Eco-conduite : compte-gouttes et compte à rebours

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AU SOMMAIRE ❚ FORMATIONS ET STAGES QUELLE EFFICACITÉ À LONG TERME . . . . . . . . . . . . . . P. 26 ❚ LES NOUVEAUX OUTILS QUAND L’INFORMATIQUE DONNE LA LEÇON . . . . . . . . . . . P. 30

ÉCO-CONDUITE

COMPTE-GOUTTES ET COMPTE À REBOURS RÉALISÉE PAR CATHERINE GAUDENZ ET BRUNO MOULY

Une mode ? Un leurre ? Un creux leitmotiv ? Non, la « conduite économique » est devenue un impératif pour les entreprises de transport routier, pour qui le premier euro de gagné est celui qui n’est pas dépensé. Les fo rmations dédiées pour les conducteurs routiers et les outils informatiques sont multiples, pour réduire de quelques litres la consommation de gazole sur longues distances (et, donc, limiter les émissions de CO2). Le discours dominant annonce des résultats tangibles et rapides. Sont-ils toujours mesurables ? L’Officiel des Transporteurs – N° 2567 du 8 octobre 2010

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❚ FORMATIONS ET STAGES

QUELLE EFFICACITÉ À LONG TERME? Soucieux de réduire leur consommation de carburant, donc leurs émissions de CO2 , bon nombre de transporteurs proposent à leurs conducteurs de suivre des stages d’éco-conduite. Mais pour porter leurs fruits, ces stages doivent faire l’objet d’un suivi au sein de l’entreprise. LES PRINCIPAUX POINTS DE VIGILANCE Atteindre la vitesse de croisière le plus rapidement possible ■ Savoir changer les vitesses ■ Savoir utiliser la boîte automatique ■ Utiliser le limiteur de vitesse ■ Savoir anticiper (les virages, les ronds-points, les feux tricolores…) ■ Éviter les freinages tardifs et inutiles ■ Éviter les ralentis prolongés ■ Surveiller le compte-tours ■ Savoir changer les vitesses en côte ■ Savoir exploiter les descentes ■ Gérer les conditions climatiques ■

aire d’une pierre deux coups. C’est ce qu’ont souhaité de nombre uses entreprises de transp o rts ces derniers mois en formant leurs conducteurs à l’éco-conduite. « Début 2009, la crise avait significativement ré duit notre niveau d’ a c t i v i t é, se souvient ainsi Jean-Claude Pl â , président de la SAS Vingeanne Transports (52). Nous avons dé cidé d’en profiter pour former no tre cinquantaine de chauffeurs, tout en nourrissant l’espoir de ré d u i re nos coûts ». De fait, la consommation de carburant représente entre un quart et un tiers des charges des sociétés de transport. « Le gazole est notre deuxième poste de coût derrière

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la masse salariale », rappelle Éri c Rousseau, gérant des Transports Rousseau (58). Dans ces conditions, la moindre réduction de consommation peut avoir un impact positif sur les résultats. « C’est l’un des seuls postes où un trans porteur peut espérer dépenser moins », souligne même Laurent Gaschet, responsable de la formation chez Volvo Trucks France. Voilà qui explique sans doute que les entre p rises de TRM se soient intéressées à la conduite rationnelle bien avant que tout le monde ne parle de développement durable. « Nous proposons des formations de type écoconduite depuis 1973, date du premier choc pétrolier », rappelle Daniel Grasset, directeur du dé-

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veloppement et des centres de formation du groupe AFT-IFTIM. Mais aux préoccupations économiques qui ont par le passé incité les tra n s p o rteurs à form e r leurs conducteurs, s’ajoute à présent une pression politique.

Daniel Grasset, directeur du développement et des centres de formation du groupe AFT-IFTIM.

