"Inside of" spécial Mylène Farmer & les télés

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Mylene Farmer numéro 1 Insideof.com

Le référentiel de ses télés 233 émissions !

23 ans de carrière vus sur le petit écran


«Inside of» est un nouveau magazine au concept un peu particulier puisqu’il changera d’univers à chaque numéro. Son objectif : mettre en avant une star ou un phénomène. Pour ce tout premier numéro, le sujet s’est imposé de lui-même : Mylène Farmer. Elle est la plus grande star de la scène musicale française. Et même probablement la seule. Ses disques, ses concerts, ses DVD sont des succès grandioses alors qu’elle se montre de moins en moins. Et c’est justement cet angle de l’exposition médiatique, en l’occurrence la télévision, que nous avons choisi de développer, plutôt qu’une énième biographie. Nous vous invitons donc à revisiter le parcours télévisé de Mylène Farmer – une manière singulière et inédite de redécouvrir sa carrière. Vingt-trois ans de prestations chorégraphiées et d’interviews. L’occasion d’observer l’évolution de la chanteuse, tant au niveau de l’apparence que dans ses propos. L’occasion aussi de rappeler que celle que les médias aiment à trouver «mystérieuse» n’a pas toujours été rare sur le petit écran. Il lui a d’abord fallu installer un personnage dans l’inconscient collectif et donc multiplier les apparitions et les entretiens – ses clips, somptueux et originaux, ne pouvaient pas se suffire à eux-mêmes. Mais même si le rapport de Mylène Farmer avec l’outil télévision a évolué avec les années (et avec son statut de star), force est de reconnaître que jamais elle ne l’a utilisé pour s’épancher – point de confessions, point de vie privée. C’est Mylène l’artiste qui passe à l’écran, jamais Mylène la femme.

A star unique, format unique : ce premier «Inside of» s’allonge sur près de trois cents pages ! Il fallait bien ça pour rendre hommage à la seule et unique chanteuse française capable de déchaîner foules et passions.

Couverture : Sygma-Corbis

Les années 80 sont celles des déclarations choquantes et provocantes. Les années 90 privilégient une image soignée et sophistiquée. Les années 2000 sont celles de l’absence, de la rareté. Trois décennies d’une carrière sans faille. «Inside of» vous propose d’emprunter le chemin médiatique hors normes d’une artiste qui ne l’est pas moins.


Avant propos Avant de vous laisser monter dans la machine à remonter le temps, laissez-nous vous apporter quelques précisions pour que le voyage se passe dans les meilleures conditions possibles… Notre postulat de départ pour ce projet a été de réunir toutes les émissions de télé dans lesquelles Mylène Farmer est apparue pour parler et/ou pour chanter. Nous avons néanmoins retenu quelques émissions dans lesquelles elle ne parle pas et ne chante pas, mais où l’on nous offre des images d’elle totalement inédites (c’est le cas, à deux reprises, de l’émission «Exclusif !» en 1999). Trois règles de base pour qu’une télé soit retenue dans notre listing : elle doit nous montrer Mylène, être inédite (au moment de sa diffusion) et être fabriquée par et pour la télévision. Sont donc écartées : — Les émissions spéciales et les différents sujets sur Mylène, ou sur ses fans, auxquels la chanteuse ne participe pas, y compris ceux qui proposent des images de making of de clips ou de films (même lorsque ces images sont inédites au moment de la diffusion) car il s’agit d’images tournées par la production et non par la télévision. Exit donc les «Match Music», «Plus vite que la musique», «Mister Bizz» et autres «Fan de». Exit aussi la récente promo pour «Arthur et les Minimoys» ayant utilisé des images du making of du film dans lesquelles Mylène est vue à l’œuvre et même interviewée (citons notamment le «Vivement dimanche» du 3 décembre 2006 dans lequel Michel Drucker recevait Luc Besson). — Les interviews de collaborateurs de

Mylène sans aucune intervention de l’intéressée. Exit donc, notamment, le «Top 50» de septembre 1988 et l’«Ecran total» d’octobre 1994 dans lesquels Laurent Boutonnat est interviewé sans que Mylène soit présente. Exit aussi les déclarations dans diverses émissions et sujets sur Mylène de Pascal Nègre, président d’Universal France, la maison de disques de la chanteuse, et celles de son manager, Thierry Suc, qui est notamment intervenu en 1995 au moment de l’affaire Le Pen (quand le Président du Front National utilisait un sosie de Mylène dans ses meetings). — Les rediffusions. Bien souvent, en particulier dans les années 80, les prestations de la chanteuse ont été plusieurs fois utilisées. Citons notamment les émissions matinales telles que «Télématin» et «Matin Bonheur» dans lesquelles la chanteuse n’est jamais allée, mais qui ont souvent utilisé des images de ses prestations sur d’autres plateaux. «Un DB de plus», l’émission de Didier Barbelivien, a souvent usé de ce procédé, elle aussi. De même que le «Top 50» qui a plusieurs fois emprunté des images à d’autres émissions de Canal + («Tristana» à «Zénith», «Sans contrefaçon» à «Nulle part ailleurs»). Les chaînes étrangères ne font pas exception à la règle : le 28 septembre 1990, un canal japonais diffuse une prestation de «Sans contrefaçon» achetée à une télé française. En 1992, ZDF, une des plus grandes chaînes de la télévision allemande, diffuse la prestation de «Je t’aime mélancolie» enregistrée quelque temps plus tôt pour le «Stars 90» de TF1. — Les pubs. Avant d’être chanteuse, Mylène a tourné dans quelques pubs. Elle ne s’appelait alors pas encore Farmer. Elles n’ont donc pas leur place ici.

Autre règle de base pour ce projet : ne parler que des passages télés que nous avons pu recenser avec certitude. Il existe quelques émissions dont nous ne sommes pas sûrs et certains («Destination Noël» en 1984, « 5 sur 5», «Citron Grenadine», «Coup de soleil», «La nuit des catherinettes» en 1986) ; vous ne les trouverez donc pas ici. A contrario, nous avons pu éliminer de nombreuses erreurs qui circulaient dans les listings que s’échangent les fans, notamment via le Net. En particulier des erreurs de dates, ou des émissions pour lesquelles Mylène était programmée mais où elle n’est finalement pas venue («Bleu nuit» en 1985, «C’est encore mieux l’aprèsmidi» le 25 novembre 1985, «Le plateau des Milles» en 1986,…). En outre, nous avons découvert plusieurs émissions jamais évoquées auparavant («La vie à plein temps», «12/13» et «Transrégional express» en 1984, « 12/13 Aquitaine» et «Eurexporythmes» en 1985, «Le clipt», «Fête sans frontière» et «Aujourd’hui la vie» en 1986, «Midi Pic», «Ligne directe» et «Sida : le grand rendez-vous» en 1987, une émission en Italie et une en Suède en 1990). Notre listing n’est sans doute pas exhaustif ; il existe probablement des passages tv, en particulier à l’étranger ou sur des chaînes régionales, qui nous ont échappés. Mais, nous nous sommes efforcés d’être le plus consciencieux possible, et nous avons la prétention de vous proposer le référentiel des télés de Mylène Farmer le plus complet et le plus précis qui existe à ce jour. Dans ce même souci d’exactitude, nous avons décidé de mettre des «X» quand, malgré nos efforts, nous n’avons pas pu identifier le présentateur ou

le journaliste qui interviewe Mylène ou quand nous n’avons pas réussi à dater précisément la diffusion de l’émission. Dernières petites précisions : — Nous avons délibérément conservé le langage parlé des journalistes, des animateurs et de Mylène. Cela rend le propos péniblement compréhensible parfois, mais nous avons fait ce choix dans un souci de véracité. — La plupart des prestations chantées de Mylène sont en play-back, comme c’est souvent le cas en télévision. Nous nous sommes donc abstenus de le rappeler à chaque émission, préférant signaler les très rares fois où elle chante en direct. — Les textes en italique sont des notes de la rédaction. Dans la mesure où elles sont assez nombreuses, nous avons préféré nous passer de la mention habituelle «ndlr» afin de ne pas trop gêner la lecture. — Outre des photos de plateau, nous avons choisi d’illustrer tous les passages tv de Mylène par des captures d’écran. Malgré notre acharnement, certaines d’entre elles restent de qualité médiocre et nous nous en excusons. Notre but n’est évidemment pas de porter atteinte à l’image de la chanteuse, mais de permettre à ceux d’entre vous qui n’ont pas la chance d’avoir chez eux toutes les télés de Mylène de s’en faire une idée.

Il est temps désormais de vous laisser marcher dans les traces médiatiques de Mylène Farmer. Vingt-trois ans de télé, plus de deux cents émissions. Bon voyage…


Sommaire 1984/1985

6

Les débuts 8 Jour J (XX.03.1984) 8 La vie à plein temps (22.03.1984) 9 Jack spot (09.05.1984) 9 Le 12/13 Aquitaine (30.05.1984) 10 Les jeux de 20h (XX.08.1984) 10 Télé chansons (XX.08.1984) 10 La vie à plein temps (10.09.1984) 11 Transrégional express (20.09.1984) 11 Champs Elysées (22.09.1984) 13 Un temps pour tout (27.09.1984) 13 Une bouteille à la mer (XX.10.1984) 14 L’académie des 9 (04.10.1984) 15 Ring parade (14.11.1984) 15 Cocoricocoshow (15.11.1984) 15 Clignotant (20.11.1984) 16 L’année du zèbre (13.02.1985) 16 La vie à plein temps (14.02.1985) 17 Pour le plaisir (23.02.1985) : 17 Platine 45 (27.02.1985) 19 La clé des chants (02.03.1985) 20 Le 12/13 Aquitaine (06.03.1985) 21 Les jeux de 20h (13.03.1985) 22 L’académie des 9 (15.03.1985) 22 Ring parade (20.03.1985) 22 Eurexporythmes (23.03.1985) 24 Patatoès patatorum (XX.04.1985) 25 Aujourd’hui la vie (13.05.1985) 25 La grande suite (14.05.1985) 26 Paris kiosque (25.05.1985) 26 La clé des chants (15.08.1985) 26 Île de transe (31.10.1985) 28 Super platine (21.12.1985) 29 Tapage nocturne (27.12.1985)

1986/1987

30

Cendres de lune 32 32 33 33 34 34

Hit des clubs (XX.01.1986) L’académie des 9 (14.01.1986) Le clipt (07.02.1986) Champs Elysées (15.03.1986) Pour le plaisir (20.04.1986) C’est encore mieux l’après-midi (28.04.1986)

36 36 38 39 39 40 41 42 42 42 45 45 47 48 49 50 50 50 51 51 52 52 52 54 54 55 56 56 57 57 59 60 60 62 62 62 63 64 64 65 66 69 70 70

C’est encore mieux l’après-midi (16.05.1986) La vie à pleines dents (28.05.1986) Pollen (04.06.1986) Cœur de pique (12.06.1986) Fête sans frontière (21.06.1986) Azimut (25.06.1986) Toutes folles de lui (19.07.1986) Grande première (02.08.1986) La fête en France (13.08.1986) Affaire suivante (20.08.1986) Zénith (XX.09.1986) Antenne 2 midi (01.09.1986) Top 50 (06.09.1986) C’est encore mieux l’après-midi (11.09.1986) Aujourd’hui la vie (16.09.1986) Cocoricocoboy (26.09.1986) Show-bises (02.10.1986) Hit des clubs (02.10.1986) Embarquement immédiat (08.10.1986) La vie de famille (10.10.1986) Les jeux de 20h (22.10.1986) Cherchez la femme (XX.10.1986) C’est encore mieux l’après-midi (06.11.1986) A la folie, pas du tout (23.11.1986) C’est une chanson (XX.12.1986) Sexy folies (17.12.1986) Tous en piste (25.12.1986) Bleu nuit (27.12.1986) Béart 87 (14.01.1987) C’est encore mieux l’après-midi (22.01.1987) C’est encore mieux l’après-midi (19.02.1987) La classe (27.02.1987) Embarquement immédiat (08.03.1987) Affaire suivante (14.03.1987) Zénith (19.03.1987) Midi Pic (27.03.1987) Music family (XX.04.1987) Spéciale Festival de Cognac (XX.04.1987) La nouvelle affiche (01.04.1987) Ligne directe (02.04.1987) La vie à plein temps (07.04.1987) C’est encore mieux l’après-midi (09.04.1987) A la folie, pas du tout (12.04.1987) Cocoricocoboy (17.04.1987)

71 72 73 77 77 77 78 78 80 80 81 81 82 83 84 89 90 91 92 93 95 99 99 100 100 100 101 102 102 103

Direct (XX.04.1987) Paris kiosque (25.04.1987) Lazer (XX.05.1987) C’est encore mieux l’après-midi (11.05.1987) C’est aujourd’hui demain (27.05.1987) Grand direct (29.05.1987) Sida : le grand rendez-vous (04.06.1987) C’est encore mieux l’après-midi (19.06.1987) A l’occasion de la Fête de la Musique (19.06.1987) L’académie des 9 (29.06.1987) 40° à l’ombre (29.06.1987) Concert pour SOS racisme (15.07.1987) 22, avenue Montaigne (19.09.1987) Un DB de plus (22.09.1987) Mon zénith à moi (10.10.1987) Les oscars de la mode (21.10.1987) Bains de minuit (06.11.1987) Lahaye d’honneur (13.11.1987) Embarquement immédiat (15.11.1987) Panique sur le 16 (19.11.1987) Nulle part ailleurs (23.11.1987) Face à France (29.11.1987) A la folie, pas du tout (29.11.1987) Colaricocoshow (02.12.1987) Jacky show (09.12.1987) Un DB de plus (09.12.1987) Domicile A2 (15.12.1987) Sacrée soirée (16.12.1987) La une est à vous (19.12.1987) La une sur son 31 (31.12.1987)

1988/1990 Ainsi soit je… 106 106 107 107 109 109 110 111 111 117 118

Mon zénith à moi (XX.01.1988) Lahaye d’honneur (15.01.1988) Les uns et les autres (06.02.1988) Les uns et les autres (22.04.1988) Jacky show (24.04.1988) Les uns et les autres (29.04.1988) Fête comme chez vous (05.05.1988) La une est à vous (07.05.1988) Sacrée soirée (18.05.1988) Les animaux du monde (22.05.1988) Top 50 (26.05.1988)

104


119 Mon zénith à moi (18.06.1988) 120 A la folie, pas du tout (19.06.1988) 120 Les discos d’or sous le soleil du Québec (21.08.1988) 121 Lahaye d’honneur (24.08.1988) 121 Sacrée soirée (05.10.1988) 122 Nulle part ailleurs (07.10.1988) 125 Clip dédicace (08.10.1988) 128 Avis de recherche (14.10.1988) 129 La une est à vous (22.10.1988) 130 Jacky show (06.11.1988) 131 Le monde est à vous (06.11.1988) 132 Du côté de chez Fred (07.11.1988) 133 Cocoparadise (16.11.1988) 134 Les IIIe Victoires de la musique (19.11.1988) 135 Interchallenges (20.11.1988) 135 Une soirée pour les Restos (17.12.1988) 137 Avis de recherche (30.12.1988) 138 Avis de recherche (24.02.1989) 138 La une est à vous (11.03.1989) 138 Jacky show (18.03.1989) 139 Fréquenstar (22.03.1989) 143 Sacrée soirée (22.03.1989) 144 Avis de recherche (12.05.1989) 145 J.T. de 20h TF1 (18.05.1989) 146 Mon zénith à moi (XX.09.1989) 146 J’y crois dur comme Terre (02.09.1989) 149 Sacrée soirée (06.09.1989) 149 Avis de recherche (15.09.1989) 150 Sacrée soirée (01.11.1989) 152 TV suédoise (28.04.1990) 152 Ghibli (13.07.1990) 153 TV hollandaise (02.12.1990)

1991/1993 L’autre… 156 156 165 166 168 168 171 171

TV danoise (XX.01.1991) Pour un clip avec toi (07.04.1991) J.T. de 20h TF1 (10.04.1991) Sacrée soirée (17.04.1991) La Une est à vous (20.04.1991) Stars 90 (13.05.1991) Tous à la une (31.05.1991) Stars 90 (09.09.1991)

154

174 174 175 176 177 178 178 180 183

1999/2001

Riva del Garda (XX.09.1991) Stars 90 (07.10.1991) Sacrée soirée (11.12.1991) Tous à la une (27.12.1991) Stars 90 (13.01.1992) Ein kessel buntes (XX.03.1992) Escale (02.01.1993) Stars 90 (11.01.1993) World Music Awards (12.05.1993)

1994

Innamoramento 238 239 240 241 241

184

Giorgino 186 187 188 189 190 196

Ciné 6 (02.10.1994) 19/20 (04.10.1994) J.T. de 20h TF1 (04.10.1994) J.T. de 20h F2 (04.10.1994) TalkShow (05.10.1994) Le journal du cinéma (05.10.1994)

1995/1997 Anamorphosée 200 200 204 207 208 209 209 210 211 212 213 221 222 223 223 227 228 231 233 234 235 235

J.T. de 20h F2 (13.04.1995) Studio Gabriel (14.12.1995) Déjà le retour (17.12.1995) Hit Machine (30.12.1995) Le bêtisier du samedi soir (13.01.1996) Top…aux Carpentier (09.03.1996) Les années tubes (18.05.1996) 6 minutes (25.05.1996) J.T. de 20h F2 (28.05.1996) Studio Gabriel (29.05.1996) 20h Paris Première (30.05.1996) 12/13 (31.05.1996) J.T. de 20h TF1 (31.05.1996) J.T. RTL TVI (06.06.96) Le Mag (08.06.96) Déjà dimanche (09.06.1996) Mylène Farmer XXelle (05.10.1996) TipTop (24.10.1996) Les enfants de la guerre (27.11.1996) Stars Magazine (XX.12.1996) Joyeux anniversaire (01.03.1997) Les enfants de la Une (06.09.1997)

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198

242 242 243 245 245 247 249 252 252 252 252 253 254 254 259 260 261

Les années tubes (02.04.1999) Hit machine (17.04.1999) Tapis rouge (24.04.1999) Exclusif ! (07.05.1999) La fureur du parc – le retour (19.06.1999) Exclusif ! (21.06.1999) 50 ans de tubes (30.07.1999) Tapis rouge (11.09.1999) J.T. de 20h TF1 (28.09.1999) 100% Johnny (12.11.1999) Le point J (XX.11.1999) NRJ Music Awards (22.01.2000) Les années tubes (03.03.2000) TV russe (XX.03.2000) TV russe (XX.03.2000) TV russe (XX.03.2000) Hit machine (11.03.2000) Tapis rouge (25.03.2000) Le mag (10.06.2000) M6 Awards (17.11.2000) NRJ Music Awards (20.01.2001) What’s up (05.02.2001)

2002/2003

262

Les motS 264 267 267 268

NRJ Music Awards (19.01.2002) Hit machine (27.04.2002) Zidane ELA (19.05.2002) NRJ Music Awards (18.01.2003)

2004/2006

270

Avant que l’ombre… 272 277 278 283 284 287

Conférence de presse (XX.12.04) Symphonic show (12.11.2005) Sept à huit (08.01.2006) NRJ Music Awards (21.01.06) Arthur et les Minimoys (28.11.06) J.T. 20h TF1 (12.12.06)

290 Statistiques



1984 1985 Les débuts XX.03.1984 Single « Maman a tort » – XX.09.1984 Single « My mum is wrong » – XX.01.1985 Single « On est tous des imbéciles » – 25.09.1985 Single « Plus grandir »


1984–1985 : les débuts

Jour J Date XX.03.1984 Chaîne TF1

De la bouche même de Mylène Farmer (cf. « La Une est à Vous » 19 décembre 1987), « Jour J » est la première émission de télévision dans laquelle elle s’est produite pour interpréter « Maman a tort » (on l’a cependant vue à la télévision auparavant dans divers spots publicitaires dès 1982). Pour cette première apparition, elle est vêtue entièrement de rose : veste, nœud dans les cheveux et gants sont assortis.

La vie à plein temps Date 22.03.1984 Chaîne FR3 Pyrénées Présenté par Philippe Bachmann

8

Mylène Farmer

1984

Cette émission de l’après-midi reçoit plusieurs invités, tous assis autour de l’animateur. Mylène est présente sur toute la durée de l’émission. Elle porte une veste rose, une jupe noire et des gants roses. Elle intervient plusieurs fois au cours de l’émission, l’occasion pour elle de se présenter, et chante « Maman a tort ». Philippe Bacchman : Au niveau variétés (…), Mylène Farmer : « Maman a tort », ça sera le titre qu’elle nous chantera tout à l’heure et on vous donnera beaucoup de précisions sur elle, mais tout à l’heure seulement !

(…) PB : Mylène, toi tu as eu l’impression d’avoir ton heure de gloire à seize ans comme Chris dans le livre de Christopher Frank ? (l’invité précédent) Mylène Farmer : Je n’ai malheureusement pas lu son livre, mais mon heure de gloire, pour moi, elle est ici ! (rires) PB : Ah, elle est ici ? (rires) Ton adolescence, tu as de très bons souvenirs, ou… MF : Non, très mauvais ! PB : Très mauvais ? MF : Oui, je suis pas du tout passéiste. PB : Alors tu es plutôt l’Antéchrist ! (référence au livre dont il était question précédemment) MF : Oui, j’écrase tout ! PB : Carrément ! C’est effrayant… (A Christopher Frank) Je sais que vous avez un point commun, dans la mesure où la charmante Mylène a joué au théâtre le film « Josépha », en fait. C’est ça ? Explique-moi un petit peu. MF : Oui, c’est plutôt dans un cours de théâtre. On nous donnait la possibilité de monter des pièces, et on pouvait choisir des films. Et donc, avec trois personnes, même plus, on a choisi « Josépha ». On a lu le livre et on a monté ça en pièce de théâtre. PB : Alors tu jouais le rôle de Miou-Miou ? MF : Et je jouais le rôle de Miou-Miou. PB : Et en partant du livre… MF : En partant du livre oui. C’est-à-dire qu’on a pris tous les dialogues pratiquement, et on a essayé de faire un montage. (…) PB : C’est les élèves du cours qui ont décidé de reprendre « Josépha » ? Comment ça s’est passé ? MF : Ah oui, c’est vraiment un projet qu’on a soumis heu… PB : A la direction ? MF : Au directeur, à la direction, oui… (rires) Et ils l’ont accepté. (…) PB : Bon, Mylène Farmer…Tu es canadienne d’origine, c’est ça ? A treize ans, tu étais à Paris, après. (Mylène confirme)Alors on continue, prix de chant à l’âge de dix ans ! Ça c’était au Canada, alors ? MF C’était au Canada, oui. PB : Qu’est-ce que tu chantais à dix ans? MF : (elle parle sans son micro) Je ne me rap-

pelle plus, c’était… PB : Ton micro, ton micro ! MF : (elle reprend son micro) Je disais que je ne m’en rappelle plus. Je crois que c’était une comptine, enfin une petite chanson. PB : Alors on a parlé des cours de théâtre tout à l’heure. Tu en as suivi longtemps, des cours de théâtre ? MF : J’en ai suivi deux ans. PB : C’était ta vocation ? Tu voulais être comédienne ? MF : Mais je veux encore être comédienne ! PB : Ah tu veux encore ? Bon, c’est très bien ça… MF : Je pense qu’en passant par la chanson, c’est aussi une voie. PB : C’est une voie détournée pour revenir à la comédie après ? MF : Pourquoi pas ? PB : Pour faire les deux ? (Mylène confirme) Mannequin aussi, un petit peu ? MF : Un petit peu, aussi… PB : Mais t’en as fait des choses, dis donc ! MF : Ben oui ! PB : T’as pas l’air comme ça ! (rires) Et elle a joué « Josépha », le rôle de Miou-Miou, ce qui était pas évident. MF : Enfin, très beau rôle, en tout cas. PB : Raconte-moi comment tu as démarré dans la chanson. Tu as trouvé des producteurs, comme ça, dans une soirée ? MF : Non, pas par hasard. Je connaissais un des producteurs, d’abord, avec qui j’avais un peu travaillé au piano. Et par la suite, ils m’ont rappelée parce qu’ils voulaient sortir une chanson, et ils ont rappelé plusieurs personnes d’ailleurs, et puis ils ont fini par me choisir. PB : Et ils ont tellement insisté que tu as accepté ! (rires) Et ils se sont pas dit, eux, « Maman a tort » ! MF : Non ! (rires) PB : Maman a raison ! Allez, vas-y on va t’écouter tout de suite. « Maman a tort », Mylène Farmer, c’est son premier 45-tours. Mylène interprète la chanson dans un coin du plateau devant un fond représentant des chiffres et la pochette du disque apparaît parfois. La chanson terminée, elle regagne sa place, reste présente jusqu’à la fin de l’émission mais n’intervient plus.


Jack Spot Date 09.05.1984 Chaîne TF1

Dans cette émission musicale, Mylène livre une interprétation aussi étonnante que délicieuse de « Maman a tort ». La chanson est en effet mise en scène dans le décor de l’hôpital de la Rochefoucauld, à Paris, et les séquences alternent entre une Mylène dans le jardin de l’hôpital et une Mylène en blouse blanche préparant des soins dans une salle de l’hôpital, ce qui donne lieu notamment à un malicieux clin d’œil de la chanteuse lorsqu’elle prépare une piqûre !

Le 12/13

Date 30.05.1984 Chaîne FR3 Aquitaine Présenté par Gérard Berliet

Le présentateur du journal régional de la mi-journée reçoit Mylène à la fin de son édition. Elle porte un pull marin bleu et blanc et des bretelles. Le présentateur l’interviewe brièvement, puis le clip de « Maman a tort » est diffusé. En retour plateau, Alain Pujol, également invité, donne son avis sur le clip et encourage Mylène dans sa jeune carrière.

Gérard Berliet : Lorsqu’on est toute jeune et qu’on veut démarrer dans la chanson, ça ne doit pas être tellement facile. Je ne sais pas ce qu’en pense notre dernière invitée, Mylène Palmer (sic !), mais vous en êtes à votre premier disque… Mylène Farmer : Oui… (son nom s’inscrit à l’écran : «Mylaine» au lieu de «Mylène» !) GB : C’est donc le tout début. Ce n’est pas votre première télévision. MF : Non, j’en ai déjà fait plusieurs. GB : Déjà fait plusieurs, donc vous êtes déjà une ancienne dans le métier ? MF : Non, pas une ancienne, une débutante ! Mais j’espère continuer. GB : Pourquoi avoir essayé de tenter l’aven-

ture ? Parce que c’est une aventure ! MF : Oui. Enfin j’ai surtout eu la chance, je crois, de rencontrer des musiciens, des compositeurs. Avant ça, j’avais suivi des cours de théâtre, donc il y a quand même un parallèle. Et puis, donc j’ai rencontré ces deux personnes qui m’ont proposé cette chanson, et grâce à ça, je pense que ça m’ouvrira des portes pour autre chose, aussi. (…) Diffusion du clip « Maman a tort » en intégralité. GB : Alain, alors maintenant vous avez vu, vous avez entendu… Alain Pujol : J’ai vu et je suis pratiquement convaincu ! D’abord (…) je suis très sensible à l’image, et le clip maintenant va révolutionner un petit peu la mise en scène au niveau des plans variétés. Je suis frappé qu’en trois minutes et quelques, la durée d’un disque, on puisse avoir autant d’idées. Y a un côté un peu fou des photos de David Hamilton, y a tout. (A Mylène) Bon, vous êtes très télégénique, c’est un premier compliment… MF : Merci ! AP : J’aime votre chanson, et j’aime aussi toute cette jeune chanson qui arrive, parce qu’on nous rabat souvent les oreilles avec la chanson d’autrefois, les « Tchi-tchi », « Marinella »,… C’étaient quand même pas des trouvailles extraordinaires ! Je pense que vous avez beaucoup de choses pour…beaucoup d’atouts mais parallèlement à la chanson, mais peut-être aussi la comédie, un téléfilm…Une seule petite restriction, y a un peu trop de glycérine sur les pleurs, ça doit être beaucoup plus somptueux quand vous pleurez d’amour ! (rires de Mylène) GB : Alors, en quelques secondes, ce que vient de vous dire Alain Pujol, ça vous tente le cinéma, le théâtre ? MF : Bien sûr que ça me tente, absolument ! Mais je pense que je le ferai, de toute façon. Je suis une gagnante, donc je pense que j’espère y arriver. Le présentateur conclut le journal.


1984–1985 : les débuts

Les jeux de 20h Date XX.08.1984 Chaîne FR3 Présenté par Marc Menant et Jean-Pierre Descombes

La vie à plein temps Date 10.09.1984 Chaîne FR3 Pyrénées Présenté par Philippe Bachmann

Ce jeu culte, diffusé entre 1976 et 1987, se déroulait quotidiennement dans une petite ville de province et finissait toujours en chanson. Ce jour-là, c’est une Mylène très souriante qui conclut l’émission avec « Maman a tort », qu’elle interprète, vêtue d’un tailleur gris court, face au public et en plein air.

Télé chansons

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Mylène Farmer

Date XX.08.1984 Chaîne TMC

Vêtue du même petit tailleur gris que pour les « Jeux de 20h », quelques jours plus tôt Mylène interprète « Maman a tort » devant un décor en incrustation présentant des motifs flous pastels.

A la rentrée 1984, Mylène revient dans cette émission où elle avait fait une de ses toutes premières apparitions, six mois plus tôt. Habillée cette fois-ci d’une robe bleue à manches bouffantes, elle est interviewée et sa précédente prestation sur « Maman a tort» dans la même émission est rediffusée. Philippe Bacchman : (…) Au niveau variétés, on a pris deux gros succès de cet été, deux jeunes filles qu’on avait reçues dans cette émission. C’est Mylène Farmer, « Maman a tort », vous vous souvenez… Mylène Farmer : Bonjour… PB : …et Corynne Charby, « A Cause de Toi ». Ça a très, très bien marché pour elles deux cet été. (…) PB : On revient à Mylène Farmer. Vous vous souvenez tous de sa chanson, « Maman a tort », ça a fait un tabac cet été. Ça marche encore, d’ailleurs au début de l’automne ! MF : Oui ! (rires) PB : J’espère que tu t’attendais à un tel succès, non ? Bon on sait déjà beaucoup de choses sur toi : tu as été premier prix de chant à dix ans… MF : Oui… PB : Ça sert, quand même, après pour faire de la chanson. Tu as pris des cours de théâtre, un peu de mannequin aussi… MF : Un petit peu, oui ! PB : Donc tu es forcément intéressée par la mode ? MF : Oui, mais j’étais mannequin pas du tout en défilés, parce que d’abord je suis pas assez grande. C’était plus orienté vers les films publicitaires. Mais oui, je suis intéressée par la mode ! PB : Comment c’est venu, la chanson ? MF : Ben, un peu par hasard ! J’ai rencontré… PB : Jérôme et Laurent : qui sont ces deux zèbres ? MF : Jérôme Dahan et Laurent Boutonnat sont mes deux producteurs, et qui sont également compositeurs.

PB : C’est pas des zèbres alors ! MF : Non, je pense pas ! PB : Ils ont bien choisi… MF : Merci ! PB : OK, bon on l’écoute tout de suite. Vous vous souvenez, je crois que c’était fin mars que tu étais venue nous voir, en fait ? MF : Oui, je crois. PB : Fin mars, à « La Vie à Plein Temps », on recevait déjà Mylène Farmer, on avait senti quelque chose déjà : « Maman a tort ». Rediffusion de la prestation à la même émission du 22 mars 1984. PB : Voilà, Mylène Farmer dans « Maman a tort ». L’automne, ça se présente comment ? Tu as déjà un autre disque en préparation ? MF : Il y a un projet de disque, qui sortira je pense en décembre-janvier. PB : Et encore des télés, promotions…sur ce titre-là ? MF : Surtout des télés, parce qu’en fait j’ai pas fait beaucoup de télés, surtout les nationales… PB : Sauf ici ! (rires) MF : Sauf ici, oui ! Donc, ça va être vraiment là maintenant, la promotion. PB : Automne chargé, donc ! L’émission continue sans que Mylène n’intervienne à nouveau.


Transrégional express Date 20.09.1984 Chaîne FR3 Rhône-Alpes

Canada. Vous parliez du Québec, elle a passé treize ans de sa vie là-bas. Gilbert Bécaud : Moi, j’adore sa chanson (…) J’aime bien : (il chantonne) « Un, maman elle a tort ; deux l’amour c’est bon… ». (sic !) MD : Oui, c’est l’histoire d’une jeune fille qui dit qu’elle aime bien les choses qu’on lui a interdites, petite. GB : Exact. Moi, je trouve que c’est une très bonne chanson. (Au public) Vous la connaissez ? Elle est bien cette chanson, hein ?! MD : Alors, elle s’appelle « Maman a tort », et elle s’appelle Mylène Farmer !

Mylène est la première intervenante de cette émission musicale avec une prestation étonnante s’il en est ! Juchée sur un petit podium, sous un arbre, dans le parc des locaux techniques de FR3 à Lyon, Mylène interprète « Maman a tort » face à un public d’une dizaine d’enfants. Elle porte une vareuse blanche et bleue et un pantalon bleu. La prestation vaut surtout le coup d’œil pour son incongruité et les passants à l’arrière-plan qui ignorent complètement la chanteuse !

Champs élysées

Date 22.09.1984 Chaîne Antenne 2 Présenté par Michel Drucker

Première ‘grosse’ émission pour Mylène Farmer. Premier prime-time (à 20h30 précises à l’époque). Mylène apparaît dès le pré générique – l’une des marques de fabrique de cette émission culte des années 80, c’est en effet que l’on voit les invités arriver à l’extérieur du studio, avant l’émission. Mylène ne déroge pas à la règle et entre au studio Gabriel, juste derrière Gilbert Bécaud, l’invité

d’honneur du jour, et avant Alain Souchon ; elle salue à la caméra. Au cours de l’émission, Michel Drucker présente Mylène qui arrive sur le plateau pour chanter (en direct) « Maman a tort ». La prestation est suivie d’une interview, dont on apprendra par la suite qu’elle n’était pas prévue à la base et qu’elle eût lieu car, suite à des désistements, il fallait combler certains moments de l’émission ! Michel Drucker : La jeune fille que je vais accueillir maintenant, Gilbert Bécaud, elle est française, mais elle est née à Montréal, au

Mylène arrive sur le plateau, vêtue d’un tailleur noir, son micro à la main. En se mettant en place, elle se prend les pieds dans le fil du micro et fait une moue amusée. La musique commence, elle chante « Maman a tort » en direct, en effectuant une petite chorégraphie que le caméraman a beaucoup de mal à suivre ! Elle finit la chanson assise par terre. Michel Drucker la rejoint, l’aide à se relever, puis ils vont tous deux s’asseoir. MD : Mylène Farmer ! Sur les routes de France, cet été, je pouvais pas allumer un poste de radio sans vous entendre. On voyait des petites filles qui comptaient : « Un, maman a tort… ». Racontez-moi un petit peu : vous avez grandi au Québec, au Canada ? MF : Oui, j’ai vécu à Montréal pendant près de dix ans. MD : Mais vous êtes française… MF : Je suis française et canadienne, j’ai les deux nationalités. Et puis je suis arrivée à Paris, et depuis j’y vis. MD : Alors, vous avez fait quoi ? Vous étiez mannequin, je crois… MF : Oui, pour gagner de l’argent, j’ai été mannequin. Parallèlement, j’ai suivi des études


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© Sygma-Corbis

Mylène Farmer

1984–1985 : les débuts


© Sygma-Corbis

Un temps pour tout Date 27.09.1984 Chaîne Antenne 2

comme tout le monde. MD : Quelles études ? MF : Oh, des études, c’est-à-dire le lycée jusqu’en terminale, et puis ensuite j’ai fait un peu le mannequin. MD : Et puis cette chanson qui est arrivée dans votre vie, comme ça par hasard ? MF : Plus ou moins par hasard, disons que j’ai rencontré deux personnes, qui sont mes producteurs, Laurent Boutonnat et Jérôme Dahan, et compositeurs, et qui m’ont proposé cette chanson. MD : J’ai écouté souvent la chanson, mais j’ai pas tout compris. Vous êtes amoureuse de l’infirmière, c’est ça ? MF : Ecoutez (rires), je peux vous raconter un peu la chanson. C’est quelque chose qui me tient effectivement un peu à cœur. Ça peut arriver à beaucoup d’enfants qui sont dans des centres hospitaliers et qui n’ont finalement pour heu… j’allais dire pour mamans, disons que ce sont des personnes qui s’occupent de ces enfants, ce sont des infirmiers ou infirmières et ces infirmières donnent à manger à ces enfants, les bordent au lit, leur font un bisou avant de s’endormir, donc prennent la place des mamans. Donc, c’est une petite fille qui dit à sa maman : « J’aime l’infirmière ». MD : Bon, ça a été un énorme succès. Vous allez continuer, ou c’est un coup, comme on dit ? MF : Non, j’espère continuer ! Là, je vais sortir un prochain 45 tours, et puis après on verra si ça marche. (…) MD : Je vous souhaite une longue carrière, mademoiselle Mylène Farmer, qui vient pour la première fois à « Champs Elysées ». MF : Merci… Michel Drucker lance la suite de l’émission. Mylène reviendra lors du générique de fin de l’émission, au milieu des autres invités.

Cette émission de débat (ce jour-là consacré aux retraites) se déroule dans le cadre du lycée Rabelais, à Paris. Mylène y livre une prestation très amusante pour illustrer « Maman a tort ». La séquence débute alors qu’elle remonte un couloir du lycée. Vêtue du même ensemble noir qu’elle portait à « Champs Elysées », elle pénètre alors dans une salle de classe et commence sa chanson sur le podium réservé au professeur, face aux élèves. Elle joue avec la baguette pour désigner le tableau, ce qui ne manque pas d’amuser les quelques élèves qu’on aperçoit faire les pitres par la fenêtre de la classe !

Une Bouteille à la mer Date XX.10.1984 Chaîne TF1

C’est habillée d’un petit pull rayé et d’une veste rose que Mylène vient dans ce jeu de l’après-midi. Avant de chanter « Maman a tort », elle participe au jeu en posant une question à la candidate du jour à l’aide d’une fiche. L’animateur précise ensuite que Mylène vient du Québec, ce que cette dernière confirme, avant de se lever pour aller chanter.


1984–1985 : les débuts

L’académie des 9

Date 04.10.1984 Chaîne Antenne 2 Présenté par Jean-Pierre Foucault

Mylène fait partie ce jour là des neuf personnalités qui jouent dans la fameuse grille de ce morpion géant du célèbre jeu quotidien de la mi-journée. En tout début d’émission, elle interprète « Maman a tort » habillée en tailleur bordeaux, puis au cours du jeu, elle est sollicitée à plusieurs reprises par les candidats pour répondre aux questions du jeu. Jean-Pierre Foucault : « L’Académie des 9 » avec (…) Mylène Farmer, pour une première chanson : « Maman a tort ».

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Mylène Farmer

Mylène interprète « Maman a tort » dans un coin du plateau. (…) JPF : (au candidat) : Alors, votre ligne est partie, cher Michel, Gisèle a très bien joué : à vous de la contrer. Michel (le candidat)  : Oui, avec Mylène Farmer. JPF : Bonjour, Mylène Farmer. Bienvenue dans l’Académie ! Mylène Farmer : (elle étouffe un rire) : Bonjour ! JPF  : Voici la question  : Briançon… vous connaissez la ville de Briançon ? MF : (plus qu’hésitante) Heuuuuuuu… (…)

JPF : Mais connaissez-vous la manne de Briançon ? Qu’est-ce qu’à votre avis la manne de Briançon ? Un chronomètre de 30 secondes démarre… MF : C’est…de la charcuterie. JPF : Non ! MF : Heu… (…) La vanne de Briançon… JPF : La manne ! MF : Ah la manne ? En plus, j’entends mal ! (elle réfléchit longuement. Les autres invités soufflent des réponses) JPF : Je n’entends pas beaucoup Mylène ! La fin du chronomètre retentit en même temps que Mylène éclate d’un rire franc. JPF : C’est une sorte de miel… Les autres invités commentent la réponse. JPF : Vous n’avez pas beaucoup aidé Mylène ! C’est au tour de Gisèle, l’autre candidate, qui choisit également de jouer avec Mylène. JPF : Mylène Farmer, une autre question… John Heathcoat est un inventeur anglais (à l’énoncé du nom de cet inventeur, Mylène soupire exagérément !) qui vivait au XIXe siècle. En 1809, ce monsieur mit au point une machine qui, pourrait-on dire, fit le bonheur des dames. De quelle machine s’agit-il ? Le chronomètre démarre, alors que les autres participants donnent des réponses farfelues. MF : Un retrousse cils ! JPF : Non ! MF : Non, heu… (elle réfléchit longuement de nouveau). Il s’agit heu… (les autres invités cherchent également) JPF : Mylène, dites un mot quand même pour faire vrai ! MF : Je cherche ! (rires) Un porte-jarretelles !

Fin du chronomètre. JPF : (…) Une machine à faire de la dentelle. (…) (Il se tourne vers le candidat, qui choisit de rejouer avec Mylène). MF : Mais qu’est-ce qu’ils ont après moi ?! (rires) Un des autres invités (off) : Je les comprends très bien ! JPF : (il lit la question) On a toujours l’impression que les femmes ont le pouvoir depuis quelques toutes petites années, et pourtant quel traité pouvaient donc bien signer Marguerite d’Autriche et Louise de Savoie à Cambrai en 1529 ? Le chronomètre démarre. MF : Un traité qui a été signé… Là, je vais être un peu plus douée, je pense. Je crois que c’est la Paix des Dames. JPF : Oui, bonne réponse ! MF : C’est ça ?! Ah, quand même ! (rires) Plus tard dans l’émission, Mylène participe à une manche où il s’agit de dire laquelle des trois propositions données est la bonne réponse à la question pour faire gagner le candidat qui a choisi sa ligne. JPF : Mylène Farmer… L’échauguette : c’est un échassier, un arbre épineux ou une espèce de guérite en pierre ? MF : (soupir) Première ! JPF : Première… L’échassier ? Michel (le candidat) : Je suis d’accord. JPF : Voilà ! Au revoir la rangée du bas : c’était une espèce de guérite en pierre. Mylène rit de son erreur. Elle n’est plus sollicitée dans la suite du jeu.


Ring parade Cocoricocoshow Date 14.11.1984 Chaîne FR3 Présenté par Guy Lux

C’est tout naturellement qu’on retrouve Mylène dans cette émission culte diffusé en primetime. Elle arrive sur le plateau dans une tenue étonnante composée d’une veste en damiers et les cheveux rabattus sous un étrange chapeau rouge. Avant d’entonner le premier couplet de « Maman a tort », Mylène ôte son chapeau et le jette en arrière. La chanson est chantée en direct, comme il était de coutume dans cette émission.

Date 15.11.1984 Chaîne TF1 Présenté par Stéphane Collaro

Première participation de Mylène à cette émission de sketches à succès. Pour ce baptême, elle commence à chanter « Maman a tort », habillée d’une blouse blanche, dans un décor de chambre d’hôpital, quand les patients, qui ne sont autres que quelques marionnettes du « Bêbête Show », l’interrompent pour se demander qui est cette nouvelle infirmière qui ne les laisse pas indifférents ! Mylène reprend alors sa chanson du début, cette fois-ci accoutrée d’une espèce de jogging rose, tout en jouant avec les marionnettes.

Clignotant Date 20.11.1984 Chaîne TF1

Sur le plateau de cette émission de fin de soirée, Mylène, veste rose et jupe noire, livre une prestation académique de « Maman a tort ».


1984–1985 : les débuts

L’année du zèbre Date 13.02.1985 Chaîne TF1 Présenté par Caroline Loeb

Nouvelle année, nouveau single. Mylène Farmer défend désormais son deuxième 45 tour, « On est tous des imbéciles ». Pour ce faire, elle se rend dans cette émission musicale, assez décalée, présentée par Caroline Loeb, qui n’a pas encore enregistré son tube « C’est la ouate ». Mylène commence sa prestation sur le plateau de l’émission habillée d’un ensemble noir par-dessus une chemise à pois. Sur la fin de la chanson, Caroline Loeb la rejoint pour faire le pitre derrière elle. La prestation est suivie d’une petite interview.

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Mylène Farmer

1985

Mylène Farmer : Bonjour Caroline ! Caroline Loeb : Bonjour Mylène ! MF : Ça va bien ? CL : Ben oui, pas trop mal et toi ? MF : Ça va bien. CL : (moqueuse) Bon, ben écoute c’est pas tout ça mais qu’est-ce que c’est cette histoire d’imbéciles ? Tout le monde doit te poser la question « Alors est-ce qu’on est vraiment tous des imbéciles ? – Mais non, vous êtes très bien »… Raconte-moi un peu. MF : Et bien, je vais dire déjà qu’on a mis « On est tous des imbéciles », c’était pour pas que je me sente toute seule. CL : Oui… MF : Et puis que c’est une chanson qui est un petit clin d’œil sur ma profession, peut-être. CL : Artiste ? MF : Artiste, c’est-à-dire qu’il faut pas trop se prendre au sérieux mais faire les choses sérieusement quand même. CL : Oui. Et alors, ces paroles, c’est toi qui dis « J’aimerais bien parler de ça », ou bien on te propose des textes et tu… ? MF : Pour l’instant, en ce qui concerne « Maman a tort » et « On est tous des imbéciles », on m’a proposé le sujet, que j’ai accepté. Et puis ben par la suite, peut-être qu’on écrira tout spécialement pour moi. CL : Ça marche bien, la provocation en tout cas. (…)

La vie à plein temps Date 14.02.1985 Chaîne FR3 Pyrénées Présenté par Philippe Bachmann

L’émission reçoit plusieurs invités, tous autour de l’animateur. Mylène, veste rose et pantalon noir, est présente toute la durée de l’émission. Elle montre tous les signes de l’ennui (elle prend des poses, se recoiffe, se gratte, joue avec son micro…) jusqu’à ce que le présentateur discute un peu avec elle avant qu’elle ne chante « On est tous des imbéciles ». Philippe Bachmann (Alors que Mylène retire un fil de ses vêtements) : (…) Et puis, Mylène Farmer avec son nouveau 45 tours. Après « Maman a tort », qui a fait un tube monstrueux, je lui souhaite au moins la même chose pour « On est tous des imbéciles », son nouveau 45 tours. (…) PB : Mylène Farmer, on pourrait résumer ton itinéraire très facilement : Un, elle enregistre « Maman a tort »… (Mylène glousse) PB : Deux, elle en fait un succès. Trois, c’est reparti pour un autre succès et quatre, on est tous des imbéciles. Mylène Farmer : Voilà. Mais ce qui nous sauve, c’est le style. C’est ça qui est important. PB : On l’écoute tout de suite, cette chanson, Mylène ? MF : Oui ! (elle se lève pour aller se mettre en place) PB : Je te laisse aller t’installer. Le deuxième 45 tours de Mylène Farmer, ça s’écoute. Ca s’écoute vraiment : « On est tous des imbéciles ». Mylène interprète la chanson devant un décor en kaléidoscope, en multipliant les grimaces et mimiques. Elle regagne ensuite sa place à côté de l’animateur. PB : (…) Je te souhaite le même succès, si ce n’est mieux encore, que pour « Maman a tort ». MF : Et bien, merci.

Mylène continue de rester inattentive, mais s’amuse beaucoup des réponses de Popeck, également sur le plateau. Elle l’interrompt cependant lorsqu’il déplore n’avoir été invité qu’à une seule émission pour la promotion de son spectacle de l’époque. Popeck : Je n’ai fait qu’une seule émission en tout et pour tout ! C’est pas ce qu’on appelle matraqué, quand même ? MF : Non, mais je me demande est-ce que vous seriez heureux de passer à toutes ces émissions ? Parce que c’est promotionnel, et je trouve ça important pour un artiste. Popeck : C’est très important ! MF : C’est aussi important pour vous que pour moi. Popeck : Je vais vous dire : j’aurais préféré, parce que j’aurais gagné du temps ! MF : Alors nous sommes d’accord ! Mylène n’intervient plus jusqu’à la fin de l’émission.


Pour le plaisir Date 23.02.1985 Chaîne FR3 Alsace Présenté par Christian Daniel

Dans cette émission de variétés, l’animateur (qui a un fort accent alsacien) livre une interview assez superficielle de Mylène, qui porte pour l’occasion un tailleur noir. Petite particularité : tous deux sont assis au beau milieu du public. Christian Daniel : Bonsoir Mylène Farmer. Ravi de vous recevoir ici à « Pour le Plaisir ». Mylène Farmer : Merci. CD : Aujourd’hui, il sera beaucoup question du Canada (…) Ce qu’on sait moins, Mylène, c’est que vous êtes aussi originaire du Canada. MF : Oui, je suis née à Montréal, mais je suis

beaucoup plus française dans l’âme que canadienne. CD : Vous êtes restée combien de temps à Montréal ? MF : Neuf ans. CD : Et comment ça s’est fait le chemin vers la chanson avec ce premier disque « Maman a tort » ? MF : Tout à fait par hasard. Moi je me destinais plutôt à une carrière de comédienne, et puis il se trouve que c’est la chanson qui est venue à moi beaucoup plus rapidement. CD : Par hasard ? MF : Par hasard et avec bonheur. Je dois dire que j’ai beaucoup de chance parce que c’est difficile de faire un métier artistique. CD : Avec un premier disque, donc, qui a très, très bien marché, qu’on va tout de suite entendre donc, c’est un petit rappel, parce que ça fait longtemps qu’on a entendu ce « Maman a tort ». Alors je vous demande l’applaudir très, très fort : Mylène Farmer. Mylène chante à la suite « Maman a tort » et « On est tous des imbéciles » en effectuant les petites chorégraphies habituelles à ces titres.

Platine 45 Date 27.02.1985 Chaîne Antenne 2 Présenté par Jacky

Invitée de cette émission mythique des années 80, Mylène reste en duo avec l’animateur, Jacky, tout au long du programme, à tel point qu’on peut dire qu’elle le coprésente avec lui. Le courant passe visiblement bien entre eux deux, et le ton est à la plaisanterie pendant toute l’émission. Mylène porte un pull noir et un pantalon marron. Jacky : Bonjour Mylène ! Ça va ? Mylène Farmer : Bonjour Jacky, ça va. (elle lui fait un bisou sur la joue) J : Oh un petit bisou ! MF : (sur un ton enfantin) : Voui ! J : Je peux t’en faire un aussi ? MF : Voui ! Ils se font la bise. J : Au fait, dis-moi : tu es majeure pour venir à

« Platine 45 » ? Tu as le droit, ou quoi ? Qu’estce qui s’est passé ? MF : (toujours avec un ton enfantin) Non, mais j’ai demandé l’autorisation à mon papa et il a dit oui. J : C’est vrai ? MF : Oui. Bonjour Papa ! (elle fait coucou à la caméra) J : Bonjour le papa de Mylène ! (…) Alors, qu’estce qui s’est passé, Mylène, avant ton premier disque ? Raconte-nous un peu ! MF : Avant mon premier disque, j’étais mannequin junior. J : Mannequin pour les petits, ça veut dire ça ? Non ?! MF : Non… J : Mannequin parce que tu es petite. MF : (un silence, puis faussement vexée) Bon, allez au revoir. J : Non non, mais pars pas tout de suite quand même ! Tu es vexée ou quoi ? MF : Oui ! J : Non, sans plus ! MF : Mais si ! Je fais de la chanson parce que je

suis petite. J : C’est par dépit ? MF : Oui ! J : Ou par amour ? MF : Un peu des deux. J : C’est par amour pour moi, non ? MF : (elle arrête de faire la fâchée) Bon, allez ! J : Allez, allez ! Alors ta deuxième chanson, elle s’appelle comment ? MF : Elle s’appelle « On est tous des imbéciles ». J : Ça veut dire tout le monde, sans exception ? MF : Sauf toi Jacky, bien sûr. J : Et sauf toi ? MF : Et puis un petit peu moi, quand même ! J : Et sauf eux ! (les téléspectateurs) MF : (avec un grand sourire) Sauf eux ! J : Personne n’est imbécile, donc du coup alors ! MF : Non, ben je vais peut-être pas le chanter alors ! J : Si, moi j’aimerais bien que tu chantes ! MF : On le fait quand même ? J : On va faire ton clip et tu reviens tout de


1984–1985 : les débuts

suite avec moi ? MF : Oui, d’accord. (…)

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Mylène Farmer

Diffusion d’une séquence où Mylène, habillée une nouvelle fois de sa veste rose et d’un pantalon noir, chante « On est tous des imbéciles » sur un fond qui alterne entre noir et blanc. Retour plateau. Mylène fait un bisou à Jacky sur le front. J : Je pourrai plus poser de questions, là ! Qu’est-ce qui se passe ? MF : Je sais pas ! J : T’embrasses alors ? MF : Coup de cœur… J : Bon, alors est-ce que ça a été vite pour toi Mylène, avant ton premier disque ? Tu as fait beaucoup de maisons de disques ? Ça a été rapidement ? MF : On a cherché pas mal… J : Tu t’es fait refuser, rejeter ? MF : Euh… On s’est fait rejeter. Y a des gens qui disaient « Génial ! », et puis ils attendaient, ils attendaient, ils attendaient…Et puis finalement, c’est RCA qui a signé. J : Ils ont eu raison, non ? MF : Je crois… J : Ah ben moi aussi ! Alors, « Maman a tort » : explique-moi un peu ça. Le texte, d’abord, c’est pour toutes les mamans du monde ? MF : C’est pour toutes les mamans du monde, mais il faut pas trop leur dire parce qu’elles vont finir par m’agresser dans la rue ! J : Pourquoi ?!

MF : Ben, parce que « Maman a tort », elles aiment pas ! J : C’est vrai, ça, ce que tu dis ? MF : Oui, oui ! J : Et pourquoi ? Par rapport à leurs enfants ? MF : Non, parce qu’on touche pas aux mamans. On touche pas à ces choses-là. J : Ah oui, c’est un conflit de générations, quoi. MF : Ben oui…Excuse-moi, Maman ! J : Même la tienne a tort ? Non ! MF : Si ! J : Bon…Est-ce que tu connais le Blitz ? Si je te dis le Blitz ? MF : Euh… C’est un gâteau russe. J : C’est un gâteau russe, mais ça veut dire « éclair » en allemand, aussi, « blitz ». MF : D’accord… J : Et c’est un mec, aussi, qui chante. MF : …connais pas ! Diffusion du clip de ce groupe. Retour plateau. Jacky et Mylène sont en train de danser un slow. MF : Jacky ? J : Oui ? MF : Tais-toi ! J : (faussement dépité) Bon…Et à part ça ? MF : Je peux faire quelque chose ? J : Ouais ! MF : Tu peux te baisser un peu ? Parce que je suis petite, tu sais bien. Il se baisse et Mylène lui fait une grosse bise sonore sur le front et laisse une marque de rouge à lèvres.

J : Ça va comme ça ? Oh la la ! Mais je vais être obligé de me taire, maintenant non ? MF : Non, non vas-y ! J : Bon…Mylène ? MF : Jacky ? J : Qu’entends-tu par « On est tous des imbéciles » ? MF : Je sais pas ! Tu veux bien la reposer ? J : Oui : Mylène, qu’entends-tu par « On est tous des imbéciles » ? MF : Et bien, c’est une chanson qui est écrite pour le métier, peut-être, un petit peu… J : Le métier de chanteur, le show-business ? MF : Le show-business, peut-être le métier en général. C’est que on a tort de se prendre au sérieux. Il faut faire les choses sérieusement, mais pas se prendre au sérieux. J : C’est un peu ce que je pense, Mylène. Et la face B s’appelle « L’Annonciation », c’est ça ? MF : Oui, c’est une très belle chanson, même que j’ai pleuré tout le temps quand je l’ai chantée ! J : Ah bon ! MF : Oui. J : Tu composes… MF : (elle l’interrompt) Est-ce que je peux raconter une histoire ? J : Vas-y ! MF : Voilà, alors y a deux petits poissons qui sont dans un bocal… J : Oui… MF : Et puis y a petit poisson qui dit à son autre copain petit poisson : « Mais, si Dieu n’existait pas, qui nous changerait l’eau du bocal ? » J : C’est vrai. Peut-être Ivan, non, qu’est-ce que tu en penses ?

« (Dans le métier du show-business) il faut faire les choses sérieusement, mais sans se prendre au sérieux. »


MF : Ivan… ohé ! (décidemment très blagueuse !) J : Ohé Ivan, viens changer l’eau du bocal ! (…) Ivan, c’est un espagnol. C’est pas grave ? MF : Non, j’aime bien les espagnols. Le clip de Ivan est diffusé. Au retour plateau, Mylène chantonne. MF : Un, maman a tort… J : Deux, c’est quoi ? MF : C’est beau l’amour… J : Et trois ? MF : L’infirmière pleure… J : Ah bon ! Tu veux chanter encore « Maman a tort » ? MF : Non, non… Je peux faire quelque chose ? J : Ouais, mais c’est la dernière fois, hein ! MF : Oh, y en a encore huit ! (elle fait trois avec ses doigts !) J : Bon, d’accord… Mylène embrasse de nouveau Jacky sur la joue de façon très sonore et laisse une grosse marque de rouge à lèvres de plus. MF : Ça va Jacky ? J : Ouais, ça va. Là je commence un peu à… (Il semble étourdi et Mylène rit de manière attendrie) MF : Tu sais que je prends des cours de danse ? J : Oh ! MF : Tu veux que je te montre un petit pas de danse ? J : Fais-moi une démonstration ! Mylène met ses bras au dessus de sa tête et fais un tour sur elle-même, comme les petites ballerines. J : Ah ouais… Et tu prends des cours pour ça ?! MF : (toute fière d’elle) Oui ! J : Ah, c’est bien… MF : Tu viens avec moi la prochaine fois ? J : Quand tu veux ! On sort de l’émission, et puis… Voilà ! MF : Ça s’appelle « Stayin’ Alive » ! J : Ah oui ? « La Fièvre du Samedi Soir », c’est ça ? MF : Mais là, on est mercredi, non ? J : On est mercredi, mais on peut être samedi aussi, parce qu’on est rediffusé le samedi matin ! C’est au choix, si tu veux ! MF : Super ! J : C’est super, non ? Qu’est-ce que tu en penses ? MF : Ouais ! Très bien ! J : Alors tu prépares un album, ou quoi ? Parce que tu vas pas en rester là, toi ! MF : Non ! Après ce 45 tours, s’il marche bien, on va sortir un 30 centimètres, et les chansons sont presque toutes finies. J : C’est vrai ? Mylène acquiesce. J : Mais tu n’es qu’interprète, toi ; tu composes pas. MF : Ça te dérange ? J : Non, au contraire ça m’arrange ! MF : Moi je trouve ça déjà pas mal, hein ?

La clé des chants Date 02.03.1985 Chaîne FR3 Nord-Pas-de-Calais

C’est à l’occasion d’une remise de trophées à des sportifs que certains artistes viennent chanter dans cette émission. On retrouve donc Mylène, à nouveau habillée de sa veste rose et d’un pantalon noir retenu cette fois par une grosse ceinture rose. Parmi les autres invités, on trouve Jeanne Mas, Diane Tell ou Jean Schultheis. Mylène interprète « Maman a tort ».

J : Moi je trouve ça énorme ! C’est mieux, même, non ? MF : Oui, oui… J : Parce que tu es au devant, quoi. MF : Absolument. J : Au lieu d’être derrière. MF : Oui, c’est ça… J : C’est sympa. Qu’est-ce que tu écoutes, en musique, à part ça ? MF : Euh… J : A part toi ! MF : J’aime Julio ‘Des Eglises’ ! Et j’aime que lui ! J : C’est vrai ? MF : Oui. (Mylène imite Julio Iglesias en faisant un regard langoureux) « Je te donne mon cœur… ». J : Vas-y, continue ! MF : (elle chante) « Méva, méva, méva, mévaaaaaaaaaa ». J : Bon, ben écoute, je vais te laisser, Mylène. OK ? MF : Voui. J : C’était très gentil d’être restée à « Platine 45 ». Mylène fait au revoir avec la main à la caméra.

J : Je te demande pas de m’embrasser, parce que tu l’as déjà fait de nombreuses fois. Quoique… Mylène prend Jacky par le cou et lui couvre le visage de nombreux baisers ! J : Bon, ben au revoir, Mylène ! MF : Salut ! J : Je peux t’embrasser aussi ? MF : Oh oui, bien sûr ! J : OK. Mylène l’embrasse maintenant dans le cou, sur le menton, partout… J : (…) Salut, au revoir ! Mylène se tourne vers la caméra en riant de bon cœur et en faisant au revoir. Avant cette émission, Jacky et Mylène se sont rencontrés à La Coupole, célèbre restaurant du centre de Paris, pour déjeuner et préparer ensemble l’émission. Jacky avait pour coutume d’écrire quasiment tous ses textes. Il aimait aussi déguiser ses invités. Mylène a refusé, mais a accepté de se prêter au jeu de l’humour. Cela restera valable pour ses futures rencontres avec Jacky, à la radio comme à la télé.


1984–1985 : les débuts

Le 12/13

Date 06.03.1985 Chaîne FR3 Aquitaine Présenté par Michel André

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Mylène Farmer

Cette émission régionale de la mi-journée mélange informations locales, variétés et chroniques. Les deux invités du jour sont le comédien Jean Richard, venu présenter son autobiographie, et Mylène Farmer en pleine promotion de « On est tous des imbéciles ». Elle interprète le titre en tout début d’émission, habillée cette fois d’une large grenouillère verte, et revient sur le plateau plus tard pour une interview croisée avec Jean Richard face à un présentateur qui ne la prend guère au sérieux… Michel André : (il s’adresse à Jean Richard) Alors je voudrais vous demander  : vous connaissiez Mylène Farmer ? Jean Richard : Pas du tout ! (Mylène éclate de rire) Mais j’ai eu énormément de plaisir à l’entendre tout à l’heure ! MA : Vous avez entendu ce qu’elle a chanté ?! JR : Ah oui ! MA : Nous sommes tous des imbéciles ! JR : Tous des imbéciles ! Elle a l’air de s’y connaître ! (Mylène éclate de rire à nouveau)

MA : D’où vient ce titre ? Mylène Farmer : D’où vient ce titre ? Ben je vais vous dire surtout qu’il est très bien accueilli en général. MA : Ah oui, mais ça c’est un autre problème ! C’est une provocation systématique ? Parce qu’une autre chanson, c’était « Maman a tort ». MF : De la provocation, certainement. Agressive, je ne pense pas… MA : Non, j’ai pas parlé d’agressivité ! MF : Non, on m’a déjà parlé d’agression, c’est pour ça que je tiens à préciser ! MA : Ah oui mais attention, moi je suis pas responsable de ce qu’on a pu vous poser comme questions ailleurs qu’ici ! MF : Oui, de la provocation je crois qu’on en a besoin pour sortir un peu de la masse. MA : Alors vous êtes née à Montréal… MF : Oui, au Canada. MA : (Sarcastique) Ah c’est au Canada ? Dites donc ! Et vous aimez les voyages, vous y retournez ? MF : Non, je n’y suis jamais retournée. Je voyage dans la France pour l’instant et j’avoue que je ne suis pas retournée au Canada, non. MA : Mais qu’est-ce qui vous pèse le plus dans cette France d’aujourd’hui, dans ce métier que vous faites ? Vous êtes quand même, je dirais pas débutante, mais vous êtes une toute jeune chanteuse.

MF : Oui… Qu’est-ce qui me pèse le plus ? MA : Oui. Et qu’est-ce qui vous fait aussi le plus plaisir ? MF : Si je pense à mon métier, je pense que c’est un métier difficile et pesant quotidiennement, mais qui est aussi à la fois essentiel pour moi et plein de réjouissances. Enfin, c’est… MA : Vous aviez des raisons spéciales de vous lancer dans la chanson : une famille d’artistes ou de musiciens, un entourage… ? MF : Non, du tout. J’avoue que j’ai eu beaucoup de chance et c’est un peu par hasard. Moi je m’orientais plutôt vers une carrière d’actrice, si elle m’était proposée. Et puis la chanson est arrivée très, très vite. MA : En ce moment, on passe de l’un à l’autre assez facilement, alors la carrière d’actrice ça sera peut-être dans quelques années ! MF : Absolument, et je pense qu’il est plus intéressant de commencer, enfin en ce qui me concerne, de commencer par la chanson pour accéder au cinéma, parce que souvent l’inverse est beaucoup plus médiocre ! Le présentateur se tourne alors vers Jean Richard et revient longuement sur sa carrière. Ils parlent notamment de son célèbre cirque et fait réagir Mylène à ce sujet. MA : Je demanderai en même temps à Mylène Farmer est-ce que le cirque vous paraît tou-

« Il est plus intéressant de commencer par la chanson pour accéder au cinéma, parce que souvent l’inverse est beaucoup plus médiocre ! »


jours un grand moment de la vie artistique ? MF : (peu inspirée) Heu, je…Moi, j’avoue que le cirque ne m’a jamais beaucoup attirée ! Peutêtre les… MA : Ça vous fait peur ? MF : Non ! J’ai l’impression que c’est toujours un peu la même représentation qui se fait. Donc on va une fois au cirque, j’ai l’impression que ça n’évolue pas beaucoup. Jean Richard répond à Mylène en lui donnant sa vision du cirque traditionnel et de l’avenir qu’il espère pour celui-ci. MF : Mais je veux bien, j’avoue que de toute façon je suis profane en la matière donc c’est vrai que j’ai pas vraiment à porter de jugement. Mais ce sont des gens que je respecte en tout cas parce qu’ils font un métier très dur et assez beau. La conversation sur le cirque continue, notamment à propos des écoles de cirque dont Jean Richard désapprouve certaines méthodes. De nouveau, l’animateur demande son avis à Mylène. MF : Moi j’avoue que je préfère les personnes qui apprennent sur le tas. Je crois que c’est plus intéressant pour un artiste. Je pense pas qu’on apprend le talent, d’une part… MA : Oui mais y a pas un moment où, par exemple sur la composition, ou autres, y a des besoins qui se font sentir ? MF : Mais non, c’est justement un peu le propos de la chanson (« On est tous des imbéciles »), c’est que effectivement y a la musique, qui est quand même un art très large, moi c’est plutôt variété, et je suis interprète donc très peu musicienne, et je le reconnais et à la limite je le revendique. Donc c’est vrai que les notes de musique pour moi n’évoquent pas grandchose. J’ai pas besoin d’un…comment dire ?... d’une éducation musicale pour faire ce métier. MA : Mais comment en dehors de ça vous dialoguez, vous rencontrez le parolier, le compositeur, il y a une préparation qui se fait en commun, ou ils vous amènent tout ça tout prêt et vous prenez ça ? MF : Non ! Bien sûr, il y a une préparation, cela dit moi j’interviens sur les terrains que je connais un petit peu, à savoir sur le texte, je peux intervenir, sur l’interprétation ça c’est moi qui suis le maître, et puis les prestations… Mais en ce qui concerne la musique, je peux donner des indications ou donner mon avis, mais c’est difficile de s’installer et de dire « Voilà, je veux ça, ça, ça ! » quand on ne connaît pas ! MA : Vous ne vous mettez pas au piano en préparant une chanson ? MF : Non, j’avoue que j’ai jamais joué de piano. Un peu de guitare, mais…

L’émission est sur le point de se terminer. L’animateur présente à nouveau les mémoires de Jean Richard et enchaîne sur l’actualité de Mylène.

déjà choisi ? MF : Non. Le prochain, non, c’est en cours de préparation. Là, on prépare un album, et je vous dirai ça dans quelque temps ! MA : Ça sera du même style que les deux (45 tours) précédents ? MF : Ben, ça sera un peu de « Maman a tort », un peu de « On est tous des imbéciles », un peu de la face B, je crois qu’on essaye de… MA : Ah oui, alors la face B, on n’a pas eu le temps de l’écouter mais… «L’Annonciation » ! MF : Ça s’appelle « L’Annonciation », oui, ce qui est encore assez provocant, je crois ! (rires) MA : Oui… Dédicacé à Sainte Thérèse d’Avila et à Papa ! MF : Sainte-Thérèse d’Avila, et à Papa oui ! C’était pour la rime. Et pour le plaisir aussi (rires) MA : Bien ! Bonne route à Mylène Farmer avec ce nouveau disque. MF : Merci… MA : Vous la reconnaîtrez, elle a une robe rouge sur le disque. Elle a voulu faire le contraste sur notre plateau ! (Mylène porte en effet une large grenouillère verte) MF : (Elle montre sa grenouillère) Non, j’ai pris mon habit de clown pour Monsieur Maigret ! (le commissaire incarné par Jean Richard dans la série policière du même nom) JR : (rire attendri) L’habit de clown pour Monsieur Maigret ! C’est très gentil comme idée, en tout cas !

MA : Alors, il faut écouter les chansons de Mylène Farmer ! Le prochain titre, vous l’avez

L’émission se termine avec l’annonce des programmes à suivre.

La conversation continue avec Jean Richard qui porte un regard très critique sur le cinéma français en ce début des années 1980. MA : Vous allez au cinéma, Mylène Farmer ? MF : Oui. Moi, si j’ai un jugement à porter, je dirais qu’il y a une carence effectivement dans le cinéma, mais français surtout. A savoir que je pense que… JR : Ça en fait partie, ce que je viens de dire là…le cinéma français en fait partie. MF : Je pense qu’il y a suffisamment de metteurs en scène de talent, y a beaucoup de moyens, beaucoup plus qu’avant, et finalement ça rattrape pas effectivement le cinéma de… JR : … « de papa » ! MF : …d’avant, qui était de qualité. Le « cinéma de papa », oui ! MA : Et quel est le genre qui vous intéresse le plus ? Le style fantastique ? MF : (spontanément) Non ! J’aime pas du tout ! J’avoue que la science-fiction, j’ai beaucoup de mal ! J’aime bien les films qui ont des thèmes… JR : Moi j’étale mes regrets sur la comédie américaine. MA : Mais hier soir, FR3 a diffusé « Dracula »… MF : Voilà, ça je veux ! Tout à fait, oui !

Les jeux de 20h Date 13.03.1985 Chaîne FR3 Présenté par Marc Menant et Jean-Pierre Descombes

On retrouve une nouvelle fois Mylène dans ce jeu (elle y était déjà passée en août 1984). Cette fois-ci, c’est pour « On est tous des imbéciles » qu’elle interprète en fin d’émission, vêtue de la grenouillère verte qu’elle portait déjà dans le « 12/13 Aquitaine » une semaine plus tôt.


Ring Parade

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1984–1985 : les débuts

L’académie des 9

Date 20.03.1985 Chaîne FR3 Présenté par Guy Lux

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Mylène Farmer

Date 15.03.1985 Chaîne Antenne 2 Présenté par Jean-Pierre Foucault

Mylène est invitée une nouvelle fois à se joindre à la troupe de « L’Académie des 9 ». Elle ouvre l’émission en chantant « On est tous des imbéciles » dans une drôle de robe beige à carreaux très ample. On la retrouve ensuite dans une des cases du jeu où elle participe aux différents jeux successifs. Contrairement à sa précédente prestation dans la même émission, cinq mois plus tôt, il serait inutile de retranscrire ici les jeux où elle intervient car il s’agit de jeux de rapidité, tout va très vite, et les invités font des réponses très courtes et parfois monosyllabiques ! En revanche, il est important de noter une chose très étonnante : au cours du jeu, les invités doivent dessiner le cadeau que les candidats peuvent remporter s’ils gagnent la manche avec tel ou tel participant. C’est Mylène qui ouvre le bal en montrant un dessin de sa main qui représente une table dans un salon… dans le style exact qui sera celui du clip de « C’est une Belle Journée » (2002) et de son conte illustré « LisaLoup et le Conteur » (2003) !

Pour promouvoir « On est tous des Imbéciles », Mylène participe une nouvelle fois à cette émission de variétés de prime-time, dans laquelle sont notamment présents ce soir-là Eddy Mitchell, Phil Collins, Julie Pietri et un jeune groupe d’humoristes qui deviendront…les Inconnus. C’est habillée de sa désormais habituelle grenouillère verte et d’une veste rouge que Mylène interprète en direct la chanson. On la revoit durant le générique de fin avec tous les participants de l’émission.

Eurexporythmes Date 23.03.1985 Chaîne FR3 Rhône-Alpes

Dans le cadre de la Foire de Lyon, un podium est installé sur lequel défilent plusieurs artistes, dont Michael Jones, Sara Mandiano et Mylène Farmer. L’émission est pour le moins surréaliste car les gens passent devant le podium sans s’arrêter et les artistes font leur prestation plus ou moins dans le vide. Mylène arrive sur le podium dans la même tenue que pour le « Ring parade » proposé trois jours plus tôt, à savoir grenouillère verte et veste rouge. Elle interprète « On est tous des imbéciles » et est ensuite rejointe par un animateur, dont le nom n’est hélas pas précisé au générique. X : J’espère que vous l’avez tous reconnue ! Qui c’est ? Silence et aucune réaction du public ! X : C’est Mylène Farmer, « On est tous des imbéciles ». Et en plus, c’est une récidiviste parce que je crois que ton titre précédent, là, qui

avait fait jaser dans les chaumières c’était… ? Mylène Farmer : … « Maman a tort ». X : « Maman a tort », vous voyez c’est une drôle ! Es-tu vraiment persuadée qu’on est tous des imbéciles ? MF : Oui, mais je me comprends dedans donc tout va bien ! X : Ah bon, elle se comprend dedans ! Non, je crois que c’est au second degré. Il n’y a pas que le style, je crois qu’il y a beaucoup de fond aussi dans ce que dit, dans ce que pense Mylène Farmer. L’animateur annonce ensuite Sara Mandiano alors que Mylène descend du podium par la droite.


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1984–1985 : les débuts

Patatoès patatorum

Date XX.04.1985 Chaîne FR3 Lorraine Champagne Ardennes

Mylène est l’invitée de cette émission dans laquelle la parole est donnée aux enfants. Le thème du jour étant les voyages, l’animatrice questionne les quelques enfants sur les voyages qu’ils ont déjà faits. Mylène répond également à quelques questions et interprète « Maman a tort » et « On est tous des imbéciles ». Elle participe également au jeu fil rouge de l’émission.

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Mylène Farmer

Pour commencer, Mylène interprète « Maman a tort » dans un petit décor à fond blanc, devant un lit d’hôpital et une table de chevet, vêtue de sa grenouillère verte et d’une veste rose. La chanson terminée, Mylène rejoint l’animatrice et s’assied à ses côtés. X : Mylène, tu vas un peu nous dire tout ce qui s’est passé depuis « Maman a tort ». Mylène Farmer : Et bien, depuis « Maman a tort » j’ai préparé un autre 45 tours qui s’intitule « On est tous des imbéciles » et j’ai terminé la promotion de ce disque, et puis pour la suite

je vais sortir un album, je pense aux alentours de septembre, octobre (« Cendres de lune » ne sortira finalement qu’en avril 1986). X : Dans le même style ? MF : Oui, on va garder le même style (rires). X : D’accord. Et Mylène, toutes tes envies de faire des instruments, enfin de jouer des instruments, de faire un peu de comédie, des choses comme ça… ? MF : Pour l’instant, j’ai toujours les mêmes passions, qui sont la lecture et le dessin. Quant au théâtre, je le laisse de côté pour l’instant. Je vais essayer de parfaire ce métier de chanteuse, et puis je vais peut-être voyager, puisque c’est le sujet ! X : Oui, est-ce que t’aimes bien voyager ? MF : Bien sûr, oui ! J’ai pas la chance pour l’instant de voyager, parce que j’ai pas beaucoup de temps, mais j’irai sans doute au Canada prochainement. X : Pour ton métier ? MF : Non, non, non : pour des vacances ! (rires) Des enfants arrivent alors sur le plateau et s’asseyent aux pieds de l’animatrice et de Mylène. La présentatrice s’intéresse alors à eux et les interroge sur les pays qu’ils ont déjà visités, avant de poser la même question à Mylène. X : Mylène, t’as voyagé quand t’étais petite ? MF : Je suis allée de Montréal en France, je suis

allée aussi en Guadeloupe et en Angleterre. C’est tout. X : D’accord, donc pas encore dans les pays plus lointains. MF : Non. Après la diffusion d’un extrait du film « Roar » consacré aux lions, on retrouve Mylène avec un petit chien blanc sur les genoux qu’elle caresse chaleureusement. La présentatrice présente ensuite aux enfants des petites poupées en costume traditionnel de différents pays et ils doivent deviner leur pays d’origine. Ils en reconnaissent certains mais sèchent sur un en particulier… X : Tu sais toi, Mylène ? MF : Oui, c’est le Pérou ! Le jeu continue avec d’autres poupées. L’animatrice lance ensuite le jeu fil rouge de l’émission : l’invité présente un objet mystère et les téléspectateurs doivent écrire à l’émission pour donner leur réponse. MF : Je vais vous présenter mon papatoès…patatoès ! Alors, c’est un tout petit objet qui est en plastique et en aluminium, il comporte des numéros dessus et on le met autour de quelque chose. Voilà ! L’animatrice énonce l’adresse à laquelle écrire


La grande suite

pour donner sa réponse. On aura la réponse au patatoès de Mylène dans l’émission du mois suivant : il s’agissait d’un petit compteur à accrocher au bout d’une aiguille à tricoter afin de compter ses mailles et ses rangs. X : Mylène, est-ce que c’est vrai qu’on est tous des imbéciles ? MF : Oui, affirmatif ! X : Affirmatif ? Tu vas encore nous le redire, alors ?! MF : Oui !

Date 14.05.1985 Chaîne TF1

Mylène est présente dans cette émission de prime-time pour interpréter « On est tous des imbéciles ». Pour l’occasion, elle porte une tenue inédite : une élégante robe longue noire décolletée, ainsi qu’un tour de cou paré de brillants. La séquence a lieu en extérieur, sur une sorte de terrasse décorée de plantes et sur laquelle des gens sont attablés pour dîner.

Mylène se lève et va interpréter « On est tous des imbéciles » dans un coin du plateau au milieu de quelques bustes de mannequins posés sur des colonnes. A la fin de la chanson, l’animatrice salue les téléspectateurs et l’émission s’achève.

Aujourd’hui la vie Date 13.05.1985 Chaîne Antenne 2 Présenté par Dominique Verdeilhan

© Sygma-Corbis

Dans le cadre du thème « Chansons témoins, chansons miroirs », Mylène vient interpréter « On est tous des imbéciles ». C’est à nouveau habillée de sa grenouillère verte surmontée d’une veste rouge qu’elle effectue sa prestation, face aux intervenants de l’émission comme Francis Lemarque ou Daniel Guichard. La chanson finie, Mylène salue dans leur direction et quitte le plateau.


1984–1985 : les débuts

Paris kiosque Date 25.05.1985 Chaîne FR3 Paris-Île-de-France Présenté par Jacques Mailhot

Cette émission de l’après-midi est composée de rubriques diverses et de variétés. Mylène vient ce jourlà interpréter « On est tous des imbéciles ». C’est surtout l’occasion de découvrir sa toute nouvelle coupe de cheveux, légèrement plus courte et moins épaisse.

La clé des chants Jacques Mailhot : Nous allons accueillir maintenant sur le plateau de « Paris Kiosque » une jeune chanteuse qui monte, qui monte à tous les hit-parades : Mylène Farmer, qui va nous interpréter son dernier tube « On est tous des imbéciles ». Mais oui ! Sur le plateau, Mylène, qui revêt encore sa grenouillère verte, mais surmontée cette fois d’une veste noire, chante et danse « On est tous des imbéciles », entourée du public et des différents intervenants assis à des tables de bistrot. La chanson finie, elle salue et Jacques Mailhot la rejoint. JM : Bravo, chère Mylène Farmer ! Mylène Farmer : Merci ! JM : A très bientôt pour un nouveau tube, je sais que vous n’arrêtez pas d’en sortir donc y a

Date 15.08.1985 Chaîne FR3 Nord-Pas-de-Calais

Comme quelques mois plus tôt, Mylène est présente dans cette émission, cette fois pour défendre « On est tous des imbéciles », qu’elle interprète déguisée de son éternelle grenouillère verte !

pas de problème ! MF : On va préparer un album, on va essayer de faire plein de tubes ! JM : Un grand, grand ? 30 centimètres, carrément ? MF : Un 30 centimètres, avec neuf ou dix titres… JM : (…) Je vous dis à très bientôt, au revoir Mylène ! MF : A très bientôt ! Mylène quitte le plateau.

Île de transe

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Mylène Farmer

Date 31.10.1985 Chaîne FR3 Paris- Île-de-France Présenté par Philippe Bachmann

Après plus de deux mois de silence pendant lesquels elle a changé de maison de disques, Mylène rend une nouvelle visite à Philippe Bachmann (elle a déjà été trois fois son invitée sur FR3 Pyrénées). C’est avec sa nouvelle coupe encore plus courte et une petite robe vert clair, qu’elle vient présenter son tout nouveau single, « Plus grandir », et qu’elle rechante pour l’occasion « Maman a tort », et livre une longue interview, dans laquelle elle parle, entre autres du premier album qu’elle est en train d’enregistrer. Philippe Bachmann : Bonjour à tous, bien-

venue sur notre « Île de Transe ». Invitée aujourd’hui, Mylène Farmer. C’est son troisième 45 tours… Mylène Farmer : Bonjour Philippe PB : Bonjour ! Troisième 45 tours, disais-je, « Plus grandir »… MF : Oui… PB : Alors, ‘récapépète’ un petit peu ce qu’il y avait avant ! MF : On ‘récapépète’, alors ! Le premier étant « Maman a tort », qui… PB : (il l’interrompt) Le deuxième ? MF : Le deuxième étant « On est tous des imbéciles ». PB : Voilà. « Maman a tort », c’était y a deux ans de ça à peu près ? MF : Il y a deux ans, oui. PB : Alors, il y avait pas le Top 50 à cette époque-là, mais ça marchait super bien dans les hits, ça s’est très, très bien vendu. MF : Oui…

PB : C’était bien, pour une première expérience. Comment tu as débuté, d’ailleurs ? MF : J’ai eu la chance de rencontrer deux personnages, qui ont écrit cette chanson. PB : Des noms ! Des noms ! MF : Et bien, il y avait Jérôme Dahan et Laurent Boutonnat. PB : Où tu les as rencontrés ? Comme ça, par hasard ? MF : Non, ça serait trop long à raconter, mais ça s’est fait un peu par hasard, quand même. PB : Mais y a que des bons hasards, dans ce métier ! MF : Absolument ! (rires) PB : Bon, dis-moi, mon petit doigt m’a dit… MF : Certes ! (Mylène éclate de rire) PB : …que tu avais un superbe animal domestique chez toi, mais assez spécial quand même. MF : Oui, j’ai un petit singe, qui est un capucin… PB : C’est comment les capucins ? MF  : Le capucin ressemble à un petit chimpanzé,


c’est aussi joli. PB : Ça a une longue queue ? MF : Ça a une queue assez grande, oui, qui lui sert de cinquième bras. PB : Ah, il joue avec ?! Alors, tu as mis des arbres chez toi pour qu’il puisse grimper ? MF : (rires) Non, pour l’instant…Pas encore ! Pour l’instant, il a une grande cage. PB : Et qu’est-ce qu’il mange, ce brave capucin ? MF : Tout ce que vous mangez, avec la viande en moins ! PB : Bon, alors on peut l’inviter avec toi, alors maintenant faut l’inviter avec toi, quoi. MF : J’ai déjà essayé de l’amener sur un plateau, il y a quelques problèmes (rires). PB : Qu’est-ce que ça donne ? MF : Il a très peur des gens. PB : Et puis il grimpe aux cintres, un peu, non ? MF : Un peu, il est farouche. PB : Bon, retour en arrière. Il y a deux ans, donc : « Maman a tort ». Si on se refaisait ça pour le plaisir ? MF : Oui ! Diffusion d’une séquence où Mylène, habillée autrement, interprète « Maman a tort » devant un fond incrusté représentant une main qui compte sur ses doigts en suivant la chanson. PB : Dis donc, ton petit chimpanzé, il va falloir lui apprendre à danser, maintenant ! MF : Il chante, déjà ! Il écrit…et il prend des cours de danse ! PB : Il prend des cours de danse ?! Alors, dismoi une petite chose : j’ai vu que tu avais un truc superbe sur le dos pour « Maman a tort », là encore tu es mignonne comme tout… MF : Merci ! PB : Comment tu fais pour t’habiller ? C’est toi qui dessines tes trucs ? Comment ça se passe ? MF : Je ne dessine pas, je réfléchis et puis je vois avec…là, c’est une couturière qui m’a aidée, qui a réalisé cet ensemble. PB : Les couleurs sont importantes ? MF : Très importantes, oui. PB : Il y en a qui sont superstitieux, qui veulent jamais mettre de vert à la télévision, toi tu en mets ! MF : Je sais, oui ! On m’a déjà reproché sur « Maman a tort » d’avoir mis du vert sur un plateau, parce que ça porte malheur (c’est en fait pour « On est tous des imbéciles » que

Mylène arborait du vert…et force est de constater que ça n’a pas porté chance au single…). PB : Ben ça t’a porté bonheur, plutôt ! MF : Pour l’instant oui, donc je ne fais pas de cas de ça. L’animateur lance la séquence suivante, dans laquelle il présente diverses nouveautés. PB : (…) Ensuite, un petit groupe de Rennes qu’il faut que je te présente. Ça s’appelle Niagara. Alors, c’est sympa, ils font de la scène depuis assez longtemps, quand même. MF : C’est un joli nom. PB : C’est un joli nom et ce qui ne gâche rien, c’est que dans les chœurs on retrouve un certain Etienne Daho. Tu aimes bien Etienne Daho, toi ? MF : Oui. PB : Qu’est-ce que tu écoutes comme disques, toi ? MF : Il m’arrive d’écouter de la musique classique. Dans la variété française, j’aime beaucoup Jacques Dutronc. PB : Il fait plus grand-chose, Jacques Dutronc, malheureusement… MF : Non, mais il réapparaît… PB : Une fois de temps en temps ! MF : …et c’est très bien à chaque fois. (…) PB : Sinon, en musique classique, tu m’as dit, qu’est-ce que tu écoutes en musique classique ? MF  : J’aime beaucoup Wagner, j’écoute Mahler, j’écoute plein de choses. Très éclectiques, comme choix. PB : Comment tu choisis les musiques de tes chansons ? Comment ça se passe ? MF : Je sais pas si...Enfin, je les choisis, on me les…Les personnes qui travaillent… PB : Oui, mais tu dis oui ou non quand on te propose les choses, non ? MF : Bien sûr. Y a des choses qui me plaisent plus. Je crois que c’est au travail que… (elle se reprend) heu au piano que ça se fait. On me propose une mélodie, et puis j’aime tout de suite ou j’aime pas du tout. PB : Le texte est important dans tes chansons. MF : Bien sûr, bien sûr. Très important, capital. PB : On en parle un petit peu plus ? « Plus grandir » : comment naît un texte comme ça ? C’est après la musique ? MF : Là, ça s’est fait un peu par hasard. Oui,

c’est né après la musique. Cette fois-ci, c’est moi qui l’ai écrit. PB : Ah ah ! MF : Non, ça n’a rien de vengeance. Je sais pas si je renouvellerai cette expérience. Ca s’est fait par hasard. PB : Pourquoi ? C’était trop dur ? MF : C’est très, très difficile d’écrire un texte. Ça doit être concis, précis et j’avoue que j’ai eu du mal. PB : Il y a des trucs pour bien écrire un texte, ou pas ? MF : Je crois qu’il faut beaucoup de tranquillité, et puis surtout la tranquillité d’esprit que je n’ai pas ! PB : Tu l’as eu quand même pour « Plus grandir » ! MF : Oui ! PB : On l’écoute ? « Plus grandir », le nouveau 45 tours de Mylène Farmer. Mylène interprète « Plus grandir » avec derrière elle des images alternant entre la pochette du disque et le visuel du landau indiquant « Mylène Farmer : 1962-1985 » (ce qui est étonnant, puisque la chanteuse est née en 1961. Une volonté de l a rajeunir ou de cacher sa vraie date de naissance ?). PB : Mylène Farmer, « Plus grandir », c’est son troisième 45 tours. Tiens, je te rends ton petit micro… (il tend son micro à Mylène) MF : Merci ! PB : Y a un album en préparation ? MF : Il y a un album qui sortira vers janvier. PB : Alors tu vas réécrire des textes, quand même, ou pas ? MF : Non, il est terminé, là il est clos. Il n’y aura que « Plus grandir » de ma plume. (Il faut croire que « Au bout de la nuit », écrit par Mylène n’était pas encore prévu au menu de l’album qui sortira finalement en avril et non en janvier) PB : Bon, ben c’est déjà pas mal ! MF : C’est déjà bien. PB : Il y a un clip qui vient de se tourner sur « Plus grandir », non ? MF : Oui, il y a un clip qui a été tourné en cinémascope. PB : Alors, c’est pour le cinéma ? MF : J’espère qu’il ira au cinéma, qu’il fera l’avant-première d’un film. PB : Oh ben oui, parce qu’à la télévision ça serait dommage quand même.


1984–1985 : les débuts

MF : Oui, c’est pas suffisant, l’écran est trop petit. PB : C’est toi qui as décidé de le faire en scope ? MF : Non, non, c’est le réalisateur, qui est également mon compositeur. Des noms, encore ? PB : Oui ! MF : Allez…Laurent Boutonnat ! (rires) PB : Voilà, fallait le dire. Bon, ce cinémascope, ce clip, comment il a été tourné ? MF : Il a été tourné en un peu moins d’une semaine. Le premier jour était de l’extérieur dans un cimetière, et… PB : Toujours très gaie, Mylène Farmer ! (rires) MF : Oui ! Et les quatre autres jours se situaient dans un décor qui retraçait le… C’est un décor, c’est une chambre de château baroque avec des toiles d’araignée partout. C’est un bel univers. PB : Bon, dès qu’il sort, tu nous le donnes qu’on le montre un petit peu à tous les téléspectateurs. MF : Je vous inviterai à la projection. PB : Ah oui, en cinémascope et tout, ça va être superbe, ça ! Dis-moi, au niveau cinéma c’est « Rosemary’s Baby » ton film préféré, ou pas ? MF : Non, mais j’aime bien ce film. J’aime surtout l’interprète (Mia Farrow) et le metteur en scène (Roman Polanski) ! PB : Tu vas souvent au ciné ? MF : J’y vais assez régulièrement, oui. PB : Qu’est-ce que tu as vu de bien, récemment ? Des noms, des noms ! MF : Euh…Je ne sais pas, j’ai vu…Le dernier film que j’ai vu c’était « Mad Max ». PB : Oui…3 ! MF : Le 3 ! PB : Y a pas de raison, il est pas mal le petit australien, hein ? (Mel Gibson) Bon, tu sais que c’est l’heure de se quitter, alors à la prochaine ! On découvrira ton clip très vite… MF : D’accord ! PB : Merci, Mylène Farmer ! MF : Merci à vous !

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Mylène Farmer

Ils se font la bise et Mylène glousse en faisant « au revoir » avec la main. Générique de fin.

Super Platine Date 21.12.1985 Chaîne Antenne 2 Présenté par Jacky

Retour de Mylène sur le plateau de « Platine 45 » pour cette édition spéciale de Noël. Elle y est habillée d’un tailleur vert clair et vient présenter le clip de « Plus grandir ». L’ambiance est toujours aussi détendue entre elle et Jacky et, comme lors de la venue précédente de Mylène à l’émission, elle coprésente l’émission avec Jacky sur toute sa durée, à l’exception de quelques lancements. Mylène Farmer : (Avant même que Jacky n’ait pu parler) Bonjour tout le monde ! Jacky : Oui, voilà j’allais le dire justement ! (Mylène rit de bon cœur) Bonjour tout le monde, c’est « Super Platine ». MF : Bonjour tout le monde. J : Comment vas-tu, Mylène Farmer ? MF : Et toi-même ? J : Ben ça va très bien… (Aux téléspectateurs) Parce que c’est Mylène Farmer, tout le monde t’a reconnue, j’espère ! MF : Tu as l’air bien fatigué, Jacky. J : Oui. Toi aussi, d’ailleurs ! MF : Ah bon ? Qu’est-ce qu’on a fait hier soir ? J : On était ensemble, ou… ? MF : C’est la question suivante, je pense ! J : Ah oui d’accord, ok ! Mais qu’est-ce que tu fais généralement, le week-end, toi au fait ? MF : Ben écoute, vendredi soir, je crois que j’étais dans ton lit ! J : Oui… MF : Et puis samedi matin, on s’est réveillés et puis on est venus là, en plateau. J : Oui…Tu crois qu’on peut le révéler, comme ça, aux téléspectateurs ? MF : Oh, c’est pas grave. J : C’est pas très grave, ça y est, tant pis ! On va parler du programme de « Super Platine », ok ? MF : Oui, avec plaisir ! J : On va démarrer par Alba, ça s’appelle « Only

Music Survives ». MF : Hmm… J : Très sympathique. Ensuite, Bruno Grimaldi, ça s’appelle « Retour de Manivelle ». MF : C’est bien ! J : C’est sympa, hein ? (Il continue sa liste) « Sun City »… MF : Ça me dit quelque chose… J : (Toujours énumérant les invités) Mylène Farmer : tu connais ? MF : Non, c’est qui ? J : Deux chansons de Mylène Farmer… MF : Et y a un clip, je crois ? J : Oui ! « On est tous des imbéciles », et après « Plus grandir ». Après, les Korgis : tu connais ? MF : Oui, oui… J : Egalement, et les Communards. MF : Ah ça, j’adore ! J : Tu adores ? MF : Oui. J : Pour quelle raison ? MF : Je trouve cette chanson (« You are me world ») très, très belle et un peu baroque. J : Très baroque. C’est pour ça que ça s’appelle les Communards ! MF : Hmm…En tout cas, c’est très intéressant. J : On va commencer par quoi alors, pour voir si tu m’as écouté ! MF : Heu…Alba l’beurre ! Diffusion de la chanson d’Alba. S’ensuivent d’autres séquences sans Mylène où Jacky lance plusieurs autres clips, dont celui de « Sun City ». J : Voilà, c’était Sun City, dans « Sun City ». Sympa, hein ?


MF : Avec Sun City ! J : (…) Superbe chanson contre l’apartheid. MF : Absolument. Il y a des grandes stars, je crois, qui chantent pour ce… J : Très grandes stars…Dis-moi Mylène, est-ce que ta maman a toujours tort ? MF : Très bonne question ! Ma maman s’en est remise depuis. Après, on a eu « On est tous des imbéciles » (rires) ! J : Oui, alors des imbéciles s’y sont retrouvés ? MF : Des imbéciles s’y sont retrouvés, mais là tout va bien ! J : Tout va très bien… MF : Et elle vous embrasse d’ailleurs ! (sa maman) J : D’accord. Tu me vouvoies, maintenant ? MF : Oui, ça change ! J : Ah bon, ça change un peu, oui. Et « Plus grandir », alors : qu’est-ce qui se passe ? MF : Il se passe que il y a un clip qui s’est greffé sur cette chanson, et auquel je tiens énormément. C’est un clip qui a été réalisé par Laurent Boutonnat. J : En cinémascope ? MF : En cinémascope, oui. J : Pourquoi ? MF : Parce que c’est magnifique, le cinémascope. C’est peu usité, en plus, surtout en clip. J : Et tu trouves que ça se prête à la télévision française, ou étrangère, le cinémascope ? MF : Oh oui, tout à fait. J : Ça te gêne pas qu’il y ait des… MF : Les deux barres ? Non, ça c’est le cachet en plus. Donc, c’est un clip que j’aime beaucoup. J : Ben oui, je m’en doute ! MF : Non, je m’en doute pas ! Là, c’est vraiment sincère et j’ose le dire. J : T’as peur de vieillir, alors ? MF : J’ai peur de grandir, oui. T’as pas peur de grandir, toi ? J : Non, moi je suis arrivé à mon top-niveau, si tu veux : je fais 2, 20 mètres, ça va hein ? (rires de Mylène) Non mais la vieillesse, ça te fait vraiment peur ? MF : Oui, c’est quelque chose qui me fait peur, mais je crois que c’est un sentiment qui est

commun à beaucoup de personnes, hein ? J : Ben oui, je pense. Ok. Donc, on va d’abord regarder « On est tous des imbéciles». MF : Le scopitone, comme on dit, non ?! J : Ah non, pas scopitone. T’es quand même pas si vieille que ça, écoute ! MF : Je suis encore jeune ! (rires) J : Alors, « On est tous des imbéciles », et ensuite « Plus grandir ». MF : D’accord. J : Ok ? MF : Yes ! J : Allons-y, medley de Mylène Farmer ! Diffusion à la suite de la séquence où Mylène chante « On est tous des imbéciles » enregistrée pour sa venue à la même émission en début d’année et du clip « Plus grandir » (la séquence d’ouverture a été coupée). D’autres clips suivent, notamment un des Communards. J : Et bien voilà, c’étaient les Communards. Sympa, les Communards hein ? MF : C’est très bien. Comment elle s’appelle sa chanson, déjà ? J : « You are my World ». MF : A ton avis, il s’adresse à une fille ou un garçon ? J : Peut-être aux deux, non ? MF : Non, je crois que c’est à un garçon. J : Ouais, moi aussi, mais enfin… MF : C’est ce qu’on m’a dit. J : Qu’est-ce que tu fais pour Noël ? MF : Pour Noël, je crois que je vais m’occuper de mon petit singe, comme ce sera son premier Noël avec moi. J : C’est ton enfant ? MF : C’est mon bébé, oui. J : Un bébé singe ! MF : Je vais le cajoler, je vais lui offrir plein de cadeaux ! J : Et faire un sapin de Noël ? MF : Peut-être un sapin de Noël, oui. Très bonne idée ! J : (Aux téléspectateurs) En tout cas, moi je vous

souhaite un joyeux Noël, parce que c’est quand même dans trois-quatre jours, hein ! MF : Ah oui, joyeux Noël… J : …à tous…et à toutes ! MF : Oui ! (rires) J : L’émission se termine, Mylène. MF : C’est dommage. J : C’est dommage, hein ? On se reverra ? MF : Il me semble qu’à la première émission, on s’était embrassés sur les deux joues, et là je crois qu’on peut faire plus fort ! J : C’est-à-dire ? MF : On peut se faire un baiser sur la bouche ! J : Euh… (Aux téléspectateurs) Qu’est-ce que vous en pensez ? MF : Allez ! J : Bon d’accord ! Je dis au revoir d’abord, parce qu’après ça va être terrible ! (…) Excusez-moi, je suis déjà un peu troublé d’avance ! MF : Assume ! J : Au revoir, et joyeux Noël ! Le générique se lance sur un gros plan de profil de Mylène et Jacky se faisant un baiser sur la bouche !

Tapage nocturne Date 27.12.1985 Chaîne TF1

Mylène vient chanter « Plus grandir » dans cette émission musicale de fin de soirée. Elle est habillée d’un ensemble turquoise et d’un bustier bordeaux et exécute un semblant de chorégraphie assez particulier à grands coups de bras en l’air et de déhanchés…



1986 1987 Cendres de lune 01.04.1986 Single « Libertine » & Album « Cendres de lune » – 12.02.1987 Single « Tristana » – 16.11.1987 Single « Sans contrefaçon »


1986–1987 : Cendres de lune

Hit des clubs Date XX.01.1986 Chaîne RTL TV Présenté par Jérôme Anthony

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Mylène Farmer

1986

Mylène continue la promotion de « Plus grandir » dans cette émission de classements musicaux de la chaîne RTL TV alors diffusée dans l’Est de la France et devenue depuis RTL 9. Mylène donne pour l’occasion une prestation à la limite de l’expérimental ! Elle est en effet habillée d’un simple tutu blanc et d’un petit débardeur, blanc également. Elle exécute sur la chanson un semblant de chorégraphie. Sur le pont de la chanson, elle se met alors à tourner sur elle-même comme une petite ballerine puis tape ensuite dans ses mains avant de revenir à des mouvements plus classiques pour terminer la chanson. Une prestation aussi étrange que réussie ! Pour l’anecdote, l’émission est présentée par un tout jeune Jérôme Anthony qui a depuis officié dans les matinales de M6.

L’académie des 9 Date 14.01.1986 Chaîne Antenne 2 Présenté par Jean-Pierre Foucault

Nouvelle télé pour « Plus grandir » et nouvelle participation de Mylène à ce fameux jeu (la troisième en deux ans et demi). Lors du générique de début, Jean-Pierre Foucault présente les invités successifs, tous placés dans les cases de la grille du jeu (outre Mylène, on trouve notamment Sim, Sophie Garel et Hervé Vilard). Jean-Pierre Foucault : « L’Académie des 9 » avec (…) Mylène Farmer, pour la première chanson. Aussitôt après la présentation, Mylène chante « Plus grandir », en veste turquoise et bustier bordeaux, dans un coin du plateau. Le jeu débute ensuite. Pendant celui-ci, Mylène est sollicitée à plusieurs reprises par les candidats. JPF : (il s’adresse à la candidate) Et maintenant, vous allez pouvoir, je l’espère, tracer votre ligne, Michèle, avec… ? Michèle (la candidate) : …Mylène Farmer. JPF : Avec Mylène Farmer, bien sûr ! Voici la question, Mylène Farmer, écoutez bien : la journaliste américaine Elsa Maxwell disait : « La carrière d’une star commence quand elle a du mal à rentrer dans son chemisier et elle se termine quand elle a du mal… ». Du mal à quoi ? Le chronomètre démarre et les réflexions des autres participants fusent pendant que Mylène réfléchit. Mylène Farmer : (elle répète pour elle-même) Elle a du mal à rentrer dans son chemisier… Jean-Pierre Foucault répète la question. MF : …à enlever ses chaussures ! …Euh… Quand elle a du mal à boutonner son chemisier, non, elle arrivera à le faire… JPF : Non… MF : Euh… (Mylène sourit aux diverses blagues des autres participants). Fin du chronomètre JPF : Et bien, « La carrière d’une star commence quand elle a du mal à rentrer dans son chemisier et elle se termine quand elle a du mal à entrer dans sa jupe ». Voilà ce que disait Elsa Maxwell ! Vient ensuite l’épreuve « Le Dernier des 9 », où

chaque participant doit répondre à la suite à des questions à choix multiples. JPF : Mylène Farmer, voici la question : la perdrix du Sahara ressemble vraiment à un canadair, ça je peux vous le dire en effet (petit rire de Mylène). Alors, est-ce qu’elle fait un incessant va-et-vient entre la mer et le désert où elle niche, est-ce qu’elle tourne juste au dessus des feux allumés par les nomades, ou est-ce qu’elle utilise ses plumes sous le ventre pour transporter de l’eau ? MF : (elle réfléchit un peu) Troisième solution ! JPF : (…) Bonne réponse de Mylène Farmer ! Autre manche : Mylène est à nouveau sollicitée. JPF : Mylène Farmer… MF : Oui ? JPF : Si je vous dis Braga, où est-ce que nous allons ? MF : Euh… (on lui souffle une réponse farfelue) Hein ?! (elle sourit) Autriche ? JPF : Non, c’est le Portugal, c’est pas le même quartier ! Mylène rit de son erreur. L’émission se termine ensuite sans que Mylène ne soit plus sollicitée.


Le clipt

Champs ÉLYSÉES

Date 07.02.1986 Chaîne FR3 Méditerranée Présenté par Thierry Bézer

Dernière promo pour « Plus grandir ». Le principe de cette émission musicale est de présenter chaque jour de la semaine plusieurs chansons et les téléspectateurs votent pour reconduire leur chanson favorite de jour en jour. Mylène est au programme du jour avec « Plus grandir », qu’elle interprète en incrustation sur fond bleu. Elle porte une tunique chinoise rouge surmontée d’un long manteau rose. La prestation semble avoir plu, car on la trouve rediffusée lors des émissions des 11 et 13 février, où elle a notamment pour ‘concurrent’ « Sorry Angel » de Gainsbourg.

Date 15.03.1986 Chaîne Antenne 2 Présenté par Michel Drucker

Mylène ne vient pas ici pour sa propre promo, mais pour la bonne cause. En 1985, les premières grandes réunions d’artistes à but caritatif connaissent un immense succès (Band Aid, USA for Africa, Chanteurs sans frontières,…). Dans la foulée, chacun y va de son projet. Goldman signe la chanson pour les Restos du Cœur créés par Coluche. U2 réunit une dizaine d’artistes contre l’apartheid en Afrique du Sud autour du titre « Sun city ». Alice Dona lance le projet « Femmes du monde » avec vingt-cinq chanteuses, et compose « La chanson de la vie » au profit de l’association Care France. Nicole Croisille, Michèle Torr, Julie Piétri, Marie Myriam, Sheila font partie du casting. Michel Drucker profite de son émission pour soutenir le projet en recevant Alice Dona. Mais réunir les vingt-cinq chanteuses pour une émission en direct un samedi soir n’est pas facile. Ainsi, Barbara, Jane Birkin et Dorothée n’ont pas pu être présentes. Le disque étant sorti chez Polydor, Alice Dona contacte d’autres chanteuses du label pour remplacer les absentes. C’est ainsi que Mylène se retrouve parmi la troupe ce soir-là pour interpréter en direct « La Chanson de la Vie », alors qu’elle n’était pas sur le disque. Sur le pré-générique de l’émission, Pierre Perret, qui est l’invité d’honneur du jour, fait le tour des

coulisses en compagnie de Michel Drucker et salue les autres invités de l’émission. Mylène est assise à une petite table sur laquelle trône un seau à champagne ; elle a d’ailleurs une coupe à la main. Pierre Perret la salue, Michel Drucker également et il demande à Pierre Perret s’il connaît Mylène. Celui-ci répond :  « Mylène Farmer, on ne la présente plus ! » (ironie ?!) et Mylène précise : « On s’est rencontré en haut de l’escalier, là-bas! ». Drucker, comme d’habitude n’a pas écouté (!) et dit : « Ah, vous le connaissez depuis que vous êtes toute petite ?! ». Et ils passent aux invités suivants avant de lancer le générique. Plus tard dans l’émission, Alice Dona, assise aux côtés de Michel Drucker, accueille les chanteuses une à une en les présentant. Voilà ce qu’elle dit quand Mylène arrive : « Une remplaçante pour un soir, très adorable : Mylène Farmer ». Cheveux bruns, tirés en un très court catogan, et vêtue d’un tailleur marron, Mylène porte de larges boucles d’oreilles dorées (ce qui est assez inhabituel chez elle). Elle est la seule des vingtcinq artistes à se présenter avec un verre de champagne à la main. Les rumeurs de l’époque ont d’ailleurs dit que cela avait fortement déplu à Michel Drucker… La chanson commence. Chaque chanteuse y va de son couplet. Au milieu de ces chanteuses à voix, Mylène ne chante qu’une toute petite phrase, qu’elle minaude presque : « Tu chantes/ Seule avec tes petits/ Sans haine, tu chantes/ La chanson de la vie ». La chanson terminée, toutes s’assoient sur des marches et sont rejointes par Michel Drucker qui parle à nouveau avec Alice Dona. Lors du générique de fin, tous les artistes présents lors de l’émission sont réunis sur le plateau. Mylène est à côté d’une artiste de cirque qui a présenté plus tôt dans l’émission un boa qu’elle porte encore autour du cou. Mylène caresse le serpent en discutant avec cette femme.


1986–1987 : Cendres de lune

Pour le plaisir

Date 20.04.1986 Chaîne FR3 Alsace Présenté par Christian Daniel

Si Mylène est déjà venue dans cette émission un an avant, cette prestation est cependant unique. Afin de présenter son nouveau single, « Libertine », Mylène est bel et bien vêtue de la veste bleue et du corsaire blanc qu’elle portera pour beaucoup d’autres télés sur ce titre mais… elle est encore brune, les cheveux (courts) coiffés en petit catogan et le visage très poudré. Elle chante d’abord « Maman a tort » (complètement incongru avec ce look !), répond à quelques questions de l’animateur puis chante « Libertine ». Mylène chante « Maman a tort » puis rejoint Christian Daniel et s’installe sur un tabouret. Mylène Farmer : Merci beaucoup ! Christian Daniel : Mylène, « Maman a tort ».

Mylène, j’ai relevé quelques-unes des paroles dans vos chansons et j’ai le sentiment un petit peu, votre sourire a l’air de me démentir, que vous aimez chanter un petit peu la mélancolie et la tristesse. Je me trompe ? MF : C’est vrai, je dois être une personnalité un peu mélancolique. Il y a quelqu’un de très célèbre qui disait que la vie pourrit l’esprit et que la mort pourrit le corps. Je sais que c’est très philosophique et très macabre, mais parfois il y a des moments qui sont prodigieux dans la vie aussi. CD : Est-ce que vous êtes comme ça dans la vie ? Mylène hausse les épaules d’un air amusé. CD : Mylène, je relève : « La vie est triste », « Aimer c’est pleurer », « J’aime ce qu’on m’interdit », « Les plaisirs impolis »… MF : C’est vrai, je pense qu’il y a des moments qui sont terriblement cruels dans la vie et également des moments qui sont prodigieux. Je dois être certainement quelqu’un de mélancolique, mais je pense pas que ça soit incompatible avec ce métier et avec la joie de vivre. CD : Est-ce que vous n’essayez pas également un petit peu dans vos chansons de provoquer,

d’être un petit peu provocante ? MF : Si, ça depuis le début ! « Maman a tort », après y avait « On est tous des imbéciles », maintenant « Libertine », c’est vrai que j’ai le goût de la provocation mais c’est un peu le but de… comment dire ? …de vouloir défaire les choses, un peu, provoquer, oui… CD : L’album, avec en titre le nouvel album (sic !) « Libertine ». Alors, vous dites carrément « Je suis une libertine, je suis une catin » – ça, c’est de la provocation, ça ! MF : Oui, à cela je vous réponds que nous sommes tous la prostituée de quelque chose ou de quelqu’un, certainement oui ! CD : Ecoutez, on va écouter « Libertine ». Auparavant, je vous prends par la main pour votre amener sur notre étoile. Mylène Farmer : « Je suis libertine » (sic !). Il joint le geste à la parole, et Mylène chante sa chanson en effectuant la chorégraphie qui sera systématiquement celle de « Libertine ». Elle revient à la fin de l’émission pour le générique de fin, au milieu des autres invités et porte un grand bouquet de fleurs dans les bras.

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Mylène Farmer

C’est encore mieux l’après-midi Date 28.04.1986 Chaîne Antenne 2 Présenté par Christophe Dechavanne

Première venue de Mylène dans une émission de Christophe Dechavanne (il y en aura

beaucoup d’autres dans les vingt mois qui vont suivre). Cette prestation pour « Libertine » est primordiale puisqu’il s’agit de la première apparition à la télévision de Mylène Farmer avec les

cheveux roux, couleur qu’elle adoptera définitivement. Elle interprète son tube en tout début d’émission, vêtue d’une robe en velours bleu. Elle n’apparaît plus au cours de l’émission.


© Sygma-Corbis


1986–1987 : Cendres de lune

C’est encore mieux l’après-midi Date 16.05.1986 Chaîne Antenne 2 Présenté par Christophe Dechavanne

Deux semaines seulement après y avoir déjà participé, Mylène revient dans l’émission de l’après-midi de Christophe Dechavanne. Elle va en devenir une fidèle dans l’année à venir. L’émission se déroule aujourd’hui en direct du Festival de Cannes. La chanteuse est présente en

fin d’émission, entre Patrick Bruel et Jean-Paul Gaultier (celui-ci se dit ravi de voir « la charmante Mylène Farmer »), pour interpréter « Libertine » en extérieur, depuis un ponton de plage. Elle porte un tailleur noir avec des épaulettes démesurées. Ses cheveux sont maintenus en catogan par un ruban noir. Très souriante, elle effectue sa chorégraphie en arpentant le ponton de bas en haut !

La vie à pleines dents Date 28.05.1986 Chaîne FR3 Pyrénées Présenté par Pierre Nicolas

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Mylène Farmer

La promo continue pour « Libertine », même si le succès se fait toujours attendre. Il faut dire que le clip n’a pas encore été diffusé et que Mylène est encore brune sur la pochette du disque (première version) alors qu’elle est désormais rousse en télé. Le présentateur, costumé en Pierrot lunaire, reçoit Mylène, qui porte alors une veste bleue d’époque et un corsaire blanc. Elle est présente sur toute la durée de l’émission. L’animateur questionne Mylène sur un ton parfois candide et celle-ci est très souriante. Ils parlent ensemble des clips, des critiques et d’amour ! Mylène interprète « Libertine » en fin d’émission. Pierre Nicolas : (…) Aujourd’hui j’ai beaucoup de plaisir : je me suis habillé en Pierrot, je me suis dit « Ça va faire plaisir à notre invitée ». Bonjour, Mylène. Vous allez bien ? Mylène Farmer : Bonjour, très bien. PN  : C’est Mylène Farmer notre invitée

aujourd’hui. Alors Mylène, et bien on est partis ensemble tous les deux pour trois quarts d’heure de musique, de cinéma. Mylène a été très sympa : elle nous a apporté ses vidéoclips, ça nous fera du bien d’en voir, parce que c’est vrai qu’actuellement on n’en voit pas trop, trop sur les chaînes de la télévision publique… MF : Ne le dites pas trop fort ! (rires) PN : Oui ! On va faire tout ça, ensemble avec Mylène. Vous vous installez tranquillement, Mylène. Le présentateur explique que le décor et les fauteuils sont l’œuvre d’un artiste toulousain. Il lance ensuite les informations. Au retour plateau, il poursuit avec Mylène. PN : Mylène, vous êtes bien installée ? MF : Très bien, très confortable ! PN : C’est un petit peu particulier le mobilier ! MF : C’est étrange, oui ! PN : (…) Mylène, je ne vous ai jamais vue, jamais guère entendue vous répandre en grandes déclarations. Est-ce que vous êtes quelqu’un de secret, de discret ? MF : J’ai certainement beaucoup de pudeur, mais en l’occurrence vous m’avez dit de faire des réponses très concises parce que c’étaient des petites séquences, donc je vais faire très rapide ! (rires) PN : Est-ce que vous vous méfiez des journalis-

tes, d’une façon générale ? MF : Ça dépend, c’est comme dans tous les métiers ! Y a des personnes qui sont douées, et puis d’autres effectivement dont il faut se méfier, parce qu’ils ont pas une plume très développée et souvent un peu maladroite. PN : Lorsque vous lisez un article où on parle de vous, où on parle de votre travail, où on parle de vos disques, est-ce que vous vous reconnaissez toujours dans cet article ? MF : Y en a certains, j’ai notamment vu une critique de l’album (« Cendres de lune ») qui était assez réaliste et plutôt sympathique, d’ailleurs. Sinon, y a toujours quelques termes qui reviennent systématiquement et qui sont peut-être pas tout à fait le reflet de moi-même, mais peu importe ! PN : Peu importe ! Dans l’album, y a une chanson qui s’appelle « Maman a tort »… MF : Oui, c’était le premier. PN : C’était le premier, la première chanson. On l’écoute ensemble? MF : Oui ! PN : « Maman a tort » : c’est la première chanson de Mylène Farmer. « Maman a tort » ! Diffusion du clip de « Maman a tort » en entier. PN : Mylène Farmer, « Maman a tort ». Vous avez peut-être remarqué qu’en commençant


l’émission avec Mylène, tous les deux, on a installé quelque chose qui est pas habituel dans « La vie à pleines dents », on a installé le vouvoiement. Alors c’est moi qui l’ai fait exprès, je vais vous dire pourquoi : parce que Mylène quand elle est arrivée ce matin, elle m’a dit « Moi j’ai un peu de pudeur, un peu de timidité », et Mylène vous vouvoyez ! MF : C’est parce qu’on ne se connaissait pas, mais maintenant ça fait cinq minutes qu’on se connaît, on va se tutoyer ! PN : Voilà, on va se tutoyer, on va continuer l’émission en se tutoyant. Alors je te dis « tu » maintenant, Mylène ! MF : D’accord… PN : Est-ce que tu as déjà fait du cinéma et du théâtre ? Je connais déjà une partie de la réponse, c’est pour ça que je pose la question ! MF : Oui, j’ai suivi des cours de théâtre pendant deux ans. Et quant au cinéma, non je n’ai jamais participé à… PN : T’as jamais fait de cinéma ? MF : Pour le clip vidéo, c’est peut-être aussi, oui, une partie cinématographique. Voilà, c’est la seule expérience que j’ai eue ! PN : Un clip extraordinaire, qu’on va voir tout à l’heure dans le cours de « La Vie à Pleines Dents », qui s’appelle « Plus grandir ». Vous allez voir, ça va peut-être être une découverte pour certains d’entre vous, c’est superbe, y a une superbe mise en scène. Mais ça, c’est pour tout à l’heure. On parlait de cinéma, on va regarder un extrait d’un film qui vient de sortir sur les écrans (…), je sais pas si tu l’as vu : le film s’appelle « Runaway Train ». MF : Non pas encore… (…) Un extrait du film « Runway Train » (réalisé par Andrei Konchalovsky) est présenté. L’extrait s’achève sur une bagarre entre deux personnages. PN : (à propos du héros du film) Ah, il est très, très énervé, effectivement ! (rires) Je crois que tu préfères les gens calmes, toi, non Mylène ? MF : Ah du tout, moi je suis une grande

nerveuse ! PN : Une grande nerveuse ? Et tu aimes t’entourer de gens calmes alors puisque tu es nerveuse ? En général, quand on est nerveux on aime s’entourer de gens calmes, non ? MF : Je ne sais pas, je n’ai pas bien réfléchi à la question mais j’aime bien les grands nerveux aussi ! PN : Tu as été mannequin, je crois. MF : J’ai été mannequin, oui j’ai…Ben voilà ! (rires) PN : (…) Est-ce que tu en as gardé un goût immodéré pour ce qu’on appelle les fringues ? MF : Oui, j’ai toujours aimé les habits. (Elle regarde le costume de Pierrot de l’animateur) D’ailleurs c’est un très joli habit, ça aussi ! L’animateur propose ensuite à Mylène, sur le ton de la rigolade, d’échanger leur costume respectif, ce qui fait beaucoup rire cette dernière. Il lance ensuite le clip d’un artiste très théâtral, Egon Kragel, que Mylène confesse ne pas connaître. Au retour plateau, ils parlent encore de ce chanteur. PN : Finalement, Mylène tu le connaissais ! Au début, tu m’as dit « Je connais pas » et en écoutant et en le regardant… MF : Oui, je l’ai rencontré une fois sur un plateau de télévision aussi, et il racontait qu’il avait fait beaucoup de mime avec un monsieur… PN : Ça se voit je crois dans sa chanson qu’il a fait du mime ! MF : Il me semble oui ! (rires) PN : (…) Tiens, puisqu’on parle un peu de mise en scène, il va se passer quelque chose maintenant : on va retrouver le…Elle est pas venue les mains vides, Mylène Farmer, elle nous a amené le vidéoclip qu’on a vu tout à l’heure, « Maman a tort », mais tu nous as aussi amené le vidéoclip de ton titre « Plus grandir ». MF : Apporté, oui… « Plus grandir ». PN : Alors, c’est quelque chose d’extraordinaire, c’est un vidéoclip assez long avec une superbe mise en scène. Explique-nous un petit peu. MF : C’est en cinémascope, on a mis cinq jours de tournage, c’est du décor en non naturel

(rires) euh…et puis, ma foi, il faut le regarder ! PN : Oui, faut le regarder ! Simplement, on peut préciser que dedans il va y avoir tout un tas de transformations : toi, tu subis un tas de transformations. MF : Oui, et je termine en vieille femme, donc là il y avait tout un maquillage à faire, aussi. C’était intéressant. PN : On parlera du maquillage juste après. Ce qu’on va faire, on va se faire plaisir maintenant et on écoute et on regarde le clip de Mylène Farmer : « Plus grandir ». Le clip de « Plus grandir » est diffusé dans sa quasi- intégralité (la séquence d’introduction est légèrement amputée de quelques secondes au début et le générique est coupé). PN : Ah la la ! Mylène Farmer, « Plus grandir » : c’est extraordinaire, y a vraiment beaucoup, beaucoup de choses ! MF : Oui, c’est dommage parce qu’il y a un petit problème de son, on peut s’apercevoir, je crois, que la bande tourne trop vite ! (rien de tel ne se voit pourtant à l’antenne) PN : C’est pas de notre faute, hein ! MF : Non, c’est de la mienne ! (rires) PN : C’est les gens qui ont mis la musique sur les images ! Y a d’abord la poupée…Tu crois que l’enfance, toi, est une période de la vie un petit peu privilégiée, comme ça ? MF : Privilégiée ? Non, c’est pas tout à fait ce qu’on a démontré dans le clip ! Je crois que c’est une période qui est…bon, chacun la vit différemment, mais c’est une période qui est excessivement difficile, le passage de l’adolescence à l’âge dit d’adulte. Oui, c’est dur. PN : Oui, c’est peut-être ce passage-là qui est difficile… MF : C’est un traumatisme. PN : Y a aussi ce passage extraordinaire où on voit la vierge qui se cache comme ça (il joint le geste à la parole) et qui détourne le regard. MF : Oui, c’est une vierge qui a été fait en latex, avec un manipulateur. PN : Y a même la poupée qui est animée à la fin !


1986–1987 : Cendres de lune

MF : La poupée est animée et la poupée a été réalisée par moi-même ! (rires) Un extrait du film « Etats d’âme » est ensuite diffusé, qui semble laisser Mylène complètement indifférente lorsque l’animateur résume le scénario (l’histoire d’un groupe de jeunes fêtant la victoire socialiste en mai 1981). PN : (…) Mylène, tu as fait une chanson il y a quelques mois qui s’appelait « On est tous des imbéciles ». Je voudrais savoir si avec cette chanson tu voulais prouver que dans la vie il faut pas se prendre au sérieux ? MF : Je sais pas…Les chansons à message, je m’en méfie toujours un peu mais c’est vrai que… PN : Beaucoup de chanteurs s’en méfient ! MF : Oui ! (rires) Et pour cause ! Mais non, ce qui était à extraire de la chanson, c’était « Ce qui nous sauve, c’est le style », effectivement voilà, le style peut sauver beaucoup de choses. PN : Alors, moi je suis un Pierrot, un Pierrot c’est toujours très romantique. Je voudrais parler un petit peu d’amour avec toi. Admettons que l’amour dans la vie, ce soit un paysage ou un pays très lointain : je voudrais que tu me dises si tu penses qu’en amour il faut atteindre ce paysage et y rester, ou si ce qui t’intéresse dans l’amour c’est d’arriver, c’est le voyage qui mène à ce paysage ou à ce pays. MF : C’est tout le voyage qui m’intéresse. PN : C’est tout le voyage ? Donc tu es la femme…tu fais confiance aux rencontres ? MF : Je sais pas si je peux parler dans ces termes-là ! J’adore les rencontres, oui ! PN : Et les coups de foudre, tu y crois ?

MF : Je pense que dans sa vie, on rencontre une ou deux personnes pour qui, oui, on va voir une adoration, même, sublimée. Mais ça n’arrive pas tout le temps, non. PN : C’est trop perso comme question si je te demande si tu en as déjà eu, des coups de foudre ? MF : C’est un sujet que je n’aime pas aborder ! (rires) Pour changer de sujet, l’animateur lance alors une séquence musicale. Au retour plateau, une jeune fille de quatorze ans vient faire la promotion d’une kermesse scientifique organisée dans la région. Elle est venue avec une petite fusée et l’animateur s’amuse du goût pour la science de la jeune fille. PN : (…) Mylène, moi je croyais que c’étaient les garçons qui faisaient voler les fusées ! MF : Non, moi je jouais aux petites voitures quand j’étais petite ! Le présentateur lance ensuite un concours où il faut identifier trois films à l’aide de leur bande originale constituée de morceaux classiques. PN : C’était joli, hein Mylène ? Tu aimes bien, toi, la musique classique… MF : J’adore, oui y a des très, très belles chansons. Enfin ‘chansons’…musiques ! PN : (…) On trouve énormément de choses dans la musique classique. MF : Absolument ! PN : Alors tu as reconnu les titres des films ? Je crois que c’était pas très difficile, hein ! MF : Oui, je crois que j’ai vu la plupart de ces

films. PN : Tu peux jouer si tu veux ! (…) MF : Et je gagne un disque ?! PN : Et tu gagnes un disque ! MF : Alors, oui ! (rires) PN : (…) Tiens, tu m’as dit que ton prochain clip (« Libertine » dont l’avant-première aura lieu trois semaines après cette émission), y aurait une ambiance comme celle qu’on a vue dans l’extrait de film avec les bougies (« Barry Lindon » ) (…), vous avez peut-être vu dans l’extrait qui vient de précéder, y avait un passage très sombre avec des bougies, des messieurs avec des perruques et tout… MF : Oui, ça va être une illustration, un peu, du libertinage. PN : Ça tombe bien puisque le titre de la chanson, c’est « Libertine » ! Alors, la chanson on va se quitter avec (…) On va se quitter Mylène. Maintenant qu’on se connaît bien, on peut peut-être s’embrasser pour se dire au revoir ! (…) MF : Oui ! PN : (il lui fait la bise) Au revoir, Mylène ! MF : Au revoir… PN : À bientôt, tu reviens quand tu veux dans « La Vie à Pleines Dents ». MF : Avec plaisir ! PN : Et on se quitte avec la chanson de Mylène Farmer qui s’appelle « Libertine » (…) MF : Au revoir ! Seule sur le plateau, en guise de générique de fin, Mylène interprète « Libertine » (à noter que la prestation seule sera rediffusée dans les émissions du 18 juin et du 15 octobre, cette même année 86).

Pollen Date 04.06.1986 Chaîne FR3 Présenté par Jean-Louis Foulquier

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Mylène Farmer

C’est ce soir le tout dernier numéro de ce programme phare de JeanLouis Foulquier. Il est alors entouré de nombreux chanteurs comme Julie Piétri, Alain Bashung, Bernie Bonvoisin…Mylène est présente pour chanter « Libertine » et le rejoint pour un court entretien. Jean-Louis Foulquier : Je voulais vous présenter une petite libertine, c’est un petit cadeau, comme ça, pour la dernière de « Pollen ». C’est Mylène Farmer…


Mylène, pieds nus, porte une robe en velours signée Kate Barry (fille de Jane Birkin et de John Barry), très courte devant et longue derrière. Elle interprète « Libertine » devant un décor représentant la façade de l’Aviatic (écrit en néons). La chanson terminée, elle va s’asseoir sur un tabouret aux côtés de Jean-Louis Foulquier. JLF : Mylène Farmer, « Libertine »…Quand je pense que la petite Mylène a reçu son éducation dans une institution religieuse (Mylène éclate de rire), je me demande la tête de la mère supérieure devant sa télé ce soir ! Mylène Farmer : Bah rassurez-vous, elle est décédée (rires), et elle doit se retourner dans sa tombe ! JLF : Et alors, c’est de la provocation pure et simple, comme ça de montrer ses fesses à la télé ? Fesses au demeurant agréables ! MF : C’est un plaisir, mais maintenant si ça vous dérange (rires), je peux changer ! JLF : Non ! MF : Non ? (rires) JLF : Tu peux même remettre ça, si tu veux ! Ça sera un réel plaisir ! MF : Non, non je m’amuse beaucoup… JLF : Tu t’amuses beaucoup. Mais, ce côté provocant à la télévision, finalement tu l’as pas dans la vie ? T’es plutôt réservée, quand on te connaît un petit peu dans la vie, qu’on te croise… MF : Je suis réservée, mais je pense que ce n’est pas incompatible. J’ai des heures où j’ai envie de m’exhiber, comme tout le monde. (elle lui pose la main sur son bras, et ronronne avec un regard explicite !) JLF : Ben, si tu veux me donner ton planning, on va se croiser à ces heures-là si tu veux ! (rires) MF : D’accord… JLF : Mylène, on va écouter maintenant une dernière chanson de Vivien Savage, qui est un beau personnage, je le disais tout à l’heure, dans la chanson. Je voudrais qu’il nous chante « La p’tite lady ! », si tu veux aller t’installer, c’est un tube… Vivien Savage : Pour Mylène Farmer, je chante « La Petite Lady » (il lui fait une révérence et Mylène glousse). JLF : Voilà, au revoir Mylène. MF : Merci !

Cœur de pique Date 12.06.1986 Chaîne RTBF (Belgique)

Petit détour en Belgique. Au cours de l’émission, Mylène vient interpréter « Libertine » en veste bleue d’époque, collants blancs et bottines noires.

Fête sans frontière Date 21.06.1986 Chaîne FR3 Rhône-Alpes Présenté par Patrick Labarrière

Sur un podium installé en plein air, au cœur du parc de la Tête d’Or, à Lyon se succèdent différents artistes (Niagara, Karen Cheryl…) dont Mylène, présente pour interpréter « Libertine »…en direct s’il vous plaît ! Elle est habillée d’un collant blanc et d’une veste verte grande ouverte sur son ventre nu. La prestation est amusante car Mylène sautille littéralement de droite à gauche sur la petite scène. Le chant n’est pas toujours harmonieux mais Mylène est très énergique et la foule est réceptive !


1986–1987 : Cendres de lune

Azimut

Date 25.06.1986 Chaîne FR3 Lorraine Champagne Ardennes Présenté par Jean-François Bataille

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Mylène Farmer

Mylène est l’invitée unique de cette émission musicale. Vêtue d’un fin manteau bleu ciel, elle vient y présenter le clip de « Libertine », tout juste sorti. Outre une prestation sur cette même chanson et une autre remarquable sur « Chloé », elle répond aux questions de l’animateur, avec qui Mylène semble très complice et partage plusieurs fous rires. L’ambiance est donc très détendue et Mylène aborde ainsi ses envies, ses projets, le tournage de « Libertine » et n’hésite pas à blaguer  (…) Jean-François Bataille : Mylène, parle-nous un peu de ton album et des clips qui l’accompagnent. Mylène Farmer : Y a quelque chose, moi, que j’aurais souhaité faire mais qui a, je crois, déjà été réalisé, en tout cas c’est un projet, je sais, d’une autre artiste, et d’un groupe notamment, c’était d’illustrer chaque chanson avec

un clip vidéo. Bon, malheureusement ça demande énormément de moyens, beaucoup de temps : tout ce que je n’ai pas réellement en ce moment ! Mais c’est quelque chose que j’aurais souhaité, oui, parce que y a des chansons dans l’album qui ont un univers très visuel et cinématographique. JFB : Ben écoute, on le souhaite pour toi et pour nous ! Et puis peut-être que ça viendra très bientôt avec l’arrivée du vidéodisque… MF : Oui, peut-être. JFB : En tout cas, comme exemple justement de recherche, j’ai vu qu’il y avait une chanson où tu avais demandé (l’animateur commence à réprimer un rire et Mylène éclate franchement de rire car elle devine ce dont il va parler) l’aimable concours, il faut le dire… ils ont travaillé sur l’album avec l’aimable concours des moines fous du Tibet ! Ça surprend ! Qui sont-ils ? MF : (Elle répond avec le plus grand sérieux) Absolument ! J’ai envoyé Laurent Boutonnat, qui est donc le producteur et réalisateur, compositeur, aller voir ces moines tibétains, et comme les femmes sont exclues de ces monastères, j’ai pas pu y aller. Il y est donc allé avec son lama et… (rires) il a enregistré ces prises de son. (Cette explication farfelue est bien évidemment à prendre au second degré) JFB : Et vous allez voir le résultat ! Ecoutez bien, c’est extrait de la chanson « Chloé », Mylène Farmer. (Tous deux rient)

« J’aurais souhaité illustrer chaque chanson (de l’album) avec un clip vidéo. »

Une séquence où Mylène interprète, dans tous les sens du terme, « Chloé » est alors diffusée. Pour ce faire, elle a troqué son manteau bleu contre une veste rose. Mylène adopte alors les mouvements et mimiques d’une enfant, à la limite de l’autisme. La prestation est saisissante. La chanson commence par les chœurs clôturant en réalité la chanson « Vieux Bouc », précédant « Chloé » sur l’album (avant que « Tristana » ne soit insérée entre les deux lors de la réédition de l’album en 1987). JFB : Voilà, « Chloé ». Très, très belle chanson qui illustre tout à fait bien ce qu’on voulait vous dire avant. Donc si je ne me perds pas dans tous mes papiers (Mylène rit), on va reparler de ce qu’on vous a promis tout à l’heure, c’est-à-dire le clip de « Libertine » version intégrale cette fois. Ça, c’est important, c’est quand même un évènement. Peut-être certains l’ont vu en partie, en tout cas je crois que très peu l’ont vu dans la version intégrale et je voudrais que tu nous racontes un petit peu en quelques mots comment ça s’est passé sur le tournage, qui était très inspiré, il faut le dire quand même, de l’ambiance qu’on a vue dans le superbe film « Barry Lindon ». MF : (elle acquiesce) Le tournage s’est effectué, je crois, en quatre jours et y a eu à peu près une semaine de préparation. Il s’est tourné essentiellement au château de Ferrières, qui est


près du château de Guermantes pour situer un peu. La pièce principale a été complètement réaménagée, parce que c’était un style complètement baroque au départ, et donc il a fallu créer le style XVIIIe siècle. Donc c’est un décorateur qui a fait ça. Et qu’est-ce que je peux dire d’autre ? Ben, c’est… JFB : Que c’est Laurent Boutonnat, peut-être qui a réalisé ça ! MF : Que c’est Laurent Boutonnat, donc, toujours le même ! JFB : Qui a fait les paroles, une partie des paroles de l’album… MF : Voilà. JFB : …et qui est, je crois, un réalisateur de pub. MF : Ben, c’est-à-dire que lui a fait ses premières, c’est vrai, ses premiers pas dans le cinéma à seize ans. Il a réalisé un long-métrage qui était parti à Cannes et qui avait été…qui avait eu des petits déboires (« La Ballade de la féconductrice », projeté à Cannes en 1979, a en effet été interdit aux moins de dix-huit ans à sa sortie) et maintenant réalise effectivement des films publicitaires. C’est plus alimentairement, et puis c’est vrai

que c’est un bon exercice de toute façon. JFB : Alors parlons de toi, maintenant. Nous allons te retrouver dans cette fresque grandiose… MF : …et quant à moi… (rires) JFB : …dans des rôles tout à fait étonnants. Ça dure onze minutes, n’en manquez pas une seconde. MF : Voilà. JFB : On va vous l’envoyer dans quelques instants. Juste avant, deux mots pour dire que Mylène Farmer, c’est pas très simple parce que la petite comptine de « Chloé », on l’écoute une fois, comme ça, et vous l’avez dans la tête après pendant trois heures ! C’est un peu le paradoxe, finalement, de cet album : c’est que ça paraît très simple, mais en fait c’est très compliqué parce que les textes sont recherchés. Alors, Mylène Farmer un petit peu paradoxale ? MF : Ma vie est un paradoxe ! (rires) JFB : Très bien, merci, très belle conclusion ! Allez, nous regardons maintenant Mylène Farmer, la version intégrale de « Libertine ». Le clip de « Libertine » est diffusé en intégralité

Toutes folles de lui Date 19.07.1986 Chaîne Antenne 2 Présenté par Christophe Dechavanne

Christophe Dechavanne est aux commandes de cette émission diffusée en soirée pendant l’été 1986. Pour cette toute première, il reçoit entre autres Serge Gainsbourg, Patrick Bruel, Jeanne Mas, Françoise Hardy et bien sûr Mylène Farmer, dans le cadre du club de sport Vitatop, situé porte Maillot à Paris. La prestation de « Libertine » pour cette émission a été

rediffusée maintes fois depuis, notamment en raison de la tenue vestimentaire des figurants et de la chorégraphie particulièrement enthousiaste de l’un d’entre eux : au bord de la piscine du club de sport, Mylène, longue veste verte et collants blancs, se déhanche entourée d’hommes en maillot de bain, dont deux se tiennent debout et effectuent une danse qui se veut lascive mais dont le résultat visuel (pour le moins ridicule) justifie amplement que la séquence fasse le bonheur des bêtisiers ces dernières années !

