Immobilier logistique : l'entrepôt se plie à la demande

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Immobilier logistique

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L’entrepôt se plie à la demande P. 60

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Entrepôts anciens : faut-il les réhabiliter ? P. 68

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Plates-formes urbaines : les projets se multiplient P. 80

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L’entrepôt se plie à la demande ■ Les transactions immobilières témoignent du déplacement des utilisateurs dans de nouveaux entrepôts logistiques plus que d’une extension des surfaces. Que faire des entrepôts disponibles ? L’offre de modes de transport alternatifs à la route est un plus pour placer un produit. La certification HQE devient le passage obligé.

REPÉRAGE > L’Île-de-France commence bien l’année. Le Nord-Pas-de-Calais souffre moins que d’autres régions. > Des plates-formes logistiques disponibles sont réhabilitées, mises aux normes, adaptées aux besoins de leurs occupants. > Les parcs logistiques séduisent les clients par leurs avantages précieux en temps de crise.

1er semestre 2010 : reprise des ■ L’année 2010 a bien commencé en région parisienne et devrait continuer sur sa lancée. Il faudra attendre 2011 pour une amélioration dans les autres régions.

> La protection de l’environnement se déploie au-delà de la certification Haute qualité environnementale qui, ellemême, s’étoffe.

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010 sera une année contrastée : les transactions d’immobilier logistique ont repris en Îlede-France mais stagnent ailleurs. «Le 1er trimestre a été remarquable en région parisienne, avec 300000 m2 placés, indique Didier Malherbe, directeur général adjoint de CB Richard Ellis. Le

deuxième trimestre a été moins bon, mais des projets vont sortir aux troisième et quatrième trimestres. Nous devrions atteindre 600 000 m2 pour l’année sur la région, c’est mieux qu’en 2009. Il s’agit pour partie d’affaires de 2009 retardées. L’Île-de-France est attractive car elle offre un choix en volume et de qualité, et diversifié. »

“Si le second semestre se poursuit comme le premier, ce sera déjà bien”, MAGALI MARTON, DIRECTRICE DES ÉTUDES POUR LA ZONE CEMEA CHEZ DTZ


transactions en Île-de-France La remontée de Paris en 2010 suit une année mauvaise alors que les régions s’étaient mieux maintenues. Ce sont maintenant elles qui souffrent.Au total sur la France, et pour les entrepôts de plus de 10 000 m2, « la demande placée baisse de 11 % au premier semestre 2010, de 933500 m2 (1er semestre 2009) à 830 300 m 2, informe Magali Marton, directrice des études pour la zone Cemea chez DTZ. Lyon baisse de près de 50 % et le marché est atone à Marseille. Ailleurs, les transactions sont stables à 216000 m2. Si le second semestre se poursuit comme le premier, ce sera déjà bien. Il suffit d’une ou deux opérations pour faire la dif-

férence. La commercialisation devient plus équilibrée entre produits neufs et de seconde main. » La région lyonnaise subit le contrecoup des surfaces construites ces dernières années. Plusieurs acteurs de l’immobilier logistique reconnaissent que la crise de 2008 n’est pas la seule responsable du coup d’arrêt des transactions. « Les entrepôts se sont beaucoup développés ces quinze dernières années,rappelle Jean-Marie Guillet, directeur de la logistique France à l’Agence Jones Lang Lasalle. La production spéculative de cet actif a été très importante. Que nous arrivions à une période d’absorption n’a rien d’étonnant. Nous

“Le 1er trimestre a été remarquable en région parisienne”, DIDIER MALHERBE, DIRECTEUR GÉNÉRAL ADJOINT DE CB RICHARD ELLIS. sommes dans une période où le produit doit évoluer et répondre davantage aux besoins spécifiques des utilisateurs. »

Le stock baisse en Île-de-France Le dynamisme de la région parisienne laisse augurer une amélioration ailleurs en 2011 mais

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Les courbes de l’offre et des transactions s’éloignent

Prologis a signé un accord pour un bâtiment clé en main de 31 800 m2 sur son parc Chanteloup à Sénart (Seine-et-Marne), à livrer d’ici à 2011.

les acteurs de l’immobilier restent prudents. «Le climat économique est encore chahuté, les indices de confiance sont loin d’être revenus en zone positive », indiquait DTZ début juillet. L’activité reprenant en région parisienne dans un contexte où la construction neuve baisse, les utilisateurs se reportent sur les

2010 contre 489000 au 1er semestre 2009) avec principalement du seconde main,ce qui est alarmant selon DTZ Research.Les Bouchesdu-Rhône passent la barre des 100000 m2 (191900 contre 95600) et le Nord-Pas-de-Calais aussi, mais avec modération (147800 contre 95600).

Loyers : du mieux l’année prochaine

“Nous sommes dans une période où le produit doit évoluer et répondre à des besoins spécifiques”, JEAN-MARIE GUILLET, DIRECTEUR LOGISTIQUE FRANCE À L’AGENCE JONES LANG LASALLE.

surfaces existantes. Mais globalement,le stock ne désemplit pas : 2,5 millions de mètres carrés vides au 1er semestre 2009 et 2,78 millions au 1er semestre 2010. L’Îlede-France s’allège un peu avec 839 000 m 2 disponibles au 1er semestre au lieu de 863 500 l’année dernière à la même époque (chiffres DTZ). Lyon franchit les 500000 m2 (585000 au 1er semestre

Malgré les transactions du premier semestre, l’offre reste donc à un niveau élevé : 1,8 million de mètres carrés de classe A étaient immédiatement disponibles au début de l’année (chiffre Jones Lang Lasalle). «En Île-de-France, il peut y avoir pénurie dans le Nord et l’Ouest, alors que le reste de la région dispose d’un stock à placer, note Didier Malherbe. L’offre de seconde main grossit et sa qualité baisse. L’écart de loyers entre les produits “prime” (haut de gamme) et les autres ne s’est pas creusé, ce qui signifie que ceux des entrepôts de seconde main seront amenés à baisser. Il est difficile d’envisager d’augmenter les prix par le haut à cause de la concurrence euro-

1er semestre 2010 : demande placée en baisse de 11 % Zone France

1er semestre 2010

1er semestre 2009

Variation 2010/2009

830 300 m2

933 500 m2

- 11 %

m2

m2

+ 23%

Île-de-France

407 700

Nord-Pas-de-Calais

97 200 m2

147 600 m2

- 34 %

Région lyonnaise

87 300 m2

173 600 m2

- 50 %

24 100

m2

64 300

m2

- 63 %

214 000

m2

216 000

m2

stable

Bouches-du-Rhône Autres marchés

Source : DTZ Research, entrepôts de plus de 10000 m2

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péenne,par exemple avec la Pologne, les Pays de l’Est et l’Allemagne. » Les loyers sont compétitifs en France. « Nous disposons d’un grand parc logistique et de qualité, à des prix inférieurs à ceux de la Grande-Bretagne et de l’Allemagne, par exemple, observe René Jeannenot,directeur du pôle logistique Île-de-France de BNP Paribas Real Estate. Beaucoup de baux ont été renégociés, les propriétaires ont cherché à conserver leurs locataires. À la prise d’un nouveau bail, les mesures d’accompagnement existent toujours. » Un bail de douze ans fermes est considéré comme une très bonne nouvelle. C’est sur cette durée qu’Argan loue à Castorama la plate-forme de 72 600 m2 à Châtres (Seineet-Marne) qu’il a rachetée à AEW Europe (commercialisation CB Richard Ellis). Certains constatent une stabilisation des loyers. DTZ nuance. «La tendance est toujours à la baisse en loyer facial, et en réel de l’ordre de 10 % mais la dorsale Nord-Sud s’en tire mieux que le reste du pays, indique Magali Marton. Il faudra attendre 2011 pour voir les loyers augmenter en Île-de-France et probablement 2012, à Lyon et Marseille. »

Reprise des investissements Les loyers s’établissent autour de 50 € par mètre carré et par an en Île-de-France selon la localisation.À Lyon,ils tournent autour de 45 €. Lille propose des locations d’entrepôts logistiques aux


Transactions en France par nature d’entrepôt

Offre en France par nature d’entrepôt (Source : BNP Paribas real Estate - Research, juillet 2010)

environs de 43 €.Marseille se situe un peu en dessous et en légère baisse par rapport à 2009. Les mesures d’accompagnement se renforcent (franchise de loyers). Les baux se fragilisent. «Les logisticiens reprennent en location de petites surfaces et plus souvent qu’avant en précaire, c’est-à-dire un bail de trois ans avec sortie possible à vingt-quatre mois », explique René Jeannenot.«Dans l’existant, l’engagement n’excède pas trois ans, constate Didier Malherbe. En neuf clé en main, il s’allonge à six ans, l’idéal étant neuf ans. » L’investissement en entrepôt logistique reprend. «C’est le fait des investisseurs spécialisés en logistique », remarque Magali Mar-

ton. Ils ont dépensé 270 M€ au premier semestre 2010 dont la moitié en région parisienne,selon DTZ, contre 360M€ pour l’année entière 2009 (390 M€ en incluant les 5000/10000 m2). Les taux de rendement des investissements sont sous pression. De 8 % en 2009, ils se contractent à 7,20 % en Île-de-France et région lyonnaise. Marseille et Lille se maintiennent à 8 %. Les autres régions sont stables. «Les investisseurs restent sur des marchés matures et moins risqués », commente DTZ. La tendance vaut pour l’Europe de l’Ouest. «Dans de nombreux pays, la compression des taux est l’expression d’une anticipation de l’amélioration des mar-

“Nous disposons en France d’un grand parc logistique et de qualité”, RENÉ JEANNENOT, DIRECTEUR DU PÔLE LOGISTIQUE ÎLE-DE-FRANCE DE BNP PARIBAS REAL ESTATE. chés d’investissement et de l’intérêt croissant porté par les investisseurs », écrit Jones Lang Lasalle dans son indice européen de juillet 2010.

Encore et toujours la dorsale Nord-Sud Un marché immobilier en berne a ses attraits pour les occupants

Leroy Merlin choisit ID Logistics à Valence ID Logistics continue sa percée route A7 avec une réserve dans l’entrepôt. En 2012, 10 000 dans la grande distribution non foncière pour deux cellules références y seront traitées. alimentaire. Après Alinéa en 2009 supplémentaires, l’enseigne va Trois flux se côtoient : libre(articles maison et service, commande jardin), il se voit confier client et emporté par Leroy Merlin la marchandise. Le bâtigestion de la nouvelle ment est en forme de plate-forme de 54 000 m2 H, ce qui réduit les sur la Zac de la Motte à distances à parcourir à Valence (Drôme). Le l’intérieur. La partie distributeur entend centrale abrite la augmenter la part de réception, l’expédition Les liaisons fluviales et ferroviaires à partir du site vont se développer. marchandises qui transite et le transit. Le stocpar entrepôt et ainsi la kage est reporté dans qualité de service en magasin distribuer des références natioles allées latérales. Leroy Merlin a (110 points de vente). Il prévoit nales stockées uniquement ici et instauré la même organisation une augmentation de 25 % de des produits dits régionaux interne que sur sa plate-forme l’activité de Valence en trois ans. répartis sur plusieurs sites. Une gérée en propre à Dourges (PasÀ partir du site qui borde l’autocentaine de personnes travaille de-Calais).

L’entrepôt comporte des dispositifs contribuant au développement durable : puits de lumière naturelle, production d’électricité par cellules solaires, etc. À terme, il sera connecté au transport fluvial et ferroviaire. Les conteneurs pourront être transportés par péniche depuis Fos-sur-Mer (Bouches-duRhône). Le train acheminera du carrelage italien et sera le support des expéditions en direction du nord de la France. Des outils de mesure et de suivi de l’empreinte carbone (émissions de gaz à effet de serre) de l’activité de la plateforme, y compris du transport, seront implantés.

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Montauban : regroupement d’un distributeur Cette transaction immobilière logistique de DTZ témoigne de la volonté de regroupement des acteurs de la grande distribution. Colruyt, chaîne belge de magasins alimentaires et produits connexes, cherchait un site récent avec les autorisations ICPE (installation classée) sur Montauban (Tarn-etGaronne). Elle voulait y regrouper son activité auparavant répartie sur plusieurs

entrepôts dans la même agglomération. L’offre est rare sur le secteur. Elle signe donc en juin, auprès d’Axa Real Estate, le rachat d’un entrepôt de 18 200 m2 construit par Gazeley en 2007. Rappelons que le distributeur belge dispose d’une filiale en France, Codifrance, et de magasins sous franchise. Il vend de professionnel à professionnels, ou de professionnel à particuliers.

