La Société du Regard [1/2]

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La société du regard

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La sociĂŠtĂŠ du regard

Thomas Perrin



La société du regard

Mémoire de fin d’études, examen du DNSEP, session 2014-2015. Département design graphique de l’Institut Supérieur des Beaux-Arts (ISBA) de Besançon. Directeur de mémoire : M. Michel Collet.



P r é a m bu l e Le présent mémoire a pour objet une recherche spécifique sur le design graphique et, plus précisément, sa situation contemporaine. Cette recherche marque l’achèvement de sept années d’études supérieures en communication visuelle. Elle est l’aboutissement de multiples réflexions et de recherches entreprises tout au long de mon cursus, sur une pratique très spécifique du champ visuel.

* « Car on ne peut pas sérieusement parler du graphisme seulement à un moment m et pour lui même. » 1 Ce manuscrit tend également d’analyser tous les maillons de ce procédé, de la société moderne à la culture visuelle, de ses facteurs à ses acteurs, d’un actuel constat à un potentiel avenir. Cet examen n’a pas la vocation présomptueuse d’établir un bilan de ce que devrait être le graphisme d’aujourd’hui. Il est le simple reflet d’un point de vue personnel sur une pratique aux enjeux les plus complexes. Aussi, les observations formulées ici sont à replacer dans le contexte d’un regard mesuré d’étudiant sur sa future profession, d’une amorce de questionnement qui dirigera son parcours à venir.



Ava n t   -   prop o s Le capitalisme est actuellement l’un des éléments moteurs de notre civilisation. Via l’accumulation et la recherche du profit, il a permis, au fil du temps et des âges, de répondre aux besoins des différents modèles de notre société. Son bilan est discuté, ses modèles remis en cause. Son développement s’est accru depuis le milieu du XIXe siècle, notamment grâce à des innovations technologiques : « Avec la révolution industrielle, la division manufacturière du travail et la production massive pour le marché mondial, la marchandise apparaît effectivement comme une puissance qui vient réellement occuper la vie sociale. » 2 Les innovations et progrès techniques deviennent le moteur de la production et de la commercialisation. Au tournant du XXe siècle, le pouvoir politique perd de son influence et un nouvel ordre prend progressivement le relais. La logique marchande triomphe avec la mondialisation des échanges et le marché s’impose comme modèle général. Ce basculement vers une société commerciale a été, pendant plus d’un siècle, un terrain favorable au développement parallèle d’une société de consommation qui a réussi à la supplanter.

*


Selon plusieurs analystes et spécialistes de l’économie et de la politique, aujourd’hui plus que jamais dans notre collectivité, c’est la consommation qui est devenue le moteur de la vie et, par extension – ne nous leurrons pas – c’est l’argent qui nous gouverne, autant que :

Désormais, tout est pensé comme produit de consommation, entraînant de nombreux bouleversements. Le modèle marchand s’est imposé dans chaque sphère de notre société comme le modèle prépondérant, conduisant inéluctablement vers un consumérisme de masse.

** 8


Dans un tel contexte de mutation, le langage visuel se retrouve en première ligne. Entre domination marketing et revendication créatrice, la pratique graphique s’enfonce dans un profond déséquilibre. Face à un pouvoir que l’on ne peut renverser, réviser son orientation est devenu la préoccupation majeure des créatifs, afin qu’ils puissent reconsidérer la mesure de leur fonction. C’est ce que je me propose d’aborder dans ce mémoire.

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Des observations de la civilisation moderne

Une société monotone et totalitaire

Un système normalisé et corrosif

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Une société monotone et totalitaire

La consommation : un modèle grande vitesse

Dans son ouvrage intitulé La loi du plus fort, Rick Poynor explique que l’exigence de rentabilité est palliée par une gigantesque surproduction de biens. Ce phénomène induit que les objets vraiment nouveaux et les véritables innovations se font rares. Nous assistons à un véritable phénomène du : trop de variété, trop de reproduction, trop de fantaisie, trop de choix à faire qui n’ont rien à voir avec le besoin.

TROP

Cela n’est pas une nouvelle, le capitalisme financier règne aujourd’hui en maître, conduit par un précepte fondamental : la loi du profit. Les biens ne sont plus jugés sur leur utilité, mais d’abord sur leur rentabilité. Comme l’écrit Colin Jacobson :

« NOUS •••••• AVONS •••••• CRÉÉ •• UN •• EXCÈS •• DE •• CHOSES, •• CAR •••••••• NOUS •••••••• AIMONS POSSÉDER ••• ET ••• DÉPENSER. » 1

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Une société monotone et totalitaire

Nous entrons donc dans une économie de la variété, de la série courte et de la création de renouvellement hyper accélérée. Un fait que l’on peut observer dans la prolifération des séries limitées, véritable instrument consumériste jouant sur l’effet de rareté et sur les comportements de collection. Dans un extrait intitulé Au-delà de la valeur d’usage, Jean Baudrillard nous décrit cet épiphénomène comme un véritable

« FÉTICHISME DE LA MARCHANDISE. » 2

Désormais, on traite le monde comme un objet de consommation : tout a une date d’expiration et une espérance de vie limitée, ce qui entraîne un épuisement rapide. Les choses perdent de leur charme quand on les utilise, donc tout devient rapidement inadapté et inutile. Il faut se débarrasser des objets pour avancer, ainsi « la peur du changement, jusqu’alors presque universelle, fait place à la peur de la stagnation » 3 écrit l’historien Peter Gay. Plus rien ne doit durer très longtemps, une philosophie amplement répandue chez les constructeurs, notamment avec l’obsolescence programmée de plus en plus courante.


Une société monotone et totalitaire

Zygmunt Bauman décrit ce phénomène comme La vie liquide 4 : un univers rapide qui change continuellement de forme et n’a pas le temps de se figer. Une vie fragile où l’on passe vite à autre chose, où l’on est constamment en mouvement et où il faut courir pour cependant rester au même endroit. Dans ce monde, trop rapide pour que l’on se fixe, aucun changement n’a le temps de devenir un modèle durable. Cette absence d’idéal pour notre société dénote un profond manque de structure. Bien que nous bénéficiions de nombreuses « grandes références » dans notre passé, Dany-Robert Dufour souligne qu’aucune n’a suffisamment

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Une société monotone et totalitaire

L’art du capitalisme : l’esthétique commerciale

La seule structure résultant de cette absence de modèle est l’économie commerciale. Les professeurs et philosophes Gilles Lipovetsky et Jean Serroy expliquent l’ascension de la logique financière par une mainmise sur l’esthétique. Dans leur livre L’esthétisation du monde, ils dévoilent la dimension artistique du capitalisme, où une valeur économique est créée à travers une valeur esthétique. Le système marchand et commercial s’empare des codes artistiques pour créer une dynamique de consommation esthétique à l’échelle du plus grand nombre. La création artistique touche désormais tous les domaines en vue de la consommation ; nous assistons donc à une véritable stylisation du monde.