(le générique de fin est toutefois coupé). JFB : Voilà moi qui m’endors au cinéma d’habitude, je suis resté complètement éveillé ! Je crois que c’est un beau cadeau que l’on vous a fait, c’était la version intégrale de « Libertine ». MF : C’est la première fois qu’il passe en province, en plus. JFB : Oui, donc c’était vraiment un beau cadeau ! Il faut dire que « Libertine » marche très bien, et marche de mieux en mieux, et puis y aura très bientôt encore un nouveau 45 tours extrait de « Cendres de lune » ? MF : Non, pas extrait de l’album, mais qui sera intégré dans l’album (il s’agit de « Tristana », qui sortira sept mois plus tard !). JFB : Une nouveauté, alors ! Très bien. Mylène, merci d’être passée nous présenter ces deux chansons plus ce superbe clip dans cette émission. MF : Merci à vous ! L’animateur donne rendez-vous aux téléspectateurs pour la semaine suivante et l’émission s’achève.


1986–1987 : Cendres de lune

Grande première

La fête en France Date 13.08.1986 Chaîne FR3 Île-de-France Présenté par Jacques Mailhot

Date 02.08.1986 Chaîne FR3 Présenté par Stéphane Nicolas

A en croire le casting, cette émission musicale estivale, qui se déroule dans une discothèque de Port-Barcarès, semble être un passage obligé pour les artistes. Ce jour-là, outre Mylène, on retrouve toutes les stars du Top 50 de l’époque : Marc Lavoine, Niagara, Lio, Gold et même les Cure. La prestation de Mylène, venue chanter « Libertine », est précédée d’un court entretien avec l’animateur. La chanteuse porte la fameuse robe en velours à l’arrière aussi long que le devant est court – tenue qu’elle nous a fait découvrir le 4 juin dans « Pollen ». Stéphane Nicolas : Ça fait un carton depuis quelques semaines (le single commence pourtant péniblement à marcher) et c’est tant mieux : ça s’appelle « Libertine » et celle qui chante c’est Mylène Farmer. Elle est là, bonsoir Mylène ! Mylène Farmer : Bonsoir ! SN : Alors, Mylène passe un peu pour quel-

qu’un qui prend le public à rebrousse-poil depuis un peu plus de deux ans ! Y avait eu « Maman a tort » (…), après elle avait déclaré qu’on était tous des imbéciles, et puis là c’est une catin, c’est une libertine ! C’est un peu ça, non, la démarche ? MF : La démarche, euh… SP : C’est prendre les gens à rebrousse-poil ? MF : Oui, vous faites allusion au ton provocateur de mes chansons ? SP : Voilà ! MF : C’est avant tout un plaisir ! SP : Bon tant mieux ! Et le plaisir va être prolongé puisqu’à la rentrée, il est prévu un film sur « Libertine ». MF : Absolument, il y aura un clip qui va illustrer  « Libertine » qui va sortir à la télévision et également au cinéma (ce projet de sortie cinéma sera finalement abandonné). SP : Un grand clip d’une dizaine de minutes. Nous on vous propose pas encore ça puisque ça sortira à la rentrée (le clip est pourtant déjà diffusé en télévision), ce que je vous propose, c’est justement l’air que tout le monde a sur les lèvres, et tant mieux c’est un tube : « Libertine », Mylène Farmer ! L’animateur pose son micro et quitte le plateau pendant que Mylène se met en place sur l’introduction de « Libertine ».

Cette émission mélange sketches et variétés sous forme d’une promenade dans Paris. On retrouve ainsi au générique Lio, Popeck, Yves Lecoq, Corynne Charby… Mylène, quant à elle, apparaît sur les quais de Seine pour chanter « Libertine » sous un saule pleureur. Elle porte une veste noire cintrée et une longue jupe noire.

Affaire suivante

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Mylène Farmer

Date 20.08.1986 Chaîne Antenne 2 Présenté par Jean-Pierre Foucault

Le principe de l’émission est de recevoir des personnalités et d’organiser un procès plus ou moins farfelu. L’inculpée du jour est Mylène Farmer, accusée de pervertir la jeunesse avec « Maman a tort » ou « Libertine ». Pendant l’énoncé

des faits qui lui sont reprochés par Jean-Pierre Foucault, le président de ce tribunal ‘pour de faux’, Mylène joue de ses charmes dans le box des accusés en montrant ses jambes, en roulant des yeux et en faisant des coucous malicieux et des regards aguicheurs. Elle enchaîne en chantant « Libertine » dans sa provocante robe en velours signée Kate Barry.


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Mylène Farmer

1986–1987 : Cendres de lune


Zénith Date XX.09.1986 Chaîne Canal+ Présenté par Michel Denisot

Mylène est présente en tout début d’émission pour chanter « Libertine » dans le décor de l’émission, vêtue d’une veste blanc cassé et de collants blancs. Détail amusant : des techniciens ne cessent de passer dans le champ de la caméra !

Antenne 2 midi Date 01.09.1986 Chaîne Antenne 2 Présenté par Noël Mamère

En cette rentrée 1986, le succès de « Libertine » ne fait que croître (le disque est enfin classé au Top 50, cinq mois après sa sortie !) et son clip exceptionnel fait beaucoup parler de lui (la nouvelle pochette du 45 tours. reprend d’ailleurs un visuel du clip). A ce titre, c’est un petit évènement qui se produit puisque Noël Mamère, alors présentateur du JT de la mi-journée d’Antenne 2 (ex-France 2), reçoit sur son plateau Mylène Farmer accompagnée de Laurent Boutonnat afin que ceuxci parlent de leur succès, de leurs débuts et de leur collaboration. Il s’agit du seul et unique entretien

télévisé commun des deux artistes à ce jour, si l’on considère que la conférence de presse de décembre 2004 n’est pas une ‘vraie’ interview télé. Assis d’un côté et de l’autre du journaliste, ils portent tous les deux une veste noire. Noël Mamère : (il fait réagir Mylène sur le reportage qui vient de s’achever, consacré aux plages et au surf) Est-ce que vous avez déjà fait du surf, mademoiselle Farmer ? Mylène Farmer : Euh… non, parce que l’eau est un élément qui m’effraie, donc je préfère l’équitation ! NM : Vous avez fait beaucoup d’équitation, racontez-nous. MF : Oui, j’en ai fait pendant cinq ans. NM : Vous étiez forte ? MF : Forte, je pense que oui, j’avais un bon niveau. J’avais envie de faire une carrière, mais

j’avoue que j’ai abandonné l’idée à dix-huit, dix-neuf ans. NM : Et vous étiez une très, très bonne cavalière. Vous avez failli même être écuyère, je crois ? MF : (elle se redresse sur son siège, tout sourire) Non, n’exagérons pas ! (rires) Vos renseignements sont erronés. NM : Bon. Vous êtes en compagnie de Laurent Boutonnat, parce que Laurent Boutonnat travaille beaucoup avec vous. C’est lui-même, je crois, qui vous a incitée à faire de la chanson. MF : C’est-à-dire que oui, on s’est rencontrés et lui est compositeur, donc, a une passion pour la musique, pour le cinéma également… NM : On va en parler avec lui. MF : …et donc m’a proposé avec une autre personne la première chanson, qui était « Maman a tort ». Et depuis, voilà, nous travaillons ensemble. NM : Alors comment bascule-t-on comme ça d’un coup de l’équitation à la chanson ?


1986–1987 : Cendres de lune Mylène Farmer 46

MF : Une bonne étoile au-dessus de ma tête, certainement. Beaucoup de chance, et puis depuis deux ans beaucoup de travail, aussi. Laurent Boutonnat : (suite à la question de Noël Mamère) Parce qu’on tombe de cheval ! NM : On tombe de cheval ! (il se tourne vers Laurent Boutonnat) Laurent Boutonnat, c’est la voix, le physique de Mylène Farmer qui vous avaient séduit ou ce sont les deux à la fois ? LB : Oui c’est les deux à la fois, parce qu’on recherchait quelqu’un au moment où on avait fait cette chanson avec un ami, qui était « Maman a tort », qui était une chanson un peu spéciale qui se passait dans un hôpital psychiatrique, d’une petite fille. Et le jour où Mylène est arrivée, elle était…elle était parfaite, quoi ! C’était le personnage (rire de Mylène). NM : Parce qu’elle avait l’air un peu pervers, ou pas ? LB : C’était pas tellement pervers, c’est plutôt… psychotique, je dirais. Quelqu’un d’un peu renfermé, comme ça… NM : Une sorte d’ambiguïté, quoi ? LB : Oui, oui, très bizarre. Ça a été elle tout de suite, quoi. Même avant de l’entendre chanter. NM : Alors, vous lui avez écrit « Libertine », qui est un véritable succès, qui a fait un tabac cet été (il présente à la caméra le 45 tours, deuxième pochette). LB : Ben c’est en train de faire un tabac. Enfin, je suis ravi que ça marche. NM : Alors c’est un texte qui est aussi un petit peu pervers, ou peu ambigu, comme on voudra. LB : C’est un texte qui n’est pas très simple, peut-être. Mais curieusement, c’est assez drôle d’ailleurs d’entendre -c’est curieux que ça marche, enfin je suis ravi que ça marche- mais c’est drôle d’entendre dans la bouche des enfants chanter « Je, je suis libertine/ Je suis une catin », ce qui change un peu ! NM : Ça a l’air de vous amuser, vous devez bien rire dans votre manteau ! (rires de Mylène) LB : Non, non, je suis très, très heureux ! NM : Et bien, on va écouter un extrait du clip (sic !) que vous avez réalisé sur « Libertine », avec Mylène Farmer et puis après, on parlera ensemble de votre collaboration et de l’idée que vous vous faites de votre métier. LB : Oui… MF : D’accord.

Un extrait du clip de « Libertine » est diffusé (de la séquence du bain jusqu’à la séquence de séduction entre Libertine et son amant). NM : Voilà. Les amateurs de cinéma verront un clin d’œil à « Barry Lindon » et à tous les styles du XVIIIe. MF : C’est vrai… On dit « Barry Lindon », c’est vrai qu’il y a une couleur, je crois que c’est une ambiance. Et puis les gens n’ont de référence que ce film qui retrace le XVIIIe siècle, le libertinage : c’est « Barry Lindon ». NM : C’est un clip, un film, qui dure onze minutes. C’est pas très vendable, ça, à la télévision pour passer dans un journal, par exemple ! MF : C’est vrai qu’il y a des passages… Oui, c’est dommage. Mais je pense qu’il y aura une promotion cinématographique, c’est-à-dire dans les salles de cinéma, c’est en attente, c’est en pourparlers. Ce serait l’idéal pour ce clip (ce projet n’a malheureusement pas abouti). NM : Et vous pensez que ça aide beaucoup à la promotion d’un disque, la fabrication d’un clip très, très sophistiqué comme celui-là ? MF : Moi je veux pas faire de généralités. Je pense qu’en ce qui me concerne, le travail qui est fait depuis deux ans pour moi c’est essentiel d’avoir ce clip et le clip précédent, parce que c’est un travail d’image et puis c’est… oui, c’est enrichir, je crois, un personnage, déjà, et puis une chanson, pourquoi pas. NM : Pour vous, les deux sont indissociables aujourd’hui, si j’ai bien compris ? MF : Pour moi, indissociable réellement, mais parce que Laurent Boutonnat, parce que – vous parliez de mentor tout à l’heure – pour moi c’est surtout un admirable metteur en scène, mais dans toute sa généralité. NM : Et ça vous donne le goût de faire du cinéma ? MF : Je rêve de faire du cinéma, là, depuis que je suis toute petite et j’espère en faire un jour. Mais tout ça, ce sera aussi très réfléchi. NM : (il se tourne à nouveau vers Laurent Boutonnat) Alors vous justement, Laurent Boutonnat, depuis que vous êtes tout petit, depuis que vous avez dix ans je crois, vous faites du cinéma. Et de la musique, mais aussi du cinéma. LB : Oui. C’est-à-dire, j’ai fait du piano, j’ai appris la musique et l’harmonie très jeune, et j’ai commencé à faire des films très jeune aussi, à

dix ans comme ça, en Super 8, des petits films. Et c’est toujours deux choses que j’ai fait… j’ai toujours fait des petits films, j’ai fait la musique de mes petits films. Enfin, c’est toujours des activités que j’ai fait, comme ça… NM : Vous aviez une formation de classique, de conservatoire ? LB : Pas de conservatoire, mais des cours de piano. J’ai commencé à faire du piano à cinq ans, jusqu’à treize, quatorze ans. Et puis après, j’ai tout envoyé balader mais je m’y suis remis quand même ! NM : (il s’adresse à Mylène) C’est marrant parce qu’on assiste en ce moment à une éclosion de jeunes femmes comme vous qui ont des visages très doux, on leur donnerait le bon Dieu sans confession, si je puis dire… MF : C’est vrai… NM : …et puis qui susurrent, qui chantent des chansons très, très libertines. MF : Je crois que c’est là que réside toute la perversion de l’histoire ! (rires) NM : Vous croyez que c’est un phénomène d’époque, ça ? LB : Non, mais je pense que c’est plus intéressant de travailler…parce qu’une chanson, c’est bien, mais c’est un peu… c’est quelque chose de très simple, mais travailler autour de ça, l’image et tout ce que ça comporte, ça c’est passionnant. NM : Bien. Et bien écoutez, merci d’être venus à Antenne 2 Midi, Mylène Farmer et Laurent Boutonnat. MF et LB : (ensemble) Merci ! NM : Je rappelle ce titre, « Libertine », mais qui est déjà très, très connu. Il doit être dans le Top 50 déjà, non ? MF : Ça y est, oui. La Bible du français, actuellement c’est le Top 50 ! (rires) NM : Ah ben oui, c’est ça ! J’écoute la radio, je sais que le Top 50 c’est une référence. MF : C’est vrai, nous sommes dans le Top 50. Ça veut dire que le disque se vend, voilà, que l’artiste fonctionne. NM : Tant mieux pour vous ! Noël Mamère lance ensuite un reportage sur le pianiste Jean-Paul Farré, auquel il trouve une ressemblance capillaire avec Laurent Boutonnat, ce qui fait rire ce dernier !


Top 50

Date 06.09.1986 Chaîne Canal+ Présenté par Marc Toesca

Mylène est l’invitée principale de cette célèbre émission musicale des années 80 à l’occasion de son premier classement dans le Top : elle est en effet 43ème avec « Libertine » et ne cessera de grimper les semaines suivantes (elle atteindra la neuvième place fin octobre). Très spontanée et rieuse, elle répond aux questions de Marc Toesca, assise sur un élément du décor, habillée d’une longue chemise à damiers ouverte sur un t-shirt noir. Marc Toesca : Mylène, alors « Libertine » rentre dans le Top en 43ème position. C’est la première fois que tu es dans le Top ! Mylène Farmer : (tout sourire) C’est la première fois ! MT : Même s’il y a eu deux 45 tours : « Maman a tort », et puis l’autre c’était « J’veux pas grandir » (sic !) MF : C’est raté parce qu’il y en avait trois ! MT : Y en avait trois ! MF : L’intermédiaire, c’était « On est tous des imbéciles » (rires) MT : Oui, « On est tous des imbéciles » (…), ça y est je commence très bien l’émission ! (…) Mais j’ai remarqué que dans les clips, c’est assez sombre comme atmosphère. Les deux clips

précédents étaient assez sombres ! MF : C’est vrai ! MT : Et puis, bon, « Libertine » c’est pas… MF : C’est vrai, oui. « Plus grandir », c’était un univers un peu baroque, un peu sombre. MT : Oui, je me souviens d’une tête coupée. MF : Ça, c’est « Maman a tort », c’était la tête coupée ! Et puis «Libertine », c’est quand même un peu plus enjoué, un peu plus… MT : Ça finit dans le sang ! MF : Oui, mais j’aime bien ! Pour moi, c’est l’essence même du romantisme. MT : Et tu rêves tes clips, ou pas ? Les scénarios, moi j’ai l’impression… MF : Je ne les rêve pas, mais je cauchemarde énormément, donc y a sujet à certains scénarios, certainement. MT : Et souvent t’écris dans tes textes de chansons tes cauchemars ? MF : J’écris peu mes textes, non. J’ai écrit « Au bout de la nuit » de l’album et puis « Plus grandir », c’est les deux seules chansons. MT : J’ai une petite pochette, j’ai un échantillon de l’album, le voilà ! Pour mettre dans les mange-disques, c’est pratique ce genre d’albums ! (Il montre la version promo de « Cendres de lune », une pochette très grand format qui reprend le visuel de l’album et qui contient le 33 tours) Alors, le premier clip que tu as choisi dans le top… MF : C’est une chanson qui pourrait me faire pleurer, qui est de Cock Robin et qui s’appelle « The promise you made ». Diffusion du clip de Cock Robin.

MT : (…) Ma chère Mylène Farmer… MF : Yes ! MT : …tu es une des meilleures entrées cette semaine, 43ème avec « Libertine ». Ça t’a pris combien, le tournage du clip ? Parce que c’est quand même un événement, ce clip de « Libertine » ! MF : Combien de temps ? Il y a eu cinq jours de tournage et à peu près une semaine de préparation. MT : Et combien de figurants ? MF : Ah les figurants…Je crois que sur le plateau, il y avait à peu près cinquante personnes, c’est impressionnant. MT : C’est le budget d’un film, pratiquement ? MF : N’exagérons pas ! (rires) MT : Enfin, pas d’un long-métrage ! MF : Non, non, non, non ! Justement, là c’est le point fort de ce clip : c’est qu’il a coûté…C’est dérisoire comparativement à ce qu’il peut donner comme résultat. MT : Oui… Aujourd’hui on s’en sort un peu dans les tournages de clips : on fait intervenir des petits trucs publicitaires, des bouteilles de untel, untel… MF : Oui, c’est ce qu’on appelle les sponsors. Moi j’avoue que c’est vrai que si on peut éviter… MT : C’était difficile dans l’époque, dans le contexte ! MF : Oui, et puis c’est pas… Moi, c’est pas quelque chose auquel je ferai appel. C’est vrai que c’est bien pour accumuler l’argent, mais là en l’occurrence on a pas fait appel à ça. MT : Oui. Tu présentes ton deuxième clip,


1986–1987 : Cendres de lune

Mylène Farmer ? MF : Alors mon deuxième clip, c’est le clip probablement qui me fait le plus rire et il s’agit de Modern Talking ! MT : Oui, c’est ça oui ! MF : Je vous laisse le reste ! (rires) Diffusion du clip « Brother Louie » des Modern Talking. MT : C’est ton genre de mecs, les Modern Talking ? MF : (pince-sans-rire) Totalement ! MT : Totalement ? De toute façon, t’as aucune chance avec le brun parce qu’il est fiancé à une jeune fille qui parait-il est très jalouse ! MF : (ironiquement) C’est vrai ? Ha, c’est dommage ! MT : (…) Qu’est-ce que tu vas faire, là, Mylène Farmer ? Est-ce que t’as un projet, un autre disque, un autre album ? Ou tu vas laisser continuer « Libertine » ? MF : « Libertine », on va continuer de travailler. Et puis probablement rentrer en studio

et préparer le second 45 tours. MT : Oui, ça sera quoi le prochain, comme climat ? MF : Je ne sais pas du tout. Ce que je sais, c’est qu’on va l’insérer certainement dans cet album. MT : Qui s’appelle « Cendres de lune » (il le remontre à la caméra). C’est pratique, il est énorme. Génial ! Mais enfin, il y a quand même la taille album, hein ! (il sort le 33 tours de la grande pochette) MF : Il y a le petit à l’intérieur ! Ça, c’est une idée de promotion. MT : C’est pas mal comme idée. Alors y a un mec qui s’appelle Laurent Boutonnat qu’on voit partout sur les pochettes de tes disques, qui a fait aussi le clip, qui a écrit le scénario, qui a réalisé le clip. Tu travailles en permanence avec ce garçon-là ? MF : C’est vrai que je travaille en permanence avec lui, et pour le meilleur et pour le pire ! MT : Ha d’accord ! (rires de Mylène) Voilà, vous saurez tout, ou presque, sur la vie de Mylène Farmer. J’espère que l’on se verra bientôt, je sais

pas, avec un autre 45 tours ? Peut-être quand tu seras N°1 du Top, why not… de gaz (sic !)? MF : Pourquoi pas ?! MT : Au fait, et la scène ? MF : La scène ? Non, pas dans l’immédiat. Non, non. MT : Ça doit être difficile sur scène de refaire « Libertine ». Ça demande beaucoup, beaucoup de… MF : Non, au contraire y a plein d’idées à faire. Y a plein d’idées ! MT : T’attends d’être plus grande, plus mûre ? MF : Plus mûre, je n’en sais rien. Plus grande, certainement. Et puis je pense que les artistes vont un peu trop tôt en scène. Je pense qu’il faut travailler énormément, oui, penser et réfléchir. MT : OK ! Je te remercie d’être passée nous voir et puis à très bientôt, Mylène Farmer ! MF : A bientôt ! Au revoir Marc ! (elle fait au revoir à la caméra) Générique de fin.

C’est encore mieux l’après-midi Date 11.09.1986 Chaîne Antenne 2 Présenté par Christophe Dechavanne

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Mylène Farmer

Mylène revient chanter « Libertine » dans l’émission de Christophe Dechavanne, la valeur montante du paysage audiovisuel français de l’époque – elle y était déjà venue en avril et en mai. Il faut dire que la chanteuse et l’animateur semblent partager une vraie complicité. Après que Mylène ait chanté « Libertine » en costume veste blanc cassé et pantalon blanc, elle s’installe sur le canapé et va participer à différentes rubriques de l’émission. Christophe Dechavanne accueille un chroniqueur, Alain, qui vient présenter un sport de plage, le beach-ball, dans un petit bermuda bariolé et en tongs. Il veut faire une démonstration avec l’animateur, mais celui-ci incite Mylène à prendre sa place ! Alain : On va faire une petite démonstration. Christophe Dechavanne : Et pourquoi vous voulez pas jouer avec Mylène qui est à côté de nous ? A : Mylène, voulez-vous essayer ?

CD : Vous voulez jouer avec ça ? C’est vous qui allez jouer avec Alain, tenez ! Il tend sa raquette à Mylène pendant qu’elle se lève du canapé pour les rejoindre. CD : En plus, vous avez la tenue du beach-ball, vous avez tout ce qu’il vous faut ! Mylène saisit la raquette et se met en place face à Alain. CD : Voilà, Mylène Farmer et Alain ! Je sens que ça va être formidable ! Mylène pousse un petit cri et fait une révérence au public. A : C’est une balle qui rebondit énormément… Mylène Farmer : Oui mais on change de place ! Ils inversent leur position. CD : Très bien. Vous nous dites, hein, comme vous voulez ! MF : C’est pour le profil, vous comprenez ! (rires) CD : Ah bon très bien ! MF : Et qu’est-ce qu’on fait, là ?! CD : Ah ben je ne sais pas, vous voyez ça avec Alain ! (…) Mylène et Alain échangent quelques balles. CD : Ah, vous êtes pas mauvaise, hein ! (…) MF : (elle tend sa raquette à Christophe Dechavanne) Vous pouvez me la tenir ? C’est mieux


à deux ! (Dechavanne tient la raquette avec Mylène et se met derrière elle) Non, plus serré, s’il vous plait ! (le public siffle) Alain lance une balle et Christophe Dechavanne fait dévier la raquette de Mylène pour qu’elle rate la balle, ce qui fait rire Mylène. CD : (faussement réprobateur) Bravo, Mylène Farmer ! Alain vante ensuite les mérites de ce sport. MF : (à Christophe Dechavanne) J’aime pas son short ! (rires) Alain fait mine de se vexer et tout le public rit de la réflexion de Mylène. Christophe Dechavanne relance le sujet de la chronique. A : (…) C’est un sport assez simple mais qui permet d’avoir beaucoup de joie. CD : (ironique) Oui. Beaucoup de joie. MF : (sur le même ton) Formidable ! (Elle éclate de rire) CD : Qu’est-ce qui vous fait rire ? MF : Non… (elle retient un rire) A : Vous voulez essayer à nouveau, Mylène ? MF : Avec plaisir ! Mais toujours avec monsieur Dechavanne ! CD : Ah ben alors, attendez ! Il se replace derrière elle et saisit la raquette. Mylène lance la balle, fait quelques échanges puis Christophe Dechavanne la pousse en avant. Elle ramasse la balle et salue le public qui applaudit. CD : Merci Mylène d’être venue ! MF : Merci ! CD : On se revoit bientôt ? MF : Avec plaisir ! CD : Reste avec moi ! (Il la prend par la taille) Alain présente alors un livre consacré à la mer. Christophe Dechavanne fait alors des mimiques et des petits commentaires qui font pouffer de rire Mylène. Il lui fait une grosse bise et annonce Jackie Quartz. Plus tard dans l’émission, après que Julie Piétri ait chanté son tube « Eve, lève-toi », Mylène est à nouveau aux côtés de Christophe Dechavanne. Celui-ci explique la nouvelle formule de la rubrique culte du  play-mec. CD : Je voudrais simplement expliquer à Mylène et à vous en même temps le nouveau procédé du play-mec. Car vous le savez, Mylène, il y a un nouveau procédé MF : Hmm ?? (rires) Une nouvelle recette ? CD : (…) Pour sélectionner le jeune homme qui va se déshabiller le vendredi, Et bien on en fait venir un le lundi – il est venu – le mardi – il est venu également… MF : (elle l’interrompant en le couvant d’un regard de velours) Ce que j’aime le plus, c’est vos yeux ! Gros blanc. Christophe Dechavanne reprend son explication en bafouillant, complètement

Aujourd’hui la vie

Date 16.09.1986 Chaîne Antenne 2 Présenté par Richard Michel et Martine Mauléon

Le sujet du jour de cette émission-débat est l’autisme et l’inadaptation sociale de certains jeunes. Mylène Farmer fait partie des intervenants car c’est un sujet qui la touche. Au cours de l’émission, elle interprète « Chloé », chanson collant parfaitement au thème du débat. Au début de l’émission, on

troublé ! CD : C’est épouvantable, ce que vous me faites parce que je perds tous mes moyens ! Mylène éclate de rire et se rapproche de lui. L’ambiance devient de plus en plus torride et Christophe Dechavanne expédie son explication sous les rires de Mylène. Après la prestation du play-mec, Christophe Dechavanne rejoint le bar de l’émission où se trouve l’invité principal de l’émission, Jean-Luc Lahaye, accompagné de Mylène pour lancer la chanson de fin de l’émission. CD : On va se dire au revoir, Jean-Luc… Mylène aussi ! MF : Oui… C’est dommage ! Jean-Luc Lahaye chante ensuite une chanson en hommage à Coluche (disparu trois mois plus tôt). Après la chanson, tous les trois se retrouvent à nouveau pour dire au revoir aux téléspectateurs. La prestation de « Libertine » sera rediffusée dans l’émission le 16 décembre.

la retrouve face aux deux animateurs, habillée d’une grande tunique noire. Autre intervenant de l’émission, Claude Lambert, journaliste à « France-Soir », à qui l’on demande son avis sur Mylène. Richard Michel : Bonjour Mylène Farmer. Mylène Farmer : Bonjour. RM : Dites-moi, est-ce que comme vous le dites dans la chanson, est-ce qu’il est nécessaire d’être libertine pour être… MF : Pour être une catin ? (rires) Ecoutez, je me plais à le croire. RM : Vous pensez ? MF : Je ne sais pas, je veux pas faire de généralités. Ça m’amuse de le dire, en tout cas. RM : Bon. Claude Lambert, vous êtes journaliste à « France-Soir », vous êtes notre invité. Vous avez déjà écouté les chansons de Mylène Farmer ? Claude Lambert : Oui, oui, beaucoup. Et puis en plus, on a fait souvent des reportages sur elle et je trouve qu’elle a une personnalité attachante. Elle ne chante pas pour ne rien dire et puis en plus elle a beaucoup de charme, elle passe bien à l’écran. C’est pour cette raison qu’on fait souvent de nombreux efforts sur elle parce qu’elle le mérite. (Mylène semble très flattée) Le thème des enfants autistes est ensuite abordé avec différents intervenants. Un peu plus tard dans l’émission, l’animateur lance une séquence où Mylène interprète « Chloé », cheveux lâchés, assise en tailleur et habillée d’une large chemise blanche et d’un petit bermuda blanc. A nouveau, comme lors de sa prestation précédente sur la même chanson, en juin 86, Mylène livre une interprétation saisissante de la chanson, en jouant beaucoup à la fois avec son regard et ses mains.


1986–1987 : Cendres de lune

Cocoricocoboy

Show Bises Date 02.10.1986 Chaîne TF1

C’est avec son costume bleu d’époque que Mylène vient chanter « Libertine » sur le plateau de cette émission dont l’invité principal est Laurent Voulzy. Pendant le pont de la chanson, Mylène va s’asseoir sur les genoux du chanteur. Celui-ci se lève alors et fait danser Mylène jusqu’à la fin de la chanson.

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Mylène Farmer

Date 26.09.1986 Chaîne TF1 Présenté par Stéphane Collaro

Nouvelle participation de Mylène à cette émission de sketches. Elle est présente aux côtés de Stéphane Collaro au tout début de l’émission pour accueillir les téléspectateurs. Pendant que l’animateur présente plus ou moins le sommaire de l’émission et son invitée, Mylène s’amuse à fredonner le refrain de «Libertine ». En fin d’émission, on retrouve Mylène pour un sketch écrit autour de sa chanson. Il se déroule en effet en plein XVIIIe siècle et fait la part belle au libertinage. Une tenancière de maison close, interprétée par Claire Nadeau, propose les services de sa jeune recrue, Libertine (interprétée par Mylène), au Roi qu’incarne Stéphane Collaro. Le sketch est suivi de la chanson « Libertine », chanté par Mylène dans le costume de jeune fille de petite vertu qu’elle porte dans le sketch (haut blanc et longue jupe à froufrous multicolores). En incrustation apparaît, de temps à autre, une Mylène ‘1986’ vêtue de sa robe en velours portée pour d’autres prestations de la chanson.

Hit des clubs Date 02.10.1986 Chaîne RTL TV Présenté par Jérôme Anthony

Les prestations télévisées pour « Libertine » se suivent et se ressemblent. On retrouve donc Mylène une nouvelle fois dans ce Top pour chanter son tube, habillée de son costume bleu d’époque, pantalon blanc et bottes noires.


Embarquement immédiat La vie de famille Date 08.10.1986 Chaîne FR3 Présenté par André Dussolier et Michel Boujenah

Deux des trois vedettes du film à succès de l’époque, « Trois Hommes et un Couffin », sont aux commandes de cette émission exceptionnelle depuis Annecy. Ils reçoivent une foule d’artistes, tous dans des décors différents. Sont présents entre autres : Catherine Lara, Jackie Quartz, Jean-Luc Lahaye, Bonnie Tyler, Gold, Pierre Bachelet,… Mylène, quant à elle, interprète « Libertine » dans un décor de bar branché, habillée une fois encore d’une veste bleue d’époque et d’un pantalon blanc, bottines noires aux pieds qui se marient plutôt mal avec le lieu. Pendant le pont de la chanson, elle va s’asseoir aux côtés d’un jeune figurant et se livre à un petit numéro de charme en sa compagnie. Petite particularité : pendant l’introduction de la chanson, Mylène est filmée en gros plan. On la voit alors rire de bon cœur, puis lever les yeux au ciel, sans qu’on sache vraiment ce qui provoque cet amusement.

Date 10.10.1986 Chaîne TF1 Présenté par Patrick Sabatier

Petite originalité pour ce grand prime-time : Mylène interprête « Libertine » en direct. Toutefois, elle ne chante pas sur la version instrumentale, mais bel et bien par-dessus la version single de « Libertine », en ponctuant la chanson de ses traditionnels « Wahou ! ». Reconnaissons que l’interprétation live n’est pas des meilleures, mais à la décharge de Mylène, on peut s’apercevoir qu’elle n’a pas de retour son. Il est donc difficile de s’entendre dans ces conditions. Particulièrement enthousiaste ce jour-là, la chanteuse porte une robe bleue cintrée et des gants unis. Comme à son habitude sur cette chanson, et en dépit de son micro à la main, Mylène effectue une chorégraphie énergique et démantibulée, aux frontières du grotesque parfois, reconnaissons-le. Elle finit le titre en se déhanchant aux côtés de Patrick Sabatier qui illustre le refrain de la chanson en prenant la main de Mylène. Sur le générique de fin, on retrouve Mylène parmi tous les autres invités de l’émission. Il était en effet de coutume que les invités se retrouvent à la fin pour interpréter tous ensemble la chanson de fin de l’émission. Mylène chante donc cette chanson de groupe, notamment aux côtés de Gérard Lanvin et Josiane Balasko.


1986–1987 : Cendres de lune

Les jeux de 20H

Cherchez la femme

Date 22.10.1986 Chaîne FR3 Présenté par Marc Menant et Jean-Pierre Descombes

Date XX.10.1986 Chaîne La Cinq Présenté par Amanda Lear et Christian Morin

Mylène n’est pas présente sur le plateau en province, mais en duplex depuis Paris. C’est une nouvelle fois en veste bleue d’époque et pantalon blanc qu’elle chante « Libertine ». C’est la dernière fois que Mylène participe à cette émission qui s’arrête deux mois plus tard, remplacée par « La classe ».

Mylène vient chanter « Libertine » sur le plateau de ce jeu télévisé délicieusement coquin. Elle porte à nouveau sa longue robe en velours provocante (très très courte devant). Elle occupe le plateau entier en effectuant de larges allers-retours avec sa chorégraphie énergique et sautillante.

C’est encore mieux l’après-midi

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Mylène Farmer

Date 06.11.1986 Chaîne Antenne 2 Présenté par Christophe Dechavanne

Par amitié pour Christophe Dechavanne, Mylène est de retour dans son émission pour la quatrième fois en six mois et toujours pour y présenter la même chanson (« Libertine ») ! Elle interprète toutefois également « Au bout de la nuit ». Mylène est présente sur toute la durée de l’émission et assiste ainsi à la plupart de ses rubriques, notamment un entraînement de billard. Pour cette émission, Mylène

porte un pantalon en cuir noir et un pull noir à col roulé surmonté d’une grande veste rouge. Ses cheveux sont maintenus par un nœud mauve. Détail amusant : Mylène va chanter deux fois « Libertine » dans cette émission, ce qui porte à six le nombre de fois où elle l’aura chantée chez Dechavanne en 1986 ! L’émission commence. On découvre Mylène assise sur les marches du plateau aux côtés de Christophe Dechavanne. Christophe Dechavanne : (…) Mylène Farmer est à côté de moi. Comment allez-vous ?

Mylène Farmer : Très bien. CD : Très bien ? Vous allez rester avec nous quasiment jusqu’au bout, c’est une fête pour nous ! Nous sommes tout à fait ravis ! J’ai appris récemment que le clip « Libertine » était nominé aux Oscars de la… (rires de Mylène) Comment ça s’appelle ? MF : Aux… (elle cherche aussi) CD : Aux Victoires de la Musique ! MF : Aux Victoires de la Musique, oui ! CD : Alors est-ce qu’on est pas un petit peu en même temps contente et en même temps un peu triste quand on a un clip qui est nominé et qu’on l’est pas soi-même ? Est-ce qu’on est très embêté de ça ? MF : Embêté, non. Je pense que c’est une très


« (À propos des Victoires de la musique) J’aime l’esprit du concours, mais le moment crucial, la cérémonie, c’est quelque chose que je n’aime pas. » bonne chose, d’abord pour le réalisateur. Je pense que c’est honorer un travail qui est très beau. Et moi, indirectement, de toute façon, je suis citée au travers de ce clip, donc c’est très bien ! CD : Oui, donc c’est bien. MF : Faut être philosophe, vous savez ! CD : Qu’est-ce que vous pensez de ces cadeaux, de ces prix qu’on donne à travers que ce soit la télévision, le cinéma, la chanson maintenant ? MF : Moi, je vais vous dire quelque chose : j’aime l’esprit du concours, mais c’est vrai que le moment crucial, la cérémonie, c’est quelque chose que je n’aime pas. CD : Ben c’est-à-dire que c’est quelque chose qui développe les jalousies, les aigreurs et tout ça, forcément au moins pendant cinq minutes ! MF : Oui. Certainement, certainement. Mais je pense que vous avez subi les mêmes phénomènes ! (Mylène fait allusion aux 7 d’Or) CD : Non, non, pas du tout ! (rires) Parce que moi je le savais, donc c’était pas la surprise ! MF : Oui, bien sûr. CD : Non mais c’est bien, et puis ça donne l’occasion aux gens du métier de se rencontrer, de se voir. Vous y allez aux Victoires ? MF : Non ! Non, non ! CD : Vous êtes pas là ? MF : J’ai quelque chose d’important à faire et malheureusement je ne peux pas ! (grand sourire) CD : Vous avez du travail ! Eh oui ! Une émission de télévision, par exemple ! MF : Par exemple, oui ! (rires) CD : Alors moi je vous propose, étant donné que c’est vrai qu’on connaît Mylène Farmer avec « Libertine » très, très bien, c’est un titre que nous entendrons à la fin de l’émission, mais « Libertine » c’est pas « un » disque, les chanteurs font plusieurs choses ! Et là, il s’agit d’un album, et sur cet album il y a donc « Li-

bertine » et il y a également « Au bout de la nuit », qui est un titre que vous aimez bien ? MF : Que j’aime bien, oui, et que j’ai écrit. CD : Oui ? Ah ça c’est très bien, donc on va en profiter tout de suite (…) : Mylène Farmer, « Au bout de la nuit ». Mylène se lève et va rejoindre un coin du plateau où se trouve un grand billard à tapis bleu. Elle interprète donc « Au bout de la nuit », les cheveux lâchés (elle a ôté son nœud pendant le jingle). La chanson terminée, Christophe Dechavanne invite Mylène à le rejoindre sur le canapé où se trouve une styliste (Mylène a déjà replacé son nœud dans les cheveux). CD : Je vous présente Elisabeth de Senneville. MF : Bonjour ! (Christophe Dechavanne fait les présentations) CD : Vous avez récupéré votre micro ? Il était tombé ! MF : Il est là ! (elle refixe son micro à sa veste) CD : Dites-moi un petit mot sur ce que vous pensez de vos contemporains et de leur habillement, Mylène Farmer. MF : Ce que je pense de mes contemporains ? CD : Oui, de leur habillement plus précisément. MF : Je remets mon petit micro…Ce que j’en pense ? Je sais pas, je pense que la mode est très diversifiée actuellement. Je pense qu’on a vraiment le choix et c’est très bien ainsi ! CD : Mais vous, vous… MF : Moi j’ai une passion actuellement, c’est vrai, pour les habits d’époque, c’est-à-dire là actuellement le XVIIIe siècle, mais que demain ce pourrait être, je sais pas pourquoi pas, la Russie ! (« Tristana » n’est pas loin…) La styliste présente ensuite un petit défilé de ses

créations, suivi attentivement par Mylène. Après une chanson de François Valéry, Mylène assiste à la rubrique culinaire de l’émission. Peu attentive à la présentation de la technique du sous-vide, elle picore dans les quelques assiettes disposées devant elle. Christophe Dechavanne lance ensuite un scopitone d’époque de Johnny Hallyday. Après plusieurs rubriques auxquelles ne participe pas Mylène, Christophe Dechavanne invite cette dernière à le rejoindre sur le canapé où il reçoit Jean-Pierre Aumont, le futur Sébastien Degrâce de « Giorgino », venu présenter ses mémoires. Pendant l’interview de l’acteur, Christophe Dechavanne fait réagir Mylène. CD : Vous êtes passionnée par le cinéma, Mylène Farmer ? MF : Mais bien sûr ! CD : Le cinéma ancien ? (…) MF : Tous les cinémas ! J’aime, oui. L’entretien avec l’acteur se poursuit. Il est suivi d’une rubrique de voyance. Au retour plateau, on retrouve Alain Lagurgue, le chroniqueur de sport de l’émission (qui portait un bermuda qui avait beaucoup amusé Mylène lors de sa précédente venue). Accompagné de deux champions il fait une démonstration de billard à trois bandes. CD : Mylène Farmer, qui est avec moi, est une passionnée de billard m’a-t-elle avoué tout à l’heure en coulisses. (tous deux s’échangent un regard complice) Les deux champions de ce billard particulier font tour à tour une démonstration, pendant que Christophe Dechavanne, fidèle à ses habitudes, fait le pitre, pour le plus grand bonheur de Mylène qui ne cesse de rire ! Et inévitable-


1986–1987 : Cendres de lune

À la folie, pas du tout

ment, il propose à Mylène d’essayer de jouer un peu. CD : Vous voulez essayer, Mylène ? MF : Avec plaisir ! CD : Attention, un tapis coûte très cher ! Vous avez déjà joué au billard ? MF : Quel en est le principe ?! (rires francs) Avec l’aide d’un des champions et pendant que Christophe Dechavanne donne des explications fantaisistes, Mylène fait un essai. Elle fait une petite révérence sous les applaudissements du public.

Date 23.11.1986 Chaîne TF1 Présenté par Patrick Poivre d’Arvor

Cette émission de variétés du dimanche après-midi propose notamment le classement des ventes de disques dans les magasins Nuggets, en partenariat avec « France-Soir Magazine ». Mylène est ce jour-ci en troisième position des 45 tours français. Pour l’occasion, elle est présente sur le plateau pour interpréter la chanson, habillée une fois encore de son costume bleu d’époque, d’un pantalon blanc et de bottines noires.

Pour lancer la séquence suivante, le  play-mec, Christophe Dechavanne se met à bafouiller complètement. A ses côtés, Mylène se cache la tête dans les mains pour réprimer (avec mal) un énorme fou rire. Après le play-mec, un plan étrange montre en gros plan les visages de Christophe Dechavanne et Mylène Farmer dans une sorte de réceptacle. On se rend compte alors qu’il s’agit du couvercle de l’appareil à sous-vide présenté précédemment par le cuisinier ! Christophe Dechavanne continue de bafouiller, mais cette fois-ci uniquement dans le but de faire rire Mylène. Celle-ci pour tenter de l’arrêter n’hésite pas à le pincer, tout en continuant de rire. L’animateur arrive tant bien que mal à annoncer que Mylène va interpréter « Libertine » pour finir l’émission. Mylène va se mettre en place en disant « Quel idiot ! » et toujours en continuant de rire.

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Mylène Farmer

Face au public et forcément très enjouée, Mylène interprète « Libertine » en effectuant sa chorégraphie habituelle. La chanson terminée, Christophe Dechavanne la rejoint. CD  : J’ai une petite surprise pour vous Mylène ! MF : Allons bon ! CD : J’espère que vous n’avez pas trop chaud. Il fait une chaleur très, très éprouvante ! MF : On commence tout de suite ?! (elle ôte sa veste) CD : (ravi, il lui tient sa veste) Oui, déshabillezvous ! On va vous demander de chanter, si vous êtes d’accord, une deuxième fois « Libertine » ! (acclamations du public) Christophe Dechavanne salue les téléspectateurs MF : Bon, on va remettre la veste ! (elle joint le geste à la parole) Pour la deuxième fois, Mylène interprète donc « Libertine ». Tous les intervenants de l’émission se réunissent sur le plateau autour d’elle et dansent sur la chanson. La prestation terminée, le générique de fin défile.

C’est une chanson Date XX.12.1986 Chaîne TF1

Toujours dans le cadre de la promotion de « Libertine », Mylène est sur le plateau de cette émission de variétés pour interpréter son tube, habillée d’une veste rouge, d’une jupe très courte de la même couleur et de cuissardes noires. Le moins qu’on puisse dire c’est que l’énergie de Mylène est bien accueillie par le public qui tape dans ses mains lors des refrains finaux.


Sexy Folies

Date 17.12.1986 Chaîne Antenne 2 Présenté par France Roche

Cette interview très coquine de Mylène Farmer est devenue culte. Elle est diffusée dans le cadre de « Sexy Folies », créée quelques mois plus tôt, en avril. Une émission très particulière et très osée menée de main de maitresse-femme par France Roche. Entre fantasmes, clips coquins et aveux libérés, l’émission a pour coutume de recevoir une personnalité pour parler sans tabous de sexe. Ce soir, c’est au tour de Mylène de se prêter au jeu. Son interview est nommée : « Mylène Farmer à nu » et est menée par Monique Chouraqui. Voix off : Tous les mois, une personnalité nous parle en toute liberté de sa vie intime. Mylène Farmer nous dit tout, tout, tout. Monique Chouraqui : (bien qu’assise face à Mylène, la journaliste n’apparaît pas à l’écran si ce n’est parfois partiellement de dos) Est-ce que vous prenez des initiatives en amour ? Mylène Farmer : (filmée en gros plan, elle porte un haut noir et des gants noirs brodés de

brillants) Celle de choisir. J’aime séduire avant tout. Et posséder, peut-être dans un second temps. MC : Vous parlez avec les hommes avec qui vous avez une relation sexuelle ? MF : (dans un sourire) Un peu ! Il faut agir plus que parler ! (rires) J’aime bien le toucher, j’adore. MC : Vous préférez faire l’amour en silence ? MF : Le regard… MC : Vous n’aimez pas qu’on vous parle ? MF : Non. Parler, c’est pour construire l’avenir. MC  : Vous pourriez imaginer une scène d’amour idéale pour vous ? MF : L’ascenseur, j’aime bien. MC : Faire l’amour dans un ascenseur ? MF : C’est vous qui le dites ! (rires) MC : Ça se passe très vite, on se quitte sans se dire au revoir et sans se dire un seul mot… MF : Ça peut être ça… MC : …et on fait l’amour sans se parler. MF : Voilà. MC : Il vous est arrivé de passer plusieurs mois sans faire l’amour, plusieurs semaines ? MF : Oui, toute mon adolescence, toute mon enfance. MC : Et vous l’avez vécu comment ? C’était difficile ? C’était une frustration ? MF : C’est quelque chose que, je crois, j’ai appréhendé et que j’ai occulté et dont j’ai eu horreur aussi avant de le connaître, et même aussi un peu après.

MC : Vous vous souvenez de la première fois ? Vous voulez le raconter ? MF : La première fois… Je crois, contrairement à beaucoup de personnes, c’est un moment plutôt, certainement décisif dans la continuité, quelque chose de laborieux, de difficile. C’est quelque chose de très fragile, voilà. C’està-dire qu’on ne connaît pas, que personne ne maîtrise. MC : Ça s’est passé comment ? MF : Une chambre… Une chambre banale, un lit même pas douillet… Une chose incroyable. C’est un peu un viol. Le viol de l’enfance, un peu le viol de l’imaginaire. MC : La fin de l’innocence… MF : C’est un peu ça. C’est quelque chose après qu’on reconstruit, mais c’est vrai que ça a été un peu un film de Walt Disney qui…pouf ! qui s’en va. MC : Un souvenir désagréable, la première fois ? MF : Pas désagréable, parce que c’est moi qui suis allée vers ça donc j’ai voulu les choses. Maintenant je maîtrise beaucoup plus, et puis je vais vers ces choses avec un peu plus de vice. MC : Quelle sorte d’hommes vous attire ? Qu’est-ce qui vous trouble chez un homme ? MF : Je crois que c’est, ça a été de tous temps, les gens qui ont une existence sociale. C’est-à-dire que ça peut être du domaine de la littérature, politique, chanson, autant d’arts qui existent. MC : Quelqu’un qui détient le pouvoir, une

« (Sa première fois) Une chambre banale, un lit même pas douillet… Une chose incroyable. C’est un peu le viol de l’enfance, de l’imaginaire.  »


1986–1987 : Cendres de lune

forme de pouvoir ? MF : Un certain pouvoir, une forme de pouvoir. MC : Vous avez besoin d’admirer ? MF : J’ai besoin d’admirer, oui. MC : De vous sentir dominée ? MF : La domination, elle peut s’effectuer effectivement quand il s’agit de plaisir. MC : Elle peut s’effectuer physiquement aussi ? Vous aimez être dominée quand vous faites l’amour ? MF : Une certaine domination, oui. MC : Vous aimez la violence ? MF : Je vous parlais de viol, j’avoue que c’est – mais là aussi il faut aller doucement quand même parce que c’est quelque chose de grave – mais c’est vrai que le viol a 3% de très exci-

tant et d’assez incroyable. MC : Vous avez besoin d’avoir mal, ou besoin de faire mal pour éprouver du plaisir ? MF : J’ai besoin de faire mal et j’ai besoin d’avoir mal, oui. MC : Pour parvenir au plaisir. MF : Oui, oui. Je veux bousculer, je veux… MC : Vous n’aimez qu’un homme qui vous fait souffrir, vous ne pouvez aimer qu’un homme qui vous ferait souffrir. MF : Si on veut un peu schématiser, aller vite, ça serait un peu ça. La facilité, les choses évidentes ne sont pas intéressantes. MC : Vous pouvez vivre plusieurs histoires d’amour en même temps ? MF : Oui.

MC : Les hommes concernés le savent, les hommes de votre vie ? MF : Si j’avais à choisir ma vie, et c’est là que réside la chose la plus difficile, c’est peut-être la… comment appelle-t-on ça ? On dit bigame ? Mais peut-être multiplié par quatre ! C’est avoir trois, quatre hommes dans ma vie. Si j’avais une métaphore à faire, je prendrais volontiers la mante religieuse. C’est-à-dire que, si j’en avais le pouvoir parce que bon, je suis pas encore tombée dans la folie totale, mais je crois que je couperais la tête volontiers. MC : Après ? (Mylène acquiesce)Vous leur voulez du mal ? MF : Je les aime pas, c’est tout ! (sourire) Fin de l’entretien et suite de l’émission.

Bleu Nuit Date 27.12.1986 Chaîne RTL TV

Tous en piste

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Mylène Farmer

Date 25.12.1986 Chaîne FR3 Présenté par Jean-Pierre Descombes

C’est sous le chapiteau du cirque Gruss que se déroule cette émission de Noël à laquelle participent plusieurs artistes, entre autres Douchka et Charles Aznavour. Mylène clôt l’émission. Sur la piste de cirque, habillée d’une veste rouge et d’une minijupe noire elle interprète « Libertine ». La chanson terminée, Jean-Pierre Descombes la rejoint pour clore l’émission. Pendant que celui-ci salue les téléspectateurs, Mylène

ramasse discrètement ses deux boucles d’oreille qui s’étaient décrochées pendant la chanson, du fait de sa chorégraphie pour le moins mouvementée ! Pendant que Mylène les remet en place, Jean-Pierre Descombes fait un appel en faveur de l’Unicef. Jean-Pierre Descombes : (…) Envoyez vos dons à l’Unicef ! N’est-ce pas Mylène ? Mylène Farmer : (en se raccrochant une boucle d’oreille) Ce que je ferai également. JPB : Ah ! Mylène Farmer, on peut encore l’applaudir ! MF : Merci ! (elle salue le public) Tous les participants de l’émission se retrouvent ensuite sur la piste pour le générique de fin.

Pour cette émission spéciale fêtes de fin d’année, une pléiade d’artistes s’est retrouvée en Tunisie pour chanter leurs tubes dans le cadre de différents sites du pays. Mylène est bien évidemment présente, qui plus est pour deux séquences, toutes deux tournées à Mestir. Dans un premier temps, on retrouve Mylène perchée sur des ruines pour chanter « Libertine », en tailleur rouge et grandes cuissardes noires. Plus tard dans l’émission, on la retrouve pour interpréter cette fois « Maman a tort ». Elle est juchée dans un premier temps à l’arrière d’un bateau, puis finit la chanson sur le port. Elle porte un ensemble et un manteau à col de fourrure noirs. Notons que le vent qui soufflait lors du tournage de la séquence semble livrer un rude combat avec le brushing volumineux de Mylène !


Béart 87 Date 14.01.1987 Chaîne Antenne 2

C’est encore mieux l’après-midi

Date 22.01.1987 Chaîne Antenne 2 Présenté par Christophe Dechavanne

Invitée récurrente de cette émission de Christophe Dechavanne, Mylène est une nouvelle fois au générique cet après-midi (et ce ne sera pas

retrouve Guy Béart qui interprète sa chanson « Emile s’en fout ». Mylène a changé de place, elle est désormais assise aux côtés de la fille du chanteur, la future star du cinéma Emmanuelle Béart. Dans une ambiance bon enfant, tous les artistes présents – Mylène y compris – ponctuent la chanson de larges bras d’honneur. Guy Béart finit la chanson en se laissant tomber dans les bras de Mylène et Emmanuelle Béart, ce qui provoque leur hilarité. Dés lors, Mylène ne participe plus activement à l’émission, mais étant assise à côté de Guy Béart sur la majeure partie du reste du programme, on la voit très, très souvent à l’image. Pour l’anecdote, c’est pendant le tournage de cette émission que Mylène rencontre Danyèle Fouché, attachée de presse de Guy Béart, qui devient dés lors la sienne aussi, et ce pour plus d’un an.

Après le générique de début, on découvre sur le plateau, au bar de l’émission, Christophe Dechavanne et Mylène Farmer, vêtue d’une longue tunique noire maintenue au col par une broche. Ses cheveux sont retenus par un grand noeud noir. Christophe Dechavanne : (…) Mylène Farmer, bonjour ! Mylène Farmer : Bonjour ! CD : Comment va-t-elle ?! MF : Très bien ! CD : (…) Vous êtes en plein travail, là, ou vous avez fini ? Parce que j’ai entendu dire qu’il y a un nouveau 45 tours qui allait sortir (« Tristana »), alors vous allez nous le confirmer ou l’infirmer ! MF : Nous étions en studio et nous avons quitté le studio depuis trois jours. CD : Quand vous dites « nous »… ? MF : C’est Laurent Boutonnat, c’est toute l’équipe, c’est Bertrand Le Page, voilà. CD : C’est tous les gens qui travaillent autour de vous et qui vous aident à travailler. Ça va être un 45 tours…Alors je préviens tout de suite les téléspectateurs : on ne le verra pas et on ne l’entendra pas aujourd’hui… MF : Non. CD : …parce qu’il ne sort que début février. MF : Voilà, il n’est pas encore sorti. Donc, la promotion commence d’ici deux semaines. CD  : Donc même en avant-première, on

1987

Comme son nom l’indique, cette émission spéciale est entièrement consacrée au chanteur Guy Béart qui reçoit une foule d’artistes au sein même de sa maison. L’occasion pour lui de chanter beaucoup de ses titres et d’en partager d’autres avec ses invités, dont Mylène. Vêtue d’une veste rouge et les cheveux attachés, la jeune chanteuse est assise à une grande table dans le salon, non loin de son célèbre hôte (la québécoise Diane Tell les sépare). Guy Béart commence à chanter en direct « Frantz », qu’il partagea auparavant avec Marie Laforêt, aussitôt rejoint par Mylène. Elle se lève pour contourner la table et se tient debout à côté du chanteur pour finir la chanson dans un éclat de rire. La séquence s’enchaîne aussitôt avec une autre où Mylène interprète « Au bout de la nuit », debout dans le grand escalier de la maison du chanteur, face à une verrière. Pour cette chanson, Mylène porte une longue robe noire. Un effet vidéo, pas forcément du meilleur goût, la dédouble sur certains plans. Un peu plus tard dans l’émission, de retour dans le salon, on

la dernière, loin de là !). Elle est même l’invitée principale. A ce titre, elle interprète deux chansons et on la retrouve lors de plusieurs chroniques.


1986–1987 : Cendres de lune 58

Mylène Farmer

n’aurait pas pu en avoir un petit bout comme ça, non ? MF : Même pour vous, je ne le ferai pas ! (sourire) CD : Ce sont des choses très réglées, comme ça. Qui est-ce qui décide dans ces cas-là, ce sont les chanteurs, ce sont les auteurs, les compositeurs ou les maisons de disques, de la sortie précise d’un disque ? MF : Ben là, c’est encore une fois un travail d’équipe. C’est-à-dire que une fois que le disque est pressé… (elle s’interrompt) Ne riez pas ! (rires) CD : Mais je ne ris pas, je suis toute ouïe ! Je vous écoute ! MF : (elle glousse) Une fois que le disque est pressé, après il faut en faire plein de petits disques qui vont être en magasins, et à partir de ce moment-là on peut faire la promotion. CD : Enfin il y a eu la sortie de l’album que tout le monde connaît, et alors moi ce que je vous propose tout de suite, puisqu’on est encore dans le 30cm qui est sorti et en attendant le 45 tours et je pense que là on aura l’occasion de se revoir début février par exemple… MF : Peut-être ! CD : …pour la sortie de « Tristana », c’est ça ? MF : Voilà. CD : Moi je vous propose « Greta ». « Greta », c’est un titre donc qui est sur le 30cm. Je vous demande d’aller vous installer… MF : (en se levant) J’y vais ! CD : (…) « Greta » : Mylène Farmer ! Assise par terre sur le plateau, Mylène interprète « Greta », dont c’est l’unique passage à la télévision. Après plusieurs chroniques auxquelles Mylène ne participe pas, on la retrouve sur le canapé de

l’émission aux côtés de Christophe Dechavanne pour parler cinéma à l’occasion d’un reportage sur le Festival du Film Fantastique d’Avoriaz (installé depuis à Gérardmer). CD : Voilà, on va parler un petit peu maintenant du Festival d’Avoriaz. Vous aimez ça, Mylène Farmer, les films fantastiques, les films avec de l’hémoglobine, les films parapsychologiques, les films où il faut s’accrocher un petit peu au fauteuil ? MF : (en faisant la moue) Pas trop, non. J’ai vu un extrait de « Massacre à la tronçonneuse », c’est ça ? CD : Ah ça, c’est franchement de l’hémoglobine ! C’est même pas du film fantastique, là c’est du film d’horreur ! MF : Oui. Je trouve ça sans finesse, non. CD : Non, ça vous plaît pas… MF : Y a certainement des films très, très brillants mais j’avoue que je n’en ai pas…Non, j’ai pas d’exemples, là, non. Y a un film que moi je juge fantastique, c’était un film de Polanski qui s’appelait…heu j’oublie son nom ! « Le locataire », pardon ! CD : « Le locataire »… MF : Voilà. Que j’ai adoré ! A ce moment-là, la caméra qui filme Christophe Dechavanne adopte un effet déformant, ce qui nous livre une image très comique de l’animateur. Celui-ci découvre le résultat sur son écran de contrôle et explique qu’il s’agit d’une blague du réalisateur pendant que Mylène est carrément hilare ! CD : (…) Moi j’aimerais bien qu’on fasse la même chose sur Mylène ! MF : (redevenant aussitôt sérieuse) Non ! CD : Ça va venir ! (…) Donc c’est pas votre truc, quoi, le Festival d’Avoriaz. Ça vous tente pas d’aller voir un petit peu comme ça une série

et d’aller enchaîner des… (ses propos sont assez décousus car il continue de surveiller son écran de contrôle mais les déformations ont cessé) MF : Si, si ça n’a rien à voir. Moi j’ai pas le temps d’y aller parce que j’ai la sortie d’un 45 tours, mais c’est vrai que ça peut être intéressant. CD : Oui… L’année prochaine alors vous irez ! MF : Maybe ! CD : Sauf si vous sortez un 45 tours à ce moment-là ! MF : Voilà ! (sourire) Les déformations reprennent sur le visage de Christophe Dechavanne, ce qui provoque à nouveau l’hilarité de Mylène. MF : (entre deux éclats de rire sonores) Ah vous êtes bien comme ça ! Là j’aime bien ! Christophe Dechavanne a le plus grand mal à garder son sérieux pour lancer le reportage sur Avoriaz. Bien plus tard dans l’émission, on retrouve Mylène qui assiste à la rubrique cuisine. La diététicienne Marion Kaplan est interrompue toutes les cinq secondes par des applaudissements que lance Christophe Dechavanne pour la déstabiliser et Mylène joue le jeu, applaudissant et riant à chaque fois ! CD : (fier de sa blague) Ça vous plaît ?! MF : Beaucoup ! L’animateur laisse ensuite la diététicienne expliquer qu’une grillade équivaut à des dizaines de cigarettes fumées, ce qui laisse l’animateur pantois. CD : (il se tourne vers Mylène) (…) Moi quand je vais en vacances, je me fais régulièrement genre gentleman-farmer…c’est amusant ça ! MF : Elle est excellente ! (rires) CD : (…) Mylène, vous mangez de temps en temps des grillades ?


MF : Très peu. CD : Vous n’avez pas un énorme appétit, vous hein ? MF : Je n’aime pas la viande. CD : Vous n’aimez pas la viande ! MF : Mais je n’aime pas le poisson non plus ! CD : Bon. En revanche, les cigarettes ça vous aimez beaucoup! (rires) MF : (elle glousse) Non plus !

C’est encore mieux l’après-midi

Après la célèbre séquence du play-mec, où un homme se déshabille en direct, Christophe Dechavanne se tourne à nouveau vers Mylène, avant que celle-ci ne conclue l’émission en interprétant « Libertine ». CD : Je voudrais quand même me retourner vers vous, Mylène Farmer. « Libertine », etc. quand vous voyez un play-mec, comme ça, les poils sur les cuisses, c’est votre truc ?! C’est votre tasse de thé ?! MF : Les poils ? Non ! CD : Enfin, je sais pas…Les play-mecs ! MF : Non. CD : J’ai vu une interview de vous un jour dans une émission qui s’appelait « Sexy Folies », sur la chaîne (le 17 décembre 1986), et j’avais été très, très étonné quand même de ce que vous disiez sur les hommes, etc. Quand vous donnez des interviews, quand on vous parle de sexe ou de sensualité, vous dites réellement les choses que vous pensez ou vous parlez de Mylène Farmer « Libertine » ? MF : Ce que je peux dire, c’est que cette émission (« Sexy Folies » ), c’était un moment privilégié et que j’ai privilégié ce moment et que je ne redirai pas ces choses certainement dans une autre émission. CD : D’accord. Mais j’allais pas vous demander de me répéter quoi que ce soit ! Christophe Dechavanne invite ensuite Mylène à aller se mettre en place face au public pour interpréter « Libertine », dont ce sera d’ailleurs l’ultime prestation télévisée. La chanson terminée, Mylène salue le public. L’animateur la rejoint pour dire au revoir aux téléspectateurs et le générique se lance (avec un peu de retard, ce qui force Mylène et Christophe Dechavanne à garder la pose à l’image mais cela ne les empêche pas de rire tous les deux !)

Date 19.02.1987 Chaîne Antenne 2 Présenté par Christophe Dechavanne

Chose promise, chose due ! Mylène Farmer est fidèle en amitié et c’est donc sur le plateau de Christophe Dechavanne qu’elle vient présenter son nouveau 45 tours inédit : « Tristana ». Vêtue d’une longue gabardine grise qui cache un pull noir décoré au col d’une étoile rouge, Mylène chante le titre pour commencer l’émission. Et pour la première fois depuis ses débuts, elle n’est pas seule. Elle est accompagnée de deux danseuses, qui seront les mêmes pour chacune des prestations sur ce titre : la fidèle Sophie Tellier (la rivale de « Libertine » restera aux côtés de Mylène jusqu’en 1991) & Dominique Martinelli (que l’on retrouvera sur la première tournée de Mylène, en 1989, en remplacement de Mariane Filali qui n’a finalement fait que les concerts parisiens du mois de mai). Lorsque la chanson s’achève, Mylène rejoint Christophe Dechavanne sur son canapé pour assister à la rubrique « Mode » de l’émission. Christophe Dechavanne : Mylène Farmer, bonjour ! Comment allez-vous ? Mylène Farmer : (en s’asseyant) Très bien, merci. CD : Vous avez un micro ? Vous avez tout ce qu’il vous faut ? MF : J’ai tout ce qu’il faut ! CD : C’est le dernier titre, ça ! C’est vraiment le tout dernier 45 tours !

MF : Le tout dernier, oui, qui est sorti il y a une semaine. CD : Il y a une semaine : c’est tout frais ! MF : Tout frais ! CD : Vous avez beaucoup travaillé la chorégraphie, tout ça ? Ça demande beaucoup de travail ? MF : Ça a demandé trois semaines et weekends. CD : Trois semaines une fois que le disque a été fait. MF : Bien sûr. CD : Ça veut dire qu’un 45 tours, grosso modo, met combien de temps à se faire, un titre comme celui-là ? MF : C’est-à-dire, nous on a mis un petit peu de temps parce qu’on a fait des remixes et des remixes… CD : Des remixes, c’est-à-dire qu’on fait, on refait… MF : Oui, c’est-à-dire qu’on fait une fois la chanson en studio, qu’on la mixe une fois et que quand on n’est pas content, on est obligé de retourner en studio et de refaire les balances. CD : Et vous êtes souvent pas contente ? MF : Très souvent, oui, j’ai l’impression ! CD : Oui mais ça c’est une preuve de professionnalisme ! (rires de Mylène) Christophe Dechavanne se tourne ensuite vers une styliste, la sœur de Paco Rabanne, invitée à présenter ses créations. Mylène dit aimer le style de ses créations (présentées sur des enfants) et demande si elles sont disponibles pour les grandes personnes ! Après plusieurs rubriques et chansons, on retrouve Mylène qui assiste à la rubrique « Cuisine ».


1986–1987 : Cendres de lune

CD : (replaçant le micro sur la veste de Mylène) Tenez Mylène, vous êtes déséquipée ! Vous voyez comme vous êtes ! MF : Vous m’avez renvoyée du plateau ! CD : (…) Pardon, j’ai pas entendu ?! MF : Vous m’avez renvoyée du plateau ! CD : Moi, je vous ai renvoyée ?! MF : Oui ! CD : (…) Voilà autre chose ! En plus, je sais pas si vous vous rendez compte, vous ratiez la rencontre avec Paule Neyrac ! (la diététicienne invitée de la rubrique) MF : Formidable ! (les deux femmes se serrent la main) Pendant que la diététicienne fait sa chronique, Christophe Dechavanne s’amuse avec un de ses gadgets favoris : une mini caméra donnant des images déformées. Si la chroniqueuse se laisse prendre au jeu, ce n’est pas le cas de Mylène ! CD : Mylène ?! MF : (se détournant devant la mini caméra) Oui, continuez… (elle se cache derrière sa main) Il lui offre ensuite le livre de l’invitée et Mylène l’en remercie. Elle feuillette le livre pendant que l’animateur annonce la suite de l’émission. Mylène n’apparaît plus par la suite.

La classe

Date 27.02.1987 Chaîne TF1 Présenté par Fabrice

Unique participation de Mylène à cette émission d’humour diffusée tous les jours à 20h et qui a révélé, notamment, JeanMarie Bigard, Lagaf’, Michèle Laroque et Pierre Palmade. Le programme se terminait à chaque fois par une chanson. Ce jourlà, c’est Mylène qui s’y colle. On la découvre néanmoins dès le début de l’émission. Elle arrive en effet dans la salle de classe juste après Fabrice et est suivie des différents intervenants de l’émission qui prennent place aux différents pupitres d’écolier. Mylène s’installe au premier rang. Elle est habillée d’un tailleur gris et porte une toque assortie.

Après quelques sketchs, Fabrice lance un jeu en partenariat avec « Télé Poche » à l’adresse des téléspectateurs. Il demande alors à Mylène de le rejoindre pour l’aider. La jeune femme se lève en souriant et prend place aux côtés de Fabrice, applaudie par les humoristes invités. Fabrice fait un baisemain à Mylène et la félicite pour sa tenue. Il lui tend ensuite un chapeau qui contient plusieurs numéros, lesquels doivent être placés sur une grille. Mylène tire donc cinq de ces numéros et les énonce à haute voix. Une fois terminé, elle regagne sa place. En fin d’émission, elle interprète « Tristana » sur l’estrade, accompagnée de ses deux danseuses. Le générique de fin défile pendant la chanson.

Embarquement immédiat

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Mylène Farmer

Date 08.03.1987 Chaîne FR3

Dans le jardin enneigé d’un manoir, Mylène, en costume rouge et toque assortie, effectue un mini sketch avec Alain Souchon, qui se termine

par une course-poursuite en accéléré façon « Benny Hill » entre les sapins. Mylène chante ensuite « Tristana », toujours en extérieur, accompagnée de ses deux danseuses, le manoir en second plan.


© Sygma-Corbis

© Sygma-Corbis


1986–1987 : Cendres de lune

Affaire suivante

Zénith Date 19.03.1987 Chaîne Canal+ Présenté par Michel Denisot

Date 14.03.1987 Chaîne Antenne 2 Présenté par Jean-Pierre Foucault

C’est dans son petit tailleur gris et toque assortie qu’on retrouve Mylène Farmer au banc des accusés de ce faux tribunal. Elle y avait déjà été vue quelques mois plus tôt, pendant la promo de « Libertine » (le 20 août 1986). Le chef d’accusation est bien singulier : une courtisane vient en effet se plaindre que la libertine chantée par Mylène l’an d’avant, n’a finalement rien d’une libertine. Et pour appuyer ses dires, elle cite plusieurs vers de la chanson pour mieux les contredire. Mylène tente bien de se défendre, aidée par un avocat (trop !) sensible à son charme, mais le président JeanPierre Foucault la condamne… à chanter autre chose. La peine est aussitôt mise à exécution, et c’est avec ses deux danseuses que Mylène interprète « Tristana » sur le plateau en guise de générique de fin.

La promotion de « Tristana » passe par le plateau de « Zénith », l’émission de Michel Denisot qui deviendra « Mon zénith à moi » quelques mois plus tard, à la rentrée de septembre. C’est face au public que Mylène interprète son titre avec ses danseuses. Elle porte cette fois-ci un tailleur bleu électrique, dont un pan de la jupe est attaché à son doigt via un anneau ; ses cheveux sont lâchés. A la fin de sa prestation, alors que Mylène quitte le plateau, Michel Denisot la félicite pour son look.

Midi Pic

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Mylène Farmer

Date 27.03.1987 Chaîne FR3 Île-de-France Présenté par Philippe Bachmann

Mylène retrouve une fois encore l’animateur Philippe Bachmann (rappelons qu’il est un des premiers à avoir reçu la chanteuse à ses débuts en 1984 et qu’elle lui a régulièrement rendu visite dans les années suivantes). Comme son nom l’indique, cette émission prend place à la mijournée. Mylène y interprète « Tristana » puis répond à quelques questions de l’animateur avec qui elle est toujours aussi détendue et spontanée.

Philippe Bachmann : (il présente les invités de son émission) (…) Et puis nous recevons également avec beaucoup de plaisir Mylène Farmer avec son nouveau titre : « Tristana ». Mylène Farmer ! Sur le plateau, Mylène interprète « Tristana » dans un tailleur noir, les cheveux lâchés tombant sur les épaules. Elle est accompagnée de ses deux danseuses habituelles pour ce titre. Ensemble, elles effectuent la chorégraphie de la chanson. Celle-ci finie, l’animateur rejoint Mylène pour discuter un peu avec elle. PB : Mylène Farmer, sa nouvelle chanson : « Tristana ». Impressionnante au niveau de la chorégraphie, c’est de mieux en mieux ! (rires de Mylène) Parce que déjà tu nous avais habi-

tués à pas mal de chorégraphies sur les anciens titres… Je te laisse reprendre ton souffle, tu remarqueras… Mylène Farmer : Oui ! (rires) PB : …je discute pendant ce temps-là tranquillement, parce que c’est épuisant, croyez-moi, le métier de chanteuse ! (Mylène acquiesce d’un mouvement de tête) Il ne suffit plus de chanter, il faut savoir aussi danser ! MF : Vous avez des spots qui sont très violents ici, il fait très, très chaud ! PB : Oui, oh c’est pas le seul studio où y a des spots violents, je crois de toute façon ! MF : Non ! PB : (Alors que la pochette du 45 tours de « Tristana » est montrée à l’écran) C’est un titre qui ne ressemble pas du tout au précédent. MF : Non, on a essayé de faire exactement le


contraire, en fait, de « Libertine »… PB : Oui… MF : …de ne pas plagier cette chanson. PB : Mais toujours dans la même qualité, quand même ! MF : C’est gentil ! Et puis avec une nouvelle ambiance, une nouvelle atmosphère… PB : Oui… MF : Et là on a pris justement un peu tout l’univers russe. PB : Oui, alors ça tombait bien justement… MF : Ça tombait bien ! PB : …puisqu’on va recevoir dans quelques instants Igor Moïsseïev (chorégraphe russe, invité suivant de l’émission). Cela dit, un clip en perspective, je suppose ? MF : Oui, on va tourner je pense d’ici deux semaines. On va prendre comme décor des plaines enneigées et puis ma foi après, c’est un secret ! PB : Tu vas pas aller tourner en Union Soviétique, quand même ? MF : J’aurais bien aimé, mais je compte faire un voyage là-bas. J’ai vraiment envie d’y aller. PB : Vraiment envie d’y aller… MF : Oui ! PB : Tu penses souvent, et depuis le début j’ai remarqué, souvent image. MF : Oui. PB : Parce que tu ne penses pas seulement à la voix, tu penses à l’image, c’est pour ça que je parlais de la chorégraphie tout à l’heure. On

Music family Date XX.04.1987 Chaîne RTL TV Présenté par Jean-Luc Bertrand

Nouvelle prestation pour promouvoir « Tristana ». Mylène, en tailleur cette foisci rouge mais toujours sur le même modèle (veste cintrée et jupe courte), cheveux lâchés, effectue sa chorégraphie entourée de ses deux danseuses sur un plateau sans public.

Pour information, « Music family » remplace le « Hit des clubs », émission que Mylène a plusieurs fois fréquentée avec ses premiers singles. Comme sa grande sœur, « Music family » est diffusée le week-end sur la chaîne RTL TV (pour l’Est de la France, mais aussi la Belgique). Mais alors que le « Hit des clubs » était tourné en plateau, sa remplaçante se déplace dans la région (boîtes de nuit, salles des fêtes,…).

parle pour dans quelques mois de la sortie de disques lasers, mais audio et vidéo. Tu dois être au courant, non ? MF : Un petit peu, mais… PB : Qu’est-ce que tu en penses ? MF : Pourquoi pas… PB : Pour le métier ? MF : Je sais pas, moi je…On parle toujours de la suppression de TV6 (chaîne musicale hertzienne créée en 1985, supprimée en 1987, trois semaines avant cette émission, et remplacée par M6) et c’est quelque chose qui, moi, me tient vraiment à cœur parce que c’était une chaîne qui développait un peu autre chose… PB : C’est vrai. MF : …et une fois de plus c’est une chaîne qui a été enlevée. Maintenant, des disques dont vous parlez je trouve ça très bien, oui bien sûr. PB : Enfin on murmure qu’il y aura peut-être une septième chaîne qui sera peut-être thématique dans le style de l’ancienne TV6. MF : (en chuchotant) Je n’ai pas entendu les murmures ! (rires) PB : Si, si on le dit, on le dit en tout les cas ! Bon, merci, en tous les cas, et puis on le passera, tiens, ton clip ! MF : D’accord ! PB : Na ! Merci, Mylène Farmer. L’animateur rejoint ses invités et l’émission continue.


1986–1987 : Cendres de lune

Spéciale festival de Cognac

La Nouvelle Affiche

Date XX.04.1987 Chaîne TF1 Présenté par Patrick Poivre d’Arvor

Patrick Poivre d’Arvor anime depuis un château une émission spéciale consacrée au sixième festival du film policier de Cognac. Mylène interprète « Tristana », accompagnée de ses deux danseuses, cheveux lâchés et tailleur bleu, dont un pan de la jupe est maintenu à un anneau à son doigt. Sa prestation est faite dans ce qui semble être la grande salle du château, sous une magnifique verrière et près d’un feu de cheminée.

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Mylène Farmer

Date 01.04.1987 Chaîne FR3 Présenté par Philippe Risoli

C’est en direct du Palais des Sports de Saint Etienne (là même où Mylène donnera la première représentation du Tour 89 deux ans plus tard) que Philippe Risoli reçoit le parrain de cette émission musicale, Julien Clerc. Celui-ci a invité Mylène Farmer, et veut en profiter pour lui demander un autographe pour sa fille, préciset-il à l’animateur ! Mylène est donc sur scène, face au public, en tailleur gris à fines rayures (une taille au dessus de la sienne, façon années 80 !) et ses cheveux sont attachés. Surprise lorsqu’elle entame le titre : elle chante en direct et ses danseuses font également office de choristes sur les refrains ! C’est suffisamment rare pour

être signalé. Mais la surprise est de courte durée car dès lors que Mylène monte dans les aigus, elle maîtrise mal sa voix et le résultat manque d’harmonie. Elle tente également des effets de voix sur certaines syllabes, mais là encore le résultat n’est sans doute pas celui escompté ! Les refrains, en revanche, sont d’une justesse parfaite. A la décharge de Mylène, notons qu’elle ne semble pas avoir de retour son. Dans ces conditions, il est en effet difficile de maîtriser sa voix à la perfection. La légende veut qu’à la suite de cette prestation, Mylène refusa systématiquement de chanter en direct à la télévision. Et il faudra effectivement attendre les NRJ Music Awards de 2003 pour pouvoir savourer une nouvelle interprétation sans play-back de la chanteuse à la télévision.


Ligne directe

« Je suis en train de me construire une image, un personnage. Je voudrais avoir deux albums à mon actif (avant de monter sur scène). » Date 02.04.1987 Chaîne Antenne 2 Présenté par Jacques Pradel

Il est étonnant de retrouver Mylène dans cette émission thématique qui traite ce jour-là des maladies psychosomatiques. Pourtant, elle est bien présente, interprète deux chansons et répond aux questions de Jacques Pradel en parlant notamment du clip qu’elle s’apprête à tourner et de son singe. Jacques Pradel : La chanson, tout de suite, et on va retrouver donc Mylène Farmer. Vous découvrirez cet après-midi ses deux toutes nouvelles chansons. On va commencer avec « Tristana », Mylène Farmer… Une séquence de Mylène et ses deux danseuses interprétant « Tristana » est diffusée. Mylène porte son tailleur rouge et a les cheveux lâchés. Au retour plateau, Mylène est assise à une table face à Jacques Pradel. Elle est habillée différemment puisque, pour cette entretien, elle a remis le tailleur gris à rayures qu’elle portait la veille dans « La nouvelle affiche ». JP : Voilà, Mylène Farmer à « Ligne Directe ». (à Mylène) Bonjour !

Mylène Farmer : Bonjour ! JP : Mylène Farmer avec ses petites dernières donc… MF : Oui… JP : Ce sont les dernières chansons, on va découvrir l’autre tout à l’heure… MF : C’est une chanson d’album. JP : Alors, je vous connais pas ! MF : (spontanément) Moi non plus ! (rires) JP : C’est la première fois que je vous… Je suis bien content de vous avoir avec nous ! Vous avez vingt-cinq ans, vous êtes née au Canada et puis vous avez, à chaque fois que vous avez sorti un disque ces derniers temps, et ça va durer longtemps, on l’espère pour vous… MF : (simultanément) Je l’espère ! JP : …ben ça a bien, bien fonctionné. Je vais, juste avant qu’on enregistre cette chanson, je vais vous poser une petite question, comme ça : alors quand est-ce que vous faites de la scène ? Vous êtes pas pressée… MF : Oui… Non, c’est-à-dire, c’est vrai que j’ai une vision des choses qui diffère peut-être un peu de certains artistes. C’est que moi, je vais prendre mon temps, que je suis en train de construire une image, un personnage, et que je voudrais avoir à mon actif au moins deux albums. Voilà. Et qu’en ce moment, c’est un marché qui est très difficile, et que de se produire en spectacle c’est aussi très difficile. Donc c’est quelque chose que je veux penser. JP : Comment se construit l’image, un per-

sonnage ? Vous êtes qui, alors ? Parce que là, « Tristana », c’est pas du tout comme « Libertine » ! MF : Non, c’est-à-dire que moi sur chaque chanson, j’ai un univers différent, que c’est des vêtements différents, que c’est une chorégraphie. Et c’est à la fois aussi un support de l’image, qui est le vidéoclip. Donc c’est à chaque fois quelque chose de différent, j’essaye en tout cas. JP : Oui, alors c’est vrai que le clip de « Libertine », il était vraiment très, très bien fait et beaucoup de gens s’en souviennent certainement… MF : Y en avait un autre qui précédait « Libertine », qui s’appelait « Plus grandir » et qu’on n’a pas beaucoup vu, mais qui est très, très beau aussi, qui est du même réalisateur… JP : Ben faudra nous l’apporter un jour ! MF : Avec plaisir. JP : On le passera. Vous êtes en train de travailler sur l’autre en fait, sur le clip de la chanson qu’on vient de voir, c’est ça ? MF : Oui. On va le tourner dans deux semaines, et ma foi… c’est un secret pour l’histoire ! (sourire en coin) JP : Mais vous vous en occupez, vous, de l’histoire ? MF : Ah bien sûr ! Moi, je prépare ça avec Laurent Boutonnat, donc qui est le réalisateur, et puis après, lui fait sa construction, son… sa salade intérieure, quoi ! JP : Sa petite patte…


1986–1987 : Cendres de lune

MF : Oui, c’est ça : sa patte cinématographique, que moi je n’ai pas ! JP : Voilà. Donc, pas de scène, mais des nouvelles chansons. Bientôt un autre album ? MF : Oui, je vais sortir je pense un album en septembre (ce sera finalement pour plus tard, en mars 1988), donc on va le travailler bientôt pour la fin d’été. JP : Alors Mylène parlait de son personnage à l’instant, c’est vrai que vous êtes amoureuse des… ? MF : Des singes ! (rires) Oui ! JP : J’ai lu ça dans un article, j’ai trouvé ça génial ! Il s’appelle comment, le vôtre ? MF : Le mien s’appelle E.T., et c’est un capucin. C’est grand comme ça (elle montre la taille avec ses mains), ça a une très longue queue et c’est très, très gentil. JP : Oui, et c’est très intelligent, je crois aussi, hein ? MF : C’est très, très intelligent, oui, oui. Très pertinent !

JP : Et vous en avez un, mais quand on en a un, on se dit quelquefois « A quand le deuxième ? », non ? MF : Voilà, j’ai essayé d’avoir, comme c’est une femelle, j’ai essayé d’avoir un mâle. Et c’est un mâle qui a été capturé dans son pays, alors que le mien est né en France, donc ils ont un comportement qui est très différent. Et le comportement du mien a changé à partir du moment où l’autre est venu… JP : Vous êtes pas venue avec, là ? MF : Non ! (rires) JP : Qu’est-ce que vous en faites quand vous… MF : Il n’aime pas l’hiver ! (l’émission a pourtant lieu début Avril) JP : Non ? Alors il est où, là ? MF : Il est dans une cage quand je ne suis pas là, sinon quand je suis à la maison, il gambade partout ! JP : Ok ! Mylène, en tout cas, merci d’être venue donc cet après-midi.

MF : Merci à vous ! JP : Tout à l’heure, on écoutera cette chanson de l’album, l’album de l’année dernière… MF : Oui. JP : …et tout de suite on va s’intéresser… Estce que vous êtes, parce que comme je disais, je ne vous connais pas, vous êtes du genre à vous préoccuper, à somatiser comme on dit, à avoir des boutons quand ça va pas, ou à vous sentir mal pour des raisons d’angoisse, ou autres ? MF : Oui, moi je crois que c’est le ventre. Voyez, on dit toujours que les Vierges, c’est les organes… là ! (elle désigne son ventre) Moi, c’est le ventre, c’est mon symptôme ! Jacques Pradel enchaîne sur les maladies psychosomatiques en compagnie d’un médecin spécialisé. On retrouve Mylène en toute fin d’émission ; elle interprète « Au bout de la nuit » dans la même tenue que celle qu’elle portait pour l’entretien.

La vie à plein temps Date 07.04.1987 Chaîne FR3 Pyrénées Présenté par Marc Bessou

Mylène fait un ultime passage dans cette émission qui l’a déjà reçue plusieurs fois. Comme lors de ses précédentes venues, elle est assise aux côtés de l’animateur (cette fois Marc Bessou) parmi les autres intervenants et assiste à l’émission entière. Marc Bessou énonce ses différents invités. Lorsqu’il présente Mylène, on la découvre, cheveux lâchés, habillée de son désormais traditionnel tailleur pantalon gris volontairement trop grand.

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Mylène Farmer

Marc Bessou : (…) En bout de rangée, c’est Mylène Farmer. Bonjour ! Mylène Farmer : Bonjour. MB : On écoutera « Tristana », bien sûr (Mylène acquiesce) et puis également, on vous passera à tabac ! C’est l’expression, enfin ça va pas très loin, hein ! MF : Oui, j’aime beaucoup (rires). Diffusion d’une séquence où Mylène chante « Tristana » sur le plateau accompagnée évidemment de ses deux danseuses. Puis, l’animateur interviewe Mylène.

MB : Voilà, « Tristana », Mylène Farmer. Je sais pas pourquoi, mais ça amuse beaucoup vos petites danseuses qui sont là (il désigne un endroit hors champ) et qui regardaient le tournage. MF : Elles sont indisciplinées, ça ne va pas ! (rires) MB : C’est incroyable, ça ! Comment s’appellent-elles ? MF : Alors il y a Sophie Tellier et Dominique (Martinelli) qui sont danseuses, qui sont choristes, qui aiment le cinéma…Beaucoup de choses ! MB : D’accord. C’est la première fois que vous faites une chanson avec elles ? MF : Absolument, oui, oui. C’est la première fois que j’ai des danseuses derrière moi. MB : Et pourquoi ? Ça correspond à quoi ? C’est pour habiller, pour étoffer ? MF : Non, c’était une envie parce que c’est un bel ensemble. Par plaisir, tout simplement ! MB : Ce qui a beaucoup marqué dans ce que vous avez fait, c’est les clips, on vous l’a dit souvent, notamment « Libertine ». MF : Oui… MB : Là, pour « Tristana », vous gardez cette présentation plus scénique ? Vous avez pas envie de faire une histoire ? MF : Si, si ! C’est en préparation : on va tourner le clip dans une semaine, maintenant. On va aller dans le Vercors, puis y aura du studio près de Paris, donc encore… MB : (il l’interrompt) Y aura vos petites copines

qui sont là ? (les danseuses) MF : Y aura une des deux - malheureusement, il n’y a pas deux rôles – qui est Sophie, donc, qui était la rivale dans « Libertine »… MB : Ah d’accord ! La méchante ! MF : …et qui sera là une tsarine très méchante, encore ! (rires) MB : Dites-moi, si j’ai bien compté, si j’ai bien tout compris, ça fait cinq 45 tours, non ? MF : Ça doit être ça, oui… MB : Hein, quelque chose comme ça ? MF : Oui. MB : Et puis un album ! MF : Et un album ! Et le prochain, on le prépare, là. MB : J’ai lu, j’ai appris ça, je suis un peu embêté de l’apprendre qu’aujourd’hui d’ailleurs, que vous étiez née au Canada. MF : Absolument. A Montréal. MB : Mais vous êtes française ! MF : (sourire) J’ai les deux nationalités. MB : Ah c’est vrai ?! On le dit jamais, ça ! MF : (soupir) Ça n’a pas grand intérêt, peut être, je ne sais pas ! (rires) MB : (il imite l’accent québécois) Parce que généralement, les canadiens, c’est quand même très typique si vous voulez, l’accent… MF : Oui, mais je préfère laisser mon accent de côté ! Que je n’ai jamais eu d’ailleurs ! MB : Bon. Et ces cinq 45 tours qui se sont succédés en, quoi, deux ans et demi, à peu près ? MF : Oui, c’est ça. Deux, trois ans.


MB : Comment vous vous êtes lancée là-dedans ? C’est toujours la même question, mais c’est toujours amusant de savoir ce qui amène les gens à s’exhiber, en quelque sorte. MF : Oui. Moi je réponds : c’est une bonne étoile au-dessus de ma tête, c’est une rencontre avec deux personnes, qui sont donc…enfin, qui étaient, puisque maintenant je n’ai plus qu’un producteur et compositeur, et puis ma foi après, c’est du travail, du plaisir et puis la chance ! MB : Quand on fait une chanson qu’on a beaucoup aimée, beaucoup vue, donc « Libertine », avant, est-ce que c’est à la fois plus facile pour produire autre chose, mais y a toujours le danger que ça plonge après, non ? MF : C’est-à-dire la fameuse expression « On vous attend au tournant », effectivement. Cela dit, c’est aussi quelque chose d’agréable de proposer quelque chose de nouveau et de différent. Je sais pas bien quoi vous répondre ! (sourire) MB : Mais y a une chose que vous devriez faire, à mon avis… MF : Dites-moi ! MB : …c’est : vous devriez avec vos disques mettre une notice explicative parce qu’on ne comprend pas toujours, c’est toujours assez allusif, vous voyez ce que je veux dire ? MF : (son visage se ferme) Moui… MB : Par exemple la première chanson, y a des générations de gens qui se sont essuyées le front pour essayer de comprendre ce que vous disiez dans « Maman a tort », ce que vous vouliez dire. MF : Dans « Maman a tort » ? MB : Et là, « Tristana » c’est un peu mystérieux, aussi. Mais c’est exprès, j’imagine. MF : Je sais pas si c’est important d’avoir la notice d’emploi d’une chanson. Je crois qu’il y a des personnes sur « Maman a tort », ce dont vous parliez, les personnes ont pris le refrain, « J’aime les plaisirs impolis », d’autres « J’aime

ce qu’on m’interdit » et puis sinon c’était la petite comptine : « 1, Maman a tort… » et puis à chaque fois on prend des éléments… MB : Et donc on en fait ce qu’on en veut, finalement. C’est self-service alors ?! MF : On en fait ce qu’on en veut, absolument. Et c’est pour ça aussi que l’apport de l’image pour les vidéoclips c’est encore quelque chose de nouveau, c’est agrémenter une histoire. MB : C’est ce qui illustre et c’est finalement à travers ça qu’on comprend le but. MF : Qu’on peut comprendre oui, absolument. MB : Ces vidéoclips, vous les réalisez, enfin le mot n’est pas exact, vous y participez… MF : …activement, bien sûr. MB : …et vous jouez un rôle vraiment décisif dans l’illustration de l’histoire ? MF : Oui, oui. Être extérieure, ça je ne peux pas. Je travaille avec Laurent quant au scénario, et puis après ma foi, c’est lui qui fait… MB : Vous dites : Laurent… ? MF : Laurent Boutonnat, donc. Excusez-moi, je suis habituée de dire Laurent ! (rires) MB : C’est si vous voulez qu’on comprenne, parce qu’on ne sait pas tous : Laurent Boutonnat. MF : Voilà, et puis après c’est lui qui s’occupe du cinéma, à proprement parler. Et puis après, c’est un travail d’équipe. MB : OK. C’est tout à fait gentil d’être venue. D’ailleurs, vous savez que vous restez ?! Parce que tout à l’heure y a les questions du minitel qui sont posées. MF : Oui, absolument ! (rires) Marc Bessou se tourne alors vers l’invité suivant, l’écrivain Pierre Péan, venu parler de son nouveau livre « Les chapelières », dont l’action se situe à la Révolution. L’occasion pour Marc Bessou de se tourner à nouveau vers Mylène. MB : (…) Le lien me paraît amusant Mylène. « Libertine », c’est datable de quand, ces cos-

tumes, ces décors ? C’est un peu avant la Révolution ? MF : C’est le XVIIIe siècle, oui, un peu avant la Révolution. MB : C’est pas très loin, quand même, ce climat de luxure qu’il y avait dans ce film-là et qui précédait l’ouragan. MF : Non… L’entretien avec l’écrivain continue. S’ensuit une chronique animalière portant sur les poissons rouges. MB : (il s’adresse à tous les invités sur le plateau) Je voudrais savoir si, les uns et les autres, vous avez des poissons rouges ! (…) MF : Moi je peux vous raconter une histoire sur deux petits poissons ! MB : Ah oui, oui, allez-y ! Racontez l’histoire ! MF : Alors, c’est deux petits poissons, rouges ou verts comme vous voulez, qui sont dans un bocal et y a un petit poisson qui demande à son voisin : « Dieu existe-t-il ? » Le petit poisson qui réfléchit, qui fait trois bulles et qui dit : « Et si Dieu n’existait pas, qui nous changerait l’eau du bocal ? ». Voilà ! (rires) MB : Oh comme c’est touchant ! Vous en avez pas, vous, de poissons, malgré l’histoire ?! MF : Non. Je n’aime pas particulièrement les poissons ! MB : Ah ! C’est franc ! Après d’autres entretiens, Marc Bessou passe aux questions posées par les téléspectateurs via le minitel (ancêtre d’Internet si on peut dire). MB : On va revenir à Mylène Farmer, donc, pour la passer à tabac (d’après le nom de la rubrique). Je prends la matraque ! « Passage à tabac », Mylène Farmer ! C’est une façon de parler, hein, parce que c’est pas si brutal que ça ! Ce sont donc les gens qui ont posé des questions sur minitel (…) et je me fais leur


1986–1987 : Cendres de lune Mylène Farmer 68

porte-voix. Alors, une première question : on vous demande pourquoi dans vos clips vous êtes toujours si provocatrice, s’il vous plaît ! MF : Par goût de la provocation. Voilà une phrase bien courte et très pertinente! (rires) MB : C’est pas mal ! MF : Parce que j’aime provoquer et que ce n’est pas mon seul but, mais c’est vrai que j’ai un goût pour la provocation, comme certainement Pierre Péan, enfin le goût des choses un peu choc. MB : Donc c’est réussi, alors ! MF : Merci ! MB : (il continue à lire les questions des téléspectateurs) « Et-tu mariée ? », nous demande Tom. MF : Non, je suis célibataire et je vis avec un capucin, qui n’est pas un moine mais un petit singe ! MB : Quelle drôle d’idée ! Et ça fait quelle taille, ça ?! MF : Ce capucin est grand comme ça (elle désigne la taille avec ses mains), une très longue queue et à peu près le ton de vos chaussures… MB : Ah je vous remercie ! Mais quand elles sont cirées, plutôt ! MF : …qui ne sont pas cirées, d’ailleurs ! (rires) Marc Bessou se tourne vers le chroniqueur animalier pour lui demander s’il connaît les capucins. Celui-ci répond que ce sont des petits singes délicieux, ce que Mylène confirme avec bonheur. MB : (…) D’autres questions ! Alors, on nous demande, ça c’est peut-être un peu plus sévère : « Avez-vous l’impression qu’il restera quelque chose, qu’on se souviendra des chansons de Mylène Farmer dans quelques années ? » MF : Ça, c’est une question à laquelle je ne saurais pas répondre. MB : Mais est-ce que ça vous importe qu’il en reste quelque chose ? MF : A votre avis ? Si on fait ce métier, c’est qu’on a envie d’y laisser quelques plumes et quelques traces. Bien sûr ça m’importe ! Je

vais tout faire pour qu’on ne m’oublie pas ! (sourire) MB : C’est bien ! Remarquez, la provocation est un peu liée, d’ailleurs. MF : Oui ! MB : Bon. On vous demande, ah ça je suppose que c’est un homme, c’est dommage il a pas laissé son nom ! Il vous demande quel type d’homme vous appréciez dans la vie. MF : Quel type d’homme ? Je ne pense pas avoir un type… MB : Les capucins ? MF : Les capucins ! (rires) Oui, j’aurais pu répondre ça ! C’est encore une question très difficile… J’aime plutôt, je crois, les hommes dits intellectuels, entre guillemets. MB : Nous sommes tout un groupe ici d’ailleurs qui correspond parfaitement ! MF : Je veux dire par là, c’est vrai que je suis fascinée par les métiers d’écrivain, journaliste…Mais c’est idiot comme portrait. Je ne sais pas, je ne sais pas bien. MB : Mais je crois qu’en réalité c’était plus terre à terre, c’était physiquement. MF : Physiquement ? Alors, plutôt grand, plutôt des cheveux longs et fournis… MB : D’accord. Comme Bernard-Henri Lévy, alors par exemple ? MF : Cela n’engage que vous ! (rires) MB : Très bien ! On vous demande si vous avez fait des études. MF : Oh, j’ai fait des études, je suis allée jusqu’en fin de première. Après, j’ai abandonné et j’ai commencé l’équitation avec assiduité. Et puis ensuite, je me suis tournée vers le théâtre. MB : OK. La toute dernière question : « Est-ce que ce qu’on voit de vous c’est vous, ou est-ce que vous n’êtes pas un peu préfabriquée ? », vous demande Laurence. MF : Encore une question qui est très étrange. Préfabriquée, c’est difficile vous savez. Je pense qu’on peut être préfabriqué sur un disque. Sur cinq disques plus un album, c’est très difficile. Moi j’aime ce que je fais et j’aime ce que je pro-

pose et j’essaye d’aimer ce que je suis. Donc au diable la préfabrication ! (sourire) MB : Parfait, belle conclusion ! Merci ! MF : Merci à vous. C’était pas trop dur quand même ! (rires) Marc Bessou lance ensuite un reportage. Avant de conclure l’émission et juste après avoir évoqué une exposition de peinture, il se tourne une dernière fois vers Mylène. MB : Vous peignez pas un petit peu, vous Mylène Farmer ? MF : Un petit peu…Peindre, non. Je dessine volontiers avec des pastels. MB : Qu’est-ce que vous faites alors pendant les périodes d’inactivité ? MF : Des choses très étranges. Dans le domaine du dessin, vous parlez ? MB : Oui, oui ! MF : Oui, des choses étranges… (elle soupire) Ça, c’est encore plus difficile pour moi à exprimer. MB : Bien sûr, oui. Y a des personnages, par contre ? MF : Moi j’ai une fascination pour les insectes, donc y a des insectes un peu bizarres. Sinon, des choses qui ne veulent rien dire ! MB : Bon. Enfin qui veulent sûrement dire quelque chose, faudrait peut-être s’y pencher…On n’a pas le temps, là… MF : Nous n’avons pas le temps ! (sourire) MB : (…) Au fait, quand est-ce qu’on vous voit sur scène avec les danseuses ? MF : Pas encore. Je vais préparer un prochain album pour septembre, octobre (ce sera finalement pour plus tard, en mars 1988) et puis après, nous penserons scène. MB : Qui vivra, verra ! MF : Absolument. Marc Bessou conclut l’émission en saluant les différents invités puis les téléspectateurs.


C’est encore mieux l’après-midi

Date 09.04.1987 Chaîne Antenne 2 Présenté par Christophe Dechavanne

On ne change pas une équipe qui gagne ! Alors que son invitée principale est la femme politique Georgina Dufoix, Christophe Dechavanne accueille une nouvelle fois Mylène Farmer. En tout début d’émission, Mylène est seule sur le plateau, assise sur une marche, dos au public, en tailleur noir et cheveux maintenus par un ruban noir, pour interpréter, pour la quatrième fois à la télé, « Au bout de la nuit », qui n’est pourtant ‘que’  la face B de « Tristana ». Elle finit la chanson les yeux embués. On la retrouve un peu plus tard dans l’émission. Elle porte alors une tenue différente (en l’occurrence son fidèle tailleur pantalon gris à fines rayures) et Christophe Dechavanne l’invite à s’asseoir à ses côtés sur le canapé et la présente à Georgina Dufoix. Christophe Dechavanne  : Mylène, venez

à côté de moi ! (…) Donc, ça y est vous avez fait connaissance ? Mylène Farmer, Georgina Dufoix… Georgina Dufoix : Oui, oui. Moi j’ai une grande admiration pour elle depuis tellement longtemps ! Mylène Farmer : J’en ai une autre (d’admiration) pour madame Georgina Dufoix. CD : Voilà, si vous voulez vous pouvez vous faire quelques compliments pendant quelques secondes ! MF : C’est déjà fait ! (rires) CD : Je suis ravi de vous avoir toutes les deux côte à côte. C’est vrai que votre chanson (« Au bout de la nuit ») était très jolie et qu’en plus c’était très touchant, voilà ! MF : Merci ! Georgina Dufoix présente ensuite une de ses amies qui est styliste et qui propose un petit défilé de ses créations sur le plateau. A l’issue de ce défilé, Christophe Dechavanne demande à Mylène quelles tenues ont sa préférence et Mylène en désigne deux en souriant (un tailleur rose à ceinture verte et une robe noir et blanc à poix avec ceinture jaune).

Après plusieurs rubriques auxquelles elle n’assiste pas, on retrouve Mylène qui prend place au bar de l’émission pour la rubrique culinaire. Georgina Dufoix complimente la diététicienne Michèle Rayjal, présente sur le plateau pour parler d’équilibre alimentaire. GD : Michèle est la vivante incarnation du fait que quand on mange bien, on est belle ! (…) CD : Mylène ? MF : Alors ça veut dire que je suis laide parce que j’ai une alimentation épouvantable ! CD : Qu’est-ce que vous mangez ? MF : Beaucoup de Coca-Cola, beaucoup de bonbons… CD : (…) Beaucoup de choses sucrées, donc. MF : Coca-Cola et beaucoup de bonbons ! CD : Oui, Coca-Cola c’est pas la peine de le citer douze fois ! MF : Je fais ce que je veux ! (sourire) CD : Sinon vous mangez hamburgers, frites… ? MF : Ça m’arrive, oui. Mais c’est vrai que j’ai une alimentation épouvantable. CD : Mais des choses diététiques, des choses comme ça ? MF : (rires) Pas du tout !


1986–1987 : Cendres de lune

Michèle Rayjal présente alors une recette diététique, une mousse de pêches aux fraises et à la menthe, que Georgina Dufoix fait goûter à Mylène avant de le goûter elle-même. Christophe Dechavanne en prend également une portion, tout ça avec une seule et même cuillère !

à la folie, pas du tout

CD : (…) Vous avez trouvé ça comment, Mylène ? Parce que vous dites rien, et quand vous dites rien… ! MF : Qu’ai-je dit ?! CD : Justement, rien ! MF : Je trouve ça très bon, mais pas assez sucré ! Donc, voilà moi je rajouterai un petit peu de sucre ! CD : Oui, mais alors ça perd ses propriétés amincissantes ! Remarquez, vous avez pas vraiment besoin de mincir ! MF : Pas vraiment, non ! D’autres rubriques ont lieu sans Mylène, et on retrouve celle-ci en toute fin d’émission pour chanter « Tristana » entourée de ses deux danseuses. A la fin de la chanson, Christophe Dechavanne rejoint Mylène, accompagné de Georgina Dufoix, pour saluer les téléspectateurs.

Date 12.04.1987 Chaîne TF1 Présenté par Patrick Poivre d’Arvor

Sur le plateau de l’émission de PPDA, on retrouve Mylène pour interpréter « Tristana », accompagnée en bonne et due

forme par ses deux danseuses. C’est dans un tailleur bleu à larges épaulettes et les cheveux lâchés que Mylène chante son titre. En fin de chanson, elle salue le public qui l’applaudit chaleureusement, avant de quitter le plateau.

Cocoricocoboy

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Mylène Farmer

Date 17.04.1987 Chaîne TF1 Présenté par Stéphane Collaro

Nouvelle participation de Mylène dans l’émission comique de Stéphane Collaro. Elle se prête une nouvelle fois à un sketch costumé où elle interprète une princesse

« triste en permanence » que bouffons et troubadours tentent de distraire en vain. Le sketch s’achève par un banquet typiquement médiéval. Mylène chante alors « Tristana », accompagnée de ses danseuses, dans un des décors du sketch, vêtue d’un tailleur rouge, les cheveux lâchés sur ses épaules.


Direct

Date XX.04.1987 Chaîne Canal+ Présenté par Philippe Gildas

Philippe Gildas reçoit Mylène Farmer sur le plateau de son « Direct », émission quotidienne de la mi-journée sur Canal + (qui disparaîtra à la rentrée de septembre quand l’animateur se lancera dans l’aventure « Nulle part ailleurs », sur la même chaîne, mais en fin de journée). Mylène, dans son tailleur gris, prend place aux côtés de la comédienne MarieChristine Barrault pour répondre aux questions de l’animateur. Philippe Gildas : Bonjour Mylène ! Est-ce que le clip est fini ? Mylène Farmer : Il est terminé, oui. PG : Ça sortira bientôt ? MF : Il est en montage actuellement pendant une semaine, une semaine de mixage et la troisième semaine sera la bonne ! PG : Je voudrais bien voir « Libertine » au milieu des loups ! MF : Oui, ça va être très, très beau je pense ! PG : Vous l’avez vraiment fait avec des loups ? MF : On a fait avec un loup, et puis sinon y a des… Je vous donne pas le secret, quand même ! (rires) PG : Mais je savais depuis le début qu’elle voulait à tout prix faire son clip dès la sortie, avant même la sortie de « Tristana », d’ailleurs ! MF : Oui ! PG : Et vous l’avez tourné en Ardèche, non ?

MF : Non, non, non, on l’a tourné dans le Vercors, avec des plaines enneigées… Un très, très beau décor ! PG : « Tristana », c’est votre combien, cinquième 45 tours ? MF : Oui. PG : C’est une carrière qui est partie à cent à l’heure, alors ! Y a combien de temps ? Trois ans ? MF : Ça fait, depuis « Maman a tort », trois ans, oui. Avec un album, entre ! PG : Et « Maman a tort », c’était par hasard ! MF : Rien n’est un hasard, mais c’est vrai que j’ai eu la chance de rencontrer deux personnes qui… PG : (il l’interrompt) Boutonnat ? MF : Boutonnat, oui, Laurent Boutonnat avec qui je continue, compositeur donc qui m’a composé la première chanson. PG : Il a eu, enfin je sais pas qui a voulu cette rencontre mais c’était bien puisque trois ans après un album est sorti… MF : Oui. PG : …qui a combien ? Six mois ? MF : A peu près, oui. (l’album est en fait sorti voilà un an tout juste) PG : (…) Et voilà maintenant le nouveau 45 tours, « Tristana », on l’écoutera chanter dans un instant ! Gildas se tourne alors vers Marie-Christine Barrault, qui parle des films en costumes. PG : (…) Mylène, elle adore les déguisements ! MF : (rires) C’est vrai, j’aime bien les costumes, oui, les époques Marie-Christine Barrault : Les robes sont

très, très lourdes ! (…) Pour chanter, je suis pas sûre que ce soit bien ! (rires) PG : (se tournant à nouveau vers Mylène) Alors, « Tristana », l’histoire de « Tristana » ? MF : Que voulez-vous savoir ?! PG : Après « Libertine », il fallait le trouver quand même ! MF : Oui! C’est la dure reconversion de «  Libertine  »  ! C’est une histoire simple, « Tristana », c’est un peu la mélancolie, un peu le désespoir. Voilà, c’est un peu la couleur de cette chanson. PG : Pourquoi chaque fois, vous qui avez une vie professionnelle parfaitement réussie, apparemment une vie privée aussi dont vous n’avez pas à vous plaindre, la petite québécoise… non c’est pas Québec, vous hein ? MF : C’est Montréal. PG : …venue en France, non pas pour chanter mais bien avant déjà ! Vous aviez quel âge ? dix ans, douze ans ? MF : Oui c’est ça, neuf, dix ans. PG : Quand vous voulez retravailler, vous allez au Canada sans problèmes : ils vous connaissent bien ! MF : Ils me connaissent pas du tout au Canada, non ! Non, non ! L’album est sorti, « Libertine » est en train de sortir mais je n’ai rien fait dans ce pays. PG : Mais ils vous connaissent quand même ? Ils savent… MF : Certainement. Depuis « Maman a tort », oui, ils s’intéressent un peu à ce que je fais. PG : Sinon vous n’envoieriez pas vos disques en priorité là-bas, après la France ! MF : Ce n’est pas en priorité, c’est eux qui font appel à vous s’ils sont intéressés.

« Le tournage de “Tristana” a duré de cinq à six jours, mais vraiment à temps complet : de cinq heures du matin à onze heures du soir ! »


1986–1987 : Cendres de lune

PG : Mais ça sert pas d’être canadienne ? MF : Je ne crois pas. En ce qui me concerne, non parce que… PG : Ils vous considèrent pas du tout comme canadienne ? MF : Ben j’avoue que j’y suis jamais retournée, que je n’ai jamais rerencontré donc des canadiens. Il était question que j’y aille là, en mai donc c’est en pourparlers. Donc je pourrai vous répondre après ! (Mylène ira finalement au Canada un an plus tard) PG : La carrière de mannequin, vous l’avez complètement abandonnée ? MF : Oui, j’avais fait ça vraiment en dilettante, c’était pour gagner ma vie. Donc j’ai complètement abandonné parce que inintéressant et pas du tout ce à quoi j’aspirais. PG : Alors qu’est-ce que vous ferez après la chanson ? MF : Probablement élever des singes ! PG : (rires) Et pourquoi ? MF : Parce que j’ai une passion de cet animal, des animaux en général, mais c’est vrai des singes spécialement. PG : Mais qu’est-ce que vous en ferez ? MF : Bah écoutez, un élevage probablement ! PG : Mais des grands ? Des petits ? MF : Plutôt des gros. PG : Oui, mais ça se reproduit ! (rires) MF : Oui. Vous avez peur des familles nombreuses ?! (rires) PG : De singes, oui ! MF : Y a plein de choses à faire : l’éducation… Enfin, je sais pas, y a plein de découvertes à faire certainement avec ces animaux. PG : Enfin pour l’instant vous continuez la chanson ? MF : Pour l’instant, je suis ravie de chanter ! (rires)

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Mylène Farmer

Philippe Gildas demande ensuite à Mylène d’interpréter « Tristana », ce qu’elle fait, entourée de ses deux danseuses. A l’écran apparaît parfois un trucage vidéo entourant Mylène de fausses flammes. Après la chanson, Mylène retrouve sa place face à l’animateur. PG : Le dernier 45 tours de Mylène Farmer, « Tristana ». Alors en attendant la surprise du clip, parce que si j’insiste tellement sur le clip c’est…elle devrait faire du cinéma ! « Libertine » faisait combien de temps, le clip ? MF : Je crois que c’était onze minutes. PG : Un vrai film, en plus ! MF : Oui. Celui-là (« Tristana ») est parti pour être un peu plus long, d’ailleurs ! PG : Ah, vous allez faire encore plus long ?! Mais faut faire du cinéma carrément ! MF : Bah écoutez, peut-être un jour ! (rires) PG : « Libertine », vous l’aviez tourné dans un

château ? MF : On l’a tourné dans un château… euh qu’est-ce qu’on a fait d’autre ?! (sourire) On a fait de l’extérieur également. Et là, c’est essentiellement extérieur et un peu studio. MCB : Vous avez combien de temps pour tourner un clip ? MF : Il y a la préparation – je vous laisse juge, vous connaissez le métier ! Sinon de tournage, c’était à peu près cinq jours. Cinq, six jours mais vraiment à temps complet, c’est-à-dire c’était de 5h du matin à 11h du soir ! PG : Mais pourquoi est-ce que par rapport à une chanson vous faites un clip aussi long par exemple, et qui est une autre aventure ? MF : Oui, par plaisir. MCB : Mais alors vous changez la musique, vous l’allongez ? Comment vous faites ? MF : C’est-à-dire qu’on met ou de la musique additionnelle, dans « Libertine » c’est ce qui s’est produit, y a des moments sans musique, y a des moments avec voix-off, enfin y a plein de possibilités ! Et là en l’occurrence, on va mettre probablement la version du maxi 45 tours, donc qui est un peu plus longue que le 45 tours lui-même, avec une musique additionnelle et autre. PG : Vous préférez passer beaucoup de temps par exemple à tourner ces clips, à les préparer, les tourner ou bien faire de la scène ? Ce sont deux choses très différentes… MF : Cette question est très pernicieuse, je le sens ! (rires) PG : Vous avez fait le podium Europe 1 ? (tournée des boîtes de nuit pendant l’été 1986 avec Catherine Lara en tête d’affiche) MF : J’ai fait effectivement le podium Europe 1 et… PG : C’est une sacrée école, hein ? MF : Oui, tout à fait, oui. Très intéressant et très agréable. Je préparerai certainement une scène, mais je vais attendre déjà d’enregistrer un autre album. Quant aux tournages, c’est vrai que le cinéma me passionne, les tournages me passionnent. Et tourner avec Laurent c’est aussi quelque chose que j’aime beaucoup. MCB : Comment on fait ? C’est tout en playback ? Vous écoutez la musique quand vous tournez ? MF : Non, du tout. C’est-à-dire que chacun procède de façon différente. Nous, c’est vrai qu’on fait complètement abstraction de la chanson, du texte et de la musique pendant le tournage, et ce sera effectivement en playback derrière. MCB : Comme un vrai film, quoi. MF : Oui, oui. Philippe Gildas se tourne ensuite vers ses autres invités et Mylène n’intervient plus jusqu’à la fin.

Paris kiosque Date 25.04.1987 Chaîne FR3 Île-de-France Présenté par Jacques Mailhot

Mylène apparaît en début d’émission pour interpréter « Tristana » dans son large costume gris. Elle est bien sûr accompagnée de ses deux fidèles danseuses. Elles évoluent toutes trois dans un coin du plateau où sont disposées quelques toiles d’art moderne.


Lazer

Date XX.05.1987 Chaîne M6 Présenté par Mady Tran

Première apparition de Mylène sur la toute jeune chaîne M6, et ce pour une formidable et longue interview donnée par la chanteuse, venue présenter à la télévision son tout nouveau clip, celui de « Tristana ». Mylène se retrouve face à Mady Tran, journaliste passionnée et par conséquent passionnante, qui fait là sans doute l’une des meilleures interviews de Mylène, en tout cas l’une des plus intelligentes. Toutes deux sont assises face à face. Mylène est habillée sobrement d’un tailleur blanc et ses cheveux sont coiffés en catogan avec un ruban, blanc également. Mady Tran : (…) Sur le plateau de « Lazer » aujourd’hui est tombée comme par magie une poussière de cendres de lune : j’ai avec moi Mylène Farmer. Je suis très excitée à l’idée de recevoir ce personnage, car c’est vrai, dans la production actuelle en France c’est un personnage, c’est une image tout à fait à part. Merci Mylène d’être venue nous voir ! Mylène Farmer : Bonjour ! MT : Comment vas-tu ? MF : Très, très bien, merci ! MT : Je suis très contente de te recevoir, d’autant que ce dernier 45 tours que tu es

venue nous présenter nous plaît. Alors j’espère que je vais le faire aimer à tout le monde parce que ça, c’est un genre de challenge qui me plaît et qui m’intéresse. Je voudrais tout simplement pendant une heure et demie faire connaissance avec toi et te proposer de la musique, et parler de toi pour tous ceux qui nous regardent. MF : (un peu impressionnée) D’accord ! MT : D’où viens-tu, Mylène ? MF : Je suis née à Montréal, donc au Canada, et je vis en France depuis l’âge de neuf ans. Que dire d’autre ? Je ne sais pas ! MT : Ce que je voudrais, moi, dire, c’est rappeler un petit peu les chansons qui nous ont marqués. Le premier 45 tours… MF : Le premier 45 tours s’intitulait « Maman a tort »… MT : Et là vraiment, genre de flash, quand même, pour nous tous car c’était très particulier. On se demande toujours quand on te regarde évoluer si c’est un vrai personnage sorti d’une légende ou si c’est quelque chose que tu as eu envie de fabriquer, d’élaborer au fil des années et de ton travail. MF : C’est vrai que ce mot de « fabrication » est quelque chose qui me dérange, mais chacun pense ce qui lui plaît, comme on dit. Non, c’est certainement mon personnage qui est illustré par des chansons, par des clips, par plein de choses. MT : Des clips qui marquent eux aussi, et on parlera un petit peu plus tard de la projection que tu donnes de toi dans ces clips. On parle de toi en terme de libertine, et c’est pas un

doublon par rapport à la chanson : c’est vrai qu’on y a pensé dès le départ ! (rires de Mylène) « Maman a tort » c’est quoi, en fait ? C’est un SOS ? C’est un cri ? C’est quoi ?! MF : « Maman a tort », c’était une façon de parler d’amours étranges qu’on peut avoir quand on est adolescente ou adolescent, rencontrer une personne…Et c’est vrai que là, c’était un domaine hospitalier avec une infirmière, c’est une projection, comme ça, de la mère. C’est un amour interdit qu’on peut avoir avec une personnalité féminine, pourquoi pas. MT : Mais tout dans tes chansons suggère l’interdit, mais d’une manière très magique. MF : Tant mieux ! Mais j’aime les interdits. MT : Alors, je voudrais qu’on reparle du deuxième 45 tours, qui là aussi… MF : Qui était « On est tous des imbéciles » MT : « On est tous des imbéciles », et là c’est déjà beaucoup plus agressif dans le titre. MF : Je sais pas si c’est réellement agressif… C’est certainement provocateur. Et moi j’aime bien mettre en exergue cette phrase qui disait : « On est tous des imbéciles, mais ce qui nous sauve c’est le style ». Et je pense que c’est vrai ! (rires) MT : C’est pas dénué d’humour, de toute façon ! MF : Non, de toute façon. MT : Alors, tu es venue nous présenter ce 45 tours, mais avec aussi un clip fabuleux. J’aimerais que tu nous racontes, après la chanson, le tournage. Régalez-vous : plus de onze minutes de rêve et de magie ! Mylène Farmer, « Tristana ».


1986–1987 : Cendres de lune Mylène Farmer 74

Le clip « Tristana » est diffusé dans son intégralité, générique de fin compris. MT : Difficile de faire mieux dans la beauté et dans la magie ! Il suffit de la regarder pendant que nous découvrions ce clip – parce que je crois qu’à chaque fois que vous le verrez, vous le redécouvrirez, c’est du vrai scope – et pendant qu’on regardait ce clip, Mylène avait la tête penchée. On a l’impression que c’est quelque part un peu comme le message de Prince (alors mégastar à cette période) – Dieu sait s’il y a pas vraiment de corrélation entre vous deux ! – que quelque part tu livres quelque chose et que ça ne t’appartient plus et que c’est aux autres de le recevoir. Je suis très, très émue devant ce clip ! MF : Je le suis aussi ! C’est-à-dire que moi, c’est toujours le générique aussi, de prendre le parti de passer le générique…Le générique lui-même, c’est tellement une histoire ! C’est la concentration de tout un tournage. Et je trouve très beau un générique en cinémascope ! MT : C’est magique, tout à fait. Y a plein de choses à souligner dans ce clip. La première chose qui m’a frappée, hormis la beauté et hormis la merveilleuse lumière, c’est la dédicace : « A Papa ». Elle vient de toi ou elle vient du réalisateur ? MF : Non, je pense qu’elle ne peut venir que de moi ! MT : Bien sûr. MF : Je préfère taire les circonstances parce que là, j’ai beaucoup de pudeur à cet égard. C’est vrai que de mettre ça sur un écran, « A Papa », c’est un paradoxe mais j’avais envie de le faire. MT : Mais le personnage est bourré de paradoxes. Il suffisait simplement de souligner cette dédicace et ça suffit, je crois. Alors le tournage : est-ce que c’est toi qui parles en russe, d’abord ?! MF : C’est moi qui parle en russe. J’ai appris le

russe en seconde langue, donc, à l’école. J’en ai oublié quasiment la totalité, si ce n’est les bases : j’arrive à relire le russe, donc l’alphabet. Et donc c’était un…comment dire ? MT : Retour aux sources ? MF : Un peu un retour aux sources. J’adore cette langue, j’aime ce pays et c’était une façon, comme ça, de rendre hommage à ce pays et de retrouver des personnages qui sont réellement russes dans ce clip. MT : Alors, vu le titre de la chanson, j’ai pensé bien évidemment… MF : A Buñuel ? (rires) MT : …au film de Buñuel (« Tristana », avec Catherine Deneuve, sorti en 1970). MF : Que je n’ai pas vu, je rassure tout le monde ! (rires) MT : Mais je suis sûre qu’il te plaira car il y a vraiment tout, quoi, je veux dire, toute la palette des sentiments… MF : C’est vrai que Tristana est plus un nom espagnol et moi quand je pensais Tristana, je pensais russe, mais en fait il faudrait dire « Tristania » ! Donc c’est un petit peu plus complexe à retenir. MT : Alors je te rassure : Deneuve y est perverse à souhait et vachement séduisante! (rires) Donc, je pensais à ce film et je découvre en regardant ce clip que c’est davantage plus proche du conte de fées, avec tout ce que ça peut avoir de cruel. MF : C’est ça, c’est un doux mélange. C’est  « Blanche-Neige et les sept nains » transposé en Russie, avec de la violence, avec un romantisme poussé à l’extrême. C’est tout ce que j’aime. MT : Et des paysages d’une région de France qui est le Vercors… MF : Que vous connaissez, je crois ! MT : …que je connais bien ! MF : Que moi je connaissais absolument pas. C’est vrai que j’ai découvert des paysages magnifiques ! On a eu beaucoup de neige, alors

que partout ailleurs la neige avait fondu et ça, y a de ça un mois, et c’était prodigieux comme tournage. MT : Alors tu nous donnes beaucoup de joie avec cette chanson et ce clip et ça, je crois qu’il faut le dire car c’est pas toujours le cas, et je t’en donne en retour avec cette chanson de U2 (…). Diffusion du clip de U2, « With or without you ». Au retour plateau, Mady Tran lance la séquence du clip de la semaine, où parmi les clips qu’elle a sélectionnés, les téléspectateurs doivent élire leur préféré. MT : (…) Je me tourne vers mon invitée d’aujourd’hui, Mylène Farmer, qui est venue nous présenter son 45 tours « Tristana », et j’ai envie de faire un petit retour en arrière encore une fois avec « Libertine ». Alors, tous les clips de Mylène Farmer sont très particuliers, y a une ambiance, y a un climat. Ils sont même pour certains osés, pour d’autres intéressants. Quelle a été la réaction des gens par rapport au fait que d’une part tu te dénudes dans tes clips, et toi comment tu le vis, ça ? Est-ce qu’il y a une raison de se dénuder dans un clip ? MF : Y a une raison à partir du moment où c’est quelque chose que le réalisateur et moi-même avons déterminé. En l’occurrence, c’était dans une histoire avec des libertins, un salon libertin, une histoire romantique, une rivale, un amoureux, une amante donc… MT : …un duel ! MF : Un duel. C’était un moment qu’on avait envie de privilégier. Que moi, ça me dérange d’être nue à l’écran, je l’ai fait dans ce clip parce que c’était une volonté. Jamais je n’irai me mettre nue ni dans un journal, ni ailleurs. C’est quelque chose qu’on décide. MT : Et qu’on ressent. MF : Certainement. C’est difficile, c’est vrai, de se mettre nue à l’écran mais pas plus difficile finalement que de venir faire un interview !


MT : Est-ce que tu te sens à l’aise dans cette époque-ci ? MF : 87 ? MT : Oui, les années 80, l’an 2000 qui arrive… MF : J’avoue que je ne sais pas si je suis à l’aise ou mal à l’aise. Je crois qu’il y a des hauts et qu’il y a des bas, mais dans n’importe quelle époque. MT : Et ce métier d’artiste, est-ce que c’était ça ou rien, ou est-ce qu’il y avait d’autres tentations dans la vie, à savoir la création dans le stylisme ou dans la mode ? MF : Non. Je crois que ma vraie naissance c’était le jour où j’ai enregistré « Maman a tort ». C’est le jour où j’ai rencontré cette personne qui est Laurent Boutonnat, qui est donc également le réalisateur de ces clips, qui est également compositeur. C’est le jour où j’ai pu naître, oui, c’était une naissance. MT : Alors, on parlera plus avant de ton équipe, parce que je sais que tu es quelqu’un qui fonctionne en équipe, malgré que tu aies l’air comme ça très solitaire et très mystérieuse. (…) Diffusion du clip « Demain c’est toi » de François Feldman. MT : (…) Aujourd’hui sur le plateau de « Lazer », c’est Mylène Farmer, énigmatique et très mystérieuse. C’est difficile d’essayer de cerner un personnage sans le déflorer, mais on va quand même essayer de le faire parce que je crois que ce qui fait tout l’intérêt du tien personnage, de ton personnage, c’est justement ce côté mystérieux. Alors, bon on en est resté au tournage de tes clips, qui passent pas inaperçus, et je voudrais savoir comment tu vis ton quotidien dans ce métier. Est-ce qu’il est difficile d’évoluer dans la production française aujourd’hui en ayant une telle personnalité et en étant quelque part tellement typée que ça t’isole probablement du système ? MF : Oui, mais je crois que c’est un isolement qu’on s’impose un peu. Je veux dire, je ne suis pas réellement tout ça. C’est vrai que quelquefois je ressens un divorce énorme d’avec cette famille soi-disant du show-business, que quelquefois je suis profondément déçue de l’attitude de ces personnes qui font le show-business, que cette famille a essayé d’installer une dite loi et que eux-mêmes ne respectent pas cette loi. Et ça, c’est quelque chose, c’est un manque d’intégrité, c’est peut-être la chose qui me choque le plus. Maintenant, depuis « Maman a tort », je fais à peu près ce que je veux, je crois, avec le plus de passion possible et de plaisir. Quelquefois, on se heurte à des murs mais ça ne m’empêche pas moi de continuer et d’aimer ça, et c’est le principal je crois.

Diffusion du clip « Carrie » du groupe suédois Europe. MT : Voilà. Mylène est avec moi sur le plateau de « Lazer » sur M6, Mylène Farmer. On parlait tout à l’heure de ce métier et je voudrais moi développer cette notion d’équipe qui semble t’être chère, quand même. Tu travailles avec beaucoup de monde ? MF : Non, très peu, avec essentiellement Laurent Boutonnat. J’ai une personne qui est avec moi depuis pratiquement le début, la fin de « Maman a tort », qui est Bertrand Le Page, qui fait office de manager, qui a un statut plus important. Et puis une attachée de presse qui travaille avec moi, qui est Danyèle Fouché. MT : Qui est là ! MF : Et puis bien sûr la maison de disques. Mais j’ai réellement trois personnes à côté de moi. MT : Et ce sont des gens qui ont compris les subtilités de ton personnage et qui t’ont aidée à l’enrichir ou tu es complètement responsable de tes choix ? MF : Responsable, je sais pas ! Cette rencontre avec Laurent, moi je la qualifie du domaine de l’exceptionnel, c’est-à-dire les rencontres qu’on a très peu dans sa vie, qu’on doit privilégier. C’est vrai que cette rencontre avec Laurent, c’était extraordinaire pour moi parce que c’est quelqu’un qui a énormément de talent dans beaucoup de domaines, qui a des choses qui l’attirent, qui moi m’attirent, des choses qu’on a en commun. Et c’est vrai que c’est fascinant de trouver un personnage comme ça. Voilà, donc Mylène Farmer c’est un peu de moi, c’est certainement un peu de Laurent Boutonnat, c’est beaucoup de choses. MT : Tu penses que dans ce métier il est indispensable qu’il y ait une osmose entre un auteur, une interprète, un musicien ? MF : Pour la longévité, oui, je crois. C’est-à-dire pour un léger équilibre qu’on peut avoir, parce que c’est difficile de l’avoir, c’est fondamental, oui, pour moi. MT : Est-ce qu’on peut fonctionner longtemps avec la même personne, toujours dans un cadre très professionnel ? MF : Ça, c’est des choses qu’on ne peut pas dire. Je ne sais pas. Diffusion du clip « Les envahisseurs » d’Arnold Turboust. MT : (…) Aujourd’hui j’ai une sorte de personnage magique sur le plateau de « Lazer ». J’aime bien appuyer sur cette notion… MF : C’est gentil ! (rires) MT : …car c’est comme ça que je te reçois, et peut-être que les autres te reçoivent différemment, et donc, pour reprendre cette image de

toi qui est presque irréelle et venue d’une autre époque, de par le look, de par les couleurs et la gestuelle aussi, ça on oublie trop souvent d’en parler ! C’est vrai que quand on te regarde à la télévision, y a des gestes, y a une manière de bouger et de se mouvoir qui est tout à fait particulière. Alors Mylène Farmer, elle fait son marché comment le matin ? En jogging baskets ou en queue de pie ?! (rires) MF : Elle fait rarement son marché ! (rires) MT : Tu manges comment ? MF : Je mange n’importe quoi, je n’aime que le sucré ! J’ai très peu de goût culinaire, malheureusement. MT : Tes goûts sont exotiques dans tous les domaines ? MF : Je ne sais pas si on peut qualifier ça d’exotique, mais ils sont certainement étranges, oui ! (rires) MT : Tes références – on va pas citer le mot de « culture » parce que c’est très souvent galvaudé – tes références en matière de cinéma, de littérature : tout ce qui fait tes clichés à toi, c’est quoi ? MF : Je cite toujours un auteur, mais parce que je l’aime réellement, ce serait presque un livre de chevet, c’est Edgar Poe. J’aime le fantastique, j’aime l’imaginaire, j’aime l’étrange, le morbide. J’aime bien Maupassant…En ce moment, je lis plutôt du Strindberg, que j’avais effleuré, mais côté théâtre. Là, je lis plutôt les nouvelles. Mais y a énormément d’auteurs dont je ne connais pas d’ailleurs la totalité de leur œuvre. MT : Et dans le cinéma ? MF : Dans le cinéma, y a un film que j’ai vu récemment, mais j’ai surtout lu le livre, qui est donc « Dracula » et qui est un livre fantastique et qui n’a jamais été porté à l’écran de la même façon, avec autant de talent que l’écriture elle-même. Sinon le cinéma, j’aime beaucoup Roman Polanski, spécifiquement « Le locataire », j’aime bien « Tess ». J’aime bien Zulawski, Kubrick… MT : Des gens qui sont… MF : J’aime beaucoup le cinéma russe, également, Tarkovski. J’aime bien Bergman… Diffusion du clip « Nothing’s gonna stop us now » de Starship. MT: (...) Sur les plateaux de télévision, il y a des gens qui travaillent, il y a des gens qui participent à l’élaboration, à la réalisation d’une émission et puis de temps en temps, on voit des visages inconnus. C’est le cas aujourd’hui sur ce plateau de « Lazer » et sur M6 : il y a quelqu’un qui suit Mylène Farmer partout où elle se déplace, et je crois que je ne dévoile pas un secret en disant qu’il y a une jeune fille qui te suit, qui t’aime (…)


1986–1987 : Cendres de lune

MF : Oui, je viens de l’apercevoir ! Je crois que chaque artiste a une ou deux personnes, c’est vrai, qui suivent quotidiennement sa carrière, ses prestations de télévision. Et c’est vrai que cette jeune fille qui s’appelle donc Nathalie, pour lui donner une identité, est une personne qui me suit depuis le début et qui est très, très opiniâtre ! MT : Au-delà de ça, au-delà de l’affection et de l’admiration que peuvent porter des gens à un artiste, est-ce que de n’avoir qu’une fan, qu’une admiratrice qui vous suit partout, je trouve ça très, très étrange mais est-ce que c’est une sorte de miroir pour vous ? Est-ce que c’est réflecteur de quelque chose ? Est-ce que vous en avez besoin ? Je dis « vous » parce que je pense qu’il y a d’autres gens comme toi qui ont une admiratrice ou un admirateur qui les suit. MF : Besoin, je ne sais pas. C’est quelque chose, moi, qui m’émeut, mais également qui, je dirai pas qui m’étonne, mais c’est un peu une interrogation que j’ai par rapport à ce genre de personnes. C’est vrai que c’est assez étonnant cette assiduité, cet amour comme ça que vous recevez, mais c’est vrai qu’un artiste a besoin de ça, que ce soit l’artiste de variété, que ce soit dans le cinéma, tous les artistes. MT : A propos Mylène, tu te situes où dans la musique, aujourd’hui ? On parle de rock, on parle de new-wave, on parle de musique pop, on parle de… MF : J’en sais rien. J’ai du mal moi-même à mettre des étiquettes et des références. Je ne sais pas. C’est de la chanson française ! (sourire) MT : Est-ce que tu situes ton public ? Est-ce que tu sais qui t’aime, qui achète tes disques et qui te suit ? MF : Je crois que c’est probablement la chose la plus difficile à définir. Quand on voit ce fameux Top 50, qui est cette bible et qui va vous donner un peu la couleur du public, des envies du public, c’est quelque chose qui est quasiment impossible, si ce n’est par le courrier : ça c’est quelque chose que j’arrive un peu à déterminer, et j’ai du courrier qui est assez fantastique, des personnes qui sont très, très souvent un peu désespérées, qui ont besoin de communiquer, comme toutes les personnes qui écrivent, mais qui disent des choses assez profondes et assez troublantes.