Le Belge Colruyt regroupe son activité sur un seul site, à Montauban, (Tarn-et-Garonne) où il était déjà.

d’entrepôts. Un certain nombre peut «profiter de l’attractivité du marché pour se déplacer dans des locaux de meilleure qualité à un prix intéressant », remarque Didier Malherbe. Les implantations se concentrent toujours sur la dorsale Lille/Paris/Lyon/Marseille, alliant gros bassins de consommation et infrastructures denses. «Industriels, grands distributeurs et prestataires logistiques restent prudents quant à leurs décisions d’extension, relève Jean-Marie Guillet. Leurs mouvements sont

“Nous commençons à réenvisager des acquisitions de terrain”, MARC TERREL, DIRECTEUR DU DÉVELOPPEMENT DE GICRAM-GEMFI.

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motivés avant tout par la recherche d’économies, la rationalisation des sites et l’optimisation des flux ». Au niveau européen, « les utilisateurs privilégient principalement les espaces modernes et modulables avec de bonnes liaisons aux infrastructures de transport locales,

Les logisticiens auraient encore des surfaces disponibles qu’ils louent en direct à des chargeurs à des conditions avantageuses. S’ils commencent à relouer, ce sont de petites surfaces. Les chargeurs, après avoir complètement externalisé leur logistique,se réap-

“Les prestataires cherchent des occupants à saisonnalité complémentaire”, DIDIER TERRIER, DIRECTEUR LOGISTIQUE FRANCE DE DTZ.

écrit Jones Lang Lasalle (indice juillet). Bien que les propriétaires de produits de seconde main offrent des conditions locatives souvent très compétitives, ces entrepôts ne sont pas à la hauteur des exigences des clients potentiels. Ils restent vides ». Un site à « défauts » – faible hauteur, moindre accès au transport multimodal,etc.– trouvera preneur avec un bail plus souple. Cela peut toutefois intéresser un occupant à court terme. Hors de la dorsale, les opérations sont surtout réalisées en clé en main, pour répondre au besoin précis de l’occupant.

proprient l’immobilier et y installent un prestataire. Plusieurs acteurs notent un frémissement sur les appels d’offres de service logistique. «La logistique est vite impactée en cas de crise mais elle peut aussi rapidement se redresser, souligne Didier Terrier. Sur la région lyonnaise, beaucoup de clés en main se font au détriment des entrepôts existants. La demande d’immobilier sera plus forte en 2011. Le second semestre 2010 devrait déjà être meilleur que le premier. Certains dossiers en cours vont se concrétiser cet été. »

Occupants à saisonnalité complémentaire

Opérations à livrer en 2011

Les prestataires cherchent à regrouper plusieurs clients sur un même site ou plusieurs implantations sur une seule. « Ils cherchent des occupants à saisonnalité complémentaire : par exemple, l’un aura un stock important de mai à décembre avant Noël, tandis que l’autre, qui vend des produits d’été, l’aura de décembre à mai, explique Didier Terrier, directeur logistique France chez DTZ. Les chargeurs restent encore très frileux, ils attendent pour prendre des décisions et résistent aux incitations des prestataires à regrouper leur stock pour faire des économies d’échelle. » Norbert Dentressangle a tout de même regroupé plusieurs clients sur une nouvelle plateforme de 85 000m2 au CoudrayMontceaux (Essonne).

Cette année est donc porteuse d’espoirs à défaut de certitudes. « Nous commençons à réenvisager des acquisitions de terrain pour monter des opérations livrables sur fin 2011 et sur 2012, confie Marc Terrel, directeur du développement de Gicram-Gemfi. Nous avons pris des positions foncières en extension de terrains situés sur nos opérations existantes. Nous regardons du foncier dans le nord de la France, du côté du Canal Seine Nord Europe et autour du bassin parisien. Deux critères nous guident pour conforter les investisseurs : le raccordement fer et la certification HQE du bâti. Le critère décisif d’implantation reste le bassin de consommation mais pas nécessairement sur la dorsale NordSud. » Monique Trancart


Le nord de la France multiplie ses atouts ■ La région Nord-Pas-de-Calais est au cœur des flux de marchandises entre les ports belges et hollandais et le reste du pays, et elle capte ceux vers la GrandeBretagne. Cette position, confortée par la perspective du Canal Seine-Nord Europe, limite les effets de la crise économique sur l’immobilier logistique.

A

u dire de plusieurs acteurs de l’immobilier logistique,la région Nord-Pas-de-Calais est celle qui a le mieux résisté de toutes en 2009, y compris par rapport à l’Île-de-France, et celle qui souffre le moins au premier semestre 2010 parmi les pôles régionaux de la dorsale NordSud.«Je suis agréablement conforté par le dynamisme de la région,

“L’offre de bâtiments existants est confortable mais sans plus”, ANTOINE TOSTAIN, COGÉRANT DE TOSTAIN & LAFFINEUR REAL ESTATE. confie Antoine Tostain, cogérant du cabinet Tostain & Laffineur Real Estate, qui ne s’avoue pas surpris de cette performance. Nous connaissons au sud de Lille un développement équivalent à celui des environs de Paris ou de Lyon il y a dix ans. » Ce cabinet estime avoir traité 120 000 m2 des 180000 m2 de transactions réalisées sur la région en un an

“J’encourage tous les investisseurs à s’intéresser au Nord-Pas-de-Calais et à la vallée de Seine”, JEAN-CLAUDE BOSSEZ, PRÉSIDENT DE L’AFILOG. (juin 2009-fin mai 2010). « Le marché est resté assez dynamique et nous avons encore pas mal de dossiers en étude ou en perspective, complète-t-il. Deux projets de 100 000 m2 chacun sont au stade de la réflexion. » Parmi les opérations récentes de Tostain & Laffineur, citons Geodis Logistics, qui loue 18 000 m2 à Hem (Nord), ID Logistics en location sur 25000 m2 à Libercourt (Pas-de-Calais) pour Pepsico, PSD Log sur 35000 m2 à Oignies (Pas-de-Calais), ou encore Trenois Descamps, spécialisé en quincaillerie professionnelle, qui a acheté une plateforme logistique de 17000 m2 à Lesquin (Nord) pour soutenir son développement. Les entre-

pôts logistiques immédiatement disponibles couvrent tout de même 150000 m2,toujours selon la même source.

Pénurie de surfaces à moyen terme ? BNP Paribas Real Estate estime à 240 000 m2 l’offre disponible en moins de six mois d’entrepôts de plus de 5000 m2, toutes classes confondues. Des permis de construire pour 192 000 m2 ont été obtenus. De son côté, Tostain & Laffineur avance un chiffre de 500000 m2 de permis de construire et parcs logistiques prêts à construire, sur sept sites hors métropole lilloise. «L’offre de bâtiments existants est confortable mais sans plus, nous ne pou-

Trenois Descamps, spécialisé en quincaillerie professionnelle, a acheté une plate-forme logistique de 17 000 m2 à Lesquin (Nord) pour soutenir son développement.

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vons pas vraiment parler de suroffre, indique Antoine Tostain. Il se peut que dans trois/quatre ans, nous soyions en pénurie d’entrepôts. » L’immobilier est de qualité et la région, prisée. « J’encourage tous les investisseurs à s’intéresser au Nord-Pasde-Calais et à la vallée de Seine », déclare Jean-Claude Bossez, président de l’Afilog (1). Le trafic de marchandises en direction de la Grande-Bretagne passe par la région. Quant au Canal Seine Nord Europe permettant de relier la Seine et l’Escaut, non seulement il induit la création de

400 000/500 000 m2 de platesformes logistiques de part et d’autre, mais il participe au développement d’un axe qui se prolonge vers l’ouest sur la Seine. Par ailleurs, il va conforter les flux en provenance du Sud de la France, notamment parce qu’il s’inscrit dans le réseau fluvial, mode de transport plus favorable à l’environnement que le routier. Le port de Marseille, qui ne peut pas accueillir les navires de très gros tonnage, capte plutôt les flux en provenance de la Méditerranée et des pays du Golfe.

Cambrai bien placée

Parcolog 2 en gris à Hennin-Beaumont L’emplacement fera-t-il tout ? L’avenir dira si la plate-forme Parcolog 2 à Hénin-Beaumont, dans le sud du Pas-de-Calais limitrophe du Nord, va se remplir comme attendu. Début juillet, elle n’avait pas encore trouvé preneur. Le parc de 17 ha dans lequel investit Parcolog (Generali) se situe tout près de l’autoroute A1. Le permis de construire vient de sortir après résolution des aléas, et les autorisations d’exploiter sont obtenues. Les constructions démarreront quand un candidat pour un entrepôt aura signé. Il pourra s’y installer dans les dix mois. Le site peut accueillir deux bâtiments de 37 000 et 43 000 m2,

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avec treize cellules de 6 000 m2. « Il s’agit d’un des meilleurs emplacements du sud de la métropole lilloise, précise Antoine Tostain dont le cabinet est chargé de commercialiser la plate-forme. Geodis, Boulanger et ID Logistics sont déjà implantés dans Parcolog 1, également en façade de l’A1. » Le site d’Hénin Beaumont se situe à dix minutes au sud de Dourges et de sa plate-forme trimodale Delta 3*, elle-même reliée à de grandes infrastructures ferroviaires et fluviales et bientôt au Canal Seine Nord Europe. *Terminal de transport combiné à conteneurs (route, fer, canal) mis en service en 2003, 330 000 m2 de surface logistique.

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« Le futur canal deviendra une voie importante : le sud de la France sera plus facilement desservi à travers lui que depuis un accès par la Méditerranée, abonde Antoine Tostain. Dans un premier temps, il va drainer du vrac, puis la logistique et le transport de palettes vont suivre. » L’association Cambrésis Développement Economique (2), qui émane de communes voisines du tracé du futur canal, vend des terrains sur les 180 ha de son Actipole (autoroute A2). Elle vient d’accueillir deux nouveaux utilisateurs de logistique. La marque de prêt-àporter Morgan reprend sa logistique internationale en interne.

L’entrepôt occupé par son précédent prestataire, DHL, passe aux mains de C-Log, filiale logistique du groupe Beaumanoir qui vient de racheter Morgan. Les articles arrivent par conteneurs sur ce site. « La localisation stratégique, la qualité des salariés et la possibilité de doubler la surface du bâtiment pour atteindre 22000 m2 ont séduit C-Log », écrit l’association. Toujours sur l’Actipole de l’A2, Lidl France fait construire une plate-forme de 44 000 m 2 qui sera livrée en novembre. Elle livrera ses 70 magasins dans le secteur. Là encore, c’est la localisation, la qualité des infrastructures du bassin d’emploi et de l’accueil qui ont séduit. Quant à Fleury Michon Traiteur, il a viabilisé les 6 ha qu’il a achetés en vue de construire une unité de production avec un entrepôt de surgelés. « Les acteurs locaux ont bon espoir de voir une première tranche opérationnelle se construire pour l’automne 2012 », avance prudemment Bernard Lauverjat, directeur de Cambrésis Développement Economique.

Vingt fois moins cher qu’Anvers La localisation à proximité de la frontière belge et des Pays-Bas, Situé en bordure de l’autoroute A1, Parcolog 2 est lancé en gris. Son pendant, Parcolog 1, lui aussi proche de l’A1, a de son côté trouvé preneurs.


