Maritime : crise économique pour les chargeurs ?

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SPÉCIAL MARITIME

Crise économique, et crise de nerfs... AU SOMMAIRE : ■ Le vrai pro b l è m e , c’est la réforme des ports en France ..........................p. 22 ■ Abondance de navire s nuit aux chargeurs .....p. 24

pour les chargeurs?

La sempiternelle bagarre entre armateurs et chargeurs est repartie de plus belle en 2010 au vu des nouvelles majorations tarifaires du début d’année. Les capacités augmentent, les taux aussi ! A croire que le maritime déjoue les lois de l’offre et de la demande… Néanmoins, le marché pourrait se détendre en fin d’année, selon les experts. Un dossier de Nathalie Bureau du Colombier. a grimpe ça grimpe… état de sous-capacité. «Depuis Pa ra d ox e. Les taux de l’abolition des conférences mafret n’ont cessé d’ a u gritimes en octobre 2008, les armenter depuis fin 2009 alors mements ne se sont jamais aussi qu’au même moment, l’offre bien organisés. Ils ont bien su de tra n s p o rtmaritime n’a jagérer leurs capacités de tra n smais été aussi abondante. Les port», remarque Alain Pelegrin, navires ont beau être président du synplus grands, plus ra- « Les armateurs dicat des transitaires ont préféré pides et plus nomde Marseille (STM). mettre davantage Avant la crise, tout breux, la qualité des s e rvices de transport de navires sur un était réglé comme maritime n’est pas au service et ralentir du papier à murendez-vous. Pire, elle sique pour perla vitesse » s’est sérieusement dém e t t re à la logisgradée depuis la crise, estiment tique globale de fonctionner les clients, qu’ils soient charen flux tendus en porte à porte. geurs ou transitaires. La crise économique a re b a ttu les cartes dans la façon d’apLa crise économique préhender le transport maa rebattu les cartes ritime avec, notamment, la pratique du «slow Moins d’armateurs à cause des steaming » qui faillites, fermetures de services est en train en série, transit time fortement dégradé et, en prime, l’incertitude sur les capacités. Le re nversement de vapeur a été brutal. En surcapacité fin 2008, les a rmateurs se sont rapidement mis en

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crise de capacités

de se généraliser. Afin de contrer l’afflux massif de capacités sur le marché, les armateurs ont préféré, plutôt que de les laisser à la chaîne, mettre dava ntage de navires sur un serv i c e et ralentir leur vitesse.

Des transit time rallongés Résultat : les fréquences re stent inchangées mais les transit time se sont sérieusement rallongés car les navires sont passés d’une vitesse moyenne de 25 à 20 nœuds en deux ans à peine. «Si la vitesse diminue

Evolution en 2009 de l’offre, de la demande et des taux de fret sur le service Asie-Europe

Jan Fév Mar Avr Mai Jun Jui Aoû Sep Oct Nov Déc Capacité Taux de fret en $/TEU

Demande en TEU Taux d’emploi en %

Sources : ELAA, SSE, Alphaliner. Les taux d’emploi sont des estimations d’Alphaliner.

de 5%,la consommation de fuel baisseraalors de 15 %.Il y a un gain financier évident », explique Philip Damas, Director Liner Sh i p-

En restreignant significativement (de 26 % depuis le début de la crise en 2008) leurs capacités sur les flux Extrême-OrientEurope, les armateurs sont parvenus à restaurer les taux de fret spot, tout en optimisant l’emploi des navires, parvenant à un taux d ’ u t i l i sation de 99 % en fin d’année, selon les données compilées par les experts d‘AXSAlphaliner. Le rebond de la demande en fin d’année y a largement contribué. Pour autant, les résultats annuels des armateurs sont, pour la plupart, dans le rouge.

nent leurs t ransit time de 21 jours entre Singapour et Fos. Le slow steaming risque fort de durer et de se généraliser sous couvert de considérations environnementales.

ping & Supply Chains chez Drewry Shipping Consultants. Certains armements, comme MSC, ne le pratiquent que dans le sens Eu rope-Asie et maintien-

Des chargeurs auraient perdu des clients Si certains grands chargeurs y t ro u vent leur compte ave c une empreinte écologique plus faible, d’autres ont été lésés. Aux Etats-Unis, certains chargeurs auraient perdu des clients. En parallèle, la technique du «roll ove r» s’est déve-

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Asie-Europe, les tarifs jouent aux montagnes russes La reprise est au rendez-vous depuis le début de l’année en sortie d’Asie avec des taux de fret similaires à ceux d’avant la crise. Si l’axe Asie-Europe a joué aux montagnes russes depuis deux ans, d’autres zones ont conservé une relative stabilité des prix. C’est le cas notamment en Amérique Latine et sur l’axe Europe-Afrique.

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« Les armateurs embarquent les conteneurs aux taux de fret les plus élevés, laissant le reste à quai »

également un facteur de risque d’accroissement des délais de livraison. Si le premier navire rate la fenêtre, la marchandise prend généralement une semaine de re t a rd. Face au manque de place sur les navires en sortie d’ A s i e, une drôle de pratique s’est développée : les a rmateurs embarquent les conteneurs aux taux de fret les plus élevés laissant à quai le reste. Parallèlement, les grands chargeurs, qui traitent habituellement en direct avec les compagnies maritimes, se sont mis à confier une partie de leur fret

l o p p é e, consistant à prier les c h a rgeurs de bien vouloir att e n d re une semaine de plus avant l’embarquement du fret sur les navires mères.

