe une notoriété … L’eau de vie de poire, on ne la consomme pas tous les matins en Valloire … mais cela produit une image.
Attention le consommateurfait une image mais il peut aussi la défaire ! si vous voulez construire une image de la valloire, vous devrez travailler sur le côté fragile de votre production, c’est fragile parce que c’est rare.
Un Américain qui va chez Ogier pour commander 10 000 bouteilles, cela peut être dangereux. La poire il y en a partout, mais la Poire de la Valloire? La Fête de la Poire … les forêts, les arbres, les vergers, le climat. Le consommateur peut être attiré par cet ensemble. Comment se positionner dans le circuit commercial dans lequel la grande distribution est majo-
Contributions de chercheurs
ritaire. C’est l’un des drames de notre alimentation en France, ceux qui ont vécu la guerre et la reconstruction puis qui ont vécu l’abondance ; un passage culturel extraordinaire … qui ont bu du lait de vache puis sont passés au lait en briques ou en poudre … Le passage de l’épicerie locale au supermarché : il y a trop de choses. Alors, par exemple les filles qui achètent un congélateur à leur mère, qu’est-ce que cela peut signifier pour la génération précédente ? L’évolution des achats, de la perception est rapide entre les générations. Il faut réinventer des marchés, en changeant d’échelle … que signifie vraiment l’achat de produits de l’autre bout du monde, l’achat dans des marchés de plein air quand il fait froid, qu’il pleut. Il faut veiller à mettre les conditions de confort pour les consommateurs.
la pérennité des produits c’est aussi assurer les conditions de la production : il faut assurer une pérennité des exploitations, transmettre aux jeunes l’envie de faire ce métier difficile d’agriculteur, d’arboriculteur. Faire des comparaisons de revenu, de vacances, de conditions de travail …
il faut faire un peu rêver,
c’est difficile, en se mettant dans la peau d’un jeune qui voit sur internet des possibilités que ne peut pas lui offrir l’exploitation des parents. C’est le projet qui est important. On peut intégrer le besoin grandissant d’une agriculture “propre”, de projets personnels … par exemple les jeunes qui vont dans l’humanitaire, ils peuvent paraître idéalistes mais cela porte quelque chose. Colloque au verger Hervé Miachon et Gilles Fumey
On entend dire : «Il faut manger des fruits, car le cholestérol c’est mauvais, la viande c’est mauvais, les pesticides …». C’est une campagne de publicité mais pas seulement. Il faut construire l’image de fruits qui permettent la santé, c’est fragile mais avec vos initiatives, l’association des Arbos de Moras et les acteurs du territoire, vous avez des possibilités d’avenir.
23
Echo de média en direct Nous avons découvert la poire de la Valloire et dans une intervention que je vais faire pour RCF je vais indiquer que nous en devenons des ambassadeurs. Dans la conférence de presse qui a précédé ces Entretiens du Terroir nous avons apprécié les produits comme l’accueil des personnes. Jean-pierre MEGE Reporter à Radio Chrétienne de France
Des participants attentifs ... à la production du bien commun
Nous allons terminer les «Entretiens du Terroir». Ils peuvent être un repère, une étape. Nous ne devons pas oublier que la Valloire est le premier territoire au sud de Lyon où le voyageur découvre de chaque côté du fleuve des productions agricoles, un milieu ouvert sur des vignes, des vergers. C’est aussi un pays d’accueil avec de nouveaux habitants nombreux que nous pouvons aider à s’intégrer, à participer à la vie de nos villages. … Nous venons de vivre des moments qui nous indiquent une volonté de mettre en valeur ce territoire ; d’ailleurs, les signes d’avenir sont là avec la présence de jeunes au premier rang et des installations qui indiquent une suite au travail des générations. Nous venons de vivre des moments qui expriment un désir de faire ensemble que les organisateurs accompagneront avec les organisations et personnes compétentes pour surmonter les incompréhensions et obstacles inhérents à tout projet. L’histoire nous l’a montré, la Valloire en vaut la peine, à nous de poursuivre le chemin.
pierre BOCQUEt
Directeur Maison Familiale Rurale Anneyron
Conclusion
… n’oublions pas un aspect important : la convivialité autour de la gastronomie, et nous avons la chance d’avoir la présence de JJ Galliffet qui innove tout en s’inscrivant dans une tradition … c’est ce qu’il va nous montrer …
24
Une interprétation des produits du terroir Restaurateur en Valloire depuis 25 ans … l’un des “toqués du fruits” … interprète en direct, devant l’assistance, des recettes à base de fraises et de produits du terroir …
Et les produits fermiers et artisanaux : fromage de brebis
Armelle et vincent CHEvAl La Motte de Galaure
fromage de chèvre
Katia lEpAGE, pascal riOU Mantaille - Albon
charcuterie
Françoise et patrick GrAillAt Bathernay
miel
Corinne nivOn Anneyron
fraises
Gilles rOUx Revel Tourdan
syrah - viognier tartare de fraise épicé au fromage blanc salade de pomme carotte épinard et asperge vinaigrés Boulgour de pomme à l’huile d’olive Jean-Jacques GAlliFFEt Auberge de la Valloire
Chèvre parmentier au poivre
Gastronomie, une interprétation de terroirs
Cave coopérative sarras - saint-Désirat
pain - boulangerie
M. et Mme FAYOllE
Moras
morassienne et jus de fruits
Arbos de Moras
vannerie
Françoise DEMOUlin Moras
25
Un buffet de terroir, un buffet paysan, ce n’est pas seulement une collection de produits présentés sur une table pour satisfaire quelque faim essentielle ou superflue. Ce n’est pas seulement une collection de produits du terroir, exposés comme publicité en vue d’échange marchand. Un buffet paysan, un buffet de terroir, c’est un lieu et un moment qui manifestent les liens entre les humains et les paysages, les liens entre les producteurs et les consommateurs habitants un même territoire. C’est un savoir-faire d’éleveurs, d’arboriculteurs, exprimant au présent des décennies ou des siècles d’expériences transmises par les mots, les gestes, les silences. Un buffet paysan, c’est un lieu de mémoire vivante, un lieu de rencontres d’aujourd’hui qui lie le savoir faire artisan à l’invention industrielle, la production permanente de culture et l’insertion dans le village mondial. O, habitants de ce terroir, qui aimez vivre en ce pays, pensez-y ! Au moment de croquer l’abricot, la fraise ou la poire, de mordre dans le fromage chargé de parfums des parcours de nos chèvres, pensez-y ! Pensez-y au moment où vous tentez de maitriser ce sucre qui s’enroule en vos mains, ce miel imprenable, collant, coulant, parce que concentré de paysages fabriqués par les abeilles et leurs éleveurs. Au moment où vous laissez couler ce flot en tentant de le retenir, vin des coteaux et de l’histoire, jus des terroirs et du labeur humain, pensez-y ! Retenez ce temps qui nous échappe, retenez-le suffisamment pour savourer cette profondeur, comme l’essentiel, invisible pour les yeux. Retenez-le ! … mais gardez-vous de le retenir trop, la nostalgie vous assaillerait d’un monde disparu quand la création est permanente et nourrit notre présent.
