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SÉRIES LIMITÉES
from IC LE MAG #20
by 656 Editions
Apparu sur le marché de l’impression numérique en septembre 2018, le distributeur français de supports grand format n’en finit plus de grandir. Dernier projet en date : le lancement de sa gamme TexSprint Nature, qui offre une alternative à ses bâches en PVC.
SPRINTER,
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UNE CROISSANCE AU PAS DE COURSE
© Sprinter Dix-huit mois après notre dernière rencontre, Sprinter a encore passé un cap. « Nous avons gagné beaucoup de clients au plus fort de la crise sanitaire », explique Julien Perez, l’un des deux fondateurs du distributeur. Le chiffre d’affaires de l’entreprise basée à Chennevièressur-Marne (94) s’est établi à 4 millions euros en 2021. Une croissance significative, à mettre en rapport avec les 950 000 euros enregistrés deux ans plus tôt. Mais Julien Perez et son associé Guillaume Leclerc ne comptent pas s’arrêter en si bon chemin. Les dirigeants mettent tout en œuvre pour poursuivre l’expansion déjà engagée. Le concept de Sprinter est désormais bien rôdé, autour d’une gamme courte de 55 produits et d’un stock massif avec une forte disponibilité. « Notre rôle réside dans le service. Nous proposons une sélection de références qui répondent aux besoins présents du marché, avec le meilleur rapport qualité-prix, une disponibilité en stock et une livraison rapide. Les imprimeurs sont bien souvent de petites structures très occupées, donc nous essayons de leur simplifier la vie pour les achats », précise Julien Perez.
UNE GAMME SANS PVC
Avec sa nouvelle gamme TexSprint Nature lancée en mars, un textile sans PVC, imprimable en UV ou Latex, Sprinter passe une nouvelle étape importante
© Sprinter
dans son évolution : l’entreprise affirme son engagement sur la question urgente de l’éco-responsabilité. Ce support opaque en polyester est disponible en quatre versions, d’un grammage de 230 à 340 g/m2 . Enduit des deux côtés de polyuréthane ou de polyamide, il offre une solide tenue en roll-up ou pour tout autre affichage en intérieur, grâce à ses propriétés anti-feu. « Ce produit ne répond pas à tous les besoins, mais il crée une alternative, il offre un choix, justifie Julien Perez. Les grandes marques poussent dans ce sens ». Si Sprinter compte étendre sa gamme Nature à l’avenir, l’entreprise ne délaisse pas pour autant le PVC, très utilisé dans la communication visuelle. La composition du PVC n’est d’ailleurs plus la même depuis quelques années. « Depuis 2007, la règlement européen REACH interdit toute substance toxique dans les produits PVC. Le risque sanitaire potentiel est donc résolu, mais l’opinion publique tend malheureusement à garder cette image négative du PVC. »
L’ENJEU DE LA TRAÇABILITÉ
PVC ou non, Sprinter s’évertue à maîtriser son approvisionnement le plus étroitement possible, en limitant les intermédiaires et en remontant très en amont dans la chaîne de production, jusqu’aux fabricants de matières premières. Cette qualification précise des produits satisfait la demande du marché, ainsi que les convictions profondes de Julien Perez, qui dit « rêver de traçabilité totale des matières et des produits, sur le modèle de l’alimentaire, avec la liste des composants, leur origine, etc. » En attendant de faire bouger les lignes, le distributeur francilien ne perd pas de vue ses ambitions. Pour accélérer son développement, Sprinter a déjà mis un pied en dehors du territoire français, avec des contrats conclus en Espagne, en Belgique et en Suisse. La gamme de produits proposés à la vente devrait également s’élargir pour en compter 70 à court terme, accompagnée par un nouveau gonflement des stocks jusqu’à 8000 emplacements palettes. En ligne de mire, un chiffre d’affaires multiplié par deux en fin d’année, pour atteindre 8 millions d’euros.
