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D É C O U V R
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03 ÉDITO – Matthias Pintscher 05 SAISON 19_20 08 DE HAUT VOL – entretien avec Elizabeth Streb 14 LE TEMPS DÉCHIRÉ – entretien avec Mark Andre 18 LE MÉTIER DE COMPOSITEUR – Luciano Berio 22 COMME UN TREMBLEMENT INTÉRIEUR – entretien avec James Dillon 2 8 C R I S TA U X D E N O T E S – e n t r e t i e n a v e c H a n s A b r a h a m s e n 3 2 U N E P E T I T E M O N TA G N E M A G I Q U E – e n t r e t i e n a v e c G e o r g e B e n j a m i n 34 DU PIXEL À LA NOTE – entretien avec Steve Reich 38 À CONTRETEMPS – entretien avec Marc Monnet 4 5 M AT I È R E S O N O R E – e n t r e t i e n a v e c R a p h a ë l C e n d o 4 8 L E S R È G L E S D E L’ A M I T I É – e n t r e t i e n a v e c R e n a u d C a p u ç o n e t B e r t r a n d C h a m a y o u 5 2 C O R P S R É S O N N A N T S – S a b u r o Te s h i g a w a r a 5 7 L E S S AV E U R S C A C H É E S D U S O N – e n t r e t i e n a v e c M a r c o M o m i
P A R
T A G E R
6 1 A C T I O N S C U LT U R E L L E S 6 5 M É C É N AT 66 ENSEMBLE INTERCONTEMPORAIN 6 7 M AT T H I A S P I N T S C H E R , D I R E C T E U R M U S I C A L 69 ÉQUIPES 7 0 I N F O R M AT I O N S P R AT I Q U E S
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É D I T O V I V E L A C U R I O S I T É !
En avril dernier, alors que je marchais dans la rue au sortir d’une répétition publique, j’ai saisi au vol la conversation de trois personnes qui venaient de nous écouter. L’une d’elles racontait à ses amies qu’elle avait découvert la musique d’Helmut Lachenmann à l’un de nos concerts, deux ans auparavant : ça l’avait tout de suite intéressée, disait-elle, parce que c’était différent. Cette musique avait piqué sa curiosité. « La curiosité est un vilain défaut. » Voilà, je crois, l’un des proverbes les plus faux qui soient ! C’est au contraire une qualité, que nous devons encourager et garder constamment éveillée.
En février, le Grand Soir numérique livrera lui aussi son lot de curiosités en tout genre, comme, par exemple, une incroyable sculpture sonore cinétique de Moritz Simon Geist. Et pour le dernier concert de la saison, le compositeur italien Marco Momi s’intéressera quant à lui à… un goût et pas n’importe lequel : l’umami, cinquième saveur avec le sucré, l’acide, l’amer et le salé. Même nos concerts consacrés à nos « références » révèlent un grain de folie : ainsi du concert monographique consacré à Luciano Berio, au cours duquel nous interprèterons notamment Sinfonia, en collaboration avec les étudiants du Conservatoire de Paris. Sinfonia est une œuvre un peu « folle ». Berio lui-même la définissait comme un « documentaire sur un objet trouvé ». Et si nous jouons cette année le Pierrot lunaire de Schönberg et la Suite lyrique de Berg, c’est pour accompagner le chorégraphe japonais Saburo Teshigawara, que nous aurons l’immense plaisir de retrouver pour la troisième fois depuis l’opéra Solaris au Théâtre des Champs-Élysées en 2015.
Cette petite phrase sur Lachenmann m’a du reste rappelé ma propre réaction lorsque j’ai entendu pour la première fois Lonicera Caprifolium d’Olga Neuwirth. J’étais tout jeune, nous participions tous deux à une master classe de composition dirigée par Peter Eötvös. Et je me souviens encore de ma stupéfaction en découvrant cette musique à nulle autre pareille, curieuse à plus d’un titre. C’est d’ailleurs autour de cette œuvre, dont les développements s’inspirent de ceux d’une plante proliférante, que nous avons imaginé un Grand Soir intitulé « Cabinet de curiosités ». Un programme dont chaque œuvre est une « curiosité » en soi, et qui nous permet par exemple de créer une pièce de Gilbert Nouno pour trois triangles et électronique !
On ne compte plus cette saison les concerts où la musique sort de son pré carré pour aller à la rencontre d’autres disciplines : un concert axé sur la performance au festival Musica, une création vidéo-musicale (à moins que cela ne soit l’inverse), fruit de la rencontre entre deux géants de la création contemporaine, le compositeur Steve Reich et le plasticien Gerhard Richter, un voyage en famille dans le monde astral de Karlheinz Stockhausen avec la compagnie chorégraphique Les Ouvreurs de Possibles, L’Histoire du soldat de Stravinsky récitée et dansée etc.
Si l’on prend un peu de recul, cette saison 2019-2020 est un grand cabinet de curiosités. Et ce dès le début de la saison, en septembre, au Théâtre du Châtelet, à l’occasion de sa réouverture après deux années de travaux. Au cours de cette soirée vraiment extraordinaire, nous créerons un « ballet » d’un nouveau genre, avec une musique de Pierre-Yves Macé et une chorégraphie proprement renversante de l’Américaine Elizabeth Streb. Nous retournerons au Châtelet en mars 2020 avec la reprise d’un spectacle chorégraphique culte de Pina Bausch sur des textes de Bertold Brecht et une musique de Kurt Weill : Les Sept Péchés capitaux. Ces deux productions marquent le début d’une nouvelle collaboration au long cours sur des projets pluridisciplinaires avec cette grande institution parisienne.
Une « saison des curiosités » en somme, au cours de laquelle sont exposées des « choses » rares, singulières, nouvelles aussi, avec de nombreuses commandes passées à des compositeurs de toutes les générations comme Beat Furrer, Yann Robin, Isabel Mundry, Raphaël Cendo, Clara Iannotta, ou encore Bastien David. Un savant mélange d’œuvres de toutes sortes et de toutes formes qui saura sans aucun doute éveiller la curiosité de chacun tout au long de cette saison.
Pour notre premier concert à la Philharmonie de Paris fin septembre, nous jouerons deux œuvres aussi singulières que saisissantes : Ofanìm de Luciano Berio et la mystique et théâtrale Hiérophanie de Claude Vivier. En janvier 2020, nous consacrerons une soirée entière à… la neige avec le monumental cycle Schnee du compositeur danois Hans Abrahamsen !
Matthias Pintscher, Directeur musical
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H EUROPEAN C R E AT I V E ACADEMY 18-24.08.19 ANNECY
F E S T I VA L G E R G I E V 12.09.19 ROTTERDAM
PA R A D E
13 + 14 + 15.09.19 PARIS
R A I N Y D AY S 24.11.19 LUXEMBOURG
PICASSO, T Y M PA N S U R T O I L E
ÉMERGENCES
ANTISYSTÈME
REICH / RICHTER
KAMMERKONZERT
16.02.20 PARIS
DEMEURE ET TREMBLEMENTS 27.11.19 PARIS
27.02.20 PARIS
LES DOUZE BOÎTES DU DOCTEUR STOCK
07.03.20 PARIS
01.12.19 PARIS
H O M M A G E À O L LY
GRAND SOIR CABINET DE CURIOSITÉS
MAHLER ET LES RUSSES
HISTOIRE D U S O L D AT
EXPRESSIONS CONTEMPORAINES
FROM WITHIN…
BEETHOVEN +
I A N N O T TA & VERUNELLI
CANONS D’HIVER
LES SEPT PÉCHÉS C A P I TA U X
I N C A N TAT I O N S 19.09.19 PARIS
F E S T I VA L PRÉSENCES
10.12.19 PARIS
13.03.20 PARIS
OMBRE PORTÉE 22.09.19 BERLIN
F E S T I VA L M U S I C A 24.09.19 STRASBOURG
VERS LA LUMIÈRE 15.10.19 PARIS
DONAUESCHINGER M U S I K TA G E 20.10.19 DONAUESCHINGEN
SINFONIA 12.11.19 PARIS
15.12.19 PARIS
15.03.20 LYON
19.03.20 BRUXELLES
19.01.20 DIJON
25.01.20 PARIS
22.03.20 PARIS
29.01.20 PARIS
24 + 25 + 27 + 28 + 29.03.20 PARIS
GRAND SOIR NUMÉRIQUE
18.08.19
03.04.20 PARIS
09.04.20 GRENOBLE
14.04.20 AIX-EN-PROVENCE 15.04.20 PARIS
CONCOURS I N T E R N AT I O N A L DE PIANO D’ORLÉANS 26.04.20 ORLÉANS 11.05.20 PARIS
LOST IN DANCE / PIERROT LUNAIRE 13 + 14.05.20 PARIS
3 × 3
03.06.20 PARIS
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OJAI MUSIC F E S T I VA L 11-14.06.20 OJAI
N U O VA S T R A D A 22.06.20 PARIS
07.02.20 PARIS
22.06.20
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DU 18 AU 24 AOÛT
JEUDI 12 SEPTEMBRE
VENDREDI 13 SEPTEMBRE, 20:00
ANNECY
22:30 ROTTERDAM
SAMEDI 14 SEPTEMBRE, 15:00 & 20:00
DE DOELEN, JURRIAANSE ZAAL
DIMANCHE 15 SEPTEMBRE, 15:00 & 20:00 PARIS, THÉÂTRE DU CHÂTELET
EUROPEAN C R E AT I V E ACADEMY
F E S T I VA L GERGIEV Bou lez en solo
Passage de témoi n
Lancé en 1996 par Valery Gergiev, alors chef principal de l’Orchestre philharmonique de Rotterdam, le festival qui porte désormais son nom s’organise chaque année autour d’un thème précis. Pour cette édition 2019, le charismatique chef russe a choisi de mettre à l’honneur la musique de Pierre Boulez. L’occasion pour l’Ensemble de dépêcher tout spécialement trois de ses solistes pour interpréter un florilège d’œuvres en solo pour piano, clarinette ou violon, avec ou sans électronique.
On change de cadre, mais on garde la recette si bien éprouvée à Lucerne ces dernières années : après les Alpes suisses, les solistes de l’EIC prennent cette année leurs quartiers d’été côté français, à Annecy. Au programme : une intense et stimulante session de transmission entre les musiciens de l’Ensemble et de jeunes instrumentistes qui pourront profiter pendant toute une semaine de l’expérience de leurs aînés spécialisés dans le répertoire moderne et contemporain. La toute première édition de cette académie résolument tournée vers l’Europe se conclura par un concert alternant des œuvres pour ensemble et quelques pépites de musique soliste du xxe siècle.
Pierre BOULEZ Dialogue de l’ombre double, pour clarinette, clarinette enregistrée et piano résonnant Douze notations, pour piano Incises, pour piano Anthèmes 2, pour violon et dispositif électronique
Concert de clôture, samedi 24 août, 20:30 à l'église Sainte-Bernadette
Solistes de l'Ensemble intercontemporain Andrew Gerzso réalisation informatique musicale Ircam
Claude DEBUSSY Syrinx, pour flûte
Renseignements et réservations gergievfestival.nl
Peter EÖTVÖS Octet, pour instruments à vent Béla BARTÓK Danses populaires roumaines, pour piano Igor STRAVINSKY Trois pièces pour clarinette seule György LIGETI Ramifications, pour douze cordes solistes Pierre BOULEZ Mémoriale (…explosante-fixe… Originel) pour flûte et huit instruments Emmanuelle Ophèle flûte Ensemble de l’European Creative Academy Ensemble intercontemporain Daniel Kawka direction En partenariat avec l’Impérial Annecy Festival, l’Impérial Palace, Le Collège Contemporain
PA R A D E Ré ouver tu re en fa nfa re Pour sa réouverture après deux années de chantier, le Théâtre du Châtelet propose un spectacle immersif et en fanfare. Deux heures avant chaque représentation, sur le Parvis de l'Hôtel de Ville de Paris, l'Académie Fratellini propose des ateliers d'initiation au cirque, et un orchestre de percussions accompagne les Marionnettes Géantes du Mozambique pour un premier spectacle gratuit. Rejointes par la Cocteau Machine imaginée par le décorateur Francis O’Connor, les marionnettes emmèneront ensuite cette grande parade festive à travers les rues jusqu’au Théâtre du Châtelet. Les espaces du théâtre seront totalement investis pour reconstituer l’univers fantasque d’Erik Satie qui, il y a plus d’un siècle, entrait dans la légende du Châtelet avec le mythique ballet Parade. Entre attractions de cirque et animations, le public découvrira, toujours gratuitement, un monde étrange et facétieux, peuplé de clowns, d’acrobates, de musiciens et de comédiens. Le dernier temps fort de cette réouverture aura lieu dans la grande salle (accès payant sur réservation) où nous retrouverons les trois troupes de cirque. Les marionnettes reviendront au son des tambours puis laisseront la place à la troupe d’acrobates de Stéphane Ricordel, accompagnée par le groupe de musique ukrainien DakhaBrakha. Enfin, la compagnie Streb Extreme Action présentera des numéros vertigineux avec ses performeurs de haut vol, sur une création musicale de Pierre-Yves Macé spécialement commandée par le Théâtre du Châtelet et jouée par l’Ensemble intercontemporain.
Deux heures avant chaque représentation depuis le parvis de l’Hôtel de Ville de Paris : Ateliers, spectacles des Marionetas Gigantes de Moçambique, « Cocteau Machine », parade festive jusqu’au Théâtre du Châtelet (accès libre) Dans les espaces du Théâtre : Découverte de l’univers d’Erik Satie (accès libre) Spectacle dans la grande salle (accès payant)
ENTRÉE DU PUBLIC SUR Erik SATIE / Harrison BIRTWISTLE Mercure : poses plastiques ballet pour orchestre de chambre Création française
PREMIÈRE PARTIE Boîte Noire Stéphane Ricordel direction artistique DakhaBrakha musique DEUXIÈME PARTIE Pierre-Yves MACÉ Nouvelle œuvre, pour ensemble, sur une performance de la compagnie Streb Extreme Action Création mondiale Commande du Théâtre du Châtelet
Streb Extreme Action Elizabeth Streb direction artistique Ensemble intercontemporain Matthias Pintscher direction Tarifs 20€ à 89€ Réservations chatelet.com
Renseignements et réservations europeancreativeacademy.com
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E L I Z A B E T H · · · · · · · · S T R E B · · · · · · · · · · · · · · · _
De haut vol Comment recrutez-vous les danseurs ? Nous leur faisons passer une audition de trois jours, sans rien de vraiment dangereux. Il faut que leurs mouvements soient beaux mais aussi qu’ils soient curieux de ce qui meut leur corps. Savent-ils ouvrir leur cage pour en faire sortir l’animal sauvage ? C’est cela que je cherche. Il faut bien sûr qu’ils soient très costauds. Leur constitution doit leur permettre d’éviter les blessures. Ils doivent aussi être d’une nature à s’amuser dans leur travail. S’accroupir, tomber dans les airs et atterrir sur le ventre doit les faire sourire, pas grimacer.
Des sauts dans le vide à dix mètres du sol, des machines qui mettent les corps en apesanteur… Avec sa compagnie Streb Extreme Action, basée à New York, la chorégraphe américaine Elizabeth Streb révèle l’incroyable potentiel des corps. Pour la réouverture du Théâtre du Châtelet, elle crée Parade, hommage au ballet d’Erik Satie avec une musique du compositeur français Pierre-Yves Macé.
Elizabeth, d’où vient votre approche atypique de la chorégraphie ? Je me suis toujours demandé pourquoi les danseurs passaient leur temps à faire semblant de défier la gravité, alors que celle qu’ils affrontent est très faible. En revanche, quand vous vous laissez tomber de dix mètres de haut, vous sentez une vraie force qui vous attire. Si vous ne l’affrontez pas, alors selon moi, vous n’êtes pas profondément dans le mouvement, dans l’action. Vous êtes un danseur qui fait semblant. Ce que j’essaie de créer, c’est une sorte de danse non prédictive. Le public ne doit pas pouvoir anticiper ce qui se passe devant lui. La question centrale, c’est de réaliser des mouvements sincères dans la situation artificielle qu’est la théâtralité.
Mais ce sont des superhéros ! C’est exactement cela. D’ailleurs, dans l’école que j’ai créée, où les danseurs de la compagnie enseignent, les enfants ont tous leur préféré. Ils ont créé des emojis de superhéros pour chacun d’entre eux. Les vendredis et samedis nous organisons des spectacles. Chaque danseur est accueilli par les acclamations de ses supporters ! Parlez-nous de cette école… Je l’ai ouverte il y a seize ans, et aujourd’hui elle accueille environ 600 enfants par semaine, répartis en soixante cours. Les plus petits ont 18 mois. Les enfants sont des participants fondamentaux à notre expérience. Ils ne font pas semblant quand ils bougent, cela les rend joyeux. Après seize ans de ce programme, les danseurs de la compagnie se sont appropriés les mouvements des enfants. Comme eux, ils jouent. Qu’est-ce que vous voulez apprendre en premier lieu à ces enfants et à vos danseurs ? À voler.
Ce que vous faites avec votre compagnie est-il dangereux ? Oui. Mais c’est nécessaire. À mon avis, nous affrontons simplement notre condition physique d’être humain sur terre. Je ne comprends pas pourquoi les gens trouvent que ce que je fais est violent. Les danseurs de Streb Extreme Action sont d’accord pour se faire un peu mal, mais mon but n’est pas la souffrance. À force de répétitions, ils savent comprendre en une fraction de seconde quoi faire pour éviter les blessures graves.
Vous n’avez pas voulu connaître la musique de Pierre-Yves Macé, inspirée par Parade, avant les premières répétitions. Pourquoi ? Je n’ai pas besoin d’entendre la musique car la musique ne me guide pas. Je bâtis avec les danseurs une structure sans musicalité. C’est la perception du public qui relie mouvement et musique. Cela n’empêche pas la musique de nous émouvoir quand nous bougeons mais je considère musique et chorégraphie comme deux univers distincts.
Vous utilisez des machines impressionnantes dans vos chorégraphies. Comment sont-elles mises au point ? Des ingénieurs travaillent avec nous, au cœur de la compagnie. Nous les laissons découvrir notre univers, comprendre nos enjeux, afin qu’ils mettent au point un matériel qui ne nous trahira pas. Pour Parade au Théâtre du Châtelet, nous inaugurons une nouvelle machine, unique au monde : la molinete. C’est une sorte de tube monté sur trépied qui tourne à 360 degrés, où trois danseurs peuvent s’accrocher grâce à des bottes spéciales.
Propos recueillis par Axelle Corty En lien avec le concert Parade, p.7
Quel est le rôle de ces machines dans votre recherche ? Elles permettent d’inventer un vocabulaire nouveau. Nous créons nos équipements un peu de la manière dont les instruments de musique ont été inventés : à l’aube de l’humanité, on s’est aperçu que la voix humaine n’était pas suffisante pour représenter tous les sons qui existent sur terre. C’est ce que nous faisons dans le domaine de la danse : nous décidons que le corps humain au sol n’est pas suffisant et nous inventons des machines pour aller plus haut, plus vite, plus fort.
