Zibeline Cahier Jeunesse

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3 째 N

du 21/01/10 au 25/02/10 | un gratuit qui se lit

Blanche Neige en DVD


II

ÉVÉNEMENT

GALERIE D’ART DU CONSEIL GÉNÉRAL

Enfantillages

K. Bo urd are l ’ân e© Pe au d

Paul Wallach

André Dimanche est un éditeur sérieux, et un commissaire d’exposition facétieux. C’est à lui que la Galerie d’art du Conseil général a confié l’exposition L’Enfance de l’art à laquelle il a réservé des perles inédites. Comme le Livre pour Inès de Jean-Jacques Ceccarelli, les Attrapes-cauchemars de Denis Polge et les Jouets en bois de Paul Wallach jusque-là conservés dans leur sphère familiale et privée, et dévoilés au public par un coup de baguette

magique. Des jouets-objets auxquels l’exposition confère un statut d’œuvre d’art, au même titre que les pièces créées par Gilles Aillaud, Olivier Debré, André Masson, Bernard Rancillac, Pascal Navarro, Hervé Télémaque autour du thème de l’enfance. Non seulement ce face-à-face thématique entre «créations destinées aux enfants» et «créations sur l’enfance» est intelligent et ludique, mais il est une matrice idéale à l’imagination… Accueilli par la Maison de poupée lumineuse de Sophie Menuet, on entre de plain-pied dans un monde enchanté où figurent en bonne place les dessins d’André Masson pour ses petitsenfants, l’Âne du Poitou de Gilles Aillaud dont le regard goguenard lorgne du côté des suaves Peau d’âne de Katia Bourdarel, pas effrayées pour un sou par La Dépouille suspendue à l’entrée d’une cabane ! C’est que la galerie n’a pas ménagé ses effets, fabriquant une cabane de projection pour le film de Jacques Demy. Plus loin, une procession d’animaux bricolés, escargot en tête, telle l’Arche de Noé, fait habituellement les beaux jours des enfants de Denis Polge, aquarelliste vauclusien… Dans le rôle de découvreur de trouvailles, André Dimanche est parfait : en 2006 déjà, il éditait un livre de coloriages grand format signé André Masson ! À moins qu’il ne soit resté un éternel gamin ? MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

L’Enfance de l’art jusqu’au 4 avril Galerie d’art du Conseil général, Aix 04 42 93 03 67


LES ÉLANCÉES

ÉVÉNEMENT

III

De l’art du geste… Les Élancées, Festival des Arts du geste, déploie ses propositions sur les communes de Ouest Provence pour la 12e année, toujours portées par la même exigence artistique Roi penché ; du hip hop avec la cie En Phase de Miguel Nosibor qui marque un très beau Temps d’arrêt ; la cie X-Press avec 3 au cube, un exercice de style basé sur la géométrie; le duo Yvonnette Hoareau et Sébastien Vela de la cie Mira ; et la chorégraphie de Jacques Fargearel, qui sait faire danser les duos enfant/adulte comme personne : Ces deux-là !, étonnant duo entre un petit garçon et un jeune homme explore cette fois la relation fraternelle.

Unique dans la région, Les Élancées poursuit sa route. Malgré les baisses importantes et successives de subventions, il maintient une exigence artistique que chacun reconnaît et apprécie. Car au-delà de la programmation ouverte à tous, le festival a pour objectif -il est important de le rappelerde placer l’enfant au cœur de la démarche artistique afin de développer son sens critique et son autonomie de pensée, de lui donner les clés qui mènent au spectacle, par le biais d’ateliers de pratique en milieu scolaire, de rencontres avec les artistes. Le tout permettant de «tisser des liens intimes entre l’enfant et l’artiste» comme le rappelle Anne Renault, directrice artistique du festival. Dans les communes mises en synergie lors des Élancées ce sont des enfants actifs et concernés qui vont au spectacle, depuis 12 ans…

Coups de cœur Univers déjanté, insolite, spectaculaire… Du cirque, oui, mais pas n’importe lequel : ces trois spectacles présentent des artistes hors pair, des histoires différentes qui font appel à la poésie, la fantaisie, au burlesque… Celle de la cie Archaos, dont la nouvelle création In Vitro 09 traite «du désir et de l’arrogance de celui qui veut créer des êtres parfaits.» Les artistes brésiliens et européens mis en scène par Guy Carrara et Raquel Rache de Andrade (voir p VI) évoluent dans une étonnante structure métallique, confrontés aux créatures hybrides de l’étrange professeur Ferdelans… Dans un autre genre, Mathilde Sebald et Damien Gaumet font évoluer leur Bal caustique dans un univers surréaliste : humour noir et clowneries à la Buster Keaton pour ces deux poètes-fantaisistes qui font flotter les commodes anciennes et se rouler par terre les chaises ! Exceptionnels enfin les artistes de la cie XY : dans Le Grand C une vingtaine d’acrobates porteurs et voltigeurs créent de chimériques géométries, bousculant au passage les codes de la discipline… Un travail résolument collectif, basé sur une totale confiance en l’autre, dans une grande générosité.

Plein les yeux

DOMINIQUE MARÇON Bal caustique © Jesus Ruiz de la Hermosa

La programmation cette année propose un savant mélange de danse (8 spectacles) et de cirque (7 spectacles), avec des compagnies régionales, mais aussi internationales (Asie, Brésil, Europe du nord et du sud). C’est d’ailleurs l’une d’elles qui ouvre les festivités : le cirque vietnamien convie musiciens et circassiens avec Lang toï (Mon village), un spectacle tout en bambou qui allie les traditions virtuoses du cirque chinois et du théâtre musical vietnamien, avec la dramaturgie du nouveau cirque. Plus près de nos pratiques théâtrales la compagnie espagnole Aracaladanza et son Pequeños Paraísos inspiré du Jardin des délices de Jérôme Bosch ; et les italiens de TPO, que Scènes et Cinés a déjà reçu pour leurs précédents spectacles, reviennent avec Farfalle : leur tapis magique fera naître cette fois des papillons imaginaires. Autre belles rencontres, en danse notamment, avec un spectacle pour tout petits (dès 18 mois), Bach… à sable, de la cie La Guimbarde qui fait se rencontrer une danseuse et un violoncelliste sur les Suites pour violoncelle seul de Bach ; la rencontre de la chorégraphe Carolyn Carlson, de l’auteure Marie Desplechin, du musicien René Aubry et du créateur d’images Stéphane Vérité autour du

Festival Les Élancées du 27 janvier au 7 février Istres, Miramas, Fos, Port-Saint-Louis, Cornillon-Confoux, Grans 04 42 56 48 48 www.scenesetcines.fr


IV

ÉDUCATION

ORCHESTRE FRANÇAIS DES JEUNES | MUSÉE BLEU

Ils sont entrés dans la carrière… Ils sont jeunes, brillants, lauréats… cela ne suffit pas toujours. Les portes des orchestres professionnels, des formations grandes ou réduites sont étroites, une expérience est toujours exigée ! Leurs premiers prix de Conservatoires supérieurs apparaissent, ironie, dérisoires. L’Orchestre Français des Jeunes, créé en 1982 par le ministère de la Culture, apporte une réponse concrète et dynamique, et donne aux jeunes virtuoses l’occasion exceptionnelle de s’affirmer au cœur d’un ensemble qui a pour seul critère la qualité des impétrants.

Préparation… Car les métiers de l’orchestre ne s’apprennent qu’en y jouant et en interprétant le répertoire lors de stages sous la direction de chefs prestigieux, de tournées en France et en Europe, Berlin, Madrid, Paris... Membre depuis 1983 de la Fédération européenne des orchestres de jeunes, l’OFJ bénéficie de projets conjoints avec les jeunes orchestres européens, échange des musiciens, approche d’autres cultures, découvre d’autres sensibilités… leur

travail s’affine ainsi grâce à ces programmes soutenus par l’Union européenne. Épaulés par une équipe pédagogique brillante constituée d’instrumentistes d’orchestres et de professeurs de Conservatoires supérieurs, dirigés par le chef de renommée mondiale Kwamé Ryan, les jeunes apprennent, passent par les préparations rituelles du travail des différents pupitres, les répétitions des tutti… Cela aboutit à une interprétation d’orfèvre, précise et passionnée. La complicité est sensible entre le chef et l’orchestre, le bonheur de jouer visible… passion, élan, fougue, tout est là pour un orchestre dont les prestations sont enviées par bien des formations professionnelles !