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Mylène Farmer

Une nouvelle pause musicale avec le clip « Coûte que coûte » de Gangster d’amour. MT : (…) On parlait de diversité dans la musique en France, aujourd’hui. Alors c’est vrai qu’il

y a un retour par exemple aux années 60 avec des reprises, y a aussi les artistes qui se fabriquent un personnage à partir d’autres personnages connus de la BD, comme Lio ou même Gangster d’amour. Toi, on a l’impression que tu n’imites rien ! Je veux dire, tu proposes quelque chose de tout à fait original. MF : J’espère ! C’est vrai que je n’aime pas l’imitation, que je préfère être une personne à part entière, une personnalité à part entière. MT : Tu disais aussi que tu savais pas mettre d’étiquette sur la musique que tu proposes et ce que tu crées… MF : Non, parce que je pense que c’est pas très intéressant. Une fois de plus, le principal c’est de faire ce qu’on aime. MT : Et pourtant avec « Maman a tort », ça a été quand même un démarrage bien évident. A quel moment on sent qu’on touche les gens et que ça marche ? MF : Je crois qu’on a besoin d’un…ce qu’on appelle le succès commercial, pour avoir ce qu’on appelle un peu le coup de pouce parce que c’est vrai que quand j’ai eu « Maman a tort », « On est tous des imbéciles » ensuite « Plus grandir », que j’ai eu ce gain de popularité sur « Libertine » et… MT : Mais si tu avais commencé par « Libertine », est-ce que tu penses que les choses auraient été aussi évidentes ? MF : Je pense que c’est fatalement différent puisqu’on ne vit pas les mêmes choses au même moment. Maintenant, si je puis dire, dans la colonne vertébrale c’est la même chose ! MT : Et dans l’album que tu vas préparer cet été, est-ce qu’il y aura des choses très différentes et surprenantes ? MF : J’espère différentes, mais ça sera de la même veine donc c’est forcément un peu le même univers. Maintenant, c’est à moi et à Laurent de trouver chaque fois des choses nouvelles et j’espère étonnantes. Diffusion du clip « Everything I own » de Boy George. MT: (elle évoque les déboires, très médiatisés à l’époque, de Boy George avec la drogue) (…) Estce que tu es d’accord pour qu’on étale comme ça les problèmes des gens et que les gens viennent eux-mêmes témoigner sur leurs problèmes en télévision ou en radio ? MF : Lui, en prenant son exemple, c’est devenu un phénomène médiatique. Son actualité, c’était ses faux-pas vers la drogue donc je

« Je crois que ma vraie naissance, c’est le jour où j’ai enregistré “Maman a tort”. »

pense qu’il y a un moment donné où oui, il faut être présent et puis parler, s’expliquer. Mais d’ordinaire, je préfère c’est vrai qu’on se taise et qu’on dise le moins de choses possibles sur soi, parce que je pense que le silence est quelque chose de bien. MT : Parce que quand même, on est en 87, y a plus rien qui ne soit inavouable et on a l’impression qu’il suffit d’un problème de drogue autour d’une star, on a l’impression que l’opinion publique est restée finalement très puritaine, parce qu’aussi on se souvient des Who… MF : (elle l’interrompt) Nous sommes dans un pays puritain, mais je crois que l’Angleterre est un pays excessivement puritain également. MT : Parce que le problème de drogue ou de sexe dans le rock, c’est pas nouveau ! Et ça n’a jamais empêché les gens d’êtres des stars et d’être des… MF : C’est parce que la drogue c’est quelque chose qui fait très, très peur et qui est aussi assez terrifiant. Je crois qu’il faut pas occulter ces sujets-là. Ce ne sont pas des sujets tabous mais ce sont des sujets qui effraient, je crois, la masse populaire. Diffusion du clip « Duel au soleil » d’Etienne Daho, que Mylène qualifie de « belle chanson ». MT : (…) Mylène, je suis très, très contente de t’avoir reçue sur ce plateau de « Lazer ». J’espère simplement qu’on a amené quelque chose de supplémentaire au personnage sans l’avoir défloré, sans avoir touché à son secret, à son mystère. MF : (dans un sourire) Non, aucun problème ! C’était un réel plaisir aussi ! MT : Tu fais beaucoup de promotion, beaucoup d’interviews de radio, de télévision… MF : Non, peu d’interviews ! Et le maximum, oui, de promotion, des prestations télévisées. Pratiquement pas de galas, parce que j’en ai fait sur « Libertine » et puis chaque chose en son temps ! MT : Et peut-être un projet de scène à Paris un jour ? MF : Nous en aurons un. MT : Et je suis sûre qu’on aura un climat et un décor très particuliers ! MF : Si Laurent Boutonnat reste avec moi, certainement ! (sourire) MT : Je crois qu’il en meurt d’envie, entre nous ! Merci, Mylène ! MF : Merci à vous. Fin de l’émission.


C’est encore mieux l’après-midi Date 11.05.1987 Chaîne Antenne 2 Présenté par Christophe Dechavanne

Pour la quatrième fois de l’année (!), Mylène participe à cette émission de l’après-midi. Mais cette fois, l’émission a quitté son plateau parisien pour Cannes. A l’occasion du quarantième festival du film, Christophe Dechavanne reçoit ses invités en direct d’une plage cannoise. En milieu d’émission, il présente un petit défilé de mode en compagnie de son invité principal du jour, Jean-Claude Brialy, et de Mylène Farmer, venue les rejoindre. Cachée derrière une large paire de lunettes de soleil, Mylène est habillée de son traditionnel costume gris dans lequel elle flotte toujours ! Si elle ne commente pas ce petit défilé, on la retrouve quelques minutes plus tard entourée de ses deux danseuses pour interpréter « Tristana ». Mylène n’apparaît plus par la suite.

Grand direct Date 29.05.1987 Chaîne TF1

C’est aujourd’hui demain Date 27.05.1987 Chaîne FR3 Présenté par Guy Lux

Au sommaire de cette émission de Guy Lux ce soir-là : un programme consacré à la voyance avec diverses prévisions entrecoupées de variétés. C’est dans ce cadre qu’on retrouve Mylène en fin d’émission, venue chanter « Tristana » avec ses danseuses. Pour l’occasion, Mylène, les cheveux attachés, porte un tailleur noir et des anneaux aux poignets.

Sur une scène, face à une salle où le public est installé à des petites tables façon cabaret, Mylène interprète « Tristana », en compagnie de ses deux danseuses, dans une tenue entièrement blanche, surmontée d’une longue veste et les cheveux attachés en arrière. Entre autres accessoires, Mylène porte des anneaux aux poignets.


1986–1987 : Cendres de lune

SIDa : le grand rendez-vous

Date 04.06.1987 Chaîne Antenne 2 Présenté par Jean-Marie Cavada

Cette émission exceptionnelle est importante pour deux raisons. D’abord, elle est un avant-goût de ce que sera « La marche du siècle », célèbre émission de Cavada qui arrivera en septembre 1989 sur Antenne 2 (puis qui passera en 1991 sur FR3). Mais surtout, elle est l’une des toutes premières émissions de primetime françaises consacrée au Sida. A l’initiative de Line Renaud, se sont réunis sur le plateau du débat de Jean-Marie Cavada un grand nombre d’artistes venus

afficher leur engagement pour la lutte contre cette maladie. Parmi eux, on retrouve Marc Lavoine, Etienne Daho, Renaud, Véronique Sanson ou encore Mylène Farmer. Assis en groupe sur le plateau, les artistes présents s’expriment à tour de rôle. Et certains chantent même sur le plateau. C’est le cas de Mylène qui, en cours d’émission, interprète « Au bout de la nuit », assise, habillée d’un tailleur noir et les cheveux attachés. La caméra privilégie les gros plans sur le visage de la chanteuse qui verse une larme sur la fin du titre. Plus tard dans l’émission, Jean-Marie Cavada fait réagir les différents artistes présents sur le plateau. Il se tourne donc, entre autres vers Mylène. Jean-Marie Cavada : Mylène Farmer, ça vous

apparaît aussi à vous la grande peur de la fin du siècle, le Sida ? Mylène Farmer : Ça m’apparaît… ?! Je n’ai pas compris. JMC : La grande peur de la fin du siècle. MF : Ça transparaît en tout cas. Le fait que cette émission ait lieu, je pense que c’est quelque chose, oui, qui est très, très grave. C’est un fléau. Maintenant, que dire ? Moi j’ai côtoyé la mort de très près, j’ai vu une personne partir avec un problème de cancer. C’est quelque chose de dramatique et la vie est parfois une vaste plaisanterie. Voilà, je ne sais que dire… Jean-Marie Cavada fait réagir ensuite Marc Lavoine. Mylène n’intervient plus jusqu’à la fin de l’émission. Notons toutefois qu’étant placée derrière Line Renaud et Jean-Marie Cavada, on la voit très, très souvent à l’image.

C’est encore mieux l’après-midi

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Mylène Farmer

Date 19.06.1987 Chaîne Antenne 2 Présenté par Christophe Dechavanne

Mylène vient pour la énième fois dans l’émission de Christophe Dechavanne. Et ce sera la dernière. Ce jour-là, l’animateur fait en effet ses adieux à cette émission quotidienne qu’il anime depuis 1985 (à la rentrée de septembre, il sera sur TF1). A cette occasion, il réunit ses amis sur le plateau, au nombre desquels on retrouve évidemment Mylène Farmer, mais aussi Daniel Auteuil, Martin Lamotte, Emmanuelle Béart, Marie-Anne Chazel, Carole Bouquet et beaucoup d’autres. En cours d’émission, Christophe Dechavanne

annonce Mylène, venue interpréter « Tristana ». A l’annonce de son nom, le public l’ovationne. C’est dans une grande robe blanche maintenue à la taille par une ceinture dorée que Mylène chante son titre, entourée de ses deux danseuses. Elle porte aux poignets des bracelets en anneaux métalliques et ses cheveux sont maintenus en chignon. Visiblement ravie d’être là, Mylène est très souriante pendant la chanson. Celle-ci terminée, Christophe Dechavanne la rejoint et lui fait la bise sous les applaudissements très chaleureux du public. Christophe Dechavanne : Ça va, Mylène ? Mylène Farmer : Très bien ! CD : « Tristana », ça marche très bien puisque c’est septième (au Top 50) je crois, si je ne m’abuse ! MF : Nous sommes arrivés septième, oui ! (précisons que le titre est alors déjà classé depuis deux mois et qu’il atteint cette semaine-là ce qui sera sa meilleure place, septième donc)

Le public applaudit et crie vivement pour saluer le bon classement de Mylène. Pendant-ce temps, Christophe Dechavanne se tourne vers ses autres invités. Tous vont alors s’asseoir sur le canapé au centre du plateau. Commence alors pour Mylène un petit problème qui va l’occuper tout le temps de l’émission : son chignon ne tient pas ! On la voit donc à de nombreuses reprises le faire, le défaire, le refaire, enlever sa pince, la remettre etc. ! Elle choisira finalement à la fin de l’émission d’abandonner sa bataille capillaire et de garder les cheveux lâchés ! Si on la voit tout au long de l’émission, assise aux côtés du maître de cérémonie, elle n’intervient en revanche pas.


© Sygma-Corbis


1986–1987 : Cendres de lune

à l’occasion de la Fête de la Musique Date 19.06.1987 Chaîne Antenne 2 Présenté par Henri Sanier, Henry Chapier et Ghislaine Ottenheimer

Bonheur des années 80 : Mylène pouvait enchaîner deux émissions en direct. Ainsi, quelques heures à peine après l’émission de Christophe Dechavanne, la chanteuse est présente sur cette grande émission de variétés, en direct elle aussi, pour célébrer, avec quelques jours d’avance, la Fête de la Musique, depuis le Trocadéro, à Paris. Après que Maxime le Forestier ait interprété « San Francisco », Henri Sanier annonce Mylène Farmer et demande au chanteur ce qu’il

pense de Mylène. Maxime le Forestier : Mylène Farmer, je la connais bien : on habite la même maison ! Pas le même appartement, hélas, mais la même maison, dans le Marais (Mylène vivait alors rue Quincampoix, non loin du Centre Georges Pompidou). C’est une chanteuse de cinéma, à mon avis. C’est une femme qui met toujours des images sur ses chansons. C’est pas seulement du son, c’est une forme d’art qui est née avec le clip finalement et chaque chanson raconte une histoire, un peu à la manière d’un film. Mylène Farmer, on peut dire que c’est une actrice. Sur le podium face à la foule du Trocadéro, Mylène interprète « Tristana » avec ses danseuses. Elle porte la même tenue qu’elle avait l’aprèsmidi même pour la dernière de l’émission de Christophe Dechavanne. Sa prestation est acclamée par le public.

L’académie des 9

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Mylène Farmer

Date 29.06.1987 Chaîne Antenne 2 Présenté par Jean-Pierre Foucault

Ultime participation de Mylène Farmer à ce jeu culte qui sera bientôt présenté par Yves Lecoq, Jean-Pierre Foucault quittant le service public pour TF1 (fraîchement privatisée). Pour l’occasion, Mylène occupe la case centrale, la plus stratégique pour le jeu. On la

voit donc à plusieurs reprises à l’écran, cependant toujours à l’occasion de questionnaires collectifs. Elle porte un tailleur noir rayé et un catogan, look plutôt austère quand on sait qu’elle a pris place aux côtés de Paul Préboist, entre autres ! Pour l’heure, Mylène participe à un jeu qui consiste à trouver l’utilité précise d’un outil décrit en posant différentes questions. Jean-Pierre Foucault : (…) Une question de

Mylène Farmer ! Mylène Farmer : A mon avis, il faut passer à mon voisin directement, parce que je n’ai pas bien saisi ! (sourire) JPF : Pardon de vous avoir dérangée ! (rires) Le jeu suivant suit le même principe. Les candidats doivent maintenant poser successivement chacun une question pour deviner une astuce de jardinage. JPF : (…) Mylène Farmer, comme ça va la santé ?! MF : Très, très bien mais j’avoue que je n’ai pas encore bien saisi l’histoire !


JPF : Très bien, merci ! (rires) Question suivante : il faut maintenant déterminer une astuce de mécanique : comment ôter une bougie dans un moteur sans se brûler ? JPF : (…) Mylène Farmer ? MF : Peut-être à l’aide d’une canne à pêche ? Formidable… (rires) JPF : (…) L’idée était intéressante ! Après cette série de questions, une séquence où Mylène interprète « Tristana » sur le plateau, entourée de ses deux danseuses, est diffusée. Le jeu continue ensuite. Il s’agit de trouver la profession d’un homme en lui posant des questions. Les invités précédents ont réussi à établir que le métier de l’homme nécessitait certaines obligations légales. Vient le tour de Mylène. MF : Est-ce que c’est un métier plutôt intellectuel ou manuel ? Mais s’il y a le droit, je pense pas que c’est manuel… Mylène se trompe puisque la profession du candi-

dat, bouilleur de cru, est pour le moins manuelle. Elle participe ensuite à une série de questions. JPF : (…) La région d’appellation du cognac comprend une partie de la Dordogne, Mylène. Vrai ou faux ? MF : (sûre d’elle) Faux ! JPF : Et non, c’est vrai ! Pour le dernier jeu auquel participe Mylène, il s’agit de trouver la particularité de deux hommes présents sur le plateau. Ceux-ci ont chacun un physique pour le moins particulier – on les croirait sortis d’un film de Laurel et Hardy : si tous deux sont aussi barbus qu’ils sont chauves, l’un est grand et gros et l’autre est petit et maigre. Leur crâne lisse semble focaliser l’attention de Mylène… MF : Est-ce que ces deux personnages ont la même phobie, qui est celle des salons de coiffure ?! (éclat de rire général) L’émission s’achève après ce dernier jeu.

40° à l’ombre Date 29.06.1987 Chaîne FR3 Présenté par Caroline Tresca

On retrouve Mylène au générique de cette émission, en direct depuis le sud de la France. Notons toutefois que la chanteuse a échappé au podium installé sur la

plage et qu’elle n’a pas eu à chanter entourée de vacanciers à l’œil hagard. C’est bien en extérieur, mais sur un large promontoire blanc, que Mylène, accompagnée comme il se doit de ses deux danseuses, interprète « Tristana », dans un tailleur noir rayé, les cheveux attachés en arrière.

Concert pour SOS racisme Date 15.07.1987 Chaîne La Cinq

Au milieu de l’été est organisé ce grand spectacle en faveur de SOS Racisme où des dizaines d’artistes se sont réunis pour interpréter leur tube du moment. En extérieur, sur un podium face à une foule très dense, les chanteurs se succèdent. Mylène est de la partie pour interpréter « Tristana », habillée en veste blanche et cycliste noir, accompagnée de ses danseuses. Notons que durant le concert, une caméra embarquée propose des images des coulisses, ce qui nous permet d’apercevoir Mylène pendant un instant.


1986–1987 : Cendres de lune

22, avenue montaigne

« Ce qui fait la force d’un artiste, c’est d’être très bien entouré. » Date 19.09.1987 Chaîne Antenne 2 Présenté par Jacques Chancel et Roger Zabel

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Mylène Farmer

Diffusée tard le soir, cette émission a pour but de présenter les événements de la rentrée 1987. Beaucoup d’invités sont donc présents sur le plateau pour annoncer leur actualité présente ou à venir. Lorsqu’on en vient à s’intéresser aux nouveautés côté chanson, Albert Amsellem, le directeur des variétés de la chaîne, présente ses deux favoris : Marc Lavoine et Mylène Farmer. A ce titre, on leur demande de présenter à leur tour un jeune artiste en qui ils trouvent un potentiel intéressant. Mylène est donc assise aux côtés de Marc Lavoine, habillée d’une élégante veste blanche et d’un cycliste noir, les cheveux maintenus en arrière par un large nœud blanc. Albert Amsellem : (…) Mylène Farmer, c’est la reine du clip, quand même ! C’est elle qui a, on peut dire, imposé le clip de sa chanson comme

un vrai film. Je crois que c’était « Libertine », c’est ça ? Mylène Farmer : Oui ! AA : « Libertine », c’était un moment de cinéma. Et Mylène s’est révélée comédienne et surtout chanteuse. La suite, on la connaît et c’est pour ça qu’elle est là aujourd’hui pour présenter des nouveaux talents. Jacques Chancel : Oui, c’est ce qui est important, Albert. Je vous ai demandé justement de nous présenter des nouveaux talents et d’une certaine manière, de demander à Mylène et à Marc de les parrainer. MF : Je vais « marrainer » ! (rires) Marc Lavoine présente donc le jeune chanteur qui a ses faveurs, Alexis Zad (futur petit ami de Lio dans les années 90…pour le meilleur, et surtout pour le pire). Si le ‘filleul’ de Marc Lavoine n’a pas eu le succès escompté, Mylène en revanche fait un choix plus avisé… JC : (…) Mylène Farmer a choisi qui ? MF : Moi j’ai choisi une très jeune personne qui a quatorze ans, qui s’appelle Vanessa Paradis et qui a travaillé avec un compositeur qui a, lui, composé pour des artistes tout à fait confirmés, qui est donc Etienne Roda-Gil, et Vanessa

a certainement beaucoup de chance de démarrer avec un disque pareil (« Joe le Taxi ») et avoir autant de succès. Est-ce qu’elle a envie de poursuivre ce métier ? Ça, c’est la question que je me pose. J’aime beaucoup cette chanson, voilà. En réaction à l’avis de Mylène, Jacques Chancel et Albert Amsellem émettent de gros doutes sur les capacités d’une aussi jeune fille à pouvoir durer dans le métier. Ils ont du nez…Le clip de « Joe le Taxi » est ensuite diffusé. Un peu plus tard dans l’émission, on retrouve Mylène, accompagnée de ses danseuses, pour chanter « Tristana » sur la petite scène du plateau. Après avoir salué le public, Mylène descend de l’estrade sous les applaudissement et reprend sa place aux côtés de Marc Lavoine puis répond à quelques questions de Jacques Chancel. JC : Mylène Farmer, on le voit : vous avez fait vos traces. On a l’impression que tout vient d’assez loin alors que vous avez commencé il n’y a pas si longtemps. MF : Pas très longtemps, je crois que c’est trois ans, trois ans et demi… JC : Et ça a été facile ? Difficile au départ ? Parce


que vous êtes tellement nombreux sur la ligne, vraiment ! MF : Je peux dire relativement facile, parce que j’ai quand même eu un titre qui était « Maman a tort », le premier, qui a bien marché, qui a été en tout cas connu du public. Après, c’est vrai, le chemin n’est pas facile. Je crois que c’est énormément de travail ! JC : Mais on le voit d’ailleurs le travail, là, parce que vous avez sûrement un goût pour la comédie musicale parce que vous bougez ! MF : J’aime la danse, c’est vrai. J’aime ça, j’aime le spectacle. AA : Il faut dire que Mylène est d’origine canadienne donc je pense qu’elle a dû être élevée à la musique anglo-saxonne… MF : Oui, absolument oui ! AA : …et peut-être aux comédies musicales, également. MF : Un petit peu, mais j’aime ça. JC  : Et vous auriez envie que quelqu’un aujourd’hui écrive pour vous justement une comédie musicale où vous pourriez mêler la chanson, la danse ? Parce qu’on voit que vous êtes faite pour ça ! MF : Non. Que quelqu’un écrive une comédie musicale, je ne pense pas. J’aimerais d’abord faire un spectacle me concernant dans lequel j’intégrerais certainement des parties de danse. Enfin, y a des milliards d’idées à avoir. JC : (il se tourne vers Marc Lavoine) Marc Lavoine, je vous regardais tout à l’heure, vous la trouvez dans un état parfait de dame qui s’est installée et qui peut durer, elle ?! Marc Lavoine : Ben oui, elle a la chance d’avoir un physique très intéressant et une grosse personnalité. (…) De plus en plus dans la chanson, il se crée des équipes, y a des rencontres (…) et Mylène travaille en équipe depuis le départ et est restée fidèle à cette équipe, et c’est ce qui fait qu’il y a une vraie personnalité qui reste, qui s’installe. Les équipes sont très importantes dans ce métier. MF : Je pense que ce qui fait, effectivement, la force d’une équipe et la force d’un artiste c’est d’être très bien entouré, avoir cette fidélité et ce travail. JC : Lorsque je vous écoute, Mylène Farmer, je m’aperçois que vous êtes déjà presque sur une voie royale, que c’est un métier déjà acquis. La discussion s’enchaîne sur l’actualité de Marc Lavoine. Mylène n’apparaît plus par la suite.

un db de plus

« Quand j’étais petite, je voulais être agent de police. » Date 22.09.1987 Chaîne Antenne 2 Présenté par Didier Barbelivien

Aux manettes de sa propre émission, l’auteur-compositeur le plus demandé de l’époque, Didier Barbelivien, y présente l’actualité musicale du moment, un petit classement des chansons les plus populaires, les nouveautés en matière de clips et reçoit, parfois, un artiste. C’est le cas ce jour-là puisqu’il accueille sur son canapé Mylène Farmer, chevelure plus claire attachée en arrière, et longue veste grise, pour parler de sa carrière, de ses goûts. Didier Barbelivien : Bonjour Mylène ! Mylène Farmer : Bonjour ! DB : Je suis bien content que tu sois venue ! Dis-moi, quand tu étais petite, enfin adolescente, et que tu imaginais ta carrière de chanteuse, tu l’imaginais comme ça ? MF : Quand j’étais petite je voulais être agent de police !

DB : Tu voulais être agent de police ? Mon fils aussi, dis donc ! MF : C’est vrai ? DB : Un jour, c’est agent de police, un jour c’est pompier… MF : Après vétérinaire, et c’est bien plus tard que j’ai…. DB : Vers quel âge ? MF : Agent de police ? DB : Non, chanteuse ! MF : (rires) Chanteuse, ça c’est concrétisé à vingt-deux ans. DB : A vingt-deux ans ? Mais tu imaginais déjà faire des clips, des choses comme ça ? MF : Non, j’ai toujours eu une passion qui est le cinéma, donc les images et pourquoi pas la chanson et les clips. DB : Oui, mais tu imaginais l’ensemble, déjà, tu imaginais tes chansons avec des images en même temps, des choses comme ça ? MF : Ah oui tout à fait. Comme j’écris, c’est vrai que ça provoque toujours des images. DB : Et le dessin, c’est une nouvelle passion ? J’ai vu que tu t’étais lancée dans le dessin, j’en ai vu de toi, de très belles dans « Match » cet été…. MF : (sourire) Oui j’ai toujours aimé dessiner,


1986–1987 : Cendres de lune

Mon Zénith à moi Date 10.10.1987 Chaîne Canal+ Présenté par Michel Denisot

et c’est vrai que là, je le fais de plus en plus et spécifiquement avec du fusain. DB : Et tu vas t’en servir pour une pochette ou quelque chose ? Tu sais pas ? MF : Non, non je ne crois pas. DB : Tu les gardes pour toi ? MF : C’est très pudique … (sourire) DB : Bon, il y a un truc que tu ne gardes pas pour toi c’est ton coup de cœur ! MF : Oui alors c’est…. DB : Qui c’est, ton coup de cœur ? MF : C’est Depeche Mode. DB : « Strange Love » ? MF : Oui. C’est pas leur dernière chanson. DB : Non c’est pas leur dernière chanson. Leur dernière chanson a disparu ! On l’avait, on l’a perdue ! MF : Elle a disparu ? (rires)

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Mylène Farmer

Diffusion du clip « Strange Love » de Depeche Mode DB : Mylène, après avoir écumé tous les hit-parades existants avec « Tristana », qu’est ce que tu prépares maintenant ? MF : Je prépare un album. Je rentre en studio demain ! DB : Demain ? MF : Oui, demain, et le premier 45 tours issu de cet album sortira, je pense, vers fin octobre. DB : Oui alors tu viendras nous voir avec ce nouveau 45 tours ! MF : Bien sûr ! DB : Je t’ai choisi un coup de cœur bien personnel, c’est pas sans rapport avec toi, c’est monsieur Serge Gainsbourg. Ça date un peu hein, c’est en noir et blanc, c’est y’a longtemps. Ça s’appelle « Qui est in ? Qui est out ? » mais le

talent de Gainsbarre était déjà là. Diffusion d’une archive télé où Serge Gainsbourg chante « Qui est in ? Qui est out ? ». DB : (à propos de la chanson de Serge Gainsbourg) C’est la chanson préférée de Laurent Voulzy ! MF : C’est vrai ? DB : Oui. MF : J’aime beaucoup Gainsbourg. DB : C’est bien Gainsbourg ! MF : Surtout cette période d’ailleurs, des albums formidables ! DB : T’aurais aimé travailler avec lui à cette époque ? MF : Je suis très heureuse de travailler avec Laurent Boutonnat (rires) DB : Oui, mais sûrement à cette époque t’aurais travaillé avec lui ! Il avait écrit une très, très belle chanson pour Françoise Hardy, je crois, qui s’appelait « L’anamour ». Tu te souviens ? MF : Oui ! C’est aussi une de mes chansons préférées. Après quelques extraits de clips, retour plateau pour présenter les nouveautés de la semaine, au nombre desquelles on trouve la première cassette vidéo des clips de Mylène Farmer, que Didier Barbelivien qualifie de « truc très original » ! C’est alors la fin de l’émission. Didier Barbelivien salue Mylène avant de prendre congé des téléspectateurs. DB : Mylène, je t’embrasse ! MF : Je vous embrasse aussi ! DB : Tu reviens quand tu veux ! Fin de l’émission.

Attention, émission culte ! Le principe du programme ? Chaque samedi, Michel Denisot accueille un invité unique (issu du monde du cinéma, de la musique, de la littérature, du sport, de la télé,…) qui a carte blanche pendant l’heure que dure l’émission. L’idéal pour mieux cerner une personnalité. Ce jour-là, c’est bien sûr Mylène qui est à l’honneur. Et sa programmation est un savant mélange des genres, ce qui est sa marque de fabrique après tout ! Aussi Bambi côtoiet-il des pendus et des fantasmes politiquement incorrects. L’occasion également d’assister à la rencontre avec Zouc et de découvrir quelques images poignantes réalisées par Mylène elle-même et d’autres plus amusantes de…son petit singe E.T. ! Sur le générique de début, c’est la tradition l’invité de la semaine écrit le titre de l’émission sur une palette graphique. Ainsi voit-on à l’écran s’écrire « Mon zénith…à moi toute seule » de la main de Mylène, avant qu’elle ne signe. On découvre ensuite le plateau : deux canapés qui se font face. Sur l’un Michel Denisot, sur l’autre Mylène Farmer, en veste blanche et pull gris, cheveux attachés, en train de jouer avec un chimpanzé assis à ses côtés ! Michel Denisot : Bienvenue à toutes et à tous ! Après Jean-Jacques Beineix et ses fauves, c’est Mylène Farmer et sa chimpanzé qui font leur « Zénith » ce soir ! Mylène nous expliquera dans quelques instants pourquoi cette passion pour les chimpanzés. D’abord, je voudrais rappeler que vous êtes installée dans le show-biz et dans le Top 50 depuis déjà trois ans, avec trois titres, trois succès, qu’on a une image peut-être encore un peu trouble de vous, en tout cas troublante ne serait-ce qu’à cause tous les clips que vous faites, une image assez troublante de Mylène Farmer. (…) Y a eu « Libertine », y a eu « Tristana » et puis vous aviez commencé avec


« Je n’avais de cesse que de séduire le prêtre qui enseignait le catéchisme. » une chanson qui s’appelle « Maman a tort » où vous étiez amoureuse d’une infirmière. Mylène Farmer : (tout en jouant avec le chimpanzé) Absolument. MD : Vous entretenez une espèce d’ambiguïté autour de vous ? MF : Je ne sais pas si je l’entretiens. Je crois que ça fait partie de ma vie, cette ambiguïté, ce paradoxe. MD : Alors, on commence par vos fantasmes. Votre fantasme c’est quoi ? MF : C’est tout ce qui est paroissial. C’est vrai que c’est le prêtre ! MD : Le prêtre, c’est un fantasme qui va jusqu’au fantasme sexuel ?! MF : Oui, ça pourrait aller jusqu’au fantasme sexuel. J’ai eu une éducation religieuse tout à fait normale, mais je n’avais de cesse que de séduire le prêtre qui enseignait le catéchisme ! MD : C’est déjà arrivé ? MF : Ce n’est jamais arrivé, je vous rassure tout de suite ! (rires) MD : Ça peut arriver ! Ça arrive au cinéma puisqu’il y a une référence cinématographique qu’on va faire d’entrée… MF : Absolument oui, on a pris « Les diables » de Ken Russel. MD : « Les diables », où c’est l’histoire d’un prêtre qui a une vie sexuelle assez intense. MF : Voilà. Ça se passe sous l’Inquisition et c’est un film merveilleux. MD : Alors on voit un extrait des « Diables » et puis on est allé mener une enquête, on a demandé à deux prêtres, on leur a dit « Voilà, Mylène Farmer rêve de vous ! ». Alors d’abord l’extrait des « Diables » et puis la réaction au fantasme de Mylène Farmer. (rires de Mylène) Un court extrait du film de Ken Russel « Les diables » est diffusé en VO. Aussitôt après, le père Jean-Louis Vincent et le père Alexis Baquet réagissent au fantasme de Mylène. Le premier élargit la question au rôle du prêtre dans la société moderne tandis que le second prend la chose avec humour et va même jusqu’à proposer un rendez-vous à Mylène ! Petite précision cependant : il veut en profiter pour lui parler du Christ ! MD : Le deuxième vous donne rendez-vous, mais quand même c’est pour vous ramener dans le droit chemin, si je puis dire ! MF : Dans le droit chemin, oui ! MD : Vous pensez quoi de ces réactions ? MF : Moi, je trouve ça plutôt séduisant ! C’est bien de se prêter à ce jeu-là, déjà, à cette inter-

view. Maintenant, ça ne m’empêche de garder, de conserver ce fantasme ! MD : Et c’est un fantasme de petite fille que vous gardez ? MF : Pas réellement de petite fille. Je crois que j’ai cultivé ça, et c’est vrai que c’est plus maintenant que ça ressurgit. Mais quand il dit (le premier prêtre) qu’on est très éloigné de l’Eglise, au contraire : lors du confessionnal on est très, très approché, c’est très intimiste et c’est un moment qui est très proche pour les deux personnes. MD : C’est très émouvant une confession ? Vous y allez pour le plaisir ? MF : Moi je vous avoue que je ne me suis confessée qu’une seule fois, et là c’était quand j’étais petite et c’est vrai que j’ai eu un trouble. MD : Vous n’avez pas envie d’y regoûter ? MF : Non, pas dans l’immédiat, je vais attendre ! Je vais peut-être aller voir ce monsieur, alors ! (le second prêtre interviewé) MD : En plus, enfin j’y connais pas grand-chose, ils ont l’air bien ! MF : Absolument ! (rires) Mais moi j’aime bien le prêtre version avec l’habit de ville, comme dans « L’exorciste », avec cet habit comme ça, avec le col roulé ! MD : A plastron, costume de clergyman, quoi ! MF : Oui. Davantage, oui ! Parce que la robe, ça, non ça me gêne un petit peu ! MD : Bien ! Alors, l’histoire du singe : vous vivez avec un singe ? MF : Oui, j’ai un petit singe. C’est un capucin, qui est beaucoup plus petit que celui-ci (elle désigne le chimpanzé à ses côtés) et que j’ai depuis deux ans. MD : Pourquoi ? MF : Parce que j’ai une fascination pour cet animal parce que c’est du mimétisme avec nous, c’est fascinant. MD : Vous avez filmé le singe chez vous. Il est beaucoup plus petit que celui-là, hein ! (gros plan sur le chimpanzé en train de jouer sur le canapé) MF : Oui, beaucoup plus petit. MD : Vous lui faites faire tout ce que vous voulez ? MF : Tout ce que je veux ? Tout ce qu’il veut bien faire ! MD : Oui ? MF : Oui c’est différent ! Une séquence absolument adorable est alors diffusée. Filmée chez Mylène, en cadre serré, on y voit successivement E.T. dormir repliée sur elle-

même, puis boire à même un verre à pied en le tenant dans ses petites mains. Assise entre les jambes de Mylène, E.T. feuillette ensuite un magazine avant de saisir un stylo, le décapuchonner puis gribouiller sur les pages, encouragée par Mylène. Elle tente ensuite de reprendre le stylo à E.T. mais celle-ci pousse des cris stridents et Mylène se résigne à lui rendre ! A l’aide d’un petit chiffon, E.T. se met ensuite à frotter l’une des chaussures de Mylène qui lui donne ensuite un téléphone, ce qui permet au singe de jouer avec les touches mais aussi d’être très intrigué quand il entend la tonalité lorsque Mylène lui met l’écouteur à côté de la tête ! Séquence suivante, E.T. vide une boite d’allumettes sur le sol, en saisit une et la frotte contre le boîtier. Et ce qui devait arriver arrive : l’allumette s’embrase, pour la plus grande peur d’E.T. ! Après une pause câlin, E.T. joue avec un ours en peluche, puis Mylène lui donne un petit biscuit. C’est alors la fin de ce petit reportage maison. MD : Vous préférez la compagnie des singes à celle des hommes ? MF : Non, ce serait idiot de dire ça. Mais c’est vrai que je me sens vraiment, j’allais dire, très proche d’eux, vraiment très, très bien avec eux. J’ai une communication qui est très facile avec eux. J’ai le souhait un jour d’élever beaucoup de singes. MD : Et pourquoi ? Parce que c’est plus facile à manipuler qu’un être humain ? MF : Non, je crois qu’il faut pas essayer de faire de comparaisons. Simplement parce que j’aime cet animal, que j’ai une fascination vraiment pour cet animal. MD : Alors vous avez choisi pour la partie musicale – c’est une émission où y a beaucoup de femmes ! (rires de Mylène) Y a qu’un homme qu’on va voir sur un clip, c’est Peter Gabriel tout à l’heure sinon j’ai remarqué, c’est quasiment que des femmes ! MF : C’est contre ma volonté, alors ! J’avoue que j’ai pas du tout… MD : Ben c’est vous qui avez tout choisi, c’est pas moi ! MF : Oui, absolument mais j’ai pas du tout pensé à ça ! MD : Faut pas que je cherche d’explications à ça ! MF : Non, réellement pas ! MD : Alors les premières à chanter ce sont les Mint Juleps, qu’on commence à bien connaître en France, qu’on a découvert sur Canal déjà l’année dernière dans « Zénith ». Ce sont quatre sœurs et deux copines en fait qui chantent


1986–1987 : Cendres de lune

quasiment sans orchestre, et ça c’est assez fascinant. Pour vous, c’est ça la vraie chanson ? MF : Non, j’ai pas envie de qualifier ça. Moi j’ai découvert cette chanson au travers d’un film publicitaire et j’avoue qu’après je les ai découvertes elles et que je les trouve très, très bien, oui. Diffusion d’une séquence où, sur le plateau de l’émission, les Mint Juleps chantent « Every Kinda People ».

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Mylène Farmer

MD : (…) Vous avez commencé à chanter à quel âge ? MF : Je vais répondre comme presque tout le monde : sous ma douche certainement très jeune ! Mais réellement, à vingt-deux ans. MD : Vous avez décidé d’être chanteuse à ce moment-là seulement ? MF : C’est-à-dire que j’ai eu beaucoup de chance. J’ai rencontré une personne qui m’a proposé cette chanson qui était la première, « Maman a tort », et puis après ma foi, c’est beaucoup de travail et puis… MD : Sinon vous étiez partie pour faire quoi ? MF : J’avais très envie, je suivais, moi, des cours de théâtre, donc j’avais très envie de m’orienter vers le cinéma ou le théâtre et parallèlement je suivais beaucoup de cours d’équitation. Donc j’avais cette dualité, je savais pas : peut-être l’équitation, peut-être le théâtre ou le cinéma. MD : C’est vrai que jusqu’à l’âge de quatorze ans on vous prenait souvent pour un garçon ? MF : Absolument, oui ! Moi j’ai cette réflexion qui est gravée dans ma mémoire, c’était un gardien de l’immeuble et j’étais allée chercher le courrier et il me demandait comme je m’appelais et j’ai répondu : « Mylène ». Et il m’a dit : « C’est très joli Mylène pour un petit garçon ». Très sérieusement. MD : D’où le titre peut-être de la prochaine chanson qui va sortir bientôt ! MF : Vous êtes bien renseigné ! (rires)

MD : Qui s’appelle… ? MF : Ce sera « Sans contrefaçon ». MD : « Sans contrefaçon, je suis un garçon » ! MF : « Je suis un garçon » (sourire) Pause publicitaire. MD : (…) On va commencer avec les images d’actualité que vous avez choisies. Ce sont des images, je préviens tout de suite tout le monde, qui sont très, très dures. Pourquoi ces images très dures ? MF : Parce que j’aime la violence. MD : Vous aimez la dénoncer ou vous aimez la regarder ? MF : J’aime la regarder. MD : Vraiment ? MF : J’ai, je dirais pas un plaisir sadique, mais c’est presque ça. J’ai une complaisance dans la violence, dans les images de mort presque, oui. MD : Alors, là ce sont des images extraites d’un document d’Amnesty International, je crois. Ce sont des exécutions : on va voir des corps coupés. C’est troublant, ce que vous nous dites ! (alors que sont diffusées des images où l’on voit des hommes sur une potence : on les cagoule, puis ils sont pendus) C’est un plaisir que vous avez à regarder ça ? MF : (par-dessus des images où l’on voit un cadavre puis une tête coupée jetés dans une fosse commune) C’est-à-dire qu’il faut faire attention à dire des choses comme ça, mais c’est vrai que je dis que ce sont, moi, des images qui m’attirent. C’est des choses bouleversantes, oui. Là on a vu des pendus, par exemple, j’ai toujours pensé qu’un jour je mourrai pendue. Ça, depuis très longtemps, la pendaison me fascine aussi. MD : (alors qu’on voit à l’image la photo d’un homme exécutant un autre homme au revolver) Et là, celui-là c’est une exécution… MF : Ça c’est une image, c’est dommage qu’elle soit statique parce que j’aurais bien aimé avoir

le reportage parce que c’est l’appréhension de la mort, y a toute cette approche, y a cette personne qui va tirer…Enfin ça suscite plein de réflexions, c’est assez étonnant. J’aime bien voir ça. MD : Mais vous êtes attirée par ça ? La mort vous attire, vous excite ? MF : Je suis attirée…Je crois qu’il y a une forme d’excitation, certainement. Moi j’ai très, très peur de la maladie mais de la mort, beaucoup moins. Et pendant ce temps-là Cheeta est en train de me mordre très fort les doigts ! (en effet, le chimpanzé a la main de Mylène dans sa bouche. Celle-ci se retire d’un geste brusque en faisant une grimace de douleur) MD : Ouh la la ! Bon, on va la garder encore quelques instants et puis on va la libérer à son tour parce que pour elle c’est pas marrant… MF : Oui… MD : Alors les photos personnelles que vous avez apportées : on va vous voir enfant. Votre enfance, vous l’avez passée où ? MF : Je l’ai passée essentiellement à Montréal, au Canada. Et puis après, une vie… MD : (alors qu’on voit à l’image la photo de Mylène bébé, étendue sur le ventre) Alors ça, voilà ! On vous voit enfin nue ! (rires de Mylène) (d’autres photos de Mylène bébé) C’était la première fois, parce qu’on vous a vue nue dans les clips, aussi, ensuite ! Vous aimez vous montrer ? MF : Ben ça encore, c’est un paradoxe. J’aime me montrer… (apparaît à l’image une photo de vacances montrant Mylène et Laurent Boutonnat, suivi d’une image blanche) MD : (il l’interrompt) (…) Une photo toute blanche, pourquoi ? MF : Toute blanche parce que je voulais faire une trilogie, c’est-à-dire que c’était moi enfant, moi la rencontre de Laurent Boutonnat, qui est mon producteur et compositeur, et puis l’avenir… MD : L’avenir est en blanc ?


MF : L’avenir est en blanc pour l’instant. MD : Vous aimez vivre comme ça dans l’incertitude ? Vous n’aimez pas par exemple dire « Ma vie, ma voie est tracée, ma vie personnelle je sais comment ce sera » ? MF : Oui, je crois que je préfère cette incertitude. MD : Totalement ? MF : Oui. Oui, oui. MD : Vous avez envie de vous mettre en danger ? MF : Je suis quelqu’un du danger. Je n’aime pas les choses faciles. J’aime les rencontres difficiles, les personnalités difficiles. C’est vrai que la facilité ne m’intéresse pas, ne m’attire pas du tout. MD : Vous avez choisi Basia… MF : Oui ! MD : Qui est un bon choix aussi ! MF : J’aime beaucoup cette femme. MD : Une autre femme, et j’allais dire une étrangère : c’est vrai que vous avez pas fait de choix français ! Vous n’aimez pas la chanson française ? MF : Pas du tout, c’est-à-dire que moi j’avais demandé deux, trois personnes et ces personnes-là maintenant y a beaucoup de décisions promotionnelles… MD : Et ça collait pas ? MF : …et ça collait pas. MD : C’était qui ? On peut le dire ! MF : Oui, bien sûr ! Moi j’aime beaucoup, et je l’ai toujours dit, Jacques Dutronc. J’adore son univers. MD : Un album qui sort bientôt ! MF : Voilà, et il a pas pu venir. J’ai demandé également Taxi Girl, qui sort un 45 tours. C’est quelqu’un que j’aime bien. Et la troisième personne, j’avoue que j’oublie ! MD : Et donc on va écouter Basia que vous aimez bien. MF : Que j’aime beaucoup, oui. C’est quelqu’un qui a beaucoup de classe. Une femme qui est très belle et puis qui chante très, très bien. MD : Vous aimez le style un petit peu jazzy ? MF : Avec elle, oui ! MD : Votre nouvel album, puisque vous préparez un album, y a un simple qui va sortir donc (« Sans contrefaçon »)… MF : Fin octobre, début novembre. MD : Et l’album sortira en janvier. MF : Et puis l’album, janvier. (l’album « Ainsi soit je… » sortira finalement le 14 mars 1988) MD : Avec une autre couleur ? Vous aimez casser les images ? MF : Je pense que oui, c’est très bien pour un artiste. Et puis moi, j’ai besoin de ça. MD : Alors on écoute Basia, qui est l’invitée de Mylène Farmer : « New day for you ».

Sur le plateau de l’émission, la chanteuse Basia interprète son titre. MD : Alors, la mode c’est quelque chose qui vous touche mais je sais que là aussi, vous n’aimez pas la facilité, vous ne vous habillez pas systématiquement chez quelqu’un de la tête aux pieds. On vous identifie quasiment, même dans certaines émissions si vous commencez une chanson de dos, ce qui était le cas récemment, on vous reconnaît tout de suite, je sais pas à quoi ça tient ! Au début, je crois, vous vous habilliez un petit peu avec Kate Barry, c’est ça ? MF : Absolument, oui. MD : Qui est la fille de Jane Birkin, que vous aviez rencontrée, et puis vous étiez habillée par elle et puis maintenant vous avez un autre… MF : Je dois être très infidèle mais là j’ai rencontré donc Faycal Amor… MD : Qui est un nouveau styliste marocain, qui est né à Tanger… MF : Oui et qui est quelqu’un qui occulte un peu le star-system pour l’instant. MF : C’est la première fois qu’on parle de lui peut-être dans une émission. MF : Oui peut-être, oui ! J’aime beaucoup. Sa collection, c’est intitulé « Les enfants terribles » donc ce n’est pas pour me déplaire, et que dire d’autre ? MD : Alors vous avez conçu, parce que vous avez beaucoup travaillé sur cette émission, vous avez conçu la mise en scène de la mode qu’on va voir maintenant de Faycal Amor. MF : Oui. MD : Et on vous retrouve en train de feuilleter un bouquin. Tournage qui a été fait sur ce plateau immense. MF : Absolument, oui. On a repris les pneus des photos (rires) MD : Et les modèles sont sur le livre et sur le plateau. Les voici. Diffusion d’une séquence où l’on voit en effet Mylène assise sur une pile de pneus en train de feuilleter un livre de mode, puis présentation des modèles. MF : Je sais pas si vous reconnaissez la musique, c’est « Pinocchio » (chanson « When you wish upon a star » du film de Walt Disney) ! (rires) Je crois qu’on pourrait résumer sa collection par la sobriété raffinée, voilà ! MD  : C’est tout ce que vous aimez aujourd’hui ? MF : C’est tout ce que j’aime oui. J’aime la sobriété, j’aime le raffinement. MD : Voilà les modèles de Faycal Amor, donc qui est un couturier qui démarre. Il est installé à Paris ?

MF : Oui ! Il a une autre marque qui s’appelle « Plein Sud » qui est peut-être plus connue des gens, probablement oui. Et puis donc « Faycal Amor » qui est une signature plus haute couture. MD : Vous aimez, parce que pour l’instant on peut dire que c’est un couturier un petit peu marginal il a pas une grande notoriété et puis vous disiez qu’il fuyait un petit peu le star-system… MF : Absolument, oui. MD : …sauf aujourd’hui avec vous ! Mais vous aimez tout ça, vous aimez aller fouiner, découvrir des choses qui ne sont pas évidentes ? MF : J’aime bien quelquefois aller vers les gens, oui, même si je suis plus fascinée comme vous disiez par les singes ! Quelquefois j’aime bien découvrir l’univers des gens ! MD : Et à Paris quand vous sortez, vous allez dans des lieux où tout le monde va ? MF : Jamais ! Je sors très, très peu. Je suis plutôt casanière, j’aime bien me protéger et rester dans un milieu clos. MD : C’est comment chez vous ? C’est noir ? C’est blanc ? MF : J’ai une chambre qui est, c’est une révélation, une chambre qui est noire. On dirait presque un tombeau parce que c’est très bas de plafond, et tous les murs et le plafond sont noirs. MD : Comme Dutronc et Françoise Hardy ! Chez eux tout est noir. MF : C’est ça, oui ! MD : Et vous vivez bouclée chez vous ? Vous mettez le verrou ? MF : Oui ! MD : Vous avez envie de vivre comme ça, j’allais dire quasiment dans une prison ? MF : C’est-à-dire c’est pas une envie, c’est une défense parce que je me sens assez mal quand j’évolue dans la rue. MD : Vous faites quand même du spectacle ! MF : Et pourtant je fais un métier public. Mais c’est le paradoxe. Je l’accepte ! Nouvelle pause publicitaire. MD : Dans « Mon zénith à moi », vous le savez, on donne chaque semaine à l’invité une caméra et l’invité filme ce qu’il veut. Souvent les artistes se filment eux-mêmes, je ne sais pas pourquoi, et vous Mylène Farmer vous avez fait un autre choix : vous êtes allée à Garches, à l’hôpital où sont les enfants accidentés de la route, et… MF : Pas essentiellement. Y a des maladies génétiques, y a de tout mais c’est vrai que ce sont essentiellement des enfants, par contre. MD : Vous y êtes allée parce que je crois, quand vous aviez dix, onze ans vous faisiez des visites


1986–1987 : Cendres de lune

comme ça. MF : C’est vrai. Tous les dimanches, moi pour essayer d’échapper à ce dimanche, parce que je hais les dimanches, j’allais fréquemment à l’hôpital de Garches pour rencontrer ces enfants parce que je me sentais bien. MD : Alors on va retrouver dans ce film qui a été fait par Mylène Farmer une petite fille de onze ans qui ressemble un peu à Mylène. C’était elle quand elle avait onze ans, voilà ce qu’elle faisait le dimanche. C’est un très beau document. Diffusion d’un petit film réalisé par Mylène. Il s’ouvre sur un plan de la façade de l’hôpital de Garches, en banlieue parisienne. On voit une petite fille rousse, les cheveux attachés avec un nœud similaire à celui de Mylène, gravir les marches et s’engouffrer à l’intérieur. Une infirmière accueille la petite fille puis celle-ci pénètre dans un couloir. Filmé ensuite en caméra subjective, on découvre une chambre, un lit. La petite fille saisit un verre de lait. Elle est ensuite face à une autre petite fille, malade celle-ci, en train de se livrer à des exercices de rééducation. La petite fille malade parle, raconte des anecdotes, des souvenirs, des rêves…Le verre de lait tombe et se brise sur le sol. La petite fille malade est soulevée par un infirmier. Elle salue la caméra. Elle est ensuite placée dans son fauteuil et échange un câlin avec une jeune femme rousse de dos, les cheveux retenus par un nœud noir. La petite fille du début est devenue adulte. Mylène.

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Mylène Farmer

MD : Qu’avez-vous ressenti en retournant comme ça, quelques années après ? MF : C’est très émouvant. Je crois que je n’ai pas du tout trahi mon souvenir. J’ai eu le même plaisir de retrouver ces enfants, la même pudeur aussi parce que rentrer dans leurs univers, c’est assez difficile, il faut pas les brusquer. Et puis j’ai surtout rencontré une petite fille formidable, qui est la petite fille brune (présente dans le petit film) qui est Eléonore et qui a une maladie qui a un nom paradoxalement aussi beau pour la maladie, qui s’appelle la maladie des os de verre et donc qui est extrêmement fragilisée : elle peut se fracturer quotidiennement les os. MD : Pour la partie humour de cette émission, et là c’est pas facile d’enchaîner, vous avez choisi Zouc. C’est un thème de l’enfance, aussi, du prochain spectacle de Zouc. MF : Ce n’est pas que l’humour, Zouc. C’est proche de tout ce que j’ai essayé moi de mon-

trer au travers de ce début d’émission. C’est quelqu’un que j’aime vraiment beaucoup, oui. Diffusion d’un extrait d’un sketch de Zouc. Au retour plateau, celle-ci a pris place aux côtés de Mylène. MD : (à Zouc) L’autre jour, je vous ai vue dans une émission où vous ne parliez pas au présentateur ! Vous aviez un problème de voix ?! Zouc : Moi j’ai fait ça ?! (rires de Zouc et Mylène) MD : On va pas y revenir ! Vous n’aimez pas trop les interviews ? Z : Si ! Si, si… C’est des fois difficile, hein. MF : Très difficile ! Z : (à Mylène) On est très sœurs, à un endroit… MF : J’ai l’impression, oui. J’aime, j’adore l’univers de Zouc. Moi si j’avais une définition, c’est quelqu’un qui a le geste, la voix et surtout le silence. C’est pour moi un personnage de Bergman, et dieu sait si j’aime le cinéma de Bergman. Voilà, je ne sais pas si c’est un compliment pour vous, mais…J’aime vraiment beaucoup cette femme. MD : (à Zouc) (…) Est-ce que vous êtes proche de l’univers de Mylène Farmer ? Parce qu’on a découvert plein de choses, enfin je pense que peu de gens s’imaginaient tout ça ! Z : La fascination (…), cette attirance pour une chose qui fait peur et en même temps on peut pas s’empêcher…Moi j’ai fait la même chose à mon arrivée à Paris : je voyais toujours les ambulances (…) qui passaient comme ça, je trouvais terrible de voir une action mais de pas voir l’autre côté. MD : Vous vouliez voir ce qu’il y avait dans l’ambulance ?! Z : Oui et moi je suis allée au Samu et je les ai suivis pendant très longtemps et un jour, j’ai plus pu. MF : Moi y a quelque chose, j’ai lu le livre de Zouc – que Cheeta m’a complètement déchiré (rires) – et qui est vraiment formidable, je l’ai lu en une heure de temps. J’ai pris en exergue une petite phrase qui relate de son enfance, et elle dit : « Je ne voulais pas être un chou, je ne voulais pas être ici. Est-ce qu’il y a quelque chose pour moi ? ». C’est à peu près ça. Et moi j’ai eu aussi ce sentiment durant mon enfance, c’est-à-dire je cherchais vainement un lieu où je pouvais me blottir. MD : Un lieu ou une identité ? MF : Plutôt un lieu, et peut-être l’identité qui

« (“Bambi”) est certainement le film que je verrai le plus de fois dans ma vie. »

vient après. Z : Un endroit où on vous laisse tranquille ? MF : Oui, c’est ça. Un cocon, quelque chose où on peut se recueillir. MD : (…) Vous avez fait un autre choix qui concerne l’univers des enfants, c’est « Bambi ». Mais vous n’avez pas choisi un extrait gai, non plus ! MF : Non, c’est vrai. Là, ce qui m’étonnait, d’abord je pense et je trouve personnellement que c’est le plus beau film de Walt Disney, que c’est certainement le film que je verrai le plus de fois dans ma vie, que là c’est vrai c’est un extrait qui est très douloureux. Et ce qui était intéressant, c’est de voir que c’est très rare de montrer la mort de quelqu’un dans un dessin animé qui est adressé aux enfants, enfin plus spécialement aux enfants, et qu’en plus c’est la mort d’un parent. Ça c’est quelque chose qui est assez étonnant dans un dessin animé. Et donc là, c’est l’extrait de Bambi qui perd sa maman et qui retourne sous le bois, c’est la protection et c’est son père, toute l’image du père. Diffusion d’un extrait de « Bambi », puis une dernière pause publicitaire. MD : Dernière partie du « Zénith » de Mylène Farmer avec un dernier extrait de film, c’est un film qui s’appelle « Requiem pour un massacre » d’Elem Klimov, qui vient de sortir. MF : Qui n’est pas une très jolie traduction. En russe, je crois, ça veut dire « Va et regarde » et je n’aime pas beaucoup la traduction française. MD : Alors, en deux mots l’histoire du film donc, c’est pendant l’occupation nazie en U.R.S.S., y a un village où tout le monde a été massacré… MF : Complètement décimé, oui. MD : Y a un petit garçon qui revient dans le village… MF : Qui est le héros, qui est un jeune paysan qui rencontre une jeune paysanne et qui va être projeté dans ce monde de guerre. C’est prodigieux, ce film. J’avoue que ça fait longtemps que je suis pas allée au cinéma. J’ai vu ce film, pour moi je le qualifierai presque de chef-d’œuvre. MD : Y a encore beaucoup de cadavres ! MF : Par hasard, certainement ! Là c’est autre chose, c’est certainement l’histoire mais c’est aussi la façon de filmer, c’est les lumières qui sont magnifiques. Et puis le cinéma russe, pour


moi, c’est un des plus beaux cinémas, c’est un cinéma de symboles et j’aime le symbole. Diffusion d’un extrait du film « Requiem pour un massacre » d’Elem Klimov. MD : (…) On va voir maintenant le clip que vous préférez aujourd’hui, qui est le clip de Peter Gabriel et de Kate Bush. C’est du haut de gamme, c’est sobre, exceptionnel. MF : C’est les deux artistes que je préfère. MD : C’est une chanson qui a marché dans le monde entier sauf en France ! MF : C’est vrai, paradoxalement. Pourquoi ? Je ne sais pas… Diffusion du clip « Don’t give up » de Peter Gabriel & Kate Bush. Au retour plateau, Michel Denisot est filmé en gros plan. L’image tremble un peu. On découvre alors qu’il est en réalité filmé par Mylène, qui a une caméra sur son épaule. MF : Michel, vous me faites la « Maxi tête »  (jeu télévisé qu’animait Sophie Favier à l’époque sur Canal +, et qui prenait des bouts de visages célèbres pour n’en faire plus qu’un) ?! MD : « La maxi tête » ?! Pourquoi ?! Vous voulez renverser les rôles pour la fin de votre émission, prendre la caméra et me poser des questions comme je le fais de temps en temps, ce qui est très désagréable d’ailleurs ! MF : Je voudrais la « Maxi tête », vous savez le jingle qu’on fait sur Canal + ! MD : Quoi ? « Canal +, c’est plus » ? MF : Voilà, oui mais attendez : vous vous calez bien dans votre fauteuil et vous chantez ! (il s’exécute !) C’est très bien ! Michel Denisot : oui, mais pourquoi ?! (rires) MD : (il rentre dans son jeu) Y a pas longtemps ! (rires) MF : Michel, est-ce que votre maman regarde toutes vos émissions ?

MD : Globalement, oui. De temps en temps, je lui dis que c’est pas la peine qu’elle regarde. MF : Dites-moi le premier mot qui vous passe par la tête. MD : Maintenant ? MF : Oui… MD : Tout va bien ! Ça va, finalement, c’est pas aussi désagréable que ça ! Ça dépend qui filme ! MF : Vous avez des fantasmes, ou un fantasme en particulier ? MD : J’en ai un qui se rapproche un peu du vôtre, sauf que c’est pas les curés évidemment. J’ai été élevé dans l’enseignement libre comme vous et je dois dire que les bonnes sœurs me tapent dans l’œil, comme vous ! (rires) (…) MF : Snoopy a dit : « Un ventre plein est un ventre heureux ». Est-ce que vous êtes d’accord avec lui ? MD : Pas vraiment, non. (…) Le ventre plein, c’est pas tellement mon truc, non. MF : Vous avez des velléités d’acteur, je crois. MD : Non, y a eu une histoire comme ça, c’est quelqu’un qui voulait me faire tourner dans un film, ça na pas eu de suite. MF : Vous n’auriez pas aimé remplacer Michel Blanc dans « Tenue de soirée » ? MD : (il éclate de rire) Non, non !! C’était un numéro d’acteur très difficile. MF : Michel, faites-moi rire. MD : Qu’est-ce que je peux faire ? Il faut que ça soit macabre, il faut que je me coupe la tête, il faut que je m’arrache un bras, il faut que je fasse quelque chose d’épouvantable ! Qu’estce qui est plus épouvantable que les images que vous nous avez montrées ?! Je sais pas, je peux pas faire ! J’ai pas envie de me suicider devant vous pour vous faire plaisir ! C’est ça qui vous ferait plaisir ? MF : Peut-être ! Si je vous demandais de m’embrasser maintenant, vous le feriez ? MD : C’est pas facile, équipée comme vous êtes ! Je veux bien essayer…

MF : (rires) Très bonne réponse ! Zouc : C’est des excuses, Mylène ! MD : Je biaise ! MF : Essayez quand même ! MD : C’est marrant à faire ? (tenir la caméra) MF : C’est formidable ! MD : Vous pouvez continuer, si vous voulez. MF : C’était ma dernière question. MD : Merci beaucoup. Merci Mylène d’avoir fait ce « Zénith ». (…) Vous avez consacré beaucoup de temps, vous avez beaucoup travaillé sur cette émission et le résultat a été je crois…Vous pouvez dire le mot de la fin, Zouc ? Comment a été cette émission ? (Zouc fait « smack » avec ses lèvres) MF : Formidable ! Merci ! (elle lui caresse la joue) Générique de fin.

Les oscars de la mode Date 21.10.1987 Chaîne TF1 Présenté par Yves Mourousi

Cette cérémonie a lieu en direct de l’Opéra Garnier à Paris. Entre deux remises de prix, les variétés se succèdent. C’est ainsi qu’on retrouve Mylène Farmer sur la grande scène du Palais Garnier pour interpréter « Déshabillezmoi », une reprise de la célèbre chanson de Juliette Gréco (il est d’ailleurs paradoxal de chanter un hymne à la nudité dans une


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soirée célébrant le vêtement). Dans un fourreau noir et les cheveux lâchés, Mylène se livre à une mise en scène des plus réussies, alternant la femmeenfant, la maîtresse femme, la vamp, la mangeuse d’hommes… Sa prestation est vivement applaudie et restera gravée dans les mémoires. La chanson sera d’ailleurs sur son prochain album. Notons un petit incident à la fin de la chanson : lorsque Mylène lève un bras en l’air, un de ses seins s’échappe de son corset à son insu.

Bains de minuit

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Mylène Farmer

Date 06.11.1987 Chaîne La Cinq Présenté par Thierry Ardisson

Depuis le temple de la nuit parisienne, les Bains Douches, Thierry Ardisson se livre (déjà) à un savant mélange des genres en recevant à une même table intellectuels, artistes, politiques, etc. Ce soir-là, à ses côtés, on retrouve le chanteur Antoine, le philosophe André Glucksmann et Mylène Farmer.

En veste noire et chemise blanche, Mylène intervient une première fois à l’occasion d’un sujet abordé avec le philosophe, en l’occurrence Mai 68. Thierry Ardisson : Toi tu faisais quoi en 68, Mylène ? Mylène Farmer : Moi j’ai un esprit très individuel aussi mais c’est vrai que Mai 68, je n’ai rien vécu de toute cette époque. TA : T’avais quel âge en 68 ? MF : J’avais sept ans ! (rires) TA : (…) Mylène, tu aimes les garçons qui ont les cheveux longs ? MF : J’aime les hommes qui ont les cheveux fournis ! (sourire) TA : (…) Donc ça te plaît, le style Glucksmann ! MF : Absolument. TA : Et le style Antoine ? Antoine : Je suis un peu dégarni ! MF : (elle éclate de rire) Il a répondu ! Un peu plus tard dans l’émission, Thierry Ardisson se livre à un des ces entretiens dont il a le secret en tête à tête avec Mylène Farmer. Tous deux sont assis sur des marches. Notons que c’est la seule fois que Mylène répondra aux questions – souvent musclées – de l’animateur. TA : Tu veux qu’on se vouvoie ou qu’on se tutoie ? MF : Moi j’ai le vouvoiement…C’est une éducation, ça n’a rien d’hautain mais j’avoue que je vouvoie plus facilement, donc on va se vouvoyer. Vous avez le droit de mettre vos lunettes noires, alors. (rires) TA : Tu veux que je mette mes lunettes ?! Alors on se vouvoie et je mets mes lunettes, d’accord ! (il joint le geste à la parole) Tu as fait une chanson que j’adorais, qui s’appelait « Je suis une catin » (sic !)… MF : C’est « Je suis libertine » ! (sic !) TA : Ouais, mais y avait « Je suis une catin » dedans ! MF : En exergue, oui. TA : Et alors, maintenant y en a une autre, c’est « Je suis un garçon ». (re-sic !) MF : Oui. En fait, ce que j’aurais voulu, c’est être un caméléon. TA : Et la prochaine fois, ça va être quoi ? « Je suis un caméléon » ?! MF : Non, c’est dans la chanson, déjà ! « Je suis un garçon / Je suis un caméléon »… TA : Et la prochaine fois ça va être quoi ?! MF : Il n’y a pas encore de prochaine fois. L’album est en cours de travail, donc j’attends. TA : Tu vas pas faire du flamenco ?! MF : Non ! TA : Je t’ai vue chez Denisot un soir, tu choisissais des photos et tu choisissais exprès des photos avec un mec qui avait des têtes coupées à

la main au Vietnam, qui les mettait dans une tombe. C’était sanglant, c’était saignant, c’était violent et tu disais que tu aimais bien ça. MF : Non… Enfin, je l’ai peut-être dit mais ça, c’est des émissions en direct. Ce que je voudrais dire là-dessus, c’est que j’ai une fascination pour ça et que j’aime ça. Je ne suis ni sadique, ni folle. J’ai une fascination pour ça. TA : T’es pas un peu folle quand même ?! MF : Peut-être un peu ! Mais quant à ça, non. J’ai quand même beaucoup de respect. C’est certainement un propos qui a choqué certaines personnes. TA : Moi ça m’a pas choqué du tout ! MF : Que je sois attirée par ça, oui certainement. Que j’aime ça, c’est un débat qui est quand même plus complexe. TA : Je t’ai vue aux « Oscars de la Mode », tu chantais « Déshabillez-moi ». T’étais habillée tout en noir et à un moment, y avait une position comme ça, et on voyait que t’avais une petite culotte blanche. C’est fait exprès des trucs comme ça ! MF : Non, je suis désolée ! (rires) TA : C’est fait exprès quand même, on met pas une petite culotte blanche quand on est habillée tout en noir ! MF : Comment pouvais-je savoir que le caméraman plaçait sa caméra en dessous ?! TA : Ah ! Donc IL a fait exprès ?! MF : Certainement ! (rires) TA : Et quand tu lèves les bras à la fin de la chanson et qu’il y a le sein qui tombe, c’était préparé ou pas préparé ? Moi je me demande des trucs comme ça, je suis vachement naïf finalement ! MF : Là, je vous laisse dans le doute. TA : Alors j’ai lu une interview dans « Le Matin » où tu disais que t’habitais avec un singe. C’est vrai ? MF : C’est vrai. C’est un singe, c’est un sajou. TA : Ah c’est pas un capucin ? MF : Sajou capucin, si, si, si ! Et c’est un petit singe qui est grand comme ça (elle montre la taille à l’aide de ses mains), qui a une très longue queue et qui est adorable, caractériel mai que j’aime vraiment beaucoup. TA : Et tu disais que tu aimais bien le singe parce qu’il avait quatre mains. Quand on lit des trucs comme ça dans le journal, c’est vachement... je sais pas, moi ça me choque ce genre de trucs ! MF : (rires) Mais non, parce quand on me pose la question « Pourquoi aimez-vous les singes ? », c’est vrai que c’est difficile. Ça paraît tellement évident ! C’est vrai que non seulement il a quatre mains, c’est-à-dire qu’il peut vraiment tripoter tous les objets, reproduire tout ce que pouvez écrire, lire… Enfin, c’est assez étonnant mais ce n’est pas que ça. Un


singe, c’est fascinant parce que c’est vraiment terriblement proche de l’homme. C’est un mimétisme ! TA : Sauf qu’il a quatre mains ! MF : Sauf qu’il a quatre mains ! (sourire) TA : Donc tu préfères vivre avec un singe qu’avec un homme. Tu vis pas avec un homme, là ? MF : Non. TA : Tu vis toute seule avec ton singe ? MF : Quand bien même je vivrais, je ne le vous dirais pas ! TA : Tu me le dirais pas ?! Pourquoi ? MF : Non parce que ça, c’est quelque chose que je tairais. TA : Ah bon? MF : Oui. TA : Tu fais très attention à ta vie privée, tu fais très attention à ton image finalement. MF : Je sais pas si c’est faire très attention, je crois que je n’ai aucun plaisir à parler de ça, voilà. TA : C’est quoi ton plaisir ? MF : Mon plaisir, c’est de chanter, c’est le cinéma, c’est la musique, c’est la peinture… TA : Tu veux faire du cinéma ? MF : Je ne sais pas. J’aime aller au cinéma dans l’immédiat…Pourquoi pas le cinéma ? Je ne sais pas.

Lahaye d’Honneur Date 13.11.1987 Chaîne TF1 Présenté par Jean-Luc Lahaye

Mylène lance la promotion de « Sans contrefaçon » sur le plateau du nouveau grand prime-time du vendredi soir de TF1 qui, comme son nom l’indique, est présenté par le

TA : Et le rêve de ta vie c’est quoi, à part te marier avec moi ?! MF : A part me marier avec vous ?! Je sais pas si c’est le rêve de ma vie, mais j’ai très, très, très envie un jour d’élever des singes. TA : Ah bon ?! Mais c’est sérieux cette histoire de singes, alors ! MF : C’est vraiment sérieux, oui, oui ! Moi j’ai vu un jour un reportage sur Diane Fossey, qui était une femme absolument… TA : Oui, bien sûr, qui vivait au Kenya. MF : Oui, et c’était formidable, voilà. C’est une femme qui m’a donné envie d’élever des singes. TA Et t’as envie d’avoir plein de petits singes chez toi ! Ils se marièrent et ils eurent plein de petits singes ! MF : (elle éclate de rire) Ou des orangs-outans, ou des gorilles. TA : Si j’adoptais des singes, tu te marierais avec moi ? MF : Je vais réfléchir ! TA : Ben réfléchis ! Merci ! MF : Merci ! (rires) L’émission continue à nouveau en plateau et on retrouve ainsi Mylène parmi les autres invités. Si elle apparaît souvent à l’image, elle n’intervient toutefois plus.

chanteur Jean-Luc Lahaye, alors au sommet de sa gloire. L’émission, lancée en septembre, ne durera qu’une saison, malgré de bonnes audiences. Sur la scène, face au public, Mylène est entourée de deux jeunes danseurs, les mêmes qui l’accompagneront pour (presque) toutes les prestations de ce titre. Elle effectue sa nouvelle chorégraphie, particulièrement efficace, habillée d’un costume à damier et casquette assortie. Pour l’anecdote, Mylène voulait ses deux danseurs très jeunes, voire mineurs. Ils furent castés par Sophie Tellier. A la fin de la chanson, Mylène salue le public qui l’applaudit très chaleureusement et scande même son prénom. Les danseurs quittent le plateau et Mylène rejoint Jean-Luc Lahaye pour échanger quelques mots. Jean-Luc Lahaye : Bonsoir Mylène, comment vas-tu ? Mylène Farmer : Très bien, je vous remercie. JLL : Elle est jolie cette tenue, dis donc ! MF : Merci beaucoup ! (en direction du public) Et bonsoir à vous tous ! JLL : Ici on aime beaucoup ta chanson ! Tu as pu le constater : tout le monde chantait et

dansait avec toi. MF : Oui, et c’est très agréable ! (sourire) JLL : C’est une nouvelle chanson ? MF : C’est la toute dernière, oui. JLL : Un extrait de l’album ? MF : C’est la première chanson qui sera extraite de l’album. L’album va arriver fin janvier, je pense. (l’album « Ainsi soit-je… » sortira finalement le 14 mars 1988) JLL : Très bien. Nous l’attentons tous, Mylène ! MF : Merci ! (rires) JLL : Merci d’être venue. Dis donc, on pourrait t’appeler la star du clip, toi ! MF : Je ne sais pas ! JLL : Si, tu fais un effort tout particulier sur tes clips. Tu tournes en scope, je crois, c’est-à-dire en cinématoscope (sic !), vraiment avec des gros moyens et c’est toujours très, très soigné. Tu prends un réel plaisir, je crois. Est-ce que t’aurais aimé être comédienne, en fait ? MF : C’est quelque chose que j’aurais aimé être, peut-être le serai-je plus tard ! JLL : Certainement ! Là, j’ai une cassette, une compilation de tous tes clips : « Maman a tort », « Plus grandir » – une chanson que j’aime beaucoup -, « Libertine » et « Tristana ». (il montre à la caméra la cassette vidéo « Les clips », dans sa première version, avec boîtier cristal) Voici la compilation, si vous aimez


1986–1987 : Cendres de lune

Mylène Farmer. Ça fait combien de succès ? MF : Ça en fait quatre ! JLL : Mais toi, depuis le début ? T’as commencé en quelle année, Mylène ? MF : Vous me posez une colle ! On va regarder là-dessus ! (elle saisit la cassette et regarde au verso) JLL : Ah, elle se souvient plus de l’année de ses débuts ! Ça c’est incroyable ! MF : (rires) Le premier, « Maman a tort », c’était 84 ? 83 ? (l’hésitation de Mylène peut s’expliquer par le fait que la chanson a été enregistrée en 1983 mais est sortie dans le commerce et a connu le succès en 1984) JLL : 83, me dit-on. Je crois que c’est hiver 83-84 voilà, ça se chevauche ! Et bien Mylène, je suis content, merci d’être venue. MF : Merci à vous ! Mylène reste aux côtés de l’animateur pendant qu’il annonce la suite de l’émission, puis quitte le plateau. Pour l’anecdote, lors des répétitions de l’émission, Mylène portait une tenue originale : un intégral cuir – gants, pantalon et pull à multipoches zippées (avec manches et col roulé en laine) – surmonté de sa désormais célèbre casquette à damier.

Embarquement immédiat

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Mylène Farmer

Date 15.11.1987 Chaîne FR3

L’émission est réalisée en Tunisie. C’est dans une tenue délicieusement garçonne que Mylène y promotionne « Sans contrefaçon » : casquette noire vissée sur la tête, culotte courte

et veste noire. La prestation est précédée d’un petit sketch. Dans un premier temps, on voit Mylène se livrer à une séance photo en extérieur sous un palmier. Alain Chamfort la rejoint alors et lui demande si elle a passé une bonne nuit. Mylène, qui précise qu’elle a la suite voisine à la sienne, lui reproche de l’avoir empêchée de dormir en chantant toute la nuit. Elle le quitte et va se mettre en place pour chanter son titre en pleine végétation. Notons que c’est la seule prestation pour la chanson que Mylène effectuera seule, sans ses danseurs. Après la chanson, Mylène s’excuse auprès d’Alain Chamfort d’avoir été rude avec lui. Mais celui-ci l’envoie promener en lui disant qu’il attend Jane Birkin. Vexée, Mylène lui assène : « J’espère qu’elle a bien dormi, elle ! », avant de partir en lui tournant le dos !


© Sygma-Corbis

Panique sur le 16

Date 19.11.1987 Chaîne TF1 Présenté par Christophe Dechavanne

Récemment arrivé sur TF1, Christophe Dechavanne y présente une émission similaire à celle qui a fait son succès sur A2, « C’est encore mieux l’après-midi ». Diffusée à l’heure du goûter, on y trouve pêle-mêle variétés, chroniques et blagues en tout genre. Faute d’audience, l’émission s’arrêtera au bout de quelques mois. L’animateur lancera alors un autre programme qui fera sa gloire, « Ciel, mon mardi ! ». Fidèle en amitié, Mylène est l’invitée du jour de « Panique sur le 16 » (du nom du studio où l’émission est tournée). L’émission commence, Christophe Dechavanne arrive et fait face au public. Christophe Dechavanne  : Notre invitée aujourd’hui, c’est Mylène Farmer ! La voilà ! (Mylène arrive sur le plateau, vêtue de son costume à carreaux noir et blanc, casquette sur le crâne. Elle serre la main à Christophe Dechavanne.) Comment allez-vous ? Mylène Farmer : Très, très bien ! CD : Comment ? (Mylène ayant parlé par-dessus les applaudissements, il n’a pas entendu) MF : (elle se penche et lui répète à l’oreille) Très, très bien ! CD : Vous êtes en pleine forme ?

MF : En pleine forme. Ils se mettent en marche pour s’installer sur le canapé de l’émission. CD : (…) Vous connaissez pas les lieux, c’est une grande première ! MF : C’est la première, oui ! Je suis ravie d’être là ! CD : Moi je suis très content de vous avoir sur ce plateau. J’aime beaucoup votre petit costume ! MF : (en s’asseyant) Merci ! CD : (…) Alors j’ai eu l’occasion de vous voir, de vous entendre beaucoup à la radio puisqu’on entend beaucoup le nouveau titre, on va avoir l’occasion d’ailleurs de l’écouter un petit peu plus tard dans cette émission. Y a une nouvelle Mylène Farmer ou c’est juste un nouveau titre ? MF : C’est la suite. « Sans contrefaçon », ce sera extrait du prochain album que je suis en train d’enregistrer. Donc je vais être en studio jusque fin décembre. CD : Ah oui, donc travail acharné quand même ! MF : Travail acharné ! L’album est prévu donc pour janvier (il sortira finalement en mars). CD : Ecoutez, moi je vous propose de prendre rendez-vous déjà quand l’album sortira pour un nouveau titre, alors ! (Mylène hoche la tête mais l’émission n’existera déjà plus quand « Ainsi soit je… » sortira) Est-ce que quand l’album sortira ce sera un nouveau titre ? Parce que quand on parle de 45 tours, c’est un 45 tours qui est extrait d’un album etc. etc. MF : Quand l’album sortira…on peut pas bien

savoir ! Si le disque marche très bien jusque janvier, nous continuerons avec « Sans contrefaçon ». CD : Ben on va pas se gêner ! MF : Hé ! CD : Comment va E.T. ? MF : Très, très bien ! CD : E.T., c’est le petit singe. Qu’est-ce que c’est, déjà, comme singe ? MF : Sajou capucin ! CD : (il n’a visiblement pas compris) Singe ou capucin ?! MF : (elle reprend) Sajou capucin ! CD : Sage ou capucin ? Comme on veut : ou sage, ou capucin. MF : Sajou ! (elle articule exagérément) Sa-jou ca-pu-cin ! (rires) CD : Sajou capucin, très bien ! Après une première pause musicale, on retrouve Christophe Dechavanne et Mylène toujours sur le canapé pour une séquence intitulée pour l’occasion « Gentlewoman ». CD : « Gentlewoman », c’est parce que bien entendu « Gentlewoman Farmer » ! MF : Of course ! CD : Est-ce que vous avez déjà reçu – on m’a dit que oui donc vous allez me l’infirmer ou me le confirmer – est-ce que vous avez déjà reçu beaucoup de propositions de cinéma ? Parce que plus je regarde les clips que vous avez faits, avec certainement beaucoup d’amour parce qu’ils sont quand même bien léchés donc c’est que vous aimez ça, plus je me dis que là vous


1986–1987 : Cendres de lune Mylène Farmer 94

êtes mûre, quand même ! MF : J’ai eu beaucoup de propositions… CD : (il l’interrompt) Il faut que vous parliez un poil plus fort pour que le public puisse participer ! MF : Je vais remonter le micro ! (elle relève son micro cravate) CD : D’accord. Mettez-le dans la bouche finalement ! MF : (rires) J’ai eu beaucoup de propositions que j’ai refusées. CD : Pourquoi ? MF : Parce que j’avais cet album à faire, d’une part, que pour l’instant je me concentre au métier de chanteuse, que j’ai quand même un projet fin 88. Mais qui dit projet… CD : C’est quoi ?! (Mylène fait non de la tête) On peut pas savoir ? MF : Je ne peux absolument pas le dire. CD : On peut pas avoir la double casquette de chanteuse et de comédienne en même temps ? MF : Si, mais pour l’instant un album c’est très important, c’est le second. C’est des journées et presque des nuits de studio. CD : Parce qu’on sait qu’un clip, par exemple, c’est du play-back bien évidemment puisqu’il y a du montage etc., là vous êtes beaucoup plus actrice sur un clip que chanteuse. MF : Oui, absolument. CD : Donc ça veut dire qu’on peut… MF : Mais je pense que j’aimerais les deux métiers. CD : Qu’est-ce qui vous ferait plaisir comme rôle ? J’ai du mal à imaginer ce qui vous ferait plaisir… Genre quoi ? Genre un truc violent un peu, quand même, parce que vous êtes bien branchée violence ! MF : Certainement violent… Je pense que le comique, il faut occulter ça ! (rires) CD : C’est pas votre truc, le comique. MF : Pas du tout, non ! Non, non. CD : C’est vrai ? Vous, vous riez jamais ? Enfin on peut être gai mais pas être drôle. MF : Je pense que j’ai un petit peu d’humour, pas beaucoup quand même. Plutôt cynique. Je ne ris pas souvent, je pleure plus souvent ! CD : Ça serait quel genre de rôles, alors? Je vous ai écoutée chez Denisot, vous avez dit des choses insensées parce que vous avez sorti des images que vous aimiez, les choses dont vous avez parlé c’était pas violent, c’est extrêmement violent. C’est vrai qu’en plus dans chaque clip, y a au moins une bonne giclée d’hémoglobine ! MF : (elle éclate de rire) C’est la faute de monsieur Boutonnat ! CD : Ah c’est monsieur Boutonnat qui vous pousse – vous voyez que vous riez quand même ! – il vous pousse dans ces retranchements-là ?

MF : Il aime l’hémoglobine, oui. CD : C’est un goût à vous, quand même. Lui aussi ? (Mylène acquiesce) Bon, c’est bien comme vous travaillez tous les deux… MF : Tout est parfait ! CD : Tout s’accorde très, très bien. Vous savez que j’ai une indiscrétion ? Je sais pas si je peux la dire…C’est que le clip « Tristana » – vous savez qu’il va y avoir les Victoires de la Musique très bientôt – (…) et « Tristana » clip nominé aux Victoires de la Musique ! MF : C’est vrai ?! CD : Oui ! MF : Ben je suis ravie ! CD : Voilà. Surprise ? MF : Surprise ! CD : Heureuse ? MF : Heureuse ! (hélas, « Tristana » n’aura pas le prix qui reviendra à « C’est comme ça » des Rita Mitsouko) CD : Quand on est nominée pour un coup comme ça, on se dit « Ce serait bien que je l’ai », ou le fait d’être nominée, on est content ? MF : Très honnêtement, moi le principal c’est de l’avoir fait, c’est d’aimer ce clip et je pense que le public l’a aimé aussi. Après, ce genre de concours, remises de prix, je n’aime pas beaucoup ça. CD : Ça pousse un peu les jalousies, forcément, pendant au moins cinq minutes ! MF : Certainement. En tout cas, je serais ravie au moins pour le réalisateur, oui. CD : Oui ? Alors, je sais qu’il y a une cassette – bon je vais pas faire la promo de tout ce que vous faites… MF : Une compilation ! CD : …mais je sais qu’il y a une cassette de compilation de tous vos clips. Est-ce que le gens – ça je vous pose la question – est-ce que les gens ont la démarche d’aller acheter une cassette sur laquelle il n’y a que des clips ? MF : Absolument ! Parce que nous, c’est la première fois que ça avait été fait en France, je sais maintenant beaucoup d’artistes le font, et les ventes sont considérables. Donc je pense que ça intéresse le public ! (sourire) CD : Donc ça marche bien ! Le clip, c’est pas seulement un instrument de promotion pour le disque, c’est aussi un plaisir pour les gens, quoi. MF : Bien sûr que oui. CD : Les vôtres sont très, très bien foutus. A ce moment retentit un gong, signe qu’un ordinateur va poser deux questions à l’invité. Première question : « Le refrain qui vous irrite : « Comme tu veux, chérie… », « Alors, heureuse ? », « Tu penses à quoi ? ». MF : Plutôt du genre : « Alors, heureuse ? » ! (elle éclate de rire)

Seconde question de l’ordinateur : « Vous aimez l’amour en muet ? en mono ? en stéréo ? » MF : Je n’ai pas saisi la fin de la phrase ! (Christophe Dechavanne lui répète les trois propositions) J’aime le muet ! CD : Le muet ? Bien ! Alors il va y avoir tout au long de cette émission plusieurs questions… MF : D’accord ! (rires) Vient ensuite la rubrique de Renaud Rahard, consacrée ce jour aux agendas. Christophe Dechavanne vanne gentiment son chroniqueur, pour le plus grand plaisir de Mylène qui rit beaucoup. L’animateur montre alors à Mylène son nouveau gadget : une télécommande qui fait tourner le petit plateau circulaire sur lequel est installé le canapé où ils ont pris place. CD : (…) Vous avez pas le mal de mer ?! MF : Non, non ! (rires) Christophe Dechavanne demande ensuite à Renaud Rahard quel agenda il conseille à Mylène Renaud Rahard : Mylène je lui conseille un Holbury, c’est ce que tout le monde à dans le show-biz ! Je crois que c’est le minimum. MF : Je vous remercie : tout l’a monde l’a dans le show-biz… (rires) CD : Oui, hein c’est fou comme partant de quelque chose d’agréable il peut être désagréable ! MF : Oui ! Un modeste agenda… Christophe Dechavanne continue ses plaisanteries, et renomme notamment la marque de luxe Hermès « Herpès », ce qui fait rire Mylène. CD : C’est d’un goût douteux, hein Mylène ? Ça vous plaît pas, ça ?! MF : C’est limite ! Plus tard dans l’émission a lieu une présentation de bijoux, et notamment de colliers. Quatre jeunes filles portent ces bijoux. Christophe Dechavanne demande à Mylène lequel a sa préférence… MF : La dernière demoiselle ! CD : (…) Enlevez votre main mademoiselle, qu’on le voie bien ! (…) MF : Cela dit, je suis un petit peu myope alors je pense que je prendrai plutôt la première demoiselle ! Nouveau gong, nouvelles questions de l’ordinateur : « Au premier coup d’œil, il vous a frappée par sa cravate ? ses chaussures ? ses chaussettes ? » MF : Probablement ses chaussures ! (sourire) Deuxième question : « Avec les hommes, vous voyez grand ? vous coupez court ? vous faites du sur-mesure ? » MF : Je ne comprends pas les… (Christophe Dechavanne répète et explique les réponses.


Mylène baisse les yeux) Je coupe court ! CD : Ah ben ça doit être agréable ! (rires) Après une pause musicale, le chroniqueur Patrice Carmouze, qui restera un fidèle acolyte de Dechavanne, vient présenter le Beaujolais nouveau. Christophe Dechavanne remplit trois verres, en tend un à Patrice Carmouze et un autre à Mylène. Celle-ci y trempe les lèvres… CD : Il est bon ! Comment le trouvez-vous, Mylène ? MF : Très bon ! Moi qui n’aime pas le vin, je le trouve très bon. CD : Bon, on va reboucher la bouteille. Vous pourrez partir avec ! MF : (rires) Je vous en prie ! (elle reprend une gorgée) Christophe Dechavanne demande alors à l’ordinateur deux nouvelles questions. « Le mot ‘presse’ évoque pour vous un citron, un coup de cœur, un bouton ? » MF : (incrédule) Un bouton ?! (un temps, puis

Nulle part ailleurs Date 23.11.1987 Chaîne Canal+ Présenté par Philippe Gildas

Mylène est l’invitée principale de cette nouvelle émission de Canal + qui deviendra bientôt culte. Elle vient présenter son nouveau 45 tours, « Sans contrefaçon » habillée de son costume et casquette à carreaux noir et blanc. Elle est présente sur toute la durée de l’émission et répond à toutes les questions de Philippe Gildas qui aborde avec elle tous les sujets : les singes, le prochain album, les clips, l’écriture, les envies de scène, etc. Elle assiste et réagit à toutes les rubriques, et interprète également « Sans contrefaçon ». Philippe Gildas : Le studio est vraiment bien rempli pour l’une des gloires montantes, des vraies découvertes de la chanson française depuis quatre ans : Mylène Farmer ! (applaudissements). (en désignant le public) Ça n’arrive pas

peu convaincue) Bouton ! Question suivante « Collectionnez-vous des articles vous concernant ? Oui, parfois, jamais » MF : Euh, non. La personne qui s’occupe de mes petites affaires, qui est très proche de moi, collectionne. CD : C’est lui qui le fait pour vous ? MF : Absolument, oui. Après cette question, Mylène se lève afin d’aller se mettre en place au centre du plateau, face au public, pour interpréter « Sans contrefaçon » en compagnie de ses deux jeunes danseurs. A la fin de la chanson, sous les applaudissements, Mylène court rejoindre Christophe Dechavanne, assis sur un piano à queue. Elle s’installe sur le tabouret face au clavier. L’ordinateur annonce les réponses de Mylène aux différentes questions posées en cours d’émission. Il en ressort qu’elle est instinctive et ne se donne pas facilement. MF : (elle lève un verre de Beaujolais pour conclure l’analyse) A votre santé ! (elle boit une gorgée)

à tous les coups, vous avez le club ! Y a pas de problèmes, y a des fans ! Mylène Farmer : C’est sympathique ! (rires) PG : Apparemment, ce sont les mêmes, et les Nuls aussi ! Bonjour, les Nuls ! MF : (elle fait un grand signe de la main en direction des Nuls) Bonjour ! PG : (…) Alors, aujourd’hui ça s’appelle « Sans contrefaçon » ? MF : C’est le tout dernier ! PG : C’est le tout dernier…Et la phrase suivante ? MF : (elle prend les mimiques et la voix d’une enfant prise en faute) « Je suis un garçon »… PG : On a du mal à le croire, mais enfin après tout, on a le droit de chanter ce qu’on veut ! (Mylène acquiesce avec un grand sourire et un air enfantin) PG : Vous nous expliquerez tout à l’heure pourquoi ce titre. Alors, ça c’est un 45 tours original… MF : Oui. PG : Ça n’est pas extrait de l’album… MF : Ça sera extrait de l’album qui va sortir, je pense, fin janvier. On a un petit peu de retard. Là, je suis en studio jour et nuit (tant de retard que l’album sortira en mars et non en janvier). PG : C’est un 45 tours tout nouveau… MF : Tout nouveau, oui. PG : …qu’on n’avait donc pas entendu avant et qui précède un album à sortir en janvier. MF : Voilà. PG : Un 45 tours qui est parti alors à cent à l’heure, sur les chapeaux de roue.

CD : (…) Bon Mylène, inutile de dire (…) que j’ai été très content de faire cette émission avec vous. MF : Moi aussi ! CD : Ça va ? MF : Oh, je suis ravie ! CD : C’est vrai ? (…) Dès que vous avez un truc nouveau à nous dire, faites-moi plaisir : vous nous passez un petit coup de fil et vous venez nous voir ! MF : C’est promis ! CD : C’est promis ? MF : Promis ! CD : Je vous embrasse très, très fort ! Christophe Dechavanne salue les téléspectateurs puis échange une bise sonore avec Mylène. Malgré sa promesse, notons que Mylène ne reviendra pas sur le plateau de cette émission qui disparaîtra trois mois plus tard !


1986–1987 : Cendres de lune Mylène Farmer 96

MF : Je crois que c’est celui qui est parti le plus vite, oui. C’est une progression. PG : Mais une progression, je le disais, sur quatre ans. Est-ce que ça étonne Mylène Farmer ? Est-ce que ça étonne encore, l’aventure de la chanson ? MF : Bien évidemment ! A chaque fois, on propose quelque chose de différent, et puis le public dit oui au fur et à mesure, et de plus en plus fort. PG : Est-ce que c’est au fond tout aussi passionnant ? La première fois qu’un titre marche, c’est une aventure formidable. MF : Bien sûr ! PG : Mais est-ce que c’est tout aussi passionnant d’arriver à chaque fois à confirmer ? MF : C’est encore plus paniquant, je crois. PG : C’est encore plus paniquant avant de sortir le titre ? MF : Avant de sortir le titre, pendant, parce que c’est vrai que là il y a une force qui ne s’arrêtera pas, je pense, parce que j’ai une bonne étoile. Mais je ne sais pas, c’est une constante. Toujours aussi paniquant… PG : Mais ça, c’est à titre personnel, la panique, c’est au fond de soi. MF : Certainement, oui. PG : Mais pour la chanteuse proprement dite, qui est quand même capable d’un certain recul, vous l’avez déjà montré, d’une certaine analyse, c’est ça au fond faire une carrière au bon sens du terme : c’est arriver sur quatre ans, sur cinq ou six titres, à démontrer à chaque fois qu’on peut être encore là et encore mieux que la fois précédente. MF : C’est vrai. C’est en ça que je suis, moi, très contente en tout cas. C’est que j’ai l’impression de commencer vraiment de m’installer et puis d’avoir une réponse du public. PG : C’est pour ça que le deuxième album c’est très important aussi ? MF : Bien sûr. PG : Et il y aura beaucoup de chansons écrites

par Mylène ? MF : Y en a beaucoup plus que le précédent. PG : Le précédent, y en avait quand même déjà trois. MF : Y en avait trois, mais là je pense qu’il y en aura davantage. J’ai de plus en plus de plaisir à écrire. PG : Et sans vouloir faire d’erreurs, ce qui est pourtant ma grande spécialité, dans les trois de l’album précédent, il y avait « Libertine »… MF : Alors, il y avait « Libertine »…Non ! « Libertine » : Laurent Boutonnat ! PG : C’était Laurent, j’étais sûr de me tromper ! MF : Première erreur ! (rires) PG : Alors, « Tristana »… MF : Non…Oui, « Tristana », « Plus grandir » et « Au bout de la nuit », qui était la face B de « Plus grandir »…de « Tristana » ! PG : Mais sur les trois, des 45 tours sortis à part, donc c’est quand même…c’était déjà une belle confirmation. Et là, y en aura combien alors ? MF : Je ne sais pas, c’est en cours d’écriture. PG : C’est en cours, il faut attendre janvier, donc. Alors, on va regarder tout de suite, je le dis aux Nuls quand même : Mylène Farmer connaît très, très bien l’émission, tous les soirs, donc elle vous attend au virage ! MF : Oui, oui ! Attention ! (elle fait signe « attention » avec le doigt en direction des Nuls) (rires) PG : La balle est d’abord chez vous. On regarde : Mylène vue par les Nuls. Une séquence est diffusée dans laquelle les Nuls caricaturent l’amour de Mylène pour les animaux en lui prêtant toute une ménagerie, notamment un hippopotame ! L’énumération des animaux s’achève sur une image de JeanLuc Lahaye ! PG : On retire tout de suite de la liste Jean-Luc Lahaye qui n’a rien à y faire ! MF : (sarcastique) Non… PG : Rien de spécial…

MF : …ni l’hippopotame, d’ailleurs ! PG : Ah, ni l’hippopotame ! Mais le singe, oui ? MF : Le singe, oui ! PG : Toujours le même ? MF : J’en ai un deuxième ! Un tout petit, petit. Il est grand comme ça (elle montre la taille avec ses mains), il a trois mois, magnifique. PG : Mais toujours avec E.T. ? MF : Oui, oui. La rencontre a eu lieu hier, et c’est formidable. PG : Mais le deuxième, le tout petit, c’est un singe ou une guenon ? MF : Non, c’est un singe, mâle donc. PG : Mais c’est que E.T., malgré son nom, c’était une petite fille ! MF : E.T. est une femelle, voilà ! PG : Alors qu’est-ce qui va se passer, alors ? MF : Peut-être procréation, qui sait ? PG : Ça va devenir un zoo, chez Mylène Farmer ! (Mylène éclate de rire) Et pourquoi les singes ? MF : J’adore ces animaux. Une réceptivité qui est étonnante, une reproduction : ils écrivent, ils lisent, ils font des choses incroyables. PG : Et, sans être indiscret, comme vous ne vivez pas seule, l’autre supporte les singes ? MF : Absolument, oui, oui. C’est d’un commun accord. C’est un animal trop difficile pour pouvoir prendre cette décision. PG : Mais vous avez été obligée de choisir un ancien garde du zoo de Vincennes, non, comme compagnon ? MF : Je vous avouerai que non ! J’ai trouvé ! (rires) PG : Et est-ce que vous avez beaucoup d’autres animaux ? MF : Non, ce sont les seuls. PG : (il s’adresse aux Nuls) Bon alors, pourquoi vous m’avez dit qu’il y avait aussi une ferme et des canards ? MF : Ben alors !! (rires) (Les Nuls font les innocents) PG : Il faut jamais s’occuper des Nuls, il faut


« Il y a une force qui ne s’arrêtera pas, je pense, parce que j’ai une bonne étoile » jamais prendre ses renseignements chez les Nuls. Elle n’a donc que deux singes, et encore le deuxième, c’est un scoop : il est d’hier ! MF : Absolument, oui. Philippe Gildas annonce la suite de l’émission et lance les informations, présentées par Annie Lemoine. Pendant celles-ci, il fait réagir Mylène. PG : Est-ce que Mylène Farmer s’intéresse à l’actualité ? MF : Momentanément. Sans plus. C’est-à-dire que j’écoute avec intérêt, mais… PG : Mais quand vous dites « momentanément », c’est que d’habitude vous vous y intéressez pas du tout, ou c’est l’inverse : d’habitude, vous arrivez à vous intéresser plus ? MF : Non, je dis « momentanément », c’est quand je peux l’écouter, c’est-à-dire le soir. Mais là, en ce moment, je travaille beaucoup. PG : Mais sinon, vous pouvez très bien vous passer d’actualités pendant des jours et des jours, sans vous soucier de ce qui se passe dans le reste du monde ? MF : Je pense que oui, sincèrement oui. PG : Et vous pensez qu’il y a beaucoup de gens comme vous ! MF : Je le pense aussi, oui. PG : Ce qui se passe à la Bourse, ça vous trouble pas ? MF : Non ! (rires) Le journal continue. Philippe Gildas interrompt à nouveau Annie Lemoine pour se tourner vers Mylène. PG : Alors quand vous dites que vous vous intéressez momentanément à l’actualité, ça veut dire par exemple, en ce moment, quand vous n’êtes pas à la télévision parce que le 45 tours vient de sortir, vous écrivez ? Vous vous enfermez pour écrire les paroles ou pour enregistrer ? MF : Oui. C’est vrai que l’écriture, c’est un enfermement, on est obligé d’être isolé. J’écris, je lis, je dessine… PG : Mais ça vous le faites tout le temps, ça. Mais quand vous écrivez carrément, quand vous devez par exemple finir une chanson, pas livrer puisqu’en la circonstance c’est pour vous, mais ça veut dire qu’on peut être amené à s’enfermer pendant des heures et des heures, coupé du monde ? MF : Je pense que c’est une obligation. Peutêtre certaines personnes peuvent écrire parmi d’autres personnes. Moi, je ne peux pas. PG : On parlait des prix (littéraires) tout de

suite. Un jour vous écrirez plus que des chansons ? MF : Je ne sais pas. Moi, je dirais : « A chacun son métier ». C’est vrai qu’un jour malgré tout, j’ai eu cette pensée, envie d’écrire, de dire des choses. Mais si je le fais, je pense que ce sera beaucoup plus tard, quand j’aurai acquis une maturité, ma maturité en tout cas. PG : Vous êtes quand même, de tempérament, quelqu’un qui est capable de s’enfermer, de se couper du reste du monde, de se mettre devant sa feuille blanche et de vivre toute seule. MF : Oui, oui, tout à fait. Philippe Gildas lance alors la rubrique suivante. L’émission continue ensuite avec des fausses pubs des Nuls et la rubrique de Jérôme Bonaldi. Alors que celui-ci traite de la culture d’entreprise, Mylène l’interrompt. MF : C’est pas drôle aujourd’hui ! Philippe Gildas profite d’un sujet sur une publicité pour rebondir et revenir à Mylène. PG : Le couple Boutonnat/Farmer, qui a fait tellement de beaux clips, vous n’avez jamais été tenté par la publicité ? MF : Laurent Boutonnat travaille pour des films publicitaires, et tout spécialement pour l’étranger. Il a des commandes surtout par les Etats-Unis. PG : Et il en a jamais fait en France ? MF : En France, il a fait…il en a fait quelquesuns, quelques-unes, mais j’ai oublié d’ailleurs… PG : C’est lui qui a fait tous vos clips, Laurent Boutonnat. MF : Oui, oui, depuis le début. La chronique de Jérôme Bonaldi continue. (…) Jérôme Bonaldi : (à Mylène) Est-ce que vous êtes câblée ? MF : Je ne sais pas ce que ça veut dire ! Jérôme Bonaldi explique le principe de la TV par câble. MF : J’ai Canal +, donc…le câble de Canal+ ! Jérôme Bonaldi diffuse ensuite une publicité et demande de trouver qui en fait la voix-off. MF : Je dirais ou monsieur Montand, ou monsieur Hossein. JB : Aucun des deux, perdu ! Chantal Lauby (depuis le fond du plateau) : Bohringer ? MF : Vous aviez dit Hossein ? (elle lui fait un signe complice de la main)

JB : Perdu ! Il boit de l’alcool comme Bohringer : c’est Philippe Léotard. Philippe Gildas lance les rubriques suivantes, à commencer par la météo. La chroniqueuse, Patricia, bafouille et Philippe Gildas lui demande si c’est Mylène qui la trouble, ce qui fait beaucoup rire cette dernière. (…) PG : Beaucoup de musique dans la deuxième partie de « Nulle Part Ailleurs » (…) Mylène Farmer, avant de l’écouter chanter le nouveau 45 tours totalement original puisqu’il est en avance sur l’album qui sortira, elle nous l’a dit tout à l’heure, en janvier : un petit portrait express. Quel souvenir vous gardez, Mylène, de votre enfance au Canada ? Un seul souvenir, comme ça. MF : La neige. Souvenir idiot, mais la neige. Y avait un mètre, un mètre cinquante de neige par hiver. PG : Et ça vous manque, ici ? MF : Un petit peu. PG : C’est pour ça que vous en aviez mis tant dans « Tristana » ? MF : Oui…J’ai très, très envie de faire un voyage au Pôle Nord. PG : Vous n’êtes jamais retournée au Canada ? MF : Jamais. PG : Même pour chanter ? MF : Oui, oui…L’album est sorti là-bas, les 45 tours, mais moi non, toujours pas ! PG : Quand on y a passé les huit premières années de sa vie, ça marque quand même ? MF : Pas tout à fait, non. Très franchement, non. La neige et puis le sirop d’érable, quand même parce que je suis très gourmande. PG : Là, vous pouvez encore en acheter ici ! MF : Absolument. PG : Et si je vous dis Wadeck Stanczak ou bien Paul-Loup Rajot (sic !) (deux acteurs montants de l’époque), ça vous rappelle une période de votre vie ? MF : C’est Pierre-Loup Rajot, c’est ça ? PG : Paul-Loup… MF : Pierre-Loup ! (rires) PG : …ou Pierre-Loup, alors ! C’est vous qui avez travaillé avec lui ! MF : Pierre-Loup Rajot… PG : C’était où ? MF : Non, j’étais dans le même cours de théâtre que lui, effectivement. PG : C’était… ? MF : C’était le Cours Florent.


1986–1987 : Cendres de lune Mylène Farmer 98

PG : Et à ce moment-là, vous envisagiez donc d’être comédienne ? MF : Je sais pas si je l’envisageais. Moi, j’étais attirée par tous les métiers artistiques. C’est vrai que c’est un mélange, la comédie, un premier abord, oui, mais que la chanson… Quand j’étais très petite, je n’arrêtais pas de chanter, donc je pense que c’était aussi quelque chose que j’avais envie… PG : Mais pourtant quand je parle de l’attirance que vous aviez pour le métier de comédienne, là j’ai là… (il montre la VHS « Les Clips ») Alors, c’est sorti y a combien de temps, cette compilation ? MF : Peut-être vais-je dire des bêtises, je crois que ça fait à peu près un mois. PG : Un mois ? MF : Oui… PG : C’est une très belle idée, en tout cas. Alors, c’est donc : « Mylène Farmer : les clips ». Il faut être comédienne quand même, à partir des chansons, pour faire des clips. Le premier, je me suis amusé à regarder, il faisait 3mn50. Parce qu’on a eu une bagarre, là-haut à la rédaction, on se disait : « Non, non moi je préfère le premier » qui était « Maman a tort », donc il faisait trois minutes cinquante. Et puis y en a d’autres qui disaient : « Non, on préfère le film complet ». Le film complet étant « Tristana », qui faisait… ? MF : Douze minutes et demie. PG : Douze minutes, oui. Le prochain fera combien ? MF : Je ne sais pas encore. PG : « Sans contrefaçon », ça va être un clip, quand même ? MF : Bien sûr ! PG : Toujours avec Boutonnat… MF : Oui, oui on y pense… PG : Alors, en attendant le prochain, il n’empêche que quand on fait un clip de douze minutes, il faut y jouer, y tenir un vrai rôle de comédienne dont tout le monde se souvient. MF : Oui, mais c’est un plaisir pour moi, point final. PG : Point final ? Ça veut pas dire que dans un coin de votre tête, vous pensez qu’un jour vous pourrez retourner à la comédie plus tard ? MF : (très hésitante) Plus tard… PG : Alors ça veut donc dire que quand vous êtes dans la chanson, vous ne faites que ça, vous ne vivez que pour ça. MF : On est obligé de ne vivre que pour ça. C’est quelque chose qui vous prend énormément, énormément de votre temps et surtout de votre esprit, et aussi de votre énergie. PG : Mais au point d’être aussi discrète ? C’està-dire qu’on sait, en dehors du singe qui est un beau paravent, derrière lequel vous vous cachez, qui existe sûrement, j’en doute pas, mais

en dehors de ça, on ne sait rien de vous. C’est exprès ? MF : Je crois que c’est volontaire, oui. PG : C’est volontaire, c’est pour rajouter du mystère ? MF : C’est pas ajouter du mystère, non parce que bon, le mystère fait partie de ma personnalité. C’est que je n’aime pas dévoiler et divulguer ma vie privée, parce que je pense que ça n’a peu d’intérêt pour…je sais pas, non ? PG : Mais c’est quand même quelque chose de vous qui transparaît à travers toutes les chansons. MF : Bien évidemment, mais c’est justement ce que moi je donne au public. PG : Alors, la seule chose que vous nous donnez, c’est quand même toujours un peu provocant, un peu sulfureux. MF : J’aime la provocation. Je suis un peu comme ces deux messieurs et cette jeune fille (elle désigne les Nuls de la main). C’est que j’aime bien dire les choses qui ne sont pas dites tous les jours. PG : C’est une façon de cacher sa timidité ? MF : Je ne sais pas, j’ai pas très, très envie d’analyser ça. J’aime la provocation et puis j’aime le renfermement quelquefois. PG : Alors, une dernière question seulement avant que vous n’alliez chanter, comme ça, ça nous fera bien écouter les paroles, ce qu’on ne fait pas toujours sur les chansons, et on a tort, surtout avec les vôtres : alors pourquoi « Sans contrefaçon, je suis un garçon » ? MF : « Sans contrefaçon », c’est quelque chose qui est dans mon esprit depuis très longtemps. C’est quand j’étais adolescente, on me prenait vraiment pour un garçon. Et j’ai ce souvenir précis d’un gardien d’immeuble qui m’a rencontrée et qui m’a dit : « Mylène, c’est joli pour un petit garçon ». Et c’est vrai que j’ai eu au premier abord une animosité, et puis après…je sais pas, ça me semblait évident, alors j’étais mi-homme, mi-femme ! C’était assez étrange. PG : Ça fait une bien jolie chanson. Vous allez me laisser le micro… MF : Oui. (elle ôte son micro cravate avec peine) PG : Vous reviendrez nous rejoindre tout à l’heure. Allez prendre place. Une bien jolie chanson, je le disais tout à l’heure, et ceux qui l’ont déjà achetée le savent bien : c’est un démarrage foudroyant, c’est-à-dire que c’est dans la lignée des tubes précédents. Voici « Sans contrefaçon », Mylène Farmer ! Mylène interprète « Sans contrefaçon » sur le plateau, accompagnée de ses deux jeunes danseurs. Elle reprend ensuite sa place face à Philippe Gildas. PG : « Sans contrefaçon », la nouvelle chan-

son. Revenez vite, voilà très, très bien. Allez, regardez, pour vous reposer, le temps que vous remettiez le micro, c’est une fausse pub : les Nuls. Au retour plateau, le chroniqueur musical de l’émission, Alain Gardinier, présente les nouveaux disques de la semaine. Il invite à plusieurs reprises Mylène à réagir. Alain Gardinier : Est-ce que vous aimez les chansons d’amour ? MF : Bien sûr ! AG : En V.O. ou en V.F. ? MF : V.O. et V.F. ! Présentation d’un best of de Françoise Hardy, « Love Songs », puis d’un autre best of de l’américaine Randy Crawford. PG : (à Mylène) Vous connaissiez ? MF : Non, je connais Joan Crawford. Pas la même chose… S’ensuit la présentation du dernier album de Cher. PG : Mylène a pas connu, non ? MF : Là, j’avoue que je ne connais pas du tout. Après que le chroniqueur ait présenté les albums « You can Dance » de Madonna et « Châtelet 87 » de Barbara, Philippe Gildas se tourne à nouveau vers Mylène. PG : Qu’est-ce que vous aimez ? Si vous aviez une vedette masculine à choisir en France, ce serait qui dans la chanson ? MF : J’adore Dutronc, Jacques Dutronc. PG : Il vient dans huit jours, tiens je le précise bien : il vient dans huit jours demain. Et femmes ? MF : Femmes, c’est plus difficile. J’aime bien France Gall, j’aime bien… (elle cherche) PG : Mais comme musique, France Gall non ? MF : Après, là je parle dans le registre français. Y a plus d’étrangers, j’adore… PG : A l’étranger, par exemple alors ! MF : (spontanément) A l’étranger, moi c’est Peter Gabriel, voilà ! S’il y a quelqu’un à citer avec un grand titre, c’est Peter Gabriel. Suite et fin de la chronique musicale. Philippe Gildas lance une page de pub. Au retour plateau, il s’adresse à Mylène. PG : La question qui est revenue le plus souvent dans le courrier, alors si je vous la posais pas je serais vraiment en faute : vous avez sorti un premier album qui s’appelait « Cendres de lune », c’était y a un an et demi, presque deux ans… MF : A peu près, oui… PG : A peu près oui (la pochette apparaît à l’écran). Le voilà, d’ailleurs. Très bel album dans lequel il y avait justement « Libertine », jusqu’à « Tristana ». MF : Voilà.


PG : Là, vous entamez avec « Sans contrefaçon » le deuxième album, celui qui sortira en janvier. Quand on a deux albums, ça conduit à la scène. MF : Oui, j’y pense de plus en plus. Je me suis renseignée sur les salles : il y a beaucoup de salles qui sont réservées pour un an, deux ans. Mais c’est quelque chose que je mets là ! (elle désigne son crâne) PG : En plus, vous allez danser : on l’a encore vu tout à l’heure, on l’avait vu le soir des « Oscars de la mode » ! MF : Sur « Déshabillez-moi »… PG : Vous aviez étonné tout le monde sur « Déshabillez-moi » ! Vous allez en faire, c’est la deuxième question, vous allez en faire un enregistrement ? MF : « Déshabillez-moi » est sur…sera dans l’album d’une part, et d’autre part sur un maxi 45 tours qui sera dans le commerce essentiellement. PG : D’accord, et qui devrait sortir… MF : Il sort dans une semaine, là ! PG : Le maxi 45 tours sortira en même temps que l’album ? MF : Non, non : dans une semaine ! PG : Ah, dans une semaine ! MF : Oui, puisque sur l’autre face, il y aura « Sans contrefaçon ». PG : Et la scène, ça peut être avant la fin de l’année prochaine ? MF : Sincèrement, je doute parce que les salles sont vraiment, vraiment combles. Enfin, celles en tout cas que j’ai envie d’aborder. PG : Pour avoir répondu sincèrement à toutes les questions, je vous offre les Nuls une dernière fois, avec « Zorro » ! MF : D’accord ! Je les aime ! (rires) Une séquence où les Nuls parodient un épisode de « Zorro » est diffusée. Au retour plateau, Annie Lemoine vient rappeler les titres de l’actualité, puis Philippe Gildas présente à nouveau la VHS « Les Clips » et annonce les invités de l’émission pour la semaine à venir. PG : Claire Nebout, vous aimez ? C’était dans « Associations de Malfaiteurs », notamment, et puis dans… MF : Je n’ai pas vu… PG : Vous n’avez pas vu ? Vous n’allez jamais au cinéma ? MF : Je vais très souvent au cinéma. Je vois malheureusement peu de films parce qu’il y en a malheureusement peu de bons. PG : Le dernier que vous avez aimé ? MF : Je vais vous avouer que c’est sur vidéocassette, donc c’était « Scarface » pour la septième fois, je crois ! PG : Ah oui, mais ça c’est hors-concours, ça ! Mais dans les derniers sortis en salles ?

MF : J’ai très envie de voir le dernier film de Bertolucci, qui n’est pas encore sorti mais qui a l’air très, très beau. PG : « Le dernier empereur », ah j’ai vu, c’est très, très beau. Ça donne envie d’aller en Chine ensuite ! MF : Oui ! Philippe Gildas continue d’énoncer les prochains invités, dont la photographe Dominique Issermann (qui immortlisera Mylène en 2005 pour le livret de l’album « Avant que l’ombre… » ! Les Nuls le rejoignent. Chantal Lauby embrasse chaleureusement Mylène, Bruno Carette l’embrasse dans le cou et Alain Chabat lui fait la bise. MF : Ils sont adorables !! (rires) Générique de fin de l’émission.

à la folie, pas du tout Date 29.11.1987 Chaîne TF1 Présenté par Patrick Poivre d’Arvor

Face à France Date 29.11.1987 Chaîne La Cinq Présenté par Guillaume Durand

Cette émission de société créée par Thierry Ardisson mêle sondages, débats et variétés. Au générique de l’émission de ce jour-là, entre Jil Caplan et Lio, on retrouve Mylène Farmer, venue interpréter sur le plateau « Sans contrefaçon ». C’est sur une scène au fond du plateau, face au public et aux invités, que Mylène chante son tube, entourée de ses deux jeunes danseurs et vêtue de son costume à carreaux, coiffée d’une casquette assortie.

Les hasards de la programmation font qu’on retrouve le même après-midi Mylène Farmer sur deux chaînes différentes, pour chanter la même chanson, mais dans deux tenues différentes. Présente sur La Cinq, elle est aussi sur TF1, dans l’émission de Patrick Poivre d’Arvor pour chanter « Sans contrefaçon ». Habillée de culottes courtes noires, veste noire et béret assorti, Mylène exécute sa redoutable chorégraphie en compagnie de ses deux danseurs. Petite particularité : une caméra filme en contre-plongée Mylène et ses danseurs lorsqu’ils se donnent une accolade, penchés en avant, durant le bridge de la chanson, là où les autres prestations télévisées nous donnent toujours à voir la scène de dos.


1986–1987 : Cendres de lune

Jacky Show

Colaricocoshow

Date 09.12.1987 Chaîne TF1 Présenté par Jacky

Date 02.12.1987 Chaîne La Cinq Présenté par Stéphane Collaro

Première participation de Mylène à cette émission de Jacky à laquelle elle sera fidèle pour tous les 45 tours extraits de l’album « Ainsi soit-je… ». Sur un podium qu’entoure le public, Mylène interprète « Sans contrefaçon » dans son fameux costume à carreaux noir et blanc, les cheveux relevés sous une casquette assortie. Elle est évidemment accompagnée de ses deux danseurs. C’est dans les coulisses de cette émission que la collaboration de Mylène avec son attachée de presse Danyèle Fouché, rencontrée en début d’année 1987, prendra fin.

Mylène répond une nouvelle fois à l’invitation de Stéphane Collaro, qui officie désormais sur la Cinq. Elle participe à un sketch fil rouge dans l’émission. Celui-ci est en effet assez long et entrecoupé de diverses séquences. Il raconte l’histoire d’un scénariste du Hollywood des années 30 à qui il arrive bien des déboires après s’être entiché de la jolie secrétaire

Un DB de plus

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Mylène Farmer

Date 09.12.1987 Chaîne Antenne 2 Présenté par Didier Barbelivien

d’un des magnats du cinéma. La jolie secrétaire, robe en velours rouge, fume-cigarette et cheveux lâchés, n’étant évidemment autre que Mylène Farmer. Elle semble prendre un vrai plaisir à interpréter ce petit rôle et le résultat est agréable à regarder, si on fait abstraction des grosses ficelles coutumières de Collaro. A la fin du sketch, Mylène interprète « Sans contrefaçon », en compagnie de ses deux jeunes danseurs, habillée cette fois-ci de son costume à carreaux noir et blanc. La prestation prend place dans le décor du Coconut Groove, célèbre boîte de nuit à la mode dans les année 30, où a lieu plus tôt une scène du sketch.

Le matin chez Jacky sur TF1, l’après-midi sur Antenne 2 : voilà un temps où l’on pouvait voir deux fois Mylène à la télévision au cours de la même journée ! On la retrouve donc sur le plateau de cette émission musicale animée par Didier Barbelivien qui présente ses coups de cœur, les nouveautés, etc. Mylène y chante « Sans contrefaçon », en costume à carreaux comme il est de rigueur et entourée de ses deux danseurs. Notons que la prestation sur cette chanson est rediffusée à de nombreuses reprises dans la même émission pour évoquer le succès du titre, et ce jusque février 1988.


Domicile a2 Date 15.12.1987 Chaîne Antenne 2 Présenté par Marc Bessou, Hugo Bergson et Pascale Faure

Cette émission de l’après-midi donne ce jour-là carte blanche à Marie Laforêt. Celle-ci choisit donc de s’entourer sur le plateau de personnes qu’elle affectionne : des écrivains, un couple de danseurs de ses amis, une styliste dont elle est bonne cliente et…une certaine Mylène Farmer. Celle-ci est présente en plateau pour interpréter pas moins de trois chansons et répondre à quelques questions, aux côtés de Marie Laforêt. En début d’émission, après que Marie Laforêt ait annoncé qui elle avait invité à la rejoindre sur cette émission, Mylène interprète « La ronde triste », dont c’est l’unique prestation télévisée (la chanson n’a malheureusement jamais été chantée sur scène non plus). Mylène porte une longue robe manteau noire et ses cheveux sont maintenus en un petit chignon par un ruban rouge. Un peu plus tard dans l’émission, Mylène est de retour sur le plateau pour interpréter cette foisci « Tristana » (dont c’est l’ultime prestation télévisée), entourée de Sophie Tellier et Dominique Martinelli, dans la même tenue que précédemment. On la retrouve après la chanson,

assise à une table de verre aux côtés de Marie Laforêt. Marc Bessou : (à Marie Laforêt) Vous aimez bien, vous me le disiez tout à l’heure, ce que fait Mylène Farmer. Marie Laforêt : Ah vraiment moi j’adore, je suis inconditionnelle de ce qu’elle fait. Je trouve ça impertinent, fin, intelligent, très dans le coup. C’est vraiment une autre façon d’être, une autre façon de bouger, de dire les mots. C’est vraiment, vraiment très bien, voilà ! Je suis tellement heureuse qu’elle soit là ! (elle lui caresse le bras) Mylène Farmer : C’est très gentil ! Je voudrais retourner le compliment à Marie Laforêt parce que c’est une femme que j’aime beaucoup, voilà. (sourire) MB : Dites-moi, c’est vrai que maintenant on est habitué, il y en a eu plusieurs exemples successivement, à lorsqu’on entend vos chansons à découvrir le clip qui va suivre, c’est souvent là que se passent les choses les plus drôles ! MF : Mais là vous n’aurez rien ! (rires) MB : (il fait mine de pleurer) Mais euh ! Mais pour « Sans contrefaçon » vous préparez quelque chose quand même ? MF : Je suis rentrée hier soir de tournage ! Il s’est effectué en cinq jours dans le Cotentin. C’est les seules choses que je peux dévoiler pour l’instant ! (sourire) MB : D’accord. ML : Grande surprise ! Elle a raison ! MB : Mais ça va être toujours Hollywood, ce… ? MF : C’est en tout cas toujours le même réalisateur, Laurent Boutonnat. Nous avons pratiquement la même équipe que sur le clip précédent, et puis ça s’est merveilleusement bien passé. MB : On a l’impression que vous prenez un plaisir particulier à faire ça, que vous ne feriez plus de chansons sans ça maintenant. MF : Je ne sais pas, en tout cas c’est une passion. C’est deux choses différentes, mais c’est vrai que le cinéma m’a toujours attiré ! ML : Comme c’est bizarre ce qu’elle dit, ça j’arrive pas à comprendre alors ! (Mylène et Marie Laforêt rient ensemble – Marie Laforêt a en effet réussi à la fois dans la chanson et dans le cinéma) MB : Mais vous savez qu’il y a des gens qui chantent et qui font également du cinéma ! Y a quelques exemples ! ML : Je vois pas ! MF : Moi non plus ! (sourire) MB : (il en revient au clip) Et on le verra quand ? C’est visible quand cette chose ?

MF : Il va partir donc en montage…Je crois une semaine de montage, de mixage : fin décembre, je pense. MB : Donc ça sera peut-être en janvier ! MF : Fin décembre, début janvier. (le clip sera diffusé en effet dès les derniers jours de décembre) MB : D’accord ! S’ensuit une rubrique culinaire consacrée aux arts de la table. Marc Bessou se tourne vers Mylène. MB : (…) Mylène Farmer, vous êtes très maîtresse de maison ? MF : Non, du tout. Très, très mauvaise cuisinière ! Je vais plus volontiers au restaurant, en fait. MB : Oui, je comprends ça. Enfin, vous invitez quand même quelques camarades, non, même pas ? MF : Non, j’ai deux singes à domicile maintenant ! (rires) ML : Ah, ça occupe oui ! L’émission continue son cours sans que Mylène n’intervienne à nouveau. En toute fin d’émission, elle conclut le programme en chantant « Sans contrefaçon », cette fois-ci habillée de son costume à carreaux noir et blanc, accompagnée bien sûr de ses deux danseurs.


1986–1987 : Cendres de lune

Sacrée soirée Date 16.12.1987 Chaîne TF1 Présenté par Jean-Pierre Foucault

Depuis la rentrée de septembre, Jean-Pierre Foucault a quitté les jeux télévisés d’Antenne 2 pour animer un prime-time de variétés qui occupera la case du mercredi soir sur TF1 jusqu’en 1994 : « Sacrée soirée ». Ce soir-là, il accueille Mylène pour la première fois, et ce sera loin d’être la dernière. La chanteuse interprète « Sans contrefaçon », accompagnée comme il se doit par ses deux jeunes danseurs. La prestation commence par

un gros plan sur un cadre dans lequel on voit une photo de Mylène bébé, allongée sur le ventre. Se substitue à celle-ci un gros plan du visage de Mylène sur le plateau. Elle commence alors sa chorégraphie. Elle porte une nouvelle fois son costume à carreaux noir et blanc, maintenu à la taille par un gros ceinturon noir. Dès les premières notes de la chanson, le public frappe en rythme dans ses mains, et Mylène reçoit une acclamation à la fin de la chanson. Elle salue le public pendant qu’un rideau sur referme sur elle.

La Une est à vous

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Mylène Farmer

Date 19.12.1987 Chaîne TF1 Présenté par Sylvain Augier

Encore une première pour Mylène. Les nouvelles émissions sont légions en 1987. Il faut dire que TF1, fraîchement privatisée, a totalement revu sa grille de programmes (volant au passage quelques vedettes à Antenne 2 – Dechavanne, Foucault,…). Mylène foule donc pour la première fois le plateau de cette toute jeune émission du samedi aprèsmidi – elle y reviendra à plusieurs reprises les années suivantes.


Le concept (signé Guy Lux) : les téléspectateurs choisissent euxmêmes les séries qu’ils veulent voir. Entre deux feuilletons, l’animateur, Sylvain Augier, reçoit, dans un coin du plateau, Mylène qui interprète « Sans contrefaçon » dans une nouvelle tenue : long pantalon noir, chemise blanche, longue veste noire et petite casquette noire vissée sur la tête, laissant échapper quelques mèches de cheveux. Elle est évidemment entourée de ses deux danseurs. A la fin de la chanson, Sylvain Augier la rejoint pour échanger quelques mots. Sylvain Augier : Mylène Farmer, bravo ! Je vous donne un micro, si vous n’êtes pas trop essoufflée ! Mylène Farmer : (elle saisit le micro) Ça ira ! (elle est effectivement très essoufflée !) SA : « Sans contrefaçon », donc. Alors vous savez, je suis admiratif devant la chorégraphie. Ça a du être énormément de travail, non ? MF : C’est du travail. SA : C’est difficile à régler ? MF : Difficile… Ça demande simplement des

heures de travail et d’assiduité, c’est tout. SA : Oui, enfin vous dansez bien ! Eux (les danseurs) sont parfaitement réglés, y a pas un défaut ! Je peux vous dire, j’ai regardé, j’ai vérifié ! MF : (elle éclate de rire) C’est très bien ! SA : Alors je sais que ça va aussi sortir en clip fin décembre donc, « Sans contrefaçon »… MF : Voilà, le clip va sortir effectivement fin décembre. On a terminé le tournage il y a quatre, cinq jours ! SA : Il sera aussi bien que « Tristana » ?! MF : Je sais pas ! C’est le même réalisateur. J’en suis très, très fière ! SA : Alors à mon avis, le résultat sera bon ! MF : Oui ! SA : Et puis y a un album qui sort en février, je crois ? MF : Début février. (annoncé par Mylène en janvier 1988 quelques semaines plus tôt, l’album « Ainsi soit-je » ne sortira au final qu’en mars 1988) SA : Début février, où on retrouvera « Sans contrefaçon » bien sûr… MF : Absolument, oui.

La Une sur son 31 Date 31.12.1987 Chaîne TF1 Présenté par Christophe Dechavanne

Pour cette grande soirée du réveillon du nouvel an, Mylène retrouve pour la énième fois son ami Christophe Dechavanne. Et pour la dernière fois avant longtemps. Mylène ne fera en effet plus d’émission de Dechavanne avant 1996 ! Et encore, elle ne sera pas sur le plateau ce jour-là (voir le « Top... aux Carpentier » le 9 mars 1996). C’est donc la dernière fois qu’on les voit côte à côte.

Christophe Dechavanne est accoudé à un bar en compagnie du comédien Pierre Arditi. L’animateur demande au comédien de faire un play-back sur « Libertine ». Cigarette en bouche, Pierre Arditi esquisse quelques mouvements de lèvres alors que résonne la chanson. Christophe Dechavanne l’interrompt alors pour lui demander, sur le ton de la rigolade bien sûr, de s’excuser auprès de Mylène, qui regardait la scène depuis l’autre bout du plateau, d’avoir ainsi massacré sa chanson! A la suite de quoi, Mylène, costume noir à culottes courtes et petit béret assorti, interprète « Sans contrefaçon » sur le plateau, accompagnée de ses deux jeunes danseurs. A la fin de la chanson, alors que Mylène salue le public, Christophe Dechavanne l’invite à le rejoindre et lui souhaite « une très, très bonne année ». Mylène s’assoit donc sur un tabouret à côté de l’animateur et tous deux s’embrassent chaleureusement. Christophe Dechavanne : Je vous ai trouvée un peu tristoune tout à l’heure, par rapport à Arditi… Mylène Farmer : (dans un sourire) Pas du tout ! Non, non ! L’animateur semble n’avoir pas le temps d’accorder plus d’attention à Mylène, contre son gré visiblement, et lance aussitôt la suite de l’émission.

SA : …et d’autres titres. MF : Et plein d’autres titres ! (sourire) SA : Plein d’autres titres bien sûr ! Alors, je voulais vous poser une question aussi, Mylène : est-ce que vous vous souvenez de la première fois où vous êtes passée à la télévision ? MF : Je crois que je vous ai donné la réponse tout à l’heure et je ne sais plus ! (rires) SA : Moi je sais que c’était en 84 dans « Jour J ». MF : Oui, c’est ça : « Jour J ». SA : Comment est-ce qu’on est, la première fois qu’on se retrouve devant les caméras ? MF : Un mélange de bonheur et d’angoisse ! SA : Et d’angoisse…C’est pas facile, hein ?! MF : Non, c’est pas facile, la première ! SA : Je vous pose la question parce qu’on va découvrir maintenant un garçon dont c’est la première télévision justement : il s’appelle Félix Gray. (…) Sylvain Augier présente ensuite plus en détails la chanson « La gitane » de Félix Gray sans que Mylène n’intervienne à nouveau.



1988 1990 Ainsi soit je… 14.03.1988  Album « Ainsi soit je… » – 04.04.1988 Single « Ainsi soit je… » – 12.09.1988 Single « Pourvu qu’elles soient douces » – 20.02.1989 Single « Sans logique » 11.05.1989 début du Tour 89 – 17.07.1989 Single « A quoi je sers… » – 04.12.1989 Single « Allan (live)» – 06.12.1989 Album « En concert » 23.04.1990 Single « Plus grandir (live)» – XX.04.1990 Single « Sans contrefaçon » (à l’étranger) – XX.11.1990 Single « Douces » (à l’étranger)


1988–1990 : Ainsi soit je…

Mon Zénith à moi Date XX.01.1988 Chaîne Canal+ Présenté par Michel Denisot

Rappelons le : cette émission s’organise autour d’une personnalité qui choisit les thèmes abordés et les personnes invitées. Ce jour-là, l’émission est consacrée à Lio. Elle a souhaité la présence de Mylène car elle aime son personnage, sa chanson et « ses deux danseurs », ajoute-t-elle ! C’est effectivement toujours entourée de ses deux jeunes danseurs que Mylène est présente sur le plateau pour interpréter « Sans contrefaçon » toute de noir vêtue : veste rayée noire, pantalon corsaire noir et casquette noire.

lahaye d’honneur Date 15.01.1988 Chaîne TF1 Présenté par Jean-Luc Lahaye

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Mylène Farmer

1988

Cette prestation pour « Sans contrefaçon » est très intéressante car elle tranche par rapport aux précédentes. En effet, la marionnette vedette du clip est présente sur le plateau, assise sur des marches dans le décor, et elle articule la phrase parlée sur l’introduction de la chanson. On découvre ensuite Mylène et ses deux danseurs : la chanteuse est habillée comme dans le clip (donc comme sa poupée). Ce sera sa seule télé dans cette tenue. La chanson terminée, Mylène salue sous les applaudissements très nourris du public.


Les uns et les autres

Date 22.04.1988 Chaîne TF1 Présenté par Patrick Sabatier

Les uns et les autres Date 06.02.1988 Chaîne TF1 Présenté par Patrick Sabatier

Pour clore la promotion de « Sans contrefaçon », Mylène offre une prestation qui met à nouveau sa fameuse marionnette en vedette. La séquence débute sur un plan de celle-ci, assise sur des marches, quelque part sur le plateau, jambes croisées et les mains sur les genoux. Par un fondu enchaîné, on découvre alors Mylène, en costume et casquette à carreaux noir et blanc, dans la même position. la chanteuse est ensuite avec ses danseurs pour interpréter la chanson normalement. A la fin de la chanson, cependant, on voit à nouveau Mylène, regard fixe, assise sur les marches et à cette image se substitue alors la marionnette, inerte, dans la même position.

Pour lancer son deuxième album et son nouveau single éponyme, « Ainsi soit je…», Mylène va enchaîner à nouveau les télés. Elle commence par l’émission de Patrick Sabatier, là même où, presque deux mois plus tôt, elle avait fait sa dernière apparition télévisée. L’imagerie donnée à « Ainsi soit je…» tranche radicalement avec les précédentes : on découvre ici Mylène, les cheveux tombant sur les épaules, vêtue d’une grande robe en velours bleu roi. L’ambiance est romantique et l’interprétation de la chanteuse est très sobre. Elle laisse échapper une larme sur la fin de la chanson puis la finit le bras en l’air, la tête rejetée en arrière. Concernant l’émission en elle-même, l’ambiance en revanche est nettement moins romantique ! Mylène interprète son titre entourée d’étranges colonnes à bulles aux couleurs fluos ! Lorsque la chanson se termine, Mylène rejoint Patrick Sabatier qui présente alors quelques inventeurs et les créations de ceux-ci. Mylène, dans sa grande robe, semble complètement décalée face à un inventeur qui présente une « planche à musique », sorte de tapis qui produit des notes de musique quand on marche dessus. Le moins qu’on puisse dire est que cela ne semble pas passionner Mylène, qui assiste malgré tout à la scène d’un air poli. Pendant que l’inventeur fait une démonstration, Patrick Sabatier se tourne vers Mylène.

