zibeline n°17

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du 19/03/09 au 16/04/09 | un gratuit qui se lit

La Culture en Couleurs?



Politique culturelle Babel med Music Le MuCEM Carnavals

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Théâtre Le Massalia, la Criée Montévidéo, les Bernardines La Criée, le Gyptis, le Lenche Le Gymnase, le Merlan, la Minoterie Aix : Le Jeu de Paume, le 3bisf, Les Ateliers Komm’n’act, Aubagne, Théâtre et chanson, Châteauvallon Le Massalia, Grasse, Château-Arnoux, Cavaillon, Comoni, Vélo Théâtre Avignon, Draguignan Ouest Provence, Aix, Arles Port-de-Bouc, Martigues, Nîmes

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Danse Les Hivernales Le Merlan Aubagne, Château-Arnoux, Gap BNM, Draguignan Pavillon Noir, GTP, Ballet d’Europe Ouest Provence, Martigues, Cavaillon

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Cirque/Arts de la rue Sirènes et midi net, Martigues, Briançon, Grasse Les Elancées, Avignon, Port-Saint-Louis

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Musique Lyrique Lyrique, symphonique, chambre Contemporaine Au programme Nîmes, Latcho Divano Avec le temps, Le Lenche Concerts, au programme

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Cinéma Au programme, Digne, Image de Ville ASPAS, AFLAM

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Arts visuels Galerie du tableau, Rencontres du 9e art SMP, Ateliers d’artistes, Vieille Charité Villa Noailles, Saint-Rémy Au programme

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Livres Rencontres CoLibriS, Jeudis du comptoir, TPM Livres : jeunesse, littérature, arts, essais

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Économie La maladie des coûts

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Philosophie Livres Les jeux du je

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Sciences et techniques Environnement

V’là l’printemps Bientôt les jours vont s’allonger, le ciel s’éclaircir, les rues se parer à nouveaux des couleurs des arts, des carnavals. Chacun va remiser ses tenues chaudes et grises pour laisser apparaître sous les tissus frais la couleur de sa peau. Pourtant certains printemps auront la couleur de la peur, et la rue celle de la misère. Le temps des expulsions revient. Pas celles qui envoient hors de notre territoire ceux qui n’ont pas eu le privilège d’y naître, celui-là n’a jamais cessé, même au fort de l’hiver. Non, le temps des expulsions revient pour ceux qui ne peuvent pas payer leur loyer. La pauvreté gagne, comme une fatalité que rien ne vient enrayer, et les expulsés seront cette année plus nombreux que jamais. Sous les pavés la plage ? Les manifestants battent le bitume sans espoir et sans enthousiasme, s’accrochant désespérément au minimum vital que leur force de travail, jusque là, leur fournissait. Les réformes du système social sont un fiasco économique, masqué par la crise : ce sont Pierre Cahuc et André Zylberberg, économistes assermentés, qui l’affirment1. Déjà chacun l’avait senti : travailler plus longtemps, plus durement, quand de moins en moins de gens ont accès à l’emploi et à l’achat, n’amène qu’à creuser le déficit des caisses. Le chômage s’aggrave, les prix s’envolent, l’hôpital se délite, la culture part en lambeaux, et l’école publique meurt d’asphyxie. V’là l’printemps ? Pendant ce temps les entreprises du CAC 40 ont fait 54 milliards de bénéfice. Elles risquent, ô malheur, d’en faire un peu moins l’an prochain. Cela devrait nous affoler, mais ce sont eux qui ont peur. Avez-vous vu le visage défait de Laurence Parisot lorsqu’elle a bredouillé : «Le système est clair, les salaires doivent aller aux travailleurs, les dividendes aux entreprises» ? Partager les bénéfices, vous plaisantez monsieur le Président… Avez-vous si peur de la rue que vous envisagiez de démunir votre frère du MEDEF ? Sous les pavés la plage. Les queues devant les cinémas s’allongent, pour aller voir Welcome, et dire bienvenue enfin à ceux qui vivent là. Monsieur Besson, lui aussi entre deux portes, bouillonne. Partout les bourgeons montrent leur nez. Laissonsles fleurir. AGNÈS FRESCHEL

1 Les réformes ratées du président Sarkozy, Flammarion, mars 2009

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Rencontres Au programme

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Patrimoine Picasso, Les Baux

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Éducation La FAI AR, Théâtre Vitez, FNCTA

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BABEL MED MUSIC

POLITIQUE CULTURELLE

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Babel Med Music 2008 © X-D.R.

Au tour de Babel

Au programme Le 26 mars à partir de 19h30 Novalima (Pérou), Aronas (Nouvelle Zélande / GB), Wasis Diop (Sénégal / Fr), Sayon Bamba (Guinée / Fr), Houria Aïchi & L’Hijâz’car (Algérie / Fr), Kamel El Harrachi (Algérie / Fr), Fouad Didi et l’Orchestre Tarab (Algérie / Fr), Goldenberg & Schmuyle (Fr) Grail’Oli (Occitanie / Fr). Le 27 mars à partir de 18h30 Yom (Fr), Baster (La Réunion / Fr), Deba (Mayotte / Fr), Nidi d’Arac (It), Mosaïca (Occitanie / Maroc), Zaman Fabriq (Egypte / Fr), Hemdem (Turquie), Frédéric Galliano Kuduro Sound System (Angola / Fr), Les Bantous de la Capitale (Congo). Le 28 mars à partir de 18h30 Kora Jazz Trio (Guinée / Sénégal), Kristin Asbjørnsen (Norvège), Moussu T e lei Jovents (Provence - Fr), Rupa & The April Fishes (USA), Dj ClicK (Roumanie / Fr / GB), Istanbul Calling (Turquie), Waed Bouhassoun (Syrie), Axivil Aljamía (Andalousie - Esp), Le Bus Rouge (Fr), Sam Karpienia (Provence - Fr), Kumar (Cuba / Esp).

La cinquième édition de Babel Med s’annonce, fidèle à son esprit initial, en pleine croissance en ces temps de crise du disque. Zibeline a rencontré l’équipe dirigeante, qui explique l’esprit de cette manifestation raine n’est donc pas une trahison, et le but de Babel Med n’est pas muséologique. À force de mixer les traditions du monde, n’en arrivet-on pas à les araser, à en éliminer les originalités dans un geste unificateur ? Est-ce que toutes ces musiques revisitées ne finissent pas par sonner pareil ? S.S. : Non. On peut faire du rock teinté de tradition iranienne, qui sonnera différemment, et pas seulement à cause de la langue. À Bamako la techno n’a pas le même son, même s’ils utilisent les mêmes machines. C’est une question d’instrumentation, mais aussi de manière d’entrer dans la musique. De tradition, justement! Vous voulez donc couvrir toutes les esthétiques des musiques du monde ? S.S. : Oui, c’est ça, depuis la plus traditionnelle, celle qui permet de défendre et transmettre des patrimoines en danger, ceux qui ne passent que de maître à élèves, jusqu’aux mariages les plus éclectiques. Olivier Rey : Nous faisons la différence entre Folklore, qui désigne la musique du passé, figée, souvent inauthentique, et Tradition, qui suppose un mouvement. Et nous pensons qu’à Babel Med nous offrons un panorama de ce qui s’écrit aujourd’hui. Comme Sam Karpienia par exemple, qui est en train d’écrire la tradition occitane contemporaine, loin des revendications passéistes ou identitaires du folklore provençal. Et quel est votre budget pour ces 3 jours de manifestation ? Florence Chastanier : 850 000 euros, dont 350 000 euros de la Région, notre partenaire principal, 20% de recettes propres seulement car nous pratiquons une politique de prix très bas, le reste provenant du Conseil Général, mais surtout de sociétés musicales comme la SACEM, l’ADAMI, le FCM, ou de partenaires privés comme la Caisse d’Epargne, ou le Port Autonome… Pour combien de public ? F.C. : Environ 15000 personnes sont attendues à Babel Med. ENTRETIENS RÉALISÉS PAR AGNÈS FRESCHEL

Babel Med Music, forum des musiques du 27 au 29 mars 04 91 99 00 00 www.docks-des-suds.org Houria Aïchi, une des rares femmes invitées, dans un monde de musiques ou les femmes chantent parfois, mais ne jouent jamais...

© gunther Vicente

Zibeline : Vous organisez deux manifestations importantes au Dock des Suds : La Fiesta et Babel Med. En quoi ces manifestations diffèrent-elles ? Bernard Aubert : D’abord la Fiesta a 17 ans, Babel Med en est à sa cinquième édition. Il y a 17 ans, programmer des musiques du monde, des Suds en particulier, était audacieux. Maintenant cela l’est moins, et la Fiesta a d’autres audaces, qui consistent à faire se croiser des publics très différents, à surprendre y compris en invitant Bashung à côté de Maalesh ou d’Herbie Hancock. Babel Med en revanche va chercher des artistes souvent inconnus, mais qui travaillent avec les traditions musicales du monde. Babel Med est aussi une manifestation professionnelle. B.A. : Oui, avant tout. Il y a 30 concerts publics en trois jours, mais durant la journée Babel Med est ouverte aux professionnels, acheteurs, programmateurs, organisateurs de festivals, qui viennent visiter les stands des exposants, assister aux conférences puis aux concerts. C’est important aujourd’hui de défendre le concert, 80% des artistes en vivent. L’industrie du disque s’effondrant, les gros festivals français deviennent rentables et sont rachetés par des sociétés américaines, tout comme les tourneurs. Nous voulons préserver le côté artisanal et PME, nous nous battons pour que les festivals restent libres de leur programmation et ne se voient pas imposer les artistes par les producteurs. Et pour que les groupes restent abordables pour de petits festivals, pour que la palette esthétique reste large… Comment définiriez-vous la palette esthétique de Babel Med ? Et plus exactement, comment peut-on se réclamer d’une «tradition contemporaine», ce qui semble a priori paradoxal ? Sami Sadak : C’est le problème de la musique traditionnelle, qui est un mythe en fait. Même les musiques les plus conservées changent par mini vagues, opèrent par ruptures avec les traditions précédentes. Et puis qu’est-ce qu’une musique traditionnelle ? Quelle est sa pureté ? Le flamenco date par exemple de la fin du XVIIIe, sa tradition se fixe à la fin du XIXe… c’est très récent. Interpréter une tradition de façon contempo-



LE MUCEM

POLITIQUE CULTURELLE

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Le MuCEM, photo montage © Rudy Ricciotti Architecte

Après une période d’atermoiements financiers qui aura bloqué pendant deux ans sa construction, le MuCEM dispose désormais d’une nouvelle feuille de route dictée par le Rapport à la Ministre de la culture et de la communication relatif au MuCEM réalisé par Stéphane Martin1. Remis le 4 août 2008 à Christine Albanel et rendu public début mars, ce rapport préconise, entre autres, le transfert de l’intégralité des collections du MuCEM à Marseille («une priorité») et le lancement de deux chantiers architecturaux confiés l’un à Corinne Vezzoni2 dans le quartier de la Belle de Mai destiné à conserver les collections, l’autre à Rudy Ricciotti situé sur le môle portuaire du J4 («une urgence»). Jusqu’ici, rien de bien nouveau, Stéphane Martin rappelant que «le MuCEM est un projet original dans le paysage muséal français» par son approche pluridisciplinaire et culturelle, et «un équipement de prestige au cœur de Marseille.»

Questions d’argent Là où le rapport bouscule les idées originelles, c’est au sujet de l’usage du Fort Saint-Jean : en effet, l’équipe scientifique dirigée par Michel Colardelle devra réviser sa copie en concédant une partie de ses espaces «à un exploitant privé à vocation culturelle (…) tandis qu’une exploitation mixte pourrait être envisagée pour l’espace d’exposition existant, sur le modèle de la programmation de la Grande Halle de la Villette.» Changement de cap donc pour la Tour du roi René et la Chapelle de la Commande qui, si elles forment l’un des éléments phare selon Stéphane Martin, devront être pour le MuCEM «un outil moins coûteux, voire une source de profit à moyen terme» en devenant «un lieu de patrimoine et de culture vivant et original, destiné à accueillir un très large public.» C’est pourquoi «le Fort Saint-Jean sera rendu aux Marseillais» selon le souhait de Jean-Claude Gaudin, le chantier de restauration, pris en charge à 100 % par l’État sur trois ans, étant le premier à démarrer concrètement courant mars. Ce sera chose possible puisque le Département des recherches archéologiques subaquatiques et sous-marines (Drassm) vient d’achever son déménagement à l’Estaque. Un groupe de travail se met en place pour réfléchir à des usages plus ou moins privatisés, en lien avec les activités muséales, qui permettront de limiter les coûts de gestion et de fonctionnement. Car c’est bien d’argent dont il est question face à l’explosion du budget prévisionnel passé de 144 millions d’euros en 2004 à 175 millions d’euros

Le MuCEM,

évolutions d’un projet Pour accoucher de cet «espace magique ouvert sur la mer», il aura fallu dix ans, cinq ministres de la culture, un plan de relance, l’Union pour la Méditerranée, et le titre de Marseille Capitale européenne de la culture 2013. Pour qu’enfin cette «réinvention du musée ethnographique» voie le jour en 2012… aujourd’hui. Un budget réparti entre le ministère de la Culture et de la Communication pour 60 % et les collectivités locales pour 40 % (Conseil général, Conseil régional et Ville de Marseille). Ce qui est une première ! Financer un Musée National par le biais des collectivités territoriales ne s’était jamais fait ! Les autres musées nationaux de cette ampleur sont des établissements publics parisiens, financés exclusivement par l’État, et leurs recettes propres. Le MuCEM se fait à Marseille à condition qu’un «établissement public de coopération culturelle» soit créé et que les collectivités territoriales le financent en partie, ce qui n’est pas le cas pour le Louvre, ou le musée d’Orsay, ou le musée du quai Branly… Ceci étant accepté, la seconde phase du «vrai redémarrage» aura lieu en septembre 2009 avec, si tout va bien -et il y a urgence-, les premiers coups de pioche du bâtiment de Rudy Ricciotti et ceux du Centre régional de la Méditerranée de Stefano Boeri.

Europe ou Méditerranée ? On doit cette soudaine accélération, explique Denis Chevallier, directeur adjoint du MuCEM, à Marseille Provence Capitale Européenne de la Culture 2013 qui «a permis de remettre en marche le projet.» D’autant qu’une équipe de quatorze personnes, installées à Marseille, oeuvre à sa préfiguration en offrant au public une visibilité des thèmes et des propos du futur MuCEM à travers des expositions… Il faut croire que les Marseillais ne sont pas indifférents puisque 200 000 d’entre eux ont répondu présent à ces divers rendez-vous.

Alors, comment se redéfinit aujourd’hui le projet muséal ? Selon les vœux de Christine Albanel et les préconisations de Stéphane Martin, il s’agit d’abord de nommer un administrateur ou «hommeorchestre» à la tête d’un organisme de préfiguration pour piloter ce changement de cap… Repositionnement du projet face aux nouveaux enjeux, redéfinition des axes thématiques (le religieux, la ville, l’environnement et le développement durable, les migrations, les relations hommes-femmes), poursuite de la campagne de recherche et d’acquisition, consolidation des partenariats locaux, nationaux et internationaux : la tâche sera rude. Notamment quand, comme le souligne Denis Chevallier, «le cœur du musée de société est de croiser et de nouer le dialogue dans l’espace euroméditerranéen.» Faut-il encore que cet espace soit circonscrit ! Car, lors de ses vœux au monde de la culture à Nîmes, Nicolas Sarkozy a entériné le projet du MuCEM comme «musée des arts et civilisations de la Méditerranée.» Et l’Europe, alors…? MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

(1) Stéphan Martin, Président-directeur général de l’établissement public du musée du quai Branly depuis le 30 décembre 1998. (2) Corinne Vezzoni, architecte des archives et de la bibliothèque départementales Gaston Defferre inaugurée le 8 juin 2006


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POLITIQUE CULTURELLE

CARNAVALS

Fin mars ou début avril, les villes entrent en Carnaval, appelant les populations urbaines à la fête et au déguisement. Loin des défilés de la Côte d’Azur, auxquels touristes et habitants assistent passivement, parqués dans des carrés délimités, certaines villes proposent aux citoyens de participer à la fête : en la préparant, en défilant, en se costumant eux-mêmes… S’agit-il de retrouver le «véritable» esprit de Carnaval ? Et d’où vient cette culture ? quel est son sens? Est-il judicieux d’y associer des Cies artistiques, des spectacles de rue ? Comment amener les populations à redevenir les maîtres d’œuvre de la fête de rue, qui, gratuite, leur est offerte ? Questions essentielles au moment où se concoctent les festivités de 2013… Par ailleurs, on peut se demander pourquoi rechercher l’esprit de Carnaval dans une société laïque ou plus personne (du moins les chrétiens et les athées…) ne pratique le carême. À quelle oppression cela sert-il aujourd’hui d’exutoire, de «Carnage» avant l’abstinence ? Pour répondre à cela un peu d’histoire, puis quelques rendez-vous ! A.F.

Carnaval, une histoire de fous! Rio, Venise, Dunkerque ou Nice, le Carnaval est devenu une récréation que même les écoles s’appliquent à célébrer. On est bien loin du modèle original, d’abord affaire religieuse! En premier lieu, sa date. Elle dépend de la fête de Pâques, fixée, depuis le Concile de Nicée en 325 ap. J.-C., au premier dimanche de la nouvelle lune qui suit le solstice de printemps (le 21 mars). Pour commémorer la mort et la résurrection du Christ, l’Église institua aussi le Carême -privation de nourriture pendant les 40 jours qui précèdent le sacrifice. Avant d’entrer dans le Carême, au Mercredi des Cendres, viennent Mardi Gras et le Carnaval. Celui-ci débute 3 jours avant le carême, mais parfois, selon les lieux, il commence à Noël ou à l’épiphanie... Évidemment les traditions païennes sont présentes dans cette fête, que l’on enracine bien volontiers dans les saturnales et les lupercales romaines. Mais ces rites du débordement et de l’excès s’inscrivent, par contraste et rejet lors du carême, dans le système de la pénitence chrétienne. D’ailleurs le terme même de carnaval n’est pas attesté avant 1195, en Italie. Il dérive probablement de carnelevare qui signifie «diminuer la viande» ou d’autres expressions similaires comme «charnage» qui indique que l’on mange de la viande avant d’en être privé.

Renversement, contestation et mise au pas En fait, le carnaval prend place dans une structuration du temps cyclique propre aux sociétés agraires. Dans un monde fragile, les communautés cherchaient des repères et des assurances. Le temps annuel, répétitif, se divisait alors en deux parties, calquées sur les contingences du travail agricole : un temps fort et dense rempli de labeurs et de fêtes ; un temps faible et dilué avec la mise en attente des activités agraires. La fête témoigne aussi des structures sociales et mentales du temps : carnaval, comme les «fêtes de fous», est

Le combat de Carnaval et Carême de Pieter Bruegel l'Ancien. Kunsthistorisches Museum de Vienne, 118x164,5 cm, 1559

le temps du renversement, de la contestation pour mieux affirmer la solidarité de la communauté. Ce sont les organisations de jeunesse qui jouent le rôle décisif. Déguisés, moqueurs, irrespectueux envers les adultes, les autorités et les mœurs, les jeunes pren-nent pour un temps le pouvoir dans un monde à l’envers ! Ces jours de ripaille, de «gras», sont marqués aussi par des concours de bâtons ou de couteaux où l’on met à mort coqs, cochons ou bœufs. Ces actes permettent d’éloigner symboliquement de la communauté les puissances infernales. Partout on joue ! Les dés et les cartes, bien sûr, mais aussi la soule qui oppose et soude les communautés ou les groupes d’âge. À ce temps de réjouissances et d’excès du monde

renversé, succède bientôt la mise en ordre. C’est le jugement de Carnaval : noyé, brûlé, il est souvent mis à mort. Carême triomphe et, avec lui, vient le retour de l’ordre. Il faut noter d’ailleurs que la fête urbaine -les mentalités sont différentes en ville- se sépare de celle des villages. Les excès, bien plus importants, convainquent progressivement les bourgeois de la nécessité de contrôler les débordements. À l’époque moderne, la foule devient spectatrice de défilés et mascarades organisés désormais par les autorités municipales. On l’aura compris, cette conception s’impose et donne aujourd’hui une fête où dominent les aspects joyeux et… économiques! RENÉ DIAZ


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Marseille, sous tous les angles

© Ville de Marseille

Pile ou face ? Non ! Pile ET face, c’est le jeu proposé cette année par le Carnaval de Marseille, un thème qui gomme d’emblée l’uniformité, qui mêle joyeusement tous les contrastes, toutes les contradictions qui constituent individus et sociétés. Le 4 avril, du Rond-point du Prado au parc Borely, c’est le défilé géant des huit cortèges des secteurs de Marseille qui marquera le grand final collectif, entre 15h30 et 18h, concocté par

Arles, art des rues

le metteur en scène Pierre Puigcerver de la cie Desiderata. Pour ce faire, chacun des huit secteurs est piloté par une cie, avec l’aide des associations de quartier, de particuliers bénévoles… Dans les 11e et 12e, Com’expression organise les activités sur le thème de Il était deux fois, prenant en compte la double personnalité des personnages des contes; Dans les 4e et 5e, la cie Chrysalides a travaillé sur le thème Pas de médaille sans revers ?, ou comment mêler les inséparables chance et poisse ; Dans les 6e et 8e, la C.M.E. entraînera tout le monde Pile en face de la liberté ; Dans les 2e et 3e, les Têtes de l’art abordent La cadence du double jeu ; Dans les 1er et 7e, Terre est mer nous affirme la Cie d’ici, avec deux rois/reines géant(e)s, une chèvre/sirène et un espadon/vache… ; Les 15e et 16e sont pilotés par la cie Charivari pour un dessous des cartes qui fera tourner la roue du Tarot ; Les 9e et 10e suivent la Cie des Zinvertimbrés pour une Biosphère party ; Quant aux 13e et 14e, ils seront les disciples de Moebius dans La communauté de l’anneau de Léda Atomica, bousculant la notion de temps et de cycles. Chacun sera présent pour faire du grand final une parade bigarrée et enjouée, jusqu’au Totem de l’arrivée, le baldaquin géant, symbole collectif d’union dans la diversité.

À Arles, carnaval et festival des arts de la rue se trouvent être, le temps d’un long week-end, très complémentaires, le carnaval clôturant cette grande fête. Des arts de la rue qui sont décidément très présents, de Drôles de Noëls au festival d’Objectif Rue, et qui offrent à tous des spectacles gratuits. Objectif Rue fait son carnaval, donc, mais avant il fait son festival, et commence par décentraliser le spectacle Le Tennis, de la cie du même nom, dans les villages de Moulès (le 19 mars à 10h), Raphèle (le 19 mars à 15h), Salin-de-Giraud (le 20 à 10h) et Mas-Thibert (le 21 à 15h). Dans les rues d’Arles, les festivités démarrent le samedi 21 dès 14h30 avec la cie Un de plus et les marionnettes humaines de son spectacle Trois, suivi des leçons du montreur avec marionnettes, de la partie de Tennis, du théâtre d’ombre de la cie Lunasol et du spectacle enflammé de Bilbobasso. Quant au Carnaval à proprement parler, rendez-vous le lendemain (dimanche 22), dès 15h30 sur le boulevard des Lices, pour une parade endiablée avec l’ensemble des compagnies, ainsi qu’un dragon de 20m de long et 10m de haut… Les Fatche d’eux clôtureront en chansons, après la crémation du Caramentran en fin de journée. 04 90 49 38 32

0810 813 813

Martigues m’as-tu vu ! l’insolite, l’autodérision. Partant sur une histoire un peu folle d’enfants prodiges de retour en ville après avoir vu et vécu des histoires particulières, tous les acteurs de ce projet incroyable ont inventé qui une boule à facette démesurée (vraiment !), qui un flipper géant, d’autres encore un juke box impressionnant… Quant aux Barjo five, du quartier de Bargemont, ils sont carrément lancé les Jackson five… Après ça vous aurez compris que ça va bouger, danser, lors de la Parade finale du 29 mars (départ à 15h du parking du Général Leclerc), jusqu’au Bal final sur le parking du Théâtre des Salins, qui promet quelques belles surprises !

Martigues a la grosse tête ! Ce n’est pas une accusation gratuite mais un fait avéré, et vérifiable ! Car la ville est en effervescence pour préparer son carnaval, dont, vous l’aurez compris, le thème est cette grosse tête qui fait qu’ils «se la racontent grave», dans un délire disco et freaks ! Mis en scène par la cie Madame Olivier, ce carnaval est porté par toute la population, par les maisons quartiers, les associations, qui travaillent d’arrache-pied à la construction de chars, bien sûr, mais aussi de costumes, ainsi qu’à l’invention d’une chorégraphie, mettant en synergie idées et savoirfaire dans une belle unité. Le projet artistique de la cie Madame Olivier permet à chacun de théâtraliser ses idées, dans la démesure, Mensuel gratuit paraissant le deuxième jeudi du mois Edité à 25 000 exemplaires Edité par Zibeline SARL 76 avenue de la Panouse | n°11 13009 Marseille Dépôt légal : janvier 2008 Directrice de publication Agnès Freschel Imprimé par Rotimpress 17181 Aiguaviva (Esp.) photo couverture © Agnès Mellon Conception maquette Max Minniti

carnaval 08 © photoclub martigues

Rédactrice en chef Agnès Freschel agnes.freschel@wanadoo.fr 06 09 08 30 34

Musique et disques Jacques Freschel jacques.freschel@wanadoo.fr 06 20 42 40 57

Secrétaire de rédaction Dominique Marçon journal.zibeline@gmail.com 06 23 00 65 42

Frédéric Isoletta f_izo@yahoo.fr 06 03 99 40 07

Éducation Chris Bourgue chris.bourgue@wanadoo.fr 06 03 58 65 96 Arts Visuels Claude Lorin claudelorin@wanadoo.fr 06 25 54 42 22 Livres Fred Robert fred.robert.zibeline@free.fr 06 82 84 88 94

04 42 44 31 51

Sciences et techniques Yves Berchadsky berch@free.fr Histoire et patrimoine René Diaz renediaz@free.fr

X-Ray x-ray@neuf.fr 06 29 07 76 39

Polyvolantes Maryvonne Colombani mycolombani@yahoo.fr 06 62 10 15 75

Cinéma Annie Gava annie.gava@laposte.net 06 86 94 70 44

Marie Godfrin-Guidicelli m-g-g@wanadoo.fr 06 64 97 51 56

Philosophie Régis Vlachos regis.vlachos@free.fr

Maquettiste Philippe Perotti philippe.zibeline@gmail.com 06 19 62 03 61

DOMINIQUE MARÇON

Ont également participé à ce numéro : Marie-Jo Dhô, Christine Rey, Pierre-Alain Hoyet, Delphine Michelangeli, Guilhem Bernard, Jordan Saïsset Photographe : Agnès Mellon 095 095 61 70 Responsable commerciale Véronique Linais vlinais@yahoo.fr 06 63 70 64 18 LA REGIE Jean-Michel Florand 04 42 49 97 60 06 22 17 07 56


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THÉÂTRE

LE MASSALIA | LA CRIÉE

Suite et fin de l’Entreprise À venir au Massalia En plus de la programmation d’El Gosto théâtre et des ciné concerts du Cartoun Sardines (voir ci-dessous) le Massalia, fidèle à ses proches, programme le Théâtre de Cuisine et la Cie belge Bronks. Deux valeurs sûres du Théâtre Jeune public ! Katy Deville met donc en scène un texte de Christian Carrignon, avec deux comédiennes danseuses à aux origines métissées : Louisa Amouche et Patricia Guannel se demanderont donc si C’est encore loin?, interrogeant les enfants à partir de 10 ans sur ce qu’est une identité culturelle… du 20 au 28 mars. Quant aux Bronks ils sont magiques ! Pascale Platel sait inventer comme personne des mondes décalés, tout près des mythes mais à portée de main… Là il sera question de Pignoufs… Jan, mélancolique, attend sa Reine de Saba. Et c’est une Blonde qui débarque, pas vraiment conforme… du 14 au 17 avril. A.F.

Théâtre Massalia 04 95 04 95 70 http://massalia.lafriche.org Silence © Christophe Raynaud de Lage

Opus 3 et 4 du quatuor hivernal proposé par François Cervantes et son équipe : reprise de l’excellente Table du fond, créée en 2006, et création de la suite, Silence. Deux courtes pièces consacrées au rapport entre l’école et la famille, entre ce qu’on apprend au collège et ce qu’on découvre par soi-même dans les livres et ailleurs, entre les mots d’une mère désemparée et le silence de son adolescent de fils. Rires et larmes, amour et haine, absence et retrouvailles, les deux spectacles mettent en scène un duo de choc. Nicole Choukroun est d’une grande justesse dans l’incarnation de cette maman aimante et perdue, qui se sent «immobile comme un bac de plantes à l’entrée des immeubles» ; dans le rôle pas toujours gratifiant d’une mère échevelée et claudicante, elle touche par son émouvante humanité, et sa force malgré tout. Quant à Stephan Pastor, encore une fois, bravo ! Dans La table du fond, il incarne, avec trois fois rien -un masque, une blouse grise, un nez postiche…-, tous les personnages que la mère rencontre au collège, du concierge au directeur en passant par les profs, dont celle de maths. Succès garanti auprès du jeune public et remarquable travail d’acteur, que l’on salue aussi dans Silence où il campe parfaitement l’ado gêné aux entournures. Mise en scène et scénographie séduisent également par leur simplicité inventive. Comme toujours dans les spectacles de L’Entreprise, on est plongé dans un univers de décors allusifs et très concrets en même temps : une salle de classe d’abord, un bar ensuite, l’une devenant l’autre, avec presque rien, mais on y est. Le texte est à l’avenant, proche de tous les publics, parfois trivial, souvent d’une poésie très contemporaine, qui fait voyager loin… C’est sans doute ça la magie Cervantes. FRED ROBERT

La table du fond et Silence ont été joués en mars au Théâtre Massalia à La Friche Belle de Mai

Savoureux mélanges

Théâtre d’Algérie Depuis deux ans la coopération interrégionale entre la Wilaya d’Alger et la Région PACA permet à la Cie de Ziani Chérif Ayad, El Gosto Théâtre, d’être régulièrement présente à La Friche (également au Sémaphore et aux Salins, voir p.19). Son théâtre ancré dans le réel et dans l’histoire algérienne, et sa suite de tragédies, de résistances et de révoltes, nous renvoie un autre écho de notre histoire à travers ce qui se passe dans ce pays frère, de l’autre côté de l’immigration, de la colonisation, de l’indépendance. L’Étoile et la comète, écrit en écho à Nedjma de Kateb Yacine, replonge dans les années 90, au cœur de la terreur islamiste, quand des femmes incroyablement courageuses défilaient à visage découvert… Tandis que le Café du bonheur remonte plus loin, des années 30 à l’indépendance, à travers un spectacle musical qui sera accueilli dans le cadre chaleureux des cabarets de la criée (pourvu qu’ils ne disparaissent pas avec la réouverture du Théâtre !). Un théâtre algérien contemporain qui porte des interrogations dramaturgiques particulières, liées à une tradition orale ; mais surtout une parole essentielle pour tous ceux qui ont là-bas une partie de leurs racines, et n’ont pas vraiment l’occasion d’écouter un théâtre qui en parle. A.F.

Faust © Monsieur Elian Bacchini

Le Cartoun Sardines fait son festival, et crée le 1er Festival CinéThéâtre au Théâtre Massalia. Comme son nom l’indique, c’est un savant mélange de cinéma -chefs-d’œuvre du muet en noir et blanc- et de théâtre, les comédiens jouant en direct avec le film. Ainsi Faust de Murnau (du 6 au 8 avril), Lulu de Pabst (du 10 au 12 avril) et Le Bonheur de Medvedkine (du 14 au 19 avril) s’en trouvent révélés, autant par les voix que par la musique improvisée, qui ajoutent une dimension supplémentaire aux images, les tirant souvent vers un comique qu’elles ne possèdent pas toujours, ou dont elles raniment la désuétude. Devant, derrière ou sur l’écran, les comédiens cabotinent et jouent une partition commune ; Lulu est plus vivante que jamais, le bonheur de Khmyr et Anna plus grinçant, parodique. Quant à Faust, il est bien sûr plus diabolique encore… DO. M.

1er Festival CinéThéâtre du 6 au 19 avril Théâtre Massalia 04 95 04 95 70 http://massalia.lafriche.org

Le café du Bonheur, chansons d’Algérie Du 7 au 9 avril La Criée (cabaret) 04 91 54 70 54 www.theatre-lacriee.com L’Etoile et la comète Les 10 et 11 avril Théâtre Massalia 04 95 04 95 70 http://massalia.lafriche.org L'Étoile et la comete © Yves Jeanmougin, Casbah, Alger 2003


MONTÉVIDÉO | LES BERNARDINES

THÉÂTRE

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Matière à discours

Deux hommes et un vagin

Vice-versa © Agnes Mellon

Bien gaillards, les trois petits jeunes du collectif Ildi!Eldi comme ils disent, vont au turbin avec entrain et sans rechigner, nous offrent 45 minutes de pur délire concoctées à partir de l’adaptation habile d’une nouvelle de Will Self, sérieux coquin des Lettres anglaises, connu pour ses frasques de haut vol (prise d’héroïne dans l’avion privé de John Major) et son humour à la Jonathan Swift. Vice-Versa c’est quoi ? Une farce de derrière la jambe, une belle satire qui tourne en boucle et qui à chaque passage, telle une pelote d’épingles, ramasse de nouveaux piquants qui vont grossir un sens dérapant: Mister Bull consulte / Le médecin diagnostique / La secrétaire commente / Le jeune et frais -comme son caleçon- rugbyman consulte pour une plaie derrière le genou / Le libidineux et tortueux Margoulis diagnostique la présence d’un joli petit vagin / La pétulante secrétaire meneuse de jeu commente et fait tourner la machine

avec son micro virevoltant. Rythme impeccable, acteurs malicieux qui jouent à jouer, étonnés eux-mêmes d’être si bons à ça (Sophie Cattani, François Sabourin et Antoine Oppenheim semblent jouir de la situation) et dispositif léger comme une table de dissection qui favorise la circulation des incongruités. «Que c’est bon d’être demoiselle...» distille et détaille la voix de la mutine Colette Renard pendant que le drame se noue... C’est grinçant et bien huilé, choquant et délicieux ; on aimerait dire tout ça en anglais of course ! MARIE-JO DHÔ

Vice-Versa de Will Self, adapté et mis en scène par le collectif Ildi/Eldi, a été présenté à Montévidéo du 17 au 25 février (créé à Actoral / Paris en 2008)

Nicole Yanni a créé le Théâtre du Petit Matin dans une ancienne menuiserie. C’est peut-être pour cela qu’aujourd’hui elle s’interroge sur le geste de l’artisan, de l’artiste, sur leur relation à l’objet, au produit. Du corps à l’ouvrage, présenté aux Bernardines, est le résultat d’une longue approche, d’un cheminement d’écriture. Nicole Yanni a d’abord filmé des artisans sur leurs lieux de travail ; parallèlement se tenaient des tables rondes d’artistes. Ensuite, une commande a été passée au jeune auteur Ronan Chéneau, dont les textes poétiques, fondés sur les répétitions et les échos rythmiques, disent la complexité d’une société capitaliste mondialisée et proposent des façons d’être dans ce monde, pour l’«aimer malgré tout maintenant, avec nous dans le chaos, avec tous ces objets». Sur le plateau, c’est la chronique du projet qui est donnée à voir. Vidéos noir et blanc des artisans, discussions ou monologues des artistes (4 comédiens, dont un incarne l’auteur en train d’écrire le texte du spectacle), échanges de courriels Yanni / Chéneau en voix off, régie à vue, le spectacle vise à montrer l’expérience : le travail des artisans rencontrés, qu’on voit tous en train de Du corps a l'ouvrage © Claudine Bertomeu

façonner la matière (viande, fleurs, bois de guitare, tissus et même boules de pétanque) ; celui des artistes en train de préparer le spectacle, qui s’interrogent sur ce qui reste de leur travail lorsque la représentation est finie. Tout cela donne un drôle de résultat, un peu atelier mal rangé. «Comment lier toutes ces choses ensemble ?» se demande d’ailleurs le comédien qui tient le rôle de l’auteur. Pourtant le spectacle fonctionne parce qu’il sonne sincère et que, sur fond de crise, il est tout entier une déclaration d’amour au monde d’aujourd’hui que les deux actrices, Céline Greleauet Maude Buinoud, remarquables, profèrent avec drôlerie au début et à la fin. Dans ce corps à l’ouvrage, ils ont mis tout leur cœur. FRED ROBERT

Du corps à l’ouvrage est créé aux Bernardines par la Cie Cela ne finira jamais jusqu’au 21 mars

À venir aux Bernardines Eva Doumbia poursuit son travail entre l’Afrique et la France, avec la mise en scène de deux textes africains On ne payera pas l’oxygène d’Aristide Tarnagda etLe Grand Ecart de Dieudonné Niangouna. Des acteurs de tous les horizons et origines se côtoient dans ce projet créé à Brazzaville puis Bamako, et les deux courtes pièces, où il est question de temps et de mort, sont jouées dans le même décor. Du 31 mars au 11 avril. Théâtre des Bernardines 04 91 24 30 40 www.theatre-bernardines.org


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THÉÂTRE

LA CRIÉE | LE GYPTIS | LE LENCHE

Des deux côtés de la folie

Debrayage © A. Fonteray

La Criée ouvre ses portes à Alfredo Arias, chantre d’un théâtre déjanté tout à la fois grinçant et joyeux, d’humeur carnavalesque. En commençant par son Cabaret Brecht Tango Broadway (du 19 au 21 mars) dans le hall accueillant aménagé en petit théâtre musical, pour un cabaret très music-hall, mais aussi politique, avec les songs de Brecht et Weill, et la mémoire populaire des trottoirs argentins et new yorkais, le tout porté par Sandra Guida et Alejandra

Radano, accompagnées au piano par Ezéquiel Spucches. Quant au spectacle Divino amore, il sera accueilli hors les murs au Gymnase (du 24 au 28 mars). Arias y explore la mémoire kitsch de la troupe romaine d’Origlia Palmi, mélangeant en un joyeux bric-à-brac les mystères chrétiens et le folklore gay… On y retrouvera les deux chanteuses, et la géniale Marilù Marini, dans un pastiche de revue avec paillettes, strass et déguisements colorés…

Une toute autre humeur prendra place au mois d’avril : le cabaret sera algérien (du 7 au 9 avril, voir p 10) tandis que la Friche accueillera à nouveau la programmation hors les murs, avec une pièce très intéressante de Rémi de Vos. Débrayage analyse en effet à travers une série de courtes saynètes les situations d’oppression du monde du travail en crise : chômage, rythmes infernaux, aliénations, intégration par les salariés du discours des patrons, conséquences dans la sphère privée, le couple et la famille. La société y est observée au scalpel, dans une écriture qui n’hésite pas à accélérer, à devenir féroce, à embrayer vers des moments de folie, surréalistes et drôles… La pièce est mise en scène par Eric Vignier, familier de l’écrivain. Écrite il y a dix ans, elle n’a rien perdu, hélas, de sa brûlante actualité… AGNÈS FRESCHEL

La Criée 04 91 54 70 54 www.theatre-lacriee.com

Star déchue Adapter Sunset boulevard pour la scène pouvait sembler un projet absurde : le film est un tel chef-d’œuvre, quel est donc l’intérêt de l’entreprise ? Pourtant cela fonctionne : parce que le huis clos de l’intrigue a effectivement quelque chose de théâtral, parce que Gloria, la star du muet dont il est question, avait un jeu très théâtral, et parce que la scénographie choisie par Jacques Hansen, un grand escalier où tout se joue, des images projetées sur un écran transparent, est à la fois cinématographique, stylisée, simple et belle… L’autre pari du spectacle était de miser

sur les points communs entre Françoise Chatôt et le personnage de Gloria. La comédienne parvient sans peine à faire sentir les côtés pitoyables de son personnage, pantin mécanique, décalé du réel, vivant d’illusions depuis toujours, et plus encore depuis qu’elle n’est plus belle, plus star, plus rien. Las, l’émotion ne parvient pas à franchir la rampe, parce que Françoise Chatôt, qui de fait n’est pas atteinte de la folie véritable de Gloria, ne peut en épouser naturellement les contours, et qu’en même temps elle ne construit pas son personnage, le metteur en scène ayant Gloria © F. Mouren-Provensal

visiblement misé sur des ressemblances tout à fait illusoires. Du coup Françoise Chatôt n’est pas Gloria, et ne l’incarne pas non plus. En face d’elle les autres ne peuvent pas jouer, et la pièce, malgré des éclairs, manque de force, de rythme, et d’intérêt. A.F.

