Zibel107

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13.05 > 10.06.2017

N°107

ZIBELINE

Mensuel culturel & citoyen du Sud-Est Vos premiers Festivals

3€

législatives : la menace fn


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MAI JUIN 2017

CULTURE ET SOCIÉTÉ Mensuel payant paraissant le deuxième samedi du mois Édité à 20 000 exemplaires, imprimés sur papier recyclé Édité par Zibeline BP 90007 13201 Marseille Cedex 1 Dépôt légal : janvier 2008 ISSN 2491-0732 Imprimé par Riccobono Imprim’vert - papier recyclé Crédit couverture : © Alouette sans tête Conception maquette Tiphaine Dubois

Directrice de publication & rédactrice en chef Agnès Freschel agnes.freschel@gmail.com 06 09 08 30 34 Rédactrice en chef adjointe Dominique Marçon journal.zibeline@gmail.com 06 23 00 65 42 Secrétaire de rédaction Anna Zisman anna.zisman.zibeline@gmail.com

ARTS VISUELS Claude Lorin claudelorin@wanadoo.fr

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LIVRES Fred Robert fred.robert.zibeline@gmail.com MUSIQUE ET DISQUES Jacques Freschel jacques.freschel@gmail.com CINÉMA Annie Gava annie.gava@laposte.net

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Élise Padovani elise.padovani@orange.fr

Polyvolants Chris Bourgue chris.bourgue@wanadoo.fr Gaëlle Cloarec ga.cloarec@gmail.com

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Maryvonne Colombani mycolombani@gmail.com

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Marie-Jo Dhô dho.ramon@wanadoo.fr Marie Godfrin-Guidicelli m-g-g@wanadoo.fr 06 64 97 51 56 Jan Cyril Salemi jcsalemi@gmail.com

Maquettiste Philippe Perotti philippe.zibeline@gmail.com

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WRZ-Web Radio Zibeline Marc Voiry marcvoiry@hotmail.com Directrice Commerciale Véronique Linais vlinais@yahoo.fr 06 63 70 64 18 La régie Jean-Michel Florant laregie@gmx.fr 06 22 17 07 56 Collaborateurs réguliers : Régis Vlachos, Dan Warzy, Frédéric Isoletta, Yves Bergé, Émilien Moreau, Christophe Floquet, Pierre-Alain Hoyet, Aude Fanlo, Thomas Dalicante, Marion Cordier, Caroline Gerard, Faustine Aupaix

Emmanuel Macron est désormais Président de la République. Mais les électeurs du Front national n’ont jamais été aussi nombreux. 7 millions de voix au premier tour, 11 millions au second. Le Pen père, en 2002, avait réuni 5,5 millions de suffrages. La fille a doublé la donne, et la petite-fille pourrait bien dans quelques temps rafler la mise. D’autant que les scores du Front national dans notre Sud-est sont sidérants : ils sont en tête au premier tour dans 39 circonscriptions sur 57, réunissent 1,4 millions d’électeurs, soit 44% des suffrages exprimés. De 10 points supérieur à la moyenne nationale, le vote FN est aussi très différent dans sa nature : ce sont les arrondissements riches, les villages provençaux, la côte d’Azur, le Var surtout, massivement, qui adoubent l’extrême-droite. C’est-à-dire les petites villes où il y a peu d’immigrés, beaucoup de retraités, où les paysages sont splendides et la douceur de vivre incomparable. C’està-dire les bastions traditionnels de la droite, poches périphériques ou éloignées des métropoles, où les équipements culturels sont absents : dès 107 qu’un centre d’art, un théâtre public, un festival ambitieux sont ancrés dans le paysage, le vote FN baisse, comme mécaniquement. Une clef pour agir ? La donne ici a définitivement changé : Christian Estrosi repart affronter le Front national dans sa Ville de Nice, laissant à d’autres le combat régional, se concentrant sur la reconquête de l’électorat de droite dispersé par les affaires Fillon. Marion Maréchal Le Pen, soutenue par la fachosphère, durcit sa position, reprochant à sa tante de ne pas parler immigration ni abolition du mariage pour tous. Mélenchon, qui a fait baisser le vote FN en mettant au cœur de sa campagne la question sociale accaparée par Marine le Pen, pourrait se présenter à Marseille. Pourtant c’est la politique décidée à Paris qui fera croître ou décroître le Front national, soit en remédiant aux souffrances du peuple, soit en accroissant encore leur désespérance, et le massacre écologique de nos vies. C’est aussi le monde culturel, qui vote à gauche mais pratique aussi un entre-soi surplombant propice aux déchaînements populistes : écouter ce qui se crée ici, apporter le monde dans chaque village, cesser de regarder de haut les artistes locaux, la presse régionale, le public qui n’apporte pas de recettes touristiques, c’est aussi faire reculer le FN. On s’y met ? AGNÈS FRESCHEL

Administration Catherine Simon admin@journalzibeline.fr Houda Moutaouakil contact@journalzibeline.fr

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108

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À voir sur WebTV Zibeline «Le petit théâtre du bout du monde» avec Ezequiel Garcia-Romeu, «Nos forêts intérieures» avec Le Merlan à la Busserine, «IN-TWO» avec la Passerelle à Tallard, «Paroles en actes» avec l’ERAC à Vitrolles, Baptiste Monsaingeon et Philippe Descola pour «Nature culture ordures» au MuCEM, la suite de la websérie «Poubelle C’est la Vie!»...


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sommaire 106

société

Réparer, c’est politique : - Consommateurs d’obsolescence (P.7-8) - Artisans Répar’acteurs (P.9) - Homo Detritus au MuCEM, Repair café à Montpellier (P.10)

Politique culturelle La culture contre le FN : -Entre deux-tours (P.11) -Le FN, un parti d’extrême-droite (P.12) -Les législatives dans le Sud-est (P.13) -Forum anti-haine, représentation et politique en philosophie (P.14-15)

Atelier L’Âge de bois © G.C.

festivals

Rue des arts à Toulon (P.16-17) Les Envies Rhônements (P.18) Cannes, Jazz à Marseille (P.19) Oh les beaux jours ! à Marseille (P.20-21) Comédie du livre et Printemps des comédiens à Montpellier, Place aux compagnies à Aubagne (P.22-23) Tous dehors (enfin) ! à Gap, K-Live à Sète (P.24-25) Uzès danse, Nuits flamencas à Avignon (P.26-27) La Nuit des musées, Sons dessus de Sault, Prenez Place (P.28-29) On Air, Les Rendez-vous du kiosque, à Marseille, Tinals à Nîmes (P.30-31) Cité de la musique, Correns, Karwan (P.32-33)

MétamOrph’O, de la Cie Barolosolo © Barolosolo

critiques

Spectacles, musiques (P.36-47) Marseille, Aix, Martigues, Arles, Avignon, Château Arnoux, Saint-Roman-de-Malegarde, Cucuron, Montpellier, Monte-Carlo

événements

MuCEM, Villa Méditerranée, Opera Mundi (P.34-35)

AU PROGRAMME DU MOIS Musiques (P.48-51) Spectacles (P.52-61)

Exposition La Vie aquatique au MRAC - Sérignan Simon Faithfull, Going nowhere 2

cinéma [P.62-69] Arts visuels [P.70-77]

Marseille, Aix, Châteauneuf-le-Rouge, Arles, Avignon, Toulon, Cavaillon, Mane, Sérignan, Montpellier, Sète, Vence

livres [P.78-82] Je suis mort mais j’ai des amis, de G et S Malandrin © Versus Production


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Réparer, c’est politique ! NOUS SOMMES, DEPUIS QUELQUES SIÈCLES, DEVENUS DES CITOYENS. SOMMES-NOUS POUR AUTANT SORTIS DE L’ASSUJETTISSEMENT ? LES CHAÎNES QUI NOUS LIENT, PLUS SUBTILES, SONT CELLES QUI NOUS TRANSFORMENT EN CONSOMMATEURS INCESSANTS. POUR EN SORTIR, PRENDRE CONSCIENCE DE L’OBSOLESCENCE PROGRAMMÉE DE TOUT CE QUE NOUS ACHETONS, ET APPRENDRE À RÉPARER... UNE AUTRE MANIÈRE DE BRISER NOS CHAÎNES !

Obsolescence, mode et modernité Pourtant depuis 2015 l’obsolescence programmée est un délit en France : un fabricant n’a pas le droit de produire un objet délibérément programmé pour casser (voir encadré). Mais la durée moyenne de vie des appareils électroménagers est passée de 13 ans à 7 ans en deux décennies. Est-ce parce qu’ils sont moins chers et de moins bonne qualité ? Il est souvent difficile de prouver qu’un objet a été volontairement programmé pour casser, et les contournements des « metteurs sur le marché » sont innombrables...

Interdit de réparation Ford T © Creative Commons

LE CONCEPT D’OBSOLESCENCE PROGRAMMÉE EST NÉ DU CONSTAT QUE CERTAINS OBJETS ÉTAIENT FABRIQUÉS POUR CASSER. ET NOUS OBLIGER À LES RENOUVELER SANS CESSE, POUR FAIRE MARCHER UN SYSTÈME ÉCONOMIQUE FONDÉ SUR UNE CROISSANCE OBLIGATOIRE. LÉGALEMENT INTERDITE, L’OBSOLESCENCE QUI NOUS POUSSE À CONSOMMER A POURTANT BIEN DES VISAGES

V

ous connaissez l’histoire de cette ampoule qui brille à Livermore depuis plus de cent ans ? Elle a été fabriquée avant 1924, date à laquelle General Electric, Philips, Osram et d’autres fabricants se réunirent pour programmer ensemble la baisse de la durée de vie des ampoules à incandescence. Ce « comité des 1000 heures » s’inquiétait : trop performantes, elles éclairaient pendant plus de 2300h en moyenne en 1924. Depuis, toutes les recherches ont consisté à les fragiliser pour les maintenir à 1000 h de vie ! Aujourd’hui les consommateurs peuvent acheter des ampoules (LED, halogènes, basse consommation) durant plus longtemps et/ou consommant moins d’énergie, mais nettement plus chères, et nécessitant un renouvellement des installations électriques, et un recyclage... Bref, une consommation croissante.

La démarche peut être habile : ainsi les systèmes électroniques remplaçant les systèmes mécaniques dans l’industrie automobile interdisent souvent toute réparation partielle pour des

Loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte Art. L. 213-4-1.-I.-L’obsolescence programmée se définit par l’ensemble des techniques par lesquelles un metteur sur le marché vise à réduire délibérément la durée de vie d’un produit pour en augmenter le taux de remplacement. II.-L’obsolescence programmée est punie d’une peine de deux ans d’emprisonnement et de 300 000 € d’amende. III.-Le montant de l’amende peut être porté, de manière proportionnée aux avantages tirés du manquement, à 5 % du chiffre d’affaires moyen annuel, calculé sur les trois derniers chiffres d’affaires annuels connus à la date des faits.

suite pages 8 à 10


société

pannes mineures. Ou les rétroviseurs qui ne se changent qu’en bloc, les carrosseries mal protégées par les pare-chocs, les batteries soudées qu’on ne peut démonter pour les changer, ou les recharger. Les adaptateurs de téléphonie et autres câbles courants ne sont pas en reste : chaque modèle de chaque marque a le sien, et certains sont hors de prix : la « connectique » est devenue une industrie, et les garagistes doivent commander chacune de leurs pièces aux marques, tant que les modèles existent. Car lorsqu’ils ne sont plus fabriqués il ne reste plus qu’à faire le tour des casses, ou à changer de voiture...

Industries culturelles

Celles-ci ne sont pas en reste, et pratiquent la péremption avec efficacité, et tout azimut. Dès le départ, au niveau du simple stockage d’information : les données étant de plus en plus lourdes, tous les supports de stockage qui existaient au XXe siècle sont obsolètes : de la vieille bande perforée binaire des années 60 aux cassettes, aux vinyles, aux bandes magnétiques, aux disquettes voire aujourd’hui aux DVD-ROM, tous sont dépassés, obsolètes. Pas forcément parce qu’ils sont fragiles, mais parce que les systèmes de lecture qui permettaient d’y accéder ont disparu. C’est pourquoi le livre résiste, qui ne nécessite que nos yeux... Quant aux fichiers informatiques, ils subissent l’évolution des formats. Et au bout d’un temps souvent court, soit les nouvelles versions des logiciels ne prennent pas en compte leur codage, soit le format lui même disparaît, ou n’est plus pris en charge par l’environnement informatique. Ainsi le format TIFF, acquis par Adobe et jamais mis à jour depuis 2006. Ou pour les images le PNG, en concurrence avec le GIFF : les utilisateurs de ces formats qui ont perdu la course à l’échalote doivent acquérir les logiciels concurrents, et mettre leurs fichiers à jour tant qu’ils le peuvent, s’ils

veulent continuer à les lire. Les logiciels ? il s’agit de les remplacer rapidement par des versions nouvelles, pour que le consommateur ne garde pas à vie une licence en principe infinie : ainsi en 22 ans nous avons vu défiler Windows 95, 98, 2000, XP, Vista, 7, 8 et 10. Pas moins de 8 versions pour Microsoft.

la qualité des produits pour ne pas envoyer vers la concurrence. Reste que d’autres moyens sont à l’œuvre, dans des marchés destinés plus particulièrement aux femmes. Les collants jetables qu’il serait facile de rendre plus solides, les produits alimentaires ou parapharmaceutiques dont les dates de

« La mode est imitation collective d’une nouveauté régulière » Roland Barthes, Le Dandysme et la mode

Les fabricants ne développent les pilotes que pour les versions les plus récentes, et les mises à jour et supports techniques n’existent plus pour les anciennes versions : le consommateur est condamné à changer de version. Mais la nécessité de remplacement atteint surtout les ordinateurs eux-mêmes. Si le taux de panne des composantes informatiques hardware est généralement très bas (les geeks savent chercher les informations sur ce sujet, et n’achètent que du très solide !), la durée de vie moyenne d’un PC est de… 3 ans. Infectés par des virus, privés de la puissance minimale nécessaire pour les mises à jour, ils deviennent instables, lents et s’éteignent. Les Mac durent beaucoup plus longtemps, mais ils coûtent aussi plus cher, et sont quant à eux indémontables. Donc irréparables. Et puis les « vieux » Mac ne sont pas compatibles avec les iPhone...

Lutter contre la mode

Le système économique capitaliste repose donc sur une incitation au renouvellement. La prise de conscience de l’obsolescence programmée par les citoyens et les législateurs est en cours, et nombre de fabricants rendent aujourd’hui des comptes au consommateur, préférant soigner leur image, et mettre en avant © Creative Commons

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péremption sont ambiguës*, et, bien sûr la mode, et l’industrie de la beauté. On cite habituellement Général Motors comme origine du concept de modèle dépassé : Ford fabriquait des T solides et indistincts, et General Motors a lancé l’idée de distinction, de beauté automobile, et de modèle dépassé, ou ringard, populaire, commun. Mais avant cela la mode vestimentaire frappait déjà les Cours européennes au XVIII siècle, toujours pour distinguer, les aristocrates des bourgeois et les bourgeois du peuple, mais aussi les ringards et les branchés. Et la modernité poétique, fille de la révolution industrielle, voulait « trouver du Nouveau ». Aujourd’hui encore nos artistes songent davantage au renouvellement des formes qu’à la pertinence des œuvres. Cette recherche du Nouveau, qui lorsqu’il est collectif se dénomme la mode, impose des modèles excentriques ou importables lorsque le goût du jour est passé, des fêtes de la consommation, un rythme de l’année au gré des soldes. Lutter contre cette forme d’obsolescence programmée relève d’un acte politique : elle est à même de modifier profondément la société, qui consommerait différemment, prendrait soin des objets, des matières, et produirait nettement moins de déchets. Elle est à même de nous faire sortir du capitalisme, né en même temps que le concept de modernité. La fripe et le vintage , la récup et le recyclage, la réparation et le durable sont donc des solutions politiques capables de remettre en cause notre système économique... pourvu que la mode même de ces usages naissants ne les vide pas de leurs vertus ! AGNÈS FRESCHEL

Les mentions « à consommer avant » et à consommer de préférence avant », très proches, ne signifient pas du tout la même chose : si la date de péremption indique qu’un dépassement peut-être nocif, le « de préférence » ne signale qu’une baisse supposée de l’efficacité médicale, ou diététique... Cette confusion entraine à jeter des produits consommables.

*


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Passe-moi le tournevis ! POURQUOI JETER QUAND ON PEUT RÉPARER ? FACE AU GASPILLAGE, BRICOLEURS AMATEURS ET ARTISANS PROFESSIONNELS S’ORGANISENT

N

ous croulons sous les déchets, et dans les océans répandons un continent de plastique. Pour remédier à cela, il nous faudrait réduire considérablement notre production d’éléments non recyclables. Une problématique explosive, dans un contexte de libéralisme économique qui enjoint à toujours plus de consommation, mais où les signaux d’alerte environnementale passent les uns après les autres au rouge. D’où la sensation d’incohérence quasi schizophrénique qui envahit notre société. L’obsolescence programmée (cf pages précédentes) est devenue un délit en France, mais chaque nouvelle loi, chaque dispositif « vert » ou « durable » peut s’avérer être une aubaine pour les marchés, et il n’est pas toujours facile, pour les citoyens-consommateurs que nous sommes, de s’y retrouver. Dans un article du magazine Challenges daté d’octobre 2015, et intitulé Leroy Merlin, Seb, Rowenta, We Fix... Le business de la réparation explose1, on peut lire que l’enjeu, pour ces grosses enseignes de bricolage et d’électroménager, est de « renforcer la fidélisation, un avantage comparatif face aux e-commerçants ; mettre en avant leur démarche responsable ; et lutter face aux fab labs, repair cafes et communautés de makers qui incitent les Français, au pouvoir d’achat en berne, à rafistoler au lieu de consommer ». La ligne

dans notre secteur n’ont rien à vendre, hormis leur savoir-faire, à la différence de Darty et autres gros commerces d’électroménager ». Hervé Leblanc est ébéniste rue Louis Astruc à Marseille ; sur sa porte, un panneau « entrée libre », et le logo des Répar’Acteurs, avec pour slogan « Je répare ... et ça repart ! ». Il fait tout à la main et nous présente ses outils, quelques gouges, un rabot, une scie égoïne, et « un produit merveilleux, la gomme-laque, fabriquée par des vers sur une variété de figuiers ». Il récupère énormément de matériaux : « Pour moi le bois ne se jette pas. Au pire des cas s’il est vermoulu, il finit dans la cheminée ». Très satisfait de la démarche collective des artisans, il déplore que Hervé Leblanc décapant du vernis © G.C. beaucoup de métiers se perdent, éditoriale de Challenges, qui traite d’économie faute de transmission : « Essayez de trouver un libérale avec enthousiasme, a le mérite de tourneur sur bois à Marseille ! » rendre très claire leur démarche : puisque On sent cependant que la demande se préla tendance encourage la réparation, créons cise, de plus en plus de gens s’intéressent à la des ateliers, payants, pour drainer du client. réparation, et pour Jean-Pierre Galvez, « Les Face à cette étonnante capacité de siphonnage clients sont extrêmement satisfaits ! Quand vous des bonnes intentions, que faire ? S’informer, un aimez vos vieilles chaussures, vous avez envie de maximum, apprendre à réparer soi-même (lire les garder ». Bien-sûr, tout dépend du pouvoir p10). Et lorsqu’on n’a pas le temps, l’énergie d’achat, mais « un objet beau, bien conçu, qui dure ou les compétences, trouver d’autres solutions et qu’on peut entretenir et réparer, au final on s’y retrouve, alors qu’un objet qui ne vous donne plutôt que nourrir le grand capital ? pas satisfaction et que vous devez racheter tous les 6 mois... ». Chez Hervé Leblanc, les conseils sont gratuits, Parce qu’il y a des alternatives, locales, à taille de même que les devis et la livraison dans le humaine, qui pensent différemment l’acte de quartier ; ancien travailleur du secteur social, consommer. Et puisque l’ère est aux réseaux, il songe à mettre en place des ateliers, « pour elles se structurent souvent pour agir contre le transmettre ». gaspillage. En Paca, la Chambre de Métiers La Chambre de Métiers et de l’Artisanat et de l’Artisanat a ainsi lancé une opération mène une réflexion au niveau du tri, afin de visant à promouvoir les métiers de la répara- poursuivre cette action avec cohérence, et a tion, Répar’Acteurs2. Sous cette bannière, de déjà lancé un autre dispositif pour faire des Digne-les-Bains à Largentière, en passant économies d’énergie une priorité. GAËLLE CLOAREC par Mougins, Venelles, La Garde ou Apt, des affûteurs, cordonniers, dépanneurs informatique et électronique, luthiers, couturiers, serruriers, 1 challenges.fr/services-et-distribution/ plombiers... tous engagés dans une démarche leroy-merlin-seb-rowenta-we-fix-le-businessécologique. Jean-Pierre Galvez, le Président de-la reparation-explose_52487 2 cmar-paca.fr/les-artisans-repar-acteurs-paca de la CMA, précise que « ces artisans qui réparent

L’artisan du coin


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La morale ? Bac jaune

L

e titre de sa conférence -Homo detritus, l’idéal trompeur d’un monde sans restes- évoque irrésistiblement le semeur de zizanie d’Astérix, arme secrète de César qui cherche à diviser pour mieux régner... Baptiste Monsaingeon est socio-anthropologue, et sa thèse Le déchet durable a inspiré en partie l’exposition Vies d’ordures à voir au MuCEM jusqu’au 14 août (retrouvez notre critique sur journalzibeline.fr, ainsi que nos entretiens multimédias avec le chercheur). Le 20 avril dans l’auditorium Germaine Tillon, il s’est livré à un exercice difficile : remettre en question la moralisation du déchet. Avec une approche intéressante, prenant en compte le rapport complexe de l’être humain à sa « mécanique excrémentielle » (entre volonté de maîtrise, fantasme de pureté, acte libératoire jouissif). Baptiste Monsaingeon reproche aux politiques publiques de masquer les problèmes posés par la société de consommation au moyen d’un « tri sélectif de surface », rituel séparant le bon du mauvais jeteur. Une façon d’endormir l’esprit critique des citoyens, pour ne surtout entraîner « aucune rupture avec le paradigme productiviste ». Choisir

On le suit parfaitement, et encore plus volontiers jusqu’à sa critique des grands groupes (comme Suez, mécène de l’exposition ?) qui ont bien compris le potentiel économique majeur du déchet. Mais pourquoi jeter la morale avec l’eau du bain ? N’est-ce pas un trait remarquable de l’être humain que d’avoir tendance à peser ses actions ? Il devrait être possible de réfléchir en profondeur à notre goût immodéré et mortel pour le plastique, sans être dupe des marchés. Pourquoi n’allierions-nous pas la lucidité et la morale, en considérant notre façon de glisser sous le tapis ce que nous ne saurions voir sans frémir, les ordures, qu’elles soient ménagères, industrielles ou radioactives ? GAËLLE CLOAREC

à lire le bac jaune ou vert apaise notre culpabilité de pollueur-né, et en passer par des solutions gestionnaires, managériales, nous promet une illusoire « rédemption par la technique ».

Homo detritus Critique de la société du déchet Baptiste Monsaingeon Seuil, 19 €

Une vie après la panne

I

l y en a 1259 aujourd’hui, peut-être quelques-uns de plus dans le monde à la date d’impression de ce numéro. Depuis 2009 à Amsterdam, où Martine Postma, conseillère communale écologiste inventait le concept, les Repair Café (cafés de réparation) ouvrent partout en Europe, aux États-Unis, au Brésil, en Inde, au Japon. Un mouvement qui se développe très rapidement, sursaut contre le tout jetable, mobilisant Redémarrer un moteur de ventilateur à l’aide d’aimants © A.Z bénévoles et associations autour du goût et ou grille-pains (l’un des objets le plus souvent l’art de la réparation des objets. apporté pour auscultation auprès des experts Visite de celui de Montpellier, petit nouveau bricoleurs). Au début, certains n’avaient pas inauguré en novembre 2016, grâce au « kit compris le principe : ils laissaient l’objet, et de démarrage », vendu 49 € sur le site de la disaient « À tout à l’heure ! » Or, ici comme dans tous les autres Repair Café, il s’agit de fondation. Comme chaque 3e samedi du mois, le local partager le savoir-faire. Gratuitement (contre du Faubourg accueille les participants. Il y participation libre) on prend place dans l’une des a parfois la queue pour apprendre à réparer pièces du local (une pour la couture, une pour fers à repasser, robots de cuisine, ordinateurs, l’électronique, une pour les objets divers) et

l’un des bricoleurs patentés examine le malade. Les outils sont peu nombreux, mais souvent une simple observation suffit pour la remise en circuit de l’objet. La moitié d’entre eux ressortent en état de marche. Mathieu Mutel, de l’association Zéro Waste (avec Les Petits débrouillards, très investie, une petite dizaine de structures gèrent le lieu montpelliérain), a remarqué que les participants sont souvent des retraités ou des jeunes. « Soit ils ont gardé l’habitude de ne pas gâcher, soit ils sont les acteurs de ce nouveau rapport à l’objet, à qui on veut laisser une chance après la panne. » Une façon de faire de la politique ? Un peu décontenancé, il conclut que oui, promouvoir l’économie circulaire, lutter contre la consommation effrénée, « c’est peut-être plus utile que de mettre un bulletin dans l’urne ». À quand une prise de conscience partagée entre citoyens et politiques, sortant ce genre d’initiative du circuit alter ? ANNA ZISMAN

Repair café Montpellier Le Faubourg, Montpellier repaircafe.org lefaubourg-montpellier.org


Ici,

politique culturelle

la Culture contre le FN

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LA PRÉSIDENTIELLE A CONFIRMÉ L’ANCRAGE TRÈS FORT DU FRONT NATIONAL DANS NOTRE RÉGION. COMMENT LUTTER ? INTERROGEONS NOS PRATIQUES, AFFINONS LE CONSTAT, ET PENSONS LA REPRÉSENTATION...

Seulement dire non ? LE MONDE CULTUREL DE PACA S’EST RÉUNI ENTRE LES DEUX TOURS AUTOUR DE CHRISTIAN ESTROSI AVANT SA DÉMISSION DE LA PRÉSIDENCE DU CONSEIL RÉGIONAL. POUR FAIRE BARRAGE À LE PEN

On vote pour les migrants, les trans, les enfants d’homosexuels qui risquent de perdre leurs droits. On vote parce que eux, c’est nous. ». Et Macha Makeïeff, effarée par la tentation de l’abstention des gens de gauche, luttait contre « cette morbidité passagère qui nous prendrait », et rappelait en un très beau texte l’horreur absolue du fascisme.

I

Fracture culturelle

l y avait ceux qui disaient simplement leur peur de la menace qui monte, leur dégoût du FN : Irina Brook (Centre dramatique de Nice), Daniel Benoin (Antibes), Françoise Nyssen (Actes Sud) appelaient à voter Emmanuel Macron, « avec joie et détermination ». Ceux qui, comme Jean-Jacques Aillagon, ex ministre et conseiller culture de Christian Estrosi, disaient simplement leur engagement aux côtés d’Emmanuel Macron, et remerciaient « ceux qui avaient voté autrement au premier tour d’être là ». Parce que « le FN est incompatible avec la possibilité de l’insolence » et avec « ce qui est d’ailleurs ». Dans les zones où le vote Front national fut massif, des affects ont surgi que l’on sentait sincères. Michel Boujenah rappelait qu’à Ramatuelle, où il dirige un festival, le FN « était partout », et qu’il ne comprenait pas comment ses amis « juifs tunisiens » pouvaient voter pour ce parti. Jean Florès (directeur du Théâtre de Grasse) renchérissait, appelant « tous ses amis qui avaient voté Mélenchon à voter Macron ». Olivier Py, plus lyrique mais tout aussi personnel, rappelait qu’« on ne vote pas pour soi.

D’autres posaient des questions moins émues et plus profondes. Jean François Chougnet, « seul représentant du patrimoine et des musées », qui rappelait le « projet » culturel du Front national : « La ligne de fracture entre identité et patrimoine se joue dans nos musées de civilisation, qui défendent une ouverture au monde, une compréhension. Le Front national, c’est la figure rancie de la préservation de l’identité, l’inverse de ce que nous faisons, et qui se joue et se pense dans nos maisons. » Mais c’est Bernard Foccroulle (Directeur du Festival d’Aix) qui en appela à la « responsabilité » du monde culturel. « La fracture sociale affecte profondément le monde culturel. » Il rappela ce qui se passait en Turquie avec Erdogan, en Pologne, en Hongrie. Il rappela le Brexit. Et expliqua qu’appeler à voter ne suffisait pas, qu’il fallait que les acteurs culturels s’interrogent, tous, sur ce qui permettait ce vote partout en Europe, et sur les moyens de le combattre en réduisant les fractures. Sam Stourdzé (directeur des Rencontres d’Arles) fut plus précis encore : « Chacun d’entre nous

a sa part de responsabilité. Aujourd’hui, dans les grands festivals, la recherche de l’attractivité culturelle, la demande constante de rentabilité immédiate à laquelle nous sommes soumis nous amène à nous adresser à des publics de catégories socioprofessionnelles très privilégiées. Nous avons des éléments de réponse à apporter. Il faut travailler sur nos territoires, avec les gens, pour les gens. » Un discours rare chez les directeurs de grandes structures, soumis depuis des années à une vision libérale qui leur demande des comptes, en matière de nuits d’hôtel consommées, de places vendues, de touristes étrangers, de rentabilité en terme d’image, d’impact dans la presse nationale et internationale... La culture, en mettant en scène sa propre rentabilité, y a gagné l’assurance de financements publics stabilisés. Mais a creusé, malgré la multiplication des actions de médiation avec « les » publics, la relation avec « le » public, celui qui vit, travaille, étudie ou chôme ici. Sam Stourdzé a raison : c’est en réduisant sa fracture avec le peuple qui l’entoure que le monde culturel luttera le plus efficacement contre la haine, fruit du désarroi et enfant du mépris. AGNÈS FRESCHEL

La conférence de presse du monde de la culture contre le FN a eu lieu le 3 mai à La FabricA, à Avignon, à l’initiative de Christian Estrosi, alors Président de la Région PACA, désormais maire de Nice et candidat aux législatives niçoises

suite pages 12 à 14


12 politique culturelle

Le FN est

toujours

d’extrême

-droite

L

e résultat du premier tour de l’élection présidentielle a été un choc, une secousse, un séisme. La présence du candidat du Front national parmi les deux finalistes pour accéder à la présidence de la République a suscité une vive émotion en France. Oui, mais ça c’était en 2002. À l’époque, la qualification de Jean-Marie Le Pen avait causé l’effroi et conduit à une prise de conscience. Jacques Chirac avait balayé son adversaire avec plus de 80% des suffrages en sa faveur. Depuis, Marine Le Pen a remplacé son père à la tête du parti. C’est désormais elle qui ambitionne d’entrer à l’Elysée. Et en quinze ans, la situation a bien changé. Malgré sa défaite au soir du 7 mai, Marine Le Pen a réussi son pari : rassembler 11 millions d’électeurs, soit le double exact de son père en 2002, et imposer le FN comme une force politique incontournable en France. Et surtout, faire de ses thèmes de prédilection, qui reposent avant tout sur la peur et le refus de l’autre, des enjeux majeurs dans le débat. La dédiabolisation du FN, entamée au début des années 2010, est acquise depuis longtemps. Le processus de banalisation est en voie d’achèvement. S’ouvre désormais la phase de normalisation. Le Front national, et les idées qui vont avec, se sont installés durablement dans le pays. Pourtant le FN est et demeure un parti pas

comme les autres. L’opération de maquillage républicain, si elle est réussie en façade, ne résiste pas à l’analyse en détail. Le vernis se craquelle très vite et derrière l’apparence respectable se cachent toujours les mêmes méthodes : provocation, intimidation, pression, exclusion. Les enquêtes que Zibeline a réalisées (numéros 104, 105 et 106) dans cinq villes du Sud-est administrées par l’extrême-droite (Beaucaire, Le Pontet, Fréjus, Orange et Béziers), l’ont démontré. Repli identitaire, abus de pouvoir, rejet, peur, sont devenus le lot quotidien dans ces mairies FN. Dans nos régions, le parti continue cependant de réaliser ses plus gros scores. Sur les huit départements de ce quart sud-est, un seul, les Hautes-Alpes, n’a pas placé Marine Le Pen en tête au premier tour. Elle réalise plus de 30% dans le Vaucluse et dans le Var, 29% dans le Gard et entre 25 et 28% dans les quatre autres départements. Le tableau des résultats du premier tour selon les circonscriptions (voir ci-contre) montre clairement que dans certaines zones, l’élection de députés frontistes est envisageable. Au second tour elle n’est en tête dans aucun des 8 départements, même si c’est d’un cheveu dans le Var (49,15 %). Mais son score est bien plus haut que le score national : 44 % dans les huit départements du Sud Est, où elle serait majoritaire sans les

grandes villes (Marseille, Montpellier, Nice, Toulon et Avignon). Malgré son échec au deuxième tour, la dynamique créée autour de Marine Le Pen pourrait mener à une présence bien plus fournie du FN au parlement.

Socle idéologique

Ses deux seuls représentants actuels sont issus de nos régions : Gilbert Collard est élu du Gard, Marion Maréchal-Le Pen est députée de Vaucluse. Ce n’est pas encore officiel mais il est probable que le premier se représente. Il est déjà sûr que la seconde sera candidate à sa réélection. La petite-fille de Jean-Marie Le Pen est l’emblème de l’aile dure du parti. Parmi son travail parlementaire, une proposition de loi visant à supprimer le regroupement familial, ou une vingtaine d’interventions opposées à l’extension du délit d’entrave à l’IVG. Très bien implantée dans sa circonscription de Carpentras, elle devrait y être réélue sans difficulté. Dans la région, sa ligne identitaire, traditionnaliste et radicale est dominante. Fidèle au socle idéologique du FN. Elle a d’ailleurs émis des critiques polies mais profondes sur la contre-performance de sa tante au débat, lui reprochant en particulier de ne pas avoir parlé d’immigration. Le candidat dans la 2e circonscription de Vaucluse, Thibault de la Tocnaye, a combattu avec les commandos des forces chrétiennes au Liban et aux côtés des Contras face aux Sandinistes au Nicaragua. Il s’est distingué en décembre en traitant, dans l’hémicycle régional PACA, Christian Estrosi d’« enfoiré de gaulliste ». Dans la 16e circonscription des Bouches-duRhône, Valérie Laupies, directrice d’école, vice-présidente du Collectif Racine -le rassemblement d’enseignants liés au FNtient régulièrement des propos dénonçant l’emprise de l’islam sur la société. Dans la 7e circonscription du Var, Frédéric Boccaletti, admirateur de Charles Maurras, déclarait en 2016 que les migrants, ces « faux réfugiés », « sont animés d’un égoïsme exacerbé doublé d’une lâcheté honteuse ». Dans la 2e circonscription des Alpes-Maritimes, le candidat est Jérôme Cochet, le chargé de communication de David Rachline, maire de Fréjus et directeur de campagne de Marine Le Pen. En février, il qualifiait de « racaille » le jeune Théo, victime de graves violences policières. Non, le FN n’a vraiment pas changé. JAN-CYRIL SALEMI


13

04. DIGNE 04. MANOSQUE

LE PEN

FILLON

MACRON MÉLENCHON

26,3

17,1

19,6

22

22

19,7

20,3

22,9

LE PEN

FILLON

MACRON MÉLENCHON

30. BEAUCAIRE/ NIMES

28,8

18,2

19

21,7

30. AIGUES-MORTES

33,5

17,4

18

18,8

05. GAP

22,6

18,1

22,4

20,9

30. BAGNOLS/CÈZE

29,3

18,8

19,7

18,5

05. BRIANÇON

19,7

20,3

21,1

22,4

30. ALÈS 1

30,8

15,2

18

22,8

06. NICE 1

23,6

26,8

21

17,8

30. ALÈS 2

26,5

14,4

18,6

26,6

06. GRASSE

29,8

23,1

18,5

16,4

30. NÎMES

26,6

19,1

20

21

06. NICE 2

26,9

24,6

19,7

17,7

34. MONTPELLIER 1

22,1

19

22,8

23,2

06. MENTON

33,3

25,2

16

14,9

34. MONTPELLIER 2

10,9

15,9

24,6

33,7

06. NICE 3

30,6

24,8

18,3

15,5

34. MONTPELLIER 3

19

20,8

25,1

21,3

06. CAGNES

29,6

28,9

18,7

12,2

34. LODÈVE

25,2

16,4

20,7

23,8

06. ANTIBES

22,5

31

21,8

13,4

34. BÉZIERS 1

29,7

14,6

17,5

23,7

06. CANNES

26,7

33,1

17,7

13,1

34. BÉZIERS 2

34

18,2

17

19

06. MOUGINS

27,1

29

19,3

13,5

34. SÈTE

32

18,7

17

20,3

13. MARSEILLE 1

29,6

21,3

18,9

19,4

34. MONTPELLIER 4

26

15,8

20,8

23,9

13. MARSEILLE 2

17,7

32,4

23,6

16

34. MONTPELLIER 5

25,3

18,8

21,5

21,7

13. MARSEILLE 3

31

15,9

18,8

24,4

83. TOULON 1

25,5

26

19,6

16,8

13. MARSEILLE 4

14,4

10,8

21,8

39

83. TOULON 2

31,3

20,7

18,4

17,3

13. MARSEILLE 5

19,6

20

22

25

83. HYÈRES

27,7

26,4

19

15

13. MARSEILLE 6

25,8

23

20,6

19,9

83. LE LUC

31,3

11,9

17

29,8

13. MARSEILLE 7

26

7,7

16,9

38,6

83. FRÉJUS

30,9

29,8

17

11,9

29,9

19,7

19,1

18,6

83. BRIGNOLES

33,3

20,6

17,3

16,6

13. AUBAGNE

28

22,1

17,9

20,8

83. LA SEYNE

28,6

25,8

18,5

16,3

13. GARDANNE

31

19,3

19,2

19,2

83. DRAGUIGNAN

32,8

21,2

17

16,5

13. SALON

23

24,4

22,7

18,8

84. AVIGNON

24,3

16,5

20,3

26

13. VITROLLES

13. AIX 1

37,3

16,6

16,1

19,1

84. CAVAILLON

30,1

20,2

19

18

13. MARTIGUES

32,1

11,7

14,7

29,9

84. CARPENTRAS

35,4

18,3

16,2

18

84. ORANGE

33,8

19,5

17,2

17

84. APT

28,2

19,8

20

19

13. AIX 2

19

24,5

24,7

19,6

13. CHATEAURENARD

30,4

22,4

17,9

17

13. ARLES

32,5

16,1

16,6

22,7

Les législatives dans le Sud-est Ce tableau est élaboré à partir des résultats au premier tour des 4 premiers candidats, dans les 57 circonscriptions des 8 départements du Sud-est. Les cases grisées indiquent celui qui arriverait en tête ; les résultats en rouge ceux qui ne seraient pas présents au second tour en cas d’abstention à 30% ; les résultats en italique et soulignés sont ceux des seconds après le Front national, qui pourraient donc bénéficier d’un éventuel « Front républicain » autour de leur candidature. Le premier constat est que le Parti Socialiste est totalement absent, en 5e position au mieux dans toutes les circonscriptions. L’autre constat est qu’Emmanuel Macron n’est en tête que

dans deux circonscritions, et second dans trois autres, ce qui risque de rendre très difficile l’idée d’une majorité présidentielle au parlement. La troisième, étonnante, est l’incroyable disparité du territoire, et les écarts importants entre les circonscriptions, parfois dans une même ville. Reflet des inégalités territoriales ? Mais le plus préoccupant est que 39 circonscriptions sur 57 mettraient le Front national en tête au premier tour : un véritable raz de marée. À relativiser cependant : il n’obtient nulle part la majorité absolue, contrairement aux municipales ou aux départementales, et toute alliance de tous contre lui pourrait, partout, l’emporter. Reste de nombreuses inconnues : le vote pour

les Républicains sera-t-il plus important dans un scrutin qui n’aura pas François Fillon et ses affaires comme poulain ? L’effet Mélenchon persistera-t-il au-delà des présidentielles ? Sous quelle étiquette se présenteront les députés socialistes sortants ? Un front républicain pourra-t-il se faire dans les circonscriptions, nombreuses, où les Insoumis peuvent-être les meilleurs candidats contre le FN ? Ceux-ci parviendront-ils à des accords avec le PC et EELV ? La plongée dans l’inconnu ne fait que commencer. Un Président en France n’a pas besoin de majorité absolue, il lui suffit qu’aucune coalition ne puisse se faire contre son gouvernement. Mais avec qui va-t-il donc gouverner ? A.F.


