Sunday
Issue
SUNDAY*
Le premier numéro de Sunday abordera cette fois le travail d’Alessandro
Simonnetti et celui de Iain MacKell. Tout deux photographes, l’un
vivant a New York aborde la photo au quotidien comme un reportag. L’autre,
Anglais, capture les sous cultures saxonnes, skins, gitans, émeutiers...
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« Un fanzine (contraction de fanatic magazine) est une publication imprimée périodique ou non, institutionnellement indépendante, créée et réalisée par des amateurs passionnés pour d'autres passionnés. Ce type de publication est fortement ancré dans la philosophie DIY» 2
Édito
INTRODUCTION
Sunday* est un fanzine hebdomadaire édité et mis en page par Xavier Lecuyer. L’idée est simple, publier un fanzine conçu en une journée chaque dimanche. Pourquoi ? Conserver l’instantanéité du moment. Ce projet est né un dimanche pluvieux d’été où pour comblé l’ennui j’ai décidé de me lancer dans un projet d’édition hebdomadaire traitant d’artistes et photographes que j’apprécie, composé de contenu trouvé sur internet, du travail de mes amis, d’histoires de voyages, de rencontres etc… Le but étant simplement de partager et surtout s’amuser tout en faisant de ce fanzine un terrain d’expression graphique. SUNDAY* sera pour le moment composé uniquement en bichromie pour des raisons financières ( autopublication oblige ) c’est pourquoi je vous encourage à consulter les sites internets des artistes, photographes, illustrateurs etc. Le nombres de tirage est limité et les finitions sont exécutés a la main ( reliure etc.) . Chaque exemplaire est numéroté.
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ALESSANDRO SIMONETTI
En 2005, âgé de 27 ans, le photographe Alessandro Simonetti s’est offert un morceau de rêve américain en s’exportant du nord de son Italie natale à New York. Nourri dès l’adolescence aux cultures de la rue, il grandi près des scènes du graffiti, du skate et du punk hardcore. Des points d’ancrage majeurs qui façonneront sensiblement sa vision de la photographie mais ne l’empêcheront pas d’élargir son regard vers des sujets diamétralement opposés. D’un club fétichiste de Miami aux ravages du tremblement de terre d’Haïti, le photographe ne semble pas s’imposer de limites, il pose une empreinte noire et blanche et un œil intelligent sur ce qui éveille son intérêt. Un flashe à la douceur sombre et rugueuse, qui capte la beauté même dans l’aberration de la pauvreté ou la violence sociale. Aujourd’hui plébiscité par des marques comme Carhartt, Lee ou Zoo York et publié dans nombre de magazines internationaux, Alessandro Simonetti est sur la grande voie. Interview. 5
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Tu as déménagé à New York. Quand et pour quelles raisons? Quand j’ai quitté l’Italie, cela faisait deux ans que je travaillais comme professeur de photographie dans un lycée, en dehors de mon travail personnel. J’ai déménagé à New-York à la fin de l’année 2005. J’étais attiré par cette ville principalement pour des raisons culturelles. La première fois, je suis juste parti 10 jours, ensuite 3 mois, et puis encore 3 mois, jusqu’au moment où j’ai vraiment dû prendre un visa de 3 ans. Il vient juste d’expirer et j’attends le nouveau. C’est pour ça que je fais cette interview depuis l’Italie. Je n’avais rien quand je suis parti, mon anglais était très mauvais parce que je n’avais jamais étudié cette langue et je ne connaissais personne à l’exception d’un ami qui était avec moi. Et c’est tout, j’ai amené là-bas quelques jobs que j’avais déjà en Italie. Ca a vraiment été un travail progressif. J’ai commencé à rencontrer des gens, à me mettre en contact avec la communauté « downtown » de New York, des skateurs et des marque de skate. C’est comme ça que j’ai commencé à travailler à New York et à créer mon propre environnement. De quelle manière New York a-t-elle influencé et/ou changé ton travail ? Du côté du travail, ça a changé en termes de connections et d’opportunités, il y en a tellement plus qu’en Italie. Dans les grandes villes, tout bouge plus vite que dans les petites comme celle d’où je viens par exemple, ou même de Milan en fait. J’ai trouvé ici une situation accueillante, avec des gens ouverts d’esprit et réellement intéressés par ce que tu as à dire ou par ton travail. Le fait que c’était un nouveau terrain de jeu m’a donné envie d’essayer de prendre des photos de sujets et de personnes nouvelles. Ca m’a donné une dynamique et une énergie neuves. Quand j’ai déménagé à New York il y a 5 ans, j’avais 27 ans et c’était comme une étape pour que mon travail devienne plus mature. C’était une coïncidence que ça se passe à ce moment-là, à ce moment “d’entre-deux” où tu penses “ Je sais ce que je fais, je sais ce que j’aime photographier”. J’ai déménagé à New York au bon moment, juste quand mon « langage” commençait à devenir plus sophistiqué et New York m’a aidé à passer ce cap d’une certaine manière. 6
