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LES CARACTERISTIQUES PHYSICO-CHIMIQUES ET BIOLOGIQUES DU SOL
Plan général INTRODUCTION I – Définitions II - Pédogenèse III – Propriétés physiques et chimiques du sol IV – Propriétés liées à la structure et à la texture V – La température VI – Les caractères biologiques du sol VII – Evolution du sol VIII – L’action du sol sur les plantes Conclusion
(Cours élaboré par Boulanouar Mohamed Enseignant chercheur à l’ENS de Marrakech)
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LE SOL I - INTRODUCTION Il n’y a pas de vie sans eau, pas de vie terrestre sans sol, pas de sol sans eau. Vie, sol et eau sont intimement liés. La plante dans son milieu est environnée par : l’atmosphère, le sol, les êtres vivants. Le sol est un écosystème (Soltner 2003, page:14) Le sol est un facteur écologique édaphique car il a une action sur le développement et la répartition de certains végétaux. Le milieu sol est en relation avec 4 autres milieux, l’atmosphère, l’hydrosphère, la lithosphère, et la biosphère. Le sol est un milieu intermédiaire (interface) entre l’atmosphère, les êtres vivants, et la plante. I-Définitions a- La définition d’Aubert et Boulaine (1967) : « Le sol est le produit de l’altération, du remaniement et de l’organisation des couches supérieures de la croûte terrestre sous l’action des êtres vivants, de l’atmosphère et des échanges qui s’y manifestent ». b- Autres définitions *Le sol correspond à la partie la plus superficielle de la croûte terrestre modifiée par les agents atmosphériques (pluie, vent …) et par les êtres vivants qu’il abrite (faune et flore). Il est constitué par les fragments de la roche mère brisés et remaniés chimiquement et par des détritus de plantes et des animaux. *La pédologie (pédon = sol, logos = étude) est l’étude des sols. Dans cette étude on s’intéresse aux propriétés physico-chimiques, biologiques et à l’évolution du sol. *Edaphologie : étude des relations écologiques entre les organismes situés à la surface du sol et dans le sol. c- Observations et expériences :
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Observation d’un échantillon de sol à l’œil nu et à la loupe binoculaire : présence éventuelle des débris de roche, des fragments des plantes, des morceaux (détritus) d’animaux morts, et des êtres vivants animaux et végétaux … présence de la matière minérale (grains de sable, fragments de roches) et matière organique (êtres vivants microscopiques et macroscopique animaux et végétaux).
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Expérience : Chauffage d’un échantillon de sol dans un tube à essais : dégagement de vapeur et formation de gouttelettes d’eau sur les parois du tube. présence d’eau dans le sol
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Expérience : Si on verse de l’eau sur un échantillon de sol, on observe un dégagement de bulles d’air. Présence d’air dans le sol (atmosphère du sol)
Conclusion Le sol est constitué par la matière minérale, la matière organique, l’eau, l’air, et les êtres vivants.
II – PEDOGENESE La pédogenèse (formation d’un sol) est l’ensemble des processus de formation, de mise en place et d’organisation du sol, sous l’effet des agents du climat, de la faune et de la flore. La formation du sol s’effectue en deux étapes : - Transformation (décomposition) de la roche mère par les processus physiques (désagrégation) et chimiques (altération). - Apport de la matière organique depuis les êtres vivants animaux et végétaux. A – Désagrégation physique de la roche mère Certains facteurs physiques climatiques (gel, variations thermiques, agents d’érosion…) provoquent une désagrégation (séparation) des cristaux de la roche mère (granite, basalte…), ceci a pour conséquence d’augmenter la surface de contact avec les agents d’altération chimique. Il en résulte de cette action physique la formation des blocs de pierres des galets, des graviers, des sables et des limons. Dans ce type de désagrégation physique, la composition chimique et minéralogique est conservée.