14 politique culturelle

Sortir de sa réserve

Crise politique, LES CITOYENS NE SE SENTENT PLUS REPRÉSENTÉS ? PARTONS DES ORIGINES, FORCÉMENT GRECQUES

O L

Séquence culturelle © Isabelle Bayer-Moya

a Série de Conversations Anti-Le Pen (SCALP) accompagne une mobilisation initiée par l’École de la Cause Freudienne et le Forum des Psys, contre le FN. Depuis le 13 mars, 32 psychanalystes ont lancé un appel pour faire barrage à Marine Le Pen, dans lequel on peut lire : « L’idéologie lepéniste menace les libertés publiques. Elle exacerbe les tendances qui portent à l’exclusion, la haine et l’affrontement. C’est pourquoi nous sortons de notre réserve en matière politique pour appeler nos concitoyens à voter avec nous contre les partisans de cette haine. » Le professeur Castanet soulignait en préambule l’incompatibilité entre le discours psychanalytique et la haine promue par le FN : « Les psys savent que la haine se retrouve au plus intime, vise dans l’autre son insupportable altérité, mais leur travail consiste à nous amener à juguler, contrer cette pulsion de mort, afin de vivre avec soi et les autres… C’est pourquoi nous sommes sortis de nos cabinets, la république est en danger. » Quatre séquences réunissaient chacune des personnalités issues des mondes politique (Michel Amiel, David Cormand, Alain Hayot, Christian Kert, Patrick Mennucci, modérateur Hervé Castanet), culturel (Alain Arnaudet, Sylvie Gerbault, Macha Makeïeff, Pierrette Monticelli, Christian Sebille, modératrice Agnès Freschel), médical (Alain Abrieu, Anthony Gonçalvès, Annie Levy-Mozziconacci, Dominique Maraninchi, modérateurs Sylvain Garciaz, Hervé Castanet), éducatif et culturel (Dominique Bluzet, Jane Bouvier, Christian Bruschi, Michel Gairaud, Augustin Giovannoni, Alexis Nuselovici, modératrice Pamela King). Exemples précis sur les gestions des villes, les raisons de certains rejets, rappels historiques, nécessité d’irriguer les territoires par une culture plurielle qui démonte les discours et travaille là où les mots ont un sens, la réflexion balaie les grands thèmes, se refuse aux simplifications sectaires et partiales. On reparle de l’étranger, l’exil (fonds de commerce du FN). Alexis Nuselovici insiste : « La condition d’exilé est inhérente à la condition humaine, notre histoire est composée de migrations et d’exils, c’est notre « ADN culturel », notre « condition exilique ». Puissions-nous vivre l’exil comme nos langues ! » Refuser la peur et agir, les remparts de notre liberté, de notre dignité !

n pourrait en rester à Rousseau après les élections... Mais il nous a semblé bon de parcourir la notion de représentation politique pour tenter d’en comprendre sa crise. À l’origine est le verbe, on le sait. Dans la cité athénienne le verbe des sophistes vient contrecarrer l’autorité du mythe, du sage, de l’ancien, de la tradition comme légitimation du pouvoir politique. Notre démocratie vient de là : celui qui parle le mieux convainc les autres de la conduite des affaires de la cité, voire que 2+2=5, ou qu’il est médecin puisqu’arrivant à convaincre le patient de prendre sa médecine. La figure de Socrate surgit du combat contre le sophiste : la politique et encore moins la vérité ne sauraient être l’affaire du seul maniement de la parole, de la seule rhétorique. La politique n’est pas un art, elle est un savoir, affaire des philosophes, seuls capables de comprendre l’intelligibilité des choses, c’est-à-dire l’Idée : il y a une cité idéale, purement conceptuelle qu’il faut tenter de reproduire. Tout comme il y un lit idéal auquel se réfère le menuisier. La représentation politique est donc pure mimésis, imitation par l’esprit de ce qu’est la

« Les politiques attribuent aux hommes un penchant naturel à la servitude par la patience avec laquelle ceux qu’ils ont sous les yeux supportent la leur, sans songer qu’on ne sent le prix de la liberté qu’autant qu’on en jouit soi-même, et dont le goût se perd aussitôt qu’on l’a perdue. » Rousseau, Discours sur l’origine de l’inégalité

Cité idéale. Le philosophe est roi. Représenter c’est imiter. Mais Aristote fait entrer la mimésis et donc la politique dans l’ordre de l’incertitude. Elles ne sont que de l’ordre de l’action, et non de la spéculation. Et l’homme, animal politique par nature, prend plaisir aux représentations : sa tendance innée à la mimésis n’est donc pas ressemblance. La tragédie n’est pas la vraie action mais une mise en intrigue, exagérée, mais efficace. Ainsi, comme pour le théâtre, les hommes inventent et imaginent des institutions et des mœurs, diverses et disparates. Il n’y a pas ressemblance avec le modèle idéal, mais distance ; décalage entre le représentant et le représenté2.

MARYVONNE COLOMBANI

Le 1er Forum anti-haine s’est tenu le 8 avril au Toursky, à Marseille

Hobbes ou la cité artificielle

L’esthétique, le politique et le scientifique se mêlent dans l’histoire des idées ; et la philosophie politique antique, d’Aristote et Platon, a


15

crise de la représentation

1

pour cadre un monde fini et ordonné ; avec la il a besoin, il n’a aucune raison d’avoir un oui. La représentation, ou le gouvernement, Révolution Copernicienne, l’homme ne peut rapport à l’autre. Ce n’est pas un être social. doit exécuter le vouloir de la souveraineté plus chercher un bien suprême inscrit dans Donc, hors de question que la représentation du peuple constitué en corps. Toute autre un cosmos qui n’existe plus. Dans ce cosmos, politique soit une affaire de police, de perte représentation est un vol. pour Aristote, la cité idéale est une donnée de liberté. L’homme naturel était libre. S’il Comment la mettre en place ? En 1787 à fondamentale, quasi naturelle. Avec Hobbes est devenu social c’est que c’était un gain par Philadelphie, lors des débats relatifs à l’élaet sans elle naîtra la philosophie politique rapport à l’état de nature. Un gain de liberté ; boration de la constitution américaine, les moderne. tel est l’enjeu de la communauté politique. anti-fédéralistes plaidèrent pour la plus grande Au fondement est donc le désordre, la guerre Ainsi la liberté ne se délègue pas ; le pouvoir proximité sociologique entre le peuple et ses de tous contre tous. Pour Hobbes, représentants... Mais ils ont perdu ! dans cet état pré-social hypothétique, nommé l’état de nature, chacun veut ce qu’a l’autre, il n’y a pas de règle, c’est le conflit Les citoyens ne se sentent plus permanent. L’homme n’est plus un représentés. Qu’est-ce à dire ? Que animal politique par nature, mais la confusion s’empare gravement par nécessité. La représentation des consciences : des ouvriers politique moderne va naître d’un votent pour celui qui va baisser transfert des libertés de chacun leurs salaires, des immigrés pour à un dépositaire, un souverain une raciste, des classes moyennes qui garantit notre sécurité. C’est et instruites pour la finance. Qu’en Michel Foucault, « Il faut défendre la société », Dits et Écrits, III un contrat social. L’État sera ce est-il de notre « âme et conscience » souverain, cette personne fictive alors ? Paraphrasant Spinoza, nous représentant le peuple. La légitipourrions dire que nous sommes mité n’est donc plus le droit divin de moins en moins libres de penser, mais le droit à la sécurité. L’État puisque déterminés et traversés représente, il n’incarne plus comme par une multitude toujours plus le corps du Roi. Par ce transfert agissante d’affects, de discours et d’images qui nous font penser ce liberté contre sécurité l’État est autorisé, il a autorité sans superdont nous croyons être les auteurs. RÉGIS VLACHOS cherie divine. Il est artificiel. Voilà l’artifice politique du contrat social. C’est aujourd’hui !

« Plutôt que de demander à des sujets idéaux Citoyens assujettis ce qu’ils ont pu céder d’eux-mêmes pour se laisser assujettir, il faut chercher comment les relations d’assujettissements peuvent fabriquer des sujets »

Quoique ! Avec Rousseau on est toujours en retard : « À l’instant qu’un peuple se donne des représentants il n’est plus libre ; il n’est plus » Contrat Social, III, 15. Jean Jacques salue l’artifice politique du Léviathan de Hobbes, mais pourquoi poser en fondement la guerre de tous contre tous ? Comme le cosmos, ou Dieu, c’est un présupposé non valide. Vouloir ce qu’a l’autre c’est exporter dans l’état de nature les vices de l’état social. C’est supposer que des hommes sans langage se volent des portables ! Pour Rousseau, à l’état de nature l’homme a tout ce dont

Frontispice du Leviathan de Hobbes (1651, gravure d’Abraham Bosse)

Rousseau et la liberté

Nous abordons ici l’angle purement formel et «philosophique » de cette question au XVIIIe s ; nous l’envisagerons le mois prochain sous l’angle de la question sociale… 1

Cet ancrage de la représentation politique dans la mimésis d’Aristote est l’idée du livre de Myriam Revault d’Allones Le miroir et la scène, Seuil, 2017

2


16 festivals

À Toulon,

Les 12, 13 et 14 mai, l’ancien centre populaire surnommé encore « rue du Canon » fête sa renaissance au cours d’animations festives et participatives. Premier événement d’une longue série qui ne demande qu’à s’intensifier et à s’inscrire dans la vie quotidienne des toulonnais

on joue

Lentement mais sûrement

Évolution des travaux de réhabilitation de la place des Savonnières à Toulon, 2013-2015 © Annabelle Lhuillier-Bonnal, Laurent Perrier

Place des Savonnières à Toulon, juillet 2016 © Annabelle Lhuillier-Bonnal

D

’abord il a fallu sortir Toulon de la paralysie des années frontistes, puis panser ses blessures et enfin repenser son avenir ! Un long processus entamé par Hubert Falco dès son élection en 2001 qui a fait de la requalification du centre ville l’une de ses priorités. Aujourd’hui les toulonnais redécouvrent leur ville et, si les chantiers successifs de démolition

et de réhabilitation ont perturbé certains et laissé d’autres dubitatifs, le temps est venu de se réjouir de la transformation. C’est vrai, l’équipe municipale n’a pas été bavarde sur la question du renouvellement urbain, faute d’un temps de gestation forcément long, et l’absence de communication a ouvert la voie à bien des conjectures…

La « haute ville » a eu la primeur de cette mutation : place de La Liberté et son théâtre, plus récemment le déshabillage des anciennes halles en prévision de la création « d’un lieu de vie, d’hébergement et de culture » (Artyster Toulon) et démolition de l’hôpital Chalucet dont la maitrise d’œuvre pour la reconversion est portée par le cabinet Corinne Vezzoni et Associés1. Quant à la « basse ville », les prémices de sa mise en lumière remontent à Jean-Louis Borloo alors Ministre délégué à la Ville sous la présidence de Jacques Chirac. Premières réflexions donc, premières intentions et première réalisation place du Globe avec l’inauguration, en 2002, de la Maison de la Photographie en lieu et place des BainsDouches. En 2003, Hélène Audibert, nommée adjointe au maire en charge du renouvellement urbain, du centre-ville et du logement, prend le dossier en mains : « Nous avons construit un projet en fonction de l’habitat existant, entassé, construit puis reconstruit, depuis l’avenue de la République au centre Maillol, en passant par la place d’Armes et l’Opéra. On a travaillé sur les îlots vacants, ceux dont les appartements étaient les plus insalubres ». Au total, vingt-trois hectares sont à réinventer entre « logements habitables et accessibles à tous, espaces et équipements publics ». Un vaste programme de démolition, d’acquisition et de relogement mis en œuvre conjointement par les services de la Ville, son concessionnaire VAD (société d’économie mixte), l’Agence nationale pour la Rénovation Urbaine, l’État, la Région, le Département, l’Agglomération, les investisseurs privés et banques, la Caisse des dépôts et Consignations, en liaison avec les associations des riverains et des commerçants.

La ruée vers l’art et le commerce inventif Une décennie plus tard, la présence de la culture étant induite dans le programme de rénovation urbaine, deux équipements novateurs se sont


Salagon, musée et jardins à Mane, Alpes de Haute-Provence

collectif installés place du Globe, dans les « pieds d’immeubles » transformés en locaux associatifs : Metaxu et Le Port des créateurs. Leurs expériences respectives dans les domaines de l’art, de la culture et du community management ont permis l’émergence de la Rue des Arts, projet hybride mêlant galeries, ateliers, boutiques de créateurs et d’artisans. Un nouvel espace de vie intergénérationnel doté d’éclairages nocturnes et équipé d’un système d’accrochage de photographies en plein air2. En son cœur, un immeuble est destiné au Musée des Arts, plus particulièrement à la collection d’art contemporain constituée de 1978 à 1984 par Marie-Claude Beaud, et à l’Opéra de Toulon qui, sur deux niveaux, bénéficiera de deux studios de répétition. Bref, entre la place d’Armes et la rue d’Alger, entre la rue Pierre Sémard et la place de l’Équerre rénovée, l’ancien axe historique tombé en désuétude se revitalise autour d’une même thématique : art et arts de vivre. Opération validée par Hélène Audibert et conduite par Jacques Mikaelian, bien connu des varois. Successivement urbaniste, maître d’ouvrage public et promoteur immobilier, il a fondé la SCI Équerre Sémard Développement constituée en association avec la VAD et la Caisse des Dépôts, pour mener à bien le projet : « C’est d’abord un projet public. Pour garder le cap et conserver son sens initial, on a fait en sorte de pouvoir le pérenniser car le temps du projet n’est pas le temps électoral. On a donc pris notre temps, rencontré des gens qui nous ont fait confiance et se sont réapproprié leur ville : en premier lieu la galerie Lisa, Twiggy café et Le Petit Chicago. Tous des toulonnais. » À peine la Rue de l’art inaugurée que Julien Carbone, directeur de la galerie L’Axolotl et du Port des créateurs, a les yeux rivés sur la décennie future : « Sans les enseignes traditionnelles mais avec des initiatives singulières, le centre ancien trouve un nouvel élan et offre un autre cadre de vie. Cette synergie va se répandre dans toute la ville autour de projets privés et commerciaux tandis que la vie culturelle va se structurer. Le lancement est très dense pour que les habitants réinvestissent leur ville et que les acteurs culturels soient force de propositions. » MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

Les céréales : une culture partagée

Tarif : 4 € par jour - Gratuit pour les moins de 6 ans Tél. 04 92 75 70 50 - www.musee-de-salagon.com

DaNSE & MuSIQuE LIVE

PASSIONE EMIO GRECO PIETER C SCHOLTEN

Sur trois hectares, le quartier prendra place autour du jardin, avec l’École supérieure d’art et de design TPM, l’École supérieure internationale de commerce Kedge Business School, un incubateur/pépinière d’entreprises du numérique, une médiathèque municipale et départementale, des services et bureaux administratifs pour le Conseil départemental du Var. Des logements viendront s’adosser au projet.

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30 MaI au 2 juIN 2017 La CRIéE

@Alwin Poiana

2 Là où ça danse, Maikel Lahana et Lore Stessel, cycle d’expositions conçu par Anne Cartier-Bresson et Christian Gattinoni.

ruedesarts.fr

04 91 54 70 54 theatre-lacriee.com


18 festivals

Envirhônons-nous sans cesse ! Les Envies Rhônements quittent leur créneau d’été et invitent en Camargue du printemps à l’automne. Avec un temps fort en juin. Aurélie Labouesse, directrice de production, nous parle de ces changements, et du nouveau programme

Barolosolo © Barolosolo

Zibeline : Les Envies Rhônements, festival produit par le Citron Jaune, Centre national des arts de la rue, ont toujours été atypiques... Aurélie Labouesse : Oui. Et assez uniques en leur genre, en France du moins. Cet événement invite la création artistique, qu’elle soit plastique, théâtrale, musicale ou chorégraphique, à prendre pour partenaire de jeu l’environnement naturel. Dans un cadre entre mer, fleuve et marais, et une végétation, une histoire, exceptionnelles, et des oiseaux... L’élément paysage est constitutif de notre démarche, qui s’intéresse aussi aux sciences, sur un rythme particulier qui est celui de la rencontre. Les journées que vous organisez prennent le temps de l’échange... Oui, la convivialité y est particulière, et le festival est plutôt festif ! Pourquoi alors changer de rythme ? Mais nous gardons le principe de journées et soirées qui sortent du simple rendez-vous autour d’un spectacle ! Le festival existe en fin juillet depuis 1999. Il a pris différentes formes, a permis à Ilotopie (compagnie à l’origine de la construction du Citron jaune ndlr) des temps d’expérimentation pour ses spectacles, s’est ouvert à d’autres compagnies... D’abord annuel, il est devenu biennal en 2009. Puis nous

nous sommes interrogés : est-ce le bon rythme pour le territoire ? Les propositions dans la région d’Arles sont nombreuses en juillet, le festival arrivait un peu en fin de course pour les artistes et le public. Et en plein cœur des vacances cela nous interdisait aussi de nous associer avec certains partenaires, ou d’inviter le public scolaire avec lequel nous travaillons à l’année. Et puis en juillet en Camargue il fait très très chaud en journée, et en soirée les moustiques attaquent ! Par ailleurs, pour nous qui travaillons avec l’environnement, ce déploiement sur plusieurs saisons nous permet aussi de confronter les œuvres à différentes couleurs, lumières, flores et faunes... Comment se déclinera cette saison nouvelle ? Cela a déjà commencé, le 9 avril, avec le Centaure et la Fausse compagnie. Le public était au rendez vous pour ces moments particulièrement poétiques... Le prochain temps fort sera en juin, du 1er au 6, en partenariat avec le Festival de Camargue, puis nous nous donnerons rendez-vous en automne, en partenariat cette fois avec le Museon Arlaten, le Musée Départemental Arles Antique, Lieux Publics, la Passerelle de Gap, la Fai ar... pour ouvrir le Citron Jaune à des esthétiques différentes, et croiser nos savoir-faire, et nos productions.

Le temps fort de juin permettra de retrouver les fidèles… Oui, un des principes au Citron Jaune est que la porte reste ouverte, sans discontinuer, aux compagnies du territoire, aux compagnons de route, dans un esprit de continuité. Le 3 juin il y aura donc une grande journée à la Tour du Valat avec L’Écumerie, une compagnie de Nantes qui travaille sur l’Estrans, cet espace de terre envahi par la mer. Puis 1 Watt pour une recherche loufoque sur La tentation des Cévennes, une balade musicale avec un botaniste qui nous conte fleurette, et deux Duologos... Ce sont des duos entre un scientifique et un artiste, ici le chorégraphe Yann Lheureux puis le plasticien Pierre Surtel qui travaillent avec les scientifiques Marion Vittecoq et Delphine Nicolas de la Tour du Valat. La journée se finira avec Miroir, Miroir, la dernière création acrobatique de la compagnie Happés autour d’une balançoire miroir, surplombant un piano, reflétant le paysage et les spectateurs... Cela se poursuit le lendemain... Oui, au Marais du Vigueirat, avec d’autres propositions. Un éloge des plantes vagabondes le matin, puis conte de fée loufoque où il faudra suivre et dénicher la princesse Dormeuse. Dans l’après midi La Mondiale Générale reprendra Sabordage ! en extérieur, et le soir à Port Saint-Louis MétamOrph’O, un spectacle de cirque sur l’eau, dans l’eau, vu de la berge, par la Cie Barolosolo. Pendant toute la période une installation de Frédéric Le Junter prendra vie Avec le Vent, et avec des manipulateurs qui font vibrer les installations, dans le Parc de la Révolution à Port-Saint-louis-du-Rhône. Alors rendez vous en Camargue ? Avec plaisir ! ENTRETIEN RÉALISÉ PAR AGNÈS FRESCHEL

Les Envies Rhônements Temps fort 1er au 6 juin Port-Saint-Louis, Le Sambuc, Mas-Thibert lecitronjaune.com 04 42 48 40 04


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Cannes is a man’s world Le plus grand festival de cinéma du monde se tient dans notre région. Mais nous concerne-t-il ?

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epuis 10 ans nous nous demandons à Zibeline si nous allons annoncer et couvrir le Festival de Cannes. Parce que cette manifestation où les actrices posent comme des objets empaquetés sur un tapis rouge, où Claudia Cardinale se fait retoucher pour figurer une femme « idéale » plus que filiforme, où les yachts reçoivent des soirées arrosées avec escort girls, où les retransmissions télévisées jouent de paillettes et de potins, de glamour siliconé et d’artifices trébuchants, nous semble peu correspondre à la culture que nous défendons. Mais au cinéma que nous aimons ? Cannes chaque année sélectionne et récompense des films qui ne lui ressemblent pas. Qui témoignent des luttes, des oppressions, des changements sociaux, et de la poésie du monde. Chaque année le public scintillant et

filmé à La Ciotat, Before we vanish de Kiyoshi Kurosawa... Et en allant faire un tour à la Semaine de la critique, et (re)découvrir les séries de Jane Campion et David Lynch, genre qui entre pour la première fois dans la Sélection. Quant à la Compétition Officielle, présidée par Pedro Almodovar, on y retrouvera Michael Haneke et Before we vanish, de Kiyoshi Kurosawa © 2017 Before We vanish Film Partners Sofia Coppola, Yorgos Lanthimos friqué applaudit à des œuvres d’artistes qui et Jacques Doillon, Arnaud Desplechin et le remettent en cause. Un paradoxe lié à la Michel Hazanavicius... Toujours aussi peu nature même du cinéma, qui est à la fois un de femmes, malgré leur présence beaucoup art, une industrie prospère, et un puissant plus nette dans les jurys : la présélection reste moyen de diffusion et de connaissance des l’affaire exclusive de Thierry Frémaux et cultures et des histoires de chacun. Pierre Lescure. Lorsque l’on sait l’impact Alors nous nous demandons plutôt com- qu’a Cannes sur le monde du cinéma, on ne ment nous allons le couvrir. Sans monter les peut que regretter, année après année, que les marches, mais en nous attardant pour vous en femmes, magnifiées comme actrices, y aient rendre compte à La Quinzaine (voir p 63), si peu accès comme réalisatrices... AGNÈS FRESCHEL en poussant jusqu’au festival voisin Cannes Vision Sociale (voir p 62)... Puis en nous glissant à quelques projections d’Un Certain Festival de Cannes Regard : Barbara de Mathieu Amalric qui 17 au 28 mai festival-cannes.com fera l’ouverture, L’atelier de Laurent Cantet

Marseille à l’heure du jazz

D

eux soirées d’exception à vivre les 12 et 13 juin à l’Opéra de Marseille avec Ahmad Jamal. Un avant-goût du Festival Jazz des 5 Continents qui se tiendra au Palais Longchamp du 19 au 29 juillet. En guise de « before » à cet événement incontournable de l’été marseillais, le pianiste de légende sera en concert pour des moments hors-normes en perspective. Car cette programmation ne doit rien au hasard, et mieux vaudra s’y prendre à l’avance pour être sûr de pouvoir y assister. Le jazzman présentera en effet son nouvel album, intitulé justement Marseille. Double honneur pour la ville, celui d’avoir inspiré Ahmad Jamal © JM Lubrano cet artiste et celui d’accueillir sur une scène Marseille et aux alentours. Du 1er juin au 31 emblématique la création publique de cette juillet, une vingtaine de rendez-vous seront dernière œuvre. Privilège également pour le à retrouver dans divers lieux. Ouverture au Festival Jazz des 5 Continents d’être l’orga- Square Edmond Rostand à Marseille, pour nisateur de cet événement, qui aura lieu dans un concert gratuit avec la rencontre entre la le cadre de Marseille Heure Jazz. Véritable pianiste Raphaël Lemonnier et les influences prélude au FJ5C, cette manifestation proposera blues, cubaines et andalouses de La Trova un programme mêlant concert et cinéma, à Project. À noter également les 6 et 7 juin puis

les 19 et 20, une master class organisée au Conservatoire avec la saxophoniste Géraldine Laurent et le guitariste Nguyên Lê. Le 6 juin encore, dans les salons de l’Hôtel Intercontinental, à l’Hôtel Dieu, concert gratuit avec le son brésilien d’Andrea Caparros Trio. Le 9 c’est au Novotel que Karine Bonnafous Trio offrira son jazz au coucher du soleil. Puis les 12 et 13 place donc à Ahmad Jamal, accompagné de son trio historique et, exceptionnellement, d’Abd Al Malik et de Mina Agossi. J.C.S.

Marseille Heure Jazz 1er juin au 31 juillet Divers lieux, Marseille et alentours Ahmad Jamal avec Abd Al Malik et Mina Agossi 12 et 13 juin Opéra de Marseille 04 91 55 11 10 opera.marseille.fr marseillejazz.com/nsite


20 festivals

Lecture dessinée de Véronique Ovaldé et Joann Sfar © Marie-Christine Ferrando

Grand festival de printemps

Plus de 100 auteurs et artistes présents, 60 rencontres et spectacles dans divers lieux de la ville, 6 jours pour découvrir les livres et la littérature autrement… Oh les beaux jours !, le nouveau festival littéraire de Marseille, se déroulera du 23 au 28 mai

«

Un grand événement littéraire créé spécialement pour Marseille, pour ses habitants et pour ses lecteurs. » C’est ce que déclarait le sénateur-maire Jean-Claude Gaudin lors de la conférence de presse du 7 avril. Des festivals littéraires à Marseille, il y en a déjà eu (certains mémorables) ; mais de cette envergure, sans doute pas. Le projet s’inscrit dans le cadre du grand Plan de développement de la lecture publique initié en 2015. Plan plus que nécessaire dans une ville de l’importance de Marseille où trop d’habitants restent encore, comme on dit pudiquement, « éloignés du livre ». Ce plan prévoit, entre autres, l’ouverture d’une médiathèque à Saint-Antoine, la rénovation de bibliothèques de quartier… Au total, 22 millions d’euros de budget pour favoriser l’accès du plus grand nombre à la lecture, pour développer la visibilité et la valorisation de l’expression littéraire. C’est dans cette perspective que l’association Des livres comme des idées a été créée en octobre 2015. Présidée par Valérie Toranian, dirigée par Nadia

Champesme (libraire) et Fabienne Pavia (éditrice), l’association organise et produit Les Rencontres d’Averroès (dont la 24e édition se tiendra du 16 au 19 novembre), ainsi que le tout nouveau Oh les beaux jours ! Le festival de mai sera bien sûr un temps fort. Mais neuf mois d’actions culturelles l’ont précédé. C’était un axe essentiel du projet, ses deux directrices, toutes deux marseillaises et très impliquées dans la transmission et la diffusion de la culture littéraire, tenaient beaucoup à sensibiliser les participants au livre et à la lecture, à faire appel à leur créativité également, grâce à des ateliers d’adaptation cinéma/BD, d’écriture de critiques… En 2016-17, 28 structures et 40 groupes, soit environ 900 participants de tous âges, ont ainsi préparé en amont ce nouvel événement marseillais. Sans oublier tous ceux (9 structures, 12 groupes soit 145 personnes) qui, sous la houlette de l’écrivain Sylvain Prudhomme, du photographe JeanPierre Vallorani et de la graphiste Odile Brault, ont collaboré au grand roman-photo

marseillais, prochainement publié sous le titre Les Ephémères. Une belle synergie avant le grand rendez-vous.

Demandez le programme Une programmation foisonnante, pour six jours d’un festival qui entend célébrer « une littérature vivante et ouverte sur le monde » et « élargir la forme classique des rencontres littéraires », notamment en croisant les disciplines et les formes artistiques. Placer le livre et la littérature au carrefour des sciences humaines, des cultures urbaines, de l’image, des musiques, telle est l’autre ambition proclamée de Nadia Champesme et Fabienne Pavia. Le programme est riche, décliné en dix bulles thématiques. En ouverture, une soirée inédite consacrée à « Littérature & Football » (23 mai au Merlan), avec deux spectacles, Jouer juste (d’après le roman de François Bégaudeau) puis Le Match des matchs, une performance littéraire qui confrontera sur scène neuf écrivains autour


21 d’une partie mémorable (mise en espace d’Alexandra Tobelaim). L’après-midi du lendemain se déroulera à La Friche autour de « Littérature & Hip-hop » : de la musique, des ateliers, des battles, mais aussi des tables rondes et des conférences sur le rap et la culture hip-hop. Pas de grand festival littéraire sans grands entretiens : Maylis de Kerangal, Daniel Pennac, Russel Banks, Kamel Daoud, Joseph Boyden sacrifieront à la tradition à La Criée ou à l’Alcazar et livreront ce qui fait leurs « beaux jours ». Tandis que, dans le cadre de « Frictions littéraires », on pourra plonger avec Tristan Garcia dans la piscine de La Criée, entrer dans l’histoire avec Didier Castino et Philippe Pujol, embarquer sur Le Don du Vent pour écouter François Beaune, Gérard Lefort, Marie-Hélène Fraïssé ou Franz-Olivier Giesbert. Des dialogues entre écrivains de langue allemande et auteurs méditerranéens, c’est ce que proposera « La mer blanche », un programme de rencontres à la Villa Méditerranée. « Regards sur Marseille » fera revivre en mots et en musique la figure emblématique de Claude McKay (le 25 à La Criée) et donnera la parole à deux

envoyés (très) spéciaux, Florence Aubenas et Bruno Boudjelal (le 28). Dans les Jardins du Fort Saint-Jean, la littérature dialoguera avec les sciences humaines : quatre conférences-conversations sur des sujets très variés entre « Un auteur & un chercheur » (25 et 27). Autant de propositions qui promettent de passionnantes rencontres. Mais il manquerait quelque chose si les livres eux-mêmes ne se donnaient pas en spectacle. On pourra donc goûter sur scène aux mots d’Eduardo Berti, d’Arno Bertina (le 26) et à ceux d’Elena Ferrante, grâce à Natalie Dessay qui proposera une lecture de L’amie prodigieuse (le 27). Il y aura aussi des concerts, parfois dessinés comme celui de Keziah Jones (le 26), ainsi que des lectures musicales : Sylvain Prudhomme, Bertrand Belin (le 27) et la grande Brigitte Fontaine (le 26), qui ouvrira les portes de sa bibliothèque idéale, accompagnée en musique par l’Ensemble Télémaque.

heure durant, Véronique Ovaldé et Joann Sfar ont régalé le public, nombreux, de la lecture dessinée d’un conte contemporain, À cause de la vie (Flammarion, 2017). Véronique Ovaldé, toute de noir vêtue, mais chaussée d’escarpins vernis bleu ciel qui semblaient annoncer les beaux jours, a su comme personne donner relief à ses mots, pendant que la plume tendre et caustique de Joann Sfar les mettait en images. À noter d’ailleurs que l’image sera à l’honneur durant le festival, avec plusieurs expositions photographiques, plus une rencontre avec Marie Darrieussecq autour de son dernier ouvrage Être ici est une splendeur (P.O.L 2016), consacré à la vie de la peintre allemande Paula M. Becker. Tant de choses à voir, à lire, à entendre…. Vivement les beaux jours !

Et en avant-première… …Il y eut un amuse-bouche acidulé décalé… tout à fait réjouissant. Le 7 avril à La Friche, une

FRED ROBERT

Oh les beaux jours ! 23 au 28 mai Marseille ohlesbeauxjours.fr / librairie-paca.com

Dernier spectacle de la saison du Comœdia

R LE VI EN S- RETOU

juin 2017 Vendredi 2 0h30 à2

À bientôt à Aubagne pour la nouvelle saison 2017-2018

Théâtre Comœdia Cours Foch - 13400 Aubagne

Réservations 04 42 18 19 88

W

www.aubagne.fr


22 festivals

Vivre livre

Alain Mabanckou © Hermance Triay

M

ontpellier continue son tour de Méditerranée pour la 32e édition de la Comédie du Livre, grande manifestation des Lettres largement ancrée dans le paysage culturel et populaire de la métropole. Après avoir célébré la littérature du Maghreb (2013), puis ibérique (2015), et italienne l’an dernier, les poètes, romanciers, dramaturges et conteurs viendront cette fois de toutes les rives de la Méditerranée. Dans les allées d’écrivains venus dédicacer leurs ouvrages, et au cours des débats et rencontres organisés tout au long des trois jours de l’événement, ce sera une littérature plurielle et unie qui sera mise à l’honneur. Le territoire et les aspirations sont larges en effet. 25 auteurs seront présents, venus d’Algérie, Croatie, Egypte, Israël, Liban, Slovénie, Tunisie, Italie, Espagne… et France (Sylvain Prudhomme et Emmanuel Villin). Pour clore le tour de mer, un focus est réservé

aux auteurs grecs : huit plumes seront invitées. Parmi eux, Christos Chryssopoulos, représentant peut-être le plus connu chez nous de la nouvelle génération d’écrivains grecs, grâce à ses fictions inquiétantes, qui brouillent les repères entre récit réaliste et fantastique. Dimitri Dimitriadis sera aussi présent, dramaturge qui remet sans cesse au cœur de nos questionnements contemporains les mythes fondateurs. D’autres, moins repérés ici, mais voix d’une littérature très vivante et critique, seront à découvrir : Rhéa Galanaki entre autres, avec son récent L’ultime humiliation, qui évoque une Athènes ravagée par la crise. 2017 est aussi l’année où la bande dessinée et l’illustration prennent véritablement leurs marques à la Comédie du Livre. Une exposition dédiée à l’auteur dessinateur montpelliérain Fabrice Caro, alias Fabcaro, permettra de rencontrer l’univers banal et absurde qu’il met en scène à la première personne. Les planches originales d’une dizaine de ses ouvrages, dont le célèbre Zaï Zaï Zaï Zaï (Prix Landerneau 2015) seront exposées, croisés avec les regards autobiographiques

domaine en transition

A

près ses 30 ans fêtés en 2016 (avec un record de fréquentation de plus de 60 000 spectateurs), le Printemps des Comédiens présente cette année sa dernière programmation aux côtés du Département, avant d’entamer un nouveau fonctionnement avec la Métropole de Montpellier en 2018. Son directeur artistique, Jean Varela, a ainsi prévu une édition qui fasse date, peut-être plus encore que les années précédentes, pour ce festival théâtral qui se place parmi les plus importants après celui d’Avignon. Premier signal : le retour d’Ariane Mnouchkine, 25 ans après Les Atrides, avec sa dernière création Une chambre en Inde. Dans un espace clos situé dans ce pays qui l’inspire tant, il est question d’élaborer un objet théâtral qui puisse, par sa beauté, sa pertinence, sa vitalité, faire barrage au chaos ambiant. Sans s’en détourner, bien au contraire, mais en le cernant, avec les outils et les armes des artistes. Les portes des divers lieux du Domaine d’O

s’ouvriront ensuite sur une vingtaine de spec- cirque théâtre, ou du théâtre cirque. Du grand tacles. Éric Lacascade revient aux textes spectacle. russes avec sa mise en scène des Bas-Fonds Les élèves de l’ENSAD (conservatoire d’art de Gorki. Le texte date de 1902 et nous plonge dramatique) de Montpellier joueront un texte dans la misère d’un groupe de truands, de écrit par Charly Breton, sorti de l’école en déclassés. Des abandonnés de la société, 2013, pour les 11 comédiens de la promotion dans un monde tsariste finissant, à la veille 2016. Les Restes, texte polyphonique, raconte d’une Révolution Une chambre en Inde, Ariane Mnouchkine © Michèle Laurent attendue. Deux spectacles du Théâtre Dromesko, Le Jour du grand jour (2014) et Le dur désir de durer (création 2017), diptyque poétique, concentré autour d’un décor commun qui évolue de l’un à l’autre, une baraque, avec une rue pour laisser passer le défilé de la vie. Du


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De la création à la diffusion de trois autres auteurs, Émilie Plateau, Tanx et Gilles Rochier, dont les œuvres personnelles seront également présentées dans les médiathèques de la ville. Le dimanche sera consacré au charismatique Alain Mabanckou (Le monde est mon langage, Mémoires de porc-épic,…) qui s’entourera des 4 auteurs qu’il a choisi d’inviter, réunis à l’occasion de trois « moments littéraires » : Yahia Belaskri, Kaoutar Harchi, Serge Joncour et Yasmina Khadra. Au total, pour l’une des plus importantes manifestations littéraires en France, environ 250 auteurs seront invités par les libraires et éditeurs. ANNA ZISMAN

Comédie du Livre 19 au 21 mai Place de la Comédie, et autres lieux, Montpellier et 11 communes de la Métropole comediedulivre.fr

quatre histoires entremêlées, avec des mots surgis d’autres bas-fonds que ceux de Gorki, les nôtres, au propre comme au figuré. Après sa création à Anvers, Romeo Castellucci présentera Democracy in America, pleine de bruit et de fureur, d’images fulgurantes, de quoi bousculer les pensées embrumées. S’agit-il de ce qu’il se joue en Amérique ? Oui, mais ça marche pour partout ailleurs… Beaucoup de belles propositions encore, il faut lire le programme et réserver, tout est très vite complet. Et puis Isabelle Huppert viendra clôturer le festival, avec des lectures de textes de Sade… A.Z.

Printemps des Comédiens 30 mai au 1er juillet Domaine d’O, Montpellier 04 67 63 66 66 printempsdescomediens.com

La jeune création théâtrale régionale à nouveau à l’honneur lors de la deuxième édition de la manifestation aubagnaise Place aux compagnies

C

e n’est pas un hasard si La Distillerie, à Aubagne, dirigée par Christophe Chave, a décidé en 2016 d’initier cette manifestation dédiée à la création théâtrale régionale, résultat d’un dialogue permanent entre les Scènes d’Aubagne. Depuis une dizaine d’années, ce lieu est un « lieu de fabrique », le cadre idéal pour accueillir des artistes régionaux et leurs créations, en mettant à leur disposition les moyens de répéter, d’expérimenter leur projet sur un plateau, et de le confronter au regard d’un public. Prenant ainsi en compte la fragilité du spectacle vivant, et l’aide © Cie Soleil Vert indispensable à lui apporter en matière d’accompagnement, de production et de diffusion, La Distillerie, Le Comoedia et la Médiathèque municipale Marcel Pagnol ont concocté la 2e édition de Place aux compagnies, à découvrir jusqu’au 19 mai.

