Les Cahiers du Numérique #4 - Mai 2013

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INNOVATION / BUSINESS / POLITIQUE NUMÉRO 4 /// MAI 2013 / 45 €

www.lescahiersdunumerique.fr

3 NUMÉROS PAR AN

L’EXCEPTION CULTURELLE EST-ELLE

« Yellow » par l’artiste Nathan Sawaya. Photo offerte par brickartist.com

Patrick Bloche

« Plus l’offre légale se développera, plus le téléchargement illégal verra son attrait diminuer ! » page 8

Le Big Data Sonne le glas de l’âge industriel page 12

Cocréation

Quand le consomm’acteur devient designer page 36



DIRECTEUR DE LA PUBLICATION : Jamal Labed

ÉDITO

COMITÉ ÉDITORIAL : Patrick Bertrand, Cegid Valérie Ferret, Dassault Systèmes Romain Hugot, Sage Marc Mossé, Microsoft Frederic Masse, SAP Pierre-Marie Lehucher, Berger-Levrault David Monteau, INRIA

RÉDACTEUR EN CHEF : Reynald Fléchaux CHEF DE PROJET : Fabrice Larrue DIRECTRICE ARTISTIQUE : Pilar Cortés SECRÉTAIRE DE RÉDACTION : Dominique Friocourt (Agence Edido) JOURNALISTES : Guillaume Barrières Isabelle Bellin Christophe Cayenne Romain Chabrol Diane Dufoix Emmanuel Lempert Serge Escalé Philippe Richard Jean-Baptiste Su Toute reproduction, représentation, traduction ou adaptation, qu’elle soit intégrale ou partielle, quel qu’en soit le procédé, le support ou le média, est strictement interdite sans autorisation de l’Association Française des Editeurs de Logiciels et Solutions Internet (Afdel), sauf cas prévu par l’article L.122-5 du Code de la propriété intellectuelle. LES CAHIERS DU NUMÉRIQUE sont édités par

Association française des éditeurs de logiciels et solutions Internet (Afdel) - Association loi 1901 Siège : 11-17, rue de l’Amiral Hamelin 75016 Paris SIRET : 489305367 00018 ©2013 AFDEL - Tous droits réservés Dépôt légal : à parution Imprimé en France

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D. PERALDI

DIRECTEUR DE LA RÉDACTION : Loïc Rivière

NUMÉRIQUE : « MARQUONS UNE PAUSE EN MATIÈRE D’INVENTIVITÉ FISCALE ! » Voilà bientôt trois ans, que de nombreuses tentatives d’instauration de nouvelles taxes sectorielles ciblant l’économie numérique voient régulièrement le jour. Il en résulte à ce jour des propositions de taxes sectorielles dont l’efficience a été généralement mise en doute, voire dont les effets contre-productifs sur l’économie nationale ont été soulignés. Il est évident que, de par son caractère immatériel, l’économie numérique permet plus facilement une localisation optimale de ses actifs sans préjudice pour la qualité de service. Mais, loin d’être l’apanage exclusif de l’économie numérique, les pratiques d’optimisation fiscale sont le fait de grands groupes, tous secteurs confondus, tant le contexte concurrentiel en matière fiscale s’y prête en Europe ou ailleurs, et tant les montants en jeu sont considérables. Si la préoccupation des pouvoirs publics d’un meilleur recouvrement de l’impôt est, évidemment, tout à fait légitime et qu’elle est en outre logiquement partagée par de nombreuses entreprises -du numérique en particulier- dans un esprit de juste concurrence, il n’est pas justifié de stigmatiser l’économie numérique sur ce point en particulier. Bien plus, faire reposer l’explication du succès des entreprises les plus emblématiques de l’économie numérique sur la fiscalité procède d’une myopie dangereuse. Soyons clairs : en dépit de son effet levier sur les investissements, ce n’est pas une fiscalité plus favorable qui explique le succès de ces acteurs mais l’innovation, la puissance d’un écosystème, la taille du marché natif, la culture du risque et la concurrence. En démocratisant l’accès à la culture et au savoir, les outils et services numériques représentent pour beaucoup d’utilisateurs de formidables espaces de liberté d’expression et de création. Ces outils représentent aussi pour les entreprises la promesse d’une croissance renouvelée et d’une ouverture à l’international. Les chaînes de valeur en sont donc bousculées et c’est à une véritable transformation de la valeur qu’on assiste. Ce mouvement est ressenti de façon particulièrement forte en France où les usages sont, dans certains secteurs, enserrés dans des cadres de régulation. La mission dévolue à Pierre Lescure vise notamment à résoudre cette contradiction qui déstabilise le modèle française de l’exception culturelle. Il faut considérer avec attention que pour les usagers, la mobilité, la flexibilité ou encore le partage sont devenus aujourd’hui des valeurs essentielles qui vont parfois au-delà de la propriété des biens… Les acteurs du numériques sont ceux qui peuvent conférer cette nouvelle « valeur » aux biens. C’est pourquoi, quand le projet européen dévoile ses faiblesses comme en matière de recouvrement de l’impôt sur les sociétés, les solutions nationales doivent être écartées a priori, au profit des concertations internationales en cours comme c’est le cas à l’OCDE. C’est pourquoi les acteurs qui confèrent de la valeur aux réseaux et aux biens culturels ne peuvent se voir opposer de nouvelles taxes spécifiques qui créerait un internet à péage et dont les effets de bords ne seraient pas maîtrisés. LOÏC RIVIÈRE

Directeur de la rédaction

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8.

12.

« Plus l’offre légale se développera, plus le téléchargement illégal verra son attrait diminuer ! » Patrick Bloche, Député de Paris (PS) et Président de la Commission des Affaires culturelles et de l’Éducation

Quarter Back Le Big Data sonne le glas de l’âge industriel

SOMMAIRE NUMÉRO 4 /// MAI 2013

06. BILLET D’HUMEUR Arrêtons d’opposer préservation de la vie privée et développement du numérique par Patrick Bertrand 07. I ls ont dit, ils ont twitté, ça a buzzé

LE GRAND ENTRETIEN

08. « Plus l’offre légale se développera, plus le téléchargement illégal verra son attrait diminuer ! » Patrick Bloche, Député de Paris (PS) et Président de la Commission des Affaires culturelles et de l’Éducation

L’ESSENTIEL

12. Quarter Back Le Big Data sonne le glas de l’âge industriel 16. L’événement TechDays, « Nous avons créé un forum de la transformation numérique » 17. Best of blogs Big Data : arrêtez les maths, passez à la sociologie ! Par Cédric Deniaud 18. Cent jours : la France digitale TROIS QUESTIONS À... Benoît Thieulin, président du Conseil national du numérique « Placer très haut le principe de neutralité du Net »

LA VIE DES PÉPITES

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20. T rophées des start-up, STS Group 22. Start Up, what’s up Sculpteo, Jérôme, Featurit

LES CAHIERS DU NUMÉRIQUE /// NUMÉRO 4 /// MAI 2013


24. Le dossier L’exception culturelle est-elle soluble dans le numérique ?

LE DOSSIER

32. Un business model à la loupe Joueurs de poker : Au-delà du bluff

24. L ’exception culturelle est-elle soluble dans le numérique ? 25. Usages : la culture enfin démocratisée 27. E xception culturelle française : stop ou encore ? 29. D es p’tites taxes, des p’tites taxes, encore des p’tites taxes ! 30. Une industrie dont le disque est rayé

INNOVATION

32. Un business model à la loupe Publicité comportementale : « mais si, reprends un cookie… » 34. Business 2.0 Gérer ses fournisseurs en restant sur un nuage 36. La parole à l’innovation Cocréation : quand le consomm’acteur devient designer 38. E-Gov Facture électronique : Une étape cruciale dans la transition numérique des entreprises 39. Chronique juridique « Patriot Act » : des droits d’investigation strictement encadrés Par Kami Haeri

COMMUNAUTÉS

40. Communautés Joueurs de poker : Au-delà du bluff 42. Culture Némo : les arts numériques sur orbite ? 45. Idées Internet ou le retour de l’instinct de coopération Par Godefroy Dang Nguyen

FINANCEMENT

46. Tendances La laborieuse adaptation de l’industrie IT au cloud 48. Bourse Les éditeurs français font mieux que le Nasdaq ! 49. Les échos de la Valley Comment les robots vont créer des emplois 50. Tableau de bord L’essentiel de l’économie du numérique en chiffres

Illustrations iStockphoto

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BILLET D’HUMEUR ARRÊTONS D’OPPOSER PRÉSERVATION DE LA VIE PRIVÉE ET DÉVELOPPEMENT DU NUMÉRIQUE

D. R.

Internet est une formidable aventure collective qui ouvre des champs infinis. Ce nouveau monde porte aussi en lui-même ses dangers pour le citoyen, dangers dont la nature n’a pas vraiment changé, mais dont l’impact et les conséquences peuvent être dramatiques : cyberlynchage, cyberterrorisme, intégrité des enfants, fraudes au paiement électronique, espionnage à des fins politiques et/ou mercantiles… Les plus grands acteurs économiques de l’Internet se sont développés en donnant la possibilité à des milliards d’êtres humains d’avoir accès à ce nouveau monde, gratuitement mais avec des contreparties : les données que l’on communique, consciemment ou inconsciemment, sur notre vie et sur qui nous sommes. Cette forme moderne de troc est un progrès tant elle a permis, en un temps record à chacun et chacune d’entre nous d’avoir accès à ce formidable potentiel. Encore faut-il que ce troc ne soit pas tronqué et que les « termes de l’échange » soient établis sur des bases claires, non discutables et équilibrées, car il porte, du côté de l’utilisateur, sur une donnée essentielle : sa vie personnelle – ce qu’il est, ce qu’il pense, ce qu’il fait… La clarté et la transparence des conditions de ce troc constituent donc un élément essentiel de l’équilibre de cet « échange ». C’est une aspiration LE PRIVACY PARADOX de plus en plus marquée des internautes, APPELLE UN COMPROMIS particulièrement chez les parents de nos INNOVANT. digital natives. Internet a conduit à la création d’une véritable « économie de la donnée », structurée autour des moteurs de recherche et des réseaux sociaux qui analysent finement ces profils et ces données pour les monétiser. Côté utilisateurs, des millions de personnes n’hésitent pas à exhiber leur vie privée sur Internet… mais à la stricte condition – tacite – de garanties élevées de confidentialité. Ce privacy paradox appelle donc un compromis innovant qui permettrait de dessiner une nouvelle frontière du numérique. L’accélération du développement du numérique passe ainsi nécessairement par un équilibre entre ces aspirations en apparence contradictoires, car un internaute « sécurisé » sera le meilleur vecteur de diffusion de ces nouvelles formes de vie. Cette confiance numérique implique des règles et des instances reconnues, modernes, conscientes des enjeux de ce nouveau monde, pour les définir et les contrôler. C’est en progressant sur ce chemin de l’équilibre que le numérique se développera. Le salut de la révolution numérique, avec ses effets sur le développement de nos économies, ne viendra pas, comme le suggère certains, de l’abandon de tout contrôle sur l’utilisation des données personnelles collectées. Ce sophisme prêterait à sourire, s’il n’était gravissime. Que deviendrait, en effet, la démocratie dans un monde où l’internaute, dépossédé de lui-même, serait à la merci de toutes les déviances, notamment politiques ? PATRICK BERTRAND

Directeur général de Cegid

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LES CAHIERS DU NUMÉRIQUE /// NUMÉRO 4 /// MAI 2013


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D. R.

LE GRAND ENTRETIEN

DÉPUTÉ DE PARIS (PS) ET PRÉSIDENT DE LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE L’ÉDUCATION DE L’ASSEMBLÉE NATIONALE

PATRICK BLOCHE

« PLUS L’OFFRE LÉGALE SE DÉVELOPPERA, PLUS LE TÉLÉCHARGEMENT ILLÉGAL VERRA SON ATTRAIT DIMINUER ! » Propos recueillis par Loïc Rivière Le numérique a profondément modifié les usages culturels et démultiplié les possibilités d’accès aux contenus. N’est-ce pas pour vous un moyen inédit d’encourager la démocratisation de l’accès à la culture ?

Il est évident que les modalités d’accès à la culture sont bouleversées par le développement du numérique. La dématérialisation des supports et la communication par voie électronique ouvrent déjà au niveau mondial des possibilités inégalées d’accès aux savoirs et aux patrimoines, de formation de réseaux et de plateformes de débat, de libre expression, de diffusion et d’échange des informations et des œuvres dans leur plus grande diversité. Mais ce qui fait la différence, ce ne sont jamais les technologies mais ce qu’elles permettent et le projet de société au service duquel elles sont mises.

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Il faut d’ailleurs se méfier du terme parfois galvaudé de « démocratisation de l’accès à la culture ». Le simple accès facilité ne suffit pas. On le voit notamment avec les politiques tarifaires qui profitent malheureusement trop souvent à ceux qui fréquentaient déjà les lieux culturels et ne créent pas forcément l’effet escompté de les ouvrir au plus grand nombre. Internet apporte indéniablement une exceptionnelle facilité d’accès à la culture mais encore faut-il donc amener le public vers les œuvres et susciter la curiosité et l’envie. Je crois beaucoup à la nécessité d’accompagner notamment les plus jeunes dans cet apprentissage. C’est pourquoi je compte beaucoup sur les opportunités offertes à court terme par la mise en place du parcours d’éducation artistique et culturelle tout au long de la scolarité des enfants, prévu dans le projet de loi de refondation de l’école de la République.

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LOREM IPSUM

LA MISSION LESCURE DOIT RÉFLÉCHIR À DE NOUVEAUX MODÈLES DE FINANCEMENT SUBSTITUTIFS.

Entre risque et opportunité, comment voyez-vous l’exception culturelle s’adapter au développement des usages numériques ?

L’actualité de l’exception culturelle est brûlante avec le projet d’accord de libre-échange entre l’Union européenne et les Etats-Unis. Les autorités françaises se mobilisent actuellement pour exclure complétement les services audiovisuels du champ de cette négociation. C’est aussi le sens de la proposition de résolution européenne que nous avons rédigée avec ma collègue Danielle Auroi, Présidente de la Commission des affaires européennes à l’Assemblée nationale. Celle-ci a été adoptée le 9 avril dernier par la Commission des Affaires européennes et le 17 avril par la Commission des Affaires culturelles et de l’éducation que je préside. C’est un signal fort qu’a souhaité donner le Parlement. Je crois fondamentalement que la préservation de la diversité culturelle est un enjeu économique, culturel et d’influence essentiel pour tous les pays européens qui la promeuvent par leurs aides et leur régulation. A l’ère du numérique, peut-on parler de politique culturelle sans parler de politique industrielle ? Comment générer l’innovation dans les industries culturelles ?

L’univers du numérique est un univers très ouvert donc très permissif pour le créateur. Il permet le développement d’une société créative, qui donne à chacun la chance et la capacité,

non seulement de conduire son propre destin, mais aussi d’agir pour le bien commun. Mais parallèlement nous le voyons bien, nous avons besoin d’acteurs économiques qui puissent être à la dimension de l’univers numérique. C’est pourquoi nous menons aussi une politique visant à aider nos opérateurs au sein de ce marché mondialisé. Il reste qu’il ne faut pas comme nous l’avons déploré ces dernières années donner une trop grande prééminence aux industries culturelles, indexant la valeur artistique à la valeur marchande et le travail de l’art à la rentabilité du divertissement. Qu’attendez-vous du rapport de la mission Lescure ?

J’espère que ce rapport permettra enfin de poser les vraies questions. Les lois Dadvsi et Hadopi, contre lesquelles le groupe socialiste auquel j’appartiens s’est mobilisé ces dernières années n’étaient que des lois de retardement qui ne proposaient malheureusement aucun modèle alternatif de financement de la création. J’attends de la mission Lescure qu’elle pose les questions essentielles et propose un certain nombre de pistes permettant ensuite au législateur de trouver les moyens de concilier financement pérenne de la création et accès élargi aux contenus culturels. La mission doit réfléchir à de nouveaux modèles de financement substitutifs. En effet, il faut en chaque domaine trouver des modèles de financement qui soient adaptés aux modèles économiques sectoriels.

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LE GRAND ENTRETIEN

JE SUIS CONVAINCU QUE LA COPIE PRIVÉE PEUT S’ADAPTER AUX ÉVOLUTIONS TECHNOLOGIQUES D’AUJOURD’HUI.

Ainsi, la question du prix unique du livre est majeure pour le livre numérique. Pour la musique, secteur le moins aidé par les pouvoirs publics et le premier touché par la révolution technologique, des dispositifs nouveaux sont à trouver et il conviendra de redéfinir le périmètre et les missions du Centre National de la Musique victime temporaire du souci majeur de réduction des déficits publics. Enfin, s’agissant du cinéma, celui-ci dispose d’un dispositif vertueux alimenté par trois taxes affectées au compte de soutien et les obligations des chaînes. Le respect de la propriété intellectuelle ne semble pas être une évidence pour les jeunes générations. Pédagogie ou répression, comment y remédier ?

Cette question rejoint la précédente. Nous sommes au-delà de la problématique générationnelle. Il est temps de poser les questions essentielles et de ne plus opposer les auteurs et leurs publics qu’ils soient jeunes ou moins jeunes. Une politique juste et cohérente a plus de chance d’être acceptée qu’une loi inutile et inefficace.

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Hadopi a été un enjeu de campagne sur les sujets numériques et culturels. D’aucuns relèvent désormais même « un climat de modération ». Vous restez cependant un fervent opposant de la Haute Autorité ?

Je constate aussi un climat de modération mais ce n’est pas, de mon point de vue, la conséquence de l’acceptation sourde de cette autorité mais plutôt du constat partagé de son inutilité. C’est par son maigre bilan et dès lors son inutilité, que l’Hadopi est sortie du débat public. Mais, je crois toujours, en effet, que la loi, de par des dispositions pénales que nous jugeons exorbitantes eu égard au droit des personnes, doit être abrogée au bénéfice d’un retour au droit commun. Je crois également toujours que le budget alloué à la Hadopi serait bien mieux utilisé au service de l’aide à la création. Il s’agit de développer aujourd’hui une approche positive et de prendre en compte la réalité des usages des internautes en libérant les catalogues et en rendant l’accès aux œuvres recherchées plus facile. En effet, plus l’offre légale se développera, plus le téléchargement illégal verra son attrait diminuer.

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D. R.

C’EST PAR SON MAIGRE BILAN ET DÈS LORS SON INUTILITÉ, QUE L’HADOPI EST SORTIE DU DÉBAT PUBLIC.

Tandis que l’accès à ses contenus en tout lieu, à tout moment et depuis n’importe quel terminal est en passe de devenir la norme de l’usage culturel, l’application de la copie privée au Cloud computing ne serait-elle pas une aberration ?

La question centrale autour de la copie privée n’est pas, pour moi aujourd’hui, de savoir si elle peut ou doit s’appliquer au Cloud computing mais celle de sa propre survie, alors qu’un certain nombre de contentieux et de contestations viennent la fragiliser. Si elle doit sans conteste être amenée à évoluer, je vous avoue que j’ai un attachement particulier pour la copie privée au regard de ce qu’elle représentait lors de sa création.

En effet, la loi Lang de 1985 avait créé une exception au droit d’auteur dont la redevance pour copie privée constituait la contrepartie. D’un côté le législateur a pris en compte les usages de nos concitoyens sans vouloir les empêcher, de l’autre, il a trouvé un moyen nouveau de rémunérer le droit d’auteur. C’est cette philosophie que nous avons défendue et je suis convaincu qu’elle peut s’adapter aux évolutions technologiques d’aujourd’hui. Il ne s’agit pas de plaquer la solution à tout mais de poursuivre l’idée même qui était à l’origine de la copie privée. Le droit d’auteur a toujours su s’adapter aux évolutions technologiques au fil des années, je suis certain que cela perdurera.

