Histoire et patrimoine : l'hôtel de Lestang

Page 1

L’académie en chiffres

z Budget : 2,5 millards d’euros z 40 000 fonctionnaires dont 34 000 enseignants z 2 725 écoles : plus de 275 000 élèves z 518 collèges et lycées : plus de 240 000 élèves z Quelque 126 000 étudiants

11 L’académie de Toulouse

Les services déconcentrés du Ministère de l’Education nationale et de l’Enseignement supérieur sont l’échelon régional et départemental de la politique éducative définie par le gouvernement. Ils agissent en fonction du contexte local et en partenariat avec les collectivités territoriales : les communes pour l’enseignement primaire, les départements pour les collèges et la région pour les lycées. Ils sont constitués par le Rectorat, les directions des services départementaux de l’Education nationale, les établissements scolaires et les écoles primaires.

Le rectorat de l’académie Nommé par décret du Président de la République en conseil des ministres, le recteur est le représentant du ministre de l’Education nationale et de l’Enseignement supérieur au niveau de l’académie. Responsable de la totalité du service public de l’éducation dans l’académie, de la maternelle à l’université, il est également compétent dans le domaine de l’enseignement privé sous contrat. Il veille à l’application des dispositions législatives et réglementaires se rapportant à l’éducation nationale, définit la politique académique, gère les personnels et les établissements, et assure les relations avec l’environnement politique, économique, socioculturel. Le recteur intervient dans le programme de formation professionnelle en lien avec le conseil régional et, chancelier des universités, assure la coordination des établissements d’enseignement supérieur. Les inspections académiques Au niveau départemental, le recteur est représenté par un inspecteur d’académie-directeur

Les recteurs de l’académie de Toulouse depuis 1809 Alexandre Jamme 1809 – 1815, Maurice Ranc 05/1815 – 07/1815, Alexandre Jamme 7/1815 – 10/1815, M. de Ferrand Puginier 1815 – 1825, Simon Larrouy 1825 – 1830, François Malpel 7/1830 – 12/1832, Jean-Georges Ozameaux 1832 – 1835, M. Thuillier 1835 – 1841, Auguste Nouseilles 1841 – 1850, Adolphe Mourier 1850 – 1852, Vincent de Gourgas 1852 – 1854, Julien Laferrière 1854 – 1856, Joseph Rocher 1856 – 1863, Roch Roustan 1863 – 1871, Adolphe Gatien – Arnould 1871 – 1873, Alexandre Guiraudet 1873 – 1874, Charles Dreyss 1874 – 1877, Thomas Chappuis 1877 – 1880, Charles Capmas 1880 – 1881, Claude Perroud 1881 – 1908, Charles Jeanmain 1908 – 1911, Paul Lapie 1911 – 1914, Jacques Cavalier 1914 – 1922, Joseph Dresch 1922 – 1931, Pierre Gheusi 1931 -1937, Robert Deltheil 1937 – 1944, Paul Dottin 1944 – 1963, André Loyen 1963 – 1967, Georges Richard 1967 – 1969, Claude Chalin 1969- 1982, Daniel Levier 1982 – 1986, Jean-Claude Maestre 1986 – 1991, Bernard Toulemonde 1991 – 1992, Philippe Joutard 1992 – 1997, Jean-Paul de Gaudemar 1997 – 2000, Nicole Belloubet 2000 – 2005, Christian Merlin 2005 - 2008, Olivier Dugrip 2008-2013, Hélène Bernard 2013

académique des services de l’Education nationale (IA-DASEN) chargé de la mise en œuvre de la stratégie académique au niveau départemental. Il exerce au sein d’une des 8 Directions des Services Départementaux de l’Education Nationale (DSDEN). Le Rectorat et les services départementaux de la Haute-Garonne ont fusionné en une seule entité.

12 En février 2015, ils seront regroupés sur un site unique au sein de la ZAC Niel. Jocelyn Lermé

Bibliographie indicative Toulouse, Découvrir. Le quartier Saint-Etienne. Jean Rocacher. Toulouse : Privat, 1998 Vieux hôtels de Toulouse. Paul Mesplé. Toulouse : Editions du pays d’oc, 1948 Les monuments de Toulouse. Jules de Lahondes. Toulouse : Privat, 1920 Histoire de Toulouse. Philippe Wolff (dir.). Toulouse : Privat, 1974 Les hôtels particuliers de Toulouse au XVIème siècle. Rémi Papillault. Toulouse : Association Les amis des Archives de la Haute-Garonne, 1996 Hôtels et demeures de Toulouse et du Midi-toulousain. Guy Ahlsell de Toulza, Louis Peyrusse, Bruno Tollon. Drémil Lafage : Daniel Briand, 1999 Histoire des rues de Toulouse. Jules Chalande. Toulouse : Les frères Douladoure, 1919 L’hôtel de Lestang ou de l’académie. Pierre Saliès. Archistra, numéro 85 Dictionnaire des rues de Toulouse. Pierre Saliès. Paris : Toulouse, 1999 Vivre à Toulouse sous l’Ancien Régime. Michel Taillefer. Paris : Perrin, 2000 Toulouse. Paris : Bonneton, 1990 Promenade guidée dans les rues de Toulouse. Gérard Villet. Drémil-Lafage : Daniel Briand, 1999 Directeur de la publication Hélène Bernard, rectrice de l’académie de Toulouse, chancelière des universités Maquette : Jean-Claude Dufour - communication rectorat Crédit photos : Jocelyn Lermé

