La colonisation en Asie du Sud-Est

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Les sociétés coloniales : Afrique, Antilles, Asie (années 1850-années 1950) La colonisation en Asie du Sud-Est


La colonisation en Asie du Sud-Est Introduction !

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Ensemble très hétérogène Cultures ; histoires ; nationalismes économiques ; niveaux de développement

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= Le produit de la décolonisation commencée en 1946 avec l’indce des Philippines jusqu’à l’établissement de la République de Singapour en 1965. Ce processus (décolo) = sans doute ce qui fonde l’unité de la région (caractérisée par une grande fragilité et instabilité pol.)

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Opposition entre Asie du S-E maritime / Asie du S-E continentale : - Emiettement pol. ; rivalités éco. pour la partie maritime - Mouvement de centralisation et d’expansion étatique pour la partie continentale

I. L'Asie du S-E face à la colonisation

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II. Le nouvel ordre colonial en Asie du S-E

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III. Les transformations socioculturelles et le développement des nationalismes


Les ĂŠtats de l'Asie du Sud-Est

Rodolphe de Koninck, L'Asie du Sud-Est, Paris, Armand Colin, 2010, p. 7


Les ĂŠtats de l'Asie du Sud-Est

Rodolphe de Koninck, L'Asie du Sud-Est, Paris, Armand Colin, 2010, p. 7.


La colonisation en Asie du Sud-Est I. L'Asie du S-E face à la colonisation

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A — La péninsule indochinoise : 1°) L’émergence de communautés nationales dans la première partie du XIXe siècle 1ère ½ du XIXe marquée par processus de consolidation territoriale et de centralisation administrative. Intégration politique et culturelle —> Formation d’ensembles politiques qui sont à la fois des expressions territoriales et des centres de pouvoir (mais pas des « états-nations » !)

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Une communauté nationale irréductible à toute assimilation - culturellement autonome (mise au point précoce d’une langue écrite - résistant à la « sinisation » - fondée sur une « triple structure nationale » (Daniel Hemery : 1. L’Etat bureaucratique construit sur le modèle confucéen autour de la fonction impériale, détentrice du « mandat céleste » 2. La famille et le village, qui alimentent un véritable « patriotisme paysan » 3. la classe des lettrés, élite de la société rurale, vivier de la bureaucratie mandarinale

2°) Les étapes de la conquête 1858 : expédition navale conjointe de la France et de l’Espagne contre Danang (Tourane) 1859 : Saigon, capitale du Nam Ky (région sud), est prise. Traité du 5 juin 1862 : la Cour de Hué cède à la France les 3 provinces orientales du Nam Ky (on parle de la « Basse Cochinchine »), qui sont érigées en "colonie française". 1867 : conquête des 3 provinces occidentales du Nam Ky, donnant naissance à la Cochinchine française. La colonisation de la Cochinchine commence.


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1863 : traité avec le Cambodge, lequel passe sous protectorat français 1885 : la Chine signe le traité de Tien-Tsin par lequel elle renonce à toute souveraineté sur le Vietnam et reconnaît le protectorat français Ne pas passer sous silence les résistances : L’ « insurrection des lettrés» s'achève officiellement en novembre 1888, mais la "pacification" se prolonge jusqu'en 1896. Et encore... Les troupes françaises restent plus ou moins en opérations jusqu’en février 1910.

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« L’Indochine est la perle de nos colonies mais cette perle a la couleur du sang » (Charles Daney, Indochine, Paris, Flammarion, 1992, p.12)


Pierre Brocheux, Daniel Hémery, Indochine. La colonisation ambigüe, Paris, La Découverte, 1995, p. 23.