Programme La Distillerie présente quatre spectacles de quatre compagnies au sortir de leurs résidences de création, avec lesquelles le public pourra échanger : Le roi aux pieds sales, par la Cie Fluid Corporation (Aubagne) est un vieux conte indien pour le jeune public, réinventé en conférence ludique par Pascale Karamazov et Sophie Zanone (13 mai) ; L’oiseau bleu, de la Cie L’Argile (Guillestre), d’après l’un des plus beaux textes de Maeterlinck (18 mai) ; Olympe de Gouges, de l’intérêt d’ouvrir sa gueule ou pas, par La Bretzel Compagny (Marseille) qui met en scène trois conférencières, chacune défendant la révolutionnaire et première féministe qu’elle fut (18 mai) ; Oblique et obscure, par Pascal Farré et Anne Naudon de la Cie Soleil Vert (Marseille), d’après le recueil d’Arno Calleja Sous la forêt (à paraître aux éditions du Nouvel Attila), qui oppose « à la paranoïa de notre époque exténuée » « la vitalité sans

réserve du tragique ». À la Distillerie toujours, le 16 mai, la Cie L’Exploitation (Aix) fera une lecture de La pièce, texte de Martin Crimp (Arche éditeur). Au Théâtre Comoedia, Zone & Cie (Aubagne) jouera Mon Petit Poucet, mis en scène par Frédéric Récanzone sur un texte de José Pliya : on y entendra la version des parents du Petit Poucet, après les deux abandons successifs et le retour des enfants, qui ont bien grandi et ont quitté la foyer familial… (le 17 mai). Enfin, en extérieur le 19 mai, le Collectif Cocotte Minute (Marseille) nous fournira un Permis de bouger (réservation obligatoire auprès du Comoedia) : la performance interroge intimement l’immigration, le déplacement de vies entières qui doivent trouver ailleurs comment se recréer ; « une exploration non naturaliste, physique, irréelle, poétique, brutale, et pulsionnelle » qui réinvente l’espace public. DO.M .

Place aux compagnies jusqu’au 19 mai La Distillerie, Aubagne 04 42 70 48 38 Le Théâtre Comoedia, Aubagne 04 42 18 19 88 aubagne.fr


24 festivals

Dans l’herbe tendre

Slow Park © X-D.R.

J

oie ! C’est le printemps, et avec les beaux jours revient dans les Alpes le Festival Tous dehors (enfin) !, dédié aux arts de la rue. De la rue, et de l’herbe tendre pourrait-on ajouter, puisque comme lors des éditions précédentes une partie du programme se déroulera dans le magnifique Domaine de Charance, sur les hauteurs de Gap. Réservez

votre week-end de la Pentecôte, car cette 5e édition affiche 14 spectacles, pour plus de 40 représentations. Il y en aura pour tous les goûts : le Théâtre La Passerelle, qui porte la manifestation, soigne année après année sa cohérence et sa diversité. Annonçons d’emblée le morceau de bravoure, rares étant les programmateurs assez

audacieux pour présenter non pas un diptyque ni un triptyque, mais carrément quatre œuvres reliées entre elles. Une proposition exceptionnelle de la Cie Adhock, qui retrace en danse-théâtre « la grande histoire de la vie : sortir du nid, prendre son envol, vieillir et mourir ». Avec des comédiens à peine issus de l’adolescence, d’âge mûr, ou « vieux et irrévérencieux », prêts à faire un « immense bras d’honneur à la mort ». Autres anciens bien vifs, les retraités de la Cie O.p.U.S vous invitent à une veillée sous les étoiles de Charance, soupe à l’oignon et feu de bois à l’appui (prévoyez tout de même de vous vêtir chaudement). Côté disciplines circassiennes, le festival fait preuve d’une grande originalité ! On se laissera surprendre par la balade nocturne de Fanny Soriano, en compagnie de ses danseurs-acrobates, mi-hommes mi-bêtes. Ou par le parc d’attractions pour gastéropodes Slow Park ; si vous n’avez jamais vu un escargot faire du trapèze, c’est le moment ou jamais. Et rassurez-vous, aucune maltraitance animale : ils sont régulièrement arrosés. Plus classiques mais tout aussi virtuoses, les anglais de NoFit State Circus & Motion house, dans une performance urbaine aux prises de

Murs musée

A

vec le festival K-Live, dédié aux arts urbains, la ville de Sète s’est peu à peu parée de fresques signées par les plus grands graffeurs mondiaux. En effet, le principe est, chaque année, de laisser les artistes invités s’exprimer sur les murs de la cité. Art éphémère, les œuvres ont pour certaines disparu, mais d’autres subsistent encore et constituent aujourd’hui le MaCO, Musée à Ciel Ouvert de Sète. 25 peintures murales participent désormais largement à l’identité de la ville, pionnière dans la mise en valeur de ce patrimoine contemporain : un parcours guidé permet d’ailleurs depuis 2010 de découvrir cet art en plein essor. Pour cette dixième édition, 10 artistes vont s’emparer de l’espace urbain, et venir encore enrichir le fonds du MaCo. Les techniques et les styles sont variés. Lors des 7 jours du festival, on pourra venir voir travailler les graffeurs. Les lieux seront situés dans toute

Le MaCO de Sète, oeuvre de l’artiste Stew © Alla Goldshteyn

la ville. Car en effet, il s’agit chaque fois de briser une double frontière : celle qui sépare les habitués de l’art et ceux qui y sont moins confrontés, et celle qui persiste à cantonner l’expression artistique urbaine dans la case

sous-art pour jeunes de banlieue. Il est temps de sortir des classifications, et de goûter, en direct, à l’émergence d’un art qui s’installe de mieux en mieux dans notre vision de la ville au quotidien.


risque millimétrées (Block). Les amateurs de clown seront ravis, en découvrant Une aventure, de La boca abierta, « tendresse » tout public à partir de 7 ans, avec Lior Shoov et Anne Kempf, qui « font musique de tout ». Ainsi que la « natation synclownisée » de Plouf et Replouf, une pratique ardue, dans un bassin de 20 cm de profondeur. Deux spectacles sont attendus avec une particulière impatience : In-Two de la Cie Tandaim (retrouvez sur journalzibeline.fr notre reportage consacré à ce projet tournant autour du secret, dans le cadre d’un jumelage entre La Passerelle et le collège de Tallard), et le mentaliste Kurt Demay, dont on avait tant apprécié L’Homme cornu en 2015. Allons, un -pas si- petit dernier, parce que la réflexion par l’humour est aussi une spécialité de Gap : la Cie AIAA et son programmatique Argent, pudeurs et décadences, avec probablement bien des révélations postélectorales... NB : en avant-goût du festival, les Curieux de nature -nom du dispositif poétique inventé par le théâtre et qui conduit depuis 4 saisons des artistes à créer des œuvres en espace naturel- ne manqueront pas d’assister à la création du groupe Zur dans les Gorges de la Méouge, les 19 et 20 mai (lire p57). GAËLLE CLOAREC

04 92 52 52 52

Tous dehors (enfin) ! 2 au 4 juin divers lieux, Gap theatre-la-passerelle.eu

Les invités 2017, grandes signatures de l’art urbain, sont à découvrir : Satone, Levalet, les deux Monkeybird, Madame, Mademoiselle Maurice, Codex Urbanus, Erell, Quentin DMR. Surprise pour le dixième invité… Anniversaire oblige… Des films, une table ronde (animée par Samantha Longhi, rédactrice en chef de Graffiti Art Magazine en présence des artistes), une boutique nomade proposant des articles aux couleurs des artistes invités, une exposition de photographies (Mon MaCO à moi, Fred Trobrillant) complètent la programmation, qui s’achèvera par deux soirs de concerts électro et hip-hop au Théâtre de la Mer. Espérons que les embruns laisseront une chance aux nouvelles productions de traverser un peu le temps sétois. ANNA ZISMAN

K-Live 29 mai au 4 juin Sète k-live.fr


26 festivals

Créations à l’honneur à Uzès Danse

D

epuis 1996, les artistes se donnent rendez-vous dans les lieux patrimoniaux et les espaces extérieurs de la cité ducale idéals pour montrer la danse différemment : le jardin de l’évêché et le jardin médiéval, l’église Saint-Étienne et, plus récemment, le lavoir. Des ambiances propices à mettre en lumière propositions insolites et scène émergente, nouvelles formes et performances, à proVeine, David Wampach © Tommy Pascal grammer des films, des cafés rencontres, des ateliers et des expositions. et Romuald Luydlin (création 2017 Bleu), Durant deux week-ends, Uzès Danse renoue Alexandre Roccoli (création 2017 Weales liens avec des artistes français et inter- ver-Quintet), Jann Gallois, Laurent Paillier nationaux qui ont déjà croisé son chemin : et Philippe Verrièle écrivent ensemble un Martine Pisani tisse un fil invisible entre douzième chapitre au livre Danser la peinture passé et présent avec Sans écrit en 2010, et sous la forme d’une performance inédite. Il Undated en 2017 dont la matière est issue poursuit ses compagnonnages, anciens ou des contenus de ses pièces précédentes, actuels, avec le « réalisateur » Christophe Danya Hammoud (Il y a longtemps que Haleb qui signe son premier film documentaire je n’ai pas été aussi calme), Magali Milian expérimental Un sueno despierto, l’artiste

associé David Wampach pour un double programme Urge et Veine, Laurent Pichaud pour la forme spectaculaire qu’il donne à sa traduction de la biographie de Deborah Hay Mon corps, ce boudhiste. Il partage ses coups de cœur pour trois expressions de femmes développées dans trois soli : Malika Djardi (Sa prière) et Paula Pi (création 2017 Ecce (h) omo) aux créations empreintes d’histoire familiale et de quête personnelle, et Lea Moro qui questionne le monde du divertissement (création 2017 Fun !). Une édition prometteuse, donc, qui entre en résonance avec les formes et les questionnements de la création actuelle. MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

Uzès danse 10, 11, 15, 16, 17 juin 04 66 03 15 39 uzesdanse.fr

Flamme Flamenca

Mercedes Ruiz © Miguel Ángel González

d’une programmation mêlant tous les aspects que revêt l’univers flamenco : danse, chant, une part incontournable des identités andalouse et gitane. Ce véritable art de vivre, inscrit au Patrimoine Mondial de l’Humanité par l’UNESCO, sera pleinement célébré à Avignon. Deux semaines de flamme flamenca, où se croiseront têtes d’affiche internationales et jeunes talents, pour une trentaine de spectacles proposés et autant d’événements en accès libre. De nombreux lieux et théâtres de la ville sont associés à la manifestation, qui s’ouvrira le 18 mai au Chêne Noir. Au programme de ce premier rendez-vous, le grand danseur et chorégraphe Andrès Marin, l’un des plus novateurs de l’art flamenco actuel. Il présentera un spectacle issu d’une résidence de création effectuée au Chêne Noir. Autres figures majeures de la danse flamenca, Patricia Guerrero se produira le 26 mai au Balcon, ainsi que

U

n espace de liberté et de fête entièrement dédié au flamenco et à sa culture, ainsi se définit le festival Les Nuits Flamencas. La 4e édition de l’événement s’annonce bouillante, bouillonnante, riche

Mercedes Ruiz, le 2 juin aux Halles. Dans la section « promesas flamencas », à noter le spectacle que présentera la jeune danseuse vauclusienne Solea Fernandez, à peine 17 ans, le 20 mai au Girasole. Côté chant, les pointures seront également au rendez-vous. Argentina sera le 20 mai au Chêne Noir, pour l’une des très rares prestations en France de cette immense artiste. L’exceptionnelle voix de David Lagos, le « Cantaor de Jerez », à la riche carrière internationale, résonnera le 27 mai au Théâtre de l’Oulle. Pour les amateurs de fêtes nocturnes et débridées, douze soirées tablao seront au programme, à partir de 22h30 au Tablao Flamenco. Enfin, parmi toutes les propositions annexes, à retenir notamment le pique-nique géant sur l’Île de la Barthelasse le 28 mai ou la soirée du 30 mai au Jardin Saint-Joseph avec apéro en musique suivi d’un ciné-bodega. JAN-CYRIL SALEMI

06 22 01 06 79

Les Nuits Flamencas 18 mai au 3 juin Divers lieux, Avignon lesnuitsflamencas.com


79,254

MAI 2017

La Ville de Gap et le théâtre La passerelle présentent

2, 3, 4

juin 2017

18 / 11 / 16

e n parte nari at ave c l e ce ntre soci al Fl amants I ri s

GRATuiT

e n par t e nar i at av e c l e ce ntr e s oci al F l amants I r i s

LE TEMPS DES ENVOLÉES SAMEDI 13 MAI > 15h > 21h

Joris Mathieu / Antoine Le Menestrel / Cie Benoit Charpe / Camille Boitel / Cie Mauvais Coton / Alexandra Tobelaim / Détachement International du Muerto Coco Un après-midi en plein air, un parcours de spectacles, du Merlan au centre social Flamants Iris, à découvrir gratuitement pour petits et grands. Au programme une chorégraphie sur façade de théâtre, un monocycle sur un trampoline ! un mât de 4m indomptable, une conférence folle, du théâtre en boîte et de la poésie sonore en caravane... Bref, bienvenue aux envolées !

04 92 52 52 52

SAISON 16/17

www.theatre-la-passerelle.eu

© C.Marc & M.Ibanez

S P E C TA C L E S G R AT U I T S POUR PETITS ET GRANDS !

Festival des arts de la rue à Gap

Visuel ©Joel Robison - isme Le pont- Licences n°1050508/09/10 Cat 1-2-3

SAISON 2016 // 2017

MAI

CIRQUE THÉÂTRE POÉSIE SONORE ...

79,254

DEHORS (ENFIN)!

DES

ENVOLÉES

18 / 11 / 16

TOUS

LE TEMPS


28 festivals

Nocturne au Musée

La Nuit Européenne des Musées, 13e édition ! Zibeline vous a préparé une sélection des plus jolies propositions en Paca, Gard et Hérault

L

a Nuit Européenne des Musées ne cesse de prendre de l’ampleur. En France, l’édition précédente a vu deux millions de visiteurs franchir les portes de plus de 1 200 structures sur tout le territoire. Elle a lieu cette année le 20 mai, portée par le ministère de la Culture et de la Communication, sous le patronage du Conseil de l’Europe, de la Commission nationale française pour l’UNESCO, et de l’ICOM (Conseil international des musées). L’un des grands charmes de la manifestation, entièrement gratuite, est la multitude d’approches qu’elle utilise pour donner accès aux Le Pavillon de Vendôme c Geneviève Barrillon fleurons du patrimoine : par les arts du geste, contes que l’on passera la soirée, autour de la la littérature, la musique... Et ce n’est pas la grande cheminée du Château de l’Emperi, taille qui compte ! Les petits établissements ou bien en musique, baroque, avec la viole font souvent preuve d’une grande inventivité de gambe de Flore Seube dans la Maison pour donner le goût au public de pousser leur de Nostradamus. Fontaine de Vaucluse porte, le soir venu. ne pouvait manquer de rendre hommage à Pétrarque, mais en origami s’il vous plaît ! Le Musée-bibliothèque qui porte son nom En Provence-Alpes donnera l’occasion de réaliser le portrait du Côte d’Azur poète ou de celle qu’il aimait, la vertueuse Ainsi au Pavillon de Vendôme à Aix-en- Laure. Tandis qu’au Musée Jean Garcin, Provence, vous pourrez mettre vous-même on célébrera les poètes de la Résistance, au la main à la pâte, lors d’un atelier créatif pour premier rang desquels, bien-sûr, René Char. petits et grands « à la manière de Clémen- Dans les somptueux jardins du Prieuré de tine Carsberg », artiste adepte du jeu des 7 Salagon (Alpes de Haute-Provence), est erreurs. Ou encore en suivant les étudiants de prévue une visite tous sens en éveil, ou encore l’École Supérieure d’Art et leur studio de un atelier « la main dans le sac » : saurez-vous sérigraphie mobile. À Salon, c’est avec des reconnaître au toucher les objets du musée ?

Gard et Hérault À Saint Gilles, dans le Gard, se trouve le Centre national du microfilm et de la numérisation, qui accueille des artistes en résidence. La plasticienne Marilina Prigent présentera son travail poétique Je vous écrirai avant le printemps. Le Miam de Sète sera fidèle à sa réputation ludique : à grand renfort de fausses nageoires, pseudo tentacules et autres prothèses en carton, vous pourrez vous transformer en tritons, poulpes ou sirènes (adultes acceptés). Mais la vie n’étant pas faite que de divertissements, à Lunel, brrr !, on visitera des geôles médiévales à la lampe torche (au Musée de la tour des Prisons). Voire, à La Grand-Combe, la Maison du Mineur, avec un aperçu du travail harassant qui faisait le quotidien des travailleurs de ce bassin minier... GAËLLE CLOAREC

Nuit Européenne des Musées 20 mai nuitdesmusees. culturecommunication.gouv.fr

à noter La Nuit Européenne des Musées est également un grand succès sur les réseaux sociaux, Twitter, Facebook et Instagram. Vous pouvez la suivre et participer notamment via le hashtag #NDM

Avignon, dans la place !

I

l n’y avait jusqu’alors pas de festival dédié aux arts de la rue à Avignon, c’est chose faite avec Prenez place(s), dont la première édition aura lieu du 2 au 5 juin. C’est l’association avignonnaise Surikat Production qui en est l’instigatrice, désireuse de permettre à tous les avignonnais -y compris aux habitants des quartiers périphériques- de « bénéficier de représentations artistiques professionnelles à prix libre (au chapeau) ».

Le parking des Italiens (proche de l’université) se transformera en espace pluriel pour l’occasion, avec un village forain, de quoi se restaurer, des murs d’expressions visuelles et artistiques, et des scènes qui accueilleront les spectacles, en extérieur ou sous chapiteaux ; d’autres auront lieu ailleurs, au parc Chico Mendès, au Clos de la Murette, sur le parvis de la mairie et au Rocher des Doms. Le programme, généreux (et concocté avec

les conseils de 4 artistes associés, Pablito Zago, Polo 51.67, Stéphane Lafargue et Kevin Laval), propose du cirque, de la danse, des concerts, du théâtre, de la magie… et bien d’autres choses encore ! DO.M.

Prenez Place(s) 2 au 5 juin Avignon 09 82 52 43 69 prenezplaces.fr


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© Grandes Mothers

Prêts pour le grand Sault ?

F

anfares, danse, art de rue, performances, installations, concerts, tout ce que l’art et la création comptent de déclinaisons sera à l’honneur le week-end des 10 et 11 juin à Sault. Dans la petite ville au pied du Ventoux, le festival Sons dessus de Sault, organisé par le collectif Le Phare à Lucioles, battra son plein, en soirée le samedi 10 et toute la journée le dimanche. Au programme pour l’ouverture, Figure-toi, création de seize élèves de 4e du collège de Sault, participant au projet CREA (Cursus de Recherches et d’Expérimentations Artistiques). Ce

dispositif, unique en France, est un véritable laboratoire d’art en milieu scolaire basé sur la création contemporaine. L’objectif est d’apporter aux adolescents une éducation artistique par la pratique et la rencontre avec des intervenants, en ateliers ou en sorties dans les galeries ou musées. Le Phare à Lucioles encadre ces apprentis-artistes et le fruit de leur travail sera donc présenté à 19h, en entrée libre, dans la salle polyvalente de Sault. Loïc Guénin est à la direction artistique de ce spectacle, né d’une « envie de parler, de dire, de crier », et qui mêlera musique, danse, théâtre,

vidéo, photo, jeux de lumière, entièrement réalisés par les élèves. Le lendemain, une dizaine de propositions seront à l’affiche, toutes gratuites, dans les domaines les plus variés. Citons pêle-mêle : à 13h30, les Grandes Mothers, les deux contrebasses de Gabrielle Gonin et Sara Giommetti à la croisée du rock acoustique et de la chanson folk ; à 14h30, dans l’église, Coding Music, un solo de contrebasse et voix par Eric Brochard, à la fois « hypnotique et polyphonique » ; à 15h, [mur]mures, une nouvelle proposition du CREA, mêlant poésie et images, avec 23 élèves de 5e, entourés de l’écrivaine Anne Calas et de l’artiste numérique Uto ; Les Impromptus, deux rendez-vous improvisés avec tous les artistes du festival, à 15h et 17h ; le groupe Mabreuch et sa musique jazz-funk en concert sur la place de la mairie à 17h30 ; avant l’apothéose du Grand Final Collectif à 18h30, sur la même place. Alors, prêts pour le grand Sault ? JAN-CYRIL SALEMI

Sons dessus de Sault 10 et 11 juin Sault pharealucioles.org

Sons AOC

© X-D.R

L

e festival Les Sons du Lub’ AOC* (Appellation d’Origine Culturelle, cela va sans dire !) associe chaque année convivialité, musique, familles, amateurs éclairés, découverte du territoire, échanges d’idées… Pour cette 13e édition, l’association Arc en Sol a choisi la thématique des produits du terroir : ainsi, l’équipe professionnelle et les quelques 120 bénévoles mobilisés dans tous les villages du Pays d’Aigues tisseront une programmation électro, jazzy, chanson française, slam, aux parfums vinicoles et autres spécialités du sud Lubéron. Hors-d’œuvre au domaine du Château de Clapier (Mirabeau) : déjeuner chez le viticulteur, puis concert gratuit du groupe jazz et slam Catessens, artistes « émergeants » de la région PACA. Panses et oreilles seront rassasiées le lendemain soir, au Château de la Tour d’Aigues : dégustation (offerte !) par les vignerons de l’AOC Luberon (des fois, le contrôle, ça a du bon), restauration sur les terrasses du château, et concert du duo

Sages comme des Sauvages : chanson française accompagnée d’instruments du monde entier (coup de cœur FIP et France Inter). DJ Amazonita et Vjay Beurette viendront ensuite faire résonner le donjon du château, avec images projetées et sons électro world (15€ les deux concerts). Le troisième jour, place aux familles, aux enfants particulièrement : dans les ruelles de Beaumont-de-Pertuis, 5 scènes accueilleront, jusqu’à minuit, 12 groupes de musique actuelle (émergeants ou amateurs, tous gratuits),

d’horizons divers : They Call Me Rico (Blues), Black Lilys (pop folk), Möng (world électro), Camicela (chanson), King Tao (funk)… Pour les plus jeunes : La Volière aux Pianos, Le Petit K (beat box)… Et toute l’après-midi, la traditionnelle bourse aux instruments, des ateliers de sensibilisation à l’écoresponsabilité, des jeux, des créations artistiques, le tout emballé dans une décoration réalisée par des jeunes en situation de handicap. Mention spéciale pour Le PianO du Lac, concert de piano flottant (le 28, en bonus, prix libre), sur l’étang de la Bonde. A.Z. Les Sons du Lub’ 25 mai Château de Clapier 26 mai La Tour d’Aigues 27 mai Beaumont-de-Pertuis sonsdulub.fr


30 festivals

Toit toit mon toit !

V

oilà l’été qui s’approche : la saison du soleil et des jours qui rallongent annonce également celle des festivals de plein-air. À la Friche de la Belle-de-Mai à Marseille, c’est au plus près des étoiles que se passeront les soirées estivales. Dès le 26 mai s’ouvrira On Air 2017, qui se prolongera jusqu’au 26 août. Sur le toit-terrasse du bâtiment, chaque vendredi et samedi soir, musiques afro, jazz, salsa ou son électro seront au programme. Flâneries face au coucher de soleil en prenant l’apéro, parties de pétanque, jeux pour enfants et dance-floor seront à savourer tous les week-ends de l’été. Les 2, 3 et 4 juin, c’est le festival B:on Air qui lancera véritablement la saison On Air et occupera le lieu ainsi que les autres espaces de la Friche. Au programme de cette deuxième édition de l’événement, l’univers électro décliné dans toutes ses dimensions. Entre underground local et pointures internationales, sound-systems et DJ sets vont se succéder pendant ces trois jours. Avec également, le dimanche après-midi, une programmation dédiée aux plus jeunes. Ce jour-là, la Récré du B:on Air accueillera les enfants pour une série de découvertes et d’amusements de toutes sortes. Des jeux et ateliers musicaux, comme cette marelle/tangram géante qui sera une sorte de synthé posé au sol, le veggie jam pour apprendre comment faire de la

Toit-terrasse de la Friche la Belle de Mai, 2016 © Caroline Dutrey

musique avec des plantes, des fruits ou des légumes, ou encore la slack-line musicale, quand les balancements en équilibre sur la lanière tendue, reliée à un capteur, génèrent des sons. Une boum petite enfance est même prévue, animée par le collectif de DJ marseillais Tropicold. Idéal pour les parents qui auront besoin d’être un peu tranquilles après avoir fait la fête les deux jours précédents ! Car le programme s’annonce fourni, éclectique et de haute qualité. Ouverture le 2 juin, sur le toit-terrasse puis au

Cabaret Aléatoire, avec les DJ de Tropicold. Le collectif, qui animera la boum des petits minots, se scinde en deux ce soir, et même en quatre : sur le toit d’abord, place au son house des deux premières moitiés, Massue Moto et Edouard Soirée Loisirs ; puis, à la nuit venue, les deux autres moitiés, Why Pink et L’Amateur, seront au Cabaret. Sur le toit, c’est l’ambiance disco de Jascha Hagen qui succédera aux DJ marseillais, tandis qu’ils seront suivis au Cabaret par le trio house de Raheem Experience. Dance-floor

Kiosque on s’amuse ! commencer, le 24 mai, c’est au WAAW, le bar du Cours Julien, qu’il faudra se rendre. Et, sans se prendre au sérieux, entrer dans le jeu du karaoké géant qui sera proposé. À cette nuance près que ce karaoké-là se fera avec des musiciens qui jouent en direct, sans écran ni paroles qui défilent sur des images. Des livrets circuleront avec des textes de chansons, à chacun de choisir la sienne ! Puis place, les 28 mai et 25 juin, aux deux rendez-vous de plein-air, sur le kiosque des Allées Léon-Gambetta. La première date, organisée en partenariat avec Marsatac, s’ouvrira dès 17h avec les ateliers DJ Mimix proposés par DJ Nassim. Les enfants pourront s’initier à Baja Frequencia © Damien Chamcirkan

D

eux dimanches et un mercredi, il n’y aura cette année plus que trois dates pour Les Rendez-vous du kiosque. Mais cela n’enlèvera rien à l’envie de faire la fête et de profiter des concerts et animations prévues. Pour cette 6e édition, la programmation restera fidèle à ce métissage mêlant univers DJ et ambiance guinguette de soirs d’été. Pour

faire scratcher les vinyles, avant d’écouter ensuite le set concocté par leur professeur. Se succéderont ensuite trois univers musicaux. D’abord celui de Cleary, et sa toy pop déroutante, faite de sons de guitare ou piano mêlés à celui de jouets musicaux ou de consoles Nintendo. Puis celui de Loheem, un duo de pop tout en émotions, entre mélodies suaves et vibrations intenses. Enfin, celui de Baja Frequencia DJ Set nous portera sur les rives d’Amérique Latine avec ses rythmes de Nueva Cumbia ou de Tropical Bass mixés par les deux Marseillais Azuleski et Goodjiu. En clôture de cette édition 2017, le 25 juin, les enfants pourront d’abord retrouver l’atelier Mimix de DJ Nassim. Puis le son blues-garage-rock de Date With Elvis occupera le kiosque. Yohan Demeillers, à la guitare et au chant, et Jean-Pierre Léon, à la batterie, offrent une musique qui croise les plus pures


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Nîmes, capitale indépendante bouillant garanti jusqu’au bout de la nuit, mais il faudra garder encore un peu d’énergie pour le lendemain. Car dès 19h, la house afro-latino ethnique de Malcolm résonnera sur le toit, suivi des sons planants de DC Salas, puis de la house funk de Mad Rey. Un nouvel espace sera également à découvrir en ce samedi 3 juin. Situé en plein cœur de la Friche, le petit plateau, relooké en sons et lumières par le collectif LAB, prendra des allures de club. L’ambiance y sera assurée par la techno de la DJ russe Inga Mauer, suivie de la techno-house de The Black Madonna, pour un mega-set de trois heures, puis Abstraxion invitera Chloé pour offrir un duo jouant sur les cordes sensuelles et érotiques. Enfin, au Cabaret, à partir de 22h, match amical entre Métaphore Collectif (Marseille) et Fils de Vénus (Paris), qui feront chacun entrer leurs meilleurs joueurs. Lives, DJ sets et ambiance rave jusqu’au petit matin, avec Bagarre, AZF, December, Helena Hauff, Donara et Permakultur.

Cinq scènes pour la 5e édition de This is not a love song, le festival nîmois des musiques indépendantes, à Paloma

JAN-CYRIL SALEMI

Le B:on Air 2 au 4 juin On Air jusqu’au 26 août La Friche, Marseille 04 95 04 95 95 lafriche.org

influences du blues aux envolées explosives d’un rock brut. Deux bals enfin, concluront la soirée : le Bal d’images Super 8 d’Olivier Lubeck est une installation vidéo que l’artiste installe sur tout type de supports, arbres, murs, ou écrans suspendus ; le Bal Décalé #4 est une formation de six musiciens capables de tout jouer, swing, tango, rock, valse ou musique tsigane, pour animer en beauté le dance-floor de Gambetta. À noter enfin que lors des deux jours, la compagnie Rara Woulib tournera autour du kiosque en proposant une savoureuse cuisine-spectacle. J.C.S.

Les Rendez-vous du kiosque 24, 28 mai & 25 juin Marseille rendezvousdukiosque.fr

Danny Brown c Tim Saccenti

C

o-organisé par la Smac de l’agglomération nîmoise, Paloma, et une association de fondus de musique indépendante, Come on people, le festival This is not a love song (Tinals) ne cesse de grandir. Au point d’être devenu un rendez-vous national de premier plan qui replace le sud sur la carte du rock indé grâce à une ligne artistique exigeante mais surtout pas élitiste, qui en décline toutes les influences : pop, folk, blues, punk, psyché, garage, indie, hip hop, électro… Tinals, c’est aussi une démarche novatrice qui réinvente la notion même de festival, proposant un concept alternatif aux grands rassemblements rock de l’été hexagonal :

après-midi gratuites, ateliers participatifs, ambiance familiale, stands dédiés aux cultures underground. Côté programmation, on trouve à la fois des artistes référents, pionniers de la scène indé -et souvent rares sur le territoire national- et la scène émergente avec un goût audacieux pour la découverte. La scène régionale au sens large est aussi bien représentée avec des artistes du grand sud, de Toulouse à Toulon. Entrons dans le détail. Parmi les groupes historiques des années 90, on trouve Royal Trux, Grandaddy, Primal Scream, Echo & the Bunnymen, The Black Angels ou encore The Make Up, formation culte de la scène garage. D’autres en sont leurs dignes héritiers comme Pond, Jake Bugg, Archie &the Bunkers, Slaves. Si le rock est au cœur de la programmation, les sons plus urbains ne sont pas écartés avec Moderat, Flying, Lotus Mick Jenkins. À ne pas manquer, la seule date en France de Death Grips, découvert à Paloma en 2013. Et les organisateurs de dévoiler leurs coups de cœur : Danny Brown pour son grand écart entre hip hop et black soul, Johnny Mafia pour ses 20 ans de moyenne d’âge et ses déjà superbes compositions, Shugo Tokumaru, pour son côté ovni japonais. Le nôtre : l’acoustique toujours remarquable du lieu. Si ce n’est pas de l’amour, ça y ressemble. THOMAS DALICANTE

This is not a love song 9, 10 & 11 juin Paloma, Nîmes 04 11 94 00 10 paloma-nimes.fr


32 festivals

À l’ombre de l’Etna

O

n réduit bien souvent les musiques et danses du sud de l’Italie à la célèbre tarentelle, le festival Une semaine en Sicile nous convie à une remarquable exploration musicale et ethnographique. La Cité de la Musique, en partenariat avec l’Institut Italien de Marseille, nous entraîne entre Sicile, Calabre, Sardaigne et Salento. Le hall de la Cité présentera une exposition, Héritage musical de la Sicile Orientale, grâce au Museo Cultura e Musica popolare dei Peloritani, rassemblant photographies d’époque, objets, instruments, livres, cd, projections vidéo, pour évoquer la culture et la musique agropastorale des monts Péloritains (province de Messine). Concerts, stages, conférence, compléteront cette riche évocation. La vie et l’exil des paysans siciliens, le mirage de

Bal d’Italie © X-D.R.

Avoir vingt ans !

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on, le folklore n’est pas obligatoirement le lieu du repli identitaire, de l’étroitesse, du ressassement d’un « antan » idéalisé ! À Correns, la démonstration en est faite à longueur d’année par Le Chantier, Centre de Création des nouvelles musiques traditionnelles et musiques du monde, structure dédiée principalement à la création par le biais de résidences. Dix créations par an, accompagnées par un soutien logistique, professionnel, et des actions auprès des établissements scolaires, des écoles de musique, avec plus de cent enfants impliqués dans l’une des créations… Vitrine de ce travail exceptionnel, les Joutes Musicales de Printemps offrent une « échappée belle et musicale » à un public urbain et rural, abolissant les frontières entre les espaces, les cultures, mêlant, mixant, rêvant… au cœur d’écrins choisis (pas de sons qui se chevauchent d’un concert à l’autre), sept scènes, réparties dans tout le village, théâtre de verdure capable d’accueillir 1000 personnes, la Fraternelle, la bien nommée, destinée aux concerts d’après-midi et aux bals en fin de soirée, l’espace intimiste de l’église pour les concerts acoustiques et des « objets sonores insolites », Fort Gibron, lieu des résidences de création, et des tables rondes, Salle des Pénitents, propice aux contes, La Roquette au bord de l’Argens et ses scènes ouvertes, enfin l’Agora, délicieux petit amphithéâtre de pierre,

sans compter les balades musicales et l’animation festive des rues. Autre rareté, ce véritable « Woodstock de la Provence Verte », festival familial ouvert à tous les âges, implique Correns dans sa quasi-totalité, même les agents de sécurité sont partie prenante de la fête. La politique tarifaire en est très Le Bus Rouge © Pierre Brunel incitative (40€ pour la totalité des concerts du Mandel ; Conte-Jeune public & tout public week-end), et de nombreuses manifestations grâce aux enchantements de la Cie Audigane, restent libres d’accès. Impossible d’ailleurs de de P’tit Gus et de Léon Larchet ; Intimistes tout voir, tout entendre ! Presque 40 spectacles et virtuoses (ils le sont tous) par la poésie sur deux jours et demi ! de Kamilya Jubran, Désirs Chroniques Aussi, des parcours thématiques sont pro- Quartet ou Le Bénéfice du Doute ; on se posés : Instruments traditionnels et création, laissera entraîner par Le Bus Rouge et ses avec le détournement d’instruments ancrés « odes rurales », les bals, les scènes ouvertes, dans la tradition, comme la vielle à roue, la les déambulations par la Fanfare Strada cornemuse, le galoubet, par AFond, Désirs (Québec). Le monde se donne rendez-vous Chroniques, Etsaut, Escales, Zef, et KÔ ; là, avec « des audaces qui vont dans tous les Langue occitane et culture provençale aux sens ». Celui du partage et de la liberté créatrice côtés de Tralhaires, Tant que li siam, sous l’impulsion de Miquèu Montanaro Hum, Asondar, La Mal Coiffée, Balat, Dart dans sa dernière programmation. M.C. Lab, Tambourinaïres en Cie ; Dialogue des cultures, avec Pedro Aledo, Adana, L.Rom, Diwan trio, Tambor y Canto, Kala Joutes Musicales de Printemps Jula, Ki, Duo Heim Birioukov, Aksak ; 2 au 4 juin Exploration des nouvelles technologies en Le Chantier, Correns suivant, entre autres (déjà cités) l’Ensemble 04 94 59 56 49 le-chantier.com


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l’Amérique, seront interprétés par Maura Guerrera (chant et tambourin sicilien) par des mélodies traditionnelles, souvent imprégnées de la polyrythmie du Maghreb, avec Ziad Malik (mandole, oud), Chaperon Germain (guitare, mandoline), Lippens Thomas et Cainero Juri (tambours sur cadre). En écho, un stage, dirigé par Maltese Giorgio et Roberto Giuseppe, sous forme de master class initiera au tambour sur cadre, la variété de ses jeux, de ses particularités stylistiques, qui en font un instrument d’une étonnante complexité, avec des techniques particulières féminines et masculines. Ces deux musiciens seront rejoints, pour une découverte des sons de la tradition paysanne et pastorale de la Sicile orientale, par Vinci Salvatore (cornemuse sicilienne), Parisi

Giancarlo (cornemuse sicilienne chromatique) et l’ethnomusicologue Giordano Giuseppe, dont on verra aussi le documentaire Sons de la nativité en Sicile, auquel répondra le concert dédié à la fleur de Noël, Stella di Natale, fanfares traditionnelles, récits chantés (Cantastorie), servi par Carine Lotta (chant et direction artistique), Catherine Catella, Marc Filograsso, Maura Guerrera (chant), Patrick Vaillant (mandoline), Scalambrino Luca (batterie), Daniel Malavergne (tuba, conque), Pietro Cernuto (cornemuse). On ira ensuite à la rencontre du salento, entre tradition et création, avec les deux artistes Giagnotti Claudio et Villani Anna Cinzia, qui s’accompagnent du tamburreddhu et de l’accordéon diatonique, recréant l’ambiance des Puteche (restaurants populaires salentins).