Histoire et patrimoine L’hôtel de Lestang Christophe de Lestang naît en 1560. Issu des noblesses de robe et de cour, petit-neveu d’un cardinal et de trois évêques, il se destine lui-même aux ordres. Evêque à 21 ans, il prend successivement la tête des évêchés de Lodève, Alet-lesBains et Carcassonne. En faveur auprès d’Henri IV puis de Louis XIII, membre du Conseil du Roi et conseiller au Parlement (cour de justice) de Toulouse, il dispose de revenus importants et d’exonérations fiscales, au point d’envisager alors qu’il est dans sa trentième année, l’édification d’une résidence à Toulouse. En cette fin de XVIème siècle, la ville est sortie de son âge d’or. Le pastel, à la base d’une teinture bleue diffusée dans toute l’Europe, en avait fait la richesse et la puissance pendant plus d’un siècle. Dès les années 1560, la concurence de l’indigo des Indes et des Antilles plonge son économie dans un marasme durable. Le temps des grandes maisons urbaines de la Renaissance est révolu. C’est dans cette période de torpeur et de doute que Christophe de Lestang se met à la recherche d’une résidence à la hauteur de ses charges politiques et ecclésiastiques. Son choix se porte sur un quartier entre archevêché (aujourd’hui préfecture) et Parlement (emplacement de l’actuel tribunal de grande instance). En 1590, il fait l’acquisition d’une maison à proximité des remparts aujourd’hui disparus. Le morcellement urbain nécessite le rattachement de plusieurs terrains déjà bâtis : à terme, neuf parcelles seront réunies, d’une superficie totale d’environ 3000

mètres carrés. Dès 1593, avant que la propriété ne prenne son ampleur définitive, l’édification de l’hôtel particulier débute sous la direction d’un maître-maçon dont l’identité nous est inconnue. Particulièrement ambitieuse par sa taille, cette bâtisse confère à l’évêque de Lestang le prestige de ses illustres concitoyens, François de Clary (hôtel de pierre 1608, 25 rue de la Dalbade) ou François de Chalvet (hôtel de Chalvet 1610-1622, 12 place du Parlement). Après sa mort en 1621, la propriété reste dans la famille pour trois générations. Son neveu, Christophe Meynard de Lestang, en devient propriétaire jusqu’à son décès en 1669. Son fils Jean en hérite et la lègue lui-même à son fils Daniel en 1681. Ce dernier n’ayant aucune descendance, une succession litigieuse s’ouvre pour plusieurs dizaines d’années. Il faut attendre les troubles révolutionnaires pour retrouver la trace d’un nouvel acquéreur, Alexandre Lavaisse, bourgeois sans titre de noblesse. Suivront deux propriétaires ennoblis par l’Empire, le sieur de Lostanges et le comte de Lamezan. La loi du 10 mai 1806, crée l’université impériale, établissant le monopole de l’éducation publique. Mais ce n’est qu’à partir du décret du 17 mars 1808 que sa mise en oeuvre est possible, instituant les académies et définissant la fonction de recteur. L’académie de Toulouse compte alors quatre départements : Ariège, Haute-Garonne, Tarn, Tarn-et-Garonne. Suivront, avec la loi Fortoul de 1854, l’Aveyron, les Hautes-Pyrénées, le Gers et le Lot.

La loi de 1806, qui établit un système éducatif pour l’essentiel encore le nôtre, attribue aux communes la charge de l’hébergement des services de l’académie et de la résidence du recteur. C’est ainsi qu’en 1857 la municipalité de Toulouse procède à l’achat de l’ancienne demeure des Lestang. Autrefois aristocratique et privée, elle devient la représentation de l’Etat en province. A l’exception des réfections de 1899 et 1909, l’hôtel ne connaît aucun changement notable pendant plus d’un siècle. En 1961, le recteur Paul Dottin, devant l’ampleur croissante des attributions académiques, décide l’extension des locaux : un édifice de quatre niveaux est bâti à l’emplacement des anciens communs. Le site d’implantation du rectorat prend alors le visage que nous lui connaissons aujourd’hui.


