Cahier Zibeline59 Special MP2013

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Mais on a fait polytèquenique ! temporaires, et il est à parier que les propositions spectaculaires, trop peu nombreuses, ne désempliront pas !

On n’est pas des bœufs

© Agnès Mellon

Hourra ! L’ampleur et la réussite plus que débordante de la fête ont eu raison de leur prétendu réalisme ! Et de toute la rancœur des marseillophobes !

II

Le 12 janvier, à Marseille, le contraste entre la tiédeur des discours officiels et l’enthousiasme festif fut patent ! Manifeste ! 450 000 personnes dans la rue selon la Préfecture, qui n’a pas l’habitude d’en rajouter. Étonnant ? Pas forcément, Marseille est avide de rassemblements populaires, et manque cruellement de temps festifs. Du coup la Fête d’Ouverture a souffert de son succès : des TER bloqués, des queues au métro et au ferry boat malgré la multiplication des rames et l’efficace dispositif de filtrage, des foules trop pressées par endroits, et des événements pris d’assaut, comme les points de restauration rapide, d’où la frustration de ceux qui sont restés aux portes… Mais il a fallu gérer une affluence que les plus optimistes n’avaient pas envisagée : car personne n’avait parié que Marseille parviendrait à dépasser Lille 2004 et les presque 300 000 fêtards de la capitale nordique… Dans l’équipe de MP2013, on assurait que rassembler 200 000 personnes serait une réussite, et 300 000 un grand succès ! Et tout cela s’est déroulé sans un seul incident notable, dans une ambiance bon enfant, et sans débordement et assaut autres que d’émotion… Car on a vu des jeunes encapuchonnés aider un vieil homme fourbu, un inconnu qui relayait les bras fatigués d’une mère portant son enfant aux yeux écarquillés, tous les amateurs qui partout chantaient en retenant parfois leurs larmes, et devant l’immense rade retrouvée, la mer et tous ces bâtiments neufs, ces lumières nouvelles, ces espaces publics, cette dame qui pleurait franchement, de joie, disant ma ville, ma ville… Car Marseille est rendue à ses habitants ; la baie désormais accessible, les quais du Vieux Port dégrillagés, les trottoirs élargis, les passerelles et escaliers dessinent une géographie nouvelle pour le promeneur… Sur le J4 les bâtiments rivalisent de beauté, et le Palais Longchamp, la «bonne mère», l’hôtel Dieu éclairent le ciel de couleurs nouvelles. Tout est prêt à l’heure : même si au cours de l’année les ouvertures d’équipements vont se succéder, il y a d’ici là de quoi se nourrir avec les expositions

Quel contraste avec les Vœux de l’État au monde de la culture ! Certes les événements tragiques au Mali pesaient sur la cérémonie d’ouverture et expliquaient l’absence du Président de la République. Mais sur l’estrade Jean-Claude Gaudin, toujours aussi courtois, peine à prononcer les mots enthousiastes qui auraient dû ouvrir cette capitale qu’il a désirée, et dont il a permis la mise en œuvre. Jean-Marc Ayrault parle «stimulation du tourisme et commerce», d’industrie de la musique, un peu de la «mission de service public» des médias, mais d’art et d’artistes point, ni d’élévation de l’esprit, et de Marseille moins encore, sinon pour dire en préambule qu’il faut la préserver du «poids des inégalités», et qu’elle possède «un formidable potentiel de développement» ! Seul José Manuel Barroso, dans une langue enfin belle, affirma sa «magnifique confiance dans le talent des artistes et des acteurs culturels», rappela que la France avait un «idéal de culture», cita pertinemment Braudel, et promit par ailleurs que le budget culturel européen allait augmenter, malgré ou en raison des temps difficiles. Quant à Jacques Pfister, président de la Chambre de Commerce et de MP2013, il commença en citant Léo Ferré, un extrait de Tais toi Marseille fort mal venu ! Rejoignant Jean-Claude Gaudin dans une modestie qui vire à l’auto dénigrement, il affirma que Marseille n’était pas première de classe, et qu’ici on n’avait pas fait «polytèquenique», appuyant le mot d’un accent qu’il n’a jamais eu. Vision dont Marseille souffre autant que de sa délinquance et de la misère de ses quartiers délaissés. Car il y a à Marseille des polytechniciens, des agrégés, des docteurs, intellectuels, scientifiques, écrivains, artistes. Ils étaient d’ailleurs pour la plupart, lors de ces vœux au monde de la culture, réunis debout devant lui. Et il y a à Marseille une vraie avidité de vraie culture. Les 450 000 personnes dans la rue l’ont prouvé, à l’heure où Paris rassemblait les forces les plus rétrogrades de la nation. Reste à nourrir les attentes, jusqu’au bout des quartiers nord, et pas seulement de promesses, d’ouvertures temporaires et du feu de la fête, aussi beau soit-il. AGNÈS FRESCHEL

© Agnès Mellon


Salon, axe 13 trouveront un écho particulier, la patrouille de France qui fêtera son 60e anniversaire, ni les événements habituels, «boostés» pour l’occasion : les Rencontres cinématographiques avec une carte blanche au festival du film de Sciacca en Sicile (du 19 au 26 mars), les Zexpressives (du 4 au 15 mai), les Eclats au Château de l’Emperi (juillet et août), le Festival Côté Cour (du 2 au 12 juil), le Festival Musique à l’Emperi, le Festival des arts de la rue (du 27 au 29 sept)… et même Lire Ensemble (du 30 mars au 12 avril), pourtant manifestation émanant d’Agglopole Provence, mais qui trouve un écho «naturel» au projet de roman feuilleton lancé par MP2013, Les mystères de la Capitale.

Marseille Provence 2013 est l’aventure d’un territoire, qui veut se dynamiser au-delà de Marseille, la «ville mère» qui ne pourrait, à elle seule, supporter tous les projets. La ville de Salon, comme d’autres villes «moyennes» du territoire, l’a bien compris et s’est inscrite dans l’aventure, tous les services de la ville ayant travaillé en collaboration pour une programmation «à la fois exigeante, de grande qualité, mais aussi populaire et festive […]». «Les choix ont été motivés et sont cohérents» selon Jean-Claude Fabre, adjoint au maire, délégué à la Culture et au Patrimoine Historique ; «Notre volonté était d’inscrire la ville dans le projet en respectant un de ses axes qui met en avant l’art contemporain.» Ainsi attend-on avec impatience l’installation sur le centre ancien de Felice Varini, Deux cercles évidés par les toits (du 24 mai au 1er déc) qui jouera de formes géométriques abstraites avec les découpes des toits dans leur réalité architecturale ; attente aussi de l’exposition de l’œuvre de Taysir Batniji, L’Homme ne vit pas seulement de pain #2, réalisée en savon dans l’entreprise Marius Fabre à Salon, et qui insiste sur la portée universelle de l’article 13 de la Déclaration des droits de l’homme (du 10 avril au 16 juin) ; et encore de celle qui sera consacrée au peintre salonnais Raymond Reynaud, Un singulier de l’art (du 5 juillet au 29 sept). Sans oublier, entre autres, les artistes locaux qui

Taysir Batjini © X-D.R.

DOMINIQUE MARÇON Felice Varini © X-D.R.