Promulguée le 12 juillet 2010, la loi portant sur l’engagement national pour l’environnement, dite Grenelle 2, pousse en effet les groupes pétroliers à faire des économies d’énergie, notamment en encourageant leurs pro p re s clients à réduire leur consommation de carburant. Plus d’une centaine d’entre p rises de transport ont par ailleurs signé, depuis le 16 d é c e m b re 2008, une charte d’engagements volontaires de réduction des émissions de CO2 avec le ministère du Déve l o ppement durable et l’ADEME. Ce document les engage dans un plan d’actions devant permettre d’éviter l’émission de près de 90 000 t de CO2 et la consommation de plus de 20 millions de li-


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tres de gazole. Parmi les signataires, le groupe STG a par exemple f o rmé en intern e, ces cinq dernières années, plus d’un millier de ses 1 658 conducteurs. DES APPROCHES DIVERSES On ne saurait guère voir, dans un tel contexte, que des avantages aux formations à l’éco-conduite. Mais ces ve rtus sont-elles réelles ? En d’ a u t res term e s, quelle est leur efficacité ? Afin de répondre à cette question, intéressonsnous dans un premier temps à la façon dont se déroulent les formations disponibles sur le marché. Bon nombre d’entreprises ont, pour former leurs conducteurs, assez logiquement recours à de « grands » organismes tels Pro m o t rans ou l’AFT-IFTIM. C’est le cas des Transports Jumeau (28), qui ont fait appel à l’AFT il y a un an pour proposer un stage d’éco-conduite à une vingtaine de leurs trente conduct e u r s. « Le formateur est venu

formateur ». Ainsi, au total, chaque conducteur a été mobilisé une demi-journ é e. « Qu e l q u e 6 000 stagiaires suivent nos for mations à l’éco-conduite chaque année en moy e n n e, se félicite Daniel Grasset. Nous proposons également des formations courtes en complément de la formation continue obligatoire . Mais elles « LES ÉCONOMIES sont moins demandées depuis le passage de la FCO de trois à cinq DE CARBURANT jours. Car cet allongement nous PEUVENT VARIER permet d’évoquer l’éco-conduite ». DE 5 À 10 %. » D’ a u t res prestataires pro p osent d’autres approches. La soavec un camion équipé », expose ciété Bennes Inter-Se rvices (81) Pa t rice Métais, directeur des a par exemple fait appel à la soTransports Jumeau. Le groupe de ciété CGI, en région bordelaise, formation a de fait mis en place pour former 17 de ses 23 chaufun dispositif pédagogique bap- f e u r s. « Nous avons tra va i l l é tisé « écopilote », système d’ e n- avec les camions de l’entreprise », registrement en temps réel des explique Frédéric Bonhomme, paramètres d’utilisation d’un vé- P-dg de l’entreprise. Les chaufhicule, tels que la consommation feurs ont ainsi pu conduire leur de carburant, l’usage optimal du véhicule personnel, une premoteur et des dispositifs de frei- mière fois sans conseil, une senage, ou encore l’anticipation conde fois ave c. Les Transports et le respect de la sécurité. Bonnand (69) ont de leur côté L’intérêt ? Construire un profil de préféré passer par Vo l voTrucks. conduite et élaborer des statis- Ava n t a g e, selon Ni c o l a s tiques qui permettent d’évaluer Bonnand, gérant de la société : le formateur intervient en exle conducteur. « Le formateur nous avait de - ploitation. « Le conducteur fait mandé de définir un parcours de sa journée normale », déve45 minutes près de chez nous, loppe-t-il. Briefé le matin et le poursuit Pa t rice Métais. L e s soir, il est accompagné par le conducteurs sont montés avec lui f o rmateur qui le corrige immédeux par deux.Chacun a d’abord diatement. « Sa parf a i t e effectué le parcours sans com - connaissance des véhicules mentaire. Puis le formateur lui a permet à ce dernier de donner p roposé des points d’améliora - des conseils visant à moins sol tion. Enfin chaque conducteur a liciter le matériel et allonger sa refait le parcours en tâchant de durée de vie », apprécie en outenir compte des re m a rques du tre Nicolas Bonnand.