Voir et comprendre Les façades extérieures La visite peut commencer par l’élévation place Saint-Jacques(1) qui suit les limites du moulon (îlot urbain) et du rempart qui lui était parallèle (vestiges actuels rue Bida).

1 Il faut imaginer le quartier à la fin du XVIème siècle : le parcellaire y est dense et confus, l’actuelle place étant occupée par des constructions pauvres de bois et de torchis (plan de Melchior Tavernier, 1631, Musée Paul Dupuy). Au rez-de-chaussée, le soubassement ferme l’hôtel à la ville dans une attitude de protection qui lui donne un air de bâtisse médiévale (percées étroites et irrégulières). Cependant, les baies géminées(2) aux meneaux richement sculptés et aux encadrements ouvragés en adoucissent l’austérité. Le portail(3) est lui aussi particulièrement soigné dans sa conception et raffiné dans son ornementation. Notons particulièrement les fines sculptures sur les claveaux de pierre de l’arcade et sur les moellons saillants des pilastres. Motifs symétriques et végétaux alternent alors que des poissons stylisés rappellent les carpes d’argent figurant dans les armes des Lestang (Musée municipal, Aletles-bains). En 1859, jugée peu monumentale, cette en-

2 trée est murée au profit du portail de la rue Saint-Jacques. Malgré les nouveaux vantaux que lui donne la restauration de 1965, elle n’a pas retrouvé son usage premier. Les niveaux supérieurs de l’élèvation présentent des volumes et un ordonnancement

proches de ceux que l’on peut apprécier côté jardin : un corps central haut et cubique, rythmé aux étages par des fenêtres régulières, est encadré de deux édifices moins élevés. En contournant l’hôtel, on accède à la façade donnant sur la rue Saint-Jacques dont l’austérité est là encore de mise. La noblesse du lieu est à peine indiquée par les chambranles de pierre qui entourent les baies. Seule une porte piétonne(4) aujourd’hui condamnée témoigne d’un souci décoratif abouti. Autour d’une arcade finement moulurée, les écoinçons taillés en pointe de diamant, l’entablement et les motifs végétaux stylisés signalent la richesse et la charge du propriétaire. Un portail monumental L’aspect général de cette façade est profondément modifié en 1859, suite à l’installation de l’académie. On décide en effet une percée dans l’axe de la rue Sainte-Anne. André Denat, architecte de la ville, conçoit les plans d’un portail d’honneur(5), véritable morceau de bravoure, qui signalera solennellement la nouvelle affectation du lieu. De style Louis XIII, le portail est une évocation de l’hôtel, notamment dans la bichromie de l’appareil mixte terre cuite/calcaire. Ce jeu des couleurs alternées est souligné, en volume, par le rayonnement saillant des claveaux de pierre autour des vantaux à caissons. La référence aux ordres antiques vient renforcer la majesté de l’ensemble (pilastres, chapiteaux, fronton triangulaire). Au sommet, ailerons en volutes et cartouche encadrent une inscription gravée portant mention de la nouvelle destination du lieu. Le logis En franchissant le porche, les volumes compacts et proportionnés du logis surprennent. On pense aux palais massifs de la Florence du XVème siècle. Dans une symétrie héritée de la Renaissance, un pavillon en saillie est flanqué de part et d’autre de deux édifices moins élevés : le rez-de-jardin est destiné au service, l’étage noble aux pièces d’apparat, le troisième niveau étant celui des appartements. La façade tire aussi sa majesté et son unité de l’ordre colossal, rare à Toulouse. L’avant-corps est en effet encadré de deux piliers d’angles dont les cannelures des deux faces, creusées à la fois dans l’argile et la pierre, courent à la verticale sur les deux premiers niveaux. Seuls les blocs volumineux sculptés aux armes des Lestang viennent en interrompre la linéarité de manière frappante. Cet effet de masse homogène, une des particularités de l’hôtel, est soutenu par l’emploi important de la brique. Pour autant, le calcaire, simplement taillé (encadrements des baies) ou sculpté (chapiteaux

5

3 ioniques) est très présent malgré l’absence de carrière de pierres à Toulouse. L’alternance des couleurs adoucit le caractère rustique de la terre cuite et autorise même des compositions savantes telles que les enroulements plaqués de l’attique. Ces volutes amples forment, avec la corniche denticulée qui les surplombe et ceint l’édifice, un couronnement majestueux. L’ordonnancement régulier des percées parti-

4 cipe à l’harmonie de l’ensemble, l’emploi des hautes baies de l’étage de réception annonçant l’architecture classique.