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B — Le monde malais : = péninsule malaise + archipel insulindien + Philippines Manque d’unité politique (contraste saisissant avec la péninsule indochinoise) : royaumes concurrents. Une zone maritime stratégique - très dépendante / revenus commerciaux - vulnérable / démonstrations navales des puissances européennes

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1°) La péninsule malaise Fragmentée en plusieurs entités politiques de part et d’autre de la chaine montagneuse centrale. Rivalités économiques exacerbées autour du commerce des détroits. Mosaïque de systèmes sociaux.

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L’East India Company est présente depuis 1786 dans l’ile de Penang et à Malaca depuis 1795. Singapour, qui a le statut de port franc, est acquis en 1819. 1824 : Traité anglo-néerlandais aboutit à un « partage des sphères d’intérêt » 1826 : Accord sur les frontières méridionales du Siam fait de l’East India Company la puissance suzeraine dans la péninsule malaise.

—> Contribue à l’essor de Singapour qui devient une des principales plaque tournante du commerce en extrême-orient et le centre gouvernemental des « Straits Settlements » (Etablissements des détroits). Singapour = Une cité de + de 35 000 habitants en 1840, multiraciale (dont 50 % de Chinois ; forment une communauté très soudée dans les Straits Settlements : les Baba, dont le réseau commercial s’étend entre les grands ports d’Asie du S-E)


L'expansion coloniale dans le Sud-Est asiatique en 1914

Jean-Louis Miège, Expansion européenne et décolonisation, Paris, PUF, 1983, p. 194.


La pénétration britannique en Malaisie (1874-1909)

Jean-Louis Miège, Expansion européenne et décolonisation, Paris, PUF, 1983, p. 198.


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2°) L’Insulinde Un monde insulaire partagé entre - Espagnols : dominent ± toutes les Philippines - Hollandais : ont établi leur suzeraineté sur Java essentiellement, où la Compagnie néerlandaise des Indes orientales (VOC) a établi son QG (Batavia – 1619).

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Nombreux états musulmans quasi indépendants (ex. au N de Sumatra, le sultanat d’Aceh)

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A partir de 1800 l’Etat néerlandais assume directement l’exploitation des colonies hollandaises où la Compagnie néerlandaise des Indes orientales est remplacée par un « Conseil des possessions et établissements asiatiques ».

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Rupture avec la guerre de Java (1825-1830)

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Révolte conduite par un prince de Yogyakarta qui prend le titre de Sultan et dont l’objectif est de refaire l’unité du royaume de Mataram. A la fois contestation nourrie par les bénéficiaires de grands apanages + mécontentement des paysans inspirés par ulama islamiques.

Dorénavant l’Etat colonial ne cessera pas de s’appuyer sur la noblesse javanaise afin de s’assurer son concours et de garder le contrôle des populations.


D. K. Fieldhouse, Les empires coloniaux à partir du XVIIIe siècle, Paris, Bordas, 1973, p. 204.


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Mise en place d’un nouveau système d’exploitation : le « cultuurstelsel » = « système des cultures », introduit en 1830 par le gouverneur général Van den Bosch.

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—> extension des cultures de rente, destinées à l’exportation (caféier, canne à sucre, tabac…) grâce au travail forcé.

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—> Administrateurs coloniaux (résidents, contrôleurs…) venus des Pays-Bas veillent au déroulement des opérations (réquisition des corvéables, transport…).

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—> Elite villageoise des priyayi, dont l’autorité personnelle est mise à profit par le colonisateur, renforce sa mainmise sur la population. De même, les anciens bupatti (« régents » = seigneurs locaux auxquels était confié la perception des impôts à l’époque de la Compagnie néerlandaise des Indes orientales, et qui servaient d’intermédiaires à l’administration de la colonie) voient leur pouvoir renforcé : transmission de leur charge se fait héréditaire ; touchent un % sur la récolte…

=> Une société duale avec : - d’un côté une société pré-capitaliste : celle de la population rurale indigène (culture du riz ; rapports sociaux traditionnels au sein du village) - de l’autre un secteur capitaliste occidental : celui des entreprises agricoles et commerciales produisant pour le marché mondial (1 centaine d’usines de traitement de la canne à sucre construites entre 1830 et 1850 avec l’assistance du gouvt et gérées par des entrepreneurs particuliers, européens ou chinois)


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3°) Les Philippines Ensemble de l’archipel contrôlé par l’Espagne (la terre est censée appartenir au roi d’Espagne). Seul pays d’Asie du Sud-Est colonisé par une puissance catholique. N’est pas une colonie de peuplement (seulement 35 000 Espagnols fin XIXe).

