ALPHABET(E)A(M)
Axelle Minne
Jehanne Moll
Victoire de Changy
Rédactrice en chef
Directrice de la photographie
Secrétaire de rédaction
Matthieu Marchal
Elli Mastorou
Chroniqueur Musique
Chroniqueuse Cinéma
LES COPAINS I LLUSTRATEURS Adèle Favreau Camille Guiraud Claire Duval PARTENAI R ES Brussels Vintage Market Candice Lesage Les Ardentes Festival Ronquières Festival Vert Pomme Andenne
SALUT ! alphabetamagazine@gmail.com www.alphabetamagazine.be @AlphaBetaMag
ALPHABETABLE DES MATIÈRES B – Below the line – p.6 C – Cinq Cocas avec BRNS – p.14 D – Dark Ice – p18 E – Elli & Les Lois de l’Attraction – p.22 F – Faisons comme s’il n’était pas là – p. 26 G – Gold – p.38 H – Histoires Courtes – p. 40 I – Interview Illustrée – p .42 J – Journey to Nowhere – p.46 K – Kool Kids – p.50 L – (WE ARE) Lieutenant – p.54 M – Madame Irma(tthieu) – p. 58 N – Non, peut-être ? – p. 70 O – On y était – p. 74 P – (En) Peignoir depuis Paris – p. 76 Q – Qualitype – p. 80 R – Rendez-vous hebdomadaires – p.82 S – Save The Date – p. 83 T – Troquons Gaiment – p. 84 U – Un tête à tête – p. 88 V – Vas-y – p.92 W – Wes Anderson – p. 94 X – Xquisite Food – p. 98 Y - Comme disaient les Grecs, y’a pas d’i grec ! Z - Z/A - p.102 A - Illustration par Adèle Favreau - p.104
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1. Eleonora Pellegrin @ Muse - Make up & Hair : Carolina Trotta 2. Pom Klementieff @ Viva Paris 3. Bruno Alexandre & MĂŠlanie Marcel Alexandre 5. Madeline Kragh @ Direct Model Management - Make up & Hair : Laramie Ann 6. Hannah Kern @ Trump - Make up & Hair : Tara Carrigy
Interview : Jehanne
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Bonjour Pauline ! Quelques mots pour te présenter à nos lecteurs ?
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et des commandes suivant les envies de mes clients. Pour ces dernières, les rencontre,ils me parlent de leurs idées. Je partage également les miennes afin de définir ce que nous pouvons envisager ensemble.
Je m'appelle Pauline, j'ai 23 ans et je suis parisienne. Je pratique la photographie à temps plein depuis maintenant deux ans.
Mes photos plus personnelles me permettent d'explorer un rendu précis ou une idée. Je peux aussi travailler pour des magazines et réaliser une série de photographies construites avec thèmes. Pour celles-ci il y a un véritable travail d'équipe qui se cache derrière les photos. Je réfléchis au préalable à l'ambiance que je souhaite, aux lieux, au lumières. Je travaille également avec des stylistes, coiffeurs et maquilleurs qui m'aident à orchestrer les photos. En ce qui concerne les tests,
Toi qui es photographe, comment envisages-tu une séance ? Comment te prépares-tu ? Je réalise des séances personnelles où je peux m’exprimer, des tests pour des agences de mannequins
Un shooting, c'est toujours un moment privilégié avec un modèle. Que retirestu de ces instants ?
soit j'ai une idée précise de ce que je veux faire et je la suis, soit je vois ce que le modèle peut m'apporter. J’aime me laisser une marche de manoeuvre, ne pas tout contrôler. Je réalise également des portraits presse qui sont un véritable entrainement pour moi !
Lorsque je les photographie, j'apprends toujours quelque chose de mes modèles, ce n'est jamais une relation à sens unique. Si le courant passe bien avec elle(s), tout se déroule mieux, cela facilite les choses. Ce qui est agréable, c'est qu'à force de travailler avec certains modèles, nous finissons par devenir amies. En fait, la relation photographe-modèle, c'est comme une rencontre dans la vie de tous les jours. On s’enrichit mutuellement: elles peuvent me parler de leurs envies (stylisme/lumière/maquillages) et je leur dis ce que
La plupart du temps je ne dispose que de quelques minutes pour réaliser les images. Il faut donc savoir de suite quoi faire. Souvent l’idée me vient sur place et j'aperçois toujours un élément qui me plaît. Il faut savoir composer avec le décor et être sûre de trouver une bonne lumière de suite !
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j’aimerais en faire suivant leur idées. Je trouve cela vraiment mieux que chacune y trouve son compte et si toutes les deux nous sommes heureuses de faire cela, ça ne marche que mieux. Nous sommes encore plus impliquées.
Que t’apporte la pratique de la photographie ? Photographier m’apporte le fait d’être contente, fière de moi. Non par prétention, mais simplement parce que je suis satisfaite de ce que je fais. Quand j’arrive à concrétiser en images ce que j’ai dans la tête, et qu’en plus elles plaisent, je me dis que j’ai réussi quelque chose. De plus, le travail en équipe sur les séries apportent des rencontres très riches mais en plus, elles permettent à chacun d’apporter sa créativité dans l’ensemble du travail, comme si chacun de nous était une pièce du puzzle de la photo finale. Malgré tout, lorsque j’arrive à un résultat par moi-même je suis fière aussi d’avoir pu porter cela seule sur mes épaules.
T’imaginais-tu photographe la première fois que tu as déclenché ? Non, pas du tout ! Même à la fin de mes études de communication, je ne pensais pas être photographe. J’ai testé, une fois, pour voir où cela allait me mener. De fil en aiguille, j’ai commencé à faire des choses plus construites, plus concrètes, travailler avec des modèles...
Qui est ton mentor ? Mon premier mentor est Maxime Stange. Il m’a appris énormément de choses, il connaissait déjà la lumière de studio donc il m’a appris comment éclairer, aiguiser mon oeil. C’est la personne qui me soutient le plus depuis le début, et aujourd’hui, on grandit et évolue ensemble. En plus de Maxime, j’admire le travail d’Erwin Olaf, Paolo Roversi, Tim walker et Mondino. Si Erwin Olaf a plus un propos et un point de vue à défendre, c’est surtout leur sens de l’esthétique douce et froide à la fois qui m’interpelle.
Après ce thé partagé ensemble, selon toi, quel est le moment idéal pour en boire un ? J’aime boire du thé dans l’après-midi, pour être au calme et accompagner mon travail de retouche. Le thé, c’est vraiment un moment de détente. Le matin, c’est plutôt le café qui m’accompagne !
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CI NQ COCAS AVEC BR N S
“(...) Entre incantations claustrophobes et distance aérienne, BRNS voyage loin, des ciels cafardeux à la mélancolie toute britannique aux pastels surexposés d’une Californie en Polaroïd et d’éclats de transes percussives aux échos d’une cabine Leslie grillée par le soleil.”
Interview : Axelle & Victoire Photos : Axelle & Victoire 14
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BRNS, c’est qui, c’est quoi ?
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organique. C’est là-dedans, finalement, qu’on puise nos inspirations. On aspire vraiment à un univers très contrasté. On aime bien par exemple mêler à quelque chose d’un peu plus pop, kitsch, un sujet assez grave: c’est du contraste pur et ça justifie nos cassures, tout ça forme un univers cohérent pour nous.
Tout a commencé pour nous le premier janvier 2010. À ce moment-là, on avait essayé de travailler avec pas mal de gens mais ça n’avait pas vraiment fonctionné, on s’est alors retrouvés dans une cave sans buts prédéfinis. On a démarré en faisant du son sans savoir vers quoi on allait. On était entourés de pleins d’objets marrants, alors on s’est mis à faire de la musique avec tout ça sans se donner la moindre limite. A la base, le fait de jouer en live n’était pas du tout un objectif, on avait juste envie de créer quelque chose qui nous plaisait. On a tout fait sur un ordinateur et on a enregistré plein de pistes comme si on était tout un groupe. Est arrivé le moment où une base plutôt cohérente s’est formée, on avait alors six ou sept morceaux. Une date s’est confirmée ensuite et donc on s’est agrandis pour arriver au nombre de quatre. C’est depuis un an qu’on fait vraiment du live.
Et au niveau des visuels, par exemple pour votre EP, ça se passe comment ? En ce qui concerne les visuels du premier EP, on a travaillé avec Last Yardz, un graphiste qui fait du street art. On avait vu quelques expos de lui et on trouvait son univers vraiment très particulier et cinématographique. Lorsqu’on a utilisé ses créations, on avait aucune idée de comment ça allait être pris par le public. Puis on a mêlé notre musique à l’image, et personne n’a été dubitatif sur l’ensemble, ça a donné un tout assez cohérent. Il y a quelque chose d’intriguant dans ses visuels, et puis encore une fois c’était l’idée de mêler un univers complètement différent avec le nôtre et d’en faire un tout. On lui a donné carte blanche et on lui a fait totalement confiance.
Avant vous étiez Brains. Pourquoi avoir évincé les voyelles de votre nom ? Brains, à la base, ça vient des films de zombie qu’on regardait un peu à l’époque ; dans « Return of the Living Deads », on s’est aperçu que les zombies hurlaient tout le temps « brains brains braiiins ». Avant qu’on ne sorte quoi que ce soit, on s’appelait « braaains » puis « brains ». On a décidé d’enlever les voyelles lorsqu’on a gagné le Verdur rock. Cet événement a cristallisé pas mal de choses : énormément de contacts se sont créés en une fois. Garder ce nom, « Brains », était un peu du suicide au niveau du référencement, parce que personne ne nous trouvait, entre autre parce que beaucoup d’autres groupes s’appelaient comme nous. Et puis on a trouvé qu’enlever les voyelles avait ce petit côté ringard, un peu désuet, qui nous parlait bien.
Avez-vous des influences particulières, musicales ou autres ? Il y a clairement une référence au cinéma. On a aussi pas mal d’inspirations qui nous viennent de la musique pop, par exemple. Ce qui donne une certaine originalité à notre musique, c’est le fait qu’il n’y ait pas vraiment de limites au niveau du style, les morceaux n’ont, à priori, pas de lien entre eux. Le dénominateur commun est qu’on se retrouve dans des sons avec beaucoup de cassures et que le tout donne quelque chose de très peu linéaire. Nos morceaux, ce sont un peu des montagnes russes : on fait des boucles, différentes à chaque live. Et tout ça donne quelque chose de très
On a retenté l’expérience pour le nouvel EP, sorti en mai, mais cette fois-ci, nous avons décidé de travailler avec Carl Roosens, un illustrateur qui fait des choses très belles, des espèces de dessins un peu nerveux, griffonnés, dans des traits très violents et introspectifs. Son univers met un peu mal à l’aise mais nous, on a tout de suite accroché. On lui a, à nouveau, laissé totale carte blanche. Le visuel est très très glauque, encore plus glauque que la musique qu’on fait. On lui a juste dit « ton univers nous intéresse », il nous a demandé
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de lui donner quelques mots autour de notre musique, on en a choisis certains, mais toujours de manière très floue, pour ne pas lui donner trop d’indices. De là, il nous a envoyé quelque chose qui nous a plu tout de suite.
Si vous deviez décrire l’ambiance parfaite pour écouter votre EP, quelle serait-elle ? Antoine - Je verrais bien une écoute dans le noir complet, parce que j’aime ce côté « nu » où on ne fait qu’écouter, sans avoir aucun élément extérieur pour nous perturber. Un peu comme les concerts qui se font dans le noir où l’on peut se concentrer réellement sur ce qu’on entend et percevoir toutes les subtilités des sons. Tim - Quand tu écoutes notre musique, il y a énormément de couleurs qui se dégagent : c’est très lumineux. C’est vrai qu’écouter dans le noir permet de faire abstraction de ce qui t’entoure : ça devient alors une réelle expérience sensorielle. Les deux - L’idéal serait d’écouter le vinyle plutôt que le cd, pour les craquements. Sinon on le verrait bien en bagnole sur une route paumée ; il y a un peu un côté « road movie » dans notre musique.
cohérent, mais ça part toujours du baragouinage. Dans “Mexico”, comme les paroles sont très musicales, ça ne veut rien dire mais ça parle de plein de choses sans les nommer : il y a des choses qui se passent à travers les phrases. Par ailleurs, ces mêmes phrases créent un personnage : c’est quelqu’un qui est perdu, qui invente des mots, qui se coupe lui même. Des paroles un peu insensées ont un sens, du coup.
Un clip ? Le clip sortira en juin : c’est l’histoire d’un gars qui nait au milieu de la nature et des loups. Il se réveille avec une grosse tête de bébé, il ne sait pas ce qu’il fout là, il commence à partir et il lui arrive deux trois choses. Le clip c’est sur la chanson Mexico, or, dans les paroles de Mexico, on parle d’un gars qui est complétement paumé et qui, sur la route pour Mexico, se trouve devant un énorme mur et n’arrive pas à passer. On a rendu ça de manière un peu plus abstraite dans le clip, vous verrez, on ne va pas tout gâcher !
Vos projets pour les mois à venir ?
Il semblerait que Tim soit à l’origine des textes de BRNS : comment procèdes-tu ?
En juin, on sort “Wounded”, un EP de 7 titres. Dans la foulée, le clip de “Mexico” sortira aussi. En mai, on a fait pas mal de concerts en Flandre, et on s’apprête à tourner beaucoup cet été. Pour les festivals il y aura entre autre cas Les Ardentes et Dour, et beaucoup de concerts en Flandre et en France...On espère conquérir d’autres horizons par la suite !
Pour “Mexico”, le refrain était sorti tout seul. On envisage toujours les paroles et les voix comme un instrument en plus, c’est juste un arrangement supplémentaire, et les paroles on y pense dans un second temps. Pour “Mexico”, j’ai essayé de trouver le mot qui collait le plus possible à la musique, c’est ça qui est génial avec l’anglais, tu peux dire un peu n’importe quoi et ça le fait. Evidemment c’est retravaillé pour être
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Interview : Jehanne 18
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Qui es-tu, Elsa Guillet ?
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sur internet et dans les des magazines. Je repère les éléments qui me plaisent et je m’en inspire pour mes projets.
Je m’appelle Elsa Guillet, j’ai 20 ans et j’habite en Suisse. J’étudie actuellement à l’école de photographie de Vevey (CEPV) et je termine ma formation cette année.
Ta série « Winter Morning » nous montre des centres aquatiques vides. Que raconte-t-elle ? Pourquoi avoir accordé tant d’importance à la buée dans ces images?
Qu’est-ce qui a fait que tu t’es dit un jour « Ce sera la photo, et pas autre chose ? » C’est seulement en début de troisième que j’ai eu un déclic. Au début, je me suis retrouvée dans cette école de photographie un peu par hasard. J’étais un peu perdue sans savoir quoi faire après l’école obligatoire. Je trouvais que la photographie devait être quelque chose de sympa, alors j’ai essayé. Aujourd’hui là, elle occupe une grande place dans mon quotidien, elle m’a permis d’évoluer et de découvrir énormément de choses sur ma personnalité.