Cette extension(8) destinée aux services de l’administration est décidée en 1961, par le recteur Dottin. Le projet est confié à Robert Trilhe, architecte des universités de Toulouse, qui opte pour une évocation du vocabulaire esthétique du XVIIème siècle. Il s’inspire de l’hôtel et en reprend les matériaux (briques, pierres, tuiles canal), les volumes massifs et le répertoire ornemental (polychromie, corniche, larges baies cintrées). Le rez-de-jardin fait pendant à l’ancienne galerie-promenoir, jusque dans les détails des clefs d’arcades taillées en pointe de diamant. Le fenestrage du dernier étage rappelle quant à lui les mirandes, ouvertures répétées placées entre le toit et l’habitation qui permettaient d’aérer les combles. L’hôtel de Lestang n’en possède pas mais la ville en montre de nombreux exemples (l’hôtel de Marvejol, début XVIIème siècle, 47 rue Pharaon).

6

8

8

La cour- jardin Au début de sa construction, l’hôtel de Lestang était doté d’une cour et d’un clos étroits. Il faut attendre les premières années du XVIIème siècle pour que l’achat de parcelles supplémentaires libère un espace aux dimensions actuelles. Un jardin d’agrément tournant le dos à la ville est alors aménagé, qui donne à l’hôtel sa pleine mesure et ouvre des vues sur le parc voisin de l’hôtel d’Ulmo. Il n’en subsiste aucun plan ou document d’archive permettant une reconstitution précise. L’intérêt de Christophe de Lestang pour l’art des jardins se retrouve dans sa proprièté de campagne aux portes de la ville dans laquelle il fait aménager un parc agrémenté de jeux d’eau vive. Ce domaine aujourd’hui disparu a laissé place à un quartier de Toulouse : Fontaine-Lestang.

équivalente à celle du logis. L’unité architecturale de l’hôtel était préservée par une façade sur jardin à l’alignement rigoureux qui en masquait la présence. Aujourd’hui disparues, ces dépendances ont laissé place à un édifice unique qui en suit globalement le tracé extérieur.

Les corps secondaires A l’intersection du logis et du corps annexe, une tour d’escalier polygonale(6), proche dans son esprit des tours capitulaires en faveur à la Renaissance, est conçue à la fois comme une entrée secondaire et un signe de prestige. Elle permet également l’accès à la galerie à arcades(7) qui constituait un passage à couvert jusqu’aux limites de la parcelle. Entre coursière et loggia, ce passage extérieur s’inspire librement d’exemples fameux de l’architecture de la Renaissance (hôtel d’Assézat 1555-1557, 7 place d’Assézat). Côté impasse Saint-Jacques, des communs(8) (remises, ateliers, granges, etc.) fermaient le jardin. Comme en atteste le cadastre de 1830, ces édifices disparates organisés autour d’une cour de service, avaient une emprise au sol

Les intérieurs On pénètre dans le logis par une porte imposante surmontée d’un entablement. Quelque peu modifiée, elle conserve du dessin d’origine une digne sobriété. Il subsiste très peu de vestiges intérieurs. Le plus remarquable d’entre eux est l’escalier d’honneur(9) situé dans l’avant-corps du logis. Il se présente comme un escalier à rampe droite, dit «rampe sur rampe», déjà connu à Toulouse (hôtel d’Ulmo, 1528, 15 rue Ninau). En rupture avec l’étroitesse et l’obscurité des escaliers médiévaux, celui-ci traverse l’édifice de part en part et de haut en bas. Lumineux et ample, de circulation aisée, il constitue une pièce d’apparat.

7 Les architectes de la Renaissance avaient pris pour habitude d’apporter un soin particulier à l’escalier principal dont la solennité s’exprime ici dans un décor à l’antique. Pilastres cannelés(10), chapiteaux(10), niches à coquilles(11), frises au dessin géométrique(11), témoignent de la curiosité et de l’érudition du maître des lieux. La surprise vient de la présence constante de la brique non apprêtée pour les murs et le voûtement(12) (ni enduit, ni badigeon). L’impression de raffinement et de légèreté qui néanmoins en résulte tient aux nervures de pierre moulurée. Reporté à droite du pavillon central, l’escalier libère au premier étage les volumes amples d’une salle de réception dont les décors ne nous sont pas parvenus. De même ont disparues les cheminées monumentales, nombreuses en ce début de XVIIème siècle, dont un exemple est conservé à l’hôtel Carrion-Castelpers (XVIIème siècle,1 place Sainte-Scarbes). L’emploi de la brique se retrouve au rez-dejardin, dans l’actuelle salle du conseil, qui conserve le mur imposant sur lequel s’appuie l’escalier monumental. Tous les autres éléments architecturaux et décors ont été perdus en 1879 dans l’effondrement des voûtes du soubassement.

9 Par arrêté du 28 avril 1947, la façade sur la place Saint-Jacques et le portail (vantaux compris) sur la rue Saint-Jacques sont inscrits à l’Inventaire Supplémentaire des Monuments Historiques (ISMH).

