Charme Oriental, Confort Occidental... Vous pouvez en être assuré au Seoul Garden. Notre établissement qui compte 400 chambres offre 5 restaurants avec une variété impressionnante de cuisines, un café, un salon, un bar et un nouveau centre de forme. Situé dans le quartier d'affaires de Mapo, il se trouve plus près de Yoido et de l'aéroport international de Kimpo que tout autre hôtel de luxe. Et pour le shopping, quelques minutes le séparent d'Itaewon.
B.
Seoul Garden Hotel SEOUL KOREA
169· 1 Dohwa-dong, Mapo·ku , Sco ul. Korea TEL(02)7 17·9441, FAX ,(02)715·944 I. New York Officc .calltoll free 800·252· 1243/USA.
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Dchon Reserv ation Ltd .
TRESORS DE COREE
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Les Yon nalligi
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1:
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Le jeu du cerf-volant, yon nalligi, est depuis longtemps re passe-temps favori des Coréens, notamment au moment du Nouvel An lunaire. Encore aujourd'hui, des compêtitions de cerf-volant ont lieu pattout en hiver. On fait du cerf-volant souvent au moment de la première pleine lune de l'année lunaire. Ce jour-là, autrefois, on écrivait son nom, sa date de naissance et des exhortations du style "Dehors les mauvais esprits et restez les bons r', sur les cerfs-volants et on les faisaient voler avec l'espoir de s'assurer une bonne fortune pour l'année à venir. Les "combats de cerfs-volants" sont les plus populaires des jeux de cerf-volant. Comme le but du combat est de couper le fil du cerf-volant adverse, il est coutume d'enduire le fil d'une mixture de colle et de poudres de verre et de céramique pour le rendre résistant et abrasif. Le joueur manipule son cerf-volant de façon à ce que son fil se place en travers de celui de son adversaire. Ensuite, il tire et relâche alternativement son fil pour scier le fil de l'autre joueur. Il y a une autre compétition qui consiste à faire voler les cerfs-volants le plus haut et le plus loin possible. Les cerfs-volants en forme de "bouclier" sont les plus
répandus en Corée. Ils sont rectangulaires et troués au centre avec un sommet incliné. Ce sommet incliné leur permet de voler haut et loin, alors que le trou les rend résistants au vent et maniables. Il y a aussi les cerfsvolants en forme de diamant, appelés kaoriy6n, qui sont très courants. Parfois, on attache ~ plusieurs cerfs-volants les Ji uns aux autres pour en former un long. Des cerfs-volants de diverses formes de dragons, de phénix, et d'autres oiseaux et animaux, sont également populaires. I.:allusion la plus ancienne relative au cerf-volan es( faite dans Samguk sagi (Histoire des trois royaumes), publié en 1145. D'après ce livre, une étoile tomba du ciel en 647, la première année du règne de la reine Chindok du royaume Shilla (57 av. J.C-935 ap. J.C) et cela fut considéré comme de mauvaise augure pour la reine qui dut faire face à une rébellion. On dit que Kim Yu-shin, le général qui menait le combat contre les rebelles, lança dans le ciel un gros cerf-volant en flamme, une nuit, et fit propager la nouvelle selon laquelle la mauvaise étoile était retournée () m
au ciel et réussit ainsi à calmer la ; évolte.- ~
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)
COUVERTURE: Le meilleur
moyen de comprendre l'instin ct naturel d'un groupe ethnique n'est-il pas de regarder quel est son folklore ? Ce num éro de KOREANA vous propose de découvrir les jeux et divertissements folkloriques, les minsok nor4 qui sont . Je produit d'un folklore varié où sont représentés les danses et la musique des paysans, la danse masquée, les cerfsvolants et les jeux et rituels qui font participer toute la comnwnauté villageoise.
Les Jeux Folkloriques Distraction des esprits et assurance d'abondantes récoltes
4
Les Jeux folkloriques Coréens par Im Tong-kwon
12
Jeux folkloriques et Rituels
20
La Lutte à la corde Pour de meilleures récoltes
par Kim Kwang-on
26
Les Jeux folkloriques et la Productivité agricole
par Lim jae-hae
32
Les Danses masquées et la Culture récréative
par Chang Han-ki
©Tbe Korea Fou/ldatioll 1995.
38
INTERVIEW
Tous droits réserués. Toute reproductioll, même partielle, par tous procédés, saliS autorisatioll préalable de kt Korea Foundation, est interdite
par Chung Byung-ho
Les opinions exprimées par les a ute urs ne représentent pas n écessa ir e ment cell es de KOREANA et de la Korea Foundation.
La Musique coréenne depuis la Libération: historique et documentation
KOREANA, enregistré comme trimestriel auprès du Ministère de l'Information, (Autorisation No. Ba-1003, du 8 août 1987) est aussi pubqé en ~ponais, chinois, espagnol et anglais
48
Ha Po-gyong
42
par Song Bang-song
La Musique occidentale en Corée
par Han Sang-u
54
ARTISTES COREENS A L'ETRANGER
Philip Kang
par Kim Min
•
Korea Foundation 3
H~.i!-lPI<d
Vol.l, No.4 Hiver 1995
58
KOREANA
CHEMIN FAISANT
· Yonbyon
Publication trimestrielle de La Fondation de Corée, The Korea Foundation 526 Namdaemunno 5-ga, Chung-gu, Séoul 100-095, Corée
par Kimjoo-young
66 A LA DECOUVERTE DE LA COREE
La Zone démilitarisée: Un paradis pour les oiseaux migrateurs
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72
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80
Tambours de la paix: l'Orchestre de KBS joue à l'ONU
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L
'expression de minsok nori peut être traduite par "jeux folkloriques". C'est un terme géné-
~téi!;s.d7-
':~
. autres jeux traditionnels. Elle englobe parfois la danse et le théâtre. En tant que tels, les minsok nori sont non pas tant des activités de loisirs que des jeux récréatifs. Il faut noter que la danse et le théâtre folkloriques diffèrent de la danse classique qui est un genre à pàrt. Et bien que le théâtre de marion-
Les minsok-nori sont
non pas tant
des activités de loisirs
que des jeux récréatifs.
nettes et le théâtre masqué se soient développés indépendamment du théâtre folklorique, ils ont cependant fait de très nombreux emprunts à ce dernier. Chaque année le public peut découvrir la richesse et la variété du folklore coréen lors du festival national d'arts folkloriques qui comprend cinq grandes sections: la musique et les danses paysannes, le théâtre, la danse, les chants et les jeux folkloriques. Il existe par ailleurs trois grands groupes de nori: les nori de culte qui
comprennent les tari kut, Yongdilng
nori, kwandilng nori, t'apdori, chishin palki, ipch'un kut nori, taegam nori et tano kut nori; les nori saisonniers avec les kanggangsullae, hoetpul nori, hanjanggun nori, tapkyo nori, k6buk nori, kisebae, nottari palk~ kiwa palki et tilngbaru nori, enfin le troisième groupe de nori concerne les jeux de compétition avec les ch'ajon nori, kossaum, nonggi paetki, pordm chuldarigi et Asan chuldarigi En dehors de ces groupes il y a aussi: haenyo nori, obang nori,
ssangyong nori nor~
sodang nori et seg)X)ng
Aspects religieux et artistiques
Le plus souvent les jeux folkloriques se déroulent dans les villages de pêcheurs ou de paysans pour célébrer les saisons ~t fêter la création. Un grand nombre de nori proviennent des rituels des religions populaires et du bouddhisme. La plupart d'entre eux impliquent la communauté toute entière et, à l'origine, ils furent le fait des gens du peuple qui vivaient en
communauté et qui se les transmirent de génération en génération. Par exemple, kanggangsullae était à l'origine une ronde joyeuse permettant aux villageois de remercier la lune de leur apporter la lumière qui les libérait de la crainte de la nuit. Le bouddhisme et le confucianisme tentèrent d'enrayer ces formes d'expressions, souvent physiques, au profit de la méditation et de 1!1 réflexion; mais ils ne réussirent pas à tarir l'énergie et la joie exhubérantes des villageois comme en témoigne encore
aujourd'hui le kanggangsullae, nori saisonnier de la fête de Ch'us6k Des jeux comme le tari kut (marcher sur le pont), chishin palki (fouler la terre de dieu), ipch'un kut nori (l'accueil du printemps), taegam nori (vénérer un seigneur), tano kut nori (célébration du tano) et yondung nori (le festival des lampions) sont d'origine chamanique . comme le laisse entendre le terme kut qui signifie "cérémonie chamanique". On retrouve là les traces d'anciennes croyances populaires. Les dieux accaparèrent l'esprit du peuple lorsque celui-ci, prenant consie~ de sa condition de mortel, chercha à obtenir leur bonne grâce et leur protection. Dans le même temps, ils se mirent à invoquer les esprits et à célébrer de nombreux rites. Ils choisirent des voies de plus en plus spectaculaires pour remercier les dieux de · leurs bienfaits, ce qui donna naissance aux nori religieux. Les coréens célèbrent les saisons depuis des temps immémoriaux. Parmi les plùs célèbres fêtes qui marquent encore leur vie, il faut citer: Sol (la fête du nouvel an), Taeborüm (la fête du 15 du premier mois lunaire) et Ch'usok (la fête des moissons, le 15 du huitième mois lunaire). Se souvenir de son enfance, c'est se rappeler les jeux et les plaisirs partagés lors des minsok nori Quant aux promenades au clair de lune, elles ravivent la nostalgie du village natal. Les nori mettant en jeu des concours coïncident, le plus souvent, avec les festivals saisonniers et impliquent la participation des villages voisins. Certains concours sont de véritables événements puisqu'ils rassemblent tous les gens de la cité ou du village séparés en deux camps suivant les points cardinaux, est-ouest ou nord-sud Ces compétitions, qui requièrent la solidarité des participants, contribuent à affermir l'amitié et à fortifier l'esprit communautaire. Les nori de concours sont plus que des matchs amicaux. Dans le ~ temps anciens, leurs résultats étaient des plus sérieux: car étaient en jeu, non sc;ulement la fierté du village, mais aussi son bien-être. Par exemple, dans le cas du 6
Le plus souœnt les jeux
folkloriques se déroulent dans les villa!:J!S de .!Jêcheurs ou de paysans pour célébrer les saisons etfêter la création Un grand nombre de nori proviennent des rituels des religions populaires et du lxmddhisme La plupart d'entre eux impliquent la conununauté toute entière
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Les coréeJZS célèbrent les saLmJZS depuL<; des temps ùnménwriaU.-'C Se !:->VztÎx.>Jzir dR son erifmzce en Corée c'est se rappeler lesJ>JA.-v et les plaisirs jXJrtc{~ clair de lune,
lors des minsok JZori. Quant atLvpmrnenades au elles rauiœllt la 1ZOStülgie du
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JZC.ltûl
chuldarigi (lutte de traction à la corde), on croyait que la victoire apporterait au village une récolte exceptionnelle alors que de la défaite résulterait une pauvre moisson. Dans certains lieux, on constituait des équipes distinctes d'hommes et de femmes. L'on croyait que la victoire de l'équipe féminine était signe de la prospérité à venir. En ce sens, on peut dire que le chuldarigi est une variante agraire du rite de fertilité. Les minsok nori ne sont pas que de simples divertissements, ce sont des événements populaires qui constituent aujourd'hui ce que l'on appelle "l'art folklorique". Ils mettent en jeu non pas l'individualisme, mais plutôt l'esprit communautaire. Certains coréens, insensibles au charme de la musique occidentale, vont se laisser transporter par les sons et les rythmes des troupes de nongak qui les ravissent par leurs danses et musiques. Ils se laissent ainsi toucher parce que ces sons et ces rythmes, nés de la sagesse et de la sensibilité populaires, demeurèrent pendant longtemps indissociables de la vie de tout coréen. Il est désolant de constater que la plupart des minsok nori, qui se sont développés puis maintenus pendant si longtemps, disparaissent progressivement avec l'occidentalisation de la Corée. On ne leur ac:corde pas suffisamment d'attention dans les écoles. En outre, à cause de la modernisation et du changement des mentalités, ils sont de plus en plus négligés par les paysans qui furent les portes-drapeaux de la traciition. Les minsok nori devraient être non seulement redécouverts mais aussi préservés pour contribuer au développement et au rayonnement de la culture coréenne. Beaucoup de nori disparurent lors de la colonisation japonaise. Il faudrait pouvoir les retrouver grâce à la mémoire des anciens, ce qui permettrait de les faire renaître au sein de la vie moderne. Notre génération a le devoir de les préserver pour les générations à venir. La perte de ses traditions revient à perdre sa propre culture; cela signifie que le pays n'a pas la
capacité de sauvegarder l'héritage des ancêtres et qu'il ne fait preuve d'aucune créativité pour le faire fructifier. L'imitation des autres cultures ne devrait pas être l'objectif du développement, le mode de vie, voire la philosophie d'un pays. Il est donc temps de soutenir les efforts de ceux qui entendent préserver les minsok nori comme art folklorique. Plus on est de fous plus on rit
Les minsok nori sont les ,vestiges d'anciens rites lors desquels on vénérait le ciel voire les arbres, les montagnes et les rivières. Les villageois se réunissaient au soleil couchant pour faife des offrandes, pour danser et chanter selon les rites chamaniques. Le peuple adora ses dieux, célébra des rituels où les chants et les danses prirent de plus en plus d'importance. Les éléments religieux s'estompèrent pour laisser place aux éléments constitutifs du nori jusqu'à constituer l'art folklorique. Les troupes de nong-ak jouèrent un grand rôle pour perpétrer les rituels saisonniers et maintenir les croyances. Le jour du nouvel an, la musi,que rythmée des paysans résonnait dans tout le village alors que les villageois dansaient et chantaient sur les mêmes rythmes en accompagnant les dieux sur les lieux sacrés du village. Chaque minsok nori a ses caractéristiques propres et participe à la définition des particularités régionales. Le mode de vie d'une région dépend de l'environnement naturel et des principaux métiers de ses habitants. Ainsi, le chuldarigi (lutte à la corde) est plus largement pratiqué dans le centre et le sud de la Corée alors que le kilnettwiggi (la balançoire) est plus populaire dans le nord. Tandis que le kanggangsullae s'est bien développé sur la côte sud-ouest, dans la province de Cholla du sud, les gens de la province de Ky6ngsang du sud sont identifiables à leur k'UJaeji-na ch'ingch'ing (chanson populaire ayant pour refrain "k'UJaejina ch'ingch'ing nane'). Chaque nori, pour tout provincial, a une signification précise et il lui permet d'affirmer son identité. Quelques minsok nori, comme le y)n nalligi (jeu de cerf-
Enfants en habits traditionnelsjouant aunolttwigi (en haut) et au p'aengi ch'igi (ci-dessus)
volant) et le p'aenrti ch'igi sont pratiqués individuellement. Mais la plupart des nori le sont en groupe et plus il y a de participants mieux c'est. Le yut nori est un bon jeu à pratiquer en famille alors que le village tout entier participe aux kanggangsullae. Toute la communauté est en émoi quand se déroulent des jeux comme le kut nori, ou le chuldarigi parce que ces derniers nécessitent la participation .d'un grand nombre de personnes, parfois plus de mille. Les jeux collectifs nécessitent la présence des joueurs mais aussi celle de tous les membres de la communauté qui s'abstiennent de faire quoi que ce soit d'impur avant le jeu afin de ne pas provoquer les mauvais esprits, chacun · étant par ailleurs volontaire pour fournir le matériel et l'aide nécessaires. Ainsi des centaines de bottes de tiges de riz, dont · on a besoin pour fabriquer l'épaisse corde du chuldarigi ou du kossaum, sont donnés par les membres de la communauté qui la confectionnent bénévolement. Ces jeux, quand ils atteignent cette échelle se déroulent dans des régions où l'entraide est un mode de vie màis ils périclitent dans les régions où cet esprit fait défaut. Les minsok nori participent à l'unité nationale parce qu'ils sont capables d'inspirer le patriotisme et la solidarité. C'est pour cette raison qu'ils furent supprimés lors de la colonisation japonaise (1910-1945). Aujourd'hui, compte tenu du besoin pressant de restaurer les nori et afin de préserver le patrimoine culturel coréen, les universitaires sont à la recherche des vieilles gens capables de faire revivre les minsok nori disparus pendant les années d'occupation. Garder les minsok norivivants La question a ya nt trait à la préservation des nori, enracinés dans la vie des coréens et considérés comme coutumes saisonnières, requiert deux approches. D'une part, les minsok nori doivent être préservés dans leur forme originale. Mais, étant donnés les changements inhérents au temps, les premières formes 10
Y ongsan Soemori taegi (ci-dessus)
combatfictif entre deux équipes maniant une structure en bois et en corde représenmnt une tête de boeuf dans le but de mettre à terre l'adversaire Ci-dessous, un capimine d'équipe d'un
c'ajon nori,jeu similaire où deux équipes combattent à l'aide de lances géantes.
ne seront pas faciles à retrouver. Pour certaines personnes ces recherches de l'origine n'ont pas beaucoup de sens et les minsok nori devraient être revus pour satisfaire les goths d'aujourd'hui. Néanmoins des efforts doivent être faits pour transmettre les formes originales aux nouvelles générations. Ainsi, le Bouddha de pierre de la grotte de Sokkuram reflète les sens artistiques, religieux et esthétiques de l'époque du royaume de Silla. L'image du Bouddha serait différente si on avait tenu compte des goClts des générations précédentes pour la transformer. Le gouvernement a désigné quelques nori comme "biens culturels intangibles". C'est une sage décision mais tous les nori ne bénéficient pas de cette mesure. Un minsok nori exprime les sentiments du peuple. Il y a des raisons climatiques, culturelles, qui expliquent le développement de tel nori dans telle région. Il serait donc préférable de les préserver dans leur lieu d'origine car les déplacer risquerait de les "altérer". Ils seront d'autant mieux gardés, s'ils sont appréciés par les gens de la région. Il ne faut pas non plus sous-estimer les dangers à venir de la commercialisation. Les gens vont au musée pour apprendre à travers les vestiges du passé et tentent ainsi de recréer le présent à partir de ces bases anciennes. Un m{nsok nori, comme une relique dans un musée, incarne l'expérience et la sagesse que les humains ont accumulées, c'est pourquoi il faut pouvoir le retrouver intact. La seconde approche consist_erait, pour perpétuer les minsok nori, à recréer ou à modifier les jeux. Les valeurs morales et le sens de la beauté changent avec le temps. Tout en tenant fermement à la préservation de la forme originale, il faudrait faire des efforts pour apporter des modifications. L'histoire moderne de la Corée a été marquée par des changements brutaux, résultant du choc entre les traditions locales et les apports extérieurs tant dans le mode de vie que dans la pensée. L'introduction du christianisme et de la
A Andong,jeunes étudiantes en costumes traditionnels se préparant pour apprendre lenottari palki (le pont tle la princesse) pour perpétrer la tradition desjeuxfolkloriques.
civilisation occidentale ont apporté d'énormes changements dans la culture coréenne et les minsok nori ne font pas exception. Un nori qui ne suit pas l'évolution est voué à disparaître. Il faut donc faire des compromis pour assurer sa survie. Le nori traditionnel, qui repose sur la culture agraire, a perdu son assise populaire avec l'émergence des classes urbaines et le développe-
On peut remarquer l'apparition de nouœaux nori adaptés aux goûts modernes, alors que les nori
traditionnels perde11t kur assise populaire avec le déœloppement de la société urlxüne et industrielle.
ment de la société industrielle. Mais alors que les nori traditionnels perdaient de leur attrait, on a pu remarquer l'apparition de nouveaux nori. Il paraît sage de recréer des nori dans cette période de grands changements car tout en préservant une certaine tradition, il n'est pas impossible, dans le même temps, de s'ouvrir aux autres cultures. + 11
Les jeux folkloriques se pratiquent toute l'année, mais en particulier pour le Taeborum, la première pleine lune de l'année lunaire, le Tano, le Sème jour du Sème mois lunaire, le Paekchung-i~ jour de tous les esprits bouddhistes à la mi-juillet lunaire et la Fête de la pleine lune pour la · moisson, .le 15ème jour du 8ème mois lunaire. Etroitement liés à la société agraire, les jeux folkloriques constituent un élément essentiel des rites qui se tiennent aux étapes importantes de la riziculture que sont les semailles du début du printemps, 12
la croissance en été, et la moisson en automne. Dans les régions sud de la péninsule, la Fête de la moisson est la plus riche en jeux mais au centre et au nord de la péninsule, c'est Tano Dans l'ensemble du pays, c'est autour de Taeborûm qu'on voit se jouer une grande variété de jeux. A l'exception des jeux provenant de Chine, la plupart des jeux exécutés au début ·de l'année lunaire ont un rapport étroit avec la vie agricole. Ce sont des rites destinés à favoriser la prospérité du village.
Environs 200 jeux folkloriques ont été recensés aujourd'hui et on estime qu'une recherche plus poussée permettrait d'en trouver beaucoup plus. Sur les jeux ainsi recensés, seulement la moitié se pratique encore aujourd'hui Ces jeux peuvent être groupés en fonction de leurs objectifs. Certains sont des divertissements. D'autres ont pour but de prier pour la bonne récolte, la prospérité de l'individu ou du village. Les pages suivantes offrent une vue d'ensemble de ces jeux folkloriques coréens.
Le théâtre de marionnettes
Le théâtre traditionnel de marionnettes s'est perpétué à travers des siècles grâce à des troupes d'actew-s ambulants Ce théâtre est appelé Pakch'6rrifi nori, oLi Hongdongi nori Le théâtre de marionnettes fut intrcx:luit en Corée à travers l'Asie centrale et la, Chine et fut très populaire pendant la péricx:le des Trois royaumes (57 av. J.C - 935 ap. ].C.). La mise en scène et la manipulation de.s marionnettes sçmt similaires au théâtre de marionnettes chinois. Jusqu'aux années 1920, le théâtre de marionnettes était assez populaire et était joué par de.s troupes d'actew-s ambulants à travers tout le pays. ..
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Le yut nori; jeu de face ou pile
La.marche sur la corde raide
Le jeu de la marche sw- la corde raide fut intrcx:luit en Corée via l'Asie centrale et la Chine. Le funambule ne fait pas seulement que marcher sur la corde, mais il raconte des histoires drôles et chante aussi Parfois il fait des commentaires sarcastiques sw- la corruption de la sÜciété et toume en dérision la noblesse
Le yut nori est un jeu de face ou pile comprenant quatre bâtonnets arrondis trois côtés sm quatre, qu'on jette en l'air, et qui retomn~ face ou pile. Le score est calculé d'après la position du bâtonnet atten-i sm le sol et permet d'avancer des pions sm une sorte d'échiquier. On pratique le Yut
nori entre le Jour de l'An et la première pleine lune selon le calendrier lunaire. ll s'agit d'un jeu auquel peuvent participer les adultes comme les enfants, en famille. 13
La danse masquée de Yangju
la Yanpju py5sandaeest 01iginaire de Yangju, de la province du Kyonggi Ses 22 masques sont plus réalistes que ceux des autres danses masquées. Comme bien d'autres dans le genre, elle dénonçait d'une manière sarcastique l'injustice sociale de l'éfXXllle ou explimait l'avidité et la luxure des hommes d'une manière comique. La danse masquée de Yangju est jouée d'habitude le jour de l'anniversaire de Bouddha, le 6ème jour du 6ème mois et à la 7ème pleine lune, selon le calendrier lunaire. 14
chag~in
La danse masquée de Hahoe
la danse masquée de Hahoe s'est transmise de génération en génération dans le village de Hahoe près de Andong, dans la province de Kyonsang du nord D'après une légende, elle serait née d'un rite chamaniste, appelé pj)lshin ku~ destiné à apaiser l'esptit d'un jeune qui mowut d'un d'amour alors qu'il se languissait de la jeLme fille en question en fabriquant un masque à la demande d'Lm esprit de la montagne. 15
Le combat de Ko Le jeu est originaire du village Yutdol dans la province de Cholla du sud et est joué entre le Jour de l'An et le premier jour du deuxième mois selon calendrier lunaire. Ko désigne
un noeud en forme de boucle. Le combat ressemble à la lutte à la corde. L'équipe gagnante est assurée d'avoir une bonne récolte.
Le ch'aj6n nori Qualifié de 'Trésor national incorporel", ce combat de chars a pour but de renforcer la solidarité des villageois ainsi que de se préparer à se défendre contre d'éventuelles invasions. Il est originaire de la province de Kyonsang du nord Le simulacre de combat que se 16
disputent les deux équipes constituées des villageois a lieu d'habitude au moment du Jour de l'An lunaire Chaque pattie transpotte un char en forme de la lettre A, avec leur chef monté dessus L'équipe qui réussit en premier à mettre à ten-e le char de l'adversaire gagne
La lutte Ssirum
Le Ssirürn, jeu des hommes, semble avoir été introduit
en Corée par la Chine et transmis plus tard au Japon où il s'est développé sous la forme de la lutte sumo La peinture murale de l'époque Kogury5 de la "tombe de ssirürri' qui date de la fin du IVème siècle, montre que les Coréens aimaient ce jeu depuis des temps anciens. 17
Le Ttibaegut nori de Wido Rite chamaniste destiné à favoriser l'abondance de la pêche et la prospérité du village, le Ttibaegut nori de Wido se tient chaque année, le 3ème jour du premier mois de l'année lunaire, dans le village de Taeri dans l'île de Wi (Muangun, Cholla du nord). Un chaman élu par les villageois et les propriétaires de bateaux se 18
rendent à l'autel du village pour y célébrer une cérémonie, laquelle sera suivie d'un autre rite destiné au Roi dragon, le Yongwang ku~ organisé sur le port. Finalement, on envoie dans la mer une maquette de bateau, ttibae, dans lequel seraient embarqués d'une manière symbolique tous les mauvais esprits.
