Grand port maritime : le Havre en scène

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DOSSIER

Le Havre en scène Sommaire

Manutention I Groupe Perrigault : des projets multiples dans les cartons

I Laurent Castaing, président du directoire du GPMH :

« Ce que nous réussissons sur le roulier, nous pouvons le faire sur le conteneur »

I Gilles Fournier, président du conseil de surveillance :

« Je suis un facilitateur au service du port »

I Générale de manutention portuaire : le groupe

P.16

I Société havraise de gestion de terminaux :

P.20

La réforme portuaire au Havre I Christian de Tinguy, président du Gemo : « L’après-crise est là, mais nous n’en profitons pas » I Patrick Deshayes, responsable syndical CGT des

personnels du GPMH : la CGT mène son combat

I Christian Leroux, président de l’Umep : « Il est temps

que les pouvoirs publics agissent »

I Jean-Marc Peltier, président du Ghaam : l’espoir

d’une croissance à deux chiffres

P.29 P.30

P.22

Pré et post-acheminements I Une longueur d’avance pour le fluvial

P.31

P.24

Logistique I L’essor des marchés de niche

P.32

P.25

Services aux navires I Pilotage : des navires toujours plus gros

P.34

développement : « La réforme portuaire, une priorité » P.21 revus à la baisse

un opérateur sur tous les fronts

P.28

Roulier I LD Lines : une adéquation avec le marché

I Jean-Louis Le Yondre, président du conseil de I Projet stratégique : les objectifs de trafic

fait face à la conjoncture

P.28

P.26 P.27

I Remorquage : Boluda, des parts de marché

qui se maintiennent

I Société nouvelle de remorquage du Havre,

l’heure est à la réflexion

P.34 P.35

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DOSSIER Laurent Castaing, président du directoire du Grand port maritime du Havre

«Ce que nous réussissons sur le roulier, no Laurent Castaing, président du directoire du Grand port maritime du Havre, revient sur le trafic à fin septembre avec les difficultés rencontrées sur les vracs liquides et la bonne tenue des marchandises diverses. Il présente les grandes orientations du projet stratégique du port et les investissements en cours et à venir. Enfin, il dresse un bilan de parcours de l’avancée locale de la réforme portuaire. Journal de la Marine Marchande (JMM) : Après une année 2009 marquée par une baisse de 8,5 % de vos trafics, l’année 2010 a démarré avec de nombreux mouvements sociaux nationaux. L’économie mondiale semble reprendre des couleurs depuis le début de l’année. Malgré les mouvements sociaux, avez-vous enregistré, au Havre, une progression des trafics sur les neufs premiers mois de l’année ? Laurent Castaing (L.C.) : La situation à fin septembre montre une baisse de nos trafics. Nous perdons 1 Mt à 55 Mt. Une diminution de 2,5 % que nous devons surtout aux trafics de vracs liquides. Le pétrole brut a perdu 7 %. Ce retrait est lié principalement à la production des raffineries françaises. Il représente 40 % du trafic global. Les produits pétroliers augmentent par contre leur volume de 7 %. La situation difficile et tendue sur le pétrole ne doit pas cacher la bonne tenue des produits chimiques. Nous affichons une hausse de 32 %, et cela pour la seconde année consécutive. Cette performance tient à la forte présence de l’industrie chimique en Seine. Nous constatons aussi des changements dans ce secteur. De plus en plus, la chaîne de production dans la chimie se fait sur plusieurs sites. Nous 16 JMM - vendredi 12 novembre 2010

bénéficions de ce transfert de produits semi-finis entre les sites. En outre, une partie de ces trafics en provenance ou à destination d’autres usines a longtemps été confiée à la route. Nous agissons pour un report sur le ferroviaire ou le maritime de ces trafics intersites. Quant aux vracs secs, la situation est plus préoccupante. Si le charbon demeure stable, les autres vracs solides accusent un repli de 50 % sur les neufs premiers mois de l’année. Un constat qui nous amène à nous interroger sur ce poste. Il existe une véritable hypothèque sur l’avenir des vracs solides au Havre. JMM : Le port du Havre est aussi le premier port conteneurisé français avec un trafic qui dépasse les 2 MEVP par an. Indice de la reprise de la consommation des ménages en France, la conteneurisation a-t-elle rattrapé son retard accumulé en 2009 au Havre ? L.C. : Vous l’avez souligné et c’est une réalité, le port du Havre est le premier port du commerce extérieur français pour les trafics conteneurisés. L’année 2009 a été difficile du fait de la conjoncture internationale. Sur les neuf premiers mois de l’année 2010, nous affichons une progression de

© Éric Houri

I Laurent Castaing, président du directoire du GPMH

8 %, autant dire que nous avons rattrapé notre retard de 2009. Nous avons rejoint les niveaux antérieurs à la crise économique. Nous y voyons deux signes : le premier est que les Français consomment plus, et le second que le port du Havre est plus utilisé pour approvisionner le marché français. Une preuve de ce constat tient aussi à la bonne tenue des trafics avec l’hinterland, à savoir déchargés au Havre et dont la destination finale est en France. À fin septembre, la croissance de ces trafics pour l’hinterland a progressé de 13 %. Inversement, les trafics de transbordement diminuent de 7 %. Un autre élément qui explique la performance du trafic conteneurisé vient des escales de plus en plus nombreuses de navires porte-conteneurs de plus de 10 000 EVP. Depuis le printemps de cette année, nous recevons au moins un navire de ce type par semaine au Havre. Mærsk, CMA CGM et MSC alignent des ULCS (Ultra Large Container Ships) dans leurs services


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>>> LE HAVRE

e

er, nous pouvons le faire sur le conteneur » touchant Le Havre. La stratégie que nous avons mise en place depuis dix ans porte principalement sur l’arrivée de ces navires. Ils réalisent à chaque escale quelque 1500 mouvements. Ils sont généralement opérés sur les postes de Port 2000, à l’exception des unités de MSC qui sont déchargés sur le quai de l’Asie, ou exceptionnellement sur celui de TPO (Terminal Porte Océane, une joint-venture entre Terminaux de Normandie et Mærsk). Par ailleurs, pour les grands navires Le Havre est de plus en plus affiché comme premier port d’entrée en Europe pour les services en provenance d’Asie ou d’Amérique du Nord. JMM : Premier port français conteneurisé, le Grand port maritime du Havre joue aussi la carte du roulier avec notamment l’arrivée des voitures Kia. Quelle est la tendance de ce trafic ? L.C. : Sur les premiers mois de l’année, le trafic roulier de voitures neuves affiche une progression de 66 %. Notre plan d’action porte ses fruits. Ce trafic des voitures Kia nous rapporte. Nous avons su offrir une qualité d’escale aux armateurs grâce au travail de toute la communauté portuaire. Manutentionnaires, ouvriers portuaires et logisticiens travaillent remarquablement. Lors des escales, toutes les voitures sont embarquées ou débarquées, de manière qualitative. Nous avons pu comparer nos prestations à nos concurrents d’Europe du Nord et nous sommes complètement au niveau. Lors des récents mouvements sociaux sur le port, nous avons su garantir une fiabilité à nos clients en limitant au minimum les inconvénients.

Ces résultats sont encourageants et nous sommes actuellement en négociation avec d’autres constructeurs automobiles et leurs logisticiens pour étudier de nouveaux trafics. Quant au trafic transmanche, il reste à l’étal sur la période. La saison estivale s’est terminée avec un seul navire, en raison d’un incident en fin de période du Norman-Arrow. JMM : Le projet stratégique, adopté le 9 avril 2009, a déjà fait l’objet d’une première révision. Quelles sont les grandes lignes directrices de cette version 2.0 ? L.C. : La seconde version du projet stratégique, en cours de validation, prend en compte deux éléments essentiels : la crise économique qui a sévi en 2009 et ses conséquences sur le trafic conteneurisé, d’une part, et la baisse importante du trafic de pétrole, d’autre part. Ces deux éléments nous ont obligés à revoir une stratégie viable pour l’avenir. Les principales orientations de ce projet stratégique 2.0 confortent d’abord notre choix sur le conteneur. L’élément nouveau consiste en un retard de trois ans environ dans les objectifs que nous nous étions fixés initialement. Il s’agit simplement d’un décalage dans le temps. Ensuite, la baisse des chiffres du pétrole n’aura pas d’effet sur l’équilibre financier de notre établissement du fait de ce décalage. Le projet stratégique 2.0 nous amène à travailler de nouveau sur deux dossiers. Nous devons confirmer les premiers bons résultats du roulier. Nous devrions doubler notre trafic d’ici à 2015. Ce que nous réussissons pour le roulier nous pouvons et nous devons le faire pour le conteneur. Ensuite, nous

souhaitons avancer sur les vracs liquides. Nous constatons une progression importante des produits chimiques liquides. Nous devons concentrer nos efforts sur un report modal de ces trafics de produits chimiques vers le ferroviaire et le maritime.

Nous devons concentrer nos efforts sur un report modal des trafics de produits chimiques vers le ferroviaire et le maritime.

