Zibel86

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un gratuit qui se lit

N°86 du 17/06/15 au 15/07/15

les FestivalS Les Puissants de Bilderberg

la Méditerranée en danger



Sommaire

Société

Conférence Bilderberg ...................................................4, 5 Repenser la Révolution ................................................... 6

La MedCop21, Maison de la Région ..................................8, 9

L’IRD, Villa Méditerranée ..............................................10, 11

Politique culturelle

Le MuCEM ..................................................................12, 13

Festivals Théâtre, danse, rue

14 à 26

Musique ................................................................. 28 à 36

Critiques

Théâtre, rue .............................................................38 à 44 Musique .................................................................. 46, 47

Au programme

Cinéma ....................................................................48 à 54 Arts visuels ..............................................................56 à 62

Cartocrise et restrictions Nos étés de Festivals ne seront plus jamais comme avant. Le temps où notre région se transformait en un vivifiant territoire artistique est fini. On peut encore passer chaque soir à danser au son des musiques du monde, à découvrir des opéras en création, à écouter des textes murmurés ou hurlés dans les Cours, à vagabonder dans des installations en pleine nature, à se nourrir de patrimoine habité d’artistes, mais tout cela se replie, et exhale l’inquiétude. Chacun des grands festivals a dû réduire sa voilure, et les places offertes aux spectateurs. Et ils sont nombreux ceux qui ont fermé les portes. La réduction des financements locaux met aujourd’hui la vie culturelle en danger. L’État, non content d’avoir baissé le budget du Ministère, pousse aujourd’hui les collectivités à l’économie forcée, à cause des réductions de dotations généralisées, et du flou de la réforme territoriale. Car cette crise des festivals est une crise politique : on ne pleurerait pas les programmations de tourneurs parachutées sur le territoire pour satisfaire les touristes, si elles faisaient place à une politique culturelle à l’usage des citoyens. Aujourd’hui le plus inquiétant n’est pas la disparition de la vingtaine de festivals recensés par la cartocrise dans notre région. L’inquiétant, ce sont les virages idéologiques de certaines communes, comme Salon qui préfère l’identité provençale aux trop subversifs arts de la rue. L’inquiétant est la disparition des manifestations littéraires, des festivals de cinéma d’auteur, des expositions ambitieuses. L’inquiétant est la privatisation des lieux patrimoniaux et des biens culturels publics. L’inquiétant est que tout cela ne fait que commencer. AGNÈS FRESCHEL

Mensuel gratuit paraissant le deuxième mercredi du mois Édité à 32 000 exemplaires imprimés sur papier recyclé Édité par Zibeline SARL 76 avenue de la Panouse n°11 13009 Marseille Dépôt légal : janvier 2008

Directrice de publication Rédactrice en chef Agnès Freschel agnes.freschel@gmail.com 06 09 08 30 34 Imprimé par Rotimpress 17181 Aiguaviva (Esp.)

RetrouveZ Zibeline et vos invitations sur notre site

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Rédactrice en chef adjointe Dominique Marçon journal.zibeline@gmail.com 06 23 00 65 42 Secrétaire de rédaction Delphine Michelangeli d.michelangeli@free.fr 06 65 79 81 10

Musique et disques Jacques Freschel jacques.freschel@gmail.com 06 20 42 40 57 Cinéma Annie Gava annie.gava@laposte.net 06 86 94 70 44

Maryvonne Colombani mycolombani@gmail.com 06 62 10 15 75 Gaëlle Cloarec ga.cloarec@gmail.com Marie-Jo Dhô dho.ramon@wanadoo.fr

Arts Visuels Claude Lorin claudelorin@wanadoo.fr 06 25 54 42 22

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Jan Cyril Salemi jcsalemi@gmail.com Maquettiste Philippe Perotti philippe.zibeline@gmail.com 06 19 62 03 61 Directrice Commerciale Véronique Linais vlinais@yahoo.fr 06 63 70 64 18 La régie Jean-Michel Florant laregie@gmx.fr 06 22 17 07 56

Collaborateurs réguliers : Régis Vlachos, Dan Warzy, Frédéric Isoletta, Christine Montixi, Yves Bergé, Émilien Moreau, Christophe Floquet, Pierre-Alain Hoyet, Aude Fanlo, Thomas Dalicante, André Gilles


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Bilderberg is watching you Saviez-vous que depuis fin mai les accords de Schengen ont été suspendus et les contrôles aux frontières rétablis entre l’Allemagne, l’Autriche et l’Italie ? Que durant cette période, plusieurs postes i tout le monde entend parler du G7, Bilderberg militants et des réseaux sulfureux qui essaiment S demeure mystérieux... Or depuis 1954, cette sur le web. Bien souvent, ce sont ces derniers qui militaires étaient Conférence rassemble, une fois par an, des per- rassemblent le plus d’audience... sonnalités du monde politique, bancaire, industriel Le cas de la Conférence de Bilderberg est fraprépartis en Bavière ou médiatique, venues essentiellement d’Amérique pant. Une recherche Internet sur le sujet mène Nord et d’Europe occidentale. La plus grande rapidement vers des sites au conspirationnisme et dans le Tyrol ? du opacité, entretenue par les organisateurs et les galopant, où cette réunion de l’élite occidentale règne autour de cette conférence. est décrite comme le repaire de la société secrète Que des kilomètres participants, Une culture du secret accompagnée par la majorité des maîtres du monde. Avec un double effet à la des médias : bien que leurs dirigeants ou jour- clef : les plus crédules s’engouffrent dans le fande route ont nalistes y soient parfois invités, les organes de tasme, les plus rigoureux le jugent grotesque et presse français ne proposent aucune couverture de passent à autre chose. Complotisme pour les uns, été fermés à la cet événement, qui reste ignoré de la plupart de déni pour les autres. Où se situe la vérité ? Si les la population. Cette année, la réunion avait lieu médias restent si peu nombreux à s’intéresser à la circulation, bloqués du 11 au 14 juin dans un luxueux hôtel des Alpes Conférence de Bilderberg, comment les opinions autrichiennes. Zibeline s’en est approchée au plus pourraient-elles évoluer ? Et n’est-il pas, en soi, par des barrages près, pour tenter de percer le mystère Bilderberg... troublant, de constater qu’un tel déploiement de force ne suscite aucune curiosité des groupes de presse, des journalistes ? policiers 24h/24 ? Secrets d’actualité Le G7 s’est donc tenu en Allemagne les 7 et 8 juin, Saviez-vous que sous le feu des médias, qui ont quitté le terrain Oligarchie capitaliste pour la 63 Conférence de Bilderberg, pourtant Il faut dire que le secret, au sein du groupe Bilderces dispositions organisée en Autriche dans la foulée, du 11 au berg, est une marque de fabrique. Fondé en 1954, juin. À trois jours d’intervalle et à 50 km de il doit son nom à l’hôtel où eut lieu la première ont été prises en 14 distance.... Des centaines de journalistes étaient conférence, aux Pays-Bas. Quelques politiciens et présents en Allemagne pour le sommet officiel. Ils industriels européens et américains, soucieux de raison du G7 et avaient quitté la région depuis longtemps quand renforcer les liens transatlantiques, et de résister le sommet informel. De fait la conférence au communisme, en lancèrent l’idée. Depuis lors, le de la Conférence débutait n’est relayée par aucun grand canal de presse : ceux groupe Bilderberg organise une conférence annuelle, qui diffusent l’information sont de rares médias à laquelle sont conviées 130 à 140 personnalités. de Bilderberg ? indépendants ou alternatifs, quelques bloggers Durant des années, ces réunions n’étaient connues Protestation à l’Interalpen Hotel - Bilderberg 2015 © Jan-Cyril Salemi

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que de ceux qui y assistaient. La politique, la finance, l’industrie et les médias composent pour l’essentiel les activités des invités, tous issus, à de très rares exceptions, des USA, du Canada, d’Europe occidentale et de Turquie. Un comité directeur, d’une trentaine de membres, sélectionne les invités. Depuis 2012, le Français, Henri de Castries, PDG d’AXA, préside le comité directeur, qui compte des noms tels que JeanClaude Trichet, José Barroso, Mario Monti, Thomas Enders (PDG d’Airbus), Robert Zoellick, du groupe Goldman Sachs, ou Nicolas Baverez, éditorialiste régulier du magazine Le Point. Chaque année, plusieurs thèmes, relatifs aux stratégies économiques ou géopolitiques, sont au programme de la conférence. Les participants se doivent de respecter le secret des discussions, mais peuvent ensuite utiliser le fruit des échanges, sans en révéler la provenance. Des journalistes tels que Nicolas Barré (2013), directeur de la rédaction des Échos, ou Nathalie Nougayrède (2014), ancienne directrice du Monde, ont fidèlement respecté la clause de confidentialité.

L’effet Internet

L’opacité de l’organisation a pourtant été fissurée par l’ère Internet des années 2000 et les rumeurs autour de cette conférence ont commencé à se répandre. Il n’existe aucune archive officielle des réunions antérieures à 2010. Depuis cette année-là, comme contraint de se dévoiler un peu, le groupe Bilderberg a créé un site web, sur lequel il publie le nom des participants et la liste des sujets. La teneur des débats reste cependant totalement secrète, la presse (hormis les invités) n’a aucun accès au lieu de la conférence et la seule communication se résume au strict minimum publié sur le site web. Mais en réalité, les médias ne cherchent même pas à couvrir l’événement. Sur place, quelques journalistes autrichiens, des télévisions russes et surtout des médias alternatifs du web, hollandais, suisses, canadiens, américains, comme We Are Change ou Press For Truth. Leurs animateurs tanguent parfois entre activisme et journalisme, mais ces concepts peuvent très vite se confondre aux abords du Bilderberg, où le harcèlement de la presse est aussi une stratégie (voir encadré). Difficile, dans ce contexte, d’enquêter, d’obtenir des précisions sur le déroulement des échanges et de définir quelle est l’influence du Bilderberg sur les orientations politiques et stratégiques des gouvernements. Un tel manque de transparence donne cours à une foule de spéculations. Les enjeux issus des discussions peuvent-ils s’étendre au-delà de ces quatre jours annuels et peser sur le fonctionnement des états ? Pour ne parler que de la France, l’an passé, Fleur Pellerin, qui n’était pas encore ministre de la Culture, et Emmanuel Macron, qui n’était pas encore ministre de l’Économie, faisaient partie des invités. Cette année, Laurence Boone, qui lui a succédé au poste de conseillère économique du président François Hollande, a été conviée. De quoi susciter des interrogations !

Un déni de démocratie

L’édition 2015 comptait 129 invités, elle s’est tenue en Autriche, à l’Interalpen Hotel, un complexe luxueux perché au cœur de la forêt alpine, près de la petite ville de Telfs, à une vingtaine de kilomètres d’Innsbruck. Outre le président du comité directeur, neuf Français étaient présents, dont Alain Juppé, Patrick Calvar (directeur de la DGSI), Gilles Kepel (politologue, spécialiste de l’islam), ou Benoît Cœuré (membre du directoire de la BCE). Les thèmes abordés, et surtout les débats qui y seront liés, regardent tous les citoyens : intelligence artificielle, cyber sécurité, terrorisme, stratégie européenne, Grèce, Moyen-Orient... Mais, comme à l’accoutumée, rien ne filtrera de ces quatre jours en secret. Les réflexions, décisions, orientations sont prises à l’abri des regards, sans mandat des peuples (contre leur intérêt ?), et sans en rendre compte : en tout déni de démocratie. Le seul spectacle qu’offre le Bilderberg, c’est un ballet de berlines noires aux vitres fumées qui franchissent le barrage de police pour rejoindre l’hôtel. Dès le 10 juin, la route qui mène à l’Interalpen Hotel a été fermée à la circulation sur une dizaine de kilomètres. Les accès étaient bloqués de part et d’autre par deux check-points. Les sentiers alentours et la forêt étaient surveillés en permanence. Le dispositif policier autrichien appliqué lors du G7 a été amplifié. Les moyens de sécurité d’une rencontre officielle entre chefs d’États, ont été décuplés pour protéger une conférence privée, secrète et totalement verrouillée. Et transformer une paisible route de montagne en véritable zone d’exception.

Intimidation policière Le 10 juin, veille de l’ouverture de la conférence, j’ai été longuement contrôlé par trois policiers autrichiens en civil, près de Telfs. Un peu plus tôt, j’avais réalisé quelques photos des barrages policiers et du poste militaire. Sans me cacher, en demandant chaque fois l’autorisation, en montrant ma carte de presse. Les policiers en civil ont contrôlé ma carte d’identité, ils l’ont prise en photo et ont minutieusement regardé ma voiture, me disant notamment que le plastique cassé du feu arrière pourrait me causer des problèmes en cas de contrôle par la «police routière». Puis ils ont exigé que je leur montre les photos contenues dans mon appareil. J’ai longuement protesté, mais j’ai dû céder. Ils ont alors imposé que j’efface certaines photos où le visage des policiers était reconnaissable, alors même que je garantissais que ces visages seraient floutés. J’ai refusé plusieurs fois puis je n’ai eu d’autre choix que d’accepter. Je faisais défiler les photos, le policier me disait «celle-ci», et je l’effaçais. Sur la trentaine de photos prises ce jour-là, j’ai dû en effacer une dizaine. J.-C.S

Une addition très salée

À Innsbruck, un collectif de protestation s’est formé, pour dénoncer ces moyens démesurés, à la charge du citoyen. L’une des actions organisées a permis de faire brièvement sauter un verrou. Le 12 juin, quelque 200 personnes ont pu franchir le barrage et mener une action de protestation aux portes de l’hôtel. Banderoles déployées, musique, pendant trois heures s’est déroulé un rassemblement paisible, à très bonne distance des conférenciers, qui sont évidemment restés invisibles. «J’ai commencé à demander les autorisations en février !», confiait Klaus Schreiner, artisan de ce petit exploit. Vu le nombre de camions de police stationnés dans les alentours, tout avait été minutieusement préparé pour que cette «intrusion» puisse avoir lieu. Officiellement, 2100 policiers sont mobilisés. Mais le porte-parole de la police autrichienne indiquait qu’il ne pourrait donner un chiffre exact qu’à l’issue de la conférence (écoutez son interview sur webradiozibeline). Idem pour le coût. Günther Platter, gouverneur du Tyrol, a communiqué le chiffre de 5,6 millions d’euros à la charge de l’état autrichien pour la sécurité du G7 et du Bilderberg, précisant que la conférence privée englobait la majeure partie de cette somme. D’ailleurs ce chiffre déjà démesuré ne concerne que les forces de police : il n’inclut ni le déploiement de postes militaires fixes, avec véhicules blindés et radars, ni le contrôle aérien et son cortège d’avions et d’hélicoptères. Au final, la note du Bilderberg pourrait s’avérer très salée pour les contribuables autrichiens. Heinz Fischer, le chef de l’État, était parmi les invités de la conférence. Peut-être aura-t-il réussi à négocier un arrangement ? Mystère... JAN-CYRIL SALEMI


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Repenser la révolution Les possibilités de changer le monde existent, et on semble se lasser de l’inertie d’un système écrasant… Rarement on a vu autant de luttes contre de grands projets, et de chutes de pouvoir en place. Mais une vérité demeure : les révolutions s’étranglent au stade de l’émeute...

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orti en octobre 2014, le dernier livre du Comité invisible n’est pas, contrairement à ce qui en a été dit, d’une rhétorique nébuleuse ou prophétique. Il constate que ce ne sont pas les forces qui manquent mais la description claire de ce qu’il faut combattre. Bref, c’est une vision du monde révolutionnaire qu’il faut revoir : un nouveau vocabulaire, voire un nouveau lexique philosophique doit s’imposer, ou tout du moins se discuter. Il en va en premier lieu de l’idée de crise, vaste supercherie : «Nous ne vivons pas une crise du capitalisme mais un capitalisme de la crise». La crise est en effet un besoin du système capitaliste comme l’a montré Naomi Klein dans La stratégie du choc. Guerres, dette... sont des moyens de trouver de nouvelles opportunités de rendement. Ce qui fait dire aux auteurs qu’il n’y a pas une crise dont il faudrait sortir mais une guerre à gagner. (Précisons que le livre de Naomi Klein est un outil indispensable pour comprendre le capitalisme d’aujourd’hui, même si l’autrice n’est guère appréciée par le Comité invisible). Il ne faut donc pas attendre une crise majeure du capitalisme dans un espoir révolutionnaire : première vulgate marxiste à oublier.

Atteindre l’endroit du pouvoir

À nos amis Comité invisible La Fabrique, 10 euros

Tout aussi étonnant est le renoncement à la prise du pouvoir : l’idée est fondamentalement hérétique pour toute organisation de gauche, notamment à la lumière de ce qui s’est passé en Grèce avec Syriza. Mais le constat est peut-être pertinent : les politiques ne nous représentent pas, parce qu’ils ne sont pas là pour ça, et que le pouvoir est ailleurs. Le Comité invisible s’en prend alors à la théorie marxiste classique qui voit le pouvoir politique au service des classes dominantes : «Tout à notre conception langagière de la politique, nous débattons alors que les véritables décisions sont prises sous nos yeux.» Le pouvoir c’est l’organisation matérielle, technologique, physique. Ce sont les grandes constructions autour desquelles s’articulent les grands réseaux de résistance d’aujourd’hui ; ce sont les grands projets en quête d’énergies fossiles contre lesquelles se mobilisent des populations au travers de la planète. L’analyse est juste ; le combat politique révolutionnaire se joue aujourd’hui sur ce terrain. Par ailleurs, il n’y a qu’à voir comment la Belgique a pu se passer de gouvernement pendant de longs mois pour valider l’idée que le pouvoir est ailleurs. Se dessinent ainsi de nouvelles perspectives révolutionnaires, dans la capacité à bloquer certains sites de production ou d’information. Ou du moins de s’interroger sur l’incapacité à réaliser ces blocages, comme dans les mouvements de lutte d’intermittents :

comment se fait-il que la paralysie des chaînes de télévision ne soit jamais mise en œuvre alors que les intermittents y ont une place importante ?

S’emparer de l’information

Si la révolution échoue c’est que les technologies de l’information et du contrôle (et donc de la domination politique et économique) ont pris de cours les stratégies révolutionnaires et leur vision philosophique du monde, dualiste : sujet/monde, individu/société, homme/machine, vivant/inerte : «Le sujet rationnel occidental laisse place à la conception cybernétique d’un être sans intériorité, constitué par son extériorité, ses relations.» Les marxistes raisonnent sur l’homo economicus alors que la cybernétique a déjà produit sa propre humanité. L’économie politique créait la fiction de l’homme libre poursuivant son intérêt ; aujourd’hui l’économie libérale et sa société du spectacle ont construit la fiction de la liberté de communiquer : «À défaut d’avoir réussi à faire des ordinateurs capables d’égaler l’homme, on a entrepris d’appauvrir l’expérience humaine jusqu’au point où la vie peut se confondre avec sa modélisation numérique.» Loin d’être plus complexe, générale et abstraite, l’action révolutionnaire doit simplement s’ancrer dans le territoire. À l’exemple des zapatistes, ceux qui veulent changer le monde doivent prendre soin de ce qu’ils constituent : chaque projet destructeur de l’environnement et de l’économie locale qui est battu en brèche est une pierre portée à l’édifice émancipateur qui permet de passer de la subversion à la révolution. Il faudra donc, aussi, repenser ce mot… RÉGIS VLACHOS



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Du climat et des hommes l’économie réelle, alors que les solutions techniques existent. Selon lui les économistes doivent repenser leurs modèles, le PIB étant un très mauvais indicateur. Pascal Canfin du World Resources Institute estime quant à lui que l’heure est venue de faire migrer progressivement le capital mondial vers les industries et infrastructures compatibles avec un réchauffement maintenu à 2°C.

«Marseille est prête, Paris n’a qu’à bien se tenir»

© Gaëlle Cloarec

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e 4 juin, le président de la République est venu à Marseille lancer la Medcop21, rencontre des acteurs de la Méditerranée sur le changement climatique, préparatoire à la 21e Conférence des Nations Unies qui aura lieu à Paris à la fin de l’année. Accueilli par le président de Région, Michel Vauzelle, et par le maire Jean-Claude Gaudin, il a précisé les enjeux de la Cop21, avec l’espoir d’y conclure un accord substantiel. La décision prise par le G7 le 8 juin d’en finir avec les énergies fossiles et de maîtriser la hausse de la température moyenne, donne quelques arguments à cet espoir. Les points épineux sont toujours sur la table, notamment la forme juridique que prendrait cet accord, contraignant ou pas pour les signataires, et les nuances entre pays, selon leur degré de développement et leur capacité de lutte contre le réchauffement climatique. François Hollande a soulevé la question du financement, déterminante, et évoqué le Fonds vert initié à Copenhague en 2009, qui s’élève aujourd’hui à 10 milliards : «il faudra aller jusqu’à 100 milliards à partir de 2020». Conscient du fait que «l’indifférence est l’ennemi contemporain», il souhaite mettre en place une politique de long terme. Des propos que l’on espère sincères, de la part d’un homme qui jusqu’à récemment ne s’était pas particulièrement engagé en matière environnementale.

Le climat, nœud gordien de l’anthropocène

Assister aux nombreuses tables rondes prévues par la Medcop tenait un peu de l’épreuve d’endurance, tant les enjeux du réchauffement climatique sont

anxiogènes. C’est avant tout une réalité scientifique : selon Jean-Paul Moatti, PDG de l’IRD, «les incertitudes qui subsistent ne doivent pas servir de prétexte à la tergiversation» et «s’atteler à un dispositif de surveillance des écosystèmes devrait être l’un des objectifs prioritaires». Pour Loïc Fauchon, président de la Société des Eaux de Marseille, «40% de la population en Méditerranée est en situation de stress hydrique, de Gibraltar à la Corne de l’Afrique un triangle de la soif se dilate». Acidification des eaux marines, effondrement de la biodiversité, épuisement des ressources naturelles, crises alimentaires, insécurité géopolitique, tout est impacté par la montée de la température. Hafez Ghanem de la Banque Mondiale le formule ainsi : «notre région est en ébullition, et connaît la plus grande crise de réfugiés depuis la 2e guerre mondiale ; le changement climatique agit comme un démultiplicateur».

Que faire ?

Des leviers efficaces se sont dessinés, pour peu que l’on soit prêt à un nouveau paradigme. Pour Serge Telle, président de l’AVITEM, c’est même «le temps des opportunités : plus la crise climatique se développe, plus elle est favorable à un véritable changement de nos modèles.» Henry Marty-Gauquié, directeur de la BEI, veut mobiliser l’ensemble de l’économie financière, y compris les assureurs, «et surtout dans la transparence si on veut être crédible !» Gaël Giraud de l’Agence Française de Développement décrit des «marchés financiers qui fonctionnent comme des trous noirs, captent tout et ne restituent rien», avec pour conséquence la difficulté à financer des projets dans

Ainsi se concluait l’allocution de François Hollande lors de la cérémonie d’ouverture. Que Paris n’ait plus qu’à bien se tenir, c’est une évidence. Que Marseille soit prête, c’est encore autre chose, le quotidien irrespirable de ses habitants en témoigne, et ce n’est pas la prestation de Robert Assante à la tribune qui aura pu nous rassurer. On lui reconnaîtra tout de même un élan de lucidité : «Nous qui n’avons pas les mêmes difficultés (que les pays les plus pauvres, NDLR), comment se fait-il que nous n’arrivions pas à faire plus ? Cela n’avance pas si vite que ça». Certes ! En matière de transports en communs et de qualité de l’air, tout reste à faire. Et comme le soulignait le délégué général de l’IPEMED, Jean-Louis Guigou, «la compétition entre les collectivités va se jouer à l’avenir sur leur capacité à assurer qualité de vie et cohésion sociale». GAËLLE CLOAREC

La Medcop21 a eu lieu la Villa Méditerranée à Marseille les 4 et 5 juin, le Village des Solutions présentant une trentaine de projets concrets s’est tenu sur son parvis jusqu’au 7 juin (voir p10)


Emportés par la houle Montegrejo Eacheld John, matelot qualifié, Philippin - Pyeou Tymur, élève mécanicien, Ukrainien Renard Rémy, 3e Lieutenant, Français - Thirion Alain, Commandant, Français. Une vue de l’exposition Cargo de Vincent Ducarne © Gaëlle Cloarec

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ès l’entrée, on perçoit un grondement sourd qui ne va plus nous lâcher : celui des machines d’un gros cargo. L’imaginaire marin est inépuisable : des sirènes d’Ulysse au Titanic, du trois mâts fendant les vagues au calmar géant de Jules Verne, il suffit d’une corne de brume, du bruissement humide des embruns pour que l’humain le plus prosaïque sente l’appel du large. Ici on est d’emblée pris par une autre mythologie, celle des navires de métal qui sillonnent le globe pour livrer d’un continent à l’autre d’énormes quantités de produits bruts ou manufacturés. Le coeur de l’économie mondialisée bat dans le moteur de ces mastodontes flottants ; c’est sa résonance que Vincent Ducarne a captée en photographie et vidéo lors de deux résidences à bord d’un porte-conteneur. Son travail est inspiré d’une errance paradoxale, celle d’un cowboy côtoyé le temps d’un voyage précédent, effectué en bus à travers les USA : parti épouser une femme sans l’avoir jamais vue, il apprend juste après le départ qu’elle rompt son engagement... et ne peut rebrousser chemin avant la prochaine étape, des centaines de miles plus loin. Étrangement, cette anecdote «colle» bien à son propos, cerne la difficulté de trouver sa place à terre comme en mer, amplifiée par les vues hypnotiques des flots mouvants captés par sa caméra. Une série de portraits de marins et techniciens, en grand format, ouvre l’exposition. Leurs tenues vestimentaires, leurs regards dirigés droits vers l’objectif émeuvent étrangement, dans une confrontation troublante entre le quotidien et la grande aventure, le train-train du boulot et le frisson des lointains. GAËLLE CLOAREC

Cargo - Le passage de la ligne du 3 juin au 3 juillet Maison de la Région PACA, Marseille 04 91 57 57 52 www.regionpaca.fr

À noter : Dans le cadre de cette exposition, le 24 juin, la Maison de la Région projettera une sélection de films documentaires issus du Festival international de l’image sous-marine de Marseille et de Toulon


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Au village, des solut Tandis que la MedCop se tenait dans la Villa Méditerranée, les associations étaient invitées sur le parvis à exposer des voies alternatives...

