Français: Le Globe 46

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EL GLOBO • LE GLOBE • THE GLOBE • O GLOBO •

• TOAN

CAU! •

VOTE! RÖSTA! ¡VOTA!

HAY BAU !

PREMIO DE LOS NIÑOS PRÊMIO DAS CRIANÇAS DEL MUNDO POR LOS DO MUNDO PELOS DERECHOS DEL NIÑO DIREITOS DA CRIANÇA JORDENS BARNS PRIS FÖR BARNETS RÄTTIGHETER

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PRIX DES ENFANTS DU MONDE POUR LES DROITS DE L’ENFANT

THE WORLD’S CHILDREN’S PRIZE FOR THE RIGHTS OF THE CHILD

# 46 • 2008

07-11-09 08.38.30


Les droits de l’enfant Qu’est-ce que le WCPRC ? ............................................. 4 Célèbre les droits de l’enfant ! ........................................ 8 Comment vont les enfants du monde ? ..............10 Cérémonie de remise des prix 2008 .....................12 World’s Children’s Ombudsman ..............................14 Lauréats précédents.............................................................15

Les candidats a Traîneau à chiens dans la neige Supplément du vote, p. 28

Thanks! Tack! Merci !

¡Gracias! Obrigado!

GROENLAND (Danemark)

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CANADA

À Sa Majesté la Reine Silvia de Suède, AstraZeneca, Abraxis BioScience & Los Angeles Friends of the World’s Children’s Prize, Banco Fonder, ABN AMRO Bank, Interoute, l’ASDI, Rädda Barnen, Radiohjälpen, Folke Bernadotte Akademin, Kronprinsessan Margaretas Minnesfond, Helge Ax:son Johnsons Stiftelse, Svenska Naturskyddsföreningen, Dahlströmska Stiftelsen et Boob Design. À la Communication Works (Sydafrika), The ForeSight Group, Grenna Polkagriskokeri, Ågerups, Floristen à Mariefred, ICA Torghallen Mariefred, Centas, Euronics Strängnäs, Petter Ljunggren, Lilla Akademien, Gripsholms Slottsförvaltning, Gripsholmsvikens Hotell & Konferens, Grafikens Hus, Maria Printz & Printzens Matverk, Broccoli ainsi que Benninge Restaurangskola. À tous les enfants et jeunes gens du jury et des écoles Amies Universelles. À tous les Amis Adultes Honoraires et aux Amis Adultes ainsi qu’aux membres du Monde des Enfants et aux organisations partenaires ainsi qu’à Nick Booth, Mark Drewell, David Freeman et Geoff Tudhope.

ÉTATS UNIS

IS SAHARA OCCIDENTAL

NIGERIA SÉNÉGAL GHANA

COLOMBIE

SIERRA LEONE

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CONGO KINSHASA PÉROU

BRÉSIL

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BOLIVIE

Les personnes apparaissant dans ce numéro du Globe vivent dans les pays et les régions suivants :

Au Bangladesh : Svalorna (The Swallows) Au Bénin : Juriste Echos Consulte Au Brésil : Grupo Positivo (Portal Educacional et Portal Aprende Brasil), SEMED-Santarém, 5a Unidade Regional de Educação/SEDUCPA, SEMED-Belterra, SME-São José dos Campos, SME-Araraquara, ONG Circo de Todo Mundo, Projeto Rádio pela Educação/Rádio Rural de Santarém Au Burkina Faso: Art Consult et Developpment Au Burundi : Maison Shalom Au Cameroun: SOS Villages d’Enfants Cameroun, Plan Cameroun En Côte d’Ivoire : Ministère de l’Education, CAMUA – Berte Zanga, Unicef En Gambie : Child Protection Alliance (CPA) Au Ghana : Ministry of Education, ATWWAR – Ekua Ansah Eshon, Ghana NGO Coalition on the Rights of the Child – Susan Sabaa, Unicef, Integrated Development Centre – Kenneth Wujangi, VRA Schools – Grace Annancy En Guinée Conakry : Ministère de l’Education, CAMUE – Kourouma Oumar En Guinée-Bissau : Ministère de l’Éducation Nationale, AMIC In Inde : City Montessori School Lucknow – Shishir Srivastava, Times of India’s Newspaper in Education, Peace Trust – Paul Baskar, Barefoot College, Tibetan Children’s Villages, CREATE, Hand in Hand Au Kenya : Ministry of Education, Provincial Director of Education for Western and Nyanza Provinces, CSO Network for Western Kenya and Nyanza Province – Betty Okero Au Congo-Brazzaville : ASUDH/Gothia Cup Au Congo-Kinshasa : FORDESK, APEC En Mauritanie : Association des Enfants et Jeunes Travailleurs de la Mauritanie Au Mexique : Secretaría de Desarollo Humano Gobierno de Jalisco Au Mozambique : The Department of Education, SANTAC (Southern African Network Against Trafficking and Abuse of Children), Graça Machel Au Népal : Maiti Nepal Au Nigeria : Federal Ministry of Education, The Ministries of Education in Kogi State, Lagos

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GRANDE BRETAGNE

State, Ogun State, and Oyo State, Unicef, Royaltimi Talents Network – Rotimi Samuel Aladetu, CHRINET, Children’s Rights Network – Moses Adedeji Au Pakistan : BLLFS, BRIC, PCDP Au Rwanda : AOCM Au Sénégal : Ministère de l’Education, Ministère de la Femme, de la Famille et du Développement Social, EDEN – Lamine Gaye, Save the Children Sweden, Unicef En Afrique du Sud : Ministry of Education, National Department of Education, Eastern-, Western- och Northern Cape Departments of Education, North West Department of Education and Department of Social Development, Bojanala Platinum District Municipality and Department of Education, Qumbu District of Education, The Robben Island Museum, Unisa YLC En Thaïlande : Ministry of Education, Duang Prateep Foundation En Ouganda : Uganda Local Governments Association – Gertrude Rose Gamwera, Wakiso District – Ssekyole Deo, BODCO – Nason Ndaireho, GUSCO En Grande Bretagne : The Children’s Rights Director for England – Roger Morgan, Oasis School of Human Relations Au Vietnam : Vietnam Committee for Population, Family and Children – CPFC, Voice of Vietnam – VOV Children’s Programme, Nguyen T.N. Ly, Save the Children Sweden

www.childrensworld.org

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s au WCPRC 2008

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JOSEFINA CONDORI PÉROU P. 16 – 41

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SOMALY MAM CAMBODGE P. 67– 91

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P. 47 et 58

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TIBET NÉPAL BIRMANIE INDE RIA BANGLADESH SOUDAN THAÏLANDE NA CAMBODGE VIETNAM ÉTHIOPIE OUGANDA KENYA KINSHASA RWANDA BURUNDI ZIMBABWE

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Supplément du vote, p. 11

AGNES STEVENS ÉTATS UNIS P. 42 – 66

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Foot avec sacs en plastique

Supplément du vote, p. 8

Le Jury du World’s Children’s Prize Il te faut combien de globes ? Supplément du vote, p. 32

MOZAMBIQUE AFRIQUE DU SUD

P. 92 et dans le Supplément du vote, p. 36–47

La danse de Lord Krishna Supplément du vote, p. 5

Vote !

Urnes électorales au Kenya

Le Vote Mondial Voir le Supplément du vote

Global Vote! Världsomröstning Votación Mundial Vote Mondial Votação Mundial

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LE GLOBE publié par l’association Le Monde des Enfants avec le soutien de l’ASDI est un journal destiné aux Écoles Amies Universelles. Box 150, 647 24 Mariefred, Suède Tél. +46-159-12900 Fax +46-159-10860 Courriel: prize@childrensworld.org www.childrensworld.org

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Voici THE WORLD’S CHILDREN’S PRIZE FOR THE RIGHTS OF THE CHILD LE PRIX DES ENFANTS DU MONDE POUR LES DROITS DE L’ENFANT

Rédacteur en chef et responsable de publication: Magnus Bergmar Ont collaboré aux numéros 46-47: Johanna Hallin, Tora Mårtens, Carmilla Floyd, Kim Naylor, Andreas Lönn, Paul Blomgren, Lila DoVan, Ragna Jorming, Annika Forsberg Langa, Christiane Sampaio, Carlos França, Sven Rosell, Kent Klich, Elin Berge Illustr. & cartes: Jan-Åke Winqvist, Lotta Mellgren Graphisme: Fidelity Traductions: Tamarind (anglais, espagnol, portugais) Cinzia Guéniat (français), JaneVejjajiva (thaï), Preeti Shankar (hindi), Dr. M.A Jeyaraju (tamil). Il existe aussi des version en vietnamien. Coordination linguistique: Kerstin Connor Photo de couverture: Tora Mårtens Litho: Done Impression: PunaMusta Oy ISSN 1102-8343

LE VOTE MONDIAL 2008 14 janvier – 14 avril 07-11-09 16.05.09


« Chers votants » a-t-on écrit sur un mur dans une campagne du Zimbabwe. 560.000 enfants au Zimbabwe ont lu le journal du prix, discuté les droits de l’enfant et voté pour le Vote Mondial pour la première fois.

Ton prix pour tes d  TEXTE: MAGNUS BERGMAR phOTO : pAUL BLOMGREN, LOUISE GUBB, ELIN BERGE ILLUSTR ATION : LOT TA MELLGREN

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ans beaucoup d’écoles on travaille avec le Prix des Enfants du Monde pendant des semai­ nes ou des mois et dans plu­ sieurs matières, y compris les maths. Nous vous conseillons de travailler avec les droits de l’enfant et avec le prix dans l’ordre suivant : 1. Ensemble pour les droits de l’enfant Tu peux commencer par approfondir tes connaissan­ ces sur les droits de l’enfant à l’aide du journal du prix (pages 8 à 11) et le www.childrensworld.org. Dans les pays où il y a beau­ coup d’écoles Amies Univer­

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Salut l’Ami Universel ! Le Prix des Enfants du Monde pour les Droits de l’Enfant (WCPRC) t’appartient à toi et à tous les enfants au-dessous de 18 ans du monde ! Ton école (ou groupe) est l’une des 33.000 écoles Amies Universelles, avec 15 millions d’élèves dans 86 pays. Et bientôt vous serez encore plus. Le WCPRC 2008 se déroule entre le 14 janvier et le 14 avril. selles, une feuille d’informa­ tion sur la situation des droits de l’enfant dans ce pays par­ ticulier sera annexée à l’envoi du journal du prix. – Grâce au journal Le Globe, j’ai appris quels sont mes droits. J’aimerais que tous les enfants du monde participent chaque année au Vote Mondial. Je sais que beaucoup d’adultes dans mon pays ne savent pas que les droits de l’enfant existent, dit Massala du Congo Brazzaville. – Nous devons apprendre aux adultes quels sont nos droits, dit Adoy en Côte d’Ivoire. Koffi en Côte d’Ivoire n’a pas confiance dans les adultes:

– Nous les enfants, devons nous battre pour nos droits, on n’a rien pour rien. Je ne comprends pas pourquoi les adultes ne respectent pas les droits de l’enfant. – J’aimerais qu’il y ait un ministre pour nous les enfants, un ministre de l’en­ fance, qui contrôlerait que nos droits sont respectés, pense Coumba au Sénégal. – Beaucoup d’adultes ne croient pas que nous les enfants puissions avoir des opinions sur l’école et sur la société, dit Carine au Brésil Aishwarya en Inde, l’appuie: – Les adultes nous sous­ estiment. On devrait pou­ voir donner notre avis, comme ont le fait pour le WCPRC. La meilleu­

re source de développement pour le monde, ce sont les enfants. Comment ça se passe concernant les droits de l’en­ fant dans ta vie ? À la mai­ son ? À l’école ? À l’endroit où tu vis et dans ton pays ? Est­ce que les hommes poli­ tiques écoutent les enfants, qu’est­ce qu’on devrait chan­ ger ? Est­ce que les adultes traitent les enfants comme il faut ou qu’est­ce qui devrait changer ? De quelle façon toi et tes amis, pourriez dire à vos parents, professeurs, hommes politiques, journa­ listes et à d’autres adultes que les droits de l’enfant ne sont pas respectés et ce qu’il faudrait faire ? Ayanda en Afrique du Sud

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Global Vote 200

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Les animaux des bulletins de vote

s droits sait ce qu’il veut dire : – Vous, les adultes vous devez me traiter comme vous vouliez qu’on vous traite quand vous étiez enfants ! Dans le supplément consacré au vote tu peux t’informer sur ce que les enfants et les jeunes pensent des droits de l’enfant, le Prix des Enfants du Monde et le Vote Mondial. En t’aidant des expériences des enfants du jury (pages 36 à 47 du Supplément et sur www.childrensworld.org) du peux apprendre beaucoup sur les droits de l’enfant partout dans le monde. 2. Connaître les candidats aux prix Après avoir travaillé avec les droits de l’enfant et après en avoir parlé, le moment est venu de rencontrer les candidats aux prix de l’année et les enfants pour lesquels ils se battent. Aux pages 16–41 tu feras la connaissance de Josefi na Condori et de « ses » enfants. Aux pages

Les filles à Velankanni sur la côte orientale de l’Inde, qui ont perdu parents, frères et sœurs lors du tsunami, préparent leur Vote Mondial.

42–66 Agnes Stevens et de « ses » enfants et aux pages 67–9, Somaly Mam et de « ses » enfants. Comme tu t’apercevras, tous les trois candidats accomplissent des actions remarquables pour les enfants. Les sentiments et les pensées de ces enfants et de ces jeunes gens sont exactement les mêmes que les tiens, si tu avais vécu les mêmes choses. Ils sont comme toi. Peut-être aurez-vous, comme devoir, la lecture du journal du prix. Peut-être vous occuperez-vous d’une exposition ou d’une pièce sur les candidats aux prix et les droits de l’enfant. Peut-être ferez-vous un « voyage » comme reporters, aux pays des candidats. Le guide et le guide de l’enseignant sur le site web donneront à ton professeur plusieurs idées sur la façon dont on peut travailler avec le WCPRC. Pour que tu puisses faire un choix juste, tu dois connaître tous les candidats,

leur travail, de même que les enfants pour lesquels ils se battent. Il sera distribué trois prix : Le Prix des Amis Universels C’est ton prix et celui des autres enfants qui votent. Au cours du premier Vote Mondial, en 2001 ont voté 19.000 enfants. En 2007 ont voté 5,2 millions d’enfants. Serez-vous 6 millions en 2008? Le Prix des Enfants du Monde C’est le prix des enfants du jury. Lis plus à ce propos à la page suivante. Le Prix d’Honneur des Enfants du Monde C’est le prix décerné au/aux candidat/s qui n’ont reçu aucun des autres prix. Vous qui votez et les enfants du jury, pouvez très bien – sans le savoir – décerner votre prix à la même personne. Les trois candidats aux prix reçoivent une somme d’argent pour leur travail en faveur des droits de l’enfant. En 2008, le montant total de la somme est de USD 150.000.

Lama – Josefina Condori Le lama qui vit dans les Andes, était le principal bétail des Indiens Inca. Les lamas sont utilisés dans les villages de montagne péruviens comme animal de somme, pour leur laine et leur viande. Le Grizzly – Agnes Stevens L’ours Grizzly est l’animal officiel de l’état américain de Californie et orne le drapeau de l’état. Mais aujourd’hui il n’y a plus un seul grizzly en Californie. Le dernier a été abattu en 1922. Tigre – Somaly Mam Il y a environ 150 tigres sauvages dans la jungle cambodgienne. Ils ont survécu à des décennies de guerres et de bombardements, mais ils sont menacés d’extinctions à cause de la déforestation illégale et du braconnage.

Que se passe-t-il derrière cette porte ? On l’apprend à la page suivante

3. Préparez le Vote Mondial Dans certaines écoles, après s’être informés sur les trois 5

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Le WCPRC et le Vote Mondial ne sont pas des compétitions. Les trois candidats aux prix ont tous les trois réalisé des actions extraordinaires en faveur des droits de l’enfant et sont pour cela honorés au cours de la cérémonie de remise des prix. Tous les trois reçoivent, en prix, une somme d’argent qu’ils devront utiliser dans leur travail pour les droits de l’enfant. En 2008, le montant total des prix est de USD 150.000. Au moyen du Vote Mondial et du jury des enfants, c’est toi et d’autres enfants et jeunes qui décidez comment ces prix vont être distribués.

La fille frappée par le tsunami vote à Velankanni en Inde.

IMPORTANT ! Aucune compétition ! candidats on fait des affiches électorales et des discours. Puisqu’il s’agit de votre vote, c’est important que vous participiez à l’organisa­ tion du Vote Mondial. Dans le Supplément du vote vous pouvez vous renseigner sur les votes mondiaux au niveau international. Pour que votre Vote Mondial soit démocratique, il vous faut : • Liste électorale. Sur laquelle figurent les noms de tous ceux qui ont le droit de vote. • Bulletins de vote. Photo­ copiez ceux qui se trou­ vent à la dernière page du Supplément du vote ou confectionnez­en vous­ mêmes.

• L’isoloir. Pour que person­ ne ne voie comment vous votez. • L’urne électorale • La couleur contre la frau­ de. Il suffit de cocher les noms sur les listes électo­ rales ou d’une marque de couleur sur – par exemple – un doigt après avoir mis le bulletin dans l’urne. • Les scrutateurs. Cochent le nom des électeurs sur la liste électorale et distri­ buent les bulletins de vote. • Responsables du bureau de vote. Vérifient le dérou­ lement du vote, les mar­ ques de couleur et le dépouillement. • Préposés au dépouille­ ment. Comptent les voix et

communiquent le résultat du vote. 4. La Journée du Vote Mondial Décidez à temps de la date du Vote Mondial. En Afrique du Sud et au Brésil, par exemple, des districts scolaires entiers ont choisi une date de vote commune à toutes les écoles. Dans cer­ tains pays on réfléchit à la possibilité de décréter une Journée du Vote Mondial unique pour tout le pays. À présent vous êtes experts en droits de l’enfant, vous savez en exiger le respect et vous savez tout sur les candi­ dats aux prix et sur les enfants pour lesquels ils se

battent. Vous savez aussi tout sur vos prix et comment réaliser un vote démocratique. Que la Journée de votre Vote Mondial soit plaisante. Bonne chance et n’oubliez pas d’inviter la presse écrite, la radio et la télé ! Communiquez également au WCPRC comment ça s’est passé et ce que vous pensez des droits de l’enfant, du WCPRC et du Vote Mondial. Il faut fêter ça ! Dans le désert du Thar au Pakistan les élèves célèbrent leur Vote Mondial, au cou­ cher du soleil avec des dan­ ses, du thé et des biscuits. À Santarém au Brésil, on assis­ te à des danses et on sert les fruits de l’Amazonie. En Suède on sert des tourtes décorées avec les enfants de l’arc­en­ciel du WCPRC. Communiquez le résultat du vote N’oubliez pas de communi­ quer le résultat du vote de votre école pour chaque can­ didat, avant le 14 avril. Toutes les voix du monde seront additionnées. Vous pouvez enregistrer le résultat du vote au moyen de l’urne électro­ nique sur www.childrens world.org, par courriel à l’adresse : prize@childrens

Derrière la porte : Le jury en réunion

Le jury international des enfants 2007 avec la reine Silvia après la cérémonie.

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Quand la porte se referme sur la réunion du prix du jury, les traducteurs – seuls adultes admis dans la pièce – savent qu’ils devront traduire avec exactitude ce que les enfants disent et seulement cela. Avant la fin de la journée on devra décider qui recevra le prix du jury, Le Prix des Enfants du Monde.

De par leurs propres expériences, les enfants du jury qui viennent de 15 pays différents, sont experts en droits de l’enfant. Ils ont été, entre autres, enfants soldats, esclaves, réfugiés ou enfants des rues. Ils se battent en faveur des droits de l’enfant. Chaque enfant du jury représente tous les enfants

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world.org, par fax au No +46-159 108 60 ou par poste au WCPRC, Box 150, 647 24 Mariefred, Suède.

LES AMIS ADULTES HONORAIRES

La cérémonie de remise des prix Lors de la conférence de presse qui aura lieu à Stockholm, le 16 avril, les enfants dévoileront à qui ont été décernés les prix pour 2008. Si tu veux savoir comment cela s’est passé, visite : www.childrensworld.org. Tu y trouveras aussi des séquences vidéo de la cérémonie annuelle de la remise des prix, qui se tiendra, le 16 avril, au château de Gripsholm, à Mariefred. La cérémonie de remise des prix a toujours lieu mi-avril, à la mémoire d’ Iqbal Masih, du Pakistan, le premier lauréat du Prix des Enfants du monde, assassiné le 16 avril 1995.

Nous comptons des adultes particuliers qui protègent le Prix des Enfants du Monde pour les Droits de l’Enfant. On les appelle Amis Adultes Honoraires. Certains œuvrent dans le monde entier, d’autres dans leur propre pays. SM La Reine Silvia de Suède a été la première Amie Adulte Honoraire. Parmi les autres nous avons Nelson Mandela, Graça Machel, le Premier ministre Xanana Gusmão, Timor Oriental, le Président et Prix Nobel de la paix José Ramos Horta, Timor Oriental, le Prix Nobel Joseph Stiglitz, l’ex Directrice Générale de l’Unicef Carol Bellamy, USA, l’ex Président du Conseil de Sécurité de l’ONU et Secrétaire Général Adjoint, responsable des enfants et des conflits armés, Olara Otunnu, Ouganda, le chef Oren Lyons, Onondaga Nation (USA), le philosophe Ken Wilber, USA et le mannequin et ex réfugiée Alek Wek, Soudan et Grande Bretagne. Les nouveaux protecteurs cette année sont le ministre de l’éducation d’Afrique du Sud, Naledi Pandor et la Reine Mère Semane Bonolo Molotlegi, Royaume de Bakofeng. Désigne qui tu aimerais voir comme Ami Adulte Honoraire et pourquoi !

fant. Le WCPRC aide ton pays dans ce travail. Maintenant que vous êtes experts en droits de l’enfant, vous pouvez les apprendre et les rappeler à la maison, à l’école, auprès des journalistes et des hommes politiques.

5. Tes droits ! Quand ton pays a ratifié la Convention sur les Droits de l’Enfant de l’ONU, ce qu’ont fait tous les pays sauf la Somalie et les États-Unis, ton pays s’est engagé à faire tout son possible pour que les droits de l’enfant soient respectés. Ton pays doit aussi constamment informer sa population enfantine et adulte sur les droits de l’endu monde qui ont été victimes des mêmes abus contre les droits de l’enfant ou qui se sont battus en leur nom. Tu peux apprendre les différentes parties des droits de l’enfant en lisant les histoires des enfants du jury dans le Supplément du vote et sur www.childrensworld.org. C’est difficile d’être membre du jury. Des millions d’enfants de par le monde doivent apprendre des choses et faire des expériences à travers chaque enfant du jury. C’est pourquoi ce sont les violations contre les droits de l’enfant que tu as vécues ou ton propre combat en faveur du res-

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L’heure du décompte des voix au Vote Mondial de Velankanni.

Vous pouvez également exiger le respect des droits de l’enfant ! Faites lire ce journal à vos parents ! 

Tu peux souhaiter la bienvenue aux Amis Universels ! Nombre d’écoles et d’élèves dans le monde ne savent pas qu’ils sont les bienvenus en tant qu’écoles Amies Universelles. Toi et ton école, vous pouvez inscrire les écoles de votre région ! C’est gratuit de devenir école Amie Universelle. Pour pouvoir enregistrer une école, il nous faut : Le nom et l’adresse de l’école, le nom d’une personne de contact à l’école (professeur ou directeur) ainsi que le nombre total des élèves de l’école. Le certificat Ami Universel que nous enverrons à l’école permettra aux élèves de travailler avec le Prix des Enfants du Monde à l’école et de prendre part au Vote Mondial. pect des droits de l’enfant et ton récit à ce propos qui décideront si tu peux faire partie du jury. Les enfants du jury devront, dans la mesure du possible, venir de tous les continents et de toutes les grandes religions. Quand le soir du 13 avril, la porte s’ouvrira, nous saurons que le jury a décidé qui sera le lauréat du Prix des Enfants du Monde 2008. Les enfants du jury choisissent leur propre président et les cinq membres du comité du prix, lequel, à son tour, choisira les trois candidats de l’année prochaine.

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La Reine Silvia. Nelson Mandela, Ami Adulte Honoraire, sourit en lisant, dans le numéro du prix du Globe 2005, la bande dessinée consacrée à sa vie.

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Célèbre les droits d La Convention de l’ONU sur les Droits de l’Enfant (La Convention de l’Enfant) est composée de 54 articles. Nous en présentons ci-dessous une version abrégée. Tu trouveras le texte intégral de la convention sur www.childrensworld.org Idées générales de la Convention • Tous les enfants ont les mêmes droits et la même valeur. • Tous les enfants ont droit à la satisfaction de leurs besoins fondamentaux. • Tous les enfants ont droit à la protection contre la violence et l’exploitation. • Tous les enfants ont droit à la liberté d’opinion et au respect.

Article 1 Tous les enfants du monde de moins de 18 ans jouissent de ces droits.

 illustr ation : lot ta mellgren/ester

Article 2 Tous les enfants ont la même valeur. Tous les enfants ont les mêmes droits. Personne ne sera discriminé. Tu ne seras pas discriminé à cause de la couleur de ta peau, ton sexe, ta langue, ta religion et tes idées. Article 3 Toutes les décisions qui te concernent doivent prendre en compte ton intérêt.

Article 6 Tu as droit à la survie et au développement. Article 7 Tu as droit à un nom et à une nationalité. Article 9 Tu as le droit de vivre avec tes parents, sauf si cela est contraire à ton intérêt. Tu as le droit de grandir chez tes parents, si cela est possible. Article 12–15 Tous les enfants ont droit à dire ce qu’ils pensent. Tu as le droit de donner ton avis et ceci sera respecté, dans tou-

tes les questions qui te concernent, à la maison, à l’école, avec les autorités et les tribunaux. Article 18 Ton père et ta mère ont la commune responsabilité pour ton éducation et ton développement. Ils doivent toujours penser à ton bien. Article 19 Tu as le droit d’être protégé contre toute forme de violence, contre les mauvais traitements ou l’exploitation, que tu sois sous la garde de tes parents ou de toute autre personne.

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Le 20 novembre est un jour à célébrer. Ce jour-là, en 1989, l’ONU a publié la Convention relative aux Droits de l’Enfant, pour toi et pour tous les enfants au-dessous de 18 ans et qu’on appelle aussi la Convention de l’Enfant. Tous les pays, à l’exception de la Somalie et des USA, ont ratifié (se sont engagés à respecter) la Convention de l’Enfant. Dès lors, ils penseront d’abord au bien des enfants et seront à leur écoute.

J’exige qu’on respecte les droits de l’enfant !

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Article 20–21 Tu as droit à une protection même si tu n’as pas de famille. Article 22 Si tu as dû quitter ton pays, tu auras les mêmes droits que les autres enfants dans le pays d’accueil. Si tu t’es enfui seul, tu auras un soutien spécial. On est tenu de t’aider à retrouver ta famille. Article 23 Tous les enfants ont droit à une vie décente. Si tu es handicapé, tu as droit à des soins spéciaux. Article 24 Si tu tombes malade tu as droit à la santé et aux services médicaux. Article 28–29 Tu as droit à aller à l’école et à apprendre ce qui est important, par exemple le respect des droits de l’homme et le respect des autres cultures. Article 30 On respectera les idées et croyances de tous les enfants. Toi, qui appartiens à une minorité, tu as le droit à ta langue, ta culture et ta religion.

Article 31 Tu as droit aux loisirs, au repos, au jeu et à vivre dans un environnement propre. Article 32 On ne t’obligera pas à faire un travail dangereux ou qui entrave tes activités scolaires et ta santé. Article 34 On ne t’exposera pas à la violence et on ne t’obligera pas à la prostitution. Tu as droit à l’aide et au soutien en cas de maltraitance.

LA TRIBUNE DES ENFANTS

Article 35 Tu as droit à la protection contre la vente ou l’enlèvement. Article 37 Tu ne peux être soumis à une peine cruelle ou dégradante. Article 38 Tu ne peux pas être enrôlé dans une armée ni participer aux conflits armés. Article 42 Les États doivent faire connaître le texte de la Convention aussi bien aux adultes qu’aux enfants. Tu as le droit à l’information et à la connaissance concernant tes droits.

POUR LES DROITS DE L’ENFANT

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Comment vont les en Survivre et se développer

2,2 MILLIARDS D’ENFANTS AUDESSOUS DE 18 ANS DANS LE MONDE

79 millions de ces enfants vivent en Somalie et aux USA, les deux pays qui ne se sont pas engagés à respecter les droits de l’enfant. Tous les autres pays ont promis de respecter les droits de l’enfant.

Nom et nationalité Quand tu viens au monde, tu as droit à être enregistré comme citoyen de ton pays. Chaque année 133 millions d’enfants naissent dans le monde. 48 millions d’entre eux ne sont jamais enregistrés. Il n’y a pas de preuve écrite de leur existence !

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Tu as droit à la vie. Les pays qui ont signé les droits de l’enfant feront tout pour que les enfants survivent et se développent. 1 enfant sur 13 dans le monde (1 sur 6 dans les pays pauvres) meurt avant l’âge de cinq ans, la plupart de causes qui auraient pu être évitées.

