Virusphoto Magazine

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VIRUSPHOTO MAGAZINE ISSUE 3 - Décembre 2009


Virusphoto Magazine A ses membres ...

Couverture : Š Geoffrey Coussy


E-dito Voici venu le troisième numéro du magazine dédié à la première communauté de passionnés de photographie numérique. Comme à chaque fois, nous nous sommes efforcés à rendre hommage à nos membres et à vous présenter d’autres artistes. Plus sexy que les deux précédents, nous l’avons réservés à un public moins jeune. Ce qui n’enlève en rien le charme des autres clichés. Plus sexy grâce aux talents de Nath Sakura qui nous présente sa collection Aubabe et à François Benveniste et son égérie Liloo, dont le travail est très apprécié au sein de la communauté. Ce troisième opus est peut être le dernier sous ce format. Nous réfléchissons, suite au départ de David Nicolas, élément clé à la création de ce magazine, à la meilleure façon de continuer ce magazine sans lui. Mais rassurez vous, ce n’est qu’un au revoir ... Bonne lecture ! Frédéric.


Une photo ... Bonsoir Nathalia, comment vas tu ? Je vais bien, même si l’hiver s’annonce… Aubabe. Comment passer à côté du parallèle avec Aubade. Un simple trait d’humour ? Une satire de la mode ? Evidement, la série s’inspire des publicités pour la célèbre marque de lingerie, qui ont fait crier au génie tant de générations de photographes. Un point de départ intéressant pour ce que j’avais en tête. Des leçons photographiques. Qu’est-ce qui t’as inspiré ce Marabout de l’art photo ? Le ras-le-bol de ceux qui croient, désespérément, que la photographie se résume à une technique, à une somme de savoirs, à une accumulation de répétition de « belles images » qu’ils voient dans les magazines. Car en général, ces comptables de l’image ne fréquentent ni les expos, ni les musées. Ce sont ces gens-là, qu’en général, j’insupporte.


... Une histoire Les conditions de prise de vue sont quasi identiques d’un opus à l’autre. Pourquoi ? En apparence seulement. Et c’est là le challenge. Essayer de trouver une harmonie et une proximité dans plusieurs images prises dans des conditions complètement différentes. Des éclairages qui vont du flash studio au PAR-64 en passant par la lumière du jour et les Balkars. Une façon de me procurer un petit amusement secret lorsque je lis ou j’entends les commentaires sur les petites différences entre ces images. Pourquoi avoir choisi le nu pour cette critique de la photographie technicienne ? Parce qu’en général, les techniciens sont libidineux. A trop passer de temps sur des manuels de photographie, des magazines, des sites internet pour calibrer ses focales et calculer ce qui fait la mode des iso, ils finissent nécessairement par vivre le sexe de la même manière. Seuls derrière du papier glacé ou un écran. Et comme c’est d’eux que je me moque…