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u Village des Solutions, le réchauffement climatique semblait palpable : les associations rassemblées dans des containers métalliques expérimentaient la fournaise... mais proposaient des explications à propos de mise en œuvre concrètes en matière d’énergies renouvelables, de végétaux résistants, de gestion rationalisée des déchets dans un pays (Le Maroc) où aucun recyclage n’existe, de transports publics, de partage de voitures, de gestion de l’eau... Un petit tour dans le Village, où de nombreux débats et prises de parole étaient organisés, permettaient de mesurer combien les initiatives citoyennes semblent plus avancées que les décisions politiques. Les solutions viendront-elles de la fameuse «société civile» ? De la «communauté scientifique» ? Deux directeurs de recherche de l’IRD1 ont démontré, avec autant de simplicité que de clarté, ce que l’usage peut nous enseigner, et comment chacun de nous peut sauver le monde. En faisant ce qu’il peut ! Le livre que vient de publier Olivier Dangles se conclut d’ailleurs par la parabole du Colibri, empruntée à Pierre Rabhi, son préfacier : faire sa part, même lorsqu’il s’agit d’essayer d’éteindre un incendie avec quelques gouttes d’eau, possède une vertu exemplaire. L’écologue explique combien l’éducation aux gestes simples est importante : ne pas prendre l’ascenseur ni les escaliers roulants, mais aussi regarder et respecter les écosystèmes qui ne sont pas notre environnement, mais notre nature même, dont nous faisons partie... Il faut selon lui renouer les fils brisés qui nous ont éloignés du biologique, apprendre à nos enfants que notre monde n’est pas virtuel, et que ne devons pas l’user. Son livre, Une autre

Une autre terre Olivier Dangles François Nowicki, photographe Belen Mena, maquettiste Préface de Pierre Rabhi Editions IRD, collection Beaux livres, 42 euros

terre, est à la fois le constat d’une dégradation en cours, qui nous fait vivre sur une terre où plus aucun espace n’est naturel, et une magnifique apologie du vivant. Le scientifique a l’art de faire comprendre des concepts complexes avec des procédés simples : les photos et la maquette sont splendides, l’objet attirant, et chacun des quarante cinq mots clefs de son Lexique illustré d’une nature à protéger est introduit par une anecdote ou une fable qui permet d’imager son analyse des changements globaux qui nous affectent. Car selon l’écologue, le plus urgent est notre alphabétisation environnementale : qu’est-ce qu’une boucle de rétroaction, cercle vicieux ou vertueux ou un phénomène en déclenche un second, qui l’amplifie ou l’atténue ; comment les changements globaux procèdent de façon non linéaire, et qu’est-ce qu’un point de basculement, qui amène un lac de faible profondeur, depuis longtemps pollué, à devenir tout à coup totalement insalubre ; pourquoi et comment les océans s’acidifient ; comment les espèces disparaissent ou s’adaptent, comme les ours polaires qui ont déjà perdu du poids pour survivre sur une banquise de plus en plus mince ; et comment la pauvreté est un piège : «ce sont les riches qui dégradent le plus l’environnement et les plus pauvres, qui dépendent des ressources à leur portée, qui sont les premières victimes de la dégradation des

écosystèmes et de la biodiversité». Sa conclusion est que l’espoir est un impératif... Le livre de Geneviève Michon est tout aussi passionnant : l’ethnobotaniste, également directrice de recherches à l’IRD, y a mis 25 ans d’enquête singulière à portée de tous. Dans une langue soignée et imagée, souvent très belle, elle raconte comment, sur toute la planète, les arbres font partie de l’agriculture. Elle photographie les arbres et les gens, ces Agriculteurs à l’ombre des forêts du monde, et explique leurs pratiques. Et démontre ainsi l’absurdité des cultures intensives et des déforestations, qui appauvrissent les terres, nous privent d’oxygène, provoquent des inondations en asséchant les sols, aggravent les sécheresses et font sombrer les peuples du sud dans la pauvreté, et l’exode. Depuis plus de 25 ans la chercheuse parcourt la planète, et observe dans certains endroits préservés une véritable harmonie entre l’arbre et les cultures. Parce qu’on peut cultiver en-dessous, puisque le sol y est riche et profond, mais surtout pour eux-mêmes : source de combustible, de fruits, de fourrage riches en éléments que les pâturages ne fournissent pas, les forêts ne sont pas sauvages, mais cultivées, depuis la châtaigneraie corse jusqu’à l’agroforêt indonésienne, en passant par la culture de l’arganier au Maroc (l’huile d’argan !). Chaque peuple possède son équilibre particulier, qui varie selon le climat, tropical ou sec, la nature des sols, les traditions culinaires... Il ne s’agit pas pour Geneviève Michon d’imposer un autre modèle, mais de regarder les pratiques vernaculaires, et d’aider les peuples à les retrouver, y compris dans les pays occidentaux victimes de l’agriculture intensive. Car l’opposition qui y règne entre champs cultivés et forêts sauvages est une absurdité destructrice, et une des solutions


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tions pour retrouver une biosphère équilibrée serait de planter et cultiver des arbres, partout, dans les endroits désertés mais aussi des arbres fruitiers dans les villes, dans les vastes étendues agricoles où le sol cultivable n’est plus qu’une mince couche de terre épuisée et dopée d’engrais. Quitte à remplacer les énormes machines par de plus petites, qui passeront entre les arbres ! Car la rentabilité est un leurre, si la terre ne produit plus, et que les sécheresses et les inondations s’enchaînent... AGNÈS FRESCHEL

Institut de Recherche et de Développement, organisme de recherche français pour le développement des pays du sud, dont le siège est basé à Marseille

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La rencontre, organisée par l’IRD, a eu lieu le 7 juin au Village des solutions dans le cadre de la MedCop

Ce que nous sommes M

éditerranéens, il est évident à tous ceux qui vivent ici qu’ils le sont. Et pourtant... Lorsque le Président de notre République vient ouvrir la MedCop on mesure que la coupure historique qui a longtemps divisé notre pays, n’est toujours pas assumée. La souffrance des Méditerranéens n’est pas celle de nos voisins, comme l’a déclaré François Hollande en faisant une analogie avec le drame Ukrainien. Elle est la nôtre, celle de tous ceux qui vivent autour de cette mer qui nous relie et trimballe aujourd’hui des milliers d’hommes qui fuient la guerre et trouvent la mort. Michel Vauzelle, président de la Région Paca, l’affirme haut et fort, avec de nombreux ministres et Présidents de région de l’arc latin : Nous sommes tous méditerranéens. Les réfugiés arrivent aujourd’hui sur les plages de Sicile, ils fuient la guerre et les exactions, et notre Europe repliée ne sait les voir que comme une charge. Nous, méditerranéens, européens, devons raviver notre sens de l’accueil, de la fraternité, faire taire les xénophobes, et obliger nos dirigeants à trouver une solution politique à la tragédie migratoire que vivent ceux de l’autre rive, et les Italiens. Combien de milliers de morts faudra-t-il pour que nous décillions les yeux ? Ces hommes valent-ils moins que d’autres ? Michel Vauzelle et ses cosignataires lanceront la campagne à La Villa Méditerranée. La pétition est déjà en ligne (voir ci-dessous). Le 20 juin dans le cadre de la Journée mondiale des réfugiés l’Avitem, qui gère désormais la Villa, organise des débats, un pique nique solidaire, des performances, mix, slam, des ateliers masques pour les enfants, en partenariat avec les 7 Centres de demandeurs d’Asile

de Marseille. L’occasion aussi d’inaugurer une exposition de photographies Identités, qui j’étais qui je suis qui je serai, consacrée aux migrants et installée dans le porte-à-faux de la Villa. En bas, dans l’Agora, depuis le 13 juin jusqu’au 10 juillet, une exposition intitulée Des mots pour Refuge présente un recueil d’histoires de réfugiés Syriens en Jordanie et au Liban. Des photographies de Francesco Santini, accompagnés d’entretiens menés par Federico Dessel et Emilie Luciani (membres du collectif de journalistes humanitaires Focus on Syria) racontent les parcours et montrent la destruction et les conditions de vie actuelles de ces populations déplacées. Des visites guidées sont organisées par Médecins du Monde autour des thématiques de l’abri, de la santé, de la violence, des jeunes, de la situation économique, et du futur à reconstruire. AGNÈS FRESCHEL

Au Programme

La Villa Méditerranée accueillera également le FID du 30 juin au 6 juillet (voir page 50), ainsi que, en partenariat avec le Festival d’Aix (voir page 32), un Hommage au festival de Baalbeck le 8 juillet (18h, entrée libre) et les Rencontres Médinea sur la création musicale en Méditerranée, ouvertes au public le 19 juillet (de 14h à 17h). 04 95 09 42 52 villa-mediterranee.org

Nous sommes tous méditerranéens Migrants en Méditerranée : tous solidaires !

Agriculteurs à l’ombre des forêts du monde Agroforesteries vernaculaires Geneviève Michon Co édition IRD/Actes Sud, 29 euros Ces livres sont disponibles à la vente sur le site de l’IRD www.editions.ird.fr

Je demande que l’Union Européenne soit solidaire de Lampedusa, de la Sicile et de l’Italie comme de la Grèce et de l’Espagne. Des milliers d’enfants, de femmes et d hommes meurent en Méditerranée, fuyant les guerres, les persécutions et la misère. Je demande que l’Union Européenne se prononce

dans l’urgence pour accueillir, selon le droit de la mer et les droits de l’Homme, les migrants. Je demande que l’Union Européenne décide une politique de police claire pour démanteler les réseaux mafieux des passeurs. Je demande que l’Union Européenne ouvre sans délai des négociations de coopération avec les pays de transit et d’exil pour leur développement économique et social. La Méditerranée n’est pas un cimetière. Elle doit être un symbole de solidarité, de fraternité et de paix. Nous sommes tous méditerranéens. La pétition est à signer sur http://tousmediterraneens.com


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En été, le MuCEM reste ouvert (à tout)

E

n février dernier, un rapport de la Cour des comptes accablait la gestion du MuCEM. Outre le dépassement de budget pour la construction du bâtiment et la sous-estimation des dépenses d’entretien, la Cour pointait également la faiblesse des recettes propres du musée. Une grande partie de la presse avait relayé ces dysfonctionnements, sans prendre le soin d’une analyse détaillée, et en oubliant qu’un édifice culturel public ne se jauge pas à sa rentabilité financière. Zibeline avait alors relevé cette appréciation strictement économique du domaine culturel (Zib’ 82).

Village de marques

Quelques mois plus tard, les choix de programmation et d’activités du MuCEM pour cet été sont étonnants. Est-ce là un effet des recommandations souhaitées par l’instance comptable ? Ainsi, depuis le 5 juin et jusqu’au 30 septembre, un «concept store» s’est installé sur la Place d’Armes, en haut du Fort Saint-Jean. Cette «boutique éphémère, branchée, arty», telle que la définissent les initiateurs du projet (le collectif Villa/Alliv et la Maison Méditerranéenne des Métiers de la Mode) accueille une trentaine de designers et stylistes, reconnus ou émergents, qui proposent des créations diverses (t-shirts, bijoux, lampes, mobilier...). Encourager de jeunes créateurs et favoriser le commerce de leur art est certainement nécessaire. Mais le lieu est-il approprié ? Est-ce la mission du MuCEM d’accueillir un village de marques

branchées ? Car dans le même temps, l’offre culturelle est réduite : hormis les expositions permanentes et temporaires, et les dernières soirées spéciales en juin (voir encadrés), à partir de juillet, les propositions deviendront rares. Seules la projection, gratuite et en direct, d’un concert du Festival d’Aix (le 12 juillet) et deux soirées du Festival Jazz des 5 Continents (les 16 et 17 juillet) seront au programme.

Sous le musée, la plage

Le MuCEM Plage, qui mêlera loisirs, animations et culture, s’installera entre le 25 juillet et le 21 août sur l’Esplanade du J4, qui se couvrira de sable et se transformera pour un mois en annexe des Catalans ou de la Pointe Rouge. Avant la construction du musée, les abords du Fort Saint-Jean étaient occupés par les pêcheurs, les minots en maillots et

les barbecues improvisés, et le MuCEM veut renouer avec cette ambiance. Qui sans baignade possible ressemblera plutôt à Paris Plage... Conçu par le collectif Yes We Camp -qui avait monté un camping éphémère à l’Estaque lors de la capitale culturelle-, le MuCEM Plage proposera une programmation populaire et conviviale revendiquée. Entre séances de yoga, farniente dans des hamacs, espaces de jeux pour les enfants, ateliers, installations artistiques, tournois sportifs, sardinades, visites nocturnes du musée, soirées DJ, bals, ou spectacles, chacun devrait y trouver son compte. Même si le coût de l’opération est estimé à 350 000 euros, au moment où les budgets alloués aux manifestations culturelles qui accompagnent les expositions se réduit, dans une ville où l’on sait ailleurs jouer à la pétanque et allumer les barbecues... JAN-CYRIL SALEMI

Des hommes et des Dieux Du 24 juin au 16 novembre, le MuCEM accueillera Migrations Divines, exposition consacrée aux liens tissés entre les différents cultes polythéistes de l’Antiquité. Les œuvres et objets présentés seront prêtés par la Fondation Gandur pour l’Art et par les Musées d’Art et d’Histoire de Genève. Ces collections, d’une valeur historique exceptionnelle, témoignent du croisement des croyances en Méditerranée antique, entre l’Egypte, la Grèce et Rome. À travers les âges, le commerce, les relations intellectuelles, mais aussi les guerres ont contribué à mêler les représentations sacrées des uns et des autres. Les traces de ces échanges se révèlent par l’adoption de Dieux venus d’ailleurs, ou de figures divines métissées. Quelque deux cents pièces, objets rituels ou images de culte, datant du IIIe millénaire avant notre ère, jusqu’au IIIe siècle après J.C, composeront l’exposition. J.-C.S.

Tête de Vajrapani-Héracles © Fondation Gandur pour l’Art, Genève. Photographe André Longchamp

Cet été, le MuCEM propose une programmation éclectique et déroutante. Un jeu d’équilibriste entre culture, loisirs et commerce. Avec la rentabilité en guise de balancier ?


Germaine Tillion à l’honneur Le 27 mai, Germaine Tillion, ethnologue et figure majeure de l’histoire du XXe siècle, entrait au Panthéon, aux côtés de ses compagnons de Résistance, Pierre Brossolette, Jean Zay et Geneviève de Gaulle-Anthonioz. Le 19 juin, à l’occasion du 40e anniversaire de l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (EHESS), la mémoire, l’œuvre et l’héritage de Germaine Tillion seront de nouveau à l’honneur. De 9h à 17h, un colloque, ouvert au public, se tiendra dans l’auditorium du MuCEM, qui porte son nom. La rencontre, intitulée Les sciences sociales au XXIe siècle. Dans le sillage de Germaine Tillion, prendra pour axe de départ ses recherches menées à l’Ecole Pratique des Hautes Etudes (EPHE), ancêtre de l’EHESS.

Première femme nommée directrice d’étude à l’EPHE, elle sera, entre 1956 et 1976, une véritable ethnologue de terrain, en particulier dans le contexte colonial, puis indépendantiste, de l’Algérie. L’influence de ses travaux sur les pratiques de recherche actuelles, notamment dans l’aire culturelle méditerranéenne, feront partie des thèmes abordés lors de cette journée. Le soir, dès 19h, toujours à l’auditorium, aura lieu une rencontre-lecture. L’historien Tzvetan Todorov contera Le siècle de Germaine Tillion, où il retracera les principales étapes de sa vie. En écho, des extraits d’œuvres de l’ethnologue, qui s’est éteinte centenaire en 2008, seront lus par la comédienne Anouk Grinberg. J.-C.S.

Habiter autrement D

epuis mars 2014 et la loi ALUR, l’habitat participatif dispose d’un cadre juridique en France. D’aucuns diront qu’il vaut mieux tard que jamais, toujours est-il que cette reconnaissance permet désormais à ceux qui le souhaitent de «mutualiser leurs ressources pour concevoir, réaliser et financer ensemble leur logement, au sein d’un bâtiment collectif». De nombreuses initiatives ont vu le jour ces dernières années, s’inspirant souvent de ce qui se fait en Allemagne ou dans les pays du nord, plus avancés en la matière. Les avantages de ce mode d’accession à la propriété sont nombreux : économiques, avec un coût d’acquisition et des charges moindres (c’est ce qui avait séduit la ministre du Logement Cécile Duflot), humains, par la mise en pratique de valeurs communes (solidarité, mixité sociale, mutualisation des biens et des espaces...) et écologiques (les habitants mettant souvent l’environnement au cœur de leurs priorités). S’il n’a été reconnu que récemment, le secteur s’est structuré au fil des ans, en s’appuyant sur des coopératives et associations particulièrement dynamiques. Cette année à Marseille, après Nantes, Strasbourg et Grenoble, se tiendront les 4e Rencontres Nationales de l’Habitat Participatif. Du 9 au 11 juillet, un millier de personnes sont attendues au Palais du Pharo, à la Faculté de Sciences Économiques (site Colbert) et dans l’Hémicycle de la Région PACA pour une série de tables rondes, ateliers et projections.

Au programme, pour commencer, une journée «institutionnelle» : à l’invitation de la Coordin’action Nationale des Associations de l’Habitat Participatif (CNAHP) et de l’association marseillaise Regain, un représentant du ministère fera le point sur l’avancée des décrets d’application relatifs à la loi. S’ensuivront trois tables rondes, portant sur les partenariats possibles avec le logement social, l’actualité de la recherche, et l’accompagnement des projets par les collectivités. Le lendemain et le surlendemain verront la mise en place d’un Forum ouvert, sans ordre du jour préalable, sur la question «Comment développer l’Habitat Participatif et le rendre accessible au plus grand nombre ?» Ainsi que la possibilité de participer à un très grand nombre d’ateliers aux thèmes variés, allant de «comment se passer des banques ?» à l’implication des jeunes et des personnes âgées, en passant par les aspects architecturaux et énergétiques, les projets ruraux et... la gestion des conflits entre habitants, à ne pas négliger ! GAËLLE CLOAREC

Rencontres Nationales de l’Habitat Participatif du 9 au 11 juillet Divers lieux, Marseille 04 91 00 32 91 http://habitatparticipatif-paca.net


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Soyons l’Autre 47 spectacles parcourent la 69e édition du Festival d’Avignon. Une aventure unique à la rencontre de l’Autre (et de soi)

dialogues autour de la «cité idéale». Puis le polonais Krystian Lupa, mettra à l’œuvre une troupe survoltée à la FabricA dans Des arbres à abattre de Thomas Bernhard ; la «chorégraphe des phénomènes» Emmanuelle Vo-Dinh donnera Tombouctou Déjà-vu et Jonathan Châtel créera Andreas d’après Strindberg. Trois spectacles Jeune Public se relaieront dans la Chapelle des Pénitents Blancs dédiée. Riquet de Laurent Brethome ouvrira le ban ; suivront les projets de Benjamin Verdonck qui chorégraphie avec génie des morceaux de carton, et du duo Stereoptik qui crée en dessin et en musique Dark Circus d’après Pef.

«J

e suis l’Autre, c’est ça que devrait être la culture !». Olivier Py pourrait également résumer ainsi le Festival d’Avignon, lui qui rallie spontanément dans son édito le mouvement de solidarité de l’après-Charlie à celle de l’aventure du In, en réunissant durant «trois semaines de grand et beau bruit» le public et les 700 personnes travaillant l’été au Festival. «Le plus beau public de France», renchérissait Emmanuel Ethis, président de l’Université d’Avignon et sociologue de la culture, lors de la conférence du 19 mai donnée sur les bancs d’un amphi bondé -et d’une moyenne d’âge à l’évidence supérieure à l’habitude-, insistant sur sa singularité et sa responsabilité de transmettre et pérenniser le Festival de Vilar.

«Le théâtre, c’est le risque du vide»

Des aventures fortes, dès l’ouverture de cette 69e édition, le public est invité à en vivre. Olivier Py crée, adapte et traduit Le Roi Lear à la Cour d’honneur, «une des plus grandes pièces de l’humanité», rappelant que la grandeur du lieu crée une rapidité et une énergie qu’il faut utiliser : «Avec la Cour on doit lutter avec l’impossible. L’idée, c’est qu’elle soit une machine à détruire le théâtre bourgeois. Tout est beaucoup plus grand, il faut donc un poème plus grand que nous». Ce poème de Shakespeare, qui lui a demandé sept

Retours et nouveautés

Richard III © Paolo Pellegrin

mois de travail, est celui qui raconte le mieux, selon lui, le XXe siècle et la fonction du langage : «C’est une pièce sur le trou ! La question est comment et pourquoi on tombe dans le trou… Le théâtre, c’est le risque du vide». Philippe Girard interprètera le rôle-titre («Shakespeare l’a écrit pour lui»), Jean-Damien Barbin le fou et Amira Casar l’une des trois sœurs… Le directeur du In reprendra également Hacia la alegria, créée à Madrid dans le cadre du projet Villes en Scène, avec Pedro Casablanc dans une scénographie signée à nouveau par Pierre-André Weitz. Le 4, s’ouvrira aussi La République de Platon d’Alain Badiou, un feuilleton philosophique quotidien (à 12h en entrée libre dans les Jardins Ceccano) mis en jeu par Valérie Dréville, Didier Galas, Grégoire Ingold avec l’ERAC et des «citoyens rencontrés» (Avignonnais, artistes, politiques) qui s’empareront de ces

Il y aura des retours (qu’on espère) gagnants, «il est important que ces artistes n’oublient pas Avignon et qu’Avignon ne les oublie pas !», dont celui d’Angelin Preljocaj qui crée à la Cour avec 14 danseurs le très attendu et bien nommé Retour à Berratham de Laurent Mauvignier, dans une scénographie d’Adel Abdessemed ; Valère Novarina prépare pour le Cloître des Carmes Le Vivier des noms ; et Thomas Ostermeier reprend Richard III, dans une reconstitution du Globe adaptée pour l’Opéra Théâtre. Shakespeare décidément sera le liant de cette édition, puisque Tiago Rodrigues présentera Antoine et Cléopatre, dans une version intime et des rôles inversés. Et en portugais surtitré. Côté «découvertes», 40 artistes ne sont jamais venus au Festival. Retenons Philippe Berling qui met en scène le monologue Meursaults d’après la contre-enquête de Kamel Daoud, Benjamin Porée dans une cinématographique Trilogie du revoir, le Russe Kirill Serebrennikov joue Les Idiots d’après Lars von Trier, Samuel Achache une Fugue musico-théâtrale. Après le succès de l’Othello itinérant de Nathalie Garraud l’an passé (qui revient avec Soudain la Nuit au Lycée Mistral), le nomadisme sera très ubuesque avec Olivier-Martin Salvan qui adapte Jarry hors-les-murs, dans les lieux non théâtraux. «Les trompettes d’Avignon transportées sur un ghetto blaster, toute une symbolique», s’amuse Olivier Py, inventeur de la formule de la «décentralisation des 3 km».


Et puis notons encore, dans la suite du soutien notable apporté aux artistes de la région, l’Orchestre des jeunes de la Méditerranée, mais aussi les Estoniens du Teater N099 dans N051 qui pourront créer la surprise en (re)fabriquant leurs photos de vacances, les duos toujours passionnants formés aux Sujets à Vifs, des propositions musicales au musée Calvet avec le groupe Feu ! Chatterton et Eric Reinhardt ou avec la chanteuse tunisienne Dorsaf Hamdani. Puis nombre de pièces dansées remarquables avec Hofesh Shechter, Gaëlle Bourges (voir www.journalzibeline.fr), Fabrice Lambert, Eszter Salamon, Fatou Cissé ; et les guests d’un seul soir (chacune) : Isabelle Huppert et Fanny Ardant.