Patrick Sabatier : T’as appris à jouer de la musique quand, toi ? Mylène Farmer : Euh…Je ne sais pas. La guitare, un petit peu, le saxophone, très peu… PS : Oui…Y a longtemps, non ? MF : A l’âge de vingt-deux ans, je crois. Quand j’ai commencé la chanson. La démonstration se poursuit. Patrick Sabatier entraîne ensuite Mylène vers un autre inventeur qui présente un outil facilitant le changement de roue sur une voiture. PS : (à l’inventeur) Ça ne remplace pas le cric ?! (…) (A Mylène) T’as une voiture ? MF : Non, je ne conduis pas. Mais vous m’avez volé la question ! (rires) L’inventeur entame une démonstration sous le regard attentif de Mylène. PS : Ça t’intéresse, hein, Mylène ?! MF : Oui, bien sûr ! PS : (ironique) Oui, bien sûr… (sourire de Mylène) Mylène et Patrick Sabatier prennent place ensuite sur un canapé. Pour lancer l’artiste à venir, Yves Duteil, l’animateur présente le livre que celui-ci vient de publier : « Les mots qu’on n’a pas dits ». Il l’ouvre et demande à Mylène de lire un passage consacré à la chanson « Prendre un enfant par la main ». Mylène s’exécute, demandant quand même si elle doit tout lire ! Elle bute sur le mot « vague à l’âme » et réprime un rire, tout en continuant de lire. Yves Duteil chante ensuite sa dernière chanson. On retrouve ensuite Mylène aux côtés de Patrick Sabatier lorsqu’il annonce la suite de l’émission, puis elle n’apparaît plus jusqu’à la fin.


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Mylène Farmer

1988–1990 : Ainsi soit je…


Jacky show Date 24.04.1988 Chaîne TF1 Présenté par Jacky

Les uns et les autres

Mylène est présente sur le plateau du « Jacky Show » pour interpréter « Ainsi soit je… ». La séquence est tournée à part, sans public. Mylène est assise à même le sol, vêtue d’une longue tunique gris clair et ses cheveux sont maintenus en un chignon qui laisse dépasser quelques mèches entourant son visage. Là encore, la prestation est aussi simple qu’elle est belle.

Date 29.04.1988 Chaîne TF1 Présenté par Patrick Sabatier

Une semaine après avoir interprété « Ainsi soit je… » dans cette même émission, Mylène est de retour sur le plateau de Patrick Sabatier pour réitérer la prestation magistrale de « Déshabillezmoi » réalisée lors des « Oscars de la mode » à l’Opéra Garnier au mois d’octobre précédent. Pour éviter les imprévus vestimentaires (rappelons qu’un sein de Mylène était sorti de sa tenue lors de se dernière prestation sur cette chanson), Mylène porte cette fois-ci une robe courte noire (sans décolleté !) et une veste noire à queue de pie. La mise en scène est similaire à celle de l’Opéra Garnier et Mylène joue des mêmes accessoires (gants et chaise). La chanson terminée, Mylène salue le public

qui l’applaudit très chaleureusement. Patrick Sabatier la rejoint alors pour annoncer la suite de l’émission. Patrick Sabatier : Mylène, on parle beaucoup de politique en ce moment (nous sommes en effet à quelques jours du premier tour de l’élection présidentielle) (…), tu t’intéresses à ce genre de choses, toi ? Est-ce que les hommes politiques t’intéressent ? Mylène Farmer : Le débat politique m’intéresse. PS : Le débat politique. Alors, écoute, Patrick Bouchitey, tu le connais probablement… (le comédien a réalisé à l’époque « La vie privée des animaux ») MF : Un petit peu, et j’ai surtout vu ce qu’il a fait et c’est remarquable ! Pendant que Patrick Sabatier présente la séquence réalisée par Patrick Bouchitey, un groupe de fans dans le public hurle le prénom de Mylène et celle-ci leur fait un sourire.


1988–1990 : Ainsi soit je…

Fête comme chez vous

Date 05.05.1988 Chaîne Antenne 2 Présenté par Marc Bessou

La promotion de « Ainsi soit je… » continue dans cette émission de l’après-midi, qui a remplacé « C’est encore mieux l’aprèsmidi » (Dechavanne officiant désormais sur TF1). Mylène y chante donc son dernier 45 tours, présente son album en compagnie de l’animateur. Elle revient en fin d’émission pour une seconde chanson de son tout nouvel album : « Allan ».

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Mylène Farmer

L’émission commence. Marc Bessou salue le public et les téléspectateurs et présente le sommaire de l’émission. Il finit en annonçant Mylène Farmer qu’on retrouve aussitôt sur le plateau, habillée d’un très beau tailleur blanc, assise par terre sur un coussin, les cheveux attachés en arrière pour chanter « Ainsi soit je… ». Une fois la chanson terminée, sous les applaudissements du public, Mylène rejoint Marc Bessou qui tient à la main le 33 tours « Ainsi soit je… ». Marc Bessou : Merci Mylène ! Mylène Farmer : Bonjour. MB : Vous allez bien ? MF : Très bien ! MB : Je consultais, tout en vous écoutant – tous les sens sont comme ça rassasiés à la fois : l’oreille et la vue – un album que voici, que voilà, je le montre ici (il montre le 33 tours à la caméra), où il y a effectivement « Ainsi soit je… », « Sans contrefaçon », « Allan », qu’on

écoutera tout à l’heure, et puis plus surprenant peut-être il y a « L’horloge » de Baudelaire. Mise en musique ? MF : Oui. MB : C’est un choix de votre part ? Un choix qui peut étonner… MF : Absolument, oui, oui. Qui est tiré du livre « Spleen et idéal » de Baudelaire, et c’est un de mes poèmes préférés, oui. MB : C’est pas facile de mettre en musique un poème qui existe : est-ce qu’on n’a pas l’impression de faire quelque chose d’un peu sacrilège ? MF : Pas vraiment ! Moi je dirais que c’est un réel plaisir que de parler sur une musique, et là en l’occurrence, la musique a été faite avant le texte, enfin avant le choix du texte, en tout cas (sourire amusé) et ça m’a paru évident que de greffer Baudelaire sur cette musique. MB : Ça fait maintenant un certain nombre de disques, plus d’une demi-douzaine de 45 tours. On peut dire que vous avez là maintenant cette fois-ci, définitivement semble-t-il, une carrière qui est posée. Quand on démarre dans ce milieu, même si on a un vrai succès, rien n’est jamais acquis, quoi, on sait pas du tout si ça va fonctionner, c’est quand même sur la durée que ça compte. Donc ça fait, là, trois ou quatre ans déjà ! MF : Ce qui est surtout très, très important, c’est qu’un album marche, et en l’occurrence celui-là marche très, très bien et ça c’est formidable pour un artiste. MB : C’est vrai que c’est un discours classique, d’entendre les chanteurs dire que l’album c’est ce qui est le plus le reflet de la personnalité, c’est vrai. Vous le revendiquez, ça ? MF : Certainement ! Là, j’ai deux albums : le

deuxième album se rapproche encore plus de moi, je pense. Le troisième, j’avoue que je ne sais pas du tout ! (rires) MB : On n’en est pas là, c’est aller un peu vite en besogne ! C’est assez drôle parce qu’à le fin, je vois qu’il y a… (il regarde le verso du 33 tours) ça termine quand même plutôt bien : ça termine par « Déshabillez-moi », enfin ça termine pas tout à fait, je suis un peu malhonnête. Enfin, l’avant-dernier, c’est ça. Et puis après « Déshabillez-moi », c’est « The Farmer’s conclusion ». On pourrait d’ailleurs presque dire les titres, ça a un sens si on réfléchit (il énumère les titres de l’album) : ça suit une forme de cohérence. MF : Je pense qu’il y a une cohérence. J’espère, en tout cas ! MB : Vous savez ça, on vous l’a dit souvent, des tas de fois d’ailleurs, vous êtes un personnage un peu étonnant : on arrive souvent pas très bien à vous placer par rapport aux gens qui font votre métier. Je suppose que… MF : Laissons les choses comme ça, alors ! (rires) MB : On laisse les choses comme ça ?! MF : Oui ! MB : Bon ! On écoute tout à l’heure « Allan ». Merci, Mylène Farmer. MF : Merci à vous. Et merci au public ! MB : Restez comme ça ! L’émission continue avec différentes chroniques. En toute fin d’émission, Mylène est de nouveau sur le plateau, dans la même tenue, mais cette fois avec des gants noirs, pour interpréter « Allan » face à un micro à pied, ce qui fait que Mylène reste relativement statique durant la chanson. Notons que la version de la chanson est inédite sur disque, puisque, ici, le pont musical est raccourci.


La Une est à vous Date 07.05.1988 Chaîne TF1 Présenté par Sylvain Augier

Cette émission du samedi après-midi, présentée alors par Sylvain Augier qui sera ensuite remplacé par Bernard Montiel, mêle séries télés, diffusées selon les choix des téléspectateurs, et variétés. Mylène est présente sur le plateau pour interpréter « Ainsi soit je…». Elle présente ensuite l’album en répondant aux questions de l’animateur qui ne tarit pas d’éloges. Sur une partie surélevée du plateau, Mylène interprète « Ainsi soit je ». La chanson terminée, Sylvain Augier la reçoit, le 33 tours « Ainsi soit je… » à la main. SA : « Ainsi soit je… », Mylène Farmer. Bonjour Mylène, comment ça va ? Mylène Farmer : Bonjour. Très bien… SA : Ça va bien ? MF : Très bien ! SA : Ça fait partie de cet album qui vient de sortir et dont je me suis laissé dire qu’il était en train de devenir disque d’or, en tout cas la semaine prochaine. Ce qui veut dire 100.000 vendus, c’est ça ?

MF : (fièrement) C’est 100.000 disques vendus, oui. SA : Alors qu’est-ce qu’on retrouve sur cet autre album, Mylène ? Il y a bien entendu le grand succès « Sans contrefaçon »… MF : Oui. Il y a une chanson qui s’appelle « L’horloge », on voit ça derrière ! (elle regarde la tracklisting au verso du disque) SA : « L’horloge », qui est un poème, d’après ce que j’ai cru comprendre en écoutant l’album. MF : C’est un poème mis en musique, oui. Un poème de Baudelaire, donc. Il y a « Allan », qui parle d’Allan Edgar Poe (sic !). « Pourvu qu’elles soient douces »…je vous laisse deviner ! SA : Heu…oui, j’ai cru comprendre qu’il s’agissait de petites choses roses et rondes, c’est ça ? Y en a une autre qui s’appelle « Déshabillezmoi », comme ça on fait le tour de la question complètement ! Y a « Ainsi soit je… » bien sûr, et puis y a la conclusion de la fermière : « The Farmer’s conclusion ». MF : Enfin bref, c’est à découvrir ! SA : En tout cas, c’est un très bel album que j’ai bien aimé, moi ! MF : Merci ! SA : Et puis je trouve que vous avez du talent et que c’est joli de vous regarder chanter, en plus ! MF : C’est gentil, merci à vous ! SA : Ça fait beaucoup de choses à la fois, hein ? En tout cas, c’est gentil d’être venue nous voir. MF : Merci. Mylène quitte le plateau et l’émission continue.

Sacrée soirée Date 18.05.1988 Chaîne TF1 Présenté par Jean-Pierre Foucault

Invitée d’honneur de la célèbre émission de Jean-Pierre Foucault, Mylène offre ici une prestation qui deviendra culte. Elle se verra en effet offrir par l’animateur différentes surprises, au nombre desquelles on compte des images rares de l’enfance de Mylène au Québec qui lui feront verser quelques larmes.

Dans sa grande robe de velours vert et les cheveux lâchés, Mylène interprète « Ainsi soit je… ». La chanson terminée, elle garde la pose, tête rejetée en arrière et bras en l’air, puis salue le public. Puis elle rejoint Jean-Pierre Foucault sur le canapé. Jean-Pierre Foucault : Venez, chère Mylène. Bonsoir, Mylène Farmer. Vous allez pouvoir vous asseoir ? Vous avez une robe superbe ! C’est vous qui choisissez vos tenues, Mylène, non ? Mylène Farmer : Absolument, oui. Je travaille avec une styliste qui s’appelle Marie-Pierre Tataracci, avec qui j’ai beaucoup de plaisir de

travailler avec elle (sic !). JPF : Et pour chaque chanson, chaque clip, vous prévoyez une tenue différente ? Est-ce que ça fait partie du complet, comme on dit ? On fait la chanson, on l’interprète, et puis on va jusqu’au bout des choses… MF : … et on la déguise, on l’habille, oui. JPF : Alors, là, pour cette chanson, vous allez être – c’est vous qui avez dit le verbe, hein – déguisée comme ça à chaque fois qu’on vous verra à la télévision ? MF : (rires) Je ne sais pas si c’est déguisé, mais en tout cas avoir plaisir que de s’habiller. JPF : C’est vous qui l’avez dit, hein ! Très bien.


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1988–1990 : Ainsi soit je… Mylène Farmer 112

Mylène, vous parlez très peu, je sais, et tout le monde m’a dit : « Tu verras : c’est encore pire que Françoise Hardy ! » (…). Non, je plaisante ! C’est vrai que vous parlez peu. Vous cultivez ce look (…) de femme réservée, timide, secrète… MF : C’est quelque chose qui est incultivable ! Je suis réservée, secrète. C’est vrai que j’ai du mal… (elle cherche ses mots) JPF : Mais lorsqu’on est réservée et secrète, choisir le métier de la chanson c’est pas simple du tout, dites-moi ! MF : Non, mais c’est un paradoxe. Et j’accepte le paradoxe ! JPF : Vous êtes la femme des paradoxes ! On va commencer par regarder, chère Mylène Farmer, les numéros de votre vie (il s’agit d’un des jeux récurrents de l’émission où les téléspectateurs doivent reconstituer une date présentée dans le désordre, en l’occurrence ici la date de naissance de Mylène) et vous n’allez pas faillir à la tradition : c’est à vous de nous raconter quelque chose, un évènement, une anecdote concernant votre vie ou votre carrière, Mylène. MF : J’ai un évènement qui est marquant, et qui sera probablement le plus marquant de ma vie : c’est la perte de quelqu’un… Et paradoxalement, c’est une absence qui me donne et qui m’insuffle une force énorme pour continuer, et c’est probablement pour quoi je suis là ce soir. Donc voilà, c’est un hommage à cette personne. JPF : Vous ne direz pas qui ? MF : Non, je préfère être secrète aussi là-dessus ! (sourire) JPF : Bon, c’est un bel hommage, en tout cas, que vous lui rendez, à cette personne. MF : Oui, parce que c’est vraiment la toute première fois. JPF : Et je suis sûr que cette personne, comme on dit d’une façon un peu simpliste, de là-haut vous regarde et vous aide. MF : Toutes les télévisions que je fais, en tout cas, je pense à cette personne. JPF : Voilà. Je sais, moi, mais je ne dirai pas, pour respecter ce que vous venez de me dire, je sais de qui vous parlez. J’aimerais quand même qu’on applaudisse cette personne, si vous voulez bien, pour lui rendre un vibrant hommage (applaudissements du public). C’est difficile de faire les surprises, vous savez ! Toute l’équipe de « Sacrée Soirée » qui cherche, qui fouille, qui viole un peu la vie des vedettes, se donne beaucoup de mal. Et le hasard fait que ce soir, par deux fois, nous allons revivre des situations sympathiques, chaleureuses, voire même familiales : vous avez peut-être vu la séquence qui précédait avec Sim, où il a revu des personnes qui lui étaient très chères… MF : Je n’ai pas vu la séquence, j’étais dans



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Mylène Farmer

1988–1990 : Ainsi soit je…


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1988–1990 : Ainsi soit je…

ma loge ! (rires) JPF : Alors je regrette, mais là vous allez voir : on va essayer de mieux vous connaître, on va essayer de mieux connaître Mylène Farmer dès le plus jeune âge. Vous voulez bien ? MF : Oui ! (rires) JPF : Alors regardez, vous allez voir : on est allés chez vous, on a ouvert le fameux tiroir et voici ce qui s’y trouvait. Regardez ! Diffusion d’une séquence d’images d’archives personnelles de Mylène à l’âge d’environ six ans, entourée de sa sœur et son frère, d’abord dans une petite piscine, ensuite avec un chien, puis dans des manèges de fête foraine, sur le dos d’un chameau et pour finir à nouveau dans l’eau avec une bouée, le tout sur fond musical de « Plus grandir ». Au retour plateau, Mylène est particulièrement émue. JPF : Je fais pas ça pour faire de la peine, Mylène ! MF : On peut pas maîtriser ses larmes ! JPF : Ce sont des images qui vous font plaisir ? MF : Oui, parce que c’est les premières années de mon enfance, au Canada. C’est toujours émouvant. JPF : On m’a dit que vous étiez très émotive, on vient de le voir, mais y avait surtout, et c’est peut-être un souvenir d’enfance, y avait un personnage qui vous faisait pleurer à coup sûr. Vous savez de qui je veux parler ? MF : Je pense ! JPF : De qui ? MF : De Bambi ! (rires) JPF : De Bambi ! C’est curieux, parce que Bambi fait pleurer Mylène Farmer. Et comme moi je suis vraiment maso, j’ai demandé à nos amis de Walt Disney de nous montrer quelques images de la belle aventure de Bambi. Regardez ! Un extrait de « Bambi » est diffusé (la séquence de la visite des animaux de la forêt au nouveauné Bambi)

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Mylène Farmer

MF : C’est magnifique ! (sourire) JPF : C’est pour vous ! MF : Merci beaucoup ! JPF : Je voulais vous offrir un des héros que vous avez vu dans ce dessin animé, qui est là, spécialement offert pour vous par Walt Disney… (Jean-Pierre Foucault offre à Mylène une peluche du lapin Pan Pan) MF : C’est Pan Pan ! JPF : … et puis il est venu spécialement des

Etats-Unis car la peluche n’existe pas en France, voici pour vous Bambi ! (il sort de derrière le canapé une peluche de Bambi en même temps que Mylène laisse échapper un cri de surprise. On la voit alors à l’image et son visage marque un réel ravissement) Vous n’allez pas pleurer ?! (Mylène prend les peluches et les serre contre elle. Elle les gardera précieusement contre elle jusqu’à la fin de la séquence) Alors, ça c’est l’émotion, là j’ai d’autres cadeaux professionnels, mais on va peut-être un peu les oublier ce soir, mais enfin c’est quand même très important dans la vie d’un artiste… MF : (elle l’interrompt en désignant ses peluches) C’est vraiment un cadeau magnifique, vraiment, je tiens à vous le dire ! JPF : Attendez, c’est pas tout ! Vous êtes contente d’avoir Bambi ! (Mylène hoche la tête) (…) Alors voici deux disques d’or que je vous offre également, mais ça, ça n’a rien à voir avec Walt Disney ! On vous applaudit pour ces disques d’or qui sont la consécration de votre succès, chère Mylène Farmer (alors que le public applaudit, on voit à l’image, aux côtés de JeanPierre Foucault, un disque d’or pour l’album « Cendres de lune » et un autre pour l’album « Ainsi soit je… »). Et puis la surprise n’aurait pas été complète – vous vous demandez ce qui va se passer, hein ! – sans la complicité de nos amis de Walt Disney France et de Pierre Sisman, qui est son directeur général. Jean-Pierre Foucault accueille alors sur le plateau Pierre Sisman, accompagné de quelques enfants tenant un grand panier rempli de peluches Disney, suivis des personnages de Mickey et Minnie. Pierre Sisman : (…) Je suis très touché de savoir que Mylène est très sensible à Bambi. MF : Pour moi c’est le plus beau dessin animé qu’il m’ait été donné de voir. Je vais encore aller le revoir, parce que… PS : Mais en tout cas, je veux pas que Bambi vous fasse pleurer, parce que Bambi ne fait pas pleurer les petits enfants : Bambi les émeut. MF : Il y a un passage un petit peu violent, il y a une mort. PS : Oui, mais ça se termine bien. MF : Oui, oui, mais il y a toutes les choses fondamentales de la vie. C’est magnifique, vraiment, et d’une grande simplicité en plus. Mickey, Minnie et les enfants passent parmi le public pour distribuer des peluches aux spec-

tateurs présents, pendant que Pierre Sisman explique cette initiative. JPF : (…) Et puis notre ami Pierre Sisman va vous faire un superbe cadeau. Voilà de quoi il s’agit, regardez. (Il présente alors un cadre contenant un celluloïd original du film « Bambi ») De quoi s’agit-il Pierre exactement ? PS : Il s’agit d’un document original qui a servi au film, qui est une des scènes de « Bambi ». Vous voyez, c’est peint sur celluloïd. C’est un document qui vient des Etats-Unis, qui est arrivé par avion hier matin (…) Voilà, j’espère que ça vous fait plaisir. MF : (visiblement comblée) Est-ce que je peux me permettre de vous faire la bise ? (ils s’embrassent) Merci infiniment. Jean-Pierre Foucault évoque ensuite avec Pierre Sisman le futur chantier de ce qui sera Disneyland Paris. JPF : J’espère que vous êtes ravie, chère Mylène Farmer. MF : Je suis comblée, réellement ! PS : Et merci à Mylène pour une merveilleuse chanson, parce que c’est une chanson pleine d’émotion. C’est évidemment un tube, mais c’est surtout très, très beau. Jean-Pierre Foucault annonce ensuite Nina Simone. A la fin de l’émission, lors du traditionnel jeu de la date de naissance, on retrouve Mylène aux côtés de Jean-Pierre Foucault et Sim. JPF : Mylène Farmer va vite venir nous rejoindre parce qu’elle a un petit merci à dire, elle a oublié de le faire et c’est quand même important, m’a-t-elle dit. (Mylène arrive, ses peluches toujours dans les mains) (…) Vous vouliez remercier quelqu’un ? MF : Je voudrais remercier ce soir Bertrand Lepage, avec qui vous avez travaillé pour cette émission et toutes ces surprises, et qui est mon compagnon de route, voilà. A la demande de Jean-Pierre Foucault, Mylène presse ensuite la touche qui lance l’ordinateur qui sélectionne une date de naissance pour le jeu traditionnel de l’émission (les dates de naissance des invités sont mélangées par l’ordinateur qui délivre au final une date de naissance unique. Les téléspectateurs nés ce jour-là sont invités à appeler. L’un d’entre eux est pris en ligne sur le plateau et remporte de l’argent). On retrouve pour finir Mylène parmi les autres participants de l’émission lors du générique de fin.


Les animaux du monde

Date 22.05.1988 Chaîne TF1 Présenté par Marilyse Delagrange

La promotion de « Ainsi soit je… » continue pour Mylène qui fait escale sur le plateau de cette émission animalière. Si le contexte se prête peu à une interprétation de la chanson, Mylène offre cependant la première diffusion de son nouveau clip. L’occasion pour elle d’évoquer encore et toujours son amour des animaux (très présents dans le clip), entourée de son ami Gaétan, éleveur d’animaux qui tient une ferme en Normandie et que Mylène avait déjà présenté pour un reportage photo dans « Télé 7 Jours » en 1986. On découvre Mylène aux côtés de l’animatrice. Elles sont assises sur des gradins, entourées d’enfants. Mylène porte un tailleur blanc et un nœud blanc également dans les cheveux. L’émission débute par un reportage dans un centre animalier d’Afrique qui recueille des orangs-outans. Au retour plateau, Mylène joue avec Cheeta, un chimpanzé assis à ses côtés. Marylise Delagrange : Mylène, vous êtes un

peu la marraine de Cheeta, vous ?! Mylène Farmer : Je voudrais être sa propriétaire, la voler à Gaétan ! (rires) Il ne veut pas… MD : Comment vous avez réagi en regardant ce document où il s’agissait, là, de vie sauvage ? (Mylène câline Cheeta, désormais allongée sur ses genoux tout en jouant avec le nœud de ses cheveux) Non, Cheeta, alors laisse, s’il te plaît, le nœud parce qu’on voudrait que Mylène soit habillée jusqu’au bout ! MF : (dans un sourire, les yeux plongés dans ceux du singe) Laisse-moi parler, Cheeta ! MD : Comment est-ce que vous avez réagi à ce document où on voyait des animaux contents d’être réhabilités à la vie sauvage, contrairement à Cheeta ? MF : Moi je trouve ça formidable. Formidable. MD : Alors est-ce qu’il y a pas quelque chose d’un peu contradictoire dans votre position, qui est d’avoir des animaux chez vous, de les aimer, d’aimer les toucher, et puis justement d’aimer un document comme on vient d’en voir un ? MF : C’est vrai, c’est très paradoxal mais moi je me dis que je préfère voir mes capucins à la maison avec une cage qui est très, très grande pour eux et que je peux les sortir autant de fois que je veux et les promener. Je préfère les voir à la maison que dans une petite cage dans des magasins. MD : Oui, parce que c’est là où vous les avez

trouvés. On va aller vous rendre visite dans votre appartement de Beaubourg, où justement vous avez deux petits pensionnaires… qui s’appellent comment ? MF : Le premier, celui que vous allez voir, s’appelle E.T., je l’ai depuis maintenant quatre ou cinq ans, et puis… MD : C’est un singe capucin ? MF : C’est un sajou capucin. (l’écran géant au centre du plateau diffuse les images d’E.T. que Mylène avait filmé dans son appartement de l’époque pour l’émission « Mon Zénith à Moi » d’octobre 1987) MD : (elle désigne l’écran) Le voilà ! MF : Voilà. Et depuis, j’en ai un autre qui est également un capucin, qui a un pelage beaucoup plus clair et qui a été totalement adopté par E.T. MD : Et ils vivent en semi-liberté chez vous ? MF : En semi-liberté, oui. MD : Ils font pas trop de ravages ? MF : Le plus petit, davantage, parce qu’il est beaucoup plus nerveux. Mais elle a un comportement extraordinaire. MD : Et ce sont des animaux que vous avez trouvés ou achetés…vous avez été émue parce qu’ils étaient dans une toute petite cage ? MF  : C’est les regards…Moi j’attache une importance considérable aux regards. C’est vrai que quand je suis rentrée dans ce magasin, j’ai vu le regard d’E.T., qui avait un com-


1988–1990 : Ainsi soit je…

portement plutôt passif. Et pour moi, c’était évident que de le prendre et de l’avoir à mes côtés et pouvoir lui donner toute l’affection dont elle avait besoin. MD : Alors, tout le monde se demande comment vous pouvez tourner, travailler et avoir comme ça deux petits singes qui demandent beaucoup de soins et beaucoup d’affection. MF : C’est à peu près compatible dans la mesure où on n’a pas trop, trop de velléités de grande voyageuse, que je n’ai pas actuellement. Donc, c’est pouvoir rester à la maison et s’en occuper au maximum. Mais si je dois réellement partir, y a une personne, et une seule, qui pourrait s’en occuper. L’animatrice lance ensuite un reportage sur Stella, une jeune anglaise qui recueille et s’occupe de jeunes chimpanzés avant de les réintroduire dans la nature. Au retour plateau, on voit Mylène faire un énorme câlin à Cheeta.

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Mylène Farmer

MD : Je crois qu’on le voit : les singes ont besoin d’énormément de tendresse, surtout quand ils sont jeunes. Ils ont vraiment besoin de leur mère, en fait ! (rires) Alors, Mylène, il y a tout de même une chose que vous m’avez dite tout à l’heure que j’aimerais que vous redisiez parce que je crois que c’est important, c’est qu’en général vous refusez de montrer votre vie avec vos singes pour ne pas inciter d’autres gens à en acheter. MF : (tout en caressant Cheeta) Oui, parce qu’une fois de plus, un singe n’est ni un chat, ni un chien. On ne peut pas le laisser quand on part en vacances à une tierce personne. C’est un animal très dépressif, je crois, qui pourrait s’abstenir de manger, certes, pendant deux, trois ou quatre jours, mais je pense que ça peut être un traumatisme pour lui que de quitter ses maîtres. Gaétan pourrait le dire mieux que moi. MD : Et est-ce que vous ne seriez pas tentée par une expérience semblable à celle de Stella ? Est-ce que vous êtes un jour capable de dire « Au revoir, je m’en vais, je vais aller m’occuper de singes dans la jungle » ? MF : Je me sens foncièrement capable. Maintenant, de là à y arriver, à prendre cette décision… Je pense que je le ferai beaucoup plus tard, en tout cas. Mais je crois que ça ne se fait pas non plus à la légère, c’est rentrer comme on rentre dans un couvent. Et avoir certainement avoir beaucoup plus de connaissances

quant aux singes et à leur vie que je n’en ai moimême. Donc ça serait plus un rêve… Mais j’ai suivi longuement la vie de Diane Fossey, que vous aviez présentée lors de votre émission et qui était fascinante. MD : Enfin, en tout cas, ne nous quittez pas trop vite, je pense que tous les jeunes admirateurs qui sont là seraient très, très tristes, n’estce pas, si Mylène s’en allait ! MF : (rires) Mais je les emmènerais avec moi… Marylise Delagrange lance ensuite un reportage sur Tippi Hedren, célèbre actrice américaine, qui vivait alors entourée de félins. Au retour plateau, Mylène est à nouveau plongée dans ses jeux avec Cheeta. MD : Je n’arrive vraiment pas à arracher Mylène à sa passion ! (…) Il faut peut-être revenir à la chanson pour conclure : en fait dans beaucoup de vos chansons, il y a des animaux (elle veut en réalité parler des clips) (…) Alors dites-nous, Mylène : il y a des chevaux dans « Tristana », c’est ça ? MF : Dans « Tristana », il y a des chevaux et surtout un loup, donc, qui appartenait à Gaétan. « Libertine », y a beaucoup de chevaux, « Sans Contrefaçon », il y avait aussi des chevaux, carrioles, marionnette… Et puis le dernier, c’est à découvrir ! Il y a une biche et un grand-duc. MD : (aux téléspectateurs) Alors nous allons vous montrer, ce sera la conclusion de cette émission, en exclusivité… MF : Absolument, oui. MD : …puisque ce n’est encore jamais passé à l’écran, je crois… MF : Non, jamais. MD : …le dernier clip de Mylène, qui s’appelle, enfin qui est la chanson « Moi, je » (sic !) et vous allez… MF : (elle la corrige tout en caressant le visage de Cheeta) « Ainsi soit je… »… MD : « Ainsi soit je… », pardon ! MF : …qui ne sera pas dans son intégralité, puisqu’on va être obligés, je crois, de couper au bout de quatre minutes. MD : C’est ça. Mais je crois que les téléspectateurs auront beaucoup l’occasion de le revoir ! MF : Bien sûr, oui. MD : En tous les cas, merci beaucoup Mylène d’être venue. MF : Merci à vous. Merci à Gaétan, aussi. L’émission s’achève avec la diffusion du clip de « Ainsi soit je… »

« Je préfère voir mes capucins à la maison, dans une cage très très grande, plutôt que dans les magasins. »

Top 50 Date 26.05.1988 Chaîne Canal+ Présenté par Marc Toesca

Vêtue sobrement d’un petit pull noir et d’un pantalon blanc, les cheveux attachés en arrière, Mylène vient présenter son nouveau clip, celui de « Ainsi soit je… », sur le plateau de Marc Toesca. C’est également l’occasion pour elle de répondre à quelques questions de l’animateur. Le clip de « Ainsi soit je… » est diffusé. Au retour plateau, on découvre Mylène et Marc Toesca assis chacun dans un fauteuil se faisant face. Marc Toesca : Le clip « Ainsi soit je… » de Mylène Farmer, encore une fois réalisé par Laurent Boutonnat. Est-ce que c’est un clip facile à faire ? Est-ce que c’est aussi rapide, ou plutôt plus facile à faire que les précédents, avec un casting, des tournages extérieurs ? Mylène Farmer : Je pense pas que c’est plus facile. On a mis un peu moins de temps pour le tournage, qui s’est effectué en deux jours. La préparation est la même. Pour une petite anecdote, nous avons tourné dans le même studio que le clip « Plus grandir », qui était le studio Sets à Stains, et avec pratiquement la même équipe que ce même clip. MT : Avec beaucoup de changements depuis « Plus grandir », quoi … MF : Oui. MT : Quand même pas mal d’évolution depuis. Un mot sur le choix des animaux : est-ce que le faon, la biche ont un rapport avec ton idole Bambi, ou pas ? MF : Je pense que ce n’est pas par hasard ! (rires) MT : (…) Le choix du noir et blanc, le choix d’avoir fait un clip finalement qui est simple… MF : …qui est très sobre. Je pense que ça se mariait très bien avec la chanson, qu’il fallait cette sobriété. MT : Ça veut dire que c’est fini l’aventure des castings, des tournages en extérieur ? MF : Je ne l’espère pas. Là, en l’occurrence, c’était ce qu’il fallait, je pense. MT : Dans le clip précédent, on a vu Zouc. Pourquoi Zouc ? On s’est pas vus depuis, donc… MF : Moi j’ai rencontré Zouc sur une émission, enfin j’avais demandé sa participation lors


d’une émission qui était sur Canal+ aussi, qui s’appelait « Mon zénith à moi » (en octobre 1987) et elle est venue. Et après, nous avons lié évidemment connaissance et amitié, et quand nous avons fait le projet donc du tournage de « Sans contrefaçon », il y avait un personnage et c’était évident que ce fût Zouc. MT : Chaque fois, on t’a demandé de jouer un rôle dans tes vidéos. Y a aucun réalisateur qui est venu te voir pour te proposer quelque chose ? MF : Si. J’ai eu beaucoup de propositions, mais pas encore acceptées ! MT : Et pourquoi ? C’est un univers que… ? MF : Parce que ce n’était sans doute, là encore, pas le bon réalisateur. En tout cas, celui que je souhaitais. Et puis… MT : C’est qui, que tu souhaites ? Dis-le ! (rires) MF : Non ! Je préfère préserver ça aussi. Je vais attendre. MT : Alors bon, depuis « Libertine » ça marche bien pour Mylène Farmer. L’album (« Ainsi soit je… ») a été très bien classé, c’était arrivé directement n°6 du Top 30 : ça veut dire qu’il y a un public, ça veut dire qu’il y a des gens qui sont attentifs à tout ce que tu fais. Y a peut-être des gens qui ont envie de te voir sur scène ? MF : J’en ai envie aussi ! MT : Et alors, et alors, et alors ?! MF : Et je le ferai ! (grand sourire)

Mon Zénith à moi Date 18.06.1988 Chaîne Canal+ Présenté par Michel Denisot

Mylène est une nouvelle fois conviée à participer à l’émission culte de Michel Denisot, à la demande de l’invitée de la semaine, Christine Aventin. La jeune écrivain se déclare totalement fan de Mylène Farmer, dont elle adore le

deuxième album. Une séquence où Mylène chante « Ainsi soit je… » est donc diffusée dans cette émission qui lui est consacrée. Assise par terre sur un bloc noir entouré de projecteurs, Mylène est habillée d’une magnifique robe blanche à manches bouffantes, les cheveux attachés en chignon. Elle finit la chanson une larme tombant sur sa joue.

MT : Oui ?! T’as pas de dates ? MF : J’ai pas de dates. MT : Y a une salle mythique pour toi ? Y a une salle où tu aimerais te produire ? MF : Peut-être le Palais des Sports… MT : Oui, mais c’est grand, déjà ! MF : C’est très grand, mais y a une grande scène et j’ai envie d’évoluer sur une grande scène. MT : En tous les cas, je te remercie d’être passée nous voir, de nous avoir présenté ton clip « Ainsi soit je… ». MF : Merci ! MT : Et puis t’aimes bien Mory Kanté ? (artiste africain qui fit un tube en 1988 avec « Yéké yéké ») MF : Beaucoup. J’aime beaucoup Mory Kanté, j’aime bien Maxime Le Forestier, qui est passé précédemment. Pour conclure l’émission, Marc Toesca lance le clip de Mory Kanté.


1988–1990 : Ainsi soit je…

À la folie, pas du tout Date 19.06.1988 Chaîne TF1 Présenté par Patrick Poivre d’Arvor

Afin de présenter Mylène, venue chanter « Ainsi soit je… », Patrick Poivre d’Arvor précise en préambule que Mylène est l’une, sinon la seule, de ses chanteuses préférées du moment. C’est donc sur le plateau, face au public, que Mylène interprète la chanson dans un tailleur blanc, ses cheveux maintenus en catogan par un nœud blanc. La chanson terminée, Mylène salue brièvement le public avant qu’on ne la voie quitter le plateau.

Les discos d’or sous le soleil du Québec

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Mylène Farmer

Date 21.08.1988 Chaîne FR3 Présenté par Désirée Nosbuch

Prenant place à Montréal, au Canada, cette grande émission musicale spéciale (à ne surtout pas confondre avec la dictée de Bernard Pivot : « Les Dicos d’or » !) réunit artistes locaux et français. On retrouve ainsi Céline Dion, Diane Tell, François Feldman ou encore Stephan Eicher, et Mylène bien évidemment. Elle chante « Ainsi soit je… » dans sa grande robe blanche, les cheveux en chignon, en extérieur, de nuit, sur un pont en pierre. Elle verse une larme au cours de la chanson. A la fin de l’émission, la présentatrice réunit tous les participants de l’émission sur une grande scène, Céline Dion en tête. Tous… sauf Mylène !


Lahaye d’honneur Date 24.08.1988 Chaîne TF1 Présenté par Jean-Luc Lahaye

Sacrée soirée

Pour conclure le promotion du single « Ainsi soit je… », Mylène Farmer fait une ultime prestation sur le plateau du prime-time de Jean-Luc Lahaye. A nouveau vêtue de sa magnifique robe blanche romantique, les cheveux lâchés tombant sur ses épaules, Mylène interprète le titre, une grosse sphère orangée à ses côtés. Elle finit la chanson avec sa pose habituelle, tête en arrière, yeux fermés et bras en l’air. Elle salue le public, puis quitte la scène alors que le rideau se referme sur elle.

Date 05.10.1988 Chaîne TF1 Présenté par Jean-Pierre Foucault

Après plusieurs semaines sans apparition télé, on retrouve Mylène ce mercredi soir, en direct, sur le plateau de « Sacrée Soirée », pour lancer la promotion de son nouveau 45 tours, « Pourvu qu’elles soient douces » (qui entre au Top 50 le samedi qui suit pour y atteindre la première place quelques semaines après). Notons de suite que pour toutes les prestations télévisées que Mylène fera de

ce titre, elle sera accompagnée des deux mêmes danseuses que pour la promotion de « Tristana », à savoir Sophie Tellier et Dominique Martinelli, pour une chorégraphie autant travaillée qu’efficace. Pour cette première prestation, Mylène arbore une robe courte noire pailletée dos nu (ses différentes tenues pour cette chanson développeront toutes le contraste avant/arrière, en totale adéquation avec la chanson qui, rappelons-le, est une ode à la sodomie!), des collants noirs et ses cheveux sont relevés en un chignon serré.


1988–1990 : Ainsi soit je…

Nulle part ailleurs

Date 07.10.1988 Chaîne Canal+ Présenté par Philippe Gildas et Antoine De Caunes

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Mylène Farmer

Pratiquement un an après son passage remarqué dans la célèbre émission de Canal+ pour la promotion de « Sans contrefaçon », Mylène est de retour sur le plateau de Philippe Gildas, qui anime désormais l’émission avec Antoine de Caunes, pour présenter en exclusivité le clip de « Pourvu qu’elles soient douces ». Présente sur toute la durée de l’émission, elle répond aux questions des animateurs et assiste aux différentes chroniques, vêtue d’un tailleur blanc ample maintenu par une ceinture noire, les cheveux lâchés et des gants de cuir noir aux mains. Philippe Gildas : (…) Mylène Farmer, « Ainsi soit je… » c’est son deuxième album… Mylène Farmer : Oui… PG : Et alors, après le premier album, on s’était dit « Voilà, c’est une façon de poser une carrière, de montrer qu’on ne fait pas que des

coups », et maintenant un deuxième album. Le plus étonnant encore, c’est que… on peut le montrer d’ailleurs, cet album, puisqu’il n’a que quelques mois (la pochette de l’album « Ainsi soit je… » apparaît à l’écran) Voilà, c’est celuilà : « Ainsi soit je… », mais tout le monde se souvient quand même. Le plus étonnant, c’est que dans cet album, pratiquement toutes les paroles cette fois, c’est Mylène ! MF : Oui, j’ai eu le démon de l’écriture, là ! PG : Ça s’apprend petit à petit, ou c’est le goût qui vient ? MF : Je crois que c’est une découverte. C’est après enlever ces inhibitions que j’avais quant à l’écriture. Et puis c’est un réel plaisir, je crois. PG : Enfin, déjà dans le premier album y avait trois chansons qui étaient déjà des succès et déjà des paroles de Mylène Farmer, quand même ! MF : C’est vrai, mais un album entier c’est un lourd travail. PG : Bien aidée par Laurent Boutonnat ? MF : Bien évidemment ! PG : C’est plus que jamais le compagnon… MF : Moi je travaille toujours après les musiques. Ça m’inspire les paroles. PG : Alors c’est aussi avec Laurent que tu vis l’aventure des clips, j’ai failli dire des films ! Celui de ce soir, nous, nous allons en voir la partie chanson, qui doit faire quatre minutes

cinquante, presque cinq minutes , alors que le clip fait… ? MF : Il fait quinze minutes et y a même deux minutes cinquante de générique, je crois. Donc dix-sept minutes en tout. PG : Encore une fois un vrai film ! C’est pas la première fois, puisque tu avais déjà fait des… MF : Non, mais celui-là c’est le plus long et le plus lourd. Et le plus difficile, aussi ! PG : Voilà, petit à petit, le duo Boutonnat/Farmer avance vers un long métrage, hein ! Qu’on verra un jour prochain ? MF : J’espère… PG : Vraiment ? MF : Je pense d’ici un an et demi, deux ans. (le projet de Laurent Boutonnat mettra plus de temps à aboutir et « Giorgino » ne sortira finalement qu’en octobre 1994) Philippe Gildas enchaîne sur le succès de Mylène qui lui apporte inévitablement des fans et Antoine de Caunes lit à l’antenne une lettre de fan, fictive bien entendu. Mylène rebondit sur le contenu de cette lettre fantaisiste en confirmant qu’elle vit bien avec deux singes, Léon et E.T. … PG : On va revenir sur les singes, mais d’abord gloire à Laurent ! On n’en parle jamais : Laurent, c’est lui le Pygmalion (…) MF : On a dit Pygmalion, mentor… et je ne


sais ! (rires) PG : En fait, c’est quelqu’un avec qui tu t’entends remarquablement bien dans le boulot. MF : Oui, je crois qu’il y a une complicité énorme et une complémentarité, surtout. PG : (…) Léon va bien ? MF : Très, très bien. Il grandit ! PG : Il a quel âge ? MF : Je crois six, sept mois. (en réalité presque un an, puisque Mylène venait de l’acquérir, selon ses dires dans la même émission onze mois plus tôt) PG : Il est tout petit, quand même, encore ! MF : Oui, oui, oui ! Mais il commence à atteindre sa maturité sexuelle ! Antoine de Caunes : C’est un sapajou ou un capucin ? MF : C’est un sajou capucin ! A de C : Un sajou ? MF : Oui. PG : Ça joue avec tout le monde, d’ailleurs ! Ça joue avec E.T. ? MF : Ça joue beaucoup avec E.T., ça dort toujours sur son dos et… PG : Mais alors maintenant qu’il va devenir grand sexuellement et que E.T. est une femelle… MF : Mais justement, il a besoin d’un exemple. (elle se tourne alors vers Antoine de Caunes et le fixe !) PG : Et les singes, ça t’intéresse toujours autant ? A de C : (troublé) Je peux m’absenter quelques instants ?! (rires de Mylène) PG : Les singes sont toujours dans la maison ? MF : Bien sûr, oui ! PG : Mais t’as pas amené les souris comme il avait dit ?! (en référence à la fausse lettre d’Antoine de Caunes) MF : Non. Non, non ! PG : Parce que ça peut pas faire bon ménage avec les singes ! MF : Ça ne fait pas bon ménage. Mais c’est vrai que Diane Fossey, qui a élevé beaucoup de gorilles, c’est une femme qui me fascine. Et si j’avais un autre monde, une autre vie, je crois que j’aimerais faire ça. A de C : Sinon, on peut vous présenter Christophe Lambert ! (rire de Mylène) PG : Un mot sur le XVIIIe et le XIXe : c’est vrai que dans tous les clips, avec Laurent, vous les faites toujours se dérouler dans d’autres périodes de l’Histoire. MF : C’est l’amour du costume, l’amour de l’Histoire, je crois. PG : C’est pour faire le cinéma, le grand spectacle, quoi… MF : Oui, oui. PG : Mais ça correspond peut-être à tes lectures, aussi, non ? MF : Moi j’aime surtout – je le dis tout le

temps, mais c’est vrai – Edgar Poe… PG : Ça, c’est le côté fantastique. MF : …J’aime Baudelaire, j’aime beaucoup le théâtre de Strindberg…Et puis on va en citer beaucoup, mais je les oublie ! PG : Oui, enfin c’est quand même toujours de même nature. C’est toujours un peu mystérieux, un peu sulfureux. MF : Je crois qu’il y a toujours ce même univers, oui. A de C : Les romans noirs gothiques… MF : Oui. (sourire) PG : Est-ce que tu joues toujours sur ta timidité, ou tu es toujours aussi timide ? MF : Non. Je crois pas qu’on puisse jouer. Déjà, pendant quatre ans, on ne peut pas jouer un même rôle. PG : Autrement dit ? MF : Je suis introvertie, et j’ai ce paradoxe de vouloir être à l’avant-scène et je pense que c’est pas réellement un problème. PG : C’est pas réellement un problème, sauf si tu veux faire vraiment de la scène. Si déjà les télés te torturent ! Tu vas faire de la scène ? MF : Je vais faire de la scène. PG : On peut déjà dire quand ? MF : On peut dire que ce sera le Palais des Sports et on peut dire que ce sera en mai 89. PG : C’est-à-dire en mai prochain… MF : Absolument, oui. PG : …au Palais des Sports. Grande salle ! MF : Mais j’aurai un gros, gros travail de préparation. PG : Mais enfin quand on voit que l’album est depuis cinq mois au Top 50, depuis qu’il est sorti il est au Top 50 et il y est toujours, y a pas de raisons que le Palais des Sports soit pas plein ! Ça ne fait aucun doute !

MF : Je le connais un petit peu et c’est un milieu qui est… Je trouve ça formidable, les personnes qui peuvent se consacrer à ça toute leur vie. C’est formidable. Il est ensuite question d’une compétition sportive et de ses résultats avec un français médaillé. MF : Chez les médaillés, y a un moment qui est prodigieux : c’est le moment où ils vont gagner cette médaille. Et ça, c’est un moment qui est très, très émouvant. C’est cette performance, cette volonté d’aller plus loin et plus haut. PG : Plus que le moment où ils montent sur le podium pour recevoir la médaille, même si ils pleurent ! MF : C’est vrai ! Oui, oui. PG : Les catcheurs, ça t’intéresse les catcheurs ? MF : J’aurais une question à poser, peut-être pour les femmes catcheurs ! (rires)

Philippe Gildas lance ensuite le journal, présenté par Annie Lemoine. Celle-ci parle notamment d’un mouvement de grèves des infirmières. Philippe Gildas rebondit sur le sujet pour s’adresser à Mylène.

PG : Mylène, y a combien de 45 tours extraits de « Ainsi soit je… » déjà ? MF : Alors… « Sans contrefaçon », « Ainsi soit je… », et puis « Pourvu qu’elles soient douces ». PG : Vous aimez Brel ? MF : Je crois que c’est celui que je préfère, oui. Brel et Reggiani. PG : (…) Une question personnelle, seulement : comment vous vous êtes rendue compte que Boutonnat c’était le gars qui pouvait vous transformer professionnellement ? Parce qu’avant vous vouliez faire autre chose… MF : Pas réellement. C’est vrai que moi, je me tournais en premier lieu vers l’équitation. C’està-dire que je voulais être monitrice d’équitation. Après, je me suis très vite aperçue que ce n’était pas du tout une vocation. PG : Sauf que le cheval, vous aimez toujours ! Parce que y en a dans tous les clips, hein ! MF : Oui. Mais après, j’ai découvert, justement

PG : Tu avais une chanson avec des infirmières, non ? MF : « Maman a tort » ! (sourire) PG : Qu’est-ce que tu faisais quand tu avais douze ou treize ans, à Garches ? MF : Je m’occupais, enfin j’essayais en tout cas, le dimanche de me consacrer aux handicapés physiques et mentaux. PG : Aux enfants handicapés... MF : Oui. Absolument, oui. PG : …surtout victimes d’accidents, et aussi handicapés mentaux. MF : Oui, oui. PG : Donc tu connais bien, enfin tu connais un peu ce milieu des infirmières ?

Le journal terminé, Philippe Gildas lance la suite de l’émission, en l’occurrence la rubrique de Jérôme Bonaldi, qui présente ce soir le « Vidéo-look », un logiciel permettant d’insérer sa photo et de visualiser différentes coupes de cheveux. PG : Mylène a les cheveux lâchés, ce soir. MF : C’est ça ou le catogan. Et un jour, les cheveux très, très courts ! PG : Ah oui, donc alors là vous irez au « Vidéolook » peut-être avant faire un essai, non ?! MF : Je n’aurai pas besoin d’eux ! PG : Ah oui, vous aurez déjà décidé avant ! MF : Oui ! C’est ensuite le tour de la rubrique musicale de Alain Gardinier.


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au travers de ce clip (celui de « Pourvu qu’elles soient douces »), avec des cascadeurs, que c’était plus cette formation que j’aurais voulu entreprendre. Après, j’ai suivi des cours de théâtre, donc je voulais être actrice. Et puis j’ai rencontré Laurent Boutonnat. Moi j’appelle ça la chance des rencontres. Y a peu de rencontres dans sa vie… PG : Quand vous l’avez rencontré, vous saviez qu’il avait déjà réalisé un film ? MF : Non, c’est beaucoup plus tard qu’il m’a présenté son premier film qu’il avait réalisé à l’âge de seize ans qui s’appelait « Le voyage de la féconductrice » (sic !) et qui était même passé à Cannes, je crois. PG : Exactement ! Or, à seize ans à l’époque, la vidéo c’était quand même… MF : Mais là, c’était en 35mm ! PG : Ah c’était en 35 ? Il avait pu faire ?! Il avait réussi à convaincre quelqu’un de lui donner les fonds ? MF : Il avait pillé les fonds, je crois, le portemonnaie de son papa et de sa maman ! (rires) Je ne sais pas, mais déjà, là, oui, c’était évident, quoi. PG : J’ai lu quelque part que vous rêviez toujours de faire du cinéma. Alors vous citiez Annaud… MF : C’est vrai qu’en France, on vous demande toujours des références. C’est vrai que le premier que je citerai, c’est Laurent Boutonnat, c’est normal parce que c’est vraiment quelqu’un que j’aime et je pense qu’il sera un des grands, grands, grands réalisateurs de demain. PG : Il a quel âge ? MF : Il a 27 ans. C’est vrai que j’aime le cinéma d’Annaud, qu’il a aussi d’autres choses à faire, que j’ai hâte de voir « L’Ours »… PG : Pour l’avoir vu, je peux vous dire que c’est superbe et que ça vous plaira !

Philippe Gildas lance ensuite les « Arènes de l’Info» (première version des « Guignols de l’Info »). Au retour plateau, il rappelle aux téléspectateurs que le clip de « Pourvu qu’elles soient douces » va être diffusé en exclusivité dans l’émission. PG : Alors, cette jeune fille toute timide qu’est Mylène a écrit des paroles. Alors je sais pas si on entend très bien : peut-être c’est ça la perversité, d’ailleurs ! MF : La vraie perversité, je crois, oui ! (sourire) PG : On écoute la chanson, c’est un tout… MF : Je crois que c’est l’imaginaire de chacun qui travaille, qui va prendre un mot, un refrain ou un couplet… PG : Parce que quand même les paroles, sans ça, elles sont hard ! Jamais t’étais allée aussi loin ! MF : Elles sont sulfureuses, c’est vrai. C’est un pamphlet sur ladite perversion des hommes. PG : (il cite quelques phrases extraites des couplets de la chanson) J’en dirai pas plus, parce que dit comme ça, c’est un peu gâcher la musique quand même ! (rire de Mylène) Mais ça valait la peine de le souligner pour que vous écoutiez bien tout à l’heure tout en regardant ! Deuxième chose : en ce qui concerne maintenant le clip, pourquoi dix-sept minutes ?! Pourquoi un clip long, quoi, pourquoi un vrai morceau de cinéma ? MF : Par amour pour le cinéma, je crois, tout simplement. PG : Alors de façon plus précise : pourquoi pendant la guerre de Sept ans ? MF : Déjà, on a voulu faire la suite de « Libertine », ce qui n’était pas évident ! On a bien pensé la chose. C’est vrai que « Pourvu qu’elles soient douces » n’était pas évident de proposer la suite de « Libertine » (sic !). Après, c’est

une recherche. Pourquoi dix-sept minutes ? Parce que l’amour commun de Laurent et de moi-même pour le cinéma, pour avoir envie de dépasser peut-être, c’est vrai, une chanson et l’histoire d’une chanson. Que dire d’autre ?! PG : Mais pourquoi, alors que les paroles sont totalement d’aujourd’hui, pourquoi la placer en 1759, début de cette guerre de Sept ans ? MF : Là, je vous dirai : parce que la suite de « Libertine ». Donc ça se passe toujours au XVIIIe siècle. PG : Voilà. Et puis l’amour du costume ! MF : Et puis les costumes ! Et c’est vrai que j’ai du mal à m’imaginer en 88, que si j’avais un long-métrage à faire, je crois que je me propulserais plutôt dans un monde antérieur. PG : Alors, y a cent cinquante figurants ! MF : Y en a beaucoup plus, en fait. Cent cinquante figurants, c’est sur une journée. Y a eu huit jours de tournage et en globalité, on peut compter à peu près cinq cents à six cents figurants, donc c’était un travail colossal pour le metteur en scène. Et j’avoue que moi j’ai pris un plaisir…le plus grand plaisir, c’était le tournage, mais surtout le montage. Parce que là pour moi, c’était prodigieux ce travail que Laurent a fait avec cette monteuse, qui est Agnès Mouchel. PG : (…) Dans les dix-sept minutes, la chanson se situe pratiquement au milieu. MF: C’est ça. Alors, au début la première image, donc, c’est la fin de la dernière image de « Libertine I », et donc on retrouve Libertine étendue aux côtés de son chevalier. Et l’armée anglaise va arriver sur le territoire français par erreur, devrait aller en Prusse mais s’est trompée, et va découvrir Libertine et puis guérir. Le capitaine anglais va tomber amoureux de cette jeune fille. Et, de l’autre côté, l’intrigue donc, c’est l’armée française qui va découvrir


la présence de cette armée anglaise sur le territoire français et qui va payer des prostituées pour pénétrer le camp anglais et décimer cette armée anglaise. Et dans les prostituées, on retrouve la rivale de Libertine. PG : D’accord… MF : Et la suite, après y a toute… PG : C’était nécessaire de vous dire ceci, parce que… MF : C’est vrai que c’est un peu dommage toujours d’en montrer la version courte. PG : …parce qu’on ne peut pas vous présenter les dix-sept, bien entendu, vous le comprenez bien. Donc regardez : c’est « Pourvu qu’elles soient douces » et vous pouvez par avance applaudir ! Pendant que Philippe Gildas annonce le clip, Mylène se passe la main dans les cheveux et les regroupe d’un côté de sa tête. Une version coupée du clip est donc diffusée. PG : « Pourvu qu’elles soient douces », avec les chevaux et les cascades de Luraschi. MF : Ah oui ! C’était merveilleux, il m’a appris beaucoup de choses. Philippe Gildas lance ensuite la rubrique cinéma. Après celle-ci est diffusé un sketch de Karl Zéro qui parodie la chanson « Libertine » avec des paroles très gauloises. Au retour plateau, si tout le monde applaudit le sketch, on peut noter que Mylène n’applaudit pas alors qu’elle avait applaudi les autres séquences…

PG : Tu préfères l’originale, hein ?! (Mylène acquiesce) Reconnaissez, mon cher Antoine, que l’originale est quand même plus poétique ! A de C : J’en conviens, mais elle riait ! Mylène riait ! (rire de Mylène) J’ai vu Mylène rire ! PG : Allez, les questions, rapidement ! (…) A de C : Alors très rapidement, Mylène, depuis le début de l’émission, je me le demande : pourvu qu’elle soit rousse…Pouvez-vous nous le confirmer publiquement ? MF : Elle est rousse…en haut ! (un blanc, puis les spectateurs commencent à rire puis applaudir pendant que Mylène sourit, visiblement fière de son mot, qui trouble Antoine de Caunes encore un peu plus !) PG : Deuxième question ! A de C : C’est pas une question, c’est une suggestion. Vous avez dit tout à l’heure que vous vouliez faire de la scène en mai 89, et je sais que vos singes savent danser. Donc j’ai une suggestion à faire : après « Johnny se donne à Bercy », pourquoi pas « Mylène se donne à Thoiry » ?! (célèbre parc animalier des Yvelines) MF : (d’un air de défi) Est-ce que vous allez m’accompagner ? A de C : Volontiers ! PG : Ça fera trois, alors ! MF : (en même temps, tout sourire) Ça fera trois singes ! (rires) Avant qu’Annie Lemoine ne revienne sur le plateau pour le rappel des titres de l’actualité, Philippe Gildas annonce les invités des jours suivants, dont Renaud.

MF : (interrompant l’énoncé de Philippe Gildas) Il est encore plus séduisant de près qu’à la télévision ! PG : (surpris) Renaud ? MF : (elle désigne Antoine de Caunes, qui est en train de céder sa place à Annie Lemoine) Non : ce monsieur ! PG : Ah, Antoine ! MF : Voilà… PG : Ah bon alors, si c’est une déclaration d’amour, Antoine, vous restez ! (mais il était déjà parti…) Après le rappel des titres, Philippe Gildas annonce le programme suivant l’émission, en l’occurrence un match de catch. MF : Je me pose toujours cette question : qu’est-ce qui peut amener autant de gens à ce genre de combats ? PG : C’est parce que c’est un spectacle fabuleux ! C’est un vrai spectacle. MF : Mais qui est truqué du début à la fin ! PG : Non, c’est pas truqué. Ce qui n’est pas truqué, c’est qu’ils fassent 260 kg et qu’ils fassent des galipettes, quand même. MF : Oui… PG : Mais c’est vrai que c’est monté comme un spectacle. MF : Mais c’est un jeu de cascadeurs. PG : C’est un jeu de cascadeurs (…). Ils se battent quand même vraiment. L’émission s’achève avec l’annonce du match de catch.

Clip dédicace Date 08.10.1988 Chaîne M6 Présenté par Yves Carra

Au lendemain de la présentation d’une version tronquée du clip de « Pourvu qu’elles soient douces » sur Canal+, Mylène vient sur le plateau de cette émission musicale matinale, habillée d’un chemisier blanc ample, d’un pantalon noir, cheveux lâchés et mains gantées de cuir noir, présenter cette fois la version intégrale de son clip. Elle répond également, pas forcément de bon cœur visiblement, aux questions de l’animateur, assise sur un canapé,

et reçoit quelques cadeaux. Yves Carra : (…) Nous avons une invitée exceptionnelle aujourd’hui, c’est la première fois qu’elle est sur M6 dans « Dédicace » tout au long de cette première heure d’émission. Vous l’avez comparée à une mante religieuse, à la fée Clochette, à une libellule, vous avez aussi dit – c’est vous qui parlez (les téléspectateurs) – qu’elle possédait le goût de l’interdit, de l’ambiguïté. Et moi je peux vous dire qu’après sept 45 tours, après deux albums et des clips remarqués et remarquables, en quatre ans seulement elle occupe une place tout à fait à part maintenant dans la chanson française, vous serez bien d’accord avec moi sur ce plan-là : c’est Mylène Farmer. Bonjour ! Mylène Farmer : Merci de tant d’éloges !

YC : En plus, c’est les téléspectateurs qui parlent. D’ailleurs, à ce propos, je vous offre la carte postale du… (il prend et montre à la caméra la photo d’un chimpanzé) Il ressemble à Léon ou à E.T. ? MF : Ni l’un, ni l’autre. Ça, c’est un chimpanzé. Moi, ce sont des sajous capucins (elle prend la photo). Mais j’aimerais bien avoir celui-ci, mais c’est impossible. YC : Pourquoi ? MF : Parce qu’ils sont très, très protégés. C’est normal. YC : Alors y a aussi une belle carte postale qu’on a reçue avec plein d’éloges derrière, je vous l’offre (il montre à la caméra une carte postale puis la tend à Mylène). Y en a aussi beaucoup d’autres ! MF : Merci…


1988–1990 : Ainsi soit je… Mylène Farmer 126

YC : Je vous montre quand même le 33 tours compact (sic !) de Mylène Farmer (il montre à la caméra le CD « Ainsi soit je… ») et puis nous, bien sûr, nous allons regarder d’ici quelques minutes, mais on va en parler avant pour le présenter, « Pourvu qu’elles soient douces », donc, en version intégrale de 15mn plus 2mn50 de générique, c’est ça ? MF : C’est parfait ! (rires) YC : C’est exactement ça ! MF : Oui. YC : Donc, en clair, on peut dire déjà en préambule que c’est la suite de « Libertine »… MF : C’est la suite de « Libertine ». Vous verrez : le clip démarre sur, en fait, la dernière image de « Libertine I ». YC : Donc on est à quelle époque ? MF : On est au XVIIIe siècle, ça se déroule pendant la guerre de Sept ans et c’est une histoire qui va se dérouler sur le territoire français entre une armée anglaise et une armée française, avec comme personnage principal Libertine, le capitaine anglais, la rivale de Libertine qu’on va retrouver, qui sera une prostituée et…je vous laisse découvrir le reste ! YC : D’accord, on le découvrira dans quelques minutes. Je crois que vous avez pris beaucoup de plaisir à ce tournage, en fait… MF : Ah oui ! YC : …parce qu’il y a des cascades, il y a des bagarres dans la boue, on le verra aussi tout à l’heure, y a beaucoup d’équitation, vous aimez bien… MF : J’adore l’équitation, c’est vrai. J’ai rencontré Mario Luraschi, qui est donc un cascadeur, un des plus renommés en France, et j’ai appris énormément de choses et c’était un bonheur. Je crois, le tournage le plus difficile, quand même, qui a duré huit jours, neuf jours… YC : Neuf jours ?

MF : Oui. YC : Où ça ? MF : C’était dans la forêt de Rambouillet, tout en extérieur. YC : Tout en extérieur ? Rien en studio ? MF : Oui. YC : Avec combien de figurants, figurantes ? (on voit alors des images du making of du clip « Pourvu qu’elles soient douces ») MF : Sur la globalité, y avait entre cinq cents et six cents figurants. YC : D’ailleurs, on voit des images du tournage du tournage (sic !). Alors, on a pris des rushes, comme ça, au travers de cassettes qu’on avait… MF : (alors qu’on voit les doublures de Mylène et Sophie Tellier se battre) Ça, c’est une image du clip, d’ailleurs. YC : Oui, c’est une image du clip. C’est vraiment vous qui sautez dans les bras de l’adversaire, si je puis dire ? MF : Il y a des cascadeuses qui sont nos doublures respectives. YC : Ah oui, quand même ! Alors, je crois qu’on va peut-être en voir quelques-unes d’autres, d’images, parce qu’il y a notamment une bagarre dans la boue qui est assez étonnante. MF : Oui. Ça, c’est vraiment nous, là, sur ce moment-là. YC : C’est vraiment vous qui l’avez faite ? MF : Absolument. YC : (toujours par-dessus des images du tournage du clip) Alors là, on continue un petit peu la bagarre…Ça doit pas être évident quand même quand on est cascadeuse d’être la doublure, de se battre toute la journée, d’éteindre le feu (on voit en effet à l’image un technicien éteindre un feu sur le tournage) Vous a pas eu de problèmes, comme ça, pour allumer des feux dans la forêt de Rambouillet ?

MF : Non, non, y avait les pompiers qui étaient sans arrêt autour ! YC : (alors qu’on voit à l’image Laurent Boutonnat donnant des indications à Jean-Pierre Sauvaire, son directeur photo) Là, on voit Laurent Boutonnat. MF : Et des tuyaux ! (on distingue en effet quelque chose derrière Laurent Boutonnat qui peut ressembler à des tuyaux) YC : Des tuyaux ? MF : (réalisant son erreur) Non, c’est une roue ! (c’est en effet une roue posée derrière Laurent Boutonnat) (rires) YC : Ah bon, ça va j’ai eu peur ! Laurent Boutonnat, donc, le réalisateur, qui est aussi l’arrangeur, le concepteur et le réalisateur du 33 tours. MF : Voilà. Là, y avait Jean-Pierre Sauvaire, qui est donc le chef opérateur qui travaille avec nous. YC : Et je crois aussi, je vous en ai entendu parler dans une autre émission on peut le dire, que le montage était très important pour vous, et que la monteuse, puisque c’est une monteuse… MF : (l’interrompant) Il est bien évidemment très, très important mais je disais là surtout que c’est pour moi un réel plaisir et une grande émotion que d’assister au montage, et spécialement de celui-ci parce que c’est un travail qui est énorme, et c’est vrai que Laurent Boutonnat travaille avec une monteuse qui est extraordinaire. YC : Oui, il faut reconnaître que c’est un travail d’équipe, ça aussi, parce que je crois que vous avez repris la même équipe, je crois. MF : Là, c’est réellement un travail du metteur en scène et d’une monteuse. YC : Alors, est-ce que, je sais pas, on peut attendre un troisième volet de « Libertine I », « Libertine II »…Un troisième volet ou… ? MF : Je le souhaiterais. Faut-il avoir la chanson !


Et puis, l’avenir…je ne sais pas ! YC : Dans la chanson, je crois qu’il y a pas de problèmes puisque sur ce 33 tours (« Ainsi soit je… ») vous avez écrit tous les textes. C’est ça ? MF : Oui. YC : Y en a une particulièrement que j’aime bien, c’est « Horloge » (sic !) MF : Oui, c’est un poème de Baudelaire. YC : C’est pas mal. Vous avez peur de la mort ? Parce que le temps, c’est un petit peu, donc, la base (du poème)… MF : Je vous dirai quand on naît et quand on est enfant, on a peur de la vie, et quand on vieillit, on a peur de la mort. J’en fais partie, oui. YC : Très bien. Alors maintenant : on en a parlé, on va le découvrir. Donc, dernière image de « Libertine »… MF : Oui… YC : On arrive donc, on est en pleine campagne. Faites un petit peu appel à votre imagination, mais pas beaucoup parce que les images parlent d’elles-mêmes, et on rentre dans ce clip, « Pourvu qu’elles soient douces ». Y a quinze minutes de clip, installez-vous confortablement  ! Vous allez découvrir Mylène comme peut-être vous ne l’avez jamais vue ! En tout cas, c’est parti : « Pourvu qu’elles soient douces » ! Diffusion du clip « Pourvu qu’elles soient douces » presque dans son intégralité. Le générique de fin est en effet coupé. YC : Dur d’arriver derrière un clip comme ça ! Et voilà, c’était « Pourvu qu’elles soient douces » pour la première fois en intégralité, donc, sur une chaîne de télé, c’est ça ? MF : Oui, absolument. YC : Alors bon, c’est bien joli de le regarder une première fois comme ça, mais où est-ce qu’on

pourra le voir après, ce clip ? Parce qu’il y a sûrement des personnes qui voudraient le voir à part, bien sûr, sur une cassette avec tous les clips de Mylène Farmer. MF : Nous avons en projet de faire une seconde compilation de clips, dans laquelle sera comprise donc « Pourvu qu’elles soient douces (Libertine II) », il y aura « Ainsi soit je… » et puis « Sans contrefaçon ». YC : Je les ai tous, là ! (il prend la cassette « Les Clips volume I » et lit le verso) Moi, j’ai « Maman a tort », « Plus grandir », « Libertine », « Tristana » et « Pourvu qu’elle soient douces ». MF : Voilà, donc « Sans contrefaçon »… (elle s’interrompt pour reprendre l’animateur assez sèchement) Non, « Pourvu qu’elles soient douces », non ! (le clip ne figure effectivement pas sur la vidéocassette que Yves Cara tenait dans ses mains) YC : Non, pas là-dessus. Enfin, on peut le rajouter ! MF : Voilà. Et je pense qu’à Noël, on fera un coffret. Donc tout ça, c’est en préparation. (un tel coffret ne verra jamais le jour, du moins pas à cette époque) YC : Pourquoi est-ce qu’on le verrait pas en première partie de films ou au cinéma tout bêtement ? MF : Parce que le minutage est beaucoup trop long. YC : Alors, quel est justement, là on en vient à une question assez simple, quel est je dirais l’intérêt – bien sûr il est esthétique, il est visuel, j’ai l’impression un peu que vous construisez une œuvre – mais est-ce que c’est vraiment utile un clip comme ça de quinze minutes, à part -c’est pas du tout une agression – pour vous faire plaisir ? MF : C’est pour se faire plaisir.

YC : C’est ça ? MF : Bien sûr. YC : C’est pour construire une œuvre, en fait. MF : Oui. Utile…Ce n’est jamais utile ! Je crois que c’est important pour moi parce que je montre deux facettes, et c’est allier l’image et la chanson. Mais c’est surtout un plaisir. YC : Et puis surtout la comédie, parce que votre premier métier c’était comédienne ! MF : (sèchement) Enfin « mon premier métier »… Je m’étais orientée, c’est vrai…J’ai suivi des cours de théâtre, c’est tout. Et puis Laurent Boutonnat, lui, sa grande passion, c’était le cinéma mais lui a démarré très, très jeune. YC : Oui, à seize ans, c’est ça ? MF : A seize ans il a fait son premier long-métrage. YC : Il a été présenté à Cannes, d’ailleurs. C’est impressionnant, quand même ! A seize ans, il faut le vouloir ! MF : (visiblement déjà beaucoup plus détendue) Oui ! (rires) YC : (…) Le long-métrage de Laurent Boutonnat sûrement avec Mylène Farmer : d’ici deux ans ? MF : On peut imaginer d’ici deux ans en tout cas le long-métrage de Laurent Boutonnat, oui. YC : En tout cas, il y pense très sérieusement. MF : Oui. YC : La chanson, c’est presque un hasard de rencontre avec Laurent, alors finalement ? MF : Je sais pas si on peut parler de hasard. Ce sont des rencontres comme ça qui existent. C’est en tout cas une bonne étoile, en ce qui me concerne ! YC : Oui, ça on peut le dire ! Une bonne étoile, quand même ! MF : Et puis après, c’est beaucoup de travail, aussi. YC : Une bonne étoile qui va vous amener


1988–1990 : Ainsi soit je…

directement sur la scène du Palais des Sports en mai 89, c’est ça ? MF : Absolument, oui. Oui. YC : Bon, on va pas en parler parce que je suppose que c’est encore en préparatifs et rien n’est décidé. MF : Oui, c’est en pleine préparation. YC : Simplement, y a une phrase que j’ai retenu dans un article de « France Soir », c’est : « C’est pas la peine de dramatiser, mais je joue ma vie, quand même ». MF : Oui. Mais j’ai la sensation de jouer ma vie je dirais presque tous les jours, mais là spécifiquement c’est vrai, sur une scène. YC : A ce point-là ? C’est quitte ou double, alors ! MF : C’est quitte ou double, bien sûr. YC : Bon. (…) On a des petites surprises et on va vous montrer un document que nous avons retrouvé concernant Mylène Farmer comme, encore une fois, vous ne l’avez jamais vue, regardez ! Mylène n’est pas au courant… Diffusion d’une séquence extraite de l’émission « Fan de » (rien à voir avec celle qu’animera plus tard Séverine Ferrer !) où des enfants se glissaient le temps d’une chanson dans la peau de leur chanteur favori. Ici, une fillette d’une dizaine d’années danse sur « Tristana » en perruque rousse et robe noire. YC : C’est impressionnant, non ?! MF : C’est touchant ! YC : (…) On a décidé de vous le montrer pour vous faire une surprise et puis de vous offrir la cassette. MF : C’est gentil. YC : Ça doit être impressionnant quand même quand au bout de quatre ans seulement, parce qu’il faut bien voir ça qu’en quatre ans de temps, y a complètement un mouvement de « Farmeniomania » comme on l’a vu tout à l’heure.

MF : On se rend pas bien compte. YC : Ah bon ?! MF : Moi je remercie Dieu tous les matins et tous les soirs. Mais on se rend pas bien compte, non. YC : Carrément, c’est un petit peu le rêve… Pourquoi ? Parce que volontairement vous restez en retrait de tout ça ou vous voulez pas accepter tout ce qui se passe autour ? MF : Parce que c’est quelque chose qui n’est pas réellement palpable. Quand on me demande de définir mon public, j’en suis un peu incapable, si ce n’est au travers du courrier, quand même, qui est très important et très, très intéressant. YC : (…) Est-ce que Mylène Farmer fera comme Kate Bush : elle nous fera des albums complètement fabuleux, mais est-ce que ses apparitions sur scène seront assez rares et épisodiques ? Ou est-ce que ça deviendra une passion ? On n’en sait rien encore ! MF : J’avoue que j’en sais rien. Je crois que je le ferai en tout cas une fois, et puis après, une fois de plus, on verra après. YC : D’accord. Bon, maintenant on a d’autres surprises (…). Je vous montre une première surprise. Puisque dans toutes les paroles bien sûr du clip…euh du 33 tours de Mylène Farmer (…) « Ainsi soit je… », y a « angélique » ou « démoniaque ». Alors nous, on a demandé à Hardy, qui est un dessinateur de BD (il montre un dessin sous verre représentant Mylène) voilà ce dessin qui est vraiment superbe, je trouve. Bien sûr, je vous l’offre. Il tend le cadre à Mylène, qui observe attentivement le dessin. MF : Merci beaucoup. YC : Est-ce que vous vous retrouvez dans ce dessin, donc ? C’est ange ou démon, quoi. MF : Peut-être pour la couleur des cheveux… (rire) YC : (…) Et puis surtout, tenez ! Là, je vous le laisse ouvrir. (Il lui tend un petit paquet ca-

deau.) Allez-y… (…) (Pendant que Mylène ouvre son paquet, il s’adresse à la caméra) Alors, je vais vous expliquer ce qu’il y a dans ce cadeau même si elle l’a pas encore tout à fait découvert. C’est un livre quasiment introuvable en France, on sait même pas s’il y a une traduction française. C’est un livre qui raconte la vie de Frances Farmer, et c’est pas tout à fait un hasard si on l’offre à Mylène Farmer puisque le pseudonyme Farmer, et bien c’est en hommage à Frances Farmer. MF : (regardant le verso du livre) Ah, c’est merveilleux. Très beau cadeau. (elle le feuillette) YC : C’est ça ? Je me suis trompé avec ce que j’ai dit, ou pas ? MF : Je ne vous répondrai pas. Mais c’est un très, très beau cadeau, en tout cas. YC : Ben si, faut me répondre, c’est pas du jeu, ça ! MF : Oui, c’est en hommage à cette femme. YC : Vous vous retrouvez un peu dans sa démarche, qui est simplement… c’est une vedette hollywoodienne qui n’a pas accepté le star-system, et puis qui a subi une lobotomie parce qu’elle est devenue folle. MF : Oui, voilà. C’était un film formidable, d’ailleurs (la vie de Frances Farmer a été adaptée au cinéma en 1983). YC : Avec Jessica Lange. En tout cas, voilà, c’est un cadeau de « Clip Dédicace ». MF : C’est un merveilleux cadeau, merci beaucoup. C’est en anglais, donc je vais faire des progrès ! (rires) YC : Y a une chanson en anglais, quand même, dans l’album ! (la chanson « La Ronde Triste ») MF : Oui ! (rires) YC : Mylène Farmer, merci beaucoup d’être venue toute une demi-heure pour nous présenter ce clip, « Pourvu qu’elles soient douces ». MF : Merci à vous. YC : J’espère qu’on le verra plus souvent sur M6 ! MF : Merci de votre accueil ! Fin de l’émission.

Avis de recherche

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Mylène Farmer

Date 14.10.1988 Chaîne TF1 Présenté par Patrick Sabatier

Sur le plateau de Patrick Sabatier, Mylène et ses deux danseuses livrent une prestation en tous points identiques à celle présentée

à « Sacrée Soirée » quelques jours plus tôt. C’est donc en petite robe noire à paillettes avec décolleté arrière renversant, et les cheveux en chignon que Mylène interprète « Pourvu qu’elles soient douces » sur une chorégraphie toujours aussi redoutable.


La Une est à vous

« S’il faut choisir une série, je choisis la dernière, parce que je trouve “Marie Pervenche” consternante ! »

Date 22.10.1988 Chaîne TF1 Présenté par Bernard Montiel

L’émission, qui mélange variétés et séries à la carte, est désormais présentée par Bernard Montiel. Chose assez inhabituelle pour l’émission, Mylène est présente sur le plateau pour répondre à quelques questions de l’animateur et donner son avis sur les séries du jour, chose qu’elle ne manquera pas de faire, aux risques et périls de Bernard Montiel ! On la retrouve plus tard dans l’émission pour interpréter « Pourvu qu’elles soient douces » avec ses deux danseuses. Assise sur un fauteuil face à Bernard Montiel, Mylène porte un pull et une veste marrons et a les cheveux lâchés. Bernard Montiel : (…) Bonjour, Mylène ! Mylène Farmer : Bonjour. BM : Alors Mylène Farmer, on peut pas parler avec vous de choses très…Ce que vous dites dans vos chansons, en général c’est toujours très fort, y a toujours des messages, y a un style de vie, y a un style qui vous correspond bien,

qui vous va bien, que vous menez depuis le départ et ça, c’est bien d’avoir gardé cette même image, la sincérité, certainement, de l’honnêteté, mais alors tout de même j’ai envie quand même de parler un tout petit peu avec vous de vos clips, qui sont tout de même absolument superbes et c’est Laurent Boutonnat qui les fait, je crois. MF : C’est vrai, c’est le réalisateur, oui. C’est celui aussi qui compose à mes côtés. BM : Alors, quelle est la participation de Laurent dans les clips ? Je crois que lui écrit les musiques, c’est ça ? Et dans vos chansons ? MF : (amusée) Dans les clips ou dans les chansons ?! BM : D’abord dans les chansons, si vous voulez, et après les clips. MF : Dans les disques, en premier lieu, il est compositeur, donc c’est avant tout la musique. Et moi, sur le dernier album « Ainsi soit je… », j’ai fait quasiment l’intégralité des textes, si ce n’est Baudelaire – le poème de Baudelaire – et puis une reprise de « Déshabillez-moi ». Et quant aux clips, c’est lui qui écrit la plupart du temps les scénarios, et c’est toujours une collaboration. BM : Dans ces clips, justement, Mylène Farmer, on vous sent très, très, très bien. Alors est-ce que vous avez envie un jour d’interpréter un grand rôle au cinéma ? De quoi vous avez envie

en fait quand vous… ? MF : (elle l’interrompt) Ça fait partie des projets que j’ai et des souhaits que j’ai, oui. BM : Et alors le moyen, comme ça, d’avoir un rôle au cinéma, ça veut dire quoi pour Mylène Farmer ? Et puis de s’impliquer autant dans vos clips… MF : D’avoir un rôle au cinéma, ça voudrait dire peut-être s’oublier un peu et puis avoir une autre vie, très certainement. BM : Avoir une autre vie… MF : Le temps d’une heure, c’est vrai ! Ce sera six mois de tournage mais c’est une heure de pellicule. BM : Est-ce que quand on joue des rôles comme ça, Mylène – et puis on va s’arrêter là parce qu’on va présenter les séries aux téléspectateurs- est-ce que quand on joue des rôles aussi bien comme vous le faites, que ce soit d’ailleurs sur scène, que ce soit dans vos clips, est-ce que c’est pas aussi un moyen de s’évader d’une certaine réalité ? MF : J’ai besoin de ça sinon je crois que j’en mourrai. C’est vrai que j’ai besoin de m’évader de la réalité, oui. (sourire) BM : J’ai lu quelque part dans la presse qu’elle avait des yeux d’anges déchu, et ça j’aime beaucoup ! Je la regarde et c’est vrai ! (rire gêné de Mylène) Bernard Montiel présente ensuite les séries du


1988–1990 : Ainsi soit je…

jour dans la catégorie « Aventures » (« Le nouvel homme invisible », « L’aventure est au bout de la route » et « L’Ouest aux deux visages ») et sollicite l’avis de Mylène. BM : Alors Mylène, laquelle des trois séries éventuellement aimeriez-vous voir cet après-midi ? MF : Si je vous réponds aucune… ! (rires) BM : Aucune ?! Ça, j’en étais sûr ! D’ailleurs j’avais dit : « Elle va dire aucune » ! (rires) Une des trois ?! Aucune ? MF : Heu…Probablement le western, alors ! BM : Ça, je m’en doutais ! Bon, elle regardera pas, Mylène ! (rires) C’est ensuite la catégorie « Comédie » avec au choix « La croisière s’amuse », « Marie Pervenche » et « Fame ». Là encore, l’avis de Mylène est sollicité. BM : Alors attention à la réponse de Mylène Farmer : laquelle des trois séries aimeriez-vous voir, Mylène ? MF : S’il faut en choisir une, je crois la dernière série, parce que je trouve « Marie Pervenche » consternante ! (rires) BM : C’est gentil, ça lui fera plaisir ! (rires) Bernard Montiel tente de reprendre son sérieux pour annoncer les séries de la catégorie « Policier » (« Mannix », « Mac Gruder et Lod » et « Cher inspecteur ») BM : Alors, Mylène ? (il rit d’avance)

MF : (dans un sourire) Je choisis « Chapeau melon et bottes de cuir » ! BM : (il rit tellement qu’il bafouille) Parfait ! Pourtant la violence, en général ça vous fait pas peur, Mylène, parce que dans vos clips y a beaucoup de violence ! MF : Oui, de la violence et du sang, mais quand bien même ! (rires) Présentation de la dernière catégorie, celle des fictions, avec les séries « Loin de ce monde », « La quatrième dimension », « Le sixième sens ». BM : Alors, Mylène ? Qui a l’air tout à fait étonnée par ce qui se passe… (rires) MF : Non, sans hésiter : « La quatrième dimension ». C’est toujours très bien filmé, intéressant, cohérent. Là, oui ! Je vote pour « La quatrième dimension » ! BM : (hilare) Alors ça, ça me fait plaisir ! Enfin elle aime quelque chose dans l’émission ! Merci Mylène ! MF : Merci ! BM : De toute façon, on se retrouve tout à l’heure : vous allez chanter « Pourvu qu’elles soient douces », tiré de votre dernier album. Plus tard dans l’émission, on retrouve Mylène qui s’est changée entre-temps pour interpréter son titre. C’est en effet les cheveux en chignon et en robe noire pailletée dos nu qu’elle chante « Pourvu qu’elles soient douces » accompagnée de ses deux danseuses sur le plateau de l’émission.

Jacky Show

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Mylène Farmer

Date 06.11.1988 Chaîne TF1 Présenté par Jacky

Mylène fait à nouveau escale sur le plateau de Jacky, cette fois-ci pour interpréter « Pourvu qu’elles soient douces ». Sur un podium installé face au jeune public, Mylène effectue sa chorégraphie avec ses deux danseuses. Si elle est de nouveau habillée de sa courte robe noire à paillettes (comme lors des quatre premières prestations), elle porte cette foisci les cheveux lâchés. Lorsque la chanson s’achève, Mylène et ses danseuses tiennent la pose alors que Jacky les rejoint sur le podium.


Le monde est à vous Date 06.11.1988 Chaîne Antenne 2 Présenté par Jacques Martin

C’est la première fois (et accessoirement la dernière) que Mylène se produit sur le célèbre plateau dominical de Jacques Martin, bien qu’il soit incontournable à l’époque. Elle y est présente pour interpréter « Pourvu qu’elles soient douces ». Jacques Martin annonce Mylène. Celle-ci arrive du fond du plateau, aussitôt rejointe par ses deux danseuses. La tenue est la même que lors des précédentes prestations de « Pourvu qu’elles soient douces », à savoir robe noire pailletée à dos nu, mais Mylène comme le matin même au « Jacky Show » porte les cheveux lâchés sur ses épaules. Détail insolite, Mylène a un micro main, ce qui la handicape plus ou moins pour sa chorégraphie. Il faut prendre en compte le fait que la tradition de cette émission voulait que les artistes chantent systématiquement en direct, ou du moins par dessus leur playback pour certains. Exception a été faite pour Mylène qui s’acquitte néanmoins de tenir un micro. La chanson terminée, Mylène se voit remettre une immense gerbe de fleurs des mains de Jacques Martin, qui la couvre de compliments.

Jacky : Bonjour Mylène Farmer ! Ça va ? Mylène Farmer : Très bien, et toi ? J : Je veux savoir : est-ce que tu peux me gifler ?! Sous les cris du public, Mylène prend la tête de Jacky entre ses mains et lui fait un gros bisou. L’animateur est ravi ! MF : Je peux demander aux danseuses aussi ! J : Ah c’est sympa, mais est-ce que tu peux encore me gifler comme ça ?! MF : (elle lui montre sa main) Tu la vois, cellelà ?! (rires) En même temps, Sophie Tellier et Dominique Martinelli entourent Jacky. Accompagnées de Mylène, elles déposent chacune un gros bisou sonore sur la joue de Jacky, visiblement aux anges ! J : (au public) C’est sympa, non ?! (A Mylène) Tu t’es fait un shampooing aux carottes ? MF : (elle semble avoir du mal à entendre à cause de la musique de fond) …Shampooing… ?! J : …aux carottes ! MF : Oui.

J : Bon. Merci, Mylène Farmer ! MF : Tu peux me parler français une fois ?! J : You speak english ?! MF : I speak english ! (rires) Jacky salue ensuite Mylène puis celle-ci quitte le podium, suivie de ses danseuses.

Jacques Martin : Mylène Farmer, sous vos applaudissements qu’elle mérite véritablement. Permettez-moi de vous donner ces quelques fleurs. C’est la première fois que j’ai le plaisir de vous accueillir (...) et je voudrais vous remercier d’être venue ! Mylène Farmer : Merci à vous, et merci à tout le public. Mylène salue le public et quitte le plateau sous de chaleureux applaudissements.


1988–1990 : Ainsi soit je…

Du côté de chez Fred

Date 07.11.1988 Chaîne Antenne 2 Présenté par Frédéric Mitterrand

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Mylène Farmer

On pourrait être surpris de retrouver Mylène dans cette émission culturelle de l’aprèsmidi. Toutefois, elle n’y est pas si incongrue puisque Frédéric Mitterrand consacre son émission au cinéma de l’Est, l’une des passions de Mylène, ainsi qu’au métier de décorateur de cinéma. Mylène est donc invitée parmi d’autres intervenants, assise à côté du cinéaste russe Sergei Paradjanov, habillée d’un ample tailleur blanc cassé et les cheveux lâchés rabattus d’un côté de son visage. Elle est sollicitée à plusieurs reprises par l’animateur et conclut l’émission en interprétant « Puisque » (seule télé pour ce titre dont la musique sert de générique de fin au clip de « Libertine II »).

Frédéric Mitterrand : (il annonce ses différents invités) (...) Il y a un événement, c’est la sortie du clip de Mylène Farmer. Mylène Farmer est certainement une des personnalités les plus intéressantes du show-business français (à ces mots, Mylène baisse les yeux et a un sourire gêné). Elle a un univers extrêmement fort, construit avec énormément de qualité et son clip fait figure d’événement dans le monde du clip. Je voulais que Mylène Farmer soit présente en face de deux génies du cinéma (Alexandre Trauner et Sergei Paradjanov), de manière à ce qu’on puisse confronter son univers et le leur, elle qui commence. Après s’être longuement entretenu avec ses deux invités principaux, Frédéric Mitterrand se tourne vers Mylène. FM : (...) Je voudrais donner la parole à Mylène Farmer parce que Mylène Farmer a un parcours tout à fait singulier dans la chanson et dans le cinéma français. Elle fait des clips, mais des clips qui sont très longs, qui sont complètement hors des normes et qui sont tout à

fait remarquables, avec Laurent Boutonnat. Je voulais demander à Mylène Farmer quand elle vient d’entendre Alexandre Trauner et Sergei Paradjanov, toutes proportions gardées, Mylène Farmer, vous êtes aussi une solitaire dans la chanson française : qu’est-ce que vous retirez comme impression de ce que vous les avez entendus dire ? Mylène Farmer : Beaucoup d’humilité de ma part. Je pense que ce sont des personnes qui ont souffert beaucoup plus que moi. C’est vrai que moi j’ai un tempérament qui est très solitaire... D’autre part, je suis très émue parce que moi-même j’ai tenté d’apprendre la langue russe et que pour moi le plus beau cinéma, c’est le cinéma russe. Je l’ai découvert au travers de Tarkovski, Elem Klimov et j’ai hâte de découvrir les films de ce metteur en scène (elle désigne son voisin, Sergei Paradjanov) et je suis très émue ! (rire gêné) FM : Et pourquoi, Mylène, imposer – ce doit être très difficile – ce format par exemple de clips qui sont comme de véritables films ? On va voir un extrait malheureusement trop court du clip, et puis Mylène devait chanter pour

« J’ai une philosophie : je préfère manger des pâtes tous les jours et pouvoir m’offrir ce genre de clips. »


nous, et puis on a perdu du temps sur cette émission (...) malheureusement Mylène ne pourra pas chanter, donc on verra simplement un extrait du clip (Mylène chantera pourtant bel et bien en fin d’émission) mais vraiment l’univers de Mylène Farmer est très, très sobre et très, très cohérent. MF : Je dirai la première réponse : par amour pour le cinéma, qui est commun à Laurent Boutonnat et à moi-même, et d’autre part surtout pour s’échapper de la réalité, de tout ce que peut être le quotidien... Le rêve, avoir un besoin d’imaginaire, de vivre et de survivre. FM : Mais les maisons de disques doivent être réticentes, ou les producteurs doivent être réticents à faire un clip de dix-sept minutes  en scope ! MF : Vous savez, nous avons beaucoup investi dans ce clip et dans tous les clips précédents. C’est vrai que moi j’ai une philosophie : je préfère manger des pâtes tous les jours et pouvoir m’offrir ce genre de choses, de cinéma. FM : Alors on regarde le clip. Un court extrait du clip « Pourvu qu’elles soient douces » est diffusé.

artistique... un conseiller historique, lapsus ! (sourire) FM : Alors, vous avez une relation très, très forte avec Laurent Boutonnat, c’est à dire que c’est toujours les mêmes gens avec qui vous travaillez. MF : C’est vrai. Mais ça, c’est des choses aussi qui sont essentielles, je crois, dans la vie d’un artiste, c’est d’avoir une équipe solide et puis des univers communs. C’est pourquoi je continue avec Laurent Boutonnat, avec Bertrand Le Page et puis la maison de disques, bien sûr. L’émission continue, notamment avec une interview de Hugh Grant, présent sur le plateau. Frédéric Mitterrand se tourne ensuite à nouveau vers Mylène. FM : Mylène Farmer, vous qui n’êtes pas du tout horrible dans le clip du XVIIIe siècle mais qui êtes au contraire absolument ravissante, pourquoi est-ce que cet univers du XVIIIe siècle semble vous fasciner ? MF : Je dirais d’abord on a voulu faire la suite

FM : Malheureusement, on a eu juste une minute du clip, mais Mylène ce clip je le trouve si bien, on va faire tout un truc autour, on va faire toute une émission autour et autour du principe que ce clip dure dix-sept minutes, c’est à dire qu’il se regarde véritablement comme un film (aussi alléchante que soit cette idée, elle n’aboutira malheureusement pas). Je voulais juste vous demander comment est-ce que vous avez organisé le travail sur le clip ? MF : Je crois de la même façon qu’on peut organiser un travail sur un long-métrage avec la même rigueur, les mêmes exigences. C’est vrai qu’on fait appel à des décorateurs, que c’est des choses fondamentales que d’avoir un très bon décorateur, que d’avoir un très bon chef opérateur, que de construire un scénario. D’autre part, nous avions aussi un conseiller

Cocoparadise Date 16.11.1988 Chaîne TF1 Présenté par Stéphane Collaro

Les émissions de Stéphane Collaro (de retour sur TF1) changent de nom mais se ressemblent toujours. Pour sa dernière apparition dans l’une des émissions de l’animateur, si Mylène ne participe plus à un sketch entier,

elle arrive néanmoins à la fin d’un d’entre eux. Elle est effectivement annoncée à la fin d’un sketch portant sur une école de danse. L’un des comédiens vient alors chercher Mylène dans les coulisses et l’envoie sur le plateau, où elle rejoint ses deux danseuses pour chanter « Pourvu qu’elles soient douces », dans sa robe pailletée à décolleté arrière et les cheveux coiffés en chignon. La chanson finie, Mylène salue puis quitte le plateau.

de « Libertine », donc c’est peut-être aussi le propos qui était plongé dans le XVIIIe siècle. Pourquoi ? Peut-être parce que je suis un peu passéiste et que j’ai du mal à m’imaginer comme étant un personnage de 88. C’est vrai, j’ai beaucoup de mal… Si j’avais à choisir un film, j’aurais du mal à choisir un film d’aujourd’hui, c’est vrai. FM : Vous auriez été bien dans « Les enfants du paradis » ? MF : J’aurais bien aimé, c’est vrai ! (rire amusé) L’émission continue. Pour la terminer, on retrouve Mylène assise à même le sol, isolée dans un coin du plateau, pour chanter la face B de « Pourvu qu’elles soient douces » : l’inédit « Puisque ». Son interprétation est sobre et colle parfaitement à l’ambiance désespérément romantique de la chanson. Mylène termine sa prestation en se cachant le visage dans la main. Notons qu’il s’agit ici d’une version légèrement raccourcie de « Puisque », inédite sur disque. Après la chanson, Mylène rejoint Frédéric Mitterrand qui conclut l’émission.


1988–1990 : Ainsi soit je…

III victoires de la musique e

Date 19.11.1988 Chaîne TF1 Présenté par Patrick Sabatier

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Mylène Farmer

Troisième édition des Victoires de la Musique. Suite à ses différents succès et sa popularité grandissante et reconnue, on retrouve logiquement Mylène nominée dans la catégorie « Interprète féminine de l’année », face à France Gall et Guesch Patti. Le prix qui concerne Mylène est remis par Alain Souchon. Après qu’une photo de chacune des trois concurrentes ait été montrée à l’écran, le chanteur ouvre l’enveloppe qui contient le nom de la gagnante et annonce que celle-ci est… Mylène Farmer ! Mylène arrive alors des coulisses, vêtue d’un ensemble blanc assorti composé d’un chemisier et d’un pantalon large et d’une ceinture en cuir à double boucle dorée, les cheveux sauvagement lâchés. Elle part directement jusqu’au milieu du plateau, au lieu d’aller vers le pupitre où l’attend Alain Souchon, avec le trophée. Elle s’arrête net et prend la parole, balbutiant maladroitement

ses remerciements. Il s’installe alors un malaise sur le plateau.

monie, mais il décide finalement de la raccompagner jusqu’à l’entrée des coulisses !

Mylène Farmer : Bonsoir. Patrick Sabatier : (off) Qu’est-ce qui se passe ?! MF : Je vous remercie de m’avoir témoigné et accordé de l’affection par rapport à mon travail. (A ce moment, Alain Souchon arrive derrière Mylène pour se tenir à ses côtés et lui remettre son trophée. Son arrivée surprend Mylène qui a un mouvement d’étonnement) Voilà, je suis touchée. Un peu triste... Alain Souchon : Pourquoi tu es triste ? MF : ...mais heureuse. C’est tout. Merci à vous.

Mylène explique plus tard avoir passé l’aprèsmidi précédant la cérémonie dans les coulisses et qu’elle n’y a vu que des gens qui se font la bise pour mieux s’insulter sitôt le dos tourné. Ecoeurée par cette hypocrisie, elle est arrivée extrêmement mal à l’aise sur le plateau. Elle y est néanmoins allée car elle tenait avant tout à remercier le public (et non les professionnels, bien que ce soit eux qui lui aient décerné le prix !). Il faut savoir également que Bertrand Le Page avait refusé préalablement que Mylène ne chante à la cérémonie, arguant que l’orchestre de l’émission n’était qu’un orchestre de bal ! Mylène est donc la seule artiste récompensée et présente à ne pas chanter. Pour finir, Mylène enfonçe le clou en déclarant plus tard qu’elle a été très triste et déçue de constater qu’aucun nom n’était gravé sur son trophée. Cet anonymat l’attriste encore plus. A l’évidence, Mylène n’a jamais remis les pieds aux Victoires depuis, malgré plusieurs nominations. Pas même en mars 2005, lorsque, pour la XXe édition des Victoires de la Musique, le prix ultime de « la meilleure artiste féminine de ces vingt dernières années » lui a été décerné.

Alain Souchon remet alors son trophée à Mylène, sous les applaudissements polis du public. Le chanteur tente de prendre Mylène par l’épaule, mais celle-ci esquive. MF : (presque dans un sanglot) Et avant tout, je voudrais dire un grand, grand, grand merci au public. Voilà. Mylène est sur le point de quitter le plateau, mais Patrick Sabatier la retient et la garde auprès de lui pour annoncer la suite de la céré-

« Voilà, je suis touchée. Un peu triste… Mais heureuse. Merci beaucoup. »


Interchallenges Date 20.11.1988 Chaîne TF1 Présenté par Bernard Montiel

Au lendemain de la cérémonie des Victoires de la Musique quelque peu mouvementée, Mylène est en direct sur le plateau de cette émission de Bernard Montiel qui mélange défis et variétés pour interpréter « Pourvu qu’elles soient douces ». On la retrouve donc, bien plus

détendue et souriante que la veille, entourée de ses deux danseuses, dans sa robe noire à paillettes, les cheveux lâchés. La chanson finie, Bernard Montiel rejoint Mylène, que le public acclame. Bernard Montiel : Bravo Mylène ! Mylène Farmer : Bonsoir ! BM : Bonjour ! MF : Bonjour, et bonjour à vous tous ! (elle adresse un signe de main au public) BM : Merci Mylène. Je voudrais qu’on l’applaudisse encore, Mylène Farmer, très fort. Au nom de tous les hommes qui rêvent de ça, je t’embrasse ! (il joint le geste à la parole) Et mille mercis d’être venue après t’avoir applaudie aux Victoires de la Musique hier soir. Merci Mylène Farmer ! MF : Merci à vous, au revoir ! Mylène salue une fois encore le public puis quitte le plateau.

Une soirée pour les restos Date 17.12.1988 Chaîne TF1 Présenté par Jean-Pierre Foucault

Cette grande soirée présentée en direct par Jean-Pierre Foucault est une des premières à avoir été organisée en faveur des tous jeunes Restos du Coeur. Elle coïncide avec l’arrêt de fabrication du mythique Solex (ancêtre de la mobylette). Il a donc été décidé de mettre aux enchères les quatrevingts derniers modèles fabriqués auprès des téléspectateurs de TF1 – seize d’entre eux étant dédicacés par une vedette. Parmi elles, on compte Mylène. Mylène arrive sur le plateau aux côtés de JeanPierre Foucault pour présenter l’exemplaire du Solex qu’elle a dédicacé, et pour chanter « Pourvu qu’elles soient douces ». Elle porte pour l’occasion une tenue inédite (exit la robe noire à paillettes) : une courte robe noire au patron inversé – comprenez par là que le devant est derrière et vice-versa, ce qui est toujours cohérent avec le thème de la chanson. Ses che-

veux sont une fois encore retenus en un chignon serré. Jean-Pierre Foucault : (...) Il faut que ce Solex, Mylène, rapporte beaucoup d’argent ! Mylène Farmer : Je le souhaite. C’est vrai que c’est une cause qui me tient à coeur, donc je vous demande alors d’appeler pour cette cause. Jean-Pierre Foucault invite alors Mylène à prendre place pour sa chanson pendant qu’il annonce le numéro de téléphone à appeler pour enchérir. Sur le plateau, Mylène chante ensuite « Pourvu qu’elles soient douces » entourée bien sûr de ses deux danseuses. Pour information, ce 17 décembre, la chanteuse est, pour la troisième semaine consécutive, en tête des ventes de singles en France ! Elle y restera encore deux semaines. « Pourvu qu’elles soient douces » est alors le plus gros succès de sa carrière. La chanson terminée, elle rejoint Jean-Pierre Foucault qui s’enquiert auprès du standard des différentes enchères et apprend notamment qu’un téléspectateur, un Samir T., a mis une option à 120.000 Frs (18.300€) sur le Solex dédicacé par Mylène, ce qui semble impressionner cette dernière !


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© Sygma-Corbis

Mylène Farmer

1988–1990 : Ainsi soit je…


© Sygma-Corbis

JPF : (...) Mylène, un mot ? 120.000 Frs, c’est important ! (...) MF : En tout cas, je vais moi-même participer et je vais vous remettre ce chèque. Mylène sort de derrière son dos un chèque plié en deux qu’elle remet à Jean-Pierre Foucault. JPF : (touché du geste de Mylène) Oh, c’est gentil. Merci beaucoup Mylène ! Merci ! Je vais remettre ce chèque tout de suite de votre part au ministre délégué au budget. Merci Mylène. Le public applaudit chaleureusement la générosité de Mylène. L’émission continue sans que Mylène n’intervienne à nouveau. On l’aperçoit cependant à plusieurs reprises assise parmi les autres invitées autour de petites tables rondes.

Avis de recherche Date 30.12.1988 Chaîne TF1 Présenté par Patrick Sabatier

En cette toute fin d’année, Mylène clôt la promotion de « Pourvu qu’elles soient douces » sur le plateau de Patrick Sabatier où elle était déjà passée deux mois plus tôt. Elle porte pour cette occasion une veste noire à queue de pie et une minijupe noire, et a les cheveux lâchés. C’est entourée de ses deux fidèles danseuses qu’elle effectue sa chorégraphie habituelle. Lorsque la chanson se termine, Mylène et ses danseuses tiennent la pose pendant que le rideau du plateau se ferme sur elles. On les aperçoit alors quitter la scène pendant que Patrick Sabatier rappelle que l’année à venir verra Mylène faire ses premiers pas sur scène.


1988–1990 : Ainsi soit je…

La Une est à vous Avis de recherche Date 24.02.1989 Chaîne TF1 Présenté par Patrick Sabatier

Date 11.03.1989 Chaîne TF1 Présenté par Bernard Montiel

Mylène commence l’année 89 comme elle a fini 88 : sur le plateau de Patrick Sabatier. Mais cette fois, elle vient défendre « Sans logique », son nouveau single. Elle offre une interprétation saisissante de la chanson. Seule sur le plateau, vêtue d’un tailleur noir très strict, elle effectue une chorégraphie endiablée, les cheveux lâchés volant autour de son visage au regard perdu. Le rendu visuel saccadé est à la hauteur du thème schizophrène de la chanson.

Nouvelle visite de Mylène dans l’émission du samedi après-midi de TF1. Bernard Montiel semble ravi de recevoir à nouveau la chanteuse sur son plateau. Il répète d’ailleurs à quel point il apprécie la chanteuse. Dans un coin isolé du plateau, Mylène, vêtue d’une large tunique blanche à pompons façon Pierrot lunaire et les cheveux

Jacky Show

Mylène Farmer

1989

Date 18.03.1989 Chaîne TF1 Présenté par Jacky

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coiffés en catogan, interprète « Sans logique ». Si la chorégraphie est toujours aussi spasmodique, Mylène semble bien plus sereine que lors de sa prestation précédente ! Au retour plateau, Bernard Montiel souligne d’ailleurs la difficulté pour le réalisateur de l’émission de suivre Mylène dans ses déplacements ! Il annonce ensuite les débuts sur scène de Mylène à SaintEtienne au mois de mai à venir.

En ce samedi de Pâques, Jacky reçoit sur son plateau Mylène qui vient chanter « Sans logique ». Elle porte la même tunique de Pierrot que la semaine précédente chez Bernard Montiel. Elle danse à quelques mètres à peine d’un public jeune visiblement conquis. Lorsque la chanson s’achève, Jacky, un ruban noué autour de la tête, apporte un gros œuf de Pâques à Mylène. Jacky : Joyeuses Pâques, Mylène Farmer ! Mylène Farmer : (elle prend l’œuf en chocolat) Joyeuses Pâques ! (elle désigne son œuf) C’est un chocolat factice, je crois ! J : Je sais pas, essaye de le manger pour voir ! Comment tu me trouves en œuf de Pâques ?

MF : On dirait une rage de dents ! J : (d’abord interloqué) Ben ça tombe bien, parce que c’est vraiment une rage de dents ! MF : (rires) Bon ! J : Qu’est-ce que ça t’évoque, Pâques, toi ? MF : Une rage de dents. J : Uniquement ? MF : Oui. J : Tu planquais pas les œufs de Pâques dans le jardin ? MF : Non. Je n’aime pas le chocolat, moi ! On en a déjà parlé ! J : Pardon ? MF : Je n’aime pas le chocolat ! J : Ah, tu as horreur du chocolat ? Ah bon d’accord. Ben merci Mylène Farmer d’être venue au « Jacky Show » pour ce week-end pascal. MF : Merci à vous. Vous avez un public merveilleux, en tout cas ! (Mylène sourit au public qui aussitôt l’acclame) J  : C’est vrai  ! Qu’est-ce qu’on peut dire d’autre ? MF : « Merci Mylène Farmer » ?!


J : Bon ! (il désigne les pompons de sa tunique de Pierrot) Et les pompons, tu les as fait toi-même ou… ? MF : Non, c’est acheté, tout ça ! J : Non ? Pardon ? MF : C’était déjà confectionné ! J : C’était déjà confectionné ? Est-ce que tu es toujours amoureuse de moi ? MF : Non, tu te trompes d’animateur, je crois ! (rires) J : Ah, tu es amoureuse d’un autre animateur ?! MF : Je ne sais pas, je réponds à ta question ! J : Ah bon, non, non mais je te demande ça comme ça ! Et « Sans logique », ça veut dire quoi ? MF : Ça ne veut rien dire. J’ai toujours décidemment beaucoup de mal avec tes questions Jacky ! (rires) J : Ah bon, d’accord ! Est-ce que tu aimes les films en noir et blanc ? MF : Oui, éventuellement oui… J : Ben ça tombe bien parce que voilà Nick Kamen (jeune chanteur américain de la fin des années 80 qui était produit notamment par Madonna). Qu’est-ce que tu en penses ? MF : Qu’il a beaucoup de talent. Jacky lance le clip de Nick Kamen.

Fréquenstar

Date 22.03.1989 Chaîne M6 Présenté par Nagui

Nagui reçoit Mylène Farmer sur le plateau de son émission qui n’a rien à voir, malgré un titre identique, avec l’émission que créera Laurent Boyer quelques années plus tard. Mylène vient y présenter son nouveau clip, celui de « Sans logique », dont c’est la première diffusion. Habillée d’une veste noire, d’un pantalon noir et les cheveux rehaussés en un chignon strict, elle répond également aux questions de Nagui et a sélectionné quelques clips qu’elle souhaitait diffuser dans l’émission. L’ambiance oscille entre tension et bonne humeur, Mylène ayant visiblement parfois du mal avec l’humour de Nagui ; et, réciproquement, Nagui semble quelques fois désarmé face à Mylène. Il jongle avec le tutoiement, le vouvoiement mais parvient néanmoins à faire parler Mylène de ses goûts littéraires, musicaux, de sa tournée à venir et même de son appartement !

Nagui : Mylène Farmer, merci d’avoir accepté notre invitation. Mylène Farmer : Merci (sourire gêné)

N : C’est très gentil à toi, on est très contents, on est heureux comme tout ! La programmation musicale : tu écoutes beaucoup de musique en règle générale, dans ta vie ? MF : Beaucoup de musiques de films. N : Beaucoup de musiques de films ? Des bandes originales ? MF : Oui. N : Là en ce moment, tu as la tête prise par quelle musique de film ? MF : Toujours « Mission » (film réalisé par Roland Joffé en 1986). J’ai du mal à en… N : C’est pas vrai ? Mais pourtant y en a eu d’autres depuis : y a eu « Le Grand Bleu », y a eu « Bagdad Café », y en eu plein ! MF : « Bagdad Café » oui, merveilleuse. N : C’est bien, hein ? Et tu vas voir les films qui correspondent aux bandes originales ou tu te contentes de la musique ? MF : Je me contente de la musique parfois, quelquefois j’y vais aussi à cause de la musique. N : D’accord… MF : Et quelquefois, le contraire. N : C’est marrant, y a pas une seule bande originale dans tous les clips que tu as choisis. MF : Non, parce qu’on a un petit peu trop vu « Bagdad Café ». « Mission », je pense pas que vous l’auriez passé. Si ? N : Ah ben on se gêne pas pour en passer d’autres, hein ! MF : Ah, je ne savais pas. N : Ah ben, on le fera la prochaine fois ! MF : D’accord. N : Ça sera une occasion de revenir (rires). Elle


1988–1990 : Ainsi soit je…

est notre invitée, et par la même occasion on en profite pour vous présenter son clip, qui sera « clip des clips ». Du Mylène Farmer matin midi et soir, pendant une semaine ! Tout ça à la veille d’une tournée dont nous reparlerons tout de suite après ce tout nouveau clip, « Sans logique ». Elle est pourtant Vierge, hein, elle est pas Taureau, contrairement à ce que vous allez pouvoir voir dans le clip ! (Mylène sourit) Le clip de « Sans logique » est diffusé en entier.

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Mylène Farmer

N : Voilà. D’où la pochette, vous comprendrez, pour la trace de sang qu’il y a sur le clip de Mylène Farmer, « Sans logique ». On va en reparler bien sûr de ce clip, d’abord voyez le cadeau que vous allez pouvoir gagner grâce à cette merveilleuse émission que nous vous présentons sous vos yeux ébahis : vous allez pouvoir gagner le compact d’« Ainsi soit je », l’album, le compact de « Cendres de lune », l’album, la cassette vidéo des clips volume 1, la cassette volume 2 des clips (Nagui bafouille un peu pendant son énumération) et le baladeur avec la cassette de l’album dedans. (On voit tous ces cadeaux à l’écran) Pff, c’est beaucoup de cadeaux, tout ça ! MF : (suite aux bafouillages de Nagui) C’est compliqué, le français ! N : Hein, c’est compliqué, hein ! Surtout pour quelqu’un qui est pas forcément né là-dedans. (Mylène rit) Nagui revient alors sur le concours de la semaine précédente avant de se tourner à nouveau vers Mylène. N : On va voir défiler les dates de la tournée. Ça démarre le 18… MF : Le 18 mai, jusqu’au 25… N : …mai, ça c’est pour les dates parisiennes. Ensuite y a plein de dates en province et puis

comme y avait encore du monde, parce que là c’est déjà complet pour le Palais des Sports, vous avez rajouté une, voire deux dates, à Bercy au mois de décembre pour clore cette tournée. (Mylène acquiesce) Retour à la case départ, ça c’est génial ça ! MF : Oui c’est formidable. N : On peut rajouter une troisième date, si ça continue, non ? MF : Eventuellement… N : On va pas se gêner pour se faire du bien ! Ça comporte combien de personnes le Palais des Sports ? MF : Je crois que c’est autour de cinq mille personnes. N : Cinq mille personnes et y a sept soirs déjà pleins ? MF : Oui. N : Bon, ce qui fait déjà deux Bercy à lui tout seul, donc y a aucun problème, on peut en rajouter, c’est l’équivalent. Alors Mylène, « Sans logique » c’est un… Moi je suis surpris, on te voit pas nue dans « Sans logique », c’est bizarre après « Libertine » et « Pourvu qu’elles Soient Douces »… MF : C’est de la provocation, ça, Nagui ! N : Non je sais pas ! Ben écoute, c’est de la provocation aussi ce que tu fais des fois dans les clips. MF : Non, le sujet ne se prêtait pas à la nudité, c’est tout. N : Voilà. Alors en fait, tu as dit souvent dans la presse que le but n’était pas forcément de provoquer mais que s’il y avait certaines scènes qui pouvaient dérouter les gens, c’était parce que ça dépendait plus du sujet que du simple plaisir que de les choquer. MF : Oui. Moi je n’ai aucun plaisir à me dénuder sur un plateau. C’est assez difficile, même si c’est en équipe réduite, c’est toujours plus

difficile… N : Oui mais enfin on devine que ça va être vu par des millions de gens, aussi… MF : C’est vrai, mais ça on n’y pense pas. Il y a cette espèce de divorce, comme ça, sur le tournage. C’est pas la même chose. N : C’est l’artistique distingué du vulgaire, c’est ça ? MF : Je crois que oui, il y a un espèce d’inconscient, je crois, que de faire ça. Et puis quand bien même, hein ?! (large sourire) N : Oui : sans contrefaçon, on se fout du qu’endira-t-on ! Alors, est-ce que tu as un côté justement inconsciente ou plutôt très, très, très consciente de tout ce qui se passe ? MF : Je ne sais pas si je suis l’incarnation de la cartésienne, je crois pas, non. Mais je crois que j’ai les pieds en tout cas sur terre, oui. N : T’as les pieds sur terre, et tu sais complètement ce que tu fais, ce que tu dis : tout est pesé, réfléchi et calculé. Quand tu écris les textes d’une chanson, c’est maîtrisé, dans tous les sens du terme. MF : Oui, j’essaye en tout cas de les maîtriser. Je crois qu’il y a pas de perfection mais j’essaye d’y accéder. N : OK. Alors, encore une fois dans ces fameuses interviews – c’est vrai que tu en donnes pas beaucoup des interviews… MF : Parce que je ne m’y sens pas très à l’aise, c’est la seule réponse je crois. N : Là, ça va pas bien ? MF : Pas très bien, non ! (sourire) N : Bon on va essayer que ça aille mieux ! Tu me dis, tu me fais un petit signe dès que ça va un tout petit peu mieux ! (rire de Mylène) Y a beaucoup de références dans ce que tu dis à Baudelaire, auquel tu rends un hommage dans « L’Horloge » en mettant en musique avec Laurent…


MF : Y a d’autres auteurs, mais c’est vrai que j’aime beaucoup Baudelaire. J’aime beaucoup… N : Edgar Poe ! MF : Edgar Poe, c’est vrai. N : Et Luc Dietrich. MF : Luc Dietrich. J’aime beaucoup le théâtre de Strindberg, mais il y en a tant d’autres. Je cite un petit peu, c’est vrai, toujours les mêmes parce que ce sont effectivement des livres de chevet. N : Bon, et généralement si on prend Baudelaire et Edgar Poe, ils ont des problèmes existentiels. Là, tu as demandé Jacques Brel avec « Ne me quitte pas », ce qui peut aussi être un… MF : …qui pourrait faire partie de la même famille, certainement, oui. Pour moi, c’est probablement le plus grand interprète, avec Reggiani aussi. J’aime beaucoup Reggiani. Et « Ne me quitte pas », c’est un cri qu’on formule très souvent. Diffusion d’une séquence d’archive où Jacques Brel interprète « Ne me quitte pas ». N : Une petite précision : en plus de tous les cadeaux que nous vous avons montré tout à l’heure, vous allez pouvoir gagner également deux invitations pour aller voir Mylène Farmer en concert, que ce soit à Paris ou en province, vous pouvez écrire de partout. Et puis concernant – voilà l’affiche (l’affiche du spectacle apparaît à l’écran) – donc ce Palais des Sports, mais y a également les concerts parisiens du Palais Omnisports de Paris Bercy, les places ne seront en vente qu’à partir du mois d’avril. MF : Oui. N : C’est ça, hein ? MF : Paraît-il… N : Oui d’accord, mois d’avril. Bon alors, à propos de Jacques Brel, et pour revenir à ce côté Baudelaire et Edgar Poe, on a l’impression que par moments, tu portes tout le malheur de la Terre sur tes frêles épaules. MF : C’est lourd, quelquefois ! N : C’est lourd, hein ?! MF : Moi-même, je suis très frêle et c’est difficile parfois. N : Mais pourquoi ? Qu’est-ce qui s’est passé ? Je veux dire, sans faire de confessions ou de psychanalyse, c’est récent comme tournure d’esprit, ou c’est quelque chose qui a toujours été ancré en toi comme sentiment ? MF : Je vais dire quelque chose d’autre : c’est pour ça que moi je n’aime pas les interviews parce que je préfère, c’est vrai, dévoiler la nature de mes sentiments dans mes chansons plus que dans les interviews. Pourquoi avoir toujours besoin de se justifier ? N : Je parle pas de justification, je demande

simplement d’où ça vient. MF : Je ne sais pas. Y a des personnes, je crois, qui sont plus prédisposées à être heureuses ou malheureuses. J’en sais rien. Je ne dis pas que je suis malheureuse… N : Ah non, t’as tout pour être heureuse, là ! MF : …je dis que je suis foncièrement lucide, ce qui engendre, je crois, quelquefois des désillusions et quelquefois du bonheur aussi. N : Y a un inconvénient, j’allais dire, ou un enchaînement tout à fait logique, c’est que ton public s’identifie à tes goûts et à ta manière de voir la vie. On parle de Baudelaire, c’est le spleen, c’est la maladie du siècle, c’est « Les Fleurs du Mal », enfin bon (il s’adresse aux téléspectateurs) lisez Baudelaire, à propos, ça peut toujours vous servir dans la vie ! MF : Parce qu’il y a certainement, effectivement, beaucoup de personnes qui se retrouvent ou dans ces textes, ou dans cet univers musical, ou tout simplement dans cet univers. Je crois pas que toutes les personnes soient très, très heureuses et aujourd’hui je crois que c’est aussi de plus en plus difficile. N : Et toi, qu’est-ce qui te rend heureuse ? MF : Votre rencontre, probablement ! (grand sourire) N : Bon ! Sinon, tu as demandé Depeche Mode. Qu’est-ce qui te séduit ? Le côté anglais, le côté rythmé ? MF : Je crois que c’est un tout, là aussi. C’est un univers, d’abord, un compositeur qui est formidablement doué et puis des paroles qui sont assez belles, parce que je comprends l’anglais plus que je ne le parle, finalement ! (rires) Diffusion d’un clip de Depeche Mode. N : Le monsieur dont nous parlions pour les compositions, c’est Martin Gore, qui est le blond bouclé sur le devant… MF : …qui est tout petit ! N : Tout petit derrière ses claviers ! L’ambiance dans laquelle tu vis : tu vis dans une ambiance sombre ? Eclairée ? L’appartement, comment ça se passe, l’intimité ? On sait qu’il y a les singes, les fameux singes… MF : C’est très peu meublé, c’est rouge et noir (rire de Nagui), et que dire d’autre ? Y a une très, très grande cheminée qui est très, très belle et j’ai une chambre qui est très, très sombre, qui approche le noir, c’est bleu marine très, très foncé. N : Ça fait partie des couleurs que tu aimes bien, le noir, le bleu, le rouge… ? MF : Oui. Le rouge, un petit peu moins. N : Le rouge sang, peut-être, non ? MF : La couleur du sang, oui, j’aime beaucoup, mais c’est un rouge très, très foncé, très dense. N : Ce qu’on a vu dans le clip, le mariage par le

sang, ce que des fois on fait quand on est gamin, tu l’as déjà fait ? MF : C’est quelque chose que j’ai fait quand j’étais toute petite, mais au bout du doigt. Ça faisait moins mal ! Parce que l’entaille, là, était plus profonde ! (elle désigne en souriant sa main en référence à cette séquence du clip) N : Oui, et puis c’était plus mignon en plus, mais c’était moins visuel donc on a essayé de le mettre dans la paume de la main ! (rires) Tu avais aussi raconté que « Sans contrefaçon », tu avais déjà fait le côté garçon en mettant un mouchoir dans ton pantalon. MF : Oui, je n’essaye pas de fabriquer des anecdotes. N : Mais on va finir par trop bien te connaître, j’allais dire, entre les paroles de chansons et les clips ! MF : Finalement, oui. N : Pour quelqu’un qui veut préserver sa vie privée… MF : Je vais peut-être arrêter ! N : De chanter ? MF : Peut-être ! (sourire) N : Oh, dis pas ça, tu nous fais du mal ! (rire de Mylène) La déclinaison généralement de ce genre de clips, c’est d’aller un tout petit peu plus loin sur scène. Ça, c’est quelque chose qui a intéressé Thierry Mutin, qui te pose une question. Diffusion d’une vidéo où Thierry Mutin, chanteur des années 80, s’adresse à Mylène. Thierry Mutin : Bonjour Mylène. Pour moi, l’univers de tes clips est indissociable de ton image et j’aimerais savoir comment tu vas concilier tes clips et tes chansons sur scène. Retour plateau N : Ah oui, le décor, l’ambiance… MF : Je ne sais pas si je vais répondre à cette question, dans la mesure où je ne dévoilerai rien de cette scène. Je peux dire que cette scène sera le reflet certainement de mon univers et celui de Laurent Boutonnat. N : D’accord. Un tout petit peu XVIIIe siècle sur les bords ? MF : Non, du tout. N : Du tout ! (ironiquement) Beaucoup de chevaux… (rires) MF : (sur le même ton) Beaucoup de chevaux, de femmes nues, on l’a déjà dit ! (sourire) N : … de femmes nues, du sang, voilà, bref ! Allez-y et emmenez une blouse parce que peut-être qu’il va se passer des choses ! (rires) Tom Waits (acteur et chanteur américain souvent présenté comme maniaco-dépressif) : alors là c’est, encore une fois, comme Baudelaire, comme Edgar Poe qui était quand même un alcoolique, faut bien le préciser, Tom Waits c’est aussi l’image… Tu es attirée par l’alcool ? Tu es attirée par…?


1988–1990 : Ainsi soit je…

MF : Je suis séduite par les hommes qui boivent, oui. N : (interloqué) C’est vrai ?! MF : Oui, c’est vrai. N : Bon, ben j’ai aucune chance, écoute ! Alors, le « Downtown Train » (chanson de Tom Waits extraite de son album « Rain Dogs » sorti en août 1985), c’est une ambiance de piano-bar que tu aimes retrouver ? MF : Moi je connais très, très peu Tom Waits, c’est vrai. Je l’ai découvert au travers d’un clip qu’avait réalisé heu…aidez-moi ! Une photographe… (elle cherche) N : Une photographe… Bettina Rheims ? MF : Non, pas Bettina Rheims. Oh, c’est dommage on oublie les noms, c’est terrible… N : Bon, on va le retrouver pendant le clip, en tout cas ! MF : Je vais réfléchir, oui. Et y a une ambiance qui est assez belle dans ses clips. Et puis il a une très, très belle voix. Diffusion d’un clip de Tom Waits N : (après la diffusion du clip, il se tourne vers Mylène) Tu as retrouvé la photographe ? MF : Oui, qu’elle me pardonne : c’est Dominique Isserman, qui a beaucoup de talent (elle signera d’ailleurs la séance photo de l’album « Avant que l’Ombre…» en 2005) N : Je suis sûr qu’elle te pardonne ! (…)

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Mylène Farmer

Lancement d’une page de publicité, puis retour plateau. N : Mylène Farmer, qui prépare ardemment sa scène. Ça veut dire quoi, préparer ardemment

la scène ? Répétitions, musiciens, déjà ? MF : Pas encore, non. N : Non ? MF : Je vais le faire dès début avril. Mais quand même répétitions puisque je réalise les chorégraphies sur la scène. J’ai une jeune fille (Sophie Tellier) qui les apprend pour pouvoir les inculquer aux autres danseurs. N : Ah d’accord, donc en fait tu apprends à une personne qui après apprend aux autres ? MF : Oui, parce que pendant ce temps-là, moi je répéterai avec les musiciens. N : D’accord, donc puisqu’il faut analyser, je commence à comprendre comment il faut faire, donc il faut comprendre qu’il va y avoir des danseuses. Plusieurs danseuses, si y en avait qu’une ou deux, elle aurait appris aux deux en même temps. Non, y aura beaucoup de danseuses. On va y arriver à commencer à savoir quelque chose… MF : Vous oubliez les danseurs ! N : Les danseurs ? Oui, pardon ! Danseurs qui seront peut-être choristes, aussi de temps en temps, à la fois. MF : Je ne pense pas, non. N : Elle ne pense pas. Vous voyez qu’on arrive à avoir des petits renseignements ! Bon, et la mise en forme aussi, parce qu’on a vu aussi plein de reportages chez nos confrères de « Télé 7 Jours » comme quoi tu courrais avec Rambo (surnom de son coach, Hervé Lewis). MF : Je n’en ai fait qu’un ! N : De reportage ? MF : Oui. J’ai effectivement un entraîneur qui s’entraîne avec moi – qui m’entraîne, plutôtet qui m’apprend à courir, ce qui n’est pas une mince affaire !

N : Ça s’apprend, de courir ? MF : Oh oui, c’est très difficile de courir bien, oui. N : C’est pour quoi ? Pour la respiration ? MF : C’est pour le… aidez-moi… pour la mise en forme… N : Le souffle ? MF : …c’est pour le souffle, c’est pour une mise en conditions, tout simplement. N : Il parait que le plus dur, c’était d’arrêter de fumer. C’est vrai ? MF : C’est vrai. D’arrêter de boire, aussi ! N : Ah oui ? Enfin, de l’alcool ? MF : Non, du Coca Cola ! N : (…) Tu as arrêté de boire, plus de sucreries, plus rien ? MF : Non. De moins en moins, en tout cas. N : Et tu te présentes pour être Miss France bientôt, avec une forme comme ça ? MF : Si vous êtes mon cavalier : peut-être. N : Le cavalier ? Oh, je préférerais faire le cheval, soyons fous ! (rire de Mylène) Alors, voici Daniel Darc avec « La Ville ». Je sais que tu adores Daniel depuis Taxi Girl, tu te sens fan ? Pardon : vous vous sentez fan ? MF : Fan n’est peut-être pas le mot approprié, j’aime beaucoup… N : « Femme », peut-être alors, non ? MF : Non plus ! J’aime beaucoup son univers, j’aime beaucoup cette chanson et…que pourrais-je faire comme relation ? J’ai vu « Birdy » récemment (film de Alan Parker où un homme perturbé par son engagement dans la guerre du Vietnam se prend pour un oiseau) et je trouve que ce pourrait être le personnage de « Birdy », voilà, qui veut voler et qui n’y arrive pas.

« (Son appartement) C’est très peu meublé, en rouge et noir. J’ai une chambre sombre, d’un bleu marine très foncé, presque noir. »


Diffusion du clip « La Ville » de Daniel Darc. N : (…) Mylène, que va-t-il se passer dans les quelques jours qui vont précéder la tournée ? C’est-à-dire une fois que tout sera prêt, estce que tu vas te ‘concencrer’ (il bafouille) te concentrer ? ‘Consencrer’, aussi on peut ! MF : Choisissez ! (rires) N : Je sais pas, ‘concentrer’ je préfère ! MF : …me concentrer… N : (il reprend) …faire du yoga, te retirer, rester seule dans un coin, enfin je sais pas : qu’est-ce qui se passe, généralement ? MF : Non…Je ne prépare jamais à l’avance, donc je ne sais pas. N : Tu sais pas ? MF : Non. Probablement je continuerai de m’entraîner et puis…et puis, je n’en sais rien. N : Bon. Cette timidité médiatique, elle existe aussi dans la vie privée ? MF : Avec mes très proches, non, parce que nous avons enlevé le masque, très certainement. N : Et la main aussi ? (cette remarque de Nagui vient du fait qu’en répondant Mylène repose sa tête sur sa main) MF : La main reste toujours, d’ailleurs elle est fixée ! (Mylène fait mine de ne pouvoir décoller sa main de son visage) N : (…) Pour parler quelques petites secondes de Laurent Boutonnat, parce que c’est quand même la personne qui se cache derrière Mylène Farmer et qui fait plein de trucs : qui fait les musiques, qui fait les clips… Comment on peut le présenter au public, aux téléspectateurs ? Qu’est-ce qu’on peut dire de lui ? MF : Oh, c’est un homme qui a un physique ro-

mantique, c’est un homme qui a ses névroses, qui a, je crois, beaucoup de talent et qui aime particulièrement la musique et le cinéma, je crois, et qui aurait envie et qui va réaliser un premier long-métrage. N : Avec Mylène Farmer dans le premier rôle ? MF : Je ne sais pas. (grand sourire) Nagui revient ensuite sur le concours annoncé en début d’émission et annonce aux téléspectateurs la question : quel artiste Mylène a-t-elle associé dans ses goûts musicaux avec Jacques Brel plus tôt dans l’émission ? On revoit les cadeaux à l’écran et les dates de la tournée défilent à nouveau. N : Y a plein de concerts, c’est la folie ! Y a combien de jours ou de mois de tournée ? Ça commence en mai, ça finit en décembre ? MF : Non, ça commence…La salle parisienne (le Palais des Sports), c’est en mai et la tournée en province commence en septembre, octobre, novembre et décembre, ce que vous disiez. N : A Paris, oui, je peux le redire : décembre, le 8 et le 9, donc au palais Omnisports de Bercy (il s’agit en réalité des 7 et 8 Décembre, comme l’indique le bandeau défilant sur l’écran). Le 12 Décembre, vous serez en concert, vous, Mylène Farmer ? MF : (regard perdu) Je ne sais plus… (Mylène semble ne pas comprendre le sens de la question, et pour cause puisque Nagui fait erreur) N : Le 12 décembre, c’est votre anniversaire, faut savoir ! (Nagui se trompe effectivement sur la date d’anniversaire de Mylène qui, rappelonsle, est née un 12 septembre) Les anniversaires, ça se fête ! Bon, tant pis !

Sacrée soirée Date 22.03.1989 Chaîne TF1 Présenté par Jean-Pierre Foucault

Quelques heures après l’émission de M6, Mylène est sur TF1 pour promouvoir « Sans logique ». Sa prestation ressemble aux précédentes : seule en scène, habillée de sa large tunique blanche style Pierrot, elle effectue sa redoutable chorégraphie. Un jeu d’images arrêtées illustre, de temps à autre, la séquence dans un coin de l’écran. La chanson terminée, Mylène salue le public qui l’acclame, en souriant et en reprenant son souffle.

MF : Oui, je ne comprends pas. C’est difficile de vous suivre ! N : Pas du tout ! C’est moi qui suis peut-être un tout petit peu fouillis ! Un petit commentaire sur Kate Bush, puisque c’est le dernier clip que nous allons voir ? C’est la version anglaise de Mylène Farmer ? MF : Non, ne dites pas ça ! Non… C’est une chanteuse merveilleuse, elle est douée pour tout : pour la composition, l’écriture, le cinéma… N : Oui, c’est ce que je voulais dire ! MF : Non, je ne fais sincèrement aucune relation. N : Bon. Et y a eu déjà beaucoup de propositions, de scénarii pour Mylène Farmer ? MF : Y en a eu quelques-uns, oui. N : Qui n’ont pas reçu une réponse positive pour l’instant ? MF : Non, parce que pour l’instant j’exerce ce métier que j’aime, qui est la chanson. N : Oui. C’est vrai que si jamais vous ne faites pas de cinéma, ça serait cata pour vous ? MF : Oui. Oui, oui. Sans parler de reconversion, je crois que ça serait une prolongation, une continuité. En tout cas, quelque chose d’essentiel pour moi. N : OK. Merci, Mylène. VOUS avez été très sympa, TU reviens quand tu veux ! MF : Je reviendrai ! Merci Nagui. (l’émission ne perdurant pas, Mylène ne pourra honorer sa promesse) N : A bientôt. (Il annonce ensuite les prochains invités de l’émission, au nombre desquels figure Alain Souchon) T’aimes bien Alain Souchon ? MF : Oui, j’aime bien Alain Souchon. L’émission se finit sur un clip de Kate Bush.


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Mylène Farmer

Date 12.05.1989 Chaîne TF1 Présenté par Patrick Sabatier

Après un mois et demi d’absence dans les médias pour cause de répétitions intensives en vue de son premier spectacle, Mylène clôt la promotion de « Sans logique » là où elle l’a commencée : sur le plateau de l’émission de Patrick Sabatier, diffusée au lendemain de la première date de la tournée. La prestation est magistrale. Cet ultime tour de chauffe avant de monter sur les planches du Palais des Sports permet de voir Mylène dans un tailleur noir cintré aux revers zébrés, catogan impeccable, entouré d’un véritable ballet (ses danseurs du spectacle parisien). C’est la première fois que Mylène fait une télé avec plus de deux danseurs. Pour l’anecdote, les costumes hispanisants, crées par Plein Sud, ont ensuite été offerts aux danseurs. Le tableau qu’offre Mylène avec cette prestation chorégraphiée au millimètre près (la même que lors des concerts) est magnifique et constitue une formidable vitrine pour son spectacle.


