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MENSUEL CULTUREL & CITOYEN DU SUD-EST DU 14.01.2017 AU 13.02.2017

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Politique culturelle Les artistes ? Avalés ! 2€ ÉVÈNEMENTS La Biennale du Cirque / Shakespeare à Nice Les Elancées / Les Hivernales / Musée Fabre à Montpellier


© Carlos Thomas - Licence n°2-102-7568 / n°1-102-2068

13H00 – ATELIER DE DANSES Initiation aux danses traditionnelles, tous niveaux 16H30 – LE GRAND BALÈTI Bal traditionnel, Musiques occitanes et centre France

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Cité de la Musique, La Magalone 245 bis Boulevard Michelet - 13009 Marseille Billetterie en ligne : www.citemusique-marseille.com Information : 04 91 39 28 28

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JANVIER FÉVRIER 2017

CULTURE ET SOCIÉTÉ Mensuel payant paraissant le deuxième samedi du mois Édité à 30 000 exemplaires, imprimés sur papier recyclé Édité par Zibeline BP 90007 13201 Marseille Cedex 1 Dépôt légal : janvier 2008 ISSN 2491-0732 Imprimé par Riccobono Imprim’vert - papier recyclé Crédit couverture : © Alouette sans tête Conception maquette Tiphaine Dubois

Directrice de publication & rédactrice en chef Agnès Freschel agnes.freschel@gmail.com 06 09 08 30 34 Rédactrice en chef adjointe Dominique Marçon journal.zibeline@gmail.com 06 23 00 65 42 Secrétaire de rédaction Anna Zisman anna.zisman.zibeline@gmail.com

ARTS VISUELS Claude Lorin claudelorin@wanadoo.fr

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LIVRES Fred Robert fred.robert.zibeline@gmail.com MUSIQUE ET DISQUES Jacques Freschel jacques.freschel@gmail.com CINÉMA Annie Gava annie.gava@laposte.net

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Polyvolants Chris Bourgue chris.bourgue@wanadoo.fr Gaëlle Cloarec ga.cloarec@gmail.com

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Maquettiste Philippe Perotti philippe.zibeline@gmail.com

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WRZ-Web Radio Zibeline Marc Voiry marcvoiry@hotmail.com Directrice Commerciale Véronique Linais vlinais@yahoo.fr 06 63 70 64 18 La régie Jean-Michel Florant laregie@gmx.fr 06 22 17 07 56 Collaborateurs réguliers : Régis Vlachos, Dan Warzy, Frédéric Isoletta, Yves Bergé, Émilien Moreau, Christophe Floquet, Pierre-Alain Hoyet, Aude Fanlo, Thomas Dalicante, Marion Cordier, Marie Michaud Administration Catherine Simon admin@journalzibeline.fr Houda Moutaouakil contact@journalzibeline.fr

04 91 57 75 11

Meilleurs vœux Jamais cette expression n’aura eu, en janvier, un sens aussi littéral. Ce que nous pouvons vous souhaiter, chers lecteurs, est de passer une année meilleure. 2016 nous a lentement habitués à l’insupportable. Les attentats, le Front national, la Syrie qui sombre, la Loi Travail, François Fillon, Donald Trump, la chute des financements de la culture, la presse qui se noie, les menaces sur la Sécurité sociale, la pauvreté qui se répand, les morts de l’hiver devenus banals, les queues qui s’allongent à la soupe populaire, les prix qui flambent, la criminalité qui explose à Marseille, la canicule et les inondations ; tout cela nous installe peu à peu dans l’inhabitable, dans le chaudron de la grenouille, celle qui finit ébouillantée parce qu’elle s’accoutume à l’augmentation thermique progressive, au lieu de sauter courageusement hors de la marmite. Il nous faut sauter le pas si nous voulons vivre dignement. Accueillir les réfugiés, miser sur la culture et l’intelligence, réconcilier la société, laisser une planète habitable à nos enfants, et simplement vivable pour les plus pauvres d’entre nous. 103 Il nous faut croire en l’humanité, celle qui invente des solutions alternatives, qui fabrique des spectacles enthousiasmants, celle qui traduit Babel, rapproche les peuples, pratique la compassion. Compatir, « souffrir avec » au sens littéral, reste ce que la chrétienté a inventé de plus étonnant. Mais qui veut encore imaginer ce que l’autre ressent ? Il nous faut sauter le pas. Échapper aux pseudo-pragmatismes qui guident nos choix, nous poussant à voter contre le pire, et jamais pour ce que l’on croit. En cette année électorale, je vous souhaite d’écouter le conseil simple de Mandela : Que vos choix reflètent votre espoir, et non vos craintes. Autrement dit : n’écoutez pas les sondages, mais croyez aux projets, et à ceux qui voudront vraiment les mener.

ÉDITO

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AGNÈS FRESCHEL


CONCERT

FÉVRIER

2016/17

SAISON 2016 /// 2017

2016/17

SOIRÉES P AR T AG É E S

M E R C R E D I 1 er F É V R I E R > 1 9 h J E UD I 2 F É V R I E R > 20 h3 0

durée : ± 1 h 1 5 + e nt racte ≥ 1 0 ans

La Criée Festival !

LaFolleCriée

dans le c adre de la B iennale Int ernat i ona l e d e s Ar t s d u Ci r q ue

Théâtre national de Marseille en partenariat avec le

2016/17

© Mi c h e l N i c o l a s

18 / 11 / 16

2016/17

2016/17

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photo © Loïe Fuller

2 jours, 12 concerts de 45 minutes, Pass 4 concerts à 30 €


sommaire 103

Politique culturelle

Les gros opérateurs culturels contre les artistes indépendants (P.6-9) Jean Misrahi nouveau directeur du cinéma Les Variétés (P.10-11)

événements

François Cervantes crée Face à Médée au Merlan (P.12) Grandes musiques pour petites oreilles, Week-ends musicaux de Chaillol (P.13) Le MuCEM, la Villa Méditerranée (P.14-15) La Biennale du cirque, les Élancées, les Hivernales (P.16-17) Festival Parallèle, festival Shakespeare à Nice, les Dimanches de la Canebière, la Nuit de la lecture (P.18-19) Fest’Hiver, Les Nouvelles Hybrides (P.20)

Hubert Colas © Marc-Antoine Serra

critiques

Spectacles, musiques (P.22-32) Marseille, Châteauvallon, Montpellier, Aix, Martigues, Aubagne, Monte Carlo, Toulon

AU PROGRAMME DU MOIS

Face à Médée de François Cervantes, création au Merlan © C. Raynaud de Lage

Musiques (P.34-37) Spectacles (P.38-56)

Alfons ALT, Le Palais d’amour, 2015. Exposition 10 ans d’acquisitions et de donations au Pavillon Vendôme Le Ruisseau, le pré vert et le doux visage de Yousry Nasrallah, projeté lors des Rencontres cinéma de Manosque © Pyramide Distribution

cinéma [P.58-62] Arts visuels [P.63-67]

Marseille, Aix, Aubagne, Avignon, Montpellier, Sète, La Roque d’Anthéron, Mouans-Sartoux, Le Cannet, Cannes

livres [P.68-78]


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politique culturelle

Gros opérateurs et petits artistes LE BUDGET CULTURE DE LA RÉGION PACA, LE PROJET MARSEILLE 2018, LE PROCÈS INTENTÉ NATIONALEMENT PAR LES SYNDICATS D’ARTISTES AUX CENTRES DRAMATIQUES NATIONAUX, LES DIFFICULTÉS D’UN LIEU CULTUREL COMME MONTÉVIDÉO... TOUT SEMBLE OPPOSER AUJOURD’HUI LES « GROS OPÉRATEURS CULTURELS » ET LES ARTISTES DES TERRITOIRES. MAIS LES GROS OPÉRATEURS NE SONTILS PAS EUX AUSSI VICTIMES DES RESTRICTIONS BUDGÉTAIRES ET DES EXIGENCES DE RÉSULTATS ? LES CDN ASSIGNÉS

Les syndicats d’artistes et techniciens du spectacle, c’est-à-dire la CGT, la CFDT et FO, assignent 15 Centres Dramatiques Nationaux pour non respect du « volume d’emploi des artistes interprètes » dans leurs établissements. Nice, Marseille et Montpellier sont tous trois concernés. Effectivement l’Accord signé par l’État et la profession en 2003 est clair : 42,5% du budget d’un CDN doit être consacré au budget artistique, dont deux tiers aux productions et coproductions majoritaires. Et « la masse salariale que chaque centre dramatique national doit consacrer aux artistes interprètes employés à des activités de plateau, à l’exclusion du directeur, doit représenter au minimum 40% du budget artistique ». Soit seulement 17% du budget global. Or les Centres Dramatiques en sont loin, certains de beaucoup. Mais leurs directeurs soutenus par le SYNDEAC (Syndicat national des Entreprises artistiques et Culturelles) font valoir que ce pourcentage, étant donné leurs baisses de ressources et l’augmentation de leurs

Christian Estrosi, voeux à la presse 2017 © Jean-Pierre Garufi

charges depuis 2003, est devenu intenable. « Les Centres dramatiques nationaux et le SYNDEAC tentent depuis longtemps de concilier les contradictions manifestes entre les cahiers des charges, l’érosion constante des moyens publics attribués, et les indicateurs de l’emploi issus de cet accord ». Ce sont 8 millions d’€ que les syndicats d’artistes réclament, et 10 000€ d’astreinte par jour. Ils en ont, légalement, le droit. Cette situation est emblématique de la fracture à l’œuvre dans le monde culturel. La décentralisation qui a permis depuis un demi-siècle de démocratiser l’accès du public aux œuvres, en particulier en régions, est mise à mal par la baisse des moyens et les structures labellisées font souvent comme elles peuvent, au détriment de la part consacrée à leur budget artistique, et en particulier à l’emploi des artistes. Ceux-ci voient depuis des années leurs contrats se raréfier, et leur niveau de vie fondre comme neige au four micro-onde. L’État et les collectivités s’avèrent incapables de financer le service public de la culture, dont ils ont fixé les lois et qu’ils participent à gérer : il faudrait

pour cela augmenter massivement les budgets alloués aux équipements culturels de province, afin que ceux-ci puissent cesser de dépenser l’essentiel de leurs budgets dans leurs charges de fonctionnement interne.

BUDGET RÉGIONAL POUR LES GROS

En région Provence-Alpes-Côte d’Azur, Christian Estrosi annonce, et fait voter, une augmentation sensible du budget de la Culture : 9% en plus ce qui, en des temps où la plupart des Villes et des Départements baissent les leurs, représente un effort louable. Mais le risque d’accroitre le déséquilibre entre les lieux et compagnies indépendantes d’un côté, et ce qu’il nomme lui-même « les gros opérateurs », est réel. En effet, en dehors des Centres Dramatiques Nationaux aucun établissement ou festival labellisé n’est contraint à un pourcentage d’emploi artistique. Les gros opérateurs de la Région sont nommés dans le budget 2017 : il


7 s’agit des Festival d’Aix, de Cannes et d’Avignon, des Rencontres de la photographie d’Arles, ainsi que des « acteurs culturels actifs à l’échelle mondiale et européenne ». Il est proposé par la Région « d’accroître le soutien » afin « d’optimiser leurs retombées pour le territoire. » Christian Estrosi répond, lorsqu’on lui demande si ce soutien fléché ne risque pas de déséquilibrer un territoire culturel historiquement construit par l’initiative individuelle d’artistes indépendants, que son programme culturel « n’est pas un menu, c’est à la carte. À côté des gros opérateurs il y a des dizaines d’aides apportées à telle ou telle association, qui s’élèvent de 5000 euros à 120 000 euros parfois. Nous sommes très attachés à ceux qui sont les porteurs d’un héritage, et il n’est pas question que les gros opérateurs soient aidés contre eux, mais bien pour les soutenir. » Si l’intention est claire, il n’est pourtant pas certain que cette augmentation des gros opérateurs profite aux artistes locaux. Les lieux institutionnels ont une gestion souvent vertueuse mais mise à mal par la diminution des subventions locales, et par un centralisme d’État qui affecte un pourcentage démesuré à la vie culturelle de la capitale (voir Zibeline 101)...

LES INDÉPENDANTS ÉVACUÉS

Que reste-t-il à la vie artistique non institutionnelle ? L’État demande aux compagnies, pour les subventionner régulièrement, de justifier d’un certain nombre de « dates » de programmation. Or les institutions produisent de moins en moins les compagnies indépendantes : ils font tourner leurs productions entre eux, et les compagnies se rabattent vers les lieux indépendants qui les accueillent à des prix dérisoires, parfois à la recette, leur offrant souvent des résidences qui diminuent les coûts mais ne les couvrent pas. Ils tournent de moins en moins, et se le voient reprocher. Pourtant, sans artistes, comment la culture vivante pourrait-elle survivre ? Détrompons-nous, elle le peut : il est possible d’imaginer une « culture » sans artistes et sans œuvres. Elle existe déjà, et rapporte. On projette des images dans des Carrières de Lumière, on fait jouer des amateurs dans des grand-messes participatives, on conçoit des expositions de photos de star dans un hôtel particulier aixois, on programme des grands concerts de DJ qui font de la musique tout seul, et on achète des spectacles internationaux déjà rentabilisés sur d’autres scènes. Les artistes professionnels locaux, s’il n’y a pas de garde-fous comme l’Accord de 2003, peuvent disparaître du paysage culturel. Leur réprobation est d’ailleurs à la mode, facilitée par leur manque de moyens qui parfois grève la qualité des œuvres qu’ils produisent. Ce qui justifie, à posteriori, les baisses successives de leurs subventions... Le serpent se mord la queue méchamment, et il est nécessaire qu’un choc survienne pour inverser la tendance : l’initiative des syndicats d’artistes à l’encontre des CDN pourra peut-être le provoquer. AGNÈS FRESCHEL

Marseille 2018 aime les gros

À

Marseille plus qu’ailleurs, la vie culturelle s’est construite autour d’initiatives individuelles d’artistes, fédérés souvent en groupe, en compagnies. Historiquement ce sont eux qui ont construit, souvent de leurs mains, les théâtres et lieux culturels, et qui ont obtenu à force de ténacité que la Ville, puis les autres collectivités jusqu’à l’État, les financent. Aujourd’hui ces lieux et compagnies disparaissent du paysage : le Théâtre Gyptis est devenu un cinéma associé à la Friche, le théâtre de Lenche est absorbé par le nouveau Théâtre de la Joliette, les Bernardines par le Gymnase-GTP-Jeu de Paume, le GRIM par le GMEM, l’espace Busserine est fermé par le Front national, Montévidéo et Karwan sont en danger... Le Toursky, le Théâtre Nono, le Klap de Michel Kelemenis, la Salle Musicatreize ou le PIC de Télémaque parviennent à proposer des programmations solides, mais ils déplorent les faibles rémunérations qu’ils sont capables de donner aux artistes. Quant aux galeries d’art contemporain et aux salles de musiques actuelles, leur économie est encore plus précaire... Aujourd’hui ce sont ces lieux institutionnels, aux directeurs nommés officiellement et souvent « nouveaux arrivants » dans la ville, qui sont aux commandes du projet Marseille Provence 2018. Il s’agit de prolonger MP2013, enfin ! L’initiative vient de la Chambre de Commerce, qui présidait déjà MP2013 : elle semble souffrir des mêmes défauts que sa sœur aînée, en y ajoutant quelques autres. Le comité de pilotage, tout d’abord, est composé exclusivement des « gros opérateurs », et d’une seule artiste : Macha Makeïeff, directrice de La Criée. Les autres ? Jean-François Chougnet, directeur du MuCEM, Alain Arnaudet, directeur de La Friche, Jan Goossens, directeur du Festival de Marseille, Bernard Foccroulle, directeur du Festival d’Aix, Pierre Sauvageot, directeur du Centre National des Arts de la rue, Dominique Bluzet, directeur du consortium GTP-Gymnase-Jeu de Paume-Bernardines, Francesca Poloniato, directrice de la scène nationale du Merlan, Gilles Bouckaert, directeur de la scène nationale de Martigues, Hugues Kieffer, coordinateur du festival Marseille Jazz des 5 continents, Pascal Neveux, directeur du Fonds Régional d’Art Contemporain, Sam Stourdzé, directeur des Rencontres d’Arles et Pierre Vasarely, président de la Fondation Vasarely. Même s’ils nous assurent qu’ils veulent associer toutes les forces du territoire, on note l’absence relative de la musique (l’Opéra de Marseille et le GMEM, Centre National de création, ne sont pas de la partie) et totale de la danse. Serait parce que des artistes, comme Angelin Preljocaj ou Emio Greco, dirigent les équipements ? On ne peut que déplorer l’absence des artistes marseillais historiques (d’Hubert Colas à Michel Kelemenis, des Minotiers à Musicatreize, des Nono à Télémaque...), et le peu de place faite aux femmes et des jeunes. Si Bernard Foccroulle envisage la production d’un opéra de Benjamin Dupé, c’est pour l’heure la seule œuvre qui est nommée. La faiblesse de la programmation de spectacle vivant de MP2013 risque, à cette aune-là, de se reproduire : comment peut-on envisager de construire une programmation artistique sans les artistes ? D’autant que les moyens seront insuffisants : les 5,5 millions de budget, qui viennent pour partie du reliquat de 2013, pour partie de subventions exceptionnelles et de la chambre de commerce, ne sont rien par rapport aux 93 millions de MP2013. Et entretemps les subventions culturelles du département 13, territoire de la manifestation, sont passées de 35 millions en 2013 à 25 en 2014, puis à 18 en 2017. Considérablement appauvries, les compagnies du territoire ne pourront rien proposer d’exceptionnel... et les gros opérateurs iront chercher ailleurs ! Il leur reste un peu moins d’un an pour préparer cette programmation exceptionnelle qui devrait se tenir de février à mai 2018. Espérons qu’ils sauront ouvrir leur comité, pour que ces six mois restructurent un paysage culturel en souffrance, plutôt que d’offrir un feu d’artifice sans lendemain. A.F.


8

politique culturelle

HUBERT COLAS, SA COMPAGNIE DIPHTONG, SON FESTIVAL ACTORAL, SONT AUJOURD’HUI DANS L’ILLÉGALITÉ. OCCUPANT MONTÉVIDÉO ALORS QUE LE BAIL EST PARVENU À SON TERME LE 31 DÉCEMBRE 2016. COMMENT EN EST-ON ARRIVÉ LÀ ?

La fin de Montévidéo ?

L

e lieu, la compagnie existent depuis 17 ans. Hubert Colas aime à rappeler les chiffres, dans une justification de son activité qui, temps libéraux obligent, amènent à soupeser l’activité artistique en termes économiques : « 10 salariés à temps plein, et dans l’année 250 artistes et techniciens employés par l’association, pour le festival Actoral et pour les créations de la compagnie dont trois actuellement sont en exploitation. Nous avons un poids, un impact humain, nous générons de l’activité », souligne l’artiste-directeur... La justification du bien-fondé de l’existence de Montévidéo ne devrait pas avoir à passer par de tels arguments : qui oserait contester l’évidente nécessité de Montévidéo et d’Actoral, qui militent depuis 17 ans pour les écritures contemporaines, produisent des spectacles créés en région et naviguant dans le monde, accueillent des artistes en résidence, programment régulièrement des rendez-vous publics... Qui oserait contester la qualité artistique de l’auteur-metteur en scène Hubert Colas, la pertinence de sa programmation ? Mais, comme nombre d’acteurs marseillais, il n’a pas été placé par les collectivités à la tête d’un équipement ou d’un festival existant : il l’a construit, dans des années plus fastes, alors que la Ville de Marseille comme beaucoup d’autres manquait de lieux culturels, et abondait volontiers aux

initiatives des artistes constructeurs. Ces années ont passé, et Hubert Colas a de plus en plus de mal à payer son loyer, ses salaires, avec des charges en hausse constante et des subventions qui, petit bout par petit bout, régressent.

FIN DE COLOC, FIN DE BAIL

L’histoire de Montévidéo est cependant plus complexe : investi en 2001 par Hubert Colas et Jean Marc Montera (GRIM), il s’agit d’un lieu partagé depuis son origine. Mutualisé bien avant que cela soit la mode, et non pas comme souvent de la nécessité de regrouper les forces, mais de la volonté de travailler ensemble. Mais le GRIM et ses musiques improvisées, en difficulté financière, lâché par l’État et sommé de s’associer avec un Centre National ou de disparaître, a fusionné avec le GMEM, et déménagé à La Friche (voir Zibeline 102). Diphtong et son festival Actoral doivent donc aujourd’hui assurer seuls un loyer annuel de 70 000 euros, augmenté de 20 000 euros de fluides (les charges locatives, l’électricité...) pour les 9 lieux de résidences, les salles de travail et d’accueil public, le bar et les bureaux. Même si le départ du GRIM amènera des économies de location des lieux supplémentaires de répétition, Diphtong aura

du mal à assumer seul ce loyer. D’autant que le propriétaire veut récupérer les lieux. L’affaire n’est pas nouvelle, Montévidéo alerte la presse et les collectivités depuis plusieurs années. Mais cette fois le bail est échu, et la situation semble inextricable. Sauf que plusieurs lois protègent cette salle de spectacle dont la destination culturelle ne peut être changée sans accord du ministère de la Culture : l’acquéreur devra y prévoir un lieu culturel de même surface, même s’il construit des appartements au-dessus. Par ailleurs, le propriétaire se doit de fixer un prix ferme et définitif au locataire actuel, qui a priorité sur l’acquisition. Le quartier est cher, les promoteurs nombreux qui voudraient en faire un immeuble d’habitations... mais le Ministère, le SYNDEAC, les collectivités territoriales ainsi que la Mairie de Marseille et la mairie de secteur répètent leur attachement à ce lieu, et leur volonté d’y maintenir Diphtong et Actoral. Si cette volonté reste entière, le propriétaire devra vendre en priorité à ses locataires, à la Ville si elle veut se porter acquéreur pour y loger Diphtong, ou en tout état de cause à un propriétaire qui devra garder la destination culturelle du lieu...

À Montévidéo, la cour vue de haut © Pierre Gondard


"Nous ?"

LE COCHE LOUPÉ

L’histoire semble se répéter, et on se souvient comment la Minoterie a vu un beau matin sur ses murs un permis de construire inattendu, qui l’expulsait du lieu que les Minotiers avaient construit de leurs mains... Pour les reloger, la mairie a dû bâtir le Théâtre de la Joliette en toute hâte. La solution pour Montévidéo pourrait être différente : soit la mairie achète le lieu et l’État et les collectivités territoriales investissent pour que les règles de sécurité y soient enfin respectées (et que le public puisse être accueilli au delà de 50 personnes, ce qui n’est pas le cas actuellement) ; soit chacun augmente suffisamment les subventions, et garantit le prêt que Diphtong devra obtenir pour acheter le lieu elle-même. Car les 70 000 euros de loyer économisés ne suffiront pas à régler les mensualités d’un crédit pour un bien (sur)estimé à 4 millions d’euros, et les recettes de Montévidéo devront augmenter considérablement... Là encore, un coche a été manqué il y peu de temps : le projet de départ du GRIM, qui met de toute façon Diphtong, seul locataire, dans une situation difficile, était prévu de longue date ; la décision de vendre du propriétaire aussi. Lors du départ d’Alain Fourneau et Mireille Guerre du Théâtre des Bernardines, il a été envisagé qu’Hubert Colas en prendrait la succession : spécialiste des écritures contemporaines, il aurait pu construire une programmation en cohérence avec son voisin le Gymnase, ne pas devenir SDF, trouver un équilibre financier entre les salles de répétition, de résidence et de création de Montévidéo, et la salle de spectacle. Actuellement d’ailleurs le Festival Parallèle (voir p 18), programmé aux Bernardines, est accueilli à Montévidéo pour ses soirées, sa logistique, ses répétitions et expositions. Les lieux se complètent parfaitement... « J’ai créé 42 spectacles depuis que je suis metteur en scène. Dont 38 à Marseille. » Hubert Colas justifie encore sa présence, sa volonté d’être là et d’y créer. Et lorsqu’on lui demande s’il ne désire pas plutôt partir, prendre la direction d’un établissement labellisé hors de Marseille, il refuse. « Marseille use les corps et les épuise. J’ai pensé mon projet aux Bernardines, parce qu’on m’avait demandé de le faire. Il me paraissait juste. J’ai dû y renoncer, et cette blessure n’est pas pansée. Mais je ne quitterai pas Marseille. » Qui a bien de la chance d’avoir un artiste de ce talent, et si fidèle. Un de plus qu’il faudra veiller à ne pas laminer.

Du 1er au 9 février 2017 « Que faire de l’avenir, quelle société, quelle vie collective, voulons-nous vraiment ? Notre existence peut-elle se passer d’un "Nous"? »

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10 politique culturelle

Capitaine Mizrahi

Zibeline : Depuis le 23 décembre 2016, vous êtes officiellement le repreneur des Variétés, un repreneur très attendu. Vous êtes le PDG de la société Ymagis, donc un industriel du cinéma. Pourquoi devenir un exploitant de salles ? Et pourquoi ce cinéma ? Jean Mizrahi : Ce sont deux choses très différentes. Dans le cadre d’Ymagis j’ai fréquenté beaucoup de salles car la société leur apporte de nombreux services. Je me suis pris de passion pour le métier d’exploitant et quand j’ai vu que Les Variétés était un peu à l’abandon, j’ai décidé de le remettre sur ses rails et de lui redonner une nouvelle vie. M. Moravioff était un de nos clients. Je suivais la situation de près car on avait une créance assez significative sur sa société et je me suis positionné pour reprendre ce cinéma qui partait à vau-l’eau. Vous vous retrouvez patron d’un cinéma en grande difficulté mais avec un fort potentiel, en plein centre d’une ville qui ne compte que 9, 6 fauteuils pour 1000 habitants. Quel est votre projet précis pour ce cinéma qui a perdu son label Art et essai en 2011 ? Oui, une ville sous-équipée, en effet. Le Label art et essai a été perdu car l’exploitant ne payait pas ses taxes, donc n’était plus éligible. Or le cinéma continuait à passer des films Art et Essai. Le projet comporte plusieurs volets : le premier est déjà mis en œuvre, puisque j’avais commencé à m’occuper du cinéma avant même la reprise officielle : il s’agit de programmer à nouveau des films qui ont une audience, de retrouver l’accès aux films auxquels ce cinéma à fort potentiel peut prétendre. Sur les quelques films sortis ces dernières semaines, les Variétés ont une des meilleures positions en province. Deuxième volet : j’ai décidé de refaire les salles. Ce cinéma n’a pas été entretenu. Des travaux vont démarrer au cours du 1er semestre : tentures, moquette, sièges, augmentation de la taille des écrans quand c’est possible et amélioration de la projection et du son pour une expérience de cinéma de très grande qualité. Troisième volet : il faut élargir l’activité de l’animation, préservée par une équipe qui a continué à se battre et reprendre les films de patrimoine, les films pour la jeunesse, les

UN NOUVEAU CAPITAINE VA DIRIGER LES VARIÉTÉS, LE CINÉMA DE LA CANEBIÈRE. ZIBELINE A RENCONTRÉ JEAN MIZRAHI, INDUSTRIEL DU CINÉMA CINÉPHILE QUI SE PRÉSENTE COMME UN PATRON RIGOUREUX, PRAGMATIQUE ET CONFIANT !

séances spéciales, les avant-premières, tout ce que le cinéma ne faisait plus. Donc essayer de retrouver les labels « Recherche et Découverte », « Jeune public » et « Patrimoine et Répertoire » ? Exactement. C’est un cinéma qui a toutes les raisons de les avoir. Il les a perdus à cause de la mauvaise gestion. Le cinéma va-t-il fermer pour les travaux ? Non ! On refera les salles une par une. L’idée est d’en ajouter une 6e ce qui donnera plus de puissance sur le marché et la possibilité de jongler avec une offre qui s’élargit actuellement. On va réaménager le hall pour le rendre plus chaleureux, avec, dans un 2e temps, une offre de boissons et de repas. L’idée est que les Variétés redevienne un centre de rencontre et de discussion pour le public marseillais. Vous parlez d’améliorer la qualité de la projection. Vous allez donc l’équiper avec le système Eclair Color ? Eh oui, je jongle avec mon autre casquette d’Ymagis ! J’essaie de convaincre mes techniciens de venir à Marseille installer un projecteur et si tout se passe bien, ce sera la semaine prochaine : une salle Eclair Color à Marseille ! Pourriez-vous expliquer à nos lecteurs en quoi cela consiste ? Il s’agit d’un nouveau procédé de traitement de l’image élaboré avec les équipes d’Eclair Color et de CinemaNext, deux filiales du groupe français Ymagis, avec un meilleur rapport de contraste, des noirs plus profonds, des blancs plus lumineux, des détails plus précis, donc une image plus riche, qui ressemble plus à ce que voit l’œil humain dans la réalité. On l’a montré à des artistes, chefs opérateurs, réalisateurs, tous emballés par le procédé. On a déjà équipé 14 salles en France. J’espère que les Variétés sera le 15e, le 1er dans le Sud. Est-ce que le fait que ce procédé soit développé par Ymagis est entré en jeu pour votre décision de reprise des Variétés ? Pas du tout. C’est un vieux rêve ! Je suis un

amoureux du cinéma depuis que je suis gosse. Étudiant, j’ai passé des journées d’une salle à l’autre et j’ai une culture cinématographique assez large. Eclair a restauré plus de 700 films. On va faire des séances spéciales avec des films du patrimoine dont certains sont des inédits, pas vus depuis leur sortie en pellicule. Eclair Color est un procédé de très bonne qualité et assez accessible financièrement, je veux que les Variétés soit un des 1ers à en bénéficier. Et qu’en est-il du César, les salles de Castellane jusqu’alors associées aux Variétés ? Le bail est en cours de préparation. C’est une procédure qui devrait aboutir courant janvier. Ce cinéma a une place particulière dans le paysage cinématographique marseillais : travail avec les festivals, les associations, les cinéastes de la région. Programmation de films du cinéma indépendant… Est-ce que vous allez travailler dans le même sens ? Bien sûr. Je pense que c’est très important qu’un cinéma de cette qualité, qui est un phare pour l’art et essai, ait une relation étroite avec la création dans la Région. Sinon ça n’a pas de sens ! Proposerez-vous toujours les conditions particulières qui étaient octroyées aux festivals accueillis par Les Variétés ? Il y aura des festivals aux Variétés, mais on va regarder au cas par cas, parce que je ne connais pas encore les conditions faites à chaque festival. Soyons clair : l’Art et Essai est un métier difficile économiquement. Il y a, au niveau national, désaffection des films d’auteur pour des films plus généralistes. Néanmoins, il semble qu’à Marseille il existe un public pour ce cinéma. Je souhaite l’équilibre économique qui, seul, offre la garantie de la pérennité des Variétés. Mon premier objectif est la stabilité financière qui permettra les « écarts ». Il s’agit d’obtenir un équilibre entre l’entité commerciale et la promotion des créateurs. Il faut espérer que ça n’empêchera pas certaines manifestations fragiles d’exister ! Le risque jusqu’à présent était que ça s’arrête


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Jean Misrahi © Annie Gava

complètement ! Je n’ai pas l’historique exact des manifestations, mais je ne pense pas qu’elles représentent un volume d’heures tel qu’elles ne puissent trouver leur place. En ce qui concerne l’équipe des César-Variétés, qui s’est énormément investie alors même que les salaires n’étaient pas versés, que prévoit le plan de reprise ? On garde l’essentiel de l’équipe, soit 11 personnes sur 15. Evidemment, si le César rejoint Les Variétés. Dans le cas contraire, ça peut nécessiter des réajustements. L’équipe pourra-t-elle poursuivre son travail d’animation et l’organisation d’événements ? Oui, ce travail sera même développé ! Avec certainement des changements de méthode visant à plus d’efficacité. Pour faire redémarrer la machine, je compte m’appuyer sur les personnels qui ont eu le mérite de résister à la tourmente et ont prouvé un vrai attachement au cinéma. Comment ça se passe avec les distributeurs dont certains n’ont pas été payés pendant des années ? On est sur une nouvelle société, pas celle qui était défaillante. J’ai repris le cinéma, son fonds de commerce, pour redémarrer à zéro. Du coup, pour les distributeurs, il n’y a pas d’historique de mauvais paiements. Aujourd’hui, ils sont face à moi, ils me connaissent, connaissent mes méthodes de travail et n’ont aucune inquiétude, ils savent qu’ils seront payés !

Quels sont vos rapports actuels avec la Mairie de Marseille qui est votre bailleur et à qui M. Moravioff devait beaucoup d’argent ? Là encore les dettes précédentes ne concernent pas la nouvelle société. Je suis allé les voir. Ils sont plutôt rassurés par cette reprise. En avril 2015 a été voté en conseil municipal l’accord pour la création d’Artplexe, un complexe cinématographique de 7 salles avec parking, galerie et fleuriste en haut de la Canebière, sur l’emplacement de l’ancienne mairie de secteur, avec l’ambition d’obtenir le label Art et Essai. Comment envisagez-vous la cohabitation/ collaboration avec ce « concurrent » potentiel ? Pour l’instant ils ne sont pas là ! Si le projet se réalise, il faudra que chacun trouve sa place. De toute façon sur Marseille il y a une pénurie d’équipements. Même très près des Variétés géographiquement, il y a la place pour des programmations complémentaires. De plus, je doute qu’avec les coûts de construction et toutes les contraintes économiques qui pèsent sur ce projet, Artplexe puisse être exclusivement art et essai : il aurait bien du mal à équilibrer ses comptes... La maire de secteur, Mme Bernasconi, a souhaité une redynamisation de La Canebière par des animations organisées le dernier dimanche de chaque mois. Les associations avaient posé comme condition à leur participation que les projections se fassent aux Variétés. Vous inscrirez-vous dans ce projet « Travelling Canebière » ?

J’ai rencontré Mme Bernasconi, et bien sûr tout projet qui tend à faire de La Canebière un axe à plus forte valeur ajoutée ne peut qu’être positif pour Les Variétés : on va travailler avec la mairie et les associations sur ce coup. Quelle sera votre stratégie pour que le public découragé par les mauvaises conditions de projection et par la pénurie de films retrouve le chemin des Variétés, y compris ceux qui l’ont déserté pour le Chambord dans le 8e ? Le Chambord n’a pas la capacité d’accueillir tous les films. La programmation y est plus généraliste d’ailleurs. Les films qui ne passaient plus sur Marseille vont à nouveau être à l’affiche aux Variétés et les salles seront rénovées. Dès que le public verra les résultats, il reviendra très vite. D’ailleurs, un mouvement a déjà commencé : les caissiers m’ont confirmé que ça faisait 2 ans qu’ils n’avaient pas vu autant d’affluence ! On a programmé Your name, un dessin animé japonais de Makoto Shinkai, et c’est le meilleur résultat de la Région Sud pour les entrées ! Après Marseille comptez-vous acheter d’autres cinémas ? Oh là là ! Non ! Attendez, là il y a déjà beaucoup de travail ici ! ENTRETIEN RÉALISÉ PAR ANNIE GAVA ET ÉLISE PADOVANI


12 événements

Vers la tragédie

© C. Raynaud de Lage

François Cervantes crée au Merlan, scène nationale de Marseille, un Médée à trois voix. De femmes ! Zibeline : Qu’est ce qui vous attire dans cette histoire d’infanticide ? François Cervantes : Ma pièce s’intitule Face à Médée. C’est un dialogue autour de ce mythe, de la fascination et de l’horreur de Médée. Il s’agit d’une adaptation qui remonte à la source du mythe, sans s’inspirer de textes précis. D’un tressage entre ce que les comédiennes disent d’elles dans un rapport frontal avec le public, qui met au jour ce qu’elles ont à voir avec cette femme qui reste hors de vue. Et en quoi vous concerne-t-elle ? J’ai voulu entrer dans le territoire de la tragédie. Dans son mystère. Qui est l’envers de celui des clowns sur lequel je travaille depuis longtemps. Il y a un mystère dans le tragique, quelque chose qui oblige le comédien à plonger en lui-même pour y trouver des matériaux insoupçonnés. Et puis ma fascination pour Médée n’est pas neuve, ma mère, qui était agrégée de lettres classiques, traduisait ce texte, et je l’ai en quelque sorte toujours porté en moi. Mais aucun texte ancien n’apparait dans le spectacle. Vous inspirez-vous de faits divers ? Non plus. L’adaptation consiste à tout reporter à notre époque, tout est contemporain. Ces femmes ne parlent pas d’un mythe. Le choc de cette histoire reste hors de vue, mais présent en écho, juste à côté, comme s’il venait d’advenir.