L’art devient l’instrument de la légitimation du capitalisme en s’inscrivant dans la mode et la consommation, comme le déclara Thomas J. Watson Junior (second président d’IBM) à l’occasion d’une conférence à l’université de Pennsylvanie en 1973 :


Une sociĂŠtĂŠ monotone et totalitaire


Une société monotone et totalitaire

L’

art capitaliste s’affirmerait donc comme un système  de production et distribution de plaisirs et de sensations. Il utiliserait les effets de l’art afin de solliciter nos émotions et nous faire rêver : une authentique société de consommation des désirs. Zygmunt Bauman décrit cette démarche comme la promesse de satisfaction des désirs sans jamais les satisfaire ; ainsi la « société de consommation parvient à rendre permanent la non-satisfaction. » 6 Frustrer continuellement pour relancer le désir d’achat.

L’écrivain François Brune, dans son livre intitulé Le bonheur conforme, essai sur la normalisation publicitaire, explique l’implication de la publicité dans ce processus. En visant le bonheur de son destinataire, elle transforme les désirs en besoins, elle stimule la consommation à travers un plaisir immédiat et facile, dans le but de faire toujours plus de profits. L’objet du désir devient le désir de l’objet, comme le démontre le modèle des choses de l’amour réduites à l’amour des choses, comme la pulsion sexuelle est restreinte à la pulsion d’achat. 7

L

e capitalisme artistique, pour reprendre le titre   du livre de Gilles Lipovetsky et Jean Serroy entraîne, dans sa logique de surproduction, une incontournable hyper consommation esthétique. L’industrie – car l’on peut désormais décemment parler d’industrie – cinématographique et musicale n’a jamais été aussi productive que ces deux dernières décennies. Toutefois, cette surproduction entraîne une certaine homogénéisation. Des hits musicaux aux fameux blockbusters du cinéma, aujourd’hui tout se ressemble.


Une société monotone et totalitaire

De citoyen à consommateur : un problème d’identité

Ces réalisations homogènes entraînent une cohabitation de tous les genres : du kitsch au high-tech, du rétro au futuriste, notre univers est désorganisé. Cette promiscuité au sein-même de notre société capitaliste est qualifiée de consommation transesthétique. 8

Ce système dépossède les citoyens des repères de leurs propres acquis : ils sont dans l’obligation de suivre ce modèle qui leur est imposé pour survivre dans ce mouvement. Posséder un téléphone portable – et si possible le dernier modèle en vogue – est devenu une obligation pour rester connecté au monde qui nous entoure, pour être « à la page ».

Poussés par cette peur de déqualification, les citoyens dans leur vie de consommation augmentent leur besoin de besoins, leur désir de désirs, pour obtenir satisfaction autant que possible. 9 Hantée par le problème de l’identité, cette idéologie matérialiste tente de transformer l’humain en quelqu’un qu’il ne sera malheureusement jamais. Suivant le principe découvert par Bartlebooth, l’un des protagonistes du roman de Georges Perec, La vie, mode d’emploi, il suffit de : « veiller à ce que le dernier article en rayon ne corresponde pas au reste du puzzle de l’identité, de sorte que l’assemblage doive être recommencé sans cesse du début et qu’il ne puisse jamais y avoir de fin aux nouveaux départs. » 10 Ainsi, « LE FUTUR DU MARCHÉ EST ASSURÉ. »

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Une société monotone et totalitaire

Dans un souci constant de retombées économiques, les services publics comme privés transforment les usagers en clients. Les citoyens endossent progressivement le statut de consommateur. Zygmunt Bauman décrit alors la fin de l’idée utopique de société et la résignation face à la puissance gigantesque du marché. Les individus deviennent eux-mêmes objets de ce système et démontrent leur propre valeur d’usage à travers la consommation. Ils sont conduits à n’exister qu’en se modelant sur des produits. Les femmes n’accèdent au statut de femme qu’à travers l’idéologie colportée par les campagnes marketing des bijoutiers par exemple, tout comme le slogan d’une grande marque de boisson affirmant le caractère unique de ses consommateurs :

SOIS TOI-MÊME ·CHOISIS PEPSI·

·

·

Quel style adopte-t-on ? · Quelle musique écoute-t-on ? · · Quel produit utilise-t-on ? ·

Suivre les modèles de consommation serait devenu un vecteur important de l’identité des individus et de leur affirmation.


Une société monotone et totalitaire

« LA PUBLICITÉ A PIÉGÉ LA CAPACITÉ DE DÉSIR ET DE RÊVE, ELLE NOUS INCITE À NOUS IDENTIFIER À CE CORPS QUE NOUS MONTRE L’IMAGE, JE PEUX ÊTRE — SI J’ACHÈTE CE PRODUIT — CELUI QUE JE RÊVE D’ÊTRE. » 11

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Une société monotone et totalitaire

Le citoyen deviendrait simple consommateur par l’idéologie publicitaire. Le magazine activiste Adbusters (intitulé Journal of the mental environment) dénonce cet environnement mental saturé par des messages commerciaux qui participent à une véritable aliénation et modifient dangereusement la vie des individus. On assiste à une véritable césure de l’individu avec lui-même : il n’est plus acteur de son existence, il subit la société de consommation.


Un système normalisé et corrosif

L’appropriation du potentiel de l’image

D’après W.J.T. Mitchell, l’image est le siège d’un pouvoir spécifique qui a été depuis toujours exploité et contenu. 12 Le potentiel de son langage a su attirer l’idéologie consumériste pour finalement devenir l’instrument de son influence. C’est alors qu’un bouleversement majeur prend forme : la production issue du savoir visuel devient le principal gisement de profits. La communication, en plus de sa fonction commerciale, se voit concéder de nouvelles fonctions : créer du prestige, de la valeur symbolique, voire artistique, en plus de la valeur utilitaire. Les taux d’investissement dans la communication dépassent alors tous les seuils, en vue d’accroître la notoriété des marques.

« Chaque année, le budget mondial dépensé en publicité s’élève à 500 milliards de dollars. Une étude de l’ONU estime que pour réduire de moitié la faim dans le monde, 10 % de cette somme suffirait. » 13

En 2012, seulement 36 annonceurs ont dépensé près de 62 milliards de dollars en publicité. 14 L’entreprise américaine Nike, spécialisée dans les chaussures, a aujourd’hui un budget communication équivalent à son budget de production.