Santé et Assistance médicale Tu as droit à la nourriture, à l’eau potable et aux soins médicaux. 29.000 enfants de moins de cinq ans meurent chaque jour (10,5 millions par an) de maladies dues au manque de nourriture, d’eau potable, d’hygiène et de soins médicaux. La vaccination contre les maladies infantiles les plus courantes sauve 3 millions d’enfants par an. 1 enfant sur 4 n’est jamais vacciné. 2 millions d’enfants meurent chaque année de maladies contre lesquelles on peut se faire vacciner. La moitié des enfants n’ont pas accès à l’eau potable.

Foyer, vêtements et sécurité Tu as droit à un foyer, à la nourriture, aux vêtements, à la scolarité, aux soins médicaux et à la sécurité. 3 enfants sur 4 dans le monde vivent en état de pauvreté. Environ 600 millions d’enfants vivent avec moins de 1 USD par jour. 900 millions d’autres enfants vivent avec moins de 2 USD par jour.

Enfants handicapés Toi qui es handicapé, tu as les mêmes droits que les autres. Tu as droit au soutien qui te permettra de prendre une part active à la vie sociale. Les enfants handicapés sont parmi les plus vulnérables. Dans beaucoup de pays, ils n’ont pas le droit d’aller à l’école. Beaucoup sont traités comme inférieurs et cachés. Il y a 150 millions d’enfants avec des handicaps dans le monde.

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Enfants qui vivent dans la rue Tu as droit à vivre dans un milieu sûr. Tous les enfants ont droit à l’instruction, aux soins et à un niveau de vie décent. 60 millions d’enfants ont la rue comme foyer. 90 millions d’autres enfants travaillent et passent leurs journées dans la rue mais ont une famille dans laquelle ils retournent la nuit.

Délits et peines Les enfants ne seront emprisonnés qu’en dernière instance et pour très peu de temps. Aucun enfant ne sera soumis à la torture ou à d’autres sévices. Les enfants qui commettent des délits ont droit à l’aide et aux soins. Les enfants ne seront ni emprisonnés à vie ni soumis à la peine de mort. Au moins 1 million d’enfants sont emprisonnés. Les enfants emprisonnés sont souvent maltraités.

Travail nuisible Tu as droit à la protection contre l’exploitation économique et contre le travail qui nuit à ta santé ou qui t’empêche d’aller à l’école. Les enfants de moins de 12 ans ne doivent pas travailler du tout. Environ 200 millions d’enfants entre 5 et 14 ans travaillent et pour 3 enfants sur 4 d’entre eux le travail nuit à leur sécurité, leur santé, leur intégrité et leur scolarité. 8,4 millions d’enfants sont exploités à travers les pires formes de travaux, comme esclaves pour dettes, soldats ou prostitués. Au moins 1,2 millions d’enfants sont victimes de « trafficking » qui est l’esclavage d’aujourd’hui.

Protection contre la violence Tu as droit à la protection contre toutes formes de violence, d’incurie, de maltraitance et d’agression. Chaque année 40 millions d’enfants sont si maltraités qu’ils ont besoin de soins médicaux. 19 pays dans le monde ont interdit toute forme de sévices ce qui fait que seuls 2 enfants sur 100 dans le monde sont protégés contre la violence par la loi. Beaucoup de pays permettent les châtiments corporels à l’école.

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Enfants des minorités Les enfants qui appartiennent à des groupes minoritaires ou indigènes ont droit à leur langue, leur culture et leur religion. Indigènes sont par exemple les Indiens d’Amérique, les Aborigènes d’Australie ou les Lapons d’Europe du Nord. Les groupes indigènes ou minoritaires sont souvent désavantagés. Leur langue n’est pas respectée, ils sont molestés ou discriminés. Beaucoup d’enfants n’ont pas accès aux soins médicaux.

Tu as droit à la protection et à l’assistance en temps de guerre ou si tu es en fuite. Les enfants en guerre ou en fuite ont les mêmes droits que les autres. Ces 15 dernières années, au moins 2 millions d’enfants sont morts, victimes de la guerre. 6 millions ont été blessés physiquement. 10 millions ont été blessés psychiquement. 1 million ont perdu leur famille ou en ont été séparés. 300.000 enfants sont employés comme soldats, transporteurs et détecteurs de mines (chaque année 8.000 enfants sont tués ou rendus invalides par des mines) Au moins 20 millions d’enfants sont en fuite.

École et formation Tu as droit à l’école. L’école primaire doit être gratuite pour tous. Environ 8 enfants sur 10 dans le monde vont à l’école, mais 117 millions ne commencent jamais l’école. Près de 6 sur 10 de ces enfants, sont des filles.150 millions d’enfants dont 100 millions de filles, quittent l’école avant la cinquième année de scolarité.

FAIS ENTENDRE TA VOIX ! Tu as le droit de dire ce que tu penses à propos de toutes les questions qui te concernent. Les adultes doivent écouter l’avis des enfants avant de prendre une décision, laquelle doit toujours viser le bien de l’enfant.

Est-ce ainsi dans ton pays et dans le monde aujourd’hui? Toi et le reste des enfants du monde le savez 11 mieux que personne !

 TEXTE: SOFIA KLEMMING ILLUSTR ATION : LOT TA MELLGREN/ESTER

enfants du monde?

Protection en temps de guerre et comme réfugié

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THE WCPRC AWARD CER WELCOME! VÄLKOMMEN! ¡BIENVENIDOS! BEM VINDOS! BIENVENUE!

CHAO A MUNG ! AO

La Reine Silvia remet le Prix des Amis Universels et le Prix des Enfants du Monde à Betty Makoni, suivie sur scène par Ruth Bikwa et les filles Alice Shavi et Lisa Bonongwe.

La troupe de danse Kasm Kathkaars de l’Inde donne, avec grâce, la bienvenue à la Reine Silvia et au reste du public, au château de Gripsholm à Mariefred.

Le prix de 5,2 millions d’enfants

THE GLOBAL FRIENDS’ AWARD et le Prix des Enfants du Monde

THE WORLD’S CHILDREN’S PRIZE Betty Makoni

THE WORLD’S CHILDREN’S HONORARY AWARD Cynthia Maung

5.228 801 jeunes au-dessous de 18 ans ont participé au Vote Mondial 2007 et ont élu Betty Makoni, Zimbabwe. Tous les candidats ont eu plus d’un million de voix. À travers le Girl Child Network, 500 clubs soutiennent les 30. 000 filles de Betty, s’occupent de celles qui ont été victimes d’abus et protègent celles qui riquent le travail enfantin, le mariage forcé, la maltraitance, le trafficking et l’abus. Le jury international des enfants a aussi élu Betty lauréaté du prix.

Cynthia Maung reçoit le Prix d’Honneur des enfants des mains de la Reine Silvia avec Saw Romel. Cynthia est récompensée pour son combat de 20 ans en faveur de centaines de milliers d’enfants en fuite, en Birmanie et à l’extérieur. Elle dirige la clinique Mae Tao, forme des soignants qui retournent dans leurs villages en Birmanie et envoie des centaines de médecins ambulants en Birmanie, elle dirige des écoles et des orphelinats pour enfants réfugiés. 12 12

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EREMONY 2007

CÉRÉMONIE DE REMISE DES PRIX  PHOTO : ELIN BERGE

Mary Smart et les autres enfants du jury exigent le respect des droits de l’enfant dans leur lange maternelle.

Rakesh Kumar, Hassana Hameida Hafed et Idalmin Santana du jury.

THE WORLD’S CHILDREN’S HONORARY AWARD Inderjit Khurana

Hannah Taylor, avec le speech pour Cynthia Maung dans la bouche, aide Gabatshwane Gumede à préparer sa prestation.

Bijay Kumar regarde la Reine Silvia remettre le prix à Inderjit Khurana. Inderjit pense que si les enfants ne peuvent pas aller à l’école c’est l’école qui doit aller à eux. Il y a 21 ans, elle a ouvert sa première école pour les enfants qui vivent et travaillent sur les quais de gare et son organisation dirige 12 écoles du quai, 6 crèches, 75 écoles dans les bidonvilles, 20 écoles maternelles et des programmes de bourses pour les enfants pauvres.

Thai Thi Nga du Vietnam remet le bouquet de fleurs des enfants à la Reine Silvia en signe de remerciement.

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O  TexTe: Magnus bergMar PHOTO : eLIn berge

Assez de châtiments corporels !

World’s Children’s Ombudsman

Moment historique avec le

mar a appelé Olara Otunnu à la tribune et lui a dit : – La mission que te confient des millions d’enfants pour les deux années à venir est de travailler pour les droits des filles. Le droit des filles à l’instruction et à la protection contre les abus et dans les conflits armés. – Je suis enchanté de recevoir cette mission de la part de représentants de millions d’enfants et je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour que les droits des filles soient mieux respectés, a répondu Olara. On pouvait pendant toute une année envoyer des propositions de missions pour le

« Arrêtez les châtiments corpo­ rels ! C’est mon mandat pour le World’s Children’s Ombudsman ! Les enfants doivent être res­ pectés et traités avec la même dignité que les adultes. Les adultes renvoient souvent à la culture, à leurs propres expé­ riences ou à la religion quand ils tentent de justifier les châti­ ments corporels. Qui se mani­ festent par des coups de pied et de poing, des gifles, ou par le fait d’être projeté violemment contre les parois, à la maison comme à l’école. Mais pourquoi est­ce que les enfants seraient obligés de vivre à genoux ? Les enfants ont le droit d’être proté­ gés contre toute forme de vio­ lence, maltraitance et sévices. Malgré cela, 40 millions d’en­ fants dans le monde sont battus si fort qu’ils ont besoin de soins médicaux. Les châtiments cor­ porels sont honteux, humiliants, effrayants et douloureux. Il faut que ça s’arrête ! » Boaz Ongote Magaka, 15, Kisumu, Kenya

Ce fut un moment historique quand le premier (WCO), Olara Otunnu, a reçu au cours de la cérémonie, sa première mission de la part du président du jury des enfants, Omar Bandak de Palestine. Jusqu’en avril 2009, le WCO devra se consacrer aux droits des filles. WCO. Le jury international des enfants a ensuite choisi la mission à accomplir parmi les cinq propositions les plus courantes. Le premier WCO Olara Otunnu est le tout premier World’s Children’s Ombudsman. Il a été entre autres, ministre des affaires étrangères, Président du conseil de sécurité de l’ONU, Président de la commission de l’ONU sur les droit de l’homme ainsi que Secrétaire Général Adjoint,

responsable des enfants et des conflits armés. – Je suis devenu Citoyen du Monde tôt dans la vie, chez moi dans le nord de l’Ouganda. Mon père était évangéliste dans les pays voisins comme le Soudan le Kenya et la Tanzanie. Je savais où il était par les timbres sur ses lettres. À sept ans, mon père m’envoyait dans le magasin du village pour entendre les nouvelles quand notre radio ne marchait pas. Ensuite, je courais vite à la maison, pour ne pas

oublier ce qui s’était passé dans le monde et je le lui récitais de mémoire.  Questions et missions pour le WCO Tu peux confier une mission au WCO par courriel à : mission@worldschildrens ombudsman.org ou lui poser des questions à : question@ worldschildrensombuds man.org.

« J’aimerais que le World’s Children’s Ombudsman visite tous les pays du monde pour vérifier que tous les enfants aillent à l’école. Le droit des enfants à l’instruction est important ! Sans instruction

lent ; prêtres, cordonniers, professeurs, médecins. Mais pour pouvoir réaliser notre but dans la vie, nous devons d’abord aller à l’école ! » Portia Arhinful Brew, 14, Kumasi, Ghana

14

on ne peut pas survivre. S’il ne sait pas compter, un boulan­ ger ne peut pas vendre son pain. S’il ne sait pas lire le chauffeur ne peut pas trouver le chemin. Les enfants ont le droit de devenir ce qu’ils veu­

FOTO : TOr a MårTens

L’école pour tous

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oe an !

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Barefoot College

Le Mouvement des Enfants pour la Paix

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Maggy Barankitse

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Lauréats précédents du WCPRC 2000

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Asfaw Yemiru

La première année trois, parmi les milliards d’enfants victimes de la violation de leurs droits pendant le 20ème siècle, ont été honorés à titre posthume (après leur mort). World’s Children’s Prize (Le Prix des Enfants du Monde) Iqbal Masih, ex esclave pour dettes dans une fabrique de tapis, Pakistan, pour son combat en faveur des droits des enfants esclaves pour dettes. World Children’s Honoraray Award (Le Prix d’Honneur des Enfants du Monde) Anne Frank, Hollande et Hector Pieterson, Afrique du Sud.

2001 World’s Children’s Prize (Le Prix des Enfants du Monde) & Global Friends’ Award (Le Prix des Amis Universels) Asfaw Yemiru, Éthiopie. Asfaw était à neuf ans, enfant des rues. À 14 ans il ouvrait sa première école pour enfants des rues sous un grand chêne et depuis, pendant 45 ans, il a consacré tout son temps à offrir une scolarité aux enfants éthiopiens défavorisés. World’s Children’s Honorary Award (Le Prix d’Honneur des Enfants du Monde) Barefoot College, en Inde, pour son travail de pionnier, qui dure depuis plus de 30 ans, avec, entre autres, le Children’s Parliament (Le Parlement des Enfants) et les écoles du soir au Rajasthan. Le Mouvement des Enfants pour la Paix, en Colombie, qui organise les enfants contre la guerre et qui exerce des activités pour la joie des enfants.

2002 World’s Children’s Prize (Le Prix des Enfants du Monde) & Global Friends’ Award (Le Prix des Amis Universels) Nkosi Johnson (posthume), Afrique du Sud, qui s’est battu en faveur des droits des enfants atteints du sida.

Pastoral da Criança

Prateep Ungsongtham Hata

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World’s Children’s Prize (Le Prix des Enfants du Monde) Maiti Nepal, qui se bat contre le trafic de filles pauvres du Népal vers l’Inde – où elles deviennent esclaves dans des maisons de prostitution – et réhabilite les filles abusées. World’s Children’s Honorary Award (Le Prix d’Honneur des Enfants du Monde) Casa Allianza, Amérique Centrale, qui travaille en faveur des enfants qui vivent dans la rue.

2003 World’s Children’s Prize (Le Prix des Enfants du Monde) Maggy Barankitse, Burundi, qui pendant 10 ans a sauvé des dizaines de milliers d’orphelins lors de la guerre du Burundi et leur a donné un foyer, de l’amour et l’école. Global Friends’ Award (Le Prix des Amis Universels) James Aguer, Soudan, qui pendant 15 ans a libéré des milliers d’enfants qui avaient été enlevés, du travail forcé au Soudan. James a été emprisonné 33 fois et deux de ses collaborateurs ont été tués. World’s Children’s Honorary Award (Le Prix d’Honneur des Enfants du Monde) Pastoral da Criança, Brésil, qui travaille afin de réduire la mortalité infantile et la sous-alimentation parmi les enfants pauvres.

2004 World’s Children’s Prize (Le Prix des Enfants du Monde) & Global Friends’ Award (Le Prix des Amis Universels) Prateep Ungsongtham Hata, Thaïlande, qui a été enfant travailleuse quand elle avait dix ans. Elle a ouvert sa première école à l’âge de 16 ans et depuis 35 ans, elle lutte pour donner aux enfants les plus défavorisés la possibilité d’aller à l’école.

Paul, Mercy Baskar

Liz Gaynes/ Emani Davis

Les 20 mamans de Ste Rita

World’s Children’s Honorary Award (Le Prix d’Honneur des Enfants du Monde) Paul et Mercy Baskar, Inde, qui depuis 20 ans se battent contre le travail infantile nocif. Liz Gaynes et Emani Davis, USA, qui depuis 20 ans se battent pour les droits des enfants de prisonniers.

2005 World’s Children’s Prize (Le Prix des Enfants du Monde) Les 20 mamans de Ste Rita, Kenya, qui ces huit dernières années ont travaillé pour que les enfants, que le sida a rendus orphelins, voient leurs droits respectés. Global Friends’ Award (Le Prix des Amis Universels) Nelson Mandela et Graça Machel, Afrique du Sud et Mozambique. Mandela pour son long combat en faveur de l’égalité des droits pour les enfants sud africains et pour sa défense de ces droits. Machel pour son long combat de 20 ans en faveur des enfants défavorisés du Mozambique, spécialement en faveur des filles. World’s Children’s Honorary Award (Le Prix d’Honneur des Enfants du Monde) Ana María Marañon de Bohorquez, Bolivie, qui pendant 20 ans s’est battue pour les enfants qui vivent dans la rue à Cochabamba.

2006

avec nourriture, vêtements, scolarité, foyer, soins médicaux et amour. World’s Children’s Honorary Award (Le Prix d’Honneur des Enfants du Monde) Jetsun Pema, Tibet. La soeur du Dalaï Lama a, depuis 40 ans, oeuvré en faveur des droits des enfants réfugiés tibétains.

2007 World’s Children’s Prize (Le Prix des Enfants du Monde) & Global Friends’ Award (Le Prix des Amis Universels) Betty Makoni, Zimbabwe, qui à travers le Girl Child Network donne la force aux filles de réclamer le respect de leurs droits. Elle soutient les filles victimes d’abus et protège celles qui risquent d’être victimes d’abus, du mariage forcé et du trafficking. World’s Children’s Honorary Award (Le Prix d’Honneur des Enfants du Monde) Cynthia Maung, Birmanie, qui pendant 20 s’est battue pour la santé et l’instruction de centaines de milliers d’enfants réfugiés aussi bien en Birmanie, sous la dictature, que dans les camps de réfugiés en Thaïlande. Inderjit Khurana, Inde, qui depuis 21 ans dirige plus de cent écoles et deux lignes de téléphone d’assistance pour des enfants parmi les plus pauvres de l’Inde, qui vivent et travaillent sur les quais de gare.

World’s Children’s Prize (Le Prix des Enfants du Monde) Craig Kielburger, Canada, qui a 12 ans a créé Free The Children (Enfants Libres). Craig se bat pour le droit des jeunes à faire entendre leur voix et pour libérer les enfants de la pauvreté et des violations des droits de l’enfant. Global Friends’ Award (Le Prix des Amis Universels) AOCM, L’AOCM, Rwanda, 6.000 orphelins à la suite du génocide au Rwanda qui s’entraident pour survivre

Nelson Mandela/ Graça Machel

Ana María Marañon de Bohorquez

Betty Makoni

AOCM

Cynthia Maung

Craig Kielburger

Inderjit Khurana

Jetsun Pema

15

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L E J U RY P O U R L E P R I X D E S E N FA N T S D U M O N D E 2 0 0 8 E L J U R A D O D E L P R E M I O D E L O S N I Ñ O S D E L M U N D O 2 0 0 8 O J Ú R I D O P R Ê M I O C R I A N Ç A S D O M U N D O 2 0 0 8

the jury for the world’s children’s prize 2008

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E LLE MI A IVE R SE

Idalmin Santana

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Gabatshwane Gumede

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L MI A IVE R SE

Railander Pablo Freitas de Souza

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L E MI EL A IVE R S UN GRANDE

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VIETNAM

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Mary Smart

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Hannah Taylor

CANADA

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Hassan Hameida Hafed

SAHARA OCCIDENTAL

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BANGLADESH

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Isabel Mathe

MOZAMBIQUE

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Ofek Rafaeli ISRAËL

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Rebeka Aktar

Rafesh Kumar INDE

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Om a r Ba n d a k

PALESTINE

E LLE MI A IVE R SE

UN

Sukumaya Magar NÉPAL

E E L MI SEL Laury Cristina A IVE R Hernandez Petano

UN

COLOMBIE

E LLE MI A IVE R SE

UN

Maïmouna Dio u f

SÉNÉGAL

the world’s children’s prize for the rights of the child 2008

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NOMINÉE • Pages 16–41

Josefina Condori Josefina et ses collaborateurs rencontrent beaucoup d’enfants dans les villages andins. Yanapanakusun travaille avec l’école du village pour informer sur la situation des bonnes dans la ville de Cusco.

J Dionisia avait 10 ans, elle était fatiguée et seule dans le noir quand Josefina Condori l’a vue pour la première fois devant l’une des écoles du soir de la ville de Cusco. La famille où Dionisia était bonne l’avait chassée. Elle n’avait nulle part où aller. C’est à ce moment que Josefina a pris la décision. Elle allait offrir aux filles comme Dionisia un foyer, les soins et la connaissance pour se battre pour leurs droits.

après que Dionisia s’est endormie dans un coin de l’unique chambre de l’appartement, Josefi na a dit à Vittoria et à Ronald: – Nous devons faire plus pour aider les fi lles. Plus tard, je veux construire une maison où pourront venir toutes les filles qui ont besoin d’aide. Mais jusque là, elles habiteront ici, chez nous.

osefi na a créé l’organisation Yanapanakusun en 1994 pour aider les fi lles et les femmes qui sont bonnes dans la ville de Cusco au Pérou. Josefi na travaillait elle-même pendant la journée, dans une famille. Le soir elle passait dans les écoles de la ville avec Vittoria et Ronald, avec qui elle avait créé l’organisation. Ils expliquaient que toutes les employées de maison ont droit à un bon salaire, au congé du dimanche et à être traitées avec respect. C’est un de ces soirs-là que Josefi na a rencontré Dionisia. Et la même nuit,

Le rêve de Lima Pour Josefi na tout commence quand elle a sept ans et vit avec sa famille dans un village au sud du Pérou. Elle est assise à sa place préférée, sur une pierre à la forme de Continue à page 18

Josefina Condori est nominée au WCPRC 2008 pour son long combat en faveur des filles qui travaillent comme bonnes au Pérou, souvent dans des conditions proches de l’esclavage. Beaucoup parmi les centaines de milliers de bonnes sont exposées à des sévices dans les foyers où elles travaillent. Josefina, qui elle-même a été bonne, se bat depuis l’adolescence pour les droits des employées de maison. En 1994 a été crée l’organisation Yanapanakusun, qui dirige un foyer pour filles en détresse et un centre pour employées de maison. Josefina et Yanapanakusun font un travail de formation et de prévention dans 30 villages aux alentours de Cusco, diffusent cinq émissions de radio, exploitent un hôtel, une ferme et une école pour filles et garçons travailleurs. 500 filles ont vécu dans le foyer. Des dizaines de milliers ont reçu soutien et aide. Josefina procure aux filles nourriture, vêtements, chaussures, soins, un foyer, la possibilité d’aller à l’école, la sécurité et l’amour. Mais elle travaille surtout pour instruire tous les enfants travailleurs sur leurs droits et leur apporter la connaissance afin qu’ils puissent en exiger le respect.

POURQUOI JOSEFINA A-T-ELLE ÉTÉ NOMINÉE ? colombie ecuador

brésil

Pérou Lima

Océan Pacifique

Le

Cusco

s A bolivie nd es

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 TEXTE: JOHANNA HALLIN PHOTO : TOR A MÅRTENS & JOHANNA HALLIN

Les filles invisibles Au moins cinq pour cent des filles au Pérou, c’est-à-dire 560.000 filles, sont bonnes et leur travail est de faire le ménage, la lessive, cuisiner, garder les enfants ou d’autres tâches ménagères. Que les garçons des rues souffrent c’est bien connu, mais les filles souffrent en silence et peu connaissent leurs problèmes.

« Ne sois pas si reconnaissante ! » « Dois-je dire merci parce que je respire ? Non, justement ! » dit Josefina. Ce qu’elle veut dire c’est que beaucoup d’enfants travailleurs ont appris à exprimer leur reconnaissance pour tout. Ils ne s’attendent pas à être bien traités. « Bien sûr que c’est important d’être poli et de dire merci, mais j’essaie d’apprendre aux filles que le fait d’être bien traitée, le respect, pouvoir rencontrer ses parents, jouer et se reposer ce ne sont pas des cadeaux. Ce sont les droits de l’enfant ! »

Bienvenus dans la ville inca Partout à Cusco flotte le drapeau arc-en-ciel. L’arc-en-ciel était un symbole du royaume des Incas qui s’étirait sur toute la chaîne des Andes avant que les Espagnols envahissent la région au XVIème siècle. Cusco était la capitale du royaume inca. À présent le drapeau arc-en-ciel est le drapeau de la ville elle-même.

Salut l’ami ! Il y a beaucoup de façons de saluer de nouveaux amis dans les villages des Andes. Si Edwin, 12 ans, voit quelqu’un avec qui il veut devenir ami, il ramasse un caillou et le lance. Ici il lance un caillou contre Clorinda, 14 ans. Quand elle aura remarqué le caillou à ses pieds, ils pourront commencer à se parler.

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Tous les soirs Josefina et les filles mangent ensemble.

cheval et elle pleure. Son père vient de mourir. Sans père pour s’occuper des champs dans la jungle, la famille va rapidement s’appauvrir. Bientôt ils n’auront plus ni argent pour la nourriture ni vêtements. – Et ce n’est pas la peine de rabâcher que tu veux aller à l’école, dit maman à Josefina. Tu dois aider à la maison, l’école c’est pour les garçons. La vie est vide depuis que

papa est mort. Josefina se met à rêver de partir pour Lima, la capitale. Elle sait que beaucoup de filles de la région y sont allées pour travailler. « Là-bas, je pourrais aller à l’école, acheter de beaux vêtements. Et des chaussures ! Et des bonbons ! » pense Josefina. Alors quand maman dit à Josefina de l’accompagner chez une parente à Lima, elle est très contente.

Battue et chassée À Lima ce n’est pas comme Josefina avait imaginé. Elle devra vivre dans une petite chambre sale avec son cousin et sa famille. « C’était une erreur ! » pense Josefina. Pendant cinq ans elle vit dans la petite chambre. Beaucoup de nuits, couchée sur le sol où elle dort, elle pleure. Le jour, elle s’occupe de l’enfant du cousin, balaye, lave et fait la vaissel-

le. Josefina n’aime pas sortir car les enfants du quartier se moquent d’elle parce qu’elle parle le quechua et non l’espagnol. La femme du cousin crie des ordres en espagnol. Quand Josefina ne comprend pas ce qu’elle dit et se trompe, elle la bat et lui donne des coups de pieds. – Chola, crie la femme. Tu es bête et paresseuse ! Un jour l’enfant de la maison se blesse.

Josefina a sorti des vêtements de bébé pour le bébé de Miriam, qui n’a que deux jours. Miriam, 16 ans, vit dans le foyer depuis trois mois. Elle a été chassée de la maison où elle travaillait quand la maîtresse de maison a découvert qu’elle était enceinte.

Josefina est souvent invitée à l’émission de radio de Yanapanakusun. C’est une bonne façon d’informer les filles qui sont bonnes et que leurs employeurs ne laissent pas sortir.

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Quand à 12 ans Josefina (à droite) peut commencer l’école, elle entre en contact avec beaucoup d’autres filles qui, comme elle, travaillent comme bonnes. Enfin elle trouve des amies qui la comprennent.

Josefina (au centre) avec sa mère dans les environs de son village natal. Quand après dix ans de travail comme bonne, Josefina a retrouvé sa mère, elles pouvaient à peine se parler. Josefina avait presque oublié sa langue maternelle.

– Ce n’est pas ma faute, essaie d’expliquer Josefi na, mais la femme du cousin ne la croit pas. Elle sort un couteau et menace de tuer Josefi na. À douze ans, Josefi na rassemble son courage et demande à son cousin l’autorisation d’aller à l’école. – Fille ingrate, qui s’occupera de notre enfant ? Sors d’ici, dit le cousin. Il ouvre la porte et Josefi na se trouve dans la rue, seule. Mais elle a de la chance. Grâce à un voisin,

elle trouve un nouveau travail dans une famille d’un autre quartier de Lima. Elle peut enfi n commencer l’école du soir. Là, elle apprend lentement à lire, à écrire et à compter. À l’école du soir Josefi na se fait enfi n de vraies amies. Ce sont aussi des fi lles qui travaillent. L’une d’elle emmène Josefi na à la réunion d’une association pour les employées de maison. Elles s’y retrouvent tous les dimanches. Elles parlent de leurs expériences et ensem-

ble, elles essaient de trouver des solutions à leurs problèmes. Et elles rient beaucoup. Maman! À 17 ans Josefi na veut revoir sa famille. Elle retrouve son cousin à Lima qui lui explique comment retourner au village. Le cousin est heureux de la voir, car après que Josefi na avait disparu, sa mère était allée à la police pour signaler sa disparition. Josefi na revoit sa mère. Dix ans ont passé depuis leur dernière rencontre et il y

a beaucoup de choses qu’elle veut raconter. Mais c’est à peine si elle y arrive ! Pendant les années où elle a travaillé, les familles lui ont interdit de parler quechua et elle a presque oublié sa langue maternelle. – Tu m’as tellement manLa recherche des origines des filles et de leur certificat de naissance a mené Josefina à travers la chaîne des Andes. Beaucoup connaissent à présent son travail et soutiennent Yanapanakusun dans son combat pour les droits des filles.