BIO EXPRESS PATRICK BLOCHE, qui a commencé sa carrière politique comme assistant parlementaire en 1981, est président (PS) de la Commission des Affaires culturelles et de l’Education de l’Assemblée nationale. Député de Paris depuis 1997, il est aussi maire du 11ème arrondissement de Paris depuis 2008. Dans le cadre de ses différents mandats, il s’est impliqué sur les questions relatives à l’économie numérique, notamment en tant que co-président du groupe d’études sur Internet, les technologies de l’information et de la communication et le commerce électronique (1997-2012). Il est également administrateur de différents espaces de programmation culturelle.

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QUARTER BACK

LE BIG DATA SONNE LE GLAS DE L’ÂGE INDUSTRIEL Sans sourire, notre monde devient une matrice numérique dont il est possible d’analyser d’immenses pans. Une nouvelle donne qui bouleverse les règles du jeu économique. par François Lambel

P

our la plupart d’entre nous, Big Data rime surtout avec « big mystère ». Réaliser un tant soit peu ce que sont ces « données massives » passe par un effort d’imagination. Que les plus timorés se rassurent. Le « Big » de Big Data est tellement grand qu’il est également hors de portée des bases de données relationnelles. Leur technologie de traitement de données bien structurées (texte, chiffres) est inadaptée à l’analyse des données soit non structurées, soit dans des formats multiples. Celles qui pèsent 95 % du monde du Big Data. Plus significatif encore, les unités arithmétiques nécessaires pour mesurer les quantités en jeu flirtent déjà avec les limites du système métrique (voir encadré). En 2013, le Big Data, c’est la porte qui s’entr’ouvre sur notre univers en phase de numérisation ultra rapide. La production de données numériques y croît de façon exponentielle (+ 60 % par an). Chaque jour, des milliards de milliards d’octets naissent. Ainsi, aux quelque 500 milliards de courriels émis quotidiennement s’ajoutent, par exemple, 4,2 milliards de commentaires sur Facebook, assortis de près de 400 millions de photos. Tout cela n’est qu’une goutte d’eau dans le flot produit par les machines elles-mêmes. Les millions de transistors alentour déversent un afflux d’informations ininterrompu qui s’accroît de lui-même. Selon IBM, 90 % des données existantes ont à peine deux ans. POURQUOI LE BIG DATA A BESOIN DU CLOUD

C’est la rencontre de ces masses vertigineuses avec la possibilité, tout aussi vertigineuse, de les exploiter qui fonde l’intérêt du Big Data. À l’explosion exponentielle des quantités de

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données produites répondent des couches logicielles dernier cri capables de les traiter et, aussi, d’animer et de coordonner à une échelle planétaire la couche matérielle. Ce vecteur, c’est ce qu’est devenu Internet avec le cloud computing : d’immenses unités de traitement et d’espaces de stockage suffisamment performants pour extraire des informations à des prix abordables au regard de la valeur qu’elles génèrent. Reste une difficulté technique à surmonter, celle du débit des réseaux qui peine à déplacer les masses de données traitées à une vitesse satisfaisante. Développé en Open Source, Hadoop est l’exemple le plus en vogue d’une pile logicielle complexe, capable de piloter des milliers de processeurs pour réaliser le traitement massivement parallèle de pétaoctets (millions de Go) de données. Une ressource matérielle délivrée par des serveurs exploités comme s’ils étaient… de l’électricité. La simple énergie, pour assurer le traitement. C’est dans cette perspective que certains ébauchent l’idée d’une révolution informationnelle. Ils lui prédisent un impact sur l’économie du monde plus fort et plus violent que celui de la révolution industrielle. Rien de moins. Pour eux, l’économie de la connaissance de la demande, des besoins et des pénuries relègue au second plan le rôle et le poids de la production. LES ENTREPRISES SONT-ELLES PRÊTES ?

Oui, car elles ont pris conscience du potentiel analytique et décisionnel du Big Data dans un environnement hyper concurrentiel. Logiquement, les très grands comptes ont pris le train plus tôt que les autres. En particulier, ceux du secteur de la distribution

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Corbis © Corbis

LOREM IPSUM

où les données sur les clients prolifèrent. Mais, maturation de l’écosystème du Big Data aidant, les sociétés de taille moindre commencent à avoir accès aux mêmes potentiels de traitement. Les spécialistes prédisent la disparition du décisionnel, de la Business Intelligence (BI), sous sa forme habituelle. L’ampleur de l’afflux de données, d’une part, et la possibilité d’assurer des traitements en temps réel à des coûts abordables, d’autre part, destinent le Big Data à un rôle clé dans le fonctionnement d’une entreprise dès lors qu’elle accède à d’importants volumes de données dont le traitement et l’analyse influencent sa stratégie et ses décisions quotidiennes. Non, car le Big Data ne s’improvise pas. Tout d’abord, il faut disposer d’experts qui cumulent connaissances informatiques et statistiques, les fameux « Data Scientists ». Le BigData, qui a vocation à orienter la gouvernance de toutes les entreprises, est encore un Far West numérique où tout est à découvrir. Ensuite, la réussite du Big Data se pose comme la cerise sur le gâteau d’un SI parfaitement contrôlé… Mi-janvier, Fleur Pellerin, ministre déléguée chargée des PME, de l’Innovation et de l’Économie numérique, a appelé de ses vœux la création d’une filière Big Data en France. La tradition mathématique de haut niveau française n’attend que cette dernière pour s’exprimer. Mais le succès dépendra de la création d’un écosystème unique. Des propositions d’actions sont d’ores et déjà sur la table. Comme celle, defendue par l’Afdel, de créer un fonds de financement de 300 millions d’euros en partenariat public-privé, afin de développer en France l’incubateur dédié au Big Data qui fasse référence dans le monde.

AUX LIMITES DES UNITÉS DE MESURE

Pour 2016, Cisco prévoit que 1,3 zettaoctet de données transiteront par Internet. Le résultat d’une multiplication par 40 du trafic, entre 2006 et 2015. Zetta symbolise l’immense chiffre de 1 000 milliards de milliards. Un trilliard en français, un sextillion en anglais. Les ordres de grandeur concoctés par la start-up française MFG Labs fonctionnent bien pour réaliser la démesure de ce zettaoctet. Le préfixe zetta a été institué en 1991, en même temps que yotta. Mille fois plus grand que zetta, yotta est, avec ses 24 zéros, la limite actuelle du système international d’unités.

200 pétaoctets

Tout ce qui a été imprimé par l’humanité depuis le XVe siècle de Gutenberg. Il faut un million de pétaoctets pour faire un zettaoctet.

8 exaoctets

Tous les mots jamais prononcés par l’humanité. Il faut 1 000 exaoctets pour faire un zettaoctet.

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QUARTER BACK

///// Dell quitte la Bourse pour se réinventer En 1984, Michael Dell avait fondé le succès de sa société sur la fabrication de PC à la demande. Presque trente ans après, il veut recentrer Dell sur les entreprises à la recherche de services à valeur ajoutée. Pour réussir cette mutation, Michael Dell a lancé une opération record de rachat des titres en Bourse pour un montant de 24,4 milliards de dollars – du jamais vu dans le monde hightech. Ce LBO est financé par 16 milliards de dettes, un prêt de Microsoft d’environ 2 milliards, les 16 % du capital détenus par Michael Dell (estimés à près de 4 milliards), ainsi qu’un conséquent apport personnel, et, aussi, le soutien du fonds d’investissement Silver Lake pour un montant estimé à 1 milliard. Le diagnostic de Michael Dell est le bon : pour survivre, sa société doit s’affranchir de l’obsolescence de la micro-informatique. D’une part, alors que ce marché se consumérise, Dell n’est pas parvenu à s’imposer auprès du grand public. En baisse de 20 % l’an dernier, cette activité est la seule à générer des pertes chez Dell et ne représente plus que 19 ≈% de l’activité

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du groupe. D’autre part, alors que l’avenir est à la mobilité, les ventes de Dell diminuent sur ce secteur (- 20 % en 2012), faute de proposer autre chose que des PC portables standard. Pour le constructeur texan, les gisements de croissance sont ailleurs. Pendant que le chiffre d’affaires total du groupe pour l’exercice qui vient de s’achever baisse de 10 % à 44,7 milliards de dollars, son activité serveur est la seule à progresser (+ 11 % à 9,2 milliards). Ce dynamisme fait de Dell le numéro deux du marché mondial des serveurs x86, et l’écart avec le leader HP se réduit. Mais, virtualisation et cloud computing aidant, ce marché s’étiole aussi. Depuis cinq ans, Dell a mis la main sur 25 entreprises, toutes spécialistes des systèmes d’information professionnels. Protégés des foudres des analystes financiers en quête de rentabilité immédiate, Michael Dell et son conseil d’administration s’attellent à fondre leurs technologies dans le creuset d’où sortira le nouveau Dell. Une refonte qui rappelle celle imposée par Lou Gerstner à IBM, au tournant du siècle. G.B.

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/ Cebit 2013 : extension du domaine de la puce

/ Free : le coup de bluff du blocage de la publicité

/ Mobile World Congress, des bijoux en attente de réseau

Le plus grand salon mondial de la hightech, le Cebit d’Hanovre, qui a eu lieu début mars (4 100 exposants, 300 000 visiteurs), a confirmé l’extension des applications numériques à de nombreux domaines de la vie quotidienne. Avec l’apparition de nouveaux gadgets connectés, comme ce gant téléphone (Winnershine Technology), cette balle de golf contrôlée par smartphone (Woddon Industrial Limited), cette carte d’anniversaire intégrant de la vidéo (Spreengs), ce projet de fauteuil surveillant votre santé (institut Fraunhofer) ou encore ce stylo-scanner connecté au smartphone (PenPower Technology). Le Cebit a également vu se confirmer plusieurs tendances de fond, comme la robotique personnelle (avec le robot en kit RQ-Huno), l’impression 3D (avec un modèle à 1 500 euros chez Fabbster) ou encore l’automobile connectée, avec des annonces de BMW, Mercedes-Benz ou Ford.

S’il s’agissait de mettre les pieds dans le plat en bloquant, début janvier, l’affichage de publicités sur les écrans de ses internautes, Free a atteint son but. Si l’objectif était de trouver une solution équilibrée entre, d’une part, les FAI qui fournissent de la bande passante à leurs internautes et, d’autre part, ceux qui profitent de cette bande passante pour engranger des recettes publicitaires, c’est un échec. Il reste une certitude : personne ne veut supporter le coût de la généralisation du multimédia en ligne.

Le Mobile World Congress est aux terminaux ce que le Mondial de l’automobile est à la voiture : une messe consacrée à l’innovation. Avec les tablettes en nouvelles stars, l’édition de cette année voit déferler des produits avec de meilleurs écrans, des processeurs plus rapides et toujours plus de fonctions embarquées. Mais les mobiles ont aussi besoin d’autoroutes (de l’information) pour exprimer leurs potentiels. Alors que la 3G est à la peine, le cabinet d’études Wireless Intelligence prévoit que la 4G passera de 1 % des connexions en Europe aujourd’hui à seulement 20 % en… 2017.

/ BlackBerry 10 et Windows Phone 8 jouent la carte pro Alors qu’Apple (iOS) et Google (Android) se partagent plus de 80 % du marché des smartphones au quatrième trimestre (dont près de 70 % pour le seul Android), RIM avec Blackberry 10 et Microsoft avec Windows Phone 8 jouent des coudes pour se faire une place au soleil. Tous les deux, pour des raisons historiques, parient sur le marché professionnel. RIM, parce que c’est là que se trouve sa base installée la plus importante et la plus fidèle. Microsoft, parce que les DSI verraient d’un très bon œil un fournisseur unique pour l’équipement de leurs utilisateurs finaux.

/ Un seul brevet valable dans toute l’Europe

Par Guillaume Barrières et Reynald Fléchaux

À compter du 1er janvier 2014, le brevet unitaire européen permettra de ne faire qu’un seul dépôt valable dans les vingtcinq pays signataires de l’Union européenne. Ce dépôt pourra se faire indifféremment en trois langues : anglais, français ou allemand. Sept fois moins coûteux et plus rapide que l’actuel système de dépôts nationaux, le brevet unitaire devrait aussi bénéficier de juridictions d’envergure européenne. Des opposants, dont Nokia et Ericsson, s’inquiètent que des « patent trolls », très actifs aux États-Unis, puissent chercher à tirer profit du brevet unitaire.

/ YouTube prépare des chaînes payantes « Les Échos » prêtent à Google le projet de lancer des chaînes vidéo payantes sur YouTube. Plus d’une vingtaine seraient dans les starting-blocks sur la base d’abonnements entre 1 et 5 dollars par mois. Le modèle économique retenu repose sur le reversement de 55 % des sommes perçues aux fournisseurs de contenus, YouTube empochant les 45 % restants. Les fournisseurs auraient aussi la possibilité de commercialiser des espaces publicitaires dans leurs diffusions.

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L’ÉVÉNEMENT

ALAIN CROZIER PRÉSIDENT DE MICROSOFT FRANCE

D. R.

TECHDAYS “ NOUS

AVONS CRÉÉ UN FORUM DE LA TRANSFORMATION NUMÉRIQUE ” Pour Alain Crozier, président de Microsoft France, l’événement de l’éditeur, qui a réuni 18 000 visiteurs en février, s’ouvre désormais à des thématiques dépassant l’informatique. Propos recueillis par Loïc Rivière Quel bilan tirez-vous de ces TechDays 2013 ?

Alain Crozier : Cet évènement 100 % français, qui constitue un rendez-vous incontournable du numérique, a connu un succès sans précédent. Nous avons en effet accueilli 18 000 visiteurs pendant trois jours. La TechDays TV, qui retransmettait les temps forts en live, a quant à elle réuni plus de 44 000 visiteurs. Au-delà des chiffres, un tournant marque cette 7e édition : d’un événement informatique de référence, les TechDays sont devenus un véritable forum de la transformation numérique. Nous avons ainsi ouvert nos portes, cette année, aux décideurs métiers, issus du marketing, de la vente ou encore des RH. Dans un contexte économique morose, le numérique est plus que jamais un moteur de croissance. Les professionnels peuvent tirer parti de la transformation digitale qui est en marche pour accélérer leur business. Notre programmation, cette année, faisait ainsi la part belle à des tendances de fond, telles que le Big Data, le cloud ou la révolution des écrans. Habitué aux premières places, Microsoft se présente comme un challenger sur la mobilité. Quels sont ses atouts, aujourd’hui, face à la concurrence ?

A. C. : Notre stratégie est différente de celle de nos concurrents. Une transformation numérique est à l’œuvre. Elle bouleverse la façon dont chacun peut travailler, se déplacer ou vivre au quotidien. Nous sommes les mieux placés pour permettre aux utilisateurs de tirer pleinement les fruits de cette transformation. Dans le sillage de notre vision originelle – installer un PC sur chaque bureau, dans chaque foyer –, notre ambition est, aujourd’hui, de proposer aux professionnels et au grand public des services connectés, en continu, sur tout type d’appareils, sur

tout type de terminal mobile. Nous avons ainsi renouvelé l’ensemble de nos offres. Avec Windows 8, ce sont désormais plus de 1 700 références certifiées par nos partenaires fabricants. Sur le mobile, nous sommes le challenger que le marché attend. Notre dynamique de vente est forte. En novembre 2012, les ventes de Windows Phone étaient quatre fois plus élevées qu’à la même période l’année précédente. Enfin, alors que le modèle économique de certains acteurs repose sur la monétisation des données personnelles, notre approche se fonde d’abord sur la commercialisation d’innovations pensées pour les utilisateurs, afin qu’ils puissent créer à leur tour. Quelles sont les initiatives que la filiale française lance sur le territoire ?

A. C. : L’entreprise est engagée depuis de longues années à faire du numérique un moteur de transformation positif pour le pays. Il s’agit d’une présence de fond, durable. Dans le domaine de l’éducation, nous avons ouvert, en décembre, la classe immersive pour toutes les écoles, de la maternelle au supérieur, et qui permet d’apprendre autrement, de renforcer des scénarios pédagogiques grâce au numérique. Microsoft soutient également l’entrepreneuriat avec, par exemple, Spark, le tout nouvel espace ouvert dans Paris, pour accueillir et former les entrepreneurs du numérique et les développeurs. Notre objectif est de leur permettre d’accéder à un programme d’aide complet pour qu’ils puissent lancer leur activité. Notre attachement à soutenir la jeunesse est également profond. Avec la Web@cademie, Microsoft France a ainsi lancé un programme il y a quelques mois, afin de former des jeunes en échec scolaire au métier de développeur web.

LA 7E ÉDITION SOUS LE SIGNE « DIGITAL IS BUSINESS ! »

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1er événement propriétaire IT en Europe 18 200 visiteurs 44 000 visites sur la TechDays TV et 58 mn de consultation moyenne par visite 3 conférences plénières, plus de 300 sessions 140 exposants sur une surface de 5 500 m2

LES CAHIERS DU NUMÉRIQUE /// NUMÉRO 4 /// MAI 2013


BEST OF BLOGS

BIG DATA : ARRÊTEZ LES MATHS, PASSEZ À LA SOCIOLOGIE ! Plutôt que dans l’élaboration d’un modèle mathématique, le défi du Big Data réside dans la construction d’une logistique de l’information. Lu sur le blog

http://www.mediassociaux.fr

O

D. R.

D. R.

n présente souvent la donnée comme l’or noir du XXIe siècle. En 2011, l’humanité a créé environ deux zettaoctets (Zo) de données numériques, soit deux millions de To. Et ce n’est qu’un début. Après avoir été multiplié par neuf entre 2005 et 2010, le volume de données devrait être encore multiplié par sept dans les cinq ans à venir, selon une étude récente d’IDC. Toujours plus de tweets, de messages, de commentaires, de partages, de reprises qui accroissent les informations, leurs reprises, partages et détournements. Au-delà du « buzzword », le Big Data mérite l’attention des entreprises, en réponse à deux enjeux de plus en plus sensibles et, jusque-là, non totalement maîtrisés.

BIO EXPRESS CÉDRIC DENIAUD 2010 Il fonde The Persuaders, cabinet de conseil spécialisé dans l’accompagnement de la mutation digitale des entreprises. 2008 Il crée avec Frédéric Cavazza MediasSociaux.com, premier blog francophone dédié à l’analyse des médias sociaux. 2009 Il prend en charge la stratégie de l’UMP sur les réseaux sociaux.

• L’enjeu technologique. La question n’est pas de savoir quel outil utiliser mais comment récupérer des données issues des médias sociaux ; données qui sont à 85 % détenues par des entreprises comme Facebook, Google et Twitter. Ces dernières définissant (chaque jour) des règles (changeantes) d’un jeu dont les entreprises peinent à comprendre les usages, opportunités et risques. L’origine des données, leur pertinence, leur influence sont également un enjeu majeur de la mesure. • l’enjeu économique. Offrir la bonne offre à chaque client et la personnaliser en fonction de ses requêtes sur les moteurs de recherche, en fonction de ses affinités, de ses amis, de sa situation géographique à l’instant T est le fantasme de chaque entreprise. En d’autres termes, transformer le Big Data et « toute petite data » adressée à la bonne personne, au bon service, pour pouvoir servir le client… et ses propres objectifs.

