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Du 19/01/11 au 16/02/11 | un gratuit qui se lit
Le
partage des arts
Politique culturelle Marseille Provence 2013, Mons 2015 Forum Drac, la Criée La collection Lambert, Région en scène Scènes et Cinés Ouest Provence
4,5 6,7 8,9 10
Théâtre Portrait de Julien Duval Le Merlan, le Gymnase, la Criée Théâtre du Centaure, les Bernardines, la Friche, le Lenche Le Jeu de Paume, Arles Grasse, Briançon, Vitez Au programme
11 12 13 14 15 16 à 23
Danse BNM, Châteauvallon, Nîmes Au programme
24 26,27
Musique Lyrique Chambre, symphonique Au programme Actuelles, Jazz, Monde
28,29 30,31 32 à 37 38
Cirque Au programme Arles, Istres, Grasse, Port-de-Bouc, Martigues
39 40
Jeunesse Amarelles, Pas sages…les images Préau des Accoules, nouveaux collectionneurs Spectacles Livres
41 42 44 à 47 48,49
Cinéma Grim, Manosque, 360° et même plus, Institut de l’image Rendez-vous d’Annie, Vitrolles
50,51 52,53
Arts visuels Arles, Marseille Université de Provence, Ecole supérieure d’Art (Aix) Galerieofmarseille, Vidéochroniques, Saffir Au programme
54 55 56 57
Livres Rencontres Littérature Arts
Disques
58,59 60 à 63 64 à 66 67
Rencontres Au programme
68,69
Philosophie L’enseignement de la philosophie
70
Sciences et techniques L’écriture
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Histoire Le massacre des italiens à Aigues-Mortes Le MuCEM
72,73 74
Chrysalide et bonne année
La crise, ce n’est pas seulement quand l’économie va mal, que les revenus baissent, que l’on a des difficultés concrètes et croissantes pour tenir jusqu’à la fin du mois, et faire vivre au quotidien sa famille, son commerce, son entreprise. La crise, historiquement, c’est une période de latence ponctuée de protestations, un état de grand inconfort qui précède un bouleversement. La crise, c’est ce qu’ont vécu les Tunisiens, formidablement : l’état de chrysalide, juste avant la métamorphose. De l’extérieur il semble que rien ne bouge. Que les chrysalides sont des cocons délaissés. Mais quiconque peut observer sous la soie est stupéfait de la transformation qui s’y produit, invisible, dans un espace étroit… Le public se presse aux conférences, aux rencontres, aux débats. Délaisse un peu les salles de spectacles. Question de moyens, et de contenus : partout la volonté de prendre la parole, de participer aux discussions, se révèle. Surtout ne plus s’en laisser conter ! Le petit manifeste de Stephan Hessel remporte un incroyable succès. Tandis que la télé continue à produire des animateurs aboyeurs tenant des propos indignes, condamnables, condamnés, certains abandonnent leurs écrans et leurs ondes et vont chercher dans le vivant des alternatives à la sous-pensée commune. Y aurait-il quelqu’un dans la chrysalide ? À Zibeline on y croit. Modestement, à notre échelle, depuis toujours. C’est en différenciant pensée et info, art et habillage, culture et communication -confondus par le ministère- que l’on produit une pensée critique. Constructive, émancipée, indignée. Vous nous suivez dans l’aventure depuis trois ans, toujours plus nombreux. On tenait en cette nouvelle année à vous en remercier. Et à vous recommander deux choses, pour que la chrysalide ne devienne pas mortifère… Aux associations et lieux culturels qui nous sollicitent : nous ne sommes ni une multinationale ni un service public, mais une association qui vit d’adhésions. Si vous tenez à notre existence, et à figurer dans nos pages, songez à apporter votre écot. Au public : ne vous détournez pas des salles de spectacles, plongées aujourd’hui dans un désarroi économique palpable. Elles ont besoin de vous, ou seront bientôt sommées de céder aux sirènes du divertissement, de la variété et de la gaudriole. Aujourd’hui, seule la fréquentation assidue d’un public avide d’intelligence peut les en préserver. AGNÈS FRESCHEL
Patrimoine La Corse En montagne
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Adhérents
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POLITIQUE CULTURELLE
MP13 ET MONS 2015
Un petit tour vers la future capitale belge de la culture permet de relativiser les enjeux de la nôtre, et de prendre la mesure de ses difficultés et de ses ambitions Mons, Capitale Européenne de la Culture en 2015 Mons est une petite commune de 92 000 habitants. Soit à peu près le double de la population d’Aubagne, et la moitié de celle d’Aix. Mais son agglomération compte plus de 250 000 habitants et quelque 800 000 dans un rayon de 30 kms. Qui inclue Maubeuge, ville française située à moins de 10 kms : la notion de coopération culturelle transfrontalière est une réalité dans ces cités jumelles, qui mutualisent leurs équipements, en particulier les salles du Manège : une programmation commune est mise en place, des bus relient la Scène nationale française et le Manège-Mons, pôle Wallon qui regroupe le Théâtre Royal (1000 places), le Théâtre le Manège (600 places), un auditorium de 300 places, et trois salles à l’architecture modulable. L’équipement culturel de Mons est donc impressionnant pour une ville de cette taille, qui possède un patrimoine
très bien mis en valeur, un musée des Beaux-Arts qui compte (le BAM), quelques festivals, la belle légende du dragon de Saint Georges, et une bible de Gutenberg. Elle est capitale culturelle wallonne depuis 2002, et son bourgmestre (son maire) n’est autre qu’Elio di Rupo, ministre d’État, qui fut deux fois chef du gouvernement wallon, et reste président du parti socialiste belge. Depuis plus de dix ans il a parié que le développement de sa ville passerait par la Culture, et accomplit un travail impressionnant de construction et de restauration. Pourquoi donc Mons a-t-elle été choisie par la Commission, qui favorise généralement des villes qui ont besoin du label, pour accomplir un bond culturel ? D’une part parce qu’elle est la seule ville belge qui a postulé dans les temps !, mais aussi parce que l’agglomération a besoin d’un coup de pouce : territoire sinistré économiquement depuis la fin des charbonnages, le revenu moyen des habitants y est de
Le theatre du Manege © M F Plissart
L’enjeu Capitale 10% inférieur à la moyenne belge et le taux de chômage, en nette baisse depuis 5 ans (il est passé de 25% à 20%), y reste très élevé. La Capitale s’ancre fermement dans une réalité économique émergeante. Le projet, intitulé Où la technologie rencontre la culture, s’appuie sur les installations récentes d’entreprises sur le territoire : Microsoft et IBM sont par là, Google y installe son antenne européenne, on y parle e-healthing, ralentissement extrême… Bref, l’activité économique semble s’orienter vers les nouvelles technologies et avoir fait le deuil de la mine, et la capitale culturelle parie sans complexe sur cet avenir et sur le monde économique, qui le lui rend bien.
Budgets prévisionnels
Question de territoires… D’ailleurs le financement de la Capitale est sensiblement différent de celui de Marseille Provence 2013 ! Avec un budget de fonctionnement de 75 M d’€, l’échelle semble pourtant à peu près la même (98 M d’€ pour MP2013). Mais Mons n’a presque plus rien à construire : Arsonic, un bel équipement musical pour l’ensemble Musique Nouvelle, va voir le jour, ainsi que le bâtiment pour la Fondation 2015. Il faut aussi achever de transformer l’architecture culturelle de la Ville qui mêle d’ores et déjà habilement les lignes et transparences contemporaines et un superbe patrimoine gothique. Marseille Provence 2013 a plus à faire. Si le patrimoine ne manque pas
POLITIQUE CULTURELLE
il a besoin d’aménagements et de restaurations urgentes, et l’équipement culturel du territoire est pauvre. Il a fallu investir massivement pour pouvoir accueillir la programmation : même s’il est difficile d’isoler ce qui aurait été construit sur le territoire sans MP2013, on peut estimer que les infrastructures créées, aménagées et restaurées représentent au moins 650 M d’€ (voir tableau). De plus à Mons le territoire n’est plus à faire, et la métropole n’est en aucun cas tiraillée. En Provence tout est différent : Toulon et son agglomération TPM semblent définitivement retirés d’un projet qu’ils avaient approuvé (ils ne veulent verser qu’1 des 7.5 M d’€ prévus initialement), Ouest Provence se débat entre Istres qui entre dans la danse et le reste de l’agglomération qui n’y vient pas, Aix et sa CPA jouent à la princesse au petit pois, délicate et capricieuse, et toutes les autres communes veulent tirer concrètement profit de l’argent qu’ils mettent au pot commun… Plus de deux millions d’habitants étaient concernés par le projet Marseille Provence 2013. Si Aix et Toulon se retirent, qu’en restera-t-il ?
…et de financements Quant à Mons, la ville est suffisamment aidée par les tutelles pour prévoir des événements dans les agglomérations alentours sans leur demander de participation. C’est essentiellement le Ministère de la culture de la communauté française qui finance, tandis que le sponsoring, le partenariat et le mécénat fonctionnement au-delà des prévisions : toutes les sociétés veulent en être, et à 4 ans du début des manifestations, Mons a déjà recueilli plus de 8 millions de mécénat… alors que Marseille Provence 2013, à moins de deux ans du début, peine encore à convaincre les entreprises.
Les projets artistiques Ils sont sensiblement différents. Mons s’appuie sur un savoir-faire et une gouvernance stable, qui permet d’avoir une vision claire des projets axés sur la création autour de figures emblématiques de la ville : Van Gogh, qui peignit à Mons ses premières toiles, Orlando de Lassus, «Prince de la musique» renaissante, qui y naquit, Verlaine qui écrivit Sagesse dans sa prison, et Saint Georges qui y terrassa son Dragon. Yves Vasseur, commissaire de la programmation et directeur du Manè-
ge-Mons, veut essentiellement «établir des passerelles entre l’héritage patrimonial et la création contemporaine, en s’attachant en particulier aux technologies.» Pour cela il passera commande à des artistes, collaborera avec la Capitale Tchèque (Pilsen sera également capitale en 2015), et avec les Capitales précédentes. D’ailleurs il est question de poursuivre et labelliser des projets intéressant également Marseille Provence 2013 ! Avec le FID (Festival international du documentaire), avec le Ballet National de Marseille (Frédéric Flamand vient de Charleroi, tout proche), et avec l’ECO (Orchestre contemporain européen) regroupant Télémaque, ensemble marseillais, Musiques Nouvelles, de Mons, et De Ereprijs, formation hollandaise. Projets dont nous devrions contempler les premiers feux à Marseille… Car MP2013 a fini de trier les 2200 projets reçus pour labellisation. Les acteurs culturels qui les ont déposés sauront bientôt s’ils sont ou non financés, mais l’association, qui ne dispose que de 69 M d’€ pour l’artistique (si le budget prévisionnel devient réalité et qu’il n’y a pas de défection), fera certainement des déçus… C’est le risque bien évidemment d’un appel à projet large, ambitieux, non dirigiste, tel que l’a voulu Bernard Latarjet. L’autre faiblesse de notre capitale est la lenteur de la procédure qu’elle implique, mais qui est très largement accentuée par les tergiversations politiques des Villes. Risque et faiblesse qui sont les revers d’un projet ambitieux intellectuellement, sociologiquement, territorialement. Reste à connaître enfin ce qu’il en sera de l’artistique. Encore un peu de patience : s’il n’y a plus de reculs, que chacun continue d’y croire malgré le délitement évident du contexte social et politique national, Marseille Provence 2013 peut encore devenir une très belle aventure. AGNÈS FRESCHEL
www.mons2015.eu www.marseille-provence2013.fr
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Marseille s’équipe La ville n’en est pas à un paradoxe près, et il n’est jamais très aisé de savoir qui dirige ; ainsi les musées et les bibliothèques n’ont plus de directeur : MariePaule Vial et Gilles Eboli, lassés semble-t-il du fonctionnement municipal et du manque de crédit, sont partis occuper d’autres fonctions. Plusieurs élus se partagent la charge de la culture sans que la hiérarchie des décisions soit tout à fait claire, la DGAC et le cabinet du maire ne semblent pas toujours d’accord… Vous avez dit délitement ? Et bien non. Dans le même temps une transformation sans précédent s’opère. Jean-Claude Gaudin l’a promis : non seulement la Ville de Marseille tiendra ses engagements financiers vis-à-vis de l’association MP2013, mais elle met tout en œuvre pour que les équipements soient prêts à temps. Effectivement ses investissements sont massifs : 150 M d’€ sont consacrés à remodeler le visage de la Ville. Aujourd’hui, aucun n’étant arrivé à terme, on tarde à en voir les effets ! Mais le MuCEM, la Cité des Arts de la rue, le Musée des Beaux-Arts, la nouvelle Friche, les 14 salles de MK2 sur la Canebière, le Silo, le Frac, le Musée Borely, le musée d’Histoire vont incontestablement changer la donne. Sans compter les projets plus modestes, de la nouvelle Minoterie au Pôle instrumental de Télémaque, en passant par le centre de Danse Kelemenis, le château de la Buzine, la Fondation Regards de Provence et la Villa Mistral. Les rénovations sont également nombreuses, et devraient permettre de profiter pleinement de la Criée, du Toursky, de L’Odéon, de l’Opéra, du Musée Cantini et de la Vieille Charité, du cinéma l’Alhambra, et des musiques actuelles au Moulin et à l’Affranchi… Bien entendu la mairie n’est pas seule à financer ces projets, estimés à près de 500 M d’€. Mais elle est maître d’œuvre de nombre d’entre eux, et participe financièrement à la plupart des investissements initiés par l’État, le conseil régional, ou les acteurs culturels eux-mêmes. Il reste donc à espérer que tout sera en ordre de marche en 2013, et que Marseille aura su ainsi profiter de cette année pour devenir la capitale culturelle qu’elle n’aurait jamais dû renoncer à être ! Sans oublier, d’ici là, de continuer à soutenir un tissu culturel fragile : il en a besoin au quotidien, et sa paupérisation actuelle est affolante… A.F.
www.marseille.fr © Gilles Martin-Raget
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POLITIQUE CULTURELLE
FORUM DRAC
Médiation et
À la demande du ministère de la Culture et de la Communication, la Drac Paca organisait le 15 décembre aux ABD Gaston Defferre le Forum régional : Démocratisation et pratiques culturelles à l’heure du numérique
Dans le cadre du programme «Culture pour chacun» lancé cet été par Frédéric Mitterrand, les Directions Régionales des Affaires Culturelles proposaient dans chaque région des assises sur l’accès à la culture en vue d’une Rencontre nationale les 4 et 5 février à Paris. La Drac Paca a choisi quant à elle de s’interroger sur démocratisation et numérique, d’examiner les médiations qui accompagnent cette mutation technologique, la part de l’action artistique et culturelle en milieu scolaire et universitaire… Pour cela elle a voulu croiser les expériences de terrain dans les domaines de la lecture, du patrimoine, de l’enseignement artistique et du spectacle vivant :
création et l’excellence ? est-il engoncé dans un art institutionnel ? les cultures populaires peuventelles être soutenues ? quelles sont les frontières entre art, communication, divertissement, distraction ? quelle est la position des créateurs face aux médias numériques ?
étaient donc invités des représentants des différents champs de la culture «engagés dans les questions de démocratisation culturelle à l’ère du numérique» comme l’a rappelé François Brouat, directeur régional des affaires culturelles, désireux de rassurer les acteurs culturels et leurs syndicats. En effet ceux-ci s’inquiètent de cette «culture pour chacun», dont les promoteurs taxent injustement les artistes d’élitisme, nient le travail de démocratisation accompli depuis des années, en dépit des baisses constantes de moyens, et des changements sociaux et médiatiques… En préambule donc, François Brouat a souhaité trouver un terrain d’entente «car la raison d’être du ministère est l’accès aux œuvres et à la culture la plus large». En faisant d’abord un constat : l’effort de démocratisation culturelle a été porté par différents ministères, et le programme Culture pour chacun ne remet aucunement en cause ce qui a été fait depuis 50 ans: «pour Frédéric Mitterrand la culture pour chacun n’est pas un succédané de la culture pour tous»… Puis par des questionnements: le ministère doit-il favoriser avant tout la
Pratiques démocratiques et démocratisation des pratiques
© X-D.R
Face à la marchandisation qui a contaminé la culture et la fracture culturelle qui double la fracture sociale, opter pour une position de résistance fait l’unanimité. Seuls les moyens diffèrent : le Festival international d’art lyrique d’Aix-en-Provence a mis en place un service éducatif afin de sensibiliser les plus jeunes à l’opéra et éviter de se trouver face à des «consommateurs»; l’Université d’Avignon et des pays de Vaucluse accompagne le développement d’une bibliothèque numérique avec une formation des étudiants intégrée à leur enseignement pour «les faire revenir vers le livre, la documentation et leur ouvrir l’esprit vers d’autres champs que ceux enseignés» ; l’École Régionale d’Acteurs de Cannes s’allie à l’Institut Supérieur des Techniques du Spectacle pour opérer un rapprochement entre acteur et technicien, indispensable depuis l’utilisation de nouveaux interfaces technologiques. Des chemins divers donc pour répondre aux évolutions posées par les nouveaux médias en termes de transmission, d’appropriation, de création, d’investissement… et d’éthique ! Car entre Culture et cultures populaires, public et consommateur, art et industrie culturelle, pratiques démocratiques et démocratisation des pratiques, les concepts méritent d’être affinés. À l’avenir, s’interroge Gilles Éboli, conservateur général des bibliothèques, «peut-on penser l’idée d’une bibliothèque numérique universelle comme une utopie désirable ?», tandis que Hervé Passamar, directeur de l’agence pour le développement et la valorisation du patrimoine, préconise de mieux connaître la typologie des publics, sans négliger les touristes: «quand on s’adresse à tout le monde, on ne s’adresse à personne». Quitte à penser la «Culture pour chacun» comme une réponse à leur demande ? Les désirs formatés des publics peuvent-ils être prescriptifs sans tomber dans le populisme? La question, soulevée, ne trouva pas de réponse… À moins que le sursaut ne vienne, justement, d’un secteur où les nouvelles technologies sont à la pointe des pratiques artistiques : l’art contemporain ! L’École supérieure d’art d’Aix, qui s’est équipée très tôt, s’interroge en permanence sur les questions de temps réel, de réseau, d’interactivité, mêlant réflexions épistémologiques, pratiques et expérimentations : une approche libertaire de la démocratisation
LA CRIÉE
POLITIQUE CULTURELLE
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numérique par une pratique de hacker défendue par son directeur, Jean-Paul Ponthot, qui souligne que «dans la logique de démocratisation culturelle pour chacun ou pour tous, il s’agit d’abord de qualifier l’œuvre que l’on propose». Une œuvre d’excellence, bien sûr, car «la démocratisation culturelle part du principe d’antériorité de l’œuvre et du patrimoine en direction du public». Propos confirmés par Emmanuel Vergès,
directeur du Zinc, qui rappela les théories de Mac Luhan, et souligna qu’il n’y a pas de révolution réelle des médias sans révolution de la création et des pratiques: si les usages s’appauvrissent, l’accès illimité est illusoire… MARIE GODFRIN-GUIDICELLI
Numérique, un progrès en art ? Les rapports d’Elise Longuet et Francis Lacloche, les discours de Frédéric Mitterrand, les déclarations cadres de la Culture Pour Chacun notent toutes «une convergence des pratiques culturelles vers les écrans» et prescrivent «une politique volontariste» du MCC pour accompagner cette mutation, présentée comme inéluctable. Qu’en est-il ? Bien présomptueux qui prévoit l’avenir de l’art! Quoi qu’il advienne on ne peut envisager de le prévoir, et de mettre en place une politique prescriptive, sans faire un tour par l’esthétique, et par une réflexion historique sur le progrès en art. L’art progresse-t-il ? Peut-on dire que Beethoven c’est mieux que Mozart? La réponse consensuelle à cette question est négative : la Tour Eiffel n’est pas plus belle que l’Obélisque. Ni plus laide, comme le prétendaient les nostalgiques (appelés aussi selon les contextes réactionnaires, passéistes, ringards ou vieux, vocable qui gagne aujourd’hui). Pourtant certains facteurs font évoluer les arts et les lettres : un artiste peut approfondir son langage, des techniques artistiques nouvelles (la perspective, l’harmonie…) peuvent être maîtrisées, et l’invention de matériaux peut permettre l’éclosion d’univers inespérés (les plastiques, la photographie…). Mais si ces évolutions changent parfois la donne en profondeur, elles ne signent pas toujours des progrès au sens strict : l’art y gagne, l’art y perd, ou gagne même à s’édifier contre. Ainsi l’harmonie (l’écriture en accords) a indéniablement fait progresser la musique occidentale, mais au passage elle a fait disparaître la sublime polyphonie Renaissante, que nos oreilles retrouvent avec délices dans les polyphonies populaires du monde. Quant à ceux qui se proclament modernes, ils ne produisent pas toujours les œuvres les plus marquantes : Perrault allait dans le sens de l’évolution esthétique en pui-
sant dans les contes populaires et en refusant l’influence antique et les Grands Genres, mais ses Modernes ont laissé moins de traces littéraires que Molière, La Fontaine et Racine qui aimaient les Anciens. Quant aux diktats des avant-gardes, on sait à quelles impasses ils ont pu mener : Boulez, en déclarant en 1952 que «tout compositeur est inutile en dehors des recherches sérielles», expédia pour longtemps la musique contemporaine vers des champs dont lui-même eut du mal à sortir… Qu’en est-il du numérique ? A-t-on aujourd’hui le recul pour en juger? Le ministère de la Culture (et de la Communication) doit-il dépenser nos subsides pour équiper les foyers français en TNT (sigle explosif !), numériser les fonds des bibliothèques, équiper en numérique les salles de cinéma ? Est-on certain, à l’heure où les études montrent que les jeunes ont changé leur mode de lecture et d’écoute (ils lisent des extraits et écoutent des plages de trois minutes), et où Internet sert essentiellement à l’industrie pornographique, aux jeux d’argent et aux tchats phatiques (au mieux dénotatifs…), que promouvoir ces médias aille dans le sens des missions du ministère de la Culture ? La résistance à l’appauvrissement culturel que chacun constate ne passerait-il pas plutôt par le rétablissement des subventions au spectacle vivant, moins de copinage dans les nominations, un soutien affirmé à la librairie et au cinéma indépendants, et un effort massif d’investissement dans les actions de médiation? D’ailleurs les intervenants du débat étaient formels : il faut apprendre à maîtriser le numérique, qui sans médiation humaine appauvrit les pratiques culturelles, malgré la multiplication des ressources mises à disposition. AGNÈS FRESCHEL
Macha Makeïeff à la Criée
Contrairement à ce qui avait été prévu, semble-t-il par le ministère de la Culture lui-même qui dans l’absolu devrait être décisionnaire, Catherine Marnas ne sera pas la prochaine directrice de notre Centre dramatique national. Pourtant tous paraissaient soutenir sa candidature, de la DRAC à la Mairie de Marseille et au conseil général 13, en passant par la Région PACA qui envisageait de s’engager financièrement pour faire de la Criée un Pôle régional si le projet de Catherine Marnas était retenu : celui-ci semblait correspondre en effet aux nouvelles attentes du ministère, produire et diffuser la création régionale, qui en a bien besoin, se préoccuper des publics et de la formation. Mais aussi, en particulier par l’association avec Di Fonzo Bo, s’attacher à faire venir à Marseille les metteurs en scène nationaux et internationaux les plus pertinents. Il n’en sera pas ainsi. Reste à espérer deux choses: que Macha Makeïeff vienne rapidement s’implanter dans la région pour redonner tout le panache qu’il mérite à ce magnifique théâtre, avec un projet artistique qui corresponde aux besoins du territoire; que Catherine Marnas puisse poursuivre son travail de création dans des conditions décentes, en disposant enfin d’un outil à la mesure de son talent. Pas trop loin de Marseille, si possible, afin que les créateurs et le public d’ici puissent en profiter ? AGNÈS FRESCHEL © Simon Wallon
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POLITIQUE CULTURELLE
LA COLLECTION LAMBERT
Lambert désœuvrée ? À Avignon, le prêt d’une partie du fond du collectionneur Yvon Lambert ne cesse de créer la polémique. Les répercussions d’une telle collection d’art contemporain, pour la Ville comme pour le marchand d’Art, sont indiscutables, surtout après le succès de la triple exposition Barcelo : la côte de l’artiste s’est encore envolée, ce qui est tout bénéfice pour le collectionneur, et la Ville a bénéficié du rayonnement sans précédent de l’exposition. Mais aujourd’hui le centre d’art fête amèrement ses 10 ans avec une exposition Je crois aux miracles prophétique. Une fête gâchée par «un désintérêt de la municipalité» selon le collectionneur qui menaçait fin 2010 de retirer ses 350 œuvres estimées à 63 millions d’euros, alors qu’il souhaitait auparavant léguer les œuvres à l’État via Avignon au terme du contrat qu’il a signé jusqu’en 2019. La cité des Papes, pour accueillir ce «cadeau», doit trouver les moyens de ses ambitions.
Des attaques lassantes
Un «petit Beaubourg» en faillite ? Jacques Montaignac, directeur des affaires culturelles de la Ville, temporise. «C’est un problème de double gouvernance. Les défauts de gestion proviennent des deux structures (ndlr : le directeur de RMG, société déficitaire avant l’exposition, a démissionné fin 2010 et la collection, qui a vu défiler depuis sa création 7 administrateurs est surendettée depuis 2 ans à hauteur de 185 000 €). Ces problèmes antérieurs à l’exposition ont amplifié les phénomènes de
par mail : «le déficit annoncé est inhérent à RMG et indépendant de la collection Lambert.» De son côté, Marie Josée Roig, maire d’Avignon, rappelait son soutien «sans faille» lors du vernissage des Miracles. Un soutien confirmé au Conseil Municipal lors du vote, pour la deuxième année, d’une rallonge de 45 000 € pour éponger «le déficit structurel» du musée.
Le financement La participation municipale annuelle s’élève à 440 000 €, identique à partir de 2011 à celle de l’État. Le financement de la Région PACA s’élève à 220 000 €. Avec la participation de mécènes et des fonds propres, le budget annuel est de 1,6 million d’€, auxquels s’ajoutent 50 000 € par an de fluides (eau, gaz, électricité, entretien…) aux frais de la municipalité. Quant au conseil général de Vaucluse, il met à disposition de la commune en bail emphytéotique depuis 1999, sous réserve qu’il accueille les œuvres du collectionneur, l’Hôtel de Caumont. Cette cession à titre gratuit, a été estimée en 1999 à 1 173 857 €, dont les travaux de réhabilitation qui ont été financés à hauteur de 457 347 € par le conseil général 84. Pourtant Jacques Montaignac estime que «l’apport des partenaires est restreint pour ce musée qui a toujours manqué d’un bras, celui du conseil général.» Il souligne de plus que le lieu est trop exigu aujourd’hui pour contenir les 1200 œuvres répertoriées. Eric Mezil, directeur de la collection Lambert © Delphine Michelangeli
Le 11 décembre, à la veille de l’inauguration de l’exposition anniversaire de cet ensemble d’art minimal, conceptuel et Land Art digne d’un petit «centre Pompidou», le galeriste avoue sa lassitude. «Je me pose sérieusement la question d’un départ. C’est à se demander si la ville est vraiment intéressée par notre présence. Je ne partirai pas comme un voleur, mais fin 2011, je m’en vais si les choses ne bougent pas.» Depuis l’installation du musée, les critiques fusent tandis que les ennuis à l’Hôtel de Caumont s’accumulent. Problèmes techniques et réaménagements fréquents dans un lieu du XVIIIe non adapté, la fameuse affaire du «baiser rouge», récents travaux «catastrophiques» selon le galeriste qui n’étanchent pas les problèmes d’humidité, et le déficit structurel chronique. Et le dernier coup qui met le feu aux poudres, l’accusation par la société d’économie mixte RMG (gestionnaire du Palais des Papes, de l’office de tourisme et producteur technique de l’expo Barcelo) d’un dépassement (entre 250 et 400 000 €, chiffres officiels non publiés à ce jour) des dépenses (sur 850 000 € de budget prévisionnel). Si à l’hôtel particulier le succès Barcelo est réel (43 000 visiteurs dont 2,50 € par ticket reversés à RMG), au Palais des Papes (24 000 visiteurs pour la seule expo mais 260 000 entrées en totalité) et au Petit Palais (chiffres non communiqués) les compteurs affichent des résultats en deçà des 200 000 visiteurs espérés. Pour Eric Mézil, directeur de la Collection, «ce dépassement est faux, c’est de la calomnie. Le budget artistique est réglo, nous affichons 855 000 € de dépenses. La Ville avait décidé que RMG prendrait en charge les dépenses du Petit Palais qui a raccroché
au wagon en janvier 2010. On ne peut pas nous imputer ces frais supplémentaires ni les 45 000€ d’étude de satisfaction ou les frais de gardiennage ! C’était du pur bonheur de voir cette foule cet été. Le succès a dépassé le succès d’orgueil, c’est aussi une réussite économique qui a permis de découvrir un Avignon culturel lié à l’art contemporain. La Ville a peut-être trop de trésors et boude son plaisir.»
déficit. Ils auraient dû équilibrer. Le juste milieu… est au milieu, il y a une part de responsabilité des deux côtés.» Il assure que «laisser partir la collection serait une erreur de politique culturelle fondamentale», mais souhaite un débat sur le fonctionnement financier. Yvon Lambert et Éric Mezil restent sidérés que des doutes subsistent sur leur travail, qui en 10 ans a ramené plus de 300 000 visiteurs. «Si on n’a toujours pas convaincu, c’est qu’il faut partir. On a inventé quelque chose d’exceptionnel, les gens viennent du monde entier été comme hiver» s’exclame le directeur qui reconnaît que «la Ville ne leur coupe pas les vivres» mais reste «furax, amer et vexé», proposant même sa démission. Ce «coup de colère» du collectionneur n’étonne pas la Ville, habituée à son «caractère bien trempé». Fabien Strack, directeur du cabinet du Maire, affirme «qu’il n’a jamais été question de laisser partir la Collection» et rassurait mi-décembre Éric Mezil
Vence et Arles
En attendant un doublement de surface, la Collection fait son nid ailleurs. Une antenne de la Collection pourrait atterrir prochainement aux Ateliers d’Arles. «Même si les moyens sont limités, le maire a compris que la ville peut vivre grâce à la culture. Notre idée n’est pas de quitter Avignon, mais il faut trouver une solution pour que le projet avance.» Contacts sont également pris avec la ville de Vence qui cèderait à Yvon Lambert un magnifique terrain à destination muséale. Les 350 œuvres resteront jusqu’en 2019 dans leur écrin avignonnais, sauf achoppements sur les termes de la convention qui lient le prêteur à la ville d’Avignon. Des alternatives qui n’ont pas l’air de tracasser la Mairie, qui ne pourra profiter des 37 Picasso récemment prêtés à la Collection en ne leur offrant pas les conditions hygrométriques adéquates. «Il faut des travaux sérieux pour accueillir des œuvres de cette ampleur» regrette Éric Mézil. Au vu de l’exposition des Ponts organisée actuellement par RMG, Avignon préfère peut-être s’en tenir à son patrimoine ? DELPHINE MICHELANGELI
RÉGION EN SCÈNE
Hommage au maître
Conçue pour l’anniversaire des dix ans de la collection avignonnaise d’Yvon Lambert, cette exposition se parcourt comme un cabinet de curiosité contemporain. C’est toute une histoire de l’art moderne et contemporain (à partir des années soixante du siècle précédent moins quelques tendances) qui est condensée entre les murs et la cour de l’Hôtel de Caumont. On ne sera donc pas surpris de retrouver les artistes favoris, souvent amis de la première heure : Sol LeWitt, Judd, Twombly, Serrano, Douglas Gordon très représenté avec Nan Goldin, comme nombre de ceux et celles présents dès le premier Rendez-vous (il y en eu quatre), exposition inaugurale en l’année 2000. Le commissaire, Eric Mézil, a habilement joué le jeu des citations, des références, des correspondances et des surprises autour de la figure tutélaire (et pourtant absente) du galeriste et collectionneur. Citation des expositions précédentes (Barcelo, Figures de l’acteur, À Fripon, fripon et demi…). Référence à l’histoire de l’art : artistes inconnus ou anonymes découverts par hasard, Carjat (sombre portrait de Baudelaire), Cézanne, Léger, Man Ray s’imbriquent avec les œuvres plus récentes provenant presque toutes de la collection. Correspondance entre les créations : le mouvement aérien suspendu d’une bande magnétique dans l’installation de Zilvinas Kempinas renvoie au lasso aveugle à l’amour dans la vidéo de Salla Tykka.
Surprise avec la présence sculpturale dans la grande galerie d’un élément d’architecture de Jean Prouvé en dialogue avec les structures des artistes minimalistes. Surprise aussi dans la salle consacrée à un cabinet de curiosités où se mêle un bric-à-brac d’objets hétéroclites étiquetés dans des vitrines avec un papier peint et des sons d’oiseaux de Louise Lawler. Surprise encore avec la découverte de plusieurs films rares, expérimentaux et de vidéos plus récentes (Mekas, Broodthaers, Gréaud, Wallinger…) ou la délirante pièce sonore en 45t vinyl L’apothéose du dollar racontée par Salvador Dali. Le tour du propriétaire fait, on peut avoir l’envie furieuse de se poser un bon moment devant l’œuvre élue. Alors, même loin du saint Père, on prie de pouvoir bénéficier de quelque siège pour entrer en contemplation. À ce miracle-là au moins, on peut croire. CLAUDE LORIN
Je crois aux miracles jusqu’au 8 mai Collection Lambert, Avignon 04 90 16 56 20 www.collectionlambert.com
Vincent Ganivet, installation pour Je crois aux miracles, Collection Lambert en Avignon, 2011 © Delphine Michelangeli
POLITIQUE CULTURELLE
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Renforcer le maillon faible
Tu m'écoutes ? de la cie Debrid'art © X-D.R.
Depuis 2001 le festival Région en scène présente une sélection de compagnies régionales qui vont ensuite se produire au festival national de Figeac, Le chaînon manquant, qui réunit l’ensemble des sélections régionales. Une occasion pour de petites compagnies de se produire devant de nombreux programmateurs. En PACA les représentations sont ouvertes au public et se déroulent à nouveau cette année à Aubagne et au Pays de l’Étoile. L’événement est organisé par Le cercle de midi, qui opère la sélection en PACA. Le but est clairement de constituer un maillon entre la vie associative et les plateaux du réseau national, qui souvent choisissent leur programmation parmi les productions des centres chorégraphiques et dramatiques, ou des scènes nationales, ne permettant pas aux compagnies émergeantes de sortir d’un réseau alternatif aux moyens souvent restreints. Cette année treize compagnies plus ou moins repérées sont programmées du 14 au 16 février. Les manifestations sont gratuites ou à 5 €, et permettent de voir de nombreuses formes jeune public, du théâtre, de la danse, des musiques du monde. On y retrouvera Miguel Nosibor et son très beau Temps d’arrêt, Jeanne Béziers qui met en scène une forme jeune public, un beau texte de Valletti, un décapant Malade Imaginaire, un étrange Être le loup, les vivifiants Onstap, un travail sur Ubu de la cie Loreleï, et le sextet de Bijab et Maryam Chemirani. Et beaucoup de chansons. On prendra aussi le temps de la découverte et de la réflexion lors d’une rencontre inaugurale. Et on regrettera, comme souvent, l’absence de formations musicales classiques, baroques, contemporaines ou jazz. Le concert, hors la chanson, ne ferait-il plus partie du spectacle vivant ? AGNÈS FRESCHEL
Au programme Le 14 fév 15h30 La Distillerie Rencontre professionnelle 18h00 La Distillerie Théâtre : Et puis quand le jour s’est levé Cie La p’tite marchande 21h00 MJC l’Escale Chanson : BatPointG et Mochélan Le 15 fév 10h00 Le Comoedia Théâtre musical : Tu m’écoutes ? Cie Debrid’arts 14h00 La Distillerie Théâtre : Le malade imaginaire Cie Vol Plané 16h30 Roquevaire Théâtre : Être le loup Cie Orphéon théâtre intérieur 21h00 MJC l’Escale Chanson: Maison Rouge et Petite Musique Musique du monde : Oneira Le 16 fév 10h00 Saint-Zacharie Cirque : Tout l’univers en plus petit Attention Fragile 14h00 La Penne-sur-Huv Théâtre : Père U à la plage Cie Loreleï 16h00 La Penne-sur-Huv Danse : Temps d’arrêt Miguel Nosibor Danse : Parce qu’on va pas lâcher Les Onstap 21h00 Le Comœdia Théâtre chanté : Deuxième mouvement Le cri du chœur Région en scène 04 42 18 19 88 www.cercledemidi.org
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POLITIQUE CULTURELLE
SCÈNES ET CINÉS OUEST PROVENCE
Une compétence culturelle Où en est la culture sur le territoire de Ouest Provence ? La question se pose alors que le Festival intercommunal Les Élancées est suspendu cette année, que l’adhésion de la régie Scènes et Cinés à Marseille Provence 2013 n’est plus à l’ordre du jour et que le désengagement de l’Etat, la réforme de la taxe professionnelle et la réforme des collectivités noircissent décidément l’avenir. Depuis sa création en 2006, Scènes et Cinés, établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC) a permis au vaste territoire intercommunal, qui regroupe les villes d’Istres, Miramas, Fos, PortSaint-Louis, Grans et Cornillon-Confoux, d’optimiser la diffusion culturelle, fidélisant les publics, en créant de nouveaux, par le biais d’une programmation riche qui étale ses propositions dans les théâtres et salles des six villes concernées. C’est une des particularités qui caractérise Ouest Provence par rapport aux autres intercommunalités et qui fait des émules, avec Aggloscènes notamment, qui regroupe la Ville de Saint-Raphaël et le Forum, Théâtre de la communauté d’agglomération. Ouest Provence est la seule intercommunalité de France à assurer toute la compétence culturelle des villes qui la composent. «Avec un principe fondamental, le consensus » comme le souligne Mokhtar Benaouda directeur de cette régie, et depuis peu directeur des Affaires culturelles. Un consensus qui régit notamment toutes les réunions du Conseil d’Administration, «composé d’élus communautaires à la culture, plus quelques autres élus positionnés par leurs maires respectifs». Toutes les décisions y sont prises en commun, sachant que l’intercommunalité est «nettement moins riche actuellement du fait que les dotations globales de l’État ont diminué progressivement. On en a bien sûr subi les répercussions, notamment en ce qui concerne les Élancées.»
Les Élancées Sur ce sujet la division entre élus du territoire est notoire et visible : la Ville d’Istres plaide pour un maintien du festival, en soulignant la qualité du festival et sa notoriété auprès du grand public. Mais la décision de la suspension pour causes financières a été prise le 8 septembre lors d’un CA de Scènes et Cinés. «Le maintien est impossible» selon Mokhtar Benaouda, qui rappelle d’ailleurs qu’«en 2008, suite au désengagement de l’État, la collectivité a pris en charge la totalité des Élancées. Certaines manifestations qui commençaient à prendre pied sur le
territoire, et je parle notamment des rencontres de danse urbaine (Zone Danse Hip Hop ndlr) qui ont connu trois éditions, faisaient le plein systématiquement, avec des ateliers, des productions, des rencontres entre professionnels et amateurs très convaincantes. Elles ont été supprimées pour préserver les Élancées.» A-t-on alors pris la mesure de la menace ? Une des propositions fut d’instaurer une biennale, solution qui ne recueillit pas le consensus. «Mais attention rajoute Mokhtar Benaouda, les Élancées sont suspendues, pas annulées. Des contacts ont été repris avec la Drac notamment, pour parvenir à rétablir ce festival.» Autre raison de discorde, l’adhésion à Marseille Provence 2013. La Ville d’Istres a adhéré, au contraire du SAN Ouest Provence. «MP2013 s’inscrit dans un contexte politique très lourd, avec beaucoup de contentieux explique Mokhtar Benaouda. On était à deux doigts d’adhérer, mais politiquement il n’ya pas eu le fameux consensus suffisant pour y parvenir.» Il n’en demeure pas moins que la question des Élancées divise là aussi, Istres avançant que le Festival était «dans leur corbeille d’idées pour 2013», Yves Vidal, président de Scènes et Cinés, rétorquant qu’«il n’a jamais été question que les Élancées, événement intercommunal, fasse partie d’une programmation dans le cadre de MP2013.»
Perspectives Comme partout la politique culturelle se trouve menacée, quand bien même elle est concertée, volontaire et territorialisée. La position de Mokhtar Benaouda est claire, il continuera à faire en sorte de «faire cohabiter service public et industrie culturelle, en faisant le nécessaire pour que l’industrie culturelle ne vampirise pas le service public.» En tant que gestionnaire et acteur culturel, sa préoccupation est de sanctuariser le budget artistique, «le préserver avec les investissements nécessaires, et convaincre la collectivité et les élus -et dans leur grande majorité ils font le nécessaire-, qu’ils sont absolument indispensables pour pérenniser l’activité de l’établissement, et pour répondre à ces exigences de service public».
Les budgets Un budget artistique de Scènes et cinés, pour la saison 2010-2011, est de 1.3 M d’€, musique actuelle comprise (la programmation de la salle de l’Usine à Istres), auquel vient se rajouter habituel-
Epicycle © P. Cibille
Trois spectacles faisant partie de la programmation des Élancées sont donc maintenus à Istres : Sarkha de l’École Nationale des Arts du Cirque de Tunis, le 13 fév à 15h; Lalala Mr Gershwin de la Cie Montalvo-Hervieu, le 15 fév à 18h30; Epicycle du CirkVOST, le 17 fév à 18h30, le 18 à 20h30, le 19 à 20h30 et le 20 à 16h, sous chapiteau. Voir p 40. 04 42 56 48 48 www.scenesetcines.fr
lement celui des Elancées (180 à 200 000 €). Il est réparti territorialement comme suit : Istres 44%, Fos 16 %, Miramas 25%, Grans 4.5%, Cornillon-Confoux 1.5%, Port-Saint-Louis 9%. Quant au budget total de fonctionnement de la régie, il s’élève à 6.4 M d’€, dont 76% de financement public et 24% de billetterie (soit 1.54 M d’€). Ouest Provence verse 88% des subventions, soit 4.3 M d’€, le Conseil Général des Bouches du Rhône 5% (soit 243 000 €), le Conseil Régional 4% (soit 195 000 €), le reste provenant de divers dispositifs (CUCS, Politique de la Ville, Onda, CNV) Le budget d’investissement engagé par Scènes et Cinés en 2011 pour moderniser les équipements et réhabiliter les bâtiments s’élèvera à plus de 660 000 €. DOMINIQUE MARÇON
PORTRAIT DE JULIEN DUVAL
THÉÂTRE 11
Le roman d’un acteur Julien Duval © Pierre Yves Gaulard
On vient de le voir dans Eric von Stroheim au Merlan (voir zib 36) et Villa Olga à Briançon et Cavaillon (voir p 15), le Banquet fabulateur un peu partout, on le retrouvera dans Lignes de faille à Gap, Draguignan et Martigues… Décidément Julien Duval fait rêver nos metteurs en scène : Renaud Marie Leblanc, Alexandra Tobelaim et Catherine Marnas lui confient de beaux rôles dans lesquels sa fraîcheur butée, sa précision sans faille et sa générosité éclatent. Sa profondeur et sa douleur aussi, plus inattendues… C’est que cet acteur de 30 ans conserve un profil de gamin !
Un peu comme Catherine. Elle est joyeuse aussi, très enthousiaste, ce qui est forcément agréable. Renaud Marie Leblanc arrive au plateau avec une dramaturgie plus définitive, qui répond au texte, et qu’il construit dans sa tête au préalable. Même s’il écoute beaucoup aussi ce que proposent les acteurs. Vous apprenez donc encore ? Un acteur apprend tout le temps. Et puis cette saison j’aurai abordé des registres complètement différents, du vaudeville à la crudité d’Eric Von Stroheim. Sans compter toutes les facettes du Banquet Fabulateur… C’est très agréable pour un acteur ! ENTRETIEN RÉALISÉ PAR AGNÈS FRESCHEL
Zibeline : Quand avez-vous commencé à faire du théâtre ? Julien Duval : À sept ans, à Dole. Je ne sais pas ce qui m’y a poussé mais je harcelais ma mère qui harcelait l’école de théâtre… Assez tôt j’ai fait des films, des spectacles professionnels, puis au Lycée j’ai suivi les options théâtre, et après ça je suis entré à l’ERAC à 17 ans. L’ERAC m’a véritablement formé. Comme j’étais le plus jeune j’avais tout à y apprendre… Quand vous êtes vous senti vraiment un comédien ? Je crois que j’ai été sûr de pouvoir être un acteur quand j’ai joué Marat/Sade en 1996, lors de ma seconde année d’ERAC. Pour diverses raisons je n’étais pas très heureux dans ce spectacle, du coup je me suis construis un personnage muet tout seul, avec un parcours et une logique. Et j’ai su que je pouvais faire ça. Mais j’ai surtout appris en suivant l’enseignement de Catherine Marnas l’année suivante, pour le spectacle de sortie d’école en 2000. On nous disait souvent à l’ERAC qu’il fallait trouver la famille de théâtre dans laquelle on était bien… c’est arrivé au bout, avec évidence. C’est à dire ? J’avais l’impression de pouvoir finir ses phrases. Ça m’arrive encore aujourd’hui. Je comprends tout ce qu’elle me dit. Esthétiquement, mais surtout dans sa manière d’aborder le plateau. Elle travaille sur l’énergie, sur le corps, et met l’acteur en possession de ce qu’il fait sans le violenter. Elle ne peut travailler que dans la confiance, avec une équipe qu’elle connaît et qui se connaît, avec un collectif, une collégialité. Rien ne repose sur la souffrance ou la compétition, il n’y a pas de manipulation. Certains metteurs en scène manipulent ? Oui, certains en tous les cas travaillent davantage dans la douleur, et d’autres pensent qu’il faut violenter l’acteur pour qu’il se dépasse… Jamais Catherine. Vous avez continué de travailler avec elle juste après l’ERAC ? Pas tout de suite. Je suis revenu en 2003 pour Faust et entré dans la compagnie en 2005. Avant j’étais reparti à Dôle, où j’ai fait quelques mises en scène, le temps de constater que je n’étais pas fait pour les responsabilités que cela entraîne. Et puis à Paris où j’ai fait du cinéma, de la radio, de la télé… Ici vous avez eu un rôle important dans Plus Belle la Vie…
Oui, je jouais un pianiste aveugle, ça a duré quelques mois en 2005. Avant ça à Paris j’ai joué dans Avocats et associés, et dans une série plus intéressante, tournée caméra à l’épaule, Âge sensible. Je jouais un paraplégique ! C’est étrange la télévision, parce que les gens dans la rue vous reconnaissent, vous êtes hyper identifié pour un truc que vous n’aimez pas vraiment… Pourquoi n’aimez-vous pas ? Parce que les conditions de production, dans Plus Belle la vie en particulier, ne permettent pas d’être bon. Pour jouer un aveugle on vous demande de lever les yeux au ciel. Vous avez beau dire non, un aveugle ça ne regarde pas en l’air on ne vous écoute pas. Et puis c’est impossible de refaire une prise pour des raisons budgétaires, et les dialogues sont souvent difficiles à justifier… Cette année vous vous trouvez dans trois créations importantes… Oui, c’est la première fois depuis que je suis entré dans la compagnie Parnas que je travaille avec d’autres metteurs en scène. Je crois que j’en avais besoin. Travaillent-ils différemment ? Dans le détail oui. Alexandra est en interrogation permanente, elle change les choses jusqu’au bout.