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Siège de l’administration coloniale = Manille (où réside le gouverneur et le Conseil de gouvernement = la Real Audiencia, aussi cour de justice). Provinces administrées par des alcaldes mayores.

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Une culture espagnole qui s’est imposée d’autant plus facilement qu’elle a bénéficié de l’influence homogénéisante du catholicisme et qu’elle n’a pas rencontré de résistance très affirmée

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Souverain d’Espagne accorde des concessions (les encomiendas) qui permettent aux titulaires : - de requérir la main-d’œuvre - d’obtenir une part des récoltes produites par les tenanciers —> Grace au système des encomiendas, les ordres religieux détiennent d’immenses propriétés

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Progressivement, naissance d’une bourgeoisie locale (Ilustrada) où l’on trouve de nombreux métis, lesquels restent méprisés par les Espagnols nés dans la métropole (les peninsulares)


La colonisation en Asie du Sud-Est II. Le nouvel ordre colonial en Asie du Sud-Est !

Dernier tiers du XIXe : moment où : - la France et la Grande-Bretagne achèvent leur prise de possession sur les péninsules indochinoise et malaise - les établissements hollandais se consolident en Insulinde

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Années 1880 = celles d’une intensification de l’influence coloniale avec division des territoires en compartiments coloniaux. Mise en place de modes d’administration et d’exploitation occidentaux sur des populations qui jusque là n’ont eu aucune expérience directe de l’autorité européenne, voire n’ont connu aucun contrôle central.

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A — Le régime colonial : 1°) L’Indochine française Une administration française est mise sur pied, non sans difficulté. Nécessité de recourir à des interprètes et de former des administrateurs blancs. La France s'appuie bientôt sur les "notables" et les "interprètes" qui en tirent profit.

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a) Le démembrement de l'État vietnamien.

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En 1887, l'Union indochinoise, décidée à Paris en 1886, a pris forme juridique et politique avec la création d'un Gouvernement général de l'Indochine, vite devenu l'autorité suprême (le gouverneur général = un « vice-roi »…) Le gouvernement général est réorganisé en 1897 par Paul Doumer, qui le dote d'un ensemble de services généraux et des ressources d'un « budget général » alimenté principalement par les impôts directs, accrus, des droits de douane et le produit de régies fiscales (sel, alcool, opium).


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b) La mise sous tutelle du Cambodge

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17 juin 1884, signature d'une convention qui dépouille pratiquement le roi du Cambodge de toute autorité : le Cambodge devient un protectorat

2°) La Malaisie Là, l’expansion et la consolidation du pouvoir colonial s’accompagne de la mise en place d’une structure étatique.

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1891 : Création d’une Fédération de Malaisie qui regroupe les « Straits Settlements et les états malais sous la direction d’un service administratif européen unique => Uniformisation du régime foncier, de l’organisation fiscale et de l’enseignement Péninsule malaise forme, à partir de 1914, une unité : la « British Malaya » que le contrôle politique anglais maintient soudée ensemble.

3°) Les Indes néerlandaises Evolution du système des cultures vers une véritable mise en valeur du pays. Attrait des Kaux européens pour d’autres secteurs que la canne à sucre : Plantation d’hévéa, de palmiers à huile (Est de Sumatra) ; investissement de Kaux dans les mines.

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1916 : Concession d’une assemblée représentative : le Volksraad (« Conseil du peuple »).