Se pencher sur ces enjeux, c’est faire rapidement ressortir la question centrale qui se cache derrière ce chiffre fourni par IBM : 90 % des données de l’entreprise seraient inexploitables. On ne dit pas ici que les données ne sont pas exploitées faute de temps ou de ressources, mais que des données noyées ou une approche macro des informations font que la plupart des technologies en place n’en fournissent pas une vraie exploitation, au-delà du fait que les données collectées sont partielles, beaucoup d’informations restant informelles ou non consolidées. Les infrastructures décisionnelles des entreprises ne sont plus dimensionnées pour analyser des quantités toujours plus importantes de données, à 80 % non structurées, parce que les organisations abordent le sujet comme le feraient des mathématiciens plutôt que comme des sociologues. Une donnée n’a de sens que si on la prend comme une variable et non comme une information brute. À des mêmes chiffres, on peut faire dire tout et son contraire en fonction du contexte dans lequel on les place et de l’objectif final recherché, notamment dans une démonstration ou argumentation. Le principal défi que rencontrent les entreprises avec les médias sociaux et l’explosion des données ne réside pas dans la capacité à traiter des volumes toujours plus importants et complexes, mais dans « la “logistique de l’information” : comment transmettre la bonne information aux bonnes personnes, au bon format, au bon moment, pour éclairer les actions à mettre en place, afin de servir les objectifs business de l’entreprise sur Internet et dans le monde réel », selon Alan Mitchell, expert britannique de la question.

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CENT JOURS : LA FRANCE DIGITALE

TROIS QUESTIONS À... D. R.

PRÉSIDENT DU CONSEIL NATIONAL DU NUMÉRIQUE

BENOÎT THIEULIN Chargé d’accompagner la réflexion du gouvernement sur le dossier de la neutralité du Net, le Conseil national du numérique (CNN) renouvelé a consacré ses premiers travaux à l’examen de cette question. Son président nous expose les grands axes de l’avis, remis le 13 mars à la ministre Fleur Pellerin. Propos recueillis par Loïc Rivière L’avis du CNN sur la « Net neutralité » a recentré sur les libertés publiques un débat auparavant centré sur l’économie des réseaux. Pourquoi ?

Benoît Thieulin : Il nous a paru utile de sortir du strict champ de la régulation technico-économique qui relève de l’Arcep et partir du point de vue de l’usager : de son droit de s’informer (lecture) à sa liberté de s’exprimer (écriture), puis de considérer les nouvelles capacités que cela lui confère en termes de liberté de création et d’innovation. Et, à partir de là, de l’individu aux entreprises, on se rend bien compte que ces libertés et ces « capacités » constituent des leviers stratégiques pour l’innovation et la compétitivité de notre économie ! Une fois cette étape franchie, il nous a fallu revenir à l’essentiel : l’architecture de l’Internet possède des particularités qui ont contribué à son succès : l’interopérabilité, l’ouverture et le principe du end-to-end… La définition suivante s’est ainsi imposée : « La neutralité des réseaux de communication, des infrastructures et des services d’accès et de communication ouverts au public par voie électronique garantit l’accès à l’information et aux moyens d’expression à des conditions non discriminatoires, équitables et transparentes. » Certaines considérations de l’avis ne reviennent-elles pas à conférer aux principaux services numériques un quasistatut de service public ?

B. T. : C’est une question qu’on ne peut manquer de se poser au fur et à mesure que certains grands services numériques envahissent le quotidien et fondent notre économie. La notion de service public n’est pas directement abordée dans notre avis,

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mais elle se lit donc entre les lignes, en effet... D’ailleurs, Paul Krugman lui-même n’a pas hésité à prendre ce temps d’avance en qualifiant les services de Google de quasi-service public, à l’occasion de la fermeture abrupte de Google Reader. Les situations de ce genre vont se multiplier et il faudra bien accepter que des « services essentiels » qui sont utilisés tous les jours par la très grande majorité de la population (individus comme entreprises) puissent se voir imposer certains obligations, étant donné leur responsabilité, de même que les opérateurs télécoms ont des obligations de qualité de service, d’interconnexion et d’interopérabilité. Ainsi, la neutralité du Net revêt pour nous cette double dimension : des réseaux d’accès aux services d’accès. Qu’attendez-vous d’une loi ? Ne pensez-vous pas que certains sujets relèvent surtout d’un droit de la concurrence qui s’est peu intéressé au numérique ?

B. T. : La loi est là pour poser des principes. Inscrire ces principes dans la loi de 86 permettrait en outre de placer très haut le principe de neutralité dans la hiérarchie des normes. Mais une fois ce principe enfin garanti, le sujet relève bien sûr du droit de la concurrence, mais aussi du droit des télécoms, du droit civil, du droit pénal, voire du droit des données personnelles, etc. À charge pour différents acteurs (Arcep, tribunaux, Autorité de la concurrence), de l’appliquer. S’il faut en passer par la loi, c’est parce que nous avons dépassé le cadre d’une réglementation purement sectorielle et que nous sommes désormais dans le champ d’application d’un grand principe fondamental. La neutralité, c’est d’abord la traduction de l’égalité dans l’environnement numérique !

LES CAHIERS DU NUMÉRIQUE /// NUMÉRO 4 /// MAI 2013


/ Le nouveau Conseil national du numérique est né

/ Rapport Beylat-Tambourin : comment stimuler l’innovation ?

/ L’ambition numérique du président de la République

Le CNN renouvelé, en place depuis le janvier 2013, rassemble des personnalités issues de l’entrepreneuriat, des grandes entreprises, de la recherche, de la société civile et des médias. Présidé par Benoît Thieulin, fondateur de la Netscouade, le CNN s’est vu confier la mission de réfléchir à trois sujets : la « Net neutralité », la fiscalité du numérique et la lutte contre la fracture numérique.

Pierre Tambourin, directeur général de Genopole, et Jean-Pierre Beylat, président du pôle de compétitivité Systematic, ont rendu publiques leurs conclusions. Leur rapport propose notamment de combler le manque de financement en fonds propres des entreprises innovantes en mobilisant une faible part de l’épargne des Français et en améliorant les stratégies de sortie possibles pour les investisseurs. Il insiste également sur la politique de protection (propriété intellectuelle, normalisation) au service des entreprises innovantes.

Lors d’un déplacement à Clermont-Ferrand le 20 février 2013, le président de la République s’est exprimé sur l’« ambition numérique » de la France. Il a notamment annoncé la mobilisation de 20 milliards d’euros d’investissements publics et privés sur dix ans pour améliorer l’accès au très haut débit en France, et indiqué que 150 millions d’euros des investissements d’avenir seraient réorientés vers des technologies clés du secteur numérique : le cloud computing, le Big Data, la cybersécurité, les objets connectés.

/ Fiscalité du numérique : la réforme se cherche Le rapport rendu en janvier 2013 au gouvernement par MM. Colin et Collin distille une réflexion étayée sur les ressorts économiques du numérique mais propose en définitive une vision très négative de sa contribution économique et sociétale, le qualifiant même de « prédateur ». Il défend le principe d’une nouvelle fiscalité liée à l’exploitation des données issues du suivi de l’activité des internautes. L’Afdel s’est prononcée publiquement contre l’instauration de cette fiscalité d’exception. Il est crucial que les pouvoirs publics ne confondent pas les dispositifs permettant de lutter contre l’évasion fiscale avec des mesures risquant de peser sur les acteurs français du web. Selon le sénateur Jean Germain (PS) : « Pour avancer sur la fiscalité numérique, il faut avancer sur la fiscalité de l’UE. Ce n’est pas la faute de Google si l’UE n’est pas harmonisée fiscalement. »

/ Séminaire gouvernemental sur le numérique Le 28 février 2013, le Premier ministre a détaillé la feuille de route numérique du gouvernement à l’horizon 2013 et a affirmé le principe d’une clause de rendezvous annuel. Dix-huit mesures ont été annoncées, parmi lesquelles la création des quartiers numériques, dont Paris Capitale du numérique est une déclinaison, la numérisation des PME et ETI grâce à 300 millions d’euros de prêts bonifiés, le renforcement des formations aux métiers du numérique, etc.

/ Protection des données personnelles : le débat s’intensifie au niveau européen Un an après la publication de la proposition de règlement sur la protection des données personnelles de la Commission européenne, le parlementaire européen Jan Philipp Albrecht a déposé un rapport de 350 amendements qui sont loin de faire l’unanimité. Le texte, salué par la CNIL, a le mérite de limiter la notion de droit à l’oubli dans un sens plus réaliste, mais renforce considérablement les obligations pesant sur les entreprises, notamment sur les PME. Le débat continue, avec un vote en commission parlementaire les 29 et 30 mai.

/ La filière s’approprie le programme Ambition logicielle Pour les éditeurs de logiciels, croître du stade de PME à celui d’ETI est un véritable défi. « Ambition logicielle », annoncé par le séminaire gouvernemental du 28 février, permettra aux pépites de la filière logicielle de bénéficier localement, de façon accélérée et privilégiée, d’un ensemble de leviers financiers et de compétences propices à leur développement. Initié et porté par l’Inria, « Ambition logicielle » sera piloté par l’Afdel et présidé par Pierre-Marie Lehucher, directeur général de Berger-Levrault.

/ Nominations dans l’écosystème numérique Michel Combes a officiellement pris les rênes d’Alcatel-Lucent. • Les parlementaires Christian Paul (PS), Laure de la Raudière (UMP), Bruno Retailleau (UMP) et Pierre Camani (PS) ont été nommés au CNN en formation élargie. • L’Australien Nick Leeder succède à JeanMarc Tassetto à la tête de Google France. • Benoit Loutrel est nommé directeur général de l’Arcep. • Olivier Henrard devient secrétaire général de SFR. • Delphine Reyre est nommée directrice des affaires publiques de Facebook France. • Guillaume Leblanc est nommé directeur général du SNEP.

Par Diane Dufoix et Emmanuel Lempert

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LA VIE DES PÉPITES

TROPHÉES DES START-UP L’INNOVATION À L’HONNEUR Organisée par l’Afdel, cette première édition témoigne de la volonté des jeunes entreprises de miser sur l’innovation pour devenir les nouveaux champions de l’économie française. par Philippe Richard

D

ans le cadre de sa soirée des vœux, organisée le 15 janvier dernier, l’Association française des éditeurs de logiciels et solutions Internet (Afdel) a inauguré ses Trophées des start-up. Remis par Alain Crozier, président de Microsoft France, devant un parterre de 250 représentants de l’économie numérique et en présence de Fleur Pellerin, ministre déléguée aux PME, à l’Innovation et à l’Économie numérique, ces Trophées récompensent des entreprises françaises ayant moins de dix ans d’existence et réalisant une croissance à deux chiffres. Les lauréats de cette première édition sont Content Square dans la catégorie « Services aux entreprises », In-Webo Technologies dans la catégorie « Mobilité », Navidis dans la catégorie « Virtualisation 3D », Verteego dans la catégorie « Responsabilité sociétale des

Ces récompenses témoignent des niveaux remarquables de ces cinq sociétés, en termes d’innovation et de vision du marché. Exemple avec Navidis : ce spécialiste des solutions interactives multimédia 3D temps réel a développé une technologie validée par plus de 40 partenaires industriels à travers différents projets de R&D collaborative auxquels la société participe, comme City+ (dans le cadre du grand emprunt), EPIC (Europe), Issy Grid (France), Futur en Seine (région Ile-deFrance)… À son actif, il y a notamment la première plateforme multicanal de services d’hyperproximité. In-Webo Technologies, qui développe une solution de sécurisation des accès et des données pour les plateformes Cloud et SaaS, apparaît également comme une pépite capable de convaincre de nombreux donneurs d’ordre. Parmi ses atouts

Cette récompense renforce notre notoriété auprès de sociétés qui ne nous connaissaient pas bien. (In-Webo Technologies) entreprises » et Mixvibes dans la catégorie « Médias et Divertissement ». « Ces pépites portent en elles tous les espoirs de notre industrie pour construire de nouveaux champions français, les Dassault Systèmes de demain. Le rôle d’une organisation professionnelle comme l’Afdel est d’accompagner leur croissance et de les distinguer lorsqu’elles le méritent », a expliqué Jamal Labed, le président de l’association.

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majeurs, une solution d’authentification forte pour téléphones mobiles, qui a reçu la certification de sécurité de premier niveau (CSPN) délivrée par l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (Anssi). Cette certification a été obtenue à l’issue d’un processus de six mois, au cours duquel la solution d’In-Webo Technologies a été évaluée par un laboratoire indépendant agréé

LES CAHIERS DU NUMÉRIQUE /// NUMÉRO 4 /// MAI 2013

par l’Anssi. Pour Didier Perrot, président et fondateur d’In-Webo Technologies, toute l’équipe est fière « d’avoir un reçu un trophée dès la première édition. Cette récompense renforce notre reconnaissance et notre notoriété auprès d’entreprises qui ne nous connaissaient pas bien. Ce trophée nous a permis de mieux nous faire connaître auprès des membres de l’Afdel — que nous avons rejointe depuis un an environ — et des éditeurs, et de leur faire découvrir ce que nous pouvons leur apporter en termes de sécurisation de leurs propres solutions ». Composé de membres de l’Afdel, le jury a également apprécié la cohérence de la stratégie de Verteego, une PME fondée en 2008 à Paris et pionnière des solutions SaaS de traçabilité et management des ressources. Pour Rupert Schiessl, cofondateur et directeur général de cette société, « remporter ce trophée est le témoignage d’une confiance forte de la part de la communauté des éditeurs de logiciels. Pour notre société, qui aura cinq ans cette année, cette récompense consacre sans doute notre passage du monde des start-up vers celui des PME dynamiques, tournées vers l’international ». Visionnaires, les Cahiers du numérique s’étaient déjà penchés sur Mixvibes (qui transpose les outils des DJ dans l’univers numérique) et sur Content Square (spécialisé dans les solutions de test de l’ergonomie des sites) dans ses précédentes éditions (se reporter respectivement aux numéros un et trois des Cahiers).


20 %

C’est la part du chiffre d’affaires réalisé dans l’édition qui est consacrée à la R&D (développement et aide aux partenaires).

STS GROUP, BIEN PLUS QU’UN ÉDITEUR DE LOGICIEL Grâce à ses nombreuses acquisitions et ses multiples partenaires, cette société propose une offre globale de confiance numérique sur trente-six plateformes de services dans le monde. par Isabelle Bellin

L

’histoire commence en 2000, lorsque Bernard Calvignac, chef d’entreprise, rachète un de ses principaux clients, STS, une société toulousaine qui développait des microfilms, seuls supports à valeur probante dans les années 1990. En bon financier, il décide de développer l’offre à l’international. Il mise aussi sur la mutation en cours vers l’économie numérique et réfléchit à la façon de garantir, dans ce nouveau contexte, l’identification des personnes, l’intégrité des documents numériques transmis, leur confidentialité. La première directive européenne sur la signature électronique est publiée fin 1999. Depuis, le cadre législatif se précise dans chaque pays et s’homogénéise en Europe. Aujourd’hui, tout document électronique peut être archivé légalement.

50 %

D’ici à trois ans, STS Group prévoit que la moitié de son chiffre d’affaires proviendra des royalties versées par ses partenaires SaaS. Cette part n’est aujourd’hui que de 15 %. Rapidement, l’équipe s’étoffe avec l’arrivée d’Henry Cremades, Pierre Fort et James Cohen. Pendant cinq ans, une dizaine d’ingénieurs développent des

logiciels d’archivage à valeur probante, pour tous types de documents électroniques, vidéos, photos, audio. En 2005, STS, rebaptisé STS Group, remporte le premier appel d’offres européen d’archivage électronique légal, lancé par la Banque de France, battant au passage les grands éditeurs de gestion électronique de documents et la société en place, Logon SI, rachetée en 2006 et dont le dirigeant Pierre Leijder rejoint STS Group.

« L’archivage n’était pas suffisant, déclare Henry Cremades. Pour rester leader, nous avons misé sur une offre globale, comportant à la fois les aspects preuve d’identité, échange et archivage à valeur probante. » À partir de 2007, l’entreprise rachète plusieurs sociétés pour étayer ses compétences : l’espagnol Ipsca (signature électronique) et le français Keyvelop (échange). À la fin 2009, elle prend des parts dans la société française Risc, spécialisée dans le cloud pour les TPE-PME (avec 20 000 clients en portefeuille). Aujourd’hui, STS Group (une trentaine de salariés à Aubervilliers) affiche un chiffre d’affaires de 10 millions d’euros dans l’édition logicielle, avec deux produits phares mis sur le marché en 2012 : STS PEA, pour les grands groupes qui souhaitent héberger leurs données dans leur propre datacenter, et STS SaaS Manager,

dédié aux partenaires qui opèrent des plateformes de services. « Nous développons ce mode SaaS depuis 2010, selon un modèle spécifique, explique Henry Cremades. Nous créons des joint-ventures avec des partenaires qui souhaitent développer une plateforme de services, et nous les aidons à bâtir, avec nos outils, des offres auprès de leurs clients, telles que des services de e-paie, e-dossiers médicaux, e-relevés bancaires, lettres recommandées électroniques, etc. Nous nous rémunérons sur les royalties. » STS Group affiche ainsi 36 plateformes partenaires dans 30 pays. Dont quatre en France, comme celles lancées par la société Risc avec la marque Navaho qui a acquis les agréments d’hébergement de données pour les administrations européennes et la santé. Pour autant, 85 % du chiffre d’affaires provient toujours de STS PEA (150 clients, notamment des banques en France, en Espagne et en Belgique), avec une progression annuelle visée de 8 à 10 %. Mais la société mise beaucoup sur l’évolution du SaaS, avec l’objectif de doubler ses royalties chaque année. Cela permettra également de faire face aux difficultés en trésorerie rencontrées depuis le rachat de Risc, dont STS Group est actionnaire minoritaire avec un pouvoir de contrôle. WWW.GROUP-STS.COM Illustration : Sophie Nathan

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LA VIE DES PÉPITES

par Isabelle Bellin

what’s

SCULPTEO FABRIQUE LES OBJETS IMAGINÉS EN LIGNE À partir du dessin d’une assiette, d’un vase, de n’importe quel objet transformé sur le site de Sculpteo en fichier 3D, l’objet est fabriqué sur une imprimante 3D, étonnante machine d’abord dédiée au prototypage rapide qui dépose la matière par couches. Le processus demande entre quelques minutes et quelques heures. Les trois fondateurs ont de l’expérience : Clément Moreau et Éric Careel sont des ingénieurs de l’Internet et des télécoms, Jacques Lewiner est l’ancien directeur scientifique de l’École supérieure de physique et chimie industrielles de Paris (ESPCI). Entreprises, architectes, bureaux d’études ont été leurs premiers clients. Depuis 2011, ils font appel à des designers qui dessinent des objets grand public personnalisables, comme des coques de téléphones portables, vendues 25 euros et livrées sous trois jours. Principaux créneaux visés à terme : les arts de la table et la bijouterie. L’entreprise réalise 40 % de son chiffre d’affaires à l’export, dont 30 % aux États-Unis. Elle mise beaucoup sur la R&D (6 à 10 personnes y travaillent sur une vingtaine au total), d’une part, sur les procédés (pour proposer une large palette de matériaux, de textures et de couleurs), d’autre part, sur la simplification des logiciels. Ses imprimantes 3D tournent à plein régime.