Nicolas Bonnand, dirigeant des transports époymes : « Nous avons commencé à proposer des stages à nos conducteurs en 2008. Depuis, nous formons tous les nouveaux arrivants. »

Les Transports Rousseau ont quant à eux privilégié la formation en interne pour leurs 200 conducteurs. « Nous avons deux formateurs agréés, détaille Éri c Rousseau. Ils animent notam ment la journée d’intégration à laquelle tous les nouveaux arri vants participent, et dont une p a rtie est consacrée à l’écoconduite ». Concrètement, l’ e n-

treprise a défini un parcours type de 37,6 km, très accidenté, que chaque conducteur effectue a vec un véhicule lesté par trois fois : une première fois seul ; une deuxième fois avec un formateur qui lui apporte des conseils ; une dernière fois avec le formateur mais sans commentaire s. Résultat ? « Le troisième trajet est en général parcouru de façon

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un peu plus rapide, s’étonne Éric Rousseau. Et la consommation est en moyenne inférieure de 4 l/100 ». D’IMPORTANTS GAINS IMMÉDIATS À court terme, les gains à attend re d’une formation à l’écoconduite peuvent en effet para î t re spectaculaire s. « L e s économies de carburant peuve n t varier de 5 à 10 % », affirm e Daniel Grasset. « Nous enregis trons 7 % de gain sur la consom mation de gazole en moyenne de puis dix ans », renchérit Laurent Gaschet. Et les bénéfices ne s’ a rrêtent pas là… « C’est bluffant, admet Patrice Métais. L’exe rcice effectué avec le formateur dé montre qu’un même conducteur peut effectuer un même trajet un tout petit peu plus vite, a vec une conduite plus souple, en consom mant moins et en usant moins la machine ». À plus longue échéance, cependant, l’enthousiasme des transporteurs se fait plus mesuré. Pour certains, les effets des stages d’éco-conduite sont quasiment nuls. En cause : les mauvaises habitudes que les conducteurs ne sont pas toujours prêts, ou capab l e s, d’abandonner. « Un an après, c’est oublié, déplore

« Seuls 3 ou 4 chauffeurs sur 17 ayant participé au stage s’efforcent d’appli quer ce qu’ils ont appris », déplore Frédéric Bonhomme, P-dg de Bennes Inter-Services (81).

Frédéric Bo n h o m m e. Sur 17 chauffeurs concernés, nous en avons trois ou quatre qui s’effor cent d’appliquer ce qu’ils ont ap pris et dont la consommation a baissé. Les autres ne sont pas inté ressés ». Même remarque de la part de Patrice Métais. « Nous n’obser vons pas de baisse significative de consommation de carburant, reconnaît-il. Même si les conducteurs ont bien réagi, il n’est pas facile de changer pour des individus qui ont quinze à vingt ans de métier ». Ce n’est d’ailleurs pas pro p re aux conducteurs routiers. « Pre n e z

l ’ exemple des ra d a r s , p ro p o s e Daniel Grasset. Si je vous dis qu’il y en a partout,vous ferez attention. Mais si vous savez qu’il n’y en a pas, vous vous autoriserez des écarts ». En d’ a u t res term e s, comme le dit le proverbe : chassez le naturel… il revient au galop ! D’ a u t res transporteurs ve ulent pourtant y croire. « Sur l’en semble du parc,la baisse n’est pas très significative, reconnaît Eric Rousseau. Mais sur tous les gros consommateurs, comme les ben nes ou les grumiers, elle se mon t re assez importante. Or nous

➜ WALTER BONETTI, Consultant et formateur tout transport pour BW Formation

« La plupart des conducteurs ont trop confiance en eux » ❱❱ L’OT : Qu’est-ce que l’écoconduite ? W. B. : C’est une technique de conduite qui repose sur un savoir-faire et requiert des capacités d’anticipation. Mais c’est aussi un savoir-être qui consiste à adopter une attitude de bon sens. Son ambition est de réduire la consommation de carburant, et du même coup les émissions de CO 2. Mais elle diminue aussi la sinistralité, réduit les coûts d’entretien des véhicules et fait baisser le stress des conducteurs.