buffet de terroir offert par :
Un buffet paysan, un buffet de terroir, un lieu, un moment, des liens, de l’amitié qui doit irriguer notre vie quotidienne d’habitants d’un territoire où tout cela est donné, est bati, à portée de main, de regard, d’espoir. Secquaj El Epdac, paysan berbère
poésie des saveurs
26
ii
tErrOirs - initiAtivEs
27
sUr lE tErritOirE rHÔnE vAllOirE
Zoom sur Moras, sa Fête de la Poire 2008 .... De tout temps la colline de Moras a servi de refuge aux hommes. Des fouilles, réalisées dans les années 70, ont révélé des habitats successifs depuis le Néolithique. La particularité archéologique du site se situe dans la mise au jour d’une série de vases peints et surtout, de plats à incisions ornés de motifs réalistes ou abstraits qui témoignent d’une société évoluée et peut être même d’une forme d’écriture de type dit « morassien ». Le village cité pour la première fois en 1009 se concentre autour du château. Vers 1250, le second bourg s’établit à mi-hauteur de la colline sur l’une des principales voies de communication du Dauphiné : la route allant de Grenoble au Rhône. Cette nouvelle implantation favorisa la prospérité du bourg qui était alors à la tête d’une châtellenie regroupant plusieurs villages (Manthes, Lens Lestang, Epinouze, et Saint- Sorlin). En 1330 le nouveau bourg s’entoure de remparts, construits aux frais des habitants, qui sont reliés à ceux du château. En 1349 le dauphin Humbert II vend ses biens au Roi de France. Moras devient alors terre royale mais garde son statut de mandement. En 1637 le château est détruit sur l’ordre de Richelieu. En 1854 une vierge couron-
sur le territoire rhône valloire
née est érigée en ex-voto à la place du donjon du château pour conjurer une épidémie de peste. En 1850 l’aménagement routier qui traverse la commune éventre la muraille. De l’enceinte médiévale demeure deux portes : « la porte médiane » et la « porte inférieure », surmontées de tours carrées. Quelques vestiges de la muraille sont visibles à proximité de la Maison du Gouverneur (privée) qu’Alphonse d’Ornano, lieutenant général de Henri IV pour le Dauphiné, fit construire en 1592. L’apogée de Moras (XV – XIIIème siècles) est marquée dans l’architecture du bourg par des demeures de caractère construites intra-muros pour de riches notables. Remparts et maisons sont construits en molasse et galets roulés en « arêtes de poissons ». A l’entrée Est du village un marronnier, symbole de liberté, a été planté en 1848 et arrosé, selon la légende, par du vin des coteaux de Moras. Dans le centre du village se trouve la maison natale du peintre Maurice Savin (1894-1973) membre de l’école française dont de très belles œuvres sont visibles à Montélimar entre autres. La Maison Quarrée des XVIe – XVIIe siècles, présente dans sa cour un magnifique escalier Renaissance à balustres en pierre de style Louis XIV, sans oublier l’Eglise Notre Dame de l’Assomption (Art Roman Dauphinois XIXIIe siècles).
28
La révolution puis le XIXe siècle ont mis fin à la puissance administrative et militaire de Moras, à cette époque la châtellenie éclate en communes indépendantes.
... le millénaire de Moras les 6 t 7 juin 2009
C’est dans ce cadre historique que l’Association « Moras en Valeur» et la Municipalité de Moras se sont associées pour commémorer…
sur le territoire rhône valloire
29
“ Cueillez le fruit à la source” ou … les “Chemins de l’ Arborescence” La CCRV a sollicité un bureau d’études “Maîtres du Rêve” pour explorer les possibilités de développement du tourisme en Valloire. Celui-ci a rendu un premier rapport lors d’une réunion à St Rambert d’Albon (12/10/2006) qui a suscité la mise en route d’un projet de valorisation croisée et coordonnée des ressources patrimoniales, paysagères, humaines … autour du fruit, d’où le slogan “cueillez le fruit à la source”. Les personnalités, spectateurs et participants de l’étape (contre la montre) du Critérium du Dauphiné Libéré (13/06/2007) ont ainsi découvert sur le parcours de longues banderoles à cette enseigne, rouges comme les fruits mûrs ! Les Commissions Tourisme, Agriculture - Environnement, Culture de la Communauté de Communes se sont “emparées” de ce projet pour tenter, chacune avec son orientation particulière, de le traduire en actions concrètes et en dynamique commune.
Un état des lieux, quelques instantanés !
Communauté de Communes rhône valloire
Comment passer d’un territoire plein de qualités et de diversité mais qui n’est que “de passage” à un territoire qui valorise ses ressources et où il fait bon s’arrêter pour un séjour de découverte ?
sur le territoire rhône valloire
Un projet, des actions dès l’année 2008.