Pertuis, à l’heure 13

Dobout an bout, Cirquons Flex © Vincent c@ctus Vanheck

Thierry Roche souligne la spécificité de MP2013 : «La capitale de la culture ne s’entend pas ici comme une ville unique : c’est tout un territoire qui s’empare du projet, avec des villes relais, Aix-en-Provence, Arles, Marseille, vigies de cette programmation culturelle. Le pari, généreux et ambitieux cherche à faire vivre à l’unisson un territoire aux multiples facettes avec plus de 500 projets.» Un territoire qui s’étend au-delà du département 13, ainsi, Pertuis peut s’enorgueillir d’y être la seule ville du 84 ! L’équipe municipale tout entière, avec son maire, Roger Pellenc, vice-président de la CPA, affirme avec force sa volonté de participer à cet élan culturel. Vigie entre deux départements, la ville de Pertuis voit ses deux festivals d’été labellisés, et s’inscrit à Cirque en Capitales, soutenu par Maryse Bernard, directrice des Affaires Culturelles de la ville en partenariat avec le Bois de l’Aune. Patrick Ranchain, son directeur, rappelle que l’excellence artistique peut se conjuguer avec de grands rassemblements populaires. Pour les arts du cirque, deux villes, Vitrolles et Pertuis qui va connaître la primeur (juste après La Villette) de la création autour des 7 péchés capitaux, Pulsions, avec le CNAC (les 2, 3 et 4 mars) : 19 étudiants de fin de cycle sous la houlette de Laurent Laffargue, metteur en scène de la Compagnie du Soleil Bleu. Puis, la Compagnie Cirquons Flex, en temps fort des cultures urbaines, offrira un spectacle circassien chorégraphié (23 juin), Dobout an Bout. La fin du mois d’aout verra la magie de l’opéra baroque des marionnettes des Frères Forman. De quoi émerveiller le Vaucluse ! MARYVONNE COLOMBANI

III


Le cirque,

cœur de Capitale Dans l’espace de Marseille Provence, le cirque devient capital ! Durant un mois plus de 50 spectacles, dont 15 créations, 200 représentations, pour certaines gratuites, circulent de la Seyne à Marseille, d’Aix à Arles, de Martigues à Istres, Port-de-Bouc, Vitrolles… En diffusant

l’éventail des esthétiques circassiennes, historiques et contemporaines, avec un focus sur le clown et la magie, Cirque en Capitales met les artistes internationaux et ceux du territoire dans les théâtres, sous chapiteaux et dans les rues encore Tout est bien ! Catastrophe et bouleversement du très récompensé Nikolaus Holz et sa compagnie PréO-Coupé (30 janv au 2 fév puis du 9 au 12 fév au Parc Chanot). Quatre acolytes rejoignent la seconde création de Julien Candy, Le Cirque misère, poursuivant sa recherche sur la poésie des objets (29 et 30 janv). Fusion entre musique et acrobatie avec le Vol du rempart (29 et 30 janv). Au CREAC, le Festival Cirque en Corps, accueille la création Casa dolce casa du Karakasa Circus qui allie le cirque le plus classique à la modernité de la danse et du théâtre : musique puissante, saut acrobatiques et euphorie de la danse (29 et 30 janv, puis 2 et 3 fév à la Seyne-sur-Mer). Du 14 au 17 fév, planches et bouteilles de gaz constitueront la base de jeu du cirque Inextremiste dans Extrêmités. Les 19 et 20 fév, venant d’Argentine et du Brésil, la compagnie Morosof présente 2 ½, un travail de voltigeurs très intime, précédés par Ronde de la compagnie Rouge Eléa. Au Parc Chanot, le Pôle National Cirque Méditerranée invite le collectif marseillais Anomalie et son univers fantastique et physique dans Les larmes de Bristlecone (15 et 16 fév). Coréalisé avec Archaos, le projet Somewhere and nowhere de l’israëlienne Orit Nevo prend son inspiration dans les mouvements migratoires et promet une expérience émouvante (22 au 24 fév).

Les utoPistes, Cie Mpta - Les Mains, les Pieds et la Tête aussi @ Christian Ganet

● MARSEILLE, LA SEYNE-SUR-MER

Au Pôle National Cirque Méditerranée, le Festival Janvier dans les Étoiles débute avec le Bal des intouchables de la Cie des Colporteurs, du 24 au 27 janv. Une création du fildefériste Antoine Rigot nous entraîne dans une cour des miracles moderne (puis du 9 au 23 fév au théâtre du Gymnase hors les murs). Venu de Suède, le Cirkus Cirkör marche sur un fil en conjuguant dans Knitting peace cirque contemporain et «mouvement mondial de tricot» en faveur de la paix (1er au 3 fév et du 24 au 26 janv au CREAC). Issu également du triptyque européen Lacrimae, Rose de Cahin-Caha revisite l’essence sacrée du cirque pour une danse d’éventails de plumes et des acrobaties sur objets instables, à réserver aux adultes (25 au 27 janv puis du 7 au 11 fév au CREAC). Troisième volet avec Risk (25 au 27 janv puis du 2 au 4 fév au CREAC). Fall, fell, fallen du Lonely Circus poursuit cette notion de prise de risque propre au cirque et le rapport à l’aléatoire. Un duo entre concert et performance plastique (25 et 26 janv). Focus clown avec la compagnie des Plumés pour deux spectacles qui mettent en scène des poules savantes : Prends en de la graine (28 janv au 1er fév) et Guinguette (2 et 3 fév) ou

IV

● MARSEILLE, PAYS D’AIX

À la Criée, Mathurin Bolze et le collectif d’acrobates XY présentent Utopistes, spécialement conçu pour le théâtre (26 et 27 janv). À Bas bruit sera repris au Bois de l’Aune, Aix (1er au 3 fév) et à Rousset (6 et 7 fév). Bébel le magicien, virtuose des tours de cartes, présente Une carte ne vous sauve pas la vie pour rien (20 au 23 fév) pour une épopée surréaliste et poétique à travers l’histoire secrète des cartes. ◆ Le Merlan sera le premier à accueillir la compagnie L’immédiat de Camille Boitel qui distille sur le territoire ses projets bouleversés et débordants : La (conférence sur la) jubilation (1er et 2 fév puis le 5 fév à Seconde Nature, Aix), et un parcours dans Marseille avec La Machinajouer (2 et 3 fév puis 8 et 9 au Bois de l’Aune, 14 à Vitrolles, 15 à Fuveau). Et encore L’Immédiat (29 au 31 fév), le Cabaret Calamiteux créé le 12 fév à Lambesc (puis le 14 à Vitrolles et le 15 à Fuveau) et avec le Surnatural Orchestra (8 et 9 fév au Bois de l’Aune). Frédéric Nevchehirlian sera le témoin d’un duo à corps tendus, composé par Virginie Le Flaouter et Vincent Maillot dans De l’autre côté (1er et 3 fév). Autre parcours dans la ville


avec Opus Corpus, une exploration de la suspension proposée par Chloé Moglia (1er au 3 fév). Vagabondage hors les murs encore avec La grosse collection, une installation magique d’Eric Burbail (19 au 23 fév). Et un Focus Magie impulsé par le Merlan avec un Diner magique à la Criée (22 fév) et une soirée de Gala magique (23 fév au Gymnase). ◆ Le Focus Clown s’installe à la Friche, avec François Cervantes qui y présente Carnages (29 janv au 23 fév) et Le prince séquestré (5 au 10 fév). Deux occasions pour retrouver l’univers de l’auteur et de son Entreprise. ◆ Au théâtre du Centaure, les 9, 10, 16, 17 et 20 fév, au coucher du soleil, un duo de circassien et musicien présente Le vide-Essai#5. ◆ Au Daki Ling, objet théâtral non identifié avec Black swan revival and the karma people de Xavier Laurent et Kamel Abdessadok (13 et 14 fév) et, dans le cadre de Tendance Clown, la première production officielle de la structure avec Apocalypse et résurrection (22 et 23 fév). ◆ À Aix, au Grand Théâtre de Provence les émotions seront sublimées dans Séquence 8 par les canadiens virtuoses des 7 doigts de la main (8 et 9 fév).