Proposer des plates-formes à l’acquisition «Au 1er semestre 2010, Lille, en deçà de ses performances habituelles, réussit néanmoins à maintenir le cap avec six transactions totalisant 76000 m2 d’entrepôts logistiques de plus de 5000 m2, dont DHL à Dunkerque pour 11 450 m2 », écrit début juillet le service études de BNP Paribas Real Estate, conseil en opérations immobilières*. «En 2009, le Nord-Pas-de-Calais est le marché qui a le mieux résisté à la récession avec plus de 200000 m2 commercialisés », indique Tiphaine Chatton, chargée d’études activités logistique et commerce. En volume, la baisse a été limitée à 18 % entre 2008 et 2009. Les transactions se sont inscrites dans la moyenne des années précédentes, en dépit d’un nombre réduit de commercialisations. Les opérations en compte propre et en clé en main de très grande taille ont soutenu ce marché. En revanche, la prépondérance des transactions au profit de logisticiens, comme celle de Wincanton à Houplines sur 21000 m2 pour Inbev, est moins

en direction des ports d’Anvers, Rotterdam et Amsterdam, intéresse des sociétés de dimension internationale. « Deux hectares sur notre parc coûtent vingt fois moins cher qu’une surface identique en banlieue d’Anvers, précise Bernard Lauverjat. De plus, les entreprises qui décideront de s’implanter ici avant fin 2012, bénéficient d’avantages fiscaux et sociaux, car nous sommes sur une Zone de restructuration Défense. » Les grandes enseignes qui dépotaient les conteneurs près des ports de Hollande et de Belgique, il y a quelques années, transfèrent cette activité en France avec une distance d’une heure et demie, deux heures en camion, autour des axes autoroutiers (A1, A2). «Être un couloir derrière les grands ports est un plus pour la région,

traditionnelle. Le marché est habituellement dominé par les chargeurs, notamment locaux, de la vente à distance et de la grande distribution spécialisée. En 2009, par souci d’économie et pour se garantir une plus grande souplesse, les chargeurs ont

les classes B et C s’est creusé. «La livraison début 2010 de 40000 m2 d’entrepôts à LauwinPlanque lancés en blanc par Gecina ne semble pas préoccupante, estimait le service Études en février. Ce secteur logistique du sud lillois le long de l’autoroute

portée au rythme de commercialisation, eu égard à la progression de l’offre en 2009, recommande le conseil en immobilier. Les développeurs devront répondre à la demande des utilisateurs, en particulier en proposant des plates-formes à l’acquisition. »

“En 2009, le Nord-Pas-de-Calais est le marché qui a le mieux résisté à la récession, avec plus de 200 000 m2 commercialisés”, TIPHAINE CHATTON, CHARGÉE D’ÉTUDES ACTIVITÉS LOGISTIQUE ET COMMERCE CHEZ BNP PARIBAS REAL ESTATE.

préféré déléguer leur logistique, immobilier inclus. » BNP Paribas Real Estate observe que l’offre sur le secteur a parallèlement augmenté de 82 % pour atteindre 230 000 m2 (fin 2009). Des entrepôts de classe A sont passés en seconde main mais ils trouvent preneurs par exemple à Hem (Nord) et Dourges (Pas-deCalais). Les loyers faciaux des entrepôts de classe A – 43€/m2/an environ – se sont maintenus en 2009. L’écart avec

A1 est particulièrement convoité. » L’offre d’entrepôts continue de s’étendre en Nord-Pas-de-Calais. Parcolog propose une nouvelle plate-forme à Hénin-Beaumont (voir ci-contre). La région bénéficie du redressement du trafic conteneurs au port de Dunkerque, observé fin 2009 et confirmé en 2010 par l’engagement de certains utilisateurs. «Néanmoins, avant de nouveaux lancements, une grande attention devra être

confirme Antoine Tostain. La région est un bassin de consommation très important. Elle a su se restructurer sur de nouveaux métiers après la fermeture des mines. La main-d’œuvre revient moins cher qu’en Belgique. Les élus se sont rendu compte que la logistique était créatrice d’emplois, dont une part peu qualifiés, ce qui peut contribuer à la réinsertion sociale. C’est un pays d’entrepreneurs, de travailleurs, ils ont toujours des idées, ils avancent. » Les sociétés de grande distribution, nombreuses en NordPas-de-Calais, sont de gros consommateurs de logistique. «Aujourd’hui, ils deviennent propriétaires de leurs implantations car ils connaissent mieux leur cycle de développement, analyse Antoine Tostain. Les utilisateurs essaient de trouver un terrain par eux-

mêmes et de se passer d’un promoteur. S’ils ne sont pas pressés, ils opteront pour un clés en main bien adapté à leur activité, sauf s’ils ont besoin d’une surface en six/huit mois. La massification des flux continue, les entrepôts sont de plus en plus grands. » Le succès de la région n’évacue pas les querelles de clocher. Des communes entrent en concurrence au profit des utilisateurs. Comme ailleurs, « la période n’a jamais été aussi avantageuse pour eux, qu’ils soient acquéreurs ou locataires », observe Antoine Tostain & Laffineur.

À plus long terme, le Canal Seine Nord Europe, avec sa ligne de trois plates-formes sud-nord, à Noyon (Oise), Péronne à l’est d’Amiens (Somme) et Marquion, à l’ouest de Cambrai, devrait conforter les flux du nord de l’Europe vers la France. * Il s’agit de l’agglomération lilloise au sens large et de sa région, d’Arras à Dunkerque. Le secteur de Cambrai en est exclu. Sources :“Les entrepôts en France”(Property report, février 2010) et “Entrepôts de plus de 5000 m2 en France”(At a glance, juillet 2010), BNP Paribas Real Estate.

M.T. (1) Afilog : Association pour affirmer la logistique dans toutes ses dimensions. (2) Interface entre collectivités locales et investisseurs, créée en 1996 sous l’impulsion de la CCIC et de Cambrai, Caudry, Le Cateau et Solesmes, dans le Nord, pour aider les investisseurs dans la recherche de leur site d’exploitation.

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Entrepôts anciens : faut-il les réhabiliter ? ■ Les plates-formes vides peuvent être réhabilitées ou reconstruites, en particulier quand elles sont bien placées.

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’offre d’entrepôts logistiques reste à un niveau élevé en 2010. «À la fin du 1er semestre, 1,8 million de mètres carrés était vacant, précise Magali Marton, directrice des études chez DTZ, à propos des bâtiments de plus de 10 000 m2. C’est mieux que 2009 où nous avions comptabilisé 2,5 millions de mètres carrés libres à la même période. » BNP Paribas Real Estate estime à 4 millions de mètres carrés les surfaces de plus de 5000 m2 disponibles à un an. Certains secteurs sont plus touchés que d’autres. Les acteurs de l’immobilier parlent de sur-offre, notamment

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“Les promoteurs et développeurs s’intéressent au réaménagement des surfaces existantes”, CAROLINE CECCALDI, DIRECTRICE DE L’AFILOG.

en région lyonnaise où la situation s’aggrave par rapport à 2009, avec « 550 000 m2 disponibles et pratiquement que du seconde main, ce qui est alarmant, juge DTZ qui fournit ces chiffres. Partout en France, l’offre n’augmente plus par les surfaces neuves. » Quand elle baisse, c’est donc par un report des clients

sur l’existant. La moitié des 4 millions de mètres carrés libres aurait d’ailleurs plus de six ans. Dans quel état sont ces surfaces, sontelles toujours aux normes? Réutiliser un bâtiment existant, même


récent, c’est-à-dire de moins de trois ans, demande de se poser des questions, comme la charge que peut recevoir sa dalle. Certains entrepôts trouvent preneur sans difficulté parce qu’ils ont été constamment entretenus et mis aux normes pour le stockage de produits courants, comme la plate-forme de 17000m2 datant de 1998, rachetée récemment par Trenois Descamps (Nord). D’autres abritent des activités moins exigeantes en autorisations comme la messagerie ou des secteurs amenés à se développer. «Jusqu’à présent, le recyclage des produits en fin de vie, leur élimination ou leur valorisation, a plutôt occupé du bâtiment industriel de 1 000 à 3000m2, et les communes sont très réticentes à les accueillir, écrit BNP Paribas Real Estate dans son Property Report, «Les entrepôts en France» (février 2010). Néanmoins, à l’avenir, on peut imagi-

ner que la réglementation dans ces domaines soit appliquée plus sévèrement et qu’il faille trouver de nouveaux lieux pour la filière. La valorisation des déchets étant une activité à faible valeur ajoutée, elle pourra difficilement s’offrir des bâtiments de dernière génération. À défaut, elle pourrait devenir un débouché pour les entrepôts anciens, très touchés par la vacance. »

Hauteur disponible : un critère déterminant Les organisations professionnelles – Afilog et Aslog – pressentent que les entrepôts existants vont créer un marché. « Ce sera une tendance de fond, les promoteurs et développeurs s’intéressent au réaménagement de ces surfaces », note Caroline Ceccaldi, directrice de l’Afilog. Une conférence sur ce thème a été organisée lors de la Semaine internationale du transport et de la

“La réhabilitation offre une nouvelle opportunité dans une stratégie de gestion d’actifs ou de valorisation”, PATRICK CANAC, PRÉSIDENT D’ABCD. logistique,en mars dernier.Patrick Canac, président d’abcd, avait réuni Gazeley, Axa Real Estates et AMF Qse pour en parler,considérant que «la raréfaction de l’offre foncière, l’arrivée de nouvelles normes et réglementations, l’obsolescence croissante d’une partie du parc, l’évolution des technologies de construction font de la réhabilitation une nouvelle opportunité dans une stratégie de gestion d’actifs ou de valorisation. » Tout n’est pas réutilisable.Il vaut mieux qu’un entrepôt ait été prévu divisible dès sa conception pour le convertir à de nouvelles activités et le relouer.Mais la construc-

En 2011, l’entrepôt circulaire de Pantin, au nord de Paris, va faire peau neuve.

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“Un espace sans poteaux va coûter plus cher à la construction”, CHRISTOPHE CHAUVET, DIRECTEUR DES OPÉRATIONS D’ELCIMAÏ RÉALISATIONS.

tion par modules,avec des poteaux intermédiaires, peut aussi gêner le réaménagement. « Un espace sans poteaux va coûter plus cher à la construction mais il est moins contraignant par la suite car il permet une meilleure adaptation à un nouvel occupant », remarque de son côté Christophe Chauvet,

directeur des opérations d’Elcimaï Réalisations. Par ailleurs, les utilisateurs cherchent un site bien adapté à leurs besoins. «Ils apprécient d’avoir la hauteur qu’ils veulent, il est difficile de rehausser une toiture dans l’existant, il vaut parfois mieux, si le bâtiment est bien placé, le démolir et reconstruire au même endroit », observe René Jeannenot,directeur du pôle logistique Île-de-France de BNP Paribas Real Estate.

De l’espace autour du bâti « La mise aux normes par rapport aux autorisations d’exploiter est le principal souci d’un entre-

pôt ancien, c’est ce qui le rend inexploitable, il est parfois quasi impossible pour les logisticiens d’obtenir les autorisations », constate Jean-Louis Humbert, responsable adjoint du service des installations classées chez Proud Reed, foncière française à fonds britanniques dont 60 % des surfaces sont occupées par de la logistique, soit 2 millions de mètres carrés, qui a engagé une réflexion et des travaux sur son patrimoine ancien afin de le rendre plus attractif sur le marché. Les dispositifs de sécurité incendie et de protection de l’environnement coûtent cher. Il y a un calcul économique

Le nouvel entrepôt de DSV Solutions à Wattrelos (Nord) est construit en deux phases. On aperçoit sur le côté droit la seconde partie du chantier qui est en cours.

Un entrepôt reconstruit sans arrêter l’exploitation Goodman a livré, en avril, 18 300 m2 des 42 300 qu’il reconstruit à Wattrelos (Nord) chez DSV Solutions France. Le chantier a lieu alors que l’exploitation continue. Il s’agit de démolir deux bâtiments

“Exploiter deux bâtiments est plus compliqué qu’un seul grand”, JEAN-FRANÇOIS MOUNIC, DIRECTEUR GÉNÉRAL DE GOODMAN.

présents sur le site et d’en reconstruire un seul au même endroit. « Il y avait beaucoup de travaux à prévoir pour mettre aux normes les anciens entrepôts et, de plus, exploiter deux bâtiments est plus compliqué qu’un seul grand, relate JeanFrançois Mounic, directeur

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général de Goodman. Il a donc été décidé de démolir et de reconstruire. DSV Solutions désirait rester sur le secteur puisque son client principal, La Redoute, s’y trouve, et il ne voulait pas interrompre son activité. » Cette réalisation exige une grande coordination entre les acteurs. « Il a d’abord fallu rapatrier le stockage du bâtiment A dans le B, démolir le A et construire la moitié du nouvel entrepôt, explique Olivier Barge, directeur technique de Goodman. Puis, l’activité réfugiée dans le bâtiment B est réinstallée dans la première partie du bâtiment neuf. Le B peut maintenant être détruit et la nouvelle plate-forme parachevée. Le chantier se termine en mars 2011. » Pendant un an, DSV Solutions exerce son activité dans une moitié de bâtiment. En matière

d’autorisation d’exploiter (ICPE), cela signifie que cette première partie doit être autonome en matière de sécurité incendie et de protection de l’environnement, d’où une conception et une construction spécifiques. Cette réalisation est également exemplaire dans la réutilisation des matériaux de démolition sur place. Le béton est concassé et placé en sous-couche de voirie. Les briques, anciennes, ont été récupérées en vue d’être vendues. Les terres déblayées sont remblayées sur le site, ce qui évite le transport de matériaux par camion. Les travaux ont coûté 20 M€. C’est plus cher qu’une mise aux normes – plusieurs millions d’euros – mais les bénéfices sont plus élevés : l’exploitation est réunie dans un seul bâtiment et la qualité de celui-ci permet de le rentabiliser.