Au fur et à mesure, les leçons deviennent plus philosophiques. Ainsi, de « Savoir utiliser un bol beauté », on arrive à « Avoir un objectif dans sa vie ». Pourquoi cette métamorphose ? J’ai caressé l’idée que ceux qui regarderaient ces photos se poseraient les mêmes questions. Pas les techniciens hélas, puisqu’ils ne regarderont que le rendu des textures, la finesse des mises au point et les choix de cadrage (qu’évidement, dans cette série, ils n’approuveront pas). Mon idée de départ était qu’à travers la critique de la technique, une approche plus philosophique (je suis docteur en philosophie, ça marque), plus artistique, apparaisse. Car, après tout, la technique n’est que le moyen par lequel le photographe fait naître un sentiment, une idée, ou une opinion. Un simple outil. Justement, les deux derniers enseignements sont « Avoir un objectif dans sa vie » et « Accepter de lâcher prise pour faire place à l’essentiel». Des conseils applicables dans le vie. Quelle relation y a-t-il entre l’art, et la vie ? S’il n’y a aucun lien entre l’art et la vie, à quoi servirait-il de vivre ? Solliciter une prise de conscience sur ce que l'on voit me semble un défi intéressant. Inciter le spectateur à aller au-delà de son subjectivisme et à s’interroger sur ce que l’image peut révéler de lui-même, lorsqu’il regarde. Après tout, au-delà du jeu de mot, susceptible de n’amuser que les photographes, « avoir un objectif dans la vie », me semble justifier sa propre existence, non ? Quelle photo préfères-tu dans cette série ? Pourquoi ? « Ne jamais perdre une occasion de prendre son pied ». Ca me semble une bonne façon de voir la vie. En tout cas, c’est la mienne. Peux tu nous raconter l'une de ces séances ? C’est sans doute la séance la plus tordue que j’ai eu à subir. J’avais décidé de réaliser une leçon en lumière naturelle, avec une ombrelle portée par la modèle, puisque les accessoires photos constituent le fil rouge de la série. Mais évidement, ce jour-là, il pleuvait à seaux, et la lumière était si faiblarde que même en jouant sur les réglages, un résultat qui coïnciderait assez avec les autres leçons était impossible à obtenir.


Nath Sakura Donc, en forçant sur la balance des blancs, en jouant avec plusieurs réflecteurs pour «!booster!» les tons, et en tirant les valeurs au plus sensible, au plus long et au plus ouvert, la leçon «!ne pas utiliser d’ombrelle par temps d’orage!» est née. Bien par hasard et dans la douleur.! Et enfin, une remarque ? Pour une fois, je n’ai rien d’autre à dire (rires), si ce n’est que mon nouveau livre vient de sortir. Il s’appelle «!Une femme, deux hommes, trois regards!». Il a été réalisé en collaboration avec Fabrizio Pasini, un cartooniste italien unanimement apprécié et Nalair, un excellent caricaturiste français. On peut le commander directement chez l’éditeur!: http://www.editionsragage.com/support.htm!







Une journĂŠe avec ...

Joel


Shooter une personnalité de la télévision est, je dirais, entre la mode, le portrait et le jeu de comédien. Elle contrôle totalement son image et sait déjà ce qu’elle attend de la séance. Cela peut, pour certains, faciliter les prises de vue, mais freiner d’autres dans leur élan créatif. Nous avons déjà pris le temps de faire un premier tri des images déjà produites et des besoins de la séance à venir pour maximiser l’impact des images produites. Le staff est prévenu et tout est bouclé. Pour le choix du matériel, ça sera très simple. Mobilité, rapidité et légèreté. Donc un flash cobra direct sur le boitier et une optique, le 24-70mm f/2.8. Un vrai couteau suisse. Le rendez-vous est donné à 14h avec avec Alina P. et toute l’équipe. Superbe après-midi après une matinée pluvieuse et plutôt fraiche, ce qui laissait présager le pire pour le reste de la journée. Mon assistante, qui arrive sur le lieu de préparation à l'heure dite se chargera de filmer le backstage. C’est toujours agréable de conserver une trace filmée d’une séance. Tandis que tout le monde s’affaire depuis bientôt 1h, j’arrive au point de rendez-vous et repart immédiatement en repérage. Lumière, poses, mobilier urbain, passants... Tout est bon à exploiter lorsque l’on décide de shooter dans le centre de Paris, plein de touristes en cette belle après-midi d’août. Tout est réfléchi, pensé et préparer. Bien évidement, une fois sur place, on laisse toujours faire la magie des accidents. Un coup de vent, un spectateur... La maquilleuse, sous le regard attentif d’Ana, mon assistante se met à la tâche pendant que le coiffeur prépare déjà son matériel. Résolument 80’s, tel est le mot d’ordre pour cette séance urbaine. Make up, coiffure et habillage ok, on se dirige vers le premier lieu de shoot. Premiers clics test et une super ambiance, une lumière un peu dure mais qui tombe très bien et un modèle qui se lache complètement. Que du bonheur! Quelques retouche make up, on replace un peu le stylisme qui a bougé, la coiffure aussi est réajustée, pendant que je vérifie les premières images de la séance. Dynamique de la ville, force des lignes et des poses, tout se déroule au poil.




