Zibeline n°34

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du 13/10/10 au 17/11/10 | un gratuit qui se lit

Investir la culture



Politique culturelle Marseille Provence 2013 Le CAC à Istres, les Rencontres artistiques Méditerranéennes du Var Hors-la-loi de Rachid Bouchareb Actoral

5 6 7 8

Saisons Avignon

10, 11

Théâtre La Criée, le Vitez, le Jeu de Paume, Pourrières, Préavis de désordre urbain Au programme

12, 13 14 à 19

Danse GTP, BNM, Pavillon Noir Ballet d’Europe, BNM, Dansem Au programme

20 22 24, 25

Musique Concerts Lyrique, Concerts, Contemporaine Au programme Jazz, actuelle, chanson Au programme

26 à 29 30, 31 32 33 à 36 37

Cirque Istres, Nono, Arles, Le Merlan, Sainte-Maxime, Gap

38, 39

Arts de la rue Petit Art Petit, Gardanne, Salon Le Gymnase, le Merlan, Small is beautiful

42 43

Jeunesse Au programme Merlan, Jeu de paume, Salins, Centaure Châteauvallon, Grand Théâtre Livres

44, 45 46 47 48, 49

Cinéma FFM, Entre nos mains, Illégal, Liberata Instants vidéo, Cinehorizontes, Image de ville, Gardanne, Institut de l’image Les rendez-vous d’Annie, AFLAM, Apt, Toulon

50, 51 52, 53 54, 55

Arts visuels Aix-en-Provence, Avignon Parcours marseillais FRAC, CCIMP Bandol, Fabrik89, Artothèque Au programme

56, 57 58 59 60 61

Rencontres

62, 63

Livres Rencontres Littérature, arts, musique

Sciences

64 à 67 68 à 74 75

Histoire Sétif et Hors-la-loi

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Marseille oubliée Hé ho les Marseillais, vous vous sentez une âme de capitale culturelle ? Quelques faits devraient vous sauter aux yeux, si vous n’aviez tant l’habitude d’être maintenus aux marges. Marseille, métropole qui regroupe près d’un million d’habitants, n’abrite ni son rectorat, ni sa direction des affaires culturelles, ni sa fac de lettres, arts et sciences humaines. Cette situation est unique en France : de telles institutions, essentielles à la vie culturelle, se trouvent toujours dans les capitales régionales. Imagineriez-vous que le Campus de Lettres quitte les fastes de Montpellier pour trouver refuge dans les arènes nîmoises, que le Rectorat d’Alsace abandonne Strasbourg pour migrer vers de sages images d’Epinal, et que la DRAC de Midi Pyrénées tourne le dos au lyrisme de Toulouse pour s’enfermer dans les médiévaux remparts de Carcassonne ? Marseille n’abrite pas davantage les grands musées d’art de la région, ou les festivals subventionnés. Elle est la seule ville de cette importance démographique à ne pas avoir d’Opéra National, ni d’Orchestre. Ce sont ces conditions, fondées sur une méfiance historique envers la ville rebelle, pestiférée, populaire, bigarrée, dues aussi aux erreurs stratégiques de ses dirigeants successifs, qui font de Marseille une métropole étrange, sans centre d’affaires, sans bourgeoisie éclairée, mais riche d’une vitalité artistique particulière, née des gens qui vivent et construisent ici, et ont pris l’habitude de ne pas attendre grand-chose des institutions. Attention cependant à ne pas confondre le pansement avec une cerise sur un gâteau, qui demeure absent. Si on fait de Marseille la Capitale des Arts de la rue, si on investit dans ses quartiers Nord, dans son cousinage avec le Sud et la Méditerranée, ses musiques populaires, si on lui donne un MuCEM, c’est encore pour la maintenir aux marges : la tête de l’Empereur s’expose à Arles, l’État investit dans la musique savante d’Aix, et aujourd’hui dans le théâtre à Toulon. Quitte à délabelliser la Scène Nationale de Marseille, voire la Criée, disent les rumeurs ! Qu’il ne faut pas écouter, mais qui alertent… La plus ancienne métropole de France a, par défaut d’investissement institutionnel, construit une identité culturelle forte et indépendante. À l’heure où on l’a nommée Capitale, il ne faudrait pas qu’elle renonce à obtenir ce qui lui est dû. AGNÈS FRESCHEL

Philosophie La pop philosophie

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Adhérents

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MARSEILLE PROVENCE 2013

POLITIQUE CULTURELLE

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attend les décisions des dossiers déposés pour labellisation auprès de l’équipe de Bernard Latarjet. Les réponses tardent, dangereusement. Les projets d’envergure ont besoin d’assurances pour être mis en branle, pour trouver les financements complémentaires que MP 2013 ne saurait fournir. Pour avancer. Il ne reste que deux ans, il n’est plus question d’atermoiements. L’objet du débat était là. Il ne fut pas traité. Dommage : le numéro 77 du Ravi (toujours disponible sur le site www.leravi.org), posait les bases du problème bien plus profondément.

Le débat est ailleurs

AGNÈS FRESCHEL

Faut-il miser sur 2013 ?, débat organisé par le mensuel satirique Le Ravi, s’est tenu au cinéma l’Alhambra le 5 oct, et a été diffusé simultanément sur les ondes de Radio Grenouille (disponible en poadcast sur www.grenouille888.org ) © Agnès Mellon

Clarifications Tout le paradoxe de la Capitale culturelle était représenté ce soir-là : sur la scène trois hommes politiques majeurs, responsables de la culture à la Ville, aux conseils régional et général. Renaud Muselier, Patrick Mennucci et Michel Pezet en représentation, caricaturés par les dessinateurs du Ravi pendant le débat, échangèrent mine de rien quelques flèches perfides, mais dans l’ensemble se tinrent plutôt bien, manifestant la volonté de sortir Marseille Provence 2013 des stricts enjeux politiciens. Mais comment faire ?

Culture ou politique ? L’absence de tout représentant de Marseille Provence 2013 faussait de fait toutes les problématiques : ils n’avaient pas été invités, et étaient les seuls à posséder les réponses artistiques. Dans la salle le premier rang était réservé à la Ville de Marseille, et occupé par des Élus. Sur les 300 personnes présentes, peu d’habitués des salles sombres, des galeries et des rayons intimes de bibliothèque. Aucun artiste ne prit la parole : des politiques, nombreux, quelques directeurs de lieux, les seuls pertinents. Malgré les efforts de recentrage de Michel Gairaud qui menait le débat, il ne fut jamais véritablement question de culture. Mais d’investissement et de gouvernance. Problèmes essentiels, qui minent l’avenir de la capitale culturelle, placée entre des élections présidentielle et législative, qui vont changer le paysage local en 2012, et les prochaines municipales, auxquelles Messieurs Pezet, Mennucci et Muselier pensent forcément très fort. Ce qui est logique. Faut-il miser sur 2013 ? Dans ce contexte la question posée par Le Ravi prenait un sens pervers : il est évident que les politiques parient sur 2013, mais plus en vue de 2014 que par amour de l’art. Même s’ils s’en défendent, même si des préoccupations culturelles les animent aussi. Le fait de confier la gouvernance à Bernard Latarjet, décision très courageuse de Jean-Claude Gaudin, devait en principe préserver Marseille Provence 2013 de ces dérives-là. Mais à Marseille la Culture est soudain devenue un enjeu politique. Ce qui lui donne une importance bienvenue, mais l’entraîne parfois fort loin de son objet : esthétique, intellectuel, éducatif, émancipateur. Concepts qui ne furent jamais évoqués.

De quoi fut-il question, donc ? D’éclaircir la position de la Ville, ce que Renaud Muselier fit avec conviction. Il expliqua que son rôle était de construire les équipements nécessaires à 2013, que la Ville investissait 500 millions d’euros, et promit que les grands bâtiments attendus seraient prêts, que les transports et l’accueil des visiteurs serait repensé, et que lui ne fournissait que le cadre. Que des ajustements avaient été nécessaires au sein de la Ville de Marseille pour lever les malentendus initiaux sur le «Guichet unique» qui semblait doubler celui de Marseille Provence 2013. Patrick Mennucci regretta qu’il ne siège pas comme représentant de la Ville au Conseil d’Administration de MP2013, et qu’on ne sache pas très bien qui décidait, de Madame Vlasto, de Monsieur Hermann, ou de lui-même. Il insista surtout sur l’échec de la métropolisation de Marseille «depuis 50 ans», qui ne pourra pas être compensé simplement par la capitale… rejoignant en ce sens Michel Pezet, qui soulignait combien Marseille peinait à devenir une ville culturelle d’envergure, comme le sont plus «naturellement» Aix ou Arles (Monsieur Hermann, à ce propos, rappela très justement que le CG investit à Arles, que toutes les collectivités aident l’activité culturelle d’Aix, alors que les Musées de Marseille, son Opéra, bref tous les équipements coûteux sont laissés aux seuls soins de la Ville, et que le CG et le CR n’y investissent pas un centime… oubliant au passage que l’État fait de même, confortant depuis toujours Marseille dans son personnage de cité oubliée, et marginale). Quelques difficultés d’envergure furent évoquées également. Le fait que les mécénats attendus (15 millions sur 80) sont pour l’heure quasiment absents : alors que les collectivités territoriales et locales tiennent toutes leurs engagements, les entreprises comptent-elles bénéficier des retombées économiques sans investir ? Le fait que le monde culturel de la région, mis à mal par les restrictions budgétaires de l’État, la stagnation des subventions des collectivités territoriales, la situation économique globale, attende trop de MP2013, qui représente comme le rappela Patrick Mennucci «moins d’un dixième des subventions annuelles courantes de la culture sur le territoire. Soit 80 millions sur presque 900 millions.» Enfin il fut question des inquiétudes d’un monde culturel qui


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POLITIQUE CULTURELLE

LE CAC À ISTRES | TOULON

Recentrages Après la mise à l’écart à mi-parcours de saison de son directeur Bernard Hennequin (pour cause, semble-t-il, d’éléments par trop sexués offerts au regard dans l’exposition Brunier-Mestas), le Centre d’Art Contemporain réoriente ses activités futures. Une direction unique sous la houlette administrative de Jocelyne Urban et artistique de Catherine Soria regroupe désormais les trois structures déjà présentes dans le Pôle Arts Visuels: le Centre d’Art Contemporain, l’Artothèque de Miramas et l’Adapp (1). Avec un budget semble-til identique (mais on n’a pas jugé bon de nous en communiquer le détail malgré notre demande claire de précisions !), il s’agit «…de mutualiser les moyens des trois structures en conservant les missions et l’identité de chacun. La programmation doit donner envie au public, avec un vrai travail autour des œuvres» indique Catherine Soria. D’où l’importance donnée à la médiation : une partie du personnel de l’Adapp bascule vers l’art contemporain pour «un travail plus pointu» tandis que l’association se consacrera aux actions vers les publics amateurs et le patrimoine. Expositions et aide à la production d’artistes locaux et plus réputés, en émergence, échanges nationaux, internationaux, mise en réseau avec

Weebles ( 2010) de Laurent Perbos, exposition Tout l'univers jusqu'au 13 novembre au CAC d'Istres © Claude Lorin

d’autres structures d’art contemporain, développement de partenariats pour «ne pas être seulement programmateur, mais articuler de la pensée avec une politique artistique», telles sont les ambitions de la nouvelle directrice. Un modèle de programmation annuelle est envisagé selon le fil rouge d’une thématique : mise en bouche en début d’année avec une exposition introductive, puis une monographique, un temps fort en milieu de calendrier, deux expos monographiques pour finir. Pour 2011, Les Réalités de la Fiction inaugurent cette nouvelle démarche avec dans l’ordre : Les 4 temps de la fiction, Bruno Peinado, Images Transversales (art et cinéma), Nicolas Pincemin, Lilian Bourgeat. Le regroupement du pôle arts visuels en un seul bâtiment sur le site du Centre Éducatif et Culturel d’Istres a été évoqué plusieurs fois, en particulier par Jean Hetsch, vice-président de Ouest-Provence, délégué aux affaires culturelles, lors du vernissage de Michel Stéfanini le 24 juin, ou dans le journal du SAN Ouest Provence de septembre. Depuis sa création en 1993 et divers changements de directions, le CAC d’Istres n’a pu prendre totalement sa place dans le paysage de l’art contemporain régional. L’opportunité est-elle offerte avec ce recentrage du Pôle Arts Visuels ? CLAUDE LORIN

(1) Association intercommunale pour le développement des arts plastiques et du patrimoine

Var des deux rives

Les Rencontres artistiques méditerranéennes font entendre la parole des artistes et acteurs culturels étrangers

Maroc, Italie, Espagne, Tunisie, Italie, Palestine, Albanie, Liban : les Rencontres organisées par le conseil général du Var ouvrent une fenêtre sur d’autres cultures, entrecroisant paroles, témoignages et créations. Trop rarement présent en France, Roger Assaf a offert deux temps forts : le premier comme auteur, comédien et metteur en scène du monologue La Ville aux miroirs qui fit regretter aux spectateurs la configuration peu propice du Crep des Lices… Un souhait entendu par le conseil général qui rappela ses objectifs : «éveiller la conscience des diffuseurs varois, leur faire découvrir d’autres propositions, bref, être le passeur entre artistes, publics et structures»… Le second comme directeur du théâtre Le Tournesol à Beyrouth et rédacteur d’une Encyclopédie universelle du théâtre en langue arabe dont il prépare le 4e volume. Dès les premières minutes, il donna le ton : «Vous continuez à faire du théâtre ? c’est du militantisme !» Un dialogue s’instaura autour des conditions de travail des artistes au Liban, de la transmission orale, de l’écriture contemporaine. De ses matériaux de création (la mémoire contemporaine et la réalité vécue), de ses interrogations («comment faire du théâtre qui rassemble dans une société totalement divisée ?»), de

l’absence de subventions («personne n’a de salaire au Tournesol, les seuls à avoir des rentrées d’argent travaillent à la télévision») et de ce qui fait leur force : rassembler autour du théâtre toutes les confessions. À la librairie d’images Contrebandes, la lecture d’Éric Valentin entraîna à Tanger, la ville du conteur Mohamed Mrabet avec lequel il travaille à la retranscription de ses «Dits». En quelques pages extraites du recueil de textes et de peintures Le Poisson conteur (Le Bec en l’Air éditions), il donna corps aux mots dits par Mrabet, inspiré par les expressions de son visage et le mouvement de ses mains. Peu après, les places de Toulon s’animèrent à la faveur d’artistes espagnols : le clown muet Léandre Ribera qui n’hésita pas à faire entrer dans son jeu les spectateurs hilares, la Cie Kamchàtka dont les silhouettes grisâtres intriguèrent autant que leurs valises rétro… Et Andrès Marin, l’une des grandes figures du flamenco contemporain, qui clôtura les festivités à l’Hôtel du Département. Espérons donc qu’en 2011 les Rencontres sortent enfin de leur confidentialité professionnelle, pour figurer en bonne place dans l’agenda culturel du public. MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

Les 4e Rencontres se sont déroulées du 1er au 6 oct dans 10 lieux à Toulon www.var.fr


HORS-LA-LOI

POLITIQUE CULTURELLE

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Chez nous

Le site de La Ligue du Sud, qui demande à ses adhérents 100 euros pour que Marseille ne devienne pas terre d’Islam, appelait à manifester contre un «film anti-français financé par l’État Français». Il faut aller faire un tour sur ces sites : celui du Chardon Varois glace le sang, dessine les Arabes comme des animaux sans visage, en appelle à la libération de la France par… Charles Martel ! Quant aux Petits échos d’Oran, il écrit : les gauches extrêmes, le Parti communiste, les socialistes à la Mennucci, la Ldh, la Licra, le Mrap, toutes celles qui vomissent la France, veulent faire un État soumis à la charia, repentant et humilié... Patrick Mennucci, venu promouvoir le film en partie

© A.G

Il est peu fréquent d’être accueilli au cinéma par des cordons de policiers et des cris haineux. C’est pourtant dans ces conditions que le dernier film de Rachid Bouchareb a été projeté à Marseille en avant-première au Pathé Madeleine, le 20 septembre

subventionné par la Région PACA, fut donc ce soirlà traité de collabo. Mot lourd de sens… les Algériens sont-ils des nazis ? Comment l’extrême droite française compte-t-elle faire oublier que les miliciens se recrutaient dans ses rangs ? Résultat des appels Internet : quelques manifestants empêchèrent le public de passer, bousculèrent les journalistes malgré les cordons de police, hurlèrent des horreurs à l’encontre d’un Harki venu voir le film «pour savoir», scandèrent des insultes à l’encontre des quelques contre-manifestants… dont un «rentre chez toi» insistant à la face d’un français musulman désemparé de tant de bêtise. Peu de mal, direz-vous ? Sans doute, si ces réac-

tions nauséabondes n’entraînaient avec elles celles d’une droite a priori respectable et qui, pour ménager un électorat d’anciens rapatriés et de nouveaux xénophobes, en appelle à la censure, confond mémoire et histoire, et continue de nier les faits les plus établis. Et le droit des Algériens, des Français musulmans, des autres aussi, d’aller regarder de près cette histoire, qui est la nôtre, et dont l’examen seul pourra enfin permettre de bâtir une maison commune. (Voir le point de vue de notre historien p 76). AGNÈS FRESCHEL

Fresque pour mémoire Si Indigènes mettait en scène les colonisés défendant en 43 une marâtre-patrie qui n’était pas la leur, Hors-la-loi, deuxième volet d’une trilogie annoncée, présente l’avènement d’une nation indépendante dans la douleur et la violence à travers le destin tragique d’une famille algérienne.

L’expropriation par les colons dans les années 30 et les massacres de Sétif en 45 constituent les traumatismes initiaux qui poussent trois frères à l’émigration et les placent chacun à leur façon hors d’une loi injuste. L’essentiel du film se déroule entre 1950 et 1960 dans le Paris des usines Renault, du couvre-feu pour les Algériens, de l’immense bidonville de Nanterre superbement photographié. Dans la continuité de la Résistance, le Paris des porteurs de valises, des faux papiers, du terrorisme, de sa répression. Le Paris d’un FLN clandestin aux collusions mafieuses s’imposant par le meurtre de ses concurrents politiques. Dans un registre différent, Les Sacrifiés de Touita proposait une même lecture sans concession de la période (Zib. 25). Reconstitution historique à grands moyens, revendiquant les influences du cinéma américain -Coppola et Scorcese ne sont pas loin, convoquant les ombres de Melville en citation feutrée : Bouchareb ne signe pas ici un chefd’œuvre cinématographique mais une fresque populaire, parfois pesante, servie avec talent par Djamel Debbouze, Roschdy Zem, Sami Bouajila. Elle image enfin, dans la mémoire collective, cette «sale guerre» qui appartient à l’histoire commune des deux pays. ÉLISE PADOVANI Hors-la-loi de Rachid Bouchareb


Abondance de mots… Plus de 50 propositions artistiques et contemporaines en 2 semaines, des partenaires et des lieux divers ; quelques faiblesses comme la lecture de Pierre Alféri pour France Culture et une surprise : un pompier à la Ionesco dans les escaliers de Montévidéo ! Pour le moins généreuse, l’édition 2010 d’Actoral s’est révélée «prolifique et hétérogène» comme le prophétisait Christophe Fiat dans son amicale contribution au dépliant constellé de petites planètes programmatiques ; vertige assuré et puisque Hubert Colas invite au partage de la métaphore («il y a des chemins qui unissent....»), il est permis de souffler un peu et de regarder en arrière, le nez au vent. Sollicité à plein, requis dans son attention la plus vigilante, le public n’a pas faibli depuis Zone Éducation Prioritaire de Sonia Chiambretto. De sa mise en espace avec l’Erac il n’y a pas grand chose à dire, sinon qu’on y trouve la «manière» heureuse de notre auteur (Actes Sud Papiers, voir Zib’27) : langage syncopé, disparition du sujet au profit de la parole chorale, présence du tragique quotidien ; mais aussi un durcissement systématique du sens : adolescents enfermés dans l’espace de leur origine, cour de récréation où résonnent les échos de la guerre... trop didactique ? L’impression est paradoxalement similaire avec les Sysiphes et Zombies traversant le Kaïros d’Oskar Gomez Mata : drôlerie audacieuse des situations, langage dramatique déconstruit, jeux avec l’ici et le maintenant, ralentissements intempestifs ne réussissent pas à convoquer sur la scène du Gymnase le dieu des instants propices (le Kaïros du titre) censé triompher de la voracité de Chronos ; au mieux quelques temps morts... petite victoire ! Plus excitantes, et au fond assez voisines dans leur interaction avec le public, les propositions de Marseille Objectif Danse : Batterie de David Wampach et While We Were Holding It Together d’Ivana Müller brisent délicieusement toute résistance intellectuelle. L’un propose une performance nerveuse de pile épileptique où désarticulation et tremblement, secousses musculaires sur chocs de grosse caisse, mousse à raser en guise de dentelles disent l’homme en volaille à vif ou plus sûrement en ange déplumé ! Radical ! L’autre organise un tableau «vivant» parfaitement immobile (nerfs et muscles dans leur volonté de fer) qui laisse circuler une parole atone

Spiro Scimone © Gianni Fiorito

non adressée («j’imagine que..»),comme une pensée à soi-même, qui déclenche chez celui qui regarde un afflux d’images éphémères, souvent drôles, qui ne se fixent pas et dansent dans la tête ; subtil et émouvant ; quand les premiers signes d’épuisement de la posture apparaissent sur scène, c’est fou comme le spectateur est content d’avoir mal partout ! Du discours mouvant, du risque de l’interprétation, et de l’engagement de celui qui écoute, il est aussi question avec la mise en lecture pétillante, dirigée par Galin Stoev, de Danse «Delhi» d’Ivan Viripaev, sept pièces brèves qui jouent avec humour d’une même situation dont tous les personnages explorent les possibles dramaturgiques ; virtuosité, rêverie et tendresse portées par des lecteurs assis qui font valser les pupitres. Enfin, plus rassurants dans la simplicité de leur forme, les 2 pièces et

le film de Spiro Scimone émeuvent par leur profonde humanité, leur attention aux frémissements des êtres fragiles (Nunzio incarné par le déchirant Francesco Sframeli) ou la mise en œuvre d’une langue qui fait mouche entre surréalité et remontée d’une tradition aigre-douce de Beckett à Raymond Devos (Pali avec ses clochards sublimes perchés au dessus du monde fait en permanence rire et pleurer). Abondance de mots peut donc ne pas nuire tout à fait ! MARIE-JO DHÔ

Actoral 2010 s’est déroulé dans divers lieux de Marseille entre le 25 sept et le 13 oct

La fin de Montevideo ? La commission de sécurité a permis à Hubert Colas d’aller jusqu’au bout d’ActOral, mais sous surveillance filtrée… Le soir de l’ouverture, les spectateurs étaient comptés, retenus à l’entrée. Plus grave : Montévidéo ferme dès le 15 oct, pour cause de sécurité. Il faut faire des travaux, il y en a pour 300 000 euros. Montévidéo ne les a pas. Désespère. Réunit quelques sous, implore des rallonges de subventions. Est-ce qu’un des lieux les plus inventifs et vivants de Marseille, qui abrite Actoral, mais aussi le GRIM et la cie Diphtong, va devoir fermer ses portes parce qu’il n’a jamais eu l’argent nécessaire pour se mettre aux normes (logiques !) de sécurité ? Après la belle réussite d’ActOral, chacun attend impatiemment la réouverture… nous y reviendrons, en vous rendant compte des derniers spectacles (ceux qui ont lieu pendant qu’on imprime…), en vous annonçant que le Livre de Jan, d’Hubert Colas, passe bientôt au Gymnase… aux murs décidément accueillants ! A.F.



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SAISONS

Les saisons avignonnaises débutent traditionnellement un peu plus tard… C’est qu’il faut du temps pour se remettre du Festival !

AVIGNON

Avignon :

à fond les saisons ! lectures jouées de Contes à croquer une fois par mois, trois débats Croq’philo, des rencontres d’improvisation des Kamikaz et des résidences de compagnies de la région. La Cie permanente avignonnaise On est pas là pour se faire engueuler présentera du 2 au 5/2 une étape performative de sa nouvelle création Tout au bord, «un mariage entre technologie et ancrage terrestre.» Le théâtre du Kronope, en résidence permanente, créera Le Songe d’une nuit d’été le 12/4 pour le Festival Festo Pitcho. Anaïs Richetta et Loïc Beauché relèveront le challenge d’interpréter 27 personnages. Joëlle Richetta montera une Carmen inspirée de Mérimée, sans masques (la marque de fabrique du Kronope) mais moult chevelures. Rendez-vous le 31/3 et 1/4 pour la découvrir.

Les Vauclusiens sont à l’honneur cette fin d’année sur la scène belge du Théâtre des Doms. Excessifs dans C’est l’enfer (!) les 15 et 16/10 (voir page 19) et généreux avec Little Wendy and my family group au profit d’Amnesty International le 22/10. Le circassien Kenzo Tokuoka revient en solo le 25/11 dans DS You can never be absolutely still, une étape de travail de son exploration du langage monocycliste. Les 26 et 27/11, en collaboration avec l’Ajmi et le cinéma Utopia, sous l’égide de Sud Culture aura lieu le Forum des Contre-Cultures, une alternative de réflexion au Forum d’Avignon lancé par le Ministère de la Culture depuis 2008. Conférences, ateliers, film, spectacle proposeront d’autres pistes de réflexion sur la dimension économique de la culture. Et pour finir 2010, soirée Double Jazz entre les Doms et l’Ajmi le 17/12, avec le Trio Grande / Quatre.

Carnet de voyage en forêt enchantée © Delphine Michelangeli

Au Théâtre du Chêne Noir, l’infatigable Gérard Gélas crée deux spectacles cette saison : Mais n’te promène donc pas toute nue de Georges Feydeau du 18/11 au 5/12 et Bibi ou les mémoires d’un singe savant du 8 au 12/4. Dans ce dernier, Cyril Lecomte adapte et interprète le texte de Henri-Frédéric Blanc, auteur marseillais anarchiste à la plume lyrique et engagée. Entre temps, deux rendezvous mensuels à suivre. Deux concerts et pas des moindres : littéraire avec Stéphan Eicher et Philippe Djian le 15/10, argentin avec le Cuarteto Cedron les 4 et 5/11. Des Conférences sous le Chêne avec Abd Al Malik le 11/11 (voir p.19), Les derniers jours de Stefan Zweig par Laurent Seksik le 20/1, qui adaptera le roman pour une création signée Gélas d’ici deux ans, et l’Esprit de l’athéïsme par André Comte-Sponville le 3/2. Deux spectacles jeune public : Éby et le mangeur de contes de Laurent Montel mis en scène par Sarah Gabrielle le 8/12 et Les Précieuses Ridicules le 10/2. Le moliérisé Jean-Paul Farré revient avec Les

Douze pianos d’Hercule et son univers poético-burlesque du 9 au 10/12. Brigitte Mounier nous étonnera dans Road Movie à bicyclette les 27 et 28/1. Le Théâtre des Capucins et Marc Olinger dévoileront l’intimité de deux hommes de pouvoir avec la reprise du best seller théâtral Le Souper, de J.-C. Brisville, du 10 au 12/3.

À la Fabrik’théâtre, interdite de concerts amplifiés (une opportunité en moins pour assister à des concerts proches du centre ville), on continue de s’occuper du public jeune (mais pas uniquement) et d’accueillir la scène émergente. Une Fabrik’ qui se veut «école du spectateur», entre ateliers théâtre hebdomadaires,

Hormis les Lundis au Soleil à suivre désormais mensuellement (1re rencontre le 18/10 avec Claudio Stellato), le CDC des Hivernales a fixé son rendez-vous d’hiver du 24/2 au 5/3. Le Festival de danse aura pour thème les Amériques et accueillera Trisha Brown Dance Company, Jonah Bokaer (New York), Lia Rodriguez (Rio de Janeiro), Hafiz Dhaou, Johanne Saunier, Radhouane El Meddeb, Cédric Andrieux, Josette Baïz et la cie Grenade. Un temps fort essentiel à la danse en Vaucluse… de même que toute l’activité annuelle du CDC. Alain Timar livrera sa création annuelle au Théâtre des Halles du 25 au 29 mai : Les Quatuors heureux d’Olivier Coyette, une fable polyphonique en 20 tableaux pour 4 acteurs et 30 personnages. Avant cela, de nombreux rendez-vous théâtraux et des auteurs-interprètes talentueux à (re)découvrir : la Cie In Situ les 14 et 15/10 dans Occident, (voir p.19) et du 4 au 7/11 Howard Barker avec La Douxième bataille d’Isonzo (voir p.19) ; bouffée d’oxygène avec le marseillais Christian Mazzuchini qui sera les 9 et


10/12 le Mythomane de Serge Valletti ; David Lescot, Molière de la Révélation théâtrale 2009, racontera ses souvenirs d’enfance communiste du 19 au 21/1 dans La Commission centrale de l’enfance, en partenariat avec la Scène Nationale de Cavaillon ; du 4 au 6/1, place au poème dramatique Dans le jardin de mon père de et par Claude Guerre. Pendant le Festival Festo Pitcho, le Jeune Public sera gâté, l’auteur s’appelle Wajdi Mouawad, avec Pacamambo, les 12 et 13/4, sous la houlette de Marie Provence. Pour finir côté théâtre, le plateau des Halles accueillera les 17 et 18/6 le travail d’écriture que François Cervantes, auteur actuellement en résidence au Conservatoire d’Avignon, mène avec les élèves du département théâtre. L’année sera également musicale avec un Récital de Jacques Bertin le 16/12 suivi par Et toi tu marcheras dans le soleil (autour d’Arthur et Isabelle Rimbaud) le 17 par Isabelle Bloch-Delahaie. Jean-Yves Picq ponctuera la saison avec 3 lectures mises en musique : le 14 /1 Voïces ou le Retour d’Ulysse avec Alain Bert, le 18/2 Les Effrayants avec le batteur Guigou Chenevier et le 10/3 Franz avec Fred Giuliani au sampler. Le 7 mai, un concert inédit l’Amour, la prière, associant les pages sacrées de Liszt et Messiaen. En dehors des spectacles qu’ils recommandent à leurs adhérents à Cavaillon ou ailleurs, les ATP d’Avignon ont programmé 8 spectacles à découvrir à la Salle Benoit XII, dont 4 créations : Extinction de Thomas Bernhard par le Théâtre de la Madeleine (le 9/11), Encore une heure si courte par le Théâtre du Mouvement (le 15/3) absolument recommandé, Les Yeux d’Anna de Luc Tartar par la cie Théâtre Temps (le 30/3) et Le Horla de Maupassant par la Cie des Dramaticules (le 14/4). Pas moins de 100 représentations prévues à l’Auditorium de Vaucluse (au Thor). Pour Michel Fuillet, vice-président du conseil général de Vaucluse, «l’Auditorium prouve qu’on peut avoir une salle culturelle en dehors des grandes agglomérations». La programmation est populaire (facile ?) mais réserve aussi quelques surprises de qualité : 13 spectacles d’hu-

mour, dont Christophe Alévêque le 6/11 et le nouveau spectacle du Quatuor le 18/3. 20 rendez-vous musicaux avec Patrick Fiori et Dave, mais aussi le Quatuor Calienté le 13/11, The Glenn Miller Memorial Orchestra le 15/1, Aïda (pour les collégiens) le 3/5. Le cycle théâtre accueillera Annie Cordy le 21/11 et Gérard Jugnot le 16/3, Guy Bedos et Macha Meril dans Le Voyage de Victor le 5/2, Alice Belaïdi le 12/4 qui terminera la tournée de Confidences à Allah et Jean Piat le 28/5 dans un texte signé par son épouse Françoise Dorin. Parmi les 6 propositions chorégraphiques, la Belle au Bois dormant par le Ballet de l’opéra de Kiev le 10/2 et Cendrillon par le Ballet de l’Opéra d’Avignon le 27/3. Car les 10 spectacles Jeune Public prouvent l’attention particulière portée aux jeunes spectateurs (22 000 places déjà réservées) qui pourront vois la Flûte Enchantée, Peter Pan, Cendrillon. L’Eveil Artistique des Jeunes Publics, toujours nomade, a quant à lui programmé 3 spectacles pour ce dernier trimestre. Carnet de Voyage en forêt enchantée du 23 au 26 oct, une féérie déambulatoire au Théâtre Golovine (par la cie avignonnaise les Eponymes). La chapelle des Pénitents Blancs accueillera Boby Boy, inspiré par l’univers musical de Boby Lapointe, les 5 et 6/12 et Voyage d’un courant d’air les 8 et 9/12. DELPHINE MICHELANGELI

Théâtre des Doms - 04 90 14 07 99 www.lesdoms.be Théâtre du Chêne Noir 04 90 82 40 57 - www.chenenoir.fr La Fabrik’théâtre - 04 90 86 47 81 www.fabriktheatre.fr CDC les Hivernales - 04 90 82 33 12 www.hivernales-avignon.com Théâtres des Halles - 04 90 85 52 57 – www.theatredeshalles.com ATP d’Avignon - Bureau du Festival 04 90 27 66 50 Auditorium du Thor - 04 90 33 97 32 - www.auditoriumdevaucluse.com Éveil Artistique - 04 90 85 59 55 www.festivaltheatrenfants.com

Précision et erratum Dans l’article sur le OFF d’Avignon, paru dans Zibeline 33, les chiffres de location, estimatifs, étaient communiqués par l’association AF&C, et n’engageaient pas les théâtres cités. Contrairement à ce que nous avons indiqué suite aux informations communiquées par l’AF&C, le Balcon travaille uniquement en co-réalisation et n’effectue plus de contrat de location depuis deux ans.


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THÉÂTRE

CRIÉE | VITEZ | JEU DE PAUME | POURRIÈRES | PRÉAVIS

Cascade glacée Le roman écrit par Vesaas en 1963, mais traduit en Français 30 ans après, a ses fans absolus. Ceux qui l’ont découvert ados, et se sont perdus dans ses ambiguïtés irrésolues, ses délicatesses qui tournent autour du dit, ses secrets qui ne se dévoilent jamais, même entre les lignes… L’adaptation dramatique de Joël Jouanneau a su préserver à la fois les non-dits, magnifier la dureté colorée des ambiances glacées, la froideur affolante des étreintes, et établir une progression dramatique faite de cercleS concentriques qui conduisent mine de rien vers le point névralgique de l’histoire, fui aussitôt qu’atteint… La mise en scène de Stéphanie Loïk repose également sur des principes appuyés : les petites filles Siss et Unn sont évoquées par deux acrobates gémellaires, danseuses de corde verticale, suspendues comme

colorés du mortel Palais de Glace. Cela reste statique pourtant, une fois ces éléments intelligemment posés. Peutêtre aurait-il fallu, tandis que l’intrigue progresse, concevoir une évolution des principes scéniques ? A.F.

Palais de Glace a été créé le 8 oct Jusqu’au 16 oct La Criée, Marseille 7e 04 91 54 70 54 www.theatre-lacriee.com

Atelier de critique © Agnès Mellon

l’enfance, troublantes dans leur proximité sensuelle. Siss adulte est une jeune voix qui crie et lève droit les bras au ciel, parcourant en rectilignes le pourtour de la scène, répondant à

une femme assise au centre, la tante qui sait, ou ne sait pas, le mot de l’histoire. C’est beau, carré et glacé, simple comme les ombres d’arbres nus projetés au sol, les prismes

le 16 oct de 10h à 13h avec Agnès Freschel Atelier ouvert à tous les spectateurs ayant vu Palais de glace Inscription indispensable 04 96 17 80 30

En toute complicité

Ce serait trop long de t’expliquer... © Philippe Houssin

Trois compères, compagnons des grands chemins du théâtre, désiraient monter une pièce de Hanokh Levin, dramaturge israélien. Une pièce drôle et violente qui met face à face Hoyamer, vieil homme qui veut s’offrir une putain pour son anniversaire et la prostituée Kokotska qui ne brade pas ses services.

Le fils, Hoyamal, enrage de voir son maigre héritage s’envoler. Ça se complique quand le père n’arrive pas à bander et que Kokotska ne veut pas rembourser. Le fils, alors, demande à remplacer le père, mais elle refuse. C’est sordide. Mais voilà que les 3 comédiens se voient refuser l’autorisation de monter le texte. N’écoutant que leur envie de jouer, ils décident de faire 3 scènes «à la muette» et de proposer un montage de textes contemporains autour. Cela donne un spectacle original, plein d’humour où le quatrième, le troisième et tous les murs autour du jeu explosent, où les comédiens sont autant des personnes que des personnages. Le jeu et la réalité se confondent, et le théâtre devient une vraie rencontre avec ces baroudeurs de la scène. Ils le disent d’ailleurs : «Pour un acteur, jouer c’est vivre.» Les scènes drôles s’enchaînent, on entend de vrais textes (de Pommerat à Salvayre ou Tarkos), les

spectateurs attablés entrent en jeu… L’ambiance est bon enfant, les comédiens servent à boire et proposent des chips, comme à la maison. Ambiance détendue garantie ! CHRIS BOURGUE

La Putain de l’Ohio n’a pas été joué - Ce serait trop long à t’expliquer... le mieux c’est que tu viennes a été conçu par Haïm Menahem, avec Philippe Séjourné et Christian Mazzuchini et joué à La Minoterie du 5 au 9 oct Il sera joué au Théâtre Vitez, Aix, le 20 oct 04 42 59 94 37 http://theatre-vitez.com

L’attirance des contraires L’argument est manichéen en diable. Tout les oppose culturellement : elle lit Schopenhauer, il lit Mickey. Vont-il pouvoir s’aimer, construire quelque chose ensemble ?... Les classes socio-culturelles instaureraient-elles des interdits encore plus forts que ceux des Capulet et des Montaigu ? Ce n’est guère original, soit. Pourtant, l’adaptation du roman à succès de Katarina Mazetti, Le mec de la tombe d’à côté, par Alain Ganas nous entraîne dans un moment fort réjouissant. Le texte est plein d’humour, bien écrit, la mise en scène de Panchika Velez intelligente et efficace. Le décor sobre et minimal laisse une belle liberté ; le banc de cimetière se transforme en lit ; un fauteuil situé d’un côté, une table et deux chaises de l’autre permettent d’identifier les maisons des protagonistes. Il y a une

tension de tango dans cette histoire, ils se détestent avant de se connaître, se cherchent, s’évitent, se trouvent, se séparent, essaient de renouer un lien… La rencontre vouerait toute ébauche romanesque au désastre, puisqu’elle se déroule dans un cimetière. Elle vient sur la tombe de son mari, qui était biologiste, cultivé, fin, écolo, responsable ; lui, il rend visite à la tombe de sa mère. La première tombe est nue, la seconde surchargée de fleurs, de citations. Elle le trouve rustre, il la trouve fade, une «crevette» «beigeasse»… On rit beaucoup en voyant cette pièce, les acteurs, Sophie Broustal et Marc Fayet, sont drôles, mais plus encore rendent leurs personnages crédibles et touchants. Une belle réussite ! MARYVONNE COLOMBANI

© Cosimo Mirco Magliocca

Le mec de la tombe d’à côté a été donné au Jeu de Paume, Aix, du 5 au 10 oct


Augustin d’Hippone né et mort dans un territoire qui se situe en Algérie actuelle. La première partie, l’enfance et la jeunesse, énumération des tentations, des péchés, pèse, malgré les qualités du lecteur, mais les deuxième et troisième parties ont plus d’allant : verve du récit d’anecdotes, comme celle d’Alipus et les gladiateurs, ou émotion poignante de l’évocation de la mort de sa mère, réflexions sur le temps, la mémoire «qui garde l’objet perdu pour les yeux», et qui «retient l’oubli»… la recherche d’un sens, sous l’égide d’un Dieu qui «étend le ciel comme une peau». Chaque livre se referme sur un chant composé par Kay Fender pour la représentation comme une enluminure musicale. La mise en scène de Marik Frigère permet d’en)tendre simplement un texte auquel il est impossible d’adhérer, en particulier quant à sa vision de la femme… mais dont le cheminement qui s’offre à nous permet d’étreindre une pensée essentielle à la compréhension de notre fondement culturel.

Il faut être doté d’un sacré culot pour mettre en scène une œuvre aussi ardue que les Mémoires de Saint Augustin ! C’est que Francescu Raffaelli a grandi avec, à son chevet, la belle formule «avance sur ta route parce qu’elle n’existe que parce que tu marches»… Il se livre ici au périlleux exercice de la lecture d’une œuvre souvent austère. Voix bien placée, surmontant la difficulté liée à l’acoustique d’une église qui a tendance à brouiller les sons, par une diction ample et posée même lorsqu’elle donne l’impression de la hâte. Une belle présence jusqu’au cœur des silences, dans une djellaba bleu roi, rappel des origines de Saint Augustin,

M.C.

© X-D.R

Les confessions ont été données en l’église de Pourrières, les 18 et 19 septembre, à voir aussi à l’Abbaye Saint-Victor le 17 octobre

Le sens du désordre Pour sa quatrième édition Préavis de désordre urbain a connu un beau succès, et quelques couacs. La manifestation interventionniste a des progrès politiques à faire, et braquer un bureau de poste sans prévenir, même déguisé en Père noël et avec une mitraillette très en plastique, ou bloquer la circulation des trams en agitant au nez des chauffeurs une muleta au centre d’un carrefour très emprunté, n’est pas très malin : s’il faut transgresser l’ordre urbain, ce n’est pas en violentant le quotidien des habitants les plus fragiles, mais en étonnant leur regard. Mais ne doutons pas qu’ils y parviendront ; à la Friche le premier jour, puis accueillis en urgence par la mairie du 1er secteur qui a pris le soin de baliser le terrain, ou par les Bernardines, qui savent y faire dans la gestion du public, Préavis de désordre urbain a donné à voir des talents : ceux, poétiques, qui font sécher des poissons sur un fil, d’autres qui font de la plongée dans une poubelle, qui mesurent le sol et la

longueurs des pas, qui vous entrainent dans des flux de foule imaginaires. Dans un salon de coiffure pour cheveux africains, Eva Doumbia nous parle de la condition de métis à travers la mise en scène de sa coiffure naturelle, non défrisée, et de la difficulté d’assumer, enfant, sa tête crépue, pour le rejet qu’elle suscitait. À cette performance/transformation en blonde platine ou sculptée/naturelle, inenvisageable hors du salon de coiffure, répondait la petite forme étrange conçue par Carole Vanni et Alain Fourneau. Cérémonieuse, faite de gestes codés, d’absence de repères spatiaux réels, d’espaces imaginaires dessinés dans l’air, la danse à peine esquissée exigeait qu’on s’arrête au détail, qu’on s’y recueille, isolés des bruits de la ville. Un ordre désurbain, en contrepoint… A.F.