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DIMANCHE 22 SEPTEMBRE
MARDI 24 SEPTEMBRE
16:00 BERLIN
20:30 STRASBOURG
PIERRE BOULEZ SAAL
THÉÂTRE NATIONAL DE STRASBOURG SALLE GIGNOUX
JEUDI 19 SEPTEMBRE 20:30 PARIS PHILHARMONIE DE PARIS SALLE DES CONCERTS – CITÉ DE LA MUSIQUE
I N C A N TAT I O N S S cènes de rituels Voilà une soirée placée sous le sceau de l’antique, pétrie de mythes et de mysticisme ! Tour à tour, Gérard Grisey, Luciano Berio et Claude Vivier nous confrontent à notre finitude en même temps qu’à nos aspirations d’éternité, bref, nous mettent face à notre condition humaine. Quand Grisey évoque « l’image d’une énigmatique stèle découverte par des archéologues », Berio s’empare de l’Ancien Testament, mettant en perspective le Cantique des cantiques et les visions fantastiques du livre d’Ézéchiel. Créé par l’historien des religions et des mythes Mircea Eliade à partir du mot hiérophante (du grec hierós (« sacré ») et phanios, « qui apparaît »), le terme hiérophanie désigne donc une manifestation du sacré. La Hiérophanie
de Vivier est une vaste représentation de l’existence humaine. Théâtrale, l’œuvre exige des musiciens des pratiques insolites : improviser, chanter bouche fermée une musique qui leur rappelle leur enfance, crier les noms des dieux, échanger leurs instruments ; tout cela au cœur d’exhortations spirituelles. Pour sa redécouverte en France, Hiérophanie est spécialement mise en espace par Silvia Costa. Gérard GRISEY Stèle, pour deux percussionnistes Claude VIVIER Hiérophanie, pour soprano* et ensemble Luciano BERIO Ofanìm, pour voix de femme**, deux chœurs d’enfants, deux groupes instrumentaux et dispositif électronique en temps réel Noa Frenkel voix** Marion Tassou soprano* Silvia Costa mise en espace Maîtrise de Paris Edwige Parat cheffe de chœur Ensemble intercontemporain Matthias Pintscher direction Tempo Reale réalisation informatique musicale Coproduction Ensemble intercontemporain, Festival d’Automne à Paris, Philharmonie de Paris Tarifs 20€ / 25€ Réservations philharmoniedeparis.fr / 01 44 84 44 84
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OMBRE PORTÉE
F E S T I VA L M U S I C A
Création et révélation à Berl i n
Per forma nces en tout gen re
Depuis son ouverture en 2017, la Pierre Boulez Saal de Berlin s’est imposée comme un lieu de rencontre musicale de premier plan. L’EIC y est régulièrement invité et, cette année, avec un programme présentant notamment deux créations. À commencer par la première nationale de Shadow of the Future du Finlandais Magnus Lindberg, créée l’an passé à Paris. En réponse à une commande de l’EIC, Lindberg cherche à « explorer toute la dynamique chambriste de l’Ensemble en tentant de trouver une palette expressive maximale avec des forces minimales ». Pour Sasha J. Blondeau, ce sera une création mondiale, celle de Contre-espace qui devrait prolonger la réflexion du jeune compositeur français sur « les notions de distance, de voisinage, de continuité/discontinuité dans un même territoire de composition ». L’EIC propose enfin une grande redécouverte : celle de Hiérophanie du compositeur québécois Claude Vivier, titre emprunté à l’historien des religions Mircea Eliade pour désigner une manifestation ou révélation du sacré. Composée en 1970, Hiérophanie est une représentation scénique de l’existence humaine qui exige des interprètes des pratiques étranges et inattendues : improviser, jouer et chanter bouche fermée, crier les noms des dieux ou encore échanger leurs instruments…
Pour cette nouvelle invitation du festival Musica, les solistes de l’EIC s’offrent une petite récréation théâtrale, où la musique fête le corps et le corps fait de la musique. L’interprète n’y est plus seulement musicien, il est acteur, corps de lumière et de son. Mais théâtralité ne signifie pas uniquement « théâtre musical », genre dans lequel Mauricio Kagel ou François Sarhan se sont particulièrement investis. C’est également interroger le geste musical, dans une réinvention complète de la technique instrumentale, voire de l’instrumentarium lui-même. Comme par exemple Vinko Globokar qui, dans ?Corporel, entraîne le percussionniste dans une véritable performance : seul en scène, torse et pieds nus, assis par terre, face au public, il explore tous les bruits qu’il peut produire avec son corps. La théâtralité en musique, c’est aussi faire subir aux instruments tous les traitements imaginables. On tape la caisse de la contrebasse avec un maillet de timbale chez Jacob Druckman, on la désaccorde pour faire naître une atmosphère énigmatique chez Franco Donatoni.
Claude VIVIER Hiérophanie, pour soprano et ensemble
Jacob DRUCKMAN Valentine, pour contrebasse
Sasha J. BLONDEAU Contre-espace, pour ensemble
François SARHAN Situations – IV. « Vice versa », pour deux interprètes
Création mondiale Commande de l’Ensemble intercontemporain
Vinko GLOBOKAR ?Corporel, pour un percussionniste et son corps
Magnus LINDBERG Shadow of the Future, pour ensemble
Natacha DIELS An Economy of Means pour batterie miniature et électronique
Mauricio KAGEL MM 51. Ein Stück Filmmusik, pour piano (et métronome) François SARHAN Home Work II, in the garage pour percussionniste corporel chantant
Création nationale
Création française
Marion Tassou soprano Silvia Costa mise en espace Ensemble intercontemporain Matthias Pintscher direction
Franco DONATONI Alamari, pour violoncelle, contrebasse et piano Solistes de l’Ensemble intercontemporain
Avec le soutien de la Fondation Meyer
Renseignements et réservations festivalmusica.fr
Renseignements et réservations boulezsaal.de
Master classe, le mercredi 25 septembre à 15h à la Cité de la musique et de la danse 11
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ÉCLAIRAGE Diégo Tosi, violoniste mar’eh de Matthias Pintscher
MARDI 15 OCTOBRE 20:30 PARIS PHILHARMONIE DE PARIS SALLE DES CONCERTS – CITÉ DE LA MUSIQUE
VERS LA LUMIÈRE Du spi rituel dans la musique Avant le concert, à 19:00 Rencontre avec Mark Andre et Matthias Pintscher Entrée libre
mar’eh de Matthias Pintscher est un poème lyrique qui exige du violon solo une immersion totale dans le son. Celui-ci doit se dédoubler, devenir en même temps peintre ou poète, pour se plonger instinctivement dans cette œuvre. Il lui faudra effacer de son jeu toute trace de préparation afin d’envelopper le public d’une atmosphère très particulière, élaborée à partir d’une vaste palette sonore. Très subtile, alternant harmoniques artificielles pianississimo et traits excessivement virtuoses, l’écriture de Matthias Pintscher est comme un chant du cœur : elle nécessite une très grande maîtrise non seulement de l’instrument, mais aussi de son propre corps. Un calme intérieur inébranlable est primordial afin de laisser transparaître ces sonorités inouïes dans toute leur pureté. Dans un large passage de la pièce, qui semble une vaste improvisation mais n’en est pas moins extrêmement bien pensé et organisé, le violoniste se retrouve sur quelques crins de l’archet, sans trembler, comme un funambule sur son fil. J’aime jouer cette pièce, surtout quand l’acoustique de la salle s’y prête – comme à la Pierre Boulez Saal de Berlin où nous l’avons interprétée voilà deux ans. J’y ai fait l’expérience d’une véritable complicité entre notre jeu et l’acoustique. Je retrouverai certainement cette sensation dans la salle des concerts de la Cité de la musique.
déchirure, fracture, interstice. Un concept clé pour la lecture de certains épisodes des Évangiles. Mark Andre le transpose musicalement en créant un « temps musical strié de déchirures », comme de fulgurantes et lumineuses révélations. Très présent dans la Genèse pour désigner l’aura ou la beauté d’un visage, le mot hébreu « mar’eh », qui signifie « vision », « apparition », inspire à Matthias Pintscher un concerto pour violon solaire et prismatique. Absent de la Genèse mais présent dans le reste de l’Ancien Testament, « nur » signifie la « fournaise ardente » ou la « lumière » : ici, la fournaise de l’ensemble, dans laquelle le piano brûle de tous ses feux… Matthias PINTSCHER NUR, pour piano et ensemble Création française
mar’eh, pour violon et ensemble
L’un est allemand, mais vit entre Paris et New York, l’autre est français, installé à Berlin. Ils ont le même âge ou presque, sont proches l’un de l’autre, et partagent un même goût pour la spiritualité, qu’ils expriment, chacun à sa façon, dans leurs créations respectives. Mark Andre a trouvé dans l’exégèse du Nouveau Testament une intéressante source d’inspiration pour son triptyque riss. Le terme allemand renvoie au champ sémantique de la fissure :
Mark ANDRE riss 1, 2 et 3, triptyque pour ensemble Création française
Dimitri Vassilakis piano Diégo Tosi violon Ensemble intercontemporain Matthias Pintscher direction Coproduction Ensemble intercontemporain, Festival d’Automne à Paris, Philharmonie de Paris Tarif 18€ Réservations philharmoniedeparis.fr / 01 44 84 44 84 12
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M A R K · · · · · · · · A N D R E · · · · · · · · · · · · · · · _
Le temps déchiré Comment ce concept se transpose-t-il dans votre travail de composition ? Le « riss » décrit pour moi une certaine typologie temporelle, dans laquelle la paralysie du temps laisse se déployer une forme de fracture qui peut, par exemple, être narrative, mais pas uniquement. Dans l’Évangile comme dans la vie, nombre de situations sonores concrètes peuvent en relever : le vent qui signale la présence de l’Esprit saint, les murmures et les bruits du feu pendant le renoncement de Pierre… Du point de vue compositionnel, il s’agit pour moi d’intégrer et de développer des situations sonores fragiles, instables. Concernant plus spécifiquement la composition de riss, c’est une musique en état de disparition, avant, pendant et après cette disparition – une disparition qui n’a rien de dramatique ou de pathétique ni même de poétique ou de lyrique. Le terme de « riss » ne doit pas non plus être entendu comme déconstructiviste ou négatif. C’est une donnée typologique. Ce qui m’intéresse, c’est la disparition en tant que types d’action ou de temps, en tant que familles de sons. Cela renvoie pour moi à des interstices compositionnels, auxquels je veux donner l’espace de respirer. Le défi étant d’atteindre par là le plus haut niveau possible d’intensité. Prenez un son qui appartient au temps métrique (celui du chef d’orchestre), mais qui déploie intérieurement une forme de granulation : ces granulations ne sont selon moi pas seulement des artefacts ou une coloration, ce sont aussi des rythmes qui appartiennent à un temps que je qualifierais de morphologique : c’est-à-dire la manière dont le son respire.
Compositeur français installé en Allemagne, Mark Andre trouve dans l’exégèse des Évangiles un formidable réservoir d’idées de composition. En témoigne son triptyque riss, que l’Ensemble intercontemporain présente en création française cette saison à la Philharmonie de Paris.
Mark, que signifie le mot « riss » ? C’est un terme allemand qui couvre une large polysémie, laquelle correspond en français au champ sémantique de la fissure : déchirure, fracture, interstice, anfractuosité. Dans un texte d’exégèse du Nouveau Testament, la théologienne Margareta Gruber voit dans le concept de « riss » l’une des typologies centrales les plus significatives de l’Évangile. Et ce dès le baptême de Jésus, qui a lieu dans la vallée du Jourdain, l’un des lieux les plus bas sur Terre, puisqu’il se situe à - 421 mètres en dessous du niveau de la mer. Et puis, il y a le ciel qui s’ouvre, laissant descendre l’Esprit saint. Plus tard, on retrouve le « riss » dans l’histoire du voyageur laissé pour mort par les bandits (donc dans une situation véritablement transitoire) puis sauvé par le Bon Samaritain, ou lors du renoncement de Pierre – qui ouvre une fissure d’importance dans les Évangiles et l’histoire de la foi puisque Pierre sera le premier Pape. C’est aussi la disparition de Jésus ressuscité, aussitôt que les pèlerins d’Emmaüs le reconnaissent dans la version de Luc, la tenture du Temple qui se déchire ou le tremblement de terre de la Passion… Margareta Gruber décline également le concept pour commenter des passages plus délicats ou complexes, comme ces trois « et » qui ouvrent chacun un « riss » dans l’Apocalypse.
Votre œuvre, et pas seulement riss, se nourrit d’une riche spiritualité. Musique et spiritualité ont longtemps cheminé main dans la main. Si elle ne s’exprime plus aujourd’hui de la même manière qu’autrefois (par des motets ou des messes par exemple), quelle part de ce large héritage assumez-vous ? Je ne veux pas créer de malentendu. La seule commande que j’ai reçue d’une église (de la part de l’Église protestante et de l’Église catholique en même temps du reste) est une pièce d’orgue qui a été créée en 2018. Toutes les autres pièces sont destinées à un cadre séculaire, sans aucun prosélytisme. Ce sont des pièces de concert qui peuvent entrer en résonance avec le genre de rituel que vous évoquez, mais ce n’est pas l’objectif. Cela étant dit, l’Évangile est pour moi un enseignement, potentiellement compositionnel. Mon approche musicale n’en est ni allégorique ni métaphorique, mais complètement typologique. À cet égard, je pense qu’un tel texte devrait pouvoir interpeller des personnes qui ne sont pas directement concernées par la religion.
L’exemple le plus évident est celui du silence. Un silence est généralement noté de manière chronométrique, mais le son lui-même a un temps morphologique, celui des résonances. Et ce temps morphologique est prédominant puisqu’il relève de la disparition d’énergie et de la distribution spectrale. Les « riss » dont je parle, ce sont donc tous ces gestes ou morphologies sonores, dont les informations structurelles – c’est-à-dire autant situationnelles qu’organisationnelles – constituent une signature temporelle du son (harmonique, inharmonique, bruité…). Dans le texte de Margareta Gruber, « riss » désigne le déploiement d’interstices rituels. Dans mon cas, ce déploiement se fait dans un contexte compositionnel.
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Propos recueillis par Jérémie Szpirglas En lien avec le concert Vers la lumière, p.12
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MARDI 12 NOVEMBRE
11:00 DONAUESCHINGEN
20:30 PARIS
DONAUHALLEN, MOZART SAAL
PHILHARMONIE DE PARIS SALLE DES CONCERTS – CITÉ DE LA MUSIQUE
DONAUESCHINGER M U S I K TA G E
SINFONIA Berio sous toutes ses facettes
Festiva l de création lé genda i re Fondés voilà presque 100 ans, les Donaueschinger Musiktage font aujourd’hui figure de rendez-vous incontournable de la création musicale. Invité en compagnie de Matthias Pintscher, l’EIC y présente pas moins de trois créations ! La première allemande de Rumorarium de Pierre-Yves Macé et deux créations mondiales : un concerto pour clarinette et ensemble de Beat Furrer composé spécialement pour Jérôme Comte, soliste à l’Ensemble intercontemporain, et Allein, commande passée à Johannes Boris Borowski qui revisite librement la Cantate religieuse BWV 33 « Allein zu dir, Herr Jesu Christ » de Jean-Sébastien Bach.
ÉCLAIRAGE Johannes Boris Borowski, compositeur Allein, pour ensemble
Dans Allein, commande de l’EIC, je joue avec le matériau musical en revisitant de manière plus ou moins fugace la Cantate religieuse BWV 33 « Allein zu dir, Herr Jesu Christ » de Jean-Sébastien Bach, composée à Leipzig en 1724. Je considère en effet que composer revient à s’approprier un matériau qui est la propriété de tous : ici, je le laisse libre de vivre une existence différente. Je l’altère et, au fil du processus, il est changé et se change lui-même. C’est notamment le rôle dévolu à l’alto, qui est placé à l’extérieur de l’ensemble instrumental, en retrait, tandis que les deux cors sont de part et d’autre de la scène. L’alto semble ainsi isolé, comme ostracisé, autant par sa localisation que par le discours musical.
Pierre-Yves MACÉ Rumorarium, pour ensemble et sons mémorisés Création nationale
Johannes Boris BOROWSKI Allein, pour ensemble Création mondiale Commande de l’Ensemble intercontemporain et des Donaueschinger Musiktage
Beat FURRER Nouvelle œuvre, pour clarinette et ensemble
Le temps d’un concert, les solistes de l’EIC et les jeunes musiciens de l’Orchestre du Conservatoire de Paris explorent l’univers contrasté et haut en couleur de Luciano Berio, dévoilant les nombreuses facettes du compositeur. Des facettes qui, dans leur variété, manifestent un questionnement aussi intense qu’original sur la musique comme en attestent ses Sequenze, qui poussent les solistes dans leurs retranchements virtuoses, ou son Concerto pour deux pianos et orchestre, qui explose le genre concertant en un véritable labyrinthe musical. De Sinfonia, sa composition la plus connue, Berio disait : « Le titre doit être pris au sens étymologique désignant des instruments (ici huit voix et instruments) “ jouant ensemble ” ou, au sens large, de “ jeu collectif ” d'éléments, de situations, de significations, de références différentes. » L’œuvre brasse en effet de nombreux éléments en un gigantesque et fascinant « collage » : citations musicales, littéraires, noms de personnalités et même des slogans politiques de Mai-68 !
ÉCLAIRAGE Clément Saunier, trompettiste Sequenza X, pour trompette et piano résonnant de Luciano Berio
Cette Sequenza est très singulière dans le répertoire pour trompette, par sa forme, son exigence et sa durée, mais surtout par l’idée principale qu’a Luciano Berio de faire générer à l’interprète un halo acoustique comme prolongement de son instrument – à l’aide d’un piano dans la caisse duquel le trompettiste joue certains passages. Ce jeu de résonances donne au trompettiste le pouvoir de maîtriser le temps et l’autorise à sculpter davantage les moments où il ne produit pas de sons. Berio utilise et magnifie des techniques instrumentales explorées et développées par les grands jazzmen, allant du trémolo au « flatterzunge », des notes pédales aux « doodle tonguing », pour servir son discours. En utilisant la trompette de manière claire et directe, Berio la met à nu et fait de cette Sequenza X, selon ses propres mots, « la plus ambitieuse de toutes les Sequenze ».
Luciano BERIO Sequenza X, pour trompette et piano résonnant Concerto pour deux pianos et orchestre Sequenza VIIb, pour saxophone soprano Sinfonia, pour huit voix et orchestre
Création mondiale Commande de l’Ensemble intercontemporain et des Donaueschinger Musiktage Avec le soutien de Pro Helvetia
Nina ŠENK Nouvelle œuvre, pour ensemble
Clément Saunier trompette Hidéki Nagano piano Julien Blanc piano Rui Ozawa saxophone Synergy Vocals Orchestre du Conservatoire de Paris Ensemble intercontemporain Matthias Pintscher direction
Création Mondiale Commande de l’Ensemble intercontemporain et des Donaueschinger Musiktage
Jérôme Comte clarinette Ensemble intercontemporain Matthias Pintscher direction Renseignements et réservations swr.de/swrclassic/donaueschinger-musiktage
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Coproduction Ensemble intercontemporain, Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris, Philharmonie de Paris Tarif 18€ Réservations philharmoniedeparis.fr / 01 44 84 44 84
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· · · · · · · · L U C I A N O
· · · · · · · · B E R I O
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Le métier de compositeur ou même de retourner un jour en Chine par une tout autre route. Et puis, aussi absurde que cela te paraisse, je reviendrai de Chine à pied ou tout au plus à bicyclette : je ne voudrais perdre aucun détail des villes et des paysages que j’aurai traversés à vol d’oiseau. Ou encore, j’y vais à pied et je reviens en avion. Je n’aime pas ces voyages stochastiques où l’on s’occupe uniquement de la forme globale, de l’enveloppe, mais non du détail, où les frontières sont définies mais non les rapports réels, qu’il faut prendre sur soi de réaliser à l’intérieur de ces limites. De même que je n’aime pas ces architectes qui deviennent scénographes : ils font un beau dessin et le donnent au théâtre en attendant impatiemment que les pauvres travailleurs de l’atelier du décor le réalisent. Et je n’aime pas non plus les architectures sans fonction précise, qui ne respectent pas la vie, l’idéal, le travail de l’homme. Je préfère un gratte-ciel sans idéaux (mais pas non plus sans un idéal) dans Park Avenue aux pyramides égyptiennes. Pendant la réalisation du projet initial, donc, c’est-à-dire pendant que je définis les détails, il peut arriver également que la découverte et la prolifération de l’imprévu deviennent tellement importantes que je modifie effectivement le projet, et j’accomplis alors le chemin inverse ; des détails, que j’étais venu recueillir et fixer, surgit un projet différent. En somme, je ne jette rien, en bon Ligurien. Voilà qui relie Allelujah I à Allelujah II, Sequenza II à Chemins I, Sequenza VI à Chemins II et III, Sequenza VII à Chemins IV, Sequenza VIII à Corale ou, dans la direction opposée, Chemins V à Sequenza IX.
Publiés pour la première fois en 1981, les entretiens que Rossana Dalmonte a mené avec Luciano Berio nous montrent le compositeur véritablement à l’œuvre. La vision qu’il offre de son propre processus créatif éclaire ses plus grands chefs-d’œuvre, dont les Sequenze, nées de sa fascination toujours amusée pour la virtuosité instrumentale. Des Sequenze dont on pourra entendre deux opus, pour trompette et pour saxophone, au cours du concert du 12 novembre à la Philharmonie de Paris.