Cherchez-vous à comprendre comment on peut tuer ses enfants ? Oui, mais pas seulement. Plutôt comment on succombe, littéralement, à la passion. Dans le mythe l’amour n’est pas un choix, il est imposé à Médée par une force extérieure, par Aphrodite. Aujourd’hui encore l’amour intervient dans les destins, sa force permet le brassage, le métissage, la rencontre de l’autre, qui n’a jamais été autant à l’œuvre que de nos jours. Médée n’est pas seulement une femme abandonnée, son nom nous dit qu’elle médite, qu’elle est médecin aussi, qu’elle connait les poisons. Elle est reine d’un peuple primitif : les Grecs se pensaient au centre du monde et étaient fascinés par les confins, les autres cultures, l’existence du primitif. Jason n’abandonne pas que son épouse, c’est tout un peuple qu’il trahit, et c’est tout un peuple qu’elle venge. Le fait qu’elle soit étrangère est donc important. Oui, très. C’est cela que les acteurs doivent chercher, cette étrangeté qui est en eux, en nous. Ces forces qu’on ne connait pas encore. Les forces féminines ? Avoir porté un enfant 9 mois et porter la main sur lui, c’est se tuer. En cela son acte est féminin, et pose la question personnelle du sacrifice. Mais son geste sort complètement de l’intimité, il est aussi public : elle incendie la jeune mariée, tue son père, pose cet acte sur

la place publique un jour de fête. En fait j’ai voulu retourner au mythe original, pas à ses écritures. Mais j’ai été profondément marqué par l’assassinat des enfants dans Dogville de Lars Von Trier, et aussi par la Médée de Pasolini. Ces femmes me touchent comme s’il s’agissait d’un autoportrait. Quand j’écris j’ai l’impression d’être une femme, je porte quelque chose qu’on a mis en moi et que j’aide à venir au monde. Si le meurtre et Médée ne sont pas présents sur scène, quel sera le décor ? Les trois femmes, sur un plateau dépouillé. Tout vient d’elles. Jusqu’à la lumière. On ne les quitte pas du regard. On a enlevé tous les éléments importants de scénographie qu’on avait prévus, pour des choses plus fines, et j’en suis heureux... ENTRETIEN RÉALISÉ PAR AGNÈS FRESCHEL

Face à Médée sera créé au Théâtre du Merlan, Marseille, les 19 et 20 janvier (voir p.38) Texte et mise en scène François Cervantes, avec Anna Carlier, Hayet Darwish et Catherine Germain 04 91 11 19 30 merlan.org


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Ouvrez grand vos Petites Oreilles

L’Histoire du soldat © Agnès Mellon

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ix salles de spectacle accueillent, à Marseille, la 2e édition des « Quartiers d’hiver » de Grandes Musiques pour Petites Oreilles, un festival récurrent, spécialement conçu par l’ensemble Télémaque afin de rendre accessible la musique dite « contemporaine » aux jeunes générations. Quatre spectacles sont proposés et jouent sur l’interdisciplinarité, marient la musique au dessin, au cirque, au théâtre, au cinéma. Mostrarium est une création (production et commande musicale du GMEM-CNCM-Marseille, coproduction Théâtre Massalia et ABD Gaston Deferre, avec le soutien du PIC- Ensemble Télémaque) où se mêlent dessin, manipulation de figurines, vidéo, théâtre d’ombres, musiques instrumentale et électroacoustique pour un voyage étrange et poétique en compagnie de la plasticienne Loïse Bulot et du compositeur Nicolo Terrasi (dès 5 ans). Deux nouvelles créations de l’Ensemble Télémaque sont également à l’affiche : un ciné concert drôle et décalé autour du film

d’animation de Marek Beneš (2016), Les nouvelles aventures de Pat et Mat (partenariat avec le cinéma L’Alhambra, dans le cadre du festival Télérama Enfants), présente des musiques originales de Karl Fiorini, Raoul Lay, Olivier Penard, Luca Macchi et Béatrice Thiriet (dès 3 ans) ; un chef-d’œuvre d’Igor Stravinski, L’Histoire du Soldat (créé il y a bientôt cent ans sur fond de guerre 1914/18), est dirigé et mis en scène par Raoul Lay (coproduction Archaos, Pôle National Cirque Méditerranée) avec sept instrumentistes, la comédienne Agnès Audiffren et le comédien-funambule Thibault Mullot (dès 8 ans), dans le cadre de la Biennale Internationale des Arts du Cirque (voir p 16). Le Chevalier Déconcertant enfin,

spectacle créé l’an dernier autour de la figure du Baron de Münchhausen ré-incarnée par l’écrivain Charles Eric Petit dans le corps et l’esprit mythomane d’un écolier d’aujourd’hui (joué par Agnès Audiffren sur une musique de Raoul Lay) est repris pour une série de représentations à ne pas manquer ! (dès 9 ans). JACQUES FRESCHEL

Grandes Musiques pour Petites Oreilles 27 janvier au 26 février Mostrarium 27 & 28 janvier Théâtre Massalia, Marseille L’Histoire du Soldat 1er février Théâtre du Centaure, Marseille Le Chevalier Déconcertant 17 février PIC, Marseille 18 & 19 février Théâtre La Cité, Marseille Les nouvelles aventures Pat et Mat 25 février Cinéma l’Alhambra, Marseille 26 février Château de la Buzine, Marseille 04 91 43 10 46

ensemble-telemaque.com

Dans les vallées © Olivier Milchberg

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epuis 2009 fleurissent les Week-Ends Musicaux, grâce à l’Espace Culturel de Chaillol, durant toute une saison de concerts de janvier à juin : quatre concerts sont présentés dans quatre vallées du Gapençais par groupe invité. Chaque formation rivalise en qualité, variété, inventivité. Le début d’année 2017 sera ainsi marqué par la délicate virtuosité des cinq musiciens d’AKSAK, complices depuis vingt-sept ans, unis par leur fascination pour la musique des riches traditions musicales des Balkans. Christiane Ildevert (contrebasse), Isabelle Courroy (flûtes kaval), Lionel Romieu (guitare, mandole, oud, trompette, voix), Patrice Gabet (violon, saxophone alto, voix) et Philippe Franceshi (clarinette, chant) composent, arrangent, interprètent avec tendresse et

talent un répertoire à la confluence de multiples influences. On goûtera avec passion l’avant-première de leur dernier album, Les Artisans du Temps, enregistré à l’automne dernier et qui paraîtra au printemps prochain. Un air de fête s’installera du 26 au 29 janvier, tour à tour à l’église de La Beaume, la Salle des Fêtes de Chorges, la Maison de la Vallée de Pont du Fossé et la Chapelle des Pénitents

de Gap. Volutes acrobatiques, mélodies endiablées, sages mélopées, rythmes pour danser ou rêver dans l’écrin des vallées du Gapençais… (et au tarif tout doux de 8€, avec gratuité jusqu’à 12 ans). MARYVONNE COLOMBANI

26 janvier Église, La Beaume 27 janvier Salle des Fêtes, Chorges 28 janvier Maison de la Vallée, Pont du Fossé 29 janvier Chapelle des Pénitents, Gap festivaldechaillol.com


14 événements

Nurith Aviv en collaboration avec Emmanuelle Laborit, Signer en langues, 2016, film Production MuCEM - 24 images © Nurith Aviv, 2016

Après Babel, traduire, la nouvelle exposition du MuCEM, est enthousiasmante : profonde comme la pensée, précieuse comme une exception, et belle d’objets rares et d’œuvres qui attrapent l’esprit d’aujourd’hui

Traduire la pensée du monde

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l était une fois une Tour, et un peuple uni qui subit un châtiment étrange. Dieu pour les punir d’être ensemble et de construire les sépara, et leur offrit les langues. Babel, babil, barbare, bla-bla, ils inventèrent des mots pour désigner les langages des autres, et répandirent la malédiction de la Tour, dont la destruction les avait cloués au sol et séparés de la langue de Dieu. L’exposition conçue par Barbara Cassin commence par cela, le mythe et ses déclinaisons, ses traductions, ses illustrations, ses transpositions artistiques. Le Babel de Borges, qui est une bibliothèque infinie contenant tous les livres possibles, la Tour de Tatline, utopie de la 3e Internationale, les effondrements de Yang Yongliang qui nous rappellent d’autres tours écroulées... Dans une douche sonore on entend des traductions, différentes, des quelques versets de la Bible racontant comment les hommes parlaient tous « d’une seule lèvre ». Étaient-ils finalement silencieux ?

La salle suivante montre le désir constant de retrouver une langue universelle, akkadien diplomatique, pictogrammes lancés dans l’espace, esperanto, globish. Il apparaît sur des tablettes d’argiles, des affiches, des sigles, des mosaïques. Au revers une autre constante historique et universelle : la langue de l’autre côtoie la représentation d’une étrangeté barbare, ou de l’incompréhension. Zineb Sedira passe en trois écrans de la langue de sa mère à celle de sa fille, qui ne se comprennent pas. Car traduire est une nécessité, et parler plusieurs langues une richesse : des étudiants de la SATIS ont filmé les conversations de marseillais plurilingues, qui changent de langue selon la teneur, affective ou factuelle, de ce qu’ils disent. Le parcours de l’exposition est passionnant, et peut se faire à plusieurs vitesses : un dispositif interactif retrace les parcours de traduction de Tintin (traduit en plus de langues que la Bible !), du Capital de Marx ou d’Aristote, Euclide et

Galien, et montre par quels canaux les pensées se sont répandues. On pourrait y passer des heures ! Et des livres enluminés nous font entrer dans la complexité de la traduction : les textes sacrés et leurs commentaires sont-ils la transcription du verbe divin, de la parole des prophètes ? Luther et Cyrille inventent des langues pour répandre les religions chrétiennes, on représente les interprètes, et Moïse recevant les Tables de la Loi, parfois cornu, parfois transpercé de lumière comme Chagall le voit... Erreurs de traduction ? Peu importe, les représentations existent, comme celles de l’arbre de la connaissance, pommier ou figuier, ou champignons hallucinogènes... et la pensée circule. La dernière partie de l’exposition s’attache aux intraduisibles, à ce qui résiste dans chaque langue. Un homme à chapeau se reflète en lapin (Métamorphose de Markus Raetz), une installation littérale fait pleuvoir des hallebardes, des cordes, cats and dogs et


15 canivete devant un film de Nurith Aviv qui illustre avec brio la connotation : Emmanuelle Laborit, dans les différentes langues des signes nationales, démontre comment chaque pays conçoit les femmes, l’homosexualité, la culture... Dans la tête en France, dans la danse en Inde, dans l’imbrication au Japon ! C’est toute une histoire du langage qui est là, matérialisée en un parcours simple, riche des objets exposés et de la pertinence de la pensée. Un hic ? Sa richesse même, l’affluence habituelle au MuCEM et le peu d’espace consacré (un demi-étage) empêchent parfois le recul nécessaire, ou l’intimité avec certaines œuvres qui sont comme des reliques. Et d’entendre les sons, de pouvoir s’emparer vraiment des casques et des dispositifs interactifs... Évitez donc les moments d’affluence !

Pour prolonger l’exposition Le 16 décembre, Barbara Cassin invitait plusieurs spécialistes à présenter le fruit d’un workshop international consacré aux « Intraduisibles des trois monothéismes », à commencer par les noms mêmes de Dieu, qui débouchera sur la publication d’un dictionnaire. L’intraduisible, c’est donc ce quelque chose « que l’on ne cesse pas d’essayer de mieux traduire », et qui selon la philosophe ressemble à un symptôme, dont la définition est précisément d’être insaisissable... D’ailleurs, traduire vraiment est-il possible ? Vouloir retrouver une parole véritable, initiale, est illusoire. La traduction est une

représentation, plus ou moins fidèle, plus ou moins complète, infinie comme la Bibliothèque de Babel. Mais elle est, comme toutes les représentations, indispensable pour comprendre le monde : il s’agit donc de « penser entre les langues ». Ces questions seront débattues lors de deux cycles d’entretiens où l’on se demandera comment Traduire la parole de Dieu (les 25, 26 et 27 janvier) et Faire avec les différences (les 2 et 3 février). En complément, le catalogue édité par Actes Sud présente des réflexions subsidiaires passionnantes ; sur la représentation théâtrale Renaissante, réapparue en traduisant Sophocle au XVe siècle ; sur le voyage des Mille et une Nuits ; sur le silence de Babel ; sur le doublage au cinéma... Autre approche, par le spectacle vivant : autour des intraduisibles, le musicien Ahamada Smith viendra slammer le 21 janvier, accompagné de Christophe Isselée et Emmanuel Cremer. Dans la foulée, le groupe d’intervention artistique urbaine Ici Même proposera de jouer avec les mots au sens propre et au sens figuré.

Autres événements L’Université populaire du café poursuit ses sessions : au MuCEM le 20 janvier, avec Zeev Gourarier, qui évoquera les lieux de sociabilité que sont les cafés, le lendemain à l’Ecomotive avec l’agro-économiste Alfred Conesa pour évoquer le commerce équitable face aux grands groupes industriels. Dès le 21 janvier et pour un mois, on pourra découvrir

une relecture des collections du musée par l’étonnant circassien -autant que plasticienJohann Le Guillerm (dans le cadre de la Biennale internationale des arts du cirque, voir p16). Le 28 janvier, une rencontre est organisée par le Festival Parallèle (voir p 18) avec sa directrice, Lou Colombani, et Daniel Blanga-Gubbay, chercheur en philosophie politique, sur la puissance vitale des marges. Le public est invité, toute une après-midi durant, à dialoguer avec les artistes programmés lors de la manifestation. Autre rencontre, scientifique cette fois : un séminaire en entrée libre (sur inscription : i2mp@mucem.org) aura lieu le 9 février sur le thème de La fabrique des images dans les mondes arabe et musulman contemporains. AGNÈS FRESCHEL ET GAËLLE CLOAREC

Retrouvez sur notre WebRadio Zibeline la Traversée mensuelle du MuCEM, avec sa Chronique des libraires, le groupe Radio Babel Marseille, le premier spectacle du nouveau cycle Construire Détruire Reconstruire, No se registran conversaciones de interés, signé Roger Bernat, les Échappées Foraines, et une visite guidée de son exposition par Barbara Cassin.

Après Babel, traduire jusqu’au 20 mars MuCEM, Marseille 04 84 35 13 13 mucem.org

L’Occident face à ses responsabilités

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e cycle Les Mardis de la Villa Méditerranée accueille Antoine Sfeir, en partenariat avec Euromed-IHEDN, une association qui promeut une meilleure connaissance de la région euro-méditerranéenne, notamment sur les questions de défense et sécurité. Le journaliste et politologue, spécialiste du monde arabe et musulman, interviendra sur les Responsabilités et reculades occidentales au Proche et Moyen Orient comme en Afrique du Nord. De quoi débrouiller un peu l’écheveau historique, religieux et géopolitique de ces territoires, où « les populations arabo-méditerranéennes ont de plus en plus l’impression de subir une véritable « croisade » et ont tendance à croire que l’État islamique, autoproclamé et terroriste, est une résistance au néo-colonialisme à peine masqué de l’Occident ». Sans oublier,

évidemment, la dimension économique, absolument stratégique dans ces zones riches en hydrocarbures. L’intervenant reviendra plus précisément sur l’invasion de l’Irak par les États-Unis en 2003, sur le cas de la Lybie, sur ce que l’on a appelé les printemps arabes, et évidemment, sur l’essor et l’évolution de Daech. Attention, l’entrée de la conférence est payante (10 € / Accès gratuit pour les membres d’Euromed-IHEDN et les étudiants). G.C.

Responsabilités et reculades occidentales au Proche et Moyen Orient comme en Afrique du Nord 7 février Villa Méditerranée, Marseille 04 95 09 42 70 villa-mediterranee.org Antoine Sfeir © Hannah-Opale


16 événements

fort incontournable de la saison Les Élancées, Temps culturelle de Scènes&Cinés, le Festival

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cènes&Cinés affirme encore une fois sa volonté de faire de la culture un vecteur essentiel du bien-vivre ensemble. Cette « nécessité de cohésion sociale, essentielle à la vie culturelle », selon les mots de Nicole Joulia Présidente de Scènes&Cinés, irrigue les six communes du territoire -Istres, Miramas, Fos, Port-Saint-Louis, Grans et Cornillon-, permettant la circulation des spectacles et des publics. Une vie culturelle qui a trouvé son rythme au fil des années, nettement accéléré lors des Élancées ! La programmation, concoctée par Anne Renault, directrice artistique du Festival (le seul à intégrer la programmation de la Biennale internationale des arts du cirque, voir ci-contre), illustre bien cette volonté de mettre en avant « l’art du geste », dansé ou circassien. Les productions internationales promettent de grands et beaux moments, et certaines

d’entre elles ne sont pas des inconnues pour les fidèles du Festival : la Cie Aracaladanza revient avec Vuelos, qui donne vie aux œuvres de Léonard de Vinci dans un feu d’artifice de musiques, de couleurs et de lumières ; l’incontournable Cie québécoise Les 7 doigts présente deux spectacles : Triptyque, qui réunit danseurs et acrobates pour explorer le mouvement et la gravité à partir de 3 chorégraphies de Marie Chouinard, Victor Quijada et Marcos Moreau, et Réversible, leur dernière création ; québécois aussi, les 6 artistes de la Flip Fabrique revisitent les disciplines traditionnelles du cirque avec beaucoup d’humour ; le Groupe acrobatique de Tanger, emmené par Abdeliazide Senhadji (de la Cie XY), propose haute voltige et pyramides ascensionnelles dans Halka, aux rythmes de chants et de percussions... Mais le Festival soutient aussi, depuis ses débuts, la création artistique locale : Michel

Halka, Groupe acrobatique de Tanger © Christian Ganet

dans un partage de curiosités

Les Elancées installe sa 19e édition dans les théâtres et chapiteaux du territoire de Ouest Provence

La danse est d’ici Du chaos naissent les étoiles © Nabil Hemaïzia

Amériques ou l’Afrique sur le thème « Identités et Racines ». Aujourd’hui Isabelle Martin-Bridot privilégie « la plus grande ouverture esthétique possible, dans un esprit de partage, et un désir d’exigence ». Éclectique et internationale, Les Hivernales convie à sa table Carolyn Carlson qui s’adresse aux enfants dans sa fable écologique Seeds et son petit personnage virtuel Elyx, et les franco-allemands Malgven Gerbes et David Brandstätter pour leur pièce documentaire AIR. Il fait les yeux doux à l’italien Daniele Albanese qui lui réserve sa première en France de VON, pièce à la gestuelle très physique, et à Yvann Alexandre qui dévoile sa toute nouvelle création Les Fragments immobiles. Mais ce qui frappe les esprits dans cette programmation, c’est son

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fficiellement à la barre du CDC – Les Hivernales d’Avignon depuis novembre dernier (Zib’101), Isabelle Martin-Bridot signe son premier festival, 39e du nom. Au menu 33 représentations, 16 stages, des projections, des expositions et un colloque pour un festival qui « se joue des genres pour présenter la danse contemporaine dans toute sa diversité ». Soit un revirement à 360 degrés au regard des précédents focus sur l’Asie, les

ouverture délibérée aux voisins les plus proches tels Christian Rizzo, directeur du CCN de Montpellier, qui présentera sa création 2016 Le Syndrome Ian (à lire sur journalzibeline.fr) et le BNM avec Le corps du Ballet national de Marseille (à lire sur journalzibeline). Comme aux artistes installés en région, nouvelle preuve de l’existence d’un véritable vivier chorégraphique made in Provence. Cette année Jean-Antoine Bigot (Marseille) a jeté son dévolu sur la Maison Jean Vilar qu’il transformera en atelier de peinture pour une performance danse, peinture et musique live. Nans Martin (artiste associé au Théâtre Golovine) réservera aux Hivernales la primeur de sa création 2017, D’œil et d’oubli, après avoir révélé l’an dernier Parcelles ; Frank Micheletti (Toulon) a choisi d’interroger le devenir écologique de la planète dans Bien sûr, les choses tournent mal ; Nabil Hemaïzia (Avignon) s’émancipera du collectif 2 Temps 3 mouvements pour créer Du chaos naissent les étoiles ; dans Au-delà de l’absence, Sébastien Ly (Toulon) investira la collection Lambert tout imprégnée encore de l’exposition Patrice


17 Kelemenis ouvre les festivités avec sa dernière pièce Rock & Goal, petit bijou qui fait une apologie réjouissante des mouvements du sport ; Le Cirk BiZ’arT, qui porte bien son nom, installe le second degré dans des reprises de standards de cabaret ; les acrobates clowns du Cirque Poussière nous font découvrir un monde plein de fantaisie ; le Groupe Noces exprime les questions poétiques et métaphysiques que se posent les enfants dans Lullinight ; le Théâtre de Cuisine confronte une comédienne et une danseuse qui construisent une maison, entre rire et peur ; enfin, la Cie Azeïn présente sa dernière création, Cave Canem, qui questionne avec humour la place de l’humain dans le monde... en compagnie d’un chien comédien ! Un coup de cœur pour terminer cette liste non exhaustive : Le Petit cercle boiteux de mon imaginaire, de la Cie Zampanos, spectacle intimiste « à l’humilité émouvante et dont on ressort ébloui » ! DOMINIQUE MARÇON

Les Élancées 1er au 12 février Istres, Miramas, Fos, Port-SaintLouis, Grans, Cornillon scenesetcines.fr

Chéreau, un Musée imaginaire. Enfin Naïf production, trio associé au CDC pour trois ans, déploiera dans La Mécanique des ombres « une histoire d’hommes qui se cherchent et tentent de trouver leur image dans l’autre ». De la même manière, cette 39e édition se veut curieuse des jeunes auteurs chorégraphiques en invitant sur le plateau de Matière première, autrefois nommé Hiverôclites, Liam Warren (solo Absentia), Julie Alamelle et Wendy Cornu (Effacée(s)). Et soucieuse des générations futures en ouvrant ses stages aux enfants, seuls ou accompagnés, qui pourront pratiquer la danse au coté des artistes invités. La relève est assurée. MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

Les HiverÔmômes 6 au 13 février Les Hivernales 18 au 25 février CDC – Les Hivernales, Avignon 04 90 82 33 12 hivernales-avignon.com

Trois, deux, un...

Cirque !

L

Secret (temps 2), Johann Le Guillerm © Philippe Cibille

e top départ est imminent pour la 2 édition de la Biennale Internationale des Arts du Cirque ! Initiée en 2013 lors du Temps Fort Cirque de la capitale culturelle, la manifestation a vu le jour en 2015 et se pose désormais comme le plus grand festival de cirque au monde. Il ne s’agit pas d’une exagération à la marseillaise, quelques chiffres suffisent pour s’en convaincre : plus de 60 spectacles, des troupes venues des quatre coins du globe, des dizaines de représentations réparties dans 26 communes, sur les six départements de la région Provence-AlpesCôte d’Azur. Pendant un mois complet, c’est tout un territoire qui va vibrer au rythme du cirque. Et nul doute que le public répondra présent. « En 2015, nous avons rassemblé 85 000 spectateurs, soit un taux de remplissage de 85%, explique Guy Carrara, le directeur d’Archaos – Pôle Cirque Méditerranée, organisateur de la Biennale. On espère faire au moins aussi bien, si ce n’est mieux. » Au vu du choix et de la qualité des propositions à l’affiche, l’objectif est largement envisageable. e

Temps sports et temps forts Avec une quinzaine de lieux d’accueil et une trentaine de spectacles au programme, Marseille sera la ville-phare de l’événement. D’autant que la capitale du sport, qui sera lancée en janvier, viendra se télescoper avec les circassiens. Premier mix du genre, le 14 janvier, où une parade de cirque défilera du MuCEM au VieuxPort, pour l’ouverture de cette année supposée sportive. Et en février aura lieu un tournoi de pyramide humaine, sur le modèle des castells catalans. Des collèges

et des lycées y participeront, grâce aux interventions d’artistes qui, aux côtés d’enseignants de sport, ont animé des ateliers dans ces établissements. Rayon spectacle, le village-chapiteaux sera installé sur les plages du Prado. Avec l’immanquable Secret (Temps 2), par Johan Le Guillerm et ses machines à cirque déroutantes. Ailleurs dans la ville, signalons à La Criée Limits, par les acrobates de Cirkus Cirkör ou au Merlan les suspensions de Yoann Bourgeois dans Minuit. Du côté de Ouest Provence, le Festival Les Elancés (voir ci-contre) est de nouveau associé à la Biennale. On y retrouvera notamment le quatuor aérien du Cirque Poussière, à Istres et à Vitrolles. Dans le Vaucluse, la Garance à Cavaillon accueillera sous chapiteau Bestias, spectacle d’une véritable tribu de cirque, composée d’hommes et d’animaux. Il sera aussi programmé par La Passerelle à Gap, tout comme Santa Madera, un duo de roue cyr, à l’affiche également du Théâtre Durance à Château-Arnoux et du Bois de l’Aune à Aix. Dans le Var, on tournera en rond au Pôle Jeune Public du Revest avec Respire, du Circoncentrique, et on décollera à Châteauvallon avec Halka, par le Groupe Acrobatique de Tanger. Enfin, délire et émotions fortes garantis à Antibes, avec le tractopelle du Cirque Inextrêmiste dans Extension. Tous en piste ? Prêts ? Partez ! JAN-CYRIL SALEMI

La Biennale Internationale des Arts du Cirque du 21 janvier au 19 février à Marseille et dans 25 autres villes de Provence-Alpes-Côte d’Azur biennale-cirque.com


18 événements

Des corps, des corps, des corps ! Déplacement, Mithkal Alzghair © Tanz im August-Laura Giesdorf

C

e qu’il y a de formidable avec les festivals c’est la régularité de leur retour : Parallèle, réalisé par l’association KOMM’ACT, n’y coupe pas et le revoilà bien calé -même si ce terme ne convient guère à un événement aussi turbulent- au creux de la dernière semaine de janvier. Des jeunes il y en aura et des prometteurs ; des avérés et des aguerris aussi ; tous des artistes complexes et décomplexés semble-t-il au vu de l’éclectisme d’une programmation qui fait la part belle à la danse, ou ce qui tourne autour, comme l’illustre peut-être le visuel cosmique du duo Aubert-Lindsay ! On s’élancera en toute liberté avec Katerina Andreou, on tremblera en confiance avec l’ultime volet du triptyque du troublant chorégraphe brésilien Volmir Cordeiro, on goûtera à la mouvance « glocale » grâce au Grand Mal d’Anne Lise Le Gac, mais se laissera-t-on envoûter par le rituel clubber de Michele Rizzo qui promet sinon un supplément d’âme tout au moins une quête d’identité ? Le syrien Mithkal Alzghair, qui prend le risque d’interroger les identités, se confrontera à la question essentielle et polysémique du Déplacement. Le mouvement, c’est aussi un peu la spécialité de Sandra Iché dont on aime beaucoup la démarche croisée de ses « Wagons Libres » ;

avec Droite/Gauche (ouverture de chantier) la boussole s’affolera peut-être face à l’orientation « physique et politique d’un corps dans les espaces qu’il traverse », tandis que les nomades du verbe que sont Raphaëlle Bouvier et Maxime Potard feront rouler la poésie sonore du Muerto Coco sur la Canebière. D’autres explorations plus proches de la performance et du théâtre : au Merlan, Emilie Charriot jettera ses interprètes dans les bras de la King Kong Théorie de Virginie Despentes, et Maxime Curvers dans 9 pièces courtes proposera aux siens d’agir en scène selon des consignes simples (improvisation ?) ; Marion Siéfert et son étrange créature nous

invitent dans le web 2.0 pour faire ami(e) ; à la Criée, Tiphaine Raffier présente un ambitieux projet qui convoque le cinéaste Bruno Dumont et la sociologue Jeanne Favret-Saada autour de « l’invisible » et de « ce qui est tu dans ce qui est dit », et aux Bernardines Argyro Chioti, dont on connaît la rigueur, offre la première en France des Apologies 4 et 5 d’Efthimis Filippou : on y retrouvera le travail choral, l’exigence du texte et la plongée en eaux profondes qui sont la marque du groupe Vasistas. Comment alors ne pas avoir confiance en la Vitalité Indomptable (titre de la rencontre du 28 janvier au MuCEM autour d’une alléchante hypothèse : « Et si les marges produisaient leur propre vibration ? ») que le Festival Parallèle affiche avec panache ? MARIE-JO DHO

Festival Parallèle 24 au 29 janvier Divers lieux, Marseille 04 91 11 19 33 festivalparallele.com

Nice upon Avon lequel ne craint pas de recourir aux anachronismes et se livre brillamment à une réflexion sur le temps qui passe. Faut-il encore souligner l’excellence de la formation dramatique à l’anglaise, et le talent éclatant des comédiens qui en sont issus ? Cyril Cotinaut et Sébastien Davis prendront la suite, avec un Timon d’Athènes profond et pétillant à souhait (ils ont rallié à leur cause Étienne de La Boétie, Bertolt Brecht ou encore Karl Marx, pour faire bonne mesure). Une création qui vise à vous emporter « au pays de la misanthropie », mais tout en légèreté. Dans la foulée, on ne manquera pas Le songe (d’une nuit d’été) chorégraphié par le directeur des Ballets de Monte Carlo, Jean-Christophe Maillot. Interprété par des danseurs d’exception, sur une scénographie d’Ernest Pignon-Ernest, il porte l’onirisme à des sommets. re lies Shakespeare © Marc Mandril Ferarrio

I

l ne se retournera probablement pas dans sa tombe, en bon anglais excentrique, friand d’hommages irrévérencieux. William Shakespeare est de nouveau à l’honneur sur la Côte d’Azur, pour un festival au nom qui secoue, Shake Nice !, troisième édition. Six œuvres et autant d’approches énamourées du poète de Stratford-upon-Avon sont au programme. Pour commencer, le Conte d’hiver, mis en scène par son compatriote Declan Donnellan,

Et parce qu’il n’y a pas de raison que le festival soit réservé aux adultes, les adolescents à partir de 12 ans pourront accompagner leurs parents lors des représentations de Here lies Shakespeare. Une enquête surréaliste signée Patrick Sims, grand marionnettiste américain, impliquant l’écrivain, une pomme de terre, un brontosaure et même Frankenstein ! Légèrement plus âgés, dès 14 ans, ils auront accès à l’un des drames le plus sombres du répertoire shakespearien, Richard II, roi malade du pouvoir, mis en scène par Guillaume Séverac-Schmitz. Pour finir résolument en jeunesse, place aux collégiens et lycéens des Alpes-Maritimes, qui ont travaillé avec Irina Brook un Shakespeare freestyle détonnant. GAËLLE CLOAREC

Shake Nice ! 18 janvier au 5 février Théâtre National de Nice 04 93 13 90 90 tnn.fr


19

En habits troubles du dimanche

L’année 2017 commence avec une initiative de la mairie des 1er et 7e arr. de Marseille. Avec quels moyens ?

Les Girafes © Compagnie Off

D

ésormais, tous les derniers dimanches de chaque mois, la Canebière, artère emblématique de la ville, revêtira ses habits de fête. Les Dimanches de la Canebière, associant habitants, commerçants et acteurs culturels, deviendront un rendez-vous où se croiseront des animations en tout genre : spectacles de rue, musique, arts numériques, balades urbaines… Pourtant la programmation de la première date, le 29 janvier, reste mystérieuse : la mairie évoque une quarantaine d’animations prévues sans dévoiler de détails, souhaitant conserver l’attrait de la surprise. Ou n’étant pas tout à fait claire sur ses enjeux : Sabine Bernasconi, maire de secteur, est aussi vice-présidente déléguée à la culture du conseil départemental 13, donc interlocuteur crucial pour nombre d’associations aux subventions en berne

(baisse globale de 27% depuis 2014). Les mairies de secteur ont très peu de moyens, mais les associations culturelles seront nombreuses, poussées par la nécessité de plaire à ce subventionneur indispensable, à aller animer pour quelques euros, ou pour rien, l’artère emblématique de Marseille. Car il s’agit d’être spectaculaire dans un quartier indispensable à qui veut conserver, ou conquérir, la mairie de Marseille. Le « geste inaugural » sera ainsi proposé par Karwan qui propose un spectacle de la Compagnie Off. Les Girafes, sous-titré « une

opérette animalière », investiront la Canebière avec leur rouge éclatant. Immenses marionnettes dressées sur des échasses dissimulées, elles atteindront les balcons des immeubles. Elles seront également à portée du sol, où des garçons de piste un peu clowns entraîneront le public dans un univers de cirque et de délire. Jusqu’à ce qu’une diva s’élève vers elles pour y interpréter son répertoire lyrique... Karwan sait faire, et ce sera sans aucun doute spectaculaire, et paraît-il explosif ! Dans un tout autre registre, l’association Les Labourdettes, réunie autour de Christine Breton, proposera une balade de quartier. Les habitants des tours construites par Jacques Henri-Labourdette sur le cours Belsunce sensibiliseront les passants sur la façon dont Marseille a détruit sa vieille ville. Rendez-vous à 15h au 16, la Canebière pour une déambulation savante et ludique. Et ici ou là tout au long de la journée pour découvrir les autres animations, et les films aux Variétés (voir p 10 et 11). J.C.S.

Les Dimanches de la Canebière 29 janvier puis le dernier dimanche de chaque mois marseille1-7.fr

C

’est une première pour cette manifestation, et la date n’a pas été choisie au hasard. La Nuit de la Lecture voit le jour deux ans après les attentats commis contre l’équipe de Charlie Hebdo. Une façon pour le ministère de la Culture, à l’initiative de cette manifestation nationale, de rappeler l’importance de lire pour s’ouvrir l’esprit. « La lecture est la première source de savoir et aussi le premier pas vers l’imaginaire », souligne Audrey Azoulay, la ministre. En pratique, l’objectif sera d’encourager la lecture, mais aussi de permettre l’accès à des espaces de culture au-delà de leurs horaires d’accueil habituels. 1200 propositions et 600 lieux, librairies et bibliothèques notamment, seront ainsi associés à l’événement. Avec la perspective également d’atteindre une extension globale des horaires d’ouverture des bibliothèques, qui reste toutefois difficile à

mettre en place. Raison de plus pour savourer l’exception de cette nuit particulière ! Dans la région, la programmation restera clairsemée, mais les territoires supposés reculés donneront l’exemple. Dans les Hautes-Alpes, la bibliothèque municipale d’Eourres, Le Lézard Vert, ouvrira ses portes toute la nuit. À Meyreuil, dans les Bouches-du-Rhône, deux spectacles seront à l’affiche : Tour de contes pour adultes, par la compagnie Amarande, et Au bout du conte, par La Tête dans les Nuages. Enfin, à la librairie Manifesten à Marseille, soirée lecture et échanges avec divers auteurs et les éditions Sicania. J.C.S.