Changement de lieu mais style identique pour quelque chose de moins statique. La ville est un merveilleux terrain de jeu pour qui prend le temps de s’en imprégner, de se l’approprié pour en faire ‘sa ville’, le temps d’un shooting. Seconde partie, second style et je vois un piéton qui pousse son Vespa à vive allure. Je me dis ‘ça pourrait être top, ça !’ Je n’ai pas le temps de me retourner que je vois l’assistant styliste se lancer à sa poursuite, évitant un bus, 3 camions, 2 cyclistes, pour finalement revenir avec le jeune-homme, ravi de nous prêter son scooter le temps d’une photo. Sympa! Alina à Paris! Alina s’éclate, ultra pro, ultra habituée des caméras, la voir évoluer et gérer son espace est un vrai plaisir ! Nous surplombons la Seine et elle se glisse dans la peau d’une touriste qui découvre Paris avec cet émerveillement propre à un enfant découvrant le monde... Du plaisir à l’état pur ! 4 looks, 4 ambiances, 4 facettes de la ville et chaque fois des surprises. La séance se termine à 17h. L’équipe remballe alors qu’Alina est déjà partie pour un autre rendez-vous. Je range mon matériel et nous checkons rapidement les 250 images shooté cette après midi, en l’espace de 2h. Belle pioche. Inspirés, de nombreuses images retiennent déjà notre attention pendant ce pré-editing. Pour conclure cette journée, je dirais qu’il est essentiel que chacun se prépare pour la séance et soit au top de sa forme. Courir dans tous les sens, ajuster, modifier, corriger, une séance n’est jamais de tout repos, surtout quand on transporte à chaque fois plusieurs kilos de matériel, accessoires et fournitures.Une équipe qui sait tout de suite ce qu’on attend d’elle et qui maîtrise parfaitement sa spécialité, une bonne ambiance, et une passion pour ce qu’on fait, tels sont les clés pour des images qui parlent d’elles-mêmes. Une journée avec Joel.


Invitée d’honneur

Aboutalithium


Comment et pourquoi avez-vous commencé à photographier ? J’ai commencé la photo vers l’âge de 18 ans – c’est à cette époque que je commençais à fréquenter les forums de photo etc. La photographie me permet de m’exprimer et m’offre la possibilité de transmettre ce que je ressens, ou tout simplement de raconter une histoire. Quel matériel utilisez vous ? Qu’est-ce qui a motivé votre choix ? Tout au début, j’avais un simple compact et plus tard, mon choix s’est orienté vers un reflex car je connaissais quelques personnes, qui à l’époque, utilisaient ce type d’appareil. Aussitôt essayé, aussitôt acheté… Où puisez-vous votre inspiration ? Quel est le point de départ de vos photos ? Je m’inspire de beaucoup de choses différentes mais l’univers féerique/fantasy m’attire énormément. Fan d’artistes de peinture numérique, notamment de Luis Royo, j’imagine des mises en scène qui traduisent cette ambiance loin de la réalité. Ainsi, le point de départ des mes photos est d’abord une idée, ensuite, viennent le choix des accessoires et enfin du lieu.