JMM : Depuis le début de l’année, la FNPD-CGT a lancé plusieurs mots d’ordre pour des heures et des journées de grève dans les ports. Une façon de mettre la pression localement pour l’avancée des négociations. Quel est le calendrier des prochaines semaines de cette réforme au Havre, et quelle est l’ambiance des négociations locales ? L.C. : En premier lieu, je rappelle que nous avons signé, en juillet, un accord dit «de méthode » avec le syndicat pour formaliser le souhait de poursuivre les discussions au niveau local dans le respect de l’accord-cadre national du 30 octobre 2008. Avec cet accord, le syndicat CGT du GPMH s’engage à garantir l’activité sur le port jusqu’à la fin des négociations de l’accord local de mise en œuvre. Cet accord de paix sociale implique l’arrêt des mouvements locaux, qui ont récemment fortement désorganisé et perturbé l’activité des entreprises. Cet accord a été respecté par toutes les parties. Du point de vue social, les négociations locales continuent. Nous travaillons actuellement sur la mise au point de la garantie de rémunération et les effectifs futurs du GPMH. Ces deux aspects doivent trouver une issue pour permettre le transfert des personnels avant le 9 avril 2011. Le nombre de conducteurs d’engins du GPMH qui seront détachés est fixé par JMM - vendredi 12 novembre 2010 17


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DOSSIER protocole, mais les listes nominatives ne sont pas encore dressées. Actuellement, et ce avant la réforme, la moitié des conducteurs de portiques travaillent déjà sous l’autorité d’opérateurs de manutention avec un contrat de mise à disposition. Les réunions techniques se déroulent bien. L’atmosphère est plus tendue au cours des réunions portant sur la philosophie générale d’application de la réforme. Nous avons aussi dû répondre à des questionnements des cadres du port. Ils s’interrogent sur l’avenir du port sans la manutention. Il n’y a pas lieu d’avoir des craintes de la perte de cette activité de manutention. Nous conservons toutes nos activités commerciales et nous y mettons les bouchées doubles. Il est certain que la masse salariale du GMPH va aller en se réduisant, mais avec une rationalisation des emplois. Nous avions des doublons parfois que nous allons pouvoir gommer. La rationalisation issue de la réforme va nous permettre de gagner en compétitivité et donc d’accroître ensuite l’emploi sur la place portuaire. JMM : Ces points concernent l’aspect social de la réforme. Quelles sont les prochaines étapes sur la cession de l’outillage ?

L.C. : Tous les outillages ont été cédés à des opérateurs. Tous sauf le terminal multivrac. L’avenir du vrac sur notre port a amené le manutentionnaire local à retirer son offre. Nous allons donc procéder à un appel d’offres international comme le prévoit la loi. Nous avons respecté tous les termes de la loi : procédure de gré à gré puis procédure par appel d’offres. L’appel d’offres prévoit une utilisation préférentielle pour du vrac. Cependant, si nous recevons des offres pour d’autres types de marchandises, nous étudierons les demandes mais en préférant conserver la destination première de ce terminal. Notre nouveau rôle d’autorité portuaire est de gérer au mieux les équilibres du port. Outre le terminal multivrac, deux portiques ZPMC, actuellement sur le quai d’Asie, seront aussi vendus par appels d’offres. Les conventions sont signées sauf deux, pour la Générale de manutention portuaire (GMP) et la Compagnie nationale de manutention portuaire (CNMP), dont les derniers points de finalisation sont en cours. JMM : Port 2000 continue son expansion et ses travaux. Des dix postes initialement prévus, cinq sont en activité. Quelles sont les prochaines étapes de ces terminaux ?

I La mise en sommeil du projet d’exploitation du terminal méthanier d’Antifer «n’est pas un abandon mais un décalage dans le temps».

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L.C. : Il convient de distinguer les phases. Le Grand port maritime du Havre a fini les travaux d’infrastructures sur les dix postes à quai. Aujourd’hui cinq postes sont actuellement en opération. Terminal de France (TDF) dispose de trois postes, et TPO s’est installé sur deux autres postes. Nous attendons deux décisions importantes. La première concerne TPO, qui doit passer de deux postes à trois postes. La seconde doit venir de TNMSC (joint-venture entre Terminaux de Normandie et MSC). Ils doivent investir sur Port 2000 et transférer leur trafic du quai de Bougainville vers Port 2000. Ils sont en cours de constitution d’un dossier de financement. Cette situation n’est pas figée. TDF a bien fonctionné ces derniers temps. L’entreprise réclame un troisième poste vers l’Ouest. Pour satisfaire à cette demande avant la décision de TPO sur un troisième poste, TPO doit se décaler d’un poste vers l’ouest pour permettre à TDF d’étendre son terminal. Ces opérations permettront à chaque opérateur d’avoir trois postes à disposition, et au port de conserver trois postes, les numéros 10, 11 et 12 en réserve pour les développements futurs. JMM : Le développement des trafics nécessite des investissements tant sur les quais qu’à terre. Quels sont les principaux dossiers à réaliser dans les prochains mois ? L.C. : Les investissements sont nombreux et nous devons conserver un équilibre géographique au sein du port. Nous investissons à Port 2000 sans pour autant oublier les terminaux avals que nous rénovons. Dans le même temps, nous allons démarrer les travaux du terminal multimodal. La première pierre a été posée et son ouverture est prévue pour 2013. Ce terminal multimodal est une nécessité. Il évite aux opérateurs ferroviaires et fluviaux d’escaler dans


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>>> LE HAVRE chaque terminal, et leur permet surtout de grouper leur chargement. Par ailleurs, nous investissons aussi dans les voies d’accès terrestres de Port 2000. Il est arrivé, au cours des derniers mois, qu’une file de camions bloque l’accès à Port 2000. Nous voulons prévenir ces risques avec l’arrivée de nouveaux opérateurs et la croissance du trafic. Nous allons donc dédier une voie routière et une voie ferrée par terminal sur Port 2000. Nous avons lancé l’appel d’offres pour la réalisation de ces opérations. À travers ce chantier, nous allons supprimer tous les croisements routiers et ferroviaires pour fluidifier la circulation. De plus, comme nous l’avons identifié récemment, nous avons besoin de nouveaux espaces pour le roulier. Il nous manque une quinzaine d’hectares. Nous réfléchissons sur des schémas d’organisation pour améliorer encore plus les temps d’escales de ces navires. La solution d’un parking à étage n’est pas à l’ordre du jour. Nous voulons aussi réserver une bande à l’arrière du terminal roulier pour permettre à des centres de PDI (Pre Delivery Inspection, inspection avant livraison des véhicules) de s’installer. Il y a des centaines de nouveaux emplois à la clé. JMM : Vous avez abordé les différents investissements de vos établissements, sans parler de l’écluse fluviale de Port 2000 ? Elle devait être réalisée, dans les études préliminaires de Port 2000, quand le trafic fluvial aura atteint 20 % des pré et postacheminements, un point atteint aujourd’hui. L’autre sujet porte sur le terminal méthanier d’Antifer. Vous envisagez de prendre une participation dans la société d’exploitation, mais à quelles fins ? L.C. : Commençons par l’écluse fluviale devant relier les terminaux de Port 2000 au port intérieur. Nous avons réalisé un séquençage des dif-

férentes phases à réaliser. Nous avons besoin, comme pour le ferroviaire, de voies de chargement et de voies de groupage. Pour le fluvial, le lieu de groupage sera sur le terminal multimodal. Pour le chargement, il s’agira en premier lieu de l’accès par la mer à Port 2000 puis d’un accès direct type écluse. Nos études socio-économiques démontrent qu’avec un trafic de 3 MEVP réalisés sur Port 2000, cette écluse trouvera sa pertinence. Nous n’en sommes pas encore à ce niveau de trafic. Selon nos nouvelles prévisions, nous pensons atteindre ce cap en 2020 avec cependant une inconnue : le trafic réalisé à Port 2000 dépendra en large partie de la rénovation des terminaux sur les ports amont et aval. Si les travaux de rénovation se font concomitamment sur Port 2000 et les terminaux anciens, les progressions iront de concert ; sinon l’un prendra le pas sur l’autre. Le second dossier dont vous faites état, le terminal méthanier d’Antifer, se retrouve dans une phase différente. Le port envisage aujourd’hui de prendre une participation financière dans la société qui porte le projet. Le conseil de surveillance ne s’est pas encore prononcé et demande des précisions juridiques sur ce dossier. Cette prise de participation est motivée pour maintenir le dossier en l’état pendant une mise en sommeil. Les raisons de cette position sont simples. La conjoncture actuelle et l’ouverture prochaine du terminal méthanier à Dunkerque ne plaident pas en faveur de la mise en exploitation d’un terminal à Antifer. Cela signifie un recul du projet de quelques années. Nous allons signer un pacte d’actionnaire d’une période de cinq ans avec Gaz de Normandie qui nous donne une liberté de revente de nos parts. Cette mise en sommeil n’est pas un abandon mais un décalage dans le temps.

Le port du Havre devient une des composantes de la réussite du projet du Grand Paris. Il faudrait parler des ports de l’estuaire de la Seine.

JMM : Le président de la République a présenté son projet du Grand Paris sans omettre d’y apporter une dimension maritime en incluant Le Havre comme porte maritime de la capitale. Comment envisagez-vous votre rôle dans ce projet ? L.C. : Nous sommes ravis de voir que la France a tourné une page. Elle a trop longtemps tourné le dos à la mer. Elle a oublié que sa marine marchande est un vecteur de développement économique. Ce projet est passionnant puisqu’il considère que Paris sera une grande capitale avec une dimension maritime. C’est un changement de cap par rapport à une très ancienne politique française qui a longtemps opposé Paris et les villes portuaires. Le port du Havre devient une des composantes de la réussite de ce projet. Bien plus, il faudrait parler des ports de l’estuaire de la Seine et non seulement du Havre. Et dans ce concept, la commission interportuaire de la Seine regroupant les ports de Rouen, Paris et Le Havre permet de travailler sur ce trait d’union entre Paris et Le Havre qu’est la Seine. JMM : La coopération entre Le Havre et Rouen est-elle enfin devenue une réalité ? L.C. : Elle est plus qu’une réalité, elle est une nécessité. Nous réfléchissons bien au-delà de notre simple circonscription portuaire. Ainsi, lorsque nous avons travaillé sur le projet d’autoroute de la mer en Manche vers la péninsule Ibérique, il nous est apparu que le port de Rouen est plus adapté que nous à recevoir ces navires. Nous le portons avec la direction de Rouen. Autre exemple : si demain, lors des réponses à l’appel d’offres du terminal multivrac, des offres pour d’autres types de trafic devaient survenir, nous les étudierions en concertation avec Rouen pour une meilleure complémentarité entre nous. Propos recueillis par Hervé Deiss JMM - vendredi 12 novembre 2010 19


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DOSSIER Gilles Fournier, président du conseil de surveillance

«Je suis un facilitateur au service du port » Gilles Fournier, qui aura 65 ans au printemps 2011 – âge limite pour présider le conseil de surveillance d’un Grand port maritime –, se voit comme un facilitateur bénéficiant d’une liberté de ton pour faire avancer les dossiers de la place havraise.