On s’initiera à la guimbarde sicilienne, u marranzanu, à la flûte en roseau et à la double flûte, au tambourin sicilien, au chant et à l’accordéon diatonique, après s’être laissé porter par les voix de la tradition sicilienne, puis on aura sans doute envie de se dégourdir les jambes grâce aux stages de danses siciliennes et sardes et la fête qu’est ce festival se clôturera par un grand bal d’Italie avec tous les musiciens et les Ballade Ballade Bois dans l’écrin de la Magalone… MARYVONNE COLOMBANI

Une semaine en Sicile 16 au 22 mai Cité de la Musique, Marseille 04 91 39 28 28 citemusique-marseille.com

Football à la marocaine

K

arwan investit la Grande Halle de la Cité des arts de la rue pour une partie de football « à la marocaine ». Un Derby, au Maroc, est un événement sportif et populaire suivi massivement Derby © Le Nashi par les supporters chevronnés ou les simples badauds, et qui déborde volontiers l’enceinte des stades. La version qu’en donne le cirque urbain Colokolo conserve l’humour et l’énergie collective de ces manifestations, en mettant en scène un commentateur déjanté, un arbitre forcément corrompu, et deux équipes dotées... d’une bascule de saut ! De quoi s’amuser des dérives classiques du monde footballistique, tout en régalant leur public de performances physiques impressionnantes. La représentation aura lieu à 14h30 le 20 mai, dans le cadre du Festival Tendance Clown #12, qui invite après le spectacle à rejoindre le Parc Billoux tout proche : deux autres œuvres y seront également en accès libre (Maintnow !, de la Cie Facile d’Excès et Ce n’est pas commode, par la Cie À Tiroirs)

“L’archet prodige d’Edgar Moreau” LE MONDE “Le petit prince du violoncelle” TÉLÉRAMA Victoire de la musique classique 2013 et 2015

GAËLLE CLOAREC

Derby 20 mai Cité des arts de la rue, Marseille 04 96 15 76 30 rue-cirque-paca.fr

LA SALLE MUSICATREIZE > 53 rue Grignan 13006 Marseille Tarifs 12/8 euros reservations@musicatreize.org > 04.91.00.91.31 ou achat en ligne : https://fr.yesgolive.com/la-salle-musicatreize


34 événements

Depuis la mer Aventuriers de la mondialisation et cultures urbaines : le Musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée renouvelle ses expositions

T

andis que l’exposition Vies d’ordures. De l’économie des déchets se poursuit au MuCEM jusqu’au 14 août, celle de la photographe Anne-Marie Filaire s’achève le 29 mai (retrouvez nos critiques sur journalzibeline.fr). Rêvons la ville, que l’on doit aux élèves du collège Versailles, est à voir au Centre de conservation et de ressources du musée jusqu’au 9 juin, à la Belle de Mai.

Expositions : ça tourne ! D’autres prennent le relais, dont celle, prometteuse, intitulée Aventuriers des mers. Conçue en partenariat avec l’Institut du monde arabe, elle porte sur les prémices de la mondialisation, en remontant l’histoire du commerce maritime international, du VIIe au XVIIe siècles. Son commissaire Vincent Giovannoni propose de « considérer l’histoire depuis la mer », qu’il s’agisse de la Méditerranée ou de l’Océan

La recherche filmée en sciences sociales © C. Lallier et S. Coulouma

Indien, en n’éludant « ni l’esclavage, ni les tentatives d’évangélisation entreprises par les Européens ». Il défend une vision historique de l’interaction, à rapprocher des travaux de Patrick Boucheron (lire p78 notre chronique consacrée à l’ouvrage collectif Histoire mondiale

de la France). Pour étudier le brassage des idées, des biens et des religions, l’exposition se base notamment sur la cartographie, les représentations mythiques des monstres marins, et un choix de marchandises somptueuses, recherchées à travers les âges par les puissants.

L’œil de l’Abbé délicate, respectueuse de ses sujets, équilibrée dans la composition. Là aussi des visages, souriants ou austères : la misère d’après-guerre vue par l’abbé n’est pas photogénique, elle est digne. Le dernier pan, centré sur sa personne et son action, résonne juste lui aussi. On y reconnaît les images connues Compagnons Emmaus par Gilbert Scotti © G.C de photographes majeurs, escendant le vaste escalier en colimaçon Henri Cartier-Bresson, Edouard Boubat, qui emmène le visiteur dans les profondeurs Robert Doisneau, Marc Riboud qui saisit au de la Villa Méditerranée, on est accueilli par vol en 1954 l’arrivée des colis à l’hôtel Rochester une série de visages au regard troublant. Les où furent livrés les dons répondant en masse à splendides portraits de compagnons d’Emmaüs, son appel. Le portrait de l’Abbé Pierre le plus réalisés en noir & blanc par Gilbert Scotti. émouvant reste peut-être celui réalisé par un Dans un grand format qui leur sied, la finesse anonyme sur les pentes du Corcovado, à Rio des tirages révélant les traces tumultueuses dans les années 60 : cet homme si vif, qui remua d’une vie humaine, marquées sur la peau. Une des montagnes d’inertie, s’est brièvement introduction parfaite pour les volets suivants de assoupi contre une balustrade, son appareil cette exposition conçue comme un triptyque. posé à côté de lui. GAËLLE CLOAREC Où l’on apprend que l’Abbé Pierre était également photographe, affectionnant ce moyen immédiat de témoigner. Loin de n’être qu’un L’exposition l’Abbé Pierre photographe travail de documentation, ou le journal visuel s’est tenue à la Villa Méditerranée, er de ses pérégrinations, son œuvre se révèle Marseille du 1 au 16 avril

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Où va l’Algérie ?

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ette question est le titre de la conférence des Mardis de la Villa qui se tiendra le 16 mai. Pour tenter d’y répondre, Akram Belkaïd, journaliste au Monde Diplomatique et à Orient XXI, dressera un état des lieux de la situation actuelle en Algérie. Si le pays a traversé sans secousse la période de crise qui a agité ses voisins, Tunisie, Libye et Syrie, de nombreuses interrogations pèsent sur son avenir. La succession du président Bouteflika, la question du pouvoir, de la démocratie, de la paix sociale, ou celle des ressources financières, liées à un pétrole dont le prix est en baisse, seront notamment à l’ordre du jour. J.C.S.

16 mai Villa Méditerranée, Marseille 04 95 09 42 52 villa-mediterranee.org


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Autre nouveauté, une double manifestation dans le cadre du Printemps de l’Art Contemporain (voir p 75), qui se décline à partir du 13 mai au Musée d’art contemporain (Hip Hop, un âge d’or) et au MuCEM (Graff en Méditerranée). Ces dernières années, grâce au travail de l’ethnologue Claire Calogirou, la collection du MuCEM s’est étoffée, avec non seulement des panneaux graffés, mais des esquisses, affiches, vidéos, vêtements... Toute une culture urbaine est à découvrir à travers ces objets peu coutumiers des cimaises.

Rencontres et Événements Le temps fort Nature, culture, ordures donnera lieu à deux conférences importantes : le 18 mai, Philippe Descola tentera de Penser la nature à l’heure de l’anthopocène ; le 8 juin, c’est l’architecte Léon Telvizian qui évoquera Beyrouth, ce symbole du chaos, « de la crise des déchets au renouveau politique ». Le 20 mai, c’est la Nuit des Musées un peu partout sur le territoire (lire p 28). Au MuCEM, on dansera, avec les élèves du lycée Saint-Charles,

et ceux d’Aix-Marseille Université, qui proposent des parcours chorégraphiés dans les salles de l’exposition Vies d’ordures, au J4 et au Fort Saint Jean. Autre déambulation artistique nocturne, autour de la photographie contemporaine cette fois : la Nuit de l’instant aura lieu les 9 et 10 juin, dans divers lieux de la Joliette et du Panier, et le musée y participe. Tout comme au festival littéraire Oh les beaux jours ! (lire p 20), qui s’installe dans les jardins du fort Saint Jean du 25 au 28 mai. Au programme, des conférences en plein air, sur le thème de la cabane ou de la question animale (avec Opera Mundi), des projections (avec Photomed), un voyage en compagnie de Keziah Jones, ou encore une rencontre avec Florence Aubenas. Par ailleurs, l’Institut Méditerranéen des métiers du patrimoine propose trois séminaires ou journées d’études en accès libre sur inscription (i2mp@mucem.org). Ils porteront les 18 et 19 mai sur La recherche filmée en sciences sociales : ouverture à l’image et légitimité scientifique ; le 8 juin sur L’alimentation

méditerranéenne : analyses historiques et questionnement muséologique ; et le 9 juin sur La collecte ethnographique dans les musées de société : collecter les migrations. Enfin, un nouveau cycle s’ouvre, suite à l’intégration dans les fonds du MuCEM d’une collection centrée sur l’histoire coloniale de la France en Algérie. Intitulé La voix des objets, il aura lieu deux lundis par mois, en accès libre, et en partenariat avec la Cité de la Musique, qui assortit les rencontres de concerts. Première date, le 15 mai, autour du Poids des héritages, avec l’éclairage d’une historienne, d’un archéologue et d’un anthropologue. Le 29 mai, des architectes et un photographe traiteront de Visages urbains et architecture coloniale. GAËLLE CLOAREC

Retrouvez sur notre WebRadio Zibeline la Traversée mensuelle du MuCEM et sa Chronique des libraires

MuCEM, Marseille 04 84 35 13 13 mucem.org

Conclure

L

e cycle de conférences Quel(s) monde(s) habiter aujourd’hui ? initié par Opera Mundi arrive à son terme. Le paysagiste Gilles Clément n’ayant pu venir le 24 avril à la Bibliothèque Départementale des Bouches-du-Rhône, ses fans trouveront réconfort auprès du philosophe Dominique Bourg, auquel revient l’honneur de conclure une série d’interventions foisonnantes (nos retours consacrés à la saison 2016-2017 sont à retrouver sur journalzibeline.fr). L’enseignant à l’École Polytechnique de Lausanne et vice-président de la Fondation Nicolas Hulot s’exprimera le 16 mai à la BDP13, sur la « Terre qu’il nous faut habiter, loin des rêves de transhumanisme et de vie extra-planétaire » caressés par certains. Face à lui en tant que discutant, François Gemenne, un spécialiste des changements climatiques, professeur à Sciences Po et directeur exécutif du programme de recherche interdisciplinaire Politiques de la terre à l’épreuve de l’anthropocène. Il sera intéressant de découvrir leur position sur le terme d’anthropocène*, parfois critiqué par d’autres penseurs qui lui préféreraient l’usage plus précis du néologisme capitalocène, pointant le capitalisme comme responsable des déséquilibres environnementaux actuels. Par ailleurs Opera Mundi organise d’autres rencontres. Le 24 mai à la Bibliothèque de Rognes, où une sociologue de l’environnement, Maïa Martin,

interviendra sur la cohabitation avec le loup. Et le 25 mai à Marseille lors du festival littéraire Oh les beaux jours ! (lire p 20-21), pour deux doubles conférences avec chacune un écrivain et un philosophe. Le MuCEM accueillera Pierre Senges et Gilles A. Tiberghien (Des cabanes rêvées aux abris contraints), puis Tristan Garcia et Florence Burgat (« Nous » et la question de l’existence animale). De quoi trouver matière à réflexion, avant d’embrayer après l’été sur un nouveau cycle, qui portera sur le Vivant dans tous ses états. G.C.

* Concept popularisé par Paul Crutzen, chimiste de l’atmosphère, Prix Nobel 1995, selon lequel la planète est entrée dans une nouvelle ère géologique attribuable à l’activité humaine, née avec la révolution industrielle Habiter en terriens à l’Anthropocène 16 mai Bibliothèque Départementale 13, Marseille Cohabiter avec le loup 24 mai Bibliothèque de Rognes Rencontres Un chercheur / un auteur dans le cadre du festival Oh les beaux jours ! 25 mai MuCEM, Marseille 07 82 41 11 84

opera-mundi.org

MAG AZINE .C OM


36 critiques spectacles

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Au cœur blanc des paradoxes Blandine Savetier met en théâtre le chef-d’œuvre d’Orhan Pamuk. La ville de Kars, coupée du monde par la Neige, y est une île infernale

L

e romancier turc a reçu le Prix Nobel de littérature quelques mois après la publication de Neige. Un roman qui parle de poésie et de religion, de politique surtout, dans une superposition de voix où on se perd avec passion. Tous les personnages y sont paradoxaux, Ka le poète stambouliote qui cherche Dieu dans la neige et l’amour, Lazuli (Bleu dans la pièce) le terroriste tendre qui aime la poésie, Kadifé la femme libre et voilée, le jeune islamiste qui rêve d’un futur enivré... Seuls les kémalistes sont des caricatures univoques, marionnettes du pouvoir, maniant la référence aux Lumières et à la Démocratie comme autant d’outils d’oppression totalitaire. Tout le présent de la société turque semble prédit là, en 2005 : entre les militaires et les islamistes, entre le désir et le mépris

de l’Europe, l’envie et le rejet d’Istanbul, entre la soif de vie et la soif de Dieu, entre la raison et la foi, entre l’interdit d’état et le prescrit religieux, il © Jean-Louis Fernandez n’est pas de chemin. La neige tombe, coupant du monde la petite ville d’Anatolie qui a nié sa mémoire, ses Kurdes, le génocide arménien Les jeunes filles voilées, prises au cœur blanc des paradoxes, s’y suicident. Il ne fait pas froid. À l’intérieur d’espaces grillagés qui s’ouvrent et se referment, Blandine Savetier dirige ses comédiens sans chercher un naturel impossible : ils surjouent, boxent, s’approchent, glissent, et décochent. L’essentiel du roman

est là, dramatisé avec intelligence, sans grande invention scénographique, mais résonnant aussi avec notre actualité. Celle d’une laïcité brandie comme outil d’intolérance, et une foi qui légitime l’assassinat... A.F.

Neige a été joué à La Criée, Marseille, du 26 au 28 avril et au Théâtre Liberté, Toulon, les 11 et 12 mai

Les derniers gestes des marionnettes

L

a compagnie d’Ézéquiel Garcia-Romeu est un des trésors de notre région, mais que l’on a plus de chance de voir ailleurs qu’ici ! Ce Petit théâtre du bout du monde, après Arles (à lire sur journalzibeline.fr) et le 3bisf (Aix), s’est installé pour une série de représentations précieuses à la Criée. Le marionnettiste, seul, est assis au sol d’un espace étroit et peuplé de créatures endormies. C’est l’une d’entre elles,

les yeux allumés, qui lui donne vie en caressant s o n v i s a g e. Enfermé sous un plafond bas au dessous d’un étage, il invite les spectateurs à circuler autour, à regarder chacune des saynètes où ses personnages de guingois, à bout de vie et de souffle, tentent © Nathalie Sternalski encore quelques gestes. Ses créatures sont très belles, effrayantes, chauves et blafardes, sortes de freaks d’un après-monde qui aurait récupéré une machine à écrire, une télé en noir et blanc, un téléphone à cadran, des vinyles. La musique, les sons dispensent des bribes de mélodies sans doute anciennes, entrecoupées d’interférences. Mais les seuls mots du spectacle sont des articles du Monde, qui racontent une

terre qui s’autodétruit. En 2015. Au dessus, à l’étage, trois marionnettes plus grandes, plus humaines, semblent mortes debout. Jusqu’à ce que de dessous il anime à leur tour, en des gestes ultimes, ces vieilles gens d’un temps d’avant, d’un temps d’après, et qu’une énorme machine à sons vienne tout balayer. Jusqu’aux nuages. Un spectacle d’une heure d’une poésie triste, et d’une beauté plastique rare, porté par le regard attentif et étonné que le marionnettiste porte sur ses créatures. Si particulières qu’elles semblent elles-mêmes, du bout de leur monde, le manipuler. AGNÈS FRESCHEL

Le Petit théâtre du bout du monde a été donné du 4 au 13 mai à La Criée, Marseille Retrouvez le monde d’ Ézéquiel Garcia-Romeu sur journalzibeline.fr/programme/ webtv-zibeline-le-bout-du-mondedezequiel-garcia-romeu/


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Acrobate du rire

E

dmonde Franchi, marraine 2017 de Festi’Femmes, festival dédié à l’humour au féminin, présentait la primeur de sa nouvelle création Show devant (et aussi sur les côtés) au Toursky dont elle est la mascotte. Jubilation attendue, programmée, chacun se remémore les spectacles précédents, attend les trouvailles à venir… L’actrice séduit, tant par son talent que par son humanité, sa capacité de partage, d’empathie, son goût des mots, des expressions savoureuses, ses mimiques. Et le public fut comblé par ce spectacle inspiré des grands moments du music-hall, avec ses tours de chant, ses numéros, ses gags, menés avec une intelligence mutine et malicieuse par notre chanteuse, acrobate, danseuse, stripteaseuse, diseuse de bonne aventure (si la boule de cristal se brise, la boîte de conserve de pieds paquets convient aussi !), accompagnée par son acolyte musicien et magicien Diego Bordonaro. Dans une mise en scène qui rappelle les meilleurs Fellini, on voit arriver, en retard, deux personnages (Pépito et Yolanda) en vêtement de ville, ruisselants (ils ont cheminé sous la pluie), un peu perdus, qui

© X-D.R.

découvrent la salle des fêtes dans laquelle ils sont censés donner leur représentation. Tout est en désordre, les dernières festivités ont laissé leurs traces, les accessoires sont trempés, doivent sécher avant chaque numéro, d’où la nécessité de glisser des interludes, blagues potaches et chants des années 60-70 pour les plus récents, inénarrables de mièvrerie, de clichés désopilants, avec le superbe piano de Pepito et ses variations emportées. Yolanda

se lance avec fougue dans des numéros improbables, comme l’exceptionnelle démonstration de trapèze volant qui vaut son pesant de douleurs zygomatiques ! Tout s’enchaîne avec gaité, dans un esprit de coq à l’âne du meilleur cru. Tremblez devant le lancer de haches, l’effeuillage sauvage, étonnez-vous avec les tours de corde ou de mouchoirs (enfin secs !). Puis tout finit (en a-t-on vraiment envie ?), par les chansons en rafale. Un 1er avril, quel bel augure ! MARYVONNE COLOMBANI

Show devant a été donné le 1er avril au Toursky, à Marseille

Vous avez dit déviant ? cimenterie désaffectée dédié à la résidence et la création artistiques, la Déviation. Au centre de la programmation, les questions de sexualité et de genre -et donc de normes et de différence- vues à travers le prisme de la création contemporaine et d’artistes queer. Danseur et chorégraphe, François Chaignaud, de la compagnie Vlovajob Pru, s’est déployé au milieu du public, happé par son solo Dumy Moyi. Une performance déambulatoire entre récital lyrique polyglotte et danse sacrée, créée en 2013 pour le Festival Montpellier Danse. Comme une créature couverte d’une parure carnavalesque, Chaignaud se meut dans un espace sans scène ni gradin, n’hésitant pas à frôler les spectateurs, comme il bouscule le cadre occidental du théâtre. Sa quasi-nudité provoque le contraire d’une gêne, elle créé une intimité bienveillante. Quand les mouvements, d’inspiration indienne, nous tournent vers l’Orient, les chants, eux, questionnent nos Shades of a queen, Mmakgosi Tsogang Kgabi © H. Richaud

Essai transformé pour les cultures queer et la 2e édition du festival Transform qui a pris ses quartiers dans un lieu atypique

A

près une naissance dans les quartiers sud, le festival porté par le collectif LGBTQI Idem a mis le cap vers l’Estaque, au pied du massif de la Nerthe, dans une

sens et nos références par la diversité de leurs origines : répertoire médiéval, cultures philippine, séfarade ou ukrainienne. Changement de décor. Mmakgosi Tsogang Kgabi définit sa performance Shades of a queen, comme une conversation qui invite le spectateur à prendre part à ses réflexions sur la construction des identités de genre. Dans son salon vintage, elle enchaîne les appels téléphoniques, des conversations courtes et répétitives, les questions insolites, à des interlocuteurs des deux sexes. Allemande d’origine sud-africaine, l’artiste mêle également à sa démarche la question de l’origine : noire et lesbienne n’est pas une double peine mais un point d’appui pour une artiste qui joue sur le terrain de la subversion. Choix artistique assumé, chaque soirée se termine avec un DJ set qui met à l’honneur les femmes qui ne sont pourtant pas rares dans cette discipline mais seulement ignorées. Là encore, histoire de décloisonner… les genres. THOMAS DALICANTE

Le festival Transform s’est déroulé les 21 et 22 avril, à La Déviation, Marseille


38 critiques spectacles

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Drôle de drame

D

’abord il y a eu un chantier-lecture mis en espace au théâtre des Bernardines en décembre 2014. Déjà très fort, déjà jubilatoire (voir chronique sur journalzibeline.fr). Ensuite, Suzanne Joubert a apporté quelques menues modifications au texte de son Show room, nouveau drame. Ce texte, superbe, est aujourd’hui édité (éditions Les Solitaires Intempestifs). Et ce qu’on espérait alors a eu lieu. La pièce a été créée dans une mise en scène collective de l’auteure et des deux comédiens metteurs en scène qui portent ce projet depuis le début. On prend les mêmes et on réussit. Marie Vayssière (dont Suzanne Joubert se plaît à rappeler que c’est en la voyant jouer qu’elle a décidé d’écrire pour le théâtre) et Arnaud Saury. Elle et Lui. Les protagonistes de ce « nouveau drame ». De quoi au juste est-il question ? D’une lecture à nouveau ? La scène est quasi vide et les deux acteurs, lunettes sur le nez, semblent chercher leur texte parmi les feuillets en désordre. Bien vite pourtant, on se rend compte que cette prétendue lecture, dont ils sortent assez rapidement, est une métaphore de ce qui

© Agnès Maury

se joue dans la pièce et sur scène. Car ce soir-là, alors qu’Elle a entrepris de lancer sa sacro-sainte tirade vespérale, long soliloque ponctué d’« attendu que » sans appel qu’Elle répète complaisamment tous les soirs entre deux gorgées de Pineau, Lui, cambré dans sa ridicule panoplie de torero, pour une fois, l’interrompt. Prend la parole….et fait dévier le cours habituel des choses. Réflexion sur l’usure du couple, sur la lourdeur des rôles assignés, sur la

dérisoire exhibition de l’intime, sur le théâtre aussi et sur le jeu, le texte fait mouche. Plombant sur le fond ; si drôle pourtant. Entre absurde (et même tragique) et hystérie, le comique et le rêve se faufilent, comme une issue possible au lent défilement (délitement ?) des existences. Suivant les consignes de l’auteure -« mieux vaut forcer le trait que de se lover dans la tiédeur d’une option naturaliste »-, les deux comédiens y vont à fond pour notre plus grand plaisir. On rit parfois jaune, mais qu’est-ce qu’on rit ! FRED ROBERT

Show room a été représenté au théâtre Joliette-Minoterie, Marseille, du 25 au 29 avril

Mettre du cœur au voyage Non, leur credo à eux, c’est plutôt la poésie, d’ailleurs ils commencent par « distiller de douces pensées » à la cantonade. « Et pour vous, c’est quoi le bonheur ? » demandent-ils, tels les Jean Rouch et Edgar Morin du XXIe siècle*. « Manger », répond l’un ; « avoir des amis avec qui rigoler » répond l’autre ; « mon chat », dit une troisième... Fabien Cartalade, joueur de trombone la nuit, homme de ménage le jour, souligne par ses notes et ses pensées amplifiées l’atmosphère paradoxale de ce spectacle. Pleine d’une nostalgie et d’un espoir tenaces, car le bonheur, « c’est quelque chose qui ne peut pas durer », et d’ailleurs, « ce n’est pas une finalité en soi, c’est une manière de voyager ». GAËLLE CLOAREC

© Vélo Théâtre

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ne poignée de gens, c’est vous, c’est nous, parce que l’expérience du train, de la gare, de l’attente dans une salle des pas perdus est commune à tous. Le Vélo Théâtre a décidé de « faire société » et propose une nouvelle création nourrie du

pouvoir évocateur de l’univers ferroviaire. Pour que ce soit chaleureux, deux agents rêveurs et approximativement anglophones vous accueillent et vous installent. Chacun son siège, chacun son numéro, mais leur tentative de mettre de l’ordre n’est pas très crédible.

* En référence au film Chronique d’un été réalisé en 1960, où les auteurs posaient cette question aux passants

Une poignée de gens... quelque chose qui ressemble au bonheur a été vu au Théâtre Massalia, Marseille, le 27 avril


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Ce théâtre qui parle de nous

M

Le Merlan a programmé en avril trois spectacles ancrés dans le présent, portés par des auteurs-metteurs en scène : Pauline Bureau, Joris Mathieu et Jean Baptiste Amman

on cœur de Pauline Bureau ne relève pas à proprement parler du théâtre documentaire. Théâtre documenté plutôt, rehaussé de la force de la fiction : il s’agit de mettre en scène le scandale du Médiator, ses morts, le combat réel d’Irène Frachon, médecin qui a combattu le labo pharmaceutique et obtenu l’interdiction, et l’histoire d’une victime recomposée à partir des récits de plusieurs. La mise en scène, élégante, entrecoupe les scènes de noir, et les acteurs Des Territoires © Christophe Raynaud de Lage jouent d’étrangeté, de décalages, de brusquerie, trois dispositifs. L’un avec un robot industriel de colères, de silences, d’évanouissements : au bras articulé dont la pince installe des cela crée un rapport étrange, décalé, avec la petits personnages pendant que la voix nous réalité, que l’on perçoit comme en un songe. parle d’Hamlet. Les deux autres sont des Car Mon cœur est aussi l’affirmation poé- imprimantes 3D qui matérialisent un objet tique que quelque chose bat en nous, que tandis que la voix nous conte une histoire personne n’a le droit d’atteindre : c’est cette et que des hologrammes s’animent derrière prise de conscience de ce qui a été brisé en une vitre. Le lieu théâtre n’existe plus, nous Claire, par le Médiator mais aussi, avant, par explique-t-elle. Sa dernière forme connue est une société ne supportant pas le surpoids celle de modules installés dans les rues, où des femmes, qui est tout l’enjeu politique l’on peut programmer la pièce de son choix. de la pièce. Enjeu un peu court cependant : Un peu le principe de la cabine L.I.R, que la le scandale du Médiator, des lenteurs de la compagnie a installée dans la bibliothèque décision politique, de la justice, l’abjection des du Merlan. On scanne un livre, et derrière un labos et des assurances pourraient aboutir miroir, l’image vidéo d’un comédien vient à la dénonciation d’un système écrasant, nous en dire quelques extraits. Loin d’être plutôt que d’un scandale passé, jugé et puni. futuristes, ces propositions interrogent notre Méfions nous des pilules et de notre désir de devenir d’humain au milieu de machines maigrir ? Certes, mais de tout ce qu’on nous qui nous entourent toujours plus, et nous fait avaler, aussi. remplacent aussi peu à peu. L’adaptation à cette nouvelle réalité implique de modifier nos repères, nos regards. Ainsi, la taxe sur One machine show les robots, thème souvent raillé lors de la Un casque sur les oreilles, nous, spectateurs, campagne présidentielle, est pourtant appelée avançons. Guidés par la voix-machine, voix à devenir un enjeu majeur dans les prochaines métallique, mécanique. C’est celle authentique années. Y compris au théâtre. d’un chatbot, un de ces robots de conversation qu’on trouve sur Internet. Une partie de ce qu’elle nous raconte provient d’un dialogue Histoires gigognes réel que Joris Mathieu, le metteur en scène, Tout est posé en vrac sur la table, chips étalées, a eu avec un de ces bots. Sa compagnie, le verres. Le décor est celui de l’intérieur d’un Théâtre Nouvelle Génération, propose pavillon de banlieue. La cuisine, le salon, la avec Artefact une expérience hors norme. penderie, le jardin sur le côté. Benny nous en Celle d’un théâtre sans acteur, sans humain. détaille les moindres recoins. L’escalier qui Tout n’est que robots et machines. Les spec- mène à l’étage n’a de rampe que du côté tateurs, séparés en petits groupes, découvrent gauche, et des traces de doigts au côté droit !

Le texte de Baptiste Amman, Des Territoires (Nous sifflerons la Marseillaise) est rythmé de détails enchevêtrés, et d’échos, de retours en arrière, d’échappées. Ils sont trois frères et une sœur. Un matin, où tout allait bien. Les garçons font les dingues, et font tourner un joint, Demain c’est loin, le rap d’IAM sonne à fond. Un soir, Benny a eu un accident de voiture, cerveau en bouillie. Puis leurs deux parents sont morts. « Tout a changé et le plus dur, c’est d’avoir vu tout changer », dit Lyn. Leur enfance, leur innocence, partie en poussière. Le quartier, où l’ambiance n’est plus comme avant. Avec la vie de cette famille, l’auteur et metteur en scène enlace la grande histoire. Les quatre comédiens virtuoses (tous issus de l’ERAC) naviguent dans ces histoires gigognes. « Ils ont sifflé La Marseillaise, tu te rends compte ? » Ah ? Au camion-pizza de Moussa, le match est diffusé. France-Algérie. « Ce devait être le match de la réconciliation. » Samuel slame à la guitare les commentaires de Thierry Roland. Des superpositions emmêlées naissent un présent insupportable, où la jeunesse va dans le mur, un racisme qui s’installe, rendant palpable l’âpreté de la situation sociale dans le pavillon de banlieue. L’intention politique et sociale est amenée, soulevée, puis le ronron du quotidien vient la faire retomber. Jusqu’à ce que la Révolution, incarnée par Condorcet enterré dans le jardin, s’évoque et s’anime... AGNÈS FRESCHEL ET JAN-CYRIL SALEMI

Mon Coeur a été joué les 5 et 6 avril au Merlan, Marseille, et le 25 avril à La Garance, Cavaillon Artefact a été donné les 25 et 26 avril au Merlan, Marseille L.I.R [Livre In Room] se tient à la Bibliothèque du Merlan, Marseille du 25 avril au 13 mai Des Territoires (Nous sifflerons la Marseillaise) a été joué les 27 et 28 avril au Merlan, Marseille


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Du théâtre pour témoigner

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Il ne faut pas laisser le théâtre aux experts du théâtre » sourit Mohamed el Khatib lors de l’entretien qui suit son dernier travail, C’est la vie. « Si le théâtre est un divertissement comme les autres, il n’est pas utile… On peut faire et s’adresser aux gens autrement. » Avec C’est la vie, le jeune metteur en scène se place aux limites du dicible en présentant deux acteurs, Fanny Catel La Rive dans le Noir c Richard Schroeder et Daniel Kenigsberg, qui ont pour point du « fact-checking » au « traité de l’acteur » commun d’avoir perdu un enfant. Ce sont suivi d’un « traité de l’auteur ». Les deux proleurs vécus, leurs mots qui se retrouvent tagonistes jouent avec pudeur, tendresse, sur scène… La distanciation propre à l’acte délicatesse. Émotion du public, les histoires artistique se retrouve grâce à la présence personnelles affleurent… nous ne sommes d’écrans, qui présentent, décalées, une série de plus au théâtre, mais dans un partage humain, « didascalies » (« les acteurs se réhydratent »), infiniment. commentaires encore plus qu’indications scéniques. Un petit fascicule est distribué au Pour revenir public, invité à parcourir certains passages Le soleil ne revient pas sur sa course, pas de en lecture silencieuse, généalogies des « pro- remontée d’ouest en est, le théâtre est le seul tagonistes », d’Andromaque, art poétique lieu du revenir… Pascal Quignard livre avec

La rive dans le noir une performance poétique d’une bouleversante intensité. Textes lus ou dits pour arpenter l’invisible, le pouvoir des mots, des langues sans lesquelles le monde n’existe plus… magie du verbe, seul capable d’évoquer (au sens premier) les choses et les êtres qui ne sont plus… Sinon le chant des oiseaux : Marie Vialle se livre à une interprétation virtuose de cris, feulements, chants, trilles, pépiements, gazouillis, sifflets, babillages, hennissements, miaulements… tout un bestiaire sonore auquel le piano de Messiaen fait écho. Entre le corbeau de Lascaux et la chouette de la grotte Chauvet se tissent les contes, porosité des mythes et de la réalité, énigmes pour vaincre la mort, magie des oiseaux sur scène, comme nés des traces rupestres, corbeau et chouette effraie jouent avec les deux personnages. Temps suspendu, poème vécu, rendu sensible par la voix fraîche de Marie Vialle, dans un clair-obscur propice aux songes éveillés… MARYVONNE COLOMBANI

C’est la vie a été joué du 6 au 8 avril et La Rive dans le noir les 4 et 5 mai, au Bois de l’Aune, à Aix-en-Provence

Traité du vide

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didactique, Nicolas évoquait le thème de cette composition, issu d’un récit métaphorique d’Isaac Louria, rabbin et kabbaliste du XVe siècle. Reprenant le thème du vase, et du vide nécessaire à la création de la forme que prendra le récipient, Nicolas Zemmour joue sur nos « vies saturées », apporte la vivacité de son humour, distanciation indispensable. L’ambivalence des êtres et du monde, écriture entre plein et déliés, est matérialisée par le décor dans lequel tout objet est double, la table géante devient maison, l’échelle proue de navire… La troupe connaît de beaux mouvements d’ensemble, une danse très maîtrisée, mâtinant la technique classique de ruptures contemporaines qui ne sont pas sans rappeler certains passages de Pina Bausch. Quelles passionnantes prémices ! M.C. © ashbey@.fr

es sorties de résidence du 3bisf sont toujours attendues, sans doute parce qu’elles permettent au public d’approcher au plus près le processus de création. Les artistes présentent un état de leur travail, en définissent les principes, les modalités, explorent avec les spectateurs la matière même de leur art, livrent les secrets de leur écriture et aiguisent leur perception de la production artistique, ses exigences, ses implications. La création du Zemmourballet n’échappe pas à la règle. Lors de sa sortie de résidence, une partie du spectacle La brisure des vases était présentée, portant une série de questionnements quant à la pertinence de tel ou tel passage, montrant à quel point tout est sujet à interrogation dans le cheminement de l’élaboration d’un spectacle, le jeune et talentueux chorégraphe, Nicolas Zemmour, tenant compte, chose rare, de l’avis de ses danseurs, établissant une démarche ouverte. Aux cinq danseurs auxquels se joint le chorégraphe qui s’inclut dans la danse, se mêlaient trois stagiaires. Très

La sortie de résidence de La brisure des vases a eu lieu le 27 avril au 3bisf, à Aix-en-Provence


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Enveloppé c’est dansé !

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omposée il y a plus de vingt ans par les deux grands chorégraphes israéliens Inbal Pinto et Avshalom Pollak, la pièce chorégraphique Wrapped a été « recréée » cette année, subissant quelques variations, afin d’être au plus près du regard porté par ses auteurs sur la société actuelle. Une série de vignettes, tableautins délirants et malicieux, s’enchaînent en un rythme tonique. Personnages qui semblent tirés de bandes dessinées, avec leurs attitudes, leur malléabilité, leur capacité d’invention, jubilatoire. Robes rouges des contes ou imperméables du polard, tricornes des fous, maillots de bain des affiches d’antan, couleurs acidulées, poses de catalogues, et revirements mutins, tout se mêle en une joyeuse performance où l’esthétique de la surprise prime. La mise en scène dessine des espaces, élargit ou rétrécit le cadre, joue des limites à l’instar des Tex Avery, bouleverse les codes ; les danseurs surgissent, bondissent, se livrent à d’acrobatiques évolutions, glissent d’« image » en « image », reviennent, établissent une continuité dans cet univers déjanté. Les

de Chaplin, la Norma, Beethoven (Concerto L’empereur), Estaban Sallas, Fats Waller, Art Tatum et Ben Webster, sont prises à revers, déclinées avec humour, tendresse, intelligence. Tout peut arriver sur le plateau, dans un esprit de dérision vivifiant, jusqu’au point final, pied de nez aux conventions (pas forcément à celles que l’on croit !). Une liberté émouvante anime danseurs et chorégraphie. « Nos créations sont optimistes et différentes de la réalité quotidienne parce que nous avons envie de donner à voir autre chose » expliquent les chorégraphes en préambule. Une distance salutaire qui permet la création ! © Avshalom Pollak

grammaires classiques et contemporaines se mêlent en une irréprochable technique, emportée par la fougue des neuf artistes qui semblent se démultiplier sur scène. Les musiques empruntées à Lime Lights

MARYVONNE COLOMBANI

Wrapped a été dansé les 28 et 29 avril au Pavillon Noir, Aix-en-Provence

Émotions de haute pointe

L

e mois d’avril est traditionnellement le mois au cours duquel des chorégraphes sont invités par la Compagnie des Ballets de Monte Carlo. Cette année deux femmes sont à l’honneur, Marie Chouinard (Canada), et Natalia Horecna (Slovaquie). Travailler avec une troupe classique constitue une quasi première fois Cy Twombly Somehow, Marie Chouinard © Alice Blangero pour Marie Chouinard qui est l’une des figures incontournables de la qui, même après l’abandon symbolique des danse contemporaine. Elle proposait une pointes sur le plateau, gardent leur précision création autour de l’œuvre du peintre Cy classique et savent la mettre au service d’un Twombly : Cy Twombly Somehow. Abstrac- autre discours, sur la composition musicale tions audacieuses, corps aiguisés, allant de originale de Louis Dufort. À noter que cosla lascivité d’une scène du Satiricon à des tumes, maquillages, lumière, scénographie métamorphoses d’insectes aux pattes effilées sont de Marie Chouinard : la chorégraphie est qui tentent de nouvelles stridulations. Mou- ici pensée à l’instar d’une œuvre plastique, et vements d’ensemble éblouissants, arrêts sur la chorégraphe peint, sculpte, construit. Sa image, respirations, attentes, soli virtuoses, façon de remercier la troupe lors des saluts dans un cadre nu modelé par les lumières, est émouvante d’humilité. soulignaient l’excellence des treize danseurs On était plongé dans l’actualité tragique avec

But behind the bridge de Natalia Horecna, pièce inspirée par la mort du petit garçon kurde (Aylan) échoué sur une plage turque. L’histoire devient un conte, avec les Esprits, les trois hommes du Destin (autre figure des Parques), le Destin lui-même, et son costume qui fait saillir les os, une forme de chœur antique avec cinq couples qui pleurent silencieusement. Tous deviendront le peuple des ombres auquel l’enfant (t-shirt rouge et short bleu, comme Aylan) se joint. Une poésie triste imprègne ce monde dominé par une lune propice aux mirages. Une immense tendresse vient tempérer le désespoir, sur des musiques de Hendrix, Cage, Sibelius, Vivaldi (…) et le poignant Jesus’Blood never failed me yet de Gavin Briars & Tom Waits. L’œuvre aurait sans doute gagné à être plus resserrée, mais la virtuosité des danseurs fait tout oublier ! M.C.