Ni catalogue ni supermarché

Découverte et émergence font partie de la mission du In, mais également une ouverture à l’international et en particulier cette année aux pays du Sud avec, entre autres, les Egyptiens de Last Supper (voir www.journalzibeline.fr) ou le dramaturge grec Dimitris Dimitriadis, dans Homériade avec l’ORAP et Robin Renucci. «Je me battrai pour que le Festival ne soit pas considéré comme un gros catalogue» martèle Olivier Py qui défend bec et ongles l’idée de rencontres et de débats indissociable du Festival, et non celle «d’un supermarché de la lecture et d’une liste de spectacles». Ainsi aux Ateliers de la Pensée (qui avaient accueilli plus de 20 000 personnes en 2014 sur le Site Pasteur), aura lieu un festival de rendez-vous tournés vers la pensée politique. Autre lieu en entrée libre à découvrir et apprécier, La Nef des images à l’église des Célestins retracera la mémoire du festival avec ses archives compilées par l’INA diffusées quotidiennement, et une brillante exposition de Guillaume Bresson, qui signe l’affiche et sera visible dans l’exposition-évènement Patrice Chéreau, un musée imaginaire, à la Collection Lambert agrandie. Confronté cette année, comme toutes les structures avignonnaises, à une réduction budgétaire municipale, et «handicapé» par le remboursement de 10 000 billets suite aux mouvements sociaux des intermittents et aux intempéries 2014, le Festival a réduit la voilure de deux jours. Mais reste sans aucun doute une folle aventure qui nous rend Autre… DELPHINE MICHELANGELI

Festival d’Avignon du 4 au 25 juillet 04 90 14 14 14 www.festival-avignon.com


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Le Off, c’est extra !? de dépenses cumulées), avec 110 millions d’euros de recettes contractualisées avec les programmateurs. De quoi soutenir pour Greg Germain que «les compagnies ne repartent pas exsangues et ne mettent pas des années à s’en remettre». Une affirmation à prendre avec parcimonie, la plupart des compagnies sachant pertinemment qu’elles risquent de perdre de l’argent, suivant le type de contrat, le prix de location de la salle (5500 euros en moyenne) et son taux de remplissage, surtout si elles ne créent pas le buzz dès les premiers jours. Un retour sur investissement qu’elles rattraperont sur les tournées… des saisons suivantes. Un an d’attente, voire deux, pour être diffusé, c’est forcément périlleux. Mais le risque d’Avignon reste paradoxalement incontournable, 3000 programmateurs y font «leur marché» chaque année. © Delphine Michelangeli

1 pièce en 1966, 1336 en 2015 ! Le Off fête ses 50 ans et continue de grandir…

«I

l y a 50 ans, André Benedetto donnait au théâtre des Carmes la première représentation de la pièce Statues. Un geste libre et fragile effectué par un homme qui ne savait pas encore ce qu’il inventait» s’émouvait le 27 mai Greg Germain, président jusqu’à l’automne d’Avignon Festival & Compagnies, l’association qui coordonne le Off depuis 10 ans. 50 ans plus tard, ce geste d’opposition au Festival officiel a ainsi accouché du «plus grand théâtre du monde» : un exponentiel festival autofinancé en 2015 par 1071 compagnies (dont 228 de PACA) et 127 lieux (dont 116 théâtres) avec 1336 spectacles disséminés pendant trois semaines dans la ville-théâtre. Si l’abondance actuelle, voire l’overdose, donne le tournis, derrière le «folklore» affiché et sous les 130 tonnes de papiers, quelques pépites spectaculaires dominent, heureusement pas uniquement en Off.

Un demi-siècle de spectacles

La Maison Jean Vilar (et son antenne de la BNF) conserve la mémoire du Festival, In et Off, et fêtera cet anniversaire avec l’Université (où s’ouvrira à la rentrée un nouveau master Théâtre et Patrimoine) :

exposition, quizz, campagne d’identification des compagnies, tables rondes, concours d’affiches. Du côté d’AF&C, outre le catalogue tiré à 120 000 exemplaires, la carte d’adhérent de 16 euros (pour un prix moyen de spectacle à 12 euros), une billetterie en ligne Ticket’Off, des timbres collector, le traditionnel Village du Off, une nouvelle charte tentera de rapprocher le Off d’un festival éco-responsable avec une «écolo parade» le 19 juillet. L’engagement de la Ville se veut plus présent : l’adjointe à la culture Catherine Bugeon, désormais au conseil d’administration d’AF&C, a annoncé la signature d’une convention d’objectifs «pour commencer à écrire une histoire commune» dont le slogan est Le Off, c’est extra, et a réaffirmé la volonté que le «Off concerne aussi les 90 000 Avignonnais», notamment ceux de l’extra-muros, en impliquant associations de quartiers et centres sociaux. Cultures du Cœur fera également le lien entre l’offre et la demande de 1000 emplois saisonniers réservés aux jeunes des quartiers. Hors remparts toujours, le parc du Château de Saint-Chamand sera ouvert au Footsbarn Travelling Théâtre.

Un investissement incontournable ?

S’il est à regretter qu’en moyenne seuls 20% des sondés répondent aux enquêtes annuelles d’AF&C, quelques chiffres ressortent. En 2014, le budget moyen par compagnie, dont 20% d’entre elles reviendraient plus de 3 fois en 5 ans, a été de 25 000 euros (34 millions

Lieux permanents et théâtres d’été

Entre la parade d’ouverture du 3 juillet et le bal de clôture du 25 juillet, comment choisir parmi les 1336 propositions ? L’auteur, la compagnie, les comédiens, le metteur en scène, le genre, l’horaire, le goût du risque et la curiosité... Se fier aux lieux d’accueil s’avère aussi indispensable. On fait confiance, par exemple, au Théâtre des Doms, la vitrine Sud de la création belge, où le programme est toujours excitant : les 9 spectacles 2015 ne dérogeront pas à la règle. En face, Les Hauts Plateaux affinent d’année en année leur sélection, l’Ajmi impose ses musicales Têtes de jazz, le cinéma Utopia prépare une série de rencontres et de films passionnants et, toujours à la Manutention, l’installation Truth Box de Meriam Bousselmi, programmée par le TAMAM, sera immersive. En plus de leur création maison, les Scènes d’Avignon accueillent des programmes soignés avec de nombreuses compagnies aidées par la Région PACA. Parmi les têtes d’affiche au Chêne Noir, dont Mesguich, Philipe, Auteuil, Barrault, Alévêque... le Collectif 8


adapte Alice de Carroll, et Gérard Gelas crée Un cadeau hors du temps de Luciano Nattino avec Jacques Frantz et Claire Borotra. Au théâtre des Halles, Alain Timar reprend Ô vous frères humains et Pédagogies de l’échec, et Agnès Régolo Le Mariage de Figaro avec sa virevoltante troupe. Il faudra compter aussi sur José Pliya, Laurent Fréchuret, Rémi De Vos, Carole Fréchette… Au Balcon, la Cie la Souricière joue Femme non rééducable, Grégori Bacquet Un obus dans le cœur, et Serge Barbuscia présente Marche dans la cour du Musée Angladon. Le Chien qui Fume accueille 7 spectacles, dont celui de Gérard Vantaggioli, Et mon mal est délicieux, et 8 autres au Petit Chien. Aux Carmes, Le Bleu d’Armand reprend sa Chienne de Vie, Jean-François Matignon La Peau Dure et La Ronde de nuit, Philippe Caubère La danse du diable et Bac 68, et Seb Lanz L’enseignement de l’ignorance. Chez Golovine, de la danse à profusion et dans tous les styles avec les Cie Par-Allèles, Pyramid, Difé Kako… D’autres lieux accueillent des pièces pertinentes : le Girasole, le Théâtre de l’Oulle, le Grenier à Sel, la Tache d’encre (Manuel Pratt), les Barriques (Partisans signé de notre collaborateur Régis Vlachos, qui jouera par ailleurs Dieu est mort au Vieux Balancier). Et parmi ceux ouverts exclusivement l’été, retenons La Manufacture (Fuck America de Haïm Menahem, Braises d’Artefact), La Parenthèse (Franck Micheletti, Jonah Bokaer, Mickaël Phelippeau), Les Lucioles (Antigona de La Naïve) et le Théâtre Arto (Mademoiselle Espérance des Carboni). Pour finir, extra-muros, L’entrepôt reçoit le Théâtre Alibi, le collectif niçois Mains d’œuvre et sur un temps plus court, des formes innovantes (Charles-Eric Petit, Clara Le Picard, Mathieu Ma Fille Foundation, Les Comptométrices, Mises en Scène). Le Théâtre du Maquis, Ma Compagnie et le Kronope jouent à la Fabrik’Théâtre ; Eclats de Scènes et Christian Mazzuchini à La Rotonde dans Bidoch’Market ; et sur l’Île Piot, la Région Midi Pyrénées fait son incontournable cirque. Pour le reste, ouvrez grand vos oreilles… DELPHINE MICHELANGELI

Festival Off, Avignon du 4 au 26 juillet www.avignonleoff.com

Avant-Propos

Pendant le festival Off, le 13 juillet, suivez la rencontre autour de la création contemporaine francophone organisée par la Région et le Théâtre des Doms avec un focus sur deux compagnies de la Fédération Wallonie-Bruxelles et deux de la Région PACA (Elise Vigneron du Théâtre de l’Entrouvert et la circassienne Caroline Obin). Agnès Freschel et Emile Lansman animeront cette rencontre radiophonique, diffusée sur la WebRadioZibeline. le 13 juillet de 10h à 12h30 Théâtre des Doms, Avignon 04 90 14 07 99 www.lesdoms.be


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15 compagnies pour (tous) les enfants

Le monde sous les flaques © Lee Davison Photography

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endant le festival Off, s’il y a un lieu extra muros, à 200 m de l’étuve avignonnaise, où il fait bon découvrir des spectacles en famille, c’est à la Maison du théâtre pour enfants qui se transforme pour la 33e année et pendant 17 jours en espace privilégié entièrement dédié au jeune public. Organisé par l’association Eveil Artistique qui sensibilise toute l’année les enfants à l’art et à la culture, ce «festival dans le festival» est incontournable par la qualité de sa programmation et son accueil adapté.

15 compagnies seront présentes, dès 9h45, avec des pièces visibles à partir de 1 an, un parcours interactif de marionnettes préhistoriques (succès garanti !), un stage théâtre (20 au 24 juil), des apéros-sirops à la sortie des spectacles, et une fête d’ouverture (6 juil à 15h) gratuite et ouverte à tous. Parmi les curiosités : Le monde sous les flaques de la Cie l’Artifice, un spectacle 50/50 (30 mn de jeu, 30 mn d’échange) pour cultiver son jardin imaginaire ; Dzaaa !, une épopée intérieure pour enfants rêveurs ; Carta Memoria de la Cie Clandestine spécialiste de l’origami ; L’ours qui avait une épée, une création sur l’environnement en théâtre d’objets. Et encore : du théâtre avec Le sable dans les yeux adapté par la Cie Les Passeurs ; du conte avec En fer et en os de Rachid Bouali ; une pièce poétique sur l’acte de grandir dans Lapin ; des marionnettes magiques dans Toi du monde ou venues de Barcelone dans Adieu Bienvenida ; du théâtre de papier avec Marcellin Caillou d’après Sempé ; et pour les plus grands, de la danse sur le thème de l’adolescence avec Punky Marie du Groupe Noces.

e l’autre côté du Rhône, à une dizaine de kilomètres seulement des festivals In et Off d’Avignon, direction Villeneuve-lez-Avignon ; on garde le soleil et les cigales et on passe, du Vaucluse au Gard, de la région Paca au Languedoc-Roussillon pour deux autres évènements juillettistes qui tiennent tête à la ville-théâtre. L’un d’entre eux, Les Rencontres d’été, accueille à La Chartreuse une douzaine de spectacles privilégiant les textes contemporains, dont certains des auteurs ont été accueillis durant l’année en résidence au Centre des écritures du spectacle. Ainsi, on découvrira avec curiosité celui de Pauline Ribat sur la violence

S

italiennes Francesca Garolla et Lucia Calamaro. La Winter Family et Pierre Meunier seront quant à eux accueillis en partenariat avec le In. Pour finir, Uniforme, exposition responsable… promet de ses cartels inspirés une prise de conscience originale sur la liberté d’expression. DELPHINE MICHELANGELI

DE.M.

DE.M.

Festival Théâtr’enfants et tout public du 7 au 25 juillet (relâches 12 et 19) Maison du théâtre pour enfants, Avignon 04 90 85 59 55 www.festivaltheatrenfants.com

faite aux femmes, Depuis l’aube (ode au clitoris), ou Ogres de Yann Verbugh sur l’homophobie. Dorothée Munyaneza racontera le génocide rwandais dans Samedi détente, d’autres chorégraphes tisseront des liens avec la littérature : Olivia Grandville ou Thierry Thieû Niang créeront respectivement sur des textes d’Aurore Jacob et Patrick Autréaux. A noter nombre de créatrices pour cette 42 édition : le parcours de Véronique Bellegarde autour des Mensonges, l’installation immersive numérique de Carole Thibaut, les Lumières d’Odessa de Macha Makeïeff, les musiciennes Laurence Monti et Myriam Lafargue, les auteures

Ubu © Olivier Martin Salvan

ur l’île de la Barthelasse, le Festival Contre Courant continue de croire au rôle social de l’artiste et à l’émancipation du public par la culture. Programmée par la CCAS, la Caisse des Activités Sociales des électriciens et gaziers, la manifestation pluridisciplinaire accueille en accès gratuit pour tous (sauf spectacles de 22h à 5 euros) une trentaine de propositions contemporaines, dont un focus pour cette 14e édition sur la place de la femme (avec l’Aboyeuse de chez Hermès, Lilith par Julie Recoing, La Fabrique d’héroïnes par Joëlle Cattino), et un partenariat renouvelé avec le Festival d’Avignon qui programme Ubu (14 juil), By Heart par Tiago Rodrigues (le 16) et accueille un stand des Activités sociales aux Ateliers de la Pensée sur le site Pasteur de l’Université d’Avignon. À noter, My way de Michel Kelemenis (le 10), une lecture de Pas pleurer de Lydie Salvayre par Anne Alvaro et Nicolas Pignon et la pièce Aimer si fort de Guy Alloucherie (13 juil), mais aussi l’Agora Theater, la Comédie de St Etienne, le Théâtre de l’Argument, la Cie TGV, le chanteur Valérian Renault en solo… Marier populaire et exigence, c’est possible.

La Chartreuse rencontre les créatrices D

Culture pour tous

Les Rencontres d’été du 4 au 24 juillet La Chartreuse, Villeneuvelez-Avignon 04 90 15 24 45 www.chartreuse.org

Festival Contre Courant du 10 au 19 juillet La Barthelasse, Avignon Réservations obligatoires 06 80 37 01 77 www.ccas-contre-courant.org


Restructuration L

e festival Villeneuve en Scène a changé de direction cet hiver, dans des conditions de nomination et de passation compliquées. Entretien avec Brice Albernhe, aujourd’hui à la tête de ce rendez-vous des théâtres en itinérance. Zibeline : Quel est votre projet pour ce festival que vous souhaitez inscrire dans la continuité ? Brice Albernhe : Mon job c’est de porter un projet de développement culturel et de soutien aux compagnies. Je ne suis qu’un passeur entre artistes et public. Ce festival doit être un endroit utile aux compagnies, et à leur diffusion. Je revendique totalement la continuité, la rupture est dans la restructuration avec l’idée d’amoindrir le risque pour les compagnies accueillies. D’où l’idée de resserrer cette édition dans la durée et le nombre de spectacles ? C’est en effet voulu et non subi ! Ce festival est un des rares, voire le seul avec le In, à toucher de l’argent public pour son fonctionnement. Ça nous impose une responsabilité. Celle de limiter le risque artistique et financier pour les compagnies qui jouent à la recette, en les accueillant toutes de la même manière et en prenant tout en charge, sauf le coût plateau. À terme, le projet est de mettre en place un minimum garanti. Comment envisagez-vous d’y arriver ? En intégrant le festival dès le début de leurs productions, en m’appuyant sur les réseaux. L’idée c’est aussi d’homogénéiser la programmation, d’avoir des compagnies qui ont un rayonnement artistique de même niveau et des ressorts publics identiques. Que retrouvera le public habitué et que découvrira le néophyte ? La notion même de l’itinérance ! Celle d’une écriture qui va vers le public avec des projets hors les murs, comme Tupp’ ou la coupeuse de feu ou les deux pièces du chorégraphe Denis Plassard. On ouvre aux arts de la rue avec Opéra Pagaï ou la Cie Retouramont, au cirque avec Nikolaus, à la musique avec Danbé. Un rapport au corps important parcourt l’édition, mais on reste dans la dimension festive, ludique et foraine. Propos recueillis par DELPHINE MICHELANGELI

Festival Villeneuve en Scène du 10 au 23 juillet Villeneuve-lez-Avignon 04 32 75 15 95 www.festivalvilleneuveenscene.com


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Châteauvallon d’été L

Titanic © Agnès Mellon

a saison du CNCDC Châteauvallon se poursuit chaque année jusqu’à la fin du mois de juillet, avec une programmation qui fait la part belle à la danse et dont la majorité des spectacles se dérouleront dans l’amphithéâtre de plein air. Le 26 juin, le danseur et chorégraphe Franck Micheletti, avec sa compagnie Kubilai Khan Investigations, relie Toulon et Bandung, en Indonésie, avec Your Ghost is not enough : écrite comme un poème, la pièce réunit Idio Chichava, danseur Mozambicain, et Sara Tan, danseuse originaire de Singapour, portée par la musique live de Benoît Bottex et Franck Micheletti. De la danse toujours avec le Alonzo King Lines Ballet les 26 et 27 juin ; le chorégraphe américain présente 3 de ses chorégraphies : Men’s quintet, Writing Ground, inspirée des poèmes de Colum McCann, et le Concerto pour deux violons porté par la magnifique partition de Jean-Sébastien Bach. Le Ballet National de Marseille viendra danser Titanic (les 17 et 18 juillet). Frédéric Flamand reprend le ballet qu’il a créé en 1992, fascinant hommage à l’une des figures mythiques de la révolution industrielle. Plus tôt dans le mois, la compagnie de cirque québécoise Les 7 doigts de la main revient à Châteauvallon avec Cuisine & confessions, spectacle dans lequel le toucher, l’odorat et le

goût s’allient aux acrobaties virtuoses pour faire ressurgir nos souvenirs d’enfance (du 18 au 20 juin) ; Les Tambours de Tokyo, en collaboration avec le festival de musique de Toulon et sa Région, feront résonner leurs Taïkos, tambours aux sonorités profondes (le 23 juin) ; Pascal Rambert reprend Avignon à vie, pièce créée en 2013, véritable déclaration d’amour à cette ville et son festival autant qu’un inventaire de souvenirs personnels ou collectifs liés à la mythologie du lieu et de l’événement (le 4 juillet). Enfin, les Nuits Flamencas reviennent pour la 9e année, sous la direction artistique de Juan Carmona : 2 soirées, les 24 et 25 juillet, résolument placées sous le signe de la fête avec une Fiesta flamenca qui mêle aux rythmes flamencos les bulérias déjantées de Diego Carrasco, les rumbas catalanes de Manolo & les Gyptis et les nouvelles étoiles de la danse flamenca, le Ballet Flamenco de Andalucia, prestigieux ambassadeurs de l’art flamenco dans le monde, et Una Noche en casa patas, lieu mythique situé au cœur de Madrid qui sortira de ses murs pour la première fois ! Do.M.

Châteauvallon, Ollioules 04 94 22 02 02 www.chateauvallon.com

Nuits vauclusiennes D

ans le Vaucluse, il n’y a pas que le Festival d’Avignon. Il y a aussi le Festival des Nuits de l’Enclave, qui en est aujourd’hui à sa 50e édition, à Valréas, Grillon, Richerenches

et Visan. La programmation théâtrale y est riche et prometteuse : Gilbert Barba, directeur artistique du Festival, transpose Dom Juan de Molière au XXe siècle ; la Cie Mise en scène Bon Appétit, Cie Mises en Scène, juillet 2012 © Delphine Michelangeli

propose Bon Appétit ; dans Instants cueillis au fil des nuits, la Cie La Pierre Blanche parcourt l’histoire de ce festival et de ceux qui l’ont vécu ; le jeune public est aussi convié avec Mot Mot de la Cie Éclats de scènes ; les Tréteaux de France nous proposent le célèbre récit Le faiseur d’Honoré de Balzac mis sous forme théâtrale par Robin Renucci ; la Cie Eclats de Scènes joue Bidoch’Market de Michel Bellier ; la Cie Triple AAA crée La Très lamentable comédie adaptée du Songe d’une nuit d’été de Shakespeare ; la Cie Studio Monstre donne sa vision du célèbre roman Les Misérables de Victor Hugo ; la Cie Théâtre du Rond Point met en scène une usine de cartonnage de Valréas pendant la seconde guerre mondiale ; en clôture, la Cie Les Nouveaux Nez propose un duel au féminin, qui fait voler en éclat rires et notes de musique. ALICE LAY

Les Nuits de l’Enclave du 8 au 26 juillet Valréas, Grillon, Richerenches, Visan 04 90 28 12 51 www.nuits-enclave.com


Théâtre à la Cour

e festival de théâtre salonnais Théâtre Côté Cour reprend du service pour une 26e édition, dans la Cour Renaissance du Château de l’Emperi. Le programme commencera avec Angèle, grand classique du cinéma de Marcel Pagnol d’après le roman Un de Beaumugnes de Jean Giono. L’œuvre est ici adaptée pour le théâtre par Louis Feyrabend et mis scène par Yves Pignot qui lui donne une dimension intemporelle (le 4 juillet). Le Festival se poursuivra avec Les fourberies de Scapin de Molière par la Cie Le Grenier de Babouchka, dans une mise en scène inventive de Jean-Philippe Daguerre (le 6). Troisième et dernière pièce (le 8) avec Ce soir, j’attends Madeleine : un spectacle musical écrit d’après les célèbres chansons de Jacques Brel dans une mise en scène de Violette Mauffet avec Crystel Galli à l’accordéon, Jimmy Tillier au piano et Guillaume Nocture au chant. Un jeune serveur de café attend Madeleine avec qui il a rendez-vous. Pour faire passer le temps, il nous raconte la vie de «ces gens-là», de son quotidien… ALICE LAY

Festival Théâtre Côté Cour les 4, 6 et 8 juillet Château de l’Emperi, Salon-de-Provence 04 90 56 00 82 www.theatre-cote-cour.fr

Populaire ou populiste ? our la troisième année Jacques Weber propose de passer la soirée P À la belle étoile au Théâtre Silvain, avec une programmation susceptible de remplir le lieu magnifique : Francis Huster dans Le Joueur d’échec d’Eric Emmanuel Schmidt (d’après Stephan Zweig) le 3 juillet, Charles Berling et Bruno Solo dans Inconnu à cette adresse le 2 juillet, Birkin, Piccoli et Hervé Pierre qui disent Gainsbourg, poète majeur pour ouvrir le festival le 1er juillet. La programmation s’appuie certes sur des textes, mais aussi sur des productions privées. Après Les Brigandes du Château d’If (voir p 46) et les soirées de la Cité de la musique qui ont réussi à drainer un public populaire, après les Chevaliers du Fiel et Roland Magdane nettement plus lourdingues, les trois soirées À la belle étoile gagneront-elles le pari, à 27 euros minimum la place dans un gradin de pierre au confort d’écoute aléatoire, de contenter un public venu retrouver leurs stars anciennes ? On attendra sans doute Lisa Simone (le 17 juillet) en évitant soigneusement Patrick Fiori puis Julien Doré, pour retourner au Silvain... A.F. À la belle étoile du 1er au 3 juillet Théâtre Silvain, Marseille www.festivalalabelleetoile.fr

Les Fourberies de Scapin © F. Rappeneau

L


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Au programme

du Marseille L

e Festival de Marseille a commencé avec la Parade de Willi Dorner et va se poursuivre jusqu’au 17 juillet en enchaînant les soirées exceptionnelles. Les 17 et 18 juin, au Silo, c’est le Ballet de l’Opéra de Lyon qui ouvrira la danse, avec une Sarabande de Benjamin Millepied, et deux pièces de Forsythe : des programmes qu’on peut qualifier de néoclassiques, tendance américaine, c’est-à-dire mâtinés d’un peu de Cunningham et d’un soupçon de jazz... Les 20 et 21 juin, au Klap, la Cancoco Danse company va «bousculer toutes nos idées préconçues : le handicap ne constitue pas un empêchement au mouvement». C’est ce qu’affirme Apolline Quintrand après avoir vu Playing another, un spectacle composé de deux pièces d’Hetain Patel et Thomas Hauert, conçues pour ces danseurs professionnels handicapés ou valides. Dans l’écriture de la danse, la contrainte seraitelle aussi libératrice, inspiratrice ? Source d’émotion, sans nul doute. La seule proposition théâtrale sera la reprise de Mission, spectacle choc de KVS, retraçant l’itinéraire, les interrogations religieuses, la confrontation à la misère, au postcolonialisme et à la guerre d’un prêtre missionnaire au Congo. Par l’intense comédien Bruno Van den Broecke, les 23 et 24 juin à la Friche. Retour à la danse, insurrectionnelle, essoufflante et noire, enthousiasmante, de Hofesh Shechter. Le chorégraphe israélien sera pour la première fois à Marseille, avec son ballet junior. Mais deGeneration n’est pas un plan B ! Shechter parie sur la jeunesse en convaincu, et sa danse est l’une des plus frappantes qu’on ait vues sur les scènes ces dernières années... (les 25 et 26 juin à la Criée).