La série « Winter Morning » parle d’absence. Les centres aquatiques sont des espaces totalement factices, construit entièrement pour le divertissement. Du coup, j’ai eu envie de les photographier complètement vides, pour leur permettre d’exister différemment. L’architecture de ces lieux me plaisait énormément et la buée les plonge dans la poésie. Ce point commun esthétique sert de fil conducteur entre les images.
Quels sont tes projets pour le futur ? Comment envisages-tu ton avenir dans la photographie ?
En plus des portraits, tu photographies également les objets de manière quasi chirurgicale. Pourquoi ? Qu’est-ce qui te touche dans le fait de photographier des objets de la sorte ?
Pour le moment je me suis inscrite à une formation supérieure en photographie s’étalant sur deux ans, également à Vevey. J’aimerais beaucoup refaire des stages à l’étranger dans un futur proche et participer à un maximum de concours. Mon avenir dans la photographie ? Etant consciente de la difficulté de percer dans le métier, pouvoir gagner ma vie avec la photographie serrait déjà un but en soit ! Mon rêve ultime serait de travailler à l’étranger pour de grands magazines.
Dans cette série, intitulée « Kalium », je montre des objets du quotidien , qui ont une signification particulière à mes yeux, une double utilité. Le terme chirurgical est peut-être un peu fort mais si j’ai photographié ces objets de manière aussi froide c’est probablement pour camoufler la fragilité du sujet dont ils témoignent, tout comme la peinture blanche les dissimule eux-mêmes.
Parle-nous de « Manon ». Comment choisis-tu tes modèles ? La série “Manon” a été réalisée dans le cadre d’un travail scolaire. Ce sont des images purement esthétiques, pour lesquelles je n’avais pas vraiment réfléchi à un concept. Cependant, la photographie de mode m’intéresse de plus en plus , c’est pourquoi j’ai profité de cet exercice pour tester une approche dans ce sens. Mes modèles sont principalement des amies ou des connaissances. Il m’est arrivé de solliciter des personnes que je ne connaissais pas dans certains projets personnels mais je n’ai, jusqu’à maintenant, jamais été très satisfaite du résultat. Je crois que j’ai besoin d’observer la personne avant de la photographier, afin de la faire exister à ma manière.
Qu’est-ce qui t’inspire au quotidien et qui infuence le contenu de tes images ? Je regarde beaucoup le travail des autres photographes
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Une dernière anecdote avant de clore cette entrevue ? J’avoue que j’ai de la difficulté à parler de mes images. Je suis une personne très spontanée et peu optimiste, du coup je suis très vite lassée de mon travail, j’ai toujours besoin de me renouveler, de prendre des risques et d’essayer de nouvelles choses. J’ai peur de l’autosatisfaction via le regard des gens, j’ai peur de stagner et de trop me laisser influencer.
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Dans le roman paru en 1987, Ellis aborde avec le ton distant et caustique habituel les errances des étudiants de l’université huppée de Camden, dans le New Hampshire. De la cafet’ à l’amphi en passant par les dortoirs, le lecteur suit les voix intérieures de Paul, Sean et Lauren (ainsi que d’autres camarades ponctuels) dans ce qu’ils racontent de leur quotidien typique d’étudiantslash-gosse de riche. Les mots-clés sont ici : drogue, alcool, sexe, bière, marie-jeanne, alcool, coke, sexe, vomi, fêtes, encore un peu de sexe, et le TP occasionnel pour lequel tu te réveilles trop tard.
Les Lois de l’A ttraction
Souviens-toi, ami lecteur : lors de l’édition précédente, je te parlais de “To Kill a Mockingbird”, le film avec Gregory Peck adapté du livre éponyme de Nelle Harper Lee. Pour ce nouveau numéro, j’ai décidé de rester sur le thème des adaptations littéraires puisque j’ai eu récemment entre les mains le deuxième roman de l’américain Bret Easton Ellis, « Les Lois de l’Attraction », dont me suis empressée de téléch visionner la version filmée une fois ma lecture finie. C’était en 2002, les gens n’avaient pas encore de smartphones, et Pierre Bourdieu venait de mourir. Rock and roll.
Alternant tour à tour cynisme grinçant et désespoir morbide, Ellis dresse, avec son air de ne pas y toucher, un portrait au vitriol de ces rich college kids qui, à défaut d’avoir reçu l’attention nécessaire de leurs parents, s’en foutent plein le nez avec leur argent et sacrifient leur éducation sur l’autel du coup de reins anonyme. Le lecteur averti notera par ailleurs que certains des protagonistes des Lois de l’Attraction feront des apparitions dans les livres suivants de l’auteur, comme Sean, le frère de Patrick Bateman AKA American Psycho, ou encore Victor, l’ex-copain camé de Lauren, qui sera le héros de Glamorama.
C h ro n i qu e s : E l li
Un livre qui maîtrise avec brio l’art de brasser du vide, qui captive autant qu’il décontenance. Roger Avary devait être du même avis, puisqu’il entreprend en 2002 de le transposer au grand écran. Et si cet ancien collaborateur de Tarantino (scénariste sur Reservoir Dogs et True Romance) n’a pas fait grandchose de notoire depuis, son film témoigne d’un travail d’adaptation consciencieux et d’une mise en scène innovante et atypique. La détresse sourde et le narcissisme latent de ses héros sont exprimés à travers ce choix quasi-systématique de les cadrer en gros plan, et renforcent la proximité avec le spectateur établie déjà par leur monologue en voix off. Démultipliant les points de vue (normal pour un film choral tu me diras), Avary joue avec les moyens d’expression propres au septième art, du split-screen au montage saccadé en passant par les longues séquences d’images « rem22
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est une gueule notoire du crew Judd Apatow (Jay Baruchel, notamment vu dans « Undeclared » ou « En cloque, Mode d’Emploi »). Ajoute à ça la brune canon (c’est Shannyn Sossamon, elle était hype en 2002) et la blonde bonnasse (Kate Bosworth) du moment, fais-les danser sur une B.O. catchy allant de Rapture à Gainsbourg en passant par George Michael, et tu obtiens une heure et quarante cinq minutes de divertissement savamment orchestré, acide et coloré qui fleure bon les années deux mille.
bobinées » pour segmenter la narration. L’ambiance chaotique et fragmentée du roman se traduit à l’image par des mouvements de caméra fluides, parfois presque lâches : à Camden le temps est distordu, et le sol s’enfonce sous tes pieds comme après une lampée de MDMA.
De son premier plan jusqu’ à son dernier, le film se calque ainsi sur le ton du livre, sur ce sentiment de désinvolture blasée, comme une histoire sans queue ni tête que tu entends sans écouter.
Dix ans après The Doom Generation de Gregg Araki, un film au parfum étrangement similaire, la génération suivante attend toujours la fin du monde : c’est d’ailleurs le nom qu’elle donne à ses fêtes.
Niveau casting, le film d’Avary est typiquement représentatif de la génération post-ado fin 90s/début 00s qui a grandi avec MTV du temps où la chaîne passait encore de la musique. Les Lois de l’Attraction c’est le film dans lequel le mec de « Dawson » est bi (James Van der Beek, what else ?) la grande sœur de « Sept à la Maison » (Jessica Biel époque pré-Timberlake) se repoudre le nez façon Mia Wallace, le petit brun mignon d’American Pie (Thomas Ian Nicholas) essaye de se dépêtrer des avances outrancières du mec que tu as vu dans Smallville ou Lost (Ian Somerhalder), et plus loin, dans le fond, le gringalet en train de faire une overdose
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FAI SON S COM M E S’I L N’ÉTAIT PAS LÀ. “Je suis là, dans la même pièce. J’attends le bon moment. Que le naturel soit vraiment là. Car c’est lui qui apporte ces petits détails, ces gestes et ces attitudes inspirantes. Je crois que c’est la confiance que la personne m’accorde qui me fait devenir invisible. Et c’est à cet instant que les mouvements se figent, que le silence s’installe et que l’atmosphère change. J’adore. Mais surtout, faisons comme si je n’étais pas là.”
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GOLD Cette fille devait avoir de l’or qui lui poussait sous la peau, de l’or ou autre chose, qu’importe; elle irradiait. Toute cette lumière enfouie à l’intérieur d’une seule personne, ça piquait les yeux des promeneurs trop habitués aux ciels bas et couverts. Et puis entre l’éblouissement et la chaleur étouffante l’amalgame était vite fait, d’aucuns imaginaient à tort que cette fille brûlait. Personne n’osait la toucher. Tout ce vide lui faisait tressauter le cœur encore plus fort, et à mesure des battements, les scintillements grimpaient en cadence, faisant reculer encore un peu plus loin les passants effrayés. Toujours plus de distance à l’extérieur menait à toujours plus de rayons à l’intérieur. J’imagine qu’elle finit par se consumer, qu’il ne doit en rester aujourd’hui qu’une poignée de cendres dorées.
texte
: Victoire
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H I STOI R ES COU RTES
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L’ensemble de tes créations rappelle une douce berceuse. Est-ce que la musique est un moteur de création chez toi ? J’écoute beaucoup de musique, parfois elle est essentielle quand je réalise la pochette d’un album, parfois je la mets simplement en fond sonore, pour me détendre, ou bien quand je bois un thé, ou bien encore quand je me repose.
Et sinon, quel genre de rivages pour cet été ? Cet été j’ai comme projet de partir en Islande, j’ai également envie de découvrir Berlin, l’Italie et la Belgique un peu plus tard.
Un beau/fort souvenir graphique à nous raconter avec des mots plutôt que des images ? Lorsque j’ai découvert le travail de Michal Batory, j’ai été tout de suite interpellé par l’imagination de cet homme, un univers ludique et graphique très fort.
Interview : Axelle
Qui sont tes artistes préférés ? En général, qu’est-ce qui t’inspire ? Les principaux artistes que j’aime sont Antoni Tapies, Michal Batory, Henry Darger, Jacques Prevert, Roger Ballen. J’aime l’idée qu’on puisse créer une image à partir de ce qui nous entoure, ce qu’on peut trouver dans la rue, le hasard. C’est ce qui m’inspire en général, au delà des artistes que j’ai cité.
Coucou Bertrand ! Alors, qui es-tu ? Que fais-tu ? Je m’appelle Bertrand Sallé, j’ai 26 ans. Dans la vie, je suis graphiste et illustrateur.
Ton portfolio est composé essentiellement de collages, ça t’est venu comment cette passion pour l’assemblage ?
Création numérique ou à l’ancienne, un petit secret de fabrication ? J’aime mêler les deux, je me sers de vieux papiers, de photos, et en même temps j’utilise l’outil numérique pour assembler le tout, tel une bonne mayonnaise. Le secret c’est l’observation.
J’ai
été vers le collage naturellement, depuis l’enfance, j’ai toujours aimé assembler les choses, c’est ma forme d’expression.
On dirait que tes images racontent des histoires. Comment se finissent-elles ? Je
laisse à chacun la liberté de choisir son histoire, je n’aime pas quand une image est trop explicite, j’aime bien quand le spectateur peut inventer son propre récit.
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I NTE RVI EW I LLUSTRÉ E
Découvrant le travail de Marilyn Faucher au moment où les étudiants québecois entamèrent leur grande action de grève, nous sommes tombés amoureux de son trait coloré qu’elle adapte à toutes les situations. Entre le boulot, les manifestations et les projets personnels, Marilyn répond à nos questions, feutre en main.
Interview : Axelle 42
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Qui es-tu Marilyn Faucher ?
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Tu fais partie de l’équipe de Pica Magazine, tu peux nous en dire plus ?
Je suis étudiante en deuxième année au baccalauréat en Design graphique de L'UQAM à Montréal. Parallèlement, je suis designer graphique chez Novaconcept, une entreprise se spécialisant en formation en ligne.
Pica magazine est une initiative étudiante de l’École de design de l’UQAM. Annuellement, cet outil de communication visuelle invite les étudiants actuels, les anciens étudiants, les professeurs de l’École de design de l’UQAM ainsi que les designers étrangers et locaux, à réfléchir à une problématique donnée et à y répondre de façon conceptuelle ou rédactionnelle. Chaque année l'équipe d'édition tout comme la thématique se renouvellent. J'ai donc fait partie de la troisième équipe d'édition, dont le thème portait sur le processus créatif, en compagnie de mes ami(e)s Stéphanie Bergeron, Eliane Cadieux, Étienne Beaudoin-Vles et Serina Tarkhanian. J’ai vraiment apprécié mon expérience en tant que coéditrice, malgré la grande charge de travail, je serais prête à recommencer dès demain!
Le dessin est très présent au sein de ton travail, même dans ce qui semble plus être une commande graphique, comme par exemple « Thé comme si comme ça ». Qu’aimes-tu chez lui ? Le mélange entre design et illustration m'a toujours intéressé. Je les ai toujours vus comme une seule et même entité et non comme deux pratiques distinctes. Dans un projet, j’arrive plus aisément à développer un concept en utilisant l'approche illustrative et donc, par défaut, elle est très présente dans mon travail. En ce qui attrait au projet « Soso Thé comme si comme ça », le mandat était de réinventer l'emballage du Thé dans le cadre du concours Young package 2011. Mon concept est basé sur l'idée du réconfort qu'une boisson chaude peut nous apporter. Pour ce faire, j'ai associé chaque variété de thé avec une expression québécoise qui laisse présager un moment de réconfort. Le jeu de mot se base sur la façon qu'ont les québécois de contracter la prononciation du « Tu es » en « Thé ». Par exemple : « Tu es fâché noir », prononcé en québécois: « Thé fâché noir ».
Ton meilleur outil-ami ? En ce moment la gouache. Mais généralement pour travailler, j’utilise un simple feutre noir.
Trois clichés du graphiste qui te vont à merveille : Être curieuse, toujours analyser et critiquer autant mon travail que celui des autres.
Que faut-il te dire pour que ton cœur s’emballe pour un projet ? Tu as carte blanche. Trop souvent les clients ne nous font pas assez confiance, du moins d’après les expériences que j’ai vécues. Ils nous imposent leurs idées ce qui peut parfois brimer notre créativité (et ici je ne veux pas dire qu’ils n’ont jamais de bonnes idées). Simplement, lorsqu'on a carte blanche, on peut vraiment se permettre de faire un projet qui sera plus profond au niveau conceptuel et donc, plus durable. Pour moi ce qui est vraiment intéressant du métier, c'est de commencer un projet à zéro et de le mener à terme.
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Y-a-t ‘il des thèmes que tu préfères ?
Et dans les semaines à venir, il se passe quoi pour toi ?
Je m’intéresse à tout, mais je dirais que le thème du temps est très présent dans ma recherche personnelle. Que ce soit par le biais de la nostalgie, des saisons, des traditions, de la vieillesse ou par les fêtes, le thème du temps reste quelque chose qui me passionne énormément. Si j’avais à choisir dans ma vie professionnelle, « l’Art de vivre », soit la cuisine, le textile, la maison, le jardinage et les meubles, serait mon thème de prédilection.
Étant donné le contexte socio-politique à Montréal, soit la grève étudiante, je travaille actuellement temps plein chez Novaconcept. Parallèlement je milite comme je peux avec mes ami(e)s de l’École de la Montagne rouge, dont j’ai justement produit tout récemment une illustration pour une de leur publication. Je continue également mes projets personnels en prévision de ma dernière année d’université.
