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LE COURRIER PICARD HIER, AUJOURD’HUI, DEMAIN...

5,90 €

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EDITO JEAN-DOMINIQUE LAVAZAIS DIRECTEUR GÉNÉRAL DU COURRIER PICARD

Le Courrier picard, hier, aujourd’hui, demain Mai 2018 Hors-série édité par le Courrier picard

ALLER DE L’AVANT…

A

ller de l’avant, c’est ce que le Courrier picard et ses collaborateurs ont toujours fait au cours des soixante-quatorze dernières années. Aller de l’avant avec ambition, fierté et courage, et ceci malgré les difficultés qui ont présidé à sa naissance et ont pu jalonner son histoire. Né à l’aube de la Libération grâce au courage et aux valeurs de quelques hommes, le Courrier picard a toujours su mobiliser ses forces et sa détermination, au gré des situations et des événements. D’un journal départemental né sur les rives de la Somme, il est devenu une référence régionale, reconnu nationalement et présent sur l’ensemble du territoire picard, dans l’Oise depuis 1975, et dans l’Aisne depuis 2005. Malgré les difficultés financières des années 2000, le Courrier picard a su rebondir depuis 2010, et consolider sa présence régionale et la qualité de ses contenus, concrétisées par des nouvelles formules du journal en 2011 et 2016. Avec l’appui du groupe Rossel La Voix, sont assurées désormais la pérennité de l’entreprise et sa capacité à investir dans l’avenir. Car, aujourd’hui, le Courrier picard, comme toute la presse écrite, fait face à un nouveau défi, celui de la transformation numérique. Précurseur dans le domaine avec un premier site internet en 1999, le Courrier picard, en bénéficiant des compétences du groupe et de ses collaborateurs, continue à innover depuis dix ans à travers de nouveaux produits et contenus rédactionnels. Il veille désormais à adapter son fonctionnement aux impératifs des nouvelles pratiques numériques : agilité, transversalité, détermination malgré les incertitudes. Aller de l’avant, oui ! Mais sans oublier ses racines, son histoire, son ADN, car ce sont les ferments de la réussite de demain : attachement à la Picardie, à l’information et la démocratie locale, à ses habitants. Les collaborateurs du Courrier picard sont fiers aujourd’hui de vous présenter cette histoire dans ce hors-série de la rédaction, et sont déterminés à poursuivre la mission que les fondateurs leur ont transmise.

Infographie : IDIX Sources : Archives Courrier picard, Histoire d’un quotidien régional par Jacques Béal 1994 Impression : Imprimerie Presse Flamande, Rue du milieu, 59190 HAZEBROUCK

29, rue de la République Amiens

Directeur de la publication : Jean-Dominique LAVAZAIS

Rédacteur en chef : Mickaël TASSART Conception : Olivier HANQUIER Mise en page : Olivier HANQUIER Gérard GARCIA et Frédéric DEVILLARD Photos : Archives Courrier picard, Fred HASLIN, Olivier HANQUIER, Francis LACHAT, René DOMONT, Dominique TOUCHART, Philippe FLUCKIGER

Aucune partie de ce document ne pourra être reproduite ni diffusée sous aucune forme ni par aucun moyen électronique, mécanique ou d’autre nature, sans l’autorisation écrite des propriétaires des droits de l’éditeur. ©2018 – Courrier picard Merci à tous les collaborateurs actuels et anciens sollicités pour ce hors-série

SOMMAIRE Aujourd’hui le Courrier picard écrit son avenir : page 5 Les différentes étapes de la fabrication d’un journal : page 10 Un journal et une entreprise pas comme les autres : page 15 Des mutations technologiques aux évolutions stratégiques : page 27

L’Art déco et le Courrier picard, une belle histoire architecturale : page 51

Le Courrier picard, 74 années au cœur de l’actualité : page 59


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QUELLE STRATÉGIE POUR LE COURRIER PICARD À L’HEURE DU NUMÉRIQUE ? La transformation digitale doit répondre aux attentes et nouveaux usages des lecteurs. Confort de lecture, des articles de qualité, de la vidéo : le Courrier picard poursuit sa mue au XXIe siècle pour rester le journal de la Picardie et des Picards.

DES CHIFFRES

Le service Desk au siège à Amiens

À

86 % des abonnés reçoivent leur journal avant 7 h 30.