Julien PEREZ, co-fondateur de Sprinter
© Procédés Chénel
© Procédés Chénel
PROCÉDÉS CHÉNEL, UNE
HISTOIRE DE TRANSMISSION
Plus que centenaire, mais toujours plus durable, la fabrique de papiers à émotions Procédés Chénel a encore beaucoup à donner. Bien ancrée dans l’air du temps, connectée avec le monde de la création et les jeunes générations, l’entreprise aborde les années qui viennent avec confiance et détermination. Bertrand Genevi
Une saga familiale. Aujourd’hui dirigée par Sophie Chénel, la société Procédés Chénel a été fondée en 1896 par son arrière-grand-père. À l’origine, l’entreprise francilienne se spécialise dans la menuiserie, mais le spectre s’élargit sous l’impulsion de Guy Chénel. Architecte de formation et inventeur prolifique, il dépose une soixantaine de brevets durant son mandat. Son invention majeure, née dans les années 1970, est encore exploitée par Procédés Chénel en 2022 : le Drop Paper. « La signalétique des salons était historiquement réalisée en panneaux de bois. Mon père a développé une solution pour les remplacer par du papier, pour gagner en légèreté et en sécurité », rembobine Sophie Chénel. Atout maître de l’entreprise, ce matériau singulier, ultra résistant et ignifugé, brille également par sa modularité. Il se décline sous forme de cloisons, de luminaires, de mobiliers ou de plafonds.
LA QUATRIÈME GÉNÉRATION AU POUVOIR
Sophie Chénel a « toujours exprimé la volonté de prendre les rênes de l’entreprise ». Elle intègre la société en 1994, à 27 ans. Admirative du travail de son père, elle creuse toutefois son propre sillon en orientant l’activité autour des créateurs de décor et en accentuant le développement à l’international, jusqu’à se voir nommée gérante en 1997.
© Procédés Chénel
Aujourd’hui, la PME compte une vingtaine de salariés. Ses « architectures de papier » se destinent aux concepteurs d’expositions, aux professionnels de l’événementiel et aux architectes d’intérieur. Des systèmes faciles d’installation, pérennes comme éphémères, sont proposés. Conception, impression, découpe : Procédés Chénel s’occupe de tout dans son atelier. Tous les éléments décoratifs sont personnalisables, pour coller aux souhaits de chaque créateur. Car une ambition anime l’entreprise au quotidien : la transmission d’émotions au travers de ses productions.
CRÉER DES ÉMOTIONS
Procédés Chénel compte nombre de clients prestigieux : des acteurs du luxe comme Chanel et Hermès, des géants de la grande distribution comme Carrefour, des agences de design comme Dragon Rouge. Et si le fabricant a su séduire les plus grands, c’est parce qu’il touche la corde sensible. Auteure de créations délicates, la société labellisée Entreprise du Patrimoine Vivant explique son succès par la matière. « Le papier apporte une émotion que le textile ou des matériaux plus denses n’offrent pas », avance Sophie Chénel. La dirigeante note que les sensibilités divergent selon les pays : « Les réalisations prennent des expressions différentes, car les créateurs s’approprient nos produits selon la culture locale ». La planète entière s’accorde toutefois sur une chose : la nécessité de s’engager pour plus de responsabilité.
