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LES NOUVEAUX – JULIE LEDRU & OLIVIER BAYU GANDRILLE

LES NOUVEAUX

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Elle enflamme Rodeo, tempétueux premier film sur l’univers du cross bitume de Lola Quivoron, au cinéma en septembre. L’actrice et la réalisatrice viennent de remporter le prix de la critique au Champs-Élysées Film Festival, après le Prix coup de cœur du jury Un certain regard à Cannes.

« Enfourcher une moto, c’est se créer une bulle de bonheur et d’adrénaline que l’on déplace avec soi, un bon gros shoot de liberté », analyse Julie Ledru, originaire du Val-d’Oise, dans un sourire qui crie l’évidence d’une passion totale. C’est en tombant sur une photo jaunie de sa mère posant près d’une Suzuki qu’elle prend goût à la moto. Arrivée au cross bitume seule, comme Julia, la tête brûlée qu’elle interprète dans Rodeo, Julie Ledru se fait rapidement un nom sur Instagram, à mordre de la piste en zone industrielle. Lola Quivoron, jeune réalisatrice éprise d’héroïnes et de héros solitaires et de mysticisme, cherche alors à pénétrer cet univers pour son premier long métrage et se prend de subjugation pour la bikeuse, qui raconte : « J’étais assez repliée sur moi-même au moment de notre rencontre, et l’amitié tissée avec Lola m’a permis d’incarner le personnage principal du film, qui ne m’était pas destiné à l’origine. » Cette titulaire d’un diplôme en restauration gastronomique enchaînait jusque-là les missions en intérim. Sa composition animale, dopée à l’urgence de vivre, lui promet déjà plusieurs rôles sur grand écran. « Je veux aller vers des rôles où l’on me sollicite pour ce que je suis et ce que je donne », lance-t-elle dans un mélange de fièvre et de douceur.

Rodeo de Lola Quivoron, Les Films du Losange (1 h 45), sortie le 7 septembre

Photographie : Julien Liénard pour TROISCOULEURS LAURA PERTUY

2

Pluie de récompenses au festival Côté court mi-juin pour TNT d’Olivier Bayu Gandrille, qui signe là un teen movie politique sur les émeutes de 2005. Un film d’époque pour « un événement historique » peu vu au cinéma.

« Je voulais faire deux films en un et j’avais peur que la greffe ne prenne pas », nous dit-il. Elle prend pourtant à merveille. Mêlant aux émeutes de 2005 un récit initiatique teinté de fantastique et d’horreur autour d’une bande de gamins et de la légende urbaine de Paupaul, « fou des quartiers riches qui viole les jeunes qui passent par les bois, surtout les rebeus et les renois », dixit un personnage du film, TNT déploie avec une grande intelligence une réflexion sur la naissance et l’origine de la peur et sur « la violence de la sortie de l’enfance » pour les enfants racisés confrontés très jeunes aux violences policières, rendues ici à l’état de grand méchant loup. Dans ce

film d’inspiration autobiographique, Olivier Bayu Gandrille, né à Singapour et débarqué à 13 ans, en 2005, à Cergy, tord le cou au paradigme d’une violence intrinsèque dans un récit d’aventure rappelant Stand by Me de Rob Reiner et le cinéma de Steven Spielberg. Cinéphile chevronné depuis qu’enfant son loueur de DVD lui légua tout son stock, lui permettant de construire « les premières pistes de [sa] cinéphilie » à base de cinémas japonais et coréen, Olivier suivra de longues et prestigieuses études (lettres, histoire de l’art, philo), fera d’ailleurs un tout aussi prestigieux stage à la rédac de notre magazine en 2015, avant de s’atteler à l’écriture de ses propres films. Son prochain projet, qui est un long métrage, devrait épouser les couleurs de A Brighter Summer Day d’Edward Yang, son film d’enfance préféré : « Un film choral avec des enfants au début des années 2000. » À suivre de très près.

MARILOU DUPONCHEL

Photographie : Julien Liénard pour TROISCOULEURS

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Tout doux liste de l’été

C’est l’été, vous êtes coincés à Paris, et vous ne savez pas comment occuper vos kids sans vous-même vous ennuyer ? Voici quelques idées ludiques, curieuses et créatives qui plairont à toute la famille.

MOINS DE 3 ANS 3 À 6 ANS

LES SÉANCES BOUT’CHOU [cinéma] Lapins tachetés, loups pas si féroces, petite taupe et gorille géant… les animaux ont la part belle lors des séances Bout’chou, destinées à éveiller les plus petits au cinéma. Également à l’affiche, le programme de courts métrages Grosse colère & fantaisies vient leur apprendre à faire la paix avec leurs émotions.

dans les cinémas mk2, les week-ends en matinée, jusqu’au 31 août, dès 2 ans.