Une drôle de pratique «Nous avons découve rt ce phénomène fin 2008 lorsqu’un navire de MOL était en avarie commune. Le conteneur part bien à la date prévue mais reste une semaine à terre dans un hub.Nous risquons de perdre nos clients à cause de cela », s’inquiète un t ra n s i t a i re. La multiplication des transbordements constitue

aux transitaires pour sécuriser une partie de leurs cargaisons. « C’est dangereux pour les armateurs qui perdent une partie des relations commerciales avec les grands chargeurs », fait valoir le consultant britannique. Les armateurs comptent-ils sur les chargeurs pour éponger leurs dettes ?

Des tarifs ascendants Au plus mal en 2009, les compagnies ont procédé à des réajustements tarifaires dès juillet alors que les capacités continuaient de s’élever avec l’ e n-

Le vrai problème, c’est la réforme des ports

Les ports français sont à la traîne Les réajustements opérés ne semblent pas lui poser de problème : «Les armateurs gèrent leurs surcapacités ou sous-capacités comme ils l’entendent. On s’en fiche de mettre deux jours de plus parce que la vitesse des

orte-parole du Syndicat des transitaires du port du Havre (STH), Jean-Louis Le Yondre se dit davantage révolté par les difficultés d’application de la réforme des ports français que par les changements opérés dans le t ra n s p o rt maritime de conteneurs depuis la crise. Il tire aujourd’hui la sonnette d’alarme.

P

Philip Damas, Dir Drewry Shipping

Gagner des parts de marché

TA : Quel est l’impact de la crise

à la même enseigne.Que l’on soit à Anvers, Ro t t e rdam ou Ha mbourg,la surcharge est la même. Les armateurs desserv i ront les ports français les plus fiables,les ports où la CGT ne les emm...pas! La réforme des ports doit nous permettre de gagner des parts de marché, et de rattraper Valence dans le Sud et Rotterdam au

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No rd », lance Jean-Louis Le Yondre, également vice-président de TLF et président du conseil de développement portuaire du Havre.

Des évolutions Tramar, la société havraise de transit qu’il dirige, possède une agence à Shanghaï, aux pre-

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sur le transport maritime ? PD : La hausse du prix du fret a été vertigineuse entre l’Asie et l’Europe. Les taux ont triplé de mai 2009 à mai 2010, impliquant des coûts logistiques supplémentaires pour les chargeurs. Les réductions de capacités sont impressionnantes. A présent, l’offre est insuffisante pour faire face à la demande. Et outre l’envolée des prix, les chargeurs subissent des retards de livraison.

miers mois de l’année une croissance soutenue par rapport à la même période de 2009.Et les volumes Asie-Europe ont même connu un rebond spectaculaire de l’ordre de 30% », indiquait, début mai, CMA CGM. En Asie, à l’import comme à l’export, l’essor des volumes a été de 20% au premier tri m e s t re2010 se traduisant par des tarifs en hausse, supérieurs à ceux du premier tri m e s t re2009, indique l’European Liner Affairs Association (ELAA). Pourtant, cette expansion ininterrompue ne devrait pas durer. Dre w ryShip-

ping Consultants prédit une accalmie pour la deuxième moitié de 2010 avec l’arrivée de nouveaux navires.

De nouvelles capacités sur le trade Asie-Europe « MSC et CMA CGM vont recevoir des livraisons au cours des prochains mois. Des capacités vont entrer sur le trade Asie-Europe et les prix vont diminuer au deuxième trimestre. Sur le transpacifique,où les armateurs continuent de perdre de l’argent, les prix baisseront un peu plus tard », prédit Philip Damas.

en France mières loges donc pour observer les évolutions de stratégie armatoriale.

Au Havre, comme à Marseille, les professionnels de la filière maritimo-portuaire s’exaspèrent des difficultés d’application de la réforme portuaire au moins autant que des surcharges appliquées par les armateurs.

Au Havre, les professionnels de la filière maritimo-portuaire pâtissent non pas du prix trop élevé du fret maritime ou des transittime à rallonge. Tout comme à Marseille, ils sont exaspérés par les mouvements sociaux et les difficultés de parvenir à signer des accords locaux dans le cadre de la réforme des ports. «Les armateurs font subir la même chose à tous les transitaires dans tous les ports. Tout le monde est logé

trée en flotte de nouveaux nav i re s. Une augmentation qui, selon elles, «couvre tout juste les coûts». En 2010, avec le red ressement de l’économie et donc des volumes, les tarifs sont de nouveau sur la courbe ascendante. A elle seule, la route t ranspacifique a fait un bond de 10,8% fin avril, soit une hausse de 213USD par TEU, rapporte le cabinet Dre w ry Shipping Consultants. «Les marchés qui avaient été touchés en premier par la crise tels que les Et a t s Unis, l’Asie-Europe, et l’intra Asie, affichent sur les deux pre-

E n c o retrois ans de croissance pour la flotte mondiale navires est passée de 22 nœuds à 18.Par contre,il faut savoir que les ports français ne déchargent et livrent que 37,5 % des conteneurs destinés à la France. Le reste part à Gênes, Ba rcelone, Rotterdam, Anvers et ce, même s’ils sont plus chers», remarque Jean-Louis Le Yondre.