La rn usique des paysans, la nong-ak La musique des paysans pratiquée aujourd'hui viendrait des cérémonies rituelles pratiquées au VIIème siècle, lorsque la Corée ancienne commença à cultiver la terre. Il comporte des éléments de rites incantatoires traditionnels pour réclamer une bonne récolte. La troupe de musique des agriculteurs est constituée d'un large gong de cuivre, d'un petit gong et de deux tambours. Il est parfois accompagné d'un t'aep'y6ngso, instrument à anches, qui
produit un son bizarre ressemblant à un gémissement, et de danseurs coiffés d'un chapeau spécial. Celui-ci est doté d'un long serpentin en papier qui produit des effets magnifiques lorsque les danseurs tournent leur tête à toute vitesse. La musique et la danse varient selon les régions. La troupe de musique des agriculteurs de Namsadang de la province de Ky6nggi est très connue. 19
P utte à la corde Pour de meilleures récoltes Kim Kwang-on Professeur à l'Université !nha ·
20
armi les nombreuses manifestations qui animent la Fête annuelle du 1er mars à Y6ngsan, disuict de Ch'angnyong, dans la province du Kyangsang du Sud, le chu/darigi, la lutte de traction à la corde, est de loin la plus animée. Ce jeu sans pareil, qui mobilise des milliers de villageois, nécessite la fotmation de deux équipes ou camps, est et ouest, symbolisant la division physique de la ville par le mur de la vieille cité. L'équipe de l'est symbolise le sexe mâle, celle de l'oues~ le sexe féminin. On dit que la victoire de la
:seconde donne d'aoondantes récoltes. Ce qui n'amoindrit pas pour autant la volonté de l'équipe adverse de gagner. Ceci étant, la récolte n'est plus réellement l'enjeu p1incipal quand les pueurs, p1is au jeu, tirent de toutes leurs forces, ne songeant plus qu'à une chose remporter la victoire. Ce jeu instaure 1 un véritable climat d'adversité au sein de la communauté: il arrive que les membres d'un~ famille, s'ils se sont retrouvés dans des camps opposés, ne se parlent plus pendant des semaines après le jeu . La corde utilisée pour le chuldarigi est
constituée de deux parties, chacune faisant 40 mètres de long et 50 cm de diamètre. Faite de plusieurs torons de cordes en paille, elle présente une épaisseur telle qu'il est impossible de la saisir d'une seule main. li faut s'y cramponner par le dessus et tirer en s'aidant de la centaine de cordelettes très fines accrochées tout du long. A ses exu·émités, la grosse corde laisse accessibles les oouts des torons qui permettent aux puems de s'y agripper pom tirer. Sa fabrication nécessite non seulement une quantité considérable de paille de riz,
mais aussi beaucoup de main-d'oeuvre et plus de vingt pms et vingt nuits de travail Une fois terminée, les deux équipes postent des sentinelles près de la corde, 24 heures sur 24, dans l'éventualité où un puem viendrait secrètement marcher sur la corde ou y introduire un clou ou une aiguille, ce qu~ o·oit-on, aurait pom résultat de bliser la corde le pur ]. Par ailleurs, une croyance populaire veut qu'une femme marchant sur la corde donne naissance à un garçon Ce qui incite beaucoup de femmes à le faire. Pendant la période de colonisation
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japonaise, à Mokhaeng-dong (clans la ville de Ch'ungju, province du Ch'ungch'ong du Nord), on lapidait à mort toute femme ayant été surprise en train de piétiner la corde Les cordes mâle et femelle sont identiques à l'exception de leur boucle La corde femelle doit être plus large que la corde mâle de sorte que, au moment de les attacher, on puisse glisser la seconde à l'intélieur de· la première et passer à travers une büche de trois mètres .de long et de 25 cm de large qui les maintiendra attachées l'une à l'autre En 1968, j'asi~ à un concours de chuldarigi. Des centaines d'hommes déboulaient sur le tmain, apportant avec eux leur corde respective Cela se passait clans la cour du lycée Yongsan, il était environ une heure de l'après-midi Les cordes étaient si lourdes qu'on avait été obligé de les suspendre sur des traverses que deux hommes portaient sur leurs épaules. Alors que le moment était venu de réunir les deux cordes, chaque équipe insistait pour que l'autre vienne plus près de sa boucle. "U ne femme n'est pas censée faire le premier pas'' a·iait l'ouest "Ils n'ont pas l'air
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Détail d'une corde pour la lutte (ci-dessus) la boucle de la corde "mâle" est placée dans la boucle 'Jemelle" et;bloquéeà l'aide d'un morceau de bois pourformer une corde unique (ci-dessous)
d'être prêts" répliquait l'est avec moquerie. S'engageant dans une joute verbale, ils se lancèrent des injures pendant plus d'une heure Fatigué d'attendre, je demandai à un spectateur quand est-ce qu'ils se décideraient à attacher les deux cordes. Quel homme et quelle femme accepteraient de faire ça en plein p ur ?me répondit-il en gloussant Après d'exaspérantes tergiversations, avec même l'intervention d'un gendarme du coin qui tira à blanc, les boucles se rejoignaient pouce par pouce et la büche allait être mise lorsque l'une d'elles glissa. Les joueurs qui se tenaient à l'extrémité de la corde avaient tiré pensant qu'ils avaient donné l'avantage aux adversaires. Les capitaines d'équipe leur ordonnèrent d'avancer les cordes mais les boucles ne firent que se frôler pour retomber de nouveau Et ils dur€nt recommencer, et ce, à plusieurs reptises et clans une franche gaieté, avec à l'occasion des commentaires du genre "il doit être viril pour rentrer et sortir de la femelle autant de foiS'. Et le soleil conunença à descendre pour laisser place au a·épuscule A cinq heures, les deux cordes furent enfin reliées et la traction dématTa L'équipe femelle remporta
la victoire en dix minutes sur deux mètres de terrain Les cris de triomphe s'élevaient jusqu'au ciel Les gagnants prennent les deux cordes, lesquelles sont parfois coupées et vendues en morceaux Il paraîtrait que la paille de la corde, utilisée comme engrais, donne de ~nes récoltes, donnée au bétail, rend les bêtes plus vigoureuses, et déposée sur les toits, protège la maisonnée. Même des pêcheurs de Masan .(province de Kyangsang du Sud) viennent pour avoir un bout de corde dans l'espoir de gonfler leurs prises. Autrefois, les perdants auraient dû payer des taxes ou exécuter des corvées, à titre de gages, pour les gagnants · La lutte de traction à la corde est un jeu particulièrement répandu dans les régions de riziculture de l'Asie du sud-est Dans l'est de l'Indonésie, il est apparenté à un rite destiné à célébrer l'union annuelle d'un dieu et d'une déesse. Le jeu est organisé au début de la saison des cultures, auquel participent hommes et femmes dans deux équipes distinctes. La corde est tirée avec le buste, penchant en avant et en arrière comme pour simuler l'acte sexuel L'union annuelle des divini.tés renvoie à un rite largement pratiqué dans la région méridionale de la Corée, mais certains villages, qui en ont eu assez de répéter la chose année après année, ont matié les dieux On observe une coutume similaire au Laos. Un soir avant que la saison des semailles n'anive, les hommes et les femmes s'alignent pour former deux files à la manière d'tme queue de serpent et dansent En dansant, les femmes font des gestes comme pour chasser au loin les hommes, pour représenter la pluie en u·ain de faire partir le soleil Le jeu de u-action à la corde a lieu après la danse. Là auss4 on O'Oit que les femmes doivent gagner pour assurer une 'récolte fructueuse. Dans le pays voisin .égalemn~ au Cambcxlge, les hommes et les femmes se livrent à ce jet~ dans les temples ou les monastères, invoquant l'indulgence divine pour les moissons. Le peuple de Myanmar confère à ce jeu un caractère propitiatoire pour la pluie, tme a·oyance qtù émane de la pratique des rites de fertilité. L'assimilation d'une file de personnes avec un serpent est assez fréquente dans les
régions méridionales du Japon La mise en cotrélation de la corde avec la pluie est motivée par la fotme qu'a la corde qui ressemble à un dragori. En effet, lorsqu'on la regarde de hau~ l'épaisse corde à laquelle sont attachées des myriades de cordelettes fait penser à cet animal mythique Les gens pensent donc qu'en tirant la corde.ag~ la région recevra beaucoup de pluie puisque l'animal est supposé être responsable de la pluie. A cet égard, les habitants de Chinju, d'Ulsan et d'autres régions de Corée ont souvent recouru au chuldarigi lors des grandes sécheresses Récits chinois
Ce jeu s'est développé en une u·adition également en Chine Dans le Livre des Sui (Sui-shu), un ouvrage d'histoire datant du 7ème siècle, on peut lire: "Une lutte de traction à la corde se joue dans deux provinces. Le jeu tire son origine des exercices militaires imposés à l'armée Chu en guerre contre les Wu Les tambours et les chants retentissent tellement fott qtte cela en est presque angdissant Il est tme a·oyance populaire selon laquelle l'équipe gagnante est récompensée d'une belle récolte. La coutume s'est étendue à d'auu·es régions." Feng Yan de la dynastie Tang a déait le jeu avec davantage de détails dans son carnet de voyage Fengshi Wenjianiu: la lutte de u·action à la corde était appelée dans les temps anciens "traction à la boucle". Dans les Etats Yang et Ha~ il se joue à la première pleine lune de l'année Les soldats Chu se seraient entraînés avec ce jeu lorsqu'ils se battaient contre les Wu (. ..). Une corde faite d'écorce de bambou fut d'abord utilisée puis remplacée par une corde en chanvre qtù mesurait enu·e 40 et 50 pieds. Chaque extrémité présente une centaine de franges auxquelles les tireurs s'agrippaient pour tirer. En son milieu est planté un drapeau pour mat·qtter le centre Au son des tambours, chaque équipe farouchement cramponnée à la corde tire de son côté en poussant des mugissements Celle qui parvient à faire avancer l'équipe adverse a gagné." Ce document nous apprend ainsi qtte la lutte de traction à la corde était déjà très populaire sous la dynastie Tang (7ème-
10ème siècle) et qtte la corde de chanvre a remplacé celle en écorce de bambou On lit dans la Chronique Jinglong (jinhlong u:enguanjl) que ''En 710, pendant la fête Qingrning, le roi regardait ses officiers jouer à la u·action à la corde dans le prdin de Liyuan Une douzaine de cordelettes étaient attachées à la corde de chanvre et elle était tirée de chaque côté par trois ou quatre hommes. Dans l'éqttipe de l'est se trouvaient les deux gendres du souverain et sept ministres ayant pour adversaires cinq ministres de rang supérieur et cinq généraux Deux d'enu·e eux, épttisés et à bout de forces, s'effondrèrent près de la corde et ne se relevant pas, le ro4 qui rit de bon coeur, demanda qtt'on les aidât à se relever". En Chine, ce jeu est des plus populaires dans les provinces du Hunan et du Hube4le long du Yangzi et près de Guangdong au sud. Dans le Hubei, on y joue en grand nombre au moment de la prerrùère pleine lune. La corde représente également un dragon et l'action de la tirer symbolise l'ascension de l'animal au ciel Ce folklore se retrouve au Japon où la lutte de u·action à la corde est intimement liée à la culture du tiz comme en témoigne la prééminence de ce jeu à Kyushu qui diffusa la riziculture dans tout l'archipel De même, en Corée, on y joue u·ès peu dans les régions de cultures sèches, comme par exemple dans celles qui se u·ouvent au nord du fleuve Han, et à contrario, il est très répandu au s~td de Honam (province du Cholla) et à Yongnam (province du Kyongsang) où on cultive beaucoup de riz. Si en Corée et en Chine, le jeu se déroule généralement lors de la première pleine lune, (le chuldarigi de Yongsan précédemment évaqtté se jouait également le jour de la première pleine lune jusqu'à ce qu'il fut décidé qtt'il aurait lieu le 1er mat·s en commémoration du Mouvement d'indépendance du 1er mars 1919), au Japo~ il est organisé en différentes occasions selon les régions. La région nord de Kinki cenu·ée autour de Kyoto et d'Osaka, pratique cette lutte le jour de la prerrùère pleine lune Alors qtt'au sud, on y joue le jour des Centaines d'âmes (septième pleine lune) et qtt'à Kyusht~ cela ait lieu à la huitième pleine lune Cepnda~ 23
Lutte à la cordejaponaise(au-desms) lutte à la corderoréennedeMiryang, à la "crabe"
de l'année Ce qui explique que sur 192 fêtes depuis quelques temps, les Japonais ont traditiônnelles coréennes, pas moins de 52 tendance à l'organiser le jour de la première sont célébrées ce jour-là En outre, près de lune quelle que soit la région 40% des jeux folkloriques et des rites de Pour expliquer la popularité de ce jeu fertilité dédiés aux dieux tutélaires du village dans la région de Kinki, un savant japonais a avancé la théorie selon laquelle cette région, sont organisés ce même jour. Il est clair que le chuldarigi est une autrefois centre politique et culturel de activité rituelle importante de la société l'archipel, accueillit de nombreux immiagricole puisqu'il a lieu le jom de la première grants coréens qui l'y introduisirent. En pleine lune, qu'il est une simulation de même temps, il sous-entend que ce jeu pourrait être d'origine japonaise dans la l'union sexuelle et que la corde symbolise le dragon n est également à noter qu'il conmesure où il était joué plus fréquemment . stitue l'occasion de renforcer la solidarité du lors de la huitième pleine lune qu'en d'autres occasions. Ce qui est le cas en Corée, village et l'attachement à son pays. il serait notamment dans les régions côtières de la surprenant que les agriculteurs travailleurs et province de Cholla du Sud, dans l'île de acharnés offrent à la cause des quantités Cheju, dans les provinces du Kangwon et considérables de paille de riz et lem énergie du Kyonggi et dans certains endroits de la pour tresser les cordes jom et nuit pendant province Kyongsang. il est donc logique de presqu'un mois sans éprouver une once de vouloir déduire que le jeu fut transmis de sentiment de fierté et d'amour pour leur terre. En ce sens, le chuldarigi est un jeu l'archipel à la péninsule Pourquoi joue-t-on au chuldarigi le jour représentatif du folklore coréen Dune région à une autre, que ce soit en de la première pleine lune ? Parce que la première pleine lune du calendrier lunaire Corée, en Chine ou au Japon, on découvre était un événement sacralisé par les anciens des variations patticulières dans la pratique peuples cultivateurs qui faisaient étroitement de la lutte de traction à la corde nexiste par exemple le ke-chuldarigi,·ou lutte de dépendre le déroulement du cycle agraire de la lune. Ainsi, pour eux, la première traction à la corde en crabe, très populaire à pleine lune coïncidait avec le premier jom Mi.J.yang (province du Kyongsang du Sud). 24
Chaque joueur glisse sa tête à l'intétiem de la boucle de la corde et doit tirer celle-ci en avançmt à quatre pattes. On attache parfois cinq cordelettes à chaque extrémité de la corde principale, lesquelles sont tenues par cinq hommes. Et lorsque les dix jouems, à quatre pattes sur le soL s'efforcent de la faire avancer dans leur camp, on a vraiment l'impression de voir un crabe, ce austacé qui a la particulatité de se mouvoir en marchant de côté. Les Tibétains au Sichuan (Chine)
observent des règles similaires. Toutefois, le jeu ne demande que deux hommes. Placés à chaque bout de la corde qui fait 4 mètres de long, les joueurs doivent passer la boucle autour de leur cou et la tirer. Les autochtones l'appellent jeu de traction à la cordeéléphant parce que la vue de ces deux hommes tirant 'chacun de leur côté rappelle l'imposant mammifère. Cest également de cette manière qu'il se joue parmi les Kirghizes d'Asie Centrale avec, cepnda~ la différence que l'on donne aux ~ : meurs des
cornes de boeuf qu'ils plantent dans le sol de sot1e qu'ils ne soient pas entraînés vers l'arrière. Dans un village de pêcheur à Kyushu Qapon), le jeu ne consiste pas à tirer une corde sur sa longueur mais une corde circulaire, plaçant les adversaires face à face. La forme de la corde se déforme, tant le plus fot1 parvient à tirer la corde vers lu~ entraînant le plus faible. Ainsi le cercle ressemble à un serpent En fai~ toute l'idée est de simuler le serpent. Dans plusieurs
régions du Japon, on a·oit qu'à la manière du dragon, le serpent détient le pouvoir de donner d'abondantes récoltes. En résumé, le jeu de traction à la corde coréen est de même nature que celui que l'on retrouve généralement au sud de la Chine et dans les pays du sud-est asiatique, les points communs étant le lien entre le jeu et la riziculture, la symbolique du dragon, la représentation du rapport sexuel et la conviction que la victoire de l'équipe femelle appot1e d'abondantes récoltes. + 25
LES EUX FOLKLORI UES ETLA PRODUCTIVITE AGRICOLE Lim}ae-hae
Professeur de folklore Université d'Andong
D
ans toutes les cultures, les fêtes et les jeux folkloriques ont été étroitement liés au travail dès leur origine et ont été transmis de génération en génération dans ce contexte La Corée ne fait pas exception à la règle. Les jeux folkloriques coréens s'inscrivent dans les traditions d'une culture agricole et se sont perpétués pendant des siècles au coeur de la société rurale. Je ne parlerai pas des jeux d'enfants dans cet article, car ceux-ci ne sont pas directement liés à l'agriculture et sont étrangers à la question de survie. Je tiens à distinguer aussi les jeux folkloriques des jeux populaires qui se pratiquent aujourd'hui Dans la société rurale traditionnelle, la pratique des jeux folkloriques était limitée à une ceitaine période dans le cycle agricole pour qu'ils n'entravent pas la bonne marche 26
du travail Cest pom cette raison que dans une société agricole, les jeux de grande envergure, nécessitant de nombreux paiticipants et plusieurs jours de préparation, se passaient à des moments particuliers, tels que les jours fériés de la motte-saison Les jeux et les pratiques folkl01iques liés à l'agriculture se répartissent dans les deux catégories suivantes: ceux qui sont directement liés au travail, qui se produisent sm le lieu de travail, et ceux que l'on ne pratique qu'au moment de la saison motte pendant les jours de fête. Les premiers comprennent des activités d'entraide pratiquées dans les champs ou dans les environs des fermes en vue de renforcer l'esprit d'entraide et la productivité des agriculteurs, alors que les autres se rappoitent à des tites incantatoires, qui ont pour but de favoriser les récoltes et la prospérité du village dans le cadre des fêtes
traditionnelles. Que ce soit des jeux liés au travail ou des jeux-tites incantatoires, ils ne se jouent jamais au hasard On les exécute à des moments spécifiques du cycle agricole ou du calendrier lllflaire. Ces jeux folkloriques sont des activités collectives réservées aux fêtes traditionnelles ou aux tâches agricoles, comme le mariage ou le repiquage du riz. Le fait que ces jeux soient limités à ceitains moments de l'année seulement montre bien que lem objectif patticulier est de réaliser la prospérité éconorrùque de la communauté grâce aux bonnes récoltes. De ce point de vue, les jeux folkloriques coréens ne se conforment pas aux modèles établis par l'histotien hollandais Johan Huiz.inga ou pat· le français Roger Caillois. Huiz.inga indique que les jeux -que ce soit les jeux d'enfants, les jeux folkloriques ou les jeux populairesn'ont aucun rapport avec les questions
d'intérêt matériel. Caillois définit les jeux comme une activité qui n'apporte ni de produi~ ni de richesse. Pour lu~ les jeux sont uniquement une activité de consommation Caillois prétend "qu'en fait, les jeux se caractérisent par le fait qu'ils n'apportent ni produi~ ni richesse, ce qui les différencie du travail ou de l'art Lorsqu'on gagne à un jeu, tien ne change On peut tout recommencer au d_ébut. Il n'en résulte ni récolte, ni production, ni chef-d'oeuvre, aucune augmentation de richesse. Les jeux sont destinés uniquement à la consomination, la consommation de temps, d'énergie, d'hu· mour, d'habilité. Et lorsqu'on doit acheter des équipements ou louer un ·endroit pour les jeux, il s'agit de consommation d'argent" Or les jeux coréens sont fort productifs. Incluant des compétitions, de la musique à instruments à percussion, des chants et des danses, ils sont liés au travail, enracinés dans la tradition du ture, système de travail coopératif traditionnel pratiqué dans les villages ruraux. Tous ces jeux coréens contribuent à accroître la productivité en veillant au moral des travailleurs. C'est la raison pour laquelle la personne qui dirige ·les chant:s agricoles est payée plus que les travailleurs eux-mêmes qui vaquent à leur dur labeur lors du désherbage des rizières. La contribution qu'apporte le meneur de chants à la productivité est unanimement reconnue Certains sont persuadés que ces jeux conttibuent également à la a·oissance du riz D'après eux, la musique des paysans accompagnée d'instruments à percussion, nongak, aide non seulement à galvaniser les tt·availleurs mais aussi à faire pousser le riz, et est en quelque sotte susceptible d'éliminer des insectes nuisibles. L'érudit indien T.C. Singh a fait des recherches au sujet de l'influence de la danse et des chansons sur la croissance des · plantes. Il a fait jouer de la musique ~ tt·aditionnelle indienne, ra!JI, sm les rizières de sept villages. Ces rizières ont produit entre 25 et 6o% de plus que des tizières sans musique. Singh a également fait des expériences concernant l'influence de la danse sur la croissance des plantes. Il a exposé une variété de fleurs, dont la marguetite, le souci et le pétunia, à la danse traditionnelle sans accompagnement musi·
cal na découvert que la saison d'éclosion se trouvait accélérée de deux semaines ou plus. Les expérimentations de Singh soutiennent la thèse coréenne selon laquelle les danses et les chansons accompagnées de musique instrumentale à percussion contribuent non seulement à soutenir le moral des tt·availleurs mais aussi à stimuler l'énergie des plantes, ce qui les fait mieux pousser. les jeux·rites incantatoires
Le pont de la princesse, lenottari palki, où
la "princesse" marche sur le dos des participants est un des jeux-rituels qui favorisent les récoltes.
Le.sjeu.xfolkloriques coréens sont étroitenu:>nt liés au tramil; enracinés dans la tradition ture, système de trawil coopératif des uil!a!J?--" ruraux Azrr des compétitions et la musique des agriculteurs, ils contribuaient â améliorer la productivité. en remontant le moral des agriculteurs.
