Bonus Zoo été 2014 by Redaction Zoo

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RENCONTRE ACCIDENTELLE © Christin et Verdier / DUPUIS

tions caritatives dont la préparation insuffisante tend à lÊamateurisme ; de lÊarrogance des fortunés qui se croient au-dessus de toutes les règles au seul motif de leur bonne naissance et de leurs moyens financiers ; et dÊune certaine naïveté des aspirants migrants, qui fantasment un monde occidental idyllique et ne peuvent que déchanter tant la réalité diffère de leurs rêves.

UNE CASE À LA LOUPE

Trois groupes d’individus en voyage, trois destinations différentes, trois parcours qui vont se croiser, pour une rencontre sur la transsaharienne qui va leur laisser, à chacun, des traces.

anny sÊennuie dans ses études de littérature. Elle voudrait vivre une vie plus romanesque, faire quelque chose dÊutile. Alors elle sÊengage pour une mission caritative de MédicÊAfrica, une association humanitaire un peu bricolo, qui est parvenue à affréter un camion rempli de médicaments, pour les convoyer vers un dispensaire africain, dans une brousse indéfinie, au Niger peut-être. Elle accompagne Nico (dont le père garagiste a fourni le camion) et Lila (dont

les parents ont collecté les médicaments). Ailleurs, dans un village de la brousse nigériane, Diop et Norbert se préparent à un voyage en sens inverse. Cherchant une vie meilleure, ils vont essayer dÊentrer clandestinement en Europe, direction la France. Diop se rêve en joueur de foot, il en a les capacités physiques, tandis que Norbert envisage de créer une start-up de formation à distance. Ailleurs encore, aux Émirats Arabes Unis, Shafiq et Karim se préparent à accompagner le Cheikh dans une partie de chasse en Afrique. Une partie de chasse en pleine réserve naturelle, mais dans un monde où lÊargent peut tout acheter, nombreuses sont les règles qui peuvent disparaître contre une enveloppe de dollars⁄ Détail important, cÊest Karim qui fait partie de la famille régnante, et qui par conséquent bénéficie des moyens considérables de son oncle. Shafiq, dont la famille est bien plus éloignée du

pouvoir, ne bénéficie des largesses du Cheik quÊen tant quÊinvité de Karim.

Certaines cases sont particulièrement caustiques. Notamment celle, page 89, qui laisse croire que Norbert a accompli son rêve. Un récitatif explique ÿ Un mois après, Norbert bossait au noir dans une boîte dÊinformatique Ÿ. De fait, on voit Norbert affairé sur un ordinateur. Oui mais⁄ il est debout, un chiffon sur lÊépaule, des gants ménagers dans la poche arrière de son pantalon, un aspirateur à ses côtés. Il bosse effectivement dans une boîte dÊinformatique. Pas au poste quÊil espérait : il fait partie de lÊéquipe dÊentretien. ¤ lÊimage de cette case, il y a dans lÊalbum un propos désabusé qui est purement graphique, discret, dans les détails de lÊarrière-plan. On regardera notamment le défilé des camions qui roulent sur la transsaharienne et leurs chargements⁄ Après Partie de chasse et Les Phalanges de lÊOrdre noir (dessinés par Enki Bilal il y a plus de 30 ans), Pierre Christin livre un récit plus politique quÊil y paraît, et nÊa rien perdu de son acuité ni de sa férocité. JÉRłME BRIOT

RENCONTRE BLACK BLANC BEUR Voilà donc trois groupes de jeunes gens ayant à peu près tous le même âge, mais dont les motivations et aspirations sont radicalement opposées. Même le temps dans lequel ils vivent est différent. Norbert et Diop rêvent de leur avenir ; les Français sont dans lÊinstant présent, particulièrement Lila et Nico qui, amoureux, veulent surtout passer du temps ensemble sans se préoccuper du lendemain. Quant aux Arabes venus pratiquer leur chasse ancestrale, cÊest bien dans le passé quÊils se projettent. Une tempête de sable va réunir ces trois groupes et les forcer à cohabiter dans des circonstances critiques, ce qui va les rapprocher. Au-delà de ce récit humain bien enlevé, lÊalbum se livre à une critique véhémente à la fois des organisa-

RENCONTRE SUR LA TRANSSAHARIENNE de Christin et Verdier, Dupuis, Aire Libre, 88 p. couleurs, 19 €