À Garonor, au sud de l’aéroport RoissyCharles-de-Gaulle, deux bâtiments vont être démolis et reconstruits en clé en main l’an prochain.

Réhabilitations en région parisienne Foncière Europe Logistique se lance dans la rénovation de ses entrepôts anciens en Seine-Saint-Denis. Objectif : diminuer la vacance des locaux et maintenir les loyers. En 2011, celui de Pantin, l’ex-Citrail, va faire l’objet d’une réhabilitation architecturale. Situé aux portes de Paris, il convient à la

à mener entre investissements en travaux et rentabilité attendue du bâtiment sur le moyen terme. La présence d’amiante se rencontre rarement sur les entrepôts, ou parfois seulement en couverture (amiante-ciment). Il n’y a pas d’obligation de la déposer. Il suffit de la conserver en bon état et de ne pas y toucher (éviter la formation de poussière). Une des exigences de la réglementation des installations classées pour la protection de l’environnement – avoir une distance de 20 m entre le bâtiment et la parcelle voisine – constitue un véritable obstacle à la mise aux normes. « Les entrepôts ont été construits en utilisant la surface de terrain au maximum, rappelle Jean-Louis Humbert. À l’avant, ils disposent d’une cour de manœuvre pour les poids lourds mais à l’arrière, la limite de pro-

logistique du dernier kilomètre. Il date du milieu de 1975-1977, couvre plus de 150 000 m2 dont 137 300 d’entreposage et 13 750 de bureaux. À Garonor, au sud de l’aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle, deux bâtiments vont être démolis et reconstruits en clé en main, également l’année prochaine.

priété est très proche. Si elle est à 5 m, il faudra rogner 15 m sur le bâti. » Un rétrécissement qui peut s’avérer fatal à l’activité logistique. L’entrepôt logistique que Proud Reed vient de réhabiliter aux alentours de Rennes n’avait pas ce défaut : 35-40 m le séparent de la clôture à l’arrière et à peu près la même distance, à l’avant. Cette disposition et le fait que le secteur manque de plates-formes autorisées, ont convaincu le propriétaire d’engager 2,5 M€ de travaux pour mieux le commercialiser.

Se passer des sprinklers Des murs coupe-feu ont été ajoutés.Ce qui suppose de recouper la structure métallique car ils doivent parfois dépasser de la couverture. Mais, une structure ainsi affaiblie doit être renforcée

Le permis de construire pour le premier de 10 000 m2 est obtenu, celui pour un deuxième est déposé (photo). Le total de la reconstruction envisagée concerne 135 000 m2. Rappelons que le site, qui date de 1970, abrite 350 000 m2 d’immeubles industriels.

par la pose de contreventements. Des bassins de rétention d’eau et de stockage temporaire des eaux pluviales pour éviter l’engorgement des réseaux ont été créés. «Il n’a pas été nécessaire de poser

“La mise aux normes par rapport aux autorisations d’exploiter est le principal souci d’un entrepôt ancien”, JEAN-LOUIS HUMBERT, RESPONSABLE ADJOINT DU SERVICE DES INSTALLATIONS CLASSÉES CHEZ PROUD REED. des sprinklers car les cellules sont petites (3000m2), nous avons donc pu conserver la hauteur disponible pour l’activité, détaille Jean-Louis Humbert. Le bâtiment, qui date du début des années 1990, mesure 9 m de haut. » L’entrepôt a obtenu les autorisations d’exploiter de base : 1510, 2925 et 1530. Monique Trancart

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➔IMMOBILIER LOGISTIQUE

Le parc logistique : une solution économique ■ À condition d’être bien situés, les parcs sont intéressants pour les utilisateurs et pour les concepteurs, sans oublier les collectivités qui les accueillent.

La concentration de bâtiments sur un parc, telle que celle aménagée sur Logistiparc Nord, de Gecina, à Lauwin-Planque (Nord), génère des économies à la construction et à l’exploitation.

D

es parcs logistiques sortent de terre et il semble que ces groupements d’entrepôts aient un avenir devant eux.«Tout le monde souhaite que ça se développe, estime Didier Malherbe, directeur général adjoint de CB Richard Ellis. Avec la concentration sur un même lieu, les coûts sont mieux amortis. Les infrastructures sont regroupées avec leur circulation de camions, l’aménagement paysager peut être développé. Les utilisateurs savent qu’ils peuvent disposer de plus de surface selon leurs besoins. Les parcs seront plus nombreux et souvent multimodaux, si ce n’est de façon effective, du moins avec cette possibilité. » Les collectivités locales voient en eux une source de développement économique sur leur territoire. BNP Paribas Real Estate y croit aussi, avec un bémol : la locali-

L’ISO 14001, source de performances Les acteurs de l’immobilier logistique se lancent dans la certification Iso 14001. Barjane (voir ci-contre) et Prologis ont annoncé l’avoir obtenue. Prologis la met en place sur ses implantations dans toute l’Europe depuis fin 2009, de l’achat du foncier jusqu’à la remise des clés aux locataires. « L’idée est de mesurer et mettre en place les outils pour réduire l’impact sur l’environnement de nos activités, puis voir quelles économies ont pu être dégagées », souligne Jean-Michel Lemius, directeur des projets Europe du Sud. Une étude de l’Afnor (2008) a démontré l’existence d’un lien entre, d’une part, la gestion responsable de l’environnement et d’autre part, la performance financière de l’entreprise et son acceptabilité

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par la collectivité du fait de sa meilleure image de marque (www.afnor.org/certification). Rappelons que l’ISO 14001 reconnaît l’engagement et les efforts d’une structure en management environnemental, et ceci à l’échelle internationale. La norme guide l’organisation d’une société dans une logique de progrès continu. Les actions concrètes engagées ont des impacts, par exemple, sur la baisse de consommation d’eau et de l’utilisation des matières premières, sur le recyclage et le retraitement des déchets, la maîtrise des risques, ou encore la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Le certificat, une fois obtenu, doit être renouvelé tous les trois ans avec un audit de surveillance tous les ans.

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sation doit être à la hauteur.Logiparc 03, pôle logistique multimodal (rail, route, air), est situé dans l’Allier,sur la Communauté d’agglomération de Moulins (26 communes). Au cœur de la France, ces 184 ha peuvent s’intégrer dans un réseau européen de plates-formes portuaires et terrestres. Ils se situent à septhuit heures de trajet en camion de Turin, Milan et Stuttgart, et à trois heures de Lyon et quatre heures et demie de Paris. Les autoroutes attirent les parcs comme des aimants. Le Maineet-Loire développe les Anjou Actiparc aménagés pour les projets logistiques de grande ampleur près le l’A11 (Nantes-Paris par Angers), l’A87 (Angers, Bordeaux) ou encore l’A85 (AngersLyon par Tours). Certaines zones sont embranchées fer. Le Logistiparc Nord de Gecina couvre 40 ha, à Lauwin-Planque, près de Douai (Nord), entre l’A2 et l’A1.Bien situé,il peut accueillir 4 immeubles indépendants, soit 185 000 m2 au total. Le groupe veut faire de ces grandes platesformes des ensembles de qualité, durables, installés dans des parcs paysagers, se conformant aux exigences de la certification Haute qualité environnementale. Le site de Lauwin-Planque a aussi obtenu la certification Parcs d’activités labellisés pour la maîtrise de l’environnement qui s’applique à un territoire (voir ci-contre). Sur le parc logistique Les portes de Vémars (projet en blanc,Vald’Oise), également le long de l’autoroute A1 mais à 30 km de Paris, Prologis construit un bâtiment de 32000m2 pour le compte d’un industriel. Le potentiel est de 14 bâtiments, soit 160 000 m2 sur 42 ha, dont une première tranche est sortie de terre en 2009. Goodman commence à déposer les permis de construire des premiers entrepôts sur les 33 ha

qu’il a acquis au Parc de la Goële à Saint-Mard (Seine-et-Marne). Le site, qui longe la nationale 2, se situe à 9 km de l’aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle et à peu près à la même distance de l’autoroute A1 sans avoir à traverser d’agglomération.

Un embranchement fer par entrepôt « Les parcs vont se développer, confirme Léo Barlatier, directeur du développement de Barjane. Nous y croyons pour plusieurs raisons. Cela va dans le même sens que la densification de l’habitat, source d’économies de terrain et d’installation de réseaux. Un parc permet de concentrer les activités qui ont un impact sur l’environnement en un seul endroit et un endroit stratégique, et de mutualiser les mesures et les moyens pour les intégrer et limiter les nuisances. Les infrastructures, les bretelles d’autoroutes, un embranchement ferré ne peuvent pas s’amortir dans le cadre d’un seul bâtiment. » Par exemple, tous les grands bâtiments du nouveau parc logistique des Bréguières aux Arcssur-Argens près de Draguignan (Var) seront équipés d’un embranchement privatif. Une voie est réservée aux utilisateurs du parc en gare des Arcs, voisine. Elle peut accueillir un train complet. Une voie spécifique conduit au parc, et se divise en quatre pour desservir les plates-formes.


Des arbres d’alignement et des vergers seront plantés en 2012 au niveau du parc logistique des Bréguières, dans le Var, après la mise en eau de la nouvelle ligne du Canal de Provence qui alimentera les citernes d’arrosage.

Les travaux de cette liaison par voie ferrée s’achèvent en 2012 et sont financés par la communauté d’agglomération dracénoise à laquelle le site appartient, avec l’aide de l’État, du fonds européen Feder, de la Région, du Conseil général. La Cad a confié l’aménagement du parc au groupe Barjane. Lidl y occupe 40000m2 depuis juin pour livrer ses magasins du Sud de la France. Global Logistics Systems, filiale de la Royal Mail (Grande-Bretagne), s’est installée fin mai sur 2 200m2 pour traiter 10000 colis par jour. La Poste vient de signer sur 1620m2 pour fin 2011. Au total, 216 000m2 peuvent être construits sur les 80 ha de terrain.

Charges réduites de moitié La mutualisation des équipements,réseaux,services,est source d’économies à la construction puis à l’exploitation. Les bassins de rétention d’eau de pluie notamment pour l’incendie consomment moins de foncier s’ils desservent plusieurs immeubles. Il suffit d’une ou deux sources d’eau pour alimenter les poteaux incendie et les sprinklers de dix bâtiments, au lieu d’en installer une par entrepôt. Les aires de stationnement sont mutualisées. Cinquante places sont disponibles sur le parking poids lourds doté

d’un local chauffeurs.Au lieu que chaque société fasse épandre du bitume sur l’équivalent de 200 places dont elle n’a pas l’utilité en permanence,un parking commun absorbe les pointes et les creux de chacune. Les espaces verts, plantés autour du parc, seront arrosés à partir de citernes alimentées par le canal de Provence dont un nouveau tronçon, proche, sera mis en eau fin 2011. Un pôle de vie va être installé à l’entrée du parc avec un bureau de poste, déjà sur place, puis une agence bancaire et une agence d’intérim, sans oublier une restauration d’entreprise. La sécurité est assurée 24heures sur 24 par du personnel de Barjane dans un PC sur place équipé de télésurveillance. «Le gain sur les charges par rapport à une solution individualisée pourra aller jusqu’à 50 % selon nos prévisions, précise Léo Barlatier. Les services offerts aux entreprises sont portés par un syndic (association syndicale libre) où nous sommes majoritaires car nous restons propriétaires d’une partie du foncier. Nous avons recruté un responsable de site et allons lui adjoindre une équipe d’entretien. »

Réinvestir les économies dans la construction Les économies ainsi réalisées sont réinvesties dans la qualité de construction avec l’emploi de charpente en lamellé-collé et de dispositifs menant aux certifications HQE ou Bâtiment basse consommation (BBC). « La mutualisation permet aussi d’harmoniser l’architecture et les aménagements paysagers sur l’ensemble du parc, de dessiner des perspectives, ajoute Léo Barlatier (1). Ainsi se créent une image de marque du lieu et un sentiment d’appartenance. » L’identité des grands bâtiments sera différente de celle des petits, mais dans des registres voisins.Voies et parkings seront bordés de 1500 arbres d’alignement, une fois le tronçon du canal terminé. Les espaces périphériques, les bassins de récupération des eaux de pluie ou d’extension de crues, seront plantés différem-

ment selon leur degré d’humidité. Aux plus secs, des vergers avec oliviers, figuiers, amandiers. Aux plus humides : des saules, acacias, lauriers, etc. Les bâtiments se construisent au fur et à mesure sur le parc logistique des Bréguières dont l’aménagement général sera terminé fin 2010. L’organisme certificateur Ecopass vient de reconnaître la conformité du site au système de management environnemental Iso 14001, depuis la conception jusqu’à sa gestion en passant

Démarche environnementale Palme La démarche Palme – Parcs d’activités labellisés pour la maîtrise de l’environnement – fleurit à côté de la certification HQE sur les parcs logistiques. Barjane y adhère (voir article cicontre) et figure parmi ses administrateurs. Palme s’applique « à un territoire d’activités qui rassemble des considérations économiques, sociales et environnementales comme facteurs de développement durable », lit-on sur le

site de l’association qui l’a conçue, et regroupe collectivités, aménageurs et prestataires (www.palme.asso.fr). L’association, créée en 1997, cherche à promouvoir les territoires engagés sur la voie du développement durable. Elle accompagne ses adhérents dans la mise en place et la gestion d’un système de management environnemental comme l’Iso 14001.