Sophie CHÉNEL, Pdg de Procédés Chénel
© Procédés Chénel
PROCÉDÉS CHÉNEL, UNE HISTOIRE DE TRANSMISSION
© Procédés Chénel
LÉGUER UNE PLANÈTE VIVABLE
Sophie Chénel le confesse sans détour : « Nous lançons 30 tonnes de papier sur le marché chaque année qui, pour majorité, ne se recyclent pas ». Le produit phare de Procédés Chénel, le Drop Paper, est un composite fait de cellulose, de polyester et de fibre de verre. Une fois ces matériaux intégrés dans le papier, difficile de les dissocier. Poussée par l’urgence d’agir, l’entreprise a donc développé, en 2020, le Drop Cake : des panneaux composés à 60 % de chutes de production de Drop Paper et à 40 % de polyéthylène recyclé. Et Sophie Chénel voit plus loin : « Nous mobilisons nos clients pour récupérer les matières et en faire autre chose. Un décor éphémère sur un salon peut se transformer en mobilier durable ». La preuve avec les designers Laurianne Beaunier et Aurélien Veyrat, dont une pièce réalisée en Drop Cake a fait son entrée dans la collection 2022 du Mobilier national, une institution, créée au XVIIe siècle, ayant pour mission de perpétuer des savoir-faire d’exception.
ÉCHANGE DE SAVOIR-FAIRE
En lien avec la gestion de ses déchets, Procédés Chénel a monté la « School Paper ». Dans un format hybride entre concours et workshop, des étudiants en design sont invités à expérimenter à partir de chutes de production. L’occasion pour ces jeunes talents de rencontrer un jury de professionnels et d’échanger sur leurs pratiques. Ce projet tient particulièrement à cœur à Sophie Chénel. « Nous travaillerons sur le bois brûlé cette année. Après un passage dans notre atelier pour appréhender notre activité et nos matières, un workshop se tiendra à la Bibliothèque Historique de la Ville de Paris, le 18 juin prochain », s’enthousiasme la dirigeante. Le showroom de Vanves est aussi le théâtre d’autres animations : des ateliers « Paperclass » pour découvrir les produits de la maison aux plus informels déjeuners « Paper Lovers ». En parallèle, après 25 ans à la tête de l’entreprise, Sophie Chénel prépare sa succession : « J’espère la transmettre à mes enfants. Ils sont encore jeunes, mais cette perspective les intéresse ». La transmission, encore et toujours.
Sophie CHÉNEL, Pdg de Procédés Chénel
CRÉANOG :
LOGIQUE DE LA SENSATION
Le sens du détail, Créanog s’y attache au quotidien, depuis son atelier de gaufrage et de marquage à chaud du Viaduc des Arts, dans le douzième arrondissement de Paris. À sa tête, Laurent Nogues, diplômé de l’École Nationale Supérieure des Arts Appliqués et nommé Maître d’Art par le Ministère de la Culture en 2011. Un homme qui manie aussi bien la création graphique que le savoir-faire d’un artisan, le tout baigné dans un goût certain pour les nouveaux outils numériques. Bertrand Genevi
Laurent Nogues lance Créanog en 1994, dans le sillage de son père, imprimeur spécialisé dans le packaging de luxe. L’idée est « d’accompagner les marques et les agences de communication dans la matérialisation en relief. » Le jeune artisan constate qu’à l’époque il n’existe sur le marché qu’une connaissance très relative des savoir-faire du marquage à chaud et du gaufrage. Rapidement, le dirigeant décide de lancer un studio de création et l’intègre dans sa structure, « pour susciter l’envie de solliciter ces techniques, mais aussi en projeter une autre utilisation. »
TECHNIQUES SOUS-EXPLOITÉES
De l’avis de Laurent Nogues, le marquage à chaud et le gaufrage étaient alors sous-exploités par les annonceurs. « Ces techniques étaient cantonnées à des utilisations basiques, incluant le nom du produit et de la marque, rarement plus. Représenter un visuel élaboré était rarissime ». Une ambition intime l’animait alors, et ne l’a pas quitté depuis : valoriser l’impression en relief, apparue dès le XVIe siècle, et la mettre au service d’idées contemporaines. Pour en faire une technique ancrée dans le présent, mais néanmoins dotée d’un grain singulier.
