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TEMPS FORT

Aucune zone de production n’est privilégiée en matière de risque de contamination par le mildiou. La maladie est une menace sérieuse pour la culture de pommes de terre. Et particulièrement là où le climat est frais et humide. Pour y faire face, les agriculteurs multiplient les traitements en vue de limiter les dégâts, qui peuvent vite devenir importants, allant jusqu’à détruire 100% de la récolte. Sans oublier que la contamination peut aussi toucher les tubercules durant la période de stockage. Une stratégie fongicide adaptée s’avère donc primordiale pour le producteur. Aussitôt que le climat est humide, l’agent pathogène se multiplie très rapidement. Idem lorsque l’hygrométrie et la température montent de quelques degrés: le risque décuple. À l’échelle mondiale, les études montrent que le champignon détruit 16% de la production en moyenne. En Europe, les dépenses engendrées pour lutter contre lui sont estimées à environ 1 Md€.

Jusqu’à 100 % de perte de rendement

Difficile de réussir à chiffrer les pertes, car le mildiou touche non seulement la production, mais aussi sa qualité. En cas d’attaque tardive, c’est d’ailleurs le critère qui va se détériorer en priorité et entraîner des pertes importantes en conservation. Résultat: surcoûts au triage et chute du prix de vente. Selon les chiffres publiés par Arvalis-Institut du végétal, la perte de rendement peut aller jusqu’à 50% en cas d’attaque assez précoce, voire 90 à 100% si celle-ci a lieu avant l’initiation de la tubérisation. Les essais conduits par l’institut durant quatre ans sur trois variétés différentes ont permis de chiffrer les pertes de rendement brut. Elles sont de l’ordre de 1 à 1,2% par jour de végétation perdu (100% du feuillage détruit) à partir de l’initiation

MILEOS: LIMITER LES TRAITEMENTS SANS RISQUER LA CONTAMINATION

L’outil d’aide à la décision (OAD) Mileos s’appuie sur une base de données riche et fiable issue de nombreuses années d’expérimentation d’Arvalis-Institut du végétal et des services de la protection des végétaux du ministère de l’Agriculture. Il accède aux informations météorologiques proches de la parcelle ainsi qu’aux données telles que la variété implantée, la date d’observation des stades de la culture, les traitements déjà réalisés, le volume d’irrigation apporté… en clair, tous les paramètres déterminants pour estimer le risque d’apparition du mildiou. Mileos guide l’agriculteur dans son raisonnement et lui indique en temps réel, via des alertes SMS, le risque d’apparition de la maladie. L’utilisateur peut donc traiter seulement si cela est justifié. Selon les régions, les conditions climatiques de l’année et les variétés, l’utilisation de l’OAD permet de réduire de trois traitements en moyenne par an.

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ARVALIS-INSTITUT DU VÉGÉTAL

Le mildiou se développe très rapidement et peut causer des dégâts importants en cas de foyer non maîtrisé dans une parcelle.

Le mildiou se reconnaît aux larges taches brunes huileuses auréolées de vert pâle sur la face supérieure des feuilles et au duvet blanc sur leur face inférieure. Des taches qui se dessèchent ensuite en leur centre.

En Europe, les dépenses engendrées pour lutter contre le mildiou sont estimées à environ 1 Md€

de la tubérisation. D’autre part, les taux de contamination des tubercules à la récolte oscillent entre 10 et 20%, voire 30 les années pluvieuses en fin de cycle (août et septembre).

Quels leviers agronomiques?

Les mesures agronomiques se révèlent efficaces pour limiter l’inoculum primaire du mildiou ainsi que pour accroître l’efficacité de la protection fongicide. Les tas de déchets situés à proximité des parcelles plantées peuvent être décontaminés grâce à l’application de chaux vive. Autre solution disponible: bâcher pour neutraliser la dissémination. Enfin, le recours à un produit antigerminatif limite le nombre de repousses dans la culture suivante. De même, naturellement, que choisir de laisser le minimum de tubercules à l’arrachage.

ARVALIS-INSTITUT DU VÉGÉTAL LA FLANDRE

L'AVIS DE L'AGRICULTEUR

Alexandre Rivenet, agriculteur et producteur de plants aux Attaques (Pas-de-Calais)

«Les outils numériques m’aident à prendre les bonnes décisions»