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qué, dit Josefina et elles pleurent ensemble. De retour à Lima Josefina continue à aller à l’école chaque soir. À 23 ans, elle passe enfin son examen. Elle est si fière ! Vittoria, sa nouvelle amie, la félicite. Elles se sont connues à l’association pour les employées de maison et projettent de s’établir à Cusco pour y créer une association similaire. Cusco est une ville sur la chaîne de montagnes des Andes. Il y a quelques siècles c’était la capitale du royaume des Incas et c’est encore un centre où les filles vont travailler. Josefina, Vittoria et Ronald s’installent dans une seule pièce. Quand ils commencent leur travail dans les écoles du soir, ils remarquent que la situation des domestiques à Cusco est encore pire qu’à Lima. La plupart des domestiques sont des petites filles, beaucoup n’ont que cinq ou six ans et sont seules en ville. La plupart viennent de villages tout en haut des montagnes, ne parlent que le quechua et n’ont aucun contact avec leur famille.

les d’état, mais l’organisation de Josefina a aussi créé une école pour filles et garçons qui travaillent à Cusco. Yanapanakusun, l’organisation de Josefina a construit la grande maison pour les filles dont Josefina rêvait. Ils ont aussi un petit hôtel pour des résidents venus du monde entier et un studio de radio pour informer sur le travail domestique des filles. Le travail avance mais Josefina se heurte encore aux oppositions de la police, d’avocats et de juges qui veulent fermer la maison. – Ils ne veulent pas écouter les filles, dit Josefina. – Les filles que nous aidons ont souvent été trompées et ne se sont jamais senties aimées. C’est pourquoi nous voulons montrer que nous sommes vraiment concernés par leur sort. 

Jeux et mouvements sont très importants pour la confiance en soi et le plaisir d’aller à l’école. C’est une part importante du programme de formation de Yanapanakusun et de Josefina.

Que foNt JosefiNa et YaNapaNakusuN ? • Dirigent un foyer où les jeunes filles employées de maison ont un logis, des vêtements et la protection. • Recherchent les familles des filles et aident les filles à obtenir les papiers d’identité. • Dirigent un centre d’aide pour les employées de maison de Cusco. • Cinq émissions de radio pour informer sur la situation et les droits des filles, leur famille, leurs employeurs et la société en général. • Travail de prévention dans les villages et les communautés des montagnes aux alentours de Cusco. • École du soir Maria Angola pour les filles et les garçons travailleurs à Cusco. • École professionnelle pour les filles employées de maison. • Exploitation agricole dans la vallée sacrée des Incas. • Exploitent un hôtel et une agence de voyage.

« Nous nous entraidons » Josefina a créé l’organisation Yanapanakusun avec Vittoria Savio Gilardi et Ronald Zarate Herrera en 1994. Yanapanakusun signifie « nous nous entraidons » en quechua. L’organisation a beaucoup de projets. Le plus important, Caith, est le travail de Josefina concernant les filles employées de maison.

Nous nous sentons concernés Très vite le travail de Josefina s’oriente vers l’aide à apporter aux filles travailleuses et invisibles de Cusco. Tout d’abord, on aide les filles à se procurer un certificat de naissance. Mais c’est difficile, car beaucoup ont oublié leur nom de famille et l’endroit de leur village. Josefina doit souvent faire de longues marches jusqu’aux villages des montagnes. Elle profite de ses visites dans les villages pour parler de la situation des filles à Cusco. Quand les filles ont leur certificat de naissance, elles peuvent commencer l’école. La plupart vont dans les éco20

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Rosia Rosia est libre sur la montagne

R

osia ne veut pas se lever. Sous la couverture en laine tissée par papa c’est douillet, mais hors du lit il fait froid. De petits cristaux de glace se sont déposés pareils à un voile blanc sur toute la maison et le village. Les sandales de Rosia sont raides par le gel nocturne et le froid lui blesse les pieds. Le petit village se trouve à 4.300 mètres au-dessus du niveau de la mer, alors malgré

la proximité de l’équateur, les nuits sont froides. Rosia court jusqu’au robinet et de nouveau jusqu’à la maison, puis elle saute sur place pour se réchauffer les pieds. Mais au moins le temps est sec. Pendant la période des pluies elle se réveille toujours avec la neige et la boue. Quand le petit-déjeuner est prêt, Rosia réveille son frère et sa sœur, José et Jeovana. Maman et papa ne sont pas là. Ils se sont levés

bien avant l’aube pour descendre la montagne dans une marche de trois heures. En bas la famille possède une culture de maïs. Maman a dit à Rosia de s’occuper du frère et de la sœur. Mais ils trichent avec la toilette, ils se passent seulement un peu d’eau sur le visage. L’eau du puits est glacée. – Ne dites surtout rien à maman, dit Rosia en pouffant. Voit mal Rosia emmène les enfants à son école couleur bleu clair. Derrière le mur en pierre les enfants jouent au foot. Rosia adore le foot. Ils jouent garçons contre fi lles et Rosia n’a pas peur de tacler pour s’emparer du ballon. Elle

Rosia Sencia Peña, 11 Aime : Être sur la montagne avec les moutons. Plat préféré : Pommes de terre bouillies. Désire : Une paire de chaussures claires en cuir. Aime : Mon frère, José 8 ans et ma sœur Jeovana, 5 ans. Jouer au foot. Déteste : Les disputes et les bagarres, quand les enfants sont méchants entre eux. Rêve de : Travailler comme employée de maison, gagner de l’argent et acheter de beaux vêtements. Est fi ère de : La jupe que papa a faite.

 TEXTE: JOHANNA HALLIN PHOTO : TOR A MÅRTENS

Là-haut sur la montagne Rosia se sent libre. Elle court avec les moutons et joue avec son frère et sa sœur. Aujourd’hui elle rêve qu’elle travaille à Cusco et qu’elle a de beaux vêtements tout neufs. Soudain elle est tirée de son rêve par le cri déchirant d’un mouton ! Elle se précipite vers le mouton et le renard gris, mais trop tard…

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Pommes de terre piétinées – miam-miam ! Tous les jours après l’école, Rosia aide son père à sécher les pommes de terre. La famille peut conserver les pommes de terre séchées tout l’hiver, sans qu’elles se gâtent. 1. Choisis de toutes petites pommes de terre. Mets-les à sécher au soleil.

2. Après deux jours, on peut marcher sur les pommes de terre et les piétiner pour que la peau en craquant laisse passer le liquide. 3. Piétine plusieurs fois. À la fin les pommes de terre sont sèches et noires.

dribble et marque un but ! Les autres filles jubilent et se mettent à sauter et Rosia lève les bras au ciel. Dans la classe, Rosia n’est pas aussi sûre d’elle. Elle aime l’école. Mais le soleil si fort de la montagne lui a endommagé les yeux et elle a de la peine à voir ce que le prof écrit au tableau. Maman voudrait bien la montrer à un médecin, mais ils doivent d’abord économiser pour payer la visite et le long voyage de quatre heures. D’ici là Rosia est obligée de cligner des yeux et avoir mal à la tête jusqu’au déjeuner. Désire des chaussures L’école finit chaque jour à midi. Alors Rosia prend sa sœur par la main et monte vers les sommets de la montagne. Elles vont garder les moutons. – Sur la montagne, je me sens libre, dit Rosia. Elle a une fronde pour lancer des cailloux contre le troupeau de moutons et

les diriger vers la maison, le soir. Rosia aime le bruit de fouet que fait la fronde. Parfois elle joue avec d’autres enfants qui gardent les moutons sur la montagne. Mais en général il n’y a qu’elle, son frère et sa sœur. Alors elle s’assied sur la montagne, regarde les moutons et rêve. Surtout d’aller travailler à Cusco. Rosia a vu beaucoup de filles du village sauter sur la plate-forme d’un camion et disparaître en ville, vers un monde excitant. – J’aimerais travailler et gagner de l’argent. Je pourrais m’acheter de beaux vêtements, d’abord je m’achèterais un cardigan jaune avec des boutons luisants. Et des chaussures ! Je veux vraiment une paire de chaussures, dit Rosia. La mère de Rosia travaillait à Cusco quand elle était jeune. Maman a parlé des voitures et des bancs croulants de fruits où on vend des pommes, des oranges et des mangues. – Mais je ne veux travailler que chez quelqu’un que je connais, pas dans une famille étrangère. Mais je préférerais aller à Cusco avec ma mère, dit Rosia.

4. Mouds les pommes de terre séchées pour en faire une farine et utilise-la dans le ragoût, les soupes et les potées.

Rosia

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Le renard gris arrive Soudain le cri déchirant d’un mouton arrache Rosia à son rêve. Le frère et la sœur de Rosia se mettent aussi à crier en voyant les dents luisantes du renard s’enfoncer dans le cou du mouton. Le sang jaillit de la toison. Rosia poursuit le renard gris et le mouton. Elle jette une pierre qui effraie le renard mais c’est trop tard. Son mouton blanc est mort. – Qu’est-ce qu’on va faire ? Maman va se fâcher et nous battre, dit José en regardant avec effroi le mouton dans les bras de Rosia. Il arrive souvent que les

parents battent leurs enfants, mais Rosia sait que leur mère ne les battra pas. Mais elle va crier et se fâcher. Sur le chemin du retour Rosia est triste et elle se tait. Elle porte le mouton et le sang se colle à son pull. Le village n’a pas d’électricité, ainsi quand le soleil s’est couché et que maman a fini de l’enguirlander, Rosia reste seule dehors, assise dans le noir. – Je vais m’en aller d’ici, pense-t-elle au milieu des larmes. Tout s’arrangera, pourvu que je m’en aille. 

Rosia avec sa famille, devant leur maison qui se trouve au milieu du village.

Beaucoup d’enfants du village n’ont jamais de petitdéjeuner. Avec le ventre vide, la classe est bruyante et agitée. C’est pourquoi certains parents donnent à tous les enfants un verre de bouillie le matin. Une fois par semaine c’est la mère de Rosia qui arrive avec le goûter.

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Pourquoi est-ce que les filles veulent aller à la ville ? • À la campagne, les gens sont souvent pauvres. Certaines filles vont à la ville pour échapper à la faim et au froid. • Les écoles dans les villages sont petites et n’ont que trois ou quatre ans d’études. Certaines filles vont à la ville parce qu’elles veulent continuer d’aller à l’école. • L’alcoolisme et la violence sont les problèmes les plus courants dans les villages pauvres. Certaines filles vont à la ville pour échapper aux abus chez elles.

Sandales en pneus de voitures Rosia et la plupart des enfants des villages aux alentours de Cusco portent des sandales, été comme hiver. Elles s’appellent ushuta et avant elles étaient en peau de lama. De nos jours les sandales sont en vieux pneus.

Au Pérou, la plupart des filles qui vont à la ville ne savent pas très bien ce qui les attend. Les filles qui sont employées de maison doivent souvent travailler dur et sont isolées dans les maisons où elles travaillent, surtout avant qu’elles aient appris l’espagnol. La plupart du temps, elles sont maltraitées et abusées. C’est pour cela que le travail de Josefina, de Yanapanakusun et des écoles du village est d’informer les enfants et les parents sur la vie d’une bonne.

Rosia et ses camarades de classe adorent jouer au foot. Les murs en pierre de l’école servent de lignes de touche.

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 TEXTE & PHOTO : JOHANNA HALLIN

Je suis bien !

– Je suis bien ! Je suis bien ! Les cris rebondissent entre les maisons et les montagnes. Dimitri, de l’organisation de Josefina, Yanapanakusun, est arrivé en moto sur la nouvelle route en terre battue, la toute première route à relier le petit village. Il s’agit de l’un des 30 villages que Yanapanakusun visite régulièrement.

L

es élèves des premières années de collège, jouent, parlent, font des listes et dessinent toute la matinée. Le sujet c’est la dignité. C’est un mot compliqué et il faut un certain temps pour clarifier ce qu’il signifie exactement. – La dignité c’est se respecter soi-même et les autres, dit Regina. – Exactement, dit Dimitri. Nous sommes peut-être pauvres, mais nous sommes quand même dignes de respect. Vous devez vous appliquer à l’école et être

gentils avec les adultes, mais les adultes doivent aussi être gentils avec vous. Personne n’a le droit de vous battre ou de vous maltraiter. Lidia fronce les sourcils. Quand son père rentre soûl, ça finit souvent en bagarre et en coups. Ce n’est pas du respect, pense Lidia. – Ça me met en colère de voir mon père agir ainsi, dit-elle. Lidia et les autres élèves ont beaucoup parlé des parents et des adultes soûls. Ici, beaucoup d’adultes boivent pour oublier la dureté

Lidia Garate Luza, 13 Aime : Jouer dans la cour de l’école. N’aime pas : Que les adultes se disputent et se battent. Exige : Que papa me respecte moi et mes copains. Regrette : Maman. Elle est morte quand j’étais petite. Admire : Dimitri, qui nous enseigne les droits de l’enfant.

du travail, la faim et la pauvreté. Mais les enfants n’oublient jamais. – Avant je rêvais de partir vivre à Cusco ou à Lima, mais maintenant mon rêve est qu’on construise une école de plus dans notre village, dit Lidia. – Je veux terminer le collège et après ouvrir un magasin. Je vendrai du pain, des nouilles, des pommes de terre et du sucre. Je préfère vivre ici. Mais jamais, jamais je ne boirai et mon mari, quand j’en aurai un, ne boira pas non plus. 

Tout le corps participe quand c’est Yanapanakusun qui fait la leçon.

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Assez de profs soûls Jeni Maribel Piñe Pucyura, 9 Aime : Les maths, c’est simple et logique. Déteste : Les adultes soûls. Veut être: Bibliothécaire, pour pouvoir lire tous les livres.

Jeni Maribel adore l’école. Résoudre les problèmes de maths, par exemple. Mais aujourd’hui c’est lundi et la classe ne va rien apprendre de nouveau.

J

eni-Maribel et les autres enfants restent assis à leur place complètement immobiles quand ils entendent arriver le professeur. Il sent la sueur et l’alcool. Aussitôt, il se met à crier : – Où est ma chaise ? Vous êtes des bons à rien, espèces de fils de paysans idiots ! Qu’est-ce que je fais dans ce trou? Le prof vient de Cusco, mais travaille dans le petit village de Jeni Maribel.

Beaucoup d’adultes de la ville méprisent les gens de la campagne. C’est pour ça que le prof se moque de son travail. Il est souvent soûl et ce jour-là, comme la plupart de lundis, il s’endort la tête sur son bureau. Les enfants restent à leur place en silence toute la journée. Quand le prof se réveille, il ôte sa ceinture pour frapper quelqu’un sur les doigts. À la fi n de la journée d’école, les enfants se ras-

semblent derrière la maison de Jeni Maribel. – Nous devons faire quelque chose, dit-elle. Ils décident d’aller tous à la maison et de parler à leurs parents du prof. Jeni Maribel parle des coups et des réprimandes du prof soûl. Ce soir-là les parents se rassemblent et vont à la police. Le jour suivant le prof ne vient pas. Les élèves restent seuls dans la classe toute la semaine. Mais le lundi suivant arrivent deux nouveaux profs. – Nous connaissons vos problèmes. Mais nous promettons de ne jamais venir à l’école soûls. Nous vous traiterons avec respect comme vous nous respectez en tant que profs, promettent-ils. Jeni Maribel est fière. Avec ses camarades elle s’est débarrassée du prof soûl. – Ils devraient mettre tous les mauvais profs en prison ! dit-elle. Mais pas seulement les profs, tous les adultes qui battent ou maltraitent les enfants. 

Jessica Quispe, 11 ans et Juli Borrientos, 9 ans, ont des costumes de la région de Tinta, au sud de Cusco.

Victor Manuel Meza, 10 ans et Marco Antonio Luna Huisa, 11 ans, portent des costumes de la fête des moissons de la région de Tinta.

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La garderobe de Cusco  TEXTE: JOHANNA HALLIN PHOTO : TOR A MÅRTENS

Les enfants de la région de Cusco adorent danser et chanter. Il y a beaucoup de beaux costumes à porter et de danses à apprendre. Certains datent des Incas, d’autres ont des origines espagnoles. Pendant les mois de juin et juillet les fêtes se succèdent. Le festival le plus important de Cusco s’appelle Inti Raymi et vient du temps où les Indiens Incas célébraient le solstice d’hiver, le jour le plus court de l’année.

Clorinda Cachira Owepe, 15

Heureuse : Quand je danse. Malheureuse : Quand nos lamas et nos moutons meurent de froid en hiver. Énervée : Contre les adultes qui obligent les filles à travailler jour et nuit sans un seul jour de libre. Désir : Danser de nouveau au bord du précipice.

Rosemery Ugarte, 12 ans porte un costume qui est arrivé au Pérou, il y a quelques centaines d’années, avec les conquistadors espagnols.

Clorinda danse au bord du précipice Reyna Caceres Puma, 10 ans et Carlos Enrique Contreras, 11 ans, portent un costume de Chicchinccha. On les appelle les cowboys des Andes, puisque dans cette région, beaucoup s’occupent de vaches et de chevaux.

Sabina Yahaira, 5 ans, porte un costume Tincus de la région du lac Titicaca dans le sud du Pérou.

Jose Nicolas Ccapatinta Lopez, 12 ans, porte un costume Canchi que l’on met pour exécuter l’une des plus anciennes danses indiennes. Ça consiste à sécher les pommes de terre.

Sur www.childrensworld.org tu peux voir deux films où Clorinda et ses copines d’école dansent.

« J’adore danser ! Mais j’ai besoin de place. Mon village se trouve près de la montagne Apu, dont le nom veut dire dieu en quechua. C’est la montagne la plus haute et la plus sacrée qui entoure Cusco. Chaque hiver nous faisons une grande fête et tout le village danse. Nous les filles sommes particulièrement effrénées. L’endroit où est célébré le festival se trouve sur la montagne près d’un ravin. Les vieux du village racontent de filles à la danse si effrénée qu’elles sont tombées dans le ravin. Une fois j’ai failli tomber dans le précipice ! Mais papa m’a rattrapée. »

Gregorio Cansaya Quispe, 10 ans, porte un costume de diable provenant d’une danse traditionnelle de la région de Paucartamzo, près de la jungle péruvienne.

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 TEXTE: JOHANNA HALLIN PHOTO : TOR A MÅRTENS

Fatiguée et seule à

Cusco

La plupart des filles qui viennent à Cusco pour travailler viennent des montagnes qui entourent la ville. Elles rêvent de la ville, d’instruction et de beaux vêtements. Mais le plus souvent la réalité ressemble plus à une prison.

Personne ne me voit

Traitée comme un chien « Je dois rester à la cuisine et manger les restes, comme un chien. Parfois on ne me donne rien à manger. Une fois j’avais tellement faim que j’ai fouillé la poubelle derrière la maison. Alors je me suis dit que j’aurais mieux fait de ne pas exister. » Reyna, 11

« C’est la maîtresse de maison qui fait la cuisine, mais c’est moi qui épluche les légumes et surveille le feu. Après, c’est moi qui fais la vaisselle. Beaucoup de gens disent qu’elle cuisine bien. Ça qui me rend dingue. Il n’y a jamais personne pour voir que je l’aide. » Fany, 12

On lui tire les cheveux « Je lave tous les vêtements de la famille. Le pire se sont les taches de fruits sur le pull blanc de leur enfant. C’est difficile à enlever et si je ne réussis pas, la maîtresse de maison se fâche. Elle crie et me tire les cheveux. » Carmen Celia, 13

Ne sort jamais « Je ne sors jamais. Je me perdrais et à qui je demanderais le chemin ? Je ne parle pas espagnol. Et puis, mon patron dit qu’on peut se faire dévaliser et battre dans la rue ou que la police m’arrêterait. Ça me fait peur. » Laydi, 12

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Valeria s’endort sur son banc

Dit de gros mots « Le maître de maison se fâche facilement contre moi. Quoi que je fasse il crie. De gros mots, très haut. Quand il fait ça, j’ai envie de m’arracher les oreilles. » Juli, 13

À l’école du soir les filles ont l’occasion d’utiliser l’ordinateur. La plupart d’entre elles ne font que dépoussiérer les ordinateurs là où elles vivent.

Josefina rencontre les filles à l’école du soir La visite des écoles du soir est une part importante du travail de Josefina et de Yanapanakusun. C’est là qu’elle rencontre les filles qui ont besoin d’aide. Les écoles du soir sont destinées aux employées de maison adultes mais beaucoup d’élèves sont des enfants. Beaucoup d’employeurs ne permettent pas aux filles d’aller dans les écoles ordinaires, mais ils les laissent aller à l’école du soir après les tâches de la journée. Certaines filles n’ont le droit d’y aller qu’une fois par semaine. C’est pour cette raison que les écoles du soir organisent des leçons supplémentaires, le samedi et le dimanche.

Aujourd’hui, Valeria s’est endormie, la tête dans le livre et les bras sur les genoux. Le prof de la plus grande école du soir de Cusco la réveille gentiment. Ce n’est pas la première fois qu’il voit une fille épuisée après un jour de travail. Mais Valeria a honte. Elle veut bien se conduire, mais c’est difficile quand on a du sable dans les yeux et les bras lourds comme du plomb. « Je me lève juste avant six heures du matin. Il fait froid dans toute la maison et je me mets tout de suite à nettoyer pour me réchauffer. Si j’ai de la chance, les deux garçons dorment jusqu’à sept heures et demie. Ce qui me laisse un peu de temps pour mes devoirs avant qu’ils se réveillent. La maîtresse de maison part travailler quand je me réveille, c’est donc moi qui habille les garçons et qui emmène l’aîné à la crèche. Le cadet n’a qu’une année. Je le garde et je joue avec lui toute la journée. J’aime quand il rit et il m’aime aussi. À la mi-journée je fais déjeuner les garçons et je les lave. Puis, je m’occupe d’eux et je lave les vêtements le reste de l’après-midi. En général c’est facile. Mais parfois mes patrons se fâchent. La semaine passée je jouais avec les garçons dans la rue quand le maître est arrivé. Il n’y avait pas de voitures, ce n’était pas dangereux, mais il s’est mis dans une grande colère et m’a traitée d’idiote. J’avais honte et ça m’a rendue triste. Tous les soirs à six heures je vais à l’école du soir. C’est ce que je préfère de toute la journée, mais je suis toujours si fatiguée. J’ai mal à la tête et j’ai à peine la force de tenir ma plume. C’est pour ça que je ne suis pas si bonne à l’école. Je n’ai pas la force de me concentrer sur ce que dit le prof. J’aimerais aller à l’école pendant la journée comme les autres enfants. Mais c’est impossible parce que je dois travailler. À neuf heures et demie je rentre. Je dois alors faire la vaisselle du dîner et essayer de manger quelque chose avant de me jeter sur le lit, morte de sommeil. »

Valeria Llamacehima Churata, 13 Aime : Bricoler et faire des boucles d’oreilles. Est triste : Quand je pense à maman et à comment elle riait et m’embrassait. Rêve : D’être infirmière.

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Luz Garda trouve

un foyer

Luz Garda a 11 ans quand elle se trouve dans le bus en route vers une ville dont elle ne connaît pas le nom. Elle s’est enfuie. Elle est seule, elle a faim et elle est loin de parents qui crient et d’hommes qui la tripotent. Une femme bien habillée s’assied près d’elle. – Tu as besoin d’aide ?

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uz Garda n’a qu’un mince T-shirt sur elle. La femme l’enveloppe dans une couverture et lui sourit. – Nous allons à Cusco, dit la femme. C’est une grande ville, mais ne t’en fais pas, je m’occuperai de toi. Luz Garda est contente.

Enfi n un adulte qui s’intéresse à elle. Jusque là elle ne s’était jamais sentie à sa place nulle part. Quand elle avait six ans son beau-père l’avait envoyée chez une tante en ville, pour qu’elle aille à l’école. Mais les années avaient passé sans que la tante se décide à payer les taxes scolaires. Au lieu de cela Luz Garda avait dû aider à la maison et dans le petit magasin de la tante. Un jour, Luz Garda trouva ses sœurs qui l’attendaient devant la porte. Elle les embrassa, tout étonnée. Ses

grandes sœurs lui manquaient depuis qu’elles avaient quitté le village bien des années auparavant. – Tu vivras chez nous, lui dirent les sœurs. Alors elle quitta la maison de sa tante sans dire ni adieu ni où elle allait. Mais la vie chez les sœurs n’était pas ce que Luz Garda avait espéré. Elle arrêta l’école pour s’occuper de son neveu. Les sœurs travaillaient tous les après-midi et toutes les nuits dans un bar. Mais le pire c’était le petit ami de l’une des sœurs. Quand la sœur travaillait, il essayait de déshabiller Luz Garda et de la toucher. Quand Luz Garda le dit à sa sœur, celle-ci éclata de colère. – Ne mens pas à propos de mon ami, cria-t-elle en giflant Luz Garda. Fous le camp ! Alors Luz Garda prit la porte, alla jusqu’à la station de bus et acheta un ticket de

Luz Garda et sa meilleure amie Adaluse sont au marché annuel de Cusco. Les familles chez lesquelles elles travaillaient avant ne leur donnaient pas congé. C’est la première fois qu’elles mangent de la barbe à papa, qu’elles font un tour de manège et sur la grande roue.

bus avec tout l’argent qu’elle possédait. C’est ainsi qu’elle se trouva à côté de la belle femme sur l’autobus de Cusco. Le rêve devient cauchemar La première semaine c’est comme dans un rêve. Luz Garda dort bien et le jour elle aide la femme à balayer la maison. Mais ensuite la femme exige que Luz Garda fasse toujours plus. Les repas, la vaisselle, la lessive, la poussière, laver les légumes, les courses, les vitres. Les tâches se multiplient et la femme est de plus en plus mécontente. Comme Luz Garda vient

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Aime : Danser, écouter de la musique, lire, faire du shopping. Livre préféré : Harry Potter. Musique préférée : Reggaeton. Rêve de : Être artiste ou guide touristique. Admire : Josefina. Elle est comme une mère.

Les droits de la bonne Un jour au marché, près du vendeur de pain, Luz Garda rencontre une fi lle. – Salut, tu es aussi bonne ? demande la fi lle.

Luz Garda achète des billets de manège avec l’argent qu’elle gagne dans la famille où elle travaille en ce moment. Ils sont justes et gentils.

 TEXTE: JOHANNA HALLIN PHOTO : TOR A MÅRTENS

Luz Garda Callapiña Chani, 16

d’un village sans électricité, elle n’a jamais utilisé un fer à repasser. Un jour elle brûle l’un des chemisiers de la femme. Quand la femme s’en aperçoit, elle se met dans une grande colère. – Tu es une ingrate et une paresseuse. Je devrais t’envoyer à la police, hurle-t-elle. Luz Garda travaille tous les jours de la semaine, de sept heures du matin à neuf heures et demi, l’heure de se coucher. Elle s’applique à la besogne, mais la femme trouve toujours quelque chose à redire.

Luz Garda hoche la tête étonnée. La fi lle dit que même celles qui travaillent comme bonnes ont le droit d’aller à l’école, le droit d’être libres tous les dimanches et le droit à un salaire. Luz Garda n’a rien de tout cela, mais comment oseraitelle dire quoi que ce soit à la femme ?

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Luz Garda ne revoit plus la fille. Parfois elle pense que c’était un ange qu’elle a rencontré au stand de pain. Elle pense tous les jours à ce que la fille a dit. Mais chaque fois qu’elle essaie de faire valoir ses droits, la femme se met à rire. Un soir, Luz Garda s’enfuit à nouveau. Elle court jusqu’à ce qu’elle pense que ses poumons vont éclater et que personne ne la suit. Cette nuit-là elle dort sur la place de Cusco. Quand la police la réveille, elle est transie et elle a peur. La police garde Luz Garda enfermée plusieurs jours. Mais fi nalement on l’envoie chez Josefi na et Yanapanakusun. Une quinzaine de filles de tous âges

partagent le même dortoir. Toutes proviennent de petits villages aux alentours de Cusco et ont travaillé dans des familles qui les maltraitaient. Josefi na pose beaucoup de questions, mais Luz Garda ne répond pas. Elle la fi xe simplement en silence. Elle n’a plus confiance en personne. A confiance en Josefina Longtemps Luz Garda se donne beaucoup de peine pour irriter Josefi na. Elle est désagréable, refuse d’aider et ne veut être l’amie d’aucune autre fi lle. Mais Josefi na est patiente. Elle comprend que c’est une façon pour Luz Garda de montrer qu’elle est malheuLe certificat de naissance de Luz Garda était nécessaire pour lui permettre de reprendre l’école.

La garde-robe de Luz Garda Vêtements de danse Deux valises constituent la garde-robe vestimentaire de Luz Garda.

– J’adore danser le reggaeton. J’ai pris plusieurs cours de danse pour apprendre à mieux danser. C’est important d’avoir des chaussures à talons quand on danse.

Vêtements de travail – Ils ne sont pas si élégants, alors ça ne fait rien si je me salis.