Le contrôle marchand sur le monde de l’image est à présent total ; il devient la courroie de transmission de la pensée consumériste. Inévitablement liée à l’émergence des premières formes du capitalisme de consommation, la communication est devenue marchandise avec, comme seul projet, de se liquider le plus possible.

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Un système normalisé et corrosif

La communication est le reflet des valeurs de notre société aujourd’hui plongée dans la consommation ; elle va même jusqu’à les déposséder. François Brune atteste que « ce que l’on croît être la valorisation des produits n’est à chaque fois que la dévalorisation des “valeurs”. Toutes les publicités sont réductrices. » 15 C’est à une véritable appropriation des signes réduits à de simples arguments de consommation que nous assistons depuis les années 80. La firme de boisson Coca-Cola s’est accaparé l’esprit de générosité de Noël pour en faire un serviteur du pouvoir d’achat lors de cette fête chrétienne. De même que Matthieu Wolf, dans sa campagne publicitaire pour l’enseigne de grande distribution Leclerc, a détourné les affiches de mai 68 en défendant une nouvelle cause : le pouvoir d’achat.


Un système normalisé et corrosif

Cette stratégie de détournement se conforte dans un pouvoir légitime donné à l’image : tout ce que l’on montre à travers elle est indiscutable. L’esprit se soumet au pouvoir des images, alors que cette manipulation marketing n’est que diffamation. La publicité ne mène jamais à la réalité et n’est qu’une banale illusion du réel. La compagnie allemande Sixt propose, à travers son slogan Boost Yourself et ses campagnes de publicité, de regonfler sa condition sociale grâce à la location d’une voiture – luxueuse, cela va sans dire – pour une période déterminée. Il a été scientifiquement prouvé* que la location d’un quelconque véhicule ne fera jamais de vous :

« LE PATRON »

« UNE SUPER NANA »

« UN CHAMPION » (pour ces messieurs)

« UNE MAMAN QUI DÉCHIRE » 16 (pour ces dames)

Cette prolifération de fourvoiement visuel entraîne un profond désamorçage de la véritable information à des fins commerciales. Oliviero Toscani, pour l’entreprise italienne de prêt-à-porter Benetton, a utilisé dans ses campagnes de publicité des photographies de condamnées à mort, brouillant ainsi la frontière entre information et publicité, pour se faire valoir par un sujet des plus sensible. Déjà à son époque, l’écrivain français Blaise Cendrars déclare :

« La publicité est la fleur de la vie contemporaine, elle touche à la poésie. » 17 C’est dans cette même approche que de plus en plus de cinématographes sont appelés à travailler sur les – désormais nommés – films publicitaires. La publicité ne veut alors plus faire passer un message, mais simplement interpeller le public en créant une proximité émotionnelle.

* Autre mensonge abondamment répandu dans la publicité.

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Un système normalisé et corrosif

L’écrivain et poète français Paul Valéry résume :

« La publicité, un des plus grands maux de ce temps, insulte nos regards, falsifie toutes épithètes, gâte les paysages, corrompt toute qualité et toute critique, exploite l’arbre, le roc, le monument, et confond sur les pages que vomissent les machines, l’assassin, la victime, le héros, le centenaire du jour et l’enfant martyr. » 18


Un système normalisé et corrosif

La surexposition au regard

L’image étant l’une des stratégies prééminentes du nouveau modèle consommatoire, le procédé commercial de la surproduction et de la surexposition lui est également appliqué, comme à un produit. Ainsi que le confère Maxime Boidy et Stéphane Roth dans la préface du livre de William John Thomas Mitchell Iconologie : Image, texte, Idéologie :

Le design marketing et la publicité sont aujourd’hui les deux formes prépondérantes de communication visuelle. Dans sa stratégie pour mieux atteindre sa cible et avoir le maximum d’impact – telle une arme militaire – c’est un système d’une violente conformation qui est perpétuellement exposé à notre regard. Des études démontrent que nous voyons en moyenne 3 000 annonces par jour 20 ; cette propagande fait désormais partie de notre vie quotidienne. Selon le romancier américain William Burroughs, « les images sont virus », car « le virus entre par effraction et se maintient par la force. » 21 La publicité est donc un système colossal de contrôle de notre société contemporaine. Les spécialistes en mercatique sont même allés jusqu’à inventer un dispositif de promotion, basé sur un message persuasif diffusé d’une personne à une autre, appelé marketing viral. Ce principe a notamment été employé profusément depuis la révolution Internet. Pour exemple, le groupe webmail de la société Microsoft (Hotmail) qui joint automatiquement une publicité pour la firme dans chaque mail envoyé par ses usagers.

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Un système normalisé et corrosif

« LA QUANTITÉ ABUSIVE DES IMAGES QUI NOUS ENGAGENT À CONSOMMER TOUJOURS PLUS EN AVILISSANT NOS SENS EST ORGANISÉE ET GÉRÉE, DANS UNE DÉBAUCHE OBSCÈNE D’ARGENT, PAR LES MAÎTRES DE L’INDUSTRIE PUBLICITAIRE ET DU MÉDIA-PLANNING. JAMAIS L’HUMANITÉ N’A ÉTÉ AUTANT SOUMISE À UNE TELLE PROPAGANDE VISUELLE ET JAMAIS CEUX QUI ONT LA CHARGE DE CULTIVER ET D’ÉLABORER LES LANGAGES VISUELS N’ONT ÉTÉ AUTANT COMPROMIS AVEC LES POUVOIRS EN PLACE. J’ASSIMILE LA FAÇON DONT LES SIGNES SONT AUJOURD’HUI PRESQUE EXCLUSIVEMENT UTILISÉS À UNE ENTREPRISE TOTALITAIRE DONT LES TENANTS DU POUVOIR NE SONT PLUS DES MILITAIRES, MAIS DES DÉTENTEURS DE CAPITAUX. POUR PARAPHRASER ROLLAND BARTHES, LE TOTALITARISME, CE N’EST PAS D’EMPÊCHER DE VOIR, C’EST D’OBLIGER À VOIR. » 22


Un système normalisé et corrosif

Pour reprendre le titre de l’ouvrage de Guy Debord, la société du spectacle n’a jamais été aussi présente. Ses valeurs de passivité, de séparation et d’appauvrissement ont maintenant laissé place à l’excès, la diversité et le(s) mélange(s) en tout genre. Gilles Lipovetsky et Jean Serroy dans L’esthétisation du monde décrivent ce phénomène comme l’âge de l’abondance spectaculaire par excès. Par cette avalanche d’images, c’est notre quotidien lui-même qui devient spectacle. On n’aura jamais vu autant de publicité dans les magazines ou dans nos boîtes aux lettres, comme de chaînes télévisées ou d’heures de programmation. C’est une véritable surenchère de spectacles.

