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Le Salar d’Uyuni

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Machu Picchu

Machu Picchu

En willing sur une terre de sel LE SALAR D’UYUNI ET LE SUD LIPEZ

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Le Salar d’Uyuni est la destination phare de la Bolivie. Situé à plus de 3600m d’altitude, le plus vaste désert de sel du monde représente la moitié des réserves de lithium exploitables de la planète. Ses dimensions sont de 150 kilomètres sur 100. En général sa visite dure trois jours et s’accompagne de la traversé du Sud-Lipez (page 62). Ces trois jours seront nos derniers en Bolivie, nous profitons du trip pour passer par la suite la frontière chilienne avec qui la bolivie partage la propriété de la réserve naturelle. Pour nous, ces trois jours auront étés les meilleurs de notre voyage. Nous avons passé 3 jours les yeux et la bouche grands ouverts à chaque arrêt. Les quelques pages qui suivent, sont le récit de Basile, à la manière du Machu Pichu, de nos 3 jours dans le Salar et le sud Lipez. Nous avons passés ces trois jours avec 3 autres français : Justine, Pierre et Antoine.

Avez vous déjà vécu 3 jours dont vous saviez qu’ils marqueraient votre vie ?

C’est ce que ce récit essaiera de vous faire vivre, avec toute la passion dont son auteur est épris après ce séjour. Assis en tailleur sur un lit superposé dans un dortoir aux murs blancs dans la ville de San Pedro de Atacama au Chili, il creuse dans sa mémoire pour relater les faits avec véracité.

Tout commence dans un bus de nuit La PazUyuni. Les 3 estivants du Machu Picchu ont soif de découverte et voguent vers le salar ou « désert de sel » Bolivien. Basile est assis à côté d’un assureur Lyonnais sympathique mais soucieux de placer la totalité de ses expériences de voyage dans chacune de ses phrases. Édifiant. Ensemble, ils évoquent le terme du salar et le quarantenaire semble étonné lorsqu’il apprend que les grenoblois n’ont toujours pas réservé leur excursion. Finalement, et en livrant une bataille de coude polie mais acharnée sur l’accoudoir, les deux enjoués s’endorment paisiblement sous les coups de minuit.

La grande aiguille indique le numéro 6 lorsque la population du bus émerge. En ce petit matin ensoleillé, Paul, Basile et Amaury laissent leur yeux engourdis gambader sur le paysage qui défile derrière la vitre.

« Les gars ? Vous êtes chauds de partir aujourd’hui pour le salar si on trouve une agence ? » C’est Paul qui, la voix enrouée, prononce ces paroles et ignore encore qu’il fera changer le cours du destin. Les deux lurons acquiescent et c’est 10 minutes plus tard, dans les rues froides et désertes de la ville d’Uyuni que nous retrouvons la bande de back-packers (prononcer avec un..

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..ironique accent américain dont même l’alphabet phonétique ne saurait fidèlement rendre compte). Ils marchent à la recherche d’une agence qui leur inspire confiance et à qui ils sont prêts à verser les 800 bolivianos nécessaire aux fondements de leur expédition : chauffeur/ guide, repas, dortoirs, entrée dans les parcs nationaux etc... Un groupe de touristes sympathique avec qui partager l’aventure est aussi en tête sur leur liste de souhait.

Finalement, c’est dans la seconde agence visitée qu’ils apercevront trois globe-trotteurs en sac à dos. Une fois entrés dans l’enceinte , ils ont l’habitude et l’expérience et se taisent, à l’affût d’un dialogue qui leur permettra de discerner la nationalité du langage parlé. Coup de chance : ils sont français ! Décision est prise de s’inscrire avec eux pour les 3 jours et deux nuits d’aventure qu’ils partageront.

Se doutaient-ils, nos impétueux étudiants, que c’est dans de chaleureuses accolades et adieux chargés d’émotions qu’ils se sépareront de leurs nouveaux compagnons 3 jours plus tard ?

Une fois leur dette de 800 Bolivianos épongée, c’est l’heure des présentations. Antoine est ingénieur dans une entreprise à Antibes, Pierre est enseignant remplaçant en lycée à Lille et Justine vient de finir ses études prolongées pour se préparer au monde du travail à Paris. Tout trois ont 25 ans et sortent d’une école d’ingénieur lyonnaise. Il est aussi temps de faire connaissance avec le véhicule qui les portera : il s’agit d’un 4*4 Toyota Land Cruiser 7 places.

Notre équipe lance son chargement sur le toit de la voiture, où se situe à la réception Gregorio. Ce bolivien d’une cinquantaine d’année.

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à la peau burinée par le soleil et le sel sera leur chef d’orchestre. La légende raconte qu’il mâche des feuilles de coca jusque dans son sommeil... C’est excités comme des puces que les 3 simplets (la rédaction peine à renouveler ses pronoms) guettent l’entrée sur le fameux désert de sel.

Comme promis, le paysage laisse sans voix. Aucun être vivant ne survit dans cet environnement hostile. A perte de vue, des cristaux de sel. 11 000 km2 de sel dont on ne peut distinguer la fin. Sous les pieds, 120 mètres d’épaisseur de sel, quelques centimètres d’eau puis du lithium. 40% des réserves mondiales sous le soleil Bolivien. Rien que ça.

Arrêts après arrêts, Gregorio affûte la curiosité occidentale en prodiguant des brins d’explication en espagnol. Pause est faite au cimetière de trains, aux flaques d’eau chaudes volcaniques et finalement au checkpoint du Dakar. Cela fait maintenant 4 ans que la course mythique inclut le désert de sel dans son tracé. Alors que chaque horizon se ressemble, nos européens peinent à situer leurs point cardinaux et s’en remettent à Gregorio pour suivre le parcours. Ils déjeunent pour reprendre des forces.