Quelles sont vos méthodes de travail ? Travailler autour d’une idée et rassembler le nécessaire pour la réaliser : modèles, accessoires, lieux… Parfois, pendant une séance avec une idée de départ précise, j’arrive à faire une histoire qui n’était pas prévue… Vous travaillez régulièrement avec des modèles. Qu’est-ce qui vous plait dans la photo de l’Humain ? Photographier les humains est un aspect important pour moi car j’ai besoin de chercher le côté mystérieux de la personne avec qui je travaille, de trouver ce regard qui exprime quelque chose d’intéressant – ambiguïté, peur, tristesse, mystère… Bien que cela soit parfois difficile (car chaque personne est différente et a sa propre façon d’exprimer les choses, surtout devant un objectif), je tiens toujours à ce que le regard et l’expression que je recherche, se rapprochent le plus possible de mon idée de départ. Encore une fois, il peut y avoir des surprises – un regard que je n’imaginais pas qui finalement colle à la série.


Aboutalithium Il est parfois difficile de trouver des modèles…Comment avez vous surmonté cet obstacle ? Je n’ai pas rencontré ce problème puisque jusqu’à présent, ce sont mes proches et amis qui se sont prêtés au jeu. J’ai beaucoup de chance d’avoir d’aussi bons modèles – chaque session est un plaisir et à chaque fois, les sessions sont réussies, autant pour moi que pour eux. Comment se déroule la séance ? Quels sont vos rapports avec les modèles ? La quasi-totalité des séances débute par un briefing – ce que je souhaiterais faire, de quelle manière, les poses à adopter. Il m’arrive cependant de laisser carte blanche aux modèles – ils s’imprègnent de leur rôle et jouent le jeu eux-mêmes. Pouvez vous nous donner quelques notions sur la gestion de la lumière ? La lumière est essentielle pour moi, comme pour beaucoup de photographes je suppose.


Je recherche toujours un endroit où se trouve . une belle lumière et je jongle ensuite avec elle. Cette exploration est surtout vraie pour la macro que j’ai commencée récemment – pas de belles photos sans une belle lumière… Et pour cela, il faut chercher… Une fois la photo prise, comment l’exploitez vous ? Je regarde toutes les photos issues de la même série. La première sélection consiste à choisir celles qui sont bonnes techniquement. La seconde, à sélectionner celles qui sont riches « émotionnellement ». L’étape finale est le post traitement qui peut prendre beaucoup de temps – en effet, j’apporte énormément d’importance à la colorimétrie et avant de valider la série, j’essaye plusieurs versions. S' il y en a, quelles sont les émotions que vous voulez faire passer à travers vos photos ? Il s’agit surtout de cultiver un mystère et une ambiguïté qui peuvent se traduire de différentes manières. Si vous deviez définir votre style, quel serait il ? Je ne recherche pas à reproduire la réalité ni à la

montrer. Je crée en revanche un univers qui n’existe que dans mes pensées, mais qui peut être dévoilé grâce à la photographie. Ceci est différent pour les photos de concert/book où les couleurs restent une priorité et où la réalité est plus visible. La musique est votre deuxième grande passion. Y a-t-il un lien entre l’expression de ces deux arts ? La musique est en fait ma première passion et c’est elle qui m’a amenée à la photographie. J’ai commencé à jouer à l’âge de 12 ans et à partir de cette date, les premiers textes de chansons sont nés. Voulant mettre un visage derrière ma musique, je me prenais en photo. Ainsi, la musique et la photo sont liées puisqu’elles permettent d’exprimer chacune des choses différentes. Elles sont complémentaires : s’il y a une chose que je ne peux exprimer en musique, je le fais en photographie. Et vice versa. Avez-vous déjà eu des commandes ? Si oui, comment cela se déroule-t-il ? Oui, en effet. J’ai réalisé récemment une session photo pour un groupe de rock (www.fagelborn.com). Elle servira à illustrer leur premier EP qui sortira dans quelques semaines.