Dans une certaine mesure, ces expérimentations permettent de reconnaître que les jeux folkloriques dans le cadre du système de travail coopératif ture font partie du travail lui-même. Cela dit, regardons quelle est la signification des jeux folkloriques qui s'exécutent annuellement loin des champs, pendant la saison morte, pour favoriser les récoltes. Comme on l'a vu plus hau~ les jeux-rites sont d'habitude liés aux activités de fête, manifestant le désir ardent des paysans d'obtenir une bonne récolte et la prospérité du village Ces jeux· rites contribuent-ils à la croissance des plantes comme les jeux liés au système tu~ Comme ces jeux-rites sont incantatoires et ritualistes par définition, on serait facilement tenté de supposer qu'ils sont étrangers aux questions pratiques comme la a·oissance des plantes. Poltan~ il nous faut les regarder de plus près. Croyant (ermement que ces jeux-rites appottaient de bonnes récoltes, les villageois coréens les ont pratiqué malgré vents et marées pendant des siècles. Lors de l'occupation japonaise, où de tels pratiques fw-ent interdites, les villageois contiu~re de les pratiquer au tisque d'êtt·e an·êtés. Un tel attachement ne saurait nous permettre de les négliger comme de vieilles conventions ou une croyance aveugle en la magie En ef~ l'hypothèse moderne selon laquelle ces jeux ne sont que de vieilles coutumes ou des superstitions n'a jamais été vérifiée scientifiquement Ces derniers temps, on commence pow-tant à reconnaître le danger du rationalisme qui croit aveuglément en la force de la raison humaine. Aujourd'hui, la révolte contre un tel rationalisme démesuré a fait 27
naître des idéologies positives comme le réductionnisme, le post-structuralisme ou le post-marxisme, surmontant les limites du rationalisme Le philosophe allemand Hans-Georg Gadamer, connu pour son analyse des préjugés, rejette le rationalisme moderne qui voit la cognition et l'objet comme deux choses diamétralement opposées à la subjectivité et à l'objectivité, le qualifiant d'artificiel et de théorique. Gadamer explore alors le concept de fusion horizontale, le horizontverschmelzung sèion lequel la situation du chercheur pue un rôle certain dans sa compréhension d'un événement ou d'un phénomène. Ce concept libère le chercheur de ses expériences limitées, en le mettant en relation avec les données de la ·recherche. C'est ainsi que la philosophie transmoderne transforme chez le chercheur sa vision du monde, lui permettant de ·comprendre d'une manière créative l'objet en question, entraînant la transformation du chercheur lui-même Mircea Eliade, spécialiste de l'histoire de la religion, des mythes et du langage symbolique, disait que "l'analyse créative est s~eptibl de transformer l'homme ns'agit de l'un des arts de vivre, capable de modifier la qualité de l'existence". Trop souvent, les chercheurs définissaient le monde en fonction de leurs préconceptions, lui donnant un sens d'après leurs idées fixes. Les études déjà faites sur les rites incantatoires et les jeux de cérémonies sont juste un autre exemple de ces habitudes dominées par les préjugés nfaut désormais ne plus considérer que ces jeux ne sont que la manifestation de l'aspiration chez les villageois à la prospérité et à la fertilité. Il faut revoir l'objet d'un oeil neuf, en se concentrant sw- la situation des villageois et sur les jeux eux-mêmes. Alors cette recherche pourra transformer notre vie et offrir un nouvel att de vivre L'influence de la lutte à la corde sur la récolte . Parmi tous les jeux incantatoires, la lutte à la corde est le plus courant Rites pratiqués en l'honneur de l'esprit du poteau, le changsung ku~ le py6lshin ku~ fête des villageois datant des temps anciens, et le 28
chishin palki, rite annuel des villageois pratiqué en l'honneur de l'esprit de la teiTe, sont également pratiqués couramment, mais la lutte à la corde est le rite le plus enraciné. Les chercheurs croient généralement que la lutte à la corde se pue le 15 du premier mois lunaire pour assw-er une bonne récolte et la protection contre des désastres naturels pow- l'année qui commence Ce rite peut-il exercer une quelconque influence sur la croissance des plantes ? Une réflexion portant sur la "fonction productive" de la lutte à la corde pourrait aider à trouver des réponses à des questions plus générales posées sur les jeux-rites incantatoires. Traditionnellement, les Coréens célèbrent quatre principaux purs de fête: S6lla4 ou ]our de l'An, premier pw- du premier mois lunaire: Taeborûrn, la première pleine lune du quinzième pur du premier mois lunaire, Tano, le cinquième pur du cinquième mois lunaire, et Ch'us:Jk, la fête de la pleine lune pour la moisson, le quinzième jour du huitième mois lunaire De nombreux jeux folkloriques et cérémonies ont été transmis jusqu'à ' ncius avec ces jours de fête, mais curieusement, c'est autour de TaeborLim que la plupatt d'entre eux se pratiquent Tous les jeux pratiqués pour Taebonlm se caractérisent par leur tradition in ~ cantatoire pour favoriser les récoltes. Patmi ces jeux se trouvent, entre autres, la lutte à la corde, le pont de la princesse Nottari palki dans lequel la "princesse" marche sur un pont humain, et la Kan{!Jflngsullae, danse de la ronde exécutée par les femmes. Ces jeux se puent. également lors de la Fête de la moisson et la participation féminine est très active. Le Pont de la princesse et la Kang {flngsul!ae sont exécutés tous les deux pat· les femmes, le soir. Les femmes patticipent également d'une manière active à la lutte à la corde Le soleil et le jour représentent généralement le masculin et au féminin, on associe la lune et la nuit. Quant à la première pleine lune, elle symbolise la fertilité et l'abondance S6l!al, le Jour de l'An lunaire, se base sw- l'orbite de la terre autour du soleil et est ainsi une fête "d'hommes''. li représente les liens consanguins et donne lieu à des cérémonies consacrées aux ancêtres. Par contre, Taeborûm se base sw-
Scène d'une lutte à kl corde 29
..
le cycle de la lune et est considéré comme une fête "de femmes''. Représentant les liens avec la région ou le village, il fait naître des rites honorant les esprits du village Lors de la fête de la première pleine lune, les femmes s'adonnent à divers rites et jeux qui appellent à la fertilité et à l'abondance. Illustrant la pleine lune qui évoque l'abondance, la ronde Kanggangsullae représente le changement des quatre saisons et appelle à u~e bonne récolte Le Pont de la princesse imite en quelque sorte l'acte sexuel, et est donc lié aux souhaits de fertilité et d'abondance Mais c'est la lutte à la corde qui, de tous ces jeux, est le plus dynamique et a la plus grande importance La lutte à la corde nécessite une préparation longue et compliquée Pour savoir ·si ce jeu n'est qu'un simple rite incantatoire ou s'il exerce une influence tangible sur la récolte, concentrons-nous sur les trois phases . fondamentales de ce jeu: la préparation, la compétition elle-même, et la scène finale La phase de préparation consiste principalement en la collecte de la paille et en la surveillance de la corde préparée On joue des instruments à percussion lorsqu'on visite les maisons du village pour collecter la paille et èle l'argent. Comme le processus de collecte de la paille est considéré comme faisant paitie du rite favo1isant la récolte, les villageois en donnent volontiers. Ensuite, se réunissent les fabricants de la corde pour tresser la paille Une fois la corde tressée, elle représente désormais le dragon, esprit de l'agriculture, et les organes génitaux de l'homme et de la femme Cette corde saa·ée doit être protégée contre l'impureté. Ainsi les villageois la gardent jour et nuit et ils veillent notamment à ce que les femmes ne s'en approchent pas Pourtant des femmes sans fils font des efforts désespérés pour la toucher, persuadées que le contact avec la corde leur permettra d'avoir une progéniture mâle Les villageois ne considèrent pas la corde comme un instntment de jeu mais un être sacré capable d'assurer la productivité et la vitalité. Qu'il soit question d'avoir un fils ou de cultiver le riz, il s'agit toujours d'une activité donnant la vie Cest pourquoi les Coréens qualifient souvent l'acte d'avoir des enfants et puis de les élever, "d'agriculture des enfants". Dans la 30
lutte à la corde, la paille du riz est non seulement un produit de la riziculture mais aussi un médiateur assurant une bonne récolte Cest aussi Lill être générant la vitalité capable d'assurer une "bonne récolte" dans 'i'agiiculture des enfants''. La corde, représentant la vie et la promesse d'une bonne récolte, est traitée avec tous les égards: avant de la transpo1ter sur le site de la lutte, on la pose devant l'autel destiné à l'esprit tutélaire et un simple rite chamanique a lieu Sur le chemin vers le site de lutte, les hommes et les femmes tentent de monter sur la corde, croyant qu'elle possèdent une force magique. Celui qui réussit à monter sur la corde doit payer une somme assez considérable pour les bénéfices, notamment la longévité, que la corde magique pourrait lui accorder. Cette croyance en la force magique de la corde se manifeste d'une manière encore plus évidente sur le lieu de lutte. La corde est divisée en deux parties, "mâle" et "femelle", et puis deux personnes, une habillée en hom~ et l'autre en femme, montent sur la corde. Lorsque les deux extrémités se rencontrent en un simulacre de l'acte sexueL les villageois dansent et font des commentaires obscènes. On trouve par ailleurs une scène identique dans le rite destiné à l'esp1it des poteaux, le ChangsLing ku~ dans lequel Lill ma1iage entre les poteaux mâle et femelle a lieu et où le simulacre de l'acte sexuel de la première nuit s'exécute d'une manière explicite L'union des deux caractères mâle et femelle dans un acte sexuel constitue un aspect commun avec les danses masquées. Dans une ceitaine danse masquée, les deux protagonistes s'engagent dans l'acte sexuel pour montrer même l'accouchement d'un enfant Dans bien des lites exécutés par les chamans, on entend abondamment des commentaires brutaux évoquant l'acte sexuel et l'accouchement d'un enfant Ces rites ont été considérés comme faisant p;utie de rites incantatoires appelant à la fe1tilité et favolisant les récoltes. Lorsque la p;utie femelle gagne le match dans la lutte à la corde, on dit que c'est de bon augure pour la récolte Dans ce1taines régions, on n'attache pas d'importance au résultat, croyant que le match lui-même
apporte de bonnes récoltes. Au village P'yonghae, dans la région d'Uichin de la province du Kyongsang du nord, on a·oit que la victoire de l'équipe du dragon mâle assurera une bonne récolte de riz et que celle de l'équipe du tigre, donnera une bonne récolte d'orge On dit que la récolte était mauvaise les années où la lutte à la corde n'avaient pas lieu Ceci indique qu'il y aurait plus qu'une simple croyance ou superstition dans ces 1ites incantatoires. L'emploi de la corde après le match diffère selon les régions: dans certains endroits, on la roule autour de l'arbre sacré du village, dans d'autres, on la découpe en morceaux et on la jette dans les champs comme engrais ou la donne en fourrage aux bovins. Dans les villages de pêcheurs, on l'utilise pour les bateaux Tout cela est dû à la croyance que 1~ corde apporte de la chance. Par contre dans le cas de son utilisation comme fourrage ou engrais, il s'agit plutôt d'un objectif pratique ·
Caractères incantatoires des rites et probabilités scientifiques La a·oyance que les activités autour de la lutte à la corde affectent la récolte a été appuyée, dans Lille ce1taine mesure, par des recherches botaniques. Comme l'agiiculture implique une interaction entre les hommes et les plantes, une recherche qui se concenu·e uniquement sur les aspects humains des jeux folkloriques et qui ne tient pas compte des facteurs biologiques des plantes, ne permet pas d'obtenir des résultats scientifiques. L'influence directe de l'émotion et des idées des hommes sur les plantes a été prouvée en diverses occasions. L'exemple le plus représentatif est celui fourni par le botaniste C. Backster. A 1'aide d'un galvanomètre, il a montré que les plantes, même des feuilles détachées, réagissaient aux idées humaines. li a également monu·é que les plantes qui étaient p;uticulièrement intimes avec une ce1taine personne, pouvait sentir les sentiments de cette demière, à Lille distance de 1 km ou plus. Marcel Vogel, chercheur de 11nstitut de recherche d'IBM, à La Gaude en France, a poursuivi ses recherches à la suite de Backster. li a cueilli deux feuilles de "saxifrage" dans son jardin et les a mises l'Lille sur sa table de nui~ et
Lakanggangsullae, ronde dansée par lesfemmes
l'autre dans la salle de séjour. Chaque matin, lorsqu'il se levait, il disait à la fe uille dans sa chambre de continuer à vivre, tout en ne prêtant aucune attention particulière à l'autre. Un mois après, celleci a commencé à se décomposer, alors que l'autre dans sa chambre à coucher restait encore fraîche. A pa11ir de cela, il a conclu que les plantes sont capables de sentir les sentiments humains. Parallèlement, des expérimentations au sujet de l'impact de l'acte sexuel sur la o·oissance des plantes ont été réalisées et on a montré que le simulao·e de l'acte sexuel comme celui de la lutte à la corde est susceptible d'influencer les plantes. Il est intéressant de noter que les cherchems qui ont mis en doute les découvet1es de V~el ont été convaincus par des expérimentations plus t'écentes. Vogel a invité des psychologues, des médecins, des programmateurs informatiques et d'autres scientifiques, qui se montraient sceptiques à l'égard de ses recherches, pom lem montrer ses expérimentations. Dans une expéri-
mentation, il a menacé des plantes, soit en idées soit par action, mais il n'a obtenu aucune réponse L'assistance s'est engagée à critiquer ses expérimentations. Ensuite quelqu'Lm a commencé à pa1·ler du sexe. A ce moment-là, les plantes ont réagi On en a conclu que la conversation sm le sexe a dü proyoquer chez les assistants la stimulation de '1'orgone", sone d'énergie sexuelle. Le psychiatre auttichien Wilhelm Reich a été le premier à discuter de l'existence de l'énergie sexuelle connue sous le nom "d'organe'', qu~ selon lu~ pénètre l'univers et est susceptible d'influencer les comportements humains. D'autres physiologistes de plantes ont également indiqué que la croissance des plantes pourrait être stimulée par l'exposition à l'énergie sexuelle. Le pouvoir de la pleine lune
La concentration des jeux folkloriques autour de la période de la première pleine lune a un rapport étroit avec leurs fonctions pratiques. La nuit
de la pleine lune est, bien sür, la nuit la plus claire du mois et par conséquent, elle est la plus apte aux festivités. Le botaniste Louis Kervran a prétendu que la force gravitationnelle de la lune exerce une influence considérable sur la croissançe des plantes. Il rejette la supposition générale selon laquelle les plantes n'ont besoin que de l'eau et de la lumière. Alick Mc Innes, qui a consacré sa vie à l'étude des effets de la ~ que radiation sur les plantes, indqu l'éclosion des fleurs arrive à son point culminant à l'approche de la pleine lune. Les deux études ci-dessus laissent supposer que la lune aurait une certaine capacité à encourager l'éclosion et à exciter la vitalité des plantes. Ainsi, il serait judicieux d'exécuter les jeux au moment de la pleine lune, lorsque cette dernière fait croître au maximum la vitalité des plantes, et c'est pourquoi, sans doute, nos ancêtres ont choisi de faire ces jeux au moment de la pleine lune. + 31
LES DANSES MAS UEES ET LA CULTURE RECREATIVE Chang Han-ki
Professeur de théâtre et de cinéma Université Dongguk
L'utilisation du masque est multiple, la principak consistant à dissimuler les traits de celui qui le porte et à lui tramférer un pouwir surnaturel et magique. Les danseurs pensent qu'en portant un masque, ils acquièrent une personnalité nouœlle et deuiennent le réceptack du pouwir du personnage. AutrEfois, les danses masquées CQnstituaient moins une source de diœrtissement qu'un mo_ven de se prémunir contre le malheur, la maladie, ou les mésaœntures. La plujXlrt des danses masquées coréennes tirent leur origine du
p
armi les nombreuses formes de divertissements traditionnels existant en Corée, les nong-ak, musique et danse paysannes, et les t'al-ch'um, danses masquées, sont peut-être les deux plus intéressantes et les plus représentatives. La plupart des fêtes folkloriques s'ouvrent aux sons retentissants et énergiques du nongak et s'achèvent sm une représentation de t'al-ch'um Le premier suscite l'enthousiasme du public et l'invite à participer à la fête et le second porte son enthousiasme à son comble La tradition a intégré les jeux et autres activités à caractère ludique tels que le jeu de la bascule, la lune ou encore le ch'aj5n (joute) dans les fêtes populaires. Cepnda~ rien ne vaut les sons fougueux et dy32
chamnz~we
et autres religimlS indigènes.
namiques des tambours, gongs et autres instruments à percussion et à vent, qui forment l'accompagnement musical du nong-ak et du t'al-ch'um, pour attirer irrésistiblement les foules et leur donner envie de participer aux réjouissances. Aucun jeu individueL qu'il s'agisse de la lutte ou de la bascule, ne témoigne aussi bien que le nongak et la t'al-ch'um de l'esprit de coopération coréen . Les masques d'aspect exotique que portent les interprètes de la t'al-ch'um dévoilent l'âme du personnage incarné. Ce dernier peut chanter, danser, proférer des malédictions ou prodiguer de bonnes paroles. Sur ce poin~ la t'al-ch'um est un folklore unique en son geme qui se réalise à travers des récits qui font rire, pleurer ou
crier les spectateurs, lesquels identifient leurs joies et peines à celles des personnages. La t'al-ch'um se caractérise par la diversité des genres: danses lentes ou rapides, sons aigus ou graves, débits de paroles nonchalant ou véloce, registre langagier vulgaire ou châtié. La danse, le mime, les paroles et la narration sont autant d'éléments qui concow-ent à dépeindre avec justesse les émotions et les sentiments du peuple coréen Les danses masquées existent dans les traditions de la plupatt des pays du monde Au Japon, en Chine et dans la Grèce antique, elles traduisent les convictions populaires prédominantes. Les tragédies, les comédies et les satires jouées par les anciens Grecs pendant la fête de Dionysos
dériveraient d'un type de danse masquée. L'utilisation du masque est multiple, la principale consistant à dissimuler les traits de celui qui le po1te et à lui transférer un pouvoir sumaturel et magique. Les danseurs pensent qu'en portant un masque, ils acquièrent une personnalité nouvelle et deviennent le réceptacle du pouvoir du personnage. Cette démarche est comparable à cene d'un acteur qui doit "subir une métamorphose" pour entrer dans la peau de son personnage. Il est vrai .que les masques et les incantations qui nous sont parvenus avec les différents t'al-ch'um affectent profondément les interprètes. Le masque du lion donne . au porteur le
courage de l'animal Le port du masque de l'aristocrate ou du boucher ne se limite pas à l'acte simple du déguisemn~ il donne une identité nouvelle. On dit que les masques donnent aux dansems une sorte de pouvoir magique qui leur pe1met de se libérer d'eux-mêmes et de leurs inhibitions. C'est l'essence même des pièces de danses masquées. Une fois pris par leur personnage et la représentation, les interprètes oublient leur statut social et leurs frustrations. npeut aniver que les danseurs, ayant atteint un degré élevé de concentration, parviennent à se doter d'un pouvoir extraordinaire. Autrefois, nombre de chamans se vantaient de détenir des
pouvoirs magiques et de fait, ils pa>Sédaient un pouvoir dépassant l'entendement des gens du commun. Il est possible qu'ils y soient parvenus parce qu'ils y croyaient vraiment Dans plusieurs versions modernes, le port du masque permet toutes les audaces: une fois travestis, le domestique Malttugi et l'esclave Swettugi, appartenant aux classes les plus défavorisées de la société, deviennent très influents et ne mâchent plus leurs mots ils donnent des ordres aux aristocrates et aux lettrés, les tournent en dérision. Ils contrarient les amours d'un riche noble décadent avec sa jeune concubine et jouent des tours aux moines
Scène de la danse masquée Y angju Pyolsangdae
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bouddhistes apostats. Leur comportement se veut être une démonstration de leur pouvoir surnaturel et de celui des masques.
Masques pour la danse Autrefois, les danses masquées s'imposaient moins comme une source de divertissement que comme un moyen de se prémunir contre le malheur, la maladie, ou les mésaventures. La plupart des danses masquées coréennes tirent lem origine du chamanisme et d'autres religions indigènes. La Ch'oyong-mu, une danse de cour exécutée à la cour de Silla (57 av. ].C- 935 ap. ].C) et le rituel Na~ de la période Koty6 (91&1392), sont deux des oeuvres les plus remarquables du répettoire classique. Ainsi apprend-{)n d'anciens livres et documents · que les danseurs du royaume de Silla étaient surtout réputés pour leur pouvoir de conjurer l'esprit des épidémies. De même, les gens de l'époque Kory6 célébraient le rite Narye pour chasser tous les esprits malfaisants de la com avant le premier jom de l'an du calendrier lunaire. Dans quelques autres régions coréennes, on observait des rites similaires, sous la forme de chishin fJa!ki (marche sur le dieu de la terre). Comme les danses masquées étaient associées à une cérémonie d'exorcisme, on leur conférait un caractère magique. Cest ce qui explique peut-être pourquoi elles nous sont parvenues à travers les âges. Depuis les temps anciens, une cérémonie d'offrandes aux esprits prélude à toute célébration, rite ou fête. Les saa·ifices sont destinés à attirer
les esprits dans l'espoir que ceux-ci cèdent Lm peu de leur pouvoir surnaturel La danse Ch'oyong et le rite Narye sont probablement les exemples les plus représentatifs des manifestations allégoriques du pouvoir sumaturel Si l'exhibition du pouvoir sumaturel est le principal élément constitutif des danses masquées, quelle peut être alors leur vocation fondamentale ? Habituellement, l'exécution d'une danse masquée est motivée par une raison précise et est destinée à déclencher la prise de conscience de celle-ci dès lors que la danse est investie d'une puissance smnatmelle. Le Muae-mu, "Danse sans entraves", développée par Wonhyo (617-684), un éminent moine de la dynastie Silla, en est la meilleure illustration. A travers elle, Wonhyo parvint à populariser le bouddhisme et à intégrer la religion dans la vie quotidienne du peuple, toutes classes confondues. Ce qui favorisa l'émergence d'un sentiment de conscience nationale et contri~ua . à l'unification des trois royaumes par Silla: A l'époque de Wonhyo, le bouddhisme était l'apanage de la classe noble, de la famille royale et des membres de la haute noblesse dite ch'in-go4 ''vrais üS'. Les gens du commun n'avaient pas accès à la religion de Bouddha et comprenaient encore moins ses préceptes. L'existence d'un lien entre les classes privilégiées et défavorisées demeurait virtuellement impoSsible. Dans la volonté de remédier à cette défaillance, le moine créa la Muae-mu
Distraire est la raison d'être desjeu.-r.f'olkloriqu.es et des spectœ:fe.ç Et l'a11 de la danse rnasquée nefait pas exception L'engxuemellt provient de la satire et du comique d,es persowza~:,Jf'S.