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Interview : Axelle
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Peux-tu expliquer ton parcours à nos lecteurs ? J’ai étudié le Design Graphique à l’Académie des Beaux-Arts de Porto et, c’est durant cette période que j’ai commencé à m’intéresser à la photographie et à l’édition, dans une veine artistique. Pendant mes études, j’ai pu prendre part à un semestre au « 75 » à Bruxelles. Après cela, j’a fait un stage à Barcelone, chez Twopoints.net, un chouette studio graphique spécialisé dans le graphisme éditorial et l’illustration. Maintenant, je travaille en tant que graphiste à l’Esad – Matosinhos School of art and design.
Nous avons adoré ton projet « Still-Intimate-Life » ! Quel était le but de ces images ?
Il semblerait que tu aies un très grand intérêt pour la nourriture. Comment astu commencé à travailler avec ce « matériel » ?
Ce projet, qui se situe entre une fiction et quelques éléments biographiques, présente une série de moments de partage très intimes, immortalisés par la photo.
Depuis mes études aux Beaux-Arts, j’ai développé une obsession, une passion pour les cabinets de curiosités, une collection encyclopédique d’objets à la Renaissance, et aussi pour les natures mortes de cette même période. Pour ce deuxième domaine, ce qui m’intéresse c’est la manière dont l’art se mêle directement à la représentation de la nourriture, à la symbolique ainsi qu’aux contextes politiques, culturels et sociaux.
Tout ton portfolio semble crier un amour pour l’anonymat, est-ce volontaire ? Je pense que tu as remarqué cela dans les images d’endroits où je ne photographie, normalement, jamais personne. J’aime me concentrer sur les objets et sur les espaces qui peuvent mener à des interprétations subjectives sur les personnes qui appartiennent à ces lieux.
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As-tu une routine quotidienne ? J’ai un job de graphiste à temps-plein dans une école. J’aime ce job mais je déteste la routine « métro-boulotdodo ». Je me lève tôt et je vais me coucher tard car je travaille sur mes projets personnels après avoir quitté l’école. C’est vrai que j’ai une routine de travail qui parfois déborde sur les week-ends mais j’ai toujours du temps pour bavarder, pour aller manger des sushis, pour un cinéma et pour des bisous. Tout ça fait partie de la routine !
Où trouves-tu ton inspiration ? C’est une question-piège. Les limites entre tes choix, des intérêts, tes recherches, tes amis, tes amants, tes films sont indéfinies et tous sont intégrés à la manière dont tu penses et travailles. Je ne cours pas vraiment après l’inspiration mais toutes les choses que je fais et vois sont directement liées à mon vocabulaire visuel et aussi à mon discours critique. J’essaye d’observer, de sentir, de penser et de traduire.
Quels sont tes projets pour les mois à venir ? Pour le moment, je suis en train de travailler avec des amis sur une nouvelle série de photos qui explorent le mot « Déplacé ». Je travaille également sur le numéro 4 de « Pli », un magazine d’art et design.
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KOOL KI DS !
Interview & Photos : Victoire
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Une présentation pour les lecteurs d’Alphabeta qui ne vous connaitraient pas encore ?
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Actuellement on est toujours sous ce collectif, c’est en quelque sorte un « label qualité ». En 2010 on a joué au Suiker Rock à Tirlemont, c’est un concert qui nous a particulièrement marqué. On a aussi enregistré « play » avec le soutien de « ça balance » en 2011. Là on vend toujours « dancing in the sun », version un peu améliorée.
On est Evanson, un trip power pop composé de Sam à la basse, Nick à la batterie et Hector à la guitare et au chant.
Avez-vous des influences, musicales ou autres ?
Quelle est l’histoire d’Evanson ? On existe depuis 2008. Notre but à la base était simplement de faire une musique simple, efficace et mélodique. On faisait chacun partie de différentes formations musicales. Hector faisait partie d’un groupe qui s’appelait Veda, et Nick et Sam jouaient dans un groupe appelé « no points ticket ». On s’est connu via les concerts. Lorsque nos différents groupes ont décidé de mettre un terme à leur parcours, on (Nick et Hector) a décidé de se mettre ensemble pour essayer de former quelque chose de bien. Sam a rejoint la formation en tant que bassiste quelques mois plus tard pour enregistrer quelques titres en studio. Le tout s’est vraiment bien déroulé à trois, on a donc on a décidé de continuer l’aventure ensemble en février 2008. Ce n’était finalement pas un parcours réfléchi, tout s’est mis petit à petit, rien n’était fixé.
Parmi les groupes qu’on écoute et qui nous influencent, il y a Nada Surf, Oasis, (les Spice Girls), Death Cab for cutie, Feeder, Pixies, Supertramp, Radiohead. Visuellement, Magritte pourquoi pas, parce que comme nous, il exprime des choses très fortes à partir de choses très simples. On va écrire dans nos chansons des textes qui dépeignent des émotions qui, pourtant, durent une fraction de seconde. Ce qui est difficile c’est de faire sonner quelque chose très simplement, trouver la bonne formule sans en faire des tonnes. C’est exactement ça qu’on recherche. Cette simplicité implique une sincérité qui n’existe pas toujours quand on recherche des textes ou des sons trop complexes.
Comment vous vous y prenez pour composer ?
Avez-vous déjà envisagé d’être davantage que trois ?
C’est souvent un de nous qui vient avec un début, une base de mélodie. On se met à trois et on improvise dessus jusqu’au moment où on débouche sur quelque chose qui tienne la route, qu’on aime bien. Le texte, c’est souvent des sons en anglais qui sonnent bien comme ça mais qui ne veulent pas dire grand chose. Ensuite, et seulement quand on est à un stade bien avancé dans la chanson, on fait le texte en soit, en gardant une cohérence par rapport à la mélodie chantée juste avant.
On a déjà fait plusieurs essais avec d’autres musiciens et guitaristes. Finalement, ça ne s’est jamais vraiment concrétisé parce que on se retrouve dans une formule où on a chacun notre place, notre son, en étant trois. C’est justement ça le challenge : faire sonner quelque chose sans avoir de multiples pistes.
De grandes étapes depuis 2008 ?
Si vous deviez décrire l’ambiance parfaite pour écouter votre musique, quelle seraitelle ?
On a fait une première session studio en 2009, puis une deuxième session en 2010. Suite à ça on a sorti l’EP « dancing in the sun » qui réunissait certaines chansons des deux sessions. On a gagné le prix Jump for music, le concours des mini-entreprises, également en 2009. Ca nous a permis d’investir dans des instruments, dans du studio pour notre musique, et ça nous a ouvert une opportunité de scène à Paris. On a gagné également un concours de jeune talent du Welcome Spring festival à Louvain-la-Neuve. On a joué aux franc’off en 2009. Suite à tout ça, on a été choisi parmi 200 groupes par « ça balance », un collectif qui à la base soutient des groupes liégeois mais qui s’est étendu. C’est un soutien financier et même un support d’un point de vue qualité parce qu’on a des formations, des résidences etc.
Notre musique est très différente quand elle est jouée en live et quand elle est écoutée sur CD. C’est tout à fait écoutable comme vrai pop sur cd et perçu comme plus rock en live. Pour écouter le cd donc, l’ambiance parfaite serait de l’écouter à plusieurs, dans une voiture garée au milieu de nulle part, l’été, toutes fenêtres ouvertes. Ou bien en hiver, dans un fauteuil en cuir devant un grand feu.
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Vos projets pour les mois à venir ? Continuer à créer de nouvelles choses, essayer de se renouveler un maximum. On voudrait également tourner des capsules vidéo un petit peu travaillées de nous qui jouons en live. On va sans doute bientôt retourner en studio parce qu’on a quelques compos qu’on trouve de qualité, et on a pour ambition de travailler un peu sur notre communication.
Une anecdote à raconter sur l’histoire de votre groupe ? Au Suiker Rock, on a dû s’enfermer dans une voiture pour les petits soins de Shaggy qui exigeait de ne croiser personne.
En Belgique, qu’est-ce que vous aimez bien comme groupe ? On aime particulièrement les groupes du nord du pays comme Novastar et Das Pop. D’ailleurs on se considère vraiment comme un groupe belge et on tient à cette identité, d’être catalogué comme tel et pas classé dans une province
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(WE AR E) LI E UTE NANT
Interview & Photos : Jehanne
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Qui se cache derrière Lieutenant ?
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La force de votre musicalité vient de la présence de la clarinette et du violon. Ce choix était-il une évidence ou marque-til le souhait de vous singulariser dans le paysage musical belge ?
Lieutenant, c’est un mélange d’amitié et de fraternité. C’est une petite boîte de bonheur. Nous avons commencé à faire de la musique adolescents. Le projet Lieutenant a débuté en septembre 2010 avec les compositions d’aujourd’hui et chacun y a apporté sa touche et son identité. Très vite, les concerts se sont enchaînés. Lieutenant, c’est aussi de la pop fraîche et harmonieuse et nous essayons d’atteindre une homogénéité musicale même si nous devons encore évoluer. Nous sommes encore jeunes.
Nous ne cherchions pas vraiment à nous singulariser mais nous voulions autre chose que des instruments classiques et la voix. Les instruments à cordes et à vent nous permettent de marier des symphonies différentes, et on a gardé cet ensemble, parce qu’on trouvait que ça collait bien.
Quel est votre parcours depuis votre rencontre ? Nous avons réalisé beaucoup de concerts qui ont été très importants pour nous. Nous avons essayé de placer la barre haut; beaucoup de portes se sont ouvertes et beaucoup d’institutions nous ont accueillis (Le Bucolique Festival, le Centre Culturel de Chênée, l’Espace Tivoli et d’autres salles encore.) En un an nous avons donné une trentaine de concerts, vendu un vinyle trois titres, Maestro, dont le clip est sorti récemment, et les choses ont commencé à se mettre en place. Notre E.P sortira vers début 2013. Lieutenant se concrétise. Nous sommes partis de rien, les choses se bricolent doucement et cela nous permet de faire ce que l’on veut. L’absence de moyens nous pousse à développer notre imagination pour proposer des choses intéressantes.
De quoi parlent vos chansons ?
Et votre clip “Maestro “ ?
Nos chansons parlent de relations, de malaises et de bien-être, mais elles ne contiennent pas une thématique unilatérale. Cela dépend de nos humeurs et des périodes de la vie que nous traversons. On peut dire qu’elles ne sont pas torturées mais tortueuses. Elles nous permettent de nous questionner sur notre position de jeune adulte, par rapport aux autres. Nous cherchons également la poésie des textes, à travers ses métaphores et des réflexions. Parfois, la sonorité des mots est un prétexte à la musicalité, que nous créons autour de lui. Nous laissons les instruments s’accrocher à leur poésie.
Le clip nous permet de nous diversifier dans la transmission d’un morceau. Un clip, c’est la peinture d’une mélodie par quelqu’un d’autre, mais c’est avant tout notre histoire. Les images viennent de « Sauvage Sauvage », qui a interprété le texte librement, tout en restant très proche de ce que l’on voulait. Ce n’est pas une traduction mais la force de deux visions qui se rencontrent.
Ce clip vous a permis “d’élargir votre rayonnement à d’autres horizons”. De quels horizons parlez-vous ?
Vous avez déjà eu l’occasion de donner quelques concerts, notamment en première partie des « The Tellers ». Quel est votre moment le plus fort vécu en tournée ?
Les horizons qui se sont ouverts à nous se traduisent par des retours très positifs sur le clip « Maestro », qui nous a apporté des opportunités de nouveaux concerts. Il permet de reproduire les choses alors que le live n’est qu’instantané. Sa sortie a également été le prétexte d’organiser une « release party » avec tous nos amis. Ce n’était que du bonheur.
Notre moment le plus fort, c’était à Paris. Nous avions distribué des cachets à ceux qui étaient venus voir notre concert et à la fin du set, ils ont tous levés les
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bras estampillés avec des cachets Lieutenant. C’était touchant de les voir jouer le jeu.
Vous avez aussi enregistré 3 titres. Comment ça se passe un enregistrement studio avec Lieutenant ? Nous l’avons enregistré chez nous. Nous avons un peu coupé la maison en deux pour cela: un salon servait de régie et l’autre de studio. C’est un système D, mais un excellent souvenir que nous avons partagé. Pour les prochains titres, nous irons dans un vrai studio mais nous souhaitons garder au maximum notre côté home made.
Qu’attendez-vous de demain ? Nous attendons sans hésiter la concrétisation de l’E.P, mais nous attendons également l’été avec impatience pour donner des concerts.
Un dernier mot ? Tu bois quoi ?
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MADAM E I R MA(TTH I E U) Bélier
La radio était distance, en bruit de fond une madame soleil très inspirée récite ses versets du jour et soudain “votre journée sera musicale”. Vient la question, subite et pernicieuse : “Et si les albums avaient des signes astraux ?”.
“Moi tout seul, j’existe face à l’autre” YAMANTAKA // SONIC TITAN - YT//ST Sur les pavés traîne une fille à la peau neige et aux cheveux charbon, immobile sous la pluie drue elle ne semble affectée par rien ; reine-tyrante d’une rue monochrome et vide. Elle avale d’un regard le monde, l’aspire et l’incarne. Les roulements de tambours se perdent dans les nimbes, les lèvres entre-ouvertes, la voix mystique et l’abandon des corps, la tête penchée en avant. L’atmosphère se condense au rythme des larsen de guitares, les voûtes apparaissent sous ses yeux, sur ses épaules et le synthé nous convoque. Dans la transe, les paupières se ferment et pourtant les pupilles se dilatent ; une course au cauchemar dans des chapelles de cristal, elle virevolte entre les apparitions d’ayakashi et de chats damnés, elle virevolte dans la tempête, dans les trous noirs. L’univers vibre dans une onde sonore et se reconstruit, la lumière apparaît en faisceaux, par des centaines de meurtrières et éclaire le dernier acte de Yamantaka. Le courroux de la sagesse perdue.
Chronique : Matthieu
Par un clair-obscur exemplaire où textures sombres côtoient névroses infantiles, Yamantaka // Sonic Titan livre un ovni obnubilant, chamanique entre réalité, grotesque et fantasme. Les chemins sont nombreux quant à la lecture de ce disque, les références à la pop japonaise s’heurtant à des passages franchement métal pour finir dans une noise photographique et fiévreuse mais est-il raisonnable d’attendre une ligne directrice de la part d’un disque
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qui, au final, relève plus de l’expérimental qu’autre chose ? Non, et c’est tant mieux.
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soupir. L’air se charge d’électricité en même temps que mille-et-un bruits commencent à retentir autour de nous, il fait tellement sombre que l’on ne peut savoir si c’est une plaine sans fin ou une cellule de prison. La deuxième proposition semble évidente tant l’atmosphère devient hermétique, et toujours ce noir qui nous ronge, la psychose qui s’installe et les ongles qui grattent la terre. Une piste désarmante et vicieuse (Cocaïne). Les cendres retombent au sol, tapis gris qui se teinte progressivement d’argenté, l’évolution post-rock est calme, d’une beauté froide où la magie du piano, des trombones, clarinettes, trompettes et violons laisse juste sans voix (Celladoor). Profonde, labyrinthique et intelligente “Cotard Delusion” est un exemple parfait du niveau de création de TKDE, toutes les notes sont à leur place et ont toutes un but précis et unique, fou.