J.T. de 20h

Date 18.05.1989 Chaîne TF1 Présenté par Patrick Poivre d’Arvor

Pour la première date parisienne du Tour 89, la rédaction de TF1 a réalisé une petite interview de Mylène Farmer diffusée en fin de journal. L’entretien est ponctué d’images de clips et quelques images de l’équipe du spectacle à Saint-Etienne, avant la première. Patrick Poivre d’Arvor : (après un sujet sur un film consacré aux tziganes) Dans un tout autre genre, la crinière rousse, et quelque peu tzigane d’ailleurs, de Mylène Farmer qui caracole en tête du Top 50, mais ça ne suffirait pas pour lui consacrer un sujet dans ce journal, c’est qu’elle chante bien, sur des textes très personnels, et dès demain, pour la première fois, elle affronte le public au Palais des Sports. Le reportage commence sur un gros plan de Mylène en extérieur. Elle porte un haut noir et soutient sa tête avec la main. Une courte séquence tirée du clip de « Libertine » est ensuite

diffusée avant de revenir au gros plan de Mylène, qui fait face à la journaliste Corinne Lalo, sans que l’on voie celle-ci à l’image. Corinne Lalo : (en voix-off) C’est avec « Libertine » qu’est venu le succès, mais Mylène Farmer est avant tout romantique, fragile et pudique malgré les apparences. Mylène Farmer : Je parle souvent de la caméra : je ne la considère pas comme étant une amie, et pourtant j’arrive à me dénuder devant elle. Donc ce sont plein de paradoxes. J’ai en tout cas besoin de ce miroir, quand même. CL : C’est un exorcisme, un peu ? MF : Probablement, oui. Moi j’appellerai ça presque une survie, c’est quelque chose d’essentiel. CL : (en voix-off, sur des images du clip « Tristana ») Derrière la caméra des clips vidéo, mais aussi pour les musiques et certains textes, un touche-à-tout de talent aux côtés de Mylène, son alter ego : Laurent Boutonnat. (images de Mylène Farmer et Laurent Boutonnat rentrant dans leur hôtel à Saint-Etienne) MF : C’est une bonne étoile. Ce sont des rencontres de la vie comme on en a peu, certainement. Pour moi, c’est une rencontre magique

par rapport à bien évidemment plein de choses, mais également par rapport au cinéma et à l’image, à sa façon de l’imaginer, de la créer. CL : (en voix-off, sur des images des Victoires de la Musique 1988) Sacrée meilleure chanteuse de l’année, Mylène est une écorchée vive. Elle séduit avant tout les quinze-vingt ans et les accompagne à travers le spleen de l’adolescence. MF : S’il y a une image à trouver, je voudrais être le…enfin, c’est un compagnon de route, c’est un peu le « Jeff » de Jacques Brel : « Jeff, t’es pas tout seul ». C’est un peu ce sentimentlà que j’ai. Quelquefois, c’est moi qui ai besoin d’eux, et d’autres fois c’est peut-être eux qui ont besoin de moi. CL : (en voix-off, sur des images de Mylène Farmer, Laurent Boutonnat, les musiciens et les choristes du spectacle dans la cour de la salle de spectacle de Saint-Etienne où s’est tenue la première de la tournée. On voit notamment Mylène en redingote partager un fou rire avec Carole Fredericks) Mylène et ses musiciens se sont préparés pendant six mois pour réussir ce premier rendez-vous. Une rencontre à guichets fermés puisque tous les concerts affichent complet. Fin du reportage sur ces images de la troupe.


1988–1990 : Ainsi soit je…

Mon Zénith à moi Date XX.09.1989 Chaîne Canal+ Présenté par Michel Denisot

n’avait pas deux mois (rappelons que depuis, le journaliste a perdu une seconde fille, Solenn, atteinte d’anorexie, qui s’est jetée sous un métro en janvier 1995). Patrick Poivre d’Arvor : (…) J’ai trouvé que « Chloé », qui est l’histoire de la mort d’un enfant, que chante, à sa manière, c’est-à-dire au fond peut-être presque gaie, en tout cas pas si grave que ça, Mylène Farmer, ça correspond à ma façon de gagner sur la mémoire, sur ce qui m’était arrivé.

L’invité d’honneur de cette édition est Patrick Poivre d’Arvor. Il a souhaité que son amie Mylène Farmer soit présente sur le plateau pour interpréter une chanson d’elle qu’il aime particulièrement : « Chloé ». Avant la prestation de Mylène, PPDA explique pourquoi il l’a invitée. Il évoque d’abord un drame personnel, en l’occurrence la mort de Tiphaine, sa fille, partie en 1975 alors qu’elle

Michel Denisot précise alors que Mylène vient dans l’émission hors de toute promo puisque « Chloé » appartient au premier album déjà vieux de presque quatre ans, et qu’elle n’interprète pas la chanson sur scène (Mylène est à quelques jours de sa tournée). C’est assise par terre, adossée au mur, que Mylène chante la chanson, habillée d’un tailleur blanc et les cheveux ramenés en un chignon strict. Notons pour l’anecdote que la version de la chanson telle que présentée ici est inédite sur disque, puisque les phrases parlées sur l’outro sont supprimées.

J’y crois dur comme Terre

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Mylène Farmer

Date 02.09.1989 Chaîne TF1 Présenté par Patrick Poivre d’Arvor, Nicolas Hulot et Jean-Michel Jarre

Coup double pour Mylène qui va enchaîner coup sur coup trois prime-time pour promouvoir à la fois la tournée qu’elle s’apprête à lancer en province et son nouveau 45 tours, « A quoi je sers… ». C’est ainsi qu’on la retrouve au générique de cette grande émission spéciale consacrée à l’écologie que parraine

Jean-Michel Jarre. Elle arrive sur le plateau dans un tailleur noir qui laisse entrevoir une chemise blanche, les cheveux coiffés en catogan et prend place devant Slim Pezin, son guitariste fétiche de l’époque qui feint de l’accompagner à la guitare pour l’occasion. Mylène reste statique pendant la chanson et esquisse quelques mouvements de bassin et de bras sur les derniers refrains. La chanson terminée, elle salue le public.


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Mylène Farmer

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Date 15.09.1989 Chaîne TF1 Présenté par Patrick Sabatier

Sacrée soirée Date 06.09.1989 Chaîne TF1 Présenté par Jean-Pierre Foucault

La promotion de « A quoi je sers…» passe par l’incontournable plateau de Jean-Pierre Foucault. On remarque que c’est à partir de ce single que Mylène fera un nombre très limité de prestations par single et qu’elle choisira toujours, à de rares petites exceptions, des émissions de prime-time à forte audience. Habillée d’une chemise blanche légèrement bouffante et d’un pantalon noir à taille haute, Mylène interprète « A quoi je sers… » sur un fond noir, balayé de spots de lumière. Contrairement à la prestation précédente, elle n’a pas de micro, ce qui lui permet de toute évidence d’être plus libre dans ses mouvements. Ainsi, elle se déhanche en rythme tout au long de la chanson. A ses côtés, assis sur un tabouret, on retrouve à nouveau Slim Pezin à la guitare. Lorsque la chanson s’achève, Mylène se cache le visage de la main et se retourne, alors que le public l’applaudit.

Troisième et dernière prestation pour « A quoi je sers… » (en à peine deux semaines), à quelques jours du lancement de la tournée. Mylène se rend à l’émission de Patrick Sabatier pour une prestation identique aux deux précédentes, vêtue à nouveau d’un tailleur noir et les cheveux retenus en catogan par un nœud. Pour l’anecdote, Slim Pezin, qui l’accompagne encore une fois, racontera que le costume et les chaussures qu’il porte pour ces trois prestations lui ont été offerts par Mylène, très soucieuse de lui faire plaisir. Il ajoute qu’elle insista même pour qu’il touche un cachet pour ces petites prestations.


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Mylène Farmer

Date 01.11.1989 Chaîne TF1 Présenté par Jean-Pierre Foucault

Bénéficiant d’une dizaine de jours de repos dans son éprouvante tournée, Mylène accepte d’apparaître à « Sacrée Soirée » afin de recevoir son premier disque de diamant (plus d’un million d’albums vendus), en l’occurrence pour « Ainsi soit je… ». L’événement est de taille, puisque c’est la première fois qu’une telle récompense est remise à une artiste féminine française. Mais avant de recevoir ce trophée des mains de l’animateur-vedette, Mylène offre une chanson inédite, face B de son 45 tours « Sans logique » : le poignant « Dernier sourire ». Son interprétation est simple et pure : habillée d’un ensemble blanc et les cheveux lâchés, on

découvre Mylène d’abord dans l’ombre, assise sur une marche. Ce n’est que lorsqu’elle entame la chanson qu’elle apparaît vraiment, grâce à des gros plans qui permettent de voir l’émotion sur son visage. La pénombre se refait sur elle pour l’instrumental de fin (qui se termine ici en fondu plus rapide que sur le disque). Sans que Mylène ne change de position, Jean-Pierre Foucault la rejoint alors sous les applaudissements du public. Il s’assied à ses côtés, le disque de diamant sur les genoux. Il la félicite alors pour la performance, rappelle qu’elle est la première à obtenir une telle récompense et lui remet en mains propres, tout ceci sans que Mylène ne dise un mot ! On la devine cependant dire « merci » après que Jean-Pierre Foucault lance la publicité.


© Sygma-Corbis


Une année à l’étranger

1990

1988–1990 : Ainsi soit je… Mylène Farmer 152

suède Date 28.04.1990 Chaîne Télévision suédoise

En 1990, Mylène part à l’assaut du marché européen. Des coffrets promotionnels de l’album contenant notamment le CD « Ainsi soit je… », une VHS bio et le single « Sans contrefaçon » sont ainsi envoyés aux quatre coins du vieux continent. Et c’est tout naturellement que Mylène fait quelques télés chez nos voisins. Ce jour-là, c’est en Suède, à Stockholm, dans une émission musicale, que la chanteuse se rend pour interpréter « Sans contrefaçon ». Prestation intéressante à plus d’un titre puisque si elle est bien identique à celle présentée à la télévision en France en 1987, les costumes sont en revanche ceux de la tournée, signés Thierry Mugler, et les danseurs sont Bruno Batlo et Christophe Danchaud qui l’accompagnaient sur cette même tournée, et non les danseurs de 1987.

Italie Date 13.07.1990 Chaîne Raï

La promotion de « Sans contrefaçon » en Europe passe également par l’Italie où Mylène enregistre l’émission « Ghibli », à Rome. C’est à nouveau dans son costume de scène du Tour 89 qu’elle interprète le titre. Le danseur Bruno Batlo est de la partie, comme pour l’émission suédoise, mais c’est cette fois Georges Barrier, présent lui aussi sur le spectacle de 1989, qui complète la distribution. Les costumes sont une nouvelle fois ceux du Tour 89.


L’animateur (il nous a été impossible malheureusement de retrouver son identité) annonce Mylène. Celle-ci arrive sur le plateau dans sa petite robe noire «  inversée » qu’elle avait déjà portée pour chanter le titre en 1988, lors de la « Soirée pour les Restos », deux ans plus tôt (le 17 décembre 1988) . Ses cheveux sont coiffés en chignon. Elle s’installe à la table, aux côtés de l’animateur. Il s’adresse à Mylène dans un français très correct. Les propos de cette dernière sont sous-titrés en néerlandais.

Pays-Bas Date 02.12.1990 Chaîne Télévision néerlandaise

En fin d’année 1990, alors qu’elle finalise l’enregistrement de « L’Autre… », Mylène Farmer fait une apparition dans le talk-show le plus populaire des Pays-Bas à l’époque. Elle y répond à une interview et interprète « Pourvu qu’elles Soient Douces », deuxième extrait de l’album « Ainsi soit je… » pour les pays non francophones ; le single au long titre est d’ailleurs rebaptisé « Douces » pour l’occasion.

X : Je ne peux pas vraiment dire que vous êtes une chanteuse française, parce que c’est différent, ce que vous faites. Vous chantez, bien sûr, mais quand même ! Mylène Farmer : Je souhaite être différente, c’est normal ! Mais je ne me considère pas uniquement comme étant une chanteuse, non, c’est vrai. J’aime en plus beaucoup Greta Garbo, j’aime le cinéma, j’aime tout ce qui peut inspirer le cinéma. X : Oui…Parce que quand vous chantez, vous faites de la danse aussi, vous faites beaucoup de spectacle en même temps MF : Parce que pour moi, c’est ma définition du spectacle. Le spectacle englobe beaucoup, beaucoup d’éléments, à savoir le chant, la danse, pourquoi pas le théâtre, ce sont des lumières…Tout ça, ça forme un spectacle. C’est vrai que moi je peux pas concevoir de monter sur scène sans faire un film sur scène, finalement. X : Je voudrais bien montrer un tout petit peu pendant que vous vous changez pour chanter la chanson différente (sic !)… (Il poursuit en néerlandais et à l’image, des plans du clip de « Pourvu qu’elles Soient Douces » sont présentés) Vous aimez, vous venez de le dire, beaucoup le cinéma : est-ce que vous avez déjà joué au cinéma ? MF : Non. J’ai eu quelques propositions, mais je crois que je vais attendre. J’ai un projet de long-métrage avec le réalisateur des clips, qui est également mon compositeur, qui s’appelle Laurent Boutonnat. Donc je crois que je vais attendre ce premier rôle. X : Vous êtes tellement une vedette en France, est-ce que c’est toujours important de venir peut-être par exemple ici, aux Pays-Bas ? MF : C’est très important aujourd’hui. C’est

vrai que le…je sais pas si c’est un but, en tout cas c’est une envie de tout chanteur que de traverser les frontières. C’est également mon souhait. Je sais que c’est un travail de longue haleine, ça sera difficile mais c’est aussi important, oui. X : Ce que vous faites quand vous chantez, c’est très bien, c’est toujours avec des danseurs, c’est toujours le style des vidéoclips. Quand on devient moins jeune, tout ça change : il vaut mieux chanter, plus chanter et moins danser ! Est-ce que vous avez peur de ça, de vieillir par exemple ? MF : J’ai peur de vieillir comme tout un chacun ! Maintenant, me poser cette question-là aujourd’hui : non. Je ne pense pas de toute façon chanter pendant dix ans, je crois que ma vie évoluera. J’ai envie de cinéma, j’ai envie d’écrire, j’ai envie de beaucoup de choses. Maintenant, est-ce que la vie me le permettra : ça, c’est une autre question ! X : Dans tout ce que j’ai lu sur vous en France dans des journaux français, on dit : « Elle n’aime pas du tout parler d’elle-même ». Mais quand même, vous avez choisi cette profession ! MF : C’est pas incompatible ! Je crois que je peux faire ce métier, j’essaie de le faire, tel que je voudrais le faire. C’est vrai que c’est difficile parce qu’on se heurte très souvent à ce problème de absolument devoir s’expliquer, s’exprimer. Moi, je pense que je n’ai pas à me justifier. Je préfère qu’on découvre la nature de mes sentiments dans mes chansons, dans mes textes. Maintenant, expliquer le pourquoi du comment je crois que, d’abord, je ne m’y sens pas du tout à l’aise, c’est la première raison. Et d’autre part, je crois que cette dame… X : (il précise) Greta Garbo… MF : …a tout à fait compris ce qu’il faut faire. C’est non pas cultiver le mystère mais c’est une femme mystérieuse. Je ne sais pas si je suis une femme mystérieuse mais c’est vrai que j’ai du mal à parler de moi, donc je crois que c’est mieux de ne pas parler de soi dans ces cas-là. X : Alors je vous demande maintenant de nous montrer vos sentiments dans votre chanson ! MF : Je peux le faire ! (rires) Mylène se lève et va se mettre en place pendant que le présentateur présente la chanson : « Douces ». La prestation de Mylène pour ce titre est similaire à celle présentée en 1988. Elle est accompagnée des deux danseuses qui l’accompagnaient alors, Sophie Tellier et Dominique Martinelli, et la chorégraphie est rigoureusement identique. Après la prestation, Mylène quitte le plateau.



1991 1993 L’autre… 18.03.1991 Single « Désenchantée » – 08.04.1991 Album « L’autre… » – 29.07.1991 Single « Regrets » – 19.11.1991 Single « Je t’aime mélancolie » 13.04.1992 Single « Beyond my control » – 16.11.1992 Single « Que mon cœur lâche » – 23.11.1992 Album « Dance remixes » – XX.05.1993 single « My soul is slashed »


1991–1993 : L'autre…

«Douces» Date XX.01.1991 Chaîne TV2 (Danemark)

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Mylène Farmer

1991

1990 a été l’année de la promo à l’étranger, 1991 sera celle du grand retour en France, avec l’album « L’autre… ». Avant cela, Mylène fait une dernière émission en dehors de nos frontières, pour « Douces ». Une télé étonnante ! A première vue, rien de bien exaltant (hormis le plaisir de voir Mylène bien entendu) : même chorégraphie, avec les deux mêmes danseuses, dans une tenue déjà utilisée sur cette chanson (la robe inversée). La prestation épouse les formes d’un concert (scène, projecteurs, fosse debout), et l’on remarque avec bonheur que le public est plutôt enthousiaste (bras en l’air). Mais la surprise est ailleurs : Mylène arbore une nouvelle coiffure ! La chanteuse est en effet passée chez Maniatis le 12 janvier pour adopter un nouveau look pour son grand retour en France. Cette télé offre donc l’extravagante originalité de nous présenter Mylène chantant « Douces » avec sa coupe de « Désenchantée » – curieux, non ?!

Pour un

Date 07.04.1991 Chaîne M6 Présenté par Laurent Boyer

Première télévision française de Mylène Farmer depuis plus d’un an. Pour l’occasion, la star a invité une équipe de M6, deux jours durant, sur le tournage du clip qui marque son retour : « Désenchantée ». L’émission prend donc place dans les décors enneigés du clip, pour un entretien fleuve confié à Laurent Boyer. Laurent Boyer (en blouson de cuir, col fourrure) : C’est en direct de Budapest, en Hongrie, en fait à la sortie de la ville, que nous sommes installés pour le cinquième jour de tournage du clip qu’on attendait, enfin du clip et du 45 tours de Mylène Farmer qui s’appelle « Désenchantée », que vous entendez à la radio déjà depuis le 18 mars, dans l’attente d’un album qui s’appelle « L’autre… », et qui sortira le 8 avril. Alors, déjà, merci à Mylène de nous recevoir ici, car c’est la première fois qu’une équipe de télévision, petite l’équipe (sourire), a le droit de s’installer sur le tournage d’un clip (le plan s’élargit et l’on découvre, assise à la gauche de l’animateur, une Mylène Farmer aux cheveux courts, emmitouflée dans une doudoune noire).

C’est bien la première. Bonjour Mylène. Mylène Farmer : (à peine audible) Bonjour (elle sourit puis baisse la tête, les yeux plongés vers le sol). LB : Alors vous découvrez une Mylène un peu… on comprend pas bien… On se dit qu’elle est sortie d’un roman de Charles Dickens. Vous voyez que ce matin, on l’a un peu tabassée, elle a un petit peu de sang qui coule des lèvres (Mylène lève la tête vers la caméra). Elle a beaucoup souffert et elle est habillée, comme d’habitude, par Thierry Mugler (rires), ou encore Amor, comme on peut le constater. Mylène, bienvenue. Merci de nous recevoir ici, c’est très joli. (en regardant derrière) Je crois que ça, c’est en fait l’image du début du clip… MF : (à peine audible) Oui (avec un petit hochement de tête). LB : Je crois que le clip commence comme ça. On est en plein tournage donc on est comme vous, on découvre un petit peu l’ambiance de ce clip. Alors, c’est Mylène dans cette tenue-là qu’on découvrira dans le clip… MF : Sans le manteau. LB : Sans le manteau, parce que le manteau a un côté un peu plus mode… MF : Un peu moderne, oui. LB : Il faut dire qu’il ne fait pas très chaud. Cinquième jour de tournage. Il y a combien de temps que tu es installée ici Mylène ? Ça fait une huitaine ?

« On voulait des enfants qui portent quelque chose de grave sur le visage, dans leur regard… »


clip Avec toi MF : Ça fait à peu près huit jours, oui. LB : Je sais que c’est pas très facile pour toi parce qu’il y a les conditions climatiques qui ne sont pas évidentes. Je crois qu’il a fait très froid la semaine dernière… MF : Oui, beaucoup plus froid qu’aujourd’hui. LB : Là, ça va un petit peu mieux. On a droit au soleil sur Budapest. Assez joli… Et puis, tu te lèves très tôt, et vous tournez toute la journée, c’est ça ? MF : On a des horaires un peu différents chaque jour. Mais ce matin, on s’est levé à 5h du matin. LB : Alors cet album arrive. On en a beaucoup entendu parler. Et quoique… Puisque ça fait un moment que tu es absente en fait. Depuis le dernier Bercy, on n’entend plus parler de Mylène Farmer… MF : Je crois que ça fait un peu plus d’un an maintenant. LB : Qu’est-ce qui s’est passé ? C’était une retraite ou c’était le temps de la création ? (des techniciens s’affairent en arrière plan…On en verra jusqu’à la fin de l’entretien, ainsi que des figurants, Boutonnat et toute l’équipe au travail) MF : Je crois que c’est un petit peu des deux. Je crois qu’on a besoin de se cacher après…après une scène. C’est beaucoup d’émotions. Et d’autre part, j’ai préparé le… troisième album je crois ?... LB : C’est le troisième, je te le confirme (rire). MF : (semblant demander confirmation à quelqu’un derrière la caméra… Thierry Suc, son

nouveau manager ?) C’est le troisième. Et ma foi, voilà, ça a pris à peu près quatre/cinq mois de studio. LB : De studio, et de création aussi, d’écriture, parce que tu as écrit… MF : Oui. Toute l’écriture, c’était vraiment sortie de scène jusque entrée en studio. LB : Est-ce qu’on peut dire…Cet album, on n’en parle pas encore, il sort le 8 avril (Mylène fait « oui » de la tête), donc on ne sait pas encore, personne n’a écouté (Mylène fait « non » de la tête). On sait qu’il s’appelle « L’autre… ». Il y avait « Ainsi soit je… », il y a « L’autre… » maintenant. C’est quoi, c’est une continuité cet album ? MF : (haussant les épaules) J’ai un petit peu de mal à m’expliquer quant au contenu d’un album. Je dirais que c’est de la même veine. (silence) C’est très difficile pour moi. C’est quelque chose d’assez mystérieux finalement… même pour moi. LB : Y’a que toi qui a écrit sur cet album… MF : (aussitôt) Oui. LB : …Ou on trouvera d’autres textes d’autres gens (Mylène fait « non » de la tête). Y’a une dizaine de titres, c’est ça ? MF : Oui, il y a à peu près dix titres. Il y en a même dix. Et non, je suis la seule à écrire. J’ai délaissé les poètes (petit rire). LB : Bien. (aux téléspectateurs) Les conditions de tournage, vous le verrez, parce que vous allez voir énormément d’images du tournage – (à Mylène) on en profite en fait puisque tu nous reçois ici – (aux téléspectateurs) vous allez découvrir de quelle façon Laurent Boutonnat

et Mylène Farmer travaillent sur un clip, sur ce clip qu’on découvrira tout à l’heure, « Désenchantée ». Vous le verrez par deux fois, ce clip, avant la fin de l’émission. Deux versions différentes. (à Mylène) Il y a à peu près une centaine de figurants ici ? MF : C’est ça. LB : Des enfants. Alors pourquoi avoir choisi des enfants ? Des enfants hongrois en fait, à Budapest. Y’a une raison particulière ? MF : Il y a plusieurs raisons pour le choix de la Hongrie. Il y a d’abord la neige ; on voulait un paysage de neige. D’autre part, effectivement, on voulait beaucoup de figurants. Et on voulait surtout des enfants qui portent quelque chose de grave dans le visage, dans le regard. C’est vrai que les pays de l’Est, pour ça, c’est fabuleux. D’autre part, il y a beaucoup de techniciens en Hongrie qui sont très performants et professionnels. Et enfin, une des dernières raisons, c’est que c’est beaucoup moins cher (rire de Boyer) et qu’on peut faire des choses grandioses, avec peu de moyens finalement. LB : Est-ce que ça veut dire que ça va être dans la lignée de l’imagerie Mylène Farmer ? Parce que c’est vrai que Mylène Farmer, on l’associe aux clips, clips scénarisés qui sont en fait des films, non plus des clips. Est-ce que c’est dans la même veine et ça s’inscrit toujours dans cette veine scénarisée et à grand spectacle ? MF : Ce sera la même chose. C’est la même écriture et le même réalisateur. Et pratiquement la même équipe à chaque fois, sur chaque tournage.


1991–1993 : L'autre…

LB : Est-ce qu’on peut dire aussi que, quelque part, si vous venez tourner ici, en Hongrie, à Budapest… On y pense souvent quant à toi, tes ambitions cinématographiques, et celles de Laurent… On peut se dire qu’il y a peut-être aussi… On sait que « Cyrano de Bergerac » a été tourné en Hongrie (« oui » de Mylène). On peut se dire qu’il y a peut-être aussi, pour toutes les conditions que tu as données, les prémices d’un futur long métrage, le moyen de repérer pour un long métrage. MF : (sourire) Ça, c’est quelque chose d’envisageable, qui a été envisagé. Mais j’avoue que, pour l’instant, j’ai… C’est quelque chose qui n’existe pas, et puis c’est quelque chose qui appartient à Laurent, en tout cas pour l’instant. Donc, en fait, je ne puis rien dire. Mais ce que je sais, c’est qu’il avait fait effectivement des repérages, avant d’envisager le clip, en Hongrie pour un long métrage. LB : (aux téléspectateurs) L’histoire de Mylène Farmer en clips, on va essayer de la découvrir. On va découvrir plusieurs extraits des grands clips de Mylène, et on en reparle dans quelques instants (Mylène fait « oui » de la tête). Regardez bien. Mylène Farmer en images. Diffusion d’extraits des clips de « Libertine », « Tristana », « Sans contrefaçon », « Pourvu qu’elles soient douces », « Sans logique » et « A quoi je sers… ».

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Mylène Farmer

LB : Voilà, Mylène. On vient de découvrir les extraits des (hésitation) on va appeler ça des films Mylène Farmer, de « Libertine » à « Tristana », tous les grands classiques. Qu’est-ce que ça te fait de revoir ton histoire, et presque ta carrière, en clips ? C’est vrai qu’on a beaucoup associé ça, avant la scène j’entends : l’association, c’était « Mylène Farmer, c’est

de l’image ; Mylène Farmer n’existe QUE par l’image ». Est-ce que tu as ce sentiment ? Estce que tu la revendiques ? Ou est-ce que, au contraire, ça te gène, maintenant que tu as fait de la scène ? MF : (dans un petit rire) Non, non, je n’ai aucune gêne quant à mon passé. C’est quelque chose qui est, je crois, très important pour moi, l’image. C’est ce qui m’a fait connaître, très certainement. Bien évidemment les chansons, mais c’était quelque chose d’essentiel en tout cas. Donc j’en suis très contente. Très contente. Et c’est vrai que j’avais besoin de la scène, mais ça c’est pour mes propres émotions, pas… (silence). LB : Justement, à ce propos, tu dis que, en fait, assez fréquemment, tu es en état de peur, et que tu as besoin de cette peur pour oublier. Mais pour oublier quoi ? Tes angoisses ? MF : (sourire aux lèvres) Pour oublier ses angoisses. Pour oublier que la vie est profondément dure et parfois laborieuse. Pour oublier beaucoup de choses qui sont trop intimes pour vous les raconter. LB : D’ailleurs, tu cites quelqu’un qui s’appelle Luc Dietrich, qui dit : « L’oubli c’est le sommeil de nos douleurs ». MF : Euh…No comment (rire). LB: C’est ça? Tu confirmes? Y’a pas de problème, ça reste ça. Mais cette trouille, elle te fait du bien, elle te motive ? Par exemple, au moment d’entrer en studio, tu dis que tu as quelques angoisses. Mais quand tu parlais de ça, tu n’avais pas encore fait la scène – y’avait pas encore eu le Palais des Sports, Bercy. MF : Les véritables angoisses sont quand même celles, je crois, de la scène. Le studio, c’est autre chose… En tout cas, le studio, moi je parlerai plutôt de l’écriture. Parfois, on a l’impression qu’on n’a plus de nourriture pour pouvoir aussi

donner des choses. Ça, c’est quelque chose qui m’a fait un peu peur ; quand on sort de scène, on est complètement vidé. Et puis, on s’aperçoit que ça se fait au fil du temps. LB : Vidée de ses émotions, de son trac, de ses sentiments ? MF : Non ! Comblée d’émotions ! Mais… C’est difficile à exprimer. C’est… LB : C’est un petit peu particulier quand même pour quelqu’un qui a une trouille permanente, ou qui a des angoisses et une peur, de monter sur scène devant 18.000 personnes. MF : Il y a une différence entre trouille et angoisse, je trouve. LB : Les angoisses, c’est plus profond ? MF : J’en sais rien. Enfin moi, je me résumerais comme quelqu’un d’angoissé, et pas trouillard du tout par contre. C’est quelque chose de très motivant finalement, oui. LB : L’exécutoire c’est l’écriture ? Par exemple, tu dis que tu as eu une période d’écriture après Bercy… MF : Dans un premier temps, oui c’est l’écriture, absolument. Mais il y a beaucoup de choses à jeter. Justement, quand a eu des émotions très très fortes, en général, l’après émotion, c’est pas le moment pour rédiger des choses. Je crois qu’il faut attendre quelques mois avant de… Essayer de s’échapper de quelque chose de puissant. LB : Tu fonctionnes presque comme une éponge. Tu as besoin de regarder ce qu’il se passe autour… MF : La métaphore est jolie, je vous remercie (rire). LB : N’est-ce pas ? Je vous en prie. J’aurais pu choisir autre chose, c’était inélégant (rire). C’est fonctionner comme une éponge : regarder ce qu’il se passe autour et retracer une histoire. Par contre, il y a une chose qui est


« (La mort) C’est quelque chose qui est inhérent à ma vie, qui me trouble. » étonnante, c’est que dans la plupart de tes titres, assez fréquemment, ça revient souvent, comme un leitmotiv, il y a la mort qui est là, qui est présente. Est-ce que ça fera également partie du futur album, de « L’autre… » ? MF : (haussement des épaules) Je dirais que c’est quelque chose qui est inhérent à ma vie. C’est quelque chose qui me trouble. Est-ce que ça me passionne ? Je ne sais pas bien. Oui, c’est quelque chose qui sera présent, mais c’est en deçà des mots, c’est pas forcément dit avec violence non plus. LB : Ça, ça bien partie de ton personnage. Quand on parle de toi, on a presque envie de parler de clair-obscur. On a l’impression qu’il y a des antinomies, des paradoxes permanents. Il y a la sauvage d’un côté, puis la timide de l’autre subitement… MF : Elles existent. Je crois qu’on ne peut pas fabriquer pendant sept années. (silence) Je suis comme ça, et je peux avoir mes moments d’euphorie, comme tout le monde, bien évidemment. Mais je crois que je suis profondément timide (petit rire nerveux). LB : Alors, on vient de voir une série de clips, de « Sans logique » à « Sans contrefaçon », ou encore « Tristana », « Libertine ». Il y en a un qu’on n’a pas vu, volontairement, qu’on va découvrir maintenant, c’est « Ainsi soit je… » où là, effectivement, c’est peut-être ce côté paradoxe, il s’est passé autre chose dans le tournage de ce clip. Déjà dans l’utilisation du noir et blanc, et du sépia. Et puis, c’était pas une scène à grand spectacle. On n’était pas, comme ici à Budapest, dans une usine désaffectée, avec de la neige, avec des trains qui passent…et qui rapace (sic !). Et je crois que c’est un des clips que tu préfères, c’est une des images de toi, « Ainsi soit je… », que tu aimes bien. MF : Je sais pas si c’est une image que j’aime bien. Là, j’apprécie beaucoup la sobriété de ce clip. Pour le thème, le sujet et l’univers, en tous l’ambiance, je crois que c’était important d’être très très sobre. Et surtout pas explicatif, pas être narratif non plus. Donc avoir des images et suggérer des choses, c’était plus important. LB : (aux téléspectateurs) « Ainsi soit je… ». Mylène Farmer… On regarde. Diffusion du clip de « Ainsi soit je… ». LB : (aux téléspectateurs) « Ainsi soit je… ». Mylène Farmer. Donc un des clips que Mylène préfère. Rentrons maintenant dans le détail. Si on est ici, à Budapest, c’est pour vous

montrer, c’est ce que vous allez découvrir, des images de ce tournage de clip. (à Mylène) C’est une première fois, je le disais tout à l’heure, et l’on t’en remercie, avec Laurent Boutonnat et Thierry Suc, de nous avoir acceptés sur le tournage d’un clip, parce que vous êtes un peu avares d’images de ce travail que vous faites en équipe sur le tournage d’un clip, comme en ce moment ici, en Hongrie. MF : (dans un rire) Je ne sais pas si nous sommes avares, mais c’est assez difficile qu’une autre équipe intervienne parce que, quelquefois, un tournage, surtout comme celui-ci, c’est une grosse machinerie et ça peut perturber le metteur en scène, et tout le monde. Et c’est vrai qu’on a un soucis de garder les choses secrètes, mais pour…parce que, moi, je suis probablement comme les enfants : j’aime encore les surprises. Donc j’aime bien cet effet de surprise quand on a un nouveau clip ou de nouvelles chansons. C’est pour ça que je fais très peu écouter l’album avant qu’il ne sorte. C’est une manière de préserver la chose. Images du tournage de « Désenchantée », avec la mention : « Budapest – 22.02.1991 ». Les figurants attendent. Mylène aussi… LB : A propos de ce titre, tu parles de génération, de chaos, d’intensité – j’ai eu l’occasion d’écouter le titre une fois. C’est presque un titre d’actualité. C’est une fois de plus le malaise. Mais c’est le malaise de quoi ? D’une génération ? Y’a « génération » dedans. Quelle génération ? MF : Là, je suis un petit peu désolée parce que, même si le mot « génération » existe, je parle surtout de moi. Je ne veux en aucun cas impliquer, même si j’emploie une fois de plus le mot « génération », je n’implique que moi. Maintenant, c’est que si quelques personnes pensent comme moi…je dirais tant mieux. Mais, une fois de plus, ça n’engage que moi. Je ne veux en aucun cas faire de la revendication. Et moi, me situant plutôt hors du temps et hors de l’Histoire, je préfère qu’on ne me considère que comme tel. LB : Mais pourquoi te situes-tu hors de tout ? Parce que rien ne te touche ? Ça m’étonne… MF : Ça n’a rien à voir. On peut se situer et se placer hors de tout… C’est une manière de se protéger, c’est une manière surtout de s’échapper du monde environnant. Maintenant, je fais la même chose que vous toute la journée, probablement. Mais en aucun cas, je ne me

servirai de l’actualité présente. Non pas parce que ça ne me touche pas, ce serait cruel de le dire, mais parce que ce n’est pas mon propos que de parler de ça. Images du tournage du clip de « Désenchantée » – la scène où Mylène et les enfants s’enfuient du camp. Gros plans sur de nombreux figurants. LB : Parle-moi un petit peu de « Désenchantée ». Vous êtes venus ici, à Budapest, tu le disais tout à l’heure, pour des raisons de tournage. Je sais que Laurent et toi vous aimez bien la neige, vous aimez bien l’humeur de cet endroit, la Hongrie. Mais dans le clip, on voit de jeunes enfants – il y a une centaine de figurants hongrois – avec des têtes très particulières, grimées, masquées, habillés un peu comme toi… MF : Tout à fait, même. Encore plus sales (rire). LB : Assez minimalistes, quoi, dans la tenue. Alors, pourquoi ce choix ? D’où vient l’inspiration de ce choix ? MF : Là, j’avoue qu’il est né probablement d’un amour commun, de Laurent et moi-même, pour tout ce qui est Dickens, qui est « Oliver Twist ». On aime beaucoup, tous les deux, David Lean qui avait réalisé, je crois que c’était un de ses premiers longs métrages, qui était « Oliver Twist » qui était absolument magnifique. Et c’est surtout cette approche du conte qui est permanente. LB : Oui, ça reste un petit peu dans ce qu’on a vu déjà chez toi (« Oui » de Mylène), dans les histoires qui avaient avant, dans les scénarii qui avaient été développés. C’est toujours un conte et une histoire. T’aimes les histoires. T’aimes les fins, aussi, qui sont pas forcément belles, c’est que tu dis à propose du cinéma. MF : Oui. J’aime les fins, je crois même que je préfère, les fins tragiques. (silence) LB : Tu fais beaucoup de reproches d’ailleurs au cinéma français à ce sujet-là. MF : (soupir) Je le fais dans ma vie privée (rire). Et en privé, très souvent, je… Non, je ne ferai pas de grands discours sur le cinéma français. J’ai l’impression effectivement que le cinéma français, en tout cas celui d’aujourd’hui, me touche moins qu’un autre cinéma – le cinéma russe, le cinéma américain parfois, le cinéma anglais. Maintenant il y a toujours des… LB : (la coupant) Tarkovsky, dans le cinéma russe, par exemple ? MF : C’est quelqu’un que j’aime beaucoup.


1991–1993 : L'autre…

J’aime beaucoup Bergman, David Lean qui malheureusement a arrêté de tourner, je crois. Mais j’aime aussi… Y’en a beaucoup. LB : Dans « Désenchantée », dans le clip, c’est un univers carcéral particulier… MF : On a essayé d’avoir quelque chose d’intemporel. C’est pour ça aussi le choix de ces costumes, parce qu’on ne peut pas tout à fait situer l’époque. Alors ça se situe effectivement dans un milieu carcéral. Il y a une autorité autour de ces enfants. Qu’est-ce qu’on peut dire ? Et que ces enfants n’ont rien à perdre, donc il leur reste comme solution la révolte, et c’est ce qu’il va se passer dans le clip.

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Mylène Farmer

Images du tournage du clip de « Désenchantée » – la scène de la fuite des enfants. LB : Je me souviens, enfin j’ai lu ça quelque part, sans parler de ton histoire, que quand tu étais petite, tu passais beaucoup de temps dans les hôpitaux psychiatriques. T’as fait ça pendant un petit moment. MF : Ce n’était pas des hôpitaux psychiatriques, c’étaient des... C’était d’ailleurs l’hôpital de Garches, qui a beaucoup d’enfants handicapés, moteurs et mentaux effectivement. Je m’en suis, en tous j’en ai un souvenir, j’ai eu l’impression de m’en occuper beaucoup. J’y allais très souvent le dimanche. J’étais assez petite. LB : Mais c’est pas un truc de petite fille ça ! C’est quand même assez original comme attitude. MF : Je sais pas bien. J’avais probablement besoin d’aller vers quelqu’un, vers les autres en tout cas. Mais c’est bouleversant, c’est passionnant. Peut-être que j’y retournerai un jour. LB : Ça n’a pas de rapport avec ça, avec l’encadrement, toute la structure qui est autour des enfants du clip ? MF : Peut-être inconsciemment. Là j’avoue que… (rire). LB : Y’a pas d’incidence ? MF : Effectivement, il y a des acteurs, de jeunes enfants, qui sont handicapés. Et on s’est aperçu – il y a une anecdote absolument magnifique – qu’un enfant handicapé, qui est sur le tournage, et qui s’est adapté au tournage en quatre jours. Et son éducatrice nous a dit que, en quatre jours, il avait fait des progrès de six mois. Donc c’est une jolie récompense (sourire). LB : Là c’est ton côté humaniste ? MF : Oh non ! LB : Comment tu échanges avec tous ces jeunes hongrois qu’on voit là ? MF : (images du tournage – Mylène avec le petit enfant à la mitraillette) C’est une (sic !) échange uniquement de regards puisque nous n’avons

pas la même langue, et que les interprètes ne sont pas toujours là pour traduire. Ce sont des regards et puis… Ce sont surtout des gens… Tous ces figurants ne jouent pas. Ils sont très très justes. Enfin, ils jouent, mais en aucun cas ne surjouent. Et c’est ce qui est fascinant. Ils ont une spontanéité. On a l’impression qu’ils sont nés dans ces costumes, dans cette époque. Et ça, j’avoue que c’est un plus pour le tournage. LB : Je crois que c’est un parti pris. J’ai eu l’occasion de parler avec ce qu’on appelle un casting-producer ici ; il m’a dit que, dans le choix des gens, il y avait peu de comédiens, hormis la matonne… MF : Absolument, oui. LB : Il y a des délinquants, des jeunes enfants de l’école,… MF : Il y a de tout, oui. Ce sont des gamins de la rue (rire). LB : Avec leurs réactions (images des figurants sur le tournage de la scène finale). C’est-à-dire quand on vit à Budapest, quand on a vécu ce qu’on a vécu, quand on a eu l’Histoire qu’on a eue (« Oui » de Mylène), dans une ville qui, somme toute, quand on se promène un peu ici, on sent que c’est pas forcément réjouissant au niveau de l’humeur et de l’âme. MF : C’est en tout cas habité (petit rire). LB : C’est ça. On sent qu’il y a une âme (« Oui » de Mylène), mais on sent qu’il y a une pression. MF : Il y a une dureté et il y a une…oui une dureté réelle. Images de Laurent Boutonnat filmant la scène finale de « Désenchantée ». Boyer, qui est à ses côtés, réussit l’exploit de faire dire quelques mots au réalisateur, habituellement très discret. Un entretien hélas souvent couvert par les échanges des membres de l’équipe par talkiewalkie. Laurent Boutonnat : On a une scène avec tous les figurants, avec Mylène. C’est un raccord à faire sur ce petit monticule. Nous, on est derrière, avec la caméra. On va faire brûler des pneus pour avoir une grosse fumée noire, pour être raccord avec l’usine d’hier où il y avait le feu, etc. Ils sont sensés s’échapper de l’usine, et ils vont descendre de cette petite colline (sur laquelle Boyer et Boutonnat se trouvent) pour courir dans cette immense plaine, vers rien (images du tournage, Mylène et les enfants commencent à courir). LB : Ce sera le dernier plan du clip ? Boutonnat : C’est l’amorce des derniers plans en fait. C’est le premier plan où ils s’échappent de cette prison/usine pour partir dans la plaine. Après, on a plusieurs plans à faire de leurs visages qui courent… LB : Ça a été un bonheur pour toi d’avoir cent

figurants, de jeunes hongrois ? Boutonnat : Oh oui, oui, oui. C’est formidable ! LB : Pas trop difficile à gérer ? Boutonnat : Non parce qu’il y a une équipe très solide qui tient bien tout ce monde-là. (sur des gros plans des figurants) Ils ont des têtes extraordinaires en plus. Il y a quelque chose de formidable ici, c’est qu’ils sont… Ils jouent bien. C’est même pas jouer ; ça leur plaît de faire ça, donc c’est presque naturel. LB : C’est peut-être mieux que des comédiens. Ils ne surjouent pas. Boutonnat : Ah oui ! C’est impossible les comédiens ! Ils ont quelque chose de naturel. (images du tournage – fuite de l’usine) Comme ils ont jamais fait ça de leur vie, ils ont une espèce de maladresse. Mais t’as l’impression qu’ils ont fait ça toute leur vie, que ce sont de grands professionnels. LB : T’as voulu tourner ici. Ça s’appelle la Pousca… Boutonnat : La Pousta. LB : C’est quelque chose d’énorme. C’est la plaine hongroise. Le ciel se rejoint avec la terre. Boutonnat : (sur des images du réalisateur sur son travelling, l’horizon en second plan) Absolument. La Hongrie est un pays plat où il n’y a que des plaines. Et tout le centre de la Hongrie, c’est ça : des centaines de kilomètres avec rien. Et c’est très impressionnant. Surtout avec la neige. On a l’impression que le ciel et la terre se rejoignent et que y’a rien. C’est le néant. Et c’est beau. Images du tournage – scène finale LB : (en voix-off) Voilà des plans de ce tournage ici, en direct de Budapest, en Hongrie, que vous avez le plaisir de découvrir en exclusivité puisque, au préalable, personne n’avait pu découvrir les tournages des clips de Laurent Boutonnat et Mylène Farmer. Retour au ‘plateau’ avec Mylène Farmer. LB : (aux téléspectateurs) Alors ce que je vous propose, c’est de faire une petite pause de publicité. On se repose, nous aussi, deux secondes. Et on se retrouve après, avec, pour la première fois, la diffusion du clip « Désenchantée » dans son intégralité. Coupure pub. Puis retour à l’image de Laurent Boyer et Mylène Farmer. LB : A Budapest, dans un lieu un peu particulier qui est un lieu de tournage. Celui que Mylène Farmer et Laurent Boutonnat ont choisi pour ce clip, « Désenchantée », qu’on va découvrir dans quelques instants puisque vous allez le découvrir pour la première fois sur M6, presque en exclusivité, parce qu’il est pas


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Mylène Farmer

« Je pense qu’on peut avoir les cheveux très courts et être très féminine quand même. » passé beaucoup avant (Mylène esquisse un hochement négatif de la tête pour confirmer). On a parlé un peu de ce clip, de la façon dont tu as travaillé. Alors toi, c’est ta tenue permanente, ta tenue Dickens on va dire, c’est un peu ça. Et puis, un travail de maquillage. Tu n’hésites pas à te grimer. Là, on voit que t’as effectivement la petite trace de sang. T’as beaucoup souffert dans ta vie… MF : (elle sourit et pose un doigt au coin de sa bouche) Je me suis fait très mal ici (rire de Boyer). C’est parce que j’ai reçu des pierres. Donc, fatalement, je me suis coupée avec une pierre. LB : Il y a autre chose que tu as coupé, ça tout le monde l’aura remarqué. J’ai pas sauté dessus tout de suite. MF : (rire) C’était élégant. LB : (rire) Merci. MF : Ils sont coupés ! LB : Ça va de plus en plus dans ton côté…pourquoi j’allais dire androgyne ? MF : Allons bon (rire) ! LB : Est-ce qu’il y a un autre mot ?… Peut-être

« différente ». Ce côté masculin. Oui, ce côté masculin. On sait pas trop quoi. Cette image un peu masculine et féminine. Le fait de couper les cheveux, tu sacrifies au mythe. Enfin, pas aux mites, pas les cheveux ! (rires) Mais la coupe, on va dire : « Mylène Farmer, décidément, est de plus en plus masculine ». MF : Oh non, je ne pense pas. En tout cas, ce n’est pas mon souhait. Et je pense qu’on peut avoir des cheveux très courts et être très féminine quand même. LB : Un exemple : Katherine Hepburn. MF : Audrey Hepburn. Katherine Hepburn a eu les cheveux longs plutôt, elle. Mais elle avait une façon très féminine de s’habiller, mais toujours avec des pantalons. Très sobre. Que puisje vous dire sur la coiffure ? Rien (rires). LB : Sinon que t’avais envie de le faire, et que ça fait causer quoi ! MF : Ça, c’est vous qui dites que ça fait causer. Moi, j’avais tout simplement envie de changer de tête, c’était important pour moi. Et puis, c’est plus facile de se coiffer quand on a les cheveux courts.

LB : J’aime quand on parle de pratique comme ça, c’est bien (rire). (aux téléspectateurs) Mylène Farmer, « Désenchantée », le clip, on le regarde tout de suite, et c’est la première fois que vous le découvrez. Diffusion du clip « Désenchantée », dans une version courte. LB : Mylène, on a parlé tout à l’heure des enfants hongrois, on en a beaucoup parlé, de ce choix, du lieu bien sûr. Alors, il y a une infrastructure et une équipe assez importantes. Il y a beaucoup de gens sur ce tournage… MF : Je crois qu’il y a à peu près cent vingt personnes, mais il y a surtout douze personnes, enfin « surtout » parce qu’elles viennent de Paris, douze personnes dans l’équipe technique. LB : Des français donc ? MF : Oui, absolument. LB : Avec qui vous avez l’habitude de travailler ? MF : Oui. Jean-Pierre Sauvaire qui est chef opérateur. Carine Sarfati qui est aux costumes. Et


beaucoup d’autres, et je m’excuse de ne pas les citer. LB (sur des images des personnes concernées, pendant le tournage du clip): C’est une équipe de copains, ça. C’est des gens avec qui vous travaillez fréquemment. On a l’impression que c’est presque une famille. MF : Oh oui. C’est des gens de grande qualité humaine et professionnelle. C’est vrai que c’est un plaisir, à chaque fois, de les réunir à nouveau. LB : On voit pas de chevaux dans ce clip. MF : Non. LB : Y’a pas le… MF : Le syndrome chevaux ? (rires). Non, il n’existe pas. LB : Y’a pas le Cadre Noir. Et pourtant, ça fait partie de ton histoire quand même. MF : Ça, c’est la presse qui est allée un petit peut trop loin. J’ai fait beaucoup d’équitation dans ma jeunesse. J’ai effectivement fait un passage, mais très bref, à Saumur, mais c’était pour envisager de passer le monitorat. Donc c’était très très bref. La presse s’est emparée de ça et en a fait une grande monitrice d’équitation (sourire), mais je n’en suis pas là. LB : Ça faisait pas partie de tes aspirations. En fait, chanter non plus, vraiment ? MF : Non, ce n’était pas une vocation. Mais c’est quelque chose de… C’est probablement un cadeau de la vie qui m’a été fait. LB : Est-ce que c’est une chance qui passe à un moment donné ? Est-ce qu’il faut la saisir cette chance ? Au moment où tu as rencontré Laurent sur le premier 45 tours, il y a une petite voix qui t’a parlé ? MF : C’est L’autre justement (sourire). LB : (ne comprenant pas l’allusion au titre du nouvel album à venir) C’est l’autre ? MF : Oui, c’est une petite voix. C’est une chan-

ce et une évidence à la fois. C’est-à-dire que quand j’ai rencontré Laurent… Tous les deux, nous sommes nés de la même chose. Donc c’est quelque chose de très fort et très beau, en tout cas pour ma vie (images de Laurent et Mylène, ensemble, sur le tournage de « Désenchantée »). LB : Autre chose qui a probablement été très bon, on en parlait tout à l’heure, de tes émotions, de ta peur, de ce qui te motive, de ce qui te fait avancer, ça a été la scène. Ça a été le Palais des Sports. Ça a été Bercy par la suite. Moi, je t’ai vue dans les deux cas. Je t’ai vue pleurer sur scène. Pleurer d’émotion sûrement, d’intensité (images des larmes de Mylène sur « Ainsi soit je… » et le final, pendant le Tour 89). Est-ce que ça, c’est l’avènement pour toi ? Le parcours a été long, de 84 à 89, cette scène, est-ce que ça représente l’avènement ? Et estce que ça te manque déjà, l’absence de scène depuis à peu près un an ? MF : Je ne sais pas si on peut parler d’un manque. C’est…(silence) C’est très très troublant, la scène. En tout cas, la façon dont moi j’ai abordé la scène et la façon dont je l’ai ressentie, c’est quelque chose de très troublant. Donc c’est quelque chose qui marque énormément. (silence) Là aussi c’est difficile pour moi d’en parler parce que c’est très riche. (silence) Je ne sais pas. C’est une grande émotion. Maintenant, je pourrais dire beaucoup d’autres choses, mais c’est délicat pour moi parce que je… LB : Est-ce que c’est une émotion passée, ou est-ce que c’est une émotion qui implique le fait d’être en désir justement de cette émotion ? MF : C’est une émotion qui fait partie maintenant de mes souvenirs. Mais, dans la mesure où c’est aujourd’hui, je peux la considérer comme étant du passé. Donc c’est quand même… Comment vous dire ? C’est une plaie. En tout

cas, dans mon souvenir, c’est une plaie car c’est quelque chose que je n’ai plus actuellement. Ce qui ne veut pas dire que j’ai envie d’y retourner tout de suite non plus. J’ai envie de vivre dans ma vie des choses très fortes. Je sais que je ne pourrai pas les renouveler quotidiennement. Donc je sais que ma première fois sur scène, c’était quelque chose de (silence…puis sourire) d’incroyable pour ma vie. Est-ce que je ressentirai les mêmes choses si je remonte une deuxième fois sur scène ? C’est la question, en fait, que je me pose, donc c’est en ce sens que c’est très déstabilisant. LB : Qu’est-ce qui peut t’inspirer justement un désir aussi fort, où tu te dis : « Tiens, si je faisais ça, j’aurais peut-être une émotion encore plus forte » ? Y’a le cinéma, probablement ? On t’a proposé d’ailleurs des rôles au cinéma. Garcia t’a proposé un rôle, il me semble. MF : (visiblement très surprise) Vous me surprenez parce que, moi, je n’en ai jamais parlé. LB : Ah oui ? C’est des échos alors. Des bruits… MF : (perturbée) Non, mais c’est pour dire que je n’en ai jamais parlé. LB : C’est vrai ou pas ? MF : C’est vrai que j’ai rencontré Nicole Garcia. J’ai vraiment souhaité la rencontrer. J’avais ce projet de scène donc il a fallu choisir. Et c’était évident pour moi. Ce n’était même pas un choix. Mais j’ai quand même souhaité la rencontrer. J’aime bien cette femme. J’ai eu quelques propositions. J’attends. J’attends parce que ce ne sont pas encore les bonnes. Et que j’y mettrai, je dirais, la même démesure et la même passion pour aborder ce thème-là. Mais c’est… J’attends, voilà. LB : Peut-être alors. Qui sait ? On parlait d’émotion à l’instant. L’émotion, l’intensité. (aux téléspectateurs) C’est extrait d’un double


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« Mon vrai problème, c’est d’exister et donc d’avoir le regard des autres posé sur moi. » album qui est sorti, c’est également la cassette vidéo live du Palais Omnisports de Paris-Bercy. C’est Mylène Farmer sur scène. « Plus grandir ». Regardez…

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Mylène Farmer

Diffusion du clip de « Plus grandir (live) ». LB : (aux téléspectateurs) « Plus grandir » à l’instant. C’est la scène. C’est Mylène Farmer en scène. Mylène nous en parlait à l’instant, avec cette émotion nette et intense qu’était cette scène. (à Mylène) A propos de ton succès, parce que tu as quand même du succès, tu es…je sais pas si on peut dire star ou vedette… MF : J’en sais rien. C’est pas mon problème. LB : Tu t’en fous. Par contre, il y a une réflexion que tu t’es donnée à toi-même une fois ; dans une interview, tu t’es toi-même posée la question, et tu y as répondu, et j’ai trouvé ça assez intéressant. Tu dis : « Si le succès se meurt, je serai dans une solitude incommensurable et presque insupportable ». Alors, ça aussi, c’est le paradoxe du personnage puisque tu viens de me dire : « Bof, je m’en fous, c’est pas mon problème. J’suis star, j’suis vedette, c’est pas… ». MF : Non, mon problème n’est pas le mot qu’on emploiera pour définir. Mais mon vrai problème, c’est d’exister, et donc d’avoir le regard des autres posé sur moi, d’avoir quelqu’un qui m’écoute. Et ça, c’est… Pourquoi je fais ce métier ? C’est parce que j’ai besoin de ça pour vivre. LB : C’est le désir d’amour des autres. Probablement le désir de donner aussi… MF : Bien sûr. Ça c’est…Oui, bien évidemment, oui. LB : Est-ce que tu projettes un petit peu dans l’avenir et te dire : « Est-ce que je continuerai à faire ça ? » ? C’est-à-dire un album tous les trois ans, une scène, … Je me demande su tu es capable de tomber dans une routine ? MF : Non parce que je pourrai dès le prochain album remonter sur scène… Non, je ne peux pas me projeter dans l’avenir. Quand je pense à l’avenir, je vois l’échec donc je préfère ne pas y penser… Et j’y pense malgré tout (rire nerveux). Mais c’est pas une grande quiétude en tout cas. LB : On a l’impression qu’il y a un mal de vivre permanent chez Mylène Farmer. MF : Oh, je ne voudrais pas (rire) n’émaner que ça, mais je… (silence, soupir) Que dire ? Oui, appelons ça le mal de vivre. Appelons ça une incompatibilité avec la vie en tout cas (rire). LB : Avec les autres des fois ?

MF : Avec les autres, mais ça nous sommes tous pareils. LB : L’enfer c’est les autres quoi. MF : Oui, bravo (rire). LB : Je vous en prie. (un camion arrive en second plan, depuis le décor du clip, et vient tout droit vers le ‘plateau’ d’interview) Ne vous inquiétez pas, on a un camion qui nous arrive dessus. On est vraiment sur les lieux du tournage de ce clip (rires de Mylène qui se retourne). Y’a même des coups de mitraillettes de temps en temps. C’est l’apocalypse quoi ! (le camion passe juste derrière eux puis disparaît, Mylène est morte de rire) Voilà, merci, c’est gentil. Ne changez rien. Restez où vous êtes. On s’installe et on continue dans le même esprit. Mylène, on va regarder « Désenchantée » une autre fois… Ah je voulais dire une chose. L’album n’est pas encore sorti, par contre, il y a une chose que tu as faite et qu’on n’attendait pas forcément, c’est un duo avec quelqu’un, sur cet album, avec Jean-Louis Murat. Alors là aussi, il y a une rencontre un peu particulière. Cette rencontre est née de quoi : de ton désir, du sien ? MF : Ça, je vais garder ça mystérieux. Je crois que c’est né de toute façon d’un désir commun. Nous nous sommes rencontrés et on a décidé de chanter cette chanson ensemble. Et je suis très heureuse d’avoir rencontré JeanLouis. J’aime beaucoup sa voix, d’abord. Et j’aime surtout sa façon d’écrire. Et c’est quelqu’un qui a réellement un univers. C’est pour moi – je ne sais pas s’il appréciera le compliment (sourire), c’en est un pour moi – c’est un poète d’aujourd’hui. C’est quelqu’un qui me touche beaucoup (large sourire). LB : (aux téléspectateurs) Mylène Farmer. « Désenchantée ». Diffusion du clip « Désenchantée », version intégrale. LB : (aux téléspectateurs) Voilà. « Désenchantée ». Mylène Farmer. On est sur le tournage de ce clip. L’album sort le 8 avril, je vous le rappelle. L’album s’appelle « L’autre… ». Le 45 tours, vos le connaissez puisqu’on l’entend en radio, déjà, depuis le 18 mars. (à Mylène) Mylène, après ce tournage, après Budapest, ça va être quoi ? Ça va être promotion ? Quelques télés…Très peu, d’après ce que je sais. MF : Très peu de télés, oui. LB : Merci de nous avoir accordé cette interview, surtout ici. MF : Merci d’être venu.

LB : Je t’en prie. On se remercie encore (rire de Boyer, sourire de Mylène). Et après, ça va être peut-être un peu de repos, t’occuper des animaux. Tu as toujours des animaux ? MF : J’ai toujours mes deux singes. LB : Oui, c’est ça. MF : Et, quant au repos, non. Définitivement, je déteste le repos et l’oisiveté. LB : Tu t’ennuies ? Ça t’ennuie le repos ? MF : Oui. Et ça m’inquiète beaucoup. Beaucoup. LB : Mylène. Merci d’avoir été avec nous. Et puis, on se retrouvera probablement prochainement. On ne sait pas. Qui sait ? MF : D’accord. LB : Merci. C’était ici, à Budapest, et elle va continuer le tournage du clip. Et il fait de plus en plus froid, je vous assure (rire de Mylène). Ah ! Je sais que ton rêve, ce serait de faire un reportage sur la banquise. MF : Oui, absolument. LB : C’est toujours vrai ? MF : C’est toujours vrai. LB : Je sais pas si j’irai t’interviewer sur la banquise (rires). Ça s’arrange pas (il glisse ses mains dans les manches de son blouson pour les mettre au chaud). Merci Mylène. MF : Merci. LB : (à la caméra) A bientôt. MF : Au revoir. Générique (extrait de « Désenchantée » sur des images du tournage). De l’aveu même de l’animateur, cette émission est le vrai premier « Fréquenstar » ; elle n’en a pas le nom, mais en a la forme qu’on connaîtra ensuite (une interview en extérieur). D’ailleurs, quelques années plus tard, lors de la centième de cette émission phare des années 90, un court extrait de l’interview de Mylène est diffusé : il s’agit d’un moment volé entre deux prises dans lequel on voit Laurent Boyer prendre le soleil tandis que Mylène reste à ses côtés, sans dire un mot, ne sachant pas vraiment quoi faire. Pour les dix ans de « Fréquenstar », l’animateur souhaitait faire une nouvelle émission avec Mylène, histoire de boucler la boucle. Hélas, ça ne s’est pas fait. Pour info, une grande partie de l’interview est rediffusée sur M6 le 31 août 1994, dans un montage différent, pour les besoins d’un portrait de Mylène Farmer dans « Fan-club », une émission présentée par…Laurent Boyer.


J.T. de 20h

Date 10.04.1991 Chaîne TF1 Présenté par Patrick Poivre d’Arvor

Première émission en direct pour la Mylène aux cheveux courts. Et quel direct : le J.T. le plus regardé d’Europe ! Rien de moins… La chanteuse est présente en plateau dès le début du journal quand PPDA annonce les titres : Patrick Poivre d’Arvor : Invitée de ce journal, Mylène Farmer. Un nouvel album, un nouveau clip, un nouveau visage (gros plan sur Mylène, déjà présente, cheveux très roux, pull blanc à col large lui recouvrant le cou). La chanteuse est interviewée en toute fin de journal. Visiblement intimidée, elle ne cessera de passer sa main gauche sous son menton durant tout l’entretien. PPDA : Mylène Farmer est, comme promis, avec nous pour célébrer son retour avec un nouveau 45 tours, « Désenchantée » qui s’appelle en fait plus précisément « L’autre… » (sic !). Mylène Farmer : C’est le titre de l’album. PPDA (qui n’est visiblement pas très au fait des choses) : Voilà. « Désenchantée », c’est le titre

de la deuxième chanson. Je vous propose un extrait du superbe clip tourné en Hongrie par Laurent Boutonnat, son fidèle collaborateur. Diffusion d’un extrait du clip, au moment du début de la rébellion dans la cantine. PPDA : Ce n’est qu’un extrait de ce clip qui dure en fait une dizaine de minutes. MF : Dix minutes, exactement. PPDA : Y’a une raison au choix de la Hongrie pour tourner ce clip ? MF : Il y a de multiples raisons. La principale était de changer de pays. On avait envie de tourner ailleurs. D’autre part, nous voulions des paysages de neige, de grandes étendues. Et puis également par rapport à un choix de visages d’enfants. Il y a cent figurants dans ce clip. Et on voulait des visages qui portaient quelque chose, quelque chose de grave. Et c’est plus facile de trouver ces visages dans les pays de l’Est, entre autres, malheureusement pour eux. PPDA : Vous êtes obsédée par l’idée du changement, et du visage parce que vous avez une nouvelle tête, vous vous êtes coupée les cheveux… MF : Oui (sourire). PPDA : Et obsédée aussi par le souvenir de l’enfance qui est présent dans pratiquement chacune de vos chansons.

MF : C’est vrai. Je crois que ça fait partie de la vie de chacun. L’enfance est une période qui marque, et qui marque pour tout le reste de sa vie. PPDA : C’est la raison pour laquelle vous avez cette tête de pantin désarticulé ? MF : (rire) J’ai une tête de pantin désarticulé (rire) ? PPDA : Un peu. On devine qu’il n’y a pas de fil derrière, mais… MF : J’ai souhaité en tout cas changer de visage, mais le fond reste le même. PPDA : « Désenchantée », c’est le fond de votre pensée ? MF : Oui. Je suis quelqu’un qui… Est-ce que j’ai perdu toutes mes illusions ? J’en ai délaissées beaucoup en tout cas, des illusions (sourire). PPDA : (il montre le disque « L’autre… ») Voilà. C’est un très bon album et un très beau compact disc qui l’accompagne, avec un petit corbeau qui se trouve sur la tête de Mylène qui ne dort pas (il retourne le CD), et ensuite sur la tête de Mylène qui dort. Là aussi, le symbole avec le corbeau, il y a une raison, ou c’est juste pour faire joli ? MF : Non. Je crois qu’il y a une raison. J’aime bien ce paradoxe justement. Le corbeau étant un oiseau de malheur ou de mauvaise augure, et moi, je l’ai choisi comme quelqu’un de

« Est-ce que j’ai perdu toutes mes illusions ? J’en ai délaissées beaucoup, en tout cas. »


1991–1993 : L'autre…

protecteur. Ce pourrait être L’autre. Et j’aime le contraste du noir et du blanc. Il y a de multiples symboles pour le corbeau ; je ne suis pas sûre que cela soit très intéressant de tous les évoquer (sourire). PPDA : Si, si, c’est intéressant. En tout cas, ce corbeau dort sur votre épaule sur le disque. Merci Mylène Farmer d’être venue nous voir. MF : Merci à vous. Le journal se termine. Mylène se lève pendant le générique et va vers PPDA, lui fait la bise, et reste à ses côtés. Pour information, aussitôt après, Mylène part en voiture, sous escorte avec gyrophares, en direction du studio de « Tous à la Une », l’émission de Patrick Sabatier qui est enregistrée ce soir-là vers 21h (pour une diffusion le 31 mai).

Sacrée soirée Date 17.04.1991 Chaîne TF1 Présenté par Jean-Pierre Foucault

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Mylène Farmer

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Première télé pour « Désenchantée ». Mylène Farmer, désormais star, est très attendue – un an de silence, c’est son record à l’époque ! Un vent de frénésie souffle donc sur le plateau du prime-time de TF1 qui, rappelons-le, est en direct.

En milieu d’émission, après une coupure pub, gros plan sur Jean-Pierre Foucault qui tient le 33 tours « L’autre… » entre ses mains : Jean-Pierre Foucault : La dernière fois que nous l’avons vue sur scène, c’était à Bercy, les 7 et 8 décembre 1989. Comment ? Vous n’étiez

pas à Bercy ?! C’est impardonnable ! Vous êtes pardonné quand même car nous avons pour vous quelques images. Regardez-les ces images de Bercy. Images de « Sans contrefaçon », « Libertine » (on entend le public applaudir dans le studio de « Sacrée soirée »), « Ainsi soit je… » (le public applaudit les larmes de Mylène). Retour plateau. Le public hurle. L’animateur reprend la parole : JPF : Première apparition avec cette toute nouvelle chanson, « Désenchantée », Mylène Farmer… Mylène Farmer (Le public hurle) ! La chanteuse porte un tailleur pantalon blanc et des chaussures blanches. Une tenue qui, couplée à ses cheveux très roux et désormais très courts, lui vaudra très rapidement le surnom d’« allumette » dans « L’émission » des Nuls, le samedi soir sur Canal+. Les huit danseuses qui l’accompagnent sont, elles, en noir, des chaussures aux cheveux. La prestation est un triomphe ; le public se fait d’ailleurs largement entendre tout au long de la chanson. Il faut dire que, au-delà du fait que Mylène fasse, ce soir, son grand retour avec le titre le plus fort de sa carrière, cette télé est sans doute l’une des plus réussies de la chanteuse. Elle éblouit avec une chorégraphie élégante et énergique – la plus efficace de sa carrière. Les lumières oranges qui habillent la performance sont simplement sublimes. Et la réalisation, dynamique. C’est d’ailleurs la première fois que Mylène a recours à l’ampex. C’est un procédé qui permet usuellement à un artiste d’être présent dans une émission sans être physiquement là ; il enregistre sa performance au préalable et celleci est intégrée au montage final de l’émission. Mylène en fait un usage pour le moins singulier puisqu’elle ampexe sa performance alors qu’elle est bien là en plateau. Il s’agit en fait pour elle de contrôler au maximum ce qui sera diffusé. En clair, elle fait plusieurs prises de sa chanson avant l’émission (le jour même ou quelque temps avant) et ces images sont ensuite montées avec sa prestation devant le public. Tant bien que mal. On note en effet quelques petits problèmes de raccord entre les plans larges et les gros plans, notamment au second couplet (« A quel sein se vouer… ») et pendant le bridge. A partir de cette date, Mylène utilisera quasiment systématiquement l’ampex pour ses télés, qu’elle soit ou non présente en plateau le jour de l’émission. La chanson finie, Jean-Pierre Foucault rejoint la chanteuse tandis que le public scande : « Mylène ! Mylène ! Mylène ! » : JPF : Bonsoir Mylène. Quelle ambiance !... (Mylène sourit) Et bien oui, parce que quand on fait

défaut comme ça pendant plusieurs mois (un fan hurle : « Mylène ! » et Jean-Pierre Foucault ironise : « Une autre ! » puis reprend…) Y’a combien de temps qu’on s’était pas vu à la télévision Mylène ? Mylène Farmer : Je crois que ça fait presque deux ans. JPF : Bah, deux ans, pour bon nombre de personnes qui sont là et qui sont devant le récepteur, ça fait beaucoup. Alors nouvel album, Mylène… MF : Oui. Je crois que c’est le troisième également (sourire). JPF :C’est toujours la même équipe. MF :C’est la même équipe. Je travaille toujours avec Laurent Boutonnat. Et depuis peu avec Thierry Suc. JPF :Alors on a vu des images exceptionnelles de Bercy. On pense déjà à un retour sur scène ou alors c’est une question qui n’est pas d’actualité du tout ? MF : C’est quelque chose que je délaisse un peu pour l’instant. (soupir) J’ai eu l’envie de faire cet album, maintenant je crois que… Tout démarre d’un désir, donc pour l’instant… J’ai eu quelque chose de tellement fort que… (soupir) Je crois que je vais attendre un petit peu. C’est un peu confus tout ça (sourire vers le public). JPF : On va encore attendre. Mylène, c’est une spécialité, nous fait attendre (un fan hurle « Mylèèène ! »). Non mais c’est bien, c’est une bonne chose parce qu’on attend avec grand plaisir les choses que l’on aime et les gens que l’on aime. Alors moi j’ai vu le clip. Superbe clip. On a vu les images dans « Télé 7 jours ». La question qu’on est amené à se poser les uns les autres, c’est pourquoi pas du cinéma ? Là aussi c’est une sensation forte. MF : C’est quelque chose aussi que je souhaite


faire. J’ai quelques propositions et j’attends les…ma réponse finalement (rire). JPF : Bon, ben on verra bien. Dernière question : qui fait la chorégraphie de chacune des chansons qui est toujours extrêmement réussie ? MF : C’est moi qui la fais (sourire). JPF : (au public) Mylène Farmer ! (applaudissements et cris du public). (à Mylène) Merci beaucoup. Merci à vous. (au public) Mylène à « Sacrée soirée ». (à Mylène) A bientôt Mylène. Merci. (Mylène est très longuement et chaleureusement applaudie. On voit même un fan avec une pancarte)

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La chanteuse revient en toute fin d’émission. C’est une tradition dans « Sacrée soirée » : les invités sont tous présents juste avant le générique, pour accueillir au téléphone le téléspectateur dont la date anniversaire a été désignée pendant le show. Mylène n’y échappe pas. Elle est même au premier rang, aux côtés de Jean-Pierre Foucault, devant…Astérix et Obélix ! Même si les autres invités sont également présents (Marlène Jobert, Pierre Palmade, Hervé Vilard, les groupes Avalanche et Début de soirée,…), le réalisateur s’attarde beaucoup sur Mylène, toujours dans son costume blanc, et multiplie les gros plans. On entend de nom-

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breux « Mylèèèène ! » fuser depuis les gradins tandis que l’animateur est au téléphone avec le gagnant du soir. A tel point que, au moment de remercier tous ses invités, Jean-Pierre Foucault a ces mots : JPF : Merci à toutes et à tous. Je vais prononcer un simple prénom et vous allez entendre des cris dans la salle. Merci Mylène (rire). Et effectivement, le public hurle. Le générique démarre sous les « Mylèèène !!! ». La star reste stoïque, une flûte de Champagne à la main (qu’elle ne portera jamais à ses lèvres). Elle ne parle pas, elle ne boit pas, elle ne bat pas la mesure du générique comme d’autres invités. Un énième « Mylèèèèène ! » parvient tout de même à lui arracher un sourire. Cette performance de « Désenchantée » sera plusieurs fois rediffusée. En juin 1991, dans « Sacrée soirée », quelques années plus tard pour la 250ème, puis pour la dernière de l’émission, le 29 juin 1994. L’occasion pour Jean-Pierre Foucault de confesser que Mylène était l’artiste qui l’avait le plus scotché par son professionnalisme. On l’a revue une dernière fois en août 1999 dans « 50 ans de tubes », une autre émission de l’animateur de TF1.


1991–1993 : L'autre…

La une est à vous

Stars 90

Date 20.04.1991 Chaîne TF1 Présenté par Bernard Montiel

Pour rappel, cette émission, en direct et sans public, occupait l’intégralité du samedi aprèsmidi sur TF1. Il s’agissait pour les téléspectateurs de choisir eux-mêmes, par téléphone, les séries qu’ils voulaient voir, parmi celles que leur proposait Bernard Montiel. Entre deux séries américaines, l’animateur recevait des invités. Et ce jour-là… Bernard Montiel : Son nouvel album s’appelle « L’autre… ». Bien sûr, vous savez qui c’est. C’est Mylène Farmer, dans « La Une est à vous », et son, bien sûr, répétez-le avec moi, « Désenchantée ». Mylène Farmer ! ». La performance est la même qu’à « Sacrée soirée ». Mylène, en costume blanc, entourée de huit danseuses en noir. Les conditions de réalisation sont également les mêmes : Mylène a

Date 13.05.1991 Chaîne TF1 Présenté par Michel Drucker

Il s’agit ici de la troisième télé de Mylène pour « Désenchantée » (la seconde en public). Mais ce sera un peu plus que ça : une interview et un second titre sont aussi au menu de cette émission.

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Mylène Farmer

Tandis que Michel Drucker annonce le programme de la soirée, on voit Mylène et ses huit danseuses derrière lui.

pu tourner plusieurs plans qui ont été montés ensemble. On note deux tout petits accros dans la chorégraphie : avant de se lancer dans les pas du bridge, Mylène doit se recentrer car elle est trop à droite, et, sur le refrain qui suit (« abîmés ») elle manque de trébucher. En fin de chanson, sur le ad.lib. (les refrains

qui s’enchaînent à l’infini…), notons un fait unique dans tous les passages télé de « Désenchantée » : tandis que pour les autres, elle finit toujours le bras en l’air, stoppant ainsi la chorégraphie, là on a droit à un gros plan sur son visage alors qu’elle baisse les yeux, abandonnant le play-back, puis elle relève le regard vers la caméra. On retrouve ce plan fixe sur un écran géant devant lequel Bernard Montiel est assis : BM : Jolie Mylène Farmer. « Désenchantée », extrait de son nouvel album « L’autre… » que vous avez déjà plébiscité. Mylène Farmer qui confirme là son très très grand talent, et son professionnalisme. Elle a signé également la chorégraphie ; je tenais à le préciser. » Mylène n’est plus apparue dans une émission de Bernard Montiel depuis. Pourtant, dans son autobiographie parue en 2003, l’animateur confie qu’il reçoit, malgré tout, chaque année une carte de vœux de la part de Mylène…

Michel Drucker : (…) Tout de suite, une star des années 90, indiscutablement. Elle s’appelle Mylène Farmer. On la voit rarement à la télévision. Elle a vendu en quelques années, écoutez bien, 2,5 millions d’albums, plus de 2 millions de 45 tours (on voit en second plan que Mylène et ses danseuses prennent la pose pour le début de la chorégraphie). En l’espace de trois semaines, elle est N°1 du Top 50, c’est plus qu’une référence. Nouveau look, nouvelle chanson, nouveau succès. Mylène Farmer ! (Les applaudissements, plutôt bien nourris, laissent échapper quelques « Bravo ! ») La performance est en tous points identique aux deux précédentes, à ceci près que la variété de plans est plus grande (gauche, droite, face, gros plan, plongée,…), grâce à l’immensité du Pavillon Baltard (qui accueille désormais la « Nouvelle Star » de M6). On note que, comme dans « La Une est à vous », Mylène doit se recentrer d’un petit saut avant d’entamer la chorégraphie du bridge. Les applaudissements qui suivent la chanson sont vifs, et l’on y perçoit quelques « Mylène ! Mylène ! Mylène » scandés par des fans enthousiastes. La chanteuse est alors rejointe par Michel Drucker : MD : (au public) Mylène Farmer, invitée d’honneur de « Stars 90 ». (à Mylène) Bonsoir Mylène. (au public) Elle va aller se changer et, rassurez-vous, elle va revenir pour une deuxième chanson, et, entre temps, on va bavarder un petit peu. (à Mylène) Mylène, à tout à l’heure. Merci beaucoup. On retrouve effectivement Mylène Farmer plus tard dans l’émission, assise aux côtés de Michel


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1991–1993 : L'autre…

« C’est vrai que quand tout va très vite… On se dit que la chute sera encore plus douloureuse (rire). » Drucker. Elle porte une nouvelle tenue : exit le costume de « Désenchantée », elle est désormais en pantalon et soulier noirs, surmontés d’un pull à col roulé enrubanné d’une veste en tulles marronnées, légère, aérienne, très bouffante. MD : Je retrouve Mylène Farmer qui s’est changée et je voudrais bavarder un petit peu avec vous parce qu’on vous voit peu à la télévision, vous êtes un peu l’invitée d’honneur de ce « Stars 90 ». On vous voit peu car les clips parlent pour vous. Mais ce qui me frappe moi, c’est votre changement de look (Mylène esquisse un sourire). Changement de tête, ça c’est dû à un artiste qui s’appelle Maniatis, je le sais (la chanteuse confirme d’un hochement de tête). Mais votre look est toujours très très différent. Vous avez dans votre famille un styliste ? Vous rêviez d’être styliste, de dessiner des robes, des modèles ? (le réalisateur passe sur Mylène qui porte le micro à sa bouche, mais l’inépuisable Drucker n’en finit plus de compléter sa question) Depuis que je vous connais, je vous vois toujours dans des robes, des vêtements, des pantalons que je n’ai vus nulle part ailleurs. Mylène Farmer : Non, je crois que j’ai une attirance pour le vêtement en général et que je vais vers des couturiers que j’aime beaucoup, que j’affectionne particulièrement : Thierry Mugler, et aujourd’hui, Issey Miyaké. MD : Comment vivez-vous tout ce qui s’est passé dans votre vie depuis trois ans – 2,5 mil-

lions d’albums, vous sortez le dernier album, en même pas trois semaines, il est N°1 de toutes les ventes en France. Comment vous vivez tout ça ? Vous êtes sur une autre planète depuis trois ans, non ? MF : Sur une autre planète, et à la fois très très vigilante. C’est vrai que quand ça va très très vite comme ça, il y a toujours une… (soupir) On se dit que la chute sera encore plus douloureuse (rire). Mais ça, c’est mon côté un petit peu anxieux et pessimiste. Mais c’est magnifique. C’est la plus belle chose, je crois, qui puisse arriver à un artiste. MD : Vous vendez beaucoup de disques. Vous êtes la seule femme à avoir rempli Bercy plusieurs soirs. Vous avez fait une tournée fracassante y’a pas tellement longtemps. Et vous êtes également un personnage de clips. On a fait un petit montage : « Mylène Farmer story » en quelques minutes. Diffusion d’un medley des grands tubes de Mylène, « Sans logique », « Sans contrefaçon », « Ainsi soit je… » et « Libertine » (extraits tout autant des clips que du Tour 89). MD : Mylène Farmer, quand je vous ai vue pour la première fois, j’ai eu l’impression de voir quelqu’un de très fragile, une espèce de petit roseau, et je m’aperçois que vous affrontez des foules considérables. Vous êtes une fausse mince et une fausse fragile (rire de Mylène).

Vous êtes très costaud ou est-ce que vous avez appris à vous entraîner ? Vous avez suivi un régime particulier, comme les sportifs ? MF : Pour la scène, j’ai suivi effectivement un entraînement pour acquérir une endurance suffisante pour affronter effectivement la scène. Je crois que la scène se prépare. MD : On va écouter une deuxième chanson de Mylène Farmer, « L’autre… ». C’est le titre de l’album. Dans le dernier, vous étiez tournée un peu vers vous, là vous êtes tournée vers les autres. MF : C’est un peu plus complexe que ça. Mais c’est vrai que c’est difficile de parler de l’autre. C’est peut-être plus facile pour moi de parler de moi, de mes angoisses, de mes obsessions et autre. C’est vrai que, avec la scène, j’ai découvert, je ne sais pas si c’est « mon » public, mais en tout cas un visage, et il m’était plus facile de parler de la détresse de l’autre au travers de la mienne finalement. MD : On vous revoit quand sur scène ? MF : Je ne sais pas encore. Je ne sais pas. MD : Deuxième chanson de Mylène Farmer, « L’autre… ». Merci. Mylène se lève. On la retrouve assise sur les marches du Pavillon Baltard aussitôt envahies de brume artificielle. Les yeux de la chanteuse sont embués de larmes presque dès le début de cette chanson lente (ici en version edit). Les larmes perlent réellement pendant le bridge. La chanson se termine. Mylène se lève sous des applaudissements relativement nourris. Drucker la rejoint pour la saluer d’un baise main.

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Mylène Farmer

MD : (au public) Mylène Farmer ! (à Mylène) Merci chère Mylène. MF : Merci. MD : Merci de votre visite. Bonne chance. A bientôt sur scène. Mylène est de retour sur le plateau avec tous les invités du jour pour le générique de fin. Lova Moor et Alain Delon sabrent le Champagne devant une pièce montée en l’honneur des quarante ans du Crazy Horse. Les danseuses dénudées du célèbre cabaret parisien sont parmi les invités (Yannick Noah, Lagaf’,…). L’ambiance est à la fête. Mylène reste à l’écart, en compagnie de ses danseuses, dans sa tenue de « Désenchantée » (ce qui laisserait à penser que la partie interview et « L’autre… » a été tournée séparément).


Tous à la une

de Mylène, en ce sens qu’elle n’est réellement pas présente le jour de l’émission. L’enregistrement a eu lieu le 10 avril, juste après le passage de la chanteuse au J.T. de TF1. Elle avait alors déjà enregistré plusieurs prises de sa performance de « Désenchantée », mais revenait pour l’enregistrement en public qui devait être monté avec ses prises préalables. Un mini entretien avec Patrick Sabatier était prévu après la chanson, à l’instar de ce qui avait été fait à « Sacrée soirée ». Or, au moment où Mylène arrive au studio, on l’informe qu’il faudra finalement que, après la chanson, elle rejoigne l’animateur sur le canapé de l’émission, aux côtés d’autres invités, afin qu’il lui pose quelques questions. Mylène refuse. Malgré de longues négociations avec son manager, la situation est bloquée. Au bout de trente minutes, Mylène et ses danseuses quittent le studio. Le public présent dans la salle ne verra sa performance que sur des écrans. Seul l’enregistrement ampexé est diffusé lors de l’émission.

Date 31.05.1991 Chaîne TF1 Présenté par Patrick Sabatier

Quatrième et dernière télé (française) pour « Désenchantée ». Mylène aura fait le tour des grands shows de variétés de TF1 (rappelons que, à l’époque, nous avions Drucker le lundi, Foucault le mercredi et Sabatier le vendredi). La prestation est semblable aux trois précédentes : même tenue, même chorégraphie, et mêmes astuces de réalisation – le fameux ampex. On perçoit d’ailleurs clairement que la chanson a bénéficié de plusieurs prises. C’est particulièrement criant lors du final, quand Mylène reste le bras levé : elle a les yeux au ciel sur le plan large, alors qu’elle fait face à la caméra sur le plan serré. Mais cet ampex est le premier vrai ampex

Stars 90 Date 09.09.1991 Chaîne TF1 Présenté par Michel Drucker

Mylène ne vient pas pour chanter, mais pour parler de son voyage sur la banquise avec Luc Besson, invité principal de l’émission à l’occasion de la sortie, deux semaines plus tôt, de « Atlantis », son documentaire maritime. La venue de Mylène sur le plateau est l’occasion de diffuser, pour la première fois, son tout nouveau clip, « Regrets », en duo avec Jean-Louis Murat. Michel Drucker et Luc Besson sont assis côte à côte sur des tabourets. Michel Drucker (au sujet de la Banquise) : J’ai tenu ma parole, j’y suis allé. Quelqu’un m’avait

précédé, quelqu’un que tu aimes beaucoup, c’est Mylène Farmer. Quelle n’était pas ma surprise, vous verrez le document, de voir sur une cassette de magnétoscope, que Mylène Farmer, tel un petit renard roux, est venue se promener un mois avant moi sur la banquise. Tu avais lu quelque part qu’elle s’intéressait au Pôle Nord, à l’Arctique ? Luc Besson : Je la connaissais un tout petit peu, avec Laurent… MD : Boutonnat. LB : Je les connaissais un petit peu tous les deux. Et je l’ai entendue dire un jour qu’elle adorerait aller sur la banquise. J’ai dîné un soir avec elle et je lui ai dit : « Je pars la semaine prochaine. Si tu veux venir, tu viens. ». Et elle a dit : « D’accord. » (rire). MD : Elle va nous faire part de ses impressions dans un instant. Elle n’a pas plongé. LB : Non, elle s’est dégonflée.

MD : Mais elle a vu ce que c’était quand même. LB : Elle s’est mise au bord du trou, et elle a dit : « jamais ! » (rires). MD : Moi, je me suis mis au bord du trou et on m’a poussé (rires). C’est la différence… LB : Il faut que je dise que quand Michel est venu, on lui a dit : « Tu sais, Mylène, elle a plongé ! » (rires). MD : Voilà pourquoi j’ai plongé. Je vais régler mes comptes avec elle (applaudissements). Avant d’accueillir Mylène, en exclusivité le clip avec Jean-Louis Murat, « Regrets », filmé dans un cimetière tout à fait fascinant en Hongrie ; le vieux cimetière juif de Budapest qui est complètement abandonné. Laurent Boutonnat et Mylène sont allés là-bas ; ça donne un clip très émouvant avec Murat. Ils viendront le 7 octobre sur ce plateau le chanter, mais pour l’instant, comme c’est quand même un aspect très


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1991–1993 : L'autre…

cinématographique de sa carrière, on a voulu que tu découvres avec nous le clip de Mylène Farmer qui nous rejoints dans un instant. « Regrets » ! Le clip est diffusé dans son intégralité.

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Mylène Farmer

MD : Je vous demande d’accueillir Mylène Farmer. L’entrée de la chanteuse est saluée par des applaudissements nourris et quelques « Mylène ! Mylène ! Mylène ! ». Elle vient s’asseoir aux côtés de Michel Drucker et de Luc Besson, vêtue d’un tailleur pantalon noir à rayures grises, d’ un t-shirt blanc et de souliers noirs. Une tenue très sobre. MD : Je voudrais tout de suite vous demander quelle a été votre impression quand vous avez mis le pied sur la banquise. Vous êtes allée en Arctique ? D’abord, qu’est-ce qui vous attirait, qu’est-ce qui vous fascinait dans cette région du globe ?

Mylène Farmer : Je ne sais pas si je vais être très très originale, mais ce qui me fascinait, c’était le silence avant tout, le silence absolu. Le blanc. Le froid et…(silence) Le silence avant tout. MD : On retrouvera Mylène Farmer avec JeanLouis Murat le 7 octobre. Alors maintenant… LB : Je voudrais juste dire un truc parce qu’il y a un truc qui était génial sur la banquise avec elle, c’est qu’il y avait des petits enfants Inuits, qui avaient quatre ou cinq ans, qui voulaient – c’est une image que je n’oublierai jamais – qui voulaient toucher les cheveux comme ça (rire). Elle penchait la tête comme ça pour les gamins (on entend le rire de Mylène). Pendant que Luc Besson parle, on voit des images de Mylène avec lui sur la banquise. MD : En tout cas, Mylène, je voulais vous dire que je vous remerciais infiniment du cadeau. On m’avait dit que vous aviez plongé, j’ai pas voulu me dégonfler, j’ai plongé, et j’ai appris après que vous n’aviez pas plongé. MF : (sourire) Je n’ai pas plongé… Et moi, je

voulais remercier Luc pour m’avoir offert ce rêve (sourire). Tandis que Besson rigole en tenant son micro à hauteur du nez (se moque-t-il gentiment de la façon dont Mylène tient le sien ?...), Michel Drucker présente Eric Serra, compositeur attitré des films de Besson, qui rejoint le plateau. Mylène reste bien sagement assise, sans dire un mot, pendant toute l’interview du musicien autour de son travail avec l’Orchestre Philharmonique de Londres pour la B.O. de « Atlantis ». Après quoi, Besson et Drucker se lèvent et abandonnent Eric Serra et Mylène… Pour l’anecdote, il faut savoir que quelques heures seulement avant le début de l’enregistrement, Mylène a quitté le Pavillon Baltard avec son chauffeur en direction de Vincennes pour aller acheter le t-shirt blanc qu’elle portera à l’antenne…dans une boutique de vêtements pour enfants ! Il faut croire que sa tenue initiale posait problème.


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1991–1993 : L'autre…

Riva del Garda

Stars 90

Date XX.09.1991 Chaîne Raï Uno (Italie)

« Désenchantée » ayant bénéficié d’une sortie européenne, Mylène a fait une télé en Italie. Pour l’occasion, la chanteuse a même déboutonné la chemise de son costume blanc ! L’émission est un grand show, en plein air. Sur une immense scène, la star française et ses sept danseuses (au lieu des huit habituelles) font le spectacle.

Date 07.10.1991 Chaîne TF1 Présenté par Michel Drucker

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Mylène Farmer

Voici la seule et unique télé pour la chanson « Regrets », le second extrait de « L’autre… », sorti voilà déjà plus de deux mois, et ayant déjà atteint la troisième place du Top 50.

Le public italien est enthousiaste : debout, il danse et tape dans les mains. Malgré tout, la chanson ne sera pas vraiment un succès dans les pays non francophones (en tout cas, pas avant que la flamande Kate Ryan ne la reprenne, onze ans plus tard). On constate que Mylène, inconnue en Italie, n’a pas imposé ses conditions de tournage désormais habituelles en France. Elle a ainsi été filmée sur une seule prise, et de tous côtés (gauche, droite, face, dos), alors que, comme tous les artistes, elle a son ‘bon’ profil ; la chanteuse demande en général à n’être filmée ou photographiée que de face, de dos ou sur son profil gauche.

Michel Drucker, assis avec ses invités Gérard Jugnot et Pierre Arditi, annonce la star… Michel Drucker : Elle vend beaucoup d’albums en France, c’est considérable : plus de 700.000 albums vendus ! (à ses invités) Vous allez vous tourner vers la gauche et vous allez regarder Mylène Farmer chanter « Regrets » avec Jean-Louis Murat. (au public) Jean-Louis Murat et Mylène Farmer (applaudissements et quelques cris) ! Drucker étouffe un rire quand il voit Arditi et Jugnot en rajouter pour jouer le jeu. Les deux comédiens en font des tonnes : ils se retournent pour voir Mylène, et Jugnot d’ajouter : « Oh regarde ! Elle est là ! ». En réalité, elle n’est pas

là. La prestation de « Regrets » a été tournée la veille, sans public (ce qu’on appelle un ampex). Cela reste néanmoins la seule fois où Mylène Farmer et Jean-Louis Murat chantent ensemble sur un plateau de télé. La chanteuse, en blanc des pieds à la tête (chaussures, pantalon, haut avec collerette façon Pierrot), est assise à même le sol, tandis que le chanteur auvergnat, chemise bleu gris et pantalon sombre, est assis quelques marches plus haut. Jamais ils ne bougent de leur position – ce qui fait qu’on ne les verra jamais vraiment réunis (hormis dans leur clip). Cette mise en scène, bien que très sobre, a pourtant fait l’objet de très nombreuses prises car Mylène n’en était pas totalement satisfaite. Entre chaque prise, elle courait dans la cour pour aller voir les images dans la car-régie puis revenait sur le plateau. Problème de tenue. Problème de lumière. Problème de placement. Lors des premiers essais, Murat se tenait contre une colonne, Mylène était entre ses jambes. Programmé entre 15h et 16h, l’enregistrement de leur prestation a finalement débordé jusqu’à près de 21h ! Pour se faire pardonner, la chanteuse a fait livrer des caisses de Champagne à l’ensemble de l’équipe technique dès le lendemain.


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Sacrée soirée

Date 11.12.1991 Chaîne TF1 Présenté par Jean-Pierre Foucault

Comme pour « Désenchantée », Mylène Farmer réserve la primeur de sa nouvelle performance chorégraphiée à Jean-Pierre Foucault. L’émission vedette du mercredi soir a donc la chance d’être la première dans le (petit) planning promo de « Je t’aime mélancolie », le troisième single extrait de « L’autre… ». On aperçoit furtivement Mylène dès le début de l’émission, lorsque Jean-Pierre Foucault présente les artistes présents ce soir-là et qu’on les voit arriver dans les coulisses. Mais elle passe plus tard dans l’émission. Jean-Pierre Foucault : C’est une artiste rare, mais elle vient quand même régulièrement chez nous, par conséquent chez vous. Voici un

extrait de son album « L’autre… ». C’est la première fois qu’elle interprète cette chanson sur un plateau télé avec ses danseuses. « Je t’aime mélancolie ». Voici Mylène Farmer. Mylène est une nouvelle fois entourée uniquement de danseuses (elles sont dix cette fois !), toutes brunes aux cheveux courts (ou rendues telles). Elles portent toutes un t-shirt noir sous une salopette rouge, tandis que la chanteuse joue le noir intégral : un pantalon et un haut très amples, dans un tissu soyeux et très léger, des godillots aux pieds. Ses cheveux sont désormais moins roux et plus longs. Son maquillage est inédit : des sourcils très noircis et de longs traits noirs sur le côté des yeux à la Barbara… ou Jeanne Mas (sic !). La performance est filmée comme l’avait été celle de « Désenchantée », huit mois plus tôt : une succession de plans serrés et de plans plus larges, tournés séparément et ampexés pour être intégrés au montage final. On note ainsi pas mal de ratés au niveau des raccords. Lors

du premier « Mélange du pire de mes désirs / Je t’aime mélancolie », Mylène se retrouve de dos en plan large, alors qu’elle est de face en plan serré. A la toute fin de la chanson, le plan large montre un visage de face, alors que le plan serré offre un profil au sourire éclatant. Malgré tout, c’est une prestation très réussie, notamment grâce aux sublimes lumières propres à cette émission. Le montage est dynamique. Le public enthousiaste (il applaudit en rythme au premier refrain). Le rendu est très efficace. A la fin de la performance, on voit Jean-Pierre Foucault de dos, sur sa banquette, aux côtés de l’acteur Terrence Hill venu promouvoir son « Lucky Luke ». En second plan, on peut constater la présence de Mylène et de ses danseuses sur le départ (était-ce le but de cette image ?...). JPF : Mylène Farmer ! (applaudissements) Merci beaucoup Mylène. « Je t’aime mélancolie ». Nouvelle chanson, nouvelle chorégraphie de Mylène Farmer. Chanson extraite de son album « L’autre… » (applaudissements).


1991–1993 : L'autre…

Tous à la une

Date 27.12.1991 Chaîne TF1 Présenté par Patrick Sabatier

Seconde télé pour « Je t’aime mélancolie ». Mylène, cette fois, dit même quelques mots et chante un second titre. La tenue de la chanteuse pour « Je t’aime mélancolie » est celle de « Sacrée soirée », mais le maquillage est plus sobre – exit les traits noirs sur le côté des yeux. La performance est la même. La réalisation, comme celle de « Désenchantée » dans cette même émission en mai, privilégie les plans larges ; on ne voit donc jamais Mylène seule à l’écran. La chorégraphie est ainsi bien mise en valeur. A la fin de la chanson, tandis que le plan final nous montre une Mylène tout sourire, l’animateur (aux côtés de… Jean Roucas) annonce qu’on la retrouvera plus tard. Et effectivement…

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Mylène Farmer

Patrick Sabatier : Je vous demande maintenant d’accueillir pour la deuxième fois mademoiselle Mylène Farmer (applaudissements et quelques cris). L’animateur rejoint la chanteuse, accoudée à un bar. Nous la retrouvons diaphane, dans une nouvelle tenue : une veste faite de roses rouges cousues, sur un sous-pull noir, et un pantalon noir. PS : Ça va bien Mylène ?

Mylène Farmer : (tête baissée, yeux vers le sol) Très bien, merci. PS : Mylène est un des grands succès de l’année 91 (un fan hurle « Mylène ! », Sabatier, très surpris, poursuit)… Et bien, vive Mylène ! S’il fallait extraire de l’année 91 des moments importants, les plus importants pour toi, tu désignerais lesquels ? MF : Quelque chose qui me concerne ? PS : Oui. MF : C’est la découverte de la banquise. PS : Avec Besson (voir « Stars 90 » le 9 septembre 1991). MF : J’ai eu la chance d’aller en Arctique avec Luc Besson. C’est Luc Besson qui nous a invités. Et voilà, ça reste un très très beau souvenir. PS : Et plus généralement, il y a des évènements qui t’ont marquée dans l’année qui vient de s’écouler ? MF : Il y a beaucoup beaucoup d’évènements qui m’ont marquée dans l’actualité, bien évidemment. Je vais parler, moi, d’un metteur en scène qui est parti, qui s’appelle David Lean… qui s’appelait David Lean, et qui est un grand grand metteur en scène. J’aimais beaucoup ses films. Et je regrette qu’il n’ait pu faire son dernier film. PS : Est-ce que tu as l’impression de tout dire dans tes chansons… Je sais que tu n’aimes pas beaucoup les interviews et que tu te préserves. Est-ce que tu as l’impression de tout dire dans tes chansons et qu’une fois que c’est dit, on a

besoin, à un moment donné, de se préserver ? MF : Je suis quelqu’un, par nature… je suis très discrète, donc c’est vrai que je n’aime pas beaucoup parler de moi. Je préfère parler de moi dans mes chansons. C’est quelque chose de plus facile en tout cas pour moi. PS : Qu’est-ce que ça représente par exemple le changement d’année, le réveillon du 31 décembre, la fête un peu rituelle et traditionnelle ? C’est quelque chose que tu tiens à marquer ? MF : Non. Ça n’a aucun sens pour moi (premier sourire). Non (sourire). PS : Quelles seront les choses importantes pour toi en 92, que l’on peut savoir ? MF : Je pense, j’en suis même sûre, que je vais faire un long métrage avec Laurent Boutonnat (quelques fans hurlent et applaudissent). PS : (en les pointant du doigt) Alors là, elles seront toutes à côté de toi en tout cas (sourire de Mylène). Maintenant, on va t’entendre chanter la deuxième chanson. Je te remercie au nom de notre équipe d’avoir accepté notre invitation (sourire de Mylène). MF : Merci beaucoup. PS : Ça s’appelle « L’autre… ». Mylène Farmer ! MF : Merci (applaudissements). Mylène se tient debout derrière un micro. La version de « L’autre… » est la même que celle de « Stars 90 », sept mois plus tôt, c’est-à-dire plus courte que sur l’album. Pendant les applaudissements qui saluent la chanson, Mylène baisse la tête, la relève… Une larme tombe…


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Stars 90

Date 13.01.1992 Chaîne TF1 Présenté par Michel Drucker

Il s’agit ici de la dernière prestation de « Je t’aime mélancolie » à la télévision française.

La performance est la même que lors des deux télés précédentes, à ceci près que la tenue de la chanteuse a changé : exit le costume noir, la

Beaucoup auront remarqué l’extrême fébrilité

de la chanteuse sur cette émission. Derrière un professionnalisme à toute épreuve et un sourire sincère, difficile de ne pas voir la chanteuse tousser, se toucher le front (comme fiévreuse), sans oublier son extrême pâleur. Il s’avère que Mylène souffre alors d’un vilain virus hivernal. Le jour où elle ampexe sa prestation, le dimanche 5 janvier, dans l’après-midi, un médecin vient d’ailleurs la voir dans sa loge. Un fan qui la suit ensuite jusque chez elle nous confie l’avoir vue à nouveau recevoir un médecin. Le jour de l’enregistrement final de l’émission (auquel les prises ampexées sont montées, comme c’est désormais l’usage pour Mylène), la chanteuse subit visiblement encore les assauts du virus.

1992

Michel Drucker (assis à côté d’Albert Dupontel) : Voilà maintenant quelqu’un que la France entière adore (applaudissements immédiats du public, des « Mylèèène ! » fusent un peu partout). L’année 92 ressemblera, à mon avis, en ce qui la concerne, à l’année 91, c’est-à-dire succès sur succès (« Mylène ! Mylène ! Mylène ! »). Ses clips sont des monuments. Et puis c’est une vedette, et quelle vedette ! Elle occupe la scène. La preuve. Le titre vous le connaissez (mais pas lui car il regarde sa fiche…). « Je t’aime mélancolie ». Mylène Farmer !

chanteuse arbore ici un t-shirt rouge sous une salopette noire, en opposition aux danseuses, toujours vêtues d’un t-shirt noir sous une salopette rouge. Sa prestation est très applaudie. Drucker la rejoint quelques secondes après la fin de la chanson. Mylène est essoufflée. MD : (au public) Mylène Farmer, « Je t’aime mélancolie » !... (à Mylène) Mylène, je voudrais vous remercier de votre venue. Albert voulait vous remercier également (Dupontel les rejoint). C’est toujours très bien ce que fait Mademoiselle Farmer. Bonne année 92 (Mylène va vers Dupontel pour lui faire deux bises. Ce dernier lui chuchote quelque chose à l’oreille. Elle lui répond « merci » avec un large sourire aux lèvres). Mylène, au revoir et à bientôt. (au public) Mylène Farmer ! (Elle salue de la main, puis s’en va sous les applaudissements et les cris) MD : Elle reviendra nous voir en 1992. (Ce ne sera pas le cas puisqu’on ne la verra plus sur une chaîne hertzienne française avant janvier 1993, soit un an après cette émission)

On aura noté aussi la complicité de la chanteuse et d’Albert Dupontel. Les deux artistes se retrouveront bientôt sur le tournage de « Giorgino », le long métrage de Laurent Boutonnat, fidèle complice de la chanteuse, avec Mylène dans le premier rôle féminin. Dupontel est également à l’affiche de « Jacquou le croquant », le second long métrage de Boutonnat, sorti en janvier 2007.


1991–1993 : L'autre…

Escale

Ein kessel buntes Date XX.03.1992 Chaîne MDR (Allemagne)

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Mylène Farmer

1993

Voici une nouvelle prestation de Mylène à la télévision étrangère, en l’occurrence allemande. La seule pour « Je t’aime mélancolie »…En janvier, ZDF, la plus grande chaîne outre-Rhin, avait certes diffusé la performance enregistrée à « Stars 90 », mais là, la star est venue en personne ! L’animateur présente la chanteuse, peu connue là-bas, en précisant que c’est une immense star en France, et que sa musique évolue entre mélancolie et érotisme. Puis il annonce le titre de sa chanson : « Je t’aime mélancolie » (en français dans le texte), qu’il s’empresse de traduire en allemand. La prestation de Mylène est la même qu’en France, à ce détail près qu’on compte neuf danseuses au lieu des dix habituelles. La tenue de la chanteuse est celle de « Stars 90 », deux mois plus tôt : salopette noire et t-shirt rouge. Ses cheveux ont bien poussé depuis cette dernière performance… Les applaudissements qui suivent son passage sont assez discrets. La chanteuse n’a finalement jamais percé en Allemagne (contrairement à Alizée, sa petite protégée, quelques années plus tard). C’est la dernière fois qu’elle chante pour une télé étrangère.

Date 02.01.1993 Chaîne MCM

Week-end spécial Mylène Farmer sur MCM. Pour l’occasion, et pour la promo de « Dance remixes » et de « Que mon cœur lâche », la star accorde une interview fleuve à la petite chaîne musicale du câble et du satellite, encore peu développés en France, contrairement à nos voisins européens (ce qui explique peut-être les sous-titres en anglais). L’entretien a cette particularité qu’on ne voit jamais le journaliste (Patrick Willard), pas plus qu’on ne l’entend. L’avantage, c’est que Mylène occupe 100% de l’espace. L’inconvénient, c’est qu’on ne comprend pas toujours immédiatement de quoi elle parle, ou pourquoi elle en parle, dans la mesure où l’on n’a que les réponses, pas les questions. L’émission commence par quelques images de « Dance remixes », suivi d’un court extrait de « Tristana ». Puis, gros plan sur Mylène, che-

veux mi-longs, chemise et veste blanches. Elle est filmée sur un fond bleu sur lequel, tout au long de l’entretien, viendront se poser des images de ses clips, notamment. Mylène Farmer : Je n’essaie pas de me composer un personnage. C’est ma timidité, c’est vrai que je ne fais aucun effort pour moi-même, non. Je ne suis pas dans cette rigueur. Je ne suis pas très tendre avec moi-même. Très bref extrait du clip de « Je t’aime mélancolie » (Mylène se prend un coup de coude). MF : (sur la musique de « Ainsi soit je… ») Vous savez, dans la mesure où je fais justement peu d’interview, la presse dit ce qu’elle veut de moi, et c’est pas grave non plus. Mais c’est vrai que les médias ne sont pas tendres. Je ne dis pas « avec moi », je dis « en général ». (coupure montage) Peut-être que beaucoup de personnes sont réunies dans ces métiers et n’arrivent pas à créer eux-mêmes ou elles-mêmes tout simplement. Je crois que c’est un mal français. Je crois qu’on n’aime pas le succès tout simplement, en tout cas le succès à long terme. C’est toujours douteux (sourire). (coupure montage) L’exercice de l’interview est un exercice qui m’est pénible en ce sens que j’ai du mal à parler de moi, que je…que c’est un exercice de toute façon assez difficile. Donc c’est pour ça que je préfère le rendre rare.

« Il est difficile que de s’avouer à soi même qu’on est capable d’écrire… Et d’accepter de dévoiler aux autres ses mots, ses émotions. »


Très long extrait du clip de « Ainsi soit je… ». MF : (plan plus large, on voit qu’elle est assise, jambes croisées et qu’elle porte un pantalon noir) Je n’ai jamais pris de cours de danse Donc c’est, j’allais dire, quelque chose de plus spontané. Je ne vais jamais en boîte de nuit, je n’y suis jamais allée donc… Mais par contre, c’est quelque chose oui de…j’allais dire de fondamental, non, mais qui m’est indispensable quand je chante une chanson. (coupure montage) J’ai toujours, moi, une danseuse avec qui j’ai travaillé pendant très longtemps qui a réglé les ballets pour le… (elle se corrige) les chorégraphies pour le concert. (images de « Sans contrefaçon » au Tour 89, sans le son) Je lui apprends, moi, les mouvements et, au fur et à mesure, elle les fait répéter aux autres danseuses. Quand c’est une chanson un peu rythmée, c’est plus facile d’appuyer un mot par un geste. Je travaille d’abord moi-même toute seule. Ensuite, je travaille avec cette fameuse danseuse (petit rire) pendant deux/trois jours. Et puis après, nous faisons appel à deux, trois ou quatre danseuses. Et je travaille très souvent en studio. Extrait de « Sans contrefaçon » lors du Tour 89, puis très long extrait du clip de cette même chanson. MF : (les images du clip continuent) Je suis très très présente en studio. C’est un univers que j’aime bien. Je m’intéresse à tout. J’aime vraiment profondément la musique. (retour plateau, la musique du générique de « Sans contrefaçon » en fond sonore) Je sais pas s’il y a des critères comme ça. Je… On essaie que ça sonne le mieux possible, que ce soit harmonieux, que ce soit, j’espère, un peu nouveau,

et que ce soit dansant avant tout (sourire). (coupure) J’ai un peu de mal, moi, à écouter les chansons anciennes, mais ça redonne une vie à la chanson tout simplement, ça la rend un peu différente. (coupure) J’espère qu’on part de toute façon sur des bases nouvelles, j’espère qu’on évolue. Maintenant, quant à gérer tout ça, non j’en suis incapable. Je crois que ces choses-là se font naturellement. On écoute d’autres musiques, on voit d’autres lieux, et tout ça apporte une nourriture certainement pour évoluer. (coupure) « Maman a tort » n’était pas de ma plume, mais dans l’album j’ai chanté « Plus grandir ». J’ai éprouvé le besoin immédiat d’écrire. Mais après…(silence) C’est difficile que de s’avouer qu’on est capable de le faire, d’abord, d’accepter… Et d’accepter ses mots (maux ?), ses émotions, et de les dévoiler aux autres. (silence) Mais là encore, c’était quelque chose d’évident pour moi. Je pouvais pas laisser quelqu’un écrire mes mots. (coupure) Aujourd’hui, j’ai traduit avec un co-adaptateur, « Que mon cœur lâche » en anglais, et je suppose qu’elle va voir le jour cette chanson. C’est un exercice qui est très difficile parce qu’il faut d’abord parler anglais couramment, ce qui n’est pas encore tout à fait mon cas. Et trouver un style d’écriture dans une langue qui n’est pas la sienne, c’est assez difficile. Donc, pour l’instant, je n’ai fait qu’une chanson réelle en anglais, de A à Z.

une façon qui est très très différente de… Lui, c’est quelqu’un qui est très très productif, qui écrit sans arrêt, qui… J’avoue que moi, j’ai besoin d’avoir un but (silence) qui se traduit par un album ou une chanson. En tout cas, c’est d’abord la musique de Laurent qui va me suggérer des choses. (coupure) (sur la musique de « Regrets ») J’aimerais beaucoup jouer du piano, mais je n’ai ni le temps, ni peut-être même l’énergie. Et c’est difficile de se remettre dans la peau d’un étudiant ou d’un élève. Mais le piano, c’est quelque chose qui me manque, oui. J’avais essayé de jouer le saxophone, mais ça, c’est très très difficile. J’ai ces instruments avec moi, et c’est très bien (sourire).

Diffusion du clip de « Je t’aime mélancolie ». Puis pause pub.

Long extrait du clip de « Sans logique ».

MF : Moi j’ai besoin de la musique pour pouvoir…Non pas trouver un thème, mais pour pouvoir écrire des mots sur cette musique tout simplement. Puisque j’ai travaillé avec Jean-Louis Murat (sourire), je sais que lui a

Extrait du clip de « Regrets ». MF : (sur la musique de « Regrets », tandis que des peintures défilent sur le fond bleu) J’aime beaucoup la peinture. J’aime beaucoup la peinture abstraite…Surréaliste plus que la figurative. J’aime beaucoup Dali, Max Ernst, Egon Schiele, et beaucoup d’autres que je vais oublier bien sûr. J’aimerais beaucoup avoir un Miró ou un Egon Schiele puisqu’on en parlait, mais c’est impossible. (sur une succession de tableaux en plein écran) C’est un plaisir assez immense que d’avoir un tableau chez soi et de pouvoir le regarder et de vivre avec, de se lever le matin…Et puis c’est passionnant.

MF : Depuis très longtemps, j’ai pensé au cinéma. Avant la chanson. Et la vie a voulu que je rencontre la chanson d’abord. Et je pense que c’est une bonne chose. Maintenant, j’ai très très envie d’avoir cette émotion-là, oui… Pour après, moi, pouvoir redonner une autre


1991–1993 : L'autre…

émotion parce que je pense que je remonterai sur scène. Mais j’ai besoin de ce passage-là. C’est, là pour le coup, fondamental dans ma vie. (coupure) Dans un premier temps, Laurent Boutonnat ne pouvait pas réaliser ce clip parce qu’il a un long métrage en préparation donc, pour le temps, c’était absolument impossible. Donc nous avons fait appel à Luc Besson. Pourquoi Luc Besson ? Parce que c’est quelqu’un que nous connaissons tous les deux, et qu’il nous avait invités un jour pour un très beau voyage sur la banquise. Lors de son tournage d’«Atlantis ». Et ma foi, ça nous a semblé évident. Et lui a accepté (sourire). (coupure)  Je crois qu’on a, de toute façon, des univers qui sont très très différents. Ce que lui a peut-être apporté, il me semble en tout cas, c’est peutêtre un sourire que je n’avais pas dans les autres clips, une légèreté que je n’avais pas. (coupure) Après, Laurent Boutonnat sera bloqué, de toute façon, pour le montage de son film, pour la musique et pour bien d’autres choses. Donc je pense que je vais mettre un peu de temps avant de sortir un autre album.

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Mylène Farmer

Très bref extrait du clip de « Que mon cœur lâche ». MF : Je crois que nous avons tous (rire) un côté ange, un côté démon…Oui, précisément avec les habits que je portais, en tout cas la robe blanche qui est une robe d’Azzedine Alaïa, et c’est un grand bonheur que de porter ses vêtements. (coupure) Un artiste, c’est vrai, on l’écoute donc peut avoir une certaine influence qu’il ne maîtrise pas forcément d’ailleurs. Que de prendre position, moi je n’en ai pas envie, mais je respecte les gens qui le font. (image rapide extraite de « Que mon cœur lâche » avec le texte : « Caoutchouc / Condoms / Capotes ») Moi, j’ai essayé de ne prendre aucun engagement justement, ni de dire « il faut en mettre » ou « il ne faut pas en mettre ». Il me semble évident qu’il faut en mettre (petit sourire), mais c’est vrai que ce n’était pas le…message, entre guillemets, que je voulais faire passer. Il n’y a pas de message dans la chanson. Une fois de plus, c’est un constat. (coupure) Sans parler de constat d’échec, c’est l’impuissance qui rend très malheureux également. C’est quelque chose qui nous est tombé, là pour le coup, du ciel et c’est une chose méchante. Et que de ne pouvoir réagir, c’est la chose la plus cruelle pour l’Homme. Si ce n’est qu’il faut se protéger. (coupure) Bien sûr, ça me fait mal. C’est quelque chose de tragique. L’amour est totalement perverti, mais… Je ne crois pas que je dirai quelque chose de très nouveau sur ce thème-là, si ce n’est qu’il est très douloureux. (coupure) Ne parlons plus du clip, parlons de la

chanson. Moi, une fois de plus, ça n’engage que moi, c’est plus un constat sur l’amour, ce que moi je puis ressentir. C’est quelque chose d’un peu difficile en ce moment. Et c’était difficile aussi pour moi que de ne pas en parler. J’essayais d’éviter parce qu’on a toujours peur des sujets un peu racoleurs. Et je me suis aperçue que, ma foi, ça fait partie de la vie de tous les

Stars 90 Date 11.01.1993 Chaîne TF1 Présenté par Michel Drucker

Voici la seule télé française pour « Que mon cœur lâche ». Michel Drucker est en plateau avec Alain Prost, Frank Williams (président de l’écurie de Formule 1 Williams-Renault), Damon Hill (pilote de la même écurie, aux côtés d’Alain Prost) et son épouse. Michel Drucker : Alors maintenant, on va accueillir quelqu’un, Frank Williams, qui a accumulé déjà des trophées comme le vôtre (le trophée des constructeurs de la saison passée a été remis à Williams Renault, et il trône sur la petite table au milieu des invités), qui a vendu plus d’un million d’albums à chaque fois. C’est un phénomène. Absolument. Elle commence une carrière au cinéma, vous l’avez vu à la une de tous les journaux. Voici un extrait de son dernier album, qui est en réalité une compilation des ses quatorze plus grands succès, plus cette chanson, « Que mon cœur lâche ». C’est une chanson sur la difficulté de s’aimer lorsque plane une terrible maladie sur nous tous ; vous savez de quoi je veux parler. Mylène Farmer ! Un long travelling avant, au raz du sol, puis aérien, nous mène jusqu’à Mylène, entourée de deux danseuses brunes, aux cheveux mi-longs. Ceux de la chanteuse ont bien poussé ; ils lui traînent désormais dans la nuque. Sa tenue, pour le moins atypique en télé, se compose d’une paire de bottines noires, et d’un peignoir ouvert sur un soutien-gorge et un mini short, le tout en coton couleur rose pâle. Les danseuses, quant à elles, sont en noir : soutien-gorge à paillettes, short, et collants. La petite chorégraphie est simpliste ; on est loin du déferlement d’énergie d’un « Désenchantée » ou d’un « Je t’aime mélancolie », mais ça reste efficace. La chanson se termine. Mylène se retourne vers ses danseuses ; on lit « Merci » sur ses lèvres.

jours. C’est le quotidien. C’est quelque chose que je ne pouvais pas occulter. Diffusion du clip de « Que mon cœur lâche ». Sur l’image finale (Mylène et son chewing-gum), un autographe de la chanteuse se dessine. Puis c’est le générique de fin. L’émission est rediffusée plusieurs fois sur la chaîne dans la semaine qui suit…

Puis, elle rejoint le plateau d’interview où seul est resté Alain Prost, et où trône désormais, en lieu et place du trophée de Williams-Renault, un disque de diamant en forme de pyramide pour plus d’un million d’exemplaires vendus de son album « L’autre… ». MD : En ce début d’année, on peut encore faire les bilans de l’année passée. Je vous présente : Alain Prost, Mylène Farmer. Alain Prost : Bonsoir. Mylène Farmer : Bonsoir (Mylène s’assoit, et croise les jambes dans sa tenue légère qui tranche singulièrement avec les costumes austères des deux hommes). MD : Mylène Farmer qui était, avec ce disque de diamant une des grandes triomphatrices de l’année (le CD « L’autre… » apparaît alors en plein écran). Je voudrais revenir sur la chanson. Le clip n’a pas été fait par votre cinéaste habituel, mais par Luc Besson. MF : Oui. MD : Ça a été difficile, pour vous, d’abandonner votre complice habituel pour vous confier à un autre metteur en scène, même si vous l’aimez bien, que vous le connaissez ? MF : Un petit peu difficile, mais je connais bien Luc Besson. Nous nous sommes rencontrés, il nous a invités en Arctique pour un très très beau voyage (voir « Stars 90 » le 09 septembre 1991), donc nous le connaissions bien, et puis c’est un très bon metteur en scène, donc c’était à la fois difficile et facile (petit rire nerveux). MD : Et c’était un changement. C’est un changement d’atmosphère par rapport à vos derniers clips. MF : Oui, c’est vrai que nous avons des univers assez différents, et Luc, je crois, a su nous apporter une légèreté, et peut-être une dédramatisation par rapport au thème de la chanson. MD : C’est une de vos dernières apparitions à la télévision comme interprète, comme chanteuse, puisque vous partez en Tchécoslovaquie pour tourner pendant plusieurs mois votre premier long métrage. MF : Oui. MD : Vous allez revenir à la chanson plus tard, vous ne savez pas ? MF : Bien évidemment oui ! Bien sûr (sourire). MD : Vous voulez poser une question à Alain Prost ?


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Mylène Farmer

Avant de laisser partir Mylène, Drucker présente des ouvrages sur les différents films de Luc Besson. Il offre celui de « Nikita » à la chanteuse, puis la salue, en lui souhaitant bonne chance pour son film. Mylène le remercie, puis remercie le public. Elle reste assise, tandis que Drucker lance un autre sujet.

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MF : Ecoutez, oui, je vais essayer (sourires de Mylène et de Prost). MD : C’est un univers que vous ne connaissez pas, mais qui vous fascine quand même… MF : Que je connais très peu, mais j’avoue que je suis capable de regarder des… MD : Des Grands Prix de Formule 1. MF : Des Grands Prix, oui, absolument. Euh… Je sais que Monsieur Prost, et tous les coureurs automobiles, côtoient la mort (gros plan sur Alain Prost qui quitte son sourire) et j’aurais voulu savoir : que réprésente-t-elle ? MD : (s’adressant à Alain Prost, en souriant, sans doute pour dissimuler une gêne occasionnée par une question si morbide) Que représente ce flirt permanent avec la mort ? AP : En réalité, c’est la grande difficulté. On en parle très très peu (gros plan sur Mylène qui l’écoute attentivement), mais malgré tout, sans être macabre, de temps en temps, vous laissez vos affaires dans la chambre le matin, et vous vous dites : « Tiens, ce soir, on sait jamais, je vais peut-être pas les retrouver. ». Et vous y pensez (…).


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World Music Awards

Date 12.05.1993 Chaîne TMC

Pour la cinquième année consécutive, les World Music Awards récompensent les meilleures ventes de disques dans le monde. Créée par le Prince Albert de Monaco, cette cérémonie se déroule dans le Sporting Club de Monte Carlo. Retransmise sur TMC, la chaîne de la principauté, elle est ensuite diffusée un peu partout dans le monde. En France, TF1 la programme plusieurs mois plus tard, le 1er janvier 1994, sous le titre « Une nuit à Monte Carlo ». Bernard Montiel et le mannequin Katharina Trug commentent la cérémonie et, entre deux

chansons, jouent aux guides sur le rocher monégasque. Parmi les lauréats de l’année : Mylène Farmer, qui obtient le prix des meilleures ventes de disques françaises. Elle chante « Que mon cœur lâche » (tenue et chorégraphie identiques à « Stars 90 »). On note que, juste en face d’elle, au premier rang, se trouve Michael Jackson. Il est ironique qu’elle chante « Que mon cœur lâche » devant lui alors que, dans le clip qui accompagne la chanson, un sosie du chanteur est mis à mal. On note aussi que Mylène n’a pas eu son mot à dire dans la réalisation de sa prestation qui, à l’évidence, n’a pas bénéficié des soins habituels ; pour preuve, outre le fait qu’il

s’agisse d’une seule prise ‘live’, Mylène est parfois filmée sur son ‘mauvais’ profil (rappelons que depuis qu’elle a la statut d’exiger des choses, Mylène Farmer demande toujours qu’on ne filme pas et qu’on ne photographie pas son profil droit). Après la chanson,Yannick Noah et Edwige Fenech lui remettent son prix. Dans la version originale, tout le monde parle anglais, mais pour TF1, les voix sont couvertes par les commentaires des animateurs français. Le trophée en mains, Mylène est peu bavarde : « Thank you very much. I wish you a good night. Goodbye. ». Puis elle part aussitôt. L’aventure « Giorgino » bat son plein ; elle n’a visiblement pas de temps à perdre.



1994 Giorgino 05.10.1994 sortie en salles du film « Giorgino »


1994 : Giorgino

Ciné 6

Date 02.10.1994 Chaîne M6 Présenté par Laurent Weil

Trois jours avant sa sortie en salles, la promo télé de « Giorgino » commence dans l’émission ciné dominicale de M6. Des interviews isolées de Laurent Boutonnat et Mylène Farmer sont au programme. Le sujet sera rediffusé le jour de la sortie du film, le 5 octobre, dans une version allégée. Laurent Weil, alors Monsieur cinéma de M6, lance le magnéto…

1994

Laurent Weil : Après avoir réalisé la totalité des clips de Mylène Farmer, Laurent Boutonnat vient de mettre en scène son premier long métrage. Titre du film : « Giorgino ». Interprété bien sûr par Mylène Farmer, et un nouveau venu au cinéma qui s’appelle Jeff Dahlgren. En 1918, un jeune docteur part à la recherche d’un groupe d’enfants dont il s’occupait avant-guerre. Là, il ne tardera pas à découvrir d’étranges personnages…

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Mylène Farmer

Le sujet commence par un extrait du film. Puis on découvre Laurent Boutonnat, en costume noir, assis sur un canapé.

Laurent Boutonnat : J’avais envie de… Je m’en rappelle plus très bien parce que ça fait sept ans, mais je sais que c’étaient des envies d’odeurs, de neige, de vent, d’amour, … et certains fantasmes pas très explicables. Et, à partir de là, quelque chose s’est instauré, une histoire s’est instaurée, et c’est devenu cette histoire. Pendant neuf mois, on a travaillé. C’est très étrange le processus de fabrication, entre guillemets. Mais vraiment très étrange. C’est pas rationnel.

LB : J’ai fait ce film parce que j’avais besoin de le faire. C’était une nécessité que je ne peux pas expliquer, mais dans la vie, il faut faire des choses, on doit passer par certaines choses. Et ça correspond à des choses que j’aimerais voir au cinéma, donc j’espère que les gens qui vont aller voir ce film… Enfin, d’abord j’espère qu’ils vont y aller (rire). Et ensuite, que ça va toucher des gens. Qui m’attend au tournant ? Peut-être dans les médias et tout ça. Mais ça, c’est pas très important. C’est pas très important.

Bande-annonce de « Giorgino », coupée pour faire place à Mylène Farmer, assise sur le même canapé que Laurent… mais seule (on ne les verra jamais réunis pour la promo télé du film). Elle porte un pull vert, une minijupe et des collants noirs, est peu maquillée, et coiffée de couettes.

Bande-annonce de « Giorgino » (suite).

Mylène Farmer : J’ai eu quelques propositions pendant ces quelques années de chanson qui n’ont pas abouti pour diverses raisons. Il est vrai qu’il est certainement plus rassurant pour moi que de commencer avec Laurent Boutonnat puisque je connais sa caméra, et que j’aime définitivement son univers, sa façon de filmer, sa poésie, et… Donc, en ce sens, c’était certainement plus facile pour moi, oui. Et je crois que je suis heureuse que d’avoir commencé avec lui pour un premier long métrage.

« J’ai besoin de choses qui vous bousculent, qui vous violentent un peu. Quitte à en payer le prix. »

MF : Le tiède, le rien, ou l’à peu près, non seulement ne m’intéressent pas, mais me terrifient. Donc j’ai besoin de choses qui vous bousculent, qui vous violentent un peu. Quitte à en payer le prix, je préfère, oui, prendre ce risque-là. Bande-annonce de « Giorgino » (suite et fin). MF : Je pense que ce sera assez violent comme réaction, là encore. Je pense qu’il y a des personnes qui ont envie vraiment que ça marche, que ce soit un beau film. Et puis, il y en a d’autres qui, je pense, ne l’acceptent en aucun cas parce que c’est un projet ambitieux, et je crois qu’on condamne l’ambition en France, définitivement. Mais j’y crois.


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« Il est difficile, non pas d’envisager un autre univers, mais il est difficile de ne pas prolonger cet univers. »

Date 04.10.1994 Chaîne France 3 Présenté par Eric Cachart

Ce mercredi, jour des sorties de films en salles, l’ensemble des J.T. retiennent un seul et unique long métrage : « Giorgino ». Il faut dire que, pour les besoins de la promo, Mylène, habituellement silencieuse, a fait le tour des rédactions. Ça commence par le journal de France 3, diffusé avant les grand-messes de 20h. Eric Cachart : Pygmalion, déjà auteur de toutes ses chansons et réalisateur de tous ses clips, il est pour « Giorgino » scénariste, réalisateur, producteur, cadreur, compositeur. Un film à l’atmosphère ténébreuse dont les personnages sont troublants, et l’histoire à la limite du fantastique. Mylène Farmer au cinéma. Reportage de Michel Vial et Pierre Michel. Le sujet commence par des images du film. Michel Vial (en voix-off sur des images du film) : De retour de la guerre en 1918, Giorgino est un jeune médecin qui tente de retrouver les enfants attardés dont il s’occupait avant

d’être mobilisé. Et il rencontre une jeune fille étrange qui a l’esprit d’une enfant et qui paraît sombrer, peu à peu, dans la folie. Mylène Farmer incarne cette femme-enfant dans un récit tourmenté, peuplé de fantômes et de loups.

il est difficile, non pas d’envisager un autre univers, mais il est difficile de…(silence) ne pas prolonger cet univers.

L’actrice apparaît alors à l’écran, filmée de face, dans un plan ne laissant voir que son visage et ses épaules. Elle porte un pull blanc, et des couettes. Mylène Farmer : Ça fait très longtemps que j’ai envie de jouer, d’interpréter des rôles qui sont des personnages autres que moi-même. J’ai eu la chance de commencer par la chanson parce que c’est vraiment un métier que j’aime et j’aime l’écriture. Maintenant, c’est vrai que c’est quelque chose qui était en moi et qui avait envie de naître, et que j’ai enfin (sourire) pu accomplir avec ce long métrage.

MV (en voix-off sur ces images) : Laurent Boutonnat réalisait les clips de Mylène Farmer depuis dix ans. Dans « Giorgino », il met en scène leur goût commun pour la mélancolie et le mal de vivre, grâce à quoi elle est devenue la chanteuse culte de toute une génération. MF (qui réapparaît à l’écran) : C’est vrai que j’ai besoin de l’autre, et j’accepte. MV (en voix-off) : Qu’est-ce que vous cherchez dans le regard de l’autre ? MF : (silence) Une envie de continuer, une sympathie, un amour, toutes ces choses qui font que (silence) qui vous aident à vivre, tout simplement.

Extrait de la bande-annonce de « Giorgino ».

Extrait du clip de « Beyond my control ».

MV (en voix-off) : Dans ce film, « Giorgino », on retrouve un univers qui vous semble familier, à vous et à Laurent Boutonnat : l’amour, la mort, la folie. Ce sont quand même vos thèmes favoris. MF : Oui. Notre rencontre a quand même été très très forte et capitale dans notre vie. Donc

MV (en voix-off sur ces images) : Avec « Giorgino », Mylène Farmer n’aura pas manqué son rendez-vous avec le cinéma. Héroïne à la fois candide et perverse d’un film qui revisite, non sans brio, les chemins singuliers de l’enfance.

Extrait du clip de « Beyond my control ».


1994 : Giorgino

J.T. de 20h

Date 04.10.1994 Chaîne TF1 Présenté par Patrick Poivre d’Arvor

Seule et unique interview de Mylène Farmer sur un plateau de télé pour la promo de « Giorgino ». La star est annoncée par PPDA dans les titres du journal. Patrick Poivre d’Arvor  : Notre invitée : Mylène Farmer actrice. L’héroïne en effet de « Giorgino » qui sort demain sur les écrans (gros plan sur Mylène, déjà sur le plateau. Elle porte une robe noire avec manches transparentes, et, comme à « Ciné 6 » des couettes qui se terminent, chacune, par une étoile argentée).

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Mylène Farmer

L’entretien avec Mylène intervient en toute fin de journal. PPDA : Et puis du cinéma pour terminer ce journal, avec notre invitée ce soir, Mylène Farmer. Elle est l’héroïne du film « Giorgino » qui sort demain dans les salles. Le premier long métrage de Laurent Boutonnat, qui est aussi l’auteur habituel de ses clips. Elle interprète le personnage de Catherine, une jeune fille mystérieuse qui sombre, vous allez le voir, peu à peu dans la folie. Extrait de la bande-annonce du film. PPDA : Voilà donc un extrait de ce film, « Giorgino », qui sort demain. Et l’actrice principale, Mylène Farmer. Mylène Farmer qu’on connais-

sait comme chanteuse, que nous avons eu le plaisir de recevoir souvent dans ce rôle. Et un jour, vous aviez dit : « Si je ne fais pas de cinéma, j’en mourrai ». On peut considérer que ça y’est, vous êtes sauvée là… Mylène Farmer : (sourire) Oui, pour l’instant (petit rire). PPDA : C’était un besoin si vital ? MF : Oui, quelque chose de fondamental pour ma vie, oui, que de jouer, donc, au cinéma. PPDA : Ce que vous essayiez de faire à l’époque avec tous les premiers clips qui ont beaucoup impressionné parce que c’était une époque où les chanteurs et les chanteuses ne soignaient pas beaucoup la mise en images de leur musique. C’est ce que vous avez voulu développer, ou c’est un tout autre univers, « Giorgino » ? MF : Non, je pense que l’univers est assez proche. Et à la fois, c’est UN film et UN sujet bien particulier (silence). PPDA : On a le sentiment qu’il s’agit de quelque chose qui vous touche quand même très particulièrement, parce que j’y ai retrouvé le thème d’un certain nombre de vos chansons, de petite poupée désarticulée. MF : (sourire) Je vais essayer de résumer. Je crois que c’est la rencontre d’avec Laurent Boutonnat qui a été fondamentale pour ma vie et, je le suppose, pour la sienne (sourire). Et donc, c’est la rencontre d’un univers qui est le même dans le fond – des passions communes, des goûts communs. Et, en ce sens, je crois qu’il est normal que ce soit en fait l’aboutissement d’un long travail commun, et que l’univers soit finalement proche de l’univers de ces clips.

PPDA : On peut dire que c’est lui qui a écrit ce film pour vous ? Vous l’avez un peu écrit avec lui, vous l’avez inspiré ? MF : Non, non, c’est lui qui a écrit son scénario, avec une autre personne, Gilles Laurent. Et il m’a proposé le rôle de Catherine. Maintenant, que j’ai pu inspirer un petit peu le personnage de Catherine, peut-être ; ça, il faudrait le lui demander, je ne sais pas bien (sourire enfantin). PPDA : Elle a l’air de vous ressembler, en tout cas ce qu’on croit être le vrai personnage de Mylène Farmer, c’est-à-dire un petit être (sourire de Mylène) qui est replié sur elle-même, qui est assez timide, qui a beaucoup de mal à exprimer, qui, de temps en temps quand même, a… MF : (elle le coupe) Une force en elle, oui, je le crois également. PPDA : Vous aviez la force de vous regarder, par exemple, dans ce qu’on appelle les rushs, c’est-à-dire après le tournage ? MF : Non, j’ai refusé parce que je savais que c’était un très mauvais moment pour moi. J’ai uniquement souhaité regarder sur un petit téléviseur… (elle cherche le mot) PPDA : De contrôle. MF : …de contrôle, la pendaison. C’est quelque chose qui m’intéressait que de me voir suspendue dans le vide. Et j’avoue que c’est une image qui est assez violente, assez choquante. PPDA : Qui vous a intriguée, et fascinée aussi un peu, en même temps. MF : Il y a toujours cette fascination pour ces choses. A la fois fascination et épouvante. La mort, c’est quelque chose qui vous fascine et qui vous terrifie à la fois.


PPDA : Alors, vous êtes aux frontières de la mort. Vous êtes aussi souvent aux frontières de la folie dans ce film. Vous vous êtes préparée particulièrement pour affronter ce personnage ? MF : J’ai uniquement souhaité rencontrer…demandé à un docteur, psychiatre, si je pouvais assister à quelques entretiens d’avec des malades. Et donc, il a eu la gentillesse que de dire oui. Et j’ai essayé de prendre un regard et la gestuelle – les mains sont très importantes chez ces malades – et essayer de capter comme ça des petites choses. Mais c’est l’unique préparation réelle. PPDA : Je vous remercie beaucoup Mylène Farmer. MF : Merci beaucoup. PPDA : (aux téléspectateurs) Donc je vous engage à aller voir son film à partir de demain. Il s’appelle « Giorgino », réalisé, on vous l’a dit, par Laurent Boutonnat. PPDA clôt le journal. Pendant le générique de fin, Mylène reste assise et discute avec lui.

