du fond
des gorges
Côté public
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Séances spéciales • Surtitrage français Vendredi 17 février • Surtitrage allemand Samedi 18 février Rencontre • Théâtre en pensées avec Pierre Meunier, rencontre animée par Emmanuelle Ebel (département des arts du spectacle de l’Université de Strasbourg) Samedi 18 février à 16h - Salle Gignoux • Bord de plateau à l’issue de la représentation Samedi 18 février Atelier de critique théâtrale Autour de Du fond des gorges. Avec Barbara Engelhardt, journaliste Lundi 20 février à 18h30 • Librairie Quai des Brumes Inscription obligatoire : l.besnier@tns.fr • 03 88 24 88 47
du fond des gorges Projet de Pierre Meunier Fabrication collective
Assistanat à la dramaturgie Emma Morin • Son Alain Mahé • Lumières Bruno Goubert • Collaboration artistique Marguerite Bordat • Construction Jeff Perlicius • Régie générale Jean-Marc Sabat • Régie plateau Freddy Kunze • Régie son Géraldine Foucault • Chargée de production Claudine Bocher Avec, par ordre alphabétique Pierre-Yves Chapalain François Chattot Freddy Kunze Pierre Meunier Équipe technique du TNS Régie générale Yann Argenté • Régie plateau Arthur Plath • Régie lumière Christophe Leflo de Kerleau • Régie son Hubert Pichot • Habilleuse Joëlle Gitchenko • Lingère Charlotte Pinard-Bertelletto
Du mardi 31 janvier au vendredi 24 février 2012 Horaires : du mardi au samedi à 20h, dimanches 12 et 19 février à 16h Relâche : les lundis et dimanche 5 février Salle Hubert Gignoux Durée : 1h45 > Coproduction du TNS Coproduction La Belle Meunière (www.labellemeuniere.fr), le Théâtre Dijon-Bourgogne-CDN, le Théâtre National de Strasbourg, le Théâtre de la Bastille à Paris, La Rose des Vents-Scène nationale Lille métropole-Villeneuve d’Ascq, le Théâtre de Brétigny-Scène conventionnée du Val d’Orge, l’Espace Malraux-Scène nationale de Chambéry et de la Savoie. Avec l’aide à la production d’ARCADI. Avec le soutien du Ministère de la Culture-DRAC Auvergne et du Conseil Régional d’Auvergne. Ce texte a reçu l’aide à la création du Centre national du théâtre (CNT). > Spectacle créé au Théâtre Dijon-Bourgogne-CDN le 8 novembre 2011.
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Nous utilisons un verbe, et nous voilĂ sujet. Fernand Deligny
L'air, le souffle : éléments essentiels, constitutifs, de la parole. Le pneumatique, donc. L'air comprimé. Le mot est une réalité pneumatique. Un atelier de pneus, de réparations de pneus. Dans l'ombre, un manœuvre qui semble chez lui dans ce foutoir : Freddy Kunze, régisseur du plateau et déclencheur d'évènements en tous genres. Une montagne de pneus à regonfler, comme les mots auxquels réinsuffler de l'espace et de la résonnance. Ces pneus nous seront-ils d'aucun secours ? Pneumatisation de la voix, débit, flux, pression et obstruction... Compresseurs. Clapets. Vannes de décharge. Dérèglements et emballements. Pneus usés, mots usés, bouches mortes. Un cimetière du mouvement, réel et imaginaire. Les trois types s'acharnant à regonfler ces molles coquilles vides. Juchés sur la montagne de caoutchouc, pour éprouver leur puissance à dire. Puis écroulés, épuisés, sous le poids de la tâche qui leur tombe dessus. Ce monceau de pneus et de chambres à air ainsi que de l'air comprimé en quantité vont constituer la matière principale des expériences menées sur le plateau. Pierre Meunier 5
— Être nu, dit‑il, c’est être sans parole. […] En jetant la parole, l’orateur projette certes une force qui provient de lui, que porte la buée sortie de sa bouche, qui se confond avec la buée. Mais cette force ne fait que préfigurer celle de l’invoqué, elle l’informe, elle la met en voix. Et cette forme, qui sera la meilleure pour l’appeler, va comme piéger sa force vitale, va l’obliger à comparaître, à surgir à la voix. […] — L’animal, dit‑il, est supérieur à l’homme, car il est de la brousse, et il n’est pas astreint au travail. Beaucoup de bêtes se nourrissent de ce que l’homme cultive avec peine. Il allait même jusqu’à dire que les animaux étaient plus perfectionnés que les hommes, attendu qu’ils n’avaient pas la parole. Entendait‑il par là que la parole, véhicule du progrès, fondement de l’organisation du monde, était finalement une calamité ? Voulait‑il dire que la parole était en quelque sorte née du désordre parce que nécessaire au rétablissement de la marche normale des choses ? Voulait‑il dire que si le monde s’était développé sans heurt sur la base originelle, point n’était besoin de parole, ni de techniques, les deux choses étant étroitement liées ? Voulait‑il dire que les animaux étaient à l’abri des désastres humains ?