❱❱ Quelles sont les mauvaises habitudes les plus courantes sur la route ? W. B. : Le non-respect des distances de sécurité est pour moi la mauvaise habitude la plus répandue. Le manque de communication entre usagers de la route est également très courant, notamment aux intersections. Enfin la plupart des conducteurs ont trop confiance en eux. Il s oublient que leur cerveau peut les trahir. Les informations que récoltent nos yeux peuvent être mal interprétées et nous

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amener à commettre des erreurs à cause d’un effet d’optique.

❱❱ Quels sont les facteurs de réussite d’une formation à l’éco-conduite ? W. B. : Il faut bien sûr que le f o rmateur ait une culture du métier du transport et sache se montrer pédagogue. Chauffeur routier pendant 20 ans, je suis pour ma part f o rmateur indépendant et j’interviens pour divers organismes de formation ou entre p rises de transport. Mais il convient aussi que l’entrep rise mette en place une stratégie et un suivi.

n’ a vons commencé qu’en début d’année et moins de la moitié des chauffeurs ont à ce jour suivi la formation. En poursuivant l’ef fort, nous espérons faire passer la baisse de consommation d’un d e m i - l i t re à 1 litre aux 100 ». NÉCESSAIRE SUIVI Obtenir des résultats pérennes exige de fait un engagement à long term e. L’idéal étant sans doute de pouvoir former ses conducteurs régulièrement. Mais tous les transporteurs ne disposent pas du temps et du budget n é c e s s a i res pour proposer des piqûres de rappel. « Nous avons mobilisé 17 chauffeurs sur 25, ainsi que 10 camions, calcule Frédéric Bonhomme. Nous pou vons difficilement nous permet tre d’envisager une nouvelle ses sion. D’autant que nous avo n s eu neuf FCO l’an dernier. Celleci étant passée de trois à cinq jours, nous avons dépassé l’en veloppe dont nous disposons pour la formation. Et les stages éco-conduite n’ont pu être pris en charge qu’à 50 % ». Assurer un suivi n’implique cependant pas forcément de former systématiquement tous ses conducteurs. « Nous avons com mencé à proposer des stages à nos conducteurs en 2008, témoigne par exemple Nicolas Bonnand. Depuis, nous formons tous les n o u veaux conducteurs, ainsi que tous ceux qui, parmi les anciens, ont tendance à dériver. L’essentiel est d’installer une culture com mune sur le sujet ». Pour un in-


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vestissement qui reste limité. « Une journée de formation ave c Volvo Trucks nous coûte environ 600 E hors taxe , estime Nicolas Bonnand. L’OPCA ne prend en charge que 400 euros. Le reste est donc à notre charge. Mais comme la formation se fait en exploita tion, elle n’est pas pénalisante en termes de chiffre d’affaires. Au fi nal, le jeu en vaut la chandelle ». Par-delà les formations, c’est l’entre p rise tout entière qui doit se mobiliser pour éviter que les mauvaises habitudes ne re v i e nnent. « Pourquoi ne pas afficher les consommations, s u g g è re Laurent Gaschet. Cela peut créer une émulation ». C’est le cas chez Sodinor, filiale de STG, où un tableau communique chaque mois aux conducteurs les consommations de chaque véhicule. « Sur les porte-clés des véhicules figu rent d’un côté la courbe de consommation, et de l’autre un petit personnage de couleur rouge si la consommation est excessive, o range si elle est moyenne, ou ve rte si elle bonne », ajoute

Flavien Rive, DRH du gro u p e. Résultats : un gain de 4 l/100 sur trois ans pour le service messagerie frais, et 2,9 l sur quatre ans pour le service messagerie industrielle situé à Noyal (35). Autre outil envisageable, l’ i nformatique embarquée. « Notre ordinateur de bord pour poids lourds CarCube comprend depuis deux ans une fonctionnalité écoconduite, souligne Fabien Du s s e r re, directeur France de Punch Telematix. Nous l’avo n s lancée suite à l’augmentation des prix du gazole, en réponse à une demande du marché ». Les sociétés qui emploient un formateur interne peuvent enfin s’appuyer sur la collaboration de ce dernier. « Nous avons fait appel à l’AFT pour faire passer le message,mais notre formateur interne est là pour le re l a y e r, souligne Jean-Claude Plâ. Il faut quelqu’un dans l’entre prise qui suive la consommation au quotidien. C’est ce qui nous a permis de réduire la nôtre de 0,8 l / 100 en 2009. Et la tendance se confirme en 2010 ». Même dé-