Année de création :

2009 Localisation :

Issy-les-Moulineaux et usine à Arreau (Hautes-Pyrénées) Chiffre d’affaires 2012 : N.C. Croissance 2012 : + 90 % Chiffre clé :

1 million d’euros investis par an en R&D

WWW.SCULPTEO.COM/FR

CHOISISSEZ LA RECETTE, JÉRÔME ÉCRIT LA LISTE DE COURSES

Année de création :

septembre 2011 Localisation :

Paris Chiffre d’affaires 2012 : N.C. Chiffre clé :

6 % de croissance hebdomadaire

Passionnés de cuisine, les deux associés de Chef Jérôme se sont rencontrés dans des associations culinaires de Polytechnique, après leurs études : Antoine Durieux donnait des cours de cuisine, Antoine Perrin, des cours d’œnologie. Très pragmatiques, ils décident de créer ce qui leur manque pour faire leurs courses efficacement : un langage commun pour traduire les ingrédients des recettes de sites de cuisine ou de blogs en produits de supermarché ; de quoi commander rapidement en ligne. Rien de plus simple, pensez-vous… Il a fallu pourtant plus de dix-huit mois de R&D et une sacrée équipe technique (statisticiens, mathématiciens et même un postdoc) pour déboucher sur un graphe de l’alimentation, réunissant plusieurs dizaines de millions d’ingrédients, produits et recettes dans un même langage. Le tout est supporté par des techniques d’apprentissage automatisé et de traitement Big Data, pour lesquelles la start-up a été primée. Leur première application, vendue aux supermarchés Casino, est un widget intégré aux sites de recettes comme une publicité. On choisit une recette, la liste de courses s’affiche pour le supermarché le plus proche. Visiblement, ce n’est qu’un début. HTTP://CORPORATE.CHEFJEROME.COM/

FEATURIT CRÉE LE PREMIER RÉSEAU SOCIAL ARTISTIQUE Musicien de studio et producteur depuis quinze ans, Jean-Patrick Allouche a l’ambition de faire naître de nouveaux talents en stimulant les collaborations entre artistes (le featuring en anglais), grâce à la Toile. Musiciens, chanteurs mais aussi photographes, vidéastes, designers peuvent se présenter et déposer leurs créations sur son réseau social, gratuitement pour l’instant : autant de morceaux, de vidéos, d’images qui suscitent des échanges, une émulation artistique et, finalement, de nouvelles créations. Au-delà, l’originalité est que le public abonné à la plateforme peut juger et noter ces créations, autant d’arguments qui aideront à produire les meilleures. En retour, ces fans de la première heure auront le privilège de suivre les débuts et la carrière de leurs poulains, d’assister à des enregistrements, aux premiers concerts, etc. J.-P. Allouche, qui a travaillé avec les majors, et ses deux collaborateurs espèrent voir naître chaque année, avec ce nouvel espace de créativité, un millier de créations musicales (du hip hop à l’opéra), photographiques, vidéo… WWW.FEATURIT.COM

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LES CAHIERS DU NUMÉRIQUE /// NUMÉRO 4 /// MAI 2013

Année de création :

novembre 2012 Localisation :

Paris Chiffre clé :

plus de 200 artistes ont rejoint Featurit en deux mois via le bouche-à-oreille


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LeDossier L’EXCEPTION CULTURELLE EST-ELLE

La révolution culturelle aura-t-elle lieu ? Mission Lescure, rapport du Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique (CSPLA), rapport sur la fiscalité du numérique… Ce qui est cette fois en jeu, c’est une définition de l’exception culturelle qui soit à la page de la révolution numérique. Dossier coordonné par Reynald Fléchaux, avec Serge Escalé, Philippe Richard et Rémi Sorel

ÉDITO MAÇONS OU ARCHITECTES ?

© D. PERALDI

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arviendrons-nous à restaurer un cadre réglementaire francofrançais protégeant nos industries culturelles, à l’heure de la généralisation du numérique ? Poser la question en ces termes, c’est malheureusement y répondre déjà un peu. La préservation de l’exception culturelle française, visant à financer la création hexagonale, fait l’unanimité. Mais la montée en puissance d’acteurs mondiaux qui ont construit leur succès en faisant irruption sur de nouveaux marchés (la musique, le livre, le cinéma) avec des modèles de rupture rend tout bricolage réglementaire hexagonohexagonal au mieux relativement inefficace, au pire contre-productif car pénalisant avant tout les entreprises locales. La gymnastique fiscale des Google, Apple et autres Amazon qui se jouent des frontières – un sujet aujourd’hui pris au sérieux par les plus grandes économies mondiales – a clairement montré la capacité de ces acteurs à exploiter les écarts entre les réglementations nationales. C’est avec cette toile de fond en tête que le pays doit dessiner les plans d’une exception culturelle adaptée à la culture numérique, et non pas tenter de replâtrer un édifice déjà par trop lézardé. REYNALD FLÉCHAUX Rédacteur en chef

Sommaire 25. Usages : la culture enfin démocratisée 27. E xception culturelle française : stop ou encore ? 29. D es p’tites taxes, des p’tites taxes, encore des p’tites taxes ! 30. Une industrie dont le disque est rayé

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USAGES : LA CULTURE ENFIN DÉMOCRATISÉE… Un catalogue immense, disponible à tout moment, depuis n’importe où. En inventant de nouveaux usages, le numérique a favorisé l’accès à la culture. Mais aussi profondément déstabilisé un secteur déboussolé par la rapide mutation des chaînes de valeur.

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ar ses caractéristiques intrinsèques, le numérique remodèle les industries culturelles. Et leur économie. Comme l’explique Pierre-Jean Benghozi, professeur à l’école Polytechnique, « l’importance des transformations liées au numérique, notamment dans le secteur des industries culturelles, découle du caractère spécifique des technologies de l’information. Les infrastructures sont renouvelées et déterminent en retour les activités des agents. Les capacités de traitement et de production d’informations explosent et l’interconnexion d’un réseau mondial permet un accès à distance aux œuvres inédit ! ». Avec Amazon, i-Tunes, Deezer, etc., le public a désormais accès à un catalogue très important pour quelques euros par mois. Une hyper offre. Partout, à tout moment... L’expérience culturelle moderne est basée sur l’immédiateté, l’ubiquité, l’élasticité, l’interactivité. En conséquence, la valeur n’est plus dans la possession d’un objet (disque, DVD, etc.), mais dans l’accès aux contenus. L’une des conséquences fondamentales – et trop souvent oubliée – de cette révolution des usages, c’est l’accès à la culture. Un accès qui s’est considérablement élargi ces quinze

dernières années. « En devenant numérique, précise Oliver Donnat, chargé de recherche au ministère de la Culture et auteur d’un livre sur les pratiques culturelles des Français à l’ère du numérique, la musique a par exemple encore gagné en accessibilité : les nouvelles possibilités de stockage, d’échange ou de transfert d’un support à l’autre ainsi que la multiplication des supports d’écoute ont favorisé une certaine ”musicalisation” de la vie quotidienne, permettant à une partie importante de la population jeune de vivre dans un bain musical plus ou moins permanent. » Autre conséquence tangible de l’innovation des industries du numérique : la création et la diffusion artistiques sont en nette hausse dans le cadre du temps libre. Logiciels de création et solutions de partage sont entrés dans les foyers. Les changements ont ainsi été particulièrement spectaculaires dans le cas de la musique, de la photographie ou de la vidéo. Le « do it yourself » offre la possibilité à chacun de se constituer des savoirs d’amateur, d’auditeur, de spectateur et de lecteur dans lesquels interactivité et échanges deviennent la norme.

ÉVOLUTIONS TECHNOLOGIQUES DE 1980 À NOS JOURS

Source : ministère de la Culture et de la Communication, 2011.

25


LE DOSSIER

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AMATEURS ET PROS : OÙ EST LA FRONTIÈRE ?

Face à cette redéfinition des rôles et cette révolution des usages, les piliers de la politique culturelle se trouvent désormais bien fragilisés. Ainsi en est-il du droit d’auteur – notion apparue à l’occasion d’une innovation technologique majeure, l’imprimerie, et dont le droit date pour l’essentiel de 1957, en France, du temps de l’explosion du vinyle. « À l’ère numérique, explique Michel Vivant, professeur à l’école de droit de Sciences Po, les droits patrimoniaux sont régulièrement réinterrogés, que ce soit le droit de reproduction, avec la question des copies techniques provisoires, ou le droit de représentation, comme l’ont montré plusieurs arrêts troublants (SAIF, affaire Google Images). Il est temps pour notre droit de prendre en compte la réalité des usages. Le droit est un instrument de régulation sociale qui doit être pensé en fonction des choix et besoins de la société. » Autre pilier qui flanche sous les vagues de ces nouveaux usages : la chronologie des médias. Cette règle, née avec la télévision, définit l’ordre et les délais dans lesquels les diverses exploitations d’une œuvre cinématographique peuvent intervenir et fait reposer l’ensemble de la production sur le passage en salle. À l’heure de l’immédiateté et de l’ubiquité, n’est-elle pas, bien malgré elle, un fantastique catalyseur pour le piratage et un vrai handicap pour des œuvres qui pourraient connaître un beau succès en ligne ? FAIRE PAYER LES CONTENUS : LE FORFAIT COMME PLANCHE DE SALUT

Résoudre l’équation d’une juste rétribution des auteurs, éditeurs et hébergeurs tout en garantissant à la fois la qualité de la production culturelle et son accessibilité ne se fera pas contre le public. « Tous ceux qui ont cherché à lutter contre le piratage par la répression depuis quinze ans ont fait la même erreur, s’emporte Guillaume Champeau, du site d’infos spécialisé Numerama. Ils pensent que le piratage naît de l’offre de contenus piratés, alors qu’il naît de la demande ! »

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(source : Apple).

4

milliards

de vidéos vues tous les jours sur Youtube (source : Google).

© DragoArt.com

« On assiste à une transformation des chaînes de valeurs, explique Pierre-Jean Benghozi. En ligne, chaque acteur est plus ou moins capable de tenir tous les rôles, ce qui engendre une concurrence inédite, de nature verticale, par exemple entre un artiste et son distributeur. De même, la frontière entre artistes amateurs et professionnels devient poreuse, une évolution qui touche durement certains professionnels. »

millions

de chansons vendues tous les jours sur Itunes

Dans cette perspective, une offre légale abordable et de bonne qualité, c’est-à-dire qui soit capable de rivaliser avec l’attractivité de l’expérience utilisateur proposée par l’offre illégale, semble la meilleure des garanties. Pour le professeur Pierre-Jean Benghozi, « sans forfaitisation, point de salut ! La disposition à payer pour les contenus a beaucoup baissé. Une forfaitisation, au prix d’entrée faible, aurait l’avantage d’élargir considérablement l’assiette de la collecte, et donc d’accroître les revenus des artistes. Encore faudra-t-il se donner les moyens de contrôler les sociétés de gestion collective et la répartition. Mais il faut voir plus loin... Je déplore pour ma part l’incapacité dramatique des industries culturelles à la R&D : les grandes innovations de la culture (iPod, liseuses, etc.) ne viennent jamais de son sein ! ». Un soutien beaucoup plus fort des pouvoirs publics à la recherche et au développement dans les industries culturelles constituerait donc une autre partie de la solution. Car, qu’on le veuille ou non, la culture fait désormais partie intégrante du monde économique. Et l’exception culturelle doit aussi pouvoir s’appuyer sur une politique industrielle de qualité.

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USAGES : LA CULTURE ENFIN DÉMOCRATISÉE

EXCEPTION CULTURELLE FRANÇAISE : STOP OU ENCORE ? L’exception culturelle défendue par la France doit impérativement s’adapter à la numérisation du cinéma mais aussi du livre, de la musique et de la presse. Tour d’horizon des solutions envisagées.

L

a culture n’est pas une marchandise comme une autre. » Cette fameuse déclaration de Jacques Delors en 1989, reprise ensuite par les dirigeants politiques hexagonaux tous bords confondus, résume bien la position de la France face à la spécificité qu’elle revendique en matière culturelle. Cette exception culturelle qui a muté en « diversité culturelle » au niveau européen, se traduit en France par un système très élaboré de régulation et de soutien à la création, à la production et à la diffusion des œuvres culturelles.

«

Le financement du cinéma, assuré par le CNC (Centre national du cinéma et de l’image animée) à hauteur de 750 millions d’euros en 2011, a permis à la France d’être le leader du cinéma européen, avec la sortie de 230 films par an pour un investissement de 1,4 milliard d’euros. Les chaînes de télévision nationales contribuent pour un tiers au budget du CNC. Du côté du livre, la régulation s’articule autour de la loi Lang sur le prix unique du livre, adoptée malgré les réserves de la Commission européenne. La musique et la chanson bénéficient, sous l’égide du CSA (Conseil supérieur de l’audiovisuel), d’un accord entre les éditeurs et les radios musicales prévoyant la diffusion d’un minimum de 40 % de chansons françaises à des heures d’écoute convenables. Des règles souvent contournées par les stations qui jouent sur la durée d’un titre diffusé. Outre qu’il suscite beaucoup d’interrogations de la part des autres pays de l’UE, ce cadre protecteur, bâti au fil des ans, doit impérativement s’adapter à la généralisation du numérique. Un enjeu complexe, car il faut tenir compte des pressions de l’industrie culturelle, de la position de la Commission européenne, de la juste rémunération des créateurs, sans oublier, bien entendu, l’intérêt du public. Si la défense du droit d’auteur est partagée par de nombreux pays européens, la vision d’une culture nationale protégée par l’État n’est appliquée, sous cette forme, que sur le sol français.

C’est à cette adaptation de l’exception culturelle à la française qu’est chargé de réfléchir Pierre Lescure, l’ex-PDG de Canal +, qui doit formuler des propositions dans le cadre de la mission culture-Acte 2 qu’il dirige. Dans son bilan d’étape du 6 décembre (les conclusions sont attendues fin mars), la mission Lescure dresse un constat évocateur des brutales mutations en cours. SECTEURS EN CRISE

Ainsi, le livre numérique n’a pas encore décollé. Dans le cinéma et l’audiovisuel, l’offre en ligne de VàD (vidéo à la demande) est variée, avec 70 plateformes, mais les exclusivités attribuées à quelques-unes d’entre elles nuisent à la cohérence et il n’existe pas de système efficace de référencement. D’où la difficulté pour l’internaute à trouver une vidéo. Quand à la vidéo à la demande par abonnement (SVàD), elle est abordable, avec des prix allant de 5 à 10 euros par mois, mais les titres, vieux de trois ans, ne suscitent pas un grand intérêt de la part du public. En cause, la chronologie des medias qui oblige à une parution différée des contenus audiovisuels selon leur nature. L’arrivée prochaine de Netflix et d’Amazon devrait rebattre les cartes sur ce créneau.

DÉPENSE DES MÉNAGES EN PROGRAMMES AUDIOVISUELS ENTRE 2007 ET 2011 (EN MILLIONS D’EUROS) CATÉGORIE

2007

2008

2009

2010

2011

Vidéo physique

1 543

1 414

1 406

1 402

1 267

Vidéo à la demande

9

31

44

51

77

Total

1 572

1 468

1 503

1 554

1 487

Part de marché de la VOD

2%

4%

6%

10 %

15 %

Source : Baromètre CNC.

27


LE DOSSIER

Dans le secteur de la musique, l’offre en ligne est bien plus riche et plus aboutie : sept plateformes parmi les 40 existantes proposent 15 millions de titres à un prix unitaire de 1 euro environ. Cependant, les formats propriétaires, comme iTunes, verrouillent le marché. Le bilan 2012 publié par le SNEP (Syndicat national de l’édition phonographique) indique malgré tout un repli de 5 % du marché pris dans son ensemble, à 590 millions d’euros. Et ce, malgré la légère augmentation des ventes en ligne. Dans le secteur, l’optimisme n’est pas de mise ; la fermeture annoncée des magasins Virgin n’étant pas de nature à redonner le moral à une industrie qui encaisse les coups, année après année. VENTES DE LA MUSIQUE ENREGISTRÉE ENTRE 2004 ET 2011 (EN MILLIONS D’EUROS)

CATÉGORIE

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

Ventes physiques

953

935

819

662

530

512

466

412

Ventes numériques

9

31

44

51

77

77

88

111

Part du marché numérique

1%

3%

5%

6%

15 %

15 %

19 %

27 %

L’APRÈS-HADOPI

Face à ces difficultés, les industriels sont prompts à pointer le poids du piratage. Un phénomène que la France a tenté de

juguler, via la très répressive loi Hadopi. Très répressive, mais difficilement applicable. La mesure la plus contestée de cette loi , la déconnexion de l’internaute en cas de téléchargement illégal, va d’ailleurs être supprimée. Plutôt que stigmatiser les consommateurs, Pierre Lescure affirme qu’il vaut mieux « responsabiliser les hébergeurs en les obligeant à retirer promptement les contenus illicites, déréférencer l’offre illégale et assécher les sources de revenus des sites contrefaisants ». Au-delà de ces ajustements, Bernard Stiegler, philosophe, directeur de l’Institut de recherche et d’innovation (IRI) au centre Georges-Pompidou et membre du Conseil national du numérique, pointe la nécessité de solutions novatrices à long terme : « Le vrai problème est de savoir ce que feront les lecteurs, auditeurs et téléspectateurs dans cinq, dix ou vingt ans. Il faut penser et préparer un changement industriel global. La mission Lescure doit donc définir une méthode pour passer d’un état de fait qui disparaît à un autre qui émerge. Si son rôle était d’encourager un corps malade à s’enferrer dans ce qui est la cause même de sa maladie, elle ferait fausse route… » Car, comme l’a montré l’exemple du logiciel, les géants du Net que sont Apple, Google et Amazon savent très bien échapper aux législations nationales sans pour autant renoncer à l’expansion de leurs activités. C’est tout le défi que doit relever la France et, au-delà, l’Europe.

CHRONOLOGIE DES MÉDIAS : UN CADRE STRICT POUR LA DIFFUSION DES FILMS ET VIDÉOS

Sortie nationale en salle

4 MOIS(1)

9 MOIS 10 MOIS 12 MOIS(2)

22 MOIS 24 MOIS 30 MOIS 36 MOIS

48 MOIS

VàD payante à l’acte et vente ou location de vidéo Service de cinéma pour la première fenêtre de diffusion Service de cinéma pour la deuxième fenêtre de diffusion Services de télévision en clair et services de télévision payants autres que ceux de cinéma

en présence d’accords dans les autres cas en présence d’accords avec les organisations professionnelles dans les autres cas lorsque le service applique des engagements de coproduction de 3,2 % minimum de son chiffre d’affaires (y compris part antenne)

dans les autres cas services avec obligations de coproduction services coproducteurs dans les autres cas

VàD par abonnement VàD à titre gratuit Ancienne réglementation

Accord du 6 juillet 2009

(1) Possibilité de dérogation à 4 semaines minimum. (2) Possibilité de dérogation à 6 mois.

Source : csa.fr

LA CULTURE CHANGE DE BUSINESS MODEL… MAIS SI ! DIx dollars par mois : c’est le montant que les internautes seraient prêt à payer pour une licence globale, selon une étude récente de l’université de Columbia. Mais c’est en fait déjà ce que payent les abonnés de Deezer et Spotify pour accéder en illimité à leur catalogue de streaming audio. Ne pouvant entrer par la porte, la licence globale serait-elle en train d’entrer par la fenêtre ? Ce qui est certain, c’est que les usages ont changé et que, aujourd’hui, la musique numérique se rémunère bien sur la base d’un abonnement souscrit ou… de la publicité. Les négociations entre les plateformes de streaming audio ou vidéo (Dailymotion, Youtube) et les sociétés de gestion de droits (SACD, Sacem) sont donc toujours âpres. En cause, notamment, le fait qu’en France, sur les 125 millions d’euros issus de la musique numérique en 2012, la musique gratuite financée ne représente que 17 millions d’euros de chiffre d’affaires, soit 14 % du total. Mais si la chanson Gangnam Style du chanteur sud-coréen Psy, visionnée plus d’un milliard de fois, n’a généré que 8 millions de dollars de recettes publicitaires dans le monde, elle a en revanche permis de faire de l’artiste une star mondiale, et donc de décupler ses revenus afférents. Difficile d’apprécier dans ces nouveaux usages la valeur, pourtant bien réelle, que la viralité du gratuit est en droit de revendiquer.

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DES P’TITES TAXES, DES P’TITES TAXES, ENCORE DES P’TITES TAXES ! La France, avec 13 taxes et 47 mesures incitatives, est le pays qui fait appel au plus grand nombre de mesures fiscales pour soutenir ses industries culturelles. La diffusion télévisée est le secteur le plus touché.