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Le mot muae fut emprunté à un verset du sutra d'Avatamsaka d'après lequel "celui que rien n'aliène peut s'affranchir des trivialités de la vie et de la mort''. Une légende raconte que Wonhyo eut une aventure amoureuse avec une princesse de la cour, Yosok, fille du roi Muy61 (règne 654-661). Après la naissance du garçon que celle-ci lui donna et qui portait le nom de S6lch'ong, le moine devint apostat Vêtu d'habits séculiers et le visage dissimulé sous un masque d'acrobate, il entreprit une pérégrination à travers le pays, chantant et dansant le muae Les gens du peuple furent immédiatement séduits par la mélodie et les mouvements. En apprenant les paroles, ils s'initièrent au bouddhisme et développèrent le sens de la solidarité. L'unité qui en résulta jeta les bases spirituelles de la victoire de Silla dans les guerres d'unification qui durèrent plus de cent ans Il y a également l'histoire de Kwanch'ang, fils de Pumil, qu~ en dépit de son jeune âge, dirigea une bataille contre le royaume de Paekche et y succomba Pom rendre hommage à sa bravoure et à son ~tiosm le général Kyebaek de Paekche rendit son corps à son peuple. Celui-ci, pleurant son héros, fabriqua un masque en son souvenir et inventa la "danse de Kwanch'ang" en témoignage de son respect à l'égard du vaillant guen-ier. La "danse de Kwanch'ang" était aussi exécutée pour nOLmir l'hostilité du peuple contre Paekche D'ailleurs, l'accomplissement d'un objectif précis et l'éveil de la conscience soustendent le développement de la plupa1t des danses masquées pratiquées à cette époque les éléments constitutifs du divertissement
Quel est le troisième élément important des danses masquées ? Si on part du principe qu'aucune coutume ni tradition, y compris les jeux populaires, ne sont immuables dans le temps, on peut elire que la danse masquée a également évolué. En effet, à l'époque où les danses masquées étaient essentiellement mises à contribution pour promouvoir les croyances religieuses et prouver l'existence du pouvoir surnaturel, les spectacles servaient déjà ce 36
double objectif et assuraient une détente psychologique. Puis, les danses masquées perdirent progressivement leur fonction sociale pour jouer un rôle d'agrément Ceci n'implique pas pour autant que les pièces humoristiques soient définitivement amputées de leur fonction sociale. L'un des changements les plus notables qui puisse être relevé au cours de leur évolution est qu'elles aient pris un ton comique que l'on retrouve également dans les pièces modernes. Les danses masquées sont à l'origine une "activité" dépourvue d'humour et de dynamisme, étant parfois plus empreintes de solennité que n'importe quelle tragédie. Dans Pongsan et Yangju Py5sandae, il y a plusieurs scènes muettes, dont le mime et la danse sont particulièrement lents et mesurés. La "danse du vieux moine", scène-dé de Yangju Pyosandae, offre un exemple typique de l'utilisation délibérée du silence Le vieux moine, cible des plaisanteries et des railleries de son domestique, Mokchung, et du.."petit chaman" Somu, n'émet pas Lme seule 'patole Mais sa mimique dénote une certaine recherche dans les mouvements. La nonchalance, trait caractéristique des personnages des danses masquées coréennes, affecte tous ceux de cette pièce La vulgarité et l'indécence qui caractérisent souvent les paroles sont contrebalancées par la solennité et la gravité des chants et le tempo des mouvements. Lorsque les paroles chantées et les voeux de bonheur sont formulés avec lyrisme et affectation, le son de la corne et des instruments à percussion cesse. Puis s'enchaînent immédiatement une pantomime et des danses au rythme débridé, animant toute la scène Alors que le vieux moine exécute avec beaucoup de lenteur les mouvements samjin samt'oe, sabangch'igi et kodLirum, qui sont généralement accompagnés d'une musique lente au départ, s'accélérant progressivement, les autres danseurs évoluent sur des rythmes plus rapides. Les variations rythmiques ne sont pas un tt·ait spécifique de la danse du vieux moine. Toutes les danses masquées évoluent sur un tempo similaire, le rythme variant selon l'ambiance de la scène
Dès la fin d'une scène, le 1ythme revient toujours à un tempo calme pom laisser de nouveau place à un tempo et à des rythmes différents. Ces variations rythmiques sont inhérentes au tempérament du peuple coréen et sont l'esprit et le coem des danses masquées coréennes. Distraire est la raison d'être des jeux folkloriques et des spectacles. Et l'ait de la danse masquée ne fait pas exception. L'engouement provient de la satire et du comique des personnages. Pittul Yangban (noble chancelant), onchaeng-i Saennim (seigneur au bec-de-lièvre), Malttugi (domestique), P'odobujang (inspecteur de police) et Somu (petit chaman), certains des protagonistes des pièces "Ogwangdae' et "Sandaegult, portent tous des masques à l'aspect comique et délibérément grotesque pour caricaturer les personnages incarnés. Le but est simplement d'amuser: il ne faut pas tenter de déceler un sens profond dans les danses masquées. L'idée est au départ de divertir à renfort de vulgarité dans le langage, de plaisanteries, de clia~ues drôles, de souhaits de bonhem, de mimiques et de danse. Pour pouvoir s'identifier aux personnages de la pièce, le public éprouve le besoin de rire et de s'amuser et d'y trouver la signification et la raison d'êtt·e de sa journée n s'agit d'une culture récréative issue des danses masquées. Les pièces modernes ont dès leur conception une fonction divertissante mê~ si elles contiennent quelques éléments tragiques. Ceci est l'une des caractéristiques des jeux folkloriques qui recherchent un effet dramatique tout en développant les vecteurs du plaisir. C'est probablement ce qui a permi~ à la danse masquée moderne de préserver son caractère récréatif. Les masques constituent les éléments dramatiques de la pièce et peuvent renfermer une signification et déclencher l'imagination du public. Par exemple la "danse de la prière bouddhiste" japonaise est exécutée juste avant le 15 août dans plusieurs villages et temples. Elle s'ouvre avec la danse du tambour à laquelle succèdent d'autres danses évoquant des histoires d'amour érotiques. Les personnages sont une femme
Scène de la danse masquéeSandaenori deSongp'a
enceinte (équivalent du petit chaman, Soml~ dans les pièces coréennes), lm lion et une araignée qui s'engagent dans une féroce danse. Les pièces des deux pays présentent des points communs: chaque scène aborde une histoire différente. La danse japonaise commence avec la lecture d'une prière bouddhiste; le rythme cadencé des incantations préfigurent les scènes cruciales. La "danse de la prière bouddhiste" ·est particulièrement populaire dans les temples et parmi le public, apparaissant de nos jours plutôt comme une forme de divertissement qu'une activité rituelle. La danse, à l'origine pratiquée le jour du rite des ancêtres, a évolué sous plusieurs formes dans les différents temples. De nos jours, on l'exécute à l'occasion de certains événements tels que les funérailles, les 1ites de prières pour la chute de la pluie, les
manifestations liées à l'agriculture, etc. Cependant, elle joue seulement un rôle d'agrément De façon similaire, les danses masquées coréennes se sont développées en intégrant plusieurs scènes dramatiques pour opti-miser le plaisir du public. Il y a peu de spectacles folkloriques qui procurent autant de plaisir, d'amusement et d'intérêt culturel que les danses masquées modernes coréennes. Comme nous le disions précédemment, les danses masquées coréennes ont évolué avec le temps mais la signification des masques n'a pas changé et nombre d'entre eux ont leur place dans le coeur des Coréens. D'abord, ils symbolisent le pouvoir et puis, ils détiennent une fqnction propre. Les masques ont généré une forme de divertissement complexe
Certaines danses masquées sont une critique des t~ndaces qui prévalent dans une société à un moment donné et d'autres recourent à la grossièreté et à la causticité du langage pour protester contre les aristocrates, les chefs religieux corrompus et les inégalités sociales. Elles se complètent d'une touche d'humour pour décrire les épreuves et souffrances endurées par les petites gens, faisant ainsi rire le public et lui permettant d'oublier ses problèmes. Les danses du masque coréennes encouragent l'esprit de zèle pour l'édification d'un monde meilleur et insuffle le désir d'un nouveau départ. Toutes mettent en scène des personnages qui ont la force et la patience de surmonter les difficultés de la vie et qui savent délivrer une leçon de sagesse. + 37
HaPo-gyOng La fête de la danse de Miryang Chung Byung-ho
Professeur honoraire de l'Université Chung-ang, Membre du Comité des biens culturels
L
a région de Miryang dans la Province du Kyongsang du sud a été longtemps connue pour la beauté de ses paysages, ses terres fertiles et son climat tempéré qui · ont contribués à développer son agriculture. Une tradition particulière liée aux pratiques agricoles et à l'entraide des habitants à la saison des grands travaux, s'est installée sous forme de manifestations animées de danses, de chants, de jeux collectifs et de l'habituel culte du dieu de l'agriculture. On trouve, entre autres, la danse des cinq tambours obukch'um, la danse des aristocrates hallyangmu, la danse des roturiers p6mbu-ch' um et la danse des infirmes py6ngshin-ch'um qui sont caractéristiques de la fête de Miryang. Ce festival trouverait ses origines dans une fête folklorique bouddhiste que les domestiques de ferme auraient eu l'habitude de célébrer le 15ème jour du septième mois lunaire en buvant et en dansant après le sarclage des rizières. Ce sont les doyens du village qui choisissaient un jour de bonne étoile dans le mois de la septième lune pour vouer un culte au dieu de l'agriculture. Ce jour-là, un "maître des cérémonies" était choisi parmi les meilleurs domestiques de ferme et plusieurs manifestations avaient lieu. On ne sait pas encore pour quelles raisons précises les différentes danses évoqu~s plus haut furent associées aux festivités. Mais en ce qui concerne la danse des cinq tambours, elle aurait pour origine la tradition d'entraide propre aux activités rurales et d'anciennes cérémonies folkloriques relatives à l'adoration 38
des "Cinq éléments" (fer, bois, eau, feu et terre), répandues surtout dans le sud-est du pays.
HaPogyOng
Ha Pc;gy61zg
le dernier grand dançeur
folklorique de ce siècle, aura consacré 50 ans de sa uie à œttedançe pittoresque,
si jxlrticulière à ;Hitymzg A l'apprcxhe de ses 90 ans, il lui
arriœ encore de saz~çir
son
in'>trument pour s'abandonner au rythme de cette rnusique que lui et les habitants de sa
atx:tient à coeur:
~ile.
Paekchung Nori Les festivités commencent par le nong-ak, musique .des paysans coréens à base de percussions. Un groupe de musiciens se met à jouer une musique percutante quand les doyens du village procèdent à l'exorcisme des cinq directions (nord, est, sud, ouest et centre), appelé obangu~ pour purifier le lieu de culte en chassant les mauvais esprits. Une grande perche appelée nongshindae, fabriquée avec 360 tiges de chanvre symbolisant le nombre de jours du calendrier lunaire, est érigée dans un coin de la cour. A son extrémité supérieure, sont accrochées 10 cordes tressées, en forme de dragons. Autour de cet objet sacré, ~e rassemblent les gens du village qui ont apportés dans leurs poches du riz, des fèves, de l'argent et des "papiers de voeux". Saisissant les cordes, ils tournent autour du mât puis s'accroupissent et se prosternent trois fois en faisant leurs offrandes pendant que "le maître" lit une invocation au nom de tout le monde. Le rite est suivi de danses masquées et on porte "le maître" sur un "cheval" confectionné avec une hotte en bois. On lui fait faire le tour de la place au milieu des offrandes et des danses. "Le maître" se conduit comme un Yangban, aristocrate. C'est le signal du début de la danse des vrais aristocrates, la yangban-ch'um, accompagnée de la danse des infirmes, ou py6ngshin-ch'um, exécutée par les domestiques et les servantes qui se
joignent à leurs maîtres. Ils imitent les lépreux, les bossus, les boiteux ou autres exclus de la société. La moquerie visible dans les mouvements de cette py6ngshin-ch'um traduit l'oppression des gens du peuple dans la période de Chos6n Ce jeu est une attaque satirique de l'élite aristocratique et symbolise la joie et la tristesse des gens des classes défavorisées. Et tout à coup, à cette danse improvisée, succède le p6mbu-ch'urn, la danse des roturiers, très dynamique, sauvage et pleine d'humour. Les dans~ur, un foulard à la jambe gauche en signe d'appartenance à la classe yangban, balancent bras et jambes en Sautillant comme pour dessiner un cercle. Ils dansent tour à tour et la danse des cinq tambours très attendue, débute. Celle-ci met en scène cinq joueurs de tambour positionnés aux quatre points cardinaux et au centre. Ils commencent à jouer très lentement pour accélérer graduellement leur tempo jusqu'à arriver à un rythme étourdissant qui reflète l'intensité de leur danse. Le Paekchung Nori se termine quand les spectateurs rejoignent les danseurs au sqn des tambours pour la danse finale appelée hotLin-ch'urn, la danse "libre". Les "trésors culturels"
Si la région de Miryang a produit de grands danseurs et de grands musiciens, c'est parce qu'elle a été le haut lieu des activités des sadanp'ae, troupes nomades d'attractions folkloriques et des kisaeng hôtesses professionnelles, jusqu'à la Libération. Aujourd'hui, cinq personnes sont considérées comme les spécialistes du Paekcbung Nori. Yi Kang-sok est le spécialiste de la py6ngshin-ch'um et Ha Po-gyong, celui de la obokcb'um et de la p6mbu-ch'u m En fait, Ha Po-gyong est le seul maître en la matière et compte parmi les plus grands danseurs folkloriques coréens. Ha Po-gyong est né à Miryang, en 1906. Ses parents étaient membres d'une troupe musicale de paysans locaux. Dès son plus jeune âge, il a été tout naturellement plus ~tiré par les instruments de musique que par les lettres. Il accompagnait toujours 40
ses parents dans leur tournée et c'est à l'âge de 15 ans qu'il se montra en public pour sa première danse accompagnée d'un tambour. Cette première performance lui valut le surnom de "petit danseur''. Il entra trois ans plus tard à l'école de Miryang, contraint et forcé, mais cela ne fit qu'attiser sa passion pour les tambours et la danse. Il se consacra surtout à la danse des tambours. Le moment pour lui de faire connaître son talent arriva à l'âge de 20 ans quand il rejoignit officiellement la troupe de ses parents. La même année, il fut marié à une fille du village mais continua sa vie de nomade étant peu porté aux travaux de la terre, ni au rôle de père de famille. Il passa des années à traverser le pays pour animer des matchs de lutte. Un jour, il s'enfuit vers la Mandchourie avec l'argent de la vente du boeuf que son père lui avait demandé de vendre. Plus tard, à court d'argent, il rentra au pays et travailla durement sur un chantier de construction dans la province de P'yong-an du nord, à Kanggye. Même après la mort de son père miné par l'attitude de son fils, sa vie vagabonde ne s'arrêta pas. Et c'est en 1970 qu'il décida de revenir dans sa ville natale, complètement démuni d'argent, pour fonder une association de musique traditionnelle. Il essaya de coopérer avec les meilleurs danseurs de la région, mais ses efforts restèrent vains. C'est alors qu'il donna un nouveau nom à son groupe, "l'Association de la préservation du folklore", et qu'il y consacra presque 20 ans de sa vie. Il fut gratifié d'une reconnaissance nationale pQur ses talents de danseur quand le Miryang Nori fut désigné "trésor culturel important numéro 18". De plus, en 1980, il reçut un prix du premier ministre au concours national des arts folkloriques et depuis a eu la chance de se produire à travers le pays, aux Etats-Unis et au Japon. Ses représentations ont reçu un très bon accueil et on l'a qualifié de "danseur né", de "danseur de l'au-delà"... Mais, il reste sceptique sur sa réussite: ')e n'ai jamais subvenu aux besoins de
ma famille. Je leur ai fait passer des moments difficiles" a-t-il dit un jour. Sa réponse trahissait ses remords. La danse des aristocrates
Le danseur Ha Po-gyong n'est pas seulement un expert en danse de tambour mais excelle aussi dans la danse des aristocrates et dans celle des roturiers. La première, il l'a apprise de l'un des membres de la troupe de ses parents. Un chapeau noir en crin de cheval, un grand habit blanc et un éventail à la main droite sont les vêtements et les accessoires de danse symbolisant l'appartenance à la classe noble. Le balancement de bras, le mouvement des épaules et les petits mouvements de pieds en sont les caractéristiques. Mais, ce qui fait la différence avec le~ autres danseurs, c'est que sa danse ne s'accorde pas avec les instruments au rythme lent te~s que le k6mungo, harpe coréenne, le kayagilrn, instrument à 12 cordes, ou le p'iri, petite flûte, mais avec les timbres rauques d'un ensemble d'instruments folkloriques composé de toutes sortes de tambours, de gongs et de cymbales_. Quant à l'origine de sa danse des aristocrates, elle reste peu certaine. Mais ce qui est certain, c'est qu'elle est différente de celle de la région du sud-est de la Corée, pratiquée par des danseurs masqués. La version de la danse masquée de c~te région se reconnaît à ses mouvements improvisés de bras et de pieds, appelés paegimsae, alors que les gestes de la version de Miryang sont beaucoup plus amples. Dans la danse des aristocrates de .. Miryang, au premier temps, les bras sont en deuxième position, presque parallèles au sol, et le pied droit en avant. Au deuxième temps, les bras font des mouvements de vagues et le pied gauche s'avance. Au temps suivant, le bras gauche est plié juste au-dessus de l'épaule et les danseurs font un mouvement des deux épaules à plusieurs reprises. Au dernier temps, le bras droit est plié au dessus de l'épaule et le pied du même côté à peine levé bouge avec élégance. Le sens propre du mot p6mbu de la
Ha Pog)Ong est reconnu sur le plan national pour son talent de danseur de danses
folkloriques. Rest spécialement connu pour sa "danse des aristocrates"(àgauche) La présence des danseurs
est indissociable du festiml Paekchung Noli de Miryang (ci-dessous)
danse des roturiers, pombu-ch'um, signifie "personne vulgaire", mais en fait, il se réfère au petit fonctionnaire de province dont le statut se situait entre le noble et le roturier. Quand on regarde la chorégraphie de cette danse, il ne serait pas improbable qu'elle ait été créée au cours de la dynastie Choson, époque où les paysans locaux fortunés passaient pour des gens de l'élite aristocratique. Ha Po-gyong, le dernier grand danseur folklorique de ce siècle, aura consacré 50 ans de sa vie à cette danse pittoresque, si particulière à Miryang. A l'approche de ses 90 ans, il lui arrive encore de saisir son instrument pour s'abandonner au rythme de cette musique que lui et les habitants de sa ville, avaient à coeur. +
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LA MUSI UE COREENNE DEPUIS LA LIBERATION HISTORIQUE ET DOCUMENTATION Song Bang-song
Professeur de musicologie coréenne Université Yeungnam
L
a société coréenne traverse une période de grands changements et la communauté musicale n' y échappe pas non plus. Depuis la conclusion des accords mondiaux du GATT sur le commerce en 1993, la compétition est partout et chacun doit y mettre du sien. Qu'on le veuille ou non, on ne peut s'y soustraire et la communauté musicale coréenne doit se donner les moyens adéquats pour répondre aux défis d'aujourd'hui. La créativité est sans doute l'un des moyens qui permettra aux Coréens de faire face aux défis de la 42
Les musicologues coréens d'aujourd'hui ont deux tâches majeures à accomplir: d'une fXlrt, utiliser les techniques occidentales ck manière plus autonome, d'autre fXlrt, continuer à promouwir
la créativité ck la musique traditionnelle coréenne
"mondialisation" et d'améliorer la qualité de la vie au XXIème siècle. Il en va de même pour le monde de la musique où cette créativité doit jouer un rôle de premier plan dans les changements qui concernent les techniques de composition tant occidentales que traditionnelles. Bien que la musique traditionnelle participe au développement de la musique nationale, on la considère le plus souvent comme une relique du passé et on l'écarte ainsi de la vie quotidienne. Il est vrai que beaucoup de musiciens coréens ont eu tendance à rendre cette musique traditionnelle peu accessible au
grand public, comme privée de vie, tel un animal empaillé dans la vitrine d'un musée. Ils ont également échoué en adoptant une attitude trop complaisante à l'égard de la musique occidentale. C'est pourquoi les musicologues coréens d'aujourd'hui ont deux tâches majeures à accomplir: d'une part utiliser les techniques occidentales de manière plus autonome, d'autre part continuer à promouvoir la créativité de la musique traditionnelle coréenne. Ils doiyent par ailleurs se préoccuper de la notion de conscience historique et participer à la reconnaissance de la culture coréenne.
Les compositeurs coréens de mus~qe occidentale Lorsqu'on examine comment ont évolué la musique occidentale et la musique traditionnelle coréenne, depuis la libération en 1945, le travail des compositeurs est moins visible que celui des interprètes. Les progrès liés à l'interprétat ion sont le plus souvent une question d'individu alors que ceux qui sont liés à la composition dépendent des compositeurs mais aussi de leur environnement. Pendant des années, la création a été fortement imprégnée de considérations politiques surtout après la guerre de Corée, puis pendant les différentes dictatures militaires qui suivirent et ce jusqu'au début des années 1980. Les compositeurs ont dü composer avec ces contextes politiques difficiles, voire contraignants. Yi Kang-suk a proposé dans son étude sur la musique coréenne de diviser en trois groupes, ou générations, les compositeurs coréens de musique occidentale. Kim S6ng-t'ae, Yi Hüng-ryol et Kim Tongjin, qui ont adopté les techniques et les théories occidentales du XIXè siècle, sont sans doute les meilleurs représentants de la première génération. Ils ont dü faire face à de nombreux obstacles mais ils sont reconnus, aujourd'hui, pour le travail de pionnier accompli dans la composition de kagok, petites mélodies vocales semblables aux lieder allemands. La seconde génération chercha à
La communauté musicale
coréenne ne devrait pas seulement se préoccuper de la pré:sermtion
des traditions nationales. Elle devrait se méfier du chauvinisme et des chemins étroits qu'il engendre et avoir à cœur
de favoriser la création la plus riche possible.
dépasser les restrictions imposées à leurs prédécesseurs. A la fin des années 1960, Kang Sok-hüi, Paek Pyong-dong et Kim Chong-gil tentèrent de rattraper le retard pris. Pour ce faire, ils décidèrent d'apprendre, dans l'urgence, les théories occidentales et de les utiliser pour leurs compositions. Dans le même temps, pour mener à bien le développement économique du pays on fit appel à l'importation de technologies avancées. Le milieu musical n'échappa pas à cette nouvelle donne et de nombreux jeunes compositeurs s'efforcèrent d'apprendre les techniques occidentales de la composition moderne tout en privilégiant la musique instrumentale au détriment du kagok et des autres genres vocaux développés par leurs aînés de la première génération. Très vite certains compositeurs du second groupe pensèrent qu'il n'était pas possible de composer de la "vraie musique coréenne" si l'on se servait trop des techniques' vènues de l'occident. Des comrositeurs ce>pme Lee Kon-yong et Ju pYong-üm rejoignirent ainsi le groupe de la troisième génération qui insista sur la nécessité é:le dépasser les "futilités" de leurs prédécesseurs. Pendant les années 1980, ils fmdèrént u mouvement afin de développer la tliéorîé musicale :toréenne" ...... et se posèrent la question suiyante: "Pour qui composons-nous ?". .. Curieuse.m ent, c'est le kagok de la première génération qui est demeuré le plus populaire pour les coréens. tes oeuvres modernes des compositeurs des seconde et troisième générations sont ,Je plus souvent présentées lors d'un (écital unique et ne sont plus jamais jouées par la suite. Elles ne suscitent guère l'intérêt du Coréen moyen et sont rarement diffusées à la radio ou à la télévision. C'est pourquoi il faudra attendre le prochain siècle pour évaluer objectivement leur rôle dans le développement de la musique coréenne. Toute étude, sur les compositions de "style occidental" de l'après-libération, se doit de mentionner Yun I-sang, coréen d'origine, qui vécut en Allemagne pendant de nombreuses années jusqu'à sa 43
mort en novembre 1995. Yun a été reconnu comme un compositeur de grande valeur par les critiques occidentaux. Il faut cependant faire remarquer qu 'il n'introduisit dans ses compositions que peu de références à la musique traditionnelle coréenne. Sa musique prend certainement tout son sens en occident, berceau de la musique moderne, mais il n'en va, sans doute, pas de même en.Corée. Les images de l'Orient évoquées dans les oeuvres de Yun sont peut-être issues de la musique traditionnelle coréenne mais cette dernière n'a été qu'un instrument pour produire cette impression d'attachement à la tradition coréenne. Pour définir le rôle exact de Yun dans l'histoire de la musique coréenne il faudrait répondre à la question: "Pour qui composait-il ~ ·. A cet égard, la remarque faite par Dieter M. Ayer, professeur d'études coréennes à l'université de Tubingen, pour qui: "Dire que la musique de Yun est coréenne, ce n'est guère avancer .qu'une idée préconçue même s'il est vrai que nous pouvons y trouver un système de va!eur esthétique particulier non présent jusqu'à aujourd'hui dans la musique occidentale" est intéressante. Les compositeurs de musique coréenne On peut considérer qu'il y a deux générations de compositeurs de musique coréenne. Kim Ki-su et Yi Kang-d6k sont les meilleurs représentants de la première tendance. Ils ne furent pas formés aux théories occidentales, aucun élément d'imitation ne se retrouve donc dans leurs oeuvres. La mise en place, en 1959, d'un département de musique coréenne à l'Université nationale de Séoul permit de voir émerger, dans les années 1960, une seconde génération de compositeurs. Parmi ceux-ci figurent: Yi Song-ch'6n, Kim Yong-jin, Paek Tae-ung et Park P6m-hun. Ces derniers, comme ceux des seconde et troisième générations de spécialistes de musique occidentale, doivent maintenant affirmer leur "originalité", c'est pourquoi tout jugement critique, qui se voudrait définitif, s'avère prématuré. 44
La seconde génération de compositeurs de musique coréenne s'est attachée, plus que celle de musique occidentale, à développer la notion de musique "vivante". Depuis la libération, tous leurs efforts sont allés dans ce sens. Le plus grand obstacle à la création fut lié au peu d'améliorations apportées aux instruments traditionnels, ce qui était particulièrement dommageable aux exécutions de pièces instrumentales. Il n'est pas, en effet, facile d'apporter des changements à la facture des instruments anciens afin de leur permettre de produire des intervalles précis ou d'être plus largement amplifiés tout en respectant la tonalité traditionnelle. Partout dans le monde, l'histoire de la musique a été intimement liée à celle de la religion. Il est aisé de reconnaître les liens qui existent entre la musique occidentale d'aujourd'hui et la musique catholique du moyen-âge. De même, la musique traditionnelle coréenne a subi les influepces du bouddhisme et du confucianisme.; On peut donc affirmer que la musique chrétienne introduite en Corée dès la fin du XIXème siècle, tout comme les musiques traditionnelles bouddhiques et confucianistes, ont participé à la création de la nouvelle musique coréenne dont il ne faut pas sous-estimer les richesses. La communauté musicale coréenne ne devrait pas être seulement préoccupée par la préservation des traditions nationales. Elle devrait se méfier du chauvinisme et des chemins étroits qu'il engendre et avoir à coeur de favoriser la création la plus riche possible. De même, les compositeurs coréens de musique occidentale devraient se libérer des oeuvres des compositeurs des première et seconde générations qui avaient par trop tendance à l'imitation. Les 50 dernières années de la musique coréenne peuvent être considérées comme une série d'expériences, pleines d'erreurs parfois dues au fait que les compositeurs eux-mêmes n'avaient pas su choisir une direction musicale claire. Il ne semble pas, à étudier l'histoire de la musique coréenne, que les compositeurs
aient fait preuve de beaucoup d'imagination. On peut invoquer pour expliquer cet échec la division tragique de la Corée par les conflits idéologiques. Il est maintenant temps, pour les élites musicales coréennes de s'unir et de dépasser les simples imitations pour créer une authentique musique dans une Corée unie et pacifique. Musicologie et publications Le terme de Hanguk urnak-hak, "musicologie coréenne", a souvent été pris comme synonyme de kugak-hak, l'étude de musique traditionnelle coréenne. Cet essai ne concerne, à proprement parler, ni l'un, ni l'autre. La Société de musicologie coréenne, fondée en 1948, sous le nom de Kugak bakhoe, est aujourd'hui appelée Hanguk kuk-ak hakhoe. Elle fut à l'origine, dans l'après-libération, des études entreprises sur la musique coréenne. En 1959, l'Université nationale de Séoul ouvrit un département de musique coréenne appelé kugak qui oeuvra dans le même sens. Par ailleurs, établir des distinctions entre les générations de musicologues devraient permettre de mieux comprendre la situation de la musicologie d'aujourd'hui en Corée. Chang Sa-hun (1916-1991) et Lee Hye-ku (1909- ), tous deux membres de la Société de musicologie de Corée, appartiennent à la premi~ génération. Ils peuvent être considérés comme les fondateurs de la musicologie coréenne. Non seulement ils ont oeuvré pour atteindre le niveau d'études des autres disciplines coréennes, mais ils ont formé une nouvelle génération de musicologues. Parmi leurs étudiants de l'Université nationale de Séoul se sont distingués Kwon 0-song, Song Bang-song, Han Myong-hui et Han Man-y6ng. Quant à la troisième génération de musicologues, elle comprend: Son T'e-ryo~g, Kim Chong-su et Nam Sang-suk. Entre autres publications de Lee, nous pouvons citer: ses "Etudes", "Thèmes" et ''Essais" sur la musique coréenne. Il a aussi traduit le 22ème tome des classiques chinois intitulé "Annales du roi Sejong le
Grand", et deux autres volumes sous le titre "Traductions annotées de Ak-hak Kwebom". Non seulement ces deux traductions sont à la source des recherches de Lee, mais elles ont aussi guidé les jeunes chercheurs souvent peu familiarisés avec les textes chinois. Chang commença d'écrire juste après la libération en 1945. Parmi ses premières étud~s, il faut citer celles, publiées en 1948, qui concernent les chansons populaires et les instruments traditionnels utilisés dans la société rurale. Ses essais sorit disponibles dans de nombreux recueils, comme: "Etudes de musique coréenne", "Etudes sur la musique traditionnelle coréenne", "La naissance de la musique en occident et en orient", "Essais sur l'histoire de la· musique coréenne" et ''Ecrits divers de Chang Sa-hun". L'ouvrage consacré par Chang à la musique coréenne et ses diverses sources est un instrument de référence pour découvrir la musique des annales du royaume de Choson Quant à sa "Chronologie de la musique coréenne", elle complète le précédent puisqu'elle va des temps les plus anciens jusqu'à 1990. ·Son livre "Essais sur l'histoire de la musique coréenne" renvoit à des interprétations de manuscrits anciens. Il constitue un des textes de base pour toute étude sur la musique coréenne. Quant à l'ouvrage, "Les instruments de la musique coréenne", il contient de nombreuses illustrations et décrit les fonctions, l'histoire et les performances techniques de plus de soixante instruments traditionnels. Chang publia également de nombreux ouvrages de vulgarisation. Son "Histoire de la musique coréenne" nous brosse un panorama du développement de cette musique depuis les temps ! anciens jusqu'à la période qui suivit la libération. "L'introduction à la musique coréenne" rend compte de la musique traditionnelle telle que nous la connaissons aujourd'hui, alors que "l'Encyclopédie de la musique coréenne" est le fruit de trente années de recherches proposant maintes explications sur les concepts qui appartiennent à cette histoire.