Q

ui eut cru qu’un jour Gilles Fournier se retrouverait ainsi à la tête du Grand port maritime du Havre? Son parcours est avant tout industriel, même s’il a grandi dans l’univers des chantiers navals, les anciens ACH, que dirigeait son père. C’est cet environnement très particulier qui l’a conduit dans le monde de la métallurgie et de la chaudronnerie, à la tête d’une des plus belles PME du Havre, Fouré-Lagadec, spécialiste de la maintenance industrielle. Aujourd’hui, Gilles Fournier préside le conseil de surveillance du GPMH. Une position qu’il apprécie particulièrement pour la liberté qu’elle lui procure. « Je ne dépends de personne, dit-il. C’est moi qui fixe l’ordre du jour des réunions. »

L’heure de la transformation profonde Au-delà, Gilles Fournier apprécie surtout de pouvoir user de sa liberté de ton et de parole. «Il m’est facile de dire des choses par rapport à la tutelle », souligne-t-il. Si telle ou telle orientation ne lui plaît guère, libre à lui de le faire savoir. « Le président du directoire [Laurent Castaing, ndlr] se trouve subordonné à beaucoup de patrons. Moi, ajoute Gilles Fournier, je suis au service du port et de son développement, au service du directoire pour faire avancer les dossiers lorsque c’est nécessaire. Mon rôle, explique encore le président du conseil de surveillance, est d’être une sorte de facilitateur afin que le port atteigne ses objectifs. » Les objectifs ? « Je dois pouvoir avoir un rôle sur le climat so20 JMM - vendredi 12 novembre 2010

cial pour permettre un fonctionnement harmonieux du port. » Pour ce qui est des relations apaisées entre la direction du port et le principal syndicat, la CGT, le compte ne semble pas y être encore… Mais Gilles Fournier ne désespère pas d’y parvenir rapidement désormais. Comment le président du conseil de surveillance voit-il le port à dix ou vingt ans? «Il faut déjà imaginer comment sera la zone industrielle et portuaire du Havre, qui y sera encore… On voit bien aujourd’hui, constatet-il, que des industries sont en danger. Du coup, il faut imaginer que nous serons peut-être une grande place pour l’assemblage et non plus la transformation des produits. » Pour Gilles Fournier, Le Havre doit donc encore renforcer ses positions dans le domaine du conteneur et de la logisti-

© Éric Houri

I Gilles Fournier

que à valeur ajoutée. « C’est capital », dit-il, prenant acte qu’Anvers et Rotterdam réussissent déjà ce pari. Mais il n’y a pas que la logistique. «Dans vingt ans, le pétrole sera encore là, souligne Gilles Fournier. Mais le tout est de savoir si l’on continuera de raffiner ici ou si nous importerons seulement des produits finis. »

Report de l’âge de départ

© St. S.

Mais Gilles Fournier pourra-t-il user longtemps encore de sa liberté de ton? Au printemps prochain, le président du conseil de surveillance aura atteint la limite d’âge pour la fonction : 65ans. Lui se verrait bien poursuivre à la tête de cette grande institution qu’est le port jusqu’à la fin de son mandat. Il aurait alors deux ans de plus que l’âge limite. «En ces temps de report de l’âge de la retraite, souritil, il serait logique de porter la limite à 67 ans contre 65 actuellement. Mais il faut que cela devienne une règle générale. » Si les textes demeurent en l’état, Gilles Fournier devra donc se trouver un successeur dans six mois. Stéphane Siret


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>>> LE HAVRE

Jean-Louis Le Yondre, président du conseil de développement

«La réforme portuaire, une priorité » Le président du conseil de développement détaille les différents aspects de sa mission auprès du GPMH, dans le contexte des mouvements sociaux que connaissent les ports aujourd’hui. Journal de la Marine Marchande (JMM) : Quel est le rôle du conseil? Jean-Louis Le Yondre (J.-L.L.Y.) : Notre mission est de faire des propositions auprès du Grand port maritime du Havre dans le domaine des infrastructures et plus généralement dans le domaine économique. Le projet stratégique du GPMH passe par une étude et un vote du conseil de développement. Nous avons planché sur l’agrandissement du canal de Tancarville, le chantier multimodal et nous menons aussi une réflexion sur les infrastructures portuaires sur les ports Nord et

Sud. Le conseil est relativement hétérogène avec des personnalités politiques de toutes tendances, de droite comme de gauche, des écologistes, des responsables d’associations professionnelles, des armateurs, des logisticiens, des manutentionnaires, des transporteurs routiers, en bref tous les grands corps de métiers liés directement ou indirectement au maritime. Le conseil fait des propositions qui sont budgétées avec l’appui des ingénieurs du GPMH. Elles sont ensuite transférées au conseil de surveillance. Le conseil est encadré par un

contrôleur d’État, commissionnaire du gouvernement, qui permet de réguler les études réalisées. Le rôle du président que j’occupe est d’écouter toutes les parties et aussi de prendre une décision finale en consensus avec le directeur du port. JMM : Aujourd’hui, quelle est la priorité? J.-L.L.Y. : C’est clairement le dossier de la réforme portuaire qui est le point numéro un. Nous attendons les décisions du Sénat. Il n’y a pas de rupture entre l’Unim et la fédération nationale des ports et docks. Contrairement à certaines allégations, la discussion entre les parties continue et progresse. Je m’interdis

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DOSSIER d’être pessimiste. Il est évident qu’on ne peut pas à la fois trouver une osmose entre le régime des retraites et un régime concernant la convention collective. Ce que l’un s’interdit ouvre à l’autre une fenêtre. La négociation sur la convention collective permettra, avec l’accord de toutes les parties, d’aboutir, selon des cas spécifiques, à des durées de travail protectrices selon le travail effectué sur des décennies. © Éric Houri

JMM : Quels sont les autres dossiers? J.-L.L.Y. : Le chantier multimodal est primordial. Il permettra de fluidifier le trafic fluvial et ferroviaire. Nous devons également réfléchir aux nouvelles données technologiques sur les tirants d’eau pour le port intérieur.

I Jean-Louis Le Yondre

JMM : Comment voyez-vous la conjoncture? J.-L. L.Y. : Nous ne pouvons pas dire que nous sommes encore sortis de la crise. Les ports concurrents montent

en puissance. Les mouvements sociaux affectent la progression du port du Havre. Le risque est une paupérisation globale de l’ensemble de la profession tous secteurs confondus, secteur privé comme GPMH. Cela touche près de 25000 salariés dans un premier cercle. Les marchés sont volatils. Si la réforme portuaire ne s’applique pas, le risque est de voir Le Havre devenir un port secondaire, feederisé, qui n’aurait plus d’intérêt pour les importateurs et les exportateurs. À Port 2000, tous les opérateurs de terminaux sont des investisseurs. Aujourd’hui, ils hésitent à alourdir leurs investissements tant qu’il n’y aura pas un minimum de sécurité sur le plan social. Propos recueillis par François Haugel

Projet stratégique

Les objectifs de trafic revus à la baisse

L’

examen final aura-t-il lieu le 26novembre, comme cela a été initialement annoncé, ou faudra-til attendre la réunion suivante du conseil de surveillance ? Face aux conséquences de la crise internationale et aux incertitudes économiques, quatre organisations syndicales du port du Havre (CGT, CGT- Officiers de port, CFDT et Association syndicale des ingénieurs et cadres du GPMH) ont réclamé, en septembre, une expertise du projet stratégique adopté le 9 avril 2009. Le conseil de surveillance avait alors donné son feu vert et Gilles Fournier, le président de l’instance dirigeante, avait estimé que le projet, une fois ausculté par un cabinet ad hoc, pourrait être présenté de nouveau à la fin de ce mois. Mais que ce soit au Conseil de surveillance de novembre ou à la réunion suivante, peu importe finalement : le fond de22 JMM - vendredi 12 novembre 2010

meure globalement inchangé et la date butoir du 9 avril 2011 reste un objectif. C’est en effet à cette datelà, soit deux ans jour pour jour après son adoption, que le projet stratégique entrera pleinement en vigueur avec, notamment, le détachement du personnel portuaire vers les entreprises de manutention.

5 MEVP en 2020 Depuis sa rédaction initiale, le projet stratégique du Havre a connu quelques évolutions. À l’origine, la direction du Grand port maritime du Havre (GPMH) a tablé sur une prévision de 6 MEVP à l’horizon 2020. «Nous sommes sur une base de cinq millions », concède désormais Gilles Fournier, le président du conseil de surveillance. Conséquence de cette révision des trafics conteneurs, «le phasage des

projets » est modifié. Exemple : le prolongement du Grand canal n’est plus la priorité comme à l’origine. «Nous allons d’abord lancer la plateforme multimodale », souligne Gilles Fournier. En principe, les travaux de construction de cette nouvelle zone d’échanges de conteneurs entre le fluvial, le ferroviaire et le routier devraient être engagés au cours des prochains mois avec le partenaire du GPMH dans cette opération, Projenor. Mise en service prévue en 2012. Cette nouvelle plate-forme sera située le long du Grand canal, à l’est du barreau autoroutier A29. Selon le GPMH, le chantier multimodal constitue « un élément important » devant permettra au port d’accroître la part des transports massifiés ferroviaires et fluviaux. Initialement, le GPMH tablait sur un objectif de 3,6 MEVP en 2020.