de Bach (26 et 27 janv). Dans Matamore, un duo de clowns augustes inclassables du Petit Théâtre Baraque se confronte aux voltigeurs burlesques du Cirque Trottola (26 au 30 janv puis du 9 au 20 fév au Massalia). Le jongleur magicien Etienne Saglio dédoublera son univers à la Tim Burton dans Le Silence du Monde (26 janv au 3 fév, puis du 20 au 23 fév à la Criée. Le Soir des monstres sera joué au Gymnase les 19 et 20 fév). Le jongleur fildefériste danois Karl Stets, dans Cuerdo, présente son univers minimaliste qui associe marionnette, clown, équilibrisme et fakirisme (29 janv à Boulbon, puis le 31 à Saint-Rémyde-Provence). Duo d’équilibristes, Nichons là esquisse la trame d’un désert symbolique, piochant dans le western et ses personnages archétypaux (1er et 2 fév). Illusionnisme et magie avec Close Up de Guillaume Vallée (2 fév à l’espace Van Gogh) et surgissements surprises dans la ville avec les Brigades magiques et 60 amateurs formés par le magicien (2 fév à Arles, puis du 16 au 23 fév à Marseille). Thierry Collet et la compagnie le Phalène, dans Qui-vive, distilleront l’art du mentalisme (3 fév, puis 21 et 22 fév au Merlan)

● PORT-DE-BOUC

◆ Au Domaine de Fontblanche, Vitrolles, la 24e promotion du Centre national des Arts du cirque présente Pulsions et explore les 7 péchés capitaux (21 au 24 fév puis du 2 au 6 mars à Pertuis).

Le Sémaphore accueille hors ses mur le collectif AOC dans Autochtone (1er et 2 fév), et au théâtre Qui somme-je ? avec «le clown furieux, trash et tendre à la fois» Ludor Citrik (5 fév). Après avoir accueilli les ateliers flahsmob de l’Apprentie compagnie du 7 au 11 fév (flashmob à Portde-Bouc le 12 fév, le 13 Martigues), Prosperine entrainera son public dans l’After et sa Mamamia, une «électro clown party» participative (16 fév).

● MARSEILLE, ARLES

● MARTIGUES

Au théâtre d’Arles, in et hors les murs, le cirque de Yoann Bourgeois, entre jeux de vertiges et de simulacres, balles et trampolines, conjugue en deux temps l’Art de la fugue

du 24 janv au 24 fév www.mp2013.fr

Le théâtre des Salins accueille une Soirée de Gala de Gilles Defacque, un cabaret-cirque où l’improvisation est reine (8 fév) et parallèlement l’exposition Le journal d’un quelqu’un (16 janv au 16 fév). Avec Smashed (13 fév) et Nightclubs ! (15 et 16 fév), l’art du jonglage des britanniques du Gandini Juggling devrait couper le souffle des spectateurs !

● ISTRES

Ronde, Cie Rouge Eléa © Cecile Viggiano

Le Pôle Culture partagera Le Repas du collectif Cheptel Aleïkoum. Plus qu’un cabaret circassien, c’est à un véritable banquet que le public sera convié (1er et 3 fév). Au Magic Mirror, une programmation quotidienne (1er au 23 fév) propose goûters acrobatiques, After Crique, Thé Dans’Cirque, et autres moments festifs. Les 1er et 2 fév, dans le cadre des Quartiers Créatifs, Stefan Muntaner dévoilera dans sa caravane contemporaine la collecte d’objets lancés auprès des habitants depuis octobre 2012 pour un Freak Show revisitant nos curiosités contemporaines. Avec Complètement Swing, ce sont 45 mn de cirque survitaminé et de poésie déjantée qui s’abattront sur le théâtre de l’Olivier (5 fév). Le collectif Buren Cirque croise dans Cabanons les arts et les artistes, structures de Daniel Buren et mise en scène de Fabien Demuynck, pour une déambulation inventive (23 fév). Soutenus par la Politique de la Ville, Cirque en quartiers accueille des ateliers de l’Ecole française de cirque et de Balthazar proposés aux enfants de 4 à 14 ans, sous chapiteau suivis par un spectacle des enfants et des artistes professionnels (16 au 23 fév).

V


L’art au centre Peu avant les grandes manœuvres d’ouverture marseillaises, Aix prenait quelques avances avec un parcours d’œuvres contemporaines en centre ville…

Cours Mirabeau, Yayoi Kusama, Ascension og Polka Dots on Trees, 2012, polyester. © C.Lorin-Zibeline

L’Art à l’Endroit offre une quinzaine d’œuvres inédites ou plus anciennes, certaines réactualisées, visibles gratuitement (sauf à l’abbaye de Silvacane) jusqu’au 17 février. Installées dans les lieux publics, ou donnant l’opportunité de découvrir certains lieux privés ou fermés depuis longtemps comme la discrète chapelle romane Notre-Dame de la Consolation. Mais il ne s’agit pas seulement de poser l’art au bon endroit lorsqu’il est question d’art public adressé aux passants anonymes, encore faut-il qu’il soit bien conçu…

Des perspectives

Cour de l'Hotel de ville Xavier Veilhan, Le Monument, 2011, mousse poluyrethane, polystyrene, contreplaque, acier. © C. Lorin-Zibeline

Maillon faible des expositions inaugurales, L’Art à l’endroit laisse dubitatif. Dommage ! le projet d’intégrer la création contemporaine à l’échelle d’un territoire, en prenant acte de l’environnement, avait plus d’un atout dans sa poche. Comme celui d’offrir un parcours temporel et

géographique dans l’espace public ; faire dialoguer architectures patrimoniales publiques et privées, voire sacrées, avec l’art contemporain ; créer des contrepoints, des vibrations, des résonances ; sensibiliser le public et les habitants d’une ville considérée comme un «joyau architectural» à une création polysémique. Tels étaient les enjeux de ce parcours aixois imaginé par Xavier Douroux, codirecteur du Consortium à Dijon, qui veut «ne pas renoncer à voir l’art comme un lien sociétal». Sauf que certaines haltes sont décevantes, les œuvres n’ayant pas été créées en lien avec l’espace public, comme laissées hors champ. Et si le parcours joue habilement sur les mises en perspectives des rues, des places, des façades, des fontaines pour alimenter la découverte des œuvres et jouer sur l’effet de surprise -les villes italiennes de la Renaissance ne nous ont-elles pas montré la voie ?-, ce paramètre ne peut à lui seul être un gage de réussite. À la frontière entre le passé architectural aixois et le nouveau quartier du forum culturel, la sculpture en aluminium peint de Mark Handforth, Horseshoes, redonne une échelle proche du mobilier à cet endroit particulier qu’est la ville des affaires. Trois formes en fer à cheval imbriquées symbolisent «le lien entre ancien et moderne» (!) selon l’artiste anglais qui connaît bien la ville pour avoir déjà exposé à la Fondation Vasarely. Quelques heures après son installation, les passants la traversent par amusement ou transforment ses assises en banc public : pari tenu d’une réappropriation ludique… Sur les marches du Palais de justice, l’installation aux couleurs pastel de Franz West est plus iconoclaste ! L’artiste autrichien décédé en juillet dernier évoque ici la procédure judicaire à travers un assemblage de formes organiques échappées des hautes grilles défensives, tels des appendices vivants. Rien de véritablement neuf dans ce Room in Aix qui succède à Room in Rome, mais une parfaite maitrise de l’espace public, comme dans ses installations à la place Vendôme à Paris ou au Château de Versailles. Pas inédit non plus, mais poétique en diable, l’arbre millénaire du suisse Ugo Rondinone (déjà exposé à la 52e Biennale de Venise) s’inscrit à la perfection dans la place Saint Jean de Malte : ses lignes spectrales jouent brillamment avec les lumières des façades de l’église et du musée Granet. Quant à «la plateforme de vie pour une petite communauté» que représente Le Monument de Xavier Veilhan, et dont l’ampleur rouge flamboyante tranche singulièrement avec la cour intérieure de l’Hôtel de Ville, peut-être servira-t-elle de décor aux traditionnelles séances photos des jeunes époux…

Visibles ?