Vincent Fouquet, rédacteur à l’agence de Péronne, dans la Somme.

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l’heure de la transformation numérique, Le Courrier picard fait face au même paradoxe que ses confrères de la presse écrite. L’audience du Courrier picard, c’est-à-dire le nombre de lecteurs et internautes sur les différents supports papier et numériques, se développe, mais le compte de résultats et le bénéfice sont menacés par la baisse des chiffres d’affaires. Face à cela, le premier axe de cette transformation digitale est donc bien de répondre aux attentes et nouveaux usages des lecteurs : plus de contenus de qualité, plus de confort et de plaisir de lecture, plus de mobilité, plus de vidéos… Le second enjeu de cette transformation digitale est de monétiser les produits numériques et leurs audiences, c’est-à-dire valoriser la qualité de ces produits numériques auprès de lecteurs, sous forme d’abonnements, et d’entreprises, sous forme de publicité numérique. Le dernier axe de travail est de développer la compétence des équipes, et de leur offrir les outils et moyens pour mener à bien cette mutation. Système d’information, locaux et organisation appropriés, formation en seront les leviers pour le Courrier picard. Depuis 2010, Le Courrier picard a intégré le groupe Rossel, qui est le premier groupe de média au nord de Paris (La Voix du Nord, L’Union en particulier) et en Belgique francophone (Le Soir et Sudpresse). À travers cette intégration, Le Courrier picard a su redresser sa situation financière par une nouvelle ri-

1944 : NAISSANCE

DU COURRIER PICARD

gueur dans sa gestion et la mise en œuvre de synergies en particulier dans le domaine de l’impression, des systèmes d’information et de la gestion commerciale de sa diffusion. Ce soutien du groupe Rossel lui permet aussi d’investir dans son cœur de métier à travers deux nouvelles formules du journal en 2011 et 2016, des nouveaux sites web et de nouvelles applis pour smartphone en 2013 et en 2017, et un fort développement commercial au travers du recrutement de nouveaux abonnés.

1975 : IMPLANTATION DANS L’OISE

1977 : APPARITION DE LA COULEUR

1986 : DÉPÔT DE BILAN 1998 :

CRÉATION DU JOURNAL DU DIMANCHE

1999 : LANCEMENT DU

CONTINUER À CONSOLIDER LES MARQUES DU GROUPE En 2013, le Courrier picard a aussi consolidé sa présence en Picardie à travers le rachat de L’Aisne Nouvelle, quadrihebdomdaire établi sur Saint-Quentin et sa région. De plus, la vitalité du groupe Rossel est aussi renforcée en Picardie grâce à l’audiovisuel, avec la radio Contact FM tout d’abord et depuis mars 2017, avec la naissance de WEO Picardie, chaîne de télévision régionale. Pour les années à venir, les objectifs sont clairs pour le Courrier picard : continuer la consolidation des marques du groupe en termes de visibilité et d’audience sur leur territoire tout d’abord. Ensuite, déployer de nouveaux produits papier et web et leurs performances commerciales. Enfin développer les hommes et leurs compétences pour leur permettre d’être les acteurs de la transformation.

PREMIER SITE INTERNET

2005 : IMPLANTATION DANS L’AISNE 2010 : RACHAT DU COURRIER PICARD PAR LE GROUPE ROSSEL LA VOIX 2013 : L’AISNE NOUVELLE DEVIENT UNE FILIALE DU COURRIER PICARD

2018 : LE COURRIER PICARD COMPTE 112 COLLABORATEURS ET SA FILIALE PMP 25.

JEAN-DOMINIQUE LAVAZAIS, DIRECTEUR GÉNÉRAL DU COURRIER PICARD

DÉVELOPPER LES HOMMES ET LEURS COMPÉTENCES POUR LEUR PERMETTRE D’ÊTRE LES ACTEURS DE LA TRANSFORMATION

Jean-Dominique Lavazais est le directeur général du Courrier picard depuis 2015.

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LES DIFFÉRENTES ÉTAPES DE LA FABRICATION D’UN JOURNAL 1 LA COLLECTE D’INFORMATIONS

2 LA TRANSMISSION NUMÉRIQUE

6 L’IMPRIMERIE

Elle est assurée par les journalistes professionnels de la rédaction, dans les agences départementales et locales. De plus, les correspondants locaux transmettent chaque jour les nouvelles des villes et villages de la région.