Gloria est joué au Gyptis jusqu’au 21 mars

À venir au Gyptis Juste avant le spectacle de Musicatreize (L’Arbalète magique le 16 avril, voir p 33), le Gyptis continuera à soutenir les compagnies de la région en accueillant la cie varoise Uppercuthéâtre. Depuis 2006 son Caligula est régulièrement repris dans la région. La pièce de Camus sera jouée du 31 mars au 4 avril, dans une mise en scène de Laurent Ziveri remarquable, par sa scénographie, sa direction d’acteurs et son intelligence d’un texte acrobatique…

Caligula Théâtre Gyptis du 31 mars au 4 avril 04 91 11 00 91 www.theatregyptis.com

L’Algérie vue d’ici

Les Oranges © Agnes Fuzibet

Mars en musique est fini (voir p 37), la Cie du mini théâtre est en résidence à Alger, mais le théâtre du panier ne chôme pas pour autant ! Pendant que la Cie algéroise El gosto joue des textes de Ziani Chérif Ayad un peu partout dans le département (voir p 10), le Théâtre de la Mer, marseillais, reprend au Lenche Les Oranges, d’Aziz Chouaki, auteur algérien qui vit en France depuis 20 ans. Reprend et crée, puisqu’en 2005 Akel Akian avait monté la première partie, sur les envolées et soubresauts de l’Indépendance, vue et racontée par un homme-monde depuis son balcon. La seconde partie du texte, Akel Akian n’avait pu la monter, faute de temps, de financements… Elle suit le même fil, mais s’attache à l’Algérie algérienne, après le départ définitif des colons. Toujours porté par Belkacem Tir, comédien danseur attaché au Théâtre de la Mer depuis sa création. Car le théâtre de la mer a bientôt 30 ans, et depuis ce temps il n’a pas changé de cap, allant toujours vers ceux qui ne franchissent pas naturellement les portes des théâtres pour les aider à faire le pas. Qu’il puisse aujourd’hui monter ce second volet d’un texte magnifique, dans ce qu’il dit et dans sa dramaturgie particulière, est le couronnement d’un travail de terrain, et d’un parcours artistique en constante progression. A.F.

Les Oranges Mes Akel Akian 1ère partie du 31 mars au 4 avril 2nde partie du 7 au 11 avril Théâtre de Lenche 04 91 91 52 22 www.theatredelenche.info


LE GYMNASE | LE MERLAN | LA MINOTERIE

THÉÂTRE

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Molière est son voisin Depuis plus de vingt ans Philippe Car pratique un théâtre populaire singulier. Drôle, musical, sympathique et… bourré de talent. Le monde du théâtre est tel que, lorsqu’on se présente avec modestie, que l’on brise le cérémonial, qu’on s’adresse au public comme à des copains, qu’on ne dissimule pas le plaisir qu’il y a à être là, généreux, sur scène, mais qu’au contraire on renchérit, on attend les spectateurs en musique aux portes du spectacle, on remercie chacun… le monde du théâtre est tel donc, que cet enthousiasme, cette manière d’être réellement populaire nativement sans doute, éveille souvent la condescendance du «milieu». Pourtant le théâtre populaire de Philippe Car n’a rien à envier aux plus grands! Son Bourgeois Gentilhomme lui ressemble : c’est un clown touchant, décalé où il est, à côté de ses chaussures qui le blessent horriblement, mais qu’il garde parce qu’un tailleur pour gentilhomme les a faites pour lui. Adaptant sans complexe le texte de Molière comme on s’empare d’une intrigue commune, d’une histoire populaire, il en garde le plus comique : les scènes d’apprentissage où Jourdain se ridiculise, les doubles quiproquos des jeunes premiers, la grande «Truquerie»… Il y rajoute un jeu de marionnettes à taille humaine -magnifiques créations, très bien manipulées-, une musique sympa (malgré les vilains sons synthé) interprétée en partie en direct, beaucoup de références japonisantes, un jeu de clown constant, et le talent sans faille de Valérie Bournet. Ça marche, c’est beau et drôle, et on a rarement vu le public du Gymnase si enthousiaste! AGNÈS FRESCHEL

Le Bourgeois gentilhomme d’après Molière est créé au Gymnase jusqu’au 21 mars par l’Agence de voyages imaginaires

Le Bourgeois gentilhomme © Agnes Mellon

À venir au Gymnase Vous voulez connaître toutes les raisons de ne pas manquer Oncle Vania du 8 au 16 avril ? Et bien, d’abord, c’est une pièce majeure d’un auteur majeur, le moment où Tchékhov sait le plus parfaitement mettre en scène les conflits historiques dans une sorte de laboratoire intime, familial, avec des personnages d’une complexité qui n’enlève rien à leur évidence… Ensuite, c’est Claudia Stavisky qui dirige, une des plus grandes, des plus classiques, des plus sûres de nos metteurs en scène. Enfin, sur le plateau, il y aura Philippe Torreton en médecin (séduisant) malgré lui, mais aussi la délicieuse et âcre Agnès Sourdillon, l’inénarrable Didier Bénureau, et la très talentueuse Marie Bunel. Convaincus ?

Théâtre du Gymnase 0820 000 422 www.lestheatres.net

Ce que jouir veut dire Après ses spectacles autour des femmes (voir p 21) le Merlan propose un nouveau cycle, toujours autour des thématiques du corps : Sexamor s’interroge sur les relations entre le sexe et l’amour. Forcément liés ? Pas toujours ? Antinomiques ? Non… L’érotisme est-il toujours tabou au théâtre ? Le sexe, comme l’écrit Nathalie Marteau directrice des lieux, nous fait-il «accéder à notre être authentique», ou n’est-ce encore qu’un mythe, celui d’une authenticité tout aussi illusoire que celle de notre «être» (voir p. 56) ? Quelques réponses à ces questions surgiront peut-être, à travers un duo/ duel de Pierre Meunier (Sexamor, à partir de 15 ans), deux courts spectacles pour adultes de François Chaignaud et Cecilia Bengolea (Pâquerette et Sylphide, sur la pénétration et la réincarnation) et une expérience en tête-à-tête avec François Chaignaud (Aussi bien que

ton cœur ouvre-moi les genoux, lecture personnelle de sonnets érotiques, rue Grignan, sur réservation). Problématiques soulevées également lors d’un débat avec Marcela Yacub, une lecture de texte sur «La chose» par Pierre Meunier à L’histoire de l’œil, des projections… Sexamor Du 30 mars au 4 avril Théâtre du Merlan 04 91 11 19 20 www.merlan.org Sylphides © Donatien Veismann

Femmes de bois Dans le cadre du Mois de la femme, Pierrette Monticelli a la très bonne idée de reprendre La femme changée en bûche, qu’elle avait créé en 2007. Le texte de Marie N’Diaye est particulièrement savoureux : un de ces contes philosophiques où la rencontre avec le diable coïncide avec le surgissement d’un inexprimable désir, et où la punition, pour celle qui désira des escarpins rouges, et se complut en vengeance, est la pétrification. En bûche pourtant, qui flotte. Un texte très féminin, discret pastiche de Kafka, mais où il est question de maternité et d’abandon, du plaisir et de la douleur aussi de marcher sur des talons, de frôler les murs… Le monologue est porté avec modestie et sensibilité par la comédienne, et par

© D. Bouzon

les flûtes de Dominique Bouzon qui l’accompagnent joliment. A.F.

La Femme changée en bûche Du 26 au 29 mars La Minoterie 04 91 90 07 94 www.minoterie.org


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THÉÂTRE

AIX: JEU DE PAUME | LE 3BISF | LES ATELIERS

Tisser les textes

la chance de ma vie © Michele Laurent

Tisser ensemble des textes de Rémi de Vos, Fabrice Melquiot, François Monnié, les lier par une vraie écriture, celle de Valérie Grail qui fait aussi la mise en scène, filer une intrigue -celle d’une audition où le texte de chacun est un fragment de ce qu’il est- pouvait

sembler une bonne idée. Parce que ces écritures sont fortes, parce que les comédiens choisis sont excellents, parce que la mise en abyme du métier d’acteur, complété par un regard sur ses conditions de travail, et la marchandisation de la condition d’artiste (audition

ou casting ?) est un projet intéressant. Las le tout ne fait pas texte. Pour tisser il faut avoir du métier, et sans doute un matériau moins disparate. Des moments surnagent, magnifiques, séquences de textes drôles, cruels, véritables, critiques du monde du spectacle, de ses snobismes et des désirs de midinette qu’il suscite, apologie de ses enthousiasmes aussi, face à la beauté… Mais le tout est décousu, pour filer la métaphore de lingère. Vraiment dommage. Parce que ça peut donner au public peu familier de ces écritures l’idée qu’elles ont peu de sens ; mais surtout parce qu’on sent qu’avec une vraie tension dramatique ces acteurs-là et cette mise en scène auraient pu faire des merveilles. On frôle le montage de textes façon atelier de théâtre, ou spectacle de sortie d’école…

La Chance de ma vie a été joué du 10 au 14 mars au Jeu de Paume

À venir au Jeu de Paume Rouge Carmen, de Juliette Deschamps, la fille. Si l’opéra demeure la plus connue des œuvres lyriques françaises, la nouvelle de Mérimée qui l’inspira l’est un peu moins. Juliette Deschamps a concentré l’action sur la fin de l’histoire, l’ultime rencontre de Don José et de Carmen, et a imaginé une pièce musicale en 11 tableaux, sur fond de flamenco. Sur scène un groupe de 5 musiciens, dont Antonio Moya, redonne au drame une couleur moins opératique : le flamenco prit son essor à peu près à cette époque là, quand Mérimée inventait sa cigarière… du 24 au 28 mars.

AGNÈS FRESCHEL

Nouveau chantier métissé L’expérience qui consiste à montrer au public un chantier de création est toujours périlleuse. Eva Doumbia (La Part du pauvre) et Claudia Schapira (Nucleo Bartolomeu) l’ont vécue l’autre jour au 3bisf à Aix où elles présentaient les prémices de Je t’écris... le métissage ne s’arrête t-il pas où commence l’oubli (du voyage) ? Un état de création plein de promesses, bourré de bonnes intentions et de belles idées, même si sa forme actuelle devra se débarrasser des scories dues à sa jeunesse : un rythme qui s’essouffle, quelques longueurs et certains caractères stéréotypés (la droguée, la paumée…). «Il y a encore trois semaines, il n’y avait rien, explique Eva Doumbia en introduction à la présentation, sauf des gens, un auteur, des musiciens, un propos et des questionnements. C’est un processus de «digestion» que l’on restitue ici.» Car le projet est plus vaste encore, véritable aventure artistique et humaine au long cours déployée sur plusieurs années et territoires, entre la France et le Brésil. Sur le plateau, acteurs-chanteurs et musiciens racontent des tranches de vie coupées et décalées (pour reprendre l’une des danses de l’Afrique de l’Ouest) mises bout à bout, traversées des mêmes sentiments de solitude que l’on soit à Alger ou à Sao Paulo, au Rwanda ou à Marseille. L’exil, l’identité, la fratrie, l’abandon, l’oubli, l’amour : des thèmes universels habitent France,

Gladys, Christine ou Ibrahim… Si l’ensemble est encore un peu décousu, ces destins croisés entaillés d’une même cicatrice devraient vite trouver le bon tempo pour parler d’une seule voix. Tout en conservant leurs multiples accents. MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

Je t’écris... a été présenté le 27 fév au 3bisf à Aix

© Luaa Gabanini

Pas si décevant ! Aux Ateliers on fait du théâtre avec le cœur, et ça se sent. Le public se serre sur les bancs inconfortables, heureux d’être là, et ça cause avant, après, dans Tout le monde est une deception totale, Alain Simon et Emma Gustafsson © X-D.R.

le hall étroit. La relation qui s’instaure entre les comédiens et ceux qui les regardent est précieuse, immédiatement chaleureuse, pas un brin dans la consommation. Ce soir-là, le spectacle qui se jouait n’était pourtant pas des plus faciles : les aphorismes antisociaux de Giorno, new yorkais road writer, étaient assénés, dédoublés, repétés sur un mode systématique, déstructurés encore eux qui déjà ne manquaient pas de dynamite. Alice Chenu, petite comédienne butée, concentré d’énergie, les deux danseurs qui occupaient l’espace des mots de la grâce de leur corps (décidément Emma Gustaffson est d’une rare splendeur) étaient mis en scène

par Alain Simon maître des lieux, qui faisait lui même quelques apparitions décalées, comiques, parmi ces jeunes gens. Tout le monde est une déception totale, disait le titre : le constat est radical, mais le spectacle, désordonné comme le monde, violent comme lui, était porté par un esprit de résistance aux conventions théâtrales et sociales. L’avenir n’est pas si noir ! A.F.

Tout le monde est une déception totale, d’après John Giorno, mis en scène par Alain Simon, a été crée aux Ateliers (Aix) du 16 au 20 fév


KOMM’N’ACT | AUBAGNE | THÉÂTRE ET CHANSON | CHÂTEAUVALLON

Jeune création européenne Le deuxième volet de Komm’n’act aura lieu du 14 au 21 avril : l’occasion de voir le travail de création de jeunes européens dans 5 lieux de Marseille (La Minoterie, les Bernardines, Histoire de l’œil, la Compagnie et Montévidéo). C’est donc par la mise en synergie que cet événement peut avoir lieu, qui permettra de voir 9 propositions : 1 régionale (Charles-Éric Petit) 2 autres françaises (The kisses cause trouble et Benjamin Bodi) et 5 européennes (Slovenie, Espagne, Allemagne, Portugal, Autriche), plus la création des lauréats de Komm’n’act 01, qui avait eu lieu en

2006 au Théâtre Vitez (Aix). Création de Paulo Guerreiro, Marion Abeille, Geoffrey Coppini qui ont répété en résidence au Théâtre Durance (04), à la Tannerie de Barjols (83) et à la Minoterie. Beaucoup de performances, de la vidéo, du numérique, un peu de musique binaire et de danse minimale, et pas de texte au programme. L’avenir du théâtre n’est pas forcément là, mais ce n’est qu’en y allant que vous en aurez le cœur net !

THÉÂTRE 15

Deux Isabelles pour Rimbaud

A.F.

www.komm-n-act.com Et toi tu marcheras dans le soleil © Christiane Robin

L’humain en question Issu d’un travail de recherche de deux ans sur les ouvrières des manufactures de tabac de la Belle de Mai, Carmenseitas, le spectacle d’Edmonde Franchi évoque l’histoire de la Seita, convoque la mémoire de ces femmes «oubliées» de l’Histoire, et plus généralement la disparition d’un monde ouvrier (voir Zib 15). Sans oublier le chœur de l’Académie du chant populaire, dirigé par Alain Aubin (voir page 30), qui ponctue musicalement toutes ces scènes de vie. Le 28 mars. À noter que le spectacle est aussi joué le 5 mai au Sémaphore à Portde-Bouc (04 42 06 39 09). En partenariat avec la cie tunisienne

Radhedh, La cie Alzhar s’empare de l’œuvre de. Koltès, Dans la solitude des champs de coton, dans une mise en scène de Jeanne Poitevin. Heykel Mani et Maxime Carasso campent les deux protagonistes inséparables d’un deal, métaphore sensible et troublante des échanges humains en général. Le 17 avril. DO.M.

Le Comœdia, Aubagne 04 42 18 19 88 www.aubagne.com

Carmenseitas © Agnes Mellon

Spectacle Rimbaud… L’occasion de retrouver des textes que l’on aime, la ferveur d’Isabelle Bloch-Delahaie qui interprète les poèmes mis en musique par Léo Ferré… Et c’est la respiration du chanteur poète disparu qui nous reprend, avec ses pauses, ses sons étouffés, son approche du monde lyrique, passionnée, sensuelle … Mais il y a aussi les créations de la chanteuse, sept, toutes intéressantes dans leur lecture juste et enthousiaste des textes. Isabelle, sœur d’Arthur, croise ses lettres avec celles de son frère, chacun s’approchant du génie, même si l’une l’ignore tandis que l’autre le vit... Le spectacle mélange les genres, les atmosphères, passant de la sensible interprétation en duo de

Sensation aux emportements sublimes du Bateau Ivre. Incandescence affirmée, voulue, Isabelle BlochDelahaie brûle ici d’une émotion qui entraîne son équipe, (Mathieu Ravera, magnifique au piano, à la guitare et dans les duos) dans une théâtralisation sobre et efficace. Un beau spectacle, qui ne triche jamais. Aux rappels, les bouquets embaument, ça sent le mimosa, et on emporte ce parfum avec soi comme des échos de poèmes… MARYVONNE COLOMBANI

Et toi tu marcheras dans le soleil jusqu’au 22 mars Théâtre et chanson, Aix 04 42 27 37 39

Sur les hauteurs Sur les hauteurs de Toulon se trouve encore le CNCDC de Châteauvallon… avec son histoire mouvementée, ses paradoxes… actuellement en difficultés à cause de son statut ambigu hérité des oppositions avec l’ex-mairie FN… Pays Lointain © Les Possedes

mais aussi à cause d’une communication opaque, et d’une illisibilité quasi constante de sa programmation. Pourtant elle est irréprochable et ses salles sont souvent pleines, et plus encore ses spectacles d’été, dans la magie de son amphithéâtre face au soleil couchant ! Il ne manque donc pas de raisons pour aller à Châteauvallon : parce que Buffard y passe comme ailleurs ((Not) a love song le 23 mars, voir page 21) ; parce que Lagarce surtout, et un de ses plus beaux textes : Le Pays lointain, ultime, posthume même. Le constat tragique d’une jeunesse épuisée, qui vient régler ses dernières affaires familiales, mais est habité encore d’une bouleversante envie de vivre. Un texte que la Cie Les Possédés porte avec force… sur les hauteurs ! A.F.

Châteauvallon (83) 04 94 22 02 02 www.chateauvallon.com


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THÉÂTRE

MASSALIA | GRASSE | CHÂTEAU-ARNOUX | CAVAILLON

La terre et le ciel Le problème avec le théâtre d’objet est que sa poésie est fragile. Lorsqu’il manque de magie, d’esprit mutin, la fraîcheur enfantine qu’il transporte peut dégénérer en infantilisme mièvre. Ce n’est pas tout à fait le cas avec Première neige : des moments tendres, la grâce de la danseuse, une belle opposition entre le terrien et l’aérien permettent d’éviter le pire. Mais on le frôle, à plusieurs endroits, faute d’écriture… Car dessiner deux traits sur une feuille transparente, faire couler de l’eau, tomber de la neige, ne suffit pas à alléger un jeu qui ressemble à s’y méprendre à ceux des enfants dans les cours de récré. Qui font semblant, et s’en délectent, mais ont du mal à comprendre que les

adultes en fassent autant eux qui, à leur âge, ne sont plus censés se déguiser en Blanche Neige ou s’écrouler quand on fait «Pan» avec un revolver à deux doigts… Mais le spectacle reste joli, et il suffirait peutêtre d’un rien, d’une grâce de plus, d’une accélération, pour qu’il décolle…

Première neige à été joué au Théâtre Massalia du 13 au 17 mars, puis sera repris à Arles le 18 mars, aux Comoni (le Revest-les-Eaux) les 24 et 25 mars, au Théâtre Durance (Château-Arnoux) le 1er avril, et au Vélo Théâtre du 2 au 4 avril Premiere Neige © Velo Theatre

Encloses

Rocambolesque Place à la parole poétique, démesurée, subversive de Rodrigo Garcia, que l’Interlude Théâtre/Oratorio transpose dans un théâtre musical énergique et imagé Jardinage humain, comme nombre de textes de Rodrigo Garcia, brosse un portrait sans concession d’une société de consommation annihilante, dont on subit, encore et toujours, les effets dévastateurs sur la pensée. Ici ce ne sont pas les jardins qu’on cultive, mais bien l’humain, par le biais d’un zapping qui survole les enfants, les chiens, l’économie, le foot («On peut apprendre à jouer au foot dans n’importe

quel coin, mais on peut aussi apprendre à lire, à écrire et à penser dans n’importe quel coin.»), les téléphones portables… En 49 fragments, 3 listes et 18 dessins, sous-titre de la pièce, Eva Vallejo (à la mise en scène) et Bruno Soulier (pour la musique) entremêlent habilement texte et musique, dans un concert rock décapant. DOMINIQUE MARÇON

Jardinage humain © X-D.R

Jardinage humain le 31 mars Théâtre de Grasse (06) 04 93 40 53 00 www.theatredegrasse.com Casa de Bernarda Alba © X-D.R

le 3 avril Théâtre Durance, Château-Arnoux (04) 04 92 64 27 34 www.theatredurance.com

Réaliste Drôle d’histoire, embrouillée et terrible, que nous conte Les Ateliers de la Colline. La Tête à claques c’est Stef, ou Mika, pas facile de démêler cela, ils sont jumeaux. Pour leur 12e anniversaire leur maman avait préparé un grand repas, qui n’a pas eu lieu. Et pour cause : l’un des deux avait été accusé d’avoir Tete a claques © Lou Herion

provoqué des incendies, et arrêté le jour même… Douze ans après les voilà réunis autour d’un festin où sont conviés de drôles d’invités, des poupées fabriquées au fil des années, qui les aideront à débrouiller le récit épique de leur vie. Coupables ? Boucs émissaires ? Seule certitude : ils ont été mis au ban du petit village dans lequel ils vivent, et stigmatisés dès leur plus jeune âge, subissant une histoire qui les dépasse. Auteur et metteur en scène, Jean Lambert offre un texte très humain, loin de tout misérabilisme. Pour enfants à partir de 9 ans.

La Casa de Bernarda Alba est peut être le chef-d’œuvre de Garcia Lorca. Posthume, terriblement pessimiste, écrite en 1936 quand le franquisme gagnait et détruisait tous les rêves, elle met en scène une aristocratie espagnole provinciale repliée sur des a priori de caste, un enfer de religiosité, une pruderie qui empeste la perversité. Les huit femmes enfermées dans leur huis clos volontaire y sont atroces de désirs refoulés. La Piccola Compagnia della Magnolia, en résidence au Théâtre Durance, montre cette mécanique, cette inhumanité si pure et belle grâce à des masques, des maquillages, des marionnettes. Une façon de mettre à distance, et de s’adresser aussi aux plus jeunes, à travers ce chef-d’œuvre tragique. A.F.

DO.M.

Tête à claques le 14 avril Scène Nationale de Cavaillon (84) 04 90 78 64 64 www.theatredecavaillon.com

La Casa de Bernarda Alba le 27 mars Théâtre Durance, Château-Arnoux (04) 04 92 64 27 34 www.theatredurance.com


AVIGNON | DRAGUIGNAN

Criante vérité

Réveillons-nous ! qui s’était formé au sein du Sonderkommando, il fut probablement tué lors de la révolte d’octobre 1944. Un texte laissé «en souvenir pour le futur monde de paix afin qu’on sache ce qui s’est passé ici […] Puisse l’avenir prononcer son jugement sur la base de ses notes, puisse le monde y apercevoir au moins un pâle reflet du monde tragique dans lequel nous avons vécu…» Alain Timar met en scène ce texte bouleversant, dans lequel s’immerge le comédien François Clavier. Dans un esprit plus léger, la cie STAR Théâtre plonge dans l’univers de Dickens avec Scrooge, d’après Un chant de Noël, et force masques et marionnettes. Et Anne Mauberret qui joue tous les personnages avec brio.

Francois Clavier © Coco Felgeirolles

Coédité par le Mémorial de la Shoah et les éditions Calmann-Lévy, Des Voix sous la cendre est un recueil de textes poignants, témoignages terribles de Sonderkommando (équipe spéciale) constitué de juifs, détenus du camp d’Auschwitz-Birkenau, contraints de décharger les chambres à gaz et de brûler les cadavres. Parmi ces voix, celle de Zalmen Gradowski, dont un carnet d’écrits fut découvert en mars 1945 lors de fouilles effectuées près du crématoire III de Birkenau, à l’intérieur d’une gourde allemande en aluminium fermée par un bouchon en métal. Membre très actif du mouvement clandestin

Mystère visible

THÉÂTRE 17

Le printemps s’annonce, et pour l’accueillir comme il se doit, la jeune grenouille Ranelot se précipite chez son meilleur ami Bufolet le crapaud. Les deux compères vont alors vivre des événements qui vont transformer les petites choses de la vie en aventures, avec humour et complicité. Sophie Museur, du Théâtre des 4 mains/ Canard Noir adapte le conte d’Arnold Lobel, où trois comédiens/manipulateurs de marionnettes évoluent dans un décor champêtre au plus près des spectateurs… À partir de 3 ans. DO.M.

Ranelot et Bufolet Théâtre des 4 mains Le 18 avril Théâtre des Doms (Avignon) 04 90 14 07 99 www.lesdoms.be

DO.M.

Une voix sous la cendre mes Alain Timar Du 26 au 29 mars

Ranelot et Bufolet © X-D.R

Scrooge Cie STAR Théâtre Les 15 et 16 avril Théâtre des Halles, Avignon (84) 04 90 85 52 57 www.theatredeshalles.com

Morale de l’histoire

Images vidéo, musique, lumières… Mis en scène par Jean-Louis Kamoun, Le Petit Prince est ici réinventé, tout droit sorti de l’imaginaire de l’aviateur, qui convoque aussi le businessman, l’allumeur de réverbères, le renard… Effets spéciaux, images animées (Olivier Durand) se substituent parfois au texte, les comédiens jouant aussi avec ce décor mouvant ou fixe très coloré. La beauté du texte n’en est que plus évidente.

Puis le Théâtre du Kronope -de retour au Chêne Noir après Knock, Le Bossu et Le Malade imaginaire-, se servant de boîtes à histoires musicales comme d’un coffre aux trésors, mettra en jeu les Fables de La Fontaine. Un théâtre où les masques et les costumes entraînent petits et grands dans l’univers grinçant et féerique du Loup et l’Agneau, La Cigale et la Fourmi, Le Lion et le Rat… DO.M.

DO.M. On ne badine pas avec l'amour © Manuel Pascual

Le petit Prince Les 15 et 17 avril Théâtre du Balcon , Avignon (84) 04 90 85 00 80 www.theatredubalcon.org Le Petit prince © X-D.R

Créée en 2005 au Théâtre du Chêne noir par Gérard Gélas, On ne badine pas avec l’amour est reprise pour un soir dans la salle avignonnaise. Il signait là une mise en scène alerte, jouant sur le décalage entre costumes d’époque, décors contemporains (et modulables, démultipliant les points de vue et les espaces) et airs jazzy, et s’appuyant sur le jeu impeccable des comédiens. Mélange savoureux et jubilatoire.

On ne badine pas avec l’amour le 2 avril Les Fables le 15 avril Théâtre du Chêne Noir, Avignon (84) 04 90 82 40 57 www.chenenoir.fr

En quête du père Douze ans après sa création, Wajdi Mouawad remonte Littoral. Une nouvelle mise en scène, avec une nouvelle équipe, la cie Au carré de l’hypoténuse, et le souci de ne pas trahir celui qu’il était alors, de «rester vivant et redonner à l’histoire sa présence.» Une histoire toujours ancrée dans la mémoire, la filiation, l’amour et l’exil, qui raconte le voyage initiatique d’un jeune garçon «qui cherche un lieu de paix pour la sépulture de son père.» Au cours de son périple, au Liban, il rencontre une fille en colère, qui a perdu le sien il y a longtemps. Deux réalités vont se confronter, qui l’aideront à se découvrir, à comprendre l’histoire d’une guerre qu’il porte en lui

mais qu’il ne connaît pas. Wajdi Mouawad est l’artiste associé du prochain Festival d’Avignon. DO.M.

Littoral Wajdi Mouawad Le 17 avril Théâtres en Dracénie (Draguignan) 04 94 50 59 59 www.theatresendracenie.com


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THÉÂTRE

OUEST PROVENCE | AIX | ARLES

Illégitime loi ? Marie-José Malis vient de créer Le prince de Hombourg à Toulouse et Montpellier : son spectacle arrive à Aix et Arles, encensé par la critique… Il faut dire que la metteur en scène a fait appel, pour la traduction adaptation, à Alain Badiou, philosophe qui sait expliciter les rapports entre passion et raison, légitimité et légalité. Ces deux conflits sont au cœur de la pièce de Kleist, marquée dans la mémoire collective française par l’interprétation très sentimentale de Gérard Philipe. Marie-José Malis voulait renouer avec sa dimension politique, et réfléchir au rapport du héros à la loi, qui le dépasse en un sens par sa puissance (la raison du plus fort…) mais qu’il domine par la légitimité, ou la beauté de ses actions. La pièce de Kleist met en effet en jeu un prince emprisonné pour avoir gagné

une bataille… en contrevenant aux ordres de l’Électeur de Brandebourg. Chacun veut le sauver, surtout Nathalie, fille de l’Électeur mais bien sûr amoureuse du héros. Ceci dit même le peuple, l’armée, les ministres désirent sa grâce… Même le destin (l’inconscient ?), qui s’exprime dans de belles scènes nocturnes. Seule la Loi le condamne, Loi qu’il intègre d’ailleurs, qu’il approuve… Marie-José Malis n’a donc pas voulu faire de cette pièce une apologie de la résistance à l’injustice, mais une réflexion sur l’exception, la dérogation… en cherchant un jeu contemporain «naturel», y compris dans ses débordements romantiques. Mais sans rien

enlever à sa longueur : 3h20 sans entracte. Quand on aime le théâtre on ne compte pas le temps ! AGNÈS FRESCHEL

Le Prince de Hombourg Von Kleist Mes Marie José Malis Théâtre Vitez (Aix) Les 2 et 3 avril 04 42 59 94 37 www.theatre-vitez.com Théâtre d’Arles Les 7 et 8 avril 04 90 52 51 51 www.theatre-arles.com Le Prince de Hombourg © Francois-Xavier Tourot

Sur le pouce

Sartre et Sarraute

Tout le monde connaît le Petit Poucet, le plus petit de la fratrie mais le plus malin, et donc le seul à pouvoir sauver ses frères de l’horrible fin promise par l’Ogre et les ramener à la maison les bras chargés d’or et d’argent… La cie italienne Accademia Perduta/Romagnia Teatri rend compte de l’univers noir du conte de Perrault. Seul en scène, Claudio Casadio campe le

décor, manipule des objets qui, entre ses doigts, donnent vie à tous les personnages. DO.M.

Le Petit Poucet mes Gianni Bissaca Le 7 avril Théâtre de Fos 04 42 11 01 99

Leçon de vie Les Mains sales © Synchro X

Guy Pierre Couleau a créé à Gap une très belle version des Mains Sales, de Sartre (voir Zib 15), particulièrement pertinente dans ces temps où la gauche tente de toute part de se refonder… Une histoire d’alliance, de trahison et de pureté rendue parfaitement par des comédiens rompus à cette langue théâtrale didactique, mais puissante. Pièce savoureuse de Nathalie Sarraute, Pour un oui ou pour un non s’enroule autour de ces quelques mots anodins: «C’est bien… ça» Si ce n’est que le ton, comment dire, condescendant ? va déclencher, chez les deux amis qui se retrouvent après s’être «un peu» perdus de vue, une joute verbale d’une grande richesse. Non-dits explicités, sousentendus ressassés s’invitent dans cette conversation où la communication s’expose dans son impossibilité à circonvenir l’éprouvé. Dans l’adaptation

en langue des signes de l’International Visual Theatre, mis en scène par Philippe Carbonneaux, les rôles sont joués pour la première fois par deux femmes, deux comédiennes sourdes (Emmanuelle Laborit et Chantal Liennel) doublées par deux comédiens masculins. Un double langage, une double identité qui restitue l’écriture de Nathalie Sarraute. DO.M. ET A.F.

Les Mains Sales le 10 avril Pour un oui ou pour un non le 14 avril Théâtre de l’Olivier (Istres) 04 42 56 48 48 www.scenesetcines.fr

Immense succès et imposture littéraire, qui valut à son auteur Emile Ajar/ Romain Gary d’obtenir son second Prix Goncourt en 1975, La Vie devant soi est aussi un succès théâtral, l’adapLa Vie devant soi © Agence Enguerand

tation de Xavier Jaillard ayant d’ores et déjà remporté les Molières 2008 du meilleur spectacle de théâtre privé, de la meilleure adaptation et de la meilleure actrice pour Myriam Boyer. Cette dernière incarne bien sûr Madame Rosa, ancienne prostituée au grand cœur, juive déportée à Auschwitz et qui s’est occupée d’enfants «nés de travers», comme le jeune Momo, qui vit avec elle depuis l’âge de trois ans. Un face à face qui révèle avec beaucoup d’émotions la tolérance et l’humanité des personnages. DO.M.

La Vie devant soi mes Didier Long le 2 avril Théâtre de la Colonne (Miramas) 04 90 58 37 86 www.scenesetcines.fr


PORT-DE-BOUC | MARTIGUES | NÎMES

Ailleurs, la curiosité

qui allie à la fois la musique, le théâtre, la danse et les images, mêlant le théâtre arabe traditionnel et les techniques modernes. Enfin, seul en scène, et à la manière d’un conférencier, Tiago Rodrigues racontera sa rencontre avec la ville de Beyrouth, oscillant entre conte philosophique et fantastique (L’Homme d’hier, les 26 et 27 mars) : un voyage où il rencontre son ombre projetée dans toutes les époques de la ville, et comme arrêtée à ses différents traumatismes…

THÉÂTRE

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Dorin en clowns

DOMINIQUE MARÇON

Mare Nostrum Du 24 au 28 mars Le Fou © X-D.R.