LES CERFS-VOLANTS DE BERCY VILLAGE [balade] Chaque été, Bercy Village invite petits et grands à lever le nez pour découvrir un décor inhabituel et voyager sans quitter Paris. Cette année, l’illustratrice Clémentine Henrion a paré la cour Saint-Émilion de quatre cents cerfs-volants colorés qui, tout en jeux de lumière et en légèreté, rappellent le bord de mer.

installation gratuite, visible tous les jours jusqu’au 15 septembre

POP AIR [art]

Voilà de l’art que l’on peut regarder, mais aussi toucher, et même déplacer ! Quinze artistes internationaux ont conçu d’immenses œuvres gonflables aux couleurs pop, éléments déroutants d’un monde joyeux et féérique. L’exposition invite à laisser libre cours à son imaginaire le temps d’un voyage ludique et immersif.

tous les jours jusqu’au 28 août à la Grande Halle de la Villette, à partir de 10 € pour les moins de 12 ans et 18 € pour les adultes en tarif plein

LES PESTACLES DU PARC FLORAL [spectacle] Entre les pelouses et les plans d’eau du parc floral de Paris, les Pestacles de l’été font entendre la saccade de claquettes, les notes d’un ukulélé ou la reprise, par un slameur, du Petit Prince de Saint-Exupéry. Ici, les contes se chantent, la musique se danse et la poésie emballe tout le monde.

les mercredis 13 et 20 juillet, 17, 24 et 31 août et 7 septembre à 14 h, entrée du parc 2,50 €, gratuit pour les moins de 7 ans, dès 2 ans LE JARDIN DU MUSÉE ALBERT-KAHN [balade] Lorsque le banquier Albert Kahn a aménagé son jardin à Boulogne-sur-Seine à la fin du xixe siècle, il rêvait de réunir des paysages du monde entier en un seul endroit. Pari réussi avec les ponts du village japonais qui succèdent à la roseraie, sans oublier bien sûr les symétries du jardin à la française.

du mardi au dimanche, gratuit pour les moins de 26 ans

GRAINES, L’EXPOSITION ! [art] Qu’elles soient d’arbre, de céréales, de fruits ou de fleurs, les graines nourrissent le monde et, en creux, contribuent à le raconter. Une exposition leur est justement consacrée au Centquatre, avec à la fois des contributions de divers artistes et, le 21 juillet, un atelier manuel pour les enfants dès 5 ans.

du mardi au dimanche jusqu’au 4 septembre, fermeture entre le 1er et le 22 août, gratuit pour les enfants, 5 € pour les adultes (3 € tarif réduit)

LITTLE FILMS FESTIVAL [cinéma] Pompon, petit ours plein d’idées et d’ambition, est la tête d’affiche de ce festival de cinéma pour les jeunes enfants. Mais on y retrouve aussi d’autres créatures des villes et des champs, dans une multitude de courts métrages animés aussi inventifs que poétiques qui célèbrent l’amitié.

dans plusieurs salles parisiennes jusqu’au 31 août, www.littlekmbo.com/little-films-festival-2022

L’ATELIER RODIN [art] Pendant l’été, le musée Rodin pense aux enfants (et aux grands qui en ont gardé l’âme et la fougue) et propose un parcours spécial pour les apprentis sculpteurs. Avant ou après la visite du musée, dessinez, essayez-vous au modelage ou prenez la pose pour devenir modèle… tout est possible !

du mardi au dimanche jusqu’au 28 août, gratuit pour les moins de 25 ans 6 À 9 ANS

L’ARGENT DE POCHE DE FRANÇOIS TRUFFAUT [cinéma] Dans la France de Valéry Giscard d’Estaing, les élèves d’une école primaire apprennent, chacun à leur manière, à embrasser l’adolescence. Il y a le rebelle à l’histoire compliquée, celui qui ne pense qu’à flirter, le gentil amoureux de la coiffeuse… Tous dressent un portrait gracieux du crépuscule de l’enfance, dans ce film sublime de François Truffaut sorti en 1976.

ressortie au cinéma le 3 août (Carlotta Films)

LE MUSÉE DES ARTS FORAINS [cirque] Voilà une plongée hors du temps dans les arts du spectacle, faite de vieux manèges et de cabinets de curiosités, quelque part entre les films de Terry Gilliam et ceux de Guillermo del Toro. La visite guidée se fait avec un guide comédien, en musique et sans gants, puisqu’il est possible de manipuler tous les objets.

tous les jours pendant les vacances scolaires, 18,80 € pour les adultes, 12,80 € pour les 4-11 ans.