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Institution souhaitée par les libéraux. Son intérêt est apparu pendant WW1, alors que les communications avec la métropole s’avéraient particulièrement difficiles. —> Constituer un corps consultatif auquel le gouverneur général pourrait s’adresser pour établir ses décisions.

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N’est pas cette assemblée soumise dont rêvaient les autorités néerlandaises. Devient un organe critique / abus du gouvernement hollandais ; défend les droits des populations locales…


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4°) Les Philippines 1898 : explosion du cuirassé Maine dans le port de la Havane provoque l’intervention américaine à Cuba et aux Philippines. A Manille, les Espagnols capitulent le 12 août 1898. Philippines passent sous domination US.

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Déc. 1898 : au terme du traité de paix, l’archipel est cédé aux EUA pour 20 M de $… Peu après Congrès déclare les philippines protectorat des EUA. Face à cette situation (des Américians qui prennent simplement la place des Espagnols) Philippins se soulèvent début fév. 1899 (l’insurrection dure 3 ans)

Américains entreprennent de profondes réformes : - Anglais remplace partout l’Espagnol - Ordres religieux américains remplacent les ordres espagnols, expulsés.

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1er juillet 1902 : Philippine Organic Act institue une nouvelle structure politique : un système bicaméral avec une assemblée élue et la Commission américaine jouant le rôle du Sénat

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Ilustrados modérés se vient confiés certains pouvoirs (les Américians s’appuient sur ces élites locales). En retour ces ilustrados animent un Federal Party qui milite pour l’intégration des Philippines dans les EUA

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Evolution de l’archipel vers une certaine autonomie (dès 1903) puis mise en place, à partir du 15 novembre 1935 du Commonwealth. —> se traduit par le glissement du pouvoir réel aux mains de la haute bourgeoisie des ilustrados.


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B — Les transformations socio-économiques : 1°) Des mutations radicales Le colonialisme comme prolongement du capitalisme européen… Un des objectifs des puissances col. = susciter un dévt économique profitable aux gouvernements et milieux d’affaires métropolitains.

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Accroissement des ressources naturelles / des investissements (privés pour l’essentiel)

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Investissements —> dans le domaine des équipements de transports et de communication.

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Ex. Indochine : Création de ports modernisés et de chemins de fer en // au dévt des charbonnages, des rizières, des cotonnières. => Commerce ext. x 4 entre 1887 et 1913 (de 140 à 590 M) Afflux de Kaux privés ds l’entre-2-guerres (+ de 3 000 M de 1924 à 1932) accélère la mise en valeur (équipement ferroviaire et réseau routier).

Investissements intéressent industries extractives : - Etain de Malaisie et Indonésie - Anthracite du Tonkin mais aussi plantations : - caoutchouc de Malaisie et de Cochinchine - café, canne à sucre, tabac d’Indonésie et des Philippines


La colonisation en Asie du Sud-Est II. Le nouvel ordre colonial en Asie du Sud-Est !

Investissements intéressent industries extractives : - Etain de Malaisie et Indonésie - Anthracite du Tonkin mais aussi plantations : - caoutchouc de Malaisie et de Cochinchine - café, canne à sucre, tabac d’Indonésie et des Philippines

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Développement des plantations particulièrement spectaculaire à Sumatra et en Malaisie Ouvriers proviennent de Chine, de Java. Toute une société au service des compagnies (néerlandaise, anglaises, américaines ou franco-belges) qui administrent les plantations.

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Malaisie : Plantations d’Hévéa + mines d’Etain font la fortune de la fédération.