Taureau
Le darkjazz est donc à son sommet (Les Etoiles Mutantes) et conservera à jamais son talent pour s’évanouir dans un long spleen oblique et schizophrène (Past Midgnight).
“La vie est sur terre, je créé et je possède” THE KILIMANJARO DARKJAZZ ENSEMBLE - FROM THE STAIRWELL Quand le Kilimanjaro Darkjazz Ensemble (TKDE) est né, c’était pour composer la soundtrack de films muets. Depuis la formation s’est émancipée des images, de la projection et a décidé de non plus travailler sur la lumière mais sur la fumée. C’est ainsi qu’en lançant “From The Stairwell” et en fermant les yeux l’histoire se construit en volutes ; huit pièces de brouillard tantôt cryptique tantôt boréal qui s’anime en un jazz-club angoissant porté par la voix de Charlotte Cegarra, aussi envoûtante que celle de Beth Gibbons de Portishead (All is One).
Gémeaux
Le temps est déformé, déconstruit en canaux qui s’entrechoquent ou se recoupent, le point zéro n’existe plus et jamais le concept d’enthropie n’avait été aussi trouble, bercé par des cuivres errants, las (Giallo). Vient le frisson, le moment de monter le volume, “White Eyes” est une composition doucement mélancolique, abstraite de concept humain ou calculé qui se contente de doucement flotter, la caresse le long de la nuque, des clavicules, du sein. Le souffle qui se repose et délicatement repart. Mais le trombone se tord, se courbe et se dissipe en spirale, éteignant les cierges dans un dernier
“Je bouge dans ma tête, je conceptualise et je transmets” THE ADVISORY CIRCLE AS THE CROW FLIES “L’endroit n’a pas de nom. La couleur non plus, en est t’elle une ? A moins que ce soit de la lumière, il n’y a pas d’explication possible à cette situation. C’est totalement kafkaïen. Bref me direz-vous, “As The
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Crow Flies” de The Advisory Circle aka Jon Brooks est un disque d’ambiant, ce qui n’est jamais facile à bien écouter. Il faut trouver le truc pour se plonger, l’état approprié. Ca peut être quand vous êtes très fatigué, ou quand l’atmosphère est propice, ou quand votre sang est altéré, ça peut être des tas de choses, mais ça doit être quelque chose, parce que si ce n’est pas alors c’est l’hydrocution, comme à la piscine. Et si, je dis bien si, vous avez trouvé, alors ceci est votre clef et cela est votre porte, livrée pour vous.
Cancer
Ne sommes-nous pas bien ici, à l’entrée d’un temple solaire à discuter d’opiacés et du bon temps ? Mais il est déjà tard, il faut embarquer. Rassurez-vous, les premières pistes sont cotonneuses, rebondies, on pourrait y rester pour toujours. Pourtant, on continue, portés par les apôtres du Dieu Synthétiseur et vient “Everyday Hazards” : premier titre à sortir du registre ambiant-flottant pour se glisser en mi-mesure dans une electro minimale mais toujours lumineuse. Le cycle se répète, on retourne dans une poésie étherée jusqu’à la prochaine petite pépite. Et c’en est une double, n’estce pas fabuleux ? “Modern Through Movement” et “Learning Owl Reappears”, qui débute par une montée chimique où reverb et moog nous scande l’univers en crescendo et expire en préambule à la seconde ; il y a cette nostalgie qui s’infiltre sous la peau, ces infimes variations qui électrisent chaque cheveux du crâne et l’intensité qui monte dans le ventre, jusqu’à l’apogée. Parfaite.
“Je suis l’enfant de ma mère, l’imaginaire est ma réalité” MEMORY TAPES – SEEK MAGIC / TREESHIP Des cigales, un chien au loin, quelques arpèges en boucle, les derniers rayons de soleil, une batterie downtempo et des voix distantes, échoïsées ; c’est le paysage qui se dessine à l’écoute de la première piste de “Seek Magic”, un album de chillwave lumineux et volatile. C’est avec “Bicycle” que l’on se rend compte que ce n’est pas juste sympa mais un art à envier, de pouvoir composer la liberté décomplexée, la fébrilité des émotions faciles en trouvant le juste rythme, la juste intensité, et ça chaloupe pas mal (ah ces petits passages de fièvre, parfaits pour danser les bras en l’air). La musique de Dayve Hawk est emplie de pistes légèrement sépia, des photographies un peu brûlées par la lumière comme “Green Knight” et son groove discret, sa façon de nous faire mouvoir, à peine. “Pink Stones” nous promène dans un immense aquarium en guise d’interlude et laisse place aux épaules qui bougent, aux sourires en coin et aux coups d’oeil taquins (Stop Talking).
Nous sommes toujours en mouvement, asseyez-vous confortablement, nous allons rencontrer quelque chose de fabuleux, à mi-chemin entre une déesse, un paysage sous la neige, un enfant de coeur sous LSD et des adieux déchirants mais retenus (Beyond The Wychelm). Au moins tout ça, oui. Finalement, vous avez tenu jusqu’à la dernière étape de la visite chers amis, je vous laisse, en silence, profiter de ces galeries de pixels couleur pastels jusqu’au terminus. La rencontre avec le système. Ou avec sa défaillance.
Il fait chaud, le matin est encore à venir ; heureusement que “Graphics” est là pour faire danser, jeunes et ivres, franchement cliché, franchement plaisant aussi. Une petite couche de spleen s’installe, temporairement (Plain Material) et déborde sur le début de “Run Out”, piste finale du disque un, mais le temps s’éclaircit et c’est avec un beat trip-hop que l’on quitte la nuit dans un dernier instant de fulgurance sucré/salé. Tout est terminé, retour à la maison, on se glisse sous la couette,
L’endroit n’a pas de nom, la couleur non plus, mais la lumière est certaine. Elle est dans l’appel, elle est fugace, c’est une ombre. Je n’en dis pas plus, de toute façon c’est bien connu, un prophète n’est qu’un fou (Lonely Signalman).”
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les pieds meurtris, la tête vague, le sourire figé et on lance le disque deux, “Treeship”. Il ne reste plus qu’à s’abandonner aux vingt-deux minutes d’exploration sous-marine, un ticket pour le paradis quand la seule option est de fermer les yeux.
forme de règlements de compte avec ses démons. Lorsqu’on lance l’album, on tombe directement sur la voix d’Heron et soudain, dans un frisson, on sait tout. On le sent, toute la merde qui a rendu une voix aussi torturée. Et aussi charismatique. Il avait 62 ans et était enfin parvenu à se débarrasser du Mal. Ne lui restait qu’une trainée de goudron sale et pollué barrée d’un trait de vieux scotch, juste ce qu’il fallait pour maintenir l’équilibre entre la chute libre et le point de rupture. Avec cet opus à l’odeur de souffre, il s’écrivait, se dévoilait. Fragile, rugueux et grand. Sur « Me And The Devil », il pose une voix chancelante, éraillée sur fond de beats racés et urbains qui contraste avec I’m New Here en spoken words où il nous raconte, un pâle sourire ironique sur le visage ce qu’il a traversé et où il est arrivé. Et c’est prodigieusement beau. Cela dit, même écorché il n’en reste pas moins d’une humanité folle qui s’exprime magnifiquement sur I’ll Take Care of You (avec Damon Albarn, Gorillaz, au piano), parfaite en fin d’amour, les fenêtres ouvertes, l’atmosphère orageuse et le bruit de la circulation en bas de l’immeuble.
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Dernière piste dépassant les trois minutes, NY Is Killing Me est si jazzy que l’on a envie de taper, nous aussi, dans nos mains en rythme sur le palier d’une petite bicoque familiale à Manhattan. Running et The Crutch clôture l’album avec une electro coulée au mortier, son envie d’évasion et la raison de sa course s’insinue dans les intestins, remonte par les poumons et s’installent au milieu de la gorge. La fuite, et ses derniers mots. (Suite I’m New Here, une collaboration avec Jamie XX est née en 2011 peu avant sa mort, « We’re New Here » album-remix-concept est traité dans l’édition A d’AlphaBeta !)
“Un pour tous, je suis le modèle de référence” GIL-SCOTT HERON – I’M NEW HERE “I’m New Here”, le dernier album de Gil-Scott Heron est sorti en 2010. Un an plus tard, il succombait au sida mais aussi à son parcours, à l’immensité de son existence. Avant ce dernier album, se trouve un vide de douze ans dans sa carrière musicale, ou plutôt une abysse où il a séjourné, perdu dans les méandres du crack, du trafic, de la prison, noyé dans ses espoirs contestataires déçus, dans sa lutte pour la reconnaissance noire. Et avant ça, 40 ans de musique jazz, un passif d’activiste, d’historien de la culture black, une lutte perpétuelle contre l’avilissement américain. Une poésie subversive et des idéaux qu’il a toujours considéré comme plus important que sa propre personne. Mais c’était et ce n’est plus. Décharné, le visage creusé, édenté et expirant ses dernières heures à la Prison de Rikers Island c’est grâce à la malice de Richard Russell (le grand maître d’XL Records) que l’Homme a posé sa voix une dernière fois pour un disque déjà culte, une dernière contribution au monde de la musique en
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“Je me dévoue sur Terre, je suis utile au quotidien” LAURA MARLING – A CREATURE I DON’T KNOW Laura Marling est une princesse de la folk, c’est un fait. Après deux albums forts, minimaux et viscéraux réalisés à respectivement dix-huit et vingt ans seulement, “A Creature I Don’t Know” est son troisième album, celui de l’évolution, du changement. Ça se sent d’entrée de jeu avec “The Muse” qui tire vers le bluegrass, piano et banjo compris ou en fin de partie avec un “All My Rage” carrément country. On retrouve sa folk habituelle avec “Don’t Asking me Why”, l’amertume des ruptures printanières et “Night after Night”, ses rythmes discrets mais captivants. Et toujours cette voix boisée, d’une beauté déraisonnable (Rest In The Bed) qui peut parfois sombrer dans des profondeurs où la tension lentement se concentre et fait vibrer les murs sur ce qui est la meilleure chanson de l’album ; The Beast. Les premières notes sont ténues, mais déjà graves, elle commence quasi-mumure, les accords s’enchaînent derrière ses yeux brillants, l’air se charge et la batterie libère notre souffle. A ce stade, on est totalement captif, retenu par sa voix poignante et les étincelles de la guitare électrique fraîchement apparue, et voilà l’ouragan qui nous submerge, voilà la lune qui nous obsède. Voilà la bête. Une perle d’après-midi pluvieux.
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“Moi à deux, j’existe grâce à l’autre” VENETIAN SNARES - ROSSZ CSILLAG ALATT SZÜLETETT J’ai mal à la tête. Des orchestres sceptiques jouent tristement de leurs instruments tandis qu’une tumeur furieuse me broie le cerveau. Des éclairs lancinants me déchirent épisodiquement la vue, je lorgne sur les musiciens qui m’entourent à présent, leurs yeux fixés sur moi, ronds, blancs et cernés, je ne sais distinguer s’ils sont vides ou habités. Les mains collées aux tempes, je cours et glisse, des pavés noirs et blancs à s’en perdre, des marches qui ni ne montent ni ne descendent, seulement le sang qui presse dans les avant-bras, dans les mollets, j’ai l’impression d’avoir des centaines de coeurs palpitants répandus dans mon corps rendant chacune de mes veines nerveuses et saturées. La brulure collée au nez, la salive acide, je m’accroche et je traîne le cortège symphonique, d’où peuvent-ils bien venir ? Piqure aiguë dans la nuque, sueurs froides. Le monde se met à tourner, vite, il fait très froid et pourtant je sue à grosses gouttes, je cherche la sortie mais il est déjà trop tard, mes forces m’abandonnent. Et je m’écroule en paquets d’os désarticulés. Je n’ai plus d’autre perception que celle du sol, il est sale d’un mélange d’urine, de poussière et de rouille. Le goût du fer, pâteux dans la bouche, les soubresauts de la masse noire qui se réveille et qui veut sortir. Disque schizoïque en deux mesures, Venetian Snares
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a créé ici un objet unique qui s’écoute en badtrip pour une expérience usante, paranoïde mais inédite et exceptionnelle. Probablement moins nocif qu’un cocktail d’acides et sans aucun doute plus hypnotisant.
Incroyablement simple dans la structure musicale sans pour autant être bête, il y a pourtant quelque chose de complexe, de savant chez Salem. Une sorte d’ingrédient secret qu’eux seuls connaissent et qui donne du relief à des sonorités sur lesquelles on cracherait chez d’autres. Et avec tout ça, Salem nous prend et nous plonge dans un motel abandonné aux murs dégoulinants de goudron et aux cierges en fin de course (King Night), dans une eau opaque, rance et glaciale (Asia). Comme une course dans un couloir désert, de pièce en pièce, les fantômes de ceux que l’on voudrait voir (Frost) mêlé à ceux que l’on voudrait oublier (Sick), les grésillements de la télévision annoncent les limbes ; éclairs et larsen (Release Da Boar) ; mais ça n’a aucune importance. L’air pue la mort et la gerbe comme dans un vieux squat, c’est beau et effrayant (Trapdoor) à l’image du moment où l’on décide de s’injecter la pollution, yeux révulsés, muscles contractés, orgasme chimique (Redlights).
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“La vie passe par la mort, je détruis pour transcender”
Le cycle se répète, aliénant l’esprit, ce n’est que plaisir cynique : ce qu’il t’offre, il l’arrache de tes entrailles (Hound) en murmurant qu’il n’y a plus rien à comprendre, plus rien à saisir. Il ne reste plus qu’à continuer à danser les yeux vides, le sang habité (Traxx). Il ne te reste plus que l’angoisse du vide, de la mort instantanée (Tair) et l’envie de ne jamais quitter cette boucle qui enchaîne sans cesse onirisme et néant, beauté et vice (Killer). King Night de Salem c’est une putain de grosse vague à la fois brute et volatile qui ne tolère ni concessions ni demi-mesures. Impossible à quantifier, à noter, il n’existe pour cet album aucune objectivité qualitative, tu te laisses porter ou tu nages à contre-courant, dans les deux cas tu te fais balayer.
SALEM – KING NIGHT Salem. Le nom et la pochette expliquent tout : la nuit grise, les cernes bleues et les veines noires. Et à vrai dire c’est difficile d’en avancer plus, l’album oscillant toujours entre deux extrêmes dont la frontière est infime, sorte de no man’s land du bon gout, de la bonne vie, risquant à chaque instant de basculer soit dans le too mutch au niveau de l’ambiance soit dans le simpliste au niveau des arrangements. Mais rentrons dans l’oeil du cyclone, on verra bien. Pour écouter cet album, il faut tout oublier ; ce que l’on connait déjà, ce que l’on attend, ce que l’on nous a dit, ce que l’on est. Il faut rentrer vide dans le son, être le réceptacle et rien de plus, juste le contenant qui permet à l’inaperçu de se matérialiser quelques instants. Toujours en dualité, entre beats rugueux et chant aérien, claviers sentimentaux et basses bourdonnantes, sonorités saturées et beauté inconnue, c’est une alchimie bruyante, noire et viciée qui tourne en spirales. Au delà de l’obscurité asphyxiante se trouve une sorte d’appel plus discret qui captive et nous dit de rester, d’attendre. Et on obéit, on garde la tête sous l’enclume, c’en est de plus en plus insoutenable mais on résiste, on se perd, les yeux fous, le sourire dément dans les méandres du plaisir coupable, du bien par le mal.