Chaussures de travail Chaussures de danse

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reuse et en colère. Après une année dans la maison Josefi na dit : – Je crois que nous devrions rechercher ta famille. D’abord Luz Garda a peur. Elle ne veut pas rencontrer les membres de sa famille qu’elle a fuis. Mais fi nalement elle accepte. Pendant le long voyage en bus elle parle avec Josefi na. C’est comme si c’était la première fois qu’elles parlaient vraiment. Chez sa tante Luz Garda reçoit une copie de son certificat de naissance. Cela signifie qu’elle peut reprendre l’école. Ensuite Luz Garda prend son courage à deux mains. – Pardon de m’être sauvée, dit-elle. – Pardon pour les fois où on ne t’a pas traitée comme

on aurait dû, dit la tante. Sur le chemin du retour vers Cusco tout est différent. Luz Garda a fi nalement décidé de faire confiance à Josefi na. Ma nouvelle famille Aujourd’hui Luz Garda a 16 ans. La journée elle travaille dans une famille qui paye bien et le soir elle va à l’école. Ensuite elle revient à la maison chez Josefi na dans la pièce qu’elle partage avec Fortune et Adaluse. – Le plus beau c’est que j’ai une famille ici à Yanapanakusun. Mes camarades de chambre sont comme des sœurs, dit Luz Garda. – Maintenant je suis heureuse et tranquille. Et quand je suis triste je peux pleurer sans crainte. 

Les bonbons préférés de Luz Garda.

Luz Garda et sa meilleure amie, Adaluse, sont toutes les deux en dernière année à l’école Maria Angola de Yanapanakusun.

Vêtements de sport – Je mets mes vêtements neufs pour jouer et faire du sport. Ce que je préfère c’est le saut à la double corde. Comme il fait très froid ici à Cusco je fais souvent du sport pour me réchauffer.

Chaussures de sport

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Essaie le quechua

Le droit à deux langues

Salut Je vais bien, frère (à un garçon) Je vais bien, sœur (à une fille) Comment tu t’appelles ? Oui Non Merci Salut/ Au revoir Je t’aime

L’espagnol et le quechua sont toutes deux langues officielles au Pérou. Mais l’espagnol est jugé supérieur puisque dans les villes où se trouve l’argent et le pouvoir, on ne parle que l’espagnol. Beaucoup de gens pauvres dans les montagnes ne parlent que le quechua. Souvent quand une fille arrive en ville pour travailler, elle ne peut parler avec personne. La famille où elle travaille refuse de parler quechua et elle n’a jamais appris l’espagnol. Après quelques années quand elle a appris l’espagnol, il n’est pas rare qu’elle oublie le quechua. Ce qui signifie qu’elle ne pourrait pas parler avec sa famille si elle la revoyait. – Il est donc important que les filles apprennent l’espagnol tout en conservant leur langue maternelle, dit Josefina. Ce n’est pas uniquement une question de langue, il s’agit aussi de pouvoir conserver son histoire et son amour- propre.

Allillanchu kashanki Allillanmi waykey Allillanmi panay Ima’n sutiki? Ari Manan Diospagarasunki Tupananchis cama Noka munakuyki

Gregorio t’apprend à compter jusqu’à dix en quechua sur www.childrensworld.org!

Le cartable et le matériel scolaire de Luz Garda.

Les livres sur Harry Potter sont les préférés de Luz Garda. « J’aime la loyauté entre les trois amis. Et puis Harry a des talents magiques qu’il développe au fur et à mesure qu’il apprend. Je veux développer mes talents de la même manière »

Vêtements d’été

Vêtements d’hiver

– Ce sont mes vêtements de plage. Une fois je suis allée à Lima et j’ai vu l’océan pacifique ! Lunettes de soleil

Chapeau de soleil – Je mets ce chapeau quand je me promène dans la montagne. Il faut se protéger la tête de la forte lumière du soleil, sinon on risque de perdre connaissance.

Le sac à forme de canard vient du lac Titicaca dans le sud du Pérou.

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L’organisation de Josefina dirige l’école du soir Maria Angola. Elle est ouverte aux enfants qui travaillent, filles et garçons. Les filles travaillent souvent dans les maisons ou avec des parents. Les garçons vivent généralement seuls, parfois ils louent un lit et parfois ils vivent dans la rue. Ils travaillent par exemple comme aide-serveur, marchand ambulant, aide dans une boulangerie ou un garage. Mais aussi bien les filles que les garçons sont souvent très seuls et ont le sentiment de n’être bons à rien. Ils doivent travailler très dur et sont souvent fatigués. Beaucoup trouvent que c’est difficile de travailler en groupe, car ils n’ont jamais appris à collaborer en jouant ou en potassant avec d’autres enfants. Les élèves à l’école Maria Angola apprennent beaucoup de choses différentes, mais le plus important c’est d’apprendre : • que tous les enfants ont des droits. • que filles et garçons ont la même valeur. • que chaque personne a droit au respect, à la liberté et à la connaissance. • à travailler ensemble. • à exiger le respect de ses droits.

Un jour à Yanapanakusun 07.15 L’heure de se réveiller En hiver, Josefina réveille les filles à sept heures et quart. Elles ont juste le temps de faire leur lit, se préparer et prendre le petit-déjeuner avant que certaines d’entre elles se mettent en route pour l’école. – Comme il fait froid, elles restent au chaud dans leur lit le plus longtemps possible, dit Josefina. En été, quand le soleil chauffe plus vite, elles se lèvent à six heures et demi.

07.45 Vers l’école Clorinda, 15 ans, descend vite la rue qui mène à l’école. Elle et la moitié des filles de la maison vont à l’école de jour. Les autres vont dans une école du soir.

 TEXTE: JOHANNA HALLIN PHOTO : TOR A MÅRTENS

Une école pour filles et garçons

09.00 Nourrir les oies Fortunata et Youana donnent à manger et à boire aux oies. – Elles mangent de l’herbe, des pelures d’orange et d’autres restes. Nous avons sept oies et elles pondent chacune un œuf par jour, dit Fortuna.

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10.00 Arroser les plantes Sonia, 12 ans et Elisabeth, 11 ans ont planté des graines dans de petits pots. Les plantes poussent et grandissent de jour en jour.

09.30 Nettoyer la cage du cochon d’Inde Les filles ont 14 cochons d’Inde dans une cage du jardin. Mais ce ne sont pas des animaux domestiques avec lesquels on peut jouer. Au Pérou le cochon d’Inde est un met délicat et on le mange. – Mais nous ne mangeons pas nos cochons d’Inde. Ils sont si mignons et on a pitié d’eux, dit Vittoria, 11 ans.

10.15 Laver Trapo Le chien s’appelle Trapo, ce qui veut dire torchon ou déchet. Ce nom lui vient de quand il était chiot et que Josefina a voulu le jeter en croyant qu’il s’agissait d’un déchet sur le sol. Adaluse et Sonia lavent Trapo chaque semaine. Le chien vit dans la cour et aboie quand un étranger essaie d’entrer.

10.30 Lapin câlin Il y a un lapin dans le jardin et Fortuna, 17 ans l’a baptisé Meggi. Le lapin arrive en courant quand elle l’appelle.

– Nous soignons les ani maux et les animaux nous soignent. Beaucoup de filles viennent de la campagne et ont grandi avec des animaux, dit Josefina. C’est important qu’elles aient la possibilité de maintenir ce contact. Qui plus est les animaux domestiques leur font du bien, car les filles qui ont été trahies par les adultes, peuvent se retrouver au contact des animaux. Il s’agit de soins, de confiance et d’amour.

Rosalbina, 14 ans, adore jouer à llajes. Sur www.childrensworld.org tu peux apprendre comment on fait.

11.00 Cercle de discussion chez le psychologue Une ou deux fois par semaine, Elisabeth, 11 ans et les autres filles voient le psychologue de Yanapanakusun. Ils parlent des choses graves qui sont arrivées aux filles, mais aussi de comment elles vont maintenant et du futur. – Nous apprenons à respirer lentement, à parler avec nos camarades, à écouter et à raconter. Beaucoup de gens au Pérou pensent que c’est honteux de parler à un psychologue, mais moi je pense que c’est bien, dit Elisabeth.

12.30 Tricot et jeu Quand les tâches du matin sont terminées, Vittoria, 11 ans, se repose. Tous les dimanches, des filles qui travaillent viennent à la maison pour faire des choses amusantes. Il y a quelques semaines elles ont appris à tricoter. Vittoria est déjà en train de faire sa troisième écharpe. Elle se l’enroule autour du cou et continue à la tricoter.

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13.00

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Bientôt le déjeuner Mariam, 16 ans et Sonia préparent le déjeuner. Toutes les filles déjeunent ensemble, souvent d’une potée aux pommes de terre, maïs et autres légumes.

L’heure des leçons Gracelia, 12 ans et Jeni-Maribel, 9 ans font leurs devoirs à la bibliothèque. Elles vont à l’école le matin, alors quand les autres filles partent pour l’école du soir, elles font leurs devoirs ensemble.

Dans la bibliothèque il y a des puzzles et des bandes dessinées sur les filles qui sont employées de maison.

17.30 Parc de jeux Quand un adulte a le temps de les accompagner, les filles vont au parc de jeux. Il y a des toboggans, des terrains de foot, mais le plus amusant c’est les balançoires.

16.30 Moment de luxe avec DVD Le week-end, après avoir terminé leurs devoirs, les filles peuvent regarder la télé. Ce qu’elles préfèrent ce sont les DVD avec des vidéo musicales. Clorinda a plusieurs DVD avec la chanteuse péruvienne Fresialinda. – Elle est toujours gaie et chante si bien. Et j’aime huayno, c’est de la musique indienne traditionnelle, dit-elle.

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20.30 Dîner Quand toutes les filles sont revenues de l’école du soir, c’est l’heure du dîner. Après le repas, on leur donne une cuillerée de miel. En hiver il fait très froid la nuit et beaucoup s’enrhument. Le miel ça fait du bien et c’est doux pour la gorge.

Écoute et regarde Fresialinda, l’artiste préférée de Clorinda, sur www.childrens world.org!

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18.00 Exercice antitremblement de terre Beaucoup de bâtiments au Pérou ont des cercles marqué d’un S pour les séismes. C’est l’endroit le plus sûr du jardin. C’est là que les filles doivent se rendre en cas de séisme.

22.00 Bonne nuit Elisabeth et Vittoria se brossent les dents en chahutant encore un peu avant que Josefina entre. C’est l’heure d’aller au lit. – Sueña con los angelitos ! Rêve avec les anges ! dit-elle.

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 TEXTE: JOHANNA HALLIN PHOTO : TOR A MÅRTENS

La radio des filles Jeudi matin. L’aiguille des minutes s’approche avec son tic-tac de la demie de huit heures. Les lampes s’allument. L’émission des bonnes commence. – Bienvenues ! Aujourd’hui nous parlerons du droit d’être traitées avec justice et respect, dit Inés Kcorahua Cruz. Quand Inés était petite, elle travaillait comme bonne

et c’est Josefi na qui l’a sauvée. Maintenant elle fait une émission de radio pour informer les autres enfants qui se trouvent dans la même situation où elle se trouvait. Amanda, 14 ans, est aussi au studio, elle est employée de maison et une fidèle auditrice.

– Je sais qu’il y a beaucoup de fi lles un peu partout qui sont en train d’apprendre le travail d’employée de maison, dit Inés, il faut du temps pour apprendre. Même quand on fait une erreur on a droit à la justice et au respect. Quand la maîtresse de maison se fâche, crie et tape, tu crois que c’est facile d’apprendre ? Moi, je ne le crois pas ! – Je ne le crois pas non plus ! dit Amanda dans le

Les droits à la radio « J’écoute toujours l’émission des filles. J’ai une petite radio à piles couleur argent. Ce qui me plaît le plus c’est quand on parle des droits des filles. Je travaille tous les jours, je vends des bonbons, des biscuits et des glaces dans la rue. Maintenant je sais que j’ai le droit d’être bien traitée. Le droit d’aller à l’école du soir. Maintenant que je connais mes droits, je me sens plus forte, plus intelligente et plus sûre. Avant je ne savais jamais quoi dire quand quelqu’un me maltraitait. Maintenant je sais ! Il y a des lois qui protègent les enfants et les travailleurs. J’écoute l’émission avec mes parents, comme ça eux aussi peuvent apprendre les droits de l’enfant. »

micro et sur les ondes. Tout le monde fait des erreurs et on apprend un peu à la fois. Mais pas avec des cris et des coups. La radio des bonnes émet cinq heures par semaine, en espagnol et en quechua. La plupart des fi lles qui sont employées de maison n’ont pas le droit d’écouter la radio. C’est pour cela que l’émission passe le matin, quand les fi lles peuvent écouter en cachette. – Nous savons que vous êtes beaucoup à ne pas avoir le respect que vous méritez, simplement parce que vous êtes soumises, seules et sans défense, dit Inés. – Mais souviens-toi que si tu as besoin d’aide, Yanapanakusun est là pour toi. Note notre adresse et notre numéro de téléphone pour pouvoir nous écrire et nous rendre visite !  Sur www.childrensworld.org tu peux écouter l’émission.

Zaida Ines Canahuri Quispe, 12

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Félicitations ! Aujourd’hui est un jour très spécial à Yanapanakusun. Aujourd’hui tout le monde a son anniversaire !

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’anniversaire est un jour important au Pérou. La plupart des enfants et des adultes le célèbrent par une grande fête avec tourte, ballons, clowns, cadeaux, la piñata et beaucoup de bonnes choses. Mais les fi lles qui travaillent n’ont personne pour organiser le festin. Alors, plutôt qu’un jour de joie, l’anniversaire se transforme en un jour de chagrin où on se sent encore plus seul. Plusieurs filles qui sont chez Josefi na ne connaissent même pas le jour de leur anniversaire. Elles ont perdu contact avec les membres de leur famille et ne savent plus quand et où elles sont nées. C’est pourquoi Josefi na organise une fête pour célébrer l’anniversaire de toutes les filles en même temps. Rebeca vient d’apprendre que son anniversaire c’est le 13 mai. Ça fait bizarre. Elle sait qu’elle a fêté son anniversaire avant, mais elle ne s’en souvient pas. C’était

avant que sa mère tombe malade et meure. – J’avais alors six ans et après ça mon père se soûlait tous les jours, raconte Rebeca. Je sortais tôt le matin et ne rentrais que le soir. Tout dans la maison n’était que cris et bagarres. Rebeca allait marcher sur la montagne avec les moutons et les lamas de la famille. Là elle pouvait pleurer et penser à maman. À la maison, elle se taisait et faisait attention à ne pas irriter papa. Quand elle avait dix ans, son cousin est venu les voir. – Tu dois la laisser aller à l’école comme les autres enfants, a dit le cousin au père de Rebeca. – Non, elle restera à la maison avec moi, a tonné papa. Mais le cousin a vu que Rebeca avait peur et était triste. Tôt le jour suivant, avant que papa se réveille, ils ont fait le long chemin jusqu’à la ville la plus proche et ont pris le bus pour Cusco. 

La liste de Rebeca • Livres d’aventures, de préférence sur les dragons. • Une voiture rouge, pour rendre visite aux gens de mon village. Qu’est-ce qu’ils seraient étonnés ! • Une chambre à moi avec une petite fenêtre, un lit bleu, un lecteur CD et un micro pour chanter.

Rebeca Aguilar Condori, 12 Rêve : D’une chambre tranquille, à elle. Veut être : Chanteuse et écrire des chansons. Admire : Gabatshwane, membre du jury du Prix des Enfants du Monde.

Raconte ton jour spécial ! Célèbres-tu ton anniversaire ou as-tu un autre jour spécial ? Va sur www.childrensworld.org et raconte comment tu célèbres.

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Des princesses

en excursion dans la vallée – Whow! dit Luz Garda en étirant les bras comme un condor, l’oiseau sacré des Incas. Bien qu’elle et les autres filles qui vivent chez Josefina aient toutes grandi dans la campagne autour de Cusco, c’est la première fois qu’elles visitent une ruine inca.

 TEXTE: JOHANNA HALLIN PHOTO : TOR A MÅRTENS

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rès d’un million de touristes venus du monde entier visitent Cusco chaque année. Ils viennent pour voir les fouilles archéologiques, pour marcher sur les sentiers des Incas et pour admirer la culture inca. Josefi na, Luz Garda et les autres filles se promènent le long d’étroits sentiers et d’escaliers. Arrivées à la ville inca de Pisac elles s’asseyent près du Temple du soleil à la forme arrondie. Je sais que beaucoup d’entre vous ont honte parce qu’elles viennent de la campagne, dit Josefi na. Mais regardez autour de vous ! Vos ancêtres ont bâti tout en haut des montagnes et ils étaient rois. Il n’y a pas de quoi avoir honte. Vous êtes des princesses ! Luz Garda et Sonia se regardent en pouffant de rire. On n’a pas vraiment l’impression d’être une princesse quand on a lavé les sous-vêtements de son patron toute la journée. – Je sais, dit Josefi na en riant avec elles. Parfois on a l’impression d’être moins que rien, surtout quand les patrons sont méchants et le travail est dur. C’est alors que c’est important de se souvenir de ses origines. Pisac se trouve dans la val-

lée sacrée des Incas. Le fleuve Urubamba coule à travers la vallée où poussent au moins quinze sortes de maïs. – Pourquoi les Incas habitaient si haut dans la montagne ? demande Luz Garda. – Parce que les montagnes étaient sacrées et que les Incas riches préféraient vivre près de Inti, le dieu du Soleil, raconte Josefi na. Et c’était aussi plus facile de défendre la ville en cas de guerre. – Il y avait Dieu quand le peuple inca vivait ici? demande Elisabeth. – Oui, je crois, dit Josefina. Nous sommes catholiques et croyons en Dieu. Mais les Incas voyaient Dieu dans le

soleil, la terre, les montagnes, les étoiles et l’eau. Certains rites de leur religion sont restés. Par exemple, c’est très important pour nous qui vivons dans les Andes, de respecter la nature. – Est-ce que Cusco existait au temps des Incas ? demande Luz Garda. – Oui, les Incas croyaient que Cusco était le centre de l’univers puisque c’était la capitale de leur royaume. Les fi lles rient de nouveau. – Quelle belle excursion ! s’écrie Luz Garda. Je suis heureuse de connaître les choses dont je peux être fière. 

Un étroit escalier dans la montagne mène les filles à la ville inca de Pisac.

L’Inca Kola est la boisson la plus bue au Pérou.

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Les Incas construisaient des terrasses sur les parois escarpées des montagnes pour y cultiver du maïs, des pommes de terre et des céréales.

Le peuple des rois

Si j’étais un roi inca, je… « … construirais une école seulement pour les filles et ce serait la meilleure école du monde. Avec les meilleurs profs et les plus gentils et tout le monde aurait tous les jours un excellent déjeuner » Graciela Games, 12 « … donnerais à tous les enfants seuls des tas de jouets. Et puis ils seraient libres d’école tous les mercredis pour avoir le temps de jouer avec les nouveaux jouets » Rosalbina Nina Condori, 15

« … construirais un parc seulement pour les enfants ! Il y aurait des toboggans, des balançoires, de grandes bascules et tous les enfants pourraient manger tous les bonbons qu’ils veulent. Le dimanche les enfants se reposeraient, mais le reste de la semaine ils joueraient. Le parc serait ouvert aux riches comme aux pauvres, mais pas aux adultes » Vittoria Carreño, 11 år

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« … ferais en sorte qu’aucun enfant ne soit obligé de travailler ou faire des choses tristes. Tous les enfants devraient pouvoir jouer pendant la journée. Le soir les enfants devraient être avec leur père et leur mère » Sonia Poña Hoyta, 12

« … distribuerais tout mon or, pour que plus personne ne soit pauvre. De cette façon aucun enfant ne devrait travailler ! » Zulma Panique Escolante, 14

• La grandeur des Incas n’a duré que 100 ans, mais pendant ce temps ils régnèrent sur une région qui s’étendait de la Colombie du sud jusqu’au centre du Chili. • Inca signifie roi. • Les Incas n’avaient pas de langue écrite et n’utilisaient pas la roue, mais ils étaient experts dans la construction de maisons en grands blocs de pierre et dans l’acheminement de l’eau depuis les vallées encaissées jusqu’aux sommets des montagnes. • Le Machu Picchu, la ruine inca la plus connue, aussi dans la vallée sacrée, était la résidence d’été du roi. On oublia la belle ville en pierre lorsque les Espagnols envahirent Cusco, mais ses ruines furent retrouvées par un archéologue au début du XXème siècle. • Longtemps, le chemin des Incas fut le seul moyen d’atteindre le Machu Picchu, mais aujourd’hui des milliers de touristes visitent chaque jour l’endroit par train et par bus. • Le Machu Picchu a été déclaré Patrimoine Mondial Culturel par l’UNESCO. 41

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NOMINÉE • Pages 42–66

Agnes Stevens R

Dans le quartier des SDF à Los Angeles, des centaines d’enfants luttent pour survivre parmi le trafic de drogue, la violence et la pauvreté. Ryan, 13 ans est l’un d’eux. Agnes Stevens et son organisation School on Wheels aident Ryan et les autres enfants SDF à réussir leur scolarité et à prendre conscience de leur propre valeur. Il y a un million d’enfants SDF aux États-Unis.

POURQUOI AGNES A-T-ELLE ÉTÉ NOMINÉE ?

gé des salles spéciales pour les enfants avec des ordinateurs, des livres et du matériel pour écrire et dessiner afin d’assurer aux enfants les études ainsi que leur droit à l’enfance.

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ÉTATS UNIS

Los Angeles

Washington D.C.

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Agnes Stevens a été nominée pour son combat de 20 ans en faveur des enfants SDF aux États-Unis. Chaque année Agnes et son organisation School on Wheels aident des milliers d’enfants SDF de 6 à 18 ans. Des centaines de bénévoles deviennent profs supplémentaires et donnent des dizaines de milliers d’heures aux enfants qui vivent dans des refuges, des motels, des voitures ou dans la rue. Les profs supplémentaires sont la sécurité des enfants SDF. Quand les enfants déménagent, la School on Wheels les suit et leur apporte la stabilité dans une existence précaire. Les enfants peuvent maintenir le contact avec la School on Wheels grâce à une ligne téléphonique gratuite. Agnes et la School on Wheels aident les enfants et les parents à changer d’école et à récupérer les documents perdus, comme les notes et les certificats de naissance. Les enfants reçoivent aussi un cartable, l’uniforme scolaire, le matériel scolaire et l’argent pour le bus et le métro. Dans beaucoup de refuges la School on Wheels a aména-

yan descend du bus scolaire et s’achemine vers le quartier le plus sale et le plus malodorant de la zone. Ici, aux coins des rues, on y vend ouvertement de la drogue et les SDF sont assis ou couchés sur le trottoir. Ryan et sa famille se sont beaucoup déplacés, ils ont vécu dans des refuges et dans des hôtels pouilleux. Mais jusqu’à présent ils n’ont jamais été obligés de dormir dehors, comme des dizaines de milliers d’autres ici qui dorment dans des tentes, des cartons ou de vieilles couvertures. En quelques années, Ryan a connu beaucoup de SDF, mais il les salue rarement. Beaucoup sont mentalement

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 TEXTE: CARMILL A FLOYD PHOTO : KIM NAYLOR

Une chambre pour les enfants de la School on Wheels à Downtown Los Angeles.

Agnes en promenade dans le quartier des SDF avec les sœurs Khadijah et Janine ainsi que Ryan et son cousin, qui s’appelle aussi Ryan !

atteints ou drogués et risquent de se fâcher et devenir violents si on les dérange. C’est pourquoi Ryan regarde rarement quelqu’un dans les yeux, c’est plus sûr. Au cours de sa courte promenade, Ryan doit enjamber des gens qui dorment dans la rue, dans des sacs de couchage ou enroulés dans des couvertures. Une fois il a dû se jeter sur le côté quand un homme hargneux a déferlé à toute allure avec son caddie débor-

dant de vieux vêtements et d’objets divers. Ryan est accoutumé à la saleté, aux puanteurs et au chaos. Il n’en a plus peur mais parfois il voit des choses qu’il n’a pas envie de voir. Comme la vieille femme l’autre jour, qui s’est accroupie dans un coin de rue pour uriner. Ou le couple qui se disputait et se battait sur le trottoir et la femme qui soudain a arraché tous ses vêtements et s’est mise à courir toute nue. « Personne ne devrait être obligé de vivre comme ça » pense Ryan. Quand il voit l’enseigne

jaune bien connue éclairer le béton gris, il est content. La School on Wheels – l’École sur Roues – est là avec ses lettres noires et rondes. Les fenêtres ont des couleurs gaies et quand Ryan passe le seuil de la porte il voit Agnes, la fondatrice de l’organisation. Ryan sait qu’elle a plus de 70 ans, mais Agnes parle et plaisante toujours avec les enfants comme si elle avait leur âge. Retraitée, non merci Agnes venait de prendre sa retraite de son travail de professeur quand elle lut un

Ryan et Agnes.

livre qui changea sa vie. Le livre parlait des familles SDF aux États-Unis. Agnes fut choquée d’apprendre que des centaines de milliers d’enfants étaient SDF et que beaucoup d’entre eux n’al-

Saluer avec les mains

Quand les frères Adrian, 11 ans et Daniel, 14 ans, du sud de Los Angeles se saluent, ça peut être long. Ils suivent toute une série de différents serrements de mains avant de sentir qu’ils ont salué comme il faut. Parfois ils refont la même chose quand ils se séparent ! ”What’s up?” ”How’re you doing?”

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Ryan aime aider les enfants plus jeunes qui viennent à la School on Wheels, puisque lui-même a eu tellement de soutien.

laient pas à l’école. – La retraite attendra, se dit-elle. Je vais aider ces enfants SDF dans leur travail scolaire. Agnes commença par offrir son aide dans les refuges et les écoles et rencontra deux frères SDF de 9 et 11 ans, qui voulaient qu’elle

leur apprenne à lire. Agnes se prépara tout le week-end, mais quand elle revint le lundi, les garçons étaient partis. Cela lui fit comprendre encore plus ce qu’était la vie des enfants SDF. Ils ne savent jamais où ils dormiront la nuit suivante. Agnes trouva rapidement de nouveaux

Agnes avec Janine, 9 ans, qui a été SDF la plus grande partie de sa vie.

enfants qui avaient besoin de son aide. Mais elle n’oublia jamais les garçons disparus. Les premières années Agnes travailla seule. Elle chargeait sa voiture de livres, plumes, craies et allait vers les enfants dans les parcs et les refuges partout dans Los Angeles. Elle comprit vite qu’il fallait que

d’autres aident et fonda l’organisation School on Wheels – école sur roues. Aujourd’hui la School on Wheels a grandi. D’un seul prof supplémentaire – Agnes elle-même – elle peut compter sur plusieurs centaines de bénévoles qui aident les enfants SDF à faire leurs devoirs.

Les enfants qui n’existent pas Il y a environ un million d’enfants SDF aux États-Unis dont 200.000 en Californie. – Pourtant, personne ne veut en parler, c’est honteux, dit Agnes. Les enfants SDF sont les plus pauvres parmi les pauvres. Ils grandissent dans des zones sans aires de jeux ou parcs, parmi drogue, gangs, violence et prostitution. Comparés aux autres enfants, ils sont plus souvent fatigués et malades et ont plus souvent faim. Ils se sentent différents et exclus et ils ont honte. Je veux les aider à croire en euxmêmes et leur faire comprendre qu’ils ont de la valeur. 44

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Sait écouter Ryan a reçu l’aide d’Agnes et de la School on Wheels pour changer d’école et chaque semaine il voit aussi son prof supplémentaire. – Elle m’aide à faire mes devoirs et me donne le courage de ne pas lâcher, dit Ryan en se souvenant de la première fois où il est venu à la School on Wheels. – Tout de suite en entrant, j’ai senti que ce serait mon havre de sécurité. Je pouvais m’y concentrer pour étudier. J’ai dit à Agnes que je n’avais pas de cartable et aussitôt j’en ai reçu un ! Elle sait très bien écouter. Quand j’ai un problème, elle m’aide à voir la solution et grâce à elle, j’ai appris à mieux m’aimer. Agnes dit que l’école est un deuxième foyer pour beaucoup d’enfants. Ils y

ont des amis et des adultes avec qui parler et à qui se confier. Un enfant SDF n’a pas perdu une maison, mais deux ! Même s’ils continuent d’aller à l’école, ils ne s’y sentent plus chez eux. Ryan, par exemple, ne dit jamais à personne à l’école qu’il est SDF. – Les enfants n’ont peutêtre pas les moyens de s’acheter un cartable et le matériel scolaire ou alors ils perdent leurs livres dans leurs déplacements continuels, dit Agnes. On les réprimande, mais ils n’osent pas dire la vérité à leurs professeurs. Ils ont honte, se sentent différents et exclus. À la fi n beaucoup quittent l’école. Ryan s’assied devant l’un des ordinateurs pour chercher des informations concernant un projet scolaire

Au début Agnes était seule prof supplémentaire, aujourd’hui elle a des centaines de bénévoles qui l’aident.

sur les avions. Son plus grand rêve est de devenir pilote. – J’adore l’Internet, dit-il. C’est un peu comme le plus grand livre du monde. Ryan aperçoit une petite fi lle qui se bat avec un livre de lecture. Il quitte l’ordinateur pour l’aider à épeler et à prononcer les mots. – Sans la School on Wheels j’aurais eu des difficultés à réussir à l’école, dit Ryan. C’est pour ça que ça me fait plaisir d’apporter mon aide, moi aussi. 