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>>> LE HAVRE Dans le domaine énergétique, le terminal gazier d’Antifer est en situation de statu quo pour le moment. Le GPMH entre dans le capital de Gaz de Normandie (filiale de Poweo) pour accompagner le dossier, voire rechercher un nouveau partenaire. «Pour l’heure, le marché du gaz n’est pas bon », constate Gilles Fournier. Résultat : Antifer n’est plus, comme le prolongement du Grand canal, une priorité de développement pour le moment.

«Notre projet est évolutif » Que ce soit pour l’achèvement des derniers postes à quai de Port 2000, la modernisation des terminaux du port rapide aval ou les nouvelles dessertes fluviales par exemple, le projet stratégique a représenté, au départ, un investissement de l’ordre de

700 M¤ sur la période 2009-2013. Investissement nécessairement révisé compte tenu de la baisse programmée des trafics. « Notre projet est évolutif », souligne Gilles Fournier.

Ainsi, un nouvel axe apparaît aujourd’hui au Havre : la place de l’éolien. Le GPMH, en partenariat avec les collectivités locales, mais aussi le port de Nantes-Saint-Nazaire, vient de lancer des études prospectives pour faire des ports des deux estuaires (la Seine et la Loire) des places fortes en matière de préparation et d’assemblage des éoliennes offshores. Le but : convaincre les industriels de venir implanter leurs activités dans l’un des deux ports, ou les deux. Au Havre, des terrains disposant de bords à quai ont d’ores et déjà été identifiés. DR St.S.

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La réforme portuaire au Havre

DOSSIER Christian de Tinguy, président du Gemo

«L’après-crise est là, mais nous n’en profitons pas » Après trois années de grandes difficultés, le président du Groupement des employeurs de main-d’œuvre, qui regroupe plus de 2000 ouvriersdockers, regrette les grèves à répétition et table désormais sur une situation apaisée pour reconquérir des trafics.

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e bout du tunnel? Pour Christian de Tinguy, le président du Groupement des employeurs de maind’œuvre (Gemo) du Havre et directeur général du groupe Perrigault, il serait temps d’entrevoir un peu de lumière. «Nous avons connu trois années de crise dans les ports, souligne-t-il. En 2008, il y a eu cinq mois de grève avant l’adoption de la loi sur la réforme portuaire, en juillet. En 2009, la crise mondiale. Et en 2010, ajoute Christian de Tinguy, nous avons un empilement de grèves alors que l’après-crise est là mais nous n’en profitons pas. »

Savoir profiter de la reprise Pour Christian de Tinguy, représentant havrais au bureau de l’Union nationale des industries de la manutention (Unim), il y a un problème de méthode. « En France, dit-il, on ne peut jamais négocier en dehors de la grève. Mais cela revient à affaiblir l’économie et à paupériser les entreprises. Et si les entreprises sont affaiblies, on ne pourra jamais satisfaire les demandes des organisations syndicales. » Alors, Christian de Tinguy en appelle à la raison. «En 1994, nous avons passé un accord de paix sociale avec les ouvriers-dockers. Bien entendu, il y a eu des problèmes, mais nous sommes toujours parvenus à les résoudre sans jours de grève. Au plan local, nous avons su apporter des solutions pour conserver la paix sociale grâce à un dialogue permanent. » En juillet dernier, c’est un accord de mé24 JMM - vendredi 12 novembre 2010

thode qui fut signé entre la direction du Grand port maritime du Havre et le personnel portuaire pour négocier des avancées sur la réforme portuaire. Depuis, aucun appel local n’a été lancé par la CGT, seuls les appels nationaux de la FNPD ont été suivis. Appels auxquels se sont ajoutés les mouvements liés à la réforme des retraites. «Nous subissons les grèves nationales », déplore Christian de Tinguy. Reste aujourd’hui une situation qui tendrait à s’améliorer. La semaine dernière, Christian de Tinguy prend bonne note des informations publiées par la Fédération nationale des ports et docks CGT à l’issue de plusieurs réunions portant, entre autres, sur le dispositif de cessation anticipée d’activité, la reconnaissance de la pénibilité spécifique aux métiers portuaires ou encore les garanties sur le maintien du dispositif amiante. Conséquence, le service reprend le week-end et les arrêts de travail d’une heure par profession et séquence de travail sont suspendus tandis qu’est maintenue la suppression des heures supplémentaires. « C’est la preuve que le dossier avance et que nous allons finir par arriver au bout de la réforme portuaire », constate le président du Gemo. Et selon Christian de Tinguy, il y a désormais urgence à retrouver une situation plus apaisée. «Après trois années de difficultés, il est temps. Mais nous avons toujours un problème, regrette-t-il. Si le trafic import-export est plutôt en voie d’amélioration, nous avons toujours

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I Christian de Tinguy

un souci avec les transbordements qui ont tendance à partir là où il y a de la place. En l’occurrence dans les ports de l’Europe du Nord. Et au Havre, plutôt que de savoir profiter de la reprise dans le commerce mondial, on fait la grève! »

Plus de 2000 ouvriers-dockers Dans le port du Havre, où l’on trouve le plus d’ouvriers-dockers en France, le Gemo regroupe les entreprises de manutention portuaire. Soit un total de plus de quelque 2200 dockers, dont environ 700 pour Dockers de Normandie, filiale du groupe Perrigault (Terminaux de Normandie), un millier pour la Générale de manutention portuaire, les autres se répartissant, entre autres, entre la Compagnie nouvelle de manutention portuaire et un « pool » qui aurait compté, récemment encore, 200 ouvriers-dockers. Mais aujourd’hui, cette « réserve » diminue compte tenu du niveau des St.S. trafics.


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>>> LE HAVRE

Patrick Deshayes, responsable syndical CGT des personnels du GPMH

La CGT mène son combat

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our Patrick Deshayes, le responsable syndical CGT des personnels du GPMH, tout comme Laurent Delaporte qui va devenir son successeur avant la fin de l’année, l’heure est à la mobilisation, que ce soit sur le dossier de la réforme portuaire ou sur la réforme des retraites. Depuis plusieurs mois, les mouvements sociaux se sont multipliés sur le port. «Au niveau national, les discussions ont du mal à aboutir sur la convention collective. Le point d’échauffement reste la pénibilité. Les tutelles et les patrons ont pris des engagements, mais finalement il n’y a rien de concret. Donc on se bagarre et on

fait monter la pression », note Laurent Delaporte. Le responsable explique que la CGT recherche la pérennité d’un système et une équité afin «que personne ne reste sur le bord de la route ». Patrick Deshayes, quant à lui, rappelle que l’espérance de vie d’un travailleur portuaire est inférieure de huit ans à la moyenne de la population. « La productivité a un impact sur la santé mais aussi sur la vie des familles. Les employeurs, eux, n’ont qu’une priorité, les clients… Anvers ou Rotterdam travaillent en trois/huit. Au moins, c’est un rythme régulier. Chez nous, c’est la polyvalence. On travaille sur un simple coup de fil. »

Au-delà du débat national, un accord doit également être trouvé sur le plan local. Les questions portent notamment sur le détachement et la maintenance. La CGT remet en cause les conditions dans lesquelles les salariés seraient transférés dans le privé. «Le droit de retour, par exemple, n’est pas réellement crédible. Le ministre, Dominique Bussereau, parlait à l’époque de cousu-main. C’était plutôt pour apaiser les troupes », ironise Laurent Delaporte. La CGT propose la généralisation de la mise à disposition qui est déjà en vigueur pour certains personnels sur Port 2000. «C’est un système qui marche et que l’on

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La réforme portuaire au Havre

DOSSIER peut même encore améliorer. C’est la sons. » La CGT martèle que la réforme solution la moins risquée pour les sa- portuaire n’est qu’une réforme voulue par les armements et les politilariés », insiste Patrick Deshayes. ques. Selon le syndicat, le salarié déRupture et reprise taché n’aurait pas un statut égal à de négociations celui d’un salarié d’une entreprise Au début de l’été les négociations au privée. « On veut même amener des Havre ont été rompues, provoquant salariés à travailler dans des entrepriun conflit local. « On veut rassurer ses portuaires en difficulté, voire les salariés sur la pérennité de leur même au bord du dépôt de bilan », avenir. Tout cela n’est que du virtuel. explique Laurent Delaporte. Il affirme On évoque même des compensations également que le GPMH aurait irréalisables et des garanties ficti- « bradé » son outillage et ses bâtives. On sent que le dossier n’a pas été ments. «Quant aux effectifs de l’étapréparé. Notre dossier sur la mise à blissement, on n’embauche plus dedisposition est prêt et nous le connais- puis juillet 2007… Leur priorité, ce

n’est pas le salarié mais le client. Les syndicats ont demandé une expertise car l’établissement est en danger. Les comptes sont dans le rouge. » Depuis le début du mois de juillet, les discussions au niveau local ont repris mais la CGT veut rester vigilante. «Nous voulons trouver la solution la mieux adaptée pour l’ensemble des salariés, mais nous n’allons pas tomber dans le piège de jouer le calendrier. Il y a un moment où il faudra siffler la fin de la partie. Pour l’instant, la discussion sur l’accord de méthode est respectée. » F.H.

Christian Leroux, président de l’Umep

«Il est temps que les pouvoirs publics agissent » Pour le président de l’Union maritime et portuaire du Havre, il est temps de sortir de la torpeur dans laquelle se trouve le port afin de reconquérir les trafics. Il l’a récemment expliqué à l’entourage du Premier ministre.