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aux déchirements des violons dans une fièvre interne, dans les battements de l’apnée qui se consume. Onze minutes de transe sans image, juste les répercussions de la musique sur chacune de nos terminaisons nerveuses et le frisson qui parcoure le corps, épileptique. La seconde chanson, “Blaise Bailey Finnegan III” est tout aussi transcendante mais utilise d’autres moyens pour arriver à ses fins. Une voix retenti, celle d’un vieux américain, il parle vite et mal et semble presque sénile, complètement obnubilé par une névrose conspirationnelle. Mais il dégage quelque chose. Sa voix qui nous paraissait démente nous apparaît passionnée, derrière le raisonnement primitif se cache ses réelles sensations, ses réelles pensées et il commence à nous toucher. Pas par son raisonnement mais par son aura qui nous absorbe, un nuage de naphtaline. “The government... the American government. They’re sneaky, they’re very deceitful, they’re liars, they’re cheats, they’re rip-offs. I mean, the American government is one systematic government that...that nobody can trust. I don’t trust them myself ”, “The judge says “You can’t talk like that in my courtroom, you’re in contempt of court.” then I said... I told the judge, “If that’s the best you can do, I feel sorry for you.” I said “Why don’t you just shut your fucking mouth for once and listen.” I said “I’m not gonna take any shit.” I said “I’m gonna pay my speeding ticket like I said.” I walked up to the god damn judge and I hand him my 25 dollars and I says “Here’s my money, now I am leaving.” And I left it at that”. Les images s’enchaînent au rythme de sa voix et l’instrumentation s’établit et progresse derrière, sans que l’on s’en rende compte dans une osmose cathartique. Les paroles de Blaise Bailey Finnegan s’estompent et la marée haute approche. Viennent les dix minutes les plus indescriptibles du monde, les dix minutes qui font de GYBE un des groupes primordiaux de l’histoire de la musique.
Sagittaire
“La vie est ailleurs, ma mission est ma quête” GODSPEED YOU! BLACK EMPEROR - SLOW RIOT FOR NEW ZERO KANADA Godspeed You! Black Emperor fait partie de cet obscur courant qu’est le post-rock ; perché à trois kilomètres d’altitude, de l’air frais plein la gueule on subit les pressions et dépressions, les accalmies et les tempêtes, le tout dans le paradoxe du rythme circadien instable du monde. Voilà ce qu’est le post-rock, mais ce n’est toujours pas suffisant pour définir GYBE. L’EP “Slow Riot for New Zero Kanada” est une ode envoûtante composée de seulement deux pistes de onze et dix-huit minutes qui débute par “Moya”. Fermez les volets, montez le volume à quatre vingt pour-cent, le grésillement du violoncelle s’enclenche, les cordes commencent à se tendre sous l’archet et ça monte, lentement l’halètement naît, tellement lentement que c’en est asphyxiant. Les cordes s’effacent pour laisser la place à une guitare lointaine et de nouveau ça monte, l’halètement renaît, un peu plus puissant, un peu plus proche de la possession. Il grandit comme une ombre sur un mur et se met à rugir, de plus en plus fort. On sent sa douleur brulante dans nos poumons, sa folie qui électrise les muscles, la catalepsie suivie de l’épilepsie ; la batterie explose, la distorsion des guitares se joint
Par cette capacité à créer, à amener à des passages d’une célérité incroyable, par les atmosphères déployées, par tout ça, il est indispensable d’écouter ce “Slow Riot for New Zero Kanada”.
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“Je suis le père de moi-même, je gravis ma montagne” SOAP&SKIN - NARROW
Ceux qui l’ont écouté s’en souviennent ; en 2009 Anja Plaschg sortait sous le pseudonyme de Soap&Skin son premier album “Lovetune For Vacuum”, une réussite magistrale composée de ballades au piano menées par un jeu classique impeccable aux jolies références (Chopin, Schumann et confrères), parfois teinté d’electro et à la noirceur dramatique, aux accès/excès mélancoliques.
Capricorne
Nous voilà trois ans plus tard avec “Narrow” un EP 66
huit titres fortement inspiré par la mort prématurée de son père. Et l’on en sent le poids, l’amertume froide qui glace et endurcit le regard dans “Vater” premier titre, en allemand, qui s’ouvre sur un duo piano-voix triste, de cette tristesse qui est présente depuis trop longtemps, qui n’a quasiment plus rien à ronger, absorbant toutes les forces de son hôte. Mais la lutte n’est pas terminé et arrivé au bord de la falaise, le piano se fait soudain plus martial et ah. Voilà Anja Plaschg dans toute sa grandeur ; belle, forte, fissurée et hantée. Au piano se joint l’orchestre et à l’orchestre des samples électroniques, sa voix poigne dans nos entrailles, magnifique. Après un premier titre en allemand c’est avec une reprise du disco hit français “Voyage Voyage” de l’innommable Desireless que Soap&Skin nous livre en un trip spleenien d’une toute autre dimension. “Deathmental” est un essai electronoise qui, si en version studio peut ne pas sembler tout à fait cohérent, révèle tout son parfum en live, sublimé par les jeux de lumières et par l’Autrichienne animée de convulsions, chantant comme si elle récitait un mantra sous les explosions électroniques, effrayante, inspirante, divine.
Verseau
“Tous comme un, je suis solidaire et identique à mes frères” CANNIBAL OX – THE COLD VEIN
Obscur rejeton du célèbre label Def Lux, Cannibal Ox est une création de El-Productor, bigboss du dit label et légende urbaine qui, pour concrétiser son projet, réunit deux MC de talent bien que méconnus ; Vast Aire et Vordul Megilah. Le premier aux platines, les deux autres au flow. Les trois pour un unique album, The Cold Vein, à l’allure d’une apocalypse rance et tordue, hypnotique et hallucinée qui nous traîne dans des squats de métal et de ciment, dans des parkings d’HLM insalubres entre le Bronx et Brooklyn.
Peut-être un peu moins intéressantes “Cradlesong” et “Lost” sont de jolies et légères pièces, quelques sourires tristes, une mèche derrière l’oreille. “Wonder” tire vers le presque-blues, minimal, décharné jusqu’à l’os et beau comme ce n’est pas permis. “Boat Turns Toward The Port” rappelle vaguement la superbe chanson “Goodbye” en featuring avec Apparat, en plus puissante. Les hurlements, les mécaniques électroniques, elle transperce en coup de vent, glacé et incapturable. Les vingt-neufs minutes se terminent par “Big Hand Nails Down” et quelle fin ! Cette dernière chanson est littéralement un hymne obsédant auquel il est impossible de résister. Alors on lâche prise.
El-P produit pour cet album une instru incroyable ; les beats toujours monstrueux naviguent entre science-fiction et atmosphères sombres, l’ambiance est humide et oppressante avec des tempos décousus, triturés et captivants qui se font avaler par des samples de clavier vintage, de cloches en furie, de chorale démoniaque ou de guitare jazz. Les sonorités sont infinies et addictives, il y a toujours un nouveau détail à découvrir qui relève du génie et nous envoie valser d’un grand kick dans la gueule. Loin de tout le hip-hop mainstream, Cannibal Ox nous fait oublier les bijoux bling-bling et les meufs en plastique qui rampent sur de grosses voitures au profit d’un NY fait de guettos à l’odeur d’urine 67
et de formol, de junkies cadavériques qui longent les murs et de la haine, de la violence. Les lyrics sont amers et goudronnés, toujours pertinents ils se développent à travers une poésie macabre où les métaphores sont crues et douloureuses.
sont que textures incompréhensibles et bruitages indéfinis, parsemées d’interludes, de particules de néant. “Julie and Candy” est un labyrinthe de vecteurs, se croisant pour former les plaques colorées d’un immense rubik’s cube, grosse prise de tête.
Ici, il n’y a pas de pistes à choisir ou de favorites, il faut avaler l’album d’une traite comme le shot de whisky, celui qui brûle les entrailles, embrume la vue et fait tourner la tête. Celui qu’on avale parce que c’est la merde, parce tout est crade, parce qu’il faut se lever demain.
Samples marines, de l’espace on plonge dans les profondeurs de la mer, “Alpha and Omega” est une virée à travers les cellules, les micro-organismes, la source de la vie. C’est trop que pour ne pas s’y perdre un instant, “Dawn Chorus” résonne en nous comme les souvenirs d’une folle virée psychédéliques, des images de miroirs et d’habits dépareillés. “Geogaddi” est un album mytique, qui peut se savourer aussi bien comme une douce et atmosphérique merveille que comme un buvard qui font sur la langue.
Poisson
“Je lâche prise, à travers moi la loi divine s’accomplit” BOARDS OF CANADA - GEOGADDI
La première piste de “Geogaddi” des Boards of Canada se nomme “Ready Let’s Go”, dure cinquante-neuf secondes et comporte deux nappes électroniques, six notes individuelles et une sample-spirale. Après à peine une minute on est déjà convaincus, un Boards of Canada c’est la promesse d’un long trip dans un univers à mi chemin entre le synthétique et l’organique. Parfait à écouter dans son bain ou avant de dormir en fumant voire même pour une baise amoureuse et mystique. On voyage complètement dès les premiers beats IDM de “Music Is Math” et lorsque les vocals apparaissent on traverse l’atmosphère. Ou quoi que ce soit que ça puisse être. On atterrit dans un espace étrange, galaxie où les possibilités sensorielles ne
C lai r e D uval tr iang u lai r e . canalblog . com 68
50 CenT mArIlYn mAnSon
morrISSeY CYPreSS HIll WHITe lIeS THe TInG TInGS PATTI SmITH m83 HUBerT-FelIX THIeFAIne DIonYSoS roDrIGo Y GABrIelA & C.U.B.A. JoeYSTArr
rUFUS WAInWrIGHT & BAnD BrIGITTe BooKA SHADe live mr. oIZo BAlKAn BeAT BoX DUB FX PonY PonY rUn rUn YeASAYer mIKe SKInner dj set erol AlKAn WArPAInT mIloW
THe Jon SPenCer BlUeS eXPloSIon I BlAme CoCo DeATH In VeGAS
eD KoWAlCZYK of live JoSHUA eDWArD SHArPe & THe mAGneTIC ZeroS CArAVAn PAlACe SoKo mAVerICK SABre BeArDYmAn KAVInSKY mADeon THe mAGICIAn reDneK rUSTIe SHAron VAn eTTen DAn SAn roSCoe TWIn SHADoW
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Cela fait maintenant un an que les capsules de Cinevox tournent dans les salles du Royaume : un Grand Écran qui, en deux minutes, survole l’actu du cinéma belge : tournages, sorties, interviews... Revenons sur les origines du projet : ça a commencé comment, l’aventure Cinevox ? Le projet est né du souhait de la banque BNP Paribas Fortis d’associer son image au cinéma. Déjà présente dans les domaines culturel et sportif, notamment avec Tennis Brussels Open et les Film Days, elle a donc soumis l’idée à trois agences de communication : l’une d’entre elles, Brightfish (anciennement Screenvision) est la régie publicitaire du cinéma en Belgique. Philippe Adam, son Business Development Director, avait depuis longtemps l’idée de booster le cinéma belge. À part quelques grands noms, on parle finalement peu de nos films. Et pas toujours en bien. Le public belge avait une mauvaise opinion de ses artistes. Or, quand on y regarde de près, la Belgique grouille de personnes et de projets talentueux qui gagnent à être connus.
Talentueux, le ciné belge ? Non, peut-être ! Si vous êtes allé au moins une fois au cinéma en Belgique ces douze derniers mois, vous savez sans doute ce qu’est Cinevox. Ce magazine du septième art belge format grand écran fait le point chaque mois sur tout ce qui, cinématographiquement parlant, est arrivé près de chez vous. Philippe Pierquin, qui est aux manettes du projet, s’est entretenu avec Alphabeta Magazine.
I n t e rvi e w : E l li
Nous avons donc développé un projet qui s’appuyait sur l’atout de Brightfish : l’accès aux grands écrans. Et nous l’avons complété par un arsenal de médias modernes. Le tout porté par “un ton” : Cinevox devait soutenir le cinéma belge avec enthousiasme, sans juger ou « descendre » un projet. Nous ne sommes pas là pour donner des leçons (d’ailleurs de quel droit ?), mais pour partager une passion, informer, donner un coup de pouce à ce vivier de création national, et donner un tant soit peu l’envie au public de le découvrir. À notre grande satisfaction, BNP Paribas Fortis a choisi ce projet, à mon sens le plus ambitieux, mais aussi le plus risqué puisqu’on partait de zéro. Franchement, je pense que c’était une décision très courageuse de leur part. Cinevox fut donc lancé en mai 2011. Il se décline sur trois axes : le Grand Écran mensuel, sorte de cheval de Troie arrivant littéralement à l’intérieur de la salle 70
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; le site internet, et les réseaux sociaux. Ces deux derniers prennent le relais des news diffusées en salle. Il faut savoir par ailleurs que Cinevox est un projet national – et donc bilingue. Lancé en même temps que son pendant francophone, le Cinevox néerlandophone, géré par Kurt Vandemaele, fonctionne de pair avec nous dans les cinémas de Flandre, avec les mêmes objectifs. De plus, Kurt et moi aimons beaucoup le cinéma de l’autre communauté, ça permet pas mal d’échanges et d’interactions. Depuis son lancement, le succès du projet n’a cessé d’augmenter. Il a été soutenu dans un premier temps par les professionnels qui y ont vu un excellent moyen de se faire connaître. Puis, cet engouement a rapidement été partagé par le public, notamment grâce à un petit buzz lors la dernière cérémonie des Magritte. Cette réussite s’explique par le fait que le projet profite à toutes les parties impliquées : BNP Paribas Fortis développe sa visibilité et son engagement dans la culture belge, Brightfish est ravi de faire venir du public en salles, les professionnels voient leurs films mis en avant de façon positive... et le public présent dans la salle découvre et s’informe sur de nouveaux films qu’il aura peut-être envie d’aller voir. On se retrouve ainsi dans une situation de win-win pour tout le monde avec un grand vainqueur : le cinéma belge ! Mais attention, j’insiste: ça reste du journalisme. Du journalisme enthousiaste, mais du vrai journalisme. Il y a une hiérarchisation de l’information, un lourd travail d’édition. Rien n’est écrit qui est faux ou que nous ne pensons pas. Ce n’est jamais du publi-rédactionnel. Aujourd’hui, je pense que les objectifs premiers, établis lors du lancement du projet ont été largement atteints, et même dépassés. En chiffres, cela donne entre 600000 et 800000 spectateurs potentiels pour la capsule ciné. Le site internet est mis à jour quotidiennement avec des actus sur les tournages, des castings, des portraits, plus de 380 articles ont été publiés en un an... Nous avons également un partenariat avec la cérémonie des Magritte ce qui est logique, car nous avons les mêmes objectifs… et les mêmes partenaires (BNP et la Fédération Wallonie-Bruxelles). À cela s’ajoute une page Facebook qui compte plus de 2000 fans et quasiment 500 followers sur notre compte Twitter que je viens tout juste de reprendre en mains... Nous avons encore plein de projets pour l’avenir ! Nous voulons notamment mettre le paquet sur les BNP Paribas Fortis film days en septembre avec trois films belges qui seront choyés et bénéficieront d’une rampe de lancement promotionnelle sans équivalent. L’aventure Cinevox se poursuit au minimum jusqu’en décembre, la suite dépendra de nombreux paramètres, mais espérons que nous pourrons partager notre enthousiasme pour le cinéma belge le plus longtemps possible !