Nuit de la Lecture 14 janvier 300 lieux en France nuitdelalecture.culturecommunication.gouv.fr

Visuel Nuit de la lecture 2017, conception graphique © Nicolas Portnoï © Ministère de la Culture et de la Communication – 2016

Une nuit à lire


20 événements

L’Hiver en fête

L

es théâtres du Balcon, du Chien qui Fume, du Chêne Noir, des Halles et des Carmes, scènes historiques de la Cité des Papes, invitent à la 9e édition du Fest’Hiver, du 26 janvier au 4 février. Un festival consacré de manière équilibrée au théâtre et à la danse, auquel ces structures, composant les Scènes d’Avignon, ont convié cette année les Universités Populaires du Théâtre, les élèves du Conservatoire à Rayonnement Régional du Grand Avignon, le Théâtre de L’Oulle et le Théâtre des Vents. Avec pour objectif de faire de leurs différences artistiques une force, et de donner à connaître les compagnies de la région, prometteuses ou confirmées. Au Chien qui Fume, la Cie de l’Imprimerie propose Devenir Oiseau, un travail réalisé à quatre mains par un comédien et un historien, sur un voyou de la Belle Époque. Aux Halles, Notre classe pour un chœur de dix acteurs, pièce de Tadeusz Slobodzianek, est mise en scène par Justine Wojtyniak qui convoque musique et danse pour évoquer la sombre histoire de la Pologne. Aux Carmes, la Cie Moonsch(r)zboom viendra d’Aubagne avec un spectacle tout public à partir de 8 ans : Léonard est le dernier ouvrier d’une ville désertifiée après la fermeture de l’usine, et il résiste à sa façon... Monsieur Agop, de la Cie

L’Humanité plage, Cie Pop up Théâtre © Georges Spennato

La Naïve, sera également visible dès 9 ans au Chêne Noir. Cette pièce inspirée d’une histoire vraie évoque la quête d’un homme déterminé à retrouver celui qui lui a sauvé la vie. La production du Pop Up Théâtre au Balcon est en revanche déconseillée aux moins de 12 ans, car son Humanité Plage fouille à vif les tréfonds de l’âme humaine. De même que Fragments, performance dansée et tragi-comique de la Cie Le Mille-Feuille, au Théâtre des Vents. La chorégraphie d’ø, Ensemble vide, est en revanche adaptée à tous

les âges. Conçue par Alexandre Lesouëf, elle mettra l’énergie du hip hop au service d’une lutte salutaire contre l’asphyxie du monde, au Théâtre de L’Oulle. GAËLLE CLOAREC

Fest’Hiver 26 janvier au 4 février Scènes d’Avignon scenesdavignon.com

Lire, écrire aujourd’hui

À

Dominique Quélen

Chaque année, dix villages se retrouvent au cœur d’une programmation éclectique où le public rencontre auteurs (plus de 60 depuis 2005), comédiens, musiciens. De janvier à mai, un auteur par mois est invité, pour une rencontre, un débat, une présentation, ou une expérience de plus longue haleine. Ainsi, le poète Dominique Quélen est invité en résidence d’écriture du 9 janvier au 5 février pour son futur recueil, Les Noms exacts. Se pliant aux rigueurs de la contrainte formelle, il explore le langage dans sa vertu à transcrire aussi bien qu’à masquer, en euphémismes et périphrases qui « usent la langue ». La poésie devient © P hil Jou rn é

trente-cinq kilomètres d’Aix, au sud du Luberon, l’association au doux nom paronyme d’îles paradisiaques, Les Nouvelles Hybrides, organise rencontres, résidences, diffuse, forme depuis plus de dix ans, s’attachant à programmer ses actions hors des effervescences estivales, alors que, l’afflux touristique tari, les manifestations culturelles s’ensommeillent. Croisement des pratiques artistiques ou scientifiques, découverte d’écritures nouvelles, lectures à haute voix, créations, s’appuient sur le réseau des bibliothèques, des établissements scolaires, des structures locales, des associations.

alors le moyen de faire exister le langage et si elle doit « échouer, échouer mieux ». Cette résidence permettra aussi un travail d’écriture avec une classe de seconde du Lycée Paul Cézanne d’Aix-en-Provence, concentré sur les liens entre l’écriture et ses supports possibles. Dominique Quélen retrouvera le compositeur Aurélien Dumont, avec lequel il travaille depuis 2001. Extraits d’enregistrements, lectures, confrontations entre ces deux complices seront au programme d’un dialogue animé par Daniel Dahl (le 2 février à Villelaure)… On découvrira par la suite Marie-Hélène Lafon et son « maquis textuel » (mars), l’amateur de mots-miettes, Thomas Vinau (avril) et Sébastien Brebel qui aime à gommer les frontières entre réel et imaginaire (mai). MARYVONNE COLOMBANI

Les Nouvelles Hybrides 04 90 08 05 52 lesnouvelleshybrides.com


scène conventionnée pour les expressions contemporaines

saison iv 2016-2017

CIRQUE

santa madERa

santa madERa

jEU 02 + vEn 03 Fév 19:00

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ExPéRIEnCE mUsICaLE

photo © richard patatut

mPta

dingo dingue

FantômE, Un LégER RoULEmEnt,

Et sUR La PEaU tEndUE QU’Est notRE tymPan

christian mazzuchini / zou maÏ prod

texte d’après Michel Bellier, Jean Oury, Jacques lacan,

lucien BOnnafé, françOis tOsquelles, christOphe tarkOs

07 > 11 février

CIRQUE

BEnjamIn dUPé

dU 09 aU 11 Fév

théâtre Joliette-Minoterie / 2 place henri Verneuil 13002 Marseille 04 91 90 74 28 / resa@theatrejoliette.fr / www.theatrejoliette.fr

04160 Château–arnoux Saint–auban

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ExPéRIEnCE mUsICaLE

FantômE, Un LégER RoULEmEnt,

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BEnjamIn dUPé

dU 09 aU 11 Fév infos résa 04 92 64 27 34 www.theatredurance.fr

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22 critiques spectacles

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Le grand Charles

O

n ne dira jamais assez le plaisir de réentendre, comme un enfant même si on n’en est plus un, les phrases mythiques des contes : « tire la chevillette et la bobinette cherra », « ça sent la chair fraîche », « c’est pour mieux te manger ». Dans Trois Perrault sinon rien, tout le reste est revisité de moderne façon, mais sans renier les fondamentaux du grand Charles. La mise en scène signée Haïm Menahem tire avec brio vers la comédie Cendrillon, Le Petit Poucet et Le Petit Chaperon Rouge. En maître de cérémonie décidé, Philippe Séjourné reçoit sur une scène, « qui a accueilli avant nous Paul Bocuse, John Wayne et Napoléon », les trois personnages participants d’un concours de théâtre-irréalité. Simone, technicienne fameuse pour son lever de coude, déploie son talent : bruitages électroniques, écrans vidéo, machine à voter interconnectée aux cerveaux des membres du public... « Ah ça, la production n’a pas lésiné sur les moyens ! » À gagner pour le vainqueur, une piscine vide à remplir soi-même, et une villa en kit. En lice,

trois personnalités bien différentes, dont l’objectif est de raconter leur histoire avec usage de mots clefs et gestuelle particulière. Johanna Bonnet campe une Cendrillon à la voix de stentor, fort utile pour gérer ses problèmes de famille recomposée. Le conte du Petit Poucet a une tonalité plus sombre, bien restituée par Marc Menahem. Quand au Petit Chaperon Rouge, c’est Haïm Menahem lui-même qui lui apporte son talent d’acteur. Sa grand-mère est malade, elle a la grippe-peste-varicelle, le loup qui le poursuit est pointu de partout, et comme il est brimé par le présentateur, il remporte les cœurs des jeunes spectateurs. Une œuvre à voir en famille, pour renouer de manière décalée avec l’émerveillement de l’enfance. Car comme dirait Charles Perrault, « la bonne grâce est le vrai don des fées ». GAËLLE CLOAREC

Trois Perrault sinon rien a été créé au Théâtre Joliette-Minoterie, à Marseille, du 9 au 16 décembre

© Estelle Monnier

La folle soirée

© Elisabeth Carecchio

que Beaumarchais a supprimée dans sa version finale du Mariage de Figaro, ouvre le spectacle mis en scène par Rémy Barché et indique d’emblée son parti pris de démesure et de kitsch. Embarquement immédiat pour une Folle Journée (Barché a préféré le sous-titre). Plus de quatre heures de joutes verbales, rebondissements et imbroglios divers, dans une ambiance musicale et libertine, sous la houlette de Figaro, véritable metteur en scène de cette Folle Journée. Beaumarchais la souhaitait virevoltante ; il n’aurait pas été déçu par cette version rajeunie et cependant fidèle à l’esprit de sa pièce. On bouge, on court, on investit les rangées, on bouscule le public… Le temps file au rythme endiablé et gourmand de ce concentré d’intrigues. Alors, bien sûr, on peut regretter certains choix

L

orsqu’on pénètre dans le théâtre, le spectacle a déjà commencé. La radio égrène les nouvelles du jour ; sur le plateau envahi de ballons multicolores (à dominante rose et blanc), au fond duquel se balancent les lettres argentées d’Aguas Frescas, les musiciens, conduits par Bazile, répètent l’air qu’ils joueront pour les noces de Suzanne et de Figaro… Pas longtemps. De la salle, Figaro, d’un mégaphone tonitruant, leur intime l’ordre de tout recommencer et, dans une improvisation inspirée, leur montre comment s’y prendre. Cette scène,

musicaux, des effets parfois trop appuyés. Quelques spectateurs, choqués sans doute par le manque apparent de révérence dû à un grand classique, ont préféré quitter la salle à l’entracte. Mais ils sont loin d’avoir été majoritaires. Et le public, jeunes et moins jeunes, a longuement ovationné la prestation d’une troupe à l’énergie communicative et à la puissance comique indéniable. Un Chérubin intelligemment revisité (incroyable Suzanne Aubert) ; une Suzanne crâne à souhait (Myrtille Bordier) ; une Comtesse azimutée et un Comte fin de race absolument ridicule ; sans oublier Samuel Réhault, qui incarne le maître à chanter Bazile et renouvelle de façon réjouissante le rôle du stupide juge Brid’oison. Tous sont formidables. La mise en scène et la scénographie regorgent de trouvailles. Et tout cela finit par un grand lâcher de ballons auquel la salle participe de bon cœur. Une chaude soirée en plein cœur de l’hiver. FRED ROBERT

La Folle Journée ou Le Mariage de Figaro a été représentée du 4 au 7 janvier à La Criée, Marseille


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C’est beau d’avoir peur !

L

orsque Nathalie Pernette s’adresse aux enfants, n’attendez pas la moindre mièvrerie. Et vous qui les accompagnez, préparez-vous à affronter vos peurs enfouies... Les Ombres blanches jouées au Merlan peuvent glacer le sang. Faire rire aussi, un peu nerveusement. Car les spectres qui traversent la scène n’ont rien de ralenti ni de pesant, ils bougent à toute allure dans les fumées blanches qui les font apparaître et disparaître en un clin d’œil. Ils dansent, hantant la maison et l’animant d’une magie à la fois facétieuse et inquiétante. Un carton bouge et aboie comme un chien invisible, une main sort d’une boite et danse, un petit fantôme d’oiseau surgit et parcourt l’espace en tout sens... Le magicien Thierry Collet a prêté quelques trucs à la chorégraphe, qui s’en empare pour nous faire douter du réel. Sont-ils vivants, morts, des hommes, des femmes, bienveillants ou malveillants, ceux qui habitent cette maison de leurs passages incessants ? Les deux danseurs (Lucien Brabec et Anita Mauro), animés des mêmes

© Philippe Laurençon

saccades, semblent deux jumeaux à peine distincts par leur taille (leur genre ?). Sortant parfois de l’abstraction pour mimer furtivement un geste concret, ils entraînent dans un univers de l’entre-deux, très beau dans ses fumées et ses ombres, ses lignes droites et fines, son absence de couleurs. Quant à la musique de Franck Gervais, tissée de citations lyriques, pulsées, concrètes, elle

est de celles qui traversent les rêves, comme des souvenirs mélodiques perturbés. On en frissonne encore ! AGNÈS FRESCHEL

Ombres blanches a été joué les 13 et 14 décembre au Merlan, Marseille

«

Frères humains qui après nous vivez »… François Villon ouvre le bal, pour un hommage au poète dont 2016 commémore le centenaire de la naissance : Léo Ferré. Son portrait mouvant sur le rideau rouge de la scène accueille une salle comble. Ce soir, on est venu au spectacle, mais pas seulement, il y a quelque chose de l’ordre du militantisme, de la résistance, une affirmation qu’on est debout, encore. Faut-il pour cela prétendre que « la poésie contemporaine ne chante plus, (mais) rampe » ? Celle de Léo

© Claude Serrile

Ferré forever

Ferré crie en tous cas, danse, aboie, tonne, s’apaise, effleure, manifeste, rend au monde sa profondeur, chante enfin. Richard Martin se glisse dans le rythme des phrases, les fait résonner en tempête, les « anarchistes lèvent le poing », on suit la « camarade misère », on écoute les « cris d’oiseaux », et on sème de la « graine d’Ananar ». Une alchimie s’opère sur le plateau où chaque mot prend vie : l’interprète accorde une réalité concrète au verbe, l’emporte dans un flux ample, fluide où, parfois, la parole s’arrête, attentive, savourant la valeur

du silence. L’éloquence est arqueboutée au sens, pour s’adresser à chacun. Aux côtés de Richard Martin, la virtuosité des violons de Didier Lockwood, et celle du doudouk de Levon Minassian. Nappes sobres sur lesquelles frémissent les mots, contrepoints inventifs au revers d’une « robe de cuir »… s’effaçant lorsque Y’en a marre ou que la salle s’enthousiasme à Ni Dieu, ni Maître ! Puis la chanson que Ferré composa pour Marseille, la ville aimée dans sa foisonnante multiplicité. On repart en retrouvant quelques textes sur les murs de la rue du théâtre… En effet, « grâce à eux, les poètes, on sait ce que veut dire l’humain ». MARYVONNE COLOMBANI

Thank you Ferré ! a été donné le 16 décembre au Théâtre Toursky, Marseille


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La guerre des Gauches

L

a dernière mise en scène de Joël Pommerat est un grand spectacle. Un de ceux qu’on n’oublie pas, qui confirme en vous l’amour du théâtre, et pas seulement. Depuis sa création il tourne partout, mais dans notre Sud-est personne n’a eu l’idée de l’inviter, en dehors de Châteauvallon, où les 4 dates ont fait salles plus que combles, et plus qu’enthousiastes. C’est qu’un Pommerat, ça s’attend, ça se désire. On se souvient de Cendrillon et Pinocchio comme de révélations sur la douleur de grandir, de Cet enfant ou des Marchands qui furent des chocs esthétiques et politiques, de L’histoire du Commerce ou de Je tremble, un peu moins réussis, où il cherchait autre chose... Qu’il a trouvé, dans ce Ça ira (1) Fin de Louis époustouflant.

L’auteur-metteur en scène (il ne dissocie pas les deux gestes) qui cherchait à lier le politique et l’intime a plongé dans l’Histoire. Celle de la Révolution. Avec le même désir,

mais inversé : il s’introduit dans la sphère publique, celle des assemblées, des réunions citoyennes, du pouvoir, des discours et des négociations. Mais sans délaisser les individus,

© Elisabeth Carecchio

Une bille bleue

M

ichel Lussault est un géographe prolixe : invité par Opera Mundi, il commence à parler de « l’insociable sociabilité de l’être humain » (Kant), et poursuit avec une harangue contre la « tentation de ne voir le monde que de haut, dans la position du Dieu voyeur, incommodé par le réel ». À l’écran, il affiche une photographie argentique prise par un astronaute en 1972, seule image de l’entièreté de la Terre, réussie par une conjonction extraordinaire et non renouvelée depuis. Cette bille bleue jetée dans l’immensité noire de notre système solaire, qui pourrait parfaitement continuer sans nous, « puisque nous sommes tout à fait capables de nous éliminer nous-mêmes ». Où tout est désormais cartographié, où la population est en telle expansion démographique que l’on songe sérieusement à investir d’autres planètes, car

ça y est, l’espace anthropologique excède la taille de la nôtre (« Un organisme de l’ONU est chargé de gérer les déchets spatiaux. Dès qu’il y a des poubelles, il y a de l’humain, tous les archéologues vous le diront »). Nous serons bientôt 10 milliards ; l’échelle des problèmes à gérer enfle inexorablement, avec nos mégapoles spectaculaires, l’urbanisation constante, la biodiversité qui s’effondre, et un monde contemporain marqué par « la puissance, l’accumulation, le débordement, le gaspillage ». Pour le géographe, tout ceci masque une fragilité perçant lors des catastrophes. Tchernobyl ou Fukushima, bien sûr, mais aussi le passage d’une tempête à New York qui priva d’électricité pendant plusieurs jours ce cœur du capitalisme mondialisé, « où les gens vivent et travaillent dans des immeubles de 40 étages »... Un coup de vent

a suffi, et l’on constate que « tout ce que la technologie essaie de nous faire croire est faux ». L’existence humaine est par nature vulnérable : on commence à la repenser de manière à trouver d’autres réponses que celles qui nous conduisent à la surenchère, droit dans le mur. Michel Lussault croit qu’un nouveau cadre éthique peut se dessiner, qui repolitise les questions environnementales et sociales, pour prendre soin de tous ceux qui vivent sur Terre, plantes et animaux compris. Si seulement ! GAËLLE CLOAREC

Michel Lussault est intervenu au Frac Paca, Marseille, le 10 décembre

à venir Diplomatie avec le monde sauvage (Baptiste Morizot, philosophe) 14 janvier Frac Paca, Marseille Habiter le monde en plusieurs langues. Babel revisité (François Host, juriste, et Barbara Cassin, philosophe) 17 janvier BMVR Alcazar, Marseille Habiter un monde en crise : penser les identités et les capacités (Myriam Revault d’Allonnes et Michaël Fœssel, philosophes) 7 février Bibliothèque Départementale 13, Marseille opera-mundi.org

Michel Lussault © G.C.


25

leurs émotions, motivations, leurs changements et leurs défaites. Leurs complexités. L’idée n’est pas de faire une reconstitution historique, et cette Fin de Louis parle (presque) autant de notre temps que de celui de l’invention de la démocratie. Bien sûr Louis XVI est là, et Necker qui ne s’appelle pas Necker, et la Reine qui n’a pas de nom. Mais si on reconnaît bien ça et là des mots de Danton c’est une femme qui l’incarne, un Noir qui dirige l’assemblée citoyenne. Il est question de pain, de violence, de dette, d’attentat, de représentation politique. De cela surtout. De ce passage qui a fait notre histoire : par imprudence la parole a été donnée au peuple qui ne l’a plus lâchée. Et dès le départ ce sont les gauches qui

s’opposent. Celle qui fait les yeux doux à l’aristocratie et se méfie des excès, et celle qui sait qu’il faudra user de violence pour que le tiers état soit entendu, le suffrage censitaire abandonné, le peuple enfin représenté pour ce qu’il est. Celle qui a peur de cette violence, et celle qui l’attise. Sur scène ça parle, ça crie, ça se trahit, s’allie, se réconcilie, se menace, se comprend. Personne n’a tout à fait raison ni tout à fait tort, hors quelques aristocrates infâmes, et pourtant on sent la Terreur arriver. Le Jeu de Paume est là, les comités révolutionnaires aussi, ça braille dans un désordre savamment mis en scène, depuis la scène, depuis la salle, où des comédiens d’un soir incarnent l’Assemblée Nationale. On est au cœur de la démocratie naissante,

au cœur de la passion politique, pendant 4 heures où l’on rit, on frémit, on exulte, on comprend, on s’étonne de cette actualité de l’histoire révolutionnaire. Jusqu’aux lycéens qui avaient peur de s’ennuyer et applaudissent à tout rompre... Bientôt ailleurs dans la région ? AGNÈS FRESCHEL

Ça ira (1) Fin de Louis a été joué du 7 au 11 décembre à Châteauvallon – Scène nationale, Ollioules

Écoute(s) sensible(s)

C

asque sur les oreilles, regard fixé à la fois sur les trois comédiennes assises à leur pupitre et sur l’écran qui indique le canal à sélectionner pendant qu’une quatrième feuillette les pages du dossier projetées dans le coin droit de la scène, l’auditeur / spectateur ne chôme pas, et c’est même une caractéristique de tous les spectacles de Roger Bernat que d’activer cette fonction d’éveil permanent ! Cette fois-ci il ne s’agit pas de juger Hamlet (Please Continue) ou de se comporter en citoyen responsable (Pendiente de Voto), mais de suivre en zigzag des conversations enregistrées par la police et reconstituées au plus près par les voix des acteurs. Commande du MuCEM, en collaboration avec Les Rencontres à L’échelle, et d’un intérêt certain comme le suggère malicieusement son titre, No se registran conversaciones de interés -Aucune conversation digne d’intérêt- met en scène les paroles de jeunes espagnols de l’enclave de Ceuta partis en Syrie rejoindre l’État Islamique et de leurs femmes restées au foyer. Déconstruction d’archives brûlantes, reconstruction à travers un dispositif ambitieux qui donne à entendre le décalage entre les préoccupations quotidiennes des épouses (une grossesse simulée, l’hypothèque d’une maison, les soucis de santé d’une belle-mère) et l’exaltation des combattants. « Tu vas le faire ? », question-leitmotiv qui obtient rapidement sa réponse : d’abord le « je vais pas revenir » (pleurs) puis les « immolations » (sic)

© Blenda

qui se succèdent provoquant chagrin puis fierté ; le jeu des comédiennes, qui doivent sans « jouer » trouver et transmettre l’émotion, être Sanae, Samra ou Nayua et en même temps rendre compte d’un « récit » qui circule à travers un rapport de police, est l’un des points forts de cette création ; Marion Botollier/ Samra (écouter l’entretien sur WRZ) parle très justement d’une approche à trois niveaux qui offre la bonne distance. On n’apprend rien que l’on ne sache déjà sur la fabrique du fanatisme ou le rôle des réseaux sociaux, mais quel choc et quel malaise lorsque les

flamboyantes images de propagande d’AlHayat envahissent l’écran portées par la voix de Bowie ! Ok, c’est entendu, nous sommes bien embarqués dans la même histoire ! MARIE JO DHO

No se registran conversaciones de interés a été créé au MuCEM, Marseille, en coréalisation avec Les Rencontres à l’Echelle, les 16 et 17 décembre Un entretien avec Roger Bernat et Marion Botollier a été réalisé sur la WebRadio Zibeline, à écouter sur journalzibeline.fr


26 critiques

spectacles

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Lointain effroi On plane, c’est résolument beau. Mais les intentions de Giselle Vienne, qui a créé ce Kindertotenlieder il y a bientôt dix ans, sont si criantes (le cercueil, la bouteille brisée, les jeunes désaxés) que l’effroi, finalement, reste délimité dans l’espace de la scène. On est juste les spectateurs d’un épisode d’une évidente sinistrose parfaitement interprétée, qui ne nous traverse pas. Le drame se déroule en vase clos, et c’est sûrement cela qui est le plus terrible. © Mathilde Darel

L

’atmosphère est taillée au couteau. La lumière de Patrick Riou drape la scène dans un noir et blanc de films des années 20. On sent le souffle froid du clair de lune sur le sol neigeux. Des silhouettes avec sweat à capuche, mains dans les poches, regard vissé sur les sneakers. Bref, des ados. Un cercueil, ouvert, prêt à enfermer un corps. Musique lancinante. L’image est belle. Inconfortable, mais léchée. On a lu, sur les feuillets distribués à l’entrée de la salle, la traduction des textes en anglais de l’auteur américain Dennis Cooper. On se doute bien que rien ne va s’arranger sur le plateau. « Je suis l’ordure la plus froide de toute l’histoire de l’humanité, mais ton cadavre pourri, puant, est en théorie tellement bandant que je crois qu’il va me faire fondre. » En anglais, ça passe mieux. Donc, il y a un garçon suicidaire, un autre amoureux de lui jusqu’au meurtre, une femme blonde qui fait mine de s’entailler le bras avec une bouteille cassée, le sang coule sur sa peau diaphane (elle a enlevé son t-shirt avant l’acte), une imagerie gothique, un fantôme qui parle, la neige qui se met à tomber, le

corps d’un homme nu, abusé et assassiné, peu à peu recouvert de flocons. La musique originale interprétée en direct par KTL (Stephen O’Malley et Peter Rehberg) catalyse ce paysage cauchemardesque. « L’idée de te violer et de te tuer vient de provoquer la trillionième érection. » La guitare accompagne les pulsions. Les corps se déplacent dans un ralenti cinématographique. Des poupées, qu’on prenait pour des enfants, se font violenter, puis abandonner à leur nature morte de chiffons.

ANNA ZISMAN

Kindertotenlieder a été joué à hTh, Montpellier, du 13 au 15 décembre

Out le cerf humain !

© David Ruano

exactement c’est à chercher aussi… Anthropologue, ce docteur Livingstone d’un nouveau genre (Sergi Lόpez) a bien des difficultés à annoncer son départ à l’acariâtre et indifférent siège paternel. Et pourtant là-bas, dans ces terres inexplorées qui l’attendent, un cerf-humain (David Climent) bondissant passe, se cache, le suit, double fantasmé, autre définitivement et qui souffre au point qu’il faudra l’abattre… « On prend l’humour pour aller plus loin et la mort du cerf provoque les spectateurs » sourit Sergi Lόpez lors de la rencontre avec le public. Le texte se promène, poétique, flirtant avec l’absurde, jouant des analogies, des rapprochements incongrus, des juxtapositions farfelues, se plait à effacer ensuite, fasciné

U

ne pelouse verte, un grand fauteuil, celui du père, invisible et pourtant omniprésent… Le décor minimaliste est planté pour le spectacle délirant concocté par Sergi Lόpez et Jorge Picό, 30/40 Livingstone. 30/40 pour évoquer les matchs de tennis qu’inlassablement le père regarde à la télévision, absorbé au point de ne plus voir son fils. Importe davantage le « out » qui met hors de lui John McEnroe ! Le fils, lui, cherche, depuis toujours, quoi

par les « Tipp-Ex, ces crayons à mine rectangulaire qui vous débarrassent de tout »… Le second degré teinte l’ensemble d’un glacis d’humour revigorant, le non-sens apparent remet en perspective les lieux communs, les vérités acquises, « apprendre de la nature mais aussi offrir à la nature »… Le langage en premier instrument de voyage autorise le départ vers les contrées les plus lointaines, et de là une observation de notre monde. Et peu importe si parfois les rouages s’essoufflent quelque peu, l’ensemble reste profondément jubilatoire. Au Bois de l’Aune, le spectacle était comme multiplié par la présence d’un comédien interprète en langue des signes française, Vincent Bexiga, dont la gestuelle, éloquente, accordait une épaisseur supplémentaire au spectacle. MARYVONNE COLOMBANI

30/40 Livingstone a été joué le 9 décembre dans la salle du Bois de l’Aune, Aix-en-Provence


27

Éloge de la folie

© Richard Patatut

D

ans la lignée de son dernier spectacle Psychiatrie/Déconniatrie, de Serge Valetti et François Tosquelles, Christian Mazzuchini propose Dingo Dingue. Le langage est ici souverain, personnage autant que l’acteur qui le porte, jubilatoire, déjanté, bouleversant d’acuité et de tendresse. Dans un décor anthropomorphe, de par la disposition du canapé lèvres (rouge) emprunté à Dali, des deux aquariums globe dans lesquels évoluent des poissons rouges, et des tableaux représentant chacun un œil, disposés symétriquement, accordant un regard à la scène. Dans le rouge qui domine, un indien des Amériques déboule, coiffure emplumée, pagne et peintures que je me garderai bien d’interpréter. Danse, « parlé des Apaches », ronds de fumée imaginaires et leur traduction loufoque… le cadre est posé. Soudain, dans la tête de notre protagoniste (Christian Mazzuchini) se bousculent des voix qui cherchent à sortir, se mêlent dans la bouche de l’acteur, se fraient un chemin, exigent un changement de costume… Tour à tour, Lacan, magnifique, et « ses silences [qui] sont comme des virgules entre deux points d’interrogation », Jean Oury, sa voix douce et des pensées semblables à « des singes à

cabrioles », Tosquelles et son inénarrable accent catalan, auprès de son comparse Lucien Bonnafé. Et quels textes ! À ceux qui les supposent hermétiques et réservés à une élite, Christian Mazzuchini offre une époustouflante démonstration de clarté, de

simplicité, d’humour. Avec des phrases sans appel : « la psychanalyse est un remède contre l’ignorance. Elle est sans effet sur la connerie ». Un personnage maternel (Maryline Leminoux), qui rajeunit à chaque apparition, scande la progression de la pièce. Ce n’est que redevenue elle-même enfant, qu’elle donne des ordres à son fils, lui fait réciter sa leçon… Entretemps, entre « déconniatrie » et profondeur, l’un indissociable de l’autre, les grands thèmes ont été abordés, la vie l’amour, la mort, la solitude, le réel, la vérité ; aux textes des psychanalystes se sont ajoutés les poètes, Tarkos, Michel Bellier. « La folie est un long poème qui se conserve au frais ! ». L’essentiel est de « réussir sa folie ». Pari tenu en saine et vivifiante loufoquerie ! MARYVONNE COLOMBANI

Dingo Dingue a été joué le 14 décembre au théâtre Comœdia, à Aubagne

à venir 7 au 11 février Théâtre Joliette-Minoterie, Marseille 04 91 90 07 94 theatrejoliette.fr

Histoire d’une pute magnifique constitue tous. Et qui nous renvoie à nos modes de vie, à l’acceptation de l’autre quel qu’il soit. Lumineuse, intense, grave, mutine, Claude Degliame l’est jusqu’au bout. Jusqu’à ce que la voix (la sienne, mais laquelle ?) ne montre quelques brisures en évoquant les petits-enfants, les enfants de son fils, qu’elle ne peut affronter, tant sa liberté lui ordonnerait de leur proclamer « mamie elle suce des bites ! ». L’histoire n’ira guère plus loin… Et l’on se dit que la liberté a bien sûr des limites. © Alain Richard

A

glaé pourrait s’appeler autrement, c’est un prénom de scène, un prénom qui préserve son anonymat. Car Aglaé existe bel et bien, elle est une prostituée, « une pute » de plus de 70 ans, fière de son métier, « un métier comme un autre » qu’elle exerce « par plaisir », que Jean-Michel Rabeux et Claude Degliame ont rencontré et dont ils ont recueilli l’histoire. Les histoires. Sous la plume de l’un et dans le jeu de l’autre, Aglaé est devenue un personnage de théâtre hors norme, magnifique. Nuisette « noire, très classe, non ? », qui ne cache rien d’un corps qui s’affirme de fait, bottines aux pieds, Claude Degliame ne copie pas la « vraie » Aglaé ; elle ajuste les mots, le ton, se verse un whisky, navigue entre les spectateurs, frôle ici ou là une épaule, accroche un regard, prend la pause et la quitte aussitôt. Les mots sont crus parfois, aussi crus que les néons qui l’éclairent, le verbe toujours haut, mais c’est que voyez-vous Aglaé assume tout, n’a ni envie ni besoin de convaincre, elle n’est pas là pour ça. Elle se fiche bien de ce qu’on pense

de ce qu’elle vit. Alors à qui s’adresse-t-elle au juste ? Où ce discours libéré, saisissant d’intelligence humaine, peut-il faire écho ? Si la parole est singulière elle n’est pas formatée pour provoquer, encore moins provoquer la complaisance. Elle impressionne, par sa liberté de ton, par l’humanité qui nous saisit dans sa forme la plus animale, brute, qui nous

DOMINIQUE MARÇON

Aglaé a été joué du 8 au 10 décembre au Théâtre des Salins, Martigues


28 critiques

spectacles

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La Belle sans sauce Robert

J

ean-Christophe Maillot, directeur des Ballets de Monte Carlo, s’attache cette saison à des reprises de ses ballets. C’est « une manière de rester vivant, de modifier, de changer des chorégraphies déjà faites, cela me force à composer de nouveaux ballets : l’insatisfaction est très positive ». Reprendre une chorégraphie, c’est aussi poser la question de la transmission, la meilleure selon le chorégraphe étant celle de danseur à danseur, (même si les notations sont utiles). « La danse est un art éphémère », cela participe à sa beauté ; si une pièce ne peut être « transmise d’individu à individu, elle doit disparaître »… « Quelle émotion, lorsque je voyais le couple Bernice Coppieters et Chris Roelandt enseigner leurs pas à Olga Smirnova et Semyon Chudin ! » (Les deux danseurs Étoile du Bolchoï invités, ndlr). Refusant la version des frères Grimm, le chorégraphe revient au conte de Perrault, qui ne s’achève pas au réveil de la Belle endormie et se poursuit avec l’apparition de la mère du Prince, ogresse qui n’a de volonté que de dévorer la jeune femme ainsi que ses enfants,

© Alice Blangero

à la sauce Robert. Pas de festin macabre, mais une analyse du conte : le fuseau auquel la princesse se pique le doigt ouvre un monde hostile, violent, destructeur. La bulle transparente dans laquelle elle fait son entrée en scène est déchirée… le sommeil permettra-t-il de surmonter l’horreur ? Les mondes du Prince et de la Princesse se dessinent : l’un coloré, inquiétant de superficialité, le second sombre, peuplé de « crochus ». La reine ogresse est

aussi Carabosse, (superbe Stephan Bourgond) et seul l’amour partagé sera capable de la vaincre… Le Prince ne réveille pas la jeune fille qui prend les devants, en un baiser envolé, lèvres scellées. La danse puisant aux sources du mythe atteint les profondeurs de l’inconscient, grâce à la scénographie en épure d’Ernest Pignon Ernest et les subtiles lumières de Dominique Drillot. MARYVONNE COLOMBANI

La Belle a été dansé du 28 décembre au 3 janvier au Forum Grimaldi, à Monte Carlo

Le BNM accueille

P

our la deuxième fois les directeurs du Ballet National de Marseille ont organisé un petit festival d’hiver. En accueillant et coproduisant cette année d’autres compagnies. La soirée d’ouverture réunissait un public éclectique, composé pour moitié de professionnels, pour moitié d’amateurs de danse. Après un premier trio relativement insignifiant d’Amala Dianor (faire danser ensemble trois hommes d’origines différentes ne suffit

pas à signifier la rencontre), la création d’Arno Shuitemaker a divisé le public comme rarement : les amateurs partaient par grappes, et les professionnels restés à la fin applaudirent à tout rompre. Car la pièce, minimaliste, dansée par Extremalism © Alwin Poiana trois corps dans l’ombre presque absolue, présentant chacun d’infimes variations du même mouvement comme de la musique répétitive, reposait sur un concept intéressant. Mais est-il besoin aujourd’hui d’écrire une pièce d’une heure explorant une seule idée ? Tant l’ont fait déjà, et notre temps manque tant de propos... Deux jours plus tard, Offline, qui se présente comme un chantier : le danseur Amos Ben-Ta a proposé à ses deux complices, Aurélie

Cayla et Milena Twiehaus, de participer à une expérience de création en direct. Il explique le mode d’emploi : chacun interprète un ensemble de phrases qui se recouperont à un moment non défini. Des bandes-sons préenregistrées se diffuseront de façon aléatoire, accompagnées de Dyzack (chant, guitare, harmonica). Il s’agit de montrer l’énergie et les vibrations qui animent les danseurs, l’alternance des impulsions et des vitesses, des amplitudes, des directions... La dernière soirée s’est jouée à guichet fermé pour Crisi, création d’Emio Greco et Pieter C. Scholten, interprétée avec intensité par des danseuses en contrat d’apprentissage au Ballet, le BNMNext sur la 5e symphonie de Beethoven, et des extraits d’Extremalism. La clôture en musique avec le DJ Carlos Valdes d’Amsterdam a eu un grand succès. CHRIS BOURGUE ET AGNÈS FRESCHEL

Le BNMFEST s’est déroulé du 12 au 17 décembre au Ballet National de Marseille


ESPACE CULTUREL DE CHAILLOL - SAISON 2017

WEEK-ENDS MUSICAUX « L’homme qui naviguait seul dans le cosmos»

WEM #1 AKSAK

les artisans du temps

du 26 au 29 janvier 2017 Les cinq musiciens d’Aksak fêtent vingtsept ans de complicité musicale. Amoureux des paysages d’Europe Orientale, fascinés par la richesse foisonnante des traditions musicales des Balkans, ils revisitent cette musique festive à l’aune de leur créativité. illustrations Pascal Colrat - « Le vol d’un jour »

WEM #2

NOÉMI BOUTIN vous présente ses amitiés

du 23 au 26 février 2017 La violoncelliste Noémi Boutin, au talent précocement éclos présente un programme Benjamin Britten qui font l’objet de son premier disque solo, Jean-Sébastien Bach, Lior Navok et Frédéric Pattar.

renseignements : 04 91 00 91 31 /// reservations@musicatreize.org

« Le cerf qui portait l’unviers entre ses bois »

La Salle Musicatreize // 53 rue Grignan 13006 Marseille

WEM #3

CAFÉ ZIMMERMANN musique baroque

du 30 mars au 2 avril 2017 Sans chef d’orchestre, chaque musicien de l’ensemble y est soliste, mène une ligne mélodique et vous livre cette musique à la fois intime et virtuose. Série organisée avec Prodig’Art dans le cadre du dispositif «Détours en région»

WEM #4

RECRUTEMENT DE VOIX D’ENFANTS

nouvelle musique indienne

MAÎTRISE DES BOUCHES DU RHÔNE

du 27 au 30 avril 2017 Les trois musiciens, complices et inventifs, inventent une musique envoutante qui conjugue les influences du jazz, du folk et du rock, à la subtilité mélodique des Râga (les échelles de sons indiens) et à la sidérante virtuosité de la rythmique indienne.