L’univers du divertissement s’étend maintenant partout : de notre foyer jusqu’à l’espace public. Les villes qui autrefois cherchaient à créer des ambiances plus vivables pour leurs citoyens (comme par exemple en tentant de faire entrer la campagne dans la ville par le paysagisme) sont désormais le théâtre du plus grand spectacle marketing. D’après le philosophe Jean-Louis Sagot-Duvauroux, l’espace public de diffusion est alors désétatisé et devient la partie commune d’une vaste copropriété privée. 24 Cette démarche est devenue l’apanage du groupe industriel français (aujourd’hui leader mondial) spécialisé dans le mobilier urbain de communication extérieure JCDecaux. L’entreprise à elle seule ne compte pas moins d’un million de faces publicitaires dans plus de 55 pays. Nick Compton déclare, dans le magazine britannique i-D : « Le problème est qu’il n’y a plus de moyen d’expression que les marques ne possèdent ou ne contrôlent, ou contrôleront d’ici peu. » 25

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Un système normalisé et corrosif

Cette prolifération de publicité urbaine va même jusqu’à outrepasser la législation. L’implantation de panneaux publicitaires est régie par des lois.

Lois que certaines municipalités n’hésitent pas à transgresser avec, comme seule justification, la recherche du profit. La commune de Beure(25), à la lisière de Besançon qui continue d’implanter des panneaux publicitaires en son sein, alors qu’elle dépasse déjà du double la limite autorisée, en est le parfait exemple. François-Alexandre Guyot, du relais local de l’association Paysages de France (qui lutte contre les agressions visuelles de la publicité et milite pour la préservation de nos paysages) m’a déclaré lors d’un entretien : « Ils sont complètement hors la loi, mais l’important c’est que ça rapporte à la commune. » Nicolas Guillemet, élu écologiste de la ville et de l’agglomération de Besançon, reste complètement désorienté quand on l’interroge sur la situation de la ville de Beure. Le plus inquiétant étant que la quasi-totalité des panneaux enlevés pour raisons légales ont été réimplantés ailleurs. Comme l’a exprimé mon interlocuteur : « Pourquoi définit-on des lois si c’est pour ne pas les respecter ? » 26


Un système normalisé et corrosif

Communiquer dans l’espace urbain a toujours participé à son esthétique, à sa mise en forme, à sa structuration. Alors que la notion d’esthétique est très présente dans notre société de consommation, on constate a contrario que l’on ne se préoccupe que trop peu du paysage de plus en plus négligé de nos villes.

Cette visible surproduction et surexposition produit une forte pollution visuelle. Certaines municipalités semblent néanmoins se soucier de ces enjeux, notamment Grenoble (38) qui prévoit d’interdire la publicité en ville, jugée trop « obsolète » et trop « agressive », afin de mettre en place une communication plus « libre, culturelle et citoyenne ». 27

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Un système normalisé et corrosif

Désorientation

Le constat établi par François Brune est indéniable : il y a tellement d’images dans notre environnement que l’on ne les voit même plus. La pollution visuelle entraîne une saturation de notre regard. L’authenticité laisse place à la vulgarisation. La domination matérielle et symbolique du pouvoir capitaliste sur la production des signes crée une linéarité propre à la pensée marketing : toutes les images se ressemblent, il n’y a plus aucune différenciation. Ce collaborateur du journal Le Monde Diplomatique surnomme cet impact sur notre perception de l’image « les grandes manœuvres de l’opium quotidien. » 28

« NOUS

NOUS

LA

[...]

MASSE.

SOMMES

SOMMES

CET HOMME  DE  LA  RUE, PRIS DANS L’EMBOUTEILLAGE MENTAL    DES SIGNAUX  QUI LE CERNENT,  POUR QUI LE CHAMP  PUBLICITAIRE  TIENT LIEU  DE CHAMP DE CONSCIENCE. » 29


Un système normalisé et corrosif

Cette

C A T A S T R O P H E

V I S U E L L E

décrite par Gilles Lipovetsy et Jean Serroy, enfonce l’image dans une dé-fonctionnalisation inquiétante et perd de son rôle de passeur d’idées. Les signes n’offrent plus aucune notion et ne répondent qu’au seul conformisme consumériste, comme les phénomènes de mode.

Rick Poynor traduit cette absence de fonctionnalisme par la création d’un gouffre entre l’image et la réalité : un trop-plein de manipulation par l’image pour attirer l’attention 30, et qui réduit les valeurs de la société à du rêve. Les publicitaires s’en vantent même : « La publicité est la poésie de la consommation, nous vendons du rêve. » 31 Dans sa fonction de faire croire à l’individu que la consommation va suffire à sa vie socioculturelle, la publicité dénature la notion même de rêve en voulant l’assujettir à l’achat : comme si tous les rêves devaient se résoudre en rêve d’avoir. C’est une incontrôlable modélisation de l’inconscient.

« Le message publicitaire a pour but immédiat de créer un complexe de manque pour engendrer un réflexe d’achat et à plus long terme faire accepter les rapports d’exploitation de la société capitaliste. » 32

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Un système normalisé et corrosif

De ce fait, la distinction entre communication culturelle et communication commerciale se veut de moins en moins facile à percevoir. Malgré qu’elles utilisent toutes les deux l’image pour transmettre un message, elles ne le font pas aux mêmes fins. La privatisation du paysage public fait passer la publicité commerciale au-dessus de toutes les formes de communication d’intérêt public. Le mobilier de communication urbaine de l’entreprise JCDecaux (évoqué précédemment) agence ces deux formes de communication sur le même plan, en accordant sa face la plus visible (en général, dans le sens de la circulation) à la communication marketing. On assiste à une uniformisation si forte de la communication d’intérêt public et de la publicité commerciale qu’il devient difficile de les distinguer l’une de l’autre. Cette dépersonnalisation engendre un paysage visuel froid, monotone, sans âme. Pour pallier cet aplanissement, des pays comme l’Allemagne et les Pays-Bas ont dissocié les espaces de communication entre culturels et commerciaux.