Pour la 2e édition de Mare Nostrum, temps fort qui rassemble des propositions théâtrales et musicales des pays du pourtour de la Méditerranée, le Théâtre des Salins reçoit, pour le théâtre, les metteurs en scène algériens Ziani Cherif Ayad et Taoufik Jebali, et le flamboyant acteur portugais Tiago Rodrigues. Le Café du bonheur, accueilli en partenariat avec Le Sémaphore, se jouera le 25 mars dans le bar «Paradis» (quartier Saint-Roch), à Martigues, la veille au restaurant «Le Marakkech» de Port-de-Bouc. Des lieux propices à la rencontre et à la convivialité, où deux grands artistes algériens, Mohammed Boualleg et Tarik Bouarrara raconteront l’histoire de leur pays. Entre théâtre et music-hall, sketchs et chansons humoristiques, le spectacle fait renaître l’histoire populaire des chansonniers, des années 30 à l’indépendance. Le Sémaphore accueillera par ailleurs L’Étoile et la comète, création de Areski Mellal mise en scène par Ziani Cherif Ayad (les 27 et 28 mars, voir également p 10). Le 25 mars, au Théâtre des Salins cette fois, Taoufik Jebali met en scène Le Fou de Khalil Gibran, dans un spectacle

À venir aux Salins Le 3 avril (annulation de la représentation du 4) Yannick Jaulin contera ses démons, ceux d’un homme «qui aimait tellement les histoires qu’il s’est fait avoir par l’une d’elles.» Leçon de vie d’un Terrien dont on suit le parcours pas à pas, d’une enfance rêveuse à l’enrôlement dans une secte… Les 16 et 17 avril les deux volets de Je Tremble seront sur la scène de Martigues. Ce n’est pas le meilleur Pommerat, et le second volet surtout traîne en fantasmes. Mais c’est du Pommerat tout de même, avec ses éclairs de lumière, d’émotion, de révolte. De génie ? Théâtre Les Salins (Martigues) 04 42 49 02 00 www.theatre-des-salins.fr Théâtre Le Sémaphore (Port-de-Bouc) 04 42 06 39 09 www.theatre-portdebouc.com

En habits de parade «On a tous les jours 20 ans» proclame le Théâtre Le Sémaphore depuis le début de la saison. Une vingtième saison au cours de laquelle on retrouve, au fil des spectacles, les compagnons fidèles, à l’image de la cie Agence de voyages imaginaires de Philippe Car ou encore Jean-Louis Hourdin qui seront présents pour la soirée anniversaire. Une véritable

fête, puisque le Théâtre sera investit dès 18h30 par les comédiens de l’Agence, en fanfare avec Wonderbrass et avec d’autres surprises dont un buffet, un cabaret imaginaire… Puis JeanLouis Hourdin jouera Ça respire toujours avec Pierre Henri et Éloïse Brunet, un spectacle en hommage à l’oralité, à Dario Fo et à Franca Rame, au théâtre et à ses divers artisanats… Précédemment, en coréalisation avec Fracas © X-D.R. les centres sociaux Nelson Mandela (le 14 avril) et Jacques Brel (le 15 avril), Pierre Henri, aven-turier de la langue accompagné de l’accordéoniste Patrick Fournier, jouera Fracas, hommage à l’art du verbe. DO.M.

Philippe Dorin © Leila Bousnina

Michel Froehly et sa cie L’heure du loup sont des familiers de l’écriture de Philippe Dorin. Ils ont monté ensemble un pertinent Bouge plus !, un impertinent Christ sans hache…, les autres auteurs qu’ils affectionnent sont Valletti ou Dubillard. C’est dire s’ils aiment la belle langue de théâtre ! Avec One two one two three four (oui oui ce compte que font les musiciens pour partir en mesure), ils continuent à adjoindre musique et texte, pour un spectacle tout à fait singulier. Une épopée de cinq personnages, joués par trois acteurs, qui partent on ne sait où, périplent, discutent, comptabilisent le réel, s’engueulent, repartent, rencontrent d’autres gars, et s’interrompent pour des moments de poésie tout à fait incongrus. Les comédiens, l’un cabotin, l’autre féroce, et la troisième vive comme une pétarade retenue, jouent avec le public, hilare, complice, diablement bien intentionné du Périscope. Un joli moment de théâtre convivial, dont on ressort sans trop savoir ce qui s’y est passé, en regrettant la musique pas à la hauteur, mais en ayant trouvé là l’ambiance qu’on aime dans les salles de spectacle : celle du partage, de l’étonnement, et de l’énergie décalée du réel. AGNÈS FRESCHEL

Soirée anniversaire le 17 avril Théâtre Le Sémaphore, Port-de-Bouc 04 42 06 39 09 www.theatre-semaphore-portdebouc.com

One two one… a été joué au Théâtre du Périscope de Nîmes du 24 au 28 février


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DANSE

LES HIVERNALES

Voyages d’hiver À la Chartreuse, Arles, Cavaillon, et partout dans Avignon, les Hivernales ont une fois encore réchauffé nos vacances d’hiver…

Déambulation Mallarméenne Pourquoi Quatorze ?

3 ans pour concevoir ce Bel Aujourd’hui, projet un peu fou autour du poète Mallarmé, touche à tout à la divagation prolixe. 1 parcours-spectacle en 5 volets, pour le 140e anniversaire de l’écriture d’Igitur, 3h30 de déambulation pour un public partagé au haZard en 4 tribus. Passant d’un lieu à l’autre, découvrant au passage des petits solos dansés, il en profite pour visiter une Chartreuse aux mystères infinis. La plasticienne Joëlle Molina a conçu une exposition inspirée des liens (posthumes) de Mallarmé avec la psychanalyse, qu’elle déroule en «chambres des mystères d’Igitur» Visite guidée trépidante qui, à moins d’être déjà initié à la rhétorique mallarméenne (pentagramme stphn ? un coup de dé ? le psaltérion?) laisse le spectateur encombré de mystères... S’ensuit une conférence des plus sérieuses, par Philippe Verrièle qui lit deux courtes fictions sur l’écrivain et son rapport à la danse... Dans la cave des 25

toises, Jean-Christophe Paré fait défiler sur le sable 12 danseurs dans des costumes surprenants, conçus à partir d’un journal de mode que Mallarmé écrivit... Mention spéciale aux costumes masculins ! Puis, ailleurs, deux jeunes danseuses offrent une délicieuse leçon de danse (classique), telle que le poète put la découvrir au XIXe. Enfin le public réuni s’installe dans le Tinel pour assister au spectacle d’Andy de Groat à partir de la Folie d’Igitur, bercé entre Chopin et Radiohead. Un peu fourre tout, à la cacophonie babélienne pas toujours lisible mais avec des danseurs investis et étonnants, et surtout une peuplade d’individus, de masques à gaz et de petites souris, aussi étranges que différents. DELPHINE MICHELANGELI

Mallarmé le Bel Aujourd’hui a été joué les 19, 20 et 21 fév à La Chartreuse

Ces corps de femmes

La création de David Wampach est exemplaire des impasses persistantes d’une certaine (non)danse contemporaine. Confrontées à un manque de moyens chronique elle présente au public des bout à bout d’impros, plus ou moins codées, interprétées par des corps sans aucune technique de danse. On y trouve, immanquablement, ce que les stages font faire aux débutants-avancés pour les familiariser avec l’autre, et l’espace scénique : on marche en crabe, côte à côte, on réagit à des impulsions communes, on traverse en latéral, en diagonale, en rasant les murs, on joue avec le corps inerte de l’autre, on rit, on crie, on ahane, on pleure, on se lâche. C’est agaçant, ennuyeux, puis franchement énervant. Les 45 minutes s’éternisent… La seule bonne idée, justement, est de ne pas faire durer Quatorze plus longtemps. Car cela nuit terriblement à l’image de la danse contemporaine, ce n’importe quoi justifiant souvent le discours réac du «il y a trop d’artistes», ou trop de spectacles. Quand on n’a rien à dire, pas de moyens, pas d’idée, pas d’interprètes, ce qui peut arriver à tout artiste un jour ou l’autre, il ne faut pas se présenter devant un public… AGNÈS FRESCHEL

Quatorze a été dansé le 23 fév à Benoît XII, Avignon

La persistance du pamplemousse

In Side © Stephane Gladyszewski

Le parcours proposé par le plasticien québequois Stéphane Gladyszewski à l’intérieur de la Maison Jean Vilar est bluffant. Jouant d’effets d’optique, de persistance rétinienne, il fait entrevoir des fantômes de corps, des traces, des ombres, des spectres un instant allumés qui réapparaissent un peu plus loin, des corps soudain nus, flashés, des pamplemousses qui semblent posséder une lumière intérieure lorsqu’on les écorche. Les humains ont des queues de reptiles, des masques d’argiles, et l’on traverse trois salles pour les suivre In Side, dans un petit théâtre d’ombre où les images projetées sur les corps se multiplient jusqu’à faire disparaître la sensation même du réel. Est-il là, ce corps qui se dédouble ? Que voit-on ? On n’en sait rien, mais on devine que tout cela est simple, artisanal comme les illusions de Méliès. Mais tout à l’intérieur des yeux. AGNÈS FRESCHEL

In Side a été dansé à la Maison Jean Vilar, Avignon, du 22 au 24 fév

© Frederic Desmesures

Le dernier spectacle deMichel Schweizer, ôQueens, reprend les ingrédients des précédents : des chiens, des corps en semi-représentation, des discours sur le monde et sa marchandisation… Là encore, comme dans Kings son pendant masculin, il expérimente l’effet de discours entrecroisés : celui d’une danseuse classique, d’une strip-teaseuse et d’une culturiste qui parlent de leur rapport narcissique et/ou douloureux à leur corps, et le mettent en scène ; le «discours intérieur» des chiens philosophes filmés en gros plans; le sien, lui qui cette fois est à la fois séducteur, compagnon et metteur en scène de

ces femmes qui se livrent. Même si on ne comprend pas vraiment le sens de la vidéo introductive, même si par moments ça prend un peu trop son temps, c’est encore plus fort que Kings, parce que le discours ambigu sur la meute masculine a fait place à une démonstration plus sensible, qui se permet d’être nettement drôle, ou nettement émue, comme quand la voix masquée chante la Mort de Didon pendant que l’effeuilleuse s’exécute… AGNÈS FRESCHEL

ôQueens a été dansé au Théâtre d’Arles le 24 fev

À côté de la transe Entre danse et théâtre, Entracte, de Josef Nadj, traduit les représentations du Yi king ou Livre des transformations, image mathématique du monde au cœur de la pensée chinoise depuis des millénaires, basée sur le système binaire du yin et du yang. Sur scène un double quatuor, quatre danseurs et quatre musiciens, occupe l’espace ; la musique d’Akosh Szelevényi (improvisations jazz) est au cœur du dispositif, puissante, omniprésente, phagocyte l’espace dansé. L’énergie qu’elle insuffle porte les corps instables des danseurs, sans cesse en mouvements, brisés parfois mais toujours reliés les uns aux autres.

Nadj poursuit aussi son travail plastique, transformant, dans un duo d’une étrange beauté, les pieds de Marlène Rostaing (seule femme !) en pinceau trempé dans l’encre rouge ; ou créant d’étranges tableaux d’ombres chinoises derrière des paravents éclairés de lumières mouvantes… moments trop rares : le temps s’étire, ouïe et vision se perdent dans une recherche de transe totale, pas vraiment atteinte. DO.M.

Entracte a été dansée les 26 et 27 février au Théâtre de Cavaillon


LE MERLAN

DANSE

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Le deuxième sexe au premier plan Au Merlan des femmes ont dansé. Mais avant un homme a parlé d’elles, comme il avait parlé d’eux

Douleur intarissable

Not inside

Le cœur et le corps à vif, les trois interprètes des Inconsolés disent avec radicalité la cruauté des relations humaines. Si le chorégraphe fait entendre des bribes du Roi des Aulnes de Goethe et des extraits de l’album Persuasion de Throbbing Gristle, c’est pour amplifier la désespérance de l’Etre : le père, l’enfant, la sœur, la mère… Personnages de fiction ? Souvenirs d’enfance ? Figures poétiques ? Peu importe, Alain Buffard livre sa vision mortifère de l’amour et du désamour, de l’alliance et de la «désalliance» à travers la chute vertigineuse des corps. Des corps en souffrance quasi permanente, tout autant physique que morale, livrés à nu sur le plateau, la peau offerte à la lumière crue et au regard fixe du spectateur, lui-même frôlant l’asphyxie dans la pénombre. Face à la mise en danger de leur intégrité, les danseurs dont Alain Buffard- sont exceptionnels de concentration et de force, provoquant le malaise quand la violence scande leurs mouvements et la sexua-

(Not) a love song n’est pas la plus grande réussite de Buffard. Quoi qu’il fasse, et même si ses interprètes sont magnifiques, quelque chose d’un peu plaqué demeure dans cette démonstration de féminités mise en scène par un homme. Son regard les interroge bien dans leur être et non dans leur image, pourtant. Mais la suite de séquences reste comme à la surface de leur peau. Les Inconsolés, avec les mêmes procédés de correspondance floue entre la nostalgie de la musique

lité dicte leurs postures. Un malaise qui perdure longtemps encore lorsque la tragédie se déplace derrière un écran vidéo, filtre adoucissant et protecteur entre la réalité et la fiction, la morale et l’innommable, la domination et la dépendance. Mais de quels mondes sont-ils les survivants, ces corps suppliciés à la manière de Francis Bacon, masques grimaçants ou yeux bandés, gisants revenus d’entre les morts pour chuchoter à l’oreille des vivants quelques vers de Goethe ? MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

Vacuité féminine Nadia Beugré est dans une démarche autobiochorégraphique assez touchante. Parce que l’être qu’elle présente sur scène est complexe, riche de contradictions même : androgyne, musclée, noire, elle se présente crâne rasé, en marcel kaki… Entre deux Nadia Beugré © EFitte-Duval

sexes elle semble aussi entre deux danses -gagnée parfois par l’Afrique, puis retournant à la contemporaine. Son solo, construit sur des lignes droites -elle traverse la scène en diagonales ou longe les murs- offre hélas une progression limitée, du presque rien à des moments nettement plus dansés, jusqu’au constat d’un pénis absent. Dommage, car la présence est forte, loin d’être vide justement dans cet espace, et le musicien qui l’accompagne est particulièrement intéressant lui aussi dans ses paradoxes : faisant jaillir des sons africains de sa batterie, il arrache des frottements improvisés aux instruments traditionnels…

Un espace vide, moi a été présenté au Merlan du 8 au 11 mars

Les Inconsolés a été présenté au Merlan le 23 fév, (Not) a love song le 21 fév au Merlan, et le 24 fev au Théâtre de Nîmes et 26 au 28 mars au Pavillon Noir

L’origine du monde Il y a une chose que les hommes oublient souvent, (et la psychanalyse ?), c’est que les femmes naissent du corps d’une femme, et que leur rapport aux autres corps féminins est teinté de nostalgie, et du même désir de retour au bercail qu’ils éprouvent… La dernière scène de Correspondances, où les deux danseuses s’attachent à des mamelles de latex, les palpent, les tètent, puis s’aspergent de lait, s’y roulent et s’y

Correspondances © Eric Boudet

A.F.

A.F.

(Not) a Love Song © Marc Domage

Les Inconsolés © Marc Domage

et l’esquisse de gestuelles référencées -comme si les corps prenaient des poses entrevues sur des tableaux, des chromos, des magazines- semble nettement plus «vécus»…

délectent… le rappelle avec force! Car le duo de Kettly Noël et Nelisiwe Xaba explore avec une gaieté neuve les rapports qu’ont entre elles les femmes. Apprêtées, rivales, à nu, ludiques, délirantes, elles jouent ensemble, se donnent des ordres, les contournent avec humour, miment à l’unisson des paroles, se menacent de leurs talons aiguilles. Magnifiques oui, féminines oui, soumises non, comme elles disent. C’est drôle, jusqu’à la fin émouvante. Autre chose : ce spectacle joué par deux femmes noires pourrait l’être par des blanches ou des jaunes (sauf pour le contraste du lait répandu ?). Parce qu’encore une fois l’origine qu’elles nous montrent n’est pas celui de nos attentes… A.F.

Correspondances a été présenté au Merlan du 8 au 11 mars, au théâtre d’Arles le 13 mars, et sera joué à Cavaillon du 6 au 10 avril en tournée Nomades


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DANSE

AUBAGNE | CHÂTEAU-ARNOUX | GAP

Pour chacun Danse en avril 2009 le confirme ! Chaque année le théâtre d’Aubagne réussit un festival particulièrement pertinent, attentif aux chorégraphes d’ici mais pas que Un des problèmes de la danse à Aubagne est la taille du plateau du Comœdia : problème résolu depuis que Danse en avril investit la grande salle de la Penne-sur-Huveaune. Même Maguy Marin y était à l’aise ! Cette année elle accueillera, en ouverture du Festival, les 31 mars et 1er avril, le Ballet d’Europe (voir page 24), et un autre spectacle aidé à la diffusion par le dispositif Saison 131 : Et pluie c’est tout, chorégraphié et interprété par Wendy Cornu et Hélène Peureux, un duo pour enfants autour de l’excitation physique que provoque la pluie (le 1er avril à 15h). Puis retour au Comœdia, qui abritera donc de petites et moyennes formes : le très joli trio pour enfants de Michel Kelemenis, L’Amoureuse de Monsieur Muscle, pièce mutine et anatomique (le 2 avril); deux pièces de Sylvain Groud, magnifique danseur devenu chorégraphe, ancien de chez Preljocaj, qui viendra offrir un avant goût de sa prochaine création Cordes, et un retour sur Bataille intime, un duo formidable créé avec le

comédien Bruno Bayeux sur un texte de Topor (le 4 avril). La semaine suivante débutera par un duo et un solo «regardé» de Gallotta : Sunset fratell et l’Incessante (le 8 avril), deux pièces très émues, sur la mort brutale et le temps qui transforme le regard amoureux ; et le deuxième weekend se passera dehors, en espérant faire mentir l’adage, et que le fil d’avril pourra cette année encore se découvrir. Car Ex Nihilo performera trois fois ses Trajets de vie trajets de ville les 10 et 11 avril, et Thierry Thieu Niang, toujours à la recherche de la danse de chacun, fera vibrer ensemble 25 amateurs de 7 à 77 ans (L’échange les 11 et 12 avril). Quinze jours de danse qui, tout en programmant très volontairement des chorégraphes qui vivent et travaillent ici, restent attentifs à faciliter l’accès à la danse : des enfants, des gens qui passent, et de tous ceux qui veulent se mettre en mouvement…

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Un dispositif du département 13 qui prend en charge une partie de l’achat de certains spectacles, édités sur un catalogue pour les petites et moyennes communes. L’aide étant inversement proportionnelle à la taille de la commune, le dispositif permet, depuis des années, une meilleure diffusion territoriale du spectacle vivant.

AGNÈS FRESCHEL

Femmes à la Passerelle !

Break ! Deux soirées hip hop au théâtre Durance : la reprise de Récital et la soirée de Soli

Soli - cie Rêvolution © Jean-Jacques Mahé

Le solo est un exercice peu pratiqué dans le hip hop : bien sûr il y a des moments de démo solitaire, défi jeté à la face de l’autre, performatif. Mais peu de véritables pièces courtes formant un tout expressif. Trois danseurs de la cie Rêvolution se livrent donc à cet exercice d’écriture sur leur propre corps, explorant l’une la répulsion, l’autre la bestialité, et le troisième l’abandon (le 21 mars). Les trois soli seront précédés d’un travail du chorégraphe William Petit avec un groupe d’amateurs, à qui il a transmis une de ses pièces Elan C. Quant à la cie Käfig, elle a eu la bonne idée de reprendre le quintet masculin

Cie Sylvain Groud, Bataille intime © David Morganti

Danse en avril Espace de La Penne sur Huveaune 04 91 24 70 42 Théâtre Comœdia, Aubagne 04 42 18 19 88 www.aubagne.com

qui assis sa notoriété : Récital est une explosion festive, un festival de figures époustouflantes et joyeuses qui sortent la danse hip hop des clichés de la musique hip hop, pour la plonger dans un récital acoustique classique, traficoté et commenté par la musique de Franck II Louise. La pièce a fait date, pas par hasard (le 10 avril)… A.F.

Théâtre Durance Château-Arnoux (04) 04 92 64 27 34 www.theatredurance.com

La scène Nationale de Gap accueille elle aussi un programme de Soli. Mais les interprètes seront des danseuses : Hélène Cathala, ancienne danseuse de la Cie Bagouet, en sept tableaux écrits depuis son intimité, interprète Shagga, portrait en noir, nuisette et bas dentelle, d’une femme chez elle, qui pense à un homme. Puis Julie Dossavi, danseuse Guinéenne qui accompagne la cie Salia Nî Seydou, danse un solo écrit pour elle par Daniel Larrieu, intitulé À chaque vent le papillon se déplace sur le saule (les 19 et 20 mars).

La scène de Gap accueillera ensuite une familière des lieux : la chorégraphe Nathalie Pernette a conçu pour les six danseurs de sa Cie un Repas, spectacle se déroulant tout entier autour d’une table, le temps d’un dîner (le 14 avril). Postures, regards, objets et gestes d’un repas de famille sont regardés à la loupe, les tensions et les complicités aussi, menées jusqu’au bout des fantasmes… jusqu’à ce que les couverts deviennent des instruments d’agression…. A.F.

Le Repas © Sebastien Laurent

La Passerelle Scène Nationale de Gap (05) 04 92 52 52 52 www.ville-gap.fr


BNM | DRAGUIGNAN

DANSE

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Vive le Vent ! Tous les ans la scène de Draguignan, conventionnée pour la danse, concocte au mois d’avril un programme particulièrement pertinent. Cela s’appelle les Vents du levant, parce que c’est plutôt tourné vers l’Orient, le sud en tous cas, sans exotisme : de la danse contemporaine et non ethnique, mais teintée d’horizons lointains. Cette année encore le programme est équilibré et très alléchant : musical souvent, puisque le sublime flamenco d’Israel Galvan se joue autant qu’il se danse (La Edad de oro le 24 mars), que Sidi Larbi Cherkaoui cherche son Origine (les 11 et 12 avril) en se plongeant dans la musique d’Hildegarde von Bingen autant que dans de chants maronites. Sa pièce libre, puissante, parle avec une force nouvelle de cette difficulté à concilier deux origines, à vivre dans un monde où les corps, lorsqu’ils ne sont pas séparés dans des cases, s’entrechoquent avec les autres, leur mémoire, le réel… La création d’Abou Lagraa raconte un

peu la même histoire. Paradoxalement, puisque c’est un duo d’amour, interprété avec sa femme, magnifique. Mais là encore la musique, l’eau, la lumière, semblent tisser des arabesques contraignantes, des obstacles internes, et dessiner des frontières qui contrarient le destin des corps. Jusqu’à ce qu’ils s’y soumettent… Un très beau duo, intitulé D’eux sens, le 7 avril. Et puis un solo soufi de Ziya Azazi, intitulé explicitement Dervish (le 28 mars) et… il y a Febre, le spectacle hallucinant de la Cie Membros, sur les enfants des rues brésiliens. Violent, fait de beauté brute et de nudité sensuelle, sexuelle ; mortelle aussi, déchirante. À ne pas rater, le 31 mars, même si on le déconseille aux enfants et aux âmes sensibles (prudes ?). Dans un genre tout autre, hip hop pourtant par moments, mais plus léger et ludique, la Bossa Fataka de Rameau (le 3 avril). Tout le talent des Montalvo/ Hervieu (voir p 25) au service d’une revisitation visuelle du baroque : une époque, mais aussi une folie, un tempo,

Fèbre © Agnès Mellon

une jubilation… Dans le genre plus léger, pour les enfants aussi, le groupe Noces raconte l’histoire de Bubulle, le poisson rouge disparu (Du sirop dans l’eau le 15 avril). À Lorgues, parce que la Dracénie ça n’est pas que Draguignan, même si le plateau y est parfait pour la danse ! AGNÈS FRESCHEL

Quelle promo ! La deuxième promotion de DANCE, programme européen de formation de jeunes danseurs chorégraphes, a littéralement bluffé le public du Grand Studio du BNM. La première manquait de qualités techniques, même si leur inventivité chorégraphique pointait sous la maladresse. Cette promo là est parfaite. Techniquement d’abord, ce sont de bons danseurs contemporains, rapides, souples, athlétiques et précis. Certains sont d’ores et déjà des interprètes de grand talent, comme Malgorzata Czajowska, Noémie Etlin, Juan Corres… Mais surtout, malgré leur jeune âge, ils sont capables de concevoir un programme : la succession des pièces, alternant duos, brefs soli et trios pour finir sur une grande forme, des musiques aussi, de Chopin à Bjork en passant par de la bonne électro, des tonalités,

intimistes ou drôles, mécaniques ou débridées… construisent un spectacle de près de deux heures sans un gramme d’ennui. Toutes les pièces ne sont pas du même niveau d’écriture mais aucune n’est ridicule ou vaine, ce qui est rarissime lors des cartes blanches laissées aux interprètes ici ou là ! Ainsi Samuel Denton, Giacomo Corvana, Juan Corres… (par exemple) semblent maîtriser toutes les difficultés de l’écriture chorégraphique, depuis les unissons et les portés, jusqu’à la danse au sol, la théâtralité, la musicalité, l’écriture de l’espace et de la lumière. Seul un trajet clair parfois leur manque, un propos lisible… On se réjouit donc que le Ballet National de Marseille engage quatre de ces jeunes gens ! et qu’après leur prestation au Pavillon Noir (voir p 24) on les retrouve bientôt réunis pour danser Success Story à Marseille… Mais on déplore d’autant plus que © Agnès Mellon cette formation, si efficace semble-t-il dans sa pluridisciplinarité, et son projet de former des danseurs/ créateurs, s’achève au bout de ces deux seules promos ! AGNÈS FRESCHEL

La Carte Blanche aux stagiaires de DANCE s’est déroulée les 27 et 28 fév dans le Grand Studio du Ballet National de Marseille

Les Vents du Levant du 24 mars au 15 avril Théâtres en Dracénie, (83) 04 94 50 59 50 www.theatresendracenie.com


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DANSE

PAVILLON NOIR | GTP | BALLET D’EUROPE

Art et liberté Monument aux morts, avertissement aux vivants, À nos héros de Preljocaj donne lieu à diverses interprétations. Mais reprendre aujourd’hui cette pièce de 1986, profondément engagée contre le totalitarisme, n’est certainement pas innocent… Déconcertante par ses répétitions qui parfois atteignent l’insoutenable, comme ce bond répété cent fois, ces gestes mécaniques qui se heurtent à l’impossible dépassement des corps, aspirations avortées au pied du monument aux formes géométriques et écrasantes, la chorégraphie est admirablement servie par les jeunes danseurs de la formation D.A.N.C.E. (voir p.23). Les moments musicaux alternent avec des silences où les corps créent alors leurs propres rythmes. La musique de Marc Khanneentraîne ces mouvements qui rappellent l’esthétique du réalisme soviétique, tandis que le lyrisme des extraits de Khatchatourian apporte un contrepoint de rêve, d’idéal impossible, inatteignable et condamné. Les effets de lumière, merveilleux, nous plongent dans des tableaux cinétiques. Et que dire de ce passage poétique où les mains des danseurs étendus, seules

encore vivantes, tissent les rayons de lumière… Magique. À nos héros a été dansé au Pavillon Noir du 13 au 15 mars

À venir au Pavillon Noir Outre (Not) a love song d’Alain Buffard (du 26 au 28 mars, voir page 21), le pavillon Noir programmera Les 4 saisons, une pièce écrite en 2005 par Preljocaj et guidée par un désir de légèreté, de couleurs, de pétillance visuelle. Aidé par les inventions loufdingues de «basse technologie» inventées par Fabrice Hyber, le chorégraphe atteint la légèreté et l’enthousiasme printanier, mais sème le trouble également, avec des jeux de masques, de doubles et de mort… du 6 au 10 avril, dans le cadre des Rencontres du 9e art. Le Pavillon corsaire accueillera également Waxtaan de Germaine Accogny, une pièce portée par huit danseurs africains exceptionnels, accompagnés par des percussions omniprésentes. La chorégraphe y ridiculise l’attitude de ces hommes africains qui serrent des mains, engoncés dans leurs costumes

A nos heros © Agnes Mellon

et encombrés d’attachés case, mais sont gagnés, hors de leur sphère sociale, par une frénésie de danse africaine… Un propos intéressant, parfois caricatural dans la forme dramatique qu’il emprunte… du 15 au 17 avril.

Sur le terrain

A.F.

Pavillon Noir 0811 020 111 www.preljocaj.org Ballet d'Europe © Agnes Mellon

Y’a d’la joie ! Good Morning, Mr. Gershwin, la dernière mosaïque chorégraphique de José Montalvo et Dominique Hervieu, ressemble à une coupe de champagne. Elle pétille, fait tourner la tête et donne des fourmis dans les jambes tant la jubilation des interprètes est généreuse. Sur scène et sur grand écran, le duo complice fait swinguer quinze danseurs pour rendre hommage au compositeur américain, dont il avait déjà salué le talent en montant Porgy and Bess. Cet univers musical semble fait pour eux, immense collage de genres et de techniques, de virtuosité et de fantaisie, l’interactivité entre le plateau et l’image vidéo fonctionnant, comme toujours, avec justesse. De saynètes dansées insouciantes en tableaux musicaux plus graves, Good Morning, Mr. Gershwin fait revivre les années 30 à Broadway, les premiers riffs syncopés du jazz, l’âpreté de la musique noire américaine, les effets de la dépression américaine… Le spectacle se lit comme une revue de music-hall, si prisée à l’époque, portée ici par des danseurs et des chanteurs fidèles à l’esprit des comédies musicales américaines. Les Pin Up, les naïades et autres Betty Boop ne sont jamais bien loin, même si le spectacle n’oublie pas les tristes souvenirs de la ségrégation raciale ! Avec leur feu

d’artifice d’images énergiques, les deux chorégraphes ont relevé le défi de l’écriture musicale foisonnante de Gershwin en inventant leur propre partition. Celle qui sait si bien chahuter les codes du jazz, du hip hop, de la danse classique et des claquettes. MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

Good Morning, Mr. Gershwin a été présenté au Grand Théâtre de Provence (Aix) du 18 au 21 février

© L. Philippe - CCN de Creteil

Entre deux créations et tournées, le Ballet d’europe ne chôme pas et se produit un peu partout dans la région. À Vitrolles d’abord, le 21 mars, avec une reprise de la pièce que Georges Appaix avait créée Pour Eux, travaillant sur ces corps à la technique classique pour les amener vers une gestuelle plus «naturelle». Jean-Charles Gil y reprendra aussi FOLAVI, une pièce gaie et tonique autour de Vivaldi, et Schubert in love, romantique à souhait… Dans le cadre du dispositif Saison 13 un double programme tournera dans le département, tout d’abord à la Pennesur-Huveaune dans le cadre de Danse en avril (le 31 mars, voir p 22), puis à Rognac (le 17 avril), Pertuis… Autour d’eux articule des pièces écrites pour ou par les formidables danseurs de la Cie : celle d’Appaix, et Histoire d’Eux, une pièce variable faite de courtes créations des danseurs et de Jean-Charles Gil, autour d’une scénographie commune, comme toujours confiée à Jean-Michel Bruyère. A.F.

Ballet d’Europe 04 96 13 01 12 www.balletdeurope.org


OUEST PROVENCE | MARTIGUES | CAVAILLON

Histoires de tempo

Un spectacle pour enfant qui joue avec les mots et les corps ? Léa, portée par trois danseuses en couettes blondes et robes courtes, traverse son livre pour trouver, derrière les mots, les lettres qui la composent… C’est le A de Léa, à voir dès trois ans. Petiteshistoires.com peut aussi se voir en famille, parce qu’il joue sur autre chose qui attire les enfants: le hip hop, qui raconte des corps là encore à l’envers… Dans le genre, Accrorap fait partie des plus forts. Car leur regard sur leur enfance est loin d’être lénifiant ! A.F.

Le A de léa Cie du nouveau jour le 1er avril à 15h petiteshistoires.com le 8 avril Scène nationale des Salins, Martigues 04 42 49 02 00 www.theatre-des-salins.fr

DO.M.

Miramas, Théâtre La Colonne, 04 90 58 37 86 Fos, Le Théâtre, 04 42 11 01 99 Istres, L’Olivier, 04 42 56 48 48 www.scenesetcines.fr

Urban Ballet © X-D.R.

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Enfants et plus

avec Que ma joie demeure des figures abstraites sur les Concertos Brandebourgeois de Bach, redonnant à la danse baroque ses lettres de noblesse, et une couleur nouvelle. Au Théâtre de l’Olivier, à Istres, la cie Rêvolution, dans Urban ballet, unit gestuelle hip hop et précision de la danse classique, fusionne les genres en quatre acte-tableaux sur des musiques de Ravel, Debussy, Xenakis et Franck II Louise (le 20 mars). Quant au Ballet National de l’Opéra du Rhin, il danse Coppélia ou la fille aux yeux d’émail, sur une chorégraphie revisitée par le chorégraphe norvégien Jo Strømgren (le 3 avril).

À Miramas, le théâtre de La Colonne accueille les danseurs et percussionnistes brésiliens du Balé de Rua. À travers danses et rythmes, ils racontent l’histoire d’un groupe d’amis issus des quartiers populaires de Uberlandia, petite ville de la région du Minas Gerais, «qui repeignent le monde tout en couleurs, grâce à la magie du rêve et de la danse» en une quinzaine de tableaux (le 31 mars). À Fos, Laurence Vielle (auteure du texte et interprète) et Jean-Michel Agius (chorégraphe et vidéaste) jouent et dansent État de marche, un éloge à la lenteur, à la beauté des paysages oubliés, au voyage(le 4 avril). À l’origine de ce spectacle, un voyage de 600 kms entrepris ensemble, à pied, de Bruxelles à Paris. Durant la marche se sont créées des danses et des images, magnifiées sur scène par la musique originale jouée en direct par C. Graindorge au violon et E. Rabinovitch à la batterie. Le 17 avril, les danseurs de la cie Fêtes Galantes, sur une chorégraphie de Béatrice Massin, dessinent

DANSE

Afrique rouge un diseur plutôt traditionnnels quant à eux, pour évoquer une Poussière de sang, la violence qui s’abat sur l’Afrique sans crier gare, sans épargner d’interstices, directement sur les corps. A.F.

Poussieres de sang © Antoine Tempé

Avant d’accueillir en avril Kettly Noël et Nelisiwe Xaba (voir page 20), le Théâtre de Cavaillon prête sa grande scène à Salia nï Seydou, deux chorégraphes africains qui expérimentent une très belle danse athlétique, africaine par ses racines et surtout par son propos, et profondément contemporaine. Leurs sept danseurs sont accompagnés par quatre musiciens et

Poussière de sang Seydou Boro et Salia Sanou Le 31 mars Correspondances Kettly Noel et Nelisiwe Xaba Du 6 au 10 avril Tournée Nomade(s) Scène Nationale de Cavaillon (84) 04 90 78 64 64 www.theatredecavaillon.com


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CIRQUE/ARTS DE LA RUE

SIRÈNES | MARTIGUES | BRIANÇON | GRASSE

Ça plane pour eux ! À venir à sirène et midi net

© Vincent Lucas

La sirène de The Trader Kolwezi diamond band et Caroline Selig était fondée sur une métaphore simple… De celles qui marchent lors des spectacles de rue ! Sur l’estrade, une hôtesse et un steward vous embarquent, en décalant juste ce qu’il faut le rituel d’accueil à bord, sur un vol en proie à

des perturbations monétaires. Les mesures de sécurité sont en adéquation ! Vous vous mettez en place, guidé par un commandant de bord tranquillement cynique, ancien restaurateur. Spécialité : le parachute doré, à base de désossements, d’additions salées et de monnaie flambée… Les spectac-

teurs entrent en piste en bons passagers, reçoivent leurs petits parachutes auxquels pendouillent des petits soldats dorés, prêts à l’assaut… Bel humour sur la crise, et ceux qui s’en sortent ! A.F.

