Extrait de Paris Métro Photo

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PA RI S . MÉ TR O . PH OTO Photographies du métro pa ris ien, de 190 0 à nos jours préface : Anne-Ma rie Garat textes, direction scie ntifiq

ue et iconographiq ue

Julien Faure-Conorton 324 photographies reproduite s en

:

quadrichromie et duotone

“ainsi, une à une, les photog raphies de cet ouvr age révèlent l’extraor dinaire photogénie d ’ un esp ace hors du commun qui, so us son apparent pro saïsme, réserve bie n des surprises optiq ues…” (Anne-Marie Garat)

L

e métro est un monde, un mond e d’une richesse infinie, qui ne cesse de stimuler le regard… De 190 0 à nos jours, ce livre propose une anthologie des photographies du métro parisien. Il a pour am bition de faire découvrir au grand public – et notamment aux geurs – les liens étroits qui un voyaissent la photographie et la gra nde épopée du métropolitain. Car la photogra phie est intimement liée à l’hi stoire du métro parisien : elle a documenté les différentes étapes de sa con struction, ses principales mutations, ses ou vrages d’art, son décor urbain , sa sociologie, ses drames, sa poésie…

… Si les photographes, et par mi eux les plus célèbres, ont lar gement contribué à populariser son image à travers le monde et, mieux enc ore, à l’établir comme un élément patrimonial prestigieux de la ville lumière, il est notable que le métro parisien et son un ivers ont offert en retour à la ph oto graphie et à son histoire les sources d’u ne iconographie exceptionnel le et foisonnante dans laquelle se rencontrent bo n nombre de chefs-d’œuvre. ISBN : 978-2-330-06590-4

9:HSMDNA=U[Z^UY: ACTES SUD Dép. lég. : novembre 2016 49 e TTC France www.actes-sud.fr

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M É T R O . P H O T O ACTES SUD

M É T R O . P H O T O

ACTES SUD



Préface de anne -marie garat Textes de

julien faure -conorton

PARIS MÉTRO PHOTO De 1900 à nos jours

ACTES SUD



SOMMAIRE PHOTO-MÉTRO anne-marie garat

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MÉTRO-PHOTO julien faure-conorton

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SÉLECTION PHOTOGRAPHIQUE julien faure-conorton

de 1900 à 1920

21

de 1920 à 1940

83

de 1940 à 1960

143

de 1960 à 1980

223

de 1980 à 2000

283

de 2000 à 2016

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INDEX DES PHOTOGRAPHES

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CRÉDITS PHOTOGRAPHIQUES

405

PROVENANCE DES PHOTOGRAPHIES

406


S

i le Paris de la Belle Époque, qui vit l’avènement du métro, est celui de l’euphorie rapportée par sa légende, gaîté des ­boulevards illuminés, des cabarets canailles, expansion économique et richesses coloniales, invention de l’aéroplane, du gramophone et du cinématographe, il est aussi, on l’a oublié, le cauchemar quotidien d’une ville paralysée par l’engorgement du trafic. Les transports en commun existants échouent à assurer la transhumance d’une population qui a doublé en trente ans, la voiture individuelle accapare la ville avec sa puanteur, ses nuisances, et comme ne s’est encore imposé aucun code véritable de la conduite ni de signalétique ordonnée, la circulation engendre d’insolubles embouteillages entre automobiles, omnibus, tramways hippomobiles, charrettes et camions et bicyclettes, la ville retentit du chahut des moteurs pétaradants, des avertisseurs anarchiques, du roulage sur le pavé, souvent encore de bois et très sonore : si ces maux ne sont pas récents, ils empirent. Or voilà qu’en cette fin de siècle s’annonce l’événement monstre de l’Exposition universelle qui, attirant sommités et visiteurs du monde entier, fera de Paris le phare de la modernité : il faut d’urgence construire un métro. On y avait songé auparavant mais, depuis les années 1870, les intentions de la Ville et de l’État divergent : tous les projets – dont certains futuristes que Jules Verne n’aurait pas reniés – finissent au placard. L’exemple de New York, de Londres et de Budapest surtout, cités euroanne-marie garat péennes pionnières du chemin de fer souterrain à traction électrique, relance l’ambition de doter enfin la capitale d’un transport en commun digne de son renom : le bien nommé et très diligent ingénieur Bienvenüe réalise l’exploit de construire en dix-sept mois la ligne 1, inaugurée dès 1900 ; dans les années suivantes cinq autres ouvertes par sections complètent le réseau dont le succès est immédiat. Ainsi, de 1898 à 1910, Paris a-t-il connu un chambardement dont les Parisiens d’aujourd’hui, excédés par le moindre chantier de voirie, ne soupçonnent pas la démesure. C’est ce Paris chaotique aux berges de Seine défoncées, hérissées de grues et d’échafaudages, aux rues et avenues excavées offrant leurs entrailles en plein jour qu’illustrent les premières photos de ce livre, inaugurant la longue histoire d’amour et de fascination entre métro et photo. Car, par coïncidence, en cette dernière décennie du XIXe siècle, l’appareil photo, longtemps onéreux et privilège d’élite, se démocratise rapidement. Son maniement dès lors allégé, simplifié, et sa vitesse d’exposition qui permet l’instantané en multiplient les usages ; de la réclame au reportage de sport ou de presse, à la pratique privée qui emplit les albums, les artistes ne sont pas en reste en cette époque du pictorialisme ; enfin l’engouement pour la carte postale, en plein essor, popularise les vues typiques selon un pittoresque bientôt figé en poncif : toute curiosité, toute nouveauté, le moindre événement a ses opérateurs, habiles ou improvisés ; à plus forte raison celui qui troue Paris de gouffres et de tranchées. Or par une sorte de grâce le métro transgresse l’imagerie de convention, comme si ce sujet excédait le stéréotype, offrait un lieu neuf de propositions formelles, de rêverie et