Préavis de désordre urbain s’est tenu dans divers lieux de Marseille du 18 au 25 sept


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THÉÂTRE

AU PROGRAMME

Acteur/auteur Énergie Tous Quand Agnès Regolo met en scène Hanokh Levin en scène et son ironique Que d’espoir !, ça déménage ! Il faut Après son Je ne sais quoi (voir p. 33), le Lenche dire qu’elle s’adjoint les services musicaux du Collectif Inouï, et fonce dans ce théâtre de l’urgence qui manipule l’humour noir pour mieux mettre en évidence les ressort de la domination…

enchaîne avec une création de Renaud Marie Leblanc : le metteur en scène, dont beaucoup ont apprécié la mise en scène de Phèdre à la Criée, est généralement attiré par les écritures contemporaines de Lars Nøren ou Noëlle Renaude… et est aussi comédien. Avant de créer en décembre au Merlan avec sa cie Didascalies and co un texte sur le sexe de Christophe Pellet, il se met dans la peau de l’auteur en jouant un de ces textes, autobiographique, où le personnage Thomas Blaguernon, est un auteur dramatique qui doit faire une conférence sur le théâtre. Conférence qu’on ne verra pas vraiment, mais qui donnera pourtant à entendre un discours sur l’esprit français, l’hypocrisie bourgeoise des institutions culturelles, tout en dessinant le portrait d’un écrivain révolté, écorché vif, souffrant de sa vie et du monde.

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Que d’espoir Du 17 au 20 nov La Minoterie, Marseille 2e 04 91 90 07 94 www.minoterie.org

© Delphine Michelangeli

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La pièce a reçu en 2009 le Grand Prix de littérature dramatique. La Conférence Du 26 oct au 6 nov Rencontre avec Christophe Pellet le 4 nov à l’issue de la représentation Théâtre de Lenche, Marseille 2e 04 91 91 52 22 www.theatredelenche.info Renaud Marie Leblanc © Agnes Mellon

Désopilant Le monde semble n’avoir plus aucun sens et c’est tant mieux : moins ça va et plus la cie 4 litres 12, poursuivant sa recherche sur le comportement humain, opte pour l’humour corrosif et irrévérencieux option absurde. Détraqué, conçu et mis en scène par Michel Massé, s’interroge sur les causes et les origines de la peur que la vie inspire à l’homme, à l’aide d’un savant hirsute et un peu fêlé et trois cobayes pas si soumis que ça…

© Fabrice Duhamel

La Petite est assise bien droit sur sa chaise ; elle lisse ses jupes et parle, parle ; seule dans un lieu où ils viendront tous, convoqués doucement par les mots murmurés. Émouvante Edith Mérieau, qui porte loin le monologue écrit pour elle (et ce n’est pas une formule) par Suzanne Joubert, mis en scène par Xavier Marchand. Il y a aussi des sacs plastiques, la subtilité aiguisée du tragique de Supermarché et encore André, Mariethé, Simon... Tous les autres que le théâtre nous fait rencontrer !

Détraqué Le 15 oct à 21h Théâtre Toursky, Marseille 3e 0 820 300 033 www.toursky.org

Tous tant qu’ils sont du 15 au 20 oct Les Bernardines, Marseille 1er 04 91 24 30 40 www.theatre-bernardines.org

Fantaisie Rufus joue les fantaisistes en reprenant, seul sur Indépendance Après les Pièces de mémoires, projections et scène, des textes de quelques-uns des meilleurs

Rufus joue les fantaisistes Le 5 nov à 21h Théâtre Toursky, Marseille 3e 0 820 300 033 www.toursky.org

Rufus © BM Palazon

Alger 62 Du 4 au 7 nov La Minoterie, Marseille 2e 04 91 90 07 94 www.minoterie.org

d’entre eux : Fernand Reynaud, Zouc, Coluche, Raymond Devos, Jacques Villeret, Alex Metayer, Bernard Haller, Muriel Robin… Sans aucune parodie il restitue l’humour de chacun, s’appropriant leurs univers en y insufflant sa poésie, ses délires, sa cocasserie.

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rencontres animées par Approches culture(s) et territoires le 22 oct (voir p 76), la Minoterie accueille Alger 1962, une pièce de Mohamed Kacimi sur l’Indépendance vue de Marseille. Mise en scène par Valérie Grail, la pièce a ému, fait sourire et réfléchir lors du dernier Festival d’Avignon…



THÉÂTRE

AU PROGRAMME

Dékanté

GoldonHirsh Véridique Voilà que notre Argante national emprunte les traits Dans le cadre de la saison russe en Pays d’Aix, la cie d’Ottavio, son cousin italien… Robert Hirsch incarne le vieux bourgeois pris d’un retour de verdeur, qui a épousé une coureuse de dot et déshérité son fils, et sera sauvé par sa servante dévouée… Bien sûr Goldoni a abondamment pillé Molière, qui ne se gênait pas non plus pour emprunter aux canevas italiens. Mais les élans de sa servante sont plus ambigus, la verdeur de son vieillard assez défendable, les prétentions de l’épouse pas si délirantes, et le fils n’est pas très clair… Clémentine Célarié et Claire Nadeau entourent le patriarche de leurs dévotions plus ou moins sincères. En costumes bien sûr, et décors pas si damassés. © X-D.R

Dessin de lumière, spontanéité du dialogue Le 26 oct à 20h30 Théâtre Vitez, Aix 04 42 59 94 37 http://theatre-vitez.com

La Serva amorosa Du 9 au 20 nov Le Gymnase, Marseille 1er 0 820 000 422 www.lestheatres.net

Ils viennent de Nancy mais ce n’est pas l’origine qu’ils interrogent. Odile et Michel Massé, l’une à l’écriture et au jeu, l’autre à la mise en scène, ont conçu un délire poético métaphysique essentiellement burlesque. C’est-à-dire reposant sur des interrogations primaires (dans le genre qui sommes-nous et suis-je moi, où tout cela mène-t-il et faut-il se demander pourquoi), celles qui ne peuvent conduire qu’à s’esclaffer, parce que le cœur fondamental est forcément dérisoire… Bon, partout où elles passent, Odile Massé, sa comparse et leurs gorilles mous déclenchent le rire. Philosophique bien sûr, mais surtout teinté de cette Folie sans laquelle on n’interroge rien.

Désillusions Russie toujours, avec Endroit sec et sans eau, pièce autobiographique d’Olga Pogodina mise en scène par Tatiana Frolova du théâtre KnAM. Sur le thème de l’illusion, ou des désillusions d’un peuple russe fatigué, le texte se penche sur les relations entre un frère incarcéré et sa sœur libre qui lui envoie ce dont il a besoin, les croyances en une Russie omnipotente, le régime marxiste et la démocratie… Spectacle en russe surtitré.

Boulevard Bernard Murat met en scène Faisons un rêve de Sacha Guitry, avec Pierre Arditi dans le rôle du séducteur plein d’esprit, cabot et charmeur… Une pièce drôle, spirituelle et inventive de Guitry, dont les trois caractères de base que sont le mari, la femme et l’amant illustrent à merveille les jeux de la séduction, de l’amour et du mensonge !

Endroit sec et sans eau Le 5 nov à 20h30 Théâtre Vitez, Aix 04 42 59 94 37 http://theatre-vitez.com

Faisons un rêve Du 21 au 23 oct à 21h Théâtre Toursky, Marseille 3e 0 820 300 033 www.toursky.org le 15 oct à 20h30 Théâtre de l’Olivier, Istres 04 42 56 48 48 www.scenesetcines.fr

Folisophie Du 16 au 20 nov Le Gyptis, Marseille 3e 04 91 11 00 91 www.theatregyptis.com

Rock Mais oui, le rock est assez vieux pour qu’on écrive son histoire, qu’on s’y penche sérieusement, qu’on fasse même de son évolution un spectacle. L’Atelier du possible tourne My GGGeneration avec un succès qui ne se dément pas. La recette : une véritable analyse musicologique et sociologique, une trame dramatique, et… d’excellents musiciens emmenés par Jean-Luc di Fraya, autour d’un répertoire qui les décalent juste ce qu’il faut : de Bill Haley au rock progressif, ça vous ramènera forcément vers les sons de votre enfance…

Vivants Coprogrammé avec les ATP d’Aix, Ensorcelés par la mort est lui aussi un spectacle tiré d’entretiens menés par Svetlana Alexievitch. L’écrivaine et journaliste biélorusse a recueilli les paroles de trois anciens membres du parti communiste d’URSS ayant tenté de se suicider parce qu’ils croyaient à l’avènement d’un monde meilleur, au changement radical, à l’utopie… en vain.

Laboratoire Reprenant à son compte l’analogie fructueuse des

< © Bruno Vion - flag'

années 70, qui comparait la création artistique à la recherche scientifique, les Bancs publics défendent des formes expérimentales d’art spectaculaire (ou non) : des projets croisés, étapes de travail, écritures participatives qui trouvent leur «festival» tous les ans lors des Rencontres à l’échelle. Au programme de cette 5e édition, des auteurs contemporains algériens particulièrement intenses : Thierry Niang et Julie Kretshmar, Hamid Ben Mahi (le 10 nov à l’Olivier d’Istres), Geoffrey Coppini, Kheireddine Lardjam se sont emparés des textes de Mustafa Benfodil, Hamid Skif , Mourad Djebel et Ryad Girod pour proposer des formes inattendues, théâtrales et/ou dansées, projetées en diatribe… À coté de ces écritures algériennes des projets croisés (Emile Lesbros avec un violoniste algérien le 13 nov) et du cinéma documentaire de réalisatrices qui parlent d’amnisties impossibles, en Syrie et en Algérie. Rencontres à l’échelle Du 10 au 27 nov Bancs Publics, Marseille 3e 04 91 64 60 00 http://bancspublics.free.fr www.lesrencontresalechelle.com

Ensorcelés par la mort Les 9 et 10 nov Théâtre Vitez, Aix 04 42 59 94 37 http://theatre-vitez.com © MC Soma

My GGGeneration Les 21 et 22 oct Le Gyptis, Marseille 3e 04 91 11 00 91 www.theatregyptis.com

moscovite Perspective, dans une mise en scène d’Aliona Galkina, monte Dessin de lumière, spontanéité du dialogue d’après La guerre n’a pas un visage de femme de Svetlana Alexievitch, ouvrage basé sur des témoignages de jeunes femmes engagées volontaires dans l’Armée Rouge pendant la seconde guerre mondiale. Spectacle en russe et français.

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THÉÂTRE 17

Nostalgique Authentique Une nuit d’été, dans les collines du Piémont, des jeunes Avec Joël Pommerat, le public est toujours sur le fil,

Loin derrière les collines Les 4 et 5 nov La Passerelle, Gap 04 92 52 52 52 www.theatre-la-passerelle.eu

bluffé par sa maîtrise stupéfiante de la lumière, de la dramaturgie et la puissance évocatrice de son théâtre. Sa dernière création, Cercles/Fictions n’échappe pas à cette règle : il assemble par magie les morceaux épars d’un puzzle (des fragments de vie), entrecroise les récits, convoque ses propres souvenirs en une succession de tableaux tantôt drôles, parfois rudes. On y entre sur la pointe des pieds en voyeur d’une histoire qui nous concerne aussi. Cercles/Fictions Les 15 et 16 oct CNCDC Châteauvallon, Ollioules 04 94 22 02 02 www.chateauvallon.com

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© Olivier Gendrin

Devant un rideau de fer, c’est ainsi que Marguerite Duras souhaitait que l’on représente L’Amante anglaise. La Cie Cavalcade, elle, a choisi de se concentrer exclusivement sur le moment de l’interrogatoire de Claire Lannes accusée d’avoir tué sa cousine Marie-Thérèse Bousquet, sourde et muette. Une scène stupéfiante qui signe le second mouvement du texte où la présumée coupable est frustrée, perdue et suppliante. Pourquoi l’avez-vous tuée ? répète inlassablement l’interrogateur lors «de ce jour très long»… Avec une économie de moyens, Sylvia Bruyant fait entendre l’écriture Durassienne.

femmes reviennent du bal et jouent à se faire peur, des hommes se promènent en conversant… Rêves et réalité, à la croisée de l’intime et de l’Histoire, se mêlent dans ce texte d’Eugène Durif écrit en écho à l’univers de l’écrivain turinois Cesare Pavese dont il apprécie particulièrement «l’écriture à hauteur d’homme». Ce monde, habité par la nostalgie et le lyrisme, a séduit le metteur en scène italien Pietra Selva qui s’en empare à son tour dans une distribution franco-italienne.

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Huis clos

L’Amante anglaise Le 16 oct Théâtre Durance, Château-Arnoux 04 92 64 27 34 www.theatredurance.com

Désespérés Bastian est vissé à sa webcam et Laetitia se filme en

Le chagrin des Ogres Le 16 nov Théâtre Durance, Château-Arnoux 04 92 64 27 34 www.theatredurance.com

Écolo Taxe carbone, bonus, parachutes dorés, crises économiques et menaces environnementales ? Cela ressemble à une journée banale d’un grand patron de l’industrie pétrolière… Mais qu’adviendra-t-il lorsqu’une catastrophe écologique en Alaska remettra en cause le système mondial ? Prenant prétexte de l’actualité, la Cie Artefact signe une fable écologique et explore une nouvelle hybridation des langages (texte, jeu, danse, musique, images et sonorisation) pour nous transporter dans un Alaska virginal dont l’homme serait le grand absent. Alaska Forever Le 9 nov Théâtre Durance, Château-Arnoux 04 92 64 27 34 www.theatredurance.com Le 20 nov Le Carré, Sainte-Maxime 04 94 56 77 77 www.carreleongaumont.com

© Elisa Zaniro

En miroir D’un côté les photographies de Michel Graniou, de l’autre les mots de Gilles Granouillet écrits à partir de son interprétation personnelle. La pièce Un endroit où aller se situe dans cet aller-retour aléatoire entre le travail d’un artiste vu par un autre artiste, portrait sensible et cocasse d’un jeune couple qui nous invite à sa table et déroule le fil de leur rencontre, de leur histoire. Portrait en creux d’une époque révolue dont le photographe a conservé les traces en traquant en noir et blanc quelques objets. La Passerelle en donne judicieusement un aperçu dans sa galerie avec l’exposition Les âges de la mémoire (jusqu’au 23 nov). Un endroit où aller Les 9 et 10 nov La Passerelle, Gap 04 92 52 52 52 www.theatre-la-passerelle.eu

© Elisabeth Carecchio

permanence. Ces deux adolescents enfermés dans leur bulle vont bientôt cesser d’être des enfants… en se rapprochant inéluctablement de la mort. Dépassant les clichés sur la crise adolescente et les méfaits des jeux vidéo, Fabrice Murgia écrit une pièce juste et met en scène des acteurs à l’interprétation troublante. Il joue avec les codes du théâtre et de la représentation pour trouver un bel équilibre entre monde réel et fiction et évoque, sans jugement ni discours moralisateur, le chagrin des ogres.

Complice Catharsis Des mots, des signes : deux langages pour la comédienne Ces Inepties volantes sont aussi furieuses à voir qu’à Anne de Boissy et la danseuse Géraldine Berger qui imaginent un conte inspiré d’histoires vraies, Double moi, mélange d’ingrédients inattendus. Ensemble elles ont pétri leur récolte où se fondent un paquet de kleenex, des talons aiguilles, un doudou, une bague… elles ont malaxé leurs bouts d’enfance pour raconter finalement une seule histoire et inventer une troisième langue. Celle de la scène, visuellement forte, née du mélange des deux grammaires et du plaisir du jeu. Double moi Le 5 nov Le Cadran, Briançon 04 92 25 52 52 www.theatre-le-cadran.eu

entendre ! Dans cette partition à deux voix, Dieudonné Niangouna se bat pour domestiquer la douleur sur le rythme des chuchotements et des cris de l’accordéon de Pascal Contet : la rage au ventre, il se lance «à bride abattue dans le récit de trois guerres civiles qui ont mis à feu et à sang son pays natal, le Congo-Brazzaville». Une énergie électrique court entre ces deux hommes qui s’accordent à faire resurgir les souvenirs. Même les plus douloureux. Les Inepties volantes Le 16 nov CNCDC Châteauvallon, Ollioules 04 94 22 02 02 www.chateauvallon.com


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THÉÂTRE

AU PROGRAMME

Décorations Filiation Zabou Breitman aime l’univers de l’écrivaine Lydie

Saltimbanques Le Théâtre du Maquis rend hommage à l’Occitanie

Salvayre, dont elle adapte et met en scène La Médaille (éd du Seuil). Un texte sans concession, drôle et mordant sur le monde de l’entreprise, ses codes et ses dérives à travers une grande cérémonie de remise de médailles aux employés méritants. Entre les discours qui sentent bon l’hypocrisie et ceux qui font bomber le torse, des petits désordres imprévus vont venir coincer la machine si bien huilée…

médiévale dans un spectacle théâtral, musical et burlesque dont ils ont le secret, avec des troubadours, des textes contemporains qui se mêlent à des poèmes du XIIIe, des partitions d’époque revisitées… Dans un esprit politique, le Cabaret des hérétiques se propose de retrouver «l’esprit de résistance[…] des jongleurs, trobadors et trobairitz». © Michel Sedan

La Médaille Le 13 nov à 20h Théâtre des Salins, Martigues 04 42 49 02 00 www.theatre-des-salins.fr les 17 et 18 déc à 20h30 Théâtre de Grasse 04 93 40 53 00 www.theatredegrasse.com

Dada Écrit en 1936 par Gertrude Stein, et traduit en français par elle-même, Listen to me s’inscrit dans la continuité du mouvement Dada -l’adaptation pour la scène avec Picabia sera empêchée par la guerre. Emma Morin, musicienne et comédienne, fait de ce texte inédit une traversée acoustique et sensuelle qui joue avec les mots et leurs sons, comme sa créatrice se jouait de l’académisme de l’écriture. Autour du spectacle, une visite intime du musée des Beaux-Arts de Nîmes avec Emma Morin et un conférencier à l’issue de laquelle E. Morin donnera une conférence-lecture sur Gertrude Stein (3 nov), et la projection, au Carré d’art, du documentaire d’Arnaud de Pallières, Portrait incomplet de Gertrude Stein (6 nov).

Volte Face ... et facétie ! Oyez la bonne nouvelle : revoilà sur les planches le trio bondissant (ildi! eldi! collectif) dont la libre interprétation de Vice-Versa, roman dérangeant de Will Self, trublion des Lettres anglaises, ravit à tout coup ! Dans cet apologue pétillant de malice et de férocité lubrique, le sort coquin dote un viril rugbyman d’une douce béance derrière le genou droit ; le diagnostic déclenche alors tourbillons de fantasmes et cruelles révélations à soimême ! Swift n’est pas loin... ne laissez pas filer la grosse blague touchée par la grâce du grinçant !

Abraham Les 15 et 16 oct à 20h30 Théâtre de Grasse 04 93 40 53 00 www.theatredegrasse.com Les 20 et 21 oct à 20h30 Sémaphore, Port-de-Bouc 04 42 06 39 09 www.theatre-semaphore-portdebouc.com Le 22 oct à 20h30 Théâtre de Fos 04 42 11 01 99 www.scenesetcines.fr

Vice-Versa les 18 et 19 nov Théâtre des Salins, Martigues 04 42 49 02 00 www.theatre-des-salins.fr

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Mito ! Alain Gautré puise dans les pièces de Molière «un

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Listen to me Le 4 nov Théâtre de Nîmes 04 66 36 65 10 www.theatredenimes.com

Le grand-père maternel de Michel Jonasz s’appelait Abraham, il était juif polonais, il sera déporté. Jonasz ne l’a pas connu, ce qui ne l’empêche pas de se promener dans la mémoire familiale pour faire revivre cet aïeul amoureux de sa Rose, père de sept enfants, épicier qui devient cantor dans les synagogues… À cette évocation sensible, le chanteur-auteur-comédien mêle des histoires juives à l’humour savoureux ainsi qu’un hommage à la musique tzigane qui a bercé son enfance.

réconfort quasi-philosophique» ; sa mise en scène du Malade imaginaire conserve l’aspect délirant et rieur de cette comédie-ballet, notamment les intermèdes et la partie chantée du deuxième acte, avec un réajustement actuel pour les parties dansées et chantées qui lorgnent du côté du rap, du funk, de la soul music et du raï. Argan, de doux dingue «devient un vrai clown, agissant comme un enfant pour oublier qu’il est adulte.» Étonnamment contemporain !

© Bellamy

Le Malade imaginaire Le 14 oct à 20h30 Théâtre la Colonne, Miramas 04 90 58 37 86 www.scenesetcines.fr

Universel Fellag et Marianne Épin poursuivent leur exploration d’une Baal rock ville continuellement aux prises avec la folie, coincée entre La mise en scène de François Orsoni a vivifié

C’est à Alger Les 5 et 6 nov à 20h Théâtre de Nîmes 04 66 36 65 10 www.theatredenimes.com

Avignon cet été… Ce Brecht de jeunesse, brouillon, parcellaire, possède une force indomptée, magnifiquement portée par une bande de jeunes comédiens éructant, transcendés par la juvénile et ambiguë Clotilde Hesme… Un régal ! Baal Les 4 et 5 nov Théâtre d’Arles 04 90 52 51 51 www.theatre-arles.com

© Olivier Soulie

tradition et modernité. Michel, marié à Zoubida, vient rejoindre sa femme dans sa famille, et se trouve en butte à des mœurs et des rituels inconnus. Ce sont deux des nombreux personnages que les comédiens incarnent dans cette nouvelle création.

Le Cabaret des hérétiques Le 18 nov Théâtre Comoedia, Aubagne 04 42 18 19 88 www.aubagne.fr en tournée dans le Pays d’Aix, à Rousset, Ventabren, Puyloubier, Eguilles…


THÉÂTRE 19

Tourmenté Ça soufi Stefano Fogher et Guigou Chenevier, 2 musiciens-

Biodiversité «Vivre, rêver, créer la ville et les paysages avec la

performers qui aiment la parole, se retrouvent avec Les Planches du Salut et Inouï Productions pour explorer les tourments de l’anti-dieu grâce à Dante, Hugo, Lorca, Artaud, Shakespeare… C’est l’enfer (!), un spectacle excessif «où les diables s’amusent certainement plus que les pauvres anges au paradis.» Contrebasse, cor et stratocaster se frotteront aux toupies, percussions et autres cloches diablotines.

biodiversité» : le rendez-vous de la réflexion concertée sur l’aménagement des territoires et de la ville contemporaine. Experts et pouvoirs publics, aménageurs et citoyens, chercheurs et invités sont réunis pour cette 9e édition des Rencontres de Volubilis autour de plusieurs exemples de réalisation et de gestion de territoires innovants sur le plan de la biodiversité. Interventions d’artistes, parcours poétique et naturaliste ponctueront les Rencontres.

C’est l’enfer (!) Les 15 et 16 oct Les Doms, Avignon 04 90 14 07 99 www.lesdoms.eu

9e Rencontres de Volubilis Du 17 au 20 nov Les Halles, Avignon 04 90 85 52 57 www.theatredeshalles.com

Mémoire Le Balcon ouvre sa saison avec trois représentations sur

Mélancolie Le comédien Dirk Roofthooft et le compositeur Kris

le génocide des tziganes par la cie Mémoires Vives à l’invitation de la Fondation Abbé Pierre. Samudaripen, une pièce chorégraphique dont le thème est la persécution séculaire des peuples nomades en Europe. Un spectacle orchestré par le chorégraphe Michaël Stoll qui raconte le génocide des tziganes internés par Vichy, déportés et exterminés pendant le régime nazi. Une rencontre entre le jazz manouche et la danse hip hop pour questionner l’univers concentrationnaire et les systèmes de déshumanisation.

Abd Al Malik © X-D.R.

Abd Al Malik ouvre le cycle de Conférences sous le Chêne avec un débat à l’occasion de la sortie de son livre La Guerre des banlieues n’aura pas lieu (Le Cherche Midi). Un ouvrage nominé pour le prix Edgar Faure du meilleur livre politique de l’année, dont le témoignage s’échappe des standards de la culture hip hop et fait place à la perspective d’une voie soufiste. Les jeunes des banlieues d’Avignon seront-ils au rendez-vous de ce slameur pétri de spiritualité ?

Samudaripen Les 15 et 16 oct Le Balcon, Avignon 04 90 85 00 80 www.theatredubalcon.org

Abd Al Malik Le 11 novembre Le Chêne Noir, Avignon 04 90 82 40 57 www.chenenoir.fr

Résistants

Grinçant Philippe Hottier et Stéphanie Marc sont Il et Elle dans Occident, une comédie noire de Rémi de Vos, mise en scène par Dag Jeanneret. Grinçante, crue, désespérée, atroce dans sa noirceur sans retour d’un couple en perdition, la pièce dans laquelle «on doit pourtant rire, sinon ça ne marche pas» réussit le pari de faire émerger le comique derrière l’extrémisme. Créée il y a deux ans au théâtre Sortie Ouest de Béziers par la Cie In Situ, la pièce aborde de front, avec force, la barbarie ordinaire des racistes décomplexés de tout poil. © Caroline Coste

Succès du Festival 2009, le tandem Dau et Catella revient pour jouer Sacco et Vanzetti d’Alain Guyard. Ils retracent le scandale judiciaire des années 20, immortalisé par la chanson Here’s to you de Joan Baez dont les victimes furent les militants anarchistes italiens, devenus symbole de la lutte contre l’intolérance et la discrimination, et condamnés à la peine capitale malgré le manque de preuves formelles. Une tragédie moderne interprétée par un duo de choc et mis en scène par François Bourcier. Sacco et Vanzetti Du 21 au 23 oct Le Chêne Noir, Avignon 04 90 82 40 57 www.chenenoir.fr

Occident Les 14 et 15 octobre Les Halles, Avignon 04 90 85 52 57 www.theatredeshalles.com

Visionnaire Plongeon dans l’œuvre incandescente du dramaturge anglais Howard Barker avec La Douxième bataille d’Isonzo interprétée et mise en scène par un duo captivant de complicité, Alain Cesco-Resia et Camille Carraz. Quand, devant nos yeux, la cécité et la différence d’âge se transforment en voyeurisme mental pour apprendre à s’aimer. Cru et étonnant. La Douzième bataille d’Isonzo Du 4 au 7 novembre Théâtre des Halles, Avignon 04 90 85 52 57 www.theatredeshalles.com

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Defoort rendent hommage au lyrisme du poète russe Joseph Brodsky, lauréat du prix Nobel. Une œuvre bâtie sur la mélodie et ses assonances, autour de grands thèmes métaphysiques : le sens de la vie, la mort, le voyage dans le temps et l’espace, la relation entre plénitude et néant, l’existence entre soi-même et personne. Un dialogue d’artistes pour révéler ce que les mots ne peuvent exprimer. Les Concerts Brodsky Le 15 oct Théâtre de Cavaillon 04 90 78 64 64 www.theatredecavaillon.com

Déplacés Retrouver Grand Magasin est toujours un bonheur. Pour commencer sa saison de Nomades la Scène nationale de Cavaillon envahit les villes de Châteauneuf-de-Gadagne (le 16 nov), Mérindol (le 18), Oppède (le 19), Morières (le 20), Les Paluds de Noves (le 22) de sa fantaisie combinatoire, absurde, rocambolesque et profondément Oulipienne. À trois ils abolissent toutes les règles de la représentation et des arts, pour proposer un ailleurs juste à côté et sans complexe… Les Déplacement du problème Du 16 au 22 nov Théâtre de Cavaillon en Nomades 04 90 78 64 64 www.theatredecavaillon.com

© X-D.R.


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DANSE

GTP | BNM | PAVILLON NOIR

Reflets cadavériques Denis Plassard et sa compagnie Propos créaient au Théâtre Durance un roman musical photochorégraphique intitulé Les cadavres se regardent dans le miroir. En première partie, l’atelier de danse amateur Elan C présentait dans le cadre du projet culturel Tutorat Danse la toute première création du chorégraphe, millésime 1990, intitulée Propos : retour à l’origine même du nom de sa compagnie. Le dispositif Danse en amateur et répertoire est financé par le Ministère de la Culture et a permis aux danseuses amateurs de concrétiser le bénéfice d’un travail avec un chorégraphe professionnel. Ce Propos entre langage parlé et gestualité, aux fragrances d’humour et d’autodérision, caractérise les préoccupations esthétiques de Denis Plassard. La création actuelle (65 mn) veut-elle développer cet argumentaire autour du regard sur le regard du geste? Décor : une géante maison de poupée. D’incertains personnages teintés d’années cinquante se strobotéléscopent et intriguent autour d’intrigantes intrigues intriquées peuplées de nains de jardin, de caves sépulcrales, de miroirs mutins et mutants autour d’un quatuor à cordes jouant Beethoven. Un jeu d’éclairage complexe, une performance dans l’immobilisme des danseurs en butte à un butô déjanté, un rien cuissenlair. Exposé peut-être brillant d’un professeur professant la

Scories des batailles Germaine Acogny est magnifique. Elle a dansé au Pavillon Noir un solo de femme Africaine qu’elle venait de créer à la Biennale de Lyon. Une pièce en forme de portrait, qui dit sans violence les difficultés de la vie en Afrique, même quand on est la grande Germaine, fille spirituelle de Béjart, célèbre depuis 40 ans (elle en a 66). Seule en scène avec quelques objets, sa voix cassée et son corps si beau, elle s’adresse au public, parle, bouge, instaure une relation intime faite de reproches pourtant : Songook Yaakaar, Affronter l’espoir, s’en prend aux détracteurs de l’Afrique, à ceux qui prétendent qu’elle n’est pas entrée dans l’Histoire, et qui la laissent dans sa misère. La Dame finit par une traversée très rythmée, pieds à plat et près du sol, les mains dans l’eau et les pétales de rose, les yeux plantés comme une guerrière vers une lumière inconnue…. Un autre solo de femme pour ouvrir une saison décidément très féminine : Patrizia Lo Sciuto, Sicilienne, livre elle aussi des bribes de sa mémoire, en une série de tableaux reposant sur sa relation aux objets (des poissons du marché, des papiers coupés…) et aux sons (un violoniste bruiteur aussi l’accompagne). Elle danse bien, entraîne en déboulés ou en cercles, mime un bal populaire, montre comment la danse contemporaine s’est emparée de son corps de midinette. L’ensemble manque encore un peu de liant… la pièce est en création !

© Christian Ganet

corruption dynamique et discursive… Mais au bout de 45 minutes de chronophotographie chorégraphiques, le cancre las n’a pas pu résister à l’assoupissement en fond de glace. YVES BERCHADSKY

Les Cadavres se regardent dans le miroir a été créé au Théâtre durance (Château-Arnoux) le 2 oct. Il sera repris sur la Scène Nationale de Cavaillon le 19 oct 04 90 70 64 64 www.theatredecavaillon.com

Brouiller les pistes que comme une trace ancienne, la survivance d’un univers perdu ou intime dont il n’est jamais véritablement question, sauf à le regretter. Moving Target nous parle du corps contemporain comme d’une terre étrangère, mécanique, où les sensations sont abolies, gouvernées par des choix binaires, chimiques, commerciaux. Où les reflets, les projections et les images troublent et détruisent la présence du corps réel, lui-même démantelé, multiplié, sursignalétisé. Des images d’une troublante virtuosité, toujours inhumaine, tentent de circonscrire une cible dansante qui s’enfuit entre des mots qui défilent, des quadrilatères qui l’emprisonnent, des menaces qui la poursuivent. En proie à une folie schizophrène, Katharina Christl incarne l’ombre d’un Nijinski qui s’arrache des cadres tandis que Marion Cavaillé flotte, ombre nostalgique d’une sensualité perdue… La musique, en partie interprétée en direct, joue des mêmes glissements, dominée par des scansions binaires, laissant parfois entrevoir des souvenirs expressifs aussitôt gauchis, enfouis, perturbés. L’ironie souvent affleure, comme la dernière arme contre une asepsie qui gagne et impose son ordre, impeccable et glaçant. Le constat est rude. Mais qui le voit ? AGNÈS FRESCHEL

© Agnès Mellon

Moving Target a été recréé au Grand Théâtre de Provence du 23 au 25 sept. Il sera repris à la Criée en mai 2011

A.F.

Songook Yaakaar et La vie en scories ont été dansés du 7 au 9 oct au terme de résidences de création au Pavillon Noir Germaine Acogny © Jean Barak

En reprenant avec le Ballet National la pièce qui l’avait fait connaître en Europe, Frédéric Flamand livre quelques clefs de son univers. Intellectuel, plastique, contemplatif, le mouvement y est en fait incident à la pensée. Et l’émotion, la sensualité n’y apparaissent



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DANSE

BALLET D’EUROPE | BNM | DANSEM

Jazz et répétitif La création du souvenir

Le ballet d’Europe envahit l’Opéra pour une soirée, avec une création et deux reprises

Trace avec moi © Jean-Charles Verchere

One more time est une des grandes réussites de Jean-Charles Gil. Créée en 2005, tournée partout depuis, reprise en particulier aux Salins l’an dernier par de nouveaux danseurs enthousiastes et virtuoses, la pièce repose sur le crescendo haletant de la musique de John Adams, magnifiée par mouvements d’ensemble millimétrés, et si rapides… Tout à l’inverse du pas de deux Trace avec moi : Jean-Charles Gil est remonté sur les planches avec Monique Loudières, et le duo ancien a retrouvé une complicité, un contact et une expressivité douloureuse très émouvants, sur les notes de Brad Mehldau et Herbie Hancock… Jazzy sera également sa nouvelle création, pour 10 danseurs lancés dans un espace occupé de mobilier contemporain, et confrontés au souvenir de Duke Ellington et Avishai Cohen…

Le ballet national propose en cette fin d’octobre deux programmes de créations À l’Opéra tout d’abord, durant trois soirées, un événement : Thierry Malandain, au style néoclassique affirmé et assumé, vient créer pour le BNM des Nuits d’été sur l’incomparable chef-d’œuvre de Berlioz (hélas sur bande !). Tandis que les amoureux de la technique classique pourront se délecter de la précision et de l’exigence de Malandain, les fans des images et concepts de Frédéric Flamand entreront dans les cercles et le bestiaire étrange de ses métamorphoses. Pour que chacun danse au mieux de ses goûts et aptitudes, avec un Ballet qui a enfin retrouvé un répertoire varié qu’il peut interpréter partout ! Et qui ne cesse de croître : Frédéric Flamand propose à ses danseurs de chorégraphier leur propre univers mais, contrairement à d’autres, il programme ensuite les plus marquantes de ces créations lors des tournées. L’Ouverture d’octobre donnera l’occasion de découvrir, entre autres, les créations des quatre nouveaux interprètes du ballet…

A.F.

Autrement pareil. Trace avec moi. One more Time Le 28 oct Opéra de Marseille 04 96 13 01 12 www.balletdeurope.org

Dansem : c’est parti ! nouvelles, souvent en cours d’élaboration, d’esthétiques diverses. Que le spectateur peut ensuite interroger, le cadre des Bernardines étant parfait pour l’exercice. Puis Dansem proprement dit débutera au Lenche les 13 et 14 nov, avec un solo d’Hélène Cathala intitulé La jeune fille que la rivière n’a pas gardée, et retournera aux Bernardines pour un cycle de la Cie Mal Pelo du 16 au 21 nov : deux pièces et une installation de Maria Munoz et Pep Ramis, souvent programmés à Marseille… Et cela continuera sur ce rythme jusqu’au 14 décembre !

Les Nuits d’été. Métamorphoses Du 14 au 16 oct Opéra de Marseille Ouverture 16 Les 22 et 23 oct Ballet National de Marseille 04 91 327 327 www.ballet-de-marseille.com

A.F. La Jeune fille... © Sylvie Veyrunes

Dansem Du 13 nov au 14 décembre Marseille, Arles, Aix, Château-Arnoux 04 91 55 68 06 www.officina.fr www.dansem.org

Metamorphoses © Agnes Mellon

Depuis 14 ans le festival organisé par l’Officina affirme sa singularité et monte régulièrement en puissance, proposant ses formes méditerranéennes dans toute la région et sur de nombreuses scènes marseillaises. Questionnant les formes et pratiques chorégraphiques, et plus généralement celles du corps en (non) représentation, le festival défend aussi l’existence de la danse contemporaine dans des pays où le corps reste souvent tabou, difficile à exhiber, politiquement dérangeant. Comme l’an dernier, Dansem débute donc en accueillant avec les Bernardines les Questions de danse posées par Michel Kelemenis. Une occasion particulière d’assouvir sa curiosité de formes

A.F.



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DANSE

PAVILLON NOIR | NÎMES | OUEST PCE | CHÂTEAUARNOUX

Figuratif, ou pas En attendant Suivront des siècles de calme, dernière création d’Angelin Preljocaj avec le ballet du Bolchoï (au GTP à partir du 17 nov), quelques très belles pièces à se mettre sous la dent au Pavillon Noir… D’abord la reprise d’Empty Moves du 20 au 23 oct : Angelin Preljocaj a créé deux quatuors étonnants sur la «musique» de John Cage, Empty Words. Des conférences en fait, mots vides étirés, agrémentés des réactions du publics à leur non sens si signifiant. Sur ces suites de sons prononcés des mouvements, abstraits. Des constructions géométriques, des combinaisons de corps qui dansent à l’extrême, produisent des portés, des agrégats indescriptibles. Virtuoses et coulés sans ruptures et sans arrêts, d’une souplesse et d’une continuité infinie. Parfois les perturbations des spectateurs qui protestent sur la bande son semble un instant les contaminer… puis ils reprennent, dans leurs costumes simples, sous des lumières à peine posées, leur mouvement continu et imperturbable. La première partie créée en 2004 reste très abstraite, la seconde (2007) tisse des liens émotionnels entre les corps. Des relations. Au final les deux parties se répondent et forment une des plus belles pièces, expérimentale et terriblement inventive quant au vocabulaire chorégraphique, de Preljocaj. Ensuite une pièce sur James Dean,

Empty moves © JC Carbonne

Last meadow, les 5 et 6 nov : Manuel Gutierrez, chorégraphe américain, veut faire danser la figure de l’acteur, l’incarner sur scène en citant les trois films qui ont fait sa légende. C’est une femme qui le joue, le danse, au milieu de deux hommes qui tour à tour évoquent les images d’À l’Est d’Eden, Giant et La Fureur de vivre. Que reste-t-il des figures de la mythologie américaine quand la danse les visite ? Enfin la création 2005 de Vladimir Golubev, Non Solo, les 15 et 16 nov. L’acteur danseur chanteur accordéoniste russe refuse de s’enfermer dans un mode d’expression, touche-à-tout avec talent, dessine son portrait en solo (sed non solum) en revenant sur un souvenir d’enfance loufoque… Une courte pièce de 25 mns, pour commencer la soirée au Pavillon Noir. AGNES FRESCHEL

Le Pavillon Noir, Aix 0811 020 111 www.preljocaj.org

La danse est à Nîmes Deux géants de la danse contemporaine se succèdent au Théâtre de Nîmes : Anne Teresa de Keersmaeker avec sa pièce la plus mythique, et Philippe Decouflé en création ! Rosas danst Rosas © Herman Sorgeloos

Rosas danst Rosas (les 20 et 21 oct) est la pièce qui a fait connaître ATK dans le monde. Avec Thierry de Mey qui composa pour elle une partition faite essentiellement de silences, de répétitions, de boucles et de décalages, elle inventa une danse aussi abstraite et géométrique que les sons dans sa composition, mais transcendée par les quatre corps de femmes qui entrainent dans leurs virevoltes et volte-face incessantes, jusqu’à l’épuisement. Magistrale dès cette première pièce, en blanc, sans effet, sans autre décor que quelques chaises alignées… Nîmes donne aussi à voir, au Carré le 15 oct à 17h, le film Fase de Thierry de Mey, quatre pièces de la même époque sur la musique de Steve Reich,

tournée dans une forêt, une fabrique, sur du sable… redessinant la géométrie des figures vue d’en haut, de côté. Fascinant. Beaucoup plus coloré et baroque est l’univers de Decouflé ! Sa dernière création, Octopus (du 17 au 19 nov), joue pourtant davantage d’illusions en noir et blancs, de membres étirés, qui se reflètent et se referment, enfermant les corps dans un système illusionniste de miroirs… Théâtre de Nîmes 04 66 36 65 00 www.theatredenimes.com


La chance ! Qui va avoir le privilège de voir Brilliant corners avant la Biennale de Venise ? La Cie d’Emanuel Gat est en résidence à Istres depuis 4 ans, et offre ainsi à ses hôtes la primeur de sa création en cours pour 12 danseurs «brilliants»… Et ce n’est pas tout : invité par les Rencontres d’Averroès, le plus épatant, émouvant, intelligent des danseurs issus du hip hop vient interpréter la Géographie du Danger : quand le danseur Français Hamid Ben Mahi rencontre l’écriture du journaliste Algérien Hamid Skif, cela donne un chef-d’œuvre sur la solitude de l’immigré clandestin…

Brilliant Corners © X-D.R.