… exécution ! Ainsi, le 22 décembre au Grand Théâtre de Provence, l’OFJ créait en France Métanoïa d’Olivier Rappoport. Sa mise en espace des instruments créait un son quadriphonique, mettant en relief le travail sur les bois, les larges mouvements emportés des cordes soutenues par les vents, les riches parties des percussions, auxquelles

Orchestre Français des Jeunes © Agnès Mellon

s’opposaient des passages minimalistes, des murmures incantatoires, une écriture vibrante, toute de contrastes… À ces subtiles tensions succédaient les danses symphoniques de West Side Story et le bonheur communicatif du jeu ! La somptueuse Symphonie n° 2 en ut mineur de Rachmaninov permettait à l’orchestre de faire la démonstration de son indéniable talent ; puissance, finesse, temps suspendu pendant l’adagio, temps ourlé de rêve… Sublime ! Dernier cadeau, en bis, un extrait de

Casse Noisette. Un moment de grâce, prouvant avec brio que les jeunes ne se cantonnent pas aux musiques actuelles, dès qu’ils ont la chance que ce monde-là leur soit transmis. MARYVONNE COLOMBANI

www.ofj.fr

Les Muses de l’enfance N’y a-t-il pas quelque étrangeté à vouloir emmagasiner nombre de vieilleries dans des sanctuaires où nul n’aurait l’idée de se rendre par beau temps ? La culture du bronzage, ou celle qui consiste à dévaler des pentes aléatoires et neigeuses, semble si éloignée de celle du musée… Pourquoi songer à y entraîner des enfants ? Pour leur donner un dos courbé et les yeux caves ? Par quel vice inouï peut-on les éloigner des jeux élaborés pour qu’ils deviennent de charmants adeptes de notre société de consommation ? Et voici que chuchote à notre oreille la voix de Marguerite Yourcenar, celle qui nous a emportés vers l’amour des Antiquités, celle des Mémoires d’Hadrien, «La mémoire de la plupart des hommes est un cimetière abandonné, où gisent sans honneurs des morts qu’ils ont cessé de chérir». Celle qui s’étonnait que «[s]es contemporains, qui croient avoir conquis et transformé l’espace, ignorent qu’on peut rétrécir à son gré la distance des siècles». C’est une des missions que le Musée Bleu s’est assignée. Par ses visites guidées, thématiques ou générales, s’adressant à tous les publics, et par les activités spécifiques destinées aux enfants, en s’adaptant aux différentes tranches d’âge. Lors des visites-jeu (le dimanche matin), les parents et leur(s) enfant(s) munis d’un carnet suivent pas à pas une médiatrice, pour naviguer sur le Rhône, observer les étoiles, et construire chacun sa route, apprendre à connaître Neptune, dieu irascible des mers et se le concilier, écouter les histoires qui ont peuplé l’antique Mare Nostrum, découvrir les monstres marins et les

compagnons de voyage de la divinité marine… Lectures, contes en musique, pièces de théâtre (le dimanche après-midi) font aussi entendre les voix lointaines de la mer et du fleuve. Cette démarche qui tente de rendre le musée vivant, ne se contentant pas d’expliquer, mais qui montre, qui laisse les enfants participer, agir, leur permet de s’approprier les connaissances, non pas comme une science que l’on impose, mais comme un élément naturel qui fait partie de leur vie, de leur quotidien. La distance entre le savoir et l’enfant est placée dans une nouvelle perspective. Une familiarité s’établit. On entre dans ce temps que l’on pensait mort, à l’intérieur duquel les statues vivent encore et nous touchent…

Le musée de l’Arles antique remplit avec bonheur ses différentes missions, de la conservation à la diffusion des connaissances, par une muséographie intelligente et claire et de nombreuses activités passionnantes destinées tant aux scolaires (le musée ne désemplit pas !) qu’aux particuliers. Qu’y a-t-il de plus formateur pour un enfant que ce contact direct, vécu aux sources mêmes des savoirs ? Il pleut, il neige même… et si nous allions au musée ? MARYVONNE COLOMBANI

Programme détaillé des activités et inscription www.arles-antique.cg13.fr © X-D.R

© X-D.R


THÉÂTRE DURANCE | INSTITUT CULTUREL ITALIEN ÉDUCATION V

Première danse Ils s’appellent Naomi, Florian, Malou, Laetitia… Ils sont élèves au collège Reymond à Château-Arnoux ou en classe option danse au lycée Lurçat à Martigues. Ils sont 28 adolescents à vivre depuis le printemps 2009 une aventure singulière en compagnie du Collectif Nomade Village, Danse de territoire, orchestrée par le Théâtre Durance. Un vaste projet de pratique de la danse, du théâtre, sous l’œil de la caméra du réalisateur Philippe Domengie, conduit avec la complicité de leurs professeurs. Et une juste combinaison entre formation et création qui, à l’automne 2010, aboutira à la réalisation d’un film vidéo diffusé sur le territoire régional et dans les circuits professionnels. Aguerri au travail pédagogique, le Collectif Nomade Village a pensé son projet comme on écrit un scénario, avec un thème (l’après crise, quand les jeunes se substituent aux adultes, se responsabilisent, cherchent du travail, quand l’exode est nécessaire pour survivre), des personnages (une bande d’ados), des décors (le collège, le lycée, la campagne). S’appuyant sur un découpage chronologique et une méthodologie : rencontres, repérages, ateliers de créations chorégraphiques, séquences de tournage, post-production, diffusion. Rien n’est laissé au hasard -même si tout reste ouvert- car le «premier objectif est de partager une expérience, de resserrer les liens dans les groupes, de travailler sur les connexions et l’échange entre les jeunes» souligne Virginie Coudoulet-Girard, chorégraphe et responsable pédagogique. À travers la pratique du mouvement dansé, l’écriture chorégraphique et la découverte de la matière cinématographique, les ados réapprennent des choses simples mais primordiales pour la réussite du projet, comme «laisser la place aux autres, découvrir la réalité des difficultés matérielles, faire l’apprentissage du temps…». Le tout en images car pour qu’ils appréhendent sa présence et l’oublient, Philippe Domengie n’a jamais arrêté sa caméra. Immergés dans des conditions de tournage professionnel, ils sont à fond dans l’histoire et ont pleinement conscience de son caractère exceptionnel. Éphémère aussi, car Danse de territoire est une parenthèse dans leur apprentissage de la vie… Déjà 6 ateliers ont eu lieu avec le collège C. Reymond, 8 autres seront réalisés d’ici fin mars comme autant d’occasions d’extraire des individualités des choses qui sont en elles-mêmes et qui les impliquent réellement. Avec les lycéens de Lurçat, de nombreuses séquences ont été tournées, toujours sur le même thème, mais dans un autre registre :

Scène de l’exode (Château-Arnoux) © Philippe Domengie

les filles ont joué une scène d’audition évoquant le risque d’exploitation du corps féminin adolescent. Déjà les rushs mettent l’eau à la bouche tant leur présence est convaincante, juste, naturelle. «Il faut qu’une partie de la création leur appartienne et faire en sorte qu’ils s’amusent aussi» reconnaît le collectif qui leur réserve encore d’autres moments forts. Comme les prochaines scènes «d’errance», au printemps, quand tous se retrouveront à Marseille pour partir en quête d’un travail salvateur. Pourquoi pas acteur ?

Le 1er avril, à 11h15, le Collectif Nomade Village présentera son spectacle Les Débordeurs à l’ensemble des élèves du collège Reymond. Le 7 mai, à 21h, seront projetées au théâtre Durance les scènes filmées avec les élèves de 4e, suivies du spectacle Oscar et Moi écrit et interprété par Philippe Domengie et Virginie Coudoulet-Girard

MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

Danse de territoire est coproduit par le théâtre Durance, soutenu par la Ville de Marseille et projet Lauréat Mécènes du Sud 2009. www.lenomadevillage.com et www.theatredurance.com Scène de l’audition (Martigues) © Philippe Domengie

Pulcinella Ce n’est pas un secret de Polichinelle que de révéler que l’Institut culturel italien à Marseille fait les yeux doux aux bambins ! Dès 5 ans, il leur propose une fois par mois des ateliers d’italien aussi ludiques que pédagogiques avec un professeur qui les initie à la langue de Dante et la comédienne Sabrina Giampetrone à l’expression théâtrale. Cette année, en résonance avec l’exposition du Préau des Accoules, le personnage d’Arlequin est au centre de leurs «répétitions» car une représentation théâtrale de fin d’année est prévue devant un parterre de parents émus. M.G.-G.