Il me semble que le moment est venu d’entrer dans ta « boutique ». Que sais-tu d’une de tes œuvres au moment où tu commences à l’écrire ? Jusqu’à quel point est-ce que tu t’en tiens à l’idée primitive pendant l’élaboration ? La première idée d’une œuvre est toujours, pour moi comme pour tout le monde, je pense, une idée globale et très générale, et peu à peu, au fur et à mesure que le travail avance, j’en précise les détails. Ce ne pourrait être plus simple. Je ne crois pas cependant qu’il existe des idées « de départ ». Quoi qu’il en soit, au cours de la réalisation, de la rédaction en somme et de la définition des détails, il peut arriver que je découvre de nouvelles possibilités et de nouvelles relations sur lesquelles je puis décider de m’arrêter, sans pour autant altérer la nature et la raison du projet. C’est un peu comme décider de partir en voyage, d’aller en Chine par exemple. Un tel projet ne peut surgir de rien, à l’improviste, et il n’y a pas non plus une seule manière d’y aller. Si, de plus, l’itinéraire du voyage n’a pas été fixé et décidé d’avance, à Pékin, par quelques bureaucrates de la République Populaire de Chine, et si je suis libre d’aller où bon me semble, alors ce voyage peut devenir une source de découvertes intéressantes ; chemin faisant, je peux décider de rester à un endroit plus longtemps que prévu,
Ces projets qui se prolongent dans le temps, comme tes Sequenze justement (entre la première, pour flûte, et la dernière en date, pour clarinette, il y a à peu près vingt-deux ans), font-ils partie d’un plan ou sont-ils nés par hasard ? Ma première Sequenza pour flûte a été composée en 1958 pour Severino Gazzelloni, et ce n’était certainement pas
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des changements dans le rapport à l’instrument, en imposant une solution technique inédite (comme dans les Partitas pour violon de Bach, les dernières œuvres pour piano de Beethoven, chez Debussy, Stravinsky, Boulez, Stockhausen etc.), où l’on demande à l’interprète de fonctionner à un niveau de virtuosité technique et intellectuelle extrêmement élevé. Finalement, comme je l’ai souvent dit et en y insistant : à notre époque, le virtuose digne de ce nom est un musicien capable de se placer dans une vaste perspective historique et de résoudre les tensions entre la créativité d’hier et celle d’aujourd’hui. Mes Sequenze sont toujours écrites pour ce type d’interprètes (je n’ai ni intérêt ni assez de patience pour les spécialistes de la musique contemporaine), ceux dont la virtuosité est avant tout une virtuosité de la conscience.
un hasard si l’on se trouvait ensemble à Darmstadt en ces années-là, de même que ce n’est pas un hasard si j’ai rencontré la harpe de Francis Pierre ou, plus encore, la voix de Cathy Berberian. Dans l’ensemble des Sequenze, il y a différents éléments unificateurs, prévus ou non. Le plus évident et le plus extérieur est la virtuosité. J’ai un grand respect pour la virtuosité, même si ce mot peut provoquer quelques railleries ou encore évoquer l’image d’un homme élégant et un peu évanescent, aux doigts agiles et à la tête vide. La virtuosité naît souvent d’un conflit, d’une tension entre l’idée musicale et l’instrument, entre le matériau et la matière musicale. Le cas le plus évident et le plus simple dans le domaine de la peinture, c’est lorsqu’un peintre, avec ses pinceaux et ses couleurs, réussit à faire une toile qui semble être une photographie. En musique, les choses sont plus complexes parce qu’il y a le fameux problème de l’exécution et de la réinterprétation... Un autre cas bien connu de virtuosité peut se produire par exemple lorsque des préoccupations techniques et des stéréotypes de l’exécution prennent le dessus sur l’idée ; ainsi chez Paganini, dont l’œuvre, que j’aime beaucoup, n’a sans doute pas révolutionné l’histoire de la musique, mais a contribué au développement de la technique du violon. Un autre moment de tension a lieu quand la nouveauté et la complexité de la pensée musicale - avec des dimensions expressives tout aussi complexes et diversifiées - impliquent
Extrait de « Le métier de compositeur », in Luciano Berio. Entretiens avec Rossana Dalmonte / Écrits choisis, Éditions Contrechamps, octobre 2010
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· · · · · · _ DIMANCHE 24 NOVEMBRE 20:00 LUXEMBOURG PHILHARMONIE
R A I N Y D AY S En phase(s) ave c Steve Reich En trois œuvres clés, l’EIC brosse un aperçu du parcours musical de Steve Reich – de Piano Phase, l’une de ses toutes premières œuvres dans laquelle il explore les possibilités du déphasage, jusqu’au tout récent Reich/Richter. Présentée pour la première fois à New York en avril 2019, cette création événement est, comme son titre l’indique, le fruit de la rencontre de Steve Reich avec l’œuvre de Gerhard Richter. Elle associe les structures musicales glissantes du compositeur américain à un film de la cinéaste Corinna Belz, d’après la série Patterns (2011) du peintre allemand. Les œuvres de ces deux géants de la création contemporaine s’entrecroisent pour mieux explorer la manière dont chaque art affecte l’expérience que nous faisons de l’autre.
ÉCLAIRAGE Steve Reich, compositeur Piano Phase
Après Melodica (1966), j’ai très vite voulu écrire de la musique vivante. Melodica, qui est, la dernière de mes pièces réalisées exclusivement au moyen de bandes magnétiques, se composait de hauteurs musicales (et non de paroles) manipulées en boucles. C’était une sorte de transition entre la musique pour bande magnétique et la musique instrumentale. Il me semblait malheureusement impossible, à l’époque, que ce processus progressif de changement de phase puisse être exécuté par deux êtres humains : il avait été découvert avec des machines et leur était, pour ainsi dire, indigène. D’un autre côté, je ne voyais pas ce qu’il pouvait y avoir de plus intéressant à faire sur scène avec des musiciens que ce processus de déphasage. Finalement, durant l’hiver 1966, j’ai enregistré au piano un bref motif mélodique répété, j’en ai fait une boucle de bande et j’ai essayé de jouer moi-même sur la boucle, comme si j’étais un second magnétophone. À ma grande surprise, j’ai découvert que si je n’atteignais pas la perfection de la machine, je pouvais m’en rapprocher et jouer de façon nouvelle et très satisfaisante une pièce entièrement réglée à l’avance, sans avoir besoin de notation écrite. Cela me permettait, tout en jouant, de me laisser complètement absorber par l’écoute de la musique. Dans les mois qui ont suivi, j’ai travaillé avec Arthur Murphy, un ami musicien. Chacun chez soi, nous avons expérimenté ce processus de changement de phase avec un piano et une bande. Début 1967, nous avons enfin pu jouer ensemble sur deux pianos et nous avons découvert, que nous pouvions accomplir ce processus sans assistance technique d’aucune sorte.
Steve REICH Piano Phase, pour deux pianos Eight Lines, pour ensemble Steve REICH/Gerhard RICHTER Reich/Richter, pour grand ensemble et installation de Gerhard Richter Création nationale Commande de The Shed – NYC ; de la Los Angeles Philharmonic Association Gustavo Dudamel Music & Artistic Director ; des Cal Performances – University of California Berkeley ; du Barbican Center – Britten Sinfoni ; de la Philharmonie de Paris et de l’Orchestre philharmonique d’Oslo
Ensemble intercontemporain George Jackson direction Dans le cadre de rainy days - Festival de musiques nouvelles Renseignements et réservations philharmonie.lu
Steve Reich, Différentes Phases, La Rue Musicale, collection « Écrits de compositeurs », Paris, 2016 20
MERCREDI 27 NOVEMBRE 20:30 PARIS PHILHARMONIE DE PARIS SALLE DES CONCERTS – CITÉ DE LA MUSIQUE
DEMEURE ET TREMBLEMENTS Cou p de proje c teu r su r la m usique brita n n ique Avant le concert, à 19:45 Clé d’écoute : La création contemporaine en Grande Bretagne Par Jean-Philippe Heberlé, musicologue Entrée libre « Après tout, les membres sont des pendules qui répercutent les mouvements du centre » : c’est avec cette citation du romantique allemand Heinrich von Kleist que James Dillon introduit Tanz/haus: triptych 2017. Une œuvre qui retranscrit « les tremblements intimes, l’agitation secrète d’un voyage intérieur ».
Déployant un univers sonore envoûtant, Tanz/ haus fait basculer « de l’autre côté du miroir » musical. C’est aussi vers « l’autre côté » que passe Benedict Mason dans drawing tunes and fuguing photos. Un titre qui se réfère « à la saisie d’une mélodie qui se déplacerait le long de différentes lignes ; à l’idée de poursuivre des photographies et des visions imaginaires ». Last but no least, ce programme 100 % britannique présentera également une création française de Rebecca Saunders, qui approche la matière sonore comme un sculpteur modèle l’argile, et qui imagine les structures comme un architecte conçoit des volumes. Benedict MASON drawing tunes and fuguing photos, pour ensemble Rebecca SAUNDERS Scar, pour ensemble Création française
James DILLON Tanz/haus: triptych 2017, pour ensemble de chambre Création française
Ensemble intercontemporain George Jackson direction Coproduction Ensemble intercontemporain, Festival d’Automne à Paris, Philharmonie de Paris Tarif 18€ Réservations philharmoniedeparis.fr / 01 44 84 44 84
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J · A M · · · · · · · E S · · · · · · · · D I L L O N
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Comme un tremblement intérieur magnétiques de la guitare électrique. À cet égard, je ne pense pas à l’histoire de la guitare électrique, bien que j’en sois conscient, mais plutôt à un aspect plus pragmatique ou empirique qui consiste à tenter de créer un moment en équilibre entre immobilité et mouvement.
Faisant sienne une conception cosmique de la musique, James Dillon laisse volontiers planer un certain mystère sur ses œuvres. Sophistiquée, complexe et organique, sa musique peut aussi être sensuelle et vibrante. Avec Tanz/haus: triptych 2017 qui lui a valu le prestigieux RPS Award, il explore le champ à la fois infinitésimal et abyssal du tremblement et du vibrato.
Vous vous intéressez à l’alchimie et à la Kabbale. L’idée de « haus » dans le titre est-elle liée à l’ésotérisme ? Cela participe pour moi d’un intérêt plus général pour la langue, l’histoire, les idées ; en d’autres termes, les façons de penser. L’ésotérisme ne m’intéresse pas en soi, mais les étymologies, oui, notamment toutes ces qualités que nous qualifions de « musicales » et qui échappent à la détermination conceptuelle. De ce point de vue, tout est « caché ». En introduisant la barre oblique (/) dans le titre, je sépare et joins les deux termes, et ce signe typographique se reflète d’ailleurs dans l’utilisation du point d’orgue subito dans la pièce.
Peut-on déduire du titre Tanz/haus et de l’étymologie que vous précisez (l’idée de tremblement pour le premier terme, celle de cacher pour le second) que le fondement formel de l’œuvre serait une dualité entre une activité rythmique dense mais de très faible amplitude et des plages plus mouvantes ? Le matériau est organisé autour de deux idées : la polarité – j’imagine ici une continuité le long d’un axe entre stase et mouvement – et la façon dont une qualité peut se transformer en une autre, la stase étant animée par un tremblement et les textures en mouvement pouvant quant à elles être statiques, comme les rayons d’une roue en rotation. J’imagine un continuum dense sur toute son étendue, bigarré, plein d’ondulations, de ruptures. Deux images principales ont émergé pendant le travail sur Tanz/haus : d’une part, l’idée d’« automates » et sa relation au mouvement, et d’autre part, une idée très particulière du mouvement, ce que l’historien d’art Henri Focillon appelle la « fragilité hésitante », une idée à la fois physique et conceptuelle du tremblement, du tremor, du vibrato. Au centre de Tanz/haus, et c’est là un moment symbolique, toute l’activité émane du frémissement des cordes de guitare, un tremblement idiomatique résultant du feedback entre les capteurs
L’utilisation assez répandue des bourdons dans Tanz/haus est-elle liée à votre intérêt pour la musique indienne, qui a été rendue explicite dans certaines de vos œuvres à la fin des années 1970 ? C’est probable, et elle est liée aussi à mes expériences antérieures avec la musique de cornemuse écossaise, mais ce n’est pas quelque chose de conscient en tant que tel. Je m’intéresse plutôt, d’une part, au maintien de points de repères ou de centres harmoniques et, d’autre part, à l’instabilité subtile des notes pédales, c’est-à-dire des bourdons.
Quels types de sons avez-vous inclus dans la partie électronique ? Ouvrent-ils un champ dramaturgique ? Là où les configurations analogique et numérique se rencontrent, le champ sémantique qui s’ouvre prend certainement un aspect dramaturgique. L’une des voix de la couche de matériel préenregistré est assez littérale puisqu’il s’agit d’un bref extrait d’un enregistrement audio d’une conférence donnée par Heidegger en 1952 sur les dangers de la technologie. Au-delà de l’ironie, les sons préenregistrés se répartissent pour moi en deux catégories fondamentales, symbolique et/ou sonore ; les sons sont choisis soit pour leur charge référentielle, soit pour leur potentiel mnémonique. Excusez-moi de ne parler que peu de poésie. Vous en conviendrez, il est plus facile de déguiser les « bégaiements » (Beckett) derrière le langage technique !
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Propos recueillis par Pierre Rigaudière En lien avec le concert Demeure et tremblements, p.21
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DIMANCHE 1 ER DÉCEMBRE
MARDI 10 DÉCEMBRE
DIMANCHE 15 DÉCEMBRE
15:00 PARIS
20:30 PARIS
16:30 PARIS
PHILHARMONIE DE PARIS
PHILHARMONIE DE PARIS
PHILHARMONIE DE PARIS
LE STUDIO – PHILHARMONIE
SALLE DES CONCERTS – CITÉ DE LA MUSIQUE
LE STUDIO – PHILHARMONIE
H O M M A G E À O L LY
MAHLER ET LES RUSSES
SPECTACLE EN FAMILLE
LES DOUZE B O Î T E S DU DOCTEUR STOCK
Su r les traces du com p ositeu r Ol iver Kn ussen
Dé couver te lud ique de l’u n ivers de Sto ckha usen
Avant le concert, à 19:45 Clé d’écoute : L’œuvre d’Oliver Knussen Par Pierre Rigaudière, musicologue - Entrée libre
On connaît la fascination de Karlheinz Stockhausen pour le cosmos et l’astrologie. Tierkreis (littéralement « zodiaque » en allemand) en est la plus pure illustration, en même temps que la plus charmante : les douze mélodies de ce cycle de chambre figurent chacune un signe astrologique. Douze courtes mélodies dont la beauté toute simple a inspiré aux membres de la bien nommée compagnie des Ouvreurs de Possibles un spectacle pour les enfants de 3 à 7 ans. On y suit donc l’aventure de cinq personnages qui découvrent un lieu étrange où se trouvent douze boîtes de tailles différentes. Quel est ce mystère et où sont-ils ? Sur terre, dans l’eau, dans les étoiles ? Au fil des mélodies, qui résonnent comme des boîtes à musique, et du temps qui passe, deux danseurs et trois musiciens nous prennent par la main et nous emmènent à la découverte du monde astral de Stockhausen.
En juillet 2018, le compositeur et chef d’orchestre écossais Oliver Knussen, « Olly » comme le surnommaient ses amis, quittait ce monde prématurément, alors qu’il préparait le programme de ce concert avec l’EIC. Ce dernier lui rend hommage en resituant sa musique dans son réseau d’inspirations et d’amitiés artistiques. Disciple de Britten, Knussen fut un pilier de la scène contemporaine britannique. Orfèvre des timbres et des formes, il pouvait aussi chercher l’inspiration dans un ailleurs lointain comme pour ces « fragments d’un japonisme » dans O Hototogisu! Et dans son poignant Requiem, écrit en mémoire de sa femme, Knussen mettait en musique des poèmes d’auteurs du monde entier. Deux pièces présentées aujourd’hui en création française. C’est dire si l’œuvre de cette grande personnalité musicale reste encore à découvrir de notre côté de la Manche…
Karlheinz STOCKHAUSEN Tierkreis, douze mélodies pour flûte, violon et percussion
Création française
Toru TAKEMITSU Rain Coming, pour orchestre de chambre Oliver KNUSSEN O Hototogisu! Fragment of a Japonisme pour soprano, flûte et grand ensemble Requiem. Songs for Sue, op. 33 pour soprano et quinze instrumentistes Création française
Elliott CARTER Triple Duo, pour six musiciens
Solistes de l’Ensemble intercontemporain Compagnie Les Ouvreurs de Possibles
Hans Werner HENZE Ode an eine Äolsharfe pour guitare concertante et quinze instruments
Coproduction Ensemble intercontemporain, Philharmonie de Paris, Compagnie Les Ouvreurs de Possibles
Claire Booth soprano Sophie Cherrier flûte Pierre Bibault guitare Ensemble intercontemporain Brad Lubman direction
Tarifs 10€ (enfant) / 12€ (adulte) Réservations philharmoniedeparis.fr / 01 44 84 44 84 Atelier de préparation au concert le dimanche 1er décembre de 11h à 12h Une initiation musicale et chorégraphique qui éveille le corps et les oreilles à l’œuvre de Stockhausen. En famille (enfants de 3 à 7 ans) Tarifs incluant le concert 12€ (enfant) / 16€ (adulte)
Coproduction Ensemble intercontemporain, Philharmonie de Paris Tarif 18€ Réservations philharmoniedeparis.fr / 01 44 84 44 84 24
Héritage partagé Dans le cadre du grand week-end que la Philharmonie de Paris consacre à Gustav Mahler, les solistes de l’EIC se joignent aux musiciens de l’Orchestre de Paris pour explorer l’héritage mahlérien dans l’avant-garde musicale russe du xxe siècle. Un héritage manifeste et assumé par un Alfred Schnittke ou un Dimitri Chostakovitch – mais qui s’exprime aussi dans l’œuvre d’Edison Denisov, élève de Chostakovitch qui s’est passionné pour la Seconde École de Vienne.
ÉCLAIRAGE Claire Booth, soprano O Hototogisu! et Requiem. Songs for Sue d’Oliver Knussen
O Hototogisu! est la deuxième pièce qu’Oliver Knussen a composée pour moi, et, à bien des égards, elle figure comme un pendant à son Requiem. Songs for Sue, composé à la mémoire de sa femme, une œuvre que j’ai également créée. Le Requiem donne un sentiment d’enracinement automnal, la voix faisant office de narrateur. O Hototogisu!, en revanche, m’a toujours paru plus élusive, avec ce jeu entre la voix et la virtuose partie de flûte qui va et vient entre le premier et l’arrière-plan. L’univers timbral en est assurément « d’un autre monde ». Lors d’une tournée au Japon en 2016, Oliver s’était lancé corps et âme dans une véritable folie d’achat d’instruments de percussion japonais. Le son si remarquable des woodblocks, qu’on entend d’un bout à l’autre de la pièce, évoque un questionnement primordial. La pièce est portée par un sentiment d’espoir, d’émerveillement… ce qui, au vu des circonstances de la mort d’Olly (le surnom que ses amis lui donnaient), semble plus pertinent encore. Ce sont là de parfaits petits bijoux, qui méritent vraiment d’être entendus par le plus large public possible.
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Gustav MAHLER/Alfred SCHNITTKE Quatuor avec piano Dimitri CHOSTAKOVITCH Trio n° 1, pour violon, violoncelle et piano en ut mineur, op. 8 Edison DENISOV Sonate pour flûte et piano Sextuor, pour flûte, hautbois, clarinette, violon, alto et violoncelle Sonate pour clarinette Solo, pour hautbois Solistes de l’Ensemble intercontemporain Musiciens de l’Orchestre de Paris Tarif 32€ Réservations philharmoniedeparis.fr / 01 44 84 44 84
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DIMANCHE 19 JANVIER
SAMEDI 25 JANVIER
15:00 DIJON
15:00 PARIS
OPÉRA DE DIJON – AUDITORIUM
PHILHARMONIE DE PARIS LE STUDIO – PHILHARMONIE
EXPRESSIONS CONTEMPORAINES
BEETHOVEN + 250 ans et toujours aussi actuel
Concer t é cle c tique Dans le Concerto de chambre composé en 1970, György Ligeti pousse jusque dans ses retranchements l’idée de micropolyphonie avant de l’abandonner dès l’année suivante. Alternant des polyphonies lisses et alanguies et des petites mécaniques rapides, infernales et détraquées, Ligeti veut y mettre « un certain ordre, mais un ordre un peu désordonné ». Devenu rapidement un « classique » du répertoire contemporain, ce Concerto de chambre a inspiré plus d’un compositeur, à l’instar de l’Islandaise Anna Thorvaldsdottir qui a voulu lui apporter un pendant avec Hrím (« rimer » en islandais) : s’appuyant sur le concept de dispersion, cette courte pièce est conçue comme un processus de diffusion (à la fois projection et résonance) de divers éléments musicaux à travers l’ensemble instrumental. Le programme présente également deux œuvres pour ensemble récemment créées : la première du jeune compositeur français Sasha J. Blondeau dont l’EIC avait créé le très remarqué Namenlosen en 2017, et la seconde de l’une des figures majeures de la scène musicale actuelle, le Finlandais Magnus Lindberg.