En avril, Cyril Jaubert d’Opéra Pagaï et les Apprentis de la FAI AR (voir page 62) présenteront douze fictions imaginées autour de ces douze minutes. Ce que font et pensent les gens, chez eux, pendant que les sirènes retentissent, et les habitants de la place de l’opéra pendant que la place de l’opéra se couvre de monde…

Vue sur Rue Le 1er avril à midi net Place de l’opéra www.lieuxpublics.com

Tours de pistes Un peu partout dans la région le cirque s’arrête dans les théâtres… À Briançon le trio des Cousins transformera la scène du Cadran en piste de jonglage… et de rires ! Car les trois clowns sont capables de jongler avec n’importe quoi, mêmes des sacs en plastique. Mais surtout ils inventent un univers burlesque inscrit dans un quotidien onirique, et drôle dès l’enfance, parce que leurs gestes décalés nous parlent à tous… Leur spectacle viendra ensuite à Port-de-Bouc, au Sémaphore (le 15 mai). Ne le manquez pas ! À Grasse aussi un spectacle de clown: Ludor Citrik reprend même la tradition du nez rouge et des yeux cernés de blanc ! Mais il est loin de l’Auguste, traîne derrière lui un caddie et un air de marginal, et proclame : Je ne suis pas un numéro ! Une nouvelle école du clown, théâtrale, politique, salutaire… À Château-Arnoux c’est un cirque très différent qui s’accrochera aux cintres. Parallèle 26 de Sylvie Guillermin et Guy Carrara (Cie Archaos) tente une danse de l’équilibre, perchée, acrobatique. Un peu ennuyeuse à la création, contenant une violence et un univers trash mal justifié, mais impressionnante de virtuosité, et de volonté d’aller jusqu’au bout de l’acrobatie, en la transformant en geste dansé… Enfin, à Martigues, les frères Forman vous emmèneront sous leur chapiteau… pour un spectacle plus théâtral

pourtant que circassien ! Leur Obludarium (l’exposition des Obluda, des monstres), est un monde d’illusion, de salle obscure… Car les deux Tchèques sont des magiciens de la marionnette et, leur petit orchestre aidant, ils vous trimballent vers l’est, les Tziganes, l’or et la pourpre, et ses nostalgies merveilleuses… A.F.

Les Cousins Les 24 et 25 mars Le Cadran, Briançon (05) 04 92 25 52 52 Parallele 26 © Agnes Mellon

Obludarium du 10 au 18 avril Scène Nationale des Salins, Martigues 04 42 49 02 00 www.theatre-des-salins.fr

Je ne suis pas un numéro Les 14 et 15 avril Théâtre de Grasse (06) 04 93 40 53 00 http://theatredegrasse.com

Parallèle 26 Les 17 et 18 avril Théâtre Durance, Château-Arnoux (04) 04 92 64 27 34 www.theatredurance.com

Obludarium © Christian Berthelot


LES ÉLANCÉES | AVIGNON | PORT-SAINT-LOUIS

CIRQUE/ARTS DE LA RUE

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Étranges légèretés Les Élancées ont fini leurs tours de pistes, s’affirmant cette année encore comme une manifestation populaire, pluridisciplinaire et transgénérationnelle. Retour sur deux moments légers… Sur la piste ovale du cirque Trottola évoluent trois personnages silencieux, empêtrés par des ballots de chiffons qu’ils trimballent d’un bout à l’autre, avec plus ou moins de facilité. Lui est immense et porte (Bonaventure Gacon), elle est petite et voltige (Titoune), et le troisième, anguleux, jongle (Mads Rosenbeck) ; tous trois se scrutent, se lancent des regards appuyés, se portent et s’élancent, retombent sur leurs pieds. La magie de l’équilibre est mise en scène, avec une bonne dose de poésie et pas mal d’humour. Toujours à la limite de la chute, parfois prétendument maladroite, ils créent des tableaux qui, de comiques, deviennent simplement magnifiques. Balais et ballots sont là les agrès modernes de ce cirque fragile, où la performance physique s’invite presque en intruse...

Danse de papier Délicate petite chose construite directement sur scène, Krafff est un personnage de papier kraft plus vrai que nature. Confronté au danseur Yan Raballand, ce grand corps chiffonné, fait de nœuds et de torsades, se déplie, esquisse quelques pas, se mesure. Commence alors une chorégraphie surprenante, basée sur le mouvement juste, une souplesse feinte où l’illusion du geste répété n’en est que plus touchante. Une aventure singulière unit ce corps de papier et quatre interprètes qui, dans l’ombre, le manipulent à vue, souples et discrets, sensibles au moindre froissement… Et lorsque tout prend fin, on se prend à rêver au salut final de ce grand corps tout froissé…

Krafff © Jolfre

Krafff a été dansé le 20 fév à la Colonne, Volchok a été joué du 17 au 21 fév sous chapiteau à Istres et sera aux Salins du 12 au 16 mai

Attention travaux !

DOMINIQUE MARÇON

Clown, et alors ? Personnage emblématique de la scène circassienne, le clown est mis à l’honneur depuis 6 ans lors du festival avignonnais Cité Nez Clown. La programmation concoctée par l’association d’étudiants Culture.com permet d’élaborer un nouveau regard sur le clown, mais aussi de cheminer dans divers lieux de la ville (Université d’Avignon, Théâtres des Doms, de la Poulie et Golovine, la Maison Jean Vilar, la Place des CorpsSaints), et même jusqu’à l’Akwaba à Châteauneuf-de-Gadagne. Au programme : Avanti ! ou l’histoire des débuts de l’humanité mimés et dansés par les trois cies Côté Jardin, Orange Sanguine et Casquette ; le solo de Bruno, un clown original qui réinvente le monde avec une chaise et un piano; des Valseuses effrontées et complices, au chant et à l’accordéon ; une lecture de Sur le quai, d’Alain Gras, et d’extraits de textes sur le thème du clown ; une création de la cie Dis Bonjour à la Dame où il sera question d’un frigo, de perruques… et de poésie; la projection du documentaire Agathe et le clown de Gilles Bannier (2006)… Et pour clore ces trois jours, le Clown

Fritz viendra semer la confusion et la folie avec son spectacle Kluntet. DO.M.

Cité Nez Clown du 18 au 21 mars Association Culture.com Avignon (84) 06 87 91 05 46

© X-D.R

Fritz © X-D.R.

Actuellement en résidence au Citron Jaune (Port-Saint-Louis), la cie 1 Watt présentera Le Mur dans le Centre Ville les 14 (à 10h et 15h) et 15 avril (à11h et 14h). Deux ouvriers, dont l’unique objectif est de construire un mur en brique, quelque part dans une ville, un mur qui finira forcément par questionner, déranger peut-être, perturber sûrement. Les deux protagonistes commencent donc par le Chantier, où se mêlent des réflexions sur les matériaux, les matières, les sons et les gestes répétitifs, énergiques et quasi ritualisés ; puis se pose l’inévitable question des Voisins, et de la cohabitation qu’elle induit ; celle des frontières, surtout en temps de guerre quand il s’agit de défendre son territoire ; et la Fuite pour finir. Le tout en poursuivant le chantier. Entre corps physique et corps poétique, 1 Watt pose son équilibre burlesque. Le Mur 1 Watt Les 14 et 15 avril Port-Saint-Louis-du-Rhône 04 42 48 40 04


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MUSIQUE

LYRIQUE

Pirate au Balcon ! Opéra de Marseille, dimanche 22 février : voilà près de trois heures que la soprano Ángeles Blancas Gulín surmonte avec brio les éprouvantes difficultés vocales et scéniques de son personnage : la belle Imogène, devenue folle, assiste au supplice de son amant Il Pirata Gualtiero. Son chant généreux et son timbre superbe se parent, au final, de sons filés sensibles, de phrasés souples… le rideau tombe… on est sous le charme ! C’est cet instant que choisit un malotru pour lancer d’un balcon supérieur un «Ouh !» sonore, sans doute ruminé depuis le 1er acte (on trouve son plaisir où l’on peut !), incompréhensible, indécent et méchant ! Pourquoi donc à l’Opéra quelques spectateurs, planqués et anonymes, se prennent-ils pour des supporters de foot huant une équipe décevante ? D’autant qu’il n’y a aucune raison à une telle ostensible réprobation ! La diva a

elle ne mérite pas de tels emportements ! Elle sert d’écrin à un drame rare (dernière représentation à Marseille en 1838), bien ficelé, de la veine de Norma ou La Sonnambula. La mer y est omniprésente, violente, l’expression tragique des dilemmes s’ancre dans une réalité crédible, le tout au service d’un romantisme affirmé. Et du chant souverain ! JACQUES FRESCHEL

Il Pirata de Bellini a été chanté à l’Opéra de Marseille du 17 au 25 fév Il Pirata © Christian Dresse

tout pour elle : charme et voix sublime. Le plateau vocal a illustré à souhait le pur bel-canto de Bellini : du ténor lyrique Giuseppe Gipali, dans le rôle titre, au solide baryton Fabio Maria Capitunacci, jusqu’aux seconds rôles de Murielle Oger-Tomao ou Ugo Guargliardo… Et

Berlioz mystique L’orchestre et les chœurs de l’opéra de Toulon Provence Méditerranée, ainsi que cinq solistes placés sous la direction de Laurent Petitgirard interprétaient L’enfance du Christ La «trilogie sacrée» d’Hector Berlioz, composée en 1854, rencontra un véritable succès lors de sa création. Le texte non liturgique, écrit par le compositeur lui-même, rapproche l’œuvre d’un oratorio. Fidèle à cet esprit, le parti pris de la mise en scène, confiée à Frédéric Andrau, était des plus sobres. L’épure des décors, des costumes (Luc Londiveau) et de la mise en lumière complétée par la vidéo (Ivan Mathis) relevait d’un choix judicieux, compte tenu de la sophistication esthétique de la partition, qui semble préfigurer parfois la modalité chère aux compositeurs français de la fin du XIXe siècle. Une œuvre interprétée ici avec une extrême précision par l’orchestre et les chœurs. Quant aux solistes (Avi Klemberg, Blandine Staskiewicz, Thomas Dolié, Paul Gay et Jean-Marie Frémeau), ils ont enthousiasmé le public par un chant et une diction remarquables de précision et de justesse. Ce qui leur a permis de conter clairement cette histoire en trois parties (le songe d’Hérode, la fuite en Égypte et l’arrivée à Saïs), le tout ponctué de merveilleux passages de chœurs tantôt aériens, proches de la monodie grégorienne, tantôt enflammés et plus typiques d’un roman-

tisme dont Berlioz avait le secret. L’ensemble plongeait donc comme idéalement les spectateurs au cœur même du mysticisme inhérent au sujet. Encore une belle réussite de l’opéra de Toulon ! EMILIEN MOREAU

L’enfance du Christ de Berlioz a été chanté à l’Opéra de Toulon les 27 fév et 1er mars Blandine Staskiewicz © X-D.R.

le chœur et l’orchestre furent dirigés par l’impeccable Fabrizio Maria Carminati. Quant à la mise en scène (Stephen Medcalf) réactualisée dans un climat de guerre (une dictature militaire et des partisans s’affrontent), si elle comporte somme toute quelques maladresses,

Levez-vous vite, orages désirés…

Lakmé est l’un des plus beaux opéras français du XIXe siècle. Programmer cet ouvrage dans une salle peu habituée à ce répertoire était délicat… Jack Gervais, metteur en scène habitué de l’Odéon, utilise au mieux les personnages et l’histoire afin de gratifier le public de tableaux très poétiques. L’orchestre s’en sort plutôt bien sous la solide direction de Bruno Conti. Le seul bémol est l’hétérogénéité de la distribution. Frédérique Varda assume le rôle-titre avec un timbre et une conduite vocale adaptée malgré quelques signes de faiblesse dans certaines vocalises. La voix de Frédéric Mazzotta aux aigus brillants, semble en retrait dans le médium, mais les exigences musicales et vocales de l’ouvrage sont nombreuses et complexes. En revanche, Alain Fondary n’a rien perdu de son incroyable prestance et du timbre qui a fait son succès! Les seconds rôles, formés pour la plupart au conservatoire de Marseille, assurent parfaitement leurs parties. Le défi de l’exigence est relevé !

L’Opéra d’Avignon a présenté les 13 et 14 mars Les orages désirés, œuvre lyrique en un acte et 4 tableaux, née de la passion de Gérard Condé (musique) et Christian Wasselin (livret) pour Hector Berlioz. Cet opéra, coproduit avec le théâtre de Reims, fut commandé en 2003 par le Festival de Radio-France pour commémorer le bicentenaire de la naissance de Berlioz Le jeune musicien, joué par Anne Rodier, a 15 ans ici, et l’histoire s’attache à ses premiers rêves, à ses tourments amoureux et au refuge qu’il souhaite trouver dans la musique. Il veut «chevaucher les comètes et trouver le repos entre ciel et mer.» Le titre, emprunté à Chateaubriand, a inspiré le librettiste à l’âme romantique pour qui cet ouvrage délivre un message : «Devant un amour impossible, douloureux, seule la musique peut sauver l’âme. D’autres formes d’art aussi, mais la musique a un côté ailé, immatériel, qui peut vous soulever complètement...» Enveloppé par une musique originale et lyrique, le texte nous interroge sur la Vie, l’Amour et le pouvoir de la Musique. La partition de Gérard Condé, très française, cite Berlioz mais rappelle aussi Ravel et Fauré, s’inscrivant dans leur filiation, et renouant avec des mélodies consonantes. Et comme le chante le personnage du jeune Berlioz, «La musique… est plus grande que la joie, plus vaste que l’Amour…»

GUILHEM BERNARD

CHRISTINE REY

Un défi pour l’Odéon Entre deux opérettes le théâtre de la Canebière a programmé Lakmé de Delibes. Choix judicieux !


Merveille du grand siècle La reconstitution historique de Cadmus et Hermione de Lully donnée au Grand Théâtre de Provence le 10 mars fut un enchantement Après le succès du Bourgeois gentilhomme, représenté dans sa version originale avec les ballets et intermèdes de Lully, le couple Benjamin Lazar (mise en scène) et Vincent Dumestre (direction musicale) récidive avec l’exhumation de la première Tragédie Lyrique de l’histoire de l’opéra français. De fait, en 1673 (année de la disparition de Molière), Lully et Quinault (livret) fixent avec Cadmus et Hermione les bases d’un modèle qui fera les beaux jours de l’Académie Royale de musique de Louis XIV : ouverture majestueuse à la française suivie d’un fugato vif, récitatif épousant la prosodie du français entrecoupé d’ariosos, divertissements dansés, présence importante du chœur, narration mêlant inspiration antique, pastorale, pathos et comédie… De plus, l’œuvre recèle des éléments brillants, émouvants : ici une Chaconne et ses infinies variations, là un magnifique air désespéré «Belle Hermione, hélas !…» (Cadmus : acte 5).

l’époque. Le résultat est féerique ! Les trente-cinq chanteurs et danseurs du Poème Harmonique suivent à la lettre une diction appropriée, une gestuelle codifiée, toujours face au public. Des «machines» envoient des Dieux dans les cintres trôner sur des trapèzes… Un dragon surgit, une grotte embrasée s’ouvre, le ciel et les bosquets se meuvent dans des perspectives fabuleuses sous un éclairage à la chandelle, en clairs-obscurs, des drapés dorés et des plumes africaines multicolores virevoltent, des géants imposants se pétrifient, des soldatschenille surgissent de leur matrice… Et dans la fosse, on dénombre autant de jeunes musiciens qui distillent sur leurs violes, flûtes à bec, théorbes, clavecins, hautbois et bassons baroques, des dynamiques tourbillonnantes, binaire ou ternaire, des danses pastorales, de sinfonies festives… Le public aixois ne s’est pas trompé en acclamant la troupe : ce théâtrelà est rarissime ! JACQUES FRESCHEL

Spectacle total et authentique Le miracle de ce spectacle total, mêlant chorégraphie, voix, musique et poésie, des décors et costumes d’une plastique somptueuse, réside dans sa volonté de reconstituer le genre tel qu’il aurait été créé à Cadmus et Hermione © Agnes Mellon


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MUSIQUE

LYRIQUE | SYMPHONIQUE | CHAMBRE

La voix et Titan

Égarpillage sentimental

Le concert symphonique du 4 mars à l’Opéra de Marseille reposait sur un crescendo très bien construit Cela commençait par deux airs d’opéra de Mozart, récitatifs et mélodie, chantés avec bravoure et sensibilité par Rachel Harnisch. Et de la bravoure il en fallait : Mozart n’épargnait pas ses sopranos, les faisaient monter haut, très haut, sans préparation, sans soutien ochestral, à découvert… La jeune soprano, gracieuse, semblait presque soulagée après ces acrobaties là d’aborder des extraits de Salomé : là encore la tessiture est acrobatique, mais du moins Richard Strauss ménage ses entrées ! L’orchestre suit, précède, accompagne, dirigé avec beaucoup de sentiment par Cyril Diederich, à l’aise dans ce lyrisme post romantique qui enfle, emporte et redescend comme on laisse échapper son souffle… Entracte. L’orchestre s’étoffe encore un peu, gagne en pupitres, se fait grand symphonique, philharmonique : c’est Mahler que l’on aborde, sa première, la «Titan», monumentale bien nommée. On s’accroche à son siège, on attend le souffle… ça commence mal. Le chef, tout à la fabrique de ses emportements futurs, des deux crescendos qui doivent venir soulever l’enthousiasme, en oublie que la mise en place est subtile, néglige de battre, laisse les musiciens perdus décaler (juste un peu) leurs entrées, hésiter, couiner même par moments. Le premier mouvement, pointilliste, perd un peu l’équilibre. Puis cela se reprend, la mayonnaise monte pendant la fugue, le hautbois, le violon, le violoncelle donnent le ton de l’émotion, et Cyril Diederich lance les watts, bondissant littéralement de son estrade, envolé, emportant avec lui les cordes qui sonnent, les bois qui enflent, les timbales, et les cuivres qui se lèvent. Le public à son tour retient son souffle, l’explosion est physique, le halètement, qui recommence, recommence et enfle encore quand on le croyait au bout. Quand cela s’arrête enfin le public crie littéralement, surpris d’enthousiasme. Allez donc écouter les orchestres. En vrai. Après Mahler les montagnes russes, les feux d’artifices, la musique amplifiée, tout vous paraîtra fade…

Alain Aubin © Max Minniti

Le remarquable falsettiste Alain Aubin se livrait à un exercice périlleux le 28 février dans la salle conviviale de Léda Atomica. Le spectacle, d’apparence informel, unit spectateurs et chanteur. Ce dernier raconte, se raconte, «s’égarpille» avec bonheur, suscite le chômage des contraltos féminines, rassemble les fragments éparpillés de sa vie qui l’ont conduit à la musique, au chant. Le pick up de la sœur aînée lutte contre le phonographe du grand-père, les 78 tours, l’odeur de papier kraft jauni et de bakélite… Les Platters contre les «Roses

blanches pour ma jolie Maman»… Il y a Mémé Aline, et ses touchantes vieilleries, la toccata de Bach, Pierre et le loup avec un canard qui éveille la carrière d’hautboïste, et puis surtout, la RÉVÉLATION de la voix de contre ténor grâce au petit poste Sondor. La voix devient alors un «instrument cosmique pour ne pas dire céleste» ! Il y a Elisabeth, le professeur de chant, inénarrable, «monte le palais mon petit !», mais surtout un amour, Maria Callas… Il y a aussi Alain Aubin, qui chante, nous entraîne dans son univers, nous fait chanter aussi, «giroflée, girofla»… «Le chant est une affaire de collectif» ! Avec l’Abbé Pierre il s’exclame «que la voix des hommes sans voix empêche les puissants de dormir !» Évocation de la merveilleuse aventure de l’Académie du Chant Populaire… Reprenant la métaphore initiale de son spectacle, «la musique est l’aliment de l’amour» (Shakespeare), Alain Aubin conclut «c’est juste pour dire je t’aime»… Nous aussi ! Merci pour ce moment de joie ! MARYVONNE COLOMBANI

Berio à la fête

AGNÈS FRESCHEL Rachel Harnisch © Priska Ketterer, Luzern

Deux symphonies de Mozart (n° 25 et 40), les deux seules écrites en sol mineur, ont ouvert et clos ce concert, le 6 mars en Avignon, une fois de plus brillamment dirigé par Jonathan Schiffman à la tête de l’OLRAP. Aux côtés du maître salzbourgeois, deux compositeurs italiens au programme : Luigi Dallapiccola (Piccola Musica Notturna) et Luciano Berio, décédé en 2004, dont les Folk Songs, interprétés par la jeune Cristina Zavalloni, ont remporté un énorme succès : ces 11 chansons populaires furent arrangées, et parfois composées comme de malicieuses impostures, par Berio pour Cathy Berberian : sa femme, elle-même compositrice, était une chanteuse merveilleuse d’intelligence, d’invention et de sensibilité. Les orchestrations, contemporaines, de ces chansons populaires, sont d’une subtilité inégalée. On retiendra la troisième, Loosin yelav, poignante d’émotion décrivant le lever de la

lune un soir en Arménie (pays d’origine de Cathy Berberian), et la der-nière, Azerbaijan love song, entraînante à souhait, bissée par le public. Berio savait y faire ! CHRISTINE REY Cristina Zavalloni © Maki Galimberti


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Ravel Bio

Station Mozart

La petite salle du Musée des Tapisseries (Aix) accueillait le 13 mars un nouveau concert dans le cadre de la conviviale et éclectique association Art et Buffet Concert Ravel suivi de dégustation de vin bio du Domaine de la Brillane. La Zibeline, exceptionnellement abstème ce soir-là, se contenta du breuvage musical et conçut de belles ivresses. Présentation enjouée des œuvres, analysées en détail pour la circonstance afin de permettre à tout public d’en comprendre et d’en apprécier les beautés… La Sonate pour violon et violoncelle, dédiée à Claude Debussy, exigeante et subtile mettait particulièrement en valeur le velouté, la profondeur des deux instruments, exécution sensible et virtuose à la fois, avec des passages à faire pâlir d’envie Paganini dans le quatrième mouvement, sans compter le feu d’artifice des pizzicati du deuxième, l’ampleur dépouillée du mouvement lent, avec le rendu d’un quatuor. Le Trio en la mineur pour piano, violon et violoncelle (à André Gédalge) aux accents debussystes fut inter-

prété avec magnifique élan, et même si la partition fut qualifiée de «perturbante» dans les commentaires, Florence Cabrita au piano, Noël Cabrita Dos Santos au violon, Yannick Callier au violoncelle, nous ont emportés dans la sublime «poussière de notes» de la passacaille, éblouis par l’enchevêtrement incroyable des thèmes qui tissaient une harmonie nouvelle et envoûtante. «Obstiné violon, coquin violoncelle et charmante pianiste» affirmait Noël Cabrita… en tout cas, un ensemble solaire qui a illuminé de son talent Un cœur en hiver, hommage au film de Claude Sautet tout entier baigné de ce Trio. MARYVONNE COLOMBANI

Edna Stern © X-D.R

Brahms humain Le 14 mars, le GTP accueillait le chœur Accentus pour la représentation du Requiem Allemand de Brahms, dans sa version de Londres, avec deux pianos Ce Requiem se nomme allemand, car il est écrit dans cette langue et non en latin. Inspiré de textes de la bible de Luther, l’atmosphère et le propos différent profondément des autres requiem et s’adressent davantage aux vivants, concédant une place minime à la déploration. Le texte courait dans un surtitrage discret et utile à la compréhension de l’œuvre. Les images liées à la terre, aux moissons, à la joie d’un travail récompensé, abondent. Il n’y a guère d’inquiétude dans ce requiem où domine le mode majeur. Souvent le chœur, dirigé avec une grande finesse par Laurence Equilbey, exulte. Les voix sont remarquablement placées, connaissent de

beaux vibratos. Chaque choriste se sent soliste, l’union de ces voix produit un effet large et irisé. C’est un bonheur que de les entendre dans cette partition ! Les solistes, Jutta Böhnert, soprano, et Edwin Crossley-Mercier, baryton, sont véritablement sublimes, accompagnés aussi par les deux stars du piano, Brigitte Engerer et Nicolas Angelich. Cependant, malgré l’indéniable qualité des interprètes, nous ne sommes pas transportés, extasiés. Est-ce lié à l’œuvre que Brahms qualifiait de «requiem humain», où l’on ne sent pas comme chez Mozart le poids écrasant de Dieu ? M.C. Le choeur Accentus © Agnes Mellon

21h05. Station Alexandre. On attend, en ce 14 mars, que les retardataires quittent le restaurant mitoyen pour rejoindre le gros du public confortablement installé dans le hall de l’ancienne gare de triage du Canet. Au centre de la structure Eiffel se dresse un Steinway... Mais il faudra encore attendre pour l’entendre sonner, car, en prélude, Pierre Lemarquis, neuro-musicologue et conférencier éprouvé, expose en audio-vidéo les facultés expertes du cerveau mozartien, explique comment le jeune musicien a pu mémoriser le fameux Miserere d’Allegri gardé secret en la Chapelle Sixtine. Au bout d’une analyse documentée, on comprend comment Wolfgang pouvait «en block» envisager mentalement un opus musical et non dans sa continuité temporelle… Au final, il semblerait même que la partition papale ne fut pas si difficile que cela à mémoriser ! Puis une jeune femme descend l’escalier et attaque avec délicatesse la première Sonate de jeunesse du programme. On est d’emblée séduit par le toucher d’Edna Stern, la qualité sonore tout en nuances et sensibilité développés par l’artiste. En sourdine et subtiles résonances, son Mozart est infiniment tendre, nocturne et cependant lumineux… ludique aussi, comme dans les élégantes Variations sur le thème Ah ! Vous dirai-je maman ou le 1er mouvement souplement balancé de la Sonate en la Majeur. Un récital ponctué par une «Marche turque» inventive et libre à souhait et par un aperçu du somptueux disque Bach que la pianiste vient de graver (Zig-Zag Territoires 090104) ! JACQUES FRESCHEL

Le lendemain, c’est Frédéric Isoletta (dont on lit la plume experte dans ces colonnes) qui livrait les secrets des Femmes de Mozart en compagnie de la soprano Lucile Pessey, en attendant le spectacle de Frédéric Ortiz sur Don Juan : 3e volet du festival consacré à Mozart (le 21 mars à 21h et 22 mars à 15h).


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MUSIQUE

CONTEMPORAINE

Le Père Schoenberg L’ensemble Télémaque poursuit son «Cycle de concerts thématiques et historiques» en partenariat avec la Bibliothèque départementale Le 17 février, dans la continuité du «Portrait composé» sur l’École de Vienne (avec en particulier une très belle interprétation du Pierrot lunaire de Schoenberg, voir Zib 16), Raoul Lay a mis en regard le père de l’atonalité avec des compositeurs contemporains. Paradoxalement (mais est-ce un hasard?), c’est une œuvre encore tonale que le directeur de l’ensemble musical a convoquée. Si la Symphonie de chambre (transcrite pour quintette par Webern) torture les règles de l’harmonie clas-sique, la pousse dans ses derniers retranchements, elle s’appuie cependant sur des formes traditionnelles, des accords parfaits pur jus. L’opus conserve, de surcroît, un lyrisme ancré dans le post-romantisme viennois : vertu que les musiciens ont su rendre à souhait. Autour du piano central (Hubert Reynouard), le violon (Yann Le Roux-Sèdes) et le violoncelle (Guillaume Rabier), la flûte (Charlotte Campana) et la clarinette (Linda Amrani) ont répondu au doigt et à l’anche à la direction sans faille, analytique et expressive du maestro, faisant sonner l’opus à l’image d’un orchestre au complet ! Du coup, on saisit plus clairement ce qui conduit Nicolas Bacri vers un néo-classicisme digéré, à l’image du Scherzo ou de la basse obstinée de Night Music (2001), François Narboni à construire ses effets de souffles et percussions mécaniques dans Plérôme des éons (1998-2004), ou Tristan Murail à explorer le phénomène nano-acoustique dans son «manifeste» spectral : Treize couleurs du soleil couchant (1978). Un récital qui, outre son intérêt artistique, éclaire chacun sur les diverses écoles de la musique d’aujourd’hui…

Guillaume Rabier © Agnès Mellon

JACQUES FRESCHEL

Son altesse l’alto C’est à guichet plus que fermé que son altesse l’alto s’est présenté, en cortège, dans le Grand Foyer de l’Opéra de Marseille le 21 février. Du 4e concerto royal et sonore de Telemann joué à dix, à des transcriptions signées Puccini, Villa-Lobos ou Gershwin, on a touché du doigt (et de l’oreille !) toutes les qualités d’un pupitre, accordé une quinte plus bas que ses frères-violons, peu souvent sous les limelights, mais précieux goujon de l’orchestre philharmonique. Benjamin Clasen, en luxueux Monsieur Loyal, a présenté un programme festif articulé autour de points d’orgue. Dans un florilège tiré de West Side Story, la dynamique meneuse de troupe Magali Demesse a fait preuve d’une invention, d’un sens mélodique et d’une sensibilité hors pair : une vraie artiste se cache sous cette bonne humeur-là ! Dans un pot-pourri hispanisant, on a également apprécié la classe de la «guest-star» Jean-Baptiste Brunier (alto solo de l’Orchestre de Radio France)… sans oublier la somptueuse sonorité de Cécile Florentin dans une antique Sonate pour violes de Leclair ! J.F.

Parce que la musique d’aujourd’hui prend aussi racine dans le romantisme, l’Ensemble Télémaque au complet inaugure un ambitieux programme pour tous les amoureux (et nous sommes nombreux !) des Lieder de Schubert et Schumann. De fameux poèmes chantés du premier et la citadelle romantique que constitue le cycle Les Amours du Poète sont interprétés par le ténor Fabrice Mantegna et la soprano Brigitte Peyré. Les compositeurs s’inscrivent ainsi dans une filiation inattendue, reprenant la traition de l’orchestration de Lieder : les accompagnements originaux à l’orchestre sont réalisés (voire réécrits…) par Bernard Campana (Schubert) et Raoul Lay (Schumann). Ce dernier dirige, en regard, un de ses opus moderne et lyrique, inspiré également de Schumann, de son romantisme intime et de ses larmes : WanderLied. Schubertmannia Théâtre des Salins, Martigues Le 21 mars à 20h 04 42 49 02 00 www.theatre-des-salins.fr

C’est la quinzième ! Bel exploit pour un concert de musique contemporaine ! On (ré)entendra le Portrait Messiaen dressé par la compagnie musicale, dont le succès repose, depuis plus d’un an, sur la qualité de ses interprètes et une proposition pédagogique intelligente : celle d’apprendre à écouter des opus, certes modernes, mais écrits «pour tous» par Debussy

(Syrinx, Reflets dans l’eau) ou Boulez (Dérives I) et dont le point d’orgue affiché est le sublime Quatuor pour la fin du temps de Messiaen. (Concert commenté le 17 avril à 20h30 à l’église de Trets - 04 42 61 23 75). Ensemble Télémaque 04 91 39 29 13 www.ensemble-telemaque.com

Brahms l’aïeul Le concert du 17 février à la Société de Musique de chambre de Marseille présentait un double intérêt : celui d’entendre trois jeunes solistes bourrés de talent et deux superbes Trios d’esthétiques distinctes, séparés par plus d’un siècle d’histoire musicale. Au Trio en mi bémol op.40 de Brahms, drainant une pure sève romantique, David Guerrier (cor à piston ou naturel), Nicolas Dautricourt (violon) et Bertrand Chamayou (piano) ont opposé un chef-d’œuvre moderne : le Trio de Ligeti. Composé par le Hongrois en 1982 «en hommage» à Brahms, l’opus épouse la même structure «classique» en quatre mouvements avec Scherzo, donne au cor une fonction polaire, enchaîne pulsation haletante et

marche bancale, jusqu’au lamento final où le lyrisme l’emporte. Lorsque le continuum sonore s’éteint peu à peu, qu’il nous semble entendre, au son d’harmoniques de violons s’extirpant de fréquences profondes au cor, un chant multiphonique de moines tibétains, on se dit qu’on est bien loin du traitement thématique de 1864… mais qu’au demeurant une poésie commune traverse ces œuvres ! J.F.

David Guerrier © Radio France/ Christophe Abramowitz

À venir pour Télémaque


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Retour vers le Futur Singulière manifestation organisée le 21 février au Grim pour le centenaire du Futurisme : performance et concert visuel, suivis d’un repas futuriste ! Un siècle déjà que Marinetti publiait à la une du Figaro le manifeste d’un mouvement avant-gardiste aux contours radicaux, le Futurisme. L’Institut Culturel Italien, avec le soutien d’Ars Centro d’Arte et du Centre Franco Allemand de Provence, a transformé pour l’occasion Montévidéo en Ristorante Santo Food Turismo afin d’accueillir le concert visuel de Rochus Aust par l’ensemble Re-Load Futura. Avant le véritable repas, l’équipe cosmopolite nourrit son public attablé par des mots, des images et du son, dans la tradition de l’alimentation radio pronée par Marinetti. Le manifeste des droits culinaires et ses 150000 plats qui disparaissent chaque année est alors posé sur la table, sous les directives et les invectives du chef de cuisine et de chant Fosco Perinti dont la double performance est à souligner ! Des plats, féminins ou masculins, saucés de sons et de coquillages, de trompettes, des dessertes de tables sauvages et jouissives, se succèdent… Et cette dégustation de mets immatériels s’avère être un préambule consistant au véritable repas futuriste concocté par Fabienne Sitri. Et on apprécie la pasta que les futuristes voulaient tout simplement faire disparaître ! FRÉDÉRIC ISOLETTA

À venir au Grim La quatrième édition des Rencontres Sons de Plateaux organisées par le Grim à Montévidéo se déroulera du 7 au 12 avril. La ville sur un plateau avec Radio Grenouille et Arte Radio ouvrira les festivités avec un panorama sonore à Notre-Dame de la Garde, suivi d’une émission en direct de Montévidéo avec Daniel Deshays (7/4). Place ensuite à La Théâtralité du Son pour une création mondiale de Carlos Roque Alsina et Gaston et Brigitte Sylvestre, suivi d’une table ronde en présence des artistes et des compositeurs Jean-François Peyret et Franck Smith. Le point d’orgue de cette soirée sera le concert électroacoustique de Bérangère Maximin (9/4). Une rétrospective du cinéma abstrait Abstracta avec une performance de Saul Saguati et Audrey Colaniz de Basmati accompagnée par les musiciens de l’atelier d’improvisation dirigé par Jean-Marc Montera aura lieu le lendemain (10/4). Le Son dans l’Art Contemporain sera le thème d’une table ronde avec, entre autres, Dominique Petitgand en préambule à la diffusion d’une de ses pièces et d’autres plasticiens comme Fabien Artal et Pierre Andrieux. Un concert d’Yves Robert et de Jean-Marie Maddeddu clôturera la soirée (11/4). Ces quatrièmes rencontres se termineront par une Carte Blanche à Extérieur Nuit où Jacques Rozier sera l’invité d’une table ronde intitulée Son et Cinéma. Suivront la projection de Adieu Philippine et Supplément au voyage du même auteur (12/4). Soiree futuriste© pgondard

Sons de plateaux 04 91 04 69 59 www.grim-marseille.com

Concerts «à quai»… L'Arbalete magique © Gwennegan 2007

L’activité de Musicatreize s’intensifie «au large», en récitals lointains… et c’est donc avec intérêt qu’on retrouve les musiciens de Roland Hayrabedian «à quai» pour, enfin, un concert marseillais! Leur programme s’articule autour d’une pièce encore toute empreinte de romantisme, Der Abend de Richard Strauss, et d’un classique de XXe siècle : Trois Fantaisies de Ligeti. On découvre également des extraits de Fontaines d’Israël de Johann Hermann Schein et un récent opus de Philippe Gouttenoire : O strana morte. (le 26 mars à 20h au Temple Grignan). On retrouve également le Chœur contemporain, partenaire historique

de Musicatreize, dans une Messe de Brahms, des Chants populaires de Komitas et Suite de la nuit d’Edith Canat de Chizy (le 12 avril à 20h à l’église Saint-Augustin 04 91 93 41 22).

…et conte vietnamien. Parmi la série de Contes créés par Musicatreize, L’Arbalète magique de Tôn-Thât Tiêt recueille un réel succès. Au fil d’une tournée française, le spectacle, mis en scène par Charles-Henry Bradier, arrive dans la région. On avait pu, jusqu’alors, entendre l’opus dans une version «de concert» ou sous la forme d’un livre/CD (Actes-Sud). On viendra donc nombreux (re)découvrir

l’univers sonore de l’auteur des musiques des films L’Odeur de la papaye verte ou Cyclo… pour un fin mariage de musique savante occidentale et d’un orient originel… et une fable fondatrice du royaume du Vietnam, mêlant le sacré, l’historique et le merveilleux ! (le 14 avril à 21h à St-Martin de Crau, 04 90 47 06 80. Le 16 avril à 19h15 scolaire à 14h- au Théâtre Gyptis. Atelier d’écoute à l’Alcazar le 28 mars à 17h). JACQUES FRESCHEL

Musicatreize 04 91 11 00 91 www.musicatreize.org


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MUSIQUE

AU PROGRAMME

Musique de Chambre

Chœur

Monde

Violon et piano

Saison au féminin

Rencontres et concours

Tambourinaires

Marie Cosso (violon) et Béatrice Meissner (piano) jouent Brahms, Massenet (Méditation de Thaïs) et Beethoven («Le printemps»).

Une série de 4 concerts sur l’année sur le thème de la féminité à travers les âges nous est proposée à la Bastide de la Magalone par l’ensemble Cantatrix Sopranica. La sensualité des Leçons des ténèbres de François Couperin et de Michel Delalande sera au menu du vendredi Saint, en regard d’une pièce contemporaine de la compositrice Kaija Saariaho. À géométrie variable, l’ensemble sera composé des soprani Anne Périssé dit Préchacq et Hélène Richer, de l’organiste Isabelle Chevalier et de la gambiste et violoncelliste baroque Anne Garance Fabre dit Garrus.