10


Voir et comprendre Les façades extérieures La visite peut commencer par l’élévation place Saint-Jacques(1) qui suit les limites du moulon (îlot urbain) et du rempart qui lui était parallèle (vestiges actuels rue Bida).

1 Il faut imaginer le quartier à la fin du XVIème siècle : le parcellaire y est dense et confus, l’actuelle place étant occupée par des constructions pauvres de bois et de torchis (plan de Melchior Tavernier, 1631, Musée Paul Dupuy). Au rez-de-chaussée, le soubassement ferme l’hôtel à la ville dans une attitude de protection qui lui donne un air de bâtisse médiévale (percées étroites et irrégulières). Cependant, les baies géminées(2) aux meneaux richement sculptés et aux encadrements ouvragés en adoucissent l’austérité. Le portail(3) est lui aussi particulièrement soigné dans sa conception et raffiné dans son ornementation. Notons particulièrement les fines sculptures sur les claveaux de pierre de l’arcade et sur les moellons saillants des pilastres. Motifs symétriques et végétaux alternent alors que des poissons stylisés rappellent les carpes d’argent figurant dans les armes des Lestang (Musée municipal, Aletles-bains). En 1859, jugée peu monumentale, cette en-

2 trée est murée au profit du portail de la rue Saint-Jacques. Malgré les nouveaux vantaux que lui donne la restauration de 1965, elle n’a pas retrouvé son usage premier. Les niveaux supérieurs de l’élèvation présentent des volumes et un ordonnancement

proches de ceux que l’on peut apprécier côté jardin : un corps central haut et cubique, rythmé aux étages par des fenêtres régulières, est encadré de deux édifices moins élevés. En contournant l’hôtel, on accède à la façade donnant sur la rue Saint-Jacques dont l’austérité est là encore de mise. La noblesse du lieu est à peine indiquée par les chambranles de pierre qui entourent les baies. Seule une porte piétonne(4) aujourd’hui condamnée témoigne d’un souci décoratif abouti. Autour d’une arcade finement moulurée, les écoinçons taillés en pointe de diamant, l’entablement et les motifs végétaux stylisés signalent la richesse et la charge du propriétaire. Un portail monumental L’aspect général de cette façade est profondément modifié en 1859, suite à l’installation de l’académie. On décide en effet une percée dans l’axe de la rue Sainte-Anne. André Denat, architecte de la ville, conçoit les plans d’un portail d’honneur(5), véritable morceau de bravoure, qui signalera solennellement la nouvelle affectation du lieu. De style Louis XIII, le portail est une évocation de l’hôtel, notamment dans la bichromie de l’appareil mixte terre cuite/calcaire. Ce jeu des couleurs alternées est souligné, en volume, par le rayonnement saillant des claveaux de pierre autour des vantaux à caissons. La référence aux ordres antiques vient renforcer la majesté de l’ensemble (pilastres, chapiteaux, fronton triangulaire). Au sommet, ailerons en volutes et cartouche encadrent une inscription gravée portant mention de la nouvelle destination du lieu. Le logis En franchissant le porche, les volumes compacts et proportionnés du logis surprennent. On pense aux palais massifs de la Florence du XVème siècle. Dans une symétrie héritée de la Renaissance, un pavillon en saillie est flanqué de part et d’autre de deux édifices moins élevés : le rez-de-jardin est destiné au service, l’étage noble aux pièces d’apparat, le troisième niveau étant celui des appartements. La façade tire aussi sa majesté et son unité de l’ordre colossal, rare à Toulouse. L’avant-corps est en effet encadré de deux piliers d’angles dont les cannelures des deux faces, creusées à la fois dans l’argile et la pierre, courent à la verticale sur les deux premiers niveaux. Seuls les blocs volumineux sculptés aux armes des Lestang viennent en interrompre la linéarité de manière frappante. Cet effet de masse homogène, une des particularités de l’hôtel, est soutenu par l’emploi important de la brique. Pour autant, le calcaire, simplement taillé (encadrements des baies) ou sculpté (chapiteaux

5

3 ioniques) est très présent malgré l’absence de carrière de pierres à Toulouse. L’alternance des couleurs adoucit le caractère rustique de la terre cuite et autorise même des compositions savantes telles que les enroulements plaqués de l’attique. Ces volutes amples forment, avec la corniche denticulée qui les surplombe et ceint l’édifice, un couronnement majestueux. L’ordonnancement régulier des percées parti-

4 cipe à l’harmonie de l’ensemble, l’emploi des hautes baies de l’étage de réception annonçant l’architecture classique.