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Vous êtes aux commandes du Cinevox francophone, mais ce n’est pas votre seule casquette ! Vous menez plusieurs projets de front : vous travaillez à la communication de Wallimage et vous faites partie du groupe d’experts qui examine les projets à financer par la Wallonie, vous êtes rédacteur pour les Magritte, copywriter indépendant et vous avez même écrit des romans... Comment tout cela s’articule-t-il ? Ma passion, c’est l’écriture. Ça a été le point de départ, j’ai toujours voulu passer mon temps à écrire. J’ai été journaliste sportif pendant dix ans, travaillé sur une télé locale, présenté des émissions culturelles… mais je préfère écrire. Le tournant de ma vie professionnelle fut ma rencontre avec Philippe Reynaert en 1984, lors d’un stage à l’IHECS. C’est lui qui m’a mis sur la voie du cinéma, avec le magazine Visions puis beaucoup plus tard chez Wallimage dont il est le directeur. Au fil des années, j’ai travaillé avec différentes agences de communication, des magazines, j’ai beaucoup écrit pour Brightfish, notamment pour différents projets comme l’Eurociné27, l’American Movie Day... C’est la deuxième rencontre décisive de ma vie professionnelle: je travaille avec Philippe Adam depuis 15 ans et il est aujourd’hui le directeur de Cinevox. Notre collaboration est idéale, car nous sommes totalement complémentaires. Quand il
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a une vision d’un projet, il se lance à 300% il a de l’énergie à revendre et une force de persuasion peu commune. Quand je suis fatigué, je lui téléphone et il me rebooste. Ma collaboration avec Wallimage est le complément idéal de Cinevox, car je lis tous les scénarios et dossiers soumis au fonds wallon et je suis donc au courant des tournages futurs, de l’actualité des acteurs. Je rencontre les producteurs... Ensuite, avec Cinevox, je développe la visibilité de leurs films le plus objectivement possible. Qu’ils soient ou non financés par Wallimage, ça n’a aucune importance. Ma force c’est que j’ai le même plaisir à rédiger des articles pour les Magritte, pour Wallimage, pour Cinevox que je l’avais à écrire un roman. Heureusement parce que ça m’occupe 50 heures par semaine, 50 semaines par an. Contrairement à ce que les gens peuvent croire, il n’y a pas encore d’équipe rédactionnelle chez Cinevox. J’édite le site et j’écris 95% des textes qui y sont publiés, je gère toute la communication sur les réseaux sociaux. L’aspect vidéo est par contre pris en charge par Kaos Film et c’est un vrai régal. Ce qui me plaît dans Cinevox, c’est le sentiment d’être utile, de pouvoir transmettre mon enthousiasme pour le ciné belge en général, mais aussi pour des projets particuliers qui me tiennent à cœur. Des gens que j’aime beaucoup et que j’admire profondément. Aujourd’hui, toute ma vie tourne autour de ça, et dès j’ai trois heures pour moi... je regarde un film, ou une série ! Ou je vais au cinéma avec mes enfants.
Comme vous le mentionnez sur le site de Cinevox, cette année le cinéma belge est largement représenté au Festival de Cannes. Parmi les films du plat pays présents sur la croisette, lesquels sortiriez-vous du lot?
J’aime beaucoup les gens qui y sont impliqués. C’est une histoire d’amour très forte, un film radical dans lequel j’ai tout de suite senti un potentiel « cannois »... Le fait qu’il soit présenté à la Semaine de la Critique me fait personnellement très plaisir. D’autant qu’il y a quelques mois, tout le monde n’était pas persuadé de son potentiel. Moi, j’y ai toujours cru. Et enfin, last but not least, l’ACID (Association du Cinéma Indépendant pour sa Diffusion) présente cette année à Cannes le film d’une jeune Namuroise de 25 ans très culottée qui a écrit, produit et tourné son film en un mois et demi, quasiment toute seule, avec des techniciens et acteurs bénévoles, et le résultat est vraiment réussi : c’est La Tête la Première d’Aurélie van Elmbt. Un film formidable, porté par des comédiens talentueux. David Murgia, qui tient le premier rôle m’a époustouflé et je suis ravi qu’il fasse parler de lui, car il le mérite. Je vais naturellement tenter de l’aider à accroître sa notoriété. C’est ça, au fond, que l’on veut faire avec Cinevox : raconter une belle histoire, celle du cinéma belge, la magnifier avec des mots et des images de façon à ce qu’elle soit mise en valeur, car elle vaut la peine d’être racontée, et célébrée ! Cinevox, le cinéma vu par les belges http://www.cinevox.be http://www.facebook.com/cinevoxetvous www.twitter.com/#!/cinevoxetvous ...et bien sûr un grand écran de deux minutes chaque mois dans les salles. Philippe Pierquin Rédacteur : Wallimage (www.wallimage.be), les Magritte ( www.lesmagritteducinema.be) Ouvrages parus : Réalités Virtuelles (éditions Club Québec Loisirs), Par Le Vide (thriller – éditions Paranoïaques)
C’est très subjectif ça pour le coup… Disons que pour moi, trois longs-métrages (co)produits en Belgique se détachent clairement de cette édition. Tout d’abord De Rouille et d’Os, de Jacques Audiard avec Matthias Schoenaerts. Je connaissais le projet ayant lu le scénario, mais je ne m’attendais pas à ce choc. J’ai adoré. La réalisation transcende le scénario, c’est un film poignant, organique, une incroyable histoire, avec un petit parfum de Palme d’Or pour moi... Je déteste pleurer en vision de presse, mais là, j’ai été submergé. Et puis il y a Hors les Murs de David Lambert, un projet qui me tient à cœur, car je l’ai suivi depuis le début. 72
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ON Y ÉTAIT !
Visual Domain - Bad Luck ! @ Café Maison du Peuple
Chronique : Axelle 74
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C'est lors d'un voyage à Berlin que Visual Domain est né. David "PIXL" me le dit d'entrée : il n'a rien inventé, le concept existait déjà en Allemagne et aux USA. Trouvant que Bruxelles manquait d'initiatives graphiques, cet ancien étudiant en publicité a importé l'idée jusqu'en Belgique et l'a soumise au café "La Maison du Peuple", lequel met, depuis lors, une salle à disposition pour les "Graphic Battles". En cours de route, Guillaume s'est greffé au projet suite à un stage au sein de "l'entreprise"et depuis, c'est à deux qu'ils mènent leur petite barque créative. En théorie, l'idée est de trouver une manière de mettre en avant les métiers graphiques, de créer un lieu où des artistes peuvent se rencontrer, échanger et peut-être même trouver du boulot. En pratique, David et Guillaume ont mis sur pied des évènements live bi-mensuels au cours desquels 4 graphistes s'affrontent "pour du beurre" autour d'un thème imposé. Aucune règle si ce n'est que 90% du travail créatif doit être réalisé sur place. A côté de ça, tout graphiste est le bienvenu, peu importe sa méthode de travail et son univers pourvu qu'il ait envie de relever le défi.
Dans un futur plus ou moins proche et toujours dans l'idée de créer une communauté, les deux organisateurs aimeraient exporter l'évènement sur le web afin de créer des battles en simultané dans différents pays et de générer un gros happening à plusieurs endroits en même temps. Ci-contre, les créations réalisées lors de la dernière battle ! Le thème ? Bad luck !
Julie Verrecas - http://joliejulie1990.tumblr.com/ Patate Houpette - http://www.facebook.com/pages/Patate-Houpette-/128067610576425 Julie Leunen - http://twentytwodesign.blogspot.com/
V i s ual D omai n
www . face book . com / vi s ualdomai n be
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(E N) PE IG NOI R DE PU I S PAR I S
L’une à Paris, l’autre à Bruxelles, c’était par écrans interposés que Candice et moi allions pouvoir discuter un peu plus amplement de ses différents projets et quotidien parisien. A cause d’un mois d’avril encore à cheval sur les brises de l’hiver et les premiers rayons de soleil printaniers, l’intéressée, clouée au lit, n’a pu nous faire honneur de sa frimousse à la webcam. Qu’importe les petites têtes déconfites par un rhume passager, c’est en peignoir, armées de nos cafés respectifs que nous avons tapoter gaiement sur nos claviers : copiés-collés en gage de notre bonne foi ! Interview : Axelle 76
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un pianiste m’a commandé un site web et tout s’est
[9/04/12 15:37:23] ALPHABETA MAGAZINE :
Avant tout, aurais-tu quelques titres de chansons à me proposer afin que j’installe une petite ambiance sonore propice ?
enclenché par la suite.
[9/04/12 15:38:52] CANDICE LESAGE :
Bien sûr : “Le temps de l’amour” de Françoise Hardy ou “A Sunday Kind of Love” de Beth Rowley ou encore “Danses Hongroises” de Brahms !
[9/04/12 15:39:09] ALPHABETA MAGAZINE :
Certains attentifs auront déjà fait les connexions, tu n’es autre que la demoiselle à l’origine de notre site internet ! Mais à part ça, qui es-tu ? Que fais-tu ?
[9/04/12 15:48:45] ALPHABETA MAGAZINE :
Tu évolues dans un univers très féminin et délicat, que ce soit en photographie ou en webdesign. Quelles sont tes inspirations ?
[9/04/12 15:41:34] CANDICE LESAGE :
Je suis Candice ‘Austen’ Lesage, une étudiante en langue. Je m’éparpille et je fais beaucoup de choses : des photos, du webdesigner/intégration de site web.
[9/04/12 15:51:17] CANDICE LESAGE :
Je suis aussi bloggueuse à mes heures perdues et en ce
J’ai toujours eu un côté très délicat et sensible (mes
moment j’apprends le piano en autoditacte.
proches disent même que j’ai trop la tête dans les nuages), un peu fleur bleue aussi. Mes inspirations découlent de mes lectures (littérature anglaise du 19ème : Jane Austen, les soeurs Brontë, etc), de mes
[9/04/12 15:43:44] ALPHABETA MAGAZINE :
Comment es-tu tombée dans ces deux passions que sont la photographie et le webdesign ?
films préférés, de la musique aussi. Je m’inspire du monde qui m’entoure, ou, à tout le moins, de celui que je me crée.
[9/04/12 15:46:45] CANDICE LESAGE :
[9/04/12 15:55:10] ALPHABETA MAGAZINE :
La première est arrivée par le biais d’un long processus.
Quel est ton professionnel ?
Petite, j’allais souvent au zoo avec mes parents et mon
plus
beau
souvenir
père y prenait des photos sublimes. J’ai vite attrapé le virus, j’avais même eu un joli bridge argentique jaune et
[9/04/12 15:56:36] CANDICE LESAGE :
gris à mes 7 ans. Puis, en seconde, un été, je m’ennuyais
Récemment, une cliente m’a dit qu’elle avait eu les
et je me suis inscrite sur un forum photo où j’ai pu
larmes aux yeux en voyant ma maquette, parce que
rencontrer des personnes passionnées. Echanger avec
ça lui donnait confiance pour l’avenir de son projet et
eux fut un élément déclencheur dans mon envie de
qu’elle était fière de moi. Ca m’a émue comme jamais
prendre des photos.
je n’ai pu l’être auparavant dans mon travail.
En ce qui concerne le webdesign, c’est arrivé un samedi soir alors que je m’ennuyais ; je devais avoir 12
[9/04/12 16:01:33] ALPHABETA MAGAZINE :
Tu le disais plus haut, ta passion pour le webdesign s’est développée par l’intermédiaire des blogs. D’ailleurs, tu rédiges tes articles en anglais. Comment
ans, j’étais fan du Seigneur des Anneaux et je voulais faire un site sur Orlando Bloom…(ouais!) Après j’ai ouvert un blog, puis un autre, etc. Enfin, en juin 2010,
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cela est-il venu ? Est-ce que cela a changé quelque chose dans ton travail ? [9/04/12 16:08:37] CANDICE LESAGE :
Du jour au lendemain je me suis mise à lire en anglais. Depuis je n’achète que des livres dans la langue d’Austen. Je ne regarde que des films en VO, je n’écoute que des chansons en anglais (ou presque). Bref, ça me semblait naturel d’écrire en anglais, sachant que j’ai plus d’affinités avec la blogosphère anglosaxonne qu’avec la francophone. Dans mes relations de travail, ça m’a permis de décrocher des contrats avec des étrangers, parce que je leur semble plus accessible qu’une bloggueuse francophone. Par exemple, l’an dernier, j’ai pu vendre deux photos à une journaliste de Los Angeles. Ca ouvre clairement des portes ! [9/04/12 16:13:22] ALPHABETA MAGAZINE :
De quoi parle ton blog ? Comment arrivestu à te démarquer dans ce foule de flux RSS qui nous sont soumis quotidiennement ? [9/04/12 16:16:17] CANDICE LESAGE :
Je partage mes envies, mes photos parisiennes et mon train-train quotidien en essayant de raconter des choses pas trop ennuyeuses ! J’en parlais plus haut, je n’aime pas vraiment la blogosphère francophone où tous les blogs se ressemblent et racontent la même chose (les derniers achats, les vêtements du jour etc.). Moi j’aime pouvoir partager des jolies choses comme des collections de livres, de la musique, mes petits coins de paradis,... Je ne sais pas si je me démarque vraiment, j’essaye mais c’est assez dur d’avoir du recul sur soimême. Le principal c’est que j’aime partager avec mes lecteurs, et que ça me rend heureuse ! [9/04/12 16:18:28] ALPHABETA MAGAZINE :
[9/04/12 16:17:02] ALPHABETA MAGAZINE :
Des projets pour les mois à venir ?
Ton top 3 blogs anglophones ressemble à quoi ?
[9/04/12 16:20:59] CANDICE LESAGE : [9/04/12 16:17:59] CANDICE LESAGE :
Continuer à apprendre le piano pour mettre en ligne
Le blog d’une amie texane : www.seecreatures.com, un
quelque reprises sur internet, beaucoup de site web -
joli blog rempli d’inspiration : www.englishmuse.com
dont un qui m’émerveille déjà - et une idée de livre
et le très connu : www.daydreamlily.com.
photo.
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Avant toute chose, foncez-voir cette vidĂŠo.
Interview : Axelle 80
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Tu es une graphiste basée à New-York mais tu n’as pas toujours vécu aux USA. Peux-tu nous raconter ton histoire ?
plorer et exprimer les relations entres les deux.