O

n dénombre environ une trentaine de sociétés chargées de la gestion collective des différents droits (des auteurs, interprètes, producteurs, éditeurs...). Les plus connues, la Sacem, la SACD, la SCAM, ont même créé une société commune : la Société pour l’administration du droit de reproduction mécanique (SDRM) pour la gestion des droits des œuvres utilisées dans des disques, CD-ROM, films, etc. Malgré la crise, le rapport 2012 de la Commission permanente de contrôle des sociétés de perception et de répartition des droits constate une augmentation sensible des perceptions primaires (droits perçus principalement auprès des diffuseurs au bénéfice des artistes, producteurs et éditeurs) : + 52 % entre 2000 et 2010, tandis que les sommes affectées aux

ayants droit progressaient de presque 62 % sur la même période. Cet étonnant constat s’explique par le fait que certaines sociétés ont bénéficié de droits audiovisuels en croissance, d’une renégociation de leurs contrats et de la simplification de la perception. Principaux bénéficiaires : la Sacem et la SACD. La première a collecté environ 820 millions d’euros en 2011, contre 672 millions en 2002. Elle a perçu notamment 18,3 millions de droits pour le secteur Internet-multimédia en 2011, soit une progression de 178 % par rapport à 2010 (6,6 millions d’euros). Internet représente désormais 2,2 % de ses perceptions globales. Les perceptions totales de la SACD sont passées de 179,6 millions d’euros en 2008 à 219,7 en 2010, soit une progression de 22,4 %.

LA FRANCE CRÉATRICE... DE TAXES Nombre de taxes en France par domaine

Télévision : 13

Cinéma : 6

Musique : 5

Presse, édition : 4

Spectacles : 4

Radio : 3

En Europe, la France est le pays qui a le plus de taxes « culturelles ». Il y en a une seule outre-Rhin (TV), au Royaume-Uni (TV-Radio) et en Espagne (export des produits culturels). En revanche, il y en a 9 en Grèce. Source : « The Ernst & Young International Survey on Tax Policies in the Cultural Sector », 2011.

en de droits ,3 millions ort à 2010 18 é rs ve a pp multimédia ion de 178 % par ra r Internetrogress p e Le secteu n u it de acem, so s globales 2011 à la S . erception ) récoltés s) p TAXES re s ro S ai e u E m d D ’e ri d p % LE s n n JUNG ais 2,2 PRD) (perceptio (6,6 millio DANS LA nte désorm es droits (S des droits et représe partition d tant total ré rn n e te o d m In té et le en n , d’une TVA o En 2010 . énéficient tion a augm e percepti b p m d ce ce és re a er ét S liv p . ci la o u te s cteur d TVA à 7 % uros. Cet par les 27 nt et le se néma a toujours une milliard d’e es va 10 d vi 4 é 1, e rt t cl o in p ta a atte Le spec 012. Le ci de plus et ont sup dix ans. uis juillet 2 personnes progressé de 52 % en 5,5 %, dep CNC ont ient 2 150 à e, dans u ya u a q s. lo s p ro is e u d é em n ’e és ’euros) ta millions d ales affect d 14 s sc Ces sociét 3 n fi o e s e 25 % li d e d il n rc m u gestio augmenté 011 (+ 230 Les resso charges de s utien ont 2007 et 2 le e so tr 11 ab e n 0 d e lic 2 s p % en se ap 0 s de 4 dépen ions sont ions d’euro mps, ses e : 193 mill fixant les rémunérat ires et disques durs 2011, le même te d’euros). o Copie privé es r ém d’euros en m s eu èm n d our les aux bar 0 millions . 218 millio à un déco e (+ 19 ée u n é o an rs De nouve er nvier 2013. Ainsi, p e éo ve tt d s ont reur vi uros ce ment d 1 ja rs télécom millions d’e un enregist dédiés à l’enregistre depuis le s opérateu indre 236 t est de téléviseur, Le te e en n at m u vé it ri ve à p ra si u ev ie és nt d intégr Box excl n pour cop odèles ayant et le monta odeurs et munératio m TV-Box (déc suels), la ré t 45 euros pour les vi io d au es in programm o. Elle atte jusqu’à 8 G tre 320 et 500 Go. 6,30 euros en ité comprise une capac

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LE DOSSIER

UNE INDUSTRIE DONT LE DISQUE EST RAYÉ La révolution numérique a accéléré la mondialisation et l’intensification des échanges de biens culturels. Pourtant, la France peine à créer des géants. Seuls quelques acteurs résistent aux poids lourds américains.

L

es principaux services de diffusion des œuvres dématérialisables (musique, vidéo, livre électronique) sont essentiellement contrôlés par des groupes nord-américains : Apple-iTunes (117 milliards de dollars de cash), Amazon (5 milliards), GoogleYoutube (61 milliards) ou Netflix (chiffre d’affaires de 3,2 milliards de dollars)... Quelques trublions gaulois, comme Deezer (qui a réalisé en octobre 2012 la plus grosse levée de fonds pour une start-up française, avec 100 millions d’euros) et Dailymotion (deuxième site mondial de vidéos en ligne), leur tiennent tête. Mais seuls des géants peuvent réellement contrer des géants. C’est du moins l’opinion de Bernard Miyet. Dans une tribune publiée en juillet 2012, l’ancien secrétaire général adjoint des Nations-Unies et ex-président de la Sacem, cite Vivendi et Bertelsmann : « Ce sont les seuls groupes majeurs à avoir la capacité économique de rivaliser avec des grandes sociétés anglo-saxonnes ou asiatiques. Eux seuls permettent d’offrir à nos artistes, partout en Europe, la possibilité d’exister et de trouver un rayonnement international. » Car l’évolution des attentes des internautes implique de consentir d’importants investissements. Une étude de Bain and Company, cabinet international de conseils en stratégie et management d’entreprise, effectuée auprès de 6 000 consommateurs, fait ressortir cinq tendances de fond auxquelles l’offre doit s’adapter : abondance, personnalisation, agrégation de multiples sources donnant naissance à des « carrefours d’usage » et rôle de la communauté. Selon le magazine The

Economist, Amazon a d’ailleurs réalisé, en 2011, plus de 30 % de ses ventes au travers de son moteur de recommandations personnalisées. DES SECTEURS ATOMISÉS

Autant de défis difficiles à relever pour le secteur français des biens culturels dématérialisés. Comme l’économie nationale, celui-ci est pénalisé par des obstacles structurels, culturels et fiscaux. C’est notamment le cas dans le jeu vidéo, qui est le premier bien culturel en France, avec 3 milliards d’euros de chiffre d’affaires estimé en 2012 (contre 617 millions d’euros pour la musique, 1,2 milliard pour la vidéo et 1,3 milliard pour le cinéma). Or ce secteur, représentant plus de 5 000 emplois directs, est aussi très atomisé. Presque la moitié des entreprises comptent moins de dix salariés. Même si la France est un pays précurseur en matière de création de jeux vidéo, les leaders nationaux ayant une forte présence à l’étranger sont très rares. Seuls Gameloft et Ubisoft sortent du lot. Le premier réalise environ un tiers de ses revenus aux États-Unis et 22 % dans la zone Asie-Pacifique, tandis que le second s’appuie sur une vingtaine de studios répartis dans le monde. Acquérir une dimension internationale est pourtant indispensable, car la France ne représente que 5 à 7 % du marché global, rappelle le SNJV (Syndicat national du jeu vidéo) dans son livre blanc « Éléments clés du jeu vidéo en France en 2012 ». Mais l’intégration d’une dimension internationale n’est pas encore généralisée dans l’opinion des patrons français.

ire et artistique IQUE ? de la propriété littéra DEMAIN ANACHRON le Conseil supérieur é aux services en am vée LA COPIE PRIVÉE, a pri ie els tur cop cul ur la rémunération po ud dans les usages de clo n du sio ce droit du ten an iss nts l’ex pu aya ser en La montée sée indemniser les obre 2012, à propo s en date du 23 oct ctionner pas son nom, est cen san dit ur ne i po e qu e nçu tax Co e (CSPLA), dans un avi un vé. tion », ir dans le cadre pri e. Cette « rémunéra contenus autorisée , de payer pour pouvo de stockage en lign ie exceptionnelle de chacun, par exemple à t cop an la nd de ma te de sui en la n à préjudice subi, lette, etc. numérique commu hone mobile, sa tab ue demain à l’usage e la r mais aussi son télép e serait en fait étend teu ell numérique, alors qu it, ina ie dro ord om on au son n l’éc x : tio de ons au une excep de plusieurs termin ant de compétitivité er d’anciennes soluti rtir qu ort pa cal imp à à al ier er sic lev rch mu un e che ue de e stit r qu con vie tôt ud jan plu clo de tif accéder à son titr le e e rac nn rs qu ission europée tème flexible et att s de faire débat, alo son rapport à la Comm ns à se fonder sur un sys da er Cela ne manque pa gn no ga ori à Vit t io tou t ton rai création au à licence. ce que suggère An rémunération de la re d’un service soumis n numérique. C’est au cloud dans le cad des de consommatio vée pri ie cop la de sur les nouveaux mo régime l’idée d’appliquer le 2013. Celui-ci écarte

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LA VALEUR : RIEN NE SE PERD, RIEN NE SE CRÉE, TOUT SE TRANSFO RME… L’expression « transfert de valeur » a fait florès, ces derniers temps, pour désigner la « captation de valeur » à laquelle se livreraient les acteurs du numérique, en particulier au détriment des industries culturelles. Derrière la question du transfert de la valeur se pose en réalité celle de la transformation de la valeur et du partage qui en résulte entre une économie classiquement transactionnelle et une économie qui ressort souvent – mais non exclusivement – de la gratuité. Il est donc erroné de parler de « transfert de valeur ». Les usages ne sont plus du tout les mêmes aujourd’hui, et la valeur des biens considérés a également changé. Les chaînes de valeur sont en train de se reconstituer et la question du partage de la valeur se pose, comme dans toute problématique de distributi on. Il faut donc considérer avec attention que, pour les usagers, la mobilité, la flexibilité ou encore le partage sont devenus désormais des valeurs essentielles qui vont parfois au-delà de la propriété des biens… Les acteurs du numériques sont ceux qui peuvent conférer cette nouvelle « valeur » aux biens. Source : « Fiscalité du numérique. Poursuivre un objectif d’équité sans instaurer

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de régime d’exception », Afdel 2013.

millions

d’e-books achetés en France en 2012 (source : GfK).

Beaucoup d’entreprises tricolores ayant réussi dans l’Hexagone n’ont pas reproduit ce succès à l’étranger. « La situation commence à évoluer dans le bon sens avec l’arrivée d’une nouvelle génération d’entrepreneurs qui pensent à l’international dès leur business model, explique Arnaud Leurent, directeur du développement international du groupe Global Approach Consulting (GAC). Le développement à l’étranger est pourtant très important. Il permet d’accélérer son innovation et ses parts de marché, car l’entreprise se trouve confrontée à des environnements parfois différents en termes d’usage, ou plus compétitifs, voire à d’autres comportements d’achat. » L’INNOVATION, CLÉ DU SUCCÈS

Reste l’aspect fiscal. De nombreux spécialistes et entrepreneurs estiment qu’il est urgent de mettre en place des règles fiscales et des dispositions légales et réglementaires qui ne désavantagent pas les acteurs européens par rapport à leurs homologues américains. Mais la baisse des charges et la flexibilité ne suffiront pas à relancer la compétitivité de l’économie française qui doit être plus ouverte au monde et à ses changements pour pouvoir se développer. L’innovation et l’adaptation à des marchés en perpétuelle évolution sont essentielles. « Tous les matins, nous

MODÈLES ÉCONOMIQUES : ENFIN DU NEUF L’évolution des comportements d’achat des consommateurs et la baisse des aides publiques et privées obligent le secteur à étudier des modes de financement alternatifs.

avons des dizaines d’idées de développement pour améliorer notre offre. Pour y parvenir, il faut libérer l’innovation autour de la musique. Cela passe par l’ouverture de notre système technique aux développeurs. Ils travaillent sur des nouveaux services et des options », explique Axel Dauchez, PDG de Deezer. Des mécanismes déjà utilisés, avec succès, dans le logiciel. Et faut-il rappeler que c’est de la Silicon Valley que proviennent les principales innovations qui ont bouleversé les industries culturelles, au cours de ces dix dernières années ? Pour Bernard Stiegler, philosophe et directeur de l’Institut de recherche et d’innovation (IRI) au centre Georges-Pompidou, le problème ne se limite pas au volet industriel, mais trouve ses racines dans la faiblesse de la recherche française sur ces sujets : « Il faut financer dans tous les domaines concernés des thèses universitaires, afin de constituer une intelligence nationale du numérique, qui fait actuellement totalement défaut. » En privilégiant, explique-t-il, une recherche tournée vers l’action et ouverte aux pratiques contributives. « Beaucoup d’enseignants et de chercheurs dans toutes les disciplines sont prêts à se saisir pleinement des possibilités inouïes du numérique, mais ils attendent pour cela une démarche sérieuse et rationnelle, et non un bricolage institutionnel. »

C’est la voie qu’explorent notamment les plateformes de financement participatif (ou crowdfunding). Après la musique et l’audiovisuel, elles s’intéressent maintenant à la BD, aux jeux vidéo ou au design. Dans l’Hexagone, la trentaine de sites de crowdfunding (sur 450 dans le monde) aurait financé quelque 15 000 projets pour plus de 6 millions d’euros, depuis 2008. Autre source de revenus, les offres en bundle qui constituent une stratégie marketing et de diversification de plus en plus développée dans le secteur culturel. Cette solution a été retenue notamment par Universal Music avec des partenariats notables, comme Peugeot Music ou encore le forfait Universal Mobile développé avec Bouygues Télécom. Les bénéfices recherchés résident avant tout dans le recrutement de consommateurs sur certains segments et l’augmentation des ventes à plus ou moins long terme. « L’analyse de la stratégie de développement d’offres en bundle nous a permis de montrer que si les bundles représentent une alternative de financement modeste, leurs bénéfices ne sont pas seulement financiers, mais aussi promotionnels et marketing avec la fidélisation du public », peut-on lire dans une enquête menée par des étudiants de l’Essec, à l’occasion du forum d’Avignon. Enfin, il y a l’émergence du modèle économique basé sur le paiement à l’acte. Dans le domaine du jeu vidéo, il pourrait bouleverser la façon de produire et de vendre des titres, mais aussi la nature des relations avec les joueurs qui deviennent véritablement acteurs de leur expérience interactive. La fragilité de ce modèle ? Il s’appuie entièrement sur l’engagement payant des clients (avec des montants faibles) et nécessite d’attirer sans cesse un très grand nombre de joueurs.

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UN BUSINESS MODEL À LA LOUPE

PUBLICITÉ COMPORTEMENTALE : « MAIS SI, REPRENDS UN COOKIE... » Pour optimiser leurs campagnes publicitaires, les annonceurs et les régies s’appuient sur une analyse de plus en plus fine du comportement des internautes. par Philippe Richard Qu’est-ce que le terme recouvre ?

Seuls 16 % des internautes cliquent sur les publicités, et 8 % d’entre eux représentent 85 % des clics : même si elle date de 2009, cette étude de Comscore révèle les limites des bannières publicitaires standard. La publicité comportementale vise à optimiser les annonces grâce à la personnalisation d’une bannière diffusée selon le comportement des utilisateurs d’un réseau (Internet, TV interactive, téléphonie mobile, etc.). Pour fonctionner, elle s’appuie sur les cookies, de petits programmes s’immisçant dans la mémoire des navigateurs Web afin de suivre le parcours des internautes. En accumulant des données sur ceux-ci, les régies peuvent en déduire leurs principaux centres d’intérêt et projets. Par exemple, un algorithme estimera probable que tel internaute sera en phase d’achat d’une voiture si un cookie a détecté une recherche sur un crédit auto ou un clic récent sur une annonce pour un véhicule. Quels sont les différentes techniques de publicité comportementale ?

Il existe cinq grandes familles de publicité ciblée : Target Discovery, Extended Reach, Lifestage Targeting, Retargeting et la publicité à ciblage comportemental. Mais la plus courante consiste, pour une régie publicitaire, à suivre les déplacements d’un internaute à travers tous les sites dont elle gère les annonceurs. Chaque régie a développé ses propres outils pour affiner son analyse.

en avance sur son temps, elle n’a pas rencontré le succès espéré. Cette technique a commencé à se généraliser en 2007, avec des offres lancées par Facebook, MySpace et Yahoo notamment. Comment fonctionne son modèle économique ?

Les réseaux sociaux et les moteurs de recherche transmettent les informations récupérées grâce aux cookies à leur propre régie. Moyennant finances, les annonceurs peuvent piocher dans ces données ciblées. Pour une agence comme Criteo, le modèle est plus complexe et repose sur un système d’enchères proche de celui employé par Google pour son offre de mots-clés. Criteo achète sur des plateformes ad exchange (bourses d’échange automatisées qui mettent en relation acheteurs et vendeurs de publicité sur Internet) de l’espace publicitaire au CPM (coût pour mille bannières affichées), qu’il revend ensuite à des annonceurs mais, cette fois, selon un modèle au CPC (coût par clic). Comme les campagnes de retargeting présentent des taux de transformation plus importants que la moyenne (grâce à des bannières personnalisées en temps réel), la marge, c’est-à-dire la différence entre le CPC et le CPM, peut varier entre 30 et 70 %. De plus en plus d’annonceurs reprochent à ces sociétés spécialisées dans le ciblage publicitaire un manque de transparence sur leurs marges. Connait-il des évolutions ?

Qui sont les pionniers ?

Le ciblage comportemental a été « inventé » aux États-Unis par la société Engage, à la fin des années 1990. Trop

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L’utilisation de plus en plus courante du smartphone pour faire des achats en ligne devrait permettre aux régies d’affiner encore leurs bases de données de

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1 Français sur 2 apprécie les publicités

utiles et bien ciblées.


© Isabelle Bonjean

DEUX BUSINESS MODELS À LA LOUPE CRITEO

Un taux de croissance de 202 100 % sur cinq ans ! Créée en 2005, la société française Criteo est certainement le plus beau succès récent du logiciel hexagonal. Son secret ? L’innovation, grâce à ses 320 ingénieurs (sur un total de 800 personnes) regroupés dans un centre de R&D de 10 000 mètres carrés à Paris. « L’innovation est au cœur de notre vision. Nous comptons poursuivre dans cette voie et continuer à participer à la mutation du secteur de la publicité en ligne », insiste JeanBaptiste Rudelle, PDG et cofondateur de Criteo. En cinq ans, la société est devenue leader mondial de son secteur. Une entrée en Bourse est envisagée. WEBORAMA

comportement des consommateurs, car cet appareil est véritablement personnel. Les avancées techniques permettent l’émergence de formats plus attractifs et interactifs (interstitiel, SMS et bannières géolocalisés, pré-roll mobile, etc.). Quel est le poids économique de ce secteur en France ?

« Pour l’instant, le ciblage comportemental représente 10 à 15 % de l’ensemble des ventes publicitaires sur les sites de Yahoo France », a indiqué au quotidien Les Échos

Jean-Christophe Gombeaud, directeur planning et stratégie au sein du portail. Quelle est la règlementation ?

La CNIL et les autorités européennes préconisent un principe de consentement exprès (opt-in) à la collecte de données et à leur utilisation à des fins de publicité comportementale. C’est l’un des objectifs de l’ordonnance du 24 août 2011. Elle impose non seulement d’informer au préalable les internautes sur la finalité des cookies et les moyens de s’y opposer, mais également de recevoir leur accord.

Scientifiques de formation et passionnés d’Internet, François Chassaing, Rodolphe Rodrigues et Sunny Paris créent Weborama en 1998. Le leader européen du management, de la diffusion et du tracking des publicités ciblées sur Internet mise sur l’internationalisation (qui représente désormais 46 % du chiffre d’affaires) de ses activités et sur son développement sur le marché de la donnée online. C’est la raison pour laquelle Weborama s’attaque à la Russie (marché où la croissance du digital est la plus rapide d’Europe : + 35 % en 2012), en prenant 51 % du capital de la société lnteractive Service. Pour son deuxième axe de développement, la société a acquis, en mai 2012, Datvantage, une plateforme de collecte et d’échange de données comportementales sur les internautes, lancée en 2009.