« Le hérisson qui voulait faire fortune en vendant des ballons »

WEM #5

AUDITIONS COLLÉGIENS 4 AVRIL 2017

au Collège André Malraux

jazz

du 25 au 28 mai 2017 Ce musicien élégant, à la technique brillante quoique jamais ostentatoire, se produit en trio avec Hugo Lippi et Fabien Marcoz, dans une formation sans batterie qui invite à une une vision plus intimiste, mélodique, de l’interprétation des standards.

WEM #6

NAPULITANA

au Collège André Malraux

fanfare napolitaine

du 22 au 26 juin 2017

RÉUNION D’INFORMATION 19 JANVIER 2017 17H30

Emmenés par le mandoliniste napolitain Fabio Galluci, les cinq musiciens de Napulitanata présentent quelques unes des mélodies les plus savoureuses du répertoire napolitain, dans des arrangements de leur cru, parfaitement réglés…

au Collège André Malraux

Renseignements : 04 91 11 78 42 www.maitrise13.fr sous la rubrique : auditions

FABIEN MARY TRIO

- Hautes Alpes -

S’inscrire avec

www.festivaldechaillol.com

« L’homme qui la nuit survolait la montagne de ses souvenirs »

AUDITIONS PRIMAIRES 6 AVRIL 2017

« La grande balançoire céleste »

INDIAN AIR


30 critiques musiques

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Noces d’émeraude !

L

es musiciens s’approchent du Steinway qui trône au milieu de la grande scène du Théâtre de la Criée. Ils s’installent, au clavier et autour, livrent quelque anecdote au passage à Jacques Bonnadier, maître de la cérémonie (le lendemain ce sera aussi Olivier Bellamy) offrent au public de belles pages du répertoire romantique : Schubert, Schumann, Liszt, Chopin, Brahms... Ils sont là, les pianistes Marie-Josèphe Jude, Katia

© X-D.R

Skanavi, Michel Beroff, Daniel Wayenberg, Vittorio Forte, Caroline Sageman, la mezzo-soprano Yana Boukov, la violoncelliste Maja Bogdanovic, Sarah Jegou-Sageman au violon, Vincent Beer-Demander à la mandoline, pour célébrer l’événement ; car en décembre 2016, le seul label de musique classique œuvrant à Marseille et dans sa région fête son 40e anniversaire : Lyrinx ! Quarante ans, pour des noces… d’émeraude

dit-on... avec la musique ! Une vie de passions et de rencontres, de rêves fous, de joies, passée à l’écoute d’artistes de toutes les générations ! Ils en ont lancé des carrières, soutenu et révélé des musiciens, Suzanne et René Gambini, en plantant leurs micros magiques au pied des instruments, témoignant inlassablement, gravant l’instant où le talent apparaît, au gré d’une phrase musicale, d’un souffle, d’un soupir… Combien d’enregistrements « Lyrinx » ont été loués par la critique, plébiscités par les mélomanes ! Les artistes leur sont reconnaissants : ils le prouvent par un feu d’artifice d’émotions musicales et de virtuosité festive, du grand piano solitaire à la musique de chambre, en duos ou trios, et lorsque les doigts s’agrègent, se bousculent, à six ou huit mains, se démultiplient sur les touches noires et blanches d’un clavier royal et vénéré, à la fête depuis tant d’années ! JACQUES FRESCHEL

Le label Lyrinx a fêté ses 40 ans les 9 et 10 décembre à La Criée, à Marseille

... qui se mange froid !

L

a Chauve-souris est l’histoire d’une vengeance qui, sous couvert d’amitié potache, est motivée par un sentiment d’humiliation profondément vécu. Du coup, la mascarade punitive imaginée par Duparquet, cette fête galante, cruelle, ce marivaudage aux pointes mozartiennes, fait froid dans le dos ! Elle aurait pu mal tourner si le livret d’origine n’avait été une... comédie. La Chauve-souris est aussi un prétexte à flonflons, valses et rengaines du fils Strauss, magnifiant l’esprit de fête et l’ivresse libertine. Autant d’ingrédients qu’on retrouve dans la coproduction présentée à Marseille pour le passage à 2017 ! Elle vaut par la qualité de la mise en scène de Jean-Louis Grinda, soulignant à propos le contraste d’apparat entre une bourgeoisie banlieusarde ridiculisée et une noblesse crépusculaire désabusée. C’est aux sources françaises de l’opus que l’homme de théâtre puise, ce soir de réveillon signé Meilhac et Halévy. Néanmoins, si l’action se focalise à Paris, c’est le « Monde d’hier » de Zweig et des Habsbourg qu’on conjugue, au passé, dans le marbre froid du décor du deuxième acte, si bien que les serpentins colorés de la fête peinent à égailler la valse. Coté plateau, on jubile ! Emmenés par Jacques

© Christian Dresse 2016

Lacombe, l’Orchestre et le Chœur de l’Opéra donnent corps et âme à un show enluminé de danses qui mêlent habilement tutus et pointes classiques aux froufrous et écarts de cancan populeux (chorégraphie Eugénie Andrin). Jennifer Michel pétille en servante maîtresse, Anne-Catherine Gillet émeut dans son double-jeu de femme trompée/trompeuse, tout comme Marie Gautrot travestie en vrai/faux prince, ambigu par essence. Olivier Grand et Jean-François Vinciguerra forment un puissant et irrésistible duo de fêtards éméchés, Alexandre Duhamel est un maître d’œuvre élégant à l’image de

Julien Dran qui conserve son chic dans sa caricature de ténor d’opéra. Estelle Dannière chante et danse à l’envi et Jean-Philippe Corre ou Carl Ghazarossian pimentent la farce… On n’oublie pas les techniciens et machinistes de l’Opéra qui, au prix d’une lecture brechtienne et sociale de l’œuvre, réalisent d’impressionnants changements de décors à vue. J.F.

La Chauve-souris de Johann Strauss a été représentée à l’Opéra de Marseille les 29 et 31 décembre et les 3, 5 et 8 janvier


31

Noël classique

L

’Opéra de Toulon programmait en cette fin d’année le premier des trois chefs-d’œuvre lyriques issu de la collaboration Mozart-Da Ponte. À en juger par la fréquentation de la salle, cet ouvrage faisait une fois de plus recette, et pour ne rien gâcher de l’esprit festif de © Frédéric Stephan fin d’année, le plateau vocal était réjouissant, à l’image d’une ouverture de paquets cadeaux. Évoluant dans un décor simple et sans fioritures inutiles, très bien mis en lumières (Marc Delamézière), les chanteurs occupaient l’espace scénique avec une décontraction et

pupitres se dessinaient très clairement. Aidé d’un livret resserré, l’autrichien donne dans cet ouvrage la pleine mesure de son génie théâtral et offre à mi-chemin entre l’opéra bouffe et l’opéra seria un divin échantillon de la comédie humaine où il excelle, dans la caractérisation des personnages, dans les airs comme dans les magnifiques grands ensembles qui parsèment la fin des quatre actes. La beauté du spectacle tenait autant ici aux qualités vocales des interprètes, tous impeccables, qu’à leurs qualités d’acteurs sublimées par de beaux costumes signés Claude Masson. Un régal pour les yeux, mais aussi pour les oreilles ! ÉMILIEN MOREAU

un plaisir communicatifs, aidés par une mise en scène fluide de Christian Gangneron, et par une direction d’une parfaite précision de la chef d’Orchestre coréenne Eun Sun Kim, qui tirait de l’orchestre un son aux timbres riches et chatoyants où toutes les entrées de

Les Noces de Figaro de Mozart a été représenté à l’Opéra de Toulon les 27, 29 et 31 décembre

Esprit de Noël

M

odeste, mais combien vertueuse, l’hysope est connue pour ses propriétés médicinales et son entrée dans la composition de certaines boissons monastiques à l’austérité reconnue, comme la bénédictine. Humble malgré ses nombreuses qualités, leur ajoutant ainsi celle de la modestie, elle accorde son nom au nouveau chœur dirigé et fondé par Bruno Rastier à Aix-en-Provence en 2016. Le principe, généreux, consiste à mêler au chœur professionnel (vingt chanteurs) une centaine de chanteurs amateurs (au sens noble du terme). Préparation durant l’année entière, travail annuel d’une œuvre du répertoire vocal, actions pédagogiques (sur le territoire régional) vers le monde amateur… Musique a capella de la Renaissance à aujourd’hui, rien ne résiste à l’enthousiasme fécond et fédérateur de cet ensemble atypique. Le Grand Théâtre de Provence accueillait le Chœur Hysope pour clore l’année 2016 dans un bel esprit de Noël, convoquant pour ce faire les chants traditionnels, passant de Vive le vent au Petit renne au nez rouge ou à l’incontournable We wish you a merry Chrismas… Spectacle de patronage au GTP, on est tombés bien bas allez-vous dire à la lecture des titres (et je vous épargne le Noël blanc), surtout si j’ajoute un air de galoubet ! Que la Befana vous apporte

© Marif Deruffi

du charbon si vous le pensez ! Le répertoire choisi balaie un large spectre, de 1600 à nos jours, voyage par le monde, de la Provence à l’Amérique du Sud… On est séduits par la beauté des voix, la rigueur (presque sans faute) des tutti, le dynamisme des arrangements, décalages jazziques, rythmiques décalées, humour… Ajoutez à cela la verve (légendaire) du tambourinaire André Gabriel, le tout jeune quatuor de cuivres Massilia Venti (Adrien Ramon, Olivier Dubois, Stéphane Muller

et Romain Davazoglou), la charmante fraîcheur des voix d’enfants (Elise Giai et Guineja Wilson), un public qui entonne Mon beau sapin ou Douce Nuit… Une calme bienveillance s’attache au monde, enfin ! MARYVONNE COLOMBANI

Le Chœur Hysope s’est produit le 22 décembre au GTP, Aix-en-Provence


32 critiques musiques

plus de musiques sur journalzibeline.fr

Lema-de Wilde, le jazz désacralisé

S

ur scène, les deux immenses Stenway se font face. Sans couvercle. « Ça ne sert à rien », révèlera Laurent de Wilde. Dans une Criée quasi-remplie, il partage l’affiche avec Ray Lema pour un concert unique, proposé par le festival Jazz des cinq continents (FJ5C) de Marseille et retransmis en direct sur FIP. Riddles (Enigmes), c’est le titre de l’album qui les a réunis et qu’ils présentent au public marseillais en première partie de soirée avant de poursuivre avec une brochette d’invités aussi divers que les parcours de Lema et Wilde sont différents. De ses origines congolaises qui l’ont conduit aux musiques du monde, Ray Lema offre un jazz nomade, influencé par les musiques du monde. Chez Laurent de Wilde, la même liberté exploratrice de champs aussi variés que l’électro, le slam ou le reggae, donne au duo une synergie qui relève de ces énigmes d’une rencontre, dévoilées dans leur projet commun. C’est d’ailleurs la synthèse -plutôt inattendue- de leurs univers qui frappe dès les premières notes. Un dialogue volontairement dépouillé, allégé en académisme autant qu’en

superflu, pour lequel chaque pianiste a fait un pas vers l’autre. Hommage à Bach ou rythmes africains, leur jazz rend libre. Une liberté que le duo Laurent de Wilde et Ray Lema © Olivier Hoffschir avait envie de partager, bien au-delà des terres du jazz. trois autres musiciens de la partie, Médéric Leur premier invité, le violoncelliste Vincent Collignon (trompette), Guillaume Perret Segal, partage d’ailleurs cette capacité à (saxophone) et Jocelyn Mienniel (flûte), franchir les frontières musicales et puiser feront aussi la démonstration de leur talent de l’inspiration dans la rencontre. Parenthèse touche-à-tout. Le leitmotiv de cette soirée qui blues avec la chanteuse et guitariste Natalia aura de bout en bout l’ambition de désacraliser M. King, grande et belle voix des musiques des genres souvent jugés à tort élitistes. À noires américaines. l’image du FJ5C. THOMAS DALICANTE Lui succède au micro Fabrice Di Falco. Si sa tessiture de sopraniste/contre-ténor rappelle celles des castrats de l’époque baroque, le chanteur lyrique italo-martiniquais refuse de Le concert autour de Ray Lema se cantonner au seul répertoire des castrats et Laurent de Wilde a eu lieu et pratique lui aussi le métissage musical. Les le 22 décembre à La Criée, à Marseille

Poésie intime

© X-D.R

L

éda Atomica propose chaque année ses Inovendables, concerts atypiques, qu’ils disent invendables, et qui rassemblent pourtant un public chaleureusement accueilli, et fidèle. Le 13 décembre, la salle accueillait un concert d’Alain Aubin, chanteur atypique, contre ténor et baryton, compositeur de musique contemporaine et assembleur de chants populaires, féru de poésie et de traditions vocales internationales. Pour son Petit Vivant, il était accompagné par Magali Rubio à la flûte et aux clarinettes, par

Philippe Azoulay à la guitare acoustique, et par Phil Spectrum, rocker inventeur de sons. Un concert de créations, précieuses. L’écriture musicale, contemporaine par ses harmonies, lyrique dans ses mélodies, est volontairement narrative, illustrative parfois, traversée de fausses références médiévales, de Purcell, de souvenirs réinventés. Les textes de Giono, Norge, Olivier Larronde ou Tagore sont récités parfois, chantés, toujours audibles, et choisis pour leur force évocatrice. Le Soir des grand’merdes conte un envahissement métaphorique des cieux et des esprits par des merdes vivantes, la fable est constamment drôle, inquiétante aussi car l’étrangeté des étrons autonomes qui se multiplient raconte un envahissement insidieux des esprits par des

idées nauséabondes... La lettre de Giono aux paysans est un cri pacifiste, exhortant ceux qui vivent de la terre de ne pas obéir aux injonctions guerrières, pas plus qu’au capitalisme qui les prive de l’accès direct à la nourriture. D’autres poèmes, plus sentimentaux, sont mis en chansons simplement. Chaque musicien fait entendre des solos touchants, un silence d’une qualité rare s’installe. Innovant certainement, dans son mélange des styles, mais inovendable ? Il faut que les musiques soient enfermées dans un système de programmation très cloisonné pour que ces créations si séduisantes, et inclassables, aient du mal à trouver le chemin des oreilles... AGNÈS FRESCHEL

La 9e édition des Inovendables a eu lieu à Leda Atomica, Marseille, en novembre et décembre


RENCONTRES CINEMA DE MANOSQUE

du 31 janvier au 5 février 2017 30e année oeilzele.net

Programme détaillé : www.oeilzele.net


34 au programme musiques marseille alpes var

La Folle Criée

Quatuor du Parvis

Le théâtre de la Criée a le privilège de présenter en avant-première des Folles Journées de Nantes les grands interprètes qui les feront vivre, tout cela grâce à René Martin. En deux jours, douze concerts de quarante-cinq minutes sur le thème de la danse offriront leurs variations. On peut composer au gré de ses envies un parcours musical. Certains concerts sont gratuits, un Pass 4 concerts est proposé à 30€, des formules sont accessibles aux enfants à partir de 4 ans. Mystère de la programmation…N’est-ce pas déjà une invite à notre curiosité de mélomanes ?

04 91 54 70 54

Véronique

28 & 29 janvier La Criée, Marseille theatre-lacriee.com

© X-D.R.

Ah ! « Poussez, poussez l’escarpolette », « De ci, de là, cahin-caha, à petits pas »… La magie de la délicieuse opérette d’André Messager ne prend pas une ride ! C’est un plaisir renouvelé que de pouvoir l’entendre à l’Odéon dans sa nouvelle production, dirigée par Bruno Membrey dans une mise en scène d’Yves Coudray, et Estelle Béréau dans le rôletitre. Le Chœur Phocéen et l’Orchestre du Théâtre de l’Odéon accompagnent cette friandise qui ouvre l’année avec bonheur ! (une conférence à l’Alcazar décrypte les ressorts de sa composition le 28 janvier).

Sylvie Niverd (violon), Chantal Rodier (violon), Cécile Florentin (alto), Véronique Gueirard (violoncelle) sont toutes les quatre musiciennes à l’Opéra de Marseille. L’envie de travailler des formes plus intimes ensemble les pousse à fonder Le Quatuor du Parvis afin de parcourir l’infinie (ou presque) variété du répertoire destiné à la formation du quatuor. On aura le bonheur de les entendre dans un concert dédié à la musique de chambre à la Cité de la Musique. Et c’est gratuit !

Orchestre Philharmonique de Marseille

15 janvier Opéra de Marseille, Marseille 04 91 55 11 10 opera.marseille.fr

04 96 12 52 74

Trios à cordes et flûte

4 & 5 février Odéon, Marseille odeon.marseille.fr

Concerti per solisti S’évadant de leur lieu d’exercice pour les voûtes claires de l’église de Sainte-Anne, les professeurs de la Cité de la Musique rendent hommage au fondateur du concerto soliste que fut Vivaldi avec l’interprétation de six concertos pour flûtes ou guitares. Virtuosité du soliste, mise en valeur par les mouvements de l’orchestre, découpage en trois parties (vive, lente, vive)… Une forme naît, emplie d’énergie « comme le feu et la fureur du style italien » (Roger North). 4 février Cité de la Musique, Marseille 04 91 39 28 28 citemusique-marseille.com

© Morgane Fouret

Quelle riche palette nous offre l’Orchestre Philharmonique de Marseille dans l’écrin de son opéra ! Les Préludes et Orpheus de Liszt, vastes poèmes symphoniques précèdent des extraits de Lohengrin, Der Fliegende Holländer, Tannhaüser ou Tristan et Isolde de Wagner (préséance familiale ?). Puis on entre dans le XXe siècle avec Paul Hindemith et sa Symphonie Mathis le peintre, composée à partir de son opéra homonyme inspiré de l’œuvre du peintre Matthias Grünewald, le retable d’Issenheim. La pièce s’articule en trois mouvements, correspondant aux panneaux du retable. L’ensemble sous la direction subtile de Lawrence Foster, et pour les parties chantées la voix de la soprano Ricarda Merbeth.

Estelle Béréau © Gabriele Alessandrini

Ricarda Merbeth © Mirko Joerg Kellner

27 janvier Cité de la Musique, Marseille 04 91 39 28 28 citemusique-marseille.com

Wolfgang Amadeus Mozart, Gioacchino Rossini, Volkmar Andreae… le XVIIIe et le XXe siècles s’invitent joyeusement à la Magalone, cadre délicat où chacun se sent invité choyé. Légèreté, délices divertissants et savants à la fois… cordes et flûte sublimées par les musiciens de l’Orchestre Philharmonique de Marseille se lovent dans les chefs-d’œuvre de ces immenses compositeurs, des quatuors, malgré le nom donné au concert ! 10 février Cité de la Musique, Marseille 04 91 39 28 28 citemusique-marseille.com


Les Folies déconcertantes

Tournée Chœur Régional PACA Une exceptionnelle tournée du Chœur Régional PACA fondé par Michel Picquemal marque le début de l’année 2017, sous le thème fédérateur « fraternité et transmission », avec un programme riche : Ave Maria de Gounod, Panis Angelicus de Franck, Litanies à la Vierge Noire et Quatre petites prières de Saint-François d’Assise de Poulenc, accompagnent le Cantique de Jean Racine de Fauré et son sublime Requiem en ré majeur. Cadeau supplémentaire, le choix des solistes, la soprano Pauline Courtin, et le baryton Frédéric Cornille, deux voix parmi les plus accomplies du moment. Le tout sous la houlette de Bruno Rastier accompagné de l’orgue de Christophe Guida.

Pas moins de cinq siècles de musique en un seul concert, c’est possible avec l’Orchestre de Chambre des Hautes-Alpes, Les Folies déconcertantes, dirigé par Jean-Christophe Keck, musicologue, chef, compositeur, producteur radio (France Musique), et spécialiste mondial de l’œuvre d’Offenbach (ouf !). Départ imminent pour un voyage qui aborde Mozart, Bach, Rossini, Offenbach ! Histoire précise et anecdotes jalonnent la route. Les mélodies s’ourlent de connaissances.

04 42 87 75 00

20 janvier Espace NoVa, Velaux espacenova-velaux.com

OPPA en tournée Jacques Chalmeau © X-D.R

4 février Temple Grignan, Marseille 5 février Église Notre Dame, Monteux 24 mars Cathédrale Sainte-Anne, Apt 25 mars Cathédrale Saint-Sauveur, Aix-en-Provence 04 42 39 76 97

chœurpaca.fr

Strauss et Dvořák en famille L’Orchestre de la Chambre Philharmonique, fondé par Emmanuel Krivine et qui a la particularité, outre son excellence de ne jouer que sur des instruments d’époque, est en résidence au GTP et propose des concerts destinés aux familles. Chaque œuvre avant d’être interprétée est racontée par le journaliste Antoine Pecqueur. La famille des instruments sera à l’honneur avec entre autres délices la Sérénade pour 13 vents en mi bémol majeur op.7 TrV 106 de Richard Strauss et la Sérénade en ré mineur d’Antonin Dvořák. À savourer sans modération ! 4 février GTP, Aix-en-Provence 08 2013 2013 lestheatres.net 3 février Théâtre de la Passerelle, Gap 04 92 52 52 52 theatre-la-passerelle.eu

Pour tous ceux qui ont raté les premiers concerts de la tournée d’hiver de l’Orchestre Philharmonique du Pays d’Aix, dirigé par Jacques Chalmeau, restent encore quelques dates (sinon, il faudra attendre l’été !), les 15 (Pertuis), 27 (Peynier), 28 (Simiane-Collongue) et 29 (Jouques) janvier. Au programme, trois œuvres de Robert Schumann, l’Ouverture de Genova, le Concerto pour violoncelle en la mineur op. 129 et la Symphonie n°4 en ré mineur op. 120 dédiée à Clara, la virtuose compagne du musicien. 08 2013 2013

15 au 29 janvier lestheatres.net

Un bal masqué Au départ, il s’agit de l’assassinat d’un roi, celui de Suède en 1792, au cours d’un bal, mais déjà le « politiquement correct » sévissait, et le régicide devra être transformé en meurtre du gouverneur de Boston. Reste la partition d’une intense beauté de l’opéra en trois actes de Giuseppe Verdi, Un bal Masqué, sur un livret d’Antonio Somma d’après Scribe. L’Orchestre et le Chœur de l’Opéra de Toulon seront dirigés par Rani Calderon pour cette œuvre ambigüe où la magie se mêle à la réalité, dans une mise en scène de Nicola Berloffa. 27 au 31 janvier Opéra de Toulon 04 94 92 70 78 operadetoulon.fr

27 janv. - 26 fév. 2017 Marseille Quartiers d’hiver 6 lieux - 14 représentations

Mostrarium L’histoire du soldat Le chevalier déconcertant Les nouvelles aventures de Pat et Mat www.ensemble-telemaque.com


36 au programme musiques alpes-maritimes hérault

Tosca

Bruno Fontaine Réconciliant les genres, le pianiste Bruno Fontaine arpente les partitions classiques ou jazz avec la même liberté. Bach, Schumann, Strauss, Puccini, Sibelius côtoient L’hymne à l’amour de Piaf (musique de Monnot), les airs de Barbara, de Gainsbourg ou de Trenet… Les harmonies se remodèlent, s’inventent, les rythmes se catapultent, se renouvellent. Poétique originalité de cet univers !

Un hiver en musique Dans l’écrin de l’église Saint-Jacques-le-Majeur de Mougins, une série de quatre concerts célèbre l’hiver du 15 janvier au 5 février. Formations réduites, mais d’une indéniable qualité ! On sera sous le charme de la harpe de Magali Pyka de Coster accompagnée de la flûte de Philippe Depetris (15 janvier), on se laissera transporter par les élans du piano de Philippe Cassard (22 janvier), les pianos de Gabriel Tacchino et Emmanuelle Stephan (29 janvier), enfin par la Caravane musicale constituée de Guillaume Bellom au piano, Rachel Koblyakov au violon et la voix de la soprano Marie-Laure Garnier (5 février). Et c’est gratuit ! 15 janvier au 5 février Église Saint-Jacques-le-Majeur, Mougins 04 92 92 50 08 mougins-tourisme.fr

Bertrand Chamayou

29 janvier Théâtre Croisette, Cannes 04 92 98 62 77 palaisdesfestivals.com

Soirée musique américaine Carte blanche a été offerte au spécialiste de la musique américaine qu’est David Charles Abell, par l’Orchestre de Cannes. Un parcours mêlant les différentes musiques issues du répertoire américain nous conduira de Samuel Barber et son Adagio pour cordes op. 11 au Concerto pour saxophone quartet de Philip Glass, avec l’Arcis Saxophon Quartett (musiciens passionnés s’il en est) et à des œuvres populaires. Lyrisme, pulsations, ragtime et tournoiements seront au rendez-vous de cette « nuit américaine »…

© Marco Borggreve

18 au 24 janvier Opéra de Nice 04 92 17 40 79 opera-nice.org

19 janvier Domaine d’O, Montpellier 08 00 20 01 65 domaine-do-34.eu

Marc Coppey © Adrien Hippolyte

Amour, mort, jalousie, intrigues politiques, services secrets, trahisons, complots… le livret de Luigi Illica et Giuseppe Giacosa, inspiré du drame de Victorien Sardou, multiplie les rebondissements, dans le décor de la Rome des débuts du XIXe siècle. Floria Tosca (Svetla Vassileva), cantatrice, et maîtresse du peintre Mario Cavaradossi (Alejandro Roy), aveuglée par ses sentiments qu’elle croit bafoués, livre son amant aux foudres du sinistre Scarpia… on connaît la suite. Renato Balsadonna sera à la tête de l’Orchestre Philharmonique de Nice et des Chœurs de l’Opéra de Nice (dont le Chœur d’enfants).

Le violoncelliste virtuose Marc Coppey, accompagné de l’Orchestre de Cannes sous la direction d’Arie van Beek, propose un concert au cours duquel on entendra le somptueux Concerto n°1 pour violoncelle et orchestre en mi bémol majeur, op. 107 de Chostakovitch. L’orchestre offrira de superbes pages du répertoire : une rareté, l’ouverture du « singspiel » mozartien Der Schauspieldirektor (Le Directeur de théâtre), et ses prime donne irritables (« Ich bin die erste Sängerin ! »), mais aussi la Symphonie n° 29 en la majeur, KV 201 de Mozart et la Symphonie n°1 en ré majeur, dite « Classique » op 25 de Prokoviev.

Arcis Saxophon Quartett © Uwe Arens

Svetla Vassileva © Andreas Jurgen

Marc Coppey

10 février Théâtre Croisette, Cannes 04 92 98 62 77 palaisdesfestivals.com

Avec son parcours lumineux, le pianiste Bertrand Chamayou collectionne les récompenses les plus prestigieuses, offre des enregistrements somptueux, et c’est un privilège que de pouvoir l’entendre en concert. De larges pans de l’œuvre de Ravel (dont il a entrepris l’intégrale) seront donnés, Jeux d’eau, Pavane pour une infante défunte, Gaspard de la nuit… aux côtés de pièces de Liszt en écho, Jeux d’eau de la villa d’Este, mais aussi Sonetto 123 del Petrarca ou encore la célébrissime et acrobatique Tarentella… entre autres pièces ! Temps suspendu. 31 janvier Théâtre Molière, Sète 04 67 74 66 97 theatredesete.com


au programme musiques bouches-du-rhône vaucluse hérault

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Jochen Rueckert quartet featuring Mark Turner Carte blanche à Rémi Charmasson

Tant Que Li Siam

© Desmond White

Marie-Madeleine Martinet, Damien Toumi et Mario Leccia, le trio fondateur du groupe, chantent un répertoire de chants polyphoniques originaux en langue d’oc, créé à partir de poèmes populaires récoltés autour du Mont Ventoux. Une célébration joyeuse d’un territoire, d’une langue et d’une culture, bien vivants. La veille, à la BMVR Alcazar, ils chanteront des extraits de leur répertoire, l’émaillant d’une présentation de l’auteur de chaque pièce et du poème mis en musique, ainsi que de leur parcours et démarche.

Batteur allemand de grande renommée, Jochen Rueckert officie depuis plus de 10 ans sur la scène new-yorkaise où il multiplie les projets et collaborations auprès de grands noms du jazz tel Pat Metheny ou Nils Wogram. C’est aussi le cas avec ce quartet, auquel il convie Lage Luno à la guitare, Matt Penman à la basse et Mark Turner au saxophone ténor, pour créer une musique imprégnée de la grande tradition jazz, qui tend vers des sons contemporains riches et créatifs.

Durant 3 jours, Rémi Charmasson (à la guitare), Laure Donnat (au chant), Perrine Mansuy (au piano), Bernard Santacruz (à la basse électrique) et Bruno Bertrand (à la batterie) vont proposer deux concerts, une conférence-live et un Open bal : Giaco : Son d’(é)toiles s’inspire des œuvres du peintres Jean-Pierre Giacobazzi en alliant peinture, vidéos et musique ; dans The Wind cries Jimi, le quintet parcourt le répertoire de Jimi Hendrix, et retrace dans une conférence-live son parcours singulier ; enfin, lors d’un bal, les grands standards de la pop et du rock, de Hendrix à Police, en passant par Clapton, Gainsbourg ou Dire Straits, vous feront danser le plus longtemps possible !

Johann Berby

3 février Cité de la musique, Marseille 04 91 39 28 28 citemusique-marseille.com

© Chris Boyer

Hilarité et bonne humeur sont au rendez-vous du 1er spectacle musical de l’année programmé par le Forum (20 janvier) : les 3 talentueuses drôles de dames des Banquettes arrières offrent un show décapant, explosif, qui allie improvisations gestuelles et chansons a cappella bien barrées ! Changement d’atmosphère avec le Massilia Sound Gospel (3 février) dont le chef, Greg Richard, revisite et arrange des standards de gospel ou des titres plus récents en mixant swing, blues, soul ou R’n’B. 20 janvier & 3 février Le Forum des Jeunes, Berre 04 42 10 23 60 forumdeberre.com

Cass McCombs Avec huit albums en 13 ans, dont le dernier, Mangy Love, est paru en septembre 2016, le chanteur, compositeur et musicien américain a acquis le statut d’icône de la scène folk indépendante. Ses chansons empreintes de nostalgie, à l’écriture résolument en dehors des modes, font appel à la fois à un blues country et à une indie pop folk léchée. Un univers complexe et talentueux qui lui a permis de partager les scènes de Blonde Redhead ou Arcade Fire, entre autres...

© Rachael Pony Cassells

Soirées musique au Forum

27 janvier Cité de la musique, Marseille 04 91 39 28 28 citemusique-marseille.com

La musique de ce réunionnais mêle subtilement le Maloya et la pop aux grooves chaleureux issus du Brésil, de l’Inde, de Cuba, d’Europe, entre traditions et modernité. Il sera accompagné de Michael Avron (guitare), Théo Croix (violon) et Christophe Mareschal (batterie), tous trois faisant aussi les chœurs. En 1re partie, le Trio Afro Transe musique présentera un répertoire alliant des rythmes du Cameroun, du Bénin et de Madagascar.

19 au 21 janvier Le Chêne Noir, Avignon 04 90 86 74 87 chenenoir.fr Les Banquettes arrières © Pierre Noirault

© X-D.R.

28 janvier Domaine de Fontblanche, Vitrolles 04 42 79 63 60 charlie-jazz.com

7 février Le Rockstore, Montpellier 04 67 06 80 00 rockstore.fr


38 au programme spectacles marseille

Dans le nom

L’éloge de la folie

© Simon Gosselin

Face à Médée

04 91 54 70 54

© Jean-Luc Pycovsky

En s’appuyant sur les travaux de l’ethnologue Jeanne Favret-Saada, spécialiste de la sorcellerie dans le monde paysan, Tiphaine Raffier met en scène et scénographie son propre texte. Dans le nom est un thriller psychologique en zone rurale contemporaine. On y est partagé entre le productivisme de l’agriculture industrielle et la force de la nature, teintée de magie au fil des siècles par les humains inquiets de ses débordements. Le capitalisme est comparé à un « système sorcier », où l’on ne débouche que sur des « alternatives infernales ».

Premières dates pour cette création 2017, centrée sur la figure antique de Médée, femme amoureuse jusqu’à l’infanticide. François Cervantes, convaincu que « cette histoire n’est pas seulement dans le passé, elle est aussi dans les fibres de notre corps », dissèque avec ses comédiennes -Catherine Germain, Hayet Darwich, Anna Carlier- la chair de la tragédie : passion, exil, pouvoir et trahison. À partir de 14 ans. La représentation du 20 janvier sera suivie d’une rencontre avec les artistes. (voir p.12).

24 au 26 janvier La Criée, Marseille theatre-la-criee.com

© Cosimo Mirco Magliocca

© Stephan Muntaner

La résistible ascension d’Arturo Ui 19 & 20 janvier Le Merlan, Marseille 04 91 11 19 20 merlan.org

505 ans ont passé depuis la publication en latin de ce texte majeur où la Folie fait son propre éloge. Pierre-Philippe Devaux et Serge Sarkissian s’en emparent dans une déclinaison gourmande plutôt qu’adaptation, mêlant les irrévérencieux mots d’Erasme avec ceux de Charles Baudelaire, Juliette Gréco et Charles Trenet. Ou comment une satire vieille d’un demi-siècle permet de saisir les travers contemporains... 27 janvier Théâtre Toursky, Marseille 0 820 300 033 toursky.fr

Le Bac 68

Philippe Torreton dans la peau d’Arturo Ui, un personnage mâtiné de Hitler et Al Capone. L’œuvre de Bertolt Brecht, rédigée pendant la 2de Guerre mondiale, résonne toujours férocement ; transposée dans le contexte de notre délabrement politique contemporain, elle souligne que l’on n’a retenu quasiment aucune des leçons du passé. Corruption et manipulation sont les deux mamelles du fascisme (re)naissant.

1968, c’est l’année où on l’a quasiment donné, le Bac. Facile ! Enfin, pas tant que ça pour Ferdinand Faure, alias Philippe Caubère, qui situe la Sibérie « quelque part entre Naples et l’Australie ». Même avec des épreuves réduites à la session orale, il risque d’être recalé. Il est pourtant à bonne école, avec une mère bavarde comme une pie et aux idées bien arrêtées sur la politique, les CRS, la CGT, le relâchement des mœurs, le Pape et l’URSS.