Photo~Métro

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de fantasme. Certes les premières photos du recueil s’inscrivent dans la tradition bien établie de la photo d’architecture – ainsi des percées de Haussmann, de la construction de l’Opéra – mais, à l’instar de la tour Eiffel ou du magasin de la Samaritaine, le sujet d’actualité est celui des matériaux de la modernité industrielle, fonte, fer et acier appliqués à l’architecture, bravant les académismes en exhibant les structures porteuses, les parements et le rivetage, et dont les réalisations, aujourd’hui entrées au patrimoine, sont alors objet de curiosité, de polémique sinon de scandale. Dix ans plus tôt, la tour Eiffel a pourtant préparé les esprits mais le métro n’est pas un édifice unique repérable de loin dans son érection solitaire : son horizontalité s’étend en labyrinthe, forant le sous-sol de tunnels voisinant avec les conduits et collecteurs d’égouts, soubassement obscur de la ville associé aux miasmes et à la vermine du cloaque, compartimenté d’alvéoles douteuses, de carrières désaffectées, voire de gisements antiques. Un envers occulte auquel le métro ajoute ses galeries de taupe géante sapant l’assise de surface, soudain surgie de sa nuit pour enjamber la Seine de viaducs, éventrer les gares, surplomber les boulevards avant de fouir de nouveau ses voies souterraines selon un réseau invisible qui, tissant sous la ville un double de sa carte de rues et d’artères selon sa propre logique de circulation, suscite tout un imaginaire de l’emprise tentaculaire et de la descente aux ténèbres. Une crainte qui reste à apprivoiser par sa fréquentation, au risque d’accidents, et il y en eut – à ses débuts le tragique incendie de la station Couronnes. Nul doute qu’il y avait là source d’appréhension, en même temps que de fierté pour l’audace d’un projet aussi novateur, propre à inspirer ses photographes, Parisiens et visiteurs étrangers, amateurs comme artistes illustres. Leur inventivité visuelle ne s’est pas démentie jusqu’aujourd’hui, la photo n’a cessé de saisir les instants, les scènes ordinaires ou insolites de la vie suburbaine et aérienne, ses innovations techniques, ses mues esthétiques et sociales, les violences de l’Histoire collective qui l’ont marquée et la variété humaine des passagers transportés par millions de millions à travers le siècle, faisant du métro un emblème définitif du paysage parisien. Découpé en séquences temporelles, le livre jalonne le siècle de vingt ans en vingt ans, révélant l’extraordinaire photogénie d’un espace hors du commun qui, sous son apparent prosaïsme, réserve bien des surprises optiques. La photo s’y confronte, interrogeant l’étrangeté familière de cet espace par définition transitoire, où passe le temps bref du transport, celui long de l’Histoire, monde de profondeurs et de surfaces, de la nuit et de la lumière – le langage même de la photo –, peuplé de présences en surnombre et de fantômes solitaires, lieu par excellence du hasard, des flux, des collisions et des glissements de foules anonymes, circulation des fièvres, des désirs électriques dans la promiscuité, le brassage populaire du travail comme du loisir, douceurs et brutalités des matières, des corps, des regards, un vecteur des destins inconnus canalisés, égarés et retrouvés au gré des correspondances ; une gigantesque métaphore poétique en même temps qu’une archive exemplaire d’un pan de l’histoire urbaine. Les premières photos du livre sont réalisées sur commande des entreprises de la CMP et de la Compagnie Nord-Sud qui se partagent le chantier. Pour la plupart conservées à la Bibliothèque historique de Paris et à la photothèque de la RATP, ces 6