Les photos des correspondants, les textes, les photos et les infographies parviennent à la rédaction sous forme numérique.

Chaque nuit sortent environ 55 000 exemplaires de l'imprimerie située à la Pilaterie.

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7 L’EXPÉDITION Pour transporter le journal, 3 véhicules partent du centre d'impression pour livrer 10 centres d'éclatement . D'où repartent des véhicules plus légers vers nos points de distribution.

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ÉDITION PICARDIE MARITIME

4

ÉDITION AMIENS

SOMME (80)

ÉDITION NORD AMIÉNOIS

Abbeville

ÉDITION HAUTE SOMME Amiens

Corbie Péronne

5 LA RÉGIE PUBLICITAIRE

ÉDITION SUD AMIÉNOIS

ÉDITION AISNE

Ailly-sur-Noye

Structure destinée à la commercialisation d’espaces publicitaires dans le journal et ses suppléments.

ÉDITION OISE

Saint-Quentin

Beauvais

Compiègne

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AISNE (02)

3 LA PRÉPARATION DES ARTICLES La rédaction dispose d’un système d’écriture électronique permettant à chaque journaliste de saisir lui-même ses textes, et à l’éditeur de préparer, sur écran, les articles : relecture, calibrage, titres, etc…

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4 LE PRÉMÉDIA Le prémédia intervient dans le montage des pages des rubriques telles que Météo, Détente, Horoscope, etc. Service mutualisé avec la Voix du Nord, son activité s’organise autour de la fabrication, de la publicité et des suppléments.

8 LA DIFFUSION OISE (60)

Chaque jour, plus de 50 000 exemplaires sont vendus dont 3 500 via le numérique. Le portage à domicile présente 70 % de notre diffusion print ( données mars 2018).

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LE 16 OCTOBRE 1944 SORT LE PREMIER NUMÉRO DU COURRIER PICARD La capitale picarde est occupée depuis le début de la guerre. De tendance radicale-socialiste, le journal Le Progrès de la Somme est devenu l’organe de la collaboration. Le 31 aout 1944, Georges-Louis Collet arrive à 7 heures dans les locaux du journal avec son brassard FFI. C’est le début de l’histoire du Courrier picard.

Le 16 octobre 1944 avec les fondateurs et les premiers administrateurs du Courrier picard. Messieurs Boucly, Chardon, Catelas, Cornut-Gentille, Collet, Garrou. Au second rang, messieurs Sacquespée, Burel, Loisel, Fiquet, Dufau-Labeyrie.

À

l’été 1944, les Alliés ne sont plus loin ; la Résistance s’organise. Intendant au lycée de garçons d’Amiens, Joseph Garou est l’un de ses responsables dans la Somme. Un soir, il convoque chez lui deux enseignants de l’établissement : Francis Dufau-Labeyrie, agrégé d’anglais, et Georges- Louis Collet, professeur de latin et de grec. « On va avoir besoin de vous , leur lance-t-il. On est chargés de sortir le journal de la Libération, un journal pou r r emplacer le Progrès de la Somme. N’en parlez surtout pas !» Mais la libération d’Amiens arrive plus vite que prévu ! Les troupes canadiennes et anglaises entrent en ville le 31 août. Il devient urgent d’occuper les locaux du Progrès de la Somme. Francis Dufau-Labeyrie et Georges-Louis Collet partent remplir leur mission. Le premier n’ira pas jusqu’au siège du journal. Croisant un char canadien, le professeur d’anglais va guider les alliés dans les rues de la capitale picarde. Georges-Louis Collet se

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dirige donc seul vers le quotidien local. Le 31 août 1944, cet homme de petite taille arrive à 7 heures dans les locaux du journal avec son brassard FFI (Forces françaises de l’Intérieur). Il indique à Maurice Hisler, PDG du Progrès, qu’il prend le contrôle du journal au nom de la Résistance en général et du groupe Libération-Nord en particulier. Et il dit simplement au dirigeant : « Vous êtes à ma disposition » MAURICE CATELAS PREMIER PRÉSIDENT Impossible de conserver le nom de « Progrès », terni par la collaboration. Il faut lui trouver un nouveau nom. Ce sera « Picardie Nouvelle ». Un journal qui n’est au départ qu’un « dazibao », une affiche que Marcelle Montigny s’empresse d’aller coller sur la statue de Marie-Sans-Chemise, place Gambetta, au centre d’Amiens. Ce n’est en fait que quelques semaines plus tard, le 16 octobre 1944, que paraît le premier numéro à en-tête du Courrier picard. Il