Les seconde et troisième générations de musicologues coréens, tout particulièrement ceux du département de musique coréenne de l'Université nationale de Séoul, se sont spécialisées dans la théorie musicale coréenne. Parmi les recueils les plus importants, il faut citer: "Etudes des structures mélodiques de la musique coréenne" de Paek Taeung, les ouvrages de Han Man-yang intitulés: "Etude de la musique bouddhique en Corée" et "Essais sur la musique traditionnelle coréenne"; enfin mes propres travaux intitulés: "Etude sur l'histoire de la musique coréenne", "Etude de la musique ancienne dans l'histoire de la Corée", ''Etude de la musique au temps du royaume de Koryo", et "Essais d'histoire sur la musique coréenne". Dans le texte qu'il consacra. à la structure mélodique, Paek examine la structure mélodique du p'ansori, alors que Han privilégie l'étude de la musique bouddhique. Des données historiques fondamentales figurent dans ces documents. La traduction annotée de Nangye sonsaeng yugo par Kwon 0-song et Kim Se-jong est une traduction des classiques chinois recueillie à l'époque du royaume de Choson par Park Yon qui couvre la période allant de l'époque du roi Sejong jusqu'au début du XVème siècle. La traduction annotée "Chtlng bo munhOn pigo" par Kim Chong-su est une traduction abrégée de documents relatifs à la musique composée vers la fin de la dynastie Choson Comme autres recueils citons: "Sources et références à l'histoire de la musique coréenne catholique" par Cho Son-u, "Sources et références à l'histoire de la musique des églises protestantes coréennes" par Hong Chang-su. j'ai également publié une "Bibliographie annotée sur la musique coréenne" qui couvre les publications d'avant 1980. "Divers écrits sur la musique coréenne" de Han Myong-hui est une compilation d'articles qu'il publia dans un mensuel. Enfin l'Institut National de Musique Classique a publié en 1991 un précieux index en rapport avec "Les annales du royaume de Chosori'. 45
De nombreux ouvrages ont été publiés en langues étrangères. Celui de l'Allemand Andreas Eckardt: "Musiques, chants et danses de Corée" (Musik, Lied, Tanz in Korea) est une introduction à la musique traditionnelle. ''les instruments de musique coréenne" (Korean Musical Instruments) par Keith Howard est un ouvrage abondamment illustré. Quant à son livre intitulé "Groupes, chants et rituels chamaniques" (Bands, Sangs and Shamanîstic Rituals), il concerne la musique de l'île de Chin-do sur la côte sud de la Corée. "Les rythmes et percussions dans la musique des paysans" (Drum's Rythms in Korean· Farmer's Music) de Robert C Provine est une compilation des partitions découvertes alors que l'auteur étudiait avec le maître Kim Py6ng-s6p. li a également rédigé des ''Essais de musicologie sino-coréenne". Quant à Coralie Rockwell, elle a publié "Kagok, forme vocale traditionnelle de la Corée" (Kagok, A
"Essais sur la musique traditionnelle coréenne"; Han Man-Yong, "Etudes sur la musique traditionnelle coréenne"; Lee Byong-won, "Musique bouddhique de Corée", et enfin mes propres écrits, "Le Sanjo, tradition de la musique K6-mungd', "Les musiques populaires de Corée et du Canada: étude ethno-musicale", "Sources écrites de la musique coréenne". Il faut aussi citer: Chang Sa-hun, "Glossaire de musique coréenne" (traduction d'entretiens radiophoniques sur la musique coréenne); l'ouvrage de l'Académie Nationale des Arts, "Etudes des arts de Corée: la musique traditionnelle" (cet ouvrage renvoit à la musique populaire, aux jeux folkloriques, aux danses masquées... ); mes propres écrits, "Arts savants de Corée" et "Bibliographie annotée de musique coréenne" (qui renvoit aux publications et essais sur la musique coréenne des années 1970). Manuscrits de partitions et
Traditional Korean Vocal Form).
Certains musicologues coréens ont publié des articles en anglais: Lee Hye-ku,
Les 50 dernières années de la musique coréenne peuœnt être considérées comme une série d'expériences comportant des erreurs paifois dues au fait que les compositeurs eux-mêmes n'az:aient pas su choisir une tendance musicale claire
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enrg~stm
Les 'recherches produites par les
musicologues coréens depuis 1945 sont basées sur l'étude de vieux manuscrits de partitions ou de documents dont certains concernent la musique populaire et le p'ansori. La reproduction des manuscrits anciens et la production d'enregistrements sont essentielles à l'étude de la musique coréenne. Parmi ceux-ci, il faut citer la première édition fac-similée du "Shiyung hyangakpd' publiée en 1954 par l'Institut d'Etudes Asiatiques de l'Université de Yonsei. La seconde publication facsimilée, publiée en 1959 par Tongmungwan concerne l'édition de 1610 du " Yanggum shinbo". Ces premières éditions inédites ont grandement contribué aux progrès de la musicologie coréenne. Les lettrés ont toujours été fortement intéressés par les livres de chants traditionnels (kakok), parmi ces derniers figurent: "Haedong kayo" de Kim Su-jang, sans doute rédigé en 1763, publié par Chongùmsa en 1950, puis "Kagok wollyu"(publié en 1973 par Culture d'Asie), "Hy6mnyul taes6ng'
(publié en 1984 par l'Université de langue coréenne Dongguk). La première reproduction d'un manuscrit ancien fut réalisée en 1943 par Song S6k-ha. Il y en a eu de nombreuses autres après la libération et depuis 1979, l'Institut National de Musique Classique a publié une série concernant les origines de la musicolo$ie coréenne. De nombreuses cassettes et des disques de musique traditionnelle coréenne ont été récemment réédités en disques compacts. Parmi ces derniers figurent: "Anthologie de la musique traditionnelle coréenne" qui est une bonne introduction à divers genres de musique traditionnelle (Shinsegi Record Co, 1968); "Choix de musique coréenne traditionnelle", enregistré par Universal Record en 1%8, comprend six disques où l'on trouve les pièces les plus importantes du répertoire. L'Institut National de Musique Classique édite chaque année trois disques appartenant à sa série "Choix de musique coréenne", alors que
le ministère de la culture et de l'information produit une quarantaine de disques d'enregistrement 'live'. "L'encyclopédie de la musique populaire coréenne" comprend 14 cassettes de chants et de musiques populaires, produites par la radio MBC, disponibles maintenant en CD. Le siècle dernier de l'histoire de la Corée fut des plus troublé, marqué par des interventions et des invasions étrangères. Depuis la libération, la nation a oeuvré à la modernisation mais ce terme a souvent signifié occidentalisation et rejet des traditions coréennes. Aujourd'hui, la Corée reconnaît les limites de l'occidentalisation et est à la recherche de nouveaux repères culturels qui concernent aussi la musique. · A l'orée du XXIème siècle, nous ne devons pas oublier que le futur est indissociable du passé. Les racines saines et solides du présent qui s'ancrent dans le passé, participeront à l'évolution.. à venir. La musicologie ne doit pas l'oùbher. +
Ci-dessous bibliographie de quelques livres sur la musique coréenne publiés en anglais. Chang Sa-hun. Glœruy ofKortWl music Séoul: Radio management Bureau, Ministr y for the state Council Administration, 1%1 Eckardt, Andreas. Musik, Lied, Tanz in Korea. Bonn: H. Bouvier and Co. Verlag 1968 Hahn, Man-young Studies in kortWl Tnulitional Music Séou~ Tamgu-Dang, 1991 Howard, Keith. Korean Musical Instruments. Séoul, Segwang Music publishing Co, 1988
- -. Ban~
!XJ~
and sharnarlNic
rituals. Séoul, Ségwang Music Publishing Co, 1989 Lee Byong-won. Buddhist Music of Korea. Séoul, Korean National Commission of UNESCO, 1987 Lee Hyu-ku .Ewlys on Korean traditional Music traduction Robert C Provine, Séoul: Royal Asiatic Society Korea Branch, 1981 Perforrning Arts of Korea. SéouL Korean National Commission for UNESCO, 1975 Provine, Robert C Drom Rhythms in Korean Farmers' Music SéouL Shinjin munhwasa, 1975 - -. .Ewlys on SinoKortWl Musiroqzy SéouL llchisa, 1988 Rockwell, Coralie. Kagok, a traditional Ko~ voad forrn. Providence, Asian Music Publications, Brown university, 1972 Song Bang-song. An Annoted Bibliography of Korean Music. Providence: Asian Music Productions, Brown University, 1971. - - . The KortWl-amadian Folk -· Songs an ethnomusirological Study. Ottawa, Canadian Centre for Folk Culture Studies, National Museums of Canada, 1974 - - . Sourœ Readings in KortWl Music Séou~ Korean Commission for UNESCO, 1980 - -. The ~jJ T.rndition of Korean Komun-go Music. Séoul, Korean National Commission for UNESCO, 1986 SUJVey of Korean AriR traditional music SéouL Académie Nationale des Arts, 1974
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LA MUSI UE OCCIDENTALE EN COREE HanSang-u Critique musical / chef du département de Musique Lycée des Arts de Séoul
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n situe, en général, la date de l'introduction de la musique occidentale en Corée entre 1880 et 1890, lorsque les missionnaires protestants importèrent les hymnes chrétiens. Par conséquent, on a été amené à penser que la musique occidentale a pris racine dans le pays avec ces hymnes, mais en vérité, elle a emprunté plusieurs voies pour s'introduire, notamment par le biais de la musique militaire à l'époque du royaume de Choson qui aurait favorisé son implantation. Malgré ces opportunités, ce n'est qu'à 48
nserait souhaitable que les compositeurs coréen..-':; partg:n~ aœc de nouœlles oeuvres. une émotion aœc leur public délaissé jusqu'à maintenant Cela nécessite un nouœau tramil de composition qui doit œhiculer un "esprit coréen·; mêrnes'il doitfaireappel à une technique occide.ntale
la fin des années 50, après les 36 années de colonisation japonaise suivies de la guerre de Corée, que la musique occidentale a commencé à être écoutée et enseignée de façon sérieuse en Corée. Le début de l'intérêt porté à l'éducation des jeunes talents date de cette époque. Cependant, si on observe de plus près l'histoire de la musique occidentale en Corée, on découvre que des chants avaient déjà été composés dans les années 20. De nombreux airs imprégnés des sentiments de déchirement entre la tristesse et l'espoir du peuple coréen durant l'époque coloniale, ont été écrits et
chantés en dépit des restrictions imposées par les japonais. Ces premiers efforts ont abouti à la création du premier orchestre symphonique coréen, l'Orchestre Symphonique de Koryo, immédiatement après la Libération de 1945. Trois ans plus tard, la tompagnie de l'Opéra International mettait en scène pour la première fois un opér~, "La Traviata" de Verdi, sous la direction du ténor Yi In-SOn. Ces premier pas allaient galvaniser les premiers musiciens coréens de musique èlassique occidentale. Mais hélas, la guerre de Corée allait interrompre toutes activites musicales du moins jusqu'à l'armistice de 1953. Cependant, la fondation du Lycée des Arts 'de Séoul dans la ville de Pusan, capitale provisoire, cette même année, a donné un coup de pouce à l'enseignement précoce de la musique et a servi de clé de voûte à son développement. La formation à l'étranger a permis aux jeunes virtuoses coréens, à partir de la fin des années 50, de s'imposer dans le monde et a rendu possible l'épanouis·sement de leur sensibilité musicale. Toutefois, concernant l'expansion de la musique, comme on se préoccupait en priorité du nombre de productions, la qualité a été négligée. Lorsque l'on jette un regard sur les 50 dernières années qui ont suivi la Libération, force est de constater que, malgré le plaisir de voir s'ouvrir à certains de nos musiciens une carrière internationale de tout premier plan, la Corée est dépourvue d'une vraie culture musicale classique occidentale. La composition coréenne La création musicale proprement coréenne a vu le jour avec "Pongs6n• hwd', un air composé par Hong Nan-p'a ~ en 1920, mais il faudra attendre le milieu des années 50 pour que celle-ci porte réellement ses fruits. Comme la formation des jeunes c0mpositeurs à l'étranger a commencé plus tard que celle des musiciens, ce n'est qu'après leur retour au pays vers la fin des années 60 que se sont multipliées leurs activités de composition avec une technique nouvelle . 49
Mais avant eux, des compositeurs comme Na Un-yong, Chong Hoe-gap, Yi Sang-gun faisaient déjà de la musique expérimentale, soit en insérant des éléments coréens à une musique occidentale, soit en adoptant une technique moderne de composition. De ce milieu est né deux mouvements, l'un conservateur et l'autre progressif. Des jeunes comme Paek Pyong-dong, Kang · Sük-hùi et Pak Chun-sang se sont associés, pourtant, pour contribuer à rapprocher les compositeurs coréens du milieu international de la composition. Le retour en Corée des jeunes compositeurs dans les années 70, a revitalisé la communauté des compositeurs coréens. L'action du comité coréen de l'Association Internationale de la Musique Moderne, dirigé par Kang Sük-hui, a fait
Un orchestre doit être g?ré comme une entreprise cajXlble d'assurer des compen.'>Cltions adéquates à ses
membres pour jouer complètement son rôle. Les orchestres symphoniques coréens doiœnt se professionnaliser et assurer la qualité et la diffusion de leur musique, si la Con~
œut awir de
la musique de haut niveau
L'Orchestre symphonique de KBS en concert 50
connaître au milieu musical international les activités de composition coréenne. Parmi les groupes qui ont aussi participé au développement de la création musicale, on peut citer le Club des Compositeurs, la Ligue des Compositeurs d'Asie, le Cercle d'Etude Musicale du vingtième siècle, l'Association des Femmes Compositeurs et le Groupe de la Troisième Génération. Mais le problème majeur des compositeurs coréens est qu'ils ont eu tendance à négliger leur public et il serait souhaitable qu'ils fassent partager, avec de nouvelles oeuvres, une émotion au public délaissé jusqu'à maintenant. Cela nécessite donc un nouveau travail de composition qui doit véhiculer un "esprit coréen", même s'il doit faire appel à une technique occidentale. C'est aussi la seule
fa çon pour la musique coréenne de gagner ses lettres de noblesse sur la scène internationale. La musique symphonique
L'Orchestre symphonique de Koryo fut créé immédiatement après la Libération, pour répondre à un réel besoin. Mais les activités de la musique symphonique n'ont pris une tournure véritable qu'avec la mise en place de l'Orchestre symphonique de KBS et de l'Orchestre symphonique Métropolitain de Séoul dont les chefs d'orchestre respectifs, Lim Won-shik et Kun Saengryo, ont le mérite de les avoir élevés à un niveau professionnel. Par la suite, Hong Yon-taik, l'ancien chef en titre de l'Orchestre National, a ouvert "l'ère des orchestres indépendants" en créant
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l'Orchestre symphonique Coréen. · En plus d'une vingtaine de concerts annuels qu'ils donnent régulièrement, ces orchestres indépendants affirment leur professionnalisme en participant à des manifestations variées. Les performances régionales de ces orchestres indépendants 1 mis en place dans les villes et dans les provinces font partie d'une politique de pro~tin culturelle du gouvernement dont l'objectif est d'en augmenter le nombre. Le Festival de la musique symphonique organisé par le Centre des Arts de Séoul ouvre une saison musicale chaque printemps où s'illustrent plus d'une vingtaine de ces orchestres. L'opéra
L'événement qui marque le début de l'histoire de l'opéra coréen a été "la
Traviata" de Verdi, le premier opéra mis en scène en Corée par la Compagnie de l'Opéra International de Yi In-son en janvier 1948, trois années après la Libération. Après la guerre de Corée, l'opéra coréen a connu une certaine expansion sous le parrainage de l'Opéra National qui, de 1962 jusqu'à aujourd'hui a présenté presqu'une cinquantaine d'opéras, dont 9 de composition coréenne. La création en 1968 d'une "Compagnie d'opéra" par Kim Cha-kyung, a été ce qui a permis de jouer des "opéras indépendants" et a consacré cette culture en ayant une meilleure audience que l'Opéra National. Cette Compagnie est riche d'un répertoire de 34 opéras, en 27 ans (de 1968 à 1995), dont 7 de composition· coréenne. De plus, depuis sa création, 5
ou 6 autres compagnies nouvellement créées, qui jusqu'à présent se contentaient de se produire dans des salles polyvalentes, pourront enfin profiter du théâtre de l'opéra de Séoul inauguré à l'intérieur du Centre des Arts. Il serait temps maintenant de mettre en scène des opéras de qualité capables d'attirer la sympathie du public. Pour ce faire, ces représentations ne devraient plus se produire indépendamment d'un théâtre d'opéra qui répond davantage à la demande du spectateur. En fait, le seul membre permanent d'une compagnie d'opéra en est son directeur. Le producteur, les chanteurs, le chef d'orchestre ou le metteur en scène n'étant jamais les mêmes, il a été impossible de roder des spectacles et la scène n'offrait que peu d'attraits aux spectate)..lrs. Avec l'ou-
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verture nouveau théâtre de l'opéra du Centre des Arts, on peut espérer que celui-ci optera pour le travail d'un répertoire.
Les musiciens sur la scène nationale Si des musiciens comme Kim Wonbok et Yun Ki-son illustrent bien la scène nationale d'après la Libération, il faudra attendre le retour de leurs confrères ou consoeurs formés à l'étranger, vers la fin des années 1950 ou le début des années 1960, pour que le milieu des artistes soit plus animé. A l'heure où on célèbre le cinquantième anniversaire de la Libération, la Corée ne rossède pas encore de réels interprètes à proprement parler dans la mesure où ces musiciens ne · peuvent plus se consacrer aux concerts une fois en Corée, contraints qu'ils sont à former les jeunes musiciens. En consé. quence, leurs performances musicales perdent de leur dynamisme et de leur qualité. Mais malgré cette situation, certains artistes arrivent à maintenir leur statut d'interprètes professionnels grâce à de nombreux concerts sur la scène nationale, ainsi devenue plus prestigieuse. Parmi les artistes qui ont contribué à donner de l'éclat aux concerts nationaux pendant les 50 dernières années difficiles qui ont suivi la Libération, on cite les pianistes Shin Soo-joung et Lee Kyungsook. Cette dernière qui est aussi la directrice musicale de l'Institut national coréen des Arts, a poursuivi une carrière active et est restée une interprète à part entière en donnant plusieurs séries de concerts. Du côté des violonistes, ce sont Kim Nam-yun, Kim Min et Chung Chan-woo qui dominent la scène nationale. Fondateur d'un ensemble de musique de chambre appelé "l'Ensemble baroque de Séoul", Kim Min a joué un rôle important dans le développement général de la musique de chambre. Dans ce domaine, on compte comme pionniers connus pour la variété de leurs concerts, le Quatuor à Cordes de Kumho, l'Ensemble du Festival de Séoul et le Club Yeum. Depuis la fin des années 80, de nom52
breux jeunes talents formés à l'étranger rentrent et contribuent à relever le niveau des performances artistiques. Mais pour faciliter la poursuite de leur carrière et permettre aux jeunes artistes de percer, il serait souhaitable que plus de salles de concert perfectionnées soient construites aussi bien dans la capitale qu'en province.