La dégradation de l’espace visuel urbain entraîne un véritable changement de statut de l’image, ainsi que la perte de notre sensibilité pour cette dernière. L’image devient un tel simulacre, qui se place entre nous et la réalité, qu’il devient impossible de démêler le vrai du faux, de faire la différence entre une communication d’intérêt public ou une banale stratégie commerciale. Cette responsabilité du design marketing dans la crise de l’image a été invoquée par Hugues Boekraad dans sa monographie de Grapus. 33 Selon le philosophe Jean-Louis Sagot-Duvauroux , la dé-symbolisation des signes et des images provoque une dévastatrice perte de confiance en ce langage qu’est la communication visuelle. 34

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Un système normalisé et corrosif

Culture visuelle de masse

« Toute culture peut être considérée comme un ensemble de systèmes symboliques. [...] Tous ces systèmes visent à exprimer certains aspects de la réalité physique et sociale, et plus encore, les relations que ces deux types de réalités entretiennent entre eux et que les systèmes symboliques eux-mêmes entretiennent les uns avec les autres. » 35 46


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Selon l’Oxford English Dictionnary, la culture est le nom de code représentant la conduite de la pensée et du comportement humain ; elle relève du concept de la gestion. Cette définition correspond au pouvoir de contrôle de la culture que s’est accaparé la société de consommation. La production culturelle s’organise comme une industrie et on assiste à la marchandisation de la culture. Hal Foster, dans son ouvrage Design & Crime, décrit le passage de la culture du marketing au marketing de la culture. Le designer graphique et critique Michael Bierut illustre ce phénomène par le rapprochement fonctionnel du musée et du centre commercial : les musées s’organisent comme des revendeurs de la culture, avec magasin de divers produits dérivés ; les centres commerciaux agencent de plus en plus leur image, entre vitrines stylisées et espaces aux architectures artistiques. Comme le souligne le sociologue britannique Paul Baker :

« Je suis certain qu’un jour un centre commercial sera classé monument historique. » 36 Peu à peu, la culture est abandonnée par ses acteurs au profit des critères du marché de consommation. Désormais, la culture entre dans l’économie et l’économie dans la culture qui devient une industrie mondiale. De plus en plus, la culture (et plus spécifiquement l’art) apparaît comme une marchandise lambda, ce qui tend à donner un nouveau sens à ce terme.


Un système normalisé et corrosif

De ce fait, la culture visuelle se voit elle aussi transformée. D’après W.J.T. Mitchell 37, notre rapport à l’image et sa valeur dépend de ce qu’une culture lui incorpore et, comme nous l’avons vu précédemment, l’image est prise dans la consommation.

L’ouvrage l’esthétisation du monde décrit une forte dé-symbolisation de l’image : aujourd’hui le message n’est plus fait pour dire, mais pour éberluer. Ce manque d’implication entraîne un langage ordinaire du regard, une dégradation de l’image de la ville et donc de son esprit : c’est l’esthétisme consommatoire qui domine aujourd’hui notre culture visuelle.

Dans son essai sur la normalisation publicitaire, François Brune décrit la publicité comme l’arme culturelle d’une oppression économique, au même titre que l’arme économique d’une aliénation culturelle. 38 L’art est l’instrument de vente de la publicité et valorise son institution : elle lui confère une légitimation socioculturelle. Des musées de la publicité voient le jour, tout comme de nombreuses manifestations culturelles, telles que le festival du film publicitaire ; une émission télévisuelle retraçant – selon eux – les meilleures publicités va jusqu’à arborer pompeusement le nom de

Culture Pub.

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Un système normalisé et corrosif

Selon Rick Poynor, la publicité est désormais la culture qui définit tout le reste. Si, comme le souligne le célèbre historien de l’art Ernst Gombrich :

« LE MONDE RESSEMBLE AUX IMAGES QU’ON FAIT DE LUI » alors

LA PUBLICITÉ NE FAIT PAS PARTIE DE LA CULTURE DOMINANTE, C’EST LA CULTURE

DOMINANTE

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Table des matières

Préambule Avant-propos

p. 5 p. 7

DES OBSERVATIONS DE LA CIVILISATION MODERNE

p. 11

Une société monotone et totalitaire

La consommation : un modèle grande vitesse L’art du capitalisme : l’esthétique commerciale De citoyen à consommateur : un problème d’identité

p. 12 p. 15 p. 18

Un système normalisé et corrosif

L’appropriation du potentiel de l’image La surexposition au regard Désorientation Culture visuelle de masse

p. 22 p. 26 p. 43 p. 46

LES SIGNES D’UN PAYSAGE VISUEL EN MOUVEMENT

p. 51

Diverses marques d’un bouleversement professionnel

Plusieurs mutations de l’environnement Entre changement de statut et rapport de force Différents retentissements sur l’activité graphique

p. 52 p. 56 p. 60

Des perspectives pour un renouveau ?

Des constats révélateurs d’une urgence Des conditions particulièrement françaises Une certaine idéologie du travail En guise de perspectives : quelques orientations possibles

p. 109 p. 116 p. 120 p. 128

Notes Bibliographie Iconographie Informations complémentaires

p. 147 p. 150 p. 152 p. 157



Notes

Préambule & Introduction 1 • Entretien avec Thierry Sarfis, 27 novembre 2014. 2 • Guy Debord, La Société du spectacle, Gallimard, Folio, 1992, p. 39. 3 • Paul Dickinson et Neil Svensen, Beautiful Corporation : Corporate Style in Action, Edinburgh et Londres : Pearson Education, 2000, p. 15.

p. 5 p. 7 p. 8

DES OBSERVATIONS DE LA CIVILISATION MODERNE Une société monotone et totalitaire La consommation : un modèle grande vitesse 1 • Colin Jacobson, Friends of Foe?, Creative Review, novembre 2000, p. 47. 2 • Jean Baudrillard, Pour une critique de l’économie politique du signe, Gallimard, 1972, pp. 154-168. 3 • Peter Gay, The Enlightenment : An interpretation, vol. 2 : Science of Freedom, Wildwood House, 1973, p. 3. 4 • Zygmunt Bauman, La vie liquide, Fayard, Collection Pluriel, 2013. 5 • Dany-Robert Dufour, L’Art de réduire les têtes : Sur la nouvelle servitude de l’homme libéré à l’ère du capitalisme total, Denoël, p. 69.

p. 12 p. 13 p. 13 p. 14 p. 14

L’art du capitalisme : l’esthétique commerciale 6 • Zygmunt Bauman, La vie liquide, Fayard, Collection Pluriel, 2013, p. 127. 7 • François Brune, Le bonheur conforme : Essais sur la normalisation publicitaire, éditions de Beaugies, 2012, p. 40.