marque, en fait, la fusion des deux titres ayant fait leur apparition à la Libération dans la Somme : Picardie Nouvelle, donc, plutôt dans la mouvance socialiste et gaulliste, et l’Écho de la Somme, catholique. Lancé le 18 septembre, il arrête sa publication le 14 octobre. Il n’y a pas de place pour deux quotidiens, faute de papier. Le samedi 14 octobre, Picardie Nouvelle annonce ainsi que dès le prochain numéro, un nouveau journal « représentera à Amiens et dans le département de la Somme, les mouvements unis de la Résistance, dans le cadre des idées directrices du Conseil national de la Résistance .» Le lundi 16 octobre, un autre communiqué, en première page du Courrier picard signale qu’«une coopérative ouvrière va être créée ». Son premier président s’appelle Maurice Catelas, déjà à l’origine de la création de la coopérative l’Union, qui fabrique et vend du pain. Résistant, il est le neveu du député communiste Jean Catelas, guillotiné par Vichy. GEORGES CHARRIÈRES


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DE LA SCOP AU DÉPÔT DE BILAN ET AU RACHAT PAR LE GROUPE LA VOIX Créé en 1944, le Courrier picard a vécu sous la forme d’une société coopérative ouvrière jusqu’en 2010 et son rachat. Entre-temps, le Courrier picard aura connu des hauts et des bas.

L

a société coopérative ouvrière de production anonyme à capital et personnel variables sous la dénomination du Courrier Picard naît le 10 novembre 1944. La Scop ou un homme égale une voix se traduit par le fait que les salariés sont associés majoritaires et détiennent au moins 51 % du capital social et 65 % des droits de vote. Si tous les salariés ne sont pas associés, tous ont vocation à le devenir. Dans une Scop, il y a un dirigeant comme dans n’importe quelle entreprise. Mais celui-ci est élu par les salariés associés. En 1944, le Courrier picard compte 88 sociétaires. Les premières décennies sont florissantes. En 1969, on compte 201 sociétaires sur 245. Car après deux ans de présence et à condition d’être âgé de 21 ans, chaque travailleur peut devenir associé. Les bénéfices sont répartis de la manière suivante 15 % à la réserve légale ; 0,50 % à la direction ; 9 % à la caisse de solidarité et 75 % au travail. En dix ans entre 1957 et 1967, le capital de l’entreprise est doublé. Les premières difficultés arrivent au début des années 70. En 1975, l’entreprise connaît son premier déficit annuel. BAISSE DES SALAIRES DE 25 % EN 1977 En cause notamment l’augmentation de la masse salariale qui fait suite à la création de nouvelles éditions. En 1977, face à cette crise, des mesures drastiques sont prises. L’accord du 10 juin 1977 stipule la suppression des avantages extra-conventionnels. Cet accord se traduit par des baisses de salaire allant jusqu’à 25 %. Des mesures qui permettent le redressement de l’entreprise sous la direction du directeur Bernard Roux, un énarque qui lance le Courrier picard dans l’aventure de la télématique. Mais l’inflation du prix des matières premières (papier), des salaires, amène le 12 décembre 1985, le président du journal Ivan Joly avec le conseil d’admi-

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Le « Courrier picard » abandonne son statut de Scop AMIENS O Réunis hier en assemblée générale extraordinaire, les sociétaires du Courrier picard, non sans émotion, ont décidé à une large majorité l’abandon du statut coopératif de leur société. Alors que 92 % d’entre eux avaient précédemment exprimé leur volonté de céder leurs parts sociales à la Voix du Nord, 95 % des sociétaires présents ou représentés ont en effet confirmé le projet d’abandon du statut de Société coopérative ouvrière de production (Scop) et sa transformation en société anonyme. Cette décision est maintenant subordonnée à l’autorisation ministérielle permettant la radiation du Courrier picard de la liste des Scop, décision qui devrait intervenir d’ici la fin de l’année Face à des difficultés financiè-

res dues à la situation actuelle de la presse française mais aussi à la crise économique que nous traversons, le Courrier picard avait entrepris depuis plusieurs mois une réflexion sur son devenir et consulté ses sociétaires qui, en avril dernier, avaient refusé à plus de 87 % de procéder par eux-mêmes à une recapitalisation de l’entreprise. La société avait alors décidé de faire appel à un partenaire extérieur, entraînant du même coup l’obligation d’abandonner son statut coopératif acquis depuis sa création, le 16 octobre 1944. Une page se tourne. Mais pour autant le Courrier picard entend continuer à jouer son rôle de premier média en Picardie tout en profitant de nouveaux moyens de développement que ce rapprochement avec le groupe Voix du Nord lui offre désormais.