Josette-Baiz-Compagnie Grenade-Quatuor-Bela, Spectres © Cécile Martini

Sur la place d’armes du MuCEM, Michel Kelemenis reprend sa jolie petite pièce, Zef !, pour de jeunes interprètes qui se soulèvent et s’apaisent comme des rafales de vent, l’un vers l’autre (le 26 juin) voir Zib 79. Un concert ciné à l’Alhambra permettra d’entendre la nouvelle star du fado Gisela Joã puis de voir La cage dorée de Rubens Alves le 28 juin, avant de retrouver au BNM Anne Teresa de Keersmaeker qui fait danser un couple sur La nuit transfigurée de Schönberg (les 2 et 3 juillet) et reprend sa pièce mythique Fase, le 4 juillet, au Silo. La veille Josette Baïz créera Spectres avec le quatuor Béla à la Minoterie avant de reprendre Guests, le 12 juillet, à la Criée (voir Zib’80 ). Entretemps on aura vu Rocio Molina les 4 et 5 juillet, un Sacre du printemps de Daniel Linehan au BNM les 6 et 7 juillet, Nomada (flamenco) de la Cie Manuel Linan au Silvain le 8 juillet et surtout deux spectacles très différents de Wim Vandekeybus : à la Criée la reprise de sa première pièce, sauvage, déchirée, What the Body does not remember, crée en 1987 (le 9 juillet) au Silo sa dernière création, moins turbulente, plus sensuelle Speak low if you speak love (le 11 juillet). Pour finir le Ballet du Capitole viendra Valser sous la direction de Catherine Berbessou (le 16 juillet

au Silo) avant qu’on ne conclue tout cela avec un Bal Tango concocté par MOD, sous l’Ombrière, le 17 juillet, pour danser dès 19h... AGNÈS FRESCHEL

Festival de Marseille jusqu’au 17 juillet 04 91 99 02 50 festivaldemarseille.com

Presque rien

Au Klap, la compagnie Ex Nihilo propose de venir découvrir les premiers pas de sa création 2016, sur la ville bien sûr, ses extensions et son emprise, et les lieux où la résistance se joue, «petits endroits de dignité» à attiser... A.F. Découverte dansée KLAP, Marseille 1er juillet 04 96 11 11 20 www.kelemenis.fr



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La danse en 7 temps Wei-Chia Su © Chang-Chie Chen

A

u Centre de Développement Chorégraphique Les Hivernales d’Avignon, l’équipe d’Emmanuel Serafini joue le jeu du festival Off en déclinant une palette de pièces chorégraphiques de haute volée dans l’évènement L’été danse au CDC #4. Sept temps forts se tenant de 10h à 21h45 du 10 au 20 juillet, qu’on peut tout à fait dérouler à la suite en cas d’appétence absolue, avec deux compagnies de la région Paca et d’autres invités accueillis dans le cadre de partenariat régionaux et internationaux. Par l’entremise du théâtre des Doms, la Belgique démarrera ainsi chaque jour avec Cortex : de la danse théâtre de la compagnie 3637 accessible au jeune public (présentée en février au Festival Les Hivernales 2015) qui place l’enfance au cœur du mouvement et en livre délicatement tous ses souvenirs et espoirs. Balkis Moutashar

prendra le relais avec Les portes pareilles, une pièce créée dans le cadre des quartiers créatifs de Marseille Provence 2013 mettant en jeu un duo de femmes à la croisée du music-hall et du cabaret. Direction le Nord-Pas de Calais avec Isida Micani, danseuse chez Carolyn Carlson, qui nous invite à s’équiper de lunettes 3D pour découvrir dans un foisonnement d’images enchanteur sa version du parcours initiatique, dans une alternance d’interprétation féminine ou masculine. Roser López Espinosa, jeune chorégraphe catalane, s’inspire de la migration des oiseaux et livre dans Lowland un duo d’une précision époustouflante sur le dépassement de soi. Puis, avec la région Midi-Pyrenées, c’est le chorégraphe franco-algérien Bouziane Bouteldja qui dénoncera dans Réversible tabous, religions, interdits en mêlant hip hop et danse contemporaine, poursuivant en solo sa recherche sur l’altérité. Six danseuses de la compagnie taïwanaise Horse, que dirige le chorégraphe Wei-Chia Su, prendront le relais avec FreeSteps, une pièce de groupe lumineuse qui offre 50 minutes d’esthétique visuelle éblouissante. Pour finir la journée en s’émoustillant l’imagination, on terminera avec Théorie des prodiges, la création 2015 du Système Castafiore dans laquelle Marcia Barcellos et Karl Biscuit livrent toute leur folie créatrice pour ré-enchanter le monde et les territoires vierges de l’imaginaire. Sans oublier, sur la durée du festival (11, 13, 16 et 19 juillet à 11h30), le cycle de rencontre RESO@ DANSE pour découvrir l’univers d’une vingtaine de chorégraphes présents à Avignon, qui auront lieu dans le cadre accueillant de la Calade de la Maison Jean Vilar, en entrée libre.

Avoir 20 ans ! L

e festival de Vaison Danses fête ses vingt ans cette année pour une édition qui, concoctée par Philippe Noël avant de passer le flambeau à Bernadette Stalmans, Directrice de la culture de Vaison-la-Romaine, a su garder la qualité éclectique qui l’a placée aux premiers rangs des scènes internationales. B. Stalmans insiste sur les choix esthétiques, résolument en prise avec le monde contemporain, et «qui font appel au cirque, à l’acrobatie, aux expressions urbaines, pour un festival qui se revendique clairement pluridisciplinaire et ouvert à la diversité de son public». Du 15 au 28 juillet, on aura le bonheur d’applaudir une nouvelle fois Dada Masilo et son adaptation libre de Carmen de Bizet (15 juillet) ; la création de Catherine Berbessou, Valser, qui, malgré son nom, nous emporte dans un tango qui envoie tout valser, imprimant les pas des danseurs dans la terre de l’arène (le 19) ; les 22 acrobates de la Compagnie XY pour un Il n’est pas encre minuit en apesanteur (le 22) ; puis The Roots de Kader Attou qui mâtine le hip-hop de danse contemporaine (le 24) ; enfin, Cuisine & Confessions de la Cie Les 7 doigts de la main, éblouissants d’invention (les 27 et 28). Sans compter les spectacles, bals, conférences, stages, rencontres avec les artistes, et en ville (le 17) Ouest side story par la Cie Françoise Murcia. MARYVONNE COLOMBANI

Vaison Danses du 15 au 28 juillet Théâtre antique, Vaison-la-Romaine 04 90 28 84 49 www.vaison-danses.com/

DELPHINE MICHELANGELI

L’été danse au CDC #4 du 10 au 20 juillet (relâche le 15) CDC Les Hivernales, Avignon 04 90 82 33 12 www.hivernales-avignon.com

Résidence au Transformateur

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epuis 2014, le studio de la Compagnie du Ballet d’Europe de Jean-Charles Gil a un nouveau nom, le Transformateur, en hommage au lieu dans lequel il s’est installé, une ancienne usine électrique. Dans un perpétuel esprit d’ouverture, d’échanges, où savoirs, techniques et sensibilités enrichissent artistes et pulics ; le Transformateur, «lieu pluriel et mosaïque ouvert à tous», accueille des troupes en résidence, porteuses de projets forts,

comme la Cie Mouvimento qui présentera le 2 juillet (en entrée libre) son nouveau travail de création De chair et d’os, sur une idée originale de Wendy Cornu qui signe aussi la chorégraphie aux côtés de Julie Alamelle. Dans cette danse à deux voix (Julie Alamelle et Sandra Français), se déclinent et se combattent les diverses formes de carcans et de fantasmes qui naissent autour de l’image de la femme. Vidéo, captations en direct, jeu avec les spectateurs

qui se retrouvent au cœur du dispositif, souligent ce travail riche où l’on est à la fois «observateur pudique et spectateur intrusif». M.C.

le 2 juillet Le Transformateur, Allauch 04 96 13 01 12 www.balletdeurope.org



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Ouvrez vos oreilles

Douceurs du port D

epuis 6 ans le Citron Jaune, Centre national des arts de la rue, transforme les quais du port de Port-SaintLouis, ville avec laquelle il est partenaire, en scène ouverte où se succèdent les compagnies d’arts de la rue tous les mercredis soir de juillet, dès 19h. Cette année ne déroge pas à la règle, avec 11 spectacles programmés : la Cie anglaise Acrojou mêle acrobaties aériennes et circassiennes dans son poétique Frantic ; Vincent Warin crée des déséquilibres sur un BMX et en joue, sur les sons chauds du violoncelle de William Schotte avec L’Homme V ; l’étonnant «théâtre de rue à haut degré alcoolémique et littéraire» du Pudding Théâtre et son Alambic ; le cirque Sens dessus dessous du collectif Malunés ; la très attendue dernière création de la Cie Ilotopie, La recette des corps perdus, sur le cannibalisme social et l’artiste à consommer… Et bien sûr le volet gastronomie, avec, cette année, une association intéressante avec le Conservatoire Grands Sud des Cuisines ! Do.M. Les Mercredis du Port les 8, 15, 22 et 29 juillet Quais du port, Port-St-Louis 04 42 48 40 04 www.lecitronjaune.com

F

estival itinérant dans le delta du Rhône, la biennale Les Envies Rhônements annonce une 14e édition qui a pour thème Ecouter le paysage, l’occasion pour l’équipe du Citron Jaune, Centre National des Arts de la Rue, à l’initiative du projet, de questionner la relation de l’homme à son environnement. C’est accompagné d’artistes passionnés et engagés sur des questions environnementales que pourra se faire cette «écoute», au cœur du delta devenu le temps d’un été le lieu de croisement de la culture, des sciences et des arts, ainsi qu’un véritable laboratoire à ciel ouvert pour ces artistes. Outre la découverte des œuvres créées in situ, le festival met aussi l’accent sur la sensibilisation des publics sur les grandes questions environnementales à travers ces créations et les émotions artistiques qu’elles provoquent, provoque des relations entre artistes, chercheurs et scientifiques et permet le développement de la coopération internationale sur ces sujets. Les oreilles seront donc particulièrement sollicitées pour écouter la musique des paysages convoqués et transformés ! Dès le 4 juillet des installations au long cours verront le jour dans la ville d’Arles et dans la nature Camarguaise : Ronald van der Meijs crée avec Wind Violins un dispositif où le son est généré par l’intervention des vents et la flexibilité des grands arbres sur neuf solistes d’acajou et d’ébène (du 4 juillet au 2 août dans le Jardin d’été d’Arles) ; Dries Verhoeven invente un télescope qui permet de dire adieu à tout ce qui disparaît avec

Fare Thee Well ! (du 5 juillet au 2 août au Musée Réattu à Arles) ; Ursula Warnecke pare les Arbres de couleurs qui subliment leurs formes (du 4 juillet au 2 août au Château d’Avignon aux Saintes-Maries) ; Will Menter fait appel à notre magie intérieure avec sa Dérive sonore, des sculptures et installations construites avec des matériaux simples (bois, ardoise, feuilles…) qui créent des paysages sonores (du 26 juin jusqu’à biodégradation totale de l’œuvre au Bois François à PortSaint-Louis) ; Abraham Poincheval relève un défi avec sa Bouteille échouée sur la plage Napoléon, à Port-SaintLouis, à l’intérieur de laquelle il s’installe et qui remontera progressivement le Rhône ; Le Champ harmonique de Pierre Sauvageot… Du 30 juillet au 2 août, place aux arts de la rue, aux balades, à la danse et aux musique (à la Tour du Valat au Sambuc, au Bois François à Port-StLouis, au Marais du Vigueirat à Mas Thibert et au Château d’Avignon aux Saintes-Maries) avec la Cie Ilotopie et leurs petites illusions collectives qui se jouent sur L’Eau de là et les Grandes Esgourdes qui nous parlent au plus près, Le Chant des Pavillons de La Fausse Compagnie, le Babel Sonore de la Cie Caracol, les installations de Merel Kamp, le rituel dansé de la Cie Léa P.Ning… Do.M. Les Envies Rhônements Installations du 4 juillet au 2 août Spectacles du 30 juillet au 2 août Arles, Camargue 04 42 48 40 04 www.lecitronjaune.com

Sens dessus dessous, Malunes © Jason van Lith

Abraham Poincheval, Bouteille © Courtesy-Galerie-Semiose

Potagez-vous ! D

ouzième édition pour l’atypique festival Caressez le Potager qui invite, selon les mots de son initiateur Jean-Louis Favier, à passer du (bon) temps «le cul dans l’herbe et la tête dans les étoiles» durant 3 jours dans le Parc de la Mirabelle. Au menu des réjouissances, du théâtre, de la danse, du cinéma d’animation, de la musique… au milieu d’une nature magnifiée par un potager cultivé plant par plant par des centaines de familles de la vallée de l’Huveaune ! La création maison sera celle du chorégraphe Marco Becherini et du metteur en scène Bruno Deleu, une danse/théâtre, librement inspirée des Métamorphoses d’Ovide, en déambulation ou en lieux fixes dans le Parc. Mais aussi, tout au long de ces 3 jours, la pépinière d’images de Sylvie Frémiot, les diaporamas de Kamar Idir, Mascoto ou le Barré Perché de Denis Barré, les mélodies du groupe Goldenberg & Schmuyle, des ateliers d’arts plastiques… Do.M. Caressez le potager du 9 au 11 juillet Parc de la Mirabelle, Marseille www.caressezlepotager.net



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Le Jazz passe par tous ! L

Hiromi en quintet. Le 18, toujours au Théâtre Silvain, Radio Babel Marseille et le Stanley Clarke Band, un événement rare à ne surtout pas manquer. Le 20 c’est le saxophoniste hyper-volubile Kenny Garrett qui inaugurera avec brio les soirées du Palais Longchamp, suivi d’une carte blanche au trompettiste Eric Truffaz accompagné de Sylvain Luc, Richard Galliano and Friends. À retenir : le 21, une soirée où les femmes seront à l’honneur avec la joyeuse et non moins talentueuse Anne Pacéo, puis l’extraordinaire chanteuse Melody Gardot. Une femme aussi ouvrira la soirée suivante, la pianiste Perrine Mansuy avec ses acolytes dans son projet Rainbow Shell. Viendront alors Charlie Winston avec une soirée electro-pop le 22, et les jazzmen du métro newyorkais Too many Zooz et Goran Bregovic, le 23. Clôture de cet événement le 24 avec le violon cubain de Yilian Canizarès et Caetano Veloso en duo de stars avec Gilberto Gil pour célébrer la chanson brésilienne.

Kenny Garrett © Keith Major

e Jazz est il une musique du passé devenue classique ? Une musique de répertoire, ou de création ? Plus que jamais les musiciens qui viennent des 5 continents jusqu’à Marseille affirment que, au-delà des stars, témoins encore vivants de la grande époque du bebop ou du free, cette musique née au XXe siècle continue d’évoluer au présent, et peut toucher un public jeune. En se relookant et en s’affirmant marseillais, en programmant de jeunes jazzmen et des femmes, le festival Marseille Jazz des Cinq Continents, 16 ans déjà, souhaite drainer de nombreux spectateurs, toutes catégories d’âges confondues, au cours de sa prochaine édition. En pratiquant une tarification bien plus abordable que les grands festivals de la Côte d’Azur, en collaborant avec de nombreux lieux et structures du territoire marseillais qui se mettent aux couleurs du jazz et programment des rencontres, des expos, des after intimes ou endiablées, le festival de Marseille Jazz sait fidéliser un public divers, populaire, composé essentiellement par les habitants et les proches voisins plutôt que les estivants, même si ceux ci commencent à être attirés par ce «jeune» festival au regard de ses aînés de Nice, Antibes ou Marciac. Si les jardins du Palais Longchamp restent le lieu privilégié, d’autres lieux seront investis du 15 au 24 juillet pour une grande célébration du jazz d’aujourd’hui. Raphaël Imbert et

DAN WARZY et AGNÈS FRESCHEL

dix musiciens ouvriront les festivités le 15 au Théâtre de La Criée. Au MuCEM, le lendemain, d’accueillir le Christophe Lampideccia 5tet, Sax Machine, le Lisa Cat-Berro 4tet et le 5tet d’Omar Avital. Troisième soirée, le 17 au Théâtre Silvain, avec Lisa Simone et le trio

Marseille Jazz des 5 Continents du 15 au 24 juillet www.marseillejazz.com

Passion jazz omme à l’accoutumée, l’équipe de passionnés du Moulin à Jazz va œuvrer pour accueillir un public que l’on espère nombreux pour l’édition du 18e Charlie Jazz Festival dans le majestueux Domaine de Fontblanche à Vitrolles. Dès le premier soir (le 3 juillet) l’affiche est très alléchante avec le trompettiste vedette Ambrose Akinmusire, dont le dernier CD a été déclaré «disque-choc» par Jazzman-Jazz Magazine. En fin de soirée le guitariste Sylvain Luc et Stefano Di Battista se produiront en quartet, et en guise de starters, dès 18h30, c’est le groupe de funk marseillais Accoules Sax qui ouvrira les festivités suivi du Trio d’En Bas. Le lendemain, dès 18h00, le violoncelliste marseillais Emmanuel Cremer, artiste en résidence pour le festival, donnera sa création avec son 4tet, suivi de la fanfare TaharTag’L. Le trio du contrebassiste Renaud Garcia-Fons, avec accordéon et vibraphone, emboîtera le pas avant de laisser la place au dernier concert de la soirée avec le trio Paolo Fresu, Omar Sosa et Trilok Gurtu. Le 5 à 18h00, la musique continue avec le duo Petite Vengeance de Raphaël Quenehen et Jérémie Piazza, et la fanfare Impérial Kikiristan qui saura nous faire patienter avant l’entrée en scène du pianiste Brad Mehldau avec ses amis

Trio d’en bas © Koke Leiva

C

de toujours Larry Grenadier et Jeff Ballard : un moment à ne pas manquer. La clôture avec le Magnetic Ensemble nous permettra de célébrer le meilleur musicien de l’année 2014, le talentueux Thomas de Pourquery, avec les compositions d’Antonin Leymarie. La programmation artistique de ce festival, qui favorise depuis ses débuts un jazz actuel, contemporain, invite des musiciens de formations

régionales et d’envergure internationale, tous portés par une passion qu’il sauront, à n’en pas douter, vous faire partager ! DAN WARZY les 3,4 et 5 Juillet Domaine de Fontblanche, Vitrolles 04 42 79 63 60 www.charliejazzfestival.com


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Vingt d’honneur pour les Suds epuis 1996, tous les ans pendant une semaine en juillet, un festival atypique s’installe dans la plus grande commune de France. Au fil des ans, Les Suds à Arles sont devenus une référence internationale dans la pléthorique liste des festivals de musiques du monde. Mais l’événement arlésien propose bien plus que de la musique. Il invite à observer l’actualité du monde et la créativité de ses cultures pour inventer cette mondialisation positive où les diversités nous rendent semblables parce qu’humains. «Faisant fi de la marchandisation de la culture et de la peur sclérosante de l’Autre, nous pensons que ces musiques de la mondialité ouvrent la porte à d’autres manières d’exister au monde», indique la directrice Marie-José Justamond, inspirée par la pensée d’Albert Jacquard, Edgar Morin ou Edouard Glissant. Pour cette 20e édition, l’équipe des Suds a construit une programmation fidèle à sa ligne de conduite fondatrice : l’exigence artistique au service d’une fête populaire. Une nouvelle fois, artistes de renommée internationale, créations inédites et talents en émergence alterneront sur les différentes scènes de la ville dont le patrimoine et l’étendue exceptionnels sont judicieusement valorisés. Sensible aux mouvements qui questionnent le monde, le festival consacre plusieurs de ces grandes soirées à des artistes venus de pays en résistance ou en effervescence. Les Cubains de l’Orquesta Buena Vista Social Club dont Omara Portuondo et Eliades Ochoa, en tournée d’adieu, feront danser le théâtre antique. Suivront une soirée franco-maghrébine avec le Tunisien Dhafer Youssef, en première partie de la création Taziri de Titi Robin et Mehdi Nassouli. Les rebelles et l’espoir de l’Europe avec deux femmes engagées et deux grandes voix, la Grecque Maria Farantoùri et l’Espagnole Rocío Márquez. L’âme tsigane du légendaire Taraf de Haidouk et l’énergie africaine de Vaudou Game composeront un plateau particulièrement festif. Dans l’atmosphère intimiste des «Moments précieux» de la cour de l’Archevêché, on prendra plaisir à écouter Lena Chamamyan (Arménie-Syrie) ; Kintsugi, la création de Gaspar Claus, Serge Teyssot Gay et Kakushin Nishihara ; Sirventès, le dernier projet de

La Dame Blanche © VictorDelfim

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Tamazgha

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Manu Théron avec Youssef Hbeisch et Grégory Dargent ; le Réunionnais Zanmari Baré, héritier de Danyèl Waro. Ambiance électrique et post-industrielle en revanche, avec les «Nuits des forges» aux anciens ateliers SNCF, en compagnie de Batida, Imhotep ou encore la Dame Blanche. Dans l’esprit de «la Nuit» qui fut blanche en 2013 dans le cadre de la capitale européenne de la culture, les Suds, ont imaginé cette fois «la Nuit des fleuves», pour un 14 juillet qui verra converger sur les quais de nombreux publics, musiciens professionnels et amateurs vers un dialogue entre le delta du Rhône et celui du Mississippi, avec, entre autres, les Marseillais Raphaël Imbert et Pierlau Bertolino trio. Sans oublier les salons de musique, les scènes en ville, les siestes musicales, les ballades au fil du Rhône, les nombreux stages, débats et projections.

e festival de musiques Berbères et Populaires d’Afrique du nord soufflera cette année ses 10 bougies ! Pour célébrer l’anniversaire, Sud Culture, qui produit l’événement, embarquera le public pour un voyage musical unique, où tradition se mêlera aux métissages actuels. Toujours avec la volonté de rendre la culture accessible à tous ; le festival Tamazgha rassemble petits et grands, musiciens professionnels et amateurs, mélomanes ou amoureux des rythmes ensoleillés. Des nombreux musiciens seront présents : Idebbalen issu d’une tradition musicale très ancienne, Irhaven, groupe de musique chaoui, Moh Small, Kassia, Ali Ferhati… L’événement se déroulera sur trois soirées, du 25 au 27 juin, durant lewwsquelles les musiques berbères seront à l’honneur ; en mêlant mémoire des traditions et métissages actuels, professionnels et amateurs, elles vous feront découvrir les traditions d’Afrique du Nord.

THOMAS DALICANTE

LAURE LAVERGNE

Les Suds du 13 au 19 juillet Arles 04 90 96 06 27 www.suds-arles.com

Festival Tamazgha du 25 au 27 juin Centre culturel Mirabeau, Théâtre de la Sucrière, Marseille www.festivaltamazgha.org


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Mimi

Aki Onda © Sandrine Marc

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u 1er au 5 juillet, le très attendu festival MIMI, organisé par l’association l’A.M.I, Aide aux Musiques Innovatrices, fêtera sa 30e édition. Si la majeure partie des concerts ont lieu comme chaque année à l’Hôpital Caroline, sur l’Île du Frioul, la première soirée se déroulera à l’U. Percut (rue Sainte à Marseille) avec les marseillais du groupe Les Statonells et la pop électro de l’homme-orchestre arlésien Henri

Festival MIMI du 1er au 5 juillet U.Percut, Île du Frioul, Marseille 04 95 04 95 50 www.amicentre.biz

Zikour Zac sa 18 édition, le festival Zik Zac voit

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Marquet alias Delta Sònic. Dès le lendemain, sur le Frioul, place aux concerts d’envergure et aux créations du festival : celle du musicien, compositeur et artiste plasticien japonais Aki Onda qui élabore-là un travail d’architecture sonore, puis celle d’Andy Saunders et Chris Cutler qui reprennent leur projet Himmel entre drone, kautrock et cosmic jazz. Avant et après, le lieu résonnera au rythme des Percussions de Strasbourg ; du rock minimaliste et disco-punk du groupe Joujou ; de la musique minimaliste et envoûtante du cultissime Young Marble Giants ; de l’électro chaabi du trio égyptien E.E.K. feat Islam Chipsy ; de la création franco-nipponne Gunkanjima (navire du guerre en japonais) qui réunit 6 musiciens dans une transe quasi mystique, du noise à l’électroacoustique ; et de l’intrigante performance des japonais Acid Mothers Temple & The Cosmic Inferno. À noter enfin qu’aura lieu, le 27 juin, une soirée gratuite sur le toit terrasse de La Friche pour fêter les 30 ans de l’association et le lancement du Festival ! Do.M.