Les musiciens sur la scène internationale Han Tong-il, jeune pianiste prodige, fut le premier musicien coréen à partir à l'étranger. Ce dernier avait attiré l'attention de tout le pays tant par son jeune âge que par le contexte de son départ en pleine guerre. Il s'agissait d'une aventure
un peu à part à cette époque qui a fait comprendre à la société l'importance de l'éducation musicale précoce. Par la suite, carrière il a poursuivi une grand~ d'interprète aux Etats-Unis, mais devenu à présent professeur à l'université de Boston, on peut dire qu'il a renoncé à être concertiste. Cet exemple montre combien la vie d'un concertiste n'est pas simple et que la compétition internationale est rude. Cependant, la présence de grands artistes coréens au festival de la musique, en août dernier, en commémoration du cinquantenaire de la Libération, nous a offert un grand moment et nous a permis de nous rendre compte encore une fois de leur talent internationalement re-
connu. La première artiste de ce niveau a été la violoniste Chung Kyung-wha. A l'école Juilliard, elle a été l'élève de Ivan Galamian dont les anciens disciples Itzhak Perlman et Pinchas Zukerman ont été ses partenaires. Sa soeur, la violoncelliste Chung Myung-wha et son pianiste et chef d'orchestre Chung Myung-hwun ont fondé avec elle le "Trio Chung" connu pour sa musique de chambre. Chlll'lg Myung-hwun a été aussi directeur de musique de l'Opéra de la Bastille et est considéré comme un des plus grands chefs d'orchestre du monde. Sous sa baguette, le festival du cinquantième anniversaire de la Libération a
réchauffé le coeur de tous les Coréens. Parmi les violonistes qui se produisent à l'étranger, il y a Kim Younguck aux Etats-Unis et Kang Dong-suk à Paris sans oublier la jeune Sarah Chang qui prend la relève. Cette jeune prodige est prometteuse pour le vingt-et-unième siècle. Quant aux pianistes, ils ne sont pas tellement reconnus mais Paik Kun-woo qui travaille de façon active en Europe et qui a été primé pour ses enregistrements discographiques, mérite notre estime. Dans cette lignée, on peut citer Kim Hae-jung, Suh Hai-kyung et notamment Paik Hae-sun récompensée au Concours international de musique
reine Elisabeth qui, sans doute, même si elle a suspendu sa carrière d'interprète, étant maintenant professeur à l'Université de Séoul, répondra certainement à notre attente. Parmi les compositeurs qui se produisent à l'étranger, il y avait Yun I-sang qui s'est éteint en novembre 1995 malheureusement avant de pouvoir rentrer au pays pour des raisons politiques. Son Institut de musique a été fondé en Corée du nord, mais comme sa musique n'y est pas complètement comprise ni jouée librement, on peut dire qu'il a mené sa vie de musicien en solitaire. Par ailleurs, on a cru longtemps limitées, les capacités des chanteurs lyriques coréens, mais récemment, une émergence de talents .remarquables nous a surpris, en particulier trois sopranos qui ont tenu des rôles principaux dans les opéras importants. Hong Hei-Kyung est l'une des premières cantatrice de l'Opéra Métropolitain de New York et Shin Young-oak a fait ses débuts avec des premiers rôles. Jo Sumi, à qui Herbert Von Karajan lui même a fait des éloges, a centré sa carrière en Europe. Ces trois chanteuses nous promettent un bel avenir comme leur consoeur Kim Young-mi qui a reçu un prix au concours de Pavarotti. Le baryton Hans Choi a fait son entrée dans le cercle des grands grâce au Concours international de Tchaikovsky en 1990. Le basse Philip Kang, plus actif en Allemagne, a aussi rejoint le rang des chanteurs de renommée mondiale aux côtés des plus grands au Festival Wagne,r de Bayreuth. Lors des concours internationaux où de nombreux jeunes prodiges sont légion, on a pu découvrir la jeune Hanna Chang qui a gagné le Concours international de violoncelle Rostropovich en 1994. Cette jeune virtuose est un nouvel espoir pour la musique de demain. Ces cinquante dernières années ont montré que les musiciens coréens avaient une réelle potentialité et il semble qu'ils cueillent aujourd'hui les fruits de leur persévérance. + 53
ARTISTES COREENS A L'ETRANGER
PhilipKang Les succès d'une basse coréenne sur la scène européenne Kim Min
Professeur de musique, Université Na tionale de Séoul Directeur de l'Ensemble Baroque de Séoul
B
on nombre d'amateurs de musique sait que Kang Byung· woon, rriieux connu dans la corn -rn un a uté in te rna tionale sous le nom de Philip Kang, a réalisé l'impossible en devenant une basse accomplie dans le monde fermé de l'opéra européen. Cependant la plupart des Coréens ne le connaissent pas alors qu'ils devraient tous être fiers de lui. Bien que nous vivons à l'ère de l'infor· mation, j'ai réalisé, en rédigeant cet article, combien cette information est désé· quilibrée et que celle qui concerne la cL~lture, souvent, n'atteint pas la Corée. En Europe, il est reconnu pour sa voix souple, puissante et pour sa remarquable étendue vocale. Il fit ses débuts inter· nationaux au festival de Bayreuth où, pour la première fois, un artiste asiatique était choisi pour interpréter un rôle important. De 1988 à 1992, il joua des rôles clés dans les quatre opéras de la Tétralogie de Wagner, dirigé par le célèbre chef d'orchestre et pianiste Daniel Barenboim. Les opéras de Wagner, fiertés de l'opéra allemand, sont considérés comme la synthèse de la musique dramatique allemande. Chaque opéra, d'une durée moyenne de quatre heures, est un véri· table défi tant pour les interprètes que pour le public. C'est une rare prouesse pour un chanteur asiatique que d'être reconnu comme un des grands inter· prètes de Wagner. Les artistes asiatiques, souvent de petite stature, sont voca· lement moins puissants et imposants que leurs homologues occidentaux. C'est pourquoi la plupart d'entre-eux ne sont 54
PhilipKang
En Europe, il est reconnu pour sa wix souple, puissante et pour sa remarquable étendue wcale nfit ses- débuts
internationaux au festival
de Bayreuth où, pour la premièrefois, un artiste asiatique était choisi pour
interpréter un rôle important
appelés qu'à tenir des rôles secondaires dans les productions wagnériennes. Kang est un homme plutôt imposant, aux traits généreux bien en harmonie avec sa large étendue vocale. Pendant les années où il travailla pour le festival de Bayreuth, qui f\.lt créé en 1876 par Wagner, Kang a dû surmonter de nom· breux obstacles. Il a construit sa carrière grâce à sa ténacité et son acharnement. Certaines personnes réussissent sans trop faire d'efforts, et souvent le succès ne vient pas à ceux qui travaillent d'arrache· pied. Philippe Kang n'a pas réussi aisément. Il a travaillé inlassablement pendant les 20 dernières années. Je l'ai connu, il y a 25 ans, alors qu'il était jeune diplômé du département de musique de l'Université nationale de Séoul et qu'il se préparait à partir étudier en Allemagne. Plus tard, je l'ai re0contré à Berlin et j'ai, depuis, suivi de près son cheminement. Il a étudié avec le professeur Herbert Brauer à l'Académie Nationale de Musique de Berlin et il fit ses premiers pas en tant que professionnel en 1976 ayec l'Opéra de Berlin Ouest. "Pendant des années, )ai vécu avec le handicap d'être né dans un petit pays d'Asie mais, précise-t-il, j'ai pu le sur· monter grâce à un dur labeur". Il s'est aussi produit, dans des rôles importants d'une soixantaine d'opéras, dans des villes comme Hambourg, Berlin, Munich, Lisbonne, Nice, Zurich, Paris, Bruxelles, Vienne, Madrid, Rome et Londres. Durant la saison 1993-1994, Kang s'est produit à l'Opéra Royal de Londres dans
''La flûte enchantée" de Mozart, et à Nice dans le dernier opéra composé par Wagner, "Parsifal". Il a chanté dans le "Tannhauser" de l'Opéra National de Berlin, puis dans "Rigoletto" de Verdi, enfin et de nouveau dans "La flûte enchantée" donnés par l'Opéra de Cologne. Le talent de Kang ne se limite pas à l'opéra puisqu'il étudia avec le professeur Brauer le lied et l'oratorio. Outre ses succès en tant que soliste. au festival de Bayreuth, il fut invité au festival de musique de Berkshire aux Etats-Unis et comme soliste par l'orchestre symphonique de Chicago, sans compter Paris, Rome et plusieurs autres villes européennes. Maintenant, il peut choisir ses rôles tout en travaillant à promouvoir l'opéra dans sa Corée natale. En 1995, il a commencé à enseigner à de jeunes musiciens à l'Université nationale de Séoul. "Pendant des années, je me suis esSentiellement occupé de ma carrière à
l'étranger quand j'ai soudain réalisé que 20 ans s'était déjà écoulé. Se produire, ditil, est important mais former de jeunes musiciens aussi. J'ai maintenant les capacités et l'énergie pour faire ce travail". Il est certain que l'expérience musicale et le talent artistique de Kang seront bénéfiques à la communauté musicale coréenne. Kang rencontra sa femme, la soprano Han Min-hüi, alors que tous deux interprétaient l'opéra "Eugène Onéguine" de Tchaïkovsky en 1972 à l'opéra de Oldenberg. Ils se marièrent en 1980. Durant des années, ils ont suivi le même chemin, parfois jouant dans les mêmes productions comme à l'opéra de Nuremberg. Mais depuis 1988, Hari s'est retirée de la scène pour s'occuper de ses quatre enfants. Etoile du festival de Bayreuth, Kang n'est pas seulement un grand artiste, il est aussi un père de famille dévoué, avec une foi religieuse qui le guide dans la vie de tous les jours. +
·'Se produire'; déclare Philip Kang "est irnportant mais former de jeunes rn usiciens l'est aus-si. j'ai maintenant les capacités et l'énergie pourfaire ce travail et je vais donc rn :v consacrer.''
Kang habillé en Hagen, un des rôles qu'il a chanté pendant les cinq années où il a été soliste au festival Wagner de Bayreuth (à droite);scènedecours;
en
magazine d'opéra allemand avec Kang couverture; Kang dans "La. flûte enchantée" de Mozart, dans le rôle deSarastroà Paris; Photos de Kang dans des opéras divers. 56
DIE \NlERNA1!0NAlE OPERNZEI1S0-1Rif1
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a Mandchowie, aupurd'hui foyer de deux millions de O:lréens de souche, fut habitée pendant longtemps par les descendants des tribus Jurchen qui fondèrent la dynastie Jin au XIIème 'siècle. La région, généralement appelée Chine du nord-est, est divisée en trois provinces -le Liaoning, le Jilin et le Heilongjiang- et la population coréenne est concentrée à Yonbyon (Yan bian, en 58
chinois), district autonome des Coréens, autour de YanR Cest dans les années 1860 que les Coréens commencèrent à s'établir massivement en Mandchourie, mais beaucoup s'y étaient déjà installés avant cette date Qu'est-ce qui est à l'o1igine de cet exode coréen ? La dynastie Qing, créée par les Mandchous à Pékin en 1644, ferma une large zone autom du mont Paektu (Paektu-
san, connu en Chine sous le nom de Changbaishan) et y interdit toute cultme et habitation, car l'endroit con-espondait au lieu sacré de naissance de Taizu, fondateur de l'empire Or, dans les années 1860, la péninsule coréenne fut ravagée par des années de mauvaises récoltes, notamment les provinces du Nord de Hamgyong et Pyong-an Les gens de ces provinces, dans une
Le ü.u: Ch'Onji dans le cratère du montPaektu
tentative désespérée pow- fuir la pauvreté et la famine, bravèrent les interdits des autorités chinoises. Ils traversèrent les fleuves Yalu et Tumen et pénétrèrent en Mandchourie pow- y défricher la terre Des milliers de personnes furent arrêtées et rapatiiées, mais beaucoup d'autres réussirent à y rester. Cette COffiJllunauté coréenne grossit avec tme nouvelle vague d'émigration à pattir de
1869 lorsque la péninsule coréenne fut touchée une nouvelle fois par de graves désastres naturels. Pendant trois ans, la Mandchourie vit arriver une centaine de milliers de Coréens ---60.00) de la province du P'yong-an et 26.000 de celle de Hamgyong. Ce fut une vie dure pour eux. lis exploitèrent de vastes terres non revendiquées, mais comme seuls les Chinois et les Mandchous étaient autorisés à posséder de
la terre, les Coréens fw-ent souvent réduits à être des ouvriers ag~icoles ou des tenanciers. Dans les années qui suivirent potntant, divers événements contiibuèrent à aca·oîti·e encore la population coréenne en Mandchourie En 1875, face à la menace russe, la Chine des Qing leva l'interdiction sur l'établissement de populations dans la région, dans l'intention de promouvoir la croissance de population En 1W5, le Japon obligea la 59
cour de Corée à signer un traité de protectorat permettant au gouvernement pponais d'exercer une autorité totale sur la diplomatie coréenne Cinq ans plus tard, la Corée fut annexée par le Japon Alors des milliers de Coréens quittèrent la patrie en signe de protestation ou de désespoir. Encore d'autres Coréens émigrèrent en Mandchourie à la suite du Mouvement · d'Indépendance du 1er mars 1919. Cest pour des raisons économiques que l'émigration illégale de la fin du XIXème siècle eut lieu, mais celle du début du XXème siècle fut p:ovoquée plutôt pour des raisons politiques. Bien des Coréens optèrent pour l'exil en Mandchourie plutôt . que de se soumettre aux Japonais en Corée Des archives de 1907 évaluent à 71000 la population coréenne en Mandchourie Ce . chiffre se monte à 98.000 en 1909, à lOO.CXX) en 1910, année de l'annexion coréenne par le Japon, à 200.CXX) en 1916 et à ?!J7.CXX) en 1921
DeStination de prédilection pour les patriotes La zone autour du mont Paektu est sacrée pour le peuple coréen comme pour les Mandchous, vainqueurs de la Chine des Ming et fondateurs de la dynastie Qing. C'est peut-être la raison pour laquelle les
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Kando (ci-dessous) est le port d'attoche des Coréens émigrés qui vivent et cul·
tivent la terre (à droite) comme l'ontfait leurs ancêtres; Cuisine de style coréen traditionnel (ci-dessus), enfants coréens (ci-dessus, en haut)
Coréens ont afflué vers la région en temps de oise nationale Vers la fin de la dynastie ChŒDn, la cour de Corée accorda à ses sujets la pennission provisoire de franchir les frontières du nord vers la Chine Face à la ruée des Coréens vers le Nord qui ne manqua pas de provoquer des conflits entre les Coréens et les Chinois, un magistrat coréen chargé de la partie nord de la province de Hamgyong nomma la région englobant le bassin du fleuve Tumen le long de la frontière entre la Corée et la Mandchourie, Kando Qiandao, en Chinois), littéralement "île entre les deux terres", ce qui laisse entendre qu'il s'agissait d'une sotte de zone libre Lorsque la Corée fut privée de sa souveraineté par les Japonais, la Mandchow-ie
devint une destination de choix pour les patriotes coréens qui s'engagèrent dans des luttes armées contre les Japonais le long des frontières. La région est également connue pour ses nombreuses institutions d'éducation modemes créées en vue de perpétuer la culture et l'esprit d'indépendance du peuple coréen Parmi ces institutions, il y a le SOjon Lyceum à Rongjing, fondé par des pal:!iotes dont Yi Tong-nyong et Yo Chun Cet esprit de patriotisme et d'indépendance reste intact dans la population coréenne à Yonbyon Depuis l'établissement des relations diplomatiques entre la Corée du Sud et la Chine en 1992, les touristes coréens affluent .à Shenyang, Yanji et au mont Paektu. Là, ils rencontrent une communauté issue de la troisième et de la
quatrième générations de Coréens de souche pra.tiquant encore de vieilles coutumes coréennes qu4 poLutant, ont été oubliées depuis longtemps en Corée. Comme la Corée du Nord n'est pas encore ouverte à l'extérieur, les Sud-Coréens doivent faire un voyage aller-retour en passant par Pékin et Shenyang. Pourtant, quand ils mettent le pied à Yanji, ils se voient accueillis en langue coréenne et non pas en chinois, bien que ce soit un coréen un peu démodé. Là-bas, on trouve des Coréens dans tous les coins de l'adminisu·ation locale et des marchés. Le mont Paektu
Le mont sacré Paektu se trouve au sudouest de Yan~ à cinq heures de voiture On 61
y arrive à travers des forêts de bouleaux. Le lac situé au creux du cratère volcanique au sommet du mon~ est le lac Ch'on~ IYaprès des archives anciennes, le mont Paektu entra en éruption trois fois depuis le XYlème siècle -en 1597, 1688 et 1702. La forme du cratère change tout le temps, car les éléments cisèlent sans cesse de nombreuses cimes en pierre entourant le lac Les touristes ne manquent jamais de se faire photographier près du lac devant ces cimes aux formes variées. Quelques cimes ressemblent à des pagodes, d'aÙtres à des lions ou à des tigres. Certaines rappellent les faucons sautant dans l'air. Le lac mesure 4,85 km du nord au sud et 335 km de l'est à l'ouest Sa profondeur moyenne est de 204 m Cest là que les fleuves Yalu, Tumen et Songhua prennent leur source
Yon~
vu du mont Paektu (ci-dessus,
en haut); Les chutes d'eau de Changsaek, site touristique connu au pied de la montagne (ci-dessus); Ch'Ongsan-ri, lieu de la victoire tragique des combattants coréens pour l'indépendance(à droite); Pavillon de pin (extrême droite); MonumentàPong-odong (en haut à droite) 62
Pendant la période de l'occupation japonaise, le mont Paektu servit de base à plusieurs centaines de combattants de la résistance coréenne. Qingshan-li (ou Ch'ongsan-ri selon prononciation coréenne), situé à 30 km au sud-ouest du centre du comté Helong, est le site de bataille où le leader de la résistance Hong Pomdo et ses hommes firent tomber dans une embuscade une armée japonaise forte de 3.000 soldats, dont 2.000 furent tués. Les Japonais se vengèrent avec ce qu'on appelle "le massacre de 1920" où le village avoisinant Baiyunping fut complètement détruit Après la victoire à Quinshan-li, Hong et Kim Chwa-jin, autre figure de la résistance, évacuèrent leurs forces vers Yulang, le 21 octobre Les Japonais apprirent la nouvelle et
encerclèrent le village. Pourtant, l'Armée d'indépendance réussit à se sauver, profitant de la nui~ et à se jouer de l'ennerrù une fois de plus. Fengwu-dung (Pong-o-dong en coréen), situé près d'un ravin au nord-est du réservoir Fengwu de la ville Tumen, est le site d'une autre victoire célèbre. Fengwudung est appelé à l'origine ''Pavillon Ch'omd', mais son nom fut changé lorsqu'un groupe d'érrùgrés coréens, menés par le combattant de la résistance Ch'oe Tong-jin, s'installèrent dans la zone et commencèrent à cultiver la terre Le village devint le quartier général des forces de résistance de l'Assemblée populaire coréenne de Kando (Kando Kungminhoeût). A la suite de la bataille de Sant'unja de juin 1920, les unités japonaises de patrouilles
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de frontières traversèrent le fleuve et avancèrent vers Fengwu-dung dans l'espoir d'éliminer la résistance. Mais le général Ch'oe, réLmissant ses forces avec Hong POm-do, les attira dans un piège tendu au ravin et réussit à les repousser. Fengwu-dung se situe à environ 20 km du côté sud du ravin par où 1 les Japonais tentèrent de pénétrer dans le ravin A l'épcx::rue, il y avait plusiew-s villages dispe!·sés dans les environs mais aujourd'hui le ravin se1t de réservoir et approvisionne la villedeTumen Une Histoire de Corée vivante La ville de Rongjing (Y ongjong en coréen) est 1iche en événements historiques et touche particulièrement le coeur des Coréens. A l'ouest de la ville se dresse le mont Piam (Piamsan), célèbre pour son
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"Pavillon à un pin" illustré éminemment dans le "Pionnier'', célèbre chant patriotique des temps de l'occupation japonaise. Le pavillon fut baptisé en l'honneur d'un vieux pin qui se serait dressé sur le mont. Le pavillon d'origine a disparu auprd'h~ mais la ville de Rongjing a construit, ces derniers temps, un nouveau pavillon et a planté des pins dans un effort pour attirer les touristes. En 1992, les Coréens ont dressé une stèle en commémoration de l'esprit du "Pionnier'', mais les autorités chinoises l'ont enlevée, laissant seulement son piédestal Du sommet du mont, de vastes rizières créées dans les vallées du fleuve Haeran par les émigrés des premiers temps sont clairement visibles. Les traces des émigrés coréens sont nombreuses dans la région li y a de nombreux sites historiques dont les plus connus sont le puits, le collège Taesong, le Sojon Lyceum, le pont de Rongjing, la tombe du poète coréen Yun Tong-ju et deux symboles de l'oppression japonaise: le consulat japonais et le comll)issariat de police. Le puits est importànt parce qu'il a donné son nom à la ville Rongjing signifie le "puits du dragon". Le pont de Rongjing est cher aux Coréens parce qu'il est évoqué dans le chant du "Pionnier". Le collège Taesong est connu pour avoir été une école coréenne moderne dans les années 1920. La tombe du révérend Kim Yak-yon, éminente figure du mouvement d'indépendance, se trouve au village de Changjae Kim amena un contingent de dix foyers d'émigrés coréens, de la province du Hamgyong nord à la ville chinoise de Myongdong (Mingdung en chinois) en 1899. lis achetèrent des terrains aux Chinois dans la région et commencèrent à les exploiter. Bientôt ces champs devinrent une enclave coréenne Kim était persuadé que le développement des ressources humaines est capital à l'indépendance d'un pays et ainsi créa une école pour les Coréens. li rouvrit le Sojon Lyceum, lequel avait été ouvert à Rongjing en 1% mais avait été fermé par les autorités japonaises. li le rouvrit sous le nom de Myongdong. En 1<Xl9, ce dernier fut converti en une école chrétienne consacrée à l'éducation moderne Myongdong est également connu pour
le monument dédié au révérenq_Kim, pour l'église qu'il avait construite et pour de nombreuses reliques liées au poète Yun Tong-ju Yun y naquit en 1917. li finit l'école primaire Myongdong à l'âge de 14 ans, et entra au collège Ünjin, institution chrétienne fondée par un missionnaire canadien à Rongjing. En 1941, il obtint un diplôme à la faculté Yonhùi (actuellement l'université Yonsei) à Séoul, pour ensuite aller au Japon où il fréquenta la faculté de littérature anglaise à l'université Rikkyo. En juillet 1943, à la veille de son départ pour Séoul, il fut arrêté par la police pour avoir participé aux
mouvements d'indépendance et fut condamné à deux ans de prison li mourut à la prison de Fukuoka le 28 février 1945. la tombe de Yun se trouve au cimetière de l'église East Hill près du collège Ünjin Le district autonome Yonbyon est un témoin de l'histoire de la résistance coréenne contre l'oppression japonaise et a conservé l'héritage culturel de la Corée On y trouve encore aujourd'hui beaucoup de coutumes bien mieux préservées qu'en Corée. Les ancêtres de la population coréenne de souche en Mandchourie, lorsqu'ils ont quitté feur patrie, n'ont pas oublié leurs
Yon~
a été le ténwin de
l'histoire de la résistance roréenne à l'oppression japonaise. On y
trouve de nombreux sites historiques romme le pont de
Rong;tn (ci-dessus), le monument deRong;tn, l'école primaire de Myijngdong et lerollège Taes6ng
(page de gauche, de haut en bas) Photographiedupoète Yun Tongju. (page de gauche, en bas)
racines. lis incament la fie1té et la ténacité de tous les Coréens. C'est pourquoi tant de touristes sudcoréens font un si long chemin pour se rendre à Yonbyon. Sans la division du pays, ils auraient pu prendre le train à partir de Séoul, passant par les villes nord-coréennes de Kaesong et de P'yongyang, ou longer la côte est en traversant les ports Hamhûng et de Ch'onjin. C'est encore impossible et le voyage par avion via Pékin fait aspirer encore plus les Coréens à la réunification de la patiie + 65
LA DECOUVERTE DE LA COREE
a Zonee d émn.liltairJ~éce
Un paradis pour les oiseau migrateurs Yoon Moo-boo
Professeur de biologie Université Kyunghee 66
L
a région de Ch'orwon porte les cicatrices de la douloureuse épreuve de la division territoriale de la Corée. la plaine de Ch'orwon, la plus vaste de la province de Kangwon, s'étend de part et d'autre de la ligne de démarcation. N'en déplaise à certains, mais pow· les grues, c'est un paradis Des montagnes entourent cette plaine fertile et ses coteaux. Dès la fin du mois de novembre, à l'approche .de l'hiver, des oiseaux migrateurs rares appartenant aux espèces les plus variées y séfJurnent jusqu'à
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la mi-mars. Survolant les plaines par bande de deux ou trois, ou par colonie de plusieurs centaines, ces oiseaux sont les seules créatures à pouvoir traverser en toute liberté la Zone démilitarisée qui sépare les deux Corées. A peu près à la même époque, Ch'orwon accueille d'autres types de visiteurs: des photographes amateurs et des ornithologues qui viennent observer des oiseaux migrateurs rares comme les grues de Mandchourie, les grues blanches et certaines espèces de la famille des accipitridés.
la gme de Mandchowie, oiseau protégé
et qualifié de "trésor naturel" en Corée, figure dans la liste internationale des oiseaux migrateurs en danger. La grue blanche et le vautour moine, également ''trésors naturels", sont visibles uniquement près de la Zone démilitarisée Leur tiennent compagnie, des petits oiseaux de montagne tels que le bruant rustique, la pie-grièche grise chinoise, le diamant à longue queue, le pinson rose de Pallas et le bruant des roseaux japonais, qui passent l'automne et l'hiver dans cette réserve naturelle, faisant de Ch'o1won le meilleur site d'observation 67
de l'avifalU1e en Corée Depuis quelques temps, des membres de la famille des ansérines et les canards sauvages que l'on trouve habituellement à l'embouchure du fleuve Naktong à Pusan et dans le réservoir de Chlll1aill à Ch'angwon, province du Kyongsang du Sud, migrent à Ch'orwon au moment de la saison froide. Ce sont ainsi près de 2CXXl de ces oiseaux qui viennent trouver refuge dans la Zone démilitarisée et les régions agricoles avoisinantes de la grande plaine de Ch'orwon · Les rizières, les champs secs, les arbustes qui poussent près des cours d'eau, les champs de roseaux et de miscanthus purpurascens offrent des habitats appropriés à nos petits hôtes d'hiver. Les · arbustes et les champs de roseaux sont particulièrement recherchés parce qu'ils fournissent lll1 abri sûr contre les prédateurs · tels que les busards, les aigles, les belettes et les chats sauvages et qu'ils pourvoient en abondance en libellules comestibles. Ils constituent une aire d'hivernage idéale
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La Zone démilitarisée abrite les meilleurs et les plus anciens habitats naturels préservés au monde. L'abondance en ressources alimentaires en fait un habitat idéal tant pour les oiseaux que pour les autres animaux
Grues de Mandchourie survolant la Zone démUitarisé(àgaucheetà draite)chaque hiver, 80à lOOdeœs oiseaux en danger viennent trouver rtifugeaux alentours de
·: ra lignededéman:ation.
principalement parce qu'ils ne sont pas fréquentés par l'homme. La grue de Mandchourie La Zone démilitarisée de la péninsule coréenne offre le meilleur et le plus ancien des habitats naturels préservés du monde. De par se.s disponibilités alimentaires, elle représente lll1 habitat idéal pour les oiseaux et les autres créatures de la falll1e. Au fil de leurs années de recherches, les ornithologues ont recensé plus de 150 sortes d'oiseaux-hivernants, migrateurs de passage, visiteurs d'été et population fixe, le long de la ligne de démarcation. Celle-ci s'étend sur 240 km, traversant la péninsule d'est en ouest, de l'île de Paengnyong au large de la côte occidentale, aux régions de Kimp'o, Munsan, Ch'orwon et Yanggu près du littoral ociental. Les oies et les canards sont les visiteurs les plus assidus. Suivent des oiseaux appartenant aux familles des falconidés, des muscicapidés, des fringillidés, des motacillidés et des ardéidés.
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L'oiseau le plus connu est la grue de Mandchourie qui est menacée. C'est un échassier qui est considéré comme le plus élégant de la famille des grues et qui suscite l'intérêt des ornithologues du monde entier. Un grand nombre de grues de Mandchowie gagnent cette région de "no man's land" en longeant la ligne de démarcation pendant l'hiver. Chaque année, elles sont entre 80 et 100 à venir du nord, du lac Ozero Khanka en Sibéiie et des bassins du fleuve Amour en Chine Les grues de Mandchourie passent l'hiver près des régions ag~icoles limitrophes de la Zone démilitarisée de Ch'orwon. On en trouve dans les rizières qui s'étendent autour de la gare désaffectée de Ch'otwon, à Wolchng-r~ à Sapsu-ri et dans le réservoir 70
de Kangsan Elles hivernent en groupe, se nourrissant d'épis de riz et d'eau Bien que Ch'orwon soit l'une des régions les plus froides de Corée, ces échassiers parviennent à smvivre jusqu'à la belle saison du fait qu'ils ne pondent pas pendant l'hiver. N'ayant pas de "becs" supplémentaires à nourrir, ils peuvent se contenter d'un régime alimentaire moins tiche Les g~ues blanches sont plus nombreuses que celles ·de Mandchourie Chaque année, ce sont environ 200 d'entre elles qui élisent Ch'orwon comme quartier d'hiver, se nourrissant d'épis de riz et côtoyant les g~·ues de Mandchourie On remarque depuis deux ou trois ans la présence à Ch'otwon de vautours moines, connus comme oiseaux de la victoire On
les voit, en g~·oupe de dix ou plus, près des champs et à l'intérieur de la Zone démilitarisée, se repaissant de ca da vres d'animaux tels que les chevreuils et les lapins. L'aigle impérial, qui fait pattie de la famille des accipitridés, les rares buses pattues, les buses variables et les piesgrièches grises apparaissent également en hivernage nest intéressant de voir des oies à front blanc et de5 canards sauvages, qui vivent généralement à l'embouchure du fleuve Naktong et dans le réservoir de Chunam, migrer vers le réservoir de Kangsan, à Ch'otwon Une vingtaine de vautoms moines, l'un des plus grands oiseaux du monde, a été localisée uniquement dans la région de PanmunjOm, le long de la ligne de trêve.