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BUSINESS 2.0

GÉRER SES FOURNISSEURS EN RESTANT SUR UN NUAGE Avec le rachat d’Ariba par SAP, le mouvement des applications d’entreprise vers le cloud entre dans une nouvelle phase. par Christophe Cayenne

L

e SRM ou Supplier Relationship Management est à la gestion des fournisseurs ce que le CRM (Customer relationship Management) est à la gestion des relations avec les clients. Il s’agit de permettre à une entreprise de systématiser l’ensemble des processus impliquant des interactions avec ses fournisseurs. Selon TechNavio, le secteur du SRM devrait connaître une croissance d’environ 8 % par an d’ici à 2015… Le SRM recouvre ainsi la gestion des fournisseurs eux-mêmes, la gestion de leur performance, la gestion de la chaîne logistique et la gestion de la co-innovation et des codéveloppements, etc.

fournisseurs, la mise en œuvre d’une approche d’évaluation de leur performance et un cadre formel incitant les fournisseurs clés à mettre l’accent sur la valeur et l’innovation. Ces fonctions peuvent être gérées avec des outils bureautiques pour commencer, mais les plus performantes des entreprises étudiées par Accenture ont eu rapidement recours à des solutions IT plus adaptées. Ce qu’ont bien compris les grands noms du logiciel spécialistes de la logistique et des ERP, qui, tous, ont investi dans le secteur, à commencer par Oracle, SAP (rachat d’Ariba) et JDA et ce, dès les années 2000.

DES FOURNISSEURS IMPLIQUÉS DANS LA R&D

UN PIONNIER DU SAAS

Le SRM a émergé un peu avant le milieu des années 2000 et s’est imposé après la crise de 2008. Crise qui a conforté les stratégies existantes de réduction des coûts et de consolidation du nombre de fournisseurs. Mais ces stratégies ont aujourd’hui atteint leurs limites. Il ne suffit plus de gérer ses fournisseurs en s’assurant qu’ils livrent les bons composants au meilleur prix. De plus en plus, les fournisseurs participent à l’écosystème d’innovation de l’entreprise en apportant leurs capacités de R&D et de design. C’est évidemment le cas dans le domaine de l’automobile et de l’aéronautique, mais le phénomène s’étend désormais à la grande distribution et aux services.

Pour concurrencer les nombreux spécialistes des e-achats, les ERP ont alors développé leurs propres solutions dans le domaine. La montée des ERP et la difficile connexion avec les autres applications de l’entreprise ont favorisé la concentration du marché (voir le tableau ci-dessous). On dénombre également des solutions françaises innovantes : SynerTrade, avec plus de 225 clients dans le monde (dont 50 dans le classement Fortune 1000), ou Ivalua, qui compte aujourd’hui plus de 100 projets déployés avec succès au sein d’entreprises de tous secteurs d’activité. Ces applications de SRM ont été, avec le CRM et les ressources humaines, les pionnières en matière d’applications métier en mode On Demand en ASP puis, aujourd’hui, dans le cloud. Ce sont encore actuellement les applications les plus utilisées en mode SaaS.

Comme l’a observé Accenture, les outils basiques pour initier une démarche SRM sont une matrice de segmentation des 8 SOLUTIONS DE GESTION DES FOURNISSEURS ÉDITEUR TYPE

Spécialiste

ERP

Spécialiste

Spécialiste

ERP

ERP

Spécialiste

Spécialiste

NATIONALITÉ

Italie

États-Unis

France

États-Unis

États-Unis

Allemagne

France

Inde

NOMBRE DE CLIENTS

N.C.

Env. 160

100

6000

N.C.

730 000

225

Plus de 200

(issus d’Ariba)

Source : Afdel.

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© Fotloia

LA PAROLE À L’INNOVATION

COCRÉATION : QUAND LE CONSOMM’ACTEUR DEVIENT DESIGNER Le numérique permet déjà aux industriels de mieux comprendre le consommateur. L’étape suivante consiste à l’impliquer dans la conception même des produits. Par Reynald Fléchaux

I

mpliquer les consommateurs dès les phases de conception des produits : si l’idée n’est pas réellement nouvelle – les premières recherches sur le design participatif en Scandinavie remontent aux années 1970 –, le concept a pris une tout autre dimension avec la généralisation des technologies de l’information. D’abord, ces dernières ont montré la faisabilité d’un processus de création collaboratif à grande échelle, impliquant de nombreuses personnes disséminées sur le globe. Surtout, réseaux sociaux et terminaux mobiles sont de plus en plus utilisés par les consommateurs pour interpeller les marques. Ces dernières ont donc dû accentuer leur présence sur ces canaux pour répondre aux clients et tentent d’y mener des actions marketing. Impliquer, via les mêmes outils, les consommateurs dans l’amélioration de leurs produits ou services, voire dans la conception de nouveautés, apparaît comme un prolongement naturel de cette démarche. « Le digital a décuplé nos capacités à interagir avec les consommateurs eux-mêmes. Certains de nos films publicitaires sont ainsi testés avant leur lancement auprès de panels de quelques centaines d’internautes. Cela afin de recueillir leurs réactions », illustre Arnaud de Lamothe, directeur marketing et communication de Citroën (voir encadré page suivante). Pour les industriels, les intérêts sont multiples. La démarche leur permet non seulement d’affiner leurs produits ou services en y introduisant des fonctions réellement attendues par les consommateurs, mais également de faire émerger des idées qui auraient échappé à leurs équipes internes. Tout en améliorant leur image de marque auprès des consommateurs. À la clé, la promesse de produits ou de services mieux adaptés au marché. Le principe du codesign peut aussi être exploité pour affiner les études précédant les lancements de produits. Une voie

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qu’explore notamment l’éditeur Dassault Systèmes, avec des solutions dédiées aux industriels de la grande consommation et aux distributeurs. « Ces entreprises sont confrontées, d’une part, à un consommateur dont les goûts évoluent rapidement et qui sait décoder les stratégies des marques et, d’autre part, à de très nombreux lancements de produits mis au point avec des dizaines d’intervenants différents », détaille Philippe Loeb, le vice-président du premier éditeur français en charge de ces deux marchés. L’idée du spécialiste de la 3D ? Proposer des solutions de conception de packaging et de modélisation des devrait générer rayons permettant un chiffre d’affaires de d’impliquer directement les clients. « On parvient ainsi à mémoriser les exigences des consommateurs et à vérifier qu’on y répond bien dans le processus de développement », explique Philippe Loeb, qui ajoute que les outils permettent de capitaliser sur les bonnes pratiques décelées lors des processus de conception précédents.

Quirky

25 millions de dollars en 2012

DES COMMUNAUTÉS DE CONCEPTEURS CONSOMMATEURS

Le créneau suscite également l’intérêt d’une poignée de startup. Aux États-Unis, la réussite la plus emblématique se nomme Quirky. Née en 2009 à New York, cette société, créée par Ben Kaufman, réunit 300 000 personnes intéressées par la conception de nouveaux produits. Cette communauté propose, affine et sélectionne les meilleures idées soumises par ses membres. Les trois meilleures idées choisies chaque semaine sont ensuite

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D. R.

transformées en produits par les équipes de Quirky et se retrouvent dans les rayons de partenaires distributeurs. Plus d’un tiers du chiffre d’affaires généré est reversé aux membres de la communauté, en fonction de leur participation à la conception du produit concerné. Selon Ben Kaufman, Quirky devrait générer un chiffre d’affaires de 25 millions de dollars en 2012 (contre 7 millions en 2011). La start-up espère dépasser le cap des 100 millions en 2013, notamment via son expansion internationale. Pour la France et la péninsule ibérique, Quirky a ainsi noué un partenariat avec

Auchan (voir encadré ci-dessous). Sur un principe similaire, mais en visant plutôt des produits cobrandés avec des industriels, Nov’in, start-up française fondée par un ingénieur d’une trentaine d’années, a vu le jour en décembre 2012. Aux avantages précédemment cités, ces sites communautaires en ajoutent un nouveau : ils hébergent les premiers consommateurs du produit. Comme l’explique Ben Kaufman, la production en série ne débute que lorsque 1 000 prototypes ont été achetés sur le site.

POUR AUCHAN, COLLER AUX BESOINS DES CONSOMMATEURS

« La grande distribution a longtemps été un modèle porté par les industriels, avant de développer ses propres produits, dans les années 1990. Le partenariat avec Quirky nous permet de franchir une nouvelle étape, avec des produits imaginés par les consommateurs eux-mêmes, au plus près de leurs besoins. » Voilà comment Flavien Dhellemmes, directeur de la vente d’équipements d’Auchan, résume le parcours qui a amené le groupe nordiste à s’intéresser à la start-up new-yorkaise et à nouer avec cette dernière un accord de partenariat exclusif sur les six premiers mois de 2013, portant sur tous les pays dans lesquels le distributeur est présent. En plus de commercialiser certains produits figurant déjà au catalogue de la start-up, Auchan propose à ses clients d’adhérer à une version locale de la plateforme collaborative, afin de les amener à présenter eux aussi leurs idées. Objectif : « Proposer en rayons, pour Noël 2013, une cinquantaine de produits conçus par des clients de nos magasins », selon Flavien Dhellemmes. Ou par des collaborateurs du groupe. « Au final, nous voulons vendre dans un magasin des produits inventés par des consommateurs provenant de la zone de chalandise », conclut-il.

CITROËN MISE SUR LE DESIGN PARTICIPATIF

Personnalisez la DS3 ! Inauguré en 2010, le concours Creative Awards de Citroën vise à impliquer des designers externes ou de simples consommateurs dans la conception des produits de la marque aux chevrons. Lancé en parallèle de la DS3, le concours a d’abord mis l’accent sur la personnalisation de cette voiture, un thème qui était justement au centre de ce modèle. Il a récompensé, parmi 700 projets de personnalisation qui ont été déposés sur le site du concours, un designer italien pour un modèle de toit aujourd’hui intégré à la gamme DS3. Depuis, la marque aux chevrons a maintenu le concours. « Les Creative Awards sont une boîte à idées pour Citroën, détaille Arnaud de Lamothe, le directeur marketing et communication. Mais l’objectif est bien d’aller jusqu’à la réalisation du produit ou du service imaginé par le participant. Ainsi le toit Flavio (issu de la première édition, NDLR) est aujourd’hui l’un des toits personnalisés les plus vendus sur la DS3. Cette année, parmi les quelque 1 000 dossiers que nous espérons recueillir, nous comptons bien développer deux ou trois applications qui seront ensuite proposées à nos clients. » Lancée en décembre dernier, la troisième édition du concours invite en effet les participants à imaginer des applications mobiles susceptibles de faciliter la conduite ou la vie des automobilistes. « Nous effectuons en interne une première sélection des dossiers sur la base des critères suivants : originalité de l’application et pertinence pour les conducteurs ainsi que pour Citroën », précise Marie Laloy, responsable de la stratégie digitale de la marque aux chevrons. Quatre prix seront remis pour une dotation totale de 15 000 euros.

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E-GOV

FACTURE ÉLECTRONIQUE : UNE ÉTAPE CRUCIALE DANS LA TRANSITION NUMÉRIQUE DES ENTREPRISES La facture électronique est aujourd’hui un élément incontournable pour soutenir et développer les entreprises. Mais, en France, la transposition de la directive européenne a été mal engagée. Seule existe la vision, restreinte, de la facture électronique comme levier du contrôle fiscal. par Rémi Sorel

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u’il s’agisse du financement du bas de bilan, de l’amélioration de la productivité, d’un meilleur contrôle des délais de paiement, du financement par affacturage à moindre coût ou du pilotage fin de la trésorerie, tout concourt à favoriser la facture électronique pour soutenir et développer l’activité quotidienne des entreprises françaises. En décidant de promouvoir le développement de la dématérialisation fiscale des factures, l’Union européenne l’a d’ailleurs parfaitement compris. La directive du 13 juillet 2010 tend à simplifier les règles d’application de la facture électronique, dans l’objectif affiché de favoriser son adoption et d’en développer l’usage. En France, la transposition de cette directive a fait l’objet d’une loi, promulguée le 29 décembre 2012, dont les textes d’application n’ont pas encore été validés en Conseil d’État. Or, sur le fond, le compte n’y est pas. La diffusion de l’usage de la facture électronique suppose de définir et de mettre en œuvre une politique bien plus volontariste et bien plus ambitieuse que celle actuellement portée par les pouvoirs publics (direction générale des Finances publiques – DGFiP –, direction générale de la Compétitivité, de l’Industrie et des Services – DGCIS – et ministère chargée des PME, de l’Innovation et de l’Économie numérique). RETROUVER L’ESPRIT DE LA DIRECTIVE

Pour Romain Hugot, administrateur de l’Afdel et président du groupe de travail n° 3 du Forum national de la facture électronique, « l’impulsion nécessaire doit être donnée à la facture électronique, afin que sa promesse de valeur soit au rendezvous et que le gouvernement réoriente les travaux engagés par l’administration, en particulier au niveau de la transcription de la directive européenne ». Car force est de constater que les principes fondateurs de la directive européenne n’ont pas été repris dans le projet de décret d’application de la loi de finances récapitulative. À ce jour, la vision, éminemment restreinte et

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restrictive, de la facture électronique par le contrôle fiscal est la seule qui existe. Cela est d’autant plus dommageable que le ministre de l’Économie et des Finances, Pierre Moscovici, a annoncé, le 6 février dernier, un train de mesures pour améliorer la trésorerie des PME, n’hésitant pas à affirmer que la généralisation de la facture électronique constituerait un levier significatif pour la mise

L’impulsion nécessaire doit être donnée à la facture électronique. en place de ces mesures. Un mois plus tard, dans une tribune publiée le 12 mars par le journal Les Échos, Pierre Moscovici feignait même de s’interroger sur l’opportunité de « (…) réfléchir à une petite révolution qui serait d’engager notre pays vers une dématérialisation totale des factures » ; concluant qu’il y avait là « un beau chantier de modernisation de notre économie ». De nombreux progrès sont donc à faire d’urgence. Au premier rang desquels figurent la reconnaissance de conformité de l’archivage électronique d’une facture originale papier, la possibilité de multiplier les formats et les formes d’archivage des factures, la mise en place de moyens et d’outils de sécurisation des échanges économiquement viables et aisés à adopter, l’assouplissement des contraintes liées à l’usage de l’échange de données informatisées (EDI), la possibilité de recourir à la voie de la piste d’audit – comme le propose la directive –, et la création d’une domiciliation électronique des entreprises permettant de favoriser et de simplifier les échanges électroniques. À l’évidence, l’entérinement du projet de décret dans sa forme actuelle ferait courir un risque au développement de l’usage de la facture électronique en France et en compromettrait durablement les avantages, pourtant reconnus par tous.

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D. R.

CHRONIQUE JURIDIQUE

PATRIOT ACT : DES DROITS D’INVESTIGATION STRICTEMENT ENCADRÉS par Kami Haeri

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eaucoup d’encre a déjà coulé sur les risques que comporterait le Patriot Act pour la protection des données. Le US Patriot Act (Uniting and Strengthening America by Providing Appropriate Tools Required to Intercept and Obstruct Terrorism Act) confère en effet une compétence aux autorités américaines, sous le contrôle de leurs juridictions, afin de prévenir et punir les actes de terrorisme et d’espionnage aux États Unis et dans le monde. Il faut rappeler que les dispositions introduites dans le droit américain par le Patriot Act s’appliquent à toute « personne américaine » et, notamment, à toute personne morale de droit américain et à leurs filiales. Mais il convient en outre de préciser que sont également concernées les entreprises étrangères (notamment françaises) qui ont une filiale ou bien un lien suffisant avec le territoire américain. S’est donc posée en filigrane la question de l’impact de ce texte fournissant des solutions au regard des modèles d’outsourcing qui connaissent un développement considérable grâce aux évolutions récentes du cloud computing. Visant la lutte contre le terrorisme, le Patriot Act n’a pas été conçu comme un instrument d’espionnage économique, mais comme une adaptation des mesures d’investigation à l’évolution des formes de criminalité et à l’usage des technologies de l’information par les terroristes en particulier. La désormais fameuse section 215 du Patriot Act renforce ainsi un dispositif existant d’investigation (FISA orders) permettant aux agents fédéraux de se faire communiquer par une entreprise américaine ou sa filiale – quel que soit le pays d’implantation – toute information utile intéressant une enquête sur le fondement d’une ordonnance rendue ex parte par un juge.

KAMI HAERI AVOCAT ASSOCIÉ AUGUST & DEBOUZY

L’éditeur de bases de données, dès lors qu’il est soumis au droit américain, peut donc être contraint de communiquer des informations stockées sur ses serveurs, sur la base d’une décision de justice prise à l’issue d’une procédure non contradictoire. Dans ce cas, la personne requise par les

autorités américaines ne peut informer un tiers de l’existence d’une telle procédure, sauf à ce que l’intervention de ce tiers soit indispensable à l’obtention des données. La section 215 précise enfin que l’éditeur qui a coopéré de bonne foi ne saurait être tenu responsable pour avoir communiqué des informations à la demande des autorités américaines. Néanmoins, les informations ainsi recueillies ne sauraient en aucun cas être exploitées dans une autre procédure ou dans un autre contexte que celui circonscrit par le cadre des investigations. La diffusion de ces informations est donc strictement prohibée. En outre, les pouvoirs de contrôle du juge américain, qui est au moins aussi soucieux des libertés individuelles que le juge européen, ont été singulièrement renforcés à l’occasion du vote des lois autorisant la reconduction du Patriot Act. Depuis 2006, les agents fédéraux sont en effet tenus de motiver leurs requêtes en exposant les indices (probable cause) permettant, au-delà des simples soupçons, d’attribuer une activité criminelle à la personne qui fait l’objet de la demande d’information. Il convient de relever qu’en France ce type d’informations est susceptible d’être obtenu dans le cadre assez similaire des réquisitions adressées par un officier de police judiciaire sur simple autorisation du procureur de la République. Ainsi, le périmètre des investigations permises par le Patriot Act est sensiblement le même que celui autorisé en France et dans de nombreux pays européens. En définitive, il importe, afin d’éclairer les légitimes interrogations que suscite ce texte mais en restant loin des fantasmes facilement instrumentalisés, de veiller à ce que les projets de directive Police and Criminal Justice Data Protection et de règlement General Data Protection Regulation s’inscrivent dans une démarche de conciliation efficace entre le droit de la protection des données personnelles et l’objectif de garantie des libertés contre les actes de terrorisme.

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COMMUNAUTÉS

JOUEURS DE POKER : AU-DELÀ DU BLUFF Quelques années seulement après son explosion, le poker en ligne fait vivre plusieurs milliers de joueurs professionnels. Et, surtout, fédère une large communauté de passionnés. par Romain Chabrol

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é sous sa forme actuelle en 1999 aux États-Unis, le poker en ligne explose véritablement au milieu des années 2000. On découvre alors que le célèbre jeu de table n’est pas que bluff et verres teintés : c’est aussi un jeu de stratégie où les cartes se comptent, et un passe-temps ludique qui rassemble et fédère. La génération élevée aux jeux vidéo s’engouffre alors sur les « .com » d’Everest Poker ou de Winamax et va vite faire des allers-retours entre le online et le live. La star française et actuel numéro un mondial Bertrand Grospellier, dit « Elky », 32 ans, était un professionnel du jeu vidéo StarCraft avant de se tourner vers le poker en ligne, en 2006, et de conquérir en deux ans les tables de tous les casinos du monde. LES PROS DU RISQUE CONTRÔLÉ

Dans sa version en ligne, le poker se rend accessible à tous, et à tout moment. Le ticket d’entrée est peu élevé... Ainsi, de jeunes joueurs peuvent avoir accès à un nombre important de « mains », être en contact avec des plus expérimentés et progresser très rapidement. Il y aurait, aujourd’hui, en France quelques milliers de joueurs vivant du poker, principalement dans sa version en ligne. Gérant leur bankroll comme un portefeuille boursier en prenant toujours des risques contrôlés, ils sont à mille lieux de cette image du joueur compulsif qui colle à la peau du poker pour les non-initiés. En dépit de cette professionnalisation, la dimension sociale et communautaire du poker reste considérable. Il existe en France de nombreux sites d’infos et de partage. Le plus important d’entre eux – et seul indépendant –, Clubpoker, propose comparatifs des salles en ligne ou live, fiches pédagogiques, dossiers, lexiques, podcasts radio, forums. Il réunit une communauté de 50 000 passionnés. Dans la foulée du vote de la loi sur l’ouverture à la concurrence du secteur des jeux d’argent et de hasard en ligne, en 2010, l’autorité veillant à son application, l’Arjel, a agréé une quinzaine de plateformes de poker en ligne.