Cette extension(8) destinée aux services de l’administration est décidée en 1961, par le recteur Dottin. Le projet est confié à Robert Trilhe, architecte des universités de Toulouse, qui opte pour une évocation du vocabulaire esthétique du XVIIème siècle. Il s’inspire de l’hôtel et en reprend les matériaux (briques, pierres, tuiles canal), les volumes massifs et le répertoire ornemental (polychromie, corniche, larges baies cintrées). Le rez-de-jardin fait pendant à l’ancienne galerie-promenoir, jusque dans les détails des clefs d’arcades taillées en pointe de diamant. Le fenestrage du dernier étage rappelle quant à lui les mirandes, ouvertures répétées placées entre le toit et l’habitation qui permettaient d’aérer les combles. L’hôtel de Lestang n’en possède pas mais la ville en montre de nombreux exemples (l’hôtel de Marvejol, début XVIIème siècle, 47 rue Pharaon).

6

8

8

La cour- jardin Au début de sa construction, l’hôtel de Lestang était doté d’une cour et d’un clos étroits. Il faut attendre les premières années du XVIIème siècle pour que l’achat de parcelles supplémentaires libère un espace aux dimensions actuelles. Un jardin d’agrément tournant le dos à la ville est alors aménagé, qui donne à l’hôtel sa pleine mesure et ouvre des vues sur le parc voisin de l’hôtel d’Ulmo. Il n’en subsiste aucun plan ou document d’archive permettant une reconstitution précise. L’intérêt de Christophe de Lestang pour l’art des jardins se retrouve dans sa proprièté de campagne aux portes de la ville dans laquelle il fait aménager un parc agrémenté de jeux d’eau vive. Ce domaine aujourd’hui disparu a laissé place à un quartier de Toulouse : Fontaine-Lestang.

équivalente à celle du logis. L’unité architecturale de l’hôtel était préservée par une façade sur jardin à l’alignement rigoureux qui en masquait la présence. Aujourd’hui disparues, ces dépendances ont laissé place à un édifice unique qui en suit globalement le tracé extérieur.

Les corps secondaires A l’intersection du logis et du corps annexe, une tour d’escalier polygonale(6), proche dans son esprit des tours capitulaires en faveur à la Renaissance, est conçue à la fois comme une entrée secondaire et un signe de prestige. Elle permet également l’accès à la galerie à arcades(7) qui constituait un passage à couvert jusqu’aux limites de la parcelle. Entre coursière et loggia, ce passage extérieur s’inspire librement d’exemples fameux de l’architecture de la Renaissance (hôtel d’Assézat 1555-1557, 7 place d’Assézat). Côté impasse Saint-Jacques, des communs(8) (remises, ateliers, granges, etc.) fermaient le jardin. Comme en atteste le cadastre de 1830, ces édifices disparates organisés autour d’une cour de service, avaient une emprise au sol

Les intérieurs On pénètre dans le logis par une porte imposante surmontée d’un entablement. Quelque peu modifiée, elle conserve du dessin d’origine une digne sobriété. Il subsiste très peu de vestiges intérieurs. Le plus remarquable d’entre eux est l’escalier d’honneur(9) situé dans l’avant-corps du logis. Il se présente comme un escalier à rampe droite, dit «rampe sur rampe», déjà connu à Toulouse (hôtel d’Ulmo, 1528, 15 rue Ninau). En rupture avec l’étroitesse et l’obscurité des escaliers médiévaux, celui-ci traverse l’édifice de part en part et de haut en bas. Lumineux et ample, de circulation aisée, il constitue une pièce d’apparat.

7 Les architectes de la Renaissance avaient pris pour habitude d’apporter un soin particulier à l’escalier principal dont la solennité s’exprime ici dans un décor à l’antique. Pilastres cannelés(10), chapiteaux(10), niches à coquilles(11), frises au dessin géométrique(11), témoignent de la curiosité et de l’érudition du maître des lieux. La surprise vient de la présence constante de la brique non apprêtée pour les murs et le voûtement(12) (ni enduit, ni badigeon). L’impression de raffinement et de légèreté qui néanmoins en résulte tient aux nervures de pierre moulurée. Reporté à droite du pavillon central, l’escalier libère au premier étage les volumes amples d’une salle de réception dont les décors ne nous sont pas parvenus. De même ont disparues les cheminées monumentales, nombreuses en ce début de XVIIème siècle, dont un exemple est conservé à l’hôtel Carrion-Castelpers (XVIIème siècle,1 place Sainte-Scarbes). L’emploi de la brique se retrouve au rez-dejardin, dans l’actuelle salle du conseil, qui conserve le mur imposant sur lequel s’appuie l’escalier monumental. Tous les autres éléments architecturaux et décors ont été perdus en 1879 dans l’effondrement des voûtes du soubassement.

9 Par arrêté du 28 avril 1947, la façade sur la place Saint-Jacques et le portail (vantaux compris) sur la rue Saint-Jacques sont inscrits à l’Inventaire Supplémentaire des Monuments Historiques (ISMH).