La flotte mondiale va poursuivre son expansion au cours des trois ans à venir. En 2009, 4 657 navires représentaient une capacité de 12,6 M TEU. En 2010, celleci sera portée à 13 M TEU avec 4 719 navires. Et la déferlante de porte-conteneurs se poursuivra

ector Liner Shipping & Supply Chains chez Consultants : «Triplement des taux et retards» Les chargeurs ont-ils vécu ce phénomène de la même manière ? PD : Non. Trois jours de t r a n s i t time supplémentaires ont des conséquences très négatives auprès des chargeurs très sensibles aux délais de livraison. Les industriels du textile, des produits de grande consommation ou de la mode doivent alors constituer davantage de stocks. En revanche, le slow steaming pour des produits à faible valeur tels que le papier ne pose

pas de problème dans le sens Europe-Asie. Avec le slow steaming, peuton dire qu’il y a des taux à deux vitesses ? PD: Aussi paradoxal que cela puisse paraître, les prix sont identiques. Les armateurs ne sont pas parvenus à créer un surcoût pour les services rapides car, la plupart du temps, les chargeurs recherchent le coût de transport le plus faible. Le point de friction arrivera si tous

les navires se mettent à pratiquer du slow steaming. Non seulement les transit time se sont détériorés mais on constate jusqu’à dix jours d’écart entre les différents transporteurs présents sur le marché. Un trajet entre les ports de Hong Kong et du Havre peut se faire en 20 jours avec le FAL 2 de l’armateur CMA CGM ou en 30 jours sur le loop A de Grand Alliance. Sur le même axe, il faut compter 29 jours avec le service LION de MSC.

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également en 2011 où l’on prévoit 4 895 unités pour une capacité d’emport de 14,3 M TEU (+ 9,8 %). A.P. Møller-Mærsk devrait réceptionner 62 commandes, Cosco une cinquantaine, MSC et CMA CGM une quarantaine au cours des trois ans à venir.

« La plupart du temps, les chargeurs recherchent le coût de transport le plus faible »

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« Les armateurs embarquent les conteneurs aux taux de fret les plus élevés, laissant le reste à quai »

également un facteur de risque d’accroissement des délais de livraison. Si le premier navire rate la fenêtre, la marchandise prend généralement une semaine de re t a rd. Face au manque de place sur les navires en sortie d’ A s i e, une drôle de pratique s’est développée : les a rmateurs embarquent les conteneurs aux taux de fret les plus élevés laissant à quai le reste. Parallèlement, les grands chargeurs, qui traitent habituellement en direct avec les compagnies maritimes, se sont mis à confier une partie de leur fret

l o p p é e, consistant à prier les c h a rgeurs de bien vouloir att e n d re une semaine de plus avant l’embarquement du fret sur les navires mères.

Une drôle de pratique «Nous avons découve rt ce phénomène fin 2008 lorsqu’un navire de MOL était en avarie commune. Le conteneur part bien à la date prévue mais reste une semaine à terre dans un hub.Nous risquons de perdre nos clients à cause de cela », s’inquiète un t ra n s i t a i re. La multiplication des transbordements constitue

aux transitaires pour sécuriser une partie de leurs cargaisons. « C’est dangereux pour les armateurs qui perdent une partie des relations commerciales avec les grands chargeurs », fait valoir le consultant britannique. Les armateurs comptent-ils sur les chargeurs pour éponger leurs dettes ?

Des tarifs ascendants Au plus mal en 2009, les compagnies ont procédé à des réajustements tarifaires dès juillet alors que les capacités continuaient de s’élever avec l’ e n-

Le vrai problème, c’est la réforme des ports

Les ports français sont à la traîne Les réajustements opérés ne semblent pas lui poser de problème : «Les armateurs gèrent leurs surcapacités ou sous-capacités comme ils l’entendent. On s’en fiche de mettre deux jours de plus parce que la vitesse des

orte-parole du Syndicat des transitaires du port du Havre (STH), Jean-Louis Le Yondre se dit davantage révolté par les difficultés d’application de la réforme des ports français que par les changements opérés dans le t ra n s p o rt maritime de conteneurs depuis la crise. Il tire aujourd’hui la sonnette d’alarme.

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Philip Damas, Dir Drewry Shipping

Gagner des parts de marché

TA : Quel est l’impact de la crise

à la même enseigne.Que l’on soit à Anvers, Ro t t e rdam ou Ha mbourg,la surcharge est la même. Les armateurs desserv i ront les ports français les plus fiables,les ports où la CGT ne les emm...pas! La réforme des ports doit nous permettre de gagner des parts de marché, et de rattraper Valence dans le Sud et Rotterdam au

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No rd », lance Jean-Louis Le Yondre, également vice-président de TLF et président du conseil de développement portuaire du Havre.