4 B- Altération chimique de la roche mère Elle peut être effectuée par : - Hydrolyse : lyse ou destruction des cristaux, des molécules en présence de l’eau et mise en solution des ions. - Acidolyse : attaque de la roche par l’eau acide chargée en ions H+. - Oxydation : peut provoquer la libération de certains éléments comme le fer ferreux (Fe2O3). L’hydrolyse est le mode d’altération majeur des roches cristallines (granite, basalte…). Elle aboutit à la formation des argiles (colloïdes minéraux) et des ions (Ca++, Mg++, K+, Na+…). Exemple d’altération des minéraux du granite : Quartz sable (désagrégation physique). Feldspath Argile (altération chimique). Biotite (mica noir) oxyde du fer qui donne la couleur rouge aux argiles (altération chimique par oxydation). L’hydrolyse est beaucoup plus importante en milieu sédimentaire carbonaté (phénomène de dissolution) que sur les roches cristallines.
CO + H O CaCO -------------> Ca++ + 2(HCO ) <------------(calcaire insoluble) (soluble) 2
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B.1: Hydrolyse totale (destruction totale des minéraux et néoformation des argiles). Néoformation : est la formation de nouveaux minéraux notamment les argiles à partir des matériaux libérés au cours de l’altération totale de la roche mère. Cette forme d’hydrolyse totale est surtout représentée dans les sols tropicaux (climat chaud et humide, milieu neutre, bon drainage). Dans ce type d’hydrolyse, il y a départ des ions mobiles (Ca++, K+, Na+…) et formation d’hydroxydes peu mobiles, les argiles (pauvres en silice). B.2 : Hydrolyse partielle. Correspond à la destruction partielle des minéraux primaires et la formation des argiles plus au moins riches en silice. Ce type d’hydrolyse partielle s’effectue sous un climat tempéré. Il y a l’action du climat sur l’hydrolyse : Minéraux primaires sous un climat tempéré) climat tropical) équatorial).
Montmorillonite (argile très riche en silice, se forme Kaolinite (argile pauvre en silice, se forme sous un Gibbsite (argile sans silice, se forme sous un climat
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L’hydrolyse des minéraux primaires (feldspath, biotite…) est faible sous un climat tempéré, mais forte sous un climat chaud et humide. Cette hydrolyse s’accompagne de perte de silice donc de formation des argiles de plus en plus pauvres en silice.
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C : Incorporation de la matière organique dans le sol La matière organique du sol provient de la litière (débris végétaux, feuilles, racines…). Cette litière se décompose par les microorganismes du sol (bactéries et champignons) pour donner l’humus (substance colloïdale issue de la matière organique). La décomposition de la litière en humus par les microorganismes est appelée l’humification. L’humus est composé par : - Les acides humiques - Les acides fulviques - Les humines
les bactéries du sol assurent la formation de l’humus et la minéralisation de la matière organique.
La litière (Matière organique fraîche)
Minéralisation (primaire) SO4 ; PO4 ; NO3 ; NH4 …
Humification
HUMUS +
Réorganisation bactérienne
Minéralisation (secondaire)
SO4 ; NO3
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PO4 ; K , Ca … Schéma de formation des humus naturels et leur minéralisation L’humus augmente la fertilité d’un sol par conséquent : - Il améliore la structure d’un sol. - Il augmente la capacité de rétention en eau. - Il adsorbe les ions nutritifs : NO3 ; PO4, K+, Ca++… - Il est considéré comme une source alimentaire en azote et en sels minéraux pour les plantes.