La capitale des SDF Los Angeles est célèbre pour ses étoiles de cinéma et ses belles plages. Mais c’est aussi la capitale des SDF aux États-Unis. Il s’y trouve plus de SDF que nulle part ailleurs. La plupart se trouvent dans le quartier des SDF à Downtown Los Angeles, à un jet de pierre des gratte-ciel où les banques et les grandes compagnies ont leurs bureaux.

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Pourquoi devient-on SDF ?

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Il y a plusieurs raisons mais le plus souvent il s’agit d’économie. L’un des parents ou les deux perdent leur travail et ne peuvent plus payer le loyer. À la fin ils sont expulsés et se retrouvent à la rue. Beaucoup de mères deviennent SDF quand elles quittent l’homme qui les maltraite. Une partie des parents sont SDF parce que drogués ou à cause de problèmes psychologiques. De plus, il y a des milliers d’adolescents fugueurs qui vivent seuls dans la rue.

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Dans le quartier des SDF à Downtown des milliers de personnes vivent dans la rue.

On exige beaucoup des profs supplémentaires Agnes appelle son organisation School on Wheels parce que souvent ses profs parcourent de longues distances. Ils vont là où sont les enfants, dans les écoles, les bibliothèques, les refuges, les motels et les salles des enfants de la School on Wheels. – Nous devons être la sécurité des enfants, dit Agnes. Ils ont été floués trop souvent et doivent savoir qu’ils ne sont pas seuls. Qu’il y a des gens qui croient en eux et ne les oublient pas. Il existe à ce jour environ 400 profs supplémentaires, mais Agnes en veut au moins le double. Pourtant ce n’est pas si facile d’être bénévole pour la School on Wheels. Tous les candidats sont contrôlés avec soin. – Ils doivent remplir un formulaire de demande, laisser leurs empreintes digitales et un extrait de leur casier judiciaire et passer une entrevue. Nous devons être sûrs que nos profs supplémentaires feront du bon travail et que les enfants seront en sécurité.

Que font Agnes et la School on Wheels ? Agnes avec les enfants et ses collaborateurs devant la salle des enfants à Downtown. Chandalea est SDF, elle a reçu un nouveau cartable.

Chandalea reçoit un cartable ! Avant chaque année scolaire la School on Wheels distribue des cartables nouveaux contenant plumes, règle, ciseaux et autres choses utiles. Chandalea, 11 ans, est heureuse de son sac à dos et se réjouit de commencer l’école bientôt. – Moi et ma famille, nous sommes SDF depuis longtemps, dit-elle. C’est très dur, mais nous prenons soin les uns des autres. 46

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• Apportent un soutien scolaire à des milliers d’enfants. Des centaines de profs supplémentaires travaillent bénévolement plus de 30.000 heures par an. • Aménagent des salles spéciales pour enfants dans les refuges, avec ordinateurs, livres et du matériel pour écrire et dessiner. • Donnent chaque année un cartable équipé avec du matériel scolaire à 5.000 enfants. • Donnent aux enfants SDF l’uniforme scolaire si nécessaire. • Ont une ligne téléphonique gratuite où les enfants appellent pour garder le contact et demander de l’aide. • Aident les enfants et leurs parents quand ils sont obligés de changer d’école. • Aident les enfants et leurs parents à récupérer des documents perdus comme les notes scolaires. • Donnent des conseils aux parents sur l’éducation de leurs enfants. • Travaillent dans cinq régions de la Californie du sud dont Los Angeles, Santa Barbara et Ventura. La School on Wheels existe aussi dans les états de l’Indiana et du Massachusetts.

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veut avoir la paix Avant que Ed, 11 ans, soit SDF, il n’avait jamais imaginé qu’un enfant puisse se retrouver à la rue. La nuit où la famille a dormi dans une voiture est, jusqu’à ce jour, la pire de sa vie.

L

e problème commence vraiment le jour où le père d’Ed bat sa mère, Edith. Quand son père va en prison ils doivent vivre avec le salaire de sa mère qui est insuffisant pour la nourriture et le loyer. – Emballez vos affaires, dit un jour maman. Nous devons partir d’ici. – Où est-ce qu’on va aller ? demandent Ed, son petit frère, Leonard et sa grande sœur, Guadalupe. Un instant, maman ne dit rien.

– Je ne sais pas, avoue-telle fi nalement. Garde le masque On les aide à transporter leurs meubles et leurs affaires dans un entrepôt. L’indispensable est empaqueté dans quelques sacs et mallettes qu’ils traînent avec eux dans leurs déplacements chez des amis ou des connaissances. La plupart de ceux qu’ils connaissent vivent déjà à l’étroit. Ils ne peuvent jamais rester plus de

quelques nuits dans le même endroit. Les vacances d’été se terminent bientôt et Ed se fait du souci pour la rentrée scolaire. Naturellement, maman cherche un nouvel appartement moins cher, mais ça paraît impossible. Tous les propriétaires exigent le premier et le dernier loyer d’avance. Il s’agit de plusieurs milliers de dollars, somme que maman n’a jamais en réserve. Elle travaille dans un restaurant à hamburgers et gagne peu. Tout le salaire disparaît dans la nourriture, les vêtements et les tickets de bus. Six mois plus tard ils sont tous désespérés. Souvent ils dorment par terre dans le salon de quelqu’un avec leurs affaires enfouies pêlemêle dans des mallettes et des sacs. C’est un vrai cirque le matin quand tout le monde cherche des vêtements propres en même temps. Encore plus difficile est de se rendre à l’école à partir d’un endroit où l’on ne s’est

 TEXTE: CARMILL A FLOYD PHOTO : KIM NAYLOR

Ed

Ed Korpie, 11 Vit : Au refuge, à Venice. Aime : Le skateboard, le baseball, le football. Lire. Les jeux vidéo. N’aime pas : Qu’on me prenne mes affaires. Adore : Ma famille. Admire : Tony Hawk, skateur. Rêve de : Apprendre à faire un ollie en skateboard. Veut être : Réalisateur de jeux vidéo.

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Papa est sorti de prison et vit en ce moment chez un copain. Il vient souvent au refuge rendre visite à ses enfants.

À Los Angeles presque tout le monde a une voiture mais Ed et sa famille vont partout à pied. Parfois les gens les regardent bizarrement simplement parce qu’ils vont à pied !

jamais trouvé auparavant. Ed est toujours fatigué et inquiet. Il a souvent mal au ventre et à la tête. Il n’a ni le temps ni la paix pour faire ses devoirs, car ils doivent déménager presque tous les soirs. Ed ne dit pas à ses camarades de classe ni aux professeurs qu’il est devenu SDF. Ils pourraient se moquer de lui et le mépriser. Il travaille dur pour que personne ne remarque qu’il y a quelque

chose qui ne va pas, mais parfois c’est presque impossible de garder le masque. Papa ne sait rien Leur père ne sait toujours pas ce qui s’est passé. Il écrit de prison en demandant quand ils iront lui rendre visite. Avant, quand il était en prison, leur mère les emmenait le voir, mais cette fois elle ne veut pas. Elle dit qu’ils n’ont ni le temps ni les

moyens. Ed comprend que maman a décidé de quitter son père pour de bon. Mais comment vont-ils s’en sortir ? À la fin, ils ne savent plus où aller. Maman appelle tous ceux qu’elle connaît et un ami leur propose de dormir dans sa fourgonnette. Ils étendent des couvertures sur le plancher et se blottissent les uns contre les autres dans l’étroit espace de chargement. Cette nuit-là Ed a très

peur et ne peut pas dormir. C’est effrayant d’entendre les bruits extérieurs, mais le pire ce sont toutes les pensées qui lui passent par la tête. C’est donc comme ça qu’il leur faudra vivre le reste de leur vie ? Le jour suivant, maman en a assez. On lui a parlé d’une église qui a des lits pour les familles SDF mais dans un tout autre quartier de la ville, très loin des écoles des

Ed avec sa mère, Edith, son frère Leonard, 9 ans et sa sœur Guadalupe, 15 ans. La mère d’Ed est mexicaine. Son père est né aux États-Unis, mais ses grandsparents maternels ont immigré de Finlande, ce qui fait que Korpie, le nom de famille d’Ed, est finlandais. Le refuge est situé près de la célèbre promenade de Venice Beach. C’est là qu’Ed et Leonard font du skateboard mais ils ne se baignent pas souvent car l’eau est sale.

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enfants. Alors Ed, son frère et sa sœur doivent changer d’école et elle est obligée de chercher un nouveau travail. Avocat et professeur Ils vivent depuis six mois dans une petite pièce dans le refuge de l’église. Ils ont deux lits superposés et une penderie où ils enfoncent toutes leurs affaires. Une fois par semaine, Jessica de la School on Wheels, le prof supplémentaire d’Ed, vient

le voir. La journée elle est avocat divorce, mais ce travail-ci est plus amusant ditelle à Ed. Il aime Jessica parce qu’elle est gentille et elle sait si bien expliquer les problèmes de math difficiles qu’ils en paraissent tout simples. Souvent ils vont potasser à la bibliothèque. C’est agréable de sortir un instant du refuge. – Le pire au refuge ce sont toutes les règles, c’est dur pour les enfants d’avoir si

peu de liberté, dit Ed à Jessica. Nous devons tout le temps aller au culte, sinon ils nous mettent dehors. Notre chambre est très petite, c’est difficile de surveiller toutes ses affaires et de s’entendre. Mais ça fait du bien de savoir où on peut dormir la nuit. De ne pas être dehors dans la rue, dormir dans les voitures ou par terre chez des gens. 

Maman vient de nettoyer la chambre de la famille mais Ed dit qu’il ne faut pas plus d’une demiminute avant que ce soit de nouveau le chaos.

Ed aime lire, surtout les Chroniques de Narnia de C.S. Lewis.

Ed adore le skateboard – Je suis hyper content quand j’apprends de nouveaux tricks. J’essaie d’apprendre à faire un ollie. Je tombe tout le temps et me fais mal mais ça vaut la peine.

Le plat préféré d’Ed est le club sandwich et le menudo mexicain de maman.

Ed et la maison de ses rêves Ed fait ses devoirs avec Jessica, son prof supplémentaire. Chaque fois qu’ils se voient, ils commencent par examiner les écorchures d’Ed. Il se blesse souvent en faisant du skateboard.

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– Une maison verte avec une piscine, une bibliothèque privée et un skatepark. Le rêve c’est une chambre à moi, ce que je n’ai jamais eu. Je mettrais des affiches sur les parois, j’y serais tranquille et je m’occuperais de mes affaires. 49

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Un jour dans le qua Janine Williams, 9 ans, sa grande sœur Khadijah, 16 ans, et leur mère sont SDF depuis six ans. Cette nuit, elles vont essayer de trouver un lit dans un refuge d’urgence, au centre du quartier des SDF de Los Angeles. C’est ici que viennent ceux qui n’ont nulle part où aller.

 TEXTE: CARMILL A FLOYD PHOTO : KIM NAYLOR

17.30 Queues pour dormir en sécurité Janine, sa grande sœur et sa mère se placent en bout de la longue queue pour le refuge Midnight Mission. Il est situé au centre du quartier des SDF et ce soir des centaines de SDF espèrent y trouver un repas et un lit. Cela s’appelle sommeil sûr, car c’est très dangereux la nuit dans les rues de cette zone.

18.00 Le dîner, enfin ! Janine reçoit un plat de ragoût de viande et légumes. – Le goût est meilleur que l’apparence, assure-t-elle.

19.00

05.30 Le réveil-matin de la police À l’aube, alors que Janine dort encore, la police patrouille dehors dans le quartier et réveille les SDF qui dorment dehors. C’est interdit de vivre dans la rue. Certains protestent mais la plupart se lèvent et ramassent leurs affaires.

06.00 Bonjour Il s’agit de se lever à l’heure si on veut avoir le temps de prendre le petit-déjeuner. Le matin tous ceux qui sont de passage au refuge doivent quitter les lieux. Janine et Khadijah iront à l’école tandis que maman cherchera du travail et un autre endroit où dormir la nuit qui vient.

Bonne nuit Les adultes passent la nuit dans de grands dortoirs. Les familles avec enfants s’entassent dans une petite chambre au deuxième étage. Ce soir il n’y a qu’une autre famille. Le père, la mère et trois enfants en bas âge. Ils viennent de se retrouver SDF et c’est leur première nuit dans un refuge. Janine a pitié d’eux. Elle, elle a dormi dans ce refuge plusieurs fois et elle sait comment ça se passe. Les couvertures grises et usées grattent, mais Janine s’endort vite.

10.00 Leçon Depuis qu’elle est SDF, Janine a été obligée plusieurs fois de changer d’école. Par moments elle a manqué plusieurs jours d’école. – C’est difficile de se faire des amis et de suivre les leçons quand on est nouvelle.

07.45 À l’école Janine prend le bus pour l’école. La School on Wheels lui a donné des jetons de bus pour qu’elle ait les moyens d’aller à l’école tous les jours.

15.00 À la School on Wheels Après l’école, Janine se dépêche de revenir dans le quartier des SDF et à la chambre d’enfants de l’école School on Wheels. Tous ces amis SDF s’y rencontrent. – Ceux qui travaillent à la School on Wheels sont gentils et disponibles.

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uartier des SDF 15.30 Le goûter Janine mange un beignet frit au miel avec cannelle et fondant. C’est bon mais ça colle aux doigts.

L’heure de faire la queue Janine et Khadijah vont à la rencontre de maman. Bientôt elles sauront où elles dormiront cette nuit. Agnes fait un bout de chemin avec elles. Elle et les enfants se connaissent depuis des années. Agnes leur donne le numéro de téléphone gratuit de la School on Wheels. – Appelez-nous si vous avez besoin d’aide. Vous savez que votre prof supplémentaire vient à vous où que vous soyez, leur rappelle-t-elle.

16.00 Les devoirs Janine reçoit l’aide de Steve, son prof supplémentaire pour ses devoirs. Il sait si bien expliquer qu’on comprend tout. Il connaît aussi de bonnes blagues.

17.20

17.27 L’homme aux ballons À mi-chemin elles rencontrent Joe, l’homme aux ballons, qui est expert dans l’art de former les ballons. Il fait des fleurs et des lapins pour d’autres enfants SDF qui sont là avec leur prof supplémentaire de la School on Wheels. – S’il vous plaît, faites-moi un cœur, s’il vous plaît, prie Janine.

Avant

17.30 Cœurs Janine fait le dernier bout de chemin avec ses copains de la School on Wheels. Elle tient fortement ses deux cœurs, un rose et un rouge qu’elle mettra, cette nuit, près de son oreiller. Quelle belle fin de journée !

Une demi-coiffure

Après

Un jour Janine a rencontré une femme SDF qui faisait de belles coiffures. Elle a posé des rallonges de cheveux à Janine et les a tressées, mais, le premier jour elle n’a pu faire que la moitié. Le jour suivant, la femme avait disparu et Janine s’est promenée plusieurs jours avec une demi-coiffure. Mais finalement elles se sont retrouvées dans un autre refuge. À présent la coiffure est entière !

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Jarifri, 11 La maison idéale : Une maison bleue avec

une porte noire à Las Vegas, parce que j’aime toutes les lumières qu’il y a là-bas. Il y aura quatre chambres, quatre armoires, deux salles de bains. Aime : Danser, le taekwondo, l’école. Admire : Mon grand frère. Michael Jackson. Elvis Presley.

La maison de nos rêves

Il y a plus d’un million d’enfants sans abri aux États-Unis. Ils vivent dans des refuges, des voitures, des hôtels pouilleux « Moi, mon frère et mes parents vivons dans ou dans la rue. Leur famille a fini à la rue pour diverses une petite chambre de motel. Ici, il y a beau- raisons, mais ils ont tous une chose en commun; ils rêvent coup de SDF. Frank, mon prof supplémend’un foyer à eux où ils seraient heureux et en sécurité. taire de la School on Wheels, vient ici une fois par semaine pour m’aider à faire mes devoirs. Depuis que nous travaillons ensemble j’ai de meilleures notes. Être à l’étroit n’est pas un problème, ça nous permet de nous sentir plus proches les uns des autres. Chaque week-end mon père et moi nous jouons sur la promenade de Venice Beach. Il est clown et moi je danse en habits et chapeau dorés. Je danse depuis que j’ai appris à marcher et je suis ceinture rouge de taekwondo. J’ai commencé les arts martiaux pour pouvoir me défendre. Il y a pas mal de voyous à l’école »

Shatrea Olivera, 12 La maison idéale : Une grande maison rose

avec quatre chambres, une grande cuisine et une arrière-cour avec des balançoires, non, toute une aire de jeux. Je veux une chambre bleue et blanche pour moi. Aime : Jouer. Admire : Maman « Nous sommes SDF depuis que maman a quitté papa parce qu’il était méchant avec elle. Nous avons vécu dans plusieurs endroits. Chez des parents, à l’hôtel et dans une voiture. À un certain moment, on déménageait presque tous les jours. Maintenant nous vivons dans un refuge provisoire. Nous disons ’provisoire’ parce que nous sommes sur le point d’obtenir un appartement à nous. Maman travaille et met de l’argent de côté pour qu’on puisse se débrouiller toutes seules. Ce refuge est assez bien. Il y a une aire de jeux dans la cour et beaucoup d’enfants avec qui jouer. La School on Wheels a aménagé une chambre spéciale pour les enfants avec des livres, de quoi dessiner et des Cesar avec son ordinateurs. C’est petit frère Eric. là que je dessine et je rencontre mon prof supplémentaire »

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La maison idéale : Un palais blanc aux parois blanches

et des planchers en bois luisant, une piscine et un skatepark. J’inviterai tous les jours mes amis avec leur famille à un énorme buffet avec de la nourriture fantastique. J’aurai une télé avec écran géant et toutes les consoles de jeux qui existent. Admire : Mon grand frère, qui m’écoute quand j’ai besoin de parler à quelqu’un. Aime : Le skateboard, nager, la pizza et la glace, lire. « Nous sommes SDF depuis plusieurs années. Le pire ce sont tous ces va- et-vient. Nous devons traîner toutes nos affaires dans les bus. On perd souvent quelque chose. J’ai perdu des tas de mes choses préférées dont j’ai vraiment besoin. Ça me rend triste et ça m’énerve. Vivre au refuge ça va parce qu’il y a beaucoup d’enfants. Mais les règles sont trop sévères. Les enfants n’ont pas de liberté et doivent tout le temps se tenir tranquilles. J’aime la School on Wheels parce qu’ils m’ont tellement aidé. Parfois je perds le contact avec mes profs supplémentaires quand nous déménageons, mais on se retrouve toujours »

Matthew, 12 La maison idéale : Une grande maison avec une énorme télé et un skatepark derrière la maison. Admire : Le skateur, Dustin Dollin. Aime : Le skateboard, les jeux télé.

« Le pire quand on est SDF c’est qu’on doit tout le temps changer d’école. Je suis allé dans trois écoles en une année. Je suis toujours nerveux quand je change d’école, c’est dur de devoir tout le temps s’intégrer et se faire de nouveaux amis. En ce moment je vis dans un refuge avec ma mère, deux sœurs et deux frères. J’ai un très bon prof supplémentaire de la School on Wheels. J’espère qu’elle pourra continuer à m’aider même si on redéménage. Nous avons vécu dans différents refuges et dans des hôtels pouilleux et jusqu’ici cet endroit est le mieux. Notre refuge précédent se trouvait dans une zone difficile avec un tas de gangs violents. Ils tiraient toute la nuit. Mais mes copains de là-bas me manquent. Mon rêve pour le futur c’est de mettre fin à toute la violence et de devenir skateur professionnel ou policier ».

 TEXTE: CARMILL A FLOYD PHOTO : KIM NAYLOR

Cesar Hurtado, 12

La famille de Cesar.

Kibsaim Itsui Gallegos-Sierra, 8 La maison idéale : Une maison rose à rayures blanches. Ma chambre aura des parois roses avec des fleurs rouges. La maison se trouvera sur la plage et aura un grand jardin avec toboggan et piscine. Admire : Mon prof supplémentaire. Aime : Les jeux vidéo, le rock ring, jouer à cache-cache et à chat.

n .

« Je crois que j’ai toujours été SDF. Ma mère, moi, ma sœur et mon petit frère, nous nous déplaçons. Nous avons vécu dans des refuges à Los Angeles. Des fois on va au Mexique. Le pire quand on vit dans un refuge c’est qu’on doit se lever si tôt. Quand nous sommes à Los Angeles je vais à la School on Wheels presque tous les jours. Crystal, mon prof supplémentaire, fait les devoirs avec moi et m’emmène en excursion. Je veux aussi être prof quand je serai grande. Je veux apprendre à nager, mais ça a l’air difficile. Je ne suis jamais allée à la mer, mais j’ai entendu dire que c’est très beau »

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 TEXTE: CARMILL A FLOYD PHOTO : KIM NAYLOR

Rosemary Oliva, le prof supplémentaire de Brianna l’aide à comprendre un problème épineux.

Brianna veut aider les SDF q Il est tard le soir quand Brianna, 11 ans, va avec sa mère et son grand frère Adrian, réserver une chambre dans un motel miteux. Les deux frères aînés se cachent au coin de la rue. Cinq personnes n’ont pas le droit d’occuper une seule chambre mais leur mère n’a pas les moyens d’en louer deux. Si on les découvre, c’est la rue, de nouveau.

Q

uand la voie est libre, maman fait entrer Ryan, 12 ans et Daniel, 14 ans. Une fois dans la chambre, ils sont tous soulagés, ils sont à l’abri un soir de plus. Depuis que Melissa, leur mère a quitté le père des enfants à cause de sa violence, il y a quelques semaines, ils ont passé d’un motel à l’autre de la zone la plus pau-

vre et la plus dangereuse du sud de Los Angeles. La famille ne peut rester trop longtemps au même endroit, car le personnel du motel fi nirait par remarquer qu’ils sont trop dans la même chambre et les jetterait dehors. Mais maman n’a presque plus d’argent. Où

vont-ils aller ensuite ? Maman cherche de l’aide dans l’annuaire du téléphone et trouve le numéro de divers refuges pour SDF. Elle et les enfants ont de la peine à s’accepter comme SDF. Un SDF c’est un homme sale en haillons qui dort dans des cartons, non ? Maman commence quand même à téléphoner et les enfants écoutent. Il se trouve qu’une partie des refuges accueillent les familles. – Combien d’enfants avezvous, demande l’homme du refuge. Ils ont quel âge ? Quand il entend que

Daniel, l’aîné des garçons de Melissa, a 14 ans, c’est un non sans appel. – Il doit vivre seul dans la section des hommes adultes. – Mais il n’a que 14 ans, c’est un enfant, dit Melissa. – Ce sont les règles, dit l’homme au refuge. Nous ne laissons jamais les garçons adolescents avec les familles. Ça peut être dangereux. Maman raccroche et continue de téléphoner, mais c’est désespérant. À Los Angeles beaucoup d’adolescents font, déjà à 12 ans,

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F quand elle sera grande partie de gangs violents. Dans les refuges on a peur que ces jeunes garçons usent de violence envers les autres enfants. Mais maman ne renonce pas. Elle insiste, prie et supplie et fi nalement elle trouve un refuge qui accepte toute la famille.

Brianna Audinett, 11 Vit : Dans le sud de Los Angeles. Aime : Les chaussures, faire du théâtre, lire, écrire des histoires. N’aime pas : S’ennuyer. Heureuse : Quand je suis à la School on Wheels. Admire : Maman. Veut être : Médecin ou star de cinéma.

Tais-toi ! Le jour suivant, ils prennent le bus pour le quartier des SDF dans le Downtown Los Angeles. Le refuge ressemble à une prison, une grande bâtisse grise en béton. Brianna trouve que le quartier est horrible. C’est sale et plein d’ordures. Les gens crient, agitent les bras, boivent et sont étendus comme morts sur les trottoirs. Brianna remarque soudain qu’un vieil homme la regarde bizarrement. Sa mère le

Brianna n’aime pas le quartier des SDF, c’est sale, plein d’ordures et parfois dangereux.

voit aussi. À la fi n elle lui dit d’arrêter. Il s’éloigne un peu mais continue de la fi xer. – Ne t’en fais pas, maman dit Brianna plus tard. Je sais me défendre. Brianna et sa famille restent six mois dans le refuge. On leur a donné une place dans un dortoir avec lits superposés dans la section famille. Il y a beaucoup d’autres mères avec leurs enfants et Brianna se fait vite des copains. Ce qu’il y a de bien avec le refuge c’est de savoir qu’on a un endroit pour dormir, pense Brianna. Les désavantages, ce sont les rues à l’extérieur et toutes ces bousculades et le brouhaha du dortoir. Les enfants crient, pleurent et les sirènes des ambulances et des voitures de police hurlent à intervalles réguliers. Ryan qui est 55

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Brianna

Un jour une équipe de cinéma arrive à la School on Wheels. Ils vont tourner un film. Brianna et ses amis écriront le scénario et joueront dans le film.

D

Brianna avec sa famille : Daniel, Ryan, Adrian, Brianna et Melissa, leur mère.

 TEXTE: CARMILL A FLOYD PHOTO : KIM NAYLOR

asthmatique se sent plus mal au refuge et tousse presque continuellement. Ce n’est pas possible non plus de jouer comme d’habitude. – Tais-toi, tiens-toi tranquille, voilà ce que les enfants entendent tout le temps. – Ils agissent comme s’ils ne savaient pas ce que le mot « amusant » signifie, se plaint Brianna à sa mère. – On ne va pas rester ici pour toujours, promet-elle. La School on Wheels est le salut En face du refuge, Brianna trouve son salut; la salle pour enfants de la School on Wheels. Brianna y va tous les jours après l’école. – J’adore la School on Wheels. Ils s’occupent de nous et nous protègent, explique-t-elle à sa mère. Si un importun dans la rue nous fait des histoires, on nous aide. On nous a donné un numéro gratuit que l’on peut appeler n’importe quand si l’on a besoin d’aide. Brianna et ses frères et sœurs reçoivent un cartable

neuf et un prof supplémentaire chacun pour l’aide aux devoirs. De plus on aide leur mère quand les enfants doivent changer d’école. Beaucoup de papiers et de documents importants ont disparu quand ils étaient SDF mais la School on Wheels leur en fournit de nouveaux. Le plus important c’est que maman sait que ses enfants sont en sécurité pendant qu’elle est au travail. – Sans vous, nous ne nous en serions pas sortis, dit souvent maman à la School on Wheels. Un jour on annonce à la famille qu’on va les aider à emménager dans un appartement à eux. C’est irréel, mais fantastique. Brianna est hyper heureuse de quitter le refuge, mais elle pense revenir dans le quartier des SDF plus tard. – Je serai médecin quand je serai grande et j’aiderai les malades, surtout les SDF. Ils n’ont ni argent ni assurance maladie mais je vais quand même les aider. 

Brianna en plein rôle, dans le costume de Ruby.

S

ce il e n

! Ca

ans le fi lm, je vais jouer le rôle de Ruby, une des héroïnes, explique Brianna. Elle et son amie Janine, qui interprète la grande héroïne Pink Ice, forment un team. – Nous sauvons des gens et nous battons contre des brigands, dit Janine, qui à la fi n du fi lm essaie de transformer tout chose sur terre en une mer de diamants roses. Elles ont écrit le scénario ellesmêmes avec leurs amis SDF de la School on Wheels. L’équipe du fi lm vient de l’organisation Hollywood Heart. La journée, ils travaillent sur des productions réelles à Hollywood, mais pendant leur temps libre, ils veulent faire quelque chose pour aider les enfants en situation difficile. Pendant trois jours, la School on Wheels se transforme en lieu de tournage. Les enfants écrivent le scénario, construisent les coulisses, confectionnent les accessoires et les costumes. En dernier, ils tournent le fi lm et quand il est monté, ils assistent au gala de la première. – C’est parmi ce que j’ai fait de plus amusant, dit Brianna. Si je ne peux pas devenir médecin je serai peut-être étoile de cinéma. 

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devient star de cinéma Hollywood Heart vient tourner à la School on Wheels. Les enfants SDF sont les stars du jour.

Khadidjah, 16 ans, fait une pause dans sa demande d’inscription au lycée pour jouer dans le film.

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Avant le tournage tous les enfants doivent se faire maquiller et mettre leur costume. Salmai, 7 ans, a les cheveux argentés et le symbole du dollar autour du cou.

Ryan Audinett, 13 ans, joue le rôle du détective, avec les menottes toutes prêtes.

Ryan Wilson, 13 ans, montre sa meilleure pose de star avec une mitraillette en plastique.

Les super héroïnes Pink Ice (Janine) et Ruby (Brianna) se préparent pour leur scène suivante.

Derrière le masque de Red Devis se cache Ryan McNeil, 9 ans.

Adrian Audinett, 12 ans, aime réaliser un film mais au fond il veut être architecte.

D ONNÉES SUR LE CINÉMA Los Angeles est appelée la capitale du cinéma et le quartier de Hollywood est célèbre dans le monde entier. Déjà en 1910 on y a fait le premier film hollywoodien. Il s’appelait ‘In Old California’ et c’était un film muet, un film sans son. Le premier film parlant s’appelait ’The Jazz Singer’ et est sorti en 1927. Au début les compagnies de ciné faisaient des versions étrangères des films parlants américains pour que même les personnes qui ne parlaient pas anglais puissent les voir. On tournait une autre version du film avec par exemple des acteurs français ou espagnols. Un peu plus tard on s’est rendu compte que c’était plus économique et plus facile de doubler ou de sous-titrer les films dans les différentes langues. Quand de plus en plus de gens ont eu la télé, dans les années 50, beaucoup ont cru que le cinéma mourrait. Mais ça n’a pas été le cas. De nos jours, les grandes maisons de productions à Los Angeles sortent environ 60 films par année et l’industrie du cinéma fait des milliards de dollars de chiffre d’affaires.