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n aura beau avoir les plus beaux outils du monde, si nous n’avons ni la compétitivité ni la fiabilité, cela ne sert à rien. » Le port du Havre n’a sans doute pas à rougir de la qualité de ses installations mais, comme le souligne le président de l’Union maritime et portuaire du Havre, Christian Leroux, la fiabilité n’est pas au rendez-vous depuis des mois en raison d’une situation sociale fortement tendue. Le 4 novembre, comme président des Unions nationales maritimes et portuaires, il a d’ailleurs évoqué la situation économique et sociale des Grands ports maritimes français auprès du directeur de cabinet du Premier ministre, à Matignon. Il y a quelques mois, il a conduit une délégation de l’Umep à la sous-préfecture du Havre afin de remettre au représentant de l’État une motion dans 26 JMM - vendredi 12 novembre 2010

laquelle les acteurs portuaires demandent la fin des grèves afin de relancer l’activité et ne pas laisser filer les trafics. «À l’heure où l’industrie est de plus en plus fragile, dit aujourd’hui Christian Leroux, les ports français sont un gage de stabilité avec leurs 100 000 emplois directs. Il est grand temps que les pouvoirs publics en prennent conscience. » Au Havre, l’Umep de Christian Leroux regroupe quelque 600 entreprises, soit 16 000 emplois. Et la situation sociale complexe dans laquelle se trouve aujourd’hui le port engendre des conséquences directes. «Toutes les entreprises ont perdu de l’activité. En moyenne 10 %, constate le président de l’Union. Pour l’instant, il n’y a pas de licenciements secs, mais nous ne pourrons sans doute pas tenir très longtemps. » Ce que souhaite

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I Christian Leroux

Christian Leroux? «La raison doit aujourd’hui prévaloir sur les intérêts des syndicats et du patronat. Nous sommes dans une situation ubuesque et il est temps d’en sortir. » Pour le président de l’Umep, la raison est simple et l’enjeu capital : «La mondialisation est bien présente et les échanges internationaux connaissent de nouveau un développement exponentiel. Vu de Hong Kong, Shanghai ou Pékin, les chargeurs se


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>>> LE HAVRE fichent de savoir si leurs marchandises passeront par Le Havre ou Zeebrugge. Ils veulent savoir si elles arriveront. Nous devons être à la hauteur et offrir la meilleure fiabilité possible. » Or, pour Christian Leroux, la situation havraise est aujourd’hui inquiétante et Le Havre n’aurait plus toutes les cartes en main. « Autant

nous sommes bons sur la logistique, autant, note-t-il, nous avons des raisons de nous inquiéter avec le transbordement. On s’aperçoit que Zeebrugge est en pleine expansion dans ce domaine-là et ils ne sont qu’à environ 300 km de nous. » Dans son bureau, Christian Leroux a accroché une photo de la visite du

président de la République, Nicolas Sarkozy, au Havre. C’était le 16 juillet 2009. «Il est venu réparer un oubli historique et dire que la France ne devait plus tourner le dos à sa façade maritime, souligne le président de l’Umep. Il est temps d’en apporter des preuves. » St.S.

Jean-Marc Peltier, président du Ghaam

L’espoir d’une croissance à deux chiffres Jean-Marc Peltier est depuis le mois de juin le nouveau président du Groupement havrais des armateurs et agents maritimes (Ghaam) Journal de la Marine Marchande (JMM): Quelle est la politique que vous souhaitez mettre en œuvre au sein du Ghaam? Jean-Marc Peltier (J.-M.P.) : Je m’inscris dans la continuité de la politique menée par la présidente sortante (Véronique Lépine, ndlr), à savoir travailler dans la transparence sur la technicité et les modalités de l’accueil des navires et de la marchandise dans le port du Havre, mais aussi à la promotion de celui-ci tant au niveau national qu’international. Dans ce contexte, nous sommes en relation étroite avec l’autorité portuaire et douanière ainsi qu’avec les autres organisations professionnelles au sein de l’Umep (Union maritime et portuaire, ndlr), et aussi en parallèle. Le Ghaam compte aujourd’hui 39 adhérents dont 17 siègent au conseil de direction. JMM : Vous prenez la tête du Ghaam dans un contexte économique et social difficile, quelles sont vos priorités? J.-M.P. : La priorité ultime est de sortir enfin des conflits sociaux dans lesquels nous sommes enlisés, mais aussi de redonner à la place portuaire sa crédibilité, lui permettre de préserver et développer des emplois. Notre

croissance est affectée et nous manquons de nombreux rendez-vous avec l’avenir. Dans l’intérêt de toutes les professions portuaires, il faut revenir à la sérénité quel que soit le niveau du débat, local ou national. Il en va de l’avenir des jeunes générations. Le port du Havre est un outil formidable, mais nous n’arrivons pas à nous élever là où nos concurrents progressent constamment. JMM : Quelles sont les principales attentes des armateurs présents sur la place portuaire havraise aujourd’hui ? Quels sont les dossiers les plus urgents ? J.-M.P. : Aujourd’hui, les armateurs sont excédés par les perturbations opérationnelles. Le Ghaam, qui fédère leurs agents, intégrés ou non, se bat pour préserver l’acquis avec de plus en plus de mal. Ce n’est pas notre vocation, bien au contraire, notre rôle est avant tout d’attirer de nouveaux trafics pour la prospérité de tous. Par les temps qui courent, c’est un vrai casse-tête chinois. Pourtant, nous avons des atouts : notre position géographique à l’entrée du « channel », notre accessibilité

pour les plus grands navires, la souplesse de nos administrations, le professionnalisme de tous. Il nous faut aussi nous diversifier à nouveau sur des trafics autres que le conteneur tel que le conventionnel perdu depuis des années, le roll on/roll off qui se redresse, les vracs solides et liquides, le cabotage, la croisière qui a le vent en poupe, etc. Vous imaginez les dégâts occasionnés par trois jours de grèves consécutifs plus ou moins reconductibles. JMM : Quels sont vos espoirs pour le port du Havre dans son ensemble? J.-M.P. : Une croissance à deux chiffres pour 2011. Qui est prêt à relever le défi? Le Ghaam vous attend. Avec le GPMH et l’Umep, nous sommes allés courageusement rencontrer les armateurs allemands ainsi que les sièges européens d’armateurs internationaux à Hambourg, le 14 septembre, pour vendre notre port. Dans cette conjoncture, c’est un exercice périlleux, et quand nous avons évoqué le bout du tunnel sur les mouvements sociaux, cela en a fait sourire (voire rire) plus d’un. Toutefois, n’est ce pas notre mission? Pour qui agissons-nous sinon pour la communauté portuaire dans son ensemble? Propos recueillis par F.H. JMM - vendredi 12 novembre 2010 27


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Manutention

DOSSIER Groupe Perrigault

Des projets multiples dans les cartons Que ce soit sur le Terminal de Normandie ou à Port 2000, le groupe de manutention Perrigault ne manque pas de projets. Mais beaucoup, aujourd’hui, sont suspendus au niveau des trafics.

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ur le Terminal de Normandie, le quai d’Asie sera-t-il entièrement restructuré pour offrir, avec de nouveaux terre-pleins, comme une bouffée d’oxygène au groupe de manutention familial Perrigault qui l’exploite ? Depuis plusieurs années, le projet est dans les cartons de Terminaux de Normandie (TN), filiale du groupe de Jean Bekaert. «Mais aujourd’hui, il est suspendu à la révision en cours du projet stratégique du Grand port maritime du Havre », souligne l’un des responsables de l’entreprise. Les cartes semblent dans les mains de la direction du port qui doit décider si elle se lance dans une opération coûteuse de rénovation du quai d’Asie pour en faire un poste à quai de nouvelle génération, capable d’accueillir des portiques similaires à ceux de Port 2000 afin de servir des porteconteneurs dernier cri. Pour l’heure, le dossier est dans une situation d’at-

tente. Le port demande des garanties de trafics que Terminaux de Normandie ne peut offrir faute de visibilité dans une période où la fiabilité sociale n’est pas au rendez-vous. Autre projet pour le groupe Perrigault, le transfert des activités de MSC du Terminal de l’Océan, à Bougainville, vers les nouveaux postes de Port 2000. TNMSC a pris livraison des murs de quai des nouveaux terminaux. La réalisation «d’au moins trois postes à quai » est au programme pour l’alliance entre le manutentionnaire havrais et l’armateur italien. Leur mise en service n’est pas programmée avant le second semestre 2012. D’ici là, TNMSC aura construit les terre-pleins nécessaires. L’ultime étape avant que ces nouveaux terminaux deviennent opérationnels consistera à déménager à Port 2000, dans une opération qui s’annonce spectaculaire, les portiques livrés il y a quelques années à Bougainville. Restera

alors à savoir ce que deviendront les terminaux de Bougainville situés en amont de l’écluse François-Ier. Pour l’heure, aucune décision n’est prise.

«Ripage » délicat à Port 2000 À Port 2000 également, le groupe Perrigault est engagé dans TPO, le Terminal Porte-Océane exploité avec Mærsk. Au cours des prochaines semaines, une opération de «ripage » de postes à quai devrait avoir lieu avec la Générale de manutention portuaire qui exploite, en voisin, le Terminal de France avec la CMA CGM. Objectif de l’opération : faire glisser TPO d’un poste à quai vers l’ouest, permettant ainsi à la GMP de récupérer un autre poste pour accroître ses capacités. Prévue dès l’origine de Port 2000, l’opération, simple sur le papier, devient bien plus complexe sur le terrain. Pour des questions de coûts notamment. Au final, TPO disposerait toujours de deux postes à quai. Mais un troisième est aujourd’hui en option. Option qui ne pourra être levée qu’en fonction du niveau des trafics. St.S.