Le spectacle a été donné du 27 au 30 avril au Grimaldi Forum, à Monaco


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100 000 volts et plus

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rank Micheletti est à son meilleur niveau quand il combine l’énergie des danseurs de Kubilai Khan investigations et des rockers du groupe londonien Mugstar. Plus d’une heure durant, jamais l’équilibre ne se rompt dans ce contrepoids parfaitement balancé : sa création Volt(s) Face exclut toute forme illustrative pour trouver une réelle résonance par la confusion ou la dissemblance entre le mouvement et la musique. Corps et sons s’échappent de la batterie ou d’un riff de guitare électrique, danseurs et musiciens croisent leurs trajectoires ou leur voix dans un flux d’énergie continu. La tension permanente de la chorégraphie -écriture fluide et fouillée (une bouche qui effleure un micro, une cambrure ondulatoire)-, des bruits, des éclats de voix, du rock, provoque de longues et intenses vibrations. C’est une danse qui naît de l’intérieur, s’expulse et se propage en volutes acides à l’instant où le groupe se lance dans une course compacte, tel un essaim d’abeilles, avant de se disloquer brusquement, de circuler dans les sombres recoins du plateau avec un sentiment d’urgence. Une danse qui s’évapore en effluves hypnotiques dans des duos particulièrement

© Jean-Michel Blasco

ciselés. Sans cesse Volt(s) Face nous déphase : l’accélération cède la place à la suspension, la vitesse foudroyante au geste volatile. Mais, comme toujours, Frank Micheletti n’engage pas uniquement le mouvement dans ses compositions, il questionne « nos codes, nos cadres et nos normes » : « Il faut voir ce que le monde peut nous apprendre » entend-on fuiter à nos oreilles. Sa façon d’habiter le monde vient bousculer nos certitudes et interroger notre propre manière de vivre…

Comme happé par une spirale sans fond, il dézingue l’« étrange odyssée de la vitesse industrielle et technologique », rebat les cartes avec frénésie et invoque « la rime et la vie » pour faire face au vertige, et éviter que la terre ne se dérobe sous nos pieds. MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

Volt(s) Face a été créé le 25 avril au théâtre Les Salins, scène nationale de Martigues

Questionnements identitaires

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près Invisibles, qui donnait la parole aux chibanis, travailleurs immigrés, âgés, originaires du Maghreb, commentant ensemble leur impossible retour au pays, Nasser Djemaï poursuit avec Vertiges son travail autour de la © Jean-Louis Fernandez quête d’identité et de l’histoire de l’immigration. Dans l’appartement familial qu’il a quitté depuis longtemps pour mener sa vie, mais dans lequel il revient quelques jours pour s’occuper de son père malade, Nadir, le fils aîné, est déboussolé. Il y retrouve ses parents, sa sœur, son frère, et ce quartier -« sensible », « populaire », il connaît les termes et ne peut s’empêcher de se désoler de cet état de fait-, cette cité qui n’a cessé, depuis son départ, de se dégrader. Entre passé et avenir, deux générations s’affrontent, non-dits et espoirs bafoués faisant le sel des échanges nourris, vifs et parfois violents qui rythment les

scènes, malgré l’amour qui les lie. Le retour du fils aîné dérange l’ordre établi, fait se confronter deux cultures, celle de ses parents nés sur l’autre rive de la Méditerranée, et celle qui les constitue eux, les enfants, qui sont nés en France. Dans le décor très réaliste d’un intérieur fait de meubles en formica ornés de bibelots et photos de famille, chacun des protagonistes monologuera sur sa condition et ses désillusions. Le père (émouvant Lounès Tazaïrt), malade, dans l’attente du voyage annuel qui lui permettra d’aller consolider la maison et arroser les oliviers « là-bas » ; la mère (Fatima Aibout), tiraillée

entre le foyer qu’elle tient à bout de bras « ici » et l’impossibilité d’un quelconque changement « ailleurs » ; la sœur (Clémence Azincourt), célibataire, dont l’emploi permet à la famille de tenir mais qui rêve de fonder une famille ; le petit frère, Hakim (Issam Rachyq-Ahrad), attiré par les barbus qui trafiquent en bas de l’immeuble, peu disponible pour trouver un travail ; et Nadir (Zakariya Gouram), silencieux sur le délitement de son couple et de sa vie si peu parfaite… Nasser Djemaï orchestre les tensions de main de maître, sans tomber dans les clichés, sans complaisance non plus, jusqu’au décès inéluctable du père qui offre une scène des plus émouvantes, hors du temps. Ensemble, dignes, silencieux et sans acrimonie, la mère et les enfants entourent son corps, le lavent, le préparent, quelles que soient leurs croyances et leur façon d’attraper la vie. Unis, enfin. DOMINIQUE MARÇON

Vertiges a été joué le 27 avril aux Salins, scène nationale de Martigues


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Dans un carré de verdure

A

près Les Particules élémentaires, d’après le roman de Michel Houellebecq (2013), et avant 2666, d’après celui de Roberto Bolaño (2016), Julien Gosselin a aussi créé des spectacles plus intimistes, dont Le Père d’après l’ouvrage de Stéphanie Chaillou L’Homme incertain (Alma éditeur). Julien Gosselin, dont le travail s’attache à mettre en scène le monde d’aujourd’hui, met en lumière et en lecture ce texte magnifique qui raconte le désespoir d’un paysan que les circonstances économiques et politiques, plus précisément la mise en place de la Politique agricole commune, ont amené à être spolié de ses terres, de sa ferme, du bonheur qu’il avait à vivre sa passion. Poussé par ses enfants à se retourner sur son passé, il va chercher à comprendre comment il en est arrivé à échouer. Au-delà de l’introspection de cet homme –cet échec est-il seulement le mien ?-, le texte questionne la place de chacun au sein d’une Histoire dont la marche en avant impitoyable peut laisser sur le carreau ceux qui ne peuvent pas, ne savent pas, réagir aux injonctions économiques. Laurent Sauvage, seul au centre d’un plateau nu, fait siens les mots de cet homme, s’empare de la langue simple,

© Simon Gosselin

percutante de Stéphanie Chaillou, incarne avec puissance et fragilité cet homme brisé, interrompu, qui a pu finalement réparer sa vie. D’un ton sobre et monocorde il entre dans l’intimité de chacun, impulse un rythme lent qui va crescendo lorsque la musique de Guillaume Bachelé se déploie en une transe hypnotique qui colle aux doutes, à la solitude, à la conscience torturée, au courage, à la révolte. Puis s’arrête, brutalement. Les mots, la voix seule, emportent alors vers

l’apaisement, une renaissance qui laisse les spectateurs exsangues mais plein d’une richesse humaine universelle qui s’est dite, et qui, durablement, bouscule. DOMINIQUE MARÇON

Le Père a été donné les 25 et 26 avril au Théâtre d’Arles

Le Partage est réac

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a langue de Claudel est sublime. Ce qu’il raconte de la relation de désir et de domination, d’amour de Dieu et d’amour de soi, est charnel, brûlant, empli de doute et de ferveur. Mais dire que ce texte est daté ne suffit pas. Il est aussi, par moments, © Michel Cavalca abject, lorsqu’Amalric fait l’apologie de la traite des Noirs, ou qu’Ysé parle de son dégoût des Jaunes, et de son plaisir à leur mort. Raciste, les personnages du Partage de Midi le sont indéniablement. Mesa, qui incarne Claudel, ambassadeur de France, ne les approuve pas, mais les écoute sans broncher. Quant à sa vision de la femme... Ysé est un personnage de théâtre fascinant. Un rôle d’exception pour une comédienne. Elle est au centre de la pièce, de toutes les scènes, admirée par trois hommes, incarnant la vie même, objet de tous les désirs. Mais

justement, objet. « Jument revêche », capricieuse, voulant qu’on lui cède la place, puis plus tard abandonnant ses enfants, portant la faute, la damnation et la mort. Jamais totalement responsable de ses actes, tournant la tête aux hommes mais ne comprenant rien aux affaires, à la guerre. Mineure. Amante passionnée mais inconséquente, pas même mère aimante. Qu’une jeune femme mette en scène ce Partage en incarnant Ysé a de quoi surprendre, donc. D’autant qu’on ne peut pas dire que

Clémentine Verdier évite l’obstacle. Blanche et évanescente apparition, légère de son rire quand l’heure est grave, elle n’hésite pas à minauder sans dérision, à faire la coquette, à séduire, ou à s’humilier face à Amalric. Elle est émouvante et juste, et tous les acteurs le sont, effaçant l’aspect suranné du texte et le jouant dans une sorte de temps suspendu, un ailleurs qui n’est pas que géographique, une étrangeté qui est celle d’un autre temps, mais aussi d’un autre monde. Les planches de bois qui figurent le pont du bateau puis les croix du cimetière et enfin les planches de survie disent aussi cela, le non lieu du décor. Et la force poétique de la langue est là, comme inatteignable, et atteinte pourtant. On regarde ces marionnettes aristocratiques, coloniales et catholiques s’agiter avec grâce. Loin, si loin de nous. AGNÈS FRESCHEL

Le Partage de midi a été joué les 20 et 21 avril au Théâtre des Halles, Avignon, par la Cie Lâla/théâtre


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L’Inde au bistrot

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eux fois par an la Régie Culturelle PACA organise des Scènes de Bistrots au printemps et à l’automne. Des séries produites par la Région, qui permettent aux artistes du territoire de s’aventurer hors de leurs sentiers battus, dans des villages peu habitués à les recevoir : les Bistrots de Pays sont parfois le seul commerce du coin, et toute la population est là, pour écouter et voir, boire un verre et manger un menu partagé. Le 28 avril Tie Break, trio de jazz conduit par Cyril Benhamou, se produisait à Oppède tandis que Jessie Veeratherapillay emmenait les habitants de Saint-Roman-de-Malegarde bien loin de leur paysage vauclusien avec le spectacle Nâtya Sevâ. Car les Scènes de Bistrots, souvent musicales, se risquent rarement à la danse, surtout indienne ! Mais aller à la rencontre de l’autre et de l’art dans ces territoires ruraux est plus que jamais essentiel. Les habitants réunis dans le petit espace de Chez Claudette, les enfants surtout, ne quittèrent pas « la princesse » des yeux. Il faut dire que Jessie Veeratherapillay est fascinante. Maîtrisant cet art ancestral

Cie lyakam © G. Martinez

classique avec une grâce absolue, elle sait mieux que personne ici (elle est franco-indienne et sa compagnie Lyakam est ancrée en PACA) faire comprendre les émotions, les codes, les histoires de cette danse narrative. L’amante délaissée, la mère qui joue avec son fils, l’enfant, le dieu volage, le joueur de flûte, tous s’incarnent dans ses gestes, sur son visage incroyablement expressif. Bien sûr le spectateur ne comprend pas tous les codes

de cette danse qui est un langage, mais une voix off l’y aide parfois, et il en saisit assez pour suivre et comprendre la théâtralité de cet art si lointain. Puisque chez nous la danse ne raconte plus, ou en tout cas pas en mimant comme en une langue des signes magnifiée, y aurait-il quelque chose à explorer dans cette danse théâtre si différente et raffinée ? Chez Claudette ce soir-là, on était bien loin de Saint Roman... AGNÈS FRESCHEL

à venir Nâtya Sevâ est en tournée jusqu’au 20 mai dans le Var et le Vaucluse, Tie Break jusqu’au 27 mai dans le Vaucluse et les Alpes-Maritimes 04 42 94 92 00 laregie-paca.fr 04 92 77 68 86 bistrotdepays.com

Les ménestrels fille ça n’existe pas

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h oui, les filles au Moyen-âge n’ont pas le droit d’aller se battre comme leurs pères, mais se marient ou vont au couvent. Quel choix ! Le père de Christine, sans discussion aucune, a décidé que sa fille irait au couvent. C’est la guerre contre les troupes de Montbrison, un héritier mâle vient enfin de naître et le jeune Thibault, son fils adoptif, élevé avec Christine, l’accompagnera à la bataille. Mais voilà, Christine (Stéphanie Rongeot) qui a reçu jusque-là l’éducation d’un garçon, puisque l’on n’espérait plus de fils légitime, n’a pas du tout envie de la prison monastique et ne rêve que de batailles, tandis que le sensible © Isabelle Fournier - Cie Les Passeurs Thibault (Nicolas Fine) n’a pas du tout la au lieu de résidence qui a vu le travail de son fibre militaire. Les deux jeunes gens échangent élaboration, s’est jouée au Théâtre Durance leurs rôles. Tel est le point de départ de la pièce pour un public séduit par la verve des coméde Catherine Anne, Sous l’armure (éditions diens, le brio des compositions musicales, L’école des loisirs). La Cie Les Passeurs joue l’efficacité des décors (Aude Vanhoutte) avec bonheur cette œuvre jeunesse depuis construits en cartons, de la muraille mobile 2015. La dernière représentation, hommage qui devient grotte, montagne, abri, rempart,

château, aux costumes (Anne Dupont) découpés, suggérant par leur forme, robe, armure, cage… Les éléments du conte médiéval sont réunis, seigneur autoritaire (Gilles Najean), châtelaine (Cécile Bouillot) qui brode en pleurant, paysans au grand cœur, dragon vert (passage obligé de l’acte héroïque) et, bien sûr, Ménestrel (Gentiane Pierre qui est aussi l’oiseau) grâce aux récits duquel tout finira pour le mieux. Et d’ailleurs, le Ménestrel est-il une femme ? La question du genre est abordée avec une délicate intelligence, nous rappelant que la condition féminine a sans doute évolué, mais que tout n’est pas gagné ! La metteur en scène Lucile Jourdan sourit et souhaite que le sujet ne soit pas plus durable que le carton des décors : « Il faut en parler pour que ce ne soit plus un sujet ! ». Une pépite contre l’étroitesse des idées reçues ! MARYVONNE COLOMBANI

Sous l’armure a été joué le 3 mai à Théâtre Durance, à Château Arnoux-Saint-Auban


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Faire du neuf

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a 3e édition du Grand ménage de printemps, Festival des arts de la rue porté par le Centre culturel Cucuron Vaugines, a eu lieu juste avant le 1er tour des élections présidentielles. « Une date choisie pour pouvoir s’amuser une dernière fois, devant l’incertitude du scrutin », selon Romaric Matagne, coordinateur de la manifestation. S’amuser, certes, mais pas niaisement comme disent les Québécois. Parce qu’on a ri, abondamment, mais Cie 2L au Quintal, au Grand ménage de printemps 2017 © Geneviève Chaud les artistes de rue n’ont pas laissé passer cette occasion de titiller la politique, intolérants, vulgaires et bassement intéressés avec intelligence et esprit mutin. « Je hais les semblent si familiers... haies » chante Generik Vapeur en désossant Bernard Llopis offre Le Vivant au prix du une voiture pour en faire des instruments de mort, une « vente flash exceptionnelle de musique, et aussi « Veuillez garder vos illusions l’employé dont vous avez rêvé, pas syndicalisé, et foncer droit dans le mur ! ». qui vous fera gagner de l’argent ! ». Les Arts Oseurs piochent dans les souvenirs Il est vrai que la subversion est parfois un d’enfance de Magyd Cherfi, fils de l’immigra- peu trop appuyée, la Kie Faire Ailleurs par tion, la Cie Tétrofort revient avec son couple exemple gagnerait à alléger, ou du moins à de comédiens géniaux, dont les personnages rendre plus accessible sa « chronique de la

troisième zone, ce monde hostile des gueux, des indigents et des sans-grades ». Mais le spectacle, dont c’était la première, a encore le temps de mûrir. Ce qui demeurera dans les mémoires, c’est un festival chaleureux, plébiscité par les artistes autant que par le public (qui d’ailleurs a pu écrire son enthousiasme aux Cucuronais, via une carte postale prévue à cet effet, en piochant une adresse au hasard dans le bottin). Et un « clou », la mythique Jurassienne de réparation du Théâtre Group’. Des acteurs hilarants qui vous font pleurer de rire en parlant de carburateurs (!) avec des accents délicieux. Du grand art populaire, et des dialogues collant diablement à l’actualité électorale : « Nous avant avec du vieux on faisait du neuf, aujourd’hui ils font tout pour que le neuf soit déjà vieux »... GAËLLE CLOAREC

Le Grand ménage de printemps a eu lieu les 21 & 22 avril à Cucuron et Vaugines

Premier tour à la ZAT

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arfois, quand il y a beaucoup, ça fait vite trop. On craint de rater quelque chose, de ne jamais être au bon endroit. On s’affole en étudiant le programme. On essaie de trier, les critères sont parfois discutables. En ce week-end électoral, la ZAT, au parc Montcalm à Montpellier, apaise les doutes. Oui, le programme est dense et varié. Partout des spectacles, des partages, des propositions. Pas de panique : tout est gratuit, là, à portée de regards. Dans cet ancien terrain d’entraînement militaire, les élèves comédiens du Cours Florent, postés sur des piédestaux (pas gigantesques ceux-ci, juste à taille humaine), en ligne, les yeux portés loin devant, incarnent chacun un sportif iconique. Nadia Comaneci, Franck Ribéry… Les monologues déroulent un pan de leurs pensées cachées. Ils nous livrent une intimité fragile. Des garçons d’une dizaine d’années, dubitatifs, goûtent au plaisir transgressif de voler un peu de la vérité du footballeur. Plus loin, sur la piste d’athlétisme, une course au ralenti, disputée par des athlètes grimés (cours Florent), intrigue et émeut : que d’efforts, que de souffrance au pays de la performance… La distance entre ici et le W de Perec semble s’être amoindrie. Des bâtisses sœurs, ajourées, élancées,

Des bâtisses sœurs, Cie Olivier Grossetête © A.Z

cartonnées, commencent à pointer plus loin. Olivier Grossetête, metteur en œuvre, impulse l’énergie des flâneurs dans cette construction éphémère, dont on nous dit qu’elle est utopique. Tout le monde est bien pourtant là, à scotcher, assembler, penser une architecture que chacun peut inventer et traverser. Équilibre aussi, dans le Pelat de Joan Català qui apprivoise un mât, intimidant de simplicité. Il s’agit de le faire tenir debout, et de monter au sommet. L’objet condense espoir et inquiétude, le performeur décline savoir-faire traditionnel, humour, acrobatie, et partage, là

aussi, puisqu’il sollicite l’aide du public pour hisser le mât. L’Envol commence. Les 9 (très) jeunes comédiens de la Cie Adhok s’élancent en quête d’un travail, d’un amour, d’un avenir d’adulte. Mise en scène survitaminée et écriture incisive. On voudrait le meilleur pour cette incarnation d’une jeunesse si vibrante et décontractée. On pique nique, on joue au frisbee, on fait la sieste. Les spectacles s’enchaînent, s’entrecroisent, la Transumante, sculpture mouvante de Johann Le Guillerm qui ne tient que par équilibre, encore et toujours, progresse tout en lenteur et puissance. On n’aura pas le cœur de venir assister, une heure avant le résultat du premier tour, à la destruction publique de la ville de carton. Sursis ou sursaut ? À suivre… ANNA ZISMAN

La 11e édition de la ZAT, organisée par Lieux publics, a eu lieu au Parc Montcalm à Montpellier les 22 & 23 avril


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Le pouvoir des fleurs

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ans Lakmé de Léo Delibes, « le blanc jasmin à la rose s’assemble », les fleurs sont rituelles, unissent les cœurs étrangers de l’Indienne et de l’Anglais, guérissent les blessures mortelles… elles empoisonnent aussi ! Dans Lakmé, c’est Pierre Loti qu’on retrouve, comme à la source de Madama Butterfly (Puccini) ou Madame Chrysanthème (Messager), scellant, par l’amour de deux êtres (et le sacrifice de l’héroïne), l’union de deux cultures vouées à s’ignorer. Dans Lakmé, c’est l’art français de la seconde partie du XIXe siècle qui s’exprime, par ses clichés exotiques, ses harmonies sonores sans pareilles, ses mélodies enchanteresses… Dans Lakmé, enfin, on trouve le doux Duo des fleurs et, bien sûr, l’acrobatique Air des clochettes ! Il faut une voix rare pour interpréter ce dernier, capable d’allier douceur et virtuosité, vocalises tintinnabulantes et suraigus. Il y seulement quelques années a éclos une fleur exceptionnelle, digne de ses illustres aînées (Robin, Mesplé, Dessay...) : Sabine Devieilhe. L’artiste incarne le rôle-titre à la perfection, convoquant un bouquet de nuances, formidable de sensibilité. Les Marseillais

© Christian Dresse 2017

mesurent la chance de l’entendre lors de la première le 3 mai en lui réservant un triomphe. La soprano colorature est accompagnée par la stature grave de Nicolas Cavallier, tout de noblesse dans le paternel Nilakantha : sa déclamation large du français est exemplaire. Julien Dran est plein de charme dans Gérald, même s’il n’a pas tout à fait le ténor de l’emploi (remplaçant au dernier moment Florian Laconi). La distribution est remarquable (Majdouline Zerari, Cécile Galois, Anaïs Constans, Emmanuelle Zoldan,

Loïc Félix, Marc Scoffoni) jusque dans les rôles tirés du Chœur de l’Opéra de Marseille (Rémi Chiorboli, Jean-Vital Petit, Damien Surian) qui, une nouvelle fois, fournit une superbe prestation, en particulier dans la périlleuse scène du marché du 2e acte. En dehors d’un maladroit monticule posé à l’avant-scène au 1er acte (périlleux pour le déplacement des artistes !) ressemblant à un gâteau au chocolat mal démoulé, la scénographie est réussie (Lilo Baur, Katia Flouest-Sell, Caroline Ginet) : le changement de décor à vue de la brillante place de la ville à la sombre forêt est superbe ! Dans la fosse, Robert Tuohy dirige l’orchestre maison avec finesse et bon goût. JACQUES FRESCHEL

Lakmé a été donné du 3 au 11 mai à l’Opéra de Marseille

Bonheurs lyriques

Viva Mozart © Hugues Lagarde

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oment incontournable du calendrier du dynamique Espace NoVa de Velaux, le concert lyrique du Festival Les Classiques de Velaux nous conviait à un programme Mozart, par le biais d’extraits de trois opéras : Les Noces de Figaro, La Flûte enchantée et Don Giovanni. L’intelligence du choix des morceaux, qui ne font pas toujours partie des « tubes », contribuait au charme de cette matinée qui transporta le public venu en nombre. Le bel Orchestre de Cannes, sous la houlette virtuose du jeune

chef Victorien Vanoosten, moult fois primé, fin et précis, se glissait avec aisance dans tous les registres, passant de l’allégresse au drame, de l’insouciance à la gravité. Les ouvertures de chaque œuvre précédaient avec une juste élégance les soli et duos interprétés tour à tour par trois superbes solistes, la soprano Pauline Courtin, le ténor Antonel Boldan et le baryton Seung-Gi Jung. Expressivité, légèreté malicieuse, et une voix délicate, Pauline Courtin, avec un véritable talent dramatique, apportait aux airs une subtilité

nouvelle, délicieuse Pamina dans l’aria Ach, ich fül’s, es ist verschuvu, pièce d’orfèvre, mutine Zerlina aux côtés de Don Juan Là ci darem la mano, ou bouleversante Donna Anna Crudele, non mi dir… Ses comparses masculins, malgré un léger trouble des débuts, soutenaient avec brio leurs rôles de Comte des Noces, de Papageno, de la Flûte, de Don Juan ou de Leporello. Voix large et veloutée du baryton, colonne ouvragée, voix souple et sensible du ténor, envols brillants… Un sens du phrasé et de la mélodie rassemble les trois chanteurs à la carrière internationale. Un moment de grâce bienvenu en ce début de printemps. MARYVONNE COLOMBANI

Viva Opéra a été donné à l’Espace NoVa de Velaux, le 30 avril


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Musiques sœurs dans l’écrin de la salle Musicatreize. Expérience neuve pour ce lieu dédié à la musique contemporaine que de recevoir un musicien que de multiples héritages inspirent, de son Maroc natal au jazz en passant par le blues et le fado. Les musiques se tissent, se nourrissent de littérature, conjuguent la mer et la lumière avec une subtile aisance. Un parfum de Debussy, liquides arpèges, pour les eaux méditerranéennes des origines, où le jazz virtuose dessine le mouvement ourlé des vagues tandis qu’ostinato Jean-Marie Machado © Jeff Humbert les profondeurs affirment leur  Il n’est pas de boîtes dans lesquelles permanence. Cette base se retrouve avec on puisse enfermer, catégoriser les dif- La muraille, solidement ancrée face au vent férentes formes musicales, j’ai toujours jazzique des pièces consacrées à la Bretagne milité pour que les musiques restent sœurs » battue par les vents ; Izella où se décline une s’exclame le pianiste Jean-Marie Machado, subtile enharmonie (peu importe « si au piano invité pour son concert Orient magique un do et un si # ont le même son, mais savoir,

«

en les jouant, que ces notes semblables ne sont pas les mêmes, a quelque chose du secret initiatique »). À ces déferlantes emportées répond l’Orient magique, et un piano aux cordes pincées, heurtées, jouées à l’instar de celles d’un kanoun lumineux. Le fado et le blues se rencontrent, même nostalgie, diffuse tristesse, spleen existentiel, Sœurs de sang (Irmãs de sangue), avec les deux grandes chanteuses que furent Amalia Rodrigues et Billie Holiday. Ancien et nouveau continent se croisent, dans la pureté de leurs mélodies, et les voltes pianistiques qui les accompagnent, frémissements d’âmes au cœur de la Solitude (Solidaõ), avant de découvrir un fado joyeux qui nous emporte dans un vertige échevelé où les accessoires, percussions, grelot de canne à pêche (oui !) se déversent dans les entrailles du piano « arrangé ». Au public conquis deux bis sont généreusement accordés, Blue spice et Solidaõ… La note bleue fait son entrée avec maestria chez Musicatreize ! MARYVONNE COLOMBANI

Le concert a été donné le 14 avril dans la Salle Musicatreize, à Marseille

Par la grâce d’Amour

I

nfatigables, Guy Laurent et les Festes d’Orphée explorent le patrimoine musical de la Provence historique, exhument des pièces oubliées ou méconnues et les rendent au public avec un souci d’exactitude remarquable. Travail de fourmi, recherche dans les archives, réflexion sur l’interprétation… la partition Les Muses rassemblées par l’Amour du compositeur aixois André Campra (16601744), redécouverte par Jean-Philippe Goujon et restituée par Jean-Michel Hey, a donné lieu à une collaboration fructueuse entre les Festes d’Orphée et l’AMU, avec Julien Ferrando en porteur du projet. L’œuvre commandée à Campra et Perrin par l’Académie d’Aix en 1723, afin de célébrer la fin de la grande peste de 1722 qui ravagea la Provence, fut créée à Aix en 1728. En 2014 cette musique de célébration de la vie renaît avec les Festes d’Orphée, est l’objet d’un CD en 2015, et trouve en écrin privilégié, le théâtre du Jeu de Paume en 2017. On ne peut que saluer la formidable restitution de cette partition nourrie de culture antique,

© Festes d’Orphée

correspondant au genre de l’idylle (« idille » au XVIIIe). Dieux et muses font triompher la paix et le sentiment amoureux, même Mars (Gilles Schneider) dépose les armes et n’est plus à craindre, séduit par l’Amour (Laure Bonnaure), Apollon (Rémi Beer-Demander), rend grâce aux Muses (Nathalie Di Fusco, Catherine Soubrouillard, Céline Urbaniak), et la vertu est célébrée dans une harmonie retrouvée, avec un chœur superbement enlevé. Airs de joie portés avec élégance par l’orchestre d’instruments anciens… Il

n’est pas encore de clivage imperméable entre musiques savante et populaire : biniou, galoubet et tambourin s’immiscent aux côtés des violons, et le Musicien provençal (Maximin Marchand) ne dépare pas ! Le travail précis mené sur les prononciations, les intonations, les phrasés, participe à l’indéniable qualité de la représentation qui offrait en première partie de beaux extraits de l’Orfeo nell’inferi du Carnaval de Venise du même Campra à propos duquel, en 1754, le jésuite M. A. Laugier disait : « Campra est un séducteur qu’on aime infiniment ». Nous aussi ! MC

Les Muses rassemblées par l’Amour a été joué le 2 mai au Jeu de Paume, à Aix-en-Provence


48 au programme musiques marseille

Don Carlo

Viole et violoncelle ?

Pas d’erreur, il s’agit bien de Don Carlo, version remaniée pour la scène italienne en 1884 par Verdi de son opéra Don Carlos, sur le livret français de Joseph Méry et Camille du Locle, d’après la pièce (allemande) de Schiller. Amours, complots, raison d’état, guerres d’Europe, héritage de Charles Quint… Philippe II d’Espagne (Nicolas Courjal) épouse Elisabetta (Yolanda Auyanet) et se voit menacé par son fils Don Carlo (Teodor Ilincai), entre autres péripéties, sous la houlette de Lawrence Foster dans une mise en scène de Charles Roubaud aux côtés du chœur et de l’orchestre de l’Opéra de Marseille.

À l’initiative de Jean-Christophe Keck, directeur musical, les Dimanches d’Offenbach à l’Odéon permettent de découvrir des œuvres peu connues du compositeur d’Orphée aux enfers. Ainsi, la délicieuse Pomme d’api (Aude Fabre), abandonnée par son amant Gustave (Xavier Mauconduit), se voit placée chez l’oncle de ce dernier, Amilcar Rabastens (Frank T’Hezan). Indifférences trompeuses et réconciliation lors d’un repas enlevé, comptage de côtelettes… une gourmandise avec Diego Mingolla au piano.

04 96 12 52 70

Un petit bijou est proposé dans la belle salle de Musicatreize, rassemblant les deux magnifiques musiciens de l’ensemble Soave que sont Jean-Marc Aymes (clavecin) et Emmanuel Balssa (viole de gambe et violoncelle) sur un programme Marais, Forqueray, Corelli, Barrière, Geminiani, Lanzetti. Le prétexte ? La querelle qui opposa la basse de viole aux « entreprises du violon et (aux) prétentions du violoncelle », aristocratie française contre sa concurrente italienne… une occasion de croiser des chefs-d’œuvre.

14 mai Odéon, Marseille odeon.marseille.fr

Violettes impériales

Arabella Steinbacher © Peter Rigaud

Orchestre Philharmonique de Marseille

L’opérette en deux actes de Vincent Scotto croise les amours de Violetta (Cecilia Arbel) et Don Juan (Lionel Delbruyère) avec le destin d’Eugénie de Montijo (Perrine Cabassud) et Napoléon III (Michel Delfaud). La marchande de violettes deviendra une proche de celle à qui elle a prédit le titre d’Impératrice et se dévoue avec courage pour la sauver en prenant sa place dans le carrosse menacé d’un attentat. Tout finira bien, sous la houlette de Bruno Conti dans une mise en scène de Jack Gervais. Les bouquets de violettes « portent bonheur ».

19 mai Salle Musicatreize, Marseille 04 91 00 91 31 musicatreize.org

Edgar Moreau

Edgar Moreau © Julien Mignot

8 au 17 juin Opéra de Marseille 04 91 55 11 10 opera.marseille.fr

Lionel Delbruyere © X-D.R.

L’Orchestre Philharmonique de Marseille quitte d’écrin de l’Opéra pour la grande salle du Silo de Marseille. Le programme riche et porteur invite le public à venir écouter Halil de Léonard Bernstein, superbe nocturne pour flûte et petit orchestre, La Havanaise, l’Introduction et le Rondo capriccioso de Saint-Saëns, Tzigane de Ravel et le Sacre du Printemps de Stravinski. Le tout sous la direction musicale de Lawrence Foster avec le violon d’Arabella Steinbacher et la flûte de Virgile Aragau. 21 mai Opéra de Marseille 04 91 55 11 10 opera.marseille.fr

Jean-Marc Aymes © ME Brouet

Yolanda Auyanet © X-D.R.

Pomme d’api

04 96 12 52 70

20 & 21 mai Odéon, Marseille odeon.marseille.fr

Le jeune prodige Edgar Moreau est déjà, à 23 ans, révélation instrumentale classique Adami (2012), deuxième prix au concours international Tchaïkovski (2011), prix du jeune soliste au Concours Rostropovitch (2009) et mène une carrière internationale. La valeur n’attend pas… Soirée immanquable dans la salle Musicatreize sur un programme Bach, Ligeti, Kodaly. Il ne faudra pas oublier de réserver ! 27 mai Salle Musicatreize, Marseille 04 91 00 91 31 musicatreize.org


au programme musiques bouches-du-rhône vaucluse var

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Suites pour violoncelle

Faust

Aimez-vous Brahms ? Avec le jeune pianiste virtuose Martin Helmchen, encore davantage ! Il interprètera, sur un piano d’époque, le lyrique et subtil Concerto pour piano et orchestre n°2 en si bémol majeur op. 83 aux côtés de la Chambre Philharmonique dirigée par Emmanuel Krivine. Ce bel ensemble jouera ensuite la Symphonie n°1 en ut mineur op. 68 (surnommée la « Dixième symphonie de Beethoven ») du compositeur cher à Sagan. Un grand souffle romantique sur le GTP !

Sous l’égide de l’association des « Amis du Théâtre Lyrique », une nouvelle production dirigée par Alain Guingal et mise en scène par Nadine Duffaut reprend l’histoire du Faust de Gounod. Damnation, air des bijoux, humanité fragile dans ses aspirations à l’éternité et au savoir… une mise en garde qui nous renvoie à notre mesure humaine avec Nathalie Manfrino dans le rôle de Marguerite, Florian Laconi dans le rôle-titre et Jérôme Varnier en Méphistophélès, aux côtés de l’Orchestre Régional Avignon-Provence, et les Chœur et Ballet de l’Opéra Grand Avignon.

© Fabrice Dall’Anese

Louis Rodde c © Yannick Coupannec

La Chambre Philharmonique

17 mai GTP, Aix-en-Provence 08 2013 2013 lestheatres.net

Voyage solitaire, méditation, temps suspendu, tout a été écrit, dit sur les Suites de Bach pour violoncelle seul, et pourtant, elles semblent toujours nous livrer un supplément de sens, exploration musicale et spirituelle à la fois. Le grand violoncelliste Louis Rodde reprend cette « pierre angulaire » du répertoire dans l’écrin du Domaine de la Cadenière, et arpentera avec nous les n° 1, 2 et 4. Une respiration qui nous accorde au monde…

Florian Laconi © X-D.R

19 mai Domaine de la Cadenière, Lançon-de-Provence 04 90 42 74 76 musiquealaferme.com

Ensemble Polychronies À ceux qui croient encore que si l’on parle opéra ou conservatoire, ce sera forcément un peu guindé et (faussement) réservé à un public compassé, l’Ensemble Polychronies (à géométrie variable), issu de l’Opéra de Marseille, apporte un retentissant démenti ! Composé de percussionnistes, Florent Fabre, son fondateur, Mathieu Schaeffer, Bernard Pereira et Bernard Boellinger, il nous emporte dans un univers bluffant où l’on croise la création contemporaine avec des œuvres de Thierry de Mey, Minoru Miki, Emmanuel Séjourné et l’incontournable Steve Reich.

Anna Bolena Composé à partir de l’histoire tragique d’Anne Boleyn (Irina Lungu), la seconde épouse d’Henri VIII (Carlo Colombara), l’opéra de Donizetti rappelle les derniers jours de la vie de cette reine accusée (à tort sans doute) d’adultère et de traîtrise. Complot de ses ennemis de cour, volonté du roi de se remarier avec Jane Seymour (Ketevan Kemoklidze) ? La version sentimentale est privilégiée : affrontement entre règne des tyrans et passions amoureuses… Un chef-d’œuvre du bel canto romantique sous la houlette de Samuel Jean.

© X-D.R

14 & 16 mai Opéra du Grand Avignon 04 90 14 26 40 operagrandavignon.fr

17 mai La Colonne, Miramas 04 90 50 66 21 scenesetcines.fr

9 & 11 juin Opéra du Grand Avignon 04 90 14 26 40 operagrandavignon.fr

Roméo et Juliette Le drame shakespearien a nourri l’inspiration de nombreux compositeurs, sans doute la version de Gounod est l’une des plus fidèles, sur un livret de Jules Barbier et Michel Carré, avec une partition d’une intense poésie qui réserve des morceaux de bravoure éblouissants à la soprano (Mihaela Marcu) et au ténor (Ismael Jordi). Les amours tragiques des amants de Vérone seront mises en scène par Paul-Emile Fourny sous la direction musicale de Giuliano Carella avec l’Orchestre et le Chœur de l’Opéra de Toulon. 4, 6 & 9 juin Opéra de Toulon 04 94 92 70 78 operadetoulon.fr


50 au programme musiques var alpes-maritimes hérault

Orchestre National de Montpellier

Papae Marcelli

04 98 05 05 05

28 mai Abbaye de La Celle lesvoixanimees.com

Orchestre de Montpellier © X-D.R

La nuit d’un neurasthénique Si l’on connaît la musique de film de Nino Rota, on oublie parfois que ce grand compositeur a aussi écrit pour de multiples formes musicales, chanson, ballets, musique de chambre, symphonique, sacrée, sans compter des opéras, dont on aura le privilège d’entendre un superbe exemple avec La Nuit d’un neurasthénique sur un livret de Riccardo Baccelli. Gianni Schicchi de Puccini (opéra en un acte) viendra compléter le programme dirigé par Francesco Lanzillotta dans des mises en scène de Marie-Ève Signeyrole. Deux petits bijoux !

04 92 17 40 79 31

26 & 27 mai Opéra de Nice opera-nice.org

Festival sacré de la beauté Le « Off » de l’âme, autre nom du Festival sacré de la beauté, en marge du festival de Cannes du 19 au 27 mai : Notre Dame de Bon Voyage de Cannes et l’île Saint Honorat offrent un large programme sous la présidence de Michael Lonsdale. Entre méditations, conférences, soirées spirituelles et artistiques, dont une soirée œcuménique avec concours de chorales et chœurs de Gospel, l’Orchestre de Cannes sous la direction de Maxime Tortelier interprètera avec son aisance virtuose la Sérénade pour vents en mi bémol majeur op.7 de Strauss, celle pour vents en ré mineur op. 44 de Dvorak et celle pour cordes en do majeur op.48 de Tchaïkovski. 27 mai Basilique Notre Dame de Bon Voyage, Cannes 04 93 48 61 10 orchestre-cannes.com

9 au 15 juin Opéra de Montpellier 04 67 60 19 99 opera-orchestre-montpellier.fr

14 mai Théâtre Molière, Sète 04 67 74 66 97 theatredesete.com

Le Chanteur de Mexico

Trio Wanderer Sans doute la formation de musique de chambre la plus demandée au monde (on la retrouvera cet été à la Roque d’Anthéron), le Trio Wanderer, né dans les années 80, apporte une virtuose intelligence à ses interprétations. Vincent Coq (piano), Jean-Marc Phillips-Varjabédian (violon) et Raphaël Pidoux (violoncelle), joueront dans l’écrin de la Salle Pasteur le Trio élégiaque n°1 en sol mineur de Rachmaninov, le Trio pour piano et cordes n°4 en mi mineur « Dumky » de Dvořák et le Trio pour piano et cordes n°2 en mi bémol majeur de Schubert. Trio Wanderer © Marco Borggreve

Dans l’écrin de l’Opéra, l’Orchestre Philharmonique de Nice, dirigé par Philippe Auguin, arpentera les partitions du XXe siècle : Lontano pour grand orchestre de Ligeti, Prélude pour un drame de Franz Schreker (inspiré de l’ouverture de son opéra Les Stigmatisés), La Valse, poème chorégraphique de Maurice Ravel et le Concerto pour violon en ré majeur op.35 d’Éric Wolfgang Korngold, écrit « pour un Caruso du violon, plutôt que pour un Paganini ». Le violoniste Michael Barenboim sera ce Caruso magnifique !

Marie-Eve Signeyrole © Marc Ginot

Orchestre Philharmonique de Nice

Le théâtre de Sète aura le bonheur d’accueillir l’Orchestre National Montpellier Languedoc-Roussillon sous la direction du jeune (25 ans) et talentueux chef David Niemann pour un programme d’une belle richesse éclectique, comprenant l’Ouverture de Don Giovanni de Mozart, le délicat et complexe Concerto pour violon et orchestre en ré mineur de Schumann, avec la superbe soliste de l’Orchestre, Dorota Anderszewska et enfin la sublime Symphonie n°5 de Mendelssohn, « Réformation ».

27 mai Opéra de Montpellier 04 67 60 19 99 opera-orchestre-montpellier.fr

Le chanteur de Mexico ©ATL Productions

Dédiée à la mémoire du Pape réformateur Marcel II, la Missa Pape Marcelli a aussi une valeur de manifeste : Giovanni Pierluigi da Palestrina y faisait la démonstration (destinée aux pères du Concile de Trente) que la musique polyphonique n’est pas incompatible à la compréhension des textes, reproche qui tentait de l’interdire au profit du seul chant monodique dans la musique sacrée. Les Voix Animées interprètent ce bijou, ainsi que des motets de Francesco Soriano et une création de Léo Collin. (Et c’est gratuit !).