Morgan & The Messengers, la gouaille facétieuse de Karimouche… et le mythique groupe Zebda qui clôturera le festival. Cette année encore, musique et arts graphiques se mélangeront : le street art est toujours à l’honneur, grâce à l’équipe de Ka divers qui invitera des graffeurs de la région à exprimer leur art sur de gigantesques toiles durant les trois soirs. Pendant les installations du festival, des ateliers d’initiation au graff seront aussi proposés aux enfants sur le site du théâtre de Verdure. Les œuvres planteront le décor du festival. Graffeurs ou musiciens en herbe, les jeunes auront de quoi éveiller leurs esprits créatifs. Les élèves de Mohamed Bellal, portés par le projet «Tamtam’x» feront résonner leurs percussions à chaque début de soirée. Nouveauté de cette année 2015 : Un camping ouvert aux festivaliers, de quoi profiter pleinement de l’ambiance du festival sans se soucier du retour. L.L.

e

encore plus grand et revêt une casquette innovatrice. Du 16 au 18 juillet, le quartier du Jas-de-Bouffan à Aix-en-Provence sera le théâtre d’une programmation pop et éclectique. Comme lors de chaque édition, ce sont de grands noms de la musique qui ont répondu présents. Au programme, entre autres, de ces 3 soirées : Biga Ranx et son reggae/hip hop, Hollie Cook et sa voix saveur tropicale, la bossa suave de Flavia Coelho, le roots reggae anglais de Paul

Awa Ly © Fabiola Torres

Zik Zac festival du 16 au 18 juillet Jas de Bouffan, Aix-en-Provence 04 42 63 10 11 www.zikzac.fr

Rock Island

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epuis 2012, le festival Rock Island attise les premiers élans festifs de l’été et réveille les autochtones en quête de sons acidulés. Faute de lieux et de subventions nécessaires, Rock Island n’avait pas trouvé écho dans la cité phocéenne en 2014 mais revient en force en 2015. Festival de musiques pop rock à consonance électronique, il s’habille cette année aux couleurs plus locales en dévoilant une programmation pour le moins marseillaise avec notamment la présence de Virgomusic et des DJ de la Dame Noire aux platines, collectifs qui remuent les fêtards et autres afficionados de musiques électroniques tout au long de l’année. Beaucoup d’autres seront présents, comme le quatuor niçois Hyphen Hyphen qui fait le buzz depuis quelques années, la jeune parisienne Fiona Walden à la voix suave, le trio anglais We have Band, le quatuor Isaac Delusion, les new yorkais The Martinez Brothers… La musique, qui a le pouvoir de traverser les frontières, offrira au public un large choix de sets venus d’ici et d’ailleurs pour un voyage aux mille saveurs. LAURE LAVERGNE

Rock Island Festival les 2,3 et 4 juillet Fort d’Entrecasteaux, Marseille www.marseille-rockisland.fr

Sun festival our sa 2 édition, le Vitrolles Sun festival

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ne change pas de recette. Accès sur le développement durable, la cohésion sociale et le vivre ensemble, le festival du soleil posera à nouveau sa bonne humeur au parc de Fontblanche à Vitrolles. Le vendredi et samedi, venez danser, entre autres, avec le Massilia Sound System dont la notoriété n’est plus à faire, Eve Dahan, jeune djette qui ambiance les soirées du sud, et redécouvrir des artistes internationaux tels que Nneka et sa voix de velours, Siska, chanteuse du Watcha Clan aux influences néo soul/ trip hop, FM Laeti et ses compositions aux rythmes inspirés du rock et de la soul-pop des années 70… Le dimanche, les minots seront à l’honneur lors du Sun Day, une garden party électro avec un Dj Set entièrement réalisé par leurs petites mains et des ateliers arty, natures et écologiques qui leur seront destinés tout au long de la journée. De quoi laisser les parents se prélasser dans l’herbe du parc, bercés par les bonnes ondes musicales. L.L. Vitrolles Sun festival du 10 au 12 juillet Parc de Fontblanche, Vitrolles www.vitrolles-sunfestival.com


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Nuits d’Istres

Dub Station

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our démarrer l’été en rythme, le Dub Station festival revient cette année après deux éditions pleines de succès. Installé au domaine de Fontblanche à Vitrolles, le sound system prendra racine au milieu de la nature où chaleur et bonne humeur se mélangeront à la mouvance d’un bon reggae remixé. Au Dub Station la musique est avant tout une expérience physique et collective, de partages et de communions. Deux jours durant, des artistes de la scène internationale et amoureux de la scène provençale enchaîneront mixages musicaux et partages de nouveaux échos. À l’affiche, entre autres, Kanka, un des pionniers de la scène dub françaises, Black board System, le célèbre sound sytem, Martin Campbell, The dub Machinist et la douce voix Sénégalaise de Sista Daba. Un festival haut en couleurs qui éveille les sens. L.L.

epuis les années 90, le festival musical d’Istres a vu défiler de grands artistes tels que Lou Reed, James Brown, Michel Petrucciani ou encore The blues Brothers. Après une année off en 2014, les nuits d’Istres reviennent en force pour trois soirées, du 7 au 9 juillet, dans le magnifique parc du Pavillon Grignan. Asaf Avidan ouvre les festivités : l’auteur-compositeur-interprète israélien à la voix si particulière sera précédé en première partie par Charles Parsi, harminiciste hors du commun aux sons jazz et blues. Le lendemain c’est le groupe de musique électro-rock français Shaka Ponk qui fera vibrer les arbres centenaires du parc, après le folk trash de la jeune et énergique Lisa LeBlanc. Julien Clerc, qui n’est plus à présenter, clôturera les Nuits en foulant pour la seconde fois la scène du Pavillon Grignan ! LAURE LAVERGNE

Orange Blossom © Adrien Selbert

Nuits Métis

Asaf Avidan © Ojoz

les 7, 8 et 9 juillet Pavillon Grignan, Istres Office de Tourisme 04 42 81 76 00 www.istres.fr

F

idèle à son esprit festif, citoyen et populaire, la 22e édition des Nuits Métis promeut la diversité culturelle. Avec un regard particulièrement inquiet mais combatif sur l’actualité. «La réalité de la situation de la vie culturelle en France nous empêche d’être joyeux. La montée des idées extrémistes, du repli sur soi et la frénétique course vers la croissance nous fait peur. Pour faire face, il est urgent de résister, de rêver

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près le succès de son premier spectacle La lesbienne invisible, la comédienne Océanerosemarie revient sur scène avec un nouveau seule-en-scène dans lequel elle fustige les BBB, entendez par là les bons Blancs bobos qui pensent avoir le monopole du bon goût, l’adoption de chatons, le racisme de gauche… Bref, son humour est toujours aussi savoureux, et ses

Nuits Métis du 17 au 20 juin Plan d’Eau de Saint-Suspi, Miramas 04 90 58 98 09 www.nuits-metis.org

tacles aussi précis, surtout quand elle s’attaque au politiquement correct et aux préjugés ! Do.M le 30 juin Espace Julien, Marseille 04 91 24 34 10 www.espace-julien.com

Sons du Lub’…

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our le troisième éposode des Sons du Lub’, l’association Arc en Sol poursuit sa visite du territoire Sud-Luberon et se pose à Lauris pour une soirée de musique précédée d’un parcours musical dans les rues du village dès 17h. C’est Sam Karpiena et sa singulière poésie qui lancera les festivités, et cèdera sa place à Piers Faccini (guitare, voix) et Vincent Segal (violoncelle). Ces deux amis de longue date mêlent dans leur album Songs of time lost compositions originales et reprises. En fin de soirée, un Mapping vidéo de Denis Cartet et Alain Nicolas sera projeté sur les arcades du Château : une évocation poétique, en 3D, de la lune. Do.M Les Sons du Lub’ partent en live ! le 4 juillet Les terrasses du château, Lauris 06 95 13 97 73 www.arcensolasso.fr Piers Faccini et Vincent Segal © Payram

Chatons violents

et de partager pour inventer un autre lendemain», indique Marc Ambrogiani, directeur artistique du festival. Au programme, musique, cirque, arts plastiques, village associatif. Après le mercredi après-midi consacré au jeune public, les trois soirées suivantes accueillent, parmi les 90 artistes de différentes nationalités, Maryam Saleh & Zeid Hamdan (Egypte-Liban), Cumbia All Stars (Pérou) ou encore Orange Blossom (FranceEgypte). Mais aussi des artistes de l’hexagone pourtant d’un autre monde : Lo’Jo, Mekanik Kantatik, Chinese Man… T.D.

Dub Station festival les 26 et 27 juin Domaine de Fontblanche, Vitrolles www.musicalriot.org


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Be With Me Now ! À

peine quitte-t-on le wagon d’Aix en juin (voir Zib’85), luxueux prélude à l’une des plus importantes manifestations d’art lyrique dans la ville de Cézanne et Milhaud, qu’on se rue des quatre coins du monde vers le grand train du 67e Festival d’Aixen-Provence ! Bernard Foccroulle reste fidèle à une programmation variée et riche, invitant de fabuleux chanteurs, metteurs en scène, des orchestres prestigieux et leurs chefs, où l’incontournable dévotion à Mozart flirte avec un goût avoué pour le baroque, où des univers modernes et classiques, la création et la tradition s’interrogent dans une féerie convoquant les arts musicaux, visuels, chorégraphiques... Incontournable !

Haendel et Mozart

La première affiche se suffit à elle-même ! Elle réunit dans une nouvelle production du Festival Patricia Petibon et Philippe Jaroussky, le chœur MusicAerterna et le Freiburger Barockorchester dirigés par Andrea Marcon ! Katie Mitchell met en scène un chef-d’œuvre baroque de Haendel, récit tragique d’une magicienne prise à son propre jeu de séduction et du désir : Alcina. On garde les mêmes phalanges instrumentale et vocale, cette fois dirigés par Jérémie Rhorer, pour une autre nouvelle production, preuve s’il en est qu’on ne chante plus Mozart comme hier ! C’est un singspiel en allemand, créé une cinquantaine d’année après Alcina que met en scène Martin Kusej, une turquerie, modèle du genre à l’époque classique, chantée par un plateau expert : L’Enlèvement au Sérail.

Britten retrouvé

Quelle belle idée de reprendre la production du Songe d’une nuit d’été de Britten, mémorable succès de l’édition 1991 signée Robert Carsen, avec Sandrine Piau et l’Orchestre National de Lyon sous la baguette de Kazushi Ono !

Persephone © Teatro réal

On retrouve ces musiciens dirigés par Teodor Currentzis pour une soirée où le metteur en scène Peter Sellars réunit deux œuvres et deux héroïnes recluses : Iolanta de Tchaïkovski et Perséphone de Stravinski (poème d’André Gide). Les voix rares d’Ekaterina Scherbachenko et Dominique Blanc se répondent et des danseurs cambodgiens apportent une touche originale à cette production madrilène.

Créations...

On ne manque pas l’opéra pour six voix de femmes Svabda (Mariage) de la compositrice serbe Ana Sokolovitc. On assiste à une première européenne par l’Académie du Festival ! C’est aussi Simon Rattel qui dirige l’Orchestre des Jeunes de la Méditerranée, des solistes du London Symphony Orchestra et près de 300 choristes amateurs pour une fresque, en français, d’après le mythe de Thésée : Le Monstre du Labyrinthe de Jonathan Dove (commande du festival).

La danse est à l’affiche avec Josette Baïz et la Compagnie Grenade pour Spectres, avec le Quatuor Béla, ainsi qu’un voyage à travers l’Europe et quatre siècles de musique, en suivant Tamino grâce à un dispositif vidéo : Be With Me Now ! Les orchestres et chœurs présents au festival, auxquels on ajoute Musicatreize, Abdel Rahman el Bacha ou le Quatuor Modigliani donnent aussi des concerts prestigieux... JACQUES FRESCHEL

Festival d’Aix-en-Provence du 2 au 21 juillet 0820 922 923 www.festival-aix.com

Voix romantiques et baroques L

a Valette-du-Var, depuis onze ans, propose aux amateurs de musique classique (et des chœurs en particulier) d’entendre des grands opus du répertoire dans le cadre magnifique du Domaine du Coudon : sa nature, son panorama exceptionnel sur la ville... au crépuscule… lorsque les premières notes s’élèvent et tournent dans l’air du soir... Deux belles soirées en plein air sont à l’affiche : La Camerata Vocale est ancrée en Dracénie, elle est aujourd’hui dirigée par une jeune cheffe formée à Toulon : Adèle Pons. Elle interprète un répertoire de Romances autour de la musique allemande pour chœur et piano (Alcibiade Minel) de Haydn, Schumann, Schubert ou Brahms. Ce sont ensuite l’Orchestre de Chambre de Toulon et du Var et les Chœurs Polyphoniques de l’Union

Professionnels et amateurs sont placés sous la direction du chanteur Philippe Médail qui interprètent également une Petite messe de Haydn et un Concerto de Vivaldi. À découvrir dans le Var ! J.F.

USAM © X-D.R

Sportive et Artistique de la Marine (USAM) Toulon qui offrent un sommet de la musique sacrée baroque : le Gloria de Vivaldi, avec pour solistes Marie-France Pellier (soprano) et Eliette Guenez (mezzo-soprano).

11es Nuits du Coudon les 6 et 7 juillet Concerts à 21h15 La Valette-du-Var 04 94 23 62 06 www.lavalette83.fr


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Triomphes populaires

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omme chaque été aux Chorégies d’Orange, les spectacles grandioses s’articulent autour de deux grands opéras du répertoire. Le premier offre trois représentations de l’opéra le plus joué et apprécié de par le monde : Carmen de Georges Bizet. Imaginez Kate Aldrich dans le rôle-titre et Inva Mula (Micaëla), rien d’autre que le roi des ténors Jonas Kaufmann (Don José) et Kyle Keteslen (Escamillo) : un plateau royal accompagné par l’Orchestre Philharmonique de Radio France, les Chœurs des Opéras d’Angers-Nantes, Avignon et Nice réunis sous la baguette de Mikko Franck dans une mise en scène à en mettre plein les yeux de Louis Désiré ! De quoi remplir les 8 000 places des antiques gradins (les 8, 11 et 14 juil) ! La phalange radiophonique étant sur place, elle retrouve son chef Myung Whun Chung, star des maestros, pour un programme de musique française : Berlioz (Carnaval Romain-Ouverture), SaintSaëns (Symphonie n°3) et Poulenc (Concerto pour deux pianos) et encore deux stars : Martha Argerich et Nicholas Angelich (10 juil). Mais c’est à un récital lyrique d’opéras italiens qu’on goûte dès l’ouverture avec Ekaterina Siurina (soprano) et Joseph Calleja (ténor), l’Orchestre National de Lyon dirigés par Enrique Mazzola (7 juil). On attend début août pour apprécier Roberto Alagna dans Il Trovatore de Verdi en compagnie de Marie-Nicole Lemieux (Azucena) ou Nicolas Testé (Ferrando), découvrir aussi au pied du mur des artistes tels que Hui He (Leonora) ou George Petean (Conte di Luna). C’est Charles Roubaud qui met en scène et Bertrand De Billy qui dirige l’Orchestre National de France,

© Philippe Gromelle / © Stéphane Alili

les Chœurs d’Avignon, Nice et Toulon (1er et 4 août). Les musiciens se joignent au pianiste Cédric Tiberghien pour le Concerto en sol de Ravel, avant la Symphonie du Nouveau monde de Dvorak (3 août). On apprécie aussi la plus belle basse française actuelle : Nicolas Courjal en récital avec piano (1er août à 18h-Cour St-Louis).

Chorégies d’Orange du 7 juillet au 4 août 04 90 34 24 24 www.choregies.fr

JACQUES FRESCHEL

Au milieu des chèvres ! E

n huit éditions, le festival Musique à la Ferme à Lançon-Provence a acquis sa place dans les manifestations estivales (l’association propose aussi des affiches hors festival : L’Heure Musicale du Roulage). Outre le fait que son directeur artistique, le pianiste Jérémie Honnoré, s’entoure d’artistes de choix, le lieu lui-même des concerts est singulier puisque c’est dans sa propre ferme familiale, dans une chevrière, à côté et en présence de chèvres donc, qu’on goûte à des pièces classiques du répertoire chambriste destiné à l’origine, il faut le dire, aux salons aristo-bourgeois. Et le paradoxe vaut d’être vécu ! Les amateurs y trouvent leur compte, car cet écrin rural possède une âme indéniable : il s’y passe quelque chose ! C’est dans la convivialité qu’on est accueillis, dégustant aux répétitions publiques gratuites aux concerts ou spectacles, des «en-cas champêtres à base de fromages... de chèvre !». Durant une semaine, on entend Amandine Favier, Célimène Daudet, Sébastien Hurtaud, Pamela Hurtado dans Beethoven,

musical pour enfants est proposé autour des Fables de la Fontaine (Médiathèque) et Le Carnaval des Animaux de Saint-Saëns s’invite dans cet espace à sa mesure. Cet été ...? Passez par Lançon ! J.F.

Musique à la Ferme du 15 au 22 juillet Lançon-Provence 04 90 42 74 76 http://musiquealaferme. jimdo.com © Hubert Guillermain

Mendelssohn ou Brahms... et une pléiade d’artistes à tous les instruments, pour des programmes qui affichent aussi des pièces contemporaines. Un spectacle


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Festival de guitare de Lambesc 2 015 : 15e édition du Festival international de guitare de Lambesc, une des manifestations qui a su devenir un temps fort des prémices de l’été, dans le bel écrin du Château Pontet Bagatelle dont l’adresse classique, route de Lambesc à Pelissanne (D15), est toujours poétiquement complétée comme une carte marine par ses latitude et longitude (43°39’6, 24’’N, 5°14’22, 59’’E), sans doute pour préciser que le monde a rendez-vous là, sous les grands platanes de la cour du vieux mas provençal, avec la compagnie des musiques d’Albéniz, Granados, Villa-Lobos, Barrios, Moreno-Torroba, Mompou, Hadjidakis, Théodorakis, Bogdanovic, Chopin… Le directeur artistique du festival, Jorge Cardoso, auteur de nombreux ouvrages de musicologie, évoquera les origines européennes (époque baroque) de la musique populaire de l’Amérique Latine, avec un concert sur instruments d’époque. Il convie à la fête de grands noms de la guitare, moult fois primés au plus haut niveau, et à la carrière internationale. On aura ainsi le bonheur d’entendre, pour la Pologne, Wiktoria Szubelak (diplômée de l’université de musique Chopin à Varsovie), l’Italie, Agostino Valente qui a travaillé entre autres avec Nino Rota, l’Uruguay et Portugal, Ricardo Barcelo, musicologue, professeur et compositeur, la Grèce, Antigoni Goni, premier prix de la Guitar Fundation of Americas, l’Espagne, Fernando Espi, «l’un des meilleurs guitaristes espagnols» selon la presse, et bien sûr pour l’Argentine, Jorge Cardoso. Outre l’indéniable qualité des instrumentistes, l’atmosphère des spectacles en plein

Jorge Cardoso © Festival Lambesc

air ajoute sa magie. On a le loisir de bavarder avec les artistes, de se rafraîchir, de visiter une petite exposition d’art sous tente, de découvrir les albums quasi introuvables des guitaristes invités. Chaque année, ce festival est une réussite, grâce aussi à l’accueil chaleureux et familial des membres de l’association Aguira, Charles (président de l’association) et Annie Balduzzi, ainsi que le dévouement éclairé de tous les bénévoles.

Festival international de guitare de Lambesc du 28 juin au 4 juillet Château Pontet Bagatelle, Lambesc 06 09 58 47 13 www.festivalguitare-lambesc.com

MARYVONNE COLOMBANI

Escapades musicales A

vec en exergue la définition du terme escapade, «action d’échapper un certain temps aux obligations de la vie quotidienne», le ton est donné. Les Escapades proposées par Alfred Martin, Président de l’Association Odyssée-Théâtre Durance et Elodie Presles, Directrice du Théâtre Durance, vont enchanter le début de l’été en sortant résolument du cadre traditionnel du théâtre pour s’égayer aux alentours, choisissant ici une ferme, là un stade municipal. Le rythme et l’élan dominent cette année avec la musique du monde portée avec bonheur par des groupes dont la jeunesse d’esprit et l’énergie savent transporter tous les publics. Le 3 juil, on verra ainsi à la Ferme de Font Robert l’inclassable et inventive Armelle Ita, chanteuse, clarinettiste, pianiste qui, aux côtés de Mélody Debono, choriste et improvisatrice et de Nicolas Paradis, véritable homme-orchestre, compose un univers poétique entre les jeux vocaux africains de Zap Mama, les envolées jazziques de Nina Simone et le trip hop acoustique de Portishead. Puis, Lo Còr de la Plana, mené par Manu Théron, le célèbre et charismatique groupe de la Plaine (à Marseille), ces «trobaires marselhés» qui se nourrissent de multiples influences (musique concrète, Ramones,

pour les deux concerts du soir : Mulêketú Bands’Show qui vous emporte de l’Amérique du sud, aux Balkans, au rythme de mélodies survoltées, et The Afrorockerz qui chaloupe entre l’afrobeat pur et le rock planant mâtiné de jazz et d’électro. Groove, funky, tribal, rock, soul… l’été danse ! M.C.

Armelle ita - Photo live © Clement Puig

Bartók, Velvet underground…) joueront du verbe et des sons avec une virtuosité vivifiante. Le lendemain aura un cadre sportif, dans le stade municipal de Peyruis, avec le groupe Bloco Mulêketú (attention à 16h) et ses infatigables percussions, avant la respiration de Partitions Bambous qui vous éblouira par sa légèreté et la précision de trois acrobates qui souplement voyagent sur une étrange structure de bambous géants (17h30). On retourne à la Ferme

Les Escapades les 3 et 4 juillet Château-Arnoux/StAuban, Peyruis 04 92 64 27 34 www.theatredurance.fr


35 ans de pianos ! D

ans le petit village de La Roque d’Anthéron est née l’idée, il y a 35 ans, de créer un festival de piano. La famille Onoratini (aujourd’hui Michel en assure la présidence), une foule de bénévoles et René Martin (son inusable directeur artistique et magicien feu-follet) ont bâti, d’édition en édition, un monument artistique ! C’est sans doute, et ce depuis longtemps, le plus beau festival de piano au monde, accueillant les plus grands pianistes et une foule de mélomanes ou amateurs de musique classique, mais aussi jazz, dans une douzaine de lieux rivalisant de charme, des Bouches-du-Rhône aux portes du Vaucluse. Une multitude de concerts à diverses heures sont accessibles à toutes les bourses et l’on n’est jamais déçu lorsqu’on vient «à La Roque» !

Fête de la Musique

Le festival fête donc durant un mois, son 35e anniversaire, mais propose un rendez-vous initial pour la Fête de la Musique. Le 21 juin, des petits auditoriums sont installés pour des concerts gratuits sur les places du village et l’on déambule de 11h30 à 18h pour écouter, non seulement des pianistes de renom, mais aussi des amateurs éclairés, «de 7 à 77 ans», étudiants pianistes, dans des programmes validés par la direction du festival, pour le plaisir de tous. Pour la 35e édition, une exposition rétrospective des 34 éditions antérieures est ouverte aux heures d’ouverture du Parc du Château de Florans, accessible sur présentation du billet de concert.

Piano pur !

On veut en cet anniversaire, revenir, le plus possible, à l’esprit d’origine : le «piano pur». Même si la musique de chambre, les orchestres ou le clavecin sont à l’affiche, plus que jamais ce sont les Steinway ou Renaud Capuçon © Jean-François Leclercq

autres Bösendorfer qui règnent en maîtres, transcendés par les doigts des plus grands virtuoses, mythes vivants on jeunes pousses, révélations, stars de demain, grands interprètes français et étrangers... Impossible de tous les citer ! Le poumon du festival, la grande scène du Parc du Château de Florans coiffée de son immense conque acoustique, accueille des concerts à 18h et 21h ou 21h30, au rythme aussi de mémorables «Nuits du piano». Mais on file aussi par les petites routes du Lubéron vers Lourmarin, Cucuron, Gordes et ses magnifiques terrasses, l’abbaye de Sylvacane, ou vers le Pays d’Aix son Grand Théâtre, le Musée Granet, l’église St-Jean de Malte... et vers Rognes et ses superbes Carrières, Mimet en son château, l’église de Lambesc... jusqu’à l’orée de la Camargue au bords de l’Étang des Aulnes fleuri de lauriers roses.

Des noms ?

Allons-y ! Matsuev, Berezovsky, Bar-Shaï, Neuburger, Luisada, Korobeinikov, Jude, Guy, Billaut, Désert, Strosser, Braley, Hirose, Diluka, Pennetier, Chaplin, Trifonov, Geniet, El Bacha, Buniatishvili, Queffélec, Laloum, Angelichv Goerner, Lugansky, Le Guay, Fray, Vinnitskaya, Grosvenorv Kadouch, Sokolov, Tharaud, Volodos... rabelaisien... et j’en passe ! Sans oublier le jazz de Trotignon ou Corea, le violon de Capuçon, le clavecin d’Hantaï, les Wanderer et les Modigliani, l’alto de Berthaud... À vos marques ! JACQUES FRESCHEL

Festival International de La Roque d’Anthéron du 24 juillet au 21 août 04 42 50 51 15 www.festival-piano.com


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Aller plus haut ! s’agrègent rencontres, veillées et balades... À découvrir pour prendre de la hauteur cet été !