C.1- Les facteurs qui influencent l’humification
8 C.1.1-Le climat (température, humidité) Une augmentation de la température et de l’humidité favorisent l’activité biologique donc une rapidité de l’humification biologique. Sous un climat boréal froid, la vitesse de décomposition de la litière est très lente, alors que sous un climat tropical chaud et humide la décomposition de la litière est très grande. C.1.2-La nature de la végétation La végétation a également une action sur l’humification : les litières des plantes riches en azote (légumineuses, graminées…) se décomposent très vite. Ces plantes donnent une litière appelée litière améliorante, car il y a une stimulation de l’activité microbienne par les oses et par les acides aminés. Dans le cas des plantes résineuses (plantes qui produisent de la résine, comme les conifères), elles fournissent une litière acidifiante pauvre en azote. Cette litière qui se décompose très lentement donne naissance à un sol généralement acide, l’acidité défavorise l’activité biologique de la faune et des microorganismes qui interviennent dans l’humification. Pour le cas de la Litière indifférente (chêne et hêtre), la vitesse d’humification est intermédiaire entre celle de la litière améliorante et la litière acidifiante. Dans la décomposition des litières, certains facteurs ont une action positive sur l’activité bactérienne : - la richesse du milieu en azote. - La teneur des aliments énergétiques stimulant la microflore bactérienne qui intervient dans le processus de l’humification. D’autres facteurs au contraire ralentissent le processus de l’humification : - les résines. - Les polyphénols tannants, ralentissent la biodégradation des protéines (formation du complexe polyphénol-protéine). - Une teneur élevée en lignine (résineux) à décomposition plus lente que la cellulose est souvent considérée comme un facteur négatif de l’humification. C.2. Classification des humus : Notion d’horizon et profil pédologique A : horizon de surface contenant de la matière organique B : horizon intermédiaire formé par les produits du lessivage C : horizon formé par la roche mère. L’horizon A se subdivise en A0, A1, A2… A0 très riche en matière organique peut être formé de 3 couches : L : litière (feuilles de l’année) F : couche de fermentation à débris encore visibles (feuilles des années précédentes) H : couche humifiée. C.2.2. Différents types d’humus : A- Humus peu évolués
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Ils sont caractérisés par une forte proportion de la matière organique à structure peu évoluée.
1- Humus de type Mor Il se forme quand le sol et la litière sont acides (plantes : résineux. Roches : granite, grès, sable…). Ce type d’humus Mor se forme également quand les conditions climatiques sont très froides en haute montagne. Dans la formation du Mor il n’y a que l’activité lente des champignons, l’acidité est défavorable à l’activité des lombrics et des bactéries. L’horizon A0 est généralement épais de 10 à 30 cm. Le rapport C/N > 25 (C : carbone, N : azote) le pH est compris entre 3,5 et 4,5. 2- Moder Dans le cas du Moder il y a incorporation moyenne de la matière organique dans le sol avec un horizon A0 peu épais 2 à 4 cm. Le rapport C/N est compris entre 15 et 25, le pH varie entre 4 et 5. B- Humus évolués Mull : Dans le cas de l’humus de type Mull, la décomposition de la litière est rapide, A0 est très faible. On trouve cet humus dans des sols riches, profonds, bien drainés, sous climat tempéré, sous une forêt de feuillus (arbres qui perdent leurs feuilles en automne-hiver) ou une prairie. L’activité biologique est importante (vers de terre ou lombrics et microorganismes) favorisée par un climat tempéré (une température relativement élevée et une humidité moyenne), une bonne aération du sol, par la richesse en calcium du milieu et par la richesse en azote de la litière. Le rapport C/N <15, le pH varie entre 5,5 et 8,5.
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III- Propriétés physiques et chimiques du sol La pédogenèse donne naissance à un système composé de particules sableuses, limoneuses, des colloïdes minéraux (argiles) , des colloïdes organique (humus) et des sels minéraux. A- Propriétés des colloïdes Les colloïdes sont des macromolécules minérales ou organiques hydrophiles susceptibles d’être ionisées. Une suspension : les colloïdes chargés négativement (argiles ou humus) sont en mouvement permanent dans l’eau grâce à des forces de répulsion électriques entre les particules. Floculation ou précipitation : les ions calcium , les ions H+, neutralisent les charges négatives des colloïdes, qui se précipitent en formant les agrégats. Ces derniers empêchent le lessivage des ions. B- Formation du complexe argilo-humique Les molécules d’argile et d’humus électronégatives peuvent s’associer par des cations comme les ions Ca++…, en formant des complexes argilo-humiques. Le complexe argilo-humique améliore la fertilité du sol, Il assure une bonne aération du sol, il améliore la réserve en sels minéraux (adsorption), K +,Mg++,Ca++, Mg++…
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B- Les caractères physiques du sol Les principaux facteurs édaphiques sont conditionnés par la texture, la structure, la porosité, et la teneur en eau. C.1. La texture Elle est déterminée par l’analyse granulométrique des particules du sol. Au moyen du triangle des textures (planche 4). On distingue selon le pourcentage et la taille des particules 4 grandes textures: Texture argileuse, sableuse, limoneuse, et une texture équilibrée. Cette dernière est la plus recherchée en agriculture.