Jean-Claude Plâ, président de la SAS Vingeanne Transports (52) : « Nous avons décidé d’en profiter pour for mer notre cinquantaine de chauf feurs, tout en nourrissant l’espoir de réduire nos coûts ».

m a rche au sein des Transports Rousseau. « Les conducteurs ayant suivi un stage éco-conduite doivent remplir chaque semaine une fiche indiquant leur consom mation, puis la déposer dans le bureau des formateurs, témoigne Éric Rousseau. En cas de déra page, ceux-ci peuvent en chercher l’origine et en discuter avec l’indi vidu concerné ».

Car la conduite rationne lle n’est, ra p p e l o n s - l e, pas une science exacte. « La consomma tion d’un même véhicule au sein d’une même flotte peut varier de deux à trois litres en fonction de la charge qu’il transporte, de la f o rce du ve n t , du plein effectué, etc. », rappelle Pa t rice Métais. Dans ces conditions, il faut être en permanence attentif au moindre détail. « Nous avo n s décidé de bâcher toutes nos ben n e s, indique Éric Rousseau. Leur consommation a ainsi baissé de près de 4l/100 ». Si la promotion d’une conduite rationnelle exige de parler de conduite, elle ne s a u rait donc s’en contenter. Les questions d’itinéraire ou de sécurité doivent elles aussi être abordées. Dès lors, les gains à en attendre ne se limitent pas à la seule consommation. « Un conducteur qui consomme peu est un conducteur qui sollicite moins le matériel, qui conduit mieux et qui est moins fatigué », c o n f i rme Laurent Gaschet. ● CATHERINE GAUDENZ

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❚ LES NOUVEAUX OUTILS

QUAND L’INFORMATIQUE DONNE LA LEÇON La plupart des fournisseurs d’informatique embarquée se positionnent sur le nouveau business de l’éco-conduite. Ils lancent des modules, souvent en option, capables d’en déduire le comportement des conducteurs. En compléments des formations ? l e rte rouge ! Malgré le compte-tours sous les yeux, tous les conducteurs routiers ne sont pas des as de la conduite sur “zone verte”. La plupart des fournisseurs de solutions embarquées de gestion de flottes et de géolocalisation de véhicules proposent donc la parade. Pour appuyer les formations, ils ve ndent des modules embarq u é s d’éco-conduite capables de mes u rer le comportement du conducteur en situation réelle, freinage, accéléra t i o n s, décéléra t i o n s, régime moteur au ralenti, surrégime, vitesse… et d’exploiter ces données pour en t i rer l’analyse du profil de conduite par ra p p o rt à un profil théori q u e. « Ce sont des ou tils qui relaient au quotidien et sur la durée les bonnes pratiques enseignées dans une formation spécifique délivrée plusieurs mois auparavant. La vigilance des chauffeurs est ainsi mainte nue », explique Fabien Dusserre, d i recteur France de Pu n c h Telematix (appartanant au groupe Trimble depuis mi-septembre), l’un des géants mondiaux de l’ i n f o rmatique embarquée pour les poids lourds. Pour les exploitants de flottes, les nouveaux systèmes proposés par les spécialistes en informatique embarquée peuvent s’ a v é rer plus efficaces que la seule formation à l’éco-conduite, en permettant une économie de carburant « jusqu’à 25% comparé à un comportement de conduite un peu nerveux » selon Pa t ri c k Minot, directeur général de Nomadic Solutions, fournisseur

autre en mode GPRS « qui envoie à la fin du parcours, les données vers un serveur distant qui les ex ploite ». Ces trois versions sont commercialisées ce mois-ci pour les véhicules légers et utilitaires. « La version pour les camions sera lancée fin 2010 ou début 2011. Le prix du plus simple module s’élève entre 100 et 200Ä,avec le pack for mation », précise Patrick Minot. Principal avantage : elle s’affranchit d’ordinateurs embarqués et de l’ i n t rusion du système de mesure dans le CAN BUS, le réseau électronique de capteurs et d’actionneurs des véhicules permettant le contrôle du moteur, de la boîte de vitesse et des équipements de sécurité. Inconvénient : des mesures moins précises.