“La mutualisation permet aussi d’harmoniser l’architecture et les aménagements paysagers sur l’ensemble d’un parc”, LÉO BARLATIER, DIRECTEUR DU DÉVELOPPEMENT DE BARJANE.

par le chantier et l’accueil des entreprises. « Nous souhaitons déployer la démarche environnementale sur tous nos projets et sur la gestion de nos sites existants, informe Léo Barlatier. Nous essayons toujours d’avancer, et l’Iso 14 001 est un outil qui nous fait progresser. La norme couvre plus de domaines que la certification HQE (bâtiment). Ici les 80 ha de la parcelle sont soumis au management de l’environnement. » Monique Trancart (1) Architecte du parc : Agence Goulard Brabant; paysagiste : Agence Guillermain; hydrologue : Eau et Perspective assisté d’un environnementaliste.

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➔IMMOBILIER LOGISTIQUE

Des entrepôts frigorifiques certifiés HQE ■ Les entrepôts frigorifiques se démarquent des autres notamment par leur consommation d’électricité, d’où une certification distincte. Ce marché bouge.

L

a certification Haute qualité environnementale plates-formes logistiques s’est enrichie en avril d’un addendum «entrepôts frigorifiques». Ce complément en quatre points a été élaboré au sein d’un groupe de travail spécifique de l’Afilog, animé par Gilles Saubier, administrateur, par ailleurs directeur du pôle immobilier de Stef-TFE, spécialisée en transport et logistique sous température dirigée.Dauchez Payet,société d’assistance à maîtrise d’ouvrage qui représente Gazeley à l’Afilog, s’est vu confier la rédaction par Certivea (organisme certificateur). La qualité environnementale d’un entrepôt frigorifique se certifie donc par le référentiel NF Bâtiments tertiaires Démarche HQE plates-formes logistiques de 2009 et par cet ajout (1).Alors qu’un entrepôt « ordinaire » est peu chauffé voire pas du tout et n’est pas soumis à une réglementation thermique, le même bâtiment frigorifique, sans obligation non plus, a tout intérêt à limiter ses déperditions...de froid. C’est pourquoi la performance de l’enveloppe a été ajoutée, dans leur cas, à la cible 4 «gestion de

Certification HQE pour l’exploitation La certification «NF Bâtiments tertiaires en exploitationDémarche HQE» vient compléter la HQE simple «limitée» à la programmation, la conception et la réalisation des immeubles. Cette certification sortie en 2009 s’adresse à tous les bâtiments en exploitation dont les entrepôts, qu’ils aient été ou non certifiés à la construction. Elle s’applique opération par opération, sauf en présence d’un système de management sur l’ensemble d’un patrimoine. Elle comprend trois référentiels techniques : système de management de

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l’opération de l’exploitation (Smex), qualité environnementale du bâtiment en exploitation (QEBE) et qualité environnementale des pratiques (QEP). Elle implique le propriétaire, son exploitant et la majorité de ses utilisateurs qui doivent avoir des pratiques significativement supérieures à ce qui se fait couramment dans ces domaines. Le Smex s’inspire de la norme Iso 14001 (voir plus haut dans notre dossier). La QEBE applique les 14 cibles de la démarche HQE à la phase exploitation du bâti. La QEP concerne les acteurs.

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Des transtockeurs ont été installés dans le bâtiment frigorifique de 25 000 m2 sous température dirigée positive, réalisé par Elcimaï pour Senoble (yaourts) à Villeroy (Yonne) et terminé en 2009.

L’Afilog met à jour sa charte développement durable La certification HQE brouille les cartes. L’Association, pour affirmer la logistique dans toutes ses dimensions (Afilog), a ressenti le besoin de revoir sa charte développement durable pour la mettre en cohérence avec la Haute qualité environnementale plus récente. La charte concerne également le transport, peu présent dans la HQE. La nouvelle mouture est sortie fin juillet.

l’énergie» de la certification HQE. Tout naturellement, la performance de l’installation productrice du froid a été intégrée dans cette cible qui traite également les émissions de CO2 (gaz à effet de serre) variables selon le fluide frigorigène employé. La gestion de l’énergie est aussi évaluée selon que l’entrepôt est sous température négative (inférieure à 0 °C) ou positive (de 00 °C à 5 °C ou de 5 à 12 °C). Enfin, la cible 7 sur la «maintenance pérennité des performances» est reformulée pour ces plates-formes. Elle se découpe donc en conception des systèmes pour une maintenance simplifiée, et en moyens de suivi et contrôle des consommations, d’une part, et des performances, d’autre part.

Le retour du fluide ammoniac Cette nouvelle version de la certification HQE commence à prendre corps sur de nouveaux immeubles. Le groupe Stef-TFE a construit en Vendée, un entre-

pôt frigorifique modèle (voir encadré page 76).Le cabinet d’architectes SAGL vient de déposer un permis de construire pour un entrepôt frigorifique certifié HQE. Il aura des dispositifs que n’a pas l’entrepôt en froid positif de 19 500 m2, en chantier à Nanteuil-le-Haudoin (Oise) pour le compte de Nexity/Geprim (centre de distribution Système U), comme par exemple, une meilleure isolation thermique, une gestion poussée du froid et une récupération de la chaleur sur l’installation frigorifique. Le choix du fluide frigorigène influence la consommation d’énergie. «L’énergie est le point le plus préoccupant sur ce type d’entrepôt, précise Marc Terrel, directeur du développement de Gicram-Gemfi. Un des moyens pour améliorer le rendement de la production de froid est d’utiliser l’ammoniac comme frigorigène avec une installation bien sécurisée. Depuis un an ou deux, l’entreposage frigorifique est un marché qui nous permet de développer des surfaces. »


À la recherche d’entrepôts avant tout pérennes

Arrivée en limite d’âge Plusieurs acteurs de l’immobilier logistique confirment le développement de ce débouché. «La demande de nouveaux entrepôts est alimentée par la grande distribution en croissance », explique Olivier Barge,directeur technique France de Goodman, qui développe une plate-forme logistique sous température dirigée pour Liddl à Chanteloup-les-Vignes (Yvelines). Le distributeur manquait d’une base à l’ouest de Paris pour desservir ses magasins. La plate-forme de 40 000m2, dont le chantier devrait commencer fin 2010, comprend plus de 37000m2 en froid négatif, positif ou à température ambiante. D’une façon générale, «une partie des bâtiments qui abritent des produits frais aujourd’hui sont petits et arrivent en limite d’âge, estime M. Barge. Ils sont remplacés par des nouveaux, plus grands. » Autre raison de construire du neuf : « Les distributeurs, après avoir réorganisé leurs produits d’épicerie, de consommation courante et de textiles, revoient leur stockage de produits frais ou surgelés, note Marc Terrel. Avant, ils utilisaient des sites disséminés. Aujourd’hui, ils veulent des platesformes intégrées. »

■ L’Aslog* a créé sa commission immobilière logistique. Ce n’est pas une rébellion contre le label HQE, mais ça ressemble fort à un ajustement.

L

a crise économique pousse à la sobriété, ce qui nécessite de prioriser ses choix. « Vous pouvez décrocher la certification HQE, quelle garantie avez-vous qu’il y a réellement maîtrise de l’énergie? », interroge Christophe Chauvet d’Elcimaï, directeur des opérations d’Elcimaï Réalisations, fondateur de la nouvelle

Interparfums stocke près de Rouen Les travaux de la plate-forme Interparfums à Criquebeuf-surSeine (Eure) ont commencé au début de l’été pour une livraison en avril 2011. Le fabricant de parfum en flacons dispose d’une usine sur l’agglomération de Rouen, proche. Il exporte une grande partie de sa production vers l’Asie en conteneurs par le port du Havre. Il a signé un bail de neuf ans ferme avec le groupe Gicram, pour 30000m2 d’entrepôt avec une extension

Intérêt des promoteursinvestisseurs

Monique Trancart (1) Voir www.certivea.fr.

possible de 36000 m2. La logistique est sous-traitée à Sagatrans qui occupe les lieux. L’entrepôt fait l’objet d’une demande de certification Haute qualité environnementale plateforme logistique, pour la construction ainsi que l’exploitation. Parmi les dispositifs lui permettant d’y prétendre, figurent une isolation thermique et phonique, la récupération des eaux de pluie pour l’utilisation en chasse d’eau, un éclairage

fonctionnant par détecteur de présence, ou encore le retraitement des déchets tout au long de la vie du bâtiment. Sur ce dernier point, un cahier des charges s’appliquera aux utilisateurs. Dans le Parc logistique du Bosc Hetrel de 23 ha dont il est propriétaire, Gicram a déjà construit 36000 m2 où Carrier Climatiseurs et les lampes Berger se sont installés en 2009. À terme, 100000 m2 seront bâtis.

L’entrepôt HQE dont les travaux ont commencé, sera livré en mars 2011.

© Gicram

Auparavant, la demande d’un investissement dans un bâtiment frigorifique venait d’un exploitant pour la grande distribution. Aujourd’hui, « des promoteursinvestisseurs se positionnent sur les entrepôts de surgelés pour les offrir à la location, les utilisateurs préférant payer un loyer que d’investir »,observe Thierry Griveaux, architecte du cabinet SAGL. Malgré tout, ce n’est pas un marché euphorique. « Il est en profond changement mais il n’y a pas d’augmentation de surfaces sous température dirigée car la consommation des produits qui en ont besoin stagne », analyse Gilles Saubier.

commission immobilière logistique de l’Aslog avec Christophe Gallois, consultant chez Jones Lang Lasalle, Fabienne Cavalié et Thierry Murat de Safege, respectivement directrice de l’Unité industrie et directeur du développement et de l’expertise industrielle. « Nous voulons nous recentrer sur ce qui est primordial dans la construction d’un

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Les participants de la commission immobilière logistique de l’Aslog sont, de gauche à droite : Thierry Murat (Safege), Christophe Gallois (Jones Lang Lasalle), Julien Mongoin (Nexity-Geprim), Fabienne Cavalié (Safege), Philippe Voisin, Christophe Chauvet (Elcimaï Réalisations).

➔IMMOBILIER LOGISTIQUE

immeuble. » À commencer par les économies d’énergie. Le recentrage signifie, par exemple, ne pas se focaliser sur l’isolation thermique d’un bâtiment non étanche à l’air, car doté de huit quais par où entrent et sortent des flux de marchandises, ou encore regarder à deux fois

l’installation d’une production d’électricité photovoltaïque, installée là pour obtenir un bilan énergétique positif sans recherche, en premier lieu, de limiter les besoins dans ce domaine. La commission lance des actions de calcul thermique statique et dynamique (entrepôt en fonctionnement). « L’immobilier est peu maîtrisé par les logisticiens et les chargeurs, remarque Christophe Chauvet. La commission est là pour apporter des réponses aux questions des chargeurs, des logisticiens et des investisseurs. » Les participants à la commission réunie pour la première fois en juillet ont en commun de vou-

loir construire des bâtiments pérennes. Ils commencent leurs réflexions sur trois thèmes qui y concourent : la maîtrise de l’énergie – être moins dépendant des variations du coût de l’énergie mais ne pas pousser les dispositifs économisant l’énergie à l’absurde –, les autorisations d’exploiter et la maintenance. Les exploitants de plates-formes logistiques sont souvent confrontés à la validité dans le temps de leurs autorisations d’exploiter (installations classées pour la protection de l’environnement).Correspondent-elles aux produits et aux volumes stockés aujourd’hui? Comment chiffrer les propor-

Un entrepôt frigorifique HQE pilote

L’isolation de cet entrepôt a été renforcée. L’ouverture des portes entre espaces à températures différentes est contrôlée de près.