La Communauté de Communes Rhône Valloire avec l’Office de Tourisme ont déjà mis en place, dans les années précédentes, une vingtaine de boucles de randonnée. Pour chacune d’elles, des marraines et parrains de boucles, en assurent l’animation. Les parcours comportent une signalétique de direction, ils sont désormais coordonnés entre eux et avec la Grande Boucle de la Drôme des Collines … et demain avec le parcours Véloroute du Léman à la mer ! Il s’agissait alors d’établir une mise en valeur commune de ces boucles, de les rendre plus actives aussi pour les randonneurs, de leur faire découvrir aussi la qualité du paysage et … des produits. le programme 2008 “Chemins de l’arborescence” porte sur le travail collectif d’explorations sur 5 de ces boucles par des randonnées de groupe et commentaires en direct suivis d’une mise en commun autour du casse-croûte : Champagne (12 mars), Albon (21 mai), Manthes (25 juin), Moras (24 septembre), Anneyron (17 octobre ?). le courrier d’invitation pour la première exploration résume l’action … à suivre …
30
Courrier d’invitation
(aux élus, aux marraines et parrains de boucles)
Opération : les chemins de l’arborescence, étape 2 Rhône Valloire : paysages découverte... La Communauté de Communes Rhône Valloire s’étend sur un territoire de terres et d’eaux, traversé d’histoires, d’arborescences … Chaque clocher a son histoire mais les liens qui ont uni les hommes ont forgé une culture de terres et d’échanges. Des boucles de randonnée ont été mises en place sur le territoire de la Communauté de communes. La rencontre du Jeudi 6 décembre 2007 à Anneyron a rassemblé les différentes commissions et groupes de travail autour de la présentation de ces boucles. Elle a permis d’en retenir cinq pour une valorisation dès cette année : Anneyron, Manthes, Moras, Albon, Champagne. C’est sur cette dernière que nous vous invitons à vous joindre à une balade matinale de découverte active : le Mercredi 12 mars se terminant par un apéritif offert par la Communauté de communes et un repas tiré du sac (autour de 12 h 30). Guidés par les connaisseurs locaux, avec l’appui de spécialistes extérieurs (botaniste, historien, géographe …), nous ferons ensemble le choix des caractéristiques de la signalétique future qui sera partagée par tous les chemins de Rhône Valloire : nature des stations de découverte, styles d’informations et de panneaux, mode d’emploi des chemins, activités ludiques … Rendez-vous : Mercredi 12 Mars à 9 h devant l’église de Champagne. Vous avez participé au développement de certains de ces chemins, vous êtes un acteur de ce territoire intéressé par son développement, nous tenons vraiment à votre présence.
Veuillez recevoir nos meilleures salutations. NB. En cas de pluie importante, veuillez vous renseigner : Office de Tourisme 04 75 03 17 05
Sur le territoire Rhône Valloire
31
sur le territoire rh么ne valloire
32
sur le territoire rh么ne valloire
33
Paysages du Bien Vivre en Drôme des Collines C’est une manifestation organisée par trois établissements de formation “agricole” de la Drôme des Collines : la MFR de Mondy Bourg de Péage, le Lycée horticole de Romans, la MFR d’Anneyron. Elle vise à développer la conscience commune d’un paysage qui est cadre de vie pour les habitants d’un territoire, construit par les activités humaines, notamment l’agriculture et dont l’harmonie reste toujours fragile. Une première édition a eu lieu les 11 et 12 mai 2007 sur les trois sites avec une manifestation commune à Miribel sous la forme d’une réunion publique. Elle a rassemblé historiens, géographes, élus, habitants … dans le croisement des regards sur les paysages de leur vie quotidienne, paysages du bien vivre en Drôme des Collines.
la deuxième édition de cette manifestation aura lieu les 24 et 25 avril 2009 sur les trois sites avec une soirée publique à st Donat … à suivre …
sur territoire rhône valloire II - b -le Terroir(s) en Valloire(s)
34 28
Terroirs DU MONDE
Forum des Dentelles de Montmirail , construire la « Dynamique Planète - Terroirs »
Les 26 & 27 juin 2008 aura lieu le 2 Forum International « Planète Terroir - Dentelles de Montmirail 2008 » ème
Il est organisé par Terroirs & Cultures avec les trois appellations Béa urnes de Venise, Gigondas et Vacqueyras. A nouveau placé sous le patronage de l’UNESCO et désormais sous le parrainage du Ministère de l’Agriculture et de la Pêche, le forum reçoit aussi le soutien de nombreux acteurs locaux de collectivités, d’organismes et d’institutions. Le Forum International «Planète Terroirs » devient le rendez-vous régulier des acteurs de terroir du monde, un lieu de débats et de rencontres, de croisement des expériences et des savoirs qui s’appuie sur les expériences locales pour mieux appréhender les réponses globales. Quinze pays seront représentés : Bénin, Brésil, Canada, Espagne, Grèce, Hongrie, Italie, Laos, Liban, Madagascar, Maroc, Nouvelle Zélande, Russie, Suisse, Sénégal.
Dominique Chardon Président de Terroirs & Cultures
Terroirs du Monde
Lors des premières « Rencontres Internationales de l’UNESCO » organisées à Paris en novembre 2005, nous avons posé les fondements de notre démarche, adopté une définition et une charte des terroirs sous l’egide de Claude Béranger et Jacques Lefort.
Le Forum de l’Aubrac, en septembre 2006, a ensuite témoigné de la réalité du terroir. Chacun a pu mesurer par l’étude du vécu que le terroir n’est pas un concept mais bien une force vivante. Guidés par André Valadier, Vincent Alazard, les femmes et les hommes qui font vivre cette terre, avec le Laguiole, un fromage AOC mais aussi un couteau, avec l’aligot et la fouace. Ici race Aubrac et l’herbe du plateau, avec les paysages et les Chemins de St Jacques, avec la gastronomie et tout particulièrement celle de notre ami Michel Bras, avec la force du tourisme qui fédère et valorise cet ensemble... nous avons vérifié que le terroir peut offrir, parmi d’autres bien sûr, une réponse bien réelle aux enjeux actuels de notre monde. Une voie innovante, porteuse de «valeurs ajoutées», source de développement durable et de cohésion sociale du paysan au citoyen en passant par l’artisan, le consommateur et plus largement l’ensemble des acteurs. Nous avons constaté que valoriser la diversité et l’identité, protéger l’origine des produits, promouvoir les cultures alimentaires et le goût, le local et l’infiniment petit, situer l’Homme au cœur de la vie des territoires était un combat juste et économiquement porteur.
35
Les dernières émeutes de la faim, les crises et les désordres alimentaires, la pauvreté, la littoralisation des populations, les migrations vers les villes, l’uniformisation des cultures, la réduction accélérée de Ia diversité, les problèmes environnementaux sont autant de signaux d’alerte qui nous amènent à réfléchir et à poursuivre notre démarche. Il est nécessaire d’élaborer, proposer des itinéraires et des choix de développement alternatifs.
soins et ses attentes.
C’est pourquoi nous souhaitons faire du Forum des Dentelles, le Forum de la construction d’une véritable «Dynamique Planète Terroirs» pour tout particulièrement :
Se doter des « outils » pour transmettre et mutualiser les compétences et les savoirs à ceux qui veulent se former et se mobiliser. C’est la condition sine qua non pour concrétiser notre action et la pérenniser.