J.T. de 20h « L’incompréhension, parfois, vous pousse à vous enfermer et au mutisme. C’est une protection dangereuse. »

Date 04.10.1994 Chaîne France 2 Présenté par Etienne Leenhardt

Coup double pour Mylène : elle est présente dans les deux JT de 20h, le même jour. Alors que TF1 propose une interview en plateau, France 2 diffuse un sujet sur « Giorgino » dans lequel la chanteuseactrice dit quelques mots. Etienne Leenhardt : Du cinéma pour terminer, avec la sortie demain de « Giorgino », le premier film de Mylène Farmer que l’on connaissait pour ses chansons, comme « Libertine » ou « Désenchantée », qui étaient accompagnées de clips vidéo déjà très proches du cinéma. « Giorgino » est réalisé par l’homme avec lequel Mylène Farmer a bâti toute sa carrière. Pascale Deschamps et Patrick Voigt. Le sujet commence... Pascale Deschamps (en voix-off sur des images du film et du making of) : Après cinq ans d’attente, « Giorgino » livre enfin ses secrets. Premier long métrage d’un duo à part sur la scène musicale française, « Giorgino » est né dans l’imagination de Laurent Boutonnat, compositeur et réalisateur (images des maquettes du décor de « Giorgino »). Né d’une envie de prolonger, dans un long métrage de fiction, l’esthétique très particulière de leurs quatorze clips. Laurent Boutonnat (en voix-off sur des images du film et des images de lui à son bureau) : Une envie de vieilles demeures poussiéreuses, une

envie de vent, de neige, une envie de l’eau, une envie d’amour, une envie de… je ne sais pas… de violence, une envie érotique. (Filmé parlant depuis derrière son bureau) Et à partir de là, quelque chose se crée, une histoire. Mais, à la fin, je me suis demandé finalement d’où ça venait… (Gros plan sur une maquette du décor du film, l’église et le cimetière enneigés). PD (en voix-off sur des images du tournage) : Conte fantastique, loin des réalités, loin des modes, « Giorgino » c’est la rencontre d’un jeune médecin, rescapé de la guerre de 14, et d’une jeune femme solitaire, accusée par tout un village d’avoir noyé un groupe d’enfants dont elle avait la charge. Un rôle étrange, écrit sur mesure pour Mylène Farmer. Mylène Farmer (filmée de face, en plan très serré, sur fond de mur blanc, cheveux détachés, peu maquillée, portant un pull blanc très sobre) : C’est une jeune fille qui est différente et qui va payer de sa différence. C’est une jeune fille qui est pure, je crois, comme sont les enfants. Extrait du film – la scène de la rencontre entre Giorgio et Catherine dans une rue du centrevillage. Retour sur Mylène… PD (en voix-off) : Elle a choisi le silence. MF (plan plus large, jusqu’aux coudes) : Oui. C’est un peu ce que je fais moi aussi. C’est-àdire que c’est vrai que l’incompréhension, parfois, vous pousse à vous enfermer et au mutisme. PD (en voix-off) : Et à être encore moins compris. MF : Oui, moins compris, et plus lapidé. Mais… C’est une forme de protection, mais une protection dangereuse. PD (en voix-off sur la musique de « Giorgino » et l’image de Boutonnat marchant au ralenti devant un mur de bobines de films) : Prenant une nouvelle fois le risque d’être incompris, Mylène Farmer et Laurent Boutonnat signent un film étrange qui ne parle finalement de rien d’autre que de la difficulté de communiquer.


1994 : Giorgino

Talk Show

Date 05.10.1994 Chaîne LCI Présenté par Guillaume Durand

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Mylène Farmer

Mylène continue la promotion de « Giorgino » en livrant la plus longue interview donnée à l’occasion de la sortie du film. Pour ce faire, elle s’est installée avec son interlocuteur, Guillaume Durand, dans le salon d’un palace parisien. L’entretien, enregistré quelques jours avant, a été diffusé le mercredi de la sortie du film, puis plusieurs fois dans les jours qui ont suivi. Choisissant ses mots avec (trop de) soin, Mylène répond longuement et parfois laborieusement aux réflexions confuses d’un Guillaume Durand qui semble cependant passionné. Accrochez-vous ! Guillaume Durand : Un film, il faut le vendre. Vous qui êtes si timide, ça vous barbe pas tout ça ? Mylène Farmer : Je ne sais pas si « barber » est le mot juste, mais c’est un exercice difficile pour moi. (pendant le début de l’entretien, Mylène joue avec le goulot d’une bouteille de Coca-Cola qu’elle ne boira pas) GD : Est-ce que vous avez un petit peu peur, un petit peu d’angoisses parce que un film, c’est pas comme une tournée, c’est pas comme un disque. C’est énormément de travail et tout se

joue en une semaine. Quel effet ça vous fait ? MF : C’est quelque chose de presque inhumain. C’est difficile, c’est difficile. Je crois que je serai contente le jour où ça sortira, et essayer de se déposséder de la chose totalement. GD : Alors, « Giorgino » : ça fait combien de temps que ce projet existe pour vous? MF : De mémoire, parce que…C’est huit années, je dirais. Et réellement, l’écriture a commencé il y a trois ans. Et il a vu le jour il y a environ un an et demi, je crois. GD : Donc ça vous a occupée toutes ces dernières années, quoi. L’obsession, c’était de faire ça. MF : Oui. Surtout Laurent Boutonnat, je dirais, le réalisateur. Moi, j’ai eu beaucoup plus de temps libre, assez pénible là aussi parce que n’ayant pas la faculté que de me tourner vers la musique, puisqu’il est le compositeur. Donc ça a été une période très longue et pas très agréable. GD : Alors pourquoi fait-on quelque chose qui n’est pas très agréable à vivre? Quelle est l’exigence de fond ? MF : La passion, je dirais. D’abord, je pense que c’est un besoin pour moi que de faire des choses, à savoir ou l’écriture, ou des films, créer quelque chose. Faire les choses en termes de plaisir, dans le fond, ce n’est peut-être pas très, très important ou si important. Je crois que ça se passe à une autre dimension. GD : C’est vraiment quelque chose, on parlait tout à l’heure d’exigence, c’est une importance de la liberté ou… ? MF : Parce que je ne sais pas gérer cette liberté,

de même que j’ai besoin du regard de l’autre pour exister, même si ça paraît quelque chose d’assez dramatique comme confidence ! Mais cette liberté, je la trouve réellement dans mon métier, dans le fond. GD : Alors, on va évidemment pas raconter le film, parce que les films sont faits pour être vus. On va simplement, avec la bande-annonce que vous avez eu la gentillesse de nous confier, avoir un petit peu une idée de l’ambiance du film et puis on va parler justement de ce monde qui vous habite et qui habite aussi Laurent Boutonnat. D’abord, donc, des extraits de ce film. Diffusion de la bande-annonce de « Giorgino ». GD : Voilà donc pour le climat du film. Alors pourquoi ce film commence en novembre 1918, si ma mémoire est bonne ? Pourquoi cette date ? MF : Je vais essayer de répondre pour Laurent Boutonnat. Il me semble qu’il voulait…La guerre 14-18 est en toile de fond, réellement. Je crois que ce scénario est né d’un désir de femmes, de femmes rudes et violentes, donc dans un univers de guerre. Donc c’était plus facile pour lui, j’imagine. C’est difficile pour moi que de répondre à sa place. Pourquoi la guerre de 14-18 ? Parce que c’était une période extrêmement difficile. Avoir des femmes esseulées, c’est un moment qui est effectivement, la guerre, propice pour… GD : Mais ça vous touche parce que vous connaissez, comme tout le monde, ce qui s’est


passé justement à cette époque-là. Bon, non seulement il y a la mort, et elle est très présente aussi dans le film, mais il y a cette idée aussi que ce sont les femmes qui prennent la société à bras-le-corps. C’est une idée qui vous touche, ça ? MF : Si je ne porte mon regard que sur ce groupe de femmes : non, définitivement pas ! (rires) Mais une société de femmes, non en aucun cas, dirigée par les femmes, non, je pense qu’une balance, une bonne balance est ce dont nous avons tous besoin. GD : Alors, le climat on en parle. C’est vrai que souvent quand vous avez fait des clips, des clips longs, des clips qui étaient proches du cinéma on s’est dit « Ça y est, Boutonnat va certainement faire un film, Mylène Farmer a envie de faire un film », maintenant le film est là. Mais ce climat qui est à la fois historique et à la fois fantastique, il vient d’où ? Pour lui, forcément il répondra d’un coté, mais pour vous, pour l’avoir accepté c’est que ça vous touche aussi. MF : Moi, c’est plus une grande confiance en Laurent Boutonnat et en son travail. Quant à l’univers, j’ai aimé le scénario et j’ai aimé le personnage de Catherine. Maintenant, essayer de réfléchir…Non, c’est plus des sensations, des odeurs et moi, cette sensation que de pouvoir justement mettre quelque chose dans ce personnage. GD : C’est quand même pas un monde ordinaire, parce que donc, on va pas raconter, on a dit tout à l’heure le déroulement mais on peut raconter un petit peu le début. Donc, c’est un jeune médecin, il sort, il est démobilisé, il s’occupait d’un asile d’enfants et il essaye de retrouver ces enfants. On a tout une, comment dirais-je… c’est un itinéraire, au fond… MF : Oui, tout à fait, oui. GD : …qui est un itinéraire initiatique. Ça se passe dans la neige, c’est à la montagne, c’est

très beau, il y a un père, il y a les femmes qui fument, enfin ce sont des images qui sont des images rares au cinéma. MF : Je le pense, je le pense. Je pense que son cinéma est rare. Il a une façon de filmer et de raconter des histoires qui lui sont très, très personnelles. GD : Alors mettez vous à sa place : pourquoi ce monde-là le touche, lui ? MF : Moi je crois que je ne pourrai pas répondre à sa place. Pour avoir moi-même posé ces questions dans le fond et lui ne trouvant pas de réelles réponses quant à ces fondements, pourquoi être attiré plus par quelque chose ou autre chose, je ne sais pas bien. C’est comme la peinture, dans le fond : pourquoi est-ce qu’on est attiré par un peintre ? Moi je crois que je ne saurais pas l’expliquer. Pourquoi tel peintre plutôt que celui-ci ? GD : Mais c’est un monde qui est quand même très poétique et qui est très détaché, enfin qui parle un petit peu du réel, on en a parlé un petit peu au début, il y a la guerre de 14, il y a des professions, il y a des gens, il y a des solitudes, il y a des gens ensemble, il y a beaucoup de violence. Mais en même temps, c’est très onirique. MF : Oui. C’est sans doute cette attirance pour tout ce qui est contes, l’irrationnel peut-être, la poésie je pense, oui. Mais des choses qui peuvent faire partie de notre monde et de notre vie de tous les jours, mais c’est vrai qu’il a une attirance pour ça. Maintenant, je suis en train de m’embrouiller parce que je ne sais pas bien pourquoi ! Si ce n’est que j’en reviens à, ne serait-ce que moi, un paysage… Je préfère un paysage, je vais vous dire, fracassé qu’un paysage avec des pommiers en fleurs. Pourquoi, je ne le sais pas. Ce sont des choses, comme ça, qui vous appartiennent. GD : Qui vous sont donc sensibles, qui sont

exprimées très largement. Alors il y a aussi une autre chose qui est très particulière dans le film, bon on va pas comparer avec des metteurs en scène comme Visconti parce qu’il y a pas de rapport, mais c’est vrai qu’il y a un parti pris, on va dire, de lenteur. Parce que si on dit ça, les gens vont dire « On va pas y aller, c’est lent » ! C’est pas du tout lent et ennuyeux, mais c’est volontairement, comment dirais-je, c’est un rythme comme ça, un peu comme une espèce de mélopée. MF : Parce que justement, j’en reviens à ces odeurs, à toutes ces choses. Je crois que ça prend du temps pour des personnages, plutôt que justement ce cinéma très monté, très rapide et des personnages qui sont rétrécis, qui ont cette valeur. Je crois que lui justement allait vers une expression plus lente et plus, moi j’oserais dire plus enrichie, mais ça n’engage que moi. Plus généreuse, peut-être. GD : C’est vrai que c’est un peu le contrepoids de tout ce dont on parle beaucoup actuellement, de Quentin Tarantino à Luc Besson, où ce sont des hommes en blanc et noir qui deviennent… MF : Oui, qui ont du talent. Mais c’est vrai que c’est, je pense, une autre expression, une autre façon de raconter les choses. GD : Comment devient-on, pardonnez-moi la question, mais comment devient-on justement quand on est chanteuse, quand on fait de la scène, comment devient-on actrice ? Même si on a fait des clips, ça, ça doit pas être une expérience finalement si facile que ça. MF : C’est quelque chose que je pense, et sans prétention aucune, avoir en moi. En tout cas, je l’ai souhaité et je le veux depuis tellement longtemps. La chanson est venue à moi un peu par hasard, j’avais envie moi de jouer. J’ai suivi des cours de théâtre, mais ça on s’en moque un peu. C’était simplement un passage, comme


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Mylène Farmer

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1994 : Giorgino


ça, dans ma vie. Une envie de jouer, une envie d’interpréter les personnes qui sont autres que moi-même et cette chose, enfin ce côté ludique quoi, qui est… GD : …qu’on trouvait énormément dans les clips. MF : Qu’on trouvait déjà dans les clips, mais en mode tellement rétréci. Mais malgré tout, c’est vrai que c’est comme ça que j’ai pu, bon indépendamment de l’écriture, de la scène, de tout ce qui fait que ce métier est vraiment passionnant, qui m’a fait tenir quand même, parce que c’est long ! J’ai attendu presque dix ans pour réellement faire un premier film. C’est long… (rires) GD : Oui mais justement alors, est-ce que ça veut dire que maintenant, parce que finalement quand un film est terminé, c’est vrai que vous allez être délivrée par le fait qu’il sorte, de savoir s’il y a un accueil avec le public, on vous le souhaite évidemment, c’est normal, mais est-ce que immédiatement, maintenant, vous vous dites : « C’est une autre carrière qui commence et c’est vers ça que je veux aller définitivement ». Et est-ce qu’il va falloir attendre longtemps que lui refasse un film, ou est-ce que vous pouvez tout à fait imaginer de jouer, travailler avec d’autres metteurs en scène ? MF : Non, je crois qu’aujourd’hui je peux réellement imaginer travailler avec quelqu’un d’autre. Maintenant, je pense que je serai difficile dans mes choix, je le sais. Aussi bien par rapport au réalisateur que l’histoire elle-même. Donc je pense que je, si je puis me projeter sur quelque avenir, faire très peu de films, certainement. Certainement. GD : Et qu’est-ce que vous aimez, alors, justement ? Parce que ce cinéma de climat est un cinéma bien particulier, alors qu’est-ce que vous aimez, vous ? MF : Je crois avoir des goûts très éclectiques. Je vais essayer de…J’aime beaucoup Jane Campion, tous ses films, ses premiers films également. J’aime Oliver Stone, j’aime Kubrick, j’aime David Lean, j’aime David Lynch, Bergman... GD : Donc, c’est un goût éclectique, quoi. MF : Oui. Oui, dans le fond oui. GD : Mais pas très français, d’après la liste que vous venez de donner ! MF : Polanski, heu… (rires) GD : Ha oui, c’est toujours du cinéma où il y a beaucoup de spectacle, ou au contraire beaucoup d’onirisme, beaucoup de choses qui sont quand même… C’est pas le mari, la femme et l’amant qu’on trouve ! MF : Non, j’aime les choses qui ont une âme, une histoire et une magie, et qui portent le spectateur. Je peux moi-même être un spectateur qu’on qualifie de moyen, mais c’est-à-dire ne pas avoir cet œil trop critique. Et si un film

m’emmène, si une histoire m’emmène, mais c’est magique ! C’est la chose la plus magique, je crois. GD : Alors à la fin, le héros, Jeff Dahlgren, et vous, vous vous retrouvez dans un cimetière. On va pas dire ce qui se passe, mais c’est vrai qu’il y a quand même comme en peinture, puisque vous avez parlé de peinture, une espèce d’imagerie qui existe : des croix, des églises etc., etc. Ça vient d’où tout ça ? MF : Ce que cela peut suggérer, bien évidemment, mais d’un point de vue esthétique je crois aussi, qui est important. Une croix, c’est beau. Une tombe…Je trouve qu’une tombe, un cimetière est un endroit magique. C’est quelque chose une fois de plus que nous avons en commun, mais je crois que c’est expliqué par cette rencontre que nous avons eue et qui a été une rencontre fondamentale pour moi dans ma vie et assez immédiate. Donc en ce sens, je crois que c’est presque normal que d’avoir des mondes un peu communs et des attirances. GD : Vous voulez dire que d’une certaine manière, peut-être, il vous a aussi arrachée à ce qui pouvait être une carrière de show-business traditionnelle, que vous n’avez jamais vraiment voulu mener. MF : Que je n’ai, je crois, jamais menée quoiqu’il arrive ! Mais…envie de faire quelque chose, envie de faire ce long-métrage et envie de prendre des risques. GD : Alors comment s’est passé le tournage ? Parce que je suppose que les conditions, étant donné que ça se passe en hiver, en plus y a énormément de scènes qui se passent en hiver mais il fait beau en même temps, ce qui sont des conditions météos pas faciles à trouver parce qu’en général il fait pas toujours beau, ça a dû être un peu long et un peu compliqué. Alors, comment ça s’est passé ? Racontez-moi… MF : Le tournage était très, très long, je crois qu’il a duré cinq mois. Quant aux conditions de tournage, c’était difficile à cause du temps bien évidemment, parce que très, très, très froid. Donc par moments, même le tournage a dû s’arrêter parce que trop froid, parce qu’on ne pouvait presque plus jouer. Maintenant, je crois que toutes ces difficultés sont malgré tout inhérentes à un tournage. La réelle difficulté était je crois le…la difficulté de… (Mylène rit de ne pas trouver ses mots) j’allais dire la tension qui régnait sur ce tournage, la tension que toute cette chose que Laurent portait dans le fond qui est extrêmement lourde. GD : Vous vous êtes faits totalement, parce que finalement lui, c’est son premier film, vous c’est votre premier grand rôle, vous vous êtes faits mutuellement et définitivement confiance dès le début, ou tout d’un coup du coin de l’œil vous vous êtes un petit peu surveillés l’un

l’autre ? Parce que c’est vous qui portez tout : et lui, et vous. MF : Je crois qu’il y avait à la fois une grande confiance, puisque c’est vrai qu’on a très peu parlé du rôle par exemple. J’ai lu le scénario. Et une fois sur le tournage bien sûr, des indications de mise en scène. Mais de sa part, en tout cas, je suppose que c’est une confiance. ‘Regardés du coin de l’œil’, malgré tout de temps en temps. C’est-à-dire moi je l’ai quand même observé travaillant avec d’autres, puisqu’il y avait quand même beaucoup d’acteurs. Et parfois probablement des réactions assez violentes, oui, parce que c’est vrai que dans ces moments-là, on vous dit « Moteur, action ! » et vous avez une espèce, d’abord d’angoisse profonde, et de demande qui est énorme quant à ou le regard ou même un mot, et que parfois ce mot n’arrive pas et que là on fait abstraction de toute une vie commune. GD : Ça devient professionnel. MF : Oui. Oui, dans le fond oui. Beaucoup plus cruel et plus…Mais je crois que c’était aussi essentiel. Je n’aime pas moi être trop protégée. J’étais réellement considérée comme une actrice engagée sur un film, et non pas comme le petit oiseau qu’on va couver. En aucun cas, non. GD : On se retrouve dans un instant pour parler de ce film de Laurent Boutonnat, avec Mylène Farmer et Jeff Dahlgren. Une pause pendant laquelle est diffusé le journal de LCI. GD : On se retrouve donc avec Mylène Farmer qui a la gentillesse de nous recevoir pour un film qui va, je l’espère, vous surprendre : « Giorgino », donc, de Laurent Boutonnat, avec Jeff Dahlgren. Alors est-ce qu’on peut Mylène parler du fait que le film a été tourné en anglais ? Il est tourné en Tchécoslovaquie, il est tourné en hiver et en plus il est tourné en anglais. Pourquoi ? C’est pour rechercher la plus grande audience possible à travers le monde, ou c’est l’histoire… MF : (elle l’interrompt) Non, sincèrement non. C’est parce que Laurent Boutonnat voulait travailler avec des acteurs comme Louise Fletcher, Joss Ackland, et a trouvé son premier rôle aux Etats-Unis, donc c’est plus une volonté que d’aller vers des acteurs, donc une langue qui s’est imposée. GD : Louise Fletcher, tout le monde connaît, c’était l’infirmière de « Vol au Dessus d’un Nid de Coucou » et donc qui parle français, si mes souvenirs sont bons et elle était très charmante. C’est pour aller vers ces acteurs-là qu’il a choisi ce parti pris là ? MF : Absolument, oui parce que…Mais lui-


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même dit ça : « J’aurais pu tourner ce film en espagnol, russe… ». Peu lui importait la langue, dans le fond. GD : Alors donc un travail qui a été compliqué, et tout à l’heure vous nous disiez que c’était très difficile d’expliquer les raisons pour lesquelles vous étiez dans ce monde-là, dans à la fois ces rêveries, cette poésie et aussi ces fantasmes. Et pourtant quand on essaie de trouver une logique à tout ça, parce qu’après tout il y a forcément une logique même si on la veut pas, la première chanson c’était « Maman a tort », après c’était « Libertine », et maintenant c’est un film où il y a énormément de femmes, même si c’est une envie de l’auteur. Est-ce que cette logique vous apparaît ou estce que c’est un hasard total? MF : Je pense que c’est un hasard. Mais là une fois de plus, c’est difficile, pardonnez-moi de le redire (rires)… GD : C’est pas grave ! MF : …parce que ce film, dans le fond, ne m’appartient pas, en tout cas son histoire et son… GD : Mais vous êtes sûre qu’il ne l’a pas écrit pour vous ? Parce que quand vous dites qu’il ne vous appartient pas, il l’a quand même probablement en partie, enfin il savait que vous alliez jouer le rôle principal de Catherine. MF : Oui. Maintenant je… (elle cherche ses mots) GD : C’est du sur-mesure, quand même. MF : C’est une bonne couture. Est-ce que c’est du sur-mesure ? Je ne sais pas bien, mais là c’est peut-être plus par pudeur, je ne sais pas bien. Est-ce qu’il a écrit réellement ce rôle pour moi ? Je ne sais pas, parce que le personnage principal c’est peut-être lui qui a voyagé avec lui le plus longtemps, et peut-être que Catherine est arrivée plus tard, donc… GD : Et est-ce que lui justement, sans sombrer dans une espèce de simplification extrême, est-ce que lui il s’est vécu un petit peu comme Jeff Dahlgren, donc qui est le héros du film, à savoir ce médecin qui recherche des enfants ? MF : Je crois qu’il est…Cette chose commune d’avec ce personnage, c’est cette âme d’enfant qu’il a en lui et cette quête, cette quête essoufflée. Je crois qu’il a ça en lui. GD : Mais quand on a fait un film comme ça, qui est justement un film poétique, est-ce que c’est, comment dirais-je, vous savez que la critique en France n’aime pas trop le mélange des genres, ça peut être aussi bien un artiste qui a réussi dans un domaine qui est la variété, le fait de faire du cinéma, ça paraît presque pour beaucoup de gens qui sont extrêmement bienpensants et extrêmement rigides… MF : Obscène ? (rires) GD : Oui ! C’est pas obscène, mais on n’a pas le droit de changer de registre, et pourtant vous,

vous avez ce besoin et vous en avez même exprimé tout à l’heure l’envie. Ça vous gêne qu’on vous oblige à vous enfermer dans un même registre ? MF : L’idée de l’enfermement me gêne. Maintenant, est-ce que moi j’ai été gênée par ça : non. Non, parce que j’ai essayé au maximum de me protéger et de ne pas écouter, de ne pas entendre. Sinon, effectivement si on écoutait et si on entendait réellement, je pense que c’est trop mutilant. Non. J’oserais dire je me moque de ce qu’on pense et de ce qu’on dit. C’est presque vrai. GD : C’est pour ça que depuis des années vous avez toujours choisi de faire votre métier, d’être extrêmement discrète sur vous, sur votre vie, enfin sur beaucoup d’aspects du travail d’artiste qui en général sont surexploités et plombent votre carrière ? MF : Oui, parce que je pense… Moi, j’essaye de ne pas m’essouffler et de ne pas essouffler l’autre. Donc en ce sens, je suis obligée d’être absente. Et puis je crois que c’est ma nature profonde, tout simplement donc je n’ai pas à me faire violence pour ça. GD : Et vous, quand les disques se vendent comme ça énormément, ça veut dire, bien au-delà du succès commercial, qu’il y un intérêt profond entre un artiste et les gens. Vous croyez que les gens vous aiment pour quoi, au fond ? MF : Je ne sais pas ! Non… (large sourire) GD : Pour ce mélange entre la fragilité et la provocation ? MF : Je crois pour, s’il y a à trouver une expression, peut-être pour la sincérité, parce que je crois que c’est une valeur qui existe toujours. Mais c’est difficile que d’exprimer pourquoi l’autre vous aime. Je ne sais pas… GD : Et quand est-ce que vous vous êtes rendue compte, vous dans votre carrière, parce que en général les carrières de chanteurs démarrent, elles surfent un petit peu sur les vagues adolescentes, ça a été aussi le début de votre carrière quand vous avez chanté « Maman a tort » etc. Quand est-ce qu’on se dit «Moi, je vais faire autre chose », c’est-à-dire je pars sur ce plongeoir-là mais je vais aller dans une autre piscine, quitte à être décrédibilisée un petit peu ? MF : Là, vous parlez d’un genre plus que de changement radical de vie ? GD : Non, pas de vie pour vous, mais quand est-ce que vous vous êtes dit que vous alliez prendre au fond tout ça en mains, sérieusement pour obtenir, pour aller vers des objectifs précis ? MF : Je crois, le goût du risque. Là encore, c’est…Le calcul n’y est pas pour grand-chose, si ce n’est que une « carrière », même si c’est

un mot qui n’est pas très joli, c’est quelque chose qui se pense, qui se gère. Maintenant, c’est quelque chose qui, je ne sais pas, qui s’est construit comme ça. GD : Petit à petit. MF : Oui, qui s’est fait lentement. Mon début n’a pas été fulgurant. J’ai eu trois bonnes années pour apprendre mon métier et apprendre ce que j’aimais et ce que je n’aimais pas, dans le fond, par rapport à moi-même et par rapport à l’extérieur également. GD : C’est-à-dire ? MF : C’est-à-dire de « Maman a tort », qui a été un succès mais j’étais quand même encore pas très connue jusqu’alors. Et après il y a eu deux autres 45-tours qui étaient plus discrets. Et puis après, le fameux « Libertine » qui là a été réellement…les projecteurs ont été mis sur moi. Mais donc, pendant cette période…Enfin, tout ça pour essayer d’expliquer que ça n’a pas été quelque chose, comme ça, d’immédiat, on vous donne tout. Ça a été quelque chose d’assez progressif, donc probablement de moins perturbant pour moi. GD : Donc d’une certaine manière, vous pouvez vous dire que la même attitude, vous allez, c’est donc la même expérience, vous allez l’utiliser pour le cinéma ? C’est-à-dire que c’est quelque chose qui commence, vous êtes habituée aux hauts et aux bas de ce qui s’est passé dans la chanson, et comme vous semblez avoir derrière la fragilité une assez grande volonté, vous allez attaquer un deuxième monde, tranquillement et avec le temps. C’est ça l’idée ? MF : Oui, là c’est plus une façade sereine, qui en aucun cas n’existe, dans le fond, si ce n’est que là je suis plus posée que d’ordinaire. Mais c’est plus un parcours angoissant qu’autre chose. Maintenant, pour répondre à votre question, je le ferai effectivement avec un maximum de réflexion et de réelles envies. C’est-à-dire, me perdre dans quelque chose pour le rien : non, en aucun cas. GD : Donc, ça veut dire qu’il faut forcément trouver des textes extrêmement forts, des scénarios extrêmement forts… MF : Ça va être de plus en plus difficile, je le sais. Mais c’est… GD : Mais est-ce que vous avez envie, puisque vous avez dit tout à l’heure que vous aimez bien les choses très différentes, d’Oliver Stone à d’autres metteurs en scène, ça veut dire estce que vous pouvez jouer une comédie, par exemple, par goût du fait de jouer ? Ou est-ce que tellement pas dans votre registre que ça vous paraît surréaliste ? MF : Si vous me proposez Woody Allen, je vous dis oui, j’accours ! (rires) Maintenant, tous les genres de comédie : non, je pense pas. Je ne sais pas, d’ailleurs, mais je ne pense pas avoir


ce talent-là, et peut-être cette envie tout simplement. Une bonne comédie, oui c’est aussi intéressant et passionnant qu’un… GD : Sûrement, mais je veux dire tout le monde a envie de jouer avec Woody Allen, parce que on entre sans frapper, enfin si jamais il vous appelle, on s’assoit, vous lui dites de s’asseoir et on lit même pas le scénario, à la limite ! Mais le monde, le fait de changer de monde, parce que c’est un monde tellement particulier, celui du film donc qui sort mercredi, que c’est vrai qu’il y a aussi le risque d’être cataloguée dans une espèce de fantastique, onirique… MF : Ma foi, j’en ai pris le risque, et puis j’espère avoir la chance que d’avoir des propositions différentes. Je fais appel, j’allais dire, à l’intelligence du metteur en scène, plus qu’à quelque chose, comme ça, qui… GD : Mais est-ce qu’après on se dit pas, quand on a fait un film comme ça, ou quand on a eu une expérience comme ça qui est très profonde, parce que vous avez attendu plusieurs années, vous avez tourné pendant cinq mois, et puis c’est compliqué etc. et puis le film sort, est-ce qu’on a envie après, j’allais dire, de retourner dans le travail d’avant ? Est-ce que vous pourriez vous dire « Bon, ben maintenant, il faut s’y remettre », ou est-ce que vous y avez déjà pensé, écrit, travaillé, fait des musiques, ou pas du tout ? MF : Non. J’ai eu pendant effectivement le tournage même, plutôt juste après le tournage, quand le tournage s’est terminé, une envie que de tout abandonner, tout délaisser. Pour aller vers quoi, c’était le point d’interrogation et plutôt une période d’anéantissement qu’autre chose. Aujourd’hui, oui j’ai très envie de retourner vers l’écriture, enfin mon écriture, en tout cas, pour essayer de découvrir des choses que je ne connais pas moi-même, je suppose, parce que je ne sais pas ce que je vais faire, je

ne sais pas ce que je vais écrire. Mais non, j’ai toujours cette envie. Je sais que si cette envie me quitte, j’arrêterai. J’aurai en tout cas cette honnêteté. GD : Il y a quelque chose qui peut apparaître paradoxal, c’est que finalement vous êtes très pudique, réservée, timide, et en même temps vous faites des choses qui sont toujours, qu’elles soient habillées ou pas habillées, toujours un peu explosives. C’est jamais… Pourquoi ? MF : Parce que je crois que ça fait partie de mon propre paradoxe. C’est cette envie que de se cacher, cette envie de lumière et qui se reproduit dans le moindre de mes actes et pensées. C’est quelque chose de conflictuel mais nécessaire. GD : Vous savez que par rapport justement aux années précédentes, on a appelé ça un peu pompeusement les années 80, celles qui s’annoncent sont plus tellement les années de la provocation. Mais quand je dis « la provocation », c’est pas la provocation au sens idiot mais la provocation au sens presque artistique des choses. Maintenant, ceux qui essaient de sortir le bout du nez pour faire des choses un peu différentes, on leur tape sur le bout du nez. Ça vous fait peur, ça ? MF : J’ai l’impression que ça a existé toujours, ça, que c’est omniprésent, que dès qu’on essaye de faire quelque chose qui n’est pas, effectivement, dans ce chemin balisé, on vous tape sur les doigts. Mais… GD : On vous a tapé, vous, sur les doigts ? MF : Attaquée, bien évidemment ! Mais une fois de plus, peu m’importe, ça ne nous touche pas. Un artiste existe parce qu’un public est là. Au fond, j’enfonce des portes ouvertes, mais c’est la vérité vraie ! Donc, tant qu’un public me dit « Continue ! C’est quelque chose que nous aimons », je continue. GD : Est-ce que vous vous reconnaissez, non

pas personnellement, mais dans des attitudes qui peuvent vous ressembler, par exemple pour quelqu’un comme Isabelle Adjani qui vit un peu… qui au fond montre à l’écran des choses souvent excessives et puis qui le reste du temps disparaît ? MF : Je ne sais pas si nous sommes pareilles, mais c’est vrai que on m’a fait souvent cette réflexion, par exemple, que nous avions… Mais c’est plus pour évoquer des choses, dans le fond, des choses négatives en fait. Cette comparaison a été… GD : Non, mais là c’est dit… MF : Non, je le sais mais là je pense à ça parce que c’est quelqu’un qui, je crois, a essayé réellement de gérer sa carrière et son image et de faire ce qu’il lui plaisait, et parfois de s’évanouir et qu’on le lui a reproché. Maintenant, est-ce que je… Je ne sais pas, c’est quelqu’un qui a un grand talent. GD : La dernière question : est-ce que la vie quotidienne, c’est-à-dire celle qui est ni sur les planches, ni dans les studios, ni en tournage, est-ce qu’on y trouve un peu de bonheur, de plaisir, ou est-ce que finalement il faut attendre désespérément de faire quelque chose et de se montrer ? MF : Je crois que j’ai besoin effectivement de faire quelque chose, et ce métier… Sinon, je le vis mal. GD : En tout cas, on vous souhaite le plus grand succès pour le film… MF : Merci beaucoup. GD : …à vous et à Laurent Boutonnat. Le film donc qui est sorti aujourd’hui sur les écrans et que je vous encourage vivement à aller voir, parce que c’est un film qui ne ressemble pas aux autres et c’est tant mieux ! Ciao, à demain. MF : Merci beaucoup… Générique de fin de l’émission.


1994 : Giorgino

Le journal du

Date 05.10.1994 Chaîne Canal+ Présenté par Isabelle Giordano

A l’évidence, le jour de sa sortie, « Giorgino » est en bonne place dans l’émission cinéma N°1 du paysage audiovisuel français de l’époque : le bien nommé « Journal du cinéma » sur Canal+. Isabelle Giordano : Vous connaissiez ses clips. Voici maintenant son film. Laurent Boutonnat signe, avec « Giorgino », une fresque de trois heures. Mylène Farmer sur grand écran, prise dans le tourbillon de la guerre de 14-18. Alors le cocktail est très simple : interviews et réactions. C’est parti.

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Mylène Farmer

Le sujet commence par des images du tournage de « Giorgino ». On y voit notamment Mylène ‘en civil’, sans son ‘costume’ de Catherine, aux côtés de Laurent Boutonnat, derrière la caméra. Suivent quelques mots du réalisateur, filmé en plan assez large, de face, assis sur un fauteuil, en costume noir. Laurent Boutonnat : C’est un peu les derniers jours d’un homme, et son parcours vers l’enfance en fait. Extrait de la bande annonce, avec, en voix-off sur la fin : « Mylène, comme actrice ? ». LB : Le travail avec les gens que vous connaissez bien, surtout sur un plateau comme ça,

d’abord c’est plus dur…vous êtes plus dur avec les gens, beaucoup plus qu’avec les autres acteurs. Et, en même temps, c’est vrai qu’on se parlait assez peu. Je me souviens, quand je la dirigeais, c’était très peu de mots, mais souvent je la touchais. J’avais besoin de la toucher, de la mettre dans ses marques ; c’étaient des trucs très bizarres. (il continue de parler sur des images de Mylène prises pendant le tournage du film) Mais c’est un vrai bonheur parce qu’elle se laisse guider, ce qui n’est pas souvent le cas de tous les acteurs qui ont un peu peur de se laisser guider.

X : Les loups. MF : Un mystère. X : Sexe. MF : Le sexe, euh… (silence, elle baisse la tête, puis la relève) Peut être très drôle, très fort. X : La folie. MF : Attrayante (silence). X : L’amour. MF : Je reviens à « fondamental », c’est indispensable. Je crois que c’est la seule chose réellement importante pour l’être humain. X : « Giorgino ». MF : La force du désespoir.

La musique de « Tristana » remplace la voix de Boutonnat sur les images du tournage. Puis, tandis que la musique continue, on se retrouve dans la suite d’un palace parisien où l’on voit Mylène Farmer arriver et s’installer, dans un look très lolita : une toute petite robe crème, des collants, des chaussures d’écolière noires et des couettes. Elle se jette dans le fauteuil telle une enfant. L’interview, telle qu’elle nous est montrée, est originale : le journaliste dit un mot (illustré par une image du film, des tubes de Mylène servant de bande-son) et la star réagit.

Suit un micro-trottoir à la sortie d’une séance dans un cinéma des Champs Elysées, le jour même, à 17h. On y croise visiblement des fans de la chanteuse désormais actrice. Les avis sont très favorables (« C’est magnifique », « C’est géant », « Allez le voir », « Laurent est un génie, Mylène c’est une comédienne née, et on attend une nomination aux César avec impatience parce que, vraiment, sans parti pris, elle le mérite. Elle est fabuleuse »). D’autres plus nuancés (« C’est pas mal, mais il y a quand même beaucoup de longueurs. (…) Farmer en tant qu’actrice ? Elle parle pas beaucoup, mais elle joue très bien l’autiste, la folle, à la fin du film. »). Et ça se termine par l’avis d’un spectateur isolé (les autres étaient en groupes) : « J’aimerais que beaucoup de gens aillent le voir, la voir elle en tant qu’actrice, et non pas en tant que chanteuse. C’est vrai, les groupies c’est assez pénible ».

X : 14-18. Mylène Farmer : La guerre. C’est aujourd’hui la même chose. X : Femmes. MF : Des femmes violentes, des femmes qui vous battent. X : Hommes. MF : Absents.


cinĂŠma



1995 1997 Anamorphosée 19.09.1995 Single « XXL » – 17.10.1995 Album « Anamorphosée » – 12.12.1995 Single « L’Instant X » – 26.03.1996 Single « California » – 25.05.1996 Début du Tour 96 06.08.1996 Single « Comme j’ai mal » – 19.11.1996 Single « Rêver » – 29.04.1997 Single « La poupée qui fait non (live)» – 21.05.1997 Album « Live à Bercy » – 20.08.1997 Single « Ainsi soit je (live) »


1995–1996 : Anamorphosée

Studio

J.T. de 20h Date 13.04.1995 Chaîne France 2 Présenté par Etienne Leenhardt

Nous sommes en pleine campagne pour la présidentielle. Tous les jours dans son J.T., la rédaction de France 2 propose un « Journal de campagne ». Curieusement, ce jour-là, Mylène Farmer, qu’on n’a plus vue ni entendue depuis plus de six mois, y est présente… Etienne Leenhardt (après avoir donné les derniers sondages entre Balladur, Chirac et Jospin) : Une journée marquée par l’irruption dans la campagne de la chanteuse Mylène Farmer, fort mécontente qu’un sosie ait pris part aux déplacements électoraux de Jean-Marie Le Pen.

1995

Le sujet commence par des images du sosie chantant « Sans contrefaçon » à un meeting du Front National. X (en voix-off sur ces images) : Vous la reconnaissez ? Mylène Farmer bien sûr ! Et bien non ! C’est son double, l’un de ces sosies d’artistes auxquels le Front National fait appel pour animer ses meetings. Seulement voilà, Mylène Farmer, la vraie, la chanteuse, s’insurge contre le procédé, et, de Los Angeles, elle appelle France 2. Mylène Farmer (au téléphone, sur des images fixes extraites de l’avant-première de « Giorgino ») : Je suis scandalisée d’apprendre que monsieur Le Pen ait pu utiliser mon image et tromper les gens de cette façon. Je trouve que ce procédé est révoltant. C’est scandaleux. Et je suis surtout triste, profondément malheureuse, que les gens qui m’aiment bien aient pu penser un instant que je puisse cautionner une telle politique. (coupure) Et il y a des personnes qui ont appelé la maison de disques (images du meeting) et qui ont fait l’amalgame, qui n’ont pas pensé une seconde que c’était un sosie. X : Et Mylène Farmer porte plainte. Jean-Marie Le Pen (invité deux jours plus tôt sur le plateau du J.T. de France 2) : Grâce à ça, j’aurais connu le nom de Mylène Farmer. Je n’en avais jamais entendu parler.

200

Mylène Farmer

Le sujet est rediffusé le 24 avril dans l’émission « Ça se discute » de Jean-Luc Delarue, sur France 2.

Date 14.12.1995 Chaîne France 2 Présenté par Michel Drucker

Première apparition télé de Mylène Farmer depuis plus d’un an. Alors que son album « Anamorphosée » est sorti deux mois plus tôt, la star n’a pas daigné montrer le bout de son nez avant ce jour. Et à la surprise générale, elle choisit un talk-show plutôt qu’une émission de variétés. L’émission quotidienne de Michel Drucker est diffusée en access primetime (avant le 20h donc…). Dès le générique, on entend une véritable hystérie sur le plateau : le public scande le nom de l’idole…En entrant sur le plateau, Michel Drucker et l’ensemble des chroniqueurs semblent étonnés par cette ambiance survoltée. L’animateur peine même à présenter son équipe tant les « Mylène ! Mylène ! Mylène ! » se font entendre. Michel Drucker : Quelle ambiance !... Elle arrive. Attendez, attendez. Elle arrive. Elle arrive. Mais j’aimerais d’abord que vous présentiez tous mes copains. Drucker parvient néanmoins à présenter ses quatre complices (Gaël Leforestier, Benjamin Castaldi, Virginie Lemoine, Laurent Gerra) avant de présenter l’invitée du jour… MD : Ecoutez, vous l’avez deviné, notre invitée

est tout simplement Mylène Farmer. Mylène Farmer ! Le public se lève pour l’applaudir et scander son nom. Un accueil hystérique. Mylène arrive, sublime, vêtue d’une robe en cuir noir et d’un cardigan crème, perchée sur de très hauts talons, ses cheveux remontés en chignon. Drucker part la chercher au fond du plateau, la prend par la main et l’amène jusqu’au siège où elle doit s’asseoir, juste devant le public. Elle peine à regarder devant elle, visiblement très émue par les cris et les bravos aussi incessants qu’assourdissants. Elle est mal à l’aise, au bord des larmes. Drucker arrive péniblement à calmer le public. MD : Vous devriez venir, Mylène, plus souvent parce que vous savez (les cris reprennent)… Chut ! Remplir la salle avec les problèmes qu’il y a en ce moment dans la circulation (l’hiver 95 connaît l’une des plus longues grèves que la France ait jamais connue), c’est une performance (Mylène esquisse un sourire) et, grâce à vous, elle est vraiment remplie…avec des fans, y’a pas d’autre mot. Des fans qui vous suivent depuis longtemps. Est-ce que vous les connaissez ? Vous savez qui écoute vos disques ? Vous les rencontrez de temps en temps ? Ils vous écrivent ? Mylène Farmer : Oui, beaucoup. Beaucoup. MD : Vous en êtes à votre quatrième album. Ils vous suivent donc depuis déjà cinq ou six ans (sic !). La tranche d’âge, vous la connaissez ? Estce qu’il y a une majorité de filles ? De garçons ?


Gabriel

Statistiquement. Plus de vingt-cinq ans, moins de ving-cinq ans ? Des ménagères, des jeunes, des moins jeunes ? (voyant Mylène perplexe) Vous ne savez pas ? MF : Je crois que j’ai un peu de mal à répondre à cette question, si tant est qu’il y a beaucoup de jeunes, oui. Beaucoup de filles, beaucoup de garçons. Et (en regardant le public) je tiens à vous remercier (les applaudissements et les cris repartent de plus belle). MD : Chut ! Attendez, attendez. Mylène Farmer est une artiste qu’on ne voit jamais à la télévision, donc j’aimerais bien en profiter et lui poser quelques questions (sourire de Mylène). D’abord, c’est vrai : pourquoi on vous voit si peu ? Vous êtes quoi, quatre ou cinq artistes comme ça en France, qu’on ne voit pratiquement jamais. C’est parce que c’est un média qui vous fait peur ou parce que vous considérez que les disques sont faits pour être écoutés, les clips sont faits pour être vus dans certaines émissions, et que l’artiste n’a pas obligatoirement le besoin de venir parler au public ? MF : Je pense, avant tout, que c’est un exercice qui est difficile pour moi. Et j’ai un petit peu de mal à parler de moi-même, donc c’est… MD : Le trac. MF : Le trac aussi, et puis le… (elle baisse la tête, avec un sourire, intimidée).

MD : Quand il s’agit de parler de votre CD, je crois quand même que, là, vous allez être beaucoup plus volubile. Mylène Farmer, « Anamorphosée », c’est le quatrième (il montre le CD). On ne vous a pas entendue et vue depuis longtemps… MF : Oui. MD : Vous étiez partie à l’étranger, aux EtatsUnis ? MF : Je suis partie un an à Los Angeles. Et puis un peu à New York également. Et puis j’ai surtout enregistré cet album ; c’est un travail de longue haleine. MD : Alors on en dit un petit mot de cet album. Douze titres qui, d’après « L’express », sont un « adieu aux larmes ». MF : (silence) Ça, je ne sais pas. Je me méfie toujours des choses très radicales comme ça. Euh… On m’a dit que c’était un album plus optimiste. Peut-être. Mais j’aime les larmes aussi. MD : Bon. Et bien, on va voir, pour la première fois, on va écouter « L’instant X » puisque, à chaque fois que vous faites un album, il y a évidemment des clips. Et c’est vrai que vos clips sont aussi célèbres que vos CD (sourire de Mylène) parce qu’ils sont très bien faits. On va d’ailleurs en revoir pas mal tout à l’heure. Donc c’est la première fois. MF : Oui.

MD : Qui est monsieur Marcus Nispel (réalisateur du clip de « L’instant X ») ? MF : C’est un réalisateur allemand, qui vit à Los Angeles je crois, et qui a réalisé de nombreux clips, jamais avec les français je crois, ou peutêtre avec Alain Chamfort, et que j’aime beaucoup, qui a un grand talent. MD : « L’instant X », c’est le single, comme on dit ? MF : Oui. C’est le deuxième extrait de l’album. MD : Mais y’a quand même douze titres. Pour la première fois, en exclusivité, voici « L’instant X » (applaudissements). Diffusion du clip de « L’instant X », dans une version très réduite (un refrain, un couplet). MD : « L’instant X ». Sans entrer dans la technique, moi j’ai vu la plupart de vos clips, on va en voir un petit montage exceptionnel dans un instant, ils sont tournés beaucoup en extérieur, donc vous dépendez beaucoup de la météo… MF : (dans un rire) Oui. MD : Vous allez dans les pays chauds, et souvent dans le froid d’ailleurs. MF : Souvent dans le froid. MD : Comment ça se passe ? Vous êtes dirigée, comme un metteur en scène dirige une comédienne, vous vous abandonnez

« (Pour le clip de XXL) j’étais réellement attachée à l’avant de ce train, pendant près de cinq heures, sans pouvoir descendre et parfois à vitesse rapide. C’était assez étonnant. »


1995–1996 : Anamorphosée 202

Mylène Farmer

complètement au metteur en scène ? Ou estce que Laurent Boutonnat ou vous, vous vous mêlez de ce qu’on appelle le story-board, l’histoire, ou là vous donnez le CD au metteur en scène et c’est lui qui vous dit : « Moi, j’attends ça de vous » ? MF : Avec Marcus Nispel, c’est un petit peu différent. C’est vrai que je lui donne la chanson, et la nouveauté, c’est que je lui demande : « Quelle idée avez-vous par rapport à ça ? ». J’avais besoin, en tout cas envie, que quelqu’un m’amène quelque chose de l’extérieur, un nouveau regard. Quant au travail d’avec Laurent Boutonnat – j’ai fait quand même beaucoup, beaucoup de clips, et j’ai été très très gâtée – et là, c’était un travail commun, souvent, en parlant de l’histoire. MD : Comme vous venez rarement à la télévision, moi je voudrais en savoir un petit peu plus sur vous. Qu’est-ce que vous gardez comme souvenirs de vos dix années passées au Québec ? Moi, la première fois que j’ai entendu parler de vous, j’en ai entendu parler comme d’une québécoise, de quelqu’un qui avait grandi à Montréal… MF : Je crois que j’irrite beaucoup de personnes parce que j’ai très très peu de souvenirs, si ce n’est aucun souvenir de mon enfance. Je crois le souvenir de la neige, en tout cas j’ai retrouvé une sensation agréable. MD : C’est pour ça que la plupart de vos clips se passent dans le froid et dans la neige. MF : Probablement. Mais très très très peu de souvenirs. MD : Et alors, ce qu’il faut savoir, c’est que vo-

tre première vocation, c’était la comédie. Vous avez pris des cours avec Mesguich, je crois, Daniel Mesguich (sourire de Mylène). Votre première passion, ça a été le théâtre… MF : Au Cours Florent également. MD : …Et puis, pourquoi vous avez bifurqué vers la chanson, avant d’y revenir puisque vous avez également tourné au cinéma ? MF : Ce sont les hasards de la vie, et des rencontres qu’on peut avoir, qui sont très très importantes. Et j’ai fait la rencontre de Laurent Boutonnat donc, qui voulait lui-même se diriger vers le cinéma, et était également compositeur, adorait la musique. Et nous sommes nés de la même chose, donc de la musique. MD : Alors, c’est vrai que vous ne feriez pas cette carrière s’il n’y avait pas Laurent Boutonnat. Vous parlez souvent de lui. On ne le voit jamais ; c’est quelqu’un que je n’ai jamais rencontré. Qui est Laurent Boutonnat ? Quelle est sa formation ? Il est musicien bien sûr. Vous l’avez rencontré dans quelles circonstances ? C’est lui qui vous a donné envie de chanter. MF : C’est, j’oserais dire, par hasard. C’est un ami commun qui nous a réunis. Et lui m’avait parlé donc de cette première chanson, « Maman a tort ». MD : Il est musicien au départ ? MF : Il est de grands talents. Il est musicien. Il est réalisateur. Il aime l’image. C’est quelqu’un qui écrit bien. MD : Est-ce qu’on peut dire que votre carrière aurait pris un virage différent s’il n’y avait pas eu Laurent Boutonnat ? Est-ce qu’on peut dire que les clips, car quand on parle de vos clips,

on ne peut pas ne pas parler de Laurent Boutonnat, est-ce qu’on peut dire que ce sont vos clips qui sont aussi à l’origine de votre succès ? MF : Je crois que c’est un tout. Je crois que c’est très très important en effet. Je crois que la musique est importante. Je pense que les mots sont très très importants ; c’est une façon de dialoguer avec l’autre. Je crois que c’est un tout. MD : Et bien voilà un petit montage : on va aller des débuts, du premier album, jusqu’à « L’amour XXL » (sic !). Voici un petit survol de votre carrière en clips. Mais je crois que tous vos fans les connaissent, mais seront contents de les revoir (cris du public). Medley des clips (pendant lequel on entend le public cirer et applaudir) : « Pourvu qu’elles soient douces », « Libertine », « Je t’aime mélancolie », « Sans contrefaçon », « XXL ». Retour plateau, le public est à nouveau hystérique. Mylène sourit et le remercie. MD : (aux spectateurs) Ne vous inquiétez pas, nous repasserons souvent des clips de Mylène. (à Mylène) Moi, je voudrais une explication technique : ça c’était « L’amour XXL » (re-sic !) où vous êtes à l’avant d’une locomotive à vapeur. Ça a été tourné comment ? MF : Ça, ça a été éprouvant pour moi. MD : C’est tourné où ça ? MF : A Los Angeles. Et j’étais réellement attachée, donc, à l’avant de ce train, et ce pendant près de quatre, voire cinq heures, sans pouvoir descendre du train, et le train roulait réellement, et parfois à

« (À propos du réalisateur Marcus Nispel) J’avais envie que quelqu’un m’amène quelque chose de l’extérieur, un nouveau regard. »


« On m’a dit que c’est un album plus optimiste. Peut-être. J’aime les larmes aussi. » vitesse rapide. Donc c’était assez étonnant. MD : Autre question avant que j’oublie : quand est-ce que vous reviendrez sur scène ? MF : Euh… Très bientôt (applaudissements et hurlements dans le public). Drucker accueille alors les chroniqueurs cinéma et musique, respectivement Benjamin Castaldi et Gaël Leforestier. Comme le veut le principe de l’émission, Mylène va rester jusqu’à la fin. C’est l’occasion d’abandonner les tabourets, juste en face du public, pour rejoindre la grande table, plus lointaine, en fond de décor. Rubrique musique. Gaël présente une compil’ de rock, avec notamment Supergrass, Oasis, Iggy Pop, Lenny Kravitz,… A Michel Drucker qui lui demande si elle connaît tous ces groupes, Mylène répond simplement : « Oui », avec un beau sourire. Gaël présente ensuite un coffret de singles de Nirvana qu’il offre à Mylène. MD : Vous aimez Nirvana ? MF : J’aime beaucoup Nirvana, oui. MD : Comment vous définiriez leur musique ? MF : Leur musique, je ne sais pas. Mais le chanteur, en tout cas, avait un charisme très étonnant et assez exceptionnel. MD : Vous l’aviez rencontré ? MF : Non, jamais. Pour conclure sa rubrique, Gaël présente un CD de John Lee Hooker. Drucker s’empresse de l’offrir à Mylène… MF : C’est une belle pochette. C’est ensuite la rubrique cinéma de Benjamin. MD : (à Mylène) Un p’tit mot. Quel souvenir garderez-vous de votre dernier film, qui a été une longue aventure, qui est sorti il y a un an je crois, « Giorgino » ? MF : Oui. Très électrique et très passionnant. MD : Vous recommencerez bien sûr ? MF : C’est mon souhait en tout cas, oui. Benjamin présente alors « Le Président et Miss Wade », de Rob Reiner, pour sa sortie en salles.

MD : Vous avez vu le film ? MF : J’ai vu la moitié du film. Benjamin Castaldi : Elle est partie avant, c’est mauvais signe. MF : Non, je m’étais trompée de séance, donc je suis entrée et le film était déjà commencé (rires). MD : On va vous raconter la deuxième partie donc. Benjamin présente le film. Puis enchaîne avec « Smoke », de Wayne Wang et Paul Auster, que Mylène confie ne pas avoir vu. BC : Ça se passe dans un tabac, c’est relativement gonflé parce que, en Amérique, la chasse aux fumeurs est catastrophique ; on ne peut plus fumer nulle part. MD : (à Mylène) Vous fumez ? MF : Oui. MD : Comment vous faites alors quand vous êtes dans un lieu public ? BC : Comme tout le monde, elle se cache parce que c’est absolument impossible de fumer, ni dans les restaurants… MF : Là-bas, c’est impossible, absolument. MD : Et quand vous allez aux Etats-Unis, dans les avions, vous tenez le coup pendant douze heures ? MF : Oh oui, sans problème. MD : En mangeant du chewing-gum ? MF : Non (large sourire). Benjamin finit la présentation du film. Puis évoque « Des anges et des insectes » de Philip Haas. MD : (à Mylène) Pour terminer avec le cinéma, quels sont les acteurs et les actrices français ou outre-Atlantique, étrangers, qui vous ont fasciné quand vous étiez petite fille, et qui vous fascinent encore ? Vos légendes, vos mythes ? MF : Greta Garbo. Mais, plus récemment, j’aime beaucoup Robert de Niro, Al Pacino, Michelle Pfeiffer. MD : Et les français ? MF : Français, j’aime beaucoup… euh… (elle réfléchit)… (rires) Gérard Depardieu,

c’est facile (rire). Laurent Gerra et Virginie Lemoine entrent ensuite en plateau pour leurs « Zap’tualités ». Ce jour : un sketch sur Miss France. Puis ils rejoignent tout le monde à la grande table. MD : (à Mylène) Je vous ai vu rire, de bon cœur (Mylène baisse la tête et sourit… en fait, elle n’a offert que de vagues sourires polis pendant le sketch). Merci beaucoup chère Mylène. Je rappelle : « Anamorphosée » vient de sortir. Vous reviendrez sur scène quand, dans un an ? MF : Je ne sais pas (un « Mylène, on t’aime ! » fuse du public, suivi par des cris et des applaudissements). MD : Vous reviendrez nous voir ? On n’entend plus Mylène, mais elle fait « oui » de la tête, avec un large sourire. Drucker referme l’émission sous les « Mylène ! Mylène ! Mylène ! ». L’émission a été enregistrée dans l’après-midi du 12 décembre, soit deux jours avant sa diffusion, et le jour de la sortie de « L’instant X ». D’ailleurs, beaucoup de fans présents ont leur single ou leur maxi 45 tours avec eux. Tant mieux pour eux car, à la sortie de l’émission, en pleine rue, Mylène passe un long moment à signer des autographes. Et ce, dans une vraie cohue. Des fans montent même sur des voitures pour prendre des photos ! Accompagnée de Thierry Suc, son manager, et de gardes du corps, Mylène peine à rejoindre sa voiture. Et même une fois assise à l’intérieur, elle continue de signer des autographes, tandis que des flashes crépitent un peu partout. Malheureusement pour Michel Drucker qui enregistre un second « Studio Gabriel » juste après, la salle est désormais presque vide pour l’invité suivant. Dommage…


1995–1996 : Anamorphosée

Déjà le retour

Date 17.12.1995 Chaîne France 2 Présenté par Jean-Luc Delarue

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Mylène Farmer

Second talk-show en quelques jours pour Mylène Farmer, toujours sur France 2, toujours en access prime-time, mais en direct cette fois ! La chanteuse est l’invitée principale de « Déjà le retour », l’émission dominicale de Jean-Luc Delarue, prolongation de « Déjà dimanche », le magazine de l’actu people et ‘culture’ de l’animateur. Jean-Luc Delarue (de pied, face caméra, tandis que les invités, dont Mylène, sont assis en second plan, sur deux banquettes) : Bonsoir, ou re-bonsoir. Nous sommes en direct. Et nous avons la chance de recevoir ce soir une chanteuse qui fait à la fois partie des gens les plus connues de ce pays, mais aussi les moins connues. Mylène Farmer est l’une de nos rares grandes stars (gros plan, sur Mylène, qui baisse aussitôt les yeux, puis la tête, visiblement mal à l’aise), un mot qu’on utilise pourtant ici avec un peu de parcimonie – ça la fait sourire – mais qui s’applique pourtant parfaitement à elle. Mylène Farmer parle très peu, elle dégage du mystère, de l’irrationnel. Ses compositions sont originales, très personnelles. Ses femmes…ses fans, pardon (sourire de Mylène) campent toujours en bas de chez elle. Ses albums sont toujours de grands succès. On a envie de savoir beaucoup de choses quand on reçoit My-

lène Farmer, notamment savoir ce qu’elle aime vraiment. Et aujourd’hui, elle a choisi d’inviter quelqu’un, première illustration : une femme psychanalyste qui s’appelle Marie de Hennezel, qui vient de publier un récit qui s’appelle « La mort intime (ceux qui vont mourir nous apprennent à vivre) », qui est préfacé par François Mitterrand. Mylène Farmer souhaitait la rencontrer, ce sera chose faite. Et puis on parlera aussi de ce bouquin qui a bouleversé, et qui bouleverse, tous ceux qui ont la chance de tomber dessus. Et puis parce qu’il est bon aussi de rire parfois, nous recevrons François Cluzet, qui est acteur comme vous le savez, et qui sera à l’affiche d’une comédie mercredi prochain, avec Guillaume Depardieu. Cette comédie s’appelle « Les apprentis » et c’est tout bonnement génial. François Cluzet est donc notre troisième invité. Générique L’animateur est désormais assis avec ses invités. Lui et Marie de Hennezel sur un premier canapé, Mylène Farmer et François Cluzet sur un second. Une table basse trône au milieu (avec quelques confiseries posées dessus). JLD : Mylène Farmer, d’abord. Bonsoir Mylène. Mylène Farmer (sublime dans un ensemble crème – très longue jupe et t-shirt prêt du corps dont les manches descendent jusqu’à la moitié des mains, un ruban rouge de lutte contre le Sida posé sur le buste) : Bonsoir. JLD : Ça va ? MF : Très bien (large sourire).

JLD : On est contents de vous revoir. On se demandait même presque si vous ne nous aviez pas un peu oubliés. Tout le temps, vous avez été extrêmement discrète, vous parlez assez peu, mais alors là, c’est depuis un an, depuis deux ans… MF : J’ai quatre ans d’absence. Mais j’ai fait quand même un long métrage. Et le réalisateur est aussi le compositeur, donc ça a été un travail extrêmement long pour lui – le montage du film. Et puis j’ai eu besoin d’un peu de recul, je crois. JLD : Donc à l’étranger (elle confirme). Vous êtes partie à Los Angeles, un peu à New York également. On peut parler presque d’un exil, dans un pays où on ne vous connaît pratiquement pas, par rapport à la France où, (en regardant François Cluzet) c’est fou le phénomène qu’il y a autour de Mylène Farmer. C’est la première fois qu’on reçoit un invité où quatre jours, cinq jours avant, c’est : « Mais à quelle heure elle sera là ? Elle sera là ? ». On appelle au bureau. Ce sont des choses assez étonnantes. (à Mylène) Qu’est-ce qui a motivé votre départ, et qu’est-ce qui a motivé votre retour ? MF : Le besoin d’oxygène avant tout. L’envie de voyages, de découvrir des choses que je ne connaissais pas. L’envie de s’oublier soi-même. Euh… Rencontre de nouvelles personnes. Autant de choses qui font… C’est une nourriture dont j’avais besoin. JLD : Et le retour ? Qu’est-ce qui vous donne envie de revenir en France après ? MF : Définitivement l’envie de faire mon métier (très large sourire), de revenir à mon métier.


JLD : En tout cas, vos fans ne vous ont pas oubliée. Je ne sais pas s’il y a toujours des fans qui vous dispensent cet amour XXL (petit rire de Mylène) en bas de chez vous, partout, dans tous vos déplacements. Ça doit être assez délicat à vivre, j’imagine, parce que vous devez vous demander ce que vous pouvez leur donner en retour quand on vous donne autant d’amour comme ça, non ? MF : C’est toujours un petit peu difficile, si ce n’est qu’ils sont relativement discrets eux-mêmes, même s’ils attendent en bas de chez moi. C’est une présence à la fois effacée et très démonstrative, donc c’est… JLD : C’est quoi ? C’est des sourires ? Vous leur dites deux mots ? MF : Des choses très simples. C’est des échanges de paroles. Mais ils ne me demandent pas davantage. JLD : Alors, sur votre proposition, nous avons donc invité Marie de Hennezel, qui a écrit « La mort intime » qui est un livre consacré à l’accompagnement aux mourants. Pourquoi est-ce que vous aviez envie qu’on parle de ce livre ? MF : Parce que j’ai beaucoup aimé ce livre. (en regardant Marie de Hennezel) Je le trouve merveilleusement écrit. Et surtout c’est le témoignage de choses qui me touchent profondément. Que la mort est un sujet qui me passionne, qui m’a hanté de nombreuses années, et qui aujourd’hui me… j’oserais dire, ne m’obsède plus de la même façon. Et c’est aussi grâce à cette lecture. JLD : De quelle manière ? Comment vous expliquez ce déclic ? MF : J’ai lu deux livres. (à Marie de Hennezel) J’ai lu un autre livre, que vous devez connaître, qui s’appelle « Le livre tibétain de la vie et de la mort » (on entend un « oui » de Marie de Hennezel) et qui parle justement de cet apprentissage que de ne pas craindre et être obsédé, justement, hanté par l’idée de la mort. Et, l’idée peut-être d’une autre vie, également, après la mort – c’est pas une fin en soi. Et c’est aussi le message que vous donnez dans ce livre. Et puis c’est un… je ne dirai pas un métier, mais un don de soi qui est merveilleux. Et voilà… J’avoue que ce livre m’a aidée et m’a confortée dans certaines choses. JLD : (à Marie de Hennezel) En fait, vous êtes psychanalyste, il faut l’expliquer. Depuis une dizaine d’années, vous travaillez dans ces centres de soins palliatifs où, donc, on apporte une présence, une chaleur humaine, quelqu’un avec qui parler, à ceux qui sont en train de

quitter la vie. C’est un livre qui est à la fois très positif parce qu’on se dit, finalement, que les mourants sont… Vous n’aimez pas ce terme parce que jusqu’au dernier jour, on est encore vivant. Marie de Hennezel : Oui. JLD : Ceux qui vont mourir, en tout cas, sont souvent beaucoup plus en harmonie avec euxmêmes, qui voient la mort arriver avec beaucoup plus de facilité, s’ils l’acceptent, que ceux qui sont autour d’eux. C’est assez étrange. MdH : Non, ce n’est pas étrange parce qu’ils sont malades depuis longtemps donc ils ont fait tout un chemin ; on ne se rend pas compte du chemin que des gens font quand ils sont atteints d’une maladie grave. Et que, d’étape en étape, finalement, et souvent dans la solitude, c’est ça qui…souvent dans la solitude parce que les autres, autour, ne veulent pas voir qu’ils font ce chemin (gros plan sur Mylène qui acquiesce d’un hochement de tête). Donc, effectivement, quand ils arrivent à quelques mois, ou à quelques semaines de cette échéance, ils sont souvent beaucoup plus prêts que leur entourage. Et, vous voyez, ce qui est important dans ces moments-là, c’est de…c’est vrai qu’on ne peut plus porter de masque (on entend Mylène approuver cette remarque). On a besoin d’aller au bout de soi-même, d’être dans une authenticité très très grande. Et, pour cela, je crois que les personnes ont besoin de pouvoir échanger avec les autres parce qu’ils sont vivants, justement, jusqu’au bout. Et malheureusement, ce qu’on voit, c’est qu’à cause du tabou de la mort, à cause de cette peur dont vous parlez, les proches, les soignants aussi, la société en général n’est pas capable simplement d’être là (nouvel acquiescement de Mylène), et de se mettre à l’écoute de ce qu’ils ont à nous dire. Alors, j’ai voulu simplement, à partir de mon expérience, dire : « Ne passez pas à côté de cette expérience ». Parce que c’est une expérience… Je crois que c’est l’expérience humaine la plus profonde qui existe, que de pouvoir être auprès de quelqu’un qui est en train, ou qui va mourir. JLD : Mais, à la limite, on se dirait presque que le meilleur moment de sa vie, ce serait le moment de sa mort… MdH : Non. JLD : …si on est en harmonie avec soi-même. Il y a un film qui va sortir, de Xavier Beauvois, au début du mois de janvier, qui s’appelle « N’oublie pas que tu vas mourir ». Vous pensez qu’il faut vivre avec cette idée-là pour vivre heureux ?

MdH : Je crois que… Pas pour vivre heureux, mais pour vivre peut-être plus consciemment… MF : (en même temps) Pour redonner les vraies valeurs de la vie probablement… MdH : …parce que, je crois que, bon qu’est-ce que ça veut dire « vivre heureux » ? On a des moments de bonheur, et puis.... Enfin le malheur fait aussi partie de la vie, justement, la souffrance fait partie de la vie. Donc vivre plus consciemment, plus… Habiter davantage tous les moments de la vie, que ce soient les peines et les joies, mais être là, vraiment, dans sa vie. JLD : Vous avez été surprise par l’invitation de Mylène Farmer ? MdH : J’ai été très touchée. Surprise, oui. Très touchée. (à Mylène) Et j’avais très envie de savoir pourquoi vous m’aviez invitée. JLD : Elle nous l’a dit, plus ou moins. François, vous vouliez faire un commentaire ? François Cluzet (assis aux côtés de Mylène) : J’ai lu il y a pas longtemps que le fait de se savoir mortel était la première maturité ; c’està-dire qu’on devient mûr quand on sait qu’on est mortel. Et puis, je me demande toujours si la mort est pas bien longue que la vie ; et en ce sens, et bien il faut profiter de ce qui est court (rires). JLD : (…) François Cluzet n’a pas été choisi par Mylène Farmer, mais je suis certain qu’elle est contente de… MF : Bien sûr. JLD : Vous vous connaissiez ? MF : Nous nous sommes rencontrés sur le tournage du film que j’ai fait… à Prague. Jean-Luc Delarue fait alors parler François Cluzet de son actualité, le film « Les apprentis », puis revient vers Mylène… JLD : Vous avez été au cinéma quand vous étiez à Los Angeles ? MF : Oui, bien sûr. JLD : Quels sont les derniers films que vous avez vus et que vous avez aimés ? C’est embêtant comme question, ça, parce qu’il faut fouiller. MF : C’est toujours quand on me pose cette question que je ne trouve pas de réponse (petit rire). JLD : Oui. Vous dites : « J’ai plus d’humour en moi que de joie ». Quelqu’un a fait une démonstration, par exemple, en disant que dans les jeux télévisés, avant, c’était de l’humour qu’on essayait de dispenser, et aujourd’hui c’est vraiment de la joie – on applaudit, on va gagner un truc, etc. Comment vous situez la

« La mort est un sujet qui me passionne, qui m’a hanté de nombreuses années ne m’obsède plus aujourd’hui de la même façon… »


1995–1996 : Anamorphosée

différence entre l’humour et la joie ? Et dans quelle(s) situation(s) vous pratiquez l’humour, si vous le pratiquez, si vous êtes seulement sympathisante ? MF : Avec un vrai recul sur moi-même. Quant à la joie, c’est des moments très très furtifs. Et ce peut être tout ou n’importe quoi. JLD : Vous vous marrez dans la vie? MF : Bien sûr. Bien sûr (François Cluzet rit). JLD : Non, je sais pas. On connaît… On a peu l’occasion de vous voir vous marrer, Mylène. Je voudrais qu’on se penche un peu sur… Je sais pas quel regard vous portez sur ce qu’on dit sur vous, parce qu’on dit beaucoup de choses, on écrit beaucoup de choses sur vous ; des journaux se permettent de faire des dossiers énormes alors que vous ne leur avez même pas accordé une interview. Donc on s’est amusé à se plonger là-dedans. Gilles Bernstein, un des journalistes qui travaillent avec nous, s’est penché sur l’image à travers la presse, à travers tout ce qu’on voit dans les journaux. C’est incroyable de voir à quel point vous occupez une place importante dans les journaux, sans même parfois être au courant (rire de Mylène).

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Mylène Farmer

Gilles Bernstein (en voix-off sur un défilé de couvertures et d’articles de presse, prêtés pour l’occasion par l’équipe du « Mylène Farmer Magazine », premier fanzine Farmerien en kiosques, avec, en fond sonore, des tubes de la star) : Mylène Farmer est rare sur les plateaux, mais la littérature la concernant est abondante, quoique peu diversifiée. Tribune la plus accueillante : la presse télé. Mylène se s’y montre jamais, mais elle doit faire vendre car elle collectionne les couvertures. « Télé 7 jours », « La confession d’une star », confession choc : elle a appris à sourire. « Télé 7 jours » encore, « Son étrange confession, re-choc : « Je n’ai pas de souvenirs d’enfance ». Mais « Télé-poche » est

plus fort que Mylène et propose « Un voyage au cœur de son enfance ». Deuxième catégorie : la presse pour jeune fille en fleur. Mylène y fréquente les plus grands : Philippe Swam, David & Jonathan, Roch Voisine. Le célèbre « Salut ! » ajoute la photo de Mylène bébé, celle de la chanteuse, brune, puis châtain. Pour la voir blonde, reportez-vous à « Secrets de stars ». Enfin, la presse musicale où l’on trouve le papier le plus méchant, et le dossier le plus complet. L’assassinat est signé Oliver Cachin, dans « Paroles et musique ». Mylène Farmer incarne, dit-il, « une certaine idée du néant et peut se contenter, sans logique, de multiplier le zéro à l’infini ». Le dossier, le voici, dans « Rock hit » : discographie, biographie, clipographie ; un vrai « Que sais-je ? », les photos en plus. Après le classement par titres, le classement par thèmes. Chapitre 1 : Laurent Boutonnat. Le « Pygmalion », « mentor », « réalisateur », «  compositeur  », toujours cité, rarement montré, voici la photo, c’est dans « Studio mag » (photo de « Giorgino »). Chapitre 2 : les singes car on vous le répète à longueur de colonnes : Mylène vit avec ses singes capucins, ou plutôt son singe puisque Léon est mort, et qu’il ne reste que E.T. que voici (photo extraite de « Télé 7 jours »). Allez, pour conclure, un peu de glamour : Mylène fait la couverture de « Photo » du mois dernier. La tendance 96 est donc mutine et fragile. Ce que confirment les images du dernier clip remontées spécialement pour « Déjà le retour » (extrait du clip « L’instant X », dans une version inédite puisqu’il ne comporte que les images de Mylène). JLD : (…) D’abord, sur la revue de presse, est-ce que, pour vous, c’est une revue de presse qui donne une idée de ce que vous êtes vraiment, ou est-ce que vous avez plutôt l’impression d’avoir, je sais pas, une espèce de revue de fantasmes de

journalistes qui n’ont pas assez d’informations pour pouvoir nourrir leurs lecteurs ? MF : Là encore, je pense que je suis responsable. Mon silence est la cause de… j’allais dire autant de papiers, ou de choses qui sont ou vraies ou fausses. Là encore, j’ai un recul suffisant pour ou ne pas être heurtée, ou prendre ça justement avec un certain recul. JLD : Oui, je vous ai vu sourire ; ça vous a amusée plutôt, non ? MF : Euh… Maintenant, il y a une presse que je n’aime vraiment pas du tout, c’est la presse – et je ne parle pas de moi d’ailleurs – mais qui attaque physique et choses extrêmement privées ou personnelles, et ça, c’est assez inadmissible. Le reste, peu m’importe (sourire). JLD : A chacun de vos albums, surtout dans vos clips, vous avez joué des personnages. Cette fois-ci, autant la pochette de l’album d’ailleurs que le clip donnent le sentiment d’avoir affaire à une Mylène Farmer qui veut se montrer nue, dans tous les sens du terme – elle-même. (la pochette d’« Anamorphosée » apparaît en plein écran) Est-ce que ça correspond à une réalité ou c’est moi qui ai l’esprit tordu ? MF : Tordu, je ne pense pas (sourires), mais c’était plus, moi, l’idée, la tête étant inexistante, de l’esprit qui s’échappe. Et c’est un peu le parcours que j’ai eu, en tout cas cette initiation que j’ai eue pendant quatre années, d’avoir l’esprit qui voyage. JLD : Y’a une lettre que vous aimez bien, qui revient souvent dans vos chansons, c’est la lettre « X ». Rayons X (sic !), l’amour « XXL ». Bon, utilisée dans ces circonstances-là, on peut pas vraiment dire que ça parle de choses cochonnes ou que ça parle d’anonymat, mais est-ce que ça correspond (rire)… Le « X » c’est votre lettre préférée ? MF : J’aime le « X » (rires). Quant à l’anonymat, c’est parfois agréable.


JLD : Je prends cette phrase, « J’aime le X », je la mets dans un article (rire de Mylène), et je lui donne un tout autre sens si je veux… MF : Voilà. JLD : Quand on parle de vous, inévitablement on parle de votre singe capucin, E.T. – donc Léon n’est pas mort, contrairement à ce qu’on a entendu dans le reportage (Mylène confirme). E.T. est remercié sur la pochette de votre album. Alors je voulais savoir quelle était sa collaboration ? Qu’avait-il apporté ? MF : (sourire) Sa présence. Et… JLD : Qu’est-ce qu’il vous apporte ? MF : Un animal apporte beaucoup de choses. C’est un compagnon. Ce sont des jeux. Ce sont autant de choses qui font que…ça provoque un sourire (sourire). JLD : Il vous a donc accompagné aux EtatsUnis j’imagine ? MF : Non. Non. C’est impossible. On ne peut pas voyager avec un singe, non. JLD : Tous vos clips sont de vrais petits films. Vous avez également joué dans un long métrage. Vous avez dit à un moment, vous avez été jusqu’à dire : «Si je ne fais pas du cinéma, j’en mourrai». Est-ce que cette phrase est encore d’actualité ? MF : C’est toujours pareil. C’est-à-dire que c’est vrai que quand on parle à un journaliste, vous le savez aussi bien que moi, après on vous prend une phrase comme ça et puis on la sort, non pas de son contexte… JLD : (la coupant) Celle-là, elle est suffisamment forte pour vivre toute seule, presque. MF : Ce que moi j’ai voulu évoquer, c’est vrai que j’avais besoin absolument de faire un long métrage, de faire un film, de jouer. Donc, en ce sens, j’avais l’impression que si je ne pouvais pas atteindre cette chose-là, c’était une mort en soi. Vous dire que demain, je me serais suicidée, non, probablement pas. Mais, une fois de plus, ça c’est toujours très réducteur, et… JLD : D’accord. j’insiste pas. Est-ce que vous pourriez reprendre cette phrase à votre compte, François ? FC : Non, je ferais du théâtre (rire de Mylène). Cluzet parle du cinéma, de son film, puis de la grève historique qui paralyse à ce moment-là la France entière pendant des semaines. Delarue demande aussi son avis à Mylène sur le sujet… JLD : Vous, Mylène, vous l’avez vécu comment ce mouvement ? Quel regard vous avez sur ce mouvement ? MF : Justement, cette façon que de prendre des personnes, comme ça, en autostop, ça a réhumanisé un peu notre ville, c’est vrai (sourire). Après avoir demandé à Marie de Hennezel son avis sur le sujet, l’animateur clôt l’émission, non sans rappeler l’actualité de chaque invité.

Hit Machine

Date 30.12.1995 Chaîne M6 Présenté par Charly et Lulu

En cette toute fin d’année, M6 diffuse des messages de vœux de personnalités. Mylène a accepté de se prêter au jeu (ce qui est rarissime). Son message est diffusé pour la première fois dans la fameuse émission musicale du samedi matin.

Mylène Farmer : Bonjour, je vous souhaite à tous et à toutes une très bonne année 96 et vous dis à très bientôt sur M6 (rire). Ce message a été enregistré au Crillon, célèbre palace parisien, au moment où Mylène faisait un reportage pour la version allemande du magazine « Vogue », avec Amélie Nothomb. C’est en effet là que les deux femmes ont été présentées, à la demande de la célèbre écrivain belge, pour une interview croisée et une série de photos parues dans le magazine de mode outre-Rhin en mars 96.


1995–1996 : Anamorphosée

Le bêtisier du samedi soir

Date 13.01.96 Chaîne France 2 Présenté par Arthur

Quatre ans qu’elle n’avait pas chanté sur un plateau de télé en France ! Mylène Farmer reprend le micro. C’est « L’instant X » . Et c’est chez Arthur, dans une émission qui, depuis, est passée sur TF1 sous le titre « Les enfants de la télé ».

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Mylène Farmer

1996

Arthur : Vous le savez, régulièrement, on se souvient des tubes qui ont marqué le Top 50. Et ce soir, c’est un Top 50 spécial Mylène Farmer dont les clips ont défilé des semaines durant au rang de N°1. Vous le savez, on vous le dit depuis le début de cette émission : juste après, ce sera un évènement. Mais voici, pour ceux qui l’ont oubliée – y’en a peut-être un ou deux, mais ça m’étonnerait – voici les grands tubes de Mylène Farmer, et juste après, ici même : le retour. Sélection clippée des tubes Farmeriens : « Liber-

tine » (daté ici de 1988 !), « Sans contrefaçon », « Pourvu qu’elles soient douces », « Désenchantée » et « XXL ». A : Son nouvel album s’appelle « Anamorphosée » (il montre le CD à la caméra). Le titre qu’elle va interpréter pour vous ce soir, « L’instant X ». C’est un évènement ; ça fait quatre ans qu’elle n’a pas chanté à la télévision. Elle le fait ce soir pour vous dans « Le bêtisier du samedi soir », sur France 2. Je voudrais qu’on l’applaudisse très très très fort (le public s’exécute aussitôt). Mesdames et messieurs : Mylène Farmer ! (le public se lève) Mylène chante son nouveau single, accompagnée de deux danseuses, pour une chorégraphie simpliste, mais élégante et féminine. La chanteuse est également venue, et c’est une première, avec des musiciens – quatre au total – au look rock, voire grunge. Autre nouveauté : exit les grandes tenues, la star porte un simple jean’s bleu, recouvert de jambières en cuir noir façon

chaps, et un petit top à manches longues transparent laissant voir un imposant soutien-gorge. Dernière innovation : la chanteuse utilise un micro casque. Sa coiffure est celle qu’elle arborait chez Drucker et Delarue : un chignon remonté couplé de mèches raides ou bouclées qui descendent un peu partout. Mylène a enregistré sa prestation avant l’émission – elle n’est pas présente sur le plateau – et ça se voit. Malgré les efforts qu’elle et Arthur déploient (prétendant se saluer de la main à la fin de la chanson), il est flagrant que la séquence a été ampexée. On note un montage sonore navrant pendant le pont musical – certains ont cru bon d’ajouter des applaudissements lorsque Mylène et ses danseuses balancent des confettis partout. Mais le plus visible reste les images du public qui se lève et applaudit, avant et après la chanson : ce sont exactement les mêmes ! La raison ? Il était probablement difficile de trouver des images d’un public enthousiaste après la chanson, une fois que ce dernier s’est rendu compte de l’absence de la star…


Top… aux carpentier

Les années tubes Date 18.05.96 Chaîne TF1 Présenté par Jean-Pierre Foucault

Une semaine avant le lancement de sa nouvelle tournée, Mylène Farmer participe à ce qui est devenu la seule émission de variétés régulière de TF1 (on est loin des trois prime-time hebdomadaires d’il y a quelques années). Pour l’évènement, la star chante deux titres et accorde un petit entretien à Jean-Pierre Foucault.

Date 09.03.1996 Chaîne TF1 Présenté par Christophe Dechavanne

Seconde télé pour « L’instant X » (à deux semaines, pourtant, de la sortie du single « California »). Mylène participe à l’hommage rendu à Maritie et Gilbert Carpentier, mari et femme, célèbres producteurs des grands shows de variétés des années 70 (notamment les « Top à… », d’où le nom de l’émission). Participer ? C’est beaucoup dire. Une nouvelle fois, le passage de la chanteuse est totalement ampexé. La star n’est pas là. Mais, pour une fois, ce n’est pas caché. Dechavanne l’annonce dès le début, après avoir demandé aux différents invités s’ils connaissent la chanteuse. Michel Boujenah : Je ne veux pas le dévoiler. Christophe Dechavanne : On n’insiste pas. Jean-Claude Brialy : On le lira dans « Voici ». MB : Mon corps est tellement désiré. (…) CD : Charles Aznavour, vous la connaissez personnellement ? Charles Aznavour : Non, je ne la connais pas personnellement, mais j’aime beaucoup ce

Premier titre : « Sans contrefaçon ». La prestation est semblable à ce qui se passera sur scène pendant le Tour 96 (mais sur l’enregistrement sonore de 1987 !) : des danseurs torse nus, simplement habillés d’un mini short à paillettes, d’un boa et d’une coiffe à froufrous, le tout dans des couleurs très flashy. Mylène, quant à elle, porte la tenue qui sera la sienne pour « Désenchantée » lors de la tournée à venir. Il

qu’elle fait. Je trouve qu’elle est vraiment, on peut dire, pourrie de dons. Elle a tous les dons ! CD : Y’a deux choses. Elle ne peut pas être avec nous ce soir pour un voyage à l’étranger prévu de longue date (Mylène est à Los Angeles pour le tournage du clip « California » quand l’émission est enregistrée). Et deuxièmement, je sais pas si je peux le dire devant Maritie, elle a été enregistrée avant hier de manière à éviter à Gilbert des sautes d’humeur. Maritie Carpentier : Vous avez bien fait. (…) CD : Mylène Farmer, avec un tube ; ça s’appelle « L’instant X ». La prestation est identique à la précédente, deux mois plus tôt : quatre musiciens, deux danseuses, même choré, même look (hormis le petit top). Une nouveauté tout de même : après le petit lancer de confettis/neige pendant le pont musical, Mylène prend ses danseuses par la main, les ramène vers le centre du plateau, et donne à chacune un petit smack sur la bouche. Shock !

manque la veste ‘gentleman farmer’ pour en faire la copie conforme du Tour 96 sur « Sans contrefaçon ». La coiffure en moins, même si on s’en approche déjà. Pour info, juste avant qu’elle n’arrive sur le plateau, il est suggéré au public présent de descendre des gradins pour s’installer sur le plateau lui-même afin d’obtenir « une atmosphère de concert ». Petite recommandation : « N’hésitez pas à mettre de l’ambiance ». Aussitôt dit, aussitôt fait. La chanteuse est bien présente face au public, mais sa prestation est mixée à une autre enregistrée plus tôt. Des traces du montage sont plusieurs fois flagrantes. On citera, par exemple, le moment où, après le bridge, Mylène reprend le refrain de dos, en plan large, alors qu’elle est de face en plan serré. Quoiqu’il en soit, le public est conquis et lui réserve une véritable ovation. La chanteuse est alors rejointe par Jean-Pierre Foucault. Jean-Pierre Foucault : Bonsoir Mylène. Mylène Farmer : Bonsoir. JPF : Tout le monde se rassied. Quel succès ! (sourire de Mylène) Tout le monde se lève, tout le monde danse. Merci. Ce qui prouve que quand vous venez, il se passe quelque chose, et pourtant vous êtes bien rare à la télé. Alors première question que j’aimerais vous poser, c’est pourquoi vous vous faites si rare. Est-ce que c’est une volonté délibérée de votre part,


1995–1996 : Anamorphosée

non pas de vous cacher, mais enfin de quelque peu vous préserver vis-à-vis du public de la télévision, Mylène ? MF : Pas me préserver du public, mais une façon de ME préserver en général. C’est quelque chose que j’aime faire, mais avec parcimonie. Ça dépend aussi des émissions qui vous offrent une qualité de travail, que ce soit une qualité de lumières, de tournage, autant de choses qui sont rares en télévision, et qui sont importantes pour moi. JPF : Exigeante donc, c’est bien. (applaudissements et cris du public) Merci en tout cas d’apprécier le travail de l’ensemble des équipes, avec notre ami Gilles Amado. MF : Merci à vous. JPF : Alors Mylène, Bercy, ça c’est une aventure. D’autant que vous y serez trois soirs : le 31 mai, le 1er juin, puis une date un p’tit peu plus lointaine dans le courant du mois de juin, ce sera le (hésitant)… MF : Le 28.

JPF : Le 28 (cris dans le public). Bercy, je peux vous dire pour m’être renseigné, Bercy pour Mylène Farmer, on va pas faire de comparaison, mais y’a au moins trois semi-remorques de plus que Johnny puisqu’il y a dix semi-remorques (rire). Donc une équipe technique impressionnante sur scène. Et puis une équipe aussi humaine à laquelle vous tenez beaucoup, et notamment dans le métissage des gens qui vous entourent. MF : Oui, c’est vrai que j’ai souhaité avoir des danseurs qui viennent donc des Etats-Unis, de New York. Et c’était justement pour avoir ce métissage, avoir des peaux de couleurs différentes. JPF : Alors, des chansons qu’on connaît, comme celle-là (en référence à « Sans contrefaçon » qu’elle vient de chanter), puis plein d’autres. MF : Oui. Il y a dix-sept chansons, je crois, dixhuit (cris dans le public). JPF : (au public) Moi quand je dis… Je vais vous dire « dix-sept mots », y’a personne qui crie

6 minutes Date 25.05.1996 Chaîne M6

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Mylène Farmer

C’est le grand jour. Mylène Farmer lance sa nouvelle tournée, à Toulon. Une équipe de M6 ToulonMarseille l’y a rencontrée pour quelques images diffusées dans le « 6 minutes » national, sous le titre : « Le retour ». On découvre alors, dès la première image, une Mylène en chemisier blanc, assise dans le fauteuil orange du Tour 96. Mylène Farmer : Traqueuse, mais heureuse, heureuse de le faire en tout cas. X : (en voix-off sur un extrait du clip « California ») Mylène Farmer a le trac. Et pour cause :

elle n’est pas montée sur scène depuis huit ans (sic !). (sur des images de Mylène prenant place sur le fauteuil orange) Son retour, elle a décidé de le faire en grand : une tournée de dix-neuf concerts. On connaît son goût pour l’image : derrière elle, ses musiciens et ses danseurs, il y a un écran géant de neuf tonnes. MF : Il y a d’excellents musiciens qui m’entourent. J’ai de très très bons danseurs. Ils viennent tous des Etats-Unis, non pas parce que les danseurs français ne sont pas bons, mais tout simplement, j’avais envie d’un métissage donc c’est plus facile aux Etats-Unis pour trouver ce métissage, cette différence de couleurs de peau. (coupure) Je suis bien entourée. X : (sur un extrait du clip de « California ») Mylène Farmer en tournée, ça commence ce soir, au Zénith de Toulon, avec M6.

dans la salle, il suffit que Mylène dise « dixsept chansons »… C’est…Vraiment, la vie est injuste. (à Mylène) Merci en tout cas d’être venue ce soir. MF : Merci à vous. JPF : On vous reverra un peu plus tard pour chanter une autre chanson, une des dernières. Merci beaucoup Mylène Farmer. MF : Merci de votre accueil (elle se lève aussitôt et fait un signe au public). JPF : Restez avec moi… (Mylène se rassied) L’animateur présente l’invité suivant, sous les « Mylène ! Mylène ! Mylène ! » scandés par le public. JPF : Elle va revenir, Mylène, bien sûr tout à l’heure. Mais le fait est qu’elle ne reviendra pas. Certes, plus tard dans l’émission, nous aurons l’occasion de la voir chanter son single du moment, « California », mais la prestation a été ampexée ; Mylène ne revient pas sur le plateau. Le montage est néanmoins très habile cette fois ; on croit vraiment qu’elle est là. Malgré cela, le public participe avec enthousiasme pendant la performance, offrant cris et applaudissements à l’écran qui lui présente Mylène. Pour cette prestation, la chanteuse, qui porte une (toute petite) robe blanche, est accompagnée de David Matiano, l’un des danseurs du Tour 96. L’unique occasion de les voir se livrer, l’un contre l’autre, à une chorégraphie sensuelle et langoureuse. Unique car il n’y aura pas d’autre télé pour ce titre, et que la performance du Tour 96 sera totalement différente.


J.T. de 20h

« J’aime les choses rares. J’ai besoin d’une émotion qui soit grande. Voilà pourquoi je choisis de faire peu de scène. » Date 28.05.96 Chaîne France 2 Présenté par Benoît Duquesne

Trois jours après le premier concert du Tour 96, Mylène Farmer est au 20h de France 2. Curieusement, elle est en duplex depuis sa loge de Bercy, et non sur le plateau, alors que ses concerts parisiens ne commencent que trois jours plus tard. Elle parle à la toute fin d’un J.T. qui a pris du retard en raison d’une allocution du Président de la République quant à la suppression du Service National. Benoît Duquesne : Mylène Farmer arrive à Bercy. Elle ne s’y était pas produite depuis près de sept ans. (Mylène apparaît en plein écran, cheveux détachés, pull rouge, très maquillée, assise sur un canapé. Quelqu’un, ne sachant visiblement pas qu’elle est à l’antenne, passe entre elle et la caméra) Avant de retrouver Mylène Farmer en duplex de sa loge qui se trouve à Bercy, la présentation de son spectacle avec Jean-Jacques Dufour. Le sujet commence par des images de « Alice » lors du premier concert, à Toulon.

Jean-Jacques Dufour (en voix-off) : Dans la vie de cette canadienne – Mylène est née à Montréal – la chanson est un accident. En effet, elle rêvait d’être comédienne. Oui, mais voilà, les hasards de la vie ont conduit cette fausse rousse sur une autre voie. Sa voix, justement, mais avec un ‘x’, on l’entend, pour le première fois en 84. Le début d’une carrière où l’image tient autant de place que le son. (sur un extrait du clip de « Libertine ») L’image, c’est celle que la belle donne dans des clips façonnés par son ami Laurent Boutonnat. Elle y joue les garçonnes polissonnes, les libertines ou les amazones. Un monde de fantasmes, un peu ambigu et pervers, qui séduit ses admirateurs. (sur un extrait de « Je t’aime mélancolie » lors du premier concert, à Toulon) Sorti en 88, son deuxième album, « Ainsi soit je… », a dépassé le million et demi d’exemplaires. Plutôt secrète, paradoxale, et sûrement provocatrice, cette châtain – oui, Mylène est châtain – (sur un extrait de « Désenchantée » lors du premier concert, à Toulon) s’est tue pendant quatre ans. Entre temps, il y avait eu un film, « Giorgino », malheureusement un échec. Mais ça, c’est une autre histoire… Retour plateau. BD : Alors, Mylène Farmer, bonsoir. Mylène Farmer (à peine audible, esquissant un sourire) : Bonsoir.

BD : Merci beaucoup d’être avec nous ce soir. On ne vous voit pas souvent sur scène. C’est un choix ? MF : Oui. Parce que j’aime les choses rares, que j’ai besoin d’une émotion qui soit grande. Et voilà pourquoi je choisis de faire peu de scène. Et qu’à chaque fois, c’est une émotion qui est étonnante. BD : Mais ce contact avec le public, c’est quelque chose que vous recherchez quand même, dont vous avez besoin ? MF : C’est, j’oserais dire, ce pour quoi je vis. Ce sont des moments extraordinaires. Et j’ai vraiment besoin de ça, oui, pour continuer (sourire). BD : Alors, on l’a vu un petit peu là : vos spectacles sont des vrais shows, on a envie de dire presque à l’américaine. Vous les travaillez très très longtemps ? MF : C’est un travail de longue haleine. J’ai un entraînement physique. Et puis, c’est un travail de conception. C’est passionnant à faire en tout cas. BD : Et vous avez, aussi pour ça, beaucoup travaillé aux Etats-Unis. C’était important pour vous d’avoir cette influence américaine ? On pouvait pas travailler en France ? C’était une étape obligée ? MF : Non. Quand je suis partie, moi, aux EtatsUnis, c’est plus l’idée du voyage. J’avais envie de faire une coupure entre ma vie à Paris, ma vie


1995–1996 : Anamorphosée Mylène Farmer 212

« Je ne sais pas si Los Angeles m’a changée, je ne le pense pas. » professionnelle. J’ai souhaité voyager. Ne plus penser à moi, ne plus penser à mon métier. Et j’ai également enregistré l’album là-bas. J’ai fait des rencontres. Ça a été important pour moi. BD : Ça a été important parce que vous en êtes revenue changée ? MF : Changée (sourire). Je ne sais pas si c’est Los Angeles qui m’a changée, je ne le pense pas. C’est simplement l’idée du voyage, l’idée de l’oubli de soi, et la réflexion. Et un changement qui s’effectue naturellement. BD : Alors si on vous compare de temps en temps à Madonna (sourire de Mylène), c’est une référence qui vous plait, qui vous énerve ? MF : Enerve, en aucun cas. Je trouve qu’elle a beaucoup, beaucoup de talent. La comparaison est facile, en ce sens que c’est une personne de sexe féminin, qu’elle aime les danseurs, qu’elle aime le show, dans sa tradition, euh…Voilà. BD : C’est aussi une référence à vos chansons, à vos clips, à l’atmosphère qui s’en dégage. MF : (perplexe) Ça, je ne sais pas. Peut-être. J’avoue que je lis peu ce qu’on écrit sur moi (sourire). BD : Enfin, vos plus grands fans disent que c’est aussi Madonna en mieux puisqu’ils voient plus de sensibilité et d’émotion dans ce que vous faites. MF : (sourire) C’est gentil. BD : On a parlé tout à l’heure du film, dans le sujet qu’on vient de voir. Vous avez eu une expérience qui n’a pas été excessivement concluante (Mylène confirme). Vous avez envie de recommencer, de réessayer dans le cinéma ? MF : (bafouillant) C’…Je…Oui…La réponse… J’ai presque hésité (sourire), mais je crois que j’aimerais faire un autre film, oui. BD : Vous avez déjà des projets en cours, des choses que vous voudriez faire ? MF : J’ai eu là encore quelques rencontres. Mais je ne me projette pas dans le futur donc pour l’instant, le moment présent c’est la scène et cette rencontre avec un public. BD : Alors, cette rencontre à Bercy, vous l’envisagez comment là ? Vous allez vous produire deux soirs ? MF : Oui. Ensuite, une tournée – je crois que j’ai vingt-deux dates, vingt-deux concerts. Je vais également à Bruxelles, tous les pays francophones. BD : Et pour vous, bon, c’est une grande étape dans votre carrière. Une tournée comme cellelà, ça se prépare et ça demande d’être en super condition, j’imagine. Mais qu’est-ce que vous

attendez le plus dans ces rencontres que vous avez avec les gens ? MF : Une émotion. Une émotion nouvelle et, moi, pouvoir donner une émotion nouvelle également. BD : S’il fallait un peu vous qualifier, vous préfèreriez qu’on vous qualifie de libertine ou de garçon, ou de garçonne ?

MF : Qu’on ne me qualifie pas (sourire). BD : Merci en tout cas. Merci beaucoup d’être restée avec nous ce soir. MF : Merci à vous. BD : Et puis, donc, on pourra vous voir à Bercy. Merci bonsoir. Le présentateur clôt le J.T. aussitôt après.

Studio Gabriel Date 29.05.1996 Chaîne France 2 Présenté par Michel Drucker

Gaël Leforestier, chroniqueur musique dans l’émission quotidienne de Michel Drucker, propose ce jour-là un petit reportage sur le premier concert du Tour 96 de Mylène Farmer, au Zénith de Toulon – c’était quatre jours plus tôt. On y voit pêle-mêle l’hystérie de dizaines de fans présents devant la salle dès le matin, des techniciens qui s’affairent aux dernières mises en place, l’entrée du public dans le Zénith, le stand merchandising,… Mylène y dit quelques mots, mais on ne la voit pas parler. Gaël Leforestier : (en voix-off sur des images du public courant pour s’installer au premier rang) Quel est votre rapport avec les fans, Mylène ? Mylène Farmer : (en voix-off sur des images de la salle, pleine à craquer) Vous savez, des bouffées comme ça, des bouffées d’amour, ou d’agressivité, c’est toujours quelque chose de très très porteur et très déstabilisant. (sur des images des danseurs, choristes et musiciens, en coulisses) J’avais envie de travailler avec des danseurs américains parce que je savais que je

pouvais trouver un métissage. (on voit alors Mylène sortir de sa loge, habillée pour son entrée en scène) J’attends ces moments de scène, et je l’ai attendu pendant longtemps donc ça a été très très fort. Images du concert : « Alice », « Désenchantée », « Je t’aime mélancolie ». MF : (en voix-off sur des images furtives de l’entretien – Mylène et Gaël sont assis sur des fauteuils, dans la loge de la chanteuse qui porte une chemise et un pantalon écrus) Si vous évoquez la scène, j’ai passé un moment assez incroyable, assez extraordinaire.


20h Paris première

« J’aime être aimée. »

Date 30.05.96 Chaîne Paris Première Présenté par Paul Amar

Comme son nom l’indique, cette émission prend place à 20h, sur Paris Première, chaîne du câble et du satellite désormais sur la TNT. Paul Amar, transfuge de France 2, y reçoit une personnalité différente chaque soir de la semaine, pour un long entretien en tête à tête. Ce soir-là, c’est Mylène Farmer qui est à l’honneur. Le plateau de cette émission, Porte Maillot à Paris, a pour particularité d’être en vitrine ; les gens qui passent dans la rue peuvent donc tout voir. C’est sans doute pour cela que l’interview de Mylène a été enregistrée si tard – vers minuit ! – mais cela n’a pas empêché une poignée de fans de s’y rendre… Cet entretien reste majeur dans le parcours télé de la chanteuse, malgré le propos parfois confus du journaliste. Mylène est magnifique, proche de ses fans (auxquels elle accordera une séance

d’autographes après l’émission), et elle parle longuement. C’est rare, donc précieux. Pendant le générique du début, la chanteuse est filmée dans la rue, seule, en contre plongée. Coiffée d’un chignon aussi volumineux qu’élégant, elle porte une toute petite robe bleue et des platform shoes blanches. Souriante, mais visiblement mal à l’aise, elle marche dans la nuit parisienne, tantôt les bras dans le dos, tantôt les bras croisés, mais toujours le regard fuyant, et ce jusqu’au studio de l’émission. Paul Amar : (en voix-off sur ces images) Mylène Farmer apparaît très rarement sur les plateaux télé ; elle ne les aime pas. Mais notre bulle de verre ressemble si peu à un plateau télé. (Mylène entre dans les locaux de Paris Première) Elle trouve la télévision de plus en plus anecdotique et inintéressante ; nous veillerons, elle et moi, à rendre l’entretien le plus dense possible. Elle n’aime pas le soleil ; extérieur nuit, ce sera notre décor d’un soir. (Mylène arrive dans le studio et s’assied, seule, sur le banc de l’interview, contre la vitrine derrière laquelle se sont agglutinés plusieurs fans, à quelques centimètres de leur idole qui leur tourne désormais

le dos) Elle cultive volontiers le mystère, je le savais et je l’ai vérifié en découvrant le titre de son dernier album « Anamorphosée » ; j’ai pris, je l’avoue, le dico pour être bien sûr du sens – « Anamorphose : image déformée par un miroir courbe ». Pourquoi Mylène Farmer se veut-elle à ce point déformée ? Pourquoi met-elle un miroir courbe entre elle et nous ? Je ne sais pas. Vous non plus, je suppose. Alors, suivez-moi, je vais me glisser derrière le miroir pour tenter de surprendre la vraie Mylène Farmer. Mais, s’il vous plait, ne lui dites surtout pas, elle pourrait m’en vouloir. (Paul Amar entre dans le champ de la caméra et s’installe à côté de Mylène) Bonsoir Mylène Farmer… Mylène Farmer : (souriante mais à peine audible) Bonsoir. PA : …Merci d’être avec nous dans cette bulle de Paris Première. (regardant les fans de l’autre côté du verre) Vous savez que… (petit rire Mylène) Oui, on le voit… C’est… Y’a eu Bruel et vous. Voilà. Le soir, tard, du monde, comme ça, autour de la bulle… Ils nous entendent. MF : (tournée vers les fans) Bonsoir (rire). PA : La présence de ce public qui est venu vous voir, donc de vos fans, dans cette émission qui commence, elle… Ils vous rassurent, ils vous inhibent, ils vous… ? MF : (en regardant le fans) Me rassurent (sourire). PA : Ils vous rassurent ?


1995–1996 : Anamorphosée Mylène Farmer 214

MF : Oui (large sourire). PA : Parce qu’ils vous aiment ? MF : Je le suppose puisqu’ils sont là (sourire en les regardant). PA : Vous aimez être aimée ? MF : J’aime être aimée, oui (sourire). PA : (aux téléspectateurs) Alors, il est tard, le soir, vous le voyez de toute façon à la lumière, parce que cette émission sera diffusée jeudi 30 pour la première fois, à 20h. (à Mylène) C’est-àdire vingt-quatre heures avant Bercy. Et, comme vous êtes en tournée, entre plusieurs villes de province et Paris, on a choisi tard le soir pour enregistrer cette émission. Vous auriez préféré être en direct et en pleine lumière, à 20h, ou cette lumière nuit vous convient davantage ? MF : Je crois que je préfère la nuit (sourire). PA : Pourquoi ? MF : C’est plus rassurant pour moi (sourire). PA : Pourquoi (sourire) ? MF : Ça fait partie des paradoxes : je peux être dans la lumière et j’aime l’ombre également. PA : Et vous préfèreriez l’ombre ou la lumière si vous deviez choisir – lumière jour, ombre nuit ? MF : J’aurais les deux réponses : l’ombre et la lumière (large sourire). PA : L’ombre et la lumière… MF : Difficile de faire un choix entre les deux. PA : A vingt-quatre heures de Bercy, vous vous sentez comment ? Ça va ? MF : Ça va bien. Le trac quand même, mais relativement sereine. PA : Et le trac adouci par le fait que vous aimez la scène ? Je veux dire : rencontrer le public sur scène dans… MF : (le coupant) J’aime profondément ça. Je le fais rarement, mais j’aime ça. PA : Alors, vous allez chanter évidemment toutes vos chansons qu’on connaît, mais no-

tamment les plus récentes, et celles de cet album que j’ai reçu, Mylène Farmer, que j’ai écouté très attentivement. Et je l’ai dit, en vous accueillant, j’ai repris le titre… Je fais un aveu : je ne connaissais pas ce terme, « Anamorphosée »… MF : (le coupant) C’est un terme cinématographique, mais j’avoue que, moi, je lui ai trouvé un sens plus poétique (sourire). Et j’ai mis « ée » à la fin. C’était plus pour évoquer le…l’idée d’un spectre qui s’est élargi – donc ma vision du monde, mes sensations qui se sont élargies – et l’idée de ce rassemblement, non pas de la compression, mais d’un rassemblement pour ne faire plus qu’une image pure. PA : Ce que vous dites, c’est pas ce que j’ai ressenti parce que quand j’ai vu la traduction de ce texte, je me suis dit, quoi, ça veut dire déformation ; c’est un peu comme au Musée Grévin : on se présente devant un miroir courbe et, tout d’un coup, c’est pas nos traits. Alors moi je me suis dit… MF : (le coupant) J’ai pris le risque. PA : Vous avez pris le risque (sourire) ? MF : Je savais que je pouvais… Oui. PA : Mais, justement, enfin, quand j’ai vu ce mot et quand j’ai cherché le sens, j’ai aussitôt regardé vos photos, celles que vous présentez de vous, et aucun trait de vous n’est déformé, on va les regarder ensemble ; (il feuillette le livret du CD « Anamorphosée » en gros plan) vous apparaissez telle que vous êtes habituellement. Alors qu’est-ce qui est déformé ? Parce que, d’une façon visible, rien n’est déformé… MF : (le coupant) Mais, à nouveau, j’écarte, moi, le sens de la déformation justement. Euh… En aucun cas déformation, non. Peutêtre transformation, mais ce n’est pas non plus « métamorphosée » (petit rire). Peu importe d’ailleurs. Je préfère le sens poétique de ce mot (sourire).

PA : Transformation, si elle devait exister, de quelle nature ? MF : Je crois que j’ai un grand changement qui s’est opéré en moi. J’ai voyagé d’abord. PA : Oui. MF : Je me suis échappée de la France pendant près d’un an. J’ai essayé d’oublier mon métier, de m’oublier moi-même d’une certaine façon, et essayé de découvrir des choses différentes, des choses qu’on peut qualifier d’un peu plus normales, la vie de tous les jours en somme. PA : Vous savez que le contraire – vous qui connaissez très bien le sens des mots, et je vous écoute, et vous avez écrit vos textes – le contraire de « normal » c’est ? MF : Anormal (sourires). J’aime l’anormalité (large sourire). PA : Ce qui m’a un peu effrayé, je vous le cache pas, vous qui dites là, à l’instant, que vous vouliez retrouver un petit peu la normalité, (en lui montrant la pochette de « Anamorphosée ») c’est quoi ? C’est la décapitation ? Y’a pas votre tête ! MF : Je sais. Mais, là encore, j’ai pris le risque parce que je savais que ça pouvait évoquer ça. Moi, je l’ai plus pensé en ce sens : l’esprit qui s’échappe, l’esprit qui va vers le haut, l’esprit qui voyage. Donc c’est ce que moi, j’ai voulu évoquer. PA : L’esprit a voyagé. Et le corps a voyagé vers l’Amérique, c’est ça, quand vous avez quitté la France ? MF : L’Amérique. J’ai choisi l’Amérique. Pourquoi ? Je ne le sais pas bien dans le fond. C’est peut-être plus facile pour moi que d’aller vers Los Angeles puisque j’y avais déjà rencontré quelques personnes. Maintenant, c’était plus l’idée des étendues vastes, d’une forme de liberté, une certaine solitude parce que Los Angeles est une ville pour solitaires – la rencontre est très difficile malgré tout…


« Cet album a été écrit à Los Angeles, dans une maison louée, qui avait un petit studio à l’étage inférieur. » PA : (la coupant) Elle peut être violente parfois ? MF : Elle peut être violente, troublante, mais j’avoue que j’ai passé, moi, un très très bon séjour. PA : Et c’est là-bas que vous avez écrit « California » ou c’est ici ? MF : C’est là-bas. PA : Ah c’est là-bas ! MF : Donc, moi, j’ai demandé à la personne qui travaille avec moi, compositeur et producteur, Laurent Boutonnat, de m’y retrouver, et cela au bout, je crois, de cinq mois, et j’ai eu cette envie que d’enregistrer l’album à Los Angeles. PA : Là on regarde, je dis bien on regarde, on écoute évidemment « California », mais on regarde « California », là-bas. Diffusion du clip de « California » (jusqu’au pont musical). PA : Le regard est très triste à la fin. C’est la perception que vous avez de Los Angeles, de l’Amérique telle que vous la montrez là ? MF : Non, parce que, là, elle est un petit peu caricaturale, je dirais. On s’est quand même polarisé, ou concentré, sur la prostitution ; Los Angeles n’est pas uniquement la prostitution. D’ailleurs, il a été difficile de… Sur Sunset, y’a souvent justement – le quartier cloisonné – toutes les prostituées et là j’avoue qu’elles avaient disparu car elles avaient des problèmes avec cet acteur, enfin tout ce qui s’est passé autour de cette anecdote. PA : Hugh Grant, oui. Pourquoi ce choix justement ? Pourquoi ce thème ? MF : Je ne suis pas sûre d’avoir la réponse (sourire) si tant est que j’ai toujours envie de jouer, d’interpréter une prostituée. Et j’avoue que sur « California », c’est spontanément venu. Et donc, j’ai fait appel à Abel Ferrara qui, lui, évoque beaucoup la prostitution dans ses longs métrages. PA : Quand vous dites dans la chanson : « Ma vie s’anamorphose » – c’est difficile à dire d’ailleurs (Mylène le dit) – alors ça veut dire quoi dans ce… ? MF : Dans cette chanson là ? PA : Dans cette chanson, oui. MF : Là encore, j’ai toujours une difficulté quant à l’explication de textes. Parfois, il suffit de prendre des mots et, ma foi, une sonorité peut évoquer certaines choses. Moi, « Ma vie qui s’anamorphose », si je peux essayer de trouver un sens à ce mot, c’est plus dans l’idée de ce rétroviseur, et là on en revient plus à l’aspect

cinématographique, donc de cette concentration du format cinémascope, etc. Mais j’ai l’impression qu’on ennuie les gens avec ça (rire). PA : Y’a un contraste impressionnant – moi, je vous découvre, je connaissais vos chansons, mais je vous découvre – entre cette façon dont vous vous exprimez, qu’on retrouve d’ailleurs dans vos textes, et cette image que vous montrez – (il se retourne et regarde les fans derrière la vitre) avec ce public toujours patient (Mylène lève les yeux vers eux, un large sourire aux lèvres), apparemment, ils ne se lassent pas de ce que vous dites, de ce que vous montrez de vous. Cette image très, on va dire les choses, qui est même perturbante pour un homme qui vous interviewe, troublante en tout cas, que vous montrez, très provocatrice, et puis les mots que vous employez, ce que vous dites à l’instant. Vous en êtes consciente, j’imagine quand même ? C’est délibéré ? MF : Délibéré, préméditation, non, je n’en suis pas sûre. C’est juste l’idée et l’envie que d’interpréter des rôles différents. C’est autant de facettes qui fait (sic !) partie d’une personnalité. J’essaie, moi, de les exploiter, de ne pas tricher et de ne m’interdire rien. PA : Rien ! (Mylène confirme d’un hochement négatif de la tête) Mais ça veut dire que dans ce clip, vous êtes dans la fiction ? Vous ne mêlez pas ce que vous ressentez, ou dans le texte d’ailleurs que vous écrivez, ce que vous ressentez, parce que j’ai cru comprendre que, et là j’oublie le clip qu’on vient de voir évidemment, j’ai cru comprendre qu’il y avait une frontière très mince entre ce que vous exprimez et la façon dont vous vivez les choses finalement. MF : Il y a une frontière très très mince dans le fond. C’est vrai que quand moi j’écris les textes, dans le fond je ne pense qu’à moi, qu’à ce que je ressens, ce que j’ai envie d’exprimer. Parfois, ce sont des idées ou violentes ou dérangeantes ou… Mais, là encore, c’est faire abstraction absolument de l’autocensure. Et c’est une liberté pour l’écriture. PA : Vous êtes, de ce point de vue, complètement désinhibée ? MF : Non ! Parce que ce serait là l’absolue liberté. Je ne le suis pas, mais je… Dans le fond, ce métier m’aide à justement extérioriser tout ce que je n’oserais pas probablement dans la vie de tous les jours. Donc c’est une chance que de pouvoir avoir ça. PA : Ça va ? C’est la première fois que vous participez à une émission aussi longue – une heure ?

MF : Aussi longue, oui (rire). PA : C’est la première fois ? MF : Oui, je crois, oui. (Mylène a visiblement la mémoire courte) PA : Et ça va ? MF : Ça va bien, oui (large sourire). PA : Je ne sais pas qui doit avoir le plus peur de l’autre. MF : (rire) Je ne sais pas. PA : (aux téléspectateurs) On retrouve Mylène Farmer dans quelques instants, après la pub. Coupure pub. Retour plateau. Paul Amar et Mylène Farmer ont bougé : ils sont désormais face à face sur des petits siègent entourant une table basse ; une télé reprend l’image de leur tête à tête en second plan. Ils se sont éloignés de la vitrine ; on ne voit plus le public. PA : Et on retrouve notre invitée, Mylène Farmer. Je ne sais pas si les téléspectateurs ont vu – y’avaient tous ces albums que j’ai présentés…enfin j’ai présenté le plus récent évidemment, de vous – mais vous êtes arrivée avec un gros livre que vous gardez (rire de Mylène). On a changé de lieu, vous êtes arrivée avec ce gros livre, vous le gardez avec vous. Qu’est-ce que c’est ? MF : C’est-à-dire que quand vous avez, que nous avons préparé l’émission… PA : (la coupant) Attendez, on va le montrer. N’hésitez pas. Je sais bien qu’il est lourd. MF : (elle s’avance pour poser le livre sur la petite table devant elle) Je sais qu’on va évoquer la littérature. (…mais le reprend aussitôt, en regarde la tranche, avant même qu’un cadreur, qu’on voit s’approcher, ait pu le filmer) Et ce livre fait partie de…Est-ce que c’est un livre de chevet ? J’en sais rien, mais en tout cas, c’est un livre que je trouve magnifique et c’est un cadeau. Donc j’avais envie de l’emmener tout simplement (elle le pose cette fois sur la table). PA : L’auteur ? MF : (penchée en avant, elle le feuillette sur la table) Et c’est Allan Edgar Poe (sic !), traduit par Baudelaire. Et c’est un livre très ancien du XIXe siècle et qui a beaucoup d’illustrations… (elle peine à en montrer une) Si je les trouve. (ça y’est !) Ce sont des anciens dessins. PA : Et bien je vais le découvrir… Décidément vous me faites découvrir beaucoup de choses. (le journaliste feuillette le livre à son tour) Alors, « Le scarabée d’or ». Je sais que vous aimez les animaux. « Le chat noir ». Décidément ! C’est


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complètement au hasard, et rien n’est préparé. Tout est improvisé. (il s’arrête sur une illustration…qu’on ne voit pas, hélas) C’est un peu lugubre non ? Mais c’est de la littérature. MF : (toujours penchée en avant sur son livre, elle ne l’a pas lâché et scrute – inquiète ? – son feuilletage par l’animateur) Oui, c’est Edgar Poe (sourire). PA : C’est Edgar Poe ! Vous aimez lire, hein ? MF : (refermant le livre tandis que, comme le journaliste, elle se redresse dans son siège) J’aime lire. Je ne lis pas suffisamment, mais j’aime ça. PA : Déjà enfant, adolescente, vous lisiez beaucoup ? MF : Pas du tout. Au contraire. Je crois que j’ai eu une rébellion absolue quant à l’école et ce qu’on vous imposait comme lecture. Donc je crois que j’ai refusé ça totalement. Jusqu’au jour où, autodidacte, j’ai décidé que j’allais, moi, vers une famille littéraire, et puis après, on fait son chemin tout seul. Et c’était plus agréable comme ça pour moi. PA : Quand vous écrivez vos textes, vos chansons, vous écrivez comment ? Où ? La nuit, le jour ? Chaudement habillée, dévêtue ? Seule, pas seule ? MF : La seule réponse que je puis formuler : seule. Maintenant, quant à la tenue vestimentaire, je crois qu’elle m’importe. Euh…J’essaie de me souvenir… Non, ce peut être la journée, la nuit, peu importe. PA : Le lieu, peu importe ? MF : Le lieu, non, peu importe. PA : Peu importe ? (Mylène confirme) Ça peut être chez vous… C’est à Paris, c’est à la campagne, c’est au bord de la mer, peu importe ? MF : Ça dépend. Pour cet album, par exemple, c’était à Los Angeles, dans une maison qui était louée, qui avait un petit studio à l’étage inférieur. Et c’était… (elle réfléchit, puis sourit) Non, pas dans ma chambre. Dans une autre chambre. PA : Ah, les douze chansons de cet album, vous les avez écrites là-bas ? MF : Oui. PA : En ville même ? Dans la ville ? MF : Oui. J’avoue que je crois ne pas avoir besoin d’un lieu justement précis. J’arrive à m’isoler, et reformer cette bulle dont on a besoin pour écrire, dans n’importe quel lieu. PA : On a vu la ville, en tout cas telle que vous, vous l’observez, vous la ressentez, dans « California ». On va voir une autre sorte de ville – fin de monde, fin de siècle – « L’instant X ». Diffusion du clip de « L’instant X » (jusqu’au pont musical). PA : Alors tout est blanc, mais c’est pas un blanc immaculé. Là vous annoncez des choses

terrifiantes, non ? MF : (rire) Non, j’ai voulu retracer la vie, non pas la vie, mais une journée, que l’on peut avoir, où tout va mal. Tout va mal. C’est une concentration d’évènements, dès qu’on se lève, et tout va mal, à nouveau. Et on attend CE moment : souvent il se passe ça dans une journée ou dans un mois, où à la fois toutes les choses viennent se concentrer, se former un peu comme un puzzle, et c’est le moment où tout rejaillit, et cette fois vers le haut, et non pas vers le bas (rire). PA : Ce jour-là, vous alliez bien ou mal ? C’était un jeu de votre part ou vous étiez dans une humeur plutôt maussade ? MF : Très sincèrement, je ne m’en souviens pas, mais… Je ne sais pas. PA : Et cette fin de siècle que vous nous annoncez, vous en pensez quoi, vous ? Vous y croyez au messie, parce que vous parlez du messie ? L’instant X, c’est quand le messie arrivera ? MF : Pas précisément. Je crois… Je crois… Je crois à quoi ? Une forme de spiritualité, je crois qui est indispensable pour tout le monde. Maintenant, être une religion particulière, non, j’avoue que j’ai du mal à le nommer. PA : Spiritualité, vous la voyez quoi, dans le regard de l’Homme, ou là-haut, une force invisible, supérieure ? MF : Parfois, j’aime l’idée de la force invisible, et je préfère trouver une force et une générosité ici, et de personne à personne, c’est plus important. PA : C’est quoi le Styx ? MF : Le Styx, c’est ce lac qui est dans l’enfer (sourire). PA : Ah ! Et vous dites ça avec un sourire désarmant ! (rire de Mylène) Vous le connaissez ce lac ? MF : Je l’ai évoqué souvent en tout cas. J’aime beaucoup ce mot. J’aime bien jouer avec les mots. PA : Et vous l’imaginez comment ce lac ? MF : Très noir. PA : Et l’enfer ? MF : (silence) Une idée de l’Homme, dans le fond. PA : Noir aussi ? MF : Oui. Trop lourd. Trop lourd, cette idée. PA (circonspect) : (silence) C’est simplement un jeu auquel vous vous livrez ou, au fond de vous, vous avez cette vision assez pessimiste ou de l’homme, ou de l’humanité. Est-ce qu’on se rapproche, quand je vous entends parler et vous entends penser à voix haute, plutôt de la littérature, ou est-ce que vraiment, au fond de vous-même, vous exprimez ce que…ce que vous pensez ? MF : Je crois avoir… Je ne sais pas si vous faites allusion à pourquoi un public a pu me suivre

tout au long de ces années quand, moi-même, j’ai évoqué des thèmes un peu plus difficiles, un peu plus désenchantés, parce que moi-même je l’étais profondément oui. Maintenant, il s’opère dans la vie, à nouveau, des changements, qu’on le veuille ou non, et il y a des personnes qui ne changent pas. Moi, j’ai eu cette chance que de rencontrer… C’est toujours, là encore, difficile ou la justification ou d’essayer de trouver des mots. Vous dire que j’ai trouvé la lumière serait un petit peu fort (sourire), mais j’ai une rencontre, en tout cas, d’avec un livre qui a été important dans ma vie… PA : (simultanément) Lequel ? MF : …qui est « Le livre tibétain de la vie et de la mort » qui parle de l’idée de l’impermanence, qui… (silence) Vivre le moment présent. Et ça, ça a été quelque chose d’extrêmement fort pour moi. Cette idée que de ne pas appréhender la mort. Enfin, autant de choses… Là je vous donne tout en vrac, c’est un peu confus (sourire). PA : Non, non, non, non, je vous suis parfaitement. Vous étiez… MF : (le coupant) Tout ça pour essayer d’évoquer ce changement. PA : Oui parce que vous étiez hantée par l’idée de la mort, par cette notion de mort… MF : (le coupant) J’étais profondément hantée, c’est-à-dire qu’il n’y avait pas un jour sans que je pense à cette mort. PA : La mort de l’autre ou… ? MF : Ou la mort de l’autre ou ma propre mort, le vieillissement, enfin toutes ces choses qui font que vous vivez mal, dans le fond. Et c’est, dans le fond aussi, le refus de vivre (silence et sourire). PA : Tout au long de l’émission, j’ai le sentiment, parce que là vraiment je vous découvre et j’ai vraiment l’impression qu’il se passe quelque chose de nouveau, puisque vous l’affirmez, et alors il y aurait un décalage, c’est rigolo, si j’ose dire, mais ça doit l’être, entre les sujets qu’on a prévus (sourire)… MF : C’est vrai ? PA : Et ben oui, qui sont le reflet de tout ce que vous avez offert, jusqu’à présent, à votre public, et les nouveaux mots que vous prononcez, c’est-à-dire les sentiments que vous exprimez. Alors, ça fait rien, allons jusqu’au bout. Après tout, vous choisissez difficilement entre l’ombre et la lumière. On va continuer avec ce décalage. MF : Bien sûr, oui. PA : Alors, on va voir un extrait de film, « Giorgino » où là vous aviez un rôle difficile… MF : Oui. PA : …Très difficile. On regarde. Extrait, en version originale, de « Giorgino » – la scène où Catherine (Mylène) est sur le lac gelé,


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sauvée de justesse par Giorgio (Jeff Dahlgren). C’est la dernière fois que nous sera donnée l’opportunité de voir des images du film à la télé. PA : Dans ce film de Laurent Boutonnat, vous jouez le rôle – c’est Catherine, c’est ça ? (Mylène confirme) – d’une jeune fille qui a du mal à sortir de sa propre enfance, à la limite de l’autisme. Est-ce que vous rejoueriez ce rôle aujourd’hui ? MF : Oui ! PA : Il vous a plu ? MF : Oui, beaucoup. Beaucoup. PA : Ce film, alors c’est… (en pointant du regard et du bras les fans devant lui) Voilà, le public est encore là… Vos chansons et vos albums, énormes succès, avec Céline Dion, enfin vous vendez par centaines de milliers. Et ce film n’a pas rencontré le succès auprès du public. A votre avis, pourquoi ? MF : Le fameux instant X n’est pas venu (rires). PA : C’est quoi, c’est comme une alchimie qu’on attend, qui se produit ou pas ? MF : Je crois. Je ne suis pas sûre que ça remette en question ni la qualité du film, ni d’un album, ni d’un artiste. Là, j’essaie de faire abstraction de moi, de ma présence dans le film, mais tout simplement, je continuerai de défendre ce film, je continuerai d’aimer ce film. Maintenant, je crois qu’il n’a pas trouvé la rencontre, qu’il n’a pas eu cette rencontre d’avec le public. Est-ce que c’était un mauvais moment pour le film ? Est-ce que c’était trop noir pour le public ? Je crois qu’on n’aura de toute façon jamais la réponse donc… Ma foi, accepter, entre guillemets, cet échec. Mais pour moi, ce n’en est pas un. Donc je le vis bien dans le fond. PA : On voit que vous aimez l’image, on le voit dans vos clips qui sont de petits scénarii, parfois courts, parfois brefs, parfois plus longs – dix à douze minutes. Vous aimez l’image

au point de faire un long métrage. Vous allez continuer ? MF : Là encore, je n’ai pas la réponse. Je crois que j’aimerais, oui, faire un autre long métrage. J’aime jouer. J’aime interpréter des rôles. PA : On va sortir de cet univers un peu glauque, un peu difficile pour entrer dans un autre, beaucoup plus éclairé, là – on passe de l’ombre à la lumière – dans un univers que vous aimez qui est celui du cheval, et vous allez découvrir un homme que vous connaissez, et que Laure Fortin a rencontré. Sujet sur Mario Luraschi, grand spécialiste des cascades avec chevaux. Il a participé à différents clips de Mylène – « Libertine », « Pourvu qu’elle soient douces »,… Il en parle bien sûr ici... Mario Luraschi : (…) Pour Mylène Farmer, j’ai eu le grand plaisir de faire son clip. Effectivement, c’était exactement dans les mêmes conditions qu’un vrai film. (sur des images de « Pourvu qu’elles soient douces ») D’ailleurs, on a tourné plus de huit jours. Elle était venue s’entraîner un tout petit peu. Pas beaucoup parce qu’elle a pas besoin de s’entraîner ; elle monte quand même très bien. Et on s’est, en plus, super bien marrés. On a réglé toutes les cascades – aussi bien les grandes galopades, où elle retrouve le bel officier, que la partie grande bagarre où on s’est le plus marrés d’ailleurs. (…) PA : Vous n’étiez pas doublée, là, dans le film ? MF : Non. PA : C’est vous qui montez ? MF : Oui, oui. PA : Vous aimez le cheval. MF : J’adore ça, oui. Je crois que j’en ai un petit peu peur aujourd’hui, bizarrement. PA : Pardon ? MF : Je dis que je crois que j’en ai un petit peu

peur, peur de monter à cheval. PA : Maintenant ? MF : Oui. PA : Pourquoi ? MF : Parce que je le fais de moins en moins. Donc l’acrobatie…peut-être avec l’âge (rire). Mais, en tout cas, la rencontre d’avec Mario a été vraiment, je ne sais pas si c’est importante, mais extrêmement agréable. Et c’est quelqu’un d’abord de très doux, très sensuel sur un cheval, et très très talentueux. Très généreux aussi. PA : Vous aimez les animaux ? MF : J’adore les animaux. PA : On m’a dit que vous aviez un singe. Chez vous ? MF : Oui. PA : Il s’appelle comment ? MF : E .T.. C’est un capucin. PA : C’est-à-dire, un capucin ? C’est quelle… ? MF : C’est un singe d’Amérique du Sud. PA : Et il vit avec vous ? (Mylène confirme) Et la communication, ça se passe comment entre vous ? MF : Très très bien (sourire). PA : C’est-à-dire ? MF : Nous pouvons converser, jouer. Des moments de tendresse. Autant de choses qui… PA : (la coupant) Il peut y avoir une vraie communication entre l’humain et l’animal ? MF : Bien sûr ! Bien sûr. Et précisément le singe. PA : Qui se passe de mots… MF : Je crois qu’elle aime bien les mots. Elle aime les intonations, mais ça, comme tous les animaux. Mais c’est quelqu’un de très très intuitif. PA : (aux téléspectateurs) Mylène Farmer reste avec nous jusqu’à la fin de l’heure, jusqu’à 21h. Pub. Coupure pub. Retour plateau. Paul Amar et Mylène Farmer


ont à nouveau changé de place. Ils sont désormais assis sur de hautes chaises de bar autour d’une étagère/table ; Mylène a un verre de jus d’orange devant elle ; elle n’y touchera pas. On voit à nouveau le public derrière la vitrine. PA : (aux téléspectateurs) Mylène Farmer est toujours avec nous, à quelques heures à peine, elle nous fait la gentillesse de venir dans cette bulle, à quelques heures à peine de Bercy. (à Mylène)Vous vous préparez comment ? Vous allez dormir ? Vous allez vous reposer ou pas? MF : J’ai peu le temps de me reposer, mais je fais beaucoup de sport. J’essaie de continuer avant les concerts. Donc c’est de l’entraînement, avec Hervé Lewis qui est un très très bon entraîneur et un ami également. C’est de la musculation et beaucoup d’endurance, donc de la course. Et en fait, je suis tout tout près de chez vous quand je viens faire du sport (sourire). PA : Au gymnase à côté-là ? MF : Je ne sais pas (rire). PA : Bon, on ne va pas… Ah ben c’est vrai qu’il y a le public qui écoute ! (rire de Mylène) Ils pourraient encore vous suivre jusque là. MF : Non, je plaisante. PA : Quand vous allez entrer dans la salle, et que vous allez voir cette foule immense, qu’estce qui se passe dans votre tête ou dans votre cœur ? Est-ce qu’il bat plus fort ? MF : Il bat plus fort. Le trac, en général, c’est avant, avant d’entrer en scène. C’est quand on commence à trop penser, trop réfléchir. Et une fois que, ou que l’on monte sur scène, ou en dessous de scène, ou dessus de scène (sourire) – tout dépend de l’apparition – là, j’avoue que s’opère un total changement ; on est totalement dans le spectacle. Et, enfin, l’analyse et la réflexion se dissipent. PA : C’est ça. Et là, vous vous donnez à la foule, quoi (Mylène confirme). Vous donnez votre talent. Un aperçu de ce concert – vous étiez il y a quelques jours à Toulon pour chanter (Mylène confirme). On regarde, on écoute, avant d’en parler. Extraits de « Alice », « Je t’aime mélancolie », « California » et « Désenchantée » lors du concert de Toulon, première date du Tour 96. PA : Avant de parler spectacle, et c’est l’objet de toute notre émission, je voudrais une petite parenthèse qui sera brève. Le fait d’aller chanter à Toulon ne vous a pas posé de problème, vous avez réfléchi, vous avez hésité ? MF : Non. Non. Je sais quels sont les problèmes

à Toulon (la ville vient de passer aux mains du Front National et de nombreux artistes y annulent leur passage). Maintenant, ma vie est celle du spectacle. Donc pourquoi refuser que d’aller dans cette ville ? Tous les gens n’ont pas choisi, une fois de plus, ce qu’il s’est passé et ce qu’il s’y passe. (silence) Non, je n’ai pas… J’y ai pensé, bien évidemment. Maintenant, j’ai décidé d’y aller. Et le Zénith de Toulon est une très très belle salle. Et le public était magnifique. PA : Et des gens de la municipalité ne vous ont pas agressée, vous ont laissé faire ? Y’a pas eu de problème de ce point de vue ? MF : Pas du tout. Aucun problème. Aucun. PA : Allez, on ferme parce qu’on ne va pas parler de ça longtemps ; ce n’est pas une émission politique, et puis on ne va pas la polluer. Je vais revenir au spectacle. Vous avez des tenues extravagantes (rire de Mylène), comme ce soir aussi… MF : C’est Paco Rabane qui a fait les habits. Et là, j’avoue que c’était encore un très très bon moment, en tout cas toute l’élaboration justement des costumes, les idées… Là encore, j’ai de la chance. PA : J’imagine qu’on vous a déjà posé la question, mais bon, inévitablement, on y pense en vous regardant sur scène : Madonna. On vous a déjà posé la question ? MF : Mais pourquoi « inévitablement » ? (large sourire) Est-ce que c’est un défaut journalistique ou est-ce que c’est une vraie envie que de me comparer à Madonna ? Je vais vous retourner la question (rire). PA : C’est bien, j’aime bien ça (sourire). C’est une vraie perception ; cette façon que vous avez de bouger sur scène, d’être désinhibée, vous l’avez dit tout à l’heure, de mêler à la fois la danse, le chant, la chanson, mais aussi vos textes, comme une provocation comme ça lancée à l’Homme. Donc, inévitablement, la comparaison se fait. MF : Alors la comparaison ne me dérange pas (sourire). Et, une fois de plus, je trouve qu’elle a beaucoup de talent donc, dans le fond, peu m’importe (sourire). PA : Peu vous importe. MF : Peu m’importe. PA : Vous la prenez pour flatteuse, pour dégradante, pour… MF : (le coupant) Comme je l’ai dit : flatteuse, flatteuse. C’est quelqu’un de grand talent. Qu’on épouse ou non ses revendications, ses excès, c’est malgré tout quelqu’un de grand talent, et elle l’a assez prouvé parce qu’elle dure,

perdure, donc…donc ce ne peut être, dans le fond, qu’un compliment, en tout cas sur, j’oserais dire, la longétivité (sic !) en tout cas. PA : J’imagine qu’un journaliste américain pourrait dire un jour à Madonna : « Tiens, vous me faites penser à Mylène Farmer » (rires). MF : Je ne sais pas (rires). PA : Le public est toujours là. (se retournant pour regarder les fans derrière la vitre) Et il nous écoute toujours. Moi, je n’en reviens pas. Vous savez quelle heure il est ? Je le dis aux téléspectateurs : chez vous, il est, quoi, 20h20 pour la diffusion, là, ici, pendant l’enregistrement, il est plus de 0h20. Ils sont venus au tout début, et ils sont encore là ! Ils sont même organisés (rire de Mylène) Ça existe. Vous avez un club de fans (rire de Mylène) qui existe et que Lionel Boisseau a retrouvé. Il a rencontré deux de ses adhérents qui parlent de vous, et de quelle manière ! Il s’agit en fait d’un sujet sur Olivier et Wilfried, les deux fans qui s’occupent alors du Mylène Farmer Fanzine, créé en 1992. Comme le dit le reportage, ce fanzine s’apprête à devenir le Mylène Farmer Magazine (quelques mois plus tard, en septembre 1996). Intégralement consacré à la star, il continuera d’exister jusqu’en 2004. PA : Il est là, Wilfried. Il est là (gros plan sur le jeune fan en question, derrière la vitre, qui fait un petit coucou à Mylène). Il est venu. Vous le connaissez ? Vous l’avez déjà rencontré ce garçon ? MF : (sourire) Probablement. Je ne sais pas. PA : (Mylène regarde fixement le fan avec un grand sourire) A votre avis… (silence) Je ne sais pas, on peut continuer l’interview, oui ? Puisqu’ils écoutent… (petit rire de Mylène qui regarde à nouveau le fan) Y’a comme un lien entre vous et eux. J’ai presque envie de m’effacer si je pouvais… MF : (rire, visiblement embarrassée) Je vous en prie. PA : Pourquoi vous aiment-ils ? MF : (regardant le fan) Je ne sais pas. (regardant le journaliste) Je crois qu’il ne faut pas me poser cette question. Je n’en ai pas la réponse. Je crois que… Je ne le sais pas (large sourire en regardant à nouveau le fan). PA : Le fait que des photos de vous soient comme ça épinglées sur les murs, sur leurs murs, qu’ils s’endorment avec, qu’ils se réveillent avec, ça génère quels sentiments chez vous, quelles sensations ? (silence de Mylène) D’être

« Je crois que la justification fait du mal, et me fait du mal à moi-même. Trouver les mots justes, c’est difficile. »


1995–1996 : Anamorphosée

présente comme ça dans une telle intimité finalement, de garçons ou de filles ? MF : Oui. (silence) J’ai presque envie de dire c’est ce pour quoi je fais ce métier, sans penser à effectivement le poster contre le mur, mais en tout cas cette idée que d’être aimée, et que d’être choyée. Donc je ne vais pas me révolter contre le fait (elle sourit à nouveau au fan) que quelqu’un veuille épingler ce fameux poster contre le mur. PA : Ah non, ce n’était pas un reproche ! MF : Non, non, non ! (sourire) Vous voyez, je suis sur la défensive parce que c’est un sujet qui est extrêmement, dans le fond, délicat pour moi. Pourquoi m’aime-t-on ? Je ne sais pas. Mais, je l’accepte en tout cas. PA : Est-ce qu’ils aiment ce mystère que vous avez entretenu, que vous entretenez ? MF : C’est ce qu’ils disaient en tout cas. Je… Là encore, c’est… Le mystère, c’est aussi une absence de justifications, que je continuerai probablement de faire, même si là (sourire), j’ai décidé de parler un peu plus longuement. Parce que, une fois de plus, je crois que la justification fait du mal, et me fait du mal à moi-même. Trouver les mots justes, c’est très difficile. PA : Non. Non, non. Vous l’avez fait tout au long de l’émission. Ils aiment peut-être aussi, en tout cas pour certains d’entre eux, garçons ou filles, cette ambiguïté que vous avez cultivée jusqu’à présent… MF : (simultanément) Probablement. PA : … « Sans contrefaçon ». Diffusion du clip de « Sans contrefaçon » (amputé du début et de la fin).