Institut culturel italien samedis 27 février, 13 mars, 24 avril, 29 mai et 19 juin 04 91 48 51 94 www.iicmarsiglia.esteri.it


VI

SPECTACLES CREAC | ISTRES | LA

SEYNE-SUR-MER | LE GYMNASE

In Vitro Veritas entre effets burlesques et intentions satiriques» qui montre aux élèves que l’on peut être interprètes mais aussi libres créateurs. In Vitro serait-elle la preuve vivante que le monde des arts du cirque ressemble à un laboratoire clandestin ? Que «le cirque est un refuge où les monstres peuvent survivre malgré tout» ? MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

Projet réalisé avec le soutien du Programme Culture de l’Union européenne et dans le cadre de França.Br 2009, l’Année de la France au Brésil. In Vitro 09 Raquel Rache de Andrade et Guy Carrara, Cie Archaos 20, 21, 22 et 23 janvier 20h30 CREAC, Marseille 06 64 52 13 53 www.archaos.fr vendredi 5 et samedi 6 février Festival Les Élancées, Istres (voir page III) www.scenesetcine.fr

In Vitro 09 © Philippe Cibille

Créée par la Cie Archaos en septembre à l’École nationale de cirque de Rio de Janeiro au Brésil, In Vitro 09 débarque à Marseille, Istres et La Seyne-sur-Mer. Une mini tournée en région qui débute au Centre de recherche européen des arts du cirque (CREAC) où la compagnie est implantée depuis 2001. In Vitro 09 est l’aboutissement d’un processus d’écriture et de création démarré en 1997 par Guy Carrara pour le scénario original et Élise Bouffel pour la réalisation de dessins, suivi en 1999 par un premier spectacle, des photos et une captation filmée… Dix ans plus tard, à partir du même scénario, Archaos entraînera dans son sillage des élèves de quatre écoles de cirque du Brésil, de France, de Belgique et de Grande-Bretagne. Leur «épopée exaltante» bâtie sur un socle d’échanges, de formation et de professionnalisation, aboutira à deux créations collectives. La première, In Vitro 99, sera uniquement interprétée par de jeunes artistes étudiants brésiliens. La seconde, In Vitro 09, accueillie en décembre au Domaine d’O à Montpellier, réunit neuf artistes brésiliens et européens diplômés d’écoles supérieures et en insertion professionnelle. Ensemble, ils combinent leur jeu d’acteurs et leur technicité de circassiens dans une aventure qui pose le problème de la procréation artificielle. Et traite du désir et de l’arrogance de celui qui veut créer des êtres parfaits. La scène pourrait se passer dans un laboratoire ou dans un centre de formation (tiens, tiens…), mais ici les professeurs et les laborantins n’ont que faire du trapèze ou de la corde lisse ! Ils cherchent le clone exemplaire, la femme idéale… Face à l’absence de pièces de répertoire pour le cirque, Raquel Rache de Andrade et Guy Carrara ont échafaudé cette «sorte de parodie mystique,

du 2 au 4 mars Janvier dans les étoiles, La Seyne-sur-Mer www.theatreurope.com

L’enfant qui ne pouvait pas grandir La compagnie Vol Plané crée Peter Pan ou le petit garçon qui haïssait les mères, d’après l’œuvre de James Matthew Barrie, au théâtre du Gymnase du 26 février au 5 mars. Entretien avec Alexis Moati, metteur en scène du projet Zibeline : Comment vous est venue l’idée de mettre en scène Peter Pan ? Alexis Moati : Ce personnage hante mon imagination depuis l’enfance. Celui qui dans le dessin animé de Walt Disney évoque l’imagination au pouvoir, la liberté, est un personnage en fait beaucoup plus tragique, qui porte en lui la blessure de l’abandon. Peter Pan est un petit garçon abandonné. L’abandon et l’impossibilité de grandir sont des thèmes universels qui me touchent intimement et poétiquement. Lorsque j’ai découvert que c’était une pièce, avec des personnages qui ont une dimension shakespearienne, je me suis dit que ce serait bien de la monter en me tournant vers un théâtre d’acteurs. C’est le parti pris de mise en scène ? Oui, on fait le pari de jouer les 25 personnages de la pièce. Cela répond à mes questions actuelles sur le jeu, la place centrale de l’acteur, ce qu’il peut vraiment prendre en charge… Un projet qui rassemble aussi un public vaste, de 8 ans à… sans limite !

Comment joue-t-on un enfant quand on est un adulte ? C’était une de mes premières interrogations ! Je pensais intuitivement que l’enjeu de jouer un enfant pour un adulte pouvait être assez intéressant et, en enfonçant une porte ouverte, que l’enfance n’est pas loin de l’état d’acteur. Partant de cette intuition je me suis dit qu’il y avait un état matriciel. Le théâtre serait un

grand terrain de jeu, qui abolirait la scène et la salle. Oui, il est possible pour un adulte de jouer un enfant, c’est même ludique pour les acteurs. L’enjeu étant de ne pas montrer comment on joue l’enfant, mais d’être, de se retrouver dans cet état-là, cet état d’enfance. Sur quel texte vous basez-vous ? Par le biais de Céline Albin-Faivre j’ai rencontré Andrew Birkin, spécialiste de Barrie en Angleterre, auteur d’une adaptation de Peter Pan sous-titrée Peter Pan ou l’enfant qui haïssait les mères, qui est le premier titre que l’auteur voulait utiliser. C’est celle-là Peter Pan © Aude Amedeo

qu’on a décidé de jouer. Comment se dégage t-on de l’univers de Walt Disney ? C’est une référence imparable, mais la matière de la pièce est beaucoup plus nerveuse, insolente et quelquefois plus tragique que l’œuvre de Disney. Ceci étant il reste quelques clins d’œil dans la pièce... Un mot sur la scénographie ? On part de la nurserie des enfants Darling et on arrive dans le pays imaginaire du jamais-jamais, fantastique, merveilleux, mais un peu dangereux aussi, beaucoup moins pastel que Disney. On n’oublie jamais la chambre d’enfant, matrice de tout, comme s’il suffisait que le rêve et Peter Pan apparaissent pour tout transformer. La famille est au centre de notre travail : on a essayé d’en trouver une déclinaison cohérente, et non pas juste fournir un corps à un personnage. ENTRETIEN REALISE PAR DOMINIQUE MARÇON

Peter Pan du 26 février au 6 mars Théâtre du Gymnase, Marseille 0 820 000 422 www.lestheatres.net


AU PROGRAMME Bleuffant

Miettes

À partir de La Barbe-Bleue de Charles Perrault et Le Château de Barbe-Bleue de Béla Bélasz, Laurence Janner crée une version attachante et profonde de ce conte dont on retient toujours le célèbre «Anne, ma sœur Anne, ne voistu rien venir ?»… Au point d’en oublier le reste ! Et le reste, justement, c’est une histoire complexe - Barbe-Bleue interdit à sa jeune épouse l’accès à son «petit cabinet noir», excitant ainsi sa curiosité sans pour autant la satisfaire qui passe brusquement de la barbarie à la poésie la plus pure. Mais elle reste accessible à tous grâce à la mise en scène qui prend petit à petit la forme d’un opéra de lumière, de couleurs et d’images.

En s’inspirant de La grosse faim de p’tit bonhomme de Pierre Delye, la chorégraphe Christine Fricker retrace le processus de fabrication du pain. Du grain de blé à la baguette le chemin est long, et la danseuse Adriana Alosi promène les grandes bottes jaunes de p’tit bonhomme au gré des décors pivotants, carré de pelouse fleuri, plantes colorées… Son corps s’abandonne aux sons et aux rythmes, souligne par petites touches poétiques l’apprentissage savant qui permet de se remplir le ventre !

SPECTACLES

VII

Du début à la faim Cie Itinerrances dans le cadre de Minots, marmailles & cie à partir de 3 ans mercredi 20 et samedi 23 janvier 15h Théâtre de Lenche, Marseille 04 91 91 52 22 www.theatredelenche.info

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DO.M. Du debut a la faim © Helene Dattler

Zinzin Premier opus de David Sire pour les petites oreilles, C’est de famille illustre avec tendresse et drôlerie les histoires des petits et des grands. Fêtes de famille interminables, fratries recomposées, chamailleries entre frères et sœurs, élucubrations des cousins zinzins, tout est tellement vrai que David Sire fait mouche à tous les coups. Il aime faire le clown quand les mots tintent avec la musique de son ukulélé et de sa guitare, et que son complice Pierre-Caillot-Zinzin s’emballe aux percussions ou rêve à la flûte à coulisse… En 50 minutes chrono, il peint un tableau familial coloré, vif, servi par un récit musical gai et vivant. M.G.-G.

M.G.-G.

La Barbe-Bleue Laurence Janner à partir de 5 ans mercredi 20, vendredi 22, samedi 23, mercredi 27 et samedi 30 janvier 14h30 Badaboum théâtre, Marseille 04 91 54 40 71 www.badaboum-theatre.com

La Barbe-Bleue © Badaboum theatre production

C’est de famille David Sire musique à partir de 6 ans mercredi 3 février 18h30 Théâtre de Nîmes 04 66 36 65 00 www.theatredenimes.com

Galafronien Et si le plus beau village du monde était celui que l’on s’invente ? Comme celui tout rouge et écrasé de chaleur de Zahra, 5 ans, qui rêve de connaître le monde… Zahra vient de perdre une dent de lait et doit suivre la coutume : aller jusqu’au cimetière, la jeter derrière elle en récitant la formule «Toi beau soleil prend la dent de gazelle et donne-moi une dent d’âne». Mais sur le chemin qui monte, elle croise une femme qui chante, un boucher et un vendeur de bougies… Sous la plume de Mohamed Bari, le village marocain de Zahra est un monde à lui seul vers lequel nous entraîne avec générosité la troupe bruxelloise du Théâtre de Galafronie. M.G.-G.