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Production d’étain : Production de caoutchouc :

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6 500 t en 1850 33 000 t en 1913

51 400 t en 1913 232 000 t en 1927

Grandes plantations essentiellement, créées à l’aide de Kaux étrangers.
 Importantes circulations d’hommes (recours à l’immigration…) : Chinois, Indiens, Tamouls… —> Malaisie tend à devenir une société multi-raciale dans les années 20

On retrouve le poids de l’immigration en Indochine (encouragé par le pouvoir colonial) Cochinchine : - De 1925 à 1930 : 100 000 nouveaux venus. - Chinois : 56 000 en 1889

250 000 en 1928

(dont 170 000 à Saigon-Cholon)


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Id à Java :

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Immigrés chinois habitent quartiers séparés dans les villes. Sont organisés selon leur origine géographique en sociétés commerciales Administration les traite de la même façon que les Javanais mais les reconnaît comme faisant partie d’une communauté distincte. Mariages mixtes (Chinois / Javanaise). Cas de Chinois qui épousent entièrement la culture javanaise.

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2°) L’accroissement des déséquilibres Economie duale : - d’un côté les « cultures riches », l’exploitation des mines et le grand commerce qui fait l’orgueil du colonisateur et attire une main d’œuvre indigène déracinée - de l’autre une industrie ravalée à la portion congrue —> de fait, pendant la période coloniale effort du colonisateur se concentre sur l’exportation des matières 1ères et sur l’importation des objets manufacturés de la métropole.

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Dégradation de l’économie villageoise traditionnelle.

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Au bilan : Tendance générale à l’appauvrissement des et à la dépendance de la paysannerie. Déséquilibre entre groupes européens et groupes indigènes et à l’intérieur de chaque communauté.

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Crise de 1929-30 va montrer que le nombre des consommateurs économiques se limite en Indochine à 1 800 000 personnes, tandis que 17 M vivent dans le dénuement. Avec l’effondrement du cours des matières premières la « belle prospérité » de l’Indochine, tant vantée par les autorités coloniales, s’évanouit. Cf cours du riz qui de 16,10 piastres les 100 kg en 1930 passe à 3,20 en 1933.


La colonisation en Asie du Sud-Est III. Les transformations socio-culturelles et le développement des nationalismes ! A — Quels bouleversements opérés par la colonisation ? 1°) Des transformations considérables… Pénétration ad. coloniale entraine ébranlement +/- rapide de l’ancienne société tandis qu’une nouvelle se développe, avec bourgeoisie d’évolués + prolétariat urbain. Pluralisme ethnique accentué : sociétés multiples où s’observe l’interaction de communautés diverses (occ. / chinoise / indienne) dont les membres - sont spécialisés dans secteurs économiques particuliers qu’ils contrôlent - tentent de maintenir un mode de vie socialement et culturellement autonome

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2°) … qui constituent le terreau des contestations Résistance à la colonisation puise sa force - dans les religions (rôle de l’islam, du bouddhisme). - dans les principes même du colonisateur (droit des peuples à disposer d’eux-mêmes ; idées d’émancipation et d’évolution)

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La colonisation en Asie du Sud-Est III. Les transformations socio-culturelles et le développement des nationalismes ! B — Une profonde modification du paysage socio-culturel S’effectue dans les 2 premières décennies du XXe.

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Mise en place d’infrastructures (communication ; transports…). Diffusion de l’anglais et du français Lutte contre les pandémies —> fait reculer la mortalité mais entraine un boom démographique dont les puissances col. sont tenues pour responsables.

Cf le cas du Vietnam :

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En une dizaine d’année destruction de l’empire d’Annam et édification de l’Union indochinoise = cadre territorial et étatique de la colonisation, qui englobe le Vietnam, le Cambodge, les pays du moyen Mékong, regroupés dans la « résidence supérieure du Laos »