Les Four Personal Cages de Sofia Taboas, écrasées par l’architecture du palais Monclar s’échappent sur le trottoir de la Cour d’Appel, rappelant au badaud les tourments affectés aux actes et aux jugements humains. Tandis que le divin, la compassion, le recueillement pénètrent en

VI


quelques formes d’incarnation dans les œuvres de Marc Camille Chaimowicz, le plus intérieur des créateurs qui composent ce parcours. Son Prie-Dieu, de bois simple et coussin damassé, rouleau d’écritures imprimées en coupures de journaux comme barre d’appui, comme unique et humble mobilier de prière, occupe à lui seul éclairé dans la pénombre le centre de la nef de la modeste Chapelle Notre-Dame de la Consolation, dont le rôle d’apaisement fut affilié dans le passé à l’hôpital mitoyen. Ce parti pris d’une esthétique loin de la radicalité ou des effusions formelles de ses contemporains impose sa discrétion dans l’abbaye de Silvacane. Dans l’armarium, Resting…and learning en réinventant les 102 livres pratiqués autrefois par les moines cisterciens, invite à des satisfactions intérieures débarrassées des consommations compulsives offertes au dehors, fussent-elles sous le couvert de l’alibi culturel. Sur le cours Mirabeau, axe majeur de la cité patrimoniale, des ronds blancs sur fond rouge vif se substituent à l’écorce naturelle en demi-teintes du platane, un des symboles de la Provence. Blasés par les coruscantes fêtes de Noël encore proches, les passants semblent ignorer ces enrubannages ostentatoires et décalés pourtant à profusion signés Yayoi Kusama. Un autre travail n’attire guère plus l’attention du chaland. La Coréenne Kimsooja a apposé sur plusieurs façades ses drapeaux utopiques. Placardés au-dessus de la ligne d’horizon et réalisés sous des couleurs plutôt pâlottes, ses Flags ne s’offrent qu’au hasard d’un regard attentionné…

Plouf !

Le carrosse en aluminium peint de Rachel Feinstein, intitulé Puritan’s Delight, s’est positionné dans le premier bassin de la fontaine de la Rotonde. Vu des abords de la place, cet étrange insecte noir invite à s’approcher pour l’observer de plus près ; las ! Il faut pour cela franchir le flot incessant des voitures. Une fois à proximité, le véhicule stylisé apparaît comme démembré : serait-ce le délice sobre et ironique d’un puritain en roue libre, adepte du

Place de l'Universite Thomas Houseago, Sitting Woman, 2012, bronze © G. Cloarec-Zibeline

second degré ? Le travail de Thomas Houseago est nettement plus convaincant. Place de l’Université, Sitting Woman, une femme de bronze -ou peut-être d’argile ?- est assise comme en deuil, le buste tourné vers la cathédrale d’Aix et son sublime Retable du Buisson Ardent. D’un côté, son œil étrangement absent laisse songeur, de l’autre, elle n’a plus de visage. La sculpture est quasiment coupée en deux, de sorte que le regard la traverse par une mince échancrure pour offrir d’étroites perspectives sur les architectures qui l’entourent. Un peu plus haut, dans la cour en pierre blonde du Mausolée Joseph Sec, un bas-relief impressionne. Il fallait bien ces dimensions conséquentes au Flowering Plant Panel pour que l’œuvre ne rétrécisse pas sous le regard des statues datant de la Révolution. On est aux portes du Service des Vaccinations, et il est plaisant d’imaginer le voyageur en partance pour les pays chauds qui viendra se prémunir contre la fièvre jaune et tombera sur ces grandes fleurs en tuf calcaire, prélude à l’exotisme. À noter que contrairement au projet initial, le travail de Yuang Yong Ping prévu dans le patio du GTP a été installé à l’Hôtel de Gallifet. Quant à celui de Jorge Pardo, il a été annulé.

L’Art à l’endroit se découvre jusqu’au 17 février à pied ` ou en diabline électrique, muni d’un dépliant. Parcours entre 1h à 1h30. www.mp2013.fr

MARIE GODFRIN-GUIDICELLI, CLAUDE LORIN, GAËLLE CLOAREC

Aix, ville rouge ? Rouges les costumes des circassiens, les boudins qui marquent l’itinéraire entre la Rotonde où un portique offre son arche à de jeunes femmes sur des cordes en balançoire, rouges les tenues des acrobates sur les mâts chinois qui jalonnent le parcours, rouges les énormes ballons qui à la fin de la fête alors que la patrouille de France dessine au ciel les couleurs du drapeau, délivrent des centaines de baudruches sur lesquelles les enfants s’élancent. Madame la Ministre, plus réaliste, est en rose. Les musiciens d’Urban Sax animent dans leurs étranges costumes les terrasses du GTP. Prélude aux festivités marseillaises, les derniers accords sonnent comme des appels de bateaux, clin d’œil à la ville portuaire qui prend le relais. Puis un ballon blanc s’élève doucement dans les airs emportant une acrobate aérienne qui offre un numéro de draps suspendus. Enfin entre le Pavillon Noir et le GTP, un numéro de funambule d’une maîtrise rare. Entre le début des soldes et les festivités d’ouverture, la foule avait choisi cette mise en bouche bon enfant, pourtant coincée dans l’espace étriqué d’un quartier marchand… MARYVONNE COLOMBANI

© Agnès Mellon

Tapis rouge du Pôle National du cirque Méditerranée

VII


Méditerranée plurielle Fièrement dressée au-dessus des toits de La Friche la Belle de mai, la Tour-Panorama marque une étape décisive de sa métamorphose, et l’exposition inaugurale Ici, Ailleurs donne le ton d’une nouvelle ère sans frontières

Djamel Tatah, Sans titre, 21 panneaux, huile et cire sur toile © MGG-Zibeline

Ici, Ailleurs jusqu’au 31 mars La Friche, Marseille 04 95 04 95 95 www.lafriche.org

VIII

Désormais les anciens magasins ont laissé place au Panorama et à la Tour, deux entités réhabilitées par Matthieu Poitevin et Pascal Reynaud, architectes de la ré-affectation du site industriel. Toutes deux se rejoignent en hauteur, sur une terrasse aérienne qui donne à voir comment la ville est faite, des toits du quartier aux calanques de l’Estaque… C’est là, sur cette «mer suspendue» entre ciel et terre, que la sculpture monumentale de Sigalit Landau agit comme une parenthèse dans l’histoire Ici, Ailleurs écrite par Juliette Laffon. L’ouvrage est «un grand collage de propositions uniques, souvent inédites, de 39 artistes du pourtour méditerranéen invités comme on invite ses voisins. Ni bilan de la création contemporaine méditerranéenne ni panorama de la scène arabe, mais la présentation d’œuvres d’artistes nomades que leur travail amène à d’autres cultures.» Bref, une exposition évolutive, sans concept préétabli, qui a pour effet de rendre ce foisonnement exaltant, ou indigent selon certains : le récit se développe en quatre chapitres qui sont parfois redondants, mais qui soudent cet ensemble éclectique. D’autres s’interrogent sur la présence de la super production de Wael Shawki qu’ils voudraient classer dans le genre «film d’animation» ! Mais le chef-d’œuvre «plastique» de cet artiste contemporain a toute sa place dans cette exhibition. Donc Ici, Ailleurs provoque la polémique, et c’est tant mieux : l’exposition questionne, bouscule, trace des lignes de fuite, laisse une grande place aux artistes femmes, et distille ainsi de multiples points de vue. Le premier chapitre interroge «Le voyage, l’exil, le déplacement» et fait la part belle à la pièce de Mona Hatoum, Cellule, réalisée dans le cadre d’un AEM chez Arnoux industrie. Double référence à la prison (6 cages)