Geneviève Calame-Griaule
Éthonologie et langage, La parole chez les Dogon, Éd. Lambert Lucas Limoges, 2009.
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Y aurait-il des choses qui habitent les mots plus volontiers, et qui s'accordent avec eux – ces moments de bonheur qu'on retrouve dans les poèmes avec bonheur, une lumière qui franchit les mots comme en les effaçant – et d'autres choses qui se cabrent contre eux, les altèrent, qui les détruisent : comme si la parole rejetait la mort, ou plutôt, que la mort fît pourrir même les mots ?
Philippe Jacottet
L'encre serait de l'ombre, Éd. Gallimard, coll. poésie, 2011, p. 253
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Mes mots d’avant la mort seront le prolongement de moi-même un long silence de connivence avec le monde. J’ignore les vérités qui s’offrent à vos gorges dans le dédale du sens unique. La mienne reste muette et libère mon esprit de cet attachement d’être entendue dans l’instant. Rien dans mon expérience de l’usage des mots ne retient ma mémoire ouverte à dire autrement ce que je dis. Je ne suis pas embarquée en croisière long time des mots pour le dire mais des mots pour penser. La perméabilité de nos espaces mentaux articule à l’infini l’être autour de lui-même. L’espace infini se définit de lui-même sans fin, articulé en permanence entre les espaces infinis de chaque être. Nous sommes bercés par les mots de l’autre depuis la naissance. L’appartenance répond à la culture collective mise en semence sans autre expérience que la reproduction de soi dans l’autre. Elle affecte notre regard sur l’essence même du mouvement intemporel de nos êtres libres d’appartenance. La pensée rêveuse sillonne nos retranchements mélancoliques, habite nos nuances dans la palette existentielle, peut-être est-ce cela la richesse de notre univers sans énonciation. Tous les mots se disent dans mon silence. J’ai souvent oublié de me taire face à l’univers mal énoncé. L’oubli est une sauvegarde naturelle souhaitée inconsciemment. Il n’est pas lié à la parole juste à l’être lui-même. En spectatrice des mots des autres, je découvre l’habileté motrice propre à chacun. Je vois dans les corps animés par la sortie des mots, des mécaniques en mouvement. J’ignore si cet acte te transforme. Ma vision demeure mon acte. Tu ne dis pas cela mais écris cela. La transformation du dire appartient à l’énigme de la pensée. L’idée même opprime le détenu, prisonnier de cette pensée sans issue. Qui es tu sans le dire ? Un détenu en cavale la pensée aux trousses… Tu serais cloîtré vivant dans le fond de ta gorge. Détenu sans permission mais libre dans cette tête insondable. 8
Us et coutumes, deux mots pour farcir les cerveaux fraîchement débarqués. Servir de décharge onomatopéique, jeu guttural inventé pour remplir les espaces iconoclastes. Les espaces plein de mots sont victimes d’une perte de sens. L’oraison funèbre de la raison dessine un cloître de dépossession. Les détenus s’organisent peuvent sortir sans permission pour jouer au jeu de la cacophonie. KpaciT aurifeR rime dans j’irai cracher sur vos tombes avec Mort subiT en enfeR Posséder des mots décapitalise l’innocence des êtres. Sens commun, détenu, prison ferme à perpétuité.