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THÉÂTRE
LE MERLAN | LE GYMNASE | LA CRIÉE
Actor in comedia
Révolutionnaire
Y a-t-il un seul, je dis bien un seul spectateur qui ne soit sorti hilare, légèrement titubant (salle triomphalement houleuse) et le souffle court de cette expérience de théâtre comme on n’en fait plus ? On nous avait prévenus, «spectacle mythique», «succès jamais démenti», une «com» à pousser au crime de lèsechef-d’œuvre en aiguisant le sens critique, et en activant la machine à douter... Peine perdue ! Du début à la fin ça marche, surtout quand ça dit que ça ne marche pas et que scène et salle sont par exemple plongés dans le noir ou que l’acteur (Yves Hunstad) perd son personnage ou rate son entrée ou encore décapite son balai à trois coups ! De quoi s’agit-il ? D’un voyage aux sources du théâtre, de la lumière (l’éclairagiste s’appelle André et sans lui rien ne serait...) et allez, on l‘écrit sans majuscule, de l’âme. «L’acteur qui me joue est très inquiet» confie goguenard le personnage hardi qui harangue la foule, allume le public, rebondit sur les éternuements, surfe sur les quintes de toux et prend à partie les spectateurs qui jouent fort bien leur rôle ! Lui n’a peur de rien, il a traversé le temps, les amours ; son costume en témoigne : un brin oriental, un rien baroque, un zeste de Matamore, la collerette de Shakespeare et le nez en bois de... Pinocchio ? L’étoffe des rêves quoi ! L’acteur se contente de ses yeux qui brillent et d’un petit coussin posé sur les planches ; à lui les trous de
La Criée a fait venir à Marseille un spectacle qui a fait couler beaucoup d’encre : Notre Terreur, du collectif D’Ores et Déjà emmené par Sylvain Creuzevault, apparaît comme une révolution sous le ciel théâtral parisien… Et indéniablement, cette expérience collective, politique, qui interroge l’exercice collectif du pouvoir à un moment crucial de notre histoire tout s’y passe au Comité de Salut public, entre la mort de Danton et celle de Robespierre- est formidablement vivifiante, et réussie. La façon de retracer le désordre des conversations en foulant au pied les règles élémentaires de la prise de parole théâtrale (on y parle en même temps, l’un sur l’autre, en se coupant, comme dans les plus agitées des AG syndicales), mais aussi les surprenants moments de distanciation esthétique, par le chant en particulier, sont fascinants. Mais puisque ces jeunes gens ont reçu dans la presse nationale leur lot mérité de compliments, risquons quelques réserves… Le dispositif bifrontal est très à la mode pour des raisons économiques (il évite le coût d’un décor) et politiques (il casse le quatrième mur et donne l’impression au spectateur de faire partie de l’affaire théâtrale). Mais il massacre la moitié du spectacle : il est dommage de contempler seulement les dos de Robespierre et Saint Just, quand les spectateurs assis en face sont privés du visage de Couthon. Par ailleurs certaines tirades, en particulier le monologue inaugural, sont écrites un peu vite, trop longues, pas coupées, ce que les acteurs compensent en hurlant. Enfin ? Politiquement, ce collectif sans femmes ne saurait représenter le jeune théâtre en marche. Les comédiennes peuvent assumer avec une distance intéressante les rôles masculins, représenter le Comité de Salut Public. Ou le tribunal révolutionnaire qui guillotina Olympe de Gouges…
© Stephane Gaillochon
mémoire, les feuillets épars, les 400 coups de théâtre ; à lui la lourde tâche de faire tenir ensemble les pièces du puzzle, d’accompagner la traversée des miroirs et de chevaucher sans faiblir la frontière entre l’illusion et la réalité, le rire et l’émotion. Trop pour un seul homme ? Que nenni ! L’art de la comédie dévoilé «comme si » tout naissait dans l’instant par un comédien qui maîtrise, au-delà de l’imaginable, son métier. Du grand art, tout simplement ? MARIE-JO DHO
La Tragédie Comique de Yves Hunstad et Eve Bonfanti cie La Fabrique Imaginaire) a été présentée par le théâtre du Merlan au théâtre du Gymnase le 14 et 15 janvier. Les deux autres volets de la trilogie sont proposés au Merlan du 18 au 22 janvier (voir p 17).
A.F.
Porno de bois
© Marine Fromanger
L’usage de la marionnette pour mettre en scène les Contes de La Fontaine est surprenant. Pour le dire crûment, voir des figures anthropomorphiques (des fétiches ?) mimer la fellation, la sodomie, la levrette ou décliner des missionnaires dessous dessus est fort étrange. Que les manipulateurs passent après pour essuyer d’un mouchoir non négligent les traces liquides de ces ébats fictifs n’est pas plus ragoûtant, ou excitant, ou scandaleux. Cette manière de représenter le sexe sur scène est simplement une solution bizarre, comme les mangas pornos : ces © Cie Emilie Valantin
fétiches destinés habituellement à rassurer les enfants -qui ne supportent pas normalement de voir des corps vrais recevoir des coups de batte- servent ici à représenter publiquement des actes intimes. Pourquoi pas ? D’autant que la scénographie faite de courbes agencées, la manipulation subtile des grandes marionnettes articulées, les trouvailles comme celle du carrosse, l’accompagnement à l’harmonium, le jeu des comédiens/manipulateurs sont d’une virtuosité épatante. Sans parler de la beauté des marionnettes. Reste que les Contes de La Fontaine sont grivois, pas pornographiques. L’acte sexuel y disparaît généralement dans des ellipses, ou des allusions (certes très claires !) et il s’attache plutôt à décrire la séduction et le désir, la jouissance aussi, avec humour, distance et délectation. Le sexe chez lui reste dans la langue, et plutôt dans ses creux. Sa représentation, même distanciée, gauchit le plaisir de ses textes. Sade y conviendrait mieux… AGNÈS FRESCHEL
La Courtisane amoureuse mis en scène par Émilie Valantin a été joué à la criée du 11 au 15 janvier
CENTAURE | LA FRICHE | LE LENCHE | LES BERNARDINES
THÉÂTRE 13
Ivresse claudélienne
© Jean-Jacques Delattre
Claudel a écrit la 1re version de L’Échange en 1894. Plus d’un siècle plus tard on reste sidéré par son actualité, qui sans doute a motivé le choix de ce texte. Franck Dimech, le metteur en scène, a été sollicité par Oriza Hirata, auteur et directeur de la Cie Seinendan à Tokyo, pour monter un spectacle avec ses acteurs. Pas facile de travailler en permanence avec un traducteur et de mettre au point une traduction contemporaine du texte flamboyant de Claudel. Pourtant les comédiens se sont appropriés les mots et les restituent dans la musique de leur langue et un jeu d’une précision d’orfèvre. Deux couples que tout oppose se rencontrent sur cette terre du Nouveau Monde : Louis Laine et Marthe, jeunes mariés émigrés, Thomas Pollock, riche industriel, et sa compagne Lechy, comédienne alcoolique. Pollock propose de l’argent à Louis en échange de Marthe. Au début l’acteur Shoichi
Ayada joue nu et libre comme un oiseau dans la longue scène avec Marthe, Mima Fukushi, dont la fragilité physique contraste avec la force de son amour. L’espace scénique est vide, rien n’aide les acteurs, tout repose sur eux. L’arrivée des deux autres protagonistes s’annonce par des billes d’acier qui tombent brutalement sur une plaque de métal et se répandent sur le sol. Lechy, Nahoto Kawasumi, surgit, ondulante et enjôleuse : tout est joué. Pollock, impressionnant Yozo Shimada, achève la mise en place du piège en proposant une liasse de dollars à Louis. Tout s’anéantira dans les larmes et le feu, le rire fou de Lechy, le cri de Marthe. CHRIS BOURGUE
L’Échange (coproduction Cie Seinendan, Théâtre de Ajmer, Système Friche Théâtre) s’est joué à la Friche du 11 au 16 janvier
Honni magnat
Il faut écrire
Un spectacle pour démonter par l’exemple les méfaits du grand capitalisme industriel sur l’agriculture extensive et ses sociétés traditionnelles ? La Rosa Bianca, monologue malin programmé par le théâtre de Lenche, oppose un magnat du pétrole américain, avec force maîtresses, au propriétaire paternaliste et indien d’une hacienda dont le sous-sol regorge d’or noir convoité. L’histoire d’une tentative de manipulation, qui se solde par un meurtre, et oppose la valeur ancestrale de la lenteur, de la terre qu’on cultive et du partage de la misère à celle de la vitesse, de l’énergie qu’on brûle, du lucre et de la lapidation des richesses. Le spectacle est porté par Maryse Aubert, seule en scène hors quelques accessoires et figurines qu’elle manipule. Son jeu très cabaret androgyne est d’une belle précision spatiale, ponctué de gestes et de postures qui donnent à voir aisément les personnages. Sa voix, forte et pas toujours juste, et ses accents approximatifs, souvent inutiles, sont moins convaincants. Mais on se laisse prendre sans effort à cette histoire édifiante, rendue avec une belle énergie.
Présenter ne suffit pas. Cette illusion règne chez beaucoup de jeunes comédiens talentueux, qui pensent que leur présence habitée suffit à faire spectacle, c’est-à-dire à être regardé. Le collectif au demeurant très sympathique emmené par Aurélie Leroux a créé il y a une paire d’années une première pièce épatante, autour de bribes de Tchékhov tissées comme en une mémoire en ruine. Ça s’appelait Tâtez-là si j’ai le cœur qui bat, et était si prometteur que le Théâtre des Bernardines a coproduit Pas encore prêt. Le résultat est plus que décevant. Sur les mêmes principes de fragments assemblés ils mettent en scène la mort… mais n’ont pas grandchose à en dire (trop jeunes ?), refusent de piocher dans les textes des autres et pensent qu’habiter le plateau de quelques allusions peut nourrir 1h20 de
A.F.
À noter La Rosa Bianca, de Bruno Traven, est joué jusqu’au 29 janvier au Théâtre de Lenche, Marseille 04 91 91 52 22 www.theatredelenche.info
déambulations… Deux moments se détachent vaguement, l’un où il est question de mort cellulaire illustrée avec des morceaux de sucre (comique ?) l’autre, final, où ils semblent réinventer l’existentialisme sans le savoir en contemplant une mouche qui meurt. Sartre écrivait vraiment mieux, et plus profond. Une plongée réelle dans la pensée d’intellectuels et les œuvres d’artistes est indispensable à l’élaboration d’un spectacle qu’on veut écrire… et qu’on ne saurait concevoir avec le seul talent de comédiens, et de metteur en images. A.F.
À noter : Pas encore prêt se joue aux Bernardines jusqu’au 22 janvier 04 91 24 30 40 www.theatre-bernardines.org
Partir et se retrouver Une fois de plus le chapiteau était plein. Les petites formes poétiques présentées depuis la rentrée par le Théâtre du Centaure enthousiasment véritablement grands et petits. Un certain magnétisme attire vers ces corps doubles, chargés de force animale et au© Frederic Chehu
réolés de rêves. Après un petit film tourné sur le port de Marseille et la Digue du large dans un beau contraste -noir de la centauresse et blanc des paquebots- et des plans sur ces grues dont les silhouettes rappellent les chevaux, Camille arrive sur son frison noir à la profondeur abyssimale, Graal. Elle est droite et semble flotter, tenant à la main une valise blanche. Le déplacement est fluide, quasiment irréel. Un texte en italien est murmuré qui évoque le vent des départs et le temps des séparations. Une belle émotion et une surprise : après une fausse sortie Camille revient avec Manolo et Darwin : les deux centaures jouent en duo, annonçant le poème de février. CHRIS BOURGUE
Poème Centaure s’est donné au Centre équestre Pastré le 8 janv
À venir La Chambre duo avec Graal&Camille, Darwin&Manolo et le film Bosphore le 12 fév à 18h et 20h 04 91 25 38 10 Manolo présente Influx à Cheval-Passion en Avignon du 19 au 23 janvier. 08 92 05 30 05 Aux Salins à Martigues, la déambulation poétique FLUX en avant-première les 18 et 19 février 04 42 49 02 00
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THÉÂTRE
JEU DE PAUME | ARLES
De la roulette au cri de la mouette Tragédie dentaire… Quel délicieux sous-titre ! Une perspective qui vient heureusement détourner celle de Vers toi terre promise. L’histoire est tragique. Le couple Spodek a tout perdu pendant la guerre, l’une de ses filles est morte dans un camp de concentration et l’autre qui avait été cachée chez les bonnes sœurs refuse de revoir ses parents et s’apprête à prononcer ses vœux. Leur cabinet dentaire aussi a été revendu, en raison des lois anti-juives. Ils ne le récupèreront qu’en 1945. Contexte dramatique s’il en est, pertes irrémédiables. Comment vivre après la Shoah ? Paradoxe du théâtre, on rit beaucoup. Le texte de Jean-Claude Grumberg est magnifiquement écrit. Une extraordinaire capacité à saisir les instants, les réflexions du quotidien, les attitudes, à dire avec légèreté les choses les plus graves, à rendre vivants et attachants ses personnages. Une virtuosité des mots que les acteurs servent avec une justesse et une intelligence rare. Christine Murillo et Philippe Fretun campent le couple de dentistes Spodek avec finesse et humour, Clotilde Mollet et Antoine Mathieu se glissent dans la peau de multiples personnages avec une aisance stupéfiante (ah le cri de la mouette !). La mise en scène de Charles Tordjman, efficace, sobre, sait exploiter l’étroitesse de l’espace scénique et les décors d’une ingénieuse simplicité avec brio. La complicité qui unit tous les acteurs de la pièce est sensible, les rouages s’imbriquent avec une précision
Vers toi terre promise © Christine Sibran
de métronome. Et pourtant, la pièce s’étage sur plusieurs niveaux de narration, mêlant le regard de l’enfant qui allait se faire soigner les dents chez monsieur Spodek, au récit de la vie de ce dernier, fragments qui émergent de la linéarité… Une pure merveille, revenue au Jeu de Paume, producteur d’un succès
dont les spectateurs ne se lassent pas ! MARYVONNE COLOMBANI
Vers toi terre promise a été joué au Jeu de Paume du 12 au 15 janvier
Berlin année moins un Au départ, il y a un journal, témoignage anonyme (en fait, Marta Hillers) d’une jeune femme allemande, qui vit à Berlin en 1945 lorsque la ville tombe aux mains des Soviétiques. Ce journal fut publié en 1954 pour la première fois, porteur de faits dont on n’a pas envie d’entendre l’horreur politiquement incorrecte. Tatiana Vialle souligne combien cette voix singulière rejoint celle de toutes
les femmes, violentées lors des guerres. Sa mise en scène s’efface dans la lecture terrible des cahiers que la jeune femme donne à lire à son fiancé juste démobilisé. Ce dernier fuit, incapable d’affronter ces mots qui impitoyablement racontent le quotidien d’atrocités et de peurs, qui disent à quel point «la beauté fait mal» lorsque «tout passe par l’estomac». Nécessité
de dire pour que nous ne soyons pas des «animaux sans mémoire». La pièce est portée par la bouleversante interprétation d’Isabelle Carré, fragile et incroyablement forte à la fois. Swann Arlaud, le fiancé, symbolise le refus de regarder la vérité en face. Cette femme subit la double peine de la défaite et de la violence. Elle n’est pas la seule : on compte plus d’un
million de viols par les Soviétiques à Berlin. Un moment fort de théâtre dont on ne sort pas indemne. M.C.
Une femme à Berlin a été donné au Jeu de Paume, Aix du 13 au 18 décembre
© Julie Pagnier
Des gens de bien Concocté dans les laboratoires d’Aubervilliers, le Tartuffe d’après Tartuffe de Molière mis en scène par Gwenaël Morin est une pépite, une expérience théâtrale des plus réjouissantes pour le spectateur comme elle l’est visiblement pour les comédiens qui, libérés des conventions, réinventent l’espace en s’emparant du moindre recoin sur et hors de la scène. Il faut dire que le plateau est nu, à l’exception d’une table, d’une chaise, d’un bougeoir, bougie allumée et qui doit le rester, que les comédiens se repassent tel le témoin qui les relie tous, et des photocopies scotchées au mur ou suspendues. Car là n’est pas l’essentiel, dans ce théâtre qui fait la part belle au texte, coupé, resserré pour permettre à la mise en scène de se recentrer sur le personnage
d’Orgon, fiévreux, passionné, cet homme «traître à luimême» comme indiqué, tel un slogan, sur un carton. Les comédiens passent d’un registre à l’autre avec un naturel confondant, flirtant avec le burlesque comme avec le tragique, traversant de façon fulgurante une scène à la façon d’un manga ou provoquant très sensuellement, peut-être même douloureusement, le désir, et peu importe que les rôles féminins soient tenus par des hommes. Gwenaël Morin peut nous tartuffer à l’envi, on le laissera faire… DOMINIQUE MARÇON
Tartuffe d’après Tartuffe a été joué au théâtre d’Arles les 6 et 7 janvier
GRASSE | CAVAILLON | VITEZ
THÉÂTRE 15
Alexandre tout puissant placements entre le lit, le trône et la table ; et l’intervalle dansé façon Bollywood est grotesque ! Il reste la superbe création sonore de Steve Shehan et Charlotte Castellat qui trouve un bel équilibre avec la partition dramaturgique de Laurent Gaudé et l’ourle de subtiles sonorités jazz et orientales. Et l’envie de relire cette pièce où l’écrivain comme toujours flirte avec la tragédie et l’épopée, plonge dans des terres anciennes et des mondes disparus, non pas comme un ethnologue mais comme un amoureux de la fiction et de la langue. Dans un esprit de liberté que le spectacle parvient trop rarement à transcender.
Tchéky Karyo, Laurent Gaudé, Michel Didym, l’affiche est alléchante ! Mais Le Tigre bleu de l’Euphrate ne tient pas ses promesses : un comédien d’ordinaire puissant, un texte politique et symbolique, dense mais difficile à saisir, un metteur en scène aguerri à l’écriture dramatique contemporaine (dont on peut voir actuellement en tournée Le mardi à Monoprix d’Emmanuel Darley) et pourtant l’alchimie ne prend pas. On s’échappe du spectacle. On s’attendait à un décor minimaliste, juste un rai de lumière affleurant le profil aiguisé de Tchéky Karyo qui ferait entendre le dernier souffle d’Alexandre le conquérant et son ultime combat… avec la mort. Au lieu de cela le comédien semble écrasé par le monologue, capable d’autant d’éblouissements que d’errements dans les méandres de l’histoire, du songe et de l’effroi mêlés ; le décor pharaonique conçu à l’origine pour le plein air l’empêtre dans ses dé-
MARIE GODFRIN-GUIDICELLI
© Eric Didym
Le Tigre bleu de l’Euphrate a été joué les 7 et 8 janv au Théâtre de Grasse
Ils aiment Le Théâtre Vitez a proposé le 8e Festival de Théâtre amateur des troupes de la région aixoise Une phrase de Kafka en exergue, «pour briser la glace de la mer intérieure». Et le festival enchaîne sur une dizaine de soirées les représentations. Bien sûr l’ensemble est inégal, les textes plus ou moins bien choisis ou interprétés, il y a des passages involontairement comiques où le souffleur chuchote des répliques hilarantes, «parlez bas, ils vont vous entendre !». Mais les spectacles gagnent tous leur lot d’applaudissement. On ne cherche pas de qualité professionnelle, on reconnaît plutôt le courage de ces amateurs qui se mettent en danger sur scène et acceptent de présenter leur travail, trouvant ici le point d’orgue d’années de répétitions. Amour du théâtre, du jeu, des mots, sensible connivence avec un public ami. La Cie On verra ça demain a proposé un montage de textes sur le désespoir de l’enfance et la maltraitance. On reconnaissait au passage Les Misérables Enfant j'étais par la cie On verra ça demain © Patrice Claire
Du plaisir
de Hugo, Le petit Chose de Daudet, la terrible histoire de Chronos et de Zeus, Le petit Chaperon rouge... mais celui qui fait peur au loup ! Cela débouche sur une note d’espoir avec les citations des Droits des enfants. Une comédienne joue quelques standards au saxophone alto, une autre chante Summertime. Militant. Le Théâtre du Labyrinthe présentait un texte de Beckett de 30 mn : 3 personnages morts dans leur tombe se parlent de leur vie triangulaire, de choses qu’ils n’ont jamais pu se dire. Une façon caustique de revisiter le thème de l’adultère, avec la présence étonnante de Béatrice de Villars. Et puis, il y a des pépites comme la courte pièce d’Hubert Colas, reprise pour les «petites formes», Temporairement épuisé (créé en 1988), avec la mise en scène de Chantal Inizan et les acteurs amateurs de la Compagnie La Nacelle du Luberon, de la fédération Côté cour, côté jardin de Pertuis, qui se haussent à une qualité quasi professionnelle. On ne peut que saluer un tel festival qui draine un public nombreux et fidèle, efface les frontières entre l’institution et les spectateurs, présente des textes, défend des idées, rend au théâtre son caractère populaire et festif. MARYVONNE COLOMBANI ET CHRIS BOURGUE
© X-D.R.
Quand on lui demande pourquoi elle a voulu monter un vaudeville, Alexandra Tobelaim répond : parce que j’adore ça ! Villa Olga, qu’elle vient de créer à Briançon (le 14 janv) mais dont on n’a pu voir qu’une petite forme à Cavaillon, exhale déjà cette chose-là : le plaisir, le rire, la joie. Regorgeant d’incongruités, le texte de Catherine Zambon fait exploser ses petites trouvailles dramaturgiques dans un second degré permanent, jouant des recettes du théâtre de genre (la comédie policière) mais les faisant exploser à force de renchérissements, fausses révélations, double et triple jeux… comme dans un film des Marx qui aurait pris des couleurs, ou un Hellzapoppin qui aurait trouvé son enfer sur la Côte d’Azur. La scénographie met tout ceci en boîte (vert printemps !) et joue de plans, de cachettes absurdes, de surprises, de bruits et de répétitions, de groin de cochon qui couine à tout va… Les costumes sont délicieux, les comédiens de vrais diables à ressort qui vous soumettent à un rythme d’enfer, absurde, exquis. Du plaisir on vous dit ! AGNÈS FRESCHEL
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THÉÂTRE
AU PROGRAMME
Talents Capillaire Comment poser plus intimement la question de la
Sacrifice Le théâtre de Lenche a mis en place à son annexe de
création artistique ? Lee Krasner et Jackson Pollock sont deux figures phares de la peinture américaine. La question de l’abstraction et de l’instinct, de ce que coûte le geste, et la gloire ou non atteinte, s’est visiblement posée dans ce couple génial, et auto destructeur. Paul Desveaux met en scène ces deux personnages, sur un texte qu’il a commandé à Fabrice Melquiot, en un duo plein de bruit et de couleur.
la Friche du Panier des résidences offertes à des compagnies émergeantes, qui présentent leur travail de création au terme de quelques semaines d’élaboration. Depuis janvier c’est le comité Béni Oui Non qui travaille sur Le joueur de flûte de Hamelin, cherchant à comprendre comment un chœur, fut-il de rats, s’en va au sacrifice… Résultat début février !
© Laurent Marro
On en a vu une préfiguration formidable en début de saison : lorsqu’Eva Doumbia parle de ses cheveux de Noire, des douleurs et contraintes qu’ils imposent, de ce désir de les lisser, de les tresser, elle parle en fait de ce désir de faire disparaître la différence… puis de la fierté de pouvoir sculpter sa chevelure comme une matière unique. Une identité ? Avec quelques comédiennes danseuses chanteuses et musiciennes venus du Congo, du Mali, du Cap vert et du Brésil elle en fait un questionnement commun, et festif.
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Pollock Du 25 au 29 janv La Criée 04 91 54 70 54 www.theatre-lacriee.com
Une chorale Du 1er au 5 fev Le Lenche 04 91 91 52 22 www.theatredelenche.info
Inédit ! On retrouve au Lenche le Tanit théâtre, dans un monologue écrit spécialement par Serge Valletti pour la verve et l’énergie de Roland Peyron… Un monologue calibré pour un acteur forcément mythomane, ouvrier qui devient patron en passant par la case prison. Ou pas ? L’invente-t-il comme il fait tout le reste, sur scène, À plein gaz ? À plein gaz Du 8 au 26 fév Le Lenche 04 91 91 52 22 www.theatredelenche.info
Moi et mon cheveu Du 10 au 18 fév Les Bernardines 04 91 24 30 40 www.theatre-bernardines.org © Elizabeth Carecchio
tri, que garder et que détruire lorsqu’on veut refonder une société ? Voilà que dans leur cuisine un homme et une femme passent en revue l’essentiel de la pensée contemporaine et quelques bribes de mémoire commune, cherchant ce qu’ils en gardent… Un moyen pour Jean-Charles Massera (l’auteur) et Benoit Lambert (le metteur en scène) de tenter de bâtir une pensée critique globale à la portée de tous. En confiant les rênes à un couple loufoque : Martine Schambacher et François Chattot, pétaradants.
Daniel Danis est un auteur engagé au langage subtil : on lui doit en particulier Kiwi, un succès singulier. Wilma Lévi est une comédienne magnifique qui aime à s’attacher à des textes forts : on l’a vue notamment dans L’Inattendu de Fabrice Melquiot, ou le journal de Etty Hillesum. Ils se sont alliés pour mettre en scène, avec la complicité de Znorko, la rencontre de deux enfants : une petite fille Israélienne qui gaspille de l’eau, un petit garçon Palestinien qui descend sa colline pour la rencontrer. Y aurait-il une solution dans l’enfance ? Sous un ciel de chamaille Du 15 au 19 fév La Minoterie 04 91 90 07 94 www.minoterie.org
© Mathieu Bonfils
© V. Arbelet
La prière des clowns Du 15 au 25 janv La Friche-studio ÉRAC 04 95 04 95 78 www.erac-cannes.fr
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Que faire (le retour) Du 1 au 12 fév La Criée 04 91 54 70 54 www.theatre-lacriee.com
le dernier travail des élèves de 3e année, celui qui les met en situation professionnelle. Youri Pogrebnitchko du Théâtre Okolo de Moscou a imaginé un montage de textes de Tchekhov, pour lui maître absolu. La Mouette, Oncle Vania, Les trois sœurs et La Cerisaie croisent des chansons contemporaines de Joe Dassin et des dialogues de cartoons, mélange pour le moins étonnant ! Le tout dans un décor minimaliste, au plus près de l’âme des personnages.
© Linda Lemaire
Critique Dialogue Lénine l’écrivait en 17. Que faire ? Comment faire le
Tchekhovien L’École Régionale d’Acteurs de Cannes présente
THÉÂTRE 17
L’art pour survivre Macédonien Germaine Tillon fut une des figures majeures du XX
Racines Abraham, Michel Jonasz ne l’a pas connu. C’est son
siècle. L’ethnologue qui se pencha sur l’Algérie, puis milita pour la décolonisation, entra en résistance en 1939. Elle fut déportée à Ravensbrück, où elle réussit à écrire et créer avec des codétenues une opérette, une sorte de revue qui met en scène leur vie de déportées. Verfügbar (Corvéables), ou l’humour pour survivre… Danielle Stéphan met en scène cette œuvre paradoxale, tragique par son contexte, mais formidable leçon de vie et de résistance. Alain Aubin a fait les arrangements, et on y retrouve une bande de comédiennes, chanteuses et musiciennes épatantes. Amandine Buixeda, Alice Mora, Elisabeth Moreau, Frédérique Souloumiac, Murielle Tomao… Une production ambitieuse, soutenue par de nombreux théâtres de la région, le Gyptis en tête.
grand-père maternel, juif Polonais, mort à Aushwitz, a qui il rend hommage dans une pièce dont il est l’auteur et l’interprète. Au gré de ses souvenirs Abraham va convoquer tous ses chers disparus, sa femme Rosele, ses enfants, son meilleur ami et «meilleur tailleur du monde» Yankle avec qui il refait le monde sur un banc, de son enfance en Pologne au départ forcé pour la Hongrie… Avec tendresse, lucidité et un humour yiddish irrésistible, Michel Jonasz dit ses racines et les chante au son de musiques klezmer composées pour l’occasion.
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Le Verfügbar aux enfers Du 8 au 12 fév Théâtre Gyptis 04 91 11 00 91 www.theatregyptis.com
Abraham Les 11 et 12 fév Théâtre Toursky, Marseille 0 820 300 033 www.toursky.org le 17 mars Théâtre de Nîmes 04 66 36 65 10 www.theatredenimes.com
© Archive du Theatre National de Strumica
Pour sa semaine macédonienne le Toursky fait venir une pièce de Jordan Plevnes mise en scène par le réalisateur Projkovski. Il s’y attache à la figure de Krste Petkov Misirkov, intellectuel macédonien qui au début du XXe siècle fut le témoin hélas privilégié du sombre délitement des Balkans. La troupe du Théâtre National de Strumica nous fait revivre les désillusions tragiques de cet homme qui croyait à l’avenir des valeurs humanistes.
Rencontres © Herman Sorgeloos
Le dernier jour de Misirkov Le 28 janv Théâtre Toursky 0 820 300 033 www.toursky.org
Solitude Kristian Frédric, dont on a vu notamment au © photos de repetition Helene Arnaud
Duo Ils triomphent depuis 8 ans avec leur duel musical
Après la Tragédie comique (voir p 12) et Du vent… des fantômes, La Fabrique Imaginaire nous emmène en un Voyage dans le temps où des personnages, un sexologue, une actrice, un généticien, un musicien, échangent à propos de cette notion mouvante. Le présent a-t-il une réalité, et la réalité existe-t-elle ? Voyage 1er épisode Les 21 et 22 janv Le Merlan 04 91 11 19 20 www.merlan.org
© X-D.R
Revenant Cela fait des années que l’on n’a plus vu les mises
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Duel Opus 2 Les 21 et 22 janv Théâtre Toursky 0 820 300 033 www.toursky.org
Jaz Les 4 et 5 fév Théâtre Toursky 0 820 300 033 www.toursky.org
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comique… les deux instrumentistes sont des virtuoses du piano, du violoncelle, et du burlesque. Leurs interprétations des pages musicales les plus célèbres se déjantent et partent dans des vrilles inattendues, et irrésistibles. Une parodie de concert dans l’esprit de celles du quatuor, en plus caustique…
Toursky les mises en scène de Koltes (La Nuit juste avant les forêts) et de Daniel Keene (Moitié-moitié), revient avec un texte de Koffi Kwahulé. Un monologue où les technologies numériques servent de décor au questionnement d’une femme comme enfermée dans un monde hostile, déglingué, où les hommes règnent en prédateurs.
© X-D.R
en scène de François-Michel Pesenti à Marseille. Ni dans la région. Ni beaucoup plus sur les scènes nationales et internationales où il a brillé, en Europe du nord ou au Japon. Depuis 2003 on ne sait plus rien de lui, mais sa Cie du Point aveugle continue d’être conventionnée. Subventionnée donc, par les collectivités. Il faut dire que Pesenti a compté, beaucoup, à Marseille, qu’il y a par certaines de ses mises en scène bouleversé l’esthétique régnante, et apporté une cruauté parfois salvatrice. Et parfois insupportable. Que reste-t-il aujourd’hui de cette révolution-là ? Système Friche Théâtre et le Merlan produisent conjointement celui qui fut le gourou absolu, et indéniablement talentueux, de toute une génération… À sec Du 17 au 24 fev La Friche 04 95 04 95 02 www.lafriche.org
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THÉÂTRE
AU PROGRAMME
Long ?
Observation Badinage Frédérique Plain met en scène deux comédies- Á partir de l’ensemble des textes de Robert Walser, modifiant le texte en cas de termes trop datés «ou supprimant les détails référentiels d’une société trop éloignée de la nôtre», Danielle Bré crée RéCréation avec sa compagnie In Pulverem Reverteris, un «spectacle pour adolescents présents ou passés, familles et tous types d’éducateurs, ce qui fait quand même du monde…» Une façon pour elle de briser le silence, d’instaurer un dialogue entre adultes pas forcément présents et adolescents pas vraiment absents, bref, de «prendre le risque de l’altérité». C’est là la création de la première version, légère, plus ludique, une seconde version étant prévue pour la fin de l’année à la Minoterie.
proverbes de Musset, Il faut qu’une porte soit ouverte ou fermée et On ne saurait penser à tout, toutes deux illustrant un questionnement cher au dramaturge : comment vivre l’amour ? Frédérique Plain veut faire entendre des pièces leur radicalité, leur drôlerie et leur modernité pour les faire entrer «en résonnance avec notre présent», sans que la langue ne perde de sa poésie. Musset-diptyque Du 3 au 5 fév Théâtre du Jeu de Paume, Aix-en-Provence 0 820 000 422 www.lestheatres.net
RéCréation Les 26 et 27 janv Théâtre Antoine Vitez, Aix 04 42 59 94 37 www.theatre-vitez.com
le 8 fév Théâtre du Cadran, Briançon 04 92 25 52 52 www.theatre-le-cadran.eu
le 8 avril Théâtre de Nîmes 04 66 36 65 10 www.theatredenimes.com
Abymes Les Acteurs de bonne foi est la dernière pièce de Marivaux. En un acte, loin de ses préoccupations habituelles sur le sentiment amoureux, centrée tout de même sur le jeu, le mensonge, les inconscients lapsus de langue et de cœur… des acteurs. En plein bouleversement esthétique, alors que les Philosophes se battent à propos de l’utilité sociale du théâtre -Diderot invente le drame bourgeois, Rousseau publie sa Lettre sur les spectacles-, Marivaux en dramaturge défend son art preuve à l’appui… Jean-Pierre Vincent met en scène un texte qui le poursuit depuis longtemps. Avec de jeunes comédiens, comme il a toujours la générosité de le faire. Les acteurs de bonne foi Du 15 au 19 fév Le Gymnase, Marseille 0820 000 422 www.lestheatres.net
très fidèlement adapté et mis en scène par Patrice Leconte. Huis clos qui tourne autour d’échecs amoureux, et de la vaine recherche du bonheur de deux personnages que la douleur égare parfois, sans toutefois tomber dans la caricature. Loin du mélodrame, Irène Jacob et Gérard Darmon jouent avec justesse et élégance de ces sentiments très humains. Je l’aimais Du 8 au 12 fév Théâtre du Jeu de Paume, Aix-en-Provence 0 820 000 422 www.lestheatres.net
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La tragédie de Richard II Du 25 au 29 janv Le Gymnase, Marseille 0820 000 422 www.lestheatres.net
Transpositions Attirance Le roman best-seller d’Anna Gavalda, Je l’aimais, est
© BM Palazon
Acte Vegas © X-D.R.
© Christophe Raynaud de Lage
Le Richard II programmé cet été dans la cour d’Avignon a fait couler bien de l’encre et failli faire tomber des têtes. Il n’a pourtant rien de scandaleux. Cette tragédie shakespearienne (qui n’est pas sa meilleure) est simplement mise en scène sans génie, et avec quelques partis pris agaçants. Mais resserrée dans des espaces intérieurs mieux sonorisés et éclairés elle y gagnera sans doute. D’autant que Podalydès, lorsque sa voix ne se perd pas dans le vent et la froidure, et son jeu subtil dans l’immensité déserte d’un plateau insensé, est un comédien fascinant. Cette production trouvera peut-être la brillance en des écrins plus calfeutrés et modestes ?
Février sera Tchekovien au Vitez, avec pas moins de trois spectacles consacrés à La Mouette : Mikaël Serre, avec la Comédie de Reims, rapproche les personnages de Nina, qui se rêve en actrice dans la grande capitale, d’acteurs hollywoodiens prêts à tout pour la même chose (le 2 fév) ; Acte Vegas, une autre mouette, texte de Liliane Giraudon mis en scène par Geoffrey Coppini, s’attaque au genre et à la norme à travers des fumées et le décalage d’une sombre boîte de nuit (le Vegas) qui serait une prolongation de La Mouette (le 9 fév) ; Nina ? (épilogue), de Sabine Tamisier, est sous-titré Lendemains pour La Mouette: un monologue pour une comédienne, Nina, lu par l’auteure elle-même… (le 16 fév). Théâtre Antoine Vitez, Aix 04 42 59 94 37 www.theatre-vitez.com
Figure Jean-Pierre Jourdain adapte la Jeanne D’Arc de Joseph Delteil, Christian Schiaretti la met en scène en prenant le parti de faire vivre son héroïne, de la naissance au bûcher. Juliette Rizoud, seule en scène, est tour à tour angélique ou sensuelle, jouant sur un plateau où tout se transforme, une table destrier, les pupitres en armées, les balais en forêt menaçante, la Cour du roi en cathédrale, prison, bûcher… Ce spectacle est accueilli dans le cadre de la programmation des ATP d’Aix. La Jeanne de Delteil Du 15 au 17 fév Théâtre des Ateliers, Aix 04 42 38 10 45 www.theatre-des-ateliers-aix.com/blog
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THÉÂTRE
AU PROGRAMME
Spectaculaire
Philosophique Satire Recueillies avec soin et respect dans les bistrots par Marc Paquien s’attaque au chef-d’œuvre du maître Jean-Marie Gourio, Les nouvelles brèves de comptoir bénéficient de la mise en scène énergique de JeanMichel Ribes, et du jeu, non moins énergique, d’une belle bande de comédiens. Pour humer l’air du temps et se dire que ces pépites humoristiques, et souvent avinées, ressemblent parfois à des traits d’esprit réfléchis. Au zinc aussi on philosophe ? © Carole Parodi
À l’origine de Soupçons, la pièce mise en scène par Dorian Rossel, il y a le polar documentaire de JeanXavier de Lestrade, implacable document filmé de 8 heures sur les coulisses du procès, du côté de la défense, d’un homme accusé d’avoir tué sa femme, encore plus suspect quand l’enquête de la police prouve la bisexualité… Dorian Rossel réécrit l’intrigue en mettant à nu la multiplicité des points de vue -grâce notamment à une scénographie pleine de trouvailles- et les préjugés d’une Amérique bien pensante.
Les nouvelles brèves de comptoir Les 5 et 6 fév Théâtre Les Salins, Martigues 04 42 49 02 00 www.theatre-des-salins.fr
Les Femmes savantes Du 15 au 17 février Théâtre de Nîmes 04 66 36 65 10 www.theatredenimes.com
du 2 au 4 fév Châteauvallon, Ollioules 04 94 22 02 02 www.chateauvallon.com
Soupçons Le 25 jan à 20h30 Théâtre d’Arles 04 90 52 51 51 www.theatre-arles.com
Odyssée Philippe Genty revisite la figure du rêveur dans l’un de ses spectacles phares, présenté il y a près de 15 ans au théâtre Molière. Voyageurs immobiles, une parade sonore et visuelle dans laquelle 8 comédiens déroulent un monde poétique entre humour, ironie et noirceur. Un voyage rare et spectaculaire où se mêlent danse, marionnette, chant et théâtre. À voir en famille.
© Brigitte Enguerand
Sous le volcan Les 27 et 28 jan à 20h30 Théâtre Les Salins, Martigues 04 42 49 02 00 www.theatre-des-salins.fr
dévoiler toute la modernité et l’intensité des textes dont elle s’empare, classiques ou pas, propose un dyptique avec deux pièces de Musset : Fantasio et On ne badine pas avec l’amour. Benoît Lambert les met en scène de façon décoiffante, révélant les préoccupations similaires vécues par la jeunesse de 1830 et celle des années 2000, chacune se battant pour prendre en main son destin, se révoltant contre une société limitant les choix de vie… Enfants du siècle, un dyptique Les 10 et 11 fév à 20h30 Théâtre Les Salins, Martigues 04 42 49 02 00 www.theatre-des-salins.fr © Pascal Francois
Célébrations La compagnie l’Heure du Loup fête ses 10 ans Funèbres d’existence au théâtre de Nîmes avec une pièce La compagnie Zirlib aborde dans la création À l’abri
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les 1er et 2 fév à 20h30 Scène Nationale de Sète 04 67 74 66 97 www.theatredesete.com
Voyageurs immobiles Les 27 et 28 janvier Théâtre Molière, Sète 04 67 74 66 97 www.theatredesete.com
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Contemporain Infernal La compagnie La Tentative, dont l’objectif est de Guy Cassiers met en scène le roman de Malcolm Lowry, Sous le volcan, dont Josse De Pauw signe l’adaptation et endosse le rôle central. La «Divine comédie ivre», telle que la définit l’auteur lui-même, se déroule sur une année, débutant le jour de la fête des morts à Quauhnahuac, au Mexique, au pied de deux volcans mythiques, et se concentre sur le couple que formaient Geoffroy Firmin et Yvonne un an plus tôt. Avec pour seul décor des écrans sur lesquels sont projetées des images tournées au Mexique, le metteur en scène flamand casse les codes de représentation pour s’approcher au plus près de cette prose poétique.
de la comédie : Les Femmes savantes. Dans cette nouvelle création, il révèle l’actualité brûlante des questions soulevées par Molière, l’émancipation des femmes comme le délirant désir de tout savoir qui caractérise plus que jamais notre XXIe siècle. Une intrigue sentimentale doublée d’un portrait virulent de la lutte entre snobisme et bon sens.
© Koen Broos
spécialement écrite par Serge Valletti. Roméa et Joliette, une création très librement inspirée de la tragédie de Shakespeare dont le seul titre est déjà tout un spectacle, mise en scène par Michel Froehly. Deux actrices et quatre acteurs échangeront leurs rôles dans cette surprenante adaptation coproduite par le théâtre de Nîmes. Roméa et Joliette Du 1er au 3 février Théâtre de Nîmes 04 66 36 65 10 www.theatredenimes.com Le 25 mars Theatre Sémaphore, Port-de-Bouc 04 42 06 39 09 www.theatre-semaphore-portdebouc.com
de rien, écrite et conçue par Mohamed El Khatib, la mort dans tous ses états. Sans concession ni angélisme, avec une ironie grinçante presque attachante, cinq comédiens issus de ce jeune collectif théâtral retracent vingt parcours de morts atypiques et explorent l’un des tabous de nos sociétés occidentales. Une préservation du rapport au monde à découvrir de toute urgence pour se «mettre en bouche la mort». À l’abri de rien Les 8 et 9 février Scène Nationale de Sète 04 67 74 66 97 www.theatredesete.com
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THÉÂTRE
AU PROGRAMME
Violences
Concret Confession Jean, grand gaillard sans bagage ni argent va faire irruption une nuit au sein d’une famille en deuil. Engagé pour quelques travaux de force par la patronne des lieux veuve depuis peu, il va peu à peu réveiller chez les uns et les autres les cœurs et les langues, préparant chacun au printemps qui s’annonce. Se refermant paradoxalement sur le drame qui le ronge… Sobre, la mise en scène de François Rancillac restitue au plus juste la langue concrète de Giono et s’appuie sur le dispositif scénique ambitieux de Jacques Mollon, inspiré des tableaux Outrenoirs de Pierre Soulages. © Lucie Laurent
Partant de faits historiques sur lesquels s’est penché l’historien Gérard Noiriel (voir Zib 36 et p 72), Serge Valletti a écrit une «comédie triste» en quatre actes, un vaudeville macabre mis en scène par Patrick Pineau, qui témoigne sans juger, racontant l’histoire par le biais d’une famille bourgeoise retranchée pendant les événements mais néanmoins au cœur de l’action. Sale août Le 26 jan à 20h30 Théâtre de la Colonne, Miramas 04 90 58 37 86 www.scenesetcines.fr
Transposition
Faillite Hamelin, comme dans la légende allemande Le joueur de flûte de Hamelin dont s’inspire l’auteur espagnol Juan Mayorga, est une pièce dont le sujet est les enfants. Mais il s’agit de pédophilie, et d’une ville qui doute d’un de ses notables, prédateur coupable, aux yeux d’un juge, de s’attirer les bonnes grâces d’une famille pour abuser des enfants. Christophe Sermet met en scène sobrement, sans décor, ce texte dérangeant qui met en cause une société entière, une société en proie à une faillite collective. Hamelin Le 25 jan à 20h30 Théâtre de Fos 04 42 11 01 99 www.scenesetcines.com
Il s’agit bien du Médecin malgré lui de Molière, même si, dans la mise en scène de Jean-Claude Berutti, directeur de La Comédie de Saint-Etienne, Sganarelle se trouve être un sans domicile fixe de la banlieue parisienne, qui y vit avec femme, qu’il frappe, et enfants. Il se retrouvera docteur dans une famille bourgeoise d’un quartier chic… Modernisé mais ne trahissant pas le texte d’origine, ce Médecin garde pour le metteur en scène «le relent de fabliau carnavalesque» et surtout «le combat pour la vérité» et contre l’hypocrisie cher à Molière. Le Médecin malgré lui Le 4 fév à 20h30 Théâtre de l’Olivier, Istres 04 42 56 48 48 www.scenesetcines.fr
Amnésie Guy Bedos et Macha Méril joueront Le Voyage de
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© Daniel Locus
La Chute Le 3 fév Théâtre le Comoedia, Aubagne 04 42 18 19 88 www.aubagne.fr © Regis Nardoux
Le 28 jan à 20h30 Châteauvallon, Ollioules 04 94 22 02 02 www.chateauvallon.com
les 10 et 11 fév Théâtre de Cavaillon 04 90 78 64 64 www.theatredecavaillon.com
© F. Mouren-Provensal
Raymond Vinciguerra et la compagnie Tétra-Art propose une lecture pertinente d’un texte fascinant, grâce à la mise en scène réussie de La Chute d’Albert Camus. Clamence, interprété par Philippe Séjourné, prend conscience de l’inanité de son comportement passé qui lui deviendra lentement insupportable. Au-delà de l’enfer des autres, Camus nous tend un miroir et nous livre au feu de la confrontation d’avec nous-mêmes, en nous invitant à une lucidité introspective qui seule peut bâtir un changement collectif.
Le Bout de la route Le 29 jan à 20h30 Théâtre de l’Olivier, Istres 04 42 56 48 48 www.scenesetcines.fr Le 1er fév à 20h30 Théâtre La passerelle, Gap 04 92 52 52 52 www.theatre-la-passerelle.eu
Victor pour une représentation unique au théâtre le Comoedia. Écrite et mise en scène par Nicolas Bedos, la pièce traite du deuil impossible, de la fuite, de la folie douce et de la liberté de revisiter nos vies. À travers Victor et son amnésie post-accidentelle et une femme mystérieuse avec laquelle il retracera son passé, l’auteur passe de la comédie romantique au polar. Le Voyage de Victor Le 28 janv Théâtre le Comoedia, Aubagne 04 42 18 19 88 www.aubagne.fr
Comique Elue «pièce comique» et «adaptation française» aux Molières 2010, Les 39 Marches est un spectacle décapant mis en scène et joué par Eric Métayer. Plus de 150 personnages interprétés tambour battant par quatre comédiens clownesques qui restituent avec loufoquerie l’univers d’Alfred Hitchcock. Une adaptation réussie d’un thriller en noir et blanc digne du cinéma d’espionnage de cette époque. Pour le plaisir du rire et du rêve. Les 39 marches Le 5 fév Théâtre le Comoedia, Aubagne 04 42 18 19 88 www.aubagne.fr les 11 et 12 fév Théâtre de Grasse 04 93 40 53 00 www.theatredegrasse.com
Collectifs 7 monologues commandés par le Bruit des Hommes à 7 auteurs (Yves Borrini, Joseph Danan, Marie Dilasser, Philippe Dorin, Samuel Gallet, Laurence Vielle et Serge Barbuscia) composent cette création originale autour des Métiers de nuit. 7 interprètes-solistes (Stéphane Bault, Emilie Blon Metzinger, Yves Borrini, Estelle Galarme, Sophie Johson, Sébastien Tavel et Aïni Isten) donneront corps et voix à cette collection de portraits qui forment un état des lieux provisoire de nos insomnies, un delta d’histoires fragmentées. Métiers de nuit Le 12 fév Théâtre le Comoedia, Aubagne 04 42 18 19 88 www.aubagne.fr
Radical Il fallait oser faire claquer la langue de Shakespeare en baskets et en slam et réunir Denis Lavant, la rappeuse Casey, D’ du groupe Kabal, Marie Payen, le rappeur new-yorkais Mike Ladd ! Razerka Ben Sadia-Lavant tente cette approche inédite et reprend à son compte l’histoire de Timon d’Athènes qui permet au dramaturge d’évoquer de manière abstraite et brutale l’un de ses thèmes favoris : la misanthropie ou le refus radical du monde… Timon d’Athènes Les 27 et 28 janv Théâtre de Grasse 04 93 40 53 03 www.theatredegrasse.com © X-D.R.