Des évolutions Tramar, la société havraise de transit qu’il dirige, possède une agence à Shanghaï, aux pre-

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sur le transport maritime ? PD : La hausse du prix du fret a été vertigineuse entre l’Asie et l’Europe. Les taux ont triplé de mai 2009 à mai 2010, impliquant des coûts logistiques supplémentaires pour les chargeurs. Les réductions de capacités sont impressionnantes. A présent, l’offre est insuffisante pour faire face à la demande. Et outre l’envolée des prix, les chargeurs subissent des retards de livraison.

miers mois de l’année une croissance soutenue par rapport à la même période de 2009.Et les volumes Asie-Europe ont même connu un rebond spectaculaire de l’ordre de 30% », indiquait, début mai, CMA CGM. En Asie, à l’import comme à l’export, l’essor des volumes a été de 20% au premier tri m e s t re2010 se traduisant par des tarifs en hausse, supérieurs à ceux du premier tri m e s t re2009, indique l’European Liner Affairs Association (ELAA). Pourtant, cette expansion ininterrompue ne devrait pas durer. Dre w ryShip-

ping Consultants prédit une accalmie pour la deuxième moitié de 2010 avec l’arrivée de nouveaux navires.

De nouvelles capacités sur le trade Asie-Europe « MSC et CMA CGM vont recevoir des livraisons au cours des prochains mois. Des capacités vont entrer sur le trade Asie-Europe et les prix vont diminuer au deuxième trimestre. Sur le transpacifique,où les armateurs continuent de perdre de l’argent, les prix baisseront un peu plus tard », prédit Philip Damas.

en France mières loges donc pour observer les évolutions de stratégie armatoriale.

Au Havre, comme à Marseille, les professionnels de la filière maritimo-portuaire s’exaspèrent des difficultés d’application de la réforme portuaire au moins autant que des surcharges appliquées par les armateurs.

Au Havre, les professionnels de la filière maritimo-portuaire pâtissent non pas du prix trop élevé du fret maritime ou des transittime à rallonge. Tout comme à Marseille, ils sont exaspérés par les mouvements sociaux et les difficultés de parvenir à signer des accords locaux dans le cadre de la réforme des ports. «Les armateurs font subir la même chose à tous les transitaires dans tous les ports. Tout le monde est logé

trée en flotte de nouveaux nav i re s. Une augmentation qui, selon elles, «couvre tout juste les coûts». En 2010, avec le red ressement de l’économie et donc des volumes, les tarifs sont de nouveau sur la courbe ascendante. A elle seule, la route t ranspacifique a fait un bond de 10,8% fin avril, soit une hausse de 213USD par TEU, rapporte le cabinet Dre w ry Shipping Consultants. «Les marchés qui avaient été touchés en premier par la crise tels que les Et a t s Unis, l’Asie-Europe, et l’intra Asie, affichent sur les deux pre-

E n c o retrois ans de croissance pour la flotte mondiale navires est passée de 22 nœuds à 18.Par contre,il faut savoir que les ports français ne déchargent et livrent que 37,5 % des conteneurs destinés à la France. Le reste part à Gênes, Ba rcelone, Rotterdam, Anvers et ce, même s’ils sont plus chers», remarque Jean-Louis Le Yondre.

La flotte mondiale va poursuivre son expansion au cours des trois ans à venir. En 2009, 4 657 navires représentaient une capacité de 12,6 M TEU. En 2010, celleci sera portée à 13 M TEU avec 4 719 navires. Et la déferlante de porte-conteneurs se poursuivra

ector Liner Shipping & Supply Chains chez Consultants : «Triplement des taux et retards» Les chargeurs ont-ils vécu ce phénomène de la même manière ? PD : Non. Trois jours de t r a n s i t time supplémentaires ont des conséquences très négatives auprès des chargeurs très sensibles aux délais de livraison. Les industriels du textile, des produits de grande consommation ou de la mode doivent alors constituer davantage de stocks. En revanche, le slow steaming pour des produits à faible valeur tels que le papier ne pose

pas de problème dans le sens Europe-Asie. Avec le slow steaming, peuton dire qu’il y a des taux à deux vitesses ? PD: Aussi paradoxal que cela puisse paraître, les prix sont identiques. Les armateurs ne sont pas parvenus à créer un surcoût pour les services rapides car, la plupart du temps, les chargeurs recherchent le coût de transport le plus faible. Le point de friction arrivera si tous

les navires se mettent à pratiquer du slow steaming. Non seulement les transit time se sont détériorés mais on constate jusqu’à dix jours d’écart entre les différents transporteurs présents sur le marché. Un trajet entre les ports de Hong Kong et du Havre peut se faire en 20 jours avec le FAL 2 de l’armateur CMA CGM ou en 30 jours sur le loop A de Grand Alliance. Sur le même axe, il faut compter 29 jours avec le service LION de MSC.

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également en 2011 où l’on prévoit 4 895 unités pour une capacité d’emport de 14,3 M TEU (+ 9,8 %). A.P. Møller-Mærsk devrait réceptionner 62 commandes, Cosco une cinquantaine, MSC et CMA CGM une quarantaine au cours des trois ans à venir.