Brilliant Corners Le 21 oct La Géographie du Danger Le 10 nov Théâtre de l’Olivier, Istres 04 42 56 48 48 www.scenesetcines.fr

Échanges Miguel Nosibor crée sa nouvelle pièce Aller-Retour, avec sa compagne Fabienne, danseuse elle aussi. Rien de hasardeux là dedans : Miguel Nosibor veut mettre en danse son expérience de l’échange, avec ses élèves, ses stagiaires, ses amis, les autres artistes issus de pratiques voisines. Ce qu’il donne avec sa danse généreuse, et ce qui lui est rendu. Aller-retour Le 6 nov Théâtre de Fos 04 42 11 01 99 www.scenesetcines.fr

Trois grâces Le Théâtre Durance a la bonne idée de programmer le cycle électroacoustique de Michel Kelemenis, (musiques de Christian Zanesi), trois très belles pièces témoignant de son écriture accomplie. Une réflexion sur ce qui est gracieux et disgracieux, ce que l’on voit et ce qui échappe, sur les phases

quantiques de la lumière, et la vitesse du regard qui s’accommode mal de celle des corps lancés dans la course… Alea. Viiiiiite. Disgrâce Le 22 oct Théâtre Durance, Château Arnoux 04 92 64 27 34 www.theatredurance.fr Disgrace © Agnes Mellon


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MUSIQUE

CONCERTS

On entend encore le frottement de la plume de Chénier sur le parchemin où il coucha son dernier poème, en prison, tout comme le bruit sourd de la guillotine brisant une jeunesse pleine de promesses… Andrea Chénier est l’un des rares opéras (avec Dialogues des Carmélites) à dénoncer la Terreur. En situant, sans parallaxe temporelle, l’action durant la Révolution française, la mise en scène de Claire Servais nous conduit au musée, jusqu’à assumer le kitsch du livret par un final «lumineux», transcendant le passage vers la Mort du couple héroïque. À bien y regarder, les décors (Dominique Pichou) figurant un gigantesque échafaud morcelé dans l’espace, prêt à l’emploi, et l’arène orangée représentant le tribunal populaire au 3e acte, génèrent de puissants effets. Car c’est là, précisément, que tout se joue du rapport psychologique semblant annoncer le triangle Cavaradossi, Scarpia, Tosca. Andrea Chénier de Giordano fait partie de ces ouvrages poussant les voix vers des intensités peu communes. Les plus grands ont chanté le rôle-titre,

mais ils ne sont pas nombreux aujourd’hui à pourvoir l’endosser. Zoran Todorovich est un ténor au port altier, au timbre compact, puissant. Hélas, ses moyens ont été altérés, le 1er octobre, par un fort rhume. Cependant, tout le plateau vocal a été bien pensé. Irène Cerboncini maîtrise son soprano vibrant pour la jeune amoureuse Madeleine de Coigny et le superbe baryton Marco di Felice, assume la complexité de Gérard, révolutionnaire tiraillé entre sa haine de l’Ancien régime, son désir de posséder son ex et noble maîtresse, et sa volonté profonde de rester vertueux. L’ensemble des seconds rôles contribue à la réussite d’une production venue de Monte-Carlo. Le chef Fabrizio Maria Carminati à la tête de l’Orchestre et des Chœurs de l’Opéra rend enfin à l’opus son vérisme chatoyant et ses élans musicaux opulents. JACQUES FRESCHEL

Andrea Chénier a été donné à l’Opéra de Marseille du 23 sept au 5 oct

Andrea Chenier © Christian Dresse 2010

La lyre et l’échafaud

Du son à l’idée

I Virtuosi Italiani X-D.R. Au XVIe siècle l’art instrumental s’émancipe du©texte qui jusqu’alors lui servait d’incontournable support (prières, chansons…). En quelque sorte, à ce

moment-là de l’histoire, la musique devient un art «abstrait», bien avant la révolution picturale du début du XXe siècle. Cependant, peut-être effrayés par ce phénomène qui plaçait la musique instrumentale hors du «sens» (que veut donc «dire» une sonate ou une symphonie ?), les musiciens baroques ont cherché à établir des relations entre les phénomènes sonores, rythmiques, mélodiques, et les passions humaines ou les phénomènes naturels. C’est ainsi que les partitions de l’époque regorgent d’effets imitant l’orage, le sommeil, les chants d’oiseaux ou le murmure des fontaines, la jalousie, l’amour, le plaisir… D’Antonio Vivaldi, on connaît les fameuses Quatre

saisons, moins les nombreux Concertos à titre comme La Rustique, L’Amoureux, La Tempête en mer, Le Soupçon… Autant de pièces qui, par leur rudesse dynamique, leur plainte mélodique, sensuelle, l’aspect furieux ou haletant des trémolos, leurs harmonies sinueuses, suggèrent des climats où les pensées s’envolent au fil des élans agiles d’un violon solo. C’est vers ces contrées imaginaires que nous ont emmenés les cordes aguerries d’I Virtuosi Italiani et leur chef/soliste Alberto Martini le 7 oct pour le 2e concert du Festival de Saint-Victor (à suivre… voir p30). JACQUES FRESCHEL

Obscure clarté nuire à l’écoute. Car qu’est ce que ce premier romantisme allemand ? Le sentiment de la nature, les cyprès inquiétants, et l’innocence de l’enfance

qui s’oppose à un monde de mensonges que fuient les poètes… Puis, on eut le bonheur d’entendre la grande pianiste interpréter seule Chu© Jean-Louis Bergamo

Univers sombre que celui choisi ce soir-là au GTP pour le spectacle Les derniers feux du romantisme, dirigé tout en finesse par Laurence Equilbey ; le concert de chœur Accentus s’ouvrait sur Franz Liszt avec Weinen, klagen, sorgen (d’après J.S. Bach), puis Nuages gris ; le chœur entame le premier morceau de dos, son parfait, harmoniques sensibles et prenantes, direction d’une rigueur toute d’élégance et de tension. Brigitte Engerer accompagne le chœur pendant la première partie, légèrement, tissant finement le son entre les voix et son piano. Le lyrisme est profond, évident, l’atmosphère poignante échappe aux lourdeurs que la tristesse existentielle des œuvres de Max Reger ou Hugo Wolf pourrait entraîner. Le surtitrage, clair, permet de goûter à la poésie des auteurs dont les compositeurs se sont inspirés, sans

chotements secrets de Clara Schumann, dans leur transcription de Franz Liszt, où les silences s’interrogent. Et le tendre Liebeslied de Robert Schumann. Enfin Rêve d’amour et Cantique d’amour de Franz Liszt. Le piano se fait aérien, les difficultés techniques accessoires… Sublime ! Le concert s’achève avec le chœur Accentus seul, dans quelques pages essentielles de Malher. Sons irisés, ampleur, intériorité, des finales pailletées… un pur bonheur de tristesse et de désespoir ! MARYVONNE COLOMBANI

Ce concert a été donné au GTP le 2 oct


MUSIQUE

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In memoriam Séquence émotion : Caline Barbizet, après une présentation rapide par Pierre Vasarely du rapport qu’entretenait le plasticien avec la musique, prit la parole pour parler de celui qui fut son mari. Quelques mots simples, suivis d’extraits du concert donné par le pianiste marseillais en 1975, et enregistré par FR3 : Milhaud, puis Bach, dont les lignes mélodiques habilement tissées firent corps avec les œuvres du grand Victor. Puis immergé dans un espace de sons de couleurs et de formes, l’auditoire put apprécier le récital d’Evelina Pitti, ancienne élève du maître. Les œuvres de

Bach, l’âme slave à fleur de peau de Rachmaninoff, puis Dutilleux, et sa première sonate pour piano «à Geneviève Joy» emplirent le lieu de leurs volutes invisibles. Solidement ancrée dans le clavier, la pianiste proposa une interprétation de ces pièces, pleine d’émotion et de retenue. Hommage vibrant aux deux artistes disparus, qui, l’espace du concert, semblèrent réinvestir la place : tout le charme de l’illusion. CHRISTOPHE FLOQUET

Ce concert a eu lieu le 16 sept à la Fondation Vasarely, Aix

Evelina Pitti © Gerard Pau

Un double hommage in situ dans le temple de «l’optical art», quand Vasarely accueillait Barbizet

Syntaxe de l’air Infatigable, L’Opéra au village ne cesse de proposer des spectacles qui allient qualité et innovation. Le 18 sept, l’église romane accueillait Télémaque pour un concert à la composition originale : aux cinq mouvements du Quintette opus 39 de Prokofiev se mêlaient en un savant tissage des pièces solistes d’auteurs contemporains. Melancholia pour contrebasse solo (Jean-Bernard Rière) de Hersant : les graves s’approfondissent, comme une matière lourde et malléable, puis les cordes graves deviennent chanterelles, s’adonnant aux aigus les plus absurdes, le bois de l’archet jongle, le spectre tout entier s’éveille. Dans Sarc d’Ohana, le hautbois (Blandine Bacqué) oscille entre interrogations et certitudes, arrachements d’âme et légèreté, polyphonies incroyables, tandis que la Sonate pour alto (Pascale Guérin) de Hindemith, très romantique, vibre d’accents sourdement passionnés.

© Dany Savary

La Sonate pour clarinette (Linda Amrani) de Denisov suit une esthétique picturale pointilliste, toile parsemée d’éclats, d’arêtes vives qui semblent sculpter l’espace, acrobaties défiant la mesure. Enfin, la très lyrique Cadenza pour violon (Jean-Christophe Selmi) de Penderecki semblait vouloir déchiffrer toute la complexité d’une âme, mouvements qui s’exacerbent, vont au-delà des capacités humaines,

repoussant toujours les limites, jeu des extrêmes, doubles cordes enchaînées, jusqu’à la formulation de l’indicible. Ce parcours permettait d’apprécier des œuvres de compositeurs du XXe, riche contrepoint à la danse du Quintette, composé pour un ballet, qui livre une galerie de tableaux, tantôt un monde oriental empli de poésie et de mystère ou d’une verve féroce, tantôt une description de la démarche de

l’ours, puis celle, brillante, du jeu des acrobates ou d’une danse russe traditionnelle. Le bis, de Tristan Murail, inspiré des Ruines circulaires de Borges, emporte le violon et la clarinette dans un affrontement étrange. L’un et l’autre rêvent, mais l’un n’est que le songe de l’autre, mode spectral où la virtuosité ne peut être que subtile. Un concert d’exception, qui animait de souffles invisibles la délicate installation de plumes duveteuses et blanches d’Isa Barbier, esquisse d’un globe qui épousait les formes de l’abside, construction fragile, éphémère écho, manifestation à peine tangible de l’idée… MARYVONNE COLOMBANI

Concert Les Subjectifs, donné à Pourrières au Couvent des Minimes le 18 sept.

Emilie Capulet, pianiste inspirée Dans le cadre somptueux du château de Cassis, Emilie Capulet, pianiste diplômée à Aix, Marseille et Londres

(Guildhall School of Music) a apprivoisé un Pleyel quart de queue de 1920 à la chaude sonorité mais à la mécanique © Yves Bergé

capricieuse, dans un programme très viennois. Les 12 Variations sur Ah, vous dirai-je maman de Mozart, d’une clarté juvénile, étaient entourées des plus grands romantiques. Technique sûre, phrasé élégant pour l’Etude en mi majeur op.10, belle lisibilité et main droite survoltée dans la Fantaisie-Impromptu de Chopin. Avant la Ballade en sol mineur, superbement interprétée, un moment de respiration où la pianiste présente les œuvres avec beaucoup de ferveur. Dans les Impromptus en mi b majeur et b mineur de Schubert, Emilie Capulet effleure le piano avec un charme exquis, la technique étant toujours au service d’une musicalité d’une grande matu-

rité: les guirlandes de triolets dans le 1er Impromptu, si maîtrisées, rappellent la jouissance romantique du musicien. La Valse-Caprice de Liszt, souvenir de soirées viennoises, héritées de danses schubertiennes, pièce redoutable, doigté puissant et bondissant : Schubert sublimé par la tornade Liszt ! Le Carnaval de Vienne, jeu généreux et inspiré, est un bel hommage à la théâtralité et aux audaces harmoniques de Schumann. Un très beau moment de musique, offert avec grâce. YVES BERGÉ

Ce récital s’est donné le 19 sept au Château de Cassis


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MUSIQUE

CONCERTS

Lamenti e pianto les rangs d’un public venu nombreux, ce 3 oct, pour goûter au derniers feux du festival automnal de Concerto Soave. On a rarement l’occasion d’entendre

une telle qualité d’interprétation du style baroque, une telle maîtrise de l’équilibre, des phrasés tissés avec finesse, de la juste distanciation inter-

Maria Critina Kiehr et Jean-Marc Aymes © C Peillon

La Sinfonia lente et plaintive ouvrant la Cantate «Bella madre dei fiori» de Scarlatti résonne gravement dans la belle acoustique de l’église Saint-Laurent. Les deux violons d’Alessandro Ciccolini et Alba Roca glissent de retards en anticipations, de dissonances en consonances et s’amusent des frottements harmoniques qui font les délices tendrement douloureux de la musique baroque italienne. Aussi, quand Maria Cristina Kiehr (voir p 73) déploie son chant, doucement réservé, aux sonorités suaves et au timbre compact, très homogène et peu vibrant (mais sans aucune platitude), au fil d’une basse continue souple (Etienne Mangot au violoncelle) et libre d’arpèges, traits virtuoses limpides comme une eau de source (Jean-Marc Aymes au clavecin), on se dit qu’on a bien fait de grossir

prétative, ni trop timide, ni trop extravertie des affects anciens. Si la soprano semble avoir été un peu chagrinée au début, le souffle un peu court, la vocalise hésitante et l’aigu anxieux, tout est vite rentré dans l’ordre. Après un Concerto du même Scarlatti, riche en contrepoints célestes, où l’alto de Myriam Cambreling a rejoint l’ensemble, le récital s’est achevé par un «must» de la musique sacrée. Le Salve Regina de Pergolèse, à l’égal du Stabat mater dont on entendit de nombreuses souvenances harmoniques, foisonne en madrigalismes, effets sonores intensifiant le sens de mots chers aux «passions» de l’époque, tels les «soupirs» et les «larmes»… qu’on a bien failli verser ! JACQUES FRESCHEL

L’orgue de demain Star atypique de l’orgue, Jean Guillou tenait les claviers de Roquevaire le 26 septembre Sa présence, son aura et ses interprétations valent à coup sûr une nef bien remplie, ce qui s’est largement vérifié lors du 14e Festival International d’Orgue de Roquevaire. Et jusque dans ce programme plus qu’original et très vingtièmiste, accompagné par les excellents percussionnistes du Trio Delta, Jean Guillou s’affirme comme une légende vivante. Entre deux interprétations de Bach qui feraient tomber de leur tribune une ribambelle d’organistes, l’artiste démontre ses

talents de compositeur avec des pièces scintillantes et enlevées pour percussions seules (Chroniques) ou associant l’orgue à l’impressionnant dispositif allant du marimba au gong (Colloque n°6 et 8). Toujours en recherche de nouvelles sonorités, ce bonhomme hors du commun n’hésite pas, en véritable apôtre, à amener le public sur le terrain du XXe siècle d’hier, jusqu’aux sonorités d’aujourd’hui. FRÉDÉRIC ISOLETTA

Le festival d’Orgue de Roquevaire se poursuit jusqu’au 17 oct http://orgue.roquevaire.pagespersoorange.fr

Destin tragique La figure de Didon, reine de Carthage, est une inspiratrice précieuse pour nombre de compositeurs. Parmi eux Purcell bien sûr, mais aussi des Français, ceux du Grand Siècle de Louis XV comme les illustres Couperin et Campra et les moins connus mais intéressants Pancrace Royer et Michel Pignolet de Montéclair. Pour servir ce programme français singulier, l’ensemble Les Folies Françoises composé au violon et à la direction de l’excellent Patrick Cohën-Akenine, au clavecin de Béatrice Martin et au violoncelle de François Poly. Tantôt en trio pour le Neuvième Concert des Goûts Réunis de Couperin, au clavecin seul pour d’exquises miniatures comme Le Tambourin ou La Majestueuse de Royer, ou en soutien de l’admirable voix à la prononciation parfaite d’Anne Magouët, si à l’aise dans ce baroque français pour deux cantates évoquant le triste sort de Didon : les quatre interprètes ont illuminés par leur talent le temple protestant de la rue Grignan. FRÉDÉRIC ISOLETTA

Cherubini «l’ancien» ? C’est dans la magnifique salle du Grand Tinel du Palais des Papes d’Avignon qu’a débuté le Festival de musique ancienne avec une soirée consacrée à Luigi Cherubini dont on fête cette année le 250e anniversaire : des cantates rarement jouées pour commencer, puis le Drame lyrique Pygmalion, originellement composé pour le castrat Crescentini en 1809 : l’ensemble instrumental Les Nouveaux Caractères -dirigé du pianoforte par Sébastien d’Hérin- et le Chœur de l’Opéra-Théâtre d’Avignon ont accompagné des solistes remarquables. En particulier Karine Deshayes, bien connue et appréciée des avignonnais, fut remarquable dans Circé, magnifique cantate pour mezzo-

Les Nouveaux Caracteres © X-D.R.

soprano et orchestre : son interprétation, brillante et théâtrale, fut longuement applaudie.

On regrette cependant que l’immense salle du Tinel ne mette pas les voix en valeur : trop résonante, elle rend les

textes peu compréhensibles. Autre regret : l’absence du contre-ténor Christophe Dumaux dont le nom figure pourtant sur le programme de cette soirée… Autre étonnement : beaucoup d’œuvres, dont par exemple Le Remède de fortune de Guillaume de Machaut, programmée le 19 octobre, ont une place évidente dans ce Festival, mais il est curieux de noter combien certains classiques ont «vieilli»… Sinon comment justifier que Cherubini, compositeur du XIXe siècle (17601842), contemporain des grands romantiques Frédéric Chopin et Hector Berlioz, ouvre ce Festival dit de «musique ancienne» ?... CHRISTINE REY



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MUSIQUE

LYRIQUE | CONCERTS

«Grand opéra» économique (l’univers décrit y est pharaonique…), l’ultime scène où le temple s’écroule sur les Philistins au moment où Samson, attaché aux colonnes de l’édifice, cheveux coupés et yeux crevés, implore une dernière fois Dieu de lui redonner sa force herculéenne… À Marseille, on y entendra Olga Borodina et Torsten Kerl dans les rôles-titres sous la direction d’Emmanuel Villaume.

Rarement opéra aura connu une aussi longue gestation. Samson et Dalila, toutefois, est le seul véritable opéra de Saint-Saëns que la postérité retient (avec aussi le très rare Henri VIII). Et c’est un chef-d’œuvre unique, illustrant peut-être l’aboutissement magistral du «Grand opéra» à la française ! D’inspiration biblique, cet opus, puisant sa source dans la forme des oratorios baroques, retrace l’ascension, la victoire du héros, la trahison de Dalila, la vengeance et la mort de Samson. Les airs et les chœurs sont d’une grande beauté avec pour sommet le fameux «Mon cœur s’ouvre à ta voix» immortalisé par Callas ou Shirley Verret. Monter l’ouvrage dans une version de concert n’est pas un sacrilège tant l’action y est figée : on regrette cependant, dans ce choix de production qui est aussi

JACQUES FRESCHEL

Samson et Dalila Les 17, 23 et 26 nov. à 20h et le 20 nov. à 14h30 Opéra de Marseille 04 91 55 11 10 www.marseille.fr

Samson et Dalila, Gustave Moreau © RMN (Musee d'Orsay) - Jean-Gilles Berizzi

Des voix dans Mozart !

© X-D.R

fiancée respective. Ils leur tendent un piège… dans lequel elles tombent ! Cependant, l’épilogue de ce marivaudage est bien amer, car Mozart et da Ponte, dans Cosi fan tutte («ainsi font-elles toutes») en épinglant les travers de la gent féminine (cliché de l’époque pas vraiment éradiqué aujourd’hui)… agrafent plus généralement ceux de nature humaine. Un des grands opéras mozartiens, mis en scène par Philippe Sireuil et dirigé par Dominique Trottein, dans une production de l’Opéra Royal de Wallonie (passée par Toulon en 2009) et dont l’intérêt premier est la qualité annoncée du plateau vocal… ce qui n’est pas si courant de nos jours dans les opéras de Mozart.

J.F.

Auditorium de la Faculté de Médecine Marseille Le 9 nov. à 20h30 SMCM Adhésions Espace Culture 04 96 11 04 60 ou Harmonia Mundi 04 91 33 08 12 (gratuit pour enfants de sociétaires de 7 à 14 ans)

J.F.

Cosi fan tutte Le 12 nov. à 20h et le 14 nov. à 14h Opéra-Théâtre d’Avignon 04 90 82 81 40 www.operatheatredavignon.fr

Encouragés par Alfonso (Nicolas Courjal) célibataire cynique, Ferrando (Florian Laconi) et Guglielmo (Armado Noguera) deux jeunes officiers amoureux parient sur la constance de Fiordiligi (Nathalie Manfrino) et Dorabella (Patricia Fernandez), leur

Orientalisme Avec Carmen ou Les Pêcheurs de Perles, Georges Bizet nous invite au voyage. Il en va de même pour son exotique Djamileh (1872), œuvre rarement donnée, dans laquelle on est convié dans l’univers de

Tchèques Le mélomane attend toujours avec une certaine impatience le début de la saison de concerts de la Société de Musique de Chambre de Marseille. Pour le coup, c’est l’une des formations issues de l’immense vivier de Bohème (Prazak, Kocian, Talich…) qui est invitée par l’équipe de Bernard Camau. Le Quatuor Zemlinsky joue Schubert (n°5 D.68 en si bémol majeur) les fameuses «Dissonances» K.465 en ut majeur de Mozart et le Quatuor n°1 op.4 en la majeur post-romantique d’Alexander von… Zemlinsky (1871-1942).

Djamileh © Yves Bergé

mille et une nuits. Le livret, tiré de Namouna de Musset, narre l’aventure de la belle favorite Djamileh, immanquablement congédiée, comme toutes ses semblables, esclaves colocataires du harem, par le sultan Haroun. Néanmoins, celle-ci est prête à tout pour reconquérir l’amour de son maître… La mise en scène de Bernard Grimonet devrait trouver sa mesure sur la scène aubagnaise (une production qui fut créée au Couvent de Minimes à Pourrières durant l’été 2009 pour L’Opéra au Village, voir Zib’22). L’orchestre réduit en formation de chambre accompagne de jeunes et talentueux chanteurs. J.F.

Djamileh Le 5 nov. à 21h Comœdia d’Aubagne 04 42 18 19 88 www.aubagne.fr

Piano… piano La saison de concerts à l’Opéra de Marseille s’ouvre en accueillant deux grands virtuoses des claviers. Bertrand Chamayou, l’un des interprètes les plus doués la jeune génération des pianistes français, joue le Concerto n°2 de Chopin avec Evelino Pido à la baguette qui dirige également l’Ouverture du Freischütz de Weber et la Symphonie n°41 «Jupiter» de Mozart (le 2.oct. à 20h). On le sait peu, mais Cyprien Katsaris est né à Marseille : c’est un formidable musicien qui rafla dans les années 70 les Premiers Prix Cziffra et Reine Elisabeth. Intéressé par toutes les musiques, luimême compositeur, on l’entend dans le très romantique 2e concerto de Liszt aux côtés de Louis Langrée qui prend les rênes de l’Orchestre Philharmonique de Marseille dans le poème symphonique Le Chasseur maudit et la grande Symphonie en ré mineur de César Frank (le 6 nov. à 20h) J.F.

Opéra de Marseille 04 91 55 11 10 www.opera.marseille.fr


CONTEMPORAINE | CONCERTS

MUSIQUE 31

Composer aujourd’hui ? terie – Entrée libre), une mise en bouche apéritive et lutine de courts airs humoristiques accompagnés à la trompette. Avant des Compositrices de l’ailleurs : deux pièces d’Hanna Kulenty Preludium, postludium and psalm (2007) et Sofia Gubaïdulina In croce par Guillaume Rabier au violoncelle et Jean-Marc Fabiano à l’accordéon (le 17 nov. à 18h30 au Point de bascule). La harpe (Lydia Laurent) et la guitare (Philippe Azoulay) jouent les Pinceurs d’âme aux côtés des instrumentistes de Télémaque au grand complet pour un programme mêlant des opus de Ravel, Roussel, Villa-Lobos à ceux de deux jeunes brésiliennes Tatiana

JACQUES FRESCHEL

Le Mois des Compositeurs jusqu’au 7 déc Histoire de la musique (épisode 1) le 16 nov. à 18h. à l’Alcazar – Entrée libre Ateliers pédagogiques les 17 et 18 nov. de 9h30 à 17h30 au Grim (gratuit sur inscription) 04 91 39 29 13 www.ensemble-telemaque.com

En fin de Contes

Orchestre et Ciné La saison symphonique toulonnaise s’ouvre avec Giuliano Carella qui, depuis qu’il est le directeur musical de l’opéra, tire la phalange varoise vers le haut. Cet éminent chef dirige la violoniste Akiko Suwanaï dans le fameux Concerto de Tchaïkovski. Avec l’Orchestre de l’Opéra, il joue également l’Ouverture de La Scala di Seta de Rossini et poursuit son intégrale des symphonies de Beethoven par la 4e op. 60 (Le 21 oct. à 20h30 au Palais Neptune). On retrouve l’Orchestre de

Catanzaro et Valéria Bonafé, doublé d’un hommage à Robert Coinel (le 19 nov. à 20h30 à La Magalone Cité de la Musique )… À suivre : cela dure un mois !

© Agnès Mellon

Raoul Lay, à la tête de l’Ensemble Télémaque, consacre un mois entier (cosa rara !) à la composition. Il propose de faire entendre «des compositeurs locaux et lointains, jeunes et moins jeunes, hommes et femmes» en particuliers ceux du XXIe siècle, déjà bien engagé. Les auditeurs, plus ou moins avertis, suivent des ateliers de composition, des ateliers-concerts et envisagent un acte créateur s’inscrivant aussi bien dans l’héritage que la nouveauté ; les concerts rapprochent les styles par de fines concordances, temporelles, formelles, esthétiques, géographiques. La manifestation s’ouvre par une présentation conviviale agrémentée de courts opus (le 10 nov à 19h à la Mino-

l’Opéra de Toulon dans la fosse pour un Ciné-concert toujours apprécié (voir p.55). C’est Gabriel Thibaudeau qui compose et dirige la musique d’accompagnement du film muet Le fantôme de l’Opéra (1925) d’après le célèbre roman de Gaston Leroux. (le 6 nov. à 20h – déconseillé aux moins de 8 ans).

Le dernier des sept Contes du cycle initié par Roland Hayrabedian, entendu en juin dans sa version musicale (voir Zib 31), est créé sur le plateau du

Gymnase dans une mise en scène d’Aurélie Hubeau et Damien Caille Perret. «Antti Puuhaara est un mélange de cycle choral et de mélodrame inspiré d’une légende finlandaise» écrit le compositeur finnois Tapio Tuomela, qui cosigne le livret avec Erik Söderblom. Un «univers magique où se mêlent géants, devins, fille-oiseau et sorcière» sur un mythe héroïque et une musique interprétée par les voix de Musicatreize mâtinées de sonorités de harpe, de cordes et d’accordéon. Un livre-disque est également paru chez Actes-Sud (voir p 74).

J.F.

Opéra de Toulon 04 94 92 70 78 www.operadetoulon.fr

Dumay, Hendricks… Derwinger au piano, dans une habile mise en espace avec jeux de lumières et projections (le 21 oct. à 20h30 Opéra). Jérôme Pillement dirige un programme de musique sacrée d’opus de Poulenc, Landowski et Vivaldi avec Luc Antonini au continuo (le 31 oct. à 17h - Eglise des Carmes). J.F.

Opéra-Théâtre d’Avignon 04 90 82 81 40 www.operatheatredavignon.fr

Aux créneaux ! Le Festival de Saint-Victor se poursuit sous la nouvelle présidence de Jean Stéphane Bourgeat (et avec un nouveau paravent acoustique qui empêche le son de filer en arrière dans le chœur de l’Abbaye fortifiée). La Petite messe solennelle de Rossini est chantée par le Chœur Régional PACA avec un quatuor de solistes et son accompagnement singulier mêlant le piano et l’harmonium (le 21 oct. à 20h30). C’est ensuite le violoniste Laurent

Antti Puuhaara Le 4 nov. à 20h30 Le Gymnase, Marseille 0 820 000 422 6 www.lestheatres.net

© Guy Vivien

Le violoniste Augustin Dumay joue le Concerto de Beethoven avec Yeruham Scharosky à la tête de l’OLRAP dans la Symphonie de Bizet (le 15 oct. à 20h30 - Opéra). On n’a pas l’occasion d’entendre souvent, sur scène, le plus beau cycle de Schubert. Le Voyage d’hiver, sommet du romantisme, union intime de la poésie et de la musique. La soprano Barbara Hendricks chante les 24 poèmes, accompagnée par Love

J.F.

Korcia qui revient aux créneaux en compagnie de l’accordéoniste David Richard et du Quatuor Você pour un programme festif de musiques de Gershwin, Morricone, Rota, Grapelli, Chaplin (Charles), Vivaldi, Bartok…(le 10 nov. à 20h30). J.F.

Marseille 04 91 05 84 48 http://saintvictor.chez.com/

Jeune quatuor et belle enchanteresse Les quatre jeunes musiciens du Baroque dirigé par Paul Agnew, la Quatuor Modigliani ont, en peu d’années, fait leur place au panthéon des formations du genre. Cette saison, on les entend à plusieurs reprises à Marseille (25 janv. SMCM), Avignon (8 mars Opéra), mais c’est à Aix qu’ils débutent leur périple méridional avec l’opus 76 n°4 «Lever de soleil» de Haydn et Les Quatuors en la mineur op.13 et fa mineur op. 80 de Mendelssohn (le 19 oct. à 20h30). L’Orchestre Français des Jeunes

soprano Salomé Haller interprètent des extraits d’œuvres de Lully, Haendel, Haydn autour du personnage de la belle princesse de Damas et ensorceleuse Armide, tombée amoureuse du Croisé ennemi Renaud (le 4 nov. à 20h30). J.F.

GTP, Aix 04 42 91 69 69 www.legrandtheatre.net


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MUSIQUE

AU PROGRAMME

Électro

Méliès

Duo

Chopin

Hommage au père de l’électroacoustique : Pierre Schaeffer par Les Acousmonautes. Marseille. Le 15 oct à 18h30. Urban Gallery

Courts voyages animés par les sons mixés du saxo-clarinettiste Louis Sclavis et de l’orchestre khmer Phare Ponleu Selpak sur des courts métrages de Georges Méliès et du réalisateur américain surréaliste Charley Bowers. Briançon. Le 22 oct. à 20h30 au Cadran

Augustin Bourdon (violon) et Nina Uhari (piano) jouent un programme de Sonates de Mendelssohn, Schumann et l’incontournable chef d’œuvre de Franck (Sonate la majeur). Marseille Le 23 oct. à 17h. Foyer de l’Opéra

Le pianiste Abdel Rahman El Bacha joue des Valses, Mazurkas, Nocturnes, Polonaises, Ballade, Barcarolle. Toulon. Le 10 nov au Palais Neptune

04 91 37 52 93

Point d’orgue… Dernière flèches du 14e Festival d’orgue de Roquevaire : récital de Vincent Dubois (le 15 oct. à 21h), avant Diego Tosi (violon) et BaptisteFlorian Marle-Ouvrard aux claviers (le 17 oct. à 16h). Roquevaire 04 42 04 05 33 http://orgue.roquevaire.pagesperso-orange.fr

Opérette La compagnie Les Amoureux transis représente l’Opéra-Bouffe Gariné du compositeur Dikran Tchouhadjian, «l’Offenbach oriental» fondateur au XIXe siècle de l’opéra arménien. Une œuvre méconnue, jamais produite en français. Marseille. Les 16 et 17 oct à 14h30 Odéon 04 96 12 52 70 www.marseille.fr

Bénites Le cycle des Chants Sacrés en Méditerranée s’articule autour des Eaux Sacrées, on entend l’ensemble italien de musique médiévale Quattrocento pour des chants liturgiques et les turcs d’Häzineler dans des chants soufis (le 16 oct Eglise d’Ansouis), avant Juan Carmona (guitare flamenco) pour des chants de baptême (le 24 oct. à 18h au Temple de Lourmarin). 04 90 90 94 20 www.festival-durance-luberon.com

Insolentes ? Marier la viole et le sax au rock ou la vielle au luth africain serait une «insolence»… Bigre ! Draguignan. Festival des musiques insolentes Les 21 et 22 oct au Théâtre 04 94 93 55 45 www.theatresendracenie.com

Hommage Le compositeur Robert Coinel est décédé il y a un an. Des créations de ses compagnons musiciens et des opus de sa main sont joués en témoignage d’amitié. Marseille. Le 22 oct Auditorium Cité de la Musique Entrée libre sur réserv 04 91 39 28 28

04 92 25 52 52 www.theatre-le-cadran.eu

Bandes de quatre Le 22e Festival de Quatuors à cordes en Pays de Fayence se déroule, comme chaque automne, entre SaintRaphaël et les villages perchés de Seillans, Mons, Callian… Parmi la crème des formations internationales, la manifestation accueille, pour célébrer Mozart et Schumann les Quatuors Parisi (France), Prazak (République Tchèque), Arriaga (Belgique), Signum (Allemagne), Zemlinsky (République Tchèque), Leipzig (Allemagne) et Voce (France). Pays de Fayence. Du 23 au 30 oct 04 94 76 02 03 www.quatuorsenpaysdefayence.com

3x4 Après les Tchèques du Quatuor Prazak dans Borodine, Schulhoff et Dvorak (le 22 oct), place à deux formations plus jeunes pour le Week-end Quatuors au Méjan. Les Espagnols du Cuarteto Casals jouent Mozart, Bartok et La Jeune Fille et la Mort de Schubert (le 24 oct. à 11h) avant les Français du Quatuor Alma dans Haydn, Debussy et Mendelssohn (le 24 oct. à 17h). Arles. Chapelle du Méjan 04 90 49 56 78 www.lemejan.com

Violon Andrea Cardinale accompagné au piano par Alessandro Magnasco dans Tartini, Beethoven, Sarasate, Schumann et Granados. Trets. Le 23 oct Salle du château 04 42 61 23 75 www.lesnuitspianistiques.com

Ancien Au cœur de la 6e édition du Festival de Musique Baroque de Marseille un hommage est rendu au flûtiste Pierre Rampal (du 29 au 31 oct). Les concerts du festival sont produits par les artistes de l’Opéra de Marseille et du Conservatoire National à Rayonnement Régional. Marseille. Les 22, 29 oct et les 5 et 12 nov à 20h30, le 30 oct à 18h30, le 31 oct, les 7 et 14 nov à 16h. Basilique du Sacré-Cœur 04 91 14 66 76 (voir p.75)

04 94 93 55 45 www.festivalmusiquetoulon.com

04 91 55 11 10

Trio Le Trio Chausson joue Mozart Mendelssohn et Chopin. Marseille. Le 25 oct au Gymnase 0820 000 42 www.marseilleconcerts.com

Deux voix Ruth Baumgartner (soprano), JeanChristophe Maurice (baryton-basse) et Lily Guironnet (piano) proposent un choix de mélodies pour deux voix de Purcell, Dvorak, Mendelssohn, Schumann, Gounod, Saint-Saëns, Massenet… Marseille. Le 5 nov. Villa Magalone 04 91 39 28 28 www.citemusique-marseille.com

Liouba Timofeeva La pianiste russe joue Chopin, Schubert, Liszt, Rachmaninov, Prokofiev. Les Pennes Mirabeau. Le 7 nov. à 16h 04 42 02 55 14 www.lesnuitspianistiques.com

Lauréat Le jeune pianiste Guillaume Vincent lauréat du Concours Long-Thibaud 2009 donne un récital qui court de Beethoven à Messiaen. Nîmes. Le 8 nov au Carré d’Art 04 66 36 65 10 www.theatredenimes.com

Office L’Organiste et compositeur Thierry Escaich et l’Ensemble Sequenza 9.3 (chant grégorien) donnent un office imaginaire. Marseille. Le 8 nov Eglise des Réformés 04 96 11 04 61 www.marseilleconcerts.com

Campra 3e programme de Petits motets de l’Aixois, dont on célèbre la naissance il y a 350 ans, par l’ensemble soliste des Festes d’Orphée et pour clore l’année qui lui est consacrée. Aix. Le 9 nov Chapelle des Oblats 04 42 99 37 11 www.orphee.org

Mixtion Dans le cadre des Rencontres d’Averroès quatre musiciens Francesco Tristano, Murcof, Bachar et Rami Khalifé échangent entre deux pianos, des percussions et un Electronica. À partir d’œuvres de Bach, Byrd et Frescobaldi, un mélange de musiques classiques et électroniques. Martigues. le 10 nov. à 20h30 et 22h au Théâtre des Salins 04 42 49 02 00 www.theatre-des-salins.fr

Quintettes Mise en regard de deux Quintettes de Schumann et Chostakovitch par l’ensemble Des Equilibres. Aubagne. Le 10 nov au Comœdia 04 42 18 19 88 www.aubagne.fr

Brecht vocal Nada Strancar chante Brecht, non pas sur les musiques de Kurt Weill, mais celles du compositeur Paul Dessau (1894-1979). Marseille. Du 10 au 16 nov à La Criée 04 91 54 70 54 www.theatre-lacriee.com Nada Strancar © Christian Ganet


CONCERTS

MUSIQUE 33

Fontaine je boirai de ton eau Brigitte Fontaine © Francois-Xavier Emery

Silhouette de petite fille, bas résille, bottes de Maya l’abeille, marche mécanique, jouet blessé… Et une voix si fausse parfois qu’elle en est vraie, des textes qui ne cessent, acrobatiques, de se heurter, de se déconstruire, de se perdre, de se disséquer en une fascinante plongée où le sens émerge des non-sens mêmes… Esthétique d’accumulations déjantées, esprit d’escalier, glissements, dérapages, reprise des poncifs en coquillages nacrés de nouveaux mondes. «Arthur Rimbaud du top 50», avec la folie d’un Antonin Artaud : c’est Brigitte Fontaine. Capable de dénoncer les «roseaux malpensants», tout en «haïssant les chiens à poussette» ! Sous l’écorce des mots s’insinuent des interrogations existentielles, désespérées, «je dis je mais je ne sais pas du tout qui je suis». Le concert fut avant tout une lecture d’extraits de Nouvelles de l’exil, Le Bon peuple du sang ou de Portrait

de l’artiste en déshabillé de soie (à paraître chez Flammarion), à l’ombre d’une lampe de bureau, geste théâtral du doigt léché pour tourner les pages,

Comme une source Chaque année, Ecume organise un festival de Chants sacrés en méditerranée, variant les thèmes auxquels les différents participants doivent adapter leur programme. Pour cette 19e édition, le thème choisi est «comme l’eau qui coule» (voir p 30). Le Comœdia d’Aubagne accueillait le 3 oct dernier un double concert, grec et bulgare. L’ensemble grec Maye, spécialement constitué pour l’occasion essentiellement par des professeurs de musique traditionnelle (à Arta), offrait au public un beau florilège de musiques d’Asie Mineure, de Crète et un chant byzantin. La belle voix de la chanteuse Theodora Athanasiou prenait les inflexions des vieux enregistrements, les instrumentistes présentaient le Yayli tanbour, le Kemenche (une sorte de violon au très long manche et au corps rond), le oud, le ney (longue flûte en roseau), les percussions. Les

influences balkanique et orientale se mélangent pour donner une musique profondément originale : la Grèce occupa longtemps la côte d’Asie Mineure et ce n’est qu’après le sac de Smyrne que les grecs de ces régions revinrent en Europe… On retrouvait ensuite le groupe des Balkanes, qui proposait un spectacle entièrement renouvelé, dans le respect du thème, Arda, source ardente. Production plus sombre que la précédente, plus intérieure, avec des chants qui s’appuient sur des légendes bulgares, où il est question de jeunes filles qui s’endorment au bord des sources, de guerriers qui vont à la guerre, de lune qui retient les filles parties chercher de l’eau… de sorcières et d’eau magique… Une poésie profonde et belle, comme le jaillissement sourd d’une source enfouie. MARYVONNE COLOMBANI

Freud et sa chanteuse Je ne sais quoi est un récital étrange ! Natalie Joly fait revivre très joliment Yvette Guilbert, chanteuse populaire et polissonne qui inspira les chanteuses modernes de Piaf à Barbara, mais aussi le chant cabaret de Schönberg ou Kurt Weill, et fut abondamment croquée par Toulouse Lautrec. Natalie Joly reproduit avec une minutie exquise les poses, sourires, et surtout la voix parlée-chantée de son

modèle, qu’elle maîtrise parfaitement. On sait moins qu’Yvette Guilbert entretint une correspondance suivie avec Freud, venu plusieurs fois la voir à Paris, fasciné par l’impudeur assumée de ce répertoire qui parle de sexe avec plaisir. Fasciné aussi par la comédienne, par ce qui fait une artiste, proximité ou éloignement de son modèle… Bref Je ne sais quoi, qui cite mine de rien ces échanges épistolaires, © X-D.R possède une lecture à double détente tout à fait fascinante, relevant du plaisir mimétique -l’émotion est là, le rire, les larmes, au sens propre- et de la distanciation conceptuelle ! A.F.