Extra-ordinaire Après Derniers remords avant l’oubli en 2006 et Nature morte dans un fossé en 2010, le Collectif DRAO revient au Théâtre de Grasse avec sa toute nouvelle création : Petites histoires de la folie ordinaire ou l’épopée presque ordinaire d’un homme ordinaire racontée de manière alerte, drôle, voire débridée… Entre réalisme et fantastique, la pièce prend le spectateur à témoin d’un univers qui bascule. Petites histoires de la folie ordinaire Les 4 et 5 fév Théâtre de Grasse 04 93 40 53 03 www.theatredegrasse.com
Poésie
© Yann Sevrin
En résidence au Théâtre Durance dans le cadre des confrontations artistiques transfrontalières, Busca est une jeune compagnie italienne à découvrir. Dans la création L’Univers se fout du glamour, deux comédiens et un musicien nous invitent à une traversée poétique aux confins des mots et de la musique, sur la route de Prévert, Dubillard, Ferré… L’Univers se fout du glamour Le 28 janvier Théâtre Durance, Château-Arnoux 04 92 64 27 34 www.theatredurance.fr
Spéculation Autre confrontation artistique transfrontalière, ici Turin/Berlin, avec la compagnie 15Febbraio en résidence de création au Théâtre Durance et Claudia Hamm. Dans Still Live, il sera question de la notion de présent, constamment en tension entre passé et futur. Une première représentation en français avec 3 comédiens, un broker et un voyant. Still Live Le 11 février Théâtre Durance, Château-Arnoux 04 92 64 27 34 www.theatredurance.fr
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DANSE
BNM | NÎMES | CHÂTEAUVALLON
Noir ou blanc
Les Vertiges de l'immobilite © Agnès Mellon
Soirée variée au BNM. D’abord les 12 élèves-danseurs proposent une chorégraphie d’Hervé Robbe. Vêtus d’une tenue sportive à capuche, ils traçent sur le sol et dans l’espace des diagonales à grandes enjambées et jetés de bras, se déplaçant comme les pièces d’un jeu de dames sur la La Valse triste de Sibélius accompagnée de rires d’enfants et de rumeurs urbaines. Puis Eric Oberdoff propose une chorégraphie très pure, jouant sur les lignes verticales de barres fichées dans le sol. Sept hommes en noir se déplacent, se fuient, se rencontrent avec une belle énergie sur une pièce de Bach. Quelques solos, mais aussi des rencontres à deux, dans une danse de contact où s’éprouve le poids de l’autre avec alternance de rapidité et de mouvements très lents, suspendus. Une grande sobriété mêlée à une émotion contenue, une tension intérieure que le spectateur ressent aussi. Ces indécisions entre le vertical et l’horizontal, le partage et la solitude, ne sont pas sans évoquer notre condition d’homme. Enfin Olivia Grandville a choisi de ne travailler qu’avec six interprètes féminines, répondant à la demande d’une pièce sur l’utilisation des pointes. La
face cachée de cette technique se révèle par la fragmention du personnage de Giselle. Les 6 danseuses, jambes nues, abordent le plateau en ordre militaire et cadencé, avant de s’exprimer sur pointes et métronome, citant des passages du Ballet et d’autres références classiques. Peu à peu elles ôtent leur blouson blanc pour choisir des vêtements disparates sur un portant. Chacune s’isole dans son histoire, avec des ruptures, des gestes saccadés, évoquant la mélancolie de l’héroïne romantique et les questions de l’interprète contemporaine. C’est un éclat de rire qui ponctue cette pièce étonnante mais décousue : jeu, dérision ? CHRIS BOURGUE
Flow down - opus 12 - Les vertiges de l’immobilité 6 Giselles ont été dansé du 15 au 18 déc au grand studio du BNM
De terre et de feu Avec La Pasión según se mire, le chorégraphe et danseur sévillan Andrés Marín a offert au public du Théâtre de Nîmes l’essence même de la passion flamenca. Son dernier spectacle, incandescent et éloquent, se décompose de tradition en avant-garde en tableaux d’emballement et de ruptures, de pleins et de déliés, de souffles et de terre, jouant constamment avec la tension dramatique et la radicalité d’une danse volcanique. Entouré de 10 musiciens, dont la majestueuse Lole Montoya et le puissant José de la Tornasa au chant, c’est avec la danseuse Concha Vargas que la démonstration d’épure touche à la pure jubilation. Il est un cygne noir, un pur sang aux bras de géant, athlétique et concentré, d’une précision absolue et d’une vélocité rare, qui se cambre,
se cabre et rugit, et partage l’arène de lumière avec cette femme gironde, délicieusement faconde. La danseuse aux pieds nus, dont la force vitale irradie, atteint des sommets d’énergie communicative. L’art est vivant, un tourbillon qui débute en forme de prière dans la lumière rouge et s’achève par une vision très contemporaine du flamenco, clown blanc entouré de chariots de feu qui signe avec espièglerie son oraison funèbre. Ce tour d’horizon dans le vocable et la passion du flamenco nous happe et nous échappe, nous abandonnant dans l’envie prodigieuse de plonger nos entrailles et nos talons, à notre tour, dans la chaleur du rythme flamenco. DELPHINE MICHELANGELI
© Javier Fernandez
La Pasión según se mire s’est joué le 14 janvier dans le cadre du Festival de Flamenco au théâtre de Nîmes
Total contrôle Les Zita Swoon ont laissé les spectateurs de Châteauvallon à la marge de Dancing with the Sound Hobbyist. À de rares exceptions, ils sont sortis de leur bulle : la raison à la forme hybride de la pièce, mi-concert mi-spectacle ? à l’espace scénique et sonore trop conceptuel ? au dialogue inclassable entre le mouvement et la musique ? Pourtant le collectif belge joue à fond la carte de la complémentarité entre ses membres, les deux choristes et le danseur de la Cie Rosas, exceptionnel Simon Mayer. Car tout ici est musique : le glissement de ses mains sur le sol, leur frottement, l’effleurement du corps, ses coups de pieds, ses brefs trépignements comme, plus tard, le cliquetis d’une chaîne, le froissement d’un sac plastique. Ainsi poussé à la périphérie de leur patchwork musical,
l’excentricité et l’explosive frénésie dont ils sont auréolés : fausse retenue ? austérité de façade ? froideur calculée, feinte ? Les enfants trop sages de la scène anversoise ont offert un spectacle tellement formaté, aux rouages si bien huilés, que la déconvenue occulta le plaisir attendu. Dommage, le «trip» de cette tribu cosmopolite chorégraphiée par Anne Teresa de Keersmaeker en a laissé plus d’un sur le quai malgré quelques fulgurances musicales, le timbre mélancolique du singer-song writer du groupe, Stef Kamil Carlens, et la présence mutine de Simon Mayer. MARIE GODFRIN-GUIDICELLI © Gauthier Bourgeois
mélange de rock, pop, blues et disco sous influences afro-cubaines, on apprécie d’autant plus la danse, entre
secousses, soubresauts, ondulations… jusqu’au vertige : on est bien là au spectacle. Mais où sont passées
Dancing with the Sound Hobbyist a été donné le 14 janv au CNCDC Châteauvallon
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DANSE
AU PROGRAMME
Communauté
Mixte Enfin ! Le Ballet national de Marseille tourne son programme Après le Carmen d’Antonio Gadès, le GTP ouvre son néoclassique au théâtre Molière de Marignane. L’occasion de retrouver les créations de Malandain et Lucinda Childs -Nuits d’été et Tempo Vicino-, deux pièces qui nécessitent une technique et une implication sans faille, et Doux ?, une création d’Anton Zvir, danseur au Ballet. Puis les 29 et 30 janv les Gapençais auront la chance de suivre une masterclass avec Katharina Christl, une danseuse étonnamment explosive… Malandain/Childs/Zvir Le 23 janv Théâtre Molière, Marignane 04 91 71 36 32 www.ballet-de-marseille.com
© Frederik Buyckx
En plusieurs saynètes aussi réalistes que fantasmagoriques, le collectif Peeping Tom nous embarque dans son univers unique et singulier (voir Zib 36). Trois caravanes plantées dans la neige abritent d’étranges personnages qui s’exposent, avec toutes leurs névroses, aux rapports humains. Contorsions improbables, attitudes maladives, dérapages certains pour évoquer les maladresses de la solitude et nous plonger dans un fantasme collectif. Une performance à couper le souffle (ou le froid).
magnifique plateau à une autre grande formation : le Ballet national de Genève arrive avec ses 22 danseurs pour un ballet en trois actes qui n’est autre que la Cendrillon de Michel Kelemenis. Ne manquez pas ce conte classique revisité par l’esprit mutin de notre chorégraphe, sur la musique de Prokofiev… Créé en 2009, on peut enfin le voir «chez nous» ! Cendrillon Les 12 et 13 fév Grand Théâtre de Provence, Aix 04 42 91 69 69 www.legrandtheatre.net
Ruisseaux La perte qui nous construit, l’informe et le toucher, le raffinement snob, l’hermaphrodisme originel… voilà à quoi rêvent les danseurs du Ballet Preljocaj lorsqu’il s’agit de se faire chorégraphes. Les Affluents existent depuis 1995, et plus de 35 pièces ont ainsi été créés. Dont quelques réussites fulgurantes ! Cette année ce sont Lorena O’Neill, Émilie Lalande, Baptiste Coissieu et Sébastien Durand qui s’y collent… on se demande un peu où ils en trouvent le temps, entre deux tournées !
32 rue Vandenbranden Du 3 au 5 fév Théâtre Le Merlan, Marseille 04 91 11 19 20 www.merlan.org
Chocs Lia Rodrigues, chorégraphe qui a installé sa Cie Mare
© Vincent Lepresle
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Les Affluents Les 4 et 5 fév Pavillon Noir, Aix 0811 020 111 www.preljocaj.org
Hommages Le ballet de Jean-Christophe Maillot reprend le © JC Carbonne
dans une favella de Rio, est en Europe pour présenter deux pièces majeures : Pororoca, du bruit des cailloux dans les lits des rivières, met en scène les métissages et les chocs qu’ils entraînent ; Ce dont nous sommes faits, pour les mêmes 11 danseurs, est une pièce tout aussi politique mais plus intime, charnelle, nue. Une chorégraphe importante, à ne rater sous aucun prétexte.
répertoire des ballets russes : Le spectre de la Rose, Daphnis et Chloé, puis Shéhérazade qui réunit les 40 danseurs. Le Ballet, qui reste techniquement un des meilleurs du monde, s’affirme dans un style classique qui n’hésite pas à emprunter au contemporain, surtout pour ses décors et ses lignes. De la belle danse… Les Ballets de Monte Carlo Les 8 et 9 fév Scène Nationale de Sète 04 67 74 66 97 www.theatredesete.com
Pororoca le 12 fév Ce dont nous sommes faits le 13 fév à 18h30 Le Merlan 04 91 11 19 20 www.merlan.org
Fluide Jean-Charles Gil reprend le duo masculin, qu’il a
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Pororoca le 28 fév Scène nationale de Cavaillon 04 90 78 64 64 www.theatredecavaillon.com
Pororoca © Sammi Landweer
conçu comme une rencontre entre un de ses danseurs et un interprète marocain. Confrontation puis rencontre entre deux styles, classique et contemporain d’un côté, hip hop et oriental de l’autre, le duo raconte aussi l’apesanteur de l’eau où les corps plongent, se noient, s’accrochent et jouent, abandonnant leurs appuis terrestres en même temps que leurs certitudes culturelles. Udor Polimates Ballet d’Europe Du 15 au 17 fév Pavillon Noir, Aix 0811 020 111 www.preljocaj.org
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© Agnes Mellon
DANSE
Dialogue
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Années 30 Étouffant Montalvo et Hervieu s’emparent de l’esprit new yorkais années 30. Celui du jazz, de la comédie musicale, des Noirs qui s’émancipent, des danses populaires qui s’imposent sur les scènes. Ils en font un spectacle joyeux, hommage à Porgy and Bess, coloré, explosé, dynamique. Visible par tous les yeux : amenez y vos enfants, mais ne vous en privez pas.
© Luc Riolon
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Dans Flamenco se escribe con Jota, trois danseurs virtuoses inventent un dialogue artistique vibrant entre Flamenco et Jota. La rencontre de deux peuples dont les histoires se sont écrites au rythme des musiques. Entourés de six chanteurs-musiciens, Miquel Ángel Berna, Úrsula López et Rafael Campallo parviennent à un degré d’harmonie absolu en faisant triompher la Jota sur les terres de la Buleria.
Lalala Gershwin les 8 et 9 fév Théâtre de Nîmes 04 66 36 65 10 www.theatredenimes.com le 7 fév L’Olivier, Istres 04 42 55 24 77 www.scenesetcines.fr
© Eric Lamoureux
Manta est une pièce d’une acuité rarissime. Hela Fattoumi y danse la vie sous un voile intégral qui la couvre jusqu’au bord des yeux. La manta, blanche comme un linceul. La danseuse y laisse transparaître son corps comme démembré, décharné, privé de luimême, dans des poses sexuelles de soumission. Elle s’ébat dans des épaisseurs de tissu qu’elle plie sans cesse puis jette au vent, libérée, pour chanter et danser enfin l’exubérance de sa liberté retrouvée, dans des vêtements qui habillent sans embaumer.
Flamenco se escribe con Jota Le 22 janv Théâtre de l’Olivier, Istres 04 42 56 48 48 Le 25 janv Théâtre Molière, Sète 04 67 74 66 97 www.theatredesete.com
Manta Les 8 et 9 fév La Passerelle, Gap 04 92 52 52 52 www.theatre-la-passerelle.eu
Ouverture Après avoir admiré sa passion à Nîmes (voir p 24), on retrouve Andres Marin à Grasse où il danse accompagné par un musicien et un chanteur. Une sorte de solo à trois où il cherche à sortir le Flamenco de ses traditions pour en faire une danse de création. Il y parvient avec brio, et émotion. Op.24 Andres Marin Les 8 et 9 fev Théâtre de Grasse 04 93 40 53 00 www.theatredegrasse.com
Anda ! Le Festival Flamenco de Nîmes se termine le 22 janvier, mais il vous reste quelques spectacles, et non des moindres, à aller déguster : Rafaela Carrasco qui promet de «construire le futur» avec son Vamos al Tiroteo (20 janv à 20h) ; la puissante Melinda Sala, enfant du pays, avec piano et violon (21 janv à 22h30) ; et une création mondiale, pas moins, celle de Belén Maya, Tres, qui prend sa source à l’essence même du flamenco… (22 janv à 20h). Sans oublier le cante avec les Mujerez Juana la del Pipa, Dolores «La Agujeta» et La Macanita (21 janv à 20h) et Diego Carrasco, le «gourou de Jerez» ! (22 janv à 17h). Festival de Flamenco Jusqu’au 22 janv Théâtre de Nîmes 04 66 36 65 10 www.theatredenimes.com
© L. Philippe CCN Creteil Cie M H
Brazil Quand le hip hop subtil de Mourad Merzouki rencontre la vigueur des danseurs Brésiliens, cela donne deux créations : Agwa (2008) et Correira (2010) mixent avec l’énergie d’une culture naturellement métissée les pas et les sons de la samba, du hip hop, du jazz, de la bossa. Un punch sans limite, qui dit aussi la force artistique des cultures urbaines. Correria et Agwa Le 12 fev Théâtre Durance, Château-Arnoux 04 92 64 27 34 www.theatredurance.fr
Flamboyante Un seul mot d’ordre : ne rater sous aucun prétexte Carmen, le ballet mythique de la compagnie Antonio Gadès inscrite à son répertoire depuis 1983, car Carmen est toujours aussi ardente et la chorégraphie semble taillée pour défier le temps… loin du folklore et des clichés. Carmen Le 21 janv La Passerelle, Gap 04 92 52 52 52 www.theatre-la-passerelle.com
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Des Indes Il y a près d’un siècle et demi Pierre Loti rêvait à la fille d’un brahmane tombée amoureuse d’un conquérant anglais… et Delibes trois ans plus tard écrivait Lakmé, opéra dont quelques mélodies justement célèbres peuplent encore notre inconscient musical. Sylvie Guillermin replonge dans cet orientalisme pour créer ses Lakmé(s), filles amoureuses, respectueuses, délaissées, sacrifiées et saintes… Une mise en danse féministe d’un thème qui traverse notre littérature ! Lakmé(s) Le 12 fév Le Cadran, Briançon 04 92 25 52 52 www.theatre-le-cadran.eu
© Jesus Vallinas
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MUSIQUE
LYRIQUE
Le luxe de la maturation Pour ceux qui n’avaient pas pu se rendre à la création française de Street scene en mars dernier à l’opéra de Toulon, la maison a eu la bonne idée de le reprogrammer, pour seulement deux dates festives. Exceptés quelques menus changements dans la mise en scène et quelques ornements supplémentaires dans la chorégraphie confiée pour l’occasion à de nouveaux danseurs, la proposition était identique, et la distribution vocale était à peu de choses près la même. Ce qui n’a pu que ravir les amateurs ! Ce que ce chef-d’œuvre de Kurt Weill semblait avoir perdu en fraîcheur par rapport à la première exécution, il le gagnait en maturité : en effet, les chanteurs semblaient habiter davantage leurs personnages, à l’image de Laurent Alvaro (Franck Maurrant)
veté du titre, l’ouvrage prenait au passage une profondeur dramatique très intense. Transcendé par le dynamisme de la mise en scène, l’orchestre était encore plus incisif, confirmant au passage sa remarquable malléabilité sous la baguette toujours aussi vive de Scott Stroman. Les rares passages de chœurs, gonflés pour l’occasion, gagnaient encore en émotion. Une reprise qui montre donc, une fois de plus, qu’il faut du temps aux productions pour parvenir à l’excellence… © Olivier Pastor
Cassandra Warner nouvellement recrutée et très convaincante dans le rôle de Rose Maurrant aux côtés d’Adran Dwyer, toujours impeccable dans le rôle de Sam Kaplan. En définitive, malgré l’apparente naï-
tout en noirceur et en violence conte-nue ou de son épouse sur scène Elena Ferrari tourmentée et sensible à souhait. Dans cette distribution impeccable, on retiendra également la belle prestation de
EMILIEN MOREAU
Street Scene a été repris à l’Opéra de Toulon les 29 et 31 décembre
Drôl’Attique On sort de La Belle Hélène, opéra-bouffe représenté autour de Noël et du Nouvel an 2010 à l’Opéra de Marseille, comme après une agape festive, copieuse et arrosée : en zigzagant, la tête tournante et l’estomac un peu chargé. Assurément, la mise en scène quasi-trentenaire de Jérôme Savary conserve une force olympienne, fourmille d’idées scéniques et de décalages comiques tranchants, mais elle possède les défauts de ses qualités : elle se leste à l’occasion, par souci d’actualisation du livret, de jeux de mots pesants, et le foisonnement d’effets théâtraux en rafales, délires enchevêtrant danseurs, acrobates, chœurs et topless, parasite parfois ce qui devrait capter l’attention au centre de l’action. Au demeurant, on se réjouit de l’intérêt public croissant pour ce type d’ouvrage, fleuron d‘une culture populaire ayant traversé les décennies depuis le Second Empire, et dont les sarcasmes étaient supposés railler les travers. C’est fort justement que l’auditoire a ovationné ce fastueux divertissement. Il ne faut certes pas se fier à l’ambiance fantaisiste qu’une telle œuvre génère et qui pourrait laisser penser que la musique d’Offenbach est «facile». Elle distille, entre autres, des moments de grâce que Nader Abassi a particulièrement soigné à la tête de l’Orchestre de l’Opéra. Si Mireille Delunsch a campé une Hélène altière, son berger troyen Alexander Swan (Pâris) a manqué un peu de coffre. La palme revient finalement au trio Eric Huchet (Ménélas), Marc Barrard (Agamemnon) et Francis Dudziak (Calchas) dont le métier a servi à souhait la comédie et le chant.
Paris dernière ?
JACQUES FRESCHEL
La belle Hélène a été représenté du 21 au 31 décembre 2010 à l’Opéra de Marseille © Christian Dresse
C’est en 1866 qu’eut lieu la première de l’opérette La Vie parisienne. Une dizaine d’années plus tôt, Jacques Offenbach, violoncelliste à l’orchestre de l’Opéra Comique, avait proposé au ministre d’alors de créer un lieu de spectacle pouvant accueillir un nouveau genre de divertissement «de nature à plaire aux intelligences cultivées et à la masse des spectateurs…» Ainsi naquirent les Bouffes-parisiens où fut créé Orphée aux Enfers, son premier triomphe. La Vie parisienne, composée sur un livret du célèbre duo Meilhac-Halévy, fit également la gloire de ses auteurs puisque l’œuvre fut jouée 265 fois consécutives. Satire d’une société qui s’amuse et où l’argent mène le monde, on y rencontre le Tout Paris qui, à cette époque, prépare l’exposition universelle de 1867 et dont Offenbach va faire, en maître du Réalisme social musical, la caricature. Du coup, la mise en scène de Nadine Duffaut, tout en conservant son incontournable aspect festif, met justement l’accent sur les rapports de classe. «Je ne sais vraiment pas ce que j’ai pu faire au Bon Dieu pour qu’il m’ait comblé de tant de joie et de tant de musique !», écrit Offenbach. Que
© Cédric Delestrade-ACM Studio
d’inoubliables airs et ensembles furent chantés ce soir avec allégresse, notamment par Lionel Peintre, merveilleux en baron de Gondremarck, Lydia Mayo -son épouse- ou encore Florian Laconi en Brésilien… Le final apporta une touche parisienne supplémentaire avec un cancan déchaîné et dansé avec passion par la troupe des Ballets de l’Opéra d’Avignon. Si ce brillant spectacle a fait salle comble, on regrette que, faute de budget, ce patrimoine risque de disparaître de la cité papale. En effet, se plaint Nadine Duffaut, «c’est peut-être la dernière fois que l’on verra ce genre d’ouvrage à Avignon.» CHRISTINE REY
La Vie Parisienne a représentée les 30, 31 décembre 1er et 2 janvier
MUSIQUE 29
Puccini à l’école Scène finale de La Bohème : Mimi, couchée au sol, agonise. Rodolfo la soutient. Quelque partition posée à même la scène évite les trous de mémoire. Autour on s’active tristement : Musetta, Marcello, Colline, Schaunard… Leontina Vaduva fait travailler une seconde distribution de stagiaires, dans l’auditorium de l’Hôpital St-Joseph, dimanche 9 janvier, pour clore sa master-class conçue autour de l’œuvre de Puccini par l’association que dirige le baryton Cyril Rovery. Vaduva reprend les chanteurs: «Ne poitrine pas !» lance-t-elle à la jeune Mimi, «colle ta langue au palais… place le son plus haut.» Ci et là, la diva corrige la prosodie italienne, l’attaque d’une voyelle ou la position d’épaules encore trop raides… À la fin, sur les derniers accords du piano (Ludovic Selmi) et les déchirants «Mimi !» lâchés par le jeune poète au désespoir… dans le public venu nombreux, on verse une larme : comme d’hab !
Master-class avec Leontina Vaduva © Muriel Despiau
J.F
Opéra-Théâtre Pour Tous : Pôle de spectacles et de promotion lyrique Euro-Méditerranéen www.operatheatrepourtous.com
La prochaine Master-class à l’Hôpital St-Joseph sera animée par Mireille Delunsch autour des Noces de Figaro les 12 et 13 fév (entrée libre).
L’art de transmettre La soprano Leontina Vaduva livre pour Zibeline son avis sur nos jeunes chanteurs… et quelques souvenirs Zibeline : Quelles sont vos impressions sur le niveau des jeunes chanteurs en France ? Leontina Vaduva : Les jeunes ont des problèmes. Ceux qui sortent des conservatoires ne sont pas assez préparés pour la scène. Ils n’ont pas eu assez d’heure de technique et de chant. Du coup, quand la technique n’est pas sûre, je ne peux aller très loin dans mes conseils sur l’expression ou l’abord des perMaster-class avec Leontina Vaduva © Muriel Despiau
sonnages. En Roumanie, mon professeur de chant m’apprenait même à m’asseoir ou me lever d’une chaise, comment tomber à genoux, communiquer avec le public… Vous avez l’habitude des master-class ? Oui depuis trois ou quatre ans ! Je suis appelée un peu partout, en Tunisie, en Corée du Nord, à Paris ou Toulouse… D’ordinaire je travaille sur des airs d’opéras. Ce qui est intéressant ici c’est que le stage est axé sur un ouvrage entier. Mais ce n’est qu’une «mise en bouche» ! Les jeunes chanteurs ont des voix intéressantes, mais il faut savoir les guider. Personnellement, j’ai acquis de l’expérience au contact de grands noms de l’art lyrique. Aujourd’hui la préparation est moins «finie», ils mélangent les techniques. Mais ce qui est intéressant à Marseille, c’est aussi l’aspect scientifique du stage qui permet de bien comprendre comment fonctionne l’appareil vocal. Quelles qualités doit on avoir pour chanter La Bohème ? Il faut, pour Mimi en particulier, de l’expérience et de la maturité. Aborder d’autres rôles avant pour ne pas se laisser prendre par le torrent de sons qui vient de l’Orchestre. Ne pas tout donner, gérer la puissance, ne pas pousser : comme dans le bel canto mais avec des accents véristes. Quels sont vos meilleurs souvenirs dans Mimi ? J’en ai beaucoup : l’enregistrement avec Pappano à la baguette, ou avec Domingo au Met, à Toulouse, Buenos Aires… Il faut conserver un esprit jeune dans cet opéra pour que la recette miracle fonctionne, à la fin en particulier, pour nous faire pleurer à tous les coups. Et vos projets actuels ? Je donne des récitals et me consacre à l’enseignement. Je travaille sur un projet Verdi avec Marie-Christine Barrault… et je m’occupe de mon petit garçon !
À Marseille on aime les voix, par tradition… particulièrement les ténors ! On apprécie surtout le chant généreux et la présence d’un artiste propre à transmettre de l’émotion. Force est de constater que Stanislas de Barbeyrac a réussi son examen de passage au Foyer de l’Opéra le 8 janvier. Ce jeune ténor français a choisi un programme qui sort de l’audition convenue de pot-pourri d’arias. En puriste, il entame son récital par un des plus beaux cycles de Lieder qui soit. Il montre dans les Dichterliebe une belle expression, sobre et bouleversante quand le piano de Françoise Larrat, si important chez Schumann, distille de magnifiques postludes. Les dix mélodies des Illuminations, composées par Britten sur des poèmes de Rimbaud, mettent en lumière un lyrisme prodigue servi par un timbre égal, bien cuivré, capable de puissance comme de demi-teintes adroitement mixées. En bis, l’Air de la Fleur de Don José comme celui de Lenski de Tchaïkovski fournissent une coda luxueuse après un concert certes éprouvant, mais fort bien maîtrisé de bout en bout. Le public venu nombreux ne s’y est pas trompé, acclamant à sa juste mesure un ténor talentueux qu’on entendra fin janvier dans Cavalleria Rusticana (Beppe).
ENTRETIEN RÉALISÉ PAR JACQUES FRESCHEL
JACQUES FRESCHEL
Talent sûr !
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MUSIQUE
CHAMBRE | SYMPHONIQUE
Un Chopin de lumière Dix années de partenariat entre les nuits pianistiques et le théâtre Toursky, et encore un superbe concert dans le cadre des manifestations du bicentenaire Chopin. Le 14 décembre dernier on avait ainsi le privilège d’écouter Dang Thaï Son sur un programme d’une belle densité, le Concerto pour piano et orchestre n° 2,
Dang Thai Son © X-D.R.
l’andante Spianato et la Grande Polonaise Brillante puis le Concerto pour piano et orchestre n°1. Le pianiste était accompagné par l’orchestre de chambre de Toulouse dirigé avec enthousiasme par Claudio Cruz. L’orchestre, de par sa formation réduite, était écrasé au départ par la puissance du piano qui progressivement a su donner un bel élan à l’ensemble. Faut-il rappeler la fluidité, la clarté du jeu, les notes comme liquides, les beaux emportements et les apaisements lyriques ? Les arpèges s’enlacent avec une rapidité et une délicatesse qui font oublier la matérialité même de l’instrument. C’est une âme qui s’exprime, un être qui s’épanche avec fougue et retenue tout à la fois. La musique est un don, «je vous offre une Mazurka de Chopin» sourit le virtuose. Rêverie, méditation, entre le Köln concert d’un Keith Jarret ou les effusions d’un Michel Legrand, avec, par-dessus cela, une indicible poésie. Ne pensez pas que le sublime ne fasse pas de concessions à l’humour : le ter, (le public est grisé !) sera Pagode de Debussy. Lumineux ! MARYVONNE COLOMBANI
Spectacle donné au Toursky le 14 déc
Crise mystique ! Bicentenaire oblige, Liszt était à l’honneur à l’opéra d’Avignon avec une œuvre très peu jouée : La légende de Sainte Elisabeth. Cet oratorio, de grande envergure, pour orchestre, chœur, maîtrise d’enfants, solistes, relate la légende de la patronne des hongrois : chassée de ses terres par sa belle mère après avoir refusé son héritage princier, elle consacra sa vie à Dieu, soulageant les miséreux. Cette grande fresque sonore, balayée par la foi du futur abbé, étendit ses phalanges dans une éclatante matité, sous fond d’harmonies diatoniques diaprées de modalité. Le souvenir de Palestrina, ombré de la présence de Beethoven sous le regard bienveillant du gendre, Wagner, envahit les deux tableaux de ce quasi opéra. Servie par une
belle distribution, dirigée avec enthousiasme et précision par Alain Altinoglu, la geste lisztienne put être pleinement appréciée du public. Soulignons le superbe travail de tous ces artistes présents sur scène qui ont rendu une copie très homogène, pleine de souffle. CHRISTOPHE FLOQUET
Ce concert a été donné le 15 janvier à l’opéra d’Avignon avec son orchestre, sa maîtrise et son chœur, le chœur régional de PACA et les solistes : Christina Dietzsh, Nora Gubish, Pauline Nachman, Marc Barrard, Olivier Heyte, Chul-Jun Kim, Jean-Marie Delpas et Augustin Mathieu
Le crépuscule des idoles Rencontre du troisième type entre le pape du new musette et le cantor de Leipzig : Galliano, auréolé d’un sextette schubertien, rencontrait et jouait Bach ! Décor : sextette, dans l’ombre, hyper sonorisé, douche sur la star, debout, dans une réverb à faire Richard Galliano © Vincent Catala-Universal
pâlir la cathédrale d’Aix. Et les scènes défilent : prélude pour violoncelle interprété à la main gauche de l’accordéon, contrapunctus extrait de l’art de la fugue (enfin, on pense ?) concerto en la m, fa m, do m, aria, sicilienne… c’est noël ! Les pièces s’enchaînent, litanie de notes égrenées mécaniquement, rythmées par les bravi de la salle du GTP. L’accordéon, successivement avatar de la flûte, du violon, est réduit à un rôle élémentaire, voire rudimentaire. Décidément, Bach lui va mal. Il fallut attendre le bis pour apprécier la Badinerie à l’accordina, et Richard à l’accordéon, le vrai, dans la valse à Margaux ! Après son incursion dans un répertoire qui ne restera pas dans les annales de l’accordéon, prions pour retrouver celui qui fut longtemps… notre idole. C.F
L’Histoire à l’envers Entamer un programme de concert symphonique par du répertoire contemporain pour le poursuivre avec de la musique concertante fin XIXe et l’achever avec un chef-d’œuvre classique peut sembler étrange au mélomane, surtout lorsque la musique de John Adams ouvre le bal. Célébré pour ses ouvrages lyriques à travers le globe, il est trop peu joué en France, à cause de l’apparente trivialité de son langage répétitif qui n’a pourtant rien de minimaliste : c’est sans doute la richesse de son écriture orchestrale qui fait fuir les formations hexagonales. L’orchestre de l’opéra de Toulon s’est emparé de cet univers dans Shaker Loops avec une aisance confondante, aidé par la direction précise de Paul Watkins qui rendait grâce à une partition très riche en jeux de timbres et de nuances. La suite du programme, alléchante elle aussi, fut un brin décevante en raison de la prestation d’Antonio Meneses au violoncelle : malgré une évidente technique et un superbe vibrato, la justesse n’était pas toujours au rendez-vous sur les aigus dans deux partitions particulièrement périlleuses de Tchaïkovski qui furent néanmoins bissées par une superbe sarabande de Bach où la virtuosité du soliste put alors s’exprimer sans risque. La deuxième partie du concert mettait en lumière la 39e symphonie que Mozart écrivit vers la fin de sa vie, à 32 ans, dans une période sombre de sa carrière. En passant d’un siècle à l’autre, l’orchestre ne s’est pas départi de sa superbe, signant là une fort belle exécution de l’ouvrage, tout en contrastes, où les vents légers donnaient la réplique à des cordes très incisives, dans un tissu harmonique très mouvant faisant écho aux tourments du compositeur. Ce concert révélait une fois de plus la bonne santé de l’orchestre de l’opéra et une direction artistique dont les choix demeurent pertinents. ÉMILIEN MOREAU
Ce concert a eu lieu au Palais Neptune, Toulon, le 13 janv Antonio Meneses © Leo Aversa
MUSIQUE 31
Renaissance du piano italien Le consul général d’Italie, le directeur de l’Institut Culturel Italien, le président de la Chambre de commerce italienne, ont pris l’heureuse initiative d’inviter les étoiles montantes du piano italien. Le concert inaugural a permis de découvrir Orazio Sciortino dans un programme consacré à Liszt, inspiré par le charme de l’Italie romantique. Une première partie est extraite des Années de pèlerinage (Italie). Sciortino fait preuve d’une grande délicatesse de toucher, un raffinement impressionniste superbe dans Sposalizo, et d’une technique sûre sans inutile spectaculaire, dans Sonetto del Petrarca n° 140. Grandes plages d’accords soutenus, tierces staccato en arpèges, trémolos et trilles à deux mains : sa virtuosité n’est jamais gratuite dans Après une lecture de Dante, dont la coda brillante est une belle envolée lyrique. La seconde partie s’attache à des Paraphrases d’opéras. Verdi et Donizetti sont revisités par Liszt : Aïda tout en délicatesse et chromatismes, attaques pianissimi presque impalpables, Rigoletto, où l’on retrouve le merveil-
Orazio Sciortino © X-D.R.
leux quatuor bella figlia dell’amore. Et d’immenses variations où l’on se plut à rêver d’un Liszt bondissant. Et en bis la mort d’Isolde, toujours transcrite par Liszt sur un piano devenu orchestre et un pianiste qui détaille sans perdre la mélodie continue. Après les déferlantes Pollini et Michelangelli, le piano italien semble renaître avec de nouveaux talents qu’on aura le plaisir de retrouver à l’Institut Culturel Italien : Michelangelo Carbonara, Chiara Bertoglio, Scipione Sangiovanni. Le déclin politique de l’Italie
est heureusement compensé par une richesse culturelle vivante qu’il faut soutenir, pour éviter qu’elle ne s’effondre comme les murs délaissés de Pompéi… YVES BERGÉ
Le concert inaugural de la série, Etoiles montantes du piano italien, a eu lieu le 16 décembre à l’Institut Culturel Italien
deuxième série du cycle Les étoiles montantes du piano italien à l’Institut Culturel Italien. Deux heures d’un riche voyage, du baroque à la musique de film. Trois sonates difficiles de Scarlatti ouvraient le programme, gammes et ornements éblouissants sous les doigts sûrs du pianiste. La transcription de la Toccata et Fugue en ré mineur de Bach par Busoni fut magistralement interprétée : souci de liberté et de rigueur, maturité rare, plénitude du son sur le stretto où toutes les entrées se rejoignent avec force. Une parenthèse bel canto avec les Variations en mi mineur de Donizetti, une œuvre qui manquait d’audaces harmoniques. La très belle Fantaisie en sol mineur de Nino Rota nous rappela que le merveilleux mélodiste de Fellini était un grand compositeur : musique impressionniste, réveil ravélien, précédant des envolées lyriques très symphoniques. La Rhapsody in blue de Gershwin scellait cette superbe soirée, swing énergique, technique et sensibilité étonnantes. Un Nocturne de Respighi, à peine effleuré et une Tarentelle de Rossini, survoltée, résumaient en bis le talent de ce jeune pianiste. Y.BG
Après le beau concert de son compatriote Orazio Sciortino, le jeune pianiste Michelangelo Carbonara assurait la
Ce récital a eu lieu le 13 janvier à l’Institut Culturel Italien
Barok toute ! Soirée d’ouverture pleine d’émotion le 16 décembre Limpide Premier concert de l’année et succès mérité au foyer de l’opéra le 15 janvier Le quatuor Garance -une formation toute féminine, chose rare chez les musiciens- a régalé l’auditoire du foyer, plein à craquer comme toujours, dans un programme de quatuors à cordes allant de la fin du XVIIIe siècle au début du XXe. Le père du genre, Joseph Haydn, était représenté avec l’opus n°3 en sol mineur dit «le cavalier», idéal pour l’entrée en matière d’un Quatuor au son léger et délicat dû à la complicité palpable de Sophie Perrot et Cécile Bousquet aux violons, Blandine Leydier à l’alto et Elisabeth Groulx au violoncelle. Le langage âpre du 7e quatuor de Dmitri Chostakovitch posait alors un décor bien différent, entre couleurs populaires et écriture tendue. Puis les accords sculptés dans les dissonances russes laissèrent place à une palette de couleurs échappées de la musique de Maurice Ravel : l’unique quatuor à cordes du maître français, si redoutable d’exécution, a trouvé là un terrain de jeu idoine avec une interprétation limpide et raffinée, mettant en valeur la perspective sonore de cette architecture musicale au relief pigmenté. FRÉDÉRIC ISOLETTA
pour la 8e édition du Festival Nuit d’Hiver Malgré une délocalisation pour cause de travaux, le Grim n’a pas été abandonné par ses adeptes pour l’ouverture attendue de ce festival Barok au théâtre de la Minoterie. En programmant La trahison orale de Mauricio Kagel, chantre du théâtre musical, le pari de familiariser le public avec ces œuvres, mithéâtrales mi-musicales, qui fleurissent dans le second vingtième siècle, était lancé. Et tenu ! Écrit d’après les Evangiles du Diable, le texte déclamé par Bernard Bloch devient le support d’une fine mosaï-
que musicale aux contours surprenants concoctée avec malice par le compositeur argentin. Gaston Sylvestre aux baguettes percussives, Jean-Marc Montera à la guitare, Fortunato d’Orio au piano, Fanny Pacoud au violon et alto, David Rueff aux saxophones et Brigitte Sylvestre à la harpe surent soumettre leurs talents habituellement tournés vers l’improvisation à l’écriture plus rigoureuse de Kagel, et firent dialoguer leurs instruments (où il faut ajouter un piano jouet, des cloches, castagnettes, plaques de cuivres…) © Pierre Gondard avec ce texte délirant, distribué entre autres aux musiciens euxmêmes dans la mise en scène minimale d’Hubert Colas. Poétique ou lumineuse, mais hélas si peu jouée, La trahison orale est une pièce surprenante qui tombe à pic pour le lancement d’un festival tourné vers l’avenir. FRÉDÉRIC ISOLETTA
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MUSIQUE
AU PROGRAMME
SPECTACLES
ENSEMBLES
RECITALS
L’Arlésienne
Séculaire
Grigory le Grand
La comédienne Marie-Christine Barrault aime à relier dans ses spectacles des univers musicaux et poétiques. C’est le mélodrame de Daudet L’Arlésienne qu’elle narre en compagnie de l’Ensemble Opus 16 (dir. Jacques Pési) qui joue la musique ensoleillée de Bizet.
Il est des pianistes qui enferment leur jeu entre des barreaux stylistiques qui les empêchent de valser en liberté au dessus des touches noires et blanches du clavier. D’autres mettent leur imagination au service d’une émotion pure, débordant des cadres rythmiques théoriques et laissent respirer les phrases musicales sur la palette des nuances sonores : Grigory Sokolov est de ceux-là ! Chez lui le souffle, la lumière et la virtuosité exultent sans aucun mauvais goût. Qui a vu Sokolov en scène sait qu’il est aujourd’hui l’un des plus grands, l’un des plus humbles ! Il s’assied, il joue… et tout n’est que musique. Pour ce récital exceptionnel, il joue Bach, rappelant à l’évidence que la musique baroque, d’avant même l’invention du piano, peut trouver sa plénitude à cet instrument, et Schumann, alliant la fusion volcanique à la pure poésie.
ARLES. Le 8 fév. à 20h30 au Méjan 04 90 49 56 78 www.lemejan.com
Vidéo-Bach
F.-X. Roth © Celine Gaudier
Bach & Baroque est le 7e volet de la collection Operastoria, série de programmes vidéo réalisés par Gonzague Zeno, projetés sur grand écran : images vivantes colorées, tableaux, gravures, partitions, manuscrits... à l’écoute de la musique du Kantor, agrémentée de textes lus et sous-titres en points de repère historique. Un moment de délassement instructif ! AVIGNON. Le 9 fév. à 18h Théâtre du Balcon 04 90 85 00 80 www.theatredubalcon.org
Baroque et tango Leonardo García Alarcón et La Capella Mediterranea imaginent un croisement entre les madrigaux de Monteverdi et les tangos de Piazzolla, au fil d’étonnantes transcriptions et improvisations sur instruments anciens et modernes. Deux danseurs de tango tournoient au son d’arabesques de la soprano argentine Mariana Flores et du «tanguiste» Diego Valentin Flores. DRAGUIGNAN. Le 11 fév. à 20h30 Théâtres en Dracénie 04 94 50 59 59 www.theatresendracenie.com
TOULON. Le 4 fév. à 20h30 au Palais Neptune 04 94 18 53 07 www.festivalmusiquetoulon.com
L’Ensemble Les Siècles dirigé par François-Xavier Roth joue les Concertos brandebourgeois n°1 & 4 de Jean-Sébastien Bach avec, en regard, le Concerto de chambre de Gyorgy Ligeti. Des opus séparés par près de deux siècles et demi d’histoire !
Grigory Sokolov © Klaus Rudolph
ARLES. Le 28 janv. à 20h30 au Méjan 04 90 49 56 78 www.lemejan.com
La veille, au pays de Cézanne, les mêmes jouent Bach uniquement et ses Concertos brandebourgeois n°1, 3, 4 & 5. AIX. Le 27 janv. à 20h30 au GTP Concert «Presto» pour les enfants (à partir de 7 ans) le 26 janv. à 16h autour de ce programme (voir p 46). 04 42 91 69 69 www.legrandtheatre.net
Immanquable ! Juan Diego Florez est aujourd’hui le ténor di grazia le plus populaire. Merveilleux dans le bel canto italien comme dans les vocalises de Haendel, sa voix légère, claire, aux aigus faciles et son chant serein devraient séduire les amateurs marseillais, depuis qu’ils tolèrent (l’ancienne génération étant en voie de disparition) des organes plus modestes que ceux des César Vezzani ou autre Tony Poncet… Le Péruvien est accompagné par Vincenzo Scalera au piano.
Balbastre oublié
Rétrospective Un film (80 min.) de Gilles Coudert retrace l’aventure des Musicollages (échanges, rencontres, répétitions et performances) à travers Marseille. MARSEILLE. Le 14 fév. projection à 18h et 20h30 Auditorium Cité de la Musique (Entrée libre) 04 91 39 28 28 www.citemusique-marseille.fr
Grande «Dudu» Le Théâtre de l’Odéon devant fermer bientôt pour travaux, les spectacles d’opérettes s’enchaînent rapidement pour le plaisir des amateurs. La Grande Duchesse de Gerolstein d’Offenbach, bouffonnerie militaire, est réactualisée par Jacques Gervais. MARSEILLE. Les 29 et 39 janv. à 14h30 Odéon 04 96 12 52 70 www.marseille.fr
ARLES. Le 10 fév. à 20h Temple réformé 09 51 16 69 59 www.baroquesgraffiti.com MARSEILLE. Le 11 fév. à 20h30 Bastide de la Magalone 04 91 39 28 28 www.citemusique-marseille.fr
Coupo santo ! André Gabriel, l’Escandihado, Les tambourinaires du Pays d’Aubagne, la chorale l’Escolo de la Ribo font sonner les galoubets et la langue de Mistral. AUBAGNE Le 30 janv. à 16h Eglise St Sauveur (Entrée libre)
MARSEILLE. Le 31 janv. à 20h Opéra 04 91 55 11 10 www.opera.marseille.fr Juan-Diego Lorez © X-D.R.
Mariana Flores © Marie-Emmanuelle Bretel
L’ensemble Baroques-Graffiti poursuit son histoire du Quatuor avec un musicien français oublié. Claude Balbastre (1724-1799), élève de Rameau, fut un organiste jouissant d’une grande réputation à Chapelle Royale, au Concert Spirituel, à NotreDame… et claveciniste attaché à la Cour du futur Louis XVIII ou Marie Antoinette… On découvre ses Sonates en Quatuors avec Sharman Plesner et Adrien Carré aux violons, Jean-Christophe Deleforge au violone et Jean-Paul Serra au pianoforte.
Flammes et soupirs
Tambourin
Claudia Sorokina (soprano) accompagnée de Julie Degiovanni (clavecin) chante l’amour sous le triple croisement de l’Italie baroque, de Rameau et Haendel.
Avec Virginie & Jean-Baptiste Giai, Elodie Souli-Oubré (tambourinaires), Maurice Guis (piano), Michel & Marie-Josée Bernard-Savoye (récitant & chant), on découvre les Tambourinaires Aixois de la Belle-Epoque qui ont déployé une grande activité durant les dernières décennies du XIXe siècle et jusqu’à la Grande-Guerre (création de l’Acadèmi dòu Tambourin, organisation de concours...).
MARSEILLE. Le 4 fév. à 20h30 La Magalone 04 91 39 28 28 www.citemusique-marseille.fr
Jennifer, Philippe, Brigitte et Bruno
AIX. Le 15 fév. à 19h Temple rue de la Masse 04 42 99 37 11 www.orphee.org
Une pluie de grands interprètes réchauffe l’hiver des mélomanes aixois. Et bien au-delà !
Duo
Le mezzo soprano Jennifer Larmore s’allie au quintette à cordes OpusFive pour florilège d’airs de Rossini, Haendel… (le 4 fév. au GTP). Le formidable pianiste français Philippe Giusiano ravit dans Chopin et Rachmaninov (le 14 fév. au Théâtre du Jeu de Paume), quand Brigitte Engerer ajoutent aux Nocturnes du Polonais des grandes fresques romantiques de Liszt et Schumann (le 17 fév. au GTP). L’Orchestre Régional de Cannes (dir. Philippe Bender) joue la Symphonie «Prague» de Mozart et, en compagnie du pianiste Bruno Fontaine, son Concerto n°20 et celui en ré majeur d’Haydn (le 18 fév au GTP).
Deux jeunes talents, le pianiste Guillaume Vincent et le violoniste Jérôme Benhaim interprètent les Sonates pour piano et violon n°5 «Le printemps» & n° 7 de Beethoven. MARSEILLE. Le 28 janv. à 21h Station Alexandre. 04 91 00 90 00 www.station-alexandre.com
Trio Trois formidables solistes, Olivier Charlier (violon), Henri Demarquette (violoncelle) et Michel Béroff (piano) jouent les deux Trios op. 8 & 67 de Chostakovitch. ARLES. Le 13 fév. à 11h Méjan 04 90 49 56 78 www.lemejan.com
AIX. Concerts à 20h30 04 42 91 69 69 - www.legrandtheatre.net
Romantisme Caroline Boirot (piano) et Franz Ortner (violoncelle) interprètent Beethoven, Schubert et Schumann.
CHAMBRE Quatuor
MARSEILLE. Le 8 fév. à 20h Auditorium de l’Hôpital St-Joseph 04 91 54 76 45 www.musiqueandco.com
Le jeune Ensemble Raro, Quatuor avec piano formé en 2004, a rapidement conquis les grandes salles spécialisée dans la diffusion de musique de chambre. Il était naturel que ces jeunes musiciens se frottent à l’exigence critique des Sociétaires de la Musique de Chambre de Marseille, dans Mahler, Brahms et Schumann.
SYMPHONIQUE Passage Entre 1795 et 1811 un monde se couche… et sur le lit familier du classicisme s’étire le romantisme. L’Orchestre des Pays de Savoie s’emploie à éclairer cet instant décisif de l’histoire musicale, avec son cycle des Concertos pour piano de Beethoven. Son chef Nicolas Chalvin invite le pianiste Cédric Tiberghien pour son 1er Concerto en ut majeur. On entend aussi, en perspective, la 104e Symphonie de Haydn ou le Shaker Loops de John Adams… et on rit avec Mozart et sa trépidante Ouverture des Noces de Figaro.
MARSEILLE. Le 1er fév. à 20h30 dans l’Auditorium de la Fac de Médecine de La Timone. S.M.C.M. Espace Culture 04 96 11 04 60
Trio Emmanuel Strosser (piano), Romain Guyot (clarinette) et Giorgi Kharadze (violoncelle) jouent Debussy, Brahms, Max Bruch et… Louise Farrenc ! MARSEILLE. Le 15 fév. à 20h30 dans l’Auditorium de la Fac de Médecine de La Timone. S.M.C.M. Espace Culture 04 96 11 04 60
GAP. Le 28 janv. à 20h30 La Passerelle 04 92 52 52 52 - www.theatre-la-passerelle.eu
Idriss Agnel (Cétéra et Percussions), Luc Gaugler (violes de gambe), Jean Noël Catrice (flûtes à bec), Henri Agnel (Orpharion, Pandore, Cistre, Cétéra) jouent de la Musique de la Renaissance italienne signée (ou pas) Joan Ambrosio Dalza, Pietro Paolo Borrono Da Milano, Francesco Spinacino, Stefano Allegrini… LES BAUX DE PROVENCE. Le 13 fév. à 16h30 La Citerne 04 90 54 34 39 tourisme@lesbauxdeprovence.com
Cedric Tiberghien © Benjamin Ealovega
Les Ménestriers
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MUSIQUE
AU PROGRAMME
Création Orchestre National de Montpellier © Marc Ginot
Beethoven sur un plateau
Conte moderne
Les qualités reconnues du Mahler Chamber Orchestra sont le fruit d’un amalgame réussi entre des instrumentistes issus des grandes écoles musicales du monde entier. Tugan Sokhiev brille depuis son accession à la tête de l’Orchestre du Capitole et le pianiste Nicholas Angelich est admiré pour sa pâte sonore somptueuse. Ces talents s’allient, sur la grande scène du théâtre aixois, pour un concert Beethoven : Ouverture de Coriolan, Concerto pour piano n°5 «l’Empereur» et la Symphonie n°7. Cela promet !