Deux jours de Rencontres en Dracénie et quatorze chorales en compétition pour le 7e Concours de Chorales de Draguignan.

Le 21 mars à 20h Église adventiste de St-Tronc Marseille 04 91 26 20 14

Quintette L’Ensemble Pythéas en quintette Yann Le Roux-Sèdes et Cécile Gouiran (violons), Pascale Guérin (alto), Guillaume Rabier (violoncelle) et Linda Amrani (clarinette)- jouent Boccherini, Mozart, Haydn et l’Opus 115 de Brahms. Le 27 mars à 20h30 Villa Magalone, Marseille 04 91 39 28 28 www.citemusique-marseille.com

F.I.

Le 10 avril à 20h30 Villa Magalone, Marseille 04 91 39 28 28 www.citemusique-marseille.com

Coda russe

Piano et violoncelle

C’est une tradition : peu avant son dernier concert de l’année, la Société de Musique de Chambre de Marseille annonce la saison à venir. En 20092010, pour les 90 ans de la vieille institution phocéenne, les sociétaires entendront les Quatuor Prazak et Modigliani, les pianistes Elena Rozanova, Laurent Cabasso, Pascal Amoyel, les violoncellistes François Salque et Emmanuelle Bertrand… dans des grands opus du répertoire ! Quant au dernier concert en question, il affiche un programme russe : Borodine, Tchaïkovski et Chostakovitch par les jeunes et talentueux lauréats du concours de Bordeaux 2007, le Quatuor Atrium !

Le formidable duo Michel Dalberto (piano) et Henri Demarquette (violoncelle) interprète des Sonates, Fantaisie et transcriptions de Lieder de Schubert et Brahms.

Le 7 avril à 20h30 Faculté de Médecine Le concert est offert aux nouveaux sociétaires désirant adhérer pour la saison 2009-2010.

Printemps de l’orgue Les amis de l’orgue de SainteMarguerite annoncent un printemps organistique riche en concerts. À raison d’une heure d’orgue tous les deux dimanches, la musique ancienne sera à l’honneur sur l’instrument récent de Philippe Quoirin. Michel Pellegrin (22/3), André Rossi avec Patrice Barsey au hautbois et François Olivier de Sardan au violoncelle (5/4) et Benoit Dumon avec la soprano Annabelle Sodi (19/4) serviront Bach, Buxtehude, Corelli et consorts. F.I.

Eglise de Sainte-Marguerite, Marseille - 04 91 75 17 60 Entrée libre. 17h.

Le 16 avril à 20h30 Jeu de Paume, Aix 04 42 99 12 19 www.concertsdaix.com

Quatuor à cordes Le quatuor «Opus 16» -Cécile Jeanneney et Cathy Benoist (violons), Denis Emeric (alto) et Céline Bardin-Soumier (violoncelle)- joue Haydn, Leleu et Schubert. Le 22 mars à 17h Le Castellet 04 94 32 79 13 www.lessoireesducastellet.org

Orgue de Ste Marguerite © X-D.R.

Du 27 au 29 mars concours le 29 mars de 10h à 18h. Espace Saint Exupéry Draguignan www.aicler-provence.fr

Lieder Le Chœur de chambre Asmarâ dirigé par Samuel Coquard propose un «voyage initiatique» autour de Lieder pour chœur de Schubert et Brahms avec Magali Frandon au piano. Le 30 mars à 20h30 Jeu de Paume, Aix 04 42 99 12 19 www.concertsdaix.com Le 1er avril à 20h30 Temple Grignan, Marseille 04 91 11 78 42 www.maitrise13.com

«Carte blanche» à un trio féminin – Vaïana Lacombe, Rosine Lecocq, Marion Osellame- qui, soufflant dans leur flûtet à trois trous (galoubet) et frappant sur leur tambourin, chantent la Provence et nous font découvrir des répertoires méconnus… Le 24 mars à 19h Chapelle des Oblats, Aix 04 42 99 37 11 www.orphee.org

Polyphonies corses Jean-Paul Poletti et le Chœur d’hommes de Sartène chantent les polyphonies de l’Ile de Beauté Le 3 avril à 20h Cathédrale St-Sauveur, Aix 0892 68 36 22 www.aixenmusique.fr

Baroque Mère douloureuse…

Passion johannique

L’ensemble Baroques-Graffiti, dirigé du clavecin par Jean-Paul Serra, propose un programme somptueux autour des Stabat Mater de Vivaldi et Alessandro Scarlatti. Avec Bénédicte Pereira (soprano) et Madeleine Webb (mezzo).

La chorale du Roy d’Espagne, l’Ensemble Musical Méditerranéen et l’Orchestre Serge Paloyan interprètent la monumentale Passion selon St-Jean de J. S. Bach.

Le 2 avril à 20h30 Chapelle des Oblats, Aix Le 3 avril à 20h30 Église Notre-Dame du Marseille 04 91 64 03 46 www.baroquesgraffiti.com

Mont,

Le 3 avril à 20h Église St-Cannat, Marseille Le 5 avril à 15h Cathédrale St-Sauveur, Aix 04 91 40 14 05 www.choraleduroydespagne.fr

Contemporain Poème électronique Le Flâneur de Jean-Louis Clot avec Alain Aubin, Félicitas Bergmann, Laurent Grauer et Marie Prost. Technique/informatique : Gmem. Le 28 mars, 21h Théâtre Marélios, La Valette du Var 04 94 23 62 06 www.lavalette83.fr

Acousmatique Les Acousmonautes proposent de rencontrer le compositeur Christian Zanetti et de découvrir ses opus lors des traditionnelles Foliephonies initiées par Lucie Prod’homme. Le 30 mars à 18h15 et 20h30 Cité de la Musique 04.91.39.28.28 www.citemusique-marseille.com

«Du romantisme à l’électroacoutique» Eric Charray (clarinette), Alain Pelissier (alto), Jacques Raynaut (piano) et Lucie Prod’homme (création électroacoustique), nous transportent, au fil de l’histoire de la musique, de Schubert à la musique d’aujourd’hui. Le 24 mars, 20h30 Cité de la Musique 04 91 39 28 28 www.citemusique-marseille.com


35 Lyrique Tournée des faîtes L’Opéra éclaté propose des «adaptations» tout à la fois vivifiantes et accessibles de classiques du répertoire lyrique. Son Barbier de Séville italien, mis en scène par Olivier Desbordes, dont les récitatifs chantés sont remplacés par des extraits du texte français de Beaumarchais, devrait susciter l’enthousiasme des cités alpines de Veynes, Serres, Tallard, L’Argentière, Guillestre, Chabottes et Embrun. Accompagnement réduit pour piano et sextuor,

Chefs-d’œuvre ! Il y a plus de vingt ans l’Opéra de Marseille créait, en France, la version originale de Jenufa en tchèque, avec une Leonie Rysanek qui fit sensation! Depuis, ce chef-d’œuvre, signé Leós Janacek au début du XXe siècle, est devenu l’un des fleurons des scènes lyriques, bien au-delà de l’hexagone. Autrement dit, c’est désormais un «classique» ! Il faut dire que l’histoire de cet infanticide rural contient des scènes expressives et saisissantes d’une rare puissance. Cette production de l’Opéra d’Angers/Nantes, primée en 2007 par le syndicat Professionnel de la Critique, mise en scène par le couple Patrice Caurier et Moshe Leiser, propose d’entendre la formidable Nadine Secunde dans l’écrasante figure maternelle Kostelnica… mais aussi la soprano Olga Guryakova dans le rôle titre, les ténors Hugh Smith (Laca) et Jesús Garcia (Steva) sous la direction musicale de Mark Shanahan (les 31 mars, 2 et 7 avril à 20h et le 5 avril à 14h30). Le tonitruant Requiem de Verdi est un des piliers du répertoire de musique sacrée. Outre sa majesté, il séduit par son aspect dramatique et sa verve mélo-

pour des Excentrés alpins qui depuis des années amènent les meilleurs spectacles jusque dans les vallées les plus encaissées, l’hiver… Du 24 mars au 6 avril La Passerelle, Gap 04 92 52 52 52 Le Cadran, Briançon 04 92 25 52 52 www.opera-eclate.com

Jenufa © Vincent Jacques

dique. On réserve au plus vite pour deux dates qui rempliront, à n’en pas douter, la grande salle de l’opéra municipal. D’autant que le quatuor vocal est superbe avec Ana María Sanchez (soprano), Dolora Zajick (mezzo), Giuseppe Gipali (Ténor), Orlin Anastassov (basse). Pinchas Steinberg dirige l’Orchestre et les Chœurs de l’Opéra maison avec le Chœur Orpheus de Sofia (le 17 avril à 20h et 19 avril à 17h). Opéra de Marseille 04 91 55 11 10 http://opera.marseille.fr

le 31 mars à 20h30). Les solistes du CNIPAL proposent leur Aper’opéra (le 21 mars à 17h au foyer). Opéra théâtre d’Avignon 04 90 82 81 40 www.operatheatredavignon.fr

Estienne l’aixois Guy Laurent conclut traditionnellement son 18e Festival de Musique Sacrée le jour de Pâques par

Mozart et Salieri La pianiste Anne Queffelec et l’Orchestre de l’Opéra de Toulon (dir. Giuliano Carella) proposent une affiche alliant les deux rivaux croqués sur la toile par Milos Forman en 1984 : Salieri (Symphonie Veneziana) et Mozart (Concerto n°27 et Symphonie n°41« Jupiter »). En collaboration avec le Festival de musique de Toulon et sa Région. Le 9 avril à 21h Palais Neptune, Toulon 04 94 92 70 78 www.operadetoulon.fr

La pianiste Arminé Sogomonyan propose un programme alléchant associant Bach (Partita), Scarlatti (Sonates), Brahms (Intermezzi) et un morceau de bravoure des récitals virtuoses : Carnaval de Schumann.

Trilogie Bach

Les 7, 8 et 9 avril à 20h30 Le Méjan, Arles 04 90 49 56 78 www.lemejan.com

Grand Théâtre de Provence, Aix 04 42 91 69 69 www.legrandtheatre.net

Piano romantique

Semaine pascale La 24e Semaine Sainte arlésienne se décline en une trilogie majeure autour de Johann Sebastian Bach : L’Art de la Fugue est interprété par un quatuor de violes de gambe, des Sonates sont jouées au féminin par Stéphanie-Marie Degand (violon baroque), Marianne Müller (viole de gambe) et Violaine Cochard (clavecin), quand la soprano Agnès Mellon chante et dirige l’Ensemble Barcarolle pour des Cantates, Suites et Sonates.

Grand Théâtre à perdre haleine Après que la comédie musicale Fame, tirée du film éponyme, a fait escale à Aix pour cinq représentations en français (du 25 au 29 mars), on entend, pour un récital unique, l’un des plus fameux contreténor de sa génération. Andreas Scholl chante les célèbres Nisi Dominus et Stabat mater de Vivaldi accompagné par l’Orchestre de chambre de Bâle (le 31 mars). Le mois d’avril est riche en événements : le fado lusitanien de Cristina Branco séduit les amateurs (2 avril), avant le concert des Lauréats HSBC 2008 de l’Académie du Festival d’Aix (3 avril). Emmanuelle Haïm dirige Le Concert d’Astrée dans l’oratorio La Résurrection du jeune Haendel (9 avril)… et l’on n’oublie pas un dernier regard posé sur Mozart par François-Xavier Roth et son orchestre Les Siècles qui s’attachent à des opus pour flûte du salzbourgeois (les 14 et 15 avril).

Titus magnanime Une nouvelle production de La Clémence de Titus de Mozart est à découvrir sur la scène avignonnaise avec le ténor Gilles Ragon pour le rôle titre, Ermonela Jaho, Karine Deshaye… dans une mise en scène d’Alain Garichot (le 29 mars à 14h30 et

Symphonique & récitals

un concert festif avec les Vêpres d’un Confesseur de Mozart et le Concerto pour violon BWV 1042 de Bach (le 12 avril à 16h30 à la Cathédrale St-Sauveur à Aix - Concert donné également à Marseille le 14 avril à 20h30 à L’église St-Laurent / La Tourette). Mais l’ensemble vocal et instrumental exhume et défend également un maître aixois baroque en la personne de François Estienne (1674-1755) et son «Exaudiat te Dominus». À découvrir en amont lors d’un Concert-lecture (le 31 mars à 19h au Temple de la rue Masse à Aix– entrée libre) et une Conférence illustrée (le 1er avril à 18h30 la Cité du livre à Aix – entrée libre). Festes d’Orphée 04 42 99 37 11 www.orphee.org JACQUES FRESCHEL

Le 9 avril à 18h30 Musée des Tapisseries, Aix 0892 68 36 22 www.aixenmusique.fr

Opus russes et pianiste chinois L’OLRAP dirigé par Rossen Milanov et le violoniste Sergej Krijlov jouent un programme russe : Concerto de Tchaïkovski, Symphonie «classique» de Prokofiev (le 10 avril à 20h30 à Montfavet). Le pianiste chinois Xu Zhong donne un récital annonçant la Sonate en si mineur de Liszt, des Préludes de Debussy, Petrouchka de Stravinsky (le 14 avril à 20h30). Opera théâtre, Avignon 04 90 82 81 40 www.operatheatredavignon.fr


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MUSIQUE

NÎMES | LATCHO DIVANO porains, inspirés par des courants phare comme Dumb Type, inventent actuellement un art mixte aux couleurs futuristes. Le son et l’image dessinent les mêmes univers sans nature et semble-t-il sans nostalgie, séduisants de stylisation, de rapidité et de maîtrise des techniques numériques. En revanche la danse contemporaine, moins courtisée par les jeunes japonais, prendra à Nîmes des couleurs de chair particulières : avec Kentaro!!, proposition d’un jeune breaker, Project Oh!yama interprété sans fard par 5 danseuses déjantées, et Baby.Q, aux effets visuels d’avant-garde, Nîmes mise sur des spectacles très variés… À découvrir, puisque tous ces spectacles viennent pour la première fois en France !

Nîmes Nippon

AGNÈS FRESCHEL

Kentaro © X-D.R.

Tous les deux ans désormais Nîmes abandonne son ses attaches latines, son passé romain, son air de corrida et ses allures flamenca pour devenir Japonaise ! Du 24 au 28 mars L’expérience japonaise va bouleverser pour la deuxième fois la ville. Il y a deux ans -c’est une biennale- l’expérience fut forte, la programmation résolument contemporaine, électronique, surprenante, fondée sur des mondes plastiques virtuels, stylisés, souvent sans chair mais pas sans émotion. Les Nîmois, embarqués dans l’aventure,

ont d’emblée joué le jeu, partant à la découverte d’artistes jeunes, inconnus souvent en Europe, et aux démarches difficilement identifiables… Cette année Nîmes parie sur ce même désir d’aventure… En partenariat avec le label SONORE, la manifestation sera très musicale, avec 13 concerts (voir p 39) électro et acoustique, ou mixte… où l’on apprendra que si les Japonais aiment essentiellement les sons déchirés et synthétiques, ils peuvent aussi être mambo, et chantent beaucoup… Ces concerts, toujours accompagnés d’effets visuels, ne sont pas très éloignés des expos, performances et parades proposées : car les artistes contem-

L’expérience japonaise Du 24 au 28 mars Théâtre de Nîmes, Odéon… (30) 04 66 36 65 00 www.theatredenimes.com

Bel échange C’est ce que signifie Latcho Divano, le nom du Festival dont la deuxième édition se déroulera du 1er au 11 avril à Marseille Cette manifestation se signale par sa diversité puisqu’elle propose conférences, musiques, expositions, théâtre, cinéma dans différents lieux de la ville. Un unique et bel objectif : approcher et faire connaître la culture tsigane. Avec une palette des musiques tsiganes en Europe : du swing manouche, le 3 avril à la Cité de la Musique, avec Mandino Reinhardt, le compositeur de la musique de Swing de Tony Gatliff, présenté le 11 avril au Variétés; le 8 avril, au Cabaret Aléatoire, du rom rock avec Erica et Emigrante, Erica, une jeune Rom d’origine hongroise, accompagnée de sept musiciens dont le guitariste compositeur, Serge Leonardi. Et bien sûr, aussi, des groupes régionaux… Au J4 sous chapiteau le spectacle de Késaj Tchavé (du 2 au 5 avril), danse et musique d’enfants roms de bidon-

villes slovaques, formés par Ivan Akimov, qui parlera de ce généreux projet le 2 avril après un des concerts. L’image aussi permettra d’approcher la culture Rom : des expositions de photographies de Laurence Janner, qui parcourt la Roumanie depuis huit ans, de Marina Obradovic qui est allée à la rencontre des Roms de la Belle de Mai, de Vincent Sojic et Richard Melka ; et des films : Poligono Sur de Dominique Abel, une femme qui a voulu chercher les racines du flamenco dans un quartier de Séville, le quartier des Très Mil, le 7 avril au Variétés où se déroulera aussi la soirée documentaire, le 8 avril, avec Stella de Vanina Vignal et Sonya et sa famille de la Slovaque, Daniela Rusnokova. Mais les mots ne seront pas en reste: Patrick Williams parlera des «Gitans,

La Fanfare Vagabontu © Bari Bahtali

Roms et Manouches», François Billard de Django Reinhardt. Au Badaboum Théâtre des représentations théâtrales intéresseront les plus jeunes, un conte traditionnel tsigane hongrois mis en scène par Laurence Janner et Le Cirque de l’ours Pirouette de la cie Audigane, ainsi que des Lecturbulences, récits tsiganes proposés par trois comédiennes. Et le 8 avril, journée internationale

du peuple Rom, Romano dives, au Cabaret aléatoire avec La Mascarade par la Fanfare Vagabontu ! ANNIE GAVA

Latcho Divano 09 52 72 89 28 www.latcho-divano.com


AVEC LE TEMPS | LENCHE

MUSIQUE

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Et pour quelques airs de plus… De la chanson dans l’ «R», qu’elle soit rétro, rock, rap ou reggae, pour clôturer le festival Avec le Temps Après les grands airs de Sophie, la bouffée d’air pur de MuRat, et les deux membres des WRiggles qui ne manquent pas d’air en s’exprimant désormais en duo, d’autres scènes déclineront la variété française d’une nouvelle ère : de trottoir en comptoir, on partagera une tranche d’humour et d’amour sur un air d’accordéon (Zaza FouRnier le 19/3, malheureusement sans ClaRika qui a annulé sa tournée), on écoutera les banlieusards livrer leur cafard et leur désespoir (MeRlot et David LafoRe le 20/3), Abd Al Malik © X-D.R.

ou avoir l’air Zen avec Thomas FeRsen sur des ballades jamaïcaines et des guitares hawaïennes. Le Festival s’évade aussi vers d’autres aires musicales, nous transportant du Cri du Port avec le Jazz de Mélanie Dahan et son quartet (20/3) jusqu’au Lenche avec les marseillais d’Alcaz pour une rencontre où l’on se dira tout (23/3), au Théâtre de l’Oeuvre avec Jean-Louis Cadoré et Mancer, pour finir en courant d’air (concerts gratuits) à l’Intermédiaire (Louis Ville le 20/3, Mi et Eddy la Gooyatsh le 21/3). Dans l’air du temps, Thierry Brayer propose même un petit tremplin pour les chanteurs en herbe, les sélectionnés seront en piste le 23 à 13h30 au Café Julien et la finale suivra à 16h30. Deux bouffées d’air enfin : le retour sur scène de Pigalle (le 21/3) avec les énergiques Debout sur le Zinc et un plateau slam avec Abd Al Malik et Ysaë (25/3). Et cette première partie marseillaise sera à découvrir

Zaza Fournier © X-D.R.

lors d’un show case le 20 dans les locaux de Guimik, rue Sénac. Le Slam n’est pas d’la poésie en l’air, mais plutôt l’air qu’ont aujourd’hui les vers, on ne doit pas le critiquer sévère... X-RAY

Poésie tactile à la mode pragoise Dans le cadre de Mars en musique, le théâtre de Lenche avait invité la cie franco pragoise Golem Théâtre, qui défend les auteurs français en Tchéquie et les auteurs tchèques en France. Une lecture expressive est intelligemment mise en scène par Frederika Smetana et Michal Laznovsky. Tout commence par le piano jazz léger et convivial de Premyl Rut, qui chante aussi des airs des années trente du mouvement du théâtre libre. (Quelle belle langue, le tchèque !). C’est drôle, spirituel, enlevé. La première partie du spectacle tricote chants et lectures, Karel Capek, Jiri Kolar, Ladislav Novak, Vaclav Havel, on cultive alors des fleurs sur les balcons, dans les gares, jamais chez les percepteurs !, un art d’aimer cocasse, il y a aussi des recettes énormes, «bon appétit !», et des poèmes impossibles que sert avec virtuosité l’actrice,

Marketa Potuzakova, «oiseau» (42 fois répété !), une déclaration d’amour en langage cybernétique, 0/1/0/1/0. La deuxième partie est consacrée à Bohumil Hrabal, Les noces dans la maison. Rencontres, interdictions, livres au pilon, difficulté de vivre, boisson, humour, et le visage radieux d’une compagne exceptionnelle… et la musique pertinente de Jiri Neuzil. Un très beau spectacle : c’était la première fois que cette troupe se produisait à Marseille, elle reviendra à l’automne prochain, nous lui souhaitons la foule qu’elle mérite ! MARYVONNE COLOMBANI

Le Golem Théâtre s’est produit au théâtre de Lenche du 3 au 7 mars dans le cadre de Mars en Musique Petites recettes pragoises © X-D.R


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MUSIQUE

CONCERTS

Casse-tête Et si le printemps commençait par swinger ? Triade et Mikko Innanen seront au Moulin à Jazz de Charlie Free à Vitrolles pour une soirée hors des sentiers battus (28/3). Quelques walking bass plus loin, l’AJMI d’Avignon à la Manutention accueille le Mélanie Dahan quartet «la princesse et les croque-notes» (20/3), Les Larmes du Clown pour un ciné-concert à Utopia (26/3), le Jazz Story n°5 Eddie Costa ou le malentendu (27/3), l’Arthur Kell quartet «Traveller» (5/4) et le Laure Donat quintet (10/4). Rien n’empêche de faire un crochet par La Gare de Coustelet pour écouter le Maxi Monster Music Show (21/3) et Ba Cissoko (28/3). Retour à Marseille avec un programme chargé à la Meson : flamenco d’Antonio Negro (3/4) et de Sarah Moha (4/4), électro pop avec So ? Mash ! (10/4), afro-cubain avec Cachimbo (11/4), et jazz swing pour le Trio Tentik (12/4). Jazz encore à Allauch au Carré de Soi avec le French Sumo (20/3), ou ambiance moins feutrée à la Machine à Coudre avec les chinois Xiao He et les canadiens Vialka (22/3), le garage blues de Cut in the hill gang (24/3), le rock électro des Polypes et de Jolie Police (27/3), sans oublier les affectueux Ze Cardiacs (28/3). Mais l’Espace Julien peut suffire au bonheur : après Avec le temps (voir p 37), les déjantés Wampas (26/3), sans oublier La Chanson du Dimanche (1er/4), le punk rock de The Unseen et Orange Agent (6/4), le jazz de Raul Midon, China Moses et Raphael Lemonnier (7/4) et les Ghinzu (10/4). Les nightclubbers pourront toujours se tourner vers le Poste à Galène et la pop belge

Vis a Vies © Sarah Lesven

d’Absynthe Minded (28/3), des Legendary Pink Dots (12/4) et des désormais incontournables Felipecha (18/4). Toujours accueillante, la petite salle du Paradox programmera sur ses planches le rock de Monzon (23/3), la fanfare tzigane Sarda Orchestra (26/3) et le duo jazzy Mamzell Match (31/3). Ce n’est bien sur qu’une sélection, rien ne vous empêche d’aller giter à l’Estaque sur le bateau Inga des Riaux avec bebop dance floor et surtout live music tous les mardi : le trio Etriba (24/3) et le Patsy

Quartet (31/3). Mais attention, talons interdits à bord ! Enfin, trois dates pour ne pas rater le duo Vis à Vies dans notre région : Cabriès (4/4), Aurons (5/4) et Saint-Chamas (10/4) accueilleront ces joyeux lurons qui ne laissent que de bons souvenirs partout où ils passent. Emouvant, vitaminé et chargé d’émotion, l’heureux alliage sonore et artistique concocté par Myriam Daups et Gérard Dahan a de quoi séduire... FRÉDÉRIC ISOLETTA

Et encore… Un vrai melting pot de concerts des 4 coins du monde à l’honneur ce mois ci ! Réouvert depuis peu sur le Cours Julien, le Planet Mundo K’fé fait revenir dans notre ville les sons Afro Beat et Cubains des New yorkais de Kokolo (27/3), avant un mois d’avril résolument funk (les 3 et 10/4) avec les DJ de Souled Out puis Selecter the Punisher. Après avoir rencontré à la Méson le hongrois Akosh Szelevényi (le S de Akosh S. Unit), dans une mini résidence expérimentale de trois jours (du 21 au 23/3), on sera surpris d’y entendre des standards éthiopiens, ces mélodies vocales de l’age d’or rendus célèbres via le label Ethiopiques, en version instrumentale avec les cuivres de l’Imperial Tiger Orchestra de Suisse (17/4). Boa Fé sera en concert gratuit le 10/4 à Aubagne pour la manifestation du RAMA. On peut aussi faire la Grande Nouba sur des rythmes araboandalous à l’honneur à Martigues dans

le Festival Mare Nostrum du 24 au 28/3. Le jazz se déclinera façon Samba avec Stacey Kent (25/3) à Six-Fours (Espace Malraux). Même le Reggae se met à l’heure européenne, l’allemand Sebastian Sturm (4/4) passera par Toulon à l’Oméga, le hollandais Ziggi par la MJC d’Aubagne (17/4) pour deux uniques dates dans le sud, tandis que notre Dub Akom local recevra le seul jamaïcain en déplacement, Anthony John (11/4) aux Salons de la Valette (83)… Et même le Rap français (Rohff le 10/4) ou la Variété française (Anaïs le 4/4, et Thomas Dutronc le 16/4) s’exportera dans la salle du Dock des Suds. On ne pourra pas rater les prestations de Ba Cissoko et Grace, tous deux en tournée, au Nomad’ Café pour le griot guinéen (17/4), ou à l’Oméga pour la folkeuse reggae (27/3), avec

Kokolo Band © X-D.R.

la divine Sandra Nkakké. Les couleurs de Marseille se dévoilent toujours au Printemps, et encore une fois, il faudra faire un choix avec toutes ces dates… Quant au poisson d’Avril de cette année, ce ne sera pas le scat de Al Jarreau, il est confirmé au Palais des Congrés (1er/4). X.RAY


AU PROGRAMME

Jazz attitude Jazz tous azimuts à la Cité de la Musique ! D’avril à juin, la salle marseillaise accueille de grands noms de la scène jazz, à commencer par un Jazz de nuit, en collaboration avec le Festival Jazz des 5 continents (le 2 avril). Une sorte de mise en oreille avec, excusez du peu, Jean-Luc Di Fraya au chant et percu, Jean-Christophe Maillard au saz électrique (luth turc), Luis Winsberg à la guitare, au saz et au chant et Julien Lourau au saxo, Nasser Soltani à la percu… Les élèves d’ensembles jazz de la Cité ouvriront la soirée, tandis que Dj Oil terminera la nuit. En parallèle, du 2 avril au 22 mai, deux expositions pareront les murs de la Cité de photos issues l’une de la collection de Serge Mercier, l’autre du regard de Laurence Fillon sur les femmes dans le monde du jazz. Le 3 avril, c’est avec Latcho Divano (voir p 36) que s’afficheront les grands noms du jazz manouche : Mandino Reinhardt (solo guitare), Marcel Loeffler (accordéon), Sony Reinhardt (chant), Claudius Dupont (contrebasse) et Franki Mehrstein (guitare rythmique) dans un concert très swing. Les 6 avril et 25 mai, Scènes ouvertes avec les élèves du jazz band, les ensembles jazz et les enseignants de la Cité de la Musique, entre standards et compositions propres, sans oublier le bœuf final avec le public. Plus tard, en mai, jazz fusion avec le groupe Synop-Sis (le 11), et en juin swing avec le Philippe Petrucciani quartet (le 8).

Cité de la Musique 04 91 39 28 28 www.citemusique-marseille.com Julien Lourau © X-D.R

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MARSEILLE

AUBAGNE

Cabaret Aléatoire : Soirée Valérie : Minitel Rose, Anoraak, Collège, Russ Chimes (20/3), Addicted Electro Party (21/3), Kill the Dj/Battant Realize Party (27/3), In Bed with Jarring Effects (28/3), Dj Muggs, Maniacx, Dj Rebel (3/4), In Bed with Bipôle (4/4), Latcho Divano : fanfare Vagabontu, Emigrante, Dj Soumnakaï, Vj Champi (8/4), Jennifer Cardini, Seb Bromberger (10/4), Markovo, Squarepusher (15/4)

L’Escale : Bizet était une femme (20/3), Ba Cissoko, Seydou Drame (11/4), Ziggi, Messengers (17/4)

04 95 04 95 09 www.cabaret-aleatoire.com

Cité de la Musique : Nicolas Dary/Alain Jean-Marie (23/3), Du romantisme à l’électroacoustique (24/3), Zou, shake that thing ! de Moussu T e Lei Jovents (26/3), Scène ouverte au jazz (30/3) 04 91 39 28 28 www.citemusique-marseille.com

Dôme : Benabar, Charlotte Marin (9/4) 04 91 12 21 21

El ache de Cuba : Barrio Jabour (19 et 26/3), Maudit Comptoir (20/3), Dj Sky & Dj God save the 45 tours (21/3), Mingus Family (27/3), stage de Pandeiro avec Sérgio Bacalhau (28/3, 11h à 15h), Full Jazz Attitude quintet (17/4) 04 91 42 99 79 www.elachedecuba.com

Embobineuse : Ancient Mith, Zoën, Askanius (20/3), Nagual, Animal Hospital (25/3), projection du film Choron Dernière de Pierre Carles et Eric Martin, avec performance de Félix Fujikoon et Miamiam (28/3) 04 91 50 66 09 www.lembobineuse.biz

DO.M.

MUSIQUE

Tankono : Aniruddha, Apurba Mukherjee (19/3), Sayon Bamba Camara (21/3), Tropical Swing (27/3), Superfly All Stars (4/4), Duval MC, Apkass (9 et 11/4), Yancouba Diébaté (10/4), Little Big (16/4) 06 43 21 54 29 http://tankoko.online.fr

AIX Le Korigan : Curtiss, Mary has a qun, Everlyn, Syopsis (20/3), Clover Seeds, Tal K Mas, Holophonics, Rescue Rangers (27/3), All Damned (28/3), Soul Stereo, Jumping Lion (3/4), Mindlaq Project, Nocive (10/4) 04 42 54 23 37 Luynes

Le Pasino : Maxime Le Forestier (20/3), Serge Lama (27/3), La Route fleurie (6/4) 04 42 59 69 00 www.pasino-aixenprovence.com

Théâtre et Chansons : Vincent Gaffet (4 et 5/4), Voyage en Aragon (17 au 19/4) 04 42 27 37 39 www.theatre-et-chansons.com

06 29 75 09 71 www.mjcaubagne.fr

BERRE Forum : Cinémusique sur le Québec : projection de La Grande séduction de Jean-Jacques Pouliot, suivi de Yves Lambert et le Bébert Orchestra (26/3) 04 42 10 23 60 www.forumdeberre.com

CHÂTEAU-ARNOUX/SAINT-AUBAN Théâtre Durance : Elisabeth Kontomanou (20/3), Atelier de musique improvisée (14/4) 04 92 64 27 34 www.theatredurance.com

BRIANÇON Théâtre Le Cadran : L’instrument à pression (3/4), Ali Baba et les 40 voleurs, ciné-concert par la cie La Cordonnerie (15/4), Ilene Barnes (17/4) 04 92 25 52 52

HYÈRES Théâtre Denis : Hugh Coltman, Jil is Lucky (20/3), Festival faveurs de printemps : Clare & The Reasons, Tamara Williamson (16/4), Sammy Decoster, SvenSson (17/4), Sebastien Schuller, Jim Yamouridis (18/4) 04 94 35 48 77 www.tandem83.com

TOULON Oméga Live : Hip hop convict support, part 2 (20/3), The Dynamics, Shaolin Temple Defenders (21/3), Grace, Sandra Nkake (27/3), Soirée Local Heroes (28/3), festival Les Fantaisies toulonnaises: Thomas VDB, La Chanson du dimanche (3/4), Sebastian Sturm, Danakil (4/4), Dub Invaders, High Tone Crew sound system (10/4) 04 98 070 070 www.tandem83.com

NÎMES Théâtre : L’expérience japonaise : YMCK (24/3 à 20h au Théâtre), Chimidoro (24/3 à 22h30 à l’Odéon), Ruins alone (25/3 à 20h au Théâtre), Kicell (25/3 à 22h30 à l’Odéon), Akane Hosaka et Yudaya jazz (26/3 à 22h à l’Odéon), Erina Koyama (27/3 à 20h au Théâtre), Maruosa et De De Mouse (27/3 à 22h à l’Odéon), Kan Mikami (28/3 à 15h à la Cour d’appel), Asa Chang & Junray (28/3 à 20h au Théâtre), Doddodo et Tokyo Panorama Mambo boys (28/3 à 22h à l’Odéon) 04 66 36 65 00, www.theatredenimes.com


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CINÉMA

AU PROGRAMME | DIGNE | IMAGE DE VILLE

Les Rendez-vous d’Annie Samedi 21 mars à partir de 16h 30 l’Alhambra Ciné Marseille en partenariat avec Les Mains Unies propose un ciné tajine spectacle : Le Frabyle, un spectacle de Tayeb Belmihoud, «spectacle de tous les mélanges, des mélanges réussis ou ratés, des traditions différentes…» ; Si Mohand U M’hand, l’insoumis, un film de Rachid Benallal et Liazid Khodja qui trace le portrait du grand poète kabyle de la fin du siècle dernier. Réservation impérative au 04 91 46 02 83 ou alhambra13@wanadoo.fr

Expérience africaine de Laurent Chevallier

Mercredi 25 mars à 20h30, l’Alhambra Ciné Marseille propose le dernier film de Laurent Chevallier, Expérience africaine, qui suit la découverte par six adolescents, élèves du collège de Marciac, des racines du jazz et d’une autre culture ; d’abord leur apprentissage avec les musiciens du groupe guinéen Folifo, composé des anciens musiciens de Momo Wandel, le doyen du jazz africain et leur prestation au grand concert au 30e festival «Jazz in Marciac». Dans la deuxième partie, la caméra les suit à Conakry, dans les familles des musiciens de Folifo, et recueille leurs réflexions tout au long de ce voyage musical, culturel et humain. Débat avec le réalisateur après la projection. 04 91 46 02 83 www.alhambracine.com

Vendredi 27 mars à 17 h 30, à l’Espace Culture, projection du documentaire Marseille Couleur Ebène. Vous pourrez rencontrer son réalisateur, Abraham Azie, alias Abrams DJ, qui a arpenté la ville deux ans durant, à la rencontre de sa «diaspora noire».

Du 18 au 31 mars au Cinéma Mazarin-Aix, dixième quinzaine de Cinéma hispanique en collaboration avec l’association La Noria, une douzaine de films dont Cartes postales de Leningrad de Mariana Rondon, Si loin de Tania Hermida et Une histoire du tango de Caroline Neal. Puis du 8 au 21 avril se tiendra la 8e édition du festival La confusion des genres, des films qui ont jalonné l’histoire du cinéma gay et lesbien, des avant-premières et des rencontres avec des réalisateurs dont Pascal Alex Vincent et l’équipe de Je te mangerais, premier film de Sophie Laloy.