Le plus beau village du monde Théâtre de Galafronie à partir de 6 ans mardi 23 février 20h, mercredi 24 février 15h Théâtre Massalia, Marseille 04 95 04 95 70 www.theatremassalia.com

> David Sire © Aymeric Warmy Janville

Renversant Le Globe, Thierry Bedard, à partir de 8 ans mercredi 24 février 14h30 et 19h30, vendredi 26 février 20h30 Théâtre de Grasse 04 93 40 53 00 www.theatredegrasse.com samedi 6 mars 18h30 Théâtres en Dracénie, Draguignan www.theatresendracenie.com jeudi 11 mars 19h Théâtre d’Arles 04 90 52 51 51 www.theatre-arles.com

Allons donc, la géopolitique servie sur un plateau au jeune public, c’est possible ? Avec Thierry Bedard, oui, qui aime raconter aux enfants l’ordre et le désordre du monde dans une histoire aux rondeurs ambiguës. Car, par le truchement d’un énorme globe qui passe des mains d’un spécialiste à celles d’un assistant maladroit et plein de poésie, il dit le monde tel qu’il peut être vu -ou vécu- selon que l’on se trouve en Afrique ou en Europe. Mais aussi l’histoire, la géographie, l’espace, le déséquilibre Nord-Sud… Derrière les cartes, les atlas et les planisphères, l’enfant découvre un monde bien plus vaste encore, la tête à l’envers. De l’autre côté du globe. M.G.-G.

Chrysalide Chez Peau d’âne, ce qui plaît à Estelle Savasta, «c’est surtout ce qui se passe sous la peau, c’est le symbole énorme de cette peau dans laquelle elle entre belle enfant en fuite, dans laquelle elle devient solitaire et crasseuse et dont elle sort prête à aimer». De ce passage à l’âge adulte, Estelle Savasta, metteur en scène de la Cie Hyppolite a mal au cœur, a composé un spectacle muet, habité par la présence expressive de Camille Forgerit, la douceur de l’univers sonore, le chuchotement de l’histoire. Dans une atmosphère intime et féerique, délicate et lumineuse, Seule dans ma peau

d’âne dit la douloureuse destinée d’une jeune fille qui se cogne à la mort avant de rencontrer l’amour. M.G.-G.

Seule dans ma peau d’âne Cie Hyppolite a mal au cœur théâtre à partir de 8 ans vendredi 5 février 20h30 Le Carré, Sainte-Maxime 04 94 56 77 77 www.carreleongaumont.com


VIII

SPECTACLES MASSALIA | FOS | BERRE | THÉÂTRE

DE GRASSE

Être un clown Pourquoi alors cette extravagance physique du clown ? Cela a à voir avec la sauvagerie. L’exubérance extérieure est un signe des sentiments primordiaux qui agitent Arletti, de ses antagonismes primaires, de blanc, de rouge, d’orange échevelé. Pouvez-vous nous raconter la naissance d’Arletti ? Oh, elle existait bien avant que je sois née ! Mais bon, nous nous sommes rencontrées parce que François Cervantes m’a demandé de créer un personnage qui rendrait l’humanité attachante. C’était en 1986, j’étais une jeune comédienne qui sortait de la rue Blanche. La création fut d’abord plastique, je l’ai dessinée, coloriée surtout. Et j’ai passé des heures à ne rien dire ! Mais le langage des couleurs m’a aidée. Et Albert Fratellini aussi, le plus bête des trois frères, celui que j’ai toujours préféré. Son nom m’est venu après, Arletti, comme un son dans ma bouche, un roulement. Cervantes dit qu’un clown est un poème sur pattes ; un désir sur pattes aussi. La Curiosité des anges premier spectacle de la Cie l’Entreprise, est né de cette recherche menée entre Dominique Chevallier, Cervantes et moi, autour de la découverte d’Arletti et de Zig. Comment évolue-t-elle depuis 25 ans ? Est-ce que vous la travaillez ? Oui je la travaille, un peu comme un musicien travaille son son. Il fait des gammes, mais ce n’est pas l’essentiel, l’essentiel est d’imaginer le son parti-

Portrait Arletti © Christophe Raynaud de Lage

Pour plusieurs semaines Catherine Germain va endosser les habits et le maquillage d’Arletti, personnage de clown qu’elle a inventé il y a 25 ans avec François Cervantes, et qui depuis évolue au gré des spectacles qu’elle crée avec lui. Il lui arrive d’endosser d’autres masques, comme dans le Voyage de Penazar ou l’Ile. Ou même de jouer à découvert, comme dans Médée, qu’elle vient de créer avec Laurent Fréchuret. Mais Arletti est son clown à elle, comme un appendice, presque indépendant, qui vit au-dedans. Zibeline : Qu’est-ce que cela veut dire, être un clown ? Catherine Germain : C’est mettre quelque chose de soi en lumière sur un plateau. Comme une nature profonde et poétique, un être passionné dont on vient témoigner sur scène. C’est difficile à définir au-delà, cela vient peu à peu, avec le travail, une recherche sur soi. Mais paradoxalement mon moi y disparaît et se fond dans une chose partageable, une sorte d’essence universelle. Quelque chose de bête, au sens animal, naïf et magnifique du mot. Mais pourquoi les apparitions d’Arletti font-elles immédiatement rire ? Quand elle arrive sur le plateau le public entre en vibration, reconnaît cette part de moi que j’y ai mise et qui est aussi la sienne, celle que nous portons en commun. Ce n’est pas un rire qui surgit mais le sourire sympathique de cette reconnaissance primordiale. Une dilatation, qui montre que le spectateur m’a vue.

culier que l’on veut produire, et de s’obstiner jusqu’à y parvenir. Vous présentez à la Friche deux spectacles, le premier étant une rencontre avec Thierry Niang, danseur. Y a-t-il un rapport entre le travail du danseur et celui du clown ? Oui, c’est la même abstraction qui nous guide, mais animée exactement à l’op-

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Nez cessaire

posé. La syntaxe est très différente, mais la langue est commune, intérieure, dans le corps. Quant à l’autre spectacle il est plus ancien et repose sur la rencontre entre trois clowns différents, Arletti, Zig et Boudu (Bonaventure Gacon ndlr). Là mon altérité n’est pas d’être un clown face à un danseur, mais d’aimer le théâtre, le jeu. Vous séparez vous parfois d’Arletty ? Jamais complètement. Même quand je joue Médée elle m’habite. La découverte du clown est irrémédiable… ENTRETIEN RÉALISÉ PAR AGNES FRESCHEL

Un amour du 2 au 13 février Les Clowns du 16 au 27 février Théâtre Massalia, Marseille 04 95 04 95 70 www.theatremassalia.com

Sur les bancs L’Entreprise joue deux autres textes de François Cervantes, La Table du fond et Silence, un diptyque qui brosse un portrait émouvant d’un collégien qui aime apprendre et découvrir. Un très beau texte écrit au fond d’une salle de classe en 1996, mais qui ressemble à l’enfance de tous ceux qui aiment lire, apprendre, être seuls… Après une tournée Nomades à Cavaillon en partie annulée par la neige, le diptyque s’en va à Grasse… La table du fond. Silence. les 5 et 6 février Théâtre de Grasse 04 93 40 53 00 www.theatredegrasse.com La table du fond © Christophe Raynaud de Lage

Vous connaissez l’histoire du petit homme, pirouette, cacahuète, qui avait une drôle de maison en carton avec des escaliers en papier… Et du facteur qui y est monté et s’est cassé le bout du nez. Mais pour faire sa tour-née il doit le retrouver, ce qui n’est pas simple du tout, surtout quand il se met à essayer celui du caniche ou du bonhomme de neige ! Avec ses belles lunettes à volets, Nathalie Della Vedova embarque tout le monde, dès 2 ans, jusqu’à l’heureux dénouement de ce conte drôle et inventif. DO.M. Mon nez © Eric Grundmann

Mon nez Cie Objet sensible à partir de 2 ans mercredi 20 janvier 10h30, 15h et 16h30 mercredi 27 janvier 10h et 15h Théâtre de Fos 04 42 11 01 99 www.scenesetcines.fr mercredi 3 févier 15h Salle polyvalente, Berre l’Étang 04 42 10 23 60 www.forumdeberre.com