25 au 27 janvier Scène nationale de Sète 04 67 74 66 97 theatredesete.com

18 janvier Le Liberté, Toulon 04 98 00 56 76 theatre-liberte.fr

7 au 11 février Le Gymnase, Marseille 08 2013 2013 lestheatres.net

20 & 21 janvier Théâtre Toursky, Marseille 0 820 300 033 toursky.fr

24h de la vie d’une femme On n’en finit pas de (re)découvrir l’œuvre protéiforme de Stefan Zweig, sans doute l’écrivain étranger le plus lu en France. Des talents certains s’emparent ici de l’une de ses nouvelles : Éric-Emmanuel Schmitt, qui l’adapte, Steve Suissa à la mise en scène, et Clémentine Célarié qui interprète avec ferveur cette femme amoureuse d’un homme plus jeune qu’elle, dévoré par le démon du jeu. « Je suis prête à vieillir, conclut l’héroïne. Vieillir, c’est ne plus avoir peur de soi ». 31 janvier Théâtre Toursky, Marseille 0 820 300 033 toursky.fr


retrouvez La prograMMation du théâtre MassaLia dans La BiennaLe internationaLe des arts du cirque avec

21 > 22 janvier 2017

Et l’acier s’envole aussi Guillaume Apollinaire avait le sang chaud et on lui doit des pages enflammées : certains de ses poèmes, et ses correspondances avec diverses maîtresses. Pierre Béziers s’inspire ici de ses Lettres à Madeleine, une jeune femme rencontrée dans un train alors qu’il partait au front, en 1915. « Je pense à ton corps exquis divinement toisonné » s’énamoure le poète depuis les tranchées, tandis qu’autour de lui hurlent les obus de la grande boucherie.

La MondiaLe GénéraLe entrée libre \/ EquilibrE sur objEts

8+ ans

Et l’acier... c X-D.R copie

3 > 5 février 2017

3 & 4 février Théâtre Toursky, Marseille 0 820 300 033 toursky.fr

LoneLy circus

\/ CirquE élECtro minéral

La Friche La BeLLe de Mai 41 rue Jobin 12 rue François simon 13003 marseille

The Servant La dialectique hégélienne du maître et de l’esclave se retrouve illustrée dans cette pièce inspirée du roman éponyme de Robin Maugham, mise en scène par Thierry Harcourt. Pour son rôle de serviteur venimeux autant que distingué, as de la manipulation au point de prendre l’ascendant sur son jeune aristocrate de patron, Maxime d’Aboville a remporté un Molière en 2015. Il est entouré d’un quatuor de non moins excellents comédiens, Roxane Bret, Xavier Lafitte, Adrien Melin et Alexie Ribes.

The Servant c Brigitte Enguerand.jpg

Billetterie 04 95 04 95 75 www.theatremassalia.com

3 février Théâtre Toursky, Marseille 0 820 300 033 toursky.fr

Mostrarium Le Massalia accueille ce spectacle, fruit de la rencontre entre une plasticienne, Loïse Bulot, et un compositeur, Niccolo Terrasi, en partenariat avec le festival Grande musique pour petites oreilles. Pour orchestrer un défilé de monstres et animaux rares, les deux artistes jouent des ombres et de la lumière, de l’apparition/ disparition, par la grâce de la vidéo, du dessin en direct et du film d’animation, le tout en interaction constante avec la partition musicale. À partir de 6 ans.

04 95 04 95 75

27 & 28 janvier Massalia, Marseille theatremassalia.com


40 au programme spectacles bouches-du-rhône var

A

Le chant des oliviers

04 95 04 95 75

9 au 13 février Massalia, Marseille theatremassalia.com

Traversée (avant-propos) Tatiana-Mosio Bongonga est funambule. Le 1er février 2017 à midi pile, lors de la première Sirène de l’année, elle traversera sur son fil la Place de l’Opéra à Marseille, avec en tête l’idée que « nous ne sommes que la gestion continue de nos déséquilibres », et que cette fragilité existentielle est aussi ce qui pousse un être humain vers un autre, en quête de lien. Un spectacle du collectif Basinga, présenté dans le cadre de la Biennale internationale des arts du cirque (lire p 16).

Marilyne Bal a grandi dans un restaurant, avec un père cuisinier. Un vécu qui irrigue cette pièce mise en scène par Anne Bouvier, où l’on voit un restaurateur à la retraite confronté a sa filleule, propriétaire de son logement, et décidée à le vendre. C’est qu’elle veut investir dans un restaurant avec son fiancé, un cuisinier libanais adepte des émulsions moléculaires. Une hérésie encore plus irritante que la menace de perdre sa maison ! 19 janvier Le Comoedia, Aubagne 04 42 18 19 88 aubagne.fr

9 janvier Klap, Marseille 04 96 11 11 20 kelemenis.fr

Adios Bienvenida Sherlock Holmes C’est la 7e édition de Polar en lumières, le festival de cinéma à Vitrolles. Et pour fêter ça, quelle meilleure compagnie que celle du roi des enquêteurs à casquette, j’ai nommé... Sherlock Holmes ! Avec le Théâtre du Kronope, la célèbre affaire du Chien des Baskerville, de Sir Arthur Conan Doyle, a pris un coup de jeune. Elle est mise en scène par Guy Simon, avec, comme c’est d’usage dans la troupe, des interprètes masqués. Qui est le coupable ? Élémentaire, mon cher Watson !

Le Mimaia Teatro de Barcelone est de retour sur nos planches ! Mimaia signifie cachette ou refuge dans le sud de l’Espagne, et c’est bien volontiers qu’on les accompagnera dans ce lieu secret où naissent les histoires. Celle de Bienvenida (Bienvenue), par exemple, cuisinière hors pair, qui régale les marins, musiciens et voyageurs de ses délicieuses sardines. Un merveilleux spectacle de marionnettes, à voir à partir de 6 ans. © Philippe Hanula

aussi comme Arbre », c’est le titre un peu mystérieux de cette œuvre hybride : une exposition accueille adultes et enfants à partir de 3 ans, quand le comportement étrange d’un homme poussant un chariot de ménage attire leur attention. Sur son bras, le tatouage d’un serpent...

Meet me half way © Zoé Dumont

La Cie Skappa! & associés est artiste en compagnonnage au Théâtre Massalia jusqu’en 2018, et explore le thème du Paradis. A, c’est la première lettre de l’alphabet, c’est « comme Adam, mais

© Elsa Chiappini

Deux moments de choix au programme du Klap ! Dans le premier, Edouard Hue rallie les poètes Henri Michaux et Jean de la Fontaine à son amour pour le Japon, à mi-chemin entre deux cultures. L’interprétation de sa chorégraphie est confiée à Yu Otagaki. Le second est un projet participatif avec une vingtaine d’amateurs seniors, guidés par la danseuse Kaori Ito et son père sculpteur, Hiroshi Ito.

© Daniel alonso (CDT)

© Paolo Cardonna

Meet Me Half Way + Can we danse ?

1er février Parvis de l’Opéra de Marseille Lieux Publics 04 91 03 81 28 lieuxpublics.com 8 février Théâtre de Fontblanche, Vitrolles 04 42 02 46 50 vitrolles13.fr

22 janvier L’Alpilium, Saint-Rémy-de-Provence 04 90 92 70 37 mairie-saintremydeprovence.fr 24 janvier Théâtre du Rocher, La Garde 04 94 08 99 34 ville-lagarde.fr 25 janvier Le Comoedia, Aubagne 04 42 18 19 88 aubagne.fr


au programme spectacles bouches-du-rhône alpes-maritimes 41

Libres sont les papillons

© Fabienne Rappeneau

Les règles du savoir-vivre dans la société moderne Agnès Régolo met en scène une pièce de Jean-Luc Lagarce, auteur hanté par la mort, mais non dénué d’humour et refusant le pathos. Son texte s’inspire d’un manuel du savoir-vivre rédigé au XIXe siècle, pour comprendre ce qui, dans toute société, encadre l’existence. Un nombre colossal de règles explicites ou implicites, rassurantes et étouffantes à la fois. Car si naître et mourir se font assez aisément, somme toute, c’est la vie entre les deux qui demande de l’endurance et parfois... un mode d’emploi.

2 février Le Comoedia, Aubagne 04 42 18 19 88 aubagne.fr

10 février Le Comœdia, Aubagne 04 42 18 19 88 aubagne.fr

L’instant décisif

17 au 19 janvier Le Jeu de Paume, Aix-en-Provence 08 2013 2013 lestheatres.net

Ancien malade des hôpitaux de Paris

© Isabelle Fournier

© X-D.R

Il est possible que cela picote un peu les pupilles et que l’on affirme avoir éternué trop violement ou que le vent a charrié du sable… Les trois fragments d’histoires du texte de Bénédicte Couka (lauréat du Prix Annick Lansman 2012), superbement joués et mis en scène par la Cie Les Passeurs, abordent des questions graves qui ne s’adressent pas qu’aux enfants, avec délicatesse et légèreté. (Tout public à partir de 7 ans). L’instant décisif n’est pas le dernier, comme on pourrait le supposer, mais bien plutôt le premier, qui initie l’ensemble… émotion du premier pas… Niel Armstrong n’est pas loin ! La Cie Du Zieu nous présente l’histoire d’une troupe au travail, qui s’interroge et par là nous aussi, sur les liens entre théâtre, monde, politique … Action théâtrale ? Action politique ? Nathalie Garraud et Olivier Saccomano nous invitent à apprécier La beauté du Geste 1… Fascination des commencements ! 25 au 27 janvier Le Bois de l’Aune, Aix-en-Provence 04 88 71 74 80 boisdelaune.fr

Être un jeune médecin et se trouver confronté seul au monde des urgences du dimanche soir à Paris, voilà qui n’est pas de tout repos et qui n’apporte aucune gloire à celui qui se dévoue à la multitude de patients et de cas qui se présentent alors ! Dérision, humour, satire, avalanches verbales, nourrissent le monologue jubilatoire de Daniel Pennac interprété avec une verve savoureuse par Olivier Saladin.

© Emmanuel Noblet

Le sable dans les yeux

8 février Le Comœdia, Aubagne 04 42 18 19 88 aubagne.fr

Créée en juillet dernier au Festival d’Avignon, De l’imagination de Clara Picard fait du « dernier quart d’heure » accordé par la Barbe Bleue à sa femme une comédie musicale qui se refuse à attendre mêlant prières affligées et appels à une sœur Anne qui ne voit jamais rien venir. Un superbe éloge est chanté par notre « Barbarella » à propos de ces vertus que l’on ne cesse de qualifier (à tort) de défauts : la désobéissance, la curiosité, principes de vie et de création. Un petit bijou à partager en famille. © Ch. Raynaud de Lage - Festival d’Avignon

© Raphaël Arnaud

La comédie de Léonard Gershe, adaptée par Éric-Emmanuel Schmitt, comprend les ingrédients classiques du genre, évoquant la différence (le personnage principal, Julien Dereims, est aveugle), traitée souvent de manière cocasse, les dissensions familiales ; elle, Anouchka Delon, se heurte à la mère (Nathalie Roussel) du jeune homme… On rit beaucoup, mais la pièce, dans la mise en scène de Jean-Luc Moreau, sait atteindre une certaine profondeur humaine et touchante.

De l’imagination

7 au 11 février Le Jeu de Paume, Aix-en-Provence 08 2013 2013 lestheatres.net 1er au 5 février Théâtre Anthéa, Antibes 04 83 76 13 13 anthea-antibes.fr


42 au programme spectacles bouches-du-rhône

Franz est fiancé à la subtile Swanilda, mais il est fasciné par l’énigmatique Coppélia, « fille aux yeux d’émail » du vieux Coppélius, le fabricant d’automates… Le conte d’Hoffman devient ballet, féérique, parcourant dans la chorégraphie d’Éric Vu-An, directeur artistique du Ballet Nice-Méditerranée, la mythique partition de Léo Delibes. Décors et costumes copiés sur ceux d’origine participent à la fraîcheur de l’ensemble interprété par les danseurs du Ballet Nice-Méditerranée.

© Boris Dambly et Michel Boermans

Platonov © Dominique Jaussein

Coppélia

Peurs Bleues Deux pièces pour les jeunes danseurs de la cellule de professionnalisation du Ballet Preljocaj : l’une, inscrite au répertoire, Peurs Bleues d’Angelin Preljocaj, nous emporte au rythme des envolées romantiques de Beethoven, dans l’imaginaire de l’enfance, série de tableautins minimalistes qui permettent de jouer à se faire peur… ; la seconde, Chacha d’Hervé Chaussard nous convie à un chassé-croisé vertigineux…

© Eric Lucas

19 janvier GTP, Aix-en-Provence 08 2013 2013 l estheatres.net

31 janvier & 1er février Théâtre Antoine Vitez, Aix-en-Provence En partenariat avec les ATP 04 13 55 35 76 theatre-vitez.com

3 & 4 février Pavillon Noir, Aix-en-Provence 04 42 93 48 14 preljocaj.org

The game

27 & 28 janvier Pavillon Noir, Aix-en-Provence 04 42 93 48 14 preljocaj.org

Tentatives de fugues

© X-D.R.

Mosaïque d’extraits de pièces mythiques de Merce Cunningham dans un arrangement de Robert Swinston, Event constitue un hommage et un témoignage exceptionnel de l’œuvre du danseur et chorégraphe américain. La virtuosité s’allie à la rigueur géométrique des compositions, joue de l’esthétique de la surprise et reste indéniablement d’une troublante actualité. Délimitant l’espace scénique, les longs lés colorés inspirés des cerfs-volants de Jackie Matisse-Monnier ajoutent à la poésie de l’ensemble.

© Yi-Chun Wu.

© JC Carbonne

Event

Avec cinq danseurs, cinq niveaux de jeu, un chiffre-clé se dessine dans la nouvelle pièce d’Hervé Chaussard, artiste associé cette année au Pavillon Noir et « fan de philo ». Le projet, jouer avec des philosophes comme Schopenhauer, Spinoza, les parodier au cours d’une partition chorégraphique tenant à la fois de la « science-fiction et du ringard ». Projection de ce que sera la danse dans cinquante ans… Une fiction parfaitement articulée qui ne laisse pas de place au hasard… et pourtant, tout est possible…

10 & 12 février Pavillon Noir, Aix-en-Provence 04 42 93 48 14 preljocaj.org

Cette œuvre de jeunesse d’Anton Tchekhov (il l’écrit à 18 ans) est refusée par le directeur du Théâtre Marly à Moscou et ne sera retrouvée que bien après la mort du dramaturge, à l’état de brouillon. C’est à ce texte « matrice monstrueuse lue au prisme d’inquiétudes contemporaines » que la jeune troupe de onze comédiens de la Cie Premiers actes, menée par le metteur en scène Thibaut Wenger, s’attache. Inconstance du personnage principal, descente aux enfers, rire et tragédie, pour un spectacle à couper le souffle !

Le nouveau spectacle de la Cie En devenir, Tentatives de Fugue (Et la joie ?... Que faire ?), se glisse entre l’art de la fugue musicale, celui de la fuite (de la norme, du statu quo…) et la quête d’une joie nouvelle, nourrie des forces de l’imagination, de la volonté de créer un autre monde. Tentatives vouées à l’échec ? Peut-être… la recherche n’est-elle pas ce qui importe le plus ? Proust, Artaud, se rencontrent, mais aussi Bergman, Hölderlin et tant d’autres… Une création bouleversante, mise en scène par Malte Schwind. 8 & 9 février Théâtre Antoine Vitez, Aix-en-Provence 04 13 55 35 76 theatre-vitez.com


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Vague ou la tentative

Lorenzaccio

Les Nouveaux-Nez & Cie font escale au théâtre des Ateliers dont le directeur, Alain Simon, est aussi à l’écriture et à la mise en scène du spectacle. Le trio clownesque composé de Gabriel Chamé Buendia (Piola), Heinzi Lorenzen (Fritz) et Alain Reynaud (Félix Tampon) effectue un virtuose télescopage entre trois parcours singuliers. Poésie, rire, profondeur des vrais clowns nourrissent cette pièce étonnante, tendre, déjantée et infiniment humaine !

Catherine Marnas met en scène un Lorenzaccio résolument politique et décapant, qui crée un parallèle saisissant et subtil entre la société postrévolutionnaire de Musset -la tyrannie des Médicis- et la notre. Dans une version resserrée qui ne perd rien de sa force ni de sa violence, huit comédiens éblouissants tiennent tous les rôles, du tyran monstrueux (Alexandre) au fantoche écœurant (Lorenzo), en passant par les personnages féminins, premières victimes d’une société en crise...

© Alesxis Nys

Triiio Fritz, Piola et Felix

7 février Théâtre des Ateliers, Aix-en-Provence 04 42 38 10 45 theatredes-ateliers-aix.com

20 janvier 3bisf, Aix-en-Provence 04 42 16 17 75 3bisfcom © Pierre Grosbois

© Alain Simon

La Cie 1WATT présente une étape de travail de son tout nouveau spectacle Vague ou la tentative des Cévennes au 3bisf, à l’issue d’une résidence de création. Inspiré par la pensée de Fernand Deligny, le travail des comédiens s’attache aux errances du langage, de la folie, de l’incohérence… luttes pour être soi et vivre avec / à côté des autres ? (gratuit sur réservation)

Rock & Goal 26 & 27 janvier Les Salins, Martigues 04 42 49 02 00 les-salins.net

La pièce d’Eschyle évoque Prométhée (« qui pense avant »), celui qui vola le feu et la connaissance des arts à Héphaïstos et Athéna pour l’offrir aux hommes faibles et démunis par la faute d’Épiméthée (frère du premier, mais qui lui « pense après ») lors de la répartition des qualités. On connaît la terrible punition endurée par le Titan ami de l’humanité à cause de ce larcin. « (Il nous donne une véritable) leçon d’insurrection » affirme Olivier Py à qui l’on doit le texte français et la mise en scène du spectacle. 24 janvier Centre Social La Provence, Aix-en-Provence 25 janvier Salle du Pays d’Aigues, La Tour d’Aigues 26 janvier Salle Jean Monnet, Meyreuil 27 janvier Centre social du Château de l’Horloge, Aix-en-Provence 04 42 26 83 98

atp-aix.net

© Agnès Mellon

Prométhée enchaîné

La toute nouvelle création de Michel Kelemenis, pièce ludique pour tout public, rapproche la danse et le sport, et montre comment le plaisir du corps tient à la fois de la performance physique et de l’amour esthétique du geste. Deux couples, quatre danseurs et danseuses, transforment les jeux de foot, hand, volley, rugby et tennis en duos et duels électrisants ! 18 janvier Les Salins, Martigues 04 42 49 02 00 les-salins.net 1er février Théâtre de Fos (dans le cadre des Elancées) 04 42 11 01 99 scenesetcines.fr

Collection secrète #2 C’est le deuxième des nouveaux rendez-vous -gratuits- proposés par les Salins, imaginés par Frank Micheletti et la Cie Kubilaï Khan, qui proposent de découvrir ou redécouvrir Martigues, ses lieux et ses habitants. Une fête, une promenade, de la danse, une performance... Tout est possible et envisagé, vous ne le saurez qu’en vous inscrivant rapidement auprès de la billetterie du Théâtre, qui vous tiendra au courant par sms ou mail... 28 janvier Les Salins, Martigues 04 42 49 02 00 les-salins.net


44 au programme spectacles bouches-du-rhône

Sleeping Water

Danbé

Alors que quatre comédiens répètent sur scène une adaptation très libre du Comte de Monte-Cristo d’Alexandre Dumas, c’est une tout autre histoire qui se joue sous nos yeux. Car c’est de leur propre lâcheté, leur propre violence et leur médiocrité dont il va être question ! Avec beaucoup d’humour et une pointe de surréalisme, la Cie belge du Chien qui tousse rend un bel hommage au théâtre, et à sa magie.

© Noemie Nguyen

Les Salins accueillent, en première européenne, l’un des plus grands chorégraphes contemporains, le japonais Saburo Teshigawara pour sa dernière création. Tout à la fois danseur, costumier, scénographe et chorégraphe, cet ovni dans le paysage de la danse contemporaine développe une approche à la fois auditive, visuelle et plastique d’un spectacle. À découvrir ! 10 février Salle polyvalente, Berre l’Etang 04 42 10 23 60 forumdeberre.com

9 & 10 février Les Salins, Martigues 04 42 49 02 00 les-salins.net

Les Nono font leur show

Le Conte d’hiver

© Elian Bachini

Dans une petite ville de province, en Italie, le directeur d’une troupe de théâtre vient demander de l’aide au préfet nouvellement nommé car son lieu vient de brûler. Après avoir devisé sur l’art, les deux hommes se brouillent, car si pour le premier le théâtre est l’essentiel de la vie, pour le second il n’est que mensonge et distraction. De cet antagonisme naît la fable drôlissime d’Eduardo de Filippo que met en scène Patrick Pineau, qui offre une belle réflexion sur les rapports complexes entre l’art et le pouvoir.

© Philippe Delacroix

27 janvier Le Sémaphore, Port-de-Bouc 04 42 06 39 09 theatresemaphore-portdebouc.com

21 janvier La Colonne, Miramas 04 90 50 66 21 scenesetcines.fr

Le fabuleux destin d’Aya Cissoko, jeune française d’origine malienne, est conté par la Cie (Mic)zzaj -prononcez «mixage»- qui propose une expérience particulière de spectacle : le concert sous casque. Une immersion dans une histoire pleine de dureté et de violence, dont la digne Aya s’affranchira en se réfugiant dans la pratique de la boxe et en devenant championne du monde. Une création poétique et sonore au plus près du son, de la voix et de l’intime pour apprécier l’art radiophonique, sous la plume de Marie Desplechin. 28 janvier La Colonne, Miramas 04 90 50 66 21 scenesetcines.fr

L’art de la comédie

© Cordula Treml

C’est un show musical burlesque, onirique et complètement azimuté que propose la joyeuse bande du Théâtre Nono, un concert où se joue en direct un répertoire jubilatoire ! Huit musiciens et huit chanteurs et comédiens revisitent et réorchestrent, à leur sauce, le patrimoine de la pop internationale, et ça dépote ! Y a t-il meilleure façon pour commencer l’année ?

© Emmanuel Rioufol

© Mariko Miura

Monte Cristo

Un roi devenu fou tue son épouse aimante et gaie… Ainsi commence la pièce de Shakespeare, qui épingle la folie des pères, célèbre la force de l’amour, et la vitalité des jeunes gens qui transgressent les règles et s’aiment au-delà des barrières de classe. Philippe Car met en scène cette comédie baroque avec l’art du décalage grotesque qu’on lui connait, et son amour des mélanges. Cela fourmille de trouvailles scénographiques, de musiques entraînantes, de couleurs, de costumes inventifs regorgeant de poches, de plis et de surprises…

04 42 11 01 99

20 janvier Théâtre de Fos scenesetcines.fr


au programme spectacles bouches-du-rhône alpes-maritimes

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Antoine et Sophie font leur cinéma Coline & Dominique Bagouet

Petit éloge de la nuit

C’est avec la dernière œuvre créée par Dominique Bagouet, So Schnell, que les danseurs de la formation professionnelle Coline (session 2016-2018) feront leur première expérience de plateau, après 5 semaines de travail passées avec Rita Cioffi et Sylvie Giron, deux interprètes de la pièce. En 2e partie la pièce Jours étranges, recréée par Catherine Legrand, danseuse emblématique de D. Bagouet, sera dansée avec une distribution exclusivement féminine.

À partir du texte d’Ingrid Astier, abécédaire poétique très personnel nourri de notes, lectures et dialogues croisés entre Nerval, Bashung ou Baudelaire, Gérald Garutti a conçu un spectacle peuplé de démons et merveilles, véritable ode à la Nuit et à ses charmes nocturnes. Pierre Richard déambule au cœur de ce chemin de mots et d’états contrastés fascinants.

Richard II Un homme, devenu roi malgré lui, perd tout, sa couronne, son royaume et sa stature divine ; jeté en prison tel un simple mortel, devenu fou, il va se réfugier dans un monde poétique. Ce qui déclenchera meurtres et trahisons de la part de la horde de personnages qui gravitent autour du trône… Dans une mise en scène rythmée et enlevée de Guillaume Séverac-Schmitz.

04 42 56 48 48

24 janvier L’Olivier, Istres scenesetcines.fr

27 & 28 janvier (dans le cadre de Shake Nice, voir p 19) Théâtre national de Nice 04 93 13 90 90 t nn.fr 3 février Le Sémaphore, Port-de-Bouc 04 42 06 39 09 theatre-semaphore-portdebouc.com

Dans leur ciné-club très personnel et jubilatoire, qui s’apparente plus à un délire poétique qu’à une analyse filmique, Sophie Cattani et Antoine Oppenheim (Collectif Ildi!eldi) questionnent avec humour et impertinence les traces que laisse un film dans la mémoire intime de chacun. Sur des textes écrits par Olivia Rosenthal, qui interrogent la mécanique du désir et les méandres de la vie amoureuse, ils posent un regard décalé sur Les Parapluies de Cherbourg, de Jacques Demy, et les films de la saga Alien et de son personnage féminin emblématique Ripley.

04 90 52 51 51

Ivo Livi ou le destin d’Yves Montand Le titre dit tout, ou presque… De la vie de cet artiste atypique, la Team Rocket et Cie, emmenée par Ali Bougheraba et Cristos Mitropoulos, crée un spectacle original et sensible qui mêle habilement musique et poésie. Des quartiers marseillais aux studios hollywoodiens, des chantiers de la jeunesse aux Théâtres de Broadway, en passant par les réunions du PC et les désillusions politiques, ces cinq artistes nous rendent témoins de ce destin hors norme.

17 janvier Théâtre d’Arles theatre-arles.com © Michel Durigneux

04 42 56 48 48

21 janvier L’Olivier, Istres scenesetcines.fr

© J. Oppenheim

Jours etranges © Caroline Ablain

27 janvier Espace Robert Hossein, Grans 04 90 55 71 53 scenesetcines.fr

Mais qu’est-ce que « nous » ? Le philosophe et écrivain Jean-Paul Curnier revient pour une deuxième conférence, toujours consacrée à la place du collectif dans la société. Partant de ce « Nous », affirmation d’une condition commune, il interroge la dimension collective et politique de la pensée comme de l’action. Et pose comme la question de la réhabilitation possible de ce postulat comme seule solution à la bonne marche d’une existence partagée par tous.

04 90 52 51 51

1er février Théâtre d’Arles theatre-arles.com

27 janvier Espace Gérard Philippe, Port-Saint-Louis 04 42 48 52 31 scenesetcines.fr


46 au programme spectacles bouches-du-rhône vaucluse

Savoir enfin qui nous buvons

Du rêve que fut ma vie

Si vous voulez vivre une expérience humaine originale, embarquez dans un enivrant voyage délivré par le conteur d’exception Sébastien Barrier, sur la route de vins naturels et des vignerons et vigneronnes amoureux qui les fabriquent. Savoir qui nous buvons vraiment se fera en savourant des vins d’appellations contrôlées, servis par ce comédien grisant qui ne fait ni une conférence, ni un apéro décadent, mais une célébration de l’oralité et de la littérature lors d’un véritable moment de partage.

04 90 52 51 51

© Vincent Muteau

Comment jouer Don Quichotte quand le théâtre est investi par un vide-grenier qui doit se tenir là le lendemain ? Qu’à cela ne tienne, il suffit de se servir dans ce bric-à-brac pour travestir rapidement les comédiens, faire d’ustensiles de cuisine une armure, de paniers en osier des montures ou une partie du décor… La mise en scène de Laurent Rogero, qui fourmille de trouvailles et d’inventions est servie par des comédiens merveilleux qui se réapproprient l’œuvre de Cervantes et la magnifient en faisant du héros un fou magnifique !

Le précédent spectacle de la Cie Les Anges au Plafond, Les mains de Camille, explorait l’enfance de Camille Claudel ; celui-ci s’attarde sur les correspondances (lettres, billets, dépêches, télégrammes…) que la sculptrice de génie, enfermée et abandonnée dans un asile d’aliénés, n’a jamais expédiées. Et brossent le portrait de cette artiste à l’ironie mordante, sincère, révoltée et touchante qui n’a eu de cesse de chercher à retrouver sa liberté d’expression. 7 au 11 février en Nomade(s) La Garance, Cavaillon 04 90 78 64 64 lagarance.com © Anamorphose

© Angelique Lileyre

Don Quichotte

Linge sale

25 janvier L’Alpilium, Saint-Rémy-de-Provence 04 90 92 70 37 mairie-saintremydeprovence.fr

3 & 4 février Théâtre d’Arles theatre-arles.com

Verein… C’est une performance théâtrale atypique qui vous est proposée par le metteur en scène suisse Christophe Meierhans : sur le plateau, une centaine de spectateurs volontaires vont se voir attribuer une tâche à effectuer pour concevoir un repas en commun ! Tout en vous entraidant, vous n’aurez plus qu’à suivre la recette, ou pas, en mettant votre grain de sel dans la préparation de ce menu démocratique. De quoi nous interroger sur notre capacité d’ancrage dans le collectif… Verein – À cent guerres de la paix dans le monde 7 au 9 février Théâtre d’Arles 04 90 52 51 51 theatre-arles.com

Georges Appaix poursuit son exploration des liens entre les mots et les gestes, entre les notes et les corps. Une femme, muette, qui danse, et un homme qui parle beaucoup vont se rapprocher, paroles et mouvements se faisant rythme, danse, seul ou à deux. Pendant que Mélanie Venino et Alessandro Bernardeschi s’apprivoisent, Appaix les guide d’un mouvement de tête, chante et danse aussi. Le plateau devient terrain de jeu, lieu des langages communs au corps et à la parole. 16 au 20 janvier en Nomade(s) La Garance, Cavaillon 04 90 78 64 64 lagarance.com

© Bastien Ranschaert

Vers un protocole de conversation ?

Une femme, un homme, un vélo. Et que de propositions ! Alice Roma et Damiano Fumagalli, les deux interprètes de la Cie Rasoterra, nous entraînent dans un tourbillon de portés acrobatiques où l’un et l’autre s’élèvent, se soulèvent et se laissent tomber pour mieux se retrouver. Entre acrobaties saisissantes et tendres baisers, les deux complices nous font partager un éventail d’émotions brutes, dans un jeu fou et sensuel. 10 février Auditorium Jean Moulin, Le Thor 04 90 33 96 80 auditoriumjeanmoulin.com


au programme spectacles

vaucluse alpes-maritimes

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L’homme seul PompierS

À travers le parcours d’une jeune femme d’aujourd’hui, Virgina André (Elsa Granat), le metteur en scène Alain Ubaldi propose une réflexion sur l’histoire et la figure de Médée et de leurs rapports avec les fondements de la société contemporaine. Le tragique s’engouffre dans sa vie le jour où son mari décide de la quitter pour une femme beaucoup plus jeune. Son combat intérieur est alors celui qui lui permettra de continuer à dire « je », dans une société faite de compromis et faux-semblants.

C’est l’histoire d’une fille qui ne savait pas qu’elle pouvait dire non. Elle croyait peut-être à l’amour avec cet homme. Lui s’est servi d’elle et tous les hommes de la caserne en ont profité. Elle est un peu simple d’esprit mais a fini par raconter. Le procès va avoir lieu. Ils se retrouvent juste avant l’audience. Ce texte poignant de Jean-Benoît Patricot est mis en scène par Serge Barbuscia.

20 & 21 janvier Théâtre des Halles, Avignon 04 32 76 24 51 theatredeshalles.com

Raconter l’errance, la déchéance, la solitude. Que se passe-t-il quand on a tout perdu ? Comment concevoir que cela peut se produire d’un jour à l’autre ? Seb Lanz a choisi de se pencher sur cette part de notre société que l’on occulte souvent. Avec la complicité de Sophie Rey à la mise en scène, ils travaillent avec le comédien Fred Guittet. Ensemble, ils élaborent un texte, encore en chantier, à partir d’improvisations et de témoignages recueillis dans la rue. Une étape de travail sera présentée aux Carmes. 20 janvier Théâtre des Carmes, Avignon 04 90 82 20 47 theatredescarmes.com

© Gilbert Scoti.

© Julie Reggiani

© Philippe Hanula

La chambre de Médée

Trouble(s)

04 90 85 00 80

Jésus de Marseille

19 janvier Théâtre de la Cité, Nice 04 93 16 82 69 theatredelacite.fr

Haute dose de délire dans cette pièce de Serge Valetti, comme souvent dans les textes de l’écrivain marseillais. Ce Jésus-là, né à Marseille, y a connu quelques mauvaises fréquentations, notamment le dénommé Satan, au comportement pas très catholique. Décidé à fuir ces influences troubles, Jésus achète un camion-pizza, et rapidement, la rumeur se répand : ses pizzas auraient le pouvoir de soigner quiconque en mange... Mise en scène de Danièle Israël, avec Camille Cuisinier et Pierre-Benoist Varoclier.

© Aurore Duprey

20 au 22 janvier Théâtre des Muses, Monaco 00 377 97 98 10 93 theatredesmuses.fr

© Jacques Delforge

8 & 9 février Théâtre des Halles, Avignon 04 32 76 24 51 theatredeshalles.com

17 janvier Le Balcon, Avignon theatredubalcon.org

Le pluriel entre parenthèses n’est pas anodin. Ce spectacle, dont une étape de travail a été présentée en décembre, s’interroge sur tout ce qui peut troubler, perturber, ou même bouleverser l’être humain. Dans tous les registres, de l’état intime amoureux aux relations sociales complexes, du corps à l’esprit. Conçu à partir d’une écriture collective sur base d’improvisations et mis en scène par Alexia Vidal, le travail de la Cie Corps de Passage tente d’embarquer le public, mêlé aux comédiens sur le plateau. 11 & 12 février Théâtre des Carmes, Avignon 04 90 82 20 47 theatredescarmes.com

Les fables de La Fontaine Tout le monde connaît naturellement l’œuvre de Jean de La Fontaine. Ses métaphores animales pour dépeindre les mœurs et travers des humains ont traversé les siècles. Adultes et enfants connaissent tous au moins quelques citations de ces fables imagées. William Mesguich et ses comédiens du Théâtre de l’Etreinte en proposent une version débridée, moderne et fantasque. Tout en rythme, en délire, en rire et en poésie, sans oublier pour autant l’inévitable morale.

04 90 85 00 80

4 février Le Balcon, Avignon theatredubalcon.org


48 au programme spectacles alpes var

Le vent se lève – Les Idiots / Irrécupérables ?

Kyoto forever 2

L’Histoire du radeau de la méduse

La Chose commune En mai 1871 tombait la Commune de Paris. David Lescot, dramaturge, comédien et musicien s’est plongé dans cette histoire et a voulu l’associer au jazz. De cette idée improbable en apparence naît un étrange opéra où se mêlent chansons, textes, jazz et slam. Avec Emmanuel Bex à la baguette musicale, les six interprètes du spectacle font revivre les événements et les acteurs de cette période révolutionnaire. Et révèlent le lien finalement évident entre jazz et Commune : la lutte contre l’ordre établi.

04 92 52 52 52

31 janvier La Passerelle, Gap theatre-la-passerelle.eu

Les travers de notre monde sont en question dans cette œuvre collective de la Cie La Nuit Remue. Avec David Ayala à la mise en scène, une quinzaine d’artistes ont créé ce spectacle à partir d’écrits de Pasolini, Guy Debord ou Sade. Les artistes questionnent la dictature de la consommation ou la toute-puissance des médias et s’efforcent d’y échapper au moyen d’une Chambre des Désirs, qui respecte les aspirations de chaque être. Attention ! Création tonique et ébouriffante, conseillée à partir de 15 ans. 31 janvier Théâtre Liberté, Toulon 04 98 00 56 76 theatre-liberte.fr

Princesse vieille reine Le Mariage de Figaro Agnès Régolo met en scène la pièce de Beaumarchais avec une belle intelligence du texte, de la scène et des acteurs. Elle en a gardé la drôlerie mais surtout la force révolutionnaire, la revendication d’égalité, de liberté, l’impertinence de cette raison qui s’impose et va quelque mois après l’écriture renverser le système monarchique, conservant à la pièce une incroyable actualité.