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Paul Doumer, gouverneur général de 1897 à 1902, en fixe les structures et les modalités de fonctionnement, savoir : - l’appareil du gouvernement général - le démembrement de l’espace vietnamien en 3 territoires de statut ≠ (2 protectorats : Annam + Tonkin / 1 colonie : Cochinchine) - la transformation de la bureaucratie mandarinale en rouage d’exécution du pouvoir étranger. - l’exploitation fiscale rationnelle de la paysannerie (par les régies du sel, de l’alcool, de l’opium…) - la substitution de l’écriture romanisée (le quôc ngu) aux idéogrammes —> nouveau système d’enseignement « franco-indigène » qui encourage, à côté de l’étude du français, l’apprentissage de l’écriture romanisée du quôc-ngu. - l’adaptation du système des écoles aux besoins de la colonisation. Enseignement qui ne débouche que sur des tâches subalternes - la suppression des concours littéraires (1915-1919) —> grades littéraires conféraient l’exemption de l’impôt personnel, de la corvée et permettaient de postuler aux postes de fonctionnaires

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=> Administration col française oblige les classes dirigeantes à tourner le dos à la tradition chinoise pour s’ouvrir à l’Occident : Abandon de la culture classique ; effondrement d’une civilisation. Désarroi des élites.


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Signes tangibles de la présence coloniale dans les villes

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- Bouleversement du domaine médical avec développement, dès les 1ères années du XXe, d’un important réseau sanitaire (dispensaires ; hôpitaux ; Institut Pasteur…) - Formation de nouvelles élites qui aspirent à la responsabilité. Le colonisateur fait appel à ces nouvelles élites pour diriger les populations du Laos, du Cambodge (sentiment d’une double colonisation : française et vietnamienne)

A l’inverse, dans les campagnes, réflexes de fermeture / innovations apportées par le pouvoir colonial ne sont pas rares.

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Perte des repères entraine attitude de réaction avec idéalisation d’un état social ancien représenté comme paisible, juste et prospère. —> Très forte orientation traditionnaliste et conservatrice. C’est en ce sens (refus du processus de modernisation) que l’on peut interpréter les mouvements de révolte paysanne fin XIXedébut XXe.
 Paysans recourent à la fuite, au sabotage, à la rébellion Place de la religion (bouddhisme ; islamisme). Cf en Indonésie : rôle affirmé des oulamas.

Fréquentes éruptions soudaines de mouvements religieux localisés. Mouvements qui se nourrissent d’une tradition messianique puisée : - dans l’Islam : venue d’un Roi de Justice qui inaugurerait un nouvel âge de paix et de prospérité. - dans le bouddhisme : focalisation sur de « saints hommes », messies ou prophètes (phu mi bun en lao ou en thai), capables de canaliser les résistances contres les autorités coloniales :

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cf les effervescences occasionnées par les phu mi bun dans le Sud du Laos et le Nord-Est du Siam fin XIXe-début XXe.


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Au Vietnam, fin XIXe-début XXe, désarroi consécutif à l’installation du pouvoir colonial se traduit par la profusion des mouvements messianiques populaires. A leur tête on trouve des illuminés, guérisseurs, devins, médiums.

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Ces derniers se présentent comme des réincarnations de génies protecteurs du pays et ne constituent pas un grand danger pour l’ordre colonial (ne sont inspirés par aucune doctrine pol., ne recourent pas à la violence armée)

C — Résistances / Nationalisme / Anticolonialisme Ancienneté du sentiment national n’est pas la même partout : Viêt Nam, Cambodge, Siam : là existe un sentiment national ancien (≠ en Indonésie, Malaisie, Philippines)

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Fin XIXe : Mouvts au sein desquels s’exerce une conscience nationale forte sans que pour autant on voie émerger notion nette de l’état nation

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1°) Les mouvements de résistance à la conquête coloniale se prolongent jusqu’à fin XIXe Ex. entre 1885 et 1897 Mouvt royaliste Can Vuong (Aide au roi) des lettrés confucéens au centre et au Nord du Viêt Nam. —> typique de ces mouvts dirigés par les anciens souverains et les anciennes classes dirigeantes dépossédées par la conquête coloniale.


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2°) Un nationalisme moderne n’émerge qu’avec l’apparition de couches sociales nouvelles Sous l’effet des transformations socio-économiques opérées par le régime colonial (intelligentsia moderne ; bourgeoisie commerçante ; employés des ad publ ou privées).