p. 17 p. 17

De citoyen à consommateur : un problème d’identité 8 • Gilles Lipovetsky et Jean Serroy, L’esthétisation du monde : Vivre à l’âge du capitalisme artiste, Gallimard, 2013, p. 325. 9 • Zygmunt Bauman, La vie liquide, Fayard, Collection Pluriel, 2013, p. 16. 10 • Ibid, pp. 59-60. 11 • Thierry Sarfis, Sortir du graphisme de caserne, 2010.

p. 18 p. 18 p. 18 p. 20

Un système normalisé et corrosif L’appropriation du potentiel de l’image 12 • William John Thomas Mitchell, Iconologie : Image, Texte, Idéologie, Les Prairies Ordinaires, Collection Penser/croiser, 2009, p. 235. 13 • Jan Kounen, 99 francs, 1h39, 2007 14 • Article issu du site web llllitl.fr : Les annonceurs qui ont le plus dépensé en publicité dans le monde, décembre 2012. 15 • François Brune, Le bonheur conforme : Essais sur la normalisation publicitaire,  éditions de Beaugies, 2012. 16 • Phrase d’accroche issue de la campagne télévisuelle 2013-2014. 17 • Blaise Candrars, Aujourd’hui, Le Crapouillot, 1927. 18 • Paul Valéry, Regards sur le monde actuel, Paris, Gallimard, Folio Essais, 1988, p. 75.

p. 22 p. 22 p. 22 p. 23 p. 24 p. 24 p. 25


Notes

La surexposition au regard 19 • Maxime Boidy et Stéphane Roth, L’indiscipline de l’image, dans William John Thomas Mitchell, Iconologie : Image, Texte, Idéologie, Les Prairies Ordinaires, Collection Penser/croiser, 2009. 20 • La publicité est partout, article tiré du Réseau Éducation-Médias. 21 • William S. Burroughs, James Gauerholz et Ira Silverberg (eds.), Word Virus : The William Burroughs Reader, Londres, Flamingo, 1999, p. 304. 22 • Vincent Perrottet, La loi du marché sur la tête, Communiqué de Presse, Exposition La Traverse, 2010, p. 2. 23 • Joe Carnahan, L’Agence tous risques, 1h59, 2010. 24 • Thierry Sarfis, Graphisme et pouvoir, Carnet du centre du graphisme  et de la communication visuelle d’Échirolles, 2004, p. 8. 25 • Nick Compton, The revolution will not be franchised, i-D, n°205, janvier 2001, p. 85. 26 • Entretien avec François-Alexandre Guyot, Association Paysages de France, Besançon, 7 novembre 2014. 27 • Le Nouvel Observateur, Grenoble veut bannir les publicités de ses rues, 23 novembre 2014.

p. 26 p. 26 p. 26 p. 27 p. 28 p. 28 p. 28 p. 29 p. 30

Désorientation 28 • François Brune, Le bonheur conforme : Essais sur la normalisation publicitaire, éditions de Beaugies, 2012, pp. 17-67. 29 • Ibid, p. 9. 30 • Rick Poynor, La loi du plus fort. La société de l’image, Pyramid, 2002, pp. 116-117. 31 • François Brune, Le bonheur conforme : Essais sur la normalisation publicitaire, éditions de Beaugies, 2012, p. 25. 32 • Thierry Sarfis, Sortir du graphisme de caserne, 2010. 33 • Hugues Boekraad, Mon Travail Ce N’est Pas Mon Travail - Pierre Bernard, Design Pour Le Domaine Public, Lars Müller Publishers, 2007. 34 • Thierry Sarfis, Graphisme et pouvoir, Carnet du centre du graphisme et de la communication visuelle d’Échirolles, 2004, p. 12.

p. 43 p. 43 p. 44 p. 44 p. 44 p. 45 p. 45

Culture visuelle de masse 35 • Claude Levis-Strauss, Introduction à l’œuvre de Marcel Mauss, dans Marcel Mauss, Sociologie et anthropologie, Pairs, P.U.F., 1960. 36 • Paul Baker, Malls are Wonderful, Independant on Sunday, 28 octobre 1998, p. 12. 37 • William John Thomas Mitchell, Iconologie : Image, Texte, Idéologie, Les Prairies Ordinaires, Collection Penser/croiser, 2009, p. 5. 38 • François Brune, Le bonheur conforme : Essais sur la normalisation publicitaire, éditions de Beaugies, 2012, p. 268. 39 • James B. Twitchell, Adcult USA : The triumph of Advertising in American Culture, New York, Columbia University Press, 1996.

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Notes

LES SIGNES D’UN PAYSAGE VISUEL EN MOUVEMENT Diverses marques d’un bouleversement professionnel Plusieurs mutations de l’environnement 1 • Entretien avec Thierry Sarfis, 27 novembre 2014. 2 • Gilles Lipovetsky et Jean Serroy, L’esthétisation du monde : Vivre à l’âge du capitalisme artiste, Gallimard, 2013, pp. 48-49. 3 • Non à l’exploitation du travail gratuit comme modèle de réussite en France, Lettre ouverte à Madame Axelle Lemaire, http://www.travailgratuit.com/, 2014. 4 • Cécilia Di Quinzio, Graphistes en colère : le débat continue, Télérama.fr, Arts & Scènes, 10 juillet 2013. 5 • Metropolis M magazine, Research & Destroy : Graphic Design as Investigation, n°2, 2006.

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Entre changement de statut et rapport de force 6 • Richard Lagrange, Editorial de Graphisme en France, Centre National des Arts Plastiques, 2014, p. 9. 7 • Entretien avec Thierry Sarfis, 27 novembre 2014. 8 • Rick Poynor, La loi du plus fort. La société de l’image, Pyramid, 2002, p. 58. 9 • Thierry Sarfis, Graphisme et pouvoir, Carnet du centre du graphisme et de la communication visuelle d’Échirolles, 2004.

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Différents retentissements sur l’activité graphique 10 • Ibid, p.17. 11 • Xavier de Jarcy, Graphistes en colère : pourquoi ils ne veulent plus “fermer leur gueule”, Télérama.fr, Arts & Scènes, 1er juillet 2013. 12 • Cécilia Di Quinzio, Graphistes en colère : le débat continue, Télérama.fr, Arts & Scènes, 10 juillet 2013. 13 • Guide de la commande de design graphique, Centre National des Arts Plastiques, 27 octobre 2014. 14 • Xavier de Jarcy, Les graphistes en colère enfin entendus ?, Télérama.fr, Arts & Scènes, 4 décembre 2014. 15 • Rick Poynor, La loi du plus fort. La société de l’image, Pyramid, 2002, p. 122.