JAZZ À LA VILLETTE FOR KIDS ! [musique] À la rentrée, le festival Jazz à la Villette sera ponctué de rires et de cris de surprise. Car, entre les concerts illustrés et les contes musicaux, le programme dédié aux enfants se veut drôle et intriguant. En témoigne Les Cromosaures de l’espace, space opéra insolite sur des dessins de l’auteur de bande dessinée Brecht Evens.

le 4 septembre dans l’amphithéâtre de la Cité de la musique, 14 € pour les adultes, 10 € pour les enfants

DE L’AUTRE CÔTÉ DU CIEL DE YUSUKE HIROTA [cinéma] Et si le ciel n’existait plus, définitivement obscurci par les fumées que d’immenses cheminées crachent en permanence ? C’est ce qu’imagine Yusuke Hirota dans ce film d’animation écolo où l’on suit le jeune Lubicchi et son ami Poupelle, un hommedéchets, bien décidés à prouver que les étoiles existent.

au cinéma le 17 août (Art House) LE JARDIN D’ÉTÉ DU MUSÉE DU QUAI BRANLY [contes] C’est dans les jardins du musée du quai Branly – Jacques Chirac, confortablement installé à l’ombre d’un arbre, que l’on peut écouter des histoires extraordinaires venues des confins du monde. Légendes africaines, mythes asiatiques ou contes océaniens se dévorent des oreilles, après avoir découvert la faune et la flore du lieu.

tous les samedis après-midi du 9 juillet au 27 août, gratuit dans la limite des places disponibles

APRÈS 10 ANS

EVERYTHING EVERYWHERE ALL AT ONCE DE DANIEL KWAN ET DANIEL SCHEINERT [cinéma] Evelyn, gérante d’une laverie, est à bout. Son mari veut divorcer, et son contrôle fiscal tourne mal. Jusqu’à ce qu’elle comprenne que, dans des mondes parallèles, elle est une multitude d’autres Evelyn. À réserver aux ados, cette réinterprétation du multivers façon studio A24 se révèle réjouissante.

au cinéma le 31 août (Originals Factory)

POTINS DE PARIS [balade] Savez-vous où et quand s’est déroulé le plus grand cambriolage de France ? Comment Voltaire est devenu riche ? Qui a fait des recherches sur la pierre philosophale ? En costumes et avec humour, Victoria et Gabrielle content les petites anecdotes et la grande histoire de Paris lors de passionnantes visites en plein air.

trois parcours de 1 h 30 accessibles aux moins de 16 ans, 17 €, gratuit pour les moins de 12 ans.

UP TO SPACE AU MUSÉE DE L’AIR ET DE L’ESPACE [sciences] Aller vers l’infini et au-delà, cela commence au musée de l’Air et de l’Espace du Bourget. L’exposition temporaire qui s’y déroule tout l’été invite à se mettre dans la peau d’un astronaute, avec simulateur de pas lunaire en microgravité et manipulation de roche martienne. En bonus, une plongée dans les coulisses du film Buzz l’Éclair.

jusqu’au 31 août, gratuit pour les moins de 26 ans

L’interview

Alexandre, 14 ans, Gaïa, Jeanne et Anselmo, 9 ans, ont interviewé Pierre Salvadori, réalisateur de La Petite Bande. Un grand film d’aventure, une comédie sur l’amitié et l’engagement ; ou comment cinq collégiens projettent de faire sauter l’usine qui pollue leur rivière.

Jeanne : Qu’est-ce qui t’a inspiré le titre du film ? Je voulais un titre qui évoque l’amitié et le fait qu’on est plus forts ensemble. J’avais d’abord pensé à « petit gang », à la « petite troupe », et puis c’est le mot « bande » qui s’est imposé. Parce que ça peut faire penser à une bande d’amis, de voyous, de fous ; donc La Petite Bande est un titre qui ressemble au film !

J. : Toi aussi, tu avais une petite bande ? Non, j’étais un enfant solitaire, comme le personnage d’Aimé. J’ai changé plusieurs fois d’école, j’étais timide et je n’avais jamais vraiment le temps d’établir des liens avec les autres enfants. En revanche, quand je partais en colo, je retrouvais à chaque fois les mêmes copains, et c’est cette bande qui m’a fait grandir, découvrir le théâtre et prendre confiance en moi.