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En art, je suis intéressé par tout ce qui est visuel et pas seulement la photographie. Je suis influencé par ce que je vois tous les jours, pas uniquement par des maîtres de la photographie. J’aime l’art en général mais aussi la hautecouture ou le design. Quand j’ai commencé à photographier au début des années 90, nous n’avions pas accès à toutes les sources de média telles que nous y avons accès aujourd’hui. Je n’ai pas eu internet avant 2001 parce que c’est arrivé très tard dans mon pays et j’ai acheté un ordinateur parce que je devais écrire mon travail de fin d’études. Avant ça, je faisais tout de manière analogique et si je créais un fanzine par exemple, je le faisais de mes mains, du découpage aux photocopies. Au niveau de la photo ou de l’art, c’était très dur parce qu’en Italie tu ne pouvais pas facilement avoir accès aux livres, à l’art et aux images. A ce moment là, j’étais très inspiré par le photographe américain Glenn Friedman. Il photographiait tout ce que j’aimais: le skate, des artistes hip hop, Public Enemy, Minor Threat et The Misfits pour en nommer quelques uns. C’était exactement tout ce que je regardais toujours, ce qui m’inspirait. Ses livres « Fuck you heroes » ou « Fuck you too » étaient comme des bibles pour moi. C’était un point de référence au début. Si je devais choisir un designer, ce serait Bruno Munari, un designer italien qui travaillait avec tous les types de média, du graphisme au lay-out, les caractères, la typographie et le design. Pour moi, son point de vue était plein de sens.
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Ton intérêt pour le street art a commencé quand tu étais encore un adolescent qui faisait du graffiti sur les trains. Comment passe-t-on du graffiti à la photographie, et les deux sont-ils connectés d’une certaine manière? Tu mentionnes le street art mais quand j’ai commencé le graffiti à 16 ans, ces mots n’étaient pas communs et je pense que c’est quelque chose qui est arrivé plus tard. Pour être honnête, je me sens un peu envahi par toute cette vague street art et je ne suis plus vraiment fan de ça. Quand j’étais jeune, je faisais du graffiti, pas du street art et il y a une grande différence entre les deux, je pense. J’ai commencé au début des années 90 et à ce moment, c’était vraiment un truc DIY, qui n’existe plus aujourd’hui à mon avis. Celui qui commence là dedans maintenant a déjà des tonnes d’exemples sur comment faire ça étape par étape, comment devenir connu et comment se mettre en contact avec les galeries. Le graffiti m’a donné une manière très forte de penser la photographie parce que ce n’est pas commun pour un gamin de 16 ou 17 ans d’essayer de se promouvoir, même à une petite échelle. Les caractéristiques du graffiti ont beaucoup aidé mon travail je pense. Quand j’étais jeune, je voyageais beaucoup avec mes amis pour peindre des graffitis et tu deviens plus indépendant quand tu fais ce genre de choses. Ca m’a aussi aidé en termes de communication et sur la manière de créer mon propre style. Je dois dire que je suis content d’avoir fait
du graffiti dès cet âge-là parce que ce que je fais maintenant est un progrès naturel, une conséquence de ce que je faisais avant. Je suis aussi content de commencer maintenant, je sais quels types de médias et d’outils je peux utiliser actuellement, mais avec la connaissance d’une autre époque. Te souviens-tu d’un moment spécifique qui t’a donné envie de commencer la photo ? A 16 ans j’ai eu mon premier appareil photo manuel, c’était un Pentax P30T. Je l’utilisais pour photographier les graffitis que je peignais sur des trains pendant la nuit. Les trains et les graffitis ont été mes premiers sujets mais aussi les concerts punk/hardcore auxquels j’allais et les skateurs avec qui je traînais. Tu as choisi de faire du noir et blanc et de l’argentique. Pourquoi ? Quand j’ai commencé, je faisais surtout de la couleur. Passer au noir et blanc a été une réaction que j’ai eue quand le digital est apparu. Ce n’était pas une position artistique du style « J’emmerde le digital, je vais seulement faire de l’argentique », mais ça me semblait la chose naturelle à faire à ce moment là. J’ai commencé le noir et blanc parce que je me sentais très proche du côté tactile de la photo, le fait de pouvoir développer ses propres films soi-même et tout ça. Mais je dois dire qu’au cours de cette dernière année, j’ai