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Mylène Farmer

PA : (le clip est coupé au moment où Mylène et Zouc jouent ensemble, assise face à face) Cette scène est très touchante parce qu’on a parlé une première fois de Zouc quand Denisot était là, parce qu’on avait présenté une interview

qu’il avait faite d’elle, il y avait un long silence d’ailleurs, assez étrange entre les deux (Mylène confirme), et on avait demandé des nouvelles qu’on n’avait pas eues. Là, on revoit Zouc avec vous. Vous avez des nouvelles ? MF : Non. J’avoue que non. PA : Elle a disparu comme ça. (On a appris depuis que, hospitalisée pour un cancer, elle a rencontré des complications qui l’empêchent désormais de remonter sur scène.) MF : Oui. C’est quelqu’un de grand grand talent (sourire). PA : Oui, oui, et c’est curieux parce qu’un assez grand talent pour survivre aux difficultés de votre métier, parfois, mais bon… Y’a comme un retrait. MF : Elle avait en tout cas, elle a toujours probablement, une grande grande fêlure en elle et… Mais c’est une femme très très troublante en tout cas. Sur le tournage, je me souviens des… Troublante (sourire). PA : Quand vous dites « fêlure », c’est curieux parce que c’est un mot auquel j’ai pensé en préparant cette interview, de vous et pour vous. C’est un mot que vous employez volontiers vous-même quand vous évoquez vos propres sentiments ou votre propre vie ? MF : Je crois que j’ai une fêlure en moi, très certainement. C’est peut-être ce qui, dans le fond, me relie à ces personnes que vous évoquiez, qu’on appelle les fans (elle les regarde en souriant), et qui ont ça en eux également. Ce peut être un mal de vivre, ce peut être une…des choses qu’on ne comprend pas bien, ou des manques profonds (sourire, silence). PA : Mal de vivre ? MF : Le mal de vivre, oui, c’est quelque chose que j’ai évoqué. Est-ce que je l’évoquerai à nouveau ? Probablement pour l’autre, plus que pour moi. Moi, je crois avoir eu des réponses dans ma vie. Ça a été parcouru de difficultés, de joies également, et je crois que je fais défi-

nitivement partie de ces privilégiés. Je vais… Quand je pense à « privilégiés », je pense souvent à des enfants, par exemple des enfants dans les hôpitaux que je vais voir de temps en temps… PA : (simultanément) Oui, je sais. MF : … Et à chaque fois que j’ai envie de me plaindre, par exemple, je pense immédiatement à ces enfants, par exemple, et je me dis : « Bon sang, la vie est courte. Eux ont une vraie, vraie souffrance. Elle n’est peut-être pas métaphysique, mais c’est une souffrance qui est profonde et qui est pour, peut-être, leur vie entière ». Et, dans le fond, je ne m’autorise pas à être plus triste que ça, ou plus désarmée que ça. Ce qui n’empêche pas la fêlure, mais qui vous donne envie de vous battre un peu plus vivement en tout cas. PA : J’ai re-regardé certains de vos albums. Je vous avoue que j’ai cherché désespérément – je vais les montrer quand même – un sourire. (Il montre la pochette de « Cendres de lune » à la caméra) Alors, celui-ci, il n’y est pas. (« Anamorphosée ») Le récent, il n’y est pas. « Ainsi soit je… », qui a beaucoup marché, il n’y est pas. « L’autre… », il n’y est pas. Je pensais que vous n’alliez pas sourire pendant cette émission, et vous n’avez cessé de sourire, souvent en tout cas (sourire de Mylène). Alors, est-ce que ça veut dire que… (il regarde à nouveau la pochette de « L’autre… ») Cet oiseau noir, comme ça, terrible, « L’autre… ». Est-ce que le prochain album, ce sera une Mylène Farmer très souriante ? MF : Je ne sais pas. Je ne peux même pas envisager le prochain album. Donc vous n’aurez pas la réponse (sourire). Quant au sourire, c’est dans le fond assez spontané ; vous êtes quelqu’un de charmant, donc j’ai envie de sourire (large sourire). PA : Et vous souriez aussi aux téléspectateurs… MF : (simultanément) Ça m’arrive aussi (rire). PA : …Peut-être à travers moi.


MF : Peut-être. PA : Cette évolution dont vous parlez comme ça est… MF : (le coupant) Probablement. Le sourire l’accompagne, en tout cas, oui. PA : « XXL ». C’est aussi dans le récent album. Diffusion du clip de « XXL » (très amputé). Retour plateau avec un gros plan sur un t-shirt porté par une fan derrière la vitre. PA : Ah ! Y’a même le t-shirt (rire) ! Ça, c’est plutôt début de siècle ? Ce tournage… Vous avez fait comment avec cette locomotive ? MF : C’était un tournage qui a été effectué à Los Angeles, à Fillmore, qui est une concentration d’orangeraies, et il y a beaucoup de trains, des trains anciens. (regardant l’écran où est passé le clip) C’est un vrai train, de 1906 je crois. Et j’étais câblée devant la locomotive et elle roulait vraiment (sourire). PA : Ah, c’est pas un trucage électronique ?! On vous a collée à cette locomotive ? (Mylène confirme). Vous n’aviez pas peur ? MF : Non. Non. A la fin, oui ; le dernier plan, qui est le plan large, où je me suis retrouvée réellement toute seule en face de cette locomotive, avec des loumas qui étaient très très éloignées… PA : (la coupant) Loumas, des caméras qui survolent. MF : Et là, le train prenait vraiment de la vitesse, et tout d’un coup, on se pose quelques questions (sourire). PA : Ah, mais pour le coup justement, on oublie les angoisses métaphysiques, existentielles, mal de vivre… MF : (simultanément) Certes (rire). PA : … On est dans l’action, finalement comme sur scène. MF : Oui, on est dans le moment présent. PA : J’ai oublié de vous demander tout à l’heure, parce que j’ai observé que vous êtes née au Canada, vous avez quitté le Canada à l’âge de neuf ans (Mylène confirme) : vous êtes Canadienne venue en France à l’âge de neuf ans, ou vous êtes Française née au Canada ? MF : J’ai les deux nationalités. Donc, selon l’humeur, je suis Canadienne ou Française (sourire). PA : Vous êtes née à Montréal ? MF : Oui. PA : On a reçu avant-hier, oui c’est ça avanthier, Charlebois, mais vous n’avez pas le même accent. MF : Non. Je l’ai perdu très très vite. PA : Ah vous l’aviez ?! MF : Un petit peu, je pense, oui. PA : Et vous avez cette nostalgie des immensités ? On retrouve souvent ces immensités, ou même la neige, le blanc dans vos clips. Vous l’avez ?

MF : Nostalgie, je ne sais pas. Mais, en tout cas, j’ai un amour profond pour ce blanc immaculé, la neige, le froid. Et j’ai appris à aimer le soleil (sourire). PA : Ah ! Ça aussi c’est nouveau ! Ça aussi c’est nouveau, parce que dans tout ce que j’ai lu de vous, sur vous… MF : (le coupant) Oui. J’ai toujours évoqué le froid, c’est vrai, mais… PA : On est à quelques jours de l’été, c’est parfait (Mylène confirme). Et à quelques heures de Bercy. Donc vous allez chanter vendredi soir à Bercy, puis un peu partout en France, et puis en Europe, notamment à Bruxelles, Toulouse, Marseille, Lyon, Genève, donc forte longue tournée… et Alexandre Pachoutinsky, chef d’édition, me dit dans l’oreille : « C’est fini ». L’émission est terminée. MF : C’est fini (large sourire). PA : Oui. Ça va ? MF : Très bien… PA : (simultanément) Ça s’est bien passé ?

MF : … Merci à vous en tout cas. PA : Donc la première fois que vous participez à une émission d’une heure ? MF : Oui. La dernière (le journaliste, très surpris, reste sans voix). Mais c’était un bon moment. PA : Merci beaucoup, Mylène Farmer, et bon Bercy. MF : Merci beaucoup. La musique du générique commence, mais le micro de l’animateur reste allumé assez longtemps pour qu’on l’entende indiquer à la chanteuse qu’ils doivent restés assis. Ce que la star fait sans sourciller. Mieux : elle discute en off avec le journaliste. Elle semble même particulièrement bavarde, ce qui est suffisamment rare pour être signalé. Des images de l’entretien sont rediffusées dès le lendemain, dans le best of de la semaine, l’occasion de voir des images de Mylène quittant le studio qui n’avaient pas été diffusées à l’origine.

12/13 Date 31.05.1996 Chaîne France 3 Présenté par L. Bobillier et G. Mattera

C’est le grand jour : Mylène est ce soir à Bercy ! Les J.T. s’en font évidemment l’écho, à commencer par celui de France 3, à la mi-journée.

Georges Mattera : Mylène Farmer retrouve la scène. Il y a sept ans que la chanteuse ne s’était pas produite en public. Ce soir et demain, elle sera à Bercy, avant d’entamer une tournée en province. La métamorphose physique de l’interprète de « Libertine » n’aura échappé à personne, mais honni soit qui mal y pense, le style Farmer n’a pas changé. Thierry Stampfler et Loïc Le Moigne l’ont rencontrée à Toulon. Le sujet commence par des images du concert de Toulon : Mylène sur son araignée pour « Alice ».

Thierry Stampfler : (en voix-off sur des images du concert de Toulon – « Alice », puis « California ») Un show ambitieux et qui se veut spectaculaire. Voici donc la réponse de Mylène Farmer et de son entourage au défi majeur posé à la chanteuse depuis le début de sa carrière : (sur un extrait du making of du clip de « California ») comment passer des vidéoclips soignés, et parfois sulfureux qui ont fait sa renommée aux dures réalités de la scène ? Une stratégie de rupture qu’elle a choisie aussi avec les médias, dont elle sait attiser la curiosité, tout en s’y soustrayant le plus possible. Rarement mystère n’a été entretenu avec autant de soin dans le petit monde du show-business. (sur des images des fans devant le Zénith de Toulon) Le contraste n’en est que plus frappant avec l’attitude de ses fans de toujours arborant avec tendresse les peluches qu’ils s’apprêtaient à lui offrir quelques heures plus tard, sur scène. Sincères et fidèles, ils font pourtant preuve d’un humour détaché et plutôt inhabituel pour des fans. Micro-trottoir devant le Zénith de Toulon. Fan 1 : Très heureux que Mylène, enfin, daigne remonter sur scène. Fan 2 : La renarde ouvre sa tanière (rires). Fan 3 : J’ai la chair de poule (rires). TS : (sur des images du public dans la salle) À Toulon, pour être au premier rang, ils se sont installés devant la salle dès 6h du matin. (sur un extrait de « Désenchantée » sur la scène de


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Mylène Farmer

Toulon) Une passion que Mylène Farmer accueille avec des sentiments parfois mitigés. Mylène Farmer (assise sur une chaise en bois au dossier immense, devant une peinture mise en avant, elle porte un t-shirt blanc et brillant) : L’idée de quelqu’un qui va attendre toute une nuit, une journée pour croiser votre regard est quelque chose d’assez perturbant. Et j’accepte ça parce que ça fait partie de ce métier. TS : (en voix-off sur un extrait du making-of du clip de « California ») Contrairement à son spectacle précédent qui était très sombre, la chanteuse a choisi d’évoluer cette fois en pleine lumière, soutenue par des effets visuels parfois spectaculaires. (sur un extrait de « Je t’aime mélancolie » sur la scène de Toulon) Reste cependant la froideur inhérente à ce type de spectacle. Mylène Farmer parviendra-t-elle à répondre à l’attente de dizaines de milliers de fans électrisés par ce retour très attendu ? Réponse dès ce soir à Bercy, puis dans une dizaine de grandes villes françaises.

Date 31.05.96 Chaîne TF1 Présenté par Claire Chazal

A l’évidence, le J.T. le plus regardé d’Europe ne pouvait pas passer à côté de la rentrée parisienne de la plus grande chanteuse française (et vice-versa). Claire Chazal : Enfin, le retour sur scène de Mylène Farmer. La chanteuse rousse, aux titres parfois sulfureux, a entamé une tournée dans toute la France. Point de départ : Bercy, à Paris. Elle y est ce soir et demain. Jean Chubilleau et Bénédicte Delfaut l’ont rencontrée au Zénith de Toulon. Le sujet commence par un extrait de « Désenchantée » sur la scène de Toulon. Jean Chubilleau : (en voix-off sur ces images) Avec un nouveau spectacle, plus simple et plus lumineux qu’à l’accoutumée, Mylène Farmer séduit une nouvelle fois son public. Elle qui avait disparu après le terrible échec de « Giorgino », son premier film, il y a deux ans. Mylène Farmer (en gros plan, laissant deviner le t-shirt blanc brillant, déjà vu au « 12/13 » de France 3, ce même jour) : Ça m’a troublée, peut-être plus que blessée. Euh… J’ai toujours, moi, envisagé, dans ma vie, l’échec. Je sais que ça pouvait survenir dans le disque ; ça a été le

film. Donc c’est toujours décevant. (sur des images de Mylène et Laurent ensemble dans la rue, à l’époque du Tour 89) Mais plus pour le metteur en scène en fait, qui y a mis toute son âme, et qui n’a pas eu la réponse qu’il attendait ; c’est difficile. JC : (en voix-off sur un extrait de « California » sur la scène de Toulon) Le metteur en scène, Laurent Boutonnat, c’est lui aujourd’hui qui signe la réalisation de ce nouveau spectacle. Avec moins de mystère et plus de sérénité, Mylène Farmer interprète, accompagnée de choristes, d’anciennes et de nouvelles chansons, avec toujours, toujours le même érotisme. MF (filmée cette fois en plan large, assise, jambes et bras croisés, on peut voir le reste de sa tenue : un pantalon large blanc et des platform shoes noires) : Ça correspond à un geste, un regard, une odeur, autant de choses qui évoquent l’érotisme. JC : (en voix-off) Et sur scène ? MF : Sur scène, c’est aussi bien une lumière, et c’est un regard entre un public et un artiste. JC : (en voix-off sur un extrait de « Je t’aime mélancolie » au Zénith de Toulon) Douze ans se sont écoulés depuis «  Maman a tort », la première chanson de Mylène Farmer. Pour son public, autant d’années d’une authentique fidélité.


J.T. fois sensuel et musclé, Mylène Farmer nous propose l’essentiel de son album « Anamorphosée », mais aussi des nouvelles versions de « Libertine », « Sans contrefaçon » et « Désenchantée ». Sur scène, la chanteuse aux cinq millions d’albums vendus décoche de grands sourires au public, et paraît plus détendue qu’auparavant. Visiblement, son exil Californien lui a fait du bien. MF : L’idée, oui, du voyage, de l’oubli de soimême pendant quelque instants, et découvrir des choses de la vie – j’avais un peu oublié. Et puis, ma foi, on change, parfois naturellement, parfois avec des rencontres. Et puis de retrouver le sourire, c’est plutôt agréable. JCG : (en voix-off sur des images de « Désenchantée » sur scène) Près de sept ans depuis son unique tournée, et cinq ans après son précédent album, le petit écureuil timide n’a pas été oublié ; sa rentrée parisienne à Bercy s’est jouée à bureaux fermés. Et la Belgique ne fera pas exception.

Date 06.06.1996 Chaîne RTL TVI (Belgique)

Le jour où Mylène se donne en spectacle à Bruxelles, la chaîne belge RTL TVI propose un sujet enregistré quelques jours plus tôt, lors du passage à Bercy de la chanteuse. Le présentateur du J.T., en plateau, lance le sujet en annonçant un entretien exclusif. Le sujet commence par des images de « Je t’aime mélancolie » en concert, filmées à Paris le 31 mai. Jean-Claude Gerlache : (en voix-off) Plus qu’un concert, il s’agit avant tout d’un spectacle visuel : images psychédéliques sur écran géant, chorégraphies à la Madonna et light show vertigineux. Chaque chanson est prétexte à une mise en scène différente, et un changement de costume de la rousse diaphane. Mylène Farmer (en gros plan, très maquillée, interviewée peu de temps avant l’entrée en scène, à Bercy): C’est comme ça que moi j’envisage les shows. Maintenant, je suis capable d’apprécier un show beaucoup plus, entre guillemets,

simple, plus modeste dans sa structure. Mais, quant à moi, c’est ce que j’aime. JCG : (en voix-off sur des images de « Alice » sur scène) Durant deux heures d’un show à la

De plus larges extraits de cet entretien avec Mylène seront diffusés sur la chaîne en décembre, lors du second passage du Tour 96 en Belgique.

Le Mag Date 08.06.1996 Chaîne MCM Présenté par Christian David

Le 1er juin, Mylène Farmer reçoit une petite équipe de MCM pour un assez longue entretien dans sa loge de Bercy, avant son second concert parisien. Elle porte pour l’occasion une longue et ample jupe couleur ficelle et un top à bretelles bleu clair. On regrettera que le journaliste qu’elle a en face d’elle n’ait pas de micro-cravate car son propos, déjà assez confus, est du coup péniblement compréhensible. On regrettera aussi qu’il porte cet affreux pantalon de cuir, mais ça c’est autre chose…

Christian David : (aux téléspectateurs) Bonjour. Bienvenue dans « Le Mag ». Aujourd’hui, je ne suis pas sur le plateau habituel, je suis dans les loges de Bercy pour un mag spécial avec Mylène Farmer. (à Mylène) Bonjour. Mylène Farmer : Bonjour. CD : Merci d’être là. C’est parti « Le Mag ». Tout de suite : générique. Générique CD : Ben, bonjour. Je suis vraiment content de vous rencontrer parce qu’on se connaît pas, on s’est jamais vus. Alors, je voudrais déjà qu’on parle un petit peu de la conception de l’album – très très court parce que je voudrais qu’on parle surtout du show. Je voudrais savoir : le son, où vous avez été chercher ce son particulier qui a dans cet album qui est très…très moderne ?

MF : Probablement Los Angeles, le fait de travailler avec des musiciens de là-bas. Quant à des désirs en tout cas de guitares, ça, ça vient plus de la maison (sourire). Voilà. CD : Donc y’a quand même une certaine évolution musicale entre le dernier album et celui-ci. Et je voudrais savoir comment c’est apparu, comment ce désir est venu d’avoir quelque chose de plus radicalement dur, musicalement. MF : Euh… L’envie d’avoir des guitares, essentiellement. Moi, pour être restée assez longtemps aux Etats-Unis, je crois que ça influence. (silence) Et puis, peut-être une évolution naturelle dans le fond. CD : Une envie peut-être, oui, de choses plus dures. Je trouve que l’album a une tendance un peu, un peu rock quand même, on peut le dire. MF : Là j’en reviens encore, je crois que


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l’apport des guitares – (dans un petit rire) je vais me répéter – je crois que c’est important pour le son, oui. CD : L’envie de moins de machines ? Parce qu’il y a quand même eu beaucoup de travail sur les machines sur les albums précédents… MF : C’est vrai que je l’ai beaucoup fait. Et c’est vrai que j’avais envie de choses un peu plus ‘live’, comme on dit. CD : Plus humaines ? C’est plus humain un son de guitare joué par quelqu’un quand même… MF : Il se passe autre chose, c’est vrai. Mais j’aime bien les deux.

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Mylène Farmer

Extrait de « Alice » sur scène. CD : Je voudrais qu’on passe à la section show. Parce que moi je m’interroge – je n’ai pas vu le show encore, je vais le voir ce soir. Je voudrais savoir comment on arrive à reproduire le son merveilleux que vous avez sur cet album qui a un son studio énorme. Est-ce qu’il est semblable…Est-ce que vous avez réussi à trouver ce son sur scène ? MF : Oui. Il y a des musiciens qui sont vraiment formidables. Je suppose qu’on dit ça à chaque fois qu’on fait une tournée ou un album, mais là, j’avoue que j’ai une chance énorme. Ils sont pour la plupart, si ce n’est la totalité en fait, américains… CD : (la coupant) Oui, il y a juste un clavier français. MF : Oui, absolument, qui est Yvan Cassar, qui est le chef d’orchestre… CD : (la coupant à nouveau) Qui est une base, qui est la sécurité. MF : (dans un large sourire) Oui, oui, oui. Et euh…Que puis-je dire d’autre ? Les musiciens français sont très bons musiciens ; on n’est pas

en train de faire des séparations… CD : (la coupant toujours) Mais enfin c’est juste que vous avez passé beaucoup de temps à Los Angeles, c’est peut-être normal de ramener sous le bras ces musiciens américains. MF : Voilà. C’étai plus simple, oui. J’ai également des danseurs qui sont de New York. Donc c’était plus simple aussi pour les répétitions. Enfin, à tous points de vue, c’était plus simple que de prendre des musiciens de là-bas. Mais en tout cas, ils jouent merveilleusement bien, et c’est vraiment un support énorme pour moi. CD : Y’a sept ans que vous avez pas fait de scène, c’est quand même beaucoup (Mylène confirme). Alors, est-ce qu’il y a une difficulté à remonter sur scène ou, finalement, c’est vraiment tellement l’envie elle est là que ça se fait tellement comme ça ? MF : (souriant) Vous avez la réponse. C’est plus ça. C’est la vraie…un vrai, vrai désir. Et spontanéité, je crois. CD : Alors j’imagine qu’il y a eu beaucoup d’émotion. Hier, j’ai des amis qui vous ont vue et qui m’ont dit que, bon il y a un show très technique, très beau, très bien fait, mais il y a quand même beaucoup d’émotion. Et ça, je trouve que ça colle aussi à votre personnage. C’est important de l’avoir même sur scène. MF : Ça, c’est quelque chose que j’espère ne jamais perdre, en tout cas cette émotion…que me procure le public, dans le fond. Et moi, j’essaie de donner autre chose que justement des choses très établies, très structurées. CD : Est-ce qu’après sept ans d’absence, est-ce que c’est pas un peu difficile…Quel public on va retrouver ? Est-ce qu’on va retrouver son public ? Est-ce qu’on a réussi à reconquérir d’autres gens ? Est-ce qu’on se pose ces ques-

tions-là quand on arrive à un ou deux jour, voire le jour même, sur scène ? MF : Dans la mesure où plusieurs personnes, avant même, vous posent cette question : « Mais quel est votre public aujourd’hui ? ». J’avoue que j’y ai pensé moi-même, que je l’ai un petit peu entraperçu sur l’album – des visages nouveaux (sourire). Et ma foi, là, j’ai un public, je crois, plus d’hommes aujourd’hui que je ne l’avais avant (large sourire). CD : C’est une bonne nouvelle (rire). MF : C’est une bonne nouvelle (sourire). Mais en tout cas, un public vraiment chaleureux. J’ai une chance énorme pour ça, vraiment ! Extrait du making of du clip de « California ». CD : L’image est parfois violente. Je vois dans les clips : vous mourrez, vous faites mourir quelqu’un d’autre que vous, souvent (petit rire de Mylène). Et j’ai entendu dire que vous avez lu un livre qui vous a un petit peu travaillé, un petit peu bouleversé. Donc, est-ce que ça a à voir avec le fait que vous vivez intensément et de ce que vous avez envie de faire passer par l’image, ce que les gens peuvent recevoir ? MF : J’aime les choses fortes. J’aime les choses qui sortent de la normalité. J’aime les sentiments forts donc c’est… Maintenant, quant à répondre à votre question, « est-ce que j’aime ou tuer ou être tuée ? », ça, ça fait partie de… CD : (la coupant) Sans psychanalyse (rire de Mylène), sans psychanalyse. MF : Je joue moins peut-être aujourd’hui les victimes, par exemple. Je m’en suis rendue compte dans les clips de cet album. Faisant référence au dernier clip, avec Abel Ferrara, quand on a parlé donc du sujet du clip, je voulais, moi, interpréter une prostituée, et il m’a


« La réponse que j’ai trouvée, c’est vivre le moment présent, et essayer de comprendre que c’est important. » demandé : « Mais quel type de prostituée ? ». Je lui ai dit : « Pas une victime. Je ne veux pas être une victime dans ce clip » (large sourire). CD : Vous êtes quand même une victime dans ce clip puisqu’elle meurt cette prostituée. MF : Oui, mais c’est au-delà de ça. C’est… J’ai l’impression, moi, de porter autre chose en tout cas. Quand j’ai rencontré – parce qu’il y a des prostituées dans la vidéo… CD : (la coupant) Ah, ce ne sont pas des comédiennes ? MF : Non, pour la plupart, ce sont de réelles prostituées. Et, j’ai eu ce sentiment qu’elles n’étaient elles-mêmes pas des victimes, qu’elles avaient réellement choisi leur métier. Où est la vraie vérité, la réalité ? Je n’en sais rien. Mais…une sensation de liberté, en tout cas, dans leur métier. Extrait du making of du clip de « California ». CD : Alors sur scène, je voudrais qu’on vienne à la scène, j’imagine qu’il doit y avoir une scénographie, une chorégraphie (Mylène confirme), des décors,… Est-ce que c’est vous qui choisissez…est-ce que c’est une totale liberté sur ce travail-là ? MF : Bien sûr ! Heureusement ! Oui, oui, totale liberté, total contrôle, et surtout total plaisir – c’est bien plus intéressant que le contrôle luimême. Et là encore, chaque département, c’est vraiment important, aussi bien l’image, cette idée de l’écran, et puis toutes les surprises qui se passent pendant ce spectacle. Chorégraphiquement, j’ai fait appel… J’ai moi-même quelques chansons qui sont chorégraphiées,

donc, par moi. Et j’ai fait appel à deux autres chorégraphes : un qui est français, et qui est sur scène également, qui est un des danseurs, et puis un autre qui vient des Etats-Unis qui a illustré, donc, une chanson. CD : Est-ce que c’est pas difficile, pour vous, de… Je voudrais qu’on parle un petit peu maintenant du contact avec les journalistes, la presse, les médias. C’est très rare que vous accordiez des interviews. Et là, d’un seul coup, vous avez, j’ai l’impression que vous avez envie de parler aux gens. D’où c’est venu ? Est-ce que justement cette liberté de travail, cette envie de revenir, sept ans d’absence font que, d’un seul coup, on a envie de raconter aux gens ce qu’on a fait, ce qu’on est en train de faire, et ce qu’on a envie de faire ? MF : Je crois, en tout cas pour ce spectacle, là ça s’est fait relativement spontanément. J’avais envie de parler de ce spectacle, c’est vrai. J’avais envie de…oui, de faire partager ça avec les personnes qui m’aiment bien. CD : Alors, est-ce que ce spectacle a plus d’importance, au niveau, je veux dire, personnel, de ce que vous avez pu donner dedans, par rapport à ce que vous avez fait auparavant pour avoir, peut-être, envie d’en parler plus. C’est peut-être quelque chose qui vous correspond davantage, à l’heure actuelle, c’est-à-dire au moment où vous en êtes là, dans la carrière ? MF : En tout cas, au jour d’aujourd’hui, oui. Oui, je puis dire que je suis en parfaite osmose d’avec ce spectacle. CD : Vous êtes heureuse donc ? Parce que c’est vrai, on a toujours tendance à dire : « Oui, Mylène Farmer est quelqu’un d’un peu… ». Parce

qu’on ne vous entend pas beaucoup, on ne vous voit pas beaucoup, donc évidemment il y a questionnement tout le temps sur la vie des gens quand ils parlent pas trop. Vous êtes quelqu’un de plutôt positif, optimiste ? MF : Optimiste, je ne pense pas. Positif, oui, j’essaie de l’être. Et ça, c’est ma quête d’aujourd’hui – essayer de, oui, de rendre les choses un peu plus faciles, un peu plus vivantes, et de ne m’intéresser qu’au moment présent. Et, dans le fond, c’est ça, il me semble, la vraie force que moi j’ai pu trouver, et que n’importe qui peut trouver. C’est essayer de ne plus être envahie par les…ni par un passé qui peut être ou encombrant ou douloureux, et essayer de ne pas trop se projeter dans le futur qui est toujours une source d’interrogations ou de grands vertiges, donc c’est… Voilà, c’est, moi, la réponse que j’ai trouvée, c’est vivre le moment présent, et essayer de comprendre que c’est important. Long extrait de « Je t’aime mélancolie » sur scène. CD : Je voudrais qu’on parle un peu des clips parce que, ça, c’est important. Y’a aussi une image vidéo très très importante – c’est même des films, c’est pas vraiment des vidéos très classiques – depuis « Libertine » jusqu’à « California ». Je trouve qu’il y a vraiment un gros travail de fait. Est-ce que ça, c’est important pour vous l’image, de travailler l’image ? Est-ce que c’est aussi un côté artistique que vous exploitez chez vous ? MF : Oui, j’ai eu la chance, moi, de… CD : (la coupant) Comédienne, un peu


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quand même ? MF : D’abord l’idée de jouer, oui, est quelque chose que j’aime. J’aime l’image. J’aime le cinéma profondément. J’ai eu la chance de… J’ai commencé ce métier il y a près de douze ans, je crois, le clip commençait d’être quelque chose d’important pour la chanson. (silence) Que puis-je dire ? J’ai eu la chance de travailler avec Laurent Boutonnat, donc d’avoir quelqu’un de grand talent, et à la fois d’idée et de conception. Et c’est quelque chose que j’aime toujours faire. CD : Maintenant, c’est devenu tellement habituel. C’est comme un support normal… MF : (elle le coupe) C’est vrai. CD : …On sort une chanson, on fait un clip. Et, des fois, c’est tellement vide… Et je trouve que ceux-là ont toujours eu un gros travail, pas forcément en rapport avec la chanson, mais qu’il y a toujours un plaisir, je pense, d’artistes – comédiens et réalisateurs – dans ce que vous faites au niveau images ? MF : Ça, ça fait partie, je crois, de, là encore on va parler de désirs, c’est-à-dire de ne pas se dire : « Tiens encore une chanson, encore un clip ». Mais, à chaque fois, de ré-envisager la chose, et de se dire que c’est toujours aussi important. Et ça l’est réellement pour moi.

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Mylène Farmer

Diffusion du clip intégral de « Sans logique ». CD : Alors moi, je voudrais reprendre ce que vous disiez tout à l’heure par rapport au présent, et l’angoisse du futur : c’est vrai que tant qu’on a du plaisir, le présent est important. Et là c’est un présent qui va durer puisque la tournée est assez longue. Il est question que vous reveniez… MF : (elle le coupe) A Bercy. CD : …à Paris à la fin du mois de juin. Et peut-

être même à la rentrée (Mylène confirme très discrètement). Donc est-ce que c’est pas un peu, en même temps, inquiétant d’avoir cette longue haleine de route à avoir devant soi comme ça ? MF : Je crois que la tournée est relativement courte. J’ai, je crois, vingt-deux dates. Souvent, les artistes font des tournées de quatre/cinq mois. Donc, moi je l’ai voulue relativement courte pour essayer de ménager la…là encore, j’en reviens à la spontanéité et l’idée du vrai plaisir, et non pas de la répétition et de… CD : (la coupant) Vous ne voulez pas rentrer dans une habitude, un cercle où finalement on ne s’en sort plus et on finit par faire le show comme si on allait faire n’importe quoi d’autre ? MF : Oui. Oui. J’ai toujours un peu peur de ça. Donc c’est pour ça que je prends beaucoup de temps avant de remonter sur scène, ou même de faire un album. C’est plus riche comme ça pour moi. CD : Est-ce qu’il est question d’un album live ? Il n’y a rien qui existe de vous en live (Mylène ne rectifie pas l’erreur). Moi je trouve que vous avez tellement d’intensité, d’être dans cette tournée, que ce serait peut-être le moment d’en faire un (sic !) ? MF : Il y en aura un, oui. CD : Ah, ben ça c’est une bonne idée (re-sic !). MF : D’ailleurs le spectacle, ce soir, est filmé. Et l’album sera fait justement aujourd’hui. CD : Vous prenez beaucoup de temps pour préparer un album, beaucoup de temps pour préparer un spectacle, mais qu’est-ce que vous faites sinon quand vous êtes pas Mylène Farmer sur scène et en studio (petit rire de Mylène) ? Qu’est-ce que vous aimez bien faire dans la vie ? MF : J’aime bien voyager. J’aime bien lire. J’aime

bien… (silence) On va s’en tenir à ces deux choses (rires). CD : D’accord. On n’ira pas plus loin (rires). Qu’est-ce que vous pensez des gens qui parlent… Est-ce que vous lisez beaucoup les critiques ? Est-ce que vous portez de l’attention à ça ou pas du tout ? MF : Pas du tout serait un mensonge. Mais le moins possible en tout cas. CD : Est-ce que vous avez appris à vous blinder ? Est-ce qu’il y a une fragilité qui s’est un peu échappée au fil des temps ? Ou est-ce que vous avez toujours gardé un petit côté…où des fois où finalement ça pique, ça fait un peu mal, quoi, et qu’on a envie de tout casser et d’aller taper sur la tête des gens qui écrivent des choses horribles ? MF : Blindé, je crois qu’on ne l’est jamais et tant mieux. Maintenant, relativiser, ça fait toujours partie de cette même chose, c’est-à-dire prendre des distances, ça oui, sérieusement. CD : C’est important ? MF : C’est important oui. CD : Ben merci beaucoup de nous avoir accueillis dans votre loge. MF : Merci à vous. Merci. CD : Donc on rappelle qu’il y a une tournée qui dure jusqu’à peu près ? (silence de Mylène) Rô ! MF : Je ne sais pas (rires). CD : (après avoir entendu une réponse de Thierry Suc, manager de la chanteuse, depuis derrière les caméras) Jusqu’à fin juin. Et bien on va vous voir sur scène, d’accord ? MF : D’accord. CD : Merci d’avoir été là. MF : Merci beaucoup. CD : Au revoir Mylène, merci beaucoup. MF : Au revoir. CD : « Le Mag », c’est fini, on se retrouve demain avec autre chose (sic !).


Déjà Dimanche Date 09.06.1996 Chaîne France 2 Présenté par Jean-Luc Delarue et Nadège Dubospertus

Le journal people dominical de France 2, produit et présenté par Jean-Luc Delarue, est l’occasion d’une nouvelle interview de Mylène Farmer dans les coulisses de son Tour 96 (entretien enregistré le 1er juin). L’occasion d’un vrai petit reportage en backstage – le seul jamais réalisé par une équipe de télé dans les coulisses d’un concert de Mylène. Petit regret tout de même : on aurait souhaité que les membres du staff et de la troupe soient plus bavards, plutôt que de laisser la parole, une fois de plus, aux fans… et à un certain Johnny (sic !).

Nadège Dubospertus : Depuis la sortie de son dernier album, on sait que Mylène Farmer est « anamorphosée » – c’est le titre de cet album. Depuis cette semaine, son double concert complet au Palais Omnisports de Paris-Bercy, on sait qu’elle est aussi métamorphosée. Jean-Luc Delarue : Oui, ce sont ses fans qui le disent après l’avoir vue sur scène dans un concert avec un gros son, pyrotechnie, effets spéciaux, bref, très Hollywood. Normal, c’est là que vit désormais Mylène Farmer à plein temps. Christophe Jannin a été visité l’envers de ce Bercy très attendu. Il a notamment croisé une autre bête de scène, un homme polygame, à la fois marié avec sa guitare, sa moto et sa femme, Laetitia. Le sujet commence par des images du clip de « XXL ».

Christophe Jannin : (en voix-off sur ces images) Après une longue absence, Mylène Farmer nous est réapparue en blanc l’année dernière, au travers de l’album « Anamorphosée », avec voile blanc, (sur un extrait du clip de « L’instant X ») mousse blanche, mais toujours avec le petit côté sulfureux (sur un extrait du clip de « California ») présent dans le clip tourné par Abel Ferrara. Sa dernière prestation sur scène datait de 1989. (sur des images du public prenant place dans la salle du POPB) C’est à Bercy qu’elle a effectué son retour parisien. Et autant vous dire que les fans ont répondu à l’appel. Il est 19h, les portes viennent de s’ouvrir, c’est la course aux meilleures places, dans une ambiance de franche camaraderie (image d’un videur pas très avenant). Vous trouvez qu’elle a beaucoup changé Mylène ? Fan 1 : Je trouve qu’elle est un peu moins renfermée ; elle a l’air d’être un peu plus… Fan 2 : Plus souriante. Fan 3 : Moins sombre. Fan 4 : Mais, au fond d’elle-même, elle a encore le mal de vivre quelque part, je pense. CJ : (sur l’image de Mylène assise dans sa loge, sur le même canapé et dans la même tenue que pour l’interview de MCM diffusée la veille) Chanter devant un public aussi énorme, ça doit être impressionnant, non ? Mylène Farmer : Oui, mais je crois que je fais pas vraiment la différence entre une salle énorme et une salle plus modeste, en ce sens que je pense au même spectacle et que, dans le fond, 14.000, 17.000 ou 4.000, c’est une concentration de personnes qui n’en font presque plus qu’une. CJ : (sur des images du public s’installant à Bercy) Certains étaient prêts à tout pour être au premier rang. Vous attendiez depuis quelle heure pour entrer ? Une fan (assise dans la fosse) : 6h. CJ : Du matin ? La fan : Oui. Hier aussi. CJ : Ah, vous étiez là hier aussi ? La fan : Ça s’entend pas ? (la jeune fille n’a plus de voix) CJ : (sur l’image de deux fans examinant le pass du journaliste) D’autres sont de vrais collectionneurs acharnés. A votre avis, il vaut combien mon backstage ? Le fan : Ça, c’est très très rare. Mais les collectionneurs peuvent le toucher à 200/300 francs (30/45 euros). Mais ça dépend des boutiques qui vend (sic !). Mais, globalement, c’est 200/300 francs. Pour un simple petit bout de papier comme ça.

CJ : Mon p’tit bout de papier ! (sur des images des musiciens en coulisses) En coulisses, du côté des musiciens, pratiquement tous américains, tout va bien. Abraham Laboriel Jr (le batteur) : Ça va être grand, ça va être chaud. Le plus grand spectacle jamais vu en France. Susie Davis (claviers, percussions) : Je suis en super forme. CJ : (sur des images des danseurs en coulisses) Chez les danseurs, ça a l’air d’aller aussi. Petit assouplissement avant le show, ça fait du bien. (sur des images des couloirs dans lesquels on croise Jeff Dahlrgen, l’ex héros de « Giorgino » devenu guitariste de Mylène Farmer) Il est 21h, la pression monte. Yvan Cassar (claviers, direction musicale) : C’est dans cinq minutes. CJ : (toujours dans les couloirs) Mais qui c’est làbas au fond du couloir ? Oh, mais c’est Johnny ! Alors comme ça, vous connaissez Mylène ? Johnny Hallyday : Non, je la connais pas du tout, non. CJ : Mais qu’est-ce que vous faites là alors ? JH : Je suis venu la voir parce que ce qu’elle fait, c’est bien. Et c’est la première fois que je la vois sur scène…enfin que je vais la voir sur scène puisqu’elle est pas passée encore (sic !). Et je suis très content d’être là. CJ : Apparemment, le show est très spectaculaire. JH : Oui, j’ai vu des passages à la télévision. Ça a l’air formidable. Et puis, mon coach a pu s’occuper d’elle donc physiquement elle est en forme (Hervis Lewis, l’entraîneur sportif se tient, tout fier, aux côtés du chanteur). CJ : (sur l’image de Mylène en loge) Un show spectaculaire donc ! Sans dévoiler Mylène, on peut en savoir un peu plus ? MF : Si je vous dis ce que c’est, je vais donc le dévoiler (rire). Mais c’est le… Je crois que le blanc est la couleur dominante en tout cas du spectacle, sans en dévoiler l’entrée. Euh…Des choses très aériennes, je crois. CJ : (sur des images du public dans la fosse) Bon, si vous appelez tous très fort Mylène, on vous passe un bout du spectacle (le public scande « Mylène ! Mylène ! Mylène ! »). Diffusion d’un montage d’extraits du concert très complet et très dynamique qui servira plus tard à la publicité du live. CJ : (sur ces images) Un concert que vous aurez l’occasion de voir durant le mois de juin un peu partout en régions, et de nouveau à Bercy le 28 juin.


1995–1996 : Anamorphosée

Mylène Farmer XXelle

Date 05.10.1996 Chaîne Musique Plus (Québec) Présenté par Geneviève Borne

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Mylène Farmer

3 juin 1996. Entre deux dates du Tour 96, la chaîne musicale québécoise Musique Plus enregistre un entretien avec Mylène Farmer. C’est relativement curieux, dans la mesure où la tournée ne passera pas là-bas... L’émission est diffusée une première fois en octobre 1996. Une version plus longue – avec davantage d’extraits du spectacle – sera diffusée près d’un an après, en septembre 97, lors de la sortie du « Live à Bercy » au Canada. Le générique du début est composé de photos tirées de l’album « Anamorphosée » sur lesquelles se posent le titre de l’émission et la musique de « California ». Suit immédiatement une rapide discographie des albums datée et illustrée par les pochettes des disques sur fond de clips : « Maman a tort » pour « Cendres de lune », « Sans contrefaçon » pour « Ainsi soit je… », « Plus grandir » (le clip studio, bizarrement) pour « En concert », « Désenchantée » pour

« L’autre… », « Libertine » (le remix sur le clip de l’époque) pour « Dance remixes », « California » pour « Anamorphosée ». Sur des images du clip de « Pourvu qu’elles soient douces », le texte suivant : « Mylène Farmer, récipiendaire du prix Victoire pour l’artiste de l’année en 1988 ». Sur des images du clip de « XXL » : « Mylène Farmer, plus de 5 millions d’albums vendus mondialement ». Puis l’animatrice Québécoise annonce l’interview. Lors de la première diffusion, elle le fait depuis un champ de course automobile (sic !). Dans la deuxième, c’est depuis le Trocadéro, à Paris. Le texte est le même dans les deux cas. Geneviève Borne : Bienvenue à cette émission spéciale qui met en vedette Mylène Farmer. Mylène Farmer est une méga star en France. Elle fascine les gens. Et tout au long de sa carrière, elle s’est entourée de mystère ; elle a accordé très peu d’entrevues. Et ça, c’est une facette d’elle que ses fans apprécient beaucoup. Et malgré l’image très forte qu’elle projette dans ses vidéoclips, c’est une jeune femme très discrète et très timide que j’ai rencontrée à Paris. J’ai tenté de percer le mystère Mylène Farmer. On voit alors des images de Mylène assise, prê-

te pour l’interview. Elle porte une large et longue jupe d’un marron doré et un petit top noir recouvert d’une chemise claire transparente. L’interview commence... Le bruit ambiant du restaurant où se tourne la rencontre et l’accent québécois de la journaliste ne facilitent hélas pas la compréhension du propos. GB : Mylène, bonjour. Mylène Farmer : Bonjour. GB : J’ai beaucoup aimé ton spectacle. Y’avaient plusieurs éléments – y’avait un groupe grunge, y’avaient des images tirées directement de rêves, y’avaient des chorégraphies très dance. Ça faisait très années 90 : on prend un peu de tout ce qu’on aime, on mélange tout ça, et puis…Faut savoir bien le faire. Est-ce que ça a été un grand défi de marier tout ça ? MF : Non, du tout. Presque naturel. J’ai fait appel à une équipe créative quant aux images et je leur ai demandé, pour ne parler que des images, de l’abstraction pour habiller toutes les chansons. Quant aux chorégraphies, j’en ai fait quelques-unes ; j’ai fait appel également à un chorégraphe français (Christophe Danchaud), qui est également sur scène, qui est un des danseurs, de travailler sur certaines chansons. Et puis, ma foi, tout le reste, c’est… (elle ne finit pas sa phrase). GB : Alors, tous ces styles-là te plaisent ?


MF : Si tant est que je voulais que ce soit un spectacle qui soit agréable pour les gens, étonnant, et assez complet. GB : On t’a vue, sur scène, arriver dans une araignée. Sur plusieurs des t-shirts vendus au spectacle, y’avait une araignée. T’as écrit aussi une chanson, « Alice », qui parle d’une araignée. Qu’est-ce que ça représente l’araignée ? MF : (rire) Quand j’ai évoqué l’araignée, que j’ai eu envie d’écrire sur cette petite Alice, je pensais à la face…au visage noir de l’artiste, ce que peut ressentir l’artiste, l’autodestruction de l’artiste, donc cette envie de dire à cette araignée de s’effacer, de partir. Voilà. Maintenant, est-ce que tout le monde a compris ça ? C’est pas très très grave dans le fond. J’avais envie d’évoquer une araignée, donc voilà (petit rire). GB : J’ai remarqué aussi que t’as changé beaucoup les arrangements de tes chansons. C’est plus rock. MF : Oui. Il y a plus de guitares, c’est plus ce qu’on appelle ‘live’ – moins d’instruments synthétiques. GB : C’est l’influence de la Californie ou tu commençais déjà avant à aimer le rock davantage ? MF : Je crois que j’ai toujours aimé les guitares. Maintenant, je pense qu’il faut parfois du temps pour y venir. Mon passage aux EtatsUnis a dû influencer, inconsciemment en tout cas. GB : T’as passé beaucoup de temps à Los Angeles ? MF : Près d’un an. GB : T’avais besoin de partir de Paris ? MF : Oui. GB : Pourquoi ? MF : Des moments, comme ça, dans sa vie où on veut s’échapper d’une normalité, de choses qui sont routinières. Donc envie de partir, du voyage.

GB : T’as pu vivre l’anonymat à Los Angeles ? MF : Oui. GB : Ça t’a apporté beaucoup. MF : Ça apporte toujours ; on se restructure, oui, d’une certaine façon parce qu’il y a des passages, comme ça, dans sa vie d’artiste, où on a besoin, oui, d’être isolée, d’être loin de son métier, si je puis dire, de son identité, en tout cas, de chanteuse ou… GB : Est-ce que ta façon de voir ton métier a changé ? MF : Non, c’est toujours la même. Je ne me prends pas au sérieux, mais essaie de faire les choses très sérieusement. J’ai toujours la même distance d’avec ce que je fais, malgré tout. GB : Mais ta façon de voir la vie a changé par contre ? MF : Elle est plus sereine, peut-être, aujourd’hui, un peu plus tendre. GB : T’as dit que t’avais réussi finalement à apprivoiser la mort. T’étais très hantée par la mort dans le passé. A quel point ? MF : Au point de se lever tous les matins et d’envisager sa mort, ou la mort du voisin, ou de ses proches. J’avoue que c’est quelque chose, oui, qui me hante moins, qui m’intéresse toujours autant en revanche. GB : Tu crois maintenant qu’il y a une vie après la mort ? MF : Je ne suis pas aussi définitive. J’essaie de l’envisager en tout cas. GB : Et ça, ça rassure un peu ? MF : Ça aide en tout cas à vivre sa vie de… Enfin ses moments présents, oui (sourire). GB : T’as rarement accordé des entrevues. A défaut de parler de toi, t’as fait beaucoup parler de toi. Est-ce que tu l’assumes ? Est-ce que tu l’as toujours assumé ? MF : Non, je n’aime pas parler de moi. J’ai du mal. J’ai du mal. Maintenant, je sais que c’est important aussi pour… Je crois que je me dois,

à un moment donné, dans le fond, de parler de moi puisque les gens s’y intéressent un petit peu. Donc j’essaie de me faire violence et de faire un effort (sourire). GB : Tu préfèrerais être plus discrète ? MF : Je le suis de toute façon. Mais, là encore, c’est plus par pudeur. J’ai l’impression de dire suffisamment au travers de mes textes. GB : Dans plusieurs des tes vidéoclips, tu te transportais dans une autre époque. Est-ce que t’as le sentiment que t’aurais aimé vivre à une autre époque ? MF : Non. Je crois que c’est simplement l’idée du costume. Et essayer justement d’apprivoiser d’autres époques. Maintenant, une nostalgie d’époques que je n’ai pas connues, non, en aucun cas. GB : Plusieurs de ces anciens clips-là étaient parfois choquants, ou avaient une sexualité explicite, tout ça. Est-ce que, consciemment, tu voulais provoquer ou si c’était l’idée du réalisateur ? MF : Non parce qu’un texte est un texte, donc le texte c’est moi qui l’écris (sourire). Maintenant, c’est vrai que j’ai travaillé avec Laurent Boutonnat sur les clips. Et nous avons beaucoup parlé sur chaque clip, chaque histoire, ce qu’on avait envie d’exprimer. Quant à l’idée de choquer, non c’est quelque chose qui vient, dans le fond, après. C’est plus le spectateur qui va être ou non choqué. L’idée de provocation…J’aime l’idée du non-conformisme par exemple. Maintenant, provoquer pour provoquer n’a aucun intérêt. GB : Pour vous deux, pour Laurent et toi, une bonne occasion de mettre en valeur vos talents d’actrice et de réalisateur. MF : Ça, je peux parler pour lui en tout cas (sourire). C’est un excellent réalisateur. C’est quelqu’un qui aime l’image, qui aime… qui a une jolie narration. J’aime son travail en tout cas.


1995–1996 : Anamorphosée Mylène Farmer 230

GB : Le premier film que vous avez fait ensemble n’a pas eu l’accueil que vous espériez. Quelle leçon t’as tiré de cette aventure-là, de « Giorgino » ? MF : De leçons, aucune parce que j’ai toujours envisagé ou l’échec de quelque chose, ou en tout cas son incompréhension. Donc une leçon de vie, en aucun cas parce que je crois que…j’espère avoir en moi une humilité quant à un travail fait et quant à un résultat envisagé. Maintenant, une déception, certainement oui. GB : Est-ce que ça t’a pas enlevé l’envie de faire du cinéma quand même ? MF : Non parce que, là encore, il faut relativiser. Je sais que, essayer de parler d’autre chose que de mon film à moi, il y a tellement de films ou de livres qui sont des livres et des films formidables mais qui ne rencontrent pas leur public. Je pense qu’il y a des moments comme ça qui sont mal programmés. GB : Est-ce que tu crois au destin ? Est-ce que t’étais prédestinée à faire ce métier-là ? MF : Je crois à des choses, est-ce qu’on peut parler de destin, des choses qui vous sont apportées, mais après c’est à vous de faire tout le travail – c’est à vous de construire ou de détruire. Donc est-ce que tout est écrit ? En aucun cas, non. GB : Est-ce que tu as trouvé que la façon de travailler des américains était très différente de celle des français, au moment de faire l’album, au moment de tourner des vidéoclips ? MF : Je crois qu’ils ont un professionnalisme qui est très étonnant, très performant. Ce sont des gens qui discutent beaucoup avant, qui peuvent discuter après, mais pendant, ils sont là et sont là pour travailler et pour donner le maximum. Donc ça, c’est peut-être une caractéristique qui est assez étonnante chez eux. GB : J’aimerais parler de tes plus récents vidéoclips. Donc celui pour « XXL », qui a été réalisé par Marcus Nispel, tu te retrouves en figure de proue devant une locomotive. T’étais réellement sur une locomotive en mouvement ? MF : Attachée au train, oui. GB : C’était…Ça faisait peur ? MF : C’est impressionnant, mais surtout sur le dernier plan. C’est un plan très très large, et là j’étais vraiment seule sur le train, avec des caméras qui étaient très éloignées, et le train prenait réellement de la vitesse. Là, c’est toujours très impressionnant (petit rire). Sinon… J’aime bien l’idée du challenge à chaque fois, sinon je m’ennuie. GB : Et pour « L’instant X », ça a été fait à New York ? MF : Ça a été fait… (elle réfléchit). Je crois en studio à New York, oui. Et là, j’étais plongée dans un bain de mousse, donc c’était plus statique. GB : Tu t’es impliquée pour le concept de ces

vidéoclips-là ? MF : Oh oui toujours. Toujours, oui. Je ne peux pas envisager ni de faire ce métier ni de me propulser quelque part sans en, non pas tirer les ficelles, parce que ce n’est pas une très jolie image, mais en tout cas être partie totalement prenante. GB : Et pour « Californie » (sic !) ? MF : Là, j’ai eu envie de faire appel à ce réalisateur, Abel Ferrara. J’avais envie de jouer une prostituée (sourire). Et, ma foi, il a répondu oui. Donc c’est une belle aventure pour moi. GB : Y’a un flash-back, puis on te voit toi avec les petits cheveux courts comme t’avais à l’époque aussi. MF : Euh…Oui, oui. Non, ce pourrait être la version 90 de « Libertine » (petit rire). Son évolution (sourire). GB : Une autre chose qui m’intrigue, c’est que, dans les entrevues que j’ai lues, tu disais régulièrement que tu te trouvais pas nécessairement jolie, alors que t’es une très jolie fille (sourire embarrassé de Mylène), que tu ne t’aimais pas beaucoup non plus, souvent. C’est tout un paradoxe. Ça doit être difficile d’être constamment sous les projecteurs quand on a ces sentiments-là ? MF : Oui, mais, là encore, je ne vais pas combattre ce paradoxe, il fait partie de moi. Il fait partie de, je crois, de la vie d’un artiste tout simplement. On a ses moments d’ombre, ses moments de lumière. Que de ne pas s’aimer ou totalement s’aimer et que d’avoir envie d’être sous ces dites lumières, je crois que c’est tout à fait envisageable. GB : Au tout début, au départ, tu voulais être comédienne, au départ. Alors, la chanson, c’était venu un peu par accident. C’est devenu un amour plus important aujourd’hui ? MF : En tout cas, j’ai eu la chance que d’avoir et Laurent Boutonnat pour le clip et juste l’idée du clip, tout simplement, pour la promotion d’une chanson. Donc, dans le fond, ça a comblé un vide que j’aurais pu ressentir. Maintenant, un clip n’est pas un long métrage ; j’en ai fait un. Et maintenant, c’est quelque chose que j’aime profondément faire, mais qui n’est plus de l’ordre de l’obsession. GB : Tu fais des dessins ? MF : Oui. GB : Ça fait longtemps ? MF : Non, j’ai découvert ça réellement sur l’enregistrement de l’album, quand j’étais à Los Angeles, dans des moments…des moments quoi d’ailleurs ? Je ne sais pas (rire). Où je devais m’ennuyer, j’ai commencé de prendre mon crayon et de dessiner. GB : Mais est-ce que tu savais que tu pouvais bien dessiner comme ça ? MF : Non, mais c’est encore très (rire)… Je n’ai

pas un grand grand talent pour ça, mais j’aime bien le faire. GB : Quand tu regardes l’ancienne image, la Mylène des clips d’avant, est-ce que tu te reconnais encore ? Est-ce que tu t’identifies encore à cette image-là ? MF : Oui. D’abord, je ne me regarde pas (rire). C’est plus simple. Mais euh… Bien sûr. Ça a été une parcelle…Il y a des choses qui sont toujours là, qui sont en moi. Maintenant, j’ai changé, et c’est normal ; le temps nous change. GB : Dans les dernières années, t’as vécu beaucoup de changements : t’as apprivoisé la mort, t’as changé un peu de style musical, de look, t’as vécu dans une autre ville. Donc beaucoup beaucoup de changements. Ce serait quoi le changement que t’aimerais faire encore ? Quelque chose chez toi que t’aimerais changer, ou quelque chose dans ta vie ? MF : Je ne sais pas. Je laisse la vie m’apporter ce genre de choses. Je crois que je suis déjà assez gâtée. Diffusion d’un micro-trottoir très enthousiaste à la sortie de Bercy. GB : Est-ce qu’on va avoir la chance de te revoir au Québec ? MF : Je suppose que je vais y aller, oui. GB : En spectacle ? MF : Si je peux amener le spectacle, et tout le spectacle, je viendrai. Maintenant, c’est une structure qui est très très lourde – l’écran est géant. Donc l’idée…C’est pour ça qu’en province j’ai fait peu de dates, parce que je voulais amener tout le spectacle que j’ai présenté à Paris Donc, pour le Canada, si on me dit : « on peut emmener toute la structure, tout le spectacle », je le ferai, avec plaisir. GB : A ton spectacle, samedi soir, tu regardais le visage des gens qui étaient devant toi et t’as dit : « J’ai les plus beaux visages devant moi ». Moi, je peux pas imaginer qu’est-ce que c’est d’avoir des regards comme ça. Qu’est-ce que tu voyais ? MF : Des regards. Là encore, c’est… (silence) Des personnes qui vous écoutent et qui vous donnent au travers de leur sourire, de leur regard ou de leur émotion, donc c’est quelque chose… Ça c’est des cadeaux qui sont très étonnants, très uniques en tout cas. GB : T’es heureuse maintenant ? MF : J’aime ce que je fais. Au jour d’aujourd’hui, j’aime profondément ce que je fais. J’aime le spectacle que je fais, j’aime la rencontre d’avec le public. Donc oui, au jour d‘aujourd’hui, oui (sourire). Le générique de fin commence aussitôt.


Tip Top

« Le spectacle s’est arrêté brutalement, indépendamment de ma volonté, et j’ai très envie de retrouver le public. »

Date 24.10.1996 Chaîne TF1 Présenté par Eric Jean-Jean et Nathalie Simon

Mylène Farmer est l’invitée principale de cette émission de seconde partie de soirée. Elle en est aussi la marraine puisque c’est la grande première (il n’y en aura d’ailleurs que deux au total). Pour l’occasion, on nous annonce une grande surprise. Une chose est sûre : la star va chanter « Comme j’ai mal ». C’est d’ailleurs la seule télé pour ce titre sorti deux mois et demi plus tôt en single, et la première télé française de Mylène depuis près de cinq mois (rappelons qu’elle s’est fracturée le poignet sur scène, lors du concert de Lyon, le 15 juin). Eric Jean-Jean : Grand évènement dans ce « TipTop » n°1. C’est un immense plaisir que de la voir ce soir. Elle a fait le tube de l’été avec sa chanson « Comme j’ai mal » (rectificatif : le titre n’a pas dépassé la onzième place du Top 50), elle est avec nous ce soir, voici Mylène Farmer ! Le public, debout façon « Top of the pops » ou

« Hit machine », est très enthousiaste. On note d’ailleurs sur certains plans que, grâce à une petite astuce informatique, il est plus nombreux qu’il n’était réellement (une partie du public est dédoublée, sur la gauche de l’écran). Mylène, qui est accompagnée de quatre musiciens, porte un pantalon noir à pattes d’éph’ et un petit top noir à manches très longues (recouvrant ses mains) qui laisse apparaître son nombril. Sa prestation est, comme souvent, un montage entre un enregistrement ampexé et une vraie performance en public. Accroupie juste devant le public pour les couplets, Mylène n’hésite pas à aller plusieurs fois prendre la main des premiers rangs pendant sa chanson. Très applaudie, la chanteuse rejoint ensuite l’animateur dans un coin du studio, près d’un piano, avec du public juste devant elle…mais aussi au-dessus, sur une passerelle ! EJJ : Bonsoir. Merci d’être avec nous dans « TipTop » pour cette première. Je sais que vos télés sont rares donc d’autant plus précieuses. Merci d’être avec nous ce soir pour cette première de « TipTop ». « Comme j’ai mal », c’est un single qui semble particulièrement prédestiné. Alors, une question qui paraît anodine quand on la pose normalement, mais qui là ne l’est pas du tout : comment ça va ? Mylène Farmer : Très bien, merci.

EJJ : Votre poignet ? MF : Beaucoup mieux (large sourire). EJJ : C’est vrai ? MF : Il bouge (sourire). EJJ : Il bouge ! (rires) On a eu peur un peu ? MF : J’ai eu, j’ai eu peur oui, bien sûr. EJJ : Alors, on va expliquer pour tout le monde ce qu’il s’est passé en fait : c’était le 15 juin dernier, Mylène est à Lyon, sur scène. Qu’est-ce qui s’est passé ? MF : Je suis tombée de scène (sourire). C’est haut, et ma foi j’ai été entraînée par un danseur, mais peu importe. J’ai eu le poignet donc fracturé – fracture ouverte. Donc c’est du temps pour remettre tout en place. EJJ : Est-ce que vous remontez sur scène parce que vous êtes une femme de parole et que vous aviez promis à vos fans de terminer cette tournée, ou est-ce que vous avez vraiment envie, comme quelqu’un qui tombe de cheval par exemple, de remonter sur cette scène parce que c’est un véritable challenge ? MF : Parce que j’en ai très très envie. Parce que le spectacle s’est arrêté brutalement, donc indépendamment de ma volonté, et que j’ai très envie de retrouver le public bien sûr (applaudissements et cris). EJJ : Est-ce que le spectacle va changer ? MF : Oui. Je vais éviter de tomber à nouveau (large sourire). (elle ne précise pas qu’elle ajou-


1995–1996 : Anamorphosée Mylène Farmer 232

tera « Ainsi soit je… » au tracklisting de la plupart des dates à venir) EJJ : J’aimerais qu’on parle maintenant de votre image en général, sur scène notamment – on a vu de superbes images (lapsus révélateur car les images, nous les verrons plus tard dans l’émission lorsque Mylène reviendra pour un second titre…Visiblement, les plateaux n’ont pas été enregistrés dans l’ordre de diffusion). Moi, j’ai eu le plaisir d’être là pour la première de votre tournée, c’était dans le Sud de la France (Toulon). Et, par rapport à cette image que les gens ont de vous, de quelqu’un de timide, de quelqu’un qui ne se donne pas facilement, là, sur scène, vous êtes beaucoup plus extravertie, beaucoup plus dévêtue. C’est toujours cette dualité entre Mylène Farmer, la véritable personne je dirais, et puis aussi Mylène Farmer telle qu’elle est sur scène, un peu agressive, même agressive sexuellement. MF : Sur scène, agressive sexuellement, je ne le pense pas (rire). EJJ : Un peu déshabillée. MF : J’ai cette dualité en moi. Je crois que beaucoup d’artistes l’ont. J’aime l’ombre et la lumière. Et c’est vrai que je choisis la scène, et c’est un moment de lumière, donc je donne tout ce que je puis donner : l’émotion et, j’espère, un peu de plaisir, une fois de plus, au public (applaudissements et cris). EJJ : Je voudrais qu’on parle de vos clips vidéo. Le clip vidéo, c’est quelque chose d’important, j’ai cru le remarquer, pour vous. Vous vous impliquez beaucoup dans la fabrication des clips vidéo ? MF : Je m’investis. C’est quelque chose qui m’intéresse beaucoup, qui m’a toujours intéressée, l’image. J’aime les metteurs en scène. EJJ : J’ai en tête justement le clip que vous avez fait pour le single « California », un clip qui a été fait par Abel Ferrara, grand réalisateur s’il en est. Alors comment ça s’est passé ? Il vous a proposé un script, un scénario ou vous y avez travaillé un petit peu ? MF : Un petit différemment. Je l’ai appelé, nous avons conversé. Il m’a demandé qu’est-ce que je voulais faire, qu’est-ce que j’exprimais dans ma chanson. Je lui ai dit que je souhaitais jouer une prostituée (large sourire). Et nous avons longuement conversé. Puis il m’a demandé de travailler sur le scénario parce qu’il pensait que c’était intéressant dans la mesure où j’ai écrit le texte donc que j’avais probablement des idées.

Puis nous avons à nouveau conversé et je suis allée à New York pour le rencontrer. Et, ma foi, je lui ai proposé quelques idées, il a ajouté les siennes, et nous avons travaillé de cette façon. EJJ : On connaît Ferrara sur ses films qui sont souvent un petit peu violents. Mais là, il vous a poussée à l’extrême ou c’est vous qui avez joué ce rôle de la prostituée ? Il y a une scène extrêmement violente où la prostituée se fait frapper, etc. dans le clip. Et ça, ça vous plait encore ? MF : Quand on va vers un metteur en scène comme Abel Ferrara, on sait ce qu’on fait, donc je savais à quoi je m’attendais, et j’avais envie de cet excès. EJJ : Vous êtes l’invitée principale de cette émission, Mylène Farmer. Une nouvelle fois, merci d’être avec nous (applaudissements et cris). MF : (sourire) Merci. EJJ : (aux téléspectateurs) Et on se retrouve tout à l’heure pour une grande et belle surprise avec Mylène Farmer. La chanteuse revient en effet plus tard dans l’émission pour une vraie surprise… Nathalie Simon : Et tout de suite, un duo étonnant. Une grande première puisque Mylène Farmer chante avec Khaled ! (applaudissements et cris) EJJ : Oui, une grande première ! Et un grand cadeau que nous fait Mylène Farmer. C’est la première fois qu’à la télévision, elle accepte de faire un duo – elle le fait pour la première de « TipTop ». Vous allez voir un moment extraordinaire maintenant : la reprise d’une chanson de Michel Polnareff, l’un de ses premiers tubes, « La poupée qui fait non », chanté en duo, Nathalie vous le disait, par Mylène Farmer et par Khaled ! (applaudissements et cris) Il s’agit d’un duo 100% inédit. La prestation ne se fait pas en direct pour autant : les deux chanteurs ont enregistré la chanson en studio au préalable. Ils la reprendront par deux fois sur la tournée de Mylène en décembre (à Genève et à Paris). Le morceau sera d’ailleurs le premier extrait du « Live à Bercy », fin avril 1997. En revanche, la version studio qu’ils nous offrent ce soir n’a jamais été gravée sur disque à ce jour. La prestation est simple : Mylène et Khaled sont assis face à face sur des chaises d’inspiration

orientale, très près du public, pendant la quasi intégralité du morceau – seule Mylène se lève à la toute fin de la chanson pour s’agenouiller devant Khaled. La chanteuse porte un fuseau noir, des chaussures à talon haut noires et un top imprimé aux couleurs et aux formes orientales surmonté d’un gros collier ethnique. Elle arbore aussi une immense bague cubique à la main droite. La performance bénéficie une fois de plus d’un savant montage entre une prestation en public et un ampex, pour une réalisation plus efficace (ralentis, travellings,…). Après la chanson, très applaudie, les deux artistes rejoignent les deux animateurs, non sans serrer des mains dans le public. On entend un « Mylène on t’aime ! » au moment où la chanteuse se met aux côtés d’Eric Jean-Jean. EJJ : Alors quand on a un duo, la première idée qui nous vient à l’esprit c’est qui a eu l’idée, et pourquoi cette chanson de Polnareff, Mylène ? MF : C’est une idée commune. Nous avions envie de chanter ensemble. Et qui a eu l’idée ? Nous aimons tous les deux Polnareff. Moi, personnellement, c’est, je crois, la première chanson que j’ai apprise il y a très très longtemps. EJJ : Et la version, je dirais, plus arabisante, c’est Khaled, c’est toi ça ? Khaled : Ah ben oui (rire de Mylène). EJJ : J’espère en tout cas qu’on vous reverra très très bientôt tous les deux ensemble, c’était un vrai bonheur de vous avoir dans « TipTop ». (…) EJJ : Mylène, on en parlait, nous, tout à l’heure, lorsque nous étions face à face : vous, Bercy c’est le…(il cherche) 12 décembre. MF : 12 décembre (applaudissements et cris). EJJ : Et ce que je vous propose, pour donner un petit avant-goût à ceux qui n’ont pas encore vu le spectacle, lors de sa première partie je dirais, c’est de regarder quelques images. Longs extraits du spectacle (« Désenchantée », « California », « Alice », « L’instant X »). Les applaudissements qui suivent se doublent de nombreux cris et autres « Mylène on t’aime ! ». EJJ : Mylène, une question un peu naïve, mais ça vous fait quoi de voir ces images ? MF : (qui entend mal en raison des cris) Qu’estce que ça me fait de voir ces images ? EJJ : Est-ce que ça vous fait quelque chose,


Les enfants de la guerre Date 27.11.1996 Chaîne TF1 Présenté par Julien Courbet

est-ce que ça vous trouble, est-ce que…Comment vous vous sentez lorsque vous voyez le public qui réagit comme ça (les applaudissements reprennent), notamment sur « L’instant X », vous vous rappelez, on en avait parlé la dernière fois quand on s’était vu à la radio (Eric Jean-Jean a également interviewé la chanteuse sur NRJ) ? MF : (en désignant du doigt le public présent) C’est surtout quand je les entends que ça m’émeut toujours, bien sûr. EJJ : Il vous tarde le mois de décembre maintenant ? (Mylène, visiblement émue par le public, répond d’un simple hochement de tête) Est-ce que vous avez une petite appréhension ? MF : On en a toujours. On a toujours le trac. Je crois que Khaled est pareil (Mylène rit – Khaled confirme). Mais j’ai l’impression que c’est presque plus difficile de faire des moments, comme ça, de télévision que de monter sur scène. EJJ : Pourtant, moi je trouve que vous vous en sortez particulièrement bien (sourire de Mylène). (au public) On est d’accord ? (le public applaudit) Mylène, pour finir, la question que tout le monde se pose en ce moment – on murmure ça dans les couloirs des télés, des radios : est-ce que c’est votre dernière tournée ? (le public hurle : « Noooon ! ») MF : Je n’ai pas la réponse. Je ne sais pas. EJJ : On n’espère pas. MF : Je ne l’espère pas non plus (petit rire). Les animateurs lancent alors la chanson suivante.

Unique télévision pour « Rêver », le cinquième et dernier extrait de l’album « Anamorphosée » – un single sorti une semaine plus tôt, et déjà huitième des ventes. Il s’agit d’un grand show de primetime autour de Luciano Pavarotti qui parraine « War child », un réseau d’associations qui viennent en aide aux enfants touchés par la guerre à travers le monde. Triste anecdote : Mylène vient juste de perdre un être cher quand elle enregistre cette émission.

(applaudissements et cris immédiats dans le public). Cette chanson s’appelle « Rêver ». Mylène Farmer, qui est avec nous ce soir. Mylène interprète son nouveau tube, accompagnée de quatre musiciens. Elle propose une image très élégante : un maquillage sobre et raffiné, un chignon aérien, à la Audrey Hepburn, et sa grande robe en lamé argent du Tour 96 (qui est alors encore sur les routes). Elle laisse poindre une petite larme à l’œil droit après le pont musical...larme qui s’échappe et coule le long de sa joue sur le dernier mot, « aimer ». Elle rejoint ensuite Julien Courbet et Luciano Pavarotti sur le canapé, sous les cris du public, qui se lève pour l’applaudir et scander son prénom. Mylène Farmer : (très large sourire) Merci beaucoup. JC : Mylène, cette chanson était de circonstance, « Rêver », quand on voit, alors on a vu ensemble y’a quelques instants, avant le démarrage de cette émission, le reportage qui va suivre, puisque nous allons maintenant parler des orphelins des « Enfants de la guerre ». Quand vous avez vu ce reportage, Mylène, vos premières pensées, ça a été quoi, de voir tous ces enfants sans parents ? MF : D’abord une grande émotion, bien sûr. Manque de mères. Manque de femmes autour d’eux. Et surtout, je voudrais dire que je crois que c’est une très belle idée que d’associer la musique à cette douleur, à ce manque. Donc je suis toute avec eux (sourire). JC : En tout cas, c’était bien que vous soyez avec nous ce soir, Mylène.

Julien Courbet : (à Luciano Pavarotti) Maître, un nouveau témoignage. Une grande, grande star dans notre pays – une star ailleurs aussi, mais c’est vrai que nous l’adorons ici : Mylène Farmer avec une chanson de circonstance

Pour information, Mylène était bel et bien présente devant le public pour la partie parlée de sa prestation. En revanche, elle a enregistré la partie chantée dans une salle vide, un peu plus tôt dans la journée.


1995–1996 : Anamorphosée

Stars magazine

« Essayer de donner le maximum de plaisir, c’est comme ça que j’envisage les shows. » Date XX.12.1996 Chaîne RTL TVI (Belgique)

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Mylène Farmer

Le Tour 96 de Mylène Farmer fait à nouveau escale à Bruxelles, six mois après y être passé une première fois. Pour l’occasion, RTL TVI réutilise l’interview enregistrée par une équipe de la chaîne en mai dernier, à Bercy, et diffusée très succinctement le 6 juin. Cette fois, nous aurons droit à de plus larges extraits de cet entretien, et même à un cadrage moins serré, permettant de voir la tenue portée par la star (la première diffusion ne comportait que de très gros plans sur le visage). Le sujet commence par des images des clips « Pourvu qu’elles soient douces », « California » et « Libertine » sur la musique de « Libertine » sur lesquelles deux journalistes – un homme et une femme – dressent son portrait. X : (en voix-off) Mylène Farmer est née au Canada. Dès ses débuts, avec « Maman a tort », la libertine va cultiver, avec une science raffinée, son image de créature sexy. Mylène est aussi secrète et énigmatique dans sa vie qu’elle est impudique et exhibitionniste dans les mises en scène de ses chansons et surtout de ses

clips. Après le flop au cinéma de « Giorgino », un film pour lequel elle s’était énormément investie, Mylène a fui. Elle a choisi la Californie pour son exil doré. Mylène Farmer (en pull noir, avec sa coiffure de scène) : Je suis allée à Bali, pour répondre à votre question, qui est un pays magnifique. Maintenant les Etats-Unis parce que j’avais envie d’une ville, même si celle-ci est étrange. J’avais envie de retrouver certaines personnes que j’avais rencontrées là-bas. Et parce que j’avais en tête d’enregistrer l’album et que, ou New York ou Los Angeles vous offrent des studios et des musiciens qui sont très performants. X : (sur un extrait du clip de « California ») A Los Angeles, la Canadienne n’est plus personne – personne ne la reconnaît. Elle peut se replonger dans le travail. Pour son clip « California », Mylène fait appel au réalisateur Abel Ferrara. Résultat sulfureux et érotique à souhait. MF : J’aime les habits. J’aime les créateurs. J’aime les maquilleurs, les coiffeurs. J’ai eu la chance de rencontrer là, depuis en fait le début de l’album, une personne avec qui je travaille maintenant tout le temps et qui a créé cette coiffure (images de sa coiffure du Tour 96 prises pendant l’entretien). C’est autant de choses que je trouve importantes pour un artiste. (extrait du clip de « L’instant X ») J’ai réellement tenu sur cette tournée à non pas contrôler, parce que ce n’est pas un très joli mot, mais en

tout cas à être absolument dans tous les départements, à savoir les images par exemple, le choix de l’équipe qui s’occupe de ces images sur l’écran. Euh… aussi bien, bien évidemment, le casting des danseurs. Et le casting des musiciens, je l’ai laissé à Laurent Boutonnat parce que j’avais d’autres choses à faire de toute façon. Et, ma foi, toute la conception artistique, j’y suis vraiment impliquée. X : (sur des images de « California » sur scène) A trente-six ans, Mylène est plus que jamais une femme caméléon qui ne cesse de surprendre par son look. Sur scène, elle change de tenue à chaque chanson. C’est du Farmer version méga spectacle (extrait de « Je t’aime mélancolie » sur scène). MF : Essayer de donner le maximum de plaisir, aussi bien visuel qu’émotionnel, chorégraphique. C’est comme ça que moi j’envisage les shows. Maintenant, je suis capable d’apprécier un show beaucoup plus, entre guillemets, simple, plus modeste dans sa structure. Mais, quant à moi, c’est ce que j’aime. X : (sur des images de « Alice » sur scène) Lors de son dernier spectacle, elle sortait d’un tombeau pour apparaître sur scène. Pour sa nouvelle tournée, Mylène est encadrée de danseurs, de tapis roulants et d’élévateurs. Mylène Farmer sera en concert le samedi 7 décembre à Forest National (extrait de « Désenchantée » sur scène).


Joyeux anniversaire Date 01.03.1997 Chaîne M6

M6 a dix ans. Pour célébrer l’évènement, de nombreuses person-

nalités ont enregistré des messages de félicitations. Ils sont diffusés et rediffusés tout au long de la journée entre les programmes de la chaîne. Mylène est l’une de ces personnalités.

les enfants de la une

Arthur : Dans un instant, nous parlerons des nouveautés de « Vidéo Gag » et nous continuerons à répondre à vos questions et à découvrir cette rentrée de TF1. Mais je vais

La chanteuse, debout, est accompagnée au piano par Yvan Cassar, pour une version inédite de son tube de 1988. Il s’agit en fait de la version épurée du Tour 96 réenregistrée pour l’occasion

en studio (la chanteuse ne chante pas en direct). Mylène porte une tenue aussi belle qu’originale – une robe faite de filets et de plumes – et arbore un chignon des plus sobres, avec une large mèche devant qui se marie parfaitement à son maquillage, tout en élégance. Sa prestation est émouvante – nous n’échapperons pas aux larmes habituelles – mais ampexée, une fois de plus. Même son « merci », chuchoté dans un joli sourire, ne nous dupe pas. D’autant que les animateurs de TF1 présents face à Arthur (Bernard Montiel, Lagaf’, Philippe Risoli, Thierry Roland,…) insistent bien lourdement pour nous faire comprendre qu’elle n’est pas là : ils envoient cris, saluts et baisers dans sa direction supposée et prétendue, et hurlent pour qu’elle les rejoigne. De quoi mettre mal à l’aise le maître de cérémonie.

1997

Soirée smocking et robe de soirée sur TF1. La chaîne réunit tous ses animateurs autour d’Arthur pour présenter sa grille de rentrée lors d’un grand prime-time évènement. Pour l’occasion, Mylène a accepté de venir chanter, ce qu’elle n’avait pas fait à la télévision depuis près d’un an…et ce qu’elle ne fera plus pendant dix-huit mois !

demander à Valentin, notre camarade steadycam, de montrer le disque d’or et de platine (sic !) d’une dame qui va chanter pour nous tout de suite (la caméra part alors vers le disque de diamant, et non d’or, d’« Anamorphosée » et le disque de platine doublé d’une vidéo de diamant du « Live à Bercy » – ils sont posés sur des marches derrière l’animateur). Elle a vendu plus d’un million d’albums « Anamarphosée » (sic !), c’est le nom de l’album (applaudissements et quelques cris dans le public). C’est sa dernière télé avant plus d’un an. Elle a choisi TF1 pour chanter « Ainsi soit je… ». Mesdames et messieurs, Mylène Farmer !

Date 06.09.1997 Chaîne TF1 Présenté par Arthur



1999 2001 Innamoramento 09.03.1999 Single « L’Âme-stram-gram » – 07.04.1999 Album « Innamoramento » – 08.06.1999 Single « Je te rends ton amour » 21.09.1999 Début du Mylenium Tour – 28.09.1999 Single « Souviens-toi du jour… » – 22.02.2000 Single « Optimistique-moi » – 18.07.2000 Single « Innamoramento » 05.12.2000 Single « Dessine-moi un mouton (live) » & Album « Mylenium Tour » – 27.02.2001 Single « L’histoire d’une fée, c’est… »


1999–2001 : Innamoramento

Les années tubes

Date 02.04.1999 Chaîne TF1 Présenté par Jean-Pierre Foucault

C’est le grand retour de Mylène Farmer. On ne l’a plus vue à la télé depuis plus d’un an et demi. Elle revient ce soir dans ce qui est devenu le seul prime-time régulier de variétés sur TF1, « Les années tubes ». Au programme : une prestation chorégraphiée de son tout nouveau single, « L’âmestram-gram », et quelques mots aux côtés de Jean-Pierre Foucault.

1999

Jean-Pierre Foucault : Sa dernière apparition ici, sur ce plateau, date de 1995 (c’était en fait le 18 mai 1996). Quatre ans après, elle a choisi « Les années tubes », elle a choisi de venir chez vous pour vous présenter son nouvel album. Il s’agit de Mylène Farmer. Mylène Farmer !

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Mylène Farmer

Le public applaudit vigoureusement. Et la chanteuse apparaît accroupie, entourée de dix dan-

seurs, accroupis eux aussi. La première chose qui frappe, c’est sa coiffure : elle arbore de longs cheveux bouclés. Sa tenue est simple : un pantalon large noir et une chemise noire sur lesquelles sont greffées de grandes fleurs colorées. Pour l’anecdote, trois des danseurs qui l’accompagnent ce soir seront sur le « Mylenium Tour », cinq mois plus tard. On note aussi la présence de Bruno Batlo qui remplace, au dernier moment, un danseur américain retenu aux Etats-Unis pour un problème de visa. L’ancien danseur du Tour 89, qui travaille désormais chez Thierry Suc, fera du coup l’ensemble des télés « L’âme-stram-gram ». La prestation chorégraphiée de cette chanson est efficace, aidée en cela par une réalisation très soignée. Lumières, montage : tout est fait pour que ce retour soit dynamique et élégant. Et le public ne s’y trompe pas : il applaudit vivement la chanteuse à la fin de sa chanson. JPF : « L’âme-stram-gram », extrait du nouvel album de Mylène Farmer ! Mylène rejoint alors l’animateur qui, comme

le public, la reçoit debout près du banc où se trouve habituellement toute la troupe de chanteurs-danseurs de l’émission (la Compagnie de Roger Louret). Elle s’assoit immédiatement, faisant dos au public. Mylène Farmer : (au public) Merci. JPF (qui s’assied aussi) : Bonsoir Mylène. MF : Bonsoir. JPF : Quatre ans, c’est long hein ? Quatre ans c’est long. Alors, est-ce que c’est un rythme qui vous satisfait, comme ça, de prendre le temps, de laisser mûrir les choses et de présenter un album parfaitement terminé, parfaitement fini ? Ça vous manque pas ça Mylène ? MF : Ça me manque. C’est pourquoi j’ai décidé de monter sur scène plus rapidement, donc en septembre (cris et applaudissements du public). JPF : Donc on en reparlera. Ce sera à partir du 24 septembre (l’animateur parle ici de Bercy, mais Mylène fera d’abord une première date à Marseille, le 21 septembre). Alors, ces quatre ans de gestation : qu’est-ce qu’il a de différent par rapport à l’album que vous étiez venue présenter ici au mois d’octobre 1995 ?


MF : Essayer de vivre différemment, lire, voyager, rencontrer d’autres personnes. Et puis la réécriture, donc se nourrir au maximum pour pouvoir donner d’autres choses. JPF : Et la Chine ? Parce qu’elle a une place importante dans les images qu’on va voir dans un instant. La Chine, vous l’avez découverte quand, dites-moi Mylène ? MF : Ecoutez, j’étais allée à Hongkong une seule fois, mais très brièvement, donc j’avais très peu de souvenirs. Et là, je suis restée à Hongkong et Pékin, qu’ils appellent Beijing, trois semaines. JPF : Alors, vous avez rencontré un homme qui est un metteur en scène extrêmement talentueux… MF : (le coupant) Oui, qui a fait quinze longs métrages. JPF : Quinze longs métrages. Et vous lui avez demandé – là aussi c’est une de vos particularités, c’est le soin que vous apportez aux images qui accompagnent vos chansons – vous lui avez demandé de mettre en scène votre clip, c’est ça ? MF : Absolument oui. JPF : On peut regarder un bout ? MF : Bien sûr (sourire). JPF : Allez, on regarde un p’tit bout puisque nous allons parler cette langue universelle qu’est l’image. Regardez bien : c’est ce clip tourné à Beijing, à Pékin il y a quelques semaines de cela. Diffusion d’un extrait du clip de « L’âme-stramgram » (scène de la bataille finale quand, Mylène, armée de sa langue magique, vient libérer sa jumelle emprisonnée). On entend le public taper dans les mains et crier. Retour plateau sous les applaudissements nourris d’une audience conquise. Mylène sourit. JPF : On peut dire qu’à chaque fois, on n’est pas déçus, hein ? Pour ce qui vous concerne, et en ce qui concerne vos clips, pour la créativité. Surtout, ne me tirez pas la langue ! De grâce, ne me tirez pas… (rires de Mylène et du public) Parce que s’il se passe ce qu’il s’est passé dans le clip… A Bercy, qu’est-ce qui va se passer ? Qu’est-ce que vous offrez à ceux qui vont venir remplir plusieurs soirs de suite, à partir du 24 septembre, la salle, Mylène ? MF : Moi, il me semble que l’émotion est la chose primordiale et c’est ce que j’offre (cris et applaudissements dans le public). JPF : Merci beaucoup, Mylène, d’être venue ce soir… MF : Merci. JPF : …nous réserver cet album (sic !)… MF : (au public qui applaudit vivement) Merci à vous. JPF : …cette chanson, un extrait de ce clip. Et à très bientôt MF : Merci, au revoir.

Hit machine Date 17.04.1999 Chaîne M6 Présenté par Charly et Lulu

Cette émission a beau occuper la case du samedi matin de M6 depuis près de dix ans, c’est la toute première fois que Mylène y vient. Charly et Lulu, les animateurs, ne manquent pas de le rappeler dans leur lancement. Pour l’occasion, la star a droit à un traitement de faveur : non seulement elle ampexe sa prestation (ce qui est habituel pour la chanteuse depuis 1991), mais en outre, elle le fait face à un public totalement différent de celui présent pendant le reste de l’émission, puisque exclusivement composé de fans. Pour ce faire, différents groupements de fans ont été sollicités, comme feu le Mylène Farmer Magazine. Le tournage a lieu trois jours avant la diffusion, au studio de l’émission, à la Plaine-Saint-Denis, au nord de Paris. Le public est convié à 7h du matin pour une entrée dans le studio à 9h ! Le titre est plusieurs fois répété pendant que les fans

attendent dehors – pour l’anecdote, c’est le danseur et chorégraphe de Mylène, Christophe Danchaud, qui prend la place de la chanteuse pour les essais techniques. La prestation de Mylène se fait ensuite en une seule prise. Public de fans : ambiance garantie. Dès les premières images, on entend des « Mylèèène ! », des « Mylène on t’aime ! » et autres cris. Et dès les premières paroles, le public chante à l’unisson avec la star, ce qui ne manque pas de la faire sourire. La prestation est semblable à celle des « Années tubes », à deux points près : Mylène est entourée de huit danseurs, et non dix, et elle porte désormais une courte chemise parme nouée au dessus du nombril. A la fin du titre, la chanteuse reçoit quelques peluches de la part du public. De retour sur le plateau de l’émission, avec le ‘vrai’ public, Charly et Lulu présentent face caméra le single de la chanteuse, qu’elle a dédicacé, et le jette au public. Dommage que cette fois, ce ne soit pas un public de fans…


1999–2001 : Innamoramento

Tapis Rouge

Date 24.04.1999 Chaîne France 2 Présenté par Michel Drucker

Troisième et dernière télé pour « L’âme-stram-gram », en tous points équivalente au « Hit machine » diffusé une semaine plus tôt, à une exception près, et elle est de taille : Mylène parle ! A la fin de la chanson, Michel Drucker rejoint en effet la chanteuse au centre du plateau, sous des applaudissements nourris, et lui fait dire quelques mots (pas beaucoup).

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Mylène Farmer

Très tard dans l’émission, Michel Drucker, entouré d’Isabelle Boulay, Axelle Red, Alain Souchon et Francis Cabrel (l’invité d’honneur du jour, avec Patricia Kaas) annonce le passage de Mylène. Michel Drucker : Tout de suite, la rentrée de quelqu’un qui se fait très rare. Alors elle, je crois qu’en quinze ans de carrière, elle a chanté deux fois sur scène – c’était à Bercy. Elle recommence le 24 septembre. La voici avec un nouvel al-

bum. C’est Mylène Farmer. Je vais la rejoindre dans quelques instants. « L’âme-stram-gram » (titre qu’il épelle). Mylène Farmer ! Mylène chante son titre en chemise parme et pantalon noir, accompagnée de ses huit danseurs. La prestation est ampexée, comme d’habitude. Les danseurs quittent le plateau quand Michel Drucker la rejoint. MD : Bonsoir Mylène. Mylène Farmer : Bonsoir. (les applaudissements continuent) Merci. MD : C’est le plus mauvais moment pour vous, parce qu’il faut parler. MF : Oui, je vous le confirme (rire). MD : Vous me le confirmez ? (rires) Un mot sur cet album, « Innamoramento », hein ? En italien. MF : « Innamoramento », oui. MD : Vous avez écrit quatre ou cinq chansons, paroles et musique. C’est la première fois que vous écrivez autant, non ? MF : C’est la première fois. MD : Car depuis le début de votre carrière, y’a quinze ans, depuis « Libertine », vous avez toujours écrit.

MF : J’ai toujours écrit mes textes et Laurent Boutonnat la musique. MD : Alors, vous êtes un cas particulier : vous êtes là depuis près de quinze ans, ça se voit pas (sourire de Mylène), mais vous avez déjà vendu dix millions de disques, et vous n’avez chanté que deux fois sur scène. Pourquoi cet écart entre le deuxième Bercy et le troisième ? (l’écart entre le premier et le deuxième était pourtant plus grand) MF : Parce que j’ai besoin de ce temps, parce que je veux ces moments rares parce que je veux l’émotion intacte. Donc ce sont des moments qui se doivent être rares pour moi (sic !). MD : Ça veut dire que les rares fois où vous regardez, où vous avez devant vous les gens qui vous aiment, c’est sur scène évidemment. MF : Oui. MD : Et maintenant, vous revenez le 24 septembre, c’est ça ? MF : Oui. MD : Je vous remercie beaucoup de votre visite… MF : Merci à vous. MD : … dans « Tapis rouge », chère Mylène Farmer. (au public) Je vous demande de l’applaudir encore. MF : (au public) Merci (large sourire).


Exclusif ! Date 07.05.1999 Chaîne TF1 Présenté par Frédéric Joly et Emmanuelle Gaume

On aperçoit Mylène dans un sujet du magazine people quotidien de TF1. La star, pourtant peu mondaine, s’est en effet rendue à la Galerie Piltzer, à Paris, pour le vernissage du peintre Robert de Niro senior, père du célèbre acteur américain. On la voit quelques secondes pendant le reportage, de même que les autres invités (Anouk Aimée, Billy Crystal, Guillaume Durand, Uma Thurman,…).

La fureur du parc — le retour Date 19.06.1999 Chaîne TF1 Présenté par Arthur

En ce samedi soir, à deux jours de la Fête de la musique, Arthur transporte son célèbre karaoké télévisé dans le Parc des Princes, à Paris, pour un grand show diffusé en direct sur TF1. Les invités récurrents de « La fureur » sont là. Parallèlement, des dizaines d’artistes se succèdent sur scène devant un stade comble. En tête de la liste : Mylène Farmer.

A l’origine, la chanteuse n’est pas annoncée dans le programme de l’émission. Son nom circule néanmoins quelques jours avant l’évènement. Arthur confirme sa présence, quelques instants avant le début de l’émission, dans le J.T. de 20 heures de Claire Chazal. On apprendra plus tard que Mylène a accepté de venir sur la scène du Parc des Princes à condition de passer en premier, ce qui n’a pas été simple à gérer pour la production qui avait déjà prévu de lancer le spectacle avec un duplex depuis le Stade de France où Céline Dion donnait alors un concert. C’est pourtant bien Mylène qui ouvre le show avec une sublime interprétation de « Je te rends ton amour », son nouveau single, sorti onze jours plus tôt. Sur les premières notes de la chanson, la star apparaît, immobile, sur une plateforme qui l’amène depuis le dessous de la scène et la soulève aussitôt dans les airs, tandis que, à l’écran, son nom s’inscrit sur les côtés. Armé d’un micro-casque, elle porte la superbe et longue robe du clip, signée Olivier Theyskens (des ateliers de John Galliano), sensuellement ouverte sur une de ses jambes. Ses cheveux, toujours bouclés, sont ornés de plusieurs brindilles. Sa prestation est statique, puisque Mylène ne peut pas bouger de la plateforme, mais la réalisation est efficace, notamment le travelling circulaire sur le pont musical. Une très belle télé. Un vrai régal pour les yeux à peine gâché par les paroles qui défilent façon Karaoké pendant la chanson, comme le veut la tradition de l’émission d’Arthur (habituellement en studio). On note que, malgré la foule considérable, on perçoit aisément des « Mylèèène ! » dans le public. La chanson finie, Mylène sourit, salue le public et Arthur, puis baisse la tête tandis que la plateforme la ramène très lentement sous la scène. La pochette de l’album « Innamoramento » et les dates du « Mylenium Tour » à venir défilent alors sur l’écran.


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Exclusif !

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Mylène Farmer

Date 21.06.1999 Chaîne TF1 Présenté par Frédéric Joly et Emmanuelle Gaume

Le lundi soir, le journal people quotidien de TF1 revient sur l’émission d’Arthur diffusée deux jours plus tôt sur la même chaîne (et produite par la même boîte). On y apprend que Mylène a eu quelques petits soucis lors de son entrée en scène : sa robe se serait coincée dans les câbles de la plateforme, retardant du coup le début de sa chanson. Des images de la star se préparant, sous la scène, nous sont alors montrées. Elles seront rediffusées quelques mois plus tard dans « Les enfants de la télé », autre émission d’Arthur, afin d’expliquer la longueur du lancement de l’animateur qui, sur les consignes de la régie dans son oreillette, a dû meubler en attendant que Mylène soit prête.

50 ans de tubes Date 30.07.1999 Chaîne TF1 Présenté par Jean-Pierre Foucault et Eric Jean-Jean

Seconde et (déjà) dernière télé pour « Je te rends ton amour ». Cette émission estivale prend place dans le sud de la France, en extérieur, au bord d’une piscine, de nuit, et en public. Pendant tout l’été, elle revient, un soir par semaine, sur les tubes qui ont marqué les français. La prestation de « Désenchantée » à « Sacrée soirée » du 17 avril 1991 y sera d’ailleurs rediffusée au mois d’août. Mais les chansons actuelles y ont aussi leur place. C’est donc tout logiquement que Mylène vient

y chanter son nouveau single. Sa prestation, enregistrée dans la maison du sculpteur César, en Provence, non loin de là où se tourne l’émission, s’apparente davantage à un clip qu’à un passage télé. En effet, il s’agit d’une succession de séquences tournées séparément et montrant Mylène dans différentes pièces de la maison ou dans le jardin, puis montées avec un gros plan fixe sur le play-back de la chanteuse. Une télé aussi belle qu’originale qui se termine par un très gros plan sur les yeux embués de larmes de la star qui, comme au Parc des Princes pour sa prestation précédente, porte la robe rose du clip.


Tapis Rouge

Date 11.09.1999 Chaîne France 2 Présenté par Michel Drucker

Dix jours avant le premier concert du « Mylenium Tour », Mylène vient sur le prime-time de Michel Drucker. Elle y interprète non pas une, mais deux chansons, dont « Souviens-toi du jour », le nouveau single qui parait deux semaines plus tard. Et elle y dit même quelques mots. Michel Drucker annonce le passage de Mylène. Il est assis aux côtés de Johnny Hallyday, invité d’honneur de l’émission, qui s’empresse de dire tout le bien qu’il pense de la chanteuse. Johnny Hallyday : Pour moi, elle, c’est la seule chanteuse française qui fait des spectacles à l’américaine, un petit peu comme moi je les conçois (applaudissements). Michel Drucker : Alors, elle est à Bercy le 24, 25, 26, 29 septembre, et tu pourrais ajouter qu’elle a toujours des tenues assez extraordinaires. Et la tenue qu’elle porte pour la chanson « Souvienstoi du jour » ne passera pas inaperçue. Mylène Farmer ! (applaudissements très soutenus)

Les cheveux en pagaille, montés en chignon, la chanteuse, très maquillée, est seule en scène, un micro-casque vissé à l’oreille. Elle porte une robe brillante aussi sexy que glamour, faite d’un bustier et de voilages transparents, très échancrée sur les côtés. Le début de la chanson, quasi a capella, se fait sous les cris d’amour du public qui bat rapidement la mesure en tapant dans les mains quand le rythme commence. Mylène reproduit, seule, ce qui sera une chorégraphie de groupe pendant sa tournée à venir. A la fin de la chanson, tandis que Mylène, très applaudie, sourit largement, Michel Drucker annonce qu’elle reviendra plus tard dans l’émission, « dans une autre tenue ». Et effectivement, assis aux côtés des Hallyday, père et fils, et de Michèle Laroque, l’animateur annonce à nouveau la chanteuse. MD : On va retrouver Mylène Farmer (applaudissements). « Pourvu qu’elles soient douces ». Ça, c’est un tube fort célèbre. Je la rejoins après. Mylène Farmer ! La chanteuse réapparaît, entourée cette fois de six danseurs et deux danseuses (ceux de la tournée à venir), pour reprendre l’un de ses plus gros

tubes : « Pourvu qu’elles soient douces ». Il s’agit d’un play-back sur la version originale du single, déjà vieille de onze ans ! La prestation est, quant à elle, celle du « Mylenium Tour » à venir, à ce détail près que, sur scène, la chanteuse ne fera ce titre qu’en partie, dans le cadre d’un medley, alors que là il est en version intégrale. Autre détail : la tenue de la chanteuse et des danseurs est celle qu’ils porteront sur scène, exception faite du faux cul qui n’est pas présent ici. La chanson finie, les danseurs quittent le plateau et Michel Drucker rejoint la chanteuse, sous des applaudissements particulièrement nourris (des cris et des « Mylène ! Mylène ! Mylène ! » fusent de partout). Il faut croire que la chanteuse a donné du fil à retorde au réalisateur en demandant à être rejointe sur le plateau plutôt que d’aller sur le canapé comme tous les invités. On note en effet des ratés de réalisation particulièrement flagrants : Drucker apparaît dans le champ quand il ne faut pas, bientôt suivi par un caméraman qui se retrouve en plein cadre. La chanteuse et l’animateur sont néanmoins réunis pour un bref entretien dans lequel Michel Drucker semble troublé, tant par les manifestations hystériques et sporadiques de certains fans que par la tenue, très légère, de


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« Ce qui est important pour moi, c’est de présenter la même chose à Paris et en province. » son interlocutrice (en culotte et bustier).

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Mylène Farmer

MD : Mylène Farmer. « Pourvu qu’elles soient douces ». Mylène Farmer : Bonjour. MD : Voilà une chanson qui nous rappelle des bons souvenirs, des bons moments. 24, 25, 26 et 29 septembre à Bercy. MF : Oui. MD : C’est votre troisième spectacle en quinze ans. C’est dire si les évènements sont espacés. Johnny Hallyday a parlé tout à l’heure de l’impression qu’il a quand il voit vos spectacles, ces mises en scène qui sont à chaque fois surprenantes. J’ai l’impression que le prochain est encore plus important, m’a-t-on dit, non ? MF : Je ne sais pas… MD : (la coupant) On m’a dit que c’est LE spectacle le plus important itinérant qu’on n’a jamais produit sur scène, parce que vous allez également en tournée. MF : Ce qui est important, pour moi, c’est de présenter la même chose à Paris et en province. MD : Mais comment vous faites ? C’est compliqué, non ? En général, on n’arrive pas à faire ça. MF : La passion (rire). MD : Donc c’est quoi ? C’est quinze semi-remorques (rire) ? MF : (dans un large sourire) Venez me voir ! (cris et applaudissements du public) MD : Très bien. Dites-moi, Mylène, même quand vous venez à la télévision, où c’est un tout petit aperçu ce votre univers, on l’a vu tout à l’heure, on l’a vu dans vos tenues à chaque fois différentes, comment vous faites pour avoir

l’œil à tout ? Parce que sur scène, ce que vous allez présenter, c’est quelque chose de colossal. Je sais que vous regardez tout, évidemment : le moindre soulier, la moindre chorégraphie, c’est vous qui réglez tout ça. C’est le sens du détail que vous aviez déjà petite fille, ça ? MF : Je ne sais pas petite fille. En tout cas, j’aime le détail. Je crois que tout est important. Je travaille sur ce spectacle avec un autre chorégraphe, je fais des chorégraphies moi-même, et je crois que c’est la passion de ce métier en tout cas. J’aime faire ce que je fais. MD : On va vous rappeler de bons souvenirs. Voici des images de vos deux précédents spectacles qui étaient déjà des évènements considérables. Extrait audio de « Sans contrefaçon » ‘live 89 sur un medley d’images du concert de l’époque. Puis extrait audio de « XXL » ‘live 96 et de « Désenchantée » ‘live 96 sur un medley d’images du second spectacle. Retour plateau, avec un public très enthousiaste. MD : Mylène Farmer, dans quinze jours, un des évènements de la rentrée. A Bercy dans quinze jours. Merci de votre visite chère Mylène. MF : Merci. (au public) Merci à vous. MD : Dites-moi… (l’animateur ne parvient pas à se faire entendre tant le public crie et applaudit) Moi qui suis un… (le public crie encore plus fort et scande le prénom de la chanteuse, ce qui la fait sourire). Vous viendrez l’applaudir à Bercy ! (Mylène remercie le public) Elle vous donne rendez-vous à Bercy ! (le public continue

d’applaudir) Attendez ! Puisque les fans sont très attentifs au calendrier, comme y’a déjà beaucoup de monde et que c’est pratiquement à guichets fermés, il y a une date supplémentaire en décembre, vous reviendrez à Bercy… (Mylène confirme de la tête ; les cris redoublent) Moi qui suis un fou de sport, je vois votre silhouette ; vous faites combien d’heures de gym par semaine ? Tous les jours au moins, hein ? MF : (troublée) Je ne sais pas. Euh… Deux fois par… Deux fois par… Non…Une fois … MD : Une fois pas jour ? MF : …par jour, pardon (rire)… Quatre fois par semaine, pardon (éclat de rire). MD : Avec un préparateur physique ? (Mylène, morte de rire, confirme d’un hochement de tête) Vous avez raison. Merci Mylène Farmer. L’animateur enchaîne alors avec la séquence suivante, non sans mal puisque le public scande le prénom de la chanteuse. La prestation de « Souviens-toi du jour » a été rediffusée dans cette même émission, « Tapis rouge », un mois plus tard, le 16 octobre, avec un montage différent, incluant des images du public présent ce jour-là et de Muriel Robin, alors invitée d’honneur. Quelques plans inédits de Mylène sont alors également inclus au montage. Quant à celle de « Pourvu qu’elles soient douces », elle a été réutilisée en partie le 31 décembre 1999, à l’occasion de la grande soirée de passage au nouveau millénaire sur France 2, présentée par… Michel Drucker.


J.T. de 20h Date 28.09.1999 Chaîne TF1 Présenté par Patrick Poivre d’Arvor

Une semaine après son lancement à Marseille, le « Mylenium Tour » fait escale à Bercy pour quatre dates (les 24, 25, 26 et 29 septembre). A la veille du dernier de ces concerts parisiens, Mylène accorde un entretien au J.T. de TF1. Il s’agit d’un sujet ; elle n’est pas en plateau.

100% Johnny

Patrick Poivre d’Arvor : Musique, avec le retour sur scène de Mylène Farmer, l’une des seules à rivaliser de moyens avec Johnny Hallyday pour des représentations hors normes. Une gigantesque machine à émerveiller des dizaines de milliers de spectateurs. Reportage de Jean Chubilleau et Damien Blondeau. Le sujet qui commence par des images de « Pourvu qu’elles soient douces » sur scène, version 99. Jean Chubilleau : (en voix-off sur ces images) Se produire cinq fois à Bercy, devant 85.000 personnes en tout, elle est la seule artiste cette année à réussir la performance. En quinze ans de carrière, et trois séries de concerts seulement, la jeune femme, toujours secrète et romantique, est devenue, pour beaucoup de jeunes, une artiste culte. Mylène Farmer (en chemise blanche, assise sur la balançoire de « Dessine-moi un mouton », sur la scène de Bercy) : Je crois que j’ai mis sept années avant que de monter sur scène. Parce que j’avais envie d’être prête, en tout cas d’être capable de donner justement ce que j’ai à donner. Parce que je veux ces moments rares. J’ai un public qui est, je l’avoue, merveilleux, qui me donne énormément. Et puis, leur offrir quelque chose d’exceptionnel. JC : (en voix-off sur un extrait du clip de « Souviens-toi du jour ») Le rêve secret de Mylène Farmer ? Jouer dans un film de Roman Polanski. (sur des images de « L’âme-stram-gram » sur scène) En attendant le cinéma, la chanteuse qui vient de vendre près de 700.000 disques en cinq mois seulement, se donne en spectacle à Bercy, avant une tournée dans toute la France.

Date 12.11.1999 Chaîne TF1 Présenté par Jean-Pierre Foucault

Deuxième (et dernière) émission pour « Souviens-toi du jour ». Mylène est invitée dans ce grand show mettant à l’honneur Johnny Hallyday ; le titre de l’émission fait référence au nouvel album de l’idole, « Sang pour sang », qui sera un énorme succès – le premier disque de diamant du chanteur qui dit partout son admiration pour Mylène Farmer, et ce depuis des années. Il l’a donc invitée dans son show. Et chose exceptionnelle : après sa chanson, Mylène accepte une petite interview à trois, alors qu’elle préfère généralement les tête-à-tête. Elle ne dira cependant que quelques mots. Jean-Pierre Foucault, assis en face de Johnny Hallyday, annonce l’arrivée de Mylène… Jean-Pierre Foucault : Elle s’intéresse au spectacle et aime les grandes salles, les grandes mises en scène. Tu vois de qui je veux parler, Johnny ? Johnny Hallyday : Oui, moi je l’aime beaucoup, personnellement, parce que, c’est vrai, elle fait

des très beaux spectacles. Je peux même dire que, quand elle part en tournée, et qu’elle fait des spectacles, elle ne gagne absolument pas d’argent parce que ses spectacles coûtent tellement cher, mais ils sont tellement beaux. C’est Mylène Farmer. JPF : Mylène Farmer. Elle est ton invitée. Mylène Farmer, « Souviens-toi du jour ». Mylène Farmer pour « 100% Johnny ». Le visage de Mylène apparaît en gros plan. Ses cheveux, très roux, longs et ondulés, dansent au souffle d’un ventilateur. Elle arbore son désormais classique micro-casque, et porte une robe en résine couleur chair épousant chaque forme de son corps, sur laquelle sont brodées des larmes de sang ou des flammes, selon ce qu’on veut y voir. On apprendra plus tard que cette tenue, signée Dominique Borg, aurait dû être portée lors du « Mylenium Tour », mais qu’elle a été écartée pour diverses raisons (trop fragile, il était difficile de l’enfiler entre deux chansons). Pour l’anecdote, elle valait, à elle seule, près de dix mille euros ! Mylène la remet presque six ans plus tard pour l’affiche du spectacle « Avant que l’ombre…à Bercy ». Pour ce qui est de la prestation elle-même, Mylène est accompagnée des six danseurs et deux danseuses du « Mylenium Tour » qui, eux, portent leur tenue de scène (pantalon noir


1999–2001 : Innamoramento

et manteau de voile bordeaux ouvert sur un torse nu pour les hommes, et sur un petit top noir pour les femmes). La chorégraphie est celle du spectacle, à ce détail près qu’elle commence plus tôt puisque les danseurs sont là dès le début de la chanson, ce qui n’est pas le cas sur scène. Comme d’habitude, en particulier dans les émissions réalisées par Gilles Amado (grand admirateur de la chanteuse), Mylène bénéficie de facilités de tournage (ampex et différentes prises) et d’une réelle volonté de faire du beau – lumières, flammes en incrustation, choix des couleurs, bougies au premier plan, montage dynamique : tout est voué à sublimer la prestation.

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Mylène Farmer

L’émission a été tournée bien en amont, et « Mylenium Tour » oblige, Mylène a fait un vrai ampex pour cette émission (rappelons que la chanteuse a pour habitude d’ampexer ses prestations, mais de venir quand même les refaire en plateau le jour de l’enregistrement, par respect pour le public) ; Mylène n’est donc pas là le jour de l’enregistrement, tout a été enregistré avant. Et ça s’entend dans le mixage son, notamment lors des applaudissements qui suivent l’entretien. Ça se voit aussi : la chanson à peine finie, elle est déjà assise auprès de Jean-Pierre Foucault et Johnny Hallyday ! JPF : Mylène Farmer. « Souviens-toi du jour ». Mylène invitée par Johnny pour «  100% Johnny ». Johnny qui nous a dit tout le bien qu’il pensait de toi, Mylène, il y a quelques instants (notons, pour l’anecdote, que, depuis quinze ans qu’il la reçoit, c’est la première fois que Jean-Pierre Foucault tutoie la chanteuse). Bonsoir Mylène. Mylène Farmer : Bonsoir. JPF : Tout va bien ? MF : Très bien (sourire). JPF : Bon alors, vous avez deux points communs tous les deux, si vous me permettez. C’est les tournées, parce que vous aimez, bien entendu, surprendre… JH : (le coupant) Je crois que Mylène est un petit peu comme moi : elle adore la scène – ça se voit d’ailleurs, ça se voit avec tous les décors et toutes les mises en scène qu’elle fait sur scène. Donc nous avons cette passion, déjà, en commun. Et puis, nous avons le public également. JPF : Oui. (se tournant vers Mylène)Alors, estce qu’on pourrait concevoir ce métier, Mylène, justement sans la scène, sans ce contact direct avec le public ? MF : (en regardant Johnny) C’est le meilleur moment, je crois (sourire). JPF : Et est-ce que c’est toi qui, directement, t’impliques dans l’imaginaire, dans la construc-

tion, dans la mise en scène du spectacle ? MF : C’est ce qui m’intéresse en tout cas, oui JPF : Alors cette tournée, qui est un triomphe, hein, reprend très très bientôt, au mois de décembre (elle reprendra en fait le 17 novembre, quelques jours après la diffusion de cette émission, après un mois de pause) pour finir, on peut le dire, d’une façon assez originale, à quelques milliers de kilomètres de Paris. A quel endroit ? MF : Je vais en Russie (large sourire). JPF : Oui. Pourquoi en Russie ? MF : (perplexe) Parce que c’est un public qui m’accueille (rire). JPF : Oui, donc c’est à Moscou, à Kiev, SaintPétersbourg. MF : (simultanément) Moscou, Kiev, Saint-Pétersbourg, oui (le concert de Kiev n’aura finalement pas lieu). JPF : Donc ce sont des villes que tu connaissais certainement en tant que touriste ? MF : Oui. JPF : Mais jamais en tant qu’interprète et artiste ? MF : Jamais, non. JPF : (se tournant vers Johnny, Mylène étant peu bavarde) Alors, premier contact, hein, avec le Russie… JH : Je sais que les russes adorent les chanteurs français, adorent la musique en général, mais adorent les chanteurs et les chanteuses français. JPF : Alors, je le disais : deux points communs. Le premier, c’est la scène, on vient de le voir. Puis, le second point commun, c’est le contact que vous avez tous les deux avec les fans, hein ? C’est vrai que Johnny tu pourrais pas imaginer un jour te passer du contact avec tes fans ? JH : Oui, enfin bon, je dirais pas que les fans, parce que c’est vrai que les fans c’est important, mais je crois que c’est le public en général. Je crois que, en général, le public, ils viennent voir d’abord des artistes qui leur donnent quelque chose. Je pense qu’il faut être généreux quand on est sur scène, ce qui est le cas de Mylène. Et on donne autant qu’on reçoit. Tu sais, il y a pas de mystère : les gens ne te donnent rien si tu ne leur donnes pas quelque chose. JPF : (à Mylène) C’est le même avis, je suppose ? MF : C’est vrai (rire). JPF : Ben voilà ! Donc Mylène a dit « C’est vrai » donc y’a pas de problème. Merci beaucoup, Mylène, d’avoir accepté l’invitation de Johnny MF : Merci à vous. L’animateur invite alors Johnny à se lever pour aller chanter une de ses nouvelles chansons, « Quelques cris ».


Le point J Date 09.11.1999 Chaîne TVA (Québec) Présenté par Julie Snyder

En plein « Mylenium Tour », Mylène accorde un entretien pour le célèbre talk-show québécois de Julie Snyder (qui viendra, quelque temps plus tard, s’essayer à une carrière à la télévision française, sans réel succès). Il faut dire que, à l’époque, il avait été fortement question que la chanteuse aille donner quelques shows outreAtlantique. Mais ça ne s’est finalement pas fait. Curieusement, l’entretien ne sera illustré qu’avec des images du Tour 96. Autres curiosités de l’interview : Mylène y rit vivement…et fume ! C’est la seule télé, à ce jour, où la chanteuse s’est autorisée ce ‘vice’ Le sujet commence par un rapide patchwork audio et vidéo, mêlant des extraits des différentes tournées et des différents clips de Mylène, mais aussi des images de la chanteuse dans les coulisses de son « Mylenium Tour », avant d’entrer en scène. Puis on découvre l’animatrice canadienne, à l’accent très prononcé, en face de Mylène, toutes deux assises sur des canapés en cuir noir, dans ce qui semble être une loge. La chanteuse porte une longue jupe écrue et une veste en jean bleu. Julie Snyder : Vous avez un succès phénoménal. Grasset disait que la réussite c’est souvent la revanche sur le bonheur. Est-ce que ça s’applique à vous ? Mylène Farmer : Probablement, oui (rire). Oui, c’est très difficile d’être heureux. JS : Est-ce que quand vous étiez petite, vous vous disiez : « Quand je serai grande, je serai

chanteuse » ? MF : Non, du tout. Je crois que je ne me suis jamais posée cette question. En tout cas, je n’en ai pas le souvenir. Je ne sais pas. JS : Et à quel moment vous avez eu envie de devenir chanteuse ? MF : C’est un hasard. Je voulais être actrice, donc j’ai pris des cours de théâtre, mais ça c’était plus tardivement. Et puis c’est une rencontre qui a fait que j’ai commencé la chanson. JS : Et puis, vous vous êtes dit : « Je me lance là-dedans » ? MF : Là, je crois que c’est la vie qui m’a happée. En tout cas, je me souviens m’être dit : « Je sais que c’est ce que je veux faire ». Surtout à travers l’écriture. C’est quelque chose qui m’a tout de suite beaucoup aidée et intéressée. Extrait de « Rêver » pendant le « Live à Bercy » qui se poursuit pendant les deux questions suivantes. JS : Votre spectacle est très spectaculaire, est un grand déploiement. Ça ne ressemble à rien. Autant c’est très spectaculaire, autant c’est très, parfois très émotif, très intimiste. Quand vous vivez les moments d’émotion, on sent la foule frissonner avec vous, et vous pleurez même en interprétant certaines chansons, dans quel état êtes-vous ? MF : D’émotion intense. C’est quelque chose à la fois qui consume, et à la fois c’est un partage. JS : Est-ce que vous pleurez systématiquement à chaque spectacle ? MF : Ecoutez, je ne sais pas. Je ne réfléchis pas à tout ça. Si ce n’est qu’il y a des chansons, oui, dont le texte me touche profondément. Et puis c’est vrai que l’écoute que j’ai, qui est d’une grande grande qualité, d’une grande chaleur, me provoque aussi, me suscite des émotions. Fin de l’extrait de « Rêver ».

JS : Quand on assiste à votre spectacle, on a l’impression d’être à la messe, à une cérémonie (sourire de Mylène). Et après la cérémonie, après la communion avec le public, parce que c’est très très intense, est-ce que vous ressentez un vide après, après cette grande force ? MF : Je le ressens fatalement. Mais c’est plus après une… quand une tournée est terminée, que c’est vraiment le grand trou noir. Là j’ai la chance d’être accompagnée et entourée. Donc c’est vrai que le plongeon est assez bref. Maintenant, la nuit parfois (rire) propose d’autres choses. JS : Les paupières ont du mal à se fermer ? MF : Oui, beaucoup de mal oui. JS : Qu’est-ce que vous faites dans ce cas-là ? MF : Je crois que j’ai le spectacle qui revient en boucle. Ce que j’ai considéré comme étant des erreurs. Je pense à des textes, je pense à des mouvements, à tout ce qui fait le spectacle. Extrait de « Désenchantée » lors du « Live à Bercy ». JS : Vous arrivez à tout gérer. Par exemple, le spectacle, c’est vous qui l’avez conçu. MF : C’est moi, c’est moi et beaucoup d’autres. Je crois que faire les choses seule, c’est quelque chose qui ne m’intéresse pas. J’aime le dialogue, que ce soit avec un, deux, dix...Maintenant, donner naissance à quelque chose et puis après faire appel à des gens de talent autour de moi. JS : Non, mais vous le portez sur vos épaules. MF : (sourire) Je le porte sur mes épaules oui, en tout cas au moment X, c’est-à-dire quand je rentre sur scène, il n’y a plus que moi, mais aussi des danseurs et des musiciens, et une technique. Mais c’est vrai que si moi je flanche, le spectacle n’est plus. Extrait de « XXL » lors du « Live à Bercy ».


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JS : Vous êtes née au Québec (Mylène confirme). Et où vous avez vécu exactement au Québec ? En région ? A Montréal ? MF : Une province du Québec, je ne sais plus. (silence) Je me souviens simplement du nom Sainte-Marcelline, si ça peut vous aider (rire). Le reste, je ne sais pas. JS : Vous alliez chez les sœurs, chez les Marcellines ? MF : Oui. JS : Et pourquoi vos parents, qui sont quand même français… Parce que vos parents sont pas québécois – on dit souvent que vous êtes québécoise ; vous l’êtes parce que vous êtes née au Québec, vous avez un passeport canadien (Mylène confirme). Mais pourquoi vos parents sont venus au Québec ? MF : Pour raison professionnelle. JS : Et ils sont retournés en France aussi pour raison professionnelle ? (Mylène confirme) Et est-ce que vous étiez contente de retourner en France ? MF : Je ne peux pas… Je pourrais mentir. Je n’ai pas ce souvenir là non plus (rire). JS : Mais quand même, pour une petite fille, passer du Québec à la France, donc c’est une autre culture, c’est… Avez-vous eu un choc en arrivant ici ? MF : Ecoutez, on m’a dit, alors là je vais vous répéter ce qu’on m’a dit, que c’était quelque chose d’assez difficile. Maintenant, moi-même, je n’en ai pas le souvenir. Extrait de « Vertige » lors du « Live à Bercy ».

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Mylène Farmer

JS : Y’a des tableaux qui sont très sexy. Vous êtes quand même, peut-être que vous n’aimerez pas l’expression, vous êtes un sex-symbol… MF : Je ne sais pas (rire). JS : Non mais que vous le sachiez ou non (rire de Mylène). Vous êtes très belle. Est-ce que vous, vous vous trouvez belle ? Quand vous vous voyez sur scène ou quand vous regardez les vidéos ? MF : Non, non. Ce sont des moments difficiles pour moi (rire). Je préfère voir l’ensemble, voir si le moment est beau, riche, émouvant, mais quant à moi, me polariser sur moi, non, c’est

toujours quelque chose de très difficile. JS : Pourquoi c’est quelque chose de si difficile de parler de vous, de penser à vous,… MF : (la coupant) Y’a pas de réponse. JS : … de vous regarder ? MF : Je ne sais pas. Extrait du clip de « Libertine ». JS : Est-ce que vous êtes aussi libertine que dans vos clips ? MF : Je…Là…Je sais que cette question revient souvent, je ne peux pas répondre à cette question-là (rire). JS : Ah ben comment je pourrais la formuler ? (Mylène, qui tient désormais une cigarette, fixe silencieusement l’animatrice du regard, tout en lui souriant) Vous me regardez et : « Allez, rame ! Rame ma vieille ! Je t’écoute » (rires). MF : Passez à une autre question en tout cas (rires). JS : Ah, c’est ça ! Ma prochaine question, euh : est-ce que vous aimeriez être comme dans vos clips ? MF : Vous savez, une chanson, c’est une chanson. (sur un extrait du clip de « Sans contrefaçon ») Après on a envie d’y mettre des images, de raconter une histoire à travers cette chanson. Donc c’est un moment choisi, un morceau choisi. Vous dire que si j’exprime « Sans contrefaçon, je suis un garçon », si vous me posez la question : « Est-ce qu’aujourd’hui, vous avez toujours envie de mettre un mouchoir dans votre pantalon ? », je vais vous dire : « Non, c’était le passé ». Maintenant j’ai exprimé ce moment-là. Ça ne veut pas pour autant dire que je dois véhiculer ou cette image ou ce sentiment toute ma vie. Extrait de « Sans contrefaçon » lors du « Live à Bercy ». JS : Je vous oblige en ce moment à parler de vous, parce que j’ai pas le choix puisque je fais une interview sur vous, et qu’on va pas parler du canapé en cuir sur lequel vous êtes assise (rires). Est-ce que vous avez l’impression, par exemple, d’être chez le dentiste et qu’on va

vous arracher une dent ? MF : Ce n’est pas à ce point-là, mais c’est une sensation de malaise… (rires). Extrait du clip de « Comme j’ai mal ». JS : Vous le dites vous-même : vous avez une araignée en vous. Vous êtes une petite ‘bibite’. (Mylène reste silencieuse, perplexe, puis fait les gros yeux et rit) Non, mais euh…Parce que pour moi, vous êtes une petite ‘bibite’ dans le sens où… MF : (la coupant) Ça veut dire quoi ? (elle éclate de rire, et porte sa cigarette jusqu’au cendrier posé par terre) JS : Une ‘bibite’, ça existe pas en France ? Y’a pas de mot ‘bibite’ ici ? (Mylène est morte de rire) En France, une ‘bibite’, c’est…Euh, en québécois, une ‘bibite’ c’est un petit moustique (Mylène éclate de rire en tenant sa cigarette, tandis que l’animatrice mime l’insecte), genre avec des pattes. MF : D’accord. Extrait de « Alice » lors du « Live à Bercy ». JS : (sur un extrait du clip de « Pourvu qu’elles soient douces », la scène de la poursuite à cheval) Mylène, dans vos clips, vous prenez beaucoup de risques : vous faites les cascades, vous galopez à cheval, vous êtes attachée sur des trains. Est-ce que vous vous êtes déjà blessée ? MF : Brûlée deux fois, sur le train, et pendant le dernier clip (« Souviens-toi du jour »), il y avait du feu à proximité et il faisait très très chaud. Probablement des bleus, oui (sourire). Je suis quelqu’un de très physique. J’aime ça. J’aime cette prise de risque. JS : Est-ce que vous aimez souffrir ? MF : D’une certaine manière, oui, certainement. Certainement. Extrait du clip de « Je t’aime mélancolie » (quand Mylène reçoit de nombreux coups de poing). JS : Vous partagez votre vie avec un singe qui s’appelle E.T. (sourire de Mylène). Comment ça


s’est passé ? Est-ce que vous vous êtes levée un matin en vous disant : « Tiens, aujourd’hui, je vais me procurer un singe » ? MF : Je crois que ça s’est passé comme ça. J’avais envie d’un animal, et je suis allée dans les magasins qui, malheureusement, vendent des animaux, et je suis tombée sur cette petite fille (sourire). JS : Et vous l’avez vue tout de suite, comme ça ? MF : Immédiatement. C’est tentant d’avoir un singe (sourire). JS : Oui ? (Mylène confirme) C’était un coup de foudre ? MF : Oh oui, total ! (sourire) JS : Instinctivement, on sait comment élever un chien ou un chat, mais est-ce que instinctivement, vous saviez quoi faire avec le singe ? MF : Oui. J’ai dû être singe dans une autre vie donc ça a été très facile (rires). JS : Vous croyez à la réincarnation ? MF : J’aime cette idée ; elle est très poétique. JS : Et qu’est-ce que vous voudriez être dans une autre vie ? MF : Ben puisqu’on ne peut pas être un animal, c’est forcément un humain. Maintenant…peu m’importe. Vivons celle-ci ! Extrait du clip de « Je te rends ton amour ».

JS : Vous êtes proche de Salman Rushdie pour qui, en quelque sorte, le monde est une prison (Mylène confirme). Et vous, vous avez déjà dit : « Parfois, je me sens enterrée vivante ». Est-ce que vous avez l’impression que votre liberté, à vous aussi, vous échappe ? MF : Parfois. Mais je ne suis pas sûre que ce soit le monde environnant qui m’impose ça ; je crois que c’est moi toute seule effectivement. Et quant à Salman Rushdie (la couverture de son livre polémique « Les versets sataniques » apparaît à l’écran), c’est quelqu’un de très gai dans la vie ; il a beaucoup d’humour. JS : Est-ce qu’il vous communique cet humour ? MF : Oh oui totalement ! On a de grands éclats de rire ensemble (sourire). JS : Qu’est-ce qui vous attirait chez lui ? Pourquoi vous avez eu envie d’aller vers lui ? MF : Parce que c’est quelqu’un de charismatique. Parce que c’est un grand écrivain – je n’ai pas tout lu ses livres (sic !), mais certains. Et puis parce que ce qu’il a vécu est quelque chose qui m’a profondément touchée. Et j’avais envie… Voilà, il s’est trouvé qu’on s’est rencontrés lors d’une soirée ; je suis allée spontanément vers lui parce que j’avais envie de le connaître. JS : On vous sent moins sombre qu’avant ? MF : (silence et haussement d’épaules) Ça, je suis

pas sûre que je puis répondre à une question comme celle-là. Je… (silence) Je crois qu’on a tous… (silence) ses ombres. Donc je les porte en moi, et je les porterai jusqu’à la fin de mes jours. (silence) Je crois qu’on apprend aussi avec la vie, avec le temps, ses expériences. Là encore, tenter que de laisser ses fardeaux de côté parfois, mais maintenant, ça resurgit tellement vite. La fin de l’entretien se fait avec « Désenchantée » en fond sonore. JS : Votre plus grand hit, ou en tout cas un de vos plus grands hits, c’est « Désenchantée ». (Mylène confirme) Qu’est-ce qui vous enchante ? MF : La gentillesse. La générosité. (silence) Toute forme d’art : la peinture, la littérature, le cinéma, … Et puis… (silence) Beaucoup de choses. Le voyage ; j’aime voyager. JS : Merci beaucoup. MF : Merci à vous…d’avoir souffert avec moi (rires). JS : Oh oui j’ai souffert autant que vous ! Y’avait une belle réciprocité dans la souffrance (rires). Les deux femmes se lèvent. L’interview se termine sur la toute dernière image du DVD « Live à Bercy », quand on voit Mylène dans les coulisses, après sa sortie de scène – le tout sur la musique de « Désenchantée ».

NRJ Music awards Date 22.01.2000 Chaîne TF1 Présenté par Ophélie Winter

La chanteuse apparaît à l’écran dès le générique de début, lors de la montée des marches. Elle salue le public sous les crépitements des flashes. Perchée sur des talons aiguilles, elle porte une coiffure dans le même esprit que celle du « Mylenium Tour » – mais sans les nœuds blancs – et une robe noire à bretelles au décolleté plongeant, très fendue sur le devant. Elle couvre ses épaules d’une imposante écharpe en soie noire et jaune. Le premier prix qui la concerne est celui de l’album francophone de l’année. Elle a pour ‘concurrents’ Céline Dion, David Hallyday, Pierpoljak et Zebda. Le trophée est remis par Richard Anconina et Dolores O’Riordan (des

Cranberries). La chanteuse irlandaise peine à lire le titre de l’album gagnant et demande l’aide du comédien français : c’est « Innamoramento ». Assise au premier rang, aux côtés de Thierry Suc, son manager, et de Pascal Nègre, le patron de sa maison de disques, Mylène se lève et monte sur la scène, dans la même tenue qu’elle portait sur les marches, et sur la musique de « Souviens-toi du jour (sweet guitar mix) ». Elle est très applaudie. Son prénom est scandé par le public. C’est sous les cris qu’elle commence son discours.

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Voici la toute première cérémonie des NRJ Music Awards que l’on retrouve depuis, tous les ans, fin janvier, depuis le Palais des festivals, à Cannes. L’évènement réunit chaque année les plus grandes stars francophones et internationales qui se voient remettre des prix pour lesquels le public a voté, contrairement aux traditionnelles Victoires de la Musique décernées par les professionnels. C’est sans doute pour cette raison que Mylène, trois fois nominée, est présente pour

cette première. Grand bien lui en a pris puisqu’elle est la grande triomphatrice de la soirée.