Je ne sais quoi Jusqu’au 17 oct Théâtre de Lenche, Marseille 2e 04 91 91 52 22 www.theatredelenche.info

autodérision de l’auteur qui se lit, parce que l’on est toujours autre… Beau duo dialogue avec Areski Belkacem, accompagnement complice et détaché à la guitare de Yan Péchin… Elle «nous parle, bouche cousue», souveraine et déchirante, «bourrée d’alexandrins» et de folie dionysiaque, le public reprend en chœur Salam, Salam, puis elle s’en va mains nouées d’adieu, papillon qui replie ses ailes. Poupée cassée et sublime. MARYVONNE COLOMBANI

Concert donné lors de la journée d’ouverture des Correspondances de Manosque le 22 sept au Théâtre Jean le Bleu


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MUSIQUE

ACTUELLES | JAZZ

Et si Marsatac avait trouvé Son lieu avec le site de la Friche Belle de Mai ? Le labyrinthe urbain de la Friche s’harmonise bien avec le concept de ce festival pas comme les autres

La rue est à nous avec des esthétiques aux antipodes les unes des autres. Des ondulations du monde d’un Féfé se mettant tout le monde dans la poche pour une relecture surprenante de I got a woman de Ray Charles à la performance jubilatoire des SudAfricains de Tumi & The Volume, les habitués ont pu une nouvelle fois savourer la présence sur scène de Succes, pour ceux qui s’étaient remis de la prestation renversante des Shaka Ponk dont l’énergie et le jeu de scène époustouflant doivent encore résonner au travers des murs de la Cartonnerie. Pour un pari, il est réussi, reste à savoir si ce nouveau point de chute deviendra pérenne, ou si à terme il faudra s’exiler et voir encore plus grand…

© Agnès Mellon

Heureuse surprise, tant les atermoiements locaux ont mis en doute jusqu’au bout la tenue sur notre territoire d’une manifestation digne de sa réputation internationale, qui a encore attiré 21000 adeptes du 23 au 26 sept. Certes il n’est pas simple de se rendre à la Friche sans avoir recours à un véhicule, ce malgré la bonne volonté d’organiser une valse de navettes. Sans parking à proximité et sans vélos urbains, qu’on ne peut pas emprunter après minuit, il fallait être motivé pour garer ses roues ! Mais les trois niveaux différents reliés aux trois salles (Le Cabaret Aléatoire, la salle Seita, La Cartonnerie) et la déambulation de la rue intérieure offraient au festivalier de ce théâtre urbain un cloître à ciel ouvert géant, avec un espace vital qui fait souvent défaut à ce type de manifestation. Ceux qui n’ont pas pu entrer dans une Seita archi pleine et surchauffée pour écouter les étonnants performeurs locaux Nasser ne seront pas du même avis, mais l’avantage d’être à la fois dedans et dehors est considérable. Avec 57 formations au compteur, le Marsatac 2010 ne fait pas dans la demi-mesure et contente chacun,

FRÉDÉRIC ISOLETTA

Marseille Jazze ! La Cave est à deux pas de l’Auditorium de la Cité de la musique. Le trompettiste Christophe Leloil, après E.C.H.O.E.S, est déjà en rodage dans un autre projet : il forme le New Quartet Line 4 avec Eric Surmenian à la contrebasse, André Charlier à la batterie et au clavier Carine Bonnefoy avec laquelle il partage une grande complicité. Une musique

Francesco Bearzatti © Dan Warzy

Christophe Leloil © Dan Warzy

Jazz sur la Ville investit un lieu de plus à Marseille : l’Institut Culturel Italien a accueilli Francesco Bearzatti au saxophone et clarinette, accompagné du pianiste Oscar Marchioni. Un bon concert constitué de compositions personnelles de chacun des musiciens. Le standard There will never be another you, interprété d’abord par le piano en solo, sied bien au duo et procure une grande émotion romantique. Un hommage aussi à Sonny Rollins, Stan Getz... Le registre du saxo est volubile, les articulations inattendues, et pourtant évidentes. La mélodie est la règle de la soirée et la couleur reste très italienne. Ce concert a eu lieu le 5 oct …

chargée d’énergie où chaque musicien jouit d’une grande liberté mais où tout s’accomplit dans l’instant. Les compositions de chaque membre du groupe, telles Chasing Monsters, Sleepwalker, Lost in the Tube, Up Town... semblent questionner de la place de l’humain dans la vie urbaine. Est-ce une musique qui illustre les replis individualistes d’aujourd’hui ? Le quartet sait aussi installer des moments d’accalmie, comme dans la ballade Numbers interprétée tout en rondeur au buggle. Ce concert a eu lieu le 6 oct … Le Roll’ Studio, tout en haut du Panier, est une cave voûtée intime (environ 50 personnes) où l’accueil est chaleureux. Le guitariste Paul Pioli et le contrebassiste Christian Brazier ont proposé un duo particulièrement adapté à l’espace. Un jazz fait de compositions d’influences multiples. Le dialogue entre musiciens s’est étiré tout au long de la soirée sur des canevas harmoniques riches. Ce concert a eu lieu le 25 sept DAN WARZY Duo Pioli / Brazier au Roll'Studio © Dan Warzy


MUSIQUE

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Flâner à Saint Rémy En septembre, Saint-Rémy se voue au Jazz. Les oreilles du promeneur sont d’abord réjouies par une aubade avec fifres, tambourins, galoubets et costumes arlésiens au Château de Roussan. Puis, au gré de la flânerie, sur le site antique de Glanum ou sur les places du centre ville, près du Café Riche on s’attarde auprès d’un be-bop endiablé. On découvre, entre deux, de superbes galeries qui s’attachent à promouvoir l’art contemporain. Après ce préambule, le clou de la journée : Tania Maria et son univers onirique et sensuel. Dès les premières mesures, la chanteuse se révèle généreuse, volubile, puis expansive, exubérante. Les couleurs chaudes de sa voix, la qualité de la pulsion syncopée trouvent appui dans le toucher suave de la pianiste, qui sait aussi utiliser son instrument comme une percu. Marc Bertaux se

livre à la basse à des variations hallucinantes ; le trio, avec Edmundo Carneiro aux percus semble se livrer à une joyeuse partie de cache-cache, variant les impros comme pour mieux surprendre l’autre ; on suit une véritable conversation, facétieuse, avec ses ruptures, ses passages à l’unisson, ses instants d’accords savoureux, ses éclats de fureur rythmique. La voix de Tania Maria, véritable caresse sur les bossas novas, irradie de joie de vivre. Elle fredonne, siffle, imite une multitude d’instruments, murmure ou déclame en «gromelo», slame ; sa voix se transforme en orchestre, quand elle ne devient pas lyrique ; elle sait aussi s’effacer, n’hésitant pas à chanter hors micro pour mieux mettre en valeur le travail exceptionnel des autres musiciens, se bornant à ponctuer de quelques accords épicés leur fastueux délire créatif.

Tania Maria © X-D.R.

Décidément, une immense artiste que cette reine incontestée du Choro !

sept à Saint-Rémy-de-Provence

JEAN-MATHIEU COLOMBANI

Ce concert a été donné le samedi 18

Si l’on chantait ? Il est une tradition au Théâtre et Chansons : le passage à l’acte du spectacle par les stagiaires des ateliers de chant d’Isabelle Bloch-Delahaie. Au fil des ans, on les retrouve, on constate leurs progrès. Le cru 2010, L’autre versant de la colline, est particulièrement bon : des voix bien placées, un choix éclectique et bourré d’humour dans les pièces à interpréter. Le moteur à explosion, L’imparfait du subjonctif ou Prince de l’amûr de Chanson Plus Bifluorée… La mise en scène de chacune des prestations est intelligente, drôle, avec des mouvements d’ensemble remarquablement réglés. Le spectacle

ne s’endort jamais, variant les registres, établissant une progression qui permet à chaque artiste de montrer ses qualités propres. Un excellent travail ! Et le meilleur est à venir : Michel Melchionne avec son spectacle Chansons Bouts de Crayons, pour le jeune public (dans le cadre de Momaix, le 17oct à 15h), la qualité des textes et leur poésie n’est plus à mentionner… Mouron chante Brel, quinze années d’amour, les 6 et 7 nov pour une remarquable reprise des chansons de Brel. Les 27 et 28 nov, Coko, Tango des organes se départageant le corps de l’homme, avec un humour à la Devos. Et la reprise les 4, 5, 11

et 12 déc du très beau spectacle d’Isabelle BlochDelahaie, Malvina chante avec les loups (voir Zib’ 20) : c’est un moment d’intense poésie, à ne pas rater, si vous n’avez pas encore eu la chance d’y assister. MARYVONNE COLOMBANI

L’autre versant de la colline a été donné les 24, 25 et 26 sept

La bonne chanson Le Festival de la Chanson Française en est à sa 8e édition, et les concerts, souvent décentralisées autour d’Aix-en-Provence remportent un remarquable succès public. Si le festival fait appel à quelques têtes d’affiche comme Richard Gotainer ou Pierre Perret, il permet aussi de mieux apprécier des chanteurs dont l’œuvre n’est habituellement livrée que de manière fragmentaire. Ainsi Enzo Enzo, dont on connaît quelques titres bien diffusés, mais dont le spectacle entier est une pure merveille, avec de très beaux textes, (poétiques ou mordants, inénarrable «je hais les gosses !») une palette riche, couvrant de nombreux registres, une superbe présence sur scène; ainsi également L’art à Tatouille dont nous avons tous le souvenir, avec Mets de l’huile, s’est produit avec bonheur à Trets, festif et épicurien, qui «en connaît un rayon de lune» ! venant du pays de «la rouquette qui craque sous la dent»… Le festival sait aussi présenter de parfaits inconnus, comme le sympathique chanteur québécois Christian Sbrocca, qui interprète Trenet et quelques

Enzo Enzo © X-D.R.

unes de ses compositions ; ou Monsieur Lune, avec sa merveilleuse affiche à la Ernest Pignon Ernest, et son enthousiasme juvénile, son humour un peu décalé, son énergie, un bon rythme, de jolis textes, qui prennent parfois à rebrousse mode comme son Reviens pas !… Et puis il y a les groupes qu’aucune

radio nationale ne présente et qui drainent leurs fans, circulent avec efficacité hors des sentiers battus de la diffusion ; le groupe Bardan, avec un ensemble qui peut faire penser à Bratsch dans ses orchestrations, une belle dynamique, voix rauques, harmonica, et des chansons superbes, comme Quartier des vivants ou Vie bancale. Le concert à deux voix de Yves Jamait où les fans chantent toutes ses chansons, et Daniel Fernandez, une guitare magnifique, dans les registres du flamenco ou de la bossa nova. Des textes travaillés, une bonne dose d’humour, un esprit engagé vivifiant, on passe de la satire à la fresque sociale ou à l’instant poétique, très belle évocation de Dijon… Un ensemble qui a fait salle comble au Bois de l’Aulne, rappels sans fin… Décidément la chanson française nous porte bien ! MARYVONNE COLOMBANI

Le Festival de la Chanson Française s’est tenu dans le Pays d’Aix du 1er au 9 oct


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MUSIQUE

ACTUELLES

Joe Jackson © X-D.R.

La Fiesta des Suds est toujours synonyme de réchauffement climatique assuré dans les méandres surchauffés du Dock des Suds. Du 15 au 23 oct avec six soirées (ou nuits avec un tram prolongé jusqu’à 2h30) au programme, sans compter les expositions, rencontres et projections, le rendez-vous incontournable des marseillais et de nos voisins plus ou moins proches se veut toujours aussi éclectique et méditerranéen. Avec un budget de près d’1.2 million, plus de 60% de recettes propres (dont 380 000 euros de billetterie), la fiesta affiche une belle santé financière : le conseil général reste le seul subventionneur, mais ne ménage pas son engagement qui s’élève à 500 000 euros. Dans ce contexte-là il est sans doute maladroit d’affirmer, comme l’a fait son Directeur Bernard Aubert lors d’une conférence de presse très courue, qu’il ne se passe rien à Marseille musicalement en dehors de la Fiesta, et de Babel Med. C’est réduire vraiment très vite le champ musical à celui des musiques du monde (quid du jazz, des musiques contemporaines, baroques, classiques, lyriques qui rassemblent des publics nombreux toute l’année ?), et rayer du même geste le succès des musiques actuelles, des salles indépendantes, de Marsatac, du Mimi, et des quelques dizaines de concerts et festivals qui animent la vie musicale marseillaise. Mais cette déclaration à l’emporte pièce relevait visiblement du désir légitime d’obtenir plus encore pour ces musiques-là, métissées, permettant à chacun de découvrir la culture de l’autre, mais aussi

Arno © Danny Willems

Tout est au Sud !

de s’en laisser contaminer. Pour preuve le programme : en préambule une soirée d’ouverture à l’accent du sud, avec Ahamada Smis et les frangins de Zebda (15/10), puis le rockeur belge à texte Arno qui fera figure d’extraterrestre à côté du blues occitan de Moussu T e Lei Jovents (16/10). L’icône postpunk Joe Jackson (20/10) et le légendaire saxophoniste Wayne Shorter (21/10) seront à surveiller de près avant la nuit aux couleurs africaines animée par Youssou N’Dour & Le Super Etoile de Dakar et secondé par Dub Inc (22/10). L’embrasement final à tendance électro des Gotan Project, du déjanté Bonaparte (voir p 73) et des

Les missionnaires de la musique Sous l’impulsion de Tandem, Scène de Musiques Actuelles Départementale, le 14e Forum des Musiques Actuelles bat son plein de l’épicentre Toulonnais jusqu’aux confins du Var. Itinérant du 6 au 23 oct avec des points de chute à Draguignan,

Brignoles et Saint-Raphaël, le chapiteau plein de surprises se centrera sur l’agglomération toulonnaise jusqu’au 20 nov (Toulon, Hyères, La Seyne, La Valette, Ollioules, La Garde, La Crau, Six-Fours, Le Pradet, Le Revest). Pouvant accueillir 300 personnes, cette immense tente sonore est à visiter. L’action culturelle y est de rigueur, et Tandem programme des concerts pédagogiques destinés Appletop © X-D.R.

couche-tard des platines The Supercharger & Distropunx DJ (23/10) dément formidablement le reproche que l’on pouvait faire parfois à certaines éditions précédentes : la Fiesta, ouverte sur le monde entier, prouve bien que les Suds sont partout ! FRÉDÉRIC ISOLETTA ET AGNÈS FRESCHEL

www.dock-des-suds.org

tant aux primaires qu’aux collégiens et lycéens, autour de plusieurs histoires : les musiques actuelles en partant du blues, la percussion de l’Afrique aux Caraïbes et les technologies appliquées aux musiques actuelles. De quoi intéresser non seulement les enseignants de musique mais aussi ceux d’histoire, de technologie, de physique ou de français avec trois productions estampillées Tandem qui tournent régulièrement dans l’année. Avec une proximité et une convivialité rare lors des grands rendez-vous musicaux, le FMA entend faire du partage son credo avec un accès gratuit, une proximité des artistes et une intégration de tous types de public. Cette véritable tournée sous chapiteau accueillera également des groupes locaux et régionaux rompus à la scène comme les excellents Mina May, Appletop, Chemin du désert, Kami… dans des styles variés allant du psyché rock à l’électro jazz. De même une exposition sur le rock des 70’s côtoiera des rencontres autour des risques auditifs. Un chapiteau où il fera bon flâner quel que soit votre âge, au risque de vous cultiver sur le monde des musiques actuelles ! F.I.

www.tandem83.com


AU PROGRAMME AIX Théâtre et Chansons : Michel Melchionne (17/10), Mouron chante Brel (6 et 7/11) 04 42 27 37 39 www.theatre-et-chansons.com ARLES Cargo de nuit : Alice Russell (15/10), 1973, Lilly Wood & The Prick (22/10), Anoraak, Minitel Rose (23/10), Brain Damage (29/10), Babet (5/11), Disiz Peter Punk (6/11), Cascadeur, The Bewitched Hands (12/11), Sly Johnson (13/11), General Elektriks (16/11) 04 90 49 55 99 www.cargodenuit.com AVIGNON Théâtre du Chêne Noir : Le Cuarteto Cedron (4 et 5/11) 04 90 82 40 57 www.chenenoir.fr Les Passagers du Zinc : Festival la Triplette des Passagers avec Izia (14/10), Hocus Pocus (15/10) et Christophe (16/10), Jaqee, Kzé Négré (22/10), Twin twin, 69 (23/10), les 10 ans de Faya Reflex (29/10), Disiz Peter Punk, Renga feat. Dr Mozz (5/11), Madjo, Brune (6/11), Joyce Jonathan, Peau (12/11), Pony Pony Run Run, In the club (19/11) 04 90 89 45 49 www.passagersduzinc.com BERRE L’ETANG Forum des jeunes et de la culture : Victor Démé (29/10), Vertigo Songs, Las Hermanas Caronni (6/11), ciné musique avec la projection de O’ Brother de Ethan et Joel Cohen, suivi du Carolina Chocolate Drops (18/11 à 18h30 et 21h30) 04 42 10 23 60 www.forumdeberre.com CAVAILLON Théâtre : Jeanne Cherhal (5/11) 04 90 78 64 64 www.theatredecavaillon.com CHÂTEAU-ARNOUX Théâtre Durance : Roberto Fonseca (5/11) 04 92 64 27 34 www.theatredurance.com CHÂTEAUNEUF-DE-GADAGNE Akwaba : Beast, Emilie Chick (15/10), Dele Sosimi et le Hot club afrobeat orchestra, Soul freak brothers (22/10), Elysian Fields, Jesus is my girlfriend, Phi (24/10), Rahzel/Oddateee dj set (4/11), Kiddus I, Derajah, Selecta solo (6/11) 04 90 22 55 54 www.akwaba.coop ISTRES L’Usine : U-Roy (21/10), Hocus Pocus, Smooth (30/10), Rod Taylor and the positive roots band (5/11), Kaly live dub (6/11) 04 42 56 02 21 www.scenesetcines.fr LUNEL Salle Georges Brassens : Festival de mandolines (du 27 au 30/10) 04 67 42 06 81 www.mandolinesdelunel.com MARSEILLE Théâtre La Criée : Diane Reeves (2/11), Nada Strancar chante Brecht/Dessau (10 au 16/11) 04 91 54 70 54 www.theatre-lacriee.com Cabaret Aléatoire : Dj Mehdi, Riton (16/10), T Raumchmiere live band, Markovo (21/10), Mas Professor (30/10), W.A.S.P. (4/11), Rahzel, Underkontrol, A SM (5/11), High Tone (6/11), Broken Social Scene, The Bewitched hands (10/11), !!! Chk Chk

Chk (13/11), Shannon Wright (15/11) 04 95 04 95 09 www.cabaret-aleatoire.com Espace Julien : The swell season (14/10), Apocalyptica (16/10), The Dillinger escape plan (17/10), John Mayall, The Yardbirds (20/10), Moriarty, Kid Francescoli (22/10), Sexion d’Assaut (26/10), Sophie Hunger (27/10), Izia (4/11), Joby Bernabe (6/11), Raul Paz (11/11), The Drums (15/11) 04 91 24 34 10 www.espace-julien.com La Mesón : Fabrizio Bosso quartet (17/10), tablao flamenco Manuel Gutierrez (6/11), Otkhon (7/11), carte blanche à Manu de Barros (16 au 20/11) 04 91 50 11 61 www.lameson.com MARTIGUES Théâtre des Salins : Rencontre entre Francesco Tristano, Rami et Bachar Khalifé et Murcof pour un concert classique suivi d’une performance électro (10/11), Incisif #1 : Lilly Wood & The Prick, Emilie Lesbros (12/11) 04 42 49 02 00 www.theatre-des-salins.fr MAUBEC La Gare Adama Cissoko et les Blakoros, La Mauvaise herbe (15/10), Nathalie Natiembé (23/10), Trempoly (10/11), Samenakoa (12/11) 04 90 76 84 38 www.aveclagare.org NÎMES Théâtre : dans le cadre de l’Agglo au rythme du jazz, concert de Chick Corea (18/10) 04 66 36 65 10 www.theatredenimes.com

MUSIQUE

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OLLIOULES Châteauvallon : Bibi Tanga and the Selenites (23/10), Black rock coalition orchestra, a tribute to the black women songwriters (5 et 6/11), Roberto Fonseca (13/11) 04 94 22 02 02 www.chateauvallon.com PORT-DE-BOUC Théâtre Le Sémaphore : Sam Karpienia, extatic Malanconi (6/11) 04 42 06 39 09 www.theatre-semaphore-portdebouc.com SAINTE-MAXIME Le Carré : David Murray end the Gwo-Ka Masters (17/10), Le nouveau trio gitan & Florin Niculescu (23/10), Black rock coalition orchestra, a tribute to the black women songwriters (7/11) 04 94 56 77 77 www.carreleongaumont.com SALON-DE-PROVENCE Portail Coucou : Tremplin Buzzbooster (16/10), Pakistan express, The Yolks (23/10), Dhoad gypsies from Rajasthan (2/11), Alabama Slim (6/11), Anything Maria, Lily wood and the Prick (13/11) 04 90 56 27 99 www.portail-coucou.com TOULON Oméga Live : Chewy chocolate cookies, Manege 88, The Slutgarden, Beat Wankers, Pixel Face (16/10), Local Heroes 16 : Voodoo, Heiki (22/10), Local Heroes 17 : Lag, Run, P-Troll, Hollywood Sekks (6/11), Pigalle, Bat Point G (19/11) 04 98 070 070 www.tandem83.com VENELLES MJC : Evelyne Gallet (6/11) 04 42 54 71 70

Et en jazz... ARLES Jazz’Trium : Louis Winsberg-Lilian Bencini-Olivier Renne. Masterclass durant le week-end du concert (5/11) 0490 541 205 www.radio3dfm.com AVIGNON AJMI : Workshop de Lyon / Slogan (14/10), Tom Rainey Trio (19/10), Noah Rosen trio (22/10), Christian Brazier 4tet (29/10), Une année dans la vie de Wayne Shorter, écoute et conférence-débat animée (4/11), Loïc Fauche 5tet (le 5/11) 04 90 860 861 www.jazzalajmi.com HYERES Théâtre Denis : Bill Carrothers (piano solo) (16/10) 04 94 007 880 www.jazzaporquerolles.org MARSEILLE Jazz sur la ville : Jusqu’au 17 oct. Programmation des derniers concerts sur www.myspace.com/jazzsurlaville Cité de la Musique : Expo Histoires de Batteries ; Olivier Temime (15/10), Simon Bolzinger 4tet - Inca Mandinga (l4/11), Gildas Boclé Trio (15/11) 04 91 392 828 http://pages.citemusique-marseille.com Cri du Port ; Expo Instants Jazz par Denis Dalmasso ;

Choumissa invite Maria Simoglou (14/10), Emile Parisien 4tet (10/11) 04 91 50 51 41 www.criduport.fr Inga des Riaux : Fabienne Zaoui e beijo accustico (15/10), Juste un swing (22/10), Abram jazz 4tet (29/10), Phil Good (5/11), Arias Parisi Alamel trio(12/11) 06 07 575 558 www.inga-des-riaux.com Station Alexandre : Carte blanche à Sylvie Paz (Bal Latino) (6/11) 04 91 009 000 www.station-alexandre.org Centre Edmond Fleg : Roy Swart’s cabaret-jazz (16/10) 0491 735 781 www.jazzclubprovence.com VITROLLES Moulin à Jazz : Robin Nicaise 5tet (16/10), Enzo Carniel invite Nicolas Folmer (13/11) 04 42 796 360 www.charliefree.com EN LUBERON Du 15 au 24/10 : Rural Detour en Vaucluse / 9e édition avec Helène Labarriere et Violaine Schwartz. Huit villages traversés de St Saturnin à Bonnieux. www.luberonjazz.net


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CIRQUE

ISTRES | NONO | ARLES | MERLAN | STE MAXIME | GAP

Monstrueusement Dada Pour Madona Bouglione, le cirque a «la beauté de l’innocence et la force de la vérité», c’est un art qu’elle a su rendre contemporain tout en conservant sa dimension traditionnelle. Avec Cirque O Présent, sorte de maison de tous les cirques ouverte à tous les artistes, de toutes les disciplines, dont elle est directrice artistique, elle a créé à Istres, après un mois de résidence, Pentimento, sur la musique du Lac des cygnes de Tchaïkovski. Sur scène onze artistes revisitent le ballet, insérant au cœur des numéros traditionnels de trapèze, acrobaties, clowns ou encore jonglage une poésie vibrante et inventive par le biais de la vidéo notamment –quel jeu délicat entre la projection d’une fleur et un clown jardinier !-, de la danse, d’effets visuels impressionnants et délicats, telles ces boules géantes descendues des profondeurs du théâtre jusque sur la scène… Un cirque délicat et nuancé. DO.M.

Mister Monster s’est joué au Théâtre d’Arles le 9 oct

Pentimento a été créé au théâtre de l’Olivier, à Istres, du 1er au 3 oct

Complètement NoNo ! Quand les NoNo font leur cirque le spectateur croit devenir fou, perd l’équilibre, rêve tout haut et même se met à croire à l’impossible. Il assiste à une fable poétique et ludique composée de minuscules sketches -absolument irrésistibles- et de grands numéros de cirque traditionnel -voltige, équestre, manipulation, jonglage. Mais dans cette rutilante parade quelque chose cloche,

Un cygne des temps

un grain de sable enraye la belle mécanique… des situations totalement décalées, des personnages loufoques, des skieurs égarés, des souris blanches glissées dans le pantalon, un troupeau de culottes bouffantes, des mines patibulaires qui jouent des maracas ! Et la liste n’est pas exhaustive car l’imaginaire des NoNo est un puits sans fond. Ahurissant le duo-duel © Agnès Mellon

avec le cerceau, croquignolesque le crooner déjanté, assourdissant le battle aux 13 paires de sabots de bois. Ah le grand méchant loup, il ferait pleurer de rire le plus craintif des chérubins ! Deux heures durant, le public reste scotché sur son siège prêt à décoller sur une simple injonction de ces personnages farfelus. Car la piste circulaire est devenue leur terrain de jeux favori, livré à des numéros d’acrobaties puisés dans un vieil imagier, peuplé de machines-objets et d’un défilé ininterrompu de petits gestes tonitruants et de grosses carcasses muettes (tout est dans cette confrontation des contraires). C’est Zazie égarée au cirque et Jarry prêtant sa Machine à décerveler à quelques irréductibles rêveurs. MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

Les NoNo font leur cirque jusqu’au 23 octobre Théâtre NoNo, Marseille 8e 04 91 75 64 59 www.theatre-nono.com

Pentimento © Bruno Perroud

DELPHINE MICHELANGELI

Mister Monster © Yvette Rotscheid

À partir d’un conte médiéval, la cie Anomalie &… dirigée par Jeambenoix Mollet, associée à nouveau à Philippe Eustachon (les Witotos), a créé une fable fantastique, physique et très dadaïste. Si dans le spectacle Mister Monster, l’intention est «de révéler le monstre qui est en chacun de nous» en réunissant une fine équipe à cheval (à dada ?) entre arts du cirque, danse et théâtre, le résultat nous laisse immergés dans un entre-deux volontaire et absurde du «monde moderne». L’histoire de Valentin et Orson (jumeaux séparés à la naissance par une ourse dans la forêt) est prétexte à élucubrations sur le plateau, découpé en deux espaces. Habitants de la ville et du réel en avant-scène se confrontent à la forêt lointaine, ses mystères et ses fantasmes. Chacun des 6 personnages puisera dans ce monde sauvage son propre faune et sa part d’ombre. Ils se parlent à voix basse, observent cet ailleurs muséal et fantasmé, dans lequel ils basculent chacun leur tour, pour devenir des êtres à poils, découvrant leur animalité. Autour de Pierre Palmi, à poil et barbu, qui rugit sans rougir et se laisse tartiner de mousse à raser par le «monde social», une tribu chevelue qui saute partout, se pend aux branches, fait le show entre galipettes, clowneries, pop corn, acrobaties instantanées. Humour et dérision sont tapis dans chaque recoin, servis par une bande son «au poil» de Thomas Turine, organique, cardiaque, vitale. Un peu décousu, certes, ce théâtre de recherche décloisonne avec gloutonnerie les arts pour servir un propos ambitieux sur la nature humaine. Obscure et parfois incohérente.


Homomorphes Le Merlan retrouve ses humeurs vagabondes ! Outre les quatre portraits de ville qu’il accueille avec Lieux publics et La Friche dans divers lieux de Marseille (voir p 43), le théâtre retourne dans le troublant Muséum d’Histoire Naturelle de Marseille… Michael Cros y installe un Zoo étrange, des cages aux barreaux symboliques ou réels, ces corps dont la chaleurhumaine sera numérisée, apparaissant comme une empreinte numérique, ou une sensation réelle… Corps plastiques, de danseurs, d’acrobates, de monstres de foire, prisonniers ou libres. Une déambulation à accomplir à la vitesse de son choix et de ses attentes : pour trente minutes, ou trois heures…

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Zoo chaleurhumaine Du 28 oct au 4 nov de 19 à 22h Museum d’histoire naturelle, Marseille 4e 04 91 11 19 30 www.merlan.org

Zoo chaleur humaine © X-D.R.

Avant les Roms Après s’être attaché en début de saison au sable moite des légionnaires (voir p 9), le Carré emmène sur la route des peuples nomades ; avec une exposition, un conte musical tzigane, du grand jazz manouche et le Circus Klezmer, qui avait enchanté Massalia il y a deux ans. Un spectacle tout public qui met en scène un mariage Yiddish au son si caractéristique des clarinettes Klezmer. Avec quelques numéros de jonglage et d’acrobatie virtuoses, intégrés dans une narration et un univers poétique et burlesque. Autour de roulottes, fières de l’être, mémoire d’une Europe centrale éradiquée par les nazis. A.F.

Les Fils du vent du 18 au 24 oct Carré Léon Gaumont, Sainte Maxime 04 94 56 77 77 www.carreleongaumont.com

Oh le joli duo! Il était une fois une acrobate rêveuse qui passait à travers les miroirs, outrepassant les surfaces réfléchissantes au son d’un piano qui accompagnait ses tours… Melissa Von Vépy offre un moment de pure virtuosité suspendue, une incarnation fugitive de la grâce… qui redore et restitue la magie cruelle des miroirs fabuleux. A.F.

Miroir miroir Les 12 et 13 nov à 19h La Passerelle, Gap 04 92 52 52 52 http://theatre-la-passerelle.eu

Miroir Miroir © Christophe Raynaud De Lage

Réfléchir davantage




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ARTS DE LA RUE

PETIT ART PETIT | GARDANNE | SALON

Dans le vent ! qu’elle a rencontrés au cours de sa résidence dans le quartier. Plus loin, l’atelier d’écriture de C’est la faute à Voltaire permettait d’inventer un nouveau destin aux personnages de contes qui se trouvent à l’étroit dans leur histoire. Tantôt, marionnette de taille humaine venue de Lille et son créateur Éric Bézy, proposait des vidéos-performances filmées dans le quartier au milieu des habitants. Le chien Bébert et son maître Lolo de la Cie Les Cousins ont réjoui petits et grands tandis que Cirkatomik fourguait aux festivaliers des inventions destinées à les protéger de divers désagréments. Cocasse ! CHRIS BOURGUE

Le Festival a eu lieu le 25 septembre

© Chris Bourgue

C’est dans un mistral vivifiant que s’est déroulé Petit Art Petit, organisé par l’association Lézarap’art, au cœur du quartier des Aygalades (Marseille 15e). Familles et curieux ont été accueillis pour une journée conviviale autour d’un pique-nique géant dans le parc arboré de L’Oasis. Des installations plastiques s’accro-chaient sur les troncs des arbres et dans les feuillages, produites par des ateliers participatifs menés avec les écoles du secteur. D’autres ateliers, éphémères, permettaient à chacun de se lancer dans la création sans idées préconçues : réalisation d’une fresque sur le thème du Jardin des délices de Bosch, modelages en argile, gribouillages géants en osier... Pascale Mijares, artiste invitée en collaboration avec le FRAC, a réalisé pour sa part une fontaine avec une batterie de cuisine de récup, et une sculpture faite de tiroirs, comme autant de récits des habitants

Salon, rues et château

© Delphine Michelangeli

Onze compagnies régionales et étrangères, essentiellement circassiennes, ont investi pendant 3 jours les rues de Salon, transformant l’espace public en terrain d’expression artistique gratuit. Une volonté municipale de poétiser l’espace urbain et démystifier les artistes en instaurant de façon pérenne ce rendez-vous déambulatoire dans chaque recoin de la ville afin, d’après Jean-Claude Fabre, élu à la culture, «que les gens circulent et redécouvrent encore plus la ville». En ouverture de cette 2e édition, une forme monumentale, frontale et fixe avec Schraapzucht joué deux soirs consécutifs au cœur de la splendide cour du château de l’Empéri. La com-

pagnie hollandaise Tuig a proposé une étonnante machine à remonter le temps à qui il ne manquait que la parole. Une

cordes, poids, grande roue et poulies, opérée par trois personnages plutôt hostiles, rameurs de galères qui chercheraient à nous prendre dans leurs filets. En dessous, un comédien s’agite au milieu des chaises, tables, transats et fenêtres, qui montent et descendent magiquement, jusqu’à devenir lui aussi l’objet des cadenceurs. Un bric-à-brac incroyable qui touche surtout par son incroyable machinerie visuelle. DELPHINE MICHELANGELI

Salon Public a eu lieu du 1er au 3 octobre à Salon-de-Provence

structure en bois qui devient le théâtre d’un monde mobile, rythmé au premier étage par une manipulation savante de

… et tout le tremblement ! 16h tapantes place de l’église, un cortège étrange se met en branle. Deux personnages d’un autre temps défilent sur de drôles de destriers, suivis d’une foule nombreuse et complice… Musique ! Le coup d’envoi est lancé pour cette nouvelle édition du festival des

arts de la rue de Gardanne. Entre 16h et 23h les spectacles se succèdent et même s’entrecroisent. Il y a du théâtre avec La célèbre histoire de Don Quichotte et Sancho Panza jouée en totale interaction avec le public par la compagnie CME, dans une ambiance Le GUID © X-D.R.

simple de détente et de divertissement. Et puis les Clowns de la compagnie Les Nez En Plus interviennent tout au long du festival en faisant des blagues au public. Sur la place devant la mairie, Les Mains Nues de l’Orchestre vocal de la Compagnie Traction-Avant chantent, dansent et rythment une balade à petits pas, tous de pois, rayures et cachemires vêtus. Vient ensuite le moment de la danse : le GUID, Groupe Urbain d’Intervention Dansée d’Angelin Preljocaj, amène son répertoire dans la rue afin de faire découvrir au plus grand nombre quelques principes et pages marquantes de danse contemporaine. Entre trois extraits de spectacles qu’ils présentent, s’intercalent deux compagnies de danse, l’une dynamique et collective de hip hop et l’autre en duo. Par la proximité des représentations, on s’attend à un dialogue dansé où cha-

cune d’entre elles va utiliser le contexte particulier et l’espace de la rue. Mais il s’agit plutôt d’une succession de chorégraphies, et chacune s’y exprime avec un style très marqué. Souvent avec talent, sachant ainsi satisfaire tous les publics. Le public se presse à chacune des prestations en essayant de ne pas en perdre une miette ! Beaucoup s’étonnent, rient, apprécient. Le festival se poursuit après une petite pause «dîner» par une déambulation acrobatique et pyrotechnique où chaque engin présenté semble sortir d’un siècle passé, au temps où Léonard De Vinci imaginait des machines extraordinaires. CLARISSE GUICHARD

Tremblement de Rue s’est déroulé le 2 oct à Gardanne


GYMNASE | LE MERLAN | LIEUX PUBLICS

ARTS DE LA RUE

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Défie-les ! Ouvrir la saison avec un groupe d’amateurs qui reprennent l’idée d’un défilé de mannequins ? L’idée semblait tape-à-l’œil et démago ! Rares sont ceux qui savent jouer pudiquement des maladresses des nonprofessionnels, et il leur fallait encore subvertir les règles de la représentation/marchandisation des corps… Le propos de la cie T-public est néanmoins d’une limpidité surprenante : sur une scène retrouvant le proscenium anglo-saxon du défilé de mode -pour voir sous les jupes et zyeuter les jambes, encadrés par des compressions de bouteilles en plastiques, défilent non stop les corps de ces amateurs qui ont sacrément bossé, et savent ce qu’on leur fait faire. Survêtus pour se stripteaser comme des pelures d’oignons, voilés pour mieux contraindre leur érotisme, affublés de sacs sur la tête, de codes barres, de prothèses de membres qui les rendent monstrueux, ils mettent au clair les règles absurdes du genre. En affichant leur monstruosité, mais surtout en assumant tranquillement la présence sur scène, dans ces positions là, de leurs corps non formatés. Beaux, laids, gros, imparfaits, nus parfois, simplement, parodiant sans y croire les déhanchements démarches provocations et airs boudeurs des professionnelles de la mode : celles qui s’affichent sur nos kiosques, nos écrans, dans nos rues, et jusqu’à la tête féminine de l’État, modèles de rien, omniprésentes…

© Agnès Mellon

Le défilé de marques, coproduit par le Merlan, s’est déroulé lors du Préavis de désordre urbain le 17 sept, et pour l’ouverture du Gymnase le 24 sept

A.F.

Petits actes subversifs Les premiers jours de Small is beautiful interrogent notre quotidien avec force et pertinence… Roger Bernat proposait avec sa Sirène qui ouvrait les festivités, puis en soirée, de mettre sur la place publique des scenarii peu innocents ! À midi, équipés de casques, ceux qui possédaient un billet se Small is beautiful © Agnes Mellon

voyaient encerclés, puis poursuivis par des «loups» affamés (voir couverture). Le soir le jeu se faisait plus personnel, les questions plus directes (avez-vous peur des arabes ?), voire carrément intimes (vous caressez-vous le sexe le matin ?), les attitudes des participants donnant clairement à voir leurs réponses impudiques, ce qui opéra des rapprochements étonnés entre jeunes et mûrs, pauvres et installés, sans choquer ceux qui gentiment refusèrent d’entrer dans le jeu… Sur les Escaliers de Saint Charles, d’autres happenings : les artistes descendent les marches, incongrus, superbes ou burlesques, la foule grossit, s’arrête, hausse les épaules ou applaudit au cadeau. Stephen Bain, sur le Port, propose un thé et une conversation, very british même lorsqu’il se plie en quatre… Un très beau début de petites choses, et d’autres se préparent : l’ANPU a semé ses questionnaires à Martigues, Aubagne, et Marseille après avoir analysé Port-Saint-Louis. À partir du 13 oct les réminiscences latines vont s’afficher sur les murs de nos monuments, visibles seulement si vous prenez le petit train… Et puis il y aura, en coproduction avec Le Merlan, le collectif Berlin. Qui vient d’Anvers, comme son nom l’indique, et propose 4 portraits de villes particulières, coproduits conjointement par le Merlan et Lieux publics : Iqaluit s’installera du 13 au 23 oct au Palais de la Bourse, tandis que Jerusalem et Bonanza (village texan a priori paradisiaque, mais traversé d’incroyables conflits) projetteront leurs ombres et leurs interventions à La Friche du 19 au 23 oct. Le

cycle Holocène, et Small is beautiful, se termineront du 20 au 23 oct Place de la Major avec le spectacle sous chapiteau sur la capitale Russe. Moscow, et sa violence, et sa beauté. A.F.

Small is beautiful Jusqu’au 23 oct 04 91 03 81 28 www.lieuxpublics.com Cycle Holocene Jusqu’au 23 oct 04 91 11 19 20 www.merlan.org Collectif BERLIN © Thomas Legreve


CAHIER JEUNESSE

Les jeunes spectateurs et leurs familles peuvent picorer à l’envi dans le menu Mômaix 2010 composé par 7 structures aixoises (du 13 oct au 18 déc). De la danse avec la dernière création de Michel Kelemenis (voir p 46) et les Petites histoires.com d’un virtuose du hip hop Kader Attou. La chanson se pare de toutes les couleurs depuis les Chansons bouts de crayons de Michel Melchionne jusqu’aux élucubrations verbales de Corentin Coko (Tango des organes) en passant par Isabelle Bloch-Delahaie (Malvina chante avec les loups). À moins que la curiosité enfantine ne soit titillée par le portrait d’Armide l’enchanteresse dessiné par l’Orchestre français des jeunes Baroque à travers les œuvres de Lully, Haendel et Haydn (concert pédagogique) ou le pétillant opéra d’Offenbach Orphée aux enfers… Cette année, conte, théâtre et marionnette se taillent la part du lion ! Les comédiens du Théâtre des Ateliers partagent autour d’un goûter leur Saison Russe, les mots de Philippe Dorin (Dans ma maison de papier), Wajdi Mouawad (Pacamambo) et Ulrich Hub (L’Arche part à 8 heures) tintinnabulent sur scène. Parfois même il y a des images immobiles et des mots muets mélangés comme dans La Trafiquante. Plus spectaculaire, le Slava’s Snowshow parade en tête des festivités.

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M.G.-G.

Mômaix 04 42 91 99 19 www.aixenprovence.fr

Époustouflant

La Trafiquante © X-D.R

Éclectique !