Générale de manutention portuaire

Le groupe fait face à la conjoncture

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ompte tenu des objectifs qui ont été fixés par l’entreprise, les six premiers mois de l’année 2010 ont été en demi-teinte à la Générale de manutention portuaire (GMP) au Havre. « Le fait que les mouvements sociaux sur la retraite aient été à l’échelon national nous a pénalisés. Grâce à des moyens supplémentaires en termes de personnels et de matériels, nous avons pu faire face, mais cela coûte beaucoup plus cher à l’entreprise. Il y a un impact », 28 JMM - vendredi 12 novembre 2010

commente Louis Jonquière, le directeur général de la GMP. Pour beaucoup d’entreprises, la crise monétaire puis la crise économique ont laissé des traces, mais la GMP s’en sort plutôt mieux. Explications: «Le groupe CMA CGM a fait du Havre sa tête de pont. En travaillant avec lui, nous sommes donc privilégiés par rapport à des armateurs plus volatils. Malgré les grèves, le groupe n’a pas écarté Le Havre dans sa desserte des ports nord-européens. C’est un

atout majeur. » En 2009, la GMP a enregistré un trafic de 1,2MEVP sur le port du Havre. Pour les six premiers mois de 2010, elle enregistre 620000 EVP, soit une légère progression expliquée par une reprise des trafics en juillet et en août. « CMA CGM a fait des alliances et cela est également positif notamment sur nos activités sur Port 2000. » Au cours de cet été, la GMP a mis en service le poste 5 sur Port 2000. Elle a réceptionné également quatre nouveaux


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>>> LE HAVRE portiques, ce qui établit à 10 le nombre de portiques utilisés sur les trois postes à quai de Port 2000. « Nous sommes presque à saturation des installations. Les investissements sont donc maintenus. Compte tenu des volumes traités, nous pouvons encore englober du trafic pendant quelques mois. » Seul souci sur Port 2000 qui freine les ambitions de l’entreprise, la GMP n’a pas pu récupérer

le quai numéro 2 qui devait lui revenir en octobre dans le cadre d’un ripage des terminaux. Un problème qui, selon Louis Jonquière, bloque également le développement du port du Havre dans son ensemble. Sur les terminaux Nord, l’entreprise de manutention a redessiné les plans de son parc afin de faciliter la desserte routière. Aujourd’hui, 33 % de l’activité sont concentrés sur le quai des

Amériques qui est au maximum de ses capacités. Des aménagements y ont été faits notamment des travaux permettant de faciliter la montée des chauffeurs dans les cavaliers. Le directeur général de la GMP ne cache pas qu’il reste aujourd’hui très attentif aux discussions portant sur la réforme portuaire en espérant une sortie de crise prochaine. F.H.

Société havraise de gestion de terminaux

Un opérateur sur tous les fronts

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a SHGT, logisticien et gestionnaire de terminaux portuaires, se développe au Havre autour de quatre axes principaux: le roulier, les vracs, le sucre et les terminaux fluviaux à conteneurs desservant la région parisienne. Le chiffre d’affaires généré par la SHGT est de 30 M¤. La société emploie 180 cadres, techniciens et dockers, et gère des trafics estimés à 3 Mt/an. La SHGT, qui fait partie du groupe Sogena, a développé depuis plusieurs années des partenariats pour plusieurs de ses activités (Scat pour le transport fluvial sur Paris, Manucar pour la manutention Ro-Ro, Manuport pour le terminal sucrier ou encore Cipha pour le terminal charbonnier du Havre pour n’en citer que quelques-unes). Jean-Yves Apard, le directeur général de la SHGT ne cache pas que la conjoncture n’est pas des plus favorables. « Nous avons hâte que la crise économique s’arrête pour relancer l’activité roulier et que la réforme portuaire puisse enfin se faire pour l’activité des vracs », confie-t-il. Le grand motif de satisfaction pour le responsable est le résultat très prometteur du réseau des terminaux à conteneurs parisiens que sont Evry et Limay. « Il y aura aussi Bruyères-sur-Oise qui n’a pas encore démarré. Sur la région pa-

risienne, nous avons pour ambition à court terme d’atteindre 10000 à 20000 conteneurs par terminaux en un an. Sur ce trafic, nous faisons beaucoup d’orge par conteneurs et nous démarrons le bois. Nous avons été précurseurs pour le vrac en conteneur. Evry a l’avantage d’être au cœur de la plus importante zone logistique de © Éric Houri Paris. Limay est un peu plus concurrencé par la route car plus pro- I Yves Apard, che du Havre » explique le respon- directeur général sable. Au Havre, le trafic du sucre de la SHGT. conteneurisé est également un des cœurs de métier de la SHGT. « Nous sommes ressortis gagnant de la réforme de la politique agricole commune. La France et l’Allemagne exportent maintenant en Europe. Avec des noms prestigieux comme Danone ou Coca Cola, la clientèle a également changé. La traçabilité et la démarche qualité sont devenues des choses importantes pour nous. » Ce trafic est estimé de 50000t à 60000 t par an. Trois silos de 15000 t constituent le terminal sucrier du Havre. Depuis un an, la SHGT a également concentré ses efforts sur le roulier, et ce malgré un contexte économique morose. « Et nous pensons que

cela va payer. Les armements les plus difficiles et les constructeurs autos paraissent réellement satisfaits. Nous avons tout misé sur la qualité et nous avons demandé de gros efforts à nos personnels. » En 2009, un peu plus de 100 000 véhicules ont ainsi transité sur le terminal roulier pour la société. Sur le trafic du vrac, la société intervient au centre minéralier du Havre pour le compte d’EDF. «Malheureusement pour nous, on ne construit pas assez de centrales thermiques à charbon en France, contrairement à ce qui se passe chez nos voisins d’Europe du Nord », regrette au passage JeanYves Apard. Pour le centre multivrac du Havre, un appel à projet doit être lancé. Un centre de broyage de clinker générant 45 emplois en directs et 70 en indirects pourrait voir le jour, un projet porté en collaboration avec la société Vracs de l’Estuaire. Une autorisation préfectorale devrait intervenir en novembre. Les travaux pourraient démarrer au deuxième semestre 2011 pour une exploitation début 2013. F.H. JMM - vendredi 12 novembre 2010 29


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Roulier

DOSSIER LD Lines

Une adéquation avec le marché

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D Lines n’est pas présent depuis longtemps sur le marché du transmanche. Mais déjà la compagnie française tire son épingle du jeu, notamment au Havre. Mais que dit la conjoncture? Christophe Santoni, le directeur général de LD Lines, explique qu’il existe deux marchés pour le transmanche. Il y a tout d’abord le détroit avec les ports de Calais, Boulogne et Douvres. Ce marché est selon ses propres termes « calamiteux » du fait d’une surcapacité énorme et du retour en force d’Eurotunnel. «Cela nous a conduits à arrêter l’activité sur Boulogne », précise-t-il. LD Lines concentre ses activités et ses investissements sur la Manche Ouest, sur un secteur qui va de Dieppe à Roscoff. Au Havre, la compagnie a conservé à peu près le même volume de passagers qu’en 2009, ce qui est convenable compte tenu de la crise (219000 fin août contre 227 000 l’an passé à la même période). «Il n’y a pas eu d’effondrement du prix du ticket car il existe un équilibre entre l’offre et la demande. » Pour le fret, le bilan est moins bon, mais Christophe Santoni apporte une explication. «Nous avions deux navires pouvant prendre du fret l’an dernier. Cette année, la donne est différente puisque nous avons toujours deux navires, un ferry conventionnel et un navire rapide, mais un seul peut prendre du fret. Auparavant, Nous n’avions pas de demande suffisante en fret et il fallait pratiquer des prix plus bas, ce qui nous a décidés à prendre cette option cette année. » La prochaine étape pour LD Lines est le Norman-Leader. Ce navire est actuellement en construction dans des chantiers à Singapour. Il devrait être mis en service au printemps 2011. «C’est un outil parfait pour re30 JMM - vendredi 12 novembre 2010

lier Le Havre à Portsmouth. Il peut accueillir 75 camions et 1 300 passagers. Il disposera de 160 cabines car nous avons une grosse demande pour les traversées de nuit. Il y aura des salons avec 156 sièges sleepers et aussi des sièges économiques. » Ce navire devrait remplacer le Côted’Albatre qui assure actuellement la liaison au départ du Havre.

Un succès commercial Depuis quelques mois, un navire rapide, le Norman-Arrow a été mis en ligne. «Cela nous a permis de proposer des départs de nuit au départ de Portsmouth. C’est un gros succès commercial. Cette formule rapide plaît aux clients. Il faut cependant nuancer par le fait que ce navire n’a pas un énorme potentiel car il ne peut pas naviguer en hiver. Il démarre la saison en mars et s’arrête début septembre. » Le Norman-Arrow, qui a subi fin août une avarie dans le port du Havre en heurtant un duc d’Albe, est actuellement en réparation à Brest. Et les autoroutes de la mer ? « Nous avons pas mal pratiqué par le passé. Nous en avons tiré aussi des conclusions. Le routier reste une solution flexible et peu chère, et un navire ne peut pas le concurrencer à armes égales. Les autoroutes de la mer se développeront uniquement s’il existe une vraie politique avec des projets d’infrastructures. Après cinq ans d’exercice, nous avons fermé Toulon/

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I Christophe Santoni, directeur général de LD Lines.

I Le NormanArrow est un navire rapide, une formule qui plaît aux clients, même s’il ne peut naviguer en hiver.

Rome, et contrairement à ce qui a été dit, c’était un laboratoire. » Christophe Santoni explique qu’à 80 %, les volumes de fret ont été accompagnés. Aujourd’hui, la compagnie se concentre sur la liaison SaintNazaire/Gijon en Espagne. Une ligne prometteuse selon le directeur. Par contre, une ligne au départ du Havre ne serait pas adaptée, concède Christophe Santoni. « Le temps de mer entre Le Havre et l’Espagne est trop long pour les routiers. Les temps de repos des chauffeurs sont codifiés avec une coupure de onze heures minimum. » F.H.