Le week-end « Beethoven et la modernité » de la Philharmonie de Paris est l’occasion de mettre en perspective l’œuvre visionnaire du grand maître prométhéen et la création contemporaine, dont il est toujours, deux siècles plus tard, l’une des figures tutélaires, à l’instar d’Helmut Lachenmann qui écrit : « C’est dans la musique de Beethoven que, pour la première fois, l’homme subjectif dit “je”. » Ainsi les solistes de l’EIC se joignent aux musiciens de l’Orchestre de Paris et nouent un dialogue par-delà les siècles, en tressant par exemple les mouvements du Septuor pour cordes et vents op. 20 et les Bagatelles contemporaines de l’Autrichien Friedrich Cerha. Ludwig van BEETHOVEN Septuor pour cordes et vents en mi bémol majeur, op. 20 Friedrich CERHA Neuf Bagatelles, pour trio à cordes
MERCREDI 29 JANVIER 20:30 PARIS PHILHARMONIE DE PARIS SALLE DES CONCERTS – CITÉ DE LA MUSIQUE
Michael JARRELL Assonance IVb, pour cor Iannis XENAKIS Charisma. Hommage à Jean-Pierre Guézec pour clarinette et violoncelle Helmut LACHENMANN Toccatina, pour violon
György LIGETI Concerto de chambre, pour treize instrumentistes
Jean-Luc HERVÉ Rêve de vol, pour alto et clarinette
Anna THORVALDSDOTTIR Hrím, pour ensemble
CANONS D’HIVER Quand la neige inspire les com p ositeu rs
Création française
Solistes de l’Ensemble intercontemporain Musiciens de l’Orchestre de Paris
Sasha J. BLONDEAU Contre-espace, pour ensemble Création française
Tarif 32€ Réservations philharmoniedeparis.fr / 01 44 84 44 84
Magnus LINDBERG Shadow of the Future, pour ensemble
Avant le concert, à 19:00 Rencontre avec Kaija Saariaho, compositrice Entrée libre Le canon, c’est la fugue réduite à sa plus simple expression. Il ne cesse pourtant d’inspirer les compositeurs, pour beaucoup en réaction à ce que Jean-Sébastien Bach en a fait… C’est d’ailleurs ainsi que les dix canons de Schnee d’Hans Abrahamsen sont nés : dans les années 1990, le compositeur danois arrange des canons du Cantor de Leipzig pour ensemble et les fait tourner en tous sens. De cette circularité d’où émerge une esthétique quasi répétitive, Abrahamsen tire quelques
Ensemble intercontemporain Dylan Corlay direction Avec le soutien de la Fondation Meyer Renseignements et réservations opera-dijon.fr
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principes pour la composition de Schnee. En ajoutant au mélange un jeu de questions/ réponses, il cristallise le discours, comme si le temps était réversible – un paysage hivernal et figé, auquel répondent les « images de neige » de Matthias Pintscher et l’« aurore boréale » de Kaija Saariaho. Kaija SAARIAHO Lichtbogen, pour neuf instrumentistes et électronique en temps réel Anton WEBERN Cinq Canons sur des textes latins, op. 16 pour soprano, clarinette et clarinette basse Cinq Lieder spirituels, op. 15 pour soprano et ensemble Matthias PINTSCHER Lieder und Schneebilder, pour soprano et piano Hans ABRAHAMSEN Schnee, dix canons pour neuf instruments Yeree Suh soprano Ensemble intercontemporain Matthias Pintscher direction Coproduction Ensemble intercontemporain, Philharmonie de Paris Tarif 18€ Réservations philharmoniedeparis.fr / 01 44 84 44 84
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Cristaux de notes ascendante, si vous regardez la neige suffisamment longtemps pour avoir l’impression qu’elle monte.
Schnee d’Hans Abrahamsen est l’une des pièces les plus riches et les plus suggestives écrites sur le thème de la neige. Une rigueur formelle extrême (dix canons séparés par des intermezzi), neuf musiciens qui déploient une grande économie de moyens, comme pour étudier au microscope l’intérieur d’un flocon. Rencontre avec un compositeur épris de simplicité et de romantisme allemand.
Schnee est l’une de vos pièces les plus longues et les plus complexes, composée de dix canons et trois intermezzi : pourriez-vous nous expliquer sa structure ? Dans un certain sens, la pièce est très simple : cinq mouvements symétriques que vous entendez chacun dans deux versions différentes. Le deuxième mouvement est quasiment un scherzo, le troisième, un mouvement lent. Les deux derniers canons sont plus courts, comme lorsqu’un épisode de neige s’arrête. D’une certaine façon, après ma pause dans la composition, j’ai senti que ma musique, après avoir été trop complexe, était redevenue simple. Schnee évoque de la musique minimaliste mais utilise des techniques très étendues, comme la microtonalité et beaucoup des techniques de la musique d’aujourd’hui.
En 2006, Schnee signait votre retour sur la scène internationale après une décennie au cours de laquelle vous n’aviez pas ou peu composé, comme si le blanc du papier s’était transformé en neige. Comment est née cette œuvre ? D’une certaine manière, ma première pièce sur la neige était Winternacht (1978) pour sept instruments. Par hasard, j’avais trouvé dans une librairie d’occasion un livre de Georg Trakl. Ses poèmes, plein de couleurs et d’onirisme, m’avaient beaucoup ému. Au début de la pièce, on entend des petites ponctuations, comme des flocons de neige qui tombent, puis la ligne de neige qui s’amoncelle sur le sol, créant une surface de plus en plus gelée. Entre 1988 et 1998, c’est vrai, j’ai traversé une longue période de silence compositionnel. Je n’écrivais plus que des esquisses ou ne faisais que des arrangements de mes propres pièces ou d’œuvres d’autres compositeurs. L’image que vous suggérez entre le blanc du papier et le blanc de la neige est envisageable, mais le vrai déclenchement de la composition s’est opéré lorsque j’ai transcrit les Sept Canons de Bach. Des pièces très courtes, qu’on peut regarder de différentes manières si on les répète ou si on choisit d’en étudier l’avant ou l’arrière-plan. Rapidement, je me suis aperçu que la neige ressemblait aux canons. Une mélodie s’ajoutant à une autre mélodie créait une chaîne descendante, ou une ligne
La neige a inspiré des compositeurs comme Claude Debussy, dont vous avez d’ailleurs orchestré The Snow is Dancing (avec le reste de Children’s Corner)… Voyez-vous des affinités entre votre musique et la sienne ? J’adore ces pièces de Debussy. Dans ma version de The Snow is Dancing, la neige tombe plus rapidement afin qu’on l’entende vraiment danser. Lorsque je composais Schnee, je me suis aussi aperçu que les deux notes de sa pièce pour piano Des pas sur la neige étaient revenues dans le tissu instrumental sans que je m’en rende compte. Comme Debussy, je pense que la musique est partout dans la nature. Mais je pense que la neige de Debussy est plus douce que la mienne, qui est plus germanique.
Durant la composition de Schnee, j’ai été bouleversé par la lecture de Neige d’Orhan Pamuk. Cet homme qui prend le bus pour se perdre dans les paysages enneigés d’Anatolie me rappelait certains tableaux romantiques. Depuis Schnee, la neige n’a pas cessé de vous inspirer, avec notamment votre pièce orchestrale Let me tell you et la prochaine création de votre opéra La Reine des neiges d’après Andersen. Winternacht et Schnee ont tracé la matrice pour les œuvres qui ont suivi. À l’époque, je lisais beaucoup de poèmes sur la neige ; ma femme m’a conseillé de lire La Reine des neiges de Hans Christian Andersen, et elle avait raison ! Dès 2006, j’ai écrit un livret, des esquisses où j’essayais d’utiliser toutes les phrases originelles d’Andersen. On retrouve ainsi beaucoup de Schnee dans mon opéra. Après ma pause dans l’écriture, j’ai retrouvé la joie de retravailler en tant que compositeur. Parfois, vous tombez dans une tempête de neige qui vous empêche d’avancer, puis vous continuez dans un paysage plus doux et apaisé. Mais entre-temps, vous avez appris ce que c’est que de lutter.
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Propos recueillis par Laurent Vilarem En lien avec le concert Canons d'hiver, p.27
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DIMANCHE 16 FÉVRIER
JEUDI 27 FÉVRIER
18:30 PARIS
19:00 PARIS
MAISON DE LA RADIO – AUDITORIUM
CONSERVATOIRE DE PARIS – ESPACE MAURICE FLEURET
F E S T I VA L PRÉSENCES
ÉMERGENCES Pépi n ière de ta lents
Conte et créations
VENDREDI 7 FÉVRIER 20:30 PARIS PHILHARMONIE DE PARIS SALLE DES CONCERTS – CITÉ DE LA MUSIQUE
GRAND SOIR NUMÉRIQUE Créer à l’ère des nouvelles technologies Des performances audiovisuelles, une sculpture cinétique, des « gestruments », de l’informatique musicale et même… des instruments acoustiques : pas de doute il s’agit bien d’un Grand Soir numérique. Présentée dans le cadre d’une nouvelle édition de la Biennale Nemo, la soirée propose un tour d’horizon de la création à la croisée des arts et des technologies. Et comme un Grand Soir sans nouvelle œuvre n’en serait pas vraiment un, le compositeur Yann Robin présentera Triades, le dernier volet de son grand triptyque autour de la contrebasse.
Alex AUGIER/Alba G. CORRAL ex(O), performance audiovisuelle Simon STEEN-ANDERSEN String Quartet, pour quatuor à cordes Moritz Simon GEIST Tripods One, sculpture cinétique et dispositif électronique en temps réel
Le compositeur anglais George Benjamin est cette année l’invité d’honneur du festival Présences de Radio France. Pour l’occasion l’Ensemble intercontemporain présentera son conte lyrique, Into the Little Hill. Une œuvre pour deux voix (soprano et contralto) et ensemble composée en 2006 en collaboration avec le dramaturge Martin Crimp, qui s’inspire librement de la célèbre fable allemande du xiie siècle, Le Joueur de flûte de Hamelin. Dans cette relecture contemporaine, le texte acéré de Crimp et l’instrumentation qui fait la part belle aux timbres inhabituels (cymbalum, flûte basse, banjo etc.) renforcent l’envoûtante étrangeté de cet opéra miniature. Présences étant un festival de créations, l’EIC en présentera deux. La première, un concerto pour percussion et ensemble de la compositrice allemande Isabel Mundry, la seconde du jeune compositeur français Bastien David, repéré il y a deux ans lors d’un atelier-concert au Conservatoire de Paris.
Jesper NORDIN Sculpting the Air, Gestural Exformation pour ensemble et électronique
George BENJAMIN Into the Little Hill, conte lyrique en deux parties pour soprano, contralto et ensemble de quinze musiciens
Tadej DROLJC/Elías MERINO SYNSPECIES, performance audiovisuelle
Bastien DAVID Nouvelle œuvre, pour ensemble
Yann ROBIN Triades, pour contrebasse, ensemble et dispositif électronique
Création mondiale Commande de l’Ensemble intercontemporain et de Radio France
Création mondiale Commande de l’Ensemble intercontemporain et de l’Ircam-Centre Pompidou
Nicolas Crosse contrebasse Ensemble intercontemporain Lin Liao direction Moritz Simon Geist, Alex Augier, Alba G. Corral, Elías Merino, Tadej Droljc électronique, vidéo live Manuel Poletti, Robin Meier réalisation informatique musicale Ircam Coproduction Ensemble intercontemporain, Arcadi, Philharmonie de Paris En partenariat avec l’Ircam-Centre Pompidou Dans le cadre de Némo – Biennale internationale des arts numériques d’Île-de-France
Depuis plusieurs années, les solistes de l’EIC mènent un travail pédagogique approfondi avec les élèves des classes de composition et d’interprétation du Conservatoire de Paris. Une mission qui fait partie de l’ADN de l’Ensemble depuis sa fondation en 1976. Ce concert présentera plusieurs créations de jeunes compositeurs qui seront interprétées conjointement par les solistes de l’Ensemble et les élèves musiciens du Conservatoire. L’opportunité de découvrir les créateurs mais aussi les interprètes de demain. Créations des élèves de la classe de composition du Conservatoire de Paris Frédéric Durieux, Stefano Gervasoni, Gérard Pesson et Luis Naón, professeurs de composition Département écriture, composition et direction d'orchestre
Ensemble intercontemporain Élèves en 3e cycle supérieur en Diplôme d’artiste interprète, répertoire contemporain et création du Conservatoire de Paris Coproduction Ensemble intercontemporain, Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris Entrée libre (dans la limite des places disponibles) Réservations reservation@cnsmdp.fr
Isabel MUNDRY Nouvelle œuvre, pour percussion et ensemble Création mondiale Commande de l’Ensemble intercontemporain et de Radio France
Samuel Favre percussion Jennifer France soprano Helena Rasker mezzo-soprano Ensemble intercontemporain Pierre Bleuse direction Dans le cadre du festival Présences 2020, festival de création musicale de Radio France Tarifs 14€ / 16€ Réservations maisondelaradio.fr
Tarifs 10€ / 20€ / 25€ Réservations philharmoniedeparis.fr / 01 44 84 44 84 30
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· · · · · · · · · · · · · · · · G E O R G E
· · · · · · · · B E N J A M I N
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Une petite montagne magique C’est avec Into the Little Hill que commence pour vous le travail avec le principe d’auto-narration de Martin Crimp. Vous l’avez amplifié dans votre deuxième opéra, puis abandonné dans le troisième. Était-ce un échafaudage qui n’est plus nécessaire aujourd’hui ? C’est quelque chose que Crimp a inventé pour ses propres pièces, et notamment avec Attempts on Her Life où il n’y a aucune action conventionnelle, où tout est narration. Quand j’ai lu ça, juste avant de rencontrer Martin pour la première fois, j’ai pensé que c’était peut-être la clé que je cherchais : j’ai toujours voulu raconter des histoires, mais pas d’une façon conventionnelle. Nous avons alors développé cet aspect dans Written on Skin, où l’auto-narration concernait cette fois non pas deux mais cinq personnages. Mais à mesure que l’histoire progresse, la séparation entre naturalisme et narration commence graduellement à se dissoudre.
George Benjamin faisait, il y a peu encore, partie des compositeurs pour lesquels l’opéra ne va pas de soi. Pourquoi chanter du théâtre ? Comment ? Il aura fallu une conjonction de circonstances, en l’occurrence une commande du Festival d’Automne et la rencontre avec un librettiste providentiel en la personne de Martin Crimp, pour que tombent les barrières et qu’il s’attèle à sa première œuvre scénique – d’après la vieille légende allemande du Joueur de flûte de Hamelin. Bien lui en a pris.
George, dans le conte lyrique qu’est Into the Little Hill, le livret de Martin Crimp vous laisse de la place en tant que compositeur et aussi en tant que dramaturge musical. Absolument, et je suis certain que c’était l’intention de Martin ! Il aime profondément l’idée que quelqu’un écrive de la musique sur ses textes. Je pense qu’il apprécie que s’instaure entre nous un jeu et à chaque nouveau texte, il me met face à un défi structurel en me donnant des problèmes de plus en plus difficiles à résoudre. C’est vrai qu’il me laisse beaucoup d’espace. Pour moi, c’est une chose merveilleuse parce que je peux mettre l’accent sur ce que je crois être ses intentions, mais je peux aussi les contredire et aller dans une direction légèrement différente.
Vous avez manifestement recherché des voix avec peu de vibrato. Est-ce pour vous éloigner du bel canto ? Je n’aime pas trop l’idée de beaux moments de chant alternant avec un peu de théâtre ! Au contraire, je crois que la tension théâtrale, à travers le chant, doit se maintenir de la première à la dernière mesure. Cela veut dire que les éléments théâtraux ont une fonction et que les mots doivent être intelligibles. Le public adhérera plus facilement s’il comprend la signification de ce qui se passe. Je veux que la langue soit entendue, mais aussi que la musique se concentre sur la voix. Je pense qu’un vibrato excessif est une distorsion cruelle de la nature de la voix. Bien sûr, il est parfois utile en tant qu’élément émotionnel et expressif, mais il ne doit pas être utilisé en permanence, et son amplitude doit être contrôlée de façon à ce que la note vibrée reste identifiable.
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Le premier interlude commence avec un solo de flûte basse, qui incarne le jeu magique du joueur de flûte. L’ambiance un peu orientalisante est-elle référentielle ? Mes premières esquisses pour cette scène étaient écrites pour un piccolo jouant très fort, très haut, très vite, scherzando. C’est la première idée qui m’est venue, parce qu’elle correspond à l’image que cette histoire a forgée à travers les siècles : une musique joueuse et drôle telle que la décrit par exemple un poème célèbre de Robert Browning. Puis j’ai trouvé ça impossible à écrire, inintéressant, et je me suis dit que cette musique capable d’hypnotiser toute une population d’animaux devait être séduisante, au sens premier du terme, voire hallucinatoire et sensuelle. C’est là que j’ai pensé à la flûte basse. Si vous voulez trouver la source d’une partie de mon écriture pour la flûte, regardez du côté de la musique indienne, avec son ornementation et sa structure rythmique bien spécifiques. Il y a aussi une forte technique polymodale tout au long de cette scène.
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Propos recueillis par Pierre Rigaudière En lien avec le concert du Festival Présences, p.31
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· · · · · · · SAMEDI 7 MARS 20:30 PARIS PHILHARMONIE DE PARIS GRANDE SALLE PIERRE BOULEZ – PHILHARMONIE
REICH / RICHTER
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Ré p ét e r, va r i e r Avant le concert, à 19:00 Conférence : La musique et les autres arts Par Steve Reich, compositeur Entrée avec le billet pour le concert
Du pixel à la note
Gerhard Richter voue une grande admiration à Steve Reich. En hommage à celui-ci, il a réalisé, en 2002, une série d’œuvres peintes sur des photographies (réunies dans le livre City Life). En 2009, dans le cadre de son exposition au musée Ludwig à Cologne, le plasticien allemand a demandé au compositeur américain de jouer Music for 18 Musicians. Sept ans plus tard, ces deux géants de la création contemporaine se retrouvent à New York pour un nouveau projet associant une création musicale et un film réalisé en collaboration avec Corinna Belz à partir de la série Patterns (2011). Une nouvelle œuvre, tout simplement intitulée Reich/Richter, dans laquelle musique et images se fondent en une osmose totale, les variations des compositions de Reich répondant à celles des peintures de Richter. Également au programme, deux autres œuvres qui synthétisent le style du compositeur américain, entre déphasages, rythmes trépidants et kaléidoscopes de timbres…
Créée en avril 2019 à New York, et repris cette saison par l’EIC, Reich/Richter est une véritable expérience filmique dans laquelle la vidéaste Corinna Belz a saisi la rencontre créative de deux géants de la création contemporaine : le plasticien allemand Gerhard Richter et le compositeur américain Steve Reich. Ce dernier revient pour nous sur la genèse et la composition de cette œuvre unique en son genre.
Steve, comment ce projet a-t-il vu le jour ? Tout a commencé en 2009. Je jouais alors la première partie de mes pièces Drumming et Music for 18 Musicians avec l’Ensemble Modern basé à Francfort. Gerhard Richter, qui exposait alors au musée Ludwig à Cologne, a souhaité que je vienne y jouer Drumming avec des membres de l’Ensemble, puis Music for 18 Musicians à la Kölner Philharmonie, toute proche. Tout s’est parfaitement déroulé, et c’est alors que nous avons fait connaissance. Une rencontre brève mais chaleureuse, marquée par un respect et une admiration mutuels. Sept ans plus tard, en 2016, j’ai appris qu’il désirait discuter d’un nouveau projet. Il m’a proposé de le retrouver à la galerie Marian Goodman, l’endroit où il exposait à New York. C’est là qu’il m’a montré son livre Patterns. Divided – Mirrored – Repeated. Richter est parti de l’image d’un de ses tableaux abstraits de 1990 qu’il a divisée en bandes verticales : d’abord deux, puis quatre, huit, seize, trente-deux, jusqu’à obtenir quatre mille quatre-vingt-seize bandes, chaque bande devenant plus fine à chaque division et se reflétant individuellement selon un axe vertical. L’œil passe ainsi d’une peinture abstraite à une série de « figures » de plus en plus petites, puis à des abstractions « psychédéliques ». Gerhard, qui était en train de réaliser un film à partir de ce livre en collaboration avec Corinna Belz, m’a proposé d’en
Steve REICH Double Sextet, pour ensemble Runner, pour grand ensemble Steve REICH/Gerhard RICHTER Reich/Richter, pour grand ensemble et installation de Gerhard Richter Création française Commande de The Shed – NYC ; de la Los Angeles Philharmonic Association Gustavo Dudamel Music & Artistic Director ; des Cal Performances – University of California Berkeley ; du Barbican Center – Britten Sinfoni ; de la Philharmonie de Paris et de l’Orchestre philharmonique d’Oslo
Ensemble intercontemporain Elim Chan direction Coproduction Ensemble intercontemporain, Philharmonie de Paris
Tarifs 10€ / 13€ / 17€ / 22€ / 26€ / 30€ Réservations philharmoniedeparis.fr / 01 44 84 44 84
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écrire la musique. J’ai répondu que c’était un projet très intéressant et que j’aimerais en voir des fragments. Il m’en a envoyés, et j’ai alors donné mon accord.
pixels, la musique passe à une cellule de quatre doubles croches, puis de huit, et seize. Mais, de peur d’être un peu trop littéral, je me suis mis à insérer des valeurs de notes plus longues – à l’origine des croches, mais ensuite, avec l’augmentation du nombre de pixels, des noires. Au milieu du film, quand l’image passe de cinq cent douze à mille soixante-quatre pixels et que les images deviennent plus grandes et la musique ralentit sensiblement. Ensuite, le nombre de pixels allant en diminuant, la musique revient à des croches et doubles croches plus rapides, pour s’achever sur un mouvement très vif. Toutefois, les rapports entre changement dans l’image et dans la musique ne sont pas toujours aussi systématiques.