Mamanbobo

Et si le «pays du jamais jamais» de Peter Pan ressemblait à un bric-à-brac de canapés usés, à un vaisseau fantôme et des libellules plus belles que Betty Boop ? Et si une joyeuse tribu de 6 acteurs parvenait à rendre plus vraie que vraie l’illusion du théâtre au point qu’une fois le rideau tombé, on tangue encore ? On croit dur comme fer aux rêves comme la famille Darling ? Et si on se prenait pour de méchants pirates, une bande de gamins insolents, des Indiens ? Et si on jouait jusqu’à l’épuisement, emporté par la malice des comédiens, les trouvailles de la mise en scène, le rythme jubilatoire…

Lucie a 12 ans lorsqu’elle perd sa grand-mère adorée, Marie-Marie, emportée par la Lune. Persuadée que la Mort va venir la chercher à son tour, la jeune fille l’attend pour lui casser la gueule ! Et continue à veiller sur elle… Comment mettre des mots là où il difficile de s’aventurer ? Comment dire la candeur et la rébellion, la souffrance et l’insouciance ? L’auteur Wajdi Mouawad a choisi de créer un hymne à la vie, ici mis en images et en jeu d’ombre et de lumière par la jeune metteure en scène Marie Provence. Pacamambo dès 9 ans 6 nov 17h Théâtre du Jeu de Paume, Aix 0 820 000 422 www.lestheatres.net

Peter Pan ou le petit garçon qui haïssait les mères dès 8 ans 2 nov 19h Théâtre Antoine Vitez,Aix 04 42 59 94 37 http://theatre-vitez.com 10 nov 20h30 Le Cadran, Briançon 04 92 25 52 52 www.theatre-le-cadran.eu

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Magique

PeterPan © Agnès Mellon

En 2002, Slava’s Snowshow créait l’événement hors les murs du Jeu de Paume. Depuis, sa tournée dans le monde continue ! L’épopée de ces quinze clowns au nez rouge, avec bulles de savon, gigantesques toiles d’araignée et tempête de neige marche à coup sûr car le show de Slava allie la performance à la poésie, une profonde tristesse à un immense bonheur, l’absurde au surréalisme. Chaque scène est jouée comme un tableau, chaque geste comme un poème, chaque décor un symbole : Slava a l’art de nous ramener au paradis perdu de notre enfance. Slava’s Snowshow 9, 12 et 14 nov 20h30 10, 11 et 13 nov 15h et 20h30 Grand Théâtre de Provence, Aix 04 42 91 69 69 www.legrandtheatre.net

7 d’un coup

Le Petit Tailleur est un de ces contes qui valorisent les faibles, la vaillance, l’intelligence et… la bonne fortune ! Le compositeur Tibor Harsányi a conçu en 1939 une partition très illustrative, où l’on entend distinctement les mouches qui volent, le sanglier furieux qui trépigne, l’ingénuité du tailleur, la beauté de la princesse… Une trentaine de minutes, la voix radiophonique de François Castang, sept musiciens dirigés par Roland Hayrabédian : un bon moyen d’entrer en musique dès 7 ou 8 ans. Le Petit Tailleur 17 oct 15h Grand Théâtre de Provence, Aix 04 42 91 69 69 www.legrandtheatre.net

Âge tendre

L’Atelier des Arts de Sainte Marguerite, qui propose désormais une véritable saison de spectacles vivants dans le 9ème arrdt de Marseille, consacre les vacances de la Toussaint aux tout petits : avec des spectacles dès l’âge de la crèche, jusqu’à la fin de la maternelle, d’autres juqu’à 10 ans, par des cies marseillaises qui aiment à raconter des histoires et à faire vivre sons et objets : la Cie Mascarille, Crochetryolé, l’Atelier de mars se produisent dans la journée (10h, 16h ou 18h selon les âges…) du 26 au 30 oct… Vacances au théâtre Marseille, 9ème 04 91 26 09 06 Cie Crochetryolé, semaine Vacances au théâtre © X-D.R


AU PROGRAMME

La vie, la mort, le temps, la pensée… les jeunes enfants aussi s’interrogent, et interrogent le monde. Pour ces philosophes en herbe, Pasquale Buonarota, Alessandro Pisci et Lucio Diana ont imaginé une fable en trois volets dont un sur l’esthétique : La fable de la beauté ou «l’aventure fabuleuse et rocambolesque d’un roi et de son bouffon à la recherche de la beauté qui fera de son royaume le meilleur des royaumes». Quel qu’en soit l’endroit. Un spectacle donné en français pour la première fois, dans une adaptation signée Denis Fayollat.

Les «Gitans du monde» font une halte au Carré le temps de l’exposition-installation Les fils du vent Tziganes et peuples nomades et du spectacle de la Cie Est en Ouest Sur la route des tziganes. Deux manières de découvrir leurs modes de vie : l’exposition propose de marcher sur leurs pas à travers des photos et des images historiques, des roulottes et un campement ; Jean-Baptiste Laya choisit la poésie du geste en mouvement, le goût de l’enchantement et la musique klezmer pour évoquer ce peuple victime de l’exode. Sur le plateau, une danseuse, une conteuse et cinq musiciens sont les acteurs de ce conte musical universel. En prolongement, deux rencontres : le 21 oct avec Jean-Baptiste Laya et les artistes à l’issue de la représentation ; le 23 oct avec Pierre Le Fur, conservateur du musée Un siècle de roulottes pour échanger sur le thème «Nomadisme et littérature de voyage».

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Mammaluna dès 4 ans 20 oct 15h La Gare Franche, Marseille 15e 04 95 04 95 70 www.theatremassalia.com

La fable de la beauté dès 6 ans 20 oct 15h Théâtre Durance, Château-Arnoux 04 92 64 27 34 www.theatredurance.com

© Nicola Pavone

Surprise

Les fils du vent – Tziganes du 18 au 29 oct Parvis, grand hall et médiathèque Sur la route des tziganes 21 oct 14h30 dès 6 ans Le Carré, Sainte-Maxime 04 94 56 77 77 www.carreleongaumont.com

Du théâtre sans texte (ou presque), expressionniste, visuel et sonore dans lequel on entre comme dans un rêve… Une vendeuse d’allumettes est un conte de glace et de feu écrit par Andersen, adapté à la scène par la compagnie L’Escabelle en une version contemporaine : c’est une petite fille pauvre oui, mais pas résignée, qui s’efforce en rêvant de choisir sa destinée : tel est le message de Heidi Brouzeng grâce à son look de personnage de BD, ses petits pas de danse, ses mots décousus, son masque et sa kyrielle d’objets. Il y a de la joie dans cette sombre histoire !

Insolent

C’est un régal que de voir la Cie Vol plané se saisir du Malade imaginaire, comédie-ballet en trois actes dans laquelle Molière pille allègrement ses propres œuvres : Les Fourberies de Scapin,Tartuffe, Le Médecin volant. Pour jouer cette pièce noire et folle, quatre acteurs déploient leur art sans compter, portés par la vivacité de l’écriture, la collusion de la farce avec la tragédie. Sur scène, débarrassés de tous les artifices de l’illusion, ils font entendre au plus juste la petite musique de Molière.

Une vendeuse d’allumettes dès 6 ans 16 et 17 nov 19h30 Théâtre de Grasse 04 93 40 53 00 www.theatredegrasse.com

Le Malade imaginaire dès 12 ans 12 et 13 nov 19h Le Cadran, Briançon 04 92 25 52 52 www.theatre-le-cadran.eu

La famille Tombola ne possède rien d’autre qu’un arabiye, petit chariot fourre-tout pour transporter ses objets usuels : ils sont voyageurs, explorateurs de mémoire et raconteurs d’histoires, sans cesse sur les routes entre l’Europe et l’Orient. Pour évoquer leur vie la Cie ExtraMuros et le Collectif Kahraba croisent théâtre d’ombre, marionnette et théâtre d’objets dans une économie de moyens qui colle à la situation. Un drap devient l’écran, un sac plastique un nuage, une bouilloire un coffre d’argent… Pour tout trésor la famille Tombola a du cœur ! Arabiyetna, La Famille Tombola dès 6 ans 11 et 13 nov 15h Daki Ling, Marseille 1er 04 95 04 95 70 www.theatremassalia.com

Frissons

Premier de 3 ciné-concerts avec Filmharmonia, le PôleJeunePublic «fait entendre» Le Fantôme de l’Opéra, adaptation au cinéma du célèbre roman de Gaston Leroux par Rupert Julain (1925). Du noir et blanc, bien sûr, de l’effroi avec des souterrains hantés, de l’amour avec un étrange génie défiguré. Si absolu et exclusif que lorsque Raoul entre dans la vie de la belle Christine, le fantôme ne le supporte pas… Au pied de l’écran, l’Orchestre de l’Opéra emporte l’auditoire cinéphile, dirigé par Gabriel Thibaudeau, compositeur canadien qui s’est fait une spécialité de l’accompagnement musical de film muet. Le Fantôme de l’Opéra dès 8 ans 6 nov 20h Opéra de Toulon 04 94 98 12 10 www.polejeunepublic.com

© Arnaud Hussenaut-Desenonges

Nomade

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Le coup de projecteur sur la vitalité de la création italienne se poursuit : après le Teatro Kismet Opera, place à la Cie Cerchio di Gesso et sa pièce de théâtre Mammaluna, C’era una volta e non c’era. Il était une fois et il n’était pas… trois sœurs endormies, devenues grises et oubliées alors que les années passent. Cent ans, peut-être plus ? Tout basculera le jour où Mammaluna, par une nuit de pleine lune, traversera cette grande fenêtre blafarde et ravivera les couleurs et les joies du passé.

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Philosophique

Voyage

Illumination

SPECTACLES


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SPECTACLES

LE MERLAN | CENTAURE | JEU DE PAUME | SALINS

Est-ce magique ? tant qui lui manquait. Peut être les magiciens ont-ils aussi à lui apprendre… Les enfants qui étaient là, les parents aussi, et les adultes sans enfants, n’en revenaient pas : si on voit des magiciens chez Sébastien, à la télé la manipulation est nettement moins sidérante ! Et puis il y avait le Soir des Monstres d’Etienne Saglio, comme une preuve du bien fondé de cette programmation. Le magicien, qui est aussi acrobate, metteur en scène et comédien, maitrise les arts magiques pour faire naître des monstres : ses jonglages illusionnistes, ses tuyaux qui s’animent et qu’il massacre longuement, ses jeux des cordes qui s’emmêlent et l’envoient dans les airs, ses projections qui multiplient le réel et le diffractent jusqu’à le faire disparaître, tout cela construit un spectacle terrifiant et soufflant, dont la magie est un ingrédient essentiel. Entre l’appétit cruel de Max et les maximonstres, et les acrobaties burlesques de Buster Keaton.

Après un Défilé de marques programmé au Gymnase (voir p 43) la saison du Merlan débutait en ses murs avec 10 jours de magie La démarche artistique de Nathalie Marteau, directrice de la Scène Nationale, est toujours singulière : elle invite des formes inattendues, qu’elle produit souvent et présente à des publics très mixtes, des plus branchés culture jusqu’aux gamins turbulents des quartiers nord. Et ça marche, parce que les formes sont accessibles, près du corps - comme on dit d’un vêtement- et loin des textes la plupart du temps. Proposant d’autres écritures. Mais la magie, fallait l’oser ! Si les arts circassiens ont conquis leurs lettres de noblesse dans les salles de théâtre subventionnées, il n’en est pas de même pour les saltimbanques illusionnistes, manipulateurs de cartes, de lames rétractables ou de pensées. La programmation proposée au Merlan n’échappa pas toujours à un côté Grand Cabaret de Patrick Sébastien. Ce qui est dommageable : ce que l’on peut voir là n’a a priori pas grand-chose à faire sur une scène

Dark Blue Bloom © X-D.R

subventionnée. Mais est-ce bien sûr ? Scorpène avec ses analogies scientifiques approximatives, son côté grandiloquent mine de rien, est un brin agaçant. Mais ce qu’il parvient à produire donne l’impression vertigineuse qu’il entre dans les têtes. Et interroge sur le réel, le regardé, le temps du spectacle, ce qu’on nous montre et qu’on nous cache. Comment fait-il, se demande-t-on ? Comme devant les manipulations plus terre à table de Bébel, qui produit un close-up sidérant, proprement inexplicable. Les numéros

Performance

Le Centaure propose dorénavant une performance tous les mois ! Ces petites formes font leur réputation dans le monde des salons hippiques, où ils remportent toutes les compétitions. Artistiques et troublantes, elles plaisent beaucoup aux jeunes adolescents, souvent fans de chevaux et habités de monstres hybrides mythologiques…

illusionnistes à coups d’épées, de lévitation et de miroir traversé de part en part de Hugues Protat et de son épouse potiche, ou l’abattage comique du show de Gaetan Bloom, sont plus contestables mais tout de même… Il y a là non pas un art en soi, mais tout un pan illusionniste que la scène contemporaine, toute à ses réflexions sur la distanciation et la cruauté, a négligé d’explorer. Il est si divin d’y croire, d’être épaté, bluffé, illusionné ! Les arts circassiens ont apporté à la scène d’aujourd’hui un sens de l’exploit épa-

AGNÈS FRESCHEL

La Magic Week s’est déroulée au Merlan du 1er au 10 oct

Matisse et la danse

noir en blanc, puis on s’introduit dans l’atelier du peintre, il y rencontre l’inspiration (Caroline Blanc, magnifique et mutine), puis les traits et les couleurs… La narration est limpide, cela se conclut par une belle évocation des Danseuses, sur un clair de lune de Debussy orchestré... Et si les choix musicaux synthétiques du début sont plus contestables, le Jazz de Redolfi donne à la pièce juste le peps qui manquait aux premières scènes !

Bonne idée que de mettre l’idée de Matisse en danse ! Ses couleurs et ses formes simples, ses aplats et ses feuilles découpées, trouvent dans la courte pièce de Michel Kélémenis une illustration de choix. Pertinente. Cela commence par une visite au musée en

A.F.

Poème Centaure Le 13 nov Théâtre du Centaure, Marseille 8e 04 91 25 38 10 www.theatreducentaure.com

A.F.

Henriette et Matisse a été créée à la Biennale de la danse à Lyon, et dansée aux Salins le 5 oct.

© X-D.R

© Agnès Mellon

Elle sera reprise au Jeu de Paume, Aix les 13 et 14 oct dans le cadre de Mömaix 0 820 000 422 www.lestheatres.net


CHÂTEAUVALLON | GYMNASE | GRAND THÉÂTRE DE PROVENCE

SPECTACLES 47

Double face Si l’étiquette hip hop colle encore à la Cie Farid’O, Saleté est autrement plus complexe. La parole rude et incisive de Robert Schneider est portée par quatre danseurs-récitants incarnant tour à tour Sad, irakien de 30 ans débarqué en Allemagne où il vend des roses. Préjugés, jugements hâtifs, peur, différence jaillissent, exhumés de sa tête sur une BO qui scande autant les mots que les corps. Des interprètes à l’énergie «hip hopienne», c’est vrai, dont chaque déplacement, chaque glissement, chaque modulation semblent s’immiscer dans la respiration de l’autre. Théâtre et danse se marient subtilement : au texte écorché vif et militant qui puise sa cruauté dans la violence faite aux peaux basanées («la guerre a un sens») répondent une danse fluide, des figures aériennes. Comme si Farid Ounchiouene détricotait la dure réalité par la douceur des corps, une certaine légèreté. Dans les rues de

Bassora ou d’ailleurs, l’étranger n’a pas de nom de famille - pourquoi faire ? - il vend des roses. Et dans ce ballet de fleurs rouges, les épines ne blessent même plus les mains de ceux qui dansent… A contrario, la Cie Alexandra N’Posse développe exclusivement une grammaire hip hop et smurf et son spectacle Les S’tazunis sent le «réchauffé», enfile les démos et les saynètes comme un collier de perles en essayant, vainement, de raconter une histoire. Haro sur la super puissance américaine, son affreux billet vert, la convoitise des hommes, le tout à la louche… Dans cette bande joyeuse qui surfe sur toutes les musiques made in USA, les hommes tirent leur épingle du jeu en offrant un ou deux soli puissants, dont une partition fusionnelle avec une table. Mais c’est peu !

Saleté © Andras Fenris

Saleté et Les S’tazunis ont été donnés respectivement les 24 sept et 1er oct à Châteauvallon

MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

Hommes-orchestre © X-D.R

Cet Offenbach-là commence au milieu du fatras d’un plateau de théâtre qu’une troupe de comédiens découvre au seuil de sa première répétition. On monte La Vie Parisienne ! Mais le metteur en scène fait fauxbond. La partition posée sur un lutrin, les chanteurs découvrent le premier chœur, lisent les dialogues initiaux, se répartissent les rôles… Peu à peu, ils laissent tomber leur feuille, jouent comme s’ils improvisaient : la sauce prend. Foin d’une gare ! Les Brésiliens ou Suédois débarquent au fil du livret, la machine prend son élan, l’idée fonctionne à pleine vapeur… et force comique ! Pourtant ce qui est le plus original, et sans doute aussi le plus économique, c’est qu’Alain Sachs distribue des artistes capables de jouer la comédie, chanter, danser… et même interpréter l’accompagnement instrumental. On se relaye au piano (selon un planning sans doute calculé sur excel), on sort sa trompette, son violon ou

Et en plus de gueules de théâtres, certains en possèdent la voix ! Haut-perchée à souhait en Veuve d’un colonel, graveleuse celle du Bottier, tandis que la coquette Métella s’illustre dans le seul air réellement lyrique de l’œuvre (les voix sont cependant reprises par des micros en façade). L’idée distanciée chemine ardemment, autant dans le pastiche «Son habit a craqué dans le dos», que dans l’univers pré «dada» qu’on peut parfois dénicher chez Offenbach… Le tout dans la fête… et couronné par vrai Cancan en apothéose. JACQUES FRESCHEL

son violoncelle, sa clarinette, une grande duduche tire sa flûte, et vas-y qu’on te pousse au pied d’une harpe, qu’on frappe en bande sur un marimba ou tout autre outil sonore…

Mille et une couleurs

La Vie Parisienne a été jouée au Gymnase du 28 septembre au 2 octobre

Les Siecles © Agnes Mellon

Les musiciens des Siècles ont fait briller de mille feux l’odyssée des Ballets Russes au Grand Théâtre de Provence : nous n’étions certes pas au Châtelet le 4 juin 1910 mais, cent ans et des poussières plus tard, François-Xavier Roth a fait revivre avec éclat le programme, pour le bonheur des oreilles de tous âges rassemblées ce soir-là. 1910 : la fabuleuse histoire des Ballets Russes n’en était qu’à ses balbutiements et faisait découvrir au Tout-Paris les pages orchestrales russes mêlant folklore, avant-garde, tradition romantique et orientalisme exacerbé. Le Festin, ballet regroupant des extraits symphoniques de Moussorgski, Glinka ou Tchaïkovski et Les Orientales, esquisses chorégraphiques associant Glazounov et Arenski aux nordiques Grieg et Sinding (avec des

orchestrations originales des compositeurs contemporains Mantovani et Piper) ont le temps d’une soirée plongé un auditoire comblé au cœur des productions du visionnaire Diaghilev. Après des Danses polovstiennes de Borodine très enlevées, la version historique avec récitant de Shéhérazade du génial orchestrateur Rimski-Korsakov démontra le souci d’authenticité de cet ensemble jeune et dynamique, dialoguant avec le verbe tranchant de Daniel Mesguich. Un concert sans frontière où une foisonnante palette de timbres était disposée sur la scène du Grand Théâtre. FREDERIC ISOLETTA

Ce concert a eu lieu le 5 oct au Grand Théâtre de Provence à Aix


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LIVRES

Le visage de Rosemonde

Avec pour décor «le ciel indigo du quartier Canapé-Vert» en Haïti, où naquit l’illustratrice Pascale Monnin, James Noël raconte La fleur de Guernica, son premier album jeunesse, comme un poème. Quelques mots suffisent à donner vie à Sismo le garçon turbulent, Rosemonde et son cahier «peuplé de dessin et de photos», comme le tableau Guernica qu’elle lui offre. Une brève rencontre et Sismo rêve à la jeune fille jour et nuit avant que le tremblement de terre ne détruise tout… À l’apparente quiétude des dessins succèdent alors des images aux lignes fracturées, aux couleurs froides : le chaos est dans les têtes («Une vraie Babel

Gauguin. Ce livre bâti sur une actualité dramatique parvient à concilier l’inconciliable : l’amour comme arme de résistance à la tragédie.

de larmes et de désespoir en bloc») et dans la ville (inscriptions et signes entremêlés, visages masqués, formes désordonnées). Seul Sismo regarde le ciel toujours indigo, désormais habité par les âmes des morts, et part à la recherche de Rosemonde. Saine et sauve elle réapparaît telle la petite fleur restée intacte au milieu des ruines du tableau, son visage peint à la manière de

Petits bouts de vie

Déjà avec Les heureux parents (Zib’25), Laetitia Bourget enchantait le lecteur de sa plume minimaliste pour dire aux enfants la genèse du sentiment amoureux. Avec Le creux de ma main, elle tend la main à sa voisine d’atelier l’illustratrice Alice Gravier pour raconter l’éclosion du monde : l’arrivée d’un bébé dans la famille. Par la grâce d’une petite fille malicieuse et enjouée, tout un monde minuscule s’anime au creux de sa main : un flocon de neige, un oiseau blessé qui s’envole à nouveau, un têtard transformé en grenouille, une luciole attrapée et sitôt relâchée, quelques morceaux de porcelaine habilement recollés… Jusqu’à ce qu’une petite tête délicate lui sourie et qu’une grenouillère emplisse ses bras. Face à de courtes phrases décrivant l’enthousiasme de la petite fille à faire renaître la nature et les choses, les pleines pages illustrées enveloppent de douceur ses jeux et ses découvertes (trait fin et précis, transparence des encres colorées). Un va-et-vient entre rêve et réalité qui rend cet album attachant. M.G.-G.

Le creux de ma main Laetitia Bourget, Alice Gravier dès 3 ans Éd. Sarbacane, 14,90 euros

MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

La fleur de Guernica James Noël, Pascale Monnin Éd.Vents d’ailleurs, 15 euros

India song

Le jeune Devdas est paresseux. Jeune apprenti coiffeur, il passe sa journée à se contempler dans un miroir. Pour échapper aux reproches et aux coups, il s’enfuit du village et, dans la jungle, rencontre le Démon de la nuit avec lequel il commence une danse terrifiante… Par la ruse, Devdas prendra le dessus et reviendra chez lui, riche, toujours paresseux, mais heureux ! Ce conte imaginé par Muriel Bloch présente l’intérêt d’être accompagné par de la musique indienne et des instruments traditionnels de la péninsule asiatique : le sitar, le tempura (cordes pincées), le tabla ou le dhol (tambours), la flûte bansouri… et les chants en bengali. Le livre coloré est illustré par Allegra Agliardi et la documentation à la fin du livre enseigne l’essentiel sur les spécificités musicales locales, des styles populaire et savant ou de son enseignement. JACQUES FRESCHEL

Livre & CD Gallimard Jeunesse dès 3 ans, 13,50 euros

Belle pour aller danser ?

Bianca a 13 ans, elle est en 4ème. Ses parents sont divorcés. Alors avec son frère Lenny, lycéen difficile, et sa petite soeur Léna, ils trimballent les valises toutes les semaines entre les 2 apparts. Et ce n’est pas facile à vivre, surtout avec les lettres du Proviseur pour blâmer le grand frère… qui s’enferme tout le temps dans sa chambre avec sa copine tandis que Bianca doit s’occuper de sa petite soeur et échange des SMS avec ses copines. Et puis ce samedi il y a une fête. Mais aura-t-elle l’autorisation de s’y rendre ? Surtout qu’il y aura Gabriel, le cousin d’une amie. Grand, joli sourire,

tout y est pour qu’un premier amour se dessine. De SMS en courses pour acheter avec sa mère un nouveau soutien-gorge, tout se prépare pour cette fameuse soirée du samedi... Le suspens est entier ! Une jolie promenade du côté des premiers émois et approche sensible de la garde alternée, vue du côté des enfants. CHRIS BOURGUE

Une semaine chez ma mère Gladys Marciano Éd. du Rouergue, coll. Dacodac, 7,50 euros


LIVRES

Le meilleur des mondes de Claude Ponti

Les albums de Claude Ponti parlent à tous les âges. Ils tiennent l’équilibre entre naïveté, fantaisie et ironie. Les personnages y sont tout-mignons, mais aussi vaguement inquiétants ou énigmatiques, tels le Doudou méchant ou Blaise, le poussin masqué ; les familles y sont douces et rassurantes, à moins qu’elles ne soient recyclables à la consommation, comme dans le catalogue des parents à l’usage des enfants qui veulent en changer. Des animaux et objets anthropomorphes, bizarroïdes et déjantés, qui ressemblent à rien ou à nain porte quoi, sont affublés de noms

ronds et sonores, à l’humour potache : Okilele, l’Eugénie des larmes, la carpe Hédiem, Métentenskondti et Métébouché… On ne s’étonnera pas que les albums de Claude Ponti plaisent aussi aux architectes, qui le mettent à l’honneur cette année. L’architecture hybride mêle le minéral à l’organique, et au végétal. Des châteaux à la Gaudi tiennent dans un équilibre précaire ; les cabanes dans les arbres ont la taille du cosmos ; les larmes font des maisons. Les espaces saturés et grouillants alternent avec des immensités épurées ; les jeux d’échelles

animent des paysages en transformations constantes, selon une logique d’associations d’idées qui tient au rêve ou au caprice de celui qui l’explore. On fabrique le château d’Anne Hiversère en suivant la recette du gâteau ; des aventures initiatiques conduisent d’un univers à un autre, avec pour compagnon la porte de sa maison perdue ; on traverse des miroirs et des rideaux de pluie. Et ainsi, comme dans Lewis Caroll, explorer le monde revient à le réinventer au fur et à mesure qu’on le découvre. Si les albums de Claude Ponti plaisent à

© Bih Bih et le Bouffron-Gouffron, Claude Ponti, Ecole des Loisirs, 2010

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tous les âges, et aux architectes, c’est grâce à l’inépuisable fécondité de ces mondes possibles, effervescents ou oniriques, qui se transforment et se réinventent sans cesse, en se réajustant à la mesure des petits qui grandissent, et des grands qui rajeunissent. AUDE FANLO

Quand l’architecture se livre avec Claude Ponti du 15 sept au 15 janv Ateliers de construction d’un Abrikaban, espace de lecture, workshops Maison de l’architecte, Marseille 8ème Exposition et ateliers Librairie Imbernon, le Corbusier, Marseille 8ème à partir du 17 nov L’Ile aux livres à l’Alcazar : 80 dessins originaux extraits d’albums et une carte blanche pour 5 vitrines qui contiendront des dessins préparatoires, objets et références personnelles Rencontre avec Claude Ponti le 17 nov à 9h30, animée par Adèle de Boucherville et Olivier Douzou et journée des professionnels le 18 nov

Libellule et moutons

Encore deux très jolis titres chez Picquier. Le premier nous parle de la mort d’une libellule dans un jardin. Les fourmis s’empressent autour d’elle en grande procession. Rien de triste : un court poème du Coréen Cheon Jeong-cheol illustré par les aquarelles lumineuses de Lee Gwang-ick. L‘enfant sera ébloui par les couleurs qui envahissent peu à peu les pages tout en faisant l’apprentissage nécessaire de l’existence de la mort et du déroulement de la vie... Le second album présente un conte d’Yveline Féray inspiré de la tradition tibétaine. Trois enfants sont enlevés dès leur naissance par les sœurs de la reine, jalouses de la maternité de leur cadette. Le roi accuse son épouse et la fait emprisonner. Les enfants, recueillis par un prêtre tibétain qui se réincarnera en oiseau magique, retrouveront bien sûr leurs parents, et les méchantes sœurs seront punies ! Les illustrations d’Anne Romby, aux couleurs vives, aux dessins d’une grande précision

dans les détails des costumes et des paysages ne manqueront pas de faire rêver les jeunes lecteurs à partir de 8 ans. Et aux éditions Ricochet, pour les très petits, un imagier présente 1000 et 1 moutons, à compter pour s’endormir. Mais pas seulement ! Car les dessins sont d’une grande variété, on s’y promène d’une époque à une autre, d’une situation à l’autre avec délectation et amusement. Le jeu du comptage des moutons tendrait plutôt à tenir éveillé ! il ne faut pas en oublier, certains sont bien cachés… Le trait de Kerso, sûr et précis, à l’encre noire avec des réhauts jaunes et un camaïeu de gris,

ménage des trésors de drôleries. CHRIS BOURGUE

Dans le jardin, la libellule est morte, Éd. Picquier, 13 euros L’Oiseau magique, Éd. Picquier, 16,50 euros 1001 moutons, Éd. du Ricochet, 17 euros


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CINÉMA

FFM | FILMS

Corps et âmes C’est sur les tarentelles endiablées du trio Gli Ermafroditi que se sont ouvertes, le 28 sept au cinéma le Prado, les rencontres FFM. Prélude emblématique de l’énergie des organisatrices qui, depuis 2006, font découvrir au public marseillais le travail cinématographique des femmes de Méditerranée. Première rencontre : Questione di cuore, une comédie à l’italienne qui débute par deux infarctus et s’achève par un enterrement ! Francesca Archibugi y raconte l’amitié entre Angelo, carrossier de son état, et Alberto, scénariste en panne d’inspiration, réunis par la peur de la mort et le goût de la vie. Une façon drôle, tendre, d’interroger les apparences et à l’instar d’Alberto d’imaginer des réponses. Avec Cosmonauta, dans le même registre, Susanna Nicchiarelli s’amuse des illusions et des contradictions des communistes italiens au temps du spoutnik et de Gagarine, mêlant au parcours initiatique fictif d’une jeune militante des images d’archives. Se défendant d’un réalisme social potentiellement réducteur, la réalisatrice tunisienne Raja Amari a présenté Les secrets, huis clos tragique sur la condition féminine que l’expression métaphorique et symbolique rend universel. Violence des vérités dévoilées par la suggestion de la mise en scène sous la lumière diffuse de Renato Berta. Hafzia Hersi, alias Aïcha-Cendrillon claudiquant au bal des maîtres sur des escarpins rouges, un talon cassé, ou s’avançant au grand jour, sa robe virginale éclaboussée de sang, libre enfin, crève l’écran. Films incarnés. Le corps des femmes sujet et objet cinématographiques de désirs, de frustrations, d’outrages. Le corps à peine pubère de Niloofar, destiné à l’écartèlement des accouchements successifs dans le film libano-iranien de Sabine El Gemayel, plus bouleversant par son

Les secrets de Raja Amari

propos que par sa forme trop illustrative. Le corps inconvenant de Lily la folle dans Pieds nus sur les limaces de Fabienne Berthaud (voir Zib’ 31). Les corps-fantômes des bosniaques violées et assassinées par les nationalistes serbes, pièces à conviction manquantes pour le tribunal international de La Haye dans le thriller politique de Christian Schmid, La révélation. Films sur les choix aussi. Celui de Luna (Jasmila Zbanic), celui d’Eduart (Angeliki Antoniu). Pour l’exilé Esfedandyar de retour au pays, entre vengeance et apaisement, un choix qui s’inscrit magistralement dans tous les plans de Sepideh Farsi. Jeu sur les mises au point, reflets, cadrages où se recompose un Téhéran géométrique, ville abstraite que nul ne reconnaît plus. Le prix du public de 13 en courts, mini-festival organisé aux Variétés à l’intérieur des Rencontres, a été décerné à la fiction douce-amère Phone Story de Berivan Binevsa. Il aurait pu aller

à Sabine El Chamaa pour Promenade : une vieille dame dans les ruines blanches d’une ville bombardée, ramasse un à un des morceaux de murs effondrés. Plus tard, couchée à même le sol dans son nouveau logement qui peu à peu se colore, elle regarde le patchwork qu’elle a reconstitué où courent d’anciens motifs rompus. Image de l’entêtement de la vie et de la mémoire, corps et âme endoloris, comme dans de nombreux films de cette sélection qui a tenu ses promesses de femmes. ÉLISE PADOVANI

Films Femmes Méditerranée a eu lieu du 28 sept au 6 oct

Désaliénation Le 21 sept, Mariana Otero était au cinéma Le Mazarin, à Aix, pour présenter Entre nos mains, un film généreux, éminemment politique. «Je voulais porter mon regard sur une utopie qui se confronte au réel… et je me suis intéressée aux scop, entreprises qui fonctionnent sous forme de coopératives.» Mariana Otero s’immerge donc, à Orléans, pendant trois mois, dans une PME de lingerie féminine, Starissima, dont les salariés, en majorité des femmes, décident de construire leur propre coopérative. Elle montre ainsi leurs interrogations, leurs doutes, leurs difficultés à prendre la parole, à décider. Il faut investir un mois de salaire et, comme le dit une des ouvrières, «Si ça marche pas, tu perds tout.»

Mariana, qui filme elle-même, a su tisser de véritables liens avec ces femmes, cela est manifeste : le film se construit avec elles dans une énergie

commune. «Créer une coopérative ou créer un film, c’est pareil !… Plus elles s’impliquaient dans le projet, moins elles avaient peur, y compris devant la Entre nos mains de Mariana Otero

caméra.» C’est à une évidente libération de la parole de celles à qui «on n’a pas appris à penser» que nous assistons et, en ces temps difficiles, c’est réjouissant ! Le sujet est grave : l’entreprise se solde par un échec économique mais l’expérience collective enchante. La séquence finale, en comédie musicale, est l’aboutissement d’une vraie aventure humaine visant à transmettre le désir qui a été de faire vivre l’utopie. ANNIE GAVA

Entre nos mains était également programmé aux Variétés à Marseille par Films-Femmes-Méditerranée


Aller simple On pourrait craindre qu’Illégal n’en dise guère plus que son affiche. Le titre, la dureté de ses lettres majuscules, apposé au tarmac d’un aéroport, des agents de police usant de la force pour qu’une femme monte dans un avion, le tout noyé dans la grisaille du plat pays. En bref, Madame est sans-papiers sur un territoire de l’union européenne, donc hors-la-loi, donc interpellation, détention, et aller simple vers son pays d’origine. Pas besoin d’être belge pour connaître ce doux refrain. Madame sur l’affiche, c’est Tania, immigrée russe qui vit seule avec son fils de 14 ans, et qui, dès les premières images du film, efface ses empreintes digitales au fer à repasser. On vous le disait. Sanspapiers. Donc arrestation à la sortie du bus, centre de rétention de la banlieue bruxelloise, et retour vers la Russie. Bouh, vilain système. Et ? Illegal © Versus-production

Et Tania. Car Illégal n’accable pas, ne cherche pas de coupable, ne cadre pas si large. La réussite d’Olivier MassetDepasse est de ne jamais faire de la subjectivité fictionnelle un prétexte à la critique sociale. Chez lui, la fiction est toute-puissante. Sa réalité, c’est Tania et rien d’autre. Parce que Tania (Anne Coesens, admirable de retenue) n’a aucunement l’intention de partir, parce que son fils, Ivan, eh bien c’est toute sa vie, et que de toute façon, elle s’est juré de ne plus jamais fouler le sol russe. Pourquoi ? On ne le sait pas. Et puis cela nous est égal. Ce serait donner du grain à moudre aux affréteurs de charters. Ce qu’elle est prête à endurer pour rester en Belgique auprès de son fils, l’enfermement, la misère des centres familiaux de rétention, la violence policière, dépasse, et de très loin, cette question de la légalité administrative et des pratiques gouvernementales. En allant au bout de sa Illégal subjectivité, s’applique à démontrer qu’au-delà d’un système, il y a l’humain, et qu’il est bien là le cœur du débat. RÉMY GALVAIN

Sortie en salles le 13 oct

Liberata, une héroïne corse L’héroïne du film de Philippe Carrese, pasionaria de la Résistance, est une allégorie de l’île qui, dès 1943, sortit seule, par l’unique force de ses combattants, du joug fasciste, et fut ainsi la première région française occupée à réussir sa libération. Comment concilier les fâcheux errements des intellectuels et artistes corses lors du congrès de A Muvra en 1938 avec l’obstination des insulaires à ne livrer aucun Juif aux forces d’occupation pendant toute la durée de la guerre, le fameux serment de Bastia de «vivre et mourir français», le rôle réel des FFI ou celui proclamé, pendant les décennies de l’après-guerre, des gaullistes et de leurs acolytes tardifs… Philippe Carrese réalise une fiction pour FR3, sans grand moyens financiers, donc nécessairement symbolique et dépouillée, mais qui par sa finesse d’analyse apporte un témoignage bouleversant de ce que fut la réalité de cette période. À travers les relations ambiguës de deux frères, résistants et communistes, avec deux soldats de l’armée italienne qu’ils retournent contre les Chemises noires, c’est toute la spécificité de la résistance Corse qui est symbolisée. Liberata relate une belle histoire d’amour mais manie aussi humour et ironie dans des dialogues savoureux, écrits tant en Corse qu’en Italien ou en Français ; l’accent est juste et la langue belle, ce qui est constitue une rareté dans les films évoquant l’île. JEAN-MATHIEU COLOMBANI

Liberata a été projeté à la Maison de la Corse, à Marseille, le 25 sept


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CINÉMA

RENCONTRES

Poésie électronique Entre installations vidéo, performances poétiques musicales et multimédias, programmations de vidéos et films, rencontres avec artistes et penseurs, la 23e édition des Instants Vidéo s’annonce sous les meilleurs auspices créatifs. L’artiste Giney Ayme sera à l’honneur : ses performances et ses installations plastiques et vidéo seront visibles le 5 à l’Espaceculture et à la Compagnie, le 11 à la Fosse et le 13 à La Friche. Les Grands Terrains, Art/Position, OÙ et l’Artothèque exposeront les installations vidéo d’artistes de tous horizons, dont la Française Mélanie Terrier, le Japonais Hiraki Sawa ou encore la Syrienne Iman Hasbani. Les performances ne seront pas en reste à La Friche: Vincent Bonnet présentera son livre Pense bête en compagnie de quelques complices le 11 ; le lendemain Ex-pose de Skalen combinera danse musique et vidéo et la soirée du 13 sera le cadre de trois performances signées Morton Feldman, Philippe Charles et Giney Ayme. Les perfor-

mances se poursuivront en parallèle à la Fosse le 11 nov avec un concert de David Oppetit et Greg Lelay et les Nuns, quatuor vocal contemporain, puis, le 14 aux Grands Terrains avec une performance d’Enna Chaton. À ne pas rater non plus les rencontres-débats avec artistes et spécialistes ni les programmations internationales d’art vidéo qui se dérouleront du 10 au 14 nov de 14 à 23 h. RÉMY GALVAIN

Sur vol - Installations de Giney Ayme

Les instants video Du 5 au 14 nov Marseille www.instantsvideo.com

Présences hispaniques Montrer le dynamisme et la richesse du cinéma espagnol, tel est l’objectif de l’association Horizontes del Sur qui propose du 5 au 14 nov son 9e festival, Cinehorizontes 2010, au cinéma le Prado à Marseille. 28 films seront présentés dont 7 en compétition pour le Grand Prix du jury présidé par la chorégraphe et réalisatrice espagnole Blanca Li. Un hommage sera rendu à Fernando Trueba dont le film El Baile de la victoria, adapté du roman d’Antonio Skarmeta et neuf fois nominé aux Goya, est en compétition. On pourra voir aussi El año de las luces et Belle époque avec Penelope Cruz. En ouverture, le 5 nov à 20h, Yo tambien d’Álvaro Pastor, en présence de Lola Duenas qui interprète Laura, une femme relativement anticonformiste qui devient l’amie d’un homme

trisomique. En clôture, le 13 nov à 20h, Io, Don Giovanni du cinéaste très inspiré par la musique, Carlos Saura, en sa présence ! Entre ces deux moments exceptionnels, vous aurez l’occasion de voir des films, de rencontrer des réalisateurs comme Javier Rebollo et sa coscénariste Lola Mayo, dont le film La Mujer sin piano est en compétition, tout comme Tres dies amb la familia, premier film de la jeune réalisatrice Mar Coll, Elisa K. -l’histoire d’Elisa âgée de 11 ans qui vient de se rappeler quelque chose de terrible- de Jordi Cadena et Judith Colell. La isla interior de Dunia Ayaso et Félix Sabroso est une histoire sur la peur de la folie et Map of sounds of Tokyo d’Isabel Coixet, avec Sergi López, raconte l’histoire de Ryu, une jeune Japo-

naise, vendeuse au marché aux poissons et… tueuse à gages. Comme chaque année, le festival met en lumière les jeunes cinéastes espagnols de l’ECAM et de la Filmoteca Vasca avec une soirée courts métrages parrainée par le magazine Vocable. Si on ajoute les buffets et la musique, c’est une semaine très festive qui attend les amateurs de culture hispanique, les cinéphiles et ceux qui ont envie de découvertes ! Un festival qui s’affirme chaque année dans le paysage régional. ANNIE GAVA

Horizontes del Sur 04 91 08 53 78 www.horizontesdelsur.fr

Vertigo Pour sa 8e édition, Image de ville élève sa réflexion à hauteur de gratte-ciel. À travers débats, conférences et projections, Verticalopolis propose de penser la ville debout : orgueilleuse Babel, nécessité urbaine, lieu d’isolement ou d’échanges, de prestige ou de stigmatisation. Le festival aixois a invité les architectes Jean Nouvel (Pritzker Price 2008) et Manuelle Gautrand, des cinéastes et producteurs, des historiens de l’architecture... La programmation cinématographique mêle fictions et documentaires, films du répertoire et films récents, tous en vostfr.

Hommage à Éric Rohmer, récemment disparu, et au burlesque américain Harold Lloyds accroché à jamais aux aiguilles de l’horloge murale géante de Safety last (1923). En avant-première, I wish I knew, réalisé par Jia Zhang-ke pour l’expo universelle de Shanghaï, témoignage de 18 habitants de cette mégapole en mutation constante. Une nuit entière sera dédiée aux tours plus ou moins infernales. Un programme à donner le vertige ! E.P. I Wish I Knew de Jia Zhang-ke

Breaking news de Johnnie To (2004), Buffet froid de Bertrand Blier (1979), Claire Dolan de Lodge Kerrigan (2004), Cloverfield de Matt Reeves (2008), Cube de Vincenzo

Natale (1999), L’Imprécateur de Jean-Louis Bertucelli (1977), Land of the dead de George A. Romero (2004), Le Rebelle de King Vidor (1949). La liste n’est pas exhaustive...