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C.2. La structure La structure est le mode d’association des particules. On distingue: - Structure particulaire : toutes les particules sont libres, (cas des sols argileux), pas de lacunes, ce qui empêche la circulation de l’eau et de l’air. - Structure en agrégats ou glomérulaire : dans ce cas les colloïdes floculés donnent des agrégats. Lorsque ces agrégats s’additionnent ils donnent les grumeaux. Dans ce type de structure poreuse, la circulation de l’eau et de l’air est facilitée. Ce type de structure est préconisé en agriculture, elle se trouve présente dans les sols fertiles. D- Les caractères chimiques du sol Notion du pouvoir adsorbant d’un sol : La plupart des colloïdes minéraux (argiles) et organiques (composés humiques), présentent des charges électriques négatives qui leur permettent de fixer de façon réversible les cations dissous dans l’eau (H+ ou cations Ca++, Mg+, K+, Na+…). L’ensemble de ces colloïdes électronégatifs constitue le complexe adsorbant du sol. La capacité d’échange : est la quantité maximum de cations qui peuvent être fixés par ce complexe. Donc la capacité d’échange est d’autant plus élevée que le sol est plus riche en colloïdes. Suivant la quantité de cations fixés par rapport à la capacité d’échange le complexe absorbant d’un sol peut être : -saturé : tous les ions fixés sont alors des cations : exemple des sols calcaires ou salins. -plus au moins saturé : il existe alors une proportion plus au moins importante d’ions H+ parmi les ions fixés, exemple des sols lessivés ; le podzol. Le pH du sol est donc en relation directe avec l’état de son complexe absorbant. Plus le complexe absorbant est désaturé donc riche en ions H + plus le pH est faible,donc le sol est acide. Le pH est au contraire plus élevé pour les sols à complexe saturé (sols calcaires, et sols salins…). Le pH a une action sur le développement et la répartition de certains végétaux et sur la faune et les microorganismes qui interviennent dans l’humification de la litière ; IV- Propriétés liées à la structure et à la texture A- Porosité La porosité est la proportion occupée par les lacunes (interstices) par rapport au volume total du sol. P (porosité) = volume occupé par les lacunes (pores) x 100 volume total du sol
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On distingue la microporosité (ou porosité capillaire) qui correspond au volume des capillaires dont le diamètre est inférieur à 8µ. Ces capillaires retiennent l’eau dans le sol. La macroporosité qui correspond au volume des capillaires dont le diamètre est supérieur à 8µ. Ces capillaires sont généralement remplis d’air. B- L’eau dans le sol La teneur d’eau s’exprime en pourcentage par rapport au poids sec. Cette eau se trouve sous différents états : Eau de gravité ou de saturation: après une pluie abondante le sol gorgé d’eau laisse migrer en profondeur une certaine quantité d’eau sous l’influence de la pesanteur c’est l’eau de gravité ou eau libre. Eau de capillarité est l’eau retenue dans les interstices ou capillaires dont le diamètre est inférieur à 8µ. Une partie de cette eau capillaire est disponible pour les plantes celle qui est mise en réserve dans les interstices dont le diamètre allant de 0,2 à 8µ. L’eau capillaire retenue par les capillaires dont le diamètre est inférieur à 0,2µ n’est pas disponible pour les plantes (eau inutilisable pour les plantes) car elle est fortement liée au sol. Eau d’imbibition (ou eau hygroscopique) est celle qui imbibe les colloïdes hydrophiles c’est à dire les complexes argilo-humiques. Eau combinée ou liée est l’eau de structure de certaines molécules, exemple des argiles constituées de silicates hydratés d’alumine. Capacité au champ ou capacité de rétention en eau correspond à la quantité totale d’eau retenue dans le sol ; elle correspond à l’eau capillaire plus l’eau d’imbibition et l’eau liée. Seule une partie de l’eau capillaire peut être aspirée par la plante, les forces de succion exercées par les racines des plantes est inférieure ou égale à 15 ou 16 atmosphères. Point de flétrissement permanent : correspond au taux d’humidité d’un sol pour lequel une plante se fane irréversiblement, puis elle meurt.