IDENTIFICATION DE MARQUE
Chez Créanog, ce particularisme s’exprime historiquement dans des dossiers de presse et des cartons d’invitation aux détails très travaillés, réalisés pour de grandes marques. Si le monde de l’édition a souffert de l’avènement du digital, l’entreprise parisienne a tenu bon en appréhendant tous ses projets comme des produits d’exception. L’orage passé, un engouement retrouvé pour le carton d’invitation est apparu ces dernières années, pour établir un nouvel équi-
« Le gaufrage apporte le sens du toucher, grâce auquel une marque ou une institution communique autrement. L’expérience du lecteur s’enrichit et l’impact du dispositif s’en voit décuplé »
Laurent NOGUES, dirigeant de Créanog
Tous visuels © Laurent Nogues - Créanog F I 95
libre, probablement plus sain, entre le digital et le papier. « Nous vivons dans un monde de surconsommation d’images digitales. Et l’uniformisation guette : il devient difficile d’affirmer si une image émane de Dior, Chanel ou Cartier. Mais grâce à un carton d’invitation, une marque est en mesure d’exprimer ses valeurs, son histoire et bien d’autres critères d’identification qui lui sont propres », plaide Laurent Nogues.
FAIRE APPEL AUX SENS
Car rien ne remplace le contact tactile du papier ou du carton. « La technique de gaufrage a cela d’exceptionnel. Elle apporte le sens du toucher au-delà de la vue, et grâce à cela, une marque ou une institution communique autrement. L’expérience du lecteur s’enrichit et l’impact du dispositif s’en voit décuplé », défend l’artisan. Ces propriétés tactiles ne se limitent pas à une expérience haptique. Elles peuvent aussi revêtir un aspect fonctionnel : Créanog collabore ainsi avec les Éditions du Patrimoine pour une collection d’ouvrages destinés aux personnes déficientes visuelles. Le gaufrage donne alors une perception précise de chefs-d’œuvre architecturaux comme le Panthéon ou l’Abbaye de Cluny.
ÉMULATION ENTRE MÉTIERS D’ART
Si Laurent Nogues nourrit son processus créatif des échanges avec ses clients, il n’en oublie pas ses semblables. Une aventure menée entre 2017 et 2019 avec Wonder Lab, un collectif d’artisans d’art français, lui a permis d’exposer à Tokyo. Une étape charnière dans le développement de Créanog. Depuis, les uns travaillent avec les autres, dans une approche transverse entre métiers d’art.
CRÉANOG : LOGIQUE DE LA SENSATION
Laurent NOGUES, dirigeant de Créanog
Tous visuels © Laurent Nogues - Créanog
Une complémentarité et une émulation qui ouvrent la voie vers d’autres champs d’applications pour l’atelier, comme l’association du papier et du verre, ou le rapprochement du gaufrage et de la broderie. « Nous construisons pas à pas une offre à la fois originale et globale. C’est un atout dans un secteur du luxe en attente d’une démarche exclusive et d’un interlocuteur unique, de la conception à la production », explique le dirigeant.
ACCOMPAGNER LE PASSAGE DU TEMPS
Mais les créations pointues de Créanog prennent aussi vie grâce aux derniers outils numériques, auxquels Laurent Nogues n’hésite pas à accorder une place de choix. « Maîtriser un savoir-faire historique est une chance exceptionnelle, mais rien n’empêche de le faire évoluer avec des solutions modernes. » Intégrer la programmation 3D et la commande numérique ont ainsi permis à Créanog d’opérer un bond dans la matérialisation et la recherche de nouvelles écritures. Gravure de formes à la géométrie parfaite, effets de dégradé en dorure : le terrain de création s’est élargi à des productions impossibles à la main, sans toutefois la remplacer. En ardent défenseur de l’artisanat français, Laurent Nogues insiste sur le savant équilibre à trouver entre deux mondes que l’on pourrait croire antagonistes : « Si nous nous mettons au service de l’idée contemporaine et si nous intégrons le progrès, des entreprises telles que la nôtre seront toujours en mesure, demain, de perpétuer la tradition de l’impression en relief. »