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La musique comme un aimant En plein cœur du Congo belge, un Tourne-Disque peut avoir deux bras et deux jambes. Zidrou et Raphaël Beuchot tirent de cette constatation un récit humaniste très réussi.

e choc des civilisations. CÊest ce que ressent Eugène YsaÈe, Maître de Chapelle de la Cour de Belgique, en débarquant au Congo belge en cette année 1930. Invité par son neveu Lucien à y passer trois semaines, il sÊimmerge dans lÊambiance coloniale sans paliers de décompression. Le vieil homme de 71 ans découvre les usages dÊun petit monde qui domine un territoire grand comme 75 fois la mère patrie. Les paysages éblouissants ne parviennent pas à faire oublier au violoniste virtuose les colons imbus dÊeux-mêmes soutenus par lÊalcool, lÊadministration en roue libre, les atrocités commises sous Léopold II et la main dÊﬂuvre noire corvéable à merci. DÊailleurs, dans la splendide villa de Lucien, les domestiques ne manquent pas. Depuis près de 40 ans, un homme est même là pour placer et retourner les 78 tours sur le phonographe. On lÊappelle Tourne-Disque. Il a la haute main sur lÊincroyable collection de disques initiée par feu le père de Lucien. En discutant avec le dévoué serviteur, Eugène YsaÈe sÊaperçoit avec étonnement de sa grande sensibilité musicale. Et se dit que ses élèves bruxellois nÊont vraiment rien à lui envier en la matière. Démarre alors une amitié improbable entre les deux hommes que tant de choses séparent, mais que lÊamour de la musique et une

grande bienveillance rapprochent furieusement. De cette escapade exotique, Zidrou et Raphaël Beuchot tirent un récit où la tendresse affleure sans tomber dans la mièvrerie. En équilibrant le rapport dominant-dominé, ce coup de foudre amical sur fond de musique classique représente évidemment beaucoup plus que le simple rapprochement de deux hommes. Cette description semblera peut-être idéalisée à certains, mais franchement, que ferait-on sans les idéaux ? THIERRY LEMAIRE

TOURNE-DISQUE de Zidrou et Beuchot, Le Lombard, 104 p. couleurs, 17,95 € 43

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UN ZOO,

Des animaux sauvages qui parlent, une gardienne gaffeuse, un directeur transformé en homme-lapin : le « Crazy Zoo », à défaut d’être le zoo le plus populaire, est le plus déjanté !

ana, une lycéenne surnommée ÿ la reine des gaffeuses Ÿ, postule pour un job dÊété au zoo Oumagadoki. Son directeur, Shîna, cultive une extravagance à la Willy Wonka1. Pas toujours volontairement : voilà des années quÊil a été transformé en créature mihomme mi-lapin. Pour lever cette malédiction et retrouver forme humaine, Shîna doit bâtir ÿ un jardin dÊanimaux Ÿ et rendre lÊendroit populaire. Il a reçu le pouvoir de transformer ses pensionnaires en créatures humanoïdes douées de parole. Mais Shîna est égocentrique et capricieux, il a pour principe de vie de ne faire que des choses qui lÊamusent...

rieuse⁄ le ton change. Les dessins gagnent en élégance, la véritable histoire commence enfin, et oui : le manga devient intéressant. Un éditeur avisé est-il intervenu, est-ce lÊauteur qui a su réorienter la série ? En tout cas, ce manga en cinq tomes initialement paru dans le Shônen Jump, après avoir frôlé lÊaccident éditorial, sÊavère dÊune lecture tout à fait plaisante.

JÉRłME BRIOT

Le héros de Charlie et la Chocolaterie de Roald Dahl, et des films du même nom.

LA BELLE ET LES BÉBÊTES Malgré un thème original [et un excellent titre, NDLR], Crazy Zoo est une série qui démarre plutôt mal. Dans les deux ou trois premiers chapitres du premier volume, lÊauteur joue poussivement le registre de lÊhumour loufoque. Concédons quelques réussites, comme la présentation du job dÊété faite à Hana par son futur directeur : ÿ Concernant la répartition du travail, on va faire simple : toi tu fais tout⁄ Et moi, je te regarde travailler ! Ÿ⁄ mais pour lÊessentiel, les effets tombent à plat, tout est surjoué, lourdingue, et la surexcitation générale nuit à la lisibilité. Il faut pourtant oublier la première impression négative. Car après cette mise en place pour le moins labo44

CRAZY ZOO, T.1 ET 2

de Kôhei Horikoshi, Delcourt, 192 p. n&b, 6,99 €