L’île aux cactus constitue la prochaine halte. Semblant émerger de nulle part, elle est baptistée « la maison des incas » pour une raison que le narrateur ne connaît pas. L’espagnol sud-américain étant difficile à comprendre, il franchit une autre dimension lorsque son locuteur a une poignée de feuilles de coca dans la bouche... Finalement, ce même guide remplit nos touristes de joie en réalisant le dernier stop de la journée au milieu du désert pour contempler le coucher de soleil et « tomar la ultimas fotos ». Dans la jeep, à mesure que la nuit tombe, le guide propose un câble pour mettre de la musique et c’est Justine qui revêtira le rôle de Disc - jokey en proposant du Manu Chao aux tympans de l’équipe. Bien que brinquebalés par les imperfections de la route de terre qui s’éloigne du Salar, nos valeureux nomades voient leurs paupières peser subitement plusieurs kilos. Il faut reconnaître que le soleil et le vent sont abrutissants. Une heure et demie plus tard, les gaulois traversent un village et y installent leur campement. Les chambres ne sont pas chauffées et la température à l’intérieur est de 9 degrés. Toujours plus chaud qu’au dehors. Après un rapide dîner, les voyageurs ont l’idée d’un jeu de cartes mais il est 22h et les journées sont fatigantes. Ils s’endorment en pensant au lendemain ...

Aussitôt réveillés, nos explorateurs rangent leurs sacs et les lancent à Gregorio, toujours debout sur le toit du 4*4 avec une capacité de réception hors-norme. Le schéma de la journée se répète : litres de crème solaire sur la peau et lunettes de soleil posées sur le nez, le groupe s’émerveille arrêts après arrêts devant ces paysages féeriques. Il ne s’agit plus là d’horizons de sel mais d’immensités désertiques. Entourées de volcans enneigés et de ciel bleu, les vallées donnent du fil à retordre aux pupilles de nos français estomaqués (plus de 20 « roh putain c’est beau » captés par nos caméras). Le paysage mue encore pour laisser place à des lacs. La jeep pénètre dans la réserva nacional de Eduardo Avaora. Les « lagunas » expliqués par Gregorio offrent des contrastes de couleurs saisissants. Les centaines de flamants roses déploient leurs ailes pour atterrir sur l’eau, gelée par le froid de la nuit. Le tableau est magnifique et laisse penser à la brousse africaine. Nos amis ne manquent pas d’apprécier le cadre. Shooting photos à tout va et tentatives d’amadouements des oiseaux pour tenter de les voir de plus près.

« Gregorio, combien de temps on à la droit de rester ici ? »

A chaque arrêt, Gregorio lance des bribes d’explications scientifiques et géologiques et annonce le nombre de minutes laissées en autonomie sur le site. Nos itinérants s’en délectent avec satisfaction. La signification géologique du dernier arrêt de la journée n’a pas eu d’écho dans le cerveau du narrateur. Davantage usé aux sciences politiques plutôt qu’aux formations de puits volcaniques en ébullition, et autre rejets de souffre... il ne comprends pas mais apprécie. Le soleil se couche et annonce le début d’une soirée phénoménale. N’ayons pas peur des mots. Une fois arrivés dans leurs dortoirs, nos pèlerins apprennent l’existence d’une source chaude à ciel ouvert. Il est 21h ... Ils se munissent d’un maillot de bain et d’une serviette et vont affronter les -15 degrés extérieurs armés de plusieurs couches.

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Ils se changent en quatrième vitesse et se glissent dans l’eau à 30 degrés. La rédaction s’excuse mais son vocabulaire atteint ses limites lorsqu’il s’agit de poser des mots sur un tel sentiment. En pleine nuit, adossés contre le mur du bassin et la tête en l’air, ils contemplent la Voie lactée. Le village où ils crèchent n’étant pas relié a l’électricité, la pollution lumineuse est nulle. Un moment de plénitude extrême touche nos vagabonds. Croyez-moi, c’est un moment rare.

Après deux heures à patauger en émettant des théories sur la taille de l’univers ou sur le but des hommes sur Terre, il est l’heure de sortir. Les cheveux partiellement gelés par le vent du désert (véridique), nos routards se rhabillent à la hâte et s’en vont dormir en contemplant une dernière fois ce dôme étoilé sublime. Ils sont au milieu du désert Bolivien et viennent de faire partie d’un tableau divin. Le lendemain, Gregorio montre une dernière fois la puissance de ses mains en agrippant un à un les sacs de plusieurs kilos comme s’ils s’agissaient de vulgaires kaplas. Il conduit avec vigueur une jeep dont la direction est altérée et dévie sur la gauche. Dans l’habitacle se trouve 6 adultes redevenus des enfants le temps de 3 jours, qui contemplent le paysage en silence. Ils ont conscience d’avoir quitté le monde réel le temps d’une expédition. A la frontière chillienne, les regards sont amicaux et c’est avec une pointe d’émotion dans la voix que nos copains s’enlacent. « Belle rencontre » « Merci à vous les gars » « Envoyez un message si vous passez à Antibes ! ». Le cœur gros, ils se retournent une dernière fois et partent dans des directions opposées. Ils se sont promis un Google photos et une discussion WhatsApp pour ne pas perdre contact.

La douane chilienne est passée sans encombres. Les 3 jeunes laissent derrière eux un des plus beaux paysages qu’ils n’ont jamais vu de leur vie. Une fois de plus, ils laissent leurs yeux dériver sur la vitre du bus, des souvenirs plein la tête...

Basile

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