Le film suit-il la même structure et progression que le livre ? Non. Le film part… de la fin et il est de surcroît beaucoup moins systématique. Cela commence par les bandes, puis on évolue progressivement vers des images abstraites de plus en plus grandes. Le tableau n’est jamais aperçu dans sa globalité, mais on s’en approche avant de revenir petit à petit aux bandes. C’est donc une sorte de structure en arche. Vous avez travaillé sur les structures en arche par le passé. Est-ce ce qui vous a séduit dans ce projet ? En partie, mais ce qui m’a le plus intéressé, c’est le tout début, avec ces couleurs vibrantes, chatoyantes. Au lieu de « diviser, refléter, répéter », le film multiplie et répète. En langage informatique, les bandes initiales se composent de deux pixels. Puis, elles se subdivisent et s’affinent. Or, au moment de m’atteler à ce travail, je venais de terminer deux pièces : Runner et Music for Ensemble and Orchestra. L’une et l’autre s’achèvent sur une oscillation entre deux notes qui changent progressivement, jouées par presque tous les instruments. J’avais envie de commencer une pièce avec cette oscillation… et voilà que ce film débute, justement, avec deux pixels ! Un timing parfait… C’est ainsi que j’ai décidé que la structure de la musique serait liée à celle du film.
Pensez-vous que la musique aurait été différente si elle n’avait pas été liée au film ? Sans le film, cette œuvre n’existerait pas. Le tournage était déjà bien avancé quand je me suis mis au travail. Cette situation m’a obligé à trouver de nouvelles façons de composer. Je n’écris pas pour le cinéma mais le film de Richter n’est pas un film comme les autres. En définitive, le résultat de cette collaboration, c’est une œuvre nouvelle. Franchement, je ne sais pas si le film serait aussi intéressant s’il était muet, et, de mon côté, je n’ai pas l’intention de présenter cette partition en concert. Je crois qu’ensemble, ces deux œuvres s’enrichissent réciproquement. Entretien réalisé par Carol Ann Cheung (mars 2019), traduit par Franck Mallet et Valérie Malfoy
« Liée » ? Comment cela ? La synchronisation du film, comme pour n’importe quel film, s’opérait via le code temporel standard SMPTE. Celui-ci indiquait l’heure, la minute, la seconde et la fraction de seconde dans une case située en bas à droite du film que je pouvais consulter tout en travaillant sur mon ordinateur. Ce code indiquait le moment précis où le visuel changeait. Lorsque le film commence avec les bandes à deux pixels, la musique débute par une cellule oscillante de deux doubles croches. Lorsqu’il passe à quatre
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VENDREDI 13 MARS 20:30 PARIS PHILHARMONIE DE PARIS SALLE DES CONCERTS – CITÉ DE LA MUSIQUE
GRAND SOIR CABINET DE CURIOSITÉS Nez crochu et rose des vents… Un cabinet de curiosités, c’est un lieu dans lequel on présente une multitude d’objets rares et singuliers. C’est ainsi que le programme de ce concert a été imaginé. Et, comme tout cabinet de curiosités qui se respecte, chacune des œuvres qui le compose a une particularité étonnante. L’instrumentarium, par exemple, est souvent insolite, la scène devenant alors elle-même un « cabinet de curiosités » : comme ce Feed Back pour trois triangles et électronique de Gilbert Nouno, ou cet harmonica de verre dont les sons cristallins n’ont pas manqué de stimuler l’imagination de Clara Iannotta. Les sources d’inspiration sont éclectiques : les folles arabesques du chèvrefeuille servent de modèle à Olga Neuwirth, tandis que Die Stücke der Windrose de Mauricio Kagel mêle indistinctement des « objets sonores » trouvés aux quatre coins de la planète. Enfin, pour son œuvre au titre étrange, Bosse, crâne rasé, nez crochu, Marc Monnet s’est inspiré d’un personnage du théâtre latin des Atellanes : Maccus. Et le compositeur d'ajouter : « C'est le caractère de l'anormalité qui m'a intéressé ». Voilà qui méritait bien une place de choix dans ce Grand Soir de curiosités musicales.
Gilbert NOUNO Feed Back, pour trois triangles et électronique Création mondiale Commande de l’Ensemble intercontemporain
Wolfgang Amadeus MOZART Adagio et Rondo, K. 617, pour flûte, hautbois, alto, violoncelle et harmonica de verre Clara IANNOTTA Nouvelle œuvre, pour harmonica de verre, alto, violoncelle et électronique Création mondiale Commande de l’Ensemble intercontemporain
Marc MONNET Bosse, crâne rasé, nez crochu pour deux pianos et ensemble avec électronique (extraits) Mauricio KAGEL Die Stücke der Windrose : Nordwesten Die Stücke der Windrose : Osten pour orchestre de salon Olga NEUWIRTH Lonicera caprifolium, pour ensemble et bande Gilles Durot percussion Hidéki Nagano piano Dimitri Vassilakis piano Ensemble intercontemporain Matthias Pintscher direction Gilbert Nouno réalisation informatique musicale Ircam Coproduction Ensemble intercontemporain, Philharmonie de Paris En partenariat avec l’Ircam-Centre Pompidou Tarif 18€ Réservations philharmoniedeparis.fr / 01 44 84 44 84
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· · · · · · · · · · · · · · · · M A R C
· · · · · · · · M O N N E T
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À contretemps Comme chez Kagel, toutefois, la surprise semble un aspect essentiel de votre travail. Une surprise qui est à la fois celle de l’auditeur et la vôtre. Oui. Et j’essaie de préserver cette fraîcheur : pour moi, le « projet » représente souvent un danger. Je suis persuadé que la vie peut être autre chose qu’un tissu d’habitudes. L’écriture elle-même le montre. Il est d’autant plus important de préserver cette indépendance dans le contexte actuel. Pourtant, où que ce soit, l’invention est possible. Simplement, on la musèle. La société est irrémédiablement le lieu de cette lutte-là.
Se tenant soigneusement en marge de toute école ou de quelqu’avant-garde que ce soit, le compositeur Marc Monnet trace une route singulière sur la scène musicale contemporaine. Son œuvre inclassable interroge toutes les conventions et remet chaque fois ses certitudes en question, à l’instar de Bosse, crâne rasé, nez crochu, une œuvre destinée à l’EIC, reprise cette saison. Rencontre.
Marc, la rumeur court que vous n’aimez pas l’exercice de la biographie… C’est juste : j’ai toujours trouvé cet exercice ridicule et inutile. Je me suis même longtemps amusé à en écrire de fausses qui sont encore reprises ça et là… On les recopie sans se soucier de leur véracité. J’ai donc décidé de ne plus m’y livrer. Aux vraies comme aux fausses.
En rejetant toute contrainte, vous vous éloignez de cette avant-garde qui, depuis près d’un siècle, ne s’élabore qu’en se confrontant précisément à la contrainte… Je crois que cette époque est derrière nous : il n’y a plus aujourd’hui d’idéologie dominante, mais justement un éclatement qui brouille les repères traditionnels. Même lorsqu’elles ne sont pas dans l’écriture, les contraintes sont toujours là, multiples, et ont trait à la société, à l’organisation, à l’administration, à la logistique. Ces contraintes contingentes expliquent aussi pourquoi certaines de mes pièces sont rarement rejouées : il est difficile de constituer la formation appropriée. Même Bosse, crâne rasé, nez crochu pose problème en ce sens puisque son exécution nécessite deux pianos, et deux excellents pianistes, en plus de l’électronique.
Ne peuvent-elles pas tout de même livrer quelque indice, quelque clef d’écoute, sur l’œuvre d’un compositeur ? Oui et non. Par exemple, toutes mes bios (les vraies !) indiquent que j’ai étudié auprès de Mauricio Kagel – ce qui est vrai, évidemment. Mais cette information, reproduite et répétée, a fait de ces moments passés auprès de lui un énorme handicap : il a fallu que je me batte pendant des années pour faire comprendre que ce n’est pas parce qu’on est « avec » Kagel, qu’on est « comme » Kagel et qu’on fait la même musique que lui. En réalité, il n’est intervenu que lorsqu’il le fallait et m’a donné les moyens de faire ce que je voulais faire : c’est tout ce qu’on demande à un professeur.
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Au sujet de ces habitudes, que pensez-vous de l’étiquette et du décorum des concerts ? Je les remets constamment en question. Sous diverses formes, d’ailleurs, et d’abord au travers de mon écriture. C’est le cas de Bosse, crâne rasé, nez crochu. La commande spécifiait une œuvre longue. En me lançant dans l’écriture, je ne savais pas exactement ce que je voulais faire. Plus tard s’est ajoutée la contrainte d’une pièce avec soliste, ce qui m’intéressait peu. Ma réaction, même si elle n’allait pas délibérément contre la contrainte, s’est dévoilée au cours de la composition. Tout d’abord, j’ai eu envie de mettre en avant le piano au sein de l’ensemble. Puis j’ai ajouté les trois intermèdes à deux pianos. Ces intermèdes n’ont rien à voir avec le reste, tant par leur effectif instrumental – l’orchestre se tait, le chef doit attendre – que par leurs contenus. Cette pièce s’est ainsi déstructurée pour se structurer autrement.
La théâtralité semble pourtant être un aspect essentiel de votre musique. Bosse, crâne rasé, nez crochu, ne serait-ce que par son titre, fait référence au théâtre… Moins que le théâtre, c’est la physicalité de la musique qui m’intéresse. Un musicien est un être humain, un individu de chair et de sang. Le son n’est pas abstrait. Selon le musicien qui joue, la perception de l’œuvre sera affectée. Cela étant dit, sans être systématiquement le lieu d’un geste théâtral, j’ai constaté que la musique faisait presque toujours naître chez l’auditeur une image. Comme si nous avions besoin d’une fiction imagée de la chose musicale. Même par le passé, chez les Romantiques par exemple, les symphonies ont eu des titres suggestifs. À l’inverse, une image peut me suggérer un geste musical.
Propos recueillis par Jérémie Szpirglas En lien avec le Grand Soir Cabinet de curiosités p.37
Votre rapport à l’écriture, votre remise en cause des schémas préétablis, recèlent un humour souvent dévastateur, à l’instar de cette ironie qu’on se plaît à trouver chez Gustav Mahler. On me parle souvent, en effet, de l’ironie qui se dégage de mes œuvres. Ce n’est pas un acte délibéré de ma part. Concernant Mahler, que j’admire bien entendu énormément, j’avoue toutefois que sa musique me gêne un peu par son côté théâtral et dramatique.
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· · · · · · _ DIMANCHE 15 MARS
JEUDI 19 MARS
DIMANCHE 22 MARS
11:00 LYON
20:00 BRUXELLES
15:00 PARIS
AUDITORIUM – ORCHESTRE NATIONAL DE LYON
BOZAR – SALLE HENRY LE BŒUF
PHILHARMONIE DE PARIS
Dans le cadre du Klarafestival
AMPHITHÉÂTRE – CITÉ DE LA MUSIQUE
FROM WITHIN…
I A N N O T TA & VERUNELLI
HISTOIRE D U S O L D AT
S ons et lu m ières
Pet i t t h é â t re, g ra n d c l a ss i q u e À l’origine, L’Histoire du soldat de Stravinsky était non seulement récitée et jouée mais également dansée. Retour aux sources avec cette production originale qui réunit le comédien Éric Ruf, le danseur et chorégraphe Alban Richard et, bien sûr les solistes de l’Ensemble intercontemporain. Ensemble, ils célèbrent les génies combinés d’Igor Stravinsky et Charles Ferdinand Ramuz, dans ce conte moral au fort parfum faustien – même s’il est en réalité inspiré d’un conte traditionnel russe. Et l’on ne peut qu’acquiescer à cette maxime frappée au coin du bon sens poétique : « Un bonheur, c’est tout le bonheur, deux, c’est déjà trop .»
ÉCLAIRAGE Éric Ruf, comédien (Sociétaire honoraire de la Comédie-Française) L'Histoire du soldat d’Igor Stravinsky
Imaginée pendant la Première Guerre mondiale, pour un effectif réduit et une production itinérante, L’Histoire du soldat relève de ce qu’on pourrait appeler un « théâtre pauvre ». Il y a certainement dans l’imaginaire des gens quelque chose de vertueux dans l’arte povera. L’acteur qui entre seul en scène est d’une certaine manière plus héroïque que celui qui entre en scène entouré d’une foule de figurants. Le public adore ce rapport direct avec la scène. La convention théâtrale est une donnée capitale. Il y a un plaisir immédiat à voir un récitant changer de rôle. L’Histoire du soldat ne gagnerait pas forcément à être mise en scène avec des moyens importants. La donne la plus importante reste la performance de l’acteur. La dimension faustienne est résumée à la manière d’un conte pour enfant. Il est rassurant que les diables soient diables et qu’ils soient en même temps des êtres humains avec lesquels on peut dialoguer. Ramuz n’est jamais « pauvre », il a toujours quelque chose à raconter, c’est extrêmement ludique. Il disait de son Histoire du soldat qu’elle était une « lanterne magique animée ». Je suis sensible à cet univers fait d’ombres chinoises, de constellations et de bonshommes qu’on découpait dans notre enfance. La musique de Stravinsky capte l’attention de l’auditeur mais le conte s’adresse aux enfants, petits et grands.
Igor STRAVINSKY L’Histoire du soldat, lue, jouée et dansée Éric Ruf comédien (Sociétaire honoraire de la Comédie-Française) Alban Richard chorégraphie et danse (Directeur du centre chorégraphique national de Caen en Normandie) Solistes de l’Ensemble intercontemporain Dans le cadre de la Biennale des musiques exploratoires Renseignements et réservations auditorium-lyon.com
Deux com p ositrices et leu rs références
En 2014, l’Ensemble intercontemporain découvrait l’univers de création du jeune compositeur serbe Marko Nikodijevic. Une première rencontre suivie d’une deuxième à l’occasion des 40 ans de l’EIC, puis d’une troisième en juin 2018 avec le projet From Within… (de l’intérieur). Une production à la fois intime et spectaculaire, fruit de la collaboration entre Marko Nikodijevic et l’artiste audiovisuel et musicien électro Robert Henke. Le but poursuivi par les deux artistes est de « créer une expérience sensorielle totale, dans l’osmose d’un souffle commun entre la musique et le dispositif lumineux ». Sur scène, une impressionnante structure de lumières LED réagit à une musique tantôt contemplative, tantôt déchaînée comme une tempête soudaine, venue de nulle part, ou peut-être de l’intérieur d’une dimension cachée.
Dans le cadre du week-end « Elles » de la Philharmonie de Paris, deux jeunes compositrices italiennes, Francesca Verunelli et Clara Iannotta, ont été invitées à choisir une œuvre de référence dans leur « panthéon » personnel du quatuor à cordes, afin de la mettre en perspective avec l’une de leurs propres œuvres. C’est ainsi que la première a choisi la figure tutélaire beethovénienne et son Quatuor à cordes n° 15 en la mineur, op. 132. Elle le met en relation avec son Ultimi Fiori pour violoncelle solo et électronique, pièce dans laquelle elle travaille la matière sonore en empruntant une technique propre à la décoration architecturale, le « sgraffito ». Quant à Clara Iannotta, son choix s’est porté sur une autre compositrice contemporaine, la Britannique Rebecca Saunders, dont l’approche charnelle du son relève plutôt de la sculpture, tandis que Iannotta elle-même s’intéresse à l’étirement extrême des phénomènes sonores dans dead wasps in the jam-jar (iii).
Marko NIKODIJEVIC/Robert HENKE From Within…, pour grand ensemble, électronique et lumières Création nationale
Ensemble intercontemporain Matthias Pintscher direction Studio Robert Henke conception et réalisation électronique Ircam ingénierie sonore
Francesca VERUNELLI Ultimi Fiori, pour violoncelle solo et électronique
Avec le soutien de d&b audiotechnik
Ludwig van BEETHOVEN Quatuor à cordes n° 15 en la mineur, op. 132 (extraits)
Renseignements et réservations bozar.be
Clara IANNOTTA dead wasps in the jam-jar (iii) pour quatuor à cordes Rebecca SAUNDERS Fletch, pour quatuor à cordes Solistes de l’Ensemble intercontemporain Coproduction Ensemble intercontemporain, Philharmonie de Paris Tarif 32€ Réservations philharmoniedeparis.fr / 01 44 84 44 84
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· · · · · · _ MARDI 24 MARS 20:00 MERCREDI 25 MARS 20:00 VENDREDI 27 MARS 20:00 SAMEDI 28 MARS 20:00 DIMANCHE 29 MARS 20:00 PARIS – THÉÂTRE DU CHÂTELET GRANDE SALLE
LES SEPT PÉCHÉS C A P I TA U X Wei l l/Bre cht/Ba usch Destinée au cabaret, Die sieben Todsünden (Les Sept Péchés capitaux) est la dernière œuvre commune de Bertolt Brecht et Kurt Weill. Ce ballet chanté, créé en 1933 au Théâtre des Champs-Élysées, stigmatise avec une ironie mordante la société capitaliste à travers l’expérience d’une femme à la double personnalité, confrontée aux vices qui mènent le monde. L’entité moralisatrice qu’est la famille de la jeune fille est tournée en dérision, alors même que le regard porté sur ses aventures reste lucide et presque cynique. Habituée des
chefs-d’œuvre musicaux, la chorégraphe Pina Bausch s’empare en 1976 de ces Sept Péchés capitaux avec un sens de la mise en scène féroce. Elle ne s’arrête d’ailleurs pas en si bon chemin et, d’un ensemble de « chansons » pour la plupart tirées de Grandeur et décadence de la ville de Mahagonny ou de L’Opéra de quat’sous signés par les mêmes auteurs, elle concevra dans la foulée un spectacle tout aussi saisissant : Fürchtet euch nicht. PREMIÈRE PARTIE Die sieben Todsünden (Les Sept Péchés capitaux) version pour une voix basse féminine arrangé par Wilhelm Brückner-Rüggeberg DEUXIÈME PARTIE Fürchtet euch nicht (N’ayez pas peur) Musiques et chansons tirées de L’Opéra de quat’sous, Le Petit Opéra de quat’sous, Happy End, Le Requiem de Berlin et Grandeur et décadence de la ville de Mahagonny Kurt Weill musique / Bertolt Brecht textes Pina Bausch mise en scène et chorégraphie Rolf Borzik décors et costumes Tanztheater Wuppertal, Pina Bausch danseurs Cora Frost soprano Ensemble intercontemporain Jan Michael Horstmann direction Coréalisation Théâtre du Châtelet, Théâtre de la Ville - Paris Tarifs de 13€ à 109€ Réservations chatelet.com
VENDREDI 3 AVRIL 11:00 PARIS PHILHARMONIE DE PARIS SALLE DES CONCERTS – CITÉ DE LA MUSIQUE
PICASSO, TYMPAN SUR TOILE S cola i re et pa r tici patif Entrer dans l’univers de Pablo Picasso en posant le tympan sur les toiles du maître : le compositeur Guillaume Hermen a lancé ce défi à une classe de CM2 de Saint-Ouen et aux solistes de l’Ensemble intercontemporain. Enfants et musiciens invitent le public à découvrir quelques œuvres du peintre et donnent vie, à travers des expériences participatives, à des créations originales.
ÉCLAIRAGE Guillaume Hermen, compositeur Picasso, tympan sur toile
Ce concert du 3 avril, programmé en résonance avec l’exposition Les Musiques de Picasso à la Philharmonie de Paris, n’est que la partie émergée de l’iceberg puisqu’il vient conclure un projet au long cours que je mène, avec la complicité de solistes de l’EIC, auprès d’élèves d’une école primaire de la ville de Saint-Ouen – des enfants qui n’ont aucune formation musicale particulière. Ce projet est bâti sur deux volets interdépendants et d’égale importance à mes yeux : la création et la transmission. Chaque semaine pendant ces deux années, je me suis rendu dans les classes afin de tenter de communiquer aux enfants le goût de la perception, de l’expression et de l’invention artistique. L’idée est d’envisager mes rencontres avec eux comme un terrain fertile à la création, et, réciproquement, de mettre la création au service de ces rencontres, pour une pédagogie à la fois concrète et amusante. Lors de ces ateliers, je propose aux enfants de prendre conscience de la valeur rythmique qu’ils peuvent trouver au sein d’éléments
Coproduction Ensemble intercontemporain, Philharmonie de Paris Tarifs 5€ (individuel) / 90€ (classe scolaire) avec atelier de préparation à l'écoute Réservations philharmoniedeparis.fr / 01 44 84 44 84 Ce projet a reçu le soutien de la Sacem.