Image de Ville Du 12 au 16 nov Aix, divers lieux www.imagedeville.org


Gardanne et le monde La 22e édition du Festival Cinématographique d’Automne de Gardanne présente 80 films venus de 30 pays, longs et courts métrages ! Vous pourrez rencontrer les réalisateurs parmi lesquels Mariana Otero, avec le généreux Entre nos mains, Pascal Boucher, avec Bernard, ni dieu ni chaussettes, et plusieurs réalisateurs algériens : Khaled Benaïsa avec Ils se sont tus ; Mohamed Soudani avec Une guerre sans images et Liazid Khodja avec Si Mohand U M’Hand, l’insoumis. Au moment où Hors-la-loi déchaîne polémiques et actions haineuses, vous pourrez revoir tous les films de Rachid Bouchareb, en particulier le très bon Little Sénégal. Et à l’heure où l’on chasse les Roms, vous aurez peutêtre envie de revoir Swing et Liberté de Tony Gatlif ? En ouverture, le 22 oct, La nostra vita de Daniele Lucchetti, une photogra-

phie de l’Italie à travers le parcours de Claudio, ouvrier du bâtiment. Alamar du Mexicain Pedro Gonzalez-Rubio clôturera la manifestation, le 2 nov : un enfant de cinq ans, en vacances chez son père, découvre la mer des Caraïbes et une autre culture… Entre ces deux films on n’a que l’embarras du choix et on se laissera tenter par un sujet, un réalisateur ou un pays : le Chili avec La nostalgie de la lumière de Patricio Guzman, la Turquie avec Miel de Semih Kapanoglu, le Kirghizstan avec Le voleur de lumière de Aktan Arym Kubat ou la Russie avec Le dernier voyage de Tanya de Alexei Fedorchenko. La soirée Bollywood avec New-York Masala de Nikhil Advani et la compétition de courts métrages seront aussi au programme d’un Festival qui promet de belles soirées d’automne. ANNIE GAVA

Alamar de Pedro Gonzales-Rubio

Festival Cinématographique d’Automne du 22 oct au 2 nov Cinéma 3 Casino, Gardanne 04 42 51 44 93 www.cinema-gardanne.fr

La résurrection du clown Il est de toutes les rétrospectives, comme s’il courait après le temps perdu. Vingt ans exactement. C’est ce qu’il aura fallu à l’œuvre de Pierre Etaix, 81 ans, pour retrouver le chemin des salles obscures après de nombreux litiges juridiques et une restauration complexe de ses films. Cinq longs métrages et trois courts, tournés en l’espace d’une décennie, auront suffi à accoler son nom aux légendes du burlesque que sont Keaton, Linder, Chaplin et Jacques Tati, pour qui il fut dessinateur, gagman et assistant réalisateur sur Mon Oncle. C’est sur le tournage de ce dernier qu’Etaix était apparu, du haut de ses vingt-sept ans, allure de dandy et sourire rêveur. Né artistiquement au cirque et au music-hall, il réalise pour lui des centaines de croquis à la recherche du gag parfait. En 1961, il tourne un premier court métrage, Rupture, où l’on entrevoit déjà son sens millimétré de la mise en scène et son goût pour les personnages lunaires. Puis suivra le Soupirant, son

premier long. Le travail de Pierre Etaix trouve à partir de ce film sa singularité mais aussi une continuité assumée de ses maîtres. Comme eux, il se crée un personnage récurrent, amoureux transi et maladroit. Enclin à l’utilisation de l’outil cinématographique, il s’essaie aux effets sonores, au trompe-l’œil, au montage expressif. En seulement dix ans, Etaix définit un humour qui n’appartient qu’à lui, doux et mélancolique. Qu’il mettra toute une vie à nous léguer. RÉMY GALVAIN

L’institut de l’Image à Aix présente l’intégrale de ses films du 27 oct au 5 nov : du Soupirant, qui sera présenté le 30 oct à 16h par Jean-Philippe Tessé, critique aux Cahiers du cinéma, au Pays de cocagne, une occasion de voir les films du «clown», invisibles depuis longtemps. 04 42 26 81 82 www.institut-image.org


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CINÉMA

RENDEZ-VOUS D’ANNIE

Le 16 oct à 20h, aux Variétés Marseille, l’association Solidarité Provence Amérique du Sud propose La Mirada invisible de Diego Lerman. La séance sera précédée d’un débat avec Martin Kohan, auteur du roman Ciencias Morales, qui a inspiré le film. Le 21 oct à 20h, en avant-première, Ce n’est qu’un début, documentaire de Jean-Pierre Pozzi et Pierre Barougier qui sera présent. Une école de la région parisienne a expérimenté durant deux ans la création d’un atelier de philosophie en classe de maternelle. Les Variétés 08 92 68 05 97 La Mirada invisible de Diego Lerman

Du 26 au 31 oct, Cinémémoire présente Mémoires partagées #1 Algérie : projections, tables rondes au Polygone Etoilé, à l’Alcazar et au CRDP. En ouverture, le 26 oct à 19h 30, à la Cinémathèque de Marseille, Carte Blanche à la Cinémathèque Algérienne en présence de sa directrice, Badia Sator ; projection de Mascarades de Lyes Salem. En clôture le 30 à 22h, un ciné-concert, Une Terre Algérienne de Claude Bossion et Agnès O’Martins. Cinémémoire www.cinememoire.net

Le 28 oct à 20h, en partenariat avec le cinéma Le Prado, l’association Cinépage propose le superbe film de Sergey Dvortsevoy, Tulpan : le retour dans la steppe kazakhe d’Asa, un jeune marin qui veut devenir à son tour berger. Asa doit se marier avant de pouvoir devenir berger. Son seul espoir est Tulpan, la fille d’une autre famille de bergers. Mais… Cinépage 04 91 85 07 17 www.cinepage.com

Les mardis de la Cinémathèque proposent à 19 h au CRDP le 2 nov, Les Assassins de l’ordre de Marcel Carné et le 9 Répulsion de Polanski. Le 4 nov dans le cadre de la journée, Psychiatrie et cinéma, organisée par l’AFRET, projection à l’Alhambra Ciné Marseille du film Copacabana de Marc Fitoussi, avec Isabelle Huppert et sa fille Lolita Chammah. Babou, une mère marginale va essayer de regagner l’estime de sa fille Esméralda. Babou rêve de s’évader sur la plage de Copacabana à Rio de Janeiro, sa fille fantasme sur un beau mariage traditionnel…

Les Rencontres d’Averroès, durant tout le mois de novembre, placent la région Sous le signe d’Averroès, et du cinéma Le 7 nov au cinéma Lumière à la Ciotat, un documentaire de Jawad Rahib, El Ejido, la loi du profit. Le 10 nov à 20h 30 à la Friche, en ouverture des Instants vidéo, Repérages en Palestine pour l’Evangile selon Saint Mathieu de Pasolini. Du 12 au 14 nov, à la Maison de la Région, en partenariat avec l’INA et le CMCA, week-end documentaire : le 12 à 19h, Ecologie, ces catastrophes qui changèrent le monde de Virginie Linhart (voir p 68) et Alice Le Roy, en présence des réalisatrices. Le 13 nov à 18h, au Méjean à Arles, dans le cadre de Sous le signed’Averroès, table ronde avec Francesco Forgione autour de son livre édité par Actes Sud, Mafia Export. Après un apéritif, projection à 20h 30 du documentaire d’Esmeralda Calabria, Biutiful cauntri, en sa présence. Le Méjan 04 90 93 33 56 Rencontres d’Averroès 04 96 11 04 76 / 72 www.rencontresaverroes.net Biutiful Cauntri d’Esmeralda Calabria

Alhambra Cinémarseille 04 91 46 02 83 www.alhambracine.com Copacabana de Marc Fitoussi

Le 22 oct à 18h30 à la Friche dans le cadre de «Les Pouilles à Marseille», l’association Les 7 portes présente KAOS, une installation vidéo-photographique, le regard du duo Sisygambis (Christine Coulange et Nchan Manoyan) qui montre les paradoxes du Salento. Cette installation sera présentée jusqu’au 13 nov.

Utopia, Avignon 04 90 82 65 36 www.cinemas-utopia.org

Institut culturel de Marseille 04 91 48 51 94

Le 22 oct à 20h30, au Renoir à Aix, en avant-première, le film de Michel Leclerc Le Nom des gens, avec Sara Forestier et Jacques Gamblin, en présence du réalisateur : Bahia Benmahmoud, jeune femme extravertie, se fait une haute idée de l’engagement politique, n’hésitant pas à coucher avec ses ennemis pour les convertir à sa cause… Renoir 04 42 26 85 12

Le 23 oct à 18h30, au Polygone Etoilé, Peuple et Culture Marseille propose un film choisi par son atelier de pratique cinéma, Chacun sa Palestine de Nadine Naous et Léna Rouxel, le portrait de jeunes réfugiés palestiniens nés au Liban… Le documentaire sera précédé d’un court métrage réalisé par l’atelier. Polygone Etoilé 04 91 91 58 23 www.polygone-etoile.com

Le 14 nov à 18h, à Utopia-Manutention, dans le cadre de Sous le signe d’Averroès, projection de Draquila, l’Italie qui tremble, de Sabina Guzzanti : une dénonciation de l’instrumentalisation politique du tremblement de terre de L’Aquila qui a détruit, le 6 avril 2009, cette ville des Abruzzes. Francesco Forgione, auteur de Mafia Export, participera au débat après la projection.

Le 5 nov à 19h au cinéma du Merlan, projection de Ressources humaines de Laurent Cantet, suivie d’un débat. Le Merlan Scène nationale à Marseille 04 91 11 19 20 www.merlan.org

Le 5 nov à 20h à la Friche, projection du film de JeanFrançois Neplaz, Alpini, portrait de l’écrivain italien Mario Rigoni Stern (cf Zib 33), présenté par Gérald Collas. Le 10 nov à 20h30, à Châteauvallon, Les Chantiers du cinéma proposent Portraits de femmes, Au fil du temps avec la projection de Sia, le rêve du python, adaptation par Dani Kouyaté de la légende du Wagadu, un mythe Soninké du VIIe siècle. Les Chantiers du cinéma 04 94 09 05 31 www.festivalportraitsdefemmes.f

Draquila, l’Italie qui tremble de Sabina Guzzanti

Le 16 nov à 19h30 ce sera un ciné-concert, El Topo d’Alejandro Jodorowsky : Hors-la-loi, El Topo défie, pour l’amour d’une femme, les Quatre Maîtres du Désert qu’il vainc. Sa conscience s’élève jusqu’à ce que sa femme le trahisse. Sa nouvelle vie d’homme saint commence alors, et El Topo s’engage dans la libération d’une communauté de parias. La Cinémathèque de Marseille 04 91 50 64 48


AFLAM | APT | TOULON

CINÉMA

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Apt à l’heure africaine Du 5 au 10 nov aura lieu le 8e Festival des cinémas d’Afrique du pays d’Apt : projections de films au cinéma CésarCinemovida, rencontres avec les réalisateurs, leçons de cinéma. Un hommage sera rendu à Samba Félix Ndiaye, fondateur de l’école de cinéma documentaire africain, et au grand comédien Sotigui Kouyaté. En ouverture, le 5 à 18h, Un Homme qui crie de Mahamat-Saleh Haroun, Prix du jury à Cannes, un film fort sur le Tchad, la guerre et son absurdité, et, à 21h, What a wonderful world de Faouzi Bensaïdi. Parmi les films présentés, Moloch tropical, les dernières heures du président haïtien Jean de Dieu Théogène (Zinedine Soualem) de Raoul Peck qui présentera aussi Lumumba et donnera une leçon de cinéma le 7 à 14h. Présents aussi, le cinéaste tunisien Mohamed Zran avec un documentaire

conviés plus de 600 scolaires, dont certains formeront le jury lycéen présidé par la réalisatrice sénégalaise Angèle Diabang. Le succès de cette semaine particulière a conduit les organisateurs à programmer les films deux fois, comme en 2009. Entre les films, vous pourrez aller voir une exposition de photos sur l’Afrique à la galerie Zoomy ou les superbes «Textiles» de l’artiste nigériane Nnenna Okoré à la fondation Blachère. Et dans tous les cas, il est prudent de réserver ! ANNIE GAVA Un homme qui crie de Mahamat-Saleh Haroun

sur sa ville, Zarzis, ainsi que, pour le focus sur le cinéma marocain, Brahim Fritah, Faouzi Bensaïdi, qui donnera lui aussi une leçon de cinéma le 6 à 14h et Daoud Aoulad Syad dont le dernier film, La Mosquée, sera pré-

senté en clôture, le 10 nov à 21h. Les cinéastes de la génération émergente ne seront pas oubliés avec une rencontre le 7 à 10h, animée par Olivier Barlet. Avant le Festival se tiendra la «journée lycéenne» à laquelle sont

Liban, mon amour

FIMÉ, fais-moi peur

Du 19 oct au 20 nov, AFLAM présente dans plusieurs villes de la région un panorama du cinéma libanais en une quarantaine de films. Un cinéma né sous les bombes, dans le chaos d’un Beyrouth occupé, scindé, détruit, reconstruit. Un cinéma devenu au fil des années le moyen privilégié de dire, reconstituer, interroger la réalité du pays. La programmation rend compte de son évolution, de sa vitalité et de son renouveau depuis la dernière guerre de 2006 à travers le travail de Borhane Alaouié, Jocelyne Saab, Randa Chahal Sabbag et d’autres encore… Dans Chou Sar, censuré au Liban, De Gaulle Eid s’interroge sur les crimes impunis : une projection inédite. Massaker (2004) de Borgmann, Slim et Theissen, Khiam 2000-2007 (2008) de Joana Hadjithomas et Khalil Joreige, Terra Incognita (2003) de Ghassan Salhab révèlent ce même désir de ne pas oublier. Beyrouth fantôme de Ghassan Salhab

enrichira l’atmosphère angoissante des Trois Lumières de Fritz Lang le 7 nov à Ollioules ; le 8 à Six-Fours, Dans La Nuit, film de Charles Vanel, sera accompagné par le pianiste virtuose Karol Beffa ; The Lodger de Hitchcock prendra une dimension tantôt orchestrale tantôt psychédélique sous les archets du Manuchello Quartet le 10 nov à La Garde, tandis que Zombie Zombie, groupe psyché-Krautrock, s’attaquera à un autre maître du cinéma : Eisenstein et son Cuirassé Potemkine le 11 à La Valette-du-Var. Les courts métrages seront eux aussi à l’honneur le 9 nov grâce au studio Folimage et au trio jazz l’Effet Vapeur. À noter enfin, le 12 à Saint-Mandrier, l’excitant projet du groupe Antiquarks qui revisitera un chefd’œuvre de suspense, Duel, le premier film de Spielberg. RÉMY GALVAIN

Festival International des Musiques d’Écran Du 5 au 13 nov Toulon 04 94 21 60 18 www.filmharmonia.fr

Le fantôme de l'opéra de Rupert Julian

Beyrouth fantome de Ghassan Salhab

Pour sa 6e édition, le Festival International des Musiques d’Ecran déploie bobines et créations musicales dans l’agglomération toulonnaise. Neuf ciné-concerts prendront un malin plaisir à nous faire peur. ODDSAC lancera idéalement les hostilités aux Variétés de Toulon. Ce film expérimental posera les bases d’un FIMÉ aux allures troubles et obsédantes, auxquelles la séance de clôture, une performance live du collectif Soundwalk intitulée Ulysses’ Syndrome, fera écho. Les classiques muets du genre seront au rendez-vous : Le Fantôme de l’opéra de Rupert Julian sera accompagné le 6 nov par l’orchestre de l’Opéra de Toulon; Benjamin Macke, accordéoniste électronique,

Festival des cinémas d’Afrique Du 5 au 10 nov Apt 09 52 57 49 35 www.africapt-festival.fr

(1998), portrait mélancolique de la ville martyre mêlant fiction et documentaire, ouvrira la session marseillaise aux Variétés le 4 nov en présence du réalisateur. La sélection reviendra également sur des œuvres peu diffusées, à l’instar des deux premiers longs métrages de Maroun Baghdadi, Beyrouth ô Beyrouth (1975) et Petites guerres (1982), deux films cultes de la production cinématographique libanaise, ou encore Le vendeur de bagues (1965) comédie musicale de Youssef Chahine avec Fairouz, témoignage d’une époque où le cinéma libanais sollicitait le concours de réalisateurs étrangers. E.P.

Cinéma(s) du Liban Du 19 oct au 30 nov Marseille, Forcalquier, La Garde, La Valette, Salon 04 91 47 73 94 www.aflam.fr


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ARTS VISUELS

AIX-EN-PROVENCE

Desseins de traits Jean-Marie Sorgue s’est éteint en avril dernier. Le Gudgi lui rend hommage en lui consacrant sa première édition d’Aix itinéraires de l’art Relégué à la disgrâce pendant la période post-moderne, le dessin a pourtant continué d’être à l’œuvre. Moyen d’expression privilégié au point que certains artistes en ont fait leur médium majeur (E. PignonErnest, O. Hucleux…) voire leur unique ressort comme le décida définitivement à la fin des années soixante Jean-Marie Sorgue*. Il y a encore peu la galerie Ardital, la Villa Tamaris puis l’Abbaye de Silvacane consacraient son travail sans se douter que l’artiste allait, hélas, définitivement poser ses plumes à

Aix. Le musée des Tapisseries et le musée Granet lui avaient offert leurs cimaises et en 2001 l’artiste fit don de 80 dessins au musée de la ville. Hommage lui est donc rendu grâce à un parcours d’expositions dans la ville d’Aix et extra muros jusqu’au 16 oct, produit par le GUDGI, groupement des galeries d’art d’Aix-en-Provence sur le principe des «parcours dans la ville d’Aix» conçus par Alain Paire (Amado, Bioulès, Ducaté…). «Nous voulions ouvrir au plus grand nombre de visiteurs et d’amateurs Majestes defuntes, 1981, Jean-Marie Sorgue © X-D.R

intéressés par l’art contemporain les galeries privées et les institutions publiques autour d’un même projet et rendre cet hommage à l’un des plus importants artistes aixois» insiste Corinne Théret de la galerie du Lézard, coorganisatrice avec Vincent Bercker et Alain Paire. Au total plus d’une centaine d’œuvres dans dix-huit lieux dont certains exposent un seul dessin accompagné d’un portrait photographique de l’artiste par son ami Jean Pécoul. L’appréhension de l’œuvre de Sorgue peut souffrir de cette dispersion géographique mais on apprécie les ensembles conséquents rassemblés dans un même espace exprimant la grande cohérence de ce travail singulier indépendant des modes. Les grands formats particulièrement faits de nodosités ténébreuses, troubles visionnaires anthropomorphes et matières biomorphiques ne sont pas sans

évoquer Max Ernst ou Fred Deux. Les prochains itinéraires de l’art ambitionnent de mettre à l’honneur le photographe Jean-Pierre Sudre, la tenue d’un premier festival d’art contemporain en 2011 et une biennale du dessin en 2012. CLAUDE LORIN

Aix itinéraires de l’art 2010 Hommage à Jean-Marie Sorgue 1924-2010 jusqu’au 16 oct www.gudgi.org (*) lire la remarquable présentation faite par Alain Paire sur le site de sa galerie : www.galerie-alain-paire.com

Un concentré de Sorgue Quatre tableaux seulement sont exposés au Musée Granet sur les 80 que compte la donation qui fit l’objet en 2004 d’une exposition et d’une édition non moins significative, Sorgue, un artiste, une donation. Pour des raisons de calendrier surchargé, le musée Granet n’a pu s’associer à l’événement qu’en les glissant dans un espace entre ses collections ancienne et contemporaine. C’est peu, mais ils concentrent les thèmes essentiels et fondateurs de son œuvre : les Locomotives, les Obstacles/forteresses, les Majestés défuntes et les Villes saintes/paysages. Que de chemin parcouru depuis les couleurs évanescentes des années 50 aux personnages aux formes anthropomorphes et aux Obstacles ! «Toute une œuvre bâtie sur les souvenirs d’enfance, influencée par le mystère du rite et des costumes (il fut enfant de chœur)» souligne Bruno Ely, conservateur en chef, directeur du musée Granet, et élève de Sorgue au lycée Mignet en 1968. Depuis ils n’ont jamais cessé de se voir, «avec des temps forts», se liant d’une amitié sincère au point qu’il persuada Sorgue d’écrire son autobiographie et de publier un entretien avec son fils dans le catalogue de 2004. Deux textes à lire pour comprendre son œuvre, insiste Bruno Ely qui se souvient de l’artiste «pris au jeu de l’écriture après un état de résistance». Où l’on découvre, ému, un chapelet de souvenirs, sa solitude d’enfant unique, son plaisir de «gribouiller sur des petits cahiers», ses déménagements à répétition, la présence aimante de sa mère dont il lui fallut se séparer à l’entrée à l’internat. Mais aussi son grand désarroi et ses cauchemars, sa prise de contact avec Aix en 1953, et toute «[sa] vie de peintre difficile, solitaire, inquiète, marquée par la recherche d’une expression personnelle»… Alors «faut-il dire ici peintre, dessinateur ?» comme l’écrivait Denis Coutagne dans sa préface… Qu’importe, l’essentiel est de percer les obscurs lacets noircis avec obsession sur de grandes feuilles de papier Canson, ces planches dessinées qui font toute la singularité du Fonds Sorgue. M.G.-G.

jusqu’au 16 oct Musée Granet, Aix 04 42 52 88 32 www.museegranet-aixenprovence.fr


AIX-EN-PROVENCE | AVIGNON

ARTS VISUELS 57

Esprit des lieux

© Bettina Steinacker

Phot’Aix 2010, qui a déjà une histoire ancienne, s’inscrit dans le cadre du 50e anniversaire du jumelage entre Aix et Tübingen. Le face à face est inédit, non pas conçu comme un état des lieux de la photographie de part et d’autre de nos frontières mais comme un moyen de circuler à travers «un archipel autonome d’images». Immersion frontale dans l’Allema-

gne d’aujourd’hui à la galerie Fontaine obscure avec Bettina Steinacker qui offre un point de vue distancié sur les transformations urbaines de la région industrielle de la Ruhr. Des terres en jachère, des lieux qui disent la disparition, l’effacement, des zones intermédiaires : parking, entrepôts, murs abandonnés, hôtels d’étape, zones pavillonnaires… Un travail d’obser-

vation presque clinique qui interroge, peut-être, la place laissée par l’homme à la nature dans ces Terrains vagues : des photographies qui évoquent «un temps éloigné et des activités perdues, une méditation sur la perte de sens des lieux» selon Jean Arrouye. Au Musée des Tapisseries, la collusion des styles et des géographies rappelle l’extrême diversité des pratiques photographiques actuelles. L’exemple le plus probant étant les travaux de Dominique Bosq et Jörg Umrath, La Peau du monde, le premier donnant à voir l’illusion de lieux identifiables à travers des lunettes 3D (le grand escalier de la gare Saint-Charles), le second usant de la fragmentation de vues aériennes pour recomposer un paysage imaginaire. L’un et l’autre proposent un travail extrêmement sophistiqué. Térence Pique préfère explorer la ville contemporaine à l’heure où les lumières électriques se substituent à la lumière naturelle, quand il peut

«réchauffer» la réalité crue, froide, des soubassements de lieux hostiles. Une mise en abîme des profondeurs de notre environnement ?… Avec Tilman Rösch, le paysage architectonique affleure par frottements à angles vifs de l’ombre avec la matière, la lumière et la couleur. Une construction cubiste quoiqu’abstraite qui, in fine, poétise la ville. Et d’autres encore qui disent Le Danger de la disparition (Alice Angeletti, Michaël Serfaty) ou Le Micro cosmos (Harald Gottschalk, Frédéric Nakache). M.G.-G.

Phot’Aix jusqu’au 7 novembre Expositions Off dans 17 lieux aixois et Regards croisés Tübingen-Aix Musée des Tapisseries Galerie Fontaine obscure 04 42 27 82 41 www.fontaine-obscure.com

La 16ème édition du Parcours de l’Art, organisée par l’association éponyme qui expose aussi mensuellement dans sa galerie, sème dans 25 lieux d’Avignon, 33 artistes triés sur le volet (sur 200). Loin de s’arrêter aux artistes régionaux, l’événement ouvre également l’œil vers l’Ukraine, la Slovaquie et la Birmanie. Les expositions sont accompagnées de conférences, visites et films, construits autour du travail de l’artiste invité, le marseillais JeanJacques Surian et son œuvre kaléidoscopique occupée par les mythes et les strates temporelles. «Mes tableaux parlent du temps, de l’urbanité et très souvent de Marseille que j’aime autant que je déteste» explique l’ancien professeur d’arts plastiques qui «exhortait ses élèves à lire plutôt qu’à regarder la peinture» et qui qualifie son style de métafiguration (ou figuration mentale). Au Cloître St Louis, il présente un ensemble de grands formats labyrinthiques, dont un triptyque de 1993 et la série Fragments amoureux inspirée par Barthes, jamais sortie de son atelier. «Il n’y a pas de lien entre les images, ce sont des séquences. Un collectionneur fou pourrait avoir envie de réunir tous mes tableaux, mais ça n’est pas mon concept. Ce qui

J.J. Surian en plein accrochage © Delphine Michelangeli

m’intéresse c’est de choisir un espace et de le remplir». Son travail le plus récent est également à l’honneur, de délicieux petits formats sur le nu féminin à travers l’Histoire de l’art. S’il confesse avoir été méfiant au départ le principe de sélection lui paraissait fumeux -il est aujourd’hui ravi de participer. Dans la déambulation, on retiendra au Cloître, les installations sur calque et photos sur verre de la lyonnaise Marcelle Benhamou et les sculptures

de Jean-Paul Moscovino. À la Maison Jean Vilar, Thierry Savini expose un étonnant Eros en crin végétal et un Crâne aux 1000 roses. Ne manquez pas le travail photographique performatif d’Imen Djouini et les magnifiques poupées de Cécile Perra à l’Espace Vaucluse (jusqu’au 17 oct). Entrée libre (sauf séances cinéma à l’Utopia). DELPHINE MICHELANGELI

Sculpture de J.P. Moscovino dans la cour du Cloitre © Delphine michelangeli

3 semaines d’art contemporain

Parcours de l’art jusqu’au 23 octobre Avignon 04 90 89 89 88 www.parcoursdelart.com


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ARTS VISUELS PARCOURS

MARSEILLAIS

Généreux Courez à la rencontre des œuvres et des artistes ! Tel est le mot d’ordre donné par Mouv’art, Ouvertures d’Ateliers d’Artistes et Portes Ouvertes Consolat : l’art contemporain généreusement Pfou ! Faut pas être mou du g’nou ces jours-ci ! Petits livrets en guise de vademecum en poche, plans dépliés largement sous ses yeux ébouriffés, surligneur en main, café refroidi abandonné sur le bord de la table trop étroite du bar d’à-côté… l’aficionado doit batailler ferme avec ce qui lui est offert de voir de l’art contemporain à Marseille. Dans la même période ont lieu trois évènements qui ravissent nos mirettes : Mouv’art pour le plus récent, Portes Ouvertes Consolat et Ouvertures d’ateliers d’artistes pour les plus vénérables ont en commun d’offrir généreusement la rencontre avec les artistes. Plus de 120 tout compte fait ! Là, physiquement disponibles, les œuvres au mur chez eux ou installées dans l’espace public. Gratos. L’atelier ou la maison sont ouverts, avec quelques petites réjouissances à grignoter un verre à la main. Tout le plaisir est pour nous. Nous tous. La rencontre est facile : les gens sont dans la rue, pas besoin de pousser la porte, elle est ouverte. Alors on entre même dans des containers. Pas question de jouer au guide étoilé de l’art contemporain marseillais : un nom, un lieu plus recommandable ? Z’avez qu’à y’aller. Mais de bien belles découvertes : Guillaume Gattier (résidence prometteuse aux Ateliers Boisson), Hervé Proby (ses dernières plaques d’acier ouvragées), Clara Feder (mise en installation vertueuse de Paul et Virginie), la maison-atelier-tout-est-art de Frank Garam. Être accueillant par respect pour les Julie Darribere Saintonge dans son atelier avec Martine Robin, Ouvertures d'ateliers d'artistes 2010 © C.Lorin/Zibeline

Mouv’art © Agnès Mellon

artistes et les organisateurs, tous ceux et celles qui se lèvent l’âme pour quelques centaines d’euros de salaire seulement et de grosses inquiétudes souvent, pour que ça existe. Et ça existe. Mais j’apprends que la Tangente va fermer. Certains s’interrogent : verra-t-on cette année les élus à la culture et responsables publics ? Hors fonction éventuellement. Pour constater ce qui est fait in situ. Contrairement aux idées reçues, les subventions ne sont pas fatalement vécues comme une manne (une aumône ?) bien recueillie des artistes ou des porteurs de structures dédiées à l’art contemporain : il s’agit de faire vivre un projet et de partager… D’autres

demandent : avez-vous rencontré des collectionneurs ? Quelques mécènes ? D’autres réclament la création de nouveaux ateliers d’artistes dans la ville (1). Indécent ? Et dire que je n’ai encore pu voir cet atelier, découvrir les trucs de tel collectif, mettre enfin un visage sur une invitation. (1) collectif Art 13 http://marseillequel avenircultureenv.hautetfort.com

Enchères De leur côté Mouv’art et le Château de Servières ont aussi programmé une vente aux enchères. Maître Cornette de Saint Cyr (qui officia cet été dans les Alpilles pour le festival Ap’art) descend sur le cours d’Estienne d’Orves à l’invitation d’Emmanuelle Saint Denis. La quatrième édition de À vendre se fera au 24 de la rue Montgrand dans un immeuble prêté pour l’occasion par la Ville de Marseille. Le principe est souvent le même : les artistes (encore eux) offrent une œuvre, la mise à prix devant être des plus accessibles, parfois moins de cent euros. Une part revient à l’artiste, l’autre à l’organisateur ; de l’ordre de vingt pour cent qui seront réinjectés dans les projets l’année suivante précise Martine Robin pour Château de Servières, pour partie dans le partenariat avec le Portugal initié l’année dernière suite à l’invitation marseillaise. Ouverture d’ateliers d’artistes a désormais son équivalent lisboète avec la création de l’association Castelo d’if. Cent artistes dont une

délégation marseillaise en invitée d’honneur seront les 20 et 21 novembre prochains dans le quartier de Graça. Vous suivez ? CLAUDE LORIN

Mouv’art, Portes Ouvertes Consolat et Ouvertures d’ateliers d’artistes ont eu lieu jusqu’au 10 oct Association Portes Ouvertes Consolat 04 91 95 80 88 www.assopoc.org Mouv’art 06 20 97 63 01 www.mouvart.fr À vendre du 15 au 17 oct Association Château de Servières 04 91 85 42 78 www.chateaudeservieres.org


FRAC | CCIMP

ARTS VISUELS 59

Pour sa dernière exposition avant réinstallation en 2012 dans ses nouveaux murs à la Joliette, le FRAC propose une exposition qui interroge… l’exposition Prendre la porte et faire le mur invite à expérimenter l’exposition comme un lieu de réflexion sur le médium exposition et ses composants. Troublant parcours proposé par la commissaire invitée, Florence Ostende. Dans ce white cube il y a peu et plus à voir, à entendre, à comprendre au risque de la confusion sur la nature des choses et d’interprétations fortuites. Que faire de ce cube de bois peint en blanc : siège ou œuvre ? (Le Belvédère, Saadâne Afif). Qu’éclaire dans l’angle de la salle le faisceau lumineux du projecteur de scène posé au sol? (Poursuite en angle, mi-rasante, mi-frontale, Michel Verjux). Que fait cet homme bien réel assis devant un ordinateur ostensiblement muet à vos interpellations ? (Instant Narrative, Dora Garcia). Comment ces deux rectangles sombres suspendus au mur s’inventent-ils comme tableaux pendant qu’ils diffusent des paroles en sourdine ? (La peur des anges, Philippe Parreno). Pourquoi ces grands panneaux transparents placés de façon labyrinthique servent-ils à accro-

cher trois fois rien ? (Brain 1, Simon Dybbroe Møller). Tiens ! des textes projetés sur le mur blanc d’à côté se déroulent… que disent-ils ? Ils décrivent des gens… ils parlent de cette personne en rouge qui rit dans la pièce d’à côté… d’un homme à lunettes qui se rapproche et se met à lire les textes projetés sur le mur ( Instant Narrative, Dora Garcia). Repenser l’œuvre d’art, les lieux de monstration, le rapport à l’œuvre, les modalités d’implication du public, évoquent bien des tentatives historiques : Futuristes, Duchamp, art sociologique, happenings, Fluxus et autres propositions non muséales. On sait depuis longtemps que l’art n’est plus seulement délectation esthétique. Faut-il faire sienne la déclaration clouée à l’entrée par Simon Dybbroe Møller invitant le visiteur à renoncer aux conventions passées. Mais entre qui ? Mais lesquelles ? Celles qui nous lient à l’art, évidemment. CLAUDE LORIN

Prendre la porte et faire le mur jusqu’au 11 décembre FRAC, Marseille 2ème 04 91 91 27 55 www.fracpaca.org

Alain Rivière, Comment j’ai fait certaines de mes expositions, 1997-2004 FRAC Paca © Alain Rivière

S’asseoir sur le white cube

L’art a la côte Qu’est-ce qui fait courir la Chambre de commerce et d’industrie Marseille Provence ? Permettre aux mondes de l’entreprise et de l’art de se rencontrer, comme en témoigne sa collection permanente dont les premières archives datent de 1599 (plus de 80000 ouvrages, des peintures, aquarelles, affiches, photographies, cartes et plans, instruments de navigation…). Dès lors l’idée de créer un concours artistique en direction de la création actuelle se justifie pleinement : «Il ne s’agit pas d’un prix, souligne Gérard Traquandi, président du jury, les artistes gagnent le fait que la CCI achète leurs pièces». La dotation d’achat se montant à 30 000 euros, qui se répartissent cette année entre Cari Gonzalez-Casanova (accueillie aux Ateliers d’artistes de la ville de Marseille de 2005 à 2007), Denis Prisset (fondateur des Éditions P à Marseille) et Mathieu Schmitt (diplômé de la Villa Arson à Nice) sous la forme d’une acquisition ou d’une commande. Avant de «décrocher le gros lot», les artistes ont été présélectionnés par un comité constitué par la CCI Mar-

seille Provence, puis choisis par un jury professionnel. Leurs travaux sont exposés au Palais de la Bourse avec 7 autres artistes qui ont fait mouche parmi les 78 dossiers de candidature récoltés émanant du territoire et au-delà (66 en 2009). Un intérêt croissant qui s’explique par l’enjeu

financier et la visibilité, mais également par la souplesse de la CCI vis-à-vis du thème central : l’économie du territoire intègre l’ensemble géographique des communes d’Arles, d’Aix-en-Provence et de Toulon. On est alors en droit de se demander comment des artistes vivant à l’étranger peuvent s’emparer de ce

Denis Prisset, photo extraite de son diaporama © D. Prisset

territoire. Ce que Gérard Traquandi clarifie simplement : «Il n’y a pas de malentendu entre nos choix et le thème de la CCI car elle est, par définition, ouverte sur l’Europe et la Méditerranée. On a préféré s’intéresser à une réflexion autour de l’économie, de cet espace-là». D’où la présence de Cari GonzalezCasanova qui travaille avec une entreprise de Château-Gombert, Aurélie Masset et Malik Ben Messaoud qui produisent des écofauteuils design ou Sandra Aubry et Sébastien Bourg qui évoquent le GPS à travers un ouvrage marqueté de tradition artisanale. MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

3e Concours artistique de la CCI Marseille Provence jusqu’en janvier 2011 Palais de la Bourse, Marseille 1er 0 810 113 113 www.ccimp.com


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ARTS VISUELS

BANDOL | FABRIK89 | ARTOTHÈQUE

Nouvelle vague À l’heure où la 7e édition de L’œil en Seyne bat son plein (jusqu’au 7 nov), Bandol lance son premier festival de photographies Horizon vertical. Une «photoïncidence» surprenante, légitimée par l’installation de Louis Lumière à Bandol de 1935 à 1948 et la volonté de la Ville de dérouler le fil rouge de la mémoire. L’inauguration se déroulant d’ailleurs en présence de ses petits-enfants… Sauf que la posture est résolument contemporaine grâce à un commissariat co-signé avec l’association Art&A et une carte blanche offerte à la galerie parisienne Esther Woerdehoff. Au Centre culturel, à la galerie Ravaisou et au parc du Canet (en plein air), 24 photographes français et internationaux dessinent «un périple Odysséen» composé de bords de mer, d’architectures du littoral et d’environnement.

nautiques, bâti, industries, ailleurs… Comme s’il s’agissait d’ouvrir encore l’horizon sur le Grand large avec, notamment, le traitement perturbateur de la couleur chez David Koenig, bleu vif circonscrit à un carré incrusté dans le noir et blanc. Une irruption qui pourrait donner le ton à un événement que d’aucuns attendaient dans cette paisible cité balnéaire. MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

Bunker, France, 2002 © Philippe Calandre

Un état des lieux tantôt distancié - les discothèques inanimées de Christophe Mauberret -, historique - les vestiges de bunkers de Philippe Calandre -, ou poétique avec Loan Nguyen. Au Centre culturel, la sélection se caractérise par une

certaine unicité de tons (sentiment d’inachevé) et de thèmes (nature déshumanisée). Dans son prolongement, la proposition de la galerie Esther Woerdehoff opère une cassure stylistique en multipliant les points de vue et les sujets : activités

Art tôt

Déclic nocturne population rurale qui, en principe, est en train de dormir ! Une façon d’interroger les hommes par leur absence, de n’en conserver que leurs empreintes, de faire surgir du noir absolu la trace de leur passage : deux pompes à essence, des meules de foin, des fanions colorés, une construction inachevée… Des photos pensées comme une «mise en scène de la théâtralité du monde» nées au cours d’un long travail de repérage, tout feux allumés. Inconsciemment, peut-être, Julien Lombardi inscrit son œuvre dans la photographie plasticienne tout en ne perdant jamais de vue le travail de collecte à la rigueur toute scientifique. M.G.-G

Artefact Julien Lombardi jusqu’au 27 novembre Fabrik 89, Marseille 7e 04 91 55 58 29 www.fabrik89.com

Artefact © Julien Lombardi

© X-D.R

30 ans et déjà deux prix ! La Bourse du talent #40 et la Mission jeune artiste 2010, et l’adoubement de la Bibliothèque nationale de France qui vient d’intégrer à sa collection une œuvre de sa série Artefact. Le jeune photographe Julien Lombardi se sent «encouragé sur le chemin qu’il s’est choisi» après ses études d’anthropologie à la MMSH d’Aix et une année vagabonde au Maghreb et en Afrique de l’Ouest. Une parenthèse qui fut aussi une révélation alors même qu’il «fait des images» depuis ses 7 ans et lui fit préférer l’épanouissement de son imaginaire aux travaux de recherche. À la galerie Fabrik 89, les épreuves d’Artefact frappent par leur matité («une texture qui absorbe la lumière et évite les reflets»), leur étrangeté (impression de jamais vu) et le protocole mis en œuvre. Solitaire, Julien Lombardi aime plus que tout explorer au volant de sa voiture, la nuit, le territoire alpin pour offrir un portrait en creux d’une

Horizon vertical jusqu’au 14 novembre Centre culturel (Horizon vertical), galerie Ravaisou (Grand large), parc du Canet (en plein air), Bandol 04 94 29 22 70 / 04 94 29 37 35 www.bandol.fr

Le 6 oct, l’Artothèque du lycée Artaud vernissait l’exposition de ses vingt ans d’activité. La structure est née autour d’un groupe d’enseignants et d’élèves qui voulaient «favoriser la rencontre de l’art contemporain par le jeune public, apporter aux lycéens un complément de formation par l’éducation du regard et l’approche des disciplines artistiques». La Proviseure dans son allocution a rappelé l’originalité et la singularité de cet héritage, qui passe commande à des artistes (elle possède un fonds de près de 400 œuvres), prête son fonds aux adhérents, édite des cahiers monographiques, expose des artistes majeurs. Pour son 20ème anniversaire, l’Artothèque a donc publié le troisième volume de ses portfolios (voir Zib 31) qui réunit les œuvres de 45 des 61 artistes qui y ont réalisé une exposition personnelle depuis sa création. Le document de très belle facture a été tiré à 190 exemplaires numérotés, vendus au prix de 200 euros. Les premières planches du portfolio ainsi que celles des deux précédents documents sont l’objet de l’exposition, présentée ce soir là par les élèves de terminale : un panorama pointu et pertinent des plus intéressants artistes de notre région. Car connaître l’art tôt, à l’artothèque, permet de côtoyer les plus grands… YVES BERCHADSKY

www.lyc-artaud.ac-aix-marseille.fr/artotheque


AU PROGRAMME

ARTS VISUELS 61

Fusionnel Le musée Ziem poursuit son approche de la peinture de paysage et s’attache ici au «paysage abstrait» avec l’œuvre peint d’Olivier Debré (1920 –1999), notamment ses Signes-Paysages. Loin de vouloir témoigner d’une réalité objective, Olivier Debré s’était engagé dans une représentation sensible et sensuelle du paysage. Quasi fusionnelle… M.G.-G.

Signes-Paysages Olivier Debré du 20 octobre au 23 janvier Musée Ziem, Martigues 04 42 41 39 60 www.ateliermuseal.net

Borderline La série de photographies de Geoffroy Mathieu Extension urbaine et les photographies, vidéo et installations de Barbara Sarreau La ville avance Le cube sont les deux faces d’une même expérience : un jeu d’allersretours entre Marseille, Tanger et Tétouan vécus par les deux artistes en mai 2010. Ce projet s’inscrit dans une thématique que Vol de Nuits développe cette saison avec Aurore Valade et Laetitia Bianchi (Plein air), Till Roeskens (À propos des certains points de l’espace) et Martine Derain (L’Étrange demeure). M.G.-G

La ville avance Geoffroy Mathieu / Barbara Sarreau jusqu’au 25 novembre Vol de Nuits, Marseille 04 91 47 94 58 www.voldenuits.com

L’aventure surréaliste Jacques Herold participa à l’aventure surréaliste aux côtés de Tanguy, Breton, Brauner… Le musée Cantini rend hommage à cet artiste qui vécut à la villa Air-Bel à Marseille de 1940 à 1943 et réalisa, notamment, le Jeu de cartes de Marseille, un ensemble de Cadavres exquis et de Dessins collectifs qui figurent dans le fonds permanent du musée. L’exposition monographique présente également un ensemble conséquent de bronzes, dessins et toiles. M.G.-G.