Je suis née et j’ai grandi à Taiwan. J’ai étudié la publicité à l’université, ce programme se concentrait sur la publicité et le marketing. C’est pendant mes études que j’ai réalisé que je préférais la partie créative à la partie « business » donc, après avoir été diplômée, j’ai postulé pour obtenir une bourse afin de partir étudier à l’étranger. Le gouvernement taïwanais m’a octroyé l’allocation et a avancé mes frais d’études au Pratt Institute en 2010.
Souvent, je vais sur des sites de design pour trouver de l’inspiration, comme la plupart des étudiants en graphisme. Je pense que mes études de publicité m’ont vraiment influencées. Le programme se focalisait davantage sur la planification plutôt que sur la mise en pratique. Donc, avant de faire du graphisme, je passais beaucoup de temps à penser et planifier. De cette manière, ce que je produis ressemble toujours énormément à ce que j’avais planifié.
Quand on se balade sur ton portfolio, on peut remarquer que le processus « handmade » est très important pour toi, peuxtu expliquer pourquoi ?
Qu’est-ce qui te passionne dans le graphisme ?
Quelles sont tes influences ?
Je suis quelqu’un de très mauvais en communication verbale et l’écriture ne m’a jamais intéressée. Cependant, communiquer à l’aide d’un langage visuel me met bien plus à l’aise.
Je crois que c’est dans ma nature. Je n’essaye jamais de donner une touche « hand-made » à mes travaux. En fait, je n’ai jamais cru que mon travail soit vraiment hand-made jusqu’à ce que vous me posiez cette question.
Quels sont tes projets pour les mois à venir ?
Tu as l’air d’être une éternelle amoureuse de la typographie. Peux-tu nous en dire plus sur ton projet de typographie « handmade » ? Qu’est-ce qui te fascine dans les lettres ?
Pour l’instant, je suis en train de travailler sur ma thèse laquelle explore le design d’informations en mouvement. J’aime beaucoup la mise en forme de données parce que ça rend des statistiques vraiment ennuyantes beaucoup plus intéressantes et aussi, j’aime l’impact fort et direct que cela implique.
J’aime vraiment la typographie. Mais c’est totalement nouveau pour moi car je n’avais rien appris de cela jusqu’à ce que j’arrive aux USA. Pour moi, c’est une histoire de culture. La typographie est à l’Ouest ce que la calligraphie est à la culture chinoise. Les caractères sont des médias pour communiquer, c’est aussi un art de la communication. En ce qui concerne le projet typographique, je me demandais pourquoi certaines des lettres capitales étaient si différentes des bas de casse. Leurs racines étaient souvent semblables mais je voulais utiliser une manière « organique » pour ex-
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R E N DEZ-VOUS H E BDOMADAI R ES Jusqu’à la prochaine parution d’Alphabeta Magazine, retrouvez-nous sur le blog pour un reportage hebdomadaire sur différentes expos !
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: Axelle
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SAVE TH E DATE ! Tu n’étais pas là à la toute première FIESTALPHABETA ? Allez, on va pas t’en vouloir trop longtemps, pourvu que tu nous dises que tu nous réserveras bien un de tes week-ends de septembre parce que, devine quoi ? On remet ça !
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TROQUON S GAI E M E NT
Un dimanche après-midi de janvier, je me suis retrouvée à flâner au TrucTroc qui donne, depuis 1975, l’opportunité aux visiteurs de troquer ce qu’ils veulent contre une des oeuvres exposées. Je me suis laissée promener par mon regard et c’est ainsi qu’au détour d’une salle, mes mirettes n’ont pu s’empêcher d’aller observer de plus près une petite boîte renfermant carte et personnages de papier, certainement une des œuvres les plus délicates exposées ce jour-là. Il ne me fallu pas plus pour apposer mon post-it signé d’un timide « Axelle pour Alphabeta » ! Quelques semaines plus tard, une réponse virtuelle à mon papier griffonné planta le décor d’un nouveau récit... Interview : Axelle 84
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Tiens, quelque chose m’interpelle. Ton CV détaille une formation en stylisme et on ne voit rien de cette teneur dans ton portfolio. Comment cela se fait-il ?
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Un jour, j’ai trouvé aux puces l’album d’une personne qui avait une date de naissance très proche de la mienne, je ne l’ai pas l’acheté. Je me suis dit que quelque chose de fort et de brutal avait dû arriver pour que cet album se retrouve là.
J’ai fait des études de mode il y a 10 ans. Dans ma pratique actuelle, on retrouve des éléments de ce parcours, par exemple dans le rapport au corps, la chorégraphie et la scénographie que j’installe au sein de mes créations.
On ne peut pas l’éviter quand on parcourt l’ensemble de ton travail, le thème du “chemin de vie” revient sans cesse. Qu’est-ce qui te fascine dans ce sujet ? Est-ce une petite obsession ? Ce n’est pas une obsession, mais j’aime l’idée de trajectoire, de mémoire collective/familiale. Je travaille à partir de vieilles photos, ce sont des photos anonymes, je les choisis moi-même sur les marchés aux puces ou sur Internet. Jamais je ne travaille à partir de photos qui seraient « identifiables » d’une manière ou d’une autre. Personnellement, je trouve que les photos de la fin du 19ème siècle sont moins intéressantes parce que trop figées. A partir du moment où la photo s’est “démocratisée”, elle est devenue plus spontanée et donc plus intime. Ce sont alors des instants plus particuliers qui sont capturés. Je crée à partir de ces témoignages et le spectateur peut alors se plonger dans le passé.
L’utilisation de cartes dans certains de tes travaux, comme dans “Les Cabinets de curiosité” n’est pas anodine, n’estce pas ? Est-ce pour ne pas se perdre en route ? L’utilisation de la carte routière rejoint l’idée des lignes de la main. J’ai beaucoup de vieux plans de Paris, de Londres. J’adore ces images et leurs textures, tout autant que l’idée d’une déambulation à l’intérieur de la boîte, cette envie de cheminement et de trajectoire. Oui, la notion de trajectoire est vraiment un fil conducteur dans mes travaux.
Tu parles de souvenirs, de mémoire. Est-ce que ton travail à une portée autobiographique ?
Tu oscilles entre dessins et collages. Comment ces techniques sont-elles arrivées dans ton processus de création ? As-tu songé à explorer d’autres mediums ?
Je ne raconte rien du tout sur moi mais c’est une dimension qui m’intéresse et me touche. Je ne fais pas de l’autofiction, je fais de la fiction narrative au moyen des photos. C’est une forme de fiction collective.
J’ai gardé certains réflexes liés à la mode notamment le travail sur les formes. J’adorais le côté créatif mais pas la couture. En fait, je ne suis pas attirée par l’aspect technique des choses. Encore un reste de mon expérience en mode : j’adore le produit fini, l’objet en lui-même, sa fonction. De ce fait, j’aime bien travailler sur des œuvres qui ressemblent à de petits objets dans la présentation : boites, etc.
Dans « Le Fil de la Vie », les cartes postales que j’utilise ont vraiment été envoyées, elles ont un expéditeur et un destinataire qui ont vraiment existé. J’aime imaginer ce qu’on peut faire de ces éléments : j’invente, je joue. Parfois, les gens sont choqués par le fait que j’achète des photos qui ont appartenu à d’autres, alors que ça me paraît assez naturel. On peut dire que c’est une lutte contre l’oubli, et utiliser des photos si anciennes crée une forme d’anonymat et de distanciation.
Je fais des collages depuis que je suis toute petite : à 5 ans, je découpais dans les catalogues « La Redoute » et faisais des grands collages en rouleaux. Et j’ai
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toujours travaillé avec des carnets qui, pour moi, traduisent une sorte d’intimité. Mes dessins sont un peu japonisants : épurés, présentés dans des boîtes ou des carnets. Je passe du petit format au très grand, de cette notion d’intime et de confidentiel à quelque chose de cartographique.
que je fais. Peut-être cette idée que, forcément, on est toujours face à un autre, peut-être même à un double.
Tu l’évoques toi-même en présentant ta suite de collages « Sweet Memories », tu collectionnes des photos, des images. Que trouve-t-on dans tes collections ? Est-ce que ce besoin de garder cache une peur d’oublier ?
Il y a une forme de dualité lorsque je mêle un peu de fantaisie à des photos à priori tristes. Récemment, j’ai commencé à travailler avec de la pâte à modeler un médium qui rappelle l’enfance, il faut voir comment le travail va évoluer, je ne le sais pas moi-même.
J’ai emmagasiné beaucoup de choses dans mes armoires. C’est à partir d’une grande quantité de matières premières que j’ai pu commencer à travailler. Je n’ai pas d’idée fixe sur ce que je vais trouver, c’est très souvent à l’instinct, surtout en termes d’objets. Si jamais je veux acheter un type de photo en particulier, je vais sur Ebay ou Delcampe mais pour le reste, je ne planifie rien. Il y a une volonté de créer à partir de quelque chose qui était tombé dans l’oubli mais mon but c’est de partager ce que je fais comme la fameuse madeleine de Proust.
Je suis professeur d’Arts Plastiques à Paris et le fait d’inviter les élèves à expérimenter m’a beaucoup nourrie et m’a motivée pour ma pratique artistique personnelle.
Dans l’ensemble, toutes tes créations sont comme des petites histoires à décortiquer et à réinventer. Aussi, tu manies parfois l’écriture journalistique au sein du magazine « Le Bonbon ». Ne sont-ce pas des codes pour indiquer qu’un jour tu pourrais écrire des histoires ?
Et cet été, sur quels chemins te retrouvera-t-on ? Tout d’abord, il y a la Biennale d’Art Contemporain de Cachan et plus tard, on pourra voir mes créations sans doute à Bruxelles à l’automne dans une galerie rencontrée grâce à Art Truc Troc. Deux boutiques à Paris présentent mes pièces en ce moment : Lulu&cie et Territori. Pour le reste, je vais essentiellement travailler sur la présentation de mes travaux. Comme ce que je fais est souvent petit, il faut trouver une manière d’attirer le regard. Je réfléchis à de nouveaux dispositifs : avec des miroirs pour travailler le reflet. Et enfin, ayant participé à Art TrucTroc à Bruxelles dernièrement, j’ai développé plusieurs projets notamment une vidéo réalisée par Valentina Càlà qui sera utilisée lors une vidéo- performance avec le pianiste Lionel Bams. Ce genre de collaboration pluridisciplinaire c’est enthousiasmant et j’espère qu’il y en aura beaucoup.
Ca s’est passé par hasard, c’est une amie qui a géré Le Bonbon et m’a proposé de faire des interviews de quelques personnes. J’ai eu l’occasion de faire de belles rencontres artistiques. L’écriture de portraits est intéressante, c’est un peu comme de la peinture : on essaye de construire par petites touches. J’ai eu affaire à des personnalités très différentes et je faisais en sorte qu’elles se retrouvent dans les quelques lignes que j’écrivais sur elles. Ce n’est pas du tout mon métier mais j’aimerais bien écrire oui, sur la danse et le nouveau cirque aussi. Ce sont deux disciplines que j’aime tout particulièrement.
Jamais on ne croise une création qui ne montre pas « L’autre », d’une manière quelconque (collages, dessins de mains,..) Est-ce important pour toi ? C’est drôle que tu dises ça, car je suis sélectionnée pour la Biennale d’Art Contemporain à Cachan dont le thème est l’altérité. Comme je le disais, à chaque fois les photos sélectionnées sont anonymes. Il me faut une forme de distanciation. Je ne sais pas comment en parler mais oui, il y a une forme de rencontre dans ce
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U N TÊTE À TÊTE
C’est dans un bar désuet au cœur de Bruxelles que j’ai rencontré Vincent Liben pour les beaux yeux du webzine. Un chocolat chaud pour lui, un coca pour moi, et puis...
Interview & Photos : Victoire
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Une présentation en quelques mots pour les lecteurs qui ne te connaitraient pas encore ?
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J’étais venue te voir à une présentation de ton album « tout va disparaître », en 2008. Trois ans plus tard, en juin dernier, sort ton album Vincent Liben où y sont repris certains titres. Pourquoi ce choix ? Tout va disparaître te laissait un goût d’inachevé ?
Je m’appelle Vincent Liben, je suis auteur, compositeur et chanteur.
On t’a connu en tant que fondateur et chanteur du groupe de rock Mud Flow, qu’est ce qui t’a poussé à bifurquer vers la chanson française ?
Ce n’est pas vraiment ça. Mon contrat d’artiste a été racheté en France. Je n’ai à présent plus aucun contrat en Belgique, je suis attaché à un label français... Dans « tout va disparaître » ce n’était pas moi qui chantait sur tous les titres, et ce genre de choses dites « expérimentales » ne fonctionnait pas pour le marché français où il est déjà extrêmement difficile d’être identifié. J’ai gardé une partie des morceaux où je chantais seul mais je les ai réenregistrés. En Belgique, c’est plus facile de faire ce qu’on veut à ce niveau là alors qu’en France tout comporte directement davantage de coûts. Il faut vraiment s’identifier dans un genre particulier. Je suis déjà considéré comme ayant « le cul entre deux chaises », les gens ne comprennent pas bien si je fais du rock ou de la chanson française. C’est difficile de se mettre dans des cases mais je reste persuadé qu’on peut toujours « ne pas faire comme tout le monde ».
J’étais un petit peu fatigué du système « groupe » : répéter beaucoup, se voir souvent, ... Ca prenait énormément de temps ! Tout cela fonctionne très bien quand on a vingt ans, et puis, les années aidant, on a plus forcément envie de tout ça. A côte de ça, j’avais surtout envie d’aller plus loin dans les textes... Et même si je faisais un effort en anglais, ce n’était pas optimal. Je n’exprimais pas totalement ce que je voulais, or je considérais que c’était important. A ce moment là, tout le monde a commencé à faire du rock et c’est devenu pénible. Il n’y avait avait plus que ça, des festivals de rock-rock-rock... C’en était plus très rock and roll de faire du rock !
Comment qualifierais-tu cet album ?
Procèdes-tu de la même manière pour écrire tes chansons en français que lorsque tu le faisais en anglais ?
C’est à toi de le qualifier pas à moi... (Réponse de l’intéressée : beaucoup de qualificatifs, mais à choisir : doux.)
Oui. Au début du groupe je venais avec des bribes de chansons et on travaillait tous ensemble, et puis au fur et a mesure j’ai commencé à travailler davantage seul à la maison. Les morceaux étaient ensuite « finis »avec le groupe. La différence est qu’aujourd’hui je fais vraiment tout tout seul : les paroles, les arrangements etc. Je maquette des versions très avancées à la maison et je vais en studio ensuite, simplement pour remplacer les sons électroniques par des « vrais » sons.
Ta chanson en duo avec Berry, « mademoiselle liberté » semble être un titre qui te tient particulièrement à cœur. Tu nous racontes ? Je l’aime particulièrement parce que j’ai fait ce duo avec Berry dont j’admirais énormément (mais vraiment énormément) le premier album. Je l’ai beaucoup écouté. C’est surtout pour la rencontre que ça a été merveilleux. On a passé beaucoup de temps là-dessus, beaucoup d’émissions radios aussi, et elle à chaque fois répondu présente alors qu’elle était elle-même entrain de terminer son album qui, je l’espère, va cartonner !