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Les Sept Péchés capitaux, chorégraphie de Pina Baush, Wupperta, janvier 2018
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JEUDI 9 AVRIL 19:30 GRENOBLE
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MC2 – AUDITORIUM
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D e l a s u bve r s i o n en musique Qui a dit que la création musicale était déconnectée des réalités du monde ? Comme son titre l’indique, Deflation – Eine kleine Marxmusik de Frédéric Pattar tire son inspiration (amusée) des théories marxistes. Pour Raphaël Cendo, c’est la réalité brute et souvent « sauvage » du système boursier qui est à l’origine de sa nouvelle œuvre. Changement d’univers avec Take Death de Bernhard Gander qui imagine un scénario tout à fait inattendu (transposé dans un registre emprunté au cinéma d’horreur) : et si la pauvre vierge sacrifiée lors du rituel du Sacre du printemps revenait à la vie pour se venger de ses bourreaux ? Comme une revanche des dominés sur les dominants.
ÉCLAIRAGE (SUITE) Guillaume Hermen, compositeur Picasso, tympan sur toile
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qui leur sont familiers, quotidiens et intimes. Nous apprécions par exemple la richesse musicale de György Ligeti à travers les battements de nos cœurs, nous pénétrons l’univers de Gérard Grisey en calant notre respiration sur les accords de Partiels, et découvrons l’œuvre picturale de Pablo Picasso en imitant les postures et les expressions des visages peints. À mi-chemin entre le spectacle musical et la conférence ludique, Picasso, tympan sur toile propose de tendre une oreille sur le langage et la pensée créatrice du peintre. Les compositions, interprétées par les enfants et les solistes de l’EIC, peuvent tantôt dévoiler le processus créatif d’une œuvre de Picasso, tantôt révéler la musique du geste de l’artiste au travail ou encore transposer les formes d’un tableau dans le monde acoustique. C’est en équilibre sur cette frontière fine qu’il y a entre les arts que les enfants et moi-même avons marché chaque semaine, tant dans les moments de découverte des œuvres que dans la construction graphique de nos partitions. À titre personnel, je ne me lasse pas de ce défi passionnant : inventer des outils pédagogiques et imaginer des écritures permettant de réunir dans un univers cohérent des musiciens de niveau exceptionnel et des enfants débutant la pratique musicale.
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Frédéric PATTAR Deflations – Eine kleine Marxmusik, pour ensemble
Matière sonore Raphaël Cendo développe depuis de nombreuses années le concept de saturation instrumentale qu'il décrit comme « la conséquence d'une démesure dans un espace limité », et comme « la quête de l'animalité comme rejet de la domestication, comme désir de constituerde nouveaux territoires ». Il présente cette saison une nouvelle œuvre, à l'initiative de l’EIC et de la MC2, à la fois brute et sophistiquée, ayant pour point de départ les données chiffrées issues d’un indice boursier américain : le NASDAQ. Cela demandait bien quelques éclaircissements.
Création française
Raphaël CENDO Nouvelle œuvre, pour chanteuse, ensemble et électronique Création mondiale Commande Françoise et Jean-Philippe Billarant
Bernhard GANDER Take Death, pour vingt instruments et DJ Christina Daletska mezzo-soprano Patrick Pulsinger DJ Ensemble intercontemporain Bastien Stil direction Augustin Muller réalisation informatique musicale Ircam Renseignements et réservations mc2grenoble.fr
Raphaël, sur quelle idée se fonde cette nouvelle création ? À la base, le conseiller musique de la MC2 de Grenoble m’a suggéré l’idée d’une pièce traitant de l’économie – au sens large. Au moment où nous parlons, je ne sais pas encore précisément sur quel(s) texte(s) je vais m’appuyer pour la concevoir. Une chose est sûre : je ne vais pas utiliser des documents trop démonstratifs, qu’ils soient pro ou anticapitalistes, car je ne veux surtout pas asséner de leçon de morale. Par conséquent, je compte plutôt utiliser des données chiffrées, issues du NASDAQ par exemple, pour essayer de créer une dramaturgie en confrontant ces informations à l’état brut, sans chercher à imposer un point de vue surplombant.
Il s’agit d’une pièce pour chanteuse, ensemble instrumental (vingt-cinq musiciens) et électronique – soit une pièce de grande ampleur. Quels en sont les principaux axes ? À l’origine, lorsqu’on m’a proposé de faire cette pièce, l’électronique n’était pas présente. À vrai dire, je traverse une forme de « crise » vis-à-vis de l’électronique, car il me semble qu’une certaine forme de pensée de l’électronique est arrivée en bout de course. Une pensée qui produit toujours les mêmes mouvements de spatialisation, qui génère aussi quasiment les mêmes sons. Le temps réel est très connoté et, au final, très limité dans ses effets. Pour les précédentes pièces que j’ai pu faire avec de l’électronique, j’ai travaillé essentiellement sur ordinateur et le rapport physique avec le son électrique me manquait beaucoup. C’est pour cela que j’y travaille en ce moment à l’Ircam, avec un dispositif permettant en quelque sorte d’improviser sur une matière sonore brute. L’idée d’improvisation et la recherche d’une matière très physique constituent les deux axes majeurs de ma nouvelle œuvre.
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MARDI 14 AVRIL 20:30 AIX-EN-PROVENCE CONSERVATOIRE DARIUS MILHAUD
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Dans le cadre du Festival de Pâques d’Aix-en-Provence
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MERCREDI 15 AVRIL 20:30 PARIS PHILHARMONIE DE PARIS GRANDE SALLE PIERRE BOULEZ – PHILHARMONIE
KAMMERKONZERT Et comment se déploie ici l’ensemble instrumental ? Il constitue une sorte de synthèse de toute la recherche que j’ai pu effectuer jusqu’à présent sur le travail instrumental : les sons saturés, total-saturés, infra-saturés… La forme de la pièce tend également vers la saturation, avec non plus un matériau développé longuement mais au contraire des changements formels très abrupts, sans connexion apparente. Par rapport à mes pièces antérieures, de nouvelles interactions entre la chanteuse et l’ensemble instrumental vont peut-être apparaître, avec de fortes consistances de timbres. Quant à l’électronique, elle interviendra en contrepoint de l’ensemble avec une autonomie propre.
Comment vont s’articuler entre eux ces différents éléments constitutifs ? Par rapport à l’électronique, je ne veux pas me cantonner à des sons qui datent des années 1960 ou 1970. Je cherche à les transformer en utilisant ce que l’Ircam appelle « les agents autonomes », c’est-à-dire l’intelligence artificielle. Dans la pièce, il va y avoir une interaction étroite entre la chanteuse et l’ordinateur, qui va notamment se traduire par de véritables duos. L’ordinateur va créer en temps réel de nouvelles partitions pour la chanteuse : ce seront des formes ouvertes comme il peut en exister dans les partitions de Boulez par exemple. La chanteuse va improviser sur ces partitions élaborées en direct. Je tiens vraiment à ce que l’ordinateur lui donne des possibilités d’invention in situ. Nous sommes ici à la pointe de ce qui peut se faire actuellement à l’Ircam avec l’intelligence artificielle.
Que représente cette création à vos yeux ? Je pense que c’est l’une de mes créations les plus ambitieuses. Elle va nécessiter plus d’une année de travail pour une durée de 25 minutes. J’y brise tous mes réflexes habituels sur la musique électronique en particulier.
Vous utilisez le logiciel ImproteK, développé par Marc Chemillier (CAMS-EHESS) et Jérôme Nika (Ircam). Que permet-il exactement ? Le logiciel alimente l’ordinateur en lui fournissant toute une matière (sonore, gestuelle) produite en amont par un musicien improvisateur (un saxophoniste, par exemple). L’ordinateur peut ensuite répondre et dialoguer avec le musicien en suivant des protocoles précis : soit il procède par imitation, soit il part complètement dans une autre direction… Le logiciel est déjà très avancé mais j’aimerais parvenir à un stade encore plus élevé, à partir duquel l’ordinateur aurait sa propre ligne de contrepoint.
Propos recueillis par Jérôme Provençal
Cha m bre dou ble ÉCLAIRAGE Avant le concert à la Philharmonie de Paris, à 19:00 Rencontre avec Bertrand Chamayou, pianiste Entrée libre
György Ligeti, compositeur Concerto de chambre
L’EIC reçoit deux invités d’exception pour un concert qui l’est tout autant : le violoniste Renaud Capuçon et le pianiste Bertrand Chamayou. Ensemble, ils interprètent le Kammerkonzert de Berg. Dans cette œuvre de transition vers le dodécaphonisme, Berg sublime les contraintes compositionnelles qu’il s’impose dans une œuvre bouillonnante. Bouillonnantes également, les textures imaginées par Ligeti dans son propre Concerto de chambre : réglant au millimètre des mécaniques qu’il prend ensuite un malin plaisir à détraquer, Ligeti veut « un certain ordre, mais un ordre un peu désordonné ». S’intéressant au premier mot de la Genèse, « bereshit », Matthias Pintscher donne lui aussi un certain ordre à la soupe primordiale de la « Création », en la séparant en deux autour d’une note horizon : le mi bémol.
Le titre de « Concerto » indique que toutes les parties instrumentales sont écrites pour des virtuoses du même rang. Il n’y a en cela aucune distinction entre « solos » et « tutti » comme dans le concerto traditionnel mais des groupements toujours nouveaux de solistes qui se détachent, la texture polyphonique demeurant toujours très visible. Le langage musical de cette œuvre – et cela s'applique en général à ma musique depuis le milieu des années 1960 – n’est ni tonal, ni atonal.Des textures rythmiques et des types de mouvements spécifiques caractérisent chaque partie du Concerto de chambre. Dans la première, le mouvement est doux et coulant, les figures rythmiques hétérogènes forment un réseau musical uniforme. Dans la seconde, d’abord presque statique, la texture est plus homophone ; le mouvement est ensuite interrompu par des formes rythmiques expressives. La troisième partie est quasi mécanique, comme si un curieux appareil de précision à moitié détraqué se mettait en mouvement. La polyrythmie est particulièrement marquée dans cette partie. La quatrième partie, très rapide et très virtuose, a aussi quelque chose du perpetuum mobile, mais peu à peu le mouvement presto se désagrège, la musique se perfore et pour ainsi dire se dilacère, et pour finir, elle se liquéfie complètement : des fleurs de rhétorique mélodiques surgissent, s’égarent, ne conduisent nulle part – la musique est comme envahie de lianes.
György LIGETI Concerto de chambre, pour treize instrumentistes Alban BERG Kammerkonzert, pour piano, violon et treize instruments à vent Matthias PINTSCHER bereshit, pour grand ensemble Renaud Capuçon violon Bertrand Chamayou piano Ensemble intercontemporain Matthias Pintscher direction Coproduction Ensemble intercontemporain, Philharmonie de Paris Réservations Conservatoire Darius Milhaud festivalpaques.com Philharmonie de Paris philharmoniedeparis.fr / 01 44 84 44 84 Tarifs 10€ / 13€ / 17€ / 22€ / 26€ / 30€
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György Ligeti, L’Atelier du compositeur Éditions Contrechamps, Genève, 2013 47
R E N A U D · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · C A P U Ç O N
· · · · · · · · · · · · · B E R T R A N D
· · · · · · · · · · · · _ C H A M A Y O U
Les règles de l’amitié Dans ce concerto de chambre, les instruments solistes ne sont pas présents d’un bout à l’autre de la partition. Comment percevez-vous ce dialogue concertant ? R.C. : Ce qui est extraordinaire avec cette œuvre, c’est son architecture si particulière. Ces parties distinctes avec les instruments solistes qui entrent séparément tout d’abord, puis cette cadence où les deux dialoguent avant que tous les instruments les rejoignent : il y a une grande originalité dans cette idée de réunir deux instruments emblématiques avec un ensemble d’instruments à vent. Cette singularité s’accompagne d’une extrême complexité en même temps que d’une indéniable dimension sensuelle. B.C. : J’aime beaucoup les œuvres hybrides qui questionnent la forme. Souvent, on perçoit une délimitation entre masse orchestrale et ligne soliste. Dans le Kammerkonzert, ce qui frappe d’abord, c’est l’héritage du concerto grosso avec les séries qui se déplacent d’un instrument à l’autre comme des lignes mélodiques, même si l’on peut repérer certains moments solistes. Comme les Kammersymphonies de Schönberg auxquelles il rend hommage, le Kammerkonzert demeure un ensemble très orchestral avec des interventions très séparées.
Le Kammerkonzert d’Alban Berg célèbre la rigueur de l’écriture dodécaphonique en même temps que l’amitié qui liait le compositeur à Anton Webern et à leur maître commun : Arnold Schönberg. Rencontre avec Renaud Capuçon et Bertrand Chamayou, deux grands solistes et deux grands amis, qui interprètent ce Kammerkonzert pour la première fois avec l’Ensemble intercontemporain, le 14 avril à Aix-en-Provence et le 15 avril à la Philharmonie de Paris.
Dans quelles circonstances avez-vous entendu le Kammerkonzert d’Alban Berg pour la première fois ? Bertrand Chamayou : Je l’ai entendu dans la première version qu’en a enregistrée Pierre Boulez. J’ai été attiré très jeune par la musique du début du xxe siècle. À douze ans, je voulais composer de la musique sérielle. Au Conservatoire de Paris, c’est sur cette œuvre très stricte que j’ai choisi de faire mon mémoire d’analyse. Je me souviens avoir noté tous les renversements, toutes les séries et même d’avoir repéré certaines erreurs de permutation dans la partition éditée. Il est très rare que l’Ensemble intercontemporain invite des solistes. Ce projet de jouer le Kammerkonzert de Berg est d’autant plus enthousiasmant qu’il met en valeur les liens d’amitié qui ont présidé à son écriture. Renaud Capuçon : Je l’ai moi aussi découvert dans cette célèbre version dirigée par Pierre Boulez, avec Pinchas Zukerman, Daniel Barenboim et l’Ensemble intercontemporain. C’est au festival de Lugano, en 2016, que je l’ai joué la première fois avec Martha Argerich et je le joue depuis régulièrement avec Nicholas Angelich.
R.C. : Je suis fasciné par l’esthétique de la Seconde École de Vienne, j’ai joué à de nombreuses reprises le Langsamer Satz de Webern et le Concerto à la mémoire d’un ange de Berg. Je travaille l’unique Concerto pour violon de Schönberg et j’ai le projet de monter son Pierrot lunaire ou sa Fantaisie pour violon et piano, pourquoi pas avec Bertrand d’ailleurs…
Comment appréhender le volume et les timbres si spécifiques d’un effectif d’instruments à vent ? B.C. : On note une entité orchestrale et une sonorité très particulière dans ces instruments. L’écriture entrelace toutes les parties, au point qu’on se demande parfois qui est soliste et qui ne l’est pas. En revanche, il y a un périmètre bien délimité par la nature des timbres. R.C. : L’œuvre pose un problème d’équilibre, qui exige de trouver des solutions avec la disposition, surtout dans la grande salle Pierre Boulez de la Philharmonie de Paris.
Propos recueillis par David Verdier En lien avec le concert Kammerkonzert, p.47
Cette incursion dans la Seconde École de Vienne vous donne-t-elle envie d’explorer d’autres pans de la musique du xxe ou même de la musique contemporaine ? B.C. : Pierre Boulez m’a dit un jour : « Les interprètes manquent de courage. » Je souhaite désormais consacrer davantage de place à la musique contemporaine. Au dernier festival Présences, j’aurais dû interpréter une pièce de Wolfgang Rihm, mais il n’a malheureusement pas pu la terminer pour des raisons de santé. Je crée prochainement un concerto de Michael Jarrell à la Philharmonie de Paris, je suis très enthousiaste à l’idée de commencer les répétitions.
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CONCOURS I N T E R N AT I O N A L DE PIANO D’ORLÉANS Révé l e r l e s p i a n i s t e s de demain C’est un concours unique en son genre. Un concours de piano international axé sur le répertoire du xxe siècle à aujourd’hui. Depuis sa première édition en 1994 à Orléans, il révèle, à un rythme bisannuel, les pianistes de demain. Chaque nouveau concours est l’occasion pour les candidats de se « frotter » à l’univers musical contemporain avec une ou plusieurs œuvres au programme. Cette année, ils joueront une création de Pascal Dusapin et le Concerto de chambre pour piano et ensemble de la compositrice polonaise Agata Zubel. Et comme pour toute grande compétition artistique qui se respecte, le public pourra découvrir les jeunes talents lauréats du concours lors d’un concert au Théâtre des Bouffes-du-Nord.
DIMANCHE 26 AVRIL 15:00 ORLÉANS THÉÂTRE D’ORLÉANS – SALLE ANTOINE VITEZ FINALE DU CONCOURS Francis POULENC Sextuor pour piano et vents, op. 100. I – Allegro vivace* Agata ZUBEL Concerto de chambre, pour piano(s) et ensemble Création française
Œuvres pour piano au choix (de 1900 à 2020) Finalistes du concours Solistes de l'Orchestre symphonique d'Orléans* Ensemble intercontemporain Simon Proust direction Renseignements et réservations scenenationaledorleans.fr Informations sur le concours oci-piano.fr
LUNDI 11 MAI 20:30 PARIS THÉÂTRE DES BOUFFES-DU-NORD CONCERT DES LAURÉATS Pascal DUSAPIN Piano Works : n° 3 – « Black Letters »* Commande du Musée du Louvre et du Concours international de piano d'Orléans
Agata ZUBEL Concerto de chambre, pour piano(s) et ensemble** Œuvres pour piano au choix (de 1900 à 2020)*** Lauréat du Prix Sacem* Lauréat du Prix Polska Music** Finalistes du concours*** Ensemble intercontemporain Simon Proust direction Tarifs de 12€ à 25€ Réservations bouffesdunord.com / 01 46 07 34 50
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MERCREDI 13 MAI, 20:30 JEUDI 14 MAI, 20:30 PHILHARMONIE DE PARIS SALLE DES CONCERTS – CITÉ DE LA MUSIQUE
LOST IN DANCE / PIERROT LUNAIRE Saburo Teshigawara : l’art de l’épure
d’Arnold Schönberg. Revisitant vingt-et-un poèmes du recueil éponyme du poète belge Albert Giraud, il invente un nouveau vocabulaire de geste pour répondre au Sprechgesang (parlé-chanté) utilisé par le compositeur dans ce chef-d’œuvre marquant une véritable rupture avec la musique post-romantique. Poursuivant son exploration de la Seconde École de Vienne, Teshigawara s’empare à la même occasion de ce chef-d’œuvre à clefs qu’est la Suite lyrique de Berg. Alban BERG Suite lyrique, pour quatuor à cordes Arnold SCHÖNBERG Pierrot lunaire, op. 21, pour voix et cinq musiciens
Après leur rencontre sur la scène du Théâtre des Champs-Élysées en 2015 pour l’opéra Solaris, imaginé en collaboration avec le compositeur japonais Dai Fujikura, et après le spectacle autour de Toru Takemitsu et Olivier Messiaen la saison passée au Théâtre de Chaillot, l’Ensemble intercontemporain retrouve Saburo Teshigawara pour une expérience de danse toujours aussi singulière. Le chorégraphe s’aventure sur un terrain familier à nos solistes, puisqu’il revisite l’esthétique symboliste du Pierrot lunaire
Salomé Haller soprano Saburo Teshigawara mise en scène, scénographie, lumières, costumes, danse Rihoko Sato danse Solistes de l’Ensemble intercontemporain Coproduction Ensemble intercontemporain, Philharmonie de Paris Tarifs 20€ / 25€ Réservations philharmoniedeparis.fr / 01 44 84 44 84
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· · · · · · · · · · · · · · · · S A B U R O
· · · · · · · · T E S H I G A W A R A
· · · · · · · _ Corps résonnants par Jérôme Provençal
exprimer. « Je crois en la capacité du corps à nous apprendre des choses que l’on ne soupçonne même pas.(2)», déclara-t-il dans un entretien. Ayant effectué une apparition très remarquée lors du Concours chorégraphique international de Bagnolet en 1986, Saburo Teshigawara va par la suite affirmer toujours davantage sa singularité au gré de nombreuses créations (solos, duos ou pièces de groupe) accueillies dans le monde entier.
Cultivant depuis trente-cinq ans un art du mouvement sophistiqué et vibrant, le danseur et chorégraphe japonais Saburo Teshigawara présente cette saison un Pierrot lunaire singulièrement revisité avec l’Ensemble intercontemporain. Portrait d’un créateur unique, véritable sculpteur d’une danse de l’âme, épurée et épique.