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C- La perméabilité d’un sol La vitesse de l’écoulement de l’eau à travers le sol dépend de la texture et structure d’un sol. (voir Manuel de travaux pratiques sur le sol, Aourir et coll. 2001) V – La température En surface on a les oscillations (variations) quotidiennes et saisonnières, à 30cm de profondeur pas de variations journalières et saisonnières. Les sols secs se réchauffent plus vite que les sols humides La température joue un rôle limitant pour la majorité des représentants de la faune du sol. Les variations de température en fonction de la profondeur du sol déterminent les variations verticales de la faune. VI-Les caractères biologiques des sols A- Les organismes du sol 1- les microorganismes (procaryotes) Bactéries et actinomycètes (bactéries ramifiées) dégradent la litière et produisent des vitamines et des antibiotiques. 2- les champignons (eucaryotes) Interviennent également dans la décomposition de la litière surtout celle de la lignine et la cellulose (enzyme cellulosique). Optimum de développement des champignons pH entre 4,5 et 5,5. Les champignons dominent alors dans les sols acides qui conviennent moins aux bactéries et aux actinomycètes. Rôle des microorganismes Les microorganismes assurent : - Humification de la litière - Le déroulement des cycles biogéochimiques (C, N, P…) - Décomposition de la litière et humus (minéralisation). A- La faune du sol Le sol renferme un grand nombre d’espèces animales appartenant à plusieurs groupes zoologiques, l’étude systématique de ces espèces est difficile, pour cela le critère de classification le plus simple utilisé est la taille. Selon la taille de l’animal on distingue : - La microfaune taille <0,2mm Les Protozoaires (amibes, ciliés, flagellés) et Nématodes (vers ronds) constituent l’essentiel de cette faune.
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La mésofaune dont la taille est comprise entre 4mm et 0,2mm. Elle est composée essentiellement de microarthropodes (Les Collemboles et les Acariens …).
- La macrofaune : dont la taille varie entre 80mm et 4mm, elle est composée des larves d’Insectes (Coléoptères, Diptères), des Myriapodes (les mille- pattes), etc…
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C- Le triple rôle de la faune du sol Dans la formation du sol et l’entretien de sa fertilité, la faune du sol a une action mécanique, chimique et biologique. 1- Action mécanique : Les animaux du sol fragmentent les matières organiques. A la division macroscopique sommaire des vers de terre, succède le broyage microscopique des Myriapodes, puis des Collemboles des Acariens et des Nématodes. L’augmentation de la surface qui en résulte est énorme, la surface d’une feuille par exemple passe de 1 à 10 000 fois, d’où meilleure attaque bactérienne et enzymatique. Puis le brassage que subissent ces fragments surtout dans le tube digestif des vers de terre (Lombrics), les mélangent aux éléments minéraux et aux microorganismes qui y trouvent des conditions favorables à leur prolifération. Ce malaxage par les vers de terre contribue fortement à la construction des agrégats stables qui augmente la porosité du sol.