L’entrepôt des Essarts, en Vendée, fait office d’installation pilote pour consolider la certification HQE plates-formes logistiques frigorifiques, sortie en avril 2010. Le site de 3 800 m2 du groupe Stef-TFE comprend 2 400 m2 à -25 °C, 820 m2 à +2 °C/+4 °C, un quai réfrigéré et une salle de démou-

lage avec tunnel de congélation. Situé au cœur d’un marché régional très actif en agroalimentaire, il est multiclient. « Le référentiel haute qualité environnementale spécifique aux entrepôts frigorifiques met en valeur ce que nous faisons

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quand nous construisons un tel bâtiment », précise Gilles Saubier, directeur général adjoint d’Immostef, pôle immobilier de Stef-TFE, et participant au groupe de travail sur ce thème à l’Afilog. Parmi les dispositifs relevant de la certification HQE, sur l’immeuble des Essarts, citons l’emploi de l’ammoniac. Il n’est pas un gaz à effet de serre contrairement à d’autres fluides frigorigènes. Il a un très bon rendement, d’où une moindre consommation d’électricité des machines. Les économies d’énergie sont courantes sur les installations frigorifiques. La chaleur est récupérée sur la production de froid pour dégivrer les évaporateurs de l’installation, et pour réchauffer le sol de la chambre froide négative qui, autrement, gèlerait, gonflerait et se détériorerait. L’installation est régulée pour fonctionner selon les besoins du moment. L’isolation des parois est à son

maximum avec des panneaux sandwich contenant 20 cm de polyuréthane, là où 16 ou 18 cm sont plus habituels. Les bardages sont blancs afin de réfléchir le rayonnement solaire. « La gestion de l’ouverture des portes est tout aussi importante que l’isolation, pointe Gilles Saubier. Nous formons le personnel pour qu’il ne bloque pas les portes ouvertes pour charger ou décharger plus vite un camion. » Des portes dites rapides, qui se lèvent par empilement d’un panneau souple, sont employées entre espaces à température différente. Une pompe à chaleur chauffe et refroidit les bureaux. Les déchets – cartons, films plastiques, métaux – sont triés afin d’être récupérés par les filières de valorisation. Le site a été choisi au plus près de l’autoroute A83 et il est accessible sans traverser de zone habitée. L’architecte – Stéphane Aubey – a marié les différents volumes de l’entrepôt. Un tel immeuble coûte 10 à 15 % de plus que son équivalent en version basique. Il se rentabilise en quinze ou vingt ans par les économies d’énergie, en faisant abstraction des autres bénéfices pour l’environnement.


DHL sur un entrepôt embranché fer à Dunkerque Voici un entrepôt commode pour décharger des marchandises depuis un train. Un chariot peut aller directement du wagon à l’entrepôt. Le quai fer de la plate-forme où DHL loue 11000m2 depuis avril à Dunkerque, comprend une aire de manœuvre pour les trains, à l’arrière, sur 8m de profondeur et protégée des intempéries par un auvent. À l’avant, les quais

tions des différents matériaux présents sur le site (plastiques, bois, emballages, etc.)?

Des équipements accessibles Aujourd’hui, le stock d’entrepôts vides est élevé. Peut-on toujours les utiliser en l’état, ou fautil les mettre aux normes? «Nous étudions le couplage entre mise à

routiers accueillent les camions. Le terrain qui appartient au Port de Dunkerque (Pas-de-Calais) jouxte une aire de stockage de conteneurs. Foncière Europe Logistique (FEL) est propriétaire de l’entrepôt, le premier de classeA sur le port. Il est construit par Kic, promoteur régional. BNP Paribas Real Estate est conseil immobilier pour FEL, et CB Richard Ellis l’est pour DHL. Le

niveau thermique et sécurité incendie, indique Christophe Chauvet en précisant que la réglementation est le domaine de Thierry Murat. Nous cherchons des solutions qui aient un coût contenu. Un mur coupe-feu peut avoir un caractère isolant. » La maintenance contribue à faire durer les immeubles. L’accessibilité aux équipements sera

permis de construire a été obtenu pour 22000 m2. Le Port de Dunkerque, 3e port français, devrait profiter de la saturation des ports du Nord de l’Europe. Il s’est doté de deux nouveaux portiques à conteneurs et a agrandi l’aire de stockage en 2009. Il peut notamment réceptionner des marchandises venant d’Asie et destinées à la grande distribution.

Une aire de 8 m de profondeur à l’arrière de la plate-forme permet aux trains de manœuvrer.

donc prévue dès la conception. C’est à l’ordre du jour de la réunion de septembre.Par la suite,la commission se penchera sur le foncier et les zones d’activités. Un espace d’échanges sera créé sur le site de l’Aslog. La commission prévoit de rédiger des guides de bonnes pratiques. Monique Trancart *Association française pour la logistique.

Manutan et Sisley dans le Val-d’Oise Panhard Développement a livré deux entrepôts logistiques dans le Vald’Oise en juillet. Le premier conçu par Daniel Nuret Architectes pour Manutan couvre 43 000 m2 à Gonesse. Le spécialiste en fournitures industrielles (outillage, manutention, mobiliers, etc.), mène une politique de développement durable. Il a donc demandé que cette nouvelle surface soit certifiée HQE plates-formes logistiques. Les audits HQE sur le programme et la conception ont eu lieu cet été. Fort de cette demande, Panhard Développement a proposé à Sisley de s’engager dans le même sens pour son entrepôt de Saint-Ouen-L’Aumône (Vald’Oise). La marque de produits cosmétiques, en développement, a

souhaité regrouper sur un même site son centre de distribution et ses laboratoires de recherche et développement, des activités naguère abritées dans plusieurs bâtiments à Gennevilliers (Hauts-deSeine). L’opération comprend 37 600 m2 d’entrepôts sur 45 600 m2 construits. Conçue par SAGL Architectes Associés, la plate-forme est certifiée Haute qualité environnementale bâtiments logistiques pour le programme et la conception. La HQE est concentrée sur la gestion de l’énergie (dont une gestion technique du bâtiment) et sur celle de l’eau (réducteurs de débit, récupération de l’eau de pluie pour l’arrosage, etc.).

Dans le Val d’Oise, Manutan a voulu que son entrepôt de Gonesse, (à gauche) soit certifié HQE et Sisley y a été encouragé pour ses nouveaux locaux à Saint-Ouen-L’Aumône (à droite).

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➔DOSSIER 2

➔IMMOBILIER LOGISTIQUE

L’Oréal joue la basse consommation ■ La plate-forme de Roye (80) de 40 000 m2, développée par Argan pour l’activité mondiale de la division Produits de Luxe du groupe L’Oréal, vise le label BBC. Outre sa faible consommation énergétique, l’installation HQE se caractérise par la présence d’un système d’ECS solaire, un dispositif de récupération des eaux pluviales, une chaudière bois et une volonté d’intégration paysagère maximale.

Le bâtiment est équipé d’une ossature bois en lamellé collé, la part importante d’éclairage zénithal renforçant la sensation de naturel, tout en économisant l’énergie.

«L

es deux axes prioritaires d’Argan, pour la réalisation de cette plateforme de 40000 m2 dédiée à l’activité logistique mondiale de la division Produits de Luxe du groupe L’Oréal, concernaient le bilan carbone et l’optimisation de la consommation énergétique », explique Jean-Baptiste Rerolle, directeur des Programmes d’Argan (voir encadré). Le bâtiment, situé à Roye (80) à 20 km d’Amiens, le long de l’autoroute A1, se caractérisera en effet par une consommation en énergie primaire inférieure à 50 kW/h/m2/an, «ce qui

La chaudière à plaquettes de bois, d’une capacité de 200 m3, assure une autonomie de dix journées de chauffage intensif.

en fera une des premières platesformes labellisée BBC (1) en France ».

Chaudière bois et isolation performante Pour ce faire, le bâtiment, qui pourra être chauffé au-dessus de 19 °C, est équipé d’une isolation renforcée, l’épaisseur de laine de verre atteignant 180 mm sous toiture et 120 mm en façade. Des valeurs assez exceptionnelles pour la logistique. «Le standard en la matière est plutôt le ratio 60/40 », commente Jean-Baptiste Rerolle. Autre point fort, assez rare également sur un site logistique : la présence d’une chaudière à pla-

À propos d’Argan La société Argan, créée en 1993 est une foncière spécialisée en immobilier logistique, membre de la FSIF (Fédération des sociétés immobilières et foncières) et d’Afilog. Elle est également cotée en Bourse sur Nyse Euronext. Basée à Neuillysur-Seine (92), elle maîtrise l’ensemble de la chaîne de développement des projets, de la conception des plates-formes à

leur gestion locative, et fonctionne selon une stratégie qualitative « APL » : « A » pour plates-formes de catégorie A, « P » pour emplacements « Prime » (forte densité d’entrepôts logistiques favorisant la relocation et la maîtrise des coûts de transport pour le locataire) et « L », c’est-à-dire louées à des locataires financièrement solides (logisticiens, chargeurs,

“Le patrimoine d’Argan a doublé au cours des quatre dernières années pour atteindre 763 000 m2 au 30 juin 2010”, FRÉDÉRIC LARROUMETS, DIRECTEUR DU DÉVELOPPEMENT D’ARGAN.

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distributeurs ou industriels), avec des baux longue durée, de 9 ans fermes lors de la première location, qui sécurisent l’investissement. Argan développe des plates-formes pour compte propre ou acquisition. « Le patrimoine de la foncière a doublé au cours des quatre dernières années pour atteindre 763 000 m2 au 30 juin 2010 », révèle Frédéric Larroumets, directeur du développement d’Argan, « et il se compose de 31 plates-formes présentant un taux d’occupation proche de 100 % ». Principaux locataires : Daher, DHL, ND Logistics, K + N, Caroll, La Poste, L’Oréal, Rexel, Géodis, Caterpillar, BSH, Castorama.

quettes de bois, d’une capacité de 200m3, permettant une autonomie de dix journées de chauffage intensif. Dans la pratique, la plate-forme,constituée de 7cellules de 9,80 m de hauteur libre, a été réalisée en un temps record. Argan a été désignée le 2 juin 2009 pour une livraison le 18 juin 2010, des délais bien inférieurs au standard habituel de 18 mois. «Le terrain était identifié », précise Jean-Baptiste Rerolle, mais les dossiers de permis de construire et de demande d’autorisation d’exploiter n’étaient pas lancés en juin 2009. «Le dossier de permis de construire a été préparé et déposé en moins de 30 jours, pour une autorisation obtenue le 27 août 2009, soit seulement 58 jours plus tard. Le dossier d’autorisation d’exploiter a été, quant à lui, déposé par L’Oréal le 3 juillet 2009 ». Les travaux, effectués par GSE, ont démarré le 17 novembre 2009. Le bâtiment a été livré il y a deux mois «malgré 35,5 jours ouvrables d’intempéries durant lesquels le chantier fut totalement interrompu », ajoute Jean-Baptiste Rerolle.

Éclairage zénithal optimal Vu les orientations initiales du projet, « l’intérêt d’entrer dans une démarche environnementale qualitative s’est ensuite imposé de manière assez logique et évidente, au fur et à mesure de l’élaboration du bâtiment. D’où le choix d’intégrer le référentiel HQE ». Argan a été épaulée sur ce volet par l’entreprise Payet Dauchet (2), assistant à la maîtrise d’ouvrage


environnementale – en axant également la conception sur le confort des utilisateurs mais aussi en optimisant tous les éléments ayant trait au process et au stockage. La part d’éclairage zénithal a ainsi été accrue, 8 % de la toiture étant équipée de skydoms, «alors que la moyenne se situerait plutôt entre 4 et 5 % ». Cette particularité va, bien entendu, dans le sens d’une réduction de la part d’énergie consacrée à l’éclairage, le choix de luminaires performants (T5), équipés de réflecteurs spécifiques et de détecteurs de présence, participant également à une gestion énergétique optimale. Côté utilisateurs, l’éclairage naturel assure un environnement visuel confortable au niveau des surfaces de préparation, l’ensemble du bâtiment réduisant l’impression de confinement classique grâce à l’intégration de châssis complémentaires de 9 à 18 m2, ouvrant sur l’extérieur, et de bandeaux horizontaux en façade. Tous les murs ainsi que les sous-faces de la toiture sont peints en blanc, afin de renforcer l’impression de clarté. « Le choix d’une ossature poutre en lamellé collé accroît par ailleurs la sensation de naturel dans l’entrepôt et les bureaux », poursuit Jean-Baptiste Rerolle.