et au cœur palpitant prêt à exploser (formes rouges en verre réalisées au Cirva) qui devrait susciter l’envie du public de découvrir à Aubagne d’autres aspects de son travail (voir p 9). Dans son film The Seaman, Bouchra Khalili évoque le déplacement à travers le ballet des grues du port de Hambourg tandis que la voix off de l’ouvrier dit les difficultés de son travail. Pour raconter «L’histoire au présent, le monde en question», Orlan conjugue en vidéo un travail plastique et politique sur le thème de l’hybridation et de l’immigration à Marseille, Yazid Oulab crée La Halte comme une invitation à «se fondre dans le paysage intérieur», Gloria Friedman s’inspire d’une allocution de Barack Obama. Akram Zaatari, Kounellis, Zineb Sedira, Yto Barrada, Sarkis et Hrair Sarkissian (son travail photographique est l’une des grandes révélations de l’exposition) sont les auteurs du troisième volet sur «La mémoire, la transmission», certaines des pièces étant le fruit des AEM. L’intérêt de Ici, Ailleurs est aussi de restituer le travail en coulisse des artistes et des entreprises impliqués dans MP2013 ! En forme d’épilogue Le Panorama abrite trois pièces monumentales sur «Le voyage, l’histoire au présent, la mémoire», notamment celles de Djamel Tatah et Lara Baladi. L’une évoque l’enfermement psychique de jeunes gens désœuvrés (Les Hittistes) dans des peintures contraintes à l’espace clos d’une boite surdimensionnée ; l’autre l’emprisonnement des corps féminins concrétisé par la suspension d’un objet sculptural aux formes éloquentes : une ceinture de chasteté inspirée des traditions médiévales en guise de réponse au harcèlement des femmes en Égypte. Son titre français ? La liberté viendra. Ici et là-bas. MARIE GODFRIN-GUIDICELLI Mona Hatoum, Cellules, 2012-2013, métal, verre soufflé © MGG-Zibeline


L’impermanence du lieu Heureux qui commence son voyage au Centre d’art des Pénitents noirs à Aubagne, là où le Frac lance son épopée ulysséenne1 avec Mona Hatoum ! Née à Beyrouth, d’origine palestinienne, résidant à Londres et Berlin, Mona Hatoum interroge depuis trente ans les questions de cartographie, de frontière, Vue de l'exposition Mona Hatoum, Mappings, Centre d'art des Penitents noirs, Aubagne © MGG-Zibeline

d’exil et de territoire en devenir. Mais de manière sculpturale, et avec une forte prédilection pour la matière et les objets qui déterminent la forme à venir : cheveux humains, cartes routières, laine, vitrine en bois, savons de Naplouse… Construite selon le principe d’une mise en écho des pièces, l’exposition Mappings s’ouvre sur la vidéo Roadworks dans laquelle l’artiste, Doc Martens lacés à ses pieds nus, arpente le quartier de Brixton à Londres en 1985, allusion aux attributs des policiers et des skinheads lors des émeutes raciales… Son engagement et la radicalité de ses propos sont d’ores et déjà posés, non sans humour, dans cette performance centrée «sur le corps en tant qu’entité soumise aux menaces, et à la surveillance des structures du pouvoir». Puis un chapelet de créations emblématiques ponctue le parcours, entre minimalisme et monumentalité : tels ces deux dessins abstraits réalisés à partir d’un quadrillage délicat de cheveux, proposition inversée du positif et du négatif. Tel ce Globe aux barres d’acier entrelacées qui, dans son équilibre instable, joue sur l’affrontement, la résistance et la tension : la terre serait-elle devenue une cage où aucune échappatoire n’est possible ? Telle Worry Beads posée au sol, évocation troublante du chapelet paternel à travers des perles en bronze transformées en boulets de canon sous l’effet d’un jeu d’échelle. Sculpture radicale, au caractère violent et subversif, à l’instar de toute une œuvre dont la sensibilité poétique et la beauté formelle permettent des clefs de lecture multiples.

Mona Hatoum Mappings jusqu’au 17 mars Centre d’art des Pénitents noirs, Aubagne 04 42 18 17 26 www.aubagne.fr/ penitentsnoirs

MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

Ulysses est un itinéraire d’art contemporain proposé par le Frac Paca jusqu’en décembre 2013.

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Production Friche !

Fabrique artistique au sein d’un espace public, la Friche sera ouverte 365 jours durant l’année capitale. Une carte Friche va offrir tarifs réduits et gratuité pour certaines manifestations. Un week-end par mois Made in Friche proposera au public de rencontrer plus directement les artistes : auteurs avec la Marelle, musiciens de presque tous les bords, graphistes, radio mobile avec la Grenouille, pratique numérique avec le Transistor... La salle des machines, nouvelle librairie, ouvre ses portes au bas de la Tour (voir p8), et le Pôle théâtre et ses deux salles seront inaugurées en octobre, sous la direction artistique de Catherine Marnas avec une pièce de Copi. Dans un souci constant de partage et de dialogue avec les publics, outre la Crèche, le Skate Park, les arts numériques, les jardins évolutifs… les grandes Carrioles, imaginées par des duos chef/artiste, proposeront de la cuisine de rue traditionnelle et inventive et une aire de jeux pour les enfants sera inaugurée en mai. On retrouvera les 48h chrono pour la fête du quartier en mai et pour faciliter la circulation avec le Centre Ville les tunnels Bénédit et National, relookés par Frédéric Clavère, Philippe Mouillon et Maryvonne Arnaud,

seront inaugurés fin mars ! Bref, conformément à l’esprit qui l’a toujours animée, la Friche en 2013 restera une ruche… effervescente ! Un peu d’histoire ? La Manufacture des tabacs avait fermé ses portes en 1990. Dès 1995 Jean Nouvel définissait les bases d’un Projet Culturel pour un Projet Urbain ; de 2001 à 2012 l’agence ARM de Matthieu Poitevin, fils de Christian dit Julien Blaine, effectue d’immenses travaux, qui font de la Friche une structure en perpétuelle évolution. Marc Bollet, président depuis 2010, souligne le triple projet actuel : construire, rénover et développer les activités culturelles. Pour cela une SCIC assure la gestion sous forme coopérative, expérience originale et unique : les 70 résidents ou frichistes sont désormais associés. De son côté Alain Arnaudet, directeur de la Friche et successeur de Philippe Foulquié, a le souci d’assurer la pérennité de la structure au-delà de 2013, avec des projets rayonnants et le développement du mécénat. Mais pour que la ruche transforme son effervescence en miel durable, il faut des moyens de production… qui tardent encore à être accordés au-delà des projets 2013.

04 95 04 95 95 www.lafriche.org

CHRIS BOURGUE

IX


En attendant l’ouverture du MuCEM et du Musée d’histoire, un remarquable parcours d’expositions historiques temporaires se propose au visiteur au cœur de Marseille… Ulysse, le bruleur de frontieres et la mer blanche du milieu, film ecrit et realise par Malek Bensmail © Dana Farzanehpour - production Marseille Provence 2013 - production deleguee Les Films d'ici

Méditerranées Des grandes cités d’hier aux hommes d’aujourd’hui exposition conçue par Yolande Bacot et Patrice Pomey jusqu’au 18 mai de 12h à 18h visites scolaires en matinées visites guidées tous les jours à 14h30 Le catalogue Méditerranées, publié par Gallimard, suit pas à pas les étapes de l’exposition, l’agrémente de textes d’historiens, d’un catalogue des œuvres précis, d’une bibliographie précieuse. Un ouvrage qui peut se lire et se parcourir à plusieurs vitesses, grâce à une mise en page lumineuse qui laisse toute la place à des photographies amoureuses des objets… J1, Marseille www.mp2013.fr

