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CRISE DU PAPIER : « LE COVID N’EST PAS LE FOND DE L’AFFAIRE »

Dans un communiqué publié en février, l’association européenne des industries graphiques Intergraf tirait la sonnette d’alarme sur la pénurie de papier. Explications avec Paul-Antoine LACOUR, délégué général de la COPACEL, l’organisation professionnelle représentant les entreprises françaises produisant du papier, du carton et

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de la pâte de cellulose. Propos recueillis par Cécile Jarry

© Copacel

Les imprimeurs sont confrontés à une crise du papier de très forte ampleur. Quels en sont les ressorts ?

Deux phénomènes distincts expliquent cette crise : une modification de l’équilibre entre l’offre et la demande, et des coûts de production démultipliés chez les papetiers. Depuis 2007, la consommation de papiers graphiques en Europe est en baisse. Tous les secteurs sont touchés, à des rythmes différents, mais la réduction est réelle, année après année. Chez les papetiers, la rentabilité de l’outil industriel est devenue problématique, avec des taux de charge descendus en dessous des 80 %, entraînant la fermeture de machines pour éviter les surcapacités. Avec un rythme qui s’est intensifié ces trois dernières années. Face à cette offre en baisse est arrivé le rebond de l’activité économique en 2021, engendrant mécaniquement ce « pincement » sur un marché devenu un temps sous-capacitaire par rapport à la reprise liée au ralentissement de la pandémie mondiale. Mais il ne faut pas se tromper : le Covid n’est pas le fond de l’affaire. Cette tendance de notre industrie, qui voit des capacités disparaître, est amorcée depuis plusieurs années et n’a pas été motivée par la pandémie, mais par une baisse constante de la consommation de papiers graphiques en Europe.

Impossible de faire marche arrière ?

C’est une évolution structurelle forte. Les papetiers ont décidé de convertir leurs capacités en papiers graphiques pour produire des papiers de spécialités ou du carton bien avant le Covid. Ces transformations coûtent des millions d’euros, il n’est donc pas envisageable de faire marche arrière.

S’est ajoutée à cela la hausse des coûts de l’énergie…

Les coûts de production des papetiers ont augmenté de façon conséquente à cause de la hausse démentielle du prix de l’énergie, notamment durant l’été 2021. Mais une autre hausse, propre au secteur papetier, a également contribué à augmenter les prix des papiers : celle de la pâte à papier, qui a atteint des niveaux très élevés du fait de manques de capacités face à une demande mondiale qui était bonne. La Chine est sortie du Covid avant l’Europe, suivie des États-Unis. Aujourd’hui, les prix restent hauts. Le marché n’échappe pas non plus à la crise du fret. La mécanique du commerce international maritime est grippée, les délais de livraison s’allongent et le coût des transports augmente.

De nouvelles capacités de production de pâte à papier sont annoncées pour 2023. Concernant cette crainte que le monde de la communication bascule définitivement du côté du digital, je reste confiant. L’impact du numérique sur la planète a aujourd’hui largement infusé auprès du grand public. Le papier a donc, selon moi, encore toute sa place dans nos vies.

Intergraf craint que cette crise incite éditeurs et annonceurs à se tourner définitivement vers le numérique. Qu’en pensez-vous ?

« Deux phénomènes distincts expliquent cette crise : une modification de l’équilibre entre l’offre et la demande et des coûts de production démultipliés chez les papetiers »

Paul-Antoine LACOUR, délégué général de la Copacel

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