2- Une action chimique L’enrichissement chimique des turricules (déjections) des vers de terre en potassium, phosphore, le calcium, le manganèse…, améliore la fertilité du sol. 3- Une action biologique Tous les animaux du sol sont microphages c’est à dire ils consomment des bactéries, des algues et des champignons. Ils rajeunissent et stimulent la flore microbienne et la diffusent dans toutes les parties du sol. On remarque aussi que les matières organiques contenues dans les déjections des animaux s’humifient plus facilement que les autres débris végétaux. Conclusion La faune et microflore du sol cohabitent et leurs actions se suivent et se complètent. La digestion de la matière organique s’effectue à l’intérieur du tube digestif de la faune du sol, tandis que la digestion de la microflore est externe, grâce à des enzymes que sécrètent les bactéries et les champignons. La faune du sol découpe les débris végétaux et incorpore les matières organiques. La microflore humifie et minéralise cette matière organique. 1- Les champignons du sol: sont des levures, des champignons supérieurs et des moisissures. Ce sont des êtres hétérotrophes (vivent au dépens de la matière organique). Le milieu qui leur convient est le milieu acide où ils ne rencontrent pas la concurrence des bactéries. Ils interviennent surtout dans la dégradation de la cellulose, de la lignine préparant ainsi l’humification. 2- Les actinomycètes : ont la taille et le caractère unicellulaire des bactéries, mais l’aspect ramifié des moisissures. Plus sensibles à la concurrence des bactéries et champignons, ils interviennent après eux, dégradant la chitine des membranes des champignons. Ils sont plus sensibles à l’acidité que les moisissures, ils préfèrent un pH de 6 à 7.5.Ils peuvent synthétiser les vitamines et des antibiotiques.
25 3- Les bactéries : Les bactéries aérobies ont un rôle agronomique important, La majorité de bactéries hétérotrophes dégradent la cellulose, les protéines … participent à la minéralisation de la matière organique et à l’humification. La vie et l’activité des bactéries sont affectées par 5 conditions du milieu : - l’aération : qui explique notamment la diminution rapide du nombre des bactéries aérobies avec la profondeur. - L’humidité - La température (optimum 21 à38°C) - pH favorable à leur développement se situe entre 6 et 8 . - Présence du calcium.
VII- L’évolution du sol 1- Notion d’horizon Le sol n’est pas une entité statique, mais un ensemble naturel évoluant lentement sous les facteurs climatiques et biologiques (pédogenèse). Il y a une évolution parallèle du sol et de la végétation à chaque biome lui correspond un type de sol. Altération de la roche mère donne naissance à la matière minérale, la décomposition de la litière et des animaux du sol donnent de la matière organique. Les constituants minéraux et organiques vont se différencier en horizons. Un sol ayant un profil du type AC est un sol jeune (peu évolué). Un niveau intermédiaire entre A et C peut se former appelé horizon B. Il peut correspondre à un niveau d’accumulation des produits lessivés suite à une migration depuis l’horizon A des éléments solubles comme les sels minéraux et colloïdes. Le profil est de type ABC,(ce profil est caractéristique des sols évolués). Le profil pédologique peut être alors de type AC non évolué, ou de type A(B)C, avec (B), peu différencié dans le cas de sol peu évolué ou, de type ABC avec un niveau intermédiaire bien différencié. ABC (A)C AC-------> A(B)C 2 – Les différents types de migration Suivant le sens de l’entraînement des éléments solubles on distingue : la migration descendante, facteur essentiel de l’évolution du sol. la migration oblique et la migration ascendante. a- La migration descendante (verticale) : elle prédomine dans les régions à pluviosité importante et répartie sur toute l’année. Donc l’horizon A est un niveau lessivé et l’horizon B est un niveau d’accumulation (enrichi en éléments fins, et en élément solubles). Le lessivage des sols : consiste en un enrichissement en profondeur des cations métalliques (K+, Na+, Mg+, Ca++…) qui se trouvent soit à l’état libre
26 soit à l’état fixé sur le complexe adsorbant. Le lessivage entraîne une dé saturation du complexe adsorbant ce qui augmente l’acidité d’un sol (pH acide), et une diminution des éléments fins (argiles…). La structure grumeleuse en agrégat résiste au phénomène du lessivage (Mull est caractérisé par un complexe argilo-humique stable). b- Migration ascendante : fréquente en région aride et semi aride où sous l’effet d’une forte évaporation se produit à partir de la nappe phréatique une remontée d’eau riche en substances solubles qui viennent précipiter en surface ce qui donne une croûte superficielle salée (remontée de chlorure de sodium). c- Migration oblique : elle se produit le long des pentes dans les régions à reliefs accidentées où elle contribue à la formation de chaînes de sols. VIII- L’action du sol sur les plantes Adaptation des espèces à l’humidité, à la texture et à la salinité du sol Exemple 1 : NB : le site ci-dessous n’existe plus ; on a construit dans cette région la station d’épuration des eaux usées de la ville de Marrakech.