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Pour les exploitants de flottes, les nouveaux systèmes proposés par les spécialistes en informatique embarquée peuvent s’avérer plus efficaces que la seule formation à l’éco-conduite.

de systèmes de géolocalisation et de télématique embarq u é e. Du coup, l’offre de tels outils est en train d’ « exploser » en s’ a ppuyant sur des technologies et des méthodes variées. Nomadic Solutions a ainsi développé une suite d’outils matériels et logiciels à destination des organismes de formation à l’écoc o n d u i t e. Le fabricant lance notamment la vente de son Ecogyser, un petit boîtier qui, fixé sur le tableau de bord du conducteur, enre g i s t re notamment l’accélérométrie longitudinale (accélération, décélération), transversale (pour les virages) et verticale (profil de la route, trous, dos d’âne…) du véhicule. « Le boî tier se comporte comme une clé

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USB que l’on peut brancher à un PC. Celui-ci exploite les données grâce à un algorithme que nous avons breveté.On en ressort les at titudes de conduite, la consom mation de carburant, l’impact des émissions de CO2… et a posteriori des conseils de conduite économi que », indique Pa t rick Minot. La solution de Nomadic permet de suivre l’évolution dans le temps du comportement de conduite. « Il s’agit d’un suivi de la formation qui récompense les bons élèves et offre la possibilité de re f a i re un stage pour les mau vais », ajoute le dirigeant. Nomadic propose deux autres versions de son Ecogyser, l’une en mode Blue Tooth qui permet de dialoguer avec un PDA et une

TRANSMISSION DE DONNÉES PAR GPRS C h ez GFD, société de conseil et de développement qui intègre et c o m m e rcialise la solution Ec o Kilometrix de la SSII St e ria, on propose l’utilisation d’un boîtier branché à la prise FMS (Fl e e t Management System) du camion suivant le protocole standard FMS qui permet de récupérer les données du régime moteur, du fre i n a g e, de la vitesse…du CAN BUS auquel elle est reliée. Comme bon nombre de produits offerts, le boîtier de GFD transmet les données par GPRS à un serveur central chargé de les analyser. « On en déduit un suivi en temps réel du comport e ment des chauffeurs avec une c h a rte graphique qui illustre leur évolution. C’est un support à la formation de la conduite ration nelle et responsable. Il permet


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d’économiser 4 000 Ä de carburant par an sur la base de plus de 60 000 ki lomètres parcourus an nuellement », souligne Éric Félix, consultant pour GFD auprès de St e ri a . La solution est proposée en location pour un tarif situé entre 29 et 35 Ä par mois. Ma s t e rnaut, l’un des leaders européens de la géolocalisation, propose une solution hybride qui utilise les données du CAN BUS, sans passer par la prise FMS. « No u s avons racheté la société NSI qui a bre veté une pince sans contact permettant de récupérer les in formations, surrégime, vitesse élevée, moteur tournant à l’ar rêt, freinage brusque… du CAN BUS, sans intrusion. C’est une technique unique sur le marché qui offre aux tra n s p o rteurs la possibilité d’une flotte de ca mions sans prise FMS ou de ne

L’offre des produits, qui s’appuient sur des technologies et des méthodes variées, est en train d’« exploser ».

la vitesse du véhicule sur le chro notachygraphe, idem pour le ré gime moteur. Les données des ac célérations/décélérations, sont enregistrées par un accéléromè tre inclut dans le boîtier de l’unité centrale. L’arrêt du moteur de vient re p é rable automatique ment en fonction des informa tions de la vitesse et du régime moteur », révèle le dirigeant. Résultat : la fonctionnalité de la conduite économique est adaptée à tous les véhicules. De plus, un écran dynamique informe le conducteur en temps réel sur son style de conduite, avec alertes et rappels à l’ordre par synthèse vocale. Toutes les données sont accessibles par internet sur le web de Punch Telematix. L’entreprise commercialise son module d’éco-conduite en option gratuite au sein de son offre plus globale Carcube, son ordinateur embarqué de navigation pour poids lourds.