Amours rocambolesques entre le pays basque, Paris et Mexico, le ténor Miguel Morano, la pétillante Cricri, la furie Tornada, l’ami Bilou, sans compter Eva et l’imprésario Cartoni, l’opérette de Francis Lopez nous emporte dans son tourbillon d’intrigues, de voyages, de mélodies qui sont devenues des tubes. Cette fougue est superbement servie dans la mise en scène de Christian Blain, les ballets d’Estelle Danvers, les Chœurs Mélopée, sous la houlette de Jean-Marc Miquel. 28 mai Théâtre Molière, Sète 04 67 74 66 97 theatredesete.com


au programme musiques bouches-du-rhône alpes alpes-maritimes hérault

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Lionel Dandine trio

Naïve New Beaters

Le projet Dakhla Sahara Session est pour le moins étrange et intriguant : unir, le temps d’un enregistrement et de concerts, les univers à priori radicalement différents du trio electro punk français Cheveu et du légendaire combo saharien Group Doueh, mené par le guitariste Baamar Selmou et sa musique de transe mystico-électrique. La création issue de cette rencontre est « atomique », « un big bang tellurique » qui fait coexister deux démarches et deux temporalités divergentes… une expérience unique !

Ils ont pour noms David Boring (chanteur), Martin Luther BB King (guitariste) et Eurobelix (machine) et forment un trio français déjanté. Les Naïve New Beaters, dont le troisième album, A la folie, est paru l’été dernier, seront à Scène 55 à Mougins. À l’image de leur titre Heal Tomorrow, conçu avec Izia, leur concert promet d’être particulièrement dansant, grâce à des rythmes endiablés où s’entrechoquent pop, électro, disco, rock et hip-hop !

18 mai Le Merlan, Marseille 04 91 11 19 20 merlan.org

L’Amour voyageur L’amour est au centre du concert que donnent la chanteuse grecque Elèni Bratsou et le musicien spécialiste des instruments historiques Pascal Gallon, au luth et au théorbe : à travers des airs de cours français, de lamenti et arie italiens, de Canciones Antiguas d’Espagne et de chants de Crète ou de Chypre, ils mêlent un répertoire connu ou oublié qui en fait l’éloge.

Le pianiste de jazz marignanais Lionel Dandine a commencé à jouer du piano très jeune, à 5 ans, et s’est rapidement tourné vers le jazz. Après plusieurs d’années d’études, avec des professeurs prestigieux tels que Michel Petrucciani, Daniel Goyone ou Michel Zenino, il se produit aux côtés des plus grands. Dans ce concert, accompagné de Nicolas Koedinger (contrebasse) et Thierry Larosa (batterie), il rend hommage à l’un des grands pianistes de l’histoire du jazz, Erroll Garner, jouant quelques-uns de ses standards favoris, mais aussi des compositions personnelles dans le plus pur style garnérien. 2 juin Le Sémaphore, Port-de-Bouc 04 42 06 39 09 theatre-semaphore-portdebouc.com

© X-D.R

© X-D.R

© X-D.R

Group Doueh & Cheveu

26 mai Scène 55, Mougins 04 92 92 55 67 scene55.fr

Cette guitare a une bouche

Eleni Bratsou © Max Minniti

Fabien Mary trio

2 juin Cité de la musique, Marseille 04 91 39 28 28 cite-marseille.com

Pour cette 5e proposition des Week-ends musicaux en pays Gapençais, l’Espace Culturel de Chaillol accueille le trompettiste Fabien Mary et son trio, une formation sans batterie qui interprète des standards du « Great American Songbook », soit la période du Grand répertoire américain de musique populaire qui court des années 1920 à 1960. Accompagné de Hugo Lippi à la guitare et Fabien Marcoz à la contrebasse, il mettra ses pas dans celui du trio de Chet Baker, avec l’élégance qui le caractérise. 25 au 28 mai Ancelle, Rambaud, Savines-le-Lac, Montmaur 06 82 81 87 42 festivaldechaillol.com

C’est le dernier projet proposé par Serge Teyssot-Gay, dans le cadre de sa carte blanche, à la scène nationale de Sète. Après Kit de survie et Kintsugi, il fera scène commune avec un autre « monstre » de l’histoire de la musique en France : Rodolphe Burger. Le cofondateur de Noir Désir et celui de Kat Onoma sont deux guitaristes hors pair, dont le jeu, dès les premières mesures, est immédiatement reconnaissable. Pour cette création singulière ils seront accompagnés de Sarah Murcia (contrebasse, chant, clavier), Arnaud Dieterlen (batterie) et Phil Cabon au son. 9 juin Théâtre Molière, Sète 04 67 74 66 97 theatredesete.com


52 au programme

spectacles marseille

Yoshitsune, le Prince des samouraïs

La Fête de la Dette Avec un même mot d’ordre (« éducatif, ludique et solidaire »), Christophe Alévêque repart à l’assaut de « la peur, la culpabilité et surtout l’ignorance, mère du grand n’importe quoi ». Sa Fête de la Dette, auparavant parisienne, aura lieu cette année au Toursky, avec au programme un apéro, des surprises, son spectacle Le tour de la dette en 80 minutes, un repas plantureux et un grand bal. Tous les bénéfices de la soirée iront au Secours Populaire.

La Nuit Unique

2 juin Théâtre Toursky, Marseille 0 820 300 033 toursky.fr

© Jean-Pierre Estournet

Und

© X-DR

Vous aimez écouter des chants et des poèmes dans le noir ? Michaux, Rimbaud, par exemple ? Cette Nuit Unique est faite pour vous. Embarquez avec Jacques Livchine pour la sortie de résidence du Théâtre de l’Unité chez Lieux Publics. Un voyage nocturne sans plan préétabli, guidé par l’inspiration... car « l’esprit et l’âme continuent de marcher même quand on dort ».

20 mai Lieux publics, Marseille 04 91 03 81 28 lieuxpublics.com

Le conteur Pascal Fauliot a pris goût dans son enfance aux récits traditionnels nippons. Il livre ici l’histoire tumultueuse d’un fameux samouraï, Minamoto no Yoshitsune. Une épopée transmise de génération en génération au Japon, depuis le XIIe siècle ! Comme souvent, en particulier lors de ses collaborations avec le metteur en scène Yoshi Oïda, la musique participe pleinement du spectacle. Elle sera jouée en direct par Etsuko Chida (chant, koto) et Emiko Ota (chant, percussions). À partir de 8 ans.

04 91 54 70 54

© Christophe Raynaud de Lage

30 mai au 2 juin Le Gymnase, Marseille 08 2013 2013 lestheatres.net

Quand les vingt artistes de la Compagnie XY se livrent à des impromptus acrobatiques dans l’espace public, ils choisissent bien leur moment : nul doute qu’entre les deux tours de la présidentielle, on aura besoin de s’évader un peu. L’occasion se présentera lors des Dimanches de la Canebière, fin avril, puis de la traditionnelle Sirène et midi net, le premier mercredi du mois de mai, sur le Parvis de l’Opéra de Marseille. 30 avril La Canebière 3 mai Parvis de l’Opéra Lieux publics, Marseille 04 91 03 81 28 lieuxpublics.com

© Alwin Poiana

Passione

Les Voyages

Une femme au bord de la folie dans un monde qui se disloque. Le propos est énigmatique, mais le contexte est celui de la Seconde Guerre mondiale... En bon adepte d’un « théâtre de la catastrophe », le dramaturge anglais Howard Barker a écrit un monologue tragique, dont s’empare avec brio la soprano Natalie Dessay. La mise en scène et la scénographie, remarquables, sont respectivement signées Jacques Vincey et Mathieu Lorry-Dupuy.

9 juin La Criée, Marseille theatre-la-criee.com

« Il faut que je vous dise que mon corps est curieux de tout » ; c’est un danseur qui prononce cette phrase, mais ce pourrait être n’importe quel être humain. Emio Greco et Pieter C. Scholten revisitent La passion selon Saint Matthieu de Jean-Sébastien Bach avec les artistes du Ballet National de Marseille, sur une partition librement adaptée par Franck Krawczyk, au piano et à l’accordéon. L’extase mystique et la légèreté ne seraient-elles donc pas incompatibles ?

04 91 54 70 54

30 mai au 2 juin La Criée, Marseille theatre-la-criee.com


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Solo Le format court des Découvertes dansées conviendra particulièrement à cette pièce interprétée et chorégraphiée par le danseur virtuose Junpei Hamada. Il y interroge la notion d’obsolescence, s’intéressant « à ce qui semble gâché, perdu, inefficace, inutile », et à ces choses si nombreuses dont on se demande pourquoi elles existent. 8 juin Klap Maison pour la Danse, Marseille 04 96 11 11 20 kelemenis.fr

© Kazuhito Hori

Dédale ensemble

Pampero

© Wendy Mottard

Des artistes en herbe ont donné vie à ce spectacle : Émilie Garetier, Mylène Lamugnière et Claire Indaburu guident les élèves de deux écoles du 3e arrondissement de Marseille, dans une chorégraphie inspirée de la pièce Zef ! Un petit vent de douceur et d’amour (Michel Kelemenis). Cette Découverte dansée participe de l’inauguration de l’ensemble immobilier Carré Saint Lazare, qui place l’artistique au cœur du logement social : on peut lire à ce sujet notre article Habiter l’art sur journalzibeline.fr.

11 juin Klap Maison pour la Danse, Marseille 04 96 11 11 20 kelemenis.fr

© Agnès Mellon

Valérie Costa emmène son public aux côtés d’une vingtaine de danseurs amateurs, dans un projet participatif, issu d’ateliers d’immersion. Plusieurs parcours sont à choisir, pour découvrir le quartier marseillais Saint Mauront, en mutation urbaine accélérée. Des déambulations parallèles où l’on se sépare pour mieux se rassembler. Rdv à 16h dans le Hall de Klap.

19 mai Klap Maison pour la Danse, Marseille 04 96 11 11 20 kelemenis.fr


54 au programme

spectacles bouches-du-rhône

Only one of many

Les Franglaises

Le compositeur Sébastien Roux et la chorégraphe DD Dorvillier travaillent à rendre le spectateur plus actif que de coutume, à travers un dispositif qui favorise l’observation et l’écoute « comme des expériences de création autonomes ». Ils lui proposent de combiner successivement quatre éléments : deux partitions musicales, et deux séquences dansées. Dans le cadre du festival Les Musiques.

04 91 32 73 27

Antigone Le Mille-Feuille est une compagnie de théâtre qui entend mettre l’acteur au centre, en faisant le choix pour raconter l’histoire d’Antigone de ne pas la situer dans le temps, ni par les costumes, ni géographiquement. Entre « héroïsme antique et nihilisme moderne », l’éternelle révoltée de Jean Anouilh déploie sa -considérable- force tragique.

17 mai BNM, Marseille ballet-de-marseille.com

© X-D.R

© Victor Delfim

Prossimo & Crisi

Crisi © Jean Barak

16 & 17 mai Théâtre Fontblanche, Vitrolles 04 42 02 46 50 vitrolles13.fr

Le BNMNEXT prépare la génération montante du Ballet National de Marseille. Emio Greco et Pieter C. Scholten l’ont doté d’un répertoire propre, notamment ces deux pièces mêlant chorégraphie très écrite et espaces d’improvisation. Un cocktail souple et tonique, qui trouvera aisément sa place dans deux sites remarquables, la Chapelle arlésienne Sainte-Anne, et surtout l’Abbaye de Silvacane.

Molière du Meilleur spectacle musical 2015, la troupe totalement déjantée des Franglaises (4 filles et 8 garçons, mais ici le féminin l’emporte sur les lois de la grammaire), revient avec un nouveau programme de chansons à succès du répertoire anglo-saxon, (des Beatles à Rage against the machine ou Queen), traduites façon « Google Trad ». C’est puissamment drôle, enlevé, musicalement irréprochable. Une sacrée épreuve pour les zygomatiques !

Festi Pitchou Alléchant programme que celui de Festi Pitchou, le festival vitrollais pour enfants de 2 à 11 ans : des compagnies de grande qualité, comme Le Montreur et son Parc d’attraction pour marionnettes (on avait adoré le spectacle donné à l’automne au MuCEM), une école éphémère de cirque proposée par le CIAM, les clowns géniaux de Force Nez, des projections, des ateliers de danse, un mystérieux tunnel sonore... Sans oublier la Bibliocyclette de Fotokino !

2 juin Théâtre Comoedia, Aubagne 04 42 18 19 88 aubagne.fr

État civil

18 mai Chapelle Sainte-Anne, Arles

04 91 32 73 27

Cie Okkio © Thomas Bohl

20 mai Abbaye de Silvacane, La Roque d’Anthéron ballet-de-marseille.com

3 juin Divers lieux, Vitrolles 04 42 02 46 50 vitrolles13.fr

Ah ! Les démarches administratives ! Un roman, un poème… Tous les qualificatifs littéraires sont parfois convoqués pour souligner les situations parfois ubuesques auxquelles nous sommes confrontés. Un groupe d’étudiants des cursus théâtre de l’AMU jouent le texte de Sonia Chiambretto dans une mise en scène de l’auteure et de Louis Dieuzayde. L’univers kafkaïen de nos quotidiens. 18 & 19 mai Bois de l’Aune, Aix-en-Provence 04 88 71 74 80 boisdelaune.fr


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Un autre 11 novembre

Que faire ?

Entre Monteverdi et Bob Dylan, Amanda Lear et Siouxie and the Banshees, Alessandro Bernardeschi et Mauro Paccagnella dansent leur mémoire, leur vie, leur départ d’Italie pour la Belgique, la télé des années 70, leur adolescence qui perdure malgré les rides et la calvitie galopante. Un spectacle où l’existence se joue et se construit, soutenue par un chœur d’une trentaine de personnes (constitué en amont lors d’un atelier participatif).

Dans un hôtel isolé, quelque part aux confins de l’Europe, un petit groupe d’humains se retrouve avec la volonté de changer la société, de participer à la création d’une nouvelle utopie. Entre idéal grandiose et minuscules tragédies personnelles, chacun croit pouvoir donner un sens à sa propre existence, avant de sombrer dans le doute et tout remettre en cause. Le texte de Michel Bellier, mis en scène par Joëlle Cattino, avec les musiques de Dominique Lafontaine, est une fable festive et jubilatoire sur l’essoufflement d’un monde.

23 & 24 mai Bois de l’Aune, Aix-en-Provence 04 88 71 74 80 boisdelaune.fr

Dans le cadre du projet Résistance porté par l’Espace NoVa Velaux et la Cie La Naïve, est né, avec de jeunes comédiens amateurs (entre 15 et 17 ans), un spectacle évoquant l’histoire vraie de lycéens qui un 11 novembre 1940 avaient décidé de résister à l’occupation allemande et de continuer à vivre. Lettres des jeunes condamnés à leur famille, drôlerie, humour, se mêlent à l’émotion suscitée par le drame. Une pièce humaine et profonde assurément, qui résonne, indispensable avertissement.

04 42 87 75 00

© Isabelle de Beir

© Jean Poucet

©X-DR

Happy hour

10 juin Espace NoVa, Velaux espacenova-velaux.com 19 mai Le Sémaphore, Port-de-Bouc 04 42 06 39 09 theatresemaphore-portdebouc.com

Je clique donc je suis Pierre et le loup

3 juin Pavillon Noir, Aix-en-Provence 04 42 93 48 14 preljocaj.org

Le spectacle interactif du magicien et mentaliste Thierry Collet s’ancre dans une réalité très contemporaine, les nouvelles technologies et les techniques de captation et d’utilisations des données personnelles développées dans de grandes sociétés digitales. Déambulant de table en table au gré de ses expériences, il fait la démonstration de quelques prototypes d’applications et de logiciels aux propriétés supposées miraculeuses, destinées à nos téléphones portables et à nos ordinateurs par ailleurs supports des effets magiques du spectacle. Ludique et troublant ! 26 & 27 mai Les Salins, Martigues 04 42 49 02 00 les-salins.net

Medianoche Le spectacle de Vicente Pradal se fonde sur les Romances et Villancicos, poèmes pour la plupart anonymes, écrits aux XVe et XVIe siècles en Espagne. Certains s’apparentent à des contes, certains sont métaphysiques, satiriques ou drôles, mais tous parlent d’amour, de mort et de liberté que les interprètes incarnent tels des bateleurs. Chanteurs, musiciens, danseuses et jongleur permettent ainsi de faire découvrir un chapitre fondamental de la littérature espagnole.

© Nicolas Navarro

© JC Carbonne

© Nathaniel Baruch

On l’avait déjà adorée l’an dernier, aussi quelle belle idée de programmer de nouveau la version dansée du célèbre Pierre et le loup de Prokofiev, dans l’inventive et espiègle chorégraphie d’Émilie Lalande. Cinq danseurs se partagent tous les rôles, Pierre, l’oiseau, le chat, le canard, le grandpère, les chasseurs et bien entendu le loup. Une malle à malice offre son ventre pour faire apparaître les personnages et la fin du conte prend des allures jubilatoires. Un bonheur à partager en famille.

30 mai La Colonne, Miramas 04 90 50 66 21 scenesetcines.fr


56 au programme

spectacles bouches-du-rhône

hérault

vaucluse

Les voyages fantastiques

Histoires cachées

© X- DR.

Marco Polo…

Au début du XXe siècle, Georges Méliès tourna quatre courts-métrages inspirés d’aventures écrites par Jules Verne. Ce sont ces Voyages fantastiques que met en scène Ned Grujic, en recréant l’illusion d’un plateau de tournage. Les comédiens, en costumes d’époque, campent merveilleusement des personnages tout droit sortis de films muets, avec force projections, trucages et tours de magie !

04 42 11 01 99

Dans son dernier spectacle, Éric Bouvron imagine la rencontre de Marco Polo et de l’empereur mongol Kubilaï Khan. Entre l’aventurier vénitien et le conquérant fou et meurtrier, fondateur de l’Empire de Chine, s’immisce l’imaginaire du metteur en scène, porté magnifiquement par trois comédiens et trois musiciennes-chanteuses qui créent en direct le son et la musique.

3 juin Théâtre de Fos scenesetcines.fr

© Bushido

Marco Polo et l’hirondelle du Khan 19 mai Espace Robert Hossein, Grans 04 90 55 71 53 scenesetcines.fr

C’est dans la rue que les comédiens du Begat Theater distillent les histoires transmises au public de curieux qu’ils embarquent, casque sur les oreilles. Quatre tranches de vie, quatre histoires, séparées mais parallèles, s’immiscent dans les têtes : il suffit alors de se laisser porter par l’imagination, de s’abandonner au décor de la rue pour que chaque détail et personne rencontrée se transforment en une expérience artistique inédite.

Mec ! C’est le titre du premier disque du poète et chanteur Allain Leprest que Philippe Torreton fait entendre, dans un récital où il veut non pas prendre ces textes à bras le corps, mais « à bras l’âme ». Avec le percussionniste, batteur et improvisateur Edward Perraud, le comédien entame sur scène un dialogue où se mêlent les mots torturés, percutants, ciselés du poète et les sons du compositeur.

18 mai Auditorium Jean Moulin, Le Thor 04 90 33 96 80 auditoriumjeanmoulin.com

© Jean-Louis Duzert

Franito

04 42 56 48 48

6 juin L’Olivier, Istres scenesetcines.fr

© Stephane Thabouret

Associé au danseur Fran Espinosa, le clownmime Patrice Thibaud mêle le flamenco et le burlesque -élément essentiel de tous ses spectacles- pour raconter l’histoire d’une mère étouffante et de son fils, sage et docile, qui ne peut empêcher ses pieds de rester en place. Palmas et claquements de doigts de l’un s’unissent aux sons des cordes de la guitare de Cédric Piot et aux cris et onomatopées hilarants de cette mama espagnole haute en couleurs.

Seul(e), les oiseaux

20 mai L’Alpilium, Saint-Rémy 04 90 92 70 37 mairiesaintremydeprovence.fr 19 mai Théâtre Molière, Sète 04 67 74 66 97 theatredesete.com

Chorégraphe associé au Théâtre Golovine pour cette saison, Nans Martin, avec sa compagnie Les laboratoires animés, a mis en place une série d’ateliers de février à mai pour construire son nouveau spectacle. Les participants sont tous des amateurs, qui ont pleinement collaboré à cette création et en seront les interprètes. Le thème abordé lors de ce travail est celui de la migration, à la fois celle des oiseaux et bien sûr celle des humains, devenue problématique majeure de ce début de siècle. 16 mai Théâtre Golovine, Avignon 04 90 86 01 27 theatre-golovine.com


au programme spectacles vaucluse alpes 57

Dans un canard

L’empreinte du vertige

Lors du festival de nouvelles dramaturgies européennes sur les cinq sens, le Théâtre des Carmes, en partenariat avec l’Université d’Avignon et des Pays de Vaucluse, propose la découverte de trois spectacles : Les yeux fermés, mis en scène par Stéphen Pisani, l’opéra Il Re Cervo, livret et mise en scène par Paolo Bosisio, et Solaris d’après Stanislaw Lem et Andrej Tarkovskij, mis en scène par Paolo Bignamini.

En résidence de création aux Doms, la Cie F.A.C.T. propose une première version d’un travail d’écriture commencé il y a plus d’un an. Vertige il y a, celui que ressent Elisa après avoir percutée une panthère au volant de sa voiture, la veille de l’anniversaire de sa fille. S’ensuit un road trip fantasmagorique, au cours duquel elle retracera l’histoire de son adolescence marquée par une étrange pathologie, le « vaginisme », qui la rend inapte aux relations humaines. L’histoire d’une résilience possible...

19 au 27 mai Les Carmes, Avignon theatredescarmes.com

Un petit bout de paradis Dans la France des années 80, deux clans s’opposaient farouchement : les adorateurs d’Elsa contre ceux de Vanessa. 30 ans plus tard Vanessa est une grande star, une icône populaire, toujours chanteuse mais aussi actrice, égérie de la mode... José Pliya convoque, dans ce qu’il appelle une « fantaisie beckettienne », la farce, le grotesque, la clownerie et le tragique au travers de quatre portraits de fans attendant la chanteuse à la sortie d’un de ses premiers concert. Envie, langueur, compétition, absurde... les travers de notre société sont délicieusement dénoncés !

26 & 27 mai (et durant le Off du 6 au 29 juillet) Les Halles, Avignon 04 32 76 24 51 theatredeshalles.com

© Marina Raurell

Cap au pire

04 32 76 24 51

19 & 20 mai Les Halles, Avignon theatredeshalles.com

Les mots peuvent être des traîtres. Même si, comme l’écrit Thomas Bernhard dans son discours de réception du Prix Büchner, ils « [...] effacent et détériorent, font honte, falsifient, estropient, assombrissent et enténèbrent seulement », ils sont ce qui reste. Jacques Osinski met en scène le court roman de Samuel Beckett, une déclaration d’amour aux mots qu’incarne Denis Lavant. « Encore. Dire encore. Soit dit encore. Tant mal que pis encore. Jusqu’à plus mèche encore. Soit dit plus mèche encore. Dire pour soit dit. Mal dit. Dire désormais pour soit mal dit ». Mais dits. 9 juin (et durant le Off du 6 au 29 juillet) Les Halles, Avignon 04 32 76 24 51 theatredeshalles.com

© X-DR

Dans cette comédie grinçante, Jean-Daniel Magnin épingle les dérives, les failles et les pièges du monde du travail, en mettant en lumière le « benchmarking », technique de « gestion de qualité »... Dans un centre d’appels comme il en existe tant un stagiaire, dont le contrat est reconduit d’une année sur l’autre, va provoquer par maladresse des catastrophes et révéler la souffrance de chacun au sein de l’entreprise. Alors, travailler, ou ne pas travailler ? L’occasion de s’interroger sur l’emploi et sur des initiatives expérimentant une économie contributive dont l’émergence est croissante.

1er juin Les Doms, Avignon 04 90 14 07 99 lesdoms.be

Incorso Place à l’inattendu, l’étrange, et même l’aventure ! La Zone Utopiquement Reconstituée, alias le Groupe ZUR, propose un rendez-vous à ne pas manquer. Le collectif est à la croisée entre arts plastiques, cinéma et théâtre de rue. A la nuit tombée, les spectateurs se retrouveront quelque part en extérieur, dans un lieu encore à définir. Le mystère plane également sur le contenu du spectacle. Déambulation, poésie, projections, effets de sons et de lumière animeront cet univers onirique à découvrir.

© Jean-Francois Rabillon

04 90 82 20 47

© Stéphane Trapier

Senses

04 92 52 52 52

19 & 20 mai La Passerelle, Gap theatre-la-passerelle.eu


58 au programme

spectacles var

Dormir cent ans

Aldo morto Italie, XXe siècle, décennie 70. Les années de plomb pèsent sur le pays, le climat social est tendu, et l’organisation révolutionnaire des Brigades Rouges mène la guerre à l’Etat. En 1978, Aldo Moro, chef de la Démocratie Chrétienne, est enlevé puis assassiné. Daniele Timpano, dramaturge italien contemporain, se saisit de cette histoire avec le recul de sa génération, née pendant ces événements. Son écriture, à la fois lucide, ironique et distante, est servie par David Lescot, qui met en scène et interprète son texte.

Le passage de l’enfance à l’adolescence, étape cruciale de la vie, est au cœur de ce spectacle, écrit et mis en scène par Pauline Bureau. L’auteure a déjà exploré ce vaste thème de l’identité adolescente. Elle s’attarde ici sur l’éveil du désir, les attirances incertaines entre garçons et filles, perdus dans un monde d’adultes qui ne leur correspond pas. Le refuge est alors le rêve. C’est dans leurs songes qu’Aurore, 12 ans et Théo, 13 ans, se rencontrent. Là s’ouvrent tous les possibles. 23 mai Théâtre Liberté, Toulon 04 98 00 56 76 theatre-liberte.fr

Ce spectacle est né d’une image, celle des premières pages du roman Le Justicier d’Athènes, de l’écrivain grec Petros Markaris. Il raconte le suicide de quatre retraitées, au plus fort de la crise dans son pays. « Nous partons pour vous éviter cette charge », écrivent-elles en testament. Ces mots donnent le titre en italien de la pièce, créée par Antonio Tagliarini et Daria Deflorian. Ils nous plongent dans l’exploration de la vie de ces femmes et de ce qui les a poussées au désespoir. Spectacle en italien, surtitré.

23 mai Châteauvallon – Scène Nationale, Ollioules 04 94 22 02 02 chateauvallon.com

My rock © Claudia Pajewski

© Pierre Grosbois

Ce ne andiamo…

Ce ne andiamo per non darvi altre preoccupazioni 19 mai Châteauvallon – Scène Nationale, Ollioules 04 94 22 02 02 chateauvallon.com

L’amour et les forêts

30 & 31 mai Théâtre Liberté, Toulon 04 98 00 56 76 theatre-liberte.fr

Reality © Guy Delahaye

743 carnets, notes patientes prises entre 1947 et 2000, journal intime étrange, dénué de tout commentaire, de tout pathos, de toute analyse, relevé des faits et gestes du quotidien, inscrits par Janina Turek. Après sa mort, sa fille retrouve les écrits maternels. Les comédiens complices, Daria Deflorian et Antonio Tagliarini, offrent un spectacle (en italien surtitré) qui tente de déceler, entre les lignes, ce que signifie le terme « réalité » dans son rapport au jeu d’acteur et de création artistique.

© Filipe Viegas

À la peine pour écrire son nouveau roman, un écrivain rencontre l’une de ses lectrices, qui lui relate sa vie sans détour. Enfermée dans son couple par la jalousie infernale d’un homme, elle se livre au romancier et finit par tromper son mari. Laurent Bazin adapte ici l’ouvrage d’Eric Reinhardt, paru en 2014. Le metteur en scène conserve toute l’innovation littéraire portée par ce roman et ce portrait de femme toute en émotions. Isabelle Adjani s’en fait l’interprète.

20 mai Châteauvallon – Scène Nationale, Ollioules 04 94 22 02 02 chateauvallon.com

Dans les années 50 aux Etats-Unis, Elvis Presley devient l’emblème du rock n’ roll. Dans le même temps, Merce Cunningham invente la danse contemporaine. Jean-Claude Gallotta était alors son élève à New York. Il y a dix ans, il a créé ce spectacle, qui ne sera joué que de rares fois. Il le reprend en 2015. Entouré de neuf danseurs, il compose une quinzaine de séquences où il remonte le temps en danse avec quelques extraits de ses textes et de ceux de Claude-Henri Buffard. 2 & 3 juin Châteauvallon – Scène Nationale, Ollioules 04 94 22 02 02 chateauvallon.com


au programme

spectacles var alpes-maritimes

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L’arrière boutique

Water on mars 100 anneaux, 21 balles, 15 massues, 15 barres chocolatées, 6 boîtes en plastique, 10 rouleaux de papier toilette. Voilà les ingrédients très précis de la recette de ce spectacle. La préparation en est confiée à trois jongleurs, américains et suédois, Wes Peden, Tony Pezzo et Patrick Elmnert. Ils composent ensemble une danse des objets et des corps, mêlée de break-dance sur fond de musique électro. Leur technique, leur vitesse d’exécution et toute l’énergie qu’ils déploient sont phénoménales.

Comme à chaque fin de saison, le Cabinet de Curiosités, compagnie associée au Théâtre du Rocher, organise la visite de son Arrièreboutique. La troupe, en résidence au Rocher depuis plusieurs années, proposera cette fois de découvrir un espace artistique éclectique et ouvert à tous les imaginaires. Formes courtes de toutes sortes se succéderont, théâtre, danse, musique, ou performances. En ébauche ou plus élaborées, éclats d’un soir ou chantier en cours, avant tout place sera faite à la création.

Comment moi je ? Bric à Brac est une petite fille qui vient de naître, seule au monde. C’est en cherchant son chemin dans l’existence qu’elle apprendra qui elle est et trouvera sa voie. La Cie Tourneboulé questionne le monde qui nous entoure en creusant le sillon de la philosophie, pour construire sa pensée et aider à grandir. Marie Levavasseur signe le texte et la mise en scène de ce spectacle, où se mêlent jeux d’acteurs, marionnettes et musique.

28 mai Théâtre du Rocher, La Garde 04 94 08 99 34 ville-lagarde.fr

© Fabien Debrabandere

© Einar Kling-Odencrants

Le nid

Soldat peaceful Demain matin Tommo sera exécuté. Ce jeune soldat anglais d’à peine 17 ans a refusé d’obéir, de monter pour une énième attaque sanglante et meurtrière. Non par peur mais pour secourir un camarade blessé. La pièce de Simon Reade, adaptée du roman de Michael Morpurgo, nous entraîne dans l’enfer de celle qu’on appela la Grande Guerre. Ce monologue poignant sur les horreurs de ce premier conflit moderne et mondial est mis en scène par Laurent Ziveri et la Cie Pop Up.

Les tout-petits, de 6 mois à 3 ans, sont invités par la Cie belge Theater de Spiegel à découvrir un univers douillet où une violoniste et une chanteuse vont les entraîner vers un doux voyage musical. Elles cherchent où se poser pour couver leurs œufs, vont apprendre à déployer leurs ailes et aussi à quitter le nid. Cette forme courte est le prolongement sur scène de Caban, un espace de jeux et d’activités créatives installé au Theater de Spiegel à Anvers.

May B Il y a plus de 35 ans, Maguy Marin créait l’une des pièces les plus importantes de la danse contemporaine. May B, inspiré du théâtre de Beckett, rassemble dix personnages, blancs de farine et de salpêtre, les yeux cernés de noir, ahuris, tragiques, clownesques, qui font groupe malgré eux, malgré leur solitude. Un hymne aux « corps entravés, empêtrés, ces corps malhabiles qui tiennent debout quand même. ». Un groupe brinquebalé qui fait corps : l’invention d’une esthétique fondatrice.

© X-DR

20 & 21 mai Pôle Jeune Public, Le Revest-les-Eaux 04 94 98 12 10 polejeunepublic.fr

30 mai Pôle Jeune Public, Le Revest-les-Eaux 04 94 98 12 10 polejeunepublic.fr

© Marco Caselli Nirmal

© Senne Van Loock

9 & 10 juin Châteauvallon – Scène Nationale, Ollioules 04 94 22 02 02 chateauvallon.com

16 mai Théâtre du Rocher, La Garde 04 94 08 99 34 ville-lagarde.fr

04 83 76 13 00

19 & 20 mai Anthéa, Antibes anthea-antibes.fr


60 au programme

spectacles alpes-maritimes

Issue

Sacré sucré salé

30 & 31 mai Anthéa, Antibes anthea-antibes.fr

18 au 20 mai Théâtre national de Nice 04 93 13 19 00 tnn.fr

Ballet Nice Méditerranée

04 83 76 13 00

Le chorégraphe franco-algérien Hervé Koubi était venu présenter sa pièce Ce que le jour doit à la nuit en 2013 lors d’une tournée internationale. Le revoici, avec 12 danseurs mués en barbares, ceux qui ont toujours autant fait peur que fasciné. Douze hommes tournent, sautent, jouent du couteau, sur les airs sacrés de Mozart et Fauré ou sur les sons traditionnels d’Algérie. Et tout se mélange, humanité, violence, création, invention, dans un ensemble qui ressemble à l’histoire de la Méditerranée.

2 & 3 juin Anthéa, Antibes anthea-antibes.fr Les nuits barbares (ou les premiers matins du monde) 26 & 27 mai Théâtre national de Nice 04 93 13 19 00 tnn.fr

© X-D.R

Les nuits barbares

© D.Jaussein

Somptueux programme : trois pièces, chorégraphiées par trois grands noms de la danse de ballet. Jirí Kylián et sa Sinfonietta pour 14 danseurs, bijou de spontanéité créé en 1978. Oceana, de Lucinda Childs, dans la pure lignée de sa quête du mouvement perpétuel, et Oktette, de Uwe Scholz, naviguant sur les sons si évocateurs de Felix Mendelssohn.

2 & 3 juin Théâtre national de Nice 04 93 13 19 00 tnn.fr

La grenouille avait raison

© Nathalie Sternalski

04 83 76 13 00

C’est d’une bien agréable façon qu’on suit les leçons de théologie de Stéphanie Schwartzbrod : à travers les recettes de repas de fêtes des trois religions du Livre, elle nous emmène sur les chemins parfumés de l’aïd, carême, pâques, pessah, hannouka, pourim... Délicieuse voie pour pénétrer dans le sacré, assaisonnée de récits mythiques, mystiques, ludiques… Hummm, ça sent bon par là !... © n.sternalski

C’est une rencontre qui a donné lieu à Issue. Entre la chorégraphe habituée de la scène d’Anthéa Eugénie Andrin et le journaliste tunisien Shiran Ben Abderrazak. L’antiboise s’est nourrie du récit du Journal d’une défaite, chronique des débuts du Printemps arabe, des espoirs et désillusions suscités par une liberté qui brûle. La scénographie (Roxanne Ducruet) invite les danseurs à évoluer sous des portes suspendues à ras du plateau. Obstacles autant qu’ouvertures.

Le metteur en scène Pierre Blain réunit comédiens et élèves du lycée professionnel Paul Augier de Nice pour l’écriture collective d’un repas à base de légumes destinés à la poubelle (parce que trop petits, trop cabossés), cuisiné sur scène à la sauce télé-réalité. Les toqués déclament l’effarante et effrayante liste des ingrédients contenus dans les chips, réchauffent les querelles entre vegan et viandards… Un sujet loin d’être futile et qui met en appétit.

© X-DR.

© X-DR.

Eat Parade

James Thierrée continue de façonner son univers fantastique et poétique, à la croisée du cirque, de la magie, du chant, du théâtre, du mime… Spectacle total et enchanté, la dernière production de la Compagnie du Hanneton convoque tout à la fois, s’adresse à tous nos sens et touche au plus profond. L’artiste, aux côtés d’animaux magiques et d’une contorsionniste (Valérie Doucet) règne en maitre de l’imaginaire. 7 au 11 juin Théâtre national de Nice 04 93 13 19 00 tnn.fr


au programme

spectacles gard hérault

61

Rue Jean Jaurès

hTh invite, pour une semaine de projections, workshop, spectacles et installation le collectif allemand Gob Squad, qui depuis plus de 20 ans manipule le réel pour mieux nous le décrypter. En navigant sur le net à la recherche d’une représentation de la société occidentale, ils ont exhumé une vidéo familiale ni plus ni moins banale que tant d’autres. Ils la rejouent sur scène, rajoutant chair et passé aux personnages. Une fête, un karaoké, du malaise, de la convivialité sur jouée. Une entrée fracassante pour réfléchir à ce qu’on imagine être le bonheur aujourd’hui.

© Alice Piemme

Cela fait 35 ans que la CIA (Compagnie Internationale Alligator) fait surgir le théâtre là où on ne l’attend pas : dans la rue, au cœur de l’entreprise, dans les collectivités. Avec comme ligne de mire des sujets éthiques et politiques. Dans ce nouveau spectacle, Jean Jaurès (re)prend la parole. Appuyé sur une mise en scène qui convie le public à prendre part au débat, 100 ans après l’assassinat du socialiste, on questionnera ensemble (dès 9 ans) la place de l’engagement aujourd’hui. 17 mai Saint-Hilaire-de-Brethmas

17 & 18 mai Théâtre Bernadette Lafont, Nîmes 04 66 36 65 10 theatredenimes.com

18 mai Salindres

17 & 18 mai Domaine de Grammont, Montpellier 04 67 99 25 00 humaintrophumain.fr

19 mai Sauve

© Marc Ginot

En 1987, déjà malade, le cinéaste américain John Cassavetes écrit un texte de théâtre, avant de disparaître un an plus tard. La pièce n’avait jamais été jouée avant que Jan Lauwers ne la monte à hTh (Montpellier) cette année. Deux hommes décident de vivre une soirée de stupre, pied de nez à la vie qui se termine pour eux en cul de sac, et magnifique ode à l’amitié qui lie ces deux personnages. Un événement désenchanté. (voir critique sur journalzibeline.fr)

04 66 52 52 64

lecratere.fr

Mr Kropps Au milieu du public et dans la rue, la Cie Gravitation pose la question du vivre ensemble. Mr Kropps, utopiste pur et dur comme on les faisait au XIXème, défend son projet d’habitat collectif. Les différents personnages, à l’écoute des réactions des spectateurs, expliquent leurs espoirs et leurs craintes, chacun avec leur passif sociopolitique et leur réalité quotidienne. On s’écharpe, on rit, on avance. On réfléchit et on doute. Démocratie participative, politique vivante et vraie.

La nuit des taupes Dernière création du plasticien et metteur en scène Philippe Quesne, La nuit des taupes nous entraine dans les bas-fonds. Sept comédiens costumés en imposants maitres des sous-sols élèvent le propos animal en bien autre chose que la condition humaine. On joue, on fait de la musique, on s’accouple, on accouche, on repense son habitat en le détruisant violemment, on danse. On ne parle pas. On vit. En parralèle avec le programme Welcome to Caveland, conçu par l’auteur, autour du concept de sous-sol.