10


L’académie en chiffres

z Budget : 2,5 millards d’euros z 40 000 fonctionnaires dont 34 000 enseignants z 2 725 écoles : plus de 275 000 élèves z 518 collèges et lycées : plus de 240 000 élèves z Quelque 126 000 étudiants

11 L’académie de Toulouse

Les services déconcentrés du Ministère de l’Education nationale et de l’Enseignement supérieur sont l’échelon régional et départemental de la politique éducative définie par le gouvernement. Ils agissent en fonction du contexte local et en partenariat avec les collectivités territoriales : les communes pour l’enseignement primaire, les départements pour les collèges et la région pour les lycées. Ils sont constitués par le Rectorat, les directions des services départementaux de l’Education nationale, les établissements scolaires et les écoles primaires.

Le rectorat de l’académie Nommé par décret du Président de la République en conseil des ministres, le recteur est le représentant du ministre de l’Education nationale et de l’Enseignement supérieur au niveau de l’académie. Responsable de la totalité du service public de l’éducation dans l’académie, de la maternelle à l’université, il est également compétent dans le domaine de l’enseignement privé sous contrat. Il veille à l’application des dispositions législatives et réglementaires se rapportant à l’éducation nationale, définit la politique académique, gère les personnels et les établissements, et assure les relations avec l’environnement politique, économique, socioculturel. Le recteur intervient dans le programme de formation professionnelle en lien avec le conseil régional et, chancelier des universités, assure la coordination des établissements d’enseignement supérieur. Les inspections académiques Au niveau départemental, le recteur est représenté par un inspecteur d’académie-directeur

Les recteurs de l’académie de Toulouse depuis 1809 Alexandre Jamme 1809 – 1815, Maurice Ranc 05/1815 – 07/1815, Alexandre Jamme 7/1815 – 10/1815, M. de Ferrand Puginier 1815 – 1825, Simon Larrouy 1825 – 1830, François Malpel 7/1830 – 12/1832, Jean-Georges Ozameaux 1832 – 1835, M. Thuillier 1835 – 1841, Auguste Nouseilles 1841 – 1850, Adolphe Mourier 1850 – 1852, Vincent de Gourgas 1852 – 1854, Julien Laferrière 1854 – 1856, Joseph Rocher 1856 – 1863, Roch Roustan 1863 – 1871, Adolphe Gatien – Arnould 1871 – 1873, Alexandre Guiraudet 1873 – 1874, Charles Dreyss 1874 – 1877, Thomas Chappuis 1877 – 1880, Charles Capmas 1880 – 1881, Claude Perroud 1881 – 1908, Charles Jeanmain 1908 – 1911, Paul Lapie 1911 – 1914, Jacques Cavalier 1914 – 1922, Joseph Dresch 1922 – 1931, Pierre Gheusi 1931 -1937, Robert Deltheil 1937 – 1944, Paul Dottin 1944 – 1963, André Loyen 1963 – 1967, Georges Richard 1967 – 1969, Claude Chalin 1969- 1982, Daniel Levier 1982 – 1986, Jean-Claude Maestre 1986 – 1991, Bernard Toulemonde 1991 – 1992, Philippe Joutard 1992 – 1997, Jean-Paul de Gaudemar 1997 – 2000, Nicole Belloubet 2000 – 2005, Christian Merlin 2005 - 2008, Olivier Dugrip 2008-2013, Hélène Bernard 2013

académique des services de l’Education nationale (IA-DASEN) chargé de la mise en œuvre de la stratégie académique au niveau départemental. Il exerce au sein d’une des 8 Directions des Services Départementaux de l’Education Nationale (DSDEN). Le Rectorat et les services départementaux de la Haute-Garonne ont fusionné en une seule entité.

12 En février 2015, ils seront regroupés sur un site unique au sein de la ZAC Niel. Jocelyn Lermé

Bibliographie indicative Toulouse, Découvrir. Le quartier Saint-Etienne. Jean Rocacher. Toulouse : Privat, 1998 Vieux hôtels de Toulouse. Paul Mesplé. Toulouse : Editions du pays d’oc, 1948 Les monuments de Toulouse. Jules de Lahondes. Toulouse : Privat, 1920 Histoire de Toulouse. Philippe Wolff (dir.). Toulouse : Privat, 1974 Les hôtels particuliers de Toulouse au XVIème siècle. Rémi Papillault. Toulouse : Association Les amis des Archives de la Haute-Garonne, 1996 Hôtels et demeures de Toulouse et du Midi-toulousain. Guy Ahlsell de Toulza, Louis Peyrusse, Bruno Tollon. Drémil Lafage : Daniel Briand, 1999 Histoire des rues de Toulouse. Jules Chalande. Toulouse : Les frères Douladoure, 1919 L’hôtel de Lestang ou de l’académie. Pierre Saliès. Archistra, numéro 85 Dictionnaire des rues de Toulouse. Pierre Saliès. Paris : Toulouse, 1999 Vivre à Toulouse sous l’Ancien Régime. Michel Taillefer. Paris : Perrin, 2000 Toulouse. Paris : Bonneton, 1990 Promenade guidée dans les rues de Toulouse. Gérard Villet. Drémil-Lafage : Daniel Briand, 1999 Directeur de la publication Hélène Bernard, rectrice de l’académie de Toulouse, chancelière des universités Maquette : Jean-Claude Dufour - communication rectorat Crédit photos : Jocelyn Lermé