Grues se rwurrissant de paille de riz dans la Zone démilitarisée
Pour l'avifaune, la présence humaine est synonyme d'urbanisation, de pollution et d'autres périls. Non seulement les espèces en danger, mais aussi les populations résidentes et les oiseaux migrateurs vont trouver refuge ailleurs parce que les hommes les privent de leur habitat et de leurs ressources alimentaires.
protection des oiseaux menacés L'hiver dernier, une grue blanche du parc de Yang-in Farmland a pondu deux oeufs. Ceux-ci ont été incubés artificiellement et ont donné deux grues qui ont fait l'objet de soins pa.tticuliers. Ayant atteint un certain stade de croissance, elles ont été transpor,tées en camion au réservoir de Kangch'on, près de Ch'orwon, où elles ont
été mises en liberté au milieu de centaines de leurs congénères qui y vivent. Cependa~ elles ne se sont pas mélangées aux autres. Elles suivaient les hommes et les véhicules de passage, et l'une d'elles a été écrasée par un camion Elle n'a pas survém L'autre a été rattrapée et ramenée à Yong-in pour une protection en captivité. Elevées dans l'environnement protégé qu'est un zoo, elles ne savaient pas vivre à l'état sauvage Elles étaient incapables de subvenir à leurs besoins parce qu'elles étaient habituées à ce que l'homme les nourrissent La protection artificielle des oiseaux menacés, tels que la grue de Mandchourie, les grues blanches et les vautours moines, ne favorise pas forcément la croissance de leur population ou de leur nombre, lesquels
migreront vers un autre site l'année suivante. C'est en leur donnant un environnement naturel non-pollué et vierge qu'on pourra vraiment les protéger. De nos jours, l'habitat de ces oiseaux sauvages en danger est menacé pa.t· l'urbanisation. Les activités humaines telles que l'agriculture et la construction de routes et de bâtiments dans la perspective de la réunification des deux Corées transforment la région de Ch'orwon en une peau de chagrin qui se rétrécit de jour en jour. Si la préservation de l'environnement naturel s'accompagne d'efforts pour offrir à ces visiteurs d'hiver assez de nourriture pour leur petmett.re de survivre pendant la saison froide, Ch'orwon restera le paradis de cette gent ailée de Corée + 71
GROS PLAN
<*"'tt '95 KWANGJU BIENNALE
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Sung Woo-je
Journaliste au Sisa journal
a ville de Kwangju est plus animée que jamais. Dans le sillage du mo4vement prodémocratique de 1980, elle a établi sa réputation de "Mecque de la démocratie". Cette cité a aidé la nation coréenne à sortir d'un des moments les plus sombres de son histoire en la guidant vers la démocratie. Aujourd'hui, Kwangju fait à nouveau parler d'elle. D'une part, la décision du procureur général de la République de ne
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pas poursuivre les responsables de la violente répression qui suivit le massacre de 1980 y a soulevé une tempête d'indignation et de protestations. D'autre part, Kwangju a accueilli l'une d ~ - plus grandes manifestations artistiques que la Corée ait jamais connue du 20 septembre au 20 novembre dernier. Dans l'exposition principale, consacrée à l'art contemporain, étaient présents pas moins de 91 artistes venus de 50 pays. Mais il faut tenir compte aussi des six autres
expositions. Trois, respectivement intitulées: 'l'expression picturale des lettrés orientaux", "Les caractéristiques de l'art moderne coréen", "L'art coréen contemporain", ont permis de faire découvrir les arts de la Corée d'hier et d'aujourd'hui. Deux autres grandes expositions ont exploré les relations de l'art avec la politique. L'une 'l'art comme témoignage" a examiné le rôle et les rapports que l'art a entretenu avec les soulèvements qui marquèrent notre siècle depuis 1900.
__e Kwangju 6utre, "Kwangju, l'esprit de Mai", a tenté de rendre compte des implications politiques et sociales du mouverpent de résistance du 18 mai 1980. Dans le même temps, une autre exposition avait été organisée au cimetière d~ Mangwol en hommage aux victimes du massacre de 1980. Enfin, la dernière grande exposition, qui nécessita le plus de préparation, fut dirigée par Nam-june Paik, coréen d'origine, l'un des plus fameux artistes de vidéo de ce
temps. Sous le titre 'l'art infographique", il plein air du parc Chungwoe. Dans ces avait réuni les noms les plus célèbres lieux se sont produits quotidiennement représentatif des domaines de l'art des troupes de danse et des groupes folkloriques aussi bien locaux qu'ininteractif, du multimédia, de la réalité virtuelle, voire du réseau internet Nous ne ternationaux. Au total, 12000 participants citerons que l'américain Scott Fischer, venus de 30 pays ont offert aux spectateurs une éblouissante fête de la culture. ancien de la Nasa, aujourd'hui réputé pour ses oeuvres en rapport avec la réalité Enfin, à la Biennale sont venues se virtuelle. greffer plusieurs autres manifestations que Il fallait aussi compter avec les · ce soit le "festival d'Art unifié", organisé manifestations organisées au Centre d'art avec le soutien de la communauté des et de culture de la ville et au théâtre en artistes de K.wangju, ou bien des défilés de
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prêt-à-porter. Ainsi la Biennale, de simple exposition d'arts visuels, est devenue un véritable festival regroupant toutes sortes de formes artistiques. La cité de Kwangju, symbole de la résistance, est donc maintenant et plus que jamais une "Cité des arts". Le thème central de la Biennale, formulé par le slogan "Au-delà des frontières", reflète l'espoir du comité organisateur de voir l'art permettre de dépasser les divisions idéologiques, de !lationalités, de religions, de races et de cultures, et de voir aussi chaque être humain devenir citoyen du monde. La Biennale de Kwangju est la première du genré dans la région AsiePacifique. Son thème, qui nous incite à aller au-delà de nos différences, est d'autant plus fort que la Corée, pays divisé, est plus que sensible aux conflits et aux rivalités régionales.
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On notera que la plupart des artistes coréens, présents à l'exposition internationale d'art contemporain, ont essayé de rendre compte des tensions et des conflits qui existent dans la société coréenne et qu'ils ont offert par leurs travaux une vision de paix et de réconciliation. Cela fut particulièrement évident dans les oeuvres de ceux qui participèrent au mouvement artistique Minjung de 1980 (mouvement artistique du "peuple"). Ainsi Hong Sung-dam, qui utilisa son art pour protester contre la dictature militaire, avait choisi de présenter une nouvelle vision de son engagement en rassemblant 50 reproductions d'une de ses anciennes séries intitulée Mai retravaillées à l'aide de la vidéo. Un prix spécial a été décerné â Kim Jung-heun pour sa toile "Le snack-bar de Disney à PanmunjOm", allégorie ayant trait
à la Corée après 50 ans de division Quant à Lim Ok-sang, il tenta d'apporter des réponses à la question de savoir quel est le rôle des intellectuels coréens depuis 1990. Une stratégie düférente
La Biennale de Kwangju, comme le reflète la liste des participants, a tenté de se démarquer tant des biennales du monde développé que des biennales qui se tiennent dans des villes du tiers monde comme La Havane ou Sao Paulo, ces dernières ayant avant tout une programmation régionale et plus précisément latina-américaine. A Kwangju, des artistes de tous les continents étaient présents. Bien que la ville, en terme de développement, ne soit pas à la hauteur des villes d'Europe de l'Oues~ la Biennale avait l'envergure et l'ambition d'une manifestation digne d'un pays développé.
. Deux points essentiels la démarque de la célèbre Biennale de Venise qui célébrait cette année son centième anniversaire. Le premier fut de ne pas reprendre la notion de pavillon national, ce qui a permis aux artistes des nations du tiers monde et à ceux des pays développés d'exposer dans 'tes mêmes conditions. Il faut aussi souligner que les artistes d'Europe de l'Est, du M_oyen-Orient, d'Afrique, d'Asie du sudest, d'Amérique latine et des autres régions du tiers monde ont pu être . mis en présence d'artistes des pays développés sur un même pied d'égalité en terme de talent, de mérite et non ~e force ou d'appartenance nationale. La seconde grande différence avec la Biennale de Venise repose sur le fait que la commission a sélectionné un groupe relativement jeune d'exposants, la plupart dans leur trentième ou quarantième
année. Pour les jeunes artistes, la Biennale de Kwangju a comblé, ainsi, le vide créé par l'absence d'Aperto cette année à Verùse. La moyenne d'âge des artistes participants à l'exposition principale était de 37 ans. La Biennale ne se veut donc pas une vitrine de talents reconnus, même si les oeuvres de maîtres comme George Lappas (Grèce), Chuck Close (USA), Jeff Wall (Canada), Fang Li-jun (Chine), Zofia Kulik (Pologne), étaient aussi présentées. La crise actuelle du marché de l'art ne facilite pas, comme par le passé, l'organisation des manifestations internationales. Souvent des impératifs économiques dictent la sélection des artistes et des lauréats. La Biennale de Kwangju a voulu rompre avec ce phénomène en se focalisant avant tout sur une certaine nouveauté. Les travaux des artistes du tiers ~ monde ont reflété surtout les carac~ téristiques artistiques de leur région. a_ tf Alors que l~s artistes africains rendaient compte, par l'utilisation de formes ~ narratives, du passé et du présent de leur pays, ainsi que des tensions existant entre l'individu et la société, ceux d'Océanie tendaient à créer une nouvelle culture afin de dépasser le fossé qui existe entre l'Europe et les cultures indigènes. Si les oeuvres des artistes asiatiques paraissaient avoir dépassé l'opposition existant entre l'occident et les civilisations traditionnelles de l'Orient, celles des Artistes d'Europe de l'Est tournaient en dérision les mouvements et les formes politiques déshumarùsés. Quant aux artistes latino-américains, ils ont puisé dans leur riche imagination et leurs traditions pour faire des observations sur la civilisation, la politique, la civilisation, le sexe, le corps et la mythologie.
tallations". Seulement 10 o/o des oeuvres exposées étaient à deux dimensions, ce qui reflète le changement décisif de l'art contemporain vers l'installation et son incroyable potentiel Les travaux vus à Kwangju n'étaient pas tant des exercices formels que des commentaires, concrets et puissants, portant sur la politique et la société. Sur le thème "Au-delà des frontières", la plupart des artistes ont choisi l'installation comme nouvelle manière de dialoguer mais aussi pour son aptitude à traduire une grande variété de thèmes et parce qu'elle permet de jouer avec un grand nombre de matériaux Cette prédominance des "installations" reflète une tendance mondiale. Pour une part, cela' tient à la notion de compétition rattachée généralement aux biennales. On remarquera que les installations sont
!
L'exposition "L'art infographique" très populaire de Paik Namjune(ci-dessus);
Le forum des jeunes artistes.
La Biennale de Kwangju a attiré l'attention parce qu'elle a été un véritable forum pour les jeunes artistes qui sont tentés par l'aventure et l'expérimentation comme le montraient de nombreux travaux, la plupart en terme "d'ins-
Alexis Leyva Kcho, son oeuvre Para olvidar (Pour oublier) qui a reçu le premier prix(àgauche); Oeuvres de George Lappas, Grèce,
Jeff Wal~
Cam:ula, et de
WoJae-ji~
Corée
(page de gauche, de haut en bas)
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sensées retenir plus volontiers l'attention des spectateurs qui, en un laps de temps très court, doivent découvrir un grand nombre d'oeuvres. Les artistes ont opté pour les "installations" dans l'espoir de capter l'attention, voire de produire une forte impression sur le spectateur, mais c'est aussi pour les créateurs le moyen d'exprimer avec force leur message. Le grand prix a été attribué à l'artiste cubain Alexis Leyva Kcho. Quand ce dernier a quitté son pays, il n'avait qu'une vague conception de son projet. Son oeuvre "Pour oublier", est un exemple extrême d'installatiçm qui comprend des bouteilles de bière rassemblées autour d'un vieux bateau en bois du lac . Tamyang, lac situé près de Kwangju Cet ensemble évoque la condition de 'ceux qui ont quitté Cuba et de ceux qui ont dû y
Un groupe relatiœment jeune d'exposants a été sélectionné par la ccmuni.'I.Sion. Pour cesjeunes
artistes tentés par l'aventure et l'expérimentation. la Biennale de Kwangju a comblé le vide créé
par tahsc>nce d'AfJe11o cette année à Venise La Biennale de
Kua.ngju a attiré l'attention parce qu'elle a été un Léritahle f orum pour les jeunes artistes.
L'exposition principale de la Biennale de Kwangju. 76
demeurer. Avec cette Biennale, la Corée peut avoir l'espoir de devenir un centre mondial· de l'art La Biennale de Kwangju est aussi le premier événement de cette envergure qui a lieu hors de Séoul depuis trente ans et cela grâce à la remise en place du système d'autonomie locale. En abritant cette manifestation culturelle internationale, Kwangju a démontré qu'on pouvait aller à l'encontre de la centralisation à Séoul du politique, des affaires et de la culture. Certes la Biennale a quelque peu souffert d'un temps de préparation très court (10 mois) et d'un manque d'expérience. Mais on peut considérer que ce fut un succès comme l'indique la présence, en un mois, d'un peu plus d'un million de visiteurs. •
ACTUALITES '
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Le Cinéma coréen d'aujourd'hui Chang Suk-yong
Critique cinématographique
es dernieres années, on a vu la fréquentation des salles de cinéma présentant des films coréens augmenter de façon significative. Il s'agit vraiment d'une bonne nouvelle car cela prouve que le cinéma coréen s'améliore En fait, ce qui semble avoir poussé les Coréens à sortir au cinéma est la diversité des films produits par des cinéastes de plus en plus professionnels. Pourtant, les spectateurs espèrent encore davantage des films coréens. rannée dernière, l'industrie cinématographique coréenne a été marquée par les succès de jeunes réalisateurs dynamiques alors que les films des réalisateurs plus connus ont été boudés par le public et les critiques. Les films à sujets légers, qui ont remporté plus de succès que les films graves et les longs métrages destinés à la "génération X", c'est-à-dire aux 15-20 ans, ont été très à la mode. Presque tous les prix ont été décernés à des films de qualité ou expérimentaux Se rendant compte de l'importance de produire de bons films, surtout depuis que le marché du cinéma s'ouvre et qu'il y a la télévision par câble, l'industrie cinématographique coréenne a essayé de choisir des sujets variés, comiques, politiques, idéologiques, de science-fiction, etc. Le nombre des compagnies de . production indépendante a augmenté Selon le comité de censure, 65 films coréens, dont deux dessins animés, ont été produits en 1994. 29 d'entre eux ont été censurés. La production de films coréens est encore en baisse alors que 382 films étrangers ont été soumis à la censure du comité Parmi les films coréens produits en
1994, on peut citer en particulier: 'Je veux ce qui m'est interdit" (Nanun somanghanda. Nege kumjidoen kosul.),
"Un voyage de hasard" ( Uyonban yohaeng), "Deux Flics" ( T'ukapsu), "Whimory", ''!:histoire de deux femmes" (Tu yoj;l iyagt), ''!:Amour absolu" (Ch6ltae sarn~, ''!:homme de 49 jours" ( 49 ilui . namja), ''Evaporation" (ChUng-ba[), "Au dehors du monde" (Saesang pakkuro), "Deux vies pour Hollywood" (Holiudu kidudui saengae), 'Kumiho", "La vie en rose"( Changmibit insae~, ''Règles du jeu" (Keimui p6pchik), ''Taebaek sanmaek'', 'Je vais m'enVoyer à toi" (Noege narLil ponaenda), "La mouette bleue" (Pullushig')[), ''Le pirate'' (Haepk), "Tuer sa femme" (Manura cbugigl), "Le jeune homme" (Ch6lmun namja), ''Les ongles" (Y5nfop).
Comparé aux 96 films produits en 1992, la production est en baisse mais comparé aux 64 films de 1993, elle se maintient il est pourtant à noter qu'un plus grand nombre de personnes sont allées voir des films étrangers en 1994. Ains~ pour survivre face aux succès remportés par les films étrangers, les producteurs coréens ont choisi des sujets controversés ou commerciaux, ce qui leur a plutôt bien réussi Les spectateurs ayant 30 ou 40 ans ont été spécialement visés par les producteurs ces dernières années. La distinction entre les différents genres cinématographiques est devenue plus nette, les sujets plus variés et l'éventail des spectateurs plus large. Les films se sont montrés plus aventureux et moins conventionnels et décrivent plus directement le sexe et la violence Le point de vue idéologique des réalisateurs est montré plus clairement sur
l'image, l'utilisation de techniques "hollywoodiennes'' se généralise. La nudité est de plus en plus fréquente et les réalisateurs ne craignent plus que les films érotiques soient taxés de commerciaux Les jeunes cinéastes ]llflent directement de problèmes sociaux et traitent des événements du passé d'un point de vue actuel et ont essayé de créer un nouvel esthétisme Œventail des !Jl=rsonnages s'est également élargi avec maintenant des criminels, des activistes, des guérilleros, des dirigeants de mouvements populaires ainsi que des moines apostats. Les producteurs dépensent plus d'argent pour la promotion des films et les droits reçus par la vente de vidéo sont compris dans le calcul des coüts de production. Des personnages considérés comme négatifs, comme les voyous, se sont retrouvés à l'écran dans la peau de personnages sympathiques, certains films ont créé des modes et les producteurs sont devenus plus forts dans le domaine du marketing. il y a aussi quelques jeunes réalisateurs audacieux qui cherchent à faire des films pour toucher des spectateurs pàtentiels mais leur stratégie de base n'est pas très différente de leurs anciens. Leurs films changent urùquement dans leur form~ au niveau esthétique et du langage En 1994, plusieurs cinéastes ont échangé leur travail avec celui de leurs collaborateurs: des réalisateurs ont joué, des cameramen ont réalisé des films, des critiques ont écrit des scénarios, des acteurs ont dirigé d'autres acteurs et des poètes ont écrit des critiques... En 1994, les films décrivant la coréanité furent mieux accueillis à l'étranger qu'en Corée. Bien que délaissés par le public coréen, ces films ont pourtant eu besoin 77
, ACTUALITES
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qui ont servi d'esclaves sexuelles aux de l'aide financière des pouvoirs public. Beaucoup de chaebol, conglomérats soldats japonais au cours de la secohde coréens, ont investi clans la production de guerre mondiale films mais en s'intéressant uniquement à la Par contre, 'thibiscus fleurissant' a été production de vidéos. très décevant au niveau du sujet traité Voici maintenant une appréciation de unilatérem~ malgré le fait qu'au point l'intérêt des spectateurs pour leurs films de vue technique, il soit au top niveau faite à partir du nombre d'entrées clans les comme l'annonçait la publicité lors de l'avant-première. 'Thiver avec un piano" salles de cinéma en 1994 et en 1995. Ces (P'ianoga ittnun ky6u!) de Cho Kumchiffres sont sujet à caution car ils ont été fournis par la Fédération des propriétaires hwan s'est fait remarqué, quant à lu~ par sa fraîcheur. Ce long métrage raconte de salles de cinéma et par diverses l'histoire d'un amour triangulaire un peu compagnies de proçiuction démodé entre deux soeurs et un homme, "Deux Flics" est en tête du palmarès avec quelques scènes remarquables. avec 860.000 entrées en 1994. Viennent "Il n'y a pas de sorties de secours" ensuite clans l'ordre, ')e vais m'envoyer à toi", "Au dehors du monde", " Taebaek (Pisanggunun opta) de Kim yong-bin est saomaek", '1a mouette bleue", "Kumiho", sorti clans peu de salles après avoir connu d'énormes difficultés financières. Ce film ')e veux aller sur cette île" (Ku sorne kagosipda), "Règles du jeu", "La vie en présente pas mal de scènes accrocheuses et drôles, mais c'est aussi un film rose". Pendant la première moitié de 1995, d'avertissement contre le compottement "Docteur Bong'' (Takra pon{i) est le film de la ' ~énratio X" d'Apkujong-dong, qui a été le plus vu en salle avec 382(XX) quartier qu'elle fréquente ''Docteur Bong'' entrées. Suivent, "Le terroriste" ( T'eroest une comédie romantique sur un doc"L'hibiscus fleurissant" teur playboy. Le film d'action ''traditionnel" risu t'u), (Mugunhwa kkotchi p 'i6ttsumnida), '1e sur deux frères très unis '1e terroriste", s'est bien défendu sur le marché. rautre long jeune homme" (Ch6lmun namja), "Maman a un petit-ami" (6mma ege aeini métrage sur le mode de vie de la saeng-gyotta), "Les hommes souffrent" génération X, '1e jeune homme" a reçu un (Namja nun kwoe-rowo), '1e crépuscule accueil mérité des critiques. "301,302" tombe dans le néon" (Neonsokuro raconte la vie de deux jeunes filles, l'une, anorexique, l'a utre, boulimique. Des 302", ''Chère Keumhong'' noulchida), "30~ (Kumhong-a Kumhong-a). Lorsque l'on . complots politiques sont le sujet de compare ces chiffres avec ceux de 1994, on 'Tempire éternel" qui est un film réalisé remarque que les films coréens ont plus par Pak Chong-won, l'un des réalisateurs de succès. les plus prometteurs de Corée "Docteur Bong", "Le terroriste" et "Le rannée 1995 marque le 75ème annijeune homme" ont connu un réel succès versaire du cinéma coréen, le SOème qui montre que même des films qui ne anniversaire de la Libération du pays et le sont pas "artistiques" peuvent intéresser le 30ème anniversaire de la création de public. l'Association coréenne des critiques Un autre film a attiré patticulièrement cinéastes. A l'occasion de ces multiples l'attention: il s'agit d'un documentaire commémorations, de sérieuses discussions intitulé "A voix basse" (Najün mokson), ont eu lieu pour savoir comment obtenir réalisé par la réalisatrice Pyon Yong-ju, a des statistiques exactes. Par exemple, on a été passé pour la première fois clans une parlé du problème de l'exactitude de la salle commerciale à Séoul. Ce documendate de délibération du comité. de censure, taire traite, de façon directe, un sujet de celle de mise en circulation, ainsi que de "actuel" sur les femmes dites de "confort" celle du nombre des spectateurs. Beau-
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coup doutent de la crédibilité des chiffres avancés par les compagnies de production cinématographiques. D'après un sondage effectué auprès d'adolescents, 32,8% ont répondu n'avoir vu aucun film pendant l'année; 73,6% d'entre eux préféraient les films américains, 18,4% les films chinois ou de Hongkong, 4,5Wo les films coréens, 3~% les films européens, et 0,4% les films asiatiques. ')0>/o des personnes intetTogées ont déclaré préférer les films policiers ou d'aventure, 20Yo les films d'amour et 14% les films de mystère L'industrie du film coréen connaît encore. des difficultés mais est plutôt en bonne santé. "Un après-midi de chien" (Kaerptün nalui ohü) réalisé par Yi Minyong a reçu un bon accueil en attirant déjà près de 300.(XX) spectateurs clans les· salles. 'Qui est-ce qui me rend fou?' (Nug;t narül mich'ige hanunga) se défend déjà assez bien '1e dragueur" (Kkorich'inun narnj:l) réalisé par Ho Tong-u a l'air de plaire aux spectateurs avec des scènes vivantes et fraîches. ''Va toute seule comme la corne du rhinocéros r• (Musoui ppulch'o-rom honjasO kara) de 0 Pyong-ch'oL '1e papa tonton" (Acchi apJXl) de Shin Sung-su, '1e tireur" (Ch'ongjapl) de Kim Üi-sük et '1e coiffeur" (Hairdresser) de Choe Chin-su sont des oeuvres qui ne peuvent pas laisser les spectateurs indifférents. De plus en plus de producteurs ont tendance à s'adapter au goût du public et investissent plutôt maintenant clans des films commerciaux grand public secondés par de jeunes réalisateurs auxquels le genre commercial convient très bien "L'anémone" (Malmijal), un long métrage très artistique de Hu Hyon-mok qu'il a réalisé à l'âge de 70 ans n'a malheureusement pas été bien accueilli par le public. Pourtan~ 'Tapocalypse de la marine" (Haebyong Mukchirok) de Yi Pyong-ju qui déait la vie des marins et le dessin animé '1e faucon rouge" (Pu/kun mae) témoigne clairement que le cinéma est bien vivant et solidement "enraciné". On peut voir que le cinéma ne se porte
ACTUALITES
Son-u intitulé "Le cinéma de la rue: le nettoyage d'un film coréen" (Kilwiui y5nghwa, "Han-guk y5nghwa sshitkkim'). Ce documentaire de 53 minutes a, en ef~ été présenté au Festival de Cannes pour le 60ème anniversaire du cinéma où 17 . cinéastes du monde entier étaient présents L'invitation du cinéaste coréen Chang montre combien l'industrie cinématographique coréenne est reconnue sur le plan mondial et est non négligeable pour les producteurs étrangers. Alors que les cinéastes ne cessent de s'efforcer de produire de meilleurs films, les membres des différents comités cinématographiques sont très critiqués pour avoir négligé le soutien qu'ils se doivent d'apporter à cette industrie et de ne.s'être intéressé qu'à l'exercice de leur pouvoir. En terme de volume de production de films, la Corée se place au lOème rang mondial li serait bon d'éduquer le jeune public dès l'école primaire concernant les différents media de l'image en formant des enseignants et en mettant à leur disposition le matériel nécessaire. Car, au niveau luo-atif, pour obtenir davantage de devises étrangères, il semble que cet enseignement soit plus utile que l'exportation de nombreuses voitures. C'est avec cette idée en tête, qu'une vingtaine de grandes compagnies se sont lancées dans l'industrie cinématographique. Leur apport en capitaux ainsi que les efforts des pouvoirs publics concernant l'équipement et le recyclage des cinéastes va certainement contribuer à rehaus.ser le niveau du cinéma coréen. Les pouvoirs publics ont quasiment ignoré l'existence des départements d'études cinématographiques des universités et ce n'est que depuis une période récente qu'on se rend compte de leur importance et de la forte valeur ajoutée qu'apporte l'industrie cinématographique. L'industrie cinématographique coréenne a besoin d'être soutenue par les pouvoirs publics, d'investis.sements privés
Scènes tirées defilms coréens sortis en 1994 et en 1995
(de haut en bas et de gauche à droite)"Taebaek sanmaek", "Deux Flics", "Un après-midi de chien", "Docteur Bong" et"Chère Kewnhong".
massifs, d'allocations et de subventions pour les cinéastes, d'être exemptée des taxes pour tout investis.sement en matériel et d'une loi permettant une promotion plus large. Il est urgent de trouver un compromis sur l'utilisation des profits tirés de cette industrie qui devraient y être réinvestis.