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Nick avec Frank, son père et Michelle, sa mère.

Nick est un héros À sept ans, Nick habitait dans un immeuble qui était un repaire notoire de trafiquants de drogue et de drogués. Un soir la police a fait une descente.

Nick Barger, 10 Vit : Dans un motel à Los Angeles. Aime : Le skateboard, dessiner, les jeux télé, lire. N’aime pas : La drogue. Être traité comme un petit garçon. Triste : Quand mes amis déménagent. Adore : Être avec ma famille. Admire : Maman et papa. Laura, ma prof sup. Rêve de : Une maison à eux. Veut être : Écrivain.

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ans toute la maison, dans chaque appartement, tout le monde s’occupait de drogue. Des gens allaient et venaient chez Nick et souvent quelqu’un gisait et dormait sur le canapé ou par terre. Dans l’appartement du dessous il y avait un gang qui vendait de la drogue 24 heures sur 24. Les parents de Nick, Michelle et Frank, n’en vendaient pas mais étaient presque toujours drogués. Ce qui les rendait différents, pensait Nick. Parfois ils étaient là couchés ou assis le regard dans le vide. Parfois,

quand ils se réveillaient de leur léthargie, ils étaient très malheureux. Nick aimait ses parents mais ils étaient trop malades et trop absents à cause de la drogue pour pouvoir vraiment être mère et père. Nick devait se prendre en charge. Dans une famille d’accueil Un soir tard, Nick s’est réveillé en entendant des appels et des cris à l’extérieur. Les gens couraient dans les corridors, peut-être pour s’enfuir ou pour jeter la drogue dans les toilettes. Un instant après, la police est

entrée en trombe dans l’appartement de Nick en criant contre ses parents. Les policiers avaient des gilets noirs et des armes. La mère et le père de Nick avaient l’air très effrayés. Puis un policier a aperçu Nick. – Tu ne peux pas rester ici, a dit le policier. Nick pleurait et disait qu’il voulait rester avec ses parents mais le policier a téléphoné à un assistant social qui est arrivé et l’a emmené. Nick ne savait pas ce qui allait arriver à ses parents. Lui-même a été placé dans une famille d’accueil, une famille qui est payée pour s’occuper des enfants qui ne peuvent pas vivre chez leurs propres parents.

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A été battu Nick a eu son huitième anniversaire dans la famille d’accueil, mais personne ne semblait s’en soucier. La famille avait beaucoup d’enfants, les siens et d’autres enfants placés. Ils étaient plus âgés que Nick et le maltraitaient. Ils lui disaient des méchancetés et le battaient. Nick essayait de se défendre, mais ils étaient plus grands et plus forts. Les parents nourriciers ne faisaient rien pour l’aider. Quelque temps après, la mère de Nick a été admise dans un centre de réhabilitation pour toxicomanes et Nick a pu lui rendre visite. Ils ont pleuré en se revoyant et sa mère lui a demandé pardon. Ils plaisantaient et riaient quand maman a découvert des bleus sur les bras de Nick.

– C’est ma famille d’accueil, ils me battent, a dit Nick. La mère de Nick s’est plainte aux assistants sociaux qui avaient choisi la famille d’accueil. Mais les parents nourriciers ont prétendu que Nick mentait. Il a dû tomber. Ou alors c’était la mère de Nick qui l’avait battu. Ceux qui décidaient ont cru les parents nourriciers et Nick a dû retourner chez eux. Alors les choses ont empiré. Tout le monde était fâché parce qu’il avait mouchardé et on le tabassait encore plus. Mais à

La chambre du motel où Nick et ses parents vivent est très étroite.

ce moment-là la mère de Nick n’avait pas touché à la drogue depuis longtemps et pouvait entreprendre les démarches pour récupérer Nick défi nitivement. Nick a été convoqué au tribunal, mais la première fois qu’il a vu le juge il n’a rien osé dire de la maltraitance. Les parents nourriciers l’avaient menacé. – Ferme ta gueule ou dis que c’est ta mère qui te bat, ont-ils dit à Nick. Sinon...

se retenir et a dit la vérité. Le juge a abattu le maillet sur la table en disant : – Tu iras vivre avec ta mère. Nick a pu aller vivre dans le centre de réhabilitation où sa mère se battait pour se libérer complètement de la drogue. Son père vivait dans un autre centre de réhabilitation pour hommes. Nick et sa mère partageaient la chambre avec deux autres mères et leurs cinq enfants. C’était serré mais Nick s’est vite fait de nouveaux amis et

Chez maman Finalement, la troisième fois au tribunal, Nick n’a pas pu

L’attrape-rêves de Nick est placé au-dessus du lit pour attraper tous les horribles cauchemars avant qu’ils perturbent le sommeil nocturne.

 TEXTE: CARMILL A FLOYD PHOTO : KIM NAYLOR

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Mon institutrice supplémentaire La prof supplémentaire de Nick de la School on Wheels s’appelle Laura. – Elle est mon amie, mon prof et ma grande sœur. Elle m’aide à faire mes devoirs et a énormément de patience. Laura m’a aussi emmené voir un match de base-ball et au ciné.

Sur la paroi, Nick, maman et papa ont chacun leur calendrier quotidien où on reçoit un point négatif si l’on fait quelque chose de mal et un point positif si l’on fait quelque chose de bien – Ça nous aide à être positifs, dit Nick.

ça se passait bien pour maman. Elle n’a pas seulement appris à se libérer de la drogue, elle a aussi appris à payer les factures et à s’occuper de son enfant. À vivre sans drogues, tout simplement. De nouveau ensemble Aujourd’hui les parents de Nick sont sans drogues depuis trois ans. Ils ont pu quitter le centre de réhabilitation mais n’ont pas trouvé Nick n’a pas le droit d’emmener des copains au motel. C’est fermé à tous ceux qui ne vivent pas là.

d’endroit pour vivre. – La maison de mes rêves est un appartement en attique au 42ème étage, dit Nick. Ma chambre sera gothique, avec des parois et des meubles noirs et un éclairage au néon bleu et des chauves-souris en plastique au plafond. Quoique fi nalement ça n’a pas d’importance. Ça m’est égal si nous vivons dans des cartons, pourvu que nous soyons ensemble.

Puisque Nick et ses parents sont SDF, ils sont obligés de vivre dans un motel avec beaucoup d’autres SDF. Ils paient un mois à la fois mais ils savent qu’on peut les expulser à tout moment. Nick a eu beaucoup d’amis SDF qui ont disparu du motel. – C’est presque impossible d’avoir le temps de se faire et de garder un ami de cœur, dit-il à ses parents. Le soir, avant de s’endor-

mir, Nick pense à tout ce qui lui est arrivé. – Je vais écrire un livre sur ma vie, parce que je veux raconter aux gens ce que j’ai vécu. J’ai survécu à tant de choses pendant que j’attendais de revenir à la maison chez mes parents. – Tu es notre héros, Nick, disent maman et papa. Sans toi, on ne s’en serait jamais sortis. 

L’ami des araignées Maman s’est fait faire un tatouage qui représente une araignée parce que Nick aime les araignées. – Une fois on a vu une araignée sur la paroi de la classe. Tous les enfants criaient et voulaient la tuer mais je me suis mis devant l’araignée et j’ai crié que personne ne devait la toucher. Le prof a dit : « Écoutez Nick, il a raison » J’ai fait sortir l’araignée par la fenêtre.

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skateboard Dès qu’il peut Nick prend son skateboard et s’entraîne à de nouveaux tricks dans la rue, devant le motel. Le skateboard est un des sports les plus populaires des États-Unis. On dit qu’il a été inventé par un surfeur qui s’ennuyant, a monté des roues sur une planche de surf et a « surfé » sur l’asphalte.

 TEXTE: CARMILL A FLOYD, JOHANNA HALLIN PHOTO : KIM NAYLOR

Nick adore le Qu’est-ce qu’un skateboard ?

La planche – a souvent un motif en dessous qui s’efface quand on l’utilise. Le grip – pour l’adhérence sur le dessus de la planche. Le tail – extrémité arrière de la planche Le nose – extrémité avant de la planche La roue – quatre roues Les axes – deux axes maintiennent les quatre roues

Les tricks les plus classiques Le ollie – Une figure de base qui est le point de départ de beaucoup d’autres tricks, un saut sur du plat sans les mains. Le nollie – Comme le ollie mais à la place de sauter depuis la partie arrière de la planche « le tail » on saute depuis la partie avant, « le nose » Le Kickflip – En sautant, on fait vriller la planche en une rotation complète autour de son axe longitudinal. Le 180 – Une demi-rotation autour de son axe. Le 360 – Une rotation complète autour de son axe. Le 900 – Deux rotations et demi, s’effectue sur vert ramp. Le grind – Glisser sur les axes. Le 50-50 – Un grind sur les deux axes. Le Five-0 – Un grind sur l’un des axes. Le Boardslide – Glisser directement sur la base avec la planche. Le Manual – Une figure d’équilibre sur deux roues en avant ou en arrière.

VOICI COMMENT EXÉCUTER UN OLLIE :

1. Poser le pied arrière tout à l’arrière du tail et le pied avant au milieu de la planche.

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2. Se ramasser sur soi-même et plier les genoux

3. Sauter en faisant en sorte que le tail claque contre le sol pour permettre à la planche de s’orienter vers le haut.

4. En sautant, 5. Retirer les faire glisser le jambes pour pied avant vers s’élever plus. l’avant. Ce qui permet à la planche de s’élever et de s’équilibrer.

6. Redresser les jambes et recentrer le poids du corps.

7. Atterrir en assouplissant les genoux. Continuer à rouler. 61

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La tante de Marlen est sa « mère »

C’est très fréquent chez les Mexicains de Los Angeles d’avoir son nom en lettres d’or autour du cou. Ou le nom de quelqu’un qu’on aime bien. Le bijou avec le nom de Marlen est un cadeau de maman.  TEXTE: CARMILL A FLOYD PHOTO : KIM NAYLOR

Quand la mère de Marlen a découvert qu’elle était séropositive et n’avait plus la force de travailler, elle a perdu son appartement. L’assistante sociale lui a dit: « Va dans un refuge pour SDF malades du vih-sida, sinon on t’enlève ta fille ».

M

Marlen appelle « maman » sa tante Angelina, parce qu’elle s’est occupée d’elle et l’a aimée comme une vraie mère.

La garde-robe de Marlen Marlen Contreras, 13 Vit : Dans un refuge pour malades du vih-sida. Aime : Le skateboard, la musique, dessiner, l’école. N’aime pas : Les gens méchants. Est triste : Quand maman est malade. Adore : Maman. Voudrait : Un petit chien, malheureusement on ne peut pas avoir d’animaux dans le refuge. Veut être : Infirmière ou médecin.

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arlen et sa mère ne voulaient pas aller vivre dans le refuge. – Nous avions très peur, raconte Marlen. Nous ne savions presque rien sur le sida. Maman croyait que moi aussi je tomberais malade si nous vivions avec d’autres personnes contaminées. Nous y sommes maintenant depuis plusieurs années. Je m’y plais bien et j’ai appris un tas de choses sur la maladie, comme par exemple que l’on peut survivre longtemps si l’on prend les médicaments et si on se soigne.

Marlen est née au Mexique mais est arrivée aux États-Unis quand elle avait deux semaines. – Celle que j’appelle ma mère est en fait ma tante. Je n’ai jamais connu mon père et ma mère biologique ne pouvait pas s’occuper de moi. Elle buvait beaucoup et est allée en prison. Ma tante Angelina m’a emmenée en Amérique pour que j’aie une chance dans la vie. Je l’appelle maman, parce qu’elle s’est toujours occupée de moi comme une mère.

Se fait du souci pour maman – Quand j’étais petite elle Les plus beaux sneakers de vivait avec mon beau-père Marlen sont des Superstars, ou des Shelltoes, de face ils que j’aimais beaucoup. Puis ressemblent à un coquillage. ils se sont séparés et maman a rencontré un autre homme Le chèque-cadeau pour qui la battait. Un jour mon acheter l’uniforme scolaire beau-père est venu à la maique les enfants reçoivent son pour me voir. L’homme de la School on Wheels.

Marlen reçoit un nouvel uniforme scolaire de la School on Wheels une fois par année et plus souvent, si nécessaire. – À l’école le must ce sont les vêtements de marque. Il est dangereux de porter certains vêtements et certaines couleurs, car les gens peuvent croire qu’on appartient à un gang particulier. C’est plus simple de porter l’uniforme scolaire, pull et pantalon bleus.

– C’est mon jean préféré. Il est pratique pour sauter et danser. Parfois je suis très en colère et frustrée. Alors, ça me fait du bien d’écouter de la musique, de sauter dans tous les sens et de danser comme une dingue. La musique me rend heureuse. Ce que je préfère c’est le hip-hop et le rock espagnol. – J’aime la gym à l’école mais mon sport préféré est le skateboard.

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ne l’a pas laissé entrer. J’ai vu mon beau-père à travers la fenêtre, j’ai pleuré, tapé, appelé mais il ne m’a pas entendue et n’est jamais revenu. L’homme était de pire en pire, il battait et menaçait ma mère. Finalement la police est venue le chercher. Puis maman s’est aperçue qu’elle était séropositive. La mère de Marlen se porte assez bien, mais parfois elle doit être hospitalisée. – Je suis alors très inquiète, dit Marlen. À part Marlen il n’y a que trois jeunes enfants au refuge. – Une amie de mon âge est allée dans un autre refuge. Nous étions les meilleures amies du monde et nous pouvions parler de tout. Elle me manque. Marlen ne doit dire à personne où elle vit, car beaucoup ont encore des préjugés sur le sida. Une fois une camarade de classe a découvert où Marlen habitait. – Elle a dit à tout le monde à l’école que je vivais dans un foyer pour malades du sida et que tout le monde devait se tenir à l’écart de moi. « Ne parle pas à Marlen » disait-elle. « Ne la laisse pas s’asseoir à côté de nous. Elle peut t’infecter toi et ta famille » Je suis allée me plaindre au directeur. À la fi n j’ai menacé d’envoyer la police chez elle. Elle a eu peur et a arrêté. 

Michael est SDF depuis que sa mère a le cancer Quand la mère de Michael a attrapé le cancer des poumons et est tombée dans le coma, elle a perdu son travail et leur belle maison au bord de la mer.

Michael et sa mère

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a mère de Michael est restée plusieurs mois dans le coma, à l’hôpital. Michael qui, à ce moment-là avait 14 ans, vivait chez son meilleur ami de l’équipe de foot. Une semaine sur deux Michael vivait à l’hôpital avec sa mère. – C’était dur. J’étais obligé d’être l’adulte et maman était devenue comme un enfant dont je devais m’occuper. Quand maman n’a plus eu d’argent, on l’a transférée dans un hôpital moins bon où le personnel était surmené et stressé. – Ils me traitent comme un chien, pleurait maman. J’ai affreusement mal mais on ne me donne pas d’analgésiques, parce que l’hôpital doit faire des économies.

La robe d’examens – Cette robe je la portais aux promotions quand j’ai terminé l’école primaire. C’est ma mère qui me l’a donnée et j’aime la couleur et le modèle.

Quand maman enfi n a pu rentrer, ils n’avaient nulle part où aller. Finalement, ils se sont installés dans un refuge pour SDF. À l’école, Michael n’a rien dit de ce qui s’était passé. Il avait peur que les gens le méprisent. Les notes ont baissé et il a failli perdre sa place dans l’équipe de foot.

Michael veut être joueur de foot professionnel.

– Grâce à School on Wheels j’ai eu un prof supplémentaire, Rafael. Avec son aide, j’ai attrapé mon retard et réussi le travail scolaire. Nous nous voyons encore une fois par semaine. Mon rêve c’est de devenir joueur de foot professionnel ou pompier. 

Michael adore jouer au football américain. – Le jeu m’a bien appris à collaborer et à ne pas être égocentrique. Tout le monde est important dans une équipe. Nous sommes seulement aussi bons que notre maillon le plus faible. Le prix de football de Michael.

C’est cher d’être malade Près de 50 millions d’Américains n’ont pas d’assurance maladie et sont très frappés quand ils doivent payer des frais hospitaliers vertigineux. Les États Unis sont parmi les derniers pays dans le classement de l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé) concernant le fonctionnement du système de santé.

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Les enfants ont la même valeur Sierra se réveille en sentant que son père lui secoue l’épaule. Il n’est que cinq heures et demie du matin, mais si elle ne se lève pas maintenant, il y aura de longues queues pour les douches. ierra se glisse jusqu’aux douches situées dans le corridor et se tient sous l’eau chaude à moitié endormie. Enveloppée dans un linge, elle retourne en sautillant dans la chambre et plonge tout droit dans le lit pour dormir encore une heure avant le petit-déjeuner. À huit heures, tout le monde doit quitter les locaux. On doit emporter les objets de valeur car on ne peut pas fermer les portes des chambres à clef. Personne n’a le droit de revenir avant tard dans l’après-midi. Papa va au travail et Sierra à l’école. – N’oublie pas que nous devons répéter ce soir pour le prochain pow-wow, dit papa. – D’accord, répond Sierra.

Elle et son père Big Bear sont Hunkpapa, des Indiens Sioux. Sierra danse et son père joue du tambour. Un pow-wow est une fête où les Indiens se rencontrent et parlent, dansent, chantent et jouent ensemble. Sierra aime danser les danses traditionnelles, surtout la Danse-desbeaux-châles que seulement les femmes et les fi lles dansent. – On tourne sur soi-même et on virevolte avec de beaux châles riches en couleurs à tel point qu’on ressemble presque à un papillon, explique Sierra. – Quand je danse j’oublie mes problèmes. Sierra est fière d’être indienne. – Dans notre culture les enfants ont la même valeur que les adultes. Nous som-

Sierra avec son père Big Bear. Elle a aussi un nom indien qui signifie Cellequi-marcheavec-l’orage.

mes présents lors de conseils et notre voix compte. C’est bien. Dans l’école de Sierra, quelques enfants ont appris qu’elle vivait dans un refuge. – Certains sont méchants et disent « Je ne l’aime pas, elle est SDF. Elle est pauvre » Je n’ai que trois copains à l’école. Les gens veulent seulement être avec ceux qui ont la même couleur de peau qu’eux. C’est déprimant d’être maltraitée parce qu’on est différent. 

 TEXTE: CARMILL A FLOYD PHOTO : KIM NAYLOR

Sierra Longfeather, 11 Vit : Dans un refuge, Santa Barbara. Aime : Le tambour, danser, chanter. Triste : Quand les adultes ne me respectent pas. Adore : Papa. Admire : Martin Luther King.

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Sierra veut être Moto styliste, artiste, policier, globe-trotter, danseuse, ecrivain présidente

Le tambour de papa est en bois et recouvert de peau.

Les chambres dans les refuges sont étroites.

Sierra a reçu le collier de la part de son père. Il est en argent et en turquoises.

Les Indiens étaient là avant Quand les Européens sont arrivés en Amérique du Nord il y avait environ cinq millions d’habitants, ceux qu’on appelle aujourd’hui les « Indiens » Il y avait alors des milliers de groupes d’Indiens et plusieurs centaines de langues et de dialectes mais aujourd’hui il ne reste que deux millions – J’admire Martin Luther d’Indiens environ aux États-Unis et un King parce qu’il s’est battu million au Canada. Beaucoup d’Inen faveur de toutes les diens ont été tués par les Européens races, pas seulement la mais la plupart sont morts de malasienne, aussi pour nous les dies, de faim ou d’autres difficultés Indiens. C’est triste qu’il soit causées par l’intrusion des blancs. mort à cause de ses idées. Mais aujourd’hui encore les Aujourd’hui il s’agit du groupe le gens sont discriminés. plus pauvre des États-Unis.

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Kattranece avait neuf ans, elle venait de faire des courses avec maman quand elles ont entendu un coup de feu. Il leur a fallu quelques secondes avant de réaliser que quelqu’un tirait sur elles.

Kattranece

a été blessée par balle

D

ans la voiture, vite, crie maman. Kattranece et ses petites sœurs se jettent sur la banquette arrière et maman appuie sur l’accélérateur. Les coups proviennent d’une autre voiture qui s’est mise à les poursuivre sur l’autoroute et continue de tirer. Soudain Kattranece ressent une douleur brûlante dans la poitrine. – Maman, ça brûle ! Sa mère comprend que Kattranece a été touchée, mais elle n’ose pas s’arrêter. Finalement, elle sort et s’engage dans une rue où il y a plein de gens. La police arrive et les poursuivants abandonnent. Blessée au poumon Kattranece a une blessure au poumon et risque de mourir. Elle reste trois mois à l’hôpital et on l’opère trois fois avant que les médecins réussissent à extirper la balle. Plus tard elle est témoin au tribunal contre l’un des hommes qui ont tiré. Il fait partie d’un gang et il dit qu’ils se sont trompés de personne. Ils étaient censés tirer sur quelqu’un d’autre. Kattranece doit réapprendre beaucoup de choses, comme parler, marcher et bien se souvenir. Ça se passe bien si ce n’est que la blessure aggrave considérablement

son asthme. Ce qui est un problème quand la famille devient SDF. Au terme d’une grande dispute avec papa, maman met tout ce qu’elle peut dans quelques valises et dit à ses fi lles que c’est l’heure. Tous les jours elles déménagent dans un nouvel endroit. Kattranece pense que maman a bien fait, mais c’est pénible quand sa toux s’aggrave du fait de dormir dans la poussière, la saleté et le froid dans les refuges ou dans des voitures. À présent elles vivent dans un refuge pour familles SDF. Ce que Kattranece aime par-dessus tout c’est chanter. – Je chante quand le refuge organise des piques-niques. J’étais nerveuse et une fois je me suis mise à rire au milieu de la chanson. Après j’étais soulagée et contente. Les gens ont dit que j’étais bien. Si nous avons un endroit où habiter, je recommencerai à chanter dans le chœur de l’église.  Quelqu’un a fait cadeau d’un synthétiseur à la School on Wheels en priant qu’on le donne à un enfant SDF intéressé à la musique. C’est Kattranece qui l’a eu !

Kattranece avec ses sœurs Shacarla, 4, Shatrea, 12, Kathiella, 6 et sa mère Kathleen. Quand Kattranece a quitté sa maison elle a emporté un ours en peluche comme celui-ci. Le sien a disparu au cours de tous les déménagements. Il lui manque, lui et un collier de perles qu’elle avait reçu de sa grand-mère.

Kattranece Fuguoa, 14 Vit : Dans un refuge pour familles, South LA. Aime : Écrire des chansons et chanter. Lire. Écoute : Alicia Keys. Triste : Quand les adultes se disputent. Heureuse : Quand je chante et je suis avec mes amis et ma famille. Admire : Maman. Veut être : Chanteuse, styliste ou journaliste. Kattranece est aidée dans ses devoirs par un prof supplémentaire de la School on Wheels dans la salle des enfants qu’on a construit dans le refuge.

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 TEXTE: CARMILL A FLOYD PHOTO : KIM NAYLOR

Au marché on peint les visages de tous les enfants de la famille pour les faire ressembler à des animaux sauvages.

Zachery a l’ennui de ses frères et sœurs

Pour Zachery, 10 ans, c’est un bon jour, il peut rencontrer son frère et sa sœur et aller au marché avec eux et maman. Ses frères vivent avec leur père alors que Zachery et sa mère vivent au refuge. Un troisième frère vit dans une famille d’accueil. Maman n’a pas touché à la drogue depuis deux ans

Trois sœurs = une famille

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a grande sœur Ashley est arrivée aussitôt qu’elle a appris que maman était retournée en prison. À ce moment-là ses petites sœurs étaient seules dans l’appartement et étaient sur le point d’être expulsées. Ashley a dû arrêter son travail et sa formation du soir pour s’occuper de ses sœurs. Il n’y avait pas de place chez Ashley et son petit-ami, alors les sœurs ont du s’installer ici et là. Au bout de quelques mois de vagabondage elles ont

maintenant une place dans un refuge. – J’ai vu des films sur les SDF, dit Brittney, mais je n’aurais jamais pu imaginer que j’en deviendrai une. Maman me manque et j’espère qu’elle arrête la drogue pour qu’on puisse vivre de nouveau ensemble.

et Zachery espère qu’ils pourront bientôt vivre ensemble dans un vrai appartement. – Le pire quand on est SDF c’est que je ne peux pas jouer au foot et que d’autres, au refuge, volent notre nourriture. Quand nous nous sommes installés, nous avons acheté un

tas de nourriture, mais quand nous sommes revenus, elle avait disparu. Maintenant j’ai peur que les gens volent mes affaires. Je suis aussi inquiet quand je ne peux pas être près de mon frère Desmond pour le protéger. Parfois les autres enfants à l’école le battent.

Brian & Byron ont eu un foyer !

Tous les deux aiment l’école et veulent créer des jeux

Brian, 14 ans et son frère Byron, 13, sont hyper heureux. Après deux ans dans un refuge pour SDF, leur mère a prouvé qu’elle peut se passer de drogue et on les a aidés à emménager dans un appartement à eux. Il est situé dans un quartier dangereux, hantés par des membres de gangs. La nuit on entend des coups de feu. Mais il y a une cour intérieure où ils peuvent jouer et faire du skateboard sans risquer de se trouver au milieu d’une bagarre.

vidéo quand ils seront grands. – Notre modèle est Shigeru Miyamoto, le meilleur designer de jeux vidéo du monde dit Brian.

Clifton a gagné un prix de poésie Le prof de Clifton lui a suggéré de participer à un concours de poésie et Clifton, 11 ans, qui vit dans un refuge avec sa mère, a écrit un poème d’amour.

– J’ai réfléchi aux choses que j’aime faire et dont j’aime parler avec ma famille et mes amis. J’ai appelé le poème « L’amour c’est comme... » J’ai travaillé dur et il était de plus en plus long. Le poème dit que c’est l’intérieur qui compte, non l’extérieur. Et que nous pouvons

survivre avec l’aide de l’amour, même quand nous traversons des moments difficiles. Parmi les poèmes de 10.000 enfants, celui de Clifton a été l’un des seuls à gagner un prix. Les gagnants ont pris part à une grande cérémonie à Beverly Hills et leurs poèmes

ont été lus par des acteurs célèbres de Hollywood. – Maman pleurait. J’ai gagné 500 dollars et ils ont donné un tas de livres à la salle des enfants de la School on Wheels, au refuge. J’étais fier et ça m’a engagé à faire plus d’efforts à l’école.

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NOMINÉE • Pages 67–91

Somaly Mam – Ta fille a disparu, Somaly. Elle n’était pas à l’école quand je suis allé la chercher. Je ne sais pas où elle est ! Somaly en perd le souffle. C’est son garde du corps qui appelle et Somaly craint le pire. La famille vit sous menace constante. Le combat de Somaly en faveur des milliers de filles vendues comme esclaves au Cambodge lui a valu beaucoup d’ennemis. Qu’ont-ils fait de Champa, sa fille adorée ?

L

a police se met aussitôt à la recherche de Champa qui a 14 ans, parmi les gangs de voyous des maisons de passe de la capitale Phnom Penh. C’est là qu’on trouve beaucoup des ennemis de Somaly. Ces collaborateurs cherchent jour et nuit dans tout le pays. Quatre jours après la disparition de Champa, la

e nd a l thaï

laos

vietnam

Angkor Vat

Cambodge

 TEXTE: ANDRE AS LÖNN phOTO : pAUL BLOMGREN

POURQUOI SOMALY A-T-ELLE ÉTÉ NOMINÉE ?