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Pré et post-acheminements

>>> LE HAVRE

Une longueur d’avance pour le fluvial Le mode fluvial a le vent en poupe. Depuis cinq ans environ, il est passé devant le ferroviaire. En dix ans, plus d’un million de conteneurs ont été transportés par le fleuve entre Le Havre et son hinterland.

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eudi 9 septembre. Ce jour-là, en Essonne, est inauguré le tout nouveau terminal à conteneurs fluvial d’Evry mis en œuvre par Ports de Paris et Terminaux de Seine. Bien entendu, le Grand port maritime du Havre et celui de Rouen sont conviés à l’événement auquel assistent acteurs du transport et de la logistique, chargeurs, logisticiens et commissionnaires de transport. Pour cette journée, qui marque un pas supplémentaire dans le développement du fluvial pour les pré et post-acheminements, un thème de table ronde est en débat. Il concerne les avantages et les opportunités que constitue la logistique fluviale, la complémentarité et la pertinence de l’offre fluviale et maritime sur l’axe Seine ainsi que l’optimisation des procédures douanières et des systèmes d’information. Une dizaine de jours auparavant, fin août, un autre événement a témoigné de la place du transport fluvial dans le port du Havre : onze réservoirs de 20 m de longueur et d’un poids unitaire de 46 t sont livrés depuis le port fluvial de Gron-Haute-Bourgogne (Yonne). Ils doivent transiter par le terminal roulier du Havre avant d’être livrés sous d’autres latitudes. Depuis plusieurs mois, un service régulier entre Le Havre et Gron est mis en place. Et pour les industriels de Bourgogne, spécialisés dans la métallurgie, l’utilisation de la voie fluviale est devenue un atout réel. En témoigne l’opération de la fin août pour les réservoirs hydropneumatiques de la société Charlatte. « Ce nouveau succès cu-

mule les atouts de la voie d’eau avec le passage par un port français, au bénéfice de l’environnement et du client pour lequel le coût se trouve réduit de manière significative. Sur ce trafic, le gain environnemental est estimé à 12 t de CO2. Au-delà, la coopération entre les deux ports de Gron et du Havre favorise l’optimisation des coûts logistiques et le développement des échanges internationaux au bénéfice de l’économie du pays », souligne alors Didier Mercey, directeur du port de Haute-Bourgogne.

Près d’un conteneur sur cinq Un temps regardé avec un recul certain qui a pu ressembler à une forme de mépris au profit du tout-routier, le fluvial a maintenant le vent en poupe. Plusieurs logisticiens (tous secteurs confondus) et quelques grandes enseignes de distribution basées au Havre pour la réception de leurs produits fabriqués en Asie, par exemple, en ont d’ailleurs fait un atout en termes de communication, d’image et d’économie. L’axe Seine Le Havre-Rouen-Paris constitue dorénavant le premier complexe portuaire français et permet d’approvisionner le grand marché parisien, premier bassin de consommation français avec plus de 200 millions de consommateurs dans un rayon de 600 km autour de la mégapole parisienne. Il génère plus de 128 Mt de trafics maritimes et fluviaux et évite la congestion parisienne tout en offrant un meilleur temps de transport grâce à la qualité de l’offre maritime du Havre. Depuis le lancement du premier ser-

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vice de transport combiné fluvial sur l’axe Seine fin 1994, dix plates-formes ont été mises en service et sixopérateurs y développent leur activité. Depuis cette date, plus d’un million de conteneurs ont été transportés par le mode fluvial depuis ou vers les terminaux havrais, qui ont traité 160000conteneurs fluviaux en 2009. Entre Le Havre et la région parisienne, près d’un conteneur sur cinq est transporté par voie d’eau. Et le Grand port maritime du Havre a pour ambition d’augmenter encore cette part, en particulier grâce à la mise en service d’un terminal multimodal, prévue d’ici deux ans, puis avec le projet de prolongement du Grand canal du Havre baptisé Emerhode. Grâce à la nouvelle plate-forme d’Evry et sa capacité de 10 000 conteneurs par an, le port du Havre bénéficie donc d’un atout supplémentaire pour favoriser le report modal du trafic conteneurs vers les modes massifiés, en particulier la voie d’eau. Reste néanmoins une incertitude en matière de transports massifiés : la place JMM - vendredi 12 novembre 2010 31


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Logistique

DOSSIER du ferroviaire. Pour l’heure, il tarde à se développer pour cause, entre autres, d’infrastructures insuffisantes. Mais pas seulement. De son côté en tout cas, le fluvial a réalisé des efforts payants pour se développer sur l’axe Seine. Ainsi, en 1996, tandis que le fluvial était quasi confidentiel (moins de 2 %) dans le trafic conteneurs avec l’hinterland du Havre, le fer, lui, était loin devant. Dix ans plus tard, au milieu des années 2000, inversement de tendance. Désormais, c’est le fluvial qui est en tête, puisque dans le trafic conte-

neurs pour l’hinterland. Il représente près de 10 % des échanges contre moins de 7 % pour le ferroviaire.

«Solution unique » À terme, l’objectif du Grand port maritime du Havre est de réaliser un quart de son trafic avec l’hinterland avec des modes massifiés. Et dans cette ambition, le fluvial a clairement pris une longueur d’avance qui ne devrait pas être démentie avant longtemps. Les ports du Havre, de Rouen et de Paris travaillent main dans la main pour proposer des of-

fres globales aux logisticiens et chargeurs du monde entier et en Asie en particulier. «Vu de Shanghai, explique Hervé Cornède, le directeur commercial du GPMH, il faut vendre une solution unique. » C’est d’ailleurs cette solution unique qui a permis de récupérer des marchés jusqu’à présent concentrés sur le nord de l’Europe. Depuis le début janvier, le constructeur automobile sud-coréen, Kia, utilise la plate-forme du Havre pour importer ses modèles avant de leur faire prendre la voie fluviale. St.S.

L’essor des marchés de niche La logistique se développe doucement mais sûrement. Parfois sur des marchés dits de niche.

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e nom est choisi : ce sera Eurochine. Il illustre les derniers développements en date en matière de logistique au Havre. Au cœur du port, un ensemble de vastes entrepôts vient d’être cédé pour 7 M¤ au groupe Eurasia qui y installera un nouveau showroom des produits importés d’Asie. S’étendant sur plusieurs dizaines de milliers de mètres carrés, Eurochine n’a pas vocation qu’à exposer des produits importés. Ce sera, avant tout, un centre logistique, sorte de trait d’union entre l’Asie et le marché français qui représente aujourd’hui environ un tiers des échanges entre le port du Havre et les ports asiatiques.

En attendant le «Magna Park » À l’échelle de la zone portuaire du Havre (30 km de longueur jusqu’à Tancarville), l’avènement d’Eurochine constitue un micro-événement. Néanmoins, il témoigne de la place occupée par le port normand dans le paysage logistique 32 JMM - vendredi 12 novembre 2010

européen. Depuis des années, les projets se multiplient à vitesse variée. Il y a d’abord la version rapide. C’est le cas sur le parc logistique du pont de Normandie (PLPN) où les bâtiments, ces dernières années, ont poussé comme des champignons à raison de milliers de mètres carrés à chaque fois : SDV, Daher, Normandie-Entrepôts et Buffard y sont installés. Depuis 2006, le développeur immobiliser Alsei a lancé son programme de plates-formes multimodales baptisé Stockespace. À terme, il atteindra une offre de l’ordre de 145000 m2 répartis en trois bâtiments et connectés fer, route et fleuve. À ce jour, deux bâtiments sont réalisés. Soit 100000 m2. La Slaur, société de production de spiritueux, est l’un des derniers à avoir signé pour installer ses entrepôts d’import-export aux côtés de SD’Log ou Vatinel Heppner Logistique. À deux pas du PLPN, le logisticien Gazeley a réservé une zone de 40 ha

© Éric Houri

I Hervé Cornède, directeur commercial du GPMH

pour un ensemble de 180 000 m2, le «Magna Park ». Depuis plusieurs années, le terrain a été préparé. Mais, à ce jour, aucune construction n’est encore sortie de terre. «C’est une autre stratégie que les autres logisticiens, souligne un proche du dossier. Gazeley attend d’avoir un client pour lancer son programme et lui louer les lieux. » Comme le parc logistique du pont de Normandie, le futur Magna


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>>> LE HAVRE Transports routiers Des innovations pour désengorger les terminaux Des heures d’attente et parfois d’interminables files de poids-lourds aux abords des terminaux : c’est un spectacle régulier dans le port du Havre où se croisent quotidiennement quelque 10 000 camions. Pour tenter d’effacer cet engorgement récurrent, le GPMH travaille à plusieurs solutions. La première d’entre elles, la plus visible, concerne un système de repérage sur la zone industrielle portuaire. C’est le principe de « l’entonnoir » qui permet aux conducteurs de mieux se repérer grâce à un dispositif de numérotation précise. Exemple : tel entrepôt est situé au point 3665. À l’approche du port, les chauffeurs sont guidés d’abord vers l’espace Port 3000 à 4000, puis 3500 à 4000 jusqu’au point exact. Expérimental en France, le système existe déjà dans les ports nord-européens où il aurait fait la démonstration de son efficacité. Après Le Havre, ce système dit de jalonnement pourrait être étendu à d’autres places portuaires françaises. Le principe de « l’entonnoir » doit permettre de mieux fluidifier le trafic routier. De nouvelles infrastructures doivent également voir le jour au cours des prochains mois pour faciliter l’accès aux terminaux. Reste la question, essentielle, de la rapidité avec laquelle sont servis les camions sur les terminaux. Pour les manutentionnaires il s’agit, dans une période incertaine, d’engager des investissements lourds pour acquérir de nouveaux cavaliers et élargir l’amplitude horaire d’ouverture des terminaux, que ce soit à Port 2000 ou sur le terminal de l’Europe, régulièrement engorgé. © Éric Houri