« La plupart du temps, les chargeurs recherchent le coût de transport le plus faible »

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Abondance de navires nuit aux chargeurs

Comportements versatiles, s’abstenir !

Contre toute attente, la pléthore de navires en circulation sur le marché ne favorise guère les chargeurs. Ces derniers dénoncent la manière dont les armateurs sont parvenus à créer artificiellement un état de sous-capacité et à faire monter les taux de fret. Même la qualité de service s’est sérieusement dégradée selon eux. maritimes, impossible d’ a f f iemandez à un importateur cher une quelconque concerou à un exportateur ce qu’il tation. S’échanger des informapense des services de transport m a ritime depuis la crise. Toutions sur les volumes transportés jours la même litanie, et sur les tarifs et surallez vous dire! Et bien « Les armateurs charges serait très mal n’ont mis en non, cette fois, les vu par Bruxelles. Estchargeurs ont fait face ce donc par le plus place aucune à un curieux phénogrand des hasard s concertation mène, unique dans avec les clients » que les armements l’histoire du transport ont alors décidé d’apm a ritime de lignes régulières pliquer des surcharges dès juillet conteneurisées. La crise mon2009 et de mettre en place le diale s’est traduite mécaniquesl ow steaming? Les chargeurs s’en étonnent encore plusieurs ment par la baisse des volumes mois après. «Cette similitude de fin 2008 et l’effondrement des comportements a conduit à intaux de fret sur le trade Asie-Euverser la tendance sur les grands rope en raison de l’offre abont rades alors que l’évolution de dante en navire. l’économie ne le justifiait pas. Une stratégie de On s’ i n t e r roge sur leur nive a u restauration des taux de coordination.Il y a eu des stratégies de gel de capacités ave c Cela n’aura duré que quelques des navires mis à la chaîne puis mois à peine, juste le temps pour les armements de se ressaisir et a vec l’introduction de la navide mettre en place les premiers gation lente.Cela a été fait sans éléments d’une stratégie de resla moindre concertation avec les t a u ration des taux. Au lendeclients.Les armements ne se sont main de la fin des conférences pas demandé si cela pouva i t

avoir des conséquences dommageables pour leurs clients», remarque Philippe Bonnevie, délégué général de l’Association des utilisateurs de transport de fret (AUTF).

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La Commission européenne veille Quelques semaines avant, Armateurs de France écrivait: «Il va de soi que, s u rtout dans un contexte de concurrence exacerbée, les armateurs consultent leurs clients et que les modifications de services répondent au mieux aux demandes formulées». Une réponse faite lors de la consultation de la Commis-

terminaux à conteneurs où ils sont chargés sur de plus gros navires. A l’époque où elle s’en était emparé, la Commission craignait notamment que ce projet, en vertu duquel les propriétaires européens de navires sont convenus de prendre collectivement en charge les coûts afférents à la mise hors service de navires de collecte, n’ait pour but de réduire la capacité et, par conséquent, de provoquer une augmentation des taux d’affrètement de ces navires. L’ i d éea donc été aba n d o n n éepar ses promoteurs, mais Bruxelles n’a pas pu examiner le dossier sur le fond.

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ne a ouvert une procédure formelle d’examen concernant le p rojet « Baltic Max Feeder » en raison d’une possible violation des règles de l’Union européenne (UE) sur les pratiques commerciales restrictives. Les promoteurs de Baltic Max Feeder ont toutefois renoncé à leur projet avant que Bruxelles n’aille au bout de ces investigations (voir

encadré). La réduction de la vitesse des porte-conteneurs a modifié l’organisation de la chaîne logistique. «Ce rtains grands importateurs, comme, par exemple,Carrefour,Auchan,Decathlon, ont dû constituer des stocks plus import a n t s . Il est à craindre qu’ils abandonnent les solutions de post transport par voie fluviale,qui seront alors ju-

gées trop lentes,au profit du mode routier. Il faudra donc se pencher sur l’équation environnementale globale d’une telle décision », explique Philipe Bonnevie. «Les stocks sont la variable d’ajustement. Dans certains secteurs, comme le textile ou le SAV, cette réduction de vitesse a accéléré le phénomène de relocalisation dans les pays du bassin méditerranéen où la main d’œuvre est de plus en plus qualifiée. Ce rtaines filières exigent des réactivités plus fortes et il est difficile de s’adapter à ces phénomènes.Ceci étant,il faut deux à trois ans pour une réorganisation complète de la chaîne logistique», analyse Daniel Boudouin, chercheur au CRET-Log et à la tête du cabinet d’études Jonction, spécialiste de la logistique.