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La coupe (transect) qui a été effectuée au niveau de la rive gauche de l’oued Tensift près du pond sur la route Marrakech-Safi montre : * l’existence des plantes halophiles ou halophytes (plantes qui supportent la salinité) est due essentiellement à la salinité du sol. Celle-ci est liée aux chlorures apportés d’une part par l’eau de la nappe phréatique, qui est très proche de la surface du sol à cet endroit et d’autre part par l’eau de l’oued Tensift qui est relativement salée (Dossier pédagogique, 1999). * la répartition des différentes espèces le long de la coupe de la rive gauche de Tensift est liée à plusieurs facteurs écologiques édaphiques dont : • La texture du sol (texture argileuse, sableuse…). • Le degré de salinité du sol. • Le degré de l’humidité du sol, en relation avec le niveau de la nappe phréatique. Dans ce milieu étudié, la texture, la salinité et l’humidité du sol varient en fonction de la topographie du milieu, cuvette-terrasse. Le long de cette coupe les espèces se répartissent suivant leur degré de tolérance à la salinité, à la sécheresse et à l’immersion. Plusieurs adaptations physiologiques et morphologiques caractérisent ses plantes halophytes vis à vis de la salinité du sol. Pour survivre dans ces terrains salés, les plantes halophiles doivent économiser l’eau au maximum, car le sel présent dans le sol retient fortement l’eau et gène l’alimentation hydrique de la plante (sécheresse physiologique). Pour cela ces plantes absorbent de grandes quantités de sodium pour maintenir leur pression osmotique interne élevée. Parmi les adaptations de ces espèces halophiles à la salinité on cite : •
Réduction des feuilles, donc diminution de la surface foliaire, pour limiter les pertes d’eau par évaporation et par transpiration (ex : Frankenia - Tamarix).
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La diminution de la transpiration peut être assurée également par l’épaississement remarquable de la cuticule (ex :Juncus) d’où l’aspect luisant de ces plantes.
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Réduction de la transpiration par enroulement de la feuille suivant la longueur en prenant la forme d’un cylindre creux et les stomates qui sont localisés sur l’épiderme supérieur deviennent alors internes (ex : Imperata cylindrica).
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Engorgement (succulence) des feuilles, qui deviennent épaisses (ex : Suaeda), et des tiges (ex : Salicornia) pour augmenter le pouvoir osmotique interne par rapport à la pression du sol.
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Rejet du sel par exsudation (rejet du sel par les feuilles et les tiges), ce qui laisse apparaître des cristaux de sel sur les feuilles et les tiges (ex :Limonium - Tamarix).
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Formation des poils vésiculeux en forme d’outre qui servent de réservoir d’eau (ex : Atriplex - Chenopodium).
Les adaptations de ces espèces à l’humidité du sol L’humidité du sol est due aux variations du niveau de la nappe phréatique. Ces variations sont corrélées au rythme saisonnier des précipitations et aux modifications de la topographie. En effet dans les dépressions (cuvettes), la nappe phréatique est moins profonde et peut même affleurer, alors qu’elle est profonde au niveau des terrasses élevées. Les végétaux temporaires (thérophytes et géophytes) dominent surtout dans les cuvettes où la submersion dure toute la saison d’hiver, alors que pendant la saison estivale (été) où les conditions climatiques deviennent sévères, le niveau de la nappe baisse et le milieu devient sec. Ce milieu est instable et les espèces végétales n’apparaissent qu’à la saison favorable (saison humide). Les végétaux permanents (phanérophytes - chaméphytes), colonisent surtout les terrasses. Dans ces endroits la nappe phréatique est profonde et par conséquent le sol (sableux) est sec. D’autre part pendant les périodes sèches, on aperçoit des efflorescences (croûtes de sel) entre les touffes des plantes et à la surface du sol, dues à des précipitations du sel suite à l’évaporation de l’eau. Ces végétaux subissent donc l’action de deux types de sécheresse : - Une sécheresse due à la faible teneur en eau surtout pendant l’été (sécheresse édapho- climatique). - Une sécheresse physiologique due à la forte salinité du sol (le sol retient fortement l’eau). Conclusion L’étude de la flore d’ouljat Tensift illustre bien la relation entre les caractères physico-chimiques du sol et des plantes. Deux facteurs principaux régissent l’existence et la répartition des plantes halophiles dans cette zone, la salinité du sol (sol halomorphe), et les fluctuations du niveau piézométrique de la nappe phréatique ; En effet l’eau fortement minéralisée de la nappe phréatique affleure à cet endroit sous forme d’une résurgence au niveau de rive gauche de l’oued Tensift.