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« La dimension sociale est très importante au poker ; on a besoin de rencontrer d’autres joueurs et d’échanger. Ceux qui pratiquent le poker sont avant tout des joueurs, c’est-à-dire des individus qui aiment être en communauté autour d’une activité ludique. Paradoxalement, la loi de régulation française de 2010 a sapé un peu cet esprit d’échange et de solidarité. Les joueurs français sont maintenant parqués entre eux. Avant, tout le monde était éparpillé sur les « .com » et il y avait une solidarité française. On partageait plus les informations... Personnellement, je préférais jouer face à des Australiens ou à des Allemands ! » FRANÇOIS-PHILIPPE CROUÉ, chef d’entreprise

« J’ai découvert le poker à Las Vegas, en 2005. De retour en France, je me suis mis à jouer en ligne : on pouvait jouer, quand on voulait, tout type de partie avec tout type d’enjeu et en gardant peut-être la tête plus froide qu’en live… C’est toujours le cas, mais l’offre de jeu en ligne s’est bien réduite, depuis la régulation de 2010 : seules deux variantes, Omaha et Hold’em, sont autorisées sur les « .fr », pour sept ou huit sur les « .com ». Certes, le niveau de jeu s’est amélioré, et il y a plus de joueurs, mais on a perdu quelque chose. » SANDRINE PEREIRA, chef de projet dans la restauration

« Le goût du poker me vient de mon père et j’y joue depuis que je suis petite… En 2006, lorsque j’ai su qu’on pouvait désormais jouer avec d’autres personnes sans bouger de son canapé, j’ai foncé. Et les gains étaient plus attrayants ! Ajoutez à cela ma geek touch assez prononcée, je ne pouvais plus passer à côté de mon ordinateur sans ouvrir une room… Grâce à la communauté poker qui s’est créée, j’ai pu jouer par la suite lors de quelques tournois : France Poker Tour, ÎIle-de-France Poker Tour, Live Ladies dans les cercles à Paris… Mes gains me font juste continuer à particpier en finançant d’autres parties. » TERENCE BERTAULT, directeur de tournoi au casino de Saint-Denis (La Réunion)

LES 5 SITES LES PLUS FRÉQUENTÉS PAR LES JOUEURS

1. Pokerstars.fr : 1 900 2. Winamax.fr: 1 300 3. Partypoker.fr : 700 4. iPoker.fr : 650 5. Barrièrepoker.fr : 350

« Je joue depuis l’âge de 11 ans. J’en ai 32, aujourd’hui. J’ai commencé à jouer online : un ami m’avait montré Everest Poker et j’ai vite été pris de passion pour ce jeu… Puis je suis parti m’installer à la Réunion et suis tombé sur le forum Reunion Island Poker qui m’a beaucoup apporté, aussi bien dans mon jeu que dans les rencontres que j’ai pu y faire. Actuellement, je joue presque tous les jours online ; je n’ai en fait pas le droit de jouer en live car je travaille dans un casino. C’est la loi. Mais l’offre est très dense online et on peut jouer de belles tables à toute heure. »

Selon la moyenne du nombre de joueurs qui misent (cash players), connectés à tout moment. Sources : Arjel, Poker Scout.

300 000 à 400 000

joueurs réguliers en France (pour 694 000 comptes actifs), dont 12 % de femmes. 41

© Fotolia

LAURENT DUMONT, cofondateur de clubpoker.net


CULTURE

NÉMO : LES ARTS NUMÉRIQUES SUR ORBITE ? Après quinze ans d’existence, Némo, le festival des arts numériques de la région Ile-de-France, semble atteindre une nouvelle dimension. Touchant désormais à tous les domaines de la création. par Romain Chabrol

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par le Cube d’Issy-les-Moulineaux et le Centquatre parisien... Un festival pour tous les goûts. Dans toutes les directions.

Des têtes d’affiche de haut niveau comme Robin Fox, Underground Resistance ou Roll the Dice. De plus de plus de lieux partenaires : de l’Avant Seine-théatre de Colombes au Musée d’art et d’histoire de Saint-Denis, en passant bien sûr

Au risque d’une certaine confusion ? La bannière « arts numériques » peut en effet sembler un peu floue. Pas facile de déceler ce qui réunit certains musiciens contemporains ou électro et les performeurs visuels et sonores. Le recours aux nouvelles technologies ? Mais quel est l’art qui n’est aujourd’hui pas numérique ? Némo s’apparente donc à un pot-pourri à la pointe de la création contemporaine. Un pot-pourri offrant de belles surprises, dont certaines ont été véritablement plébiscitées par le public.

a 15e édition du par festival NémoBellin s’est et déroulée, fin 2012, sur trois Propos recueillis Isabelle Loïc Rivière semaines. Et la 16e édition est déjà sur les rails. Au menu, un spectre d’œuvres de plus en plus large – concerts expérimentaux et électro, installations audiovisuelles en tout genre –, loin des premières éditions qui tournaient essentiellement autour de l’image : infographie et cinéma expérimental.

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LES CAHIERS DU NUMÉRIQUE /// NUMÉRO 4 /// MAI 2013

© Daniel Karl Fidelis Fuchs

SUPERPOSITION PAR RYOJI IKEDA

Ryoji Ikeda explore la façon dont nous comprenons la nature à l’échelle de l’atome. Une expérience sensorielle combinant sons, images, concepts mathématiques à partir d’instruments et d’images générées en direct sur une multitude d’écrans.


L’ART NUMÉRIQUE EST ENTRÉ DANS L’ART CONTEMPORAIN. ENTRETIEN AVEC... GILLES ALVAREZ, DIRECTEUR ARTISTIQUE DU FESTIVAL NÉMO Quel est l’enjeu de Némo ?

Gilles Alvarez : Il s’agit du seul festival d’arts numériques orienté vers le grand public. Les autres ne visent que les diffuseurs. Ce festival a d’abord été un panorama de nouvelles images. Puis les nouvelles images sont devenues les images. Elles ont été complètement intégrées au langage du cinéma. On a donc décidé, en 2010, de se concentrer sur les performances audiovisuelles et les installations multimédia, d’explorer les rapports entre images et sons, de montrer des œuvres qui ne soient pas statiques. Nous voulons inscrire celles-ci dans la sphère de l’art contemporain ; elles en sont l’un de ses segments les plus dynamiques. Nous défendons une approche tangentielle et voulons révéler une nouvelle catégorie de spectacle vivant. Comment définir l’art numérique ?

G. A. : L’art numérique est celui qui utilise les nouvelles technologies et qui joue sur l’interaction. L’interaction entre les éléments artistiques (images et sons), l’interaction avec le public, l’interaction avec l’environnement. Cette interaction est permise par les nouvelles technologies... La définition est technologique et non pas esthétique. Toutes les esthétiques peuvent collaborer.

Ces œuvres ne sont-elles pas présentes dans les musées d’art contemporain ?

G. A. : L’art numérique est entré dans l’art contemporain, mais il reste de nombreux obstacles. On ne voit pas d’installations d’arts numériques dans les musées. Il y a en effet une défiance des collectionneurs et des institutionnels ; défiance qui tient notamment à l’entretien des pièces des œuvres... Il faudrait qu’elles soient vendues avec un contrat de maintenance ! Quels liens entretenez-vous avec les entreprises du secteur numérique ?

G. A. : Némo est organisé par Arcadi, l’établissement public de coopération culturelle de la région Ile-de-France destiné au soutien de la création du spectacle vivant. Némo présente les commandes d’Arcadi via son fonds ACME (NDLR : aide la création multimédia expérimentale), des coproductions ou des invités. Nous ne connaissons pas le monde des entreprises. Artistes et diffuseurs, nous serions pourtant inspirés d’aller dans le sens d’une plus grande collaboration avec les entreprises du secteur numérique... Notre domaine nous montre justement à quel point création artistique et innovation technologique sont liées.

LE CERCLE DE PASCAL BAUER

CITYSCAPE 2095 PAR MANDRIL ET LEGOMAN

© Yannick Jacquet

Un projet original mêlant dessins, mapping et projections, qui illustre le déroulement d’une journée dans une ville, monde imaginaire et tentaculaire. LASER MASTER PAR ROBIN FOX

Difficile de définir l’artiste australien Robin Fox. Lui-même se présente comme « synesthésiste », de « perception simultanée » en grec, c’est-à-dire artiste associant des modalités sensorielles différentes, en l’occurrence son et image. Il revendique l’héritage des bidouilleurs géniaux de la musique visuelle (Mary Hallock et son orgue à couleurs de 1916) et les allers-retours entre langages musical, visuel et scientifique. D’abord musicien expérimental travaillant à partir de vibrations et d’oscilloscopes, Robin Fox transforme aujourd’hui des fréquences en rayons laser et fragmente ces rayons avec des fumigènes. Le résultat ? Un show hypnotique à base de tunnels envoûtants. Le tout baigné de vibrations électro, au sens premier du terme : on y entend véritablement l’électricité. Un geek sur Saturne. Maître ès vibrations et fréquences, Robin Fox travaille aussi sur des projets de prothèses auditives et de canons à son avec l’université de Melbourne.

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© Lasse Marhaug

© School Gallery / Olivier Castaing, 2012.

Une pièce monumentale composée à partir d’un appareillage qui met un écran en mouvement sur un chariot. Sur l’écran, un taureau noir se lance dans une course sans fin pour se libérer du joug qui l’entrave...


CULTURE

COMMENT LE WEB CHANGE LE MONDE FRANCIS PISANI, DOMINIQUE PIOTET, éditions Pearson, 328 p.

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es évolutions en cours de l’Internet changent radicalement la manière de s’informer, de se distraire, de se cultiver et de travailler des deux milliards d’internautes dans le monde. A contrario, ce sont les 77 millions de smartphones vendus chaque année qui modifient à leur tour le web. Ce livre fait un point indispensable sur les tendances actuelles du « www » et puise aux meilleures sources. Des notions techniques souvent mal comprises y sont clairement exposées. Les auteurs pointent la force des acteurs qui animent aujourd’hui toute la partie dynamique du web. Ils décrivent cette « alchimie des multitudes » qui permet, par exemple, de réunir les compétences de contributeurs pour connaître ou anticiper des phénomènes qui échappent aux meilleurs experts. Loin de verser dans le culte béat du web, les auteurs brossent en conclusion un tableau des enjeux à venir, notamment la tension entre le Word Wide Web de Tim BernersLee et les réseaux sociaux tels Facebook, sans se risquer à des prévisions hasardeuses.

Par Serge Escalé

/ La Société numérique,

/ La Cybercriminalité en mouvement,

Cahiers français n° 372, La Documentation française, 96 p.

Éric Freyssinet, éditions Hermès science publications, 226 p.

Ce numéro dédié à la révolution du numérique présente les points de vue très argumentés des experts, juristes, sociologues, enseignants-chercheurs. Depuis le droit international de l’Internet jusqu’à la transformation de l’écrit à l’heure du numérique, en passant par le renouvellement des industries culturelles ou les liens faibles et forts dans les réseaux sociaux. Le lecteur y trouvera un éclairage particulièrement documenté sur l’Internet des objets qui ouvre tout un nouveau champ de possibles, mais pose autant de défis (droit des citoyens, confidentialité, etc.).

Contrefaçon de cartes bancaires, vol de voitures, escroquerie à l’avance de frais, aux numéros surtaxés, au commerce en ligne : la liste des méfaits est longue, montrant combien la cybercriminalité est devenue une délinquance puissante et très organisée. Ce livre dépeint la face noire du numérique, une face bien connue de son auteur, chef du pôle judiciaire de la Gendarmerie nationale. Il identifie précisément la contradiction, pour les services spécialisés, entre la nécessité de disposer d’instruments d’investigation puissants et le respect des libertés individuelles.

/ Pris dans la Toile

L’Esprit aux temps du web, Raffaele Simone, collection Le Débat, éditions Gallimard, 272 p. Après l’écriture et l’imprimerie, une troisième révolution cognitive majeure est en cours, induite par Internet et les médias numériques. Raffaele Simone, linguiste italien, décrit dans ce livre les transformations profondes produites par ce qu’il appelle la « médiasphère » sur l’intelligence, nos sens, notre relation au savoir et les rapports sociaux. Cette analyse critique du numérique laisse cependant, à la fin du livre, l’espoir que les formes nouvelles d’organisation d’une « démocratie numérique » refondent le politique.

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/ L’Attention au monde, Sociologie des données personnelles à l’ère numérique Emmanuel Kessous, éditions Armand Collin, 320 p. L’exploitation des données personnelles et la captation de l’attention des internautes constituent les piliers centraux des acteurs économiques de la Toile. « Vendre du temps de cerveau disponible », comme le disait cyniquement Patrick Le Lay, alors PDG de TF1, exige d’exploiter au mieux cette denrée rare qu’est l’attention. L’auteur explore avec minutie les mécanismes employés par un marketing agressif dans notre économie de marché en voie d’être remplacée par une « économie de l’attention ». Il pointe, avec une certaine acuité, la nécessité de protéger la vie privée.

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IDÉES

INTERNET OU LE RETOUR DE L’INSTINCT DE COOPÉRATION par Godefroy Dang Nguyen

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D. R.

arler de confiance à propos d’Internet peut sembler incongru. Souvent accusé de véhiculer les pires excès, le réseau a toujours suscité beaucoup de méfiance. Pourtant, il est aujourd’hui le vecteur d’une transformation sociale qui affecte deux milliards de personnes, celle qui accompagne une redécouverte (ou du moins une réactivation) de la confiance et de la coopération.

BIO EXPRESSGODEFROY DANG NGUYEN Directeur scientifique de M@rsouin, groupement d’intérêt scientifique créé en 2002 à l’initiative du conseil régional de Bretagne et qui fédère 11 centres de recherche en sciences humaines et sociales travaillant sur les usages des TIC. Ces centres sont issus des quatre universités bretonnes et de deux grandes écoles (Télécom Bretagne, Ensai). Directeur scientifique adjoint de Télécom Bretagne. Diplômé de l’Institut d’études politiques de Paris et ingénieur civil des Mines.

Avec l’avènement de la société industrielle, une armature institutionnelle s’est mise en place où la confiance n’était, en principe, plus nécessaire dans les relations économiques. Le droit de propriété, la liberté contractuelle, le pouvoir de police et judiciaire de l’État en cas de manquement aux obligations contractuelles devaient limiter le rôle de la confiance et asseoir la coopération. La théorie économique a construit à partir de là une vision d’un homo economicus égoïste et calculateur. À l’origine, Internet ne devait pas remettre en cause cette armature institutionnelle. Son formidable essor, au moment de la bulle (1996-2000), semblait ouvrir de belles perspectives au commerce électronique. Avec l’éclatement de cette bulle, Internet ne s’est pas effondré pour deux raisons : les capacités de transmission ont augmenté grâce à la diffusion de l’ADSL, ce qui a induit des usages nouveaux, et l’internaute a repris à son compte les possibilités qu’offrait le Net, plutôt que de se contenter d’un rôle de client passif. Ce fut l’éclosion du Web 2.0. La tradition de coopération est certes au fondement même du Net. C’est ce principe qui régit, depuis l’origine, c’està-dire depuis 1969, la rédaction des RFC (requests for comments) sur la base desquelles sont élaborés les standards de l’Internet. Ces valeurs de coopération, de

confiance et de contribution volontaire, facilement partageables au sein d’une communauté homogène d’informaticiens, paraissaient toutefois difficilement transposables à monsieur Tout le Monde. Or ce que l’on observe, c’est exactement le contraire. Il y a Wikipedia, bien sûr, mais aussi tous les forums d’entraide (Doctissimo pour la santé, Auféminin.com pour les femmes, Tripadvisor pour les voyages, certains même à vocation commerciale), les liens sociaux virtuels tissés sur Facebook ou les réseaux sociaux.

AVEC CES NOUVELLES FORMES DE COOPÉRATION, L’HOMME RETROUVE DES COMPORTEMENTS ANCESTRAUX OCCULTÉS PAR LA RÉVOLUTION INDUSTRIELLE. Avec ces nouvelles formes de coopération, l’homme retrouve des comportements ancestraux – la capacité à coopérer avec des étrangers qui ne sont membres ni de sa famille, ni de son clan est un trait distinctif de homo sapiens sapiens – que la révolution industrielle avait apparemment occultés : il donne gratuitement son temps et ses talents au service d’un « bien commun » (il y a plusieurs centaines de millions d’années, la chasse en commun, aujourd’hui la production de connaissances et d’informations). Bien sûr, ses motivations peuvent être aussi égoïstes : par exemple, dans un engagement sur un projet de logiciels libres, le simple goût de résoudre un problème se double, parfois, de la volonté de se tailler une réputation (pour le petit nombre de chefs de projet qui réussissent). Mais, en général, la motivation des internautes est bien cette « réciprocité forte » qu’ont identifiée les spécialistes de l’évolution.

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TENDANCES

LA LABORIEUSE ADAPTATION DE L’INDUSTRIE IT AU CLOUD Si le modèle du client-serveur n’a pas tout à fait dit son dernier mot, toute l’industrie IT projette désormais son avenir dans l’informatique en nuage. par Guillaume Barrières

B

ien qu’encore en gestation, l’informatique en nuage est bel et bien l’avenir du traitement de l’information. Elle transcende le potentiel de la virtualisation, ces technologies qui scindent les systèmes d’information en deux avec, d’un côté, les couches logicielles et, de l’autre, les couches matérielles. Cette scission, pour technologique qu’elle soit, a de profonds impacts économiques. Demain, lorsque les entreprises confieront « au nuage » la plupart des traitements de leurs informations, leurs prestataires devront leur répondre en termes de prestations de services (le fameux suffixe as-a-Service). Encore naissants, ces business models se décrivent en effet avec une palette d’acronymes construits sur la base XaaS (X-as-a-Service), où le X est tour à tour l’infrastructure (IaaS), la plateforme (PaaS, infrastructure et logiciels de base) ou le software (SaaS, Software-as-a-Service). Dans tous les cas, les entreprises utilisatrices se cantonnent à… utiliser des ressources IT mises à disposition. Ce qui exclut de leurs sphères comptable et technique tant la possession que l’exploitation de ces ressources. L’informatique en nuage a ses précurseurs. Ils se nomment Salesforce.com, fondé en 1999, pour le SaaS et Amazon Web Services, créé en 2006, pour l’IaaS. Ces deux acteurs ont rapidement étendu leur offre sur le PaaS. Google fait également office de pionnier en proposant des services de SaaS, Paas et IaaS. Ces entreprises font encore la course en tête, mais les grands noms de l’informatique œuvrent à leur mutation. Pour eux, le défi est de ne pas lâcher la proie pour l’ombre. Autrement dit, d’éviter de sacrifier leur base installée, leurs parts de marché et les revenus associés à la nécessité de s’adapter à l’informatique en nuage.

réalisée par Deloitte, a calculé que l’investissement nécessaire impose une période de transition de quatre ans. Sans appui extérieur, des profits importants sur l’activité classique sont donc indispensables pour financer la transition vers le SaaS. Cegid, premier éditeur français de solutions de gestion, est un exemple de transition réussie et revendique 75 000 utilisateurs pour ses services SaaS, clients d’une cinquantaine de logiciels. En 2013, l’éditeur de logiciels de gestion devrait voir les revenus SaaS dépasser pour la première fois ses ventes traditionnelles de logiciels sous forme de licences. Tous les grands éditeurs ont entamé leur mutation, de plus ou moins grande ampleur. Oracle a commencé, il y a près de dix ans, le redéveloppement de l’ensemble de ses applications pour les rendre disponibles en mode cloud. SAP investit également sur son infrastructure et a lancé un ERP en SaaS en 2010 : Business ByDesign. TROIS ANNÉES MARQUÉES PAR UNE SUCCESSION D’ACQUISITIONS

2011 Octobre Décembre

2012 Mai

RightNow (CRM) acheté par Oracle pour 1,4 milliard de dollars SuccessFactors (RH) acheté par SAP pour 3,1 milliards Ariba (gestion des achats) acheté par SAP pour 4,5 milliards

Que l’on soit constructeur ou éditeur change littéralement la donne. Le premiers est confronté à une double mutation. À celle des datacenters en phase d’ouverture vers le cloud s’ajoute celle induite par le recul du PC au profit des terminaux mobiles (smartphones, tablettes). C’est dans ce contexte que Dell a choisi de quitter la Bourse pour se réinventer hors de portée des analystes financiers focalisés sur la rentabilité à court terme (voir page 14). Soumis aux mêmes pressions, HP, de son côté, tarde encore à élaborer une stratégie compréhensible.