Jacques Hérold (1910-1987) et le surréalisme jusqu’au 11 janvier Musée Cantini, Marseille 6e 04 91 54 77 75 www.marseille.fr

Jacques Hérold, La maison de crystal, 1938 © ADAGP, Paris, 2010

Contre nature En écho à sa collection photographique (150 œuvres sélectionnées pour l’occasion), le Musée d’art de Toulon présente le travail de l’artiste allemande Karen Knorr issu de son étrange série Fables. Une recherche sur le rapport de l’homme à l’animal et la figure métaphorique de l’animal qui prend la forme de tableaux mis en scène dans un décorum muséal : leur séduction ambiguë tient peut-être au trouble qu’ils suscitent ? M.G.-G.

Fables Karen Knorr du 16 octobre au 30 janvier Musée d’art, Toulon 04 94 36 81 01


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RENCONTRES

Libraires du sud /Libraires à Marseille 04 96 12 43 42 Rencontres avec Marie-Claude Char et Michelle Gazier pour la présentation de la première édition de La Correspondance 1951-1954 de René Char et Nicolas de Staël (éd. des Busclats), le 15 oct à 19h à la librairie de l’horloge (Carpentras) ; avec Jean-Louis Bianco pour Si j’étais Président… Que faire en 2012 ? (éd. Albin Michel), le 16 oct de 10h à 12h à la librairie Au Poivre d’Âne (Manosque) ; avec le père Bernard Lorenzato, le 19 oct à 18h30 et avec Robert Peloux autour du thème de son dernier livre Les religiosités populaires, archaïsme ou modernité ? (éd. de l’Atelier), le 20 oct à 18h30, à la librairie Saint Paul (Marseille); avec Marie-Sabine Roger pour Vivement l’avenir (éd. du Rouergue, le 20 oct à 19h à la librairie Aux Vents des mots (Gardanne) ; avec René Coppano pour Il était une fois Marseille (éd. La Manufacture des livres), le 28 oct à 18h30, et avec Anne Proenza et Teo Saavedra pour Les Evadés de Santiago (éd. Le Seuil) le 18 nov à 18h30, à la librairie Au Poivre d’Âne (La Ciotat). Itinérances littéraires : rencontre avec Néstor Ponce pour Sous la pierre mouvante (éd. Le Bec en l’air), dans le cadre du festival Belles Latinas organisé par Espaces latinos, le 14 oct à 17h30 à la libraire All Books & Co (Aix) et le 15 oct à 19h à la librairie Le Petit Pois (Manosque). Escales en librairie : Rencontre avec David Toscana pour Un train pour Tula (Ed. Zulma), le 13 oct à 18h30 à la librairie l’Ecailler (Marseille), animée par Pascal Jourdana, et 15 oct à 18h30 à la librairie Le Grenier d’abondance (Salon), animée par Nathalie Delsalle.

AIX Fondation Saint John Perse – 04 42 91 98 85 Rencontre-débat avec Joëlle Gardes, le 22 oct à 18h. Voyons voir – info@voyonsvoir.og Le 16 oct : Vernissage à 12h, au domaine de Château la Grande Bauquière, à Puyloubier, de l’expo Liquidations/Dérapages contrôlés de Vincent Bonnet et Catherine Melin ; à 16h, au domaine de Château Grand Boise, à Trets, conférence de Sylvie Coëllier, Panneaux de campagne, à 16h45 film de Noël Ravaud, La société ne souhaite pas faire de commentaires à ce sujet à ce sujet non plus et à 17h30 performance avec Maxime Carasso pour un film de Noël Ravaud.

ARLES Atelier Archipel – 06 21 29 11 92 Exposition de peinture de Vonnick Caroff, jusqu’au 24 oct. Hôtel Le Bervédère – 06 27 30 57 71 Exposition de photographies de Fred Eral, Touchez des Yeux, prolongation jusqu’à la fin de l’année. Collège international des traducteurs littéraires – 04 90 52 05 50

27e assises de la traduction littéraire en Arles, sur le thème Traduire la correspondance. Conférences, tables rondes, ateliers de traduction… Du 5 au 7 nov.

BARJOLS Association Plaine Page – 04 94 72 54 81 Les éditions Plaine Page présentent leur dernière parution Les Entre Peaux, Barjols, des tanneurs aux artistes, suivie de lectures des textes du recueil : le 16 oct de 18h à 19h au théâtre Apollinaire à la Seyne et le 3 nov à 18h30 à la librairie Imbernon du Corbusier à Marseille. Dans le cadre du Festival Les Musiques insolentes, le 23 oct au Centre Elias à Barjols, ils organisent un atelier de percussions sur instruments originaux de 17h à 19h ; Bamboo Orchestra en concert à 19h30 ; rencontre improvisée entre Sébastien Lespinasse (poésie sonore) et Heddy Boubaker (saxo) à 20h30.

BEAUCAIRE Office de tourisme – 04 66 59 26 57 10e salon des Métiers d’art, du 15 au 17 oct, casino municipal au Champ de Foire.

FORCALQUIER Association Forcalquier des livres – 04 92 75 09 59 10e fête du livre d’artiste : autour de l’auteure Corinne Hoex qui créera un texte inédit, une vingtaine d’artistes présenteront leurs œuvres et travailleront à la réalisation d’un livre d’artiste commun. Du 22 au 25 oct.

GARDANNE Médiathèque Nelson Mandela – 04 42 51 15 16 Fête de la science : Biodiversité, quels défis pour l’avenir ? expos, spectacles, balade nature (le 23 oct à 14h30), séances d’observation en forêt (le 24 oct à 14h30 et 16h30), espace lecture, le monde des fourmis… Du 20 au 24 oct.

LA BOUILLADISSE Centre culturel – 04 96 11 27 69 Dans le cadre du cycle Quelle ville pour demain !, projection du film de Marc-Henri Wajnberg, Oscar Niemeyer un architecte engagé dans le siècle, suivie d’un débat animé par Bruno Jourdan, en présence de Jacques Sbriglio et Rudy Ricciotti. Le 14 oct à 19h.

LAMBESC Agglo du Pays d’Aix – 04 42 93 85 85 2e édition du festival de l’imaginaire du Pays d’Aix Autres Mondes : spectacles, concerts, rencontres et dédicaces avec les auteurs invités, conférences, débats… Du 20 au 24 oct.

LA SEYNE-SUR-MER Théâtre Guillaume Apollinaire – 04 94 87 21 30 11e fête du livre de théâtre : le 16 oct, sur le thème des Écritures théâtrales contemporaines, lectures de

pièces récentes, rencontres avec Éric Durnez, Francine di Mercurio, Sabine Tamisier, Stéphanie Marchais, Natacha de Pontcharra... ; le 17 oct, sur le thème de Théâtre et histoire dans le Var, rencontre avec des historiens, metteurs en scène, auteurs, autour de la pièce Drame à Toulon - Henri Martin de Claude Martin et Henri Delmas (1951) et projection du film D’autres sont seuls au monde de Raymond Vogel (1953).

MARSEILLE Regards de Provence – 04 91 42 51 50 Exposition Les trésors cachés du Sacro Monte Di Orta, jusqu’au 16 janvier. Institut Culturel Italien – 04 91 48 51 94 10e semaine de la langue italienne, du 18 au 23 oct : conférence d’Anna Proto-Pisani Entre deux langues, littérature et migration en Italie, le 19 oct à 18h ; exposition photo de Simona Filippini, Di Lei, du 19 oct au 19 nov, inauguration le 19 oct à 19h ; projection du film Lettere dal Sahara de Vittorio de Seta, le 20 oct à 18h. Installation vidéo-photographique Kaos, un autre regard sur le Salento par le duo Sisygambis, du 22 oct au 13 nov à la Friche. Rencontre avec Giovanni Maria Bellu à l’occasion de la sortie de la traduction de son 1er roman L’Homme qui voulut être Perón (éd. Actes Sud). Le 9 nov à 18h. ABD Gaston Deferre - 04 91 08 61 00 Exposition Jours de fête en Provence, co-produite avec le Museon Arlaten. Jusqu’au 23 déc ; autour de cette expo, visite musicale avec André Gabriel, le 16 oct à 15h, Têtes de Tarasque, atelier pour enfants de fabrication d’instruments de musique avec Marie Picard, le 16 oct à 14h et 16h, De bric, de broc et de roseaux, atelier pour enfants de fabrication d’instruments de musique avec Henri Maquet, le 20 oct à 14h et 16h, conférence musicale avec André Gabriel, le 21 oct à 18h30 et Maracas et Toutoures, atelier pour enfants de fabrication d’instruments de musique avec Marie Picard, le 23 oct à 14h et 16h. Exposition photographique de Patrice Terraz, Les cent visages du vaste monde, jusqu’au 11 déc. Dans le cadre de Ces étonnants archivores, conférence sur L’Assassinat d’Henri IV et le midi de la France, avec Michel Cassan, professeur à l’Université de Limoges et auteur de La Grande Peur de 1610, et Françoise Hildesheimer, conservateur général aux Archives nationales. Le 18 nov à 18h30. BMVR Alcazar – 04 91 55 90 00 Présentation de livres d’art provenant du centre de documentation Ernst Goldschmidt, bibliothèque du Musée d’art contemporain, jusqu’au 16 oct. Lectures théâtralisées par la cie Peanuts : Les animaux malades de la peste, le 30 oct dans le cadre des Littorales. Les Mardis du Mucem : cycle de rencontres-débats animés par Thierry Fabre pour comprendre les civilisations entre Méditerranée et Europe. Un


RENCONTRES 63 bréviaire méditerranéen pour le XXIe siècle avec Predrag Matvejevitch, écrivain et essayiste, professeur honoraire de langues romanes à l’Université La Sapienza de Rome. Le 9 nov à 18h30.

Espace Ecureuil – 04 91 57 26 49 Conférence de Jean Weissenbach et Fabienne Orsi sur Le projet génome humain : une brevétisation ratée ?, le 26 oct à 18h30. Conférence de Jean-Noël Bret : Italie, Italies I : Le grand tour ou le voyage en Italie, le 26 nov à 12h30 et le 29 oct à 12h30 et 18h ; Italie, Italies II : Rome, musées et monuments, le 16 nov à 12h30 et le 19 nov à 12h30 et 18h. Centre Richebois – 06 14 69 65 94 Exposition Une exploration partagée, photographies de Aude Lavenant, Gilles Gerbaud et des stagiaires du Centre, jusqu’au 30 oct. Galerie Jean-François Meyer – 04 91 33 95 01 7e édition de Poésie Marseille. Du 22 oct au 31 oct.

Cinéma les Variétés – 06 22 57 81 80 Exposition de photos de Julien Anselme issues de la parution du livre D’une belle à l’autre (éd. P’tits Papiers, 2008). Du 28 oct au 20 nov. Librairie Maupetit – 04 91 36 50 50 Mini-concert Hansel et Gretel un conte musical chanté par Catherine Vincent, le 16 oct à 11h15 ; rencontre et dédicace avec Raphaële Frier à l’occasion de la parution de son dernier album Pedro à 100 à l’heure (Mango), le 23 oct à 15h ; dans le cadre des Littorales, Jeanne Siaud-Facchin dédicace son livre Génération Ado le dico (Bayard jeunesse) ainsi que Raphaële Frier le 30 oct à partir de 14h sur le stand de la librairie. Art-Cade – 04 91 47 87 92 L’autre bord #1 : rendez-vous annuel avec la création contemporaine méditerranéenne, du 14 oct au 6 nov. Vernissage à la galerie des grands bains douches de la Plaine le 14 oct à 18h30 ; vernissage à la galerie Montgrand le 15 oct à 18h30 ; lecture de Mohamed Kacimi à la galerie des grands bains douches le 5 nov à 18h ; rencontre Les modernités hors de l’europe, le 6 nov à 14h à la bibliothèque départementale Gaston Defferre. « Rochers Carrés », 2009, série photographique, courtesy Kader Attia, Sharjah Art Foundation, galerie Christian Nagel (Berlin & Cologne)

Espaceculture – 04 96 11 04 60 Atelier d’écriture littéraire et symbolique proposé par l’association Zingha (sur résa au 06 61 66 89 85), les 13 et 20 oct de 10h à 18h. Rencontre avec Paul Aubert sur La Frustration de l’intellectuel libéral. Espagne, 1998-1939, le 28 oct à 17h30. CIPM – 04 91 91 26 45 Exposition consacrée au travail graphique de Pierre Alferi, Les Illustrés dans le cadre du festival ActOral. Jusqu’au 20 nov. Atelier Vis à vis – 04 91 33 20 80 Book Project International, XIIIe Rencontres de l’édition de création : manifestation organisée autour du livre d’artiste et de la bibliophilie. Les 30 et 31 oct, de 10h à 19h. Alphabetville – 04 95 04 96 22 L’art à l’essai : appréhender l’art, ses techniques, ses médias, selon des parcours, des artistes, des positions, des situations par la présentation de publications récentes et sous forme de rencontres avec les auteurs, au travers d’essais sur l’art. Le 14 oct à 18h30, Recherche et création, art, technologie, pédagogie, innovation (éd. du Parc, ENSA Nancy) présenté par Samuel Bianchini et Jean-Paul Fourmentraux ; le 4 nov à 18h30, Erik Bullot présente son ouvrage Renversements 1, notes sur le cinéma (éd. Paris Expérimental) ; le 17 nov à 18h30, Jacqueline Caux présente Le silence, les couleurs du prisme et la mécanique du temps qui passe (éd. de l’Eclat) de Daniel Caux.

poésie persanes, dans le cadre des 16e Rencontres cinélittérature. Le 15 oct à 18h30. Conférence avec Mohammad-Reza Djalili, politologue spécialiste du Moyen-Orient et de l’Asie centrale, auteur notamment de L’Iran de A à Z (éd. A. Versailles) et de Géopolitique de l’Iran (éd. Complexe) sur la question iranienne. Le 19 oct à 18h30.

ROGNES Office de tourisme – 04 42 50 13 36 Salon des littératures imaginaires : rencontre avec Charlotte Bousquet, le 21 oct à 18h30 et spectacle déambulatoire de la cie Estock Fish, le 23 oct à 10h et 11h45. Bibliothèques en fête sur le thème des littératures contemporaines slaves, du 19 oct au 12 nov.

SAINT-RÉMY Musée Estrine – 04 90 92 34 72 Exposition Bargoni, peintures récentes, jusqu’au 28 nov.

SALON Ville – 04 90 44 89 00 Village des sciences : animation sur la biodiversité marine, expo escales littorales sur des espèces et écosystèmes emblématiques de la Méditerranée, explications sur l’hydroélectricité avec EDF, les transports et leur sécurité, la musique assistée par ordinateur… Du 19 au 22 oct à l’espace Trenet.

MARTIGUES Médiathèque Louis Aragon – 04 42 80 27 97 Exposition Photographes d’Ailleurs et d’ici : photographies de Anne-Marie Camps, Marina Obradovic, Jean Barak, Yann Castannier et Jean-Félix Fayolle, jusqu’au 30 octobre à la salle de l’Aigalier. Vernissage et concert de Sylvie Paz le 14 oct à 18h30 à la salle de l’Aigalier; conférence de Reza, le 15 oct à 18h à la médiathèque.

ORANGE Le Théâtre Antique – 04 90 51 17 60 Au temps d’Auguste : s’amuser et comprendre le monde antique grâce à 7 ateliers originaux. Ateliers lampe à huile, fibule, écriture, masques, école du gladiateur… Du 23 au 31 oct. Conférence avec Jean-Charles Moretti, responsable de l’Institut de Recherche sur l’Architecture Antique de Lyon, directeur de recherches au CNRS : Théâtres Grecs et théâtres Romains, le 27 oct à 18h.

PORT-DE-BOUC Médiathèque Boris Vian – 04 42 06 65 54 Rencontre-débat avec Parviz Abolgassemi, universitaire et poète autour de la littérature et de la

Apéritif artistique

Comme chaque année et peut être mieux encore, avant la grand messe des Tables Rondes, les 17eRencontres d’Averroès se mettent sous son «signe» et proposent une série d’événements artistiques qui mettent en scènes, en films, en lectures «la méditerranée des deux rives». Du cinéma (voir p 54), une grande expo photographique au MuCEM, et des collaborations réaffirmées avec DanseM, les Bernardines, les Salins, le Méjan, La Friche pour du théâtre en arabe… Des représentations, des concerts et des films de grande qualité. Vous avez le choix : d’Arles à Apt et La Ciotat, pas moins de 21 événements traversent le territoire… Sous le signe d’Averroès Jusqu’au 12 déc www.rencontresaverroes.net


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LIVRES

RENCONTRES

Les habits neufs des Littorales

Pour sa 3e édition, le rendez-vous annuel des auteurs et des livres proposé par les libraires indépendants associés poursuit son ancrage dans le paysage littéraire marseillais en s’autorisant quelques innovations prometteuses Une thématique fédératrice d’abord. Pour les Littorales 2010, ce sera Moi et les autres. Une exploration de l’écriture entre intime et collectif, qui se jouera sur cinq jours, en plusieurs temps et selon différents axes et genres, afin que tous les lecteurs puissent y trouver plaisir. Comme les années précédentes, la manifestation débutera avec une soirée «cinélittéraire» autour du documentaire de Virginie Linhart, 68, mes parents et moi, en présence de l’auteure réalisatrice (voir p. 66). Le 28 se passera au Comptoir, en compagnie de Maylis de Kerangal (voir Zib 33) et de Fabrice Humbert. Le 29, 2e

grande nouveauté, sera consacré à des tables rondes assez pointues sur le thème à la BMVR Alcazar. Et durant le week-end, les chapiteaux reviendront sur le Cours d’Estienne d’Orves pour accueillir l’espace librairies, diverses animations ainsi que, 3e nouveauté, un forum radiophonique en partenariat avec Radio Grenouille. Quant au Comptoir littéraire, il se tiendra cette année, dernière nouveauté notable, au calme de la Boate, à deux pas du cours. Une vingtaine d’auteurs invités (voir p 66 et 67), des rencontres croisées et des approches variées, de multiples propositions dans et hors les murs, les

Débats et résistance

C’est peu dire que le Festival du Livre de Mouans-Sartoux (06) est un rassemblement militant. Dès la descente du TER, on en prend conscience en remplissant un questionnaire sur le choix des transports en commun. Et ce sera ainsi tout le week-end : palissade pour la paix, vente de produits bio, bouquinistes, stands associatifs accompagnent ce festival bon enfant qui draine une large partie de la population de la commune ainsi que les fidèles venus de toute la région… et d’ailleurs ! Centré à ses débuts sur la culture occitane, rassemblant alors une quarantaine d’auteurs au plus, le festival a rapidement connu une croissance importante. Aujourd’hui ce sont des centaines d’écrivains, journalistes, réalisateurs, hommes politiques également, qui s’y retrouvent pour rencontrer un public de plus en plus nombreux. Sous l’égide du maire écologiste de la ville

André Aschieri et de son initiatrice Marie-Louise Gourdon, l’événement prend des allures de forum citoyen. Toute la ville y participe. Des dizaines de bénévoles veillent à la circulation de la foule, à la gestion des files d’attente, au bon déroulement des rencontres et des débats. Les lieux publics (gymnases, salle polyvalente) sont réquisitionnés pour l’occasion, ce qui n’empêche pas l’installation de chapiteaux dont celui, énorme, consacré à la littérature jeunesse. Bref, une bonne partie du bourg est investie pour trois jours de débats, projections, signatures, lectures parmi lesquels il est difficile de faire un choix. La diversité des propositions et le nombre des rendez-vous a d’ailleurs de quoi donner le tournis. D’autant que la plupart des interventions sont sonorisées à l’extérieur des salles, afin que tout le monde puisse profiter des échanges, et que l’on est constamment

Littorales affirment leur ambition d’offrir à tous les publics un festival de littérature de grande qualité. À suivre sans modération. FRED ROBERT

Les Littorales, festival littéraire organisé par l’Association Libraires à Marseille, aura lieu du 27 au 31 oct en différents lieux de Marseille www.librairie-paca.com

© X-D.R

sollicité. Une ambiance vraiment particulière, qui tient de la fête de parti et du salon du livre traditionnel. Certains viennent pour rencontrer des écrivains et faire dédicacer leurs ouvrages ; on les voit attendre sagement leur tour devant les stands. Avec une prédilection pour les écrivains à succès, telle Katherine Pancol ! On note comme ailleurs la foule auprès des auteurs et illustrateurs jeunesse, devant les éditeurs BD également. Mais il est évident que pour la majorité des visiteurs, venir à Mouans signifie participer aux débats publics. Florence Aubenas, Guy Bedos et Christophe Alévêque, Thomas Legrand, Nadia Kaci et beaucoup d’autres ont fait salles combles. Dans un climat d’intervention active du public. Apostrophes, applaudissements frénétiques, questions très directes, les gens ici viennent pour en découdre. Et la littérature dans tout ça ? Les rencontres purement littéraires rassemblent visiblement moins, comme en a témoigné celle avec Bernardo Carvalho. Certaines sont déprogrammées en dernière minute (Volodine). Quant aux auteurs qui se succèdent au Café littéraire, ils n’ont que quelques minutes pour évoquer leur livre dans un brouhaha continu peu propice à l’échange. En cet automne social plus que chaud, le public de MouansSartoux semble avoir eu besoin, avant tout, de manifester son mécontentement sur la politique de l’actuel gouvernement. De résister à sa manière… Et tant pis pour la forme ! FRED ROBERT

Le festival de Mouans-Sartoux s’est déroulé du 1er au 3 oct

La presse régionale en question L’Alcazar organise dans sa salle de conférence une série de rencontres qui veulent dessiner le paysage de la presse écrite régionale. Le premier volet, le 5 oct, était passionnant. Christian Digne, chef du service politique de La Marseillaise et ancien rédacteur en chef, et Jacques Bonnadier, journaliste historique et plume marquante du Provençal, parlèrent des trente glorieuses de la presse, après un documentaire très éclairant de Gilles Cayatte : Le Provençal, quotidien du pouvoir. Une occasion unique de comprendre les enjeux et l’histoire paradoxale de notre PQR (presse quotidienne régionale, pour les intimes) au moment où elle traverse une crise sans précédent… Dont il faut absolument qu’elle se relève si nous voulons continuer à vivre dans un espace démocratique, et avoir un regard sur les arcanes de notre vie régionale. La suite des débats ? Les nouvelles formes de la presse écrite. Avec Le Ravi, Rue89, 20minutes et… Zibeline bien sûr. On vous y attend nombreux ! A.F.

Paysage de la presse régionale Les nouvelles formes de la presse écrite BMVR l’Alcazar, Marseille 1er Le 21 oct à 18h www.bmvr.marseille.fr



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LIVRES

LES CORRESPONDANCES DE MANOSQUE

Rencontres, lectures, spectacles… les Correspondances, années après années, transforment Manosque en capitale littéraire. Mieux, en centre du monde des lettres

Lectures La petite salle du Théâtre Jean-le-Bleu accueillait de précieuses mises en voix : celle d’Antoine Volodine et de deux de ses hétéronymes fut un moment intense. L’auteur était accompagné de Dominique Pinon et d’Agnès Sourdillon proposant une lecture à 3 voix, celles de 3 écrivains présents dans son dernier livre. Lecture frontale, manuscrits éclairés par 3 lampes et une bande-son souvent inquiétante… tout l’univers du livre est là : regard fixe, visage impassible, obscurité. Pour dire la noirceur du monde, l’endoctrinement des enfants, l’amputation des soldats blessés, l’échec terrifiant des utopies égalitaires. Pour en finir avec «le camp des paroliers officiels» et les «10 décennies de douleur». … Dessiner la lecture en direct… L’entreprise, presque délirante, donna lieu à un moment de pure magie. Il faut dire que François Schuiten et Jacques Abeille se connaissent bien. Que l’univers du dessinateur belge semble être né au creux d’un miroir graphique où se reflèterait les constructions mentales de Jacques Abeille. Suivant, détournant, mettant en abyme les descriptions surréelles du poète de la quête le dessinateur ne les donne pas à

Kim Thuy © Francois-Xavier Emery

Olivier Adam © Francois-Xavier Emery

voir : il les transcende et les détourne. Un bémol à la magie ? L’accompagnement inutile, improvisé sans inspiration, par un guitariste involontairement plongé dans une œuvre dont il n’avait pas la connaissance intime. Difficile de se hisser sans préparation à ces hauteurs-là. … Lots of love est une lecture à 2 voix : celle du père, Scott Fitzgerald, celle de la fille surnommée Scottie. Hippolyte Girardot et Marie Vialle lisent l’échange de lettres des dernières années de la vie de l’écrivain. Scott est ruiné, alcoolique, réduit à l’écriture de scénarios. Il s’inquiète pour les études et l’avenir de sa fille, lui prodigue ses conseils. Il apparaît mesquin et parfois même pitoyable : on n’est pas convaincu par le choix de ces textes terre à terre. Écrivains, Antoine Volodine éd. Le Seuil Les mers intérieures, Jacques Abeille François Schuiten, Attila Les Jardins statuaires, Jacques Abeille, Attila Les Cités obscures, François Schuiten, Casterman Lots of love, éd. Le Livre de poche

Rencontre de Sophian Hadjadj avec Jerome Ferrari © Francois-Xavier Emery

Rencontres Comment dire de soi sans dévoiler son être, et se soumettre à un entretien littéraire quand on n’est pas un as de la représentation ? Sans doute en désignant l’écrit comme ultime refuge… Kim Thuy, auteur de Ru, se livrait aux confidences avec une gêne trop volubile lors de son entretien avec Pascal Jourdana, qui sut néanmoins donner une belle idée de l’ouvrage. Autobiographie déguisée, le roman se nourrit de l’expérience de boat people de la jeune femme, sa fuite de Hanoï avec sa famille, le camp, l’exil, l’accueil merveilleux au Canada Elle y tiendra un restaurant, «Ru de l’âme». Quatre ans, dix mille assiettes lavées… il est temps pour Kim Thuy de retourner en étrangère au Vietnam, puis d’emprunter la voie des mots, 10 000 mots répondant aux 10 000 assiettes… «Jouer avec les mots pendant un an», voici le pari, un livre naît, Ru. Pourtant les mots résistent, la langue française imparfaitement maitrisée mais «seule langue dans laquelle [elle peut] réfléchir». L’auteur s’émerveille de la vie, trouver dans toute épreuve un pendant positif est un peu agaçant. Puis elle lit un passage de son roman. Quête de soi, images fulgurantes, aquarelle qui dessine par touches successives, strates de sens et de temps… Le badinage s’efface devant une écriture forte et sensible. Émotion. … Olivier Adam porte une veste à carreaux qui lui donne un air de baroudeur. Son dernier roman, Le cœur régulier, lui a été inspiré par sa résidence à Kyoto : les grands arbres, le ciel, si importants pour les japonais… Il confie à Michel Abescat qu’un article sur un japonais qui apaisait les candidats au suicide lui a donné son point de départ. Le personnage de Sarah a peu à peu surgi, «mêlant la force du réel

et celle de la fiction pour faire entendre une voix. Le masque du féminin permet peutêtre plus d’authenticité, d’intimité. C’est à ce jour, me semble-t-il, le livre le plus intime que j’ai écrit.» Une rencontre bienvenue, après une lecture musicale qui, la veille, avait aplati considérablement le texte (voir Zib 33) en lui imprimant un rythme étranger à sa course. Pourquoi ce flux rock ininterrompu et indifférencié qui noie l’évolution subtile du personnage, le passage de la France au Japon, le sentiment antagonique d’amour/indifférence, presque incestueux, envers le frère mort? … Sofiane Hadjaj interroge Jerôme Ferrari en historien. Ou en romancier qui s’est attaché à l’Histoire. Celle, sale, de la Guerre d’Algérie, du côté des Français tortionnaires, militaires de carrière plongés dans les horreurs de la répression à Alger en 1957 (voir p 70). C’est en philosophe que Jérôme Ferrari lui répond, interrogeant la nature humaine, l’origine du mal, la barbarie. Affirmant qu’elle est en chacun, naturellement, et que les Lumières nous trompent. Passionnant. Le coeur régulier, Olivier Adam, éd. de l’Olivier Ru, KimThuy, Ed Liana Levy Où j’ai laissé mon âme, Jérome Ferrari, Actes sud

CHRIS BOURGUE, AGNÈS FRESCHEL, MARYVONNE COLOMBANI

Voir également p 33 le concert de Brigitte Fontaine


RENCONTRES

LIVRES

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En marge des Correspondances

Un Brésilien en Russie… Bernardo Carvalho a la bougeotte. Pourtant, entre Paris, Manosque et Mouans-Sartoux, il a pris le temps de se poser un soir à L’Attrape-Mots à Marseille. Histoire de parler, abondamment et dans un excellent français, de son dernier roman. ’Ta mère répond à la commande d’un producteur qui a offert à quinze auteurs une résidence d’un mois dans une grande ville du monde, à condition qu’ils y écrivent une histoire d’amour et cèdent leurs droits sur une éventuelle adaptation cinématographique. Carvalho a choisi Saint-Pétersbourg. Sans connaître ni le pays ni la langue, inspiré par quelques lectures et documentaires, il s’est lancé. De la contrainte thématique et de l’expérience «flippante» vécue là-bas, il a tiré une fiction (voir p.67) sous-tendue par la panique. Ecrite de façon brute, sans autres effets que ceux d’une construction millimétrée : une manière originale d’aborder l’histoire d’amour.

Éternelle jeunesse de la résistance Pour la 27e édition de la Fête du Livre, les Écritures croisées créent l’événement, et la surprise Inattendu, le choix d’un invité d’honneur, Stéphane Hessel, qui n’est pas à proprement parler un écrivain: c’est pourtant une salle comble qui applaudit, à la soirée inaugurale, l’arrivée du résistant à la carrière diplomatique exceptionnelle, et qui rend hommage aux idéaux qu’il défend et incarne en même temp, une culture humaniste et européenne, une immigration exemplaire, l’engagement indéfectible pour les droits de l’homme et pour le Tiers-Monde. Inattendue aussi la personnalité même de cet invité : dès son arrivée, il improvise avec son complice Jean-Louis CrémieuxBrilhac, son conscrit, grand historien et fondateur de la Documentation française, une saynète facétieuse qui régale le public ; sa vie et ses messages sont profondément édifiants, mais il s’amuse et cabotine

presque. Il incarne la mémoire d’un siècle, de la déportation à la création de l’ONU, de De Gaulle à Mendès France, mais il vient pour parler au présent, des désastres écologiques, des conflits du MoyenOrient, du climat politique, avec un engagement idéaliste et parfois provocateur de jeune militant et de vieux renard à la fois ; et il s’interrompt soudain pour réciter, à la façon d’un mantra, un poème d’Edgar Poe… Avec un rendez-vous avec les étudiants, une programmation cinématographique riche de l’expérience tragique du monde, une belle exposition photographique réunissant les clichés les plus célèbres de l’actualité, et un panel d’invités qui lient leur engagement artistique à la lecture de l’histoire, la Fête du Livre a une nouvelle fois réussi son pari, en se plaçant cette année sous le signe de l’éternelle jeunesse de la Résistance. Et sous la protection d’un jeune homme de 92 ans ! AUDE FANLO

… et un homme louche à l’Alcazar Le festival ActOral y a proposé une heure avec François Beaune, actuellement en résidence à Manosque. Auteur d’un 1er roman remarqué, fondateur de la revue Louche et promoteur d’objets dérivés louches, telles les cartes postales à l’envers (le texte en est déjà rédigé, il suffit d’inventer l’image !), c’est peu dire que la notion de louchitude lui est chère. Porter un autre regard sur la réalité, biaiser pour voir autrement; par-delà l’apparente facétie et les métaphores fromagères, le propos est loin d’être vain.

La Fête du livre a eu lieu du 1er au 3 oct à la Cité du livre, Aix. L’exposition de l’agence Magnum : 25 ans de reporters sans frontières, se poursuit jusqu’au 4 nov. 04 42 26 16 85 www.citedulivre-aix.com

FRED ROBERT

’Ta mère, de Bernardo Carvalho (éd. Métailié) et Un homme louche de François Beaune (éd. Verticales).

Dans le cadre de sa résidence à Manosque jusqu’en janvier, et afin de poursuivre son «grand déballage», François Beaune est en quête d’histoires vraies, que vous pouvez lui adresser à l’hôtel Voland à Manosque ou par mèl à gdeballage@gmail.com. Si vous êtes à Marseille, vous pourrez aussi venir les lui raconter dès mars 2011 puisqu’il sera alors en résidence à La Friche

© Dennis Stock-Magnum Photos Venice Beach Rock Festival. Californie. 1968

Des maisons et des hommes Parce que l’édition et la promotion d’ouvrages originaux, non formatés, nous est chère, nous ne pouvions manquer le rendez-vous annuel proposé par la BDP Gaston Defferre en partenariat avec l’ARL Paca. On ne change pas une formule qui fonctionne; c’est donc sur le même principe que se sont organisées ces 3e Rencontres de l’édition indépendante : une maison d’édition de la région en invite une venue d’ailleurs. C’est ainsi par exemple que les éditions Parenthèses avaient fait signe à Champ Vallon de Seyssel dans l’Ain, qu’André Dimanche présentait le superbe travail éditorial de Clémence Hiver (de Sauve dans le Gard), que la jeune maison des Alpes-de-Haute-

Provence C’est-à-dire recevait La Louve Editions, venue de Cahors pour présenter ses ouvrages historiques, et que Le Port a jauni avait fait signe à Lirabelle, de Nîmes… Ces journées, ponctuées de tables rondes, lectures et autres intermèdes musicaux, se déroulent dans un climat détendu, propice aux échanges. Elles offrent chaque année des découvertes insolites, telle cette «entreprise éditoriale effrontée (et non effondrée)», Monsieur Toussaint Louverture (c’est son nom !), invitée de Toulouse par l’agence éditoriale toulonnaise Géhess. Elles permettent aussi de mieux connaître ces professionnels d’une édition hors des sentiers battus, dont on ne peut que soutenir l’ambition et la passion. FRED ROBERT

Les 3e Rencontres de l’édition indépendante se sont tenues à Marseille les 17 et 18 sept


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LIVRES

LITTÉRATURE

L’opium des saltimbanques Après La Hague, ses tempêtes et ses déferlantes, c’est au bord du Rhône que Claudie Gallay installe sa nouvelle fiction. Sur les berges du fleuve, au pied des remparts d’Avignon. Et dans la ville aussi, au plein cœur d’un été pas comme les autres, puisque c’est celui, lourd, caniculaire et désormais historique, qui vit l’annulation du festival et tous les mouvements des intermittents du spectacle. Dans cette ambiance de surchauffe, tant climatique que politique et sociale, la romancière imagine l’histoire de quelques passionnés de théâtre. Odon, le directeur d’un petit lieu, qui met en scène la pièce d’un jeune auteur mort, Paul Selliès; sa fille, Julie, qui joue dans la pièce ; et puis Mathilde, son grand amour, revenue triompher dans sa ville avec un rôle important ; et Isabelle, l’ancienne, qui a connu les premiers festivals, l’époque des Vilar et Philipe ; et tous les autres, acteurs, techniciens, hommes à tout

Héritière de 68 ?

Virginie Linhart n’est pas la fille d’un militant anonyme. Son père, Robert Linhart, fut une figure phare de 68. Ou du moins aurait dû, s’il n’avait refusé ce mouvement «petit-bourgeois», sombré dans la dépression et vécu Mai en cure de sommeil. Le fondateur du mouvement maoïste en France n’est donc pas un père anodin, et c’est cette mémoire que sa fille interroge : en sociologue et documentariste elle enquête et écrit un essai ; en témoin elle en fait un roman sensible, où elle scénarise son parcours, dessine des visages où son père apparaît en creux, et toute une génération d’enfants de 68, personnages croisés emblématiques d’une Comédie humaine défictionalisée. On comprend beaucoup de choses à travers ce filtre étrange, ce regard d’historienne qui tenterait une objectivité factuelle passée au crible d’un point de vue

faire, qui tournent et virent dans la chaleur de juillet en attendant la suite. Au milieu de tout cela débarque Marie, une jeune fille écorchée (au propre comme au figuré). La sœur de Paul, venue demander des comptes… Cadre mythique, personnages attachants, secrets dévoilés, hommage au monde du théâtre, les ingrédients sont là. Pourtant, la sauce ne prend pas. On ne fait que glisser sur ce récit volontairement fragmenté. Conflits et passions y flottent, amortis, lointains. Avignon devient une île, que l’auteure ne parvient pas à aborder. FRED ROBERT

L’amour est une île Claudie Gallay Éd. Actes Sud, 21,80 euros

interne assumé. Les réticences sur l’héritage des enfants de militants, sur la liberté sexuelle, les liens complexes avec la mémoire de la Shoah, avec Althusser, la psychanalyse. Avec l’école aussi, l’élite intellectuelle parisienne, quelque chose d’une volonté d’excellence refoulée, et le sentiment d’abandon. Jamais réac, rendant toujours hommage à l’engagement politique, à l’enthousiasme et la liberté qui habitaient ces parents particuliers, au courage aussi qui mena certains intellectuels maoïstes à l’usine, ou au Larzac. On est très loin de l’actuelle relecture des repentis entrés en carrière politique. Très loin aussi de l’hommage aveugle. Depuis la publication de Le jour où mon père s’est tu Robert Linhart a repris la parole. Enseigne, écrit. Se réapproprie son histoire ?