Y a-t-il une photo que vous affectionnez particulièrement dans votre portfolio ? Si oui, pourquoi ? Oui, une telle photo existe et il s’agit de celle qui a été prise à mes débuts avec un compact. Il s’agit de Sleeping Elf qui a marqué le début de mon aventure photographique… Et récemment, la photo Suicide qui fait partie de la série Forgotten Realms (macro), bientôt visible sur mon nouveau site en septembre. Quels sont les photographes que vous admirez ? Si je devais en citer un qui m’a bluffé c’est David La Chapelle – en voyant son exposition présentant notamment sa photo Le Déluge. J’étais impressionnée par ses mises en scène et ses couleurs. Mais ce n’est pas du côté de la photographie que je puise mon inspiration – comme je l’ai mentionné plus haut, c’est plus la peinture digitale, l’univers fantasy et les styles anciens tels que baroque. Quels sont vos projets ? Comment imaginez-vous la suite de votre parcours ? J’ai plusieurs projets en cours et quelques idées à réaliser. Les projets à court terme mais en continu sont les books pour les mannequin/acteurs/artistes ayant besoin d’un portfolio professionnel. Et pour être toujours en contact avec la musique, je continue les photos de concerts. Auriez vous envie d’essayer un autre type de photo ? Si oui, lequel ? J’ai essayé un jour de photographier des skaters, et j’aimerais bien le refaire. Et dans un registre complètement différent : réaliser des reportages sur les subcultures (punk, gothique, hippies…). Pourquoi elles ? La réponse est simple : j’ai ces trois là dans les veines … Une remarque ? Oui – la vie est courte, réalisons nos rêves quand on le peut encore !



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La sĂŠlection des membres



Eric Frey - Aube en Camargue http://www.wix.com/ericfrey/photo http://www.virusphoto.com/108792-aube-en-camargue.html (Aube en Camargue)


Yohann dugué - L’arroseur http://www.virusphoto.com/108780-larroseur.html (L'arroseur)


Yohann DuguĂŠ - La Perdrix http://www.virusphoto.com/107144-la-perdrix.html (La Perdrix)


Philippe Verdon - Merops Apiaster http://www.philippeverdon.com http://www.virusphoto.com/108560-merops-apiaster.html (Merops apiaster)


Patrice Dorizon - Captive www.aumememoment.com http://www.virusphoto.com/107320-captive.html (Captive)


Vincent Sitbon - L’horreur est ua bout du message http://www.virusphotoblogs.com/raoul21/ http://www.virusphoto.com/106498-lho...e-message.html (L'horreur est au bout du couloir *1000ème Message!*)


Tony Niunkovics - Nuage et champs http://www.flickriver.com/photos/26255153@N08/ http://www.virusphoto.com/106586-nuages-and-champs.html (Nuages & Champs)


Geoffrey Coussy - Bronson ou pas www.geoffrey-coussy.com http://www.virusphoto.com/105129-bronson-ou-pas.html (Bronson ou pas)


François Benveniste - Accident de Bain - Modèle Liloo http://www.fbenveniste-photos.com http://www.virusphoto.com/93569-acci...e-de-bain.html


El Justino - Africa Queen http://www.virusphoto.com/109063-africa-queen.html (Africa Queen..)


El Justino - Red Label http://www.virusphoto.com/108694-red-label.html (Red Label..)



L’invitée, Isabelle Souriment À l’adolescence, je m’amusais à photographier sans pellicule, certainement pour me faire la main et éduquer mon oeil! A 19 ans je quitte la Bretagne pour Londres et fais des études tout en travaillant. Ma première expérience était le photojournalisme afin de témoigner de ce qui m’entourait, tout en réalisant de nombreuses piges pour différents journaux londoniens, j’ai obtenu mon A Level au London Collège of Printing. À cette époque je faisais des reportages sur des personnes atteintes du sida, des sans-abris, des travestis, des gens de la nuit; témoignant de leur environnement quotidien : drogue, prostitution, violence, etc. Puis, avec une journaliste nous avons fait un reportage sur une prison de jeunes. Il avait pour objectif de relater et de tenter de comprendre le nombre inquiétant de suicides qui s’y déroulaient dans l’ombre. J’ai mis fin à cette expérience, lorsqu’un de nos articles a été remanié par un rédacteur en chef: omissions d’informations et remaniements transformant nos observations. En tant que journaliste de terrain, nous avons refusé que nos reportages soient au service de stratégies manipulant l’opinion publique. C’est à ce moment que j’ai arrêté de travailler pour la presse et me suis orientée vers l’expression artistique. J’ai obtenu mon BA en arts plastiques à Goldsmith College en 1998 après un HND en photographie à «Arts University College of Bournemouth». Ensuite, j’ai exposé principalement à Londres mais aussi en Belgique et à Berlin. À Londres, nous étions un collectif d’artistes dans le East End, et nous organisions régulièrement des expositions. Pendant cette période, j’ai réalisé des performances, des installations et des films et vidéos.