Organiser et agrandir un réseau opérationnel d’acteurs de terroirs et de compétences de tous les pays, de toutes les professions et de toutes les disciplines pour développer un laboratoire d’idées, une plateforme de recherches et d’echanges et des actions sur les terroirs. C’est à notre point de vue de cette «mise en réseau» que naîtra une véritable force des terroirs. La liste des partenaires qui soutiennent déjà notre démarche est un gage d’avenir. Je veux les remercier pour leur appui, leur confiance et leur engagement. Et dire à tous ceux qui le souhaitent qu’ils peuvent s’associer et nous rejoindre. Chacun peut participer et s’impliquer pour faire valoir son regard, ses be-
terroirs du Monde
Elaborer collectivement des propositions et des projets nourris de nos débats en plénière et des résultats des travaux thématiques des neuf ateliers. La venue du Ministre de l’Agriculture, Michel Barnier à la veille de la Présidence Française de l’Union Européenne sera à ce titre l’occasion de mobiliser la France et l’Union Européenne sur nos actions et notre réseau.
Nous avons la volonté de travailler pour poser les conditions du renouveau des territoires au Nord comme au Sud. Nous le savons tous, les modèles n’existent plus! Avec les terroirs, nous sommes dans la complexité et la transversalité. Nous avons donc besoin de poser des repères de redonner du sens, d’avoir de nouvelles analyses et de nouveaux éclairages. Ce sont ces défis que nous voulons, avec vous, essayer de relever lors de cette rencontre sur les Dentelles de Montmirail. C’est une fois encore un lieu magique qui accueillera le Forum. Il porte en lui une force et des valeurs
qui contribuent à nous aider à voir plus loin. Depuis longtemps, les hommes et les femmes nombreux, y mènent une action exemplaire. Leur histoire, leur combat, leur réussite, leurs appellations, leurs produits, leur cheminement, leur paysage parlent pour eux. Sur place, à travers le prisme du vin et de la Méditerranée, nous poserons véritablement la question de l’uniformisation, de la standardisation et de la globalisation. Car le danger est là : un monde unique, uniforme et polarisé ! Un monde qui renie la diversité et engendre par voie de conséquence la fin de la créativité indispensable à notre survie. C’est un véritable enjeu de civilisation qui sera mis en questionnement. Nous souhaitons que chacun y prenne part, apporte son témoignage, son savoir, son expérience pour faire émerger des actions concrètes. C’est notre ambition. Nous comptons sur vous et nous vous attendons nombreux.
À la tribune du Forum : Mamadou Cissoko Diop (Sénégal), Marie Rouanet (écrivain des “Pays d’Oc”), Rudy Rubovsky (Hongrie), Serge Arzeni (OCDE)
36
terroirs du Monde
37
Un groupe de Réflexion - Action : “Terroir en Valloire” Autour de la poire
les Entretiens du terroir du 25 avril ne sont pas une fin en soi, une manifestation spectaculaire sans conséquence. la satisfaction exprimée par plusieurs participants comme le projet des organisateurs indiquent qu’une suite est possible et nécessaire. Elle est nécessaire car la dynamique qui a permis cette réalisation exprime une volonté de valoriser le potentiel du territoire. Elle est possible parce que les acteurs présents dans leur diversité ont exprimé le désir de développer leurs activités en synergie.
qui pourrait être un produit phare de la Valloire, nous pourrions rassembler les fruits et arboriculteurs du territoire. Nous n’ignorons pas l’impact terrible de la sharka ou des aléas climatiques mais il s’agit justement d’explorer des pistes d’avenir pour les exploitations agricoles et les jeunes qui s’y installent ou envisagent de le faire. Autour des arboriculteurs, nous pourrions, dans un second temps, rassembler les activités intéressées par une valorisation commune : associations patrimoniales et culturelles, entreprises locales, communes et structures intercommunales, établissements de formation … Proposition est faite aux arboriculteurs de la Valloire de constituer dès l’automne 2008, après la Fête de la Poire, le noyau “arboricole” d’un groupe de réflexion et d’action, formé par ces différents acteurs.
Objectif du groupe Court terme : organiser les Entretiens du Terroir en Valloire n°2 (mars 2009) autour du thème “Quel marquage possible pour les fruits et les produits de la Valloire” … ou autre thème qui paraîtra plus pertinent. Moyen terme (2009-2012) : participer activement au rassemblement de l’ensemble des acteurs du territoire
autour de la constitution d’un “panier de biens et de services” en Valloire.
Méthode Organisation de réunions (par exemple en 5 demi-journées ou journées) avec des intervenants adaptés au thème choisi et rencontres avec les acteurs non agricoles du territoire pour les intégrer à la réalisation des «Entretiens du Terroir» (Animation par la MFR Anneyron).
Financement envisageable MFR Anneyron (cadre Pôle Ressources Fruits Territoires, avec mobilisation de financements Département, Région) , Communauté de Communes Rhône Valloire (cadre projet “Cueillez le fruit à la source”), Vivea (Fonds de formation des exploitants agricoles) …
partenariat Un partenariat prioritaire sera établi avec l’association “Terroirs et Cultures” avec l’objectif d’intégrer la Valloire (et au-delà la Drôme des Collines) dans le réseau des terroirs du monde. Une proposition d’accueil du Forum International “Planète Terroirs” sur la Drôme des Collines en septembre 2010 pourrait être envisagée. Le partenariat local reprend celui instauré pour les «Entretiens du Terroir n°1» : autour de la MFR Anneyron : CC Rhône Valloire, Arbos de Moras, Auberge de la Valloire … et peut s’élargir aux associations et structures qui le souhaitent. Appel à tous les volontaires ...
Constitution d’un groupe de réflexion action - terroir en valloire
38
iii
tErrOirs - ExplOrAtiOns
39
Terroirs ... une approche historique L’irrigation
Extrait de la publication (mars 2008) :
« regards croisés sur rhône valloire, Fragments de l’histoire du territoire »
par Mathieu Galliot-Bismuth, Laboratoire d’Etudes Rurales, Université Lyon 2 … dans le cadre d’une étude pour la Communauté de communes Rhône Valloire (avec, pour cet extrait, des références au travail de Bernard Mousserin (MFR Anneyron) ou de Pierre Martin).