De Tyr à nos Docks Tout au bout et en haut du J1, à l’abri de la digue mais ébloui par la mer, le visiteur entre en Méditerranées. L’exposition s’offre comme un voyage Des grandes cités d’hier aux hommes d’aujourd’hui et s’éditorialise sans complexe : depuis une dizaine d’années les musées de civilisation et d’histoire ont cessé de présenter simplement des collections d’objets, ou de s’assigner uniquement des buts pédagogiques : ils affirment des points de vue, des visions de l’histoire, font avancer les sciences humaines par l’analyse, la découverte et diffusent des idées nouvelles. Méditerranées est à cet égard exemplaire : elle cite largement Emile Temime et Fernand Braudel, met la «démocratie» athénienne entre guillemets, démontre que la Renaissance vient d’Orient en exposant astrolabes et commentaires persans sur le mouvement

des planètes (XIIe siècle), affirme que le capitalisme s’invente à Gênes, publie des documents effarants sur le passé colonial de Marseille… Volontairement subjective, elle vise à montrer l’emprise de la rive nord sur l’orient, moins prolixe sur les pérégrinations marchandes de Sindbad, les esclavages arabes ou les eunuques des harems. C’est que, une citation de Paul Veyne l’affirme dès l’entrée, «L’Histoire demeure fondamentalement un récit, et ce que l’on nomme explication n’est guère que la manière qu’a le récit de s’organiser en une intrigue compréhensible.» Ainsi l’exposition se livre comme une fiction conduite par un Ulysse qui traverserait les villes et les époques, grâce à un très beau film qui accompagne chaque étape d’un nouvel accostage (Ulysse le brûleur de frontières, Malek Bensmaïl). Les vidéos et films d’animation sont nombreux, clairs et extrêmement soignés, et un parcours complet nécessitera plusieurs heures… D’autant que les pièces présentées sont rares, et sublimes : des maquettes de navires prêtées par le Musée National de la marine aux marbres antiques les plus précieux, de la jalousie de Cordoue aux poinçons alphabétiques phéniciens, du caftan Ottoman brodé d’or aux mosaïques carthaginoises, toutes les pièces rassemblées sont incroyablement émouvantes, et retiennent une attention constamment ravivée. Jusqu’à ces dockers en noir et blancs qui, comme Ulysse, montrent leurs muscles dénudés (photographies de Brian Griffin). On revient à quai dans cette virilité affirmée. Et on se rend compte que ce voyage séculaire à travers notre mer a toujours laissé les femmes loin sur les rives… AGNÈS FRESCHEL

Les cartes de la mer

Mémoire des rives : cartes et portulans de Méditerranée jusqu’au 30 mars Alcazar BMVR, Marseille www.bmvr.marseille.fr

X

La salle d’exposition au 1er étage de la BMVR présente ces cartes marines manuscrites que l’on appelle portulans. Sur des parchemins richement enluminés, les calligraphies d’une extrême finesse invitent à la rêverie. On y perçoit les successives conceptions du monde, et la récurrente tension entre science et religion : l’influence de l’astronome grec Ptolémée repris par les géographes arabes dès le VIIIe siècle, la question de la sphéricité de la terre, la découverte de Jupiter par Galilée qui a permis de résoudre le problème des longitudes... On y voit aussi l’importance cruciale des cartes en matière commerciale et militaire. À

l’époque où l’on exerçait un métier de père en fils pendant des décennies, des lignées de cartographes passaient de port en port, de Majorque à Messine, Naples, Barcelone et Marseille pour vendre leur art au plus offrant. On peut ainsi admirer les œuvres de François Ollive (1646) ou de son prédécesseur Joan Oliva (1593) et comparer leurs styles, les différents blasons, une Vierge à l’enfant destinée à protéger les navigateurs, les croix du calvaire symbolisant Jérusalem et la puissance ottomane marquée par son Croissant. Marseille, elle, est représentée par de nombreux moulins. Aux XVIIe et XVIIIe siècles, l’apparence évolue

BMVR de Marseille Ms2185 Francois Ollive Atlas Portulan de la Mer Mediterranee 1646

mais les problématiques demeurent : Louis XIV a fait cartographier entièrement son royaume, et sur le recueil de plans aquarellés exposé, on voit les principaux ports de la Méditerranée avec leurs fortifications. La géographie sert à vendre, et à faire la guerre, comme toujours. GAËLLE CLOAREC


Au banquet des massaliotes Dans la magnifique chapelle centrale de la Vieille Charité, une exposition dévoile le Trésor des marseillais. Offrande religieuse au Temple de Delphes, érigé 500 ans avant J.-C., cet édifice sculpté témoigne de la prospérité des phocéens devenus massaliotes en s’installant un siècle plus tôt sur notre rivage. Mis au jour en 1901, le Trésor comprenait 29 fragments d’une frise. Prêtés par la Grèce au Musée d’Archéologie Méditerranéenne, ils ont permis la reconstitution en 3D de ce sanctuaire consacré à Athéna. La scénographie de Muriel Garsson nous fait réaliser à quel point notre vision blanche et bleue des temples grecs antique est erronée : cinabre, ocre rouge, azurite et orpiment étaient au contraire utilisés couramment pour colorer les sculptures et souligner l’architecture. Les poteries attiques à figures noires dévoilent des thèmes en faveur à l’époque : audacieuses amazones à cheval amputées d’un sein, corps souples d’athlètes, et la déesse guerrière terrassant un géant. Pour magnifier l’ambiance delphique, un habillage sonore subtil réalisé par Jean-Marc Montera répond aux oliviers qui décorent les pilastres de la chapelle, tandis qu’au ciel du dôme un gros nuage blanc se déploie. L’exposition donne au visiteur le plaisir ingénu de savoir que Marseille était il y a 2500 ans une cité florissante, grande exportatrice de vin, de cruches, de coupes et d’amphores. Témoins, les vestiges exhumés sur l’emplacement du collège du Vieux-Port, où se trouvait une vaste salle de banquet dans laquelle résonnaient

Fragment de coupe attique a figures rouges decoree d'une main soutenant un skyphos credits Fouilles du College Vieux-Port - Marseille (2005)

rires et chants en grec ancien. En sortant, on pense aux archéologues grecs, qui vivent dans leur pays des moments difficiles et craignent pour la préservation de leur patrimoine, trésor de l’humanité.

Le Trésor des marseillais, exposition à la Vieille Charité, jusqu’au 15 avril

GAËLLE CLOAREC

L’antique fleuve Le Rhône n’en finit pas de livrer ses trésors, et Luc Long d’expliquer avec la même flamme comment depuis 25 ans les fouilles fluviales ont bouleversé la connaissance du passé d’Arelate duplex. Arles la double, posée sur deux rives, commerçant avec la mer et le fleuve, emblème de la magnificence romaine, symbole du pouvoir impérial et religieux… Les pièces réunies aux archives départementales sont un concentré de l’exposition arlésienne, et réunissent les plus belles pièces, celles qui furent exposées eu Louvre, dans un parti pris artistique plutôt que civilisationnel : peu d’objets du quotidien, mais le sublime Gaulois captif en bronze, la grande Statue de Neptune, la petite anse de cruche à figures mythologiques… Chaque objet, chaque sculpture est exposée sobrement mais avec un soin extrême, qui permet d’en faire le tour, ou d’en voir l’autre face grâce un système de miroir. Et de finir par le Buste de César… Impérial, comme il se doit ! A.F.

César et les secrets du Rhône Jusqu’au 24 mars ABD Gaston Defferre, Marseille 04 13 31 82 80

Gaulois captif, statue de bronze. 1er quart du 1er siècle av.J.-C. © Remi Benali - musée départemental Arles antique CG13

XI


Clam Au Silo. Marion Rampal et Raphaël Imbert ont choisi Freedom. Dans l’assistance, les élèves des classes orchestre de collèges, avec qui la foule répète pour les mises au point à partir de 18h… À 19h le chant surgit dans l’enthousiasme. Christophe Leloil, qui s’était juché en haut des escaliers, fait jaillir sa trompette, puis le silo s’anime de couleurs, et le feu d’artifice commence !

Christophe Leloil © Dan Warzy

Devant l’Opéra on se presse par milliers ! On chante la-la-la quand le Chœur des pros guide les voix inexpertes : elles n’en manquent pas... de cœur ! Sur le célèbre Libiamo de La Traviata, le son monte vers les étages du bâtiment. Au niveau du sol, loin de la source, on devine un rythme ternaire aux gesticulations du chef... jusqu’au dernier si bémol, aigu, sur lequel on s’égosille !