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ares sont ceux qui se lèvent un matin en se disant : “Aujourd’hui, je vais photographier le métro.” Celui-ci est le plus souvent un sujet d’occasion, non prémédité mais qui s’impose au photographe parce que soudain, au détour d’une bouche, d’un escalier, d’un couloir, d’un escalator, d’un quai ou d’une rame, il l’interpelle, le surprend, l’attendrit, le séduit, l’attriste, le choque, l’amuse, le repousse ou l’attire. Bien sûr, le métro est un monde. Un monde d’une richesse infinie qui ne cesse de stimuler le regard, de l’élancement des vertes lianes de fonte imaginées par Hector Guimard au chatoiement des rames dont les couleurs vives se brouillent et se mélangent à l’arrivée à quai en passant par les affiches publicitaires de tout acabit qui se plient de bonne grâce aux parallèles les plus édifiants. Et puis il y a les gens. Ces hommes, ces femmes, ces enfants que l’on croise l’espace d’un instant, qu’on ne connaît pas mais avec lesquels on partage un trajet ; qu’on côtoie à l’entrée des stations ou dans les couloirs de correspondance, que l’on bouscule sans trop y prêter attention, contre lesquels on trépigne lorsqu’ils freinent notre progression, tout absorbés qu’ils sont dans la leur. Ces voyageurs, le photographe les observe. Il est le témoin silencieux d’un regard, d’une attitude, d’un geste qui julien faure-conorton résonnent en lui et qu’il décide alors, en entomologiste consciencieux, de capturer. Rentré chez lui, il jugera des qualités du spécimen recueilli. “MÉTRO”/“PHOTO” : l’évidente analogie entre ces deux sub­stantifs est à relever. Deux mots, deux univers, deux abréviations qui, par apocope, ont supplanté le mot complet soulignant par-là même la familiarité, l’intimité du public vis-à-vis de ces deux moyens de transport, l’un physique, l’autre mental. Tout comme “PHOTO” recouvre une multitude de réalités, “MÉTRO” est un terme protéiforme qui sert aussi bien à qualifier ce moyen de locomotion dans son ensemble qu’à en désigner des éléments particuliers. Ainsi trains, quais, couloirs de correspondance, entrées de stations, architectures extérieures constituent-ils tous “le métro” de Paris. La lumière est un troisième élément qui unit ces deux domaines. Indispensable à la photographie, qui ne peut exister sans son action, elle est également déterminante pour le métro, ville sous la ville, monde essentiellement souterrain que jamais n’atteindront les rayons du soleil. De 1900 à 2016, de l’inauguration du chemin de fer métropolitain de Paris à la parution de ce livre, Paris-Métro-Photo se veut comme une anthologie des photographies du métro parisien. Fruit d’une recherche iconographique menée auprès d’acteurs variés (institutions, agences, photographes, collectionneurs), la sélection réunie ici ne prétend pas à l’exhaustivité. Celle-ci serait d’ailleurs bien illusoire tant les photographies sur ce thème sont innombrables. Les œuvres retenues l’ont été avant tout