Exemple 2 : le chêne liège Il est certain que le climat (température, précipitations…) joue un rôle primordial dans la répartition du chêne liège. Mais au sein de l’aire de répartition de cet arbre, ayant le même climat, il pourrait y avoir l’influence des facteurs écologiques locaux comme le sol … En effet l’étude de la répartition du chêne liège dans la région de Temara, au sud de Rabat, montre que cette espèce végétale ne se développe pas sur les sols calcaires
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C’est une espèce calcifuge (généralement les sols calcaires ont un pH basique), mais elle préfère les terrains siliceux (sableux), le chêne liège est silicicole (généralement les sols siliceux ont un pH acide). Des expériences (in vitro) montrent que la présence du calcaire empêche l’absorption de certains ions utiles pour la croissance de la plante comme le fer. Dans le sol calcaire le fer est à l’état insoluble Fe(OH)2, ce qui entraîne la mort de la plante. Des essais de régénération du chêne liège dans la forêt de Mamoura autour du « daya Zader » (Planche 13) montrent que les plantes préfèrent des sols sableux ayant une épaisseur inférieure à 2 mètres, bien drainés. Il fuit les « dayas » car elles sont remplies d’argiles de structures compactes qui empêchent le développement normal des racines des plantes. Des expériences complémentaires ont été réalisées pour montrer l’action du pH sur l’absorption du calcium du sol par les plantes calcifuges et calcicoles (Planche 14). Pour la plante calcifuge (Lupinus luteus), l’absorption du calcium est faible à des pH acides, mais elle est très forte à des pH basiques, or les terrains calcaires sont basiques, par conséquent les plantes calcifuges, devraient absorber des quantités très importantes de calcium qui deviendrait toxique pour la plante. Quant à l’espèce calcicole (vicia faba), elle absorbe de faibles quantités de calcium aussi bien dans le sol ayant un pH acide que dans le sol ayant un pH basique.
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D’après ces résultats, il paraît que le chêne liège qui se développe sur les sols siliceux acides absorbe de quantités raisonnables du calcium que dans les sols calcaires basiques. Il est donc certain que l’absorption du calcium dépend étroitement du pH du milieu chez les plantes calcicoles et calcifuges.
Conclusion Le sol est essentiel aux organismes vivants. Son importance est multiple : agricole, forestière, industrielle mais aussi écologique. Il n’y a pas de développement durable sans exploitation rationnelle des sols. Ces derniers constituent une ressource non renouvelable à l’échelle planétaire et indispensable au développement des populations humaines, en raison de leur importance en tant que facteur primordial dans la production alimentaire. De ce fait, ils doivent être protégés. Leur dégradation, suite à de nombreuses actions anthropiques (agriculture intensive, déforestation et érosion, utilisation excessive de fertilisants, pesticides et autres produits chimiques polluants) est (et doit être) l’une des préoccupations de différents organismes nationaux (Eaux et Forêts) et internationaux (FAO notamment) pour tenter de réduire sinon éviter les conséquences socioéconomiques et écologiques graves qui résultent de la destruction des sols. Le grand public doit aussi être sensibilisé à ces problèmes pour l’inciter à participer à l’action de sauvegarde des sols. Parmi ce public, les élèves sont particulièrement de bons partenaires potentiels dans cet effort. En effet, selon Pol (1996), les sols constituent un sujet propice à l’éducation à l’environnement, en raison des dangers que représentent leur destruction aveugle.
Fin
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