Histoire et patrimoine L’hôtel de Lestang Christophe de Lestang naît en 1560. Issu des noblesses de robe et de cour, petit-neveu d’un cardinal et de trois évêques, il se destine lui-même aux ordres. Evêque à 21 ans, il prend successivement la tête des évêchés de Lodève, Alet-lesBains et Carcassonne. En faveur auprès d’Henri IV puis de Louis XIII, membre du Conseil du Roi et conseiller au Parlement (cour de justice) de Toulouse, il dispose de revenus importants et d’exonérations fiscales, au point d’envisager alors qu’il est dans sa trentième année, l’édification d’une résidence à Toulouse. En cette fin de XVIème siècle, la ville est sortie de son âge d’or. Le pastel, à la base d’une teinture bleue diffusée dans toute l’Europe, en avait fait la richesse et la puissance pendant plus d’un siècle. Dès les années 1560, la concurence de l’indigo des Indes et des Antilles plonge son économie dans un marasme durable. Le temps des grandes maisons urbaines de la Renaissance est révolu. C’est dans cette période de torpeur et de doute que Christophe de Lestang se met à la recherche d’une résidence à la hauteur de ses charges politiques et ecclésiastiques. Son choix se porte sur un quartier entre archevêché (aujourd’hui préfecture) et Parlement (emplacement de l’actuel tribunal de grande instance). En 1590, il fait l’acquisition d’une maison à proximité des remparts aujourd’hui disparus. Le morcellement urbain nécessite le rattachement de plusieurs terrains déjà bâtis : à terme, neuf parcelles seront réunies, d’une superficie totale d’environ 3000

mètres carrés. Dès 1593, avant que la propriété ne prenne son ampleur définitive, l’édification de l’hôtel particulier débute sous la direction d’un maître-maçon dont l’identité nous est inconnue. Particulièrement ambitieuse par sa taille, cette bâtisse confère à l’évêque de Lestang le prestige de ses illustres concitoyens, François de Clary (hôtel de pierre 1608, 25 rue de la Dalbade) ou François de Chalvet (hôtel de Chalvet 1610-1622, 12 place du Parlement). Après sa mort en 1621, la propriété reste dans la famille pour trois générations. Son neveu, Christophe Meynard de Lestang, en devient propriétaire jusqu’à son décès en 1669. Son fils Jean en hérite et la lègue lui-même à son fils Daniel en 1681. Ce dernier n’ayant aucune descendance, une succession litigieuse s’ouvre pour plusieurs dizaines d’années. Il faut attendre les troubles révolutionnaires pour retrouver la trace d’un nouvel acquéreur, Alexandre Lavaisse, bourgeois sans titre de noblesse. Suivront deux propriétaires ennoblis par l’Empire, le sieur de Lostanges et le comte de Lamezan. La loi du 10 mai 1806, crée l’université impériale, établissant le monopole de l’éducation publique. Mais ce n’est qu’à partir du décret du 17 mars 1808 que sa mise en oeuvre est possible, instituant les académies et définissant la fonction de recteur. L’académie de Toulouse compte alors quatre départements : Ariège, Haute-Garonne, Tarn, Tarn-et-Garonne. Suivront, avec la loi Fortoul de 1854, l’Aveyron, les Hautes-Pyrénées, le Gers et le Lot.

La loi de 1806, qui établit un système éducatif pour l’essentiel encore le nôtre, attribue aux communes la charge de l’hébergement des services de l’académie et de la résidence du recteur. C’est ainsi qu’en 1857 la municipalité de Toulouse procède à l’achat de l’ancienne demeure des Lestang. Autrefois aristocratique et privée, elle devient la représentation de l’Etat en province. A l’exception des réfections de 1899 et 1909, l’hôtel ne connaît aucun changement notable pendant plus d’un siècle. En 1961, le recteur Paul Dottin, devant l’ampleur croissante des attributions académiques, décide l’extension des locaux : un édifice de quatre niveaux est bâti à l’emplacement des anciens communs. Le site d’implantation du rectorat prend alors le visage que nous lui connaissons aujourd’hui.


Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.