STATISTIQUES C h ez Qualcomm, l’option écofiables possibles du comportement conduite est payante dans ses du chauffeur. Il peut amener un deux offres globales d’ i npas investir pour en équiper gain de 10% d’économie de car - formatique embarquée, Omni exleurs véhicules », a f f i rme Aurélie burant », poursuit la dirigeante. press qui utilise la prise FMS et Rodriguez, chef du marché tra n s- Au t re va riante technologique, MCP 2000, un ordinateur de bord celle proposée depuis deux ans haut de gamme. Les deux soluport chezMa s t e rnaut. La transmission des données par Punch Telematix, un « pure tions communiquent avec un se fait par GPRS sur un serveur player » de solutions embarquées portail Internet FleetVisor de l’enweb de l’entreprise, accessibles pour les poids lourd s. « Nous t re p ri s e. Ils permettent aux aux clients transporteurs, qui en avons été les premiers à présenter conducteurs de visualiser en calcule la consommation de car- une application d’éco-conduite au temps réel leur comportement et b u rant, l’émission de CO2 et sein d’un système standard d’in - aux exploitants d’obtenir pléthore même un classement des formatique embarquée », se tar- d’informations, statistiques, graconducteurs. « L’objectif de cet ou - gue Fabien Dusserre. Sa solution phiques sur la conduite. Tom Tom til d’aide à la formation est de évite la prise FMS et le branche- Business Solutions intègre dans fournir les informations les plus ment au CAN BUS. « On récupère sa suite logicielle d’aide à la navigation Tom Tom Work, un module d’éco-conduite EcoPlus, un boîET LA TOPOGRAPHIE DU TERRAIN ? tier connecté à son homologue de géolocalisation, qui remonte les souligne Fabien Dusserre, son directeur Mesurer le style de conduite des conducteurs informations en temps réel du France. De son côté, OMP – intégrateur des pour en réduire leur consommation de port OBD2 du véhicule. « Notre boîtiers et des logiciels de la société Eliot – carburant, c’est bien. Calculer cette consomtechnologie ne passe pas par la offre « un système capable de mesurer le mation en fonction de la topographie du prise FMS et le CAB BUS »,précise parcours et la charge du véhicule, c’est mieux. poids à l’essieu en fonction du contexte Éric Hubert, directeur commeropérationnel, permettant d’ajuster le trajet à la Or, la plupart des fournisseurs de solutions cial de Tom Tom Business conduite rationnelle », selon Sébastien Rufflé, embarquées d’éco-conduite avouent Solutions. Intégrée ou pas à la soresponsable pôle client chez OMP. « ne pas avoir encore de modules spécifiques lution Tom Tom Wo rk, l’option Quant à EloMobile, spécialisé dans les flottes pour ces deux données ». Ils y travaillent Ec o Plus sera lancée fin 2010. de camions, s’il peut calculer le poids à pourtant. Chez Punch Telematix, « on planche Orange Business Services, premier l’essieu, « mesure grossière qui permet de sur ces fonctionnalités en mettant notamment opérateur mobile en France, n’est voir si le camion est aux trois quarts vide ou au point un détecteur de mouvement pas en reste avec son produit Fleet plein », note Fédéric Serre, son directeur gyroscopique pour la topographie, capable de Performance. Le prestataire revendiscerner l’enfoncement de la pédale d’accélé - général, il dispose aussi d’un accéléromètre dique plus de 30 000 véhicules rateur ou de frein en montée ou en descente », qui tient compte du relief des trajets. équipés, VL et PL. ● B. M.

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