Métro~Photo

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en fonction de leur intérêt photographique, celui-ci ayant prévalu sur toute autre considération. Cela ne signifie pas que nous avons ignoré ou nié la dimension historique du sujet, simplement que notre préoccupation première a été d’élire des images qui disent quelque chose de ce qui fait l’essence même du photographique. Aussi cet ouvrage n’est-il pas une histoire du métro parisien par la photographie mais un livre de photographies traitant du métro parisien. Le métro n’est pas uniquement un gigantesque et invisible labyrinthe souterrain. Il empiète également sur l’espace urbain, ici aérien, là viaduc sur la Seine, et partout il ouvre sous nos pieds ses centaines de bouches. Aussi le lecteur trouvera-t-il réunies ici aussi bien des photographies prises dans le métro qu’à ses abords. Parfois, il pourra être surpris de son caractère secondaire ou anecdotique dans la composition, comme dans cette admirable Pluie, rue de Rivoli de Maurice Tabard (p. 184) ou dans ce Marché aux oiseaux et aux fleurs de Marcel Louchet (p. 165). Ces exemples sont là pour souligner que le métro, via ses édicules et ses mâts, constitue une composante essentielle du paysage parisien, symbole de la capitale française au même titre que la tour Eiffel avec laquelle les photographes se sont d’ailleurs souvent plu à l’associer, d’André Kertész (p. 122) à Willy Ronis (p. 200) en passant par Izis (p. 193) et Frank Horvat (p. 201). Si elles partagent un thème commun, les photographies réunies dans ce livre n’en possèdent pas moins des statuts très différents qui vont de l’objectivité du constat technique à la subjectivité de l’interprétation poétique. Les présenter ici sans discrimination, seulement rythmées par une scansion chronologique, permet de les considérer autrement, de mettre par exemple en évidence le modernisme des photographies des années 1900, l’avant-gardisme des photographies d’agences de presse, le surréalisme des photographies documentaires, l’excellence technique des photographies à visée esthétique, en somme, de souligner la porosité des catégories consacrées par l’usage et de repenser l’histoire de la photographie. Les quelque trois cents œuvres qui forment cette sélection sont également révélatrices des tendances qui caractérisent le traitement de ce sujet. Si certains de ses aspects ont été maintes fois traités et sont largement représentés dans ce livre, d’autres se révèlent plus rares. C’est notamment le cas des photographies de détails et en particulier de détails d’éléments Guimard, pourtant emblématiques du métro parisien. À l’exception des incomparables créations de Brassaï (p. 85, 117 et 119), ceux-ci n’ont que très rarement retenu l’attention des photographes. Certaines formes d’expression n’ont par ailleurs été que peu explorées, comme la nature morte, représentée ici par un unique exemple (p. 157). La réunion d’un tel ensemble permet en outre de prendre conscience de l’inégale photogénie des stations du réseau métropolitain comme on constaterait le charme inégal des modèles d’un portraitiste. Ainsi la station Opéra est-elle l’une des plus appréciées, de Robert Doisneau (p. 214) à William Klein (p. 236-237) en passant par Édouard Boubat (p. 211), Willy Ronis (p. 164) et Giancarlo Botti (p. 235). Idem pour la station Passy qui séduisit tour à tour, parmi tant d’autres, Ergy Landau (p. 138), François Kollar (p. 87) et Michael 18


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Ci-contre : roger schall - Brouillard sur le viaduc d’Austerlitz, 1937 Ci-dessus : robert capa - Ouvriers en grève, quai de Grenelle, mai-juin 1936 Pages suivantes : À gauche : marianne breslauer - La Rotonde, 1929 À droite : roger schall - Carrefour Richelieu-Drouot, la nuit, 1935 95





renĂŠ minoli (ratp)

260

- Rames circulant dans un tunnel, 4 aoĂťt 1975



raymond depardon

308

- Paris, 16e arrondissement, 1982



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“ainsi, une à une, les photog raphies de cet ouvr age révèlent l’extraor dinaire photogénie d ’ un esp ace hors du commun qui, so us son apparent pro saïsme, réserve bie n des surprises optiq ues…” (Anne-Marie Garat)

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e métro est un monde, un mond e d’une richesse infinie, qui ne cesse de stimuler le regard… De 190 0 à nos jours, ce livre propose une anthologie des photographies du métro parisien. Il a pour am bition de faire découvrir au grand public – et notamment aux geurs – les liens étroits qui un voyaissent la photographie et la gra nde épopée du métropolitain. Car la photogra phie est intimement liée à l’hi stoire du métro parisien : elle a documenté les différentes étapes de sa con struction, ses principales mutations, ses ou vrages d’art, son décor urbain , sa sociologie, ses drames, sa poésie…

… Si les photographes, et par mi eux les plus célèbres, ont lar gement contribué à populariser son image à travers le monde et, mieux enc ore, à l’établir comme un élément patrimonial prestigieux de la ville lumière, il est notable que le métro parisien et son un ivers ont offert en retour à la ph oto graphie et à son histoire les sources d’u ne iconographie exceptionnel le et foisonnante dans laquelle se rencontrent bo n nombre de chefs-d’œuvre. ISBN : 978-2-330-06590-4

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