Vendredi 27 mars à 20h au cinéma Variétés, dans le cadre du festival Migrations et Exils, projection du film de Tarik Teguia, Inland (Gabbla) en sa présence. Malek, un topographe d’une quarantaine d’années, accepte une mission dans une région de l’Ouest algérien. Arrivé sur le site, il commence par remettre en état le camp de base, décimé lors d’une attaque des intégristes. Dans la nuit, son sommeil est perturbé par des déflagrations. Le lendemain, Malek voit des gendarmes et des villageois s’affairer autour de corps mutilés. Puis, il trouve cachée une jeune femme noire, qui parle mal l’anglais et ne veut pas donner son nom… Le film est au Variétés à partir du 25 mars

www.lescinemasaixois.com

Du 26 au 29 mars 2009 se déroulera à Rousset la 7e édition du Festival Provence Terre de Cinéma (voir Zib 16) Les Films du Delta 04 42 53 36 39 www.filmsdelta.com

Du 1er au 14 avril, dans le cadre des Rencontres du 9e Art (voir p 43), l’Institut de l’Image, à Aix, propose Histoires de cow-boy. Le 5 avril à 14h, le dessinateur de Valérian, J-C Mézières, viendra parler de son amour des grands espaces et de l’Ouest sauvage à l’occasion de la projection du film de David Miller, Lonely Are the Brave. Institut de l’Image www.institut-image.org

Du 31 mars au 7 avril, au cinéma les Arcades de Salon se dérouleront les 19e Rencontres cinématographiques : 32 films de 25 pays, de Bosnie au Mali en passant par la Malaisie ou la Norvège… dont le beau film palestinien d’Anne Marie Jacir, Le sel de la mer, le superbe film bosniaque Premières neiges, Le cahier de Hana Makhmalbaf, Française de Souad El Bouhati, Le Roi et le Clown de Lee Jun-Ik ou L’île de Pavel Lounguine… Amor Hakkar sera présent pour présenter La maison jaune de même que Vincent Dietschy pour Didine et l’équipe d’un film italien, inédit en France, Il vento fa il suo giro de Giorgio Diritti. Autre film inédit, un documentaire musical, Rythm is it de Thomas Grube sur l’orchestre philharmonique de Berlin. Pour les plus jeunes un ciné goûter, le samedi, autour du Bal des Lucioles, quatre courts métrages de Lettonie mettant en scène des insectes. Quant aux lycéens, ils pourront voir Joe Strummer : The Future is Unwritten de Julien Temple sur le leader des Clash. Pour les cinéphiles, du répertoire : De l’influence des rayons gamma sur le comportement des marguerites de Paul

Premières neiges, le cahier de Hana Makhmalbaf

Newman et L’Esprit de la ruche de Victor Erice. Enfin, les amateurs de courts métrages auront leur séance (gratuite) en présence de Lionel Vania Arazi qui a réalisé Le Secret de Cassandre. Les Rencontres cinématographiques de Salon 04 90 56 35 74 www.rencontres-cinesalon.org

Le Petit fugitif de Morris Engel, Ruth Orkin et Ray Ashley

Jeudi 2 avril à 20h30, à l’Alhambra, en présence de son réalisateur Fabrice Coppin, Première épée : Hugo, âgé de quinze ans ne pense qu’aux taureaux ! L’heure de la première mise à mort est arrivée, un rituel qui marquera son passage à l’âge adulte. Du 25 mars au 5 avril, à l’Alhambra, cinquante-six ans après sa sortie, reprise de Le Petit Fugitif de Morris Engel, Ruth Orkin et Ray Ashley, lion d’argent au festival de Venise, un film sans lequel ni les 400 Coups ni A bout de

souffle n’auraient existé, comme l’a déclaré Truffaut. Et si vous n’avez toujours pas vu le petit bijou d’Agnès Varda, Les Plages d’Agnès, vous avez encore une chance: il est programmé tous les vendredis jusqu’au 24 avril à 21h ! 04 91 46 02 83 www.alhambracine.com

ANNIE GAVA


Du 6 au 9 avril, à Digne-les-Bains, les 37e Rencontres cinématographiques : projections et rencontres avec des cinéastes, dont Khalil Joreige avec Je veux voir et Khiam, Emmanuel Finkiel pour Nulle part, terre promise et Rabah Ameur-Zaïmeche pour Dernier maquis. Séverin Blanchet présentera la série Enfants de Kaboul, série de cinq courts métrages réalisés par des réalisateurs afghans. Un jury, présidé par

Paul Otchakovsky-Laurens, attribuera le prix de la ville de Digne au meilleur court métrage. Rencontres Cinématographiques de Digne-les-Bains et des Alpes de Haute-Provence Centre Culturel René Char, Digne (04) 04 92 32 29 33 www.unautrecinema.com

Nulle part terre promise de Emmanuel Finkiel

Cinéma paysan Du 8 au 14 avril, Image de ville présente les quatrièmes Journées du Film sur l’environnement, consacrées au monde paysan. Projections, au pays d’Aix, de 55 films, fictions et documentaires, rencontres et débats avec des cinéastes et des spécialistes des questions agricoles, expositions de photographies autour de quatre thèmes : Être paysan aujourd’hui, pour quelle agriculture ? ; Entre ville et campagne ; La crise alimentaire mondiale ; Entre producteurs et consommateurs. Champs, contrechamps propose ainsi de voir des films fondateurs comme Farrebique (1947) et Biquefarre (1984) de Georges Rouquier, des films plus récents comme Profils paysans 1 et 2 et La vie moderne de Raymond Depardon, Les terriens d’Ariane Doublet ou L’Apprenti, le premier long métrage de Samuel Collardey, permettant de réfléchir sur la vie quotidienne des agriculteurs, leur avenir… Le 11 avril l’accent sera mis sur les

cinéastes italiens avec Parabole d’or et Pastori di Orgosolo de Vittorio de Seta, Biutiful cauntri de Esmeralda Calabria, Il vento fa il suo giro de Giorgio Diritti et Padre Padrone des frères Taviani. Pour les plus jeunes, Chicken Run de Nick Park et Peter Lord, La ferme des animaux de Joy Batchelor et John Halas, Guerre et paix dans le potager de Jean-Yves Collet, Patate et le jardin potager de Damien Louche-Pélissier et Benoît Chieux... Une occasion pour tous les urbains de débattre avec des réalisateurs et des spécialistes des questions agricoles, et d’«environnement» (voir p. 58). A.G. Champs, contrechamps Journées du Film sur l’environnement Image de ville, Aix 04 42 63 45 09 www.imagedeville.org L'Apprenti de Samuel Collardey


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CINÉMA

ASPAS | AFLAM

Ola ! Des films latino ! Organisées par Solidarité Provence Amérique du Sud, les 11e Rencontres du cinéma sud-américain se tiendront à Marseille du 26 mars au 3 avril Hors le coup d’envoi au CRDP le 26 mars avec deux films argentins et la soirée de clôture au cinéma Le Madeleine, c’est à la salle SEITA de la Friche que se déroulera l’ensemble de la manifestation, présidée par le réalisateur argentin Carlos Sorin, qui a obtenu un Lion d’argent à la Mostra de Venise et le Goya (César espagnol) du meilleur film étranger pour son premier long métrage La pelicula del Rey en 1986. «La venue de Carlos Sorin à Marseille sera un moment fort, précise Léonor Harispe, coordinatrice des Rencontres. C’est lui qui donnera la «leçon de cinéma», mise en place avec L’IUFM. Nous projetterons en avant-première son dernier film, La Ventana, un film en rupture avec tout ce qu’il a réalisé jusque là : l’histoire d’un vieux monsieur, en Patagonie, qui attend à la fenêtre, (la ventana) son fils qu’il n’a pas vu depuis des années… Un film magnifique ! Et Atahualpa Lichy a programmé son premier long métrage, Bombon El Perro (2004), que nous proposons aussi en séances scolaires.»

Compétitions, rétrospective, avant-premières…

Carlos Sorin © Rolando Jurado

Chega de saudade de Lais Bodansky

auront lieu aussi à La Ciotat, Manosque, Saint-Bonnet et Forcalquier… Pourtant, comme beaucoup de manifestations, leur budget est plus que serré et c’est grâce au dynamisme et aux bonnes volontés que les amoureux du cinéma latino pourront voir tous ces films !

ASPAS 04 91 48 78 51 www.aspas-marseille.org

ANNIE GAVA

Déplacements et errances Rencontres La Faute a Voltaire d’Abdellatif Kechiche

Sept films seront en compétition pour le Colibri d’or : outre La Ventana, le dernier film du réalisateur de Mon Ami Machuca, Andrés Wood, La buena Vida, une vision critique de la société chilienne d’aujourd’hui ; La Morenita du mexicain, Alan Jonsson Gavica ; un film inédit portoricain, d’Adorno Irrizarri et Emilio Rodriguez Vasquez, El Clown qui raconte l’histoire d’un clown d’un cirque de village, parti travailler en ville dans la publicité… Il y aura aussi un film vénézuélien, El Tinte de la fama ainsi que Chega de saudade, de la réalisatrice brésilienne, Lais Bodansky. Une rétrospective permettra de revoir les classiques de l’humour latino, dont La Muerte de un burocrata et La Estrategia del

caracol, et de découvrir Estrellas, le documentaire de Federico León et Marcos Martinez sur Villa 21, un studio de cinéma dans un bidonville de Buenos Aires qui a obtenu le prix spécial du Jury au Buenos Aires Festival Internacional de Cine Independiente (BAFICI). Ce ne sera pas le seul documentaire; le FID offrira sa Carte Blanche, et, en avantpremière mondiale, Valeria dos Santos et Philippe Claudeprésenteront Paraguay, une révolution par les urnes, une tentative de comprendre pourquoi la société paraguayenne confie son destin aux mains d’un religieux. Et comme les autres années, des courts métrages seront en compétition : 14 ont été sélectionnés, représentant 8 pays. Chaque projection sera suivie d’un buffet et le 27 mars on pourra écouter un concert de Liubila, un trio de «musiques hispaniques populaires revisitées.» Des projections

Comment les cinémas arabes ont-ils abordé l’émigration, son histoire, ses conséquences, et l’exil ? Telle est la problématique de l’AFLAM du 2 au 5 avril Si les films sont peu nombreux avant les années 80, après, ils ne manquent pas, surtout ceux qui parlent de l’émigration maghrébine comme Traversées du Tunisien Mahmoud ben Mahmoud, Visa, la dictée du Tunisien Ibrahim Letayef, Paris-sur mer du Marocain Mounir Abbar, Visa pour un rêve, de l’Algérienne Samia Chala., Bye bye de Karim Dridi, ou La faute à Voltaire d’Abdellatif Kechiche… Seront abordées aussi d’autres émigrations comme celle du Proche-Orient vers l’Amérique latine avec Ila Ayn ? du Libanais Georges Nasser, ou vers le golfe avec La Sueur des palmiers de l’Égyptien Radwan El Kashef ; les migrations intérieures avec À Casablanca les anges ne volent pas, du Marocain Mohamed Asli, ou les déplacements qui font naître de nouvelles formes d’esclavage avec Bonne à vendre de la Libanaise Dima El Joundi.

Certains cinéastes seront présents : le 2 avril, à 20h 30, Nadia Kamel présentera Salade Maison. «L’histoire est simple. Ma mère, Mary, est une salade de religions, de cultures et de gens. Elle est juive, catholique et musulmane. Elle est italienne et égyptienne. Elle est communiste, féministe et pacifiste d’instinct…» Le 3 avril à 20h30, Brahim Fritah présentera Le Tableau : l’oncle du réalisateur revoit un tableau d’El Jadida, sa ville natale, qu’il a peint trente ans auparavant à son arrivée en France, et il raconte sa jeunesse au Maroc, son départ, sa vie d’ouvrier à la régie Renault. Et le 4 avril à 14h00, La femme seule, le récit par une jeune Togolaise de son esclavage. Bourlem Guerdjou sera présent lui aussi le 4 pour parler de Vivre au Paradis un film qu’il a réalisé en 1999. Participera à l’échange, à 20h30, Stéphanie Alexandreresponsable de l’audiovisuel auprès de la Cité nationale de l’histoire de l’immigration. Le 5 avril à 14h, Marie Vanaret et Aurélien Desclozeaux, son chorégraphe interprète, présenteront O.S., le un parcours d’un immigré du Maghreb devenant ouvrier spécialisé en métropole dans les années 50, le premier solo de Triptyque Soul. Le même jour, Serène Delmas, de La Cinémathèque de Toulouse, viendra présenter deux films : Aventure en France de Jean-Paul Ngassa à 16h et Pierre et Djemila de Gérard Blain à 18h. 26 films, 12 pays, une exposition de Kamel Khélif et Samiha Driss, de la danse, des débats, deux projections hors Marseille, à Gardanne et Port-de-Bouc, le programme est alléchant ! A.G.

Aflam Cinéma les Variétés 04 91 47 73 94 www.aflam.fr


GALERIE DU TABLEAU | RENCONTRES DU 9e ART

ARTS VISUELS

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16m2 et plus Le 37 rue Sylvabelle à Marseille a vu défiler des générations d’artistes contemporains. Et ça continue. Mais la Galerie du Tableau est en sursis… Qu’est-ce qui mesure 16m2, a reçu plus de six cents artistes, huit cents expos en presque vingt ans, et plafonne à 30 000 euros de budget annuel actuellement ? Dès sa création en 1990 par Bernard Plasse et l’association Diem Perdidi, la Galerie du Tableau a été conçue selon le concept un artiste, une œuvre, une semaine. Le premier : Max Ernst et un de ses microbes. Sélection au felling et éclectisme comme principe. Vernissage chaque lundi à 18h30. Visite d’atelier ensuite et plus si affinités. Avec Porte Avion et Athanor, elle constitue le triumvirat historique des galeries d’art contemporain à Marseille. Mais plus pour très longtemps ! Chez Athanor, Jean-Pierre Alis tirera définitivement le rideau aux vacances d’été, et Bernard Plasse envisage de décrocher les cimaises avant la fin de l’année s’il ne trouve pas un lieu plus adapté. A 74

ans, toujours des projets derrière la moustache, il laisse poindre une certaine lassitude. Le marché de l’art à Marseille ? «Il y a peu de collectionneurs sur Marseille, et ils vont acheter à Paris ou ailleurs, souvent plus cher, des artistes que nous montrons ici!». Les institutions muséales ? «En bientôt vingt ans, je n’ai pas eu un achat du Frac, alors que j’ai présenté des pièces qui sont aujourd’hui au Frac.» Quant à Marseille 2013, «…sollicité au début et puis plus rien. Ce sont les arts de la rue qui les intéressent. Ça risque de se rapprocher plus du carnaval de Nice que du Louvre ou de Beaubourg» et «ce qui manque à la ville, ce sont des gens compétents entourés de professionnels.» Ici le musée d’art «contemporain» n’en a gardé que le sigle entre []. Alors Bernard Plasse avance l’idée de le ramener en centre ville «avec 700 à 1000m2 en trois parties : toujours les 16 de la galerie, et le reste donné en partie en gestion à une galerie de renommée internationale sur deux ans, et en partie en expo permanente avec des artistes d’ici. Avec des vernissages simultanés. Les gens, les collectionneurs viendraient acheter plus facilement !» Malgré l’amertume, les projets ne manquent pas.

Pour cette année un triptyque Toronto, Hambourg, Marseille, Marseille s’invite à Toronto ; en mai, un livre en hommage à deux grands poètes actuels vivant à Marseille, Jean-Jacques Viton et Liliane Giraudon, entretiens avec Xavier Girard ; pour fin 2009-2010, Un peu plus au sud qui réunira des artistes du Maghreb et des œuvres itinérantes intégrant lumière et énergie solaire. Pour l’heure, Bernard Plasse souhaite un autre lieu plus commode pour la Galerie du tableau, ou… son arrêt. Il a rendez-vous le 7 avril.

Galerie du Tableau 04 91 57 05 34 www.galeriedutableau.free.fr

prochains artistes jusqu’en mai Christophe Boursault (prix Mourlot 2008) Marie-Hélène Fraba Jack Jeffrey Laurent Septier Raphael Boccanfuso

Nouvelle séquence illustrée à Aix Plus de 70 auteurs, 12 expositions, 35000 visiteurs attendus : les chiffres des Rencontres du 9e art explosent ! En six ans, le festival de la bande dessinée et autres arts associés s’est fait une place sous le soleil d’Aix-en-Provence malgré l’image de «ville conservatrice» qui lui colle à la peau. Plus largement encore sur le territoire de la Communauté du Pays d’Aix, sillonné par des Caravanes BD customisées par les auteurs, lieux insolites pour des workshops et des rencontres sur le thème «Picasso n’existe pas»… Ce succès populaire, les Rencontres le doivent sans doute à leur esprit fédérateur qui entraîne tous les Enki Bilal Casterman

musées à introduire le loup dans la bergerie en accrochant des BD à leurs cimaises, et toutes les galeries, les librairies et les bibliothèques à jouer le jeu. Elles le doivent également à leur volonté de coller à l’image de leur grand frère, le Festival d’Angoulême, qui innove et rebondit sans cesse. À Aix donc, le public aura rendez-vous avec des œuvres (parmi les accrochages, Lucy, L’espoir au Muséum d’histoire naturelle et Ginkgo à la Cité du livre pour le jeune public), des auteurs (dont une rencontre entre Bilal et Preljocaj, dix-huit ans après Roméo et Juliette), des réalisateurs (Jean-Claude Mézières pour Histoires de Cow Boys et Pierre Carles pour Choron dernière en avant-première régionale). Et de la performance pour un Concert de dessins mêlant les encres de Vincent Vanoli aux sons pop rock de Lauter. Tiens, tiens, une forme inédite lancée à Angoulême pour sa 32e édition ! C’était il y a quatre ans… MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

Les Rencontres du 9e art du 24 mars au 25 avril Journées rencontres et dédicaces les 3, 4 et 5 avril à la Cité du livre Aix-en-Provence et Pays d’Aix www.bd-aix.com

© Gingko


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ARTS VISUELS

SMP | ATELIERS D’ARTISTES | VIEILLE CHARITÉ

Systèmes

Buffet froid ?

SMP accueille une série de dessins de Sylvie Pic montrés pour la première fois en France et un projet, Determinant hidden spaces, produit avec l’aide de la galerie et son responsable Stéphane Magat. On peut avoir un double sentiment lorsqu’on retrouve ce travail. D’une part, une certaine séduction poétique suggérée par ces espaces néo géométriques inclassables et une technique du dessin très veloutée (crayon sur papier préparé à l’acrylique). Telle cette Black Suite de 2002 montrée à Montréal, et pour la première fois en France à SMP. D’autre part, un sentiment de déjà vu, de répétition tellement la manière est caractéristique de l’artiste. On se penchera alors vers les deux caisses en bois brut d’un mètre cube environ installées dans la seconde salle. Un petit hublot rectangulaire permet d’observer à l’intérieur de chacune. Les parois sont recouvertes de formes curvilignes peintes en mi-teintes. L’effet premier donne la sensation d’anamorphose proche du travail de Georges Rousse mis en boîte. Il semble que l’effet recherché visuellement est d’annuler la présence réelle du volume cubique et d’autoriser le flottement du regard dans un autre espace ainsi révélé sans limites. D’où le titre du projet. On retrouve ici une des préoccupations qui hantent les œuvres de l’artiste. Mais, à cause d’une mise en lumière trop crue, l’illusion ne fonctionne pas complètement. «Il faut que j’atténue la lumière dans les angles car on les voit encore trop» avouet-elle. Un petit réglage seulement pour que tout tombe à Pic !

En parodiant Hector Obalk à propos d’Andy Warhol, on pourrait dire de Bernard Buffet qu’il n’est pas un (très) grand artiste. Pourtant le pape du pop badait le peintre français dit-on ! Alors qu’a-t-on à se mettre sous la dent sous les voûtes de la Vieille Charité ? Une soixantaine d’œuvres de 1947 à 1999, issues de collections particulières, d’un artiste notoire pour sa mise au ban de la grande histoire de l’art! Vilains tableaux disaient-ils, vilaine était donc la critique. L’argument est bien court. À l’inverse, affirmer que Bernard Buffet fait jeu égal avec Picasso pour avoir été précurseur dans l’art du XXe siècle (lire le catalogue), constitue une thèse plutôt excessive. En regard des Futuristes, Surréalistes, Dadaïstes ou Constructivistes, l’esthétique développée se résume à quelques traits caricaturaux. Mais à y regarder de près, bien des œuvres traduisent une empathie tragique avec le genre humain. Dommage que le style prenne le dessus, sauf dans La Mer réalisé en 1960, la seule œuvre de facture abstraite présentée ici. Un écart pour le pape de la figuration, ou une autre voie ? Les organisateurs souhaitaient une réhabilitation en lui dédiant une grande exposition. Est-ce un grand projet dans l’ambitieuse programmation

Determinant hidden spaces Sylvie Pic Jusqu’au 25 avril SMP 04 91 64 74 46 www.s-m-p.org Boites - Determinant Hidden Spaces, 2009

Le grand jeu II, huile sur toile, 130x162cm, 1977 © Galerie Maurice Garnier

d’une ville sacrée capitale européenne de la culture ? La question du Buffet reste posée. C.L. Bernard Buffet Jusqu’au 7 juin Centre de la Vieille Charité 0810 813 813 Allo mairie 0 810 813 813 Catalogue Bernard Buffet, Indigènes éditions, 2008

Des mondes nébuleux Originellement appelée La Nébuleuse, l’exposition apparaît aux Ateliers d’artistes de la Ville de Marseille sous l’intitulé Puits des mondes dans une scénographie signée Sylvain Roca, des environnements et des installations conçus par Élodie Moirenc. Un projet tricoté dans la continuité d’une première expérience en binôme au Château de Lauris, et vivement accueilli par l’Association Château de Servières qui, pour le coup, a totalement repensé ses espaces. Parce que «la proposition est ténue, dense, souligne Martine Robin, commissaire d’exposition, parce qu’elle est vivante. C’est un travail sur les formes, les matières, l’espace, la couleur : la base même des arts plastiques»… On pénètre dans ce puits sans fond par une antichambre recouverte de dessins gais et «enfantins» avant de déboucher sur des sas obscurs où l’on circule et déambule à sa guise. Dans une succession d’espaces fictifs qui brouillent les repères, dans un entre-deux instable, on découvre la Matrice, le Trou noir, le Trou blanc, la Grotte, la Salle secrète des sculptures, les Spectres comme autant d’œuvres mises bout à bout «sous forme de collections». L’ensemble évoque une combinaison théâtralisée, à réinventer sans cesse, où les matériaux et la lumière ont remplacé le dialogue des mots et le jeu des acteurs. Sylvain Roca y met en scène le vocabulaire d’Élodie Moirenc, ses matériaux -opaques ou transparents, lisses ou rugueux-, ses perspec-

Puits des mondes, Elodie Moirenc et Sylvain Roca, salle 3

tives -tronquées parfois-, ses laies de papier peint en lambeaux, ses colliers de perles géants sans début ni fin… Mais que se passe-t-il donc derrière le rideau ? Au fond de la pièce ? Là-bas, au bout du couloir ? Rien d’éternel, juste des visions immatérielles, tels les chemins de Lilliputiens tracés à coup de gommettes. MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

Puits des mondes Élodie Moirenc et Sylvain Roca jusqu’au 11 avril Ateliers d’artistes de la Ville de Marseille 04 91 85 42 78


VILLA NOAILLES | SAINT-RÉMY

ARTS VISUELS

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Architecture de la… discorde Conçue pour des initiés de l’architecture, l’exposition Architecture de la disparition rend hommage à André Lefèvre et Jean Aubert qui, dès les années 50, réalisèrent «de véritables architectures à l’échelle du paysage» À Hyères, la Villa Noailles a recours aux moyens les plus traditionnels que sont la photographie, les plans et quelques maquettes pour étayer son propos. L’ensemble est un peu sec, contrebalancé fort heureusement par deux vidéos qui, outre la clarté du propos de Patrick Bouchain et du témoignage d’André Lefèvre, rendent l’architecture plus «vivante». Sans oublier la participation de Rudy Ricciotti qui évoque l’intelligence et la générosité constructive de ceux qu’il nomme «architectes voyageurs.» D’aucuns qualifient leurs réalisations de réussite environnementale mettant en œuvre «un autre rapport au monde.» Ainsi Patrick Bouchain parle de «réussite exceptionnelle» à propos «d’une œuvre entière, sincère et spirituelle.» L’exposition tout entière est un plaidoyer en faveur du cabinet, les partis pris d’intégration au paysage, l’utilisation des pierres naturelles, la réalisation de toits-jardins, les chemins piétonniers, l’interpénétration entre les espaces intérieurs et extérieurs… Quand d’autres s’insurgent contre

© Olivier Amsellem, Villa La Lezardiere

le bétonnage du littoral varois comme ce fut le cas du domaine du Gaou Bénat transformé en hameaux ! Il faut reconnaître néanmoins que, si l’avancée du béton sur les forêts de pins et les restanques est regrettable, André Lefèvre et Jean Aubert ont réussi à se faire tout petits face à Dame nature, rendant quasiment invisibles leurs constructions entre terre et mer.

Architecture de la disparition jusqu’au 5 avril Villa Noailles, Hyères (83) 04 98 08 01 98

MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

Lignes de faille De Château Noir en Provence où Pierre Tal-Coat vécut une quinzaine d’années, à la Chartreuse de Dormont en Normandie où il poursuivit «inlassablement sa quête vers une fusion du spirituel et de la matière», le musée Estrine à Saint-Rémy-deProvence nous invite à marcher

dans ses pas. Car de flânerie il en question ici, et de traces aussi, TalCoat étant un infatigable promeneur tout autant qu’un peintre des empreintes. Né en 1905, Pierre Tal-Coat fit mille et un métiers avant de se consacrer exclusivement à la peinture à partir des années 1924, et

Pierre Tal-Coat, Vols d'oiseaux passant un reflet 1965, huile sur toile, 122 x 196 cm, Collection particuliere, © Jean-Louis Losi

jusqu’à sa mort en 1985. Sur sa route, deux hommes et deux rencontres fondatrices, l’une avec le philosophe Henri Maldiney, qui «ouvre son œil à l’émotion comme une expérience de la vie, de la réalité», l’autre avec le poète André du Bouchet qui lui fit sentir pleinement l’état «d’être dans le paysage.» Si l’exposition se concentre sur une dizaine d’années, elle n’en offre pas moins la quintessence de son œuvre en prise permanente avec la nature, sans que jamais il ne l’imite ou ne la copie. La nature –«celle de la réalité originelle»- est comme un second souffle, une architecture divine, une construction mentale quand, sur la toile, il n’en conserve que les lignes de force. Celui dont le nom signifie en breton «front de bois» n’a cessé d’affiner son vocabulaire où la ligne et la bande, rectilignes ou circulaires, sont omniprésentes, où le geste suspendu se heurte à l’hori-

zon, à la saillie d’une pierre, frôle la rugosité d’une écorce, se perd dans une faille vertigineuse. Aquatique, minérale ou végétale, Tal-Coat répétait qu’il voulait «rentrer en elle», écrivait qu’il voulait «représenter la nature de manière intuitive.» Et toutes ses recherches sur la couleur pure, la matière, la lumière ont été une réponse plastique à une quête d’une représentation sensuelle. Au point d’atteindre les rives d’une «abstraction» silencieuse. Car Tal-Coat fut aussi le peintre de la solitude et de la méditation. MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

Pierre Tal-Coat, De Château Noir à Dormont Musée Estrine, St-Rémy-de-Provence jusqu’au 14 juin 04 90 92 34 72


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ARTS VISUELS

AU PROGRAMME [Saint-Cyr-sur-Mer] Un grand bonheur, toujours, que celui de retrouver Anne et Henri Sotta et leur collection (en partie car elle compte plus de 1000 œuvres), miroir de leurs relations avec les artistes plutôt que bourse d’investissement sans risques ! À Saint-Cyr-sur-Mer, une sélection d’œuvres représentatives de l’Art brut et de l’Art singulier trouveront leur place dans cette ancienne câprerie réhabilitée en Centre d’art.

Oeuvre de Moss, l'un des artistes fugurant dans la collection Sotta

Sotta, de la collection aux expositions jusqu’au 26 avril Centre d’art Sébastien, St Cyr-sur-Mer (83) 04 94 26 19 20

[Atelier de Visu] L’Atelier de Visu nous offre l’une des très rares occasions de voir, en France, les travaux photographiques noir et blanc de Tore Sandahl qui vit et travaille à Stockholm. Comme une histoire sans paroles, ses personnages anonymes sont cadrés avec une extrême rigueur, dans un halo infini de gris et de blanc qui souligne les reliefs. Tore Sandahl Stolen Moments jusqu’au 10 avril Atelier de Visu, Marseille 04 91 47 60 07 Stolen Moments, Courtesy Tore Sandahl

[Galerie Dukan & Hourdequin] On n’avait pas vu pareil univers depuis les pré-raphaèlites… De loin, les œuvres ressemblent à des photographies numériques ; de près, ce sont des huiles sur toile ou sur papier d’une facture hyperréaliste : la méprise est telle qu’elle trouble les sens. Le modèle, toujours le même, incarne la beauté féminine, une certaine idée de l’éternelle jeunesse, la nature empirique, la rédemption après la mort… L’origine du monde, peut-être ? Ygal Ozeri Petite mort jusqu’au 16 mai Galerie Dukan & Hourdequin, Marseille (1er). www.dukanhourdequin.com Yigal Ozeri (2008), huile sur toile 20 x 30 cm

[Saint-Quentin-la-Poterie] Sans attendre la remise des prix du Festival européen des arts céramiques 2009, décerné le jour de l’inauguration le 12 juillet prochain, le Musée de la poterie méditerranéenne rassemble les créations de vingt céramistes représentatifs de la diversité des courants, des inspirations et des techniques actuels. Un florilège d’inventivité, de haute technicité, d’humour et de poésie donnant à la «terre» toute sa vivacité.

MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

Musée de la poterie méditerranéenne La Jeune céramique européenne Du 4 avril au 27 septembre Saint-Quentin la Poterie (Gard) 04 66 03 65 86

Frydman Kuhn Couturetheiere


[De la photographie et du spectacle] Guy Le Querrec (Magnum Photos) est l’invité d’honneur du 43e Salon Photographique d’Allauch, cadré sur le thème de la photographie et le spectacle. Une exposition Jazz de J à ZZ lui est consacrée à la galerie du Vieux Bassin et le soir du vernissage, vendredi 17, rencontre débat, projections et signatures. Comme à l’accoutumée, Jean-Louis Amoroso et l’association Phocal ont soigné le reste du programme avec de nombreuses expositions et évènements dans la ville : les heureux élus de ce 43e concours, sans compter les rencontres, débats, portes ouvertes, soirées et projections, à découvrir dans le détail sur www.phocal.org. 43e Salon Photographique d’Allauch du 17 avril au 10 mai divers lieux 04 91 10 49 20

Photographie de Guy Le Querrec

Les Larmes de Lora, Laurent Fievet

[Vitrine, vidéo, installation] Où il est question de portraits brouillés, de sacrifice, de vampirisation : le visage de l’actrice Gene Tierney (dans le film d’Otto Preminger, Laura) mixé avec les traits de Dora Maar (La Femme en Pleurs de Picasso, version Tate Gallery). Où l’on voit une sélection des 12 installations de la série Les Larmes de Lora conçue par Laurent Fiévet, en partenariat avec la galerie parisienne La Ferronnerie. Laurent Fiévet Les Larmes de Lora - Reflus Jusqu’au 11 avril Où - lieu d’exposition pour l’art actuel 04 91 81 64 34 CLAUDE LORIN


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LIVRES

RENCONTRES

Format à l’italienne

Ivan Messac, 2008

L’histoire de l’art européen s’est fabriquée pour parties sur des conceptions d’avantgarde, de révolution ou encore de théories de la table rase. Les Futuristes font figure de référence en la matière. Le Centre Pompidou avec quelques temps d’avance célébrait l’anniversaire de sa naissance (20 février 1909) et Marseille, respectueuse pour une fois du calendrier, modestement lui rend hommage sous plusieurs formes. À Montévidéo était proposé un repas inspiré des règles de la cuisine totale futuriste (voir p 33) et au Cipm, après un vernissage/lecture le 20 février, une sage exposition intitulée Le Futur a 100 ans court jusqu’en avril.

En hommage discret, Yvan Messac a conçu une série de dix gouaches de format affiche en s’inspirant des codes graphiques du mouvement italien. Noir, blanc et rehauts colorés issus du drapeau transalpin par endroits, chaque pièce évoque l’iconographie (l’imagerie mentale ?) produite par et autour de ce mouvement : portraits stylisés de ses représentants, textes obliques, contrastes marqués dans l’esprit constructiviste ou ateliers de mai 68. Pas tout à fait illustration ni redondance, ces images sont complétées par des livres, documents d’époque ou facsimilés. Parmi ceux-ci deux pages édifiantes intitulées Sintesi Futurista della Guerra en disent long sur la conception supérieure qu’avaient ces artistes de leur pays sur les autres européens ! La révolution et/ou la guerre comme avantgarde artistique ? Brrr…! C.L.

Hommage graphique au Futurisme Ivan Messac Jusqu’au 4 avril Centre International de Poésie de Marseille 04 91 91 26 45 www.cipmmarseille.com

Le deuxième genre Dans le cadre du cycle aubagnais Mauvais genre, la MJC a proposé de célébrer la Journée Internationale des Femmes par l’exposition de peinture Reg’Art installée dans le superbe lieu entièrement rénové de la galerie municipale : les Pénitents Noirs. Cette ancienne chapelle de St Michel accueille des expositions depuis 2001. 80 artistes femmes d’Aubagne et la région ont proposé peintures ou sculptures sur la thématique du corps et de ses représentations. L’installation séduisante de sachets de plastique rose de Caroline Avias donne une note festive et ironique.à l’ensemble. Les propositions sont très variées et de niveau différents, la règle étant qu’il n’y a pas de sélection. L’oeil se promène donc de peintures figuratives ou abstraites assez criardes à des propositions nuancées et sensibles plus abouties, comme les 9 carrés blancs contenant chacun un dyptique de dessins raffinés de Martine Rastello, et les corps suggérés de Clodine Plongeur ou Cincia, des sculptures de papier de Malooka, en terre de Martine Pellegatti, en bois flotté de Nicole Agoutin... On remarque aussi le travail de Michèle Alexandre qui évoque Alechinsky sans le copier. Exposition jusqu’au 22 mars.

À venir dans le cadre de mauvais genre... - Rencontre littéraire avec Régine Desforges, le 28 mars à 17h, dans la salle «adultes»; - Journée professionnelle (bibliothécaire et documentalistes) proposée avec le COBIAC, l’ARL, l’ABF et la bibliothèque départementale des BdR sur la littérature populaire. Le 30 mars de 9h à 17h. - Concert hard rock donné par la Maison des activités socioculturelle de La Penne-sur-Huveaune. Le 3 avril à 18h. - Conférence-concert de Sébastien Douzal, guitariste soliste. Le 17 avril à 18h. Conférence-concert : Isabelle Terjan (pianiste) et Christelle Neuillet (clarinettiste et violoniste) raconteront les destins croisés de femmes courageuses ayant ouvert la voie à l’épanouissement artistique des femmes du XXe siècle. Le 25 avril à 17h.

CB

El Aswany fait salles combles Le romancier égyptien était invité le 10 mars au Méjan et le 11 mars à la Bibliothèque Départementale pour deux rencontres organisées par Thierry Fabre, Actes Sud et La pensée de midi Bien avant le début des échanges, l’auditorium de la bibliothèque était bondé. Mieux valait arriver à l’heure pour voir celui qui déplace les foules et dont le succès ne se dément pas. L’immeuble Yacoubian vient de fêter son millionième exemplaire ; de 2002 à 2007, il est resté le roman le plus vendu dans le monde arabe, détrôné en 2007 par… Chicago, le 2e best-seller de ce dentiste cairote devenu écrivain ! Luimême n’a pas l’air d’en revenir. Pourtant, dans un excellent français, il essaie de cerner les raisons de l’écho immense de ses romans, et aussi celles qui l’ont poussé vers l’écriture, même s’il reste dentiste à temps partiel, ses patients constituant d’excellentes sources d’inspiration. La littérature, pour lui, est un moyen privilégié de comprendre les autres et d’explorer des domaines nouveaux ; elle nécessite ouverture d’esprit et tolérance. «Tout ce que j’ai écrit a dépassé les barrières», déclare-t-il. C’est sans doute cette liberté que ses lecteurs apprécient. Comme ils apprécient la vérité humaine de l’Égypte qui transparaît dans ses romans, bien loin du folklore orientaliste, et le combat qu’il mène contre toutes les

formes d’hypocrisie. Cette rencontre a permis de mesurer la bonhomie de l’auteur, ses talents de conteur, son humour. Une soirée vivante, chaleureuse, à l’image de l’invité vedette, que d’autres acteurs ont également bonifiée : le lecteur public Marc Roger qui a enchanté la salle d’extraits choisi, puis Gilles Gauthier, dont l’excellence des traductions a été saluée par le public arabophone. Ce diplomate en poste au Yemen a insisté sur l’accueil favorable qu’il reçoit dans le monde arabe grâce à son travail de traducteur, soulignant une ouverture d’esprit que les Occidentaux ont, selon lui, une regrettable tendance à nier. Longtemps après la fin des débats, El Aswany était toujours assiégé par les lecteurs venus faire dédicacer leurs livres. Pas le temps de faire une pause ! Il a pourtant gardé le sourire et eu un mot gentil pour chacun. On aurait tous voulu être égyptiens (voir p. 51). FRED ROBERT

Alaa El Aswany © Marc Melki


COLIBRIS | JEUDIS DU COMPTOIR | TPM

LIVRES

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Que viva CoLibriS ! Après le Salon parisien du Livre, consacré au Mexique, et juste avant les 11e Rencontres du Cinéma Sud-Américain (voir p 42), un nouveau venu sur la scène littéraire marseillaise : le Festival CoLibris

Luis Sepulveda © Daniel Mordzinski

Organisées par l’Association Des Auteurs aux Lecteurs (ADAAL), en partenariat avec Solidarité Provence/Amérique du Sud (ASPAS) et Libraires à Marseille, ces Journées du Livre sud américain ne sont pas tout à fait une première : elles ont déjà eu lieu en mars 2008, mais la manifestation souhaite désormais

mettre l’accent sur la création littéraire d’Amérique latine, afin d’apporter une aide concrète à la reconnaissance et à la diffusion de leurs œuvres en France. Le contexte marseillais semble propice à une telle manifestation, grâce à l’ASPAS, mais également à des libraires et éditeurs comme Jacques Aubergy. Fin connaisseur du Mexique où il a créé en 2003 le prix Antonin Artaud, directeur de la collection L’Atinoir, il sera l’un des invités de ce festival qui rassemblera des auteurs latino américains aussi fameux que le Chilien Luis Sepulveda ou le Mexicain Paco Ignacio Taibo II, et des Français amoureux de ce continent et de cette littérature, prolifique et très vivante, mais finalement peu traduite. Au programme de ces rencontres, lectures, tables rondes, séances de dédicaces, stands et spectacles à la Criée ou la BMVR Alcazar, mais aussi sous un chapiteau aux Réformés. Le festival se conclura en musique par une fiesta à l’Academia del Tango Argentino.