© Martin Argyroglo

Begin the beguine

16 mai Le Cratère, Alès 04 66 52 52 64 lecratere.fr

© David Baltzer/bilbuehne.de

Western Society

Texte sulfureux, inquiétant, bouleversant, la pièce de Büchner est d’autant plus intrigante qu’elle n’a pas été achevée. L’auteur allemand est mort en laissant des textes épars, laissant la postérité devant un gouffre d’interprétation. C’est une histoire de folie, d’un homme qui sombre à force d’humiliations. Aveuglé par la jalousie, il tuera sa femme. Michel Dezoteux s’empare des fragments de la pièce du 19ème, et crée une atmosphère envoutante qui mène aux confins de la démence.

© M. Wiart

Woyzeck

Mr Kropps, l’utopie en marche 24 mai Saint-Hippolyte-du-Fort 04 66 52 52 64 lecratere.fr 22 au 24 mai Domaine de Grammont, Montpellier 04 67 99 25 00 humaintrophumain.fr


62 au programme cinéma alpes-maritimes bouches-du-rhône

Jeune et Européen

Une vie, Stéphane Brizé, photo TS Productions © Michaâl Crotto

P

as question ni de Brexit ni de Franxit pour Cannes Visions Sociales ! Le programme de la 15ème édition de cette manifestation organisée à Mandelieu-la-Napoule pendant le Festival de Cannes par les Activités sociales de l’énergie est dédié au jeune cinéma européen. Comment questionne-t-il nos défis contemporains ? Ce sera le thème du débat animé par Jacques Kermabon le 23 mai.

Mais ce sont surtout les films projetés qui apporteront la réponse. 15 longs-métrages accompagnés par des cinéastes ou des spécialistes, auxquels s’ajoutent une sélection de 7 courts et 2 films du parrain de l’année, Stéphane Brizé, ce réalisateur de l’intime qui confronte des personnages ayant « une très haute idée de l’Homme » avec une réalité souvent déstabilisante. Il ouvrira le bal le 20 mai à 20 h avec La Loi du marché qui

a valu un César à son interprète Vincent Lindon. Il présentera le 21 mai à 18 h sa récente adaptation du roman de Maupassant : Une vie (Prix Louis Delluc 2016). Fidèle à ses objectifs de « montrer un cinéma ouvert et exigeant », Cannes Visions Sociales propose des films audacieux comme Le Parc de Damien Manivel au parti-pris minimaliste, Pretenders de l’Estonien Vallo Toomla mettant en scène dans un huis clos, inquiétant jusqu’à l’horreur, les tensions à l’intérieur de couples. Ou encore L’Ornithologue du Portugais Joao Pedro Rodriguez, qui bascule du documentaire animalier à l’allégorie, de la mésaventure du chasseur emporté par des rapides à une quête mystique, érotique, fantasmagorique. Des films humanistes faisant lumière sur notre monde tel qu’il va, à l’instar de Fuocammare de Gianfranco Rosi, plongée dans le quotidien des migrants échoués sur l’ile de Lampedusa. On aura des portraits, celui émouvant et drôle d’un inadapté qui conquiert son autonomie dans Willy 1er de Ludovic et Zoran Boukherma, Marielle Gautier et Hugo P. Thomas. Celui de Pepe qui, sortant d’un hôpital psychiatrique, cherche lui aussi

Premiers films au Berceau

35

ans, un bel âge pour un festival ! Celui du Festival du Premier Film francophone organisé par l’association La Ciotat Berceau du Cinéma en partenariat avec Les Lumières de l’Eden. À l’Eden-théâtre, ce sont 10 courts-métrages et 10 premiers longs-métrages sortis en 2016 et 2017 qui seront en compétition. 3 séances par jour, composées d’un court et d’un long métrage. Et bien sûr vous pourrez dialoguer avec les réalisateurs ! En avant première, Comment j’ai rencontré mon père, de Maxime Motte raconte la rencontre entre un petit garçon adopté et un migrant à la peau noire comme la sienne, qu’il pense être son père biologique et invite dans sa chambre à la grande surprise de ses parents. Le premier long d’Arthur Harari, Diamant noir, raconte le bannissement d’un fils de diamantaires, Pier Ulmann, devenu voyou, et a valu à Niels Schneider qui l’interprète le César du meilleur espoir masculin. Dans Irréprochable de Sébastien Marnier, un thriller intimiste où l’exclusion sociale mène à la criminalité, Marina Foïs incarne Constance, une femme prête à tout pour récupérer la

Toril de Laurent Teyssier © La Belle Company

place qu’elle estime être la sienne. Avec Corporate, plongée glaciale dans le monde de l’entreprise, Nicolas Silhol pose la question de la responsabilité et parle de « ceux qui font le sale boulot » à travers le personnage d’Emilie (Céline Sallette), jeune et brillante responsable des Ressources Humaines. Librement inspiré de sa vie, Patients, un film touchant et drôle à la fois, que Grand Corps

Malade a coréalisé avec Mehdi Idir, raconte la reconstruction physique et morale de Ben en centre de réadaptation. Dans Cessez le feu, Emmanuel Courcol brosse un tableau familial du stress post-traumatique au lendemain de la Grande Guerre, où l’on retrouvera Céline Sallette, aux côtés de Romain Duris, Grégory Gadebois et Julie-Marie Parmentier. Django, d’Étienne Comar, film d’ouverture


63

Saint-Henri en Quinzaine à s’adapter à la société dans Vivre et autres fictions du Catalan Jo Sol. Ceux de Daphné et Josh, les mineurs délinquants emprisonnés de Claudio Giovannesi dans Fiore, ou celui du quadra grec en crise dans Suntan d’Argyris Papadimitropoulos. On pourra se laisser enchanter par le long-métrage d’animation lumineux de Sébastien Laudenbach, La jeune fille sans mains, adaptation virtuose et sensible d’un conte cruel des frères Grimm où, en des temps difficiles, un meunier vend son âme et sa fille au diable. Tous les soirs à 21 h, du lundi au vendredi, dans le cadre somptueux du Domaine d’Agecroft, le public de Visions Sociales bénéficiera de la projection de films en compétition dans les sections partenaires : l’Acid, la Semaine de la Critique, la Quinzaine des Réalisateurs, Un certain Regard. Avec en rab le samedi, un film primé à la Quinzaine ! ELISE PADOVANI

20 au 27 mai Domaine Agecroft, Mandelieu-la-Napoule ccas-visions-sociales.org

de la Berlinale 2017, évoque un épisode crucial de la vie du musicien Django Reinhardt (Reda Kateb), contraint de fuir la répression nazie durant la Seconde Guerre mondiale. On pourra voir aussi Monsieur et Madame Adelman de Nicolas Bedos, La Danseuse de Stéphanie Di Giusto et Toril de Laurent Teyssier, tourné en région PACA, qui suit le parcours d’un jeune fils de paysan cherchant à reconquérir sa liberté. Rendez-vous le 31 mai à 19h pour une malicieuse ouverture : Lumière ! L’aventure commence, 108 scènes tournées par les frères Lumière sélectionnées et commentées par Thierry Frémaux, et le 4 juin pour une clôture en clin d’œil de l’Eden au plus ancien cinéma des Etats-Unis : Le Byrd de Richmond de Jean Achache, suivi d’une séance Sport et cinéma avec Mercenaire de Sacha Wolff. Enfin, après la remise des prix, Embrasse-moi ! d’Océane Rose Marie et Cyprien Vial. Une programmation variée où chacun pourra faire ses choix !

Jeannette, l’enfance de Jeanne d’Arc de Bruno Dumont © Roger Arpajou TAOS Films

P

aris Genève Rome Milan Florence Bruxelles et... Saint-Henri à Marseille ! Du 30 mai au 11 juin, 2 jours après la clôture du 70ème Festival de Cannes, 7 villes offrent au plus grand nombre l’occasion de découvrir les films sélectionnés à la Quinzaine des Réalisateurs. En partenariat avec la Région PACA, sera projetée à L’Alhambra lors de 6 séances spéciales l’intégralité de la sélection 2017, soit 20 longs-métrages et 10 courts mêlant comme toujours talents confirmés et en herbe. En ouverture le 30 mai à 20h30, un des cinq longs-métrages de femme de cette 49è édition : Un beau soleil intérieur, le dernier Claire Denis (dont la présence doit encore être confirmée à l’heure où ces lignes sont écrites). Synopsis minimaliste : « Isabelle, divorcée, un enfant, cherche un amour, enfin un vrai amour » et casting alléchant réunissant entre autres Juliette Binoche et Xavier Beauvois. Autre réalisatrice attendue le 9 juin à 20h30, Carine Tardieu, qui présentera Otez-moi d’un doute où François Damiens incarne un démineur breton qui apprend que son père n’est pas son père. On espère Bruno Dumont le 7 juin pour la projection de Jeannette, l’enfance de Jeanne d’Arc, comédie musicale d’après Charles Péguy, mêlant Scarlatti et électro-pop-rock, sur des chorégraphies de Decouflé ! De la musique, il y en aura aussi dans Alive in France d’Abel Ferrara qui filme la tournée de son groupe. Et dans l’histoire d’une slameuse du New Jersey racontée par Geremy Jasper : Patti Cake$, révélé à Sundance. L’Italie représentée par 3 films fera l’objet de 2 séances spéciales organisées avec L’Institut italien en présence de Leonardo Di Costanzo, réalisateur de L’Intrusa « qui met en scène le combat d’une femme pour construire une communauté au-delà de l’influence néfaste de la Mafia ». On retrouvera les problèmes sociaux de la Péninsule dans A Ciambra de Jonas Carpignano tourné au cœur d’une communauté gitane, ou encore dans le premier film de Roberto De Paolis, Cuori puri. Et le 8 juin, à travers West of the Jordan river, journal filmé d’Amos Gitai, on reviendra sur 50 ans de conflit israélo-arabe depuis la Guerre des Six Jours, une séance spéciale animée par Xavier Nataf. Des films en prise avec la réalité comme The Florida project de Sean Baker, où on suit une bande de gamins insolents livrés à eux-mêmes en marge du monde « enchanté » de Disneyworld, des films-épures comme L’Amant d’un jour de Philippe Garrel qui explore en noir et blanc toutes les nuances de gris du sentiment amoureux, il y en aura pour toutes les sensibilités cinéphiliques ! Il suffit de consulter le programme et, comme l’y invite l’affiche de cette Quinzaine, tirée d’une photo de Graciela Iturbide sur laquelle le mot SOGNO (rêve) perce le voile des nuages, de lever les yeux vers l’écran de cinéma pour grandir ou se grandir. ELISE PADOVANI

ANNIE GAVA

du 31 mai au 4 juin Cinéma Eden-Théâtre, La Ciotat berceau-cinema.com

Reprise partielle de la sélection de la Quinzaine des Réalisateurs L’Alhambra, Marseille 04 91 03 84 66 alhambracine.com


64 au programme cinéma bouches-du-rhône

Cour(t)s à la Criée

Paniek © Luster Productions

Pour trois jours, le cinéma remplace le théâtre à La Criée. Une sélection de courts-métrages, récents ou plus anciens, pour petits et grands, proposée par le Festival international de courts-métrages de Clermont-Ferrand avec la complicité du Festival international du Film d’Aubagne. Des séances pour tous les âges, les 3/6 ans, les 7/10 ans avec par exemple le film d’animation de Joost Lieuwma et Daan Velsink, Paniek !, où l’on voit Marja, au

volant de sa voiture, imaginer toutes sortes de catastrophes ! Des courts pour « grandir », comme l’excellent Réplique d’Antoine Giorgini où Tony, qui doit passer une audition, est lâché par l’ami censé lui donner la réplique. Dans la séance « Humour noir » ne ratez pas le court culte, Ilha das flores du Brésilien Jorge Furtado ni le décapant Des majorettes dans l’espace de David Fourier. Vous avez envie de découvrir un Paris

Derrière les fronts Le cinéma Les Variétés accueille la réalisatrice Alexandra Dols et Salah Jabr, psychiatre et écrivaine, pour la projection en avant-première de Derrière les fronts, Résistances et résilience en Palestine. Traumas, tensions, peur, honte, humiliation perturbent l’équilibre mental, minent l’estime de soi des Palestiniens. Responsable d’un Centre de soins à Ramallah, Salah Jabr est la protagoniste de ce documentaire qui veut montrer que la colonisation n’annexe pas seulement les terres mais aussi les esprits, et faire percevoir les mécaniques d’oppression mais aussi la dynamique de résistance et de reconstruction.

inhabituel, onirique ? Allez voir le superbe Ghost Cell d’Antoine Delacharlery. Ne ratez surtout pas Madam black du Néo-Zélandais Yvan Barge, où un photographe qui a écrasé le chat d’une fillette fait appel à son imagination pour expliquer la disparition de l’animal, ni Le Repas dominical de Céline Devaux, César du meilleur court-métrage d’animation 2016 avec la voix off, entre toutes reconnaissable, de Vincent Macaigne. Et si vous aviez l’idée de nourrir les ours, le film de Méryl Fortunat-Rossi et Xavier Seron, L’Ours noir, vous en dissuadera. Il y aura aussi de la musique ! Samedi à 15 h, un ciné-concert pour les petits : Robert Rossignol accompagnera deux comédies du cinéma muet américain avec Laurel et Hardy. Et, cerise sur le gâteau, en clôture à 20h30, les compositions originales des étudiants du parcours « musique pour l’image » de la SATIS. Alors courez-y vite et ouvrez grand yeux et oreilles ! A.G

04 91 54 70 54

18 au 20 mai La Criée, Marseille theatre-lacriee.com

Espagne au cœur

Fronteras © outplayfilms

Dans le cadre de la 16e édition de L’Espagne des trois cultures, proposée par Horizontes del Sur à la Villa Méditerranée, projection, le 17 mai à 16 h, de Depuis le silence, l’exil républicain en Afrique du Nord en présence de la réalisatrice Sonia Subirats. Un documentaire qui raconte l’un des événements les plus secrets de la guerre civile espagnole : l’exil républicain en Afrique du Nord Et le 10 juin à 16 h, ce sera Fronteras de Mikel Rueda, histoire d’amitié entre Ibrahim, un jeune clandestin sur le point d’être expulsé d’Espagne et Rafa, un lycéen de 15 ans. Villa Méditerranée (AVITeM), Marseille 04 91 08 53 78 horizontesdelsur.fr Derrière les fronts © Alexandra Dols

16 mai Les Variétés, Marseille 08 92 68 05 97 cinemetroart.com



66 au programme cinéma bouches-du-rhône

Cantines bio et villes sans pesticides

Frontières, passages, et courts-métrages John Cassavetes

© Guillaume Bodin

Le 18 mai à 20h, l’Eden de La Ciotat propose en avant première le nouveau documentaire de Guillaume Bodin, Zéro phyto 100 % bio, en présence du réalisateur. Une enquête sur plusieurs communes françaises qui n’ont pas attendu l’entrée en vigueur le 1er janvier 2017 de la loi Labbé, interdisant l’utilisation de pesticides dans les espaces publics, pour changer leurs pratiques. Le film évoque aussi les pionniers de la restauration collective biologique. La séance sera animée par l’association Ekilibre et les Femmes semencières.

L’Eden Théâtre rend un hommage à ce réalisateur et acteur en proposant deux de ses films du 16 au 28 mai. Une femme sous influence (1976), « à cœur ouvert » raconte l’histoire d’un couple que rien ne peut séparer. Un homme et une femme (Gena Rowlands) que le cinéma unit à jamais. Love streams (1985) aborde tous les thèmes chers au cinéaste : l’amour, le couple, la famille, la solitude. L’histoire de Sarah, passionnée, jalouse et possessive qui, se sentant trahie par son mari et sa fille, débarque chez son frère Robert, riche écrivain accro à la débauche, alors que le fils de ce dernier vient de lui être confié…

L’Illusionniste, d’Alain Cavalier © X D R

Pendant plusieurs semaines, Elsa Tamisier et la Compagnie d’Avril ont animé, auprès d’un public d’adultes amateurs, un atelier de programmation et réalisation intitulé Fiction et Documentaire : Frontières et Passages. La soirée du 16 mai marquera la clôture de la session. Avant la projection du film réalisé par les participants, cinq courts-métrages documentaires seront au programme, dont 4 Minutes Lumière, des frères Lumière, 200 000 fantômes de Jean-Gabriel Periot ou L’Illusionniste d’Alain Cavalier.

Love streams © Splendor Films

16 au 28 mai Eden Théâtre, La Ciotat edencinemalaciotat.com

16 mai Cinéma Jean Renoir, Martigues 09 63 00 37 60 cinemartigues.com

Le cycle des Intemporels du Cinéma se poursuit en ce printemps, avec trois chefs-d’œuvre du 7e art à voir ou revoir. Trois lieux du territoires Ouest-Provence accueillent en mai et juin cette programmation : le Cinéma L’Odyssée, à Fos-surMer, l’Espace Robert Hossein, à Grans et l’Espace Gérard Philipe, à Port-St-Louis. Honneur aux classiques des années 50 pendant le mois de mai, avec d’abord Pandora, d’Albert Lewin. Réalisé en 1951, Ava Gardner y tient le rôle d’une Pandora, d’Albert Lewin © Les Accacias grande chanteuse, Pandora Reynolds, dont d’Alexander Mackendrick, tourné égalele succès est pour un temps en sommeil. En ment en 1951, sera ensuite à l’affiche. Critique vacances sur la Costa Brava, elle va faire la caustique de la société de consommation, le connaissance d’un riche armateur hollandais film évoque même déjà l’enjeu de l’obsoles(James Mason). L’Homme au complet blanc, cence programmée. Enfin, place à l’humour comédie anglaise sur fond de crise sociale, parodique et décalé de Frankenstein Junior.

Mel Brooks signe, en 1975, cet hommage détourné aux films des années 30 sur l’inquiétante créature du Dr Frankenstein.

04 96 18 52 49

Eden Théâtre, La Ciotat edencinemalaciotat.com

04 96 18 52 49

Intemporels du Cinéma

du 14 mai au 11 juin Cinéma L’Odyssée, Fos-sur-Mer 04 42 11 02 10 scenesetcines.fr Espace Robert Hossein, Grans 04 90 55 71 53 scenesetcines.fr Espace Gérard Philipe, Port-St-Louis 04 42 48 52 31 scenesetcines.fr


au programme cinéma bouches-du-rhône vaucluse hérault

La fine che non ho fatto

Mémoire du sous-développement

Le canal du Paradis Depuis le XVIe siècle, le canal de Craponne, conçu par l’ingénieur du même nom, irrigue la plaine de la Crau. Les étudiants en BTS Gemeau du campus Fontlongue (Miramas), encadrés par leur professeur Youssef Tlili et en partenariat avec le Pôle intercommunal du Patrimoine culturel, en ont étudié le fonctionnement dans toutes ses dimensions. Ils signent un film documentaire, fruit de cette recherche minutieuse, avec témoignages, archives et images 3D, qu’ils commenteront en direct.

La fine che non ho fatto, de Ruben Monterosso et Federico Savonitto © X D R.

A l’occasion du Festival International du Documentaire en Cévennes – DOC Cévennes, une carte blanche est accordée à ce film et à ses deux réalisateurs siciliens, qui seront présents. Ruben Monterosso et Federico Savonitto vivent tous deux à Palerme. Ils suivent une compagnie de théâtre amateur qui adapte la pièce d’un metteur en scène local, Nino Gennaro, personnalité marquante pour tous les membres de la troupe. Le film est une sorte de portrait et d’hommage à cet auteur disparu, que ses acteurs font survivre. 23 mai Cinéma Nestor Burma, Montpellier 04 67 61 08 04 montpellier.fr

Dans le cadre d’une soirée proposée par l’association Montpellier Cuba Solidarité, le film Mémoire du sous-développement sera présenté. Réalisée en 1968 par Tomás Gutiérrez Alea, cette œuvre prend pour point de départ le roman éponyme d’Edmundo Desnoes. L’histoire est celle de Sergio, jeune dandy, qui fait le choix de rester à Cuba tandis que toute sa famille s’exile aux Etats-Unis. Le film, véritable mémoire d’une époque, celle des premières années au pouvoir de Fidel Castro, mêle fiction et documents d’archives.

Mémoire du sous-développement © Les Films du Camelia

16 mai Cinéma Utopia, Montpellier 04 67 52 32 00 cinemas-utopia.org

Ciné-concerts

© BTS GEMEAU Campus Fontlongue

Le canal du Paradis : de l’eau et des hommes à Miramas 16 mai Cinéma Le Comoedia, Miramas 04 90 50 66 21 scenesetcines.fr

Les fiancées en folie © Splendor Films

Jolis courts de mai Le titre est trompeur. C’est bien jusqu’en juin que viendra s’étirer le joli mois de mai. Avec en bonus, la programmation de courts-métrages, organisée à Avignon par le Théâtre des Doms, le cinéma Utopia et l’association Cinambule. Une douzaine de films seront à l’affiche, petites pépites à découvrir, comme le sont souvent ces formats brefs et incisifs. Toutes de création récente (2015 ou 2016), les œuvres présentées, d’animation ou de fiction, percutent en quelques minutes des thèmes aussi vastes que la crise sociale, la violence ou l’érotisme. 2 juin Théâtre des Doms, Avignon 04 90 14 07 99 lesdoms.be

Deux séances de ciné-concerts au programme le 4 juin. L’accordéoniste Virgile Goller accompagnera les films de ses mélodies, proposant chaque fois une création originale. L’occasion pour tous, y compris pour les plus jeunes enfants, de découvrir quelques joyaux à la source du 7e art : à 10h, d’abord, Les Pionniers du cinéma, une sorte de compilation rassemblant des extraits des premiers dessins animés, des premiers westerns, ou des premiers trucages. Puis à 19h, Les Fiancées en folie, l’un des chefs d’ œuvre de Buster Keaton. 4 juin Cinéma Nestor Burma, Montpellier 04 67 61 08 04 montpellier.fr

1336 jours Le documentaire de Claude Hirsch, 1336 jours, des hauts, débats, mais debout retrace le combat des salariés de Fralib pour sauver leurs emplois et leur outil de production. L’usine de thés et infusions, située à Gémenos, près de Marseille, et propriété du trust Unilever, était vouée à la fermeture, délocalisation programmée en Pologne. De septembre 2011 à juillet 2014, les ouvriers vont occuper les lieux. Ils feront plier le colosse industriel, reprendront leur usine, devenue SCOP-TI, et créeront leur propre marque, 1336. Deux d’entre eux seront présents pour une rencontre.

1336 jours, des hauts, débats, mais debout © Les Films des Deux Rives

18 mai Cinéma Utopia, Montpellier 04 67 52 32 00 cinemas-utopia.org


68 critiques cinéma

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96 minutes

S

éance unique pour le film Tower de Keith Maitland, proposé dans le cadre du 2e CinéFID (programmation mensuelle au cinéma Les Variétés). Un film qui n’a pas encore eu de sortie française en salle, découvert par Jean-Pierre Rehm au Festival International du Film de la Roche-sur-Yon, dirigé par Paolo Moretti, venu à cette occasion le présenter à Marseille. Tower remet en mémoire un fait divers terrible : le 1er août 1966, un homme, du haut de la tour de l’université d’Austin au Texas, se met à tirer sur les passants, et ce n’est qu’au bout de 96 minutes qu’il sera maîtrisé. Bilan : 16 morts et 33 blessés. De ce tueur on ne saura rien dans Tower, car c’est aux survivants, blessés ou témoins que s’est intéressé Keith Maitland, s’inspirant d’un article et de témoignages, parus en 2006 pour le 40e anniversaire de l’événement. Il aurait pu simplement les interviewer ; il a choisi de faire interpréter les protagonistes de ce drame par des acteurs et de les transfigurer par une animation en rotoscopie (technique

Tower © Keith Maitland

qui consiste retracer à la main les images en prise de vue réelle). Le spectateur va ainsi suivre ce drame durant 96 minutes à travers cette reconstitution qui mélange animation,

séquences d’archives, images en couleurs et en noir et blanc. Si le film démarre avec Neal Spelce, un journaliste, c’est au personnage de Claire que s’intéresse surtout le réalisateur,

acteur, peintre, guitariste rock, et DJ à l’occasion : Philippe (dit Bouli) Lanners. Un homme qui s’impose derrière la caméra en conteur humaniste mêlant tragédie et cocasserie, ou devant, en ogre vulnérable, nounours bourru

et tendre. Après la projection de deux de ses réalisations Eldorado (2008) et Les Géants (2011), on a pu le voir en vieux rocker chenu et empâté dans le film des frères Malandrin au titre-phrase un peu énigmatique : Je suis mort mais j’ai des amis (2015). Peu connus en France, Guillaume et Stephane Malandrin, après leur thriller fantastique atypique Où est la main de l’homme sans tête, proposent ici une vraie comédie quasi musicale, un « very good trip » additionné de coke, shit, frites bien grasses, bières, gags, et dont on sort revigoré. Yvan (Bouli Lanners) Wim (Wim Willaert), Nicolas (Eddy Leduc) et JP (Jacky Lambert), des quinquas un peu défraîchis forment un groupe de rock : Le grand ours. Ils s’apprêtent à partir en tournée aux States quand JP, leur chanteur, a la mauvaise idée de tomber dans un trou et d’y mourir. Pas une raison pour renoncer à la tournée américaine ! D’ailleurs, le deuil, Yvan, il est contre. C’est « un outil du capitalisme », affirme-t-il. Dans ce monde merdique qui aime la musique merdique qui engraisse le frère de JP, surnommé Florent Pagny, on nous demande de « faire notre deuil » de tout ! Lui veut garder son chagrin et son copain. On trimballera donc les cendres

V

endredi 8 avril, aux Variétés, les Rencontres du cinéma européen, organisées par Cinépage, dédiées cette année au cinéma belge, tirent à leur fin, régalant leur public par un focus sur le réalisateur, scénariste,

Je suis mort mais j’ai des amis © Versus production

Very good trip


une jeune femme enceinte de huit mois qui perd là son compagnon ainsi que son bébé et que vient soutenir Rita, jeune femme aux longs cheveux roux, avant qu’on ne puisse la secourir. Ce n’est pas la seule à qui il donne la parole. Il y a ceux qui ont tenté de faire quelque chose, ceux qui ont pris de vrais risques, ceux qui ont observé de plus loin, impuissants. Tous affirment qu’ils ont oublié, refoulé, et qu’ils ont eu là la chance de pouvoir réévoquer, pansant ainsi leurs plaies. « Je n’avais jamais parlé de cela à personne et je me suis dit que ça pourrait me faire du bien. » Tower, un documentaire choral, sans doute thérapeutique, immersif pour le spectateur qui se demande : « Et moi qu’aurais-je fait ? » ANNIE GAVA

Tower a été projeté le 13 avril au cinéma Les Variétés à Marseille.

Chaque semaine, un expert

CinéFID Les Variétés, Marseille 04 95 04 44 90 fidmarseille.org

GÉOPOLITIQUE ÉCONOMIE URBANISME

du défunt, on les placera sous le micro avant de les disperser au dessus de L.A. S’en suit une équipée où s’adjoignent Pierre (Serge Riaboukine), un ancien du groupe, et Dany (Lyes Salem) l’amant caché de JP, beau militaire en élément exogène générateur de ressorts comiques. Une équipée où se révèlent les petites jalousies, les petites trahisons, les petites blessures et l’immense amitié qui soude ces gens-là. S’en suit aussi une Odyssée des cendres, volées, transvasées, séparées, saupoudrées, sniffées, ingurgitées, écoulées le long du chemin canadien par des Petits Poucets rêveurs. Un récit ponctué par l’intervention d’un Coryphée inuit rigolard qui sait bien, lui, que sur leur vol pour LA, est monté Pete Best, l’homme le plus malchanceux du monde, premier batteur des Beatles, remplacé par Ringo Starr juste avant le succès du groupe, et que rien ne va aller comme prévu. Il y a une revendication d’enfance, d’émerveillement, de liberté clownesque dans ce cinéma-là, et surtout un vrai plaisir à raconter, s’appuyant sur une mise en scène précise et inventive.

GRAND TÉMOIN

MA RD I S

D E L A V I L L A

T PAPETERIE

e visite, la carte de correspondance et le papier d’entête.

ELISE PADOVANI

Les Rencontres du Cinéma européen se sont déroulées du 4 au 11 avril à Marseille et Gardanne

INFORMATIONS ET INSCRIPTIONS SUR

WWW.VILLA-MEDITERRANEE.ORG/FR/MARDIS-DE-LA-VILLA

WAFAW

WHEN AUTHORITARIANISM FAILS IN THE ARAB WORLD European Research Council - www.wafaw.org

II + + ARAP VE ISLAM

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Syrie Liban Jordanie T. palestiniens Irak


70 critiques arts visuels

Tesseract terrasse

C

harles Atlas et marseille objectif DansE, c’est déjà une vieille histoire, puisque toutes ses œuvres filmiques et vidéographiques réalisées au cours de sa collaboration avec Merce Cunningham ont été présentées au fil des 30 saisons passées. Avec Triangle France, c’est une première à double titre : première collaboration entre l’association marseillaise, coproductrice de l’événement, et le pionnier de la synthèse entre images-mouvement, arts visuels, technologie et performance ; et première œuvre de « danse média » réalisée depuis dix ans par Charles Atlas. L’artiste américain sort de son silence avec Tesseract, une œuvre totale, vertigineuse dans son expérimentation, déstabilisante par sa profusion d’images et de sons, enivrante par sa composition rythmique. Six chapitres architecturent ce conte virtuel, cinématographique, plastique et chorégraphique inspiré d’un « objet mathématique impossible à créer dans un monde en trois dimensions, si ce n’est par simulation ». Un cube en quatre dimensions, cinq si l’on ajoute le temps, qui devient presque tactile grâce à

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Conjuguant haute technologie, virtuosité des danseurs, expressions plastiques, décors inspirés, le film stéréoscopique 3D de science fiction de Charles Atlas, Tesseract, enrobe le spectateur d’une illusion troublante. Une expérience immersive radicale du projet. À l’image du chorégraphe américain, Charles Atlas repousse les limites de la création en modélisant cet « objet mathématique » sur un écran panoramique, dans une fiction filmée à grandes enjambées : de mouvements amples en plans rapprochés, la caméra fouille la chorégraphie dans une mise en abîme infinie. Figures fantomatiques noyées dans un brouillard sensoriel, silhouettes sculptées par une lumière orange dans un désert brûlant, images diffractées, duo masculin enrubanné d’un écheveau de cordes suspendues… la boucle pourrait recommencer à tout instant pour ne jamais s’arrêter. Comme Merce Cunningham encore, Charles Atlas travaille en binôme avec un compositeur, le guitariste autrichien Fennesz, dont la Visuel de production © Empac musique électronique omnil’ingéniosité et à la haute technologie mises en présente joue à armes égales œuvre par Charles Atlas et son équipe. Dans un avec toutes les matières. Additionnées les espace scénique décuplé à l’infini, les visages unes aux autres, les séquences forment un et les membres des danseurs sortent du cadre ensemble éclectique mais homogène, une jusqu’à frôler le spectateur muni de lunettes virée interstellaire délirante et jubilatoire. spéciales ; l’écran redessine ses contours Tesseract nous terrasse avec notre bénédiction, passant du format paysage au carré absolu ; un comble ! MARIE GODFRIN-GUIDICELLI les mouvements de caméra désorientent le sens de l’espace ; les figures métaphysiques propres à Merce Cunningham côtoient des scènes effervescentes et polychromes dans lesquelles évoluent des corps enveloppés de combinaisons floquées ; le décor géométrique inspiré des scénographies d’Oskar Schlemmer rivalise de perfection avec celui de Dune de Tesseract l’écrivain Frank Herbert… Indéfinissable par Charles Atlas, en collaboration avec Rashaun Mitchell et Silas Reiner un esprit cartésien, Tesseract est un ovni Production EMPAC, co-commanditée par formel qui fait appel aux fonctions cognitives EMPAC et Triangle France, présentée du public, projeté tour à tour dans une cité par Triangle France et marseille objectif DansE en partenariat avec le [MAC], lunaire, des univers cinétiques, des installations Musée d’art contemporain de Marseille hybrides, un tête-à-queue du ciel et de la terre. et la Friche la Belle de Mai. Et toujours, dans ce charivari, d’exceptionnels danseurs : des faunes libres tels Rashaun jusqu’au 23 juillet Tour-Panorama, Friche de la Mitchell et Silas Reiner, compagnons de Belle de Mai, Marseille route de Merce Cunningham et co-auteurs 04 95 04 95 95 lafriche.org


18 mai 9 juin 2017 9e édition

Arts Éphémères Parc & Salons de Maison Blanche

35ème Festival du Premier Film Francophone Vernissage mercredi 17 mai 18h30/22h

Cinéma Eden-Théâtre - La Ciotat La Ciotat Berceau du Cinéma

Programme sur berceau-cinema.com Billetterie sur edencinemalaciotat.com La Ciotat

En partenariat avec la ville de La Ciotat

www.marseille9-10.fr 04 91 14 63 50 Petroff Studio - www.petroff.fr

Photo: Denys Pastré - Conception: Louise Montagne

Du 31 Mai au 4 Juin 2017

150 boulevard Paul Claudel Marseille 9e


72 critiques arts visuels

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La Galerie du 5 , ème

cinq petits tours et puis s’en va Avec Beautiful Africa, la Galerie du 5ème signe son ultime exposition après cinq ans d’une programmation réalisée en partenariat avec Marseille Expos. L’occasion de rencontrer Marjorie Hervé, coordinatrice de Marseille Expos… Zibeline : Quel était l’objectif de la Galerie du 5ème à sa création ? Marjorie Hervé : La galerie a été créée dans la perspective de MP2013 avec la particularité de s’adresser à un public large et d’être un espace dédié à la pédagogie et à la médiation. Notre partenariat a été renouvelé tous les deux ans et a évolué sans cesse. Depuis mon arrivée en 2014, Marseille Expos met en avant chaque année l’action d’une structure membre, en lien ou non avec le magasin, comme aujourd’hui Beautiful Africa avec la thématique « Africa Now ». On a une certaine liberté et souplesse dans le choix des pièces et des œuvres. La direction des Galeries Lafayette doitelle valider le choix de la structure ou de la thématique ? Non, c’est une conversation. On partage nos informations sur la note d’intention de la structure et du commissaire, sur la liste des artistes et des œuvres. Il n’y a aucune censure. Quelle est la temporalité des expositions ? On essaye d’inscrire chaque année trois expositions dans le lieu durant plus de deux mois, ce qui permet d’accueillir en moyenne entre 700 et 900 visiteurs par événement. Ce qui représente de très bons chiffres. Et on termine l’année avec le Christmas Art Market, la foire d’art contemporain spécialisée dans l’objet d’art. Votre présence ici induit d’avoir du personnel… Oui, Marseille Expos prend en charge un poste chargé de l’accueil, de la coordination et de la médiation. Que signifie la fermeture de la galerie pour Marseille Expos ? On a déjà fait un beau parcours ensemble, on a

Marjorie Hervé, coordinatrice de Marseille Expos (à gauche) et Lydie Marchi, commissaire de l’exposition Beautiful Africa à la Galerie du 5ème des Galeries Lafayette Saint-Ferréol © François Moura

rénové deux fois le lieu, repensé la scénographie, c’est un coût pour les Galeries Lafayette. Aujourd’hui on travaille à inventer et

développer de nouvelles formes de partenariat : une galerie, ou autre chose… Il faut que chacun y trouve son intérêt. Mais l’aventure continue !

…et Frédéric Montaud, directeur de l’enseigne à Saint Ferréol depuis février 2016 Zibeline : À l’origine, la création de la galerie était une volonté du siège social parisien ? Frédéric Montaud : Effectivement, c’est sous l’impulsion de Guillaume Hauzé, qui en est l’ambassadeur, que les Galeries Lafayette ont souhaité inscrire la culture au sein des magasins et faire que l’art et le commerce s’amalgament naturellement. Vous qui prenez l’aventure en route, comment avez-vous réagi à sa présence dans vos murs ? À titre personnel, c’est un domaine que je ne connaissais pas et qui s’avère abordable parce qu’il se compose de personnalités faciles d’accès, qui savent se mettre à la portée de clients non avertis, tout comme moi. Chaque exposition est ainsi l’occasion de partager un moment de découverte. À quoi attribuez-vous sa réussite ? En l’occurrence au dynamisme de Marseille Expos, et à la ville qui a connu un véritable essor dans l’art contemporain depuis 2013. Et les Galeries-Lafayette sont une institution dans le centre-ville. Cette

convergence explique ce véritable succès. Pourquoi, dans ces conditions, fermer la Galerie du 5ème ? Il s’agit plus exactement d’un déménagement. Nous avons actuellement deux sites et prochainement un troisième à Marseille-Prado, dans un centre commercial en cours de construction. De fait le partenariat avec Marseille Expos s’arrête sur Saint Ferréol mais est toujours en réflexion. Donc votre implication sur Marseille pourrait prendre une nouvelle forme ? Exactement. C’est un projet d’entreprise, actuellement à l’étude, qui sous-entend un investissement humain, matériel, infrastructurel et financier. Mais l’expérience est déjà convaincante… ENTRETIENS RÉALISÉS PAR MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

Beautiful Africa jusqu’au 10 juin Galerie du 5ème, Marseille Commissariat : Lydie Marchi, fondatrice d’Hybrid – plateforme, dédiée aux arts visuels. marseilleexpos.com


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Le Liban, enchantement et désenchantement

Neuf structures se fédèrent autour du Liberté, scène nationale de Toulon, pour un Rendez-vous en Méditerranée consacré à la création contemporaine libanaise. Un foisonnement pluridisciplinaire, à l’image des arts visuels, particulièrement dynamiques ont traversé ces différentes périodes, comme Raymond Depardon, témoin de la beauté d’une naïade au corps bronzé et des immeubles dévastés place des Martyrs ; ou encore Chris Steele-Perkins qui fixe dans son viseur des « soldats au milieu de la foule sur les plages de Beyrouth » en 2006. La photographie fait se télescoper des polarités saisissantes : Hiroji Kubota rencontre en 1970 des enfants soldats, Gueorgui Pinkhassov croise en 2005 une petite fille en robe courte et collant blanc jouant innocemment… Au fil de la visite de Look back at Lebanon à la Maison de la Photographie, le constat est amer : le temps n’a pas de prise sur les États en guerre.