Une approche historique
UnE nÉCEssitÉ pOUr sUrvivrE
pour exploiter la ressource « Les agriculteurs avaient le droit d’utiliser l’eau des cours d’eau suivant des règles qui avaient été prescrites depuis les années 1600 environ et dont le contenu était déposé à la Mairie de Moras, cheflieu du mandement de l’époque. Ces droits concernaient surtout Veuze car cette rivière avait un débit relativement constant (elle est alimentée par des sources) et c’est sur celle-ci que l’on trouvait des petites manufactures ou des moulins
qui avaient besoin de l’eau pour fonctionner. Une réglementation s’imposait. Le moindre petit canal dérivé de Veuze (ou des Orons) avait un règlement propre et authentifié par un acte. […] On peut remarquer avec quelle précision ces actes étaient rédigés et la cohérence qu’il y avait entre la surface du pré et son temps d’arrosage. […] Les droits d’arrosage étaient […] attribués pour les parcelles qui étaient cultivées en prés et non pour les terres labourables. Ce droit était attribué à la parcelle et lorsqu’un acte de vente était réalisé le nouveau propriétaire bénéficiait de fait de ce droit d’arrosage. Le prix de la terre pouvait varier selon son attribution de droit d’arrosage ou non et chacun au moment des transactions cherchait à savoir si le pré avait un droit d’eau. […] Il n’y avait pourtant pas que des prairies en Valloire. Si les prairies dominaient au moment où les principaux règlements d’arrosage ont été mis en place, [d’autres productions virent le jour par la suite et les cultivateurs s’adaptèrent]. Alors ces terres labourables qui, en théorie, ne devaient pas être arrosées, l’étaient parfois mais il est sûr qu’elles ne bénéficiaient pas de droit d’eau en titre. Si l’agriculteur voulait arroser ses terres il le faisait au détriment de ses prés et il savait qu’il ne pouvait plus avoir de l’eau avant une semaine. […] On voit donc qu’en l’espace de trois siècles les règles ont bien évolué et que la notion de droit d’usage a davantage été utilisée par les hommes comme un droit à disposer d’une ressource plutôt que limiter cet usage à une activité déterminée. C’est à partir des années 1970-75 que ce droit at-
40
tribué à la parcelle va commencer à perdre petit à petit de son sens. L’arrivée du maïs va désorganiser le réseau et ce phénomène va s’accentuer rapidement à partir des années 1980. Cependant ces bouleversements vont peu concerner les coteaux qui conserveront leurs systèmes de production traditionnels comme le tabac et les légumes (Lapeyrouse, St Sorlin) la fraise, les cassis ou les arbres fruitiers sur Lapeyrouse, Moras et surtout Epinouze et l’élevage sur St Sorlin. L’eau a donc surtout eu des répercussions dans la plaine». Outre ce système d’irrigation, des «ponts aqueducs ont été construit sous la Restauration dans le but de protéger Veuze des eaux torrentielles venant des coteaux de Moras et St Sorlin. ». En effet certains torrents comme Frémuzet ou Combet représentaient des dangers pour les cultivateurs et devaient faire l’objet d’un entretien permanent. « Situé à moins de 500 m des sources de Veuze, le pont aqueduc de Manthes protégeait cette rivière des eaux arrivant des torrents du coteau de Moras (le torrent de Frémuzet pour ce pont). Ainsi Veuze bénéficiait d’une eau constamment propice aux différents usages agricoles, piscicoles et artisanaux. Ce pont a été restauré en 1998. » « On voit donc que les principaux utilisateurs de l’eau trouvaient, chacun à leur niveau, une satisfaction de pouvoir user d’une ressource relativement protégée et d’en tirer les avantages attendus mais il faut rappeler que ces aqueducs ne concernaient que Veuze. Par comparaison, les agriculteurs se servant des Orons pour les arrosages ne
Une approche historique
bénéficiaient pas d’une eau aussi propice mais les usages n’étaient qu’agricoles et halieutiques. […] Ces ponts aqueducs font partie du patrimoine local mais beaucoup de gens ignorent même leur existence et l’intérêt actuel de ces ouvrages est que, outre qu’ils continuent à jouer leur rôle de protection des eaux de Veuze comme on a pu le constater en 1988 et 1993, ils puissent servir d’objet pédagogique pour expliquer aux enfants et à tous ceux qui s’intéressent à la protection d’un milieu comment les générations précédentes se sont adaptées à leur environnement naturel et avec quels moyens techniques elles l’ont fait».
Contre les maladies « Au moment où le Dauphiné est rattaché au royaume de France, le mandement de Moras devient propriété du roi et ce dernier dispose de tous les pouvoirs : les cours d’eau lui appartiennent, les droits de pêche aussi. C’est à cette époque que se pose la question des eaux d’arrosage. Les habitants de la Valloire ont toujours utilisé ces eaux pour irriguer leurs terres en été mais cela provoquait maintes contestations entre usagers et on mentionne aussi de graves maladies causées par l’eau et le manque de structures d’assainissement notamment dans les bourgs. […] Cette période fut aussi traversée par de nombreux procès, règlements, délibérations… soit pour permettre à certains utilisateurs de bénéficier de l’eau à laquelle ils avaient droit, soit pour définir des quantités d’eau entre usagers, soit encore pour des raisons sanitaires à cause des odeurs et des épi-
démies. […] C’est à cette période que la réglementation sur l’arrosage fut mise en place et que les actes de cette réglementation furent consignés à Moras. L’horloge placée dans le clocher de l’église du village fixait l’heure d’arrosage pour tous les particuliers qui possédaient des prés. […] Il semble aussi que les épidémies aient fortement marqué la Valloire notamment à cause des eaux d’arrosage qui recouvraient la plaine en été et qui “exhalaient en croupissant des miasmes nauséabonds et engendraient des maladies épidémiques désignées sous en nom de fièvres d’accès”. D’ailleurs en 1656 on évoque la présence d’une maladrerie à Moras (on disait aussi maladière) sorte d’hôpital où l’on déposait les contagieux hors du village. A ce propos on rassemblait sous le terme de ”peste“ la plupart des maladies épidémiques sans que ce soit forcément la peste mais le seul remède était l’isolement des malades hors du village avec surveillance des entrées au village (ordonnance de 1603). Ces maladies touchaient principalement des populations laborieuses mal nourries et mal logées. Beaucoup de ces lépreux ou autres malades ont été utilisés pour creuser le canal de Veuze. […] C’est sous Napoléon 1er, en 1806, que fut sévèrement réglementée, par décret, l’irrigation en Valloire. Ces mesures se justifiaient par la persistance et la gravité des épidémies. Des travaux furent ordonnés et en particulier pour améliorer le lit des cours d’eau et pour faciliter l’écoulement des eaux. Les résultats se traduisirent par la disparition des épidémies et le meilleur respect des réglementations ».