Park sera connecté à tous les modes de transports. Et son développement pourrait d’ailleurs connaître un coup d’accélérateur. En effet, il est situé près de la future plate-forme multimodale qui verra le jour dans les deux ans, sur la rive nord du Grand canal, à l’est du barreau autoroutier A29. Une plate-forme lancée par le Grand port maritime en association avec Projenor. Sur le parc du Hode, Prologis, qui a déjà réalisé deux programmes de l’ordre de 40000 m2 chacun, a réservé des espaces pour un troisième bâtiment.

mande pour importer une partie de sa production, notamment la gamme «Mini ». Dans un domaine différent, le luxe – premier ambassadeur de la France à l’étranger – n’est pas en reste. Le groupe LVMH a choisi Le Havre pour exporter certains de ses produits, comme le champagne, un nouveau trafic arrivé en Normandie au cours de ces derniers mois au détriment des ports de l’Europe du Nord. Le champagne rejoint ainsi le Cognac, qui a l’habitude de transiter par Le Havre. Sans compter les développements dans le secteur du froid avec l’AméLuxe et froid rique du Sud, une spécialité havraise. Peu à peu, la logistique se développe Ces dernières années, le domaine du au Havre, parfois sous des formes très différentes. «Nous avons un réel potentiel », estime Hervé Cornède, le directeur commercial du GPMH qui parcourt le monde pour vendre la place normande. Mais pas seulement, puisqu’en association avec ses collègues de Rouen et de Paris, il promeut désormais «la solution Seine ». Témoin du travail accompli et des capacités havraises, le port a récemment capté plusieurs nouveaux marchés. C’est le cas dans l’automobile : outre le constructeur coréen Kia, le groupe BMW a choisi la place nor-

froid a connu une véritable expansion sur une zone parfaitement adaptée près du Poste d’inspection frontalier (PIF) entre le terminal roulier et les terminaux de Port 2000. C’est là qu’en 2007, Capgel a lourdement investi. Deux ans auparavant, le bas-normand Godfroy a également investi dans un entrepôt de froid. En juillet dernier, le groupe a été racheté par le japonais Nichirei Corporation, via sa filiale Nichirei Holland Holding qui compte bien affirmer le positionnement du Havre dans son dispositif mondial. Le groupe nippon exploite, sur le sol européen, près d’1,5 Mm3 frigorifiques. St.S.

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Services aux navires

DOSSIER Pilotage

Des navires toujours plus gros

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a station de pilotage Le HavreFécamp dispose aujourd’hui de six pilotines et d’un hélicoptère Dauphin-N. En juin 2011, une des vedettes va être remplacée. «Nous travaillons toujours avec les chantiers Bernard à Lorient. Une pilotine a une durée de vie de 18 ans et nous en changeons une tous les trois ans. C’est toujours le même type de vedette avec de petites améliorations en termes de sécurité. La prochaine qui va nous être livrée dispose par exemple d’un système de rail autour de la vedette qui permet au pilote de se crocher », explique François Le Guern, qui a été réélu en mars 2010 à la présidence de la station. L’hélicoptère qui a été mis en service en 2006 et qui va passer une grande visite en début d’année est utilisé à la fois sur le port d’Antifer mais aussi pour les grands porteconteneurs de Port 2000. «Aujourd’hui, plus de 15 % des navires sont servis par l’hélicoptère. Nous avons rationalisé les vols. Au final, Il n’y a pas de surcoût pour les armateurs. » À la station de pilotage, la conjoncture économique morose a conduit à supprimer un poste de marin sur Fécamp et un autre poste à l’atelier du Havre. La structure emploie aujourd’hui 51pi-

© Éric Houri

lotes et 46 personnes non navigantes. «C’est la première année où l’on ne fait pas de concours de recrutement », précise le président qui ajoute au passage que la station a compté jusqu’à 59 pilotes il y a quelques années. Et le trafic? Pour le responsable, le nombre d’escales traité est à relativiser avec la taille des navires. « Nous avons encore franchi un cap avec les 14 000 EVP. En 2009, nous avons traité 1503 escales contre 2028 en 2007. Nous avons été frappés par la crise comme tout le monde. » Il existe tout de même des motifs de satisfaction comme le trafic roulier. « Il y a

eu de gros efforts de fait là-dessus. Le trafic est revenu avec 400 escales par an. Les résultats sont également bons avec les chimiquiers. Cela représente une cinquantaine d’escales supplémentaires cette année. » Côté formation, les pilotes se sont adaptés au gigantisme avec une formation de six ans pour faire du tout-tonnage, contre cinq ans auparavant. Les stages se multiplient grâce au simulateur de la station. « Nous avons un bon retour d’expérience grâce à un suivi individuel des pilotes. Nous adaptons aussi nos formations à la demande des armateurs », précise François Le Guern. Le simulateur a notamment été mis à disposition des pilotes de Dunkerque. La station Le Havre-Fécamp a également signé en novembre 2009 une convention avec le Cross Jobourg sur l’utilisation des moyens. «Il y a toujours une vedette en rade et nous sommes souvent les mieux placés pour intervenir. Ce sont des choses qui intéressent le Cross. » Côté événementiel, la station a organisé mi-octobre un bureau fédéral élargi au Havre, l’occasion de rencontrer des représentants de toutes les stations de France et d’outre-mer. F.H.

Remorquage

Boluda, des parts de marché qui se maintiennent

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epuis le 1er avril 2009, l’opérateur de remorquage portuaire Boluda au Havre a mis en place une nouvelle organisation suite à la suppression de 36 postes de navigants. Aujourd’hui, l’entreprise dispose au 34 JMM - vendredi 12 novembre 2010

Havre de huit remorqueurs dont sept armés en service continu. «Jusqu’au 1er avril 2009, nous avions neuf remorqueurs plus un. Avec la nouvelle donne, notre objectif a été de maintenir une même qualité de service pour nos

clients. Même si la flotte a été réduite, nous avons été capables d’absorber le trafic », explique François Leray, le directeur de Boluda au Havre. L’âge de la flotte est en moyenne de cinq ans. Les remorqueurs les plus récents,


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>>> LE HAVRE d’une capacité de traction de 70 t chacun, ont été réceptionnés en 2008. Il s’agit du VB-Yport et du VB-Octeville. François Leray explique que le trafic a été perturbé par l’arrêt provisoire du terminal d’Antifer il y a un an et demi. « L’activité normale est revenue en février 2010. » Les mouvements sociaux sur le port ont également contraint l’entreprise à travailler selon des pics d’activité. Le trafic d’une journée doit parfois être traité en quelques heures seulement. «En termes d’activité globale, l’année 2007 a été une bonne année avec 12000remorques. Aujourd’hui, nous revenons à un niveau similaire aux années 20042005, soit aux alentours de 10500 remorques. Sur la place du Havre, les parts de marché avec le concurrent se maintiennent. Nous détenons 63 % du marché », analyse le responsable. Depuis le 1er janvier 2010, Boluda a récupéré comme client Hapag Loyd. Autre constat, le besoin moyen de re-

morqueur sur Port 2000 est inférieur aux demandes de passage de l’écluse François Ier. «À Port 2000, les navires sont de plus en plus gros. Il y a moins d’escales. » Sur l’année 2010, quatre remorqueurs de Boluda ont été certifiés ISM, une certification liée à la sécurité. Les autres devraient l’obtenir courant novembre. «Nous étions déjà certifiés ISO 9001 depuis 2008. Mais il s’agit d’une nouvelle étape.

Ce n’est pas une obligation, mais la volonté de notre groupe s’inscrit dans la prévention des risques environnementaux et le management lié à la sécurité. Cela correspond à des attentes de nos clients et du port. » François Leray, comme beaucoup d’autres acteurs portuaires, espèrent une reprise du trafic pour l’année à venir. F.H.

© Éric Houri

Société nouvelle de remorquage du Havre, l’heure est à la réflexion

L’

ambiance est un peu morose au sein de la SNRH, l’opérateur de remorquage portuaire qui se partage le marché au Havre avec son concurrent Boluda. «Comme tout le monde, nous avons été frappés par la crise économique. Pour l’année 2010, nous espérions une reprise qui finalement n’est pas arrivée. Et puis il y a aussi les mouvements sociaux qui se répètent sur le port. Il faut gérer les jours d’avant et d’après grèves avec des pics d’activité », constate Nathalie Bartelse, directrice commerciale à la SNRH. Aujourd’hui, l’entreprise a environ 40 % du marché sur la place havraise. Depuis le 26 juillet, la SNRH a

été contrainte par l’administration de changer son mode d’organisation du travail, un épisode de plus dans des divergences de point de vue qui durent depuis plusieurs années. «Sur les six remorqueurs dont nous disposons, nous n’en n’exploitons que quatre. Nous avons adopté le système de 12 heures à bord et 12 heures débarqués. » Les responsables de la SNRH ne cachent pas que cette nouvelle donne les empêche de développer leur activité comme ils le voudraient. « Cela fait cinq ans que nous nous battons pour défendre l’entreprise. On subit les choses. Il semble plus facile de taper sur un petit comme nous

que sur un gros. Les règles sont contraignantes. C’est un vrai carcan », complète Pascal Riteau, responsable d’exploitation à la SNRH. Au sein de la société, l’heure est à la réflexion après le coup porté par l’administration en juillet. «On ne voit pas l’avenir d’une manière radieuse. Nous nous posons beaucoup de questions. Le cadre réglementaire n’a jamais été clair et il faudrait le revoir », estime Nathalie Bartelse. Les responsables attendent également beaucoup de la mise en place de la réforme portuaire et d’une reprise du trafic sur le port du Havre. F.H. JMM - vendredi 12 novembre 2010 35


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