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Des perspectives pour un renouveau ? Des constats révélateurs d’une urgence 16 • Rick Poynor, La loi du plus fort. La société de l’image, Pyramid, 2002, pp. 136-140. 17 • Ibid, pp. 141-144. 18 • Vincent Perrottet, Partagez le regard, http://www.partager-le-regard.info/, 2013. 19 • Cole Peters, First Thing First 2014, http://firstthingsfirst2014.org/, 2014. 20 • William John Thomas Mitchell, Iconologie : Image, Texte, Idéologie, Les Prairies Ordinaires, Collection Penser/croiser, 2009, p. 20. 21 • Massimo Vignelli, The First Symposium on the History of Graphic Design, USA, 1938.

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Notes

Des conditions particulièrement françaises 22 • Alain Weill, Le Design Graphique, Gallimard, Collection Découvertes, 2003, p. 18. 23 • Assma Maad, Les Français toujours aussi faibles en anglais, Le Figaro, novembre 2012. 24 • Laurent Goulvestre, Manchote de la mondialisation : la France manque-t-elle de savoir-être interculturel ?, 2013. 25 • Xavier de Jarcy, Graphistes en colère : pourquoi ils ne veulent plus “fermer leur gueule”, Télérama.fr, Arts & Scènes, 1er juillet 2013. 26 • Catherine de Smet, Graphisme en France, Centre National des Arts Plastiques, 2003.

p. 116 p. 116 p. 116 p. 117 p. 119

Une certaine idéologie du travail 27 • Graphisme en France, Centre National des Arts Plastiques, 2014. 28 • Metahaven, Uncorporate Identity, Lars Müller Publishers, 2010. 29 • Entretien avec François-Alexandre Guyot, Association Paysages de France, Besançon, 7 novembre 2014. 30 • Rick Poynor, La loi du plus fort. La société de l’image, Pyramid, 2002, pp. 185-188. 31 • Jorge Frascara, Graphic design : fine art or social science ?, dans Victor Magolin et Richard Buchanan (eds.), The idea of Design : A Design Issues Reader, Cambridge, Mass. et Londre : MIT Press, 1995, pp. 44-55 32 • William John Thomas Mitchell, Iconologie : Image, Texte, Idéologie, Les Prairies Ordinaires, Collection Penser/croiser, 2009, p. 15. 33 • Entretien avec Thierry Sarfis, 27 novembre 2014. 34 • Dominique Quessada, L’esclavemaître, Paris, Édition Verticales/Éd. Le Seuil, 2002, p. 110. 35 • Ibid, p. 111. 36 • Vincent Perrottet, La loi du marché sur la tête, Communiqué de Presse, Exposition La Traverse, 2010, p. 1. 37 • Rick Poynor, La loi du plus fort. La société de l’image, Pyramid, 2002, p. 12. 38 • Thierry Sarfis, Sortir du graphisme de caserne, 2010.

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En guise de perspectives : quelques orientations possibles 39 • Alain Weill, Le Design Graphique, Gallimard, Collection Découvertes, 2003, p. 46. 40 • Ibid, p. 42. 41 • Marek Wieczorek, Maison Rietveld Schröder, Centraal Museum Utrecht, Wikipedia.fr 42 • Xavier de Jarcy, Graphistes en colère : pourquoi ils ne veulent plus “fermer leur gueule”, Télérama.fr, Arts & Scènes, 1er juillet 2013. 43 • Ibid. 44 • W.J.T. Mitchell, Iconologie : Image, Texte, Idéologie, The university of Chicago Press, 1986, p. 19 45 • Entretien avec Thierry Sarfis, 27 novembre 2014. 46 • Xavier de Jarcy, Graphistes en colère : pourquoi ils ne veulent plus “fermer leur gueule”, Télérama.fr, Arts & Scènes, 1er juillet 2013. 47 • Critical Art Ensemble, Ekectronic Civil Disobedience and Other Unpopular Ideas, Brooklin : Autonomedia, 1996, p. 24.

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Notes

En guise de perspectives : quelques orientations possibles 39 • Alain Weill, Le Design Graphique, Gallimard, Collection Découvertes, 2003, p. 46. 40 • Ibid, p. 42. 41 • Marek Wieczorek, Maison Rietveld Schröder, Centraal Museum Utrecht, Wikipedia.fr 42 • Xavier de Jarcy, Graphistes en colère : pourquoi ils ne veulent plus “fermer leur gueule”, Télérama.fr, Arts & Scènes, 1er juillet 2013. 43 • Ibid. 44 • W.J.T. Mitchell, Iconologie : Image, Texte, Idéologie, The university of Chicago Press, 1986, p. 19 45 • Entretien avec Thierry Sarfis, 27 novembre 2014. 46 • Xavier de Jarcy, Graphistes en colère : pourquoi ils ne veulent plus “fermer leur gueule”, Télérama.fr, Arts & Scènes, 1er juillet 2013. 47 • Critical Art Ensemble, Electronic Civil Disobedience & Other Unpopular Ideas, Brooklin : Autonomedia, 1996, p. 24. 48 • Negativeland, cité dans Mark Dery, Culture Jamming : Hacking, Slashing, and Sniping il the Empire of Signs, Westerfield, NJ : Open Magazine Pamphlet Serie, 1993, p. 6. 49 • Ken Garland, First things first : a manifesto, dans A Word in your Eye, 1964, p. 30. 50 • Rick Poynor, La loi du plus fort. La société de l’image, Pyramid, 2002, p. 148-149. 51 • Knowbotic Research, dans Mark Tribe et Reena Jana, Art des nouveaux médias, Taschen, 2006, p. 56. 52 • Marie-José Mondzain, cité dans Corentin Mallet, Ma ville, ma muse (Ma ville m’amuse), 2013. 53 • William John Thomas Mitchell, Iconologie : Image, Texte, Idéologie, Les Prairies Ordinaires, Collection Penser/croiser, 2009, p. 51. 54 • Gaston Bachelard, L’air et les songes : essai sur l’imagination du mouvement, Introduction, Paris : Librairie José Corti, 1943, p. 5-6. 55 • Catherine McCoy, Countering the Tradition of the apolitical designer, dans Essay on Design 1 : AGI’s Designers fo Influence, Londres : Booth-Clibborn Édition, 1997, p. 90. 56 • Rick Poynor, La loi du plus fort. La société de l’image, Pyramid, 2002, p. 131. 57 • Kalle Lasn, The meme wars, Adbusters, n°23, Project of revolution, automne 1998, p. 7. 58 • Thierry Sarfis, Sortir du graphisme de caserne, 2010, p. 2. 59 • Rick Poynor, La loi du plus fort. La société de l’image, Pyramid, 2002, p. 13. 60 • Vincent Perrottet, La loi du marché sur la tête, Communiqué de Presse, Exposition La Traverse, 2010, p. 3-4. 61 • Pica Magazine, n°2, La transformation, Université du Québec à Montréal, Montréal, 2012.