Avant-après, toujours Le Metaxu et la galerie L’Axolotl ont choisi d’évoquer le Liban à travers les œuvres d’artistes plasticiens. Place du Globe, Hildegarde Laszak occulte l’emplacement de deux NIPPLES © Rodolphe Cintorino

L

e Liban se raconte par fragments au fil des expositions, et sous différents angles. L’approche documentaire est la plus fréquente, qui interroge notre perception de son histoire, en appelle à notre mémoire, compresse les conflits successifs dans un temps dilué. La photographe et vidéaste franco-marocaine Leila Alaoui, elle-même victime du terrorisme à Ouagadougou le 15 janvier 2016, avait pris la mesure de cette éternelle barbarie. Sur le terrain libanais dès 2013, deux ans après le début de la crise syrienne, elle photographiait sans artifice les familles « les plus vulnérables » abritées dans des « abris de fortune ». Quelle expression incongrue pour signifier une tente, quelques seaux, un matelas posé au sol, des bâches arrimées par de lourds cailloux ! Et que dire des autres réfugiés moins vulnérables ? Dans son récit documentaire Natreen (« Nous attendons »), les yeux de Samer, Maysam et Raghad, photographiés en plans rapprochés, disent le cauchemar vécu par ceux qui ont déjà connu l’exil dans leur propre pays avant de passer les frontières. Dès les années 70, les reporters de l’agence Magnum Photos sont envoyés au pays du Cèdre, immortalisant sur la pellicule les jours d’insouciance et les nuits d’horreur durant la guerre civile (1978-1990), et les conflits armés entre Israéliens, Palestiniens et Syriens. Certains

portes-fenêtres avec Enlarge your connection, un dessin interrompu en son centre par le mur, comme l’est régulièrement le flux internet libanais. Installation métaphorique prétexte à des performances sonores et musicales en plein air. Yann Pérol et Julien Carbone, co-commissaires de Corps_Temps du Liban, présentent un voyage poétique qui « met à l’honneur les espérances et les rêves en résonances avec l’Histoire » toujours embusquée dans la mémoire des artistes, quelque soit leur médium. Dans son court-métrage documentaire Tweety Lovely Superstar, Emmanuel Gras filme la démolition d’un immeuble par quatre syriens avant un bombardement, sans commentaire : seuls les coups de masse et la chanson de Fairuz rythment leurs gestes. Le danger imminent, hélas, leur sera fatal. Minutieux, documenté, sensible, le travail de Rodolphe Cintorino s’attache à rechercher et restituer les stigmates de la guerre. Ce qui a perduré. Comme les impacts de balles en creux dont il réalise des tirages en relief : « Retourner l’impact, inverser sa direction, c’est ce que questionne NIPPLES ». Le film The Libanese Rocket Society de Joana Hadjithomas et Khalil Joreige nominés pour le Prix Marcel Duchamp- retrace le projet de conquête spatiale porté dans les années 60 par un professeur et ses étudiants. Un document comme « une chasse au trésor, un travail archéologique » qui fait de l’utopie l’antidote au désespoir. MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

Rendez-vous en Méditerranée s’est tenu à Toulon, du 2 au 13 mai, au Théâtre Liberté (Natreen), à la Maison de la Photographie (Look back at Lebanon), à la Galerie Axolotl (Corps_Temps du Liban), et au Metaxu (Enlarge your connection).


74 critiques arts visuels

Grandes marées au Mrac

I

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Sandra Patron, directrice du Musée régional d’art contemporain (Mrac) de Sérignan, signe 4 nouvelles expositions dans un espace repensé et dynamisé

l y avait déjà eu l’extension du cinq ans de collecte de déchets Mrac l’an dernier. Depuis mars, plastiques sur les océans, fondus le musée a continué sa mue, proet agglomérés, la sculpture croît posant dès l’entrée une librairie inexorablement. Magnifique spécialisée (la seule du biterrois) vision, organique, colorée. Les bien dotée et très conviviale, et objets sont reconnaissables. Leur deux de ses salles ont été rénovées. déformation évoque le chaos. Le fonds d’œuvres déposées, pour C’est tout notre monde qui est 4 ans, par le Centre national des imbriqué dans ce magma, beau et arts plastiques contribue à irriguer terrifiant, avec une force créatrice le flux de propositions à découvrir. qui défie le courant. Nous sommes bien ici dans un La Chasse, première exposition lieu ouvert et contemporain, où monographique en France de l’art se montre et se partage, se Lucy Skaer, présentée dans renouvelle, s’invente avec et pour 4 salles thématiques, offre une le public. large respiration au travail de La vie aquatique nous entraine la plasticienne anglaise. On dans un monde difracté, aux mulpeut y percevoir sa quête de la trace, sa volonté de marquer le tiples expressions : vidéos, sculptures, peintures, photographies. temps qui passe, de matérialiser Dès l’entrée dans cette grande l’absence. En particulier dans salle aveugle, une impression Eccentric Boxes (coproduction de quiétude inquiète étreint. Où entre le Mrac et la Biennale de en est la marée ? Montante ? Rennes 2016), installation née Descendante ? Bruits de clapode la maison familiale de l’artements. Vagues qui refluent. tiste, qui y prélève et imbrique Voix qui imprègnent l’espace. meubles et lattes de plancher, C’est un mouvement en boucle les mêlant, les scellant dans un qui s’impose. Les œuvres des 17 destin commun. Elle recompose artistes réunis autour de la thémala mémoire intime. Elle souligne La vie aquatique, vue de l’exposition au Mrac Occitanie - Pyrénées-Méditerranée, Sérignan, 2017. tique maritime sont habilement Au premier plan Medhi Melhaoui, À fleur de peau. Au second plan Simon Faithfull, Going Nowhere 2 ce qui disparaît. Les couches de exposées. Les images ne se brouillent pas mètre de haut la houle bleu marine. Rien temps et de souvenirs sont matérialisées par l’une l’autre, les sons ne se mélangent pas, et n’est pourtant moins fluide que ce morceau du lapis-lazuli, du cuivre, du bronze, venus pourtant les formes cohabitent et se répondent de mer arrêtée, avec un envers et un endroit, remplir les vides qu’elle a créés en opérant dans un ensemble qui dessine une vision un recto et un verso, lecture renversée de des déplacements d’objets familiers. Une moins fascinée que sur-consciente du monde l’horizon aquatique, qui permet d’être autant réflexion déclinée dans l’ensemble des œuvres aquatique. Mythes, actualité, politique, écologie, dessus que dessous la ligne d’eau, devenue présentées : emboitements, transformations, rêves, temporalité toujours recommencée drapé solide. Le Chilien Enrique Ramírez recouvrements. Pour mieux laisser affleurer transparaissent ou explosent, imposent un propose une vision surplombante de l’Océan le temps qui passe. ANNA ZISMAN regard perçant, même s’il est souvent onirique, pacifique. Un écran bleu irisé d’argent : la mer sur notre relation à la mer. Simon Faithfull plein cadre, filmée à la verticale. Les reliefs des (artiste anglais), avec Going Nowhere 2, vidéo vagues sont d’une précision quasi minérale. La vie aquatique hypnotique de 5 minutes, marche au fond Surface mouvante mais opaque, il y a quelque jusqu’au 18 juin de la mer Adriatique. La caméra est fixe, il chose qui nous interdit d’imaginer y plonger. La chasse, Lucy Skaer s’éloigne, étrange créature humaine en jean et La notice de la feuille de salle (dont il faut La Pergola (nouvel accrochage des collections) chemise blanche, il fluctue, il disparaît dans la souligner la grande qualité pédagogique) (Dé)placements, Daniel Otero Torres noirceur des eaux. Résolument arrimé au sol. nous rappelle que c’est dans ces eaux que jusqu’au 4 juin Medhi Melhaoui (né au Maroc, il travaille à furent jetés des centaines de corps d’oppoMusée régional d’art Montpellier) aborde la surface de l’eau comme sants au général Pinochet. La déambulation contemporain, Sérignan un élément vertical. A fleur de peau fige dans conduit ensuite à une île : Plastic Reef, du 04 67 32 33 05 mrac.languedocroussillon.fr le verre thermoformé en un rectangle d’1,60 Belge Maarten Vanden Eynde. Résultat de


au programme arts visuels bouches-du-rhône 75

Détendez-vous ! Pour cette 9e édition, les commissaires, Isabelle Bourgeois et Martine Robin, ont concocté un programme sur le thème réjouissant de la détente avec la complicité de T. Atanasova & T. Van Walle, F. Bouchoucha, J.C. Bureau, M. Caminitti, F. Coupet, M. Fatmi, L. Lagier, L. le Forban, G. Frommherz, A.-V. Gasc, K. Ghelloussi, M. Le Dantec, C. Melin, O. Millagou, L. Perbos, L. Scoccimaro, R. Signer, M. Sylvander. Vernissage le 17 mai à partir de 18 h 30. C.L.

Déployé: barque volante aux rames disproportionnées, bois, cordes, sangles, projet de Gerlinde Frommherz, 2017. Photo D.R.

Festival des Arts Éphémères du 17 mai au 9 juin Parc et salons Maison Blanche, Mairie 9-10e, Marseille 04 91 14 63 50 marseille9-10.fr pac.marseilleexpos.com

10ème Printemps de l’art contemporain De PAC en PAC, le réseau Marseille Expos étoffe ses parcours itinérants et agrandit son périmètre de diffusion de l’art contemporain. Les chiffres parlent d’eux-mêmes avec, pour sa 10e édition, 45 expositions, 220 artistes, 5 jours de lancement à Marseille (24-28 mai) et 3 semaines de temps forts, notamment dans les galeries et lieux d’art de Châteauneuf-le-Rouge, Istres et Aix-en-Provence. Vernissages publics, visites guidées, rencontres avec les artistes sont au menu de ce programme gratuit et ouvert à tous, néophytes, amateurs et professionnels. M.G.-G.

09 50 71 13 54

25 mai au 11 juin pac.marseilleexpos.com Gandolfo Gabriele David, Crédit : MuCEM © Gandolfo Gabriele David

Vladimir Skoda L’Hôtel de Caumont ouvre ses jardins et sa cour d’honneur aux sculptures en acier de Vladimir Skoda, artiste français né à Prague en 1942 : des sphères, des pointes dressées, des disques concaves souvent monumentaux qui créent un dialogue frontal et contrasté avec l’architecture du XVIIIe siècle. Pour le promeneur, l’expérience est une invitation à s’élever dans un mouvement dynamique ; pour l’artiste, les principes qui le guident sont l’interactivité, le magnétisme, la polarité. Pour tous, la question du corps et de l’esprit est en jeu. M.G.-G. jusqu’au 6 juin Hôtel de Caumont, Aix-en-Provence 04 42 20 70 01 caumont-centredart.com

Sculpture de Vladimir Skoda dans les jardins de l’Hôtel de Caumont, Aix, 2017 © Sophie Lloyd

Détours Le projet-titre fait écho aux questionnements de Derrida sur l’origine et la destination. Pour leur part, les artistes contemporains en proposent des approches tout autant multiples que singulières : Jérémie Setton, Zineb Sedira, Catherine Melin, Arham Lee, Barthélémy Toguo, Jenny Holzer, Yazid Oulab... Plusieurs propositions et installations ont été conçues pour l’occasion et de nombreux événements sont proposés autour de l’exposition. C.L. Destinerrance du 13 mai au 8 juillet Arteum, Châteauneuf-le-Rouge 04 42 58 61 53 mac-arteum.com

Jean Bellissen, Axe Rhône Océan Méditerranée Sibérie, Perspectives économiques, transit champignons hallucinogènes, 1999. Prêt FRAC PACA


76 au programme arts visuels bouches-du-rhône vaucluse alpes

Germaine Pratsevall Son unique matériau d’élection est le papier chiffon qu’elle perfore à l’aiguille et peint ensuite. Germaine Pratsevall vient de faire don de 345 peintures et 134 gravures, qui viennent enrichir les collections permanentes du musée Réattu. Cent cinquante sont présentées aujourd’hui dans le parcours de l’exposition permanente, telles des feuilles accrochées aux arbres, selon le souhait de l’artiste. C.L. Germaine Pratsevall, Papiers chiffons jusqu’au 11 juin Musée Réattu, Arles 04 90 49 37 58 musee.reattu.arles.fr

Germaine Pratsevall, Sans titre, 1980, aquarelle sur papier perforé 35,9 × 2,7cm, Musée Réattu, Arles. Don de l’artiste en 2016

Raoul Dufy C’était le peintre de la joie de vivre et de l’élégance, d’une forme de légèreté « cultivée et résolument moderne ». Les 52 œuvres présentée au musée Angladon brossent un panorama éclectique, tant par les thèmes que les techniques, des années 1910 à 1953, dont plusieurs aspects méconnus de son œuvre comme sa prolifique collaboration avec le grand couturier Paul Poiret.C.L. La légèreté Raoul Dufy jusqu’au 27 août Musée Angladon, Avignon 04 90 82 29 03 angladon.com Raoul Dufy, Voiliers et cargos au Havre (1924) © Adagp Paris 2017

Détails Leurs thématiques sont différentes mais les deux photographes se sont rejointes dans leur intérêt pour le détail. Senga Peckham s’est rapprochée des statues du parc de Fontainebleau, enveloppées pour l’hiver, tandis que Michèle Vannier explore le paysage rural provençal et les vergers alentours. Profitant de la disparition du contexte familier, le regardeur est ainsi encouragé à voir au-delà de l’immédiat. C.L. Cocooned 13 mai au 3 juin Chapelle du Grand Couvent, Cavaillon 06 13 90 29 36 cavaillon.com

© Michèle Vannier

Piotr Klemensiewicz Il y a quelques années déjà, Piotr Klemensiewicz se confrontait aux espaces du Pavillon de Vendôme à Aix. Le voici qui interfère ses grandes photographies-peintures avec l’église de Salagon totalement occultée, et habite les jardins de plaques d’aluminium peintes dans des motifs de vert. Là, son œuvre recompose les paysages existants, les réinvente, redéploye les perspectives, surimpose paysages intérieurs et extérieurs dans des compositions troublantes. Dans la salle Pierre Martel, esquisses, maquettes et diaporama révèlent l’élaboration de ce projet « paysager ». M.G.-G. Terrestre (paysages) jusqu’au 17 septembre Musée de Salagon, Mane 04 92 75 70 50 musee-de-salagon.com Exposition Terrestre (paysages), Piotr Klemensiewicz, musée de Salagon 2017 © Xavier Delcroix


au programme arts visuels Var Alpes Hérault

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Photo’med 2017 Tanger, Alger, Beyrouth, Eboli, Marseille dessinent la nouvelle géographie du festival Photo’med qui, sous l’impulsion de Guillaume de Sardes, invite à « regarder et penser les villes » au fil des points de vue de 22 photographes des deux rives de la Méditerranée. Si notre regard se déplace à la lecture de leurs propres regards, le festival se nomadise de Marseille à Toulon, en passant par son port d’attache : Sanary-sur-Mer. M.G.-G. du 18 mai au 11 juin Sanary-sur-Mer, Ile de Bendor, Toulon (Hôtel des arts & Le liberté) du 17 mai au 14 août Friche la Belle de Mai, Frac, MuCEM, Villa Méditerranée, Marseille 06 87 90 18 47 festivalphotomed.com

© Hicham Gardaf, Tanger

A.R. Penck A.R.Penck est l’un des protagonistes majeur du « nouvel expressionnisme allemand » de la fin du XXe siècle, né à Dresde et installé en Allemagne de l’ouest en 1980. Plutôt que de mettre l’accent sur son travail critique de la partition de son pays, la Fondation Maeght se focalise sur les enjeux de son œuvre dans ses différentes périodes et met en lumière la force plastique de ses pictogrammes et de son vocabulaire sculptural à travers un ensemble d’une centaine de pièces. M.G.-G. Rites de passage jusqu’au au 18 juin Fondation Maeght, Vence 04 93 32 81 63 fondation-maeght.com Ereignis in N.Y. 3, 1983 © A.R. Penck

Géométries amoureuses Le Crac de Sète et le Carré Sainte-Anne à Montpellier présentent deux expositions monographiques simultanées consacrées à Jean-Michel Othoniel. Ce double événement présente plusieurs facettes du travail de l’artiste à travers une soixantaine de sculptures, une dizaine de peintures et plus d’une centaine d’œuvres sur papier. À Sète : œuvres monumentales et inédites, dont une gigantesque vague de métal recouverte de verre. À Montpellier : déclinaison de pièces en verre, issue de la collection personnelle de l’artiste (1992-2016). A.Z

Jean-Michel Othoniel – The Big Wave (détail), 2017 – Briques en verre indien noir, métal. Env. H : 535 x L : 15000 x P : 510 cm – Photo : Jean-Michel Othoniel

Géométries amoureuses 10 juin au 24 septembre Centre Régional d’Art Contemporain, Sète 04 67 74 94 37 craclanguedocroussillon.fr Carré Sainte-Anne, Montpellier 04 67 60 82 11 montpellier.fr

imageSingulières La bostonienne Anne Rearick, invitée en résidence à Sète pour cette 9ème édition du rendez-vous photographique, présente une série d’images carrées du quotidien de la ville portuaire à la magie insaisissable et fascinante, dans la pure ligne de la photographie humaniste américaine. On découvrira aussi l’aboutissement des 3 ans de travaux autour du projet La France vue d’ici, passionnant portrait croisé (30 photographes) de l’Hexagone d’aujourd’hui. Beaucoup d’autres thématiques sont proposées dans ce parcours foisonnant, avec débats et perspectives très contemporaines. A.Z 24 mai au 11 juin imageSingulières – 9ème rendez-vous photographique Maison de l’Image documentaire et divers lieux à Sète 04 67 18 27 54 imagesingulieres.com

© Raphaël Helle / Signatures / LA FRANCE VUE D’ICI, La Peuge


78 critiques livres

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La France dans l’histoire

L

’Histoire mondiale de la France parue en janvier dernier aux éditions du Seuil, sous la direction de Patrick Boucheron, a fait déjà couler beaucoup d’encre. L’historien évoque « la vitesse d’un entrain collectif et du sentiment d’urgence qui l’accompagnait » ayant présidé à la naissance de cet ouvrage de près de 800 pages, pour 140 entrées et presque autant de contributeurs. Il s’agissait de répondre aux crispations identitaires à la française, en frottant notre récit national au reste du monde, et -diantre !- c’est bien ce qu’ils ont fait. Écrire une histoire de France « accessible et ouverte », réconciliant « l’art du récit et l’exigence critique », qui ne dissocie pas artificiellement le pays des destinées mondiales : « cette ambition est politique ». L’objectif est atteint ; on le mesure au plaisir intense du lecteur. Nous insisterons sur ce point, car voici un livre que l’on s’approprie, qu’on prêtera volontiers aussi, pour en parler ensuite avec gourmandise. Chronologique, entre -34 000 avant J.-C. et 2015, mais qui se savoure de diverses manières, où l’on peut aller directement à ses périodes de prédilection,

tomber en arrêt sur un épisode méconnu, oublié, insu, repartir en arrière, galoper aux conséquences. Un gros bouquin, très peu cher au vu de tout ce à quoi il ouvre : ses chapitres toujours trop courts donnent la furieuse envie d’aller écumer la bibliothèque la plus proche. On passe ainsi du temps où les normands

essaimaient « des collines d’Angleterre aux rivages de la Méditerranée » à l’abolition de l’esclavage, en passant par cette année 1848 où l’Europe se couvrait de barricades, pour mieux revenir à la Révocation de l’Édit de Nantes, ou découvrir le rabbin Rachi, dont l’hébreu aux propriétés phonétiques permet de savoir comment on prononçait la langue française en Champagne, au XIIe siècle. On retrouve les noms de batailles, que tous connaissent sans parfois les relier à quoi que ce soit : Alesia, Marignan... Contre qui se battait-on ? Jusqu’où allaient les routes du commerce, les alliances, le savoir ? Voilà ce qu’est l’Histoire, un accès précieux à toutes ces générations d’êtres humains qui se succèdent, nos semblables, notre grande fratrie qui vague après vague se heurte aux mêmes écueils : le pouvoir, la soumission, l’errance, la foi et l’argent. GAËLLE CLOAREC

Histoire mondiale de la France, sous la direction de Patrick Boucheron Seuil, 29 €

Les actes et les mots

L

e livre de Francesca Melandri évoque les terrifiantes Années de plomb qui avaient plongé l’Italie de la décennie 70 dans le deuil et la désespérance. Le parti pris de l’auteure est intéressant car elle ne montre

pas la violence des actions politiques sur lesquelles elle s’est finement documentée, mais les conséquences qu’elles ont eues sur les familles et la population. De milieux sociaux très différents, Luisa et Paolo ne se seraient jamais rencontrés s’ils n’avaient eu tous les deux une raison essentielle de se rendre le jour des visites dans un centre pénitentiaire haute sécurité. Elle vient voir son mari enfermé pour un double meurtre, lui son fils pour actes et crimes terroristes. Une violente tempête les empêchera de quitter l’île sur laquelle est perchée la prison. Cette rencontre d’une nuit et un jour les bouleverse tous deux, lui qui ne vit qu’avec le souvenir de sa femme morte de chagrin, elle dont le mari n’a jamais caressé les cheveux. Ils y trouvent une nouvelle force et un nouveau regard sur la vie. L’évocation des actes terroristes, des conditions de vie des incarcérés souvent brutalisés par leurs gardiens, mais aussi les difficultés de ces gardiens et des familles des victimes est faite

avec autant de délicatesse que de précision. Elle y mêle la poésie des parfums de figuiers et d’embruns, une émotion sensuelle et une réflexion sur le poids des mots de l’idéologie, comme celui de « révolution » : des mots « gangrenés ». CHRIS BOURGUE

Selectionné pour le Prix littéraire des lycéens et apprentis PACA 2016-17

Plus haut que la mer, Francesca Melandri Gallimard, du monde entier, traduit de l’italien, 17,90 € Folio, 7,20 €


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Le pays de Cham

«

Notre monde a abandonné la Syrie et son peuple à une horreur inimaginable ». Ainsi commence l’introduction du dernier ouvrage de Jean-Pierre Filiu, professeur des universités en histoire du Moyen-Orient, Le miroir de Damas. Travail de spécialiste, qui sait se mettre à la portée des lecteurs, l’œuvre prend pour point de départ des personnages, des faits, que l’on croit plus ou moins connaître, et raconte, dans une sorte de kaléidoscope, l’histoire de la Syrie. Pas de ixième analyse du conflit, mais bien plutôt une remontée aux sources, aux chemins complexes qui ont constitué et constituent toujours ce Pays de Cham. Une Histoire qui se lit comme les Mille et une nuits, épisodes enlacés, complémentaires, où sont évoqués Bible, Coran, mythes, et personnages héroïques ou monstrueux, devenus légende : Saint Paul, Tamerlan, Saladin, Abdelkader, De Gaulle… Filiu aborde cette histoire en présentant les différents points de vue qui ont été autant de filtres parfois (souvent) déformants. Vision sectaire, partiale, voire méprisante de l’Occident pour évoquer le Moyen-Orient, lieu

des schismes des Églises à Antioche ainsi que la division entre sunnites et chiites). Les lieux acquièrent une épaisseur nouvelle, envisagés autant dans leur géographie, leur architecture, leur population que leur histoire, strates du temps, essentielles pour percevoir l’ensemble. La Syrie est aussi présentée au lecteur européen comme un miroir, rappelant à quel point cet Orient nous est proche : « nous avons tous en nous une part de Syrie ». L’histoire récente est aussi décryptée, reliant les relations nourries de promesses non tenues et de mensonges entre Al-Assad père et fils et Mitterrand et plus tard Chirac. Qui permettent de comprendre la situation actuelle. Passionnant et révélateur ! MARYVONNE COLOMBANI

de fantasmes, de convoitises… Terrain de jeu des puissances coloniales qui règlent leurs comptes hors de chez elles. L’auteur, en un style efficace et élégant, revient sur les schémas d’interprétation que l’on nous distille, aborde l’enchevêtrement des alliances, des mouvements de populations, des religions (premier foyer de l’Islam, mais aussi témoin

Le miroir de Damas, Syrie, notre histoire Jean-Pierre Filiu éditions La Découverte, 14 €

Baston générale ?

L

e poing fermé sur la couverture l’annonce : ça va cogner. Et ça cogne. Dur. Cogne le prologue qui jette le lecteur au ras du sable tunisien, en plein attentat terroriste. Cogne la première phrase de Lang, le narrateur : « Son poing me défonce la mâchoire, j’ai au moins

une dent déchaussée, peut-être deux, […] je connais même pas le nom de la moitié des os qu’il est en train de me pulvériser… ». Bref, dès le début, on y est, dans la « foire à la baston ». Car Lang et ses potes sont adeptes du fightmob, la « performance publique ultime », qui consiste à « se fracasser ensemble au milieu des foules », histoire de montrer qu’on n’a « plus peur de prendre des coups », qu’ « on se réapproprie ce qui nous appartient et tout ce qui nous est commun, le pavé, la hargne, la lutte, notre corps et toute sa force… ». Le Marseillais Cédric Fabre écrit des fictions violentes comme l’est l’époque, dans une langue percutante, vibrante d’humour caustique et d’accents rock. Il y règle ses comptes avec une ville qu’il aime et déteste à la fois. Son dernier roman Un bref moment d’héroïsme puise aux mêmes sources que les précédents : rage et insoumission. Mais il se déploie plus haut. Car, au-delà des parties de cache-cache avec la police, au-delà de la satire toujours virulente

des politiques locaux, il raconte des retours à la vie. Celui de Lang, ancien reporter de guerre qui a remisé ses appareils photo et semble ne plus rien faire que méditer à vide. Celui d’Awa et de son fils Arsène. Celui de Maurice, alias Old Mo. Cédric Fabre crée des personnages originaux et attachants, qu’il relie par des fils inattendus. Alors, malgré tous les deuils, toutes les violences évoquées, malgré le pessimisme foncier d’un narrateur-philosophe plutôt désabusé, on se sent porté. Comme si, même au bord du chaos, un avenir était possible. Comme si tout le monde pouvait connaître ce « bref moment d’héroïsme, quand tu parviens à reprendre possession de toi, de la meilleure partie de toi. » Un roman émouvant, plein d’une humanité fière de ne pas se résigner au pire. FRED ROBERT

Un bref moment d’héroïsme Cédric Fabre Éditions Plon, Sang Neuf, 17 €


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De l’intelligence du trait

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uestionnés par les lycéens sur la raison de leur association pour créer la bande dessinée Vive la marée, David Prudhomme et Pascal Rabaté répondent qu’ils avaient envie de collaborer depuis longtemps. Tous deux scénaristes et dessinateurs, ils sont allés se promener en famille, de Palavas au Croisic, le long des plages, en sont revenus avec idées et croquis, ont tout mélangé, au point qu’ils déclarent ne plus savoir qui a fait quoi. Résultat : une galerie de portraits croquignolesques qui se moquent gentiment des comportements de nos contemporains. Le scénario se déroule sur une journée et met en scène une multitude de personnages. Rencontres, disputes et pâtés de sable en instantanés… La couleur s’imposait, et elles sont toutes justes ; les dessins précis et leur humour vivifiant nous réjouissent. Tom Tirabosco était animé d’une motivation très différente. Il dessine son enfance avec

fresque familiale montre comment se forgent les caractères et les parcours des deux frères, tous deux artistes aujourd’hui. Michel est devenu en effet grand interprète de flute de Pan, mondialement connu. Témoignage émouvant sur le regard des adultes posé sur l’enfance. CHRIS BOURGUE

Ces volumes font partie de la sélection du Prix littéraire des lycéens et apprentis de PACA qui sera décerné le 31 mai

son jeune frère, Michel, né avec une atrophie des deux bras, le couple des parents parfois tumultueux, les jeux partagés. Utilisant exclusivement des traits épais et charbonneux qui donnent de la profondeur, il évoque les difficultés de vivre avec un frère handicapé, les moqueries des camarades à l’école… La

Vive la marée Prudhomme & Rabaté Futuropolis, 20 € Wonderland Tom Tirabosco Atrabile, 22 €

Que d’aventures !

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rospecteur dans le Klondike, marin dans la baie de San-Francisco, correspondant de guerre en Corée, au Japon et au Mexique, chasseur de phoques dans le détroit de Béring, reporter à Londres, rancher en Californie, navigateur au long cours sur son voilier le Snark … Un coup d’œil sur le planisphère qui ouvre le volume suffit à convaincre le

lecteur que, oui, Jack London (1876-1916) a bien vécu de multiples vies, à une époque où le tourisme de masse n’avait pas encore submergé la planète et où voyager était encore une aventure. Ce sont donc Les vies de Jack London que retrace chronologiquement le passionnant ouvrage du réalisateur Michel Viotte. Ecrit en collaboration avec Noël Mauberret (spécialiste de l’œuvre du romancier américain), il est paru à l’automne 2016, à l’occasion du centenaire de la mort de l’écrivain et en avant-première à la diffusion, sur Arte, du documentaire éponyme. Celui qui écrivait : « J’aimerais mieux être un météore superbe, et que chacun de mes atomes brille d’un magnifique éclat, plutôt qu’une planète endormie. La fonction propre de l’homme est de vivre, non d’exister. Je ne perdrai pas mes jours à essayer de prolonger ma vie. Je veux brûler tout mon temps. », a effectivement vécu une existence brève et intense. Le livre, jalonné de nombreuses photographies, en témoigne. Comme les multiples reproductions de couvertures et de manuscrits témoignent de la vitalité de sa plume. Véritable forçat de l’écriture –il y

était obligé pour des raisons d’argent, mais c’était aussi une discipline de vie-, il écrivait partout, tout le temps. Mille mots, c’était la ration quotidienne, que ni les tempêtes, ni la maladie n’empêchèrent. À sa mort, il laissait plus de cinquante ouvrages de fiction et était l’écrivain américain le plus lu. L’ouvrage de Michel Viotte offre l’occasion de plonger dans la biographie de London, dans son intimité familiale, dans l’histoire de l’Amérique et du monde au tournant du XXème siècle également. Il donne aussi envie de relire Martin Eden, L’Appel de la forêt, Croc-Blanc, et de découvrir les autres récits d’aventures, parfois moins connus, que les périples de cet infatigable voyageur lui ont inspirés. FRED ROBERT

Une exposition consacrée à « Jack London dans les mers du Sud » sera présentée au Musée de la Vieille Charité à Marseille à partir de juin

Les vies de Jack London Michel Viotte (avec la collaboration de Noël Mauberret) Editions de La Martinière, Arte éditions, 35 €


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L’ombre d’une vengeance

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n n’échappe jamais à son ombre. Juan Belmonte le sait mieux que quiconque. Le personnage principal de La fin de l’histoire, le dernier roman de Luis Sepúlveda, ne cesse de le répéter. L’ombre de lui-même est restée quelque part dans les rues de Santiago. En ce début des années 2000, c’est elle qui le ramène dans la capitale du Chili. Cette ombre qui « nous poursuit avec la ténacité d’une malédiction. » Dans cette ville, Veronica, sa compagne, son amour, a subi la torture et s’est tue pour ne pas le balancer. 40 ans plus tard, elle est restée murée dans le silence. Il faut bien écrire la fin de l’histoire. Celle avec un H majuscule aussi. Le livre de Sepúlveda est à la fois une fiction et un document. « La littérature raconte ce que l’histoire officielle dissimule », explique l’auteur. « A toutes celles et ceux qui ont connu l’enfer de la Villa Grimaldi », indique-t-il dans son exergue. Il a vécu dans sa chair la torture sous le régime de Pinochet puis la douleur de l’exil. Dans ce récit, il nous plonge dans les

marxiste en Bolivie à l’éclatement de l’URSS, de la guerre en Tchétchénie aux soldats nazis, les ramifications sont aussi nombreuses qu’inattendues. Opposants politiques, services secrets, mercenaires, militaires, tortionnaires, s’allient et se trahissent, se détestent et se manipulent. Parfois pour un intérêt partagé, mais avec des motivations bien différentes. À ce jeu, la violence est une marque de fabrique commune. L’ombre de Belmonte est en train de le rattraper. La vengeance est un plat qui se mange froid, paraît-il. À moins que, quand elle est trop froide, elle soit suffisamment écœurante pour ne pas être mangée. JAN-CYRIL SALEMI

jeux de pouvoir troubles qui ont agité toute l’histoire mondiale contemporaine. Quelques notes à la fin de l’ouvrage mentionnent les faits authentiques consignés dans le roman. De Yalta à la dictature chilienne, de la guérilla

La fin de l’histoire Luis Sepúlveda Editions Métailié, 17 €

Une poésie embrasée

Ronny Someck © awbcasanova

L

e Centre Darius Milhaud offre une programmation riche de concerts, conférences, projections de films, débats, cours… Le 4 avril dernier, une rencontre exceptionnelle permettait au public de découvrir et d’approcher sans doute l’un des plus grands auteurs de la poésie israélienne contemporaine, Ronny Someck. Né à Bagdad en 1951, il a quitté l’Irak dès sa petite enfance pour s’installer en Israël. Ses ouvrages sont édités dans de nombreuses langues, et l’on dispose de quelques recueils superbement traduits en français par Michel Eckhard Elial, poète, traducteur de la littérature hébraïque, et directeur de la revue

Levant-Cahiers de l’espace Méditerranéen. Deux recueils étaient évoqués par une double lecture, en hébreu par Ronny Someck, sonorités musicales, sons en écho, allitérations, assonances, partition subtilement orchestrée, et en français par Pascale Goeta, clarté souveraine. Les poèmes, denses, effleurent le quotidien, le métaphorisent avec élégance et un brin d’humour, s’inscrivent dans une visée politique au sens noble du terme. L’on voit en une courte saynète des enfants israéliens et palestiniens « qui papier et crayon en main / auraient en moins de dix minutes / signé un traité de paix ». Ronny Someck sourit en rappelant combien les langues se marient : les mots d’arabe entrent de manière conviviale dans la langue hébraïque de tous les jours, comme la cuisine, « le houmous est le ciment de la paix ! ». Jonglant entre la simplicité des choses et la profondeur, le poète fait référence à un imaginaire familier, composant une mythologie

(au sens de Barthes) de la modernité. On peut déceler dans cet univers foisonnant d’images et de formes en épure les échos de Kavafis, Ritsos ou Adonis... auquel est dédié un poème, Salut à Adonis roi : « Quand tu demandes : Qu’est-ce qu’une métaphore ? / Tu réponds : Des arbres qui battent / dans le cœur des mots. » Figure de style obsédante qui parcourt l’œuvre, donnant naissance à d’autres images, d’autres définitions : ainsi, par une jeune fille : « Quand on lui demande ce qu’est une métaphore, / elle croise les mains comme un aigle / et s’envole ». MARYVONNE COLOMBANI

Cette rencontre a eu lieu le 4 avril au Centre Darius Milhaud, Aix-en-Provence

Le piano ardent Ronny Someck, éditions Bruno Doucey, 15 € Le baiser de la poésie Yehuda Amichaï et Ronny Someck, éditions Levant, 20 € L’arbre lumière Michel Eckhard Elial, éditions Levant, 20 €


82 critiques livres

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Un homme peu courant

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n cette période d’entre-deux-tours qui feraient pâlir les plus irréductibles optimistes, un détour impromptu par la poésie m’a été salutaire ; sous des dehors qui paraîtront -à tort- mièvres à certains, le Manifeste du printemps des poètes de JeanPierre Siméon, La poésie sauvera le monde, permet un retour aux fondamentaux par ce simple syllogisme : la lecture active du poème libère la conscience, et la conscience libre libère le citoyen. Cette semaine, c’est avec le recueil Poeasy de Thomas Clerc que je me suis affranchie. Je connaissais cet auteur pour Intérieur, texte hors du commun, qui fait le tour de son appartement parisien, dans les moindres recoins, les moindres détails, et qui, de digression en digression, loin d’être rébarbatif ou nombriliste, réjouit, surprend, attise la curiosité. La lecture de son dernier ouvrage est une respiration : conçu comme un abécédaire où se côtoient les thèmes les plus éclectiques (quotidien, amour, politique,…), le recueil s’enchaîne dans une logique de forme et de sonorités, mais pas de fond ni de sens, passant de For à For me, Force manquante, Fort

et place ça et là des fulgurances… Thomas Clerc, l’écrivain, le performeur, donnerait-il à lire et entendre à la manière d’un Arsène Lupin ou d’un Monsieur Loyal représenté sur la couverture ? Quelques titres pour une première mise en bouche : Anti-Anti-Œdipe, Après Intérieur, Clergyman, Coeurque, Clignotant de Noël, La femme de ma vie se trouve enfermée dans un film d’Eric Rohmer, Faire Bartleby, Taureau pas Bélier. L’écriture de ce recueil a commencé après plusieurs mois de vide consécutifs de la rédaction d’Intérieur, et deux jours avant les attentats du 7 janvier 2015, qui allaient ouvrir pour lui, pour nous, pour tous, une année tragique. Deux marqueurs temporels qui parlent d’eux-mêmes. MARION CORDIER

comme la mer, Fraîcheur de vivre, Fraises au sucre sauvage, Freud et ses poètes, Froideur profile, Frottement, Fruit retourné, Fuck… Entre légèreté et profondeur, d’un trait d’humour à un jeu de langue, le texte prend corps dans le geste subtil d’un équilibriste du verbe à la personnalité complexe et bien tranchée. D’incongruités en acuité, la pensée virevolte

Poeasy Thomas Clerc, Gallimard - L’Arbalète , 24 €

Parabole miellée

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ndubitablement, Yamen Manai est un grand conteur. Avec son nouveau roman L’amas ardent, il brosse un portrait de notre époque en empruntant le ton du conte et rejoint, en phrases d’une simplicité poétique bouleversante, l’étoffe des mythes. Au départ, il y a Don, l’apiculteur, qui vit en

ascète auprès de ses « filles », les abeilles. Harmonie du sage avec la nature. Les insectes butineurs ne le piquent pas et il sait mêler sauvages et domestiquées pour les protéger des maladies et leur donner la capacité de se défendre contre les prédateurs. Mais, ombre au paradis, élément déclencheur dramatique, il trouve une de ses ruches jonchée des corps déchiquetés de trente mille de ses abeilles. L’intrigue construite comme un polar mènera à la découverte des agresseurs, les frelons asiatiques. Comment lutter ? Parallèlement, l’on voit son village, Nawa, être en proie aux sirènes de religieux fanatiques qui apportent nourriture, vêtements, argent, confort, mais aussi leurs ombres tragiques, dont les frelons, égarés dans leurs bagages. Le récit, orchestré en six mouvements, est mené avec une aisance rare, haletant, jouant des ruptures, des juxtapositions, permet de composer tout un monde, complexe, aux ramifications étonnantes qui nous mènent jusqu’au Japon. Se tissent en une architecture souple et rigoureusement construite, les fils multiples qui nourrissent

l’intrigue. La situation internationale et intérieure de la Tunisie est évoquée sans concession, soulignant à quel point le moindre coin de la planète, même le plus tranquille, est sujet malgré lui aux bouleversements voulus par les puissants. Le roman s’ouvre d’ailleurs sur une page qui met en scène un certain politicien véreux italien, Silvio, en croisière vers Sidi Bou avec un prince du royaume du Qafar… Négociations, bonus d’un joueur de foot… Et dans les cales, des caisses au contenu mystérieux… « De tout temps, les cadeaux des princes sont empoisonnés ». Le conte s’achève en fable emplie d’une vigilante espérance. Une pépite de lecture ! MARYVONNE COLOMBANI

Ce roman a reçu le prix Comar d’Or 2017 dans la catégorie Romans en langue française.

L’amas ardent Yamen Manai Éditions elyzad, 19.50 €


Zone de sécurité temporaire Exposition 4 mars—29 mai 2017

Anne-Marie Filaire Mucem Mucem.org

Esplanade du j4, 7 promenade Robert Laffont, 13002 Marseille

Design : Spassky Fischer

Sérigraphie : Lézard Graphique



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