THÉÂTRE DE NÎMES | 3BIS F | MASSALIA | LE REVEST SPECTACLES IX

Du nord au sud L’avion est là, sur la scène, prêt à emmener, Con pasaporte flamenco, les enfants pour un tour du monde. Car oui, le flamenco est un langage devenu universel, que son ambassadrice d’un soir, la danseuse Silvia Marín, va raconter à son auditoire. Spectacle didactique et participatif (des enfants monteront sur scène pour danser), Con Pasaporte flamenco aborde généreusement tous les aspects de cet art, grâce notamment à une petite pieuvre, mascotte du spectacle, nommée Pulpitarrita. C’est grâce à elle que s’échelonneront les explications (ses tentacules illustrant les différents styles), grâce aussi à un écran sur lequel sont projetés de petits films tournés au Japon (où existent de nombreuses académies de flamenco !), en Espagne et en Andalousie bien sûr, berceau du flamenco. Là de grands artistes parlent de leur pratique, Sara Baras, Tomatiti, Pitingo, et expliquent les styles : jaleo, soleá, caña, polo, tanguillos, tientos… que dansent ou chantent ensuite sur scène Silvia Marín et ses complices de la cie El flamenco vive. Le pari est réussi mais le spectacle pédagogique manque de cette joyeuse spontanéité caractéristique du flamenco…

Con pasaporte flamenco © Paco Manzano

Con Pasaporte flamenco a été créé le 9 janvier au Théâtre de Nîmes dans le cadre du festival Flamenco

DOMINIQUE MARÇON

On attend forcément avec exigence les spectacles de Skappa !, première compagnie qui a remporté un Molière pour la toute petite enfance. Aujourd’hui programmée partout dans le circuit jeune public, sa dernière création n’est pas vraiment une réussite. Étonnamment pour une compagnie jeune public, la destination du spectacle est indéterminée. À qui s’adresse-t-il ? Le langage scénique fait de projections colorées, de costumes /déguisements, de musique binaire, est à la fois simple dans son vocabulaire et parfait dans sa réalisation technique. Dans In 1 et 2, dans Moitié moitié, dans Uccelini, pour tout-petits, cela marche à merveille. Mais là, ce spectacle pour enfants de 8 ans semble avoir oublié qu’ils ne 10 millions de km2 © Christophe Loiseau parlent ni italien ni allemand, qu’ils ne lisent pas vite et surtout pas ce qui bouge, qu’ils ne savent pas qu’Europe est une vache… et surtout qu’ils ne peuvent encore problématiser ces 10 millions de km2 qui s’ouvrent à l’échange économique et se ferment à l’humanité qui souffre, propos même et enjeu du spectacle. Quant aux adultes accompagnateurs, qui comprennent, ils sont vite fatigués par les procédés répétitifs et le jeu naïf des comédiens, destiné aux enfants. Dans cet entre deux personne ne se trouve… Dommage. Mais allez voir Uccelini avec vos tout petits !

Inadapté

AGNES FRESCHEL

10 millions de km2 a été joué au 3bisF du 3 au 5 décembre (Mômaix) et au théâtre Massalia du 12 au 15 janvier Il sera joué au théâtre Durance (Château-Arnoux) du 25 au 27 janvier, au Comoni (Le Revest) du 30 mars au 2 avril, à Cavaillon les 22 et 23 avril… Uccelini sera donné au théâtre Durance du 22 au 26 février 04 92 64 27 34 www.theatredurance.com

Portrait d’une famille ordinaire Une suspension rouge, une table, trois chaises pour tout décor, et la magie opère. La présence de trois acteurs hyper actifs suffit à la compagnie italienne Rodisio pour donner au tableau d’une famille ordinaire un côté jouissif et exaspérant. Cuisiner, conduire, repasser, jouer, s’engueuler, bref, coincée dans les aléas des besognes quotidiennes, la vie de famille n’est pas un long fleuve tranquille… Pourtant tout semblait aller pour le mieux pour ce beau papa souriant, cette belle maman attentive et cette merveilleuse petite fille, «la meilleure de tout l’univers», gymnase intrépide lancée dans une rude compétition. Après une introduction musicale tonitruante et une gesticulation quelque peu outrancière, comme si la touche «accélérer» était restée enfoncée sur le magnétoscope,

la pièce pétarade et tourne en boucle. Sur un fil narratif aussi mince qu’érodé, difficile de bâtir un spectacle en profondeur ! Il ne reste plus au trio, pour que batte le cœur de la maison, qu’à aligner sourires crispés, rires forcés, moues exagérées et grimaces expressives à un rythme infernal. Voir même répéter une scène plus de sept fois d’affilée… jusqu’à provoquer le rire ou l’exaspération des spectateurs. C’est selon. D’autant que les acteurs excellent dans l’art du théâtre, de la parodie et du mime, et déploient une énergie formidable. Mais ils finissent épuisés, et nous aussi. MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

Storia di une famiglia a été donné les 10, 11 et 12 janvier au PôleJeunePublic, Le Revest. Il sera joué du 21 au 23 janvier au théâtre Massalia, Marseille Storia di una famiglia © Stefano Vaja


X

SPECTACLES BADABOUM | SIRÈNES

ET MIDI NET | LA MINOTERIE

De cygnes en signes Le Badaboum a présenté sa dernière création pendant les vacances de Noël. Jonathan Bidot et Lénaïg Le Touze ont proposé une adaptation contemporaine de la légende allemande qui inspira Tchaïkovski pour son Lac des cygnes. Ils ont souhaité donner aux jeunes spectateurs la possibilité d’évoluer entre une histoire romantique et une aventure plus proche d’eux, afin de leur apprendre à «interpréter les signes» de la vie et du spectacle. Ils superposent donc les codes du conte traditionnel, rêve et musique, prince amoureux et jeune fille pure, avec des aspects plus prosaïques, disco ou reality show. Le collage est un peu inégal mais rythmé, coloré. Certains tableaux sont très réussis : la course du cheval blanc de Siegfried au galop en images accélérées ou l’eau du lac qui se reflète dans le rideau de fond de scène, effet réalisé avec un rétropro-

jecteur, une coupe d‘eau et des encres colorées... On entre alors dans la magie intemporelle du conte. Mais le burlesque montre son nez dans la composition du personnage d’Odile : le grand cygne noir du conte devient une vulgaire mégère qui appelle le prince héritier «mon chaton» ! Signe des temps ? CHRIS BOURGUE

Le lac des signes a été donné du 5 au 31 décembre

Prochainement au Badaboum

Comment briser la glace ! Traditionnelle représentation de Sirènes et midi net en ce glacial premier mercredi de janvier ! Du haut d’une chaire le représentant du Ministère des affaires inutiles déclare qu’il va remettre le Premier Palmarès des Recalés récompensant «le plus meilleur» des recalés des projets des Sirènes 2009. Mademoiselle Bénédicte Pilchard (Agnès Pelletier plus vraie que nature), vêtue d’un strict tailleur gris, s’empresse de traduire en esperanto gestuel, mélange succulent de gestes fantaisistes et imagés. Commence alors un défilé totalement loufdingue de personnages maladroits présentant des projets mal ficelés : un «élastonaute» accueilli par des fraises géantes sur Mars, un petit bal offert aux pensionnaires d’une maison de retraite… Un projet voulait interdire le bruit mais était dérangé par le bourdonnement des mouches, un autre prétendait inonder le parvis et y faire évoluer des sirènes -en fait, des mannequins rafistolés agités par les techniciens de surface-, un autre encore fantasmait de remplir la place de forêts vosgiennes, représentées par de vieilles tapisseries au point de croix dans des cadres dorés. Plus kitsch tu meurs ! Le tout finit par le défilé d’un dragon, bidouillé avec un étendage en

© X-D.R

La barbe bleue à partir de 5 ans du 20 au 30 janvier, mercredi et samedi 14h30 Blancheneige à partir de 3 ans

Sirènes et midi net, Le Palmarès des recalés © Vincent Lucas

plastique et des balises de circulation, qui se carapate dans tous les sens ! C’est le projet qui gagne, son concepteur se déshabille de joie et tout finit par un vin chaud bienvenu ! CHRIS BOURGUE

Le Palmarès des Recalés a été donné à midi net le 6 janvier, place de l’Opéra, par la compagnie OPUS, «phabricants» d’univers singuliers et le groupe Volubilis. Rendez-vous le 3 février pour Une canopée aux accidents, composition de eRikm, plasticien, compositeur et musicien. Sa création acousmatique autour de la rumeur des cités et des campagnes s’appuiera sur la diffusion des sirènes, qu’il qualifie de «césures menstruelles préliminaires à la catastrophe». www.lieuxpublics.com

mercredi 3, lundi 8, mardi 9, mercredi 10, jeudi 11, vendredi 12 février 14h30 09 77 73 96 36 www.badaboum-theatre.com