Phnom Penh

Le g olfe

Somaly Mam a été nominée au WCPRC 2008 pour son long et souvent dangereux combat afin de libérer les filles qui sont vendues comme esclaves aux et dans les maisons de passe au Cambodge. Somaly, qui enfant a elle-même été vendue à une maison de passe, veut que les filles qui ont été esclaves aient les mêmes chances que les autres. À travers l’organisation AFESIP, elle a construit trois foyers sûrs pour les filles qu’ils ont libérées de l’esclavage. Elles y reçoivent nourriture, soins médicaux, un foyer, la possibilité d’aller à l’école et plus tard également une formation professionnelle. Par-dessus tout, Somaly donne aux filles sécurité, chaleur et amour. 3.000 filles qui ont été esclaves, ont eu une vie meilleure grâce à Somaly. Elle-même et l’AFESIP, en exhortant sans relâche le gouvernement et les diverses organisations humanitaires à s’occuper des filles, se sont fait les porte-parole des filles au Cambodge. Somaly reçoit de constantes menaces de mort. En 2006 sa fille de 14 ans a été enlevée, violée et vendue à une maison de passe. On voulait punir Somaly pour son combat en faveur des droits des filles.

police appelle pour dire qu’on l’a retrouvée dans le nord du pays, à la frontière de la Thaïlande. Une région connue pour son trafic de jeunes filles. Somaly s’y rend aussitôt. Quand elle arrive, elle apprend que la police a retrouvé Champa dans une maison de passe. Les kidnappeurs l’ont d’abord violée et ensuite vendue à la mai-

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son de passe. L’enlèvement de Champa a été une expérience abominable pour Somaly. – Je ne pouvais pas m’arrêter de pleurer en l’embrassant. Elle était droguée et ne me reconnaissait pas. J’ai pris son beau visage entre les mains et je lui ai demandé mille fois pardon. C’était si douloureux. Mes ennemis s’étaient vengés sur moi en faisant du mal à ma fille que j’aimais tant. On l’avait obligée à subir les mêmes outrages que j’avais moi-même

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subis pendant de longues années. Sans parents L’histoire de Somaly ellemême, commence dans les montagnes forestières de l’est du Cambodge. Elle grandit dans un petit village sans père ni mère. Personne ne savait où ils étaient partis. Les gens du village prirent soin de Somaly. Il y avait toujours à manger et un endroit pour dormir dans un foyer ou dans un autre. – Mais quand on allait se coucher, je voyais les autres enfants se blottir contre leur mère. Moi, j’étais couchée toute seule et j’avais froid. Je me sentais si délaissée. Somaly avait neuf ans quand un jour un homme vint acheter du bois au village pour le revendre dans la plaine. Quelqu’un au village

dit que l’homme venait de la même ville que le père de Somaly. – Il a dit qu’il connaissait ma famille et ça m’a fait plaisir qu’il me demande de le suivre. J’espérais retrouver mon père là-bas, en ville. Rien de ce que Somaly avait imaginé ne se produisit. Elle ne retrouva pas son père et l’homme qu’elle avait commencé à appeler grandpère avait cessé d’être gentil. – Comme il n’était pas marié et n’avait pas d’enfants, il avait besoin de quelqu’un pour l’aider à la maison. Il avait aussi besoin qu’on l’aide à gagner de l’argent pour boire. Je suis devenue son esclave. Je devais me lever chaque matin à trois heures pour aller chercher l’eau dans le fleuve en contrebas. Je vendais l’eau aux restaurants

pour la soupe du petitdéjeuner. Somaly marchait plusieurs heures avec les lourds seaux d’eau. Quand elle avait fini, elle faisait la plonge dans l’un des restaurants avant de courir à la maison préparer le déjeuner pour grand-père. Le reste de la journée elle travaillait pour les voisins qui avaient besoin d’aide dans les rizières. – De plus, tous les soirs j’allais à un endroit en ville où on faisait des nouilles. Là je moulais les grains de riz pour en faire une farine avec un moulin de pierre très lourd. Je n’étais jamais à la maison avant minuit. Si Somaly rentrait avec assez d’argent pour l’alcool de grand-père, il était content. Sinon, il devenait fou. – Il m’attachait, me fouettait avec une branche de

rotin et me donnait des coups de pied comme un forcené. Vendue une première fois Somaly avait douze ans quand grand-père un jour lui dit d’aller chercher du pétrole pour la lampe chez le marchand du quartier. – Je connaissais bien le marchand. Il était gentil et me donnait des bonbons. Mais cette fois-là, il m’a frappée très fort, m’a arraché les vêtements et m’a violée. Après il m’a dit qu’il me tuerait si je le disais à quelqu’un. Il m’a aussi dit que grand-père lui devait un tas d’argent. Maintenant je comprends que grand-père avait payé sa dette en lui permettant de me violer. C’était la première fois que l’on me vendait. – Le soir, je me suis couchée sous un grand man-

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Comme punition le propriétaire de la maison m’a battue et violée. Ensuite il m’a enfermée dans une petite pièce. Avant de s’en aller il m’a dit : « Fais ce que je te dis, sinon je vais te battre et te violer tous les jours ! » Somaly ne rêvait que de se sauver et une fois elle réussit. Mais ils la trouvèrent et comme punition elle fut attachée, battue et violée par plusieurs hommes pendant toute une semaine. – Ils avaient réussi à me briser. J’avais perdu, dit Somaly. Libère la première fille Somaly se tint tranquille et ne pensa qu’à survivre. Mais ensuite il se passa quelque chose qui allait bouleverser sa vie.

guier et j’ai pleuré. J’avais mal partout et je me sentais confuse et sale. Je ne comprenais pas ce qui s’était passé. Et puisque je n’avais personne à qui parler, j’ai essayé de parler à l’arbre. Vendue à nouveau Somaly avait quinze ans et un jour grand-père lui dit qu’ils iraient dans la capita-

– Un jour une nouvelle fille est arrivée. Elle n’avait que dix ans. Elle avait la peau foncée et était très maigre. C’était comme si je m’étais vue moi-même franchir le seuil de la porte. Je me suis dit que cette petite fille ne serait pas détruite comme je l’avais été. Elle pouvait encore avoir une vie décente. Rapidement, j’ai donné l’argent que j’avais à la petite fille. Les patrons et les gardiens n’étaient pas là et j’ai pu la faire sortir. Elle était libre. Quand les patrons s’aperçurent que la fille s’était sauvée, ils voulurent punir toutes les filles. – Alors j’ai dit que c’était moi qui l’avais libérée. Ils se sont mis dans une colère folle et m’ont battue pendant

le, à Phnom Penh pour rendre visite à son parent. Mais c’était un mensonge. La maison où grand-père l’amena n’était pas celle de son parent mais une maison de passe. Il l’avait vendue. De nouveau. – Quand j’ai compris où j’étais tombée, j’ai résisté autant que j’ai pu. J’ai refusé de recevoir des « clients »

Somaly parle avec une jeune fille et sa mère. Somaly explique que l’AFESIP est là si les familles ont besoin d’aide.

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des heures. Après, ils m’ont enfermée dans une petite cage pour montrer aux autres ce qui arrive quand on désobéit. A sauvé tout le monde ! Les années passèrent. Somaly avait été si maltraitée qu’elle n’avait plus ni amour-propre ni le courage de s’enfuir. À la fi n, les patrons lui faisaient assez confiance pour la laisser sortir de la maison de passe avec ses clients. Elle ramenait toujours l’argent. À un certain moment elle avait comme client un riche amé-

ricain qui voulait l’épouser, mais elle ne voulait pas. Elle avait peur qu’il la vende aux États-Unis. Avant de partir l’homme donna 3.000 dollars à Somaly pour qu’elle puisse se refaire une vie. C’était une somme énorme. Somaly aurait eu assez d’argent pour s’acheter une maison et ouvrir un petit commerce. – Mais je savais que les autres fi lles à la maison de passe souffraient autant que

Somaly joue avec une petite fille dans un quartier pauvre. L’AFESIP surveille très attentivement les petites filles puisque le risque qu’elles soient, un jour ou l’autre, vendues à des maisons de passe est très grand.

Peur du noir – J’ai horreur d’être seule dans le noir. C’est à ce moment-là que reviennent tous les horribles souvenirs. J’adore être dehors et jouer avec les filles dans les rizières. Quand nous jouons au foot, pêchons et attrapons des crabes ensemble, je me sens revivre, dit Somaly.

moi. Depuis le jour où j’avais aidé la petite fi lle à fuir, je ne rêvais que de libérer aussi les autres. Alors j’ai donné l’argent au propriétaire et il a accepté de libérer toutes les fi lles, dix au total ! C’était magnifique de voir les fi lles comme des personnes libres ! La première rafle Somaly rencontra un coopérant français du nom de Pierre. Il l’encouragea à se

AFESI P Voici comment travaille l’AFESIP, l’organisation de Somaly

• Ils visitent les maisons de passe pour aider les filles obligées d’y travailler et pour découvrir les filles de moins de 18 ans, vendues comme esclaves. • Ils font des rafles contre les maisons de passe avec la police pour libérer les filles qu’on y a découvertes. • Ils aident les filles à dénoncer à la police ceux qui les ont vendues, achetées et utilisées. On s’assure aussi que les filles ont un avocat lors du procès. • Ils donnent aux filles libérées un foyer, nourriture, soins médicaux, soutien psychologique, la possibilité d’aller à l’école primaire et ensuite une formation professionnelle comme couturière ou coiffeuse. • Ils aident les filles à retourner dans leur famille, si cela est possible. • Ils aident les filles à commencer une nouvelle vie grâce à la formation qu’elles reçoivent. Ils procurent aux filles l’équipement dont elles ont besoin. L’AFESIP rend visite à chaque fille pendant au moins trois ans pour s’assurer que tout va bien. • Ils ont une ligne téléphonique d’assistance où les filles peuvent appeler 24 heures sur 24. – L’essentiel est d’apporter aux filles tendresse et amour. Il n’y a rien de plus important. Ainsi la plupart deviennent fortes et peuvent se débrouiller malgré tout ce qu’elles ont vécu, dit Somaly.

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refaire une nouvelle vie. Il lui dit qu’elle y arriverait. Ils se marièrent et au bout de huit années Somaly était enfin libre. Mais la pensée des milliers de filles qui étaient toujours dans les maisons de passe ne la quittait pas. Tous les jours elle pensait aux terribles abus dont étaient victimes de petites filles. Le rêve de Somaly c’était de sauver toutes les filles de l’esclavage. – J’ai parlé avec Pierre de mes rêves et nous avons décidé de créer l’organisation AFESIP (Agir pour les Femmes en Situation Précaire) pour assister les filles au Cambodge. Somaly commença les visites des maisons de passe à Phnom Penh. Elle instruisait les filles sur la santé et expliquait comment se protéger contre le sida. Elle emmenait les filles malades à l’hôpital. Les patrons, qui voulaient des filles en bonne santé, permettaient à Somaly de leur rendre souvent visite. Ce qu’ils ne savaient pas c’est qu’elle gardait aussi toujours un œil sur les filles de moins de 18 ans et qui avaient été ven-

dues comme esclaves. Peu après, l’AFESIP fit sa première rafle avec la police pour libérer l’une des filles que Somaly avait découvertes. C’était une jeune fille droguée de 14 ans qui s’appelait Srey. Somaly et Pierre s’occupèrent de Srey en la prenant chez eux. Avec le temps de plus en plus de filles s’étaient installées chez eux. Ils dépensèrent tout leur argent privé. Somaly prit contact avec toutes les organisations d’aide humanitaire qu’elle connaissait et leur demanda de l’argent pour libérer les filles. Une année après, en 1997, Somaly reçut enfin l’aide qui lui permit d’ouvrir un petit centre où elle pouvait s’occuper des filles qui étaient libérées. Ça vaut la peine de donner sa vie pour cela Onze ans ont passé depuis le début et plus de 3.000 filles qui étaient esclaves ont eu une meilleure vie grâce au dur travail de Somaly et de l’AFESIP. Aujourd’hui il y a trois foyers sûrs où vivent 150 filles libérées. À présent l’AFESIP travaille également

en Thaïlande, au Vietnam et au Laos. Mais Somaly a beaucoup d’ennemis et vit sous une menace de mort constante. On la menace en pleine nuit par téléphone, on la suit en voiture et on menace de mettre des bombes dans les foyers de l’AFESIP pour filles libérées. On a brûlé sa maison et Somaly est obligée d’avoir constamment des gardes du corps. Régulièrement, quand la situation est trop dangereuse au Cambodge, elle part à l’étranger. – On dit que la traite des filles rapporte plus d’argent que le trafic de drogue. C’est la raison pour laquelle c’est difficile et dangereux de l’arrêter. Les patrons des maisons de passe, la maffia, certains policiers, des juges et des politiciens haut placés gagnent beaucoup d’argent par la traite des filles. Certains croient qu’au moins 20.000 filles au-dessous de 18 ans sont esclaves au Cambodge. Somaly ne renonce pas à se battre pour leurs droits. – J’ai failli abandonner quand ma fille Champa a été enlevée et vendue à une mai-

– En fait, la seule chose qui me rende vraiment heureuse est de voir les filles jouer et rire de nouveau. Alors, moi aussi je suis heureuse ! dit Somaly.

son de passe. Mais elle m’a dit très calmement que je devais continuer. Champa m’a dit qu’elle m’avait, moi et qu’elle s’en sortirait quoi qu’il arrive. Mais elle se demandait ce qui adviendrait des autres filles si j’arrêtais. Ce qu’elle m’a dit m’a donné la force de continuer. Les filles m’appellent maman et je sens vraiment qu’elles sont mes filles. Je les aime. Nous avons eu les mêmes expériences et je sais de quoi elles ont besoin. Sécurité, écoute et amour. Comment pourrais-je les tromper ou les laisser tomber ? Je sais que l’on peut me tuer à tout moment, mais je suis prête à mourir pour que les filles aient un meilleur avenir. 

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Le Cambodge fortement touché De 1963 et pendant les 30 années qui ont suivi, une terrible guerre a ensanglanté le Cambodge, détruisant maisons, routes, champs et personnes. La guerre américaine au Vietnam (1959-1975), a touché aussi le Cambodge, pays limitrophe. Entre 1969 et 1973 les États-Unis ont déversé 500.000 tonnes de bombes sur le Cambodge. Grand part du pays a été complètement détruit et des centaines de milliers de personnes ont été tuées. Entre 1975 et 1979 les Khmers rouges, le parti communiste du Cambodge, ont pris le pouvoir dans le pays. Leur chef s’appelait Pol Pot. Pendant cette période, près de deux millions de personnes sont mortes de faim, sous la torture, les travaux forcés ou assassinées. On tuait même les enfants. Des milliers de personnes ont disparu sans laisser de traces. – Beaucoup disent que mon père a été enlevé par les Khmers rouges et a disparu, mais personne ne sait exactement, dit Somaly. Les crimes des Khmers rouges contre le peuple cambodgien est retenu comme l’un des pires génocides de l’histoire de l’humanité. (Plus d’informations sur le génocide sur www.childrensworld.org) La guerre et la violence ont fait que le Cambodge est

aujourd’hui l’un des pays les plus pauvres du monde. Un tiers de la population du pays vit avec moins d’un dollar par jour. Presque la moitié (45%) des enfants cambodgiens sont sous-alimentés. – La guerre et la violence n’ont pas uniquement appauvri le Cambodge, elles ont aussi brisé les gens. Beaucoup ont perdu la notion du bien et du mal. Les gens sont devenus cruels et pensent surtout à leur propre survie. La vie d’un autre être humain n’a pas tellement d’importance. Je crois que c’est pour cela que tant de familles vendent leurs propres filles aux maisons de passe. Que les filles soient plus atteintes provient du fait qu’au Cambodge les filles ont moins de valeur que les garçons. On perçoit souvent une fille comme une esclave que la famille et les autres adultes peuvent utiliser. Nous nous battons pour que filles et garçons aient la même valeur, dit Somaly.

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Sreypao

a été vendue comme esclave À sept ans, Sreypao a été vendue, par sa propre mère, comme esclave à une maison de passe. Ce fut le début d’un horrible cauchemar. – Je crois que je serais morte si Somaly ne m’avait pas aidée. Elle m’a sauvé la vie et je l’aime. Somaly est ma nouvelle mère, dit Sreypao. –

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l y en a un ici ! Viens creuser ! Dépêche-toi ! Sreypao court aussi vite qu’elle peut vers les fi lles agenouillées un peu plus loin dans la rizière. Aujourd’hui

c’est elle qui a la lourde baguette en fer pour creuser et faire sortir les crabes de leurs profonds trous dans la boue. Pendant la période des pluies Sreypao et les autres fi lles, qui vivent au foyer pour fi lles libérées de Somaly, vont à la chasse aux crabes presque tous les après-midi. Sreypao voit les pinces sortir de la boue. Elle tape fort tout autour du crabe avec la baguette mais en faisant bien attention à ne pas l’amocher. Ensuite, aussi

Sreypao, 16 Vit : Au foyer pour filles libérées de Somaly Aime : La vie ! Déteste : Que ce soit possible d’acheter et de vendre des êtres humains. Le pire : Être vendue comme esclave à une maison de passe. Le meilleur : Quand Somaly et l’AFESIP m’ont sauvée. Admire : Somaly ! Elle m’a sauvé la vie. Veut être : Comme Somaly et libérer les filles de l’esclavage. Rêve : Que la traite des êtres humains prenne fin un jour.

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La faim souvent – Papa est mort quand j’avais un an. Maman a essayé de s’occuper de moi et de mes cinq frères et sœurs. Ce n’était pas facile. Je suis la fille aînée et j’ai dû l’aider beaucoup. Faire la cuisine, la vaisselle, m’occuper de mes petits frères et sœurs et tout ça. J’ai travaillé dans la rizière des voisins pour gagner un peu plus. Nous avions souvent faim. Des fois on mangeait une fois par jour, des fois pas du tout, se souvient Sreypao. Elle avait sept ans quand un jour une femme et un

homme sont venus les voir. Sreypao ne les avait jamais vus. Le couple a dit qu’ils pouvaient aider la famille en donnant à Sreypao du travail comme employée de maison chez leur parent à Phnom Penh, la capitale. – Maman a fini par accepter et moi aussi. Je voulais aider parce que je savais que nous avions besoin du moindre sou. Aux approches de Phnom Penh, Sreypao s’est inquiétée. Elle n’était jamais allée dans une grande ville. La femme et l’homme étaient gentils et lui ont dit qu’il n’y avait pas de quoi s’inquiéter. « On va te tuer ! » Mais sitôt passé le seuil d’une maison, la femme et l’homme se sont transformés. – Ils m’ont jetée dans une petite chambre et ont fermé la porte à clé. J’ai eu peur et

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rapide que l’éclair, elle plonge la main dans la boue. – Pas mal hein ? crie-t-elle en se relevant et en agitant le crabe sous le nez des copines. Sreypao rit. Mais pendant longtemps le rire était absent de sa vie.

je me suis mise à pleurer. Je ne comprenais rien et je criais : « Pourquoi vous m’enfermez ? Je devais venir travailler comme employée de maison ! » Alors ils m’ont dit : « Arrête de crier ! Si tu ne te tiens pas tranquille, on te tue ! » J’étais terrifiée et je

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Ce qu’il faut pour réussir la chasse aux crabes ?

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…et des copines !

Le plus grand temple du monde ! Une brochette en fer…

Le temple bouddhiste sur le T-shirt de Khema s’appelle Angkor Vat et se trouve au nord ouest du Cambodge. Il a été construit au 12ème siècle et c’est la construction religieuse la plus grande du monde. Tous les Cambodgiens sont très fiers du temple. Angkor Vat est même représenté sur le drapeau du pays et sur les billets de banque ! Parfois les filles que Somaly et l’AFESIP ont libérées vont en excursion à Angkor Vat.

…un seau…

La garde-robe de Sreypao Les filles dans les foyers de Somaly ont une armoire à elles, dans le dortoir, où elles conservent leurs choses. Dans l’armoire de Sreypao il y a : Un cartable avec livres et crayons. Un savon. Un flacon de shampoing. Une brosse à dents. Un tube de dentifrice. Une assiette et une cuiller. Un coussin. Le tapis en paille multicolore sur lequel elle dort, est debout contre la paroi dans un coin de la pièce, car il ne tient pas dans l’armoire.

– Et puis j’ai tous mes vêtements dans l’armoire, bien sûr. J’adore les vêtements !

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voulais rentrer chez moi. Les jours ont passé sans que Sreypao puisse sortir. On lui donnait de l’eau mais rien à manger. Au bout d’une semaine, l’homme est entré et lui a dit : « Occupetoi d’un client ! » – Je lui ai dit que je ne savais pas ce que ça voulait dire. Que je croyais que j’étais venue dans la maison pour faire le ménage et la vaisselle. Alors l’homme est devenu furieux et a fait entrer quatre hommes. Ils m’ont arraché les vêtements et m’ont frappée avec des ceintures et des fils électriques sur tout le corps. Puis ils m’ont fait très mal. À ce moment-là je ne savais pas ce que c’était. Maintenant je sais qu’ils m’ont violée. Je pleurais et je les priais d’arrêter. Puis, je me suis évanouie. Scorpions et araignées – Ils m’ont réveillée en jetant de l’eau sur moi et en me

L’uniforme scolaire…

demandant si j’allais « m’occuper d’un client » Quand je leur ai dit que je ne comprenais toujours pas ce que cela voulait dire, ils m’ont enfermée dans une autre chambre. La pièce était pleine d’araignées, de scorpions et d’autres animaux venimeux. Quelques jours plus tard, j’avais des plaies partout et j’étais très malade. Je pleurais et j’appelais ma mère, mais ils m’ont dit : « Ce n’est pas la peine, elle ne t’entend pas. Elle ne viendra pas à ton secours ! » Je ne comprenais rien de ce qui se passait. Ils ne me laissaient même pas sortir pour aller aux toilettes. À la fi n je n’ai pas pu me retenir. J’ai dû faire dans ma culotte ou par terre. Quand les hommes l’ont vu ils sont devenus furieux et ont crié : « Pourquoi tu ne l’as pas dit ? » On m’a punie. J’ai été battue et fouettée de nouveau.

…les costumes traditionnels que nous portons pour coudre ou tisser. Ce sont les filles qui vivent dans le foyer de Somaly pour filles un peu plus âgées qui ont fait les vêtements. Elles seront couturières et elles sont très habiles !

Abandonne – Finalement j’ai abandonné. Je n’en pouvais plus de tous ces coups et j’ai accepté de faire ce qu’ils me demandaient. Mais ce n’était pas mieux, au contraire. « S’occuper d’un client » c’était la même chose. Viol et sévices. Qui plus est, toutes les nuits et par plusieurs hommes. Très vite j’ai senti que quelque chose s’était brisé en moi. Comme si j’étais morte. Sreypao a été vendue à d’autres maisons de passe. Elle avait onze ans et était esclave depuis plus de quatre ans dans diverses maisons quand un soir elle a pris la décision. – Un nouveau « client » attendait et j’ai senti que je n’en avais pas la force. Pas une seule fois de plus. J’allais m’enfuir, à n’importe quel prix. Même s’ils allaient me tuer.

La fuite Sreypao a demandé si elle pouvait aller acheter un gâteau au coin de la rue avant le client suivant. Ils ont accepté, mais deux hommes allaient la suivre pour la surveiller. – Alors j’ai dit que s’ils avaient peur que je me sauve, il valait peut-être mieux qu’ils aillent me chercher le gâteau pendant que j’attendais à la maison de passe. Les hommes ne se seraient jamais doutés que j’aurais osé fi ler. Mais aussitôt qu’ils ont tourné le dos, j’ai couru autant que j’ai pu. Quand je me suis retournée j’ai vu qu’ils m’avaient découverte et qu’ils me poursuivaient. Je pleurais et mon cœur battait très fort. – Je courais en lorgnant par-dessus mon épaule et j’ai buté contre un couple qui

Mes vêtements d’exercice...

…et mes vêtements préférés. C’est Somaly qui m’a donné le chemisier et le pantalon. C’est ce que j’ai de plus beau !

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Ensemble. Les filles ne sortent jamais seules, elles s’occupent les unes des autres pour qu’il n’arrive rien à personne. passait. Ils ont vu que je pleurais et m’ont demandé ce qui s’était passé. J’ai expliqué autant que j’ai pu et ils m’ont dit qu’ils pouvaient m’aider. Ils m’ont vite fait monter sur leur moto. J’avais très peur d’être de nouveau vendue. Mais le couple travaillait à l’AFESIP et ils étaient en train de faire leur ronde de nuit dans le parc pour rechercher les fi lles qui avaient besoin d’aide !

Du coriandre pour la soupe aux crabes.

Le bouillon Tom Yam.

Le sauvetage – Nous sommes arrivés à l’AFESIP où tout le monde était très gentil avec moi et j’ai compris que j’étais sauvée. Somaly m’a embrassée et m’a dit que tout allait s’arranger. Je lui ai tout de suite fait confiance. Je sentais qu’elle comprenait exactement ce qui m’était arrivé. On m’a donné un savon et de

nouveaux vêtements propres. Un médecin m’a auscultée et j’ai vu un psychologue. Ça faisait vraiment du bien de parler des choses horribles que j’avais vécues. Quatre mois plus tard, Somaly s’est demandée si Sreypao n’avait pas envie d’aller vivre dans son foyer à la campagne et commencer l’école.

Sochenda, la maman du foyer, aide Sreypao à préparer la soupe.

– J’étais hyper contente. Quelle merveille d’en fi nir avec Phnom Penh et tous les mauvais souvenirs. Et je n’avais jamais eu la possibilité d’aller à l’école. Le jour où je suis entrée dans la salle de classe a été le plus beau jour de ma vie. Sreypao vit depuis près de cinq ans dans le foyer pour fi lles libérées de Somaly. – Je me sens en totale sécurité ici. Somaly, notre mère du foyer et tous les autres à l’AFESIP nous donnent beaucoup d’amour. Nous, les fi lles sommes comme une famille et nous prenons soin les unes des autres. Parfois nous parlons de l’horreur que nous avons vécue. Tous les jeudis un psychologue vient nous voir et nous aide aussi. Nous essayons de faire des choses amusantes et nous pensons à toutes les belles choses qui nous attendent à l’avenir.

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Somaly, ma nouvelle maman ! – Je suis sûre que ma mère savait qu’elle me vendait à une maison de passe. Elle m’a fait sortir de la pièce quand l’homme et la femme sont venus pour que je n’entende pas ce qu’ils disaient. Je ne sais pas combien d’argent elle a reçu pour moi. Bien sûr ma mère était pauvre mais je ne comprends quand même pas comment on peut vendre son enfant. L’AFESIP m’a

La même valeur Plus tard, Sreypao veut se battre pour les droits des filles. Exactement comme Somaly elle veut le faire en racontant sa propre histoire. – Si nous voulons mettre fi n à tout ça, il faut que les gars changent. Il y a quelque chose qui ne va pas quand des hommes acceptent d’abuser des filles et des femmes comme ils ont fait avec moi. Est-ce qu’ils n’ont pas de cœur ? Est-ce qu’ils aimeraient que leurs filles, sœurs, femmes ou mères soient traitées ainsi ? Les jeunes hommes doivent commencer à regarder les filles d’une autre façon. Ils doivent compren-

aidée à revoir ma mère quelques fois. Mais je lui en veux encore et je ne veux plus jamais vivre là-bas. Au fait, ce que je voudrais c’est qu’elle aille en prison, mais je ne peux pas la dénoncer. Elle est ma mère, malgré tout. Quoique maintenant ma nouvelle mère c’est Somaly! Elle m’aime et a dit qu’elle m’aiderait à réaliser mes rêves.

– Le premier jour d’école a été le plus beau jour de ma vie ! dit Sreypao.

dre que nous avons la même valeur et devons être traitées avec respect ! Je veux parler dans les écoles de ce qui m’est arrivé. Si les garçons entendent mon histoire peut-

être vont-il réfléchir et commencer à mieux traiter les fi lles. C’est difficile de raconter à d’autres toute l’horreur que j’ai vécue, mais Somaly me donne la force d’oser ! 

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filles libérées dans trois foyers – Quand je suis triste et fatiguée, je vais voir les filles dans le foyer où vit Sreypao. Les filles me donnent la force et l’envie de continuer à me battre. Je les aime ! Nous nous faisons du bien mutuellement, dit Somaly. Le foyer est destiné aux plus jeunes filles libérées de l’esclavage. 39 filles y vivent actuellement. La plus jeune n’a que sept ans. Quand les filles ont terminé l’école primaire, la plupart déménagent dans l’un des deux autres foyers de Somaly pour filles un peu plus âgées. Là, elles peuvent suivre les écoles professionnelles de l’AFESIP et faire une formation de couturière ou de coiffeuse. Elles peuvent également étudier les mathématiques et le khmer, la langue parlée au Cambodge. – Je veux commencer l’école de coiffure, dit Sreypao. Au total, 151 filles libérées vivent actuellement dans les trois foyers.

– Si, par exemple, l’une de nous a besoin d’aide ou a envie d’aller faire un pique-nique, nous pouvons écrire une lettre et la glisser dans la boîte secrète. Il n’y a que Somaly qui en a la clé. Elle lit toutes les lettres. Comme Somaly a vécu les mêmes choses que nous, elle comprend ce que nous ressentons et ce dont nous avons besoin. J’ai écrit une lettre où j’ai demandé que ma petite sœur puisse vivre ici. J’ai peur que maman la vende. Somaly a promis qu’elle viendra ici et j’en suis si heureuse. Les clés des rêves des filles…

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Un jour au foyer p – Bonjour les filles ! Vous avez bien dormi ? Il fait encore nuit dehors quand Sochenda, la mère du foyer réveille les filles dans la belle maison de bois sur pilotis...

05.30 La douche Après l’entraînement, les filles se douchent et se brossent les dents.

05.00 Gymnastique matinale Celles qui se lèvent tôt essaient de motiver les autres. Elles troquent leur pyjamas contre une tenue de gym, se traînent dans l’escalier et se retrouvent dans la cour. C’est l’heure de l’énergique séance de gym matinale d’au moins une demi-heure.

06.30 À l’école Toutes mettent l’uniforme scolaire. – Nous nous entraidons toujours quand nous allons à l’école. Surtout nous, les plus âgées, nous vérifions que l’uniforme des plus jeunes est bien mis et qu’elles n’ont pas oublié leurs livres, dit Sreypao.