Musicatreize dirigé par Roland Hayrabedian tourne avec Le Grand Dépaysement d’Alexandre le Grand, 5e Conte de la série créée ces dernières années par l’ensemble de musique contemporaine. Jean-Christophe Marti réalisait pour 12 voix, percussions et 2 comédiens jouant en langue des signes (mise en scène Philippe Carbonneaux) une adaptation du Talmud de Babylone propice à des réflexions politiques, philosophiques, éthiques, sur la colonisation, les langues… Au fil de rencontres/épreuves avec les Rabbis du désert, les femmes d’Afrique, s’ouvre pour l’Empereur mégalomane un chemin initiatique qui ébranle ses certitudes. La forme est celle d’un conte classique et la texture musicale, vocale et percussive, étire ses dissonances autour d’un continuum qui semble creuser l’espace temps.
AIX. Le 15 fév. à 20h30 au GTP 04 42 91 69 69 www.legrandtheatre.net
CONTEMPORAINE
SALON. Le 4 fév. à 19h Théâtre Armand 04 90 56 00 82 www.musicatreize.org
Écoute intime Enrique Mazzola, à la tête de l’Orchestre National de Montpellier Languedoc-Roussillon, dirige la 2e symphonie de Tchaïkovski, le Concerto pour violon de Khatchatourian avec Silvia Marcovici, ainsi que Lumen I partition contemporaine de Régis Campo, professeur de composition au Conservatoire de Marseille. NÎMES. Le 4 fév. à 20h Théâtre 04 66 36 65 10 www.theatredenimes.org
Varié
«N’ayant jamais vécu autrement, j’ignore comment exister sans piano» déclare le pianiste Mikhaïl Rudy dans son très beau récit autobiographique paru en 2008 (Le Roman d’une vie aux éditions du Rocher). On est heureux de retrouver, depuis quelques années, ce formidable pianiste russe arpenter les salles de concerts après (il le reconnaît lui-même) des périodes de doutes dues au stress de la vie nomade d’un concertiste international. En compagnie de Fabrizio Maria Carminati à la baguette, il joue le terrible Concerto n°2 de Chostakovitch quand l’Orchestre de l’Opéra se tourne vers l’Italie avec les poèmes symphoniques Cyrano de Bergerac d’Aldo Finzi et Les Pins de Rome d’Ottorino Respighi et la suite tirée de la musique du film Le Guépard de Nino Rota. MARSEILLE. Le 12 fév. à 20h Opéra 04 91 55 11 10 www.opera.marseille.fr
Le saxophoniste Raphaël Imbert et l’organiste André Rossi déclinent les riches croisements musico-mystiques qui se tissent entre l’univers baroque de Bach et le jazz de Coltrane (on avait découvert leur magnifique disque publié il y a trois ans : Bach / Coltrane chez Zig-Zag Territoire ZZT 080101). Des transcriptions, basées sur le principe de l’improvisation, exposent une texture de contrepoints aériens où la magnificence du son prime. Les deux musiciens sont secondés par Jean-Luc Di Fraya (voix et percussions) et Pierre Fénichel (contrebasse).
AVIGNON. Le 5 fév. à 20h Le Délirium LE THOR. Le 9 fév. à 20h30 Salle des fêtes LACOSTE. Le 1 fév. à 20h30 Ancien Temple JOUCAS. Le 13 fév. à 18h Centre culturel 04 90 78 64 64 www.theatredecavaillon.com
AVIGNON. Le 4 fév. à 20h30 Opéra-Théâtre 04 90 82 81 40 www.operatheatreavignon.fr
Russie et Italie
Ponts
CASSIS. Le 23 janv. à 17h Eglise St-Michel 06 67 90 02 80 www.musicalescassis.com Benjamin Dupé © Agnès Mellon
L’Orchestre Lyrique, de Région Avignon Provence dirigé par Jean Deroyer joue Requies, opus moderne de Luciano Berio, ainsi que la Suite Pulcinella tirée du ballet néoclassique de Stravinsky. La phalange instrumentale se joint à trois solistes de premier plan pour le Triple concerto pour violon (Cordelia Palm), violoncelle (Gary Hoffman) et piano (Vahan Mardirossian) de Beethoven.
«Je voulais jouer et parler de cette musique étrange qui, en refusant le confort du pre-entendu, espère toucher chacun d’entre nous au plus intime et au plus sauvage.» Telle est l’ambition de Benjamin Dupé qui promène ses guitares et son spectacle en Nomade(s) autour de Cavaillon. Comme je l’entends réussit à rendre intime l’écoute d’une musique réputée difficile, en allant au plus près des a priori des auditeurs, pour leur tordre le cou et leur faire entendre simplement des sons nouveaux, à travers le récit de l’expérience personnelle d’un musicien.
Paysager Les Acousmonautes présentent Le son de l’air est frais, des propositions de paysages sonores électroacoustiques signés (numériquement !) Dhomont, Eloy, Modica, Prod’homme, Savouret. Ou comment prendre l’air au cœur de l’hiver... MARSEILLE. Le 28 janv. à 18h30 Urban Gallery 04 91 37 52 93
Passé intérieur Tomasi lumineux La musique solaire d’Henri Tomasi, musicien méditerranéen particulièrement attaché à la Corse, sa terre natale, et Marseille sa cité d’adoption, peu à peu, grâce à l’obstination de personnalités du monde musical (auteurs, journalistes musicologues, musiciens…) la place qu’elle mérite. Les Marseillais de l’Ensemble Pythéas sont de ceux là. Pour commémorer le 40e anniversaire de la disparition du compositeur, les interprètes, sous la houlette du violoniste Yann Le Roux, jouent un florilège de ses opus pour formation de chambre : son Trio à cordes, la Pastorale inca, Paghiella et un Chant hébraïque, ainsi que les Invocations et danses rituelles pour harpe (Vassilia Briano), clarinette (Linda Amrani) et flûte (Charlotte Campana). MARSEILLE. «Un idéal méditerranéen» Le 5 fév. à 17h (5euros) Opéra 04 91 55 11 10 www.opera.marseille.fr
Tristan-Patrice Challulau (Savoirs et mémoires), Jean-Pierre Moreau (La liberté commence là où s’arrête...), Marcel Frémiot (Comptines), Marcel Formosa (Sur l’air de), Pascale Weber (Immémorial), Frank Dufour (soft thresholds) interrogent, parfois à l’aide d’outils vidéo, multidiffusion ou électronique, l’intimité sonore du processus mémoriel. MARSEILLE. Le 10 fév. à 20h30 Auditorium Cité de la Musique (Entrée libre) www.labo-mim.org Laboratoire Musique et Informatique de Marseille
Ubris Studio Cabaret électroacoustique entre Jacques Diennet et Annabelle Playe. Concert dédié à la mémoire de Frank Royon Le Mée. MARSEILLE. Le 4 fév. à 20h30 Auditorium Cité de la Musique 04 91 39 28 28 www.citemusique-marseille.fr
MUSIQUE
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LYRIQUE Drames passionnels
Mimi mélo !
MARTIGUES. Le 22 janv. à 20h et le 23 janv. à 16h Salins 04 42 49 02 00 - www.theatre-des-salins.fr
Cavalleria rusticana de Mascagni et Pagliacci de Leoncavallo, opéras en un acte, sont souvent couplés lors une même soirée tant leur sujet (deux histoires de jalousie et de crime passionnel en Sicile) et leur style (vériste - années 1890) sont liés. Il faut de grandes voix, larges et puissantes pour chanter ce répertoire. Ceux qui étaient à Orange à l’été 2009 ont entendu Roberto Alagna chanter les deux rôles principaux pour cette production reprise à Marseille où l’on attend le marseillais Luca Lombardo dans Turridu (enfin place Reyer !) et le russe Vladimir Galouzine dans Canio et son célèbre air fleuron des ténors héroïques… terriblement émouvant ! On retrouve Béatrice Uria Monzon en Santuzza, éconduite et désespérée, quand Natalia Timchenko incarne la jeune Nedda/Colombine. C’est un habitué du genre Giuliano Carella qui dirige ce diptyque. MARSEILLE. Les 28 janv. 2 et 4 fév. à 20h et les 30 janv. et 6 fév. à 14 h30 Opéra 04 91 55 11 10 www.opera.marseille.fr Beatrice Uria-Monzon © X-D.R.
Magie romantique On donne finalement assez peu Der Freischütz sous nos contrées, grand opéra romantique allemand signé Weber, si bien qu’il n’avait jamais été représenté à Toulon depuis sa création en… 1821 ! Claude-Henri Bonnet répare cette faute de goût en faisant appel à un couple inédit : Laurence Equilbey (direction) et Jean-Louis Benoît (mise en scène). L’histoire d’amour, sur fond de fantastique, entre le «franc-tireur» Max (Jürgen Müller) et la fille du garde forestier Agathe (Jacquelyn Wagner) est contrariée un moment par Kaspar (Roman Ialcic) ayant vendu son âme au diabolique Samiel (Jean-Michel Fournereau)… Jusqu’au concours de tir final et la septième balle magique ! TOULON. Les 28 janv. et 1er fév. à 20h et le 30 janv. à 14h30 Opéra 04 94 93 03 76 - www.operadetoulon.fr Jacquelyn Wagner © X-D.R.
Plaisirs frivoles La compagnie Les Brigands, depuis dix ans, exhume avec succès des ouvrages peu joués d’Offenbach (Barbe-Bleue, Geneviève de Brabant, Le Docteur Ox, Les Brigands), ou des opérettes des Années-folles : Ta Bouche de Maurice Yvain, Toi c’est moi de Moïse Simmons. C’est avec l’esprit léger, propre à l’après Grande-guerre, qu’elle produit Phi-Phi d’Henri Christiné, pièce en chansons, bourrée de calembours et double-sens grivois, créée aux Bouffes Parisiens en 1918 et narrant l’histoire pastichée du sculpteur grec Phidias atteint par le démon de midi au siècle de Périclès. Johanny Bert évite les incontournables poses égrillardes en transposant la mise en scène en théâtre de marionnettes. MIRAMAS. Le 5 fév. à 20h30 La Colonne 04 90 58 37 86 www.scenesetcines.fr
«O fortuna !» Jan Heiting © Jean-Eric Ely
Ce bijou de Puccini est, à juste titre, l’un des opéras les plus appréciés du répertoire. Il retrace la vie de Bohème d’une communauté d’artistes démunis, vivant dans une mansarde. C’est un portrait musical du Paris populaire, sous Louis-Philippe, doublé d’une formidable histoire d’amour qui recèle deux superbes airs enchaînés («Che gelida manina» / Rodolfo et «Si. Mi chiamano Mimi» / Mimi) ainsi qu’un final déchirant, à tirer les larmes de la plus brute des pierres. Après sa création en italien en 1896, l’Opéra comique présente une version française aux Parisiens en 1898. C’est à partir à partir de cette seconde mouture qu’Olivier Desbordes (mise en scène) conçoit cette production. On retrouve l’équipe que l’on avait appréciée il y a deux ans dans Les Contes d’Hoffmann, dirigée par Dominique Trottein, avec Isabelle Philippe (Mimi), Andréa Giovannini ou Svetislav Stojanovic (Rodolfo) Jean-Claude Saragosse (Marcello)…
Près d’une centaine de choristes de l’Ensemble vocal ad Fontes, deux pianos et percussions, dirigés par Jan Heiting interprètent les poèmes médiévaux mis en musique par Carl Orff dans les années trente: Carmina Burana et son célèbre hymne cyclique à la Fortune qui introduit et clôt la cantate. MARTIGUES. Le 12 fév. à 20h Salins 04 42 49 02 00 www.theatre-des-salins.fr JACQUES FRESCHEL
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MUSIQUE
AU PROGRAMME
AIX
CHÂTEAUNEUF-DE-GADAGNE
Théâtre et Chansons : Lison David et Romain Chaffard, Amour en cours (12 et 13/2) 04 42 27 37 39 www.theatre-et-chansons.com
Akwaba : The Buttshakers, Electrik Sofa (5/2), Les Touffes Kretiennes, Pipo for people, Pasteur Guy Disc jockey (11/2), The Infesticons feat Mike Ladd & Juice Aleem, Bleubird (18/2) 04 90 22 55 54 www.akwaba.coop
ARLES Cargo de nuit : Pony Pony Run Run (19/1), Kid Francescoli, Oh ! Tiger Mountain (21/1), Blind Test (27/1), Meshell Ndegeocello (28/1), Papet J & Rit (4/2), Soirée solidaire (5/2), Tony Joe White (12/2) 04 90 49 55 99 www.cargodenuit.com
AUBAGNE MJC L’Escale : George Sound, Saïko Nata (22/1), Lafayette, Dissonant Nation, Belphegorz (29/1), dans le cadre de Région en scènes, concerts de : BatPointG et Mochélan (14/2), Maison Rouge, Petite musique et OnEira (15/2)
AVIGNON Les Passagers du Zinc : Pablo Moses, Joe Pilgrim & Solo (3/2), Lee Scratch Perry (21/2) 04 90 89 45 49 www.passagersduzinc.com
BERRE L’ÉTANG Forum des jeunes et de la culture : Projection du film de Emir Kusturica, Super 8 stories, suivie du concert de Bratsch, l’énergie des Balkans (27/1), Roland Tchakounté (4/2) 04 42 10 23 60 www.forumdeberre.com
BRIANÇON Théâtre Le Cadran : Nawal, la voix des Comores (25/1) 04 92 25 52 52 www.theatre-le-cadran.eu
CAVAILLON Le Grenier à sons : Sophia Charaï (12/2) 04 90 78 64 64 www.theatredecavaillon.com Sophia Charai et Mathias Duplessy © X-D.R.
DRAGUIGNAN Théâtres en Dracénie : Hindi Zahra (1er/2) 04 94 50 59 59 www.theatresendracenie.com
GARDANNE 3 Casino : Belle du Berry et David Lewis (21/1) 04 42 65 77 00 www.ville-gardanne.fr
HYÈRES Théâtre Denis : Tony Joe White (13/2), The Legendary Tiger Man, Hifiklub (18/2) 04 98 07 00 70
ISTRES L’Usine : Tremplin découverte pop rock (28/1), Asa (4/2), Dub Inc (12/2), Feloche (18/2) 04 42 56 02 21 www.scenesetcines.fr
MARSEILLE Cabaret Aléatoire : Meshell Ndegeocello (27/1), Borgore, Tambour Battant, Niveau zéro, Baxter Beez, Comic Strip, Dj ckel & MC Bestone, Wll Skiller Krew (28/1), Beat Junkies (29/1), concert goûter avec Erikm (2/2), Ration Steppas, Yt, MaKaya sound, Blackboard jungle sound system (5/2), Crystal distorsion, 69 DB, Dragongaz (11/2), Hofmann family blues experience, Splash Macadam (12/2), Pharoahe Monch, Jean Grae (15/2) 04 95 04 95 09 www.cabaret-aleatoire.com Espace Julien : Movaizhaleine, Moïra & Abdoulaye (22/1), Godspeed you ! Black Emperor (28/1), Yaël Naïm (5/2), Jena Lee (8/2), Les rois de la Suede (17/2) 04 91 24 34 10 www.espace-julien.com La Machine à Coudre : The Norvins (22/1), The Anus Fletcher, The Last, Esprit libre (29/1) 04 91 55 62 65 www.lamachineacoudre.com
CHATEAU-ARNOUX Théâtre Durance : Rabih Abou-Khalil et Ricardo Ribeiro (29/1), Rendez-vous chez Nino Rota, spectacle musical de Mauro Gioia avec Maria de Medeiros et Barbara Carlotti (5/2) 04 92 64 27 34 www.theatredurance.com
La Mesón : 4e édition de Autour du piano : Henri Florens et Nicolas Cante duo (21/1), Yom, Manuel Peskine et Bijan Chemirani (22/1), Eve Risser solo et Emilie Lesbros (23/1), Tablao Flamenco avec Josele Miranda (5/2) 04 91 50 11 61 www.lameson.com
Leda atomica musique : Concert de sortie de résidence de Do(s) Mineur/part 2 (22/1) 06 77 03 21 12 ledatomica.mus.free.fr L’Embobineuse : Interface #16 : Richard Antez, Riva, Muller (26/1), Anne-James Chaton et Andy Moor, Hervé Boghossian (5/2), Loup, Motto, David Merlo (11/2), Riam#08 : soirée Dokidoki avec Renardo Crew, Scarlatti Geos Electro et Thiaz Itch (12/2), Zombie Zombie, Marteau Matraque (17/2) 04 91 50 66 09 www.lembobineuse.biz Le Duke : Papastomp Vs Fat Digger Fred (20/1), Luc Sky et Selecter the Punisher (21/1), Dj Screaming Baka (25/1), Radio chantier (27/1), Bailen Putos (28/1), Dj Oil (29/1) 04 91 90 74 21 Lollipop Music Store : Turner Cody (9/2) 04 91 81 23 39 Lollipopstore.free.fr
MARTIGUES Théâtre Les Salins : Incisif #2 : The Rodeo, Oh ! Tiger Mountain (8/2) 04 42 49 02 00 www.theatre-des-salins.fr
MAUBEC La Gare : Monstropante (28/1), Papaya cake, Miss White and the drunken piano (4/2), Coâ (13 et 16/2), If if Between, Le Singe blanc (18/2) 04 90 76 84 38 www.aveclagare.org
OLLIOULES Châteauvallon : Ben L’Oncle Soul (29 et 30/1), Cabaret Azmaribet (du 11 au 13/2) 04 94 22 02 02 www.chateauvallon.com
TOULON Oméga Live : Denis Alcapone feat Winston Reedy, backed by No More Babylon (4/2), Florent Marchet, We used to have a band (5/2), CharlElie, Narrow Terence (11/2), Festival Les Nuits de l’Alligator : C. W. Stoneking & The Blue Tits, Timber Timbre, Puta Madre Brothers (12/2), Soirée Zoo Electro : Data, Enticlimax, Statue (19/2) 04 98 070 070 www.tandem83.com
VENELLES Salle des fêtes : Chantistes de Entre 2 caisses (5/2) 04 42 54 71 70
AU PROGRAMME EN JAZZ | ACTUELLES MUSIQUE 37 Aix en Provence Grand Théâtre de Provence Paolo Fresu Devil 4tet (8/2) 04 42 916 969 www.grandtheatre.fr
Arles Le Boatel (péniche) Faroa quartet (4/2) 06 08 605 324 www.leboatel.com
Avignon AJMI La Manutention Tea-Jazz Spécial Benoit Delbecq& François Houle (23/1 à 17h), Paul Lay piano solo (30/1 à 17h), Ping Machine (4/2), Vincent Courtois solo Pierre Diaz & Trio Zephyr (10/2), Edouard Bineau 4tet (11/2), Sylvia Versini-Campinchi octet(17/2) 04 90 860 861 www.jazzalajmi.com
Briançon Théâtre Le Cadran Trio Berg/Surmenian/Jeanne(1/2), Andy Emler Megaoctet (9/2) 04 92 255 252 www.theatre-le-cadran.eu
Cassis Eglise Saint Michel Raphael Imbert : Bach-Coltrane (23/1 à 17h)
Hyères Théâtre Denis Leçon de jazz Duke Ellington par Antoine Hervé (21/1), Ronnie Lynn Patterson trio (22/1), Ari Hoenig Trio (19/2) 06 31 798 190 www.jazzaporqueroles.org
Marseille Cité de la Musique - La Cave Raphael Imbert (20/1), OMax at Lomax atelier et performance à partir de 10h, Jazz en Scène Latin Jazz (Jam-session) (24/1, 07/2), Benoit Paillard trio (14/2) 04 91 392 828 www.citemusique-marseille.com Librairie Maupetit Raphael Imbert Omax at Lomax (19/1 à 18h) Cri du Port Benoît Paillard Trio (20/1), Berg/Surmenian/Jeanne(27/1), Roland Tchakounté trio (3/2) 04 91 504 151 Inga des Riaux Nougarôtrement (21/1), Gig Street (28/1), Natalia Spengler 4tet (4/2), Africa Express (11/2), Swinging Papy’s (18/2), Abram Jazz4tet (25/2),
2 soirées spéciales Le plic ploc de la pluie (27/0), Claudia Meyer (24/2) 06 07 575 558 www.inga-des-riaux.fr Le Paradox Djanamango (21/1), Street Chamaan (27/1), Godfather (28/1), Technicolor Hobo (29/1), Hofmann Family (4/2), Daedalus Spirit Orchestra (19/2), Jamse&Lied? (20/2) 04 91 631 465 www.leparadox.fr Théâtre de la Criée Mariannick Saint-Ceran, Paul Pioli, Eric Surmenian (11/2 à 21h45) 04 96 178 031 www.theatre-lacriee.com Planet Mundo K’fé Jam Session Jazz tous les mercredis et Jam Latin Jazz tous les vendredis à 21h30 Roll’ Studio Alice Martinez trio sings Blue Note (22/1 à 18h30), Trio Tentik (15/2 à 18h30), Raphael Imbert (29/1 à 18h30), Vincent Strazzieri trio (5/2 à 18h30), Sudameris trio (12/2 à 18h30) 04 91 644 315 www.rollstudio.fr MuzikMania V. Strazzieri trio jazz-soul (21/1) 0491 442 638 www.reverbnation.com
Miramas Théâtre de la Colonne Charlier-Sourisse 4tet (3/2) 04 90 500 526 www.scenesetcines.fr
Salon de Provence Salon de Musique / IMFP Jean Pierre Fourment trio (25/1), Ping Machine (3/2), Philippe Petrucciani 4tet (8/2), Kami 5tet (15/2) Jam sessions les lundis et mercredis de 19 à 23h00 04 90 531 252 salondemusique@imfp.fr
Venelles Salle des Fêtes Ahmad Campaoré 5tet + Fanga (22/1) 04 42 549 310
Vitrolles Moulin à Jazz. Fontblanche Thomas Savy trio (22/1), Alexandra Grimal 4tet Seminare Vento (8/2), Céline Bonacina trio (12/2) 04 42 796 360 www.charliefree.com
Un musicien en liberté… À surveiller de près ! Ahmad Compaoré sait tout faire ou presque et en ce début d’année 2011, nous avons la chance qu’il monte régulièrement sur scène dans la région. L’Ahmad Comparoé Quintet composé entre autre, excusez du peu, du saxophoniste Raphaël Imbert, se produira à la salle des fêtes de Venelles (22/1 à 21h) et au centre ville de Marseille sur la scène de La Meson (28/1 à 20h). Le groupe talentueux sera d’ailleurs en résidence de création à La Boite à musique dans les murs de la Friche Belle de Mai du 24 au 28 janvier. Crée en 2008 au festival Mimi, le quintet de l’agité compositeur batteur est à «vivre» en live, relevant de la véritable performance scénique. Toujours bien entouré, le percussionniste du collectif Musique Rebelle sait compter sur les soutiens de Marion Rampal ou Manu Théron. De quoi varier les expériences et additionner les talents ! FRÉDÉRIC ISOLETTA
Explosif Varié et lumineux, le RIAM 2011 a bien des secrets à dévoiler Organisé par l’association Technè, le festival va battre son plein du 4 au 19 février au son et à l’image d’une multitude d’évènements. Ouverture à Seconde Nature avec Incite, vidéo performance accompagnée de MC2 (4/2 à 19h), et direction le MAC dès le lendemain pour le lancement de la revue Volume suivie de performances de Jérôme Poret et Von Calhau ! (5/2 à 18h). Un détour s’impose au GMEM (6/2 à 18h) pour un concert et vidéo de Morton Subotnick et Lillevan. Le Petit Théâtre de la Friche accueillera une conférence de Christophe Hanna et la projection de Stéphane Bérard Les ongles noirs (9/2 à 19h), et le Salon, situé au 37 cours Franklin Roosevelt, sera la scène de la présentation du label Stembogen (12 et 13/2 de 15h à 21h). Toujours au même lieu, une performance d’Arnaud Rivière (11/2 à 19h) sera suivie d’un dj set de Radio On et des concerts de Ravi Shardja, Bass Jog et Hänschenklein (11/2 à © 2010 Ted Gordon, courtesy of Schott Music 21h30 à l’Enthropy). L’inévitable Embonineuse accueillera entre autre les concerts de Scarlatti goes électro, Clara Clara et Thias Itch (12/2 à 19h30) et rue Jean de Bernardy la salle Où, lieu d’exposition pour l’art actuel, mettra en scène l’exposition de Frédéric Joseph Sanchez (15/2 à 19h) alors que l’installation d’Olivier Rasti verra le jour à la Galerie Seize rue Fontange (17/2). La soirée du Café Julien avec notamment le live de Baron Retif & Conception Perez s’annonce explosive (18/2 à partir de 22h30). F.I.
www.riam.info
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MUSIQUE
ACTUELLES
À partir de 20h30... Rocca, dans une interview radiophonique, précise que «La vraie musique, il faut la découvrir sur scène...», puis assimile les amateurs de musique, en termes plus crus, à des moutons victimes des grandes majors et des médias. Une chance pour lui ce soir ? «Les enculés du système» ne sont pas venus consommer sur place. En revanche, ceux arrivés à l’heure prévue, c’est-à-dire 20h30, auront eu largement le temps d’user leurs coudes sur le comptoir, seul appui possible du Cabaret aléatoire pour se reposer un peu de l’attente debout de presque deux heures avant le début du concert ! Rocca, rappeur, hip-hopper d’origine colombienne, accompagné de DJ Clyde et d’un percussionniste, nous interpelle par la question : «Est-ce que vous êtes chauds Marseille?»… Uhmmmmmfffff !!! Le programme de la soirée se décale forcément. On baille ! L’ensemble Musique Rebelle d’Ahmad Campaoré arrive around midnight. Enfin ! Les musiciens tourbillonnent parmi le public, on dit un texte, puis on entend aussi des fragments du discours de Martin Luther King en 1963 à Washington... I have a dream... La communion fraternelle démarre par une intro au piano et l’orchestre arrive progressivement dans un groove funky qui nous réchauffe le cœur. Un beau trio de voix suit, avec Sibongilé M’bambo, Amahada Smis et Manu Théron très émouvants, mélange improbable de musiques d’horizons divers -entre tradition et modernité- qui fonctionnait très bien ensemble. Un autre moment fort de la soirée est celui d’une danse flamenca par Sarah Moha coiffée d’une cagoule-rebelle
Pour aborder la fin d’année 2010 avec le sentiment du plaisir accompli, il fallait se rendre au Poste à Galène le 18 décembre dernier. Minitel Rose, mais surtout Killtronik occupaient la scène de la rue Ferrari (Marseille) pour un concert à retenir. Ce jeune groupe originaire de Cannes possède décidément de bons titres dans un style pop/électro mais principalement rock vintage, et les a offerts simplement en guise de cadeau de noël avant l’heure. Plutôt habitués depuis leurs débuts récents aux premières parties, notamment des Pony Pony Run Run, nos jeunes rockeurs ont su tenir la dragée haute dans une ambiance conviviale, et rapidement réchauffée au rythme de chansons électrisantes et stimulantes, pleines de vie. À suivre de près… Killtronik © Sebastien Israel
we are the Champion !
Vivifiant !
© Dan Warzy
avec Julian Demoraga au chant. Un grand nombre de musiciens ont participé à ce concert dont Stéphane Mondésir, Sylvain Terminiello, Laure Bonomo, Fred Pichot, Fabien Genais, Wim Welker, Denis Chauvet, Kouly Bally pour ne citer qu’eux... Mais le vœu d’Ahmad Campaoré de réussir le music-melting-pot ne fonctionnera pas à plein, faute de liens véritables. Trop de propositions décousues successives, standards de jazz loin de la ligne, improvisation déjantée, alternative et expérimentale du projet ou encore une distorsion, un exercice de jonglage abscons. Au final, une unité que l’on recherche encore pour cette édition de Musique Rebelle : la révolte nécessiterait sans doute qu’on y emmène un spectateur complice, et non qu’on le malmène DAN WARZY
Ces concerts ont eu lieu au Cabaret Aléatoire Friche de la Belle de Mai le 17 déc
© Dan Warzy
FRÉDÉRIC ISOLETTA
Les vœux de Charlie L’année nouvelle démarre sous d’excellents auspices le 8 janv au Moulin à jazz de Charliefree. Le solide quartet de Christian Brazier réinvente sans cesse une partition qui sert de terreau d’expression pour les quatre musiciens extralucides qui ont subjugué un public conquis. Perrine Mansuy (claviers), Christophe Leloil (trompette-bugle), Jean Luc Di Fraya (batterie-chant), Christian Brazier (contrebasse) sont décidément excellents. DAN WARZY
CD : Christian Brazier Quartet Circumnavigation Label CELP www.myspace.com/christianbrazier - www.christianbrazier.com
Cœurs à l’unisson Au départ, il y a un CD, Hymnesse, et une envie de spectacle portée par le Théâtre Durance, puis des artistes qui souhaitent dépasser sur scène leur enregistrement. Ils ajoutent des musiciens, d’autres sonorités, des épaisseurs de passion et de talent. Résultat, un superbe moment de musique. Hymnesse, composé de l’hymne et du tissage mêle aux accents du jazz et de l’improvisation les thèmes d’hymnes régionaux et internationaux. Pas de marche militaire, non, mais de ces chants qui se sont coulés dans nos imaginaires et qui nous accompagnent. On retrouve des airs catalans, irlandais, afro-américains, italiens, corses… internationaux… qui sont ici infiniment variés. On se plaît à deviner, à retrouver, à perdre aussi les motifs connus dans une transposition free. Ces airs ne parlent-ils pas avant tout de liberté ? Triomphe la musique, la virtuosité d’André Jaume au saxophone ténor et alto avec ses superbes phrasés, la guitare aux multiples sonorités d’Alain Soler, puis la basse et les percussions de Lionel d’Hauenens, l’orgue de Barbarie dans une incroyable utilisation jazzy de JeanClaude Bourrier, qui peut vous donner
un véritable cours sur l’instrument (qu’il a entièrement construit !) après le spectacle. N’oublions pas l’harmonica et la guitare de Melchior Liboa qui ajoute à l’ensemble une dimension vidéo. Ainsi, pour illustrer Bella Ciao, il projette des extraits de Riz Amer de Giuseppe de Santis qui met en scène les «mondine» (ouvrières des rizières) de la plaine du Pô et dont ce fut à l’origine le chant… À noter le bœuf avec Raphaël Imbert qui joint les notes emportées de son saxophone à celles des autres musiciens en fin de spectacle. Un supplément de plaisir ! MARYVONNE COLOMBANI
Spectacle donné au Théâtre Durance de Château Arnoux le 8 janv Hymnesse CD (Label Durance) 15,50 euros Alain Soler © X-D.R
AU PROGRAMME
Inventaire
CIRQUE
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Rock’n’roll Vie de cirque Musique, danse, théâtre et cirque composent, sur un rythme endiablé, le spectacle Call me Mariad’Adriàn Schvarzstein. Accompagné de ses complices catalans, il revient après le magnifique Circus Klezmer pour de nouvelles aventures. Sur fond de rock’n’roll, le spectacle est une immersion dans la Barcelone des années 50 et son port très prisé des Américains, alors que l’Espagne est devenue base des forces armées américaines. Un choc culturel inspiré de l’univers des comédies musicales. Call me Maria Le 21 janv Théâtre Durance, Château-Arnoux 04 92 64 27 34 www.theatredurance.fr
Numérique Dans le cadre du Festival Amarelles (voir p 43), danse et arts numériques au coeur de ce Cinématique proposé par la compagnie Adrien M. Initialement chercheur en informatique, Adrien Mondot s’est dirigé vers le jonglage pour explorer les liens entre arts de la scène et arts numériques. Détournant les sens, le spectacle entremêle réel et virtuel multipliant les faux-semblants troublants. Des ressorts proches de la magie pour une traversée des matières virtuelles. Egalement jusqu’au 29 janv dans le hall du théâtre, promenez-vous dans un paysage virtuel en 3D dans l’Anamorphose spatiale. © Vincent d'Eaubonne
Julien Candy, mis en piste par Stéphane Dupré, signe avec Le Cirque précaire une fresque de l’absurdité de la vie. Un inventaire à la Prévert, un regard léger, poétique et aussi cruel sur notre monde, à voir dès 5 ans. Des objets hétéroclites et improbables (scie, feuille de papier, toupies géantes…) manipulés par un personnage désabusé pour retrouver les lois fondamentales qui régissent la Terre : gravité, air en mouvement, couleur, équilibre. Qui est finalement objet ? Le Cirque précaire Du 28 au 30 janv Scène Nationale de Cavaillon, sous chapiteau Place du Clos 04 90 78 64 64 www.theatredecavaillon.com
Cinématique Le 26 janv Théâtres en Dracénie, Draguignan 04 94 50 59 59 www.theatresendracenie.com
© X-D.R
8 représentations du Chant du Dindon seront données par le cirque familial des Rasposo. Une formidable métaphore de la vie jouée par des amoureux de la piste et de la vie nomade. Un voyage saltimbanque entêtant au cœur des émotions d’une musique slave, métissée par les rencontres entre contorsion, acrobatie, équilibre, voltige, jonglage et comédie. Une réussite collective pour petits et grands, unanimement saluée par la critique et le public. Le Chant du Dindon Du 11 au 20 fév Théâtre de Sète, sous chapiteau à Frontignan la Peyrade 04 67 74 66 97 www.theatredesete.com
Portuaire Archaos Le CREAC accueille chaque année des cies en résiden- Après sa traditionnelle trêve des confiseurs de janvier, ces qui ont la possibilité de présenter des étapes de travail en cours au public. C’est le cas de la cie Crop Circus avec Casalinga (le 24 janvier à 19h et le 30 à 15h), la cie Rêve avec Les incubés (le 17 fév à 19h), la cie Osmonde avec Le reste on en reparlera (le 3 mars à 19h). D’autres suivront jusqu’en juin. Un atelier de recherches amateurs, encadré par des artistes de la cie Archaos, a lieu les mardis et jeudis de 18h30 à 20h30 jusqu’au 22 mars. Quant à la cie Archaos, suite au succès rencontré avec In Vitro 09, sa dernière création, elle prépare une tournée à partir de sept 2011… 04 91 55 61 64 www.archaos.fr
Lieux Publics revient aux sources : Pierre Sauvageot lui-même se met aux commandes avec Alexandre Pax, pour remixer en 12 minutes l’œuvre fondatrice de ses Sirènes et midi net : la symphonie bruitiste et futuriste du compositeur soviétique Arseny Avraamov, qui célébra les cinq ans de la révolution de 1917 par un concert concret de sirènes d’usines, de bateaux et de canons, de bruits urbains et maritimes. Parce que les sons prolétariens peuvent s’ordonner en musique. Symphonie des sirènes Le 2 fev à midi net Place de l’Opéra, Marseille www.lieuxpublics.fr
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CIRQUE
ARLES | ISTRES | GRASSE | PORT-DE-BOUC | MARTIGUES
Territoire de cirques Dans le cadre de la programmation commune de cirque contemporain des théâtres d’Arles, Port-deBouc, Martigues et Istres du 1er au 20 février, deux représentations auront lieu au théâtre du Sémaphore. Du cirque vivant avec une compagnie belge qui présentera Le Carré curieux. Mât chinois, tissu aérien, monocycle, diabolo et jonglerie composeront ce spectacle empli de facéties, griffé d’une joie communicative. Un cirque savoureux, entre perfection vibrante et enfance dérisoire. Puis l’école nationale des arts du cirque de Tunis présentera Sarkha (le cri). Neuf jeunes artistes dans un hymne à la vie, un hommage aux poètes tunisiens dans lequel s’entremêlent le cirque, la danse et le théâtre pour nous parler de leurs terres, leurs rêves, leurs blessures et leurs espoirs. Un cri visuel et musical, qui sera également présent à Istres et à Grasse. Au théâtre des Salins, l’événement intitulé ici Terres de cirque accueillera Antigone monologue clownesque d’Adèll Nodé-Langlois. Une adaptation du mythe d’Antigone sur une piste de cirque, avec force nez rouges pour nous faire rire un jour d’enterrement. Un projet téméraire pour un résultat d’une réussite totale qui nous rappelle que le clown, au-delà du rire, transmet de grandes leçons de vie. Autre grand rendez-vous avec une contorsionniste d’exception : Angela Laurier. Dans J’aimerais pouvoir rire, la canadienne raconte sa propre histoire en forme de road-movie, accompagnée par son frère Dominique, diagnostiqué schizophrène et en scène une grande partie du spectacle, sur les traces de leur enfance. Angela désarticule son corps, cherche son axe en réponse aux visions et au déséquilibre psychique. Un dialogue entre deux états physiques extrêmes d’une rare émotion. Déconseillé au moins de 12 ans. À Arles le cirque se concentrera sur la magie (voir cidessous). Quant aux Élancées, manifestation habituellement formidable du territoire Ouest Provence, elle est cette année suspendue et se voit réduit à une portion congrue (voir p8). Mais néanmoins, le théâtre d’Istres offre l’occasion de voir trois très beaux spectacles : après Sarkha, la compagnie
La La La Gershwin © Theatre National de Chaillot
Montalvo-Hervieu présentera Lalala Mr Gershwin. C’est avec les comédies musicales de Broadway en toile de fond et sur la thématique de l’opéra Porgy and Bess que 7 danseurs virtuoses, sur pointe, en basket ou claquettes, composeront un poème visuel vif et joyeux dans un éblouissant métissage et sur un montage d’images tout aussi virtuose et désopilant. À voir en famille. Puis, voltige aérienne sous chapiteau majestueux avec la compagnie Cirkvost et son spectacle Epicycle. Une structure métallique grandiose habitée par d’étranges habitants, sept acrobates fascinants qui composent un ballet aérien proche de la BD sur fond d’électroacoustique. Installé sur des transats, le public ne perd rien des chemins spectaculaires empruntés par ces artistes, anciens voltigeurs des Arts Sauts. DELPHINE MICHELANGELI
Le carré curieux Le 4 février Sarkha (le cri) Le 11 fév (le 13 fév au théâtre d’Istres et les 17 et 18 fév au théâtre de Grasse) Théâtre le Sémaphore, Port-de-Bouc 04 42 06 39 09 www.theatre-semaphore-portdebouc.com Théâtre de Grasse 04 93 40 53 00 www.theatredegrasse.com
Sarkha © Amine Frigui
Antigone monologue clowneque Du 1er au 3 fév J’aimerais pouvoir rire Le 3 fév Théâtre des Salins, Martigues 04 42 29 02 00 www.theatre-des-salins.fr Lalala Mr Gershwin Le 15 fév Epicycle Du 17 au 20 fév Théâtre de l’Olivier, Istres 04 42 56 48 48 www.scenesetcines.fr
Arles bracadabra
Influences © Nathaniel Baruch
Voilà que Mandrake, Fantômas, Robert-Houdin et Houdini reviennent en force dans notre imaginaire, et que la magie s’installe sur les plateaux des théâtres… Après que le Merlan lui a consacré un début de saison étonnant, le théâtre d’Arles propose le cycle De la Magie moderne à la magie nouvelle, orienté plus nettement vers des formes spectaculaires qui se
méfient du show. Il accueille la Cie 14:20 avec le spectacle Notte d’une perfection technologique absolue. Avec des effets d’optique étonnants et un art du jonglage proche de la calligraphie, Clément Debailleul et Raphaël Navarro nous plongent dans un ballet magique, étrange et irréel, sous les vers de Soupault et Baudelaire et les haïkus de Bashô. Raphaël Navarro tiendra une conférence gratuite sur la démarche originale de la compagnie vers la création de ce nouveau mouvement artistique qu’est la magie nouvelle. Puis c’est Julien Maurel, alias Magic Julius, un fidèle d’Ariane Mnouchkine qui pendant trois soirées, à l’issue des représentations de Notte et d’Influences, ouvrira les portes de la magie moderne avec ses rituels et son répertoire de codes et de gestes. Prestidigitation et illusion au rendez-vous, avec un repas magique en prime ! Thierry Collet, un autre maître de la prestidigitation, présentera son dernier
opus : Influences. Un spectacle de magie interactif dans lequel il manie les objets autant que nos consciences. Un mentaliste dont l’art relève de l’illusionnisme et de la manipulation qui nous interrogera sur nos décisions quotidiennes, intimes et collectives. Conseillé à partir de 15 ans. DE.M.
Notte Le 4 fév Magic Julius Les 4, le 11 et le 12 fév Conférence sur la magie nouvelle Le 5 fév Influences Les 11 et 12 fév Théâtre d’Arles 04 90 52 51 51 www.theatre-arles.com
AMARELLES | PAS SAGE... LES IMAGES
CAHIER JEUNESSE
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Re-conte moi encore Amarelles, temps fort jeune public de Théâtres en Dracénie, s’attache cette année au conte, et décline la palette des formes actuelles
son décor pivotant sur lui-même mobiliers et objets à l’identique et pourtant si différents sous les jeux de lumière ! -, l’irrépressible envie de Blanquette de vivre hors de son enclos, sans sa longe accrochée au pieu, pour goûter au plaisir de l’herbe verte et tendre gagne en force. Mais la machine à rêver s’emballe… et l’intrusion du loup lui donne le coup d’arrêt fatal. Noir effroyable et ambiance paroxystique : l’épilogue tant redouté ne nous sera pas épargné.
Abeille et loup
Du théâtre encore avec Abeilles habillez-moi de vous, conte de Philippe Dorin mis en scène par Sylviane Fortuny, qui aborde de façon détournée et très poétique le thème de la pudeur et de la représentation de soi devant les autres. Il dit des petites choses essentielles comme l’amour d’un garçon pour sa sœur et le manque d’une fille qui n’a pas de frère. C’est l’histoire de deux personnes seules qui ne veulent plus le rester, d’une princesse retenue prisonnière par son père qui a
Comment ai-je pu...? © Tristan Jeanne-Vales
Du théâtre donc, avec Comment ai-je pu tenir là-dedans ? de Jean LambertWild et Stéphane Blanquet d’après les Lettres de mon moulin d’Alphonse Daudet. Sur le plateau la tension ne fléchit jamais ! De la voix du narrateur (troublant André Wilms) posée sur la musique envoûtante de Jean-Luc Therminarias et Léopold Frey jusqu’au dernier souffle de la chèvre de Monsieur Seguin, l’oppression va crescendo. Pourtant personne n’ignore sa mort inéluctable, mais tous restent suspendus à la narration dans l’espoir d’une fin heureuse ! D’où vient cet attachement à Blanquette, si têtue dans son désir de grand air et si coquette ? À l’art du CDN de Normandie à construire une fable métaphysique sur la liberté et la mort à partir du parcours initiatique de Daudet, à travers un théâtre visuel élégant et inventif, féerique mais sobre, qui évite l’écueil d’une illustration réaliste du récit, et une gestuelle chorégraphique créée sur mesure pour Chiara Collet, personnification malicieuse de Blanquette. Avec
Abeilles, habillez-moi de vous © Patrice Leiva
Chèvre
fait coudre entre elles ses robes (celles du précédent spectacle, L’Hiver quatre chiens mordent mes pieds) pour l’empêcher de s’enfuir… Les deux artistes prennent le conte à contre-pied, détournent les codes pour parler d’amour et de nudité, de convenances, de bonheur. Mais ça c’est tout à la fin… Et du cinéma et de la musique tout ensemble : le dessin animé de Suzie Templeton est un petit bijou assez grave, qui détourne également le conte pour parler de liberté (voir p 48). La musique jouée en direct par l’Orchestre de Toulon redonne toute son épaisseur et la saveur des timbres à la partition de Prokofiev entendue cent fois, mais qui apprend mieux que toute autre à écouter les pas du chat, l’envol de l’oiseau… M.G.-G., A.F. ET DO.M
À venir Amarelles se poursuit à Draguignan jusqu’au 26 janv (voir p 39) Comment ai-je pu tenir là-dedans ? sera repris les 8 et 9 mars au PôleJeunePublic au Revest
Gare aux images ! Aussi loin que je me souvienne seuls les enfants sages recevaient une image… Alors quand la Cité du livre annonce tout de go que les images ne sont pas sages, quelle histoire ! Le jeune public pourra juger sur place, invité durant toute la manifestation Pas sages… les images à «pénétrer
Fil de Faire, Cie A Suivre © X-D.R
dans l’univers des arts visuels pour créer, inventer, imaginer et s’amuser». Un sacré programme qui mêle exposition, ateliers, spectacles, cinéma et rencontre. À la galerie Zola, les images s’envolent car le parcours de l’exposition Matière à rétro-projeter s’accompagne de projections permanentes de films d’animation à l’heure où les compagnies leur donnent vie sur une scène de théâtre : À Suivre avec Fil de faire et Triloléo & Cie avec NoNonBâ d’après le manga autobio-graphique de Shigeru Misuki. Grâce à l’Institut de l’Image, les jeunes vivront Les Aventures du prince Ahmed, se croiront Princes et princesses et, pourquoi pas, iront danser au Bal des animaux. Il leur faudra ensuite redescendre sur terre pour un «pas sage obligé» du virtuel au réel dans les ateliers ! La Fon-dation Vasarely, l’association Visualise et Fotokino les initieront à la déformation d’une œuvre, aux silhouettes projetées, aux dessins de sable sur table lumineuse ou encore à la chasse aux images. Enfin, l’image prendra la parole sous les traits d’Aline Ahond, réalisatrice de courts-métrages d’animation, photographe et auteur-illustrateur de livres jeunesse aux éditions Mémo et Mango, lors d’une rencontre à la librairie Goulard (2 mars). M.G.-G.
Pas sages… les images jusqu’au 5 mars Cité du livre, section jeunesse, Aix-en-Provence 04 42 91 98 78 www.citedulivre-aix;com
Au tableau
Les lauréats 2010 du 1er Concours photo des lycéens organisé par l’Education Nationale et la revue l’Étudiant ont eu la chance de participer aux Rencontres de la photographie d’Arles. Lycéens qui souhaitez tenter votre chance et découvrir la grand-messe de la photographie internationale, à vos appareils ! La 2e édition est ouverte jusqu’en mai sur le thème «Au tableau», catégorie image numérique ou en série : mises en scène, portraits, couleur ou noir et blanc. Avec, à la clef, le Grand prix, la Mention des internautes et la Mention du jury, mais également des appareils, des livres etc. http://blog.letudiant.fr/concoursphotos-lyceen
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ÉDUCATION
PRÉAU DES ACCOULES | NOUVEAUX COLLECTIONNEURS
Sur les ailes de mille et une nuits
En introduction à l’exposition L’Orientalisme en Europe : de Delacroix à Matisse qui aura lieu à la Vieille Charité à partir de mai, le Préau des Accoules propose aux enfants de circuler en tapis volant pour visiter l’Orient, sa civilisation, ses parfums. «Il s’agit de parler de l’Orient avant l’arrivée des occidentaux, précise Laurence Rossellini, responsable du lieu. La préparation de nos expositions nécessite deux ans : conception, recherche des œuvres, élaboration des présentoirs, des jeux pour les enfants. C’est nous qui fabriquons presque tout. Pour celle-ci nous avons choisi le thème du voyage, avec les caravanes des marchands qui traversent la région». Aujourd’hui les jeunes enfants du Centre aéré de La Tour d’Aigues découvrent cet univers. Dès l’entrée ils sont transportés dans l’imaginaire : un tapis-volant à roulettes les propulse par petits groupes au pied d’un dromadaire immense fabriqué pour la circonstance. Ils atterrissent au 18e siècle, sous le règne du grand calife Haroun al Rachid, contem-
porain de Charlemagne. Le marchand Ali Cogia part de Bagdad pour La Mecque, puis visite Le Caire, les rives du Nil, Jérusalem, les régions bordées par l’Euphrate et le Tigre ; une carte au sol permet de suivre l’itinéraire et découvrir l’immensité d’un territoire uni par une même langue, la même religion et la même monnaie. Plusieurs vitrines proposent des objets prêtés par des musées de la région : la maison avec son tapis, ses instruments de musique, des objets du quotidien commes les babouches, les plats ; le jardin représenté par des céramiques des musées Grobet-Labadié et Granet; une lampe de mosquée du 19e aux délicates arabesques... Un des clous de l’exposition est le tableau de La danseuse au tambourin du Musée de Carpentras : peint en Perse il y a 200 ans, il témoigne de l’influence de l’Occident sur les artistes car il a été réalisé à l’huile sur une grande toile, contrairement aux miniatures plus anciennes. Pour finir, des jeux proposent aux
Carreau de bordure Perse 18e siècle © collection musée Grobet-Labadie
enfants de vêtir des personnages à l’orientale avec bijoux, turbans, babouches, de composer des dessins géométriques ou des arabesques, de comparer les écritures. Une place est réservée au fac-similé d’une page du manuscrit syrien du 14e siècle qui a permis la traduction et la publication d’Antoine Galland en 1704 mettant l’Orient au goût des élégantes et des artistes.