Voici l’encadré paru le dimanche 11 juillet 2010 après le vote des sociétaires. Il annonce la fin de la Scop et le rachat du journal. nistration à procéder au dépôt de bilan. Le 8 février 1976, les 250 sociétaires votent à plus de 70 % le plan de redressement établi par un cabinet d’audit. Il prévoit 50 suppressions d’emplois. Et deux mois plus tard, les sociétaires votent à nouveau et choisissent le Crédit Agricole comme partenaire extérieur à hauteur de 49 %. Une première depuis la création du Courrier picard. Un mariage de raison lorsqu’il faut éponger une dette de 45 millions de francs. Le Crédit Agricole devient le sociétaire B sous la forme juridique de Nor-

picom ou l’on trouve aussi des actionnaires du journal La Voix du Nord. Ces mêmes actionnaires qui en 2010 rachèteront les parts des sociétaires du Courrier qui, face aux difficultés des années 2000 de la presse quotidienne en général refuseront de procéder par eux-mêmes à une recapitalisation. Le rachat du Courrier picard entraînera la fin de l’impression du journal rue de la République et la disparition du dernier journal sous la forme d’une Scop.


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L’IMPRESSION DU JOURNAL, DU PLOMB AU NUMÉRIQUE En 1979, une page se tourne au Courrier picard. Finie l’impression au plomb, place à l’informatisation. Puis l’apparition de la couleur, avant un journal tout en couleur avec l’impression du Courrier picard sur les rotatives du groupe La Voix en septembre 2010.

C

ette nuit, pour la dernière fois s’est éteint le cliquetis des linotypes, cacophonie orchestrée de l’atelier de composition… L’odeur indéfinissable du plomb chaud ne flottera plus jamais dans tout le journal » écrivait GeorgesLouis Collet, rédacteur en chef, dans le Courrier picard le 12 mars 1979. En effet à cette date, le Courrier picard opère sa révolution industrielle. L’entreprise passe du procédé typographique au procédé offset. Avant, les articles des journalistes partaient à l’atelier pour être confiés aux linotypistes qui tapaient sur le clavier des machines à produire des caractères d’imprimerie en relief, et qui s’emplissaient de métal (85 % de plomb). On obtenait ensuite des plaques de plomb (30 kilos chacune). Ensuite, chaque plaque était enduite d’encre d’avant d’être imprimée. « Cette odeur était caractéristique, se souvient Francis Lachat, ancien président du Courrier picard et journaliste à partir de 1972 à Amiens. Les gens du livre avaient les mains dans le cambouis si on peut dire. En les voyant chaque jour, cela nous ramenait à la réalité de notre métier. Être proche des gens. » CHAQUE JOUR 12 TONNES DE PAPIER ET 100 À 120 KILOS D’ENCRE Après 10704 numéros, le Courrier picard passe à la photocomposition et à l’offset. Une nouvelle logique de fabrication apparaît avec l’informatique. Les clavistes remplacent les linotypistes. Les articles des journalistes sont tapés sur des ordinateurs. À la sortie, deux photocomposeuses. Les monteurs prennent les épreuves et montent les pages du journal en incorporant les photos, les publicités en fonction d’une maquette réalisée par le secrétaire de rédaction. Les pages ainsi photocomposées sont transposées en des plaques offset qui viendront

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équiper les cylindres de la nouvelle rotative dont le Courrier picard s’est doté. Une Goss Metroliner capable d’imprimer 60 000 journaux à l‘heure. L’impression du journal dans les années 80 nécessite en moyenne chaque jour 12 tonnes de papier et 100 à 120 kilos d’encre. Une rotative qui permettra l’apparition de la couleur sur certaines sections du journal. Puis à la fin des années 90, c’est le passage à l’informatisation des journalistes. L’ensemble de la fabrication du journal est désormais informatisé, numérisé à l’image des photos où l’argentique disparaît. Comme les métiers de clavistes et de monteurs. Le 21 septembre 2010, la Goss Metroliner s’arrête définitivement. Le Courrier picard est désormais imprimé à la Pilaterie à Marcq-en-Baroeul sur les rotatives du groupe La Voix dont le Courrier fait partie. Depuis cette date, l’impression de l’ensemble du journal est en couleur.