Babouillec, autiste privée de parole
Le 15 juillet 2011, en écho au dossier sur le projet Du fond des gorges
Les mots sont faits pour être soulevants, car nous avons besoin d’être soulevés. Marcel Moreau
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Un homme meurt, et pour la première fois on entend le silence de cette voix-là. Maurice Merleau-Ponty
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Ce qui distingue la poésie de la parole machinale, c’est que la poésie justement nous réveille, nous secoue en plein milieu du mot. Ce dernier se révèle alors à nous d’une étendue bien plus vaste que nous ne l’imaginons, et nous nous souvenons soudain que parler veut dire : se trouver toujours en chemin. Ossip Mandelstam
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La parole empirique est la pièce usée qu’on met en silence dans ma main. Stéphane Mallarmé
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À chaque mot dit, ma langue claque comme un fouet, sanctionnant le catapultage d'un grumeau de syllabes aérodynamiques évadées du corps. Une troupe d'oiseaux en vol envoyée en mission dans une direction déterminée. Piaillements de sens volant vers l'objectif déterminé par la tour de contrôle. Hypothèse : essaim bourdonnant, les mots cherchaient une espèce où se fixer, un abri sûr pour s'y établir et prospérer dans le respect et la considération. Masse vrombissante, profuse, dont chaque élément tressaillait du désir d'être dit. Nuée sonore en quête d'une espèce pensante qu'elle assisterait dans son effort d'articulation du sens, dans sa soif d'échanges nuancés et précis, dans la controverse fertile, dans la consolation exprimée, la déclaration d'amour, le défi à l'oppresseur... Les mots trouvèrent en l'homme un refuge bienvenu. Ils purent ainsi se développer, et assigner l'existence de l'homme à la perpétuation de leur espèce verbale. 17
Pierre Meunier
BiogrAphie Pierre Meunier Pierre Meunier est né en 1957. Il a suivi les formations dispensées par Pierre Étaix, Émilie Letendre, Clémence Massart, Philippe Caubère, Amy Lavietes. Il a été acrobate et clown avec le cirque du Puits aux Images entre 1979 et 1981. Il a notamment travaillé avec Pierre Étaix et Annie Fratellini dans Nouveau cirque de Paris ; avec Cécile Bon dans Steppes (1986) ; avec Zingaro ; avec le Théâtre de l’Unité dans L’Histoire du soldat de Ramuz et Stravinski ; avec Matthias Langhoff dans Don Giovanni de Mozart et Désir sous les ormes d’Eugène O’Neill ; avec François Tanguy et le Théâtre du Radeau dans Choral ; avec Philippe Nahon (Ars Nova) dans Les Naufragés de l’Olympe, fantaisie lyrique dont il a écrit le livret, musique de Giovanna Marini ; avec Isabelle Tanguy dans Feu d’après Luxun ; avec Joël Pommerat dans Pôle et Treize étroites têtes ; avec Jean-Paul Wenzel dans Caveo ; avec le Cabaret Dromesko dans La Baraque. Il a fabriqué et joué L’Homme de plein vent (avec Hervé Pierre), Le Chant du ressort (avec Isabelle Tanguy), Le Tas avec Jean-Louis Coulloc’h, Les Égarés, fabrication collective et Au milieu du désordre. Il a mis en scène Éloge du Poil de Jeanne Mordoj (2009). La même année, il crée SexAmor avec Nadège Prugnard et la compagnie La Belle Meunière. 18
Il devient directeur du Cube studio – Théâtre d’Hérisson en avril 2010. Il a conduit sur trois années un travail d’atelier avec des patients de l’hôpital psychiatrique d’Ainay-LeChâteau. Il participe au projet collectif Les Étonnistes avec Stéphanie Aubin, Christophe Huysman et Pascale Houbin. Il a également réalisé plusieurs courts métrages, Hoplà ! Hardi ! Asphalte, et une série de onze films autour de la matière intitulée Et ça continue !, présentée dans l’émission Histoires courtes sur France 2 en juillet 2007.
Directrice de la publication Julie Brochen Réalisation du programme Fanny Mentré avec la collaboration de Lorédane Besnier et Éric de La Cruz Crédits Photos du spectacle : Jean-Pierre Estournet Illustrations : p.4 Jean Dubuffet Le Métafizyx • pp.6 et 9 Pierre Alechinsky, illustrations pour Les tireurs de langues de Amos Kenan • p.7 Fernand Léger Les grands plongeurs noirs • p.16 Jean-Michel Basquiat • p.19 Fernand Léger Les constructeurs Graphisme Tania Giemza Édité par le Théâtre National de Strasbourg Kehler Druck/Kehl – Janvier 2012
Abonnements / Location 03 88 24 88 24 1, avenue de la Marseillaise BP 40184 F-67005 Strasbourg Cedex Téléphone : 03 88 24 88 00 Télécopie : 03 88 37 37 71 tns@tns.fr www.tns.fr
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SAison 11-12