Intégration paysagère sous conseil de l’ONF Le site est par ailleurs équipé

d’un système ECS (Eau Chaude Sanitaire) de chauffe-eau à énergie solaire pour les douches et les lavabos et de deux bassins : un de rétention d’une capacité de 2300m3, destiné à la collecte des eaux incendie ainsi qu’à celle des eaux susceptibles d’être polluées, et un d’orage, de 1400 m3, permettant l’infiltration des eaux pluviales non polluées dans les terrains. Une partie des eaux pluviales est par ailleurs récupérée par l’intermédiaire d’une cuve de 111 m3, «volume collecté suffisant pour assurer, une fois filtré, l’approvisionnement des sanitaires, le lavage de la plate-forme et l’arrosage des espaces verts », commente Jean-Baptiste Rerolle. Une réflexion poussée a en effet été menée au niveau de l’intégration du bâtiment, la présence de merlons en pente douce permettant de masquer les semi-remorques en ne laissant apparaître que la partie supérieure de la plateforme.«Des études menées en partenariat avec l’ONF (3) ont permis de déterminer les essences locales les mieux adaptées ». Cette plateforme, qui a déjà reçu la certification HQE au niveau de l’aménagement et de la conception, a été auditée fin juillet pour la phase réalisation. « Elle témoigne que, malgré la crise, le référentiel HQE en logistique a fait un très bon démarrage puisque 25 projets ont d’ores et déjà fait l’objet d’une

La plate-forme de 40 000 m2 est constituée de 7 cellules.

“Avec une consommation en énergie primaire inférieure à 50 kW/h/m2/an, la plateforme sera une des premières labellisée BBC en France”, JEAN-BAPTISTE REROLLE, DIRECTEUR DES PROGRAMMES D’ARGAN.

demande d’instruction. Et je suis convaincu que, en dépit d’une équation économique qui reste difficile à optimiser, la demande de certification par les utilisateurs va continuer à progresser », conclut JeanBaptiste Rerolle. Philippe Donnaes (1) Bâtiment Basse Consommation (2) La société Dauchet Payet, créée en 2003, est aujourd’hui spécialisée en construction logistique et industrielle. Elle réalise pour les principaux acteurs de ces filières des missions d’assistance à maîtrise d’ouvrage HQE, de conseil en développement durable et de gestion des projets en énergies renouvelables. (3) Office National des Forêts

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environnementale – en axant également la conception sur le confort des utilisateurs mais aussi en optimisant tous les éléments ayant trait au process et au stockage. La part d’éclairage zénithal a ainsi été accrue, 8 % de la toiture étant équipée de skydoms, «alors que la moyenne se situerait plutôt entre 4 et 5 % ». Cette particularité va, bien entendu, dans le sens d’une réduction de la part d’énergie consacrée à l’éclairage, le choix de luminaires performants (T5), équipés de réflecteurs spécifiques et de détecteurs de présence, participant également à une gestion énergétique optimale. Côté utilisateurs, l’éclairage naturel assure un environnement visuel confortable au niveau des surfaces de préparation, l’ensemble du bâtiment réduisant l’impression de confinement classique grâce à l’intégration de châssis complémentaires de 9 à 18 m2, ouvrant sur l’extérieur, et de bandeaux horizontaux en façade. Tous les murs ainsi que les sous-faces de la toiture sont peints en blanc, afin de renforcer l’impression de clarté. « Le choix d’une ossature poutre en lamellé collé accroît par ailleurs la sensation de naturel dans l’entrepôt et les bureaux », poursuit Jean-Baptiste Rerolle.

Intégration paysagère sous conseil de l’ONF Le site est par ailleurs équipé

d’un système ECS (Eau Chaude Sanitaire) de chauffe-eau à énergie solaire pour les douches et les lavabos et de deux bassins : un de rétention d’une capacité de 2300m3, destiné à la collecte des eaux incendie ainsi qu’à celle des eaux susceptibles d’être polluées, et un d’orage, de 1400 m3, permettant l’infiltration des eaux pluviales non polluées dans les terrains. Une partie des eaux pluviales est par ailleurs récupérée par l’intermédiaire d’une cuve de 111 m3, «volume collecté suffisant pour assurer, une fois filtré, l’approvisionnement des sanitaires, le lavage de la plate-forme et l’arrosage des espaces verts », commente Jean-Baptiste Rerolle. Une réflexion poussée a en effet été menée au niveau de l’intégration du bâtiment, la présence de merlons en pente douce permettant de masquer les semi-remorques en ne laissant apparaître que la partie supérieure de la plateforme.«Des études menées en partenariat avec l’ONF (3) ont permis de déterminer les essences locales les mieux adaptées ». Cette plateforme, qui a déjà reçu la certification HQE au niveau de l’aménagement et de la conception, a été auditée fin juillet pour la phase réalisation. « Elle témoigne que, malgré la crise, le référentiel HQE en logistique a fait un très bon démarrage puisque 25 projets ont d’ores et déjà fait l’objet d’une

La plate-forme de 40 000 m2 est constituée de 7 cellules.

“Avec une consommation en énergie primaire inférieure à 50 kW/h/m2/an, la plateforme sera une des premières labellisée BBC en France”, JEAN-BAPTISTE REROLLE, DIRECTEUR DES PROGRAMMES D’ARGAN.

demande d’instruction. Et je suis convaincu que, en dépit d’une équation économique qui reste difficile à optimiser, la demande de certification par les utilisateurs va continuer à progresser », conclut JeanBaptiste Rerolle. Philippe Donnaes (1) Bâtiment Basse Consommation (2) La société Dauchet Payet, créée en 2003, est aujourd’hui spécialisée en construction logistique et industrielle. Elle réalise pour les principaux acteurs de ces filières des missions d’assistance à maîtrise d’ouvrage HQE, de conseil en développement durable et de gestion des projets en énergies renouvelables. (3) Office National des Forêts

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➔DOSSIER 3

➔IMMOBILIER LOGISTIQUE

Plates-formes urbaines : ■ Alors qu’une première plate-forme logistique urbaine est sortie de terre à Marseille, d’autres entrepôts pourraient bientôt voir le jour à Paris et dans plusieurs métropoles régionales. Tour de France des projets en cours.

La plate-forme de 41 000 m2 de Sogaris à Marseille est le premier site logistique urbain neuf en France.

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vec la livraison, l’année dernière, d’une plate-forme logistique de 41000 m2 située à deux kilomètres du Vieux Port de Marseille, sur les friches de l’ancienne gare de fret d’Arenc, Sogaris a donné le coup d’envoi du retour de l’immobilier d’entrepôt en milieu urbain. Primé en décembre 2009 au Simi (Salon de l’immobilier d’entreprise) et distingué en mars dernier par le Prix de l’Innovation Logistique de la SITL (Semaine internationale du transport et de la logistique), le site semble s’afficher comme un modèle du genre. De par son emplacement, son architecture, sa qualité environnementale et les règles liées à son exploitation, il réunit en effet tous les critères entrant dans la définition de la plate-forme logistique urbaine idéale. L’emplacement, tout d’abord. Christophe Ripert, directeur étude et prospective de Sogaris, en donne les détails : «le terrain est situé à l’entrée de la ville, en première périphérie par rapport à la zone dense. Il bénéficie d’une liaison directe aux autoroutes et est relié aux transports en commun ». Le deuxième élément qui entre en ligne de compte pour distinguer

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une plate-forme logistique urbaine d’une zone logistique située en rase campagne est précisément son «urbanité ». «Pour être accepté par les riverains, le site doit bénéficier d’une bonne insertion dans la ville. Son entrée doit être travaillée, esthétique, voire paysagée, sans coupures abruptes, sans barrières, sans hauts murs fermés ». Troisième para-

urbaine se doit de présenter une empreinte carbone réduite. Ainsi, Marseille-Arenc bénéficie d’une centrale photovoltaïque de 5 100 m2 en toiture. En outre, pour réduire encore sa consommation d’énergie, Sogaris vient de commander au cabinet niçois H2O une étude de faisabilité sur l’intégration d’éoliennes horizontales et silencieuses sur le site.

“Pour être accepté par les riverains, un site urbain doit bénéficier d’une bonne insertion dans la ville”, CHRISTOPHE RIPERT, DIRECTEUR ÉTUDE ET PROSPECTIVE DE SOGARIS. mètre essentiel pour Christophe Ripert : le mode d’exploitation de la plate-forme. «L’entrée des marchandises s’effectue de manière mutualisée via des gros porteurs. Ce fret massifié est ensuite éclaté sur la plate-forme puis redistribué dans la ville via des véhicules décarbonés (camionnettes électriques,GPL,triporteurs,vélos…) ».

Éoliennes horizontales à Marseille Enfin, dernier point essentiel, une vraie plate-forme logistique

Cet équipement permettrait de produire le courant nécessaire au fonctionnement des camions électriques utilisés sur la plateforme. «On fait le test avec notre client Chronopost. Si l’étude est concluante et la solution rentable, les travaux commenceront en 2011»,indique Christophe Ripert. Tout en réglant les derniers détails techniques de sa réalisation marseillaise, dont les bâtiments sont aujourd’hui loués à 60 % à des expressistes comme Chronopost, et à des e-commerçants tels que Grosbill.com et Auchandirect.fr, Sogaris prépare son arrivée prochaine dans Paris. Il faut dire que sur la capitale, les conditions semblent réunies pour accueillir des activités logistiques. Ainsi, Sébastien Roux, chargé de la division marchandises à la Mairie de Paris,se donne trois ans pour faire sortir de terre un premier « hôtel logistique » multi-activité, libérer, dans les parkings sous-terrains de la ville, une quinzaine d’Espaces logistiques urbains (ELU) de 300 à 400m2 et convertir des rez d’immeubles en bureaux logistiques. «Aujourd’hui, on est dans la phase de finalisation, à une étape charnière », indique-t-il. Le Plan local


les projets se multiplient d’urbanisme (PLU) voté en 2003 par la Mairie de Paris a été un grand pas pour l’entrée de la logistique dans la ville. Ce PLU a identifié des terrains susceptibles d’accueillir des activités logistiques et les a réservés à cet usage (sur le plan, ces terrains correspondent aux zones UGSU – Zones urbaines de grands services urbains). Dans le même temps, les concepteurs de platesformes logistiques urbaines ont avancé. «Aujourd’hui, leurs projets sont mûrs. Ce n’était pas forcément le cas il y a dix ans »,estime Sébastien Roux. Pour revenir à Sogaris, la société va lancer un concours d’architecture pour le premier hôtel logistique dans Paris à l’automne et est en négociation pour l’aménagement d’un ELU dans le 15e arrondissement de Paris. Ce dernier sera opérationnel en 2011. Il pourrait être le premier d’une longue série puisque à terme, Sogaris envisage d’implanter un ELU par arrondissement.Les ELU de Sogaris viendraient donc s’ajouter aux 5 ELU qui fonctionnent déjà aujourd’hui dans des parkings souterrains de la ville.