L’Orient en tapis volant jusqu’au 11 juin Le Préau des Accoules, Marseille 2e 04 91 91 52 06 www.marseille.fr
CHRIS BOURGUE
Art, pédagogie et citoyenneté Les adolescents seraient à mille lieux de l’art contemporain… Pourtant, quand des accompagnements sont mis en place, ils se piquent au jeu avec une curiosité rarement démentie. C’est le cas des collégiens qui participent au projet Les Nouveaux Collectionneurs1. Pour sa troisième année, le programme concerne des élèves de 4e et de 3e de 5 collèges2 du département 13 autour d’un objectif : constituer une collection publique d’art contemporain. Un pari ambitieux qui nécessite un protocole rigoureux, l’appui des enseignants d’arts plastiques, de français, des documentalistes, et dont les premiers résultats sont encourageants : en deux ans, le fonds s’est enrichi d’une trentaine de pièces de 22 artistes, chaque classe ayant géré un budget d’acquisition de 10 000 euros par an alloué par le Conseil Général 13, et défendu ses choix devant une commission d’experts. Accrochées chaque fin d’année dans les collèges concernés par l’opération, les œuvres devraient faire l’objet d’une exposition collective en 2013. Il est même envisagé d’inventer une nouvelle forme de prêt, à l’image d’une artothèque, pour faire sortir les œuvres des établissements et les exposer
dans le milieu de l’art contemporain, sensibles aux différents médiums dont ils ignoraient jusque-là tout ou presque, initiés aux circuits de diffusion et de production, les voilà qui débattent autour des thèmes «Apparence et réalité», «Contraintes et libertés» ou «Jeux de détournements». Et plus largement encore abordent des questions sociétales, apprennent les règles du vivre ensemble : Les Nouveaux Collectionneurs devient alors un véritable levier pour une ouverture sur une éducation citoyenne. MARIE GODFRIN-GUIDICELLI
© Philippe Chitarrini, Les yeux de la meduse, 2010, technique mixte, dimensions variables
accompagnées d’argumentaires écrits par les jeunes… En attendant, le Bureau des compétences et désirs balise le chemin de la connaissance, au plus près de leurs questionnements, en les conduisant à la prise de responsabilité. Ils accumulent information et documentation, appréhendent outils méthodologiques et historiques nécessaires à l’appréciation
des œuvres, analysent et argumentent au fil des 12 séances du programme, tantôt en classe tantôt sur le terrain (galeries, ateliers parfois, musées, lieux ressources). «Tout le monde joue le jeu, souligne Yannick Gonzalez du Bureau des compétences et désirs, très vite les élèves qui sont effrayés au départ sont partie prenante à 90% car ils sont responsables de leurs choix». Immergés
1 Action soutenue par le Conseil Général, Marseille Provence 2013 et l’Inspection Académique, mise en œuvre par le Bureau des compétences et désirs et développée avec Sextant et Plus et Art-O-Rama 2 Vincent Scotto et Ruissatel à Marseille, Marc Ferrandi à Septèmes-les-Vallons, Henri Bosco à Vitrolles et Honoré Daumier à Martigues
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SPECTACLES
GYMNASE | PAVILLON NOIR | ALHAMBRA | LES SALINS
Ricky qui ? Tout est question de point de vue et de perspective dans cette histoire d’un petit garçon bien impatient de grandir au sein d’un camp d’artistes forains. Ricky Pompon, c’est lui, a beaucoup d’idées et envie de créer - il jonglera avec des tigres, changera des éléphants en musiciens… -, mais pour ça il faut être grand, et pour l’instant il assiste, en pestant, son grand frère Nestor, l’homme le plus fort du monde. Ils sont nombreux les forains, et un peu particuliers, voire effrayants, du fakir royal au magicien le comte Zubrowska et son assistant Smirnoff, en passant par Calamity Jane elle-même dont Nestor semble très amoureux, ou les Musset mari et femme, dompteurs d’animaux féroces aux formes et aux cris très bizarres… Bertrand Bossard recrée son texte et transforme sa mise en scène initiale (1996) en jouant en particulier sur un décor ingénieux, transformable, qui de plusieurs roulottes successives devient
un fond sur lequel s’incrustent, en dessins animés, les jambes du géant Nestor ou le fakir en lévitation, des marionnettes… tandis que les trois comédiens jouent une dizaine de rôles. La bravoure de Ricky finira par avoir raison de son impatience, au terme d’une sacrée nuit… DOMINIQUE MARÇON
Ricky Pompon a été recréé au Théâtre des Salins, à Martigues, le 12 janvier, et sera joué au théâtre du Gymnase, à Marseille, du 9 au 11 février 0 820 000 422 www.lestheatres.net Ricky Pompon, Le comte Zubrowska © illustration Marion Roustit
Sur les quais, on vit ! Josette Baïz attaque l’année sur des rails affutés ! Pour s’éloigner de la noirceur de sa très belle création Oliver Twist de 2009 (voir Zib’25) avec les enfants du groupe Grenade, elle déclare, à l’issue de la première de Gare Centrale, qu’elle a éprouvé un besoin de
Gare centrale, Josette Baiz © Léo Ballani
légèreté. Et de la légèreté il y en a à profusion dans cette chorégraphie d’à peine un peu plus d’une heure qui se passe sur le quai d’une grande gare française, et semble un clin d’œil aux événements rocambolesques de la période de Noël ! Dominique Drillot a installé un décor qui évoque les structures d’Eiffel, 12 personnages y attendent sagement leur train dans des costumes très colorés. Mais le système se dérègle, les trains n’arrivent pas ; de temps en temps une voix impersonnelle demande le calme pour offrir à la fin un voyage gratuit... Une histoire banale en somme, on occupe son temps comme l’on peut et, en attendant, les gens se rencontrent, se mesurent ou ébauchent des amourettes... La bande-son fait alterner la musique de Bach avec des arrangements électro de Jean-Jacques Palix. Les danseurs parcourent le plateau à grande vitesse, se jettent au sol ou dans les bras les uns des autres avec une agilité, une souplesse déconcertantes, saisis par une sorte de frénésie. D‘appétit de vivre ? Dans cette
Fin d’année en série noire
Lieu et date du délit : l’Alhambra Cinémarseille, le jeudi 30 décembre vers 15 heures Les faits : pendant une heure dix, porté par la musique jazzy de Serge Besset, Dino le chat a mené sa double vie entre, la fille de Jeanne la commissaire, Zoé, mutique depuis la mort de son père et Nico, le voleur agile et solitaire, parcourant les toits de Paris, poursuivi par des truands patibulaires et mal rasés, gaffeurs et idiots, Monsieur Hulot, Monsieur Bébé, aux surnoms en clins d’œil cinéphiliques. Témoins : une soixantaine d’enfants, une douzaine d’adolescents et d’adultes, scotchés et silencieux. Parmi eux Pierre et Thomas (15 et 16 ans), qui ont fort apprécié le gag du chien et le comique de répétition. Et Théo (10 ans), qui trouve que c’est bien qu’ «ils» soient réunis à la fin. Verdict : le troisième long-métrage d’animation produit par Folimage, Une vie de chat, réalisé par JeanLoup Felicioli et Alain Gagnol, est un polar, un vrai,
avec ses courses-poursuites, ses rebondissements, ses «méchants» et ses redresseurs de torts et même ses clins d’œil au genre. C’est aussi un régal pour les yeux : sur les toits de la capitale endormie les corps des personnages deviennent croissants de lune. On pense aux décors de Trauner, parfois. Les gargouilles de Notre-Dame Une Vie de Chat de Jean-Loup Felicioli et Alain Gagnol
vélocité on retrouve ce qu’on aime chez Josette : le mélange subtil des langages chorégraphiques du monde en même temps que celui des origines des interprètes ; on regrette seulement que ce moment unique de l’attente où tout est possible n’aboutisse pas à quelque chose de dramatiquement plus fou. CHRIS BOURGUE
Gare Centrale s’est dansé au Pavillon noir, Aix du 13 au 15 janv
À venir le 15 février à Rousset, salle Ventre le 18 février à Manosque, théâtre Jean le Bleu le 2 mars à l’Auditorium du Thor puis en avril et en mai à La Penne sur Huveaune et au Gyptis, Marseille www.josette-baiz.com
se nimbent d’or à l’aube. Quand s’y suspendent Costa, l’infâme et irascible gangster qui veut supprimer Nico, gentleman cambrioleur, devenu le sauveur de Zoé, kidnappée par Claudine, sa fausse «nounou», on pense à Harold Lloyd accroché à son horloge dans Safety Last ! tout comme la scène du zoo renvoie à La nuit du chasseur de Charles Laughton. Sans oublier les trouvailles formelles : «la vision chat» en noir et blanc, le parfum nauséabond de Claudine en volute mauve qui se répand audessus des toits… Bref jazz, polar, nuit, poésie et dessin animé font vraiment bon ménage ! INSPECTEUR A.G Un ciné-goûter a eu lieu le 12 janvier à l’espace Robert Hossein à Grans
LE REVEST | CAVAILLON | MARSEILLE | CANNES | BRIANÇON
Choisir sa mère
Debout © Makhi Xenakis
Merci la vie !
Oh boy ! © Thibaut Briere
Son histoire commence sans lui, au début du commencement, quand il n’imaginait pas avoir une vraie famille. Lui c’est Barthélémy Morlevent, 26 ans, sans emploi fixe et homosexuel. Libre comme l’air jusqu’à ce qu’il lui tombe du ciel Siméon, 14 ans, surdoué binoclard, Morgane, 8 ans, quasi transparente, et Venise 5 ans surnommée Boucle d’Or, tous trois orphelins depuis peu. Depuis que leur maman est tombée dans l’escalier… euh, suicidée, mais ça ils ne le savent pas. Il y a aussi Josiane, 37 ans, ophtalmologue, célibataire, domiciliée dans les beaux quartiers. Qui des deux aura la charge de leur éducation ?…
D’une situation dramatique à la Zola, l’auteure Marie-Aude Murail pose la question de la responsabilité et de la tutelle (ce fameux «tututruc» comme l’appelle Barthélémy) ; le Théâtre du Phare imagine un théâtre de récit et d’objets qui parle au cœur des ados. Vocabulaire familier mais jamais vulgaire, situations comiques pour faire passer la pilule du désespoir (il s’avère que Siméon est atteint d’une leucémie), décor a minima qui laisse toute la place au jeu dynamique et émouvant de Lionel Erdogan. Oh boy ! est un spectacle humain, vrai, drôle, qui ne cache pas la réalité derrière un vernis, provoquant à coup sûr l’empathie du public pour la tribu Morlevent. Car il remue des sentiments profonds et parle de la vie de chacun, l’amour filial, l’abandon, la maladie, les copains…
M.G.-G.
Oh boy, Molière jeune public 2010, a été donné le 14 janvier au PôleJeunePublic au Revest et sera joué le 25 janvier au Théâtre de Cavaillon 04 90 74 68 68 www.theatredecavaillon.com
Le texte écrit par Nathalie Papin parle d’un enfant maltraité par sa mère, et des impasses auxquelles cela conduit forcément, parce qu’on ne change pas de mère, même lorsqu’on rêve à d’autres, imparfaites. Debout raconte comment on peut grandir avec ça, et les enfants écoutent et regardent, touchés par cette histoire qu’on leur espère étrangère, mais qui met en scène un tabou commun : les mères, même les meilleures, sont toujours castratrices. Et les pères absents, ou impuissants. La mise en scène d’Alexandra Tobelaim, la scénographie, les marionnettes d’Arketal rendent l’émotion du texte avec une simplicité stylisée. Jouant sur les ocres et les gris, les ombres découpées, les projections et une manipulation simple, les marionnettes s’abstiennent de toute tentation réaliste, tandis que le tempo lent installe le spectacle dans une stratégie d’attention au texte, abondant, et aux images, nombreuses. Dans une intimité
SPECTACLES
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aussi, induite par la modeste taille des marionnettes et la subtilité des relations entre les personnages. Sylvie Osman fait oublier son corps derrière ceux qu’elle manipule. Le jour de la première sa voix fatiguée ne parvenait pas à s’imposer. Sans aucun doute un simple problème de réglage… AGNÈS FRESCHEL
Debout a été créé à Carros le 7 déc et joué au Massalia du 11 au 14 janv et au Pôlejeunepublic du Revest les 18 et 19 janv
À venir Debout 4 février La Licorne, Cannes 04 93 94 33 44 15 février Le Cadran, Briançon 04 92 25 52 52 www.theatre-le-cadran.eu
Bel Andersen La réalité économique du théâtre jeune public est telle aujourd’hui qu’il est rare de voir une production se payer un tel décor… Et bien savez vous quoi ? Ce n’est pas un luxe, et cette coproduction de plusieurs Centres dramatiques, et du Gymnase, réjouit les yeux du public. Ses décors enchâssés qui découvrent progressivement des espaces insoupçonnés, des cadres dans les cadres, des boîtes de jeu colorées, est un régal d’intelligence de l’espace. Et les enfants adhèrent ! comprenant ainsi facilement que la comédienne, selon le plan sur lequel elle se trouve, est une conteuse, une présentatrice, un personnage du récit cadre, ou enchâssé. Car Le petit Claus et le grand Claus joue sur plusieurs niveaux de représentation des contes d’Andersen, débutant par une
illustration poétique, avec une grande marionnette, de La vendeuse d’allumettes, et s’attachant ensuite à une relecture actualisée de Petit Claus et grand Claus. Là sans doute la réussite est moins grande. Non dans la représentation, mais dans le recours à des transpositions caca prout répétitives, et à un jeu outré pas toujours pertinent dans ses décalages. De même que la séquence initiale où la comédienne vient chauffer le public semble incongrue : Andersen y suffit, et le talent de trois comédiens au bel abattage. A.F.
Le Petit Claus et le grand Claus a été joué au Gymnase, Marseille, du 11 au 13 janvier
Le petit Claus et le grand Claus © Agnès Mellon
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SPECTACLES
AU PROGRAMME
Thé russe
Dès 4-5 ans les contes parlent aux enfants, alors, quand ils transportent avec eux l’imaginaire Russe jusqu’au Théâtre des Ateliers, c’est magique ! Jacques Brossier, Alice Chenu et Maxime Potard donnent voix à Hailibu le chasseur au grand cœur qui, après avoir sauvé la fille d’un dragon, reçoit un don d’une grande valeur… La recette conte spectacle, rencontre et goûter fait le succès des Lectures Plus du théâtre. Hailibu le chasseur au grand cœur 26 janvier Les Ateliers, Aix-en-Provence 04 42 38 10 45 www.theatre-des-ateliers-aix.com
Décoiffant
Hop hop hop
Karin Serres a l’art d’écrire des textes qui font mouche et interrogent le jeune lecteur, et Louise les ours est plein de promesses. Son héroïne, Louise, a 11 ans, elle vit au Canada avec son père et sa grande sœur quand une chose extraordinaire lui arrive ! un ours blanc transparent la suit jour et nuit, un compagnon de tous les instants, un double, un confident. Mais elle seule peut le voir, sacré problème quand l’ours prolifère derrière chaque habitant… Difficile alors de quitter l’ours et faire le deuil de l’enfance. Louise les ours dès 7 ans 9 et 11 février Massalia, Marseille 3e 04 95 04 95 70 www.theatremassalia.com
Accordéon, kazoo, maracas, concertinas, Muriel de Mars sait tout jouer et tout chanter : des histoires hurluberlues de vaches sur un mur, de «tégévé», de crapaud à chapeau et même de galipettes ! Comme si Charles Trenet et Bobby Lapointe avaient essaimé leur grain de folie au milieu de comptines traditionnelles. À cloche-pied Hop Hop Hop est même permis dès 0 ans, c’est dire… À cloche-pied Hop Hop Hop dès 0 ans du 19 au 22 janvier Le Lenche, Marseille 2e 04 91 91 52 22 www.theatredelenche.info
Pacifique
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Au «pays du jamais jamais» de Peter Pan, on se prend pour de méchants pirates ou pour une bande de gamins insolents, on crapahute sur le vaisseau fantôme et vole avec Betty Boop… Comme la joyeuse tribu d’acteurs portés par Alexis Moati parvient à rendre plus vraie que vraie l’illusion du théâtre, on croit dur comme fer aux rêves de la famille Darling ! On se laisse totalement emporter par la malice des comédiens, les trouvailles de la mise en scène et le rythme jubilatoire.
Transparent
Est-il si difficile de cohabiter dans le bonheur et dans la paix ? Si l’on en croit les deux artistes francoisraéliennes Einat Landais et Lital Tyano, il semblerait que oui. Sauf qu’en usant de la fable animalière, en associant jeu d’acteur et théâtre de marionnettes et d’objets, en faisant planer au-dessus des hommes la blanche colombe, le spectacle parle aux enfants qui n’ont aucun mal à saisir le vrai sens de l’histoire : harmonie. Appartement à louer dès 3 ans 4 et 5 février Théâtre de Grasse 04 93 40 53 03 www.theatredegrasse.com
Peter Pan ou le petit garçon qui haïssait les mères dès 8 ans 8 février PôleJeunePublic, Le Revest 04 94 98 12 10 www.polejeunepublic.com
Simplement vêtue d’une robe et d’un collant noirs, Jeannine Gretler ouvre son album de souvenirs avec gourmandise : entre deux accords de guitare et de violoncelle, elle se remémore mille et une anecdotes de sa jeunesse, mêle le français, le suisse allemand et l’anglais en un tour de main et endosse tous les rôles, même celui de son chien Pepsi ! Bref, le spectacle projette les enfants à cent à l’heure dans le miroir grossissant de leur propre vie. Album photos dès 7 ans 19 janvier Forum de Berre 04 42 74 00 27 www.forumdeberre.com
En éveil
La Naissance dès 3 ans 2, 4 et 5 février Massalia, Marseille 3e 04 95 04 95 70 www.theatremassalia.com
Philippe Foch propose aux tout-petits un voyage au cœur du son, un moment d’écoute particulier à partager au plus près de l’artiste : Kernel est une miniature sonore qui s’appuie sur les percussions qu’il manipule, tablas, gongs, métaux auxquels il mêle sa voix, point de départ d’une histoire particulière. Sur un texte de Suzanne Lebeau, Maud Hufnagel (qui l’interprète) et Lucie Nicolas racontent, avec des personnages de papier et métal, l’histoire de Petit Pierre, enfant différent, «pas fini», mis au ban de la société et qui mettra 40 ans, seul et en silence, à construire un manège extraordinaire, joyau de la Fabuloserie, musée d’art brut de Dicy.
Vertigineux
À l’heure du plein, du trop plein et de l’abondance, la compagnie Les Racines duVent marche à rebroussepoil ! Elle évoque le vide et part à la rencontre de ceux qui l’ont apprivoisé : trapézistes ou funambules bien sûr, mais aussi sages-femmes ou scientifiques… quelle drôle d’idée ! Un concept mis en musiques, en mots et en scène pour tous ceux qui n’ont pas le vertige. Vide dès 14 ans 1er février Massalia, Marseille 3e 04 95 04 95 70 www.theatremassalia.com
Kernel de 6 mois à 4 ans 2 et 5 février Petit Pierre dès 6 ans 15 février Théâtre Durance, Château-Arnoux 04 92 64 37 34 www.theatredurance.fr
Lumineux
Malgré la triste destinée de la petite sirène, AnneCaude Goustiaux aime le texte merveilleusement lumineux d’Andersen qui dit la cruauté du royaume de la mer si semblable au nôtre. Sa nouvelle création fera revivre sur la scène du Badaboum théâtre toute la poésie du conte pour en dégager l’émotion et la beauté. La petite sirène dès 4 ans du 16 février au 4 mars Badaboum théâtre, Marseille 1er 04 91 54 40 71 www.badaboum-theatre.com
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Premier volet d’un projet artistique autour des quatre étapes de la vie, La Naissance est une création de Jung-Shi Chou, une Taïwanaise qui vit en France. C’est aussi la rencontre entre la pensée orientale et occidentale, les mythes et les légendes issus des traditions asiatiques et européennes. Ombres chinoises, marionnettes, jeu d’acteurs, d’ombres et de lumières tenteront de recréer cette étape magique d’avant la naissance.
Apprentissage
© D-Mournet-Ramel
© Michael Faucchin
À feuilleter
SPECTACLES LIVRES
Sans bobinette
Punch
Aérien
La compagnie Vol Plané réinvente Le Malade imaginaire dans une mise en scène dépouillée et sans esbroufe, dans un dispositif qui veut casser les conventions : tirades débitées à la mitraillette, début des scènes projeté sur un écran, spectateurs sur la scène derrière le trait tracé au sol qui la délimite… Résultat : un régal de spectacle qui redonne au texte sa folie comique.
Le Cirque National de Pékin sait y faire : pour sa tournée européenne il a choisi d’adapter le célèbre ballet de Tchaïkovski, le Casse-noisette et ses enfantines mélodies… La troupe, 18 acrobates à la virtuosité époustouflante, a repris l’intrigue fantastique du conte d’Hoffmann, mais transporte la jeune fille poursuivant son Casse-noisette dans un pays rêvé, exotique, où les corps s’envolent à renfort de cordes de soie, de trapèzes et d’effets spectaculaires.
Le Malade imaginaire dès 10 ans 18 et 19 février Forum des jeunes, Berre 04 042 10 23 60 www.forumdeberre.com Faim de loup © Serge Lucas
Debout de bois dès 5 ans 1er et 2 février PôleJeunePublic, Le Revest-Les-Eaux 04 94 98 12 10 www.polejeunepublic.com
En mouvement
Basée sur une douzaine d’albums de Jeanne Ashbé, Où va l’eau ? est un spectacle pour tout-petits qui décline leur quotidien : le bain, le canard, l’éponge… dans un univers coloré qui permet de patouiller et patauger.
© Navio Théâtre
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ARM dès 6 ans 25 janvier
Aquaphile
© Tomek Jarolim
19 janvier Espace 233, Istres 21 janvier Espace Robert Hossein, Grans 26 janvier Médiathèque intercommunale, Miramas 29 janvier Le Théâtre, Fos www.scenesetcine.fr
Faim de loup dès 8 ans 13 février Théâtre La Passerelle, Gap 04 92 52 52 52 www.theatre-la-passerelle.eu
La compagnie Belge Mireille et Mathieu est connue pour son humour décomplexé, excessif, déjanté. Avec ARM ils en mettent encore plein la vue et les oreilles sur le mode de «cascades d’imagination associative» : à partir d’objets en tous genres trouvés sur les marchés aux puces se succèdent à un rythme effréné des saynètes hilarantes, et toujours pleines de poésie, sur l’amour, la violence et le jeu. Debout de bois est un spectacle basé sur le mouvement, l’acrobatie et la manipulation d’un tronc d’arbre qui sert tour à tour d’agrès et d’instrument de musique. Il sera question d’équilibre, dans un univers sonore et plastique fait de morceaux de bois qui tous construisent ou déconstruisent la station verticale.
Casse-noisette 31 janvier et 1er février Théâtre Toursky, Marseille 0 820 300 033 www.toursky.org
Où va l’eau ? 18 mois et plus 2 février Forum des jeunes, Berre 04 042 10 23 60 www.forumdeberre.com
Version contemporaine du Petit Chaperon rouge, Faim de loup raconte l’émancipation et le refus de rentrer dans le rang d’une jeune fille désœuvrée, étouffée par l’univers blanc dans lequel elle vit et les injonctions à se tenir bien bombardées par sa mère au téléphone. Laurie Cannac manipule et incarne les personnages avec des masques en papier mâché sur une mise en scène d’Ilka Schönbein qui révèle subtilement les contradictions de l’adolescence.
Philosophes
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Yan Giraldou, qui fut jusqu’en 2008 danseur au Ballet Preljocaj, a toujours dans ses créations cherché à animer l’image fixe. La BD dans ses Coloriages, et aujourd’hui l’histoire des corps dans la peinture. Sa nouvelle création, répétée au Pavillon Noir, écrit une Histoire anachronique de la peinture, de la Renaissance à l’impressionnisme, à travers des citations d’œuvres qui auront le pouvoir magique de s’animer… et de montrer comment la représentation du corps a évolué au cours des siècles picturaux. Histoire anachronique de la peinture du 27 au 29 janvier Pavillon Noir, Aix 0811 020 111 www.preljocaj.org
Passe ton Bach
Un concert en après midi pour faire découvrir aux plus jeunes les œuvres pour orchestre de Bach ? Avec François Xavier Roth et son orchestre les siècles, qui joue sur instruments d’époque, nul doute que l’authenticité sera au rendez-vous, et qu’on se gardera du rubato et effets de masse romantiques. Et la pédagogie, dont on l’a vu faire preuve sur France 2 dans Presto ! Presto Bach 26 janvier Grand Théâtre de Provence,Aix 04 42 91 69 69 www.grandtheatre.fr
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LIVRES
Recto verso
Après le Jacquot de Monsieur Hulot, David Merveille - quel joli nom - met à nouveau en scène le héros burlesque de Jacques Tati dans un album au titre-apostrophe Hello Monsieur Hulot. Vingt-deux historiettes de deux pages racontées en deux temps, deux mouvements ! Un recto fractionné en plusieurs vignettes initie le récit qui trouve sa chute dans le verso proposé pleine page. On tourne, retourne la feuille, sans mise à plat possible, heureux de repérer dans le plan d’ensemble les détails cadrés précédemment en plans plus serrés. Lecture sautillante et ludique ! On suit le personnage funambulesque, courtois et décalé,
aux prises avec une réalité climatique, urbaine ou sociale qu’il subvertit. Pas de bulles dans cette BD sauf celles qui sortent de l’éternelle pipe du protagoniste. Pas de mots sauf ceux des titres malicieux de l’auteur. Un graphisme simple et précis qui fait la part belle aux objets. Si sur la couverture, Hulot en équilibre sur une gouttière, corps légèrement incliné et chapeau bas, semble rendre hommage, comme Merveille, au génie de son créateur, inutile d’être tatiphile pour adorer à tout âge l’intelligence de ce livre et ressentir la mélancolie de la dernière saynette où le héros se met aux abonnés absents. Ses effets abandonnés sur le
Piotr aime le loup
Riche idée qu’a eue le CNDP que de rééditer le DVD de Pierre et le Loup de Suzie Templeton.Tout le monde connaît le conte symphonique, écrit et composé par Prokofiev en 1936, destiné à familiariser les enfants avec les instruments de l’orchestre : bravant l’interdiction de son grand-père, Pierre s’aventure dans la forêt et, avec l’aide d’un oiseau farceur et d’un canard rêveur, il trouve le courage de capturer le loup. Utilisant la technique d’animation «image par image» - plus de 45000 ! - popularisée par le studio Aardman pour la série des Wallace et Gromit, la réalisatrice, Suzie Templeton a pris le parti d’un film sans paroles, ce qui donne un relief particulier aux images souvent audacieuses comme les contre-plongées du duel entre Pierre et le loup. Elle situe le conte dans un univers russe contemporain peuplé de mafieux et de brutalité, où le
loup, sauvage, symbolise aussi une séduisante liberté. La musique a été enregistrée à Londres par le Philharmonia Orchestra dirigé par Mark Stephenson. On peut regretter que le DVD n’ait aucun bonus sur la réalisation du film, ni sur la musique et l’orchestre, même si le livret pédagogique propose des éléments de connaissance de l’œuvre et des suggestions d’activités. Destiné aux classes de maternelle et de primaire, le film ravira aussi le cycle d’adaptation du collège ainsi que les amateurs de cinéma et de musique… et les enfants qui peuvent le voir avec l’Orchestre de Toulon, dans un ciné-concert qui tourne depuis trois ans dans la région (voir p 43).
sable derrière lui, dos aux lecteurs, il entre dans la mer et s’éloigne. Adieu ou au revoir ? ELISE PADOVANI
Hello Monsieur Hulot David Merveille Éd. du Rouergue, 15 €
Conte pacifiste
ANNIE GAVA
DVD vidéo de 33 min + livret pédagogique SCÉRÉN-CNDP, 14 €
Il était une fois un chevalier qui n’aimait pas faire la guerre, qui était triste quand il faisait du mal à quelqu’un et qui préférait ramasser des champignons dans les sous-bois plutôt que partir en croisade… Il avait beau être grand et fort, tout le monde le trouvait anormal, et surtout le roi, qui craignait pour la réputation de son royaume… Il obligea donc le chevalier au grand cœur à aller terrasser une créature maléfique au milieu de la forêt enchantée pour prouver sa bravoure. Son grand cœur de grand chevalier fut brisé une fois la chose faite, et il devint tellement inconsolable qu’il menaça de noyer le royaume sous ses larmes, transformant les chariots en bateaux et les poissons en fleurs… Ce joli premier texte écrit par Nathalie Meynet est superbement illustré par Hippolyte qui mélange l’aquarelle aux traits légers de la plume et du crayon. Sans être follement originale, l’histoire a le mérite de faire tomber un préjugé tenace… DO.M. Le Chevalier au grand cœur Nathalie Meynet, Hippolyte Océan Jeunesse, 15 €
Une histoire vraie
Difficile d’y croire et pourtant c’est vrai : Antony Penrose, dit Tony, a mordu Picasso ! Preuves à l’appui, enfin presque… Tony, quand il était petit, vivait dans une ferme du Sussex en Angleterre avec sa mère photographe (Lee Miller) et son père peintre et poète (Roland Penrose). Entouré d’animaux et d’œuvres d’art, il fit la connaissance «de l’un des plus grands artistes de tous les temps». Dans ce minuscule récit autobiographique raconté dans un style alerte,Tony nous dit sa fascination pour «ses mains ahurissantes», raconte la séduction de Picasso sur ses hôtes et sur luimême, l’appétence de l’artiste à transformer tout ce qu’il voyait en art, même son ours en peluche et son taureau William ! Fourmillant de photos (la plupart de sa
mère bien sûr), de dessins d’enfants, de reproductions de tableaux, sculptures et céramiques de l’artiste, le livre «s’amuse» à la mesure de la démesure du personnage en un bric-à-brac joyeux de polices de caractères différentes, de jeux de noir et blanc et de couleurs. Le garçon qui a mordu Picasso est un livre joyeux où l’on découvre un «géant» facétieux qui adorait se déguiser et faire le clown, en état de création quasi permanent, à la cuisine ou jardin. Du très grand art à la portée des plus jeunes grâce à ces anecdotes d’enfance vives et simples. M.G.-G.
Le garçon qui a mordu Picasso (une histoire vraie) Antony Penrose Thames & Hudson, 14,95 €
Enfance de l’art
Il est des rééditions dont on ne se lasse pas, comme celle du superbe album de Shaun Tan, L’arbre Rouge, que Gallimard Jeunesse vient de reprendre dans une nouvelle traduction (première édition par la compagnie Créative en 2003). Texte minimaliste, avec des mots coup de poing, «inéluctable», «inaccessible»… Le désespoir est là, le mal de vivre poussé au paroxysme, à ne plus savoir ce que l’on est soi-même. Jusqu’à la découverte du bonheur, éclosion rouge qui n’était pas si loin que cela, juste au pied du lit. Une belle approche de cette interrogation sur le monde avec des images superbes, univers de bleu, de rouge, sublimes gris colorés, qui instaurent une atmosphère de mystère et de fantastique à la fois. L’arbre Rouge nous fait plonger dans l’univers trouble de nos interrogations secrètes à travers un ensemble de tableaux d’une variété de techniques et de motifs d’une richesse rare. Une profondeur exceptionnelle. MARYVONNE COLOMBANI
L’arbre Rouge Schaun Tan Gallimard Jeunesse, 13,90 €
LIVRES
Le peintre et la BD
Lorsqu’un auteur de BD et un peintre se rencontrent au cœur d’un livre, toutes les fantaisies semblent permises. Dans sa dernière BD, Joann Sfar met en scène un Chagall (pas le vrai) jeune, peintre et amoureux. Rejeté par le père de la jeune fille jusqu’à ce qu’il ait un «vrai métier», il part demander au Rabbi de Loubavich ce qu’il doit choisir, sa peinture ou son amour. Il déambule dans la campagne biélorusse, rencontre des personnages loufoques, un homme qui se prend pour Jésus Christ, un Golem, un violoniste qui ne cesse de jouer, un capitaine de cosaques et sa troupe qui n’obéit qu’à celui qui porte le manteau de commandement… Le tout se dessine au travers d’une errance colorée, le peintre esquisse, griffonne, livre aux autres ce qu’il perçoit. Obnubilé par la
poursuite de son rêve, construire un opéra pour son village, il suit la vision du plafond qu’il veut peindre. On s’amuse à chercher dans les différentes vignettes des échos de l’œuvre de Chagall, couleurs vives et aériennes, personnages flottants comme détachés du sol, vision onirique d’un monde où tout semble subjectivisé. Les yeux bleus distendus du héros de la BD observent avec une profonde humanité ce qui l’entoure. L’humour aussi établit une distanciation avec la folie du monde : Chagall dessine le violoniste en jaune, ce dernier s’interroge sur ce symbole, et le peintre déclare «tu es jaune parce que j’avais du jaune»…
Géant !
Il s’appelle Crann et sa force est surhumaine, aussi les émissaires du roi de Prusse qui souhaite détenir la garde la plus haute du monde (taille minimum : 1m88 !) vont le convaincre de s’enrôler dans le prestigieux corps des Lange Kerls. Comment le berger irlandais va devenir l’un de ces soldats d’élite, c’est ce que raconte la BD romanesque de Laurent Rivelaygue et Olivier Tallec. Une belle construction de roman, avec un zeste de fantastique (un énorme chien rouge apparaît, comme suscité par les colères du héros), de l’aventure, une histoire d’amour… Dans une mise en page sobre les vignettes sont autant de tableautins, superbement orchestrés, dans des tons pastel où les gris colorés jouent de fines harmonies. Les personnages sont croqués dans la vivacité du mouvement, attitudes, expressions stylisées qui ne manquent pas d’humour, rouges vifs, épaules étroites des sbires, ou larges à en occuper le cadre entier lorsqu’il s’agit de celles de Crann. Une foule de personnages, remarquablement caractérisée, émaille les aventures de ce héros hors du commun. Les formes ébauchées des décors créent des ambiances où la subjectivité domine. Il y a des bleus, des ocres et des grisailles magnifiques …. Un très beau roman qui unit l’originalité de l’histoire au plaisir des yeux. MARYVONNE COLOMBANI
M.C.
Les grands soldats (une aventure de Cathal Crann) Laurent Rivelaygue et Olivier Tallec Gallimard, coll. Bayou, 17 €
Chagall en Russie Joann Sfar Gallimard, 13,90 €
Le manga sauve les livres !
La culture manga oscille-t-elle entre bêtise manichéenne et violence, histoires gnangnan et yatta infantiles ? Pas uniquement ! La littérature manga recouvre un nombre impressionnant de genres et de registres et à l’instar des autres formes de littérature, elle connaît aussi bien la niaiserie que l’excellence. Son écriture est particulière, avec des rejets, des italiques, un style économe à l’extrême, que l’on rencontre aussi bien dans les BD mangas que dans les romans qui les inspirent. Hiro Arikawa est un maître en la matière. Library Wars, saga de politique fiction, offre une appréhension pertinente des problèmes de notre temps. De quoi éveiller les consciences et rendre vigilants lorsque l’on grignote sous couvert d’arguments sécuritaires des liber-
tés fondamentales. L’intrigue ? Dans un futur assez proche, les bibliothèques, derniers bastions d’indépendance intellectuelle, subissent les assauts des forces du comité d’amélioration des médias. Le corps de bibliothécaires s’est doté d’unités spéciales de défense afin de protéger les livres mis à l’index. Le thème par luimême manque de caractère fictionnel, tant les autodafés nourrissent dramatiquement notre histoire… Certes, les caractères des personnages correspondent aux stéréotypes
convenus, de la jeune fille étourdie aux louables intentions, au chef injuste parce qu’il se reproche des erreurs passées, en passant par l’amie efficace et séduisante… Mais on se laisse emporter avec plaisir dans ce récit qui sait équilibrer rocambolesque et argumentation. D’ailleurs, comment résister à quelqu’un qui n’hésite pas à citer Heine «Là où on brûle les livres, on finit par brûler les hommes» !!!
Dragons sur planche d’anatomie
Un livre comme on en rêve lorsque l’on a envie de donner chair à notre imaginaire, bestiaire fantastique et en même temps forgé à l’enclume de l’observation scientifique, voici Le Monde des Dragons, recueil des secrets de la vie de ces animaux qui peuplent la littérature fantasy. Construit comme un ouvrage de vulgarisation sur la vie de telle ou telle espèce animale réelle, l’ouvrage de Caldwell livre «tous les secrets sur ces animaux fantastiques». Rien n’échappe à cette investigation, taille, poids, durée de vie, reproduction,
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alimentation, empreintes fossilisées, dentitions (souvent terrifiantes !) jusqu’aux légendes qui entourent ces géants. On apprend aussi les ressources de leurs organes : leur langue vous rendra intelligent et beau parleur, leurs os sont dotés de propriétés curatives… Le graphisme est somptueux, les représentations d’un réalisme saisissant, les couleurs superbes. Un ouvrage à mettre entre les mains de tous les futurs dragonologues !
M.C.
Le Monde des Dragons S.A. Caldwell Gallimard Jeunesse, 18 €
M.C.
Library wars (volume 1 Conflit) Hiro Arikawa Glénat Roman, 14,99€
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CINÉMA
GRIM | MANOSQUE | COLLECTIF 360°| AIX
Folâtreries et drapés Une soirée dont on sort charmés, conquis, heureux, avec le sentiment illusoire mais jubilatoire d’être intelligent, c’est ce que nous a offert la carte blanche laissée à Extérieur nuit par le GRIM. Une conférence musicale d’abord, où William Dongois et Freddy Eichelberger, cornet à bouquin et clavicorde à l’appui, montraient comment certains musiciens «préludaient», folâtrant d’une note à l’autre, parcours improvisés loin de la trame écrite. Puis la projection de Revenez plaisirs exilés, un film inédit revenu quant à lui d’un exil de 18 ans, dont Jacques Rozier, le réalisateur, et Jean-Claude Malgloire, spécialiste du répertoire baroque, ont conté l’aventure. En 1992, Rozier, aidé d’un ami adoubé perchman pour l’occasion, capte les répétitions et la générale d’Alceste, opéra de Lully dirigé par Malgloire ; dispositif a minima pour filmer ce spectacle mis en scène par Jean-Louis Martinoty, d’une munificence digne du Grand Siècle, tout d’or et de drapés, où les statues s’envolent, les dieux descendent des cintres, les trappes engloutissent des
Revenez plaisirs exiles de Jacques Rozier
héros aux costumes et aux coiffes sublimes. Rozier prend le temps d’assister aux répétitions que décortique le deuxième film de la soirée, un «impromptu» rapidement monté par ce jeune passionné de 84 ans à partir des 35 heures de rushes. Il court le risque d’une
prise à caméra unique, anticipant les mouvements qu’il connaît par cœur, traduisant visuellement le tempo musical. Ce n’est plus seulement l’opéra qui est filmé mais la musique elle-même, la création en acte. Image, partition entrent en osmose avec le texte de Quinault, dont Malgloire a rappelé qu’il ne compte que quelque 200 mots retenus pour leurs sonorités, et que le choix d’un accord très bas (diapason 392hz) rend plus intelligibles,. Tout fait corps sur l’écran et devient évidence. Alceste pleure, Admète meurt et c’est un bonheur ! Du grand art. ÉLISE PADOVANI
Voyages en cinéma Du 1er au 6 février se tiendront, à Manosque, les 24e Rencontres Cinéma du Réel à l’Imaginaire qui proposent une semaine de projections, de rencontres entre les spectateurs et les cinéastes invités. Cette année un invité exceptionnel, Jeon Soo-il, un cinéaste coréen indépendant, dont deux films seulement ont été distribués en France, La
petite Fille de la terre noire et Himalaya, le pays d’où vient le vent, confrontation d’un homme et d’un lieu qui sera projeté en ouverture, le 1er février à 21h au Théâtre Jean le Bleu. Cinq films inédits, donc, L’Echo du vent en moi, trilogie autour du thème du temps qui passe ; Entre chien et loup, portrait d’un homme
égaré dans sa propre histoire ; Mise à nu, l’histoire d’un écrivain et suicide designer ; L’oiseau qui suspend son vol, une mise en abyme de la condition du cinéaste et, en première française, son dernier film, Je viens de Pusan, présenté en compétition au dernier festival de San-Sébastian. Autre invité de marque, Luc Moullet,
dont le portrait filmé en 2000 par Gérard Courant, L’Homme des Roubines sera présenté en ouverture à 18h. On pourra ainsi (re)voir La terre de la folie tourné quasiment sur place, ses courts, Un Steak trop cuit, Terres noires et Le Litre de lait, un vrai faux film sportif, Parpaillon. Et, bien sûr, des films que le public choisira par leur renommée, comme Nostalgie de la Lumière du Chilien Patricio Guzman, Le Voleur de lumière du Kirkhize Aktan Arym Kubat, sélectionné à la Quinzaine des Réalisateurs, ou, pour le plaisir de la découverte, comme Pudana last of the line de la Nénètse Anastasia Lapsui et de Markku Lehmuskallio, A ciel ouvert, un film d’Iñès Compan sur les mines d’argent et sur la précarité en Argentine… et bien d’autres encore. Car vous l’aurez compris, c’est à de beaux voyages en cinéma que le public est convié à Manosque, au théâtre Jean Le Bleu et au Cinéma Le Lido ! ANNIE GAVA
Rencontres cinéma de Manosque 04 92 70 35 45 www.oeilzele.net
Pudana last of the line de Anastasia Lapsui et Markku Lehmuskallio
Remue-méninges Le 13 janvier la salle du Variétés était pleine pour la soirée de lancement de la tournée du film Remue-ménage dans la sous-traitance d’Ivora Cusack, co-produit par le collectif 360° et même plus. Tourné sur une période de quatre ans, avec peu de moyens, ce film suit la grève entamée à Paris en mars 2002 par 35 femmes de chambre, employées par la société Arcade pour travailler dans les hôtels Accor. Cadences infernales, horaires à rallonges, manque de respect de leurs employeurs, voilà ce que refusent ces femmes, d’origine africaine pour la plupart. Après un premier petit succès en 2004, la déléguée syndicale, Mayan Faty, est licenciée et la lutte continue, soutenue par un comité de soutien très actif : pique-niques dans le hall des hôtels, discussions avec les clients. Certaines scènes sont savoureuses ! On rit (jaune !) aussi devant un PDG qui compare le travail harassant du ménage des chambres d’hôtel à la planche à voile : ce ne serait qu’une question d’entraînement ! Ce documentaire militant et solidaire brosse quelques beaux portraits de femmes et a le mérite de rappeler cette lutte qu’on avait déjà oubliée. En revanche, le débat qui a suivi n’avait pas un grand intérêt malgré la présence des éditions Agone qui ont malheureusement peu parlé de leur nouveau numéro, Comment le genre trouble la classe. ANNIE. GAVA
DVD disponible sur http://atheles.org www.360etmemeplus.org
Le virtuose Il est le film noir français à lui tout seul. Treize films, visibles à l’Institut de l’Image d’Aix du 5 au 25 janvier, ont fait de Jean-Pierre Melville un incontournable. D’abord considéré comme un intellectuel pour ses collaborations avec la Nouvelle Vague ou ses adaptations à l’écran du Silence de la mer de Vercors en 1947 et des Enfants terribles de Cocteau en 1950, il impose très vite une volonté de cinéma total où ses obsessions pour la fatalité et l’honneur servent d’ancrage à l’expression d’une virtuosité formelle remarquable. Instable, mégalomane, il s’autoproduit, tourne dans ses propres studios. Sa filmographie prend deux directions distinctes, l’une influencée par son expérience personnelle pendant la seconde guerre mondiale et qui parcourt la délicate période de l’Occupation (Le Silence de la mer, Léon Morin, prêtre en 1961, L’Armée des ombres en 1969), et l’autre qui comprend ses films les plus
célèbres, que l’on définit comme ses «films d’hommes» (Le Doulos en 1962, Le Deuxième Souffle en 1966, Le Samouraï en 1967 ou encore Le Cercle rouge en 1970). Comment ne pas fondre d’admiration devant le plan d’introduction du Samouraï, plan fixe de la chambre du tueur, interprété par Delon, à la frontière de l’expressionnisme ? Comment oublier l’incroyable tour de force du braquage de la bijouterie dans Le Cercle rouge, séquence de 25 minutes sans aucun dialogue, ou son introduction, elle aussi totalement silencieuse ? Il faudrait bien des mots, bien des pages, pour n’omettre aucune des réussites de l’homme au stetson et aux lunettes noires, dont des réalisateurs comme John Woo, Johnnie To, Jim Jarmusch ou encore Tarantino se posent aujourd’hui en admirateurs. Vous avez quelques jours encore pour vous rendre à Aix… RÉMY GALVAIN
Cycle Melville Institut de l’Image jusqu’au 25 janv Cité du livre, Aix 09 64 23 37 86 www.institutimage.org
Jean-Pierre Melville © X-D.R.