© Agnès Mellon

© Jacques Freschel

Au Gymnase, pour la Grande Clameur Glamour, Mireilles, imaginée par Nadia Schnock, des femmes mais pas seulement, coiffé(e)s de perruques brunes à la Mireille Mathieu, entrainé(e)s à mimer et chanter Une femme amoureuse. Sur la scène, une dizaine de Mireilles, vêtues de robes ajustées, lèvres écarlates, visage impassible. À 19h, le ballet remarquablement rodé commence et la foule mime de bon cœur la chanson d’amour. À la fin, un BIS imprévu ! En vain ! Tout le monde se met en route jusqu’au bout de la nuit…

© Patrice Cartier

A la Villa Méditerranée la clameur était écrite, répétée, créée par le personnel de la région PACA, Michel Vauzelle chantant au premier rang, partition à la main ! Minuté à la seconde, la clameur de Télémaque a résonné comme la mémoire profonde de la mer, et la précision n’a pas bridé l’enthousiasme, juste entre les cornes de brume et la vague de feu…

XII


ons ! Un rassemblement très émouvant se tenait côté Mairie, en présence Marie-Arlette Carlotti, ministre en charge des personnes handicapées. : la Clameur organisée par le Collectif Langues des Signes et Culture Sourde MP2013. Des dizaines de mains se sont tendues pour lancer un bel hommage à Marseille et sa culture ouverte à tous.

Marie-Arlette Carlotti, ministre deleguee aux handicapes lors de la clameur en langue des signes © Gaelle Cloarec

Les rangées de la vaste nef de la Major, quatre fois bondées durant la nuit ! Aoidé, oratorio en trois mouvements composé par Alain Aubin, chanté par d’immenses chœurs amateurs mais sacrément pro, qui créent une partition difficile et enthousiasmante, pleine de poésie, riche d’une vraie mémoire de la voix lyrique méditerranéenne…

© Dan Warzy

© Dan Warzy

Sur le Cours d’Estienne d’Orves une foule impressionnante s’amasse dangereusement pour regarder, le nez au ciel, les sublimes funambules du Studio de cirque. Il neige des millions de plumes ! L’immense place, à 20h et à 23h, a dû être bouclée pour refuser du monde…

© Elise Padovani

Devant l’Hôtel de Ville, comme ailleurs, une certaine fierté et contre l’attente des pessimistes, une organisation impeccable encadre la marée humaine. À 18h30, seuls les premiers cercles ont pu poursuivre le dialogue potache imaginé par Philippe Carrese avec un maire au balcon. Le do-ré-mi-la-cy-don s’est perdu dans le cri général de 19h. Peu importe, on s’est émerveillé comme des gosses des feux d’artifice qui jaillissaient sur le Panier et le Port. Dieu le père lui même pointait ses doigts de lumière sur la Bonne Mère posée sur un socle bleu. À Sadi Carnot le bleu glaciaire annonçait un retour de pêche : blocs de glace tronçonnés en direct dans des gerbes d’eau irisées, d’où naissaient gelés et translucides des créatures marines : méduses bleues et vertes, poissons, coquilles Saint Jacques.

XIII


B(off) ou (B)off ? Le 11 janvier à 19h le OFF a sonné trompette : la beuglante corolle rouge a par deux fois solennellement fendu une foule dense et trépignant d’impatience dans l’entrée d’une petite friche qui n’en attendait pas tant ! Ouverture de Marseille2013 par le Banquet... pourquoi pas ? Platon n’était pas là, Ricciotti non plus, mais Carrèse oui... encore que la vue brouillée par les fumigènes (invités ? pas invités ? on n’est plus sûr de rien) ; des éloges (nom commun /masculin) annoncés, concoctés par les 8 parrains (!) tutélaires (sérieux ?) dont la liste figure dans tous les documents sur l’historique du mouvement, seuls ceux des susnommés furent prononcés par -Diotime oblige- la sexyrigolote Zaza Janmeur (?) accompagnée de son ukulélé ; audibles par quelques personnes très motivées et très patientes, les paroles n’en sont pas à graver dans le marbre même si «la force de frappe du paysage marin» ou le «génie mélancolique de Marseille» de Rudy Ricciotti (autodérision ou enflure ?) font un effet béton. Cependant que le populaire brouhaha noyait tout de sa fougue inspirée, à l’étage Yvan Cadiou, puissant cuistotbateleur, déclamait aux woks et de main de maître ses «penne en risotto», moment plus homérique que platonicien. Certains peut-être purent en manger moyennant quelques Gastons (papa encore..) à 1€25. La conférence de presse du matin animée par Stéphane Sarpaux était nettement plus pro, et même prête, et une fois admis que les clichés toc puissent être détournés en clichés chic et même en axes artistiques de la programmation [Merguez Capitale / Mytho City / Poubelle la Ville et Kalachnik’OFF] on est tout content de voir défiler des artistes eux-mêmes tout contents d’être «placés au cœur du projet». Douze événements rattachés chacun à un des quatre axes sont présentés, décrits ou... rêvés

© A.G.

(financements flottants) par Noémie, Pierre-Yves, Mireille ou Nicolas, que tout le monde connaît sans doute ou qui se feront un nom après 2013. Yes, we camp !, projet «participatif, écologique et festif» de constructions collectives légères, ou le mystérieux Invisible Design proposé par Ginie Bel semblent bien sous tous rapports et d’autres plus piquants, comme le travail annoncé de Camille Lorin sur prothèse mammaire (lancer sur la salle d’un exemplaire siliconé ; on rigole, on rigole) dans la piscine vidée de FraisVallon... Calendrier détaillé sur le site tout radieux des visuels d’Antonin Doussot. On va bien voir ! MARIE JO DHO

Monstres d’acier et de fête La foule était là, massée sur les esplanades et les rondspoints de Grand littoral. Au cœur des Quartiers nord, depuis ce promontoire excentré avec vue imprenable sur la rade, la grande Parade des Lumières a donné le coup d’envoi de l’année capitale. Dix véhicules métamorphosés en monstres mécaniques par les Ateliers spectaculaires Sud Side ont lancé les hostilités à la nuit tombée, suivis par un convoi de 200 «minots», tous équipés de luminaires : lampes frontales sphériques, clés à molette lumineuses, tournes-vis sabre laser... concoctés avec l’association des Petits Débrouillards, pour rendre hommage à la mémoire ouvrière de Marseille et de ces territoires. Certes les enfants étaient moins visibles et bruyants que les monstres mécaniques à qui ils emboitaient le pas, mais leurs clameurs ont montré que cette année ne se ferait pas sans eux. Il fut ensuite assez pénible de rejoindre le centre-ville par les navettes, mais la convivialité était au rendez-vous parmi ces citadins venus dans des quartiers qu’ils ne fréquentent jamais. Et ça, c’était peut-être la plus belle réussite de cette belle journée ! CHRISTINE MONTIXI

© Christine Montixi

XIV


Entrée en lumière S’il est bien une ville où la culture semble être une émanation même de son cadre et de son architecture, Arles est exemplaire, sachant accueillir les éditions Actes Sud, Harmonia Mundi ou le Groupe F… «15 millions d’euros sont investis dans les manifestations culturelles» se réjouit Hervé Schiavetti, maire de la ville dont tant de monuments sont classés au patrimoine mondial de l’humanité. Il salue aussi l’engagement des différents acteurs économiques au cœur du dispositif MP13. Symbole de cette union où monde artistique et industriel trouvent une complémentarité : aux côtés du Groupe F, EDF, partenaire officiel de MP13. C’est aux bords du Rhône que se joue le premier acte en ouverture de la participation d’Arles, et en présence d’Aurélie Filippetti, de parlementaires européens, des représentants des mairies de PACA, du CG13, de la Région. Harmonie, enfin !, entre les différents acteurs, face au succès indéniable et populaire des manifestations. L’union se scelle par le superbe feu © Claude Lorin d’artifice Révélation du Groupe F, premier épisode de leur nouvelle création. Les murs des quais s’ourlent de bleu, tandis qu’un lion, très vénitien, rugit, les bateaux lumineux s’avancent sur les eaux sombres du Rhône, flammes, éclats, danse incantatoire des personnages lumineux, jaillissements, pluies d’étoiles, éblouissement du final où sans fin s’ouvrent les corolles d’immenses fleurs de lumière. Magie de l’eau et du feu conjugués en beauté, Arles et le Groupe F vont continuer de nous éblouir !