Virginie Linhart sera présente lors des Littorales à Marseille (voir p 63) Le jour où mon père s’est tu Éd. du Seuil, 2008, 15 euros Poche, 2010, 6 euros

AGNÈS FRESCHEL

Non à la tapisserie ! Remarquable petit ouvrage que le dernier essai de Belinda Cannone, La tentation de Pénélope. Le titre délicieusement provocateur, tout de fausse innocence, est à l’instar du ton adopté : écriture relâchée de la conversation, parenthèses, apartés, retours, une prose à laquelle on a lâché les brides… un plaisir savoureux de lecture, où, suprême élégance, la légèreté du style permet à la profondeur du propos de ne jamais sombrer dans la lourdeur grandiloquente, écueil régulier du genre ! En 36 courts chapitres, brosser un tableau complet de la condition féminine est pari impossible dans lequel Belinda Cannone ne s’engage pas ; mais comme les poètes, elle esquisse des pistes, aborde le sujet par des tours inattendus, «Le père marin», «Messieurs, soyez beaux» ou «Éloge de la pénétration»… Analyses de romans, de psychanalyses, travail sur la grammaire des genres aussi, vertu du neutre qui met en avant la personne avant d’en faire un être sexué. «Distinction des sexes» plutôt que

«différence», qui implique un classement. Réflexions sur le corps biologique prééminent, et les conséquences qui en découlent : être et devenir sont les mots clé que Le deuxième sexe de Simone de Beauvoir met en évidence, insiste Belinda Cannone, il faut passer enfin de l’état de nature à la construction sociale et historique… Cette relation de dominant et de dominée aliène l’un et l’autre ! Non messieurs, il n’y a pas de guerre des sexes, mais sans aucun doute il faut à nouveau refonder le regard. Ce livre ? Un régal, érudit mine de rien, à lire absolument et à partager ! MARYVONNE COLOMBANI

La tentation de Pénélope Belinda Cannone Éd. Stock, L’autre pensée, 18,50 euros Belinda Cannone sera présente lors des Littorales à Marseille (voir p 63)


LIVRES 69

Chaotique Décevant le dernier Gaudé ? Oui pour les inconditionnels de ses nouvelles ténébreuses (Dans la nuit Mozambique), de son écriture aride (Le soleil des Scorta), de la puissance fantastique de son récit (La porte des enfers). Et non, car son talent à autopsier l’âme humaine est intact. Ouragan est un texte choral porté par une poignée d’humains en déshérence, vaincus par la violence des éléments, leurs vies à bout de souffle, miséreuses. Leurs âmes mises à nu et usées dont l’issue est entre les mains des soubresauts de la nature… Laurent Gaudé se fait incantatoire, manie l’écriture oppressante à force de répétitions en boucle, de phrases courtes, de glissements d’un temps à l’autre, d’une parole à l’autre, d’une scène à l’autre ; resserre les mailles de son texte pour dire l’engourdissement des corps et des cœurs incapables d’aimer à nouveau. C’est que l’Ouragan n’anéantit pas seulement sur son passage la Louisiane – dont seuls les alligators en

sortent vainqueurs et repus (métaphore d’une nature qui reprendrait ses droits ?). Il fout en l’air des martyrs résignés, trop longtemps asservis comme Joséphine Linc. Steelson (figure de la lutte des nègres), Byron l’enfant au silence obstiné, le Révérend fou de Dieu, Rose prisonnière de la laideur de sa vie… Le texte luimême est un combat permanent contre la colère du monde, qui déverse en un flot ininterrompu son ruban de folie, de peur, de faiblesse, de violence, de désespoir, d’abandon, de brève révolte. À son tour le lecteur est englouti sous cette avalanche, pris au piège de cette litanie. Quitte à s’y noyer parfois ? MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

Ouragan Laurent Gaudé Éd. Actes Sud, 18 euros

Fable orientale Le roman possède l’excitante capacité de créer des rencontres imaginaires, de devenir le laboratoire secret dans lequel l’écrivain assemble les improbables, redessine, expérimente… Après l’impressionnante caverne de Zone Mathias Enard livre un petit bijou renaissance à l’ombre des coupoles du Bosphore. Michel Ange, invité à Constantinople pour concevoir un nouveau pont sur la Corne d’Or, laisse en plan le tombeau destiné au pape Jules II. Les lettres se succèdent, rappelant l’artiste à Rome, tandis qu’il s’imprègne de l’atmosphère de la ville pour trouver l’inspiration nécessaire. Démarche passionnante que de faire se rencontrer la Renaissance italienne et l’orientale Constantinople du Sultan Bajazet (non, pas celui de Racine) dans une construction savante et subtile, une polyphonie à voix traitées à différents niveaux : à la troisième personne

Michel Ange, et le poète Mesihi, amoureux secret et désespéré du sculpteur ; à la première personne, l’envoûtant(e) bel(le) Andalou(se), qui chante, danse, personnage énigmatique qui semble comprendre en lui toute la fascination qu’exerce l’Orient des orientalistes, beauté, préciosité, charme et… danger. Le style est précis, les phrases lapidaires, le présent taille le texte au rythme d’une tragédie classique, et met en scène l’éternel combat entre la matière et l’esprit, l’alchimie subtile qui parfois en des instants de grâce les unit. L’énigme du titre se dévoile avec finesse, et chatoiements ! MARYVONNE COLOMBANI

Parle-leur de batailles, de rois et d’éléphants Mathias Enard Éd. Actes Sud, 17 euros

Délivrez-les du mal

Quel Juste ? Quel est le poids d’une vie quand on a le pouvoir de la reprendre ? Alger, 27, 28 et 29 mars 1957. Trois jours suffisent à Jérôme Ferrari pour débattre du Bien et du Mal sans jamais tomber dans un portrait manichéen de la guerre, et s’interroger sur les sentiments qui animent le capitaine André Degorce et le lieutenant Horace Andreani. Tous deux ont affronté l’horreur des combats et de la détention en Indochine, tous deux passent des mains de leurs tortionnaires aux geôles algériennes : sauf que de victimes ils sont devenus bourreaux. Mais le plus lâche des deux n’est pas forcément celui qu’on croit. Empêtré dans une bigoterie qui lui adoucit les pleurs, le capitaine Degorce croise sur son chemin Tahar, «seigneur d’une guerre clandestine», figure charismatique de l’ALN qui va fissurer ses certitudes, mettre à mal la grandeur et la servitude du métier de militaire. Mais jusqu’à quel point ?… Remords, angoisse du Jugement dernier, résignation dans l’accomplissement de ses viles besognes (faire parler l’ennemi coûte que coûte) : alors que Degorce n’en finit pas de tressaillir,

Andreani recrache sa haine à la figure du commandeur genoux à terre. Courage, abnégation, dégoût, exactions, nausées, douleur, aveu, torture, culpabilité, perversion, héroïsme : autant de sentiments entremêlés et de situations paroxystiques. Jérôme Ferrari prête à chacun des personnages - même les plus subalternes - une parole forte, concise, servie par une écriture brillante qui ne s’embarrasse pas de superlatifs. Et les citations des Écritures saintes en exergue ne font qu’accroître encore notre malaise. Tahar, Andréani, Degorce : l’enfer, c’est la guerre. MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

Où j’ai laissé mon âme Jérôme Ferrari Éd. Actes Sud, 17 euros

L’auteur était présent aux Correspondances de Manosque pour une rencontre avec Sofiane Hadjaj (voir p 66)


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LIVRES

LITTÉRATURE

Sous un ciel si bleu, si vide Que reste-t-il du 11 septembre ? À l’heure où la polémique autour de la future mosquée fait rage, à quelques mois du dixième anniversaire des attentats, Thomas Reverdy situe son 4ème roman tout près de L’envers du monde : Ground Zero, «une absence en béton». New York donc, août 2003. La canicule stagne sur la ville. Le ciel y reste inexorablement bleu. Comme ce jour de septembre où deux avions ont percuté les tours jumelles. Sur le chantier, le corps d’un ouvrier arabe est découvert dans un puits de forage. Homicide ? Accident ? Le roman débute comme un policier. Ce qu’il n’est pas, même si l’on y croise un inspecteur du FBI. Car il importe assez peu de connaître les raisons de cette mort ou l’identité de l’éventuel assassin. Cette disparition initiale - «comme s’il n’avait jamais existé» - donne le ton du roman. Un récit à plusieurs voix sur le deuil, le manque, le désarroi. On y suit Pete, ancien policier présent lors des

attentats, reconverti depuis dans la visite du site, Candice, serveuse à Brooklyn dont le mari a été pulvérisé dans l’une des tours, et Simon le Français venu donner des ateliers d’écriture à l’université et se documenter sur les attentats en vue d’un livre. «Tout le monde a ses fantômes», qu’il parvient ou non à oublier. À travers trois personnages un brin paumés, trois itinéraires subtilement croisés, Reverdy entre dans l’intimité de l’histoire américaine récente. Mi-empathique mi-distant, il brosse le portrait d’une Amérique meurtrie. Et pose quelques pertinentes questions sur le monde comme il va… à sa perte ? FRED ROBERT

L’envers du monde Thomas Reverdy Éd. du Seuil, 18 euros

L’auteur était présent aux Correspondances de Manosque pour une rencontre croisée avec Lionel Salaün (Zib’ 33), autour de leur vision de l’Amérique

Scène primitive chez les primates Sois fidèle à l’humain, Doogie. Tandis que les humains se sont retranchés sur des stations orbitales, l’Afrique est devenue une sorte de conservatoire naturel. La famille Evans y gère un zoo immense et expérimental, et à la façon d’une Genèse post-moderne, tente d’y recréer l’animal à l’image de l’homme : Doogie, chimpanzé surdoué, y parvient presque. Recueilli bébé, le petit singe a été élevé avec les enfants du couple et il a acquis un langage et une éducation élaborés. Mais un crash au retour du voyage de promotion renvoie le prodige «civilisé» au cœur de la jungle, et le contraint, pour survivre et rejoindre le zoo, à retrouver par degré son animalité. Le récit est construit sur le monologue intérieur du singe : les «mémoires», qui retracent rétrospectivement la vie au zoo, alternent avec les épisodes «de la jungle» : ces deux trames retracent les trajets symétriquement inverses de Doogie, progression et régression, où basculent, à travers le langage, la conscience, la mort, la sexualité, les pulsions, les limites entre homme et animal. Pourtant, ces deux récits convergent : à la

Amours slaves

Le 7e ouvrage du Brésilien Bernardo Carvalho répond à une commande. Celle d’une histoire d’amour dans une grande ville du monde, ici Saint-Pétersbourg (voir p 65). Carvalho a accepté la contrainte… pour mieux la contourner (n’est-ce pas là l’intérêt des contraintes ?). Dans ce roman qui multiplie les points de vue, navigue dans le temps et sort de la ville pour des incursions en Ingouchie, en Tchétchénie et même au Brésil, on est bien loin des clichés sur la cité de Pierre le Grand. Et les amours qu’il met en scène n’ont rien à voir avec des lunes de miel sur la Neva. Pas d’exotisme slave, aucune couleur locale. Malgré le ravalement des façades, un climat de brutalité et de déréliction domine cette ville panoptique, quadrillée par la police et pourtant pleine de zones obscures. Un univers glacé, même au printemps, et glaçant. Où se débattent les fils déshérités de ce système inhumain, où le comité des mères de soldats étudie plus d’une centaine de cas par jour, où il faut tricher pour éviter

façon d’une anamnèse, le retour au zoo coïncide avec la scène primitive du mystère de sa naissance… S’inspirant d’un fait divers réel, Tristan Garcia propose une ultime variation sur l’homme-singe, qui commence comme la Planète interdite et s’achève en conte cruel. Mais l’originalité et la réussite du livre tiennent avant tout à l’inventivité de la narration, à la cohérence du langage singulier de Doogie, étonnant pidgin mêlant anglicisme, préciosités et barbares barbarismes. Et au portrait cocasse et pathétique de Doogie, imitation simiesque de l’homme dans ses rêves de puissance, lorsqu’il traverse la jungle avec son slip XXL, son pistolet et son chien, comme dans ses rêves de servitude volontaire, dans son attachement désespéré à son origine, à laquelle il a donné le nom de sa mère, sœur et divinité : sa maîtresse Janet. AUDE FANLO

Mémoires de la jungle Tristan Garcia Éd. Gallimard, 19,50 euros

Tristan Garcia sera présent lors des Littorales à Marseille (voir p63)

le service militaire et le départ forcé pour la Tchétchénie, où l’armée prostitue ses jeunes recrues afin de renflouer ses caisses, où la violence est souvent la seule issue. L’amour ? Quelques rencontres furtives, éphémères. «Quand il n’y a plus rien, il y a encore le sexe et la guerre. Le sexe et la guerre sont ce que tous les hommes ont en commun […]». La langue volontairement neutre, cynique presque, rend à merveille le quotidien terrible d’un pays miné par la corruption et le désespoir. FRED ROBERT

Ta mère Bernardo Carvalho Traduction Geneviève Leibrich Éd. Métailié, 17 euros L’auteur était invité aux Correspondances de Manosque et président d’honneur du Festival du Livre de Mouans-Sartoux

Anne-Marie Métailié était l’éditrice invitée d’honneur à Mouans-Sartoux


Grève à tous les rayons Après le succès de Notre usine est un roman, commande des salariés licenciés d’un centre de recherche pharmaceutique à Romainville, l’écrivain militant Sylvain Rossignol s’est lancé dans une fiction sur un supermarché, un monde du travail fermé où la communication est réduite à peu de choses : chacun est à son poste, du directeur aux caissières, en passant par les vigiles. Quant aux clients ils sont surtout préoccupés par leur chariot. Rien que de très banal. Mais voilà que la caissière Noémie se livre à un acte singulier et fou : elle cache le code-barres d’un bouquet de fleurs et par là même les offre à un client. Séduit, celui-ci se débrouille pour toujours passer à la caisse de Noémie les jours suivants. Cependant Noël approche et la responsable du rayon poissonnerie, Viviane, nouvellement déléguée syndicale, veut inciter le personnel à refuser de travailler le 24 décembre qui tombe un dimanche. Le directeur s’inquiète, les caissières se mobilisent, Viviane et Noémie deviennent amies, Julien se déclare solidaire. Sylvain Rossignol anime tout cela par de courts chapitres essentiellement dialogués, variant les points de vue par des

monologues incisifs dont la juxtaposition est jubilatoire. Le vote de la grève réveille les consciences, déclenche une parole libératrice. Trop beau pour être vrai ? Sur la Canebière Monoprix est en grève… CHRIS BOURGUE

Carte de fidélité Sylvain Rossignol Éd. La découverte, 14 euros Sylvain Rossignol sera présent lors des Littorales à Marseille (voir p63)

Pour que l’on n’oublie pas Pourquoi chroniquer le dernier roman de Maurice Gouiran ? Depuis que ce docteur en mathématiques, spécialiste des systèmes d’information sur les incendies de forêts, s’est lancé dans l’écriture, il publie un livre par an au moins, jouit d’un lectorat fidèle qu’il rencontre volontiers lors des nombreux festivals où il est invité. Certains de ses textes sont même étudiés en lycée ; bref, il n’a pas vraiment besoin de publicité ! Il importe pourtant de saluer ce nouvel opus. Car, au-delà de l’enquête de Clovis Narigou son double à peine déguisé (Narigou, Gouiran, vous voyez ?), au-delà de ce qui ne manquera pas d’agacer les allergiques au polar dit marseillais, à savoir les digressions sur les us et coutumes des piliers de bars de l’Estaque ou sur la faune et la flore de nos belles collines, au-delà de tout cela donc, voilà une palpitante leçon de mémoire. Gouiran utilise les ressources de la fiction policière pour débusquer les silences et les mensonges de l’histoire. Dans Franco est mort jeudi, on navigue entre plusieurs périodes dou-

loureuses de l’histoire espagnole récente, on entre dans la mémoire de ceux qui ont vécu la guerre civile puis l’exil. On prend aussi conscience que les forces réactionnaires sont toujours là, prêtes à reprendre du service et qu’il convient de rester plus que jamais vigilant. Placé sous la tutelle d’Orwell, dont une page est citée en exergue, ce roman engagé et humain est à lire pour se souvenir… FRED ROBERT

Franco est mort jeudi Maurice Gouiran Éd. Jigal, 18 euros


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LIVRES/ARTS

People et Tarifs préférentiels Porte Avion est une des plus anciennes galeries d’art contemporain associatives de Marseille mais certains oublient qu’ils sont aussi éditeurs (P. A. Gette, Le Forban, J. L. Parant, C. Marchetti…). Jean-Jacques Le Berre propose une belle affaire en souscription : Art People or Employees, livre d’artiste de Susanne Strassmann (expo actuellement au Passage de l’Art) format 21,5 x 28 cm, 136 pages, un peu plus de 120 photographies en couleurs, en français et en anglais. Le tirage est limité à 500 exemplaires pour 35 euros au lieu de 45 et une édition en tirage de tête, à 30 exemplaires numérotés et signés accessibles pour 100 euros au lieu de 125. De plus vous pouvez choisir entre deux visuels. Parution prévue en janvier 2011, exposition en septembre de la même année. Dans le monde de l’art les people ne sont pas toujours des VIP. Entre 2000 et 2009, à Venise, Bâle, NYC, Paris, Avignon… Suzanne Strassmann a capté les

gestes des gens qui font les expositions d’art contemporain. Autant, comme dans toute maison bourgeoise, les petits personnels font tourner la boutique, autant les invités peuvent être plus ou moins impersonnels. Martin Parr, Jessica Craig-Martin aussi captent dans le savoir décoder, Strassmann ouvre le champ : technicien de surface ou quelconque performeur ? décolleté pique-assiette ou fameuse critique d’art ? Mais un vigile en costard restera un vigile ! Art People or Employee se présente comme une chronique amusée et distanciée, haute en couleurs, de certains dans le monde de l’art. CLAUDE LORIN

Art People or Employees Suzanne Strassmann Éd. Porte Avion

Au photographe inconnu Cet été lors des Rencontres de la Photographie d’Arles, la rétrospective du musée Réattu rendait hommage à l’œuvre du photographe Pierre Jahan (1909-2003). Le catalogue prolonge utilement l’évènement centré sur la période sûrement la plus prolifique et éclectique de l’artiste, des années trente à la fin des années cinquante. Premier opus d’importance sur ce photographe méconnu du grand public, il reprend les thématiques de l’exposition, s’enrichit de nombreuses reproductions et d’un texte inédit de Michel Frizot. Concise et dûment informée, la contribution de l’historien de la photographie éclaire ce qui n’est pas toujours explicite face aux images et à leur évidence première. Ainsi du

Notre littoral

La poétique du bord est le résultat de deux années d’exploration photographique menée par Olivier Ansellem sur les rives provençales. Commande portée par Le Factotum avec l’appui du Conseil général des Bouches-du-Rhône. C’est donc le littoral du département qu’Olivier Ansellem a suivi entre La Ciotat et la Camargue. Une sélection de tirages grand format a été présentée à la Maison de l’architecture et de la ville Paca à Marseille (voir Zib’ 33) en parallèle à la parution de cet ouvrage rassemblant plus de cent clichés. Évacuant poncifs touristiques tout autant que les images catastrophistes, les photographies d’Ansellem se veulent cependant un authentique cri d’alerte, acerbe et distancié, sur les transformations insensées subies par le littoral provençal. Constat désenchanté que reprend et développe dans sa présentation le sociologue Jacques Leenhardt en rappelant l’autre

statut de la photographie dans le premier tiers du 20ème siècle entre image d’illustration (favorisée par la photogravure) et médium artistique (expérimentations des avant-gardes) : on perçoit les allers-retours entre ces deux pôles à travers les travaux de commande (illustration, publicité) et les recherches plus personnelles. Entre le regard humaniste d’un Doisneau, et la démarche surréaliste. CLAUDE LORIN

Pierre Jahan, libre cours Co-édition Actes Sud/Musée Réattu, 35 euros

dimension du paysage, celle temporelle des transformations, des nombreux aménagements agressifs apportés par l’Homme. Dans les pages suivantes le photographe s’entretient avec l’architecte Rudy Ricciotti à propos du projet du Mucem, d’urbanisme et d’esthétique politique maniériste. Plus poétique mais non moins dénonciateur, Christian Lacroix détricote cette langue de terre en treize petits chapitres où il est question en conclusion de «ce couloir saturé oscillant entre Eden et égout, cloaque et réserves paradisiaques». C.L.

La poétique du bord Olivier Ansellem Funny Bones éditions


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LIVRES/DISQUES

MUSIQUE

Apprendre à entendre Genres, Formes et Commentaire d’écoute : trois outils pour l’analyse musicale. Claude Abromont et Eugène Montalembert, éminents pédagogues en matière d’analyse musicale, ajoutent des contributions claires et instructives à leur œuvre entreprise au début des années 2000 (Guide et Abrégé de la Théorie musicale). Leur «dictionnaire» consacré aux Genres de la musique occidentale s’aborde par quelque 300 entrées alphabétiques, énumère les principaux genres liés au concert (symphonie, sonate…), à la musique vocale (Lied, opéra…), la danse, la musique religieuse, ou aux principes de composition (fugue, variation…). Débordant de références historiques et de liens aux œuvres, ce «pavé», destiné au simple amateur comme au musicien / musicologue, est complété par son pendant obligé. Un Guide des Formes de la musique occidentale, synthétique et abondamment éclairé d’extraits de partitions, envisage précisément la trentaine de formes fondant notre culture sonore (Aria da capo, Sonate bithématique, Rondo…) de Léonin aux Beatles.

Nonobstant, le plus original des trois ouvrages est le Petit précis du commentaire d’écoute que Fayard reprend de chez les éditions Panama (2008). Ce livre est destiné notamment aux étudiants qui doivent se confronter à l’exercice (oral ou écrit) du commentaire d’écoute : du candidat se présentant à l’épreuve musicale du baccalauréat, aux élèves des conservatoires, candidats aux concours de l’éducation nationale, danseurs… et aux professeurs désireux de former leurs élèves à l’écoute ordonnée. Avec un didactisme maîtrisé l’auteur échafaude une pédagogie en sept axes qu’il développe et illustre d’outils et de conseils pratiques. Précieux, et passionnant. JACQUES FRESCHEL

Conte finnois

On a découvert la version musicale de l’ultime des sept contes commandés par Musicatreize, Antti Puuhaara à Mar-seille le 11 juin dernier (ABD Gaston Defferre), et l’on pourra enfin apprécier l’opus dans l’espace scénique du Théâtre du Gymnase le 4 nov à 20h30 (voir p 30). On peut également se familiariser avec l’opus grâce à la paru-tion d’un livre-disque publié chez Actes Sud. Le livret (Tapio Tuomela et Erik Söderblom) tiré d’une légende finlan-daise est narré en français. Les dialogues

Piccolo solo

Jean-Louis Beaumadier est issu de la magnifique école française (marseillaise) de flûte dont Jean-Pierre Rampal fût le plus éminent représentant (un hommage lui sera rendu à Marseille, du 29 au 31 oct voir p 30). C’est à cette occasion que notre Paganini du piccolo, publie un florilège d’opus contemporains écrits durant le dernier quart du 20ème siècle. Ces partitions, qui lui sont souvent dédiées et qu’il a lui même sollicitées, prouvent,

Musique au féminin

Longtemps on a pensé que l’acte de composer de la musique était une affaire d’hommes. Aujourd’hui les deux sexes se partagent l’affiche des concerts de musique contemporaine, prouvant qu’il n’y avait aucune prédestination à cela. Les histoires de la musique ne citent que rarement le nom de femmes compositrices. Le Seicento italien (voir p 28) a pourtant été favorable à l’éclosion de talents comme Barbara Strozzi dont l’œuvre profane et sacrée est abondante. L’ensemble Concerto Soave dirigé par Jean-Marc Aymes (claviers), à la faveur de la

Électro choc

Soit cet homme est complètement fou, soit il est grand temps de s’exiler à Sainte-Hélène histoire de se remettre les idées en place. Car le plus déjanté des suisses allemands se nomme Bonaparte et sème aux quatre coins de la planète son Indie électro-punk. Coqueluche de l’underground berlinois et suivi à la trace par les spécialistes américains, cette boule à facettes posée sur un corps d’humain dégoupille sa grenade aux 14 titres plus explosifs les uns que les autres sous l’appellation non contrôlée My horse like you. Computer in love est un single qui nous ferait avaler des

Guides des Genres (42 euros), Formes (20 euros) de la musique occidentale.

Petit précis du commentaire d’écoute (17 euros) Éd. Fayard / Henri Lemoine

sont illustrés par le peintre Hannu Vaï-sänen et Roland Hayrabedian dirige avec soin les pages chorales et deux airs étonnants en finnois (Tapio Tuomela) doucement mâtinés de sonorités de harpe, de cordes et d’accordéon. J.F.

Antti Puuhaara Livre-CD Éd. Actes Sud, 25 euros

s’il le faut encore, que la «petite flûte» n’est pas qu’un fifre d’orchestre. Elles sont signées, pour partie, de musiciens liés à notre région au fort potentiel créatif : Marcel Frémiot, Régis Campo, Robert Coinel, Lucien Guérinel, Georges Bœuf… J.F.

CD Premiers Horizons Ref. 070.141 distr. Codaex

voix suave et lumineuse de Marie Christina Kiehr, exhume aussi des pièces inédites et somptueuses de Francesca Caccini (fille de Giulio) et de deux religieuses : Caterina Alessandra et Isabella Leonarda. J.F.

Canto delle Dame Concerto Soave CD Éd. Ambronay AMY025

couleuvres pop, et en plus Bonaparte est un dévastateur d’espace scénique dont les shows restent en mémoire. Plus qu’à découvrir le phénomène sur la scène de la Fiesta des Suds le 23 oct (voir p 36). FRÉDÉRIC ISOLETTA

My horse like you Bonaparte Differt-ant / Staatsakt


SCIENCES 75

Rencontres du quatrième trip Après une année blanche en 2009 l’association Polly Maggoo satisfait son public en proposant comme en 2008 les 4e RISC (Rencontres Internationales Science et Cinéma) du 2 au 7 nov au CRDP et pour une soirée au GMEM. Pour élaborer la sélection des films présentés et pour choisir les thématiques, Polly Maggoo revendique une programmation «éclectique» ou «grand public». Parmi les trois cents films reçus en 2009 et en 2010, les démarches singulières ont été privilégiées, entreprises en quête d’aventures, rencontres sans confort préalable. Au cœur de la semaine de projection qui permettra de visionner les films retenus, deux soirées extraordinaires : le 4 nov, l’image ne Moi Sekou, mon village, mon combat d’Eric Mounier

sera pas le médium des sciences, mais les poètes et performers Jean-Michel Espitallier et Eric Duyckaerts feront jongler les mots avec l’univers scientifique (séance spéciale au Gmem). Et le 5, une soirée hommage au grand documentariste anglais Richard Leacock : connu pour avoir suivi la campagne de JF Kennedy en 1960 (Primary), le cinéaste de 89 ans présentera des films scientifiques réalisés à la fin des années 1950. Poursuivant son travail dans des collèges et lycées tout au long de l’année, Polly Maggoo propose quatre séances réservées aux publics scolaires, les 4 et 5 nov à 10 h et 14 h. Nous conseillons particulièrement aux enseignants la séance du 5 nov à 10 h en partenariat avec l’IRD (Institut de Recherche pour le Développement) : Moi Sékou, mon village, mon combat d’Éric Mounier (France, 2004, documentaire, 52’). Construit comme un «voyage enquête», ce documentaire suit les pas et le parcours d’un jeune malien émigré en France. Sékou refuse la fatalité. Lorsqu’il retourne pour ses congés dans son pays, c’est pour tenter de trouver des solutions à la désertification qui détruit inexorablement son village. À

travers son périple et ses rencontres, les jeunes pourront découvrir les multiples causes, et les conséquences, de la désertification. YVES BERCHADSKY

Rencontres Internationales Science et Cinéma Du 2 au 7 nov Crdp, Gmem, Marseille www.pollymaggoo.org

Faites, faits, fête, défi… Prochain rendez-vous pour la 19e édition de la Fête de la Science du 21 au 24 oct un peu partout dans notre région Le programme trop riche pour être ici détaillé se trouve facilement sur www.fetedelascience.fr et dans de très jolis fascicules distribués dans tous les lieux publics et culturels. Dans ce cadre, Zibeline a retenu pour vous la Conférence inter-religieuse du Pr. Hagay Sobol, cancérologue et généticien, le 19 oct à 18h30 au Théâtre Comœdia à Aubagne : La génétique est-elle une fatalité ? Les textes sur la bioéthique ont vocation à être revisités régulièrement. Ce sera le cas, devant le Parlement, en 2011. Ces débats doivent également être ceux des citoyens, pour leur permettre de réfléchir ensemble au sens à

donner aux progrès constants de la médecine, qui se doit d’être au service de l’Homme. Cette conférence éclairera ce débat essentiel selon trois axes : la génétique, la bioéthique, le religieux. Venez également souffler les 50 bougies du Laser, dans le cadre de la Fête de la Science le 21 oct à la faculté St Charles. Le programme est éblouissant, il comprendra des animations, expériences et trois grandes conférences. Différentes expériences (de la Maison des Sciences et de l’Institut Fresnel) seront installées dans la salle de conférences du centre de St Jérôme les 21 et 22 oct, de 9 à 17h. Y.B.


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HISTOIRE

SÉTIF | HORS-LA-LOI

Hors-la-loi, de quelle Histoire ? Le film de Rachid Bouchareb soulève des réactions extrémistes (voir p.7). Il convient de le regarder avec recul, loin du tumulte de la colonisation positive

Hors-la-loi est, par essence, un film historique. Il narre l’histoire d’une famille dont le destin chemine avec la décolonisation algérienne. La scène initiale montre une expropriation, en 1925. C’est une allusion à ce qui fut une des permanences de la colonisation : la spoliation de terres. Depuis le Second Empire, on distinguait juridiquement les Musulmans -les indigènes- et les Français. Le code de l’indigénat (1881) permettait la saisie des terres, les sanctions collectives ou individuelles. Dans le film, le Caïd, le chef communautaire, ne défend pas les intérêts de la population locale : Rachid Bouchareb dénonce ainsi la collaboration des élites et leur trahison, et le propos tend à conclure au recours obligé à d’autres personnes pour d’autres moyens d’action. Pourquoi Sétif La scène suivante, la manifestation du 8 mai 1945, est un moment clé. Rappelons ! Les paysans affluent en ville chassés des terres et poussés par la croissance démographique. D’autre part, les colons, peu nombreux (moins de 10% de la population), disposent des meilleures terres, base de leur puissance. Ils contrecarrent le projet d’assimilation qui voulait faire des locaux, sous conditions, des Français à part entière. Pour eux le recours à la force est une solution durable ! Côté musulman, il faut rappeler que l’essor du nationalisme est tardif. L’absence initiale d’État réellement algérien et l’adhésion des élites au projet républicain ont ralenti l’éclosion de la contestation : le mouvement des jeunes Algériens, avec Ferhat Abbas, poursuit le combat de l’intégration. A contrario, les docteurs de la loi, les oulémas, veulent une nation algérienne fondée sur la pureté de la foi. Messali Hadj, lui, fonde en 1937 le Parti du Peuple Algérien et professe un nationalisme islamique populaire. Avec la guerre mondiale et le débarquement américain en

Afrique du Nord les données changent. Dégrisé par l’attente de réformes toujours repoussées, Ferhat Abbas publie un Manifeste du peuple algérien qui revendique un État algérien autonome. La France répond enfin par une ordonnance, le 7 mars 1944, où elle propose une assimilation plus généreuse. Mais il est trop tard ! Les courants contestataires s’enhardissaient, encouragés qu’ils étaient par la charte des nations unies et la création de la ligue arabe (1945). L’affaire se noue à Sétif et dans le Constantinois. Ici le film abuse : la mort du porteur de drapeau algérien fut suivie par un massacre des populations d’origine européenne (102 morts). Deux jours plus tard commence la répression sanglante. Les historiens débattent de l’ampleur et des causes des événements. Il semble que la férocité et l’outrance de la répression (des milliers de morts musulmans, peut-être des dizaines de milliers) correspondent à une volonté d’écraser le mouvement nationaliste (le PPA avait déclenché prématurément un projet insurrectionnel). Le film nous livre la vision rétroactive du FLN : Sétif et Guelma seraient le début de la guerre révolutionnaire.

Violence et terreur Deuxième temps fort : la lutte entre les factions politiques. La guerre d’Indochine et le triomphe vietnamien de Dien Bien Phu sont un encouragement majeur pour les nationalistes. La voie à suivre est choisie : il faut provoquer pour que la répression s’abatte. L’impasse politique liée au statut de l’Algérie de 1947 et à son application -un double collège et un trucage des élections- sont évoqués par nos héros révolution-naires à l’usine Renault. Le film ne fait que très évasivement allusion à ce qui fut le véritable début du soulèvement nationaliste conduit par le FLN : le massacre de populations civiles, le 1er novembre 54. S’imposent désormais le primat de l’action militaire, la violence et la terreur. Cette intransigeance conduit à éliminer toute opposition. À l’extérieur, ce sont les partis concurrents (le FLN est né d’une scission du parti de Messali Hadj, le MTLD) et tous ceux qui résistent, d’où la scène de l’assassinat du cabaretier MNA (successeur du MTLD). À l’intérieur du mouvement, ce sont les faibles. On ne voit pourtant pas les règlements de compte politique à l’intérieur du mouvement qui opposent, par exemple, les chefs de l’ALN (l’armée des

campagnes) aux chefs historiques du FLN. Le mouvement apparaît comme solide et unifié, ce qu’il ne fut pas (le leader FLN Abbane Ramdame est assassiné par ses compagnons). Les trois héros se meuvent dans un univers clos sur lui-même. Le FLN y est décrit comme un mouvement sans histoire, où les porteurs de valises ne sont que des accessoiristes aux ordres du mouvement algérien : pas de Sartre ou de Vidal-Naquet pour dénoncer les affres du colonialisme, ni même l’engagement d’un Maurice Audin. Le film poursuit la logique de légitimation du combat nationaliste du FLN : la violence ne pouvait être évitée, puisqu’elle est révolutionnaire. En réalité ces déchirures ne vont aller qu’en s’amplifiant, surtout après l’Indépendance. Les légitimer revient à justifier les violences de la vie politique algérienne. À y regarder de près, bien que les héros ne soient pas sympathiques et soient montrés comme pratiquant un peu vite le meurtre politique, ce film ressemble à un panégyrique du FLN. D’ailleurs, la version des événements de Sétif reprend les positions du gouvernement algérien: celui-ci ne cesse de demander une repentance unilatérale de la France. RENÉ DIAZ

Hors-la-loi de Rachid Bouchareb

Intégrations

Un nouveau cycle de sept conférences historiques, organisé par Approches, Culture(s) et Territoire aux Archives départementales de Marseille, a pour thème central l’inscription de Marseille dans le cadre royal à partir du règne de Louis XVI. Comment Marseille la soumise, Marseille la méditerranéenne, trouve une place dans l’espace méditerranéen et oriental. Par ailleurs ACT projette à la Minoterie Pièces de mémoire, paroles de passeurs, une série de portraits de comédiens «issus de l’immigration» (Zohra Ait-Abbas, Mohamed Adi, Akel Akian, Kamel Boudjellal, Louisa Amouche, Edmonde Franchi et Patrick Servius). R.D.

Mobilités, échanges et frontières Voisins, Wolfgang Kaiser, le 19 oct Politique et altérité : des représentations sous influence Junko Takeda, le 9 nov Pièces de mémoire, paroles de passeurs, le 22 oct, la Minoterie www.approches.fr


LA POP PHILOSOPHIE

Politique ou poétique de la vérité ?

PHILOSOPHIE 77

POL POP philosophie

La philosophie se définit premièrement ainsi selon Foucault : c’est un travail essentiel interrogeant la vérité, elle doit faire comprendre que l’accord rationnel n’est pas un fruit du consensus, mais du rapport de force. Certains objectent à cette définition que la philosophie n’est pas forcément politique, et qu’elle peut s’appliquer à tout objet ; à moins que tout ne soit politique, et que s’interroger sur Plus belle la vie -le 20 oct à 15h à la FNAC Marseille- soit un champ possible de l’investigation philosophique ? © Tonkin Prod

Alors c’est quoi la pop philosophie ? Pas de définition nette mais des injonctions, comme celle de Canguilhem : «la philosophie est une réflexion pour qui toute matière étrangère est bonne, et nous dirions volontiers pour qui toute bonne matière doit être étrangère.» Pop pourquoi ? Parce que populaire on l’espère, mais surtout dans la lignée du pop art et de la musique pop. Pour Gilles Deleuze qui inventa l’idée, c’est une philosophie impure qui s’empare d’objets inhabituels et a priori illégitimes, pour penser dans la joie. Comme par exemple la conception du monde chez les Shadoks le 22 oct à 14h, à La Criée, et par Gérard Berry professeur au collège de France. En fait la pop philosophie est un bricolage de la pensée sur des références légères qui se substituent à l’œuvre d’art ; on essaie, on trifouille les idées sur des objets étonnants. Pourquoi pas ? On s’approchera peut-être des intentions de cette pop philo à la Maison Hantée le 22 à 18h30 où Eric Aeschimann, Stéphane Legrand et Pacome Thiellement se demanderont si le rock philosophique a vraiment existé. Parce que le rock et mai 68 sont de purs évènements, surgis de nulle part, «improductifs et sans objet… ainsi le rock réussit où la politique échoue : il rend heureux.» On espère un débat vraiment rock’n’roll si les gauchistes de la Plaine passent par là ! En tout cas la semaine est riche, avec d’éminents intervenants, et quelques problématiques nécessaires comme celle du 23 à 17h30 au Palais de la Bourse, sur les métamorphoses de la temporalité et de la spatialité à l’heure du portable qui rend l’Autre en permanence à ma portée, et ma localisation connue par satellite ! RÉGIS VLACHOS

Semaine de la Pop Philosophie du 18 au 23 oct Marseille www.lesrencontresplacepublique.fr

Un brin de Sexop Philo Influencé par la pop philosophie on a inventé la PHILOsophie SEXuelle Opérationnelle ; on fait ce qu’on peut ! La philosophie a raison de s’interroger sur les objets et débats du quotidien, pour les sortir de leur doxa, leurs préjugés, leur simplification médiatique. Non pour broder mais pour les ramener à des concepts fondamentaux, afin d’éclairer et de donner envie de changer le monde. À l’inverse de Spinoza («ne pas railler, ne pas pleurer, ne pas haïr, mais comprendre»), Bensaïd disait que d’abord vient l’indignation, ensuite la pensée, et enfin l’action. Action justement que celle contre la réforme des retraites, qui en son sein porte un grave coup à l’égalité de traitement entre l’homme et la femme, et met en lumière la béance philosophi-

que quant à la réflexion sur la différence générique homme-femme. Le premier point sur lequel rien n’est réglé est celui du naturel et du culturel : hormis la procréation, tout est culturel. Or cette différenciation culturelle est d’autant plus violente qu’elle s’abrite sous une justification naturelle : ainsi l’instinct maternel, inexistant naturellement mais présenté comme conséquence de la procréation. L’autre question, qui découle de celleci, est la généalogie de la distinction du féminin et du masculin : on nage en eau trouble dès qu’on se demande d’où et comment vient l’inégalité Homme/ Femme. De l’invention de la propriété

privée qui brise l’état heureux de nature où tous étaient égaux ? Dès lors la femme devient propriété de l’homme, dixit Engel, why not… Pour d’autres elle provient d’un modèle de pensée archaïque dominant, issu des premières représentations du monde au paléolithique, qui se perpétue : on aurait évolué sur tout depuis l’homme des cavernes, sauf là-dessus, et le féminin resterait passif, l’homme actif… Il y a bien une différence entre l’homme et la femme, que l’histoire millénaire a construite. Mais peut-on constater aujourd’hui qu’il y a des valeurs féminines et d’autres masculines sans que cette distinction relève de l’essentialisme ? Ces valeurs sont le fruit de la culture, elles ont été faites et peuvent être défaites. Mais pour obtenir l’égalité la

femme doit-elle adopter les valeurs (non essentielles) de l’homme: le mode de gestion capitaliste (brutalité, rentabilité) n’est-il pas proprement inhumain ? La femme doit-elle s’y glisser parce qu’il est masculin ? Et pour y faire quoi ? Pour montrer qu’elle peut subvertir ces valeurs ? On aimerait le croire. R.V.


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Théâtre de Lenche Tarif réduit pour toutes les représentations 04 91 91 52 22 La Minoterie tarif réduit pour toutes les représentations 8 € au lieu de 12 € 04 91 90 07 94 Les Bancs Publics 1 place offerte pour 1 place achetée pour tous les spectacles 04 91 64 60 00

Mensuel gratuit paraissant le deuxième mercredi du mois Edité à 30 000 exemplaires imprimés sur papier recyclé Edité par Zibeline SARL 76 avenue de la Panouse | n°11 13009 Marseille Dépôt légal : janvier 2008 Directrice de publication Agnès Freschel Imprimé par Rotimpress 17181 Aiguaviva (Esp.) photo couverture SMALL IS BEAUTIFUL © Agnès Mellon Conception maquette Max Minniti Rédactrice en chef Agnès Freschel agnes.freschel@wanadoo.fr 06 09 08 30 34

Théâtre Vitez (Aix) Vous offre 4 invitations par séance pour Ce serait trop long à t’expliquer… Le mieux c’est que tu viennes le 20 oct à 20h30 pour Dans ma maison de papier, j’ai des poèmes sur le feu le 29 oct à 14h30 et à 19h pour Endroit sec et sans eau Le 5 nov à 20h30 2 invitations par soir pour Peter Pan le 2 nov à 19h pour Ensorcelés par la mort le 9 nov à 20h30 le 10 nov à 19h 04 42 59 94 37

Théâtre le Sémaphore (Port-de-Bouc) Vous offre Un tarif préférentiel à 8 € pour Abraham le 20 oct à 20h30 le 21 oct à 20h30 pour Sam Karpienia en concert Le 6 nov à 20h30 pour Un homme est un homme le 19 nov à 20h30 04 42 06 39 09

Secrétaire de rédaction spectacles et magazine Dominique Marçon journal.zibeline@gmail.com 06 23 00 65 42 Secrétaire de rédaction Jeunesse et arts visuels Marie Godfrin-Guidicelli m-g-g@wanadoo.fr 06 64 97 51 56 Arts Visuels Claude Lorin claudelorin@wanadoo.fr 06 25 54 42 22

L’institut culturel italien vous offre 3 adhésions annuelles d’une valeur de 32 €, cette «carte adhérent» vous donnera accès à tous les services de l’Institut, médiathèque et programme culturel. Demande par mail : iicmarsiglia@esteri.it ou au 04 91 48 51 94 Art-Cade – La galerie des Grands Bains Douche de la Plaine Vous offre Une adhésion et une consommation au bar de la galerie 04 91 47 87 92 L’imprimeur Magenta Vous offre 10% de remise sur tous travaux d’impression 04 91 32 64 54 Librairie Maupetit (Marseille 1er) La Canebière 5% de réduction sur tous les livres Librairie L’écailler (Marseille 1er) 2 rue Barbaroux 5% de réduction sur tous les livres Le Greffier de Saint-Yves (Marseille 1er) librairie générale et juridique 10 rue Venture 5% de réduction sur tous les livres

Musique et disques Jacques Freschel jacques.freschel@wanadoo.fr 06 20 42 40 57

Polyvolantes Chris Bourgue chris.bourgue@wanadoo.fr 06 03 58 65 96

Frédéric Isoletta fredisoletta@gmail.com 06 03 99 40 07

Maryvonne Colombani mycolombani@yahoo.fr 06 62 10 15 75

Cinéma Annie Gava annie.gava@laposte.net 06 86 94 70 44

Delphine Michelangeli d.michelangeli@free.fr 06 65 79 81 10

Élise Padovani elise.padovani@orange.fr

Librairie Regards (Marseille 2e) Centre de la Vieille Charité 5% de réduction sur tous les livres L’histoire de l’œil (Marseille 6e) 25 rue Fontange 5% de réduction sur tous les livres Librairie Imbernon (Marseille 8e) spécialisée en architecture La Cité Radieuse 280 bd Michelet, 3ème étage 5% de réduction sur tous les livres Librairie Arcadia (Marseille 12e) Centre commercial Saint Barnabé Village 30 rue des électriciens 5% de réduction sur tous les livres Librairie de Provence (Aix) 31 cours Mirabeau 5% de réduction sur tous les livres Librairie Au poivre d’Âne (La Ciotat) 12 rue des frères Blanchard 5% de réduction sur tous les livres La Pensée de Midi Vous offre 3 exemplaires de Histoires d’un 20 janvier, n° des 10 ans de la revue par mail : chris.bourgue@wanadoo.fr

Marie-Jo Dhô dho.ramon@wanadoo.fr

Livres Fred Robert fred.robert.zibeline@free.fr 06 82 84 88 94

Philosophie Régis Vlachos regis.vlachos@free.fr

Maquettiste Philippe Perotti philippe.zibeline@gmail.com 06 19 62 03 61

Histoire et patrimoine René Diaz renediaz@free.fr

Sciences et techniques Yves Berchadsky berch@free.fr

Ont également participé à ce numéro : Dan Warzy, Yves Bergé, Aude Fanlo, Christophe Floquet, Jean-Mathieu Colombani, Clarisse Guichard, Christine Rey, Rémy Galvain

Photographe Agnès Mellon 095 095 61 70 photographeagnesmellon.blogspot.com Directrice commerciale Véronique Linais vlinais@yahoo.fr 06 63 70 64 18 Chargée de développement Nathalie Simon nathalie.zibeline@free.fr 06 08 95 25 47




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