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CINÉMA
RENDEZ-VOUS D’ANNIE | VITROLLES
Du 19 au 25 janvier se tient le festival AFCAE Télérama. Comme douze cinémas de la région, l’Alhambra Ciné Marseille vous donne l’occasion de voir les films que vous avez «loupés» ou que vous avez envie de revoir : Mammuth de Gustave Kervern et Benoît Delepine ; Poetry de Lee Chang Dong ; Des hommes et des Dieux de Xavier Beauvois ; Vous allez rencontrer un bel et sombre inconnu de Woody Allen; Dans ses yeux de Juan José Campanella ; Tournée de Mathieu Amalric ; Fantastic Mr Fox de Wes Anderson et Les Mystères de Lisbonne de Raoul Ruiz. Pour connaître le programme, contactez les salles de votre ville : à Aix, Le Renoir et le Mazarin ; à Apt, le Cinemovida ; à Briançon, l’Eden Studio ; à Forcalquier, Le Cinématographe ; à Gardanne, Le 3 Casino ; à Manosque, le Lido ; à Nîmes, Le Sémaphore ; à Pertuis, Le Lubéron ; à Toulon, Le Royal ; à Vaison la Romaine, le Palace. Alhambra Ciné Marseille 04 91 03 84 66 www.alhambracine.com Tournee de Mathieu Amalric
Le 21 janvier à 21h30 à La Maison du Peuple Kurde, Peuple et Culture propose la projection de Lumumba, la mort du prophète de Raoul Peck suivie d’une discussion. Le 22, à partir de 19h, ce seront des témoignages sur la création cinématographique aujourd’hui en présence d’Olivier Barlet, directeur d’Africultures et avec la participation d’Antoine Tsitungu Kongolo, auteur de l’anthologie Poète ton silence est un crime. Projection de Kukan Kurcia (Le cri de la tourterelle) de Sani Elhadj Magori et d’Un transport en commun, le road movie musical de Dyana Gaye. Peuple et Culture Marseille 04 91 24 89 71 www.peuple-et-culture.org
Le 24 janvier à 20h30 à l’Utopia-Manutention à Avignon, Cuba, une utopie blessée de Renaud Schaack : à travers un voyage dans l’histoire et ses tumultes, ce film propose une réflexion sur les ambitions et les difficultés d’une politique culturelle émancipatrice. La projection sera suivie d’une rencontre avec Ana Maria Sanchez, directrice de la Maison Victor Hugo de La Havane. 04 90 82 65 36 www.cinemas-utopia.org/avignon
Le 25 janvier à 19h au cinéma le Pagnol à Aubagne, en partenariat avec le FIFA, le département SATIS, propose une projection de Farinelli en présence du réalisateur Gérard Corbiau, suivie d’une discussion et d’un débat autour du travail réalisé sur le son. Les Mardis de la Cinémathèque proposent, le 18 janvier à 19h, au CRDP, Et Vogue le navire de Fellini. Le 25, ce sera Les Espions de Clouzot. Cela continue dès le 1er février avec Forfaiture de Cecil B de Mille ; puis la cinémathèque se fera plus littéraire avec, le 8, Zazie dans le métro de Louis Malle d’après Queneau, et le 15 Hiroshima mon amour d’Alain Resnais d’après Duras. La Cinémathèque de Marseille 04 91 50 64 48
Le 21 janvier à 18h30, Attac Pays d’Arles organise une projection débat à la Salle de conférence de SaintMartin-de-Crau : Water Makes Money, le documentaire réquisitoire contre les multinationales de l’eau de Leslie Franke et Herdolor Lorenz. http://local.attac.org/13/arles
Le 21 janvier à 20h30 au cinéma Renoir à Martigues, soirée débat autour du film Cheminots, avec un des réalisateurs, Luc Joulé, Robert Mencherini, historien, et des membres du CE Cheminots – PACA. Le 1er février à 18h30, toujours au cinéma Renoir à Martigues, en partenariat avec le Café Citoyen de Provence, soirée Mondialisation que faire ? : projection du film de Coline Serreau, Solutions locales pour un désordre global, suivi d’un débat animé par l’économiste Fabrice Aubert en présence de représentants des AMAP. Cinéma Jean Renoir 04 42 44 32 21 http://cinemajeanrenoirblogspot.com
Le 27 janvier à 18h00 à l’Institut Culturel Italien, à l’occasion du Jour de la Mémoire projection du film Hôtel Meina de Carlo Lizzani, inspiré par des faits réels au lendemain de l’armistice du 8 septembre 1943… Le 1er février à 18h00, pour le 150e anniversaire de l’Unité de l’Italie, l’Institut Culturel Italien, en collaboration avec le Consulat Général d’Italie et avec Le Museo Centrale del Risorgimento de Rome, présente 1860 d’Alessandro Blasetti précédé de deux documents rares : La Presa di Roma de Filoteo Alberini, premier film muet Italien et Il piccolo Garibaldino. Le 8 février à 18h00, ce sera Piccolo mondo antico (Le Mariage de minuit) de Mario Soldati avec Massimo Serato, Alida Valli… Institut Culturel Italien 04 91 48 51 94 www.iicmarsiglia.esteri.it
Le 28 janvier à 20h30, l’occasion de la rencontre avec Edmonde Charles-Roux organisée par les Écritures croisées, l’Institut de l’Image propose de revoir Oublier Palerme, l’adaptation de son premier roman, Prix Goncourt en 1966, de Francesco Rosi avec James Belushi, Mimi Rogers, Vittorio Gassman… : Carmine Bonavia, d’origine sicilienne, a posé sa candidature à la mairie de New York. Le thème principal de sa campagne électorale est la lutte contre la drogue. Fasciné par son pays d’origine, il part en voyage de noces à Palerme… Institut de l’Image 04 42 26 81 82 www.institut-image.org Oublier Palerme de Francesco Rosi
Cinéma le Pagnol 08 92 68 81 13 SATIS / Université de Provence http://satis.univ-provence.fr
Le 27 janvier à 20h, en partenariat avec le cinéma Prado, l’association Cinépage propose Stranger than Paradise de Jim Jarmush : Eva quitte la Hongrie et retrouve son cousin Willie, installé depuis 10 ans aux États-Unis. Inadaptés à cette terre de désillusions, ils partent de Miami découvrir le paradis de la Floride, royaume du jeu et dernier espoir d’un exil douloureux. Cinépage 04 91 85 07 17 www.cinepage.com Stranger than paradise de Jim Jarmusch
Le 28 janvier à 17h à l’Alcazar, en partenariat avec Cinémémoire et la Cinémathèque de Marseille, projection de films rares sur l’eau en Provence : des courts métrages réalisés par Cinémémoire ; Débordements à Pelissanne de Raymond Menjelou ; Serre-Ponçon de Jacques Hubinet… Alcazar 04 91 55 90 00 www.bmvr.marseille.fr
Le 28 janvier à 20h30 à l’Alhambra Cinémarseille, le chorégraphe Michel Kélémenis animera un débat après la projection de Les Rêves dansants d’Anne Linsel et Rainer Hoffmann (voir Zib 35) : en 2008, Pina Bausch, quelques mois avant sa mort, décide de reprendre son spectacle Kontakthof avec des adolescents qui n’ont jamais dansé… Le 2 février à 20h30, à l’Alhambra, Jean-Pierre Thorn présentera 93, la belle rebelle, une épopée du rock au slam en passant par le punk et le hip hop, incarnant un demi-siècle de résistance musicale en SeineSaint-Denis…
CINÉMA 53
Polar,
Le 28 janvier à 20h au Variétés, en collaboration avec l’Institut Paoli-Calmettes, Projection de Ma compagne de nuit d’Isabelle Brocard en présence de la réalisatrice et d’Emmanuelle Béart. Julia, architecte en apparence comblée, décide d’employer une aide ménagère. Mais la jeune fille comprendra très vite que Julia est atteinte d’un cancer en phase terminale et a besoin de compagnie pour finir ses jours. Un lien puissant va peu à peu unir les deux femmes qui partageront ces derniers moments de vie...
vous avez dit polar ?
Le 29 janvier de 15h à 20h30, à La Friche, clôture de la Semaine du Son autour des films de Robert Guédiguian, 17 opus de 1980 à 2011. À 15 h, projection et rencontre autour de Lady Jane. À 18 h, débat rencontre avec Vincent Commaret et Valérie Meffre, monteurs son, Benoit Ivanesco, Laurent Lafran, Gérard Lady Jane de Robert Guediguian Lamps, ingénieurs du son, Gérard Meylan, comédien et Bernard Sasia, chef monteur. La Cartonnerie - Friche la Belle de Mai 04 95 04 95 04 SATIS / Université de Provence http://satis.univ-provence.fr
Le 1er février à 20h, au cinéma Variétés, en avant-première en collaboration avec la région PACA, Carancho de Pablo Trapero, avec Ricardo Darin, Martina Gusman, en présence de Thierry Frémaux, Délégué Général Festival de Cannes. Sosa, un avocat véreux, un «carancho», profite sans scrupules des victimes des accidents de la circulation à Buenos Aires et s’enrichit grâce aux assurances et à la corruption. Un soir, il rencontre Lujan, une jeune urgentiste qui essaye de sauver la vie d’un homme. Les Variétés, Marseille 04 96 11 61 61
Du 3 au 5 février, à l’Atrium de Salon se tient le 2e festival international du Film des droits de l’homme organisé par plusieurs associations. Les quatre documentaires programmés, parmi lesquels Les enfants perdus de M’Bour de Daniel Grandclément sur les droits de l’enfant au Sénégal, ont été sélectionnés au Festival de Paris. 04 42 64 20 20 www.salondeprovence.fr
Les enfants perdus de M'Bour de Daniel Grandclement
Le 10 février à 20h30, à l’Alhambra, projection de 7 courts métrages sélectionnés pour le César du meilleur film d’animation parmi lesquels Chienne d’histoire de Serge Avédikian, Matières à rêver de Florence Miailhe, Mémoire fossile d’Arnaud Demuynck et Anne-Laure Totaro… Alain Ughetto, primé en 1984 pour La Boule animera la soirée. Alhambra Cinémarseille 04 91 03 84 66 www.alhambracine.com
Appel à candidature : compétition de courts métrages tournés en Provence pour le 9e festival Provence Terre de Cinéma qui aura lieu à Rousset du 28 avril au 1er mai. Les films doivent être envoyés avant le 1er février aux Films du delta, 2 rue Marie Mauron 13790 Rousset 04 42 53 36 39 www.filmsdelta.com
Les tontons flingueurs de Lautner
Les Variétés, Marseille 04 96 11 61 61
Du 8 au 13 février se tiendra au Cinéma Les Lumières de Vitrolles, la 2e édition de Polar en Lumières. Au programme, littérature, théâtre, musique et cinéma En ouverture, le 8 février à 19h, zoom sur le polar algérien. Une table ronde réunira le parrain de la manifestation, Yasmina Khadra, directeur du Centre culturel algérien de Paris, également romancier et auteur de polars, Adlène Meddi, rédacteur en chef d’El Watan week end à Alger et auteur d’une très remarquée Prière du Maure (éd Jigal, voir Zib’30), et Okacha Touita, réalisateur du film Morituri, d’après le roman de Yasmina Khadra, dont la projection suivra le débat. Durant la guerre civile qui déchire l’Algérie, le commissaire de police Brahim Llob traque les islamistes dont il devient la cible. Son directeur l’oriente vers Ghoul Malek, un ancien potentat du régime, qui le charge de retrouver sa fille disparue. Dans le contexte actuel de manifestations et de mécontentement populaire en Algérie, nul doute que les discussions seront animées et qu’il y aura à dire sur le rôle d’éveilleur de conscience et de scrutateur social du polar, en littérature comme au cinéma. Le 10 février, ce sera une soirée en compagnie de Cédric Anger, ancien critique aux Cahiers, scénariste et réalisateur, dont seront proposés deux films : à 18h30, Le Tueur avec Gilbert Melki, Grégoire Colin et Mélanie Laurent, et à 20h45 L’avocat. Les projections seront suivies d’une rencontre avec le réalisateur, en présence de Mathieu Croizet et d’André Fortin, tous deux professionnels de la justice (Croizet est avocat, Fortin juge d’instruction), et auteurs de romans policiers. Le 11 à 18h30 débutera une soirée hommage au grand Ventura avec la projection de Cent jours à Palerme de Giuseppe Ferrara : la chronique de la vie du «préfet antimafia», le général
Dalla Chiesa, interprété par Lino, de sa nomination à Palerme en mai 1982 jusqu’à son assassinat en septembre, tournée sur les lieux mêmes où les évènements se sont déroulés. Et à 20h45, Les Tontons flingueurs de Lautner, un classique dont on ne se lasse pas ! La projection sera suivie d’une rencontre avec Clélia Ventura, la fille de Lino. Le 12 à 17h, un film de Frédéric Cérulli, Le thanato, avec Gérard Meylan et Chantal Lauby, ouvrira les festivités qui se poursuivront jusqu’à l’aube avec la reprise de la programmation du festival, plus quelques surprises, lors d’une grande nuit du polar. Le 13 février, en clôture et en avantpremière, L’art d’aimer à Marseille de Frédéric Vignale, adapté du roman très overlittéraire d’Henri-Frédéric Blanc, en présence de l’équipe du film, Serge Scotto, Sophie Garagnon, Gilles Ascaride, HF Blanc, Elisa Sanz... Toute la semaine, de nombreux auteurs tiendront salon pour rencontrer le public et dédicacer leurs ouvrages dans le hall du cinéma. Le jeune public ne sera pas oublié : spectacle le mercredi, ciné-goûter le dimanche avec Une vie de chat (voir p 44). Les écoliers de CM2 de la ville, que Jean-Luc Luciani a aidés à rédiger des nouvelles policières viendront aussi signer leur ouvrage. Entre les lignes, sur les écrans, pour tous les âges, avec en prime quelques concerts, le polar sera assurément sous les feux de la rampe ! ANNIE GAVA ET FRED ROBERT
Cinéma Les Lumières 04 42 77 90 77 www.cinemaleslumieres.fr
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ARTS VISUELS
ARLES | MARSEILLE
Lumières in situ Une première dans le patrimoine arlésien : dès mars les Cryptoportiques et la chapelle Saint Honorat seront habités par de lumineuses installations d’art contemporain Arles abrite un nombre croissant d’initiatives en faveur de l’art contemporain. Associations, collectifs et lieux de diffusion (Archipel, collectif E3, l’Atelier du Midi, Le Magasin de jouets, Galerie Huit…), et édition d’art (Analogues) ont émergé ces dernières années ébauchant un réseau encore modeste mais non dénué d’ambitions.
Lumières et ombres Créée en février 2010 à l’initiative de Laetitia Talbot, l’association Asphodèle se propose de concevoir et réaliser des projets d’art contemporain sur les problématiques de la lumière et du son en liaison avec le patrimoine et le territoire arlésien. Sous le terme générique l’espace pour l’art, ces installations in situ, au rythme d’environ trois annuelles, sont confiées sur projet par un comité scientifique à des artistes reconnus pour leur pratique dans ce domaine. Chaque évènement est
accompagné d’ateliers à destination du jeune public (les Lucioles) et des adultes dans lesquels intervient l’artiste invité, ainsi que des conférences. Une publication conçue avec les éditions Analogues doit garder trace de chaque manifestation par nature éphémère. Le premier volet de la programmation 2011 est confié à Anne-Marie Pêcheur, artiste installée à Marseille et enseignante à l’École des beaux-arts qui investira les Cryptoportiques dès le mois de mars. Viendra ensuite la proposition plus minimaliste d’Adalberto Mecarelli pour la chapelle Saint Honorat. Sont aussi pressentis pour les projets à venir Michel Verjux, Ann Veronica Janssens... et un rêve pour Marseille 2013, l’artiste américain James Turrell. «Je n’ose pas encore y croire, se reprend Laetitia Talbot. Pour cette proposition dans des lieux bruts qui nécessitent une ingénierie particulière, les budgets ne sont plus les mêmes, même si nos
Anne-Marie Pecheur, projet pour Helichrysum - Lumieres ephemeres, installation, cryptoportiques, Arles, 2011 © Cindy Lelu
projets sont réalisés avec la Ville et grâce à des partenariats logistiques et techniques. Nous regardons aussi vers des espaces autres que le patrimoine, naturels, une friche, un coin de fenêtre. Nous faisons avec ce qui est possible».
Helichrysum, Lumières Ephémères Anne-Marie Pêcheur à partir du 11 mars Cryptoportiques, Arles Association Asphodèle www.espacepourlart.com
C.L.
Les couleurs de la vie techniques différents comme mon pulvérisateur à vigne et introduit ma culture personnelle». Gravement atteints de déficience motrice et mentale, «leur main est comme un sismographe selon l’état de leur être, de leur âme, souligne l’artiste. Il n’y a aucune possibilité de figure donc j’interviens dans la rapidité ou le mouvement». Sur l’espace aussi, la technique, l’agencement des formes, le hasard, la gestuelle, la palette
Dans le hall d’entrée de l’Association régionale pour l’intégration à Marseille, la surprise est de taille : d’ordinaire si sobre, le voici paré d’un arcen-ciel de couleurs. Une cinquantaine d’œuvres graphiques recouvrent les murs déployant énergie et joie de vivre : Sophie, Rémy et leurs quatre autres compagnons, pensionnaires de l’Établissement pour enfants et adolescents polyhandicapés Germaine Poinso-Chapuis, ont vécu là une expérience unique autour de la peinture. Avec pour guides l’art-thérapeute Catherine Hery et l’artiste Jean-Jacques Surian qui a joué «les éléments perturbateurs» : «j’ai travaillé sur leurs propres écritures car leurs traces m’ont inspiré, j’ai apporté des éléments
Marc © X-D.R
chromatique… Et le résultat comble les espérances du Pr Jacques Pantaloni, Recteur, Président de l’ARI : «Jean-Jacques Surian a été l’effet papillon. Avec les œuvres qu’ils ont réalisées avec lui, ils ne sont plus handicapés, ils existent à part entière : ils ne sont pas inertes». Pour un physicien qui travaille notamment sur le chaos, le compliment est de taille et laisse présager plein de projets, comme ceux de faire circuler les dessins dans d’autres établissements, faire entrer «le beau et le qualitatif» pour voir la vie en couleurs ou encore inviter les artistes dans les murs, pas seulement au siège… M.G.-G.
Sophie © X-D.R
Regards, gestes et signes jusqu’au 17 mai sur rendez-vous ARI, Marseille 6e 04 91 13 41 40
Anne-Laure © X-D.R
UNIVERSITÉ DE PROVENCE | ÉCOLE SUPÉRIEURE D’ART D’AIX
ARTS VISUELS 55
Mix mode d’emploi Planche 1 © Laurence Lagier
Mix est une aventure éditoriale et curatoriale à trois : Laurence Lagier (dessins et photographies), Brice Matthieussent (textes), Fanette Mellier (graphisme et couleur). Son objet est polymorphe : un livre indescriptible - ni catalogue, ni livre d’art, ni monographie - et une exposition à la galerie de l’École supérieure d’art d’Aix-enProvence. Qui fait suite à des rencontres avec le trio d’artistes à la librairie Histoire de l’œil et à l’Atelier de visu à Marseille en décembre dernier. Bref, Mix est à décrypter entre les pages, au fil des signes, des traces, des ponctuations colorées. Et pour la visite, un protocole d’usage est vivement recommandé : 1 / lire le texte original de Brice Matthieussent, Lomo Reticulens, totalement fictionnel, qui prend pour socle le genre polar et pour héros Lomo, professionnel réputé, habile connaisseur des aérogares et autres chambres d’hôtel… Où il est déjà question de bien savoir circuler… 2 / manipuler l’ouvrage en tout sens, addition de photographies, textes et dessins tirés sur «papier à fiche» : 1 face papier peint (jaune-rouge-bleu), 1 face imprimée. Tiré à 500 exemplaires, il est vendu au prix de 19 euros et diffusé par le réseau de l’association Marraine Ginette et dans les bonnes librairies. 3 / découvrir les œuvres de Laurence Lagier, notamment les planches réalisées avec les étudiants de l’atelier de sérigraphie de l’École supérieure d’art, ses dessins et tirages photographiques originaux. Répétitions et variations autour d’un même thème : la circulation (signes et symboles) en Chine, au Mexique et ailleurs… Journal de bord des tribulations de l’artiste. 4 / naviguer dans l’espace d’exposition livre en main et effectuer de savants allers et retours
entre les originaux et les reproductions pour jouer au jeu des différences… car Fanette Mellier a fait «basculer» les 3 couleurs du papier dans les dessins. 5 / ne pas hésiter à retourner sur les lieux pour prendre Laurence Lagier sur le fait, rubans de scotch à la main, dessinant au jour le jour sur les murs de la galerie…
Dessin © Laurence Lagier
Mix Laurence Lagier, Brice Matthieussent, Fanette Mellier jusqu’au 29 janvier Galerie de l’École supérieure d’art, Aix-en-Provence 06 25 83 35 56
M.G.-G.
Bons papiers «Quiconque se met en face d’une œuvre d’art contemporaine ne saurait recourir à des jugements tous faits, précis et traditionnellement autorisés» Lionel Venturi, Histoire de la critique d’art. Les publications de la critique d’art nombreux sont abondantes. Mais la critique (d’art) l’est-elle encore ? La question est posée dans une modeste mais vivace publication étudiante à l’occasion d’un colloque qui s’est tenu à Aix (L’art du 21e siècle, un état des lieux, du 18 au 20 nov). Ex-situ attribue une jolie volée de bois vert à l’évènement, preuve prometteuse que l’esprit critique n’attend pas le nombre des années ! Conçu et réalisé par des étudiants en histoire de l’art de l’Université de Provence, membres de l’association Courant d’Art créée en 2002, ExSitu est un trimestriel gratuit né trois ans plus tard. Aldric Mathieu le nouveau rédacteur en chef d’Ex-
Situ, précise : «nous tirons à 700/800 exemplaires que nous distribuons nous-mêmes. Il est financé par le FSDIE (Fonds de Solidarité et de Développement des Initiatives Etudiantes ndlr) pour chaque numéro sur présentation d’une étude prévisionnelle. On aimerait passer à 1000 et introduire la couleur, pour les projets plastiques en particulier». Cela fait cinq années qu’Ex-Situ publie des «critiques d’art visant à analyser les caractéristiques d’une exposition, d’un ensemble d’œuvres, et à documenter le travail d’un artiste». La troisième édition a ouvert ses pages aux étudiants d’art pour des projets plastiques, et la première de couverture comme la mise en page de ce numéro 10 ont été conçues par des étudiants de l’École des beaux-arts de Marseille. Quant aux projets à venir après le succès de Capture en 2010 en partenariat avec le Ballet Preljocaj, Courant
Visite de l’exposition «les collections italiennes du musée des Beaux-arts», 2010 © Virginie Gaillat
d’Art s’associe à l’ASC (Association Solidarité Communication, Université de Provence) à l’occasion de la Journée internationale de la femme pour un concours photographique sur le thème La femme… son corps ici et ailleurs. Critiques à vos plumes ! C.L.
Association Courant d’Art Ex-Situ, nouvelles de l’art actuel http://courantdart.over-blog.com
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GALERIEOFMARSEILLE | VIDÉOCHRONIQUES | SAFFIR
ARTS VISUELS
Vingt sacs Pierre Boderiou, Sans titre, Mine de plombsac de papier kraft, 2010 © X-D.R
Picasso griffonnait sur les nappes en papier. Pierre Boderiou pour sa part a choisi de dessiner sur des sacs en papier kraft de supermarché. Sa dernière série, Drive in pour une partie de campagne est punaisée aux cimaises de la Galerie Saffir. Vivre à la campagne n’est pas une sinécure. Surtout lorsque dans son environnement, un hameau classé du XVIIe, il faut supporter l’emprise grandissante de douteuses zones pavillonnaires. Forcément ça prend les nerfs. Pourtant Pierre Boderiou est plutôt du genre paisible mais lorsque la bétonnière est pleine, c’est le dessin qui est appelé à la rescousse. Devant cette frénésie sans gloire de l’accession à la propriété, le remède est de s’emparer
d’un des objets emblématiques du consumérisme : le sac. En papier kraft brun de préférence, plus écolo. Délaissant pour un moment sa technique à l’aquarelle hyperréaliste (voitures de police, armes à feu) l’artiste indigné trace minutieusement à la craie noire (une technique de dessin traditionnelle aux rendus charbonneux) des représentations plus ou moins évanescentes, un peu ombreuses, incertaines. Issue de transferts photographiques pris en maraudant dans les chantiers de construction, cette imprécision s’oppose à l’exactitude du dessin technique ou des vues publicitaires flatteuses vantant des habitations rêvées mais stéréotypées. On devine des perspectives d’intérieurs en
attente de finition, imparfaits et impersonnels qui contrastent avec la platitude du support, un contenant marronnasse, maigre et vide. Les images d’indignation de Pierre Boderiou évoquent l’effroi de Maupassant qui déplorait déjà à la fin de son siècle une campagne déflorée par les outrages des industries envahissantes. Le bonheur n’est pas forcément dans le pré, ni la belle affaire dans le sac. C.L.
Drive in pour une partie de campagne Pierre Boderiou jusqu’au 19 mars Saffir, galerie nomade saffirgalerienomade.blogspot.com
Quitte ou double Dès les années 80 l’artiste suisse Raoul Marek imagine des événements sensibles et conviviaux où le public fait partie intégrante de ses œuvres, inscrivant alors son travail dans une démarche «d’esthétique relationnelle». Installations ou photos, repas ou rencontres, éditions d’objets ou vidéos, toutes ses propositions mettent en œuvre des notions d’hospitalité mais aussi de rituels. Plus provocatrice, Vivre ou mourir est une exposition-installation qui place le galeriste dans une vraie position marchande et le spectateur dans une posture d’acteur. Devenu partenaire complice d’un enjeu, il paye sa quote-part, parie aux courses de chiens, trinque au comptoir et espère rafler la mise… des multiples et des cartes de jeu avec gravé en lettres d’or le logo Winner ! Dès l’entrée, le galeriste derrière sa guérite invite à pénétrer dans son lieu d’art transformé en lieu de perdition. Après deux vidéos de scènes de courses projetées en miroir, voici la cabane des paris, faite
de bouts de ficelle et de matériaux de récupération, recouverte des célèbres cabas Tati, Dior ou Gucci ! En contrepoint, sur le mur du fond, une troisième projection fixe le mouvement d’un oiseau qui va et vient dans un cercle rouge, déplacement ininterrompu qui agit comme un leitmotiv lancinant. Si le vernissage demeure un momentclef de l’acte artistique pendant lequel l’artiste, le galeriste et le spectateur sont au coude à coude le temps du «jeu», le dispositif antimétaphori-que permet de rejouer la scène en s’interrogeant, comme Raoul Marek, sur l’état psychologique actuel de notre société : «gagner ou perdre serait devenu une situation sociale aussi intense que celle de vivre ou mourir» ? M.G.-G.
Vivre ou mourir Raoul Marek jusqu’au 12 février Galerieofmarseille, Marseille 2e 09 53 10 15 26 www.galerieofmarseille.com
Vue d’ensemble exposition Raoul Marek, Vivre ou Mourir, Galerieofmarseille 2010 © X-D.R
Points de bascule D’abord en Russie puis à Vidéochroniques, Catherine Melin a conçu Point d’appui comme une exposition globale que le regardeur doit expérimenter par ses propres déplacements physiques. Cette artiste lilloise, installée depuis un an à Marseille, s’intéresse à l’idée du mouvement des corps, même mentalement, face à l’immobilisme du bâti (aire de jeux, mobiVue de l’exposition Point d’appui, Catherine Melin lier urbain) et à la © Vidéochroniques/Frédéric Gillet dépersonnalisation des zones périphériques (arrière-cours d’immeubles, espaces de repos, parkings). Elle pose sa caméra, son appareil photographique, intègre lignes de fuite et lignes de force architecturales pour déployer ensuite, par analogies, ses données visuelles et sensibles en Wall Drawing, sculptures tubulaires modu-lables, vidéos, création son et installations. Dans les espaces ouverts de Vidéochroniques, chaque pièce adoube l’autre, tout aussi singulière et unique, pour composer un ensemble cohé-rent qu’elle nomme Montagnes russes, et produire un paysage optique et sonore en mouvement, un parcours dynamique que l’espace mental doit reconfigurer. Car les combinaisons échafaudées par Catherine Melin dédoublent les formes à l’infini, repoussent les limites de l’es-pace, décuplent les perspectives par le jeu de dessins au fusain sur les murs et les poutres, désolidarisent les architectures du sol (sans socle, les «obstacles» sont en apesanteur). Quand elles ne nous placent pas en total déséquilibre à la manière d’un culbuto. M.G.-G.
Point d’appui Catherine Melin jusqu’au 5 février Vidéochroniques, Marseille 2e 09 60 44 25 58 www.videochroniques.org
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LIVRES
RENCONTRES
Juste avant Noël
Trois contes Pour qui n’a jamais lu Kourkov, les trois courts récits réunis sous le titre Surprises de Noël forment une bonne intro-duction à son univers. La neige, le froid, l’humidité peuplent ces quelques pages, les désillusions aussi et même la prison. Pourtant, tout le temps, quelque chose luit qui réchauffe le corps et l’âme. Une soirée exceptionnelle dans un lieu hors du temps, la réalisation d’un rêve absurde et poétique, la mise en œuvre d’une entreprise loufoque dans un cadre im-probable, dans les trois cas, c’est l’espoir qui l’emporte. Et l’idée
Soupe aux Qui a dit que la culture était en crise et que l’arrière-pays était un désert culturel ?
Andreï Kourkov © Philippe Matsas/opale/éditions Liana Levi
La librairie Histoire de l’œil, en partenariat avec l’ADAAL, a offert à ses clients un avant-goût des fêtes, en invitant l’écrivain ukrainien Andreï Kourkov. Première jolie surprise, l’idée de renouveler le principe de la rencontre littéraire en instaurant la formule du brunch dominical. Ambiance décontractée et conversations détendues au jardin donc, avant et après la rencontre, autour d’un buffet savoureux. Et entre ces deux moments de dégustation gourmande, un régal de rencontre. La deuxième surprise est venue de Pascal Jourdana qui avait lui aussi prévu de donner une tournure festive à l’événement. Faisant tourner un chapeau rempli de papillotes, il a invité les participants à déguster les friandises avant de poser à l’invité les questions qu’elles contenaient, et qu’il avait spécialement concoctées. Une manière amusante de susciter un dialogue informel, auquel l’intéressé s’est soumis de bonne grâce. Quant à la troisième surprise, c’était la présence à Marseille de cet écrivain célèbre, traduit en 33 langues, auteur d’essais politiques, de scénarios, d’articles, de livres jeunesse et surtout de romans. Avec sa barbe, sa rondeur et son air débonnaire, Andreï Kourkov a fait cadeau de sa présence joviale, de son français impeccable (l’une des 7 langues qu’il parle aujourd’hui), de son humour et de sa fantaisie (que ses lecteurs connaissaient déjà, et qu’ils ont pu voir en live ce dimanche-là). Que retenir de ce jeu de questions-réponses ? En vrac, que Kourkov, Ukrainien qui écrit en russe, préfère être considéré comme européen ; qu’il réside à Kiev, comme un autre écrivain célèbre, Boulgakov, dont il partage l’«optimisme noir» et le goût de l’absurde ; qu’il collectionne, outre les langues, les cactus, les animaux (nombreux dans ses fictions), les disques et gramophones ; qu’il pensait devenir «écrivain soviétique» dès l’âge de 15 ans ; que c’est pendant son service militaire, alors qu’il était gardien de prison, qu’il a commencé à écrire et que depuis il n’a plus cessé ; qu’il le fait chaque matin de 5 à 11h ; qu’il aime Gogol quoiqu’il le juge «trop dépressif» ; que son héros
favori est Nikita Kroutchev, encore un Ukrainien remarquable, auquel il a d’ailleurs consacré l’un de ses romans ; que pingouins et Soviétiques sont «les mêmes animaux collectifs». Sans illusions mais sans cynisme, Kourkov porte sur l’ex-URSS ainsi que sur l’Ukraine et la Russie actuelles un regard dénué de complaisance mais plein de tendresse pour les êtres, animaux et humains, qui peuplent ces étranges contrées. FRED ROBERT
Andreï Kourkov était invité à Histoire de l’Œil le 12 déc à midi. À lire : Le pingouin et Le dernier amour du président (coll. Points), ainsi qu’aux éditions Liana Levi Laitier de nuit.
que toute vie mérite d’être vécue, que toute histoire est digne d’être racontée. Qu’importent les trafics, les boîtes de striptease minables et les emprisonnements abusifs, s’ils permettent d’accéder au rêve… Jolie démonstration de cet «optimisme noir» dont Kourkov s’est fait une spécialité et qu’il manie aussi habilement que l’humour à froid. F.R.
Surprises de Noël Andreï Kourkov Liana Levi, coll. Piccolo, 4 €
La soupe aux livres qu’organisent les Éditions Parole de Jean Darot démontre le contraire, avec une culture vécue, construite par les discussions, les écrits aussi bien que les paroles. Cette sympathique manifestation voyage entre les villages, les villes, s’ancrant chaque fois dans le paysage local, par le travail avec une association, une structure qui permet la mise en place matérielle. Depuis 2008 elle rassemble de manière conviviale et souvent érudite (mais sans prétention) lecteurs, auteurs confirmés ou «occasionnels». Textes, lectures, images, films, pièces, partage d’écrits, de paroles, et la soupe bien sûr, à déguster en prolongeant la conversation, idées, références, titres, entre le fromage et le dessert, chaleur, sourires, complicité. À Entrevennes, le 19 décembre dernier, la soupe aux livres avait un parfum particulier, car elle s’articulait autour du mouvement insurrectionnel pour la défense de la République en Provence en décembre 1851, en réaction au coup d’état du 2 décembre par Napoléon III. Deux temps forts, la présentation de l’ouvrage de Frédéric Négrel, La société montagnarde d’Artignosc et celle de L’homme semence de Violette Ailhaud, avec son émouvante interprétation théâtrale par la compagnie Base Art. La grande histoire s’entremêle de toutes les histoires particulières, destins brisés ou exaltés, et les témoignages se bousculent. Frédéric Négrel explique, resitue les évènements, rappelle le dates, les chiffres, s’appuie avec précision et clarté sur les travaux qu’expose son ouvrage (étude d’une remarquable précision, s’appuyant sur les archives, du cas particulier d’Artignosc). On ne souvient plus beaucoup aujourd’hui de l’ampleur de la révolte de 1851, de la violence de sa répression, qui entraîna condamnations, exécutions, déportations en Algérie ou à Cayenne. 2000 condamnations pour les seules Basses Alpes ! Certains hochent la tête dans l’assistance, de nombreuses familles gardent en mémoire les traces de ces évènements, de destins particuliers bouleversés pour avoir simplement soutenu la République, qui nous semble si évidente aujourd’hui. Frédéric Négrel justifie son choix de passer par le particulier, qui semble
LIVRES 59
livres et résistance
Marabout, bout de ficelle… qui tente de rendre le rythme africain et les sensations éprouvées là-bas. J’ai aussi voulu créer un personnage qui ait en lui une fraîcheur d’intuition, une joie et une débrouillardise à toute épreuve. Abdou serait une sorte de picaro ? Oui, et Le Candidat un mini roman picaresque, puisqu’il ne fait que 250 pages ! J’ai voulu faire d’Abdou une machine de vie. C’est un Candide qui avance et qui croit foncièrement à l’issue, qu’il bricole par tous les moyens, en s’aidant des animaux et du surnaturel si nécessaire. Abdou a l’intuition de tout ; tout ce qu’il ne connaît pas, il l’imagine. Comme les autres, il aspire à l’altérité. Je trouve d’ailleurs révoltant que les jeunes occidentaux puissent aujourd’hui voyager à leur guise, alors que la jeunesse africaine est enfermée, qu’on lui refuse le droit à la diversité du monde. Abdou représente donc la jeunesse africaine Oui, et tous les hommes aussi. Derrière lui et son histoire, il y a des films, les littératures créole et africaine, l’ombre d’Ulysse également… et tellement d’autres souvenirs... Votre langue, très particulière, est un reflet de ce mélange. J’essaie de réaliser un montage de tous ces bouts de ficelle, qui forme une allégorie. Ce montage, il faut lui donner de la musicalité et du rythme par le glissement du langage. C’est ainsi que je procède, par glissements successifs. Une aventure poétique finalement ? Oui, car c’est le langage qui crée la péripétie.
Frédéric Valabrègue est né à Marseille en 1952. Il y est revenu en 2000, après avoir vécu 16 ans au Niger, plusieurs années en Amérique du Sud puis à Paris. Cet infatigable voyageur, qui enseigne l’histoire de l’art à Luminy, trouve encore le temps d’écrire. Des essais sur l’art, mais aussi des récits et des romans. Son dernier ouvrage, Le candidat, vient d’être publié chez P.O.L.
anodin, donc sans intérêt, anonyme : «rompre avec cet anonymat, c’est ouvrir la possibilité d’une mesure du banal». Comment s’est élaborée la conscience politique dans les milieux ruraux ? La collation des multiples cas particuliers fournit une approche fine et une meilleure appréhension des faits. Les sociétés secrètes, les chambrées («chambretto» en provençal, le plus souvent les foyers républicains de la Provence), sont-elles des préfigurations de partis politiques ? En tout cas, ces lieux de discussions ont favorisé les prises de conscience, et le fonctionnement démocratique de la société. La Provence connaissait ainsi une vie dense, les idées circulaient, et le coup d’état du 2 décembre suscita révoltes et soulèvements. La répression dépeupla les campagnes, laissa des villages entiers sans hommes. L’homme semence raconte la vie de ces femmes qui se retrouvent seules, dans un village face à la montagne de Lure. Le livre lui-même a une belle histoire. Violette Ailhaud l’écrit en 1919, le glisse dans une grande enveloppe qu’il ne faudra pas ouvrir avant l’été 1952 et le destine par testament à l’une de ses descendantes entre 15 et 30 ans. Yveline découvrira le témoignage de son aïeule en 1952. Texte bouleversant, chargé d’une poésie puissante digne d’un Giono, forte et sensuelle, sensitive, brûlante. C’est si beau que de nombreuses troupes l’adaptent au théâtre, Jean Darot nous lit même une lettre du Rwanda… L’interprétation vibrante de Laure Bruno et Emmanuelle Le Caro (très belle composition à la harpe) vous happe dans l’éclairage amoureux de Paul Bruno (voir Zib’23)… De la soupe ? on en redemande ! MARYVONNE COLOMBANI
L’homme semence Violette Ailhaud Éditions Parole, Coll. Main de femme
La société secrète montagnarde d’Artignosc Frédéric Négrel Éditions 1851 Association pour la mémoire des résistances républicaines
PROPOS RECUEILLIS PAR FRED ROBERT
Voir la chronique du livre p. suivante Frederic Valabregue © John Foley/P.O.L
La Soupe aux livres d’Entrevennes, rencontre avec Frédéric Négrel © X-D.R
Zibeline : Depuis quand écrivez-vous ? Frédéric Valabrègue : J’ai commencé assez tôt à rédiger des articles. J’ai également écrit beaucoup de poésie ; certains textes ont été publiés dans des revues. Pour moi, écrire, c’était écrire de la poésie. D’ailleurs, je lis surtout de la poésie et des essais, très peu de romans. Pourtant, depuis 1989, vous en avez écrit 4… Oui, car c’est là que j’arrive à libérer ma langue. Des poèmes que j’ai écrits, il y en a peu dont je sois content. Le roman me permet de retrouver la poésie par un autre biais, à travers la charge émotionnelle et l’incandescence dont j’essaie de nourrir mes textes. En 2005, vous avez publié Les Mauvestis, un beau succès. Vous définissez ce texte comme une «chronique». Pourquoi ? Au contraire de certaines fictions au long cours à l’américaine, qui s’écrivent au passé, je cherche toujours à m’inscrire dans un présent, dans un réel fait de matière, de choses vues et entendues, une sorte de reportage. Avec Les Mauvestis, je visais à rendre l’oralité de la parole d’ados marseillais. Mais certains critiques y ont vu un tableau des jeunes de banlieue ; ce n’est pas du tout ce que j’ai voulu faire. Il y a parfois des rendezvous imprévus avec l’actualité… Aujourd’hui encore, avec Le Candidat qui débute au Niger, vous vous inscrivez dans une actualité sensible Ce n’est pas pour cette raison que j’ai écrit ce «roman africain». Mes trois livres précédents avaient Marseille pour cadre. Je désirais cette fois me transporter dans un lieu qui ne concerne plus mon environnement immédiat mais ma mémoire. J’ai vécu une jolie adolescence au Niger et j’ai voulu rendre hommage à ce pays, à son espace si particulier, à sa musique, à sa ruralité. Qu’évoque ce roman, puisque cette fois vous l’appelez «roman» ? Ce livre est un hymne au Niger et à l’Afrique. Il reprend tout ce que j’ai entendu dire, tout ce que j’ai senti, vu, lu. C’est une sorte de bric-à-brac mobile,
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LIVRES
LITTÉRATURE
La bande à Bodo
Avertissement (ne pas confondre avec «Préface») : ce roman n’est pas oulipien affirme benoîtement l’auteur... mais la lectrice - voir statistiques démographiques et culturelles - n’est pas obligée de croire monsieur Jacques Jouet qui entretient avec le réel, donc la fiction, des rapports très complexes ! Bodo, c’est d’abord le cousin de Lucy, déjà sapiens ; Bodo noir, c’est l’africain, qui joue le rôle de Baudot blanc, le colon éternel (existence mythique attestée chez le griot Don Alilo, texte à l’appui) au cours du wassan kara, forme théâtrale satirique et carnavalesque en usage dans la seconde moitié du XXe siècle au Niger, interdite en 2005. Bodo, c’est aussi et surtout le fils du susnommé, évincé lui de la représentation, pour avoir incarné trop librement le président Kountché : vagabond, guérillero, paléontologue d’occasion notre héros picaresque traverse méthodiquement des pans de l’histoire du continent africain, charmes et désolations de la déco-
lonisation et de l’indépendance, la France en filigrane... Entre Jacques le Fataliste, Zadig et le Neveu de Rameau, Bodo va et vient au gré de ses identités ; le roman se déploie, galope ou se prélasse dans la digression, le zig-zag et l’intertextualité exigeant de la lectrice vaillante une attention sans faille ; littérature plurielle sinon potentielle qui offre dans un foisonnement prolixe une Phèdre de village, une rencontre Bodo-De Gaulle au bout du rouleau à Baden-Baden, des contes et des paraboles, des documents d’archives aussi et tout le reste. Jacques Jouet aime et respecte l’Afrique ; puisant dans le cliché de l’énergie vitale le carburant de son épopée, il donne au Sarko discours de Dakar, sans jamais le regarder en face, un sacré goût de ringard ! MARIE-JO DHÔ
Bodo Jacques Jouet P.O.L. 19,90 €
Somme poétique La poésie est un genre qui, éditorialement, est moribond. Si on en écrit encore on en lit très peu, et les quelques lieux qui persistent à en publier comme le cipM tirent à un nombre d’exemplaires très restreint. Lorsqu’on ajoute à ce constat la difficulté des traductions poétiques, et le relatif désintérêt des éditeurs pour certaines littératures étrangères, on ne peut que saluer les éditions Gallimard qui publient en format poche une Anthologie des Poètes de la Méditerranée. Anthologie très contemporaine, les plus anciens ayant une vingtaine d’année, et tous les poètes publiés étant vivants, et certains très jeunes. Ce projet éditorial est porté par Culturesfrance et Marseille Provence 2013, qui revendique ce livre comme un emblème de ce qu’elle veut faire. Interroger la Méditerranée à travers la poésie contemporaine est un joli signe, et le résultat est très convaincant : le choix des poètes - il en manque toujours dans une anthologie - est remarquable, ainsi la volonté de faire figurer en face de leurs traductions françaises les textes
originaux : même lorsque vous ne comprenez rien à leurs arabesques (18 langues, 5 alphabets) elles vous parlent… D’amour, de sexe (les quelques femmes), de mer assez peu, de fruits paradoxaux, et de douleurs. De héros épiques et de traces concrètes, de refuges aussi, de maisons. On y retrouve quelques textes qu’on aime, qui vous amènent à feuilleter plus loin vers un ailleurs inattendu. Les poèmes de la rive sud sont plus âpres, durs, hantés de morts, de révoltes et de guerres. Ceux du nord s’attachent à la Méditerranée comme une mère, ceux du sud ne la voient pas. Comme toute notre histoire l’anthologie commence en Grèce, et se termine, après un tour complet des nations, par sa frontière macédonienne. En passant par le Levant, l’Afrique, l’Europe. Des notices biographiques courtes nous renseignent en fin d’ouvrage sur la centaine de poètes présents. Ce qui provoque des allers retours et un inconfort de lecture, accentué par une mise en page peu claire. Mais l’essentiel n’est pas là. AGNÈS FRESCHEL
Embarquement immédiat Du voyage d’Abdou, jeune griot burkinabé en route pour l’Europe où il veut aller «étudier la vie», Frédéric Valabrègue ne prétend relater qu’ «un tronçon sur une longue portée». On le prend donc au Niger, on le suivra jusque sur les eaux de la Méditerranée. L’important c’est le mouvement : «Il s’est dit : l’homme, si t’as la capacité, tu files vers le nord. […] Si t’as la patience, tu grignotes la route. Les petits sentiers font les grands périples». Ainsi va Abdou, du Niger à la Lybie. Berger occasionnel, récupérateur de canettes en alu, guide pour touristes en mal d’exotisme, travailleur exploité dans une saline ou un campement de rebelles et même steward improvisé sur la barque de l’exil, il peut tout faire. Un as de la débrouille doublé d’un jongleur de mots qui sait plaider sa cause pour avancer, avancer toujours. Car le désir et la détermination sont plus forts que tous les obstacles : «Faut essayer. Je me
suis toujours hissé sur des épaules invisibles». Une des grandes qualités du roman de Valabrègue est de transcrire, dans une langue charnelle et bricolée, qui charrie ruptures syntaxiques de l’oral et fulgurances poétiques, l’énergie vitale et l’imagination fertile de ce «candidat» au passage. De faire jaillir des pas et des rêveries du griot voyageur l’image d’une Afrique à la fois mythique et résolument contemporaine. Dénué de tout folklore exotique ou compassionnel, ce récit d’apprentissage en pièces détachées est un sacré viatique. FRED ROBERT
Le candidat Frédéric Valabrègue P.O.L, 16 € Lire l’entretien avec Valabrègue en p. précédente
Les Poètes de la Méditerranée Préface Yves Bonnefoy Poésie Gallimard, 12 €
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Terres maudites Le même désenchantement suinte des romans de Gary Victor et Yahia Belaskri. Le même fatalisme. Une chape de plomb fossilise la société haïtienne, une vague de violence inonde la terre algérienne ; clanisme ancestral et racisme chez l’une, fondamentalisme religieux chez l’autre. Les mêmes âmes désespérées tentent vainement de lutter contre un avenir si noir «que même les rêves ne sont que cauchemars». Le sang et la mer de Gary Victor plonge Hérodiane et son frère Estevel dans les entrailles putrides de Port-au-Prince et l’enfer de son bidonville Paradi ; Si tu cherches la pluie, elle vient d’en haut de Yahia Belaskri naît d’un terrible mensonge, l’un des maux du pays. L’intrigue romanesque, finalement, n’a que peu d’importance, ce sont les tragédies de l’histoire récente qui sont les vrais «héros», leurs ravages sur les hommes, l’ébranlement des certitudes, la violence des sentiments. Partir ? combattre ? espérer ? Tout cela à la fois, confusément. Gary Victor emprunte un style métaphorique qui amplifie les divagations d’Hérodiane et la figure fantasmagorique
Albanie blues
Né en 1944, fils d’un violoniste tombé en disgrâce, Fatos Kongoli ne s’est résolu à devenir romancier qu’au début des années 1990, au moment de la chute du régime communiste albanais, l’un des plus durs de l’ex-bloc de l’Est. Écrivain de la transition démocratique, ses livres évoquent ouvertement la dictature et ses conséquences ; ainsi La vie dans une boîte d’allumettes, traduit en 2008, dont il viendra prochainement parler à Marseille. Un récit étrange, qui commence comme un roman noir (le personnage principal, Bledi Terziu, tue involontairement une jeune Tzigane), se termine comme un roman noir (la police sonne à sa porte) mais offre tant d’autres pistes… Après l’homicide inaugural, il faut bien sûr se débarrasser du cadavre et éviter d’être soupçonné. Là n’est pourtant pas l’essentiel. Kongoli met en scène un individu fragile, proche des êtres perturbés qui hantent les nouvelles d’Edgar Poe et se jettent tout seuls dans la
Jeune Genêt
On n’est pas sérieux quand on a dix-sept ans… La figure emblématique de Rimbaud - jeunesse, révolte, et mythologie de l’auteur - veille sans doute sur la petite collection À vingt ans des éditions du Diable Vauvert, qui réunit des biographies d’auteurs circonscrites à leur jeunesse, avant leur entrée en littérature. L’idée est bonne, et placée sous le signe d’une formule réussie : «pour qu’ils deviennent des classiques, il fallait d’abord qu’ils soient des originaux». Après Flaubert, Vian, Colette et Proust, c’est le sulfureux et énigmatique Jean Genet qui vient compléter la série. Né de père inconnu et abandonné par sa mère, enfant de l’assistance publique, Genet aura passé sa jeunesse dans une succession effarante d’enfermements et de fuites, écrasé par le paternalisme autoritaire, asphyxiant, d’administrations carcérales et bien pensantes : placements avortés, internement à la colonie de
de son frère tant aimé, soulève le couvercle malodorant posé sur les laissés pour compte et le pouvoir de vie ou de mort des puissants, dénonce l’immobilisme d’une société archaïque aux croyances indéboulonnables. Le séisme sera bientôt inévitable… L’écriture minutieuse, hachée, lancinante de Yahia Belaskri ajoute à l’enfermement de Déhia, Adel, Badil dont les destins funestes se croiseront inévitablement dans cette société prisonnière «du ciel bas de l’horreur». La mort qui fauche au hasard par la main d’un fanatique ou d’un étudiant malchanceux, l’intransigeance religieuse qui dynamite le cœur des familles. Des vies martyrisées dont l’auteur amplifie l’asphyxie par son tempo de plus en plus durci. Hérodiane est plongée dans ses lectures, Déhia et Adel sont de brillants universitaires : d’une même voix, les deux écrivains s’attachent à la force des livres et de l’éducation comme seule planche de salut pour des peuples à bout de souffle. Malgré le peu de ciel bleu au-dessus de «leurs pays d’épouvante». MARIE GODFRIN-GUIDICELLI
gueule du loup. Cet homme instable, dont la parole même est sujette à caution, semble incarner la schizophrénie d’une Albanie coupée en deux, entre l’ancien et le nouveau. Le récit aussi, structuré selon des allers-retours dans le temps et les points de vue narratifs, révèle la cassure intime du personnage central, de toute une génération. Le roman offre ainsi une plongée saisissante dans l’Albanie «d’avant» tout en relatant l’avènement d’un nouvel ordre, pas franchement réjouissant non plus. FRED ROBERT
La vie dans une boîte d’allumettes Fatos Kongoli Rivages, 18 € L’auteur sera invité à la BDP pour la prochaine rencontre d’Écrivains en dialogue (organisée par l’ADAAL), mardi 25 janvier à 18h30.