Juillet

Xsigo Systems (optimisation des entrées/ sorties) acheté par Oracle (montant non communiqué) Nicira (virtualisation réseau) acheté par VMware pour 1,26 milliard

Août

Kenexa (RH) acheté par IBM pour 1,3 milliard

Octobre

Taleo (RH) acheté par Oracle pour 1,9 milliard

Novembre

Meraki (Wi-Fi Cloud) acheté par Cisco pour 1,2 milliard

Décembre

Eloqua (décisionnel, marketing) acheté par Oracle pour 870 millions

Pour les éditeurs traditionnels, la transformation des activités est un véritable challenge. L’étude CDC-Afdel de Février 2013,

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Février

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Acme Packet (VoIP) acheté par Oracle pour 1,7 milliard


Dans un rapport d’Ernst & Young (E&Y) consacré aux fusionsacquisitions (M&A) dans les secteurs technologiques en 2012, le logiciel arrive largement en tête, avec 35 % des 114 milliards de dollars échangés. Ces opérations dans le logiciel sont dominées par le SaaS, suivi par le Big Data. Sur l’année, E&Y a totalisé 250 opérations de M&A ayant trait au SaaS, pour un montant total de plus de 5 milliards de dollars. ORACLE ET SAP FONT DES EMPLETTES, MICROSOFT MISE SUR SES FORCES

Afin d’accélérer leur mutation, les éditeurs procèdent par acquisition. Ainsi, Oracle, champion de la croissance externe, après avoir absorbé RightNow à la fin 2011, a fait l’emplette, l’an dernier, de Taleo, d’Eloqua et de Xsigo Systems qui ont été rejoints par Acme Packet, début février. De son côté, SAP,

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ipartech, PME francilienne spécialiste des réseaux fibre optique, a levé, à la fin de décembre 2012, 10 millions d’euros auprès du fonds d’investissement Ciclad et de NJJ Capital, holding personnelle de Xavier Niel, fondateur de l’opérateur Free-Iliad. Sipartech déclare vouloir consacrer ces sommes à l’extension de son réseau à l’international, à Londres et à Amsterdam, deux des plus importantes plaques tournantes numériques européennes. Julien Santina, dirigeant-fondateur de Sipartech, explique qu’il reste majoritaire au capital de la société, après ce second tour de table. L’opérateur d’infrastructure neutre revendique 500 entreprises clientes sur le réseau de plus de 500 kilomètres de fibres qu’il a déployé et exploite sur Paris et ses deux couronnes.

après SuccessFactor acheté fin 2011, a mis la main sur Ariba. Une moisson de spécialistes du Saas, certes, mais l’activité des deux éditeurs repose toujours sur leurs logiciels traditionnels. Pour SAP, convaincu de la cohabitation des deux modèles, la stratégie consiste à compléter ses offres on-premise, de manière à offrir à ses clients un maximum d’agilité dans la construction de leur système d’information tout en garantissant son intégration applicative. D’autres, comme Microsoft, comptent avant tout sur leurs propres forces. La position du numéro un mondial du logiciel est évidemment particulière. Avec Windows et Windows Server, il fournit les piliers du modèle logiciel actuel. Tout en ayant un fer au feu dans le SaaS avec Office 365, c’est avec le PaaS et le IaaS Azure qu’il entend relever son défi majeur : accompagner son immense base installée vers le cloud.

SIPARTECH LÈVE 10 MILLIONS D’EUROS Sipartech souligne la modernité de son maillage en fibre optique : 800 par fourreau, soit 432 000 kilomètres au total, 1 200 points de raccordement, interconnexion de tous les datacenters parisiens. D’ici fin mars, la société compte ajouter à sa trentaine de salariés une vingtaine de nouveaux venus. On ignore comment les deux investisseurs se répartissent leur apport de 10 millions d’euros. NJJ Capital a déjà investi 1,5 million d’euros dans Sipartech, en 2010. Fondé en 1988, Ciclad est un fonds d’investissement spécialiste des PME innovantes pour le compte d’investisseurs institutionnels. Il participe déjà aux destinées d’un peu plus de 120 d’entre elles, dont le chiffre d’affaires se situe entre 10 et 200 millions d’euros.

LAGARDÈRE ACHÈTE BILLETREDUC.COM

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e groupe multimédia Lagardère Active achète BilletReduc.com, site de billetterie en ligne fondé en 2002. Les Échos estiment la transaction à sept fois le résultat opérationnel du groupe, soit une douzaine de millions d’euros. Fort d’une quinzaine de salariés, BilletReduc se rémunère en percevant entre 5 et 10 % des 2,2 millions de billets vendus auprès d’une audience d’un million de visiteurs par mois. Le groupe revendique un chiffre d’affaires de 20 millions d’euros, que le quotidien économique ramène

plutôt aux environs de 5 millions d’euros. La marge, qui provient également à 20 % de la publicité, s’établirait à 35 %. Lagardère a racheté les titres des fondateurs Denys Chalumeau et Amal Amar, qui avaient revendu SeLoger.com au groupe Axel Springer il y a deux ans. BilletReduc est la deuxième opération de croissance externe du département numérique de Lagardère en moins de six mois. Celui-ci avait déjà acquis Leguide.com en août 2012.

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BOURSE

LES ÉDITEURS FRANÇAIS FONT MIEUX QUE LE NASDAQ ! Malgré les incertitudes économiques, les éditeurs français traversent une période faste en Bourse. Et font largement mieux que le Nasdaq. Cela annonce-t-il enfin la prise de conscience du potentiel de l’économie numérique de ce côté-ci de l’Atlantique ? Par Pierre Marty, associé PwC

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’environnement économique ne cesse de distiller ses mauvaises nouvelles, et même lorsque les craintes d’un effondrement de la zone euro semblent peut-être temporairement s’apaiser, d’autres menaces prennent aussitôt le relais.

TOP 5 DES CAPITALISATIONS BOURSIÈRES DES ÉDITEURS DE LOGICIELS EN MILLIONS D’EUROS

CAPITALISATION BOURSIÈRE FÉVRIER 2013

SOCIÉTÉ

Tandis que, donc, chacun doute, que la confiance s’étiole et que même le Nasdaq fait du sur-place (seulement + 1,22 % de début novembre à fin janvier), les éditeurs français affichent, eux, en moyenne, une progression de 18 % de leur cours de Bourse sur la période. Le secteur surperforme très largement à la fois le CAC 40 (+ 10 %) et le Nasdaq, certes impacté fortement par la cure d’amaigrissement de la valorisation d’Apple. Sur douze mois, les constats sont similaires : + 8 % pour le Nasdaq, + 20 % pour le CAC 40, mais une progression moyenne de + 29 % pour les éditeurs français ! Bien sûr, d’aucuns n’y verront que l’amorce d’un rattrapage pour des multiples de valorisation jugés encore bien timides par nombre d’éditeurs.

DASSAULT SYSTÈMES

10 892

AXWAY

338

CEGEDIM

294

PHARMAGEST

215

GFI

177

ÉVOLUTION DU COURS DE BOURSE

(NOVEMBRE 2012 - FÉVRIER 2013)

TOP 10 DES CAPITALISATIONS BOURSIÈRES DES SOCIÉTÉS NUMÉRIQUES EN MILLIONS D’EUROS

CAPITALISATION BOURSIÈRE FÉVRIER 2013

SOCIÉTÉ

Mais cela témoigne surtout du fait que le logiciel résiste bien aux crises et que les perspectives du secteur restent encourageantes. Un beau message, à contre-courant du pessimisme actuel, qui mériterait peut-être d’être mieux relayé.

FRANCE TELECOM

19 753

DASSAULT SYSTÈMES

10 892

Autre point positif, ce rebond est largement partagé. Ainsi, presque tous les éditeurs ont vu leur cours de Bourse progresser au cours des trois derniers mois. Seuls quatre, parmi notre panel de 30 sociétés, ont des cours orientés à la baisse. Certaines hausses sont impressionnantes, supérieures à 25 % sur la période pour un tiers du panel. Sur douze mois, le constat est similaire : les deux tiers des cours sont à la hausse et, parmi ceux-ci, six progressent de plus de 50 %.

ILIAD (FREE)

8 248

CAP GEMINI

6 134

GEMALTO

6 083

ATOS

5 040

STMICRO-ELECTRONICS

5 531

ALCATEL-LUCENT

2 580

Un très bon cru donc, porteur de confiance en l’avenir, qui, espérons-le, favorisera la croissance de l’économie numérique dans son sillage.

UBISOFT

755

SOPRA GROUP

735

ÉVOLUTION DU COURS DE BOURSE (NOVEMBRE 2012 - FÉVRIER 2013)

ÉVOLUTION DE LA MOYENNE DES COURS DE BOURSE 120

Moyenne éditeurs français cotés CAC 40 NASDAQ

115 110 105 100 95 90 01/11/2012

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08/11/2012

15/11/2012

22/11/2012

29/11/2012

06/12/2012

13/12/2012

20/12/2012

LES CAHIERS DU NUMÉRIQUE /// NUMÉRO 4 /// MAI 2013

27/12/2012

03/01/2013

10/01/2013

17/01/2013

24/01/2013

31/01/2013


LES ÉCHOS DE LA VALLEY

COMMENT LES ROBOTS VONT CRÉER DES EMPLOIS 2013 marque une nouvelle ère pour les robots. Jusqu’à présent perçus comme destructeurs d’emploi, ils sont aujourd’hui davantage considérés comme un facteur permettant de relocaliser les activités industrielles. par Jean-Baptiste Su, correspondant à San Francisco

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our rester compétitives, les entreprises industrielles ont, au cours des dernières décennies, massivement délocalisé leur production dans des pays à la main-d’œuvre bon marché, comme la Chine, le Vietnam ou la Thaïlande. Au final, ce sont des centaines de milliers d’emplois détruits aux ÉtatsUnis et en Europe, pour la plupart des postes d’ouvriers plus ou moins qualifiés, des cols bleus. Résultat : aujourd’hui, le gros de l’électronique grand public est fabriqué en Asie, des smartphones aux ordinateurs, en passant par les TV à écrans plats et les dernières montres intelligentes. « Ce qui est paradoxal, car beaucoup de ces technologies sont inventées ici, dans les pays occidentaux », remarque Rob Enderle. Mais pour cet analyste réputé de la Silicon Valley, le vent a déjà commencé à tourner. « En prenant l’exemple d’Apple, le président Obama a souligné dans son discours d’investiture, cette année, que de plus en plus d’entreprises à forte valeur ajoutée fabriquent leurs produits ici, comme Intel ou Corning (Gorilla glass), et que beaucoup d’autres sont sur le point de rapatrier leur production, pour se rapprocher des consommateurs. » C’est là que les robots interviennent, car, en apportant aux nouvelles unités de production un haut niveau d’automatisation, ils permettent de se rapprocher des coûts de fabrication constatés en Asie. PEU IMPORTE OÙ SE TROUVENT LES USINES AUTOMATIQUES

Déjà, Apple a confirmé qu’il fabriquera certains de ses ordinateurs aux États-Unis, dans des usines entièrement automatisées. Le phénomène semble d’ailleurs planétaire. En Chine

aussi, la production de l’iPhone 5 est déjà en grande partie robotisée et son fabriquant, le taïwanais Foxconn, a prévu d’ouvrir ses premières usines en Amérique du Nord cette année. « Peu importe où se trouvent ces usines automatiques, en Asie, en Amérique ou en Europe. Le coût de l’énergie est souvent équivalent, tout comme les salaires de personnes qualifiées. En revanche, les fabricants y gagneront en image de marque, et avec des frais de transport et de douanes réduits », estime Ben Bajarin, directeur des technologies grand public pour le cabinet d’analystes Creative Strategies. Pour la Chine et les autres pays émergents, avec leur immense armée de travailleurs peu qualifiés, il s’agit d’un scénario catastrophe. « S’ils se suicidaient parce qu’ils travaillaient trop, demain ce sera à cause du chômage », prédit Rob Enderle. Pour les pays occidentaux en revanche, c’est pain bénit : moins de chômage, plus d’impôts, relance de la consommation, etc. Surtout que les nouveaux postes créés seront des emplois qualifés et à forte valeur ajoutée. Un retour aux sources pour la Silicon Valley, dont le goût pour la fabrication et le matériel (hardware) a toujours été prononcé. « La région est née avec le matériel, comme les transistors, les semiconducteurs, les oscilloscopes de HP, les disques durs d’IBM, les ordinateurs d’Apple et, maintenant, les voitures de Tesla », rappelle Steve Bengston du cabinet PwC.

LE MODÈLE DE PRODUCTION ACTUEL A ATTEINT SES LIMITES.

« Si on assiste à une nouvelle vague industrielle aux États-Unis, c’est parce qu’on a atteint les limites du modèle de la production de masse par des ouvriers bon marché, en Chine ou ailleurs, pour fabriquer nos produits high-tech. Les premiers signes de cet essoufflement ont été les suicides chez Foxconn, le principal

sous-traitant d’Apple, l’emploi de mineurs, les cadences infernales et les conflits permanents avec les employés exigeant à juste titre de meilleures conditions de travail et des hausses de salaire. C’est donc pour éviter de gérer et d’affronter la question humaine, mais aussi sous la pression de ses clients, que Foxconn automatise ses

D. R.

AVIS D’EXPERT ROB ENDERLE, ANALYSTE À ENDERLE GROUP lignes d’assemblage, malgré le coût prohibitif de ces robots. Une occasion, donc, de rapatrier une partie de cette production car, ici ou là-bas, le coût de fonctionnement des robots est assez proche. Ce qu’avait déjà compris Toyota, dans les années 1980-1990, en délocalisant ses usines japonaises hyper robotisées aux États-Unis. »

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TABLEAU DE BORD

///// L’essentiel de l’économie du numérique en chiffres Chaque trimestre, « Les Cahiers » sélectionnent les indicateurs qui font l’économie du secteur. / Passer au SaaS : quatre ans de transition pour un éditeur La Caisse des dépôts et l’Afdel, en association avec les analystes du cabinet Deloitte, ont présenté la première étude publique sur le marché français du cloud computing, centrée sur la branche logicielle (SaaS). Cette étude établit que l’investissement nécessaire pour un éditeur traditionnel impose une période de transition de quatre ans. Sans appui extérieur, des profits importants sur l’activité classique sont donc indispensables pour financer la transition vers le SaaS. Par ailleurs, cette étude met en exergue les domaines fonctionnels qui présentent un potentiel d’activité SaaS important sur le long terme, comme le jeu, la création d’expérience consommateur, la santé, la culture, le PLM et le Big Data.

/ Tablette qui rit, PC qui pleure ? Alors que les ventes de PC en France ont baissé de 13,6 % en 2012, selon le Gartner Group, l’engouement pour les tablettes se confirme. Le cabinet Forrester estime que 14 % des Européens possèdent déjà une tablette (55 millions d’unités) et qu’ils seront 55 % en 2017 (147 millions). Fidèles à leur défiance vis-à-vis de la nouveauté, les Français sont, pour l’instant, à la traîne de cette « tablette mania ». Avec 9 % d’adultes équipés, le taux de pénétration hexagonal est le plus bas d’Europe.

la baisse du dollar en cours d’année, sur ce dynamisme revigoré. Quoi qu’il en soit, la demande sera plus forte de la part du secteur privé que du secteur public en butte à des politiques de réduction des dépenses. Ce sont le logiciel (+ 6,4 % à 296 milliards de dollars) et le matériel (+ 6,4 % à 666 milliards) qui tireront la croissance du secteur tout entier, devant les services (+ 5,2 % à 927 milliards) et les télécoms (+ 2,4 % à 1 701 milliards).

/ Un milliard de smartphones vendus en 2013 En 2013, le milliard de smartphones livrés en cours d’année va faire doubler la base installée mondiale, estime le cabinet Deloitte. Cette image forte est à tempérer par un bémol technique puisque près de la moitié des smartphones seront vendus à moins de 100 dollars, voire à moins de 50 dollars. Autrement dit, le faible potentiel technique de ces mobiles limitera d’autant l’émergence d’un écosystème logiciel, à l’image de celui que constitue par exemple le Web.

/ L’informatique décisionnelle au zénith Le secteur de l’informatique décisionnelle – alias BI (Business Intelligence) – va presque doubler d’ici à 2016, passant de 79 milliards de dollars l’an dernier au niveau mondial à plus de 143 milliards en 2016, estime le cabinet d’études britannique Pringle & Company. Dans un monde désormais gorgé de données, avec la puissance du Big Data en arrière-plan, il est logique que les prestations de service, d’analyse et d’optimisation pèsent les deux tiers de ce marché, le reste allant aux logiciels proprement dits.

LES INDICATEURS CLÉS DU NUMÉRIQUE

/ Le cloud peut faire gagner jusqu’à 30 % du temps de développement

TYPE (année 2012)

MONTANT

VARIATION

SOURCE

Marché du logiciel en France

10,2 milliards d’euros

Chiffre d’affaires de l’e-commerce en France

45 milliards d’euros

Ventes européennes de PC en Europe de l’ouest au quatrième trimestre (en volume)

13,3 millions

Gartner Group

/ Forte hausse de la dépense IT en 2013, aidée par la baisse du dollar

Ventes mondiales de téléphones mobiles

1,75 milliard

Gartner Group

Après la récession de 2012, le Gartner prédit une hausse de la dépense IT pour 2013 de + 4,2 %. En novembre dernier, il n’anticipait que + 2,5 %. Le cabinet n’analyse pas le poids d’un nouveau paramètre,

Ventes de smartphones iOS et Android au quatrième trimestre (en volume)

207,6 millions

IDC

Les 400 développeurs interrogés par Evans Data sur l’efficacité du développement en nuage sont divisés. 38 % d’entre eux ont constaté une réduction des temps de développement comprise entre 11 et 20 %. Ils sont 10% à ne pas constater d’amélioration, et 10 % estiment leur gain de temps à plus de 30 %. En revanche, tous partagent la même inquiétude concernant la sécurité de leurs codes.

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LES CAHIERS DU NUMÉRIQUE /// NUMÉRO 4 /// MAI 2013

Baromètre CockpitSoftware, Afdel

Fevad




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