Une vue du marbre et des pages en cours de montage. Avec le face-à-face entre le journaliste et le typographe.

L’impression du journal.

Le travail sur les plaques de plomb.

Légende LÉGENDE CRÉDIT

La sortie des journaux des rotatives avant le pliage.

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QUAND LE COURRIER PICARD ILLUSTRE L’ART DÉCO Ce mouvement artistique est né au cours de la première décennie du XXe siècle. Il concerne non seulement l’architecture, mais aussi bien d‘autres domaines comme la décoration intérieure, le mobilier, les bijoux, la peinture, les vitraux. Le siège historique du Courrier picard en est un exemple.

A

u sortir de la Première Guerre mondiale, de nombreuses maisons sont à reconstruire à Amiens : Louis Duthoit sera l’architecte chargé du second plan de reconstruction de la ville dès 1921. À Amiens, on utilisera beaucoup l’Art déco pour les façades commerciales, garages et cinémas. Ainsi que pour la reconstruction de riches villas et peu à peu il sera aussi repris pour des maisons plus modestes dont quelques-unes entourent toujours l’immeuble du Courrier picard, dans la rue Paillat en particulier. Les principales façades sont concentrées sur la rue des Trois-Cailloux (immeuble des Grandes Galeries en particulier), la rue Ernest Cauvin (ancien cinéma) : on peut ajouter les grands garages de Picardie et de nombreuses villas rue Saint Fuscien, l’hôtel de Normandie rue Lamartine, la rue Robert-de-Luzarches ou encore les maisons ouvrières de la rue de la Contrescarpe. L’école des Beaux-Arts (actuel conservatoire de musique) construite entre 1928 et 1931 rue Desprez est due à Duthoit et n’a en fait jamais été achevée. Certaines façades ont été primées et quelques-unes possèdent encore leur petit cartel sur fond bleu marine marqué « façade primée », souvenir de l’âge d’or de

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l’Art déco. Le nom de ce courant a pour origine l’exposition internationale des arts décoratifs et industriels modernes de Paris qui eut lieu en 1925. On peut donc dire que l’Art Deco est né en France. Il s’est ensuite propagé quasiment partout : les États-Unis en ont fait une très grande exploitation. Ainsi, l’un des monuments alors les plus emblématiques de cet art est l’Empire State Building, achevé au tout début des années 30.

RETOUR À UNE RIGUEUR PLUS CLASSIQUE L’art déco se propage dans l’entre-deuxguerres. Ce courant est particulièrement présent dans les villes picardes, sorties fort meurtries de la Première guerre mondiale : Saint-Quentin en particulier mais aussi Albert, Amiens, Montdidier et bien d’autres. Le style sera en effet souvent mis en avant par les architectes en charge de la Reconstruction. Cette tendance artistique correspond à une réaction aux nombreuses (ou excessives ?) courbes et formes organiques florales de l’Art nouveau, style majeur des années dites Folles. Les stations du métro parisien des-

sinées par Guimard en sont un bel exemple encore visible aujourd’hui. Avec l’Art Deco on revient à une rigueur qu’on pourrait presque qualifier de classique : on va faire la part belle au respect de la symétrie, aux lignes épurées, à une ornementation très stylisée, presque « domptée » et on abandonne petit à petit le côté floral et pittoresque de l’Art nouveau. En architecture par exemple, l’Art déco va casser l’angle droit des immeubles d’angle : l’immeuble Courrier picard est un très bon exemple de cette recherche puisqu’il propose finalement trois façades : la façade dans la rue Paillat, la façade dans la rue de la République et à l’angle une véritable troisième façade qui est en fait un angle coupé qui permet d’ailleurs l’expression d’un registre d’ornementation spécifique. Et c’est aussi la plus jolie des trois façades… En matière d’ornementation, le décor Art déco n’est plus libre de tout envahir : bien au contraire, il sera très encadré, contenu dans un cadre géométrique rigoureux et on se rapprochera ainsi de la géométrisation du modernisme et du cubisme, qui viendront progressivement remplacer l’Art Deco dans les années 40.