Seddiki et Chemirani © Alexandre Chevillard

JACQUES FRESCHEL

Festival de Chaillol du 18 juillet au 12 août 04 92 50 13 90 www.festivaldechaillol.com

Coulisses marseillaises

Rumolino, le Kerman Mandolin Quartet... poursuit avec des «Traditions populaires et folk music» ou les Variations Goldberg en trio, un «Cabinet de curiosité musicale et philosophique» ou la «Musique comme parole prophétique» par l’ensemble Cbarré, Nadav Lev «Entre Paris et Tel-Aviv», la «Voix du violoncelle» de Sonia Wieder-Atherton, «L’alchimie du Swing» de Place Miollis, la «Musique de chambre française» par le Trio Karénine, le Quatuor Bela ou Françoise Atlan pour des tours de chant poétique, séfarade... Toute une magnifique partition où

Renaissance vocale Jacques Mauger © X-D.R

est une programmation riche, bien pensée, variée, balayant les styles et les époques, de la musique classique à celles du monde ou du jazz, que nous propose depuis bientôt vingt ans l’équipe du Festival de Chaillol sous la houlette de son directeur artistique Michaël Dian. Il faut aller dans les villages du Gapençais, les vallées du Champsaur, des Buëch ou de l’Avance, Valgaudemar, Tallard, Barcilonette, l’Embrunais ou le Pays Sisteronais, faire son choix dans la trentaine de concerts proposés, pour réaliser à quel point le magnifique travail «pédagogique» entrepris par l’Espace Culturel de Chaillol porte ses fruits dans les HautesAlpes ! Les fidèles se pressent autour de musiciens choisis pour leurs qualités humaines autant qu’artistiques : ils ont tous «quelque chose à dire et partager» et les affiches réservent souvent, de surcroît, une place non-négligeable à la musique d’aujourd’hui. On commence dès le 18 juillet par «l’Argentine savante, populaire et électronique» du Trio K/D/M, «la tradition méditerranéenne et latino américaine revisitées» par Seddiki/Chemirami/

© Les Voix Animées

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n 2015, Les Voix Animées dédient leur cycle de concerts Entre pierres et mer à Tomas Luis de Victoria, compositeur majeur de la renaissance espagnole, et à une œuvre sacrée ou s’exprime un profond mysticisme mis au service de la Contre-Réforme catholique issue du Concile de Trente. Quel écrin plus parfait peut-on rêver que celui de l’abbaye du Thoronet pour rendre grâce à la lumière du contrepoint, l’alchimie des voix... L’excellent ensemble de cinq voix a capella, dirigé par Luc Caodou, interprète sa Messe «O magnum mystérium» et des motets vénitien de Peter Philips. Au programme également une création vocale de Tomas Bordalejo à découvrir ! J.F. Mysterium le 4 juillet à 21h Abbaye du Thoronet Suite du cycle Entre pierres et mer fin août et mi-septembre 06 51 63 51 65 www.lesvoixanimees.com

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a 3e Rencontre Nationale de l’Association des Trombonistes Français se déroule sur trois jours cette année à Marseille. Elle est organisée par l’Ensemble Massilia Trombone en coproduction avec la Ville de Marseille et le CNRR Pierre Barbizet. Plus de 100 artistes sont invités pour des concerts à entrée libre, conférences, master classes, expositions. Le temps fort est un Concert de Gala avec l’Orchestre Philharmonique de Marseille (dir. Gaspard Sanchis), le 4 juillet à l’Auditorium du Pharo. On y entend des grands trombonistes : Jacques Mauger dans le Concerto pour trombone d’Henri Tomasi et Joël Vaïsse dans une création mondiale de Thierry Lancino : Pinochio’s Nose. Un instrument à découvrir sous ses multiples profils : de l’ancienne sacqueboute à la coulisse classique, ses glissandos funk, jazz ou salsa... ! En entrée libre. J.F. Festival Méditerranéen du Trombone les 3, 4 et 5 juillet Marseille www.festivalmediterraneedutrombone.com



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La chaleur du Grand Nord En ouvrant la scène aux habitants des «Quartiers Nord», François Cervantes a plongé le théâtre au coeur du réel, et de sa poésie

A

u Merlan, réenchanter le réel n’est pas une mince affaire : l’urbanisme, les difficultés sociales, la violence et le délaissement concourent à enfoncer les habitants dans le renoncement, plutôt qu’à les emmener vers un théâtre partagé. Mais en venant habiter les lieux, la Cie L’Entreprise a établi un lien véritable, sensible sur scène. Ils sont quarante. Jeunes et vieux, amateurs et professionnels, danseurs, rappeurs, comédiens, dans la salle et sur scène. Tous ont des choses importantes à montrer, et cette Épopée du Grand Nord est ponctuée de petites histoires. Celle de cette dame qui n’a plus la force de faire les courses, cette autre qui a peur du quartier où elle a toujours vécu, celui-là, qui voudrait voyager jusqu’au Vieux-Port... Le sentiment de vivre au fond désenchanté du monde se colore du talent d’une breakeuse, de deux boxeurs, d’un slameur. Et puis de l’épopée écrite par François Cervantes. C’est la fable d’un dealer international qui vient reprendre en main le quartier en terrorisant les politiciens locaux et la police, impliqués dans les trafics : l’intrigue policière fait penser au polar marseillais, au cinéma engagé italien. Car François Cervantes aime le romanesque ! D’ailleurs cette Main Basse sur un quartier se double d’une quête intime des origines qui amène l’épopée

© Tadeusz Paczula

vers une tragédie oedipienne. Enquête sur la réalité sociale, intrigue politico-policière et recherche de filiation s’entremêlent autour de la douleur des mères. Un groupe de femmes renouvelle le choeur de pleureuses antiques, et des anecdotes empruntées au réel viennent savoureusement poétiser la fiction : un chien qui prend le bus tout seul chaque jour, un homme qui vit dans une tour avec son cheval, les talons qui cassent sur les trottoirs défoncés, tout cela imbrique le réel et la fiction, et répond à la distanciation des comédiens qui commentent les scènes, guident les personnages, font traverser le plateau à l’auteur hagard... À aucun

moment le travail avec les amateurs ne se double d’un renoncement à l’exigence formelle : le théâtre est là, grâce à l’implication de tous les participants, et à la générosité de L’Entreprise. AGNÈS FRESCHEL

L’Épopée du Grand Nord s’est jouée du 3 au 7 juin au Théâtre du Merlan

Voyage en pays étrange L

e Purgatoire est un pays où les âmes mortes errent en peine, au coeur de souvenirs effacés qui surgissent par instant en flots incontrôlés... Traverser cette contrée des morts en invité curieux a quelque chose d’un plaisir orphique, mêlé de terreur. Comme il se doit, ce Purgatoire est imaginé par une Trinité divine : Marion Coutris à l’écriture, Alain Aubin à la musique, Serge Noyelle à la mise en scène, assistée de Marco Quesada (musique), Catherine Oliveira (costumes) et... Dante Alighieri qu’ils ont dû croiser entre Enfer et Paradis. Pour figurer les ombres, près de 150 corps psalmodiant, murmurant, criant, questionnant, bruissant de mots et de chants, en des espaces clos d’une beauté fulgurante : des femmes en cage vous accueillent, invitant à les rejoindre comme des corbeaux croassants, des hommes posent des questions sidérantes, une femme assise se prend pour une reine adulée, des hommes chantent sur des chaises envolées, un groupe de réfugiés avance vers la lumière, un homme vous sert à boire des potions colorées, un musicien fait sortir des sons de baguettes de glace, un homme en robe chante en soprano pour une femme en marcel qui lui répond des phrases belles et insensées, des spectres errent, des convives

© Max Minniti

s’irritent autour d’une tête de cochon en gelée bleue qui oscille... Chaque spectateur traverse les tableaux à son gré, s’asseyant sur les transats pour une longue pause ou fuyant rapidement les scènes trop glaçantes. Les maquillages blancs, les coiffures étagées, les costumes noirs et blancs et pourpres faits de dentelles subtiles et de tissus anciens, répondent aux harmonies gauchies de chants enfantins qui semblent ressassés dans des mémoires défaillantes et tous les

sons se mêlent, surgissant d’une pièce à l’autre comme des échos récurrents. On aimerait s’attarder encore, mieux écouter les mots parfois perdus dans le brouhaha qui résonne, rester longtemps, assis, dans chaque pièce, et revenir, mais à l’issue du voyage le gardien de la vie nous a offert du sel et ramené à l’espérance. Alors on part boire un verre, frustré de ne pas applaudir... et de ne pas avoir la place de citer ici tous les artistes marseillais, professionnels ou amateurs, que l’on a reconnus au passage ! A.F.

Le Purgatoire, création du Théâtre Nono, est joué les vendredis et samedis jusqu’au 20 juin 04 91 75 64 59 www.theatre-nono.com


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Poétique de la sieste C

ette charmante habitude de la sieste, dédiée à la sixième heure du jour se perd. Le rythme effréné de la société libérale de consommation y est sans doute pour beaucoup… Ce temps volé au jour, contrairement au sommeil nocturne, ne semble plus légitime. Et pourtant ! La compagnie L’Insomnante vous convertit à cette parenthèse en lui accordant un parfum enchanté. Lits blancs agrémentés de la mousseline légère d’une moustiquaire, grands arbres qui offrent un ciel mouvant et feuillu. C’est l’aprèsmidi et l’on s’étend, on ferme les yeux ou pas, on se laisse bercer par les bruits lointains qu’une discrète bande sonore distille, piano improvisé, sonorités assourdies de la ville, chants d’oiseaux… suivant les diverses formules, vous pouvez rester ainsi dans le calme recueillement du sommeil, demander une discrète berceuse au violoncelle, cordes effleurées, juste pour vous, ou un texte murmuré à votre chevet, ou encore rêver, et participer à un atelier d’écriture à la fin duquel les mots sont partagés, savourés, et accordent leurs diverses sensibilités à l’instant. Inclassables et délicieux, ces instants sont orchestrés par Francis Coulaud, Aline Maclet, Claire Ruffin, Catherine Exbrayat, Camille Boitel, David Bouvard, Manon

Hôtel à ciel ouvert © Maryvonne Colombani

Trompowsky et Vincent Beaume qui photographie les lits et leurs dormeurs un peu partout… Au 3bisf, l’Hôtel à ciel ouvert des après-midi a enchanté tous les «siesteurs». Prendre son temps, quel bonheur !

Hôtel à ciel ouvert s’est joué au 3bisf, à Aix-enProvence, le 28 mai

MARYVONNE COLOMBANI

Didascalies & Co a vingt ans ! G

rande soirée festive et familiale pour célébrer la sortie du livre Pour un long et bel itinéraire d’Anne Roche-Descosse, à l’occasion de l’anniversaire de la compagnie fondée par Renaud Marie Leblanc. Vingt ans, ce n’est pas le début de la fin, mais la fin du début, et le début de la suite ! Avec trois formes courtes et des installations photos et vidéos, la soirée évoque la cohérence d’un parcours de vingt ans, la fidélité à des auteurs, des collaborateurs et des comédiens complices, tout en témoignant de la vitalité des projets à venir. D’abord une lecture chorale des Tulipes de Noëlle Renaude : des amis se retrouvent, tous ont apporté une tulipe sauf une. Cet infime décalage dérange le bel ordonnancement d’une réunion qui se déconstruit, et se reconstruit, entre la violence des normes du groupe, le roulement creux des conversations, et le besoin vital de s’y retrouver, pourtant, ensemble. Puis un récital où Renaud Marie Leblanc accompagne le pianiste Pierre Laik et la soprano Larenka Hoareau, et livre de façon émouvante une intimité profonde à la musique. Enfin, Pierre est un Panda, de Christophe Pellet : deux enfants s’initient aux ambiguïtés de l’amitié, de l’amour et de l’identité sexuelle, et échappent aux assignations contradictoires des adultes que théorisent les lois du genre et du couple par l’indétermination onirique des jeux de zombies et d’un couple de Panda qui par miracle se reproduit (voir www.journalzibeline.fr). En quelques heures, on aura survolé ce qui fait la qualité du travail de

Tulipes © Thomas Fourneau

la compagnie, à travers les grandes scènes comme les petites formes, avec des acteurs professionnels comme avec des ateliers d’amateurs : une intelligence du texte qui a la précision métronomique du classicisme pour saisir ce que nous avons de plus actuel, une continuité musicale où le texte dans les mains des acteurs comme la partition sur le pupitre sonnent juste, un talent esthétique qui en quelques détails construit un univers visuel. Et pour ne rien oublier, la soirée s’achève avec une spectaculaire

improvisation de Renaud Marie Leblanc sur un cadavre exquis réalisé par les participants : plus vibrant qu’une tulipe, et plus drôle aussi ! AUDE FANLO

Pour un long et bel itinéraire, a eu lieu le 13 juin, au Théâtre de la Joliette


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Liberté extérieure

O

n annonçait un festival Tous dehors (enfin) ! plus circassien que les années précédentes, et tel a bien été le cas. La ville de Gap a accueilli une quinzaine de compagnies aux univers variés, allant du plus spectaculaire (Le mur de la mort du Collectif MDLM, vrombissantes mécaniques motorisées), au plus humoristique (les contorsions bon enfant et néanmoins impressionnantes des sœurs Presques Siamoises). Le public, venu parfois de loin, a pris grand plaisir à découvrir le Cirque Inextrémiste, trois très beaux garçons manipulant un tractopelle, des planches de chantier et quelques bouteilles de gaz... preuve que l’on peut vraiment s’amuser avec n’importe quoi. Un contexte original voyant éclore une chaleureuse relation avec (et entre) les artistes, l’un aux jambes handicapées, transmettant force et confiance à la machine, les deux autres suffisamment délurés (et rassurants) pour embarquer une jolie mamie en équilibre instable, lors d’un tour de piste final mémorable. Autre trio charmant, celui de la compagnie 3 x Rien, en Roue libre derrière la cathédrale, avec clarinette, grosse caisse et hélicon pour rythmer leur spectacle très professionnel : acrobaties fluides, bonne coordination et musique agréable. On s’est pressé aussi pour voir L’homme cornu, prestation impeccable d’un mentaliste flamand, Kurt Demey, et de son contrebassiste. Sur les airs inspirés de Joris Vanvinckenroye, et dans le cadre somptueux du Domaine de Charance, il était aisé de glisser dans le sillage d’un prophète menteur, qui «nourrit son ego avec

Décor de L-homme cornu © G.C.

vos stupéfactions», et prêche la vérité comme «faite des mensonges les plus plausibles, les plus acceptables». Mais le meilleur moment du festival fut sans doute aucun la déambulation sonore concoctée par le Begat Theater venu de Gréoux-les-Bains. Leurs Histoires cachées vous embarquent par les oreilles à la suite de quatre personnages aux histoires entrecroisées, en vous donnant pour consigne «soyez invisibles», mais «rappelez-vous que la ville est réelle. Les maisons, et surtout les voitures ne sont pas un décor». Conseil éminemment utile, tant le participant envoûté se projette de l’un à l’autre, dans une humanité chaque fois singulière, émouvante et terrible. On avouera un petit

faible pour le vieil auteur misanthrope, constatant lucidement que «comme tout le monde, il est son propre héros», sur les pas de qui on a goûté sans vergogne le plaisir d’être autrui, une heure seulement. GAËLLE CLOAREC

Tous dehors (enfin) ! a eu lieu du 29 au 31 mai à Gap

Figaro majeur !

C’

est à Istres, au bord de l’étang de l’Olivier, que la Comp. Marius a posé ses gradins. En plein air donc, avec vent coulis et moustiques à foison, passage de badauds à proximité et soleil couchant. Pour la troupe belge, jouer en extérieur tient d’une philosophie de vie, une condition sine qua none pour faire éclore et s’épanouir leurs créations, très souvent issues de textes du répertoire français. Après Pagnol, c’est rien moins que deux pièces de Beaumarchais qu’ils ont traduites et adaptées à leur sauce, Le Barbier de Séville et Le Mariage de Figaro, agrémentées de petits emprunts faits aux opéras de Rossini et Mozart… Au cœur de la pièce, Figaro mène le jeu, «maniganceur d’intrigues» à nul autre pareil, qui passe à la moulinette de ses combines l’histoire et ses protagonistes. La relecture des deux pièces, jouées l’une après l’autre pour n’en faire qu’une (un repas est

© P. Leïva - Scènes et Cinés

toutefois servi par leurs soins entre les deux), se prête magnifiquement au feuilletonnage des intrigues qui se croisent, et qui permet de suivre l’évolution d’un Figaro en rébellion contre la noblesse, qui terminera l’histoire marié, enfin !, mais aussi en pleine crise existentielle. Les six comédiens flamands, tous

éblouissants (Koen Van Impe, Waas Gramser, Kris Van Trier, Maaike Neuville, Evelien Bosmans et Frank Dierens), interprètent 17 rôles sans que jamais le rythme (et quel rythme !) ne varie ; ils portent, indistinctement de leur sexe, les rôles féminins ou masculins sans que les travestissements ne les fassent tomber dans

le ridicule ou la parodie, et jouent de la langue française avec une gourmandise communicative. Tout en restant très fidèles au texte, ils sèment ça et là de fréquentes et courtes digressions hilarantes qui dynamisent le jeu et le potentiel comique des caractères, avec, en sous-texte, un humour grivois qui ne gâche rien… Des décors aux costumes (superbes), de l’accueil du public «invité» aux repas ou collations qu’ils servent tout en discutant avec chacun… les spectacles de la Comp. Marius sont toujours une expérience en soi. Et s’ils bousculent les codes, c’est pour mieux servir un théâtre bien vivant, infiniment humain. DOMINIQUE MARÇON

Figaro ! a été joué du 4 au 7 juin sur l’esplanade harles de Gaulle à Istres



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La légende de Néo A

vec Néo ! Marins-bergers de Provence il y a 8000 ans, le Musée de la Préhistoire de Quinson offre une exposition remarquable tant pour son érudition accessible que pour la beauté de sa scénographie. Les objets archéologiques sont à la fois remarquablement documentés et mis en scène avec une poétique justesse. L’exposition temporaire, qui ne fait pas doublon avec la permanente (qu’elle va rejoindre en décembre), permet d’aborder la période néolithique selon trois axes, maritime, terrestre et symbolique, et retrace en parallèle le parcours de l’archéologue Jean Courtin qui est à la fois le donateur de ce fonds (il est responsable, entre autres, d’une grande partie des fouilles de Provence) et commissaire de l’exposition aux côtés de Caroline Luzi, spécialiste du néolithique et son ancienne élève. La Provence recèle un gisement préhistorique exceptionnel, «et tout n’a pas été encore mis à jour !» selon Jean Courtin. On découvre la vie quotidienne de nos ancêtres néolithiques, qui ont essaimé depuis le «croissant fertile» oriental. Sédentaires, certes, agriculteurs, remodelant le territoire, avec des vestiges touchants, de graines, d’outils, barates primitives, pots à faisselle (ils ont inventé aussi le fromage et le beurre !), cuillères de bois d’un design à rendre jaloux nos contemporains, et leurs traces d’usure, qui évoquent les gestes familiers…, mais aussi construisant

du moins la transmission des techniques, des matières premières, comme la précieuse obsidienne. On se spécialise, on invente, on crée, l’artisanat naît ici, avec la pierre polie en enseigne. On décore au cardial les vases, le souci esthétique vient compléter l’utilité des choses. Anthropophages ces ancêtres ? Certes, mais toujours avec une portée symbolique… et c’est ainsi que débute la métaphysique… MARYVONNE COLOMBANI

Néo ! Marins-bergers de Provence il y a 8000 ans jusqu’au 30 novembre Musée de la Préhistoire des Gorges du Verdon, Quinson 04 92 74 09 59 www.museeprehistoire.com

© Jean Courtin

des bateaux, marins hors pair, en Méditerranée ou sur les fleuves, et voyageurs. Et c’est sans doute le point essentiel et novateur dans l’approche de cette période : des cartes soulignent, grâce au repérage des objets, la mobilité effarante des populations, ou

À la source des sens L

a septième édition du festival Les Eauditives gagne en amplitude, reliant par la source intarissable des mots et de leurs sens, des lieux majeurs et symboliques, musée des Gueules Rouges de Tourves, parvis de l’abbaye de La Celle, musée d’Art Contemporain de Châteauvert, et sa visite éclairante par Micheline Simon. Particularité majeure, organisée par la maison d’édition Plaine Page (80 livres en 20 ans), dirigée par Éric Blanco et Claudie Lenzi, elle voit publiées chaque année des œuvres de poètes contemporains qui participent à cette fête en se livrant au jeu des tables rondes, et en offrant des lectures de leurs textes, véritables performances. Nicole Peyrafitte en écho aux lieux s’enduit le visage de la terre de bauxite récoltée au musée de Tourves, Dani Orviz livre une véritable imagerie sonore de ses textes, Cécile Richard dessine et piétine avec humour une coupe d’arbre, Pauline Catherinot prend le ton humoristique de la conteuse, Cédric Lerible accorde aux giratoires une quête de sens au point d’y passer la nuit, Dominique Massaut slame, Patrick Sirot joue des mots toujours assis, les étudiants de l’ÉADTPM se mettent en jeu avec une inventive passion, enfin, Antoine Simon clôt les Eauditives par un bain poétique et lustral dans les eaux de l’Argens… Les ouvrages prennent alors un autre ton, un autre sens, s’éclairent d’intonations, de rythmes que la disposition des mots et des lettres ne laissait pas pressentir… Des conférences ouvrent d’autres perspectives : avec Gaz de schistes et fracturation

Roula Safar Châteauvert © M.C

hydraulique, Georges Olivari, Directeur de la Maison Régionale de l’Eau, démontre à quel point la méthode d’extraction est polluante, définitivement néfaste à notre échelle, et ce, même avec les «sondages» qui usent de techniques identiques à celles de l’extraction ; tandis que Sylvie Nèves et Jean-Pierre Bobillot offrent une conférence lecture sur Les Congiés de Jean Bodel, adieux au monde du lépreux. Ajoutez encore les deux superbes concerts de l’érudite et

sensible musicienne Roula Safar… une parenthèse enchantée… M.C.

Les Eauditives ont eu lieu du 29 au 31 mai à Tourves, La Celle et Châteauvert


Le monde à savourer ! L

e festival de Gardanne, Arts et Festins du monde, a animé du 22 au 23 mai l’artère centrale de la ville, du Boulevard Carnot au Cours de la République, de chants, de danses, d’odeurs. On y vient chaque année, on compare, on retrouve, on se laisse aller à de nouvelles découvertes, il fait beau, ces journées printanières ont un parfum d’été. Plaisir de baguenauder, d’admirer les étals où tissus multicolores, senteurs orientales, jouxtent les pierres astrales, ou les bijoux que l’on fabrique devant vous. L’invitation au voyage se poursuit de façon gustative, on ne sait plus où donner de la papille entre les spécialités venues de Chine, de Provence, du Mexique, du Liban, de Madagascar, de Tahiti, de l’Algérie, de Palestine… Là encore de nombreux étals invitent à une participation solidaire, comme celle de Sunu Africa qui joue des percussions en dessert et use des bénéfices pour des actions humanitaires au Sénégal… Sur la place de l’église, l’espace devient totalement solidaire et équitable avec la participation d’associations diverses, dont l’actif Collectif ROM de Gardanne, ou Mettre la main à la graine avec Samia Tiaibia qui égrène les récits autour du

couscous, ou encore l’Atelier de calligraphie avec Fatima-Zohra Khalaf qui initie aux beautés des différents styles de lettres. Autre peinture traditionnelle, celle pratiquée par Nathalie Guimbal, ethnologue de l’association Pour une terre unie qui maquille grands et petits de couleurs de fête. On découvre en famille des instruments du monde, on apprend à danser des danses d’ici et d’ailleurs, les musiciens improvisent, se joignent au groupe enjoué… avant d’observer les étoiles des différents cieux au planétarium itinérant. Puis on se laisse porter par les groupes qui déambulent ou investissent la scène, fanfare afro-cubaine, Tanga Libre, Calypso Samba, flamenco d’Abiyelar et Paca Santiago, Mariachis la Fanfare Corazon de Mexico, chanson-rock aux accents Yiddish de Bekar et Les imposteurs, enfin, The Wanton Bishops, avec leur blues mâtiné d’Orient. La version 2015 est un cocktail encore très réussi ! MARYVONNE COLOMBANI

Le festival Arts et Festins du monde a eu lieu du 22 au 23 mai à Gardanne

Arts et festins, Gardanne © Christian Pirozzelli


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Nova over the clock L’

Espace Nova de Velaux fonde son premier festival des Arts numériques, Overclock, sur quatre jours en collaboration avec le Collectif Le Nomade Village qui apporte sa verve imaginative à cette salle dont le dynamisme n’est plus à démontrer. Expositions, performances, conférences, musiques, apéros citoyens se sont succédé avec bonheur. Le public est impliqué totalement, que ce soit dans la forme même des propositions artistiques ou dans l’investissement sur l’année, avec vingt ateliers qui ont eu lieu in situ, expression corporelle, bricolage... On notait aussi le «vidéomaton», étrange objet qui enregistre les messages vidéos des personnes qui s’aventurent à le manipuler. Délicieuses d’inventivité, les villes rêvées par l’école élémentaire Jean Jaurès côtoient les vidéos éclectiques des artistes associés, formes mouvantes et poétiques des matériaux détériorés de Pierce Warnecke, curieuses scènes de métro figées dans un effet de 3D bluffant d’Adam Magyar, les paysages d’une précision étonnante de Yang Yongliang ou encore Rush Hour et Buenos Aires Inception Park de Fernando Livschitz. Fidèle à la thématique de l’année, Utopie et Liberté, ce tout jeune festival fourmille d’idées, avec sous-jacente, la question du rapport de l’homme à ces nouveaux espaces que dessine la technologie. La chorégraphie Des Corps de Ville en est le point d’orgue. Le public entre par la scène traditionnelle -joyeux bouleversement des codes-, et suit physiquement musique, vidéos, danses (des pros et des amateurs). Depuis la création en Italie (2010), le spectacle n’a cessé d’évoluer. «Des Corps de Ville

Overclock © Le Nomade Village

ne doit pas être considéré comme un spectacle, mais comme une performance toujours en questionnement, et un laboratoire dans lequel on avance tout le temps» souligne Philippe Domengie, son directeur artistique. «Des lignes de force perdurent : la quête de sens, le vide intersidéral de la société occidentale, qui le fuit par un appétit démesuré. La plongée vers le numérique en est exemplaire. Pas de désespoir ! L’humanité résiste malgré tout.» Une bulle poétique et fragile où

la fragmentation est le signe d’un tout à construire ? MARYVONNE COLOMBANI

Le Festival Overclock a été donné du 27 au 30 mai, à l’Espace Nova de Velaux

Une Friche à la mode berlinoise M

algré une météo capricieuse et sous ses allures berlinoises, La Friche a attiré petits et grands le temps d’un week-end. Curieux, ou amateurs de performances artistiques, ils étaient nombreux à braver la pluie pour découvrir un lieu transformé, où création se mêlait joliment avec singularité. Du vendredi au dimanche, les prestations se sont enchaînées et ont rencontré un vif succès. En fin d’après midi, Eva Meyer-Kelle dans Death is Certain a dompté des cerises, à la peau un peu dure, pour offrir une conception des plus imagées où l’art visuel s’apparente à un spectacle vivant. Plus tard, la danse d’Ahmed Soura a envouté le public avec son spectacle Hauptrolle. En partageant son histoire et son talent, le chorégraphe a laissé parler son corps, dans un tourbillon d’émotions et de tourments. En incarnant des figures du théâtre allemand, Ahmed Soura fait jaillir sa poésie et des souvenirs de son pays, le Burkina Faso. Ensuite la compagnie Martine Pisani et Oscar Loeser a bâti à la perfection une mise en abyme à travers laquelle les images significatives se succèdent, Grandeur Nature. Le spectateur, captivé par la singularité de la prestation,

Hauptrolle, Christoph Winkler © Heiko Marquardt - frischefotos.de

voyage et fait parcourir son regard au gré du rythme de la projection. Durant 48 heure, La Friche habillée à la mode berlinoise a fait émerger des concepts dont nos voisins allemands ont le secret. Le spectateur déambulait de lieux en lieux en quête de nouveauté. En chemin, ils ont été nombreux à se perdre dans le théâtre vivant appelé Transit 48, un petit kiosque où s’achète

l’utile et l’agréable, le pratique et le superflu. C’était aussi un endroit où il faisait bon vivre, où le partage était de mise. Pour clôturer le samedi, des DJ berlinois ont pris possession du Cabaret Aléatoire et ont fait vibrer une foule férue de musiques électroniques. Berlin, berceau de la techno a déchainé les passions musicales le temps d’une nuit, et s’est éteint au petit matin en laissant un beau souvenir à une Friche pleine des promesses du jour. LAURE LAVERGNE