Mylène Farmer : Je me sais peu prolixe. C’est pour ça que j’ai préparé quelques lignes, au cas où. (elle déplie une grande feuille, puis la lit) J’aimerais vous dire tout d’abord que je suis très honorée de recevoir ce prix, même si l’idée du méritoire m’est un peu étrangère. Je voulais re-


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Mylène Farmer

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« Je n’avais pas le goût des prix, mais je crois que je commence à aimer ça. » mercier le public d’avoir accueilli cet album de cette façon (cris et applaudissements). Chaque album est pour moi un morceau de vie que l’on met sur partition. La réalisation de celui-ci fût plus difficile que les précédentes. Peut-être la peur de ne pas retrouver les personnes qui m’aimaient ; la peur de décevoir aussi. J’ai choisi de faire ce métier. J’ai eu la chance de pouvoir, au fil des années, trouver une réponse, un dialogue, parfois une communion (elle s’arrête, gagnée par l’émotion ; le public l’applaudit très chaleureusement). Merci beaucoup (rire). Enfin, je voudrais vous dire que je suis amoureuse des mots. J’aime les partager avec les autres. (en regardant le balcon où se trouve le public) Avec l’autre. J’aime ce moment présent. (dans un sanglot) Et j’aime ceux qui m’aiment, merci beaucoup (applaudissements). Le second prix qui intéresse Mylène est celui du spectacle de l’année. Et son « Mylenium Tour » l’emporte ! Toujours au premier rang, la chanteuse se lève et monte sur scène, à nouveau sur la musique de « Souviens-toi du jour (sweet guitar mix) ». Elle porte une nouvelle tenue : un pantalon noir (transparent du bas jusqu’à la cuisse) et un bustier noir très Muglerien surmonté d’un imposant collier, toujours noir (qu’elle porte sur le « Mylenium Tour », notamment pendant « Optimistique-moi »). Les espagnols Rossy de Palma et Enrique Iglesias lui remettent son prix sous les applaudissements d’un public très enthousiaste qui scande à nouveau son prénom. C’est encore une fois dans le bruit que Mylène va parler. MF : Je voudrais remercier à nouveau le public (elle regarde le balcon). Sans le public, je ne suis rien. Remercier Thierry Suc qui est le produc-

teur de ce spectacle et qui est assez fou pour m’avoir dit oui. Et je crois que c’est tout. Merci infiniment (large sourire). Merci. Des extraits du « Mylenium Tour » sont alors diffusés (« Innamoramento » sur la musique de « Mylenium », puis « Maman a tort », « Pourvu qu’elles soient douces », « Libertine », « Optimistique-moi » et « L’âme-stram-gram »). Aussitôt après, tandis que l’audience applaudit généreusement, on entend le début de « Optimistique-moi ». Mylène est sur scène avec ses six danseurs (ceux de la tournée). Aux premiers mots de la chanson, des effets pyrotechniques surgissent de chaque côté. En dehors de cela, la prestation est celle du « Mylenium Tour » : même chorégraphie, même tenue pour les danseurs (Mylène ayant gardé celle dans laquelle elle vient de recevoir son second trophée). La performance diffusée à l’écran a été ampexée dans l’après-midi, mais la chanteuse la reproduit à l’identique devant le public présent dans la salle. On note d’ailleurs quelques petits ratés dans le subterfuge technique (outre des changements dans la coiffure selon les plans) : ainsi sur le bridge, Mylène est de face en gros plan alors qu’elle tourne sur elle même dans le plan large. C’est la première fois que Mylène interprète ce titre à la télé ; il sort en single un mois plus tard, jour pour jour. La chanson à peine finie, Ophélie Winter, qui présente le show, laisse à peine le temps au public d’applaudir et lance la pub depuis le milieu de la salle tandis qu’on voit Mylène et ses danseurs quitter la scène, en second plan. Plus tard, arrive la troisième et dernière catégorie pour laquelle Mylène concourre : l’interprète féminine francophone de l’année. Ses concur-

rentes sont Céline Dion, Lara Fabian, Axelle Red et l’hôtesse de la soirée, Ophélie Winter. Mylène gagne à nouveau. Pour la troisième et dernière fois de la soirée, elle quitte son premier rang. Elle a gardé la tenue du trophée précédent, mais y a ajouté l’écharpe qu’elle portait sur les marches et a abandonné son collier « Optimistique-moi » pour un tour du cou genre couronne d’épines. Elle rejoint la présentatrice Lynda Lacoste et le footballeur Christophe Dugarry qui lui donnent son prix. Elle est visiblement très émue. Les cris du public n’en sont que plus grands. MF : Merci pour cette émotion (elle baisse le micro, trop haut pour elle). Je voudrais remercier Laurent Boutonnat. Si ma route n’avait pas croisé la mienne (sic !), je crois que je ne serais pas là ; j’en suis même sûre (applaudissements). Remercier ma maison de disques, Polydor, et tout particulièrement Pascal Nègre (qu’elle regarde en souriant ; gros plan sur l’intéressé très heureux du geste). Et enfin, remercier NRJ qui m’a soutenue depuis le début, c’est important. (en regardant le balcon) Et, pour conclure, je voudrais remercier le public (applaudissements et cris). Je n’avais pas le goût des prix, mais je crois que je commence à aimer ça (rire ému). Merci infiniment… Le réalisateur enchaîne alors brutalement avec un plan sur Ophélie Winter, allongée sur un canapé rouge, qui annonce l’invité suivant. On ne revoit pas Mylène après. Pour information, c’est cette cérémonie qui a rendu possible l’interview qui sera diffusée sur MCM le 10 juin qui suit. C’est là, en effet, que se sont rencontrées Mylène et Lynda Lacoste.


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Les années tubes Date 03.03.2000 Chaîne TF1 Présenté par Jean-Pierre Foucault

Première ‘vraie’ télé pour « Optimistique-moi » désormais sorti en single. Mylène y livre la prestation scénique du « Mylenium Tour », entourée de ses six danseurs. Seule la tenue change. Les danseurs sont vêtus d’un t-shirt noir et d’un pantalon recouvert d’un drapé blanc. Mylène, micro-casque aux lèvres, porte, elle, un habit aussi superbe qu’original, tiré de la collection « SDF » de Galliano, qui ne facilite en rien ses pas de danse (et qu’elle ne portera plus) : un cycliste gris et noir, des bottes à talons aiguilles et un top asymétrique fait de tissus superposés se terminant par une traîne bouffante très imposante, mêlant différents tissus et différentes couleurs (gris, rose, noir). Ses cheveux sont coiffés comme dans le clip de la chanson.

Russie Le « Mylenium Tour » se termine en Russie par trois dates exceptionnelles : les 4 et 5 mars à Moscou, et le 8 mars à Saint-Pétersbourg. Là-bas, Mylène multiplie les interviews pour divers médias locaux. Elle accorde notamment trois entretiens télévisés qui, à l’antenne ne dépassent pas les cinq minutes chacun. Pour les deux premiers, à Moscou, la chanteuse porte une veste en jean bleu sur un petit top blanc, une longue jupe écrue à motifs et des socquettes blanches dans des chaussures à talons aiguilles (tenue que l’on retrouvera trois mois plus tard lors de son interview par Lynda Lacoste sur MCM).

Chaîne MTV

Mylène est assise sur un gros fauteuil en cuir noir. Des images extraites de ses deux premières tournées et ses clips les plus récents s’intercalent entre chaque question. La traduction russe se fait par-dessus la voix de la chanteuse, ce qui rend son propos quasi inaudible. On perçoit néanmoins quelques phrases, nous laissant comprendre qu’elle parle de son album, de ses clips, de cinéma, et évidemment de son « Mylenium Tour » dont, précise-t-elle, le tracklisting a été changé pour la Russie, avec l’insertion de deux titres, en l’occurrence « Je t’aime mélancolie » et « Que mon cœur lâche ».

Chaîne TBЦ

Mylène se retrouve face à un journaliste en costume cravate. Elle est assise sur une chaise, bras et jambes croisés. Le décor est un fond bleu, ce qui lui confère un aspect J.T. ou newsmagazine. Petit détail pittoresque : pendant tout l’entretien, une petite musique d’ascenseur, type folklorique, jouée à la guitare sert de bande-son. Une nouvelle fois, la traduction quasi simultanée empêche la bonne compréhension du propos de Mylène pour les non russophones que nous sommes.

La prestation est totalement ampexée. Mylène est en effet en pleine tournée. Au moment de la diffusion de l’émission, la chanteuse est en Russie où se termine le « Mylenium Tour ».

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Mylène Farmer

Chaîne TV Saint-Pétersbourg

Cette troisième et dernière télé russe prend place à Saint-Pétersbourg, dernière escale du « Mylenium Tour ». La chanteuse y apparaît plus sophistiquée que sur les deux télés précédentes : maquillage et coiffure sont plus soignés, et elle porte une tenue plus élégante (un pantalon noir et un pull chaussette blanc avec col à plumes). Hélas, une nouvelle fois, la traduction simultanée empêche toute retranscription de l’entretien.


Hit machine Date 11.03.2000 Chaîne M6 Présenté par Charly et Lulu

Nouvelle émission pour « Optimistique-moi » et seconde venue de Mylène à l’émission musicale du samedi matin de M6. Accompagnée de ses six danseurs, la chanteuse livre la performance habituelle, mais avec une nouvelle tenue : un petit top à volants (couvrant ses seins et ses coudes) et un pantalon, totalement découvert sur la cuisse droite et dont les tissus superposés volent quand Mylène bouge. Sa coiffure est toujours celle du clip. Les danseurs, eux, restent habillés comme lors du passage aux « Années tubes », une semaine plus tôt. Petit événement : Mylène arbore un tatouage (éphémère) sur l’arrière de son épaule gauche, c’est la seule et unique fois, en vingt-trois ans de carrière, que la chanteuse expose ainsi un dessin sur peau.


1999–2001 : Innamoramento

Tapis rouge Date 25.03.2000 Chaîne France 2 Présenté par Michel Drucker

Dernière promo pour « Optimistique-moi ». Mylène est annoncée par Michel Drucker et son invité d’honneur du jour, Laurent Gerra , imitant Jacques Chancel, animateur du « Grand échiquier ». Michel Drucker : Jacques Chancel, vous avez un faible, je crois, pour Mylène Farmer. Laurent Gerra : Mylène Farmer ? (rire) Oui, j’ai un faible. MD : « Optimistique-moi ». LG : « Optimistique-moi », oui. Je crois qu’elle a bien besoin d’être optimistiquée. MD : Et bien, Mylène Farmer, « Innamoramento »… LG : (le coupant) Mylène Farmer, c’est un petit peu la Mady Mesplé des années 2000 (cantatrice française ayant débuté dans les années 50). MD : « Innamoramento », avec Laurent Boutonnat, en italien, ça veut dire « Amour naissant ». Merci Guy (Guy Béart était là aussi). Et on écoute Mylène. Une prestation en tous points similaire à celle du « Hit machine » (mais sans le tatouage) : mêmes danseurs, mêmes tenues, même coiffure, même chorégraphie. A l’instar de toutes les télés faites pour « Optimistique-moi », Mylène a totalement ampexé son passage et ne dit pas un seul mot.

Le Mag

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Mylène Farmer

Date 10.06.2000 Chaîne MCM Présenté par Lynda Lacoste

Fidèle à MCM, Mylène accorde un nouvel entretien fleuve à la petite chaîne du câble et du satellite (le troisième après « Escale » le 2 janvier 1993 et « Le mag » le 8 juin 1996) – rappelons que la chanteuse a toujours soutenu l’idée d’une chaîne musicale française. Ce qui

est étonnant ici, c’est que la star vient parler alors qu’elle n’a rien à vendre ; son « Mylenium Tour » s’est terminé en Russie début mars et ne sortira en CD et DVD qu’en fin d’année, son dernier single, « Optimistique-moi » a déjà quatre mois, et le prochain, « Innamoramento », n’arrivera pas avant le 18 juillet. Cette interview est d’autant plus inattendue que, à la fin de l’émission de Paul Amar

sur Paris Première le 30 mai 1996, la star avait confié que c’était la dernière fois qu’elle donnerait une interview d’une heure. Ceci dit, si l’émission d’aujourd’hui dure une heure, l’entretien en lui-même ne dépasse pas les trente minutes. L’interview a été tournée au Costes, à Paris. Elle a été enregistrée d’une traite, sans aucune coupure. On apprendra plus tard que la prise de contact pour cet entretien s’est faite lors des


derniers NRJ Music Awards. C’est en effet là-bas que Lynda Lacoste et Mylène se sont rencontrées ; l’animatrice remettait à la chanteuse son trophée d’artiste féminine francophone de l’année. L’émission commence par des images de l’équipe technique s’affairant à tout installer pour l’entretien, le tout sur la bande-son du clip de « L’âme-stram-gram ». Lynda Lacoste arrive alors sur le lieu de tournage, puis, une fois prête, lance l’émission. Lynda Lacoste : Bonjour et bienvenue dans « Le mag ». Aujourd’hui, c’est un mag exceptionnel puisqu’il s’agit de MF qui n’accepte que très rarement de venir à la télévision. N’oubliez pas que pour tous les artistes, vous pouvez poser des questions soit par Internet, soit par minitel, soit par téléphone. Allons-y pour la première partie. L’animatrice (ex-actrice d’AB Productions pour « Hélène et les garçons ») se rend alors dans la pièce où aura lieu l’interview. On assiste aux dernières mises au point techniques, tandis qu’une jeune femme allume des bougies un peu partout dans la pièce. Un petit sujet sur la carrière de Mylène est alors diffusé, avec des extraits de clips, une rapide biographie…et quelques perles comme la sortie de « Anamorphosée » en octobre 1996 ! On retrouve alors l’animatrice et la chanteuse assises face à face. Mylène, curieusement, est habillée comme lors de ses télés russes, trois mois plus tôt (une veste en jean bleu et une longue jupe écrue à motifs) et arbore un chignon avec frange surmonté de rajouts qu’on pourrait presque assimiler à des dreadlocks. L’entretien

commence. Mylène restera souvent perplexe devant les questions parfois surréalistes de l’australienne dont l’accent ne perturbe pas trop la compréhension du dialogue. LL : Bonjour Mylène. Merci beaucoup d’être venue dans « Le mag ». Alors, vos concerts sont toujours des spectacles avec une répétition, j’imagine, immense. Mais est-ce que ça vous est arrivée de littéralement ne plus pouvoir marcher sur vos pieds à cause des talons aiguilles, et comment faites-vous pour vous récupérer assez vite ? Mylène Farmer : Pour me récupérer vite, je me suis beaucoup entraînée avant cette scène ; j’ai un entraînement physique. Quant aux talons aiguilles, c’est assez facile de marcher avec, finalement (sourire). LL : Ah bon ?! (rire de Mylène) Moi, j’ai du mal. Mais c’est peut-être le fait de danser avec. MF : Je ne danse pas sur des talons aiguilles ; ce sont des talons qui sont un petit peu plus larges quand même. Mais c’est une difficulté, en tout cas un danger pour les chevilles, mais j’ai pris le parti que de choisir ces chaussures ; c’est plus élégant. LL : Les concerts ne sont pas sans risque. Vous êtes tombée accidentellement (rire de Mylène) à Lyon en 1996. Qu’est-ce que vous vous êtes dit ? Est-ce que vous vous êtes dit : « Bon il faut virer quelqu’un tout de suite », « Est-ce qu’il faut calmer la chorégraphie », « Est-ce qu’il faut faire moins de concerts » ? Qu’est-ce que vous vous êtes dit ? MF : Renvoyer tout le monde (rire). LL : (surprise et perplexe) Oh ! On vire tout le monde ?! (rires) Ça m’étonnerait ! (Mylène, silencieuse, laisse planer le doute) Oh oui ? MF : Non, non. Je ne sais pas bien quoi répondre. Ça a été un grand choc pour moi en tout cas.

LL : Oui. Avec votre dernier album, il y avait quand même encore, même dans l’an 2000, des clips qui ont été censurés le jour (« Je te rends ton amour »). Est-ce que ça vous a choqué ou est-ce que vous cherchez exprès d’avoir des clips qui choquent parce que, comme ça, on parle plus ? MF : Je crois que ça n’a aucun intérêt que de vouloir choquer à tout prix pour que l’on s’intéresse à vous. Il se trouve que j’aborde des sujets qui sont peut-être épineux, voire tabous… C’est un risque. Maintenant, la censure, et spécialement en France je trouve, est un peu sévère et s’attaque à tout et n’importe quel sujet, ce que je trouve vraiment regrettable. LL : Même votre premier clip, « Maman a tort », a été censuré à l’époque. Mais vous êtes quelqu’un qui est capable de faire des clips qui peuvent durer jusqu’à dix-sept minutes. Quand vous voyez le niveau que vous avez atteint, vous, quelle est votre réaction sur le niveau des clips qu’on peut voir en France en l’an 2000 ? MF : (dans un sourire) Là encore, vous me demandez de porter un jugement et j’avoue que c’est quelque chose que je n’aime pas faire. Je peux vous dire, en revanche, qu’il y a des artistes que j’aime beaucoup et qui font de très beaux clips. J’aime l’univers de Björk, j’aime ce qu’a apporté Peter Gabriel, David Bowie, … Y’a beaucoup d’artistes qui ont des clips intéressants. Diffusion partielle du clip de « Optimistiquemoi ». LL : Sur cet album, vous avez travaillé, bien sûr, avec j’imagine un homme dans lequel vous avez beaucoup de confiance, Laurent Boutonnat (Mylène confirme et sourit). Mais vous avez travaillé avec d’autres compositeurs pour cet


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album-là. Est-ce que… MF : (la coupant) Non. LL : C’était que lui qui a fait toutes les chansons ? MF : J’ai fait, moi, quelques chansons, comme compositeur et comme auteur. LL : D’accord. MF : Et c’est tout. LL : OK. Mais pour les nouveaux gens avec qui vous avez envie de travailler, est-ce que vous demandez à Laurent son avis ou est-ce que vous lui parlez après d’avec déjà pris votre décision sur les nouvelles gens avec vous avez envie de travailler ? MF : Si vous me parlez de composition, je n’ai jamais eu le souhait que de travailler avec quelqu’un d’autre qu’avec Laurent. Maintenant, en termes de vidéos, oui j’ai fait appel à beaucoup de réalisateurs différents. Est-ce que je demande son avis ? Non (rire). LL : D’accord. Et, parce que justement vos clips sont d’un tel niveau, est-ce que vous accepteriez de travailler avec des nouveaux talents, ou est-ce qu’il faut toujours quelqu’un qui ait déjà fait leurs preuves pour travailler avec vous ? MF : C’est d’abord très très difficile que de trouver un réalisateur, donc je vois beaucoup beaucoup de cassettes. C’est vrai qu’il m’est difficile d’aller vers quelqu’un qui n’a jamais rien fait parce qu’on ne peut pas s’appuyer sur un travail qui a déjà, sur des, enfin des choses qui sont concrètes, réelles. Donc je vais plus facilement vers des réalisateurs qui ont déjà réalisé des vidéos. Voilà, donc mon choix s’est porté sur Marcus Nispel, Abel Ferrara et Michael Haussman pour le dernier (« Optimistique-moi »).

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Mylène Farmer

Diffusion partielle du clip de « California ».

LL : Vous avez un corps magnifique… MF : (surprise et rire) C’est gentil. LL : Est-ce que, pour vous, votre corps est aussi important dans votre travail que votre voix ? MF : (soupir et sourire) Non. Non. (dans un rire) Je ne sais pas quoi vous répondre, si ce n’est que je… (silence) Tout est important ! On va dire, aussi bien, alors l’apparence physique que le vêtement, que le verbe aussi. Tout est important pour moi. Maintenant, est-ce que je suis obsédée par ma ligne, par mon corps ? Non, absolument pas. Je ne fais du sport que quand je monte sur scène. LL : D’accord. OK. Alors, vous êtes la seule artiste française qui est aussi collectionnée, et même plus collectionnée que Johnny Hallyday. Est-ce que vous êtes quelqu’un qui prend plus de temps à choisir les objets que vous avez envie d’associer avec votre nom ? Et est-ce qu’il y avait des objets que vous avez systématiquement refusés ? MF : Systématiquement refusés, je n’en ai pas le souvenir. Mais je travaille en tout cas avec quelqu’un qui me donne des idées ; parfois, j’apporte moi-même des idées. Et là encore, c’est quelque chose que je qualifie d’important. En tout cas, je fais attention, oui, à ce que je propose. Euh…Voilà (sourire). LL : Il y a beaucoup de questions sur l’Internet, beaucoup de sites qui vous sont consacrés. Estce que ça vous intéresse l’Internet ? Et est-ce que vous regardez les sites qui sont consacrés sur vous (sic !) ? MF : L’Internet m’intéresse, oui. Euh… Mais j’utilise mon computer surtout pour les e-mails ; j’aime bien correspondre (petit rire). LL : Et est-ce que vous regardez les sites qui sont consacrés à vous ? MF : On va rester euh… (embarrassée) Je ne sais… Je m’y intéresse, oui. J’ai du mal à… Le

culte de moi-même est quelque chose qui m’est difficile. Euh…Maintenant, je sais qu’il y a un travaille qui est fait, et qui est très bien fait. Donc je regarde ça de près et de loin. Je vais rester évasive (large sourire). LL : Alors, sur l’Internet, on dit qu’il y a des sites où on peut vous voir nue. Est-ce que votre entourage est au courant de ça ? Et, si c’est le cas, pourquoi ces sites existent-ils encore aujourd’hui? MF : Ecoutez, j’ignore ces sites (rire). Maintenant, il est facile de faire arrêt sur image quand on prend une vidéo et puis on va sortir l’image en question. Maintenant, si je suis dénudée ou nue dans une vidéo, qu’y puis-je ? Le faire interdire (soupir), c’est très difficile, très difficile. Même si on interdit, quelqu’un d’autre le fera. Donc tant pis pour moi ou… (sourire) Diffusion partielle du clip de « Libertine ». LL : Pensez-vous qu’on vit dans une société où les jeunes se sentent obligés d’être parfaits, ambitieux, énergiques tous les jours ? Et qu’est-ce que vous pouvez leur conseiller, les gens qui ont envie d’être individuels, uniques et différents ? MF : De rester uniques (sourire), c’est très important. Euh… (silence) Qu’est-ce que je peux rajouter ? Qu’il est important, et que je leur souhaite, d’avoir une passion dans la vie. C’est un moteur qui est fondamental pour vivre et survivre. LL : Vous avez beaucoup d’émotion en vous. Est-ce qu’il y avait des situations où vous vouliez absolument pas pleurer et ça arrive, et vous sentez que ça monte quand même, et est-ce que, puisque ça arrive peut-être souvent, vous avez une ruse pour éviter les larmes ? MF : Non, ça, je crois, c’est quelque chose que


je ne contrôle absolument pas. Et je ne veux pas me défendre que d’avoir justement une émotion forte. C’est arrivé énormément de fois en scène, à des moments auxquels je ne m’attendais absolument pas justement. Et, je crois, s’il y a quelque chose qu’on peut partager en scène avec le public, c’est justement une émotion. Donc je n’ai aucune immunition (sic !) (rire). LL : Alors, il y a beaucoup de comédiens qui adoreraient avoir autant d’émotions à leur portée. Est-ce que ça vous dirait un jour d’être prof de cinéma ou de théâtre ? MF : Absolument pas, non (rires). Non. LL : Non ? MF : Non. Et je crois qu’il y a beaucoup de comédiens qui ont leur propre émotion (rire). Diffusion partielle de « Rêver » (extrait du « Live à Bercy »), suivie de la seule coupure pub de l’émission. LL : On se retrouve dans « Le mag », avec Mylène Farmer, deuxième partie. Petit jingle. LL : Alors, un de mes films préférés, c’est un de vos films préférés aussi, c’est « Frances » (Mylène confirme), joué par Jessica Lange. Et il y a une scène dans ce film où elle revient chez elle, dans sa ville natale, en tant que grande star, et il y a une femme devant elle qui lui lèche les bottes, et elle dit : « Vous n’étiez pas la femme qui m’a haïe il y a dix ans, qui m’a traitée comme pire que rien ? ». Et donc, tout le monde a bien vu qu’elle l’a bien mis dans sa place (sic !). A l’époque où vous étiez mannequin, est-ce que vous avez eu des gens qui vous traitaient peut-être pas bien, quand vous étiez anonyme, et est-ce que vous avez pu vous faire justice aujourd’hui, avec la femme que vous êtes aujourd’hui ? MF : Ecoutez, je n’ai pas beaucoup de souvenirs, si ce n’est que je vais détourner la question : les personnes qui sont méchantes, vindicatives, il y en a, et j’en rencontre encore aujourd’hui…(silence) Maintenant est-ce que j’ai une réaction ? En général, j’essaie non d’avoir la réaction contraire à ses instincts premiers, à savoir que je préfère répondre par la gentillesse à l’arrogance. C’est moins douloureux (sourire). LL : Alors justement, vous avez dit que vous êtes dans une époque de votre vie où vous êtes en pleine forme, heureuse, beaucoup plus équilibrée, beaucoup plus de confiance en vous. Mais pour les jeunes qui vous adorent, qui peut-être sont en train de vivre des enfances où ils ont du mal à vivre le bonheur, qu’est-ce que vous pouvez leur dire pour qu’ils sortent de là ?

MF : Là encore, je crois que je n’ai aucune, ni solution, ni même conseil, si ce n’est que, j’en reviens à la réponse précédente : tenter de trouver une passion, un moteur dans sa vie. Maintenant, je crois qu’au travers de la lecture, et c’est ce qui m’est arrivé, on peut découvrir des choses, trouver des pansements (sourire). Et je crois que, dans le fond, la chose fondamentale, c’est le dialogue, c’est pouvoir trouver une forme de communication. Diffusion partielle du clip de « XXL ». LL : Vous avez travaillé avec beaucoup d’américains, vous avez travaillé pas mal aux EtatsUnis. Que pensez-vous avoir appris avec les américains que vous avez pas pu peut-être apprendre ici, en France ? MF : (silence) Probablement… (soupir et silence) Je pense au travail. Ce sont des gens qui sont très investis dans leur travail. Ce sont des personnes qui n’ont pas peur, je crois, ni du succès, et qui le revendiquent même. (silence) Je crois que c’est une rigueur dans le travail surtout. Maintenant, est-ce que j’ai appris ça d’eux ? Je n’en sais rien (sourire). Mais, en tout cas, j’ai pu, ne serait-ce que pendant les tournages de vidéos… Chacun est réellement à sa place et s’investit dans son travail. Il n’y a pas de mélange entre le sentiment et la fonction. Alors parfois c’est désagréable, mais parfois c’est agréable parce que c’est efficace et que ça va vite. LL : Alors, ce qui est rare avec les artistes, c’est que vous avez des fans qui peuvent venir vingtquatre heures avant un concert pour venir vous voir, et donc ils sont là peut-être pour être sûrs d’au premier rang, alors peut-être ils mangent pas, peut-être ils boivent pas, et le concert commence, ils tombent dans les pommes donc ils voient même pas le concert (rire). MF : C’est un peu dramatique tout ça, non ? (rires) LL : Non mais ça existe ! Alors qu’est-ce que vous avez envie de dire à tous ces pauvres gens qui vous adorent, qui ont même pas vu le concert du coup ? MF : Et bien que c’est dommage pour moi (large sourire). LL : Ah, oui ! Mais est-ce que vous pensez que c’est une des raisons pour lesquelles vous aimez bien sortir des live et faire des vidéos de vos concerts ? MF : Je ne suis pas sûre de comprendre le sens de la question. LL : Si y’a tellement de gens qui tombent dans les pommes donc ils voient pas le concert, ils vont le voir en vidéo. MF : (rire… consterné ?) Je ne sais pas. Mais, en tout cas, c’est quelque chose de très intéressant que de travailler sur un live, oui.

LL : Alors, votre dernier concert a été filmé par une douzaine de caméras, je crois. Est-ce que vous vous sentez différente le jour où vous savez que ça va être filmé, et est-ce que votre spectacle s’est organisé en fonction de le fait que vous savez que il faut que ce soit filmé aujourd’hui ? MF : Non, absolument aucun changement. Quant à mon comportement, moi-même, je crois qu’on ne peut pas ignorer totalement la présence des caméras. Maintenant, je crois qu’il y a une dimension telle en scène qu’on finit par oublier ces choses-là. Dans les dix premières minutes, c’est assez présent, et après, je fais totalement abstraction. Et le spectacle est totalement le même avant, après. Diffusion partielle de « La poupée qui fait non » (extrait du « Live à Bercy »). LL : Alors, vous êtes la seule artiste française, encore une fois ! (rire de Mylène) Mais cette fois-ci, vous êtes la seule artiste française pour être une artiste diamant ; c’est-à-dire que tous les albums que vous vendez, ça se vend à plus de un million (Mylène confirme). Alors, puisque vous voyez que vous avez un tel succès en France, est-ce que vous avez envie, parce que, en plus, vous êtes quelqu’un qui adore travailler, vous avez envie de peut-être apprendre d’autres langues pour toucher d’autres marchés dans le monde ? MF : Ecoutez, jusqu’à présent, ça a été un refus de ma part. Plusieurs fois, on m’a…(silence) j’allais dire « proposé » de faire album anglais, ou dans une autre langue. Dans la mesure où j’écris moi-même mes textes, il m’est difficile d’envisager ou une adaptation de quelqu’un d’extérieur, ou moi-même, je ne possède pas la langue suffisamment pour pouvoir traduire. Et dans la langue française, dans ma langue en tout cas, j’aime bien jouer avec les mots donc c’est très compliqué de trouver ça dans une langue qui n’est pas la vôtre. LL : On est souvent touché par les peintres parce qu’ils arrivent à nous toucher vraiment à l’intérieur de nous. Quelle est la dernière exposition que vous avez vue où vous avez été vraiment et réellement touchée ? MF : C’était dans un musée à New York et… L’art moderne. Euh… Je peux vous dire les peintres que j’aime : Egon Schiele, évidemment (sourire). J’aime Max Ernst. J’aime Picabia. Et je vais oublier probablement tous ceux que j’aime (sourire). Mais j’aime la peinture, oui. Ce sont des moments très privilégiés. Diffusion partielle du clip de « Je te rends ton amour ».


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« (Les fans) Je n’ai pas la sensation d’être loin d’eux. Est-ce que ça doit passer par l’interview, la justification ? Je n’en suis pas sûre. » LL : Y’a un moment dans votre concert où il y a quelqu’un qui peut monter sur scène avec vous. Comment assurez-vous la sécurité dont vous avez besoin ? Parce qu’on sait jamais… MF : Là encore, je crois que je ne… Est-ce que c’est de l’inconscience ? J’en sais rien. Mais je ne pense pas à ces moments d’hypothétique danger. Et là encore, c’est un moment spontané. J’ai mis beaucoup de temps avant que de faire monter quelqu’un sur scène. Et je préfère là encore une spontanéité. Donc il m’est arrivé – ce n’est pas systématique – de faire monter quelqu’un. Et, dans ces cas-là, non, je pense à autre chose qu’à un danger. Plus un partage. LL : Vous êtes terriblement connue dans les pays francophones. De tous les pays d’Europe, pourquoi avoir choisi la Russie ? MF : Pourquoi la Russie ? Parce qu’ils ont diffusé, quand j’ai commencé ce métier, ils ont diffusé énormément de vidéos. Et puis il y a des personnes là-bas qui ont beaucoup travaillé sur moi. Et j’avais très envie de découvrir la Russie, en tout cas son public. Je ne peux pas vous dire que je connais bien la Russie, si ce n’est que Saint-Pétersbourg est une ville magnifique, que j’y ai fait quelques rencontres qui sont assez jolies aussi, avec beaucoup d’artistes, des peintres notamment. Et que c’est un changement parce que c’est un public qui n’est pas, entre guillemets, acquis, si tant est qu’on puisse avoir un public acquis, mais vraiment là, c’était quelque chose d’assez étonnant. D’autre part, ils sont quand même assez brimés : ils n’ont pas le droit de se lever pendant un concert, ils n’ont pas réellement le droit de manifester leur joie. Et ils l’ont quand même fait, à la fin du concert – ils se sont levés, ils se sont approchés au bord de scène. Ce sont des moments assez forts.

où vous ne travaillez pas ? Est-ce que vous êtes plus contente quand vous travaillez ? MF : J’ai cette culpabilité, oui. Mais j’ai ça en moi ; j’aime le travail. C’est quelque chose que j’aime profondément donc c’est… Là encore, je me nourris de ça très facilement (petit rire). L’oisiveté ne me sied pas du tout (petit rire). LL : Alors, ce qui est formidable, c’est que vous êtes, je crois, une perfectionniste, et c’est bien dans le travail. Mais est-ce que ça veut dire que, après chaque concert, vous prenez les musiciens, les chanteurs, les techniciens et que vous faites une espèce de résumé du concert ? MF : Non, du tout. LL : Jamais ? MF : Non, non. Ni avant. Je sais qu’il y a beaucoup d’artistes qui aiment prendre la main de leurs camarades et faire une prière avant de monter sur scène ; j’avoue que je ne connais pas ça (sourire). Et après le travail, non. Après le travail, c’est terminé. Après, on… Chacun, ponctuellement, apprécie ou n’apprécie pas le moment, mais c’est plus quelque chose (silence) j’allais dire un état solitaire, de solitude, en tout cas pendant la première heure. Mais ce qui ne vous empêche pas les éclats de rire. Maintenant, quant au résumé de la situation, de ce qui s’est passé, non. LL : Justement, est-ce que, pendant un concert, vous avez envie de vous éclater de rire, parce que vous voyez un danseur qui a fait un faux pas, ou je sais pas quoi ? Et est-ce que ça vous est arrivé, devant votre public, de sortir de la chanson carrément ? Ou est-ce qu’il y a jamais eu quelque chose comme… MF : Sortir de la chanson, non. Maintenant, des éclats de rire ou des… Oui, bien sûr. Bien sûr. Ce qui fait qu’on n’est pas des robots non plus (petit rire).

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Mylène Farmer

Diffusion partielle des clips de « Tristana ». LL : A la sortie d’une tournée, normalement, pour la plupart des gens, c’est des vacances. Mais vous avez déjà envie de retravailler tout de suite ? MF : Je travaille déjà (rire). Je travaille sur le live en studio, pour le mixage, et bientôt sur le film du live. Et j’ai quelques projets à venir (personne ne le sait encore, mais le premier single d’Alizée, écrit et produit par Mylène et Laurent, sort un mois plus tard, et Mylène prépare une nouvelle chanson pour un film animé…). Donc je… Ce sera une période de travail. LL : Est-ce que vous êtes quelqu’un qui peut très bien prendre des vacances, ou est-ce que vous vous sentez tout de suite coupable le jour

Diffusion partielle des clips de « Je t’aime mélancolie ». LL : Il y a quelque chose dans mon émission où les téléspectateurs peuvent poser trois questions. J’en ai pris trois. Première question, c’est que, bien sûr, il y a beaucoup de vos fans qui se sentent frustrés parce qu’ils ne vous entendent pas assez en dehors de la scène, et ils ne vous voient pas assez non plus – moi, je suis ravie que vous êtes là aujourd’hui (sourire de Mylène). Et, est-ce que ça vous dirait un jour d’être un peu plus proche d’eux…dans leur avis ? MF : Moi je n’ai pas la sensation que d’être loin d’eux. Donc, là encore une pirouette probablement, mais j’ai l’impression d’être très proche

d’eux. Maintenant, est-ce que ça doit passer par l’interview, par la justification ? Je n’en suis pas sûre. Je me sens, en tout cas moi, proche d’eux. LL : OK. Deuxième question : vous avez dit que la vulnérabilité est un compagnon agréable et nécessaire. Est-ce que, finalement, ça vous ennuierait d’être parfaite, même s’il y a des jours où vous tentez à tout prix de l’être ? MF : Là encore, je ne sais pas ce qu’est un être parfait (long silence, puis rire). LL : Mais y’a pas des jours… On a quand même envie au moins de faire le mieux qu’on peut faire ? MF : Perfectionniste, oui. Parfait, absolument pas, non ; ce n’est pas une quête en soi. Mais, perfectionniste dans mon travail, oui. Là, ça part, je crois, d’un respect de l’autre et respect de soi-même. Je prends du temps avant de faire une pochette, je réfléchis. J’ai envie d’offrir des choses qui, moi, me plaisent vraiment. Et… (silence) LL : Troisième question Internet, et dernière question. Pour les gens qui se sent un peu perdus, peut-être ils sont athées, je sais pas, qu’estce que vous pensez que le Bouddhisme pourrait leur apporter ? Et je crois qu’il y a plusieurs styles de Bouddhisme ? MF : Ecoutez… (silence) Ne serait-ce que par curiosité, découvrir cette philosophie. Dire qu’elle est probablement plus douce que…que d’autres philosophies ou religions (sourire). Qu’elle est probablement, en tout cas ça l’a été pour moi, plus convaincante. Que ce peut être simplement un passage dans leur vie, mais que c’est, en tout cas, intéressant que de s’ouvrir à cette philosophie ; ça peut panser l’âme, ça peut aider en tout cas. Là encore, j’en reviens à l’idée de dialogue : si on n’a pas la chance d’avoir quelqu’un à qui parler, on peut le faire au travers d’une lecture comme ça, parce que vous avez beaucoup de réponses. En tout cas, si ce ne sont pas des réponses, en tout cas des tentatives de réponses (sourire). LL : OK. Je vous remercie beaucoup d’être venue. MF : Merci à vous (sourire). LL : Et bon travail (rires). MF : Merci beaucoup. LL : Merci bien. MF : Merci. On voit alors l’équipe technique démonter le matériel, sur la musique de « Optimistique-moi ». C’était la dernière interview télévisée de Mylène avant le « Sept à huit » de janvier 2006, six ans plus tard !


© M6

M6 Awards

Date 17.11.2000 Chaîne M6 Présenté par Laurent Boyer

Première télé de Mylène depuis huit mois. Mais ce soir, elle ne chante pas. Elle assiste à la toute première cérémonie des M6 Awards, présentée par Laurent Boyer, en direct du Zénith de Lille. Elle y est deux fois nominée et repartira avec un prix. L’an 2000 a commencé avec les premiers NRJ Music Awards, il se termine par les premiers M6 Awards. Un joli pied de nez au mastodonte TF1 de la part de l’ancienne « petite chaîne qui monte ». Mais l’évènement sera sans suite ; il n’y aura plus jamais de M6 Awards après cela. Avant les prix qui concernent directement Mylène, arrive celui de la révélation francophone de l’année. La chanteuse n’y est évidemment pas nominée, mais elle y est quand même citée car c’est Alizée qui l’emporte. Très émue, celle qui triomphe depuis plus de sept mois avec « Moi…lolita », et dont le premier album sort

onze jours plus tard, n’oublie pas de remercier « Mylène et Laurent », qui écrivent et produisent ses chansons. Puis vient le prix du clip de l’année. Mylène y est compétition avec « Optimistiquemoi » (face aux Red hot chili peppers, Lââm, R.Kelly, Louise attaque et Organiz’). Et elle gagne ! On la voit alors se lever de la tribune des nominés, à droite de la scène, et descendre vers le plateau par une pente aménagée. Elle porte des talons aiguilles, un pantalon noir et une veste jaune serrée à la taille par une chaîne en argent d’où pend un long pendentif sur la cuisse droite. Côté coiffure, Mylène a choisi un chignon à bouclettes. Arrivée sur scène, elle reçoit son trophée des mains de Lenny Kravitz et de l’actrice Emma Sjoberg. Le public est particulièrement enthousiaste. Un vrai plébiscite. Mylène peine à prendre la parole. Mylène Farmer : Merci beaucoup. Le public scande son prénom en chœur. Une ovation générale. Les larmes montent chez la chanteuse qui tente néanmoins de parler… mais la foule hurle encore plus fort. Mylène rit, et écrase une larme. « Mylène ! Mylène !

Mylène ! ». MF : Merci infiniment. (les applaudissements continuent…) Je ne sais plus quoi dire. Je reste coite. Merci. Merci pour cette émotion. Alors que Mylène tente de parler, elle est coupée par Laurent Boyer, alors non présent à l’écran. Laurent Boyer : Mylène (elle s’éloigne aussitôt du pupitre tandis que l’animateur la rejoint). Bravo pour cet M6 Award évidemment. Mais nous avons voulu te rendre un hommage pour l’originalité et l’innovation, la qualité de tes clips. (au public) Alors, voici un petit film des plus beaux clips de Mylène Farmer. Appréciez. (applaudissements). Diffusion d’un medley rythmé des clips de Mylène (une succession rapide d’images extraites de pratiquement tous ses clips, sur la musique de ses plus grands tubes). Il se termine par un bout de « Désenchantée » extrait du « Mylenium Tour ». Le réalisateur de la cérémonie choisit alors de revenir dans le Zénith de Lille pour montrer l’enthousiasme de la foule sur cette chanson tandis que Mylène reste stoïque sur la scène devant l’écran géant qui diffuse l’extrait. LB : Mylène Farmer ! (le public est hystérique)


1999–2001 : Innamoramento

MF : Merci infiniment. Je vais essayer de dire deux mots (mais ce ne sera pas facile car le public applaudit, crie, siffle, tape des pieds…Mylène rit). LB : Encore bravo Mylène Farmer. Et rendezvous, bien évidemment, le 5 décembre pour la sortie du DVD du « Mylenium Tour » qui nous promet des merveilles, je crois. Un dernier mot ? MF : Ecoutez, je vais ce soir emprunter quelques mots à Barbara (le silence se fait enfin, à peu près, dans la salle), et, pour le public, je voudrais lui dire que ma plus belle histoire d’amour, c’est vous. Merci beaucoup (le tonnerre d’applaudissements repart de plus belle). Et puis, pour terminer, m’adresser à Alizée, et lui dire que je suis très très fière d’elle ce soir. Merci. (applaudissements tandis que l’on voit Alizée à l’écran ; assise dans les tribunes, elle pleure et applaudit)

260

Mylène Farmer

2001

Mylène est aussi nominée dans la catégorie « Chanteuse francophone de l’année », mais c’est Hélène Ségara qui l’emporte.

NRJ Music Awards Date 20.01.2001 Chaîne TF1 Présenté par Anthony Kavanagh

Seconde édition des NRJ Music Awards. La cérémonie est désormais présentée par le québécois Anthony Kavanagh et dynamisée par le tube des Daft Punk, « One more time ». Mylène, grande triomphatrice de la première édition avec trois trophées, n’est nominée qu’une seule fois cette année.

debout au milieu de dizaines de bougies posées sur le sol, en tout cas dans sa version télévisée. La prestation est en effet ampexée. Le public présent aura droit à une version sans bougies. On s’en rend compte quand, à la fin de la chanson (écourtée pour l’occasion), Mylène est rejointe par Christophe Lambert : il n’y a plus aucune bougie par terre ! Sous les applaudissements, le comédien remet son prix à la chanteuse qui parle enfin… Mylène Farmer : Merci infiniment. Merci au public. Je voudrais, à mon tour, symboliquement l’offrir à quelqu’un du public. Donc je vais demander à Christophe, s’il m’écoute (rire), Christophe : est-ce que je peux te donner mon prix ? (l’acteur revient alors sur scène et reprend le trophée) Tentez de choisir quelqu’un dans le public et le lui offrir, merci infiniment (Christo-

La présence de la star à cette nouvelle cérémonie n’est pas annoncée. D’ailleurs, on ne la voit pas monter les marches cette année. On y voit en revanche Alizée, sa petite protégée, qui reçoit deux prix pendant la soirée (meilleur site Internet et révélation francophone) et qui chante son tube du moment, « L’alizé ». Elle ne manque d’ailleurs pas de remercier ses « parrain et marraine : Mylène Farmer et Laurent Boutonnat ». En toute fin de cérémonie, arrive le prix pour lequel Mylène est en lice : l’interprète féminine francophone de l’année. Ses concurrentes d’un soir sont Patricia Kaas, Vanessa Paradis, Axelle Red et Hélène Ségara (qui l’a battue deux mois plus tôt dans la même catégorie aux M6 Awards). Le prénom de Mylène est hurlé par le public tandis que le comédien Christophe Lambert ouvre l’enveloppe. Et c’est Mylène qui gagne. Le public applaudit très chaleureusement. Et Mylène est là ! Elle n’était pas dans la salle, mais à l’extérieur. Les portes d’entrée s’ouvrent et on la découvre, un micro à la main ; elle porte une chemise blanche nouée au-dessus du nombril, un pantacourt noir orné d’une grosse ceinture, des talons aiguilles et un chignon. Elle traverse toute la salle, sous les applaudissements, et sur la musique de « Dessine-moi un mouton (world is mine remix) ». Arrivée à hauteur des premiers rangs, un homme se jette sur elle pour l’embrasser. Mylène monte ensuite sur la scène. Christophe Lambert l’attend en haut des marches, l’embrasse. On s’attend alors à ce qu’elle aille chercher son prix, mais elle part s’installer au centre du plateau. Elle ne parle pas, elle chante ! Et c’est « Pas le temps de vivre ». Mylène se tient

phe part avec le prix tandis qu’on nous montre de nombreuses mains qui se lèvent dans le public). Merci. Mylène reste un instant immobile, observant Christophe qui ne va pas vers le public, mais qui rejoint Anthony Kavanagh. La chanteuse quitte alors le plateau en levant le bras vers le public. Le maître de cérémonie clôt alors la soirée. C’est fini pour cette année.


What’s Up Date 05.02.2001 Chaîne Canal J

Mylène participe à la bande originale du dessin animé américain « Les Razmokets à Paris » avec une chanson inédite, « L’histoire d’une fée, c’est… », qui sort en single en France le 27 février 2001. Le film, quant à lui, sort le 7 février dans les salles. Canal J, la chaîne pour enfants du câble et du satellite, s’en fait évidemment l’écho. Elle diffuse un sujet sur le dessin animé où l’on voit notamment Mylène dire quelques mots sur le tapis rouge de l’avant-première américaine du film, qui a eu lieu le 5 novembre 2000, au Mann’s Chinese Theatre sur le Hollywood Boulevard à Los Angeles. Elle porte pour l’occasion une longue veste en cuir noir, un pantalon bleu foncé et un petit top bleu ciel.

© Abaca

Mylène Farmer : Bonjour Canal J (sourire). X : Comment tu t’es retrouvée à travailler sur ce film ? MF : J’ai rencontré une personne, qui s’appelle George Acogny , et qui est en charge de la musique de ce cartoon. X : Est-ce que t’as aimé ton expérience ? MF : (qui n’a pas bien entendu en raison du bruit environnant) Est-ce que j’ai aimé mon expérience ? Beaucoup.



2002 2003 Les mots 13.11.2001 Single « Les mots » – 27.11.2001 Album « Les mots » ­– 16.04.2002 Single « C’est une belle journée » – 21.10.2002 Single « Pardonne-moi » – 03.12.2003 Album « Remixes »


2002–2003 : Les mots

NRJ Music Awards

Date 19.01.2002 Chaîne TF1 Présenté par Anthony Kavanagh

264

Mylène Farmer

2002

Troisième édition des NRJ Music Awards, troisième nomination de Mylène dans la catégorie « Artiste féminine francophone », et troisième trophée ! L’occasion pour la chanteuse de venir interpréter « Les mots », en duo avec Seal. C’est la seule et unique télé pour ce titre, sorti deux mois plus tôt et déjà vendu à plus de 200.000 exemplaires au moment de la cérémonie. Tout commence par la rituelle montée des marches les plus connues au monde – rappelons que les NRJ Music Awards se tiennent tous les ans au Palais des festivals de Cannes, qui accueille aussi le célèbre festival du cinéma. Mylène s’était prêtée au jeu en 2000, mais pas en 2001. Cette fois, elle est bien sur le tapis rouge, au bras de Seal, coiffée de son chignon habituel, et vêtue d’un grand manteau noir (avec une grosse tête de mort dans le dos) ne laissant voir que des collants, noirs encore, et des chaussures à talon aiguille, noires toujours. Elle nous apparaît à l’écran après Britney Spears et Garou, et avant Jean-Jacques Goldman et Zazie.

Quelques chansons et trophées plus tard, le maître de cérémonie, annonce le duo tant attendu. Anthony Kavanagh : Chacun dans sa langue a su trouver « Les mots » pour notre plus grand plaisir. Mylène Farmer et Seal ! Mylène apparaît seule sur une scène recouverte de brume artificielle. On note que sa tenue a changé depuis la montée des marches : toujours en noir intégral, elle porte désormais un pantalon corsaire, un court chemisier plissé dévoilant son ventre, et des bottines – une tenue de Yves Saint-Laurent Prêt-à-Porter. Elle est rapidement rejointe par Seal, lui aussi tout en noir. La prestation ‘embrumée’ qui est diffusée a été ampexée, mais les deux artistes chantent bel et bien simultanément sur scène, devant le public, sans fumée. Plus tard, arrive la première catégorie dans laquelle concourre Mylène : « Duo ou groupe francophone » (pour son duo avec Seal). Les autres nominés sont Noir Désir, Axel Bauer & Zazie, la troupe de « Roméo et Juliette » et Céline Dion & Garou. Les humoristes Eric et Ramzy ouvrent l’enveloppe. De nombreux « Mylèèèène ! » s’échappent des gradins. Et, pour le première fois depuis la création des NRJ Music Awards, Mylène ne remporte pas le prix, qui revient à Céline Dion et Garou pour « Sous le vent ».

La seconde catégorie pour laquelle Mylène est en lice arrive en toute fin de cérémonie ; il s’agit de désigner l’artiste francophone de l’année. Les ‘concurrentes’ de la chanteuse sont Alizée, Lââm, Hélène Ségara et Zazie. Et c’est Mylène qui gagne. Sous les hurlements de la foule, elle se lève de son siège et rejoint la scène. Le trophée lui est remis par Estelle Lefébure et Gad Elmaleh, tandis que son prénom est scandé par le public…y compris par Alizée, assise dans la salle. C’est sous des cris, des bravos et des « Mylène on t’aime ! » incessants que la star fait son discours de remerciements. Mylène Farmer : Vous me faites un immense cadeau. Je voudrais bien sûr remercier le public de m’avoir à nouveau nominée. Je voudrais remercier aussi NRJ, et en particulier Max Guazzini (gros plan sur l’intéressé, fondateur et directeur de la radio, assis dans la salle) qui a été fidèle depuis tout le début (sic !), remercier ma maison de disques, Pascal Nègre, remercier mon compagnon de travail, Laurent Boutonnat, à qui je dois beaucoup, toutes les personnes qui travaillent avec moi, et…et c’est un grand bonheur, merci beaucoup. La chanteuse, très souriante, se laisse applaudir, puis brandit son trophée en l’air et quitte la scène. La cérémonie s’achève.


© Midem

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© Midem

Mylène Farmer

2002–2003 : Les mots


Hit Machine

Zidane ela

Date 27.04.2002 Chaîne M6 Présenté par Charly et Lulu

Première prestation chantée de Mylène sur un vrai plateau de télé depuis deux ans. Et l’une des dernières... La chanteuse vient présenter son nouveau single, « C’est une belle journée »…et la chorégraphie qui l’accompagne ! Charly : Elle se fait rare, et elle a choisi de venir nous voir. « C’est une belle journée ». (avec Lulu) Mylène Farmer ! La chanteuse est entourée de deux danseuses, Valérie Bony (qui accompagne Mylène depuis « L’instant X ») et Frédérique Bauer (que l’on n’avait pas vue avec la chanteuse depuis « Que mon cœur lâche »). Toutes trois sont vêtues d’un pantacourt noir, d’un t-shirt blanc, d’une paire de Docks et d’un chapeau cloche. Micro casque en place, Mylène, qui arbore une nouvelle coiffure (cheveux raides), livre une prestation enfantine et efficace. En fin de chanson, après le bridge, Mylène et ses danseuses sont rejointes pour les derniers refrains par deux danseurs, habillés exactement comme elles. Pour l’anecdote, il s’agit de Christophe Danchaud et Bruno Batlo, déjà présents sur scène avec la chanteuse lors du Tour 89.

Date 19.05.2002 Chaîne France 2 Présenté par Michel Drucker

Deuxième et (déjà) dernière télé pour « C’est une belle journée », et ce, à l’occasion d’une grande émission exceptionnelle. Les artistes sont là pour la bonne cause : ELA, association européenne contre les leucodystrophies (des maladies

Après la chanson, selon la coutume de l’émission, les animateurs présentent, face caméra, le CD 2 titres et l’album dont il est extrait, puis les lancent dans le public, ce qui, visiblement, crée une certaine cohue. Lulu : Ils se battent sur le disque de Mylène Farmer. Pour info, l’émission a été enregistrée le mardi 23 avril, au soir, pour une diffusion le samedi matin, devant un public essentiellement composé de fans. Mylène a dû effectuer trois fois sa prestation : erreur dans la chorégraphie sur la première prise (au moment où Mylène doit tomber dans les bras de la danseuse Valérie Bony sur le refrain), problème de lumières sur la deuxième. Après l’émission, à l’extérieur du studio de la Plaine-St-Denis, la star s’est prêtée au jeu des autographes et des photos avec ses fans pendant une demi-heure.

génétiques orphelines) soutenue par le footballeur Zinédine Zidane autour duquel l’émission est construite. But de l’opération : rassembler un million d’euros pour la construction d’un centre d’accueil pour les malades et leur famille. Mylène Farmer vient chanter pendant l’émission. Michel Drucker : Le titre : « C’est une belle journée ». C’est Mylène Farmer / Laurent Boutonnat, une équipe qui gagne depuis longtemps, qui vient chanter cette chanson. J’espère que, tout à l’heure, quand on aura rendu l’antenne, vers 23h20/23h30, on pourra dire que nous avons vécu une belle journée. On écoute Mylène Farmer. La prestation est exactement celle du « Hit Machine » à ceci près que des plumes recouvrent le sol, et que d’autres tombent sur le plateau et sur le public en toute fin de chanson. Notons pour l’anecdote que l’émission de France 2 a été enregistrée avant celle de M6 ; le calendrier des programmations a fait que le « Hit machine » a été diffusé avant. Sachez aussi que le passage de Mylène dans « Zidane ELA » est totalement ampexé : la chanteuse n’est pas présente pendant l’enregistrement de l’émission. Zidane, comme le public qui applaudit en rythme pendant la chanson, regarde un écran. Pour info, Mylène participe à la bande-annonce de l’émission en tenue de scène avec des techniciens en second plan et, comme les autres invités, elle dit ces mots : « Zidane ELA »


2002–2003 : Les mots

NRJ Music Awards

Date 18.01.2003 Chaîne TF1 Présenté par Anthony Kavanagh

Pour cette quatrième édition des NRJ Music Awards, Mylène Farmer est à nouveau nominée dans la catégorie « Artiste féminine francophone ». Et, pour la quatrième fois consécutive, elle remporte le prix !

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Mylène Farmer

2003

La cérémonie commence par la traditionnelle montée des marches (rappelons que l’évènement prend place chaque année à Cannes, dans le célèbre Palais des Festivals, à l’occasion du Midem). On y voit Robbie Williams, Johnny Hallyday, puis…Mylène, très peu maquillée, coiffée de son éternel chignon, portant ses habituels talons aiguilles aux pieds, et vêtue d’une longue veste noire révélant un pantalon corsaire noir et blanc et un petit top noué au dessus du nombril (très transparent !). En fin de cérémonie, alors qu’on n’a pas vu Mylène Farmer à l’écran depuis la montée des marches, arrive le moment de décerner le prix de l’artiste féminine francophone de l’année. Comme tous les ans, quand arrive une catégorie qui concerne la chanteuse, des « Mylèèène ! » fusent un peu partout dans la salle, et ce, avant même que la liste des nominées ait été annoncée. Truth Hurts (chanteuse de R&B à la carrière éclair) et Marc Lavoine ne mettent pas longtemps à nous révéler le nom de l’heureuse gagnante : ce n’est ni Eve Angeli, ni Natasha StPier, ni Ophélie Winter, ni Zazie, mais bien, une

fois de plus, « Maïeline Farmer » (comme le dit Truth Hurts) ! Mylène se lève immédiatement du siège qu’elle occupait entre Thierry Suc, son manager, et Pascal Nègre, le pdg de sa maison de disques. Elle leur sert la main, puis, accompagnée d’un garde du corps, rejoint la scène sur la musique de « C’est une belle journée », vêtue exactement comme elle l’était sur les marches (ce qui n’était pas le cas les autres années). Elle lève aussitôt le trophée vers le balcon où se trouve le public ‘non professionnel’ ; elle ne regardera quasiment que dans cette direction pendant son ‘discours’. Le public scande son prénom, puis la laisse parler. Mylène Farmer : Merci beaucoup. Je vais tenter de vous raconter une toute petite histoire ; elle sera courte. Il était une fois les NRJ Awards qui m’ont fait le plaisir de m’inviter à chaque fois. Il était une fois… (un fan crie « Mylène on t’aiiime ! » – Mylène lui sourit) Il était une fois le vote, mais pas n’importe quel vote pisqu’il… puisqu’il s’agit, pardon, du vote du public, donc celui du cœur, celui qui ne triche pas. Et puis, il était une fois moi qui se demande à chaque fois : « Pourquoi moi ? »…et l’émotion arrive (dans un rire étouffant un sanglot), pardon (le public l’acclame). Et…Excusez-moi (Mylène pleure, le public l’applaudit). Et je… (le public l’applaudit) Et, à mon tour, je voudrais dire au public qu’il me tarde de vous retrouver sur scène, que ce sont probablement mes plus grandes émotions, mes plus belles émotions, et je souhaite de vous donner tout cet amour en retour (elle ne reviendra pourtant sur scène que trois ans plus tard). Et puis, enfin, je voudrais remercier toutes les personnes qui travaillent

auprès de moi, remercier bien sûr ma maison de disques, NRJ, Laurent Boutonnat avec qui je travaille bien sûr (dans un rire) depuis si longtemps, Thierry Suc mon manager, Anthony Souchet, Pascal Nègre et tant d’autres, pardon de les oublier. Merci infiniment. Le public applaudit. Anthony Kavanagh, maître de cérémonie, lui baise la main et l’invite à aller s’installer pour « une surprise ». Anthony Kavanagh : (…) « Vous savez, ça fait quatre ans que Mylène gagne ce prix. Quatre ans ! (applaudissements) Quatre ans qu’elle gagne ce prix ! Je crois qu’on peut officiellement le rebaptiser le « Mylène Farmer Music Award ». (regardant vers le plateau) Je sens que vous êtes prêts. Accompagnée par Yvan Cassar, Mylène, s’il vous plaît, faites nous « Rêver ». Mylène se tient debout au milieu de la scène, à côté du piano d’Yvan Cassar. Elle a abandonné sa longue veste, et troqué son trophée contre un micro. Le plateau est aussitôt envahi par de la fumée artificielle tandis que les écrans géants diffusent des images de nuages. La version de « Rêver » est semblable à celle qu’elle livre sur scène, lors de ses concerts. C’est pourtant en direct que Mylène chante ce soir-là, et sans ampex ! La chanson finie, elle remercie le public et Yvan, puis quitte le plateau. AK : Merci Mylène, on se revoit l’année prochaine (rire). Hélas, Mylène n’est pas revenue aux NRJ Music Awards depuis…


Š Midem



2004 2006 Avant que l’ombre… 14.03.2005 Single « Fuck them all » – 04.04.2005 Album « Avant que l’ombre… » – 04.07.2005 Single « QI » – 03.01.2006 Single « Redonne-moi » 13.01.2006 Début de « Avant que l’ombre…à Bercy » – 27.03.2006 Single « L’amour n’est rien… » – 21.08.2006 Single « Peut-être toi » 25.09.2006 Single « Slipping away (Crier la vie) » – 27.11.2006 Single « Avant que l’ombre... (live) » – 04.12.2006 Album « Avant que l’ombre…à Bercy »


2004–2006 : Avant que l'ombre…

Conférence de presse

Date XX.12.2004 Chaînes Diverses

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Mylène Farmer

2004

Mylène ne s’est pas montrée à la télévision depuis les NRJ Music Awards de janvier 2003, soit une absence de près de deux ans. Son retour devant les caméras se fait d’une manière pour le moins singulière puisque par le biais d’une conférence de presse – la première de sa carrière ! Dès le lendemain, et durant les semaines qui suivent (jusqu’en janvier 2005), plusieurs émissions s’en font l’écho. Citons notamment le « 6 minutes » de M6, le « JDM » de MCM ou encore « Nous ne sommes pas des anges » sur Canal+. Plutôt que de revenir sur chacune de ces télés en particulier, ce qui serait pour le moins redondant puisqu’elles reprennent toutes des extraits de la conférence, nous vous proposons une retranscription intégrale de l’évènement. 16 décembre 2004. Conférence de presse au Salon France Amériques, non loin des Champs Elysées, à Paris. Mylène Farmer vient y annon-

cer officiellement son retour sur scène. Une petite cinquantaine de journalistes sont présents ; ils représentent l’ensemble des médias (presse, radio, tv) français, belges et suisses ! Des bougies partout. Une petite scène sur laquelle s’impatiente une imposante table rectangulaire noire très design avec deux pieds triangulaires. Derrière elle, trois chaises de couleur beige clair (genre chaise de bureau des années 70). En fond, un immense triptyque (de 2m50 de haut environ) représentant un immense rond rouge sur fond gris. Le rouge semble être la couleur dominante de l’évènement : des lumières rouges éclairent les balcons extérieurs, les jardins et l’intérieur du lieu. Il est 18h45. Avec un quart d’heure de retard sur l’horaire prévu, la conférence de presse de Mylène Farmer commence…Thierry Suc, manager de la chanteuse et producteur de ses spectacles, entre le premier. Thierry Suc : (…) Le 8 mars 2000, il y a bientôt cinq ans, Mylène Farmer donnait le dernier concert de sa tournée « Mylenium Tour », à Saint-Pétersbourg, en Russie, devant quinze mille spectateurs. Et cette tournée qui a fait à peu près quarante-trois villes, a réuni environ quatre cent mille personnes. Depuis, il n’y a pas eu d’autres concerts. Et je suis là pour vous annoncer qu’elle reviendra sur scène le vendredi 13 janvier 2006 pour treize concerts

à Bercy uniquement. Les spectacles précédents, Mylène a toujours souhaité présenter le même spectacle à Paris et en province, par respect pour son public bien évidemment. Là, nous allons concevoir un spectacle qui sera intransportable  : l’infrastructure technique ne permettra pas d’aller en province. Donc ce sera un spectacle unique – j’espère dans tous les sens du terme – et intransportable comme je vous l’ai déjà dit. On a travaillé depuis quelque temps sur l’organisation de packages – de facilités on va dire – pour les gens de province qui vont venir. Je crois qu’il y a pas mal de personnes de province qui sont là. Donc de toutes les grandes villes de province, il y aura une possibilité d’avoir des tarifs préférentiels avec Air France, on a réservé pas mal de chambres d’hôtel avec des tarifs aussi négociés, et les vendredis et samedis, il y aura une possibilité accrue de disponibilité de places pour les gens de province, de Belgique et de Suisse. Il y aura également des bus qui vont être organisés par les autocaristes pour toutes les villes qui ne sont pas trop loin de Paris qui permettront aux gens de venir et de pouvoir rentrer après sans rester dormir à l’hôtel. Qu’est-ce que je peux vous dire d’autre ? Voilà… Pour vous présenter le schéma de cette production : vendredi 13 janvier 2006, treize concerts. Et je pense que maintenant, on va accueillir Mylène Farmer


et Laurent Boutonnat pour parler avec de ce spectacle. Une porte s’ouvre sur la droite de la scène. Le duo fait son entrée dans un silence étonnant. Pas un bruit, pas un applaudissement. Mylène s’installe au centre ; son manager est à sa droite et Laurent à sa gauche. La chanteuse porte des cuissardes noires laissant dépasser des bas blancs, une minijupe blanche, une veste écrue (avec des fleurs bleues brodées) et un bustier blanc. Pas de bijou, excepté une grosse bague de perles noires (digne d’une parure « Optimistique-moi » version Mylenium Tour). Elle arbore son éternel chignon roux. Le maquillage, quant à lui, est très discret. Sourire aux lèvres, Mylène est radieuse, mais visiblement intimidée. Laurent, lui, machouille un chewing-gum (qu’il gardera tout au long de la conférence) et se vautre dans la chaise tel un adolescent. C’est la première fois qu’il fait face aux journalistes depuis dix ans ! Habillé en noir des pieds à la tête (veste, pantalon, chemise, chaussures), il a toujours les cheveux en bataille tel un poète maudit ; ils sont simplement plus courts et un peu plus gris – la quarantaine épanouissante. Tout le monde est installé ; la première question arrive timidement. Yves («  La dernière heure  », quotidien belge) : On a déjà annoncé que c’était votre concert d’adieu. Mylène Farmer : Vous m’annoncez quelque chose que j’ignore. Ce n’est pas mon concert d’adieu. Non, non, je souhaite faire ce métier le plus longtemps possible. Michel Troadec (« Ouest France »): Juste une question facile : c’est la symbolique des treize concerts un vendredi 13. Comment est venue l’idée ? MF : Ecoutez, c’est vraiment un pur hasard. J’avoue qu’on s’amuse de cette idée en tout cas (rire). C’est un pur hasard. TS : Vous savez, juste pour la petite histoire, c’est un vrai hasard parce que Bercy est peu disponible en fait pour les spectacles – c’est une salle de sport avant tout – et lorsqu’on a téléphoné pour dire qu’on préparait ce spectacle, y’avait une possibilité à partir du vendredi 13 janvier, et y’avait treize soirées de disponibles. Et je peux vous dire que si vous additionnez vendredi 13 janvier…si vous faites 13 janvier 2006 (13 + 01 + 2006), ça fait treize. MT : Pour continuer, si c’est un spectacle intransportable, ça veut dire que vous avez prévu des choses un peu particulières, en tout cas des choses assez énormes, est-ce qu’on peut en savoir déjà ? MF : Vous savez, ça fait pour l’instant à peu près six mois qu’on travaille sur le spectacle,

avec quelques idées. Vous dire que ce sera magique, je l’espère. Que ce sera émouvant, je le souhaite. Ma foi, après, il faut continuer, pour nous, de travailler tous les trois (rire). Si monsieur Boutonnat veut ajouter quelque chose… Laurent Boutonnat : Par rapport au fait que ce soit intransportable (rire de Mylène). L’idée en fait, c’est d’utiliser toute la salle de Bercy, qui est une salle assez incroyable, de pouvoir l’utiliser complètement. C’est-à-dire de se dire que, tout d’un coup, on n’a pas besoin de restreindre la scène, etc. On peut tout faire ! Avoir plusieurs scènes, maquiller toute la salle, mettre du son partout, mettre des caissons de basse sous tous les gradins. Par exemple, au niveau du son, essayer de mettre du son de façon à ce que tous les gens, où qu’ils soient dans la salle, aient la même direction sonore, c’est-àdire qu’il n’y ait pas de direction sonore face à une scène. Donc on essaie plein de choses, on va essayer plein de choses pour ça. Voilà… (silence et petit rire de Mylène) Plus des tas d’éléments qui font que ce spectacle ne peut pas être transporté. Daniel Beaucourt (« Télépoche ») : Je voulais vous demander… La stratégie du silence, enfin ce qu’on a qualifié de stratégie du silence, vous a plutôt réussi ces dernières années. Pourquoi vous la brisez aujourd’hui puisque la conférence de presse, c’est pas un exercice auquel vous êtes rompue, je crois, en tout cas pas en France ? MF : Non… Et je suis très intimidée (sourire). DB : Pourquoi vous avez décidé de vous adresser aux médias cette fois-ci ? MF : Ecoutez, je l’ai fait vraiment pour une raison : c’est pour répondre à une demande de Thierry Suc qui est mon ami, mon manager et producteur de spectacles. Parce que je pense que, parfois, il faut savoir être quelqu’un d’autre que soi-même. Ma nature profonde est le silence et, peut-être, le mystère. Je ne cultive pas le mystère, contrairement à tout ce qu’on peut dire sur moi ! C’est ma nature profonde. J’ai beaucoup de mal à parler de moi-même. J’ai beaucoup de mal à me justifier. Maintenant, je pense qu’il était là important de répondre à cette demande. Sonia (NRJ) : Est-ce que vous pouvez nous parler du contenu du spectacle. Nouvel album, pas nouvel album ? Nouvelles chansons sur scène ? MF : Oui, j’ai un nouvel album qui sortira, je pense, mi-mars (l’album arrivera finalement le 4 avril). Nous sommes en quasi finalité de cet album, en mixage donc. Vous dire qu’il existera sur scène, certainement, dans sa majorité, et puis bien sûr d’autres chansons d’autres albums. Quant au contenu de la scène, là, j’avoue que je ne peux pas répondre (petit rire) préci-

sément parce que c’est en cours d’élaboration. S : L’atmosphère des chansons peut-être ? MF : Ecoutez, l’atmosphère…En termes de production, peut-être qu’il y a un petit changement. Moi, je reste la même donc la même atmosphère (rire). LB : Vous savez, c’est difficile de répondre précisément sur des choses qu’on fait soi-même, d’avoir du recul dessus, sur « est-ce qu’il y a des choses qui changent ? », « est-ce que c’est différent ? ». C’est toujours très difficile, ça. Franck Besnier (« Egéries ») : Je voulais savoir s’il était envisageable d’aller au-delà de ces treize dates que vous avez d’ores et déjà prévues ? Ou est-ce que c’est treize dates quoiqu’il en soit… MF : Là, je pense que c’est plus Thierry Suc qui pourra vous répondre, mais je crois… TS : (la coupant) Pour l’instant, c’est vraiment treize dates parce que les disponibilités de Bercy ne permettent pas de faire autrement. Donc les choses peuvent évoluer encore avec le temps, mais aujourd’hui c’est treize concerts. X : C’est un énorme travail pour treize représentations. Je voulais vous demander si ce travail de production est un travail que vous adorez, que vous attendez avec impatience, dans lequel vous prenez votre pied ? MF : Mon pied ? Probablement (rires). Vous savez, la production d’un spectacle… Le travail… J’aime le travail. J’aime travailler. Ça donne un sens à ma vie. Et la seule chose qui me guide, c’est l’envie d’être sur scène et partager la scène avec le public. Donc quel que soit le travail, peu m’importe. Mais c’est beaucoup de travail en effet. X : Justement pour seulement treize fois sur scène ? MF : C’est vrai. C’est aussi une frustration, croyez-moi. Mais c’est mon choix donc j’assume ce choix-là. Et puis je sais que je remonterai sur scène dans le futur donc je sais que je retrouverai et la province, et... voilà. Antoine Menuisier (« Le matin », quotidien suisse) : Est-ce qu’il y aura un DVD du spectacle ? MF : Oui, bien sûr. Comme pour tous mes spectacles. AM : Et ensuite, à votre avis, la province ce sera pour quand, la province ? MF : La province ? Mais la province ne peut pas être visitée justement pour toutes ces raisons, parce que nous ne pourrons pas transporter ce spectacle en province. Mais sachez quand même que sur les trois scènes précédentes que j’ai faites, nous avons, et c’était vraiment très important pour aussi le respect du public, et avant tout pour le respect du public, que de transporter le même spectacle à Paris, en province. Or là, c’est vrai que c’est une déci-


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sion : parce qu’il n’est pas transportable, je ne peux pas voyager. LB : Donc l’idée c’est que les gens viennent la voir. MF : Voilà. Très humblement, je vais demander aux gens de venir à moi. TS : D’habiter Bercy complètement, de pouvoir faire des choses dans Bercy qu’on ne peut pas faire lorsqu’on s’installe quatre soirs, cinq soirs ou six soirs. Virgine Carton (« La voix du Nord ») : Vous avez évoqué quelques éléments du spectacle. Est-ce qu’il y aura aussi des chorégraphies, estce que vous savez à peu près combien vous serez sur scène ? MF : Il y aura des chorégraphies. Il y aura des danseurs. Il y aura bien sûr (rire) des musiciens. Ma foi, combien serons-nous sur scène ? Je ne sais pas actuellement. Peut-être Thierry… TS : Non, pour l’instant c’est vraiment la phase où les castings vont commencer, etc. C’est un tout petit peu tôt. On a commencé… Pour pouvoir mettre les spectacles en vente – ils vont être en vente à partir de demain matin – il y a un site également qui vient d’être créé qui sera opérationnel demain matin avec la possibilité pour tous les gens de province d’accéder donc à ces fameux packages dont je parlais, pour ceux qui voudront. Pour pouvoir mettre en vente, on a dû donc avoir un dessin des scènes pour savoir un petit peu où on allait, pour savoir quel serait l’angle de vision à tel endroit ou à tel endroit puisqu’on n’a pas du tout envie d’avoir des gens qui se retrouveraient derrière la scène, contrairement parfois à d’autres spectacles. Donc, c’est la seule chose qu’on sait aujourd’hui, si on a avancé sur l’infrastructure, nous, pour pouvoir dire que les gens placés à tel endroit verrons bien, ceux qui sont là, comme ils verront pas, on met pas ces

places là en vente, etc. X : Est-ce que ce sera quelque chose de jamais vu ? TS : On l’espère. MF : Ecoutez (rires), ce serait un peu présomptueux de notre part, mais en tout cas le plus magique possible, oui. LB : Ce qui est bien, c’est qu’on peut tout faire dans un cas comme ça. Alors, le but n’est pas de faire des choses jamais vues – parce qu’il y a des choses, on croit que personne les a jamais vues, et puis on s’aperçoit que… – mais en tout cas, que ce soit surprenant. Séverine Servat (« Gala ») : Je me demande si c’est pas un peu restrictif de faire ça sur Paris, et quel va être le coût pour les gens qui vont venir vous voir de province ? Je sais que vous avez fan-club très actif, particulièrement fanatique d’ailleurs, mais… MF : (la coupant) Aimant, peut-être pas fanatique. Je préfère le mot « aimant » (rire). SS : On peut considérer qu’il est très passionnel votre public quand même. Mais donc, il va se déplacer pour venir vous voir. Est-ce que ça lui coûte cher ? MF : Monsieur Thierry Suc ? (rire) TS : Alors, les places… Bon je vais vous donner le prix des places. Ça va s’échelonner de cinquante-quatre euros, les moins chères, à cent trente-deux euros, les plus chères, au prix de vente publique. Y’aura des packages, comme je vous l’ai expliqué. Vous pourrez venir de Toulouse ou de Bordeaux,… Suivant bien évidemment… Chacun pourra choisir. Parce que je crois que ça va être aussi un rendez-vous, peut-être, pour certaines personnes, de dire « on vient passer un week-end à Paris ». Y’aura un spectacle, ils auront une nuit d’hôtel, deux nuits d’hôtel ; on a des nuits d’hôtels en deux étoiles, trois étoiles…

SS : (simultanément) Ah y’a l’hôtel qui est prévu ? TS : J’ai…On a fait travailler des gens, des agences de voyage qui ont essayé de négocier dix mille chambres d’hôtel au meilleur tarif possible. On a pris tout ça en amont. On a eu une négociation avec Air France qui a permis d’obtenir un prix de billet à peu près autour de cent euros d’où que ce soit que les gens viennent, aller-retour, quel que pays qu’ils viennent. Donc, je pense qu’aujourd’hui, bien sûr que c’est de l’argent et on en est très conscients, mais pour moins de trois cents euros, quelqu’un pourra venir voir le spectacle et passer un week-end à Paris, pour un concert le vendredi soir ou le samedi soir par exemple. Je pense qu’on a essayé vraiment d’obtenir les meilleurs tarifs. Ça se fait dans plein d’autres villes dans le monde où il y a des villes de spectacles qui attirent les gens qui viennent comme ça régulièrement. Quand il y a un rendez-vous lié à un projet artistique, je pense que ça vaut la peine. Aurélie (M6) : Je voulais savoir pourquoi avoir attendu cinq ans avant de remonter sur scène, et est-ce que le public vous a manqué ? MF : Le public me mange…me mange toujours (rires). C’est un lapsus (éclat de rire). Me manque toujours, oui. Pourquoi avoir attendu aussi longtemps ? Parce que j’ai eu besoin d’abord de faire un nouvel album. Que j’attendais aussi que Laurent soit disponible (il semble surpris). D’autre part, je veux ces moments rares. Je sais que je suis peu montée sur scène – j’ai trois spectacles à mon actif – pour cette raison. Parce que j’ai besoin d’avoir probablement une émotion intacte. Que j’ai besoin de ces moments de silence pour pouvoir revenir et, j’espère, donner le maximum, et recevoir aussi. Eric Jean-Jean (RTL) : Deux questions sur l’album. On sait qu’il arrive en mars. Qu’est-ce


qu’on peut dire dessus ? Comment il va s’appeler ? Et puis qu’est-ce que Mylène, vous, auteur, vous avez envie de raconter dans ce nouvel album ? MF : Je vais répondre surtout à la première question. L’album s’intitulera « Avant que l’ombre » avec trois petits points derrière. Vous dire qu’il y aura de nombreuses chansons – je pense quatorze titres enregistrés. Euh… Et, pour tenter de répondre à la deuxième question, c’est continuer, très égoïstement, de parler de moi (rire), de mes ombres, de mes lumières, et puis euh… Voilà (petit rire). EJJ : Vous en êtes où dans l’enregistrement, mixage, production ? MF : Très très avancé, là. LB : Oui, l’album sera probablement terminé à la fin de l’année ; le 31 je crois (rires). TS : Pas le 13. LB : Pas le 13 (rire de Mylène). Voilà. Ce sera pratiquement terminé à la fin de l’année. TS : Et il y aura un premier single fin janvier. Fin janvier. X (Pink TV) : Je voulais savoir : pourquoi êtesvous devenue une idole ou une icône pour la communauté gay qui fait partie de votre public ? MF : Pourquoi… ? Pardon, je n’ai pas compris. X : Pourquoi êtes-vous devenue une icône, quelque part, une star pour la communauté gay qui vous soutient, qui est très présente dans votre public ? MF : Pour la communauté gay, c’est ce que vous avez dit ? X : Oui. MF : Pourquoi ? C’est probablement plus à eux de répondre pour moi (petit rire). Si ce n’est que la chose qui me vient à l’esprit, c’est peutêtre ont-ils une sensibilité exacerbée, comme la mienne (petit rire). Et puis, quoiqu’il arrive, ça me réjouit (rire). David Lelait (« Nous deux ») : J’aimerais vous poser une question. Vous présentez, depuis pas mal d’années déjà, des spectacles très impressionnants, vous êtes une show-woman, et j’aimerais savoir si vous n’avez pas envie, par moments, de présenter un spectacle plus intimiste, pourquoi pas l’Olympia, pourquoi pas une petite salle ? Quelque chose qui soit pas un grand spectacle, mais qui soit simplement un tour de chant. Est-ce que ça vous fait pas envie quelque part ? MF : Ça peut être envisageable dans l’avenir, mais c’est vrai que j’ai encore envie de grandes salles, d’immensité. Mais pourquoi pas. C’est possible. Je ne connais pas, en tout cas, cette expérience, mais ce dont je suis sûr, c’est que même si on fait un Bercy ou, j’imagine, un Stade de France, pour ceux qui ont envie de le faire, on peut tout à fait créer une intimité dans une

immensité. Donc ça ne manque pas, à priori, une petite salle. (silence) Peut-être pas au Stade de France, me dit Laurent (rire). Je ne sais pas. LB : Non, mais Bercy est bien pour ça. MF : Peut-être dans l’avenir. Pourquoi pas. Stéphane Lecarrié (Radio 6, radio de Calais) : Bon nombre de vos clips sont de véritables productions cinématographiques. Est-ce qu’on peut s’attendre à un concert réalisé dans un univers cinématographique, avec des effets 5.1 – c’est à la mode en ce moment – enfin bref un environnement cinéma ? MF : (à Laurent) A toi (rire). LB : Le problème du 5.1, c’est que ça demande une direction. C’est-à-dire que si vous envisagez du 5.1, il faudrait que les gens soient face à une scène, avec une direction – (en faisant des gestes avec les mains pour mimer les gens face à la scène) un, deux, trois, quatre, cinq, etc. L’idée, effectivement, de jouer avec ça, mais en ayant…sans avoir de direction, en ayant, ce que je vous disais tout à l’heure, la même direction, pour, où que soient les gens… Par contre, jouer avec le son, avec les basses, avec les effets, ponctuer peut-être entre des moments ou des chansons avec des effets de lumières et de son, oui, bien sûr. C’est vachement bien, ça. TS : Ce qu’on peut dire, c’est que le son va être travaillé avec un jeune ingénieur du son très talentueux (Laurent confirme), avec lequel on a déjà travaillé, qui s’appelle Stéphane Plisson. Jean-Louis Gérard (MCM) : C’est aussi une question pour Laurent Boutonnat. Quelle est la couleur musicale de l’album ? Qu’est-ce qui vous a inspiré ? Vous étiez revenu avec un single aux sonorités électro… LB : (simultanément) Ah bon ? JLG : …« L’âme-stram-gram »… LB : (simultanément) Y’a longtemps alors. JLG : … Qu’en est-il cette fois-ci ? LB : Euh… Oh c’est difficile ! Je crois qu’il y a beaucoup de… (silence) Oh c’est très difficile pour moi de répondre ! C’est… Je sais qu’on aime beaucoup, Mylène et moi-même, les mélanges. C’est un album où il y a beaucoup de musiciens. Un mélange de musiciens, de sons électroniques. Beaucoup d’acoustique, un peu d’électronique. Y’a beaucoup d’instruments acoustiques. Euh… MF : Je vais t’interrompre, mais il y a sans doute, par rapport aux autres albums, beaucoup plus de guitares. LB : Oui, beaucoup plus d’instruments… acoustiques (rires). Jean-Christophe Federici (« Starclub ») : Je souhaiterais vous poser une question par rapport aux concerts. Vous vous déplacez assez souvent en concert. Est-ce qu’il y a un performer ou un concert récent qui vous a plus ou moins marqué ? Est-ce que vous avez une

référence scénique personnelle qui vous tient à cœur ? MF : La première, ou le premier groupe qui me vient à l’esprit, c’est U2 qui j’avoue, pour sa musique et pour la performance, la voix et l’âme surtout, m’impressionne énormément. Euh… (silence) C’est toujours quand on vous pose la question qu’on a un énorme trou (rire). Euh… LB : Contrairement à ce que vous dites, Mylène ne va pas très très souvent en concert. JCF : Je crois que vous êtes allée voir Madonna. Qu’est-ce que vous en avez pensé et est-ce qu’elle vous a inspirée justement, peut-être pour ce spectacle ? MF : Ecoutez, je trouve que c’est évidemment une personne de grand talent, une grande professionnelle. Si je puis formuler une toute petite critique, je trouve que ça manque un tout petit peu de sentiments, manque d’âme. Euh… Maintenant voilà, c’est pas à moi d’en juger. Puisque vous me posez la question donc je… Mais, néanmoins, c’est une personne, évidemment, de grand talent. Daniel Beaucourt (« Télépoche ») : Contrairement à ce que disait ma collègue, ma consoeur (Séverine de « Gala »), vous n’avez pas de fan-club, je crois, en France ; vous n’avez jamais voulu en avoir… MF : (le coupant) Non, je ne l’ai jamais souhaité. DB : Toutefois, il y a eu beaucoup de…enfin il y a eu des publications qui, je sais pas, ont vu le jour, peut-être avec votre assentiment ou non, en tout cas je pense que « L’instant-mag » faisait partie de celles-là… MF : (le coupant) Qui est de qualité d’ailleurs. DB : Que vous évoque justement la fin de ce magazine ? MF : La fin. Il y a une fin à tout donc je la prends avec…avec quoi ? Avec sérénité (petit rire). Et je crois qu’ils ont l’intention de faire, de poursuivre un autre magazine, il me semble. TS : Ils en démarrent un autre, oui. MF : Ils en démarrent un autre. TS : Mais rien n’est initié par Mylène ou par son entourage. Les fans qui décident de créer un fan-club peuvent le faire – on les a toujours laissés complètement libres de le faire. Et ceux qui décident d’arrêter quelque chose sont bien évidemment libres de le faire également. C’est leur choix de faire ou de ne pas faire. DB : Enfin, je pensais que vous aviez quand même un certain droit de regard sur ces publications. MF : Non, absolument pas. TS : Rien du tout. Aucune ligne éditoriale n’est contrôlée, regardée. Ils font ce qu’ils veulent, ils disent ce qu’ils veulent. Gilles Médioni (« L’express ») : Je croyais que vous aviez des projets cinéma. Est-ce qu’ils sont mis entre parenthèses à cause de la tournée ?


2004–2006 : Avant que l'ombre…

MF : Ecoutez, moi-même j’ai été assez surprise de beaucoup d’annonces concernant le cinéma. Pour l’instant, il ne s’agit pas pour moi de faire de cinéma. En revanche, j’aime le cinéma. J’espère un jour faire un autre film. Et pourquoi pas m’essayer à la production. En tout cas, c’est un métier qui me passionne et que je sais très très très difficile. Mais c’est un univers qui m’intéresse. GM : Laurent Boutonnat, vous n’aviez pas un autre projet cinéma aussi ? LB : C’est plus qu’un projet ! C’est un film qui est en préparation aujourd’hui et qui se tournera en mars prochain. GM : On peut savoir le sujet ? LB : C’est une adaptation, une vraie adaptation d’un roman du XIXe siècle qui s’appelle « Jacquou le croquant » (petit rire de Mylène). Voilà. X : Pourquoi « Giorgino » n’est-il pas sorti en DVD ? Une question de droits ou une volonté de votre part ? LB : Non, c’est que… Ça a été une histoire assez difficile à vivre, « Giorgino », vu que ce film n’a pas marché du tout. Et, à l’époque, comme j’étais très, enfin j’ai presque financé moi-même presque 80% de ce film, donc c’était… il a fallu rebondir. Et j’ai pu récupérer, en fait, les droits de ce film, les droits d’exploitation vidéo, etc. Et, à ce moment-là, vous n’avez qu’une envie, c’est prendre les droits, les mettre dans un tiroir, le fermer et ne plus jamais en entendre parler. Donc voilà, c’est ce qui s’est passé. C’est aussi simple que ça. Et peut-être un jour, je le sortirai en DVD, oui. Peut-être après un autre film ou un truc comme ça. Voilà. L’attachée de presse prévient que c’est la dernière question…

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Mylène Farmer

Sophie Khairallah (« Too much ») : Je voulais vous poser deux petites questions en fait. La première était par rapport à l’album. J’avais entendu parler de collaborations, pour les compositions de musique, avec d’autres artistes… MF : (immédiatement) Absolument pas, non. Jamais. Jamais envisagé donc non (petit rire). SK : D’accord. Et la deuxième, c’était tout simplement : qu’est-ce que vous pensez de la biographie qui est sortie sur vous de Bernard Violet ? MF : Bernard qui ? (rires) C’était facile (rires). LB : Mais tu l’as lue, non ? (sourire embarassé de Mylène, rires dans la salle) L’attachée de presse clôt la conférence. Les journalistes applaudissent. MF : Je vous remercie d’être venus en tout cas. Merci beaucoup. Le trio se retire.


Symphonic show Date 12.11.2005 Chaîne France 2 Présenté par Daniela Lumbroso

Mylène n’avait pas chanté à la télé depuis janvier 2003. La revoici pour la première (et unique) promo de son album « Avant que l’ombre… », sorti sept mois plus tôt ! Elle vient interpréter « Redonne-moi », troisième single extrait du disque. On ne l’a plus vue chanter à la télé depuis. L’émission est enregistrée le 5 octobre, un mois, donc, avant sa diffusion. Le concept du « Symphonic show », ce soir-là, veut que chaque artiste, accompagné d’un orchestre symphonique, reprenne un tube des années 70. Mylène est la seule à ne pas s’y plier et à chanter uniquement son single. Il faut dire qu’elle est un peu la reine de la soirée. Toute la promo faite pour l’émission a été axée autour d’elle. Elle s’est retrouvée en couverture de plusieurs magazines simplement sur l’annonce de sa venue à l’émission, et sans pour autant accorder d’interview (c’est Daniela Lumbroso qui a fait le tour des médias pour parler de l’évènement). Mylène ne restera pourtant que quelques minutes à l’écran.

La chanson finie, Mylène est rejointe sur le plateau par Daniela Lumbroso pour un bref entretien qui, de l’aveu même de la présentatrice, n’était pas prévu au départ. Daniela Lumbroso : « Redonne-moi », c’est un extrait du dernier album de Mylène Farmer, « Avant que l’ombre… ». Bonsoir Mylène. Merci beaucoup d’être avec nous ce soir. Bercy, treize représentations exceptionnelles, du 13 au…(elle hésite et regarde sa fiche) du 13 au 29

Mylène quitte alors le plateau tandis que la présentatrice rejoint son canapé d’interview, sur le côté du plateau. Un habile montage qui nous ferait presque oublier que la chanteuse a ampexé sa prestation ; elle a enregistré son passage séparément, sans public. C’était sa seule exigence. Ça et un plateau enfumé orné de deux cents bougies. Elle a tourné sa prestation plusieurs fois ; la quatrième prise était la bonne. En moins de trente minutes, l’affaire était entendue.

2005

Dès le début de l’émission, l’animatrice nous annonce le « grand retour », la « seule télé en France » de la star. Mais ce n’est qu’une heure plus tard que Mylène arrive enfin. Elle entre sur le plateau dans un nuage de fumée artificielle aux reflets orangés. Elle porte un pantalon noir et un chemisier noir ouvert sur son nombril laissant voir un immense crucifix en pendentif, et arbore son éternel chignon. Accompagnée par Yvan Cassar au piano et par l’orchestre symphonique, elle interprète une version inédite de « Redonne-moi ».

janvier prochain. Deux cent mille places. Elles ont été vendues un an avant le début du spectacle. Ça faisait très longtemps que le public ne vous avait pas retrouvée. D’ailleurs, en vingt ans, vos rencontres sont assez rares. Comment vous vous préparez pour ce moment ? Est-ce que vous l’appréhendez avec plaisir ? Mylène Farmer : Je l’appréhende et j’ai très très hâte de remonter sur scène, oui. DL : C’est un bonheur d’être sur scène ? MF : C’est le meilleur moment, je crois, pour un artiste, oui. DL : Tout est prêt ? MF : Non (rires). DL : Alors, on va vous laisser continuer. Merci mille fois, Mylène, d’être venue ce soir avec l’orchestre du « Symphonic Show ». Merci.


2004–2006 : Avant que l'ombre…

Sept à huit

Date 08.01.2006 Chaîne TF1 Présenté par Laurence Ferrari et Thomas Hugues

A cinq jours du premier des treize concerts « Avant que l’Ombre… à Bercy », on découvre une sublime interview exclusive de Mylène Farmer signée Thierry Demaizière pour « Sept à huit », l’émission dominicale d’information de TF1. Il s’agit du premier long entretien télévisé de la star en France depuis « Le mag » de MCM en juin 2000.

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Mylène Farmer

2006

La presse télé se fait largement l’écho de l’interview dans les jours précédant sa diffusion ; Thierry Demaizière, comme Daniela Lumbroso quelques semaines plus tôt, se prête volontiers au jeu du « Alors, elle est comment Mylène ?!!!... ». Quant aux animateurs de l’émission, ils jouent clairement celui de la surenchère sensationnaliste en multipliant les annonces et les lancements prometteurs et redondants, au risque d’en faire un peu trop et de décevoir au final. Ce n’est jamais qu’une interview… Première annonce, dans les titres de l’émission. Thomas Hugues : (sur des images de l’interview et du Tour 96) Une exclusivité dans ce « Sept à huit » : Mylène Farmer parle pour la première fois depuis dix ans à la télévision. Une star qui se dévoile et éclaire une partie du mystère qui l’entoure depuis ses débuts, il y a vingt ans. Timide et pourtant sans tabou, secrète et sulfureuse, elle parle son image, de ses fans,

mais aussi de ses doutes et de ses plaies qui ne cicatrisent pas. Seconde annonce, immédiatement après les titres, quand les présentateurs nous accueillent en plateau. Laurence Ferrari (après avoir présenté ses vœux pour 2006 aux téléspectateurs) : (…) Et pour bien démarrer la saison, un « Sept à huit » exceptionnel ce soir, avec celle qui ne parle jamais, qui ne se livre jamais, et qui, pourtant, est l’invitée exceptionnelle du portrait de la semaine de Thierry Demaizière. Il s’agit bien sûr de Mylène Farmer. Mais ce n’est pas pour tout de suite. Thomas Hugues lance le premier sujet, sur Israël. Troisième annonce, en milieu d’émission. LF : C’est l’artiste française la plus mystérieuse, la plus sulfureuse, mais également la plus populaire des vingt dernières années. Devenue objet de culte pour ses fans, emmurée dans son silence, cela faisait dix ans qu’elle n’avait accordé aucune interview à la télévision. Et ce soir, en exclusivité, elle accepte de répondre aux questions de Thierry Demaizière pour « Sept à huit ». Un évènement pour une artiste rare. Regardez. Un extrait. Et oui, ce n’est pas encore pour maintenant. Diffusion d’un court extrait. LF : Voilà. Mylène Farmer qui lève un coin du voile de mystère qui l’entoure. C’est l’interview évènement de « Sept à huit », et c’est dans un instant, dans la seconde partie de l’émission. A tout de suite. Coupure pub.


Quatrième annonce lors du retour dans l’émission, après la pause pub, et cette fois c’est la bonne ! Encore un (très long) lancement (tandis que des images de Mylène passent sur les écrans du décor) et on y est ! TH : On se retrouve pour la seconde partie de cette émission, avec une invitée exceptionnelle : Mylène Farmer. La chanteuse la plus rare de la scène française a accepté de parler à la télé pour la première fois depuis dix ans. Elle affirme même à Thierry Demaizière que c’est sa dernière interview. Une exclusivité pour vous dans ce « Sept à huit ». LF : Mylène Farmer, c’est d’abord l’une des cinq artistes françaises qui a vendu le plus d’albums depuis vingt ans – plus d’un million d’exemplaires à chaque fois qu’elle sort un opus. Elle est la seule femme à jouer dans la cour des grands, aux côtés de Johnny Hallyday, Michel Sardou, ou bien encore Jean-Jacques Goldman. Mais ce qui fait surtout la marque de fabrique Farmer, c’est le mystère quasi-total dont elle s’entoure depuis toutes ces années : pas une seule interview donc depuis dix ans, aucune apparition publique en dehors de ses concerts, rien sur sa vie privée si ce n’est quelques photos rigoureusement choisies et filtrées. De quoi attiser les fantasmes de ses milliers de fans. TH : Alors, qui est vraiment Mylène Farmer ? Au-delà de l’objet de culte et de marketing qu’elle est devenue pour tous ceux qui l’attendent en bas de chez elle, qui la suivent pas à pas dans chacune de ses tournées ? C’est une des questions auxquelles elle répond ce soir. Elle parle de cet amour du public qui la fait vivre, de sa timidité maladive, de ce goût du secret qu’on lui reproche aujourd’hui et qui, pourtant, correspond à son tempérament. Elle rétablit aussi la vérité sur les rumeurs les plus folles qui courent sur son compte, et explique

son besoin de se protéger face à un milieu du show-business qu’elle juge impitoyable. LF : Mais Mylène Farmer, à travers son dernier album intitulé « Avant que l’ombre… », c’est aussi l’image sulfureuse et ultra sexy d’une libertine qui a transgressé tous les tabous. Elle avoue ce soir qu’elle est allée au bout de tous ses fantasmes et qu’elle ne s’interdit rien en matière de liberté sexuelle. Elle parle aussi de ses doutes, de ses souffrances et de ses plaies qui ne cicatrisent pas. Un évènement donc dans « Sept à huit » : les confessions de Mylène Farmer, à cinq jours du début de ses treize concerts à Bercy qui se joueront à guichets fermés. « A l’abri du mystère » : c’est le portrait de la semaine de Thierry Demaizière, d’Alban Teurlai et de Didier Daubleach. Le sujet commence… enfin. Thierry Demaizière : (en voix-off, sur un montage d’images de clips et de gros plans sur Mylène installée pour l’interview) Elle aime les anges mais elle a la beauté du diable. Depuis vingt ans, elle déchaîne l’amour de ses fans, chavire leur cœur et nourrit leurs fantasmes. Elle a l’aura d’une diva, le statut d’une icône et son silence fait d’elle une légende. Mylène Farmer est si rare que ses paroles sont précieuses. Elle n’aime pas dire tout haut ce qu’elle chante tout bas. Ecoutons-la, c’est peut-être la dernière fois qu’elle parle. (Face à Mylène) Dix ans sans qu’on vous ait entendue, aucune interview, six années sans qu’on vous entende chanter, six années sans vous voir sur scène : vous aimez l’absence. Mylène Farmer : J’ai…C’est une nécessité, c’est par timidité, croyez-moi ! TD : Vous avez presque une timidité intimidante ! MF : C’est ce qu’on m’a dit souvent, mais je sais

que de déranger me dérange profondément également, donc j’avoue que c’est un exercice extrêmement difficile. TD : Votre timidité n’est pas la seule explication. Pourquoi vous vous cachez si longtemps avant de réapparaître ? MF : Je ne sais pas si c’est ma seule explication, en tout cas je sais que j’ai du mal, je crois que c’est au-delà de ça même, que de parler de moi. J’ai…C’est quelque chose qui m’est presque insurmontable. Je vous dois une semaine et demie d’insomnies et un presque ulcère ! (rires) TD : Excusez-moi ! MF : Je vous en prie ! (rires) TD : A ce point-là ? MF : Oui, vraiment ! Est-ce que c’est parce que je ne me sens pas suffisamment ni intéressante, ni importante, ni assez nombriliste ? Probablement, probablement…Ce qui ne m’empêche pas de monter sur scène. TD : (en voix-off, sur des images de « Vertige » extraites du « Live à Bercy ») Bercy, lieu de sa démesure. Elle y répète son prochain spectacle…en secret, comme d’habitude. (Face à Mylène) Vous allez commencer un vendredi 13, sur treize dates. Il y aura treize mille personnes chaque soir à Bercy. Vous aimez le treize ? MF : J’aime le 13, je n’ai pas de superstitions. TD : Les places sont vendues depuis presque un an. Ils attendent tous comme des fous. Parait-il que ça va être énorme, intransportable. Vous voulez nous en dire quelque chose, ou là aussi c’est le secret de ce spectacle ? MF : Ecoutez, je vais garder ce goût du secret, vous dire aussi que je regrette de ne pouvoir aller en province, mais que ce spectacle est réellement intransportable. Donc j’ai demandé au public de venir à moi, ce qui peut paraître un manque d’humilité mais c’est vraiment pour,


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j’allais dire pour, j’espère, la grandeur de ce spectacle et son côté exceptionnel, extraordinaire. TD : On sait que c’est une grande croix, on le sait ça, et qu’il y a un rideau d’eau. MF : Egalement, oui. Ce sont les fuites sur Internet, c’est ça ? (rires) TD : Oui ! Et pour apparaître si peu et si rarement, est-ce que pendant ces années où vous disparaissez le public vous manque ? MF : Oui. On a toujours le…je dirais moi particulièrement, parce que je crois que profondément rien n’est acquis, on a toujours peur de l’abandon. Je pense que le sentiment d’abandon est quelque chose qui me hante. TD : Vous pourriez dire comme Barbara : « Ma plus belle histoire d’amour, c’est vous » au public ? MF : Oh, je le dis, oui. C’est ma confession. TD : (en voix-off, sur des gros plans de Mylène) : Mais à force de se taire durant des années entières, Mylène Farmer a peut-être pris le risque de déplaire. Comme si son silence finissait par lui nuire, provocant le dépit chez certains fans et alimentant la rumeur. MF : On dit beaucoup de choses sur moi, on dit beaucoup de choses totalement erronées, on invente, j’imagine, ma vie, on invente mes émotions. Maintenant, je sais, je suis consciente… Je sais le risque du silence. Il y a certainement des personnes qui m’en veulent, parce que ce silence, qui pensent que c’est de nature hautaine alors que ce n’est que discrétion de ma part, que j’ai beaucoup de mal à me raconter. TD : Certains se demandent si ce n’est pas aussi une stratégie de communication, comme Garbo se taisait. Plus on se tait, plus on attise le mystère, et plus y a de mystère plus on invente, et plus on invente et plus on veut savoir, ce qui

provoque cette espèce de dévotion. MF : Ça, je ne sais pas. Je suis consciente, une fois de plus, de la nature de ce mystère et ce que ça peut engendrer. Maintenant, est-ce que c’est une stratégie ? Je vais vous dire non, bien sûr que non. C’est ma nature profonde. Je ne fais pas partie de ce système en ce sens que c’est vrai que je fais très très peu de télés, je ne fais quasiment pas d’interviews, mais une fois de plus j’en reviens à ma nature profonde. Et quand on ne fait pas partie d’un système, le système veut vous détruire. Et puis j’ai la chance d’avoir eu pendant vingt ans des personnes qui m’ont suivie. TD : Qui vous sont fidèles, mais fidèles presque au sens religieux du terme. Vous avez provoqué une sorte de dévotion et vous avez presque l’aura d’une diva. Il y a plein de livres qui arrivent en ce moment, un fan qui pendant deux ans vous a attendue…Enfin, c’est presque dément. Est-ce que c’est violent quelquefois ? MF : Je ne sais pas, violent…C’est perturbant, certainement. Dès l’instant que ces personnes ne gâchent pas leur vie pour moi, alors je suis en paix. Mais si j’ai le sentiment effectivement qu’ils passent à côté de quelque chose parce que je deviens l’élément absolument essentiel, là ça me perturbe beaucoup. TD : Il y a même un fan, c’est l’une des histoires les plus dramatiques qui vous est arrivée, qui est allé tuer le réceptionniste de votre maison de disques, il y a quelques années de ça. Donc, votre absence quelque part les pousse à la folie. MF : Je ne sais pas. Pour parler de cette personne, peut-être cette personne était-elle perturbée elle-même… TD : Sûrement. MF : …avant même de… C’est toujours un peu dangereux d’avoir ce genre de propos. Et c’est

suffisamment, croyez-moi, douloureux pour moi de vivre ce genre de choses. TD : Et est-ce que vous comprenez cette période qui se prête beaucoup au confessionnal, où justement les stars n’ont plus beaucoup d’intimité et aiment raconter leur enfance et leur histoire ? MF : J’essaye de ne pas juger, mais c’est vrai que je trouve un petit peu dommage cette, je vais vous paraphraser, ce manque de mystère chez la plupart des artistes. Je n’ai pas envie de savoir ce qu’elles mangent le soir, je n’ai pas envie de savoir avec qui elles… elles… Je ne dirai pas le mot (elle éclate d’un rire gêné). Je crois qu’il faut se préserver un petit peu. TD : Je crois que là, on vient d’avoir un bout de votre mystère, c’est qu’en fait vous riez. Vous êtes tout le temps figée dans l’image un peu morbide où vous n’aimez que la nostalgie, la mélancolie, la souffrance. MF : Non, ça fait partie de moi aussi, et ça fait partie de bon nombre d’entre nous. Je veux dire, on peut être faits de désespérance, de joie, enfin autant de choses qui se bousculent et se contredisent. Voilà, je suis quelqu’un…je fais partie de ces personnes qui sont effectivement un petit peu obsédées par la mort, l’idée de mort. Tout simplement, le fait d’être mortel est quelque chose d’insupportable, donc j’ai ce fardeau avec moi. Maintenant, vous dire que je suis quelqu’un de morbide, que je dors dans un cercueil et que je m’alimente d’araignées : non. (rires) J’aime les fraises Tagada ! (rires) TD : Est-ce qu’il est vrai quand même que votre grand-mère, petite, vous emmenait visiter les cimetières ? MF : Ça, c’est en tout cas un des rares souvenirs que j’ai, et… TD : Mais… MF : (elle continue) Mais ce sont des lieux qui


ne sont pas, pour moi, pardon (pour l’avoir interrompu), morbides du tout. Un cimetière, c’est pour moi un lieu de paix, un lieu de repos. J’arrive tout à fait à me recentrer dans un cimetière. TD : (en voix-off, sur des images du clip de « Sans Contrefaçon ») De la mélancolie, des cimetières, au rêve inaccessible de l’androgynie, Mylène ne va pas hésiter à mettre des mouchoirs dans ses pantalons pour ressembler, sans contrefaçon, à un garçon. MF : C’est véridique. J’avais une personne qui me disait fréquemment quand j’étais plus petite que « Mylène » était très joli pour un garçon, parce qu’en fait j’avais une voix assez grave, que j’ai forcée de muer avec le temps. TD : Vous avez toujours ce rêve d’être un garçon ? MF : Non ! (rires) TD : Une autre rumeur dit que vous auriez plein de miroirs chez vous. Alors est-ce que vous aimez les miroirs ou est-ce que vous détestez les miroirs ? MF : Alors j’avoue que là, je n’ai pas plein de miroirs chez moi, au contraire je crois n’en avoir aucun. Maintenant, la nécessité que de se regarder en permanence, mais c’est plus dans le souci de n’être pas assez jolie, pas assez bien, pas prête, je crois que c’est plus de la nature d’une angoisse que d’un narcissisme profond. TD : Donc vous pourriez dire que le miroir est votre pire ennemi ? MF : J’avoue qu’il ne m’est pas sympathique, en tout cas ! (rires) TD : Vous avez dit une fois que vous aviez des singes. Je crois que vous n’avez plus qu’un seul singe… MF : J’ai un singe, oui. Je vis avec depuis près de vingt ans maintenant. C’est un petit singe capucin, donc c’est de petite taille et c’est un animal très intelligent. TD : C’est un ami pour vous ? MF : C’est un compagnon, oui. C’est une petite fille ! TD : Donc évidemment, comme vous parlez peu, on parle à votre place. Les biographies sont nombreuses, quelquefois démentes. Je vais prendre la plus démente, c’est une biographie où on raconte qu’un putois, petite, vous aurait uriné dessus, que vous en auriez eu un grand traumatisme et que pour vous laver de cet affront, votre mère vous aurait mise dans un bain de tomates. Vous confirmez ? MF : (sourire amusé) Ecoutez, moi on m’a absolument infirmé cette histoire, donc voilà, je

pense que c’était une très jolie histoire, un peu dramatique, un peu sulfureuse, mais ce n’est pas la réalité, non ! (rires) TD : Vous en souffrez de tout ça, ou vous vous dites « C’est le prix que je dois payer puisque je me tais » ? MF : Les personnes qui s’autorisent à violer le territoire d’une autre personne pour obtenir ou pour inventer des propos, ça, je trouve ça extrêmement déplacé. Je crois que pour faire ce métier, il faut avoir les reins solides parce qu’il y a des ennemis mortels. TD : On sait qu’il n’y a pas de grand talent sans grande fêlure. On a deviné chez vous qu’il y avait une fêlure. On sait que Johnny Hallyday a été un enfant abandonné, on sait que Barbara a été une enfant violée. Est-ce que vous connaissez votre fêlure ? Est-ce que vous connaissez votre mystère, votre secret ? Vous avez le droit de ne pas nous le dire, mais est-ce que vous le connaissez ? MF : Oui, bien sûr. TD : Si on devait se servir comme seule biographie officielle de vos textes de chansons, vous dites : « J’ai peur de l’heure qui me ramène à des songes emportés, à des mondes oubliés, à des nuits de veille » et « Mémoire inachevée… ». On a l’impression que bon, l’ombre, c’est la mort, qu’avant de mourir vous avez peur que des cauchemars reviennent, que des souvenirs terribles reviennent. MF : Ecoutez, j’essaie de plus en plus, et j’avoue que ce n’est pas facile, d’extraire de ma vie, et à jamais, du ressentiment. Maintenant, vous dire qu’on a des fardeaux à traîner : bien évidemment. Que des plaies ouvertes ont du mal à cicatriser : oui. Maintenant, vous raconter la nature de mes plaies…Parfois, elles sont précises dans mon esprit, et parfois elles sont très troubles, je n’en sais rien. Je crois que c’est aussi le fait de n’avoir que très très peu de souvenirs de mon enfance, et j’avoue que c’est troublant pour moi-même. Et n’ayant pas fait appel à l’analyse... TD : C’est-à-dire que à partir de douze ans, à vos douze ans, vous ne vous souvenez presque de rien ? MF : Non, de rien. Mais même après… TD : Vous pensez qu’un jour vos souvenirs vont revenir ? Un jour vous allez récupérer votre passé, votre histoire ? MF : Non. Non, certainement pas. Je pense que ce sont des pages effacées, et puis une fois de plus, peut-être que je n’en ai pas réellement la nécessité que de savoir le pourquoi du com-

ment…Laissons ça dans l’obscurité. TD : Puisque vous n’avez plus parlé depuis dix ans (sic !), qu’est-ce qui s’est passé dans votre vie depuis dix ans que vous pouvez nous dire ? Sur votre état d’esprit, sur votre ouverture au monde, sur votre santé… MF : (rires) TD : Vous allez de mieux en mieux ? MF : Oh non, je ne pense pas ! Autant de colère… TD : Après quoi ? MF : Je ne sais pas. Je suis née en colère. (rires) J’ai commencé par le « Je déteste », et puis après j’ai appris à aimer. TD : Vous diriez aujourd’hui que vous êtes une grande personne ? MF : Non ! Grand Dieu non ! TD : Toujours une enfant ? MF : Oui ! Oui, oui… TD : Vous ne voulez toujours pas grandir ? MF : Non, ça ne comporte aucun intérêt ! (rires) Non… TD : Vraiment ? MF : Vieillir, je l’accepte parce que c’est une fatalité. Mais grandir, non. TD : Vous l’acceptez, de vieillir ? MF : Oui. Oui, oui…Vous dire que c’est douloureux : probablement, mais voilà, je n’ai pas le choix. TD : (en voix-off, sur des images de « Désenchantée » extraites du « Mylenium Tour ») Les grandes failles de Mylène Farmer n’empêchent pas un travail sans faille. Bête de scène, femme de show et dame d’affaires, elle a besoin de tout contrôler sur scène, de la lumière à la moindre boutonnière. (Face à Mylène) Ça va jusqu’à une image, une photo que vous n’aimez pas. Vous dites : « C’est mon métier, c’est mon image : je veux contrôler ça, c’est ma personne ». MF : Mais bien évidemment. C’est vrai que… Mais là encore vous… C’est un département encore plus douloureux. C’est vrai que quand on ne s’aime pas ou qu’on ne s’accepte pas, on est beaucoup plus critique envers soi-même. Donc il y a des choses que l’on déteste. Et quand on déteste, on déchire ! TD : Vous préférez le mot « sexe » ou le mot « désir », ou « plaisir » ? MF : « Désir ». C’est un joli mot. TD : On peut dire que c’est un des thèmes majeurs chez vous… MF : Oui. L’envie de, oui. TD : De provoquer ? MF : Le désir ? Aussi, bien sûr ! TD : Et d’où vous vient cette liberté incroyable que vous avez, même d’un point de vue sexuel,

« Je crois que pour faire ce métier, il faut avoir les reins solides parce qu’il y a des ennemis mortels.  »


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où il n’y a pas de tabous, tout désir est respectable… ? MF : Peut-être de mes lectures. Peut-être que j’ai lu Sade un peu trop tôt, peut-être que je l’ai dévoré…Et voilà, il y a des personnes qui vont vous raconter, se raconter volontiers. J’ai plus de facilité peut-être, moi, à raconter des désirs sexuels, des épanchements… TD : Il y a quelques années, vous disiez que ça serait mortifère pour vous de ne pas accomplir tous vos fantasmes. Vous les avez accomplis ? MF : C’est chose faite ! (rires) TD : On s’ennuie après ? MF : On s’ennuie ! (rires) On en trouvera d’autres… TD : Ce qu’il y a d’épatant et de troublant chez vous, c’est que vous êtes à la fois… être aussi timide et aussi osée. MF : C’est le paradoxe que je dois vivre tous les jours. TD : Vous avez peur du tiède ! MF : Je déteste le tiède ! TD : Est-ce que vous avez l’idée quelque part que tout est permis, tout vous est permis en tout cas ? MF : En tout cas, je ne m’interdis rien, si ce n’est… Je fais appel à ma mémoire, mais je me souviens quand j’ai écrit « C’est une Belle Journée », dans le refrain j’avais mis : « C’est une belle journée/ Je vais me tuer », à la place, aujourd’hui, de « C’est une belle journée/ Je vais me coucher ». Et je crois que là, ce pourrait être un appel au suicide de certaines personnes un peu fragiles. Et j’ai changé ce mot pour un autre parce que c’était peut-être tout d’un coup quelque chose de trop fort, trop déterminant. Je crois que tout est possible à partir du moment où, une fois de plus, on ne fait de mal à personne. TD : Vous l’avez acquis où, cette liberté ? Ce sont vos parents ? MF : Je ne sais pas. TD : Vous avez été rebelle tout de suite, tout le temps ? MF : Oui. Plutôt cachée, plutôt dans sa forme autistique – est-ce qu’on dit ce mot ? Oui ? Ce métier a été ma survie, et ça je le dis sans sens dramatique aucun. Ça a été vraiment vital pour moi, sinon je n’avais aucun sens à ma vie. L’envie, une fois de plus, de donner et surtout de recevoir, aussi. TD : Puisque vous avez employé le mot « autiste », je me permets d’en parler : vous êtes fascinée et vous allez voir sans caméras, ça vous honore, souvent les enfants malades. MF : C’est vrai que j’ai fait pas mal de visites

dans les hôpitaux, voir les enfants malades. Mais j’ai surtout, et je vais vous donner une toute petite clé peut-être de ma vie, puisque en tout cas c’est un souvenir, quelque chose d’extrêmement marquant dans ma vie : je crois aux alentours de onze ans, je suivais donc des cours de catéchisme, et tous les dimanches nous allions à l’hôpital de Garches pour aller voir des enfants malades tétraplégiques, et on avait pour mission que de jouer avec eux, de s’occuper d’eux. C’est insupportable. C’est insupportable pour quelqu’un qui marche, pour quelqu’un qui s’ouvre, pour quelqu’un qui vit. Voilà, ce sont des choses en tout cas qui sont extrêmement électrochocs dans ma vie, et c’est assez difficile après de supporter cette injustice. TD : (en voix-off, sur des gros plans du visage de Mylène) Ce monde si tourmenté, fait de souvenirs effacés, de crucifix, de bas résilles et d’anges gardiens, fascine car elle ne cesse de chanter son mystère, sans jamais dire son secret. (Face à Mylène) Est-ce qu’il vous arrive de temps en temps d’imaginer qu’un jour, vous allez disparaître complètement des médias, de la scène, de la chanson ? MF : Ecoutez, j’ai le sentiment que ce sera mon dernier interview ! TD : Celui-là en ce moment ? MF : Celui-ci ! Mais… TD : Ça vous choque si je vous dis qu’être si sûre de son désir, faire ce que bon vous semble et mener votre carrière comme vous la menez en vous moquant, en gros, des qu’en-dira-t-on et en faisant ce que vous voulez, c’est aussi né d’un énorme orgueil ? MF : Je ne pense pas que ce soit ni de l’orgueil, ni être sûre de soi. Je pense que c’est plutôt une aversion pour le compromis. Je me suis toujours dit que je ne serai jamais dirigée par mes propres peurs, parce que les peurs peuvent engendrer des choses terribles. Mais je n’ai jamais cédé à mes peurs. TD : Donc vous avez dépassé vos peurs. MF : J’ai dépasse mes peurs. Parfois elles reviennent avec force, avec fracas. Mais je ne ferai jamais rien qui est guidé par la peur. Jamais. TD : Au final de cet entretien, on se rend compte qu’on vous a beaucoup fantasmée, qu’on a imaginé que tout ça était calcul, ces apparitions, ces disparitions et que c’est votre rythme à vous finalement. MF : Tout à fait ! TD : Vous aimez le silence. MF : Je crois que le silence m’aime, plutôt ! (rires)

TD : On va peut-être se quitter sur un silence, alors ! MF : Sur un silence…Merci à vous. (silence) L’interview s’achève ainsi, silencieusement, sur un sourire gêné de Mylène, yeux baissés. Retour plateau… TH : Voilà. Et même si elle dit qu’elle n’est pas superstitieuse, Mylène reste très attachée au chiffre treize : elle démarrera sa série de treize concerts le 13 janvier prochain à Bercy. Une mise en scène, notamment, de son dernier album, « Avant que l’ombre… » (la pochette du disque apparaît sur l’écran derrière le présentateur) qui s’est vendu, pour l’instant, en neuf mois, à plus de 530.000 exemplaires (les ventes, à la sortie de caisses, approchaient alors en fait les 370 000 copies). Ainsi ce termine ce « Sept à huit » autoproclamé « exceptionnel ». Pour info, l’entretien avec Mylène a été enregistré quelques jours avant Noël, dans le sous-sol d’une boutique, dans le centre de Paris – un ancien parking transformé en galerie d’art, non loin de la place des Victoires. Vingt deux minutes ont été diffusées sur les soixante-quinze enregistrées. Seules exigences de la star : outre un choix de lumières et de profil, à l’instar de bon nombres d’artistes, elle a souhaité un grand espace clair, des bonbons à la fraises et un coin tranquille pour se reposer et fumer. Rien de bien extravagant donc. Dans le lancement du sujet par Thomas Hugues et Laurence Ferrari, comme dans les bandes annonces de l’émission ou la promo auprès des médias, l’interview de Mylène est présentée comme la première accordée par la chanteuse depuis dix ans, et sans doute la dernière ! Le premier point est évidemment mensonger. Quant au second, il s’agit d’une réinterprétation péremptoire d’une phrase prononcée par Mylène lors dudit entretien : « J’ai le sentiment que ce sera mon dernier interview». Ce sera peut-être le dernier long entretien de la star – seul le temps nous le dira -, mais pas la dernière interview puisque, depuis, elle a accordé quelques mots à RTL, le 1er décembre, pour la promo du film de Luc Besson, « Arthur et les Minimoys » (elle y fait la voix de la princesse Sélénia). Et elle a surtout retrouvé le plateau du J.T. de TF1, le 12 décembre 2006, pour parler, notamment, de son live.

« J’avais écrit “C’est une belle journée / Je vais me tuer”. J’ai changé ce mot, parce que c’était tout d’un coup trop déterminant.  »


NRJ Music Awards

Date 21.01.2006 Chaîne TF1 Présenté par Anthony Kavanagh

Septième édition des NRJ Music Awards, toujours à Cannes, au Palais des Festivals. Mylène, qui n’a plus été présente, ni même nominée depuis 2003, se retrouve en compétition dans deux catégories. Elle remporte un prix et transmet un message depuis Bercy où elle triomphe. Première catégorie dans laquelle Mylène est en lice : « L’album francophone de l’année ». Les autres nominés sont Calogero, Gérald de Palmas, Kyo et Raphaël. C’est l’équipe du 6-9, l’émission matinale de NRJ, qui ouvre l’enveloppe. Le prix est attribué à Mylène pour « Avant que l’ombre… ». Sur la musique de « Fuck them all » qui s’empare de la salle, Anthony Kavanagh, maître de cérémonie pour la sixième fois, entre alors sur le plateau… Anthony Kavanagh : Mylène Farmer n’est

pas là ce soir. Elle n’est pas là ce soir. Comme d’habitude c’est les « Mylène Farmer Music Awards ». Encore Mylène qui a gagné. Bravo Mylène ! Elle est sur scène à Bercy en ce moment. Mais je vous promets, je vous promets qu’on l’aura en ligne avant la fin de l’émission. En attendant, voici des images exclusives de son spectacle colossal à Bercy. Diffusion des toutes premières images jamais diffusées de « Avant que l’ombre…à Bercy », en l’occurrence l’intro de « Sans contrefaçon » et des extraits de « Redonne-moi » et « Fuck them all ». Images exclusives et inédites puisque le montage du DVD sera tout autre. En fin d’émission, arrive la seconde catégorie dans laquelle concourre Mylène : « L’artiste féminine francophone ». Prix que la chanteuse a remporté quatre fois (2000, 2001, 2002 et 2003). Depuis, elle n’a plus été nominée. La revoilà donc en course, avec pour concurrentes : Tina Arena, Céline Dion, Jenifer et Lââm. Et pour la première fois, Mylène perd dans cette catégorie, au profit de Jenifer qui rafle le prix pour la troi-

sième année consécutive. Avant de clore la cérémonie, Anthony Kavanagh nous propose, comme promis, de regarder et d’écouter un message de Mylène…La chose se présente comme un duplex depuis Bercy, mais il est flagrant que c’est enregistré. La chanteuse apparaît en veste noire (col de chemise blanc apparent) arborant, pour la première fois à la télé, sa coiffure de Bercy 2006. Mylène Farmer : Bonsoir. Je ne peux pas être avec vous ce soir puisque je suis sur la scène de Bercy. Et je voulais vous dire que je partage des moments absolument incroyables avec le public ici. Je voulais également vous remercier pour ce prix qui me touche tout particulièrement puisque c’est le prix de l’album, et c’est vraiment important pour moi. Et vous dire de passer une très très bonne soirée (sourire). Et je vous embrasse. Et je vous aime infiniment. Merci beaucoup. La cérémonie se termine immédiatement après.


2004–2006 : Avant que l'ombre…

Arthur et les Minimoys Le 27 novembre au soir, Mylène Farmer assiste à l’avant-première de « Arthur et les Minimoys », à Paris, sur les Champs Elysées. Elle a en effet prêté sa voix à la princesse Sélénia, l’un des personnages du film d’animation de Luc Besson qui sort en salles deux semaines plus tard. Le lendemain, et dans les semaines qui suivent, elle apparaît donc furtivement dans différents J.T. et diverses émissions (« Le grand journal » sur Canal+, « VIP » sur NRJ 12,…). On la voit sur le tapis rouge, aux côtés du réalisateur, sous les flashes crépitants, tandis que son prénom est scandé par le public présent derrière les barrières.

© Sygma-Corbis

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Mylène Farmer

Date 28.11.2006 Chaînes Diverses


© ABACA


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© TF1

Mylène Farmer

2004–2006 : Avant que l'ombre…


J.T. de 20H

« Vous m’avez observée depuis dix minutes : je suis paniquée à l’idée que de parler de moi. C’est un exercice difficile.  » Date 12.12.2006 Chaîne TF1 Présenté par Patrick Poivre d’Arvor

Toujours là où on ne l’attend pas, Mylène Farmer renoue avec le J.T. qu’elle n’avait plus fréquenté depuis « Giorgino », douze ans plus tôt ! C’est sa seule télé pour la promo de son live et de « Arthur et les Minimoys », le film de Luc Besson dans lequel elle fait une voix. Présente sur le plateau dès le début du journal, elle est annoncée par le présentateur dans les titres. L’occasion de la découvrir en gros plan, souriante, cheveux longs et lâchés sur les épaules. Patrick Poivre d’Arvor : (…) Et puis nous aurons le plaisir de recevoir Mylène Farmer qui s’est toujours fait très rare sur le petit écran, mais qu’on peut retrouver sur le grand puisqu’elle donne sa voix au dernier film de Luc Besson, et que le DVD de son spectacle de Bercy sort à son tour. L’entretien avec Mylène intervient en toute fin de journal. PPDA : Dans quelques instants, j’aurai le plaisir de recevoir Mylène Farmer (gros plan sur l’artiste) dont l’actualité est florissante en ce mo-

ment : le DVD de son spectacle à Bercy vient tout juste de sortir, et on la retrouvera demain au cinéma dans « Arthur et les Minimoys », de Luc Besson, où elle a prêté sa voix à la princesse Sélénia. Jean Chubilleau.

princesse Sélénia dans le dernier film de Luc Besson, c’est elle. (sur des images de la sortie de scène de « Avant que l’ombre…à Bercy ») Histoire de rappeler qu’elle est aussi comédienne. Histoire aussi de se faire plaisir.

Le sujet commence… Jean Chubilleau : (en voix-off sur des images de l’entrée en scène de « Avant que l’ombre…à Bercy ») Allongée dans un caisson verrouillé, elle descend vingt-cinq mètres de haut, avant d’être portée sur scène – images troublantes de son dernier spectacle évoquant la mort et la renaissance. Mylène Farmer : un univers de symboles, de mystère, de sensualité. C’est aussi le culte du travail (images de « California » sur scène, puis, sur des images extraites du making of du spectacle – Mylène au travail dans un Bercy en chantier) L’artiste supervise tout, comme un chef d’entreprise. Des années de préparation, de répétitions, des tonnes de décor pour treize Bercy qu’elle a donnés à guichets fermés. (sur des images de « Maman a tort » extraites de « La vie à plein temps du 22 mars 1984, puis des images de Mylène et Laurent lors du Tour 89 diffusées dans le J.T. de TF1 du 18 mai 1989) En vingt ans de carrière, et neuf millions d’albums vendus, elle est arrivée au sommet. Même si certains critiquent son image trop fabriquée, l’artiste continue et brouille les pistes. (sur des images du makingof de « Arthur et les Minimoys ») La voix de la

Retour plateau. On découvre une Mylène Farmer souriante, habillée d’une courte robe en soie bleue ciel façon nuisette et des cuissardes noires. Elle arbore un collier au médaillon imposant (avec une tête de mort au-dessus d’un sablier !). PPDA : Mylène Farmer, bonsoir. Mylène Farmer : Bonsoir (sourire). PPDA : La dernière fois que je vous avais reçue, c’était d’ailleurs la dernière fois que vous vous étiez exprimée en direct, c’était il y a douze ans. Pourquoi ce mystère ? Est-ce qu’il est cultivé ? Est-ce qu’il est entretenu ? Est-ce que c’est de la timidité ? MF : Vous m’avez observée depuis dix minutes, je crois (petit rire nerveux) et je suis paniquée à l’idée que de parler de moi. C’est quelque chose, un exercice très difficile pour moi. Donc il n’y a pas de marketing dans le mystère. Ma nature profonde est, je crois, la discrétion, l’humilité. C’est un exercice, je me répète, mais vraiment difficile. PPDA : Mais y’a pas d’agoraphobie en revanche : parler devant, chanter devant quinze mille personnes à Bercy, ça ne vous gêne pas ? MF : Non, étrangement, il y a ce fameux para-


coup de monde qui…qui aurait bien aimé. (Mylène fait un petit non de la tête) Non ? MF : C’est fini, et j’espère monter sur scène une autre fois, un autre jour. PPDA : Et c’est pas pour l’instant prévu ? MF : Non. (en pointant du menton le DVD posé sur la table) Ce spectacle est vraiment dans sa boîte, fermée, scellée (sourire). PPDA : D’accord, il est fermé. (en prenant le DVD dans la main) Voilà, on va le refermer. MF : Merci à vous. PPDA : Et on va mettre fin à votre supplice alors. MF : (rire) Non, tout va bien. Merci à vous. Merci beaucoup (large sourire). PPDA : Merci beaucoup Mylène. Le présentateur referme le journal. Pendant le générique, il pose un regard tendre et compatissant sur Mylène et lui dit quelques mots qu’on imagine réconfortants.

© TF1

2004–2006 : Avant que l'ombre… Mylène Farmer 288

doxe : je suis, je crois, plus à l’aise sur scène que sur un plateau de télévision (rire). PPDA : Alors, j’ai remarqué, aussi bien sur scène – je suis allé à Bercy – que là, à l’instant, vous fermez souvent les yeux. MF : Oui, c’est une manière de me replier sur moi-même, probablement, de me concentrer également. PPDA : Alors, Bercy, on va pouvoir voir – on voit déjà un petit peu sur nos écrans (des images du spectacle sont diffusées sur l’écran géant qui fait office de mur de fond) – et grâce notamment à cette…ce DVD qui vient de sortir (il tient entre ses mains l’édition limitée dont il fait coulisser les portes), qui vous ressemble d’ailleurs puisqu’il faut l’ouvrir (sic !). (rire de Mylène) C’est comme une sorte de petit tabernacle. « Avant que l’ombre etc. etc. » (sic !) Et puis, il y a la possibilité de vous découvrir sur les écrans, les grands écrans, aujourd’hui, à travers une voix, celle d’une princesse – forcément, il fallait évidemment que ce soit une princesse. MF : Oui, j’ai eu un joli cadeau : Luc Besson m’a proposé de faire donc la voix de la princesse Sélénia. Et j’ai pris un très très grand plaisir. PPDA : Et avec Luc Besson, il n’est pas impossible que vous continuiez à travailler, mais cette fois-ci comme producteur ? MF : Je l’espère. J’ai eu la chance de rencontrer Nathalie Rheims, qui est un auteur que vous connaissez également, et qui a écrit ce livre, très très très très beau livre, très très joli personnage, pour moi, qui est le personnage de Tess, c’est « L’ombre des autres ». Et puis, l’ultime cadeau de Noël, c’est un scénario de Claude Berri. Donc j’avoue que je suis comblée. Plus un DVD qui a un accueil formidable (100.000 exemplaires vendus au moment de l’interview, en une semaine seulement !). PPDA : Au fond, l’ombre ça vous va bien, plus que la lumière ? MF : J’aime l’ombre et la lumière. J’aime le silence et puis, et parfois le chant, plus que la parole probablement (sourire). PPDA : Alors, votre concert, c’était archi plein. Y’a beaucoup de gens qui auraient aimé vous voir, notamment en province. C’est pas possible que vous créiez une tournée ? MF : Malheureusement, et j’avoue que ça a été quelque chose d’assez difficile, aussi bien pour le producteur, Thierry Suc, qui m’a accompagnée dans cette très très belle aventure, et malheureusement, parce que c’était un spectacle intransportable, on ne pouvait pas donc aller en province. Donc, là cette fois, dans un manque d’humilité, j’ai demandé aux personnes de venir à moi. PPDA : Et on ne peut pas faire une resucée à Paris quand même ? Parce qu’il y avait beau-



Statistiques

Un peu de stats dans un monde de strass Répartition par chaîne* 14

12 12

85

5 12

Pour conclure cet épais référentiel des télés de Mylène Farmer, voici une petite synthèse chiffrée de vingt-trois ans de prestations médiatiques. C’est ludique… et ça aide à y voir un peu plus clair dans un parcours de communication, tout de même riche de deux cent trente-trois références, soit une moyenne de dix émissions par an depuis 1984 (la moyenne tombe à 3 sur les dix dernières années et à 1,6 depuis 2002).

40 49

Légende TF1 France 2 France 3 (National : 18, régional : 22) Canal+ La Cinq M6 Câble, satellite et régionales (rtl tv : 4, MCM : 3, tmc : 2, Canal J, LCI et PP : 1) Étranger (Belgique et Russie : 3, Québec et Italie : 2, Pays Bas, Suède, Danemark et Allemagne : 1)

Rappelons que Antenne 2 et FR3 sont devenues France 2 et France 3 en 1992, que M6 est née en 1987 et que La 5 a existé entre 1986 et 1992.

Répartition par single

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2 0 1

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Maman a tort My mum is wrong On est tous des imbeciles Plus grandir Libertine Tristana Sans contrefaçon Ainsi soit je… Pourvu qu’elles soient douces Sans logique A quoi je sers… Allan (live) Plus grandir (live) Désenchantée Regrets Je t’aime mélancolie Beyond my control Que mon cœur lâche My soul is slashed XXL L’instant X California Comme j’ai mal Rêver La poupée qui fait non (live) Ainsi soit je (live) L’âme-stram-gram Je te rends ton amour Souviens-toi du jour Optimistique-moi Innamoramento Dessine-moi un mouton (live) L’histoire d’une fée, c’est… Les mots C’est une belle journée Pardonne-moi Fuck them all Q.I Redonne-moi L’amour n’est rien Peut-être toi Slipping away (crier la vie) Avant que l’ombre (live)

Mylène Farmer

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3

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5

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Mylène a aussi chanté d’autres titres que ses singles : Chloé (3), Au bout de la nuit (5), Frantz (1), Greta (1), Déshabillezmoi (2), La ronde triste (1), Allan (1), Puisque (1), Dernier sourire (1), L’autre… (2), La poupée qui fait non (1), Pas le temps de vivre (1)


Animateurs

Émissions

Top 20 des animateurs ayant le plus souvent reçu Mylène.

Top 20 des émissions les plus fréquentées par Mylène.

Jean-Pierre Foucault Christophe Dechavanne Michel Drucker Patrick Sabatier Patrick Poivre d’Arvor Michel Denisot Jacky Philippe Bachmann Stéphane Collaro Jean-Pierre Descombes Anthony Kavanagh Bernard Montiel Arthur Marc Bessou Charly & Lulu Philippe Gildas Jean-Luc Lahaye Guy Lux Jacques Mailhot Marc Menant

20 18 12 12 11 6 6 5 5 4 4 4 3 3 3 3 3 3 3 3

9 8 6 5 5 5 5 4 4 4 4 4 3 3 3 3 3 3 3 3

spécial Mylène Farmer

Édité par les Éditions Why Not, 2 rue du Père Talvas, 92110 Clichy E-mail : insideof@editionswhynot.com – Site Internet : www.insideof.com

1984 15 1985 18 1986 1987 1988 1989 12 1990 3 1991 12 1992 2 1993 3 1994 6 1995 4 1996 16 1997 2 1998 0 1999 9 2000 9 2001 2 2002 3 2003 1 2004 0 2005 1 2006 3

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34

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Répartition par an*

C’est encore mieux l’après-midi Sacrée soirée J.T. 20h de TF1 Avis de recherche La Une est à vous NRJ Music Awards Stars 90 A la folie, pas du tout Jacky show L’académie des 9 La vie à plein temps Mon zénith à moi Embarquement immédiat Hit machine J.T. 20h de France 2 Lahaye d’honneur Les années tubes Les jeux de 20h Les uns et les autres Tapis rouge

* Sont exclus les deux passages furtifs à « Exclusif » en 1999 car Mylène n’y participe pas volontairement, ainsi que les images de la conférence de presse de 2004 qui sont multichaînes, idem pour celles de « Arthur et les Minimoys ».

Rédacteur en chef : Franck Besnier A participé à ce numéro : Clément Lagrange Conception maquette : Adrien Bonnet Distribution : NMPP Photographies : Abaca, Sygma-Corbis, Midem, M6, TF1 Captures images : Romain Huck Remerciements : Adeline Cazenave, Benoît Cachin, Corinne Arquillière, Cécile Gaffory, Cécile Dunouhaud, Cécile Roche, Christophe Molière, Christopher, Julien, Olivier V., Patrice, et les drôles de dames de Clichy. Directeur de la publication : Olivier Chalumeau N°1 (mars/avril 2007) Commission paritaire & N° ISSN : en cours Dépôt légal : mars 2007 © Tous droits réservés. La rédaction n’est pas responsable des textes et photos publiées qui engagent la seule responsabilité des auteurs. Toute reproduction de texte, logo, photo ou dessins publiés dans ce magazine est rigoureusement interdite sans accord écrit de l’éditeur.


233 passages télés décortiqués et illustrés !

M 05150 - 1 - F: 19,90 E - RD

Inside of vous invite à découvrir le parcours télévisé hors normes d’une star qui ne l’est pas moins. Vingt-trois ans sous les projecteurs de la télévision : l’occasion d’observer la carrière de Mylène Farmer sous un jour nouveau.

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Mylène Farmer et la télévision : une relation nécessaire et douloureuse. Des années 80 où la chanteuse se doit d’être partout pour se faire connaître (télés régionales, plateaux de variétés, émissions comiques, jeux télévisés) aux années 2000 où elle ne se montre presque plus dans la petite lucarne, Mylène Farmer a réussi l’impossible : dompter le fauve médiatique et en user comme bon lui semble.


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