Plusieurs critiques d’art tels que Sarah Kent du Time Out et Saatchi venu avec Waldemar Januzcak du Sunday Times ont écrit sur ces événements collectifs. Tu parles beaucoup du monde, et de son évolution, en proposant une réflexion sur ses abus. Pourquoi ? Ce monde dans lequel tu vis te fait-il peur ? Comment pourrais-tu qualifier son évolution ? Le monde ne me fait pas peur, par contre il peut parfois m'inquiéter. Difficile d’allier ensemble le progrès, l’économie et l'environnement tout en protégeant les valeurs universelles. On peut parler d’évolution, car la vie est évolution, je dirais plutôt qu’il est important de réfléchir sur nos actes et ses conséquences à long terme ce qui nous amène aux sens de responsabilité pour l’avenir de notre planète. Si tu devais définir ton style, lequel serait-il ? J’aime avoir la liberté de traverser plusieurs styles, et d’en jouer. Je me qualifierais d’investigatrice. Si je devais en définir un style, ça serait le néo-baroque, c’est un style affirmé, volontaire, fait de contrastes cohabitant avec différentes époques et différents courants. Pour toi, la photographie ne se limite pas à l’appareil photo. Tu coupes, colles, retouches….pour transformer la réalité en fiction, ou la fiction en réalité. Peux-tu nous en dire plus sur ces méthodes de travail et cet objectif, pour le moins particulier ? Je manipule au même titre que le monde manipule les choses, les êtres, la nature, ce qui nous entoure, etc. J’ai fait plusieurs installations avec de la vidéo, image, moteur, peinture, sculpture, etc. Actuellement, par le biais de la photographie, je suscite des réflexions sur notre monde. Je transforme la réalité en fiction et la fiction en réalité en utilisant différentes techniques : maquettes, collages, retouches, etc. La fonction de la photographie semble alors déplacée, transformée et met en évidence son pouvoir d’illusion. Que ce soit par des maquettes re-photographiées ou des lieux réels, je sème le doute pour questionner notre rapport à l’image. Ces ambiguïtés me permettent de capter la densité des choses et d’accéder à différents niveaux de réalité.