10 février Théâtre du Briançonnais, Briançon 04 92 25 52 42 theatre-du-brianconnais.eu

© Richard Schroeder

21 janvier Théâtre Durance, Château-Arnoux/Saint-Auban 04 92 64 27 34 theatredurance.fr

31 janvier Théâtre du Briançonnais, Briançon 04 92 25 52 42 theatre-du-brianconnais.eu

© Raphaël Arnaud

La COP 28 va bientôt s’ouvrir. Nous sommes à l’Ile Maurice, en 2022. C’est le rendez-vous de la dernière chance pour sauver le climat et la terre. Dans un futur tellement proche qu’il ressemble à notre présent, Frédéric Ferrer nous fait entrer dans les rouages de ces conférences mondiales, auxquelles il a souvent assisté. En 2008, après les accords de Copenhague, il créait Kyoto Forever. Dans ce prolongement, malgré l’extrême urgence, et l’effort des diplomates, l’accord se fait attendre...

© Jean-Pierre Vallorani

© Baptiste Klein

© Henri Granjean

En juillet 1816, un bateau sombra au large des côtes mauritaniennes ; seuls quinze marins furent rescapés, ce qui scandalisa la France de l’époque. Le Groupe Maritime s’appuie sur le tableau de Géricault en s’installant dans l’atelier du peintre et donne vie à ce terrible naufrage. En écho à cette histoire, et tragiquement toujours d’actualité, un homme racontera sa traversée dans une embarcation clandestine vers l’Europe.

Ce spectacle unit la délicate interprétation de Marie Vialle et les mots de Pascal Quignard. Il y a les robes des contes, couleur du temps, du ciel ou du soleil, il y a celles des princesses qui deviennent de vieilles reines, belles et tristes. Les poèmes se tressent, enlacent les récits où se dessinent entre autres les figures d’Emmen, la fille de Charlemagne, Emily Brontë, George Sand, la fille du gouverneur d’Ise au Japon en 888… Poésie subtile où les entrechats du verbe tissent l’étoffe des rêves. 3 & 4 février Théâtre Liberté, Toulon 04 98 00 56 76 theatre-liberte.fr


49

Moi, Corinne Dadat

Chatons violents

Complices artistiques, et désormais partenaires à la scène. Pour la première fois, Pascal Quignard franchit le quatrième mur et vient interpréter son propre texte aux côtés de Marie Vialle. Créé à l’été 2016 lors du Festival d’Avignon, le spectacle, qu’ils ont mis en scène conjointement, évoque les ombres, les ténèbres, la mort. Sans pour autant sombrer dans le morbide. Plutôt peut-être pour y puiser un nouveau souffle, et « chercher dans les ténèbres ce que nous ne sommes plus capables de voir ».

Attention, humour à la décapeuse à l’horizon ! Dans son style à la fois acide et subtil, Océanerosemarie présente son second seule-en-scène, après le grand succès de La Lesbienne invisible. Tout le monde ou presque en prendra pour son grade. Derrière le paravent du rire, la comédienne dissimule de véritables questionnements sur notre société. Profonds, comme notre rapport à la violence, ou au racisme, ou plus légers, comme cette adoration sans limite que notre époque voue aux chatons.

© Marion Poussier

La rive dans le noir

© Sven Andersen

Elle a cinquante ans, s’appelle Corinne Dadat, c’est une femme de ménage, une technicienne de surface, selon le code DRH. Sur la scène, le réel et la fiction se recomposent par la grâce du théâtre et de la danse, avec l’écriture et la mise en scène chorégraphique de Mohamed El Khatib. Humour, tendresse, le quotidien devient autre dans ce ballet des balais. Le spectacle est né de la rencontre de l’auteur avec cette femme. Elle en est l’une des interprètes, aux côtés de Mohamed El Khatib et d’Elodie Guezou.

17 janvier Théâtre du Rocher, La Garde 04 94 08 99 34 ville-lagarde.fr

Borderline

Quand souffle le vent du nord

© Frank Szafinski

7 & 8 février Théâtre Liberté, Toulon 04 98 00 56 76 theatre-liberte.fr

Finir en beauté Seul sur scène, un carnet de notes à la main, Mohamed El Khatib porte la parole fragile, confidence intime et universelle, du deuil de sa mère, base du récit auto-fictionnel qu’il délivre à partir d’enregistrements - dont celui avec sa mère durant les douze mois qui précédèrent sa mort -, de courriels de condoléances, de SMS, de documents administratifs et d’autres sources tout aussi réelles. De cette intimité exposée, tout en justesse et pudeur, naît un message simple : la vie continue.

L’expression anglaise qui donne son titre à ce spectacle est souvent employée en français pour signifier ce qui est à l’extrême limite. Le duo de chorégraphes Sébastien Ramirez et Honji Wang compose une création qui danse sur un fil fragile. Les cinq interprètes oscillent entre hip-hop, danse contemporaine et acrobaties, tout en suspension et légèreté. Les influences de traditions grecques et coréennes se mêlent sur la scène pour une danse de l’envol, physique comme spirituel.

27 janvier Châteauvallon – Scène Nationale, Ollioules 04 94 22 02 02 chateauvallon.com

3 & 4 février Châteauvallon – Scène Nationale, Ollioules 04 94 22 02 02 chateauvallon.com

Le souffle romanesque de Vienne ne s’est pas tari au XXIe, sachez-le. Daniel Glattauer y est né, et il a écrit un best-seller très contemporain sur la naissance de l’amour par e-mails interposés. Judith Wille s’empare de son histoire avec humour, sans sombrer dans la mièvrerie, grâce au talent de deux comédiens pétillants : Caroline Rochefort et Stéphane Duclot. L’attraction amoureuse n’a jamais connu de loi, et foi de romantique, ce n’est pas l’ère informatique qui y changera quelque chose !

© X-D.R

© Richard Schroeder

27 janvier Châteauvallon – Scène Nationale, Ollioules 04 94 22 02 02 chateauvallon.com

1er février Théâtre du Rocher, La Garde 04 94 08 99 34 ville-lagarde.fr


50 au programme spectacles var

W Perec

Voyage en Polygonie

Georges Perec a écrit W ou le Souvenir d’enfance sous la forme d’un récit croisé, ses parties fictives alternant avec des chapitres autobiographiques. Marie Guyonnet le reprend avec force, attentive aux deux aspects de l’œuvre, la réalisation personnelle d’un homme sauvé par l’écriture, et sa dénonciation des systèmes totalitaires. Car W est le nom d’une île, où la vie rigoureusement organisée tourne exclusivement autour du sport. Et peu à peu, son idéal olympique se désagrège...

Le collectif Les Alices adapte très librement l’ouvrage majeur de Pef, Le Prince de Motordu. En conservant l’esprit délicieusement décalé du héros, aux prises avec des difficultés de langage toutes plus poétiques les unes que les autres, mais en faisant glisser l’histoire vers le tragi-comique. Car ce spectacle interroge avec pertinence les relations entre la langue et le pouvoir. Parallèlement, la bibliothèque Georges Sand propose une exposition et des animations en rapport avec le livre, du 1er au 24 février. Dès 8 ans.

© Phil Journ+®

© X-DR

Les mots perdus

Les tout-petits adorent le théâtre d’objets, à l’âge où l’on dote encore d’une âme les choses qui nous entourent. Ce Voyage en Polygonie devrait les combler, tant il mêle habilement création plastique, manipulation de figures géométriques et animations vidéos. La musique composée par Frédéric Di Crasto y joue un rôle crucial, en soulignant le jeu de scène de Pascal Vergnault. À voir en famille, dès 3 ans. 21 janvier Théâtres en Dracénie, Draguignan 04 94 50 59 59 theatresendracenie.com

8 février Théâtre du Rocher, La Garde 04 94 08 99 34 ville-lagarde.fr

© X-DR.

Un Poyo Rojo

En attendant Godot

Deux sportifs très mâles et très drôles font éclater les poncifs sur la masculinité en un... pugilat ? Un ballet ? Un spectacle de cabaret ? Plutôt un combat de coqs, mais des plus réjouissants (poyo rojo signifie « coq rouge » dans leur pays d’origine, l’Argentine, de ceux qui se déplument allègrement dans l’arène sous une surenchère de paris). Alfonso Barón et Luciano Rosso jouent ce duo depuis des années, toujours à guichets fermés. Dès 12 ans. 24 janvier Théâtre Marelios, La Valette-du-Var 04 94 23 62 06 lavalette83.fr

© Christophe Raynaud de Lage

© Alejandro Ferrer

10 février Théâtre Marelios, La Valette-du-Var 04 94 23 62 06 lavalette83.fr

Le faux du vrai Richard Frech est le metteur en scène du Théâtre du Lézard. Autour de ses textes est né ce spectacle de « poésies et chansons sociales » : deux comédiens et un musicien y invoquent la vie ouvrière à travers une série de portraits attachants. Un beau concert doublé d’une réflexion engagée sur la désindustrialisation, la désertification des villes moyennes, et la tentation des extrêmes lorsque le chômage frappe. 19 janvier, Les Arcs 21 janvier, Salernes 26 janvier, Vidauban 28 janvier, Montferrat 31 janvier, Le Muy 2 février, Calas Théâtres en Dracénie, Draguignan 04 94 50 59 59 theatresendracenie.com

Mais qu’est-ce qu’il fait, Monsieur Godot, depuis le temps qu’on l’attend !? Nul ne le sait, et ce n’est pas si grave, l’essentiel réside peut-être dans l’acte d’attendre. Laurent Fréchuret revisite ce grand classique de Samuel Beckett, « mis en regard avec l’absurde de notre monde en crise, et du grand marché consumériste qui, lui, n’attend rien ». Avec quatre acteurs de l’excellent Théâtre de l’Incendie, il redonne goût et matière à l’espérance et la joie de durer. 24 janvier Théâtres en Dracénie, Draguignan 04 94 50 59 59 theatresendracenie.com


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Pop up Garden

Même

Le génie multiforme de Léonard de Vinci inspire la compagnie espagnole Aracaladanza, qui lui rend hommage en beauté. Ses danseurs évoluent entre machineries, miroirs optiques, étude du mouvement, prototypes d’ailes articulées pour êtres humains tentés par les cieux, donnant chair à l’imagination sans bornes du meilleur esprit de la Renaissance. Sur une idée originale du chorégraphe Enrique Cabrera. Dès 7 ans.

Pierre Rigal part du principe que le Même n’est jamais tout à fait identique, et part en quête des possibilités de dérive qui s’ensuivent lorsque l’on met en série un événement. Non sans évoquer le jeu du téléphone arabe... Il est chorégraphe, mais ne s’interdit pas de recourir à des acteurs, musiciens et acrobates, pour traiter de multiples sujets, allant des jeux de pouvoir à l’exil, en passant par la filiation et le rapport avec la nature.

© Pedro Arnay.jpg

© X-DR.

Vuelos

27 janvier Théâtres en Dracénie, Draguignan 04 94 50 59 59 theatresendracenie.com

© C.Lazerges

La nouvelle pièce de la Cie TPO jongle avec deux concepts fondateurs. Celui du Jardin planétaire théorisé par le paysagiste Gilles Clément, qui initiait il y a 20 ans l’idée que notre Terre est un espace fini, où la nature fait jardin, à observer sans contraindre. Il y a aussi le mouvement de la chorégraphe Isadora Duncan, prêtresse d’une nouvelle danse intuitive. En route pour un voyage au pays du geste libéré et d’une philosophie environnementale consciente des surprises que peut nous offrir la nature. Sculptures en papier, images projetées au sol invitent les (jeunes) spectateurs à participer à cette invention d’un nouveau paysage.

7 février Théâtres en Dracénie, Draguignan 04 94 50 59 59 theatresendracenie.com

Les NouveLLes Hybrides Saison 2016/2017

Rencontres littéraires

26 & 27 janvier Carré Léon Gaumont, Sainte-Maxime 04 94 56 77 77 carreleongaumont.com

en sud Luberon

Février 2017 - Villelaure (84530)

Dominique Quélen

Vertiges

avec Aurélien Dumont, compositeur

Dans sa dernière création, Nasser Djemaï travaille sur l’écart entre le pays d’origine des parents immigrés, et l’image fantasmée qu’en ont leurs enfants nés en France. Il le fait en sondant le fossé qui s’est créé entre un père perçu comme « le dernier des Mohicans » et son fils, longtemps éloigné de sa famille, héritier d’une culture en perdition. Un spectacle touchant et doté d’une dimension métaphysique... D’où le titre.

Marie-Hélène Lafon Avril 2017 - Cadenet (84160)

Thomas Vinau Mai 2017 - La Bastidonne (84120) © Emile Zeizig

3 février Théâtres en Dracénie, Draguignan 04 94 50 59 59 theatresendracenie.com

Mars 2017 - Ansouis (84240)

Sébastien Brebel

avec Colin Roche, compositeur Renseignements : Les NouveLLes Hybrides 04 90 08 05 52 www.lesnouvelleshybrides.com www.facebook.com/LesNouvellesHybrides


52 au programme var alpes-maritimes

Fables, d’après Jean de La Fontaine

My Rock

© Delphine Beaumont © Charles Mignon

Il y a 12 ans, Jean-Claude Gallotta écrivait son histoire du rock. En treize chorégraphies sur treize morceaux mythiques (les Stones, Presley, les Who, les Clash…), les danseurs du groupe Emile Dubois racontent et enchantent les souvenirs, les espoirs, les découvertes du futur chorégraphe. Il y a du texte (écrit par Gallotta et Claude-Henri Buffard), une énergie galvanisante, des décibels qui décoiffent et régénèrent. Un choc « rockégraphique » à éprouver de toute urgence. Le spectacle a été repensé et développé dans une reprise l’an dernier.

Avec Hélène Fillières qui met en scène une adaptation de trois nouvelles de Simone de Beauvoir, Josiane Balasko s’empare d’un texte souvent dérangeant, toujours bouleversant, et surtout empreint d’une réalité qui traverse les époques. Elle est une femme abandonnée, révoltée, qui ne supporte plus les bruits de la vie qui bat à la fenêtre de son appartement qu’elle ne quitte plus. Le bilan d’une vie brisée.

4 février Carré Léon Gaumont, Sainte-Maxime 04 94 56 77 77 carreleongaumont.com

04 93 40 53 00

Momo

27 & 28 janvier Théâtre de Grasse theatredegrasse.com

04 93 40 53 00

Les moulins à vent ont changé, et ils sont tout aussi compliqués à affronter. Le Don Quichotte de l’auteur Charles-Eric Petit s’attaque aux maux d’aujourd’hui : la finance, la restauration rapide et la publicité. Il en faut de la constance et de la folie pour un tel défi ! L’anti-héros contemporain est transposé, dans la mise en scène de la Cie Steyaert, en griot togolais et son complice Sancho est un clown musicien. Subtil décalage, qui redonne au texte originel sa puissance critique.

© X-DR

© C. Nieszawer

21 janvier Pôle Culturel, Saint-Maximin-la-Sainte-Baume 04 94 86 18 90 st-maximin.fr

04 93 40 53 00

31 janvier Théâtre de Grasse theatredegrasse.com

3 février Théâtre de Grasse theatredegrasse.com

Cannes Jeune Ballet

Looking for Quichotte

Ils ont dépassé la soixantaine, bien installés et sans histoires. Routine et préoccupations petites-bourgeoises au programme. Sauf qu’un homme va s’inviter dans le train-train, en affirmant qu’il est leur fils. Ils tombent des nues, ignorant qu’ils avaient une progéniture ! Et c’est la supposée mère (Muriel Robin), qui soupçonne le père désigné (François Berléand) d’infidélité… Le fils s’avère être l’auteur de la pièce : Sébastien Thiéry. Dialogues loufoques et imbroglios à la fois cocasses et émouvants portent le spectacle au-delà d’un comique de situation.

Avec un carton, un journal, un sac en plastique, les deux comédiens de la Cie Tàbola Rassa donnent vie à tous les animaux de La Fontaine. Le loup, le lion, l’agneau… Les situations se mêlent, les fables racontent une seule et même histoire, celle, immuable, du pouvoir, de comment le garder ou l’arracher. Une adaptation inventive et enjouée.

© Nathalie-Sternalski

© Guy Delahaye

La femme rompue

Les élèves des Écoles Supérieures de Danse de Cannes et de Marseille présentent cette année une chorégraphie de Davide Bombana inspirée par La Petite symphonie de Frank Martin et Foudre, de Claude Brumachon, pièce créée pour le Ballet en 2012. Des répertoires bien différents, pour laisser s’exprimer les talents des jeunes danseurs : effleurements suggestifs pour l’un, corps à corps fougueux pour l’autre.

04 93 40 53 00

7 février Théâtre de Grasse theatredegrasse.com


au programme alpes-maritimes gard

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Le Bourgeois gentilhomme

Pinocchio

Claire Bardainne et Adrien Mondot, avec Mourad Merzouki l’an dernier pour la pièce Pixel nous avaient émerveillés : ils sont les inventeurs d’une scénographie mouvante, quasi vivante, générée par des images animées en direct qui occupent le plateau dans un mouvement commun avec les danseurs. C’est Yan Raballand qui chorégraphie ce nouveau spectacle. La danse épouse les envolées des images, qui enveloppent à leur tour les interprètes. Une fusion parfaite.

On ne présente plus le personnage imaginé par Carlo Collodi, morceau de bois transformé en marionnette douée de vie par un vieil homme pauvre et généreux. Sous la plume de Joël Pommerat, voilà un jeune garçon, toujours naïf mais arrogant, fuyant l’ennui plus que tout et prêt à s’étourdir de toutes ses nouvelles expériences pour découvrir le monde et ses désillusions. Si l’envoûtante mise en scène de Pommerat révèle la noirceur de la société, elle montre aussi comment devenir grand tout en restant libre.

28 janvier Palais des Festivals et des Congrès, Cannes 04 92 98 62 77 palaisdesfestivals.com

04 83 76 13 00

© Elisabeth Carecchio

Denis Podalydès a choisi de redonner à la pièce de Molière sa forme originale de comédie-ballet : sa mise en scène mêle tous les arts du genre, autour de la musique de Lully, avec les solistes de l’Ensemble baroque de Limoges, dirigés par Christophe Coin, du chant, et des ballets chorégraphiés par Kaori Ito. De quoi faire éclater toute la force comique et la naïveté de cet homme qui « écoute, voit et pratique les plus belles choses, sans jamais y rien entendre ». 20 au 22 janvier Anthéa, Antibes anthea-antibes.fr

04 83 76 13 00

Extension

Parallèle

10 février Théâtre de la Licorne, Cannes cannes.com

© JP Estournet

Les ombres blanches Quelle belle idée… Inviter le surnaturel dans la chorégraphie ! Dans ce spectacle créé l’an dernier, Nathalie Pernette convie deux revenants, qui seront eux-mêmes surpris et effrayés par le ballet des objets dans la maison hantée qui occupe la scène. Les mouvements au cordeau des danseurs se prêtent parfaitement à l’installation d’un climat surnaturel, les lumières de Caroline Nguyen magnifient l’illusion, et Thierry Collet instille quelques tours de « vraie magie » à l’ensemble. Bluffant !

Après Extrêmités, leur précédent spectacle, la bande de doux-dingues du Cirque Inextremiste poursuit son exploration des équilibres précaires sur planches et bouteilles de gaz. Avec un nouvel agrès de taille et de poids : une mini-pelle qui devient le prolongement de Rémi Lecocq, privé de son fauteuil roulant et qui prend là sa revanche ! Ses deux comparses sont désormais à la merci de ce porteur surpuissant qui vont devoir apprivoiser encore une fois les lois de la gravité…

04 83 76 13 00

8 au 12 février Anthéa, Antibes anthea-antibes.fr

27 & 28 janvier Anthéa, Antibes anthea-antibes.fr

Le sport comme outil d’oppression et d’embrigadement. Le culte du corps abordé par le prisme de l’idéologie fasciste, à l’œuvre dans l’Italie des années Mussolini et en Allemagne nazie. Bruno Geslin aborde ce sujet délicat, où l’esthétisme flirte avec la terreur, dans une composition scénique qui se concentre sur l’image de deux parallèles, évoquant les barres des gymnastes. Ce sont Nicolas Fayol et Salvatore Cappello qui incarnent et transcendent les discours et les folies du désir de performance. Georges Perec et son W ne sont pas loin. Spectacle créé à Nîmes.

© Brun Geslin

© Romain Etienne

© Pascal Victor

Le mouvement de l’air

25 & 26 janvier Théâtre Bernadette Lafont, Nîmes 04 66 36 65 10 theatredenimes.com


54 au programme spectacles

gard var

Blanc Rouge Noir

Les souliers rouges

C’est un voyage au long cours que propose la Cie flamande de Koe. Trois couleurs : une trilogie pour plonger dans les affres politico-sociétales de l’Occident. D’abord l’innocence, immaculée, puis la colère, bouillonnante, et enfin le constat, noir, qui permet d’espérer une suite plus lumineuse. Théâtre dense et ébouriffant, 4 heures de mise à nu de nos fantasmes les plus effrayants, les plus crus et poétiques aussi. Une odyssée imprévisible et passionnante.

Débarrassé de tous ses oripeaux, Dom Juan, dans cette mise en scène de Brice Cayol, se dévoile dans toute sa crudité. Deux comédiens (Cyril Amyot et Laurent Dupuy) concentrent tous les rôles de la pièce. Le texte est « nettoyé », il ne dure plus qu’une heure, il conduit le spectateur dans la spirale infernale de la quête sans fin de son héros. Pas de costumes, pas de décor. Juste les mots, les sentiments, et l’essence même du théâtre qui nous mène au cœur des passions.

© eXtraTime

© Koen Broos

Dom Juan désossé

© X-DR

1er & 2 février Théâtre Bernadette Lafont, Nîmes 04 66 36 65 10 theatredenimes.com

Concerto pour deux clowns

Rien de plus effrayant que les contes traditionnels. Ceux d’Andersen encore plus. Et celui-ci, Les souliers rouges, est tellement terrible qu’on ne le raconte presque plus jamais aujourd’hui. C’est l’histoire d’une petite fille qui a osé se parer de ces souliers trop frivoles et surtout trop féminins, qui se verra trancher les deux pieds à la hache… Aurélie Namur en a réécrit le texte. Elle y a intégré révolte et humour, deux ingrédients qui parviendront à venir à bout de l’horrible marâtre. A partir de 7 ans.

24 janvier Salle Marcel Pagnol, Anduze

25 janvier Le Cratère, Alès 04 66 52 52 64 lecratere.fr

25 janvier Salle municipale, St Germain-de-Calberte

Des clowns musiciens. La Cie Les Rois Vagabonds ne nous entraine pas sur les chemins de n’importe quelle musique : il s’agit de la noble, la classique, celle qui fait des fois un peu peur et impressionne. Bach, Strauss, Vivaldi ! Une clownesse altière qui joue de l’alto et son comparse tout vouté qui traine son tuba. Le public d’Avignon les a récompensés en 2013, et la piste est encore parsemée d’étoiles pour ces deux inventeurs de cirque. 17 janvier Le Cratère, Alès 04 66 52 52 64 lecratere.fr 4 février La Croisée des Arts, Saint-Maximin-La-Sainte-Baume 04 94 86 18 90 saint-maximin.fr

Tirésias

27 janvier La Maison de l’Eau, Allègre-les-Fumades 04 66 52 52 64

lecratere.fr © Juan Robert

© Philippe Rappeneau

26 janvier Espace Georges Brun, St Privat-des-Vieux

In the box Le chorégraphe David Wampach prévoit de clôturer ses 5 ans de résidence au Cratère par une soirée qui décoiffe. Il a plein de surprises dans sa boite, qui jailliront sans crier gare : des retrouvailles, des partages, des inventions… Avec la participation de jeunes danseurs ou musiciens amateurs, originaires d’Alès. Vous voulez vous aussi sortir de la boite ? Audition le 30 janvier : préparez votre numéro de 3 à 5 minutes. Toutes les danses sont bienvenues : salon, hip-hop, jazz, classique… 3 février Le Cratère, Alès 04 66 52 52 64 lecratere.fr

Pour avoir expérimenté tour à tour la condition d’homme et de femme, Tirésias, grand connaisseur de l’âme humaine, a été puni par la déesse Héra, qu’il a vexée et le rendra aveugle. Zeus, en dédommagement, lui donne le pouvoir de prophétie et une vie si longue que ce personnage légendaire vit encore aujourd’hui. Ressassant les erreurs humaines, toujours réitérées, il retrouve goût à sa mission quand il doit sauver Léo de ses idées suicidaires. Philippe Delaigue offre au personnage un « come back » novateur, où musique et réseaux sociaux dialoguent avec Ovide et Sophocle. 31 janvier & 2 février Le Cratère, Alès 04 66 52 52 64 lecratere.fr


au programme spectacles

hérault

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Begin the beguine En 1987, déjà malade, le cinéaste américain John Cassavetes avait écrit un texte de théâtre, avant de disparaître un an plus tard. Il n’a jamais été joué. Deux hommes, qui devaient être les comédiens fétiches de l’auteur (Ben Gazzara et Peter Falk, morts eux aussi depuis), décident de vivre une soirée de stupre, pied de nez à la vie qui se termine pour eux en cul de sac, et magnifique ode à l’amitié qui lie ces deux personnages. C’est Jan Lauwers qui met en scène cette première mondiale, dans les pas de son mentor. Un événement.

Bella Figura Un incident, qui pourrait sembler mineur. Un homme laisse échapper à sa maitresse qu’il compte l’inviter dans un restaurant que lui a conseillé sa femme… La pièce raconte la soirée qui suit cette erreur originelle. Sur un parking, deux couples, liés par quelque chose à découvrir, se croisent, se défient. Yasmina Reza met en scène son texte, créé début janvier à Toulon, avec Emmanuelle Devos en femme sensible traversée par la vie qui court.

Mass B Béatrice Massin est une chorégraphe spécialiste de la danse baroque. Dans cette nouvelle création, elle met en tension la Messe en si mineur de Jean-Sébastien Bach, les mouvements codifiés du baroque, et les questionnements contemporains autour de la marche, celle qui porte tous ceux qui fuient leur pays, les ruines, la terreur. Dix danseurs venus d’horizons différents s’approprient ce langage, largement émancipé depuis sa naissance au XVIIème siècle.

Traum © Patrick Berger

Yasmina Reza © Pascal Victor - ArtcomArt

26, 27, 28 & 31 janvier, 1er au 3 février Domaine de Grammont, Montpellier 04 67 99 25 00 humaintrophumain.fr

24 & 25 janvier Domaine d’O, Montpellier 0 800 200 165 domaine-do-34.eu

18 & 19 janvier Opéra Comédie, Montpellier 0 800 600 740 montpellierdanse.com

2 février Domaine d’O, Montpellier 0 800 200 165 domaine-do-34.eu

L’univers de la créatrice (plasticienne, cinéaste) SMITH est hanté par les rêves. Traum, mot allemand pour « rêve », évoque aussi le trauma, concept qui nourrit ce travail issu d’une résidence au Centre Chorégraphique de Montpellier. Il sera question, dans une exposition, un film, et une performance chorégraphique, de métamorphose, narcolepsie, constellations,… 17 & 18 janvier (exposition et film) 25 janvier (performance) ICI Institut Chorégraphique International, Montpellier 04 67 60 06 70 ici-ccn.com

© X-DR

Les artistes de la Cie O.p.U.S. reviennent avec l’événement qu’ils avaient déjà présenté à Balaruc-le-Vieux en 2015, la déjantée Quermesse de Ménetreux (sic). Cette fois-ci, ils font la tournée des lieux décalés ou insolites du Bassin de Thau, à la rencontre du public, en toute simplicité. Les pensionnaires de la maison de retraite de Ménetreux vont encore surprendre et entrainer sur des chemins libérateurs tous ceux qui voudront se prêter à l’expérience. Une excursion pleine de rebondissements, à l’initiative de la Scène nationale de Sète.

© Spectre Productions & Galerie les Filles du Calvaire

L’excursion

Il danse, dans un style hors style, hors des époques et des courants, en frac noir accompagné par la composition du pianiste Yves Meierhans. Flannan Obé nous propose un spectacle entre cabaret humoristique et music hall, où il nous livre ses souvenirs, beaux ou si décevants qu’il faut mieux en rire, ses rêves aussi. A cœur ouvert, il partage ces épisodes avec le public. Mais ne serait-il pas finalement cette libellule, fantasque et gracieuse, imprévisible ?

© Paule Thomas

Je ne suis pas une libellule

16 au 28 janvier dans les communes du Bassin de Thau 04 67 74 66 97 theatredesete.com


56 au programme hérault gard bouches-du-rhône

Opus 14

Tout passe

L’un des porte-parole de la danse hip-hop, le chorégraphe Kader Attou, nous éblouit dans sa nouvelle création avec une réflexion sur le groupe, ou comment en sortir, comment le consolider, comment y exister. Le hip-hop est une expression qui se définit à la fois par une exacerbation des personnalités et la quête d’appartenance. Démonstration par le mouvement des 16 danseurs sur le son électro de Régis Baillet.

« …sur la nécessité de mordre ses amis », le sous-titre de la pièce, donne le ton. Roger, déclassé social, terré dans sa caravane avec vue imprenable sur l’autoroute, voit débarquer dans sa mélancolie un chien. Lequel enlève vite son masque, et le voilà qui parle, qui devise et philosophe avec son nouveau maitre. Il se lancera même dans une imitation très convaincante de Sarkozy… Un théâtre qui crie l’urgence de vivre et la nécessité du combat pour exister. Mise en scène de Sébastien Bournac.

© Marie Clauzade

© Michel Cavalca

Dialogue d’un chien avec son maître

Monté en 2014 par la Cie In Situ, ce texte adapté du récit de Vassili Grossman donne la parole à Ivan Gigorievitch, de retour après 30 ans de détention au Goulag. Il nous livre ses réflexions sur son pays, sorti du servage, tombé dans le stalinisme, ravagé par le nazisme, terrorisé encore ensuite par l’arbitraire. Jean Varela s’empare de ses mots et nous livre un témoignage précieux des fureurs de l’Histoire. 1er au 3 février Théâtre sortieOuest, Béziers 04 67 28 37 32 sortieouest.fr © François Passerini

17 & 18 janvier Théâtre Molière, Sète 04 67 74 66 97 theatredesete.com 20 & 21 janvier Le Cratère, Alès 04 66 52 52 64 lecratere.fr

20 & 21 janvier Théâtre sortieOuest, Béziers 04 67 28 37 32 sortieouest.fr

7 au 11 février Les Bernardines, Marseille 08 2013 2013 lestheatres.net

Ceux qui restent © Christophe Raynaud De Lage

Masse critique

© Emilie Bathe݀s

Le vin bourru

La première création présentée dans le tout nouveau lieu de production enfance et jeunesse de Mireval, portée par la Scène nationale de Sète, est un spectacle de cirque qui fait parler les pierres. On les empile, on les entrechoque, on les défie par l’équilibre. L’équilibriste Sébastien Le Guen et le musicien Jérôme Hoffman inventent un moment plein de sensations, entre concert électro, performance plastique et défi physique. 19 & 20 janvier Centre culturel Léo Malet, Mireval 04 67 74 66 97 theatredesete.com

Jean-Claude Carrière, dans un livre de souvenirs, nous contait son enfance dans un village héraultais viticole, entre 1931 et 1945. Sans esbroufe, il s’était donné pour mission d’adopter un regard distancié sur celui qu’il avait été, loin de celui qu’il est devenu. Pour l’auteur prolifique, cela a été, confie-t-il, une expérience périlleuse. Gilles Buonomo a adapté ce texte sensible et l’incarne dans une mise en scène de Grégory Nardella. 27 janvier Foyer rural, Mèze 3 février Salle polyvalente, Quarante 4 février Les Verreries, Moussans 04 67 28 37 32

Paul Felenbok et Wlodka Blit-Robertson sont parmi les derniers témoins qui restent. Cousins, ils avaient 7 et 12 ans dans le ghetto de Varsovie. Ils se sont cachés, ils se sont échappés, ils ont vu avec leurs yeux d’enfants ce qu’ils ont, 70 ans plus tard, raconté au metteur en scène David Lescot. Avec la comédienne Marie Desgranges, ils nous redisent ces mêmes phrases, avec les hésitations, les vides, les troubles. Le dispositif est très simple, et pourtant l’idée de théâtre est prégnante. Le pathos est évacué, les mots sont rois, les nuances de jeu viscérales. Une réussite absolue. 1er & 2 février Eglise Saint Félix, Bayssan

sortieouest.fr 3 février Théâtre sortieOuest, Béziers 04 67 28 37 32 sortieouest.fr


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58 au programme cinéma bouches-du-rhône

Souvenirs argentiques

Hommes et bêtes

Quand il a fallu partir

Maria do Mar, de José Leitao de Barros c X-D.R

Après la Cinémathèque de Bologne en 2016, le MuCEM invite la Cinémathèque de Lisbonne pour des rendez-vous mensuels de janvier à juin 2017, l’occasion de découvrir une sélection de longs-métrages récemment restaurés, tous projetés en 35 mm. Le cycle commence le 19 janvier à 19h avec une rencontre avec José Manuel Costa, directeur de cette cinémathèque fondée en 1948, qui se positionne clairement sur la préservation, la restauration et la diffusion de films sur leur support d’origine. À 21h, ciné concert : Maria do Mar, un film de José Leitão de Barros, qui raconte les amours de deux jeunes gens dont les familles sont ennemies. Ce film, tourné en 1930 avec des acteurs professionnels, amateurs et habitants du village de Nazaré, sera présenté avec une création musicale du pianiste et compositeur Roberto Tricarri et le Quartet HUM. 19 janvier MuCEM, Marseille 04 84 35 13 13 mucem.org

Le cinéma, langue universelle ?

Film Socialisme, de Jean-Luc Godard © Wild Bunch Distribution

Autour de l’exposition Après Babel, traduire (voir p 14-15), le MuCEM propose un weekend de projections : le 4 février à 18h30, la méditation cinématographique itinérante et polyglotte de Jean-Luc Godard avec Film Socialisme, et à 21h l’un des premiers films à aborder ouvertement l’homosexualité féminine, filles en uniforme de Leontine Sagan. Le 5 à 15h, l’étonnant film bilingue Allô Berlin ? Ici Paris ! de Julien Duvivier, et à 17h15 Le Port de la drogue de Samuel Fuller. MuCEM, Marseille 04 84 35 13 13 mucem.org

De leur passage sur les ondes de France Inter, ils ont gardé le surnom des « Kids ». Mehdi Meklat et Badroudine Saïd Abdallah forment un duo qui est d’abord né sur les pages web du Bondy Blog, le média citoyen créé lors des émeutes des banlieues de 2005. Plumes acérées et véritables touche-à-tout, Mehdi et Badrou présentent ici leur premier film documentaire. Il relate l’histoire de la barre Balzac, au cœur de la cité des 4000 à La Courneuve. Badrou y a grandi, Mehdi vivait tout proche. En 2011, elle fut démolie. Qu’en reste-t-il aujourd’hui ?

Gorge Cœur Ventre, de Maud Alpi © Shellac

La philo mène à tout et parfois même au cinéma ! Maud Alpi, passée de Norm Sup à la réalisation de vidéos entre amis, puis aux courts métrages, en est un exemple. Gorge Cœur Ventre est son premier long, qu’elle a écrit avec Baptiste Boulba-Ghilgna. Un documentaire-fiction dans l’enfer d’un abattoir, où un jeune homme devenu « le rouage d’une machine dévoratrice » se trouve « en bordure », et les animaux qu’il conduit à la mort « au centre ». Elle sera là le 20 janvier à 19h30 pour présenter son travail et en débattre. Une soirée organisée en partenariat avec l’Association pour la Libération Animale de la Région Marseillaise (ALARM). 20 janvier Cinéma Le Gyptis, Marseille 04 95 04 96 25 lafriche.org

Quand il a fallu partir de Mehdi Meklat et Badroudine Saïd Abdallah © Films de Pierre

24 janvier Le Merlan, Marseille 04 91 11 19 20 merlan.org

Deux femmes pour une petite leçon

Vidéo FID 2017 1 Le 17 janvier à 20h seront projetés deux films de Laura Huertas Millan, en sa présence : Sol Negro, le portrait de sa tante Antonia, une chanteuse lyrique à la beauté sombre et au destin tragique ; Voyage en la terre autrement dite, tourné entièrement dans la serre équatoriale de Lille, bâtiment construit en 1970 par Jean-Pierre Secq, s’inspire des premiers récits d’exploration naturelle et ethnographique produits en Amérique par des conquistadors, des missionnaires ou des scientifiques, évoquant la naissance du « Nouveau Monde » et les images qu’il a engendrées.