Paco Ignacio Taibo II © John Foley - Opale

CoLibriS Journées du Livre latino américain les 19, 20 et 21 mars 04 91 42 68 64

FRED ROBERT

Hissez haut les couleurs du roman ! Le 5 mars, sous une forte brise, la Caravelle a appareillé pour les nouveaux mondes romanesques en compagnie de Jean-Marie Blas de Roblès et de Charlie Galiber Lorsqu’ils n’écrivent pas de fictions, l’un est archéologue, l’autre anthropologue ; deux décrypteurs des traces et des comportements humains. Blas de Roblès a travaillé plus de 10 ans à la rédaction du foisonnant Là où les tigres sont chez eux (voir p. 51), presque 800 pages d’un récit polymorphe, baroque, à l’image du personnage central, le jésuite Athanase Kircher, que le romancier qualifie de «Géo Trouvetout du XVIIe

siècle». Galiber livre aujourd’hui le second volet de ce qui deviendra sans doute une trilogie. L’autre, un récit court, écrit en un an, qui procède par brefs chapitres, comme «par promenades» précise Galibert. Blas de Roblès a suivi dès l’origine un plan très précis, a organisé les strates de son roman comme des jeux de miroirs, en «a fugué les thèmes» d’un récit à l’autre, dans le désir de «raconter des histoires» et de jouer Jean-Marie Blas de Roblès © Michel Diedisheim avec le lecteur. Galiber semble «écrire par surprise» et il parle de son texte, de ses personnages comme s’ils advenaient à son insu. Pourtant, dans la luxuriance ou le dépouillement, tous deux questionnent les origines, l’identité et l’existence humaines. Tous deux naviguent sur les espaces illimités de la fiction, dans le sillage des Borges, Cortazar et Calvino. Une croisière de luxe. F. R.

Prochain Jeudi du Comptoir, le 2 avril à 17h30, à la Caravelle, autour de l’humour et du théâtre

Délices de l’a(d)diction Pierre Guéry est poète et performeur; la poésie, il la pratique tous les jours, toute l’année. C’est pourquoi il ne peut se satisfaire de ce que le Printemps des Poètes tend à devenir, un rituel d’animations dénué de sens. Il faut fêter la poésie comme on fête les femmes ou les amoureux ! Alors, pour rendre un hommage authentique à ce genre qui lui est cher, il a pris le contrepied de la manifestation : fi du thème national, place aux poètes in live et en VO. Peuple et Culture a ainsi invité au Théâtre du Petit Matin deux poètes de langue arabe, le Marocain Mohammed El Amraoui et le Libanais Youssef Haddad, pour une performance poétique et sonore avec le musicien Antoine Birot. Exorcismes et Arabesques a séduit le public venu nombreux malgré le mistral glacial se réchauffer aux accents d’un verbe contemporain scandé, proféré, psalmodié parfois, en français et en arabe, dans une jubilation évidente. Les 4 intervenants ont montré avec talent que la poésie se vit avec le corps, se chante, s’échange. Que c’est ainsi qu’elle reste vive. FRED ROBERT

Pierre Guéry et l’association Peuple et Culture Marseille ont présenté vendredi 6 mars au Théâtre du Petit Matin Exorcismes et Arabesques À lire : M. El Amraoui : La lune, les divisions (éd. Poésie-rencontres) et Collision (éd. Villemorges). Y. Haddad : Exorcismes et Au deçà de là (éd. L’Harmattan bilingue Poètes des Cinq Continents).


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LIVRES

JEUNESSE

Quel éveil ! Consacrer une semaine au(x) livre(s) pour les enfants, des touts petits aux plus grands (de 0 à 6 ans), c’est ce que propose depuis neuf ans l’association istréenne Ville Lecture avec Lire et Grandir. Un événement qui prend en compte, dès le plus jeune âge, l’appréhension de l’écrit par le biais d’écoutes de récits, de contes, par la manipulation de l’objet-livre, par la rencontre avec des auteurs, des illustrateurs, mais qui s’adresse aussi à leurs parents ainsi qu’aux professionnels du livre et de la petite enfance. Cette année l’association invite Christian Bruel, éditeur (éd. Être) et auteur d’album, qui propose notamment

une rencontre/débat tout public autour du thème Les albums jeunesse importants du demi-siècle écoulé (le 27 mars à l’Espace 233 à Istres). De nombreux auteurs et illustrateurs seront également présents, parmi lesquels Corinne Dreyfuss, Stéphanie Blake, Aurélia Grandin et Cyril Hahn, ainsi qu’Edmée Cannard, dont une exposition de 22 planches sera visible au Centre Culturel de Fos (du 24 au 28 mars), Charlotte Mollet, qui exposera ses œuvres à la Médiathèque Intercommunale de Miramas (du 12 au 28 mars), et Serge Bloch, qui présentera travaux de presse et personnels au CAC à Istres (du

24 mars au 12 avril). Ils seront tous là le 28 mars lors de la journée dédicaces/rencontres. Sans oublier les ateliers d’éveil musical, les spectacles, et le programme spécialement concocté par le cinéma l’Odyssée les 28 et 29 mars… DO.M.

Christian Bruel © X-D.R

Lire et Grandir du 24 au 28 mars Ville Lecture 04 42 55 70 60

L’adolescence en résonance Le 2e Forum du Prix littéraire des lycéens et des apprentis de la Région PACA a réuni son public et ses auteurs à Cannes. Une nouvelle fois l’enthousiasme a été vif ! Les 3 romans à l’honneur mettent en lumière, chacun à sa manière, les moments difficiles de la construction de soi.

Le garçon qui se rêve sirène... Depuis 10 ans, Adèle conduit la navette scolaire dans une région de montagne, de neige et de vent. Au cours de ses trajets elle se raconte, remonte dans ses souvenirs, sans ordre, au rythme de ses émotions. Sa parole se déroule comme les lacets de la route, l’enfance et de l’adolescence sont évoquées comme les pièces d’un puzzle que le lecteur actif reconstitue peu à peu. Dans une langue lyrique et rugueuse, Emmanuele Pagano fait surgir le masculin dans le féminin : car Adèle, enfant, était un garçon. Enfance avec le «grand petit frère» Axel, dans la ferme du fond, à aider le père ou la mère aux travaux, à courir dans les bois, à écouter l’histoire de La petite sirène qui se voulait «fendue» pour son prince, à assister la mère pour ses fausses couches. Puis à la fin de l’adolescence, la décision de l’opération, l’opposition d’Axel qui se réfugie dans son métier silencieux de cordiste... Un jour de tempête la navette est bloquée dans la neige ; Adèle guide ses adolescents vers une grotte pour y passer la nuit. Une nuit de révélation…

... celui qui parle aux animaux… La romancière américaine Mary Relindes Ellis a livré un premier roman de facture assez classique qui nous plonge

au cœur de la sauvage région du Wisconsin, dans un milieu de rudes paysans. Une chronique familiale douloureuse avec un père lâche et alcoolique qui bat sa femme et va jusqu’à mutiler son plus jeune fils, Bill, tandis que l’aîné s’est enrôlé pour le Vietnam où il trouvera une mort atroce. Bill sombre dans le désespoir, la mère frôle la folie. L’amour de la terre et de la nature leur permettent peu à peu de se reconstruire. Le récit donne alternativement la parole aux différents protagonistes, permettant de lever peu à peu des zones d’ombre, chacun évoquant son enfance, ses affections ou ses terreurs. Les blessures des guerres, les mentalités étriquées des petites villes servent de cadre à la lente remontée vers la vie et la reconstruction de Bill, de sa mère. Lors de sa rencontre avec les lycéens de Brignoles, l’auteure a souligné l’importance qu’elle accorde au sort des enfants et des femmes sur lequel pèse encore trop souvent le silence des familles et des autorités. Discours engagé qui a séduit les lycéens !

…et celui sui suit sa Chance ! Prenez un personnage à la Forest Gump, une émission tv du genre Pékin express, qui copierait Jules Verne, des luttes de pouvoir entre les magnats de la presse, des auditeurs fascinés, comme dans le Truman show, vous aurez une petite idée du contenu de ce livre de Thierry Maugenest, totalement jubilatoire. Pourtant, le personnage central serait

mort ? C’est par un faisceau de témoignages subjectifs que le lecteur est amené à le cerner. Sullivan Chance a été sélectionné pour effectuer un Tour du monde en 80 jours, sans un sou en poche, sous le regard permanent des caméras. Son tour du monde ressemble davantage à une errance intérieure, étrange, avec des rencontres extraordinaires… Quête de la vérité d’un être dont le comportement nous dépasse, démystification des apparences, recherche de soi, du bonheur, du sens de la vie. À cela, ajoutez une critique cinglante de notre monde hyper médiatisé, une satire de la globalisation de l’image, ah ! les poissons en plastique de pêche miraculeuse et les campements «authentiques» ! Profond et léger à la fois, ce livre est attachant, et donne certainement aux ados une leçon de vie, les amenant à s’interroger sur ce qui est essentiel. CHRIS BOURGUE ET MARYVONNE COLOMBANI

Les adolescents troglodytes Emmanuelle Pagano P.O.L, 14,90 euros

Wisconsin Mary Relindes Ellis Buchet-Chastel, 22 euros

Audimat Circus Thierry Maugenest Liana Levi, 17 euros


LITTÉRATURE

Baroque flamboyant Vous aimez les romans mondes, les histoires qui font voyager dans le temps et dans l’espace ? Vous êtes friand des Mille et une nuits, des feuilletons du XIXe siècle, des romans sud américains ? Vous adorez vous perdre dans des histoires qui se reflètent les unes les autres, selon une partition narrative savamment composée ? Vous appréciez les clins d’œil et les pièges de l’auteur ? Le 3e roman de Jean-Marie Blas de Roblès est pour vous. Un manuscrit de 1200 pages, 800 à l’arrivée, Là où les tigres sont chez eux (le titre déjà est une invite) se dévore et apporte brillamment la preuve du talent de «raconteur d’histoires» de son auteur. De sa maestria polygraphe aussi. Sur la base des prétendus mémoires d’un disciple d’Athanase Kircher, c’est la biographie, pour une grande part inventée, de ce jésuite «dinosaure de l’humanisme» qui scande les 32 chapitres du roman. Imitation de la langue du dix-septième siècle pour cette hagiographie d’un homme qui a traversé le siècle, a été adulé par ses pairs et s’est trompé sur tout. Dans cet homme qui s’accroche à son savoir ancien (gigantesque) et refuse

de voir la rationalité naissante, dans ce siècle qui vacille sur ses bases, bouleversé par la Guerre de Trente Ans, Blas de Roblès voit une image en miroir de notre époque. C’est ce qui l’a conduit à «fuguer ces thèmes» dans le Nordeste brésilien contemporain. Il mêle ainsi, avec des effets d’attente jouissifs, d’autres histoires à la principale, selon un jeu de reflets subtil, et s’essaie à toutes sortes de sous-genres : roman de mœurs, intrigue politico-policière, récit d’aventures dans la jungle, roman érotique, mais aussi carnets, notes de travail, articles d’encyclopédie… avant un «triste épilogue» qui tisse ensemble les fils épars. Variations anamorphiques, écriture inspirée… Blas de Roblès compose un univers d’une éblouissante originalité. FRED ROBERT

Là où les tigres sont chez eux Jean-Marie Blas de Roblès éd. Zulma, 24,50 euros

Une curieuse odeur de mer

Curieux titre que celui de Iode, pour un roman noir, vraiment très noir. L’intrigue n’est pas ce qui frappe le plus dans ce court roman de Juan Hernandez Luna, mais un sentiment d’étrangeté, de malaise qui envahit le lecteur. Souvent les récits à la première personne rapprochent lecteur et héros, créant une empathie plus ou moins profonde, qui assurément permet de comprendre les remuements de l’âme du personnage. Ici, cette alchimie n’opère pas, ne peut opérer. Le «je» du protagoniste reste étranger, irrémédiablement, inatteignable dans son appréhension du monde. Condamné par sa nature albinos à la nuit, rejeté par les autres, il collectionne les coquillages, massacre les poulaillers, commet des meurtres abominables, pour se protéger, pour répondre à des pulsions, insondables, parle admirablement bien de Vivaldi ou de Beethoven en mélomane averti ! Les personnages qui l’entourent

valent encore moins que lui, une mère folle, calculatrice, sainte aussi, un docteur corrompu, des chauffeurs de bus maffieux, violeurs… Un monde qui ne connaît pas d’innocence. Un étrange balancement s’opère entre l’amoralité et l’immoralité, la conscience du mal et le mal comme état de nature. Le roman commence par la nuit, faussement conformiste, et nous entraîne dans une réflexion sur l’autre, avec parfois de très belles images, comme cette «rue (qui) laisse voir son arête décharnée». Un roman dont on ne sort pas indemne.

MARYVONNE COLOMBANI

Iode Juan Hernandez Luna Tr Jacques Aubergy Editions L’Atinoir, 12 euros

Un univers en construction

Les rencontres avec les écrivains précisent parfois des points importants de la genèse des œuvres et permettent d’y voir plus clair. C’est ce qui s’est produit pour le 3e ouvrage traduit d’Alaa El Aswany, J’aurais voulu être égyptien, recueil composé d’une novella et de 9 nouvelles plus courtes. Ce troisième opus, malgré quelques fulgurances, était quelque peu décevant : impression d’une certaine platitude, particulièrement dans les récits d’enfance ; clichés dans la description de certains personnages, surtout les figures féminines, quasiment toutes gratifiées d’une «bouche miniature» ou de «bras marmoréens». Bref, on ne retrouvait que trop rarement l’énergie féroce et l’humour décapant auquel le romancier dentiste du Caire nous avait habitués. Grâce aux rencontres organisées par la Pensée de Midi (voir p 48) tout s’explique ! Ce troisième ouvrage édité et traduit est en réalité le premier qu’El Aswany a écrit,

au moment où il a décidé d’entrer en littérature, dans les années 1980. En raison, entre autres, du récit qui l’ouvre et dont le narrateur déçu vilipende l’Égypte et les Égyptiens, ce volume a été refusé trois fois par l’Office du livre égyptien. Aujourd’hui, célébrité aidant, un tel refus n’est plus envisageable et la parution de ces textes intéressera les fans de L’immeuble Yacoubian et de Chicago. Car au fil de ces récits brefs, c’est un monde qui se met en place. Les thèmes chers à El Aswany sont déjà là : hypocrisie, corruption, érotisme, cruauté… Les personnages vivants, contradictoires, très humains, aussi. Comme les fondations de l’immeuble à venir. FRED ROBERT

J’aurais voulu être égyptien Alaa El Aswany éd. Actes Sud, Bleu, 19,50 euros

LIVRES

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LIVRES

ARTS

Comment rient-ils ? Humour et Dérision constitue le catalogue de l’exposition proposée par Regards de Provence au Palais Carli à Marseille (voir Zib’16). Il reprend, à quelquesunes près, les œuvres exposées en adoptant le format à l’italienne et la couverture rigide chers aux responsables de la fondation, constituant ainsi au fur et à mesure des projets une forme de collection. L’ouvrage est organisé en trois grandes parties, tous les textes sont signés de Bernard Muntaner. L’introduction cerne logiquement les deux notions en jeu, appuyée par plusieurs exemples pris dans l’histoire des arts. Bien amenée, elle nous laisse sur une question,

Landmark

Le photographe Marco Zanta a parcouru plusieurs villes d’Europe pendant quatre années et tiré de superbes clichés qui ont été présentés lors d’une exposition itinérante (voir Zib’ 16) et rassemblés de manière pérenne dans ce livre. Le choix éditorial donne la part belle aux images après deux courtes présentations de Giovanna Calvenzi et Gabriel Bauret, en anglais (?!), mais traduites en français dans un feuillet inséré. Les approches du photographe varient d’un regard voisin du documentaire (Helsinki, Berlin, Barcelone…) à une vision plus plasticienne (Rotterdam, Vienne…). Ces quatre-vingt-dix images de bon format -20x25cm- et

les pistes de réflexion engagées interrogeant la valeur sociale du critiquable et du risible, donc la capacité de tolérance. La seconde partie est constituée alphabétiquement des œuvres sous forme de vignettes accompagnées de commentaires individualisés. Enfin, la troisième propose ces mêmes œuvres en grand format avec une présentation du travail de l’artiste et sa biographie, seize en tout, d’Albajar&Altarriba à Zevort en passant par De Tournadre, Garcin ou Ramette. L’avantage du livre sur l’exposition est notamment de pouvoir comparer grâce à ces références les différentes démarches. Un projet agréable, où des propositions d’humour

plus radical n’ont pas été conviées, si on considère une période très récente frappée de divers anathèmes, ou d’égarements politiques.

à la reproduction exemplaire (celles notamment où se confrontent patrimoine et contemporanéité comme à Birmingham, Graz, Manchester ou Londres) provoquent sans artifice aucun, alors qu’on pourrait croire parfois à un montage, un étrange sentiment d’irréalité. Comme une intrusion de science-fiction. Zanta renouvelle notre regard sur notre urbanité en montrant comment l’esthétique architecturale fait aussi image et signe, le «landmark». Ce magnifique livre pourrait faire office de vade-mecum de luxe pour l’amateur d’architecture européenne, hors poids et format. Sauf que l’index reste dans le secret

des lieux : il ne nous livre ni les noms des architectes, ni celui des bâtiments réalisés. Les provençaux reconnaîtront cependant le Stadium de Ricciotti à Vitrolles mais signalé à… Aix-en-Provence ! Un détail.

CLAUDE LORIN

Humour et dérision Edition Fondation Regards de Provence, 2009, 35 euros

C.L.

UrbanEurope Marco Zanta édition Contrasto, 2008, 43,95 euros

Architecture sonore L’architecture et la musique ont toujours entretenu des rapports distants malgré les nombreuses analogies qui lient ces deux arts : comme le disait Goethe, «l’architecture est une musique pétrifiée» ! Pourtant la démarche de Xenakis, à la fois compositeur et architecte, demeure singulière. Également mathématicien et auteur d’une œuvre protéiforme où les lois arithmétiques joueront un rôle majeur, Xenakis est l’auteur de nombreux écrits sur l’architecture et sur les relations qu’elle entretient avec la musique. Pour la première fois, l’ensemble de ces précieuses notes est regroupé dans un ouvrage grâce au concours de Sharon Kanach, compositrice et an-

cienne élève du maître. Édité aux éditions Parenthèses, Musique de l’architecture est structuré en quatre parties : Les années Le Corbusier ; La ville cosmique et autres écrits ; Xenakis, architecte indépendant ; Les Polytopes. Il est agrémenté de nombreuses illustrations, croquis, esquisses et photos originales (Pavillon Philips, Couvent de la Tourette, Diatope de Beaubourg…). En somme, un outil indispensable pour bien comprendre la démarche d’un artiste investi dans la création, déclarant justement «l’originalité est une nécessité absolue de survie de l’espèce humaine.»

Musique de l’architecture Iannis Xenakis Ed. Parenthèses, 28 euros

FRÉDÉRIC ISOLETTA

Micros intelligents À l’heure où les magazines Le Monde de la Musique et Classica fusionnent, ce livre tombe à pic. C’est que le secteur pointu de la diffusion musicale, argumentée et intelligente, est en péril. Peut-être le lectorat se réduitil au fil des ans…? Pourtant le spectacle vivant fait recette: les 130000 entrées aux dernières «Folles Journées» nantaises le prouvent… Mais, de fait, on soutient peu volontiers un espace à l’audience réduite, jugé de plus élitiste. Il faut dire qu’à force de scander (par souci démocratique !) que tout se vaut, de nommer Victoires de la «musique» ce qui devrait s’appeler Victoires de la «chanson», de placer sur un même plan musical une symphonie de Mozart et le rap ou le rock (même dans l’Éducation nationale, même au bac !) on aboutit au résultat inverse : les répertoires proposés se réduisent à peau de chagrin et la

musique classique est confinée dans un placard dont plus personne, bientôt, ne possèdera la clé… qui ouvre pourtant la porte de plaisirs ineffables. Ce livre intitulé Radio est celui d’un amoureux des notes et des mots. Dominique Jameux fut producteur sur la France Musique pendant plus de trente-cinq ans : que n’a-t-il agacé en parlant «sur» la musique ! C’est justement la parole qu’il défend à la radio, celle qui fouille, analyse, informe -allusion non-dissimulée à la concurrente Radio-Classique qui, la plupart du temps, diffuse un flot sonore sans commentaire et n’exigeant pas nécessairement une écoute «active». Avec ses 1% d’audience, France Musique est fragile. Dominique Jameux en défend le principe et les professionnels qui y travaillent, loue le «gai savoir», évoque son expérience derrière les micros, et livre, d’anecdotes

en souvenirs, ses humeurs sur «l’inanité ambiante» en invoquant la culture comme parade possible… JACQUES FRESCHEL

Radio Dominique Jameux Editions Fayard. 14 euros


ESSAIS

LIVRES

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Vauban multimédia Le tricentenaire de la mort de Vauban a été l’occasion d’une célébration, ce fut «l’année Vauban». Bon nombre d’ouvrages ont été publiés, et ce DVD interactif s’inscrit naturellement dans cette suite ! Portrait de Vauban

Le menu principal nous propose plusieurs entrées : le Film, avec ses chapitres; Voyage ; Vauban vu par ; Mémoires à sa façon ; Histoire(s). À dire vrai, l’interface est un peu déroutante car on aura tendance à cliquer sur «Le Film», comme on le ferait pour commencer la lecture d’un quelconque DVD. Or, pour saisir vraiment toute la richesse de l’œuvre et du personnage, il faut parcourir l’ensemble des entrées, ce qui se révèle d’un grand intérêt. Le film principal, consacré à Mont-Dauphin, citadelle majeure de l’architecte du roi, dévoile les arcanes de cette place remarquable et stratégiquement déterminante -en tout cas au moment de sa construction. Il illustre à merveille le système Vauban : ses conceptions, sa maîtrise technique, son fonctionnement comme spécialiste du génie. On saisit, à travers ce lieu où se mêle concret et utopie, combien le projet reflète l’homme. Les autres parties du disque permettent d’ailleurs de comprendre les ressorts de cette œuvre. Elles décrivent et décryptent l’homme sous forme de courtes interviewes. Accompagnés par la voix de Charles Berling, on y suit les traces de Vauban de son Morvan natal jusqu’à la cour du roi ; on comprend mieux ses désirs et ses rêves, les difficultés de la

tâche accomplie et la dure vie qu’il mène. On y découvre ce que le royaume doit à l’homme autant du point de vue militaire, scientifique qu’intellectuel. On y traverse également cinq autres villes ou forts construits ou modifiés par Vauban, Saint-Vincent-les-Forts, Briançon, le Fort Saint Nicolas, et deux sujets remarquables sur le fort de Bouc ou le tableau de Vernet sur le port de Toulon. En 45 films courts, que vous pouvez également retrouver sur le site de Image, Son et Compagnie, qui a édité le DVD avec l’aide du Conseil régional PACA. RENÉ DIAZ

Voyage avec Sébastien de Vauban De la frontière des Alpes au littoral méditerranéen réalisation Bénédicte Sire DVDinteractif, durée 3h30, Muséofilms www.voyageavecvauban.com

Un mythe corse Les éditions Albiana exhument un ouvrage tout à fait incroyable, en latin, et qui est sans doute destiné à de longs développements. Déjà l’histoire du texte est digne d’un roman. Vir Nemoris (L’homme du bois sacré) est composé au cours des années qui suivirent la défaite de Pascal Paoli, en 1769 à Ponte Nuovo, défaite qui entraîna la dissolution de la toute récente nation corse. Ce n’est qu’après la mort de son auteur, et en Italie, que le texte sera publié par Salvatore Viale et Niccolo Tommaseo, à Florence en 1846 ! Dans le recueil des Lettere di Pasquale de’Paoli, pour combler un vide de deux ans dans cette correspondance ! C’est la première fois que ce grand poème est traduit, (par les soins de François-Michel Durazzo), et publié en France ! Deux chants composent ce poème épique en beaux hexamètres dactyliques. Giuseppe Ottaviano Nobili- Savelli se sert, en fin lettré, des fleurs de rhétorique qu’il maîtrise de par sa fréquentation

des textes latins, (il est un brillant traducteur d’Horace), pour chanter son compagnon d’armes, le fameux «curé de Guagno» qui, selon la légende sera retrouvé mort un crucifix dans une main, un poignard dans l’autre, image vibrante d’un homme qui sacrifia tout à son peuple. Pourquoi écrire encore en latin au XVIIIe ? Parce que l’épopée est le genre le plus haut, la langue latine permet ici d’atteindre la gloire et l’universalité. L’originalité profonde de ce texte réside dans le fait que la légende se tisse au moment même où elle est vécue. Les évènements rapportés sont contemporains de l’auteur et, déjà, les personnages évoqués prennent une stature légendaire : si le récit s’attache à la figure de Domenico Leca (le curé de Guagno), de superbes pages sont consacrées à la gloire de Pascal Paoli, homme des Lumières, cultivé et subtil, versé dans l’art de la guerre, mais aussi dans celui de la politique, du droit, de

l’organi-sation de l’État. N’a-t-il pas mis en place le premier essai de démocratie suivant les principes des philosophes de son temps dont il suscitera l’admiration? Savelli chante un combat qui est le sien et qui rejoint celui de Pascal Paoli. Il n’est cependant pas au service de quelqu’un, mais au service de la liberté.

sans doute intéressant d’en tirer leçon. Car l’intérêt de cet ouvrage courageux est triple, les beautés latines de cette épopée, l’éclairage historique, le problème aigu de sa réception… MARYVONNE COLOMBANI

Comment lire Vir Nemoris ? Pourquoi donc un texte de cette qualité, de cette ampleur, n’a-t-il pas eu auparavant la place qu’il méritait ? Vae victis ? Un mythe qui ne conforterait pas ou qui contredirait le mythe national serait-il impardonnable ? Fautil toujours évacuer ce qui gêne et étouffer des moments dont on ne peut tirer de gloire ? N’est-ce pas cependant le meilleur moyen de laisser, en cultivant les ignorances, la place aux mouvements les plus extrêmes, les plus étriqués, les plus dangereux ? L’Italie fasciste s’en empara… il serait

Vir Nemoris, Circinellu ou L’homme du bois sacré Giuseppe Ottaviano Nobili-Savelli Editions Albiana Centre d’études Salvatore-Viale 15 euros


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ÉCONOMIE

LA MALADIE DES COÛTS

L’artiste malade des coûts Le médecin et le comédien ont un point en commun. Ils sont incapables de réaliser des gains de productivité significatifs ! Une consultation prend (presque) autant de temps qu’il y a 30 ans et il en va de même pour un spectacle d’une heure trente. Doit-on les blâmer pour cela ? Certainement pas. Une médecine de qualité requiert un temps de diagnostic incompressible et un spectacle plus court n’est pas meilleur ; il est simplement... moins long ! Dans les secteurs qui connaissent des gains de productivité (agriculture et industrie pour faire court), ces gains se partagent entre baisses de prix, hausses de salaire et des revenus au capital. Ils sont la cause fondamentale de l’enrichissement d’une économie. Leur absence dans certaines activités artistiques pourrait donc impliquer une stagnation des revenus des artistes sur une longue période, la même chose étant valable pour les médecins. On comprend facilement les difficultés engendrées : un comédien aujourd’hui pourrait-il gagner la même chose qu’au temps de Molière ? Alors que les gains de productivité profitent aux autres secteurs, ceux qui n’en connaissent que peu doivent pourtant accroître la rémunération des travailleurs, sous peine de ne plus pouvoir recruter. Ce qui est problématique pour le spectacle vivant, dont la part des coûts en main d’œuvre est essentielle dans les coûts totaux. Les prix des spectacles croissent régulièrement, au rythme des gains de productivité moyens du reste de l’économie, pour absorber des coûts eux-mêmes toujours croissants (ce qui est vrai pour l’acteur l’est aussi pour le technicien).

Baisse des coûts ou nouveaux revenus L’économiste américain William Baumol (en 1965) a donné à ce phénomène le nom de «maladie des coûts» (cost disease). Cette maladie touche la plupart des services intensifs en main d’œuvre (l’enseignement et les services de santé en général, mais aussi la coiffure). Dans le spectacle vivant, les conséquences sur la demande sont importantes (le cinéma en souffre nettement moins, par la possibilité de multiplier les formes de diffusion et d’étaler plus largement les coûts). Maintenir des prix qui rencontrent une demande nécessite de baisser les coûts, ou de trouver de nouveaux revenus. Aux États-Unis, de nombreuses troupes ont ainsi

historiquement misé sur la baisse des coûts, avec comme effet une forme de création orientée par l’impératif qu’ils induisent : moins d’acteurs, décors dépouillés, etc. ou limitation du nombre de créations. Globalement, cette option a conduit à plus de concentration, un formatage capable de passer les frontières pour se rentabiliser et, en définitive, une offre moins diversifiée. L’usage de produits dérivés ou de ventes de l’œuvre sous des formes connexes (télévision, disque, vidéo) est une solution usitée, mais intrinsèquement insuffisante. Le théâtre est avant tout un vécu en direct et un formatage motivé par des fins commerciales peut produire des altérations de l’œuvre regrettables artistiquement parlant. En France, le système de l’intermittence est une forme de réponse indirecte (voir Zib’16). Les subventions publiques ont retenu un modèle inverse des choix privés anglo-saxons, en misant sur la multitude des financements. La démarche favorise le bouillonnement des créations, mais se traduit également par un grand nombre de guichets de subventions qui n’accompagnent pas toujours suffisamment les créateurs, devant répondre à de nombreuses demandes avec des moyens limités. Or, dans ce cadre, encore plus quand le volume global des subventions ne suit pas la hausse des coûts, les chasseurs de subventions les plus efficaces ne sont pas forcément les producteurs les plus créatifs !

pour la culture ? Individuellement, d’abord. Avant d’invoquer un quelconque complot à la hausse des prix, il faut se rappeler de la maladie des coûts et s’interroger sur ce que l’on fait des gains de pouvoir d’achat issus d’autres domaines. Si chacun est libre de ses choix de consommation, s’insurger contre le prix élevé des spectacles et changer souvent de téléphone mobile (à des prix toujours plus intéressants !) est une attitude grotesque, à l’aune de la maladie des coûts. Collectivement, ensuite, cette dernière pousse la porte des politiques culturelles, notamment dans ce qui touche à l’accès à la culture. Si l’on pense, par exemple, à ceux qui n’ont pas les moyens de changer de mobile tous les mois, la hausse des prix est une incitation à moins consommer de culture. Doit-on la corriger par le biais d’une subvention ? STÉPHANE MÉNIA

Que voulons-nous ? Quel que soit le modèle retenu, la maladie des coûts est donc loin d’être soignée. Elle repose cruellement la question première d’une économie de la culture : que sommes-nous prêts à payer © Tonkin Prod.


LIVRES

«C’est vrai?» Rien de pire comme question ! Pour les Grecs de la période homérique, le vrai ne s’oppose pas au faux mais à l’oubli nous rappelait Détienne dans les maîtres de vérité dans la Grèce archaïque ; le mot grec aletheia signifie «ce qu’il ne faut pas oublier». Mais nous n’en sommes plus là. Dans leur dernière livraison, les éditions Agone donnent la parole à un philosophe analytique qui s’inquiète du relativisme généralisé qui entoure l’idée de vérité. Peut-on mettre sur le même plan les croyances partagées par un peuple et la science, cette dernière n’étant plus qu’une des multiples façons de connaître le monde ? Ce relativisme, on le doit au constructivisme qui est la théorie définissant les vérités comme des constructions sociales. Ainsi à la Renaissance, des contraintes esthétiques auraient poussé Copernic à mettre le soleil au centre, et les théories scientifiques actuelles seraient dépendantes de contraintes techniques. Voilà le constructivisme que décide de combattre Boghossian. À la différence de beaucoup de livres de philosophie analytique, celui ci est agréable à lire ; la philosophie analytique décortique habituellement tout ce qui touche à la vérité, et passe des pages à se demander ce que signifie «il pleut dehors», «l’actuel roi de France est chauve». Rien de tel chez Boghossian qui va au vif et à l’éclat du sujet, et non dans ses poubelles. Ses analyses serrées sont claires et on lui sait gré des distinctions entre raison épistémique et pragmatique lorsqu’il s’en prend au pari de Pascal, pour qui la vérité n’est qu’une valeur pour ce qui est de l’existence de dieu. Idem pour la nuance entre croyance justifiée et connaissance. Pour les Grecs anciens, que la Terre soit plate était justifié ; pour autant ce n’en était pas une connaissance : «Pour qu’une croyance vaille comme connaissance elle ne doit pas seulement être justifiée, elle doit être vraie.» Mais ceci se ramène très simplement pour l’auteur à des principes fondamentaux, dont la validité ne peut être dérivée de celle d’un autre principe épistémique. Un livre très instructif dans son domaine; le seul reproche est son incompréhension -comme toute œuvre de philosophie analytique anglo-saxonne- des recherches subversives de la philosophie de l’histoire. Va-t-on reprocher à Marx le principe de la lutte des classes parce qu’il n’est pas assez clair sur l’idée de vérité ? Absurde. Impossible réconciliation entre les philosophies d’outreManche, d’outre-Atlantique et continentale ? R.V.

La peur du savoir Sur le relativisme et le constructivisme de la connaissance Paul Boghossian Agone, 20 euros

PHILOSOPHIE

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Théâtre et politique Crise, remise en cause du capitalisme, glissement des richesses en faveur du capital au détriment du travail, multiplication des luttes des salariés… et pendant ce temps de quoi parle le théâtre ? Le rapport entre théâtre et politique semble être plus une thématique absurde qu’une véritable interrogation. Alors qu’il est censé interroger les passions et les combats humains, pourquoi se désintéresse-t-il de la lutte essentielle : celles d’hommes et de femmes qui prennent en main leur destin ? Qu’est-il advenu du théâtre militant ? Il est en fait assez rare d’entendre au théâtre des textes politiques qui ne soient pas des clichés. Quels sont les textes politiques de 2008 ? Le silence des communistes ? Le titre porte en lui déjà le cliché, et puis on savait qu’ils étaient aveugles sur Staline. Le superbe Méphisto for ever : qu’il était dangereux de faire des compromissions avec le régime nazi ? Le cristal et la fumée d’Attali et Mesguish : que les nazis traitaient les juifs comme des choses ? De Gaulle en mai : que le pouvoir de droite était de droite ? Le caractère critique de certaines pièces permet souvent de se réclamer d’une subversion politique peu effective ; citons Brecht : «beaucoup font les braves comme si les canons étaient braqués sur eux, et non simplement des lorgnettes de théâtre et crient de vagues et générales revendications à la face d’un monde où l’on aime les gens inoffensifs.» Mais aujourd’hui le théâtre est tellement asservi à son système de subventionnement que monter un Brecht, une pièce sur la colonisation comme Madagascar 47 peut attirer les foudres économiques des collectivités territoriales… Être critique est déjà courageux, ce qui ne saurait faire oublier que ce n’est pas subversif.

Militant Le livre d’Olivier Neveux tombe à point nommé pour nous rappeler cette expérience et nécessité du théâtre militant. Il part de deux constatations : - «Un théâtre exempt de signification politique participe à la reproduction des idéologies dominantes» ; - Il n’y a pas de raison pour que «la valeur ou l’intérêt artistique d’une œuvre militante lui soit par principe refusée». Il relève ainsi «l’étrange paradoxe d’une époque où le dédain envers toute forme d’engagement apparaît comme le signe extrême d’affranchissement» et «où toute volonté de transformer l’état des choses» est perçue comme «le témoignage d’une soumission écœurante ou suspecte.». À ce propos Neveux rappelle la position de Sartre dans son essai qu’est-ce que la littérature ?, reprenant à son compte l’idée de Pascal que nous sommes toujours embarqués : «un écrivain est engagé lorsqu’il tâche à prendre la conscience la plus lucide et la plus entière d’être embarqué.» D’où je parle ? Quels sont les déterminants qui me poussent à produire cette œuvre ? De quelle idéologie est-elle la reproduction ? Qu’est-ce que je combats ? Être dans l’ignorance de ce questionnement produit un art qui ne fait que reproduire l’injustice du monde. L’artiste est lui aussi embarqué même dans l’état d’apesanteur sociale où il évolue.