Cathédrale logistique sous “Chinatown” Par ailleurs, plusieurs sites de la capitale sont aujourd’hui à l’étude pour être transformés en plates-formes logistiques urbaines. C’est le cas du parking Suzanne Lenglen, propriété de la Mairie de Paris dans le 15e arrondissement. « Sa surface de 30 000 m2 est idéale pour des activités de stockage, par exemple »,estime Sébas-

tien Roux.Autre espace particulièrement intéressant dans le 13e arrondissement, au cœur de «Chinatown ». Il s’agit de l’ancienne gare de marchandises des Gobelins, un espace de 70000m2 et de 12 m de hauteur sous-plafond basé sous la dalle des «Olympiades ». Paradoxalement, cet entrepôt qui appartient à RFF (Réseau Ferré de France) n’est pas utilisé aujourd’hui comme point de départ pour les livraisons dans Paris intra-muros mais comme un centre de distribution de riz pour… tout le continent européen! Du côté du Port Autonome de Paris, de nombreux projets sont à l’étude. Ils pourraient voir le

“Aujourd’hui, les projets urbains sont mûrs. Ce n’était pas forcément le cas il y a dix ans”, SÉBASTIEN ROUX, CHARGÉ DE LA DIVISION MARCHANDISES À LA MAIRIE DE PARIS.

jour à plus ou moins long terme. Dans le cadre du Grand Paris et de l’Axe Seine-Nord, le développement d’une plate-forme logistique de 300 hectares d’entrepôts située à Achères (Yvelines), au confluent de la Seine et de l’Oise, est à l’étude et pourrait voir le jour à l’horizon 20152020. « L’objectif est de faire en

Le Plan Local d’urbanisme (PLU) voté en 2003 par la Mairie de Paris a identifié des terrains susceptibles d’accueillir des activités logistiques et les a réservés à cet usage (sur le plan, ces terrains correspondent aux zones UGSU – Zones urbaines de grands services urbains).

“On va lancer un appel à projets d’ici fin 2010 pour un bâtiment de 6 000 m2, disponible en bord de Seine en plein Paris”, DIDIER DEPIERRE, RESPONSABLE DU DÉPARTEMENT ETUDES ET PROSPECTIVE AUX PORTS DE PARIS. sorte que les conteneurs arrivent par voie d’eau du Havre ou d’Anvers avant d’être redistribués dans Paris », explique Didier Depierre, responsable du département Études et Prospective au Port Autonome de Paris. Autre piste à l’étude au Quai de Grenelle, le devenir des Magasins Généraux d’Austerlitz.«Ce bâtiment construit en 1907 était le “hub” de l’époque. Les marchandises réceptionnées

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➔DOSSIER 3

➔IMMOBILIER LOGISTIQUE

“La logistique n’est pas la priorité des municipalités”, VINCENT MEYER, RESPONSABLE DU SERVICE DÉPLACEMENTS À LA VILLE DE MONTPELLIER.

sur la plate-forme arrivaient en grande partie par la voie d’eau avant d’être livrées en charrettes dans le centre de Paris! », raconte Didier Depierre. «Aujourd’hui, ce bâtiment de 6000 m2 qui s’élève sur trois niveaux est le seul produit logistique disponible en bord de Seine en plein cœur de Paris. Le bâtiment est quasiment vide. On va lancer un appel à projets d’ici fin 2010. Nous retiendrons le candidat qui utilisera au mieux la voie d’eau pour l’approvision-

de s’appuyer sur des entrepôts logistiques en plein centre-ville et sont prêts, à l’instar de l’enseigne Monoprix, qui a initié la tendance en 2008 en s’installant sur la Halle Gabriel Lamé de la SNCF dans le 12e arrondissement de Paris, à modifier leurs flux logistiques pour livrer mieux et plus propre en centre-ville. Mais force est de constater qu’en matière d’entrepôts urbains, relativement peu de projets émergent encore hors des deux premières villes de France. Vincent Meyer, responsable du service déplacements à la ville de Montpellier, a son explication : « La logistique n’est pas la priorité des municipalités. Aucune commune n’a un service spécifique dédié aux livraisons ou à la logistique urbaine. Le sujet est toujours rattaché à la

À Paris, les Magasins Générauxd’Austerlitz abritent un bâtiment de 6 000 m2. Pour ce produit logistique disponible en plein Paris, six entreprises se sont déjà déclaré intéressées par ce site avant même l’appel à candidatures qui doit être lancé d’ici la fin de l’année.

nement de la plate-forme et, pourquoi pas, pour la distribution des marchandises dans Paris ».

Entrepôt sur berge à Austerlitz Cet entrepôt sur berge suscite déjà les convoitises. «Six entreprises sont d’ores et déjà intéressées par ce site. Elles évoluent dans des secteurs d’activités très divers : logistique, BTP, luxe… ». Cet engouement est bien la preuve que les logisticiens mais aussi les chargeurs ont des besoins réels

“Les transporteurs prennent

conscience de la nécessité d’utiliser des véhicules propres et de mutualiser les livraisons”, ANNE CHANÉ, RESPONSABLE D’ELCIDIS À LA ROCHELLE.

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voierie ou aux déplacements ». De fait,nombre de projets de «Centres de distribution urbaine » (CDU) ont été reportés, voire enterrés, suite à la non-réélection du porteur de projet ou à la pression d’associations de riverains voyant d’un mauvais œil l’arrivée d’un entrepôt sous leurs fenêtres. Malgré tout,pour accompagner des réglementations limitant la circulation des camions en centreville, quelques agglomérations ont réussi, en s’appuyant sur un hub logistique, à trouver un modèle de distribution urbaine pérenne. Monaco, Nice et La Rochelle en sont des exemples. Ainsi, à La Rochelle, une plateforme logistique urbaine baptisée Elcidis (pour Electric City Distribution), du nom d’un programme européen en faveur des transports propres, fonctionne depuis 2001. Située dans d’an-

ciens locaux de Sernam, à 50 m de l’entrée du périmètre de livraisons réglementé de la ville, cette « halle » de cross-docking de 800 m2 mise en place à l’initiative de la communauté d’agglomération est gérée depuis 2006 en Délégation de Service Public (DSP) par un opérateur privé, Proxiway, une filiale de Veolia spécialisée sur les déplacements de proximité. Avec ses neuf salariés et ses quatre véhicules électriques, elle assure la livraison de 100 tonnes de marchandises par mois pour le compte d’une dizaine de clients, dont 80 % de messagers, sur 700 points différents, situés principalement dans le centre-ville de La Rochelle.«Depuis une petite année, de nouveaux clients nous confient leur fret. On sent que les mentalités changent. Les transporteurs sont plus sensibles qu’auparavant à l’environnement, ils prennent conscience de la nécessité d’utiliser des véhicules propres et de mutualiser les livraisons », confie Anne Chané, responsable d’Elcidis. Par ailleurs, à Montpellier, l’élaboration d’un nouveau PDU (Plan de Déplacements Urbains) pourrait contribuer, à terme, à la multiplication d’espaces logistiques urbains. Ces derniers pourraient être situés dans des parkings équipés de bornes de recharge électrique, dans les ZAC (Zones d’aménagement concertées) en construction des quartiers périphériques ou encore dans l’Écusson, la zone commerçante piétonne de l’hypercentre de Montpellier.

Centre multimodal de distribution urbaine à Lille Aux côtés de ces quelques initiatives publiques, les transporteurs privés se mobilisent eux aussi sur le sujet et commencent à proposer de vraies solutions pour optimiser les livraisons du dernier kilomètre à partir de plates-formes logistiques dédiées. Des transporteurs routiers traditionnels allouent ainsi des surfaces d’entreposage à des sociétés spécialisées dans les livraisons du dernier kilomètre en véhicules propres. C’est le cas du Lillois


Des projets en attente Entreprendre la construction d’une plate-forme logistique urbaine est un chantier de longue haleine qui engage de lourds investissements financiers et qui, pour aboutir, doit être mené en étroite concertation avec l’ensemble des acteurs de la cité. Ainsi, malgré sa qualité architecturale, sa valeur ajoutée logistique et sa dimension écologique, l’entrepôt à étages de François-Auguste Bizet, élève de l’ENSA (Ecole Nationale Supérieure d’Architecture de Paris La Villette) et lauréat en 2008 du premier concours d’architecture de GSE sur le thème de la logistique urbaine, n’a pas encore trouvé sa place sur le site multimodal de la Porte de la Villette, au nord-est de Paris, auquel il était destiné. Dans le domaine de la logistique urbaine, ce genre de désillusions n’est pas réservé aux seuls étudiants en architecture. Les professionnels, eux aussi, ont souvent du mal à concrétiser leurs projets. Le promoteur de parcs logistiques Urban Real Estate en est le parfait exemple.

Grimonprez, qui vient de s’associer avec le livreur parisien Colizen pour effectuer des tournées en camions électriques à partir de son entrepôt de Marquez-les-Lille, situé à 4 km de l’Opéra de la capitale nordiste. De son côté,le transporteur orléanais Deret, qui s’est équipé l’année dernière d’une flotte de cinquante camions électriques pour livrer 21 villes de France, travaille avec le cabinet d’architectes Archi Concept Europe à la construction en propre d’un réseau hexagonal d’agences urbaines. La prospection des terrains a commencé en début d’année et la livraison des premiers bâtiments est prévue pour fin 2012.Le transporteur, qui s’inscrit dans une démarche patrimoniale, a un cahier des charges clair : il recherche des terrains de 10000 m2 minimum pour construire des

À l’origine il y a trois ans du concept de « City Hub », un « hôtel logistique » à étages, le développeur avant-gardiste s’est finalement aperçu qu’un bâtiment sur plusieurs niveaux exclusivement dédié à la logistique n’était pas économiquement viable en périphérie des grandes métropoles du fait du coût trop élevé du foncier. Les équipes d’Urban ont donc planché sur une deuxième version du City Hub, plus réaliste. Baptisée « City Hub 2 », celle-ci s’apparente à un véritable « éco-quartier » où sont regroupées différentes activités sur plusieurs niveaux, de la logistique urbaine en sous-sol, des bureaux et des logements sur les étages supérieurs, le tout surmonté par une centrale de production d’énergie. Mais, malgré un bilan environnemental exemplaire – le recours aux énergies renouvelables couplées à

bâtiments de 800 à 1200 m2 situés à moins de 7 km du centre-ville pour optimiser les tournées de livraison en camion électrique dont l’autonomie est d’une centaine de kilomètres. La proximité avec les ports est également recherchée. «Ces emplacements sont très intéressants de par les perspectives bimodales qu’elles ouvrent »,commente Jean-Luc Fournier, porteparole de Deret. Déjà présent en Île-de-France, sur Gennevilliers (au nord de Paris), et Bonneuilsur-Marne (au Sud), ainsi qu’en province, sur les ports de Lille et de Strasbourg, Deret souhaite également s’implanter sur les ports de Rouen et de Paris intramuros. Conscients qu’ils ont eux aussi une carte à jouer sur ce marché émergent de la logistique urbaine, les ports sont désormais une force de proposition en matière d’immobilier logistique.

Le projet d’entrepôt à étages de François-Auguste Bizet, élève de l’ENSA (École Nationale Supérieure d’Architecture de Paris La Villette) et lauréat en 2009 du premier concours d’architecture de GSE sur le thème de la logistique urbaine.

l’utilisation de véhicules électriques permet, selon Urban, de diminuer les émissions de CO2 de 94,7 % par rapport à un concept classique ! –, et un partenariat signé fin 2009 avec Vinci Immobilier d’Entreprise, un géant du secteur, « City Hub 2 » n’est pour l’instant qu’un séduisant concept architectural sur papier glacé. Si, grâce à la présence de bureaux et de logements, la rentabilité du projet

immobilier n’est plus un obstacle, il subsiste néanmoins un problème de taille : trouver un terrain dimensionné à l’ampleur de l’ensemble immobilier. Afin de pouvoir apporter une réponse réaliste et cohérente aux problèmes de logistique en ville, l’implantation d’un site comme « City Hub 2 » doit obéir à des contraintes opérationnelles et de fonctionnement importantes. Les espaces de manœuvre destinés aux camions représentent par exemple une surface extrêmement vaste. En outre, la localisation de l’ensemble logistique doit être au confluent de grandes voies de circulation, privilégiant les liens multimodaux. Pour « City Hub 2 », la somme de ces caractéristiques a permis de déterminer comme assiette foncière minimale un terrain de 6 ha et de près de 400 m de long.

Ainsi, à Lille, les autorités portuaires sont porteuses d’un projet de CMDU (Centre multimodal de distribution urbaine), lequel fédère une quarantaine de partenaires dont le Picom (Pôle de compétitivité des industries du commerce). Selon Didier Lieven,animateur recherche et développement au sein du Picom, «le centre pourrait être opérationnel en 2013. Son application sera d’abord expérimentale et limitée à une filière et à un quartier de la ville, voire à seulement une rue ». À l’image de ce projet lillois, le champ des possibles de la logistique urbaine est grand ouvert. Une seule certitude : le temps des villes n’est pas celui des hommes et il faudra plusieurs années pour voir ces projets s’intégrer de manière naturelle au cœur des métropoles asphaltées. Marie-Noëlle Frison

N° 252 • SEPTEMBRE 2010 • LOGISTIQUES MAGAZINE

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