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Réforme de la clause de raisonnabilité un enjeu vital pour Israël

PAR JONATHAN SERERO

Depuis plusieurs semaines, l’opinion publique israélienne se déchire autour du projet de loi de « de réduction de la clause de raisonnabilité » initié par le ministre de la Justice, Yariv Levin. Manifestations. Affrontements avec la police. Insultes. Invectives numériques. Bataille politique. Conflit de voisinage. Les opposants au texte de loi crient à la fin de la démocratie. Quand ses soutiens espèrent en finir avec l’ingérence du pouvoir judiciaire dans les décisions prises par les responsables politiques. Pourtant, selon un sondage publié début juillet par la chaine israélienne « Kan » 2/3 des israéliens déclarent ne pas comprendre cette notion juridique de « clause de raisonnabilité ». Explications.

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« Fin de la démocratie israélienne », « L’état religieux ». « Dictature », « Coup d’état politique », « Frères d’armes ». A entendre les slogans des opposants à la réforme judicaire et à la réduction de la clause de raisonnabilité, les heures de l’Etat d’Israël seraient comptées. Le pays serait menacé d’une fin prochaine par cette coalition composée de dangereux extrémistes sionistes de droite, d’illuminés orthodoxes ou de « babouins originaires d’Afrique du Nord ». Tous, selon les opposants à la réforme, auraient pour objectif d’imposer les lois de la Torah à l’ensemble du Peuple et d’introniser Benyamin Netanyahou au poste de prochain Roi d’Israël.

Dans son discours prononcé le jeudi 20 juillet, le Premier ministre Netanyahou a tenu à rassurer l’opinion sur les motivations qui ont poussées le gouvernement à faire voter cette loi de réduction de « la clause de raisonnabilité ». « Dans chaque démocratie, il existe des oppositions et des confrontations. Beaucoup d’entre nous pensent que ces dernières décennies l’équilibre des pouvoirs entre les différents autorités (judicaires, législatives et exécutives) a été piétiné. Notre objectif est de retrouver cet équilibre entre les pouvoirs afin que les responsables politiques puissent honorer le choix démocratique opéré par le peuple dans les urnes ».

QU’EST CE QUE LA CLAUSE DE RAISONNABILITÉ ?

Pour comprendre les déclarations du Premier Ministre ou les revendications des manifestants, il est primordial en premier lieu de définir le terme juridique de « clause de raisonnabilité ». ou plus précisément « la règle du bon sens ». Cette notion de droit héritée du mandat britannique permet au tribunal de critiquer ou voire même d’annuler une décision prise par le pouvoir législatif et exécutif au motif de son caractère déraisonnable. Exemple, en 1947, en Grande-Bretagne un désaccord oppose une société d’exploitation de cinémas aux responsables de la ville de Wednesbury située dans le centre du pays. Les deux parties se déchirent sur les jours d’ouvertures des salles obscures mais aussi la limite d’âge des spectateurs. Les autorités de la ville souhaitaient pouvoir ouvrir les cinémas le dimanche. La société d’exploitation dénonçait de son côté un abus de pouvoir des responsables locaux car selon la loi en Grande-Bretagne et ce depuis 1909, les cinémas sont ouverts du lundi au samedi mais pas le dimanche. L’exploitant du cinéma dépose plainte contre la ville et au terme des débats le tribunal qualifie les décisions prises par les autorités comme déraisonnable et dénuée de fondement logique.

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Après l’indépendance de l’Etat d’Israël en 1948, cette notion de droit britannique s’est insérée au droit israélien. Jusqu’en 1980, l’appareil judiciaire s’est retenu d’interférer dans les décisions prises par les différents gouvernements au regard du respect de la séparation des pouvoirs et du choix fait par le peuple dans les urnes.