Mettray, fugues à répétitions et arrestations multiples, engagement dans l’armée en Syrie et désertion. La biographie est rapide, elle se nourrit paradoxalement de la matière autobiographique de l’œuvre, sans pourtant y entrer vraiment, mais elle évite les impostures démonstratives pour atteindre honnêtement son ambition : proposer une lecture facile, moins rébarbative qu’une collection de dates, et esquisser un portrait d’auteur qui incite à entrer dans l’œuvre de Genet. Ou à faire des émules, pour peu qu’on ait encore vingt ans… AUDE FANLO
Jean Genet, une jeunesse perdue Louis-Paul Astraud Au Diable Vauvert, 12 €
Le sang et la mer Gary Victor
Si tu cherches la pluie, elle vient d’en haut Yahia Belaskri Vents d’ailleurs, Coll. littérature Ici & ailleurs, 17 € et 14 €
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LIVRES
RENCONTRE | LITTÉRATURE
Littérature non conforme
«Pour dire ce qu’il faut, il faut en dire trop» HF Blanc
Henri-Frédéric 1er et le Roi Gilles 1er L’Excessif (sic sic sic) ne sont pas en peine pour éclairer les lanternes un peu faiblardes et répondre à toutes - oui toutes - les questions : loin des éternels déçus doux-amers que peuvent laisser craindre leurs notices biographiques (détesté des élites locales ...interdit de dédicaces ...mis au ban ...attendant de recevoir les honneurs qui lui sont dus... ) malgré la dose évidente d’autodérision bien pensée, les deux auteurs articulent un discours qui va bien au-delà de la déploration sur la malédiction culturelle d’être marseillais : il doit y avoir une place pour une littérature hors norme, non conforme, trois tons au-dessus ou à côté des petites voix fluettes du temps. Les lieux communs, la vulgarité ? un passage obligé et un signe de reconnaissance sinon d’appartenance. Pourquoi se taire avec les loups lorsqu’on possède de facto une langue locale ample, cosmique, apte à dire le monde avec ou sans les mains? Le sacré pointe son nez, l’air de rien et le dionysiaque n’est pas loin avec son cortège blasphématoire et boiteux ; le rythme, le rythme et la cadence pour Ascaride, homme de l’oralité et de la scène ; la satire dans son acception la plus impure de ragoût parodique et aussi le pot-pourri métaphysique pour le très cultivé Blanc qui déteste que l’on aime ses préfaces... Une refondation de la littérature en vue ? Sourires lointains mais yeux gourmands ; l’entretien se termine sur la formulation d’un désir hugolien : faire cénacle et accueillir à la table du banquet overlittéraire les malpropres de la langue en tous genres…
Il est des lieux où souffle l’esprit et à Marseille, on le cherche parfois, cet invisible, ce subtil dans la mistralade... Question d’intensité sans doute, de créativité lexicale peut-être. L’overlittérature (au dessus ? au-delà ? déjà morte ?) est née de cette frénésie caractéristique de certains écrivains du lieu, à s’arracher l’étiquette platement parisienne de «polar marseillais» pour s’estampiller autrement en toute liberté dérisoire et assumée. Philippe Carrèse, Serge Scotto sont à l’origine de ce lancer de mots attrapé au vol par L’Écailler qui en a fait une collection spécifique jusqu’à la reprise de flambeau par les éditions du Fioupélan (gros crabe poilu et verruqueux bien de chez nous). Les trois auteurs qui bénéficient de l’imprimatur 2010 sont déjà et depuis longtemps fichés au Grand Déjantage du verbe : le texte d’Anne Marie Ponsot Josy Coiffure a été depuis les années 80 joué avec un certain bonheur sur toutes les - petites et hardies - scènes de la douce France. La reprise «écrite» fixe, sinon fige, cette prose de l’instant modeste dans un parler marseillais «gentil» et rassurant dans ses transgressions syntaxiques et vocaliques de petites gens un peu trop tendrement colorés. Plus corsées et urticantes, la réédition des imprécations luxuriantes de Samson Derrabe-Farigoule, homme lige de Gilles Ascaride, contre sa ville natale («...toi avec toujours ta ricane tu nous fait défiler nous autres tes médaillés, médaillés de la crasse de la méchanceté de la bêtise de la morgue de la douleur tu nous fais faire la manécanterie des soldats de bois...») et la révélation au monde du Livre de Jobi d’Henri-Frédéric Blanc, jobédification d’un marlou bling bling tombé dans la grandeur de l’humilité «…il prophétisait la ruine de la ville, la merde tombant des cieux, les trottoirs se mettant à fondre ; l’Egypte a eu ses 7 plaies : Marseille possède les siennes : les voitures, la saleté, les faux artistes, les crottes de chien, les faiseurs de projets, les zélus, les tables de café bancales...») ! Truculence, fantaisie, recyclage du connu: la lecture rouvre les yeux et les oreilles... Dieu vomit les tièdes, de toute évidence nos deux overlittérateurs aussi : se présentant à l’heure dite en un lieu convenu de la rue Paradis, Sa Sainteté le Pape
MARIE-JO DHO
Josy Coiffure Anne-Marie Ponsot (préface de Serge Scotto / Postface de Jacques Bonnadier ) Fioupelan,12 € Sur tes ruines j’irai dansant Gilles Ascaride Fioupelan, 14 € Le Livre de Jobi Henri-Frédéric Blanc Fioupelan, 14 €
Un Grec à New-York
Le 17e épisode des aventures de Constantin le Grec ne déroge pas à la règle : pas question pour le héros de lézarder sur le pont du Némésis, son nouveau bateau, ni de refaire le monde avec ses copains pescadous de L’Estaque ou l’amour avec Anaïs sa girelle bien-aimée. L’aventure est toujours au bout du quai et elle démarre sur les chapeaux de roues ! Lancé à la poursuite de son amoureuse disparue, laquelle était elle-même sur une affaire de trafic de canards du Sud-ouest bizarrement gavés, Constantin file à New-York et l’histoire file avec lui dans une course foutraque, où se croisent un gang latino des plus teigneux, un ingénieur français génial et pleutre, un fan de John Lennon complètement azimuté, un chauffeur de taxi new-yorkais natif de Marseille… Entrer dans un roman de Del Pappas, c’est accepter de se laisser gansailler, au mépris de la logique (et parfois de la syntaxe) par une faconde et
une énergie qui rappellent sans cesse au lecteur que Constantin a beaucoup à voir avec son créateur, que ses aventures «proviennent des territoires sombres de [la] mémoire» de Gilles Del Pappas, de son expérience et de sa culture riches, particulières, et que toutes ces histoires écrites, on a l’impression en les lisant de les entendre tant la voix est là. De là sans aucun doute vient son succès à la ouaneguène, dans le choix assumé d’un parler marseillais qui clame haut sa tendresse pour sa ville et ses habitants. Pour les curieux, un glossaire des mots et expressions marseillais, dont certains apparaissent ci-dessus, ainsi que quelques recettes de cuisine du Grec, dans la tradition du regretté Montalban, complètent l’ouvrage. FRED ROBERT
Constantin et les 40 canards Gilles Del Pappas Après la lune, 15 €
Ode au père Un père secret, qui n’a connu que le travail dans sa vie, un travail avec ses mains, au service de la France. Un père qui a fait la guerre pour défendre ce même pays et dont le père avait servi lui aussi, partageant le front de 14-18 avec les tirailleurs sénégalais. Un père auquel personne n’a appris à lire et à écrire et qui a construit des ponts et des barrages toute sa vie. Un père pour lequel le retour à la terre des origines est resté un mirage et qui n’y est retourné que mort, car tel était son désir. Un père dont la tombe ne sera jamais honorée par le fils qui écrit cette histoire. Lui, c’est Ahmed Kalouaz, écrivain aujourd’hui, qui essaie de reconstruire quelques instants de vie, de reconstituer les lieux à partir de vieilles cartes postales, d’imaginer les chantiers dans le froid, le partage des chambrées et des gamelles. Il évoque l’enfance de ce père orphelin, ses premiers boulots sur l’aride sol algérien, le mariage arrangé, le départ pour la France. Puis les désillusions des conditions de vie, l’installation de la femme et les enfants qui se succèdent. De la mère on ne saura rien, pas plus que des 11 enfants.
Ahmed Kalouaz semble s’être enfermé dans son aventure intérieure. Seule l’image du père le hante et il s’adresse à lui tout le long du récit à la 2e personne. Des sentiments d’adulte, que ne partageront pas forcément les lycéens et apprentis du prix littéraire… CHRIS BOURGUE
Avec tes mains Ahmed Kalouaz Rouergue, coll. La brune, 12 € Sélectionné pour le Prix régional des Lycéens et Apprentis
Monstre ordinaire Liliana Lazar, originaire de Roumanie, a vécu sous le régime de Ceau escu, avant de venir vivre en France il ya 15 ans, dans la région de Gap. Elle a décidé d’écrire son premier roman en français, une façon de prendre des distances par rapport à son pays : «Je n’aurais pas eu le même résultat dans la langue de mon enfance». C’est d’ailleurs un traducteur qui assurera la version roumaine prévue pour avril 2011... Son roman dépeint la vie inquiétante d’un village perdu dans les montagnes de la Moldavie, proches des Carpates. Une vie réglée par le Pope, les jeteurs de sorts et les «moroï», les revenants, autour d’un lac protecteur au cœur de la forêt, baptisé la Fosse aux Lions. L’histoire commence en 1965 avec l’accession au pouvoir d’un inconnu du peuple, le camarade Ceau escu. Et un parricide : le jeune Victor, souffredouleur de son père, l’assomme et le fait disparaître dans le lac. Cinq ans plus tard, le meurtre d’une jeune fille contraint le jeune homme à vivre caché sous la protection de sa mère et de sa sœur. D’autres meurtres, jamais prémédités non plus, suivront et feront de Victor un paria. Il devra se racheter en copiant jour et nuit des textes saints, interdits par le régime. Pendant ce temps un nouveau pope, complice des
autorités, instille la malhonnêteté, la suspicion et la haine de l’étranger tandis que les superstitions pèsent sur les esprits… Le lecteur est littéralement happé par ce récit nerveux au dénouement inattendu, qui l’amène à la révolution de 1989 et au changement du régime… qui fera de Victor une sorte de héros. C.B.
Terre des affranchis Liliana Lazar Gaïa, 18 € Sélectionné pour le Prix régional des Lycéens et Apprentis
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LIVRES/ARTS
L’alpha et l’oméga de Penone Toute l’œuvre de Giuseppe Penone, associé au mouvement de l’Arte Povera, est «une appropriation du sens profond de la nature à travers une poétique subtile du mouvement». L’Arbre des voyelles couché au détour d’une allée du jardin des Tuileries depuis 20001 en est une magnifique illustration, étrange gisant vivant aux racines mises à nu ; aujourd’hui sujet d’un ouvrage édité à la demande de l’artiste par le musée du Louvre, richement illustré de vues d’ensemble, de détails, de photographies explicites sur le processus de fabrication et son installation in situ, d’études et de dessins préparatoires pour le choix des essences ou des positions des racines et des lettres. L’Arbre des voyelles est une sculpture-morte dont les branches en bronze - matière noble et éternelle - donnent naissance, au contact avec le sol, à de nouvelles pousses comme «autant de vies renouvelées», et dont les racines dessinent les lettres AEIOU en référence au sonnet de Rimbaud… Quelques textes de Penone éclairent sa
démarche, notamment sur le parallèle entre la mutation et le processus de croissance de l’arbre avec l’expérience de l’œuvre d’art. D’autres encore multiplient les approches : Olivier Kaeppelin rappelle les conditions de sa réalisation ; Daniel Soutif souligne l’enracinement de son œuvre dans la relation entre l’arbre et l’humain mais également le caractère exceptionnel du projet (Penone perturbe l’ordonnancement de ce jardin à la française) ; Marie-Laure Bernadac évoque avec l’artiste les notions d’horizontalité et de verticalité, les relations mimétiques entre l’arbre et le bronze dans son œuvre sculpté. L’ouvrage, épuré, sobre, fait entendre le bruit de l’arbre qui tombe. MARIE GODFRIN-GUIDICELLI 1
Commande publique engagée en 1999 par le CNAP/ministère de la Culture et de la Communication, inscrite aux inventaires du fonds national d’art contemporain dont le CNAP assure la garde et la gestion.
Un guide pour les collectionneurs Art tribal d’Afrique Noire n’est pas un beau livre de plus sur l’Afrique avec photos quadri sur papier glacé et commentaires indigestes sur les splendeurs exotiques. Jean-Baptiste Bacquart signe un ouvrage de travail, socle de recherches postérieures, chez Thames & Hudson déjà éditeur de L’Art africain de Franck Willette et l’indispensable L’Art contemporain africain de Sidney Littlefield Kasfir. Agrémenté de 865 illustrations, le livre traverse en 240 pages le continent d’Ouest en Est au fil de 49 chapitres correspondant à des aires culturelles spécifiques, divisés chacun en deux parties : la première cerne rapidement la production des tribus concernées et éclaire - aussi rapidement - leurs structures religieuses, sociales et politiques ; la seconde s’attache à décrire quelques objets représentatifs (masques, bijoux, statues reliquaires, serrures et portes, tambours, cimiers), illustrés et accompagnés de notices bibliographiques. Rendre compte de la production artistique du
continent africain en un seul volume étant impossible, l’auteur donne les clefs d’accès à un savoir et à une érudition dont l’ouvrage constitue les prémices. Il distille aux amateurs ses connaissances acquises à la Sorbonne, à l’École du Louvre et au département d’art tribal de Sotheby’s Londres qu’il a dirigé, rappelant dès l’introduction que les «beaux objets» africains, une fois retirés de leur contexte originel, «ont perdu leur justification et leur rôle, et ne peuvent être considérés que comme des coquilles vides ». Un distinguo nécessaire à la compréhension de ces objets - et non pas œuvres - produits par «le commanditaire, le devin du village et le sculpteur». M.G-G.
Art tribal d’Afrique Noire Jean-Baptiste Bacquart Thames & Hudson, 29,95 €
Sacrément pratique Sur un modèle qui a fait ses preuves (Versailles palais des rois), les éditions du Chêne poursuivent la publication d’ouvrages de petit format richement illustrés, faisant office de guide culturel très pratique à utiliser. Grâce aux photos de Gilles Targat et aux commentaires bilingues (anglais) de Corinne Targat, vous connaitrez le Paris Sacré comme votre poche, des vestiges des édifices paléochrétiens aux églises en tous genres du XXe siècle. Quartier par quartier, ce voyage initiatique vous donnera rapidement et facilement des renseignements ludiques et passionnants avec une
fiche par monument, de Saint-Eustache au SacréCœur, en passant par Notre Dame de Paris, la Sainte-Chapelle, la Madeleine, le Cloître des Billettes ou la chapelle expiatoire. En parcourant ces joyaux de l’art sacré, croyants et mécréants prêcheront à coup sûr pour la même paroisse. FRÉDÉRIC ISOLETTA
Paris sacré Corinne et Gilles Targat Éd. du Chêne, 14,90 €
Arbre des voyelles Giuseppe Penone Musée du Louvre Éditions & Beaux-arts de Paris les éditions, 24 €
LIVRES/ARTS 65
Paris l’ado On ne compte plus les photographes qui investissent le quotidien et le banal. Mais des Halles à la place des Vosges via les méandres du métro, les ados sont-ils tous pareils ? Les clichés photographiques renvoient-ils aux clichés mentaux projetés sur la jeunesse actuelle ? Durant trois années, Hugues Lawson-Body est allé à leur rencontre pour les rassembler dans cet important ouvrage de près de deux cents images en couleur. Des images d’apparence assez convenue où des adolescents s’offrent en confiance et sans artifice ostentatoire, alternant groupes et individualités, parfois posés en toute simplicité assurée, de face le plus souvent. Des plans rapprochés s’attardent sur certains détails (coiffures, tatouages, bijoux, accessoires vestimentaires et incontournables smartphones). On croise différentes communautés d’origines africaine, asiatique, européenne ou du Maghreb. Mais les mélanges ici sont rares : skaters, métalleux, rastas, «maghreb
united», chic, rappeurs… s’affichent par des affinités identitaires, de classe (sociale), de lieu de résidence probablement aussi. Dans la préface William Klein s’interroge :«ils se préoccupent de leur look et passent leur temps à le peaufiner mais qu’ont-ils de différent des jeunes des autres villes occidentales ?». On ne fait pas d’ahurissante surprise à la mode kawaii comme au Japon dans ce Paris prodigieusement quotidien. Manifestement Hugues Lawson-Body a opté pour une neutralité bienveillante proche du reportage rappelant plutôt Raymond Depardon pour ses paysages de France (affranchis de la présence humaine), sans rechercher le spectaculaire dans le genre Larry Clark, deux figures emblématiques de l’actualité photographique parisienne. Les textes sont en anglais, si jamais à Londres, New York ou bien même Marseille…
Jeunes Parisiens Hugues Lawson-Body 1980 Éditions, 34 €
CLAUDE LORIN
L’Harcourt studio Le sous-titre peut être trompeur car cet ouvrage ne révèle pas seulement les secrets de fabrication des mythiques photographies griffées Harcourt. Il raconte aussi la genèse de ce studio commercial et artistique depuis sa création en 1934, restitue son esprit et cette esthétique remarquable, tout comme les valeurs qui se doivent d’être perpétuées ; «l’excellence, l’esthétique, l’élégance à la française, la sobriété et la magnificence». Entre la chronique historique, une autocélébration valorisant l’entreprise (une seule signature en conclusion des textes par son propriétaire actuel) et le manuel pratique de genre do-it-yourself façon Harcourt, l’ouvrage se parcourt avec beaucoup d’intérêts et une iconographie nécessairement riche : 150 photos - presque un siècle d’existence parfois
chaotique de cet établissement dont une succursale, disparue aujourd’hui, fut créée à Marseille en 1945. La partie la plus technique et pédagogique renseigne le déroulement pré et post la prise d’image (le maquillage, le fameux halo lumineux, l’astuce du bas de soie troué, la retouche au labo) et, en s’appuyant sur bon nombre d’analyses détaillées de clichés, nous éclaire aussi sur l’évolution des choix artistiques et les codes Harcourt (les canons ?) qui persistent aujourd’hui, même convertis au numérique. Une édition en coffret est disponible avec un tirage tamponné du portrait de Laetitia Casta (35 €).
C.L.
Coups de gueule Olivier Bernex a délaissé son pinceau pour la plume avec la même énergie désespérée. L’exécution de la peinture, titre ô combien violent, résume le propos de l’ouvrage dans lequel l’artiste règle ses comptes avec l’art contemporain, superpose premiers souvenirs de peinture, évocations intimes, soubresauts des années 60/70. Le tout piqué de sentences souvent intransigeantes sur le cénacle parisien dont il se dit «exclu» et de citations à la pelle… Des propos épars, dissolus comme s’il divaguait à haute voix au gré d’une vie vécue comme un sacerdoce. Tours et détours d’un homme meurtri et inconsolable dont la vie a toujours été un combat, «un long chemin solitaire». Le peintre n’est-il pas selon lui comme le poète, «cette autre espèce en survie», dans un état de repli, d’exil, d’incompréhension ? Aussi attendrissant qu’agaçant, Olivier Bernex se pose en victime de conjonctures défavorables, obligé de lutter contre la solitude et l’oubli, d’œuvrer en résistance contre… Contre qui au juste ? Sa famille en premier lieu avec laquelle il rompt
tous les liens, et une longue cohorte d’adversaires, galeristes, critiques, politiques et autres décideurs de la chose publique. Comme le Frac qu’il rebaptise Fonds régional d’aide aux copains ! Sa prose laisse perplexe, entre émoi et crispation : trop d’aigreur l’habite encore. Mais dans ce jaillissement (tourmenté et transcendant comme sa peinture) perlent de vrais questionnements sur l’acte de peindre, l’état actuel de la peinture, le statut de l’artiste, les fracas et les tourments de l’esprit créateur. Une fois le livre refermé, les mots écrits par ce peintre solaire totalement perméable aux variations de lumière résonnent étrangement : «Inquiétude, doute, impuissance… et s’il n’y avait pas d’Ariane dans cet enchevêtrement sinueux»… M.G.-G.
L’exécution de la peinture Olivier Bernex Autres Temps, Coll. Le Temps de la pensée, 20 €
L’Art du portrait selon Harcourt Secrets et techniques Éditions Pearson, 25 €
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LIVRES/ARTS
Les complexes de Meynard Ce livre accompagné d’un CD fait suite à l’exposition de Jean-Claude Meynard à la Villa Tamaris de La Seyne-sur-Mer en septembre 2010. Babel, la Géométrie des énigmes rendait compte de trente-cinq ans de créations à travers une sélection représentative des œuvres hyperréalistes des débuts, des séries sur la complexité jusqu’aux recherches plus récentes conçues avec la théorie des fractals. Richement illustré, le livre reprend le titre de l’évènement et s’attache à la récente série des Babel (très sculpturale) et des hybridations (l’artiste recombine ses propres œuvres en une nouvelle proposition), suggérant des correspondances entre elles plutôt qu’une présentation didactique et chronologique abordée logiquement en fin d’ouvrage. Le film de quinze minutes, tourné par Gilles Bastianelli dans le cadre de l’exposition, est ponctué d’apports de spécialistes astrophysiciens (André Brahic, Isabelle Grenier), de l’art (Robert Bonaccorsi,
Natures de l’art
Voici un petit ouvrage qui, en raison de son sujet, de ses qualités réflexives et l’importance des références convoquées, aurait mérité la forme d’un de ces corpulents livres d’art en tête de gondole des librairies. En quand même près de cent pages et une iconographie ad hoc, les auteurs, tous universitaires émérites menés sous la direction de Barbara Denis-Morel, docteur en histoire de l’art, explorent les enjeux mis en œuvre dans les productions artistiques contemporaines en relation avec le monde naturel. Œuvres utilisant l’espace naturel comme lieu d’intervention (Andy Golsworthy, Nils Udo), combinant les éléments de la nature (Michel Blazy) ou bien conçues à l’aide des sciences (Olaf Nicolai) ou les nouvelles technologies (Karl Sims, John McCormack), selon des dispositifs plus ou moins complexes dans lesquels, par exemple, le son est primordial comme chez Erik Samakh ou Alexandre Joly. Les concepts de nature, écologie, écosystèmes sont resitués ou redéfinis au fur et à mesure des nécessités et des questionnements en
Gian Carlo Pagliasso) ou amateur passionné (André Camapana, Paul Charbit) notamment. Les textes de Robert Bonaccorsi, commissaire de l’exposition, d’Elisabeth Préault et les regards des interviewés apportent différents éclairages sur un travail énigmatique, qui aurait appelé quelques éclaircissements supplémentaires : en aucun moment n’apparaît la parole de Jean-Claude Meynard qui convoque peinture hyperréaliste, théorie fractale, manipulations numériques, mythe de Babel et réflexions sur la représentation du monde comme si la théorie du chaos s’en était mêlée, entre figuration et abstraction géométrisante. L’art comme la pensée scientifique doivent-ils parfois provoquer jusqu’au vertige ? Ce Babel, la Géométrie des énigmes est une bonne introduction à l’œuvre de Meynard pour qui méconnaît ce travail singulier…
Babel, la Géométrie des énigmes Robert Bonaccorsi, Elisabeth Préault Fragments International, 30 €
CLAUDE LORIN
regard des œuvres. L’architecture (Jean Nouvel), l’urbanisme (Alan Sonfist), le design (les propositions de Bernard Stiegler), le paysage (Gilles Clément), parcs et jardins (Michel Corajoud, jardin du musée du Quai Branly par Patrick Barrès) participent de cette réflexion où la biodiversité peut être fortement sousjacente telle que la conçoit Patricia Johanson, avec l’émergence de nouvelles représentations art/nature comme l’éco-conception abordée dans un chapitre très dense par Patrick Barrès. À un moment où l’accord est unanime sur l’obligation de modifier nos comportements envers notre planète, on constate que les artistes contemporains n’ont pas été les derniers à prendre en compte la question, selon de singulières postures qui n’ont rien à envier à celles d’autres penseurs. Un catalogue digne de l’exposition éponyme qui s’est déroulée à l’Espace Pouillon de l’Université de Provence à Marseille, dans le cadre de l’année Mondiale de la Biodiversité.
Ecosystèmes Biodiversité et art contemporain collectif s/dir. Barbara Denis-Morel Publications de l’Université de Provence, 15 €
C.L.
Portrait pluriel Que reste-t-il à apprendre de Dominique Bagouet disparu le 9 décembre 1992 ? Il existe déjà de nombreux ouvrages, une importante filmographie (captations et adaptations), des notes de chorégraphie, photos, articles, et plus de 200 documents audiovisuels issus des archives de la Compagnie Bagouet. Un riche héritage que la structure Carnets Bagouet gère depuis 1993, préserve, transmet à travers diverses initiatives. Mais aucun objet ne nous avait donné de le voir en répétitions et de l’entendre en interviews, de croiser témoignages et analyses et d’accéder à trois œuvres majeures de son répertoire : F. et Stein (1983), Le Saut de l’ange (1987), Meublé sommairement (1989). Le premier coffret multimédia coordonné par Anne Abeille et Christine Rodès répare cette lacune,
composé du livre Parler de… et de deux DVD Voir enfin… (archives et œuvres) qui rassemblent un faisceau de regards : les journalistes Chantal Aubry, Pascale Chatain et François Cohendy, le chorégraphe et écrivain Daniel Dobbels, le dramaturge Alain Neddam, Hélène Cattala et Fabrice Ramalingom, exdanseurs de la compagnie aujourd’hui chorégraphes… L’essence de la fabrication de la danse est là, dans ce portrait pluriel de l’un des chorégraphes majeurs de la scène française des années 80/90, avec ses doutes, ses motivations, ses réflexions, ses inspirations et ses collaborations. Un document de travail et un album vivant. MARIE GODFRIN-GUIDICELLI
Dominique Bagouet Coffret multimédia, Édition La Maison d’à côté, 30 €
DISQUES 67
Talents d’ici !
La pianiste Christelle Abinasr et le violoniste Alexandre Amedro se produisent parfois sur leur terre marseillaise d’adoption (ils officient au Conservatoire Barbizet et à l’Opéra municipal). Le duo qu’ils forment connaît de beaux succès. On se souvient d’un brillant récital donné Place Reyer au début 2010 (voir Zib’27). Leur premier disque est consacré à de la musique (franco)-belge. La fameuse Sonate en la majeur (1886) de César Franck (1822-1890) est un fleuron du genre. Proust l’aurait-il évoquée dans À la recherche du temps perdu et sa fictive «Sonate de Vinteuil» ? Un motif récurrent traverse les mouvements en subissant des transformations, donne à la pièce unité «cyclique» tout en concordant à l’idée proustienne de mémoire fluctuante.
École de flûte
Jocelyn Aubrun (flûte) et Aline Piboule (piano) gravent, pour leur premier disque chez Lyrinx, un programme original et rare de musique française. Une réduction du Prélude à l’après-midi d’un faune de Debussy et la Fantaisie op.79 de Fauré complètent un triptyque de Sonates signées Philippe Gaubert (18791941), Charles Koechlin (1867-1950) et Gabriel Pierné (1863-1937). Intitulé Flûte et piano en France 1890-1920 ce disque constitue un panorama
On connaît moins l’œuvre d’un compatriote de Franck qui fut son élève. Si Guillaume Lekeu (18701894) conserve un brin de notoriété, c’est grâce à sa Sonate en sol majeur (1892-93). L’opus reprend le modèle cyclique du maître, mais possède une expression lyrique singulière (son 2e mouvement sorte de «serpent à sonate» proustien est exceptionnel !) qui fait regretter la mort prématurée, à 24 ans, d’un musicien prometteur. Le duo Abinasr/Amedro propose une version soignée des opus, mêlant au chant passionné ou nostalgique un souci constant du bon goût, de la justesse dans l’émotion et de l’équilibre clavier/cordes.
CD disponible à la Fnac Centre Bourse et par correspondance sur http://violonpiano.canalblog.com
JACQUES FRESCHEL
de l’école française de flûte, formidable héritage de Paul Taffanel à la fin du 19e siècle. L’élégance du style, le raffinement sonore se conjuguent avec la vélocité technique et l’écoute sans faille chez ces deux jeunes artistes. Ils mettent en lumière de formidables élans où le chant exulte, l’harmonie chemine au fil des nuances pastel, à l’équilibre entre une insouciance pastorale et la douce mélancolie.
CD Lyrinx LYR 269
J.F
Dans la ligne de mire Auteur, compositeur et interprète québécois, Éric Bélanger s’immisce doucement mais sûrement dans le paysage de la chanson française. Lauréat de plusieurs prix prestigieux au Canada, celui qui s’est fait connaitre outre-Atlantique avec l’album Bananaspleen en 2008 traverse cette fois l’océan avec À 35 millimètres du bonheur, douze chansons très bien arrangées avec le concours de François Richard. Traçant sa trajectoire musicale sans soubresaut, avec simplicité, poésie et
Éthéré
Après un premier album enthousiasmant, Les moissons d’ambre et ses quatorze titres chimériques installent un peu plus les Peppermoon sur la scène francophone, et qui plus est, en haut de l’affiche dans les pays asiatiques. Le troisième est déjà en chantier et devrait suivre, terminant un cycle homogène. Sur ce deuxième opus, on appréciera le timbre coiffé de la douceur de la voix arachnéenne d’Iris Kohlev, à la
Construit
Dans ce Rockingchair là, on pourrait se poser pour un confortable voyage au sein du néo jazz hexagonal. L’album intitulé sobrement 1 :1 est à prendre avec sérieux sans craindre la mauvaise blague. Le sextet multiforme - l’ingénieur du son fait partie intégrante du groupe - ne se cantonne pas dans un univers formaté. Son monde évolue de titre en titre, et travaille véritablement le son, la couleur et le timbre. Le jazz, l’électro, le rock, l’expérimental et même le tango
douceur, Éric Bélanger est un utilisateur de mots distillés avec subtilité au cœur de lignes bien mélodieuses (en duo avec Anaïs sur C’était pas vraiment nous). Comme il le dit lui-même, c’est une analogie avec l’univers de Tim Burton qui définit le mieux sa façon de chanter la mélancolie : il «traite la mort joyeusement».
À 35 millimètres du bonheur Éric Belanger Play On - Sony Music
FRÉDÉRIC ISOLETTA
fois lointaine et presque intime. Cette pop volante donne l’impression de ne jamais se poser. Les ballades de Pierre Faa, poétiques et délicates, sont symbolisées par le graphisme des pochettes, qui évolue à chaque album, et possède quelque chose d’impressionniste.
Les moissons d’ambre Peppermoon I.C Music Discograph
F.I
composent une riche palette et sont prêts à jaillir. Un instrumentarium original utilisant le teremin ou les structures Baschet (utilisé en musique concrète), la très belle trompette d’Airelle Besson et la clarinette (ou saxophone ténor) de Sylvain Rifflet sculptent le relief de ces compositions originales qui ont le souci permanent du son et de la construction. F.I.
1:1 Rockingchair Yellowbird
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RENCONTRES
Libraires du sud /Libraires à Marseille - 04 96 12 43 42 Rencontres avec Gilles Granouillet à l’occasion de la présentation du 18 au 22 janvier de la pièce Six hommes grimpent la colline (à la Minoterie), le 19 janv à 14h à la librairie Regards (Marseille) Avec Jean Jamin pour son livre Anthropologie du jazz (Cnrs éditions, 2010) écrit en collaboration avec Patrick Williams, le 20 janv à 18h à la librairie Maupetit (Marseille) Avec Bartolomé Bennassar pour sa biographie de Vélasquez (de Fallois, 2010), le 22 janv à 18h à la librairie de l’Horloge (Carpentras) Avec Carole Micheli pour La gymnastique, du prestige à l’oubli (Le Manuscrit) et Nicole Delor pour Promets-moi de mentir (Ed. Jacques-Marie Laffon), le 22 janv à 16h à la librairie Prado Paradis (Marseille) Avec Eric Semerdjian pour son ouvrage Mémoire de la douceur qui vient - Turcs, Arméniens : sortir de l’empêchement (L’Harmattan, 2010), le 22 janv à 16h à la librairie Maupetit (Marseille) Avec Ahmed Kalouaz pour son roman Avec tes mains (éd du Rouergue, 2009) sélectionné pour le Prix Littéraire des lycéens et Apprentis de la Région Paca, le 25 janv à 18h la médiathèque Boris Vian (Port-de-Bouc) Avec Yahia Belaskri pour son livre Si tu cherches la pluie elle vient d’en haut (Vents d’ailleurs, 2010), le 26 janv à 19h à la librairie Aux Vents des mots (Gardanne) Avec Joel Guedj pour son livre Introduction à l’histoire de la Shoah (Mago, 2010), le 27 janv à 17h30 à la librairie Prado Paradis (Marseille) Avec Sara Vidal l’occasion de la parution de son livre Les anciens abattoirs de Marseille (éditions Cris écrits), photographies de Frédéric Raynaud, le 28 janv à 18h30 à la librairie Regards (Marseille) Avec Jean-Marc Levy-Leblond pour La science n’est pas l’art (éditions Hermann), le 29 janv à 16h à la librairie Masséna (Nice) Itinérances littéraires : rencontre avec Lionel Salaün pour son premier roman Le Retour de Jim Lamar (Ed. Liana Lévi, 2010) animée par la libraire Agnès Gateff, le 19 janv à 19h à la librairie L’Attrape Mots (Marseille), le 20 janv à 18h à la librairie Au Poivre d’Âne (Manosque), le 21 janv à 18h à la librairie Eveils (Apt) ; avec Vincent Borel pour Antoine et Isabelle (Sabine Wespieser Éditeur 2010), le 10 fév à 19h au Forum Harmonia Mundi (Aix), le 11 fév à 19h à la librairie de l’Horloge (Carpentras) ; avec Anahide Ter Minassian et Houri Varjabédian pour Nos terres d’enfance - L’Arménie des souvenirs (Parenthèses 2010 - collection Diasporales), animée par Dominique Paschal, libraire, le 16 fév à 17h30 à la librairie Prado Paradis (Marseille), le 17
fév à 18h30 à la librairie La Carline (Forcalquier), le 18 fév à 19h à la librairie Masséna (Nice) Escales en librairie : Rencontre avec le plasticien, auteur, et rédacteur en chef des Carnets du Paysage Jean-Luc Brisson pour son dernier livre Le Paradis, quelques observations sur le Plan d’Aou (Actes Sud, 2010), le 29 janv à 11h à la librairie Le Grenier d’Abondance (Salon) et à 17h à la librairie Imbernon (Marseille) ; avec Ulli Lust pour sa bande dessinée Trop n’est pas assez (ça et là, 2010), le 9 fév à 18h30 à la librairie Goulard (Aix), le 10 fév à 18h à la librairie Réserve à bulles (Marseille) AGGLOPOLE PROVENCE Service culture – 04 90 44 77 41 Dans le cadre de la 6e édition de la manifestation Lire Ensemble qui aura lieu du 1er au 16 avril, lancement des concours de nouvelles et de marque-pages, dont la date limite d’envoi est fixée au 1er mars : concours adulte, ouvert à toute personne de plus de 18 ans n’ayant jamais publié sur le thème Bleu(s) à l’âme ; concours jeunes sur le thème Peur bleue(s), concours de marque-pages pour les enfants de 3 à 8 ans et de création de poésie libre illustrée pour les enfants de 8 à 11 ans sur le thème du bleu. AIX Centre aixois des Archives départementales – 04 42 52 81 90 Exposition Aix, ville ouvrière, 1850-1940. Jusqu’au 12 fév. Librairie All Books & Co – 04 42 12 44 43 Exposition de peintures de Constanza De Narvaz, artsite colombienne, jusqu’au 29 janv. Conférence de Eric Moreau, professeur de langues, sur Les clés de passage entre les langues ; pour un nouvel apprentissage des langues, le 19 janv à 17h. Dans le cadre de la journée internationale de la littérature hongroise, soirée littéraire avec présentation des œuvres de Szerb Antal, le 21 janv à 18h30. Ecritures Croisées – 04 42 26 16 85 A la rencontre d’Edmonde CharlesRoux, en présence de l’auteure et de son éditeur Grasset, en la personne d’Antoine Boussin, ainsi que de celle de Dominique Fernandez, Marie-Christine Barrault (qui lira des extraits de Elle, Adrienne), Bernard Foccroulle, Didier Decoin, Michel Guerrin Les 27 et 28 janv à l’amphithéâtre de la Verrière. Arcade – 04 42 21 78 00 Journée d’information professionnelle sur La prévention des pathologies dans la pratique corporelle artistique au fil du temps, avec l’ostéopathe Peter Lewton-Brain et la pédagogue diplômée CA en danse contemporaine Véronique Larcher, le 10 fév de 14h à 17h.
ALLAUCH Musée – 04 91 10 49 00 Exposition Le grand rêve aborigène, jusqu’au 6 mars. Arts at home, 10e édition, à partir de 14h Cour de l’Archevêché le 5 fév. ARLES Musée Arlaten – 04 90 93 58 11 Programmation hors les murs : Ethno’ balade : Sur la trace des marins dans le quartier de la Roquette, dès 14h30 le 16 fév. FOS Théâtre – 04 42 11 01 99 Conférence de Médéric Gasquet-Cyrus, sociolinguiste, sur Langage et Pouvoir(s) – Pouvoir(s) du langage, le 25 janv à 18h30. LA SEYNE Les Chantiers de la lune – 04 94 06 49 26 Exposition de Rustha Luna, Armée de femmes, jusqu’au 12 mars. Librairie Charlemagne – 04 94 06 01 10 Rencontre/débat avec Marcus Malte, le 11 fév à 19h. MARSEILLE Hôtel de Région – 04 91 57 52 78 Exposition Notre Région, notre avenir, 30 ans de décentralisation, jusqu’au 28 janv. Hôtel du département – 04 91 21 13 13 Exposition du peintre marseillais Henri Autran, jusqu’au 28 janv. CIPM – 04 91 91 26 45 Soirée consacrée à Jean Genet avec Albert Dichy, René de Cecatty et Leïla Shahid, le 21 janv ; vernissage, le 28 janv, de l’exposition Claude Royet-Journoud, The Time Literary Supplement qui dure jusqu’au 19 mars Lectures avec Véronique Vassiliou, Tiphaine Samoyault, Daniel Franc et Emmanuel Adely d’ouvrages des éditions Argol, le 4 fév à 19h ESBAM – 04 91 82 83 10 Sans Jean Genet, Marseille, une ville dans Le journal du voleur : rencontre-débat avec Albert Dichy, directeur littéraire de l’IMEC, reconnu comme le meilleur spécialiste de Jean Genet (le 20 janv à 10h), René de Ceccatty, écrivain, critique littéraire et traducteur (à 14h) et Leïla Shahid, déléguée générale de la Palestine au parlement de Bruxelles, amie de Genet (à 15h30) Institut Culturel Italien – 04 91 48 51 94 Colloque international sur Italo Calvino et ses rapports avec les arts figuratifs : La plume et le crayon. Calvino, l’écriture, le dessin, l’image, le 21 janv à partir de 10h Exposition Yan Nascimbene, Mes illustrations d’Italo Calvino : Le Baron perché, Aventures, Palomar, du 21 janv au 18 fév. A partir du 9 fév 2 jusqu’au 11 mai, des cours spécifiques pour les scolaires sont
organisés : un cours de soutien niveai lycée (le sam de 10h à 11h) et un cours de préparation à l’entrée au collège international (mar à 14h et 15h30). Echange et diffusion des savoirs – 04 96 11 24 50 Conférence du magistrat Denis Salas sur Qu’est-ce que la vérité judiciaire, le 27 janv à 18h45 ; conférence de Franco Farinelli, géographe, président de l’Association des géographes italiens, sur La crise de la raison cartographique, le 3 fév à 18h45. BMVR Alcazar – 04 91 55 90 00 Exposition de Marcel Bataillard, Narcisse, Méduse, Icare, Sisyphe, le paintre aveugle et autres mythes, du 22 janv au 26 fév, vernissage le 21 janv à 18h30 en présence de l’artiste. Exposition Planète mode : modèles sur mannequins créés par les sections Mode des lycées d’enseignement professionnels et par les jeunes créateurs indépendants, jusqu’au 26 fév. Conférence de Bernard Py, économiste stasticien, enseignat-chercheur sur La statistique sans les maths, une réflexion citoyenne. Le 29 janv à 15h. Galerie Juxtapoz – 09 51 23 10 09 Exposition de l’artiste peintre Virginie Biondi, du 4 fév au 2 mars. Galerie du Tableau – 04 91 57 05 34 Exposition de Franck Dubois, .JPG/Correspondances & Dialogues, du 24 janv au 5 fév. CRDP – 04 91 14 13 12 Dans le cadre des manifestations IntégraTice®, rencontre Santé et Handicap pour les professionnels de santé, médecins et infirmières scolaires, chefs d’établissement, enseignats, parents d’élèves… Le 27 janv dès 8h30. Regards de Provence – 04 91 42 51 50 Retrospective Félix Ziem, du 4 fév au 22 mai au Palais des arts de Marseille. MuCEM – 04 96 13 80 90 Les mardis du MuCEM avec Nilufer Göle, sociologue, directrice d’études à l’école des Hautes Etudes en Sciences Sociales : Voir l’Islam, dans les sociétés européennes, le 8 fév. Groupe Maritime de Théâtre – 06 40 38 51 05 Dans le cadre des Curiosités maritimes, reprise du K de Dino Buzzati à bord de la goélette L’Alliance (devant la mairie), avec une exposition. Les 20 et 21 janv à 19h et le 22 janv à 15h et 19h. ABD Gaston Deferre - 04 91 08 61 00 Des écrivains en dialogue : Fatos Kongoli et Jacques Jouet autour de la notion de Décaler le réel, le 25 janv à 18h30. Exposition En chantier, photographies de Driss Aroussi, jusqu’au 21 mai, dans l’espace d’exposition de la Bibliothèque départementale ; exposition Un lieu, des liens…, du 21 janv au 16 avril dans a galerie d’exposition ; rencontre avec Ahmed Kalouaz, le 8 fév à 18h30. Rencontre sur Marseille la violente avec Céline Regnard-Drouot, professeur à
RENCONTRES 69 l’Université de Provence et auteur de Marseille la violente (Presses universitaires de Rennes, 2009) et Laurence Montel, historien-chercheur à l’Université de Provence, le 27 janv à 18h30. Dans le cadre du cycle Ces étonnants archivores, conférence de Xavier Daumalin, professeur à l’Université de Provence, sur Les grandes dynasties marseillaises, le 10 fév à 18h30. Dans le cadre de Marseille la Méditerranéenne, table-ronde sur Progrès techniques et conflits d’intérêt : l’exemple des Arméniens et des Catalans, avec Olivier Raveux et Daniel Faget, le 17 fév à 18h30. Association pour l’Intégration des personnes en situation de Handicap – 04 91 13 41 30 Exposition réalisée en collaboration de Jean-Jacques Surian : Regards, gestes et signes, jusqu’en mai. BMVR Alcazar – 04 91 55 90 00 Rencontre/débat avec Magali Tardivel qui présente son Tour du monde des livres qui vient de s’achever en décembre 2010, le 5 fév à 17h, ateliers Autour du voyage animés par Elise Blot, romancière et lauréate du Prix Première chance à l’écriture, coanimés par Magali Tardivel, le 21 janv, le 28 janv et le 4 fév, de 16h30 à 18h30 à chaque fois. Art-Cade – 04 91 47 87 92 Archipélique 3 : l’ESBAM présente une selection des travaux de la promotion 2010 des options Art et Design dans 3 galeries de la ville : Montgrand, galerie de l’ESBAM et galerie des Grands Bains Douches. Vernissage le 28 janv à 18h à la galerie des Grands Bains Douches de la Plaine, du 29 janv au 25 fév. MARTIGUES Musée Ziem – 04 42 41 39 60 Exposition De la réalité au rêve, l’objet ethnographique et sa représentation, du 9 fév au 12 juin MIRAMAS Centre d’Art Contemporain – 04 42 55 17 10 Exposition Les 4 temps de la fiction, jusqu’au 30 jan. PORT-DE-BOUC Médiathèque municipale Boris Vian – 04 42 06 65 54 Café-lecture autour du livre de Marguerite Yourcenar, Mémoires d’Adrien, le 21 janv à 14h. Lecture du livre de Keltoum Staali, Identité majeure (éd. Atlantique, 2010) par Aïni Iften, comédienne et chanteuse, accompagnée de Alain Bressant, musicien, le 22 janv à 15h. ROGNES Office Municipal de tourisme – 04 42 50 13 36 Exposition De la Vénus de Lespugue au Penseur de Rodin, jeux de sculpture par
l’association Artesens, du 26 janv au 3 fév Exposition des artistes de Rognes, du 8 fév au 4 mars SAINT-SATURNIN-LES-AVIGNON Mairie – 04 90 22 63 00 3e journée de la Bande dessinée sur le thème du western, avec François Corteggiani en invité d’honneur. Les 12 et 13 fév. SALON Ville – 04 90 56 98 62 Exposition permanente, Des Hommes, une Ville, les maires de Salon de la Révolution à nos jours, inaugurée le 14 déc (en écho à la loi du 14 décembre 1789 sur la création des municipalités). SIMIANE-COLLONGUE OMC – 04 42 22 81 51 Concours de nouvelles sur le thème L’enfance, un droit ? 3 critères à développer : l’art descriptif, l’art du dialogue et l’art de faire passer des émotions et son ressenti. Forme libre, ouvert aux non professionnels. Exposition des textes et remise des prix le 14 mai lors de la Fête des toupetits. Date limite d’inscription : le 6 mars. VAL-DES-PRES Bibliothèque municipale – 04 92 21 27 75 Rencontre/débat avec Marcus Malte, le 28 janv à 20h30. VILLENEUVE-LEZ-AVIGNON Chartreuse – 04 90 15 24 24 Dans le cadre des jeudis du mécénat du ministère de la Culture et de la communication, colloque sur Le fonds de donation, un outil patrimonial au service de l’intérêt général : 1re table ronde sur Le fonds de dotation mode d’emploi, 2e table ronde sur Un fonds de dotation pour quel projet ? avec Pierre Morel, président de la Chartreuse (CIRCA), Didier Deschamps, directeur régional des affaires culturelles Languedoc-Roussillon, François Brouat, directeur régional des affaires culturelles PACA, Catherine Dumont, présidente de l’ordre des experts comptables de la région de Montpellier, Daniel Ruat, président du conseil régional des notaires de la cour d’appel de Nîmes, Norbert Casteltort, président du conseil régional des notaires de la cour d’appel de Montpellier, Yvon Roulet, directeur région Sud Est Méditerranée AXA France ; présentation des projets de réalité virtuelle de la Chartreuse, le 20 janv à partir de 13h30.
Biodiversité et chimie
Curieux concours de circonstance, la mode jette son année à thème 2011 à la fois sur la «biodiversité» et sur la «chimie». Mélange étonnant et détonnant (comme, hélas, à Lavera il y a 15 jours) pour ce 2011 que je souhaite donc, à tout nos Zibelfidèles, à la fois intellectuellement explosif et bio divertissant.