LES DEUX PRINCIPES DE BASE L’Art déco respecte deux principes de base : la géométrie avec un fréquent respect de la symétrie et la sobriété qu’on a parfois assimilée ici au respect de l’ordre surtout en réaction aux excès si libres de l’Art Nouveau. Et l’usage des formes géométriques dépouillées ne se limitera pas à la structure des édifices : il sera aussi employé à des fins décoratives. Ceci correspond à une certaine recherche de la pureté et de la simplicité. On a aussi dans l’idée de mettre en place un art qu’on pourrait qualifié de fonctionnel : l’Art Deco est un style urbain qui veut s’adapter à la vie moderne. La fonctionnalité prendra ainsi parfois le pas sur l’ornemental. Les industriels vont s’emparer de cette nouvelle vision des bâtiments même si l’Art Deco est coûteux et ne peut donc correspondre qu’aux projets d’une clientèle riche.

VÉRONIQUE VILLAIN

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LE COURRIER PICARD ET LES FAITS DIVERS La rubrique des faits divers dans un journal a toujours eu une place prépondérante. Le Courrier picard a ainsi relaté les assassinats comme celui survenu à Janet Marshall en 1955 à la Chaussée-Tirancourt à celui d’Élodie Kulik, la jeune banquière, les drames de la route, ou encore le crash du Concorde.

Mort mystériesue à la Chaussée-Tirancourt

Le 28 août 1955, le corps d'une jeune femme à moitié dévêtue est retrouvé dans un fourré en limite des communes de La Chaussée-Tirancourt et Belloy-sur-Somme. Il s'agit de Janet Marshall, une institutrice britannique de Nottingham qui parcourait la France à bicyclette pendant ses vacances. Grâce à un portrait-robot élaboré à partir de témoignages, Robert Avril, un vagabond de 43 ans, précédemment condamné pour viol et sorti de prison en juillet dernier est arrêté le 7 janvier 1956. Il passe aux aveux au quatrième jour. Le 7 mai 1958, il est condamné par la cour d'assises de la Somme aux travaux forcés à perpétuité.

L’affaire Elodie Kulik

Assassinée le 11 janvier 2002 à Tertry dans la Somme, Élofie Kulik était une jeune banquière de 24 ans. Seize ans plus tard, son père espère un procès après la mise en examen de Willy Bardon arrêté en 2013 alors qu’en 2012, Grégory Wiart, décédé en 2003, est reconnu comme l’un des auteurs du meurtre. Son ADN a été retrouvé sur les lieux de l’agression.

46 cercueils d’enfants

L'accident de Beaune est un accident de la route survenu le 31 juillet 1982 sur l'autoroute A6 près de Beaune, en Côte-d'Or. Accident routier le plus meurtrier en France, il a fait 53 morts dont 46 enfants et adolescents âgés de 5 à 17 ans. La plupart des victimes se trouvaient à bord d'un autocar qui a pris feu à la suite de l'accident et étaient originaires de la commune de Crépy-en-Valois, dans l'Oise. François Mitterrand, le président de la République, se rendra aux obséques à Crépy-enValois.

Le crash d’Ermenonville

Le vol Turkish Airlines 981 de la compagnie Turkish Airlines, assuré par un DC-10, reliant l'aéroport d'Istanbul-Atatürk à l'aéroport de Londres-Heathrow, s'écrase dans la forêt d'Ermenonville, près de Paris le 3 mars 1974. L'appareil s'est écrasé quelques minutes après avoir décollé de l'aéroport de Paris-Orly, où il venait d'effectuer une escale. L'accident provoquera la mort des 346 occupants de l'appareil, ce qui fait de lui le quatrième accident d'avion le plus meurtrier de l'histoire de l'aviation.

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Le tueur de L’oise

C’est le 8 avril 1979 que celui qu’on surnomme le tueur de l’Oise est arrêté. Il s’agit du gendarme Alain Lamarre. Il sera poursuivi pour un meurtre et cinq tentantives. Reconnu irresposable de ses actes, il ne sera pas jugé.

La mort d’une princesse

Le 31 août 1997, La princesse Lady Dina meurt à la suite d’un accident de voiture à Paris dans le tunnel de la voie Georges-Pompidou sous la place de l’Alma. Son compagnon Dodi AlFayed décédera également dans l’accident.

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