Il y a des références bibliques dans tes photos. Le paradis, l’enfer, le jardin d’Eden… Pourquoi ? La notion de paradis touche toute culture, c’est une notion universelle. Le concept de paradis est présent dans presque toutes les religions. Le mot paradis vient du persan par le grec paradeisos, qui signifie “parc clos où se trouvent des animaux sauvages”. « Le jardin d’Eden et la notion du "Paradis perdu" m’ont toujours fascinée. J’ai réalisé quelques travaux sur ce sujet dont l’installation "I like to think so". Un nouvel Eden, une transgression amusée et revisitée à partir des signes induits de nos mutations contemporaines. Puis, je me suis dirigée vers des "faux-semblants de Paradis faits main" où j’ai utilisé des animaux en plastique que j’ai découpé, ré-assemblé et photographié. Une fantaisie d’apprenti généticien donne naissance à ce nouveau bestiaire. Entre réalité et fiction, entre maquette et réalité, entre faux-semblant et vrai-semblable, j’entre en jeu avec ce qui m’entoure. Je crée une vision d’un monde hybride, fabriqué et inspiré par une notion allégorique du Paradis, "créé par la main de l’Homme" . J’aimerais que nous nous attardions sur ton dernier travail ( qui fait d’ailleurs beaucoup parler de lui ), « Venus d’ailleurs ». Qu’est-ce qui l’a motivé ? Quel est son concept ? Ce projet est basé sur une transposition, une mutation « numérique » d’animaux sauvages, photographiés dans des zoos et parcs animaliers, que je transporte en des lieux, paysages ou sites inhabituels qui laissent place à l’imaginaire et à la réflexion du regardant. Cette manipulation de l’image n’est qu’un artifice de plus dans un monde bousculé et modifié au quotidien. Ne peut-on avancer l’hypothèse que la nature et l’animal nous questionnent parce que leur statut les situe désormais au plus proche d’un réel que nous transformons, des espèces sauvages que nous réintroduisons dans un milieu surveillé, où le naturel ne peut survivre qu’enclos? Par le montage photographique, j’ai voulu représenter cet état de la nature, jamais intacte ni indépendante de l'homme. En déplaçant des animaux dans un paysage autre que le leur, je soulève un paradoxe entre l’idée romantique de la nature et la réalité de notre monde moderne submergé, d’informations et de technologies, à travers lequel nous souhaitons retrouver nos relations conscientes avec la nature des choses et des êtres telle




En déplaçant des animaux dans un paysage autre que le leur, je soulève un paradoxe entre l’idée romantique de la nature et la réalité de notre monde moderne submergé, d’informations et de technologies, à travers lequel nous souhaitons retrouver nos relations conscientes avec la nature des choses et des êtres telle une renaissance.» Cette manipulation ne s’applique pas seulement aux images mais à certaines réalités, comme celles de la nature et de l’animal par exemple dont l’élevage industriel, la recherche génétique, le clonage, la réintroduction d’animaux sauvages, etc , qui ont définitivement transformés nos conditions de vie. Et c’est d’actualité, regardez ce que l’ours, réintroduit dans les Pyrénées, provoque comme polémique.Pas besoin d’être un chercheur diplômé pour influer sur la génétique…du moins, pas en photographie. Comment se sont déroulées les prises de vues jusqu’à l’image finale ? Ce sont des images, des images assemblées, rassemblées, elles sont à la fois réelles et transformées. Chaque endroit à une signification. Il y a beaucoup de paysage du Danemark, que j’ai réalisé quand je me suis intéressée à la symbiose de Kalundborg. L’écosystème industriel le plus abouti et le plus documenté qui se trouve à Kalundborg au Danemark , petite ville industrielle de 20 000 habitants, située en bord de mer à 100 Km à l’Ouest de Copenhague. Leur concept de développement durable est né à la fin des années 80. En réponse au constat de l’incompatibilité du fonctionnement de notre société avec les réalités terrestres (ressources naturelles limitées, capacité de la Biosphère à « encaisser » les pollutions...). La « symbiose de Kalundborg » est un réseau qui s’est formé spontanément en une trentaine d’années, regroupant aujourd’hui 5 entreprises proches géographiquement et la municipalité. Les autres endroits sont à Dungeness, au sud-est de l'Angleterre pour sa centrale nucléaire en fin de vie et ses paysages étonnants ainsi que la maison de l’artiste Derek Jarman qui m’a inspirée. Ensuite, Esparros pour son nom à connotation de l’espoir - Olot en Espagne pour ses terres volcaniques - Moncrabeau, petite commune dans le Lot et Garonne, près de Condom, connu pour être la Capitale des menteurs - Une famille de gorilles sur des pains de glace en pensant à l’Ours polaire subissant les conséquences du réchauffement climatique, etc.