41
La réglementation comme élément unificateur de la communauté.
Des temps pour l’arrosage « La saison d’arrosage débutait autour du 25 mars et, après le 8 septembre, les agriculteurs n’avaient plus le droit d’arroser. C’était le cadre général. Ces dates étaient définies pour les riverains de Veuze qui devaient composer aussi avec les autres usagers, en particulier les moulins. […] C’était donc entre la fin du mois de mars et la fin du mois d’août que la saison d’arrosage était planifiée et durant l’hiver les meuniers étaient les principaux utilisateurs de la ressource. La notion de saison avait du sens pour eux car cela correspondait à une organisation sociale qui leur permettait d’avoir des repères par rapport à un territoire bien identifié et à un mode de fonctionnement consensuel. L’heure d’arrosage était celle fournie à partir du lever du soleil et c’est cette horloge du clocher de Moras qui fixait cette heure officielle. A l’époque où ce système a été mis en place beaucoup de personnes ne savaient pas lire et se repéraient uniquement à cette horloge. Plus tard les gens qui arrosaient leurs prés consultaient le calendrier des postes sur lequel était indiquée l’heure du lever du soleil et l’apparition des montres n’a pas remise en cause le caractère officiel de l’horaire fourni pas l’horloge de Moras. […] En matière de droit d’usage beaucoup d’agriculteurs disent ne pas avoir de traces écrites et la plupart ont utilisé ces droits uniquement par transmission orale. […] Ils étaient transmissibles de
Une approche historique
génération en génération et, en Valloire, les successions agricoles étaient essentiellement familiales. Certains agriculteurs parlaient de “droits immémoriaux” faisant allusion au fait que, lorsqu’un fils succédait à son père, il continuait à user des droits anciens et il ne se posait pas forcément la question de savoir sur quels écrits reposaient ces droits ».
Les tours d’eau « Concrètement l’organisation des tours d’eau se faisait d’amont en aval c’est-àdire depuis la source de Veuze (sur Manthes) jusqu’au quartier des Chimours à St Sorlin. Dès que le propriétaire du fonds inférieur était en droit de le faire il coupait l’eau sur le ruisseau principal, ou sa dérivation, et utilisait ensuite tout son savoir-faire pour que l’eau soit répartie sur l’ensemble du pré et selon le temps qui lui était imparti ». Pour détourner l’eau de Veuze, des petits canaux avaient été creusés. Ce sont les biefs, ou béals. Pour y faire arriver l’eau, par endroits se trouvaient des portes, dont la structure variait selon la force du courant. « Sur des biefs très peu larges les agriculteurs utilisaient des moyens rudimentaires pour couper l’eau (galets, petite planche, motte d’herbe…). Sur des biefs un peu plus larges on utilisait une porte fabriquée en bois (surtout avec du verne) ou usinée en métal et celle-ci était la plupart du temps introduite dans une sorte de glissière située de part et d’autre du bord. L’emploi en était facile et lever ou baisser ces portes ne demandait pas de gros efforts physiques et pouvait donc être fait par la femme de l’exploitant au cas où se dernier en soit empêché. Enfin sur les dé-
rivations les plus larges et sur les ruisseaux principaux (Veuze, les Orons) les ouvrages étaient nettement plus conséquents et beaucoup de portes étaient fixées sur des supports bétonnés ou encastrés dans de gros rochers. Elles pouvaient résister à la vitesse du courant et à d’éventuelles crues. Certaines, très lourdes à manipuler, étaient même équipées de filins à crémaillère ce qui diminuait fortement la pénibilité du travail d’autant plus que la pression de l’eau à couper ou à laisser partir était plus forte. Sur Veuze on retrouve encore aujourd’hui l’essentiel des portes par lesquelles l’eau allait se dériver dans les différents canaux. Tout ceci fonctionnait de manière satisfaisante […] c’est-à-dire que le temps d’arrosage qui […] avait été alloué […] suffisait pour la semaine à condition que l’eau soit correctement répartie sur la parcelle. On peut toutefois faire observer le peu de souplesse de ce système. La tâche n’était pas différable, elle exerçait ses propres contraintes sur le reste des activités de l’exploitation et aussi sur la vie familiale. La réussite technique de l’arrosage de chaque parcelle était indispensable car sur Veuze les tours d’eau ne revenaient que chaque semaine et pour un temps compté. Chacun veillait à ce que les biefs soient bien creusés : pour que l’eau ait le plus de force pour aller jusqu’au fond du pré il ne fallait pas que la rigole soit trop large. […] En Valloire les petites rigoles réalisées dans les prés portaient le nom de biailles. Ces raies étaient faites en deux temps : d’abord avec un outil à grande lame, un coupe-biaille (certains agriculteurs appelaient ça des taille-prés), on coupait le gazon sur deux
42
côtés espacés de 20 cm environ ; ensuite à l’aide d’une pioche spéciale, légèrement relevée, on enlevait la partie superficielle de la prairie, sur 5 cm environ, et c’est à partir de ce petit chenal que l’eau se répandait dans le pré. Le gazon enlevé était mis sur le côté de la biaille ou enlevé s’il pouvait gêner la fenaison ».