LA « RÉVOLUTION JUDICIAIRE » INITIÉE

PAR AHARON BARAK

Or, en 1980 éclate l’affaire des « pages jaunes » qui opposent les responsables du répertoire nationale des numéros de téléphones à la société de radiodiffusion sur le renouvellement de leur collaboration. Lors des débats, le président de la Haute-Cour Aharon Barak se sert de cette clause de raisonnabilité comme bras armé de sa révolution judiciaire. Il décide que toutes décisions gouvernementales ou toutes résolutions prises par les pouvoirs locaux même si elles paraissent logiques ou raisonnables peuvent désormais être soumises à la critique judiciaire et même désapprouvées par la Haute-Cour au regard du manque de considération des élus des équilibres et des intérêts en jeu. Ainsi, l’ex-président de la Cour suprême ouvre la voix aux appels déposés contre les nominations gouvernementales, décisions ou textes de lois votés par la Knesset, le Parlement israélien. En 1993, la Haute-Cour ordonne ainsi au Premier Ministre de l’époque, Itzhak Rabin de démettre de ses fonctions de ministre de l’Intérieur Aryé Dery au regard de ses condamnations pour corruption. En 2007, la Haute Cour déclare comme « déraisonnable » la décision du gouvernement de ne protéger que partiellement les classes des établissements scolaires des localités israéliennes situées dans le pourtour de la Bande de Gaza. En 2018, les juges de la Cour suprême ordonne à l’ex-ministre de la Défense, Avigdor Lieberman de laisser entrer des Palestiniens désireux de participer aux festivités de la Journée alternative d’Indépendance organisée par des associations de militants de gauche pour la paix. A cela s’ajoute les innombrables plaintes déposées par le comité pour la probité de l’Etat devenu le bouclier de défense des élites et de la gauche israélienne.

LIMITER LE CHAMP D’ACTION DE LA COUR SUPRÊME

C’est donc pour mettre fin à cette ingérence du judicaire dans le politique que le ministre de la Justice, Yariv Levin, souhaite désormais limiter le champ d’action de la Cour suprême. La loi de réforme de la clause de raisonnabilité est censée empêcher la Haute Cour israélienne de discuter du caractère raisonnable des décisions prises par le Premier Ministre, des ministres ou de n’importe quels élus. « Israël réintègre la liste des pays démocratiques, assure le ministre de la Justice, Yariv Levin ». « Nous nous alignons désormais sur les standards en vigueur dans tous les pays démocratiques. Non cette loi ne place pas le gouvernement au-dessus des lois. Chaque élu sera toujours tenu de respecter la loi en toute vertu et sans conflits d’intérêts. L’appareil judiciaire continuera à émettre des critiques et à donner son avis sur les décisions prises par le gouvernement mais il faut souligner dans le même temps que le gouvernement a des devoirs à remplir et des comptes à rendre à ses électeurs et qu’il se doit de tenir ses promesses électorales ».

L’opposition emmenée par Yaïr Lapid et Benny Gantz, les responsables des partis du Yech Atid et d’Union Nationale, dénoncent une volonté de la coalition de réduire à néant les pouvoirs de la Cour suprême. Ils craignent de voir Betsalel Smotrich, ministre des Finances, concrétiser son rêve d’imposer les lois de la Torah à l’Etat d’Israël ou de permettre à Aryé Dery de récupérer son portefeuille de ministre et de revenir s’asseoir autour de la table du gouvernement. « Ceux qui craignent le vote de cette loi sont les mêmes qui ambitionnent de faire tomber le gouvernement. Un gouvernement qui a été élu démocratiquement. Leurs ambitions véritables n’ont aucun lien avec la réforme judiciaire. Je tiens à rassurer tout le monde, Israël ne deviendra pas un état religieux. Israël restera un état démocratique, libre et pluriel. Nous continuerons à protéger les droits particuliers de chacun des citoyens de ce pays. Il n’y a aucun citoyen qui bénéficierait de plus de droit qu’un autre. Aucun groupe n’est au-dessus des lois. Je suis toujours ouvert au dialogue avec l’opposition » rappelle le Premier Ministre Netanyahou.

Un dialogue et des négociations qui devraient ou non se poursuivre après le vote de la loi.

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