Gaïa : Tu penses que, après l’aventure qu’ils viennent de vivre, les personnages resteront amis pour la vie ? Quand tu partages une chose pareille, tu restes ami très longtemps. Moi, les moments où j’ai fait des choses folles avec des gens, je ne les ai jamais oubliés.

Anselmo : Quoi, par exemple ? Une fois, en Corse, on est partis dans la montagne avec des cousins sans rien dire à aucun adulte, on s’est perdus, et on est revenus une fois la nuit tombée. C’était terrifiant. Et puis j’ai fait d’autres bêtises, un peu plus âgé, mais je ne peux pas les raconter dans le journal.

An. : Mais tu peux au moins nous dire ta plus grosse bêtise ? Elle est si grosse que je ne peux rien dire. Même ma maman ne la connaît pas.

Alexandre : Les enfants ont-ils réalisé eux-même leurs propres cascades ? Oui. Je tenais à ce qu’ils soient investis physiquement dans le film. On a tourné dans la montagne. Au début, certains étaient plus ou moins à l’aise, et puis au fur et à mesure c’est devenu leur territoire. de façon radicale. Ce que font ces enfants, ce n’est pas rien, et les questions qu’ils se posent sont vitales. A-t-on le droit de se battre parce qu’on nous fait du mal ? Est-ce légitime d’aller contre la loi si on nous fait du tort ? Parfois, pour faire avancer les choses, il faut sortir un peu du cadre, mais jusqu’où peux-tu aller ? C’est la question que pose le film.

Al. : L’histoire est inspirée de faits réels ? En 1972, des boues rouges se répandaient sur les plages corses, et personne ne faisait rien. On a fini par localiser la source de cette pollution : une usine italienne. Un petit commando corse s’est créé, et ils ont fait péter un bateau qui déversait ces déchets en mer.

G. : Et leurs blessures, c’était de vraies blessures ? Non, c’était du maquillage, comme des décalcomanies en relief qu’on peint une fois posées. Je voulais que les enfants portent sur leur corps les traces de l’aventure, comme moi quand j’étais petit – à force de traîner dans la nature, on était couverts de griffures.

Al. : À titre personnel, es-tu engagé pour la protection de la nature ? Je ne milite pas dans des associations, mais avec ce film j’évoque une situation An. : Et tu faisais partie de ce commando ? Non, j’avais 8 ans, mais ça m’a beaucoup marqué !

La Petite Bande de Pierre Salvadori, Gaumont (1 h 46), sortie le 20 juillet, dès 8 ans

PROPOS RECUEILLIS PAR ALEXANDRE, GAÏA, JEANNE ET ANSELMO (AVEC CÉCILE ROSEVAIGUE)

Photographie : Ines Ferhat pour TROISCOULEURS

La critique de Célestin, 8 ans DE L’AUTRE CÔTÉ DU CIEL

RESSORTIE LE 15 JUIN « C’est un film pour ceux qui aiment les aventures folles et la bagarre. Ça se passe il y a plus de mille ans (en gros), dans une grande ville avec plein de fumée qui cache le ciel. Personne ne sait qu’il y a d’autres endroits où aller. C’est triste, parce que c’est important de voyager pour découvrir de nouvelles choses. Un jour, une étoile descend des nuages et crée Poupelle, un robot tout pété fait qu’avec des trucs de la décharge. On pourrait en faire un nous-mêmes : il suffit d’avoir des gants pour les mains, des balais pour les pieds, et un cœur (par exemple une personne très vieille qui est morte). Poupelle devient copain avec un enfant qui doit travailler, parce que son papa est mort. Mon personnage préféré, c’est un mineur qui dit la vérité au garçon sur la ville. Il travaille pas pour l’argent, mais pour découvrir plein d’histoires sous la terre. Moi aussi plus tard je voudrais travailler pour le plaisir. Les gens, ils sont obsédés par l’argent, nuit et jour. Assoiffé d’argent, ils peuvent tuer ! Ça serait vraiment trop bien de pas avoir d’argent dans le monde. »

De l’autre côté du ciel de Yusuke Hirota, Art House (1 h 40), sortie le 17 août

PROPOS RECUEILLIS PAR JULIEN DUPUY

« Alors quoi ? On oublie tout ça ? Les Italiens ? Les Polonais ? Les Arméniens ? Les 600 000 tirailleurs sénégalais ? C’est tout le pays qu’a Alzheimer, ou quoi ?!? On est 500 millions de guignols en Europe et on veut nous faire croire qu’on peut pas accueillir 1 million de pauvres gens ? Ça fait même pas un par village ! »

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BONS POUR L’ASILE

LUPANO CAUUET 5. BONS POUR L’ASILE

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