48h Chrono a eu lieu à La Friche la Belle de Mai, à Marseille, du 12 au 14 juin



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Musique des Sphères «N

Qui rira le dernier ? e dernier ouvrage de Verdi est une comédie, une farce en forme d’ultime éclat de rire, d’après Shakespeare et ses Joyeuses commères de Windsor, et c’est cet «ovni» dans l’histoire de l’opéra qui clôt avec succès la saison de l’Opéra de Marseille, réalisant, sous la houlette de son directeur général Maurice Xiberras, un sans-faute en 2014-2015 (de La Gioconda au Hollandais volant en passant par les Caprices de Marianne, l’Élixir d’amour ou Tosca...). À cela deux raisons : tout d’abord une formidable scénographie, originale, colorée et fantastique, peinture à l’instar des fables animalières imaginée par Jean-Louis Grinda. Au milieu de livres immenses (ouvrages liés au sujet), servant de murs mouvants, de décors (Rudy Sabounghi) ménageant des espaces de jeu, s’agite une basse-cour : les personnages y endossent des costumes (Jorge Jara Guarda) de coq, poules et chats, âne et autres volailles... C’est très bien vu, car, ne nous y trompons pas, sous ce masque futile, à l’image des Fables de La Fontaine, se jouent les plus grandes vérités ou morales... ce que confirmera la Fugue finale : quoi de plus sérieux que le rire ! Ensuite un plateau vocal

Falstaff © Christian Dresse

L

remarquable, emmené par les stars Patricia Ciofi et Jean-François Lapointe (couple Ford), un rôle-titre pleinement assumé vocalement et scéniquement (Nicola Alaimo), un séduisant ténor Eneo Scala (Fenton)... et une pépite vocale, étoile lyrique à l’ascension fulgurante : Sabine Devieilhe. Dans la fosse, l’Orchestre de l’Opéra de Marseille dessine une palette toute de netteté, un costume sonore continu que tisse avec attention son chef Lawrence Foster. Une

belle réussite avant le départ de la phalange phocéenne vers le théâtre antique d’Orange (le 19 juin, Musique en fête. Retransmission en direct sur France 3 et sur grand écran, Place Bargemont à Marseille). JACQUES FRESCHEL

Falstaff de Verdi a été représenté à l’Opéra de Marseille du 4 au 14 juin

© Agnès Mellon

londe lumineuse, l’actrice vedette du futur film (dans le film) tourné sur un singe géant du nom de Kong, passe un bout d’essai : elle lève les yeux vers le monstre, irréel, et se fige dans une posture d’effroi, étouffant un cri que bientôt elle ne réprimera plus, glaçant, horrible dans le suraigu : Ahhrrrrrr !! Ce sera le seul ! Dès lors, sur la quasi totalité des scènes du chef-d’œuvre cinématographique de 1933 King Kong, la musique imaginée par le compositeur Raoul Lay prend le relais, enrobe les dialogues sous-titrés, restitue à la toile l’esprit du muet irriguant l’un des premiers grands succès du cinéma parlant. Du coup, les images, ses effets spéciaux (qui

MARYVONNE COLOMBANI

Rêve d’étoiles a été joué le 28 mai à l’auditorium Campra, Aix-en-Provence, dans le cadre de Musique en Questions

Vieille toile relookée ! B

otre planète n’est pas bien grande, un tour de terre, c’est une heure trente… le sol défile lentement, comme dans un avion de ligne. Si on passe au-dessus de Paris, on voit très bien la Place de l’Étoile, et les aérodromes, puis c’est la même chose à Pékin…» Jean-Loup Chrétien, pionnier de la conquête spatiale, sourit, rend l’exploit simple. L’aviation et l’aéronautique, alors que la vocation première c’est la musique, l’orgue. «Mon rêve serait d’aller sur mars avec un orgue.» De ses trois séjours dans l’espace, il rapporte des films fascinants de beauté et d’humour aussi et conjugue ses deux passions, l’espace et l’orgue, dans un concert atypique où la musique des Sphères chère à Pythagore est enfin donnée à entendre. Transcription fidèle de la signature des planètes et du soleil par des ingénieurs de la Nasa. JeanLoup Chrétien, accompagné de deux complices, Jean-Pierre Rolland et Jean-Philippe Le Trévou, nous accorde au monde, décryptant les mots éthérés de Jupiter ou du soleil. Quel est le lien entre l’espace et la musique ? «C’est qu’il n’y a pas de limites» (Clara Kastler).

demeurent encore aujourd’hui spectaculaires !) prennent une dimension poétique originale, une nouvelle profondeur... La musique, dissonante, s’avère à la fois complexe dans sa facture virtuose (formidable exécution instrumentale de l’Ensemble Télémaque dirigé par le compositeur !) et claire dans son architecture formelle, en particulier pour ce qui concerne les parties chorales et percussives exécutées par les élèves et professeurs des collèges Henri Barnier, Darius Milhaud, des écoles La Castellane et Saint-Henri Rabelais, formés toute l’année à la réalisation d’un magnifique projet artistique et pédagogique. C’est une fascination pour les yeux et les oreilles ! Les

scènes de sacrifice tribal, marches d’approche, la violence des combats dans la nature préhistorique (relayés par une musique électronique mixée en direct) ou dans les rues de New-York, jusqu’à la chute finale de Kong du haut de l’Empire State Building, se déroulent aux rythmes de chorals polyphoniques étranges, sinueux, danses rituelles, chromatismes s’affaissant dans l’esprit du madrigal... C’est admirablement pensé et, néanmoins, accessible à tous. Un pari réussi ! J.F Le ciné-concert King Kong a été représenté les 9 et 10 juin au Cinéma l’Alhambra à Marseille


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Les Brigandes du Château-d’If E

vacillent au son d’un violon dingue (Jean-Christophe Selmi), bel et fier Argentin tanguant à leur côté, rient d’un «jobastre» de trompettiste (Gérard Ocello) soufflant à l’envi des rengaines populaires... et tout le monde danse au fil des arrangements soigneusement réalisés par Ludovic Selmi (piano) qui joue en trio jazzy avec Rémy Chaillan (batterie) et Éric Chalan (contrebasse). Tout un répertoire attachant porté par des musiciens de haut-vol !

Brigandes du Château d’If © Dan Warzy

lles font le buzz les deux «Brigandes», en faisant entonner des refrains d’opérettes et chansons marseillaises à une foule réunie, comme mue par un élan spontané, le 5 juin, sur les gradins du Théâtre Silvain ! Le duo de divas occupe la scène avec une gaîté bon enfant transmise spontanément à toute l’assistance. De fait, un enthousiasme simple et naturel plane sur la soirée... Quelle belle surprise de constater que l’on est encore nombreux à être attachés à une tradition populaire, ses fameux standards, de La Canebière au Petit cabanon... mais qui recèle aussi de jolies pépites oubliées ! C’est à cela que s’attellent Muriel Tomao et Brigitte Peyré, deux belles artistes maîtrisant, sans tralala lyrique, leur soprano naturel pour donner vie et gouaille à une

JACQUES FRESCHEL

vingtaine de saynètes en musique (mise en scène Olivier Pauls). On vit et vibre avec elles aux rythmes du tango de music-hall, d’un balèti de la Belle de Mai et ses Don Juan

de quartier, des histoires d’amour à la candeur méditerranéenne, tendres ou drôles... Elles sont bien entourées ces filles naturelles de Vincent Scotto ! «Miette» et «Angèle»

L’événement Les Voix de l’Alcazar s’est joué au Théâtre Silvain à Marseille le 5 juin


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Ciné-concert au Corbusier

Ali a les yeux bleus

The tiger’s coat de Roy Clements © Dial Film Company

Ali a les yeux bleus de Claudio Giovannesi © Bellissima Films, Giovanni Attianese - Fiippo Calandrelli

Le 3 juillet, sur le toit terrasse de la Cité Radieuse, l’Association des Habitants de l’Unité d’Habitation Le Corbusier et Monodose proposent un ciné-concert en plein air. Rendez-vous à partir de 20h pour la projection, à la nuit tombée, du film The tiger’s coat (Etats-Unis, 1920) de Roy Clements, inspiré du roman d’Elizabeth Dejeans, avec l’étonnante Tina Modotti, ouvrière en Italie, actrice aux EtatsUnis, photographe au Mexique et révolutionnaire en Europe, familière de Frida Khalo ou Neruda. Le duo Catherine Vincent propose une forme originale de ciné-concert en chantant les dialogues des acteurs de façon savoureuse.

Le 28 juin à 18h30 à l’Eden Théâtre, Art et Essai Lumière propose Ali a les yeux bleus de Claudio Giovannesi : Nader, jeune romain d’origine égyptienne, tente de se rebeller contre les valeurs de sa famille. Tiraillé entre le poids de ses origines et son désir d’intégration, il va affronter la solitude et la peur et affirmer sa propre identité. La projection sera suivie d’un buffet convivial dans la cour de L’Eden. Art et Essai Lumière, La Ciotat 06 64 85 96 40 www.artetessailumiere.fr

Cité radieuse, Marseille www.marseille-citeradieuse.org www.catherinevincent.org

Françoise Romand

Ciné-concert à Bonnieux

Vice Vertu et Vice Versa de Françoise Romand © Jem Productions

Ça tourne à Villapaz de Maria Isabel Ospina © Le-loKal Production

Les Lumières de l’Eden proposent une rencontre avec Françoise Romand, réalisatrice, scénariste, productrice, née à Marseille. Le 25 juin à 20h30, Vice Vertu et Vice Versa (1996), l’histoire de deux femmes que tout sépare… Le 27 à 20h15, projection de Passé Composé (1996) avec Feodor Atkine et Anny Romand : un homme à la recherche douloureuse de son passé rencontre une femme amnésique qui fuit le sien. En présence de Françoise et Anny Romand.

L’association Camera Lucida, laboratoire d’expérimentation culturelle et citoyenne, qui œuvre dans le pays d’Apt, fête ses cinq ans. La MLEC de Bonnieux accueille le 18 juillet à partir de 18h30 une soirée ciné-concert. Apéro et repas colombien encadrent la projection d’un film et un concert. Ça tourne à Villapaz de Maria Isabel Ospina, est un documentaire sur Victor que son téléphone portable transforme en cinéaste avec la participation des habitants de son village afrocolombien du Cauca. Colombienne aussi la cumbia, musique à découvrir dans le concert du groupe Valientes gracias !

Cinéma Eden Théâtre, La Ciotat 04 42 83 89 05 www.edencinemalaciotat.com

Camera Lucida, Bonnieux 09 83 07 40 72 www.cameralucida84.com



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E la nave va ! développé au FID Lab 2014. Un écran consacré au portrait, «exercice d’admiration» dont celui qu’a réalisé Caroline Champetier sur Bruno Nuytten, Nuytten/Film, ou celui de l’intellectuel congolais Mudimbe, Les Mots et les choses de Mudimbe par JeanPierre Bekolo ou encore celui de Bernard Maris par Richard Brouillette. Les Sentiers, la traditionnelle programmation concoctée pour les plus jeunes par Fotokino avec Aniki Bóbó, premier long d’Oliveira et La Visite de Pipo Delbono.

Et aussi… Aniki Bóbó de Manoel de Oliveira © Lisboa Filme

2 500 films venus de 111 pays : la tâche de Jean-Pierre Rhem et de son équipe n’a pas dû être facile pour cette 26e édition du FIDMarseille ! C’est le 2 juin qu’a été dévoilée la sélection des 130 films que le public pourra découvrir du 30 juin au 6 juillet. Un rendez-vous important dans le paysage cinématographique, un moment «entre l’art et la vie, dans les échanges, les surprises, les bouleversements que la vie, la confrontation des cultures et des arts nous proposent» (P.O.L.). C’est par le film du Roumain Corneliu Porumboiu, Le Trésor, Prix Un Certain Talent à Cannes, que s’ouvrira le Festival le 30 juin à 20h30 au Silo.

En compétition

Le jury de la compétition internationale présidé par la Libanaise Rasha Salti devra choisir parmi 15 films, fictions et documentaires, venus de 17 pays. Trois premiers films : Home du Syrien Rafat alkazout évoque les difficultés du travail dans un pays en guerre ; Field Niggas du photographe Khalif Allah les bavures policières récentes aux USA ; et Trama e o circulo, des Portugais Mariana Caló et Francisco Queimadela, nous fera réfléchir sur le statut de l’image. Méditations aussi sur l’existence, avec Al centro de la tierra de l’Argentin Daniel Rosenfeld ou sur le paradoxe de la physique quantique avec Entrelazado du Colombien Riccardo Giacconi. Quand Krzystof Kaczmarek veut promouvoir le cinéma polonais en Islande, ce n’est pas gagné et il tourne Pawel and Wawel…

En compétition française, dont le jury est présidé par Thierry de Peretti, se trouveront 10 films. Le film-essai de Martin Vernet, Je me suis mis en marche, fait le portrait de Frank Venaille à partir de son poème La Descente de l’Escaut. Dans ma tête un rond point de Hassen Ferhani est un huis clos dans un abattoir. Le Divan du monde de Swen De Pauw nous fait passer une heure et demie dans le cabinet d’un psychiatre qui reçoit ses patients, originaires du quartier, du village voisin ou d’un autre continent. Et dans Le Juif de Lascaux, l’ancien critique de Libé, Louis Skorecki, évoque sa naissance dans un camp de concentration. Nicolas Boone, Claire Doyon, Gael Lepingle, Louidgi Beltrame reviennent au FID avec leurs nouveaux films, ainsi qu’Éléonore Saintagnan et Grégoire Motte avec un projet qu’ils avaient développé au FID Lab 2012, Les Bêtes sauvages.

Écrans parallèles

Frôler l’éternité, un hommage à Manoel de Oliveira, première grande rétrospective depuis la mort du cinéaste, permettra de voir plus de 20 films, de 1931 à 2014, de ce maître du cinéma portugais. Dehors la danse propose une douzaine de films, courts et longs «qui inventent une certaine façon de bouger», aussi bien Rabbit’s Moon de l’Américain Kenneth Anger (1972) que des films de jeunes cinéastes comme Ceremony tourné avec peu de moyens par Chloé Bourgès. Prolongation de l’exposition Futurs, un écran tourné vers la science fiction dont Parabellum de l’austro-argentin Lukas Valenta Rinner,

Comme chaque année des séances spéciales en partenariat avec différentes structures sont proposées dans différents lieux : par exemple le dernier film du cinéaste chilien Patricio Guzmán, Le Bouton de nacre au théâtre Silvain, et Les 1001 nuits du cinéaste portugais Miguel Gomes, en clôture. Sans oublier Doc Alliance, FIC Campus, Fid Lab et les quelques 150 invités… Comme d’habitude, les festivaliers vont avoir du mal à choisir et devront se munir de bonnes chaussures pour courir du MuCEM aux Variétés, de la Villa Méditerranée à la Maison de la Région ou au Théâtre Silvain ! Bon marathon ! ANNIE GAVA

FIDMarseille Festival International de Cinéma de Marseille du 30 juin au 6 juil 04 95 04 44 90 www.fidmarseille.org



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Cru 2015 À Cannes, la 33e édition de la manifestation CinÉcole a réservé une sélection de films riche et variée

S

i l’analogie sportive du marathon vient naturellement à l’esprit pour l’opération qui réunit, chaque année, dans la salle du Miramar à Cannes, avant l’annonce du Palmarès, près de 300 enseignants et étudiants pour 30 heures de cinéma non stop, c’est sur une métaphore œnologique que s’est construit le discours inaugural de cette 33e édition de CinÉcole.

Un savant équilibre

La commission composée d’enseignants de l’Académie de Nice, coorganisatrice de l’événement avec Cannes-cinéma, a présenté sa sélection de onze longs métrages et un court, issus de toutes les sections, comme autant de vins aux couleurs et bouquets différents. Et pour sortir de la blanche nuit sans gueule de bois, les programmateurs ont su maintenir un savant équilibre entre comédies fruitées, plus ou moins acidulées et œuvres graves, charpentées, longues en bouche comme le bouleversant Mia Madre de Nanni Moretti injustement oublié du Jury présidé par les frères Coen et projeté en clôture. On a pu voir cependant quelques œuvres primées comme Masaan de Neeraj Ghaywam, un des deux

Mustang de Deniz Gamse Ergüven

films indiens présents à Cannes cette année (Prix FIPRESCI). Regard sur les blocages de la société indienne à travers deux histoires d’amour impossibles. Ou encore The Lobster du réalisateur grec Yorgos Lanthimos (Prix du scénario). Une fable improbable sur le diktat du couple, où on retrouve Colin Farrell, en architecte un peu falot largué par sa compagne. 45 jours lui seront accordés pour trouver l’âme sœur sous peine d’être transformé en homard ! Il y a un grand hôtel où s’organisent les mariages et les mises à mort des célibataires,

une forêt où on chasse à coups de seringues les solitaires et, où ces derniers ont organisé une Résistance tout aussi fascisante que ce à quoi ils résistent. Ce film plutôt roublard, clairette plus que champagne, qui réunit entre autre stars, Rachel Weisz et Léa Seydoux, a laissé le public de CinÉcole assez perplexe. Autre film pétillant, le premier

Une Fatima parmi toutes les Fatima B

elle soirée d’ouverture de la Quinzaine des réalisateurs, reprise pour la 11e fois à l’Alhambra Ciné Marseille, comme l’a rappelé Aïcha Sif, présidente de la Commission culture et patrimoine à la Région qui soutient cette heureuse initiative, permettant aux Marseillais de voir les films présentés la semaine précédente à Cannes. William Benedetto a choisi de montrer, avant le huitième film de Philippe Faucon, le tout premier de l’acteur Reda Kateb, un court métrage touchant, qui lui ressemble : Pitchoune. Pitchoune, c’est le nom de la petite compagnie qu’ont montée deux frères, déguisés en clown et en cow-boy, qui gagnent leur vie en amusant les enfants. Ce jour-là, ils animent l’espace enfants d’un salon de camping et Karim, interprété par Reda Kateb, décide d’annoncer à son frère qu’il laisse tomber… Un film à la poésie décalée qui faisait partie des 10 courts métrages sélectionnés à la Quinzaine. Puis sur l’écran en gros plan, on a fait la connaissance de Fatima, une femme de ménage marocaine immigrée en France, qui accompagne sa

Fatima de Philippe Faucon © Pyramide films

fille ainée, Nesrine (Zita Henrot), pour la visite d’un appartement qu’elle louerait avec une amie. En les découvrant, la propriétaire affirme qu’elle a «oublié» les clés. Philippe Faucon n’en montre

pas plus. On a compris. La vie n’est pas facile pour Fatima (Soria Zeroual). D’autant plus qu’elle ne maîtrise pas bien le français. Ce


essai réussi de Mathieu Vadepied, La Vie en grand, une version «banlieue» des 400 coups de Truffaut (lire chronique sur www.journalzibeline.fr). Notons la présence affirmée de la Section ACID avec des crus aux robes plus sombres : De l’Ombre il y a de Nathan Nikolovitch et La Vanité de Lionel Baier que Xavier Leherpeur est venu défendre avec son enthousiasme débordant (lire chronique sur site).

Le palmarès cinécolien

Le Coup de Cœur du public est allé sans discussion à Mustang de la réalisatrice franco-turque Deniz Gamse Ergüven qui a obtenu par ailleurs le Label Europa Cinéma. Hymne au désir féminin qu’aucun mur ne pourra jamais retenir ! Suivi ex aequo dans les suffrages, par deux films de la Quinzaine des réalisateurs : Le tout nouveau Testament de Jaco Van Dormael (lire chronique www.journalzibeline.fr) et A Perfect Day de Fernando Léon de Aranoa au casting international : Tims Robbins, Mélanie Thierry, Olga Kurylenko, Fedj Stukan. Le cinéaste espagnol y dénonce avec un humour décapant l’absurdité de la guerre en suivant les tribulations tragi-comiques d’une équipe de travailleurs humanitaires à la fin de la guerre de Bosnie. Écrans Juniors ont présenté Le Monde de Nathan réalisé par Morgan Matthews, une jolie histoire sur la différence qui nous entraîne jusqu’en Chine pour des Olympiades de mathématiques ! CinÉcole au cœur des dispositifs éducatifs pour le cinéma parie sur la découverte et la transmission. Nul doute que ce cru 2015 aura atteint ces objectifs. ELISE PADOVANI

La manifestation CinÉcole s’est déroulée les 23 et 24 mai dans la salle du Miramar à Cannes

que lui reproche violemment la cadette, Souad (Kenza-Noah Aiche), adolescente rebelle qui rejette sa mère parce qu’elle est femme de ménage, parce qu’elle ne comprend rien, parce qu’elle est ce qu’elle est. Pourtant Fatima est prête à tous les sacrifices pour que ses filles ne mènent pas la même vie qu’elle. Nesrine a entamé des études de médecine et Fatima l’aide, la soutient, la réconforte. Avec Souad, le dialogue est difficile à tous les niveaux; elles ne parlent pas la même langue ! C’est aussi pour cela que Fatima prend des cours de français et écrit dans son cahier tout ce qu’elle ne parvient pas à dire. Des textes remplis de poésie et d’émotion. Des textes que Philippe Faucon a retranscrits du recueil Prière à la lune, des poèmes et pensées de Fatima Elayoubi, une «Fatima parmi toutes les Fatima». Au moment de la sortie de son film précédent La Désintégration, qui racontait la tentation de l’extrémisme, Philippe Faucon avait l’habitude de dire : «Un arbre qui tombe fait plus de bruit qu’une forêt qui pousse». Fatima est né de ce désir de raconter «la forêt qui pousse». Ce film épuré, intimiste, superbement interprété, et d’une infinie douceur est surtout un beau portrait de femme. ANNIE GAVA

La Quinzaine des Réalisateurs a eu lieu du 26 mai au 2 juin au Cinéma Alhambra à Marseille


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Sans stress, sans strass S

ans stress, sans strass, se déroulant dans le superbe site du Château des Mineurs, à Mandelieu la Napoule, à une heure de bus de la Croisette, Visions Sociales est une manifestation qui connaît un succès grandissant, bien mérité. Marrainée par Corinne Masiero (l’inoubliable Louise Wimmer de Cyril Mennegun), la 13e édition de ce festival de cinéma du CCAS proposait, à côté de sa programmation thématique sur les cinémas du Moyen Orient, une sélection internationale de films d’auteurs et six œuvres retenues dans les diverses sections de la grande manifestation cannoise. Le 21 mai, une salle comble découvrait ainsi Le Trésor, dernier film de Corneliu Porumboiu. Le réalisateur, caméra d’or en 2006 pour son décapant premier long métrage sur la Révolution roumaine, 12h08 à l’est de Bucarest, et prix du Jury en 2009 pour Policier, adjectif, dans la section Un certain regard, recevait deux jours plus tard, dans cette même section, le Prix Un certain talent des mains d’Isabella Rossellini. Fable d’une Roumanie postrévolutionnaire, qui traîne son Histoire, la fuit ou la retrouve au fond des trous. Une Roumanie où la classe moyenne, endettée, renoue avec la grande

Le trésor de Corneliu Porumboiu © Le Pacte

tradition de la débrouille parfois loufoque pour se sortir de situations difficiles mais dans laquelle on peut encore rêver de Robin des Bois, croire à l’entraide, au partage et à la possibilité de transmettre ces valeurs aux générations futures. Le scénario «based on a true story», met en scène deux voisins partis à la recherche d’un trésor caché dans le jardin d’une propriété familiale, autrefois réquisitionnée par les communistes, dans un village, à une heure de Bucarest, qui a vu passer les maîtres successifs du pays. Légende familiale qui nécessite une mise de fonds pour être vérifiée. L’aventure commence dans un embouteillage, le GPS en guide suprême, se poursuit avec la quête d’un détecteur de métaux, puis à coups de pelles de plus en plus rageuses, plusieurs mètres sous terre, fait une étape dans un commissariat de police avec un crocheteur

de serrures pour finir dans l’aire de jeux d’un jardin public. La caméra s’élève alors s’arrêtant sur un soleil qui annule la grisaille du ciel et les doutes de l’enfant sur la fiabilité de son père. Comme toujours chez ce cinéaste, les dialogues absurdes, décalés, la tendre dérision sans cynisme et l’intelligence cinématographique prévalent. Le trésor nous parle de l’Histoire et des histoires, de la réalité et des mythes, de la famille et de l’héritage. C’est un film doux, en demi-teintes, profondément humain, où les bleu-gris se givrent pour mieux s’éclairer et où les bruns s’affadissent pour mieux se dorer. ELISE PADOVANI

Le festival Visions Sociales a eu lieu du 16 au 24 mai au Château des Mineurs, à Mandelieu La Napoule

Doubles messieurs

S

eptième séance de la 33e édition du Festival du 1er Film francophone, organisé par le Berceau du Cinéma, le 28 mai à l’Eden Théâtre : un court et un long, tel a été le choix d’Yves Alion, le directeur artistique. L’Homme qui en connaissait un rayon d’Alice Vial raconte l’histoire de Monsieur Béranger (André Penvern), un employé d’un supermarché de meubles, vivant jour et nuit dans un salon en carton-pâte jusqu’au jour où sa rencontre avec une petite fille (Naomi Biton) lui permettra peutêtre d’aller voir la mer Un court métrage à la poésie décalée. Terre battue est le premier long métrage de Stéphane Demoustier, une histoire en forme de fable qui nous parle de notre société néo-libérale, où compétition et affaires prédominent, où l’on suit

Terre battue de Stéphane Demoustier © Les Films Velvet

le parcours de deux êtres, le père et le fils, enfermés dans leur monde. Le père (Olivier Gourmet, excellent comme toujours !), un cadre qui vient de perdre son emploi, ne baisse pas la tête. Il adore les supermarchés où les gens viennent en famille, et ne pense plus qu’à la société qu’il voudrait monter si bien qu’il ne se rend pas compte que sa femme

(Valeria Bruni Tedeschi), à qui il achète une paire de chaussures par mois, déprime et s’éloigne peu à peu Quant à leur fils, le jeune Hugo (Charles Mérienne), c’est un autre challenge qu’il s’est donné : intégrer une section sports-études tennis, tremplin pour Rolland Garros. Il s’entraine intensément, souffrant en silence de ce qu’il ne parvient pas

à partager avec son père. Deux courses en parallèle qui ne se rejoindront qu’à la fin (qu’on ne vous dévoilera pas). Stéphane Demoustier filme cette relation difficile, ces êtres enfermés dans leur projet, sans les juger, un peu à la manière des Frères Dardenne, coproducteurs du film. Il donne aussi à voir les coulisses du tennis de compétition, un milieu qu’il connait bien pour l’avoir fréquenté, adolescent. Un premier film réussi, lucide et attachant. On attend le deuxième ! ANNIE GAVA