Ton intention était-elle de te démarquer complètement de Mud Flow ou tu considères ton nouveau projet comme en étant la continuité ?
Un lien avec “Mademoiselle Liberté”, l’héroïne du roman d’Alexandre Jardin, qui, en amour, exige le chef-d’œuvre sinon rien ?
Pour moi il s’agit de la continuité de mes projets, c’es t simplement l’envie d’aller plus loin et d’avoir davantage d’ouverture... Parce qu’avant j’étais renfermé dans l’idée qu’il fallait faire du rock, qu’il y avait des codes, et j’avais envie de faire quelque chose de plus varié. Mais il y aussi des carcans en chanson française, on n’y échappe pas, on peut pas faire ce qu’on veut (malheureusement !). Il faut faire des choix même si on a envie d’essayer beaucoup de choses.
On m’a déjà parlé de ce roman, mais je ne l’ai jamais lu. Il y a un lien donc : c’est de là que j’ai emprunté la phrase, simplement.
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D’autres duos en prévision ? Non, pas des duos chantés en tout cas. Mais il y en aura peut-être dans l’écriture.
Je me souviens d’une petite vidéo teaser un avant la sortie de « Tout va disparaître », un paysage en accéléré aux allures de vieux films. Le teaser de “Mademoiselle Liberté” a l’air d’être fondu un peu dans le même esprit. Un amour particulier pour le cinéma désuet ? C’est mon frère qui a réalisé ces deux teasers, je crois qu’il s’agit surtout de son style propre. J’aime beaucoup les vieux films mais les contemporains aussi. C’est donc surtout la touche de mon frère qui aime bien filmer en super 8 etc. C’est ça qui est bien avec le net aujourd’hui : pouvoir réaliser des choses qui ne passeraient jamais à la télévision.
Et demain ? Pour le moment je suis en train de travailler sur le nouvel album d’Olivier Libaux ; il est entrain d’écrire « imbécile, 2 », la suite du premier album du même nom, et je reprends le rôle qu’avait laissé JP Nataf sur le premier album. J’y suis juste en tant qu’interprète, je n’écris rien : je ne fais que chanter. J’avais envie de le faire parce que je trouve qu’Olivier fait des choses importantes dans la pop française. « Imbécile » est un disque que j’ai beaucoup écouté, j’étais donc très honoré quand il m’a proposé de participer à la suite. Le concept est rigolo, le mec est sympa, les chansons sont super marrantes, c’est un peu une comédie musicale décalée. Pour le reste je travaille d’arrache pied sur les maquettes du prochain album, parce qu’il ne faut pas perdre une seconde. Tout cela prend toujours tellement de temps, même lorsqu’un album est terminé il ne sort qu’un an plus tard,... Je me suis donc mis au « gros » du travail... J’ai d’ailleurs beaucoup trop passé de temps les oreilles dans mon casque ces derniers jours, au moment où je te parle je m’entends parler de l’intérieur, c’est relativement agaçant ! (rires).
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VAS-Y ! 8 J uin - 20 h 00 C olli n e h i ll @ M e , M yself & M usic L iège http://facebook.com/memyselfandmusicbelgium 9 J uin -19 h 30 B e lle r uch e + G hosti ng S eason @ VK B ruxelles http://www.facebook.com/ events/230177870414320/ 8-9 juin D é fi lé - L a C am br e M ode ( s ) @ H alles de S chaerbeek B ruxelles 9-16 juin B r uss e ls F i lm F esti val @ F lagey + B ozar http://www.brff.be/ 9
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WES AN DE RSON
Amour filmique et papier peint baroque. Disclaimer : Ce texte n’est pas un publi-rédactionnel est en aucun cas sponsorisé par la boite de distribution de Monsieur Anderson. C’est un enthousiasme purement gratuit, c’est-à-dire des plus sincères.
Chronique : Elli 94
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Depuis qu’il réalisait des films avec des bouts de ficelle et des fusées en bouteille avec les deux frangins Wilson, Wes Anderson a parcouru son petit bonhomme de chemin, qui l’a mené récemment jusque sur les marches de Cannes. Dévoilé lors de la cérémonie d’ouverture du festival, son dernier opus sorti le 30 mai est l’occasion parfaite pour moi de vous expliquer de façon très peu objective pourquoi le cinéma d’Anderson, c’est du bonheur gratuit à portée de tous, si tu comptes pas le prix du ticket. Chez cet américain de 43 ans, c’est toujours la même histoire...mais ce n’est jamais la même histoire.
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se suivent mais ne se ressemblent pas, les mouvements de caméra sont d’une précision millimétrée. Du travelling latéral partant du tableau accroché au mur au ralenti sur la robe à motifs de la blonde à barrette, l’œil du spectateur a à peine le temps de capturer tous les petits détails qu’Anderson distille dans sa mise en scène. Rétro chic sans être hipster, raffiné sans être neuneu, son esthétique est émouvante et classe à la fois, comme un chaton avec un monocle (cette comparaison a été effectuée sans usage de l’alcool).
Comme un air de déjà-vu : Tout est familier... Dans le casting films d’Anderson, les mêmes acteurs font souvent équipe. On peut pratiquement parler de famille au sens premier du terme : hormis Luke et Owen Wilson, il entretient des rapports ténus avec la famille Coppola (le fils Roman en coscénariste, le cousin Jason Schwartzman devant l’objectif) tout en y intégrant des éléments perturbateurs. De la famille Zissou (La Vie Aquatique, 2003) à celle des Tenenbaum (2001) les schémas narratifs curieusement similaires dépeignent les aventures incongrues d’un ou plusieurs héros tentant de concilier névroses existentielles, peines de cœur et rapports plus ou moins cordiaux avec leur tribu perturbée. Derrière leurs amours contrariées (Max et Rosemary dans Rushmore (1998), Margot et Richie Tenenbaum) quêtes utopiques (le héros de Bottle Rocket et ses cambriolages foireux, Steve Zissou et sa quête du requin-jaguar) et autres errances poétiques (les Darjeeling brothers et leur mère fugueuse dans A Bord du Darjeeling Limited, 2007), tous ces gens se confrontent et s’entre-déchirent autour du même thème. Mensonges et trahisons, désamour et descendance : Le cercle familial, ce cadeau empoisonné.
...mais rien n’est vraiment pareil... Ne vous laissez pas endormir par ces similitudes, elles cachent beaucoup de variations sur le même thème. La géographie insolite de sa filmographie inclut un train en Inde, un bateau en Méditerrannée (La Vie Aquatique), des villes anonymes ou imaginaires (le lycée Rushmore, la ville des Tenenbaum) quand c’est pas des renardeaux d’animation (Fantastic Mister Fox, 2009). Wes Anderson se réinvente perpétuellement, reprend (presque) les mêmes et recommence, raconte différemment, change la couleur des rideaux aux fenêtres et coiffe les raies de l’autre côté, et troque le folk rock pour le sitar ou l’orchestre symphonique. Quand tu lances dans un de ses films, c’est comme débarquer dans ta classe le jour de la rentrée : la plupart des têtes sont familières, mais il y a des nouveaux, et ils sont habillés bizarrement. Il y a parfois Gwyneth Paltrow ou Jeff Goldblum, et même Adrien Brody au fond, près du radiateur.
Mais si les (anti)héros andersoniens font tout pour se démarquer de leurs familles, il s’avère qu’ils ont du mal à vivre sans elles. Dotés d’une attitude à la fois désabusée et déterminée face au monde, ils sont cyniques mais tendres, cruels mais hilarants, définitivement touchants. Les adultes parlent comme des enfants, les enfants parlent comme des adultes et chacun porte son drame en soi comme un oiseau blessé. Mais souvent, ces clowns tristes se rendent compte à temps que quand on s’y met à plusieurs, le fardeau est tout de suite plus facile à porter. Un autre élément saute aux yeux devant ces films, et il est typique de l’esthétique cinématographique du Monsieur ; c’est le souci du détail. Chez Wes Anderson, tout est super bien rangé. Chaque plan est minutieusement composé comme un tableau, les couleurs et les motifs 95
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Toujours similaire mais toujours différent, c’est le pari renouvelé et jusque maintenant plutôt réussi du cinéaste texan.
...et son dernier film est possiblement son chef d’œuvre. N’ayons pas peur des mots : Moonrise Kingdom est définitivement l’un des plus beaux films de l’histoire du cinéma postmoderne. J’éxagère à peine, et ne vous laissez pas méprendre par mon enthousiasme immodéré (et à peine discret) pour l’univers de Monsieur Anderson : Si La Famille Tenenbaum était jusqu’à présent pour moi son film le plus maîtrisé et le plus abouti, son dernier opus est près de détrôner la famille dysfonctionnelle la mieux habillée du septième art dans ce palmarès. Tous les éléments y sont. Porté par deux gamins bluffants de talent et de flegme entourés de familles disloquées quand elles ne sont pas absentes, le dernier Anderson voit un amour juvénile contrarié s’obstiner contre vents et marées à s’embarquer dans des aventures hautes en couleurs, au grand dam de la joyeuse troupe qui leur court après. On y retrouve les mêmes bonnes vieilles tronches (Bill Murray, Jason Schwartzman, Gene Hackman) et des nouvelles (Frances McDormand, Edward Norton, Bruce Willis), des robes fluo, des piles de livres aux couvertures bariolées, et dans sa BO, Mozart côtoie Françoise Hardy. Les enfants jouent aux grands et les adultes sont des vrais gosses, mais si les gamins versent parfois de la bière dans leur verre à lait, leurs couverts sont toujours parfaitement alignés sur la table, et aucun tableau au mur n’a l’indécence d’être de travers. Entre l’épopée juvénile et la fable héroïque, Moonrise Kingdom est un conte pour enfultes affreusement classe, émouvant et ingénu, ficelé dans un récit qui fait une boucle parfaite (quand je vous dis qu’Anderson aime la rigueur géométrique...). Le fait que ce soit minutieusement réglé comme du papier à musique n’enlève rien à l’esprit spontané et captivant de ce royaume lunaire qui est d’ores et déjà dans la liste des sources principales de bonheur de mon existence.
Faites-vous plaisir, allez-y.
FILMOGRAPHIE Bottle Rocket, 1996 Rushmore, 1998 The Royal Tenenbaums, 2001 The Life Aquatic With Steve Zissou, 2003 The Darjeeling Limited (précédé de Hôtel Chevalier), 2007 Fantastic Mister Fox, 2009 Moonrise Kingdom, 2012 Photo deWes Anderson : thisrecording.com
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XQU I S ITE FOOD C’est l’été : on dresse la table sur les ter rasses, on dépose de grandes nappes colorées sur l’herbe fraîche. Les dîners se prolongent à la lueur des bougies, plaids sur les épaules même après que la nuit noire, plutôt tardive, ne se soit étendue sur le jardin. Qui dit belle saison, dit barbecue. Qu’il soient de viandes ou de poissons, ils per mettent une multitude d’accompagnements et de déclinaisons. Voilà donc quelques idées pour égayer la table et varier du traditionnel “barbacpommes de ter re-salade” !
BROCHETTES DE LÉGUMES I dée s &
ph o t o s
- On choisit de beaux légumes de saison que l’on lave à l’eau froide et que l’on découpe en tranches. - Ensuite, on s’ar me de nos plus beaux emporte-pièces et on découpe des for mes de légumes. Coeurs, étoiles, animaux, faites-vous plaisir ! ( On garde les “déchets” pour faire une sauce ou alors pour les ajouter à une salade de riz, par exemple !) - On enfile toutes les for mes sur de longs bâtonnets de bois. On oublie pas d’alterner les for mes et les couleurs pour un résultat hyper festif ! - On sale légèrement, on poivre et on ajoute des herbes aromatiques de son choix, ça parfumera délicatement les brochettes lors de la cuisson !
: Axelle
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REPAS MONOCHROME
GLAÇALO
- Pourquoi ne pas mettre une seule couleur à l’honneur ? En voilà une bonne idée pour se donner un fil rouge et prendre toutes les décisions attenantes à un repas entre amis ! - On prendra soin de faire attention aux détails en choisissant une déco adaptée (fleurs, nappes, bougies,...), en n’oubliant aucune étape du repas ( des glaçons au sirop, des chips et du riz colorés, ...)
Pour le dessert, misez sur des choses légères et bien sucrées pour digérer calmement. Inutile de faire endurer à son estomac le calvaire d’un gâteau au chocolat farci de crème chantilly. Non ! Vous en avez marre de la traditionnelle salade de fr uits ? Ça tombe bien, nous aussi ! Alors, on prévoit des moules à glaçons en silicone, de différentes tailles et for mes. Là, deux solutions s’offrent à vous :
Quelques idées autour de la couleur mauve : - glaçons au sirop de cassis - chips de vitelottes - Kyr à la violette - aubergines et poivrons violets grillés - riz mauve - glace à la myrtille avec des mûres pour la décoration - etc...
- la glace à l’eau et sirop, un classique indémodable ! Versez 2 cuillères à soupe du sirop de votre choix dans le moule, remplir avec de l’eau claire. Placez au réfrégirateur et le tour est joué ! - les expérimentations ! Nous vous conseillons le livre : “Bâtonnets glacés sans sorbetière” qui four millent de chouettes recettes très simples (nous insistons). Notre coup de coeur, testé et approuvé : la glace au citron vert !
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Z/A/A/Z ! ALPHABET
GARCON Nils Frahm qui, pour son dernier morceau au piano, invite quelqu’un du public a improviser avec lui sur scène :) HI-TECH
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Jesus Raphaël Soto Clotilde Olyff. Alphabet en Galets : galets sur panneau de particules 74x114 cm, 1990/2004
JOLIE CHOSE
BOISSON Le thé “ Petit Chaperon Rouge “. Disponible chez Fragrances à Liège. CAFE La Tocatta, place du Marché à Liège. Pour la carte de cafés très riche DISQUE “Cracks” de Roscoe
chez http://zugalerie.blogspot.be
EXPO Marylin Monroe & Me @ Taschen Store Bruxelles
KU http://ohmybutt.tumblr.com ( on aime bien les petits culs chez Alphabeta)
FILLE Alessia Amodio, qui organise la VideDressingParty #3
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LIVRE RESTO “Les fils à maman” à Bruxelles, Coin rue du Page et rue Fourmois, 29 - 1050 Bruxelles. SHOP Dressing Up, Galerie Voos à Verviers. TUMBLR http://micmojo.tumblr.com MIAM
U.. ..n roc si biscornu (est un palindrome) WWW http://emelinebrule.net/kyrielle/ X
NON Aux lunettes de soleil placées en serre-tête ! OUI à “Belles”, deux filles qui nous montrent des femmes authentiques et belles : https://www.facebook.com/pages/ Belles/221198347975287
YESTERDAY http://www.dailymotion.com/video/xbv03c_georgesmelies-le-voyage-dans-la-lu_shortfilms ZUT !
PHRASE CULTE “Quoi de mieux que d’être le rêve d’un autre?” Clin d’oeil à Jacqueline Harpman, décédée la semaine dernière. QUESTION Reste-t-il encore un endroit dans Bruxelles qui ne soit pas vêtu de ces fameuses barrières de chantier jaunes et bleues ? Trop de travaux tuent les travaux, Bruxelles ville chantier
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