Révélation 1 a eu lieu le 13 janvier à Arles, quai Lamartine

MARYVONNE COLOMBANI

Flic floc, pas flop ! Petite bruine sur la ville de Trets, et pourtant une activité rare pour un dimanche matin : des familles, des couples, petit fascicule en main se promènent, s’arrêtent, discutent, reviennent en arrière, pointent le nez sur les façades, comptent leurs pas, observent les fontaines, lisent le nom des rues, s’attachent à des détails ignorés de leur quotidien... La Chasse au 13’or bat son plein, et le texte chargé d’énigmes permet un parcours à la fois ludique et instructif. Les chasseurs doivent découvrir un bijou volage, s’interroger l’architecture de l’église, les dates des monuments, dessiner la silhouette de la Sainte Victoire, se livrer à des exercices d’art plastique. Un trajet sous le signe de l’eau, guidé par une baguette de sourcier capricieuse avec en fin de parcours les indices récoltés, un petit exercice de géométrie entre l’étang de verre, celui aux mille reflets, le marais de l’oubli ou le canal des crapauds… l’eau est une fête ! Les Marseillais aussi supportent la pluie ! Avec parapluie et K-way, feuille de route à la main, ils ont participé avec enthousiasme ! Un trajet partait du port et de la Mairie pour s’enfoncer dans Le Panier, passant dans le Musée des Docks romains, la place de Lenche, celle du Refuge et des 4 Coins, contournant la Vieille Charité. On discutait avec l’épicier qui n’en revenait pas d’avoir été dévalisé la veille, on visitait une boutique d’art. De belles perspectives sur la mer émerveillaient la balade. Le trésor ? l’horizon !

À Salon aussi on se mouille : les 400 inscrits étaient présents, empaquetés, et rejoints par des non alignés… partant qui vers Nostradamus, qui vers l’Empéri, tous vers l’art contemporain qui s’affiche dans l’espace public, au gré d’énigmes faciles mais exigeant une attention particulière aux détails. La récompense des vainqueurs, par tirage au sort pour ne pas transformer la chasse en course ? des invitations aux spectacles, une redécouverte du patrimoine de proximité, et partout des petits cadeaux offerts par les commerçants… heureux d’ouvrir un dimanche ! MARYVONNE COLOMBANI ET CHRIS BOURGUE

La Chasse au 13’or organisée par l’agence de communication Ma langue au chat proposait 112 parcours sur 28 zones de jeu du territoire

© X-D.R

XV


Folle journée à l’Opéra Marie Orenga (violon), Blandine Leydier (alto) et Luc Dedreuil (violoncelle) vibrent aux affres du Divorce imaginé par Fazil Say en 2010, de la colère à l’obédience fatale, nécessaire… Et le public en redemande à l’écoute d’un mouvement puissant, pulsé en crescendo, tel une «course à l’abîme», œuvre d’un Turc inconnu chez nous : Ulvi Cema Erkin. Au cœur de ce programme résolument moderne, on goûte à un pur instant de grâce lorsque Fazil Say, immense pianiste pour le coup, passe au clavier pour la Sonatine de Ravel. L’artiste communique avec le public, l’invite du regard à l’écoute intime, alors que ses mains dessinent des arabesques par-delà les touches : son jeu est fondamentalement libre, comme sa pensée, en bute avec l’esprit borné du gouvernement de sa Turquie natale. Il en connait le prix, de la liberté, le musicien… dans sa chair ! On en tressaille, on crie «vivat» !

Méditerranée, et King Lawrence

Le CNIPAL © Jacques Freschel

La Folle journée a eu lieu à l'opéra de Marseille le 13 janvier de 11h à 20h

Après une partie de la nuit à déambuler autour du Vieux-Port, au top de la Clameur chantée d’après Verdi dès 19h, on se retrouve au Grand Théâtre, plein comme un œuf à 11h, petits yeux, mais l’esprit ouvert en souvenir des pupilles écarquillées de la veille ! L’Ouverture de MP13 à l’Opéra de Marseille se poursuit avec une folle journée. On croise Maurice Xiberras, visiblement euphorique : le directeur des lieux ne s’attendait pas à un tel succès public ! C’est qu’une véritable foule s’est réunie samedi soir pour chanter sur le parvis de l’Opéra et dans les rues alentour, et ce dimanche, les quatre concerts gratuits se jouent à guichets fermés : 7500 personnes sont attendues ! On jubile, on se presse dans le grand hall, les escaliers sinueux, du parterre ampoulé au raide poulailler… En matinée, le programme de musique de chambre évoque l’histoire de l’Opéra de Marseille, de ses destructions/reconstructions, projection d’images d’archives en renfort, et se tourne vers la création musicale d’aujourd’hui. En ce 13 janvier 2013, le jeune compositeur marseillais Florian Caroubi a la chance de voir son Quatuor créé devant près de 1800 personnes ! D’ordinaire, à l’occasion d’une telle affiche, l’assemblée est nettement plus intime ! Joué par le Quatuor Syrah, son opus, tiré d’un trait haletant et continu, recueille un beau succès. Les quatre cordes du cru, Louis-Alexandre Nicolini et Marie Hafiz (violons), Benjamin Clasen (alto) et François Torresani (violoncelle) livrent aussi un beau moment d’émotion avec une déchirante Prière de Turina sur les plans du Théâtre dévasté par l’incendie de 1919 !

Fazil en liberté

Dès que l’Ensemble Des Equilibres prend le relais, une nouvelle pâte sonore s’impose, rude, quasi-sauvage. Emmenées par la violoniste Agnès Pyka, les cordes de

XVI

Après la pause prandiale, nous voilà de retour pour un spectacle concocté pour les jeunes chanteurs du CNIPAL. Leur Odyssée mise en espace, et accompagnée au piano par Marion Liotard, nous conduit sur les rives de l’Espagne de Carmen à l’Égypte de la Flûte enchantée, de l’Italienne à Alger au Turc en Italie, de la Provence de Mistral et Gounod (Mireille) à la Grèce revisitée par Offenbach… Les airs et les ensembles présentés enorgueillissent l’école internationale de chant basée à Marseille et ses élèves… qui n’en sont déjà plus ! On reste dans un programme méditerranéen avec le dernier événement de la journée : apothéose sonore, pour une assemblée ravie ! L’Orchestre Philharmonique de Marseille vire du coté de Carthage avec Les Troyens (monumental Berlioz qu’on entendra cet été avec Roberto Alagna), avant de remonter vers l’Espagne de Lalo en compagnie du violoniste Laurent Korcia tout en sensualité virtuose. On fait tomber les voiles, enfin, au quai de notre belle région, aux couleurs ensoleillées du galoubet fantasmé de Darius Milhaud (Suite Provençale) et de la Marche des Rois de Bizet. Cerise confite sur un gâteau de saison, Lawrence Foster commet un show burlesque, «so british» et pince-sans rire, sur le bis de la Farandole, au rythme effréné duquel il nous entraine, claquant des mains, vers les hourras… Visiblement, l’Orchestre a trouvé son «King» ! JACQUES FRESCHEL Fazil Say et l'Ensemble Des Equilibres © Jacques Freschel


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