Nos belles locales Le neuvième Festival des Sciences et des Technologies aura lieu le 8 avril, à Marseille. Comme une «Cérémonie des Césars» ou un «Festival de Cannes», cette manifestation a pour objectif de mettre à l’honneur la communauté scientifique régionale (sciences exactes, sciences humaines et sociales, médecine, etc.), en la récompensant au travers de la remise de 8 prix. Ceuxci récompensent des chercheurs, jeunes chercheurs, collaborateurs et équipes de recherches qui se sont distingués au cours de cette année. Le Comité Scientifique du Festival rassemble une trentaine de personnalités du monde scientifique régional et travaille à la réussite de cette manifestation, en partenariat avec les trois universités d’Aix-Marseille, la Ville de Marseille, le CEA, l’INSERM, le CNRS, l’École Polytechnique Universitaire de Marseille, l’École Centrale de Marseille, l’APHM, etc. Le Festival accentuera encore cette année son engagement auprès des lycées. Les prix sont ouverts à tous. C’est l’occasion aux chercheurs et enseignants-chercheurs, techniciens et ingénieurs, personnels administratifs et équipes de toutes disciplines de communiquer et montrer leurs compétences et savoir-faire. Au-delà du soutien financier, l’importante médiatisation donnée à l’événement permet de se faire connaître auprès du grand public. Pour participer à cette neuvième édition du Festival, il suffit de remplir un dossier de candidature et de le renvoyer avant le lundi 31 janvier par courrier et par e-mail à l’adresse de «l’Avenir de la Science». 04 96 15 12 50 www.festival-sciences.com
Choc? Holà ! galactique ? Le 11 février à 20h30 à l’Observatoire du Palais Longchamp à Marseille, l’association Andromède nous invite à une conférence où Pierre-Alain Duc, directeur de recherche du CNRS au CEA de Saclay, nous propulsera en «Rencontres, collisions et fusions : les ballets spectaculaires des galaxies». Dans 3 milliards d’années, la galaxie d’Andromède heurtera notre Voie Lactée, un événement aux conséquences désastreuses pour notre propre Galaxie, mais finalement assez banal dans une vie galactique. Au sein de groupe ou d’amas, les galaxies se croisent, se heurtent ou fusionnent à une fréquence relativement élevée. Selon les modèles cosmologiques en vogue, les collisions jouent d’ailleurs un rôle fondamental dans leur naissance, évolution et mort. Elles sont désormais simulées sur ordinateur... et observées dans l’Univers. Le télescope spatial Hubble a en particulier dévoilé des images spectaculaires de galaxies spirales déchirées par des fusions, soumises à des flambées de formation stellaire et qui sous peu se transformeront en galaxies elliptiques. Seule ombre au scintillement ? l’entrée est payante : 5 euros. 04 86 67 21 03 www.andromede13.info
ITER missa est ! Le 15 février 2011 à 18h30, nouvelle conférence «Les horizons du savoir» à l’Espace Ecureuil, rue Montgrand à Marseille, autour de son programme 2010-2011 Peut-on faire l’économie de la science ?. Frédéric Rychen, économiste à l’université de la Méditerranée et Jean Jacquinot conseiller scientifique d’ITER au haut commissariat à l’énergie atomique tenteront de justifier : «ITER, 2011 un investissement international pour des résultats en 2030 ?». Au terme d’une bataille diplomatique entre le Japon et la France, la décision d’installer ITER sur le sol français fut prise en 2005 au prix d’un large consensus international et d’un financement conséquent. Quelles sont aujourd’hui les attentes d’un tel investissement ? Entrée libre et gratuite. 04 91 57 26 49 www.culture-science-paca.org
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PHILOSOPHIE
L’ENSEIGNEMENT DE LA PHILOSOPHIE
Pour qui la philo ? «On nous dit qu’il ne saurait y avoir de philosophie sans conceptualisation, chose impossible pour des enfants. Nous répondons à cette objection qu’il ne s’agit évidemment pas pour nous de faire des cours de philo à des élèves de primaire mais d’induire chez eux une démarche réflexive sur des thèmes touchant l’existence.» Michel Tozzi
Continuons le combat… Le titre du joli film sorti il y a deux mois, Ce n’est qu’un début, fait explicitement référence à un slogan de 68. Il suppose que l’enseignement de la philosophie hors de ses cadres institutionnels, pour que les enfants de toutes les couleurs pensent ensemble, est un combat politique. C’est l’histoire sur deux ans d’un atelier philosophie animé par leur maîtresse à des enfants de maternelle deuxième année jusqu’à leur troisième année. Certes il n’est pas spectaculaire puisqu’il s’agit d’être honnête quant au temps de l’apprentissage, des hésitations, des échecs. Mais la réussite est entièrement visible et nous réinterroge sur l’acte de philosopher, et plus généralement sur l’École, la République et ses gâchis. Car de la naissance à la maternelle on est presque tous
Ce n'est qu'un debut de Jean-Pierre Pozzi et Pierre Barougier
égaux : les différences de capital culturel, d’éducation et de ségrégation sont moins visibles ; dans cette classe, comme il en existe parfois (rarement ?) en France, les petits Français sont tous mélangés : Africains, Arabes, Asiatique, Européens. On n’y voit pas encore l’effet du massacre de notre société de ghettos : des quartiers, des écoles, collèges et lycées où il n’y a que des Africains, des Magrébins…et d’autres que des blancs. Le premier miracle de ce film est dans cette diversité joyeuse, qui donne un sens aux mots république, fraternité, égalité…
et quant à la liberté c’est tout l’objet de cet atelier philo dès quatre ans. Et c’est l’autre miracle ; voir des enfants réfléchir à ce que les mots «réfléchir» et «penser» peuvent dire, les entendre parler de la mort, l’amour, l’intelligence de maman qui ne met pas le Nutella au frigo… et se répliquer entre eux, tout enfant des cités de quatre ans qu’ils soient : «je ne suis pas d’accord avec toi Abderrahmen…» À voir ; pour comprendre comment on naît homme et pourquoi un système ignoble nous discrimine par couleur, race et fortune. RÉGIS VLACHOS
Ce n’est qu’un début, film de Jean-Pierre Pozzi et Pierre Barougier, distribution Le Pacte
De l’enseignement de la philosophie… Luc Chatel, ministre de l’Éducation nationale, annonçait il y a quelques semaines l’extension de l’enseignement de la philo aux classes de secondes. Ce qui déclencha chez les profs un immense éclat de rire… La réponse à cette proposition fut formelle et triviale, mais néanmoins fondamentale : on supprime cette année 16 000 postes de plus dans l’enseignement et on débloquerait des milliers d’heures ? Vu les méthodes de recrutement dans l’Éducation Nationale, il faudrait demander si mon grand-père a un peu de temps en ce moment ou si ma voisine étudiante veut se faire un peu d’argent de poche… Plus pédagogiquement, il y a paradoxalement chez les profs de philo un courant de résistance à l’enseignement précoce de la philosophie. Leur débat a trouvé un large écho en décembre dans les colonnes du Monde, dont vous pouvez retrouver le détail sur le site de l’ACIREPh (Association pour la Création d’Instituts de Recherche sur l’Enseignement de la Philosophie). Un courant, assez majoritaire chez les enseignants de la matière, revendique une forme très assumée d’extraterritorialité scolaire de
la philosophie : la pensée ne serait possible que sur la base d’un savoir déjà acquis sur lesquels il s’agit de faire preuve de réflexivité : difficile de penser la liberté sans connaissance des formes historiques élémentaires de résistance, d’indépendance et de révolutions par exemple. Par ailleurs, l’apprenti philosophe devrait faire preuve de maturité, qui est la base du philosopher. Pour ces deux raisons, la philosophie, au plus tôt, c’est en terminale et pas avant.
Transmettre Une troisième raison, moins avouable, réside dans la conservation du privilège de cet état d’apesanteur scolaire, qui consiste à postuler que le professeur de philosophie n’est pas un enseignant comme les autres. Parce qu’on n’apprendrait pas à penser comme on enseigne un cours qu’il faut étudier. Si la philosophie était une matière comme les autres il faudrait que ses professeurs se mettent
à la didactique, problématisation de l’acquisition des connaissances. Ce qui est loin d’être le cas. Un bon professeur de philosophie reste un érudit, un dialecticien, un spécialiste de Platon, Kant ou Descartes. Et c’est l’image qu’il faut préserver. Un bon professeur de philosophie lit, mais ne s’abaisse pas aux conditions de possibilités pédagogiques de transmission scolaire. Il parle, les élèves suivent, ou pas. La philosophie s’enseigne sur la base d’un implicite universitaire qui se répercute dans le seul outil d’évaluation revendiqué : la dissertation. Comme il n’y a pas de règles pour la pensée, hors de question qu’il y ait une méthode pour la dissertation : aux élèves de se débrouiller. Or on sait que la préservation de l’implicite, sociologiquement, est une condition de conservation par une élite de ses privilèges. Si la philosophie devait s’enseigner plus tôt elle devrait rendre des comptes scolaires, et montrer ses titres de possibilités pédagogiques. Elle devrait déjà clarifier ce qu’elle attend concrètement des élèves de terminales par-delà «une pensée instruite et argumentée». Or
l’élève qui récite son cours dans une dissertation se verra sanctionné alors même qu’on lui demande de l’apprendre. Les correcteurs attendent des copies intelligentes et valorisent ce qui ne s’apprend pas, donc, sans le vouloir, le capital culturel transmis implicitement dans les milieux intellectuellement favorisés. L’enseignement de la philosophie est révélateur, plus qu’un autre, des inégalités scolaires qui reflètent les inégalités sociales. Il est immobile depuis ses origines scolaires il y a deux cents ans, et repose sur le cours magistral et la dissertation. Difficile dans ces conditions de l’étendre hors de la terminale, où il rencontre d’ailleurs de plus en plus de difficultés. Pour sauver la philosophie, une autre philosophie est possible ! (voir les multiples pistes stimulantes de Michel Tozzi et de l’ACIREPh). R.V.
www.acireph.org
L’ÉCRITURE SCIENCES ET TECHNIQUES 71
Écritures Techniques scientifiques
=
L’écriture sumérienne est la première forme scripturale attestée dont les traces remontent à 3500 ans environ avant notre ère. Les historiens s’accordent à dire que c’est l’apparition de cette propriété «scripturale» spécifique de l’humanité qui marque la transition entre ce que l’on appelle la préhistoire et l’histoire. Car l’histoire en tant que discipline n’est autre que la recherche des «tracés du temps» afin de les décrire, les réécrire. L’écriture apparaît alors comme cette volonté humaine de vaincre l’inéluctable volatilité du monde par sa fixation imaginaire dans ce qui résiste aux pratiques humaines : la pierre, la terre cuite.
animal (écriture idéographique) il y a un univers conceptuel : le dessin ressemble à sa forme, notre écriture transcrit en un code phonographique complexe les sons du mot qu’on lui a oralement associé (plus quelques
À l’aube, l’écrit économique La découverte en 1994 de la grotte «Chauvet» en Ardèche et les recherches effectuées par le CNRS sur la datation de ses représentations pariétales, même si l’on conteste désormais qu’elles remontent à 30 000 ans, n’en ont pas moins de 15 à 20 000 ans. Ces dessins-mémoires écrivent symboliquement l’activité, les pratiques humaines et, en fixant le «fait de chasse», participent à leur divinisation par leur persistance même. L’action économique de chasse se transcrit dans un dessin du pouvoir magique du fait ou trophée de chasse. L’écriture sumérienne, plus «récente», repose quant à elle sur le fait économique d’échange. Elle résulterait de transactions entre contrées éloignées nécessitant la mise en place de contrats. Ces contrats étaient des boules creuses de glaise enfermant des calculi, des petites formes en argile symbolisant des nombres sous trois aspects : des sphères, des cônes ou des cylindres. Ainsi, au terme du contrat on cassait les bourses et on dénombrait par identification la quantité de calculi et son correspondant matériel, à savoir, vaches, cochons (plutôt moutons), couvée. Il s’agissait donc bien d’un processus premier de représentation conceptuelle écriture-lecture.
Le geste écrit L’acquisition par l’humanité de l’écriture phonographique*, associée aux langues, est un facteur prépondérant dans le développement de la complexité des pratiques et leur conceptualisation. Car entre le mot écrit «mammouth» et le dessin pariétal de cet
Contrat archaique sumerien concernant la vente d'un champ et d'une maison. Shuruppak, vers 2600 av. J.-C., inscription pre-cuneiforme © Marie-Lan Nguyen
codes orthographiques qui rappellent généralement l’origine du mot, ici le «th» importé de l’anglais, et sa famille, ici les 2 m de mammifère). Cependant ces deux niveaux de représentation renvoient au même «référent» : un truc qui ressemble à un éléphant penché vers l’arrière avec plein de poils et deux grosses dents qui sortent. Le concept «mammouth» lu dans les deux écritures (phonographique ou idéographique) dépend de toute façon du référentiel pratique du lecteur… autrement nommé son niveau culturel. En fait les écritures, avant de prendre le statut universel qu’elles ont aujourd’hui, se sont essentiellement fondées sur la nécessité de transmission d’un savoir et particulièrement d’un savoir-faire. Le schéma idéographique accompagné de son commentaire phonographique est absolument essentiel dans la transmission des
connaissances et leur structuration. Depuis les écrits de la syntaxe de Ptolémée (IIe siècle) jusqu’aux articles académiques actuels de Nature, en passant par l’Encyclopédie de Diderot / D’Alembert, la somme des pratiques humaines se stocke, se mémorise, se transmet par cette transition qu’est le geste d’écriturelecture. Geste qui permet de restituer tout ce que la pratique humaine recèle de gestes techniques. En cela l’écriture constitue bien le geste conceptuel universel du geste technique. Quelle que soit d’ailleurs la forme d’écriture, elle nécessite impérativement un support matériel pratique (argile, papier, tableau, parchemin, semi-conducteurs…), un outil scriptural (calame, stylo, pinceau, clavier) et un code logique de compréhension, une convention scripturale.
Décrit la technique Aujourd’hui, de notice de portable en «surfing» sur l’inter pas très net, nul doute qu’écrire et lire est aussi vital aux humains que respirer. L’avènement du multimédia a ouvert les codes cryptés de l’écrit scientifique à un plus grand nombre de praticiens. Toute forme de pratique scientifique a toujours développé son écriture spécifique. L’apparition de l’idéographie mathématique est étonnement tardive puisqu’elle ne se développe qu’après le début du XVIe siècle avec Robert Recorde qui «invente» l’identité et son «=». Jusque là les démonstrations mathématiques se faisaient couramment en latin avec des schémas et des explications littérales. Les formules alchimiques aux signes cabalistiques consignées en grimoires ouvrent la voie à la pratique chimique et à une idéographie spécifique qui mêle lettres et «traits», symbolisant respectivement éléments et liaisons chimiques. La physique développe suivant ses disciplines une idéographie spécifique et utilise largement la représentation mathématique pour développer ses propres concepts. La biologie descriptive (anatomie, zoologie…) avait développé ses propres formes idéographiques dans la schématisation. La convergence des disciplines comme biologie, biochimie, chimie organique, bio-physique, etc. conduit à la multiplication des «entrées» idéographiques, à leur mélange, leur rationalisation. Puis l’avènement de la «modélisation» par l’informatique révolutionne la fin du XXe siècle. L’écriture et le dessin «3D» modifient fondamentalement les représentations de l’univers et des pratiques scientifiques. La liaison chimique traditionnelle s’estompe peu à peu pour une description spatiale des molécules basée sur les théories mathématiques de la mécanique quantique. Le stockage de l’écrit se fait sur des «clés USB», des «disques durs» internes ou externes. Les grimoires puis les cahiers de laboratoire sont supplantés par les RAM (random access memories), les lignes s’écrivent en Gigabits, les schémas se mettent à se mouvoir en trois dimensions. L’écriture du monde change, le monde change et notre entendement aussi avec… nos aliénations. YVES BERCHADSKY
* Rien à voir avec le machin à manivelle et pavillon, l’écriture phonographique est un mode scriptural basé sur la correspondance entre signe graphique et phonème, notre écriture par exemple.
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HISTOIRE
Le travail de Gérard Noiriel est un projet historique global Le massacre des Italiens est le résultat d’un long travail dont on peut apprécier la démarche et le résultat. Quatre grandes parties se partagent l’ensemble : une société impossible… ; les usages sociaux du national ; la construction des innocences ; les enjeux de mémoire. Ce découpage correspond à ce que l’auteur appelle une socio-histoire. Le projet est global : il cherche à situer un événement dans un contexte à la fois local et national, à lier la micro-histoire qui guette les trajectoires individuelles, les relations internationales ou encore l’histoire économique.
Le contexte En commençant par le drame, un véritable massacre, l’auteur pose le contexte Aigues-Mortais fait de transformations économiques, de l’essor de la vigne et du sel, de l’attraction de Français venus se faire embaucher pour échapper à la répression envers les vagabonds, surtout récidivistes, et au déclin des campagnes. Cette foule qui afflue ne plait pas aux locaux qui la regardent avec crainte et animosité. Viennent aussi des Italiens pour les travaux saisonniers. Contrainte économique et dynamiques individuelles se croisent. C’est dans cet agglomérat instable formant société, et largement tributaire de la Compagnie des Salins du Midi, que se déroule le massacre. La conclusion marquante de l’auteur tient dans cette remarque: «les trimards ont donc joué la scène du massacre devant un public acquis à leur cause.»
L’identité nationale Dans la deuxième partie l’auteur montre que l’identité nationale a guidé les assassins. C’est le résultat de la nationalisation de la société française. Reprenant ses travaux sur la nationalité française (À quoi sert l’identité nationale, Agone, voir Zib’3), il nous montre comment la république a progressivement intégré les citoyens dans une communauté nationale. La IIIe République, fondée en 1870, réussit à faire participer tous les Français à la vie politique de la nation. Elle crée un nouvel espace public ouvert où la presse joue un rôle essentiel. À ce titre la rubrique des faits divers tienne un grand rôle dans la formation et la formulation des opinions. L‘État
LE MASSACRE DES ITALIENS À AIGUES-MORTES
Aigues-Mortes, un moment d’histoire ressuscité intervient de façon croissante dans la société afin de renforcer les moyens d’action du pouvoir central. Enfin, il montre que l’identité nationale et l’immigration sont des inventions concomitantes et interdépendantes. Les vêpres marseillaises, le 17 juin 1881, sont un moment fondateur. L’État veille à la fois à quantifier et à définir les populations sur lesquels il étend son contrôle. Il faut encore ajouter que la crise économique met en exergue l’impasse sociale du régime. Les questions nationales ont bien eu un impact sur la tragédie des marais.
L’enquête Dans la troisième partie, Gérard Noiriel reprend les éléments de l’enquête et le procès qui juge les faits. On peut voir, là encore, comment les représentants de la république ont fait coïncider leurs intérêts individuels et celui de l’État. On voit aussi la rivalité de la presse régionale, entre soi et avec les quotidiens nationaux. Surtout on voit s’affronter, par journalistes interposés, les opinions nationalistes et libérales qui dominent dans le pays. Cet ensemble explique que juges et jurés d’Angoulême se sont résolus à absoudre les criminels, comme ils se sont absous eux-mêmes, membre du peuple, de l’assassinat que leur communauté avait commis. Il ne faudrait pas oublier non plus combien la crise a tendu les relations entre la France et l’Italie, et fait comprendre qu’il fallait étouffer l’affaire pour éviter qu’une guerre éclate dans l’excitation nationaliste.
La mémoire La dernière partie s’attarde sur la trace des éléments et sur la construction de la mémoire que l’on garde. Il montre les éléments qui ont fait pression pour que le massacre disparaisse dans l’oubli au profit des traditions et du caractère du lieu. C’est aussi l’occasion d’étudier les billets de transmission du souvenir : ni la communauté italienne, ni la communauté aigues-mortaise
n’avaient intérêt à transmettre cette mémoire ensanglantée. Au-delà des événements, le livre de Noiriel analyse la façon dont les élites républicaines ont réussi à imposer la référence nationale à tous les acteurs de la cité française. C’est une leçon sur la construction intellectuelle des élites qui guident l’action de ceux qui, pour être reconnus, agissent au nom de justifications qu’ils ne maîtrisent pas. C’est enfin une histoire novatrice, pertinente, critique et engagée dans une volonté citoyenne d’offrir au public les moyens de sa propre mémoire. RENÉ DIAZ
Le massacre des Italiens Aigues-Mortes, 17 août 1893 Gérard Noiriel Fayard, 20 euros
Représentations À partir du travail de Noiriel, deux versions de l’événement tragique montrent comment un travail historien peut permettre une compréhension multiforme d’un moment historique
Aigues-Mortes, lecture Le collectif Manifeste rien proposait, le 17 déc à la Criée, une lecture du Massacre des Italiens. Une guide, employée des Salins, nous conviait à embarquer dans un petit train pour un tour du propriétaire. Mais voilà, lassée de débiter le même discours exotique sur la Camargue, elle se laissait aller, gagnée par le remords et l’horreur du passé, à nous narrer le côté obscur des marais. La chasse à l’homme, le kroumir, le sang qui ruisselle, tout réapparaissait. Avec un accent de cagole elle interpellait le public, le prenait à témoin pour mieux l’intégrer à son récit. Elle raconta le travail de forçat qui consiste à hisser les brouettes de sel sur les camelles, les tas. Elle cita le marquis de Vogüe et sa description des Ardéchois, ces paysans cévenols, lourds au physique comme à l’intellect. Elle expliqua ce qu’étaient les trimards, les SDF de l’époque, errant à la recherche d’un emploi, tentant d’échapper à la police et à la loi de 1885 qui les envoie, récidivistes, à Cayenne. Elle en chanta même leur complainte. D’allers en retours, elle parvint à ces jours affreux du mois d’août 93. D’un côté les Aigues-Mortais, communauté plus ou moins solidaire, de l’autre trimards et immigrés. Le conflit eut lieu entre les seconds sur le chantier. L’étincelle ? Les Italiens reprochaient aux trimards de ralentir la cadence et de leur faire perdre de l’argent. Les choses dégénèrent avec un geste fort : un Italien trempe sa chemise pleine de sel dans le baquet d’eau potable des trimards. La mécanique s’enclenche, un coup de couteau est porté dans la fesse
HISTOIRE73
Sale Août, une fiction ? d’un Français, et l’on court vers le drame. Citant les articles de journaux de l’époque, notre guide nous conduit au cœur des événements. Juge, émeute, appel nationaliste, le drame se noue. Chacun prend sa part dans l’assaut ou le meurtre : de la boulangère au bourgeois. Les Aigues-Mortais, jamais solidaires des trimards, montent leur propre expédition : «la chasse à l’ours est ouverte» proclame le tambour de ville ! C’est l’occasion d’insister sur un personnage, Philippe Buffart, auto-baptisé «Kroumir», un peuple massacré en Tunisie par les armées coloniales. C’est l’assassin, celui qui revendique ce rôle lors du procès. Procès inique, procès surréaliste où les morts n’auront pas de bourreau car personne n’est coupable : ni les trimards, ni les Aigues-Mortais, ni les élites, ni les responsables politiques. Cette promenade dans les marais a su faire revivre un drame violent avec truculence, humour et gravité. Belle performance de la comédienne Virginie Aimone, même si l’usage d’un accent appuyé rendait confuse la narration et nuisait à la prise de distance afin de parler des événements. Quant au texte écrit par Noiriel, il donne une version populaire de l’affaire, éclairage bienvenu et original.
La théâtralisation en débat information historique. Le fondement : comment traduire en langage théâtral un discours scientifique. Martine Derrier expliqua la démarche de l’association DAJA (Des Acteurs culturels Jusqu’aux chercheurs et aux Artistes) : relier les problèmes de la cité et le milieu culturel pour permettre une large diffusion dans la société. Noiriel précisa que l’auteur dispose d’une certaine latitude : il peut imaginer les pièces manquantes d’une histoire à condition que cela soit plausible et sans anachronisme. De la sorte, il peut construire un récit attrayant et sujet à débats pour un large public. On l’aura compris, c’est bien d’une vision civique du théâtre qu’il s’agit. Les précisions données par la suite illustrèrent ce dialogue constructif et instructif où les spectateurs, découvrant les ressorts de la mise en scène, accèdent, en même temps, aux éléments de la recherche historique. C’est aussi, en l’espèce, un moyen de construire l’histoire de l’immigration alors qu’elle brille par son absence dans les écoles…
R.D. © Lucie Laurent
Sur l’estrade Noiriel, les représentants du collectif Manifeste rien et de l’association DAJA. En face, les spectateurs auxquels s’était ajoutée une classe d’élèves. L’exercice était simple : les uns expliquaient leurs buts et leurs motivations ; les autres leurs sentiments, critiques ou louangeurs. L’auteur précisa qu’il s’agissait du plus grand massacre d’immigrés de l’histoire française : un pogrom (un massacre d’une minorité par une majorité) sans équivalent. Il évoqua le travail pionnier d’Enzo Barnaba, «le sang des marais», puis insista sur sa volonté de toucher un public large, autre qu’universitaire, par l’intermédiaire du théâtre. Jérémy Beschon évoqua le travail du collectif Manifeste rien et sa volonté, au travers de lectures spectacles, de mettre notamment en scène des ouvrages scientifiques. Il évoqua ensuite les représentations du spectacle à Montpellier, qui suscitèrent un débat houleux face à certains descendants des protagonistes de l’affaire. Une intervention de la salle permit d’insister sur le lien revendiqué entre spectacle vivant, débat civique et
La pièce mise en scène par Valletti a pour cadre la maison de M. Fournier (le Granier de la véritable histoire), un protagoniste essentiel de l’affaire. Elle a l’allure d’un drame bourgeois où il est question de l’avenir des enfants et de celui des affaires. Nos protagonistes se réunissent dans une vaste pièce où, à la façon de Tchekhov, le monde extérieur vient faire retentir son bruit pendant que se confrontent les personnages. Un professeur d’histoire tente de faire entrer dans la tête de la fille du directeur de la Compagnie des Salins du Midi quelques événements décisifs de l’histoire de notre civilisation. Un ingénieur rêve de progrès et de productivité. Un peintre cherche à faire surgir l’émotion, tandis qu’une apprentie chanteuse tente de découvrir sa voie. Dans la famille Granier, oncle et neveu s’accordent et se désaccordent sur la situation sociale tandis que la sœur, et mère, concilie les contraires. Enfin, l’employé, italien comme il se doit, sert. Tous ces personnages mis en scène vont jouer leur vrai rôle, tel que l’on peut le connaître au travers des témoignages. Ils vont faire partager la situation à travers une vision bourgeoise des événements, où la dynamique individuelle fait écho aux événements sanglants qui se déroulent. Caricature ? non pas ! Plutôt une retranscription libre des contradictions d’un groupe social affronté à un événement qui les dépasse : on nous rappelle la lecture distordue du fait divers qui provoque la curée sur l’immigré transalpin ; le refus de servir de refuge, dans une irresponsabilité qui exonère et justifie ; la mise à distance propice à l’analyse du drame, comme les variations sur le hareng-saur, facéties qui décalent les personnages. Plus personnel chez l’auteur/metteur en scène, cette ode à la ville-phare, Paris, et son horizon onirique vu de la «province» : la mère, ancienne comédienne, propose de retrouver un théâtre citoyen, éducatif et critique. Serge Valletti a conduit son projet dans un cadre contraignant : un drame historique. Son parti pris, la vision de la bourgeoisie, participe à la bonne compréhension de l’événement.
Sale Août de Serge Valletti mise en scène Patrick Pineau (voir Zib’36), a été joué à Sète, Gap, Marseille (la Criée) Il sera joué à La Colonne, Miramas le 26 janv 04 90 58 37 86 www.scenesetcinés.fr au CNCDC, Châteauvallon le 28 janv 04 94 22 02 02 www.chateauvallon.com
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HISTOIRE
LE MUCEM
Les deux derniers mardis du MuCEM s’attachèrent à envisager des solutions aux tensions méditerranéennes
Sortir des conflits pour construire une
civilisation
En passant par l’Histoire Pour introduire la rencontre avec l’historien Henry Laurens autour de son Rêve méditerranéen, Thierry Fabre proposa de s’intéresser aux échanges entre occident et orient méditerranéens à partir de 1798, date de l’expédition française d’Égypte. Moment charnière, loin d’être la première confrontation entre ces espaces : Laurens rappela qu’il s’inscrivait dans la logique géopolitique de la Révolution : au Nord, la question allemande, au Sud, la question arabe. La conquête de 1798, magnifiée par le talent publicitaire de Bonaparte, procédait du désir de partager le génie de l’Égypte, terre inventrice des sciences et des arts et de l’apprivoisement de la mort. Elle prolongeait le souci de régénération des hommes et des institutions voulu par la Révolution. La notion de civilisation, apparue au XVIIIe siècle, pouvait se coltiner à la réalité. La civilisation n’est pas envisagée comme un état, mais comme un procesHenry Laurens © X-D.R
sus : pour Napoléon, qui acclimate la notion au domaine politique, il s’agit de faire croître le progrès sous l’horizon de l’Orient. Ces idées, qu’il servira sur l’autel de sa propre gloire en Espagne ou en Russie, lui sont soufflées par Volney, homme de lettres qui cherche à constituer une science globale recoupant tous les savoirs sur l’homme. Mais pour l’heure, le déferlement Français provoque terreur et exactions… et le pays subit une réorganisation administrative. Mehmet Ali, désigné pacha par la Grande Porte, reprendra l’héritage français : il veut s’insérer dans le mouvement du progrès. En adoptant la logique du modèle de civilisation, la rhétorique du retard à rattraper sur l’occident se met en place.
L’échec des métissages Deuxième temps avec le XIXe siècle. La Méditerranée connaît une mutation en 1850 : le petit âge glaciaire s’achève. Les littoraux, inondés, insalubres, étaient réservés à la pâture des moutons tandis que les hommes s’installaient sur les hauteurs. Désormais triomphent l’anisette, la villégiature et les bains de mer. À l’est, c’est le moment levantin : le français, langue de culture, transcende les peuples qui s’assortissent dans des villes communautaires. 1914 sonne le glas de cette harmonie. Les rivages apaisés basculent dans la violence et l’exil. Le cortège des migrants se meut,
de l’Arménie au Liban, et les élites cultivées disparaissent. La Palestine, terre de rien, s’enflamme sous la brûlure des religions, et s’embourbe dans l’étau de deux contradictions insolubles : les rescapés de la Shoah vivent en Israël dans l’insécurité d’un holocauste toujours envisagé ; les Arabes dans le moment colonial constamment répété, comme si seul ce pays ne pouvait s’en abolir. Chacun s’enferme dans son récit et sa propre mémoire. Comment sortir de cette impasse ? Pour Henry Laurens, l’indispensable tâche des historiens est de réinstaller les réalités. Car l’histoire est la part scientifique de la mémoire. Cette démarche permet de s’extraire du jugement. Plutôt que de chercher la pénalisation, et la punition des coupables, mieux vaut, comme ce fut le cas en Afrique du Sud, faire surgir la vérité et procéder à la réconciliation. Si la perspective n’est envisageable qu’à moyen terme, sa réalisation, sous le sceau d’un humanisme méditerranéen, exige une mise à l’écart des religions : il faut en finir avec ces oripeaux qui dissimulent les réels antagonismes sociaux, et avec les stigmatisations qui provoquent des conflits et invalident la civilisation. Pour le conférencier, qu’un musée maintienne vivant cet héritage semble indispensable. RENÉ DIAZ
Reconnaissance mutuelle des mémoires Pour Kalypso Nicolaïdis, invitée un mois plus tôt, la Méditerranée doit éviter absolument le modèle de l’union européenne, qui oscille entre souverainisme et l’idée d’une grande nation commune. Elle doit refuser de reproduire un état, et doit en passer par une reconnaissance mutuelle des enjeux de mémoire. La politologue, professeur de relations internationales à Oxford et résidente à l’Imera, pense qu’il faut parvenir à reconnaître «les crimes des ancêtres». Face à Thierry Fabre qui constate que le MuCEM se confronte aux groupes mémoriels elle parle de son expérience propre. Descendante des Grecs de Smyrne expulsés en 1922 elle entretient avec la Turquie des relations particulières, qui ne l’empêchent pas de voir qu’à l’horizon 2030 l’Europe vieillissante aura besoin de 70 millions de migrants, et que la Turquie est non seulement son «viagra», mais encore la seule plate-forme qui puisse stabiliser ses frontières : «le modèle Turc est devenu désirable pour les pays Arabes, et la question de savoir si l’Islam est soluble dans la démocratie passera certainement par la laïcité turque, et ses progrès démocratiques actuels.» Qui passe par la reconnaissance des expulsions et massacres qu’elle a commis pour s’édifier.
À Thierry Fabre qui lui demande si son principe de reconnaissance mutuelle n’est pas «une potion magique incantatoire», elle répond qu’il s’agit d’accepter le point de vue de l’autre sans l’adopter, et en évitant d’exporter des modèles. Ce qui serait la seule solution pour régler de vieux antagonismes symbiotiques, comme ceux de la France et de l’Algérie, ou les relations d’oppression sans mutualité, comme Israël et la Palestine : lorsque Vaclav Havel s’est excusé de l’expulsion des Allemands en 1945 il n’était pas question de reconnaissance mutuelle, mais de sa reconnaissance de la mémoire de l’autre. Selon elle la Méditerranée, et l’Europe, ne seront en paix qu’à cette condition préalable. AGNÈS FRESCHEL
Prochain Mardi du MuCEM Voir l’Islam dans les sociétés européennes Nilüfer Göle Le 8 fév à 18h30 L’Alcazar, Marseille
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PATRIMOINE
LA CORSE
Un petit tour chez les Corses qui expriment aussi leur culture sur le continent…
Rompre la loi du silence… ! Le cinéma L’Alhambra a eu la bonne idée de présenter en avant-première le dernier film d’Alain Dufau et de José Césarini Paroles sur images, fondé sur l’existence d’un superbe fonds d’images sur la Corse, fruit du travail de photographes internationaux, conviés en résidence au Centre de Photographies Méditerranéennes de Bastia. Les deux cinéastes ont voulu connaître les réactions que pouvait susciter ce riche travail artistique auprès de divers insulaires : amis, esthètes ou artistes, personnages de rencontres fortuites ou choisies. Loin d’être un simple «road movie», le film fascine par l’habileté des cinéastes à mettre en confiance leurs interlocuteurs, permet-
tant à chacun de s’exprimer librement. Les gens oublient la caméra, se livrent, agacent, suscitent tendresse ou compassion, bref, savent émouvoir par leur parole. À l’évidence l’identification au territoire, au village, au quartier à la ville est très forte même si elle n’est pas exclusive. Chacun expose ses craintes, ses espoirs aussi, face à la mutation profonde et très rapide que vit l’île depuis les années 60. Sont ainsi évoqués la perte des rituels magiques de l’«Incantu à l’agula» (incantation de l’aigle) ; la disparition progressive de la transmission, du mazzérisme, dernier vestige magique du lien très fort entre les hommes et les animaux ; la peur séculaire de l’in-
vasion et son corollaire, la crainte de l’isolement : la disparition des bergers, chassés sous la pression spéculative du foncier ; l’abandon des terres aux arbres morts et aux herbes folles ; l’oubli de l’essentiel de la culture corse : l’humanisme, la poésie, la générosité, l’entraide au profit de la vacuité ostentatoire de ceux qui s’ingénient à les singer les «nantis». Aux images intemporelles des membres des confréries mixtes des villages Cargèse, de Piana, défilant vêtus de leurs plus beaux atours (aubes immaculées, chasubles satinées) sous les salves festives des fusils, s’opposent celles, plus actuelles, de jeunes à piercing et cigarette au bec, un brin
rouleurs de mécanique, plus émancipés mais aussi plus désœuvrés, des banlieues bastiaise ou ajaccienne… Un film qui réhabilite, par la parole accordée et libérée, les vertus d’un peuple qui mérite mieux que les clichés éculés dont il est souvent affligé ! JEAN-MATHIEU COLOMBANI
Barbara Furtuna canta Natale !
© X-D.R.
Aux antipodes des groupes qui se complaisent dans la délectation morose et conduisant graduellement le spectateur sensible aux ultimes confins de l’Ennui, l’ensemble corse Barbara Furtuna n’a pas oublié que Noël est avant tout une fête. Portés avec bonheur par la dynamique sonore de l’ensemble Multitudes, les voix superbes de Maxime Merlandi en siconda, Jean-Philippe Guissani en bassu et contracantu, André Dominici en bassu et la terza Jean-Pierre Marchetti sonnent juste et enchantent par leurs «rivucate». On est séduit dès l’abord par le Ô Maria, perdonu è piétà, un chant traditionnel de Noël de Santa Maria Poghju, on embarque pour l’Orient par la grâce conférée aux riches variations de la berceuse Ciuciarella ; on ramasse le bois avec les enfants de Santu Petru di Tenda pour célébrer le feu païen du solstice avec Natale in Festa ; on frissonne sur la barcarolle A veni ,ô bella… ; on accueille les
Rois Mages avec un cadeau oriental et musical inspiré Bae Dansi ; avant de désirer, pensée impie en ces lieux saints, céder au rythme dansant d’un rapslam, élaboré sur le trame d’une «paghjella», qui renouvelle avec bonheur le genre le plus traditionnel du Cantu corsu. L’interprétation fouillée et sensible de Maxime
Merlandi souligne la douceur mélancolique de la berceuse Sottu à lu Ponte, avant une composition inspirée du groupe magnifiquement interprétée par l’ensemble. La grâce des chants, la tenue des accords et la richesse des mélismes qui permettent d’entendre «la voix des anges», l’inventivité musicale, l’efficace mise en scène et en lumière du spectacle soulèvent à juste titre l’enthousiasme du public nombreux, trop nombreux à l’évidence pour les lieux où il passait… J.-M. C.
Ce concert a eu lieu 13 fois du 6 au 23 décembre dans le cadre des concerts de Noël du CG 13
À venir Le groupe de polyphonies corses L’Alba sera en concert à Ventabren, le 21 janv à 21h, à la salle Sainte-Victoire
Le Maroc et la tête de More Quand il fut exilé en Corse, le roi Mohamed V vint se recueillir à Corbara, le village natal de son aïeule Marthe Franceschini, devenue, sous le nom de Dawiya, l’épouse légitime du Sultan alaouite. Ce fait historique a inspiré aux artistes du village voisin, Pigna, haut lieu du mouvement du «riacquistu» avec sa célébrissime Casa Musicale, un Opéra mettant en scène les marionnettes du Théâtre National de Prague. Une œuvre forte et originale qui, tout en s’inspirant fidèlement des différents «versi», des «paghjelle», «chjami e rispondi» et autres formes du chant corse, fait la part belle au chant marocain ainsi qu’aux rythmes orientaux. Mais aussi à des airs
de facture plus baroque utilisant les instruments traditionnels comme la cistre ou la cialamella (sorte de petite clarinette), à des thèmes plus contemporains, voire à de véritables délires psychédéliques, pédale de distorsion écrasée à mort, façon Zappa ou Deep Purple… La trame habile du livret, établi par Guido Benigni, nous emporte dans un joyeux métissage musical, véhiculant des valeurs de fraternité, d’ouverture et de tolérance. En trois langues : corse, marocaine et française.
J.-M. C.
Davia Opéra pour marionnettes à fil Henri Agnel, Jérôme Casalongua et Amina Alaoui CD et MP3, 8,50 euros www.casa-editions.com
Salon du livre Corse Le 29/1 à 14h30 table ronde avec auteurs corses Le 30/1 à 14h30 Le paysage végétal de la Corse / Nouvel atlas linguistique et ethnographique de la Corse Maison de la Corse, Marseille les 29 et 30 janv 04 91 13 48 50 http://maisondelacorse. pagesperso-orange.fr
EN MONTAGNE
PATRIMOINE 77
La culture tout schuss Briancon sous la neige © ProRider-Sylvain
«Il a neigé !» les sourires s’étirent. Neige, routes bloquées, mais aussi vacances, sport. Les stations s’apprêtent, on estime les épaisseurs, la qualité de cet «or blanc» qui draine tant d’amateurs tous les ans. Poudreuse, fraîche (sic !), légère, durcie, cartonneuse ?… Vous me direz qu’après une bonne journée de ski, de luge, de snow-board ou tout autre instrument de glisse, ivres de plein air, nous pensons d’abord à nous reposer. Et pourtant, la montagne enneigée possède d’autres charmes que les plus curieux apprécieront, de même que ceux qui aiment l’altitude, la neige, mais pas le sport. Conscientes des exigences des touristes, les stations jouent de plus en plus la carte culture. Festivals, balades à thème, éducation, offrent de nombreuses activités. Le développement durable fait partie des critères des différents lieux.
Spectacles Le Festival des films et sports de montagne à Ceillac dans le Queyras, (du 31 janvier au 5 février), projette des courts métrages de Team Collet Production, des films de Gilles Perret, qui s’inspire de sa région, la Haute Savoie, mais élargit le propos local aux problématiques du monde, s’interrogeant sur la place de l’individu pris dans les contraintes économiques et politiques. Les concerts pleuvent sur les stations, les Orres connaissent un Festival blanc, qui présente des chanteurs variés, Sheryfa Luna (15/2), Christelle Chollet (24/2), Camélia Jordana (3/3), D’une ombre à l’autre (8/3), Puggy (9/3), Michael Jones (19/4)… Vars a connu en décembre le concert de Gaétan Roussel… et offrira le grand évènement que constitue son Urban Jib Arena (du 2 au 3 avril) avec des concerts comme celui des Monstroplantes, électro brass band ou le Scratch Bandit Crew, drum & bass-hiphop-triphop… Festival de la chanson française du 16 au 21 janvier à Risoul, avec Barcella le 17, Benoît Doremus le 18, Gérald Gentil le 19, Fabrice Mauss le 20, No one is innocent le 21, et tous le spectacles sont gratuits ! Festival du rire du 23 au 28 janvier au Puy Saint Vincent, avec Yves Lecocq (23/1), Yann Guillarme (24/1), Fanny Mermet (25/1), Sébastien Giray (26/1), Tony Saint Laurent (27/1), Les Lascars Gay (28/1) et des concours pour les nouveaux talents. Enfin, Boule de neige et Ribouldingue veut créer l’évènement du 5 au 12 mars au Val d’Allos.
Chiens de traîneaux et patrimoine Mais la culture en montagne ne passe pas que par le spectacle : prendre le temps de sortir du rythme du ski pour regarder autour de soi est le plus sûr moyen d’accéder à la culture montagnarde. À pied, en raquettes, en calèche ou… en traineau ! Bien sûr, ce n’est pas le seul moyen de locomotion proposé, mais c’est une manière inoubliable de se rendre sur les sites, découvrir le patrimoine naturel, cadres enchanteurs, et l’illusion d’être un trappeur !
gravure sur cuivre à Chaillol, ou de fabrication de sorcières et de merlins à Pisançon. On apprend à comprendre le climat à la maison de la météo des Orres, et l’on s’initie au patrimoine montagnard au musée Orrian, tandis que le Musée de l’éphémère laisse libre cours aux créations sur glace de Philippe Minier. Au Val d’Allos, on fait carrément l’école buissonnière avec la bénédiction des parents (il faut en profiter !). Chaussés de raquettes, les enfants partent découvrir les secrets de la montagne, recherchent les traces des animaux, découvrent la diversité de la faune, déterminent l’essence des arbres, apprennent à aimer et à préserver leur environnement. La montagne nous offre ainsi un monde riche où chacun peut trouver un intérêt. Et si vous pensez vous ennuyer encore, il y a toujours un numéro de Zibeline à glisser dans votre sac ! MARYVONNE COLOMBANI
www.decouverte-paca.fr
Les villages de chaque massif offrent de nouvelles architectures, de nouveaux points de vue. Certains sont même classés «plus beaux villages de France», comme La Grave-La Meije ou Saint-Véran. Villages restés authentiques de Serre Chevalier Vallée, Saint-Chaffrey, la Salle-les-Alpes, Le Monétier-les-Bains, le Casset, le Lauzet… les noms s’égrènent avec la magie de leurs syllabes lourdes, ancrés solidement dans l’architecture aérienne des montagnes. D’autres s’emportent, perchés sur les hauteurs du pays des Ecrins, PuyAillaud, Ailefroide, Dormillouse, Freissinières, où les Vaudois fuyaient l’Inquisition. On peut découvrir ainsi le cadran solaire datant de 1853 de l’église Notre Dame de la Présentation au hameau du Mélézet en aval de la station des Orres. Abries dans le Queyras dispose d’un musée, la Maison du Costume, qui présente des costumes anciens et propose des stages de dentelle sur tambour. L’usine hydroélectrique des Claux à Pelvoux retrace au sein de son espace muséographique l’épopée de la houille blanche. Puis il y a les villes, Briançon, inscrite au Patrimoine mondial de l’UNESCO, avec ses remparts de Vauban, et sa charge d’histoire en tant qu’ancienne capitale de la République des Escartons (au XIVe !). L’air le plus pur de France se respire à Embrun, la cité du lac que l’on surnomme aussi la «Nice des Alpes».
Apprendre en s’amusant Et si vos enfants aussi en ont un peu assez du ski, ils trouveront de quoi apprendre de manière ludique et responsable, avec la ferme pédagogique du Gâ à Saint Bonnet, ou la ferme découverte des cabrioles au village des Marches (Orcières)... À Orcières, on peut jouer dans des igloos, participer à des ateliers de papier recyclé, modelage et
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ADHÉRENTS
Nos Partenaires vous offrent invitations, réductions et avantages ! Pour les places gratuites, téléphonez-leur rapidement pour réserver, puis présentez votre carte de membre (1 place par carte nominative). Pour les réductions, présentez simplement votre carte (réduction valable seulement pour l’adhérent) Le Gyptis 2 invitations par soir pour Le Verfügbar aux enfers le 8 fév à 20h30 le 9 fév à 19h15 le 10 fév à 19h15 le 11 fév à 20h30 le 12 féc à 20h30 tarif réduit B (15€ au lieu de 24) à toutes les représentations 04 91 11 00 91 La Criée 10 invitations pour Que faire ? (le retour) le 10 fév à 20h 04 91 54 70 54 La Minoterie Tarif réduit pour toutes les représentations 8 € au lieu de 12 € 04 91 90 07 94 Les Bancs Publics 1 place offerte pour 1 place achetée pour tous les spectacles 04 91 64 60 00 Théâtre Vitez 4 invitations par soir pour La Récréation le 26 janv à 20h30 le 27 janv à 19h pour Acte Vegas le 6 fév à 20h30 pour Nina ? (épilogue) le 16 fév à 19h 2 invitations Pour La Mouette le 2 fév à 20h30 04 42 59 94 37
Mensuel gratuit paraissant le deuxième mercredi du mois Edité à 30 000 exemplaires imprimés sur papier recyclé Edité par Zibeline SARL 76 avenue de la Panouse | n°11 13009 Marseille Dépôt légal : janvier 2008 Directrice de publication Agnès Freschel Imprimé par Rotimpress 17181 Aiguaviva (Esp.) photo couverture Le Préau des Accoules © Agnès Mellon Conception maquette Max Minniti Rédactrice en chef Agnès Freschel agnes.freschel@wanadoo.fr 06 09 08 30 34
3bisf (Aix) Entrées et visites gratuites sur réservations 04 42 16 17 75
Librairie L’écailler (Marseille 1er) 2 rue Barbaroux 5% de réduction sur tous les livres
L’institut culturel italien 3 adhésions annuelles d’une valeur de 32 €, cette «carte adhérent» vous donnera accès à tous les services de l’Institut, médiathèque et programme culturel. Demande par mail : iicmarsiglia@esteri.it ou au 04 91 48 51 94
Le Greffier de Saint-Yves (Marseille 1er) librairie générale et juridique 10 rue Venture 5% de réduction sur tous les livres
Le Sémaphore (Port-de-Bouc) Tarif préférentiel à 8 € pour Vincent Roca le 28 janv à 20h30 Pour Le Carré curieux le 4 fév à 20h30 Pour Sarkha le 11 fév à 20h30 04 42 06 39 09 Scène nationale (Sète) 4 invitations par soir pour Le Chant du dindon Le 12 fév à 20h30 Le 13 fév à 17h 04 67 74 66 97 Librairie Apostille (Marseille 6e) 104 Cours Julien 5% de réduction sur l’ensemble du magasin Librairie Maupetit (Marseille 1er) La Canebière 5% de réduction sur tous les livres
Librairie Regards (Marseille 2e) Centre de la Vieille Charité 5% de réduction sur tous les livres L’histoire de l’œil (Marseille 6e) 25 rue Fontange 5% de réduction sur tous les livres Librairie Imbernon (Marseille 8e) spécialisée en architecture La Cité Radieuse 280 bd Michelet, 3ème étage 5% de réduction sur tous les livres Librairie Arcadia (Marseille 12e) Centre commercial Saint Barnabé Village 30 rue des électriciens 5% de réduction sur tous les livres Librairie de Provence (Aix) 31 cours Mirabeau 5% de réduction sur tous les livres Librairie Au poivre d’Âne (La Ciotat) 12 rue des frères Blanchard 5% de réduction sur tous les livres
Musique et disques Jacques Freschel jacques.freschel@wanadoo.fr 06 20 42 40 57
Polyvolantes Chris Bourgue chris.bourgue@wanadoo.fr 06 03 58 65 96
Frédéric Isoletta fredisoletta@gmail.com 06 03 99 40 07
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Dan Warzy danwarzy@free.fr
Delphine Michelangeli d.michelangeli@free.fr 06 65 79 81 10
Arts Visuels Claude Lorin claudelorin@wanadoo.fr 06 25 54 42 22
Cinéma Annie Gava annie.gava@laposte.net 06 86 94 70 44
Marie-Jo Dhô dho.ramon@wanadoo.fr
Livres Fred Robert fred.robert.zibeline@free.fr 06 82 84 88 94
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Maquettiste Philippe Perotti philippe.zibeline@gmail.com 06 19 62 03 61
Secrétaire de rédaction spectacles et magazine Dominique Marçon journal.zibeline@gmail.com 06 23 00 65 42 Secrétaire de rédaction Jeunesse, livres et arts visuels Marie Godfrin-Guidicelli m-g-g@wanadoo.fr 06 64 97 51 56
Histoire et patrimoine René Diaz renediaz@free.fr
Philosophie Régis Vlachos regis.vlachos@free.fr Sciences et techniques Yves Berchadsky berch@free.fr
La Pensée de Midi Vous offre 3 exemplaires de Histoires d’un 20 janvier, n° des 10 ans de la revue par mail : chris.bourgue@wanadoo.fr Salon du tourisme Mahana (Marseille, parc Chanot) Du 21 au 23 janv Entrée gratuite sur présentation de la carte d’adhésion Invitation coupe-file à télécharger sur www.invitationtourisme.com avec le code ZIBELINE11 Tendances Créatives (Marseille, parc Chanot) Le salon des Loisirs créatifs Du 17 au 20 fév Tarif préférentiel à 5€ Art-Cade – Les Grands Bains Douche de la Plaine Une adhésion et une consommation au bar de la galerie 04 91 47 87 92 L’imprimeur Magenta 10% de remise sur tous travaux d’impression 04 91 32 64 54 Auto Partage Provence 6 mois d’abonnement gratuit d’essai vous disposez d’une voiture quand vous le souhaitez, à réserver par téléphone ou Internet, 24h/24, 7j/7, selon vos besoins 04 91 00 32 94 www.autopartage-provence.com
Ont également participé à ce numéro : Yves Bergé, Aude Fanlo, Christophe Floquet, Christine Rey, Rémy Galvain, Jean-Mathieu Colombani
Photographe Agnès Mellon 095 095 61 70 photographeagnesmellon.blogspot.com Directrice commerciale Véronique Linais vlinais@yahoo.fr 06 63 70 64 18 Chargée de développement Nathalie Simon nathalie.zibeline@free.fr 06 08 95 25 47