Sol Negro, de Laura Huertas Millan © Evidencia Films - Les Films du Worso

04 95 04 44 90

17 janvier FID, Marseille fidmarseille.org

© Françoise Hughier

Deux femmes pour donner une Petite leçon de photographie, au Gyptis le 9 février à 19h30 : Ilka Kramer, née en 1969 en Allemagne, connue pour son beau travail sur le paysage, l’espace, l’architecture, et son illustre aînée Françoise Huguier. Photographe de mode, créatrice de la première Biennale de photographie africaine à Bamako, lauréate de la Villa Médicis, exposée à la Maison Européenne de la photo, invitée de Christian Lacroix à Arles en 2008, Françoise Huguier, qui a parcouru le monde, se définit comme une « photographe documentaire ». À ne pas rater ! 9 février Cinéma Le Gyptis, Marseille 04 95 04 96 25 lafriche.org


59

Migrants

Profession, chef op’

Sport et ciné

À la fin des années 60, le « Nouvel Hollywood » s’échappe des studios et filme en extérieur. L’art des directeurs de photographie s’en trouve bouleversé. Vilmos Zsigmond est de ceux-là et après un documentaire inédit à Marseille qui fera la lumière sur cet homme es-lumière, disparu il ya tout juste un an, on pourra à nouveau apprécier son talent dans le terrifiant Délivrance de John Boorman dont il signe l’image. C’est au Gyptis, le 29 janvier à 16h !

Dans le cadre de la Capitale européenne du sport 2017, les Lumières de l’Eden propose, le 19 janvier à 19h, Les Chariots de feu (1981) de Hugh Hudson, en présence de Morgane Barucci et Enzo Jiacomino, Trophées des meilleurs sportifs 2016 de la Ciotat. Dans les années 1920, deux athlètes britanniques prédisposés pour la course à pied se servent de leur don, l’un pour combattre les préjugés xénophobes, l’autre pour affirmer sa foi religieuse. Les chariots de feu, au titre inspiré d’un poème de William Blake, évoque l’histoire vécue de deux athlètes britanniques concourant aux Jeux olympiques d’été de 1924 à Paris.

Vilmos Zsigmond © Lost Films

Fuocoammare, de Gianfranco Rosi © Météore Films

Le 24 janvier à 19h, dans le cadre du nouveau cycle cinématographique, le Goethe-Institut de Marseille et le Videodrome 2 invitent l’auteur suisse Flavio Steimann et l’éditrice Marie Hermann (Editions Agone) à l’occasion de la parution du roman, Bajass. À 20h, projection de Fuocoammare de Gianfranco Rosi (Ours d’or de la Berlinale 2016), un documentaire consacré à l’île de Lampedusa où débarquent les migrants après leur traversée de l’enfer. 24 janvier Vidéodrome 2, Marseille 04 91 42 75 41 videodrome2.fr

29 janvier Cinéma Le Gyptis, Marseille 04 95 04 96 25 lafriche.org

Le divan de Fanny Les Chariots de feu, de Hugh Hudson © Warner Bros

Chaque jour que Dieu fait Le 31 janvier à 18h à l’Institut Culturel Italien, projection de Tutti i santi giorni de Paolo Virzì, en présence de l’actrice Federica Victoria Caiozzo. L’histoire de deux amoureux que tout oppose et tout rapproche : Guido, patient, posé et cultivé, travaille de nuit comme portier dans un hôtel et étudie les langues anciennes. Antonia, angoissée, instable, travaille de jour dans une entreprise de location de voitures et veut devenir chanteuse. Un jour, ils décident d’avoir un enfant…

Tutti i santi giorni, de Paolo Virzì © 01 Distribution

31 janvier Institut Culturel Italien, Marseille 04 91 48 51 94 iicmarsiglia.esteri.it

04 96 18 52 49

19 janvier Eden Théâtre, La Ciotat edencinemalaciotat.com

Le divan de Staline, de Fanny Ardant © Alfama Films Production et Leopardo Filmes

Berlin à l’Eden

Soirée exceptionnelle au cinéma Les Variétés le 17 janvier dès 20h, organisée en collaboration avec le Collectif Cinéma et psychanalyse et Le Séminaire de l’École de la cause freudienne : Hervé Castanet conversera avec Fanny Ardant à l’occasion de la projection de son dernier long métrage en tant que réalisatrice, Le Divan de Staline. Adapté du roman de Jean-Daniel Baltassat, le film met en scène le « petit père des peuples » incarné par l’incontournable Gérard Depardieu, sa maîtresse Lidia (Emmanuelle Seigner) et un jeune peintre (Paul Hamy). Ces trois-là se retrouvent au cœur d’une forêt, dans le bureau d’un château où trône un divan, semblable à celui de Freud à Londres. S’instaure alors un jeu trouble, dangereux et pervers.

Dans le cadre de sa participation au cycle Villes de cinéma organisé par Cinémas du Sud, l’Eden a choisi Berlin : films, conférence et un ciné concert le 22 janvier à 18h : Berlin, symphonie d’une grande ville de Walter Ruttmann (1927), un film monté par Dziga Vertov qui montre la vie et le rythme d’une grande métropole de l’aube à minuit, accompagné ici par le pianiste et facteur de piano Robert Rossignol. Une occasion de (re)voir Un, deux, trois de Billy Wilder, Victoria de Sebastian Schipper, La Vie des autres de Florian Henckel von Donnersmarck et Seul dans Berlin de Vincent Pérez. Sans oublier, le 27 à 18h, la conférence de Pierre Gras, historien du cinéma : Berlin au cinéma.

17 janvier Cinéma Les Variétés, Marseille 04 96 11 61 61 cinemetroart.com

04 96 18 52 49

Eden Théâtre, La Ciotat edencinemalaciotat.com


60 au programme cinéma bouches-du-rhône var hérault

Corniche Kennedy

Back home

L’Histoire sans fin

Back home, de Joachim Trier © Jakob Ihre Motlys c Memento Films

Le 29 janvier à 18h30, à Eden Théâtre, Art et Essai Lumière propose Back home, 3e long métrage de Joachim Trier. Le film ausculte le dysfonctionnement d’une famille en deuil et en pleine déroute depuis la perte de la mère et épouse (Isabelle Huppert), qui s’était fait connaître comme photographe de guerre. La séance sera animée par Mathieu Lericq, doctorant en études cinématographiques. 29 janvier Art et Essai Lumière, La Ciotat 06 64 85 96 40 artetessailumiere.fr

Un classique des années 80, un peu tombé dans l’oubli aujourd’hui : les plus jeunes pourront découvrir le film de Wolfgang Petersen et les plus âgés retrouveront sans doute avec délice l’histoire fantastique de Bastien. Agé de 10 ans, le jeune garçon dévore les romans d’aventure. Jusqu’au jour où il vole un livre qui le projette dans le monde extraordinaire de Fantasia et ses incroyables créatures.

L’Histoire sans fin, de Wolfgang Petersen © Warner Bros

18 janvier Théâtre Liberté, Toulon 04 98 00 56 76 theatre-liberte.fr

Mourir à 30 ans Marley

Mourir à 30 ans, de Romain Goupil © X-D.R

En lien avec son spectacle Le Bac 68, qu’il jouera au Liberté le lendemain, Philippe Caubère proposera une séance cinéma le 17 janvier. Mourir à 30 ans revient sur les années rebelles 60-70, où la conscience révolutionnaire de la jeunesse était quasiment une norme. Dans cette œuvre, réalisée en 1982, Romain Goupil se souvient de la guerre du Viêt-Nam ou des barricades de 68, et met cette période en perspective avec les désillusions qui en ont découlé. 17 janvier Théâtre Liberté, Toulon 04 98 00 56 76 theatre-liberte.fr

Réalisé en 2012 par Kevin Macdonald, ce long documentaire (2h24) plonge dans toute la mythologie qui entoure le personnage de Bob Marley. Musicien incontournable du XXe siècle, icône du reggae, Marley est aussi une figure sociale et politique majeure de cette époque. À partir d’images d’archives rarissimes et de nombreux témoignages, le cinéaste dresse le portrait d’un artiste et révèle au plus près le véritable phénomène culturel universel que représente l’homme.

Corniche Kennedy, de Dominique Cabrera © Jour2fête

Face à la mer, du haut d’un rocher ou d’un muret, des ados se jettent à l’eau. Leur but est de prendre des risques, de sentir l’adrénaline, le frisson du plongeon, l’ivresse de l’envol. L’histoire se passe à Marseille. La romancière Maylis de Kerangal a vu ces minots qui méprisent le danger, les a suivis, observés, rencontrés, racontés. La cinéaste Dominique Cabrera s’est saisie de son roman et lui a donné des images (voir critique dans Zib 98). Elle sera présente au cinéma Diagonal de Montpellier le 16 janvier pour l’avant-première de son film., et le 18 janvier pour la sortie nationale, aux Variétés à Marseille (voir p. 10 et 11). 16 janvier Cinéma Diagonal, Montpellier 04 67 58 58 10 cinediagonal.com 18 janvier Cinéma Les Variétés, Marseille 04 96 11 61 61 cinemetroart.com

Soirée courts-métrages

Feu mes frères de Simon Rieth © X D R.

Marley, de Kevin Macdonald © Wild Side Films -Le Pacte

24 janvier Théâtre Liberté, Toulon 04 98 00 56 76 theatre-liberte.fr

Pour sa 6e édition, le rendez-vous du court métrage régional initié par Languedoc-Roussillon Cinéma se tiendra le 19 janvier à l’Utopia de Montpellier. Deux films radicalement différents seront au programme, signe de la variété de la création locale. Feu mes frères, de Simon Rieth, tourné dans l’Hérault, conte une histoire d’amour qui arrive à échéance lors d’un weekend brûlant. Bougre, de François-Olivier Lespagnol, tourné dans l’Aude, se déroule au XIIIe siècle, sur fond de croisades et de procès d’hérétiques. 19 janvier Cinéma Utopia, Montpellier 04 67 52 32 00 cinemas-utopia.org


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62 au programme cinéma

Le cap des 30

L

’année 2017 sera l’année des 30 ans des Rencontres Cinéma de Manosque que nous prépare avec son énergie et ses convictions Pascal Privet. Du 31 janvier au 5 février, découvertes, hommages, rencontres avec les cinéastes qu’il suit au fil de leurs œuvres. Ainsi Kôji Fukada dont il avait présenté La Grenadière et Au revoir l’été en 2014 : le jeune réalisateur japonais sera à Manosque avec Harmonium, film qui pose la question du système familial, montre la solitude originelle et fait apparaître le lien perdurant malgré tout. En avant-première, Sayonara inspiré d’une pièce de théâtre d’Oriza Hirata. Kôji Fukada ne sera pas le seul Japonais. Invité aussi Katsuya Tomita, avec le film très remarqué Saudade, qui nous emmène dans la communauté brésilienne et le milieu du hip hop. On pourra voir, également, en avant-première, son dernier film Bangkok Nites, qui se déroule dans la rue Thaniya, un quartier chaud destiné aux touristes japonais. Autre invité très attendu, Alejandro Jodorowsky, avec qui on pourra échanger après avoir (re)vu La Danza de la Realidad et La Montagne sacrée. Le cinéaste visionnaire parlera aussi de Poesia Sin Fin, son 8e long métrage où il revient sur son adolescence et ses premiers pas sur la scène artistique de

Le Ruisseau, le pré vert et le doux visage, de Yousry Nasrallah © Pyramide Distribution

la petite ville chilienne de Tocopilla jusqu’à son embarquement pour la France. On retrouvera avec plaisir une amie des Rencontres, Claire Simon, qui présentera en avant-première Le Concours, évoquant le difficile parcours de sélection pour intégrer la FEMIS. Autre habitué, Yousry Nasrallah avec un de ses premiers films, Mercedes et son dernier, en ouverture le 31 janvier, Le Ruisseau, le pré vert et le doux visage, un hymne à la liberté qui parle d’amour, de sexe et de nourriture. Alessandro Comodin sera là aussi avec L’Eté de Giacomo et I tempi felici verranno presto, un voyage dans le cœur obscur de la forêt et des fables. On ne pourra pas en revanche rencontrer le jeune cinéaste iranien d’origine kurde, Keywan Karimi condamné à purger une peine d’un an de prison et à recevoir 223 coups de fouet pour « insultes contre les valeurs sacrées » pour son documentaire sur les graffitis politiques à Téhéran, Writing on the City. C’est son producteur François d’Artemare qui accompagnera Drum (Semaine de la Critique et Festival de Venise), l’histoire d’un avocat à Téhéran, dont la vie va être bouleversée. Et puis, il y a tous les films-souvenirs dont certains ont été projetés lors des premières Rencontres, les merveilleux Où est la maison

de mon ami de Kiarostami, L’Homme qui plantait des arbres de Frédéric Back, le mythique La Chasse au lion de Jean Rouch… Et bien d’autres encore ! 23 films que vous pourrez voir au Théâtre Jean le Bleu et au cinéma Le Lido. Les baisses de subventions successives, d’année en année, empêchent la poursuite de ces Rencontres, si intenses et si riches de découvertes. La 30e édition sera donc la dernière. On ne peut que le regretter ! ANNIE GAVA

Rencontres Cinéma de Manosque 31 janvier au 5 février Théâtre Jean le Bleu, Cinéma Le Lido, Manosque 04 92 70 35 45 vertigo2.imingo.net


critiques arts visuels

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Une collection bien vivante

L

es dix dernières années de la vie de la collection du Pavillon de Vendôme, à Aix-en-Provence, sont marquées par un choix très clair : celui du dialogue entre le musée, la photographie, les arts graphiques et les artistes contemporains qui y sont intervenus. Christel Roy, coordinatrice des musées de J.J. Surian, Ma nuit chez Lucrèce © X-D.R la Ville d’Aix-en-Provence et responsable du Pavillon de Vendôme, défend humaines. En 2016, Vincent Bioules a fait l’idée d’une collection qui se construit par donation des dix dessins préparatoires à affinités, chaque exposition d’un artiste invité L’Atelier gris qu’il réalisa lors de l’Année à investir l’esprit du lieu étant l’occasion d’ac- Cézanne 2006 et, à l’heure où nous écrivons, quérir une œuvre pour soutenir et promouvoir la veuve de Claude Garanjoud (1926-2005) la création. Réalisé in situ par Alfons Alt à vient d’offrir cinq de ses œuvres. En 2008, le l’occasion de l’exposition Tentations en 2015, musée acquit Tulipe noire et Oignon germé son vitrail est en cours d’acquisition grâce de Denis Brihat quand le photographe fit à l’aide financière du Conseil départemental donation de Cardons, Jardin de Villandry… (50 %) et de l’Association des Amis du musée. Aussi, comment mieux remercier les artistes De même les expositions Semblances de et les donateurs si ce n’est en organisant des Sophie Menuet en 2014 et Figures libres accrochages ponctuels au cœur même du de Dominique Castell en 2016 sont venues musée qui les a inspirés, dont ils ont offert enrichir la collection qui, comme le souligne une relecture personnelle et restitué leur Christel Roy, doit également son dynamisme perception singulière ? aux donations des artistes ou de leurs sur- Pour fêter ces « retrouvailles », place à des vivants. Tout est une question de relations pièces en résonance avec le lieu. De Vincent

Bioulès à Sophie Menuet, de Denis Brihat à Jean-Jacques Surian, de Piotr Klemensiewicz à Jean-Pierre Sudre, de Francois Mezzapelle à Christian Tagliavini, c’est l’histoire de rencontres, d’affinités et de complicités entre onze artistes et le musée qui se dessine. Comme en 2014, lorsque le Pavillon de Vendôme organisa une exposition célébrant les 80 ans de Lucien Clergue deux mois avant sa disparition, et dont il conserve précieusement la trace indélébile à travers Nu zébré et Carte de cœur aux deux Madone. MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

10 ans d’acquisitions et de donations jusqu’au au 5 mars Pavillon de Vendôme, Aix-en-Provence 04 42 91 88 75 aixenprovence.fr

Des écheveaux mal ficelés

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réinterprétation. D’une pièce réalisée en 2013 à partir d’un carton de Thomas Gleb (19121991) et d’une pièce de Mathieu Matégot (1910-2001). Seule Toute personne 2 - Tissage métissage des architectes Vincent Bécheau et Marie-Laure Bourgeois, achevée en mars 2016 dans les ateliers Bernet à Felletin, fait la brillante démonstration du regard créatif des artistes vivants sur ce savoir-faire ancestral. Pièce majeure de l’exposition, elle en occupe d’ailleurs tout l’espace… Quant aux données historiques et pédagogiques sur les métiers de la tapisserie, celles-ci sont contenues dans un livret de 20 pages diffusé gratuitement, et donc indispensable. M.G.-G. © Nathalie Ammirati

i pédagogique, ni tête chercheuse, Trames d’Aubusson, tapisseries contemporaines au centre d’art Les Pénitents Noirs à Aubagne laisse dubitatif. Confiée à Jacques Dubois, l’exposition se focalise sur le peintre cartonnier Marc Petit, son ami, dont on découvre un ensemble d’œuvres au style chloroformé dans les années 70, et pléthore de dessins exposés à la lumière naturelle (un comble pour leur conservation). Ironie de l’histoire, ce qui est présenté comme des tapisseries contemporaines ne franchit pas la barre du XXème siècle : Jean Lurçat (1892-1966), Hans Arp (1887-1996), Victor Vasarely (1906-1997) dont on préfèrera les tapisseries monumentales de la fondation aixoise, et Georges Braque (1882-1963). Pour le « renouveau » contemporain, il faudra se contenter de la partie introductive de l’exposition composée d’un dessin préparatoire de Marc Petit, du carton, de l’œuvre et d’une

Trames d’Aubusson, tapisseries contemporaines jusqu’au au 15 avril Centre d’art Les Pénitents Noirs, Aubagne 04 42 18 17 26 aubagne.fr/aubusson


64 critiques arts visuels

plus d’arts visuels sur journalzibeline.fr

Combas au pluriel Trois expositions pour le prix d’une à la Collection Lambert : une sélection d’œuvres provenant du musée Angladon, les travaux des diplômés d’écoles d’art, et, entre les deux, le corps de l’événement constitué de presque trois cents œuvres de Robert Combas. Salle aux Arcades : une sculpture de Robert Combas confrontée à une peinture murale de Sol LeWitt © C. Lorin/Zibeline

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n s’agrandissant sur l’ancienne Ecole des Beaux-Arts, la Collection Lambert a quasi doublé sa superficie et en profite. Pour sa nouvelle saison, trois expositions bien différentes se succèdent. Chardin, Van Gogh, Cézanne, Picasso, Man Ray, Modigliani... et masques africains amorcent la visite comme une invitation à passer de

l’autre côté de la rue de la République, au musée Angladon récemment rénové et qui conserve de belles collections anciennes et modernes. Puis le visiteur se retrouve rapidement face aux œuvres de Robert Combas dont le parcours débute symboliquement par un tableau à plusieurs mains avec les initiateurs de la Figuration Libre née dans les

années quatre-vingt : Blanchard, Di Rosa, Boisrond et Combas lui-même. Une œuvre d’apparence plus libre que les nombreuses suivantes, car exemptée de la saturation du support et des graphismes récurrents du style caractéristique de l’artiste. Plus de 250 pièces jubilatoires, trash, scatologiques souvent (à lire les commentaires en légende

Voir avec les mains peut retrouver les originaux dans les salles de la collection permanente, le public est invité à découvrir les formes avec ses mains. On ferme les yeux, et les courbes, les matières, les creux des hanches, la nudité de cet Amour au papillon (Antoine-Denis Chaudet) naissent sous le bout de nos doigts. Les deux femmes l’Été et l’Hiver, de Houdon, sculptures emblématiques © Montpellier Méditerranée Métropole du musée, sont à portée de main, à côté de son Voltaire oucher pour mieux voir. C’est une assis, enveloppé d’un drapé dont on découvre expérience nouvelle, et presque un peu la mystérieuse profondeur… transgressive que propose la nouvelle L’art et la matière, proposée en partenariat exposition du musée Fabre à Montpellier. avec le musée du Louvre, ouvre un pan Avec dix moulages de sculptures dont on nouveau dans l’accès à l’œuvre. Ici on touche,

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on s’attarde, on partage. L’engagement du visiteur est physique. La découverte se fait centimètre par centimètre, les trois dimensions sont palpables. Un audioguide sollicite notre oreille : Laure Olives, consultante non-voyante attachée au Service des publics du musée accompagne nos mains, réveille nos sensations, interroge nos perceptions. C’est un monde nouveau qu’elle nous aide à parcourir. Au début on ne sent rien – on ne voit rien. On va trop vite, on cherche à reconnaître plutôt que découvrir. Puis, un œil surgit, une bouche entrouverte surprend, des cheveux fins sur un front émeuvent. Alors l’œuvre prend vie et le dialogue mains-matière peut s’instaurer. Un espace découverte, dédié aux enfants, permet de toucher, sentir, appréhender différentes textures, du souple au dur, du doux au rugueux. Apprentissage ludique, que les adultes pratiquent d’ailleurs avec autant, voire plus de délices.


au programme arts visuels hérault

sur les cartels et parfois dans l’œuvre même !), de grand et très grand format comme cette monumentale Guerre de Troie ou plus modestes avec des dessins à l’encre, crayon, stylo bille ; et quelques sculptures qui complètent ce qui n’est pas vraiment une rétrospective puisque l’exposition est composée presque exclusivement de la collection personnelle d’Yvon Lambert, depuis les débuts de leur fructueuse collaboration dans les années quatre-vingt, jusqu’à la fin en 1990. Dans ce capharnaüm visuel on pourra apprécier le contraste avec les wall drawings de Sol LeWitt restés en place. On mesure ainsi l’écart entre les générations et les esthétiques, défendues, dans leurs divergences, par le galeriste. Une posture encore assumée aujourd’hui par Yvon Lambert. Le parcours se termine – et ouvre sur l’avenir - avec la jeune génération issue des écoles d’art. Rêvez ! propose une sélection de travaux d’élèves diplômés de sept Ecoles des Beaux-Arts du Sud, dans le cadre de leur projet de diplôme. Peu de peinture et de débordement chromatique ici, mais majoritairement des installations faisant appel aux matières et objets, au propos plus conceptualisé. Un Prix Yvon Lambert pour la jeune création vient d’être créé à leur intention. Un nouveau combat de Lambert ! CLAUDE LORIN

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Yohann Gozard 23.09.2016, 03h51 Courtesy de l’artiste. Projet photographique réalisé dans le cadre de l’exposition Retour sur Mulholland Drive, La Panacée

Du film à l’objet d’art Le nouveau directeur de La Panacée, Nicolas Bourriaud, inaugure son mandat avec Retour à Mulholland Drive. 24 artistes contemporains proposeront une invitation au décalage. Dans un parcours constitué d’œuvres qui explorent le potentiel énigmatique de choses apparemment lisses ou dérisoires, faisant ainsi référence au fameux cube bleu du film de David Lynch, négligemment échappé d’un sac et emprunt d’un mystère effrayant, il sera question de « minimalisme fantastique » et d’« inquiétante étrangeté ». Comme le cinéaste, devenu référence en art contemporain, les propositions joueront avec les codes de la culture populaire, jusqu’à inventer peut-être un surréalisme 2.0. AZ

Les Combas de Lambert jusqu’au 5 juin Collection Lambert, Avignon 04 90 16 56 20 collectionlambert.fr

Retour sur Mulholland Drive du 28 janvier au 23 avril La Panacée, Montpellier 04 34 88 79 79 lapanacee.org

Lorsque l’œil reprend du service, l’œuvre est devenue familière. Quelque chose de véritablement intime s’est noué. Pour accompagner cette exposition, des photographies de la série Les Aveugles, réalisées par l’artiste Sophie Calle en 1986, jalonnent le parcours des collections permanentes. Elle avait demandé à des personnes qui n’ont jamais vu de lui citer leur image de la beauté. Quelques-uns des diptyques – une photo noir et blanc de l’interlocuteur, une photo couleur de ce qu’il a nommé – sont merveilleusement intégrés parmi les œuvres classiques et contemporaines des galeries. À côté du célèbre Le bord de mer à Palavas de Courbet, il y a cet homme, au regard doux et étrange, la mer, brillante, peut-être grâce au clair de lune, et cette phrase : « La plus belle chose que j’ai vue, c’est la mer, la mer à perte de vue. » Voir. Imaginer. Tout semble

alors démultiplié, à redécouvrir. ANNA ZISMAN

L’art et la matière – Galerie de sculptures à toucher jusqu’au 28 mai Musée Fabre, Montpellier 04 67 14 83 00 museefabre.montpellier3m.fr

alpes-maritimes

Vue de l’exposition C’est à vous de voir... de Pascal Pinaud, Espace de l’Art Concret. Œuvres de Pascal Pinaud, Aïcha Hamu et mobiliers de Charlotte Perriand, Georges Nakashima, Dordoni - Foscarini © François Fernandez, ADAGP, Paris, 2016

Pascal Pinaud C’est dans le Château de l’Espace de l’Art Concret que l’exposition de Pascal Pinaud, alias PPP, sera accueillie. En partenariat avec la Fondation Maeght et le FRAC PACA, Pascal Pinaud Peintre jouera, fidèle à son style, à la marge entre l’artiste et l’entrepreneur. Les œuvres, en trois dimensions, proches de la décoration ou de l’architecture d’intérieur, habiteront les espaces du Château, les transformant en pièces à vivre, cuisine, salon ou chambres d’enfant. J-C S C’est à vous de voir jusqu’au 5 mars Espace de l’Art Concret, Mouans-Sartoux 04 93 75 71 50 espacedelartconcret.fr


66 au programme arts visuels bouches-du-rhône alpes-maritimes

Fragments : Archives, Courchia, Stern Plus de 40 000 photographies du fonds des Archives municipales documentent l’histoire de Marseille et de la Provence de 1860 à nos jours. Une variété et une richesse iconographique dont se sont inspirés Jean-Paul Courchia et Carole Stern qui nous invitent à construire et déconstruire l’image à travers notre perception de tableaux peints d’après les photos, et, inversement, de photos d’archives choisies d’après les tableaux. Un jeu permanent entre réalité perçue et construction artistique et intellectuelle. M.G.-G. jusqu’au 14 avril Archives de Marseille 04 91 55 33 75 archives.marseille.fr From the top, acrylique sur toile, 2005 © Carole Stern

Parcours numériques Pour le troisième acte des Chroniques Imaginaires numériques, Seconde Nature propose de redécouvrir de manière insolite le centre de Marseille suivant un parcours d’œuvres numériques entre Vieux Port, Canebière, Belsunce et Longchamp. Visites avec médiateurs gratuites et tous publics. Une carte interactive précise lieux, œuvres et artistes, ateliers et rencontres. C.L. Révélations du 29 janvier au 12 février Centre ville, Marseille chronique-s.org

place de la mairie 1&7 : Via Lactea d’Alice et David Bertizzolo ® Thiphaine Buccino

Ingénus Ils (elles) sont notamment brésiliens, français, serbes, croates, haïtiens... Ils représentent l’art naïf à travers une sélection internationale conçue en partenariat avec la galerie Jacqueline Bricard sise à Lourmarin. Des œuvres habitées par leur fraîcheur d’expression, poétiques, visionnaires parfois, un brin teintées d’innocence. C.L.

Amalia Fernandez de Córdoba, Cabalgata de los Reyes Magos. © avec l’aimable autorisation de la galerie Jacqueline Bricard

Naïfs ?...Vous croyez ! jusqu’au 26 février Office du tourisme, La Roque d’Anthéron 04 42 50 70 74 ville-laroquedantheron.fr

Bonnard en toute intimité Nouveau parcours et nouvel accrochage au musée Bonnard pour pénétrer l’intimité de l’artiste, membre fondateur des Nabis. Soit une soixantaine de peintures, dessins, affiches, photographies et commandes privées réunis autour des thèmes « Vie parisienne et vie de famille », « Modèles féminins et intérieurs », « Paysages, de la Normandie au Cannet ». Cerise sur la galette, les photos de sa maison-atelier du Bosquet prises par Caroline Rennequin qui disent l’esprit du lieu et du maitre ! M.G.-G. jusqu’au 23 avril Musée Bonnard, Le Cannet 04 93 94 06 06 museebonnard.fr

Pierre Bonnard, La Salle à manger au Cannet 1932, huile sur toile, 96,5 x 101 cm, musée Bonnard, Le Cannet, dépôt du musée d’Orsay, Paris, dation 2009 © musée d’Orsay, dist. RMN / P. Schmidt © Adagp, Paris 2016


au programme arts visuels alpes-maritimes alpes hérault 67

Stanley William Hayter Stanley William Hayter ou la métamorphose des lignes est l’avant-dernière halte du cycle d’expositions consacré à la gravure qui trouvera son apogée fin 2017 avec l’ensemble Vollard prêté par le Musée Picasso. Cette rétrospective (œuvres de 1927 à l’œuvre ultime de 1988) fait revivre son célèbre atelier 17 qui permit à Miro, Picasso ou Masson de s’initier à la gravure, avant que l’artiste britannique ne s’exile à New York et reçoive dans son « atelier 17 bis » Pollock, Léger, Duchamp et quelques-uns des surréalistes… M.G.-G. jusqu’au 30 avril Centre d’art La Malmaison, Cannes 04 97 06 45 21 cannes.com

Figure, 1981, burin, eau-forte signée en bas à droite, 75,5 x 55,5 cm, Collection H. Saunier © Stanley William Hayter

Humanistes Nasser Al Aswadi, François Calvat, Isabelle Leclercq, Elisabeth LemaigreVoreaux, Cécile Perra, Pierre Riba et David Thelim se retrouvent autour du thème de l’Humanité, aux résonances bien actuelles, pour interroger les questions de sacré, respect des cultures, tolérance et place de l’Homme. Une sélection proposée par la galerie marseillaise Patrick Bartoli. C.L. jusqu’au 12 mars Centre d’art contemporain, Briançon 04 92 20 33 14 ville-briancon.fr Nasser Al Aswadi, série des Talismans, pigments naturels sur toile, 2015. © Courtesy Galerie P. Bartoli

Rosa et les autres Dans le lieu qu’il a créé en 2000, Hervé Di Rosa s’expose mais entouré de ses influences passées et actuelles, de ses diverses collaborations internationales, et d’une sélection du commissaire de l’exposition, Julie Crenn, avec nombre d’artistes représentant cette mouvance modeste et géniale. Avec Zoulika Bouabdellah, Charles Fréger, ORLAN, Yayoi Kusama, ou Alan Vega...entre une bonne quatre-vingtaine d’autres. Vernissage le 3 février à 18h30. C.L. En toute modestie, Archipel Di Rosa du 4 février au 17 septembre MIAM, Musée des Arts Modestes, Sète 04 99 04 76 44 miam.org Hervé Di Rosa, Around the Eye in One Day, 2013, câbles de téléphone tressés © Pierre Schwartz

Thibault Desombre La Fenêtre, association spécialisée dans les arts appliqués et l’architecture, fête les trente ans de création du designer Thibaut Desombre. À travers sa production singulière d’objets et meubles, on pourra découvrir certains à-côtés comme la conception et la fabrication de guitares. Un anniversaire où sont aussi invités des talents prometteurs : Samuel Aden, Thibault Malet et Mr. & Mr®. C.L. Thibaut Desombre, 30 ans de design jusqu’au 15 avril La Fenêtre, Montpellier 04 67 64 23 90 la-fenetre.com

Thibault Desombre, modèle Fidélio, édition Pleyel. © Avec l’aimable autorisation de l’artiste et La Fenêtre


68 critiques livres

Les secrets du Manor House Motel

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«

Le plus grand voyeur du monde »… Un peu mégalomane, c’est par cette périphrase que se désigne Gerald Foos, le héros de la dernière œuvre de non-fiction de Gay Talese. De 1966 à 1980, il poursuit la vaste entreprise d’observer à leur insu les clients de son motel dans leur intimité la plus profonde, à travers une bouche d’aération en trompe-l’œil. Justifiant sa curiosité débridée par le dessein scientifique d’étudier les mœurs charnelles des Américains, il entre en contact avec Gay Talese, auteur de La Femme du voisin, ouvrage dans lequel ce dernier analyse les pratiques sexuelles des Etats-Unis. Mais ce n’est que dans les années 2010 que l’écrivain/ journaliste se décide à publier un livre sur les « rapports d’observation » du voyeur, lorsque celui-ci accepte enfin de rendre son identité publique, comptant sur la prescription de son forfait et espérant tirer profit de sa notoriété. Qu’y découvre-t-on ? L’émancipation sexuelle de cette époque, la monotonie de la vie quotidienne, les anicroches de couples au bord de la crise de nerfs, la solitude, le désarroi, quelques veuleries, un crime et …

la peu enviable condition du mateur, qui passe des heures à son poste d’observation sans rien de croustillant à se mettre sous la dent ! Le Motel du Voyeur, c’est aussi une passionnante enquête de l’auteur pour prêcher le vrai du faux dans cette histoire comportant plusieurs zones d’ombre : les dates ne correspondent pas toujours et on ne retrouve aucune trace dans les registres judiciaires de l’assassinat dont Gerald Foos affirme avoir été témoin. Par transposition, et dans une mise en abyme éloquente, c’est la propre démarche du journaliste/voyeur, ainsi que son implication morale, qui sont ici questionnées. On songe par ricochet à Truman Capote ou Janet Malcom… Et on se demande surtout s’il ne s’agit pas d’un subtil clin d’œil de Gay Talese, un magnifique canular monté avec délectation…

heure. Qui est impliqué d’après les recherches de Federico Mastrogiovanni ? Les cartels de la drogue, qui sèment la terreur et forcent les paysans à cultiver de la marijuana et du pavot ; les grandes firmes multinationales auxquelles le Président Enrique Peña Nieto a, au détour d’une réforme énergétique fallacieuse, bradé un sous-sol riche en hydrocarbures, sur un territoire contrôlé par le groupe criminel le plus dangereux du pays, les Zetas. Pour exploiter ces ressources situées sur des terres arables, quoi de mieux que de terroriser la population pour la faire fuir… Que fait la police ? Au mieux, elle est incompétente et ne mène que des enquêtes infructueuses. Au pire, elle est complice, achetée par l’argent ou les menaces de mort. La justice, l’armée et l’Etat sont aussi mis en cause. Le gouvernement tire profit de cette situation : le maintien de la société dans un état de panique permet la réalisation de réformes impopulaires comme la loi fédérale qui nuit aux travailleurs, ou la loi sur la sécurité nationale qui permet de décréter un état de siège

militaire et de qualifier de « terroristes » les protestations sociales. Les victimes sont par ailleurs systématiquement criminalisées, afin de détourner l’attention. La liberté de la presse n’existe pas ; les journalistes trop curieux sont menacés, torturés, portés disparus, assassinés. En 2012, une loi, source d’espoir, réforme le Code pénal de Nuevo León : le délit de disparition forcée devient un délit permanent, ce qui permet d’engager des poursuites pour des disparitions datant de 10 ans. Malgré cette avancée considérable, la situation ne s’est pas améliorée. Le 26 septembre 2014, date devenue emblématique, la disparition/ exécution de 43 étudiants d’Ayotzinapa brise enfin le silence et donne à ce sujet une visibilité internationale. Ni vivants ni morts est le résultat d’un travail pertinent et courageux.