Maure light Comment résister, lorsqu’on est marionnettiste, à mettre en scène Othello et Iago ? Le traître est l’emblème même du manipulateur, et le Maure n’est qu’un jouet entre ses mains. Pourtant Massimo Schuster lui donne son corps, et seuls les personnages secondaires de l’histoire shakespearienne apparaissent sous forme d’objets : les têtes maquillées, africaines, à peine marionnettes, marottes sans articulation, sont peu expressives, et ne supportent pas l’essentiel du jeu. Qui est dans le geste. L’art de Massimo Schuster et d’Alessandra Bedino, qui campe Iago, est d’une extrême délicatesse. Peaufinée par de longues années de travail : tout en décalage, sans incarnation, les personnages existent entre les corps et les objets simples ; entre une chanson de Nougaro, un Jalousy ironique et un silence émouvant ; entre Shakespeare Othello et Iago © X-D.R et cette version pleine de clins d’œil sur l’actualité sociale. La tragédie élisabéthaine devient abordable pour les enfants (bien avant 15 ans !) dans un spectacle qui repose aussi sur une intimité et une économie de moyens : une version light mais intelligente, donc. Dommage que les adolescents, pour lesquels cette version est parfaitement conçue, n’aient pas été plus nombreux dans la salle, peuplée de fans vieillissants ! AGNES FRESCHEL

Othello et Iago a été joué du 7 au 10 janvier à la Minoterie, Marseille


ARLES | THÉÂTRE VITEZ | TOURSKY SPECTACLES XI

Noël déplumant La municipalité Arlésienne marque les festivités de fin d’année par une série d’animations intitulées Drôles de Noëls : la délirante tempête de plumes le soir du 24 décembre en est l’événement emblématique. À défaut de neige, ce sont effectivement des nuées croissantes et tourbillonnantes de plumes mues par les souffleries infernales de la compagnie des Studios de cirque qui se sont abattues le soir de Noël sur la place de l’Hôtel de ville, sous le regard ébahi d’un public coiffé d’un bonnet blanc, enfants et adultes appelés à se livrer à une bataille de polochons macroscopique, sous la suggestion d’un clown blanc/Père-Noël juché sur la chapelle Sainte-Anne. Surréaliste, magique, décalé, voire dérangeant, car symbolique d’une époque où se côtoient le factice et le naturel, le manque et l’excès, l’opulence et la crise, l’artificiel et les dérèglements

Vies rêvées en kaléïdoscope Une centaine d’enfants ont eu le privilège d’assister à une représentation réjouissante au théâtre Vitez. Le lieu prête son plateau et son assistance technique aux troupes choisies par la ville pour donner des spectacles aux jeunes scolaires. Ceci dans le cadre de l’Enseignement artistique et culturel mis en place par la municipalité d’Aix pour la troisième année. Il s’agit d’un projet mené en partenariat avec l’Éducation nationale, qui touche environ 4000 élèves par an. Les domaines abordés vont des arts visuels au théâtre et à la danse, en passant par la BD, le cirque, l’art lyrique, la littérature. Chaque projet a trois axes : conférences pour les enseignants, ateliers pour les enfants, spectacles ou visites pour les classes. Tu m’écoutes ? était proposé par Dédrid’arts, compagnie aixoise. Il s’agit d’un montage de textes

climatiques ! Fascinant pour les petits comme pour les grands. Un avant-goût avait déjà été donné avec une projection mêlant trompel’œil et illusions visuelles sur la façade de l’Hôtel de ville et concocté par l’Atelier Skertzo le soir du 19 décembre : la ville de la photo et de la technologie de l’image et du numérique ne pouvait faire moins. Conjointement, de multiples animations cirque, marionnette, chanson, magie et conte ont été proposées aux petits : rien de mieux pour mettre une ville en fête ! P-A HOYET © X-D.R

Drôles de Noëls s’est déroulé à Arles du 19 au 24 décembre

tirés de Histoires pressées de Bernard Friot, auteur prolifique pour la jeunesse. Les saynettes sont des instants de vie ou de rêve qui se succèdent sur un rythme soutenu, mettant en scène les enfants qui se retouvent dans les histoires de Mathias, Benjamin ou Marie, ceux qui rêvent le jour ou qui font pipi au lit... Chapeaux et accessoires simples occupent le devant de la scène et les deux comédiennes (Judith Arsenault et Magali Jacquot) y puisent tour à tour les éléments qui les transforment. La mise en scène de Jeanne Béziers est à la fois sobre et pleine de trouvailles. Un joli travail ! CHRIS BOURGUE

Tu m’écoutes ? a été joué au théâtre Vitez le 12 janvier à l’issue d’une résidence d’une semaine

Vraiment désolée ! Depuis 30 ans le Footsbarn Travelling Theatre arpente les scènes et les pistes et l’on attendait avec plaisir, malgré la petite déception ressentie lors de leur dernière création L’Homme qui rit, ce projet pharaonesque invité par le théâtre Toursky. Il s’agissait de réunir trois troupes, des chevaux, un tracteur, des musiciens, des acrobates et des clowns, des danseuses flamenco, pour voir comment ces mondes se partageaient la piste. Hélas Sorry ! ne marche pas. Une fois encore par défaut d’écriture : mettre des gens ensemble, même (surtout ?) avec des moyens techniques importants, suffit rarement à faire un spectacle. Mais le plus étonnant n’est pas cette absence de propos, mais le manque de technique des interprètes : l’écuyère fait tomber ses poignards au premier

jonglage, le baryton chante horriblement faux, les danseuses flamenco sont ridicules, et les clowns ne sont pas drôles. Bref on s’ennuie ferme. Même les enfants. Et la salle, très enjouée pourtant au départ, venue passer un bon moment de fête, se vide de plus en plus vite. Un vrai ratage ! AGNES FRESCHEL

Sorry ! a été joué au théâtre Toursky les 7 et 8 janvier

Sorry © Emilie Pecunia


XII

SPECTACLES

GTP | OPÉRA DE MARSEILLE

Tout est mouvement Du 17 au 19 décembre le Grand Théâtre de Provence a accueilli la Merce Cunningham Dance Company du génial chorégraphe américain, disparu en juillet à 90 ans Celui qui a inventé la danse contemporaine n’est plus Une élève nous livre mais ses œuvres perdurent, toujours aussi musicales ses impressions dans leur principe compositionnel, qui est combinatoire et non narratif ou thématique. À la manière du live electronic, le nouveau directeur musical Takehisa Kosugi diffuse sa pièce Squaregame en temps réel, rythmant la chorégraphie mise en scène sur un semblant de terrain de sport où se croisent et s’entremêlent de manière très conceptuelle danseurs et sacs de marine rembourrés. Plus étonnante est la collaboration de la troupe avec le groupe de rock britannique Radiohead et l’expérimental islandais Sigur Ros pour le ballet Split Sides. Outre la notion de hasard, élément de création élevé au premier plan, Cunningham fait exploser l’espace, ou plus exactement l’investit totalement, en trois dimensions, et considère le geste de danseur pour lui-même, abstraitement. Un spectacle emblématique d’une esthétique qui a révolutionné le XXe siècle. F.I.

Tout le monde n’a pas la chance d’assister au spectacle surprenant de la compagnie américaine de Cunningham. Nous nous sommes rendus à Aix en Provence avec l’option Histoire des arts du lycée Victor Hugo. Avec l’équipe d’enseignants, nous avons pu assister au spectacle en direct, émerveillés par cette partition créée par celui qui avait compris qu’on pouvait dépasser les limites et l’imagination dans un

Split Sides © Tony Dougherty

monde artistique en plein renouveau. Associé pendant un demi-siècle au compositeur John Cage pour former LE couple de l’avant-garde du second XXe siècle, le maitre à danser continue d’habiter la mémoire de la compagnie qu’il a créée et à qui il a donné pendant chacune de ses pièces depuis 1953. 14 danseurs qui aujourd’hui diffusent son répertoire. Lorsque j’ai entendu parler de Merce Cunningham pour la première fois c’était avec mon professeur de musique. Le fait qu’il ait évoqué la mort de cet homme et tout ce qu’il a accompli m’a immédiatement séduite : rencontrer la troupe fut donc une expérience formidable. Ce qui m’a le plus surprise fut le tirage au sort effectué en direct sur scène par des spectateurs, car justement le choix des mouvements, des costumes, des décors, de la musique ainsi que l’éclairage est défini par le hasard, un simple jeté de dés, l’une des composantes favorites du chorégraphe. Cependant ce spectacle était tout nouveau pour moi, abstrait et presque inattendu. Les jeux de lumières de James F. Ingalls donnaient l’impression que tout était mouvement sur scène, insufflant au ballet une incroyable modernité. SONIA MOHAMED YOUSSOUF, ÉLÈVE EN TERMINALE HISTOIRE DES ARTS AU LYCÉE VICTOR HUGO, MARSEILLE