Histoire de l’engagement Alors que dit Neveux du théâtre de Vilar, monument du théâtre populaire ? Il n’oublie pas qu’il fut critiqué en son temps, parce qu’il prônait, dans une société divisée, le rassemblement au théâtre de toutes les classes sociales, pacifiées le temps de la représentation ; ce théâtre, pour certains, faisait peu de cas des affrontements de classes qui structurent la société. Neveux se souvient aussi du théâtre de l’anarchie d’Armand Gatti, théâtre tout entier tourné vers la possibilité d’une transformation radicale de l’ordre des choses, vers la création hic et nunc de résistances : lorsqu’il revient sur l’exécution de Sacco et Vanzetti (Chant public devant deux chaises électriques en 1966), loin de toute reconstitution, Gatti ne s’intéresse qu’à la possibilité de construire leur lutte, de faire qu’ils ne soient pas à nouveau exécutés «ce soir». L’auteur rappelle aussi que le soutien du PCF allait à cette époque essentiellement au Théâtre National Populaire et aux centres : l’enjeu politique se réduisait à élargir quantitativement l’accès à la culture, nul besoin de révolutionner les œuvres et les pratiques artistiques. Et le rapproche du phénomène Boal : en 1977 sort le théâtre de l’opprimé d’Augusto Boal. «On détruit tout d’abord la barrière entre acteurs et spectateurs : tous doivent jouer, tous doivent être les protagonistes des transformations nécessaires de la société.» Un théâtre participatif fondé sur une analyse des situations d’oppressions, qui sont décrites, prises en main et retournées par les opprimés eux-mêmes. Olivier Neveux écrit également des pages éclairantes sur André Benedetto, sur le théâtre de 68, sur la troupe Z, sur Dario Fo, sur Badiou, sur les pièces post 1995 et 2001, sur Jolie Môme, sur la Cartoucherie… Et conclut : «le théâtre n’a jamais cessé d’être politique ; il n’est pas jusqu’à son silence ou son déni des conjectures sociales historiques qui ne soit par lui-même politique. Soit le théâtre a sa place dans les luttes à venir. Soit il faudra sans regrets se passer de lui.» Un livre essentiel pour reprendre espoir dans le lien entre art et politique. RÉGIS VLACHOS

Théâtre en lutte Olivier Neveux la découverte, 23 euros


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PHILOSOPHIE

LES JEUX DU JE

Le titre est un peu facile mais pour le coup il n’est pas tiré par les cheveux: les trois sens du mot «jeu» collent tout à fait aux ambiguïtés sémantiques et existentielles du premier des sujets. Pourquoi parler du «je» alors? Et bien déjà parce que c’est le début de toute pensée. Quoique… Les bons marxistes pourraient se scandaliser de cette proposition ! «Ce n’est pas la conscience des hommes qui détermine leur existence, c’est au contraire leur existence sociale qui détermine leur conscience.» Mais nous n’aborderons pas cette question, mais une autre, parallèle : être soi-même ne veut rien dire !

Les Jeux du je Pas de «je» grec Le «connais-toi toi-même» est certainement la citation la plus connue de la civilisation occidentale ; elle est aussi, et de ce fait, celle qui plus que tout autre ne veut rien dire. Se connaître ou savoir ce que ce petit mot de «je» veut dire est la plus incroyable des absurdités (avec cette autre qui est de vouloir moraliser le capitalisme ?). Ça ne veut rien dire parce que comme l’avait bien vu le papet de la philosophie, Socrate, on est soi-même le moins bien placé pour se voir. Déjà il faut préciser ce fameux passage ; c’est Critias qui rapporte cet adage de l’oracle de Delphes et Socrate qui le tourne en dérision, avec son goût impayable pour les métaphores. Une connaissance qui voudrait se connaître c’est ça : Socrate - Voici. Demande-toi si tu peux concevoir une vue qui ne soit pas la vue des choses qu’aperçoivent les autres vues, mais qui serait la vue d’elle-même et des autres vues et aussi de ce qui n’est pas vue, qui ne verrait aucune couleur, bien qu’elle soit une vue, mais qui se percevrait elle-même et les autres vues. Crois-tu qu’une pareille vue puisse exister ? (Charmide). Rien à voir avec le «je» me direz vous ; si, un peu tout de même. Mais le «je» est une invention récente ; pour les Grecs, seule l’idée de sujet comme support de prédicats existe : telle qualité pour telle chose, la qualité étant le prédicat, et la chose

le support ; cette chose ils l’appellent hupokeimenon, ce qui ne peut être que le support de prédicats et ne peut jamais être le prédicat d’autre chose. Bon on simplifie, mais c’est à peu près ça, et on vous épargne les références à Aristote.

Le «je» pensant Ce support de prédicat va donc s’étendre à l’âme humaine avec Descartes: elle sera le support d’expériences, de vécu, mais surtout ce qui restera au bout d’une démarche qui vise à connaître la vérité. Le «je» de Descartes est ce résidu-là. Expliquons-nous plus clairement ; l’enjeu du fameux «je pense donc je suis» n’est pas directement de s’intéresser au «je», au sujet, à son petit moi enfermé dans une petite cabane où il n’aurait rien d’autre à faire que de s’émerveiller devant un poêle à bois. Descartes se pose tout d’abord la question de savoir ce qui est vrai ; et même plus, il met en doute ce qui est certain, c’est à dire estce qu’il y a des choses dans ce monde dont on ne puisse pas douter : deux plus deux font quatre, le monde existe, j’ai deux bras ? Et bien tout cela n’est pas si certain ; je peux en douter figurez-vous. Tout d’abord parce que peut-être qu’en ce moment je rêve, puisque quand nous rêvons nous ne nous disons pas que nous rêvons mais nous pensons vraiment vivre ce qui se passe ; il n’y a aucun critère qui permette de distinguer avec certitude la veille du sommeil. Et quant à l’addition de base, en dernier recours se dit Descartes, peut être est-ce un malin génie qui me trompe, et me fait croire que 2+2=4. Alors là vous me direz il y va un peu fort avec son malin génie ! Ben oui c’est lui qui inspirera Matrix, vous ne saviez pas ? Descartes avant Nemo relève le défi, ferme ses deux petits poings et crochet du gauche, coup de pied, droite, gauche au malin génie et brandissement du cogito dans la foulée : «Mais il y a un je ne sais quel trompeur très puissant et très rusé qui emploie toute son industrie à me

tromper toujours. Il n’y a donc point de doute que je suis, s’il me trompe; et qu’il me trompe tant qu’il voudra, il ne saura jamais faire que je ne sois rien tant que je penserai être quelque chose. De sorte qu’après y avoir bien pensé et avoir soigneusement examiné toutes choses, enfin il faut conclure, et tenir pour constant que cette proposition : je suis, j’existe, est nécessairement vraie, toutes les fois que je la prononce ou que je la conçois en mon esprit.» Voilà comment on en arrive à ce grand moment de la philosophy story ! Le «je», l’ego est ce reste, ce résidu intuitif. Descartes en fera même une chose ; et là il poussera le bouchon un peu loin.

Pas d’ergo Déjà cette affaire du «je» qui existe ne va pas de soi. Nietzsche la qualifiera de fiction grammaticale : «Est-il donc interdit d’user de quelque ironie à l’égard du sujet, de l’attribut et de l’objet ? Le philosophe n’aurait-il pas le droit de s’élever au-dessus de la foi qui régit la grammaire ?» (Par delà le bien et le mal). Les contraintes du langage nous conduisent à poser un sujet, un verbe, un «je pense». Est-ce à dire que le «je» existe parce que le prédicat «pense» est vérifié ? Les contraintes formelles du langage sont-elles une garantie à l’existence réelle ? bien sûr que non ; c’est confondre le mot et la chose… Mais la plus belle critique du «cogito» est celle de Foucault (voir Zib 16) : «Ce double mouvement propre au cogito moderne explique pourquoi le «Je pense» ne conduit pas à l’évidence du Je suis» ; aussitôt, en effet, que le «Je pense» s’est montré engagé Narcisse, Le Caravage, 1599


57 dans toute une épaisseur où il est quasi présent, qu’il anime mais sur le mode ambigu d’une veille sommeillante, il n’est plus possible d’en faire suivre l’affirmation que «Je suis» : puis-je dire, en effet, que je suis ce langage que je parle et où ma pensée se glisse au point de trouver en lui le système de toutes ses possibilités propres, mais qui n’existe pourtant que dans la lourdeur de sédimentations qu’elle ne sera jamais capable d’actualiser entièrement ?» Le thème de la mort de l’homme et du sujet est tout entier engagé dans cette critique qui synthétise l’enfouissement du sujet dans les lourdeurs de la métaphysique pour Nietzsche, par les conditions de productions pour Marx et par l’inconscient pour Freud.

n’est aucune si bonne façon où je voulusse être fiché pour ne m’en savoir dépendre. La vie est un mouvement inégal, irrégulier et multiforme. Ce n’est pas être ami de soi et moins encore maître, c’est en être esclave, de se suivre incessamment et être si pris à ses inclinations, qu’on en puisse fourvoyer, qu’on ne les puisse tordre.» (Essais, III,3) C’est bien dans les flottements du monde que s’enracine le sens du sujet ; nous sommes pris dans une pluralité de «commerces» qui dessinent les différents registres, les différents jeux de notre existence ; le passage de l’un à l’autre s’appelle subjectivité.

Les jeux

Pas de métaphysique du «je» Tout aussi forte est la critique de Kant sur cette évidence du «je» posé comme une réalité ; Kant la démontera dans son ouvrage à l’eau de rose, Critique de la raison pure, au cœur d’un chapitre très racoleur intitulé les paralogismes de la psychologie rationnelle. Au fait, quezaco un paralogisme ? Un abus de langage, une généralisation, du genre : je bouge mon bras donc je suis libre. Un autre ? Le corps humain est un assemblage étonnamment complexe donc quelqu’un a dû y penser, en faire les plans sur ordi, le vouloir ; donc Dieu existe. Idem pour le «je pense» dira Kant, qui n’implique en rien qu’il y ait une âme, un substrat, un quelque chose. Le sujet est d’abord une fonction, support de déterminations, d’activités diverses et variées : «ce n’est que parce que je puis saisir en une seule conscience le divers de ces représentations que je les nomme, toutes, mes représentations ; car, sans cela, j’aurais un moi aussi divers et d’autant de couleurs qu’il y a de représentations dont j’ai conscience.» C’est dire qu’être soi c’est se saisir comme unité, savoir que ce qui s’est passé il y a une minute et ce qui se passe maintenant sont bien des expériences de ma pensée ; sinon je serais autant de personnes que j’ai de pensées ou d’expériences ; forme de schizophrénie exponentielle.

«je» pratique Donc rien ne permet de poser le postulat de l’existence d’une chose qu’on nommerait je, âme, et qui existerait. Qu’il y ait de la pensée en nous est un fait ; qu’il y ait

René Descartes par Frans Hals

une métaphysique du je est un pas qu’il ne faut pas franchir… Ceci dit c’est ce qu’ont fait toutes les religions, qui sont des concentrés de tous les paralogismes décrits plus hauts. Une fois dégagé du terrain théorique, le sujet peut enfin se mettre à jouer sur le terrain de la pratique, qui en philosophie désigne la morale ; il n’y a plus à chercher ce qu’il est mais ce qu’il a à faire ; il se définit par sa fonction, il est soi, il est personne. Le sujet comme personne implique de renoncer à savoir ce qu’est le sujet, pour mesurer son pouvoir d’être, la capacité qu’il a d’être tel ou tel. La personne ne se comprend alors que dans son rapport aux autres et à des prescriptions qui lui préexistent, elle se comprend dans son ancrage mondain. C’est dans les trois commerces de Montaigne que l’on retrouve cette belle volatilité existentielle du sujet : «Notre principale suffisance, c’est savoir s’appliquer à divers usages. C’est être, mais ce n’est pas vivre, que se tenir attaché et obligé par nécessité à un seul train. Les plus belles âmes sont celles qui ont le plus de variétés et de souplesse(…) Si c’était à moi à me dresser à ma mode, il

À défaut d’être soi il n’y a plus qu’à jouer ; tiens c’est quoi au fait le jeu ? Au premier sens le ludique, les jeux quoi ; et puis le jeu du comédien qui fait semblant, du musicien qui interprète; et puis cette idée de mobilité : un rouage qui a du jeu, qui bouge. Peut être est-ce à ce dernier sens que pense Montaigne ? Être soi-même ne veut rien dire. Nous n’y croyons qu’au prix de prétentions intenables, d’histoires déposées tel un vernis superficiel sur des moi-peau non apprêtés pour les recevoir. «Le je est une fiction dont nous sommes les co-auteurs» dit Imre Kertesz dans Un autre. Nous croyons que «je» est pour fuir le jeu, l’angoisse des possibles ouverts. Notre liberté en fait. RÉGIS VLACHOS


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SCIENCES ET TECHNIQUES

ENVIRONNEMENT

Envie(ron)ronnement, ethno ou égocentrisme ? Beaucoup de manifestations de culture scientifique gravitent autour des questions «d’environnement». Préoccupation réelle ou matraquage à but lucratif ? Le spectacle humain dans son immense décor environnemental tourne-t-il à la tragédie ? L’homme-dieu, maître de lui comme de l’univers, à la fois acteur et metteur en scène de son propre rôle sur le monde, depuis quelques années s’interroge sur la validité du scénario qu’il écrit. Quel curieux regard, qui s’imagine extérieur aux conséquences de ses propres pratiques ! Car croire agir sur un «environnement» disjoint de soi-même, c’est se comporter en schizophrène qui sépare l’action de ses conséquences. Une civilisation qui considère l’Autre comme simple «environnement» souffre d’ethnocentrisme pathologique, et seul un «je» mégalomaniaque désire maîtriser le monde où et d’où il vit. Quand l’alter ego devient garniture, objet, et entre dans le décor environnemental, le malaise de la civilisation atteint son comble. L’homme devient un costume, un masque, l’individualisme se met à environner, à cerner l’humain. Le sujet considère l’Autre comme objet consommable. Ainsi l’Autre environnemental s’achète, se vend, s’échange. Mais voici que cet Autre déplacé, modifié, horrifié, souillé, pollué s’impose à la réalité subjective : les tortues carnivores importées des tropiques et achetées pour amuser l’enfant-objet sont rejetées dans les mares et les rivières où elles dévorent les poissons, quand ce ne sont pas les alligators, les serpents boa ou les tarentules que l’on retrouve dans nos parcs. On prend un chien ou un chat, aux vacances on le jette. L’environnement triomphe de l’environné.

Rat ? le bol ! C’est sans doute ce fond de questionnement philosophique que l’on eut souhaité trouver dans l’exposition du Muséum d’Histoire Naturelle de Marseille au titre alléchant de Marseille ville sauvage (jusqu’au 20 sept). Hélas, le manque criant de moyens dont souffre ce lieu mythique, où tant de vocations scientifiques locales se sont forgées, ne permet en aucune façon à cette exposition d’exprimer le fond épistémologique évoqué dans son titre. À l’heure où Marseille a remporté le titre de capitale européenne de la culture et alors que son maire clame qu’il veut placer notre ville parmi les meilleures dans les domaines scientifiques et techniques, il est absurde que d’aussi faibles moyens soient dévolus pour la diffusion de la culture dans ces domaines. Comme toute exposition réalisée sans moyens, la part excessive des commentaires écrits la rend fastidieuse et surtout inaccessible aux enfants. La faiblesse de l’interactivité n’aide pas à expliciter le message.

© Tonkin Prod.

On eut aimé que la «sauvagerie» de Marseille soit évoquée sur tous les plans ; qu’un parallèle soit mené entre le développement de la faune animale qui s’est spécifiquement adaptée au milieu urbain et sa commensalité avec la faune humaine dans sa propre adaptation à l’enfer citadin. Dans ce cadre, il eut été intéressant que les questions d’écologie politique soient abordées sous leurs aspects sociologiques. Une triste vidéo de tristes informations de «LachaineMarseille» donne tribune à la responsable municipale à l’hygiène et la santé publique. Elle vante les mérites du million huit cent mille rats noirs et d’égout «assistants indispensables» au

dégagement des ordures ménagères et brillants cureurs des conduites d’évacuation. Le moniteur vidéo participe d’une scène reconstituée assez «new age», tas d’immondices où «grouillent» quelques rats empaillés pour illustrer de façon «vivante» les mérites de nos éboueurs intérimaires. Notre déléguée municipale à l’hygiène a oublié dans son panégyrique du rat d’égout de préciser qu’ils sont les seuls travailleurs sans papiers à Marseille que personne ne cherche à concentrer au centre de rétention d’Arenc. Mais il est vrai qu’ils travaillent toujours plus pour manger plus ! Marseille ville sauvage, avez-vous dit ? YVES BERCHADSKY

Au Programme Espérons que l’exposition Télescopium qui débute au Muséum le 10 mars échappera à la pusillanimité culturelle scientifique municipale ! En collaboration avec l’Observatoire de Marseille, le Muséum participe à la célébration de l’année mondiale de l’astronomie qui commémore, en 2009, les 400 ans de la construction par Galilée (en mai 1609) de son premier télescope. Cette exposition devrait nous permettre de découvrir les différentes techniques optiques qui ont permis à l’humanité depuis 400 ans de s’environner de la conscience de son univers lointain. HYPERLINK «http://www.museum-marseille.org» www.museum-marseille.org Palais Longchamp, 04 91 14 59 55

Dans notre proche environnement et en toujours en toute urbanité, l’association Image de Ville organise la 4e édition des Journées du film sur l’environnement (voir p 41) du 8 au 14 avril 2009. Ce sera l’occasion pour le Zibelécolo, dans l’environnement aixois, «de rencontrer cinéastes, scientifiques, agriculteurs, réalisateurs et spécialistes des questions environnementales et aborder, à partir du cinéma, des questions de vie quotidienne qui représentent un enjeu essentiel pour l’avenir de la planète.»

HYPERLINK «http://www.imagedeville.org» www.imagedeville.org Espace Forbin, Aix, 04 42 63 45 09


AU PROGRAMME AIX-EN-PROVENCE Théâtre des Ateliers – 04 42 38 10 45 Rencontre publique avec le metteur en scène Pascal Rambert. Le 1er avril à 21h. Théâtre du Manguier – 04 42 96 33 31 Dans le cadre de la semaine de la langue française, le Théâtre du Manguier explore l’avenir et propose C’est pour demain !?, des rencontres singulières et musicothéâtrales itinérantes, dans les rues de la ville. Jusqu’au 31 mars.

ISTRES ADAPP – 04 42 34 20 65 Conférence monographique de Catherine Soria sur Boltanski. Le 26 mars à 18h30 au cinéma Le Coluche.

MARSEILLE BMVR Alcazar – 04 91 55 56 34 Quelle place pour les femmes dans les filières scientifiques ? Conférence d’Assia Benabdallah, chercheur au Centre de Mathématiques et Informatique à l’Université de Provence, dans le cadre du cycle Sciences et Sociétés de l’association Tous Chercheurs. Le 21 mars à 15h à l’Auditorium. Espaceculture – 04 96 11 04 60 Conférence de Claude Camous, Mirabeau à Marseille, l’homme du 23 mars. Le 23 mars à 17h. Conférence de Rémy Kerténian, Histoire de bijoux. Le 28 mars à 11h. ABD Gaston Defferre – 04 91 08 61 00 Conférence de Elisabeth Lalou : Les enquêtes, l’enquêteur et le prince (fin XIIIe – début XIVe siècle). Le 20 mars à 18h30. Rencontre avec Jean Contrucci, journaliste, écrivain, auteur de romans policiers, autour des Nouveaux mystères de Marseille. Le 24 mars à 18h30. Bibliothèque départementale de prêt – 04 91 08 62 08 Ecrivains en dialogue : Pascal Jourdana reçoit Linda Lê (In Memorial et Au fond de l’inconnu pour trouver du nouveau parus

aux éd. Bourgois) et Mathieu Terence (Technosmose, Gallimard et Les Filles de l’ombre, Phébus) pour une discussion qui portera sue Écrire toujours, par effroi, par amour… Le 7 avril à 18h30. Rencontre-débat autour de la parution de L’Iran derrière le voile (La Pensée de midi), avec Christian Bromberger, Agnès Devictor et Mina Saïdi-Shahrouz, auteurs du dossier. Animé par Thierry Fabre, rédacteur en chef de La pensée de midi. Le 14 avril à 18h30. Institut culturel italien – 04 91 48 51 94 Le roman épique italien : rencontre avec les auteurs Wu Ming I, Simone Sarasso, Gianni Biondillo, Alessandro Bertante, Antonio Scurati et Giuseppe Genna autour de ce nouveau courant littéraire. Table ronde le 30 mars au Centre aixois d’Études Romanes à 15h30, à l’association Trinacria à 19h30 et le 31 mars à l’Institut à 18h. Librairie Païdos – 04 91 48 31 00 Objectif 20 000 € pour sauver Païdos : les 21 et 22 mars, la librairie ouvre grand ses portes et lance un appel à soutien. Elle propose toute la journée des rencontres autour du livre avec des intervenants, auteurs, éditeurs, de la musique (Devil Crockett, jazz manouche…). Echange et diffusion des savoirs – 04 96 11 24 50 De la prévention sociale de la délinquance à la dissuasion urbaine du crime : conférence de Jacques Donzelot, maître de conférences en sociologie politique à l’Université Paris X. Spécialiste de l’étude des questions sociales et urbaines. Comment est-on passé de la volonté de soigner les causes sociologiques de la délinquance à la simple dissuasion du passage à l’acte ? Le 26 mars. Quelle subjectivité produit le néolibéralisme? Conférence de Jean-Pierre Lebrun, psychiatre et psychanalyste. Comment allons-nous riposter à cette invitation à nous croire libérés de la condition humaine ? Le 2 avril. La grande régression, conférence de Jacques Généreux, économiste, professeur à

l’Institut d’études politiques de Paris. La modernité libérale achevée, le défi du XXe siècle sera d’inventer une nouvelle modernité fondée sur les liens sociaux qui libèrent l’individu et non plus sur la libération individuelle qui délie les humains. Ou de repartir dans une grande régression. Le 9 avril. Toutes les conférences ont lieu à 18h45 à L’Hôtel du Département. Société des Amis du MuCEM – 04 96 13 80 90 Conférence de Michel Bozon, Docteur en anthropologie sociale, Directeur à l’institut d’études démographiques, sur Hommes, femmes et sexualité au Nord et au Sud. Denis Chevallier, directeur-adjoint du MuCEM parlera de la muséographie. Le 26 mars à 18h, salle de conférences de L’Espace Mode, 11 La Canebière. Espace Leclere - 04 91 50 00 00 Conférence de François Giraud, historien, sur La Croix d’Anjou au cœur de la Provence (6e centenaire de la naissance du Roi René). L’auteur signera son ouvrage ce jour-là. Le 23 mars à 18h. Approches Cultures et Territoires – 04 91 63 59 88 Conférence de Saïd Bouamama, sociologue, sur Immigration, discours et réalités: les idéologies en question. Le 26 mars à 18h30, salle Artémis de la Cité des associations. Maison-Blanche, mairie du 9e et du 10e arrondissement de Marseille, s’intéresse à l’histoire de la mode marseillaise en mettant à l’honneur couturières, brodeuses, modistes de 1950 à 2008. Le Musée de la Mode a prêté 20 tenues de coktail ou de soirée en hommage aux artisanes qui ont contribué à développer l’économie de la ville. À découvrir dans les beaux salons de la bastide qui ouvrent sur le jardin ! Du 13 mars au 10 avril, 150 bd Paul Claudel, 13009.

MARTIGUES Musée Ziem - 04 42 41 39 60 Dans le cadre de l’exposition de sculptures de Miró, La Métaphore de l’objet,

RENCONTRES

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conférence de Francesc Vicens, premier directeur de la Fondation Miró, Joan Miró, l’artiste et l’ami. Le 19 mars à 17h30; conférence de Catherine Soria sur La sculpture d’assemblage au XXe siècle. Le 9 avril à 17h30.

SALON Agglopole Provence - 04 90 44 85 72 Dans le cadre de la 4e édition de Lire Ensemble (du 15 au 30 mai), sont organisés deux concours de nouvelles : le 1er, ouvert aux collégiens et lycéens du territoire d’Agglopole Provence, sur le thème Ma Mère, femme de Méditerranée le 2e, ouvert aux femmes n’ayant jamais publié, organisé par le Forum Femmes Méditerranée de Marseille, sur le thème de La rue Les nouvelles doivent parvenir en 4 exemplaires avant le 1er mai au Service Culture Concours de nouvelles 2009 de l’Agglopole Provence (197 rue du Pavillon – BP 274 – Square du docteur François Blanc – 13666 Salon-de-Provence, ou lire.ensemble@agglopole-provence.org).

TARASCON

Château royal de Provence – 04 90 91 51 29 A l’occasion du 600e anniversaire de la naissance de René d’Anjou, comte de Provence, le Château royal vous invite à fêter Pâques en Famille, les 11, 12 et 13 avril : visites théâtralisées, ateliers pour enfants, visites «chocolats» ; expositions des œuvres contemporaines de l’artiste japonais Hachiro Kanno ; concert de L’Hostel Dieu de Lyon dirigé par Franck-Emmanuel Comte, Les Lamentations de Jean Gilles (le 12 avril à 16h).

TOULON Association pour les Musées de Toulon – 04 94 36 81 00 Conférence de Sylvie Pic : Art contemporain et sciences. Le 26 mars à 17h30 à la Fnac.


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PATRIMOINE

PICASSO

Itinéraire Picasso

Les pratiques de tourisme culturel se développent et notre région, parmi les plus visitées du monde, possède à ce titre des atouts indéniables… Car nombreux sont les peintres et écrivains qui ont su apprécier la Provence, sa lumière ciselante, son climat, ses paysages variés. Ce sont ces raisons qui ont amené le Comité Régional de Tourisme PACA à créer un itinéraire touristique «sur les traces de Picasso» en Provence et Côte d’Azur. En effet le fondateur du cubisme, originaire du sud espagnol, éprouva une grande fascination pour le paysage provençal. Il vint s’installer à «l’abri du monde» dans la région, à plusieurs reprises. De Arles à Cannes, en passant par Vauvenargues et Mougins, petit village situé sur les hauteurs de Cannes où il mourut en 1973, il s’imprégna des paysages, dont les empreintes apparaissent dans ses toiles et ses écrits. Et Cézanne fut un de ses véritables maître à peindre, qu’il allait jusqu’à qualifier de «père en peinture».

Des œuvres et des lieux L’itinéraire permet de relier plusieurs expositions majeures. La première, au Musée Picasso d’Antibes du 28 mars au 28 juin. En dehors de son impressionnante collection permanente, elle présentera près de 200 pièces, peintures, sculptures et céramiques de L’ère du Renouveau 1945-1949, pendant laquelle il peignit La joie de vivre. Le second rendez-vous est donné à Aix, du 25 mai au 27 septembre au musée Granet afin de mettre en valeur l’influence qu’a eue Cézanne sur l’artiste espagnol, à travers 70 œuvres de Picasso mises en regard de 30 tableaux du peintre aixois. Trois autres musées possédant des pièces majeures proposent de visiter leurs fonds : le musée Angladon en Avignon (Picasso, Van Gogh, Modigliani), le musée Réattu à Arles (2 peintures et 57 dessins) et bien sûr le

Musée National Picasso à Vallauris, avec ses deux œuvres majeures, La Guerre et La Paix. Le château de Vauvenargues, situé au pied du massif de la Sainte-Victoire, dans lequel il vécut quelques mois de 1959 à 1965, ouvrira également ses portes au public : l’occasion de s’immerger dans l’univers intime de l’artiste, de découvrir l’atelier dans lequel il réalisa de nombreuses œuvres sera ainsi donnée à 19 personnes par demi-heure, amenées d’Aix par navette, configuration des lieux oblige !

Mode d’emploi Un parcours, jalonné de onze étapes (villes, villages et campagnes) édité sur papier à 80000 exemplaires en anglais et en français, est diffusé dans les principaux bureaux d’accueil touristique régionaux. Les amateurs de peinture, de sculpture, de dessin, de céramique ou de photographie pourront également y trouver des étapes actives, pour s’exercer à travers divers ateliers organisés par des artistes de la région. En parallèle, un site Internet est également mis en ligne. Il guide l’internaute

au travers d’une carte interactive complétée, pour chaque étape, de nombreux textes explicatifs. Afin d’organiser son séjour, le touriste culturel, d’ici ou d’ailleurs, pourra également y réserver son hébergement ! JORDAN SAÏSSET

Itinéraire Picasso en PACA Comité Régional de Tourisme 04 91 56 47 00 www.decouverte-paca.com www.picassoenprovencecotedazur.com

L’ami d’Orphée dans la carrière C’est sous les traits d’un ami d’Orphée, joué par Cocteau, que Picasso entra pour la première fois dans les carrières des Baux-de-Provence en 1959. Cinquante ans plus tard, ces lieux magiques lui rendent un bel hommage. Gianfranco Iannuzzi, artiste multimédia, Renato Gatto, vocaliste, Massimiliano Siccardi, vidéaste, artiste multimédia, ont uni leurs talents pour offrir un spectacle exceptionnel. Reprenant à l’envers la démarche de Picasso, «je ne peints pas ce que je vois, mais ce que je pense», G. Iannuzzi décompose les tableaux, nous permettant d’en retrouver la structure profonde. Par cette démarche didactique, Guernica se retrouve dans un premier temps décomposé : chaque élément en émerge dans sa beauté nue, puis s’assemble, reconstitue progressivement, dans un jeu d’échos savamment orchestrés sur les parois de la carrière, l’intégralité de l’œuvre. Les tableaux sont ainsi non seulement projetés, mais mis en scène, démultipliés dans un kaléidoscope géant. Les peintures cubistes épousant les formes géométriques des murs semblent en être l’émanation naturelle. Il y a cependant de l’ordre dans cette débauche sublime de couleurs et de formes, sept séquences constituent autant de chapitres qui, par touches successives, apprennent à cerner ou du moins à percevoir le mouvement de l’œuvre de celui qui affirmait avoir mis toute la vie pour réussir à peindre comme un enfant. Émotion de voir les lignes

s’enrouler sur les murs et devenir sens… entendre et voir l’artiste s’emparer de sa toile !… Les femmes de sa vie glissent sur les blocs heurtés, l’évolution de la technique du peintre marque le temps, plus sûrement encore que les dates qui s’affichent. Les périodes s’enchaînent, néoclassicisme, cubisme, période bleue, période rose… La bande son, pertinente, accompagne les projections, Carmen illustre le Minotaure et la tauromachie, la violence des formes, des ombres noires qui s’animent… Les carrières se muent en grottes préhistoriques... C’est une ronde endiablée qui clôt cette plongée dans l’œuvre, rythmée par le mouvement tournoyant de la musique de 8 1/2 de Nino Rota. Les saltimbanques dansent sur les murs. Immergés dans l’œuvre, le public marche sur les toiles projetées sur le sol, s’intégrant à cet univers. Un moment unique ! MARYVONNE COLOMBANI

Picasso La Cathédrale d’images Les Baux-de-Provence Jusqu’au 3 janv 2010 04 90 54 38 65 www.cathedrale-images.com © Succession Picasso 2009



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ÉDUCATION

LA FAI AR | THÉÂTRE VITEZ | FNCTA

La bonne Fée et ses Apprentis Amateurs en scène ! La Fédération Nationale des Compagnies de Théâtre et d’Animation (FNCTA) des BdR propose pour sa 11e année 10 spectacles d’avril à juin L'espace de Bouèb ©algo2009

La Formation Itinérante des Arts de la Rue (FAI AR) a présenté le Panorama de ses Chantiers, à la Gare Franche, à St Antoine Au terme de 18 mois d’une intensive formation, 13 magiciens, appelés Apprentis, ont offert leurs Reflets, éclats de spectacles futurs. Chacun avec ses exigences artistiques propres a travaillé aux Pays-Bas, en Espagne, en Roumanie et dans plusieurs lieux d’accueil en France ; ils se sont confrontés aux formes d’arts en espace public, au jeu de l’acteur, à l’objet scénographique, à la pratique obligatoire d’un instrument. En se demandant bien sûr comment intégrer le territoire et faire participer le public à la création (voir Zib’11). La première soirée a été ouverte par Daniel Hermann, adjoint à la Culture de Marseille, puis Dominique Trichet, directeur, Michel Crespin, grand initiateur, Denis Trouxe, président, Pascale Reynier, déléguée à la Culture de la Mairie de secteur et Wladyslaw

Znorko, maître des lieux. Tous ont salué la richesse du projet, sa dimension européenne. Le public a ensuite visité les 13 installations des Apprentis, espaces privés, univers d’objets récupérés, de photos, d’éléments naturels, introductions à leur projet créatif. Les trois jours suivants, les présentations orales se sont déroulées devant des Auditeurs et des Observateurs (artistes, diffuseurs, institutionnels, professionnels...) précisant le sujet, la genèse, les perspectives et les besoins pour passer à la réalisation d’un spectacle fini. Des tables rondes ont concerné les relations de la FAI AR avec la profession, l’avenir des artistes dans leur vie professionnelle.

Elle etait une fois... de Geraldine Salmon © algo2009

Salmon ; travail en ville avec situations insolites et video pour Lili Jenks ; réflexion bouchère sur le cochon envisagé comme l’avenir de l’homme par Berta Tarrago ; univers urbain et réflexions sur l’espace public avec Hélène Sanier, Jana Heilmann, Ferran Orobitg, Bouèb ; la vie d’une tête sans corps de Prisca Villa ; corps dansant et video avec Naïm Abdelhakmi ; voyage intérieur et loup-garou pour Mickaël Sanchez ; rêves et illusions poétiques pour Julie Mercier et Kurt Demey. Le spectateur est intrigué, conquis par l’originalité et la richesse des propositions. On ne peut que souhaiter bonne route à ces artistes enthousiastes et généreux ! CHRIS BOURGUE

Univers insolites Les Apprentis ont souvent participé avec complicité et amitié aux propositions de leurs camarades. Impressions nostalgiques de Jérémie Steil dont le projet s’inspire du vécu de ses 2 arrièresgrands-pères, combattants de la guerre de 14, chacun d’un côté de la frontière; danse et univers féminin avec Géraldine

Début au Gyptis, le 10 avril, avec une création de la Cie Tiramisù, Un vénitien en Turquie, dans la bonne tradition de la Commedia dell’arte dans laquelle la troupe s’est spécialisée. Le 16 avril, La Criée accueillera une conférence de Jean Caune, comédien, metteur en scène et professeur à l’Université de Grenoble s’interrogera sur l’existence ou non d’une esthétique du théâtre amateur. Toujours à La Criée, Annie Perrot proposera le 17 avril une lecture en espace d’extraits de 3 auteurs contemporains : L’inconvenant de Gildas Bourdet, Art de Yasmina Reza et Musée haut, musée bas de Jean-Michel Ribes, interrogations sur notre relation à l’Art. Rendez-vous dans le prochain Zib’ pour la suite des festivités ! C.B.

Le Panorama des Chantiers s’est tenu du 10 au 14 mars L’appel à canditature pour la 3e promotion (octobre 2009mars 2011) est ouvert jusqu’au 31 mars www.faiar.org

Spectacles et conférence à 20h30 04 91 61 15 37 www.fncta.fr

Décapant et cousu main ! Installé au cœur du Campus universitaire, le théâtre Antoine Vitez a une programmation résolument contemporaine en prise avec les enjeux du monde actuel. Il permet aux étudiants en Arts du Spectacle, section Théâtre, de l’Université de Provence de s’impliquer dans la théorie et la pratique théâtrales tout au long de leur cursus. Personne ne voit la vidéo, de Martin Crimp met en scène des sondeurs, des enquêtes sur la consommation, parle de l’aliénation à concevoir la vie à travers le panier de la ménagère. On s’aperçoit vite qu’entre pizzas surgelées, café soluble et tampons hygiéniques, sous la banalité du discours affleure le constat d’une incapacité structurelle à épouser sans dommage les valeurs marchandes. La langue est celle de la rue, avec ses hésitations bafouillées, son vocabulaire pauvre ; les personnages perdent, à ce jeu, toute consistance humaine.

Nanouk Broche, enseignante à l’Université, mais aussi comédienne et metteuse en scène, a réglé le spectacle en 19 jours : «Avec les restrictions de budget on ne peut plus se permettre d’y consacrer un Personne ne voit la video © X-D.R.

mois !» Le résultat est très convaincant, les étudiantscomédiens sont investis à fond, la mise en scène est intelligente, permettant la participation des 24 étudiants grâce à des chœurs insérés entre les actes, empruntant des répliques à Joyce, Jelinek, Godard, Barker ou Marivaux, les cinq personnages étant interprétés par différents comédiens à chaque acte. L’ensemble est décapant, surtout quand lumières et musique s’en mêlent ! Quant à la régie, l’assistanat, la communication, la scénographie, ils ont aussi été gérés par les étudiants. Du cousu main ! C.B.

Personne ne voit la video s’est joué du 3 au 7 mars au Théâtre Vitez à Aix en Provence www.theatre-vitez.com




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