MARION CORDIER

Le Motel du Voyeur, Une enquête de Gay Talese Editions du sous-sol, 19 €

No man’s land

C

et ouvrage est le fruit de cinq années d’enquête méticuleuse, de recueil de documents et de témoignages sur un fléau mexicain : les disparitions forcées. On connaît les cas des dictatures argentine et chilienne, moins celui du Mexique contemporain. En 2013, on comptait 18645 disparus, soit deux par

MARION CORDIER

Ni vivants ni morts a reçu le prix PEN Mexico et le Prix national du journalisme en 2015.

Ni Vivants ni morts Federico Mastrogiovanni Métailié, 18 €


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Amours picaresques

M

eurtrie par sa rupture avec Mario, Soledad peine à reprendre le cours de sa vie. Commissaire d’exposition reconnue, il lui faut pourtant mobiliser toute son énergie si elle veut imposer à la jeune et nouvelle scénographe de la bibliothèque nationale la forme et le contenu de son exposition sur les écrivains maudits. Lorsque s’ouvre le récit, colère et jalousie sont à leur comble. Soledad vient d’apprendre qu’au lendemain même de ses 60 ans, son ex-amant assistera lui aussi à la représentation de Tristan et Iseult. Mais en compagnie de sa jeune épouse. Caressant l’espoir de se venger, Soledad fait appel aux services d’un gigolo russe de 32 ans. Le temps d’une soirée à l’Opéra, le bel Adam apparaîtra comme son nouvel amant. Puis, quel que soit le succès de l’entreprise auprès de Mario, tout rentrera dans l’ordre. C’est sans compter sur l’événement violent qui perturbe, dans la nuit madrilène, le cours normal de cette relation tarifée. Avec La Chair, l’écrivaine espagnole Rosa

est mise en perspective par la réflexion que mène ce personnage sur la malédiction. Qu’entend-elle par « écrivains maudits » et quels seront ceux qui figureront dans son exposition ? Joyau de la galerie que Soledad compose au fil d’un récit à tiroirs et miroirs, il y a Josefina Aznárez, celle qui, grâce à la plus insensée des histoires d’amour, est parvenue à publier ses livres dans l’Espagne machiste du XIXe siècle. Mais comment Soledad a-telle découvert l’existence de cette écrivaine tombée dans l’oubli ? Sur ce point comme sur d’autres – qui est vraiment Dolores, sœur jumelle de Soledad ? – Rosa Montero réserve à ses lecteurs de jolis rebondissements. MARIE MICHAUD

Montero épouse le point de vue ironique et lucide de son héroïne pour composer une fiction baroque, qui n’est pas sans évoquer l’atmosphère du cinéma de Pedro Almodovar. L’intrigue, qui repose sur la relation énigmatique que nouent Adam et Soledad,

La Chair Rosa Montero Traduit de l’espagnol par Myriam Chirousse Editions Métailié, 18 €

Pas de verre chez les fous

L

a construction est implacable, et redoutable. Je m’appelle Nathan Lucius du sud-africain Mark Winkler raconte en 67 265 mots l’histoire d’un jeune homme ordinaire - vraiment ? - au parler cash et aux manières dissolues. Son roman démarre fort par un « j’aime, j’aime pas » en guise de carte d’identité. Puis on découvre un héros bavard aux pensées anarchiques, au babil imagé et saccadé : phrases extrêmement courtes, images saugrenues et papillonnantes, parfois sans queue ni tête. L’écriture, déconcertante au début, sert le roman bâti en trois chapitres : Après, Avant, Avant et Après. Un process ingénieux qui préserve le suspens, perd le lecteur, le rattrape par la manche et lui permet de lever le voile sur tous les points laissés délibérément dans l’obscurité. Car Mark Winkler ponctue son récit de minuscules indices qui devraient nous mettre sur la voie : « La matinée a le potentiel d’un fou qu’on vient d’allumer »... 67 265 mots découpés au laser prononcés par un jeune homme ordinaire qui raconte

sa vie comme il parle et, à dire vrai, celle-ci n’est pas folichonne ! Un travail dans la vente d’espaces publicitaires, des relations affectives et sexuelles en pointillés, un passé familial ombrageux, et des divagations permanentes. Un peu perdu par ses paroles chaotiques, le lecteur ressent d’abord irritation et ennui.

Très vite l’auteur provoque un électrochoc quand, à la demande de Madge, sa vieille amie atteinte d’un cancer, Nathan Lucius se plie à son injonction et la tue. Là, le livre bascule et on se prend de sympathie pour lui (un comble !), soudain plus attentif à ses pensées, ses jérémiades, ses actes décousus, ses fragilités. Les mots crépitent et précipitent le récit dans un tourbillon incessant, parfait miroir de ses délires. Mark Winkler réussit l’exploit de nous placer dans la tête de son héros au point de ressentir ses propres douleurs physiques. À mi-parcours, le livre bascule une seconde fois : il remonte le temps jusqu’à « Avant », reconstitue le puzzle pièce par pièce ; les indices prennent tout leur sens, ses paroles et ses actes aussi. Comme Nathan Lucius, on comprend désormais où il se trouve : « dans un asile de fous sorti d’un film d’horreur », et pourquoi. Implacable, non ? MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

Je m’appelle Nathan Lucius Métailié, 20 €

Mark Winkler


70 critiques livres

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Renoncer n’est pas un luxe

A

près deux ouvrages consacrés à ceux qui pratiquent la marche comme un art de vivre, et aux xénophiles, ces rares personnages passionnés par les autres, Michéa Jacobi décline une nouvelle fois son concept abécédaire avec humour et éclectisme. 26 lettres, 26 vies de Renonçants, 26 manières de se soustraire au monde (ou de renoncer à le faire). Celle de Fra Filippo, florentin du XVe siècle, peintre et chapelain d’un couvent : défroqué pour l’amour d’une religieuse, il renonça au renoncement. Celle de l’érudit soufi Ibn Muhammad Abou Hamid al-Ghazali (1058-1111), si scrupuleux qu’il fut pris d’un doute à la fin de sa vie : et si la somme considérable où il détaillait le renoncement s’avérait contre-productive ? « Renoncerait-il jamais celui à qui il fallait si longuement expliquer ce qu’était le renoncement ? » De belles pages aussi sur Diogène (philosophe-cabot), et ses exercices d’accoutumance à ne point avoir ce qu’il souhaite, ou le troubadour Folquet, amoureux éconduit devenu

pour fuir la « négligence de la vie », comme on le comprend ! Étonnement, celui qui a dit que le renoncement pouvait être un délice n’a pas connu grande postérité... Malgré son goût prononcé pour les anachorètes, Michéa Jacobi n’oublie pas les contemporains : Che Guevara, Elvis Presley figurent au sommaire, ainsi que Brigitte Bardot. Par ailleurs, c’est la seule femme du volume. Pourquoi ? Sans doute parce que la moitié féminine de l’humanité en sait long sur le renoncement, au point de s’être effacée des livres d’histoire. GAËLLE CLOAREC

inquisiteur (« on ne tord jamais assez fort le cou à ses chagrins »). Notre préféré ? L’ermite Eucher au temps de la Gaule romaine, se réfugiant avec ceux « que le siècle a brûlés » sur les îles de Lérins. Trouver du réconfort dans la beauté des paysages méditerranéens

Retrouvez les critiques des précédents ouvrages de l’auteur sur notre site, assorties d’interviews sur la webradio Zibeline.

Renonçants Michéa Jacobi La Bibliothèque, 14 €

Cinéguide

A

ux côtés de Tokyo, Rome, Hong-Kong et Macao, voici que Marseille s’ajoute à la collection Ciné Voyage éditée par Espaces&Signes. Un petit guide de tourisme cinéphilique illustré, qui tient dans la poche et dans lequel on butine librement. On y entre par les index : réalisateurs, lieux, thématiques, cartes. Ou par chapitre. Chronologiquement ou non. C’est Vincent Thabourey, critique à la revue Positif, conférencier, formateur, coordonnateur de Cinémas du Sud, qui s’est chargé de cette « mise en scènes » de la phocéenne cité, liée aux noms de Pagnol, Carpita, Allio, mais où Renoir, Tourneur, Melville et Godard, entre autres, firent aussi quelques escales remarquées. L’auteur part de la conviction que « le feuilleton est le mode de narration » de Marseille et par un inventaire à la Prévert, sans hiérarchie, évoque dans cette « loi des séries » Plus belle la vie comme la saga politique de Comolli et Samson Marseille contre Marseille, et Marseille by

et le pire. Sans oublier l’effervescence des jeunes réalisateurs, dignes héritiers de Carpita, qui diffusent leurs films à budgets réduits dans des salles alternatives, en marge des systèmes. Avec intelligence et modestie, le défi est relevé. Sept courts chapitres (incluant introduction et épilogue) ouvrent par leurs titres-programmes les pistes de réflexion : A Marseille, la vie est un feuilleton, La ville des commencements, Un voyage intérieur, En chantant, Brigands bien aimés, Les solidarités, Marseille Hollywood. On y retrouve avec plaisir le regard pluriel des cinéastes sur la Ville et celui, plus personnel, de Vincent Thabourey sur le cinéma. ELISE PADOVANI

Netflix comme la filmographie de Robert Guédiguian. Pas facile de rendre compte des rapports des cinéastes à cette cité rebelle qui « ne se donne que de manière syncopée », entre folklore et fantasmes, patrimoine et modernité, noirceur et lumière. Pour le meilleur

Marseille mise en scènes Vincent Thabourey espaces&Signes, 12 €


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« En Lybie, les morts sont légion »

U

n mois avant son exposition Lybia : A Human Marketplace à l’Hôtel de l’Industrie à Paris (25 octobre - 13 novembre), Narciso Contreras a reçu le 7e Prix Carmignac du Photojournalisme au festival Visa pour l’image 2016 à Perpignan. Outre l’organisation de cette exposition itinérante, le photographe mexicain a bénéficié de l’édition d’un livre

monographique. Un coup de projecteur salutaire sur son travail sur la crise migratoire, sur « l’esclavage moderne et le trafic d’êtres humains » en Libye cinq ans après la chute de Kadhafi. Sur le terrain de février à juin 2016, Narciso Contraros témoigne de la situation actuelle de la Lybie : « une place forte du trafic humain où réfugiés et demandeurs d’asile sont quotidiennement achetés et vendus ». Les photographies couleurs imprimées en pleine page, courant sur la page en vis-à-vis, voire même déclinées en triptyque, disent le quotidien des centres de détention. Cela tient du cauchemar et de l’enfer sur terre. Le photojournaliste ne fait ni dans le spectaculaire ni dans le sensationnel mais dans la réalité, froide, et ses textes en cartels adoptent une identique sobriété. Une plage de sable ensoleillée, un ciel bleu dominant, au premier plan des sacs mortuaires entassés, et cette légende : « Corps de migrants décédés rassemblés sur la côte de Zuwara par un groupe paramilitaire et alignés pour être enterrés

dans une fosse commune improvisée à Abu Kammash, dans l’ouest de la Lybie ». Sur la peau des migrants, des traces de coups ; sur les visages, les stigmates de l’épuisement. Ils meurent dans l’indifférence générale, comme ces cadavres allongés dans la morgue de Sabha « après avoir été récupérés dans les rues et dans le désert ». Cartes à l’appui où sont mentionnés les routes du trafic et les noms des camps, le travail du mexicain laisse sans voix. Le texte qu’il cosigne avec Ela Stapley également : « La Lybie a courbé l’échine et a laissé les milices prendre le pouvoir. Les histoires de vies brisées se mêlent dans ce pays déchiré ». À l’heure où la Syrie se meurt, la Lybie est déjà morte. Les photographies de Narciso Contreras sont là pour nous empêcher de fermer les yeux.

vert. Ou du moins dans ce qu’il en reste. Car au cœur de ce Comté sans nom (de partout et de nulle part), les résidences secondaires et autres programmes immobiliers, et surtout les scieries, ont progressivement grignoté les futaies. Malgré quelques activistes écolos, la forêt recule. Alors certains amoureux de la nature et des bois se manifestent, de manière parfois très radicale… Il y a du western contemporain dans ce roman : un shérif solitaire et endeuillé ; un propriétaire acariâtre et souvent à cheval ; des luttes de territoires. On y trouve aussi l’ambiance noire d’un polar : la découverte macabre d’un animal bizarrement mutilé, puis celle d’un cadavre à demi décomposé ; une histoire d’amour en fin de course ; des êtres taciturnes détenteurs de secrets. Quant à la fin, elle vire au fantastique : une tempête apocalyptique, des champignons fluorescents, un étrange antidote… C’est sans doute à ce mélange des genres que tient le charme de

cet ouvrage qu’on lit d’une traite. Comme si l’essentiel n’était pas là, dans le récit de cette drôle d’enquête ; mais bien plutôt dans l’évocation presque déjà nostalgique d’une forêt vouée à disparaître. Une forêt ? Toutes les forêts. Le romancier sait en dire le mystère, la beauté farouche… Avec Écorces il signe un envoûtant plaidoyer pour la part sauvage de la nature. Et de l’homme.

MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

Lybia : A Human Marketplace Narciso Contreras Skira, Bilingue français-anglais, 45 €

Os et forêt

L

e personnage principal d’Écorces semble bien être la forêt. Ce court, étrange et prenant premier roman de Xavier Gloubokii s’articule d’ailleurs en deux parties : A la lisière, puis Dans les bois, comme s’il suivait Ahmed, le shérif, au fil de sa plongée dans le

FRED ROBERT

Écorces Xavier Gloubokii Editions Liana Levi, 17 € En librairie le 2 février


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Alors oui c’est quoi ?

D

eux excellentes nouvelles pour ouvrir l’an neuf : BEBE est né et la poésie n’est pas morte. Mieux encore si c’est possible : 48 pages bien vives raniment sans balbutier l’inusable question du C’EST QUOI ? En avant donc à la poursuite de l’objet du désir des 14 praticiens sollicités par les fondateurs (Nadine Agostini et François Bladier) d’une revue dont le numéro zéro séduit par la diversité des réponses, l’engagement mûri ou spontané de chacun, autrement dit par la générosité du don. La simplicité du support - noir et blanc/ papier bouffant appelle la lecture gourmande, et le déroulé des contributions, sagement alignées sur l’ordre alphabétique, n’échappe pas à la malice du hasard objectif. Azam, non sans gravité, fait corps en ouverture avec son rythme intime et dit « chercher » comme on fait le tri des « morts » et des « fusillés » après le massacre, tandis que Vassiliou, dernière contributrice plus légère, plus fragile, trace une route de squaw de mur en mur, dessine des signes de piste sans perdre le fil et offre les figures de

l’insaisissable permanent ; aussi définit-elle l’état de poète par le verbe « cercer » (la cerce fait le dos rond et protège de la flamme, nous rappelle le dictionnaire). Les autres ? Julien Blaine, toujours à la page, en décalé, superpose, redimensionne, prend la question au cri et à la lettre, on l’entend bien ! Patrick Dubost, en 13 stations, fait apparaître

et disparaître l’objet, et Liliane Giraudon avec un stylo un peu gras qui s’offre à la méprise (lit-on « s’écarte » ou « s’écoute » ?) discourt de la méthode sur sa (photo)copie. Frédérique Guétat-Liviani guide « l’enfant » à travers les trous dans le blanc sans forcément trouver, « en tout cas pas là », et Michèle Métail ne sait pas non plus : « les oiseaux sont de piètres ornithologues ». Pendant que Mignot, de sous-texte en référence lettrée fait débarquer les rats de la peste, Pennequin gesticule sa révolte à tue-tête. Seul Pascal Poyet, rassurant, construit à tâtons un « vois-là » bien carré en 5 x 14 lignes et ...et...silence dans les rangs ! Le secret restera bien gardé ; n’en parlons plus jusqu’au numéro 1 à paraître dans une année dont on espère que l’invitation « tu performes ? » déliera tout aussi finement les langues !!! MARIE-JOSÉ DHO

BEBE Dis moi c’est quoi la poésie ? Numéro zéro de la revue annuelle proposée par l’association BLAD&NAD

Stéréotypes échevelés

C

laudine Cohen enseigne l’histoire et la philosophie des sciences à l’EHESS et à l’EPHE ; elle s’attelle à débroussailler l’approche des Femmes de la Préhistoire. Un champ obscur, de par la rareté des vestiges et la difficulté d’identifier ce qui relève du féminin dans l’empreinte humaine. Et particulièrement sujet aux déformations

caricaturales, car même la reconstitution des physionomies hominidées à partir de fragments peut être « influencée par des préjugés racistes ou sexistes », sans parler des projections idéologiques sur les modes de vies ancestraux. On soupçonne les récits d’explorateurs au XIXe siècle, décrivant les aborigènes australiens comme des brutes infâmes, d’être à l’origine des vieux poncifs sur l’homme de Cro-Magnon traînant sa compagne par les cheveux. L’auteur relève donc les visions romancées de la Préhistoire depuis la naissance de la discipline, les gênes et tabous entourant la perception du corps féminin, les oscillations de la pensée autour du mythe des origines. En revenant aux sources concrètes et en s’appuyant sur les découvertes archéologiques qui se multiplient ces dernières décennies, elle porte un regard neuf sur le dimorphisme sexuel, la reproduction, la famille, les techniques, l’art, le savoir, le pouvoir, la divinité... détaillant à chaque étape les scénarios et contre-scénarios de la répartition des tâches

entre hommes et femmes. On apprend ainsi que la taille de pierre demande plus d’habileté que de force, que les néandertaliennes étaient aussi robustes que leurs compagnons, que les rythmes du cycle féminin, réguliers, ont pu servir à acquérir une conscience de l’écoulement linéaire du temps, stimuler les représentations symboliques ou imaginaires, et donc les cadres sociaux et culturels. En étudiant de près les « calembours formels » virtuoses de certaines figurines paléolithiques, mêlant traits féminins et formes phalliques, Claudine Cohen émet l’hypothèse que ce qui intéressait alors les artistes n’était « pas seulement la dualité, la différence, la disjonction, c’est aussi la complémentarité, la conjonction, la rencontre, l’union des deux sexes ». Une idée intéressante à suivre. GAËLLE CLOAREC

Femmes de la Préhistoire Belin, 21 €

Claudine Cohen


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Porosité / Morosité / Sabotage

L

e jeune auteur islandais Eiríkur Örn Norddahl nous avait ébloui il y a un an avec son roman coup de poing Illska, Le Mal (voir critique sur journalzibeline.fr) ; son nouvel opus tout récemment paru, Heimska, La stupidité nous déconcerte et même davantage. Chapitre I : Le tueur de bonnes femmes,

Vite, mais pas trop. Chapitre X : Trop tard. 94 paragraphes de une à deux pages en moyenne pour raconter systématiquement donc, dépecer, décortiquer, (an)atomiser, passer à la moulinette ou grossir à la loupe des événements micro – ça baise, ça baise, ça baise - ou macro – pfuittt, plus d’électricité et c’est la catastrophe. Il faut dire que nous sommes on ne sait quand, mais bientôt, voire maintenant, comme dans un futur proche, et d’ailleurs les moments se bousculent, se brouillent dans une narration sans foi ni loi qui revient en arrière puis bondit sans prévenir, tout cela plus ou moins théorisé au chapitre XV. Unité de lieu toutefois : Isafjördur la capitale du nord de l’île, qui multiplie par la propagation des images – caméras de surVeillance (sic), webcams ou simplement Instagram - les turpitudes de chacun. Au pays du soleil de minuit rien n’échappe à personne et inversement. Lenita et Aki , couple d’écrivains récemment séparés, comme deux facettes d’un même personnage (chacun a écrit un roman qui s’intitule Ahmed) se déchirent en miroir et

pratiquent méthodiquement le porn revenge. Des terroristes intellos décident d’arrêter la machine infernale et de résister au panoptisme suggéré dans le titre à la Michel Foucault, l’état de stupidité résultant de l’ouverture absolue au monde extérieur. On pense bien à Julien Coupat et à l’affaire de Tarnac, mais le foisonnement des personnages affublés de pseudos nous a déjà perdu. Ça se termine mal, très mal, mais ça n’avait pas bien commencé non plus. La satire est sans doute trop explicite mais son originalité réside dans sa cruauté, sa crudité même, que la précise traduction « au plus près » d’Eric Boury rend présente et palpable. Et ça c’est vraiment terrifique et malaisant ! MARIE-JOSÉ DHO

Heimska, La Stupidité Eiríkur Örn Norddahl Editions Métaillé, 17 €

Nostalgie quand tu nous tiens...

L

es temps actuels sont braqués vers le passé : on commémore à tour de bras, on ressort les platines et les vinyles, on organise des tournées des années 80... Et on sort des oubliettes des livres intemporels qui, pour certains, ont offert à leurs auteurs succès et gloire à l’époque de leur parution. Ou à titre posthume. Ainsi la collection Belfond [vintage] redonne-t-elle vie à des livres introuvables, à des classiques oubliés, à des curiosités littéraires dans une édition rajeunie (format, papier, typo) mais néanmoins légèrement surannée (illustrations des couvertures). Vingt-troisième numéro de cette série lancée en 2013, le roman Mr North de l’auteur américain Thornton Wilder retrouve une nouvelle jeunesse. Paru en 1973 aux États-Unis, puis en 1988 en France aux Presses de la Renaissance, son ultime roman fut adapté au cinéma par Danny Huston sur un scénario de son père, l’illustre John Huston. Et, en le lisant, pour la première fois il est vrai, on comprend pourquoi les acteurs Angelica Huston, Robert Mitchum et Lauren Bacall

la collection Belfond [vintage] la ressuscite, en quelque sorte. Et que dire du bouquin de Thomas Savage, Le pouvoir du chien, dont la simple évocation nous fait encore froid dans le dos ! On a juste envie de s’y plonger une nouvelle fois, ou de l’offrir dans cette version plus chic. De même, on a tous en mémoire Tropique du cancer d’Henry Miller, mais pas forcément Crazy Cock, titre choisi par l’éditeur... Certes les auteurs américains se taillent la part du lion, mais pas seulement : on compte aussi des auteurs anglais (J. Coates, C. Dane, I. Colagate, M. Sharp), russes (G. Vladimov) et allemands (I. Keun) à découvrir ou redécouvrir. MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

firent partie de la distribution ! Avec la même gourmandise, on pourra se procurer l’unique roman de l’auteure néerlandaise Ida Simons, Une heure avant minuit, écrit à sa sortie des camps de Westerbork et Terezin, et publié un an seulement avant sa disparition en 1960. Son décès prématuré l’a plongée dans l’oubli mais

Mr. North Thornton Wilder Traduit de l’américain par Éric Chédaille Belfond [vintage], 18 €


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De cape et d’épée

M

arseille est rebelle, l’histoire regorge d’exemples, et les canons du fort SaintJean tournés vers la ville en sont un symbole. Mais il est des faits historiques moins connus que d’autres. Ainsi, la « dictature » de Charles de Casaulx entre 1591 et 1596. Ce dernier, allié à Loys d’Aix, ayant pris parti pour la Sainte Ligue Catholique, se dressa contre le roi hérétique Henri IV (qui passa du protestantisme au catholicisme et réciproquement, plusieurs fois, selon les nécessités politiques du moment) et tenta d’instituer une République autonome à l’instar de Gênes ou Venise. L’infatigable et érudit conteur Jean Contrucci nous offre avec son nouveau roman, La ville des tempêtes, un panorama de cette période trouble au rythme d’un récit aux tours dignes d’un Alexandre Dumas : enlèvement par les barbaresques, exactions de pirates, hautsfaits de corsaires, conspirations, trahisons, improbables reconnaissances, dévouement, grandeurs et bassesses, le tout intimement imbriqué à la grande Histoire ; les personnages de fiction croisent les figures historiques avec

livrent les informations essentielles quant aux faits ou à la signification de certains termes, et une note à propos de la valeur des monnaies donne une idée tant du niveau de vie de la population que des transactions entre les différents États. L’écriture fluide, rapide, efficace de Jean Contrucci emporte avec maestria le flux du récit, et échappe avec élégance aux travers des romans historiques, qui souvent usent du cadre pour accorder un intérêt à des narrations qui en sont dépourvues. Ici, tout est juste, finement amené, et on se laisse emporter dans ce roman de cape et d’épée avec délectation. MARYVONNE COLOMBANI

vraisemblance. Les couleurs, les bruits, les odeurs du XVIème siècle renaissent, les rues oubliées s’animent, vibrent de toute une vie foisonnante, bigarrée. Une carte de la Marseille de cette époque permet de suivre les protagonistes, des notes en bas de page

La ville des tempêtes HC Éditions, 19 €

Jean Contrucci

Autopsie d’un mariage

S

ur quels secrets, omissions, demi-vérités et mensonges un couple se construit-il ? À quelles ombres redoutables le brasier d’un grand amour partagé s’alimente-t-il ?

Dans son dernier roman, l’Américaine Lauren Groff dissèque avec une acuité et une tendresse mordantes la dynamique complexe d’un mariage qui dure. Le sien, est-on tenté de penser, lorsqu’on lit que le roman est dédié à son mari. Et sans doute la romancière a-telle puisé dans sa propre expérience. Sans doute aussi les nombreuses parenthèses qui émaillent le récit, le commentent, le mettent à distance ou le replacent en perspective sont-elles le signe de sa présence omnisciente et décalée. Pourtant, c’est bien d’une fiction qu’il s’agit. D’une histoire d’amour. Celle de Lancelot, dit Lotto, et de Mathilde. Première scène, dans les dunes d’une plage du Maine. Ils sont jeunes, ils sont beaux, ils viennent de se marier – deux semaines seulement après leur rencontre. Naissance d’un couple. Qui durera plus de vingt ans, sans enfants mais avec chien, dans la fougue amoureuse et la fidélité. Alors pourquoi ce titre Fates and

Furies (en français Les Furies) ? D’où vient que les Parques (Fates) et les Furies, divinités inquiétantes, planent sur ce beau mariage ? C’est ce que l’intrigue dévoile au fil d’une composition habile faite d’ellipses et de retours en arrière, ponctuée par les nombreuses pièces que Lotto, devenu dramaturge à succès, écrit (sans savoir que Mathilde les remanie en secret), par quelques coups de théâtre aussi. Le roman propose une intéressante réflexion sur le couple. Sur la création également. Et la façon subtile (quoique souvent mensongère) dont l’existence réelle infuse immanquablement la fiction. FRED ROBERT

Les Furies Lauren Groff Éditions de l’Olivier, 23,50 euros


Comme un soleil dans les nuages…

Chaque semaine, un expert GÉOPOLITIQUE

U

ne voix à la musique très particulière résonne en nous pendant notre lecture des nouvelles de Rozenn Guilcher, qui semble nous parler à l’oreille sur le mode de la confidence, avec douceur ou colère. Un monde alors surgit, peuplé d’animaux fragiles, de forêts et d’immensités marines. Un monde qui parle de l’absence, de l’abandon dans lequel se mélangent, se répondent des voix différentes qui sont autant d’échos, où le « je » n’est jamais le même. Les voix d’un enfant, d’une mère, d’un père ou d’une personne aimée alternent sans que soit indiqué le passage de l’une à l’autre. Le lecteur hésite, relit, puis se laisse porter. Les silences aussi sont importants, et les regards, les regards sur le ciel et le soleil. En filigrane se dessinent des portraits d’exclus, de réfugiés qui tentent de survivre avec leurs pauvres mots. Comme ceux de la petite roumaine Adela dont le seul avenir est la prostitution pour nourrir sa famille, ou ceux de l’aïeule dont le fils veut vendre la maison… Autant de scènes souvent poignantes à l’émotion contenue comme dans la remarquable nouvelle Le cinquième homme, qui évoque des tentatives de relations amoureuses par SMS interposés. La lecture de ces nouvelles est un voyage au cœur des mots, « lav(és) de la grisaille du temps », à la lisière de la poésie.

ÉCONOMIE URBANISME GRAND TÉMOIN

MA RD I S

D E L A V I L L A

T PAPETERIE

e visite, la carte de correspondance et le papier d’entête. CHRIS BOURGUE

Rozenn Guilcher était en résidence à La Marelle, Maison des écrivains et de la littérature (Marseille) au printemps 2016

Déshabiller nos solitudes Sulliver, 15 €

Rozenn Guilcher

INFORMATIONS ET INSCRIPTIONS SUR

WWW.VILLA-MEDITERRANEE.ORG/FR/MARDIS-DE-LA-VILLA

WAFAW

WHEN AUTHORITARIANISM FAILS IN THE ARAB WORLD European Research Council - www.wafaw.org

II + + ARAP VE ISLAM

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Syrie Liban Jordanie T. palestiniens Irak


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Une brigande au grand cœur

M

ichèle Lesbre a le chic pour écrire des petits livres qui vous poursuivent longtemps. Par touches légères, le nez en l’air, elle vous fait parcourir des contrées qu’on croyait connues et rencontrer des gens imprévisibles. Ainsi le livre qui sortira le 2 février évoque très précisément le destin de Marion du Faouët qui mourut par pendaison à 38 ans en 1755 sur une place de Quimper. N’allez pas croire qu’elle nous livre là un récit historique haletant, vantant les exploits de cette belle femme rousse détroussant les riches pour donner aux pauvres. Nul effet de cape ou d’épée mettant en avant le grand cœur de cette Robin des bois en jupon. Plutôt une méditation sur le temps qui passe, les amours envolées et le constat amer que notre

civilisation plus vieille de trois siècles n’a pas trouvé de solutions à la misère du monde et à sa banalisation. Notre monde n’est-il pas de plus en plus violent, n’abandonne-t-il pas les plus démunis et n’est-il pas devenu la proie d’individus criminels ? Michèle Lesbre nous appelle à la vigilance pour que notre monde échappe à la haine. CHRIS BOURGUE

Chère brigande : lettre à Marion du Faouët Michèle Lesbre Sabine Wespieser, 12 €

La parole des « déclassés »

«

Trimardeur » : « vagabond, en particulier ouvrier allant de ville en ville pour chercher du travail ». Le dictionnaire précise « familier et vieilli » et situe le terme en regard du verbe « trimarder » et du nom commun « trimard », chemin, route.

L’ouvrage de Yolande Liviani, (présenté par la fille de l’auteure), Les trimardeurs, ne renvoie pas à l’époque d’un Villon, mais bien à l’histoire contemporaine, par le biais d’un récit témoignage d’une bouleversante acuité. Le texte, paru en 1980 et judicieusement réédité en 2016 par La courte échelle/éditions transit, raconte la banlieue grenobloise de 1970, le foyer-relais Ozanam, « plutôt une fourrière familiale à caractère dictatorial », non loin de celui de la SONACOTRA, les luttes face à l’humiliation, à ceux qui se substituent, pensent à la place d’un lumpen méprisé… L’écriture même de ce livre est une matérialisation de cette conquête. Yolande Liviani narre, explique, apporte son regard lucide, empli d’humour, d’ironie, de tendresse, porte une parole confisquée par les instances autorisées, médicales, sociales, politiques, économiques, qui raisonnent à coup de « vous n’aviez qu’à »… évoque le détournement du « doux (…) verbe » accueillir… « Un immigré sera-t-il jamais accueilli ? / Où est la terre

d’accueil du prolétaire ? ». Les trajets de vie se croisent, la narratrice, « brebis galeuse », mène le combat pour apporter une respiration à ce « foyer » qui interdit, détient, monopolise, contrôle les visites, signe les recommandés à la place des locataires… Humble épopée, avec ses batailles, ses doutes, ses découragements, ses ambitions, sa ténacité, son courage… Les protagonistes y gagnent une épaisseur, une dignité qui touche. Le parfum de la Commune de Paris, les mots de Brecht, participent à la reconstruction de l’estime de soi. L’héroïsme du quotidien nourrit cette fresque humaine qui, quoiqu’évidemment datée, est toujours d’une troublante et douloureuse actualité. MARYVONNE COLOMBANI

Les trimardeurs Yolande Liviani La courte échelle/ éditions transit, 10 €


Kellylee Evans. Photographie : Arnaud Compagne

AIX-EN-PROVENCE 96.2 MARSEILLE 92.8 jazzradio.fr


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À pleines dents

N

oir, blanc et bistre – trois non-couleurs qui jouent sur le contraste, des cases délimitées à main levée, un dessin cerné.

Ce sont les éléments de Velue, bande dessinée de Tanx, dessinatrice et auteure. Cet ouvrage de 2015 se reçoit comme un coup de poing en pleine figure. Le gros plan sur une bouche qui s’apprête à mordre sur la couverture nous met d’emblée dans le bain. Il sera question de la colère et de la révolte d’Isabelle, pourvue d’une pilosité envahissante depuis sa naissance nécessitant un rasage permanent. La famille veut cacher cette infirmité et contraint l’adolescente au secret et à l’isolement. Elle réussit néanmoins à aller au lycée, puis décide de dévoiler sa situation à ses camarades et son amoureux. Mais un engrenage terrible la conduira à fuir et vivre une descente aux enfers. Jusqu’à ce qu’elle décide de s’accepter et d’entrer en résistance. Pour une nouvelle vie ? La fin reste volontairement ouverte offrant une réflexion sur la différence, son acceptation

et le respect de l’autre. Beau travail d’une artiste militante qui appartient au collectif des Créatrices de bandes dessinées contre le sexisme (voir bdegalite.org) et fait partie de l’Association Artemisia - pour la promotion de la Bande dessinée féminine dont elle a obtenu le Prix en 2009. CHRIS BOURGUE

Sélectionné pour le Prix littéraire des lycéens et apprentis de PACA 2016-17

Velue Tanx 6 pieds sous terre éditions, 13 €

Construction d’une identité

O

n considère souvent les catalogues d’exposition comme, certes, d’indispensables compléments, mais surtout comme de beaux ouvrages, qui, une fois l’émotion esthétique passée, resteront sagement sur une étagère, décoratifs souvenirs qui s’empoussièrent… Le catalogue de l’exposition sur les Huaxtèques, qui avait enchanté le Musée de la Préhistoire de Quinson en 2016, constitue non seulement un témoignage, mais contribue de manière magistrale aux études concernant les populations préhispaniques. Pour la première fois sont réunis, grâce à Sophie Marchegay, commissaire de l’exposition et directrice du musée de la Préhistoire de Quinson, auteure, entre autres, de plusieurs mémoires sur les peuples de la Méso-Amérique, des textes scientifiques publiés en bilingue Français/Espagnol, qui permettent désormais une approche complète des Huaxtèques (jusqu’alors les diverses études n’abordaient le sujet que de manière parcellaire). L’ouvrage est composé de six parties, dont

aux interprétations. On les suit dans l’étude qui mène des premiers villages aux centres cérémoniels, on décrypte les relations que les Huaxtèques entretenaient avec la mort, les motifs des parures corporelles, ainsi que ceux des vêtements et des bijoux, on découvre les manifestations culturelles, l’artisanat, leur diffusion, les relations établies avec les autres peuples. Enfin, à l’instar du musée d’Anthropologie de Mexico, qui offre au rez-de-chaussée ses collections précolombiennes et à l’étage celles des indiens d’aujourd’hui, l’époque actuelle est présentée à travers les éléments ethnographiques de la donation de Claude et Guy Stresser-Péan, pionniers et infatigables chercheurs, au Musée de Barcelonnette. Un somptueux ouvrage de référence ! seule la dernière reprend l’exposition. Chercheurs, directeurs de recherche, anthropologues, archéologues, tous éminents spécialistes, livrent dans une intéressante mise en perspective l’état actuel des recherches et des travaux concernant ces populations, sans occulter les difficultés qui subsistent quant

MARYVONNE COLOMBANI

Huaxtèques, Peuple méconnu du Mexique précolombien Édité par le Département des Alpes de Haute Provence, 15 €


Janvier - Juin 2017

Hommage à la Cinémathèque portugaise José Leitão de Barros, João César Monteiro, Cottinelli Telmo, Manoel de Oliveira, João Botelho, José Alvaro Morais, Catarina Mourão, Jorge Silva Melo, Rita Azevedo Gomes, António Reis, Margarida Martins, Pedro Costa, Paulo Rocha.

Maria do Mar - Leitão de Barros © DR


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