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Petit-déjeuner Avant le petit-déjeuner, les filles vont chercher leur assiette et cuiller dans leur placard du dortoir. – Aujourd’hui c’est riz et haricots, mais mon petitdéjeuner préféré c’est poisson et légumes. La nourriture ici est excellente et je n’ai jamais faim, dit Srey Moch, 11 ans. Après le petit-déjeuner, chacune lave son assiette et sa cuiller.

Les leçons – J’adore être à l’école. Je me concentre sur ce que je dois connaître pour mon futur et je n’ai pas le temps de penser à toute l’horreur que j’ai vécue. Comme j’ai perdu beaucoup d’années quand j’étais dans la maison de passe, je n’ai commencé l’école qu’à 11 ans. À présent je vais en 5ème malgré mes 16 ans. Si l’AFESIP n’avait pas payé mon uniforme et mes livres, je n’aurais jamais eu les moyens d’aller à l’école, dit Sreypao.

12.00 La sieste Le temps de se reposer. Ça fait du bien de monter à l’étage et de s’étendre pour lire ou dormir au plus chaud de la journée.

13.00 Le ménage Les filles se relaient pour nettoyer la maison et le jardin. Certaines aident à la préparation du repas. Celles qui en ont besoin ont la possibilité d’avoir des cours d’appui avec un prof de l’AFESIP.

11.00 Déjeuner Toutes les filles reviennent de l’école pour déjeuner. 80

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er pour filles libérées de Somaly 14.00

17.00 Dîner

Tissage Chaque après-midi les filles apprennent à tisser et à coudre à la machine. – Quand je m’en irai d’ici j’aimerais suivre la formation de couturière de l’AFESIP. J’aimerais apprendre à tisser très bien pour subvenir à mes propres besoins quand je serai adulte, dit Chitra 13 ans.

18.00

20.00

Les devoirs La plupart jouent au foot, à cache-cache ou vont à la chasse aux crabes dans la rizière. D’autres lavent leurs vêtements, prennent une douche et font leurs devoirs. À 18.30 on enclenche le générateur qui apporte l’électricité au foyer. Ainsi les filles ne sont pas obligées de faire leurs devoirs dans le noir, même si elles habitent au loin dans la campagne, là où généralement il n’y a pas d’électricité. – Nous nous entraidons pour les devoirs. Si nous ne comprenons pas quelque chose, il y a toujours quelqu’un pour l’expliquer. Quand je serai grande, je veux être médecin, alors je sais que je dois étudier beaucoup, dit Leng, 11 ans, (à gauche) en train de répéter les sciences naturelles avec Sopheap, 12 ans (à droite).

L’heure du film ! Somaly veut que les filles regardent la télé de temps en temps pour qu’elles sachent ce qui se passe autour d’elles, au Cambodge comme ailleurs dans le monde. – Mais je préfère les films drôles pour pouvoir bien rire ! dit Sreypao.

21.00 L’heure d’aller dormir sous la plus longue (?) moustiquaire du monde Chacune va chercher son tapis de paille. Elles déroulent leur tapis les uns contre les autres en deux rangées sur le sol. Ensuite quelques filles laissent tomber les deux énormes moustiquaires au-dessus des couches. La moustiquaire fait plus de dix mètres de long et protège les filles contre la malaria. Juste avant qu’on déclenche le générateur et qu’on éteigne la lumière, Sochenda, la mère du foyer vient souhaiter la bonne nuit. – Elle le fait chaque soir. Elle se soucie vraiment de nous, comme une vraie maman, dit Sreypao.

24.00 L’heure de la peur… De temps en temps il arrive que l’une de filles soit tirée de son doux sommeil par quelque chose qui se promène sur sa jambe ou sur ses cheveux. Si elle lève les yeux, elle perçoit alors une énorme paire d’yeux qui la fixent et un rire épouvantable... – Parfois quand les autres se sont endormies pour de bon, je me glisse hors du dortoir et je me grime pour me transformer en fantôme domestique ! Je reviens sur la pointe des pieds et je choisis la victime idéale. D’abord je saisis tout doucement son pied… Ensuite je tire de toutes mes forces et je la sors de la moustiquaire en poussant des hurlements. Tout le monde se réveille et se met à courir partout dans la chambre en criant. J’adore me déguiser et si c’était possible, plus tard, j’aimerais faire partie d’une vraie troupe de théâtre. C’est mon rêve, dit Kanha, 19 ans. 81

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Les garçons mieux aimés

– J’étais très triste quand mon frère a pu commencer l’école alors que moi, j’étais obligée de rester à la maison et de travailler, raconte Ly, 13 ans qui vit dans l’un des foyers de Somaly pour filles libérées.

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« ci au Cambodge, les filles doivent travailler à la maison beaucoup plus que les garçons. Déjà à l’âge de cinq ans nous devons faire la vaisselle, la cuisine, coudre, le ménage, travailler dans les rizières et nous occuper de nos petits frères et sœurs pour que les parents puissent aller travailler. Les garçons ne doivent jamais faire ça. Tout ce qu’ils font c’est jouer ! Quand les parents demandent aux enfants de les aider et que le garçon refuse, ce n’est pas grave. Il est dispensé. Mais si la fille refuse, ils se fâchent sérieusement. Je trouve que c’est injuste et quand j’y pense ça m’énerve. Les garçons devraient aider les filles. Si nous nous entraidions tout irait beaucoup plus vite et nous les filles nous aurions aussi plus de loisirs. Nous aussi nous aimons jouer ! Le fils à l’école Si une famille est pauvre et les parents doivent choisir entre le fils et la fille à envoyer à l’école, ils choisissent presque toujours le fils.

C’était ainsi pour moi. J’étais très triste quand mon frère a pu commencer l’école alors que moi, j’étais obligée de rester à la maison et de travailler. Les parents croient que le fils aura un meilleur travail et que plus tard il pourra entretenir la famille. Ils croient que la fille n’est capable que de travailler à la maison. Mais moi je crois fermement que nous pouvons accomplir les même tâches que les garçons si on nous en donne la chance. Nous pouvons aussi travailler dans un bureau et être chefs ! Mais pour pouvoir bien vivre, c’est important d’aller à l’école exactement comme font les garçons. J’adore aller à l’école ! Ici au centre, nous parlons souvent du fait que la vie est plus difficile pour nous les filles que pour les garçons. J’espère que tout ça va changer pour que notre futur soit meilleur. Mais je crois que ça va prendre du temps car au Cambodge toutes les familles semblent préférer leurs fils à leurs filles. Je ne comprends pas pourquoi » 

Les filles sont en danger – Je déteste avoir peur simplement parce que je suis une fille, dit Oudom, 15 ans qui vit dans l’un des foyers pour filles libérées de Somaly.

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u Cambodge, les fi lles vivent plus dangereusement que les garçons. Le simple fait de sortir nous expose à de graves dangers. Nous risquons d’être violées, enlevées et vendues à des maisons de passe et utilisées par les adultes d’une façon ou d’une autre. C’est pour-

quoi beaucoup de fi lles ne veulent pas ou n’osent pas chercher un travail en dehors de la maison. C’est aussi ce que je ressens et je déteste ressentir cela. Je pense que nous devrions, nous les filles, nous sentir libre d’aller partout sans avoir peur. Chacun devrait avoir ce droit !

Ici dans le centre de Somaly nous prenons soin les unes des autres pour qu’il n’arrive rien à personne. Nous ne sortons jamais seules, nous sommes toujours plusieurs. S’il devait arriver quelque chose à l’une de mes camarades, je ferais tout pour la soutenir et l’aider »

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À quoi sert un krama? Le Krama est une pièce d’étoffe traditionnelle très courante au Cambodge. Ici, Chitra, 13 ans, montre quelques-unes des multiples façons d’utiliser l’étoffe !

Empêcher la sueur de couler dans les yeux… …ou simplement parce que c’est joli !

Pour se protéger la tête du soleil… …et du vent. Comme foulard…

…châle…

Quand on achète des aubergines...

Quand on se rend au temple bouddhiste…

…robe…

…ou des melons au marché !

…et jupe !

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Synoun a eu une nouvelle vie – J’ai été prisonnière dans une maison de passe en Thaïlande plus d’un an et j’ai cru que ma vie était finie. Mais Somaly et l’AFESIP m’ont donné une nouvelle vie. Maintenant j’ai un salon de coiffure à moi et je peux subvenir à mes besoins, dit Synoun.

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 TEXTE: ANDRE AS LÖNN PHOTO : PAUL BLOMGREN

«

’ai grandi à la campagne, dans un village pauvre ici au Cambodge. Une de nos voisines allait souvent en Thaïlande pour vendre et acheter des trucs. Elle disait que là-bas, c’était facile de gagner de l’argent. Un jour elle m’a dit qu’elle connaissait un homme en Thaïlande qui pouvait me trouver un travail dans une usine textile. Ma famille avait vraiment besoin d’argent alors je l’ai suivi. Mais je me suis fait avoir.

L’homme ne m’a pas emmenée à la fabrique mais dans une maison de passe. Je n’avais que 16 ans, mais quand on m’a enfermée, j’ai eu l’impression que ma vie était déjà terminée. C’était si épouvantable que j’ai perdu l’espoir de jamais pouvoir en sortir. Heureusement je me trompais. Une année plus tard, la police a fait une descente dans la maison de passe, nous a libérées et nous a renvoyées chez nous.

Famille pauvre Quand je suis revenue ma mère m’a dit que je ne devais plus quitter le village. Que je devais rester dans les environs pour qu’il ne m’arrive rien. Mais ce n’était pas si facile. Ma famille était toujours pauvre et il était impossible de gagner quoi que ce soit là où on habitait. Comment allions-nous survivre si je n’allais pas chercher du travail ? Mon père avait tout le temps peur que je ne sois pas en sécurité. Un jour, il a dit qu’il avait entendu parler d’une organisation à Phnom Penh qui aidait les fi lles qui avaient été vendues à des maisons de passe. Ils pourraient peut-être nous

aider. Papa a téléphoné et peu de temps après deux personnes de l’AFESIP sont venues me chercher. Elles avaient peur que ma petite sœur Samnang fasse la même expérience que moi, alors elles ont demandé si elles ne pouvaient pas l’emmener elle aussi. Mes parents ont bien sûr accepté et j’étais folle de joie car j’adore ma petite sœur. Jolies coiffures Nous étions très nerveuses en arrivant à Phnom Penh.

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Mais Somaly nous a embrassées et tout le monde était très gentil. Finalement on a pu se détendre. Deux jours après, des fi lles qui suivaient la formation de coiffeuses de l’AFESIP sont venues nous montrer comment on coupe de jolies coiffures et fait de beaux ongles. J’ai tout de Synoun, 23 suite compris que c’était ça Vit : Avec ma petite sœur. que je voulais faire plus tard. Aime : Ma famille. Au même moment où j’ai Déteste : La traite des commencé ma formation de personnes. coiffeuse, ma sœur a comLe pire : Avoir été enlevée et mencé à apprendre à coudre vendue comme esclave en et à tisser. J’aimais vraiment Thaïlande. cette formation. J’ai fait Le meilleur : La formation de des stages chez différents coiffeuse et l’aide pour ouvrir mon coiffeurs en rêvant d’ouvrir salon de coiffure. mon propre salon et de me Admire : Somaly. débrouiller. Mais je n’avais Veut être : Une coiffeuse en pas assez confiance en moi. vogue. Somaly et le personnel m’ont Rêve : De visiter d’autres pays. soutenue et m’ont donné beaucoup d’amour. Ils m’as-

suraient que j’allais très bien y arriver ! Son propre salon ! Une année plus tard, j’étais prête. L’AFESIP m’a priée de trouver un bon endroit pour l’ouverture de mon salon. Je savais que ce n’était même pas la peine de citer mon village puisque là-bas, personne n’avait les moyens d’aller chez le coiffeur. Mais dans la ville à une demi-heure à

Au salon « Chez Synoun, Coiffures Modernes » tu peux te faire couper les cheveux, te faire faire une permanente des cheveux et des cils, une rallonge de cheveux, te détendre avec un massage facial et te faire faire de beaux ongles grâce à la manucure ! La rallonge de cheveux est très recherchée par les clientes de Synoun et cela coûte 3.000 reals (0,75 USD).

peine en taxi-scooter du village, j’ai trouvé un bon local où je pouvais vivre et travailler. Quelques personnes de l’AFESIP se sont rendues sur place et après avoir approuvé le choix de l’endroit, ils m’ont aidée à me lancer. Ils m’ont tout donné : ciseaux, peignes, séchoirs, armoires, shampoing... tout ! C’était incroyable. Ma petite sœur a ouvert son 85

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Amour entre sœurs – Vivre avec ma petite sœur me donne un sentiment de sécurité. Maman et papa sont très heureux que nous allions si bien à présent. Ils viennent souvent ici et nous allons presque toutes les semaines leur rendre visite au village, dit Synoun.

atelier de couture dans le même local. Nous partageons les frais de location et nous sommes ensemble. Au début, l’AFESIP nous rendait souvent visite pour voir comment ça allait, comment nous nous en tirions et s’assurer que les gens de la ville nous traitaient bien. C’était

agréable. Un jour Somaly est venue au salon et je lui ai fait les ongles super bien. C’était une bonne journée ! Elle m’a demandé de l’appeler tout de suite si j’avais besoin de quelque chose. C’est une énorme sécurité de savoir que Somaly est là si nous avons besoin d’aide.

La mode équitable

Elle ou un autre membre du personnel passent de temps en temps pour vérifier que tout va bien. Si l’AFESIP ne m’avait pas aidée, je n’aurais jamais pu avoir la vie que j’ai maintenant. Je n’aurais jamais eu les moyens de faire une formation de coiffeuse ou me

mettre à mon compte toute seule. Même si ce n’est pas toujours facile, c’est formidable d’avoir une formation professionnelle et un vrai travail. À présent je peux subvenir à mes besoins et même aider ma famille. Magnifique ! » 

Une partie des filles qui suivent les cours de coiffure ou de couture de l’AFESIP ont des difficultés à trouver du travail quand elles ont terminé la formation. C’est dû au grand taux de chômage au Cambodge, mais aussi au fait que beaucoup de filles ne sont pas acceptées quand elles réintègrent la société. On les considère parfois comme « sales » et les gens vont se faire couper les cheveux et acheter leurs vêtements ailleurs. Pour aider ces filles, l’AFESIP a créé en 2003, « Fair Fashion » – Mode Équitable. Les filles confectionnent des vêtements vendus au Cambodge et à l’étranger. Elles peuvent en vivre et la place de travail est sûre. Les filles sont traitées avec respect et ne sont pas tenues de faire des heures supplémentaires. À Fair Fashion le travail enfantin est bien évidemment interdit. Ce qui n’est pas aussi évident que cela au Cambodge où presque la moitié des enfants travaillent. L’argent que Fair Fashion gagne par la vente de vêtements est utilisé pour sauver davantage de filles de l’esclavage. Actuellement 30 filles travaillent à Fair Fashion au Cambodge. En 2004, Fair Fashion a été créé aussi au Vietnam.

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Syna

sauve les esclaves À l’âge de 13 ans, Syna, est emmenée par la ruse de son village au Vietnam à Phnom Penh, la capitale du Cambodge. Là, on l’a vendue comme esclave à une maison de passe. Aujourd’hui elle fait ce que toutes les filles que Somaly a libérées rêvent de faire…

S

yna ouvre bien les yeux en passant dans les corridors sombres de la maison de passe. Derrière chaque porte en tôle, elle le sait, il y a peut-être une fille de moins de sept ans, captive et esclave sexuelle. Elle connaît les terribles abus auxquels elles sont soumises et combien elles souffrent. Pendant trois ans, Syna a été elle-même enfermée et utilisée par des hommes. À présent elle travaille comme assistante sociale pour l’AFESIP dans les maisons de passe. Dans une petite salle tout au fond de la maison de passe, 10 filles attendent Syna. Elles sont très heureuses de la voir.

– Salut ! Quelle joie de vous revoir ! Ça va ? s’informe Syna en les embrassant l’une après l’autre. Elles s’asseyent en rond sur le plancher pour parler. Au début, on plaisante beaucoup et on rit, puis ça devient plus sérieux. Plusieurs filles racontent que leurs « clients » les battent et qu’elles n’arrivent pas à se protéger. Une fille maigre et affaiblie vient les rejoindre un peu plus tard. Elle est très malade et Syna se fait beaucoup de souci pour elle. - Tu dois venir à la clinique de l’AFESIP pour qu’on puisse t’aider. Tu le promets ? La fille fait oui de la tête et

dit qu’elle va essayer. Syna rappelle aux filles que la meilleure façon de se protéger du sida c’est d’utiliser les préservatifs. Elle parle aussi de l’importance de bien se laver pour la santé. Elle distribue gratuitement à toutes les filles des préservatifs, du dentifrice, des brosses à dents et du savon. La fille a été empalée Après la visite Syna est fatiguée. L’obscurité, les petites chambres, et l’odeur si désagréable lui soulèvent le cœur presque chaque fois. Tous les affreux souvenirs de la petite chambre lui reviennent. – Si j’avais moins de dix hommes par jour, la patron-

– Si je découvre une fille soumise à l’esclavage, je le dénonce à la police qui libère la fille. Même si ce travail fait que souvent je me sens mal, cela en vaut la peine. Chaque fois qu’une fille est libérée de l’esclavage je suis extrêmement heureuse, dit Syna.

ne me battait. Souvent, comme punition, on ne me donnait rien à manger. Et malgré ma soif de liberté, il m’était impossible de m’enfuir. La maison était construite sur pilotis au milieu de l’eau et la seule façon d’en sortir ou d’y entrer c’était par un ponton très surveillé. Autour de la maison de passe, les propriétaires avaient planté, jusque dans le fond de l’eau, des pieux et des barres de fer pointus. Une fois une fille avait réussi à scier la grille de sa petite fenêtre et elle a sauté. Elle s’est empalée. – Je ne pensais qu’à m’en87

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fuir de ma prison et après une année, j’ai cru que mon rêve allait se réaliser. La police est entrée de force dans la maison de passe et nous a emmenées au poste. Mais ça n’a pas été long avant que la patronne vienne soudoyer la police. Et au lieu de nous sauver, ils nous ont ramenées à la maison de passe. Je criais qu’on m’avait enlevée et que je voulais retourner chez moi au Vietnam, mais tout le monde

s’en fichait, se souvient Syna. Jusqu’au jour, où trois ans plus tard, la police a de nouveau fait une descente dans la maison de passe. Mais cette fois c’était différent. La police s’était associée à l’AFESIP pour sauver les fi lles. – C’était très irréel ! Je n’osais pas croire que j’étais libre ! « On n’est plus esclaves ! » – Somaly est venue vers moi parce qu’elle avait vu que

Les deux missions de Syna 1. Prendre soin des filles qui sont obligées de se vendre dans les maisons de passe pour survivre. Surtout les protéger du vih et du sida. 2. Aider les enfants enlevés et vendus comme esclaves.

j’avais peur. Elle m’a prise dans ses bras en me caressant les cheveux et m’a dit « Qu’est-ce que c’est ma petite fi lle ? N’aie pas peur ! Tout va s’arranger » Ça faisait une éternité que je n’avais ressenti une telle chaleur. Je ne l’oublierai jamais, dit Syna. Elle est allé vivre dans le foyer pour fi lles libérées de Somaly et a suivi l’école de couture de l’AFESIP. La mère de Syna a cherché Syna pendant trois ans. Elles s’aiment beaucoup. Ici Syna aide sa mère à préparer le repas.

– Puis Somaly m’a demandé si je savais encore le vietnamien parce qu’elle avait besoin de quelqu’un qui pouvait parler avec les fi lles qui avaient été transportées au Cambodge depuis le Vietnam. J’avais peur, mais j’ai accepté tout de suite ! Somaly m’avait donné tant de chaleur et d’amour, elle m’avait même sauvé la vie. J’avais maintenant la possibilité de m’acquitter en partie en aidant d’autres fi lles qui étaient dans des situations difficiles. Syna a suivi des cours d’anglais, de psychologie et de psychothérapie. Somaly l’a surtout aidée à retrouver

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 TEXTE: ANDRE AS LÖNN PHOTO : PAUL BLOMGREN

la confiance en elle-même qui était très basse après un si long temps d’esclavage. - Je me souviens qu’elle m’a dit : « Ce n’est pas grave, Syna. Aujourd’hui nous sommes fortes. Nous ne sommes plus esclaves ! » Elle m’a expliqué que j’avais des droits, que je devais être forte et oser. Et ça a marché ! A sauvé 14 filles – Je travaille comme assistante sociale depuis près de six ans. Avec au moins une autre assistante sociale je visite environ trois maisons de passe par jour et j’essaie d’aider les filles à se prendre en charge. Il s’agit beaucoup de leur apprendre à se protéger contre le vih et le sida. Ensuite j’écoute leurs problèmes. Je suis leur amie. Car s’il y a quelque chose dont on a besoin, quand on est forcée de travailler comme prostituée, c’est bien d’amitié. On ne peut pas

être plus seule. On a besoin d’affection et de chaleur et c’est ce que je cherche à leur donner. Chaque fois je dis aux fi lles que les gens de l’AFESIP sont prêts à leur procurer une formation et une nouvelle vie. Mais souvent les fi lles ont fait des expériences si horribles qu’elles n’ont plus d’amourpropre. Les fi lles ont honte et ne croient pas qu’elles sont capables d’autre chose. Elles croient que leur vie est déjà détruite. C’était la même chose pour moi. Avant que Somaly m’aide, je n’aurais jamais cru pouvoir de nouveau regarder quelqu’un dans les yeux. Comme les fi lles savent que j’ai vécu les mêmes choses qu’elles, elles peuvent se rendre compte que c’est en fait possible, même pour nous, de se refaire une vie. – Mais ma tâche la plus importante dans les maisons de passe c’est de recher-

cher les fi lles au dessous de 18 ans. Les fi lles victimes de la traite de personnes. Si j’en découvre, on informe la police qui peut faire une descente et libérer la fi lle. Ensuite nous nous occupons d’elle. J’ai découvert et dénoncé les cas de 14 mineures qui étaient soumises à la traite de personnes. Toutes ont eu une meilleure vie grâce à l’AFESIP. Même si souvent cela me fait du mal à cause de tous les vieux souvenirs cela en vaut la peine. Chaque fois que quelqu’un est libéré de l’esclavage, je suis extrêmement heureuse ! Mais ce qui me rendrait totalement heureuse, ce serait de voir que plus aucune fi lle n’est obligée d’endurer ce que moi j’ai enduré. Tout le monde a droit à quelque chose de mieux. 

Syna, 23 Vit : Avec ma famille à Phnom Penh. Aime : La liberté. Déteste : Que les adultes fassent du tort aux enfants et violent leurs droits. Le pire : Être esclave et ne rien pouvoir faire. Le meilleur : Quand Somaly et l’AFESIP m’ont donné une nouvelle vie. Admire : Somaly, bien sûr ! C’est une femme extrêmement courageuse. Rêve : Que l’AFESIP survive car il y a des milliers d’enfants qui ont besoin de notre aide.

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Vie de famille – J’ai cherché Syna chaque jour pendant plus de trois ans. D’abord chez nous au Vietnam, ensuite au Cambodge, puisqu’on m’avait dit que beaucoup de filles vietnamiennes étaient enlevées et vendues à Phnom Penh. J’avais une

Syna et son petit frère, Tang, 12 ans, aident maman à faire la cuisine.

photo de Syna et j’allais dans les villages et les villes, je frappais aux portes et demandais si quelqu’un avait vu ma fille chérie. Imaginez mon soulagement le jour où finalement j’ai vu sa photo à la station de police et que j’ai compris que l’AFESIP

– J’aime Syna et je suis si fière de ce qu’elle fait, dit Chou, la mère de Syna.

avait pris soin d’elle. J’ai compris que l’AFESIP pouvait offrir une nouvelle vie à Syna, c’est pourquoi nous avons décidé de rester ici plutôt que de rentrer chez nous. Toute la famille est de nouveau réunie et j’en suis si reconnaissante ! J’aime

Syna et je suis si fière de tout ce qu’elle fait. Sans Somaly et l’AFESIP je suis sûre qu’elle serait morte, dit Chou, la mère de Syna. Dans la mesure du possible, l’AFESIP veut que les filles retournent dans leur famille et à une vie normale.

c’est la traite des esclaves La grande majorité des filles que Somaly aide a été victime de « trafficking ». Il s’agit du commerce des personnes pour en faire des esclaves. Plus de 1,2 millions d’enfants dans le monde sont victimes de trafficking, ce qui leur dénie le droit de vivre avec leurs parents, le droit d’être pro-

tégés contre la violence et les abus, le droit d’aller à l’école et le droit de jouer. La traite des filles esclaves sévit dans toute l’Asie du Sud-Est. Des milliers de filles du Vietnam sont vendues au Cambodge et des filles du Cambodge, Laos, Birmanie et Malaisie sont souvent emmenées en

Thaïlande. Des filles thaïlandaises et chinoises passent les frontières en fraude, entre autres, celle du Cambodge. Somaly les aide toutes Pour Somaly la provenance des filles n’a aucune importance. Dans les trois foyers au Cambodge il y a des

filles cambodgiennes et vietnamiennes. L’AFESIP fait en sorte que les filles du Vietnam, de Thaïlande et de Chine retournent chez elles lorsqu’elles y sont prêtes. Mais seulement si on sait qu’elles y seront bien quand elles retourneront. L’AFESIP a des centres au Vietnam, en Thaïlande et au Laos.

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ien que la plupart des pays au monde, dont le Cambodge, aient des lois qui interdisent la discrimination des filles, elles sont souvent moins bien traitées. Beaucoup de filles sont victimes d’abus, de trafficking et de la pire forme de travail enfantin, comme l’esclavage dans des maisons de passe. Plus de 2 millions d’enfants, la plupart des filles, sont victimes de commerce sexuel. Filles (et garçons) qui n’apprennent pas à lire ou à compter sont des proies faciles. 65 millions de filles ne vont pas à l’école. Sur les 150 millions d’enfants qui quittent l’école avant la cinquième classe, 100 millions sont des filles. Sur les 875 millions d’adultes dans le monde qui ne savent

ni lire ni écrire, presque 600 millions sont des femmes. Dans le monde entier, les femmes sont moins bien payées que les hommes, même quand elles font le même travail. Bien que les femmes fassent les deux tiers de la totalité du travail mondial, elles ne gagnent qu’un dixième des revenus mondiaux. Les hommes ont plus de pouvoir, en politique comme en économie puisqu’ils sont plus souvent chefs et dirigeants. Que les filles soient moins bien traitées que les garçons est contraire à la Convention de l’Enfant de l’ONU où il est spécifié que chaque personne a la même valeur et le droit aux mêmes chances dans la vie, qu’elle naisse fille ou garçon.

Sept assistantes sociales Les sept assistantes sociales de l’AFESIP à Phnom Penh travaillent dans sept districts. Elles visitent les maisons de passe, les parcs et autres lieux où les filles qui sont obligées de se vendre ont besoin d’aide. – Dans mon seul district il y a 65 maisons de passe. Je visite chaque maison une fois par mois, explique Syna. Que tant de propriétaires de maisons closes laissent entrer Syna et les autres assistantes sociales s’explique par le fait que l’AFESIP aide « leurs » filles à rester en bonne santé, surtout à se protéger contre le vih en distribuant des préservatifs gratuits.

100 des filles de Somaly sont mortes du sida O

n estime que de toutes les filles que l’on oblige à la prostitution au Cambodge quatre sur dix sont séro positives. – Quand les filles arrivent chez nous, elles vont à notre clinique. Là on leur parle du vih et du sida et on leur dit que si elles veulent, elles peuvent faire le test. Mais nous ne forçons jamais personne. Si une fille décide de faire le test et qu’elle est infectée, nous faisons tout pour qu’elle reçoive les médicaments et le traitement qu’il lui faut. Mais surtout nous la soutenons puisque c’est un grand chagrin d’apprendre qu’on a une maladie mortelle. Il faut alors beaucoup de tendresse et d’amour. Moi ou quelqu’un d’autre de l’AFESIP accompagnons toujours les filles à l’hôpital pour qu’elles ne se sentent pas seules. Si les filles y vont seules elles risquent d’être très mal traitées. Les médecins et les infirmières disent souvent que les filles sont « mauvaises » et « sales ». – Nous nous occupons des filles jusqu’au bout. Une de nos maisons pour filles libérées a été nommée du nom de la première de nos filles morte du sida. Elle s’appelait Tomdy et je ne l’oublierai jamais. Depuis, plus de cent de nos filles sont mortes du sida, raconte Somaly.

 TEXTE: ANDRE AS LÖNN PHOTO : PAUL BLOMGREN

Partout dans le monde, les filles sont moins bien traitées

Adore la liberté ! – J’adore la liberté ! Il n’y a rien de pire que d’être enfermée et abusée. C’est pourquoi je dis toujours aux enfants de ne pas faire confiance aux gens qu’ils ne connaissent pas. De ne pas se laisser tenter et suivre des personnes qui leur promettent qu’ils seront mieux ailleurs. Ça peut tourner très mal. Je le sais puisque c’est ce qui m’est arrivé, dit Syna.

Syna avec l’enfant d’une des filles de la maison de passe.

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