Alain Pelegrin, président du syndi cat des transitaires de Marseille : «Nous réservons sans savoir que l taux sera appliqué»

Le projet de service Baltic Max Feeder s’est arrêté à Bruxelles La Commision européenne a mis un terme, fin mars, à son enquête sur le projet Baltic Max Feeder développé et promu par Anchor Steuerberatungsgesellschaft mbH, un cabinet allemand de conseil f i s cal. Ce sont les promoteurs de ce projet qui ont d’eux mêmes renoncé à le mettre en œuvre. Le Baltic Max Feeder visait à répondre au problème de surcapacité qui affecte le secteur des porte-conteneurs et qui entraîne une ba i s s e du taux d’affrètement de ces navires. En règle générale, les navires de collecte enlèvent des conteneurs dans différents ports et les transportent vers des grands

sion européenne fin 2008 dans le cadre de la révision du règlement Consortia. Interrogés eux aussi à l’époque, les chargeurs avaient demandé une obligation d’information de deux mois en cas de changement substantiel. «Lors la consultation de la Commission,nous n’avions demandé qu’une seule chose: que les armements aient une obligation d’information de deux mois en cas de changement substantiel du service.Malheureusement, notre proposition n’a pas été retenue », regrette Ph ilippe Bo n n e v i e. Po u rtant Bruxelles veille. En début d’année, la Commission européen-

TA : Qu’est-ce que la crise a changé au niveau des contrats de transport ? AP : Avant la crise, chargeurs et armateurs avaient pris pour habitude de passer des contrats de transport à l’année. Mais vers la fin 2008, les armements auraient bien voulu augmenter leurs taux. Cependant, ils étaient obligés de conserver leurs tarifs. En 2009, les compagnies ont signé avec leurs clients chargeurs des contrats de

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trois mois et ceux qui tenaient absolument à avoir des contrats à l’année se sont vu appliquer un tarif moyen assorti d’augmentation ou de baisse. Ce fut une véritable bagarre car les chargeurs préfèrent connaître le prix du transport sur l’année afin de maîtriser leurs coûts logistiques. Fin 2009, on a vu à nouveau réapparaître des contrats à l’année. La situation est différente pour les transitaires. En 2008 et 2009, les armateurs donnaient des tarifs tous les mois. A présent, la tendance est de donner un prix pour trois mois. Le problème, c’est que les armateurs attendent le 28 du mois pour donner leurs prix, or nous sommes obligés de réserver 15 jours voire trois semaines à l’avance, surtout en sortie d’Asie. Donc, nous réservons sans connaître le taux qui sera appliqué. Les transitaires ont de grosses difficultés à expliquer cela à leurs clients.

Quels sont les critères qui entrent dans la négociation ? AP : Généralement, les petites et moyennes entreprises (PME) du transit confient la quasi-totalité de leur fret à un armateur, en contrepartie de l’assurance d’avoir de la place à bord. En 2009, le fret était garanti pour un mois, maintenant il l’est pour trois. En 2010, les grands noms de la commission de transport ont choisi de travailler avec 4 ou 5 armements tout en négociant les taux mais aussi les délais de paiement, les surrestaries pour les conteneurs. Il est très important d’avoir un délai de free time plus important, surtout lorsqu’on doit positionner un conteneur par rail ou par route au Nord de la Fr a nce. La négociation à terre est tout aussi importante que les taux de fret. Les commissionnaires ont la possibilité de faire du « merchant haulage » c’est-à-dire d’amener dir ectement le conteneur chez le

client en faisant appel à une société de transport routier qui garantit l’arrivée. Nous pouvons également organiser des acheminements par rail ou par fleuve, très appréciés de nos clients qui les utilisent comme stock flottant durant les deux ou trois jours de navigation. En plus, ça coûte moins cher !

Où sont passées les fenêtres d’antan ? Malgré l’ajout de navires sur les services, les chargeurs ont fait les frais de problèmes de ponctualité. Où sont passées les fenêtres d’antan ? Selon le cabinet Drewry Shipping Consultants qui a mené une enquête d’octobre à décembre 2009 sur 1600 navires, 53% seulement seraient arrivés le jour dit ou avec un jour d’avance. Outre le manque de ponctualité, les chargeurs pointent du doigt les transbord ements qui se passent mal et entraînent des retards de livraison encore plus importants, souligne le porte-parole des chargeurs français.

De votre côté, comment gérezvous les surcharges appliquées par les armateurs ? AP : Les clients s’y perdent car les noms des surcharges diffèrent selon les armateurs. Ces derniers emploient des noms différents pour ne pas qu’on les taxe d’entente. Par exemple, pour les surcharges carburant on parlait de BAF (Bunker Adjustement Factor). A c t u e l l ement, les compagnies appliquent une nouvelle surcharge baptisée EBS (Emergency Bunker Surcharge). Ils ne savent vraiment plus quoi inventer.

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« Fin 2009, les prix contractuels ont surtout été remis en question avec les transitaires et, dans une moindre mesure , avec les charg e u rs, tout au moins ceux qui ont respecté l e u rs engagements et qui n’ont pas eu une attitude opport uniste. Si vous ne respectez pas vos engagements, le jour où vous avez besoin d’un conteneur, l’armateur n’en a pas et il vous fait comprendre qu’il p ré f è redonner la pri o rité à un chargeur dont le taux est supérieur. Certains chargeurs ont dû négocier deux taux : le taux contractuel et le taux au dessous des volumes contractuels», explique Philippe Bonnevie, délégué général de l’AUTF.