recommencé la photo couleur et j’ai récemment posté certaines photos sur mon blog. C’est quelque chose que je vais faire de plus en plus. Comment travailles-tu et quels sont tes intentions quand tu prends une photo ? J’approche la photo comme un documentaire ou un reportage mais les façons de photographier peuvent varier et aller d’un genre très artistique à un genre très documentaire. J’essaie de créer de bonnes images dans lesquelles tu peux trouver de la beauté, même s’il s’agit de destruction, de pauvreté ou de laideur, et j’essaie de créer quelque chose de cool même si mon sujet ne l’est pas. C’est là qu’est la différence avec le reportage ou le documentaire. Quand je pense à un sujet, j’essaie d’envisager quelques images dans ma tête, même si je ne sais pas du tout ce que je vais voir. Ce que j’essaie de capturer dépend du sujet. Je suis beaucoup dans le comportement social et les petites niches culturelles. Par exemple quand j’ai été en Jamaïque, j’ai photographié un dancehall et je savais que je voulais surtout photographier le style de ces gens, ils portaient chaussures en faux Gucci et de fausses marques italiennes. Je ne savais pas dans quelles conditions j’allais travailler mais je savais sur quoi je voulais me concentrer. Un exercice que je pratique souvent c’est penser à ce que je ne veux pas photographier. J’ai été en Haïti après le tremblement de terre pour photographier un projet. J’étais là bas avec un tas d’amis de New York, deux photographes, un graphiste,
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un vidéaste, un écrivain et quelqu’un qui aidait sur place. Dans ce cas particulier, dans cette situation tragique, nous étions bombardés d’images de dévastation, de gens sans abri, de corps morts et c’était exactement ce que je ne voulais pas photographier, surtout parce que nous avions tous vu ces images depuis le premier jour de la tragédie. je n’aime vraiment pas la photographie sociale “triste”, ce n’est pas ce que je cherche. Quand je vais dans ce genre d’endroit, je cherche les histoires secondaires. En Haïti, je n’était pas concentré sur le nombre de morts ou à quel point la situation était lamentable. A un moment j’ai passé du temps sur un combat de coqs, et de mon point de vue c’était vraiment intéressant de voir ce qui se passait au delà de ce que tout le monde savait déjà. Nous savions tous déjà que les gens mouraient et étaient sans toit, et ça m’a plu de me concentrer sur quelque chose d’aussi banal qu’un combat de coqs. Ca disait ” la vie continue, peu importe”. Quand j’essaie de travailler sur un sujet, je recherche toujours les histoires cachées. Haïti est l’un de mes projets les plus matures. Quand je suis rentré chez moi et que j’ai développé mes films, j’ai senti que j’avais eu exactement ce que je voulais.
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Tu travailles sur des documentaires qui ont des sujets très forts et variés. cela peut aller d’aller à Haïti pour aider et prendre des photos, mais aussi pour des nuits fétichistes tu t’es vêtu de latex pour prendre des photos dans un club. Comment approches-tu un documentaire et est-ce important de t’immerger? C’est vraiment important pour moi de rentrer en contact avec le sujet, et c’est une chose subtile à entreprendre. Si tu vas dans un club fétichiste, tu dois être assez observateur pour ne pas te comporter comme un paparazzo et envahir le terrain. je pense que c’est un talent qu’on a ou pas. Ca m’est arrivé quand je suis allé à Los Angeles pour shooter un documentaire sur les armes. Tu ne peux pas être arrogant dans ce genre de situation parce que les gens qui étaient là-bas faisaient partie de gangs ou transportaient des armes, donc tu dois les approcher d’une façon différente. Avec ces gangs, je me souviens que nous étions dans un stand de tir et j’ai dit à l’un des types que son tatouage était cool, il m’a dit que c’était Mister Cartoon qui lui avait fait. Et Mister Cartoon a aussi tatoué l’u nde mes amis. Et par chance ce type connaissait ce rapper italien qui avait été tatoué par Mister Cartoon et c’est ainsi que nous nous sommes “rapprochés”. En cinq minutes nous étions dans la cabine et ils m’ont permis de prendre des photos pendant qu’ils tiraient. Tu dois être sensible et interagir avec ton sujet, que ce soit un membre de gang de Los Angeles, un couple fétichiste dans un club à
Miami ou un sans abri à Haïti. Quel est le projet que tu as le plus apprécié? Je dois dire que la Jamaïque, c’était vraiment intéressant. J’ai été happé par l’esprit de l’île, qui est vraiment rude, et ce n’était pas facile d’être là-bas avec un appareil photo. De plus, l’endroit où j’ai shooté le dancehall à Kingston a été dévasté par l’armée jamaïcaine deux mois après. Plus d’une centaine de gens ont été tué parce que l’armée recherchait le chef de la mafia des jardins de Tivoli. Est-ce important pour toi de varier, et te vois-tu faire quelque chose de complètement différent? Je dirais que je suis assez éclectique, et même si je ne planifie rien j’aime essayer différentes choses et styles. En ce moment je fais des collages avec mes photos. Je prends des éléments de mes photo en noir et blanc et je les assemble. Faire une vidéo c’est aussi quelque chose que j’aimerais essayer, surtout maintenant que la technologie te permets de faire quelque chose de bien sans gros moyens. Si je devais faire un clip, je choisirais cette amie de New York, Silvia Gordon, qui est une chanteuse incroyable et sexy. D’une certaine façon elle représente mon histoire new yorkaise en termes de musique, parce que c’est l’un des premiers concerts où je suis allé quand je suis arrivé en 2005, dans ce petit club d’Alphabet City.