Le Festival du 1er Film francophone s’est tenu du 26 au 30 mai à La Ciotat, au Berceau du Cinéma



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Bien plus qu’une expo Depuis le 10 juin s’est ouvert à Marseille un lieu qui magnifie le squat et le rêve. Bien plus qu’une exposition collective, les 40 artistes réunis nous proposent de visiter leur habitat commun, qui est celui de nos enfances, et de leurs rêves. Cauchemardesques parfois, douloureux souvent, toujours reliés à ces heures que l’on a passées dans les salles de classes, et que nos mémoires, quel que soit notre âge, chargent d’affects. Pendant près de quatre mois l’atelier Juxtapoz associé au 9e concept a convié les artistes à habiter et transformer les lieux. Et quels lieux ! 2500 m2, 3 bâtiments dont un classé (primaire, maternelle et lycée, le collège étant devenu lieu de résidence) deux cours et deux préaux... Chaque artiste s’est vu allouer soit une salle de classe, soit un de ces escaliers usés par des milliers de pas d’enfants, soit un mur gigantesque. Le résultat laisse bouche bée : aucun n’a lésiné sur sa peine, et tous ont entrepris un colossal travail de métamorphose, enduisant de couleurs, de signes, de formes, chaque mur, et les sols et les plafonds encore, se servant des vestiges, bureaux, chaises, tableaux, livres et ardoises délaissés, pour concevoir des installations

© Olivia de Bona

De jeunes artistes inspirés prennent la vie en grand et métamorphosent une institution scolaire désaffectée...

qui transcendent la réminiscence. Qui sont ces artistes ? De jeunes gens pour la plupart, beaucoup d’hommes (6 femmes sur 40 seulement...), des artistes d’ici ou internationaux tous qualifiés de Street artistes, parce qu’ils aiment tant leur art qu’ils le pratiquent dans les rues quand les galeries ne leur ouvrent pas assez vite les portes. Une unité esthétique ? Quelques points communs, dont un attrait évident pour la couleur saturée en aplats, l’amour des lettrages et des slogans, un usage

décomplexé de la figuration, entre BD et illustration. Et aussi, clairement, un refus du minimalisme, de l’épure, du geste et du conceptuel : ici on peint en grand, et vite ! Avec toutes sortes de techniques... Si toutes les salles et œuvres valent le coup d’œil (prévoyez deux bonnes heures pour tout voir), c’est parce que

Maison Blanche, mairie des 9 et 10e arrondissements de Marseille, a accueilli pour sa 7e édition le Festival des Arts éphémères. Désormais attendu par le public et par les enfants des écoles (2000 chaque année), il propose d’ouvrir les portes à l’imaginaire. Cette manifestation est l’occasion pour l’équipe municipale de favoriser l’accès de tous à l’art contemporain, soutenue cette année pour la première fois par le Conseil Général qui vient de changer de couleur. Anne-Marie d’Étienne d’Orves, adjointe à la Culture, a demandé à Isabelle Bourgeois, responsable culturelle à La Valette du Var, d’assurer le commissariat en duo avec Jean-Louis Connan, directeur artistique de l’École d’Art de Marseille. Inaugurée le 28 mai avec les sonorités inhabituelles des musiciens des ateliers toulonnais et marseillais des Pousses de Bamboo Orchestra sous la direction de Makoto Yabuki, l’édition 2015 a compté plus de 30 artistes plasticiens, performeurs et musiciens. En accédant à l’exposition par la Bastide, le public était happé par les photos géantes en très gros plan des fleurs d’Erwan Frotin,

Raoul Hébréard © Chris Bourgue

Œuvres éphémères pour rêves intemp

exotiques, ou communes comme les acanthes ; le photographe-botaniste répondant à une commande de la Villa Noailles s’est livré à la constitution d’un herbier hors du commun. Dans l’autre salle, il pouvait jouer au Petit Poucet perdu dans l’impressionnante Forêt de Nicolas Pincemin (polyptique de huit panneaux à l’huile 230x170). Sur la terrasse, il s’amusait des Topiaires mobiles en faux buis sur roulettes, proposées par l’ECAL de Lausanne. Le regard

était attiré par Le grand lac de Raoul Hébréard : un sous-marin de pacotille, surgissant sur le plan d’eau, dont pourraient sortir des extra-terrestres... Plus loin, la luxueuse caravane américaine Airstream du Théâtre du Centaure servait d’écrin à Eau forte, images


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AGNÈS FRESCHEL

Aux Tableaux jusqu’au 10 octobre Ancien Lycée Saint Thomas d’Aquin, Marseille www.aux-tableaux.com

porels sensuelles du Centaure Manolo/Toshiro, étalon lusitanien, filmé par Camille. Sur un îlot on apercevait Premières lignes, œuvre impressionnante d’Ugo Schiavi, résultat des moulages directement pris sur les rugbymen de La Valette. Puis Station devant plusieurs tentes bizarrement installées par Robin Touchard, Riches, pépites d’or géantes (résine et feuilles de cuivre) de Mary Pupet. On pénétrait encore dans le taillis occupé par les images imprimées d’Oedipe aux yeux crevés qui laissaient voir les feuillages et donnaient à lire quelques pages de Sophocle (Oedipus’cruising de Marc Turlan). On découvrait Barbacane, étrange sculpture évolutive de Frédérique Nalbandian, faite de savon soumis à l’action érosive de l’eau, réflexion métaphorique sur le rôle de l’eau ? Plus loin Rêve d’enfant, bestiaire découpé dans de vieilles portes par Charlamand, interrogeait les imageries de l’enfance et de l’Afrique. D’autres créations attendaient le public, comme les travaux des Ateliers Publics de Marseille présents depuis la première édition. Toujours aussi inventifs, ils faisaient honneur aux post-it, aux objets du quotidien et de récup’ en les détournant, mais aussi à des matériaux plus nobles comme la céramique. CHRIS BOURGUE

Le Festival des Arts éphémères a eu lieu à Maison Blanche du 28 mai au 14 juin

L’album souvenir de

Michèle Sylvander Il est des cartes postales qui ressemblent à des albums de famille ou des journaux intimes. De l’intime, justement, il en est question avec Michèle Sylvander qui puise dans les archives familiales matière à raconter -réinventer- sa propre histoire. Une histoire personnelle qui touche à l’universel parce que toujours pudique, sincère, transmise en pointillés au fil de photos, de vidéos et d’objets. Comme ces minuscules souliers posés à même le sol, ces annotations griffonnées au dos de photos laissées longtemps dans le secret. Enfouies dans les interstices du temps… Retour à l’enfance marqué par la figure paternelle et ses voyages en Algérie, au Maroc, en Indochine ; portrait pudique et réaliste de la mère dans Only You ; geste radical d’archives sur la guerre d’Algérie, d’abord retrouvées puis brûlées ; reconstitution de souvenirs détournés à l’aune de la mémoire et de la vérité recomposée… Et cette question qui la taraude, «Pourquoi es-tu parti ?», sujet d’une vidéo magistrale sur la séparation, la guerre, les colonies : les images se déroulent au son du martèlement de la machine à écrire, des fusillades et des bombardements. Et se terminent par cet imparable question : «Pourquoi tu pars ?». Dans À mon tour, je te raconte, Michèle Sylvander libère sa mémoire et ses émotions, se met à nu une fois encore en convoquant les traces des êtres aimés, des espaces habités, des vêtements enfilés. Sans pathos. Mais avec un talent de narratrice tel que le lecteur attend déjà son retour… M.G.-G. À mon retour, je te raconte Michèle Sylvander jusqu’au 11 juillet Château de Servières, Marseille 4e 04 91 85 42 78 www.chateaudeservieres.org

Face à elle le pharo © Michèle Sylvander

personne ne s’est dérobé à sa commande, et que chacun a livré sa vision de l’école, primaire pour Gilbert Mazout qui dessine à la craie des animaux velus, maternelle pour Olivia de Bona qui propose une scénographie bleu rêve pour la sieste des tout petits, lycéen pour Rémi Uno qui fait surgir ses fantasmes de profs en culotte au coeur d’une salle de classe explosée... Les gestes de révolte pure envers l’ordre oppressant d’une école perçue comme rigide et élimant l’individu sont fréquents, mais on sent aussi la peur d’en sortir démuni, comme de ce toboggan qui mène vers le chômage, cet escalier peuplé de sculptures fantastiques évoquant la faucheuse, et ce plafond crevé de lumière de Stéphane Parain, éblouissant de blanc. Des connotations mystiques, parfois naïves ou anecdotiques, souvent graves comme des questions irrésolues, traversent les salles de cet ancien établissement catholique, décidément projeté vers d’autres cieux. L’exposition, monumentale dans tous les sens du terme, se visite seul ou guidé (Office de tourisme), en classe ou en famille, le mercredi (13h/20h) et du vendredi au dimanche (11h/20h). Des happenings ont lieu tous les mercredis soirs, et la restauration est conviviale. L’entrée est libre, il suffit d’adhérer (2 €) pour y aller autant que vous voulez !


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Retours vers le futur Comment les artistes racontent la mémoire du futur ? Comment leurs œuvres prennentelles une patine historique ? Dans la lignée de l’exposition Peinture Cinéma Peinture de 1989, la Vieille Charité renoue avec la narration en ouvrant trois chapitres : «Metropolis», «La guerre des mondes» et «L’odyssée de l’espace». Du manifeste futuriste de Marinetti en 1909 aux fictions architecturales du collectif La Fratrie de 2015, l’exposition Futurs révèle à quel point l’univers des artistes fut bouleversé -tant sur le plan conceptuel que formel- par les révolutions scientifiques, technologiques, industrielles ou spatiales. Comment les cinéastes (Fritz Lang et son emblématique Metropolis ouvre la première section, S. Kubrick hante les salles), les architectes, peintres, sculpteurs, auteurs (H. G. Wells plane sur nos têtes) imaginèrent des mondes mutants, les questionnèrent ou les pressentirent, avec enthousiasme ou pessimisme. Entre visions réalistes, utopiques, oniriques, fantasmées et désenchantées. En Italie donc, mais aussi en Russie, aux U.S.A., en Grande-Bretagne, en Allemagne et en France, l’onde de choc précipite les artistes dans un tourbillon inventif et prospectif : ils déconstruisent les villes, démultiplient les espaces, fabriquent machines et robots, se réapproprient les mythes (le rêve d’Icare est plus que jamais palpable et Matisse se délecte),

Vue de l’exposition à la Chapelle. Installation de Bruno Peinado, Sans titre, Silence is Sexy, 2004, 2015 © Vincent Ecochard, Ville de Marseille

détournent les figures des supers héros (Batman peut-il réellement sauver le monde s’interroge férocement Dulce Pinzon). Certains comme les Frères Henry dès 1887 ou Thomas Ruff en 1990 redoutent la fragilité de la terre à l’aune de l’immensité cosmique et regardent désespérément le ciel étoilé. Ce même ciel qui n’augure pas toujours des jours heureux : Renaud Auguste-Dormeuil donne à voir en 2004 un dramatique et silencieux The Day Before Baghdad. Et quand Miró fait virevolter sur la toile les constellations, Kupka a «l’impression de

contempler le globe terrestre de l’extérieur»… Leur quête du mouvement est perpétuelle, mouvement de la pensée et de l’esprit, des formes et des médiums. En témoigne la fin de l’odyssée à la Chapelle en compagnie de Bruno Peinado et son installation Sans titre, Silence is Sexy où se reflètent la coupole, le passant, les ombres tour à tour déformés,

Destins du dessin En rapprochant Van Gogh et deux artistes contemporaines, trois expositions à la Fondation Van Gogh jouent au grand écart sur le thème du dessin. Ce qui n’est pas forcément pour déplaire L’exposition estivale dernière nous intéressait à la couleur dans l’œuvre de Van Gogh. Pour cette édition, Bice Curiger et Sjraar van Heugten se tournent vers un autre extraordinaire, son œuvre graphique. En contrepoint, on découvre la dernière série des Hack Wit, les dessins au pigment et les sculptures de verre de Roni Horn, ainsi qu’une troublante vidéoinstallation de la vidéaste japonaise Tabaimo.

Figure humaine

Portraits de travailleurs, paysans, mineurs baissés, courbés, au dos voûté, corps massifs lourdauds, mains noueuses, aspect terreux... entre autres, la sélection conçue par Sjraar van Heugten fait la part belle à la figure humaine et certaines classes sociales. Van Gogh semble nous demander de nous y intéresser de près, jusqu’à l’ambivalence, par exemple,

1735, Tabaimo, aitaisei-josei, 2015, installation vidéo en boucle © C. Lorin,Zibeline

de ces gerbes de blé (Auvers, 1890) tracées hâtivement peu avant sa mort qui évoquent par leur mouvement des pantins/danseuses fantomatiques sans tête. Le paysage n’est pas en reste. De près aussi : celui-ci avec cabane (Arles, mai 1888) contrarie la logique de la netteté en perspective. Car c’est au lointain que l’artiste accorde précision et détails, laissant les premiers plans à une accumulation graphique de signes. En appelant à la couleur, il est précézannien dans cette vision d’un banc, aquarellé à l’huile, encre et craie noire. Contrariant l’enseignement classique, le dessin n’est pas systématiquement le préparatoire à l’œuvre

peinte. Van Gogh lui octroie son autonomie en développant un exceptionnel vocabulaire graphique (qui n’est pas sans rappeler Dürer) et investit aussi des surfaces respectables. On aurait apprécié ici son Rocher de Montmajour ou La roubine du roy. L’exposition pointe aussi les influences croisées et expérimentations techniques à travers la gravure, héliogravures, reproductions d’œuvres d’artistes, estampes d’Hiroshige tant appréciées.

Affinités

À travers le parcours des trois univers si différents, nous touchons à l’un des aspects de la recherche essentielle que tout artiste nourrit envers ses moyens d’expression personnels. Du gros crayon de charpentier des débuts au roseau de Provence et diverses combinaisons d’outils


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De beaux papiers gonflés, rapetissés. À couper le souffle ! L’option du parcours chronologique est une réussite, le découpage en sections thématiques également qui conduisent le public à s’approprier une histoire. Leur histoire. D’autant que la scénographie privilégie la pédagogie à travers un choix de cartels détaillés, précieux repères historiques et esthétiques, et que des médiateurs culturels sont disponibles gracieusement dans chaque salle. Un double effort de la direction des Musées de Marseille que le public visiblement apprécie. MARIE GODFRIN-GUIDICELLI Dusk embossed, oeuvres de Ky Anderson, vue partielle de l’exposition. © C. Lorin/Zibeline

Futurs De la ville aux étoiles, Matisse, Miro, Calder… jusqu’au 27 septembre Centre de la Vieille Charité, Marseille 2e www.futurs.marseille.fr

Premier anniversaire pour Look&Listen avec une exposition d’œuvres sur papier en deux volets proposée par l’artiste new-yorkaise Ky Anderson. L’occasion aussi de faire le point avec Yifat Gat, initiatrice de ce lieu d’art atypique.

À lire

Crépuscule gaufré...

À voir

Futurs, textes de Olivier Cousinou, Pascal Neveux, Arnauld Pierre, Christine Poullain et Guillaume Theulière, coédition RMNMusées de Marseille, 35 euros

pour Van Gogh, pigments, colle vernis, lacérations recomposées minutieuses annotées de Roni Horn, ou chez Tabaimo le dessin traditionnel japonais inspirant les nouvelles technologies dans une mise en scène tridimensionnelle. Toutefois on se demande ce que font ici les monolithes de verre (magnifiques d’absolu !) de Roni Horn, antiformes où s’absorbe dans la matière/lumière/couleur toute velléité de trace singulière. Une antithèse du dessin. Le visiteur désirant approfondir les sujets se tournera vers la sémillante équipe de médiatrices et les catalogues édités pour l’événement chez l’éditeur voisin Actes Sud. CLAUDE LORIN

Les dessins de Van Gogh : influences et innovations Roni horn : Butterfly to Oblivion Tabaimo : Aitaisei-Josei jusqu’au 20 septembre Fondation Van Gogh, Arles 04 90 93 08 08 www.fondation-vincentvangogh-arles.org

...Mot à mot c’est la traduction de Dusk embossed, titre donné à ce projet en deux volets par Ky Anderson invitée en résidence en mai dernier. Pour la première partie, Ky Anderson a envoyé à une quinzaine d’artistes cinq feuilles de papier pour estampe retravaillé en relief (embossed) avec une presse depuis son atelier new-yorkais. Un élément de chaque est exposé ici. Ce premier volet, le plus modeste (petit format contraint par la voie postale), est aussi le moins éloquent malgré la variété des propositions, les artistes ayant travaillé davantage le recouvrement que joué avec les reliefs offerts par le papier embossé. Pour sa participation personnelle, Ky Anderson nous gratifie de seize grands formats où se combinent des systèmes de couches aquarellées successives, trames, perspectives, interpénétration d’espaces et transparences. L’acrylique diluée impose le geste assuré de l’aquarelle structurant le support comme autant d’effets suggestifs. «Même si mes peintures apparaissent abstraites, elles racontent des histoires […] Les couleurs rappellent des souvenirs, des paysages, des choses vécues il y a longtemps» précise l’artiste. L’ensemble de l’exposition sera ensuite présenté à la galerie Molly Krom de New-York.

Espèces d’art

Look&Listen se veut un espace d’art ouvert aux différentes formes et projets artistiques : atelier d’artiste, galerie,

bibliothèque, espace-vente, ateliers publics et scolaires et récemment de médiation artistique. Un rapprochement avec les entreprises locales mécènes (AESC et ID Méditerranée) pour un projet de sculptures à partir des rebuts industriels a déjà été effectué. Une gageure pour l’association à l’heure où la culture relève parfois du spectacle et des budgets en peau de chagrin. Pourtant dans cette petite commune villageoise, si la nouvelle mairie n’est pas encore totalement partie prenante, elle a facilité l’installation de cette structure dans l’ancienne Poudrerie Royale, un lieu exceptionnel au bord de l’étang, et suit chaque projet et vernissage avec attention. En 2014, l’expo inaugurale Brooklyn-Marseille avait déjà donné le ton de grandes ambitions malgré des moyens on ne peut plus modestes. L’avenir semble se construire aussi dans les synergies locales comme internationales. «À la rentrée, nous exposerons Format Raisin, une proposition de Michel Barjol de la galerie Martagon à Malaucène, nous allons aussi participer au Mois de la Photo et à la foire d’art contemporain Sluice à Londres, et puis Supervues à Vaison-la-Romaine en fin d’année» se réjouissait déjà Yifat Gat. C.L.

Dusk Embossed jusqu’au 20 juillet Look&Listen, Parc de la poudrerie, Saint-Chamas 06 80 45 03 32 www.looklisten.com


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Hervé Télémaque

Après une première au Centre Pompidou, l’œuvre d’Hervé Télémaque est accueilli à Marseille. Près de quatre-vingt pièces, peintures, collages, dessins au fusain, assemblages et «sculptures maigres», en forme de rétrospective. À cette occasion, le musée présente une sélection d’œuvres de la Figuration narrative issue du [MAC]. Rencontre/lecture avec Bernard Noël, en association avec le Cipm, le 20 juin à 15h30 en présence de l’artiste. C.L. du 19 juin au 20 sept Musée Cantini, Marseille 04 91 54 77 75 www.marseille.fr

Gilbert Garcin

Petit célibataire un peu nègre et assez joyeux, 1965, Huile sur toile, 80 x 80 cm, Paris, Centre Pompidou, MNAM © Philippe Migeat, Centre Pompidou © Adagp, Paris 2014

Le photographe marseillais le plus connu hors des frontières phocéennes est de nouveau aux cimaises de la galerie Detaille. Hélène et Gérard Detaille avaient exposé Gilbert Garcin en 2013 une première fois avec la réception d’un beau succès. Le maître de l’humour absurde auto-fictionnel en noir et blanc revient avec des projets réalisés entre 1995 et 2012. Certains clichés sont montrés pour la première fois. C.L. Ainsi va le monde jusqu’au 11 juil Galerie Detaille, Marseille 04 91 53 43 46 www.galeriedetaille.com Upward © Gilbert Garcin

Pour l’œil

La programmation de la fondation poursuit la thématique art et science au cœur du projet artistique de Victor Vasarely. Trois générations d’artistes depuis les années 60 avec le GRAV aujourd’hui représentés dans la collection d’art cinétique de Lélia Mordoch et José Mijan : Garcia-Rossi, Morellet, Le Parc, Sobrino, Stein, Yvaral, les dessins nanométriques de Michel Paysant. C.L. L’œil phénomène du 18 juin au 20 sept Fondation Vasarely, Aix-en-Provence 04 42 20 01 09 www.fondationvasarely.org

Horacio Garcia-Rossi, Sphère 6 couleurs en mouvement, 1969-71 ©Thomas Granovsky

Tony Oursler

Les rapports entre archive et création contemporaine constituent un des axes de réflexion et de programmation de la Fondation Luma. Cette édition invite Tony Oursler, grand compilateur notamment sur les phénomènes paranormaux. Un film 4D, une installation et une publication proposent «un nouveau regard à la fois sur ce matériau recueilli par l’artiste depuis de nombreuses années et sur la trajectoire de son propre travail». C.L. Impondérable : les Archives de Tony Oursler Fondation Luma Les Forges, Parc des Ateliers, Arles du 6 juil au 20 sept www.luma-arles.org Ectoplasm under an ultraviolet light, début du 20e siècle © Aaron Fedor, Courtesy of Tony Oursler’s personal archive


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Bruissements

Pour la deuxième année consécutive, le Domaine du Château d’Avignon vibrera à travers le bruissement visuel et sonore d’œuvres contemporaines. Le parcours investit château, dépendances et parc avec des créations pour certaines conçues spécialement pour l’événement et les lieux, comme une invitation poétique à construire sa propre expérience sensorielle. Performances le week-end d’ouverture les 20 et 21 juin en présence des artistes. C.L. Le Domaine des murmures du 20 juin au 4 oct Château d’Avignon, Saintes-Maries-de-la-Mer 04 13 31 94 54 www.chateaudavignon.fr Mathias Isouard, Water Percussions# , 2013, production Voyons Voir art contemporain et territoire © M. Isouard

Sculptures au jardin

Parvine Curie, Marc Nucera, Xavier Spatafora, Regina Flakenberg... Les Jardins de la Bastide Rose accueillent tout l’été un ensemble de sculptures et installations monumentales contemporaines. Dix-neuf artistes internationaux dont certains sont installés et travaillent en région Provence. C.L. De la ligne au point jusqu’au 15 oct Fondation Poppy et Pierre Salinger, Le Thor 04 90 02 14 33 Le tricot de la terre, une œuvre de Tetsuo Harada © Aygulf Le Cesne


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5 000 m2 de Collection Lambert

Le musée a fait peau neuve et s’est agrandi grâce au talent de l’agence Berger & Berger, il rouvre ses portes avec une double exposition. L’Hôtel de Caumont reçoit, avec le Festival In, une exposition hommage à Patrice Chéreau (financement participatif en cours sur kisskissbank). Archives personnelles, entretiens filmés et prêts d’œuvres (Géricault, Goya, Marina Abramovic, Mapplethorpe…) retracent ses obsessions et ses passions. Dans l’Hôtel de Montfaucon mitoyen (ancienne école d’art), une partie des 556 chefs-d’œuvre du fonds donné par Yvon Lambert à l’Etat, dont certains inédits, est présentée en collection permanente. DE.M.

© Francesco Cairo, Saint Sébastien soigné par Irène, vers 1635, huile sur toile, Musée des Beaux-Arts de Tours

Un nouveau musée Patrice Chéreau, un musée imaginaire du 10 juil au 15 oct Collection Lambert, Avignon 04 90 16 56 20 www.collectionlambert.fr

Jean-Henri Fabre

Le musée d’arts décoratifs expose une partie de la collection particulière de l’entomologiste Jean-Henri Fabre. 19 aquarelles de champignons que l’insatiable curieux a soigneusement dessinés, ainsi que des ouvrages naturalistes, des herbiers et manuscrits rappellent son talent pour Observer, (re)présenter, transmettre. D’autres oeuvres collectionnées autour de la botanique et de l’éthologie feront un écho contemporain à «L’homère des insectes». DE.M. L’art dans la nature du 18 juin au 6 sept Musée Vouland, Avignon 04 90 86 03 79 www.vouland.com © Jean-Henri Fabre, Champignons, aquarelle, sans date (collectin particulière)

Matthieu Faury

Au Château de Tarascon, forteresse et résidence médiévale des Ducs d’Anjou, Matthieu Faury s’est emparé de la figure emblématique du château. Dans le prolongement de l’exposition Si les Châteaux m’étaient contés, son installation Château-coeur conçue spécifiquement pour les lieux, explore à travers le regard contemporain la réflexion sur les métamorphoses du monument médiéval. C.L. jusqu’au 31 oct Centre d’art René d’Anjou, Tarascon 04 90 91 01 93 www.chateau.tarascon.fr

Matthieu Faury, Château-coeur, technique mixte, 2015 © Ville de Tarascon-M. Faury

Féeriques

Dans les Hautes-Alpes, La vallée de Crévoux offre un site enchanteur où des fées très bien intentionnées ont installé des œuvres d’art singulières et éphémères. Comme de passer la nuit dans une cabane de berger, restaurée et aménagée avec une œuvre de Frédéric Ollereau créée pour cette sixième édition. Accueil guidé avec un artiste, médiations, application pour smartphone, nuits numériques : tout un parcours naturel et artistique à découvrir aussi en famille. C.L. Le Parcours des Fées #6 du 4 juil au 31 août Crévoux/La Chalp 04 92 43 63 69 http://parcours-des-fees.fr © Pierre-Laurent




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