Des conflits vecteurs d’apprentissage de l’exercice de la démocratie Entre agriculteurs les règles d’usage étaient définies à partir des actes de Moras qui stipulaient le mode d’organisation des tours d’eau pour chaque pré. Chaque règlement des eaux était officialisé et enregistré au tribunal du Grand-Serre […]. Il en était ainsi de tous les actes mais un travail de recherche d’archives est rendu difficile à cause des incendies à la mairie de Moras au moment de la Révolution. […] Chacun se basait donc sur ce qui était prescrit au moment de l’établissement des droits. On peut observer ici que ces règlements ont pu fonctionner ainsi pendant plusieurs siècles simplement par respect mutuel des règles d’usage. […] La principale source de conflits étaient les vols d’eau entre agriculteurs car certains ne respectaient pas les tours d’eau et s’arrangeaient pour tirer profit de leur meilleure situation géographique ou étaient tout simplement plus malins ou plus malicieux que d’autres. Si de sérieux problèmes intervenaient entre agriculteurs, le plaignant s’en référait au règlement de l’association syndicale d’irrigation. Le garde communal réceptionnait la plainte car c’était lui qui était chargé de
Une approche historique
faire respecter les règles d’arrosage sur sa commune. Toutes les plaintes étaient alors étudiées devant un tribunal d’instance qui siégeait à St Sorlin un lundi par mois, dans la salle de la mairie. Le juge de paix venait du Grand-Serre avec son greffier et étudiait chaque cas de litige mais il faut préciser qu’il ne venait pas uniquement pour régler des problèmes liés spécifiquement à l’eau. Il traitait toutes les plaintes qui étaient déposées et l’eau y tenait, en saison d’arrosage, une place parfois importante. Les séances étaient publiques et comme les gens se connaissaient relativement bien cela occasionnait parfois des situations cocasses qui portaient à rire. […] La séance se déroulait à partir de l’exposé du juge de paix qui se basait sur le rapport des gendarmes, le plaignant donnait sa version des faits et, s’il y avait des témoins, on les écoutait. […] Il existait des petites querelles entre les meuniers et les agriculteurs qui se reprochaient mutuellement des ”vols d’eau“ soit par non respect des horaires soit parce que certains agriculteurs s’arrangeaient pour détourner l’eau de façon illicite dans leur pré. S’il ne s’agissait que d’un petit filet d’eau dérobé à l’insu du meunier le conflit ne prenait pas des proportions très graves mais il arrivait qu’en pleine nuit le meunier soit réveillé par “le silence de la roue de son moulin” comme l’évoquait le fils d’entre eux. C’était le signe qu’en amont quelqu’un avait détourné l’eau du canal d’amenée. Le meunier se levait en vitesse […] et s’en allait remettre l’eau sur son canal. Si c’était un agriculteur qui avait détourné l’eau il était très facilement identifié, il suffisait de
repérer le ou les prés regorgeant d’eau et à partir de ce constat le meunier déposait plainte et le responsable était jugé par le tribunal qui siégeait à St Sorlin ou alors le meunier réglait par la force le différent qu’il avait avec l’agriculteur. Le tribunal avait donc assez souvent à statuer sur des délits de ce genre mais beaucoup d’affaires ne passaient pas devant le juge. Les gens les plus âgés se souviennent de bagarres qui avaient lieu la plupart du temps sur place et qui mettaient aux prises un meunier et un agriculteur ou parfois les meuniers entre eux si l’un ne respectait pas les règles de répartition de la ressource. ”A cette époque les gens réglaient leurs problèmes eux-mêmes“ et beaucoup d’histoires se terminaient par “quelques coups de poing ou alors par un passage à l’eau”». Bien que l’on puisse constater que le règlement de certains conflits se faisait par la violence, la voie de la justice l’a progressivement supplantée. Son recours montre l’appropriation par les habitants des possibilités offertes par les avancées de la démocratie. Ceux-ci prennent conscience qu’ils ont des droits, et entendent les fairevaloir. Le choix de la justice plutôt que la violence traduit un sentiment d’appartenance à la communauté, en cherchant à faire respecter par cette dernière son bon droit. C’est la communauté (l’Etat) qui par son représentant (le juge de paix) fait respecter ses règles (la loi). Ce que révèlent ces délits en matière d’irrigation, au-delà de l’existence de conflits parfois entre usagers de l’eau, c’est l’acculturation des habitants de la Valloire à des pratiques de plus en plus démocratiques… » …
43
Terroirs ... une approche philosophique
Chaque sujet exprime, obscurément et confusément, la totalité du monde … C’est ainsi que, par la traduction intelligente de Gilles Deleuze (1925-1995), Gottfried Wilhem Leibniz (1646-1716) exprime la construction des agencements qui font le monde tel qu’il peut être : le meilleur des mondes possibles. Non pas “le meilleur des mondes” comme s’en moque Voltaire dans Candide. Voltaire n’avait pas probablement pas lu Leibniz qu’il croit ainsi ridiculiser en promenant son personnage dans toutes les horreurs du monde : le tremblement de terre de Lisbonne de la Toussaint 1755, l’esclavage aux Amériques …
par la subjective plume de secquaj el Epdac paysan berbère
Une approche philosophique
Nous pourrions dire que si le monde est ce qu’il est, c’est par une com-possibilité d’agencements de sujets, de possibilités simultanées d’événements, d’agencements, d’agencements d’agencements. Et comme les “sujets” ne sons pas seulement les humains, nous pourrions les appeler comme Bruno Latour, sociologue contemporain, des “actants”. Ainsi les humains en leur société seraient imbriqués dans des agencements avec des paysages, des climats, des reliefs, des sols … ils seraient imbriqués dans des agencements historiques d’actants producteurs
et produits d’une histoire. D’une histoire ? Pas seulement une, qui serait réductible à un récit du monde, mais des histoires entrelacées, croisées, concentrant en un espace-temps, l’ensemble des espacestemps particuliers d’hier et d’aujourd’hui.
chaque sujet exprime, obscurément et confusément la totalité du monde … sauf pour une part liée à son expérience sensible Cette expression obscure et confuse est ainsi préhensible, elle explique le compliqué, ce qui littéralement veut dire déplier. Elle n’atteint pas l’essence de la complexité du monde, le complexe, c’est ce qui est tissé ensemble (complexus) mais elle l’approche, elle en perçoit la dynamique qui lui échappe, qui ne peut que lui échapper. Nous humains, sujets et objets de notre histoire, entremêlée d’interactions complexes avec nos milieux de vie, produits par eux et producteurs de leur «humanisation» (il vaudrait mieux dire «anthropisation» du grec anthropos, homme). Nous, humains, sujets et objets, actants parmi d’autres, nous sommes en charge pourrait-on dire de leur agencement particulier dans l’ensemble des contraintes que portent les lois de la nature dans laquelle nous sommes, de laquelle nous sommes nés …
44
Chaque sujet exprime, obscurément et confusément, la totalité du monde … … et si nous disions, si nous osions dire que :
chaque terroir exprime, obscurément et confusément, la totalité du monde…
C’est-à-dire : si nous considérons un terroir comme un sujet, comme un agencement particulier de sujets, comme un agencement actualisé “d’actants”. Nous n’oserions pas dire que “le terroir est un sujet” sans avoir conscience qu’il en faudrait définir la qualité d’être. Nous pouvons cependant considérer ce “sujet” comme “objet” d’étude.