Après avoir suivi une formation en danse classique et en arts plastiques, Saburo Teshigawara (né en 1953) a démarré son activité chorégraphique au début des années 1980, en participant à des performances diverses et en collaborant avec des vidéastes ou des musiciens. « Ce n’était ni de la danse contemporaine ni du butô. J’étais absorbé par ce qu’on peut découvrir dans son propre corps et par la manière dont on pouvait exprimer ces découvertes. Tout est mouvement dans notre corps, les fluides, le pouls, la respiration. Je pense avoir développé une méthode du langage par le mouvement qui se démarque de la danse.(1) » Ce langage va prendre progressivement forme à partir de 1985, année de création de Karas, sa propre compagnie (dont le nom signifie « corbeau » en japonais). Fondée avec Kei Miyata, une danseuse autodidacte qui va devenir sa principale collaboratrice et interprète durant dix ans, la compagnie cherche à susciter « une nouvelle forme de beauté ». De fait, lorsqu’on pense à l’univers de Saburo Teshigawara, le mot « beauté » est celui qui s’impose le premier à l’esprit. Agencées au cordeau, ses pièces ne sont pourtant engoncées dans aucun carcan, esthétique ou autre : les corps respirent pleinement, palpitent profondément, se déplient élégamment et se déploient amplement, sculptant l’espace avec une grâce ardente en un constant va-et-vient de l’ombre à la lumière. Rares sont les chorégraphes qui donnent ainsi autant le sentiment d’écrire avec le(s) corps. Par essence éphémère, suspendue entre apparition et disparition, cette écriture en mouvement(s) permet à Teshigawara d’exprimer ce que les mots ne peuvent
D’une intensité remarquable, ses productions scéniques conjuguent rigueur extrême de la composition et vivacité sensible de l’interprétation, en sollicitant une implication totale des corps en scène, parfois jusqu’à la prise de risques. Ainsi, bien que très sophistiquées sur le plan esthétique, échappent-elles à la vaine virtuosité formelle et traduisentelles une véritable nécessité organique. À la fois danseur et chorégraphe, Teshigawara conçoit également les costumes, les jeux de lumière et les dispositifs scéniques de ses pièces. Il accorde en outre une importance primordiale à la musique et se montre très à l’écoute de la création contemporaine. Parmi ses premières pièces en témoignent notamment Noiject (1992), imaginée avec le mythique (et ultra prolifique) musicien bruitiste japonais Merzbow, et In: side (1996), élaborée avec le collectif expérimental anglais Zoviet France. Depuis le début des années 2000, Teshigawara s’inscrit de plus en plus profondément dans le champ foisonnant de la musique contemporaine. En 2002, il collabore avec le compositeur autrichien Wolfgang Mitterer, pour Oxygen, pièce performative que traversent aussi des fragments d’œuvres de Xenakis. En 2003, sur une commande de l’Opéra de Paris, il crée Air, ballet en quatre tableaux inspirés par quatre pages musicales de John Cage, qui lui permet d’explorer le rapport – fondamental dans son univers – entre l’air et le(s) corp(s).
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Apparue plus récemment, Landscape (2014) est une frémissante fresque chorégraphique et musicale cosignée avec le pianiste Francesco Tristano, dans laquelle Saburo Teshigawara se meut, tout en grâce et audace, au sein d’une étendue sonore riche en contrastes – des Variations Goldberg à des pièces de Tristano en passant, de nouveau, par John Cage.
en scène et une chorégraphie en apesanteur. À la fois savante et ludique, la partition de Dai Fujikura conjugue voix, ensemble instrumental et électronique avec une belle inventivité. « Le travail de Saburo Teshigawara est ce que je recherche avec ardeur dans le domaine chorégraphique (3) », déclarait Matthias Pintscher, directeur musical de l’Ensemble intercontemporain, au moment de la création de Solaris. Le fertile dialogue artistique engagé avec l’EIC se poursuit cette saison via deux autres pièces. Conçues et interprétées par Teshigawara et Rihoko Sato, elles puisent leur matière musicale à la source ô combien stimulante de l’École de Vienne. Intitulée Lost in Dance, la première pièce se fonde sur la Suite lyrique d’Alban Berg. Inspirée au compositeur par sa liaison secrète avec Hanna Fuchs-Robettin (la sœur de Franz Werfel) et créée à Vienne en 1927, cette œuvre pour quatuor à cordes a été décrite par Theodor W. Adorno comme un « opéra latent ». Elle donne ici lieu à un corps-à-corps aussi vif que majestueux, faisant affleurer tous les tourments de la passion. La seconde pièce porte en scène le Pierrot lunaire (1912) d’Arnold Schönberg. D’une saisissante acuité et d’une frémissante suggestivité, elle confère un relief inédit à l’une des œuvres les plus novatrices du xxe siècle, qui a marqué le début de la rupture avec le système tonal et ouvert un nouvel horizon musical.
Au fil de son parcours, le chorégraphe japonais s’attache ainsi à établir des correspondances et des résonances d’une pièce à l’autre, en tissant des liens avec certains compositeurs en particulier. Outre John Cage, on peut citer par exemple Olivier Messiaen, dont on entend le motet O sacrum convivium dans Mirror and Music (2009) – pièce interprétée en duo par Teshigawara et Rihoko Sato, sa partenaire d’élection depuis 1996 – et qui tient une place centrale dans Flexible Silence (2017). Dansée par quatre interprètes (dont Saburo Teshigawara et Rihoko Sato), cette pièce réunit en outre six solistes de l’Ensemble intercontemporain et le sextuor d’ondes Martenot du Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris pour confronter la musique d’Olivier Messiaen à celle de Toru Takemitsu. Empreinte d’une spiritualité vibrante, elle offre une ample méditation sur le dialogue culturel entre Orient et Occident à travers le rapprochement de ces deux grands compositeurs du xxe siècle. Saburo Teshigawara avait auparavant déjà collaboré avec l’Ensemble intercontemporain, en l’occurrence pour Solaris (2015), opéra contemporain dérivant du roman éponyme de Stanislas Lem – déjà adapté au cinéma par Andreï Tarkovski et Steven Soderbergh. Dans un décor stylisé à la Bob Wilson, Teshigawara déploie une mise
Gérard Mannoni, Les grands chorégraphes du xxe siècle, Paris, Buchet-Chastel, 2015. (2) Rosita Boisseau, « La vibration au bout du pinceau de Saburo Teshigawara », Le Monde, 25 octobre 2017. (3) Brochure de l’Ensemble intercontemporain, saison 2014-2015. (1)
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MERCREDI 3 JUIN
DU 11 AU 14 JUIN
20:30 PARIS
OJAI
PHILHARMONIE DE PARIS
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LE STUDIO – PHILHARMONIE
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3 × 3
OJAI MUSIC F E S T I VA L
Trio de trios, de Moza r t à S chön b erg
Ca l iforn ia d rea ms
ÉCLAIRAGE Jeanne-Marie Conquer, violoniste 3x3
Les trois ensembles résidents de la Philharmonie de Paris et leurs répertoires respectifs se réunissent le temps d’une soirée : l’époque classique de Mozart avec Les Arts Florissants, le romantisme de Schubert avec l’Orchestre de Paris, et la Seconde École de Vienne avec l’Ensemble intercontemporain. Avec l'EIC, voilà bien longtemps que nous travaillons avec une grande intensité les musiques de Schönberg et Webern en petit effectif. Avec Pierre Boulez par exemple, le travail était toujours exigeant, inlassable, demandant toujours plus de maîtrise pour laisser couler la musique et s’épanouir le discours. À cet égard, le Trio à cordes, op. 45 de Schönberg reste pour moi associé à une autre rencontre : celle avec Walter Levine, violoniste du Quatuor LaSalle, lui aussi intarissable sur le moindre détail ! Écrite en un mois, au lendemain d’une expérience de mort clinique suite à une crise cardiaque, c’est une œuvre très expressionniste. Malgré sa forme en un seul mouvement, la discontinuité des gestes successifs semble le moteur de cette œuvre majeure.
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Trois fois trois. Trois trios de trois époques, suivant un fil musical ininterrompu… C’est ainsi que le génie de Mozart ne s’épanouit véritablement que lorsqu’il découvre Bach et ses transcriptions des Préludes et Fugues témoignent de son appétit à l’imiter. Composé par un Schubert de 20 ans, le Trio D. 581 marque un pas vers l’ère romantique. Quant au Trio à cordes, op. 45, composé en 1946 alors que Schönberg a échappé à une crise cardiaque, il exprime l’effarement de la souffrance, tout en renouvelant les formes classiques et ouvrir ainsi de nouvelles voies.
Installé non loin des plages de Santa Barbara en Californie, l’Ojai Music Festival est l’un des plus anciens rendez-vous dédiés aux musiques de création aux États-Unis. Chaque année depuis 1947, au mois de juin, la petite ville, réputée pour la pureté de son air et son soleil omniprésent, devient pour une semaine un haut-lieu culturel de la côte Ouest, avec une particularité : une direction artistique tournante, qui change à chaque édition. En 2020, ce sera Matthias Pintscher qui emmènera l’Ensemble intercontemporain à sa suite pour plusieurs concerts en grand effectif présentant toute l’étendue de son répertoire : des « classiques » de Pierre Boulez (qui fut directeur musical du festival à plusieurs reprises) ou d'Helmut Lachenmann à des œuvres récentes d’Olga Neuwirth, Marko Nikodijevic ou Franck Bedrossian.
Wolfgang Amadeus MOZART Six préludes et fugues à trois voix, K. 404a d’après J.-S. Bach (extraits) Franz SCHUBERT Trio en si bémol majeur, D. 581 Arnold SCHÖNBERG Trio à cordes, op. 45
Programme complet à partir de septembre 2019 sur ensembleintercontemporain.com
Solistes de l’Ensemble intercontemporain Musiciens de l’Orchestre de Paris Musiciens des Arts Florissants
Renseignements et réservations ojaifestival.org
Tarif 32€ Réservations philharmoniedeparis.fr / 01 44 84 44 84
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Les saveurs cachées du son Connaissez-vous l’umami ? Découvert il y a plus d’un siècle au Japon, ce goût est l’une des cinq saveurs de base détectée par la langue. Pour sa nouvelle œuvre destinée à l’Ensemble intercontemporain, qui sera créée dans le cadre du festival ManiFeste de l’Ircam, Marco Momi s’inspire de ce « goût savoureux » afin de créer des textures recherchées entre ensemble instrumental et électronique. LUNDI 22 JUIN 20:30 PARIS PHILHARMONIE DE PARIS SALLE DES CONCERTS – CITÉ DE LA MUSIQUE
N U O VA S T R A D A M a n i Fe s t e d e c ré a t i o n i t a l i e n n e Avant le concert, à 19:45 Clé d’écoute : La création contemporaine en Italie Par Grazia Giacco, musicologue - Entrée libre La saison à la Philharmonie de Paris se conclut sur une note de création italienne avec quatre compositeurs de quatre générations différentes, qui, chacun à leur façon, ouvrent de nouvelles voies musicales. Quaderno di strada (« carnets de route ») de Salvatore Sciarrino constitue les fondations de tout processus de composition : des bribes d’idées jetées dans le silence. Dans Eufaunique, Stefano Gervasoni s’empare du sixième jour de la création, celui de la faune, pour interroger les aspects naturels et linguistiques de la musique. Marco Momi s’inspire quant à lui de l’umami (« goût savoureux »
en japonais) qui est l’une des cinq saveurs de base. Pour Entr’ouvert, la benjamine de ce programme, Giulia Lorusso, utilise la technologie SmartInstruments de l’Ircam pour transformer le piano en instrument nouveau « qui fusionne acoustique et électronique, dans un “jeu” de trompe-l’oreille, qui sème la confusion dans les perceptions du spectateur ». Giulia LORUSSO Entr’ouvert, pour piano augmenté Marco MOMI UMAMI, pour ensemble et électronique Création mondiale Commande de l’Ensemble intercontemporain
Stefano GERVASONI Eufaunique, pour ensemble Création mondiale de la version longue Commande de l’Ensemble intercontemporain
Salvatore SCIARRINO Quaderno di strada, douze chants et un proverbe pour baryton et instruments
L’umami, c’est ce goût qui éclate en bouche lorsqu’on croque une tomate bien mûre par exemple. Dans votre pièce Umami, à quelle expérience sensorielle invitez-vous votre auditeur ? Le concept d’umami est bien sûr utilisé ici comme une métaphore. Il ne s’agit pas d’une recherche purement technologique mais davantage d’une quête sur le rayonnement du son, par le biais de mélanges de textures. Ce qui m’intéresse dans la notion d’umami, c’est cette idée de saveur cachée qui dépasse les notions de salé, de sucré, d’amer ou d’acide. Il s’agit plutôt d’une sensation fantôme, comme un arrière-goût qui donne consistance à ce qu’on va manger. Ma pièce ne porte certes pas sur le goût culinaire mais la recherche de l’umami exige une posture perceptive qui m’est chère, celle du « ressenti ultérieur », c’est-à-dire un ressenti plus profond, qui va au-delà du seuil habituel de nos perceptions.
Concrètement, quelles textures créez-vous ? Mes textures sont très variables selon l’instrumentation de chaque pièce. J’aime redéfinir chaque fois ma façon de modeler la matière en fonction de sa nature. Je fais partie de ces compositeurs qui réfléchissent à un prototype, qu’ils découvrent au même moment que le public. D’une manière générale, je pourrais décrire mes textures comme un flux de points reliés par de nombreuses connexions possibles. Je me concentre essentiellement sur la signification que chaque son peut avoir en lui-même. Quelle attitude requérez-vous de votre auditeur ? Toutes et aucune à la fois. Je ne cherche pas à étreindre ou à séduire l’auditeur. Je ne veux pas l’amener à moi. Mon son est un « témoignage » d’affectivité qui ne demande rien. Il habite dans un espace à l’intérieur duquel je peux activer des dynamiques de valorisation. J’aime l’idée de « scénarisation » de l’écoute. Mon travail consiste à lire entre les sons, à leur offrir des parcours d’existence. Mais j’insiste sur le fait qu’il s’agit d’un
Sébastien Vichard piano Otto Katzameier baryton Ensemble intercontemporain Matthias Pintscher direction Mike Salomon réalisation informatique musicale Ircam Coproduction Ensemble intercontemporain, Ircam-Centre Pompidou, Philharmonie de Paris Dans le cadre de ManiFeste-2020 – Festival de l’Ircam Tarif 18€ Réservations philharmoniedeparis.fr / 01 44 84 44 84
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voyage de découverte très intime, qui n’a pas besoin d’être démontré ni expliqué. Seule prime l’expérience de l’écoute. Est-ce en raison de ce parcours intime que vous réalisez vous-même votre électronique ? Oui, la plupart du temps je dois absolument être celui qui produit, place et édite tous les sons et fréquences que j’utilise. J’ai eu la chance d’être formé à l’Ircam et d’y travailler régulièrement ; dans mon cas, le réalisateur en informatique musicale m’aide essentiellement du point de vue technique, ou me permet d’avoir un regard extérieur pour m’aider à prendre du recul. Il me faut connaître un son avant de pouvoir l’utiliser, mais pour cela, je dois le toucher et établir un rapport charnel avec lui. Cette connaissance demande du temps et un contact permanent avec le son et les instruments. Dans Umami, j’évoque une expérience somme toute assez rare : celle, sensible et puissante, qui permet d’acquérir un goût personnel.
Propos recueillis par Laurent Vilarem
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PA R TA G E R
A C T I O N S C U LT U R E L L E S
TOUT PUBLIC AUTOUR DES CONCERTS
SOLISTES EN BIBLIOTHÈQUES
Les concerts donnés à Paris sont, pour nombre d’entre eux, précédés d’une présentation des œuvres au programme. Elles offrent à chacun l’occasion d’être accompagné dans son expérience de la musique du xxe siècle à aujourd’hui. Certains concerts sont également suivis d’une rencontre avec les musiciens, ouverte aux questions du public sur les œuvres et leur interprétation.
Ces rencontres musicales dans les bibliothèques et les médiathèques parisiennes sont conçues et animées par les solistes de l’Ensemble. Elles ont pour but de faire découvrir l’univers de la musique du xxe siècle à aujourd’hui à un large public. La variété des interventions reflète la diversité des personnalités des solistes. Elles peuvent être axées sur un thème, une période de l’histoire de la musique, un instrument et son répertoire, un compositeur etc. Le rapport de proximité entre le public et les solistes renforce la dimension d’échange et de partage d’expérience.
RÉPÉTITIONS PUBLIQUES Chaque année, environ 10 répétitions à Paris et en régions sont ouvertes au public. Une autre façon de découvrir les œuvres (parfois au tout début de leur processus de création) ainsi que le travail des compositeurs et des interprètes. Ces répétitions sont le plus souvent commentées par un médiateur en collaboration avec les musiciens. Cette saison, des répétitions publiques seront proposées à la Philharmonie de Paris autour des concerts suivants (et d’autres à venir) :
En partenariat avec Bibliocité
JEUNE PUBLIC Faire découvrir la musique du xxe siècle à aujourd’hui aux plus jeunes, c’est former le public de demain. Un enjeu décisif porté par des activités conçues pour le jeune public.
VERS LA LUMIÈRE LE 15 OCTOBRE DEMEURE ET TREMBLEMENTS LE 27 NOVEMBRE
CONCERTS ÉDUCATIFS
HOMMAGE À OLLY LE 10 DÉCEMBRE
Imaginés par les solistes de l’Ensemble, des compositeurs ou des artistes collaborant aux spectacles en lien étroit avec des médiateurs, ces concerts présentent au jeune public, sous une forme originale et participative, des œuvres du xxe siècle à aujourd’hui. En 2019-2020, deux concerts sont proposés :
CANONS D’HIVER LE 29 JANVIER GRAND SOIR NUMÉRIQUE LE 7 FÉVRIER GRAND SOIR CABINET DE CURIOSITÉS LE 13 MARS KAMMERKONZERT LE 15 AVRIL NUOVA STRADA LE 22 JUIN
LE CONCERT EN FAMILLE
Les dates et les horaires de ces répétitions seront précisés à partir de mi-septembre (pour les premières d’entre elles) sur le site ensembleintercontemporain.com
LES DOUZE BOÎTES DU DOCTEUR STOCK LE 1 ER DÉCEMBRE À LA PHILHARMONIE DE PARIS [P.24] LE CONCERT SCOLAIRE PARTICIPATIF PICASSO, TYMPAN SUR TOILE LE 3 AVRIL À LA PHILHARMONIE DE PARIS [P.43]
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MASTER CLASSES E T AT E L I E R S E N C O N S E R VAT O I R E S
ACADÉMIES EUROPEAN CREATIVE ACADEMY
L’European Creative Academy for Music and Musicians est une toute nouvelle académie destinée à de jeunes musiciens en voie de professionnalisation. Basée à Annecy (Haute-Savoie), elle fédère de nombreux acteurs de la scène musicale internationale (dont les solistes de l’Ensemble intercontemporain) pour proposer à ces jeunes interprètes de développer leur pratique musicale, individuellement et collectivement, tout en cultivant une réflexion sur la création musicale, le statut et l’image de l’artiste au xxie siècle. Cette première édition se déroulera du 18 au 24 août et se terminera, ce dernier jour, par un concert autour du répertoire moderne et contemporain. Programme complet p.6 de cette brochure.
Accompagnés par les solistes de l’Ensemble, les étudiants des conservatoires nationaux, régionaux et parfois internationaux, futurs professionnels (ou amateurs), découvrent les techniques et les modes de jeu propres au répertoire contemporain. Ils se familiarisent ainsi avec des écritures musicales actuelles et les projets des compositeurs d’aujourd’hui. Au Conservatoire national de musique et de danse de Paris, des ateliers pédagogiques de haut niveau, conçus à partir d’œuvres au programme d’un concert de la saison, permettent à de jeunes musiciens en voie de professionnalisation de se perfectionner au contact de leurs aînés expérimentés de l’Ensemble. Ce travail approfondi, réalisé sur une période de plusieurs semaines, aboutit à un concert réunissant l’Ensemble intercontemporain et l’orchestre du Conservatoire.
ACADÉMIE MANIFESTE
Organisé par l’Ircam, l’académie ManiFeste offre chaque année à de jeunes compositeurs venus du monde entier l’opportunité de travailler avec l’Ensemble intercontemporain, sous la tutelle de compositeurs majeurs de la scène musicale contemporaine. En juin 2020, ils assisteront à des cours individuels et collectifs, des rencontres et entameront un travail « à la table » sur des esquisses de composition. Ils seront encadrés principalement par les compositeurs Marko Nikodijevic et Stefano Gervasoni et bénéficieront en outre des interventions et conseils de trois autres invités : Georges Aperghis, Thierry De Mey et Rebecca Saunders. Les compositeurs retenus à l’issue de cette première année reviendront dans l’académie un an après (en juin 2021) avec leur création finalisée qui sera alors interprétée par l’Ensemble intercontemporain.