« Je cultive 400 ha, dont 110 en plants de pommes de terre. En 2012, après une perte en culture, je me suis intéressé aux outils numériques. En clair, à cause d’une période de sécheresse suivie d’un épisode pluvieux important sur une parcelle éloignée, j’ai perdu 20 ha de récolte. Je me suis donc lancé avec les stations météo connectées et en ai installé six réparties sur les terres de l’exploitation. Les informations mesurées alimentent l’OAD Mileos [d’Arvalis-Institut du végétal] pour la culture de pommes de terre. Des tensiomètres sont disposés dans la parcelle et leurs informations sont utiles pour son irrigation. Les sols de la région sont très hétérogènes, passant du sable à l’argile en quelques mètres. J’utilise aussi le capteur de biomasse Crop Sensor de Claas sur les céréales et j’aimerais l’employer pour piloter les applications fongicides en pommes de terre. Question bénéfices, l’intérêt est de réunir assez de données pour prendre la bonne décision au bon moment. » Travail du sol, plantation, traitements, irrigation, récolte… à chaque étape de la culture, les outils numériques permettent d’économiser du temps, et donc de l’argent. La première année, la quantité de produit a diminué de 30 %. Sur l’engrais, l’économie se situe entre 90 et 100 €, le tout avec des rendements en hausse. En outre, le numérique doit servir à attirer les jeunes sur les exploitations pour assurer la relève.

Bien gérer son itinéraire technique diminue le risque. Par exemple, implanter des plants certifiés sans mildiou et ceci, dans une zone adaptée. La butte doit être suffisamment volumineuse pour que sa protection soit efficace, l’irrigation raisonnée et la fertilisation adéquate. L’idéal est bien sûr d’opter pour une variété résistante.

Protection chimique

Le programme de protection phytosanitaire est essentiellement construit sur la base d’une lutte préventive. L’objectif est de protéger les pommes de terre contre le mildiou et l’alternariose durant tout le cycle de développement de la culture, de la levée jusqu’à la récolte. Au préalable, il faut cependant bien comprendre que le programme type, qui fonctionnerait sur toutes les parcelles, n’existe pas. Il faut l’adapter à la situation géographique et le faire évoluer durant le cycle. Sans oublier que les conditions climatiques pourront demander des ajustements supplémentaires. D’où la nécessité de suivre les BSV (bulletins de santé du végétal) pour adapter la cadence des applications au risque d’infestation. Une fois les tubercules en terre, l’observation des cycles du mildiou est indispensable; c’est elle qui déclenchera le démarrage du programme. Les firmes préconisent d’entamer les traitements dès le troisième cycle de mildiou. Afin d’aider à

Moins connue que le mildiou, l’alternariose peut provoquer des pertes de rendement, notamment lorsque la maladie se manifeste de façon précoce. Au moins deux espèces du genre Alternaria peuvent affecter la pomme de terre en France: Alternaria solani et Alternaria alternata.

les agriculteurs à bien positionner le produit, Arvalis-Institut du végétal a développé l’outil baptisé «Mileos».

La résistance variétale

Pour figurer au catalogue français, les variétés ont été évaluées et sont suivies dans des essais post-inscription pilotés par l’institut. Les informations récoltées sont diffusées via le catalogue variétal, et avec la filière plants de pomme de terre, elles sont régulièrement remises à jour. Le niveau de résistance de la variété doit donc retenir l’attention des producteurs et les aider à positionner leurs interventions phytosanitaires. L’idée principale étant d’économiser du produit (et du carburant) en supprimant les passages inutiles. Le caractère explosif du développement du pathogène complique la lutte une fois l’épidémie déclarée. Retarder le plus possible l’implantation du parasite dans les parcelles est donc primordial. En cas d’infection, l’objectif sera de limiter son développement pour préserver le feuillage et ainsi limiter la contamination des tubercules. D’où la nécessité d’éliminer au maximum les repousses à la saison suivante. Celles-ci favorisant la dissémination du pathogène, mieux vaut les détruire avant que les plants ne se développent. Ne pas laisser trop de tubercules au sol à la récolte, ne pas épandre de résidus de pomme de terre au printemps, préférer l’implantation des céréales en non-labour pour laisser le gel faire son travail… autant de solutions qui limiteront les repousses.

Implanter en dehors des ZNT

L’agriculteur doit aussi penser implantation et récolte, en évitant par exemple de cultiver trop près des zones où le traitement est difficile, voire interdit. Afin de limiter le risque de foyer dans la parcelle, celle-ci doit être protégée en intégralité! Attention aux coins de champ, bordures de bois, de chemins, de haies, contours de pylône ou obstacle, bords de rivière et/ou de points d’eau… ne pas oublier les ZNT, obligatoires pour tous les fongicides. Seule leur largeur varie selon la spécialité (se référer à l’étiquette). Si malgré toutes les précautions, un foyer épidémique se déclare, le producteur n’a aucun moyen de lutte curatif. Ultime recours: l’emploi d’un agent anti-sporulant en vue de réduire la quantité de spores produite et donc de limiter la casse. En présence de foyers isolés, la solution est de les détruire au plus vite. Avant d’évacuer les fanes, pensez à les mettre dans un sac en plastique pour ne pas disséminer de spores en traversant la parcelle. Même une fois défanée, la protection fongicide reste importante pour garder les tubercules sains. Bien qu’elles soient moins sporulantes, les taches de mildiou demeurent source de contamination en cas de précipitations. C’est seulement une fois la végétation entièrement détruite que la protection peut être stoppée. ■

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