Squaregame © C. Atlas

Souillon de gala Massenet, à la mort de Bizet en 1875, est le seul héritier de l’opéra romantique de Berlioz et Gounod. Son œuvre riche de près de 25 ouvrages a survécu grâce à Manon et Werther et, depuis une trentaine d’années, retrouve les feux de la rampe avec Thaïs, Don Quichotte ou… Cendrillon ! C’est ce «Conte féerique», dans une production ingénieuse venue du Québec, qu’a proposé l’Opéra de Marseille pour les fêtes de fin d’année. Loin des zim-boum-boum affichés en cette période, l’opus allie avec bonheur une gaieté de circonstance, du merveilleux et une sentimentalité retenue. Il ne faut pas se fier à son apparente légèreté : Cendrillon n’est pas un opéra bouffe ! Son langage emprunte à l’opéra comique son foisonnement dans les dialogues et les contrepoints instrumentaux, une orchestration claire, ainsi qu’au grand-opéra son chant continu, ses élans lyriques… Les deux casse-têtes de l’ouvrage mise en scène et distribution - ont été

habilement résolus. Renaud Doucet et André Barbe dressent des tableaux fantaisistes, imaginent des pantomimes peuplées de libellules et d’araignées, de gags, jongleries et clins d’œil, ballets de «Messieurs propres», mariachis ou «Tontons flingueurs»… une cuisine années 50, rose-bonbon, avec frigo et cuisinière fantasmagoriques, une TV géante

d’où surgit la bonne Fée et ses coloratures aériennes (Liliana Faraon), un cabaret où concourent d’apprenties ménagères décidées à séduire un prince certes charmant mais dépressif, un drive-in aux bagnoles énormes d’où le couple improbable rêve aux images projetées du mariage de Grace et Rainier de Monaco… Dans son rôle écrasant, Julie Boulianne réussit à amarrer des aigus brillants à un Cendrillon © Christian Dresse 2009 Marseille médium jeune et solide, explorer aussi les angoisses de l’orpheline. À ses côtés, Frédéric Antoun, ténor léger et clair (préféré au travesti originel), Marie-Ange Todorovitch, marâtre puissante et burlesque, et François Le Roux, père drôle et tendre, ont contribué à la réussite d’un spectacle qui doit aussi beaucoup à la direction experte de Cyril Diederich. JACQUES FRESCHEL

Cendrillon a été donné à l’Opéra de Marseille du 23 au 31 décembre


CONCERTS D’AIX | THÉÂTRE COMŒDIA | GTP

SPECTACLES

XIII

d’opérette ; des sœurs tordantes, aux intonations et allures discordantes Monique Borrelli (soprano coloratur) et Bertrand Bettino (ténor) ; une marraine la fée sortie d’une affiche d’Aristide Bruant avec son porte-cigarettes et ses poses de cabaret ; un secrétaire particulier du prince qui dans la plus pure tradition du théâtre a pris la place de son maître à la recherche de l’amour véritable… qui bien sûr triomphe ! Les joyeux arrangements de Jean François Héron, le librettiste qui a compilé les musiques de Nicolas Isouard, Gioacchino Rossini, Pauline Viardot et Jules Massenet, (excusez du peu !) contribuaient au succès mérité de cet opéra-conte, mis en scène avec bonheur par Julien di Tommaso. Un régal de fin d’année !

Cendrillon et ses doubles La magie des contes réside toujours dans le fait qu’ils nous captivent avec des ficelles que l’on pouvait croire usées, des trames ravaudées à l’extrême… Malgré ses quelques 345 versions, le conte n’en a pas fini de nous étonner ! L’interprétation de la compagnie Interlude en a donné la pleine démonstration à un public conquis au Jeu de Paume d’Aix, le 12 décembre. Les acteurs chanteurs, qui interprétaient souvent deux personnages, ont emporté les suffrages, tant par la maîtrise de leur chant que par la drôlerie (parfois trop appuyée ?) de leur jeu : une Cendrillon, toute de fraîcheur et de fausse ingénuité (Eleonora de la Pena) marivaudant avec un prince chanté par Bertrand Bettino et joué avec humour par Romain Boccheciampe, marionnette désarticulée, stéréotype du prince

MARYVONNE COLOMBANI

Cendrillon(s) a été donné le 12 décembre au théâtre du Jeu de Paume à Aix. Une programmation des Concerts d’Aix Cendrillon(s) © X-D.R

Passion d’opérette Jean-Marie Sevolker mène, parallèlement à sa charge de professeur de chant au Conservatoire de Marseille, une carrière de chanteur metteur en scène. Il affirme avec humour que si l’opérette Passionnément de Messager n’est jamais jouée, c’est à cause de ses qualités soporifiques ! Quel pari curieux de vouloir monter un tel spectacle pensez-vous donc ? Détrompez-vous ! On a eu le plaisir de découvrir au Comoedia d’Aubagne la version modernisée par Franck Pantin (piano), aux accents jazz, bossa nova, bourrée d’allusions à Cloclo et Ray Charles, de clins d’œil à l’actualité, réadaptée dans la pure tradition de l’opérette. Le thème, usé jusqu’au-delà de la trame, est celui d’un Arnolphe américain, M. Stevenson, qui veut se garder du cocuage par une femme trop jolie qui bien sûr… là-dessus, des histoires de yacht, de terres incultes mais promettant d’immenses ressources pétrolières… Argument léger, mais remarquablement servi. Les voix sont justes, placées, les chanteurs savent danser, occuper l’espace avec aisance. Le spectacle est emporté par un bon rythme. Le jeune premier, Grégory Juppin, qui a repris le rôle une semaine avant le spectacle et le tient bien ! Les chanteurs s’en donnent à cœur joie et Sevolker, en américain converti au champagne, signe une belle représentation. MARYVONNE COLOMBANI

Passionnément a été donné au théâtre Comoedia à Aubagne le 10 janvier

Donnez la parole aux poètes ! Des silhouettes passent dans le clair obscur, les personnages portent des valises, marchent, pressés ou alanguis, courent pour rattraper un train invisible, bavardent, certains semblent arrivés à destination, d’autres, investis de missions importantes accélèrent l’allure … un air d’accordéon entre en scène, donne une épaisseur à ce mouvement, un nouveau sens. Il y a quelque chose de Fellinien dans cet assemblage où le quotidien s’emballe en une ronde folle… On voit même un chef d’orchestre qui dirige avec ferveur les pupitres entassés dans une caisse qu’il tire en laisse ! Une femme escargot glisse sur un skate… les valises s’entassent. Monsieur les range, aidé par Pedro son valet de pied et John-John, son majordome (d’une force comique ahurissante)… effondrements multiples, une valise s’ouvre, cris… En fait les cris sortent de la valise.

© X-D.R

ses pleurs, ses désespoirs. Bulles parfois si drôles avec leurs monstres de cirque (des corps travaillés à cœur !), et le chef qui se transforme en bonimenteur de cabaret ! Tout cependant se résout dans la musique, comme l’annonce la profession de foi du violoncelliste. Les ritournelles désaxées © Agnès Mellon évoquent une mémoire enfouie et les archets tirent du corps des instruments, des pieds des pupitres, un univers dans lequel un espoir existe encore, porté par les derniers monstres que sont les poètes. Un spectacle magique, à la fois douloureux et farfelu, dont enfants et adultes ont du mal à s’extraire.

Chacune contient les bruits que Monsieur, chasseur de son, a rassemblés. Il en cherche un, bien sûr introuvable… Ces moments créés sont autant de bulles poétiques qui s’acharnent à survivre dans un monde qui a rempli tant de valises par ses crimes,

MARYVONNE COLOMBANI

Le Cabaret des valises, mis en scène par Bernard Kudlak, musique de Raoul Lay, a été joué au Grand théâtre de Provence le 15 janvier


XIV

ARTS VISUELS FOTOKINO | CITÉ

DU LIVRE | ABD GASTON DEFFERRE

Une imagerie radieuse

Deux raisons plutôt qu’une de suivre l’actualité de Fotokino en ce début d’année avec un nouvel accrochage dans sa Vitrine et le 5ème rendez-vous du Petit cinéma. C’est à Renaud Perrin qu’il revient d’ouvrir le bal. Ce touche-à-tout formé aux Arts décoratifs de Strasbourg et installé actuellement à Marseille rassemble dans son exposition Petites formes grandes formes des linogravures récentes à tirage limité, dévoilant ainsi son talent d’auteur-illustrateur. Scénographe, réalisateur de décors, de costumes de théâtre et de films d’animation, on lui doit aussi des illustrations d’articles de presse et de nombreux albums jeunesse : Repassage (Les Oiseaux de Passage), Les petits mots d’Alfonso (Albin Michel jeunesse), Les fleurs d’Alexandrie (Actes Sud Junior), De fil en aiguille (Thierry Magnier). Côté cinéma, Harold Lloyd est à l’honneur avec trois courts métrages de Hal Roach, Fred Newmeyer et Sam Taylor : reconnaissable entre tous par ses lunettes d’écaille, il est avec Charlie Chaplin et Buster Keaton l’un des must du cinéma comique muet américain. Les enfants vont adorer son personnage loufoque et casse-cou dans Oh, la belle voiture !, Viré à l’Ouest ! et Voyage au paradis. Avant la séance, ils pourront réaliser de petits flip-books -ou folioscopes- dans lesquels leurs personnages s’animeront au fil des cascades, pirouettes et autres acrobaties inventées.