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Bibliographie

Ouvrages • Zygmunt Bauman, La vie liquide, Fayard, Collection Pluriel, 2013. • François Brune, Le bonheur conforme : Essais sur la normalisation publicitaire, éditions de Beaugies, 2012.

Magazines

• Gilles Lipovetsky et Jean Serroy, L’esthétisation du monde : Vivre à l’âge du capitalisme artiste, Gallimard, 2013.

• Graphisme en France, Centre National des Arts Plastiques, Paris, 2014.

• William John Thomas Mitchell, Iconologie : Image, Texte, Idéologie, Les Prairies Ordinaires, Collection Penser/croiser, 2009.

• Pica Magazine, n°2, La transformation, Université du Québec à Montréal, Montréal, 2012.

• Rick Poynor, La loi du plus fort. La société de l’image, Pyramid, 2002. • Thierry Sarfis, Graphisme et pouvoir, Carnet du centre du graphisme et de la communication visuelle d’Échirolles, 2004. • Alain Weill, Le Design Graphique, Gallimard, Collection Découvertes, 2003.

Articles • Xavier de Jarcy, Graphistes en colère : pourquoi ils ne veulent plus “fermer leur gueule”, Télérama.fr, Arts & Scènes, 1er juillet 2013. • Cécilia Di Quinzio, Graphistes en colère : le débat continue, Télérama.fr, Arts & Scènes, 10 juillet 2013.


Bibliographie

Événements Manifestes • Divers auteurs, First Things First 2000, dans le magazine Adbusters, 1999-2000. • Ken Garland, First things first : a manifesto, dans A Word in your Eye, 1964. • Vincent Perrottet, Partagez le regard, http://www.partager-le-regard.info/, 2013.

• Festival international de l’affiche et du graphisme, Chaumont, 2010-2014. • Entretien avec François-Alexandre Guyot, association Paysage de France, Besançon, 7 novembre 2014. • Séminaire What Design Can Do, Amsterdam, 8 et 9 mai 2014. • Laurent Devèze, Séminaire philosophique Qu’est ce que communiquer ?, Institut Supérieur des Beaux-Arts de Besançon, 2014.

• Cole Peters, First Thing First 2014, http://firstthingsfirst2014.org/, 2014. • Rick Poynor, First Things First Revisited, dans le magazine Emigre, 1999-2000.

Textes • Non à l’exploitation du #travailgratuit comme modèle de réussite en France, Lettre ouverte à Madame Axelle Lemaire, http:// www.travailgratuit.com/, 2014. • Thierry Sarfis, Sortir du graphisme de caserne, 2010. • Vincent Perrottet, La loi du marché sur la tête, Communiqué de Presse, Exposition La Traverse, 2010.


Iconographie


Iconographie


Iconographie

Page 8 :

Page 16 :

Shi-Zhe Yung, Corporate flag, magazine Adbuster, drapeau, 2000.

Paul Rand, Eye-Bee-M, IBM, logo et affiche, 1981.

Page 20-21 :

Page 23 :

Andreas Gursky, 99 Cents, Histoire des arts, photographie, 1999.

Mathieu Wolff, E.Leclerc / Mai 68, agence Australie, affiches, 2010.

Page 27 : Divers auteurs, Votre publicité ici, Google image, bannières web, 2014.

Page 31-41 : Paysages de France, Kivoitou, association Paysages de France, édition, 2012.

Page 53 : Angus Hyland, Symboles : quand la marque se fait emblème, édition Pyramid, couverture, 2010.

Page 58 : Divers auteurs, Graphisme en France 1995-2015, dans Graphisme en France 2014, couverture des 20 éditions, 2014.

Page 62 : Flore Canova, Mathieu Potevin, Geoffroy Sampaolo et Jérémie Tourant, Vous le voulez comment votre projet ? IAM architectes, affiche, 2012.

Page 63-108 : Frank Adebiaye, La commande de design graphique, Centre National des Arts Plastiques (CNAP), édition, 2014.


Iconographie

Page 110-111 :

Page 118-119 :

Ken Garland, First Things First, journal The Guardian, texte / manifeste, 1964.

Fanny Garcia et Jack Usine (GUsto), Cnocession Souvenir, zirkumflex, édition, 2010.

Page 123 :

Page 126 : Andre Baldinger (Baldinger•Vu-Huu), 87 pictogrammes, APRR, identité visuelle et signalétique, 2012.

Christophe Jacquet, 24e Festival international de l’affiche et du graphisme, CIG-Chaumont, affiche, 2013.

Page 128 : Karin van der Brandt et Alex Clay (Lesley Moore), LOVE, Lesley Moore, image, 2014.

Page 129-131 : Page 133 : Jeroen Barendse, Thomas Castro et Dimitri Nieuwenhuizen (LUST), Posterwall 2.0, Walker Art Center, projection, 2010. Page 134 : Jonathan Barnbrook, Designers, stay away from corporations that want you to lie for them, magazine Adbuster, photographie, 1991.

Karin van der Brandt et Alex Clay (Lesley Moore), Andrés Ramírez Gaviria, Lesley Moore et Onomatopee, édition, 2012.

Page 136 : Joseph Kosuth, One and three chairs, Centre Pompidou, photographie, 1965.



Directeur de mémoire : Michel Collet. Rédaction et mise en page : Thomas Perrin. Traduction française des manifestes : Slater, Clare Desperonnat. Relecture : Pierre-Noël Bernard, Anaïs Maillot-Morel, Sylvie Trillat. Impression : Simon graphic (ZI Noirichaud 25290 Ornans, France). Papiers : Intérieur, freelife cento (140 g/m2) et symbol freelife satin (150 g/m2). Couverture, plike noir 2 face (330 g/m2). Typogaphies : Akkurat (Laurenz Brunner, Lineto). Lyon (Kai Bernau, Carvalho Bernau). Remerciements : Pierre-Noël Bernard, Mélissa Bojama, Michel Collet, Clare Desperonnat, Christophe Gaudard, François-Alexandre Guyot, Anaïs Maillot-Morel, Nanta Novello-Paglianti, Pierre-Jean Perrin, Thierry Sarfis, Tassadit Simon, Sylvie Trillat.





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