En 2019-2020, ce concert sera : SINFONIA LE 12 NOVEMBRE À LA PHILHARMONIE DE PARIS [P.17]
L’Ensemble intercontemporain participe également à des master classes destinées aux élèves des classes de composition, d’interprétation et de direction d’orchestre. Les ateliers autour de nouvelles œuvres de jeunes compositeurs donneront lieu à un concert de créations : ÉMERGENCES LE 27 FÉVRIER AU CONSERVATOIRE DE PARIS [P.31]
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Les solistes de l’EIC participant au concert du 24 septembre à Strasbourg donneront une master classe autour des œuvres au programme :
INFORMATIONS COMPLÉMENTAIRES ET CALENDRIER DES ACTIVITÉS
LE 25 SEPTEMBRE À 15H À LA CITÉ DE LA MUSIQUE
ensembleintercontemporain.com
ET DE LA DANSE DE STRASBOURG
Monsieur Croche et son double, Philharmonie de Paris, janvier 2018 Twice upon a time, Philharmonie de Paris, février 2019 Atelier Sound Kitchen, Médiathèque Marguerite Duras, Paris, avril 2018
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DEVENEZ MÉCÈNE
D E L’ E N S E M B L E I N T E R C O N T E M P O R A I N
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DES AVANTAGES EXCLUSIFS
–P artager ses valeurs d’excellence et de créativité –P articiper à l’enrichissement du répertoire en finançant la commande de nouvelles œuvres –F avoriser la réalisation de projets multidisciplinaires ambitieux –A ssurer le rayonnement local et international du répertoire contemporain –A ccompagner les futures générations de compositeurs et compositrices, et interprètes –D onner accès à tous à la création et aux pratiques artistiques
Particuliers –R encontres avec les solistes, le directeur musical, des compositeurs et compositrices, et découverte des coulisses de l’Ensemble – Accès illimité aux répétitions commentées – Accès privilégié aux répétitions générales – Invitations au concert de votre choix –U n CD offert à chaque nouvelle parution discographique Entreprises Entreprises mécènes, vous bénéficiez d’avantages sur mesure, à définir avec vous en fonction du projet soutenu.
C O N C R È T E M E N T
In Between, Cité de la musique, Paris, avril 2019
« Devenir mécène de l’Ensemble intercontemporain est un acte essentiel : c’est s’engager pour la création, et soutenir les compositeurs, agir pour la culture, résister à l’uniformisation et permettre à la modernité d’avancer. Devenir mécène de l’Ensemble intercontemporain, c’est contribuer à la naissance de la musique de demain et à la construction d’un patrimoine vivant et partagé. »
LE SAVIEZ-VOUS ?
–U n don de 300 €, soit 102 € après réduction fiscale, contribuera à la réalisation d’une master classe auprès de futurs professionnels. –U n don de 500 €, soit 170 € après réduction fiscale, permettra à une classe de 20 élèves d’assister à un concert éducatif. –U n don de 1 000 €, soit 340 € après réduction fiscale, participera au financement d’une commande à un jeune compositeur. – Un don de 3 000 €, soit 1 020 € après réduction fiscale, soutiendra une tournée de l’Ensemble en France.
Particulier, vous bénéficiez d’une réduction d’impôt égale à 66 % du montant de votre don, dans la limite de 20 % du revenu imposable. Entreprise mécène, vous bénéficiez d’une réduction d’impôt égale à 60 % du montant du don, dans la limite de 0,5 % de votre chiffre d’affaires. Vous pouvez nous adresser votre don par chèque libellé au nom de l’Ensemble intercontemporain, à l’adresse suivante : Ensemble intercontemporain – Service mécénat 223, avenue Jean-Jaurès – 75 019 Paris
L’Ensemble intercontemporain remercie chaleureusement ses donateurs ainsi que la Fondation Meyer pour son soutien à la création.
H POUR PLUS D’INFORMATIONS Émilie Roffi, chargée de communication et mécénat + 33 (0)1 44 84 44 53 e.roffi@ensembleinter.com
Vincent Meyer
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Ensemble intercontemporain
Matthias Pintscher
Résident à la Cité de la musique – Philharmonie de Paris
Directeur musical
Créé par Pierre Boulez en 1976 avec l’appui de Michel Guy (alors secrétaire d’État à la Culture) et la collaboration de Nicholas Snowman, l’Ensemble intercontemporain se consacre à la musique du xxe siècle à aujourd’hui. Les 31 musiciens solistes qui le composent sont placés sous la direction du chef d’orchestre et compositeur Matthias Pintscher. Unis par une même passion pour la création, ils participent à l’exploration de nouveaux territoires musicaux aux côtés des compositeurs, auxquels des commandes de nouvelles œuvres sont passées chaque année. Ce cheminement créatif se nourrit d’inventions et de rencontres avec d’autres formes d’expression artistique : danse, théâtre, vidéo, arts plastiques etc. L’Ensemble développe également des projets intégrant les nouvelles technologies (informatique musicale, multimédia, techniques de spatialisation etc.) pour certains en collaboration avec l’Ircam (Institut de Recherche et Coordination Acoustique/Musique).
« Ma pratique de chef d’orchestre est enrichie par mon activité de compositeur et vice-versa. » Après une formation musicale (piano, violon, percussion), Matthias Pintscher débute ses études de direction d’orchestre avec Peter Eötvös. Âgé d’une vingtaine d’années, il s’oriente vers la composition avant de trouver un équilibre entre ces deux activités, qu’il juge totalement complémentaires. Matthias Pintscher est directeur musical de l’Ensemble intercontemporain depuis septembre 2013. Il est « Artiste associé » du BBC Scottish Symphony Orchestra et de l’Orchestre symphonique national du Danemark depuis plusieurs années. En 2019, il a été le premier compositeur en résidence et artiste associé de la nouvelle Elbphilharmonie Hamburg. Professeur de composition à la Juilliard School de New York depuis septembre 2014, il a été le chef principal de l’Orchestre de l’Académie du Festival de Lucerne, succédant à Pierre Boulez. En 2020, il sera le directeur musical du Ojai Music Festival en Californie.
Les activités de formation des jeunes interprètes et compositeurs, les concerts éducatifs ainsi que les nombreuses actions culturelles à destination du public traduisent un engagement toujours renouvelé en matière de transmission. En résidence à la Cité de la musique – Philharmonie de Paris, l’Ensemble intercontemporain se produit en France et à l’étranger où il est régulièrement invité par de grandes salles et festivals internationaux. Financé par le ministère de la Culture, l’Ensemble reçoit également le soutien de la Ville de Paris. L’Ensemble intercontemporain bénéficie du soutien de la Fondation Meyer pour certains de ses projets de création.
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Chef d’orchestre reconnu internationalement, Matthias Pintscher dirige régulièrement de grands orchestres en Europe, aux États-Unis et en Australie : New York Philharmonic, Cleveland Orchestra, Los Angeles Philharmonic, National Symphony Orchestra de Washington, Orchestre symphonique de Toronto, Orchestre philharmonique de Berlin, Orchestre philharmonique de Radio France, Orchestre de l’Opéra de Paris, BBC Symphony Orchestra, Orchestre de la Suisse Romande, l’Orchestre du Théâtre Mariinsky de Saint-Pétersbourg, Orchestres symphoniques de Melbourne et de Sydney… Matthias Pintscher est l’auteur de nombreuses créations pour les formations les plus diverses, de la musique pour instrument solo au grand orchestre. Ses œuvres sont jouées par de grands interprètes, chefs, ensembles et orchestres (Chicago Symphony, Cleveland Orchestra, New York Philharmonic, Philadelphia Orchestra, Berliner Philharmoniker, London Symphony Orchestra, Orchestre de Paris etc.). Elles sont toutes publiées chez Bärenreiter-Verlag et les enregistrements de celles-ci sont disponibles chez Kairos, EMI, Alpha Classics, Teldec, Wergo et Winter & Winter.
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Équipe artistique
Équipe administrative
Conseil de l’Ensemble
Directeur musical Matthias Pintscher
Directeur général Olivier Leymarie
Président Henri Loyrette
Flûtes Sophie Cherrier Emmanuelle Ophèle Hautbois Philippe Grauvogel, Didier Pateau Clarinettes Martin Adámek, Jérôme Comte Clarinette basse Alain Billard Bassons Paul Riveaux, nn Cors Jens McManama Jean-Christophe Vervoitte Trompettes Clément Saunier Lucas Lipari-Mayer Trombones Jérôme Naulais, nn Tuba nn Percussions Gilles Durot, Samuel Favre, nn Pianos/claviers Hidéki Nagano, Dimitri Vassilakis Sébastien Vichard
Directrice administrative et financière Pauline Ansel Responsable coordination artistique Alix Sabatier Responsable production et diffusion Marine Gaudry Responsable comptable Christelle Coquille Régisseur général Jean Radel Régisseur son/plateau Nicolas Berteloot Régisseur plateau Samuel Ferrand
Anne Tallineau Directrice générale déléguée de l’Institut Français
Adjointe régie/bibliothèque Caroline Barillon
le Directeur de l’Office National de Diffusion Artistique
Responsable de l'action culturelle Pia Galloro
Inspecteur de la création et des ensembles français artistiques désigné par le Ministre de la Culture
Responsable de la communication Luc Hossepied Chargée de communication et mécénat Émilie Roffi
Personnalités qualifiées Nicholas Snowman Vice-président Catherine Tasca Vice-présidente Jean-Philippe Billarant Trésorier
Violons Jeanne-Marie Conquer Hae-Sun Kang, Diégo Tosi
Catherine Boissière Pascal Dusapin
Altos Odile Auboin, John Stulz
Brigitte Lefèvre
Violoncelles Éric-Maria Couturier, Pierre Strauch Contrebasse Nicolas Crosse
Concerto pour violon et orchestre de György Ligeti, Philharmonie de Paris, mai 2019 Sophie Cherrier et Emmanuelle Ophèle jouent Loops III de Philippe Hurel, La Scala Paris, septembre 2018
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Anne Hidalgo Maire de Paris représentée par Patrick Bloche, Adjoint à la Maire chargé de l’éducation, de la petite enfance et des familles
Bibliothécaire Olaf Munk Koefoed
Harpe Valeria Kafelnikov
Dronocracy de Laurent Durupt, Comédie de Reims, mai 2018
Membres de droit Franck Riester Ministre de la Culture représenté par Sylviane Tarsot-Gillery Directrice générale de la création artistique
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Réservations Les réservations et les souscriptions aux différentes formules d’abonnement se font directement auprès des salles accueillant l’Ensemble intercontemporain. Coordonnées des salles et organisateurs parisiens ci-dessous. Pour les coordonnées en régions et à l’étranger, voir directement les pages de ces concerts sur ensembleintercontemporain.com Cité de la musique – Philharmonie de Paris 221, avenue Jean-Jaurès 75 019 Paris 01 44 84 44 84 / philharmoniedeparis.fr Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris 209, avenue Jean-Jaurès 75 019 Paris 01 40 40 45 45 / conservatoiredeparis.fr reservation@cnsmdp.fr Ircam 1, place Igor-Stravinsky 75 004 Paris 01 44 78 12 40 / ircam.fr Le Centquatre 5, rue Curial 75 019 Paris 01 53 35 50 00 / 104.fr Maison de la radio 116, avenue du Président-Kennedy 75 016 Paris 01 56 40 15 16 / maisondelaradio.fr billetterie@radiofrance.com Théâtre du Châtelet Place du Châtelet 75 001 Paris chatelet.com
Nous contacter Ensemble intercontemporain 223, avenue Jean-Jaurès 75 019 Paris 01 44 84 44 50 / contact@ensembleinter.com ensembleintercontemporain.com
Relations presse Opus 64 Valérie Samuel, Pablo Ruiz 01 40 26 77 94 / p.ruiz@opus64.com
Claudine Doury
photographe
Photographe française membre de l’Agence VU’, Claudine Doury aborde dans son travail les notions de mémoire, de transition et de passage, notamment autour de l’adolescence et du voyage. Lauréate de prix prestigieux au cours de sa carrière (Leica Oscar Barnack, World Press, Niepce…), elle reçoit en 2017 le Prix de l’Académie des beaux-arts/Marc Ladreit de Lacharrière. Elle publie plusieurs ouvrages (Peuples de Sibérie Éd. du Seuil, Artek, un été en Crimée Éd. de la Martinière, Loulan Beauty Éd. du Chêne, Sasha Éd. Le Caillou Bleu, L’Homme Nouveau Éd. Filigranes), et expose dans le monde entier. Les photographies de Claudine Doury se trouvent aujourd’hui dans des collections privées et publiques dont le FNAC (Fondation d’Art Contemporain) en France, le Musée de l’Élysée à Lausanne, le Musée de la Photographie à Braga, et plusieurs artothèques.
Ensemble intercontemporain / Association loi 1901 / SIRET 306 664 863 00033 / Code APE 9001Z / Licence d'entrepreneur de spectacles N° 2-1063215 Président Henri Loyrette / Directeur général Olivier Leymarie / Directeur musical Matthias Pintscher / Directrice administrative et financière Pauline Ansel Directeur de la publication Olivier Leymarie Coordination éditoriale Luc Hossepied, Jérémie Szpirglas Contenus rédactionnels Carol Ann Cheung, Axelle Corty, Franck Mallet, Matthias Pintscher, Jérôme Provençal, Pierre Rigaudière, Jérémie Szpirglas, David Verdier, Laurent Vilarem Conception graphique Belleville • Impression Lamazière Photographies Couverture, p.27, 30, 70 issues de la série Une Odyssée Sibérienne, © Claudine Doury / VU’ • p.10, 12 issues de la série Les Nuits Blanches, © Claudine Doury / VU’ • p.21, 36 issues de la série Sasha, © Claudine Doury / VU’ • p.51, 56, 60 issues de la série Loulan Beauty, © Claudine Doury / VU’ • p.2, 67 © Éric Garault / Pasco and Co • p.9 © Ioulex • p.13 © Frank Ferville • p.15 © Martin Sigmund • p.16 © Priska Ketterer • p.17 © Frank Ferville • p.19 © Philippe Gontier • p.20 © Pete Millson / Alamy Stock Photo • p.23 © Janet Sinica • p.25 © Sven Arnstein • p.29 © Lars Skaaning • p.33 © Matthew lloyd • p.35 © Jean-Baptiste Millot • p.39 © Elisabeth Schneider • p.40 © Lea Crespi / Pasco and Co • p.42 Les Sept Péchés capitaux, Pina Bausch, 2018 © Laurent Philippe • p.43, 44 © EIC • p.45 © Jean Radel • p.47 © DR • p.49 Bertrand Chamayou © Marco Borggreve • p.49 Renaud Capuçon © Frederic Stucin / Pasco and Co • p.53, 54 © Franck Ferville • p.57 © Maurizio Rellini • p.63, 64, 66, 68 © EIC La reproduction, même partielle, d’un article de cette brochure est soumise à l’autorisation de l’Ensemble intercontemporain. Programmes et informations donnés sous réserve de modifications. Exemplaire gratuit. Ne pas jeter sur la voie publique © Ensemble intercontemporain
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AOÛT DU 18 AU 24
SEPTEMBRE
OCTOBRE
NOVEMBRE
DÉCEMBRE
JANVIER
JEU 12 VEN 13 SAM 14 DIM 15 JEU 19 DIM 22 MAR 24
22:30 20:00 15:00 15:00 20:30 16:00 20:30
& 20:00 & 20:00
MAR 15 20:30 DIM 20 11:00
MAR 12 20:30 DIM 24 20:00 MER 27 20:30
DIM 1 15:00 MAR 10 20:30 DIM 15 16:30
DIM 19 15:00 SAM 25 15:00 MER 29 20:30
EUROPEAN CREATIVE ACADEMY
ANNECY
FESTIVAL GERGIEV PARADE PARADE PARADE INCANTATIONS OMBRE PORTÉE FESTIVAL MUSICA
ROTTERDAM/DE DOELEN – JURRIAANSE ZAAL PARIS/THÉÂTRE DU CHÂTELET PARIS/THÉÂTRE DU CHÂTELET PARIS/THÉÂTRE DU CHÂTELET PHILHARMONIE DE PARIS/SALLE DES CONCERTS – CITÉ DE LA MUSIQUE BERLIN/PIERRE BOULEZ SAAL STRASBOURG/THÉÂTRE NATIONAL DE STRASBOURG – SALLE GIGNOUX
VERS LA LUMIÈRE DONAUESCHINGER MUSIKTAGE
PHILHARMONIE DE PARIS/SALLE DES CONCERTS – CITÉ DE LA MUSIQUE DONAUESCHINGEN/DONAUHALLEN – MOZART SAAL
SINFONIA RAINY DAYS DEMEURE ET TREMBLEMENTS
PHILHARMONIE DE PARIS/SALLE DES CONCERTS – CITÉ DE LA MUSIQUE LUXEMBOURG/PHILHARMONIE PHILHARMONIE DE PARIS/SALLE DES CONCERTS – CITÉ DE LA MUSIQUE
LES DOUZE BOÎTES DU DOCTEUR STOCK HOMMAGE À OLLY MAHLER ET LES RUSSES
PHILHARMONIE DE PARIS/LE STUDIO – PHILHARMONIE PHILHARMONIE DE PARIS/SALLE DES CONCERTS – CITÉ DE LA MUSIQUE PHILHARMONIE DE PARIS/LE STUDIO – PHILHARMONIE
EXPRESSIONS CONTEMPORAINES BEETHOVEN + CANONS D’HIVER
DIJON/OPÉRA DE DIJON – AUDITORIUM PHILHARMONIE DE PARIS/LE STUDIO – PHILHARMONIE PHILHARMONIE DE PARIS/SALLE DES CONCERTS – CITÉ DE LA MUSIQUE
GRAND SOIR NUMÉRIQUE FESTIVAL PRÉSENCES ÉMERGENCES
PHILHARMONIE DE PARIS/SALLE DES CONCERTS – CITÉ DE LA MUSIQUE PARIS/MAISON DE LA RADIO – AUDITORIUM PARIS/CONSERVATOIRE DE PARIS – ESPACE MAURICE FLEURET
FÉVRIER VEN 7 20:30 DIM 16 18:30 JEU 27 19:00
MARS SAM 7 VEN 13 DIM 15 JEU 19 DIM 22 MAR 24 MER 25 VEN 27 SAM 28 DIM 29
20:30 20:30 11:00 20:00 15:00 20:00 20:00 20:00 20:00 20:00
REICH / RICHTER GRAND SOIR CABINET DE CURIOSITÉS HISTOIRE DU SOLDAT FROM WITHIN… IANNOTTA & VERUNELLI LES SEPT PÉCHÉS CAPITAUX LES SEPT PÉCHÉS CAPITAUX LES SEPT PÉCHÉS CAPITAUX LES SEPT PÉCHÉS CAPITAUX LES SEPT PÉCHÉS CAPITAUX
PHILHARMONIE DE PARIS/GRANDE SALLE PIERRE BOULEZ – PHILHARMONIE PHILHARMONIE DE PARIS/SALLE DES CONCERTS – CITÉ DE LA MUSIQUE LYON/AUDITORIUM – ORCHESTRE NATIONAL DE LYON BRUXELLES/BOZAR – SALLE HENRY LE BŒUF PHILHARMONIE DE PARIS/AMPHITHÉÂTRE – CITÉ DE LA MUSIQUE PARIS/THÉÂTRE DU CHÂTELET – GRANDE SALLE PARIS/THÉÂTRE DU CHÂTELET – GRANDE SALLE PARIS/THÉÂTRE DU CHÂTELET – GRANDE SALLE PARIS/THÉÂTRE DU CHÂTELET – GRANDE SALLE PARIS/THÉÂTRE DU CHÂTELET – GRANDE SALLE
AVRIL VEN 3 11:00 JEU 9 19:30 MAR 14 20:30 MER 15 20:30 DIM 26 15:00
PICASSO, TYMPAN SUR TOILE ANTISYSTÈME KAMMERKONZERT KAMMERKONZERT CONCOURS INTERNATIONAL DE PIANO D’ORLÉANS
PHILHARMONIE DE PARIS/SALLE DES CONCERTS – CITÉ DE LA MUSIQUE GRENOBLE/MC2 – AUDITORIUM AIX-EN-PROVENCE/CONSERVATOIRE DARIUS MILHAUD PHILHARMONIE DE PARIS/GRANDE SALLE PIERRE BOULEZ – PHILHARMONIE THÉÂTRE D’ORLÉANS/SALLE ANTOINE VITEZ
CONCERT DES LAURÉATS / CONCOURS D’ORLÉANS LOST IN DANCE / PIERROT LUNAIRE LOST IN DANCE / PIERROT LUNAIRE
PARIS/THÉÂTRE DES BOUFFES-DU-NORD PHILHARMONIE DE PARIS/SALLE DES CONCERTS – CITÉ DE LA MUSIQUE PHILHARMONIE DE PARIS/SALLE DES CONCERTS – CITÉ DE LA MUSIQUE
3 × 3 OJAI MUSIC FESTIVAL NUOVA STRADA
PHILHARMONIE DE PARIS/LE STUDIO – PHILHARMONIE OJAI PHILHARMONIE DE PARIS/SALLE DES CONCERTS – CITÉ DE LA MUSIQUE
MAI
JUIN
LUN 11 20:30 MER 13 20:30 JEU 14 20:30
MER 3 20:30 DU 11 AU 14 LUN 22 20:30
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