« La réduction de la vitesse des porteconteneurs a modifié l’organisation de la chaîne logistique »

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Abondance de navires nuit aux chargeurs

Comportements versatiles, s’abstenir !

Contre toute attente, la pléthore de navires en circulation sur le marché ne favorise guère les chargeurs. Ces derniers dénoncent la manière dont les armateurs sont parvenus à créer artificiellement un état de sous-capacité et à faire monter les taux de fret. Même la qualité de service s’est sérieusement dégradée selon eux. maritimes, impossible d’ a f f iemandez à un importateur cher une quelconque concerou à un exportateur ce qu’il tation. S’échanger des informapense des services de transport m a ritime depuis la crise. Toutions sur les volumes transportés jours la même litanie, et sur les tarifs et surallez vous dire! Et bien « Les armateurs charges serait très mal n’ont mis en non, cette fois, les vu par Bruxelles. Estchargeurs ont fait face ce donc par le plus place aucune à un curieux phénogrand des hasard s concertation mène, unique dans avec les clients » que les armements l’histoire du transport ont alors décidé d’apm a ritime de lignes régulières pliquer des surcharges dès juillet conteneurisées. La crise mon2009 et de mettre en place le diale s’est traduite mécaniquesl ow steaming? Les chargeurs s’en étonnent encore plusieurs ment par la baisse des volumes mois après. «Cette similitude de fin 2008 et l’effondrement des comportements a conduit à intaux de fret sur le trade Asie-Euverser la tendance sur les grands rope en raison de l’offre abont rades alors que l’évolution de dante en navire. l’économie ne le justifiait pas. Une stratégie de On s’ i n t e r roge sur leur nive a u restauration des taux de coordination.Il y a eu des stratégies de gel de capacités ave c Cela n’aura duré que quelques des navires mis à la chaîne puis mois à peine, juste le temps pour les armements de se ressaisir et a vec l’introduction de la navide mettre en place les premiers gation lente.Cela a été fait sans éléments d’une stratégie de resla moindre concertation avec les t a u ration des taux. Au lendeclients.Les armements ne se sont main de la fin des conférences pas demandé si cela pouva i t

avoir des conséquences dommageables pour leurs clients», remarque Philippe Bonnevie, délégué général de l’Association des utilisateurs de transport de fret (AUTF).

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La Commission européenne veille Quelques semaines avant, Armateurs de France écrivait: «Il va de soi que, s u rtout dans un contexte de concurrence exacerbée, les armateurs consultent leurs clients et que les modifications de services répondent au mieux aux demandes formulées». Une réponse faite lors de la consultation de la Commis-

terminaux à conteneurs où ils sont chargés sur de plus gros navires. A l’époque où elle s’en était emparé, la Commission craignait notamment que ce projet, en vertu duquel les propriétaires européens de navires sont convenus de prendre collectivement en charge les coûts afférents à la mise hors service de navires de collecte, n’ait pour but de réduire la capacité et, par conséquent, de provoquer une augmentation des taux d’affrètement de ces navires. L’ i d éea donc été aba n d o n n éepar ses promoteurs, mais Bruxelles n’a pas pu examiner le dossier sur le fond.

Transports Actualités – N ° 942 du 28 mai au 10 juin 2010

ne a ouvert une procédure formelle d’examen concernant le p rojet « Baltic Max Feeder » en raison d’une possible violation des règles de l’Union européenne (UE) sur les pratiques commerciales restrictives. Les promoteurs de Baltic Max Feeder ont toutefois renoncé à leur projet avant que Bruxelles n’aille au bout de ces investigations (voir

encadré). La réduction de la vitesse des porte-conteneurs a modifié l’organisation de la chaîne logistique. «Ce rtains grands importateurs, comme, par exemple,Carrefour,Auchan,Decathlon, ont dû constituer des stocks plus import a n t s . Il est à craindre qu’ils abandonnent les solutions de post transport par voie fluviale,qui seront alors ju-

gées trop lentes,au profit du mode routier. Il faudra donc se pencher sur l’équation environnementale globale d’une telle décision », explique Philipe Bonnevie. «Les stocks sont la variable d’ajustement. Dans certains secteurs, comme le textile ou le SAV, cette réduction de vitesse a accéléré le phénomène de relocalisation dans les pays du bassin méditerranéen où la main d’œuvre est de plus en plus qualifiée. Ce rtaines filières exigent des réactivités plus fortes et il est difficile de s’adapter à ces phénomènes.Ceci étant,il faut deux à trois ans pour une réorganisation complète de la chaîne logistique», analyse Daniel Boudouin, chercheur au CRET-Log et à la tête du cabinet d’études Jonction, spécialiste de la logistique.