La plongée dans l’univers coloré du designer japonais Katsumi Komagata opère comme un bain de jouvence ! Kakimonos battant l’air, livres-paravents en bois posés au sol, livres en libre service sur des pupitres translucides, dessins et livres-tableaux accrochés au mur : à la galerie Zola, les différentes facettes de son travail graphique apparaissent de manière claire et pédagogique. L’association Les Trois ourses, conceptrice de l’exposition 1, 2, 3… Komagata, a même privilégié un espace dessiné par des futons, à l’écart du passage, idéal pour lire et caresser les ouvrages tranquillement. Car c’est là toute l’originalité du projet que d’offrir aux lecteurs des livres-objets tactiles : chacun -et pas seulement les enfants auxquels ils sont destinés- peut se les réapproprier grâce aux jaquettes en PVC, aux couvertures cartonnées et aux pages translucides. Tous se plient et se déplient à l’envi, faisant apparaître et disparaître leurs couleurs chatoyantes, leurs lignes graphiques et simples, les déliés et les pleins et leurs histoires enfantines. C’est un jeu, entre l’enfant et le livre, entre l’enfant et l’adulte, que Komagata a imaginé à la naissance de sa fille puis développé via sa maison d’édition, One Stroke, à Tokyo. D’ailleurs, une réalisation vidéo montre la méticulosité requise pour assembler les pop-up et la dextérité des japonais passés maîtres dans l’art du pliage… En regard, un périmètre révèle les travaux des élèves

M.G.-G.

Petites formes – grandes formes Renaud Perrin du mercredi au samedi de 15h à 19h jusqu’au 13 février Fotokino - La Vitrine, Marseille 09 50 38 41 68 www.fotokino.org Trois (més)aventures de Harold Lloyd à partir de 5 ans mercredi 3 février atelier au pied de l’écran à 9h, projection à 10h Cinéma Les Variétés, Marseille 04 96 11 61 61

MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

1, 2, 3… Komagata jusqu’au 30 janvier Cité du livre - bibliothèque Méjanes, Aix 04 42 91 98 88 www.citedulivre-aix.com

Bestial Le dessinateur et illustrateur Tomi Ungerer a le sens du paradoxe et de l’absurde : si son terrain de prédilection est le monde animal, c’est pour mieux traquer la nature humaine ! D’ailleurs, les enfants en raffolent. Mais son œuvre est plus vaste encore comme le montre l’exposition de la bibliothèque départementale Gaston Defferre, Le singulier bestiaire de Tomi Ungerer, qui rassemble une centaine de collages, dessins classiques et satiriques, affiches publicitaires, illustrations de livres pour enfants, sculptures. Grâce aux ateliers réalisés par Fotokino, les enfants (4-6 ans) et le public familial (dès 7 ans) pourront s’armer de ciseaux, de crayons et «d’une bonne pincée d’humour» pour pénétrer son univers inclassable. M.G.-G.

Annex - Lloyd, Harold (Never Weaken)

de l’École d’art d’Aix issus d’un workshop avec Komagata, le sérigraphe Jean-Paul Portes, les plasticiens Clément Vial et Laurence Lagier. Sur le thème «Le livre un objet qui se déploie», ils ont su s’affranchir de ses histoires (un livre pour endormir les bébés, l’autre pour réveiller les poissons…) et développer des propos moins naïfs. Plus acidulés…

Le singulier bestiaire de Tomi Ungerer exposition du 21 janvier au 23 avril ateliers samedis 23 janvier, 6 février, 9 février 15h, mercredis 3 et 10 février 14h visites commentées pour les enfants mardis et mercredis 14h et 15h ABD Gaston Defferre, Marseille 04 91 08 61 00

Der kleine Unterschied © Tomi Ungerer and Diogenes Verlag AG Zürich

Dormeur © Re naud Perrin

Inventif


LIVRES/DISQUES

XV

Blanche comme sang On a donc l’impression d’assister au spectacle dans un fauteuil privilégié, qui pourrait par instants avancer plus près des corps. Les costumes de JeanPaul Gaultier, sculpturaux, baroques, contrastés et pourtant fluides comme il est nécessaire, souffrent seuls de ces focalisations qui transforment leurs fils discrets en ficelles visibles. Mais la danse y gagne, Nagisa Shirai et Sergio Diaz rayonnent, et les innombrables morceaux de bravoure -le ballet vertical des nains, l’attaque de la belle mère, le duo du réveil- sont autant de moments d’émerveillement. À la portée des enfants, s’ils ne sont pas trop contaminés par le zapping, et à la mesure de vos mémoires si vous savez encore combien les contes vous ont effrayés. Et combien l’amour qui naît, l’enfant qui vient, le cœur qui bat au fond des forêts, les cerfs qui brament, le tissu que l’on frotte et la pomme que l’on désire peuvent rougir le front des jeunes filles, blanches comme neige.

Il fut un temps où les chorégraphies d’Angelin Preljocaj respiraient la chair, exsudaient ses liquides, sa sueur, et faisaient vibrer l’air de la chaleur des peaux. Aujourd’hui autre chose est à l’œuvre dans sa danse, toujours aussi glacée mais observant les corps et non la chair, le désir et non le sexe. La danse y prend corps en images sublimées, puisant dans l’histoire, la mémoire, le fantasme, la fantaisie et ses fables. Plonger dans les contes pour écrire ce qui restera sans doute un classique est donc l’aboutissement logique de son parcours esthétique - tout comme, à l’autre bout, l’introspection littéraire qu’il entreprend avec son solo sur Genet. Tout aussi logiquement, le chorégraphe de la mémoire prend la caméra pour fixer l’œuvre définitivement. Angelin Preljocaj a toujours filmé ; lorsqu’il était à Châteauvallon il y a plus de 20 ans il a produit des courts métrages, et depuis a tourné une magnifique version de son plus beau duo, Annonciation. Avec Blanche Neige (90mn) il donne l’exemple de ce que peut être un spectacle filmé, exercice périlleux : loin de la captation neutre, ses angles et ses cadres sont choisis, et le montage, extrêmement musical, suit et harmonise les mouvements des danseurs et les élans de Mahler. Sans démonstration cependant, de façon à garder sans cesse l’idée de l’œil du spectateur, il s’approche, choisit, change d’angle, s’envole une fois… mais sort rarement du cadre de scène.

AGNES FRESCHEL

Blanche Neige Angelin Preljocaj MK2 éditions, 19,99 euros diffusion réseau Fnac à partir du 22 janvier et sur commande sur le site http://www.preljocaj.com

Pédago, écolo, coloré Les éditions Plume de carotte, créées en 2001 à Toulouse, ont une ligne éditoriale originale: elles proposent des livres pédagogiques dont la fabrication respecte l’environnement (papiers, encres végétales, limitation des transports). C’est la première maison d’édition française à bénéficier du label qualité environnementale». Les ouvrages enfants sont particulièrement inventifs et attractifs. Ainsi la collection La botanique, c’est aussi pour les tout-petits propose de découvrir Le jardin potager et celui d’agréments. Les dessins de Danièle Schulthess sont très précis et permettent de reconnaître infailliblement légumes, fleurs, oiseaux et insectes les plus courants. Ainsi l’enfant, en même temps qu’il découvre la nature domestiquée qui l’entoure, apprend les noms, s’initie au rythme des saisons. Chaque page est une découverte de la richesse et de la diversité du monde. L’album Le jardin des couleurs distingue à travers les fleurs les couleurs primaires des secondaires, propose de les mélanger et d’expérimenter l’infinité des palettes. Ces deux livres ont été respectivement réalisés avec l’aide du Jardin du Roi de Versailles et

celui de Claude Monet à Giverny et proposent, pour l’un, des adresses de jardins remarquables à visiter et pour l’autre une présentation des peintres coloristes français les plus célèbres. CHRIS BOURGUE

Au jardin potager et Au jardin des couleurs Dessins Danièle Schulthess, texte Frédéric Lisak dès 4 ans Éd. Plume de carotte, 12 euros



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