Les films commerciaux ne marchent que s'il existe aus.si des films a1tistiques. Les cinéastes dits "commerciaux" doivent donc beaucoup à leurs collègues artistes. Mais les Coréens attendent le jour où les cinéastes coréens seront enfin capables de produire des films de la trempe des films étrangers. • 79
ACTUALITES
LES TAMBOURS DE LA PAIX: L'ORCHESTRE DE KBS JOUE A L'ONU
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n cette année où l'on célèbre à la fois le 50ème alll1iversaire de la libération de la Corée et de la création des Nations-Unies, l'Orchestre Sy~phonique de la KBS est devenu le premier orchestre coréen -et le second d'Asie- à se produire au siège de l'ONU à New-York, le 5 novembre lors d'un concert de gala, sous la direction du chef d'orchestre Chung Myung-whun. Cette année marquait aussi le 50ème anniversaire de la naissance du premier orchestre symphonique en Corée et l'Orchestre de la KBS a offert un message de paix devant un parterre composé de quelques 2.000
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Lee Sang-man Critique musical
diplomates et membres de l'organisation internationale La Corée du Sud doit beaucoup aux Nations-Unies. La République de Corée fut établie sous l'égide des Nations-Unies et lorsque la guerre de Corée éclata trois ans plus tard, les forces alliées sous les couleurs de l'ONU se battirent contre les troupes communistes. La Corée d'après-guerre ne survécut économiquement que grâce à l'aide des pays membres de l'ONU. Aujourd'hui, la Corée du Sud est devenue un pays donateur, capable d'organiser des concerts pour la paix dans le monde La création en 1945 du premier or-
chestre symphonique en Corée O'Orchestre Symphonique de Kory6) a tenu du mirade eu égard à la situation à l'époque Au cours des 50 années qui séparent la fin du XIXème siècle de la libération en 1945, la Corée s'était ouverte sur la musique occidentale. Le premier orchestre coréen naquit après un entramement rigoureux. L'Orchestre de Kory6 devint un lieu privilégié pour la tnusique et les arts coréens. Mais beaucoup de musiciens disparurent pendant la guerre de Corée et de nombreuses salles de concerts furent détruites. Les temps étaient difficiles, pourtant les Coréens n'abandonnèrent
ACTUALITES
jamais leur amour pour le chant et essayèrent d'adoucir leur peine en se plongeant dans la musique Après les turbulences et les ravages de la guerre, beaucoup de musiciens qui avaient combattu au front se rassemblèrent pour . créer l'Orchestre de la KBS (Korean Broadcasting System) en 1956. Cet ensemble a survécU à de nombreuses crises et il est aupurd'hui le plus vieil orchestre de Corée Beaucoup de musiciens nés après 1945 ont été formés à l'étranger et sont devenus des interprètes de niveau international. Avec la reconnaissance internationale de leur talents, les musiciens coréens sont aupurd'hui au niveau de ceux d1sraël Le pur de la Libération, le 15 août, les mt;illeurs musiciens coréens, venant des quatre coins du monde, se sont retrouvés pour un grand concert de commémoration et c'est là qu'est née Mée de ce concert aux Nations-Unies. La plupart des membres de
Le dernier morceau au programme de la soirée fut interprété par le groupe de Samulnori de Kang]un -il qui s'était joint à l'Orchestre de la KBS pour le plus grand plaisir des spectateurs. Associant les musiques orientales et occidentales, ce concert fut des plus symboliques dans ce cadre de l'ONU
l'Orchestre de la KB5 et les solistes qui ont pué ce pur-là sont nés après la libération de 1945. Sous la baguette de Chung Myungwhun, l'Orchestre était un peu nerveux, mais sa représentation fut pleine d'énergie et d'esprit. Parmi tous les pays nonoccidentaux, la Corée et le Japon sont considérés comme ceux où l'essence de la musique classique occidentale est préservée et développée de la façon la plus authentique En réalité a uprd ' hu~ l'héritage de la musique classique occidentale est probablement mieux conservé dans les pays orientaux. Le concert aux Nations-Unies s'est ouvert par trois concertos de Beethoven pour piano, violon et violoncelle, interprétés par Chung Myung-whun au piano, sa soeur Chung Myung-wha au violoncelle et le violoniste Kim Young-uck Les spectateurs furent envoûtés et les applaudissements ne tarissaient pas. Kim
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ACTUALITES
Young-uck -qui avait pris la place de Chung Kyung-wha, la troisième intetprète du Ttio Chung- a aputé de la profondem et de la vie au récital Mettant en valeur la beauté des voix coréennes, Jo Sumi chanta un air d'opéra et pendant l'ouverture de Tchaïkovski de Roméo et juliette, Chung Myung-whun prouva son immense connaissance et sa compréhension de la musique Le dernier morceau au programme de la soirée fut interprété par le groupe de Samulnori de Kang ]un-il qui s'est pint à l'Orchestre de la KBS pour le plus grand plaisir des spectatems. Ce fut une expérience nouvelle
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et créative: les percussions traditionnelles coréennes s'harmonisant avec la musique classique occidentale D'une cettaine façon, on peut dire gue ce spectacle symbolisait bien le Hall de l'Assemblée générale des Nations-Unies. Le talent du chef d'orchestre et des musiciens était vraiment de niveau international, montrant ainsi au monde entier les dons des musiciens coréens. Sil y a quelque chose à regretter, c'est gue -bien qu'étant dirigé par Chung Myung-whunl'orchestre n'ait pas montré une meilleure unité. Néanmoins, l'émotion dégagée par l'interprétation de l'ensemble a peut-être
surpassé celle de l'Orchestre japonais de la NHK qui avait pué sm la même scène elix ans plus tôt Indivuelm~ les Coréens sont au sommet de leur art, mais ensemble ils manquent encore beaucoup d'harmonie. Ceci est le reflet de la situation politique et sociale de la Corée et il est naturel que cette influence se retrouve aussi dans les arts et la musique Au XXIème siècle, le pouvoir sur la planète reposera sm la a·éativité. Ceux qui seront capables de créer et d'entretenir un orchestre de classe internationale seront les leaders du monde dans 50 ans +
Une des caractéristiques de Yi Mun-yol réside dans la diversité de son répertoire, diversité qui s'applique aussi bien aux genres de ses oeuvres qu'aux sujets traités. na écrit aussi bien des contes que des nouvelles ou des romans.
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Yi Mun-yol Sujets graves et style soigné YuJong-ho
Professeur de littérature anglaise Université féminine d'Ewha
L
reprend la vie du poète vagabond Kim e travail qui consiste à définir Py6ng-y6n, un personnage réel du XIXème l'oeuvre d'un auteur est toujours siècle, on ne peut qt.te s'étonner de l'étendue périlleux Meilleur est l'écrivain, plus de l'oeuvre de Yi Mun-yol la tâche est difficile Dans le cas d'un Agé de moins de cinquante ans, il a écrivain comme Yi Mun-yol qui est encore l'avenir devant lui en tant qu'auteur. dép un grand maître bien qu'il soit encore "Le chant sous la forteresse", sa première jeune, cela semble quasiment impossible. oeuvre, traite de façon réaliste des moeurs Après avoir commencé à écrire à la fin des et de l'organisation de milieux structurés années 1970, il a apporté profondeur et vie basés sur la violence et permet au lecteur de au roman coréen en faisant preuve d'une faire une expérience vivante de la réalité. activité étonnante On peut dire qu'une des De même, '1e cochon du pylône" qt.li décrit caractéristiques de cet auteur réside dans la en p ~o fondeur les relations entre la violence diversité de son répertoire, diversité qui et la psychologie des foules, peut être s'applique aussi bien aux genres de ses considéré comme une oeuvre classique oeuvres qu'aux sujets traités. Dans le dépourvue de tout superfl~ dont la facture domaine du conte, de "Le cochon du révèle le réalisme de l'intérêt porté au pylône" à "L'oiseau aux ailes d'ot ~ ', il a publié monde par l'auteur. Le fait qu'il ait révélé ses des oeuvres remarquables. Quant au qualités d'écrivain à travers ces oeuvres domaine lill peu ambigu de la nouvelle, Yi réalistes semble avoir grandement contribué Mun-yol y excelle ll a publié ainsi un grand à son succès auprès des lecteurs. Mais, avec nombre de nouvelles à commencer par sa '1e Fils de l'Homme", qt.Ii traite de la relation trilogie intitulée ''Portrait de Jeunesse", qui comprend "L'hiver de cette année-là", puis entre le monde surnaturel et les choses de ce monde, Yi Mun-yol nous révèle un autre des oeuvres comme "Le chant sous la forteresse", "Notre héros défiguré" et bien · aspect de l'univers qui l'intéresse. Cette d'autres. ll suffit de se rappeler '1e Fils de oeuvre a attiré de nombreux lecteurs. S~ elle 11-Iomme", qui traite du monde surnatureL a eu du succès, on peut dire que cela vient "Pour l'Empereur", une parodie tissée du fait qu'avec une grande simplicité, elle d'ironie et d'humour et pleine de dignité, fait preuve d'une recherche, caractéristique '1'époque des héros", qui traite les grands de la jeunesse, sur la signification et le problèmes sociaux de l'époque postétieme mystère fondamental de la vie. On peut à la libération, et "Changement'', qui cherche affi.tmer que l'aspect psychologiqt.te de cette à décrire les transformations d'une époque, oeuvre a joué un rôle décisif dans la mobilisation des jelmes lecteurs. pour se sentir presque dépassé par une telle diversité. il faut aussi citer 'Tu ne retourneras pas au Nihilisme romantique pays natal", lille oeuvre analogue à une Slrite "Portrait de jeunesse" est aussi une musicale et difficile à classer dans aucun oeuvre qui peut être considérée comme genre. Si l'on ajoute quelques romans une autre fotme d'autobiographie racontant histotiques, par exemple "Le poète'', qt.ri sous la la jeunesse de l'auteur. Cest un ouvrage qlli forme d'une biographie critique de fiction, contribue à rapprocher l'écrivain des jeunes 84
lecteurs. Panni les trois parties dont elle se compose, la nouvelle dont on parle le plus et qui est la plus lue, a pour titre '1'hiver de cette année-là". Ecrite à la première personne sous la forme du récit des errances de sa période de jeunesse remontant à dix années plus tôt, elle raconte un hiver qlli COJ11I!1ence par l'évasion de la ville, se poursuit par des vagabondages dans des régions montagneuses et au f::ord de la mer et se tetmine par le retour à la ville. Les raisons pour lesquelles le narrateur quitte l'université de la ville et choisit de pattir sur les routes pour devenir mineur ou matin ne sont pas clairement explicites. Il n'existe d'ailleurs peut-être pas de raisons précises Le départ de l'adolescence et la poésie du départ sont comme une protestation de colère et de révolte lancée contre le prosaïsme de la vie quotidienne Grâce à la rencontre avec lill ancien oiminel politiqt.te qu~ après avoi.t· prépat·é sa vengeance, firlit par y renoncer, il décide de reveni.t· à la ville et prend le train pour Séoul ''En vérité, le désespoi.t· est la passion la plus pure et la plus ardente; c'est le salut''. Si cette déclaration du narrateur constitue un appel plus convaincant que toute logique, c'est patœ qt.t'il est contenu chns la poésie de la jeunesse Ce romantisme intétieur qui révèle sans trompe-l'oeil la solitude de l'adolescence, la recherche de sa propre identité et le vagabondage pour y patYeni.t· est chose rare dans la littérature coréenne et, en tant que teL il a son propre chatme Cest pourquoi "Portrait de jeunesse" est une histoi.t·e initiatique que tout jeune Coréen doit absolument li.t·e. On retrouve le charme de cette tendance romantique de Yi Mun-yol dans "Tu ne retourneras pas au pays natal". Il s'agit d'une
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oeuvre dans laquelle, tout en affirmant: :"Nous sommes en vérité la dernière 1génération de ceux qui ont eu un vélitable 1 pays natal, mais ce pays natal a disparu avant même que nous ayons vieilli.", le nanateW' tente un dépatt à la recherche de son pays natal disparu, à la recherche du , t ~ mps jadis du pays natal Le thème de ce r roman composé de dix textes en vaiiations et d'un bref épilogue apparaît clairement dans lè sous-titre, ''Chant poW' le retour au pays natal". Désormais, le pays natal de jadis a disparu et, avec lu~ des choses maintenant introuvables. Et, parmi ces choses, il y a l'esprit des lettrés de jadis; il y a aussi le raffinement artistique des ·temps anciens. Ces choses ne sont d'ailleurs pas nécessairement décrites de façon positive l'auteur critique aussi la vie désolée d'aupW'd'hui et fait revivre certains aspects des coutumes anciennes qui permettaient de rendre supportable la vie de la communauté rurale du passé. Cest dans la souffrance de la vie des gens du peuple qu'il propose une définition de Han, ce sentiment généralement désigné comme la rancoeur spécifique du peuple coréen et il dénonce la futilité d'une approche pédante qui cherche à définir cette rancoeur au mép1is de sa dimension sociale Un élément constamment présent dans l'oeuvre de Yi Mun-yol est l'intérêt qu'il accorde au Cai·actère fondamental de l'ait Sa nouvelle cowte 't'oiseau aux ailes d'o!", sa nouvelle longue '1'auroch" et le roman "Le poète", pat· exemple, sont autant d'oeuvres qui peuvent être considérées comme traitant de l'artiste et l'auteur critique tout Cai·actère tendancieux, trop conscient de son objectif, poW' insister SW' l'autonomie de l'art ainsi que sur l'irriponance du sens esthétique dans la vie. Découvrant la structure d'opposition entre la morale et l'esthétique "inême dans l'ait calligraphique de jadis, il se ~ sent loin de la calligraphie qui met l'accent sur la moralité. 't'oiseau aux ailes d'o1~ est une oeuvre qui traite des angoisses et de la situation difficile d'un artiste maudit qui avait recherché l'indépendance de l'art dans un monde ignorant le concept de l'autonomie de l'ait La recherche concernant l'essence du pouvoir, la recherche relative au caractère
Sa grande érudition fait de la lecture de ses oeuvres une ·· expérience mémorable. Le charme dû à sa capacité à élever les esprits et cette expérience de culture générale, traitant des faits et des états psychologiques, est probablement à l'origine de ce qui attire
les jeunes lecteurs. 85
arbitraire de la "force" dans la vie sont aussi des thèmes importants de son oeuvre. Sous sa plume, la déshumanisation de l'homme et le recours inconsidéré à des moyens machiavéliques, qui sont le résultat de la recherche du pouvoir, deviennent des choses réelles et vivantes: "Notre héros défiguré" en est un bon exemple. La desoiption du pouvoir et de la volonté de domination donne même parfois à ses oeuvres un ton sarcastique mais cela se trouve adouci par l'optique positive et le channe du style de l'autew-. · Da.ns "L'épcxjue des héros", qui raconte le désespoir d'tm intellectuel prcgressiste à cause de la situation politique de la Corée au lendemain de la libération, se révèlent avec netteté les réserves et le refus de l'autew- bien · décidé à ne pas se laisser enivrer par l'idéolcgie politique L'idéolcgie politique n'est parfois qu'une raison mise en avant pour se · petmettre de dominer les autres. La conception de l'art et de la politique de Yi Mun-yol est encore traitée directement dans "Le poète". Par l'intetmédiaire du héra;, le poète mant Kim Pyong-yon, il déclare "Même au moment où il se croyait totalement en union avec ces gens du peuple, il Se.rendait compte que l'amour pour ces gens ne signifiait nullement qu'il les avait positivement adoptés, qu'il avait vécu et souffen avec eux; cela, en réalité, n'était que la recherche d'un prétexte pour révéler sa malveillance à l'égard du monde dans lequel il via~ et cela n'était peut-être que flatterie à l'égard du peuple" Une telle analyse représente aussi le fond de l'âme des intellectuels qui pensent pénétrer "au coeur du peuple" pour se mettre à son service. Cela apparaît clairement, dans son oeuvre qui traite le soulèvement de Hong Kyong-rae et ses pa1tisans. Indépendamment des raisons en apparence susceptibles de justifier leur action, les motivations secrètes qui poussent Hong Kyong-rae et ses adeptes ne sont en réalité .rien d'autres que la soif et la recherche du pouvoir et, afin d'atteindre leur objectif, ils n'hésitent pas à mettre en oeuvre des moyens en contradiction avec les raisons mises en avant. De telles observations et une telle optique repré86
sentent le point de vue qui est toujours celui des critiques conservatrices au sujet des mouvements politiques radicaux Si l'on se place dans une telle optique, on comprend que les meneurs des mouvements radicaux appa1tiennent généralement aux couches privilégiées de la société et, plutôt que de pa1tir d'une observation directe et profonde des difficultés de la vie du peuple, ils se laissent imprégner par des idées radicales à cause d'une sorte d'introspection abstraite mêlée d'un sentiment de remords. Ce sont la
~ soif du pouvoir, la vanité et l'égoïsme qui motivent en profondeur leurs paroles et leur conduite. D'ailleurs, l'important ne réside ni dans un tel examen concernant les piinàpes, ni dans une étude en profondeur, mais dans le fait que, sous la plume de l'auteur, l'oeuvre qui contient une telle p1ise de conscience de l'écrivain possède une force persuasive. Si, par exemple, on procède à une approche en se basant sur le modèle du roman social occidental au XIXème siècle, on s'aperçoit que cette oeuvre est d'une structure bien particulière. Quand il déa·it ses héros, dont la caractéristique est la déviance sociale, pour rester fidèle à son sujet, l'auteur n'hésite pas le moins du
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monde à s'écaiter des normes établies et des exemples existants. li maintient donc une ce1taine distance avec le réalisme considéré dans le cach·e des caractéiistiques du roman moderne pour lequel les éléments de la romance , qui sont diamétralement en opposition, occupent une ceitaine place On peut dire que, d'tm ceitain point de vue, il se range dans la lignée des romans de sàencefiction orientaux. Mais, contrairement aux produits standardisés conçus selon un réalisme fade de facture artificielle, ce roman est plein d'intérêt et, écrit dans un style de haute qualité, il soulève l'émotion du lecteur, qu'il soit d'accord ou en désaccord avec la pensée de l'auteur, le lectew- en anive à de profondes réflexions concernant la littérature, l'humanité, la société et l'histoire Yi Mun-yol est lJil autew- qui observe et scrute les aspects intérieurs de l'homme avec une profondeur rarement .atteinte dans des oeuvres littéraires coréennes. La tendance romantique de ses débuts vient de là Sa grande expéiience et l'amplew- de sa culture générale font de la lecture de ses oeuvres une expérience dont on se souvient Le chatme de la capaàté d'élever les esprits et le channe de cette expérience de culture générale que possède la littérature, traitant des faits et des états psycholcgiques, est probablement à l'origine de la force qui attire les jetmes lecteurs. De plus, dans le climat littéraire coréen, qui n'acc01:de pas une grande impoitance à la qualité du style, Yi Mun-yol est un auteur qui accorde une importance capitale au langage son style, qui se révèle d'une solidité et d'une qualité classiques même quand il semble être un bégaiement peu soigné, ajoute encore un autre raffinement esthétique à ses romans. Traduit déjà en plusieurs langues, Yi Mun-yol a pu toucher un public relativement impoitant même à l'étranger, où l'on parle de lui et de ses oeuvres. Si cela n'est pas en soi une preuve des qualités remarquables de cet écrivain, le fait qu'il possède le don d'attirer l'attention n'en est pas moins une preuve de son talent C'est un éa-ivain qui n'a pas teiminé sa canière et je pense que nous pouvons continuer à lui faire confiance pour les oeuvres à venir. +
NOUVELLES DE LA KOREA FOUNDATION
Subventions r.~u les études Les programmes de l5ourses de sur la Corée a fétranger la Korea Foundation
la Korta Foundation offre lli1e aide finandère aux universités, aux instituts de recherche et aux bibliothèques à fétranger pour les effotts qu'ils CO!Nlaent en vue de promouvoir 1es études sur la Corée clans leur pays. les projets soumis à fapprobation de la Korea Foundation ëlo!vent relever des Sciences-Humaines, des Sciences-Sociales ou d'un domaine artistique, et clans le cadre des objectifs défmis d-après:
1) Création ou développement de dépattements d'études sur la Corée. ( cours et eQSeignants ) 2) Mise à disposition de bourses pour étudiants de 2ème ou 3ème cycles et d'allocations de recherche pour les enseignants 3) Pattidpation aux acql!isitions des bibliothèques et des catâlogues. les dossiers d'inscription devront être remis à la Korea Foundation avant le 31 mai les résultats de la sélection finale seront annoncés le 15 octobre de fannée en cours.
Pour obtenir les . dossiers d'inscription, des conseils ou toute autre irlfomution, s'adresser à :
· International Cooperation Department I The Korea Foundiition CPO Box 2147 Seoul. Koreo Tel 82-2-753-3464. Fox 82-2-757-2047. 2049
KOREAFOCUS BIMENSUEL SUR L'ACTUALITE DE LA COREE
En complément de la revue KOREANA, la Korea Foundation publie une revue intitulée KOREA FOCUS afin de partidper aux efforts entrepris pour faire connaître la Corée dans le monde et pour avoir une p1ace à part entière dans cette ère de globalisation Nous espérons que KOREA FOCUS pourra servir de référence de base à la communauté moncliale en ce qui concerne la Corée. KOREA FOCUS offre à ses lecteurs une vision générale de la Corée
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KOREA .. US FOC
contemporaine à travers un choix d'articles variés concernant l'actualité. Dans ce birnesu~ vous trouverez des articles ciblés sur la politique, l'économie, la sodété et la culture, des opinions sur le monde des affaires ainsi qu'une chronologie des événements récents en Corée.
Publiés en anglais et en ja]Xlnais, ses articles sont tirés de puolications coréennes qui font autorité en la matière tels que les principaux quotidiens, les nugazines d'actualité ou les revues universitaires.
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BOURSES POUR LES ETUDES SUR LA COREE
La Korea Foundation offre des bourses your ,. des projets d'etude ~ relevant des Sciences../ Humaines, des Sciences~ Sociales ou du domaine / artistique. Le programme · est destiné à fournir à des chercheurs, ou autres • spécialistes étrangers, l'oppor.,. ~ tunité de mener des redîerches ' approfondies en Corée pour une durée de 2 à 10 mois. Chaque candidat sélectionné recevra un billet d'avion aller-retour pour la Corée et une bourse mensuelle pendant 1a durée de son séjour.
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Les candidats devront remettre en double exemplaire les dossiers d'inscription à la section-bourses de la Korea Foundation et soumettre leur projet de recherche académique à la Korea Foundation avant le 31 mai. Les résultats de la sélection finale seront annoncés le 15 août de l'année en cours. BOURSES POUR LES COURS DE COREEN
La Korea Foundation offre des bourses pour des cours de langue coréenne destinées à des étudiants de 2ème ou de 3ème cycles, à des chercheurs, ou autres spécialistes étrangers, qui souhaitent apprendre le coréen dans un institut de langue d'une université en Corée pour une durée de 6 à 12 mois. Chaque étudiant sélectionné. se verra proposer des cours de coréen dans l'une des trois plus importantes universités coréennes. Les frais d'inscription et une bourse mensuelle pendant la durée du séjour lui seront versés. Les candidats devront remettre en double exemplaire les dossiers d'inscription à la section-bourses pour les cours de coréen de la Korea Foundation, avant le 31mai. Les résultats de la sélection finale seront annoncés le 15 août de l'année en cours. Pour obtenir les dossiers d'inscription, des conseils ou toute autre information, s'adresser à :
International Cooperation Department JI The Korea Foundation CFO Bcl<2l47 Seoul. Koreo Èl82-2-753-0465 Fox82-2-757-2047. 2049
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1995
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