Ce projet c’est déroulé sur 2 ans entre les recherches et les prises de vues de paysages et d’animaux dans la subtilité de l’assemblage d’ombre et de lumière. Chaque cliché est teinté d’une double dénonciation. La première concerne la disparition d’espèces animales, et la deuxième s’attaque aux dérives de l’homme. Je me trompe ? Je ne dénonce pas, c’est une réalité que j’utilise pour transmettre un miroir de ce qui me semble être d’actualité de nos jours. Au-delà de ma «pensée écologique» et de mon intérêt pour le monde animalier, ma démarche artistique traduit mon idée de la « responsabilité » : questionner ce qui m’entoure. Toutefois, mon rôle n’est pas de promouvoir une « vérité écologique » tout en me sentant concernée. Réaliser ce projet a pour objectif d’affronter certaines craintes, miroirs de notre époque, et d’utiliser ce questionnement comme antidote à l’anthropocentrisme. C’est quand la nature dit stop que l’on pense «écologie» Tu parles des bouleversements technologiques en opposition avec le romantisme de la nature. Mais toimême, en réalisant cette série, tu as usé de ces mêmes avancées techniques ! Je suis pour les avancées techniques. La recherche, la science contribuent à l’évolution et peuvent contribuer à améliorer nos vies. Tout dépend de ce que l’on fait de ce progrès, comment nous l’utilisons et pour quelle finalité? Tes photographies sont teintées d’humour….Tu seras peut être heureuse de nous raconter une petite anecdote croustillante ? J’en ai plusieurs mais en voici une dont j’en ai fait les frais,...En Inde à Bénarès, lors d’une sieste la fenêtre ouverte, plusieurs singes ont profité de mon sommeil pour faire main basse sur des bananes et des pellicules photos que j’avais déposé sur une table. Sortant de ma sieste, malheureusement ce n’était pas un rêve, les bananes pas de soucis, mais toutes mes images d’une semaine de travail totalement déroulées et saccagées. Imaginez cette photo ou vidéo complètement insolite! J’en ris maintenant!


Isabelle, ton avenir de photographe semble bien établi. Comment imagines-tu la suite de ton parcours ? As-tu des projets ? Une nouvelle série en tête ? La vie d’artiste, c’est une vie en éveille et en mouvement. En ce moment, je suis sur une autre série. Il est difficile d’en parler pour le moment mais je vous promets de vous en faire part une fois fini. Je réalise aussi des commandes à la demande pour diverses structures et clients. Et enfin, une remarque ? Je vous cite un chapitre écrit par Vinciane Despret dans son livre «Bêtes et Hommes» édité par Gallimard. Un livre qui m’a inspiré pour «Venus d’Ailleurs». «Les animaux imposent des choix». « Avec qui voulons-nous vivre? S’impose aujourd’hui comme le problème qu’il s’agit de résoudre. Or, la question du «nous» est loin d’être clôturée. Certains veulent vivre avec des ours, d’autres pas. On veut bien conserver les corbeaux, mais pas derrière chez soi. Dans les Pyrénées, les vautours étaient des alliés ; trop nombreux, ils deviennent des indésirables. Ce qui caractérise aujourd’hui les conflits et les débats, c’est la multiplicité des acteurs intéressés : des écologistes, des scientifiques, des éleveurs, des amateurs, des touristes, des habitants et des animaux. Qui doit-on protéger et comment doit-on faire ? Comment les humains décident-ils de ceux qu’il faut protéger ? Qui sont les élus et les électeurs ? Quels sont les motifs invoqués pour justifier d’une élection ? Quel en est le prix et qui est désigné comme devant l’assumer ? » ... Méditation pour notre évolution en tant qu’humain sur cette chère planète terre! Isabelle Souriment Site : www.clonearts.fr



Virusphoto Magazine ISSUE 3 - Décembre 2009 Directeur de publication : Frédéric Hiard Interviews : David Nicolas Choix des photos : David Nicolas Mise en page : Frédéric Hiard Contact : presse@virusphoto.com Web : www.virusphoto.com

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