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Parler nous de votre travail commercial, vous travailler maintenant pour quelques grandes marques de skates. Est-ce plus qu'un moyen de vivre et de faire de l'argent ? Ce n’est pas du tout juste une façon de gagner de l’argent. C’était l’un de mes buts de faire des photos pour des marques qui font partie de ma culture ou de publier dans certains magazines. Par exemple, pendant mon adolescence la marque Carhartt était très présente, et je me souviens penser combien j’aimerais travailler pour eux et c’est arrivé. Ce n’est pas arrivé parce que je les ai démarché, ce sont eux qui sont entrés en contact avec moi, donc c’était un aboutissement. De même quand j’ai fait cette série de skateboards pour Zoo York avec mon nom inscrit dessus. C’était l’un des plus importants buts personnels, et c’est dingue de penser pour moi que j’ai mon nom imprimé à côté des noms de grands skaters. Ca représente beaucoup pour moi. J’ai aussi eu la chance de publier dans quelques magazines comme Lowdown, et ça voulait dire beaucoup à cause de mon passé, un magazine que je lisais tout le temps quand j’étais plus jeune. Donc ce n’est sûrement pas qu’un moyen de vivre mais finalement je ne pourrais pas non plus séléctionner un travail que j’ai fait pour une marque alors que je peux avoir des préférences dans mes projets personnels.
Peux-tu choisir une photo que tu aimes vraiment et l’expliquer ? Je dirais cette photo avec le pigeon. Je l’aime parce que je ne m’attendais pas à ce qu’elle sorte de cette façon quand j’ai pris cette photo, c’était surprenant comme elle a bien tourné. La texture, la position de ses ailes, et son oeil que tu peux bien voir… Et tu veux que je te dise quelque chose? Je hais les pigeons, je pense qu’ils sont vraiment dégueulasses. Je n’essayais même pas de le photographier. Une chanson pour te décrire ? Talib Kweli – Life is a beautiful struggle Qu’est-ce qui est important au bout du compte ? Les relations en général, que ce soit l’amitié ou l’amour. Je n’en placerais pas un devant l’autre parce que même si ce sont deux sentiments différents, ils comptent de la même façon pour moi. Parfois l’amitié dure plus que l’amour mais l’amour est aussi plus intense. Et aussi, soit content de ce que tu fais, quoi que ce soit et où que tu sois. Quels sont tes projets? Retourner à la ville le plus tôt possible! New York me manque tant!
* Interview Emilie Lauriola ( Wowmagazine )
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IAIN Mckell
Iain explores the world with an intense eye for detail and composition. He is a keen observer of people often seeming to notice the overlooked or subject matter that is under the radar. Weather working with an unknown sitter or an iconic celebrity he brings a democratic eye to the subject. He manages to create an air of incredible atmosphere to his distinct narrative locations, often placing his subjects in curious landscapes or intimate interiors. There seems to be a magical, yet sensitive quality to the images rendering them transcendent and other worldly. Working within portraiture and fashion Iain manages to invest the images with his own strong vision. Iain often uses unusual characters rather than conventional models by doing this he questions and challenges are perception of ‘beauty’. When working with models or celebrities Iain manages to penetrate beyond the surface, he is drawn to the character of the person. The majority of the work is constructed and carefully planned. Iain will often draw in story board form his ideas like a Directer before shooting a film and visits locations planning the shots in great detail. This enables him to create provocative, spontaneous and effortless looking images.
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Merci Ă Alessandro Simonneti et Iain Mackell pour leurs photos et merci aux dimanches.
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CONTACT :
Mis en page et édité par Xavier Lecuyer. Relié manuellement et tiré à 20 exemplaires.
Xavier Lecuyer xlecuyer@gmail.com +33 6 25 26 11 46
08/07/2012
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