C’est sa singularité qui doit être “expliquée”, dépliée en sachant qu’une part d’irréductible nous empêchera de la réduire, mais n’est-ce pas là le secret de sa dynamique historique. Le terroir que nous construisons et qui nous construit, c’est la singularité du flux du monde en un lieu, en un temps, en une micro société, en un milieu “naturel”.
Mais, dit-on, chaque terroir ne peut être défini que sur un espace géographique limité, qu’avec des interactions entre les humains, en société, et leur milieu, avec une spécificité reconnue … oui ! Nous restons dans la définition proposée par l’Unesco.
Tous les terroirs du monde se trouvent alors reliés, là où une approche superficielle et fausse, les laissaient repliés sur eux en une identité cristallisée. Les terroirs sont des cellules du monde, avec leur noyau, leur programme, leurs interactions, leur membrane, leur information interne construite dans l’échange, transmise … du Sénégal au Brésil, du Laos au Maroc, de l’Aubrac aux Dentelles de Montmirail … les terroirs ont les accents multiples d’une langue commune, d’une humanité inscrivant sa trace dans le milieu terrien … Nous ne renoncerons pas à décrire la spécificité, la typicité, la réputa-
Nous pourrions dire qu’il est un agencement local singulier de la totalité du monde, comme si le monde surgissait ici par un passage de son flux qui traverse et construit tous les agencements singuliers, comme si le flux du monde prenait ici forme particulière, s’informait dans une configuration singulière.
Une approche philosophique
tion … cela reste nécessaire justement pour comprendre, pour apprendre, pour diffuser. Nous savons que le terroir dans lequel nous œuvrons exprime cette singularité locale et temporelle de l’universel. Et l’expression de cette singularité est d’autant plus affûtée qu’elle se bâtit dans l’échange, la controverse comme une parole qui s’élabore à mesure qu’elle se dit. Le discours du “sujet” sur le “sujet” n’est pas construit à l’avance.
chaque terroir exprime, obscurément et confusément la totalité du monde sauf pour cette part liée à l’expérience qu’en font les humains qui en vivent et qui le font vivre …
45
Présentation des organisateurs des entretiens .... partenaires du futur ANNEYRON
Terroirs et Cultures C’est une association internationale (basée à Montpellier) qui a lancé, avec l’Unesco, les Forums Planète Terroirs qui vise à valoriser les terroirs du monde … dont la prochaine édition a lieu les 26-27 juin aux Dentelles de Montmirail. Elle est en lien étroit avec des chercheurs de toutes disciplines (géographie, économie, sociologie …) qui apportent leur contribution aux acteurs de terrain dont l’expérience est un élément de connaissance et de développement des terroirs. Ces apports mutuels sont un atout majeur dans le contexte de mondialisation croissante qui tend à l’unifomisation des modes alimentaires.
Terroirs & Cultures
2 bis rue ]ules Ferry 34000 Montpellier Tel : 04 67 63 37 95 courriel : terroirsetcultures@yahoo.fr www.terroirsetcultures.asso.fr
Présentation des organisateurs des «Entretiens du Terroir»
Maison Familiale Rurale d’ Anneyron
C’est un établissement de formation en alternance qui assure plusieurs missions : La formation initiale de la 4ème au CAP, BEP, Bac Professionnel, Brevet de Technicien Supérieur … elle est orientée sur l’agriculture (arboriculture, horticulture) et le commerce. Des formations spécifiques complètent cet éventail : ouvrier agricole polyvalent … certificat de spécialisation de Technicien en Agriculture biologique … ou encore licence professionnelle. La MFR d’Anneyron s’investit pour apporter ses compétences aux acteurs du territoire : arboriculteurs, organismes … estimant que le développement durable d’un territoire nécessite un lien entre les acteurs, entre les habitants autour d’un vivre ensemble dans un cadre harmonieux. Ainsi en est-il des initiatives prises : enquête sur les critères d’achats en fruits, manifestation des “Paysages du bien vivre en Drôme des Collines” … Entretiens du Terroir …
Maison Familiale Rurale d’Anneyron 33, place Rambaud 26140 Anneyron - Boite Postale 2 Tel : 04 75 31 50 46 - Fax : 04 75 31 40 72 courriel : mfr.anneyron@mfr.asso.fr www.mfr.asso.fr/anneyron
46
QUADRIE et ant. P
Pour les de ENVELOPPES Communauté communes SEULEMENT Rhône Valloire
Les Arbos de Moras C’est une association qui se donne pour but de mettre en valeur la poire de Moras, ses bienfaits, les différentes façons de la déguster et de la cultiver, la faire connaître au grand public avec l’ensemble des fruits de la Valloire. Elle organise à Moras en Valloire, tous les deux ans, une manifestation de grande ampleur (2000 visiteurs) : la Fête de la poire avec la participation des commerçants, artisans et autres associations. La troisième édition aura lieu le Dimanche 21 septembre 2008, elle fera le lien entre poire et fruits de la Valloire et la vanille de Madagascar.
Les Arbos de Moras Mairie 26210 MORAS
Elle est constituée de 14 communes (10 en Drôme, 4 en Ardèche “de l’autre côté du Rhône”) en compétence comme toute communauté de communes du développement économique et de la gestion de l’espace. Elle cherche à valoriser sa situation géographique de passage nord-sud, est-ouest, son patrimoine historique haut-lieu du Dauphiné, sa richesse en eau et celle de son terroir de fruits. Pour cela, elle met actuellement en œuvre un projet de développement de territoire autour du fruit et de l’histoire au nom évocateur : “les chemins de l’arborescence!”
Communauté de communes Rhône Valloire Le Creux de la Thine - BP 15 26140 ALBON Tel : 04 75 03 05 36 - Fax. 04 75 03 15 96 courriel : rhone-valloire@ccrv.fr www.cc-rhonevalloire.fr
Présentation des organisateurs des «Entretiens du Terroir»
L’Auberge de la Valloire Dans son restaurant d’Epinouze, le chef Jean-Jacques Galliffet propose des interprétations de repas à base de fruits. De l’entrée au dessert, dans une grande variété de préparations, d’associations de saveurs, se développe le goût … qu’un livre, en préparation, permettra de diffuser demain. Le lien étroit entre le verger de l’arboriculteur et le fourneau du chef, cette chaîne de savoir-faire est un signe de l’affirmation d’une spécificité, un signe d’avenir possible.
L’Auberge de la Valloire
Village neuf 26210 EPINOUZE Tél 04 75 31 72 98
47
IDC ANDANCETTE 04 75 03 04 91