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—> Pour ces dernières couches soc. la question du progrès est aussi importante que celle de l’indépendance (des populations qui veulent autant s’inspirer de l’Occident que s’en émanciper)

Quelques personnalités parviennent à mobiliser la jeunesse et à diffuser leurs idées par le canal des sociétés secrètes, nombreuses au Vietnam comme en Chine :

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- Voie violente avec Phan Boi Chau : Promeut un « nationalisme d’Etat » donnant priorité au combat, par l’action conspiratrice mise sur pied depuis l’étranger

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- Voie réformiste, pacifique, avec Phan Chau Trinh, ie celle du « nationalisme démocratique », énoncé dans sa « Lettre au gouverneur Beau » (1906). Affirmation de la priorité du progrès global de la société, de la diffusion du savoir moderne sur la simple indépendance pol. Objectif = imposer une décolonisation graduelle, un processus continu de réformes en jouant l’alliance avec la gauche métropolitaine.

—> Démarche = Faire surgir le progrès et la démocratie du sein même de la société coloniale. Utiliser la colonisation pour faire naître une société civile moderne.

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Mais ce nationalisme se heurte au problème des limites de la modernisation dans un contexte colonial


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3°) Les mouvements communistes S’emploient à conjuguer action des classes populaires et de l’intelligentsia moderniste.

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PC voient le jour dans les années 20 : 1920 : Indonésie / 1928-1929 : Viêt-Nam / 1930 : Philippines 1928 : Fondation à Singapour, à l’initiative du Komintern, de la Fédération communiste des mers du Sud (Nanyang) 3 février 1930 : Fondation officielle du Parti communiste indochinois par Nguyên Ai Quôc (le futur Hô Chi Minh)

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A l’exception du Viêt-Nam, communisme ne représente qu’un courant politique minoritaire en Asie du S-E

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Orientation vers actions insurrectionnelles dans un premier temps - 1926-27 : en Indonésie - 1930 : en Indochine —> Insurrection des paysans de la province de Nghê-an, encadrés par dirigeants communistes qui organisent les « soviets du Nghê Tinh

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Puis recherche de larges alliances à caractère antifasciste - Au Vietnam en 1937 communistes et nationalistes modérés se retrouvent dans un « Congrès indochinois ». - Aux Philippines, à Manille en 1936 un front populaire est formé entre socialistes et communistes


La colonisation en Asie du Sud-Est Conclusion ! !

Destruction du système colonial en Asie du Sud-Est suite aux victoires japonaises pendant WW2 sert les mouvements de libération nationale.

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Une expérience pénible, commune aux pays de la zone (seule Thailande a évité l’occupation) mais qui donne aux groupes nationalistes agissant dans la décennie précédente l’occasion de s’emparer du pouvoir politique.

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Janvier - avril 1942 : en quelques mois le Japon s’assure le contrôle de toute l’Asie du S-E. Mise en place de la « sphère de coprospérité de la grande Asie orientale » : ie Japon tend à se substituer aux anciennes puissances coloniales dans les territoires occupés pour les exploiter à son profit.

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Au nom de cette « sphère de coprospérité » Japonais encouragent mouvements de libération nat., attisent mouvements anti-blancs. Constitution de gouvernements locaux pro-japonais. Mouvement renforcé à partir de 1943 : le Japon s’emploie à favoriser l’indépendance des pays qu’il occupe pour les préparer à résister aux alliés.

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Néanmoins, avec l’antagonisme (plus que la collaboration) entre l’occupant et les populations, c’est un autre scénario qui se dessine : celui de la lutte révolutionnaire visant à la défaite du Japon / à la libération nationale et sociale

Situation en 1945 = les nationalismes partout en situation de s’opposer au retour éventuel des colonisateurs dont l’invasion japonaise a révélé la faiblesse.

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