Alain Pelegrin, président du syndi cat des transitaires de Marseille : «Nous réservons sans savoir que l taux sera appliqué»

Le projet de service Baltic Max Feeder s’est arrêté à Bruxelles La Commision européenne a mis un terme, fin mars, à son enquête sur le projet Baltic Max Feeder développé et promu par Anchor Steuerberatungsgesellschaft mbH, un cabinet allemand de conseil f i s cal. Ce sont les promoteurs de ce projet qui ont d’eux mêmes renoncé à le mettre en œuvre. Le Baltic Max Feeder visait à répondre au problème de surcapacité qui affecte le secteur des porte-conteneurs et qui entraîne une ba i s s e du taux d’affrètement de ces navires. En règle générale, les navires de collecte enlèvent des conteneurs dans différents ports et les transportent vers des grands

sion européenne fin 2008 dans le cadre de la révision du règlement Consortia. Interrogés eux aussi à l’époque, les chargeurs avaient demandé une obligation d’information de deux mois en cas de changement substantiel. «Lors la consultation de la Commission,nous n’avions demandé qu’une seule chose: que les armements aient une obligation d’information de deux mois en cas de changement substantiel du service.Malheureusement, notre proposition n’a pas été retenue », regrette Ph ilippe Bo n n e v i e. Po u rtant Bruxelles veille. En début d’année, la Commission européen-

TA : Qu’est-ce que la crise a changé au niveau des contrats de transport ? AP : Avant la crise, chargeurs et armateurs avaient pris pour habitude de passer des contrats de transport à l’année. Mais vers la fin 2008, les armements auraient bien voulu augmenter leurs taux. Cependant, ils étaient obligés de conserver leurs tarifs. En 2009, les compagnies ont signé avec leurs clients chargeurs des contrats de

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trois mois et ceux qui tenaient absolument à avoir des contrats à l’année se sont vu appliquer un tarif moyen assorti d’augmentation ou de baisse. Ce fut une véritable bagarre car les chargeurs préfèrent connaître le prix du transport sur l’année afin de maîtriser leurs coûts logistiques. Fin 2009, on a vu à nouveau réapparaître des contrats à l’année. La situation est différente pour les transitaires. En 2008 et 2009, les armateurs donnaient des tarifs tous les mois. A présent, la tendance est de donner un prix pour trois mois. Le problème, c’est que les armateurs attendent le 28 du mois pour donner leurs prix, or nous sommes obligés de réserver 15 jours voire trois semaines à l’avance, surtout en sortie d’Asie. Donc, nous réservons sans connaître le taux qui sera appliqué. Les transitaires ont de grosses difficultés à expliquer cela à leurs clients.

Quels sont les critères qui entrent dans la négociation ? AP : Généralement, les petites et moyennes entreprises (PME) du transit confient la quasi-totalité de leur fret à un armateur, en contrepartie de l’assurance d’avoir de la place à bord. En 2009, le fret était garanti pour un mois, maintenant il l’est pour trois. En 2010, les grands noms de la commission de transport ont choisi de travailler avec 4 ou 5 armements tout en négociant les taux mais aussi les délais de paiement, les surrestaries pour les conteneurs. Il est très important d’avoir un délai de free time plus important, surtout lorsqu’on doit positionner un conteneur par rail ou par route au Nord de la Fr a nce. La négociation à terre est tout aussi importante que les taux de fret. Les commissionnaires ont la possibilité de faire du « merchant haulage » c’est-à-dire d’amener dir ectement le conteneur chez le

client en faisant appel à une société de transport routier qui garantit l’arrivée. Nous pouvons également organiser des acheminements par rail ou par fleuve, très appréciés de nos clients qui les utilisent comme stock flottant durant les deux ou trois jours de navigation. En plus, ça coûte moins cher !

Où sont passées les fenêtres d’antan ? Malgré l’ajout de navires sur les services, les chargeurs ont fait les frais de problèmes de ponctualité. Où sont passées les fenêtres d’antan ? Selon le cabinet Drewry Shipping Consultants qui a mené une enquête d’octobre à décembre 2009 sur 1600 navires, 53% seulement seraient arrivés le jour dit ou avec un jour d’avance. Outre le manque de ponctualité, les chargeurs pointent du doigt les transbord ements qui se passent mal et entraînent des retards de livraison encore plus importants, souligne le porte-parole des chargeurs français.

De votre côté, comment gérezvous les surcharges appliquées par les armateurs ? AP : Les clients s’y perdent car les noms des surcharges diffèrent selon les armateurs. Ces derniers emploient des noms différents pour ne pas qu’on les taxe d’entente. Par exemple, pour les surcharges carburant on parlait de BAF (Bunker Adjustement Factor). A c t u e l l ement, les compagnies appliquent une nouvelle surcharge baptisée EBS (Emergency Bunker Surcharge). Ils ne savent vraiment plus quoi inventer.

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« Fin 2009, les prix contractuels ont surtout été remis en question avec les transitaires et, dans une moindre mesure , avec les charg e u rs, tout au moins ceux qui ont respecté l e u rs engagements et qui n’ont pas eu une attitude opport uniste. Si vous ne respectez pas vos engagements, le jour où vous avez besoin d’un conteneur, l’armateur n’en a pas et il vous fait comprendre qu’il p ré f è redonner la pri o rité à un chargeur dont le taux est supérieur. Certains chargeurs ont dû négocier deux taux : le taux contractuel et le taux au dessous des volumes contractuels», explique Philippe Bonnevie, délégué général de l’AUTF.

« La réduction de la vitesse des porteconteneurs a modifié l’organisation de la chaîne logistique »

N ° 942 du 28 mai au 10 juin 2010

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